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Rappels réglementaires pour la conservation des registres des notaires décédés. Archives départementales du Tarn, B 2. Liste des registres achetés par Raymond Noyrit (1619). Archives départementales du Tarn, 6 E 1/310. Si les premiers actes connus sont des pièces isolées (acte de 1224 pour Castres (316) prenant la forme d’un chirographe et souvent complétées par le sceau de l’auteur juridique de l’acte, très vite, cependant, les notaires constituent des registres ou protocoles. Le premier registre de minutes notariales conservé est celui de Giovanni Scriba (1154) à Gênes ; en France, c’est à Marseille que l’on trouve les premiers registres (à partir de 1248). André Gouron, dans une étude de 1965 a dénombré 72 registres antérieurs à 1300 (317) . Dans le Tarn, le plus ancien registre conservé date de 1278-1280 : Il s’agit du registre de Pons Andrieu, notaire à Capdenac (Lot) (318). Cette pratique du registre s’oppose à celle du nord de la France, où les notaires et tabellions sont restés fidèles à l’usage des liasses, ce qui rend leur conservation plus aléatoire. Très vite, une conservation rationnelle des registres est organisée, venant des notaires eux-mêmes, soucieux de retrouver les actes émis précédemment, et du pouvoir royal, soucieux de préserver les actes authentiques des aléas des héritages. Le problème se posait en effet lors du décès d’un notaire. Généralement, les archives restaient aux mains des notaires, qu’ils soient les successeurs directs du notaire décédé, ou qu’ils en aient repris la « clientèle ». Il n’est pas rare de trouver en tête des registres que tel notaire détient les archives de tel autre, comme en 1481 où Jean Albert, notaire de Lautrec, indique qu’il possède les livres, notes et protocoles des notaires Guilabert et Massac (319). Cependant, les archives notariales pouvaient constituer un bien négociable par les héritiers d’un notaire décédé lorsqu'aucun d’eux ne reprenait l’office. Ainsi, les archives sont monnayables : en 1462, par exemple, il est fait mention d’une obligation de 5 écus d’or souscrite au profit du vicomte de Lautrec par Me Bernard de Alano pour l’acquisition des notes et protocoles du notaire Séguier (320). Malheureusement aussi, certains fonds ont dû être dispersés. Pour remédier à ce risque, le pouvoir royal essaya très tôt de réglementer la transmission des archives notariales. Dès 1303, dans une ordonnance sur l’administration de la justice dans la sénéchaussée de Toulouse, le roi ordonne de confier les registres des notaires décédés à d’autres notaires, autorisés à grossoyer les actes (321). L’ordonnance de 1304 qui réglemente la profession au début du XIVe siècle prévoit l’enregistrement des actes dans les protocoles. Elle précise que les notaires garderont avec soin leurs chartulaire (sic) ou protocolles. Et s’ils changeaient de domicile, ils ne pourraient les transporter sans la permission de leurs superieurs, de sorte que les protocoles resteront au lieu de leur premiere residence. De plus, si ses enfants (du notaire décédé) ne veulent pas etre tabellions ni notaires, les registres ou les protocolles des peres seront mis entre les mains de quelques notaires de bonne renommee et fideles (322). De fait, le souci de préserver l’unité des fonds notariaux est constant pour le pouvoir royal, puisque de telles ordonnances ou autres actes réglementaires traversent les siècles et se retrouvent jusqu’à la Révolution. La célèbre ordonnance (appelée à tort édit) de Villers-Cotterêts rappelle elle aussi l’obligation de conserver les archives notariales : Que tous notaires et tabellions, tant de nostre chastelet de Paris, qu’autres quelconques, seront tenus faire fidelement registres et protocoles de tous les testamens et contrats qu'ils passeront et recevront, et iceux garder diligemment, pour y avoir recours quand il sera requis et necessaire (323). Obligation aussi est faite de déposer les registres au greffe du tribunal. La remise des registres au greffe de la juridiction ne fut pas suivie d’effet. Pour y remédier, en 1575, Henri III crée des offices de « notaires gardes-notes » chargés de la conservation des registres des notaires décédés. Dans les fonds des Archives du Tarn, plusieurs « gardes notes » sont identifiés. A Salvagnac, le notaire Pierre Pradier, actif de 1607 à 1649, exerce ces fonctions (324). Cette obligation de conserver les registres est sans cesse rappelée. Le 9 novembre 1731, un arrêt du parlement de Toulouse ordonne que, dans toutes les villes et sénéchaussées de son ressort, les notaires constituent un dépôt pour conserver tous les registres de leurs prédécesseurs décédés. Ce texte ne semble pas avoir été appliqué, et le 12 juin 1751, un nouvel arrêt de la même institution portant reglement pour la conservation des actes des notaires decedés rappelle que les héritiers des notaires décédés doivent confier leurs minutes à une autre étude. Les procureurs du roi sont chargés de vérifier l’application de cette mesure (325). Ce texte fait suite à un autre arrêt du même parlement de 1738, faisant lui-même suite aux arrêts de 1731, 1727, 1726, 1709… (326) Depuis 1304, ce sont donc plusieurs dizaines de textes qui ont tenté d’imposer l’unité des fonds notariaux et leur dépôt chez un autre notaire. L'ouvrage de Ferrière (327), comme d'autres manuels à l’usage des notaires, consacre un chapitre (le XXIV) intitulé Des minutes des notaires après leur décès, rappelant la réglementation en matière de transmission et de conservation des minutes d’un notaire à l’autre : (…) les papiers d’un notaire royal decedé suivent l’office (p. 67). De fait la pratique, encadrée, est aussi contrôlée. Ainsi, en 1766, est dressé un procès-verbal de reconnaissance des registres du notaire Rigaud de Rabastens, ses héritiers n’ayant pas encore déposé chez un notaire les archives comme le prévoit l’arrêt du parlement du 12 juin 1751 (328). De même, en 1607, Antoine Martin, marchand de Castelnau-de-Bonnafous, achète aux enchères le 1er juin, pour 23 livres, les archives de feu Me Jean Brunet, ancien notaire de Castelnau. Mais comme ledit Martin n’est de la quallité requise pour faire l’expedition desdicts actes et contratz, presentement a susbrogé en ses lieux et place pour raison de ladicte surdicte Me Guilhaume Barthe, aussy notaire royal dudict Castelnau et ce pour pareilhe somme de 23 livres (329). S’ensuit alors l’inventaire de ces archives. Si l’on voit à travers les héritages et les successions de notaires les archives passer de mains en mains, on ne dispose que de très peu de descriptions de fonds. De même, il n’a pas été trouvé d’inventaire systématique fait spontanément pour une étude donnée. Les inventaires trouvés résultent tous d’une vente ou d’une succession. Ainsi, seuls quelques inventaires ponctuels ont été conservés, tels celui de la succession de Jean Brunet évoqué plus haut, celui de 1619 de Raymond Noyrit, notaire d’Albi, qui dresse un rolle des registres que Me Raymond Noyrit notaire a prins et retirés de Me Guilhaume Pelissier, docteur, comme achapteur de l’office et papiers de feu Me Jacques Pelissier, notaire royal d’Albi ou celui des archives de feu Me Antoine Rouzières (330). Dans ce dernier inventaire par exemple, les registres les plus anciens remontent à 1437. Les registres sont décrits par notaire et selon leurs bornes chronologiques. Cette volonté de préserver les minutiers perdure au-delà de l’épisode révolutionnaire. La loi du 29 septembre/6 octobre 1791 transfère les minutes détenues par les notaires royaux dont l'office est supprimé aux notaires publics qui les remplacent. La loi du 25 ventôse an XI confirme ces dispositions. L'article 22 de cette loi interdit même aux notaires de se dessaisir de leurs minutes. Mais il faudra attendre le XIXe siècle et surtout le XXe siècle pour que cette volonté de préserver les archives notariales aboutisse au dépôt aux Archives départementales. Depuis la Révolution Ancien Régime Introduction Histoire du notariat méridional Typologie et richesse Traitement archivistique Constitution des fonds Chez les notaires Aux Archives départementales Classement Inventaire des archives notariales Catalogue des notaires Accès cartographique Versements notariaux par ordre d'entrée Bibliographie Vous êtes ici : Notaires > Introduction > Traitement archivistique > Constitution des fonds > Chez les notaires Notaires: Ancien Régime http://archivesnotaires.tarn.fr/index.php?id=5274 1 of 2 17.04.2014 12:20

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Rappels réglementaires pour la conservationdes registres des notaires décédés. Archives

départementales du Tarn, B 2.

Liste des registres achetés par Raymond Noyrit(1619). Archives départementales du Tarn, 6 E

1/310.

Si les premiers actes connus sont des pièces isolées (acte de 1224 pour Castres(316) prenant la forme d’un chirographe et souvent complétées par le sceau del’auteur juridique de l’acte, très vite, cependant, les notaires constituent desregistres ou protocoles. Le premier registre de minutes notariales conservé estcelui de Giovanni Scriba (1154) à Gênes ; en France, c’est à Marseille que l’ontrouve les premiers registres (à partir de 1248). André Gouron, dans une étude de1965 a dénombré 72 registres antérieurs à 1300 (317) .Dans le Tarn, le plus ancien registre conservé date de 1278-1280 : Il s’agit duregistre de Pons Andrieu, notaire à Capdenac (Lot) (318). Cette pratique duregistre s’oppose à celle du nord de la France, où les notaires et tabellions sontrestés fidèles à l’usage des liasses, ce qui rend leur conservation plus aléatoire.Très vite, une conservation rationnelle des registres est organisée, venant desnotaires eux-mêmes, soucieux de retrouver les actes émis précédemment, et dupouvoir royal, soucieux de préserver les actes authentiques des aléas deshéritages.Le problème se posait en effet lors du décès d’un notaire. Généralement, lesarchives restaient aux mains des notaires, qu’ils soient les successeurs directs dunotaire décédé, ou qu’ils en aient repris la « clientèle ». Il n’est pas rare de trouveren tête des registres que tel notaire détient les archives de tel autre, comme en1481 où Jean Albert, notaire de Lautrec, indique qu’il possède les livres, notes etprotocoles des notaires Guilabert et Massac (319).Cependant, les archives notariales pouvaient constituer un bien négociable par leshéritiers d’un notaire décédé lorsqu'aucun d’eux ne reprenait l’office. Ainsi, lesarchives sont monnayables : en 1462, par exemple, il est fait mention d’uneobligation de 5 écus d’or souscrite au profit du vicomte de Lautrec par Me Bernardde Alano pour l’acquisition des notes et protocoles du notaire Séguier (320). Malheureusement aussi, certains fonds ont dû êtredispersés.Pour remédier à ce risque, le pouvoir royal essaya très tôt de réglementer la transmission des archives notariales. Dès 1303, dansune ordonnance sur l’administration de la justice dans la sénéchaussée de Toulouse, le roi ordonne de confier les registres desnotaires décédés à d’autres notaires, autorisés à grossoyer les actes (321). L’ordonnance de 1304 qui réglemente la profession audébut du XIVe siècle prévoit l’enregistrement des actes dans les protocoles. Elle précise que les notaires garderont avec soin leurschartulaire (sic) ou protocolles. Et s’ils changeaient de domicile, ils ne pourraient les transporter sans la permission de leurssuperieurs, de sorte que les protocoles resteront au lieu de leur premiere residence. De plus, si ses enfants (du notaire décédé) neveulent pas etre tabellions ni notaires, les registres ou les protocolles des peres seront mis entre les mains de quelques notaires debonne renommee et fideles (322).De fait, le souci de préserver l’unité des fonds notariaux est constant pour le pouvoir royal, puisque de telles ordonnances ou autresactes réglementaires traversent les siècles et se retrouvent jusqu’à la Révolution. La célèbre ordonnance (appelée à tort édit) deVillers-Cotterêts rappelle elle aussi l’obligation de conserver les archives notariales : Que tous notaires et tabellions, tant de nostrechastelet de Paris, qu’autres quelconques, seront tenus faire fidelement registres et protocoles de tous les testamens et contratsqu'ils passeront et recevront, et iceux garder diligemment, pour y avoir recours quand il sera requis et necessaire (323). Obligationaussi est faite de déposer les registres au greffe du tribunal. La remise des registres au greffe de la juridiction ne fut pas suivied’effet. Pour y remédier, en 1575, Henri III crée des offices de « notaires gardes-notes » chargés de la conservation des registresdes notaires décédés. Dans les fonds des Archives du Tarn, plusieurs « gardes notes » sont identifiés. A Salvagnac, le notairePierre Pradier, actif de 1607 à 1649, exerce ces fonctions (324).

Cette obligation de conserver les registres est sans cesse rappelée. Le 9novembre 1731, un arrêt du parlement de Toulouse ordonne que, dans toutes lesvilles et sénéchaussées de son ressort, les notaires constituent un dépôt pourconserver tous les registres de leurs prédécesseurs décédés. Ce texte ne semblepas avoir été appliqué, et le 12 juin 1751, un nouvel arrêt de la même institutionportant reglement pour la conservation des actes des notaires decedés rappelleque les héritiers des notaires décédés doivent confier leurs minutes à une autreétude. Les procureurs du roi sont chargés de vérifier l’application de cette mesure(325). Ce texte fait suite à un autre arrêt du même parlement de 1738, faisantlui-même suite aux arrêts de 1731, 1727, 1726, 1709… (326) Depuis 1304, cesont donc plusieurs dizaines de textes qui ont tenté d’imposer l’unité des fondsnotariaux et leur dépôt chez un autre notaire. L'ouvrage de Ferrière (327), commed'autres manuels à l’usage des notaires, consacre un chapitre (le XXIV) intituléDes minutes des notaires après leur décès, rappelant la réglementation enmatière de transmission et de conservation des minutes d’un notaire à l’autre : (…)les papiers d’un notaire royal decedé suivent l’office (p. 67).De fait la pratique, encadrée, est aussi contrôlée. Ainsi, en 1766, est dressé unprocès-verbal de reconnaissance des registres du notaire Rigaud de Rabastens,ses héritiers n’ayant pas encore déposé chez un notaire les archives comme leprévoit l’arrêt du parlement du 12 juin 1751 (328). De même, en 1607, AntoineMartin, marchand de Castelnau-de-Bonnafous, achète aux enchères le 1er juin,pour 23 livres, les archives de feu Me Jean Brunet, ancien notaire de Castelnau.Mais comme ledit Martin n’est de la quallité requise pour faire l’expedition desdictsactes et contratz, presentement a susbrogé en ses lieux et place pour raison deladicte surdicte Me Guilhaume Barthe, aussy notaire royal dudict Castelnau et cepour pareilhe somme de 23 livres (329). S’ensuit alors l’inventaire de ces archives.Si l’on voit à travers les héritages et les successions de notaires les archives

passer de mains en mains, on ne dispose que de très peu de descriptions de fonds. De même, il n’a pas été trouvé d’inventairesystématique fait spontanément pour une étude donnée. Les inventaires trouvés résultent tous d’une vente ou d’une succession.Ainsi, seuls quelques inventaires ponctuels ont été conservés, tels celui de la succession de Jean Brunet évoqué plus haut, celui de1619 de Raymond Noyrit, notaire d’Albi, qui dresse un rolle des registres que Me Raymond Noyrit notaire a prins et retirés de MeGuilhaume Pelissier, docteur, comme achapteur de l’office et papiers de feu Me Jacques Pelissier, notaire royal d’Albi ou celui desarchives de feu Me Antoine Rouzières (330). Dans ce dernier inventaire par exemple, les registres les plus anciens remontent à1437. Les registres sont décrits par notaire et selon leurs bornes chronologiques.Cette volonté de préserver les minutiers perdure au-delà de l’épisode révolutionnaire. La loi du 29 septembre/6 octobre 1791transfère les minutes détenues par les notaires royaux dont l'office est supprimé aux notaires publics qui les remplacent. La loi du25 ventôse an XI confirme ces dispositions. L'article 22 de cette loi interdit même aux notaires de se dessaisir de leurs minutes.Mais il faudra attendre le XIXe siècle et surtout le XXe siècle pour que cette volonté de préserver les archives notariales aboutisseau dépôt aux Archives départementales.Depuis la Révolution

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Introduction

Histoire du notariatméridional

Typologie et richesse

Traitement archivistique

Constitution des fonds

Chez les notaires

Aux Archives départementales

Classement

Inventaire des archives notariales

Catalogue des notaires

Accès cartographique

Versements notariaux par ordred'entréeBibliographie

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