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Approches in
tégrées du paysage pour les zones arides de l’A
frique
U N E É T U D E D E L A B A N Q U E M O N D I A L E
Approches intégrées du paysage pour les zones arides de l’Afrique présente les premières conclusions démon-trant l’importance d’adopter une gestion intégrée du paysage qui aille au-delà des interventions sectorielles
pour prendre en compte la santé des écosystèmes sur lesquels reposent les moyens de subsistance humains et la résilience des communautés rurales dans les zones arides de l’Afrique subsaharienne. La gestion intégrée du paysage revêt une importance particulière pour ces zones arides, car leur population dépend de systèmes de production fréquemment désorganisés par des chocs exogènes tels que les sécheresses.
Les données écologiques et économiques rassemblées dans ce rapport montrent que la gestion intégrée du paysage peut amplifier l’impact des investissements dans les systèmes basés sur les arbres et les pratiques de gestion améliorée du bétail et contribuer à l’augmentation de la productivité des cultures pluviales. Les efforts de gestion intégrée du paysage ont permis de coordonner les actions des multiples utilisateurs des terres et autres parties concernées, ont réduit les conflits et amélioré la gouvernance globale de l’eau, des terres et d’autres ressources. La gestion intégrée du paysage est donc une approche utile pour renforcer l’intensification des systèmes de culture en zones arides et générera, dans de nombreux endroits (mais pas systématiquement), de multiples gains, et notamment : une productivité agricole améliorée, des répercussions positives sur l’eau au niveau de l’exploitation et du paysage, la séquestration du carbone, la préservation de la biodiversité et d’autres avantages liés aux services écosystémiques, ainsi qu’une résilience accrue au climat.
Il est possible d’associer différentes politiques et interventions pour déclencher et accélérer l’extension de ces avantages à travers la gestion intégrée du paysage dans les zones arides de l’Afrique subsaharienne, afin de restaurer et d’accroître la résilience écologique et celle des ménages. Il est nécessaire de mettre en place des politiques afin de développer les conditions-cadres requises pour à la fois lancer de nouveaux programmes et modifier et étendre les efforts existants de restauration et de résilience dans les zones arides de l’Afrique subsaharienne. Cet ouvrage présente les options politiques pour six grands domaines d’intervention : (1) clari-fier les droits et responsabilités liés à la terre, (2) encourager la participation des multiples parties prenantes et l’action collective, (3) surmonter les obstacles institutionnels à la gestion intégrée du paysage, (4) Créer les conditions d’une planification et d’une gestion adaptatives, (5) créer des mécanismes et des politiques de soutien pour un financement durable et à long terme de la gestion intégrée du paysage et (6) investir dans un solide corpus de données et des plateformes de partage des connaissances sur la gestion intégrée du paysage.
Erin Gray, Norbert Henninger, Chris Reij,
Robert Winterbottom et Paola Agostini
Approches intégrées du paysage pour les zones arides de l’Afrique
Aperçu
Édition de conférence
Approches intégrées du paysage
pour les zones arides de
l’Afrique
U N E É T U D E D E L A B A N Q U E M O N D I A L E
Approches intégrées du paysage pour les zones arides de l’Afrique
Erin Gray, Norbert Henninger, Chris Reij, Robert Winterbottom et Paola
Agostini
Cet abrégé présente une vue d’ensemble de Approches intégrées du paysage pour les zones arides de l’Afrique (DOI:
10.1596/978-1-4648-0826-5)
La version intégrale du rapport définitif, une fois publié, sera affichée en format PDF sur le site
https://openknowledge.worldbank.org/. Des exemplaires du rapport peuvent également être commandés à l’adresse
http://Amazon.com.
Pour toute citation, reproduction et adaptation, veuillez utiliser la version définitive du rapport.
© 2016 Banque internationale pour la reconstruction et le développement/La Banque mondiale
1818 H Street NW,
Washington, DC 20433
Téléphone : 202–473–1000 ; Internet : www.worldbank.org
Certains droits réservés
La publication originale de cet ouvrage est en anglais sous le titre de Integrated Landscape Approaches for Africa’s Drylands
en 2016. En cas de contradictions, la langue originelle prévaudra.
Cet ouvrage a été établi par les services de la Banque mondiale avec la contribution de collaborateurs extérieurs. Les
observations, interprétations et opinions qui y sont exprimées ne reflètent pas nécessairement les vues de la Banque mondiale,
de son Conseil des Administrateurs ou des pays que ceux-ci représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des
données citées dans cet ouvrage. Les frontières, les couleurs, les dénominations et toute autre information figurant sur les cartes
du présent ouvrage n’impliquent de la part de la Banque mondiale aucun jugement quant au statut juridique d’un territoire
quelconque et ne signifient nullement que l’institution reconnaît ou accepte ces frontières.
Rien de ce qui figure dans le présent ouvrage ne constitue ni ne peut être considéré comme une limitation des privilèges et
immunités de la Banque mondiale, ni comme une renonciation à ces privilèges et immunités, qui sont expressément réservés.
Droits et autorisations
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http://creativecommons.org/licenses/by/3.0/igo/ Conformément aux termes de la licence Creative Commons Attribution
(paternité), il est possible de copier, distribuer, transmettre et adapter le contenu de l’ouvrage, notamment à des fins
commerciales, sous réserve du respect des conditions suivantes :
Mention de la source — L’ouvrage doit être cité de la manière suivante : Integrated Landscape Approaches for Africa’s
Drylands- Overview. Washington, DC : La Banque mondiale. DOI : 10.1596/978-1-4648-0826-5 Licence : Creative Commons
Attribution CC BY 3.0 IGO
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Pour tous renseignements sur les droits et licences doivent être adressées à World Bank Publications, The World Bank, 1818 H
Street, NW Washington, DC, 20433, USA ; télécopie : 202–522–2625 ; courriel : [email protected].
Conception de la page de couverture : Debra Naylor, Naylor Design, Inc.
Photo de couverture / Image de couverture : Andrea Borgarello pour la Banque mondiale / TerrAfrica. Illustration photo : Luis
Liceaga pour la Banque mondiale / TerrAfrica. © Content creators et Banque mondiale / TerrAfrica. Reproduite avec
l’autorisation de la Banque mondiale. Autorisation nécessaire pour toute autre utilisation.
iv
Avant-propos
Les zones arides—définies ici pour comprendre les types aride, semi-aride et subhumide
sec—sont au cœur des défis de développement de l’Afrique. Elles représentent 43 % de la
superficie de la région et 75 % des terres agricoles. Elles hébergent 50 % de la population,
dont une part disproportionnée de pauvres. En raison de facteurs complexes, la
vulnérabilité économique, sociale, politique et environnementale y est élevée et croissante,
compromettant les perspectives de subsistance à long terme de centaines de millions de
personnes. Le changement climatique, qui devrait accroître la fréquence et la gravité des
épisodes climatiques extrêmes, exacerbera le problème.
La subsistance de la plupart des habitants des zones arides dépend d’activités basées
sur les ressources naturelles, telles que l’élevage et l’agriculture, mais la capacité de celles-
ci à générer des revenus stables et suffisants est en train de s’éroder. La rapide croissance
démographique accroît la pression exercée sur des ressources qui s’amenuisent et créé des
conditions permettant à des épisodes climatiques extrêmes, des flambées des prix des
denrées alimentaires ou du pétrole, ou d’autres chocs exogènes de facilement déclencher
des crises humanitaires aiguës et d’alimenter de violents conflits sociaux. Contraints de
satisfaire des besoins à court terme urgents, de nombreux ménages ont recours à des
pratiques non durables de gestion des ressources naturelles, entraînant une grave
dégradation des terres, une raréfaction de l’eau et des pertes considérables de biodiversité.
Les États africains et la communauté du développement sont prêts à répondre aux défis
auxquels sont confrontées les zones arides, mais bien que la volonté politique ne manque
pas, des questions importantes restent sans réponse quant à la manière d’entreprendre cette
tâche. Les zones arides disposent-elles de suffisamment de ressources pour pouvoir générer
la nourriture, les emplois et les revenus nécessaires pour assurer des moyens de subsistance
durables à une population croissante ? Sinon, des apports de ressources extérieures
peuvent-ils combler le déficit ? Ou bien la capacité des environnements arides est-elle à ce
point limitée qu’une émigration doit être encouragée dans le cadre d’une stratégie complète
de renforcement de la résilience ? Et étant donné l’éventail des options de politiques
possibles, où les investissements doivent-ils être concentrés, sachant qu’il existe de
nombreuses priorités concurrentes ?
Afin de répondre à ces questions, la Banque mondiale a réuni une large coalition de
partenaires pour mener une étude visant à contribuer au dialogue actuel sur les mesures à
adopter pour réduire la vulnérabilité et renforcer la résilience des habitants des zones
arides. Sur la base d’une analyse des déterminants actuels et projetés de la vulnérabilité et
de la résilience, l’étude identifie des interventions prometteuses, détermine leurs coûts et
avantages probables, et décrit les arbitrages politiques qui seront nécessaires lors de
l’élaboration des stratégies de développement des zones arides.
v
Le développement durable de ces zones et le renforcement de la résilience de leurs
habitants nécessitent de prendre en compte un réseau complexe de vulnérabilités
économiques, sociales, politiques et environnementales. De bonnes réactions d’adaptation
peuvent générer des possibilités nouvelles et meilleures pour beaucoup de gens, amortir
les pertes pour d’autres, et faciliter la transition pour tous. La mise en œuvre de ces
réponses nécessitera un leadership efficace et visionnaire à tous les niveaux, depuis celui
des ménages jusqu’à celui des organisations locales, des pouvoirs publics nationaux et
d’une coalition des partenaires au développement. Le présent ouvrage, qui s’inscrit dans
une série de documents d’information élaborés à l’appui de l’étude principale, espère
contribuer à cet effort.
Magda Lovei
Responsable, Pratique mondiale Environnement et ressources naturelles
Groupe de la Banque mondiale
vi
Remerciements
Le présent volume s’inscrit dans une série de documents thématiques préparés pour l’étude
« Affronter la sécheresse dans les zones arides de l’Afrique : des possibilités de renforcer
la résilience ». L’étude, qui fait partie du Programme d’études régionales africaines de la
vice-présidence de la Région Afrique du Groupe de la Banque mondiale, est le fruit de la
collaboration de contributeurs issus de nombreuses organisations, travaillant sous la
houlette d’une équipe formée de membres du personnel du Groupe de la Banque mondiale
(GBM), de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO),
ainsi que du Programme de recherche sur les politiques, les institutions et les marchés du
Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CGIAR-PIM). Raffaello
Cervigni et Michael Morris (Groupe de la Banque mondiale) ont coordonné l’étude globale
sous la direction de Magda Lovei (Groupe de la Banque mondiale).
Le présent document, intitulé « Approches intégrées du paysage pour les zones arides
de l’Afrique », a été préparé par Erin Gray, Norbert Henninger, Chris Reij et Robert
Winterbottom (World Resources Institute – Institut des ressources mondiales) et Paola
Agostini (Groupe de la Banque mondiale).
Le document a été révisé par Diji Chandrasekharan Behr, Erick Fernandes, Michael
Morris et Raffaello Cervigni (Groupe de la Banque mondiale), Mamadou Diakite
(coordinateur TerrAfrica au sein du Nouveau partenariat pour le développement de
l’Afrique – NEPAD – de l’Union africaine), et une équipe de la FAO. Sara Scherr
(EcoAgriculture Partners) a révisé une version antérieure du présent document et apporté
de précieux conseils aux auteurs.
Les services d’édition et de conception ont été assurés par Luis Liceaga, avec le soutien
de Madjiguene Seck et Elizabeth Minchew (Groupe de la Banque mondiale).
Le rapport a été financé par le Fonds TerrAfrica, le fonds fiduciaire PROFOR et le
Programme d’études régionales africaines du Groupe de la Banque mondiale.
vii
À propos des auteurs
Erin Gray est économiste de l’environnement au sein de l’Institut des ressources
mondiales (WRI – World Resource Institute). Ses domaines d’expertise comprennent
l’évaluation des infrastructures naturelles, l’analyse coûts-avantages, coûts-efficacité et
multicritère, les marchés de services écosystémiques et le financement de la conservation,
la restauration axée sur les écosystèmes, le suivi et l’évaluation de l’adaptation. Ses travaux
se concentrent sur l’analyse économique et financière des écosystèmes côtiers, agricoles
et forestiers ; le développement de conseils, méthodes et outils techniques et analytiques
pour l’évaluation économique et l’exploitation des résultats par les décideurs ; la
conception de guides de suivi et d’évaluation de l’adaptation pour l’aménagement des
bassins versants en Inde ; et le soutien aux efforts de promotion des échanges de crédits de
qualité de l’eau dans la baie de Chesapeake. Erin a obtenu sa maîtrise de gestion
environnementale à la Nicholas School of the Environment de l’université Duke, où elle
s’est concentrée sur la politique et l’économie environnementale. Erin est également
titulaire d’un baccalauréat ès arts en analyse et politique économique et environnementale
de l’université de Boston.
Norbert Henninger est associé senior à l’Institut des ressources mondiales, où il travaille
à l’intersection de la réduction de la pauvreté, la gestion des ressources naturelles et la
gouvernance. Ses travaux se concentrent sur la génération d’informations et d’outils plus
fiables pour l’élaboration et l’évaluation des programmes de coopération au
développement, la promotion des stratégies de croissance verte, et la conduite
d’évaluations environnementales et sociales. Il est l’auteur ou le coauteur d’articles et de
publications techniques sur le ciblage des programmes de recherche agricole et de
réduction de la pauvreté, les indicateurs agricoles et environnementaux, et l’évaluation
intégrée des écosystèmes et du bien-être humain. Il a obtenu sa maîtrise en sciences de
l’environnement à l’université John Hopkins et son MBA à l’université de Mannheim
(Allemagne).
Chris Reij est un expert de la gestion durable des terres et maître de conférences à l’Institut
des ressources mondiales. Il travaille en Afrique depuis 1978. Bien qu’il se concentre sur
le Sahel occidental, Chris a participé à de nombreuses études et expertises sur d’autres
régions d’Afrique, d’Asie, des Caraïbes et du Pacifique. Ses principaux champs de
recherche et de publication ont trait à la restauration des terres dégradées dans les régions
semi-arides, l’innovation paysanne, les tendances agricoles et environnementales de long
terme ainsi que l’analyse des réussites agricoles et en matière de gestion des terres en
Afrique. Il est l’animateur de l’Initiative pour le reverdissement de l’Afrique (African Re-
viii
greening Initiatives) qui soutient les agriculteurs dans l’adaptation au changement
climatique et le développement de systèmes agricoles plus productifs et durables. Cette
initiative a été lancée pour reproduire à plus grande échelle les réussites prouvées de
reverdissement par des agriculteurs ou des communautés. Elle est opérationnelle au
Burkina Faso et au Mali, et en cours d’élargissement à d’autres pays africains.
Robert Winterbottom est maître de conférences à l’Institut des ressources mondiales où
il travaille sur l’Initiative mondiale pour la restauration de l’environnement (Global
Restoration Initiative) qui vise à rétablir la productivité des paysages dégradés et à
développer à plus grande échelle la gestion améliorée des terres et de l’eau. Il possède une
grande expérience en sciences de l’environnement et gestion des ressources naturelles,
incluant des travaux sur le contrôle de la désertification et la gestion communautaire des
ressources naturelles. Il est engagé dans le développement d’approches programmatiques
plus efficaces intégrant la gouvernance et la réduction de la pauvreté à la gestion
environnementale, et dans l’évaluation des possibilités d’adaptation au changement
climatique, des investissements REDD+ (Réduction des émissions dues à la déforestation
et à la dégradation des forêts) et de restauration des paysages. Il est titulaire d’une maîtrise
de science forestière en gestion des ressources naturelles de la School of Forestry and
Environmental Studies de l’université de Yale, et d’un BA de géographie du Dartmouth
College.
Paola Agostini est économiste principale dans le domaine de l’environnement au sein de
la Pratique mondiale Environnement et ressources naturelles. Elle est actuellement la chef
de file mondiale des Paysages résilients, où elle étudie les projets et programmes visant à
améliorer la connectivité des zones protégées, forêts, zones agroforestières, parcours et
terres agricoles, afin d’y accroître la productivité, la résilience communautaire, et la
production de services écosystémiques. Elle est titulaire d’un doctorat en économie de
l’université de Californie (San Diego) et d’une maîtrise en économie et sciences sociales
de l’université Bocconi de Milan (Italie).
ix
Résumé analytique
Ce rapport présente les premières conclusions démontrant l’importance d’adopter une
gestion intégrée du paysage qui aille au-delà des interventions sectorielles pour prendre en
compte la santé des écosystèmes sur lesquels reposent les moyens de subsistance humains
et la résilience des communautés rurales dans les zones arides de l’Afrique subsaharienne.
La gestion intégrée du paysage revêt une importance particulière pour ces zones arides, car
leur population dépend de systèmes de production fréquemment désorganisés par des
chocs exogènes tels que les sécheresses. Les ménages recourent au déplacement sur des
aires relativement grandes ou à la diversification des moyens de subsistance. Cette dernière
stratégie inclut l’utilisation de plusieurs espèces animales et végétales, mais également la
migration de travail et la transformation et la commercialisation de produits agricoles.
Cette dépendance à des écosystèmes et des services écosystémiques multiples peut
facilement entraîner un déséquilibre lié à une gestion qui se concentre sur un secteur ou un
produit de base, et qui en retour risque d’induire la dégradation d’autres ressources, de
menacer la sécurité alimentaire, ou d’accroître d’autres risques. La gestion intégrée du
paysage peut contribuer à éviter ou atténuer les impacts potentiellement négatifs de telles
interventions non coordonnées, spécifiques à un secteur et à tirer parti de synergies
potentielles. Les constats préliminaires de cette publication ont été partagés avec plusieurs
auditoires en vue de recueillir des avis, discuter des principaux résultats et d’en affiner le
contenu. Le rapport a d’abord été présenté lors d’un événement en marge de la onzième
session de la Conférence des parties à la Convention des Nations unies contre la
désertification qui s’est tenue en 2013 à Windhoek, en Namibie. Les auteurs ont également
présenté les résultats intermédiaires lors d’un séminaire organisé par le Programme de
recherche sur les politiques, les institutions et les marchés du Groupe consultatif pour la
recherche agricole internationale (CGIAR-PIM) à l’Institut international de recherche sur
les politiques alimentaires (IFPRI), lors d’une session pratique du Forum Réseau de
développement durable de la Banque mondiale, et lors d’une réunion du Comité consultatif
du PROFOR en 2014.
Défis
Les communautés des zones arides de l’Afrique subsaharienne, ainsi que leurs systèmes
de production et leurs stratégies de subsistance, se sont adaptées pendant des siècles à un
climat défavorable, permettant ainsi aux écosystèmes et au bien-être humain de se rétablir
après des sécheresses, des inondations ou des incendies. Toutefois, au cours des dernières
décennies, la forte croissance démographique, la pression sur les terres et leur dégradation,
des changements dans les précipitations, la fréquence et l’intensité accrues des sécheresses,
les conflits autour des ressources naturelles, ainsi que d’autres facteurs naturels et dus à
x
l’homme ont commencé à affaiblir la résilience de nombreuses communautés des zones
arides africaines et contribué à l’épuisement des sols et au stress hydrique. Les terres
peinent à soutenir les activités des communautés locales, érodant leur capacité à se remettre
des chocs naturels.
Malgré un nombre croissant d’expériences positives, les efforts pour relever ces défis
dans les zones arides de l’Afrique subsaharienne ont trop souvent échoué à réaliser des
améliorations significatives et durables à grande échelle. Peu d’interventions ont été
conçues pour prendre en compte les liens entre les agriculteurs en amont et les utilisateurs
de l’eau en aval. Dans de nombreux cas, des interventions ont désorganisé des systèmes
traditionnels de gestion des ressources collectives, tels que les zones humides, les réserves
de pacage et les forêts.
Les approches de développement tant à but unique que sectorielles s’avèrent, en
particulier, de plus en plus inadaptées, car elles ne prennent pas suffisamment en compte
les compromis nécessaires entre les acteurs et utilisations des terres concurrents, ou ne sont
capables ni d’intégrer les points de vue de toutes les parties concernées des communautés
locales, ni de traiter de manière adéquate les causes des conflits autour des ressources. Elles
peuvent également échouer à prendre en compte les interactions biophysiques et les effets
de levier entre systèmes de production, essentiels dans les zones arides et indispensables
pour générer et maintenir des avantages au niveau tant des exploitations que des paysages.
Par exemple, les arbres jouent au sein des paysages agricoles un rôle déterminant dans le
renouvellement de la fertilité des sols, la fourniture de sources complémentaires de
fourrage pour le bétail et de bois de chauffage pour les ménages et dans le maintien de la
productivité des terres arables, tout en contribuant à la diversification et au renforcement
de la résilience des systèmes agricoles, et pourtant, de nombreux programmes de
développement de l’agriculture et de l’élevage n’ont pas pleinement pris en compte ce rôle
capital. Beaucoup d’acteurs du développement en Afrique subsaharienne commencent à
adapter les programmes de développement des zones arides de façon à considérer des
objectifs et acteurs multiples à travers deux secteurs ou plus. L’application d’une approche
du paysage par étapes, soigneusement séquencée, peut accroître l’efficacité de ces
programmes et permet d’exploiter des occasions de restaurer la résilience dans les zones
arides.
Les possibilités de réduire la vulnérabilité et d’accroître la résilience
La rareté de l’eau et la dégradation des sols sont les principales contraintes biophysiques
des zones arides et constituent des menaces majeures pour le développement économique
et le bien-être humain. Des interventions de gestion durable des terres visant à préserver
les sols et l’eau, à renforcer le capital naturel et social et à optimiser l’efficacité de
l’utilisation des sols et des ressources en eau sont déterminantes pour la stabilisation des
systèmes de production ruraux. Elles peuvent également contribuer à restaurer la résilience
des ménages. Dans de nombreux endroits, ces interventions sont à la base de
l’intensification durable de l’agriculture. Les pratiques suivantes ont été identifiées comme
particulièrement prometteuses dans les zones arides, où l’adoption généralisée de pratiques
améliorées de gestion des terres et de l’eau est particulièrement nécessaire pour stimuler la
productivité : l’agroforesterie, les techniques de conservation des sols et de l’eau par
xi
l’agriculteur, la récupération des eaux de pluie, l’agriculture de conservation, et la gestion
intégrée de la fertilité des sols. Ces mesures ont été efficaces pour inverser la dégradation
des terres et contribuer à l’intensification durable de l’agriculture et de la foresterie. Les
économies rurales tirent avantage de ces pratiques à travers l’amélioration des rendements
agricoles, l’augmentation du fourrage, du bois de chauffage et d’autres produits de valeur,
l’accroissement des revenus et des possibilités d’emplois, la restauration de la biodiversité
et des services écosystémiques, et le renforcement de la résilience au changement
climatique. La promotion de l’adoption généralisée de ces pratiques de gestion améliorée
des terres peut constituer un élément clé d’une gestion intégrée du paysage, conçue pour
améliorer et diversifier les systèmes de production et accroître la résilience des ménages.
La gestion intégrée du paysage constitue une opportunité de restaurer les zones arides
en Afrique subsaharienne. La définition retenue ici est basée sur celle présentée par
l’initiative Landscapes for People, Food and Nature, un partenariat entre des ONG
environnementales et agricoles de premier plan, des organismes des Nations unies et des
États, et qui définit la gestion intégrée du paysage comme :
Une collaboration à long terme entre différents groupes de gestionnaires des terres et de
parties prenantes en vue d’atteindre de multiples objectifs liés au paysage. Ceux-ci
comprennent généralement la production agricole, la fourniture de services
écosystémiques (tels que la régulation et la qualité de l’écoulement des eaux, la
pollinisation, l’atténuation du changement climatique et l’adaptation à ce changement, les
valeurs culturelles) ; la protection de la biodiversité, de la beauté, de l’identité et de la
valeur récréative du paysage ; ainsi que les moyens de subsistance, la santé et le bien-être
humains locaux. Les parties prenantes cherchent à résoudre les problèmes communs ou à
tirer parti de nouvelles opportunités permettant de trouver des compromis et de renforcer
les synergies entre les différents objectifs liés au paysage. Les paysages étant des systèmes
à la fois écologiques et sociaux, la complexité et le changement en sont des propriétés
inhérentes qui doivent être gérées.
La gestion intégrée du paysage offre la possibilité de dimensionner et d’optimiser les
interventions de gestion des terres et de l’eau de façon à ce que les gains écologiques et
économiques du tout soient supérieurs à ceux de la somme des interventions.
EcoAgriculture Partners (2013b) a identifié les aspects clés de la mise en œuvre de la
gestion intégrée du paysage pour promouvoir la réussite de la restauration des terres arides
et de la résilience communautaire : 1) concevoir les interventions pour atteindre des buts
et objectifs multiples ; 2) gérer les interactions écologiques, sociales et économiques pour
réduire les oppositions internes et optimiser les synergies ; 3) reconnaître les rôles des
communautés locales ; 4) planifier et gérer les interventions de manière adaptative ; et (5)
encourager et institutionnaliser la collaboration et une complète implication des parties
prenantes. En se basant sur le rapport d’EcoAgriculture Partners (2013b) et sur les résultats
de travaux de recherche, la présente étude décline ces aspects clés dans trois grandes
composantes, et fournit 10 principes majeurs pouvant servir de liste de contrôle pour la
mise en œuvre de la gestion intégrée du paysage (voir figure ES.1). Les trois composantes
clés sont les suivantes :
xii
Figure ES.1 Composantes clés de la gestion intégrée du paysage
Composante clé 1 : un ou plusieurs buts pour le paysage, englobant des
objectifs multiples à différentes échelles Dans les zones arides ayant des utilisations mixtes de la terre et de multiples parties
prenantes, il est important d’établir une perception partagée du paysage en identifiant et
poursuivant des buts et objectifs multiples. Celle-ci permet de disposer de points d’entrée
communs pour la collaboration des différentes parties concernées aux actions essentielles
pour le renforcement de la résilience. Dans les zones arides de l’Afrique subsaharienne, les
buts et objectifs ont généralement trait à l’amélioration de la sécurité alimentaire et à la
diversification des moyens de subsistance. Dans certaines régions où la production est plus
élevée, les buts comprennent aussi l’intensification durable des systèmes de production. La
xiii
gestion intégrée du paysage doit également envisager plusieurs échelles de mise en œuvre
des interventions (par exemple, niveau de l’exploitation ou du paysage), ainsi que les
dimensions temporelles et biophysiques, particulièrement importantes dans les
environnements où les précipitations sont très variables et inégalement réparties.
La gestion intégrée du paysage doit générer des rendements économiques à court terme
pour encourager la participation des agriculteurs et des éleveurs, mais elle doit également
inciter à une réflexion holistique pour maximiser les gains écologiques (par exemple, en
améliorant les connexions biophysiques afin de restaurer le niveau des nappes phréatiques,
en mettant en place des grands corridors pour le déplacement du bétail ou en préservant les
habitats naturels). Elle doit également tenir compte des fonctions multiples des paysages
et fournir un mécanisme permettant aux parties prenantes locales de réduire les conflits
entre différents types d’utilisateurs de ressources spécialisées (tels que les éleveurs, les
agriculteurs, les pêcheurs) qui dépendent de services écosystémiques différents.
Composante clé 2 : une planification et une gestion adaptatives La gestion intégrée du paysage doit chercher à comprendre comment les utilisateurs des
terres interagissent avec leur environnement et tirent parti des principales sources de
revenus pour améliorer leur bien-être. Sa planification de l’utilisation des terres, des
pâturages et des ressources naturelles doit reconnaître les interactions écologiques, sociales
et économiques entre les différentes composantes du paysage afin d’optimiser les synergies
et réduire les oppositions internes. La gestion intégrée du paysage doit favoriser un
apprentissage continu à partir des résultats et rendre possibles l’extension des succès à plus
grande échelle et la correction des erreurs. La gestion adaptative permet également de
comprendre la résilience d’un paysage (par exemple, sa manière de réagir à des chocs tels
que des changements dans les températures et les précipitations). Face à l’incertitude
générée par les risques climatiques et économiques, la planification et la gestion
adaptatives permettent aux acteurs de réagir rapidement, en les amenant à examiner à
intervalles réguliers les succès et défis des choix actuels d’utilisation des terres. La gestion
intégrée du paysage requiert donc des systèmes participatifs de suivi et évaluation efficaces
et conviviaux ainsi que des mécanismes de retour d’information.
Composante clé 3 : une collaboration et une complète implication des parties
concernées La gestion intégrée du paysage doit impérativement identifier et reconnaître les rôles des
communautés locales et des ménages dans la gestion des ressources. Elle doit promouvoir
la participation de l’ensemble de la communauté à la planification des projets de
restauration des terres arides et autres interventions d’utilisation des terres, à l’action
collective dans la mise en œuvre de ces interventions, ainsi qu’à la coordination entre les
principales parties concernées des différents secteurs et niveaux d’échelle. Par exemple,
les actions concertées des agriculteurs exploitant des pentes raides, combinées à celles des
éleveurs pour réduire la pression de pâturage dans les endroits critiques, auront un plus
grand impact sur les taux d’érosion et de sédimentation et la restauration du couvert végétal
que des efforts individuels dispersés. Les communautés locales doivent être encouragées à
xiv
investir dans une gestion améliorée de l’eau et des terres et à partager leurs connaissances
et expériences.
Comme indiqué précédemment, le présent rapport identifie 10 grands principes (ovales,
figure ES.1), basés sur ces trois composantes clés de la gestion intégrée du paysage (Sayer
et coll. 2013). Ils permettent de concevoir des processus capables d’amener des parties
prenantes multiples à poursuivre un but commun dans un paysage donné, de rendre les
synergies et les oppositions entre les différents objectifs plus transparents, et de trouver un
accord sur des mécanismes de résolution des différends entre les parties concernées.
Les sceptiques considéreront peut-être qu’il n’y a rien de neuf dans cette recherche d’une
meilleure intégration entre les acteurs et les secteurs, avec un plus fort accent sur le ciblage
géographique. Sur le plan conceptuel, la démarche proposée ici est néanmoins nouvelle,
dans la mesure où elle intègre les enseignements tirés des précédentes approches de gestion
des terres et porte une plus grande attention au renforcement de la résilience à des facteurs
comme le changement climatique et l’évolution des forces du marché. La gestion intégrée
du paysage a une valeur ajoutée car :
• Elle ne préconise pas une approche uniforme, mais invite plutôt les parties prenantes
à considérer le contexte local et à tenir compte des secteurs, des parties concernées et
des conditions sociales, culturelles et autres prévalant sur un territoire délimité de
manière écologiquement pertinente. La gestion intégrée du paysage offre un cadre
souple permettant de dimensionner les investissements à l’échelle d’un paysage, pour
maximiser les synergies écologiques, économiques et sociales et minimiser les
oppositions internes.
• Elle insiste pour que la planification et la mise en œuvre tiennent compte des
composantes spatiales importantes pour la régénération des écosystèmes et leur
maintien en bonne santé (par exemple flux hydrologiques, habitats). La gestion
intégrée du paysage requiert que les planificateurs de l’utilisation des terres et les
décideurs appréhendent différemment chacune des échelles et prennent en compte ces
composantes spatiales.
• Elle promeut une combinaison de principes allant du bas vers le haut et du haut vers
le bas pour encourager à la fois la participation de la communauté locale et la
fourniture d’un appui institutionnel et financier adapté.
• Elle promeut une démarche de gestion adaptative prenant appui sur les composantes
de suivi et d’évaluation pour générer des données à long terme en vue de comprendre
si les communautés deviennent plus résilientes et accroissent leur capacité
d’adaptation, et si les modifications attendues ont été apportées au niveau du paysage.
La promotion de la gestion intégrée du paysage dans les zones arides de l’Afrique
subsaharienne présente de nombreux avantages :
• Une action et un investissement accru des parties prenantes : dans la région de Tigré
en Éthiopie, par exemple, la restauration communautaire intégrée de petits bassins
versants a incité les agriculteurs à investir dans des pratiques améliorées de gestion de
l’eau et des sols. Leurs efforts coordonnés ont conduit au rechargement des nappes
xv
phréatiques dans les fonds de vallées et permis ainsi aux agriculteurs de développer
l’irrigation en saison sèche et de pratiquer des cultures plus rentables.
• Une diminution des conflits autour de l’utilisation des ressources et des terres : une
meilleure coordination entre les parties intéressées peut aider à clarifier les droits et
responsabilités et à mieux comprendre les buts et objectifs associés au paysage, et ainsi
réduire les conflits autour de l’utilisation des ressources et des terres. Les accords
négociés entre agriculteurs et éleveurs sur la délimitation des corridors de circulation
du bétail en sont un bon exemple. Ils ont contribué à protéger les cultures et les arbres
des agriculteurs contre le broutage par le bétail, tout en préservant les pâturages et
l’accès à l’eau des éleveurs. De même, les accords entre des communautés locales et
des marchands de bois de chauffage et de charbon de bois ont amené ces derniers à
s’approvisionner dans des forêts gérées au niveau local ou des exploitations sylvicoles.
• Des économies de gamme et d’échelle : en mettant en commun leurs compétences et
leurs moyens, les utilisateurs des terres et de l’eau peuvent réaliser des économies
d’échelle et profiter d’avantages en matière de coût résultant d’une production
intégrée. Dans certaines interventions paysagères, la production simultanée de deux
produits ou plus entraîne parfois également une augmentation du revenu des ménages.
• Un renforcement des capacités : à travers la participation communautaire et l’action
collective promue par la gestion intégrée du paysage, les agriculteurs, éleveurs et
autres utilisateurs des ressources découvrent de nouvelles techniques et pratiques
durables. Les institutions locales ont les moyens de négocier et d’adopter des règles
pour améliorer la gouvernance environnementale, assurer un partage plus équitable
des avantages et accélérer l’adoption de pratiques améliorées de gestion des ressources
naturelles.
• Une résilience à l’échelle des ménages et du paysage : une action collective mobilisant
un grand nombre de ménages peut influencer les trois dimensions de la résilience, en
fonction des conditions locales : exposition aux chocs (par exemple, dans le sud du
Niger, des ménages ont déclaré avoir constaté une diminution de la vitesse des vents
au début de la saison de croissance, après avoir augmenté la densité des arbres sur
leurs exploitations) ; capacité d’adaptation (par exemple, dans les zones arides des
plaines du Kitengela au Kenya, les agriculteurs ont bénéficié de nouvelles sources de
revenus après avoir été convaincus de supprimer les clôtures le long des routes de
migration des animaux sauvages, améliorant ainsi l’intérêt faunistique et touristique
du parc national de Nairobi) ; et sensibilité aux chocs (par exemple, en Tanzanie, la
restauration de zones boisées et des pâturages de saison sèche à l’aide de la
régénération naturelle assistée des arbres a permis à des ménages dans les zones arides
de diversifier leurs stratégies de subsistance et d’atténuer les risques pour le bétail
durant la saison sèche).
Obstacles
Un certain nombre d’obstacles doivent être surmontés avant que la gestion intégrée du
paysage devienne une composante des processus normaux d’élaboration des politiques et
de planification du développement dans les zones arides de l’Afrique :
xvi
• Manque de connaissances et de sensibilisation à propos de la gestion intégrée du
paysage au sein des pouvoirs publics nationaux et locaux, du secteur privé et de la
société civile. La réflexion à l’échelle du paysage doit se répandre davantage parmi les
acteurs nationaux et locaux. De plus, de nombreux programmes de gestion intégrée du
paysage manquent de solides composantes de suivi et d’évaluation, en particulier au-
delà des niveaux du ménage et de la communauté, ce qui rend difficile l’évaluation
des avantages à l’échelle du paysage.
• Obstacles institutionnels entravant le traitement de la complexité au niveau du
paysage. La dynamique des paysages est généralement très complexe, car elle
implique des interactions entre divers groupes d’acteurs et différentes utilisations des
terres. Dans la plupart des cas, il n’existe pas de solutions simples aux défis complexes,
et une approche uniforme ne fonctionne pas. Une analyse approfondie des défis locaux
est nécessaire, ainsi qu’une approche d’apprentissage par la pratique associée à un
investissement important dans les réformes institutionnelles et le renforcement des
capacités. Des moyens de prendre en compte les mandats spécifiques des différents
ministères sectoriels doivent en outre être trouvés pour résoudre les difficultés d’un
travail transversal.
• Faibles disponibilité et accessibilité des données locales sur les terres, l’eau et
l’utilisation des ressources naturelles. Pour de nombreuses zones arides, les
planificateurs locaux ne disposent que d’un accès très limité aux données SIG sur
l’occupation et l’utilisation des sols, l’approvisionnement en eau et les captages, et
d’autres utilisations des ressources naturelles. Soit elles n’existent pas, soit elles ne
sont pas ouvertes au public. Sans ces données, il est difficile d’élaborer des scénarios
pour l’utilisation des terres. De tels scénarios permettent par exemple d’identifier les
zones se prêtant particulièrement bien à la mise en place de pratiques améliorées de
gestion des terres et de l’eau—et d’optimiser ainsi la productivité de l’eau à l’échelle
du paysage—ou encore les principales voies d’accès aux zones ripicoles en vue
d’accroître la résilience des systèmes de production pastoraux.
• Difficultés d’assurer la gestion des oppositions internes et la fourniture d’incitations
appropriées au changement de comportement requis. Dans les systèmes de cultures
mixtes, il est particulièrement nécessaire d’évaluer les oppositions internes et les
synergies entre les différents usages et utilisateurs des terres. Toutefois, la capacité de
réalisation de ce type d’analyses est généralement faible au sein des organes
d’exécution.
• Fragmentation du financement et de la planification de la restauration des zones arides
en vue d’une optimisation de l’utilisation des terres. En raison de la marginalisation
persistante des zones arides, la capacité locale de planification de l’utilisation des
terres est généralement limitée. Cette faiblesse peut entraîner des conflits autour des
ressources et des terres ainsi que d’autres coûts.
Recommandations
Les données écologiques et économiques rassemblées dans ce rapport montrent que la
gestion intégrée du paysage peut amplifier l’impact des investissements dans les systèmes
basés sur les arbres et les pratiques de gestion améliorée du bétail et contribuer à
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l’augmentation de la productivité des cultures pluviales. Les efforts de gestion intégrée du
paysage ont permis de coordonner les actions des multiples utilisateurs des terres et autres
parties concernées, ont réduit les conflits et amélioré la gouvernance globale de l’eau, des
terres et d’autres ressources. La gestion intégrée du paysage est donc une approche utile
pour renforcer l’intensification des systèmes de culture en zones arides et générera, dans
de nombreux endroits (mais pas systématiquement), de multiples gains, et notamment : une
productivité agricole améliorée, des répercussions positives sur l’eau au niveau de
l’exploitation et du paysage, la séquestration du carbone, la préservation de la biodiversité
et d’autres avantages liés aux services écosystémiques, ainsi qu’une résilience accrue au
climat.
Il est possible d’associer différentes politiques et interventions pour déclencher et
accélérer l’extension de ces avantages à travers la gestion intégrée du paysage dans les
zones arides de l’Afrique subsaharienne, afin de restaurer et d’accroître la résilience
écologique et celle des ménages. Il est nécessaire de mettre en place des politiques afin de
développer les conditions-cadres requises pour à la fois lancer de nouveaux programmes
et modifier et étendre les efforts existants de restauration et de résilience dans les zones
arides de l’Afrique subsaharienne. Le tableau ES.1 présente les options politiques pour six
grands domaines d’intervention qui peuvent être explorées et appliquées au contexte local
afin de relever les importants défis décrits plus haut et favoriser une gestion intégrée du
paysage.
Tableau ES.1 principaux domaines d’intervention et options politiques associées favorisant une
gestion intégrée du paysage
Domaine d’intervention Exemples d’options politiques
1. Clarifier les droits et responsabilités liés
à la terre • Décentraliser les politiques de gestion des ressources
naturelles et accorder une plus grande autorité aux
organisations chargées des ressources communautaires pour
leur donner les moyens de prendre des décisions. • Réformer les politiques foncières et de planification de
l’utilisation des terres pour renforcer la propriété
communautaire des ressources et créer une plus grande
sécurité de l’accès aux ressources naturelles et de leur
utilisation. 2. Encourager la participation des
multiples parties prenantes et l’action
collective
• Créer ou investir dans des mécanismes incitatifs visant à offrir
une compensation aux utilisateurs lésés et encourager leur
participation aux initiatives de gestion intégrée du paysage (par
exemple, systèmes de rétribution pour les services
écosystémiques). • Encourager les politiques qui favorisent les conditions-cadres
de la collaboration et de l’implication complète des parties
prenantes, notamment en matière de formation et de capacité
légale des groupes d’intérêt commun.
xviii
3. Surmonter les obstacles institutionnels
à la gestion intégrée du paysage • Réaliser un examen approfondi des politiques et programmes
de restauration des zones arides en cours pour : identifier les obstacles à l’extension des expériences réussies en matière de
restauration et à la mise en œuvre des principes de gestion
intégrée du paysage ; identifier les lacunes en termes de
personnel et de politiques nécessaires à la promotion de la gestion intégrée du paysage ; et mieux cibler les financements
des actions et programmes de restauration des zones arides. • Créer un ensemble de directives communes pour la
restauration des zones arides intégrant des principes de bonne
pratique de gestion intégrée du paysage, validé par les agences
gouvernementales compétentes afin de démontrer une
solidarité autour de la promotion de la gestion intégrée du
paysage. 4. Créer les conditions d’une planification
et d’une gestion adaptatives • Encourager la dimension spatiale dans les plans de
développement local et renforcer les politiques de planification
participative de l’utilisation des terres là où elles n’existent pas. • Inciter à la planification systématique et davantage
coordonnée et à la création de liens entre la planification et les
budgets des pouvoirs publics. 5. Créer des mécanismes et des politiques
de soutien pour un financement durable et à long terme de la gestion intégrée
du paysage
• Travailler avec les ministères des Finances, les bailleurs de
fonds et d’autres financeurs afin de promouvoir la
consolidation des financements permettant de normaliser la
gestion améliorée de l’eau et des terres. Accroître le financement de la gestion intégrée du paysage dans des zones
arides ciblées où les ménages ruraux sont particulièrement
vulnérables, et où il existe un important potentiel de
développement de l’agroforesterie et d’autres pratiques de gestion améliorée des terres et de l’eau.
• Proposer des mesures incitatives et réduire les risques perçus
de la gestion intégrée du paysage afin d’encourager les
investissements publics et privés, à travers des garanties et
autres mécanismes de réduction des risques. 6. Investir dans un solide corpus de
données et des plateformes de partage
des connaissances sur la gestion
intégrée du paysage
• Investir dans les instituts de recherche, les programmes de
développement universitaires et les ONG pour définir et suivre
les principaux indicateurs de restauration, créer des
plateformes de partage des connaissances, et établir des
systèmes de suivi et d’évaluation pour alimenter l’analyse sur
le long terme et la gestion adaptative (et les relier aux
systèmes existants de surveillance de la sécheresse et d’alerte
précoce). • Identifier les acteurs phares et les chefs de file de la gestion
intégrée du paysage pouvant jouer un rôle déterminant dans la
sensibilisation et la promotion de cette approche, et
représenter des groupes-ressources et culturels ainsi que des
secteurs différents. La documentation systématique des
réussites en matière de gestion intégrée du paysage peut
contribuer à soutenir ces acteurs. Note : ONG = Organisations non gouvernementales.
Ces recommandations générales sur les politiques peuvent être adaptées au contexte
agro-écologique de la zone. Dans les secteurs où la dégradation est sévère, il peut être
xix
nécessaire d’investir d’abord dans les pratiques durables de gestion des terres et de l’eau,
couvrant les aspects sociaux, techniques et environnementaux, en vue de rétablir la santé
des écosystèmes (par exemple, mobilité accrue du bétail, exclos, interdictions de pâture,
infrastructure de collecte des eaux de pluie, éducation et développement des compétences
des parties prenantes principales, programmes de filets de sécurité sociale pour la
fourniture de denrées alimentaires et d’espèces pour les interventions de mise en œuvre par
les villageois, etc.). De tels programmes doivent exploiter des options peu coûteuses (par
exemple en catalysant et en s’appuyant sur les efforts de restauration innovants développés
par les agriculteurs) et être adaptés au contexte local, qui est déterminé non seulement par
les personnes impliquées, mais aussi par le type de système agricole. Le tableau ES.2
fournit des exemples pour trois grands systèmes agricoles, à adapter aux conditions locales.
Tableau ES.2 La gestion intégrée du paysage dans trois systèmes agricoles des zones arides
Système
La gestion intégrée du paysage peut renforcer la résilience et contribuer à l’extension de
systèmes de production durables en :
• réduisant les conflits et en évitant les externalités négatives liées à l’intensification • mettant en place des institutions pour la planification intégrée de l’utilisation des terres
(documentant et prenant en compte les droits existants, en particulier l’accès aux ressources
collectives et aux secteurs ripicoles) et des mécanismes de résolution des conflits • soutenant l’intensification durable de l’élevage et des cultures • explorant les possibilités d’exploitation du paysage (mosaïque d’écosystèmes naturels et gérés)
en vue de renforcer le contrôle biologique, la gestion des nuisibles, la pollinisation ou d’autres
services écosystémiques • préservant les approvisionnements en eau en amont et en réduisant les externalités négatives
sur les autres utilisateurs de l’eau et des ressources naturelles en aval
• réduisant les risques de pénurie d’eau et de dégradation des terres • soutenant la régénération des forêts sèches et des espaces boisés à travers la régénération
naturelle assistée des arbres et en accroissant la densité des arbres sur les exploitations à
travers la régénération naturelle gérée par les agriculteurs • préservant les réserves de pâturage de saison sèche (par exemple, zones humides, forêts
sèches et espaces boisés) et en encourageant la gestion planifiée des pâturages • développant des infrastructures pour l’eau correspondant à la gestion durable des fourrages • diversifiant les sources de revenus et en accroissant la capacité d’adaptation • établissant des gratifications ou des paiements pour la conservation de la biodiversité, les
corridors pour la faune sauvage et, dans les zones de pentes, la protection des bassins versants • réduisant les conflits et en évitant la désolidarisation des autres utilisateurs de la ressource • créant des corridors pour le déplacement du bétail pour protéger les cultures et les arbres des
agriculteurs, en établissant des zones d’accès aux pâturages et à l’eau pour garantir la
résilience des systèmes de production pastoraux, et en mettant en place un mécanisme de
résolution des litiges • créant des corridors pour l’accès de la faune sauvage à l’eau et à la biomasse pendant les
épisodes de sécheresse
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• réduisant les risques de pénurie d’eau et de dégradation des terres • soutenant la régénération des paysages pastoraux à travers la régénération naturelle assistée
des arbres et des arbustes à l’aide d’exclos et avec l’aide des institutions communautaires de
gestion des ressources naturelles (notamment les institutions pastorales coutumières) • préservant les réserves de pâturage de saison sèche (notamment les zones humides), l’accès
aux ressources naturelles et leur utilisation • soutenant la mobilité pastorale • développant des infrastructures pour l’eau correspondant à la disponibilité en fourrages et aux
modes de pâturage afin de prévenir les risques de dégradation • encourageant une gestion des pâturages qui améliore la couverture des sols, augmente
l’infiltration et la rétention de l’eau et améliore la diversité des plantes et de la biomasse • diversifiant les sources de revenus et en accroissant la capacité d’adaptation • établissant des gratifications ou des paiements pour la conservation de la biodiversité
Les messages clés à retenir
En fournissant un cadre complet à l’extension des pratiques améliorées de gestion des terres
et de l’eau dans des secteurs ciblés, la gestion intégrée du paysage peut aider à inverser la
dégradation des zones arides de l’Afrique et renforcer la résilience des éleveurs et des
agriculteurs les plus vulnérables. Un investissement accru dans des programmes de gestion
intégrée du paysage, soutenant la coordination et la collaboration à long terme de différents
groupes de gestionnaires du territoire et parties prenantes au sein des paysages des zones
arides, peut renforcer et pérenniser ces efforts de restauration des terres, réduire les risques
de pénurie d’eau et d’épuisement des sols, diversifier les sources de revenus, soutenir
l’intensification durable et réduire les conflits.
Approches in
tégrées du paysage pour les zones arides de l’A
frique
U N E É T U D E D E L A B A N Q U E M O N D I A L E
Approches intégrées du paysage pour les zones arides de l’Afrique présente les premières conclusions démon-trant l’importance d’adopter une gestion intégrée du paysage qui aille au-delà des interventions sectorielles
pour prendre en compte la santé des écosystèmes sur lesquels reposent les moyens de subsistance humains et la résilience des communautés rurales dans les zones arides de l’Afrique subsaharienne. La gestion intégrée du paysage revêt une importance particulière pour ces zones arides, car leur population dépend de systèmes de production fréquemment désorganisés par des chocs exogènes tels que les sécheresses.
Les données écologiques et économiques rassemblées dans ce rapport montrent que la gestion intégrée du paysage peut amplifier l’impact des investissements dans les systèmes basés sur les arbres et les pratiques de gestion améliorée du bétail et contribuer à l’augmentation de la productivité des cultures pluviales. Les efforts de gestion intégrée du paysage ont permis de coordonner les actions des multiples utilisateurs des terres et autres parties concernées, ont réduit les conflits et amélioré la gouvernance globale de l’eau, des terres et d’autres ressources. La gestion intégrée du paysage est donc une approche utile pour renforcer l’intensification des systèmes de culture en zones arides et générera, dans de nombreux endroits (mais pas systématiquement), de multiples gains, et notamment : une productivité agricole améliorée, des répercussions positives sur l’eau au niveau de l’exploitation et du paysage, la séquestration du carbone, la préservation de la biodiversité et d’autres avantages liés aux services écosystémiques, ainsi qu’une résilience accrue au climat.
Il est possible d’associer différentes politiques et interventions pour déclencher et accélérer l’extension de ces avantages à travers la gestion intégrée du paysage dans les zones arides de l’Afrique subsaharienne, afin de restaurer et d’accroître la résilience écologique et celle des ménages. Il est nécessaire de mettre en place des politiques afin de développer les conditions-cadres requises pour à la fois lancer de nouveaux programmes et modifier et étendre les efforts existants de restauration et de résilience dans les zones arides de l’Afrique subsaharienne. Cet ouvrage présente les options politiques pour six grands domaines d’intervention : (1) clari-fier les droits et responsabilités liés à la terre, (2) encourager la participation des multiples parties prenantes et l’action collective, (3) surmonter les obstacles institutionnels à la gestion intégrée du paysage, (4) Créer les conditions d’une planification et d’une gestion adaptatives, (5) créer des mécanismes et des politiques de soutien pour un financement durable et à long terme de la gestion intégrée du paysage et (6) investir dans un solide corpus de données et des plateformes de partage des connaissances sur la gestion intégrée du paysage.
Erin Gray, Norbert Henninger, Chris Reij,
Robert Winterbottom et Paola Agostini
Approches intégrées du paysage pour les zones arides de l’Afrique
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