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les-folies-lormont
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Dans son édition du vendredi 07 mars, Le Monde consacre un supplément à la ville de Bordeaux. On y retrouve un portrait de Bernard Blanc, directeur d'aquitanis, qui nous expose sa vision du logement de demain !
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JEAN-DIDIERVINCENTestneuro-biologiste,membrede l’Académiedes sciences et de l’Académiedemédecine, écrivain. Il donne savisionde la ville, qu’il fréquentedepuisundemi-siècle.Qu’évoque, pour vous, Bor-deaux?
YJ’ai fait plusieursfois le tour dumon-demais j’ai tou-
jours été impressionnépar cetteville : au bordd’une «rivière»,d’unport, avec sesmonuments.C’est d’unebeauté fulgurante. Jesuis content devoir Bordeauxnet-toyée et je suis frappé enmêmetempspar la grâcede cette ville,avec ses ruelles intérieuresmédié-vales.La ville est-elle toujours fidèle àson imaged’Epinal de belle bour-geoise, un peu hautaine?
Bien sûr, il y a toujours cette«aristocratie dubouchon», natu-rellement fermée,mais on voitarriver de plus enplus de Pari-siensparmi les nouveauxhabi-tants. Et tant qu’il y auraduvin,Bordeaux resteraunevillemar-chande. Il existe uneuniversitépuissantedehaut niveauet cen’est pasunmythe. C’est unétran-gemélangede ville provincialeavec ses cercles et sesmilieuxcodés, et enmêmetempsunevil-le-capitale ouverte sur lemonde,qu’ona longtemps résuméeauxmarins et aux bordels sur lesquais.Mais il y a toujours ce par-fumdu large et quelquesbateauxqui remontent la Garonne. Il estdebon tondedire que cette villeest prétentieuse.Monpère disaitqu’ils étaienthommesbienhabillés avecdes chaussettessales. C’est une légende.C’est lamajestéde cette ville et sonhistoi-re qui donnent cette impressionsur ses habitants.Bordeaux a-t-elle un rapport par-ticulier à sonmaire?
Jusqu’à la Fronde, il y a tou-jours euune véritable autonomiede cette ville face aupouvoir cen-tral. DepuisMontaigne, il y a tou-jours euun «roi» oudes «vice-rois» à la tête de cette ville. Et c’estrare qu’ils perdent leur couronnesans l’avoir choisi. Après JacquesChaban-Delmas, Juppé, arrivé en1995, a eubeaucoupdedifficultésaudébut,mais il en est devenu lemonarquequi va être réélu.La culture est un enjeu de cesélectionsmunicipales. La villeen fait-elle assez?
Lapolitique culturelle est unpetit peu faible. Sur le plande l’artcontemporain, c’est unepolitiqueaupetit pied. Peut-être que lemonarqueactuel porte un intérêtsecondaire à ce sujet,même sipleind’initiatives existent.Maisaujourd’huiNantes tailledes crou-pières à Bordeaux.Demanièregénérale, les culturesurbaines,malgré la décentralisation, ontperdude leur prestige. Sur le planarchitectural, Bordeaux s’est unpeuendormie,même si je com-prendsque c’est difficile de s’inté-grer dansun tissuXVIIIe. Pour lemoment, hormis le Palais de jus-tice réalisé par RichardRogers, iln’y a pas de grandsprojets. Ça vaprobablementarriver.Quemanque-t-il pour que la villesoit unemétropole européen-ne?
La ville a toujours été un lieudepassage, avec unarrière-paysconsidérableet la péninsule ibéri-que toute proche. Elle fait jeu éga-le avec Toulouse. C’est unemétro-poleuniversitaire, commercialeet administrative. Pour vraimentprendre cette dimension, il fautque la ligne à grandevitesse arri-ve [elle est prévuepour 2017] ainsiqu’unbonaéroport. p
Proposrecueillis par C.Co.
Portrait
Duhautdesongrandbureauà la lumière traversante,BernardBlancpeutcontem-
pler l’évolution du nouveau quar-tier,Ginko.Symboliquement,c’està l’entrée de cet écoquartier que ledirecteur général d’Aquitanis avoulu installer le siège social del’Office public d’aménagement etde construction (OPAC), spécialis-te des logements sociaux sur lacommunauté urbaine de Bor-deaux (CUB). Sur les 2 150 loge-ments prévus d’ici à 2017, plus de30% seront des logementssociaux, partagés entre Aquitaniset un autre bailleur,Mésolia.
Ce nouveau quartier illustrel’ébullitionurbaineetarchitectura-le de la ville depuis les années2000. Lemaire sortant, Alain Jup-pé, en est à son second projeturbain. Il veut bâtir « le grand Bor-deaux 2030». La CUB n’est pas enresteetambitionned’arriveràunemétropole d’unmillion d’habi-tants. Un peu partout, les gruesmétalliques deviennent des vigiesdans le paysage bordelais. Objec-tif : aménager les différentes fri-ches urbaines. La ville dispose de700hectares, l’unedessurfaces lesplus importantesde France.
Bernard Blanc est arrivé en2008 à la tête d’Aquitanis, débau-ché par un cabinet de recrute-ment. Il découvre alors Bordeauxcôtécartepostale:unevilledepier-re et de propriétaires héritiers duvin et du commerce. Et, au-delà,uneréalitépluscomplexe: lesnou-veaux projets ont l’impératif deproposer 25% de logementssociaux dans les opérations diffu-ses, jusqu’à 35% dans les grandesopérationsd’aménagement.
En 2013, Bordeaux disposait de16% de logements sociaux. La loirelative à la solidarité et au renou-vellement urbains (SRU) en exige25%. C’est là qu’Aquitanis, parmiles plus importants bailleurssociaux de Gironde, entre en scè-ne: il gèreunparc locatif de 17000
logements, dont les premiersdatent des années 1950, et en livreen moyenne 800 neufs chaqueannée. Tous bailleurs confondus,3 650 nouveaux logementssociauxontétéagréésen2013danslaCUB.C’estdeuxfoisplusqu’il yasixans,mais c’est toujours insuffi-sant: il en faudrait plus du doublepourabsorber la demande.
On oublie vite, surtout à Bor-deaux, que les barres HLM desannées 1960 ont logé la Franced’après-guerre et permit l’accès auconfortmoderne.«Longtempsrelé-gués à la périphérie, ces grandsensemblessontaujourd’huidanslaville, explique le directeur. Il y a eulapremière séquencedemodernitédans les années 1950 et 1960, cellede l’oubli, jusque dans les années1990, et, maintenant, comment lesremettreen selle pourunenouvellemodernité?», s’interroge-t-il.
Un sujet excitant pour un pas-sionnéde59ans. Lavisiondu loge-ment social de Bernard Blanc estaussidécoiffante,voiretransgressi-ve que la couleur desmurs orangedu nouveau siège social d’Aquita-nis. Ildéfendlescharmesdelahau-teur quand aucun politique n’oses’aventurer sur ce terrain. Il parlede qualité architecturale quand laplupart des bailleurs sociaux pen-sent optimisation, industrialisa-tion et diminutiondes coûts.
Ce lauréatd’unMBAàHECParis
et d’unDEA en sciences de gestionaimepenser la ville, ses approchesconstructives, ses logements et lespolitiques publiques de l’habitat.«Il a des goûts très prononcés pourl’architectureet celadénotedans lepaysage national des bailleurssociaux, reconnaît Michèle Laruë-
Charlus, directrice générale del’aménagement de la ville de Bor-deaux. Autre qualité : il a un vraigoûtde la réflexionsur le logementde demain, son adaptation et surses occupants.»
Alors, à côté de la gestion classi-que des immeubles de quinze éta-ges, cet amateur d’aïkido et de jeudego lancedesexpérimentations:il a inventé un nouveau principeconstructif préfabriqué, modulai-reetreproductible,àossaturebois,baptisé Sylvania. Une première.Déjà 250 logements sont conçusavec ce principe un peu partoutdanslaCUB.Objectif : réaliserainsi20% de la totalité des nouveauxlogementsAquitanis.
Avec lamairie de Bordeaux, surle futur quartier Brazza, rive droi-te, Aquitanis et une de ses filialesréfléchissentàdes logementsloca-tifs participatifs : «Ce seront degrands plateaux nus et vides, et lesfamilles vont dessiner leur loge-mentet les espacespartagés,expli-que le directeur, l’œil brillant. Anous ensuite de trouver les solu-tions techniques.»
Jouer l’innovation et la prise derisqueavecBordeauxet sonagglo-mérationen terrainde jeu. Ceprofà SciencesPo et à l’Essec aimedon-ner leur chance à de jeunes archi-
tectes sans expérience. «Il a été lepremier à nous faire confiance surdes projets d’envergure», se sou-vient Diane Cholley, une des troisassociés trentenaires de l’agencebordelaisewhyarchitecture.
Quand ils ont rencontré Ber-nard Blanc, l’agence spécialiséedans la construction à ossatureboisn’avaitsursonCVquedesmai-sons individuellesoudes réhabili-tations. Il leur a proposé de trans-formerl’anciensiègesociald’Aqui-tanis en logements. La jeune équi-pea égalementconçuquinze loge-mentsneufs enplein cœurdeBor-deaux. «Soutenir la constructionàossature bois et son esthétisme enpleine ville de pierre, il faut oser»,souligneDianeCholley.
Sa réputationet ses lauriers ontgermé à Saint-Nazaire, ville danslaquelle il a dirigé l’OPAC, de 1998à 2008. Il y a expérimenté avecl’agence Lacaton-Vassal deuxextensions à uneHLMdes années1960. Un exemple d’habitats indi-viduelstrèsdensesquin’obèrepasle confort d’usage.
«Il sepréoccuperéellementde laquestiondubien-vivredans le loge-ment, de la qualité d’usage et desavoir comment impliquer tout lemonde dans cette démarche»,assurent Antoine Carde et SiegridPéré-Lahaille. Eux aussi sont dejeunes architectes bordelais à quiBernard Blanc a tendu la mainpour construire à côté de Bor-deaux, au Bouscat, un établisse-ment intergénérationnel décoif-fant.
L’histoire familiale de ce bour-reau de travail a fondé sa souples-se intellectuelle : un père suisse,colonel de l’armée de l’air, protes-tant calviniste, et une mère indo-chinoise – on dirait vietnamienneaujourd’hui – bouddhiste animis-te. « Je me suis construit dans lacompréhension d’un monde trèsmélangé.» Il voit Bordeaux com-me une ville «cosmopolite, aveccette capacité à être là et enmêmetemps loin». p
ClaudiaCourtois
«Ici, ilyatoujourseuunroi»Entretien Jean-DidierVincent,écrivainetneurobiologiste,vantelamajestédelaville
BernardBlanc,créateurdeHLMhaute-couture
AlatêtedubailleurpublicAquitanis,cepassionnédéfendl’architecture,dansunevilleoù lenombrede logementssociauxest insuffisant
1954Naît àVesoul(Haute-Saône).1992 Intègre l’Unionsociale pour l’habitatàParis.2000Prend la directionde l’OPACdeSaint-Nazaire(Loire-Atlantique).Depuis 2008Directeurde l’OPACAquitanisàBordeaux (Gironde).
élections municipales
CeprofàSciencesPoetàl’Essecaime
donnerleurchanceàdejeunesarchitectessansexpérience
Bernard Blanc, directeur général d’Aquitanis, dont le nouveau siège social surplombe l’écoquartier Ginko,en construction dans le nord de Bordeaux, le 25 février. RODOLPHE ESCHER/DIVERGENCE POUR «LE MONDE»
IV 0123Vendredi 7 mars 2014