auscultaton barrages en terre

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    IngnieriesN41p.1322

    Mars2005

    L'auscultation des barrages en terre : une ncessit

    Dans le domaine des barrages comme dans bien dautres cas, le risque zro nexiste pas, do la nces-

    sit dun suivi mthodique du comportement des ouvrages. Aprs avoir expos les principes de base de

    la surveillance et de lauscultation des barrages, les auteurs nous rappellent ici les objectifs de lanalyse

    des diffrentes mesures, travers deux mthodes diffrentes appliques deux exemples douvrage. Ces

    deux cas montrent quel point il est indispensable de disposer et de pouvoir interprter des donnes

    dauscultation pour valuer la scurit dun barrage.

    a surveillance des barrages est base surl'inspection visuelle et lauscultation.Ces deux mthodes sont complmen-taires :

    l'inspection visuelle est une mthode quali-tative qui est fondamentale car elle intgre lacomplexit du comportement de louvrage ;

    lauscultation est une mthode quantitative quimet en uvre une instrumentation et une analysedes mesures spcifiques chaque ouvrage.

    Lauscultation est indispensable pour le suivi dubarrage, de sa conception sa mise hors service.Cest une composante de son comportementstructurel et du contrle de la scurit. Elle estgalement prcieuse pour faire progresser la con-naissance sur le comportement et le vieillissementdu barrage, et permettre damliorer les tudeset expertises dans leurs diffrents aspects techni-ques et conomiques (Poupart et al., 2000). De cepoint de vue, lauscultation est une composante

    essentielle de progrs. Elle permet dindiquer lexploitant avant quil ne soit trop tard les travauxde confortement ncessaires et, dans les cas extr-mes, les mesures durgence assurant la protectiondes populations en aval.

    Le suivi du vieillissement est indispensable. Lac-clration toujours proccupante dun phno-mne doit tre dtecte le plus tt possible. Unevritable surveillance de louvrage suppose que

    lon puisse suivre lvolution de son comporte-ment dans le temps, dduction faite des variationsdues aux autres causes.

    LauscultationLes types de mesures et dappareils les plus rpan-dus pour lauscultation des barrages en remblaisont brivement dcrits ci-dessous. Ces mesuresportent sur les sollicitations et sur la rponse delouvrage. Les deux sollicitations principales sontla cote du plan deau et les prcipitations.

    La cote du plan deauest mesure par une chellelimnimtrique (visuel) ou un limnimtre enregis-treur (prcision !centimtre) ;

    Les prcipitationssont obtenues par un pluviom-tre install sur le barrage, relev quotidiennement(prcision !millimtre/jour).

    Il peut parfois tre ncessaire de prendre encompte dautres sollicitations : niveau aval, nappe

    de versant ou fonte des neiges.La rponse de louvrage est apprhende pardes mesures de dplacements et des mesureshydrauliques.

    Les mesures de dplacements sont de trois types(cf.encadr 1 (p. 14) pour les dfinitions) :

    les dplacements de surface, mesurs par nivel-lement et planimtrie (tassements, mouvements

    Une collaboration tripartite dveloppe entre le Cemagref, lENGREF et lUPK

    (Universit polytechnique de Cracovie) porte sur des disciplines telles que

    lhydrologie et lhydraulique, appliques la prvention des crues, la gestion

    et la conception des ouvrages hydrauliques, la prvention et lanalyse de ris-

    ques ainsi que la qualit et la gestion des milieux aquatiques continentaux.

    Cet article est un exemple des travaux issus de cette collaboration.

    Stphane Bonellia, Krzysztof Radzickiab, Jerzy Szczesnyb,Rmy Tourmenta et Huguette Flixa

    aCemagref,

    UR Ouvrages hydrauli-

    ques et hydrologie,

    Le Tholonet,

    13612 Aix-en-ProvencebInstitut

    d'amnagement

    hydraulique et

    de gestion de l'eau,

    Cracow University

    of Technology,

    UI. Warszawska 24,

    31-155 Krakow,

    Pologne

    Les contacts

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    Encadr 1

    Quelques dfinitions

    Pendule :appareil qui permet de mesurer les dplacements relatifs horizontaux, dans les deux directions, entre deuxpoints situs sur la mme verticale. Il peut tre direct, il est alors constitu dun fil dacier fix son extrmit sup-rieure, lautre tant reli un poids pouvant se dplacer librement la base du pendule. Il peut tre invers, lextrmitinfrieure du fil est fixe au barrage ou sa fondation, la partie suprieure est mise en tension un flotteur.

    Vinchons :appareil qui, scell de part et dautre dun joint ou dune fissure, permet de mesurer, dans les trois directions,les dplacements relatifs des deux plots ou des deux parois de la fissure.

    Inclinomtre : une sonde mobile se dplace dans un tube guide. Lensemble permet de mesurer linclinaison dunforage, lvolution dun glissement de terrain ou les dformations horizontales dun sol.

    amont/aval et rive/rive). Ces mesures mobilisentdes comptences spcialises, une fois ou deuxfois par an ;

    les dplacements en profondeur, mesurs par

    des instruments installs le plus souvent lors de laconstruction (pendule, inclinomtre, longam-tre, extensomtre, distofor, tassomtre) ;

    les dplacements relatifs, le long dun joint oudune fissure, quantifis par des instruments leplus souvent installs la demande (fissuromtre,vinchon).

    Les mesures hydrauliques sont les suivantes :

    les dbits de fuite, mesurs par empotement(collecte chronomtre avec un rcipient gradu)ou par seuil calibr (dversoir seuil avec limni-mtre, puis utilisation dune loi de seuil pour esti-

    mer le dbit). Ils concernent les drains, les puitsde dcompression, les zones de rsurgence ;

    les charges hydrauliques, mesures par despizomtres. Le pizomtre tube ouvert est lesystme le plus simple et le plus robuste. Il estimplant dans le corps du barrage, dans la fon-dation, les rives ou en aval. Il peut tre install tout moment, par exemple pour un renforcementde lauscultation. Il sagit dun forage de faiblediamtre, quip dun tubage de quelques cen-timtres et crpin en partie infrieure sur unehauteur dfinissant la chambre de mesure.La mesure se fait laide dune sonde donnant

    la diffrence de cote entre la nappe et la tte dupizomtre, pralablement nivele. La prcisionest de lordre du centimtre ;

    les pressions interstitielles, mesures par des

    cellules de pression interstitielle, appareils defaible dimension installs lors de la constructiondans le corps du barrage ou dans la fondation.Le principe de mesure de la pression dpenddu type dappareil (cellule contre-pression oucellule corde vibrante). La prcision est 0,1 1 kPa (soit 1 10 cm).

    Dans le corps du barrage en remblai, un dispositifcomplet comprend plusieurs profils amont/avalpermettant dvaluer la saturation du corps dubarrage, et un ou plusieurs points de mesure dedbits dont le rle est de dtecter lapparition et

    lvolution de zones de fuite. La fondation, lesappuis, les rives et la plateforme aval doivent ga-lement tre auscults. La figure 1 est un exempledauscultation du corps dun barrage en amontdu drain chemine et de linterface base/fonda-tion par des cellules corde vibrante. La figure 2montre un dispositif de pizomtres auscultant lesabords de ce barrage.

    Pour un barrage en service, la priodicit est ditenormale. Dans une situation particulire (construc-tion, premier remplissage, vidange et remplissage,travaux importants), la priodicit est resserre.Celles-ci sont toujours spcifiques louvrage. Il estindispensable de raliser des mesures de manirecontinue dans le temps. Plus encore que leur valeurabsolue, cest en effet lvolution des phnom-nes dans le temps quil est essentiel de connatre.Lacclration dun dplacement ou la montebrutale dune pression deau sont des exemplesde comportement quil est capital de dceler temps. Il est galement indispensable de raliserdes mesures de manire homogne dans le temps.

    Figure 1 Coupe et implanta-tion des cellules depression (barrage deChamboux).

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    L'auscultation des barrages en terre : une ncessit

    Stphane Bonelli et al.

    Lanalyse compare de lvolution de plusieursgrandeurs est parfois indispensable pour conclure.Cest notamment le cas du couple pressioninterstitielle/dbit de fuite. La diminution dundbit de fuite est un exemple de comportement

    qui ncessite la connaissance de la pizomtriedans la zone concerne. Si celle-ci diminue, onpeut conclure un auto-colmatage du corpsdu barrage (phnomne rassurant). A contrario,si celle-ci augmente, on peut souponner uncolmatage du dispositif de drainage (phnomnetrs inquitant).

    L'analyse des mesures d'auscultationLauscultation vise dtecter suffisamment ttdes discontinuits, des volutions significati-ves, des irrversibilits traduisant des dsordres.Il sagit toujours in fine de grands dplace-ments de masses ou dinterface, annoncspar des phnomnes prcurseurs : monte depression interstitielle, fissures, ouverture de

    joints Voici quelques exemples dvolutionssusceptibles de conduire des dsordres, voire des ruptures, et dont les signes avant-cou-reurs sont recherchs par lanalyse des mesuresdauscultation.

    Dplacements

    Un tassement excessif de la crte entrane

    une diminution de la revanche (diffrence entrela cote de la crte et la cote des plus hautes eauxde projet), ce qui diminue la scurit du barragevis--vis du risque de surverse. Ce tassementpeut reflter une forte compressibilit de la fon-dation, ou un compactage insuffisant du corpsdu barrage.

    Des amorces de glissement dans le talus avaldu barrage, le talus des rives ou les versants dela retenue, sont susceptibles de remettre encause la stabilit de ces talus. Limplantationdinclinomtres peut permettre de localiser la

    zone de glissement en profondeur et de suivrelvolution du glissement.

    Pizomtrie et pression interstitielle

    Une pizomtrie leve ou en augmentationdans le corps du barrage est toujours inquitante.Elle peut tre le signe dun contournement dudrain ou dune alimentation par un versant.Dans tous les cas, la stabilit du barrage est remise

    en question. Si la ligne pizomtrique vient affleu-

    rer le talus aval, des suintements peuvent voluervers une rosion interne (renard).

    Une pizomtrie leve ou en augmentationdans la fondation est prjudiciable la stabilitde louvrage. Elle peut tre impute une dfi-cience des dispositifs dtanchit de la fondationet des appuis.

    Une diminution de la pizomtrie est en gn-ral favorable. Elle peut reflter la dissipation despressions interstitielles de construction ou unediminution de la permabilit des matriaux parauto-colmatage.

    Dbit de fuiteUne diminution des dbits peut tre impute une amlioration naturelle de ltanchit du bar-rage et de sa fondation par colmatage lamont,volution qui est favorable. Cette diminution peutgalement reflter un colmatage des drains, quise trouvent peu peu contourns et ne contr-lent plus les dbits de fuite. Ce colmatage peuttre la consquence dun phnomne drosioninterne (suffusion). Dans ce cas trs inquitant,la pizomtrie va augmenter et les coulementsnon contrls peuvent tre lorigine drosion

    interne (renard) ou de glissements du talus aval.Seule la mesure du couple pizomtrie/dbitpermet un diagnostic.

    Une augmentation anormale des dbits peuttre impute une alimentation par un versant,mais aussi un processus drosion interne(renard ou suffusion). Dans ce dernier cas, leseaux collectes peuvent tre charges dlmentsfins issus du corps du barrage.

    Figure 2 Vue en plan etimplantation despizomtres (barragede Chamboux).

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    Exemple d'analyse,barrage de Chamboux (France)Une vritable surveillance de louvrage supposeque lon puisse suivre lvolution de son compor-

    tement dans le temps, dduction faite de touteautre variation : cest lanalyse conditionsconstantes . Cest prcisment ce que stipulela rglementation franaise (encadr 2) relative linspection et la surveillance des barrages int-ressant la scurit publique, cest--dire dont larupture ventuelle aurait des rpercussions gravespour les personnes, quelle quen soit la hauteur.

    Lanalyse conditions constantes supposeque lon soit capable de quantifier linfluencedes principales sollicitations : la cote du plandeau, les effets saisonniers et les prcipitations.Cest lobjet de lanalyse des mesures dauscul-

    tation, qui peut tre ralise avec les mthodesde type hydrostatique-saison-temps (galementappeles hydrostatic-season-time ou HST1).Pour un ouvrage en service, les sollicitations pro-voquent des dformations rversibles puisque ledimensionnement a t ralis en consquence :les limites de stabilit ou de rsistance ne sontpas atteintes. Lanalyse des mesures dauscul-tation permet alors de ramener les mesures conditions constantes afin de quantifier lesphnomnes volutifs et irrversibles. La vitessedvolution peut tre positive (augmentationavec le temps) ou ngative (diminution avec le

    temps), et peut tre acclre ou amortie. Cettevolution est alors interprter en tenant comptede la connaissance de louvrage que lon a parailleurs : dissipation des pressions interstitiellesde construction, colmatage du tapis drainant,

    volution des permabilits La priodicit estbiennale pour lanalyse et linterprtation desmesures dauscultation.

    Les mthodes HST ont t proposes dans les

    annes 1960 par lectricit de France pour ana-lyser les mesures de dplacements issues de pen-dules de barrages votes (Ferry et Willm, 1958).Ces mthodes sont actuellement utilises dans plu-sieurs pays pour analyser dautres types de mesu-res. Lexprience acquise depuis quelques dcen-nies sur plusieurs centaines de barrages a confirmlexcellence de lapproche comme un outil puis-sant dinterprtation des mesures dauscultation,comme le soulignent rgulirement les rapports dela Commission internationale des grands barrages.Le modle HST standard est bas sur trois effets.Le premier est leffet hydrostatique, qui rend

    compte des variations de la mesure provoquespar la retenue. Le second effet est la date dans lan-ne, qui rend compte des variations saisonniresde la mesure, de priodes douze mois et six mois.Le troisime effet rend compte de linfluence dutemps, dont le vieillissement. Afin de permettrelanalyse de grandeurs hydrauliques, la prise encompte de la pluie est ncessaire, ce qui constitueun quatrime effet intgrer un modle HST.Le Cemagref a dvelopp une variable explicativede la pluie dans les annes 1980 (cf.Bonelli et al.,2003, pour une description dtaille, et Bonelli,2004, pour un historique dtaill).

    titre dillustration, les niveaux pizomtriquesdu barrage de Chamboux (France) sont analyss(cf. Bonelli et al., 2003, pour une analysedtaille). Il sagit dun barrage en terre homognede 15,5 m de hauteur. La fondation est consti-

    Encadr 2

    La rglementation

    En France, la circulaire n 70-15 du14 aot 1970 relative linspection et la surveillance des barrages intressantla scurit publique,modifie par la circulaire n TE/8562 du 29 septembre 1983, dfinit le contrle des barragespar les services de ltat. Elle impose au propritaire le devoir de la prparation dun rapport chaque anne pour leservice du contrle. Ce rapport sur la surveillance et lauscultation du barrage donne dune part, des renseignementssuccincts sur lexploitation des ouvrages au cours de lanne, sur les incidents constats et les travaux effectus, etdautre part, sous forme de graphiques, les rsultats des mesures effectues ainsi que leur interprtation. Ce rapportcomporte obligatoirement, tous les deux ans, une analyse approfondie de lvolution du comportement de louvrage.La circulaire dcrit aussi les appareils dauscultation qui peuvent tre installs sur le barrage.

    En Pologne, la loi sur la construction(du 7 juillet 1994 modifie le 11 juillet 2003) impose au propritaire le devoir deraliser la surveillance et lauscultation du barrage, ainsi quune visite annuelle de contrle du barrage plus approfon-die, tous les cinq ans, par le service de contrle. Sur la base de ces contrles ainsi que sur la base des rsultats desmesures, un rapport dvaluation de ltat de louvrage est labor par un expert. De plus, la loi sur leaudfinit endtail les lments dauscultation des barrages.

    1. Mthode statistiquede sparation deseffets hydrostatique(H), saisonnier (S) ettemporel (T) irrversi-ble, conue l'originepar EDF.

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    L'auscultation des barrages en terre : une ncessit

    Stphane Bonelli et al.

    tue darnes granitiques (permabilit 10-5 10-6m/s) et tanche par un voile dinjection.Le remblai comporte des arnes (permabilit10-8 10-9m/s) lamont du drain vertical. Ledrain est raccord laval par des cordons drai-

    nants entours de filtres. Des puits de dcom-pression verticaux dbouchent dans un caniveaude pied qui rcupre aussi les eaux draines.Le barrage a t mis en eau en 1984.

    Le dispositif de mesures hydrauliques comporte entre autres treize pizomtres lecture directeen aval du barrage et sept cellules de pressionsinterstitielles dans le corps du barrage, dans laxede lvacuateur (figures 1 et 2,p. 14 et p. 15).Lanalyse HST de ces vingt instruments est ralisepour la priode 1989/98, soit neuf ans et environcent mesures par instrument. La prcision est delordre du centimtre.

    En moyenne, la variation des niveaux est expli-que 30 % par la variation de la cote du plandeau, 19 % par la pluviomtrie, 15 % parles effets saisonniers et 6 % par des volutions

    dans le temps. Pour certains pizomtres, la partexplicative de la pluie peut atteindre 38 %.

    Un exemple de rsultat dtaill est donn figure 3

    (courbe brute et variations de la retenue) etfigure 4 (rsultats de lanalyse). La variation desniveaux est essentiellement imputable la retenue.Leffet saisonnier est significatif, avec un maximumen t et un minimum juste avant lhiver.

    Figure 3 Cote de la retenue etniveau pizomtriquepour un pizomtre du

    barrage de Chamboux(PD1).

    Figure 4 Influence de la retenue, de la saison, de la pluie et du temps (PD1). Les courbes reprsentent le modle. Les symboles reprsententla mesure corrige.

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    Pour mieux apprhender le comportement globalde louvrage, nous dfinissons quelques indica-teurs et nous les reportons sur des vues en plan.Parmi ceux-ci, linfluence de la cote du plandeau, appel ", reprsente le ratio variation de lamesure sur variations du niveau de la retenue.

    Lorsque les mesures ne sont pas influencespar la retenue, "= 0. Aux abords du barrage,le bon fonctionnement du voile dtanchitest illustr par la dcroissance, des rives vers lefond de valle, des amplitudes de variation desniveaux (figure 5) et du coefficient "(figure 6).Le contournement par les rives du voile dtan-chit est illustr par un coefficient "proche de 1en haut des rives. Toutefois, ce contournement se

    fait au large, puisque les valeurs de "dcroissentvers le fond de valle (figure 6). Les variationssaisonnires reprsentent 5 10 % des variationstotales (figure 7). Les volutions dans le temps desniveaux sont faibles par rapport aux amplitudes

    de variation, ce qui est scurisant (figure 8).Un pizomtre situ en rive gauche prs dela crte est remarquable : variations beaucoupplus importantes que celles de la retenue (549contre 381 cm, figure 5), partiellement imputa-bles la retenue ("= 0,48 ; figure 6), variationssaisonnires les plus leves (B = 102 cm/an,figure 7). Ce comportement est d la prsencedune nappe de coteau, identifie ds le projet.Lanalyse HST permet un diagnostic : les niveauxne causent pas dinquitude, ils restent infrieurs la cote du terrain naturel et nindiquent aucunevolution dans le temps.

    Le dispositif dauscultation montre un comporte-ment satisfaisant. A contrario, linspection visuellea rvl des dsordres sur le remblai, mais cecinest pas le sujet de cet article.

    Exemple danalyse,barrage de Klimkowka (Pologne)Le barrage de Klimkowka est un barrage en terrezon. Construit en 1994, il est situ au sud dela Pologne, sur la rivire Ropa. Sa hauteur maxi-male est 33 m, sa longueur en crte est 210 m,la capacit du rservoir est de 43,5 Mm3et la sur-

    face de la retenue est de 3,06 Mm2. Une galerieet un cran dinjection assurent l'tanchit dubarrage, sous le noyau central en argile. Ce noyauest protg par un filtre bi-couches, li par unelanire drainante horizontale un tapis drainantaval au pied du barrage (figure 9). Des couchespaisses de grs spares par des couches finesde schiste constituent la fondation du barrage.Ces couches descendent sous le rservoir avecun pendage de 45-57.

    Des phnomnes dcoulement a priori anor-maux ont t constats en 2003, entre le 11 marset le 16 avril 2003. Les niveaux amont (rservoir)

    et aval, les niveaux pizomtriques, les dbitsde drainage, les prcipitations et les tempra-tures ont alors t releves quotidiennement.La figure 10 montre lemplacement des pizo-mtres. La figure 11 (p. 20) contient le report deces mesures pour la priode du 17 janvier 2003au 16 avril 2003.

    Analysons dans un premier temps les dbitsde drainage. En dcembre 2002, le niveau du

    Figure 5 Amplitude de variationtotale (cm).

    Figure 6 Influence de la cotedu plan d'eau "#

    Figure 7 Amplitude de variancesaisonnire( cm/an).

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    rservoir diminue. En consquence les dbitsde drainage (droit et gauche) diminuent, jusquun asschement total (le 20 janvier 2003 pourle drainage gauche, et le 27 fvrier pour le drai-nage droit). Ce phnomne est galement li

    la baisse du niveau aval, qui induit en outre unedsaturation du remblai sous le niveau du drain.Bien que le niveau aval soit bas et que le niveauamont continue de diminuer, le drainage gaucherecommence couler le 27 fvrier (2 l/min).Ce phnomne peut tre expliqu par une analysefine des mesures, qui intgre lensoleillement dutalus de la colline. Depuis la fin fvrier, len-soleillement et les tempratures augmentent.

    Figure 10 Implantation despizomtres (barragede Klimkowka).

    Figure 8 Vitesse d'volution annuelle conditions constantes (cm/an).

    Figure 9 Coupeet implantation descellules de pression(barrage de Klim-kowka).

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    et leau a ruissel. Quand les tempratures sontdevenues positives aprs le 10 avril, leau sestalors infiltre dans les talus, et on a observ uneaugmentation des dbits du drainage.

    Nous analysons maintenant les pizomtresouverts PRZ 4, 8 et 12, localiss lamont

    du noyau (figure 10, p. 19). Jusquau 26 mars,les mesures nont pas pu tre ralises cause de la prsence de glace dans les tubes.Ensuite, les volutions montrent un retard parrapport laugmentation du niveau du rser-voir, malgr la prsence des trois couchesdrainantes dans la recharge amont (figure 9,p. 19). Ce retard est d au temps mis parle remblai pour se saturer, aprs une priodeimportante un niveau de retenue bas.

    Figure 11 Reportdes mesures d'aus-cultation (barrage deKlimkowka).

    Les talus commencent rendre leau accumu-le pendant lhiver (dont la neige et la glace).Le talus gauche, creux et tourn vers le sud-est, estle plus ensoleill : il restitue leau emmagasineen premier, avant le talus droit, convexe et tournvers le nord-ouest. Depuis le 11 mars, date initialedenregistrement des valeurs de la temprature,

    on constate que les valeurs des dbits de draincorrespondent cette volution.

    partir du 13 mars, laugmentation du niveaudu rservoir influence les dbits du drainage.Le systme de drainage est rput sensible auxprcipitations : il recueille les eaux de pluie travers les talus. Toutefois, il nest pas influencpar la prcipitation du 4 au 9 avril. Les prcipi-tations ont eu lieu pendant des priodes de gel

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    Comment expliquer alors que la rponse despizomtres PRM 1, 5 et 9, localiss laval dunoyau soit instantane ? Ce comportement pourraita prioritre interprt comme rvlateur dunefuite. Toutefois, une analyse plus approfondie

    des niveaux pizomtriques PRM 1, 5 et 9 rvleune augmentation qui prcde celle du niveau durservoir, mais qui est concomitante laugmen-tation des dbits du drainage. On en dduit quecelle-ci est provoque par lcoulement de leaudes talus de la colline, et quil ne sagit pas dunefuite. Les observations ultrieures correspondentdailleurs un comportement classique : corres-pondance entre variations du niveau du rservoiret variations des niveaux pizomtriques.

    La description prsente ci-dessus est un extraitde lanalyse approfondie, realise pour tous lespizomtres du barrage Klimkowka, et qui tientcompte de la correspondance avec les niveauxamont et aval, et avec les dbits du drainage(Szczesny et Truty, 2003). La prise en comptedes volutions de la temprature de lair a tessentielle pour expliquer les coulements danslouvrage, bien que la priode dauscultationrenforce soit trs courte. Elle a permis dviterla mise en uvre dinvestigations coteuses (uti-lisation de traceurs et ralisation de forage pouranalyser le cheminement de leau par exemple).

    Conclusion

    Les questions de scurit lies aux barragesconstituent un enjeu. Elles concernent nonseulement le barrage lui-mme et sa scuritintrinsque , mais aussi ses modalits dexploi-tation. Le contrle du bon tat des barrages peutaussi inclure une proccupation patrimoniale,notamment pour les barrages concds.

    Lanalyse des mesures dauscultation permetdapprhender le comportement dun ouvrage,et de fonder les diagnostics. Cette analyse cons-titue le socle dune controverse ventuelle dansle cas dune situation complexe. Deux exemples

    de mthode sont prsents : lanalyse experte etlanalyse HST (qui ncessite galement une partdexpertise). Ces exemples illustrent la grandeimportance de disposer de mesures dausculta-tion pour se prononcer sur une question relative un barrage.

    Dautres mthodes peuvent tre utilises outre lobjet de recherche. Un modle danalysepermettant de tenir compte dun retard entrela sollicitation et la rponse a t rcemmentdvelopp et est en cours de transfert (Bonelli,2004). Ce retard peut tre dorigine hydraulique,

    par diffusion de Darcy (Bonelli et Royet, 2001),ou dorigine thermique, par diffusion de Fourier(Bonelli et Flix, 2001).

    Toutefois, pour quil soit possible de mettreen uvre une mthode danalyse des mesures voire de mener des recherches pour amlio-rer ces mthodes ou en laborer de nouvelles il est ncessaire de disposer de mesures dequalit (fiabilit des instruments, vrificationpriodique de leur bon fonctionnement,reprsentativit de la mesure, estimation deson incertitude, srieux de loprateur, vri-fication de la mesure) : cest la conclusion

    essentielle. Les statistiques montrent quilexiste une forte corrlation entre les plus gravesaccidents de barrages et labsence dauscul-tation organise (Londe, 1990). La qualitdu diagnostic qui pourra tre propos refl-tera la qualit du dispositif dauscultation etde la ralisation des mesures.

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    Bibliographie

    Rsum

    Pour comprendre le comportement long terme dun barrage, il est essentiel dinterprter soigneusement les donnes

    dauscultation mesures. Le contrle de la scurit dun barrage exige que les donnes mesures soient interprtes dans le

    temps le plus court possible aprs les lectures. En ce qui concerne les mthodes dinterprtation et danalyse de telles don-nes, il y a des pratiques et des points de vue variables. Toutefois, dans tous les cas, il est essentiel de disposer de mesures

    dauscultation. Les principes de base de lauscultation des barrages sont exposs, ainsi que les objectifs de lanalyse des

    mesures. La grande valeur de cette analyse est illustre sur deux exemples mettant en uvre deux mthodes diffrentes.

    Le premier exemple porte sur les niveaux pizomtriques dun barrage en terre homogne de 15,5 m de hauteur (barrage

    de Chamboux, France). La mthode est base sur une analyse statistique dnomme hydrostatique-saison-temps (ou HST).

    Le report de quelques indicateurs sur les plans du barrage permet une analyse globale de son comportement. Le second

    exemple concerne un barrage en terre zon de 33 m de hauteur (barrage de Klimkowka, Pologne). La mthode est base sur

    une analyse experte des mesures. Lobjet de ce papier nest pas de dcrire les mthodes mises en uvre, mais de souligner

    la ncessit de disposer de mesures dauscultation pour valuer la scurit dun barrage.

    Abstract

    To understand the long-term behaviour of a dam, it is essential to carefully interpret the measured data. Effective controlof dam safety requires that measured data has to be interpreted as fast as possible after the readings. In regards to the

    methods of interpretation and analysis of such data, there are different practices and varying viewpoint. However, in every

    case, it is essential to have monitoring data. The basic principles of dam monitoring are exposed, as well as the objecti-

    ves of the analysis of the measures. The value of such an analysis is illustrated on two examples operating two different

    methods. The first example concerns the piezometric levels of a homogeneous earthdam of 15,5 m of height (Chamboux

    dam, France). The method is based on a statistical analysis called Hydrostatic-Season-Time (or HST). The location of some

    indicators on the plans of the dam allows a global analysis of its behavior. The second example concerns a zoned earthdam

    of 33 m of height (Klimkowka dam, Poland). The method is based on an expertise of the measures. The object of this paper

    is not to describe the methods, but to convince the necessity of having monitoring data to estimate the safety of a dam.