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ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L’UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL Conflits potentiels entre les générations au travail par Mélodie Desrosiers Sciences de la gestion Mémoire présenté en vue de l’obtention du grade des maîtres ès sciences (M.Sc.) Janvier 2011 © Mélodie Desrosiers, 2011

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ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALESAFFILIÉE À L’UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

Conflits potentiels entre les générations au travail

par

Mélodie Desrosiers

Sciences de la gestion

Mémoire présenté en vue de l’obtentiondu grade des maîtres ès sciences

(M.Sc.)

Janvier 2011© Mélodie Desrosiers, 2011

Page 2: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

Sommaire

Lorsqu’il est question de conflits dans une même équipe de travail, nous

ne considérons pas systématiquement la dimension générationnelle.

D’ailleurs, pour les auteurs Zemke et al. (2000 :3), notre tendance est de

se concentrer d’emblée sur les aspects les plus manifestes, tels que la

personnalité, la culture, le statut d’équipe, la race, le sexe et la religion. À

la suite du travail de recension, nous réalisons qu’il manque un

approfondissement au niveau des études explorant la dynamique

intergénérationnelle et les conflits potentiels générés entre les

générations (Saba 2009). Les objectifs de notre recherche sont

essentiellement de proposer et de valider l’existence d’un certain nombre

de conflits basés sur cinq points d’opposition qui ressortent

systématiquement de la littérature. Ensuite, nous étudions comment ces

conflits pourraient se manifester dans les relations d’emploi et pourraient

modifier les comportements et les attitudes au travail, selon les

perceptions des membres des générations différentes. Finalement, nous

nous penchons brièvement sur la question de la gestion des équipes

intergénérationnelles, à savoir quelles seraient les pratiques à préconiser

pour un meilleur management de ces équipes.

Les résultats de notre étude nous conduisent à un certain nombre de

conclusions. D’abord, lors de notre collecte de données sur le terrain,

nous avons pu constater une correspondance entre les personnalités

générationnelles et les conflits potentiels dans les équipes. Or, les

résultats nous ont permis de constater que chacune des trois

générations à l’étude a des exigences, des valeurs et des attentes

différentes, ce qui peut conduire à des malentendus voire des conflits

d’ordre partiellement générationnel.

En ce qui a trait aux solutions apportées par les gestionnaires de notre

échantillon, nous avons trouvé que les gestionnaires ne parlent pas en

termes de gestion des équipes intergénérationnelles, mais plutôt à partir

d’une perspective générationnelle.

Page 3: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

ii

Remerciements

En un mot, l’aboutissement de ce projet marque la fin d’une aventure et

le commencement d’un nouveau chapitre de ma vie. Ceci étant dit, je ne

pourrais poursuivre ma route sans remercier de tout mon cœur ma

directrice, Veronika Kisfalvi, qui a su me guider par sa compétence, sa

gentillesse, sa compréhension, sa collaboration et sa très grande

disponibilité. Veronika m’a été d’une grande aide, inspiration et surtout

de motivation dans les temps les plus difficiles.

La rédaction de ce projet n’aurait pas été possible sans l’aide de mes

répondants, que je veux remercier pour leur générosité dans la qualité

de leur réponse, mais surtout pour le temps qu’ils m’ont accordé malgré

leur agenda extrêmement chargé.

Mais par-dessus tout, le dénouement de ce parcours n’aurait pas été

réalisable sans l’appui de mon conjoint, que je remercie

chaleureusement pour m’avoir accordé sa confiance et sans qui je ne

serais pas ici aujourd’hui en train de rédiger cette lettre de

remerciements. Et finalement, je remercie ma petite fille, qui est encore

trop petite pour comprendre, mais qui m’a été une source d’inspiration et

qui m’a donné la force de continuer dans les moments les plus difficiles.

Page 4: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

iii

TABLE DES MATIÈRES

Sommaire ........................................................................................................... i

Remerciements................................................................................................. ii

Liste des tableaux........................................................................................... viiListe des illustrations ..................................................................................... vii

CHAPITRE 1. Introduction ................................................................................11.1. Objectif de la recherche ............................................................................................... 1

1.2. Structure du mémoire................................................................................................... 3

CHAPITRE 2.Revue de littérature.....................................................................42.1. Réalités démographiques au Québec ........................................................................ 4

2.1.1. Le vieillissement de la population......................................................................... 52.1.1.1. Pénurie de main-d’œuvre ........................................................................ 7

2.1.1.2. La gestion des talents .............................................................................. 7

2.1.1.3. Le transfert de connaissances d’une génération à l’autre ..................... 8

2.2. La réalité des entreprises............................................................................................. 92.2.1. La nature changeante des métiers ....................................................................... 92.2.2. L’aplatissement des échelons dans les entreprises ............................................ 9

2.3. Concept d’une génération et différences intergénérationnelles.......................... 10

2.4. Conflits intergénérationnels ...................................................................................... 12

2.5. Typologie des générations ........................................................................................ 132.5.1. La génération du baby boom .............................................................................. 152.5.2. La génération X ................................................................................................... 162.5.3. La génération Y ................................................................................................... 17

2.6. Les défis de gestion face au phénomène des équipes intergénérationnelles... 18

2.7. Les implications pour la gestion............................................................................... 182.7.1. La communication ............................................................................................... 202.7.2. Le mentorat et le coaching.................................................................................. 212.7.3. La flexibilité .......................................................................................................... 22

2.8. La dynamique intergénérationnelle.......................................................................... 22

2.9. Objectifs de la recherche et conclusion .................................................................. 23

CHAPITRE 3.Cadre conceptuel ...................................................................... 253.1. Présentation du cadre conceptuel............................................................................ 25

3.2. Question générale de recherche............................................................................... 26

3.3. Les influences, les caractéristiques et les attentes des trois générations ........ 27

3.4. Les points d’opposition et conflits intergénérationnels potentiels..................... 29

3.5. Le sens au travail ........................................................................................................ 303.5.1. Le sens au travail pour la génération du baby boom......................................... 303.5.2. Le sens au travail pour la génération X.............................................................. 323.5.3. Le sens au travail pour la génération Y.............................................................. 33

3.6. Le rapport à l’institution............................................................................................. 343.6.1. Le rapport à l’institut pour la génération du baby boom .................................... 353.6.2. Le rapport à l’institut pour la génération X ......................................................... 36

Page 5: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

iv

3.6.3. Le rapport à l’institut pour la génération Y ......................................................... 37

3.7. La place du travail d’équipe....................................................................................... 373.7.1. La place du travail d’équipe pour la génération du baby boom......................... 383.7.2. La place du travail d’équipe pour la génération X.............................................. 393.7.3. La place du travail d’équipe pour la génération Y.............................................. 39

3.8. La loyauté ..................................................................................................................... 403.8.1. La loyauté pour la génération du baby boom..................................................... 413.8.2. La loyauté pour la génération X.......................................................................... 413.8.3. La loyauté pour la génération Y.......................................................................... 42

3.9. La communication....................................................................................................... 423.9.1. La communication pour la génération du baby boom........................................ 433.9.2. La communication pour la génération X............................................................. 443.9.3. La communication pour la génération Y............................................................. 44

3.10. Les conflits intergénérationnels ............................................................................. 46

CHAPITRE 4. Méthodologie de recherche ..................................................... 484.1. Approche et méthode de cueillette des données................................................... 48

4.1.1. L’approche qualitative ......................................................................................... 484.1.2. Étude de cas par l’entretien semi-directif ........................................................... 49

4.2. Structure de la recherche........................................................................................... 504.2.1. Les répondants.................................................................................................... 514.2.2. Les organisations participantes .......................................................................... 514.2.3. L’outil de recherche ............................................................................................. 52

4.3. La collecte de données............................................................................................... 524.3.1. Échantillon de la recherche................................................................................. 524.3.2. Contacts préliminaires et déroulement de l’entretien ........................................ 52

4.4 Méthode d’analyse des données ............................................................................... 53

4.5. Méthode de présentation des données.................................................................... 54

CHAPITRE 5. Résultats et analyses des générations face aux cinq dimensions ..................................................................................... 565.1. Description de l’échantillon....................................................................................... 57

5.1.1. Portrait sommaire des répondants ..................................................................... 57

5.2. Résultats et analyse de la dimension du sens au travail ...................................... 585.2.1. Résultats par génération en regard de la dimension du sens au travail........... 595.2.2. Analyse des générations par rapport au sens au travail ................................... 62

5.2.2.1. Les baby boomers et le sens au travail ................................................ 62

5.2.2.2. Les X et le sens au travail...................................................................... 64

5.2.2.3. Les Y et le sens au travail...................................................................... 65

5.3. Résultats et analyse de la dimension le rapport à l’institution ............................ 665.3.1. Résultats des générations quant à la dimension le rapport à l’institution......... 665.3.2. Analyse des générations et leur rapport à l’institution ....................................... 67

5.3.2.1. Les baby boomers et le rapport à l’institution ....................................... 67

5.3.2.2. Les X et le rapport à l’institution ............................................................ 69

5.3.2.3. Les Y et le rapport à l’institution ............................................................ 70

5.4. Résultats et analyse pour la dimension du travail d’équipe................................. 715.4.1. Résultats par génération sur la dimension du travail d’équipe.......................... 715.4.2. Analyse des générations et la place du travail d’équipe.................................... 73

5.4.2.1. Les baby boomers et le travail d’équipe ............................................... 73

5.4.2.2. Les X et le travail d’équipe..................................................................... 74

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v

5.4.2.3. Les Y et le travail d’équipe..................................................................... 75

5.5. Résultats et analyse de la dimension la loyauté .................................................... 755.5.1. Résultats des générations selon la dimension de la loyauté ............................ 765.5.2. Analyse des générations et la loyauté................................................................ 77

5.5.2.1. Les baby boomers et la loyauté ............................................................ 77

5.5.2.2. Les X et la loyauté.................................................................................. 79

5.5.2.3. Les Y et la loyauté.................................................................................. 79

5.6. Résultats et analyses de la dimension de la communication .............................. 805.6.1. Résultats des générations par rapport à la dimension de la communication ... 805.6.2. Analyse des générations par rapport à la communication ................................ 83

5.6.2.1. Les baby boomers et la communication ............................................... 83

5.6.2.2. Les X et la communication..................................................................... 84

5.6.2.3. Les Y et la communication..................................................................... 85

5.7. Les comportements clés, valeurs et attitudes des trois générations ................. 86

CHAPITRE 6. Présentation des conflits potentiels et discussion................. 906.1. Discussion en regard avec les terrains de confrontations possibles dans uneéquipe intergénérationnelle .............................................................................................. 90

6.1.1. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la variable « sens autravail » ........................................................................................................................... 90

6.1.1.1. Conflits potentiels entre les générations baby boom et X

en regard avec la variable du sens au travail ................................................... 90

6.1.1.2. Conflits potentiels entre les générations baby boom et Y

en regard avec la variable le sens au travail .................................................... 91

6.1.1.3. Confl i t potentiel entre les générations X et Y

en regard de la variable le sens au travail ........................................... 926.1.2. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la variable « rapport àl’institution » ................................................................................................................... 93

6.1.2.1. Conflits potentiels entre les générations baby boom et X en regard

avec la variable rapport à l’institution................................................................ 93

6.1.2.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard

avec la variable le rapport à l’institution............................................................ 95

6.1.2.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la

variable le rapport à l’institution......................................................................... 95

6.1.3. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la variable« travail d’équipe »......................................................................................................... 96

6.1.3.1. Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard

avec la variable le travail d’équipe .................................................................... 96

6.1.3.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard

avec la variable le travail d’équipe .................................................................... 96

6.1.3.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la

variable le travail d’équipe ................................................................................. 97

6.1.4. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la variable « loyauté » 986.1.4.1. Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard

avec la variable la loyauté................................................................................... 98

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vi

6.1.4.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard

avec la variable la loyauté................................................................................... 98

6.1.4.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard

avec la variable la loyauté................................................................................... 99

6.1.5. Confl i ts intergénérat ionnels potent iels en regard avecla variable « communication »..................................................................................... 100

6.1.5.1 Conflit potentiel entre les générations baby boom et X

en regard avec la variable la communication................................................... 100

6.1.5.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y

en regard avec la variable la communication................................................... 101

6.1.5.3. Confl i t potentiel entre les générations X et Y

en regard avec la variable de la communication.............................................. 102

6.2. Confrontations générationnelles possibles dans une équipeintergénérationnelle ......................................................................................................... 103

6.3. Les gestionnaires et les différences intergénérationnelles................................ 106

6.4. Portrait sommaire des gestionnaires..................................................................... 107

6.5. Solutions potentielles apportées par les gestionnaires face aux conflitsintergénérationnels .......................................................................................................... 108

6.6. Les défis de gestion face au phénomène des équipes intergénérationnelles. 110

CHAPITRE 7. Conclusion ............................................................................. 112

Bibliographie................................................................................................. 116Annexe A - Guide de l’entrevue.................................................................... 121

Annexe B -Formulaire de consentement à une entrevue............................ 122

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vii

Liste des tableaux

Tableau 2.1 : Comparaison des caractéristiques des milieux de travailtraditionnels et modernes 13

Tableau 2.2 : Profil des générations actives sur le marché du travail 14

Tableau 3.1 : Événements clés et valeurs propres à chacune des générations 27

Tableau 3.2 : Manifestation des conflits potentiels intergénérationnelsdans une équipe 46

Tableau 4.1 : Conflits intergénérationnels basés sur les cinq points d’opposition 54

Tableau 5.1 : Caractéristiques des répondants 58

Tableau 5.2 : Classement par génération des citations significativespar rapport à la dimension du sens au travail 59

Tableau 5.3 : Citations significatives des générations en regard avecla dimension le rapport à l’institution 66

Tableau 5.4 : Citations significatives des générations en regard avecla dimension du travail d’équipe 72

Tableau 5.5 : Citations significatives des générations en regard avecla dimension de la loyauté 76

Tableau 5.6 : Citations significatives des générations en regard avecla dimension de la communication 81

Tableau 5.7: Comportements clés, valeurs et attitudes générationnels 87

Tableau 6.1 : Confrontations générationnelles possibles dans une équipeintergénérationnelle 104

Tableau 6.2 : Caractéristiques des gestionnaires rencontrés 107

Liste des illustrations

Figure 3.1 : Conflits intergénérationnels basés sur les cinq points d’opposition 28

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CHAPITRE 1. Introduction

1.1. Objectif de la recherche

Aujourd’hui on peut considérer le marché du travail, autant au Canada

que dans le monde, comme étant en constante évolution (Petit, 2008 et

Audet, 2004). En effet, la mondialisation des marchés (Levitt, 1983),

l’évolution démographique (Audet, 2004), l’intensification de la

concurrence (Petit, 2008), la progression technologique « ont des

répercussions importantes sur le taux d’activité ainsi que sur la nature

des emplois (BIT, 2008; Bourhis, 2007; Fournier et Bourassa, 2000) et

transforment le profil de la main-d’œuvre. » (Bourhis, 2007; cité dans

Petit, 2008 : 3).

À l’intérieur même des entreprises, « les personnes sont devenues des

ressources, les temps de travail sont réduits à des urgences, les rythmes

de travail s’accélèrent, les frontières entre les sphères de l’existence se

fondent et se confondent, le travail lui-même devient incertain et, quant à

l’avenir, encore plus incertain » (Morin et Forêt, 2006 : 31). En matière

de composition de la main-d’œuvre, on a vu une grande augmentation

des femmes, des personnes âgées, des personnes nées à l’extérieur du

pays sans mentionner d’individus plus scolarisés (Petit, 2008). Les

équipes sont plus diversifiées, variées et sont de moins en moins

uniformes. D’ailleurs, lorsqu’on se penche sur le sujet de la diversité en

entreprise, il n’est pas rare de constater que les études sur les

différences reliées au genre, à la race, à l’ethnicité, à la culture ou même

à la religion (Zemke et al., 2000) abondent dans la littérature. Ce n’est

que tout récemment qu’on a commencé à se pencher sur le phénomène

de la mixité intergénérationnelle.

C’est sur cette question que portera ce mémoire. Notre intérêt pour la

recherche portant sur la cohabitation des générations dans les équipes

de travail et leurs différences n’est pas le fruit du hasard. En effet, le

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2

choix de ce sujet a pris naissance durant nos diverses expériences

professionnelles, au cours desquelles nous avons été amenée à réaliser

que ce type de conflit est inévitable. Ainsi, nous nous interrogeons sur

les fondements des confrontations entre collègues de travail et les

raisons qui peuvent pousser une telle manifestation. Essentiellement,

sachant que le travail constitue une activité primordiale pour la

préservation de la santé des personnes (Morin et Forêt, 2006), il est

primordial, pour le bon fonctionnement des entreprises, de maintenir un

climat sain dans les équipes professionnelles (Harvey 2004). De plus, en

2009, une équipe peut se composer de quatre générations ayant toutes

des idéaux, cheminements, perspectives et requêtes personnelles et

professionnelles distincts (Zemke et al., 2000). D’un point de vue

historique, on parle même d’une grande première (Johnson et Lopes,

2008). Certes, ces différences générationnelles, pour ainsi dire, vont

bien au-delà de la simple date de naissance. Or, les experts s’entendent

pour dire qu’une génération est généralement formée à partir

d’événements historiques, sociaux et culturels (Zemke et al., 2000).

C’est d’ailleurs ce qui nous pousse à creuser davantage le sujet de la

mixité intergénérationnelle.

Selon la littérature, ce sont ces différentes valeurs et opinions

intergénérationnelles qui se confrontent et peuvent créer des

malentendus, ce qui se reflète sur la productivité de l’entreprise et, en

bout de ligne, sur les résultats finaux de l’organisation. De plus, certains

auteurs croient que les attentes varient d’une génération à l’autre, ce qui

peut causer de la friction entre les générations. Par exemple, Zemke et

al. (2002) disent que les boomers accordent beaucoup d’importance au

travail d’équipe, aux longues heures au bureau, au travail acharné et à la

reconnaissance des faits. Par contre, les personnes de la génération X

considèrent les compétences plus que l’expérience, l’informalité dans les

communications et l’apprentissage continu. Les Y, quant à eux, orientent

leur pensée sur la réalisation dans un esprit de collaboration. Ces

conceptions différentes peuvent sans doute provoquer des conflits.

D’ailleurs, un des intérêts qui nous pousse à défendre la supposition que

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3

les conflits peuvent avoir une forte composante générationnelle est de

valider dans quelle mesure les répondants, nous feront sentir le poids

générationnel lorsqu’ils nous parleront de leurs exigences, valeurs et

attentes professionnelles.

1.2. Structure du mémoireLe prochain chapitre couvre le plus largement possible le thème de la

dynamique intergénérationnelle. Le troisième chapitre, celui du cadre

conceptuel, vise à présenter les conflits possibles à travers cinq points

d’opposition qui semblent ressortir systématiquement de la littérature.

C’est à travers le quatrième chapitre que nous nous attardons à

certaines considérations méthodologiques qui nous permettront de

mener à terme la présente recherche en science de la gestion.

Ensuite, dans les cinquième et sixième chapitres, nous présenterons les

constats tirés de notre collecte données, que nous discuterons par la

suite dans le chapitre 7.

Page 12: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

CHAPITRE 2. Revue de littérature

Dans ce chapitre, nous aborderons le sujet de la cohabitation des

générations qui composent la main-d’œuvre aujourd’hui, particulièrement

au Québec. Présentement, nous retrouvons quatre générations sur le

marché du travail. La plus vieille des générations, les silencieux

(représentant 16,9 % de la population active selon Statistique Canada,

2007, cité dans Petit 2008), étant appelée à se retirer dans les

prochaines années, nous avons décidé d’étudier les trois autres

générations, c’est-à-dire les baby boomers, les X et les Y. Ainsi, pour

mieux comprendre en quoi consiste l’ampleur de la situation, nous

passerons en revue l’évolution des enjeux démographiques qui

contribuent de manière directe et indirecte au phénomène des équipes

intergénérationnelles. Notons que parmi les différents angles

caractérisant une démographie, on retrouve les origines, l’aspect

ethnique et culturel et l’état physique (Audet, 2004). Pour cette étude,

nous avons choisi de nous concentrer sur la caractéristique de l’âge de

la population.

L’âge, tout au long du cycle de la vie, est la variable démographique laplus déterminante du comportement économique des gens. L’âgeexplique presque tout quand vient le temps d’analyser, dans uneperspective démographique, les comportements économiques de lapopulation. (Foot et al., 1998 : 3 cité dans Harvey 2004 : 18).

2.1. Réalités démographiques au QuébecSelon la littérature, le Québec est la province canadienne la plus

menacée par les tendances démographiques. Pour Audet (2004 :20),

ces changements s’expliquent principalement par « un affaiblissement

au niveau de la performance du Québec en matière de croissance

démographique, faisant chuter le poids démographique de la province

par rapport à la population canadienne ». Or, les facteurs contribuant à

ce phénomène sont un faible taux de natalité (Foot et al., 2000 ; Audet,

2004) et un faible taux d’immigration (Audet 2004). Certains chercheurs

vont jusqu’à prédire un déficit démographique en 2031 si le mouvement

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5

observé ces dernières années ne s’inverse pas (Audet, 2004 et Carrette,

1994).

2.1.1. Le vieillissement de la populationOr, le phénomène du vieillissement de la population touche l’ensemble

de la structure du travail. Selon Audet (2004), la proportion des

personnes de 45 ans à 64 ans, qui représentaient à peine le quart de la

population dans les années 1980, est passée à plus du tiers en 2006

pour atteindre les 40 % en 2008 (Grenier, 1999 cité dans Audet 2004).

Selon le chercheur Lesemann (2007, de 1998 à 2005, au Québec, le

pourcentage d’hommes de 65 à 74 ans occupant un emploi rémunéré et

déclaré est passé de 14 % à 23 %. Durant la même période, chez les

femmes âgées entre 65 et 74 ans, ce pourcentage est passé de 7 % à

10 %.

Selon Foot et al., (1999), ce n’est pas la majorité des travailleurs qui

peuvent se permettre un départ à la retraite à partir de la soixantaine.

Des études confirment que la majorité des personnes éligibles à la

retraite resteront sur le marché du travail plus longtemps afin d’amasser

une somme suffisante pour une rente jugée vivable (Crumpacker et

Crumpacker, 2007). D’après Foot et al., (1999 : 131), « pour s’assurer un

revenu annuel de 30K pendant 25 ans à partir de 60 ans, il faut compter

sur un pécule de 500 000 $ ».

Selon Saba (2009) et Audet (2004), ce sont les gouvernements et les

entreprises qui comptent ajuster les régimes de retraite visant à retarder

et à échelonner les départs anticipés. Pour Foot et al., (1999) et pour

Carrette (1994), les progrès de la médecine, en augmentant l’espérance

de vie, poussent aussi les futurs retraités à demeurer au sein de la

population active après 65 ans. « Compte tenu de ces nouvelles

tendances (Gauthier et al., 2007), il n’est pas surprenant de constater

que le taux d’activité, autant des femmes que des hommes de 55 ans et

plus, connaît une nette augmentation. » (Saba 2009 : 29)

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6

Dès lors, en dépit de toutes ces observations, les organisations ne

doivent pas négliger le fait que la population canadienne continue de

vieillir. Même si la proportion des personnes de 55 à 64 ans n’a jamais

été aussi importante, représentant 16,9 % de la population active, les

prévisions montrent que dans la prochaine décennie, moins d’une

personne entrera sur le marché du travail pour chaque personne qui se

retirera (Statistique Canada, 2007d cité dans Petit 2008 : 8). La figure

2.1 présente la pyramide des âges de la population canadienne et la

distribution des quatre générations présentement actives sur le marché

professionnel. D’ailleurs, on observe très bien l’importance du poids

démographique des baby boomers, qui se rapprochent de leur retraite

(Petit 2008 : 8).

Figure 2.1 : Distribution des différentes générationsau sein de la pyramide des âges de la population canadienne en 2006

Source : Statistique Canada (2007d) dans Petit (2008 : 8)

Nécessairement, la situation oblige les entreprises à se pencher sur trois

défis qui en découlent : 1) la prévision d’une pénurie de main-d’œuvre

d’ici 2031; 2) la gestion des talents; et 3) le transfert des connaissances

tacites de l’entreprise d’une génération à l’autre.

Page 15: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

7

2.1.1.1. Pénurie de main-d’œuvre

En épluchant la littérature, il n’est pas rare de tomber sur des articles à

penchant journalistique présentant des données très pessimistes. En

effet, plusieurs sonnent l’alarme face au problème de pénurie de main-

d’œuvre et ce, pour l’ensemble des métiers surtout « depuis qu’il est

question des départs massifs à la retraite de la plus grande génération;

les Baby Boomers » (Harvey 2004 : 16). Même si de fortes spéculations

se répandent à l’échelle nationale, certaines études démontrent que ce

ne sont pas tous les secteurs professionnels qui seront touchés de la

même façon (Audet, 2004; Emploi-Québec, 2007). De même que, selon

Wannell et Gravel (2002), malgré la forte médiatisation au sujet du

vieillissement de la population, encore très peu d’études crédibles sur

son impact ont été réalisées à ce jour (cité dans Harvey, 2004 :16).

2.1.1.2. La gestion des talents

La perspective d’une main-d’œuvre formée et prête à prendre la relève

ne correspond qu'à un faible pourcentage de la population québécoise.

En tenant compte des décrocheurs, d’immigrants dont l’éducation n'est

pas reconnue ici, et de ceux qui ne détiennent pas les diplômes requis

pour les postes plus spécialisés, certaines entreprises en viennent à

modifier leurs critères de sélection.

Au Québec, on prévoit une pénurie de talents dans certains domaines

professionnels (Emploi-Québec, 2007). Cette réalité au sein de nos

organisations oblige les gestionnaires à revoir la question de la gestion

de la relève (Audet, 2004). Dans la littérature à ce sujet, on retrouve

surtout des articles illustrant les répercussions du manque de talents en

entreprises et leur impact sur les pratiques actuelles des gestionnaires.

Bélair, Deloitte et Touche (2005) rapportent que 50 % des entreprises

ayant répondu à un sondage canadien disent avoir été dans l’obligation

d’embaucher des personnes moins qualifiées pour des postes à combler

et 30 % ont déclaré avoir perdu des occasions d’affaires faute de main-

d’œuvre qualifiée.

Page 16: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

8

Pour sa part, Morin (2007) avance que le phénomène de la gestion des

talents pousse les entreprises du Québec à se concentrer d’emblée sur

le bien-être de l’employé, ce qui n’était pas le cas auparavant. Barette et

al. (2002), quant à eux, soulignent que les organisations devront non

seulement développer des moyens pour attirer ces talents, mais qu’elles

devront également trouver des façons de les motiver et de les retenir

(Harvey, 2004). Lancaster et al. (2002) dénombrent deux facteurs qui

expliquent pourquoi la gestion des talents est devenue une priorité pour

les organisations (Audet, 2004) :

1- L’accessibilité à l’information. La venue d’Internet donne

l’accès à une multitude d’informations sur les entreprises,

notamment sur leurs postes vacants et l’entreprise dans son

ensemble. Les travailleurs sont plus enclins à chercher les

opportunités d’emplois.

2- Une baisse générale de la fidélité envers l’entreprise. « The

sense of decreased faith and trust in institutions is felt not just

among Xers » (Lancaster et al., 2002 : 241)

2.1.1.3. Le transfert de connaissances d’une génération à l’autre

Lefebvre (2000) souligne que : « l’un des enjeux capitaux des rapports

de générations est la transmission des savoir-faire, le partage de

connaissances, le développement des compétences et le processus de

construction des savoirs à l’œuvre dans les divers milieux » (cité dans

Harvey, 2004 : 23).

Lorsqu’un employé prend sa retraite, il emporte avec lui une partie de la

mémoire de l’entreprise (Saba, 2009 ; Tulgan, 2006 ; Audet, 2004). Or,

cette expérience tacite, pour ainsi dire, doit être transférée afin d'assurer

la continuité des affaires. Dans cette optique, pour sauvegarder ce

bagage de connaissances, les entreprises doivent recruter de nouveaux

talents pendant que le transfert de ce savoir est encore possible (Audet,

2004). De plus, les gestionnaires devront s'assurer que ces nouveaux-

venus soient en mesure de maîtriser rapidement les responsabilités que

Page 17: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

9

leurs aînés n’assumaient qu’après maintes années d’expérience (Zemke

et al., 2000). Audet (2004 : 24) ajoute :

Quand on sait que ce sont principalement les connaissances tacites quiconstituent le capital de compétences d’un travailleur expérimenté, il estévident que la gestion de la transition entre la vieille garde et la nouvellegarde sur le marché du travail devient un enjeu stratégique importantpour la société et pour les organisations qui la composent.

2.2. La réalité des entreprisesDans les organisations, on retrouve principalement deux éléments qui se

répercutent sur l’ensemble du fonctionnement de l’entreprise et qui

expliquent en partie le phénomène des équipes intergénérationnelles :

1) la nature changeante des métiers et 2) le changement de la structure

de l’entreprise.

2.2.1. La nature changeante des métiersAutrefois, on considérait la plupart des métiers comme étant plus

physiques qu’intellectuels. Conséquemment, les employés s’épuisaient

au point de devoir se retirer du marché du travail avant 65 ans (Carrette,

1994 et Foot et Stoffman, 1998). Aujourd’hui, les métiers (pour la

plupart) sont beaucoup plus cérébraux. Foot et al. (1999 : 131)

définissent ainsi ce phénomène : « Dans une économie du savoir, les

employés se fatiguent moins vite et les plus vieux sont parmi les plus

productifs grâce à leur expérience ».

Le cycle de carrière des individus est beaucoup plus varié qu’avant, ce

qui entraîne une cohabitation plus longue, comme l’explique Saba :

Ainsi, la séquence formée par les études, le travail et la retraite estremise en cause et les individus quittent le marché du travail pendantcertaines périodes, recyclent leurs compétences, reviennent sur lemarché du travail, changent de carrière, prennent leur retraite etcertains retournent aussitôt travailler. (Saba, 2009 : 25)

2.2.2. L’aplatissement des échelons dans les entreprisesDans l’ancien modèle de l’entreprise, il existait une forte relation entre

l’âge des employés et leur rang hiérarchique. Autrement dit, plus un

Page 18: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

10

employé vieillissait, plus il gravissait les échelons de l’entreprise pendant

que les plus jeunes se trouvaient majoritairement au bas de l’échelle,

voire dans des postes d’entrée (Journal des affaires, 2005; Foot et al.,

1999; Zemke et al., 2000). Ces derniers racontent :

Senior employees, who were mostly white and male, worked in the headoffice or were in command positions in the manufacturing chain. Middle-aged employees tended to be in the middle management (…) Theyoungest, greenest, and physically strongest were on the factory floor.(Zemke et al., 2000 : 10)

Foot et al. analysent ainsi le changement survenu dans les structures :

Cette façon d’attribuer les postes présentait un avantage certain : lesgens travaillaient la plupart du temps avec des personnes de leur âge,qui partageaient leur bagage culturel et leurs valeurs. Les risques deconflits étaient assez faibles. Avec les années, les structuresorganisationnelles se sont aplaties. Ce qui fait qu’aujourd’hui dans lesorganisations où autrefois il y avait 10 échelons, aujourd’hui on enretrouve 2 au maximum. (Foot et al., 1999 : 103)

2.3. Concept d’une génération et différences intergénérationnellesComme nous l’avons souligné précédemment, en 2009, une équipe

professionnelle peut comporter jusqu’à quatre générations. Or, celles-ci

ont des idéaux, cheminements, perspectives personnelles et/ou

professionnelles qui leur sont propres et qui les distinguent (Zemke et

al., 2000). Pour Johnson et Lopes (2008), ce fait constitue un

phénomène historique. Or, dans la littérature, on réfère souvent au

concept de génération, dont la définition ne fait toutefois pas l’unanimité

(Petit, 2008; Tulgan et Martin, 2006; Audet, 2004; Harvey, 2004;

Boudreault, 2002; Zemke et al., 2000). En sciences sociales, le concept

de génération est défini selon trois approches (Petit, 2008 et Harvey,

2004).

La première, l’approche démographique, renvoie au concept de cohorte

(Petit, 2008 et Harvey, 2004). Selon les tenants de cette théorie, une

génération se définit principalement à partir de caractéristiques

quantifiables telles que le nombre d’individus et/ou leur durée de vie

(Harvey, 2004).

Page 19: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

11

La deuxième, l’approche ethnologique, est liée à l’aspect généalogique.

Selon ce concept, une génération se détermine d’après sa descendance

provenant du même groupe ethnique (Harvey, 2004). Par exemple, pour

Petit (2008 : 19), « un individu est classé à un même niveau dans la

lignée de la parentèle ou d’un groupe plus large ».

Dans cette recherche, nous utiliserons la troisième perspective, soit

l’approche sociologique. Pour les défenseurs de cette approche, une

génération est segmentée par rapport à son époque (Lancaster et al.,

2002 ; Zemke et al., 2000 ), résultant ainsi en une « mémoire historique

collective » (Harvey, 2004) construite à partir d’événements historiques,

sociaux, politiques et culturels (Lancaster et al., 2002; Zemke et al.,

2000; Woodruff et Birren, 1972). Or, ce phénomène, créant des

représentations sociales semblables, influence en quelque sorte les

comportements subséquents (Mannheim, 1990; Scott, 2000 cité dans

Petit, 2008 :19).

En un mot, les personnalités générationnelles se forment par des

événements majeurs qui marqueront émotionnellement plusieurs millions

de gens encore à une étape très formatrice de leur vie (Crumpacker et

Crumpacker 2007 ; Zemke et al., 2000), voire durant leur jeunesse

(Howe et Strauss, 2007).

The three generations that occupy today’s workplace and the fourthgeneration that is entering it are clearly distinguishable by all thesecriteria– their demographics, their early life experiences, the headlinesthat define their times, their heroes, music, and sociology, and theirearly days in the workplace. (Zemke et al., 2000 : 17).

Par exemple, en suivant cette logique, on peut supposer que la

récession de 2009-2010 pourrait être considérée comme un événement

économique majeur qui formera une partie de la personnalité

générationnelle de la génération suivant les Y. D’ailleurs, plusieurs

auteurs ont des raisons de croire que les événements comme celui du

11 septembre 2001 ou encore les tueries dans les écoles (Petit, 2008)

Page 20: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

12

auront un effet sur les perspectives de vie de la génération Y

(Crumpacker et Crumpacker, 2007; Patterson, 2007; Howe et Strauss,

2000; Zemke et al., 2000). Saba (2009 : 25) cite McManus qui, en 1997,

s’inquiétait du fait que les différences générationnelles de plus en plus

marquées risquaient d’engendrer des conflits intergénérationnels.

2.4. Conflits intergénérationnels

Dans la littérature ressort surtout le sentiment d’urgence quant à la

gestion des différences intergénérationnelles. On soulève même que la

disparité entre les générations en entreprise pourrait représenter une

menace encore plus importante que les contrastes reliés à la culture, à

la différence des sexes, à l’ethnicité et à la religion (Zemke et al., 2000 ;

Lancaster et al., 2002). En outre, on soutient que le refus de reconnaître

ces différences pourrait aller jusqu’à affecter la productivité globale d’une

organisation (Zemke et al., 2000).

Bien que les générations cohabitent depuis longtemps dans les lieux de

travail (Saba, 2009), il y aurait toujours existé une rivalité (parfois

évidente, parfois intériorisée) entre les différentes générations

(Patterson, 2007; Zemke et al., 2000). Pour certains auteurs, compte

tenu de leurs expériences communes, les membres d’une même

génération ont souvent des visions, des idées et des valeurs similaires

face au travail (Saba 2009; Nicholas, 2009; Dulin 2008; Martin et Tulgan,

2001; Howe et Straus, 2000 et Zemke et al., 2000). Zemke et al.,

(2000 :11) quant à eux, expliquent ainsi les bases des conflits

intergénérationnels :

An unfortunate outcome, one that mitigates against positive creativesynergy, is intergenerational conflicts: differences in values, in views,and ways of working, talking, and thinking that set people in oppositionto one another and challenge organizational best interest.

Gravett et Throckmorton, en 2007, ont mené une étude aux États-unis

auprès de différentes organisations de 500 employés et plus. Parmi les

professionnels en gestion des resources humaines ayant participé à

l’étude, 58 % ont reconnu l’existence de conflits entre les plus vieux et

Page 21: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

13

les plus jeunes et étaient d’avis que ceux-ci étaient souvent liés aux

valeurs de travail et aux exigences quant à l’équilibre travail-vie privée.

Dans le tableau suivant, Smith (2008 cité dans Nicholas 2009 : 49)

dresse un portrait comparatif entre les caractéristiques des milieux de

travail traditionnel (appréciées par les boomers) et les milieux de travail

moderne (désirées par les X et les Y).

Tableau 2.1 : Comparaison des caractéristiques des milieux de travailtraditionnels et modernes

Milieu de travail traditionnel Milieu de travail moderne

• Sécurité provenant de l’institution • Sécurité provenant de l’intérieur

• Promotions basées sur l’ancienneté • Promotions basées sur la performance

• Loyauté envers l’organisation • Loyauté envers l’équipe

• Attendre les ordres • Défier l’autorité

• Respect basé sur le poste/titre • Le respect se mérite

Source : Smith (2008) dans Nicholas, 2009 : 49 (traduction libre)

2.5. Typologie des générationsÀ ce jour, la littérature confirme l’existence de quatre générations

distinctes composant le marché du travail (Saba, 2009; Petit, 2008;

Allain, 2005; Eisner 2005; Harvey, 2004 et Zemke et al., 2000). En

revanche, nombreux sont les désaccords en matière de leur répartition

typologique. Ainsi, pour garder une constance, nous nous appuierons

principalement sur les travaux de Zemke et al. (2000), qui nous

apparaissent les plus complets en termes de classification des

générations. Dans une étude menée auprès des générations, ces

chercheurs concluent que certaines caractéristiques attribuées à un

groupe générationnel peut aussi correspondre à un autre, surtout

lorsque les membres du groupe se situent au début ou à la fin d’une

génération : «If we wouldn’t utterly confuse everyone, we would overlap

them by three or four years (…) » (Zemke et al., 2000 : 3).

Page 22: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

14

Par exemple, pour ces auteurs, il est clair que la génération du baby

boom comprend les individus nés entre 1943 et 1960, tandis que la

majorité des chercheurs situent leur naissance entre 1946 et 1964.

Zemke et al. (2000 : 3) justifient ainsi cette différence :

We have factored in the feel as well as the face of a generational cohortin our definition. For instance, our research finds that people bornbetween 1943 and 1946 have similar values and views as the truedemographically defined Baby Boomers, those born between 1946 and1964.

Il en est de même pour la génération X. Les conclusions tirées de leurs

recherches démontrent que les personnes nées entre 1960 et 1964

s’identifiaient davantage à la génération X (qui est démographiquement

segmentée de 1964 à 1977), contrairement aux plus jeunes des X qui

s’identifient plutôt à la génération Y.

Notons également que pour le bien de cette recherche, nous écarterons

une des quatre cohortes, celle de la génération silencieuse, soit les

personnes nées avant 1943 (Zemke et al., 2000). En effet, rappelons

que, bien que ce groupe représente 16,9 % de la population active

(Statistique Canada, 2007d, cité dans Petit 2008), on prévoit qu’une forte

proportion de ces personnes quittera le marché du travail à plus ou

moins court terme. Nous tiendrons donc compte des trois générations

suivantes : les baby boomers, les X et les Y.

Pour les fins de cette recherche, nous avons utilisé le critère de l’année

de naissance pour déterminer la génération des personnes rencontrées.

Le tableau 2.2 établit la délimitation que nous avons adoptée.

Tableau 2.2 : Profil des générations actives sur le marché du travail

Les générations Années de naissance

La génération du baby boom 1943 - 1960

La génération X 1961 - 1979

La génération Y 1980 - 2000

Page 23: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

15

Il importe, avant de dresser les portraits des trois générations, d’apporter

quelques précisions et commentaires.

• Les descriptions de chacune des cohortes représentent une vue

d’ensemble générale. Il peut y avoir des exceptions. À noter

également que les profils seront analysés davantage dans le cadre

conceptuel.

• Ainsi que le fait remarquer Samson (2005), les événements ne

touchent pas tout le monde de la même manière.

• Les frontières entre deux générations ne sont pas rigides, de sorte

que nombre de personnes se retrouvent à cheval entre deux

générations.

2.5.1. La génération du baby boomLes baby boomers sont nés entre 1943 et 1960 et rappellent le grand

nombre de naissances qui ont suivi la fin de la Seconde Guerre

mondiale (Ricard, 1996 et Grand'Maison, 1993). Au Canada, avec plus

de 9,8 millions d’individus, cette génération compte pour près du tiers de

la population totale (Foot et al., 1998, dans Harvey 2004 : 39). Or, cette

génération arrive sur le marché du travail à l’époque des « Trente

Glorieuses » (1945-1975) (Ricard, 1996), période caractérisée par une

forte croissance économique (McMullin et al., 2007 et Boudreault, 2002)

et des changements sociaux majeurs. Or, les boomers marqueront cette

période en réorientant les tendances de l'État québécois. Par exemple,

cette génération fera chuter le taux de naissance, augmentera le taux de

femmes sur le marché du travail et contribuera à l’accroissement du taux

de divorces.

D’ailleurs, devant ces mouvements sociaux majeurs, Grand'Maison

(1993) attribue à cette génération le trait de la contestation. On dit qu’au

Québec, la génération du baby boom a eu un poids social tellement

important que son influence sur la vie collective du Québec a été plus

imposante que celle que les boomers américains ont exercé sur la vie

aux États-Unis (Foot et al.,1999). De plus, contrairement à leurs parents

(traditionalistes pour la plupart), qui étaient fidèles aux principes de

Page 24: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

16

l’entreprise, les boomers veulent changer les règles de l’emploi (Marconi,

2001 cité dans Nicholas, 2009 : 48). En ce sens, Harvey (2004) affirme

que c’est aux boomers que l’on doit les transformations du travail dans

les organisations. Il va sans dire qu’une partie des membres de la

génération boom intériorisera une forme de tension envers l’autorité,

découlant de cette période, et que celle-ci se répercutera à travers

certains comportements types au travail (Tulgan et al., 2006 et

Boudreault, 2002).

2.5.2. La génération XSituée juste après les boomers, la génération X englobe les personnes

nées entre les années 1961 et 1979 (Zemke et al. 2000). Certains les

nomment « post-boomers » ou « slackers » (Boudreault, 2002), et

d’autres les appellent « baby busters » (Foot, 1996, 1999). Selon la

littérature, cette génération évolue à l’époque où le fait d’avoir des

enfants est démodé (Tulgan et Martin, 2006; Samson, 2005 et Zemke et

al., 2000). Les X ont grandi parmi les MTV et les jeux vidéos (Smola et

Sutton, 2002) et forment la première génération à travailler avec la

technologie (Losyk, 1997 cité dans Nicholas, 2009 : 48).

Selon ces auteurs, les X furent exposés à l'ambition professionnelle de

leurs parents, mais aussi à leur congédiement après beaucoup d’années

de service. Les contextes économiques instables, dont les récessions

des années 1980 et 1990, créent la désillusion chez cette cohorte et les

rendent sceptiques envers l’entreprise (MucMullin, 2008). C’est d’ailleurs

ce qui explique en partie pourquoi les X sont connus comme étant

indépendants, trait qui prend naissance dès leur tendre enfance

(Tapscott, 2009; Eisner, 2005).

Leur pénétration sur le marché du travail professionnel se fait pendant

un important creux de vague (Samson, 2005). Conséquemment, les X

auront beaucoup de difficulté à trouver la stabilité d’emploi, sans

mentionner une bonne rémunération. C’est pourquoi ces X, pour la

plupart, sont hautement scolarisés. Ne voyant pas d’avenir sur le marché

Page 25: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

17

professionnel, une grande partie d’entre eux choisissent de se recycler

en poursuivant leurs études. Les plus débrouillards montent rapidement

vers des postes de haute responsabilité, ce qui pourrait expliquer, selon

Samson (2005) et Eisner (2005), une première source de conflits

générationnels potentielle. En effet, dû à leur haut niveau d’éducation, ils

sont prêts à assumer des postes de responsabilités importantes

auxquels leurs collègues boomers n’accédaient qu’après de longues

années en entreprise. D’ailleurs, pour les auteurs Howe et Strauss

(2007), il est évident qu’au Québec, une partie des membres de la

génération X aurait intériorisé une forme de frustration envers les deux

autres générations qui seraient arrivées sur le marché du travail dans

des conditions économiques plus enviables.

2.5.3. La génération YCette génération voit le jour entre 1980 et 2000 et se voit attribuer

plusieurs appellations telles que : génération Internet, Millenials, Echo-

Boomers, Nexters, Generation Why (Tulgan, 2009; Petit 2008, Zemke et

al., 2000), Generation 9–11 (Gravett et Throckmorton, 2007), N-geners

(Boudreault, 2002) et génération Net (Tapscott, 1998).

Comme le souligne Harvey (2004 : 44) :

Plusieurs chercheurs ont reconnu les limites des connaissancesactuelles liées aux jeunes travailleurs de la génération Y. Les donnéesdisponibles à leur sujet sont souvent issues de diverses spéculations etde premières analyses. Pour certains, il apparaîtra donc nécessaire deprocéder, au cours des prochaines années, à de nouvelles recherches.

D’ailleurs, Dulin (2008 : 43) abonde dans le même sens et supporte que

peu d’études ont été faites sur les besoins au travail de cette cohorte.

Or, dans la littérature, on définit les Y comme une génération

recherchant la flexibilité, une meilleure qualité de vie au travail et des

relations professionnelles transparentes, unilatérales et franches

(Nicholas, 2009). Parmi leurs influences, on retient surtout leur arrivée

dans une société du savoir et le phénomène du multiculturalisme des

sociétés (Harvey, 2004).

Page 26: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

18

Les auteurs s’entendent pour dire que cette génération, compte tenu

qu’elle sera majoritaire sur le marché du travail d’ici une dizaine

d’années (Petit, 2008; Allain, 2005 et Harvey, 2004), se fera courtiser

plus que jamais par les employeurs (Petit, 2008, Allain, 2005; Eisner,

2005; Harvey, 2004; Paré, 2002; Zemke et al., 2000).

2.6. Les défis de gestion face au phénomène des équipesintergénérationnellesIl se dégage de la littérature que l’arrimage de ces trois générations

apporte son lot de défis au monde de la gestion. Dans la littérature, on

insiste surtout sur le fait que les entreprises auront comme défi de

développer une culture qui mise sur les forces individuelles des trois

générations (Zemke et al., 2000), faisant en sorte qu’elles se sentent

parties prenantes du succès et de la pérennité de l’entreprise. Pour

Nicholas (2009) et pour Audet (2004), le défi reviendra aux gestionnaires

de réviser leurs stratégies de mobilisation, car « ce n’est qu’une question

de temps avant que le clivage s’installe entre ces générations » (Audet,

2004 : 25). Alors que pour d’autres chercheurs, le plus gros défi de

gestion sera de concilier ces différences intergénérationnelles (Saba,

2009) et d’arriver à les faire fonctionner ensemble (Zemke et al. 2000).

Un autre défi consistera à mettre à profit les connaissances acquises sur

les différences intergénérationnelles afin d’éviter, voire de prédire, des

conflits entre ces générations (Zemke et al. 2000). Ainsi, Harvey (2004 :

57) reprend les propos de Turgeon qui, en 1997, affirmait qu’« une saine

gestion des conflits ne tentera pas d’éliminer la présence de ces

derniers, ce qui serait impossible, mais bien d’en réduire les

conséquences négatives ».

2.7. Les implications pour la gestionLes résultats de cette première lecture nous permettent de constater que

les mutations du marché du travail ont des effets considérables sur les

activités de gestion (Petit, 2008) et posent des défis à l’ensemble des

gestionnaires qui joueront un rôle déterminant dans l’agencement des

Page 27: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

19

équipes intergénérationnelles. Or, deux écoles de pensée existent

actuellement en matière de gestion des équipes intergénérationnelles.

La première école nie la nécessité de gérer les générations différemment

(Saba, 2009 et Deal, 2009). Ainsi, Deal (2009) est d’avis qu’il y a au

moins autant de similarités qu’il y a de dissemblances entre les valeurs

des générations. Saba (2009 : 35), quant à elle, croit que :

[…] tenir pour acquis que des employés exprimeront certaines attentesseulement parce qu’ils appartiennent à une catégorie d’âge sembledonc recevoir peu d’appuis dans les études et manquer quelque peu defondement pour plusieurs raisons.

Toujours selon cette auteure, les implications pour la pratique résident

plutôt dans la gestion du cycle de carrière de l’individu (Finegold et al.,

2002, cité dans Saba, 2009). La littérature souligne, entre autres, le

respect des conditions du travail (Saba, 2009), le maintien d’une stabilité

dans les méthodes de gestion en entreprise (Saba, 2009 et Audet, 2004)

et finalement, la gestion des attentes selon les catégories et/ou les

secteurs d’emplois propres à chacun des individus (peu importe l’âge) et

non à la génération (Saba, 2009).

La deuxième école croit plutôt qu’il faut tenir compte des différences

générationnelles et qu’il est vital pour le gestionnaire de mettre à profit

les forces propres à chaque génération (Tulgan, 2006; Zemke et al.,

2006 et Lancaster et al., 2002).

Pour Smola et Sutton (2002), bien que les valeurs d’un individu puissent

se modifier en cours de sa maturation, l’expérience générationnelle tend

à avoir plus d’influence sur les valeurs au travail que l’âge ou la

maturation, ce qui laisse entendre qu’il existe une différence qualitative

entre les générations (Sirias et al., 2007 et Woodruff et Birren, 1972).

Page 28: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

20

Dans la même ligne de pensée, Tulgan (20061) s’exprime ainsi à propos

des grandes tendances des cohortes générationnelles.

Certainly we believe that stereotyping people according to age is asmisguided and counterproductive as stereotyping them according togender, race, culture, or religion. Still, our research since the early1990s, backed by our extensive work with people in hundreds oforganizations, tells us that it is highly instructive to look at the trends inattitudes and behavior that define generational identities. These trends,we know, are directly tied to growing up and coming of age during thesame historical period amidst the same key historical influences. That'swhat it means to be part of a generational cohort.

Après avoir exposé les deux courants de pensée, pour cette étude, nous

nous rangerons du côté de la deuxième école de pensée en posant

l’hypothèse qu’une certaine différence générationnelle existe entre les

cohortes. Dans ce même ordre d’idées, la littérature abonde d’articles

praxéologiques exposant des pratiques de gestion permettant aux

gestionnaires de mieux gérer leurs équipes intergénérationnelles. Trois

approches semblent ressortir systématiquement de la littérature, soit la

communication, le mentorat ou le coaching et la flexibilité.

2.7.1. La communication Par communication, nous entendons l’ensemble des pratiques visant à

diffuser ou à recevoir de l’information. Les gestionnaires devront être

transparents, crédibles et confiants (Dulin, 2008). Ainsi, il est

recommandé aux gestionnaires d’établir une relation de confiance et de

personnaliser la relation en tentant de mieux connaître l’employé (Eisner,

2005; Simard, 2007; Zemke et al., 2000 cités dans Petit, 2008 : 56). Les

chercheurs, pour la plupart, affirment qu’il sera déterminant que le

gestionnaire soit efficace au niveau de sa communication. Tulgan

(20062) remarque : « In an increasingly hectic environment, managers

are communicating less with their peers and more with direct reports.

This poses a challenge to successfully getting one's job accomplished. »

1 Carolyn A. Martin and Bruce Tulgan (2006) Managing the generation mix fromurgency to opportunity, second edition [ressource électronique], (visionné le 4 mai2009)2 Ibid.

Page 29: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

21

Soulignons enfin que dans la littérature, on retrouve souvent des

suggestions de pratiques visant à aider le gestionnaire à mieux

communiquer avec son équipe intergénérationnelle; par exemple, celle

de Zemke et al. (20003 :

There are two keys to creating a successful intergenerational workplace.The first is aggressive communication. Companies shouldn’t ignoregenerational differences. Instead, they should take the time tocommunicate with the different groups, uncover their needs andpreferences.

2.7.2. Le mentorat et le coachingTulgan (2006) préconise le recours au mentorat et au coaching en

gestion et ce, avec toutes les générations actives sur le plan

professionnel. Gravett et Throckmorton (2007) abondent dans le même

sens : « Organizations that understand how to tailor training and

development to incorporate the unique needs of different age groups will

find their investment leveraged to the fullest extent. »

Pour Morin et Aubé (2007 : 234), le coaching et le mentorat sont des

relations qui se différencient de plusieurs façons. D’abord, le mentor joue

principalement deux rôles : un rôle de soutien dans la carrière et un rôle

de soutien psychosocial (écouter, conseiller, servir de modèle). Selon la

mythologie grecque, le mentor était à l’origine considéré comme un ami

de longue date4. Ensuite, contrairement au coaching, qui vise l’atteinte

d’objectifs clairement définis, le mentorat vise plutôt le développement

personnel, social et professionnel de l’individu. Pour sa part, Tulgan

(2006) parle de clarifier les attentes en termes de travail et de donner de

la rétroaction à ses employés : « Offer coaching-style feedback on a

consistent basis so your Boomers know what they're doing well and what

they need to fix or improve upon, and provide guidelines for improvement

with specific goals and deadlines. » (Tulgan, 20065)

3 Ron Zemke, Claire Raines, Bob Filipczak. Generations at work. Managing the clash of veterans,boomers, xers, and nexters in your workplace, [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009)4 Wikipedia, «Mentor (mythologie) » [en ligne].[http://fr.wikipedia.org/wiki/Mentor_%28mythologie%29] (consulté le 18 février 2010)5 Carolyn A. Martin and Bruce Tulgan. (2006) Managing the generation mix from urgency toopportunity, second edition [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009)

Page 30: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

22

2.7.3. La flexibilité Afin de pouvoir concilier les différences entre les générations, les

gestionnaires devront s’armer de flexibilité (Tulgan, 2006). Gravett et

Throckmorton (2007) racontent :

Across the generations a pattern emerged during our interviews: All agegroups want respect. All age groups desire flexibility in workarrangements. However, this desire for respect and flexibility manifestsitself in different ways from generation to generation.

Sur le thème de la flexibilité émergent les exigences face à une meilleure

qualité de vie au travail (Morin, 2007). On dit à ce sujet que les

gestionnaires devront revoir toute la question de l’autorité et du contrôle

en entreprise (Tulgan, 2006). Ceci inclut une flexibilité face aux horaires,

aux tâches, au lieu où l’on travaille et aux équipes, pour ne nommer que

ces quelques aspects (Morin, 2007; Tulgan, 2006). « Managers will have

to discard traditional notions of authority, rules, and red tape, and

become more highly engaged in one-on-one coaching and negotiating

with employees. » (Tulgan, 20066)

2.8. La dynamique intergénérationnelleLe travail de recension effectué nous a fait prendre conscience du

manque de profondeur des études qui explorent la dynamique

intergénérationnelle (Saba, 2009) et les conflits potentiels générés entre

deux, voire trois générations (Petit, 2008; Johnson et Lopes, 2008).

D’ailleurs, Crumpacker et Crumpacker (2007 : 363) en témoignent : « A

third challenge to the generational perspective is the assertion of a lack

of empirical and or peer-reviewed research supporting the existence of a

generation gap among today’s worker. ».

Les études qui analysent le comportement des générations en

interaction les unes avec les autres sont plutôt rares. Saba (2009 : 25)

déplore la rareté des recherches sur la manière dont la dynamique

6 Ibid.

Page 31: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

23

intergénérationnelle se manifeste dans les relations d’emploi et modifie

les comportements et les attitudes au travail : « Dans un article publié en

2002, Finegold et al. ont fait état de cette situation et décrié le manque

d’études sur le phénomène. En 2009 la situation n’a malheureusement

guère évolué. » Dans la littérature, on trouve des études qui proposent

une série de prédictions de conflits possibles; généralement ces

hypothèses sont construites à partir de traits dominants d’une

personnalité générationnelle voire de stéréotypes (Petit, 2008) qui

semblent vouloir entrer en confrontation (Johnson et Lopes, 2008 : 33).

D’ailleurs, Johnson et Lopes (2008) et Petit (2008) émettent des

réserves quant à la crédibilité des informations recueillies auprès des

générations. « Much of the information on the current workforce,

particularly the age or generational characteristics and subsequent

management advice, is based on surveys performed by consulting and

marketing companies. » (Wolburg et Pokrywczynski, 2001; Wellner,

2003 cité dans Johnson et Lopes, 2008 : 33)

2.9. Objectifs de la recherche et conclusionL’objectif de cette recherche sera d’une part d’examiner la potentialité

d’un certain nombre de conflits basés sur cinq points d’opposition qui

semblent ressortir systématiquement dans la littérature. D’autre part,

nous souhaitons étudier comment ces conflits pourraient se manifester

dans les relations au travail et modifier les comportements dans les

équipes de travail. Pour ce faire, nous tenterons d’éclairer certaines

perceptions et croyances envers les générations identifiées dans la

littérature, et de voir jusqu’à quel point les incompréhensions et les griefs

entre les générations reposent sur celles-ci. Dans cette optique, nous

avons défini une question de recherche permettant de traduire cet

objectif : « Quelles sont les différences intergénérationnelles qui

existent dans un contexte de travail et quels sont les conflitspotentiels générés par ces différences? »

Page 32: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

24

La recension des écrits étant faite, le prochain chapitre consistera à

présenter notre cadre conceptuel de même que les axes de recherche

que nous utiliserons pour étudier notre question de recherche.

Page 33: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

CHAPITRE 3. Cadre conceptuel

Dans la première partie de ce chapitre, nous présentons notre cadre

conceptuel, issu de la revue de littérature, présentée au chapitre

précédent. Dans la deuxième partie de ce chapitre, nous développerons

nos cinq points d’opposition par génération, en posant un regard sur ce

que nous proposons comme conflits potentiels, en raison de ces

oppositions.

3.1. Présentation du cadre conceptuelLa recension des écrits présentée au chapitre précédent nous a permis

de mieux saisir le phénomène de la mixité intergénérationnelle en milieu

de travail ainsi que les tendances générationnelles de la population

canadienne. Alors que très peu d’études se sont intéressées à la

manière dont la dynamique intergénérationnelle se manifeste dans les

relations d’emploi et modifie les comportements et les attitudes au travail

(Saba 2009), les travaux analysant les conflits intergénérationnels nous

laissent quelque peu sur notre appétit. Présentement, deux types de

canevas d’études semblent exister sur le sujet des conflits

intergénérationnels.

Le premier courant de recherche se rapprochant de notre sujet d’étude

s’intéresse surtout à démystifier les différences intergénérationnelles

relatives aux attentes et/ou aux besoins des générations sur le plan

professionnel, mais sans chercher à savoir si ces différences sont

sources de conflits intergénérationnels. Par exemple, dans les plus

récentes recherches, nous avons retrouvé ce modèle chez Saba (2009),

qui analyse huit variables chez les quatre générations actives dans trois

domaines professionnels, tandis que Busch et al. (2008) analysent

quatre variables dans le domaine des technologies de l’information.

À l’inverse, nous avons trouvé beaucoup de modèles de recherche qui

anticipent des conflits intergénérationnels, mais souvent, ces prédictions

Page 34: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

26

sont conceptualisées à partir des traits dominants des personnalités

générationnelles et ne sont pas fondées sur des variables telles que

celles définies dans les recherches mentionnées plus haut (Johnson et

Lopes, 2008; Petit, 2008). Ainsi, on retrouve ce modèle dans les

recherches de Tulgan, (2006), Lancaster et Stillman, (2002); Zemke et

al., (2000) ; Howe et Strauss, (2000).

La présente étude s’intéressera donc à proposer des conflits potentiels

basés sur cinq variables que nous aurons déterminées à partir de la

littérature. Dans un premier temps, nous tenterons d’explorer les

perceptions et croyances envers les générations retrouvées de la

littérature, et de voir jusqu’à quel point les incompréhensions et les griefs

entre les générations reposent sur celles-ci. Pour ce faire, nous

reviendrons sur les événements que nous appellerons les influences

ayant marqué chacune des générations à l’étude, contribuant ainsi aux

valeurs et aux comportements adoptés par ces générations. Cet élément

de notre cadre de recherche nous permettra par la suite de catégoriser

ces comportements et valeurs clés par point d’opposition et d’expliciter la

raison de nos choix de thèmes pour cette étude.

Dans un deuxième temps, ce chapitre s’intéressera à définir les conflits

intergénérationnels possibles par point d’opposition, mettant l’emphase

sur les caractéristiques et les attentes qui semblent vouloir provoquer

des confrontations. Finalement, nous conclurons ce chapitre avec un

tableau-synthèse démontrant les conflits potentiels par la plus petite

unité d’équipe intergénérationnelle possible, soit les couples de deux

générations.

3.2. Question générale de rechercheNous ne pouvons affirmer que les conflits d’équipe au travail sont

uniquement liés aux différences générationnelles (Saba, 2009 et Tulgan,

2006). En nous basant sur l’hypothèse que ce sont les événements qui

ont forgé les valeurs et comportements d’une cohorte (Lancaster et

Stillman, 2002 et Zemke et al., 2000 ), dans cette recherche, nous

Page 35: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

27

supposerons que ces dissemblances peuvent jouer un rôle dans les

incompréhensions, les ambiguïtés, voire même les conflits qui sont

d’ordre partiellement générationnel (Sirias et al,. 2007). L’intérêt de

travailler à partir de l’idée que les conflits sont partiellement

générationnels sera d’explorer dans quelle mesure le poids de la

génération est perceptible lorsque les gens nous parlent de leurs

attitudes, valeurs, comportements, préférences ou réticences

personnelles face aux points d’opposition que nous avons déterminés.

Nous rejoindrons ainsi les propos de Sirias et al (2007 : 3) :

Although a worker’s values do change as the individual matures, thegenerational experiences tend to influence work values more than ageor maturation (Smola and Sutton, 2002), which suggests that aqualitative difference exists between generations.

Dans cette optique, nous avons défini une question de recherche

permettant de traduire cet objectif : « Quelles sont les différences

intergénérationnelles qui existent dans un contexte de travail etquels sont les conflits potentiels générés par ces différences? »

3.3. Les influences, les caractéristiques et les attentes des trois

générationsDepuis les années 1990, il se dégage de la littérature de nombreux

travaux s’intéressant aux valeurs, aux attitudes et aux comportements

des générations composant la main-d’œuvre aujourd’hui (Petit, 2008;

Harvey, 2004). Ceci étant dit, nous avons dénombré cinq points

d’opposition rejoignant les trois générations à l’étude (baby boom, X et

Y). Pour avoir une meilleure compréhension du choix des cinq points

d’opposition, nous proposons de rassembler dans un tableau synthèse

inspiré des écrits de Petit (2008 : 33) et de Harvey (2004 : 37), les trois

éléments descriptifs d’une génération (les influences, les caractéristiques

et les attentes).

D’abord, dans la première partie du tableau 3.1, nous mettons

sommairement en relief les influences qui relèvent des événements

historiques marquants et qui ont forgé les personnalités générationnelles

Page 36: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

28

des cohortes à l’étude (Petit, 2008; Harvey, 2004; Zemke et al., 2000).

Ensuite, dans le deuxième volet de ce tableau, nous classerons les

caractéristiques (comportements clés et attitudes) et les attentes

(valeurs, préférences et réticences) envers le monde du travail,

s’expliquant en partie par les influences (Petit, 2008; Harvey, 2004)

selon les cinq points d’opposition où nous proposons des confrontations.

Tableau 3.1 : Événements clés et valeurs propres à chacune des générations

Baby boomers1943-1960

Génération X1961-1979

Génération Y1980-2000

Lesinfluences

• Prospérité économique• Le premier grand choc

pétrolier• Personnalisation de

l’individu• Télévision• L’éclatement des banlieues• La guerre du Vietnam• Le droit civil• La Guerre froide• L’émancipation de la

femme• L’Homme sur la lune

• Récession économique• La vie avec un seul

parent• Musique plus• Le sida• Les ordinateurs• Le Challenger• Le mur de Berlin• Les divorces

• Les ordinateurs• La violence dans les

écoles• L’ouverture sur le

monde• Le multiculturalisme

Le sens autravail

• Dévoués à la tâche• Reconnaissance de leur

titre• Promotion• Gratification personnelle

• Opportunistes• Équilibre travail-vie privée

• Ambitieux• Équilibre travail-vie

privée

Le rapport àl’institution

• Relation amour/haineenvers l’institution• Obsession pour leur travail

• Pragmatisme enversl’institution

• Confiance enversl’entreprise

La place dutravail d’équipe

• L’équipe avant tout• Recherchent la satisfaction

de leurs besoinspersonnels

• Individu dans l’équipe • Collectivisme

La loyauté• Loyaux à l’entreprise• Avancement dans une

même entreprise

• Loyaux aux personnesmais pas à l’entreprise

• Expériencetransactionnelle

Lacommunication

• Face time• One-on-One• In-person • Formalité

• “Direct”• “As needed”• Relation hiérarchique

informelle• Communication ouverte

et transparente

• E-Mail / Voice-mail• Instant messaging• Lots of cc’s• Relations égalitaires• Rétroaction

Page 37: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

29

3.4. Les points d’opposition et conflits intergénérationnelspotentiels

Dans cette deuxième partie, il conviendra de décrire plus concrètement

ce que l’on entend par points d’opposition et comment, selon la

littérature, ces points diffèrent d’une génération à l’autre. Ainsi, c’est sur

la base des cinq concepts suivants que nous représenterons les écarts

entre les générations et que nous identifierons et caractériserons les

conflits intergénérationnels potentiels pour cette recherche. : 1) le sensau travail, 2) le rapport à l’institution, 3) la place du travail d’équipe,4) la loyauté et 5) la communication. Tout d’abord, pour supporter

l’idée que les conflits peuvent avoir une forte composante

générationnelle, notre étude consistera à reprendre de façon très

synthétique le portrait des générations au travail qui ressort de la

littérature afin de tenter de proposer certains conflits intergénérationnels

potentiels (Zemke et al., 2000). Ensuite, nous examinerons les couples

de deux, puisqu’ils représentent la plus petite unité d’équipe

intergénérationnelle qui soit. La figure 3.1 résume notre approche

Figure 3.1 : Conflits intergénérationnels basés sur les cinq points d’opposition.

Page 38: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

30

3.5. Le sens au travailIl ressort de la littérature que les changements sociaux, en progression

depuis les dix dernières années, révolutionnent nos perceptions du

travail (Morin, 2006). Selon une étude menée par les membres de la

Meaning of Work International Research Team en 1987, le travail se

classe au deuxième rang en importance après la famille dans la plupart

des pays; cependant, il joue un rôle important dans le développement de

la personne. Pour Limoges (1987), travailler est un besoin presque aussi

fondamental que se nourrir. Morin (2006 : 9) décrit le sens au travail à

travers trois définitions : le sensus, le sumo et la phénoménologie.

Le sensus renvoie à la signification du travail, la valeur aux yeux dusujet et la définition ou la représentation qu’il en a. Le sumo parle plutôtde la direction, l’orientation du sujet dans son travail, ce qu’on recherchedans le travail et les desseins qui guident ses actions. Et laphénoménologie est l’effet de cohérence entre le sujet et le travail qu’ilaccomplit, entre ses attentes, ses valeurs et les gestes qu’il posequotidiennement dans son milieu de travail.

Pour Petit (2008) et Smola et Sutton (2002), les valeurs au travail sont

davantage influencées par les expériences générationnelles que par

l’âge et l’évolution de la personne. Morin (2007) affirme que la manière

dont un individu perçoit son travail influence le sens qu’il lui donne. Ainsi,

ceux qui perçoivent leur travail comme une vocation, plutôt que comme

un emploi ou une carrière, seront plus engagés envers leur travail (Foret

et al. 2004).

3.5.1. Le sens au travail pour la génération du baby boom3.5.1.1. Dévoués

Il se dégage de la littérature que beaucoup de baby boomers sont perçus

comme des bourreaux de travail (Lancaster et al., 2002). En raison des

événements qui forgèrent leur nature compétitive, les baby boomers

entrèrent sur le marché du travail en se consacrant à la tâche. Il semble

même qu’une grande majorité de boomers ont priorisé le travail au

détriment de la famille pour se bâtir une « solide réputation » dans une

même entreprise (Saba, 2009). Selon la littérature, nombreux sont les

Page 39: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

31

boomers à croire que la productivité et la réussite se mesurent par le

nombre d’heures passées au bureau (Samson, 2005) contrairement aux Y

qui croient qu’il est important de travailler intelligemment, pas

nécessairement plus fort (Gravett et Throckmorton, 2007). Cette

philosophie a été alimentée par les patrons traditionnalistes, qui croyaient

que « le temps que chacun passait à son bureau lui valait une meilleure

évaluation que la qualité accomplie » (Samson, 2005 : 49).

3.5.1.2. Avancement de carrière

D’ailleurs, conscients de la hiérarchie (Tapscott, 2009), ils aspirent à y

grimper (Busch et al., 2008; Lancaster et Stillman, 2002) et cette ambition

pourrait constituer une priorité (Saba, 2009) dans leur carrière, même si

cela implique de prolonger les heures du bureau et/ou d’apporter du travail

à la maison (Boudreault, 2002).

Ils sont nombreux à rêver d’une position enviable dans une grandeentreprise privée, si possible une multinationale, qui offre despossibilités de mobilité tant géographique que professionnelle. Ils sontdisposés à donner toute leur énergie et le meilleur d’eux-mêmes pouratteindre les échelons supérieurs. (Boudreault, 2002 : 65)

Or, les boomers croient qu’un employé doit acquérir de l’expérience et

« faire ses preuves » afin d’avancer (Zemke et al., 2000), ce qui pourrait

constituer une source de conflits envers les Y, qui perçoivent les

possibilités d’avancement et les défis comme des caractéristiques

importantes de l’emploi (Petit, 2008; Audet, 2004; Tulgan et Martin,

2001; Zemke et al., 2000). De plus, selon la littérature, les boomers

perçoivent les autres générations comme étant impatientes (Zemke et

al., 2000). Pour O’Bannon (2001 : 99), c’est une question d’ajustement :

« Older workers have not had an easy time adjusting to the influx of

young talent. » Busch et al. (2008 : 54), quant à eux, démontrent à

travers une étude que les baby boomers restent réticents à la simple

pensée de devoir se départir de certaines responsabilités : « Boomers

felt more negatively about passing on responsibility to someone else in

the organization. »

Page 40: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

32

3.5.2. Le sens au travail pour la génération X3.5.2.1. Opportunistes

Dans la littérature, on dit surtout que les X sont attirés par les

opportunités de carrière (Crumpaker et Crumpacker, 2007; Patterson,

2007; O’Bannon, 2002; Smola et Sutton, 2002). MacLaughlin (2009)

précise que les X recherchent avant tout une sécurité de carrière plutôt

qu’une sécurité d’emploi : « They changed the career ladder to a career

lattice, and want to know, what’s in it for me? When dissatisfied with

things at work, a gen Xer will simply leave and find another job. »

(MacLaughlin, 2009 : 35).

Gravett et Throckmorton, (2007) et Samson (2005) disent que les X se

bâtissent une expérience afin de rester flexibles mais surtout,

employables. Pour Smola et Sutton (2002 : 23), c’est une question de

vouloir travailler selon leurs propres objectifs. Patterson (2007 : 19)

l’explique ainsi :

Because they do not have the same expectations for permanence in theworld that characterized the work habits and employment loyalties ofearlier generations, they have built portable careers and appear ready tochange employers as attractive opportunities and challenges arise.

Lancaster et Stillman (2002); Karp et al. (1999) et Gravett et

Throckmorton (2007), quant à eux, avancent que la raison qui motive un

X à rester dans l’entreprise est la même que celle qui le pousse à partir,

c’est-à-dire les opportunités de carrière qui lui donneront la possibilité

d’ajouter une corde à son arc contrairement aux boomers qui préféreront

rester longtemps dans une même entreprise afin d’honorer leur

réputation (Saba, 2009; Crumpaker et Crumpacker, 2007).

3.5.2.2. Équilibre travail-vie privée

MacLaughlin (2009), Patterson, (2007), Gravett et Throckmorton, (2007),

Samson (2005) et Ricard (1993) précisent que contrairement à leurs

parents (boomers pour la plupart) et à certains collègues boomers, les

membres de la génération X accordent davantage priorité à la famille, la

carrière venant en second lieu. D’ailleurs, contrairement aux boomers, les

Page 41: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

33

X ne seront pas prêts à sacrifier leurs besoins personnels au détriment de

leur emploi (Gravett et Throckmorton, 2007 ; Karp, et al., 2002).

Toujours selon la littérature, les X prônent les horaires flexibles (Nicholas,

2009) et l’autonomie au travail (Samson, 2005). Lancaster et Stillman,

2002 : 114) les dépeignent ainsi : « Accordingly, Gen Xers, struggle to

understand why it’s so important for someone to see if they are getting the

work done satisfactorily. »

Il semble évident, comme Busch et al., (2008) et Howe et Strauss (2007)

le soutiennent, que cette philosophie ne fait pas l’unanimité chez les

boomers et peut générer des frustrations et de l’incompréhension entre

eux et les X.

3.5.3. Le sens au travail pour la génération Y

3.5.3.1. Ambitieux

Saba (2009) dit que même si les Y sont conscients qu’ils travaillent au

profit de quelqu’un d’autre, il leur importe tout de même que leur travail

ait un sens. Selon Samson (2005), le membre de la génération Y

envisage son emploi comme une vocation. Parce que les Y participaient

au processus décisionnel familial (Petit, 2008; Dulin, 2008; Samson

2005; Lancaster et Stillman, 2002), ils veulent ressentir qu’ils contribuent

au succès de l’entreprise (Saba, 2009 ; Tapscott, 2009 ; Samson, 2005).

Or, pour Tulgan (2009) et Dulin (2008), les Y se sentent prêts à relever

le défi du monde organisationnel et, à l’inverse des boomers qui ont dû

faire leurs preuves avant de se tailler une place de choix au soleil

(Gravett et Throckmorton, 2007; Samson, 2005), les Y demandent à

avoir des défis de taille à relever dès leur entrée en entreprise (Petit,

2008). Karp et al. (2002 7) expriment ainsi le contraste entre les Y et les

boomers : « In the midst of this change, Boomers, who sacrificed so

much, feel annoyed by a new generation that seems to sacrifice so little

yet wants the same things, or more, in return. »

7 Hank Karp, Connie Fuller, Danilo Sirias. Bridging the Boomer Xer gap [ressource électronique](visionné le 4 mai 2009).

Page 42: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

34

3.5.3.2. Éthique de travail.

Tapscott (2009), Dulin (2008) et Samson (2005) disent qu’à l’opposé des

autres générations, les Y auront beaucoup de difficultés à sacrifier leurs

besoins personnels à leur travail. « This cohort does not live to work, this

generation seeks a healthier work-life balance than their parents

experience. » (Dulin, 2008 : 55). Pour Tapscott (2009 : 160), ces attitudes

peuvent être perçues comme un manque d’engagement, surtout par les

boomers qui, eux, ont toujours priorisé le travail : « One out of every two

Net Generation worker values family time more than work, compared with

41 percent of boomers. ».

De plus, pour Tapscott (2009), Tulgan (2009) et Lancaster et Stillman,

(2004), un peu comme les X, les Y ne voient pas la nécessité de

travailler sur les lieux de l’organisation pour être productifs. Gravett et

Throckmorton (2007)8 affirment que pour les Y, la productivité compte

avant tout :

Their work ethic cannot be measured by when they come to work, howmany hours they work, and how many breaks they take. Rather, thesegenerations would like companies to measure their work ethic in termsof the results they produce—not how they do it, where they do it, orwhen they do it, as long as (necessary) deadlines are met.

3.6. Le rapport à l’institutionDans la littérature, on dit que les générations baby boomers, X et Y

entretiennent des rapports très différents envers l’institution. Pour mieux

comprendre cette variable, certains théoriciens font une corrélation avec

le moment où ces générations entrèrent sur le marché du travail et la

santé économique de leur époque (Samson, 2005). Pour Gravett et

Throckmorton (2007), tout s’explique par les changements sociaux,

notamment ceux qui sont survenus dans les domaines de l’éducation, de

la technologie et de l’économie. Pour Samson (2005), le mouvement

économique d’une société explique en partie les perceptions de sa 8 Linda Gravett and Robin Throckmorton (2007). Bridging the generation gap how to get radiobabies, boomers, Gen Xers, and Gen Yers to work together and achieve more,, Franklin Lakes,NJ : Career Press, 224 p. [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009).

Page 43: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

35

population face au travail. Par exemple, selon les tenants de cette

théorie, il y aurait une forte corrélation entre le degré de bonheur

qu’éprouvent les citoyens et la croissance du produit intérieur brut (PIB)

de l’État. D’ailleurs, Petit (2008) et Johnson et Lopes (2008) avancent

que les attitudes des personnes peuvent se forger par les circonstances

ou les événements marquant un espace de temps. Par exemple, en

période d’incertitude économique, tous les individus, indépendamment

de leur appartenance à une génération, tendent à valoriser un emploi

stable. Un exemple qui démontre ce postulat serait les nombreux

changements économiques et démographiques enclenchés dans les

années 1980 (entrée des jeunes du baby boom et des femmes sur le

marché du travail, tertiarisation de l’économie et émergence des

technologies de l’information et des communications). Petit analyse ainsi

les effets de ces changements :

Ces changements ont eu pour conséquences de polariser le marché del’emploi et de créer un écart important entre les «bons» et les«mauvais» emplois. Ces derniers sont devenus des emplois moinsqualifiés, instables, mal rémunérés et souvent caractérisés par desstatuts d’emplois atypiques, comme des emplois à temps partiel ettemporaires, le travail indépendant et le cumul d’emplois. (Bédard etGrignon, 2000; Fournier et Bourassa, 2000 cités dans Petit, 2008 : 20).

3.6.1. Le rapport à l’institut pour la génération du baby boom3.6.1.1. Relation amour ou haine

Les boomers arrivent sur le marché du travail pendant une période de

grande prospérité économique (Crumpaker et Crumpacker, 2007 et

Ricard, 1993). Compte tenu du poids démographique imposant qu’ils ont

toujours connu, les boomers, contestataires dans l’âme, ont besoin de

faire une différence, notamment dans leur milieu de travail, qui a été

modelé par les générations précédentes (Wesner et Miller, 2008;

Lancaster et al., 2002; Cordeniz, 2002). Cordeniz (2002 : 239) les décrit

ainsi : « Having grown up with the sense that they were special and

capable of changing the world, they equate work with self-worth,

contribution, and personal fulfillment. »

Page 44: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

36

Par ailleurs, pour Tapscott (2009), le fait que les boomers aient évolué

dans une société très hiérarchisée (à la maison, à l’école et au travail)

explique pourquoi ils entretiennent une relation amour/haine à l’égard de

l’autorité, voire de l’institution (Tulgan et al., 2006 et Boudreault, 2002)

contrairement aux Y, qui voient leur supérieur comme un guide et qui

valorisent l’égalité plutôt que la hiérarchie (Nicholas 2009; Howe et

Strauss, 2007). Dans la littérature, on écrit que compte tenu de cet

aspect, les boomers auront été moins flexibles, plus compétitifs et très

indépendants (Howe et Stauss, 2007). Boudreault (2002 : 65) va dans le

même sens et précise que « le marché de l’emploi est l’un des rares

secteurs où le poids démographique joue contre eux ». Il poursuit en

citant Dunn :

As Boom climbed the corporate ladder, the steps seemed steeper, notonly because of the inherent competitiveness of upper-managementjobs, but also because of the sheer numbers of capable boomerapplicants. (Dunn, 1993 : 11 cité dans Boudreault, 2002 : 66).

Bien entendu, pour grimper les échelons de l’organisation, les boomers

voient l’entreprise comme un lieu où l’on doit faire ses preuves, à

l’opposé des X et des Y qui croient aux compétences et aux réalisations

et non au nombre d’années passées dans une même entreprise.

3.6.2. Le rapport à l’institut pour la génération X3.6.2.1. Relation de pragmatisme

Dans la littérature, on dit que les membres de la génération X se

montreront pragmatiques envers l’institution (Sirias et al., 2007;

Patterson, 2007, Boudreault, 2002 et Ricard, 1993). Sirias et al. (2007 :

751) analysent cette relation en reprenant les propos de Carbo

(1997 : 59) : « Generation X is a group without a clear identity, with

members who generally have diminished expectations, and feelings of

alienation, pragmatism, cynicism, conservatism and detachment. »

Sceptiques face à l’autorité (Boudreault, 2002), ils le sont encore plus

envers l’institution. Nicholas, (2009) ajoute même que cette génération

ne sera pas impressionnée par la hiérarchie, contrairement aux boomers

Page 45: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

37

qui ont appris à respecter les différents échelons de l’entreprise. Pour

Zemke et al., (2000) et pour Samson (2005), cette attitude qu’adoptent

les X donne l’impression aux autres générations qu’ils ne veulent pas

vraiment s’engager.

3.6.3. Le rapport à l’institut pour la génération Y3.6.3.1. Relation de confiance

Selon la littérature, les Y arrivent avec plein de confiance (Howe et

Strauss, 2007), mais surtout avec des attentes envers l’institution

(Tapscott, 2009). D'abord, ils s’attendent à ce que les entreprises leur

montrent leur métier (Tulgan, 2009). Pour Dulin (2008), le chef d’équipe

jouera un rôle majeur dans cet accomplissement puisqu’il sera perçu

comme un guide plutôt que comme un supérieur immédiat. D’ailleurs,

Howe et Stauss (2007 : 50) affirment que les Y seront plus faciles à

former que leurs collègues boomers, qui étaient plus compétitifs et

indépendants.

Dans la littérature, on affirme aussi que les Y s’attendent à créer des

liens de confiance avec leurs employeurs (Saba, 2009, Dulin, 2008;

Samson 2005 et Lancaster et Stillman, 2002 ). Howe et Stauss

(2007 : 50), quant à eux, expliquent que les Y seront plus ouverts envers

l’autorité que leurs collègues boomers, qui se méfiaient beaucoup lors de

leur entrée sur le marché du travail (Tulgan et Martin 2006 :10).

L’attitude des Y tranche également avec celle des X, qui sont demeurés

sceptiques face à l’organisation dans son ensemble (Zemke et al.,

2000). Pour Saba (2009) de même que pour Samson (2005), cette

relation devra se baser sur des rapports d’égalité et non de hiérarchie,

car contrairement aux boomers, qui ont toujours évolué dans des

structures très hiérarchisées, les Y ont été éduqués dans l’égalité

(Tapscott, 2009; Petit, 2008; Alch, 2008).

3.7. La place du travail d’équipe

Les chercheurs qui se sont penchés sur le travail d’équipe affirment qu’il

est essentiel pour le bon fonctionnement d’une entreprise (Sirias et al.,

Page 46: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

38

2007). Pour Morin et Aubé (2007 : 364), « dans un contexte

organisationnel, le groupe représente une ressource, tant pour l’individu

qui en fait partie que pour l’entreprise ». Crumpaker et Crumpaker,

(2007) voient une corrélation positive entre le degré d’attachement qu’a

un individu envers son équipe et la manière dont celui-ci perçoit ses

propres réalisations. Bien que plusieurs formes d’équipes existent à ce

jour (Lafortune et al., 2004), pour certains chercheurs, la perception

qu’on se fait à l’égard de ce concept est lourde et dépassée (Tulgan,

2009; Patterson, 2007) et doit être revue afin de coïncider avec les

besoins de notre société actuelle (Petit, 2008; Morin 2006).

3.7.1. La place du travail d’équipe pour la génération du baby boom3.7.1.1. L’équipe est un tout

Tout comme d’autres chercheurs, Sirias et al. (2007) affirment que les

boomers prônent le travail d’équipe parce qu’ils accordent de la valeur à

la participation de chacun :

As the Baby Boomers have become more influential in theirorganizations, they have also begun to implement team-basedstructures. Many of today’s key decisions-makers were in eitheruniversities or colleges or were up-and-coming young managers whenparticipative, team-oriented styles of management began to gaindominance in the 1970s and early 1980s. The values ofinterdependence, consensus decision-making and collaboration becamethe watchwords for group development. In this setting, teams trulybecame the wave of the future. (Sirias et al., 2007 : 751)

D’un autre côté, on soutient aussi que l’individualisme est au centre de

l’existence de la génération du baby boom : « They were raised to be

independent and to believe that they could control their own destinies »

(Mitchell, 1995 : xxi cité dans Boudreault, 2002 : 46). Ceci étant dit, selon

Tulgan (2006), le boomer qui se retrouve dans un poste d’autorité aura

tendance à faire de la micro-gestion dû à son besoin d’être en contrôle

de son environnement (Eisner 2005). D’autant plus que, lorsqu’ils sont

entrés sur le marché du travail, comme le souligne Tulgan (2006 : 10) :

« command-and-control leadership was the norm ». Samson (2005 : 43)

abonde en ce sens et ajoute que les boomers sont des adeptes d’un

consensus forcé, c’est-à-dire que tous les membres de l’équipe doivent

Page 47: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

39

être d’accord, « sinon le membre est tout de suite rabaissé au rang de

ceux qui n’ont pas l’esprit d’équipe ». Cette caractéristique les oppose

aux deux autres générations, qui ne recherchent pas le consensus à tout

prix.

3.7.2. La place du travail d’équipe pour la génération X3.7.2.1. Individu dans l’équipe

Une abondance de textes souligne l’individualisme des X. Citons entre

autres Sirias et al. (2007 : 751) :

A common thread in the literature is that members of generation X areto be considered to be highly individualistic more so than the BabyBoomers (…) Kennedy, (1996) states that Baby Boomers feel invincibleas part of a team but baby busters work best alone

D’un autre côté, Gravett et Throckmorton (2007) et Boudreault (2002)

ont trouvé que les X voulaient travailler en équipe à condition que les

entreprises reconnaissent l’apport individuel de chacun des membres. À

ce propos, Tolgan affirme : « The Xers need to feel included in the

process of shaping team goals, and they do need to have a concrete role

in implementing those goals. Without those features, it doesn’t look like a

team to Xers. » (Tulgan, 2000 : 65, cité dans Boudreault, 2002 : 89).

C’est, selon l’auteur, ce qui explique, en partie du moins, pourquoi les X

sont perçus comme ayant peu ou pas d’esprit d’équipe.

Samson (2005) abonde en ce sens et précise que les X ne cherchent

pas nécessairement le consensus : ils veulent simplement que chacun

respecte les opinions de l’autre. «Les autres ont le droit de penser

autrement qu’eux, pour autant que leur propre point de vue soit

respecté. » (Samson, 2005 : 51)

3.7.3. La place du travail d’équipe pour la génération Y3.7.3.1. Équipe flexible

Dans la littérature, on affirme que les Y sont plus enthousiastes à

travailler en équipe que les générations précédentes (Petit, 2008). Ce

serait, selon plusieurs chercheurs (Saba, 2009; Subjansky, 2009; Alch,

Page 48: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

40

2008; Sirias et al., 2007; Gravett et Throckmorton, 2007; Tulgan et

Martin, 2006), parce qu’ils sont habitués à fonctionner en groupe

contrairement aux X qui furent laissés à eux-mêmes et aux boomers

« qui offrent un véritable culte du moi tout au long de leur existence »

(Boudreault, 2002 : 46). Sujansky (2009 : 24) explique :

Millennials are used to doing things in groups, whether in team sports,school projects or group dates. Some have likened this trend to a typeof “herding” behavior unique to Millennials, but is certainly indicative ofteam mentality that’s important to this generation.

En contrepartie, les Y tendent à valoriser le respect de l’opinion d’autrui

et demandent en retour qu’on fasse de même à leur égard (Samson,

2005). D’ailleurs, selon une étude présentée par Gravett et

Throckmorton en 2007, les Y considèrent les boomers comme étant trop

autoritaires, voire même contrôlants.

3.8. La loyauté

Il semble tenu pour acquis, parmi les chercheurs, que l’engagement

organisationnel soit un très bon indicateur de la qualité de vie au travail

(Ketchum et Trist, 1992), donnant un sens aux employés (Morin, 2007).

Tandis que les entreprises sont prêtes à tout pour fidéliser les employés

à leur organisation (Morin, 2006, 2007), la question qui se pose à

présent est de savoir si effectivement, la loyauté en entreprise est une

question de bon-vouloir des employés ou si elle est plutôt une

caractéristique propre à la personne en tant qu’individu appartenant à

une génération spécifique.

Deux courants de pensée circulent parmi les chercheurs. En effet, une

étude de Saba (2009) conclut que les générations ne présentent aucune

différence au niveau de la loyauté envers l’organisation. Tulgan (2009) et

Patterson (2007), quant à eux, appuient cette théorie et ajoutent que le

concept de la loyauté doit être redéfini. Par ailleurs, pour d’autres

chercheurs, il est clair que les baby boomers, à l’inverse des X et Y, ne

sont pas conduits par le même type de loyauté en entreprise (Petit,

2008; Harvey 2004; Boudreault, 2002).

Page 49: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

41

3.8.1. La loyauté pour la génération du baby boomLes chercheurs dépeignent les boomers comme étant très loyaux à

l’entreprise. On dit que durant sa carrière, un boomer aura sacrifié

beaucoup de sa vie personnelle afin de prouver sa loyauté et son

engagement envers l’entreprise (Karp et al., 2002). Crumpaker et

Crumpacker (2007 : 594) dressent le portrait suivant : « Growing up in an

era of economics prosperity, this generation became great believers in

lifetime employment, company loyalty and paying one’s dues in order to

gain respect and receive seniority. »

Certains boomers voient même cette forme de sacrifice comme une

valeur à véhiculer parmi leurs pairs et subalternes (Karp et al., 2002).

Pour Lancaster et al., (2002), les boomers sont fidèles à l’entreprise

parce qu’ils ont une propension à viser la stabilité d’emploi. Saba (2009)

quant à elle, avance que c’est parce qu’ils préfèrent se construire une

bonne réputation au sein d’une même organisation. Karp et al., (2002)

ajoutent que certains boomers (surtout ceux approchant leur retraite)

s’interrogent à savoir s’ils auront assez de temps pour inculquer à la

relève ce type loyauté qui ne semble pas convenir aux deux autres

générations, les X et les Y.

3.8.2. La loyauté pour la génération X

3.8.2.1. Loyauté?

Pour la génération X, la loyauté prend un tout autre sens (MacLaughlin,

2009 et Patterson, 2007). Selon Boudreault (2002), les X manquent de

loyauté parce qu’ils furent aux premières loges des restructurations

organisationnelles et des licenciements de leurs parents dans les

années 1980 et 1990. Gravett et Throckmorton (2007) croient que c’est

parce qu’ils revivent un schéma qui ressemble étrangement à celui de

leurs parents. Un jour, par exemple, ils peuvent travailler avec quelqu'un,

et le lendemain, apprendre que cette personne a été congédiée (Zemke

et al., 2000). Pour MacLaughlin (2009), les X sont plus enclins à être

Page 50: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

42

loyaux aux individus qu’aux leaders et/ou à l’entreprise. Cordeniz (2002 :

243) décrit une étude confirmant cette tendance :

In a study where approximately 250 telephone interviews wereconducted generation X respondents described themselves as hardworkers who view jobs and work as a means to an end and claimed tohave little confidence in loyalty to leaders and institutions.

3.8.3. La loyauté pour la génération Y3.8.3.1. Échange transactionnel

Selon la littérature, les jeunes de la génération Y ont des opinions très

différentes en matière de loyauté au travail. Tulgan (2009 : 12) observe :

They can be very loyal, but they don’t exhibit the kind of loyalty you findin a kingdom, blind loyalty to hierarchy, tight observance of rites ofpassage, patience for recognition and rewards. Instead, they offer thekind of loyalty you get in a free market—that is, transactional loyalty(whatever you can negotiate). This is the same kind of loyalty youextend to your customers and clients. We call it “just-in-time loyalty”.

Pour Tapscott (2009), les Y ne veulent pas se commettre à un seul

emploi. Selon Ach, « ils peuvent réorienter leur carrière de cinq à huit

fois » (Alch, 2000 cité dans Saba 2009 :27) et acquérir de nouvelles

compétences pour augmenter leur bagage de connaissances plus d’une

fois durant leur vie (Saba, 2009 et Tulgan, 2009). Or, selon Tapscott

(2009), les plus performants en seront déjà à leur cinquième emploi dès

leur 27e anniversaire et conserveront un même emploi en moyenne 2,6

ans.

3.9. La communicationDans la littérature, on dit que la communication peut être la source de

certains conflits intergénérationnels (Smola et Sutton, 2002) et que si

négligée, elle pourrait aller jusqu’à affecter la productivité des

organisations (Gravett et Throckmorton, 2007). Pour Smola et Sutton

(2002 : 363), les générations poursuivent les mêmes objectifs mais

n’arrivent simplement pas à exprimer leurs besoins dans le même

langage : « Companies need to realize that different parts of the

population communicate in different ways. »

Page 51: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

43

Gravett et Throckmorton (2007)9, quant à eux, suite à une série

d’entrevues avec les générations, découvrent une tendance émergente :

« All age groups want respect. All age groups desire flexibility in work

arrangements. However, this desire for respect and flexibility manifests

itself in different ways from generation to generation. »

3.9.1. La communication pour la génération du baby boomOn dit dans la littérature que les boomers préconisent le formalisme

(Lancaster et al., 2002), contrairement aux X et Y qui sont à l’opposé de

cette philosophie (Eisner, 2005 et Boudreault, 2002). Gravett et

Throckmorton, 2007)10 confirment : « Y likes to take a more casual,

relaxed approach to the workplace. »

Cette préférence des boomers ressort également dans leur tendance à

vouloir officialiser et documenter : discussions (en rapport avec le

travail), rencontres et/ou réunions d’équipe (Lancaster et al., 2002). Ces

manières procédurales semblent déranger les X et les Y compte tenu de

leur attitude un peu plus relâchée. Boudreault (2002) de même que

Gravett et Throckmorton (2007) abondent en ce sens et affirment que

selon leurs recherches, les boomers sont perçus comme étant

autoritaires. En position d’autorité, on dit que les boomers aiment avoir le

contrôle sur leur environnement (Tulgan, 2009; Eisner, 2005 et

Boudreault, 2002), ce qui se reflète dans leur manière de concevoir le

« consensus » plus souvent qu’autrement avec une unanimité obligée

(Samson, 2005 et Zemke et al., 2000) : « When they are in leadership

roles, their tendency is toward a collegial, consensual, sometimes

benignly despotic style » (Zemke et al., 2000 :79). Une étude de Gravett

et Throckmorton (2007) confirme cet état de fait en révélant que les

générations X et Y affirmaient en entrevue que leurs opinions n’étaient

9 Linda Gravett and Robin Throckmorton (2007). Bridging the generation gap how to get radiobabies, boomers, Gen Xers, and Gen Yers to work together and achieve more, Franklin Lakes,NJ : Career Press, 224 p. [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009).10 Ibid.

Page 52: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

44

pas toujours respectées et que les choses devaient toujours marcher à

la manière des boomers.

3.9.2. La communication pour la génération XSelon la littérature, les X aiment communiquer lorsque nécessaire

contrairement aux Y, qui demandent à recevoir constamment de la

reconnaissance, de la rétroaction et des indications claires quant à la

définition de leur rôle en entreprise et à la précision des tâches qu’ils

doivent accomplir (Sujansky 2009; Tulgan, 2009; Petit, 2008; Dunlin,

2007). Lancaster et al. (2002) ajoutent que les X veulent recevoir de la

rétroaction à condition qu’elle soit franche et directe, et seulement au

besoin.

De plus, Boudreault (2002 : 86) note que :

[Contrairement aux boomers], ils ont en horreur les règles formelles, lesréunions vides de sens et qui traînent en longueur ainsi que lesnombreux paliers hiérarchiques qui nuisent à une communicationefficace entre les employés. Idéalement, les X aimeraient pouvoirs’exprimer directement à la haute direction.

3.9.3. La communication pour la génération YSimard croit que les Y ont une plus grande ouverture face à la

communication : « En général, les jeunes de la génération Y préfèrent

une communication ouverte et informelle à une communication

structurée et dirigée » (Simard, 2007 cité dans Petit 2008 :56). En

entreprise, on dit que les Y veulent créer des liens avec leurs

employeurs (Saba 2009; Petit, 2008), mais qu’ils demandent surtout

beaucoup de rétroaction (Sujansky, 2009; Gravett et Throckmorton

(2007 et Samson, 2005). Pour Tulgan (2009) et Patterson (2007), ce

besoin peut créer des tensions auprès des autres générations, qui les

perçoivent comme dépendants et incapables de prendre des initiatives

(Howe et Strauss 2007; Patterson, 2007). Howe et Strauss (2007 : 50)

expliquent : « Millenials will be viewed as more pampered, risk averse,

and dependent. »

Page 53: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

45

Tapscott (2009) les surnomme « the relationship generation ». Quant à

Alch (2008 : 18), il soutient que : « More than any previous generation,

they are becoming conversant with a communication revolution ».

Plusieurs auteurs soulignent que cette génération a initié plus d’un

moyen de communication via les nouvelles technologies de l’information

et des communications (NTIC) dans le but de rassembler le plus grand

nombre de gens possible (Nicholas, 2009; Gravett et Throckmorton,

2007; Lancaster et al., 2002). Ainsi, Boudreault (2002 : 95) constate :

« Aujourd’hui le réseau permet aux individus de communiquer, d’entrer

en relation avec les gens de tous âges et de toutes origines. »

Tulgan (2009 :12) souligne : « they think, learn, and communicate in

sync with today’s information environment », contrairement aux boomers

qui sont moins à l’aise avec cette façon de communiquer (Nicholas,

2009; Crumpacker et Crumpacker, 2007 et Boudreault, 2002). Déjà en

2005, Lenhart observait l’attitude suivante : « In focus group discussions

during this study, the teens revealed that they use e-mail as a means to

talk to "old people"; otherwise, instant messaging is the mode of

communication. » (Lenhart, 2005 cité dans Gravett et Throckmorton,

200711).

D’un autre côté, Gravett et Throckmorton (2007) ont trouvé que les Y

avaient moins d’aisance à effectuer des confrontations de personne à

personne, contrairement aux boomers qui en ont une grande habitude :

« Millennials may not have confrontational skills for effective interactions

with coworkers and customers. Baby Boomers are more likely to respond

to potential conflict by saying: Let's bring the team together and we'll

resolve this. » (Gravett et Throckmorton, 200712).

11 Linda Gravett and Robin Throckmorton (2007). Bridging the generation gap how to get radiobabies, boomers, Gen Xers, and Gen Yers to work together and achieve more, Franklin Lakes,NJ : Career Press, 224 p. [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009).12 Ibid.

Page 54: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

46

3.10. Les conflits intergénérationnelsÀ la suite des informations recueillies lors de notre revue de littérature et

à la lumière de notre cadre conceptuel, voyons maintenant les conflits

potentiels que nous anticipons entre les trois générations à l’étude, soit

les baby boomers, les X et les Y. Notons que comme cette étude se veut

uniquement exploratoire, suite aux données que nous recueillerons sur

le terrain, l’objectif de cette recherche sera de confirmer ou d’infirmer si

effectivement ces concepts issus de la littérature font l’objet d’un conflit

intergénérationnel pour nos répondants. Dans le tableau croisé ci-

dessous, nous avons pris soin de mettre en rapport chacun des

concepts choisis avec la plus petite unité d’équipe intergénérationnelle

possible, afin d’y détailler les confrontations potentielles. Ce tableau-

synthèse constituera la base de la méthodologie que nous décrivons au

prochain chapitre.

Page 55: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

47

Tableau 3.2 : Manifestation des conflits potentielsintergénérationnels dans une équipe

Rappelons que dans le cadre de cette recherche, nous avons posé la question

suivante : Quelles sont les différences intergénérationnelles qui existent dans

un contexte de travail et quels sont les conflits potentiels générés par ces

différences? Notre cadre conceptuel et la présentation de conflits potentiels

ayant été présentés, nous élaborons dans les prochaines pages la description

de la méthodologie utilisée pour la réalisation de notre étude.

Page 56: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

CHAPITRE 4. Méthodologie de recherche

4.1. Approche et méthode de cueillette des données4.1.1. L’approche qualitativeComme il a été souligné dans notre revue de littérature, l’étude des

conflits intergénérationnels est un sujet relativement récent et encore à

l’état fragmentaire (Crumpacker et Crumpacker, 2007). Notre

méthodologie sera donc constituée d’une stratégie de type exploratoire.

D’ailleurs, Bordeleau (1982 :12 cité dans Harvey 2004 : 59) opine dans

le même sens et affirme que cette méthode est particulièrement indiquée

lorsque le sujet de recherche est encore inconnu, voire nébuleux :

La recherche exploratoire est appropriée en milieu organisationnellorsqu’un problème est nouveau, vague, mal défini dans l’état actuel desconnaissances ou pour tenir compte des caractéristiques tout à faitparticulières du milieu où surgit le problème.

Dès lors, la méthode qualitative s’avère être l’approche la plus

convenable pour cette recherche. Baumard et Ibert (2003 : 97)

confirment d’ailleurs qu’« il est classique de lier l’exploration à une

approche qualitative ».

Par qualitatif, D’Astous (2005 : 69) entend : « une étude davantage

fondée sur la qualité ou la nature des phénomènes étudiés que sur leur

description à l’aide de nombres ». Pour Paillé (1996c cité dans Paillé et

Mucchielli, 2003 : 5), « son résultat n’est, dans son essence, ni une

proportion ni une quantité, c’est une qualité, une dimension, une

extension, une conceptualisation de l’objet ». À l’inverse, l’approche

quantitative favorise plutôt l’utilisation de méthodes rigides de collecte

d’informations et conduit à des interprétations relativement objectives

des résultats (D’Astous, 2005). Dulin (2009 : 45) établit la distinction

suivante : « Most quantitative research is confirmatory and involves

theory verification, whereas much qualitative research is exploratory and

involves theory generation. »

Page 57: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

49

Or, Harvey (2004), Beaumard et Ibert (2003), et Paillé et Mucchielli

(2003) ont trouvé qu’une limite importante de la méthode qualitative était

qu’elle pouvait seulement servir au contexte particulier de la recherche,

ce qui veut dire que les données sont difficilement transférables à moins

qu’elles soient complémentaires à une étude qui se prête au même sujet

(D’Astous, 2005). Petit (2008 : 103) émet la mise en garde suivante :

Miles et Huberman (2003) expliquent qu’avec l’approche qualitative, lechercheur travaille avec des mots et non des chiffres. Comme les motspeuvent avoir un sens différent en fonction des mots qui les précèdentet de ceux qui les suivent, le chercheur doit prendre certainesprécautions afin de bien replacer les mots dans leur contexte. Lesdonnées qualitatives peuvent donc plus facilement être interprétées defaçon erronée que les chiffres.

D’ailleurs, Kisfalvi (2006) souligne que même dans un contexte où le

chercheur tâche d’être objectif, il se peut que celui-ci introduise divers

biais dans son étude, principalement durant la cueillette et le traitement

des données.

4.1.2. Étude de cas par l’entretien semi-directifBédard et al. (1993 : 12) indiquent que « le relevé des données

pertinentes correspond au premier grand volet de l’analyse de cas, c’est-

à-dire la recherche de l’information ». Pour cette recherche, nous avons

opté pour la méthode de l’étude de cas par l’entretien semi-directif

comme outil de cueillette de données et comme instrument d’analyse.

En effet, comme en témoignent Miller et Friesen (1982 cités dans Hlady-

Rispal 2003 : 86), « l’avantage premier de ce type d’étude réside dans la

capacité d’identification des variables cruciales et la possibilité de mieux

appréhender les processus de changement et de développement qui ont

cours dans une organisation ». Yin (1994 : 1) quant à lui, privilégie ce

type d’approche dans les situations suivantes :

In general, case studies are the preferred strategy when “how” or “why”questions are being posed, when the investigator has little control overevents, and when the focus is on a contemporary phenomenon withinsome real life context.

Page 58: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

50

Notre choix de l’entretien semi-directif se base, entre autres, sur l’opinion

de Quivy et Campenhoudt (2006 : 173), qui le considèrent comme une

méthode qui « se distingue par la mise en œuvre des processus

fondamentaux de communication et d’interaction humaine ». Autrement

dit, la méthode de l’entretien semi-directif est intéressante puisqu’elle

« laisse autant que faire se peut la personne interviewée s’exprimer

librement, avec les mots qu’elle choisit et en ordonnant les sujets comme

elle le souhaite » (Morlec, 2006 : 57). D’ailleurs, Harvey (2004), Baumard

et Ibert (2003) et Yin (1994), abondent tous dans le même sens et

affirment que l’entrevue individuelle est la meilleure façon de récolter des

données. En effet, elle permet à l’enquêteur de « retirer des informations

très riches et nuancées » (Quivy et Campenhoudt, 2006 : 173).

En revanche, certains auteurs ont trouvé que l’étude de cas comporte

des risques de subjectivité (Choquet-Girard, 2008; Quivy et

Campenhoudt, 2006; Kisfalvi, 2006; Morlec, 2006). À ce propos, Kisfalvi

(2006 : 111) évoque ainsi les travaux de Devereux (1967) : « Devereux

concludes that any effective behavioural science methodology must use

the subjectivity inherent in all observation as the royal road to an

authentic, rather than fictitious, objectivity ». Finalement, Petit

(2008 : 104) soulève cet argument :

Comme les répondants ont plus de liberté dans l’élaboration de leursréponses et que le chercheur peut approfondir certaines idées ainsi quepréciser ou reformuler les questions, il risque d’y avoir un manque destandardisation d’un répondant à l’autre.

4.2. Structure de la rechercheLa structure de la recherche a été construite et élaborée de manière à

pouvoir répondre à notre question de recherche, celle-ci étant :

« Quelles sont les différences intergénérationnelles qui existentdans un contexte de travail et quels sont les conflits potentielsgénérés par ces différences? »

Page 59: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

51

4.2.1. Les répondantsAfin de répondre aux objectifs de la recherche dans le meilleur des cas,

nous avons sélectionné neuf sujets, soit trois membres de la génération

du baby boom, dont un gestionnaire; trois membres de la génération X,

dont un gestionnaire, et trois membres de la génération Y, dont un

gestionnaire. Pour être éligibles, les profils des participants devaient

répondre aux critères de l’étude. Ces critères sont décrits dans les

paragraphes qui suivent.

Pour répondre à l’objectif de la recherche qui est de proposer et de

valider ou réfuter l’existence d’un certain nombre de conflits

intergénérationnels basés sur cinq dimensions issues de la littérature,

notre échantillon sera composé de neuf membres provenant de neuf

entreprises différentes. L’objectif d’étudier un cas par entreprise sera de

valider si effectivement, notre question de recherche s’applique à

l’ensemble des membres des générations à l’étude, et non à une seule

niche professionnelle.

4.2.2. Les organisations participantes

Pour les fins de cette étude, nous nous sommes orientée dans plusieurs

domaines professionnels. Plusieurs raisons ont influencé notre décision

d’opter pour une variété de domaines plutôt que de limiter notre étude à

un seul. D’abord, le fait d’élargir le champ nous permet d’une part de voir

si les cinq composantes étudiées sont ressenties sur l’ensemble des

générations et ce, dans plusieurs types d’emplois et/ou domaines

professionnels. Ensuite, comme nous procédons à des études de cas, le

fait que ces participants travaillent tous dans des entreprises distinctes

permet d’assurer un plus grand degré de confidentialité. En effet, il y a

très peu de risques que leur identité soit découverte par leur entreprise

ou par leurs collègues de travail. Nous croyons que cette garantie

favorise par le fait même une plus grande franchise. Finalement, la

dimension temporelle étant une composante importante lors de la

rédaction d’un mémoire de Maîtrise, nous avons opté pour un échantillon

réaliste dans de telles circonstances.

Page 60: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

52

4.2.3. L’outil de rechercheOr, les résultats recherchés étant par définition qualitatifs, dans un guide

d’entrevue qui nous servira de support (Quivy et Campenhoudt 2006),

une série de questions-guides, pouvant être posées dans le désordre

(Morlec, 2006), furent développées et catégorisées selon les cinq

dimensions que nous tenterons d’étudier : 1- le sens au travail, 2- le

rapport à l’institut, 3-la place du travail d’équipe, 4- la loyauté et 5- le

style de communication. Ces questions, sous forme de guide d’entrevue,

se retrouvent à l’annexe A.

4.3. La collecte de données4.3.1. Échantillon de la rechercheComme le recommandent Miles et Huberman (2007 : 58), « les

chercheurs qualitatifs travaillent habituellement avec des petits

échantillons de personnes, nichés dans leur contexte et étudiés en

profondeur ». Afin d’obtenir une bonne diversité de répondants, nous

avons décidé d’étendre notre échantillon à plusieurs domaines

professionnels. Nous avons entre autres des sujets en provenance des

domaines des télécommunications, de la publicité, du commerce au

détail, de l’ingénierie, de la santé, de l’éducation et finalement,

d’organismes à but non lucratif (OBNL).

4.3.2. Contacts préliminaires et déroulement de l’entretien

La collecte de données a eu lieu du 20 mars au 23 avril 2010. Toutes les

entrevues ont été menées par l’auteure de ce mémoire. Ayant travaillé

dans différentes entreprises, nous d’abord pris soin de scruter notre

base de données personnelle afin de voir si certains de nos contacts

pouvaient être éligibles pour notre étude. Ainsi, un premier contact fut

établi avec ces candidats potentiels soit par le biais d’un courriel ou par

un appel téléphonique afin de les solliciter pour participer à notre étude.

Ensuite, une fois leur éligibilité validée et leur accord obtenu, nous les

rencontrions dans le lieu de leur choix afin qu’ils se sentent à l’aise

d’élaborer davantage sur le sujet des conflits intergénérationnels.

Page 61: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

53

Chaque fois, avant de débuter l’entretien, nous prenions le temps de

bien expliquer le projet au répondant et aussi de répondre à ses

questions, le cas échéant. Finalement, chacun des répondants devait

signer un formulaire qui confirmait son accord pour participer à cet

entretien. Nous avons pris soin de les joindre à cette recherche à

l’annexe B. Également, nous nous sommes assurée d’obtenir leur

permission pour enregistrer ces entrevues. Nous étions ensuite prêts à

débuter l’entrevue. Au total, nous avons effectué 9 entrevues d’une

durée d’environ 45 minutes.

4.4 Méthode d’analyse des données

Ainsi que le mentionnent Miles et Huberman (2009 : 19), « la recherche

qualitative peut-être conduite de mille et une manières ». Pour Paillé et

Mucchielli (2003 : 13), « l’analyse qualitative s’enracine dans le courant

épistémologique de l’approche compréhensive ». Miles et Huberman

(2003 : 28), quant à eux, avancent que « les forces des données

qualitatives reposent essentiellement sur la compétence du chercheur

exercée lors de leur analyse ». D’ailleurs, Wolcott (2001 : 32) confirme

qu’il existe une grande différence entre l’analyse et l’interprétation des

données. Selon Erikson (1986, cité dans Beaumard et Ibert 2003 : 52),

« la caractéristique la plus distinctive de l’enquête qualitative réside dans

la mise en exergue de l’interprétation ». Dulin (2009), Hlady-Rispal

(2003), D’Astous (2005) et Wolcott (2001) abondent dans ce sens et

disent que la recherche qualitative est caractérisée par une grande

souplesse dans la façon d’obtenir les informations désirées et par une

participation importante du chercheur dans l’interprétation des données.

Pour D’Astous (2005 : 65), c’est parce qu’il faut tenir compte des

subtilités psychologiques que « seule une interprétation humaine serait

en mesure de détecter ». Ce qui, à l’inverse, peut devenir une limite

dans la mesure où le chercheur se montre incompétent lors de ses

analyses (Choquet-Girard 2009).

Ainsi, pour nous assurer de la qualité de notre méthodologie, nous nous

sommes appuyée principalement sur les travaux de Miles et Huberman

Page 62: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

54

(2007). Tout d’abord, toutes les entrevues ont été entièrement

retranscrites de façon à conserver l’authenticité des répondants.

Proposée par de nombreux scientifiques (Harvey 2004), cette manière

de procéder nous a beaucoup aidée à analyser le verbatim une fois

retranscrit. Par la suite, nous avons modifié les noms et autres détails

susceptibles d’identifier les répondants de façon à assurer la

confidentialité de leurs témoignages. Ensuite, nous avons procédé à une

analyse de contenu, cette méthode s’avérant l’une des plus utilisées en

management (selon les chercheurs Thiétart et al. 2003 : 450, cités dans

Harvey 2004 : 69). Cette façon particulière de faire les choses est

conseillée par Miles et Huberman (2007 : 438) et vise à « repérer les

patterns et les thèmes, rechercher la plausibilité et regrouper les

tactiques ce qui nous aidera à retrouver des relations entre les

données ».

4.5. Méthode de présentation des donnéesMiles et Huberman (2007 : 29 et 174) décrivent ainsi la méthode qu’ils

préconisent :

Un format de présentation signifie un assemblage organiséd’informations qui permet de tirer des conclusions et passer à l’action[…] La forme la plus fréquente de présentation pour les donnéesqualitatives est traditionnellement le texte narratif.

Atkinson (1998 : 7-8) estime ainsi la valeur de l’histoire de cas :

It is through story that we gain context and recognize meaning […] A lifestory gives us the vantage point of seeing how one person experiencesand understands life, his or her own especially, over time.

Or, selon la littérature, le texte narratif peut se présenter autant sous

forme de notes de terrain, de citations, de phrases courtes, d’estimations

que de petits paragraphes. Pour ce faire, en nous basant sur notre cadre

conceptuel comme trame d’analyse, nous présentons nos données sous

formes de citations pertinentes, catégorisées sous chacune des

dimensions analysées.

Page 63: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

55

Plus concrètement, nous avons d’abord procédé, comme le

recommandent Miles et Huberman (2007), à une présentation intra-cas

de nos sujets sélectionnés. Pour ce faire, nous avons exposé, dans un

premier temps, des petits paragraphes issus de leur verbatim. Ensuite,

nous avons tenté de dégager des similitudes, des différences et des

comparaisons et/ou contrastes apparaissant entre les cas. Par la suite,

nous avons fait une analyse inter-cas tel que détaillé dans notre

structure de recherche au point 4.2.1 (baby boomer–X, baby boomer–Y

et X–Y). Cette méthode nous a permis de tirer certaines conclusions.

Une fois nos analyses livrées, nous avons présenté les citations

significatives par sujet dans un tableau synthèse afin que les conclusions

tirées de nos données soient reflétées et rendues via les cinq

dimensions étudiées.

Tableau 4.1 : Conflits intergénérationnels basés surles cinq points d’opposition

Dans les prochains chapitres, nous ferons état des résultats et analyses

issus de notre collecte de données.

Page 64: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

CHAPITRE 5. Résultats et analyses des générations face auxcinq dimensions

Ce chapitre présente l’ensemble des résultats obtenus lors de notre

collecte de données. Dans cette optique, nous prenons soin de remettre

le lecteur en contexte en lui rappelant que notre sujet vise à étudier les

conflits générationnels potentiels pouvant se dégager de cinq concepts

ressortant systématiquement de la littérature : 1) le sens au travail, 2) le

rapport à l’institution, 3) le travail d’équipe, 4) la loyauté et finalement, 5)

la communication. Dans ce contexte, nous ne tiendrons pas compte des

similitudes générationnelles. S’il y a lieu, celles-ci seront revues dans le

chapitre de discussion et pourront faire l’objet d’une nouvelle proposition

d’étude.

Dès lors, dans la première partie de ce chapitre, nous mettons en relief

un aperçu sommaire des sujets composant notre échantillon de

recherche. Dans la deuxième partie, nous présentons les résultats et

analyses des cinq concepts déterminés. Par résultats, on entend une

présentation de certains extraits du verbatim de chacun de nos

participants qui nous semblent pertinents pour notre recherche. Afin de

comparer ce qui se dit dans la littérature avec nos résultats empiriques,

nous avons eu recours au tableau 3.1, dans lequel nous avions classé

les caractéristiques (comportements clés et attitudes) et les attentes

(valeurs, préférences et réticences) dominantes des générations envers

le monde du travail, (Petit, 2008 et Harvey, 2004) selon les cinq points

d’opposition pour lesquels nous proposons des confrontations.

Page 65: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

57

5.1. Description de l’échantillon5.1.1. Portrait sommaire des répondantsAu total, notre échantillon est composé de neuf participants d’origine

québécoise, dont cinq hommes et quatre femmes, œuvrant tous dans

des entreprises et domaines professionnels différents. Tel que proposé

dans notre chapitre de la méthodologie, parmi ces neuf répondants, trois

sont membres de la génération du baby boom, trois appartiennent à la

génération X et trois représentent la génération Y. À noter qu’afin de

préserver leur anonymat, nous ne mentionnerons aucun détail de nature

personnelle ou professionnelle risquant de les identifier. Dans cette

optique, l’information les décrivant sera donc sommaire et très générale.

Le tableau ci-dessous présente une synthèse des profils des participants

de notre échantillon.

Page 66: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

58

Tableau 5.1 : Caractéristiques des répondants

5.2. Résultats et analyse de la dimension du sens au travailDans la prochaine partie de ce chapitre, nous faisons état des résultats

de notre recherche et de nos analyses par rapport à la dimension sensau travail. Tout d’abord, les réponses de nos participants seront

partiellement retranscrites par citations pertinentes et ensuite analysées

par génération.

Répondants Date denaissance

Âge Sexe Fonction Domaine

BB1 20 mai 1953 57 FEMME Gestionnaire OSBL

BB2 11 mars 1961 49 HOMME Gestionnaire d’équipe Commerce au détail

BB3 7 avril 1952 58 FEMME Infirmière Santé

X1 19 novembre 1975 34 HOMME Gestionnaire d’équipe Publicitaire

X2 23 février 1970 40 FEMMEEnseignante etgestionnaire delaboratoire

Universitaire

X3 11 avril 1978 32 HOMME Informatique Bancaire

Y1 14 mars 1981 29 FEMME Gestionnaire de projetévénementiel et d’équipe Télécommunications

Y2 6 mars 1985 25 HOMME Étudiant et stagiaire eningénierie Cosmétique

Y3 16 mars 1983 27 HOMME Étudiant et stagiaire enconsultation Gouvernemental

Page 67: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

59

5.2.1. Résultats par génération en regard de la dimension du sensau travail

Dans le tableau ci-dessous, nous avons regroupé quelques extraits des

témoignages des générations qui nous paraissaient dominants par

rapport à la variable sens au travail.

Tableau 5.2 : Classement par génération des citations significatives parrapport à la dimension du sens au travail

Citations significatives

BB1

« Je voulais faire des choses pour être au service du peuple, del’humanité […] Je savais que je voulais m’impliquer dans une cause,dans quelque chose qui pouvait assurer une transformationsociale. »

« […] J’avais 20 ans. C’est difficile de sentir que je pouvais avoirquelque chose à contribuer. »« L’horaire, la qualité de vie, le salaire, l’avancement n’étaient pasquelque chose que je regardais au début parce que j’ai faitbeaucoup d’années sans salaire à plusieurs reprises, alors ce n’estpas tellement ça qui a motivé ma présence ou l’avancement de macarrière. »«Je sais que je suis salariée mais on dirait que je me sens plus queça en dedans et d’ailleurs, on fait beaucoup d’heures commebénévole. Je ne dirais pas que je suis payée pour le nombred’heures que je travaille à toutes les semaines. »

BB2

« Ce n’est pas l’argent qui m’attirait, c’est tout le reste […] Moi je neviens pas travailler le matin. Je me sens un peu comme un chanteurou un comédien, un chanteur ou un comédien ne dira jamais qu’iltravaille […] C’est vraiment une motivation à chaque jour. Oui il y ades problèmes, mais ce ne sont pas des problèmes : ce sont desdéfis. »« Comment je peux faire avancer les gens, comment je peux faireen sorte que les gens soient heureux de venir travailler […] J’aimevenir travailler le matin parce je sais qu’il y aura plein de monde pisje vais avoir du fun. »« J’avais un cours d’électricien, et quelqu’un m’a offert un poste degestionnaire parce qu’il voyait mon leadership. »

Page 68: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

60

BB3

« L’amour de cette fonction-là […] C’était de satisfaire la clientèle,créer des choses, organiser pour que ça fonctionne bien […] Lecontact avec les malades et les rendre le plus confortables possibleaux niveaux physique et psychologique, pour arriver à soulagerleurs problèmes […] Ma motivation première, c’était vraiment lesgens. »« Les dernières années j’ai beaucoup pensé à ce qui me motivait autravail pis c’est quoi qui est plaisant dans ma journée d’ouvrage, pisce n’était pas juste le salaire. […] Les bonnes conditions de travailauraient aidé, mais elles étaient quand même difficiles […].Physiquement, l’horaire, je trouvais ça difficile. J’avais des séries, jetravaillais la fin de semaine et je travaillais 5 jours de suite, je penseque j‘ai fait ça 15 ans de temps. »«J’avais un patron qui m’aurait fait faire toutes sortes d’affaires. Il acomme découvert mon potentiel […] je me suis beaucoup réaliséecette année-là. »

X1

« J’aime beaucoup les défis associés à mon domaine ou à lastratégie […] Ma motivation, le matin, c’est vraiment de direaujourd’hui, je vais avoir des problèmes à résoudre, des défis àrelever […] Le train-train quotidien ne m’emballe pas outremesure. »« Je suis d’avis qu’on prouve par nos gestes ce dont on est capable.Moi, j’aime démontrer ce dont je suis capable et après ça, ça t’ouvrebeaucoup de portes […] Je vais travailler le nombre d’heures àtravailler pour faire la job pas par plaisir, loin de là, mais je vais lefaire. »« […] je n’accepterai pas une job si ça demande à ce que je fasse75 heures semaine. »

X2

« Moi, ce que j’aime, c’est de voir les résultats. J’aime ça quand çaavance. Une expérience qui avance, des résultats qui rentrent […]j’aime ça voir l’avancement des travaux c’est quelque chose que jetrouve motivant […] j’aime ça avancer. Cocher des affaires (tac, tac,tac, tac, tac. »« Une autre chose que je trouve motivante, c’est lorsque j‘aicommencé, j’étais professeure adjointe, ensuite agrégée, après çatitulaire… Adjointe, je devais avoir un certain rendement pourdevenir agrégée et là, je viens de passer agrégée »« Une entreprise se doit de se forcer à avoir les employés les plusheureux possible. C’est là qu’ils seront le plus rentables possible.Exemple : que les entreprises aient toutes des garderies. »

Page 69: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

61

X3

«Ce que je regarde en premier, lorsque je regarde pour un emploi,ce sont les perspectives d’avancement, de défis, les responsabilitéspis le salaire. »« Le fait d’apprendre encore plus de jour en jour et de toujoursévoluer professionnellement et intellectuellement, mon niveau deconnaissances. Je ne pourrais pas être dans un travail qui estconstamment routinier. »« L’horaire ne me dérange pas parce que je suis vraiment appelé àfaire du support 24/7, donc je peux me lever à 2 heures du matin lesamedi soir. Par contre, si j’étais obligé de me déplacer au bureaupour le faire, ça me dérangerait un peu plus. Mais là, je le fais de lamaison, alors c’est de joindre l’utile à l’agréable. »

Y1

« […] Je ne suis pas un bourreau de travail qui va faire 60 heuressemaine pendant 20 ans et laisser tomber mon chum et puis mesenfants! Ça ne me dérange pas pendant une période donnée oupour les besoins de la cause, que ça soit pour un projet ou unavancement de travailler 50 heures semaine. Je vais faire ça un,deux, trois mois s’il le faut, mais j’ai besoin d’un équilibre. »« Une job insignifiante avec une équipe stimulante ce n’est pasassez et puis une job enrichissante avec une équipe moyenne, tu nevoudras pas rester à moins d’être vraiment motivée. »« Si mon VP passe et me dit " Hey!, good job ", bien je vais êtrebien contente. C’est de la reconnaissance! C’est bien bon de lareconnaissance, parce que quand tu sais que ta boss t’as écrit un" good job " et elle est vraiment contente, c’est motivant. »

Y2

« Le travail d’équipe, c’est vraiment important pour moi. »«J’aime avoir un bon feedback (positif ou négatif) de la part dessuperviseurs. C’est agréable de savoir qu’on se dirige dans la bonnevoie. Quand on n’a pas de feedback, c’est plus difficile. J’aime êtreencadré par mes supérieurs. »

Y3

« Ce qui me motive, c’est le plaisir au travail, l’équipe, l’ambiance, laconvivialité, l’absence de hiérarchie trop rigide entre lepersonnel […] les conditions de travail et la flexibilité. »« Le feedback, j’adore ça. C’est un privilège lorsque tu réussis à enavoir dans un contexte de travail parce que généralement, on n’apas le temps. »« Qu’on attende de moi les résultats, mais qu’on ne me dise pas parquel moyen les faire, qu’on me laisse de l’autonomie […] Je nem’attends pas à ce que l’on me dise comment atteindre mesrésultats. »

Page 70: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

62

5.2.2. Analyse des générations par rapport au sens au travail

5.2.2.1. Les baby boomers et le sens au travail

Nous n’avons pas été surprise de constater que les boomers accordent

beaucoup d’importance à leur travail. En effet, la littérature les décrit

comme une génération se consacrant presque entièrement à son emploi

(Lancaster et al., 2002; Cordeniz, 2002), mue par des motivations

intrinsèques allant bien au-delà des conditions de travail et du salaire. À

preuve, ces quelques déclarations : « Moi, je ne viens pas travailler le

matin. Je me sens un peu comme un chanteur ou un comédien, un

chanteur ou un comédien ne dira jamais qu’il travaille. Ils vont faire un

spectacle et ils vont être contents » (BB2) et « J’aime vraiment ce que je

fais […] Je sais que je suis salariée mais on dirait que je me sens plus

que ça en dedans » (BB1). Ces commentaires appuient en quelque sorte

l’opinion de Cordeniz, (2002 : 239) : « Having grown up with the sense

that they were special and capable of changing the world, they equate

work with self-worth, contribution, and personal fulfillment ».

Or, les boomers sont reconnus pour leur trait contestataire

(Grand'Maison, 1993). En raison de leur poids démographique imposant,

nous avons déterminé que les boomers ressentent le besoin de faire une

différence dans leur milieu de travail modelé à la mesure des

générations précédentes (Wesner et Miller, 2008; Cordeniz, 2002 et

Lancaster et al., 2002). Ceci explique pourquoi ils choisissent des

métiers qui leur permettent d’opérer une transformation sociale (Wesner

et Miller, 2008; Cordeniz, 2002 et Lancaster et al., 2002). Ces quelques

témoignages nous le confirment : « Je voulais faire des choses pour être

au service du peuple, de l’humanité (…) je voulais m’impliquer dans une

cause qui pouvait assurer une transformation sociale » (BB1). « C’était

de satisfaire la clientèle (…) Le contact avec les malades et les rendre le

plus confortable possible au niveau physique et psychologique pour

arriver à soulager leurs problèmes. » (BB3)

Page 71: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

63

Les boomers sont conscients de la hiérarchie (Tapscott, 2009). D’un

autre côté, nos résultats empiriques nous permettent de constater que

nos répondants n’aspirent pas nécessairement à gravir les échelons

dans l’entreprise. Autrement dit, l’avancement de carrière, pour eux, ne

semble pas constituer une priorité, ce qui ne correspond pas au portrait

présenté dans la littérature (Saba 2009; Busch et al., 2008; et Lancaster

et Stillman, 2002). De plus, Boudreault (2002) rapporte que les boomers

prolongent les heures passées au bureau; dans le cas de nos

répondants, ce n’est clairement pas par ambition. En ce sens, la citation

suivante nous semble particulièrement importante : « As Boom climbed

the corporate ladder, the steps seemed steeper, not only because of the

inherent competitiveness of upper-management jobs, but also because

of the sheer numbers of capable boomer applicants. » (Dunn, 1993 : 11

cité dans Boudreault, 2002 : 66). En s’appuyant sur cette théorie, on

peut supposer que les boomers furent découragés face à l’avancement

qui, à leurs yeux, devenait difficile, voire impossible (Boudreault 2002).

Ceci nous donne à penser que pour se tailler une place au soleil, les

boomers devaient rester compétitifs, en acceptant les conditions de

travail imposées par l’entreprise. Ainsi en témoigne BB3 : « Des fois, il y

avait des conflits et c’est parce qu’il y en a qui étaient écœurés. Ces

gens-là auraient dû partir pour aller ailleurs, mais ils n’étaient pas

capables parce qu’il n’y avait pas d’ouvertures ». Par exemple, une de

nos répondantes avoue avoir eu des horaires chargés tandis qu’un autre

nous mentionne avoir travaillé sans salaire à plusieurs reprises. Force

est de constater que ces boomers devaient trouver une source de

motivation en dehors des conditions de travail et c’est pour cette raison

qu’ils nous disent ne pas avoir tenu compte de cet aspect dans leur

choix de travail. Revoyons ce qu’ils en disent : « Les dernières années,

j’ai beaucoup pensé à ce qui me motivait au travail pis c’est quoi qui est

plaisant dans ma journée d’ouvrage, pis ce n’était pas juste le salaire »

(BB3) « Ce n’est pas l’argent qui m’attirait, c’est tout le reste » (BB2).

Page 72: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

64

5.2.2.2. Les X et le sens au travail

Nos résultats empiriques montrent que les X de notre échantillon sont

attirés par les opportunités de carrière (Crumpaker et Crumpacker, 2007;

Patterson, 2007; O’Bannon, 2002; Smola et Sutton, 2002). De plus, ils

n’abordent pas le côté humain comme les membres de la génération du

baby boom. D’abord, nous avons observé que les X étaient très attirés

par la performance : « Moi ce que j’aime, c’est de voir les résultats […]

Une expérience qui avance, des résultats qui rentrent […] j’aime ça voir

l’avancement des travaux. C’est quelque chose que je trouve motivant. »

(X2). Ensuite, les trois répondants sont unanimes pour dire que les défis,

les responsabilités et l’avancement professionnel sont des aspects qui

les motivent dans leur carrière. D’ailleurs, les X travaillent selon leurs

propres objectifs (Smola et Sutton, 2002 : 23). X1 le confirme lorsqu’il

dit : « Je travaille à un endroit pour des raisons spécifiques. » Il semble

donc que les X travaillent avec l’optique de se bâtir une expérience qui

pourra les rendre plus employables (Gravett et Throckmorton, 2007;

Lancaster et Stillman, 2002; Karp et al.; 1999; Saba, 2009; Crumpaker et

Crumpacker, 2007; Gravett et Throckmorton, 2007; MacLaughlin, 2009).

Les propos de X3 appuient cette idée :

Je dois toujours apprendre des nouvelles choses, des nouveaux défis[…] Le fait d’apprendre encore plus de jour en jour et de toujoursévoluer professionnellement et intellectuellement, mon niveau deconnaissance […]. Je dois toujours apprendre des nouvelles choses.

On observe chez les X une volonté constante de progresser, ce qui

témoigne de leur grande ambition et qui explique, en quelque sorte,

pourquoi l’avancement professionnel est un facteur recherché. Ceci

étant dit, ils préfèrent des quotidiens moins traditionnels et détestent la

routine. Ce trait de caractère explique aussi pourquoi ils peuvent choisir

un travail en fonction de l’horaire (Nicholas, 2009) et des conditions de

travail. Or, deux de nos trois X mentionnent qu’ils accepteraient de

travailler plus de 40 heures semaine à condition que l’horaire soit flexible

et qu’il convienne à leur train de vie. En ce sens, X2 va jusqu’à dire que

c’est à l’entreprise de rendre ses employés heureux : « Une entreprise

Page 73: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

65

se doit de se forcer à avoir les employés le plus heureux possible. C’est

là qu’ils seront le plus rentables possible. Exemple : que les entreprises

aient toutes des garderies », nous dit-elle.

5.2.2.3. Les Y et le sens au travail

Les Y ont des exigences envers l’organisation, contrairement aux

boomers de notre échantillon qui nous semblaient plutôt passifs en début

de carrière. Rappelons en effet la réflexion de BB1 : « J’avais 20 ans.

C’est difficile de sentir que je pouvais avoir quelque chose à contribuer. »

D’abord, tout comme ceux de la génération X, les Y recherchent un

emploi offrant des conditions de travail intéressantes, des défis et une

possibilité d’avancement (Petit, 2008; Audet, 2004; Tulgan et Martin,

2001; Zemke et al., 2000). Par ailleurs, au travail, les Y cherchent à

créer des liens (Petit, 2008). Nos résultats empiriques nous permettent

de valider l’importance du travail d’équipe pour les Y. En effet, nos Y

rapportent que le sens au travail est autant dans les tâches accomplies

et les responsabilités assumées au quotidien que dans l’ambiance qui

règne dans l’équipe et la composition de celle-ci : « L’équipe, c’est tout

aussi important que les tâches que tu fais » (Y1). Selon eux, le fait de

travailler avec des gens sur lesquels ils peuvent compter fera toute la

différence. À ce propos, Y2 déclare : « […] une équipe qui va essayer de

t’aider, qui est souriante […] une équipe qui est avec toi dépendamment

de si ça va bien ou si ça va mal qui n’est pas toujours là à te critiquer et

à chercher c’est à qui la faute […] ». D’ailleurs, cette ouverture à la

sociabilité (Petit, 2008) soulève leur propension à vouloir faire confiance,

ce qui explique en partie pourquoi ils sont tellement ouverts à la

rétroaction. En ce sens, ces Y perçoivent cette dernière comme un

encadrement, une direction claire qui permet de réduire les pertes de

temps puisque que le travail est bien exécuté dès la première fois.

Par contre, les Y sont plus réticents que les autres générations à

sacrifier leurs besoins personnels pour le travail (Tapscott, 2009; Dulin,

2008 et Samson, 2005). Y1 en témoigne clairement : « J’aime travailler,

Page 74: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

66

mais ça ne sera pas à tout prix ». Selon ce que nos Y rapportent, c’est

un facteur qui pèse lourd au moment de choisir un emploi. Un surplus

d’efforts pourra être investi de façon temporaire, soit dans le but

d’avancer dans leur carrière ou de se faire reconnaître par leur

« patron », mais si ces conditions se prolongeaient indûment, ils seraient

enclins à regarder ailleurs. Ainsi, force est de constater que parce que

ces Y arrivent dans des conditions économiques différentes de celles

qu’ont connues les deux générations précédentes, ils ont une plus

grande aisance à contester ou même à exiger des conditions de travail.

5.3. Résultats et analyse de la dimension le rapport à l’institution

Dans la prochaine partie de ce chapitre, nous relatons les résultats et

analyses de notre recherche par rapport à la dimension rapport àl’institution. Au préalable, en les classant par génération, nous

transcrivons quelques extraits des témoignages de nos participants qui

nous ont paru révélateurs.

5.3.1. Résultats des générations quant à la dimension le rapport àl’institution

Dans le tableau ci-dessous, nous avons regroupé les points dominants

des générations relativement à la variable du rapport à l’institution.

Tableau 5.3 : Citations significatives des générations en regard avec ladimension le rapport à l’institution

Citations significatives

BB1

« […] Non, je ne fais pas du tout confiance à l’État comme ça, sansvoir ce qui est derrière. »« J’ai besoin de voir l’action […] »« Je vais juger lorsque je vais voir les résultats. »

BB2« Je me sens très privilégié parce qu’en sortant de l’école, j’avais uncours d’électricien, et quelqu’un m’a offert un poste de gestionnaireparce qu’il voyait mon leadership. »

Page 75: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

67

BB3

« Je n’avais pas une confiance aveugle dans l’organisation parceque ça fait 35 ans que tu les vois aller. Tu te fais dire qu’au mois deseptembre, ils vont faire telle affaire et tu sais que ça va justecommencer au mois de février […] C’était tout le temps les délais. »

X1« Je ne pense pas qu’il y a un endroit parfait. Je choisis donc lemoins pire des endroits […] Mais aussi, c’est parce que je travaille àun endroit pour des raisons spécifiques. »

X2

« Je pense que le travail, c’est très important puisque nous passonsune bonne partie de notre vie au travail. C’est le fun quand on estcapable d’avoir un sentiment d’appartenance envers une entité etêtre fière des valeurs qui sont propagées par l’entreprise où tuaimes ça arriver le matin, parce que tu aimes la façon que c’estgéré. ».

X3« Tu offres un service. Pour moi, toute la culture, ça ne veut pas diregrand-chose. Toutes les valeurs que l’entreprise donne, ça nem’affecte pas vraiment. »

Y1

« Je suis positive envers l’entreprise dans la plupart des cas. Jepense qu’ils sont dans un tournant où ils n’ont pas vraiment le choix.Quand tu arrives quelque part, les entreprises savent maintenantqu’il faut qu’ils t’aident parce que sinon tu ne resteras pas. »

Y2 « Ce sont des boîtes à faire de l’argent, qui vont souvent donnerl’image d’une place où tu peux grandir ».

Y3

« Par expérience, je suis devenu sceptique parce que de plus enplus, les entreprises se désengagent. Ce n’est plus comme dans letemps de nos parents, quand comme en guise de loyauté envers toi,même si les affaires ralentissaient, ils t’assuraient, te donnaient desavantages sociaux et te gardaient quand même. »« J’ai vu beaucoup d’abus dans les relations de travail. Lesemployeurs qui respectent vraiment l’éthique sont rares. Je n’ai pastant confiance parce que les gens sont de plus en plus occupés,c’est l’argent, l’argent, l’argent, c’est normal c’est le cœur del’entreprise. »

5.3.2. Analyse des générations et leur rapport à l’institution

5.3.2.1. Les baby boomers et le rapport à l’institution

D’après nos résultats empiriques, la majorité de nos répondants

boomers (deux sur trois) disent ne pas faire confiance à l’institution.

Page 76: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

68

Rappelons leurs déclarations : « Non, je ne fais pas du tout confiance à

l’État […] J’ai besoin de voir l’action (…) Je vais juger lorsque je vais voir

les résultats » (BB1). « Je n’avais pas une confiance aveugle dans

l’organisation […] C’était tout le temps les délais, les dates » (BB3). Pour

Tapscott, (2009), le fait que les boomers aient évolué dans une société

très hiérarchisée (à la maison, à l’école et au travail), explique pourquoi

ils entretiennent une relation plutôt méfiante à l’égard de l’autorité, voire

l’institution (Tulgan et al.,2006 et Boudreault, 2002) Or, pour Petit (2008 :

20), le rapport qu’entretiennent les générations avec l’institution est aussi

« imputable à l’époque et peut être influencé par les circonstances ou les

événements marquant un espace de temps ». Par exemple, la récession

des années 80, qui se prolonge dans les années 90, affectera gravement

les conditions de travail des boomers qui se trouvent déjà sur le marché

du travail. Boudreaut (2002 : 67) souligne justement : « Pour plusieurs,

c’est la rupture du contrat social entre l’employé et l’organisation. ». En

ce sens, ils rapportent majoritairement que le marché du travail de leur

époque était saturé. Ainsi, BB3 parle d’« une période où il y n’avait

quasiment pas d’affichage de postes ». On suppose donc que les

boomers, affectés par cette récession, mettent de côté leur désir de

grimper les échelons de l’entreprise, l’avancement étant maintenant

devenu difficile et que, par le fait même, ils se sont tournés contre

l’organisation (Boudreault (2002). Par ailleurs, contrairement aux deux

autres répondants, BB2 ayant été encouragé dès le début de sa carrière,

entretient un rapport de grande confiance avec l’institution :

Il y a quelqu’un qui a reconnu mon leadership il y a 32 ans ethonnêtement, je suis reconnaissant envers la compagnie parce que j’aiune maudite belle situation. Je regardais le budget et je faisprésentement partie des hauts salariés avec un secondaire 5.

Sur ce point, nous avons été surprise de découvrir que nos boomers

sont plutôt passifs face à leur carrière professionnelle contrairement à

ceux des deux autres générations, qui sont davantage proactifs pour leur

cheminement de carrière. En effet, nos baby boomers semblent avoir

simplement attendu les occasions plutôt que de les provoquer ou de les

Page 77: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

69

rechercher : « J’avais un patron qui m’aurait fait faire toutes sortes

d’affaires. Il a comme découvert mon potentiel » (BB3). « J’avais un

cours d’électricien, et quelqu’un m’a offert un poste de gestionnaire

parce qu’il voyait mon leadership » (BB1). Deux des trois boomers

composant notre échantillon semblent être entrés sur le marché du

travail sans trop d’attentes particulières, contrairement à nos participants

des deux autres générations qui exigent beaucoup de l’organisation,

comme nous le verrons maintenant.

5.3.2.2. Les X et le rapport à l’institution

Selon nos résultats empiriques, les X veulent avoir le contrôle sur leur

carrière professionnelle. Ce point majeur qui détermine une partie de

leur personnalité générationnelle au travail les oppose déjà à la

génération précédente (les boomers) : « Un jour, j’ai eu l’opportunité

pour un poste et bien j’ai appliqué et puis de fil en aiguille et bien ça a

continué comme ça » (BB1). En effet, les X savent où ils vont et

prennent les moyens pour assurer leur progression et leur ascension

professionnelle. Durant leur témoignage, ils mettent d’ailleurs l’emphase

sur le fait qu’ils choisissent d’être à un endroit plutôt que d’être choisis.

Rappelons les propos de X1, qui « travaille à un endroit pour des raisons

spécifiques ». Dès lors, ils ne sont pas particulièrement confiants envers

l’organisation, mais ne s’en soucient pas puisque pour eux, l’institution

représente essentiellement un lieu « d’épanouissement professionnel »

réalisé par l’échange d’un service contre rémunération. Par ses propos,

X3 montre qu’il n’a pas de sentiment d’appartenance face à l’entreprise :

« Pour moi, toute la culture, ça ne veut pas dire grand-chose. Toutes les

valeurs que l’entreprise donne, ça ne m’affecte pas vraiment. » Il semble

que le rapport des X avec l’institution se fasse donc sur une base

transactionnelle : « Tu offres un service et c’est ça je veux dire » (X3).

Quant à lui, X1 déclare : « En travaillant ici, je sais que je vais apprendre

à chercher X, Y, Z bagage ». Par contre, même si ces X affichent un

scepticisme envers l’institution, nous avons été étonnée de constater

que deux de nos répondants disent qu’ils aimeraient éprouver un

Page 78: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

70

sentiment d’appartenance face à l’entreprise. Voyons ce qu’ils disent à

ce sujet : « Je considère l’entreprise comme ma famille » (X1). « C’est le

fun quand on est capable d’avoir un sentiment d’appartenance envers

une entité et d’être fière des valeurs qui sont propagées par l’entreprise

où tu aimes ça arriver le matin parce que tu aimes la façon que c’est

géré » (X2). Ainsi, même si ce facteur ne fait pas l’unanimité chez nos

répondants, cette tendance révèle que les X de notre échantillon ne sont

pas aussi détachés que la littérature l’affirme.

5.3.2.3. Les Y et le rapport à l’institution

Dans le cas des Y, seule une minorité (une personne sur trois) est

confiante envers l’institution, et ce, de manière partielle : « Je suis

positive envers l’entreprise dans la plupart des cas » (Y1). Les deux

autres sont entièrement sceptiques et entretiennent un rapport de

méfiance envers l’organisation. Pour ces Y, l’entreprise ne se préoccupe

pas vraiment de la main-d’œuvre et n’est intéressée que par le profit.

Voici comment Y2 voit les choses : «Ce sont des boîtes à faire de

l’argent, qui vont souvent donner l’image d’une place où tu peux

grandir ». D’ailleurs, Y3 est convaincu que c’est par la faute des

entreprises que les individus en sont venus à travailler pour leurs

objectifs personnels :

J’ai vu beaucoup d’abus dans les relations de travail. Les employeursqui respectent vraiment l’éthique sont rares. Je n’ai pas tant confianceparce que les gens sont de plus en plus occupés, c’est l’argent, l’argent,l’argent, c’est normal : c’est le cœur de l’entreprise.

Ceci nous amène à conclure que les Y aimeraient avoir confiance, mais

que les entreprises, pour la plupart, ne leur ont pas encore donné

l’occasion de croire en elles. Nous appuyons cette supposition sur le

constat suivant. Contrairement aux X, qui semblent assumer le côté noir

de l’entreprise, on sent une déception chez les Y : « Il ne faut pas être

naïf : les employeurs ne sont pas tant intéressés par toi. » (Y3) « Où je

travaillais avant, ils voyaient leurs employés vraiment comme des

outils » (Y1). En ce sens, « C’est d’avoir confiance en l’entreprise où tu

Page 79: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

71

es. Parce que si tu as confiance, c’est qu’elle représente plus tes

valeurs, ce qui veut dire qu’elle te ressemble, donc tu vas rester plus

longtemps. »Ceci nous laisse croire que les Y n’ont pas tout à fait trouvé

ce qu’ils cherchaient au point de vue professionnel, puisque deux des Y

nous mentionnent que la seule motivation financière ne leur suffit pas :

« Ce sont des motivations internes. Ce n’est pas seulement pour

l’argent. C’est-à-dire que ce n’est pas juste dans le but de vivre ou de

travailler : il faut que je tripe sur ce que je fais. » (Y1) Nos trois

répondants sont d’ailleurs unanimes pour dire que s’ils étaient riches, ils

travailleraient quand même. Par contre, ils nous avouent tous que

présentement, ils travaillent principalement pour des raisons financières :

« Je travaille pour gagner ma vie » (Y1); « parce que j’ai besoin

d’argent » (Y2); « c’est certain que je travaille à cause de l’argent qui

rentre afin de pouvoir profiter de la vie et payer les comptes, ça va en

premier » (Y3). Cependant, contrairement aux boomers, qui mettaient le

travail au centre de leur existence, ils ne seront pas entièrement

dévoués à leur travail (Boudreault, 2002).

5.4. Résultats et analyse pour la dimension du travail d’équipe

Dans la prochaine partie de ce chapitre, nous faisons état des résultats

et analyses de notre recherche par rapport à la dimension travaild’équipe. Au préalable, en les classant par génération, nous

transcrivons quelques extraits des témoignages de nos participants qui

nous sont apparu particulièrement pertinents pour l’analyse de cette

dimension.

5.4.1. Résultats par génération sur la dimension du travail d’équipe

Dans le tableau ci-dessous nous reproduisons les commentaires qui

résument les points dominants des générations par rapport à la variable

du travail d’équipe.

Page 80: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

72

Tableau 5.4 : Citations significatives des générations en regardavec la dimension du travail d’équipe

Citations significatives

BB1

« Mon travail, ce n’est pas quelque chose qui se faitindividuellement, sinon ça serait infaisable. »« Il faut travailler en équipe parce que c’est le seul moyen d’yarriver. »

BB2« Le travail d’équipe, c’est comme le corps humain, c’est-à-dire il y aun cœur, des organes, le système digestif et un ne fonctionne passans l’autre. »

BB3

« (…) Avec les malades, ça te prend une équipe, mais même sij’aime travailler en solitaire, je choisirais de travailler en équipe, tu ascomme besoin d’une équipe. ».« Pendant certaines périodes, c’était comme si mon équipe faisaitpartie de notre famille. »

X1« J’ai absolument besoin de travailler seul, mais après ça, j’ai besoinde voir mon équipe pour échanger sur ce à quoi j’ai réfléchi etbonifier ce que j’ai essayé de développer sur papier. »

X2

« Pour moi, le travail d’équipe c’est un travail individuel que les gensréunissent pour en faire un projet final. Un travail d’équipe, c’estquand tu pars un projet et tu t’assoies ensemble dès le départ pourétablir les règles du comment ça va fonctionner, qu’est-ce qu’on faitavec ça, comment on fait le travail. »« Moi, j’aime mieux travailler seule parce que j’ai tendance à êtreplus intravertie pis solitaire au travail. »

X3

« C’est d’être capable de se partager les tâches efficacement entreles membres d’une équipe. C’est quand les parties sont autonomesdans leurs tâches, mais complémentaires. »« Moi, j’aime mieux travailler seul. Parce que j’ai toujours trouvé plusefficace lorsque j’étais tout seul. »

Y1

« L’équipe, c’est tout aussi important que les tâches que tu fais. »« Même si on travaille différemment, je crois beaucoup au travaild’équipe… structuré! C’est-à-dire que tout le monde sache qui faitquoi et quand. »

Page 81: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

73

Y2

« Le travail d’équipe, c’est vraiment important pour moi. »«C’est un apport individuel au départ, pis après ça, l’équipe doittravailler ensemble, pour retravailler ces apports individuels là etensuite, il y a des décisions qui se prennent, chacun retourne à saplace pour retravailler les choses selon les décisions de l’équipe. »« Ce sont aussi des gens qui t’écoutent et qui sont capables de tedire quand ça va bien ou quand ça va mal […] L’équipe, c’est superimportant puisqu’en général tu peux avoir du feedback des membresque tu n’avais pas pensé au départ, ce qui peut être superintéressant. »

Y3

« Une bonne équipe, c’est où est-ce que chacun contribueconcrètement au travail selon ses forces, qui sont complémentaires,qui a le goût d’apprendre de l’autre, l’ouverture, par exemple noussommes là pour atteindre un résultat, un objectif et quand chacunapporte quelque chose qui fait qu’on avance ou qu’on y arrive, c’estgratifiant. »« C’est la façon que ça se passe entre le groupe pour atteindre lesobjectifs. »« Tu fais souvent une partie seule, ta recherche, rédiger tesrapports, mais il y a un travail qui se fait beaucoup en équipe, alorsj’aime beaucoup le partage entre les deux. »

5.4.2. Analyse des générations et la place du travail d’équipe

5.4.2.1. Les baby boomers et le travail d’équipe

Les boomers sont reconnus pour accorder une très grande importance

au travail d’équipe (Sirias et al., 2007). Pour eux, l’équipe, c’est

essentiellement une unité où doit exister une interdépendance entre les

membres qui s’y rattachent et par conséquent, le consensus et la

participation de chacun est nécessaire pour son bon fonctionnement

(Sirias et al., 2007). « Il faut travailler en équipe parce que c’est le seul

moyen d’y arriver», nous dit BB1 en résumant l’opinion de nos trois

répondants. Ceci étant dit, un projet doit se faire en équipe. De plus, tous

les membres de l’équipe doivent être en accord avec le plan, « sinon le

membre est tout de suite rabaissé au rang de ceux qui n’ont pas l’esprit

Page 82: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

74

d’équipe » (Samson 2005 : 43). Les propos de l’un de nos répondants

boomer illustrent bien ce que représente l’esprit d’équipe :

Il y a un capitaine de bateau et puis ce capitaine a une équipe […] toutle monde s’en va à Gaspé. On ne va pas à Matane, on va à Gaspé.Tout le monde est convaincu qu’on s’en va à Gaspé, pis s’il y aquelqu’un de l’équipe qui n’est pas convaincu qu’on s’en va à Gaspé,bien qu’il lève la main pis qu’il nous le dise pis on va se rasseoir pour enparler, parce qu’on doit aller à Gaspé. (BB2).

5.4.2.2. Les X et le travail d’équipe

Les X, quant à eux, sont connus pour leur cynisme, voire leur

individualisme dans une équipe de travail, comme en témoignent leurs

réflexions : « Moi, j’aime mieux travailler seul. Parce que j’ai toujours

trouvé plus efficace lorsque j’étais tout seul. » (X3) « Moi j’aime mieux

travailler seule parce que j’ai tendance à être plus intravertie pis solitaire

au travail. ». (X2) Par contre, nos résultats empiriques démontrent qu’ils

apprécient le travail en groupe mais que la définition qu’en font les

boomers n’est pas de tout intérêt pour eux. D’abord, ces X veulent

travailler dans un groupe où les individus à part entière contribuent

individuellement au succès d’un projet par l’exécution des tâches

rattachées à leur rôle. De plus, les X ne recherchent pas

l’interdépendance des membres ou le consensus à tout prix (Samson,

2005) et veulent êtres reconnus pour leur apport individuel (Gravett et

Throckmorton, 2007 et Boudreault, 2002). Sur cette question, X2

confirme le point de vue des auteurs: « D’un autre côté, une fois sur le

tapis rouge, on le présente comme un travail d’équipe mais la

découverte appartient à la personne qui l’a découvert. » Dans cette

optique, pour les X, l’équipe représente plutôt le rassemblement de

plusieurs spécialistes qui forment, par leur profession unique, un groupe,

afin de réaliser un objectif commun : « Pour moi, le travail d’équipe, c’est

un travail individuel que les gens réunissent pour en faire un projet final »

(X2). « C’est quand les parties sont autonomes dans leurs tâches mais

complémentaires. » (X3) Ceci étant dit, ce n’est pas surprenant de

constater que ces X soient beaucoup moins enclins au développement

des relations interpersonnelles dans une équipe de travail,

Page 83: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

75

caractéristique considérée comme essentielle pour les boomers et

importante pour les Y.

5.4.2.3. Les Y et le travail d’équipe

Pour les Y, le travail d’équipe, c’est le juste équilibre entre le rationnel (la

structure et la méthode) et le relationnel (la concordance des membres).

Du côté relationnel, les Y tendent à valoriser le respect de l’opinion

d’autrui et demandent en retour qu’on fasse de même envers la leur

(Samson, 2005), contrairement aux boomers qui recherchent un

consensus. « L’équipe, c’est super important puisqu’en général tu peux

avoir du feedback des membres que tu n’avais pas pensé au départ ce

qui peut être super intéressant. » (Y2) Toutefois, bien que les Y

accordent un peu plus d’importance à la variable relationnelle, ils ne

misent pas uniquement sur elle. En effet, les membres de l’équipe

doivent aussi contribuer au groupe de façon individuelle. C’est ce que Y2

exprime ici : « Je crois que certaines parties doivent se faire en équipe et

d’autres seul […] c’est un apport individuel au départ, pis après ça

l’équipe doit travailler ensemble, pour retravailler ces apports individuels

là. »

Ceci étant dit, pour les Y, l’équipe est un groupe de personnes

remplissant un rôle distinct où les membres sont appelés à consentir par

la négociation du plan commun et d’une structure de projet qui sera

respectée par tous les membres afin d’atteindre le même objectif. Ainsi,

Y1 déclare : « On ne peut pas travailler de la même façon et l’on ne peut

pas faire tous le même travail non plus. C’est juste qu’il faut se structurer

pour se rendre au même objectif. »

5.5. Résultats et analyse de la dimension la loyautéDans cette section, nous présentons les résultats de notre recherche et

l’analyse que nous en avons faite par rapport à la dimension de laloyauté. Au préalable, en les classant par génération, nous transcrivons

Page 84: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

76

quelques extraits des témoignages de nos participants qui nous

paraissent révélateurs en regard de la loyauté.

5.5.1. Résultats des générations selon la dimension de la loyautéDans le tableau ci-dessous, nous résumons les points dominants des

générations face à la variable la loyauté.

Tableau 5.5 : Citations significatives des générations en regard avec ladimension de la loyauté

Citations significatives

BB1

« Je sais que je suis salariée, mais on dirait que je me sens plus queça en dedans. »« Il est clair pour moi que lorsque nous parlons de loyauté enversl’entreprise, je ne vais pas penser, je vais faire ce qu’il faut. »

BB2

« C’est quasiment trop important […] Tout ce que la compagnie m’aoffert, le fun que j’ai quand il est venu le temps de penser j’y vais-tu,j’y vais-tu pas, je me suis dit; je ne suis pas pour lâcher ma gangmoi, là. »« La loyauté pour moi c’est important. […] Le respect fait partie demon éducation. La loyauté envers les institutions, je pense que c’estune forme de respect. Mais c’est vraiment important. »

BB3

« La loyauté pour moi, c’est de donner les bonnes choses, les bonstraitements, les bonnes affaires, être vraie. C’est d’être loyale enversle client aussi, d’être honnête. »« Pour moi, rester 35 ans à la même place, je ne considère pas çacomme être loyale, c’est une question que tu n’as pas le choix y aun seul hôpital dans le coin où tu habites. Ta vie est là ! Et ce n’estpas par loyauté que tu restes, c’est par obligation. ».

X1« La loyauté, c’est définitivement à sens unique. Même cetteentreprise ne fait pas exception à la règle. Le jour où ils n’ont plusbesoin de toi, ils te mettent à la porte, merci bonsoir. »

X2« Ma philosophie maintenant, c’est que mon travail, ma loyauté estenvers moi-même en premier. Faire ma job au travail du mieux queje peux pour moi, c’est la loyauté. »

X3

« C’est de faire les tâches demandées. Je suis une ressource,l’entreprise n’a pas de sentiments et moi, je n’ai pas de sentimentsenvers l’entreprise. Je n’hésiterai pas à quitter si on m’offrait desmeilleurs défis ailleurs avec une augmentation de salaire. »

Page 85: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

77

Y1

« La loyauté, à la base, c’est de respecter l’entreprise pendant letemps que tu es là. La loyauté telle qu’on la connaît depuis 1930c’est-à-dire de rester 50 ans pour la même entreprise ça n’existeplus. Être loyale à l’entreprise pour moi, c’est de l’être le temps queje suis là. »

Y2

« Je suis loyal quand je travaille pour eux oui. Mais je n’ai pasl’impression que je leur dois plus que les services pour lesquels ilsm’ont engagé. Je n’ai pas l’impression que je dois rester 6 ans poureux justement. […] Je considère que lorsque je travaille pour uneentreprise, j’échange un service contre de l’argent. Pis si j’ai envied’aller ailleurs, je vais aller ailleurs. »

Y3

« Moi, je suis prêt à servir l’entreprise, mais je vais être plus pourregarder ce qu’ils ont à m’offrir dans un présent immédiat. C’estcombien que maintenant vous me donnez en argent et ensuite jevais me donner. »« Je ne crois pas que les employeurs sont loyaux. Quand onregarde les nouvelles, on voit des mises à pied au moindre petitproblème. Juste l’idée des contrats de trois mois dit que l’employeurne veut pas s’engager ».

5.5.2. Analyse des générations et la loyauté5.5.2.1. Les baby boomers et la loyauté

Selon la littérature, durant sa carrière, un boomer aura sacrifié beaucoup

de sa vie personnelle afin de prouver sa loyauté et son engagement

envers l’entreprise (Karp et al., 2002). Ceci nous amène à questionner la

théorie de l’engagement organisationnel avancée par Ketchum et Trist,

(1992), selon laquelle l’engagement est un très bon indicateur de la

qualité de vie au travail. Voyons ce que nos boomers en disent : « Les

conditions de travail étaient quand même difficiles. On travaillait les fins

de semaine, aux Fêtes et des fois, on avait des grandes séries de cinq,

six jours en ligne » (BB3). « J’ai fait beaucoup d’années sans salaire à

plusieurs reprises, alors ce n’est pas tellement ça qui a motivé ma

présence » (BB1). Ces témoignages nous permettent de confirmer que

l’engagement des boomers va bien au-delà des conditions de vie au

travail. « Je sais que je suis salariée, mais on dirait que je me sens plus

que ça en dedans » (BB1). « Le respect fait partie de mon éducation. La

Page 86: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

78

loyauté envers les institutions, je pense que c’est une forme de respect.

Mais c’est vraiment important. » (BB2). Ainsi, on comprend que les

boomers sont fiers d’exercer un travail qui concorde avec leurs valeurs

et que par conséquent, lorsqu’ils s’engagent, ils le font « pour le meilleur

et pour le pire » (Foret et al., 2004). D’ailleurs, ce mariage entre eux et

l’entreprise est un engagement sincère, une fidélité qui se manifeste par

la bonne conduite et le respect des règles. Ce point démontre que chez

les boomers, la loyauté ne se mesure pas uniquement par le nombre

d’années travaillées ou par la préoccupation de se bâtir une solide

réputation dans une même entreprise (Saba 2009), tel que véhiculé dans

la littérature. C’est ce qu’exprime BB3 :

Pour moi, rester 35 ans à la même place, je ne considère pas çacomme être loyale, c’est une question que tu n’as pas le choix y a unseul hôpital dans le coin où tu habites. Ta vie est là ! Et ce n’est pas parloyauté que tu restes, c’est par obligation.

La tendance des témoignages livrés par nos boomers nous conduit à

constater que ceux-ci sont loyaux envers leurs valeurs personnelles et

leurs convictions ou motivations intrinsèques. « Il est clair pour moi que

lorsque nous parlons de loyauté envers l’entreprise, je ne vais pas

penser, je vais faire ce qu’il faut. » (BB1) « La loyauté, pour moi, c’est de

donner les bonnes choses, les bons traitements, les bonnes affaires,

être vraie. C’est d’être loyale envers le client aussi, d’être honnête. »

(BB3)

On sait que le contexte économique marqué par la récession des

années 80-90, au début de leur carrière, crée une incertitude au niveau

des ouvertures d’emplois (Boudreault, 2002). Cependant, malgré cela et

en dépit de leur poids démographique imposant qui accentue la

compétition pour des postes de plus haut niveau (Boudreault, 2002), on

observe que les boomers ne sont pas restés loyaux par simple

obligation : « Si j’avais eu la possibilité de déménager d’hôpital, je ne

l’aurais pas fait parce que j’ai toujours été du type assez loyale » (BB3);

Page 87: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

79

« Quand il est venu le temps de penser j’y vais-tu, j’y vais-tu pas, je me

suis dit; je ne suis pas pour lâcher ma gang, moi là. » (BB2) »

5.5.2.2. Les X et la loyauté

Nos résultats empiriques démontrent que les membres de la génération

X se disent loyaux envers l’entreprise, mais pas de la même façon que

les boomers (MacLaughlin, 2009 et Patterson, 2007). D’ailleurs, notre

étude montre que les X se considèrent comme de forts travailleurs mais

perçoivent le travail comme un moyen pour parvenir à une fin (Cordeniz,

2002). Autrement dit, les X saisissent les opportunités qui se présentent,

et sont loyaux le temps qu’ils séjournent dans l’entreprise. C’est une

loyauté momentanée, que Tulgan (2009 : 12) baptise « just-in-time

loyalty ». Autrement dit, un peu comme les boomers, la loyauté des X se

manifeste par l’honnêteté des gestes posés dans le cadre de leur

fonction. Par contre, les X ne souhaitent pas s’engager à long terme

mais se voient davantage comme étant de passage dans une entreprise.

Pour eux, cette façon de faire est très légitime, et même honnête,

puisque pendant la durée de leur emploi, ils ont démontré de la loyauté à

l’entreprise, par l’exécution consciencieuse des tâches pour lesquelles ils

étaient engagés. D’ailleurs, le fait que les trois répondants nous avouent

qu’ils pourraient regarder ailleurs dans le cas où l’entreprise ne

répondrait plus à leurs besoins professionnels sous-entend que les X

sont davantage loyaux envers eux-mêmes, ce qui soulève une première

différence entre eux et la génération précédente, qui serait restée malgré

tout.

5.5.2.3. Les Y et la loyauté

Les Y, un peu à l’image des X, ne ressentent pas le besoin de se

dévouer corps et âme durant une vie entière à une même entreprise :

« Être loyale à l’entreprise pour moi, c’est de l’être le temps que je suis

là » (Y1). Par contre, même si les Y veulent « aussi » ajouter une corde

à leur arc de connaissances professionnelles, on ressent un plus grand

désir d’engagement envers l’entreprise. C’est ce qui pourrait expliquer

Page 88: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

80

pourquoi ils demandent à ce que la loyauté vienne aussi de l’entreprise.

D’ailleurs, deux de nos trois répondants Y croient que cette distance

manifestée auprès des institutions est causée par le fait qu’aucune

entreprise ne leur a démontré la loyauté qu’ils attendent. Y3 nous fait

part de sa désillusion quant à la loyauté de l’entreprise :

Je ne crois pas que les employeurs sont loyaux […] Juste l’idée descontrats de trois mois dit que l’employeur ne veut pas s’engager […]C’est de dire; je vais m’investir dans votre compagnie, je m’engage àme dévouer… mais à chaque expérience où est-ce qu’on m’a promis dem’engager, je me suis rendu compte que c’était pour te faire performer,pour que tu fasses tes preuves, pour que tu te donnes et ils avaient rienà offrir en bout de ligne.

Ce qui nous amène à conclure que les Y seront plus loyaux envers une

entreprise à condition que celle-ci respecte ses engagements envers ses

employés. D’ailleurs, un des Y mentionne que pour être loyal, il faut faire

confiance à l’entreprise : « La loyauté envers l’entreprise passe par la

confiance envers celle-ci (…) si tu as confiance en l’entreprise, tu risques

de rester plus longtemps » (Y1). Ce qui révèle en quelque part que les Y

seraient plus loyaux si les entreprises démontraient plus d’engagement.

5.6. Résultats et analyses de la dimension de la communication

Dans la prochaine partie de ce chapitre, nous faisons état des résultats

et analyses de notre recherche par rapport à la dimension

communicat ion. Nous transcrivons d’abord les extraits des

témoignages qui nous paraissent particulièrement pertinents quant à

cette dimension.

5.6.1. Résultats des générations par rapport à la dimension de lacommunicationDans le tableau ci-dessous nous relevons les points dominants des

témoignages exprimés par les générations de nos répondants face à la

variable communication.

Page 89: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

81

Tableau 5.6 : Citations significatives des générations en regard avec ladimension de la communication

Citations significatives

BB1

« On essaie d’avoir une communication respectueuse de l’autrepersonne […] Ça veut dire aussi que tout peut se dire et secommuniquer, s’il y a quelque chose qui ne va pas, c’est importantla communication. C’est aussi important pour l’avancement de nosdossiers. C’est-à-dire, s’il me manque de l’information pourcompléter mon travail […]. »« J’ai tendance à vouvoyer les gens de préférence. Je vouvoie toutle monde, peu importe leur âge ou d’où ils viennent. Je considèreque c’est poli et j’ai été élevé comme ça […] Ça peut offusquer lesgens qui sont rendus à une certaine place quand tu dis « tu » et leurprénom tout de suite. »

BB2

« La communication, c’est bien important parce que 1) jecommunique beaucoup et 2) j’aime mieux me faire dire quelquechose lorsque ça ne fonctionne pas, que de l’entendre par enarrière. »« La communication, surtout dans un poste de gestionnaire, parceque lorsqu’il arrive un coup dur, tu ne peux pas aller voir tesemployés, donc tu vas voir tes collègues. « J’aime bien mieux me faire tutoyer par quelqu’un de sincère quede me faire vouvoyer par quelqu’un qui m’envoie promener parderrière. »

BB3

« C’est de dire ce que l’on a à dire et de la bonne façon tout enrespectant l’autre. Admettons qu’avec mon patron, j‘étais assezdirecte. Quand j’avais quelque chose à dire, je le disais. »« Parfois, avec les confrères et consœurs, je refoulais ou jenuançais plus. Il faut que tu parles parfois avec plus de fleurs, desfois, avec des gants blancs et d’autres fois avec des gants stériles. »

Page 90: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

82

X1

« Le moins possible de tabous, de choses cachées, unecommunication efficace dans le temps, c’est-à-dire au momentopportun et de façon continue. Que la communication circule biende façon claire, précise et concise accessible à tous et en touttemps. »« Je pense que dans les entreprises, il y a beaucoup demanipulation et l’information, c’est une manipulation assezpuissante. »« La personne qui passe le balai est aussi importante que lesautres. Il n’y a aucune raison de changer le ton en fonction de lapersonne à qui tu parles. »« Lorsque j’étais jeune et je soumettais un beau document à mapatronne, j’aimais ça qu’elle me le retourne avec des beauxcommentaires. Maintenant je vais faire quelque chose, si j’enn’entends pas parler, c’est parce que c’est bon ou c’est correct. Sij’en entends parler, c’est parce qu’il n’est pas d’accord et il aretrouvé des choses. »

X2

« Des fois, dans les réunions de département, tu ne peux pastoujours dire ce que tu voudrais dire ou le dire comme tu aimerais ledire. La communication n’est pas aussi honnête, parce que tu neveux pas que ça nuise à ton dossier. […] Si tu es en opposition avecquelque chose, tu dois réfléchir à comment tu vas dire les choses.Des fois, tu ne peux pas te permettre d’avoir une opinion surquelque chose. »

X3

« C’est d’avoir une vision d’équipe claire et une vision de groupe.Être au courant de ce qui s’en vient, des projets etc. Il faut que notresupérieur s’informe de ce qu’on fait. Il faut qu’on s’informe à notresupérieur de ce qui s’en vient. »« Même si mon supérieur ne me dit pas " good job ", tu marches outu crèves. Si tu es encore là après un certain temps, c’est parce quetu fais une bonne job […] Je n’ai pas besoin d’avoir cettereconnaissance-là. Je connais ma valeur. »« Pour moi, la communication informelle n’est pas gage d’une bonnecommunication. »

Y1

« Si tu ne peux jamais savoir ce que tu dois savoir, ça ne marchepas. Et si ton boss ne te donne jamais l’information que tu as debesoin, parce qu’il la retient, ça ne marche pas non plus. Si je ne luidonne pas l’information pour me supporter ou pour me faireavancer, ça ne marche pas. Mais une communication tropabondante, ça peut ralentir le processus aussi. »

Page 91: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

83

Y2

« C’est une bonne écoute et un bon feedback parce que ça donneun bon encadrement et ça te dit si tu es dans la bonne direction. […]Peut-être plus au départ lorsque tu rentres dans un nouvelemploi […] Sinon, tu peux travailler super fort sur quelque chose quin’a pas rapport et ça ne sera pas bon et tu vas devoirrecommencer… Autant poser plus de questions au départ. »

Y3« C’est d’avoir une relation informelle reliée au travail, ça permetd’établir de la proximité et de la confiance pour ne pas que ça selimite juste à des rapports formels. »

5.6.2. Analyse des générations par rapport à la communication

5.6.2.1. Les baby boomers et la communication

Les résultats empiriques nous démontrent que les boomers accordent

beaucoup d’importance à la communication. Or, pour nos répondants,

une saine communication réside dans la transparence c’est-à-dire que

« tout peut se dire et se communiquer », nous dit un boomer en

résumant la pensée du groupe. D’ailleurs, même si pour eux, la bonne

communication peut aider à l’avancement des dossiers professionnels,

leurs propos nous ont laissé sentir qu’ils accordaient encore plus

d’importance à la communication interpersonnelle :

On essaie d’avoir une communication respectueuse de l’autrepersonne […] C’est de dire ce que l’on a à dire et de la bonne façon touten respectant l’autre. Ça veut dire que je dois avoir un certain contrôlesur mes émotions, qui ne me permettrait pas de faire une petite crise decolère ou de larmes. (BB1).

Contre toute attente, nos répondants boomers disent ne pas croire à la

communication hiérarchique, caractéristique qui leur est attribuée dans

la littérature. D’un autre côté, BB2 nous laisse supposer le contraire :

« La communication, surtout dans un poste de gestionnaire, parce que

lorsqu’il arrive un coup dur, tu ne peux pas aller voir tes employés, donc

tu vas voir tes collègues.

Page 92: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

84

Ce point nous amène à ouvrir la voie sur le prochain. Selon nos

observations, les boomers semblent accorder beaucoup d’importance

aux règles implicites de la communication, ce qui confirme les

conclusions du mémoire de maîtrise de Boudreault (2002), à savoir que

les boomers sont très politiques. En effet, leurs commentaires sont

éloquents : « Ça m’a pris beaucoup d’années pour comprendre comment

ça marche […] pour comprendre quel genre d’informations étaient

importantes à transmettre […] de bien clarifier mes demandes et de

quelle façon. » (BB1). « Parfois, avec les confrères et consœurs, je

refoulais ou je nuançais plus. Il faut que tu parles parfois avec plus de

fleurs, des fois, avec des gants blancs et d’autres fois avec des gants

stériles. » (BB3)

5.6.2.2. Les X et la communication

Dans le même sens que les boomers, les X semblent soucieux du

dommage que peut créer le « pouvoir de l’information » à leur carrière.

Par exemple, ils doivent choisir de dire ou ne pas dire certaines choses

en raison de l’impact qui pourrait en résulter sur leur avancement

professionnel : « Tu ne peux pas toujours dire ce que tu voudrais dire ou

le dire comme tu aimerais le dire. La communication n’est pas aussi

honnête parce que tu ne veux pas que ça nuise à ton dossier » (X2).

« Je pense que dans les entreprises, il y a beaucoup de manipulation et

l’information, c’est une manipulation assez puissante » (X1). Ainsi, la

communication semble faire l’objet d’une lutte entre le politiquement

correct ou incorrect. D’ailleurs, selon Lawler (1986, cité dans Petit

2008 : 72), « l’information est une source de pouvoir et permet une

meilleure collaboration et coordination au sein de l’organisation », à

condition que celle-ci soit bien utilisée. Par ailleurs, nous n’avons pas été

étonnée de constater que les X n’étaient pas préoccupés par le

développement des relations informelles, mais étaient plutôt sensibles à

la communication tactique : « Être au courant de ce qui s’en vient, des

projets, etc. Il faut que notre supérieur s’informe de ce qu’on fait. Il faut

qu’on s’informe à notre supérieur de ce qui s’en vient » (X3). Selon la

Page 93: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

85

littérature, les X aiment communiquer lorsque nécessaire (Lancaster et

al., 2002). Boudreault (2002 : 86) est aussi d’avis qu’« idéalement, les X

aimeraient pouvoir s’exprimer directement à la haute direction ». Pour

eux, c’est une question de franchise et d’efficacité. « Le moins possible

de tabous, de choses cachées, une communication efficace dans le

temps, c’est-à-dire au moment opportun et de façon continue. », déclare

X1.

Finalement, les X de notre échantillon ne ressentent pas le besoin

d’avoir de rétroaction. Convaincus de leur valeur, ils savent se valoriser

eux-mêmes, comme en témoignent deux de nos répondants : « Même si

mon supérieur ne me dit pas " good job ", tu marches ou tu crèves. Si tu

es encore là après un certain temps, c’est parce que tu fais une bonne

job » (X3). « C’est une chose dont je suis de plus en plus capable, avec

les années d’expérience, de me donner moi-même. Je suis capable de

reconnaître si mon travail est bien ou pas. » (X1).

5.6.2.3. Les Y et la communication

Dans le cas des Y, nous nous rapportons au thème de l’équilibre

puisque pour eux, la communication est une combinaison entre le formel

et l’informel. En effet, on dit que les Y veulent créer des liens avec leurs

employeurs (Saba 2009, Petit, 2008), ce qui pourrait déranger les

boomers qui semblent préférer garder une certaine distance

professionnelle. Cette ouverture aux autres fera en sorte que les Y

seront plus disposés à écouter ce que les supérieurs ont à dire sur leur

travail. En l’occurrence, les Y veulent de la rétroaction, qu’ils considèrent

comme une forme de communication tactique. Pour Tulgan (2009), pour

Patterson (2007), de même que pour Howe et Strauss (2007), ce besoin

peut créer des tensions auprès des membres des autres générations

puisqu’on pourrait les percevoir comme dépendants et incapables de

prendre des initiatives. D’un autre côté, les Y tendent à penser que ce

feedback sert à gagner du temps, comme l’explique Y2 :

Page 94: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

86

Sinon, tu peux travailler super fort sur quelque chose qui n’a pas rapportet ça ne sera pas bon et tu vas devoir recommencer […] Quand tu neposes pas assez de questions ou quand ton boss ne te donne pasassez d’information, tu stagnes.Ceci laisse présager deux choses :

1) les Y sont jeunes et sont moins confiants, donc ils sentent qu’ils

ont besoin d’être encadrés, comme le souligne Y2 : « Peut-être plus

au départ lorsque tu rentres dans un nouvel emploi […] À un moment

donné, c’est sûr que tu prends de l’assurance et que tu n’as plus

besoin. » et 2) les entreprises ne poussent pas les jeunes à user de

leur autonomie de crainte que leur manque d’expérience puissenuire au projet. D’ailleurs, sur ce deuxième point, trois répondants ont

mentionné que les boomers étaient fermés à leurs idées, ce qui nous

laisse croire que les Y n’ont pas l’impression d’avoir le feu complètement

vert pour agir dans leurs tâches au travail. « Qu’on attende de moi les

résultats, mais qu’on ne me dise pas par quel moyen les faire, qu’on me

laisse de l’autonomie […] Je ne m’attends pas à ce que l’on me dise

comment atteindre mes résultats », nous dit Y3. De plus, pour confirmer

ce point, BB3 nous déclare ceci :

J’ai trouvé que les jeunes avaient du potentiel, mais qu’il fallait lesdévelopper. L’expertise des plus âgés, tu peux en refiler aux plusjeunes, mais ils ne sont pas capables de tout absorber ce que tu ascomme connaissances […] Alors tu essaies de leur passer toutel’information possible pour travailler, mais tu t’aperçois qu’à la longue, ilsne font pas les choses comme on leur a montré. Ils prennent ce qu’ilspeuvent.

5.7. Les comportements clés, valeurs et attitudes des troisgénérationsSuite à notre revue de littérature, nous avons dénombré des

comportements clés, valeurs et attitudes propres aux générations à

l’étude (baby boom, X et Y). Nous avons rassemblé ces traits dans un

tableau synthèse, inspiré des écrits de Petit (2008 : 33) et Harvey

(2004 : 37), au chapitre 3 (voir le tableau 3.1). À la lumière de nos

résultats empiriques, certaines de ces caractéristiques inter-

générationnelles ont été développées spontanément par nos sujets.

Page 95: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

87

Or, l’objectif de notre exercice était d’une part de comparer si nos

résultats empiriques concordent avec ce qui se dit dans la littérature et

d’autre part, d’ouvrir la voie sur de nouvelles observations qui pourront

faire l’objet de pistes de réflexion pour des recherches futures. En guise

de conclusion, nous reprenons donc le tableau conceptuel 3.1présenté

au chapitre trois, démontrant les caractéristiques (comportements clés et

attitudes) et les attentes (valeurs, préférences et réticences) envers le

monde du travail, s’expliquant en partie par les influences (Petit, 2008 et

Harvey, 2004) selon les cinq points d’opposition où nous proposons des

confrontations. Les cases grises représentent les caractéristiques qui

furent modifiées ou nuancées suite à l’analyse de nos données

empiriques et les cases blanches sont les caractéristiques qui nous

furent confirmées par nos répondants.

Tableau 5.7: Comportements clés, valeurs et attitudes générationnels

Page 96: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

88

Examinons brièvement nos observations générales en rapport avec

chacune des dimensions étudiées.

Le sens au travailC’est plutôt chez les boomers que nous avons remarqué une différence.

Nos résultats empiriques confirment qu’ils sont dévoués à leur travail,

mais aucun de nos répondants ne nous parle de reconnaissance de son

titre, de promotion ou de gratifications personnelles contrairement à ce

qui est présenté dans la littérature. Nous supposons que ce trait de

personnalité peut aussi être dû au stade de leur carrière, ces personnes,

plus âgées étant près de leur retraite et ayant déjà accompli ce qu’elles

voulaient.

Le rapport à l’institutionDans la littérature, on soulève que les Y sont confiants envers

l’entreprise. Selon nos résultats empiriques, nous constatons plutôt que

les Y aimeraient être confiants, mais pour l’instant, compte tenu de leur

déception face aux organisations, ils sont très cyniques envers

l’entreprise.

Le travail d’équipeTous nos répondants nous ont confirmé spontanément ce qui se dit sur

leurs générations et le travail d’équipe dans la littérature.

La loyautéPour cette variable, nos résultats empiriques révèlent une différence

chez les X. Contrairement à leur représentation dans la littérature, la

loyauté envers la personne ne ressort pas comme caractéristique

dominante. Nous avons plutôt ajouté comme trait dominant la « loyauté

momentanée envers l’entreprise », qui semble faire l’unanimité chez nos

répondants.

Page 97: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

89

La communicationEn ce qui a trait à la variable de la communication, pour les boomers,

seul le formalisme semble être un point qui rejoint la majorité de nos

répondants, soit deux sur trois. Aucun de nos répondants boomers ne

nous parle concrètement de son besoin de parler en personne ou de un

à un tel qu’illustré dans notre tableau. Dans le même sens, les Y ne nous

mentionnent pas non plus leur besoin fondamental de s’exprimer à

travers les nouvelles technologies de l’information.

Les exigences, attentes et valeurs professionnelles des trois générations

maintenant explorées, dans le prochain chapitre, nous en discuterons en

tentant d’une part de les approfondir et d’autre part de déterminer si ces

différences peuvent faire l’objet de conflits intergénérationnels potentiels.

Page 98: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

CHAPITRE 6. Présentation des conflits potentiels et discussion

6.1. Discussion en regard avec les terrains de confrontations

possibles dans une équipe intergénérationnelleDans le chapitre 5, nous avons présenté les données empiriques ayant

trait aux exigences, attentes et valeurs professionnelles des trois

générations à l’étude relativement à cinq concepts issus de la littérature

qui semblaient présenter des discordances générationnelles. Dans le

présent chapitre, nous aimerions approfondir ces observations et voir

quelle pourrait être la nature des confrontations générationnelles

potentielles dans une équipe de travail

6.1.1. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la

variable « sens au travail »6.1.1.1. Conflits potentiels entre les générations baby boom et X en

regard avec la variable du sens au travail

Conflit potentiel n°1 : Les boomers et les X n’ont pas la même

conception de la qualité de vie au travail. Pour les X, les boomers ont

« une vieille mentalité » quant à la flexibilité des horaires et l’équilibre

travail-vie privée. Ainsi, X3 dit : « J’ai des patrons qui veulent que leurs

employés restent travailler au bureau […] c’est une vieille mentalité. Ils

n’ont pas cheminé au niveau du télétravail dans leur tête. » Tel que

démontré dans nos résultats empiriques, dû à la récession des années

80 et 90, les boomers devaient rester compétitifs en acceptant les

conditions de travail imposées par l’entreprise. Rappelons les propos de

BB3 : « Des fois il y avait des conflits et c’est parce que y en a qui

étaient écœurés. Ces gens-là auraient dû partir pour aller ailleurs, mais

ils n’étaient pas capables parce qu’il n’y avait pas d’ouvertures ». Ceci

pourrait expliquer en partie pourquoi les boomers n’acceptent pas que

les autres générations exigent autant de flexibilité des horaires et de

liberté au travail. D’ailleurs, cette différence de perception entre les

boomers et les X se répercute sur le prochain conflit potentiel.

Page 99: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

91

Conflit potentiel n°2 : Les boomers et les X ne s’entendent pas surles mêmes objectifs : carrière dans une même entreprise versus

opportunités dans plusieurs. D’abord, il est vrai que nos résultats

empiriques nous ont permis d’observer que les X sont motivés par les

opportunités de carrière. Ils se sentent en contrôle, savent où ils vont,

assurent leur avancement professionnel et surtout, ils choisissent de

travailler ou non à un endroit. Ainsi, X1 nous déclare : « Je travaille à un

endroit pour des raisons spécifiques. », chose que ses prédécesseurs

n’ont pas voulu faire. Nous supposons donc que compte tenu de leur

contexte professionnel et social modelé selon la philosophie des

générations précédentes, les boomers n’avaient d’autre choix que de se

soumettre aux règles établies par l’entreprise. Leur nombre rendant la

compétition plus féroce, c’est le seul volet de leur vie où leur poids

démographique a joué contre eux, selon Boudreault (2002). Sur ce point,

nous pensons donc que si les boomers avaient pu bénéficier d’une plus

grande flexibilité au niveau des ouvertures, ils auraient possiblement

utilisé leur position de force pour exiger de meilleures conditions au

travail dès leur entrée sur le marché du travail.

6.1.1.2. Conflits potentiels entre les générations baby boom et Y en

regard avec la variable le sens au travail

Conflit potentiel n°1 : Les boomers et les Y n’ont pas les mêmes

motivations sur le marché du travail. Nos résultats empiriques

dévoilent qu’il pourrait y avoir un terrain de confrontation entre les

boomers et les Y en ce qui a trait à leur motivation au travail. Pour Y1,

« la personne qui est en voie de prendre sa retraite est peut-être moins

motivée de faire fonctionner les choses à 300 % ». De plus, les Y de

notre échantillon nous manifestent leur mécontentement devant

l’approche des boomers à leur égard, comme le confirme Y3 : « On veut

tout de suite en prendre sur nos épaules, pis eux autres veulent nous

garder en bas de l’échelle : " regarde le jeune, nous on a monté les

échelons un à un ". » En contrepartie, les boomers ont trouvé que les Y

Page 100: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

92

manquaient d’expérience et voulaient trop rapidement prendre en charge

des responsabilités de grande envergure. En ce sens, BB3 appuie ce

point et avoue que « peut-être les vieux ne tolèrent pas les jeunes qui

n’ont pas d’expérience. Ils deviennent frustrés et ne veulent pas les aider

pis ils ne sont pas ouverts à accueillir les jeunes ».

Conflit potentiel n°2 : Les boomers et les Y n’ont pas la même

conception quant à la qualité de vie au travail. Les différentes valeurs

véhiculées par les boomers et par les Y en matière de qualité de vie au

travail pourraient présenter un terrain de confrontation potentiel entre ces

deux générations. « Oui, j’aime travailler, mais ça ne sera pas à tout

prix », affirme Y1. Nous avons trouvé que ce point pouvait faire l’objet

d’un conflit potentiel puisque les boomers semblaient percevoir les Y

comme n’ayant pas le « cœur à l’ouvrage ». D’ailleurs, BB1 nous avoue

que la qualité de vie au travail fait souvent l’objet de discussion entre les

membres de son équipe étant donné leurs points de vue divergents :

[…] les discussions portent sur celles d’entre nous pour qui les horairessont corrects et celles pour qui c’est difficile d’envisager et pour ellepour qui son horaire c’est de telle heure jusqu’à telle heure et elle quitteà telle heure.

Ce qui laisse sous-entendre qu’il n’y a pas de terrain d’entente dans

l’équipe. Sur ce point, on suppose qu’il y a matière à conflit

intergénérationnel potentiel puisque selon ce que nous avons trouvé

dans nos résultats, cela semble refléter les valeurs générationnelles

concernant la qualité de vie au travail.

6.1.1.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard de la

variable le sens au travail

Conflit potentiel : Les X et les Y n’arrivent pas avec les mêmesconditions économiques sur le marché du travail (économie maladeVS économie en santé). Sur ce point, nous avons observé qu’il pourrait

y avoir une forme de rivalité entre la génération X et la génération Y. En

ce sens, nous avons senti que certains de nos répondants X s’estiment

Page 101: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

93

plus travaillants que leurs collègues de la génération Y. C’est ce

qu’exprime X 2 :

Quand je regarde les gens de mon âge ou un peu plus vieux qui sedisent « c’est sûr que je vais devoir travailler si je veux avoir un bonsalaire » lorsque je regarde les étudiants du premier cycled’aujourd’hui, à comparer à moi quand j’étais au premier cycle, ilsveulent avoir un bon salaire sans travailler le jour et la nuit.

Cette citation ouvre la voie sur le prochain point : les trois répondants de

notre échantillon X nous ont laissé sous-entendre qu’ils consacreraient

plus d’heures au travail si les conditions se pliaient à leur style de vie. En

l’occurrence, même si les X disent prôner une qualité de vie au travail, ils

auront plus de difficulté à fixer leurs limites que les Y, ce qui pourrait

rendre certains membres de la génération X jaloux envers les Y, qui

semblent s’assumer beaucoup plus. En ce sens, Y1 et Y3 semblent

convaincus que les entreprises se doivent d’être plus flexibles en termes

de qualité de vie au travail : « […] Nos valeurs sont tellement différentes

de celles des autres générations et les entreprises ont besoin de se

rendre compte que nos valeurs sont différentes. » (Y1)

6.1.2. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec lavariable « rapport à l’institution »

6.1.2.1. Conflits potentiels entre les générations baby boom et X en

regard avec la variable rapport à l’institution

Conflit potentiel n°1 : Les boomers et les X n’ont pas la mêmeconception de l’autorité (rigidité VS flexibilité). Les X sont unanimes

pour dire que les boomers travaillent dans un cadre beaucoup trop

rigide. D’ailleurs, X2 nous avoue s’être sentie frustrée en début de

carrière puisque que pour plaire à ses patrons, elle devait assurer une

présence physique constante au bureau afin d’être reconnue auprès de

ses patrons :

Les gens regardaient à quelle heure j’arrivais et à quelle heure jesortais. […] Moi, j’aurais aimé partir à 16 h et apporter mon dossier à lamaison. Je ne pouvais pas faire ça. Je ne pouvais même pas penserfaire ça […] c’étaient tous des gens plus vieux que moi et c’étaitimportant de mettre beaucoup d’heures au travail.

Page 102: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

94

Ce terrain de confrontation doit être nuancé puisque nous avons observé

que cette frustration venait seulement de la génération X envers les baby

boomers, puisqu’aucun des boomers de notre échantillon ne nous a

parlé des X. Une explication possible serait que même si les X sont à la

recherche d’une autorité flexible, ils respecteront les cadres rigides

imposés par les boomers sans pour autant toujours le faire par plaisir :

« Alors je vais travailler le nombre d’heures à travailler pour faire la job

pas par plaisir, loin de là, mais je vais le faire. » (X2)

Conflit potentiel n°2 : Les boomers et les X ne perçoivent pas

l’entreprise de la même façon (faire une différence VS indifférence).Nos résultats empiriques montrent qu’il pourrait y avoir une nuance dans

ce conflit potentiel. D’abord, les boomers ressentent le besoin de faire

une différence dans leur milieu de travail (Wesner et Miller, 2008;

Cordeniz, 2002 et Lancaster et al., 2002) : « […] je voulais m’impliquer

dans une cause qui pouvait assurer une transformation sociale » (BB1).

En ce sens, nous appuyons ce terrain de confrontation par deux

suppositions. D’abord, mentionnons que les X vivent sous le poids de la

génération des boomers. Leur génération étant moins nombreuse, les X

doivent accepter ce qui est en place contrairement aux boomers qui, en

raison de leur poids générationnel imposant, ont pu défoncer des

barrières, voire changer des tendances sociales (Boudreault, 2002).

Ensuite, nos résultats empiriques montrent que les boomers resteront

plus longtemps dans une entreprise contrairement aux X qui capitalisent

sur les opportunités. En l’occurrence, les X étant souvent « de passage »

dans une organisation, nous supposons que leur implication de courte

durée en entreprise pourrait être perçue comme de l’indifférence par les

boomers.

Page 103: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

95

6.1.2.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard

avec la variable le rapport à l’institution

Conflit potentiel : Les boomers et les Y n’ont pas la même

perception quant à la hiérarchie (relation hiérarchique VS relationégalitaire). Nos résultats empiriques vont dans le même sens que la

littérature : les Y veulent avoir des relations égalitaires avec tout le

monde, notamment avec leur supérieur. « Ce qui me motive, c’est la

convivialité, l’absence de hiérarchie trop rigide entre le personnel » (Y3).

En l’occurrence, seulement une des trois boomers (BB1) nous dit

franchement qu’elle n’est pas totalement ouverte à cette convivialité :

« C’est "TU" tout de suite ». Tandis que BB2 nous dit que dans son rôle

de gestionnaire, il ne communique jamais les mauvais coups à son

équipe. Cette attitude pourrait être perçue comme une forme de

hiérarchie par les Y, qui prônent une transparence absolue de la part de

leur gestionnaire.

6.1.2.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la

variable le rapport à l’institution

Conflit potentiel : Les X et les Y n’entrent pas sur le marché du

travail avec la même ouverture d’esprit (scepticisme VS idéalisme).Sur ce point, nous avons trouvé que les X et les Y se ressemblaient

beaucoup. « Par expérience, je suis devenu sceptique parce que de plus

en plus, les entreprises se désengagent » (Y3) «La loyauté, c’est

définitivement à sens unique. Même cette entreprise ne fait pas

exception à la règle. Le jour où ils n’ont plus besoin de toi, ils te mettent

à la porte, merci bonsoir ». (X1). D’un autre côté, la tendance de nos

résultats empiriques nous amène à conclure que les Y veulent être

confiants mais que les entreprises, pour la plupart, ne leur ont pas

encore donné l’occasion de croire en elles; ils sont donc devenus

cyniques par la force des choses. Nous appuyons cette supposition avec

le constat suivant. Contrairement aux X qui semblent assumer le côté

noir de l’entreprise, on sent une déception chez les Y : « Il ne faut pas

être naïf, les employeurs ne sont pas tant intéressés par toi » (Y3); « Où

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96

je travaillais avant, ils voyaient leurs employés vraiment comme des

outils. » (Y1) Ce point nous laisse supposer que les X seront plus

endurants que les Y au travail. Au départ, les Y nous semblent plutôt

avoir été idéalistes. Ensuite, conséquemment à diverses expériences de

travail décevantes, ils sont devenus cyniques dans la perception qu’ils

ont des organisations. Cette attitude se répercutera sur leurs attentes et

exigences.

6.1.3. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec lavariable « travail d’équipe »

6.1.3.1. Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard

avec la variable le travail d’équipe

Conflit potentiel : Les boomers et les X ne conçoivent pas le travaild’équipe de la même façon : (l’équipe est un tout VS l’individu faitl’équipe). Les boomers sont reconnus pour accorder une très grande

importance au travail d’équipe (Sirias et al., 2007), mais pas au même

niveau que les X. En effet, pour les boomers, les membres d’une équipe

doivent d’une part être interdépendants et d’autre part adhérer au

consensus (Sirias et al., 2007). « Il faut travailler en équipe parce que

c’est le seul moyen d’y arriver» (BB1). Or le fait que les X préfèrent

contribuer individuellement et non collectivement au groupe, comme le

voudraient les boomers, pourrait être perçu comme un manque de

volonté de créer une synergie d’équipe (Samson, 2005) ce qui, selon

nos observations, pourrait créer des frictions générationnelles.

6.1.3.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard

avec la variable le travail d’équipe

Conflit potentiel : Les boomers et les Y ne conçoivent pas l’équipede la même façon : (consensus VS communauté). Un peu comme les

boomers, les Y recherchent la sociabilité entre les membres d’une

équipe. Par contre, nos résultats empiriques révèlent que les Y

valorisent le respect de l’opinion d’autrui et demandent en retour qu’on

respecte la leur (Samson, 2005). « L’équipe, c’est super important

Page 105: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

97

puisqu’en général tu peux avoir du feedback des membres que tu

n’avais pas pensé au départ ce qui peut être super intéressant », nous

dit Y2. Les boomers, quant à eux, recherchent plutôt un consensus. Un

peu comme nous le décrit un de nos répondants boomers, c’est le

capitaine qui est en charge, donc c’est lui qui décide. « […] s’il y a

quelqu’un de l’équipe qui n’est pas convaincu, qu’il lève la main pis on va

se rasseoir pour en parler […] » (BB2). D’ailleurs pour appuyer ce

postulat, Y2 et Y3 nous avouent avoir senti à quelques reprises un non-

respect de leurs opinions. Ceci rejoint les travaux de Gravett et

Throckmorton (2007).

6.1.3.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la

variable le travail d’équipe

Conflit potentiel : Les X et les Y ne conçoivent pas l’équipe de lamême façon : (collectif VS individualisme). Nos résultats empiriques

confirment que les X sont moins enclins au développement des relations

interpersonnelles dans une équipe de travail, alors que pour les Y, il est

essentiel de créer un renforcement des liens informels entre les

membres d’une équipe. Nous considérons donc que cette caractéristique

peut indéniablement créer un froid avec les Y, puisque les X seront

perçus comme des gens qui ne veulent pas s’engager. Voyons ce que

nos X en disent : « J’aime mieux travailler seule parce que j’ai tendance

à être plus intravertie pis solitaire au travail. Toute seule je suis bien

j’arrive au travail, je ferme la porte de mon bureau et je me concentre sur

mes projets » (X2). « Pour moi, la communication informelle n’est pas

gage d’une bonne communication » (X3). Ces deux commentaires nous

semblent bien refléter la tendance des X à préférer travailler de façon

plus individualiste.

Page 106: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

98

6.1.4. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec lavariable « loyauté »6.1.4.1. Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard

avec la variable la loyauté

Conflit potentiel : Les boomers et les X n’ont pas la mêmeconception de la loyauté (attachement permanent VS attachementtemporaire). Les boomers et les X se rejoignent sur un point : la loyauté

se traduit par l’honnêteté des gestes posés dans le cadre de leurs

fonctions. En contrepartie, à l’inverse des X, les boomers auront une

plus grande propension à rester dans une même entreprise pendant

toute leur carrière (Lancaster, 2002), ce qui est perçu comme une forme

d’attachement à l’organisation. De plus, même si les X affichent un

scepticisme envers l’institution, nous avons été surprise de constater que

deux de nos répondants rapportent avoir un certain sentiment

d’appartenance à l’entreprise : « Je considère l’entreprise comme ma

famille » (X1). « C’est le fun quand on est capable d’avoir un sentiment

d’appartenance envers une entité et d’être fière des valeurs qui sont

propagées par l’entreprise où tu aimes ça arriver le matin parce que tu

aimes la façon que c’est géré » (X2). Cette tendance révèle que les X de

notre échantillon ne sont pas aussi détachés que la littérature le dit. D’un

autre côté, même si les philosophies paraissent se ressembler en termes

de loyauté, l’attachement temporaire des X versus l’engagement à plus

long terme des baby boomers pourrait laisser présager une possibilité de

conflits. Nous appuyons donc les chercheurs qui affirment que le

concept de la loyauté doit être redéfini (Tulgan, 2009; Petit, 2008,

Patterson, 2007; Harvey 2004 et Boudreault, 2002).

6.1.4.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard

avec la variable la loyauté

Conflit potentiel : Les boomers et les Y n’ont pas la mêmeconception de la loyauté : (lifetime employment VS échangetransactionnel). Nos résultats empiriques soulèvent que ce conflit

potentiel doit être nuancé. Un peu comme les X, les Y ne ressentent pas

Page 107: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

99

le besoin de se dévouer toute une vie entière à la même entreprise.

« Être loyale à l’entreprise pour moi, c’est de l’être le temps que je suis

là » (Y1). Pour les boomers, c’est tout le contraire. Comme l’a souligné

BB2 dans nos entrevues, rester dans une même entreprise, y être fidèle

pendant des années, fait partie de l’éducation et de la culture des

boomers.

Or, bien que ces Y veulent « aussi » ajouter une corde à leur arc de

connaissances professionnelles, on ressent un plus grand désir

d’engagement à long terme envers l’entreprise. C’est ce qui pourrait

expliquer pourquoi ils demandent à ce que l’entreprise fasse preuve de

loyauté envers eux. Par contre, même si les Y se voient à plus long

terme que les X dans une entreprise, ils envisagent quand même un

départ éventuel vers d’autres entreprises. Cette philosophie les oppose

aux boomers, qui se voyaient toute une vie dans une seule entreprise :

« […] quand il est venu le temps de penser j’y vais-tu, j’y vais-tu pas, je

me suis dit; je ne suis pas pour lâcher ma gang, moi là » (BB2). En ce

sens, les Y seront loyaux le temps de leur passage, mais ne

demeureront pas fidèles à une unique entreprise toute leur vie comme

les boomers. Ce constat nous conduit à nuancer que les deux

générations sont loyales, mais ne conçoivent pas cette loyauté de la

même façon, ce qui pourrait aboutir à des malentendus, voire à des

conflits.

6.1.4.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la

variable la loyauté

Conflit potentiel : Les X et les Y n’ont pas la même conception de la

loyauté : (engagés VS désengagés). Un des points communs entre les

X et les Y est leur façon de se percevoir comme des contractuels dans

l’entreprise. D’un autre côté, nous avons observé que les X, qui

acceptent davantage cet état de fait, seront plus enclins à changer

d’entreprise, ce qui influencera leur comportement une fois en poste. Or,

nous pensons que l’interprétation qu’en feront les Y pourrait aboutir à de

Page 108: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

100

l’incompréhension et à des conflits. En ce sens, aux yeux des Y, qui

semblent beaucoup plus ouverts à envisager le long terme dans une

même entreprise, les X étant plus convaincus de leur statut de travailleur

autonome paraîtront plus détachés, voire désengagés. C’est d’ailleurs ce

que reflètent les propos de Y1 lorsqu’elle nous déclare :

[…] par exemple le chum de mon amie est seulement motivé par sonsalaire […] il change de job en fonction du salaire qu’il va faire […] C’estsûr qu’une personne comme ça, je vais être en conflit dans le quotidienparce que travailler avec un gars qui est juste motivé par son salaire, çava paraître et ça va faire en sorte que nos objectifs ne seront pas lesmêmes et je vais le sentir.

6.1.5. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec lavariable « communication »

6.1.5.1 Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard

avec la variable la communication

Conflit potentiel : Les boomers et les X ne communiquent pas avecle même langage : (communication politique VS communicationtactique). Selon nos observations, les boomers semblent accorder

beaucoup d’importance aux règles implicites de la communication

interpersonnelle. Les X, quant à eux, plus directs, nous disent vouloir

une franchise et « le moins possible de tabous, de choses cachées »

(X1). En ce sens, certains X semblaient très soucieux du dommage que

pouvait créer le « pouvoir de l’information » sur leur carrière. « Je pense

que dans les entreprises il y a beaucoup de manipulation et l’information,

c’est une manipulation assez puissante » (X1). Ceci nous laisse

supposer que les X seront dérangés par les règles politiques de la

communication, qui semblent chères aux boomers. Nous croyons

également que les X ne communiqueront que de manière tactique, c’est-

à-dire pour éviter de nuire à l’avancement de leur carrière, entre autres.

À cet égard, X2 avoue franchement : «Tu ne peux pas toujours dire ce

que tu voudrais dire ou le dire comme tu aimerais le dire. La

communication n’est pas aussi honnête parce que tu ne veux pas que ça

nuise à ton dossier. »

Page 109: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

101

6.1.5.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard

avec la variable la communication

Conflit potentiel : Les boomers et les Y ne communiquent pas avecle même langage : (hiérarchie VS tout le monde doit être sur lemême pied d’égalité). En ce qui a trait à la communication entre les

boomers et les Y, nous avons observé qu’il y avait matière à

confrontation et ce, à plusieurs niveaux. D’abord, les Y préfèrent

communiquer avec leurs subordonnés et supérieurs sur une base

égalitaire, alors que les boomers semblent vouloir garder une distance.

Pour supporter ce point, un des boomers (BB2) nous dit : « La

communication, surtout dans un poste de gestionnaire, parce que

lorsqu’il arrive un coup dur, tu ne peux pas aller voir tes employés donc

tu vas voir tes collègues. . Y1 nous le confirme d’ailleurs : «C’est de

mettre cartes sur table […] si tu te plantes, tu le sais et tu le sais aussi si

tu t’en vas dans la bonne direction ». De plus, nous supposons que ces

différentes attitudes des boomers dans la relation professionnelle

pourraient être perçues par certains membres de la génération Y comme

un manque de transparence et comme un refus de les aider à

progresser, ce qui pourrait générer de la frustration. Par ailleurs, en

équipe, les Y développeront une idée, ou même un projet, en fonction

des opinions des autres membres de l’équipe, ce qui ne semble pas être

en accord avec les façons de faire de la majorité des boomers de notre

échantillon, pratiquant plutôt un consensus contrôlé (Samson 2005).

« Tout le monde est convaincu qu’on s’en va à Gaspé, pis s’il y a

quelqu’un de l’équipe qui n’est pas convaincu qu’on sen va à Gaspé bien

qu’il lève la main pis qu’il nous le dise pis on va se rasseoir pour en

parler » (BB2). Pour supporter ce point, Y2 et Y3 nous avouent sentir à

quelques reprises un non-respect de leurs opinions, ce qui appuie les

conclusions de Gravett et Throckmorton (2007).

Page 110: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

102

6.1.5.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la

variable de la communication

Conflit potentiel : Les X et les Y ne communiquent pas avec le

même langage : (rétroaction VS rétraction). Pour les Y, la

communication est une combinaison entre le formel et l’informel. Cette

ouverture à la sociabilité (Petit, 2010) fera en sorte que les Y seront plus

disposés à écouter ce que les autres ont à dire sur leur travail. Or, les Y

veulent de la rétroaction, qu’ils considèrent comme une forme de

communication susceptible d’aider à l’avancement des travaux. Pour

Tulgan (2009) et Patterson (2007), ce besoin peut créer des tensions

auprès des autres générations, puisqu’il en résulte qu’on perçoit les Y

comme dépendants et incapables de prendre des initiatives (Howe et

Strauss 2007; Patterson, 2007). D’ailleurs, en ligne avec ce

commentaire, X1 nous mentionne que, plus jeune, il ressentait le besoin

d’avoir de la rétroaction :

Avant, lorsque j’étais jeune et je soumettais un beau document à mapatronne, j’aimais ça qu’elle me le retourne avec des beauxcommentaires. Tandis que maintenant si j’en n’entends pas parler, c’estparce que c’est bon ou c’est correct.Ceci laisse présager deux

choses : 1) les Y sont jeunes et sont moins confiants, donc ils ressentent

le besoin d’être encadrés, ce que Y2 confirme : « Peut-être plus au

départ lorsque tu rentres dans un nouvel emploi […] À un moment

donné, c’est sûr que tu prends de l’assurance et que tu n’as plus

besoin » et 2) les entreprises ne poussent pas les jeunes à user de leur

autonomie parce qu’elles craignent que leur manque d’expérience

puisse nuire au projet. « Qu’on attende de moi les résultats, mais qu’on

ne me dise pas par quel moyen les faire, qu’on me laisse de

l’autonomie […] Je ne m’attends pas à ce que l’on me dise comment

atteindre mes résultats », nous dit Y3. Compte tenu de ces aveux, nous

supposons donc que cette différence pourrait peut-être être reliée à l’âge

et au niveau d’expérience plutôt qu’à la génération.

Page 111: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

103

6.2. Confrontations générationnelles possibles dans une équipeintergénérationnelle

À la lumière de nos résultats empiriques, certaines confrontations

intergénérationnelles furent soulignées spontanément par nos sujets.

Ainsi, il était évident pour tous nos répondants que les différentes

générations n’avaient pas la même vision des choses au travail, ce qui,

selon eux, est à la base des conflits intergénérationnels. « Les

générations sont toutes reliées à certaines valeurs et ça demande une

adaptation » (X2). Pour les boomers :

La génération peut créer des conflits parce que la philosophie desjeunes n’est pas la même que les plus vieux […] Ils n’ont pas la mêmephilosophie, la même vision des choses, les mêmes valeurs ouprincipes que nous parce que c’est une autre génération. (BB3)

Les propos de Y1 vont dans le même sens : « nous n’avons pas la

même réalité […] on n’est pas au même stade de vie. On ne cherche

pas les mêmes choses.»

Or, l’objectif de notre exercice était d’une part de comparer nos résultats

empiriques avec ce qui se dit dans la littérature et d’autre part, d’ouvrir la

voie sur de nouvelles observations qui pourront faire l’objet de pistes de

réflexion pour des recherches futures. En guise de conclusion, nous

reprenons donc le tableau conceptuel 3.2 présenté au chapitre trois,

démontrant les conflits intergénérationnels les plus représentatifs issus

de la littérature, que nous avons ajustés en fonction de nos résultats

empiriques. Les cases grises représentent les confrontations potentielles

qui furent modifiées ou nuancées suite à l’analyse de nos données

empiriques et les cases blanches sont les terrains de confrontations qui

nous ont été confirmés par nos répondants. Enfin, pour représenter

l’équipe, nous avons effectué notre analyse en fonction de la plus petite

unité de groupe existante, soit le couple de deux générations.

Page 112: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

104

Tableau 6.1 : Confrontations générationnelles possibles dans une équipeintergénérationnelle

Comparons brièvement notre revue de littérature et ce que nous avons

constaté sur le terrain pour chacune des variables à l’étude.

Le sens au travailLes résultats empiriques ne soulèvent pas de différence avec ce qui fut

rapporté dans la littérature en ce qui a trait à la variable le sens au

travail. Or, les trois générations nous confirment spontanément ce qui se

dit sur elles à propos du sens au travail.

Page 113: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

105

Le rapport à l’institutionEn ce qui concerne le terrain de confrontation possible entre les

boomers et les X sur le rapport à l’institution, nos résultats empiriques

démontrent que les boomers ne sont pas perçus comme autoritaires tel

que la littérature les décrit. Ils sont plutôt vus par certains X comme étant

rigides. En ce sens, le terrain propose une confrontation entre d’une part,

ce que perçoivent les X par rapport aux boomers, c’est-à-dire qu’ils sont

rigides et d’autre part, la conception que se font les X sur la flexibilité au

travail. Dans la littérature, on soulève également que les Y sont confiants

envers l’entreprise. Selon nos résultats empiriques, nous observons

plutôt un cynisme chez les Y, conséquence de plusieurs déceptions

vécues en entreprise. Nous supposons donc que les Y sont plutôt

idéalistes.

Le travail d’équipe

Les résultats empiriques ne soulèvent pas de différence avec ce qui fut

rapporté dans la littérature en ce qui a trait au travail d’équipe. Or, les

trois générations nous confirment de manière spontanée ce qui se dit sur

eux et le travail d’équipe.

La loyautéCette case fut nuancée suite à l’analyse de nos résultats empiriques. Au

départ, nous avons noté de la littérature qu’il y avait un terrain de

confrontation possible entre l’attachement des boomers et le

détachement des X envers l’entreprise. Nos résultats empiriques

soulèvent que les X ne sont pas détachés, mais plutôt attachés

temporairement.

La communicationEn ce qui a trait à la variable de la communication, pour les boomers,

seul le formalisme semble être un point qui rejoint la majorité de nos

répondants, soit deux sur trois. Ce point semble se répercuter sur leur

manière de s’exprimer et selon la perception de nos répondants X, cette

Page 114: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

106

attitude s’apparenterait à une communication politique. En ce sens, nous

supposons donc que les X communiquent de manière tactique, voire

stratégique, plutôt que librement comme nous l’avions inscrit dans notre

premier tableau, puisqu’ils sont unanimes pour dire qu’ils agissent ou

communiquent d’une certaine façon pour plaire ou ne pas déplaire à la

génération du baby boom.

En ce qui a trait au couple baby boomers et Y, contrairement à ce qui fut

rapporté dans la littérature, nos résultats empiriques ne soulèvent pas de

terrain de confrontation possible entre la communication traditionaliste

des boomers et la propension des Y à utiliser les nouvelles technologies

de l’information pour discuter.

Les confrontations potentielles entre les trois générations maintenant

explorées, la prochaine partie de ce chapitre passera en revue ce que

ces conflits représentent en termes de défis potentiels pour le monde de

la gestion.

6.3. Les gestionnaires et les différences intergénérationnellesNos résultats empiriques nous permettent d’affirmer sans l’ombre d’un

doute qu’il existe des différences entre les générations. D’ailleurs, selon

la littérature, la disparité entre les générations en entreprise pourrait

représenter une menace encore plus importante que les contrastes

reliés à la culture, à la différence des sexes, à l’ethnicité et à la religion

(Zemke et al., 2000 ; Lancaster et al., 2002). Il est donc primordial que le

gestionnaire mette à profit chacune des forces générationnelles afin de

bien faire fonctionner une équipe comportant plusieurs générations

(Tulgan 2006; Zemke et al., 2006 et Lancaster et al., 2002). Au départ,

l’objectif de notre recherche n’était pas de valider comment les

gestionnaires réagissaient face aux conflits intergénérationnels dans une

équipe composée de plusieurs générations. Cependant, au fil des

entrevues, nous avons récolté quelques éléments au sujet des stratégies

utilisées par les gestionnaires face à ce genre de situation, car dans

Page 115: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

107

notre échantillon, il y avait trois gestionnaires membres des générations

du baby boom, X et Y. La prochaine partie de ce chapitre vous sera

présentée en deux temps. D’abord, nous mettrons de l’avant les profils

de ces gestionnaires; ensuite, nous exposerons les résultats et analyses

des solutions qu’ils adoptent face aux conflits dans les équipes

intergénérationnelles et dont ils nous ont fait part lors des entrevues.

6.4. Portrait sommaire des gestionnairesParmi les trois gestionnaires interrogés, deux répondants sont de sexe

masculin. Un des participants est membre de la génération du baby

boom et œuvre comme directeur général dans une succursale de

commerce en gros. Celui-ci a sous sa responsabilité une cinquantaine

d’employés, dont sept gestionnaires appartenant aux trois générations à

l’étude, soit baby boom, X et Y. Le deuxième gestionnaire, membre de la

génération X, œuvre pour sa part dans le domaine publicitaire et a sous

son aile trois personnes, dont deux gestionnaires de la génération Y et

une superviseure issue du baby boom. Enfin, la dernière gestionnaire

interviewée, membre de la génération Y, n’a pas d’équipe fixe à sa

charge. Gestionnaire de projets, elle est appelée à diriger différentes

équipes, souvent composées de ressources professionnelles variées et

ce, selon les exigences du projet.

Tableau 6.2 : Caractéristiques des gestionnaires rencontrés

Répondants Date denaissance

Âge Sexe Fonction Domaine

BB2 11 mars 1961 49 HOMME Directeur général Commerce au détail

X119 novembre

197534 HOMME Gestionnaire d’équipe Publicitaire

Y1 14 mars 1981 29 FEMME Gestionnaire de projet Télécommunications

Page 116: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

108

6.5. Solutions potentielles apportées par les gestionnaires face auxconflits intergénérationnels

Les différences intergénérationnelles posent des défis aux gestionnaires

qui doivent les affronter. Malgré ça, nous avons été surprise d’observer

que les gestionnaires de notre échantillon ne parlent pas en termes de

gestion intergénérationnelle, mais plutôt dans une perspective

générationnelle. Autrement dit, un peu comme le conclut Boudreault

(2002) dans son mémoire de maîtrise, nos gestionnaires semblent

pratiquer une gestion qui concorde avec leur personnalité

générationnelle. En ce sens, nous ne pouvons supposer que le fait de ne

pas tenir compte des différences intergénérationnelles lorsqu’ils

pratiquent leur gestion est relié au fait qu’ils ne sont pas conscients de

cette problématique. Nous pouvons tout simplement avancer que rien ne

fut rapporté spontanément à ce sujet.

Par ailleurs, le gestionnaire boomer se sent plus à l’aise à faire de la

micro-gestion, pour lui, le conflit c’est plutôt une guerre de pouvoir : « Un

conflit, c’est toujours une personne qui essaie d’en dominer une autre.

C’est toujours un dominant-dominé, un conflit » (BB2). Or, pour ce

gestionnaire, la meilleure façon de gérer ces conflits, c’est d’identifier la

source du problème : « S’il y a un conflit, il faut savoir d’où il vient et c’est

quoi la raison ». Une fois la source du problème trouvée, il s’agit de

donner une ligne directrice claire. « Pour éviter les conflits, il faut avoir

des lignes directrices claires et ça évite beaucoup de conflits à ce

moment-là ». D’ailleurs, il nous mentionne que dans un conflit, les deux

parties ne peuvent gagner : « c’est sûr qu’il va y avoir un gagnant et un

perdant […] C’est d’expliquer à celui qui gagne pourquoi il a gagné et à

celui qui perd, pourquoi il a perdu ». D’ailleurs, il impute ces conflits à un

manque de direction ou de fermeté de la part du gestionnaire. Nous

pouvons relier cette façon de gérer à la personnalité de la génération du

baby boom, puisque dans la littérature, les boomers sont reconnus pour

leur besoin d’exercer un certain contrôle sur ce qui se passe dans leur

Page 117: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

109

équipe. Nous pouvons donc relier cette façon de faire à de la micro-

gestion (Samson, 2005).

Sur ce point, le gestionnaire X utilise, quant à lui, une méthode un peu

plus évasive. Il se dit mal à l’aise devant les situations de conflits qui

peuvent se présenter de temps à autre : « Ça me met un peu mal à

l’aise. Dans ma tête à moi, je suis plus un stratège, un motivateur,

quelqu’un qui réunit versus quelqu’un qui règle des conflits. » (X1)

Lorsque la situation se présente, ce gestionnaire optera plutôt pour la

stratégie de l’écoute active. Il tentera de trouver les points positifs de

chaque partie aux prises avec le conflit pour tenter d’en tirer un bénéfice

pour tous. « Bien souvent, j’écoute les deux parties et bien souvent je

trouve que les deux se valent […] Je ne peux pas dire que je suis un

gestionnaire de conflits exceptionnel ». Nous pouvons relier cette façon

de gérer à la personnalité de la génération X puisque la littérature décrit

ces personnes comme étant une génération qui ne cherche pas

nécessairement le consensus : elles veulent simplement que chacun

respecte les opinions de l’autre. « Les autres ont le droit de penser

autrement qu’eux, pour autant que leur propre point de vue soit

respecté. » (Samson, 2005 : 51) Ceci pourrait expliquer le comportement

neutre du gestionnaire X face à la gestion de conflits : il trouve que

chacun a le droit de penser ce qu’il veut. De ce fait, on comprend

pourquoi il ne semble pas vouloir prendre position dans un cas de conflit.

Pour sa part, la gestionnaire Y préfère confronter son équipe et garder

une transparence au niveau de sa communication. « […] si tu te plantes,

tu le sais et tu le sais aussi si tu t’en vas dans la bonne direction », nous

dit-elle. D’ailleurs, elle croit que les conflits découlent d’un manque de

communication entre les gens :

C’est de mettre cartes sur table, valoriser les bons coups… Lorsqu’il ades fleurs, je leur en donne. […] C’est certain que je vais te dire tesquatre vérités même si c’est négatif, mais je vais t’aider à trouver dessolutions pour qu’on puisse travailler ensemble et que ça marche (Y1).

Page 118: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

110

Elle mentionne également qu’une saine gestion de conflits consiste à

agir en partenaire ou en collaborateur. Ne croyant pas à la distinction

hiérarchique, elle trouve inutile de se distancer de ses employés. « Ils

savent que je les traite plus comme des partenaires qu’autre chose. Je

vais m’asseoir avec eux. Je vais en pelleter de la neige, s’il faut en

pelleter. » Nous pouvons relier cette façon de gérer à la personnalité de

la génération Y puisque dans la littérature, les Y sont reconnus pour

préférer les relations égalitaires et la transparence dans la

communication (Alch, 2008; Dunlin, 2008; Petit, 2008; Tapscott, 2009).

6.6. Les défis de gestion face au phénomène des équipes

intergénérationnellesMême si de la littérature se dégage le fait que l’arrimage des trois

générations apporte son lot de défis au monde de la gestion, le discours

des gestionnaires de notre échantillon révèlent qu’ils ne semblent pas

être conscients ou sensibilisés au besoin d’adapter leurs approches de

gestion en fonction des générations (Zemke et al., 2000). Cette

constatation est en accord avec ce qui se dit dans la littérature, à savoir

que la diversité en entreprise est plutôt considérée comme étant reliée

aux genres, à la race, à l’ethnicité, à la culture ou même à la religion

(Zemke et al., 2000). Donc, nous ne pouvons que proposer que le défi

reviendra aux gestionnaires de réviser leurs stratégies de mobilisation

car « ce n’est qu’une question de temps avant que le clivage s’installe

entre ces générations » (Audet, 2004 : 25), ce qui pourrait aller jusqu’à

affecter la productivité globale d’une organisation (Zemke et al., 2000).

Cette problématique ne semble pas préoccuper les gestionnaires de

notre échantillon présentement.

Dans la première partie de ce chapitre, basé sur nos résultats

empiriques, nous avons conclu que des conflits potentiels pouvaient

exister entre les générations. Dans la section précédente, nous avons

trouvé que les gestionnaires de notre échantillon ne semblaient pas

préoccupés par la variable générationnelle dans leurs stratégies de

Page 119: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

111

gestion, mais qu’ils pratiquaient une gestion plutôt teintée de la

personnalité de leur génération (Boudreault, 2002). Les stratégies de

gestion face aux générations que nous avons identifiées dans les

entrevues avec nos trois gestionnaires maintenant explorées, nous

présenterons nos conclusions sur cette recherche dans le chapitre

suivant.

Page 120: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

CHAPITRE 7. Conclusion

L’objectif de cette recherche était d’identifier un certain nombre de

conflits intergénérationnels potentiels basés sur cinq points d’opposition

qui ressortaient systématiquement dans la littérature, soit : 1) le sens autravail, 2) le rapport à l’institution, 3) la place du travail d’équipe, 4)la loyauté envers l’entreprise, et 5) le style de communicationdésiré. Ensuite, nous voulions étudier comment ces conflits pouvaient se

manifester dans les relations au travail et modifier les comportements

des membres d’une équipe dite intergénérationnelle. Dans cette optique,

nous avons défini une question de recherche permettant de traduire cet

objectif : « Quelles sont les différences intergénérationnelles qui

existent dans un contexte de travail et quels sont les conflitspotentiels générés par ces différences? »

La contribution de notre recherche est multiple. D’abord, nous nous

sommes démarquée du premier scénario de recherche se rapprochant

de notre canevas d’étude, celui-ci étant de démystifier les différences

intergénérationnelles en nous basant sur des variables d’analyse

prédéfinies. Nous avons trouvé ce modèle de recherche incomplet,

puisqu’il ne nous permettait pas de savoir si ces différences étaient

sources de conflits intergénérationnels potentiels. Ensuite, nous nous

sommes distinguée du deuxième modèle de recherche, qui était de

proposer des conflits intergénérationnels basés sur des stéréotypes

générationnels dominants, mais non fondés sur des variables d’analyse

prédéfinies comme dans le cas du premier canevas d’étude mentionné

plus haut. Enfin, l’originalité de notre étude vient du fait que nous l’avons

fondée sur des variables que nous avons approfondies en interrogeant

des sujets répondant à des critères de recherche très précis.

Page 121: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

113

À la lumière de nos résultats empiriques, nous avons trouvé qu’il y avait

des différences intergénérationnelles et que ces dissemblances

pouvaient modifier les relations au travail. Notre constat s’apparente aux

conclusions de Boudreault (2002 : 217), dans une étude portée sur les

générations : « ces individus doivent être amenés à comprendre que les

membres d’une même génération partagent un soi générationnel

commun et que celui-ci est unique à chaque génération. » En nous

basant sur nos résultats empiriques, nous observons donc que

l’intergénérationnel est un fait très réel et, selon la littérature, un

phénomène croissant. Mentionnons que nos résultats empiriques

révèlent aussi que des conflits intergénérationnels potentiels existent,

mais que les gestionnaires de notre échantillon ne semblent pas en tenir

compte dans leur stratégie de gestion. Or, selon ces conclusions, nous

croyons que ce phénomène doit être géré activement, afin de profiter

des apports des différentes générations – de profiter des différents

points de vue, au lieu de les laisser dégénérer en conflits

dysfonctionnels. D’ailleurs, selon une étude faite par Dominiguez en

2003, encore une majorité d’organisations ne tiennent pas compte de

ces différences générationnelles, ce qui pourrait entraîner des

conséquences désastreuses sur la productivité d’une entreprise. « The

impact of generational preference does exist in the workplace, whether it

is rooted in empirical data or a product of the popular media. » (cité dans

Crumpacker et Crumpacker, 2007 : 312)

En ce qui concerne la gestion de la diversité générationnelle en

organisation, même si ce n’était pas notre objectif de départ, nous avons

eu l’opportunité de nous pencher sur les pratiques préconisées par trois

gestionnaires, représentant chacun une des trois générations à l’étude,

face aux équipes intergénérationnelles. En termes de gestion des

générations, nos résultats révèlent que les styles de gestion de ces trois

personnes reflètent leur personnalité générationnelle, ce qui rejoint les

conclusions de Boudreault (2002). Dans l’ensemble, nos résultats

empiriques vont dans le même sens que la littérature; le boomer se sent

Page 122: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

114

mieux à faire de la micro-gestion (Samson 2005), caractéristique avec

laquelle nous le présentons dans la littérature et dans nos résultats

empiriques. Nous avons également observé que le gestionnaire X, utilise

une méthode plus évasive ce qui, selon nous, semble se rapprocher

d’une forme d’indifférence, trait de caractère avec lequel nous

présentons la génération des X dans la littérature et dans nos résultats

empiriques. Quant à elle, la gestionnaire Y préfère provoquer une

confrontation directe tout en agissant en tant que partenaire et non

comme supérieure hiérarchique. Cette attitude semble être un trait de

personnalité propre à la génération Y, qui se considère sur un pied

d’égalité avec tous les membres de son équipe, y compris son supérieur

(Petit, 2010).

D’ailleurs, dans son mémoire de maîtrise, Boudreault (2002 :217)

abonde dans le même sens que nous en concluant que les gestionnaires

devront assumer que la neutralité générationnelle n’existe pas. Pour elle,

il est primordial de prendre ce facteur en considération en tentant

d’adapter leur mode de gestion en fonction des membres de son

équipe :

Les membres de l’organisation doivent être sensibilisés à la réalitédémographique, ce qui implique une prise de conscience, par l’individu,de son identité générationnelle et de quelle manière celle-ci peuinfluencer le mode de gestion.

Malgré ses apports, notre recherche comporte aussi ses limites. Parmi

celles que nous avons notées, voici les principales. Premièrement,

l’objectif de cette recherche visait à analyser les différences

intergénérationnelles possibles; nous n’avons donc pas pris en compte

les similitudes qui pouvaient exister d’une génération à l’autre. De plus,

Biggs, (2005, cité dans Grenier, 2007) a avancé que l’âge du chercheur

pouvait constituer un problème, surtout lorsqu’il s’avérait être plus jeune

que certains des répondants, ce qui fut notre cas. Ensuite, l’expérience

des gestionnaires d’équipe n’est pas équivalente, ce qui pourrait résulter

en une différence dans leur stratégie de gestion. D’ailleurs, une autre

Page 123: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

115

limite est que ces gestionnaires n’ont pas le même nombre de

personnes sous leurs ordres. En l’occurrence, seulement un des trois

gestionnaires dirige une combinaison des trois générations, ce qui peut

avoir un effet sur leur manière de percevoir ou même de gérer les

équipes intergénérationnelles. Une autre limite est liée au fait que nous

n’avons pas cherché explicitement à savoir si les personnes

interviewées faisaient partie d’une équipe comportant plusieurs

générations. Ainsi, les conflits soulevés au chapitre précédent sont donc

basés sur les perceptions rapportées dans nos résultats empiriques.

Finalement, comme nous l’avons mentionné, ceci est une étude

exploratoire; de ce fait, nous ne pouvons donc généraliser nos résultats

de cette recherche. En ce sens, il serait intéressant d’approfondir cette

étude à partir d’un échantillon plus grand, et avec des équipes

comportant un mélange des trois générations, afin de valider si les

résultats empiriques de cette recherche concernant les différences

intergénérationnelles ainsi que les conflits potentiels sont applicables ou

non. De même, il serait intéressant d’étudier plus spécifiquement les

solutions apportées par les gestionnaires pour contrer les conflits

intergénérationnels dans une équipe comportant plusieurs générations.

Or, dans cette présente recherche, nous avons validé des éléments déjà

existants dans la littérature reliée à notre sujet d’étude. La cohabitation

intergénérationnelle dans les équipes, de même que les conflits et les

défis qu’elle apporte, préoccupent les personnes de notre échantillon,

puisqu’elles en ont parlé de façon spontanée et ce, dans toutes les

industries ou organisations représentées dans notre échantillon de

recherche. Par contre, nos résultats empiriques ont pu nuancer une

partie de cette littérature. Par exemple, certains conflits qui nous étaient

présentés dans la littérature n’étaient pas concrètement vécus comme

un conflit intergénérationnel, mais plutôt comme la perception d’une

g é n é r a t i o n e n v e r s u n e a u t r e .

Page 124: ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES AFFILIÉE À L

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Annexe A - Guide de l’entrevue

Titre de la recherche :La gestion des équipes intergénérationnelles

Identification des membres de l’équipe de recherche :

Chercheuse principale : Mélodie Desrosiers, étudiante à la maîtrise en sciencesde la gestion (M.sc., option Management), [email protected]

Directrice du mémoire : Veronika Kisfalvi, professeure titulaire, 514 [email protected]

Personne rencontrée : ____________________________________________

Date : _________________________________________________________

Lieu : _________________________________________________________

Éléments Questions

Le sens au travail• Qu’est-ce qui vous motive au travail?• Qu’est-ce qui vous démotive au travail?

Le rapport à l’institution• Comment percevez-vous le monde du travail, les

entreprises…?• Pourquoi travaillez-vous (obligation, progression)?

La place du travaild’équipe

• Qu’est-ce que le travail d’équipe pour vous?• Préférez-vous travailler seul(e) ou en équipe? Pourquoi?• Parlez-moi d’une expérience de conflit que vous avez eue

avec un de vos coéquipiers.

La loyauté• Qu’est-ce que la loyauté envers son travail, pour vous?• Est-ce que vous vous considérez comme loyal envers

votre travail?

La communication• Qu’est-ce qu’une bonne communication pour vous?• Qu’est-ce qu’une moins bonne communication pour vous?

Génération

• Pensez-vous qu’il y a des raisons qui expliquent lesdifficultés ou les défis que vous vivez au quotidien avecvotre équipe?

• Pensez-vous que la génération joue en termes dedifférences dans votre équipe?

• Aimeriez-vous ajouter quelque chose?

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Annexe B -Formulaire de consentement à une entrevue

1. Renseignements sur le projet de recherche

Vous avez été approché ou approchée pour participer au projet de recherche suivant :

La gestion des équipes intergénérationnelles.

Ce projet est réalisé par Mélodie Desrosiers qui étudie à la maîtrise à HEC Montréal et

que vous pouvez joindre par courriel à l’adresse suivante : [email protected].

Ce projet est réalisé sous la supervision de la professeure Veronika Kisfalvi, que vous

pouvez joindre par téléphone au 514 340-6360 ou par courriel à l’adresse suivante :

[email protected].

Votre participation à ce projet de recherche doit être totalement volontaire. Vous

pouvez refuser de répondre à l’une ou l’autre des questions. Il est aussi entendu que

vous pouvez demander de mettre un terme à la rencontre, ce qui interdira à la

chercheuse d'utiliser l'information recueillie. Un résumé de ce projet de recherche se

trouve à la fin de ce document. Pour toute question en matière d'éthique, vous pouvez

communiquer avec le secrétariat de ce comité au (514) 340-7182 ou par courriel à

[email protected]. N’hésitez pas à poser à la chercheuse toutes les questions que vous

jugerez pertinentes.

2. Confidentialité des renseignements personnels obtenus

Vous devez vous sentir libre de répondre franchement aux questions qui vous serontposées. La chercheuse, de même que tous les autres membres de l’équipe derecherche, le cas échéant, s’engagent à protéger les renseignements personnelsobtenus de la manière suivante :

A. En assurant la protection et la sécurité des données recueillies auprès desparticipants ou participantes et à conserver leurs enregistrements dans un lieusécuritaire;

B. En ne discutant des renseignements confidentiels obtenus auprès des participantsou participantes qu’avec les membres de l’équipe;

C. En n’utilisant pas les données recueillies dans le cadre de ce projet à d'autres finsque celles prévues, à moins qu'elles ne soient approuvées par le Comité d'éthiquede recherche de HEC Montréal. Notez que votre approbation à participer à ceprojet de recherche équivaut à votre approbation pour l’utilisation de ces donnéespour des projets futurs qui pourraient être approuvés par le Comité d’éthique derecherche de HEC Montréal;

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D. En n’utilisant pas, de quelque manière que ce soit, les données ou renseignementsqu’un participant ou une participante aura explicitement demandé d'exclure del'ensemble des données recueillies.

Toutes les personnes pouvant avoir accès au contenu de votre entrevue de même quela personne responsable d’effectuer la transcription de l'entrevue, ont signé unengagement de confidentialité.

3. Protection des renseignements personnels lors de la publication desrésultats

Les renseignements que vous avez confiés seront utilisés pour la préparation d’un

document qui sera rendu public. Les informations brutes resteront confidentielles, mais

le chercheur utilisera ces informations pour son projet de publication.

® J’accepte de participer à cette recherche sachant que mon nom et mafonction n’apparaîtront pas lors de la diffusion des résultats de la recherche.

Si vous cochez cette case, aucune information relative à votre nom ou à votre fonctionne sera divulguée lors de la diffusion des résultats de la recherche. De plus, les nomsutilisés lors de la retranscription des données seront fictifs. Aucune informationpermettant d’identifier les organisations mentionnées durant cette entrevue ne seradévoilée. Par conséquent, vous pourrez compter sur la protection de votre anonymat.

_____________________________________________________________________

Le comité d’éthique de la recherche de HEC Montréal a statué que la collecte dedonnées liée à la présente étude satisfait aux normes éthiques en recherche auprèsdes êtres humains.

Signature du participant :

Prénom et nom du participant à l’entrevue :_________________________________________________

Signature du participant : _______________________________ Date (jj/mm/aaaa) :_______________

Signature du chercheur :

Prénom et nom de la chercheuse : Mélodie Desrosiers

Signature de la chercheuse : Mélodie Desrosiers 10/02/2010