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Page 1 Conséquences macroéconomiques de la « sortie du nucléaire » : Evaluation des scénarios de l’UFE à l’aide du modèle NEMESIS. Baptiste Boitier 1 , Lionel Lemiale 2 , Arnaud Fougeyrollas 3 , Pierre Le Mouël 4 et Paul Zagamé 5 Document de Travail SeurecoErasme n°1/12 Janvier 2012 1 Ecole Centrale Paris et SEURECOERASME 2 Université de Nantes et SEURECOERASME 3 Ecole Centrale Paris et SEURECOERASME 4 SEURECOERASME 5 SEURECOERASME et Centre d’Analyse Stratégique

Conséquences macroéconomiques de la « sortie du …archives.strategie.gouv.fr/cas/system/files/erasme_commission... · Page 3 Hypothèses L’objet de cette section est de présenter

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Conséquences macroéconomiques de la « sortie du nucléaire » : Evaluation des scénarios de l’UFE à l’aide du modèle NEMESIS.  

Baptiste Boitier1, Lionel Lemiale2, Arnaud Fougeyrollas3, Pierre Le Mouël4 et Paul Zagamé5 

 

Document de Travail Seureco‐Erasme n°1/12 

 

Janvier  2012 

                                                            1 Ecole Centrale Paris et SEURECO‐ERASME 2 Université de Nantes et SEURECO‐ERASME 3 Ecole Centrale Paris et SEURECO‐ERASME 4 SEURECO‐ERASME 5 SEURECO‐ERASME et Centre d’Analyse Stratégique 

 

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Introduction  

Cet  exercice,  réalisé  par  l'Equipe  ERASME6  à  l'aide  du modèle NEMESIS,  se  propose  d'évaluer  les 

conséquences  macroéconomiques,  notamment  en  termes  de  PIB  et  d'emploi,  pour  l'économie 

française de la sortie plus ou moins rapide de la production d'électricité d'origine nucléaire. Les coûts 

économiques d’une  telle  stratégie ont déjà  fait  l’objet de plusieurs évaluations, par exemple  l’UFE 

(UFE 2011), négaWatt  (négaWatt 2011) ou encore Dessus et Laponche  (Dessus et Laponche 2011) 

mais  l’analyse  des  conséquences  économiques  se  limitent  au  secteur  électrique  (investissements, 

impacts sur  les prix de  l’électricité, etc.). Aucune évaluation des conséquences macroéconomiques 

n’a encore été réalisée, même si de nombreux chiffres, plus ou moins réalistes, ont été avancés. 

L’intérêt  de  notre  étude  réside  dans  le  fait  qu’elle  prend  en  compte  les  interactions 

macroéconomiques  d’une  modification  du  mix  électrique.  Celles‐ci  sont  de  plusieurs  ordres : 

réponses  des  agents  économiques  à  une modification  du  prix  de  l’électricité,  conséquences  sur 

l’activité  sectorielle  des  investissements  dans  les  technologies  alternatives  de  production 

d’électricité. 

Pour ce  faire, nous nous basons sur  l'étude réalisée par  l'UFE7  (UFE 2011) qui a quantifié plusieurs 

scénarios  de  mix  électrique  à  l'horizon  2030.  Tous  ces  scénarios  stipulent  que  le  moyen  de 

production d'électricité le moins cher à l'horizon 2030 est le prolongement du parc nucléaire français 

actuel  (estimé  à  46€/MWh  par  EDF).  Il  en  ressort  que  toute  autre  stratégie  de  production 

d’électricité est plus coûteuse, même en prenant en compte les interactions sectorielles. Cet exercice 

ne  vise  donc  pas  à  calculer  si  la  sortie  de  l'électricité  d'origine  nucléaire  peut  être  ou  non 

avantageuse mais  à  évaluer  le  coût  économique d'un  choix  sociétale  et/ou politique de  sortie de 

l'électricité d'origine nucléaire. En effet,  suite à  l'accident de  Fukushima,  il  convient d’évaluer des 

scénarios  alternatifs  de  production  d’électricité  dans  la mesure  où,  le  risque  lié  à  la  production 

d'électricité  d'origine  nucléaire,  même  très  sérieusement  estimé,  peut  ne  pas,  ou  ne  plus  être 

accepté, par la société, comme cela a été le cas en Allemagne, et comme cela risque de se produire 

un peu partout dans le monde. 

 

La première section de cette note présentera  la méthodologie adoptée pour cette évaluation. Nous 

présenterons  ensuite  les  résultats  en  distinguant  les  conséquences  sur  le  secteur  électrique  des 

conséquences macroéconomiques. 

                                                            6www.erasme‐team.eu 7Union  Française  de  l'Electricité  (www.ufe‐electricite.fr).  Les  auteurs  tiennent  à  remercier  très chaleureusement  l'UFE  et  notamment  Jean‐Jacques NIEUVIAERT  et  Hélène  PIERRE  pour  leur  collaboration. Néanmoins,  les auteurs tiennent à préciser que  l'évaluation des scénarios UFE, présentée dans ce document, n'engage qu'eux‐mêmes, et dans aucune mesure l'UFE. 

 

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Hypothèses  

L’objet  de  cette  section  est  de  présenter  la  méthodologie  adoptée  dans  cette  étude.  Nous 

présentons  tout d’abord  les  chiffrages de  l’UFE pour  les différents  scénarios puis  la manière dont 

nous les avons intégrés dans le modèle NEMESIS. 

Les trois scénarios de mix électrique à l’horizon 2030 définis par l’UFE sont les suivants : 

(1) un premier scénario  (S70) dans  lequel  les centrales nucléaires actuelles sont prolongées ce 

qui permet de maintenir la part de la production d'électricité d'origine nucléaire à 70% ; 

(2) un  second  scénario  (S50) dans  lequel  les  centrales nucléaires actuelles ne  sont pas  toutes 

renouvelées aboutissant à une part du nucléaire de 50% en 2030 ; 

(3) un  dernier  scénario  (S20)  dit  de  « sortie  du  nucléaire »  dans  lequel  la  part  de  cette 

technologie dans  la production d'électricité n’est plus que de  20%  à  l’horizon 2030,  cette 

réduction étant obtenu par un déclassement systématique des centrales atteignant 40 ans.  

Dans  chacun  de  ces  scénarios,  la  réduction  de  la  part  du  nucléaire  est  compensée  par  des 

investissements dans  les moyens alternatifs de production  (notamment renouvelables et gaz) mais 

aussi  par  une  réduction  de  la  production  globale  d’électricité  et.  Par  ailleurs,  deux  EPR  (dont 

Flamanville) sont mis en service en 2015 dans tous les scénarios. 

La Figure 1 présente la production d’électricité par technologie dans les différents scénarios de l’UFE. 

On remarque qu’une partie de la réduction de la production d’origine nucléaire n’est pas compensée 

se  traduisant  par  une  réduction  de  la  production  totale.  Dans  le  scénario  20%,  la  production 

d’électricité  diminue  d’environ  18%  à  l’horizon  2030.  Concernant  la  production  par  source,  la 

réduction  de  la  part  du  nucléaire  est  compensée  par  la  production  d’origine  éolienne  et 

photovoltaïque  (+49  GWh)  et  surtout  par  un  accroissement  de  la  production  thermique  et  en 

particulier à partir du charbon et du gaz (respectivement +46 GWh et +115 GWh). 

 

 

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Figure 1: Production d'électricité par source en 2030 (en TWh) 

 

Source : UFE 

 

Les montants d’investissement8 nécessaires en moyens productifs sont évalués respectivement à  

117 Milliards d’euros 2010 pour le scénario S70 

165 Milliards d’euros 2010 pour le scénario S50 

209 Milliards d’euros 2010 pour le scénario S20 

 

                                                            8 Ici, on parle de l’investissement total sur toute la durée de vie des installations. 

 

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Traduction des hypothèses pour NEMESIS   

L’UFE fournit aussi, pour chacune des technologies (sauf le nucléaire hors EPR), la décomposition des 

coûts de production unitaire. Ces données nous permettent d’intégrer dans  le modèle  la chronique 

des investissements et de l’emploi par technologie. 

Cette  méthodologie  a  pour  conséquence  de  lisser  les  investissements  dans  les  différentes 

technologies  de  production  de  l'électricité.  Par  conséquent,  nous  ne  tenons  pas  compte  des 

différentes phases:  investissements puis rentabilisation. Nous avons, au contraire, « moyenné » ces 

différentes phases pour mieux mettre en évidence les impacts de long terme9. 

Par  ailleurs,  les  variations  de  coûts  liées  aux  émissions  de  CO2  n’ont  pas  été  considérées,  les 

variations de prix de l’électricité présentées sont donc hors CO210. 

Les trajectoires d’investissements par technologie ainsi que leur part dans l’investissement total dans 

les trois scénarios sont représentés ci‐après (voir Figure 2 et Tableau 1). 

Tableau 1: Part des investissements par technologie 

 

 

Par  ailleurs,  les  prix HT  de  l’électricité  (voir  Figure  3)  pour  les  consommateurs  et  les  firmes  sont 

accrus de 10% et 13% respectivement dans le scénario S50 par rapport au scénario S70, tandis qu’ils 

augmentent de 20% et 28% dans  le scénario S20. Ainsi,  les entreprises subissent un accroissement 

relatif plus  important du prix de  l’électricité, en raison d’une part du coût du réseau dans le prix de 

l’électricité plus faibles pour les firmes que pour les ménages, coût du réseau qui est beaucoup plus 

stable entre les scénarios que les coûts de production. 

 

                                                            9 Par ailleurs dans le secteur électrique, les dépenses d’investissement et les emplois, en écart variantiel, sont très sensibles à la décomposition des coûts unitaires de production dans le « nucléaire prolongé » puisque qu’il s’agit de la technologie prépondérante dans le scénario central (S70). 10 Il est bien évident qu’intégrer le coût du CO2 aurait négativement affecté les résultats, en termes de performance économique. 

 

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Figure 2: Investissements du secteur "Eau, Gaz et électricité" (en points de PIB) 

 

Source : NEMESIS 

 

Figure 3: Prix de l'électricité hors taxe pour les ménages et les entreprises (% par rapport à S70) 

 

Source : UFE et calculs ERASME 

 

 

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Résultats  

Une politique réorganisant la structure productive de la filière électrique consiste en une hausse de 

l’investissement  dans  ce  secteur  financée  par  un  accroissement  du  coût  de  production  et  donc 

d’utilisation  de  cette  énergie.  Il  s’agit  donc  de  la  combinaison  d’un  scénario  de  relance  de 

l’investissement et d’un choc d’offre négatif dû à la hausse des coûts de production. 

 

Demande d’électricité Le Tableau 2 montre  les baisses de demande  totale d’électricité dans  les scénarios S50 et S20 par 

rapport à S70. En s’appuyant sur les augmentations de prix de la Figure 3, il apparaît que la demande 

totale  d’électricité  baisserait,  en  2030,  de  5%  pour  un  accroissement  d’environ  12%  des  prix 

(moyenne nationale) dans le scénario S50. Dans le scénario S20 où le prix moyen de l’électricité croit 

de 25% par rapport à S70, la demande totale d’électricité baisse de plus de 8%. La dynamique du prix 

de l’électricité est la résultante de la hausse directe des coûts de production dans ce secteur amplifié 

par le caractère légèrement inflationniste de ce scénario via l’indexation des salaires sur les prix. 

 

Tableau 2: Demande total d'électricité (% variation par rapport à S70) 

 

 

 

Emploi dans le secteur de la production électrique L’emploi  dans  le  secteur  de  la  production  électrique  a  été  estimé  à  70 300  en  2010  (hors 

commercialisation et réseau – voir Figure 4). En 2030, ce secteur perdrait plus de 1 900 emplois dans 

le  scénario  S50 et  ‐1 300  emplois dans  le  scénario  S20.  Les pertes d’emplois  les plus  importantes 

étant concentrées dans le secteur nucléaire avec ‐7 500 en moyenne sur la période 2010‐2030 dans 

le scénario S50 (par rapport à S70) et ‐11 200 dans le scénario S20. Ainsi, la perte maximum d’emploi 

dans  le secteur nucléaire atteint  ‐29 600 en 2030 dans  le scénario S20, soit plus des deux  tiers de 

l’emploi du secteur en 2030 dans  le scénario S70. Par contre, dans  le scénario S20,  l’ensemble des 

autres  technologies crée de  l’emploi avec, en 2030, +11 300 emplois dans  la production électrique 

 

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d’origine éolienne, +5 000 emplois dans le photovoltaïque et +12 100 emplois dans le thermique, par 

rapport à S70. 

Figure 4: Emploi par technologie dans la production d'électricité 

 

Source : NEMESIS, estimation de  l’emploi pour  la production d’électricité  (exploitation) hors  réseau et commercialisation 

sur  la base des données d’entreprises d’Eurostat  (Eurostat 2011).Lecture n°1 : en 2030,  la production d’origine nucléaire 

détruit  ‐29 600 emplois dans  le scénario S20 par  rapport au scénario S70. Lecture n°2 :  la production d’origine nucléaire 

détruit ‐11 200 emplois, en moyenne entre 2010 et 2030, dans le scénario S20 par rapport au scénario S70. 

 

La macroéconomie La politique de « sortie du nucléaire » consiste en une politique de désinvestissement dans le secteur 

de  la  production  d’électricité  d’origine  nucléaire  compensée  par  des  investissements  dans  des 

technologies alternatives. En d’autres termes, elle consiste à remplacer la technologie nucléaire peu 

onéreuse  (hors coût social) par une autre.  Il s’agit donc d’un scénario consistant en une hausse de 

l’investissement dans  le secteur électrique financée par un accroissement des coûts de production, 

et donc d’utilisation, de cette énergie.  

Les  conséquences macroéconomiques  (voir  Figure  5  et  Figure  6)  de  ces  scénarios  peuvent  être 

analysées en deux temps. Tout d’abord une phase keynésienne durant laquelle les effets relance de 

l’investissement l’emportent. Ainsi, le PIB s’accroit sous l’impulsion de la demande d’investissement. 

Cette première phase s’achève autour de 2020 dans les deux scénarios. En effet, la hausse des coûts 

de production de  l’électricité entraîne, pour  les entreprises, un accroissement du coût de  l’accès à 

l’énergie, ce qui augmente les coûts de production et, in fine, les prix. Par ailleurs, la hausse du prix 

de  l’électricité  pénalise  les ménages  en  réduisant  leur  pouvoir  d’achat  et  donc  la  consommation 

 

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finale ce qui entraîne une baisse de l’activité économique. Cet accroissement généralisé des prix est 

accentué par la boucle prix‐salaire11. 

En 2030 dans  le scénario S50,  les prix à  la consommation augmentent de 0,9% et  le PIB baisse de 

0.6%  avec  ‐0.7%  de  consommation  finale  des  ménages  et  un  solde  extérieur  dégradé  (‐0.4% 

d’exportations  et  ‐0.1%  d’importations).  Dans  le  scénario  S20,  les  prix  à  la  consommation 

augmentent  de  1,8%  par  rapport  au  scénario  S70  et  le  PIB  baisse  de  ‐0.9%  avec  ‐1.0%  de 

consommation  finale  des  ménages,  ‐0.7%  d’exportations  et  +0.1%  d’importations.  Ainsi, 

l’augmentation du prix de l’électricité entraine un effet inflationniste à travers : 

(1) l’augmentation du coût de l’électricité pour les ménages, 

(2) le maintien des marges des producteurs et donc l’augmentation des prix à la production due 

à l’accroissement du coût de l’électricité, et 

(3) l’indexation unitaire des salaires (boucle salaire‐prix).  

Cette  augmentation des  prix pénalise  fortement  la  consommation des ménages  (perte de  revenu 

disponible réel) mais dégrade également  le solde extérieur en diminuant  la compétitivité des biens 

produits nationalement. 

 

Figure 5: Agrégats macroéconomiques dans le scénario S50 (% variation par rapport à S70) 

 

Source : NEMESIS 

 

                                                            11 Nous avons réalisé une variante dans laquelle nous avons conservé les hypothèses du scénario S20, mais sans augmenter  le prix de  l’électricité, et nous obtenons un effet positif sur  le PIB (+0.2% en 2030) et sur  l’emploi (+30 000),  ce  qui  confirme  l’importance  de  l’effet  de  la  variation  du  prix  de  l’électricité  sur  les  résultats macroéconomiques. 

 

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Figure 6: Agrégats macroéconomiques dans le scénario S50 (% variation par rapport à S20) 

 

Source : NEMESIS 

 

Figure 7: Emploi total (écart en milliers par rapport à S70) 

 

Source : NEMESIS 

 

 

 

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On  remarque  ainsi que  l’emploi  s’accroit  légèrement en début de période  avant de  se  contracter 

beaucoup  plus  fortement  sous  l’impulsion  de  la  contraction  de  l’activité  (voir  Figure  7). Ainsi,  en 

2015, +15 600 emplois  supplémentaires  sont  créés dans  le  scénario S50 et +28.4 dans  le  scénario 

S20, par rapport au scénario S70. Dès 2018, le scénario S50 perd de l’emploi par rapport au scénario 

S70 (avec ‐32 700 en 2020) alors que les pertes d’emplois n’apparaissent qu’à partir de 2021 dans le 

scénario S20 où  l’investissement du secteur de production de  l’électricité est plus  important. Mais, 

en 2030,  les pertes d’emplois ont été estimé à  ‐140 000 emplois dans  le  scénario S50 et  ‐200 000 

emplois dans le scénario S20. 

 

Emissions de CO2 Par  rapport au scénario maintien du nucléaire  (S70),  les émissions de GES de  l’économie  française 

s’accroissent, en 2030, de +7% dans  le scénario S50 (+9% de CO2) et de +29% dans  le scénario S20 

(+21% de CO2). Cette augmentation des émissions est la résultante de 3 phénomènes. Tout d’abord, 

le  renforcement  de  la  production  d’électricité  d’origine  thermique  au  détriment  de  la  production 

nucléaire  continue  positivement  à  la  hausse  des  émissions12.  Le  renchérissement  de  l’énergie 

électrique  entraine  des  phénomènes  de  substitution  par  des  énergies  fossiles  et  renouvelables, 

l’effet  sur  les émissions de GES est donc  très  faible. Enfin,  la  contraction de  l’activité économique 

réduit la demande globale d’énergie et donc réduit les émissions. 

Figure 8: Emissions de CO2 (écart en Mt par rapport à S70) 

 

Source : NEMESIS 

 

                                                            12  Il  faut noter qu’aucune  technique de captage et de stockage du dioxyde de carbone n’est mise en œuvre dans les trois scénarios. 

 

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Nous  constatons  néanmoins  que  le  supplément  d’émissions  provient  essentiellement,  voire 

exclusivement,  à  partir  de  2021‐2023,  du  secteur  électrique.  En  effet  durant  la  première  période 

pendant laquelle la croissance est améliorée le supplément d’émissions de l’économie est supérieur 

au supplément d’émissions du secteur électrique (+40,5 contre +40,3 en 2020 dans  le scénario S20 

par exemple – voir Figure 8). Mais dans  la seconde phase,  la contribution du secteur électrique au 

supplément  d’émission  est  supérieure  à  100%,  les  émissions  hors  secteur  électrique  étant  plus 

faibles que dans le secteur électrique, en raison du caractère dépressif de la politique. Les émissions 

additionnelles du secteur électrique dans  le scénario de sortie de crise  (+97.1 Mt de CO2 en 2030) 

correspondent à environ 4.7% des émissions du secteur EU‐ETS européen de 2005. 

 

Tableau 3: Emissions totales de GES en France (% par rapport à 1990) 

 

 

Enfin,  le Tableau 3 montre  les évolutions des émissions de GES dans  les 3 scénarios par  rapport à 

1990, nous  constatons un  effet  très  important  sur  les  émissions  globales. Par  exemple,  alors que 

dans  le  scénario  avec maintien  du  parc  nucléaire  (S70)  les  émissions  françaises  de GES  en  2020 

baissent  19%  par  rapport  à  1990,  c.‐à‐d.  proche  des  ‐20%  de  l’objectif  européen13,  celles‐ci  ne 

diminuent plus que de 8.5% en 2020 dans le scénario de sortie du nucléaire. Ces résultats montrent 

que la sortie du nucléaire peut également avoir des larges conséquences sur les émissions de GES en 

France et par conséquent sur les objectifs de réduction des GES pris par la France14. 

                                                            13 Le lecteur notera que l’objectif de réduction de ‐20% des émissions de GES est un objectif européen et peut se traduire par des réductions différentes pour la France. 14 En considérant le prix du CO2, en 2030, calculé par le modèle NEMESIS ‐ soit 88.1€ constant 2010, (Boitier, et al. 2011) ou (De Perthuis, et al. 2011) ‐.dans un exercice récent visant à évaluer les impacts économiques d’une politique de réduction des émissions de GES en France de 40% en 2030 par rapport à 1990, le surcoût pour le secteur  électrique  serait de plus de 8.5 milliards d’euros  en 2030,  soit  environ 20% du  coût de production électrique en 2030. 

 

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Conclusion  

En  résumé,  l’évaluation macroéconomique  des  scénarios  de mix  électrique  en  France  à  l’horizon 

2030 réalisés par l’UFE (UFE 2011), peuvent être analysées en deux temps. 

Dans  un  premier  temps,  les  investissements  supplémentaires  nécessaires  à  la  modification  des 

technologies  de  production  électrique,  dans  les  scénarios  de  sortie  du  nucléaire,  ont  un  effet  de 

relance de l’activité économique globale. Cette première phase est, ici, relativement modeste dans la 

mesure où nous avons lissé les investissements et elle se termine en 2020. 

Dans  la  seconde  phase,  la  hausse  des  coûts  de  production  de  l’électricité  entraîne,  pour  les 

entreprises, un accroissement du coût de l’accès à l’énergie, qui se répercute ensuite sur les prix de 

vente  de  ces mêmes  entreprises  conduisant  à  un  effet  négatif  sur  leur  compétitivité  et  sur  leurs 

ventes. Par ailleurs, la hausse du prix de l’électricité pénalise également les ménages en réduisant 

leur  pouvoir  d’achat  et  donc  la  consommation  finale  ce  qui  entraîne  une  baisse  de  l’activité 

économique. Cet accroissement généralisé des prix est accentué par  la boucle prix‐salaire. Ainsi, en 

2030, le PIB français serait réduit de 0.9% et l’emploi total de ‐200 000 dans le scénario de sortie du 

nucléaire par rapport au scénario du maintien du nucléaire. 

Les conséquences sur le secteur électrique lui‐même sont très modestes, les emplois créent pour  la 

production  d’électricité  avec  des  sources  alternatives  au  nucléaire  (renouvelable  et  thermique 

classique) compensant les pertes d’emplois dans le secteur nucléaire. 

Enfin, les conséquences de la sortie du nucléaire sur les émissions de gaz à effet de serre  du secteur 

électrique et de la France sont très importantes, dans la mesure où les scénarios de l’UFE supposent 

un recours accru aux énergies fossiles. Ainsi, le secteur électrique rejetterait 97Mt de CO2 en plus en 

2030 dans  le scénario de sortie du nucléaire en comparaison au scénario de maintien du nucléaire 

tandis que les émissions de CO2 totales de la France augmenterait de 93Mt de CO2. Au final en 2030, 

les  émissions  de GES  dans  le  scénario  de  sortie  du  nucléaire  baisseraient  seulement  de  5%  alors 

qu’elles baisseraient de 21% dans le cas du maintien du nucléaire. 

 

 

 

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Bibliographie  

Boitier, Baptiste, Arnaud Fougeyrollas, Pierre Le Mouël, Lionel Lemiale, Florent Pratlong, et Paul 

Zagamé. «Prospective économique et environnementale à l'horizon 2030 et évaluations 

économiques de différents scénarios de réduction des GES en Europe.» Note SEURECO‐

ERASME, 2011. 

De Perthuis, Christian, et al. «Trajectoires 2020 ‐ 2050 ‐ Vers une économie sobre en carbone.» 

Rapport du Comité présidé par Christain De Perthuis, 2011. 

Dessus, Benjamin, et Bernard Laponche. En finir avec le nucléaire: Pourqoui et comment. Seuil, 2011. 

Eurostat. Structural business statistics. 2011. 

négaWatt. «Scénario négaWatt 2011.» Dossier de synthése, 2011. 

UFE. «Electricité 2030 ‐ Quels Choix pour la France? .» 2011.