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De la connaissance des déterminants à l’action en Santé Publique : une continuité problématique Michel Setbon

De la connaissance des déterminants à laction en Santé Publique : une continuité problématique Michel Setbon

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De la connaissance des déterminants à l’action en Santé Publique : une continuité problématique

Michel Setbon

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La trilogie sur laquelle repose la santé publique :• La connaissance des facteurs de risque, objet de la

recherche épidémiologique (1)• Le choix de l’action correctrice/cibles, objet du politique

éclairé (2)• La mise en oeuvre du “changement” à l’échelle individuelle

susceptible de réduire le risque au niveau populationnel qui représente l’objectif final (3)

Postulat rationnel: la connaissance permet de déterminer l’action qui, appliquée, produirait le changement visé

Mais chacune des 3 étapes est problématique tout comme la transition de l’une à l’autre

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L’épidémiologie a pour objet “l’étude des variations de fréquence des maladies dans les groupes humains et recherche les déterminants de ces variations”

Identifer les déteminants = identifier les facteurs de risque (causes ?) individuels et/ou collectifs

Le plus souvent un mix des deux A l’origine du débat : déterminants sociaux

(collectifs) vs comportementaux (individuels)

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Certains considérent que les comportements individuels font partie des déterminants sociaux et que la distinction n’a pas lieu d’être

Mais d’autres proposent de distinguer :• Les déterminants macrosociaux de la santé, conditions

socio-économiques qui échappent aux choix des individus• Auxquels on peut opposer des déterminants microsociaux

de la santé qui correspondent aux comportements individuels, même s’ils sont socialement déterminés

Ce n’est pas qu’une question de sémantique mais un enjeu majeur : sur quel déterminant portera le choix de l’action correctrice et qui portera la responsabilité du changement ?

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Le problème : plusieurs déterminants sont le plus souvent identifiés en rapport avec une pathologie :• Déterminants macrosociaux : niveau d’éducation, profession,

revenus, religion, environnement physique et social, etc.• Déterminants microsociaux : mode de vie, alimentation,

croyances, perceptions, etc. Certes, leur force d’association est variable, chacun

d’eux expliquant une part plus ou moins importante de la variance• Tabagisme• Maladies infectieuses transmissibles• MCV, diabète, etc.

De plus, leur part peut varier dans le temps

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Alors que tous les résultats issus de la cohorte indiquaient que les macrodéterminants étaient associés à la mortalité (1,6 supérieure chez les plus défavorisés) et étaient atténués de 42% quand les comportements individuels sont introduits lors de l’inclusion dans le modèle, ce % s’élève à 72% quand ils sont mesurés de façon répettée (4 fois sur 24 ans)

L’équipe montre que 3 des 4 microdéterminants retenus (exercice physique, consommation d’alcool, de tabac et le régime alimentaire) expliquent cette différence : meilleure alimentation, exercice physique accru , consommation d’alcool réduite (pas d’effet du tabac)

Les comportements mesurés à l’inclusion qui expliquaient 42% de la mortalité (toutes causes), 29% (MCV) et 61% (non MCV et non cancer) du gradient social expliquent respectivement 72%, 45% et 94% si les mesures sont répettées dans le temps

Explication : les comportements évoluent dans le temps et leurs effets réducteurs sur la mortalité s’accroissent

Conséquence : les effets des comportements sur les inégalités de santé peuvent s’avérer supérieurs quand ils sont évalués de façon longitudinale

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Les arboviroses : maladies infectieuses virales transmises par des arthropodes (moustiques)

Sévissant dans les régions à climat tropical et émergentes dans de nombreuses autres régions

Les vecteurs : Aedes albopictus vecteur principal du virus du chikungunya et Aedes aegypti vecteur principal du virus de la dengue

Lors d’épidémies, le principal objectif cognitif est d’identifier les facteurs socio-démographiques et psycho-cognitifs associés à la distribution de la maladie infectieuse dans la population exposée

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Affected island Réunion Mayotte Martinique

Location Indian Ocean Indian Ocean Caribbean Sea

Population (inhabitants) 750.000 170.000 399.000

Date of the outbreak (number) 2005-2006 (1) 2005-2006 (1) 1995-2007 (4)

Epidemic/endemic Epidemic Epidemic Endemic + epidemic

Main vector Aedes albopictus Aedes albopictus Aedes aegypti

Virus Chikungunya Chikungunya Dengue

% population infected 38 38 20

Date of survey May 2006 December 2006 June 2007

Sample size N = 1035 N = 888 N = 1001

Administration method Status identification

TelephoneQuestionnaire

TelephoneQuestionnaire+ serology

Face to face Questionnaire

Contexte et design des 3 enquêtes

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Variables Réunion Sign. Mayotte Sign. Martinique Sign.Place of birthRéunion/Mayotte/Martinique 46.1

<0.00129.3

<0.00118.4

<0.01Other location 23.9 52.8 30.9Type of housingIndividual house 47.0

<0.00150.3

<0.00122.1

<0.01Collective 19.4 32.1 15.9EducationNo formal education 49.1

<0.001

41.5

<0.05

12.8

<0.01

19.819.8

Some high school 46.5

29.7

19.6High school graduate 37.2 28.2

27.8Some college 30.0 25.0

OccupationStudents 35.6

NS

34.4

NS

17.4

<0.05Housewife 44.6 37.5 15.3Unemployed 47.0 42.6 19.0Employee/independant worker 41.1 33.9 23.9Retired 39.4 29.4 14.1Household size1 to 2 40.1

NS

37.2

<0.001

20.9

NS3 to 4 40.3 46.7 19.45 to 6 46.3 41.3 18.17 or more 45.5 32.7 6.3Total 41.6 39.0 19.4

Prevalence du Chikungunya/Dengue fever en fonction des variables

sociodemographiques (% and significativité)

NS = non significant (p>0.05)

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Variables La Réunion Sign. Mayotte Sign. Martinique Sign.Perceived controllabilityAgree 37.0

<0.00136.6

<0.00119.7

NSDisagree 54.0 51.0 19.7

Perceived effectiveness of protectionAgree 38.7

<0.0138.4

N.S.16.4

NSDisagree 49.4 45.2 20.2

Perceived route of infection: mosquitoesAgree 38.7

<0.0138.2

NS19.7

NSDisagree 49.1 40.6 27.1

Perceived route of infection: airAgree 50.7

<0.00139.6

NS15.1

<0.05Disagree 35.2 37.7 22.6

Perceived route of infection: body contactsAgree 48.4

<0.00142.4

NS17.3

<0.05Disagree 37.7 37.1 23.3

Use of repellentsAgree 35.8

<0.01MD

MD16.9

NSDisagree 45.9 MD 19.7

Total 41.6 39.0 19.4

MD = missing data; NS = Non significant (p>0.05).

Prevalence du Chikungunya/Dengue en fonction des variables psycho-cognitives (% and significativité)

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Facteurs finaux Chik à La Réunion(régression logistique)

Chik à Mayotte(régression logistique)

Dengue à La Martinique(analyse bivariée)

Facteurs socio-démographiques

Habiter une maison individuelle avec jardin (OR : 3,44)***

Etre né aux Comores (OR : 2,28) ***

Habiter une maison avec jardin

Niveau diplôme élevé (OR : 0,66)

Niveau d’études supérieures

Profession (ouv. agric.) (OR : 1,80)

Habiter une maison en dur (jardin clôt) avec bonnes conditions sanitaires (OR : 0,61)

Disposer de revenus moyens et élevésCSP agriculteurs commerçants, cadres prof libérales

Facteurs psycho-cognitifs et comportements de protection

Contrôlabilité perçue (OR : 0,59)

Efficacité perçue de la protection (OR : 0,59)

Etre mieux informé sur la dengue

Utilisation régulière de sprays et crèmes répulsifs (OR : 0,71)

Contrôlabilité perçue (OR : 0,60)

Vision du monde fataliste

Synthèse comparative des facteurs de contamination

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Ce type d’enquête « ouverte » permet d’identifier rapidement les facteurs (macro et micro) corrélés à une contamination et leur puissance respective

On identifie qui est plus à risque et les facteurs d’exposition aggravant le risque ainsi que les comportements efficaces adoptés pour le réduire

Là où l’absence de protection (au plus près du moustique) est généralisée (pas discriminante), seuls les facteurs d’exposition (incluant des facteurs sociaux) différencient les groupes les plus à risque (dengue)

Quand la protection a des effets discriminants (chik/La Réunion), le fait qu’elle soit plus utilisée par les groupes favorisés ne réduit en rien sa pertinence ni le besoin de l’étendre à ceux qui ne croient pas à son utilité

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La multiplicité des facteurs de risque identifiés conduit à inférer que le plus puissant devrait être (en théorie) la cible de l’action correctrice

L’évidence cognitive a pour conséquence de focaliser le débat sur le choix du déterminant, occultant ainsi le débat et la recherche sur l’action, i.e. sur le choix de l’action efficace et sur les formes de sa mise en oeuvre

Or il peut s’avérer que ce serait moins “le déterminant” le plus puissant qui s’imposerait comme cible de l’action mais celui (ou ceux) qui sont les plus aisément manipulables : accessibles à un “coût” supportable et sur une durée compatible avec le processus pathologique

Cette approche à l’avantage de replacer l’action au centre du processus : c’est elle qui légitime la santé publique alors que la recherche sur les causes n’est que le moyen qui permet de délimiter les possibilités d’action

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La décision d’agir (ou de ne pas agir) appartient au politique

Toute action publique qui vise un changement de l’état constaté, implique un choix de valeurs, de cibles, a des coûts collectifs et individuels et entraîne des conséquences de diverse nature

Si l’on peut considérer que l’action en santé publique devrait être la traduction de la connaissance produite, c’est rarement le cas

Quand de plus sont identifiés des déterminants macro et des microsociaux, la question du choix devient plus problématique : les contraintes et limites de l’action (jugée a priori efficace) orientant ce choix

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La perception du risque (PR) s’affirme comme le microdéterminant susceptible d’expliquer les réactions face au risque

Plusieurs modèles ont été construits, testés et théorisés : HBM, PTM, SRM, etc.

Tous cherchent à identifier les variables psycho-cognitives qui concourent à la formation de la PR, i.e. “les croyances en des méfaits potentiels” à l’échelle individuelle et collective

La PR s’avère le meilleur prédicteur de la probabilité de protection ou d’absence de protection face à une menace

Par exemple il a été montré que l’augmentation de la PR a un effet sur le comportement de vaccination et que la vaccination un impact (réducteur) sur la PR

L’important est que les individus jugent leurs risques sur des bases différentes à celles des experts, que ces jugements ont des relations avec leurs comportements et… que le changement de comportement ne se génère pas par l’émission de simples conseils ou de recommandations générales !

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Prévenir une pathologie

Identification des facteurs de risque

Macrodéterminants

Microdéterminants

Action sur un ou des facteurs de

risque

Changement = réduction du

risque

Facteurs socio-démo

Perception du risque

Comportements modes de vie

sélection

Com /R

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Les déterminants macrosociaux seraient les “causes des causes” et selon certaines théories, la première source d’inégalités de santé

Justifiant une demande d’action sur le maillon supérieur de la chaîne causale (revenu, éducation, environnement, etc.)

Une telle inférence se heurte à plusieurs réalités :• Absence de preuve qu’en améliorant un facteur distal on obtienne un

changement sur le facteur proximal (le comportement)• Peu ou pas de tentative en ce sens, tant en termes de design

expérimental que d’effets• Le temps et le coût nécessaires peu compatibles avec un objectif

sanitaire visé• On sort du champ de la santé publique, celle-ci devenant le levier de

tout changement social ! Néanmoins…. Est-ce que ça peut marcher ?

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Mise en place d’un programme expérimental randomisé visant à réduire l’obésité et le diabète en agissant sur l’environnement social d’une population (4498 familles avec enfant) vivant sous le seuil de pauvreté (

En 1998, 3 groupes : 1788 reçoivent une subvention et du counseling à condition de démanager dans un quartier moins pauvre (G1), 1312 reçoivent a même somme mais sans obligation de changement ni counseling (G2) et 1398 comme groupe de controle reste dans la même situation (G3)

Entre 2008 et 2010 plusieurs indicateurs d’obésité (IMC) et de diabète (hémoglobine glucosée, HG) sont receuillis

Résultat (10 ans plus tard) : la prévalence d’IMC > 35 ou plus ainsi que d’IMC > 40 ou plus et d’un niveau d’HG de 6.5% ou plus était plus basse dans le G1 comparée au G3, avec une différence absolue respectivement de 4.61%, 3.38% et 4.31%

Mais pas de différence entre le G2 et le G3 ! Conclusion : l’environnement social joue un rôle, certes ici modeste, mais

potentiellement important dans la réduction de la prévalence de l’extrême obésité et du diabète

Commentaire : le changement du déterminant macrosocial (la pauvreté) ne suffit pas à modifier l’état sanitaire s’il ne s’accompagne pas d’un changement des facteurs qui le déterminent directement (normes sociales, environnement, counseling, etc.)

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La plupart des actions visant à réduire un facteur de risque identifié en rapport avec une pathologie portent sur les comportements et modes de vie

Pourtant, les succès attribuables à des programmes spécifiques sont rares et, quand ils le sont, ne concernent que certains groupes sociaux ! Les inégalités subsistent et souvent s’amplifient

Alimentant la critique sur le choix des déterminants sur lesquels porte l’action

Mais le choix de l’action pertinente ne suffit pas Ce sont les méthodes-moyens utilisées pour

obtenir un changement qui expliquent succès ou échecs : dimensions peu ou pas étudiées !

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La prévention (primaire) du diabète de type 2 est possible : ça marche !

Pour cela 3 dimensions à couvrir : • Comment bien conceptualiser, évaluer et communiquer

sur le risque ?• Comment bien identifier qui est à risque ?• Comment réduire le risque y compris dans les groupes

sociaux défavorisés ? La prévention (active) est conçue à partir de

l’identification des diverses influences (micro et macro) qui déterminent les comportements : modèle écologique du comportement

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Ecological model of health behavior.

Fisher E B et al. Dia Care 2002;25:599-606

Copyright © 2011 American Diabetes Association, Inc.

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Comment le risque (R) de diabète est-il perçu (mental models, MM) ? Base de toute action de com/R

La PR réunit plusieurs variables, les unes individuelles, d’autres collectives (variations culturelles)

Les choix d’action seront différents en fonction des variables et des cibles (à risque) identifiées

Objectif commun : réduire l’écart entre la PR (les MM) et le modèle normatif

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Les évidences d’action à combiner :• Activité physique accrue• Régime basse calories• Thérapie comportementale

Les interventions sont d’abord individuelles et flexibles

Mais également, organisationnelles (écoles), communautaires et stucturelles (media, disponibilité de denrées adaptées, etc.)

De même quand choix de prévention médicale, vise à renforcer l’adhérence à une médication antihyperglycémique

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Le diabète (T2) est fortement stratifié par les disparités socioéconomiques (+++ défavorisés)

Nécessitant de mettre en oeuvre des programmes transitant par les réseaux spécifiques aux groupes visés (minorités ethniques, religieuses, etc.) et par des méthodes participatives soutenues par les pairs

Résultat du PPD : en termes de changement de mode de vie comme d’adhérence au traitement, les résultats sont significatifs tant au sein des minorités défavorisées que pour l’ensemble des participants :

Après 2, 8 ans, réduction du risque de 58% (groupe changement de modes de vie) de 31% (groupe traitement médical préventif) comparé au groupe placebo *

* Diabetes Prevention Program Research Group, Reduction in the Incidence of Type 2 Diabetes with Lifestyle Intervention or Metformin, N Engl J Med 2002; 346:393-403

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Les déterminants macrosociaux de la santé permettent essentiellement d’identifier les groupes sociaux les “plus à risque”

Les déterminants microsociaux permettent de comprendre les comportements à risque et d’identifier les variables clés qui les déterminent

Parmi elles, la perception du risque s’affirme comme le modèle mental rendant compte des croyances, des informations, des valeurs et expériences des individus

C’est sa connaissance qui sert de guide à l’action et au changement

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La connaissance produite en santé publique a pour finalité l’action capable de réduire le risque

Réduire le risque exige le changement de l’état constaté Mais quel(s) changement(s) viser et comment y parvenir ? 3 critères encadrent le choix d’intervention

• La faisabilité/acceptabilité/cibles• L’efficience (coût individuel et/ou collectif du résultat attendu)• La temporalité (durée de l’action/processus pathologique)

Plus le facteur est distal, impliquant une chaîne longue de causalités, plus les effets de l’action sur lui seront incertains, dilués, lointains et coûteux

Plus l’action portera sur un facteur proximal, plus la chaîne de causalité sera réduite et l’action visant le changement concentrée sur le facteur retenu

Cela sans négliger la difficulté à rendre crédible le risque « pour soi » et en intégrant les barrières (concrètes et perçues) qui s’opposent à tout changement de comportement

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Le modèle épidémique émergent qui se caractérise par sa nouveauté, sa durée (courte), son intensité (marquée), réduit les possibilités d’action sur les facteurs proximaux (déterminants microsociaux)

Selon les contextes il est possible d’agir sur le niveau d’exposition à l’agent (ou au vecteur) et/ou sur les comportements de protection

L’identification des déterminants macrosociaux permet de différencier les modes d’action en fonction des groupes sociaux à risque en les adaptant à leurs croyances, modes de vie, réseaux sociaux et barrières

C’est la condition pour viser à la fois la réduction du risque global et la réduction des inégalités (le gradient social des contaminations)

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La connaissance socio-épidémiologique est une condition indispensable pour identifier les déterminants sociaux

Mais elle n’est pas suffisante, ni pour fixer sur quel déterminant portera l’action, ni pour indiquer comment parvenir au changement souhaité

La décision d’action sur le(s) déterminant(s), qu’il soit micro ou macro passe par une compréhension fine des comportements à risque (via la PR) et par l’identification des voies et méthodes pertinentes (à l’échelle individuelle et collective) par lesquelles le changement peut être obtenu au meilleur coût/temps

Alors que le choix d’action fondé sur la connaissance est une hypothèse, c’est le résultat de l’action qui en sera la preuve

Vers un développement des sciences du changement de comportement !

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De nombreux travaux montrent que les déterminants macosociaux expliquent les inégalités de santé et que les actions sur les comportements à risque bénéficient plus aux groupes sociaux favorisés. D’où la question :• La persistance (ou la croissance) des inégalités sociales de santé est-

elle un marqueur d’échec de la santé publique ? Le mieux est d’y répondre par une autre question : quel est

l’objectif générique de la santé publique ? Réduire les risques sanitaires au niveau populationnel ou réduire les inégalités de santé ?

Autrement dit, si un programme de santé publique visant à réduire l’incidence d’une pathologie bénéficie plus à certains groupes sociaux tout en bénéficiant à d’autres dans une moindre mesure, est-ce un échec ou un succès ?

Le débat est ouvert !

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