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MINISTÈRE DE LA JUSTICE
École nationale de protection judiciaire de la jeunesse
Mémoire de validation professionnelle
Formation statutaire des éducateurs
Promotion 2016 – 2018
GOUGEON Léa
DES MINEURS NON ACCOMPAGNÉS AUX MINEURS
ACCOMPAGNÉS PAR LA PJJ
Un défi pour les éducateurs ?
Juin 2017
Sous la guidance de BEDDIAR Nadia, Enseignante – chercheure en droit public
Mais peuvent-ils venir jusqu'ici, de l'autre côté de la mer, de l'autre côté de tout ?
Peuvent-ils trouver leur chemin au milieu de toutes ces routes,
trouver la porte au milieu de toutes ces portes ?
- J.M.G. Le Clézio
Désert
REMERCIEMENTS
Si de nombreuses personnes m'ont apporté tout leur soutien dans la réalisation de ce mémoire,
Je tiens à remercier particulièrement :
Nadia Beddiar, ma directrice de mémoire, pour la qualité de sa guidance tout au long de cette
rédaction, et pour nos échanges riches et passionnés sur le sujet,
Ma tutrice, Sylvie Angiolini, pour sa présence, sa disponibilité, ses valeurs, dont l'engagement auprès
des mineurs, le soutien et l'accompagnement m'ont aidée dans la construction de mon identité
professionnelle,
Laurence Thevenoux pour ses précieux conseils dans la construction de ce mémoire et tout au long
de cette année, sa présence et sa bienveillance au quotidien,
Les professionnels du milieu ouvert de C, mes collègues, auprès desquels j’ai grandi en tant
qu’éducatrice tout au long de cette année, pour leur soutien dans ce travail de mémoire,
Et bien sûr, ma famille et mes amis pour le travail de relecture, leur patience, et leurs encouragements.
1
SOMMAIRE
Introduction ................................................................................................................................. 02
Partie 1. Le contexte de la prise en charge des MNA .............................................................. 08
I. Le statut juridique des MNA ........................................................................................ 08
II. Le cadre d'intervention de l'ASE auprès des MNA .................................................. 09
A. Le cadre légal de la prise en charge des MNA ...................................................... 09
B. L'intervention de l’État et de la PJJ dans l'accueil des MNA ............................... 11
C. Les différents parcours migratoires des MNA ....................................................... 13
Partie 2. Les freins dans la prise en charge des MNA ............................................................. 16
I. Les difficultés rencontrées par les éducateurs dans la prise en charge des MNA .... 16
A. Travailler sans les représentants légaux du mineur .............................................. 16
B. L'impuissance et l'isolement de l'éducateur dans l'accompagnement des MNA ... 19
II. Les difficultés des MNA à investir l'accompagnement éducatif ............................... 25
A. Le mensonge source de soupçon de la part des professionnels ............................. 25
B. Un mode de vie rendant l'accompagnement difficile : l'errance ........................... 30
Partie 3. L'expérimentation et la nécessité de repenser les pratiques pour prendre en
charge les MNA ........................................................................................................................... 33
I. Les ressources à mettre en œuvre ................................................................................. 33
A. Le travail éducatif .................................................................................................. 33
B. Repenser l'accueil des MNA en milieu ouvert ....................................................... 34
C. L'entrée en relation avec les MNA par le biais de l'entretien ................................ 35
D. S'appuyer sur des outils existants pour prendre en charge les MNA .................... 37
E. Entrer en lien autrement ....................................................................................... 39
F. La notion de temporalité dans l'accompagnement des MNA ................................. 40
II. Expérimentation : la création de répertoires ............................................................. 41
A. L'idée d'un répertoire : un choix né de mes observations et d'un besoin .............. 41
B. Mes objectifs dans la création de ce répertoire ..................................................... 43
C. La mise en œuvre et le contenu des répertoires ..................................................... 43
D. L'évaluation du projet en fonction de mes objectifs .............................................. 44
Conclusion.................................................................................................................................... 46
BIBLIOGRAPHIE
LISTE DES SIGLES DE REFERENCE
LES ANNEXES
2
Introduction
Dans le cadre de la formation statutaire des éducateurs de la Protection Judiciaire de la Jeunesse
(PJJ), j'ai réalisé ma seconde année dans une Unité Éducative de Milieu Ouvert (UEMO), se situant
sur le territoire du Rhône. Lors de mon arrivée dans la structure, la Responsable d'Unité Éducative
(RUE) m'a accueillie et présentée le service et son activité. Au cours de cet échange, elle m'a parlé du
nombre croissant de prises en charge concernant des Mineurs Non Accompagnés (MNA). Il s'avère
que ce milieu ouvert est situé sur le secteur de la Mission d’Évaluation et d'Orientation des Mineurs
Isolés Étrangers (MEOMIE), toutes les mesures pénales concernant ces jeunes sont donc confiées à
ce service. Ainsi la métropole dans laquelle j'effectue mon stage a a vu arriver 1 400 MNA en 2017.
L'UEMO suit 51 MNA au 24 avril 2018 alors qu'elle en avait 3 en 2015.
La problématique des MNA était déjà un sujet qui m'avait interpellée durant le stage concours,
entre les épreuves écrites et les oraux. En effet lors de mon passage au sein d'une Unité Éducative
d'Hébergement Collectif (UEHC) j'ai accompagné un éducateur à l'hôpital psychiatrique pour
ramener un MNA sur la structure après son hospitalisation. Il avait été placé suite à un vol en réunion
par l'Ordonnance de Placement Provisoire (OPP) en structure PJJ et avait encore des affaires
personnelles dans la chambre d'hôtel où il était hébergé jusqu'à présent.
N'ayant encore aucune connaissance sur le sujet, je me suis interrogée sur le parcours de ces jeunes,
les difficultés et traumatismes qu'ils ont vécus, et les moyens dont ils disposent pour surmonter leur
déracinement forcé.
Ces dernières années sont marquées par une multiplication de textes législatifs 1 et
1 Décret n° 2016-840 du 24 juin 2016 pris en application de l'article L. 221-2-2 du code de l'action sociale et des familles
et relatif à l'accueil et aux conditions d'évaluation de la situation des mineurs privés temporairement ou définitivement de
la protection de leur famille, JORF n°0148 du 26 juin 2016, texte n° 18 ; Arrêté du 28 juin 2016 pris en application du
décret n° 2016-840 du 24 juin 2016 relatif aux modalités de calcul de la clé de répartition des orientations des mineurs
privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille, JORF n°0151 du 30 juin 2016, texte n° 33 ;
Arrêté du 23 septembre 2016 pris en application du décret n° 2016-840 du 24 juin 2016 relatif à la composition et aux
règles de fonctionnement du comité de suivi du dispositif national de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation des
mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille, JORF n° 0224 du 25 septembre 2016,
texte n° 10 ; Circulaire interministérielle du 25 janvier 2016 relative à la mobilisation des services de l’Etat auprès des
conseils départementaux concernant les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille
et les personnes se présentant comme tels, BOMJ n° 2016-01 du 29 janvier 2016 ; Circulaire du 1er novembre 2016
3
réglementaires réaffirmant le principe de la protection (évaluation et mise à l’abri) des MNA. Si ces
textes soulignent la vulnérabilité de ces jeunes, le projet de loi intitulé « Pour une immigration
maîtrisée et un droit d’asile effectif », actuellement en discussion au Parlement, semble s’orienter
vers plus de sévérité dans la gestion des personnes étrangères et l’accès au statut de réfugiés.
Dans le cadre de mon stage, j'ai pu rencontrer plusieurs MNA, je pense notamment à deux
d'entre eux que j'ai suivi régulièrement.
Tout d'abord il y a le jeune Amir2 que je reçois dans le cadre d'une co-référence avec une éducatrice.
Lorsque je le rencontre en septembre 2017, il est suivi dans le cadre d'un Contrôle Judiciaire (CJ)
ordonné par un Juge des Enfants (JE) et d'une Liberté Surveillée Préjudicielle (LSP) ordonnée par un
Juge d’Instruction (JI), pour des affaires de vols. Après avoir été pris en charge par la MEOMIE en
hôtel le temps de son évaluation, il est placé par OPP le 22 août 2017 dans un foyer accueillant des
jeunes placés par l'ASE (Aide Sociale à l'Enfance). Lors de chaque entretien, un interprète est présent
afin de pouvoir échanger plus facile avec le jeune et qu'il comprenne les mesures pénales auxquelles
il est soumis et leurs enjeux. Il suit une scolarité dans un collège afin d'apprendre le français.
Amir nous dit être venu d'Algérie et avoir 17 ans, ses parents seraient décédés dans un accident de
voiture, il aurait été à la rue dès l'âge de ses 10 ans et vécu dans l'errance depuis. Il nous rapporte
avoir traversé plusieurs pays avant d'arriver en France, notamment l'Italie et l'Allemagne. Il
consomme beaucoup d'alcool, de drogue et de médicaments qu'il trouve au marché noir. Les
éducateurs du foyer nous informent qu'il se scarifie lorsqu'il est repris par les adultes sur son attitude.
Le jeune vient à nos rendez-vous, mais il est difficile d'entrer en relation avec lui. Il est dans un
discours de revendications, exigeant de l'argent pour s'acheter des vêtements et ne comprenait pas les
obligations que lui imposent son CJ, estimant que « personne n'a à lui interdire ou l'obliger à faire
quoique ce soit ».
Puis, j'ai fait la connaissance d'Ali à la sortie de l’Établissement Pénitencier pour Mineur (EPM). Il
dit venir d'Algérie, avoir 17 ans, ses parents seraient décédés dans un accident de voiture. Il aurait
vécu à la rue avant de venir en France, en passant auparavant par l'Espagne et l'Italie. Il aurait fait de
la prison dans son pays. Il souhaite suivre une formation en pâtisserie. Il n'était pas connu de la
MEOMIE avant son incarcération et n'était donc suivi par aucun travailleur social jusqu'alors.
L'éducatrice référente en milieu ouvert que j'accompagne ce jour, le rencontre en même temps que
relative à la mise en œuvre exceptionnelle d’un dispositif national d’orientation des mineurs non accompagnés dans le
cadre des opérations de démantèlement de la lande de Calais, BOMJ n°2016-11 du 30 novembre 2016
2 Dans un souci du respect de l'anonymat des usagers, l'ensemble des prénoms présents dans ce mémoire ont été changés.
4
moi, nous l'accompagnons à l'UEHC où il va être désormais pris en charge. Lors des entretiens Ali
tient un discours très lisse, ne s'exprimant pas sur son quotidien et sur ce qu'il souhaite faire. Le lien
reste très distendu entre lui et l'éducatrice.
Au regard de ses deux situations et des échanges que j'ai eu avec les professionnels du service, je me
suis posée beaucoup de questions : Qui sont ces jeunes arrivant de pays lointains ? Pourquoi ont-ils
le même récit de vie ? Comment créer un lien de confiance avec eux et les amener à se livrer ?
Comment travailler avec ces mineurs sans pouvoir s'appuyer sur leurs familles ? Quel suivi
psychologique mettre en place pour ces jeunes ? Quel travail mener avec eux quand on sait que leur
minorité est contestée ?
Au vu des difficultés rencontrées par les professionnels dans le travail éducatif avec ces mineurs et
de l'intérêt que je porte à ce sujet, ma question de départ a porté sur les spécificités de la prise en
charge au pénal des MNA en milieu ouvert.
Durant les observations faites sur le terrain, j'ai pu ressentir le désarroi et l'impuissance des
professionnels face à la difficulté de mettre en place un travail éducatif avec les MNA. « On ne sait
pas comment faire » est une phrase que j'ai beaucoup entendue en interrogeant les travailleurs sociaux
sur la prise en charge des MNA. En effet, les éducateurs doivent répondre à des questions différentes
de celles qui se posent pour les mineurs de droit commun. J'ai ainsi pu relever au cours d'échanges
avec eux, les difficultés auxquelles ils doivent faire face dans la prise en charge de ces mineurs. Ils
ont pu citer la barrière de la langue, l'absence de papiers d'identité qui va être un frein pour l'inscription
dans une formation ou l'insertion professionnelle, l'absence des représentants légaux sur le territoire
national, le doute sur le parcours et sur l'identité et l'âge du mineur, l'errance, la prise de stupéfiants,
la difficulté à entrer en lien avec eux.
Au cours d'échanges avec différents professionnels, j'ai fait plusieurs constats. Tout d'abord, sur
le territoire du Rhône, les MNA vont être plus rapidement incarcérés que les autres mineurs, comme
cela a été le cas pour Ali. En effet, dès le premier ou second défèrement un mandat de dépôt est
demandé par le Parquet. Comment est pensée l'incarcération dans le cas des MNA ? Est-ce pour les
sortir des réseaux, les mettre à l'abri, pour garantir leur représentation devant la Justice ?
Puis, j'ai également pu constater à plusieurs reprises que plusieurs Établissements de Placements
Éducatifs (EPE) allaient répondre positivement à une demande d'admission d'un MNA et insister pour
l'accueillir alors que pour d'autres mineurs, les éducateurs doivent faire face à de nombreux refus
avant d'avoir une place de libre. Pourquoi ce choix est-il fait par les EPE de favoriser l'admission des
MNA ? Pour certains éducateurs, l'hypothèse serait que les MNA ne posent pas de difficultés au sein
5
des hébergements, soit ils investissent vraiment l'aide éducative apportée, soit ils fuguent.
Aussi, si je n'ai pas rencontré de difficultés dans le choix de mon thème de mémoire
professionnel, il en a été autrement lorsque j'ai dû formuler une problématique, et penser les
hypothèses de recherche et d'action. Une fois mes observations et mes constats faits, toute la
complexité pour moi était de délimiter le champ dans lequel je souhaitais inscrire ma réflexion et dans
lequel j'avais la possibilité d'intervenir en tant qu'éducatrice en formation à la PJJ.
Pour y parvenir, j'ai pu m'appuyer sur mon carnet de bord dans lequel je consignais ce que j'observais
sur le service, mais également au tribunal durant les audiences et avec les partenaires. Il m'a également
permis de noter les observations que je faisais lors d'entretiens entre un éducateur et un MNA, mes
impressions et celles du professionnel, les difficultés rencontrées, les besoins de l'éducateur comme
du jeune. Je relevais également les questions que les professionnels se posaient quant à la prise en
charge de ces jeunes.
Aussi, j'ai décidé d'interroger des personnes au statut varié et ne venant pas uniquement de la PJJ, la
transversalité de mon sujet de mémoire imposait de pouvoir ouvrir le champ de ma réflexion et de ne
pas me laisser enfermer dans les difficultés constatées, mais d'essayer d'en comprendre les contours
et de penser aux explications à défaut de trouver une solution.
A cette fin, j'ai eu un entretien avec un JE travaillant sur le secteur de l'UEMO et intervenant auprès
des MNA dans le champ de l'assistance éducative et du pénal, ainsi qu'un échange avec un substitut
du procureur travaillant au Parquet mineurs du tribunal. De plus j'ai souhaité rencontrer des
éducateurs travaillant dans un service de l'ASE ayant à prendre en charge des MNA au civil à
différents moments de la procédure : avant l'évaluation de leur minorité lors de la mise à l'abri
provisoire, puis après l'évaluation lorsqu'ils leur sont confiés de façon pérenne. Par ailleurs, ce service
possède une cellule PJJ pour accompagner les MNA dans un suivi renforcé sur le plan civil et pénal.
J'ai également pu échanger avec le responsable de cette structure. J'ai eu un entretien téléphonique
avec une responsable de la Mission Mineur Non Accompagné (MMNA) qui est chargée, pour la PJJ,
de répartir les MNA sur le territoire national. Pour finir, j'ai souhaité interroger les éducateurs PJJ
prenant en charge les MNA en milieu ouvert, notamment Claire et Isabelle.
Dans le cadre de mes recherches et pour nourrir ma réflexion, j'ai fait le choix de lire l'ouvrage
de Julien Bricaud, Accueillir les jeunes migrants : les mineurs isolés à l'épreuve du soupçon3, afin
d'avoir de nouvelles pistes de travail. C'est un professionnel de terrain qui vient interroger le
3BRICAUD Julien. Accueillir les jeunes migrants : les mineurs isolés étrangers à l'épreuve du soupçon. 2012, 223p.
6
positionnement des travailleurs sociaux ayant à accueillir ce public de MNA.
Il m'a permis de faire des liens entre le parcours migratoire de ces jeunes et les questions et difficultés
auxquelles sont confrontés les professionnels qui ont à les prendre en charge. Dans le cadre de mon
mémoire, je m'intéresse au versant pénal de la prise en charge des MNA, alors que dans son livre,
l'auteur se place du côté civil. Il me semble néanmoins intéressant et opportun dans ma recherche
d'avoir une vision d'ensemble concernant la prise en charge des mineurs, d'autant plus qu'à la lecture
de ce livre, j'ai pu retrouver les mêmes difficultés qu'ont à connaître les travailleurs sociaux quelque
soit la structure et le cadre dans laquelle ils exercent.
J'ai également opté pour cet ouvrage car son titre a retenu mon attention, avec notamment l'emploi
du terme « soupçon »4. En effet, dans les discussions que j'ai pu avoir avec différents professionnels,
l'accueil des MNA suscite des interrogations nombreuses et récurrentes : Est-il vraiment mineur ?
Vient-il réellement de ce pays-là ? N'a-t-il pas de la famille sur le territoire ? A quoi bon demander
un placement en hébergement puisqu'il va fuguer ?
Sans apporter des réponses à toutes ces questions, l'auteur vient interroger les pratiques des
professionnels dans la prise en charge des mineurs.
Cet ouvrage m'a aussi permis de me questionner sur la prise en compte de la famille du jeune
et de son passé. Avant la lecture de ce livre, cet aspect du travail éducatif n’était pas évident pour moi
dans la situation des MNA, alors que le travail avec la famille fait partie intégrante de la prise en
charge des mineurs de droit commun. Au sein de mon service, j'ai alors constaté que le passé du
mineur était très peu abordé. D'ailleurs, durant un entretien que j'ai pu mener, j'ai trouvé difficile
d'aborder avec lui la question de son passé, de sa famille et de son parcours. J’ai pu alors mesurer la
difficulté pour le mineur de livrer son récit de vie et de « se raconter » à des professionnels.
Julien Bricaud explique l'importance d'orienter le travail éducatif en direction des familles, malgré le
fait qu'elles soient absentes du territoire. Je me suis alors demandée : Comment aborder ce sujet avec
les jeunes ? Comment puis-je faire vivre ces grands absents dans mon discours ? Quel sens mes
questions à ce sujet va avoir pour le jeune ?
La question des MNA est un sujet actuel au cœur des débats dans notre société, qui agite les
politiques, les associations, et la justice au vue de la fragilité de ce public. J'ai été amenée à lire de
nombreux textes issus du tissu associatif militant tels que ceux de la Convention Nationale des
Associations de Protection de l'Enfant (CNAPE), du Groupe d'Information et de Soutien des
Immigrés (GISTI) ou encore de l'association regroupant des informations sur les MIE (InfoMIE).
Au travers de toutes mes observations et réflexions sur ce sujet, la question de la nature du suivi
4BRICAUD Julien. Ibid. Première de couverture
7
éducatif vers un renforcement des modalités d'intervention s'est posée. La prise en charge des MNA
nécessite-t-elle une révision des méthodes éducatives afin de répondre davantage aux besoins
particuliers des mineurs ? Considérer les MNA en niant leurs traumatismes et leurs situations
complexes serait un non-sens pour le travail éducatif. Dès lors, à partir de cette hypothèse, émerge la
problématique suivante :
Dans quelle mesure la prise en charge des MNA constitue-t-elle un enjeu nouveau pour les
éducateurs PJJ travaillant en milieu ouvert ?
Tout d'abord, afin de poser le cadre dans lequel sont pris en charge les MNA, le contexte sera abordé
(Partie 1). Dans un second temps, les difficultés rencontrées dans l'accompagnement de ces mineurs
vont être évoquées (Partie 2), et pour finir il paraît important de repenser les pratiques des
professionnels et d'envisager un nouveau outil sur lequel ils pourraient s'appuyer, objet de mon
expérimentation (Partie 3).
8
Partie 1. Le contexte de la prise en charge des MNA
Il s'agit dans un premier temps d'expliquer le cadre juridique qui s'applique aux MNA arrivant en
France (I), puis de comprendre l'intervention de l'ASE dans leur prise en charge (II).
I. Le statut juridique des MNA
En France, à partir des années 2000 et face au phénomène d'arrivées de ces jeunes, c'est le terme
de « mineur étranger isolé » qui est employé, afin d'insister sur le statut d'étranger du jeune. En effet,
dans le rapport de la sénatrice, Isabelle Debré5, le terme utilisé est celui de « mineur isolé étranger »,
le but étant de mettre cette fois l'accent sur l'isolement du mineur plus que sur le fait qu'il soit étranger.
Lors d'une réunion du comité de suivi du dispositif national de mise à l'abri de ces mineurs le 7 mars
2016, Jean-Jacques Urvoas alors garde des Sceaux annonce que la qualification sera dorénavant
« mineurs non accompagnés ». Il permet de mettre l'accent sur l'isolement de ces jeunes tout en
signifiant que l'origine géographique importe peu dans leur prise en charge.
C'est pourquoi, je vais utiliser dans mon mémoire la qualification de MNA.
De qui parle-t-on en utilisant cet acronyme ?
Dans l'article 1 de sa Résolution du 26 juin 19976, concernant les mineurs non accompagnés
ressortissants de pays tiers, le Conseil de l’Union Européenne définit les Mineurs Étrangers Non
Accompagnés comme : « tous les nationaux de pays tiers de moins de 18 ans qui entrent dans le
territoire des États membres sans être accompagnés d’un adulte qui soit responsable d’eux par effet
de la loi ou de fait, et tant qu’ils ne soient pas effectivement à charge d’une telle personne (...) (tout
comme) les mineurs nationaux de pays tiers qui furent laissés seuls après être entrés dans le territoire
de l’État membre ».
Il s'agit donc de mineurs qui se sont engagés dans un parcours migratoire seuls et qui sont donc
privés de la protection de la famille, aucune personne majeure n'en étant responsable légalement. Ils
se trouvent donc dans une incapacité juridique à être représentés comme tout mineur étant sur le
territoire national.
5 DEBRE Isabelle. Les mineurs isolés étrangers en France. (Consulté le 04 décembre 2017) 6RÉSOLUTION DU CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE. Concernant les mineurs non accompagnés ressortissants
de pays tiers. 26 juin 1997. (97/C 221/03)
9
La réglementation française reprend la même définition. Si le statut juridique du MNA s’articule
autour de la protection, les textes n’ont pas élaboré un véritable statut solide. En effet, outre la loi du
14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant, c'est surtout un décret n° 2016-840 du 24 juin 2016
qui précise les conditions d’accueil, d’évaluation et d’orientation de ces mineurs entre les
départements. Par ailleurs, l’arrêté du 17 novembre 2016 pris en application du décret précité vient
préciser le référentiel national d’évaluation et de prise en charge des MNA conformément aux
dispositions du Code de l’Action Sociale et des Familles (CASF). La difficulté pour les autorités est
double : d'une part, des majeurs se faisant passer pour des mineurs pour profiter du principe de non
expulsion du territoire et d'autre part, la saturation des services de l’ASE de certains départements qui
ne répondent pas à leur obligation de mettre à l’abri ces mineurs.
II. Le cadre d'intervention de l'ASE auprès des MNA
Il s'agit de comprendre le cadre légal qui s'impose à l'ASE dans la prise en charge des MNA (A), puis
le rôle de l’État et de la PJJ dans l'accueil de ces jeunes (B). Et enfin de comprendre les différents
parcours migratoires entrepris par ces mineurs et ceux qui sont pris en charge par l'ASE et/ou par la
PJJ (C).
A. Le cadre légal de la prise en charge des MNA
La question se pose de savoir de quels champs juridiques relèvent – ils ? : Du droit des étrangers ?
Du droit d'asile ? Ou du droit de la protection de l'enfance ?
A partir de là, quel juge est alors compétent pour connaître leur situation ? Le juge des enfants ? Le
juge aux affaires familiales ? Le juge des tutelles ?
La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, la Loi du 14 mars 2016 relative à la
protection de l'enfance, ainsi que les articles L112-3 du CASF et l'article 375 du Code civil constituent
le socle législatif de la protection de l'enfance dans lequel les MNA entrent de plein droit. En effet,
étant mineur et en danger du fait de leur isolement sur le territoire, l'ASE se doit de les prendre en
charge.
L'article L112-3 du CASF introduit par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de
l'enfance prévoit que « la protection de l'enfance a également pour but de prévenir les difficultés que
peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur
10
famille et d'assurer leur prise en charge ».7
Ainsi la prise en charge des MNA relève de l'ASE, à qui ils sont confiés par le JE. Condition sine qua
non à l'admission du jeune dans cette institution, la minorité du jeune qui doit être établie.
Les départements sont donc chargés de l'accompagnement et désignés comme service gardien. En
2016, ils étaient 13 008 sur le territoire français, soit 27,6 % de plus qu'en 2015 selon le rapport annuel
d'activité 2016 de la mission « Mineurs non accompagnés ». En juin 2017, les derniers chiffres font
état d'environ 18 000 mineurs isolés pris en charge par les institutions.
Face à l'augmentation constante du nombre de mineurs arrivant sur le territoire, la question de la
capacité d'accueil se pose rapidement. Les départements se trouvent débordés de façon disparate,
certains vont être rapidement dépassés par ces prises en charge, et en difficulté pour répondre comme
ils le devraient aux conditions d'accueil et de mise à l'abri de ces mineurs, comme le Code de l'action
sociale et des familles les y obligent. Les Conseils départementaux se retrouvant alors seuls à gérer
financièrement les situations des MNA, mais également seuls dans l'accompagnement éducatif qu'ils
doivent mettre en place auprès de ces mineurs.
Il existe des débats en vue d’inciter l’État, sur lequel repose une obligation générale
d’hébergement d’urgence de toute personne, d’augmenter sa participation financière dans la prise en
charge assurée par les départements. La mission bipartite dirigée par l'inspection générale de
l'administration, des affaires sociales, de la justice et de l'assemblée des départements de France a
rendu un rapport le 15 février 2018 qui propose de réviser le montant des sommes allouées8
Ainsi sur mon lieu de stage, le service de la MEOMIE chargé de l'évaluation et de
l'accompagnement des MNA a été rapidement dépassé par le nombre de jeunes arrivants sur la
métropole. Lors d'un échange avec un travailleur social de cette structure, il m'a expliqué que chaque
éducateur « croulait » sous les situations de MNA et qu'ils sont tous désemparés face à l'arrivée
massive de mineurs se présentant au service. Chaque professionnel a en moyenne quatre-vingt dix
dossiers, ils n'ont donc pas le temps de faire un accompagnement individualisé auprès de chaque
jeune. La plupart des MNA, qu'ils soient en attente d'évaluation ou déjà déclarés mineur, sont logés à
l'hôtel et peuvent ne jamais voir d'éducateurs s'ils ne se déplacent pas à l'adresse de la MEOMIE.
C'est pourquoi l’État a dû intervenir pour faire face à ces pratiques disparates selon le département
d'accueil.
7LOI. N°2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance 8IGA, IGAS, IGJ, ADF. Mission bipartite de réflexion sur les mineurs non accompagnés. (Consulté en février 2018)
11
B. L'intervention de l’État et de la PJJ dans l'accueil des MNA
Face à ces difficultés, l’État intervient afin d'encadrer le statut des MNA et leur prise en charge.
La circulaire du 31 mai 20139, dite circulaire Taubira met en place un dispositif national de mise à
l'abri, d'évaluation et d'orientation des mineurs isolés étrangers au travers d'un protocole entre l’État
et les départements. Ce texte vise à harmoniser les pratiques entre les départements et à mieux répartir
les prises en charge dans le cadre de l'accueil à l'ASE. Cette circulaire a été partiellement invalidée
par le Conseil d’État en raison de la clef de répartition des MNA qu’elle prévoyait.
Désormais, l’État va intervenir dans la prise en charge des MNA. En effet, lorsqu'un jeune se
présente et se déclare comme étant mineur non accompagné dans un département, il doit être mis à
l'abri le temps que l'évaluation sociale soit faite. Jusqu'à présent, les Conseils départementaux géraient
et finançaient seuls cette phase. Avec la circulaire, l’État intervient désormais en assurant le
financement de cette période de mise à l'abri de cinq jours.
Durant cette période, le mineur qui s'est présenté comme MNA va être évalué afin de confirmer ou
non sa minorité. Un arrêté interministériel du 17 novembre 2016 vient fixer les modalités de
l'évaluation sociale. Elle porte sur six points : l'état civil, la composition familiale, les conditions de
vie dans le pays d'origine, les motifs du départ du pays d'origine et présentation du parcours migratoire,
condition de vie depuis l'arrivée en France et projet de la personne.10 Pour autant, le critère de la
vulnérabilité n’est pas visé par le texte.
Puis, une fois l'évaluation établissant la minorité de l'adolescent, la loi prévoit la saisine de la
cellule nationale d'orientation et de réparation des MNA sur l'ensemble du territoire national.
L'arrêté du 28 juin 2016 planifie les modalités de prise en charge des MNA par cette cellule (MMNA),
cette dernière est par ailleurs placée sous l'autorité de la Direction de la Protection Judiciaire de la
Jeunesse (DPJJ)11, et se situe à Paris. Les MNA ne vont donc pas nécessairement rester dans le
département qui a procédé à leur évaluation. L'objectif étant de répartir les mineurs entre les
départements afin que le coût de la prise en charge par l'ASE ne pèse pas que sur certains d'entre eux.
D'ailleurs, la loi du 14 mars 2016 est venue donner une assise législative au dispositif de répartition
9 MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Circulaire du 31 mai 2013 relative aux modalités de prise en charge des jeunes isolés
étrangers : dispositif national de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation 10 MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Arrêté du 17 novembre 2016 pris en application du décret n°2016-840 du 24 juin 2016
relatif aux modalités de l'évaluation des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur
famille 11MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Arrêté du 28 juin 2016 pris en application du décret n°2016-840 du 24 juin 2016 relatif
aux modalités de calcul de la clé de répartition des orientations des mineurs privés temporairement ou définitivement
de la protection de leur famille
12
des MNA sur le territoire national tout en réaffirmant qu'ils relèvent de la protection de l'enfance12.
La répartition des MNA sur le territoire se fait en fonction d'une clé de répartition, réintroduite par
l'arrêté du 28 juin 2016. Elle correspond à la part de la population de moins de 19 ans dans chaque
département mais également du nombre de MNA déjà confiés à l'ASE par décision judiciaire. Cette
clé de répartition avait déjà été introduite dans la circulaire Taubira du 31 mai 201313 avant que le
Conseil d’État l'annule partiellement sur ce point puisqu'une circulaire ne peut pas contenir des
éléments normatifs qui n'avaient pas été introduits auparavant dans une loi.
La répartition des missions d'évaluation et de mise à l'abri entre l'État et les départements pose
question et a fait l'objet d'un contentieux important devant la juridiction administrative. Nombreux
ont été les mineurs, aidés d’associations et d'avocats impliqués, à saisir l'office du juge en référé, afin
que ce dernier ordonne au département la mise en place d'une mesure de mise à l'abri du requérant.
En effet, la saturation des services de l'ASE de certains départements a conduit à des lacunes dans la
mise en œuvre de leur mission de protection. Certains départements réclament donc une intervention
plus importante de l’État.
J'ai eu connaissance pour la première fois de cette répartition à l'UEMO lorsqu'une éducatrice
m'a expliqué que la métropole était saturée par l'arrivée massive des MNA. Je me suis alors demandée
pourquoi elle l'était à ce point. Après avoir questionné les professionnels autour de moi, notamment
des éducateurs travaillant au SEAT (Service Éducatif Auprès du Tribunal), j'ai pu entendre que la
politique du Ministère Public de la juridiction de mon lieu de stage est de ne pas saisir la cellule PJJ
de Paris et de ne pas transmettre les chiffres des nouvelles évaluations déclarant des jeunes MNA.
Cela signifie qu 'un jeune reconnu MNA dans l'agglomération, ne sera pas redirigé vers un autre
département pour être pris en charge, mais restera sur le territoire en question. Je me suis alors
demandée pourquoi le Parquet tient cette politique ? Quel est son objectif ?
Dans le cadre de mes recherches, j'ai été en lien avec la cellule PJJ qui est chargée de la MMNA
et de la répartition sur le territoire national. La responsable avec qui j'ai pu avoir un entretien
téléphonique m'a en effet confirmé la position du Ministère public. D'après le cadre légal fixé par la
Loi du 14 mars 201614, lorsqu'un Conseil départemental déclare un jeune comme étant MNA, il
transmet l'information au Parquet, qui va saisir la cellule MMNA. Deux cas de figure vont être
12 LOI. N°2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfance (1) 13MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Circulaire du 31 mai 2013 relative aux modalités de prise en charge des jeunes isolés
étrangers : dispositif national de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation 14 LOI. N°2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfance (1)
13
envisagés : soit le jeune reste sur le département évaluateur, soit il est orienté vers un autre
département, selon la clef de répartition. Or, le Parquet de mon lieu de stage refuse de la saisir, les
mineurs restent donc tous dans le département du Rhône. Ce qui conduit à un nombre de mineurs
présents sur le territoire de mon lieu de stage plus important que sur d'autres. N'ayant plus de places
pour eux dans des structures éducatives, ils se retrouvent très souvent livrés à eux-mêmes en étant
hébergés dans des hôtels et nourris par des associations locales.
Lors d'un échange avec un substitut du Procureur, j'ai pu évoquer avec lui la saisine de la cellule
MMNA et la répartition des MNA sur le territoire national. Ce dernier m'a expliqué que la position
du tribunal était de ne pas faire remonter le nombre de mineurs reconnus MNA à la cellule nationale.
Il justifie cette pratique par le fait que le mineur n'est pas entendu et pris en compte dans le choix qui
est fait pour son orientation sur le territoire, alors que même sans famille, il peut avoir un groupe de
pairs et des attaches dans la métropole du Rhône. Pour lui, « les MNA ne sont pas des caisses dans
un entrepôt que l'on peut déplacer sans les consulter. » Le parquet fait preuve d’une position qui
semble soucieuse de la préservation des liens des MNA avec les personnes de leur communauté, mais
aussi au détriment de la capacité d'accueil limitée des structures socio-éducatives.
C. Les différents parcours migratoires des MNA
Lorsque l'on s'intéresse à la situation des MNA, des questions reviennent très fréquemment :
pour quelles raisons ont-ils quitté leur pays ? Pourquoi des jeunes décident-ils de tout quitter pour
partir sur les routes de l'exil ? L'ont-ils d'ailleurs décidé ?
C'est pour tenter de répondre à cette question, qu'Angélina Etiemble, docteur en sociologie a
étudié et identifié 5 profils de MNA accueillis sur le territoire français lors d'une première étude en
2002. Tout d'abord les « mineurs exilés » qui viennent de pays touchés par la guerre ou des conflits
ethniques, et fuient pour se protéger. Puis les « mineurs mandatés » par leurs familles afin d'avoir un
meilleur avenir en France, dont l'objectif est de réussir financièrement afin d'aider ceux restés au pays.
Les « mineurs exploités », eux, se retrouvent dans des réseaux de traite des êtres humains et sont
« objets » de leur départs. Quant aux « mineurs fugueurs », ils quittent leur famille, souvent pour fuir
des conflits et des maltraitances, la fugue les conduit loin de leur pays. Enfin, les « mineurs errants »
étaient déjà dans des situations d'errance dans leur pays d'origine . Ils sont livrés à eux-mêmes très
jeunes et vivent de mendicité ou de vols. L'errance devient une façon de vivre, ils se déplacent
beaucoup, sont souvent très jeunes et sous l'emprise de produits toxiques. Ils arrivent en France
14
généralement sans véritable projet et restent inscrit dans l'errance.15
En 2012, Angélina Etiemble actualise la typologie effectuée dans la précédente étude, avec
Omar Zanna, docteur en sociologie et en psychologie. Elle apporte des précisions sur les différents
profils qu'elle avait identifiés en 2002 et fait émerger deux nouveaux types de mineurs isolés.
Concernant le « mineur fugueur », elle fait une distinction entre le « primo-fugueur » qui une fois sur
le territoire français, ne souhaite pas poursuivre son parcours migratoire alors que le « fugueur-
réitérant », quant à lui, reproduit le schéma du départ sans cesse. Elle distingue le « mineur-dans la
rue » et le « mineur de la rue » dans la typologie du « mineur errant ». Le premier, s'inscrit dans
l'errance sur le territoire de l'Europe, dans la délinquance et la toxicomanie alors que le second
concernent d'avantage des jeunes âgés de 9 à 13 ans, qui, échappant à la précarité familiale se
retrouvent en petits groupes dans la rue, à vivre de la débrouille.
Angélina Etiemble ajoute deux nouvelles figures aux MNA. Tout d'abord celle du « mineur-
rejoignant » dont l'émigration est motivée par le projet de rejoindre un proche sur le territoire national.
La seconde figure étant celle du « mineur-aspirant » qui s'est engagé dans une quête personnelle, la
migration lui permettant de s'accomplir en tant qu'individu.16
L'auteur de ces études invite à la prudence en précisant que la typologie est « réductrice »17, et
peut entraîner des raccourcis en alimentant les clichés que l'on peut se faire d'un jeune en fonction de
son pays d'origine. En effet, il paraît important de garder à l'esprit que chaque situation de ces mineurs
est différente et que ces typologies n'apportent pas un savoir absolu sur leurs parcours. D'ailleurs les
sept profils qui ont émergé de cette typologie ne sont pas figés. Les mineurs que nous sommes amenés
à rencontrer n'entrent pas nécessairement dans un seul profil, ce dernier peut évoluer entre son départ
du pays et son arrivée en France, passant du « mandaté »18 à «l'exploité »19 s'il doit travailler pour
payer sa dette au passeur par exemple.
Cette typologie permet d'apporter aux professionnels une meilleure compréhension de la présence de
ces jeunes sur le territoire français et également de leur adhésion dans le projet de départ. Ce dernier
point met en lumière le rapport qu'ont ces jeunes avec la protection proposée en France.
Au cours de plusieurs échanges avec des travailleurs sociaux, j'ai pu observer une différence de
profils entre les jeunes accueillis à l'ASE et à la PJJ. L'étude de ces typologies m'a permis de mieux
15ETIEMBLE Angélina. Les mineurs isolés étrangers en France : évaluation quantitative de la population accueillie à
l'Aide Sociale à l'Enfance. Les termes de l'accueil et de la prise en charge. pp 61-64 Consulté en décembre 2017) 16ETIEMBLE Angélina ; ZANNA Omar. Des typologies pour faire connaissance avec les mineurs isolés étrangers et
mieux les accompagner. pp 09-13 (Consulté en décembre 2017) 17Ibid. p.6 18Ibid. p. 9 19Ibid. p. 10
15
comprendre les enjeux de leur départ et les attentes qu'ils peuvent avoir lors de leur arrivée en France.
En effet, en me référant aux profils d'Angélina Etiemble, la PJJ accueille et prend en charge surtout
des mineurs fugueurs ou errants. Ils étaient pour beaucoup déjà dans une situation de grande précarité
et d'errance dans leur pays d'origine, vivant en petits groupes et inscrits dans la délinquance pour
survivre, ils reproduisent ce schéma de vie en France. Ils n'ont pas de réel projet de vie en France et
ne sont pas en demande de protection ou « sollicitant une mise à l'abri plus qu'une réelle
protection »20
Alors que l'ASE accompagne d'avantage des mineurs exilés ou mandatés, qu'ils aient été associés ou
non par leurs proches au projet migratoire, ils arrivent en France avec un projet de vie. Ils vont être
plus enclins à accepter l'aide proposée par les institutions.
Quoiqu'il en soit, même s'ils n'arrivent pas en France avec des projets et des parcours de vie
différents, ils ont tous un vécu fait de ruptures sur les routes de la migration, qu'elles soient culturelles,
sociales ou familiales, et ils ont tous connu des parcours traumatiques. Les professionnels qui les
prennent en charge, quelque soit l'institution, peuvent se trouver démunis face à des problématiques
différentes de celles des mineurs de droit commun. Ce public peut se montrer davantage fuyant face
aux adultes au vu de leurs histoires et l'entrée en lien avec ces jeunes peut être difficile.
Après avoir posé le cadre d'intervention des différents acteurs dans l'accompagnement des MNA, il
s'agit de mettre en lumière les difficultés entourant ces prises en charge.
20Ibid. p. 12
16
Partie 2. Les freins dans la prise en charge des MNA
Dans cette partie, seront envisagées les difficultés rencontrées tant par les éducateurs PJJ (I) que par
les mineurs non accompagnés (II).
I. Les difficultés rencontrées par les éducateurs dans la prise en charge des MNA
L'accompagnement des MNA va venir bouleverser les pratiques des éducateurs, par l'absence des
parents (A). Face à ces prises en charge les professionnels peuvent se sentir impuissants et isolés (B).
A. Travailler sans les représentants légaux du mineur
Parmi les missions de l'éducateur au sein de la PJJ, l'une d'entre elles est de travailler avec la
famille du mineur et d'être le lien avec elle. Même si la prise en charge s'oriente principalement en
direction du jeune, les parents étant chargés selon la loi de l'entretien, de l'éducation et de la protection
de leur enfant21, il est nécessaire de les impliquer dans toute action d'éducation afin de préserver leur
place et leur rôle.
D'autant que l'intervention des professionnels se déroule sur une période plus ou moins longue selon
la mesure, mais ils n'ont pas vocation à rester dans la vie du jeune, à la différence des parents. Il est
donc nécessaire de travailler avec les représentants légaux, pour qu'ils soient acteurs dans la vie de
leur enfant. Aussi, la note du 22 octobre 2015 rappelle « le cadre et le contenu du travail avec les
familles en milieu ouvert » en précisant que « toutes les prises en charge se construisent en
association avec le jeune majeur ou le mineur et sa famille ou ses représentants légaux dans le respect
de l'autorité parentale et de la ou des décision(s) judiciaire(s) ».22 Ainsi, les représentants légaux sont
les interlocuteurs privilégiés des éducateurs puisque l'autorité parentale vient pallier les incapacités
juridiques qui participent à la définition du mineur.
Le projet de service de l'UEMO sur laquelle j'effectue mon stage prévoit que les parents soient
associés à la prise en charge de leur enfant tout au long de la mesure et selon différentes modalités.
21CODE CIVIL. Article 371-2 22SULTAN Catherine. Note du 22 octobre 2015 relative à l'action éducative en milieu ouvert au sein des services de la
protection judiciaire de la jeunesse. p.3
17
Ils sont présents dès l'entretien d'accueil afin de présenter l'unité, la ou les mesure(s) et de pouvoir
recueillir leurs observations, attentes et craintes. Le Document Individuel de Prise en Charge23 (DIPC)
est par ailleurs rempli avec tous les protagonistes présents afin de fixer les finalités de l'intervention
éducative et les modalités de prise en charge, il est signé par chacun. Ce document vient donc
formaliser le contenu de la relation éducative.
Des entretiens familiaux peuvent être mis en place dans le but d'apporter des éléments de
compréhension sur la dynamique familiale, la place de chacun et les difficultés que la famille peut
rencontrer. Des Visites A Domicile (VAD) peuvent également être un support de l'action éducative,
pour apporter des éléments sur l'environnement du jeune, tout en respectant la vie privée et familiale.
Le travail avec les familles est donc inscrit dans les pratiques professionnelles des éducateurs PJJ.
Cependant, la prise en charge des MNA vient bouleverser les savoir-faire des professionnels.
Par essence, le MNA se retrouve seul et sans représentant légal sur le territoire national. Les
professionnels ne peuvent donc pas s'appuyer sur la famille et ses ressources pour comprendre la
dynamique familiale et les difficultés rencontrées par le jeune. Ce dernier est donc le seul interlocuteur
pour parler de sa situation et les éducateurs ne peuvent recueillir que sa parole.
L'absence des parents vient donc heurter les pratiques des professionnels, ces derniers n'étant pas
habitué à travailler sans eux dans les prises en charge. Un partenaire central est alors absent en ce qui
concerne les MNA.
En effet, le fait que la famille ne soit pas présente sur le territoire vient bousculer la prise en
charge du jeune sur de nombreux aspects. D'abord, il y a la question de la garantie de représentation
lors du défèrement d'un jeune. Les réquisitions du Parquet, sur mon lieu de stage, vont très rapidement
le mandat de dépôt, d'autant plus si le jeune est hébergé en hôtel et non pas en établissement
d'hébergement. Cette position est énoncée par l'article 144 du Code de procédure pénale prévoit la
détention provisoire pour « garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de
la justice.»24
C'est le cas d'Ali, le jeune rencontré lors de sa sortie de l'EPM, il s'agissait de sa première infraction
et un mandat de dépôt a été demandé, il vivait alors dans la rue et la condition de garantie de
représentation n'était pas remplie. Là encore, des difficultés se posent dans la prise en charge du jeune
puisqu'il faut élaborer un projet de sortie et les éducateurs ne peuvent pas s'appuyer sur la famille
23Le DIPC est prévu à l'article L 311-4 du Code de l'action sociale et des familles : « le document individuel de prise en
charge définit les objectifs et la nature de la prise en charge ou de l'accompagnement dans le respect des principes
déontologiques et éthiques, des recommandations de bonnes pratiques professionnelles et du projet d'établissement
ou de service. »
24CODE DE PROCÉDURE PÉNALE. Article 144 5°
18
pour prendre le relais.
Puis, l'absence des parents peut conduire les professionnels à un sentiment de solitude face à la
réalité de la prise en charge des MNA, lorsqu'il s'agit de trouver une solution d'hébergement, de gérer
les problèmes de santé du jeune et l'inquiétude également lorsque l'on est sans nouvelle du jeune qui
vit à l'hôtel. C'est ainsi le cas avec Amir, après avoir été placé dans un établissement d'hébergement
pour une durée de six mois, celui-ci a demandé la main levée de l'OPP suite à des violences de la part
du jeune sur un professionnel. La MEOMIE l'a alors placé dans un hôtel. Nous n'avons donc plus
d'interlocuteurs pour évoquer la situation d'Amir, et seul le lien téléphonique nous permet de garder
le contact avec lui.
Cependant je m'interroge sur l'absence de la famille sur le territoire dû à l'isolement du mineur :
Cette absence doit-elle également être omise dans le discours des éducateurs ? En effet, j'ai pu
constater à travers les entretiens faits avec des MNA, que les questions de la famille, du passé sont
très peu abordées. D'ailleurs lors d'un entretien avec un MNA, j'ai été confrontée à la difficulté
d'aborder avec lui la question de son histoire, de sa famille et de son parcours. Avec le recul, je
m'interroge sur ma posture durant l'entretien : je craignais d'être maladroite dans mes questions, d'être
intrusive et de le mettre en difficulté.
Julien Bricaud dans son ouvrage relève que « les travailleurs sociaux abordent la question avec
précaution, voir circonspection »25, partant peut-être du principe que le travail avec les parents est
impossible. Pour autant, il appartient aux éducateurs de les faire vivre dans leurs discours, de les
inscrire dans une filiation, mais également si le jeune en a l'envie et la possibilité d'entrer en contact
avec eux. Pour l'auteur, les MNA se retrouvent pris entre un projet de départ et l'acceptation d'être
parti, entre les liens qu'ils ont dans leur pays et les liens qu'ils construisent ici. L'éducateur est alors
là pour faire le lien entre sa vie passée et sa nouvelle vie ici, et lui permettre de se resituer dans son
histoire.26
Juliette Leconte, psychologue clinicienne à France Terre d'Asile vient corroborer la vision que Julien
Bricaud a du travail à mettre en œuvre avec les familles des MNA, puisqu'elle peut expliquer dans un
article que « le lien à la famille, lorsqu'il est possible, est primordial. (..) Ce lien est important car il
permet de faire des ponts entre ici et là-bas. »27
Même si contacter la famille restée au pays n'est pas toujours possible, il me semble important
25BRICAUD Julien. Op. Cit. 2012, p. 185 26Étude Approfondie de Notions à d'un Ouvrage (EANO) de GOUGEON Léa. 2018 27LECONTE Juliette. Construire un cadre rassurant pour la prise en charge complexe des mineurs isolés étrangers. pp.
53-61 (Consulté en février 2018)
19
de pouvoir aborder ce sujet avec eux, afin de leur offrir un espace de parole où ils peuvent faire vivre
à travers des mots leurs parents mais également leurs souvenirs. C'est aussi signifier aux jeunes que
l'éducateur est là pour les aider à retrouver une place dans leur histoire de vie.
Les éducateurs occupant alors la fonction d'un « passeur entre deux mondes »28.
En dépit de la qualité « d'isolement » caractérisant les MNA, et sous réserve que chaque histoire
migratoire est singulière, il pourrait être possible d'entamer un contact avec la famille puisque la
majorité des MNA possède un téléphone portable qui constitue la seule garantie de conserver un lien
familial indispensable pour eux. Néanmoins, la barrière de la langue est un obstacle majeur.
Toutefois, lorsqu'un administrateur ad hoc est désigné, celui-ci deviendra un acteur incontournable
pour l'éducateur assurant le suivi.
B. L'impuissance et l'isolement de l'éducateur dans l'accompagnement des MNA
La mission des éducateurs PJJ est d'accompagner le mineur dans son insertion sociale et
professionnelle en élaborant un projet individuel conjointement avec le mineur et sa famille afin de
favoriser son évolution et de prévenir la réitération. Les objectifs vont être différents selon le jeune et
ses besoins, la prise en charge est individualisée : travail sur l'insertion professionnelle, sociale, travail
sur la santé, avec la famille, autour du passage à l'acte, le respect de ses obligations si le JE en a
ordonnées, la préparation aux audiences. Le contenu de la prise en charge est travaillé au sein de
chaque service dans le projet pédagogique d'unité.
L'éducateur est présent dans la vie du jeune durant une période plus ou moins longue selon la mesure,
mais avec une durée déterminée. C'est un temps au cours duquel, à travers des échanges, l'éducateur
amène le jeune à s'interroger, à mieux se connaître, à prendre du recul sur sa situation, sur l'acte
reproché, avec humilité. Il le (re)met dans une position d'acteur de sa vie, et a conscience que tout
changement ne peut être impulsé que par le jeune lui-même, l'adolescent repart avec des nouvelles
cartes en mains, en ayant conscience que lui seul peut agir. Philippe Meirieu dit à ce propos que
« l'acte éducatif se réalise quand la présence de l'éducateur n'est plus nécessaire, l' « usager » ayant
repris son destin en main ».29
D'où parfois ce sentiment d'impuissance existant chez les éducateurs. Les éducatrices de mon service
m'ont fait part de ce ressenti encore plus prégnant lorsqu'il s'agit de la prise en charge des MNA.
Claire m'explique que lorsqu'elle reçoit un MNA en entretien, les premières questions qu'elle se pose
28 L'ONPE ; Collectif Babel. L'accompagnement des mineurs isolés étrangers : comment travailler avec des familles à
distance? pp. 191-197 (Consulté en février 2018) 29TIMMERMAN Virginie. Récit d'un accompagnement éducatif. (Consulté en avril 2018)
20
sont : « Est-ce qu'il a un lieu d'habitation ? Où mange-t-il ? Toutes ces questions sont secondaires
chez un autre jeune, alors que pour eux c'est prioritaire. Le fait d'être isolé ne le lie nulle part, est-ce
qu'il va pouvoir venir jusqu'au service régulièrement ? Si on leur offrait une prise en charge avec une
scolarité, un toit et de quoi subvenir à leurs besoins, on ne se poserait pas toutes ces questions et on
ne serait pas réduit à leur renvoyer notre impuissance. »30
Isabelle, quant à elle, a pu me dire qu'elle se sentait « impuissante dans la prise en charge de ses
mineurs, quelle formation leur proposer ? Où les orienter lorsqu'ils ont besoin de voir un
psychologue ? J'ai l'impression de ne pas savoir faire avec ces jeunes». 31 Face à ce sentiment
d'insuffisance, elle s'est aperçue qu'elle mettait des barrières avec ces jeunes afin de ne pas être trop
impactée par leur situation.
Un des enjeux que j'ai pu relever dans le travail d'éducateur en milieu ouvert est d'arriver à créer
du lien avec les jeunes, mais plus encore avec les MNA. En effet, la relation va se créer au fur et à
mesure des rencontres, avec le temps, à la différence des hébergements les prenant en charge
quotidiennement. Souvent l'éducateur n'a pas ce temps nécessaire à la création du lien, et la relation
éducative va être mise à mal lorsque le mineur disparaît plusieurs semaines, ne répondant plus aux
convocations ou au téléphone. Elle peut également ne jamais exister lorsque le jeune ne répond à
aucune convocation. L'éducateur se trouve alors démuni et impuissant dans cette situation, ne sachant
comment faire pour le rencontrer. La majorité des MNA suivi par l'UEMO dans laquelle je réalise
mon stage, est hébergée en hôtel, nous ne disposons donc que d'une adresse. Si l'adolescent ne se
présente pas, nous essayons de joindre le gérant de l'établissement afin de savoir s'il est toujours
hébergé et s'il occupe sa chambre. Si c'est le cas, l'éducateur peut se déplacer afin de le rencontrer et
de se présenter. Certains jeunes resteront des noms sur des dossiers, sans que l'éducateur puisse un
jour y mettre un visage.
Claire suivait un jeune, qui a très vite investi la relation et avec lequel elle était en lien. Il était hébergé
à l'hôtel, souhaitait aller rapidement à l'école pour apprendre le français et en attendant de pouvoir s'y
rendre, lisait beaucoup seul dans sa chambre pour progresser. Puis, du jour au lendemain, il n'est plus
venu aux rendez-vous et ne répondait plus au téléphone. « On se sent impuissant dans ces situations,
on ne sait pas comment les saisir, ce sont des jeunes qui sont ancrés nulle part, on est isolé».32
Lorsque des mineurs ne répondent plus aux convocations, il n'est pas rare d'avoir de leurs nouvelles
suite à un déferrement, le SEAT appelle alors l'UEMO pour en apprendre d'avantage sur ce jeune et
sur son accompagnement.
30ANNEXE N°2 31ANNEXE N°3 32ANNEXE N°2
21
J'ai fait le choix d'évoquer l'impuissance avant l'isolement dans la construction de mon plan,
mais les deux sont étroitement liés. De l'impuissance de l'éducateur naît son isolement, mais du fait
de son isolement, il se sent impuissant.
L'isolement est défini comme l' « État de quelqu'un qui est moralement seul – séparation d'un
individu ou d'un groupe d'individus des autres membres de la société ».33 L'isolement du MNA
induirait donc l'isolement de l'éducateur ?
Être éducateur en milieu ouvert peut être synonyme d'isolement étant donné qu'il est seul avec
ses prises en charge. Mais pour éviter ce ressenti, l'éducateur peut s'appuyer sur les différents
professionnels travaillant sur son service, et c'est alors tout l'intérêt du travail en pluridisciplinarité :
penser ensemble, se décaler et prendre du recul sur une situation. Il y a également les partenaires
extérieurs avec qui l'éducateur peut échanger.
Ce sentiment d'isolement, partagé par les professionnels que j'ai pu rencontrer, naît tout d'abord
de l'absence d'interlocuteurs avec qui échanger sur la situation de ces mineurs. La MEOMIE, service
gardien des MNA sur le territoire de mon lieu de stage, est totalement dépassée par le nombre de
MNA à prendre en charge. Les travailleurs sociaux n'ont pas les moyens de suivre ces jeunes et d'être
en lien avec les éducateurs PJJ. Ces derniers se retrouvent seuls à penser un projet pour ces mineurs.
Les MNA doivent pouvoir bénéficier de la désignation par le Juge aux Affaires Familiales (JAF) d'un
administrateur ad hoc, en vertu de l'article 17 de la loi du 04 mars 2002 relative à l'autorité parentale :
« l'administrateur ad hoc assure également la représentation du mineur dans toutes les procédures
administratives et juridictionnelles afférentes à son entrée sur le territoire national. (…) Assure sa
représentation dans le cadre de procédures administratives et juridictionnelles relatives à la demande
de reconnaissance de la qualité de réfugié ».34
Cependant sur le territoire de mon lieu de stage, il n'y en a pas de désigné. Lors d'un entretien réalisé
avec un JE, j'ai pu l'interroger à ce sujet. Pour lui, ça doit être au JAF de connaître de la situation des
MNA et pas au JE, puisque ce dernier intervient sur l'autorité parentale, question qui ne se pose pas
avec ces mineurs. Mais dans la pratique, les JE ne saisissent pas le JAF pour qu'il statue sur une
mesure de tutelle, car ils partent du postulat que le mineur ne restera pas dans la métropole et de faite
il ne sert à rien de lancer une procédure qui n'aboutira pas du fait de son absence.
L'isolement des éducateurs s'observe également durant les prises en charge des MNA et dans
les diverses démarches devant être mises en œuvre. Ils peuvent se sentir seuls, sans connaissance des
33LAROUSSE. Définition : isolement. (Consulté en avril 2018) 34
LOI. N° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale
22
structures vers lesquelles orienter les jeunes notamment en termes d'insertion professionnelle et de
soins psychiatriques.
Concernant l'insertion scolaire et professionnelle, les éducateurs travaillant en milieu ouvert
savent prendre en charge et accompagner des mineurs étant sortis du système scolaire ou en phase de
décrocher, n'ayant plus de rythme au quotidien. Un travail peut se mettre en place en lien avec
l'établissement scolaire, s'ils sont encore inscrits, pour avoir un emploi du temps aménagé par exemple.
L'Unité Éducative d'Activité de Jour (UEAJ) peut également accueillir ces jeunes pour qu'ils
reprennent progressivement un rythme de vie, leur permettant ainsi de reprendre une scolarité, de
réaliser des stages en entreprise pour intégrer par la suite une formation ou d'être sur le marché du
travail s'ils ont plus de seize ans. De plus, l'éducateur peut solliciter un réseau de partenaires en vue
de travailler l'orientation du jeune, tels que la Mission Locale, le Centre d'Information et d'Orientation
(CIO), pôle emploi ou la cellule emploi (dépendant de la préfecture).
Dans la prise en charge des MNA, les éducateurs doivent faire face à d'autres difficultés que
celles rencontrées avec les mineurs de droit commun. Tout d'abord, il s'agit de pouvoir orienter le
MNA vers une structure. Arrivant de pays étrangers, le jeune doit passer une évaluation afin de
connaître son niveau linguistique et qu'il puisse être par la suite orienté vers des cours de Français
Langue Étrangère (FLE). Cependant, les délais sont très longs sur la métropole entre le moment où
ils ont un entretien au CIO et celui où ils sont convoqués par le CASNAV (Centre Académique pour
la Scolarisation des enfants allophones Nouvellement Arrivés et des enfants issus de familles
itinérantes et de voyageurs) pour réaliser les tests et être orientés par la suite vers une structure,
comme en témoigne Claire : « J'ai une mesure pour un MNA, il souhaite aller à l'école apprendre le
français, il a été au rendez-vous au CIO, mais la date à laquelle il va pouvoir passer les tests pour
connaître son niveau est dans deux mois ».35 Devant ce constat de ne pas savoir quoi proposer aux
jeunes et où les orienter, les éducateurs peuvent se sentir isolés, et impuissants.
La majorité des MNA rencontrés souhaite aller rapidement à l'école pour apprendre le français, puis
suivre une formation qualifiante, pour pouvoir s'insérer et gagner de l'argent. Cette préoccupation
financière prend beaucoup de place parce qu'ils doivent rembourser une dette, envoyer de l'argent à
leur famille restée au pays ou encore pour être indépendant et s'autonomiser.
Cependant, pour pouvoir s'inscrire dans une telle formation, permettant d'être rapidement sur le
marché du travail, il faut pouvoir présenter des papiers d'identité, ce qui est un réel problème dans la
situation administrative des MNA.
35ANNEXE N°2
23
Eva Lemaire explique l'importance pour l'avenir des MNA sur le territoire national de
« S’inscrire avec succès dans une scolarisation en France est donc non seulement primordial dans
une optique de régularisation, mais cette inscription est également fondamentale en ce qu’elle
détermine la possibilité, pour les mineurs isolés, de continuer à bénéficier de l’aide sociale, éducative
et financière de l’Aide sociale à l’enfance à leur majorité.36 […] Cette pression est encore accentuée
par le fait que, pour relever le défi d’une scolarisation réussie, les mineurs étrangers isolés, arrivés
en moyenne à l’âge de seize ans, ne disposent que de très peu de temps ; et ce, alors que beaucoup
sont non-francophones, ont souvent un faible niveau scolaire et ne sont pas toujours accueillis dans
les structures scolaires adéquates. »37 Absence de papiers d'identité, manque de temps, les MNA
doivent s'insérer pour espérer obtenir un titre de séjour salarié ou travailleur temporaire à 18 ans ou
continuer d'être pris en charge par l'ASE après majorité, mais pour pouvoir s'inscrire dans des
formations, les papiers d'identité sont nécessaires.
. Une autre difficulté se présente aux jeunes comme aux éducateurs, lorsque le JE ordonne pour
un MNA un contrôle judiciaire avec l'obligation de suivre de façon régulière une formation
professionnelle jusqu'à sa majorité. Le professionnel doit permettre au mineur de respecter ses
obligations, mais au vue de ce qui a été évoqué précédemment avec l'absence de documents d'identité,
il est difficile de l'inscrire dans une formation, et donc pour lui d'être en capacité de respecter son
contrôle judiciaire. Le jeune peut également ressentir de la colère face à cette obligation dont il
aimerait s'acquitter mais qu'il est compliqué de mettre en place.
Dans la situation d'Amir, lorsqu'il était placé par OPP dans un foyer de l'ASE, il suivait une scolarité
au sein d'un collège dans une classe UP2A (Unité Pédagogique pour élèves Allophones Arrivants). Il
était investi dans les apprentissages et progressait dans la maîtrise du français. Ses professeurs
décrivaient un jeune motivé, intelligent et moteur au sein de la classe. Il avait une heure de trajet
quotidien pour se rendre à l'école, et malgré quelques absences, il se montrait assidu. Les éducateurs
du lieu d'hébergement l'aidaient à se lever le matin et à faire ses devoirs. Seulement, lorsqu'Amir a
été hébergé à l'hôtel suite à l'exclusion du foyer, il se rendait de moins en moins en classe. Lorsque
nous contactions ses professeurs, ils nous rapportaient ne plus reconnaître le jeune qu'ils avaient
accueilli quelques mois auparavant. Il arrivait toujours en retard, fatigué et éteint. Nous avons tenté
de le remobiliser pour qu'il retourne au collège après les vacances scolaires sans succès, et maintenant
qu'il n'est plus, non plus hébergé à l'hôtel et que nous n'avons plus de contact avec lui, la priorité ne
36L'auteur fait référence ici au « contrat jeune majeur » prévu à l'article L222-5 du Code de l'action sociale et des familles,
« les majeurs de moins de vingt et un ans qui éprouvent des difficultés d'insertion sociale faute de ressources ou d'un
soutien familial suffisants » peuvent être pris en charge temporairement par l'ASE. 37LEMAIRE Eva. La place des mineurs étrangers isolés dans l'espace scolaire français : quelles conséquences sur le
rapport à l'apprentissage ?. (Consulté en avril 2018)
24
semble plus être pour lui son insertion scolaire.
Lors de mes échanges avec les éducateurs, Isabelle avec qui je suis Amir m'a fait part de son
« impuissance dans cette situation et du fait que le travail avec les MNA sur l'insertion professionnelle
et scolaire est difficile car on leur demande de tenir un rythme qu'ils n'ont pour beaucoup plus ou
peut-être jamais eu. »38
Claire a relevé « qu'il est difficile d'inscrire ces MNA dans le droit commun et qu'elle passe beaucoup
de temps à faire des recherches et a appelé des structures sans avoir de résultats probants. »39
Les éducateurs se retrouvent donc bloqués dans l'insertion scolaire et professionnelle du MNA pris
en charge.
Sur la question du soin, l'isolement des éducateurs transparaît également, qu'il s'agisse d'une
obligation dans le cadre d'un contrôle judiciaire ou d'un réel besoin face aux souffrances des MNA.
Que ce soit pour Amir, Ali ou les autres MNA que j'ai eu l'occasion de rencontrer durant mon stage,
il s'avère qu'ils ont besoin d'être pris en charge par le biais du soin, pour des problèmes physiques
comme psychiques : douleurs, angoisses, automutilations, problèmes de sommeil, consommations de
diverses substances (drogues, alcool, médicaments). Leurs vies au pays d'origine, le départ, le
parcours migratoire, tant d'éléments qui ont pu être traumatiques.
Les éducateurs se font une idée des traumatismes qu'ils ont pu vivre : l'errance, la route pour venir
jusqu'ici faite de violences, d'arrestations, d'exploitations, mais sont démunis quand il s'agit de les
orienter vers des structures spécialisées pour ces prises en charge, où la présence d'un interprète est
primordiale pour que le jeune puisse être compris. Lors d'un échange avec une psychologue
rencontrant des MNA dans une structure les accueillant, celle-ci m'a expliqué que « l'interprète
permettait au jeune de parler sa langue natale et de se reconnecter ainsi avec ses racines mais
également d'éviter la relation duelle avec la psychologue, car dans de nombreuses cultures et pays
d'où la plupart des MNA arrivent, le collectif est primordial et il est compliqué et anxiogène pour eux
d'être en face à face avec un adulte ».
De plus, il est difficile d'obtenir l'adhésion d'un jeune pour l'amener à consulter un médecin, un
psychologue ou dans une association spécialisée dans l'addictologie.
Pour finir, concernant les documents administratifs, le sentiment d'isolement des éducateurs est
également présent. La principale difficulté que j'ai pu constater chez les éducateurs est de ne pas
savoir où aller chercher les bonnes informations au vu de l'évolution des dispositions législatives et
de ne pas avoir d'interlocuteur pour répondre aux différentes questions selon chaque situation : s'il a
38ANNEXE N°3 39ANNEXE N°2
25
été pris en charge par l'ASE avant ses seize ans, ou entre ses seize et dix-huit ans, s'il a une formation,
s'il obtiendra un titre de séjour et si le fait qu'il soit pris en charge par la PJJ ne lui portera pas préjudice
pour ses demandes de régularisation à majorité ?
Tout ceci, peut donner le sentiment aux professionnels d'être dépassés dans leurs pratiques et de ne
pas savoir prendre en charge ses jeunes, avec des difficultés différentes de celles rencontrées par les
mineurs de droit commun.
II. Les difficultés des MNA à investir l'accompagnement éducatif
Le soupçon des éducateurs va venir se cristalliser autour des dires du mineur, et empêcher la relation
de confiance de se mettre en place (A). Beaucoup de MNA ont pour mode de vie l'errance, ce qui va
rendre difficile l'accompagnement par les professionnels de ces jeunes (B).
A. Le mensonge source de soupçon de la part des professionnels
Lorsque je me suis intéressée à la question des MNA, j'ai pu entendre les interrogations que
leurs prises en charge suscitent et qui reviennent régulièrement : Est-il vraiment mineur ? Vient-il
réellement de ce pays-là ? N'a-t-il pas de la famille ?
Le titre de l'ouvrage de Julien Bricaud m'a alors interpellé « Accueillir les jeunes migrants : les
mineurs isolés étrangers à l'épreuve du soupçon » et m'a permis de m'interroger sur l'origine de la
naissance du soupçon chez les éducateurs et la place du mensonge.
L'auteur évoque les différents mensonges que les MNA peuvent livrer aux éducateurs. D'abord, il y
l'âge, de nombreux jeunes sont soupçonnés « d'avoir un âge différent de celui qu'ils annoncent »40
afin de pouvoir être pris en charge par les institutions. Le physique de ces mineurs et l'absence de
documents d'identité pouvant indiquer leur âge sont autant d'éléments qui ne font que renforcer le
doute. Ensuite, le jeune peut mentir sur sa nationalité, Julien Bricaud fait l'hypothèse que ce mensonge
permet de « protéger les réseaux de passage ou les réseaux criminels, mais aussi de limiter les
chances de réacheminement. » Durant un entretien auquel j'ai pu assister lors d'un défèrement d'un
MNA et de son passage devant l'éducateur du SEAT, le mensonge sur la nationalité du jeune a été
révélé par l'interprète présent ce jour, qui a pu dire « au vu de sa manière de parler et des mots qu'il
emploie, il n'est pas marocain mais algérien. » Ce qui a conduit à douter de la véracités de ses dires
lorsque le mineur nous fait le récit de sa vie.
40BRICAUD Julien. Op. Cit. 2012, p. 50
26
Puis, le nom peut être l'objet de mensonges, s'il a été changé, pour qu'il soit le même que celui utilisé
sur le passeport avec lequel le MNA voyage ou pour couvrir la fuite d'un pays. Le jeune Amir a donné
lors de chacun de ses déferrements une identité différente, une lettre était changée ou ajoutée même
si la sonorité restait sensiblement proche d'un nom à l'autre. Il a donc plusieurs mesures dans différents
cabinets de JE, le Parquet a même découvert qu'il était connu au tribunal sous seize alias. Le fait
d'avoir donné un nom modifié à chaque fois lui a permis de ne pas apparaître dans les fichiers du
tribunal comme étant déjà connu et ayant déjà des mesures dans d'autres cabinets. Ainsi, il n'a pu
éviter des sanctions plus graves.
Pour finir, le récit du voyage est modifié « par obligation vis-à-vis des passeurs », tout comme
l'isolement et les relations avec la famille au pays cachés par crainte que leur situation de MNA soit
remise en question. Le parcours qu'Amir et Ali ont pu nous raconter sont sensiblement les mêmes :
tous les deux orphelins, avec des parents qui sont décédés brutalement.41
Je me suis alors demandée en quoi les mensonges racontés par les MNA avaient un impact sur le
travail des éducateurs ?
Au sein de mon service, les éducateurs ont pu me rapporter avoir déjà été confrontés à des
mensonges ou amenés à en soupçonner dans les dires des MNA. L'éducatrice qui suit Ali a noté des
« incohérence dans le récit de son voyage, il dit avoir traversé à la nage le détroit Ceuta, ce qui est
impossible ».
Pour Isabelle, « l'histoire que les MNA nous racontent n'est pas authentique, ils récitent des choses,
peut être en mêlant des éléments de vérité mais on n'arrive pas à démêler le vrai du faux. Je pense
que ça vient biaiser la relation de confiance entre l'éducateur et le jeune. Ils ont des parcours
migratoires pour beaucoup remplis de souffrance, et ils n'ont certainement pas dû rencontrer
beaucoup d'adultes bienveillants. Donc ils n'arrivent plus à faire confiance à des adultes. Ou peut
être avec du temps. »42
En milieu ouvert, la relation éducative entre l'éducateur PJJ et le jeune se base et se créée
principalement autour des entretiens éducatifs menés au service. Pour Maurice Capul et Michel
Lemay, « les échanges verbaux occupent une place importante dans le déroulement des interventions
éducatives. » 43 En effet, à partir de ce que le jeune apporte de sa vie et de sa situation, l'éducateur va
avoir des éléments d'analyse pour mieux comprendre les ressources dont il dispose et les difficultés
sur lesquelles il pourra l'amener à travailler. Parfois quand un jeune peine à se livrer ou qu'il n'est pas
41Étude Approfondie de Notions à d'un Ouvrage (EANO) de GOUGEON Léa. 2018 42ANNEXE N°3 43CAPUL Maurice ; LEMAY Michel. De l'éducation spécialisée. 1996, p. 205
27
en lien avec son éducateur, ce dernier peut s'appuyer sur les différents acteurs qui entourent le jeune,
à savoir sa famille, son établissement scolaire s'il est scolarisé, ou de soin s'il y en a. Il pourra alors
avoir des éléments de compréhension sur ce jeune et peut alors penser à la manière d'entrer en relation
avec lui. L'éducateur a également la possibilité d'aller le voir à domicile afin de le rencontrer
autrement que derrière un bureau. Tous les leviers, dont dispose le professionnel, doivent lui permettre
de créer un lien de confiance avec le jeune afin que le travail éducatif puisse être opérant.
Lorsqu'un MNA est pris en charge par l'UEMO, l'éducateur référent dispose du Recueil de
Renseignement Socio-Éducatif (RRSE) rempli précédemment par les éducateurs du SEAT ayant reçu
le mineur lors de son déferrement ou lors d'une Convocation par Officier de Police Judiciaire (COPJ),
avec peu d'éléments recueillis. L'éducateur va donc se retrouver face à un jeune dont il ne peut vérifier
les dires, à la différence des mineurs de droit commun, il ne peut pas s'appuyer sur l'entourage du
jeune pour mieux le connaître. Dans les discours des MNA, il peut y avoir des incohérences tant au
niveau de leur récit migratoire, que dans leur parcours scolaire dans le pays d'origine. De plus, le
mineur durant ces entretiens va tenir un discours très lisse et de surface, afin de garder l'éducateur à
distance, ce dernier va alors se trouver à court, ne sachant comment entrer en lien avec lui. La relation
de confiance ne peut alors se créer, engendrant de nombreuses questions de la part du professionnel
qui se met alors à douter des paroles du mineur : Est-il vraiment mineur ? A-t-il déjà travaillé ? Est-
il en lien avec sa famille ? Souhaite-t-il réellement rester en France ? Veut-il vraiment s'inscrire dans
une formation professionnelle ou répond-il simplement à la commande du JE ?
Dans la prise en charge du jeune Amir, nous avons été présentes à plusieurs mises en examen
dans différents cabinets de JE puisque en raison des seize alias. Lors de chaque audience, le JE lui
demandait de décliner son identité et à chaque fois il promettait que celle qu'il donnait était la vraie.
Ce qui a conduit les professionnels à douter des éléments qu'il pouvait amener lors des entretiens
éducatifs : le Procureur a demandé une expertise osseuse, il est peut-être majeur ? N'a-t-il pas
d'ailleurs été évalué majeur sur un autre département et c'est pour cette raison qu'il donnerait différents
noms de famille ?
En quoi ces mensonges viennent-ils heurter les pratiques des éducateurs ?
Dans son ouvrage, Julien Bricaud explique, en partant de ses observations, que les MNA
suscitent à la fois l'empathie au vu de tout ce qu'ils ont pu traverser et de leurs conditions de vie en
France, mais aussi de la méfiance. Le soupçon « naît de la confrontation aux mensonges réels ou
28
supposés que les jeunes adressent aux services sociaux ».44 Mais qu'est ce qui conduit les travailleurs
sociaux au soupçon ? Ils se retrouvent dans l'impossibilité de vérifier ce que le mineur avance, pas de
lien avec la famille, absence de document d'identité, la barrière de la langue sont autant d'éléments
qui conduisent le professionnel à avoir des doutes et à être dans la suspicion.
Selon l'auteur, la situation des MNA viendrait bousculer et remettre en questions les convictions
des professionnels, à savoir le manque de moyens, la difficulté à protéger ce public, la question de
l'insertion et des papiers, leur situation à majorité. Ces derniers vont mettre à distance les MNA et se
focaliser sur des éléments qui viendront nourrir et confirmer les « preuves » du mensonge, en
occultant les raisons qui peuvent conduire le jeune à régir ainsi : la peur, le discours tenu par leurs
familles ou les passeurs, l'insécurité. Ce sentiment qu'est le soupçon peut être un obstacle dans la
prise en charge du mineur et créer une barrière entre l'éducateur et le jeune. Julien Bricaud parle de
« l'effet Pygmalion »45, les éducateurs par leurs convictions vont exercer, sans s'en rendre compte,
une influence sur le récit des jeunes.46 Soupçonner le mineur aura donc un impact dans la relation
éducative.
A la lumière de mes observations, je vois également dans le soupçon une marque de défense,
les professionnels vont mettre à distance les MNA, de façon inconsciente, afin de se protéger de ces
situations compliquées et singulières.
Après m'être interrogée sur les effets du mensonge sur les professionnels, je me questionne sur
ce qui conduit les MNA au mensonge. Je peux avancer le postulat qu'ils ne sont pas les seuls à mentir
et que les mineurs de droit commun peuvent aussi se cacher derrière des mensonges. Cependant, le
mensonge est quelque chose de prégnant et qui revient de la part des professionnels dès que l'on
aborde le thème des MNA.
Tout d'abord, il faut garder à l'esprit qu'il s'agit de mineurs dont le parcours migratoire a pour
beaucoup d'entre eux était fait clandestinement, avec l'injonction qui a pu leur être donnée d'en dire
le moins possible sur leur vie au pays d'origine. Les passeurs ont également pu leur dire de raconter
certaines choses afin de ne pas dévoiler les méthodes utilisées et les endroits de passage. Il leur a été
demandé de modifier certains éléments de leur vie, ce qui les amène à mentir.
L'approche de Julien Bricaud permet de replacer le MNA dans son contexte de vie et d'apporter un
autre éclairage à l'éducateur sur les différentes raisons qui conduisent au mensonge. Il met en lumière
les conditions qui conduisent aux mensonges : ils connaissent peu de choses sur la prise en charge
44BRICAUD Julien. Op. Cit. 2012, p. 47 45Ibid. p. 54 46Étude Approfondie de Notions à d'un Ouvrage (EANO) de GOUGEON Léa. 2018
29
dont ils peuvent bénéficier en France et « comparent entre eux des situations dont certains aspects
leur échappent »,47 ce qui peut les conduire à narrer des histoires similaires. Ils élaborent des tactiques
et des mensonges derrière lesquels ils se cachent. Ils mentent donc pour pouvoir être protégés par les
institutions mais également pour se protéger.
Ils se retrouvent pris alors entre les mensonges racontés lors de l'évaluation pour pouvoir être
pris en charge par la protection de l'enfance, et ils ne peuvent pas parler de leur vécu aux éducateurs.
Ces derniers se retrouvent alors désemparés face à ces jeunes là, ne sachant comment les accompagner.
C'est ainsi que la distance se créée entre les deux et que le soupçon émerge du côté du professionnel.
Pour Isabelle, le jeune Amir est pris dans ce schéma là. « Il se scarifie d'après les éducateurs du foyer,
il aurait besoin d'aller voir la psychologue pour parler de ce qu'il a vécu avant d'arriver jusqu'ici,
mais il ne peut pas s'autoriser à parler librement. »48
J'évoquais précédemment le soupçon du côté du professionnel, mais j'avance l'hypothèse qu'il
existe également du côté des MNA. Ces derniers se retrouvent face à des adultes dont ils ne saisissent
pas toujours la fonction. Ceux arrivant devant un éducateur PJJ en milieu ouvert, ont été entendus
précédemment par des policiers, puis des éducateurs au tribunal et par le JE, la confusion entre les
rôles et places de chacun existe bel et bien. D'autant plus que le terme « judiciaire » dans PJJ peut
inquiéter le jeune, qui va alors se réfugier dans le mensonge, ne sachant pas ce que l'on écrira dans le
rapport à destination du juge. Ils ne connaissent pas les conséquences que la prise en charge au pénal
peut avoir par la suite sur leurs situations, et si cela peut remettre en question leur prise en charge à
l'ASE.
Lorsque je l'ai interrogée, Claire m'a raconté le premier entretien qu'elle a réalisé avec un MNA. Ce
dernier a alors sorti de sa poche la convocation qu'il avait reçu pour venir au service. Dans cette
dernière il était noté « en cas d'empêchement majeur merci de prévenir le service au 04…. ».
L'adolescent lui a demandé s'il allait devoir justifier encore de sa minorité durant les entretiens avec
elle, puisqu'il avait lu le mot « majeur ». Cet exemple illustre bien je trouve, l'angoisse dans laquelle
ces mineurs vivent de voir leur prise en charge remise en question, et pointe également la confusion
des places qu'ils peuvent faire avec les différents interlocuteurs qu'ils rencontrent à travers leurs
parcours administratifs et judiciaires en France.
Pour finir, il m'apparaît au vu des entretiens que j'ai pu mener avec des MNA, qu'il est des
passés trop douloureux à aborder. Ali a pu nous parler brièvement de « prison là-bas », « des coups
des policiers » « de traces de machette sur son épaule », il s'agitait beaucoup lorsqu'il évoquait ses
47BRICAUD Julien. Op. Cit. 2012, p. 91 48ANNEXE N°3
30
souvenirs et se fermait complètement à tout échange par la suite. Les jeunes peuvent donc également
modifier la réalité et mentir pour ne pas avoir à revivre ce passé douloureux, sans compter la difficulté
de mettre des mots sur des maux dans une langue qu'ils ne maîtrisent pas encore. V. Carrère amène
une réflexion à avoir sur les mensonges que peuvent nous dire les MNA et permet de prendre du recul
et par là même de mettre à distance le soupçon : « Peut-être tentent-ils d'oublier ce qui les ferait trop
souffrir ? Ou réagissent-ils à la peur de ne pas être crus, au soupçon manifesté envers eux ?
Mensonges ? Ou reconstruction d'un passé, invention d'une fiction qui permet de survivre ? ».49 Il
peut être des réalités impossibles à dire mais également à entendre.
Si la confiance va mettre du temps à se créer dans la relation éducative avec les MNA du fait du
mensonge derrière lequel ils peuvent se cacher afin de se protéger, leur mode de vie peut aussi être
un frein dans l'accompagnement.
B. Un mode de vie rendant l'accompagnement difficile : l'errance
L'errance comme mode de vie chez les MNA vient renforcer la difficulté pour les éducateurs
de prendre en charge ces mineurs, avec l'absence que cela implique. Angélina Etiemble et Omar
Zanna, dans l'identification des différents profils de MNA, repèrent trois formes d'errance chez le
mineur-errant. Il y a tout d'abord l'errance-structurelle qui se met en place dans le pays d'origine et
signe un éloignement vis-à-vis de la famille et/ou de l'institution, puis l’errance-conjoncturelle en
France, occasionnée par la précarité et se structurant progressivement sur place, et pour finir l'errance-
institutionnelle, liée aux errements, voir aux ratés, de l'accueil et de la prise en charge.50
La plupart des MNA que nous rencontrons en milieu ouvert, étaient déjà dans un parcours
d'errance dans leur pays d'origine, c'est devenu un mode de vie qu'ils continuent d'adopter en France.
Ils savent survivre dans la rue, par la mendicité et par la commission d'infractions notamment des
vols. L'errance se définit comme « l'action d'errer, de marcher longtemps sans but précis. »51 ,
beaucoup sont arrivés en France au gré de pérégrinations d'un pays à l'autre, puis d'une ville à une
autre, sans suivre de but précis et sans projet migratoire.
La psychologue avec qui j'avais pu échanger sur les différences culturelles des MNA, a évoqué
également ces mineurs, surnommés les « harraga », qui signifie « ceux qui brûlent », leurs papiers
d'identité, mais également leur passé, leur famille et qui n'ont d'attache nulle part.
49CARRERE Violaine. D'abord des mineurs ? D'abord des étrangers ?. 2004, p. 8 50ETIEMBLE Angélina ; ZANNA Omar. Op. Cit. p. 12 (Consulté en décembre 2017) 51LAROUSSE. Définition : errance. (Consulté en avril 2018)
31
Juliette Leconte évoque l'affiliation de ces jeunes au monde de la rue. Le sentiment de filiation
pour ces jeunes est faible. En effet, ils ont grandi sans repères parentaux, leur famille étant défaillante,
absente ou maltraitante, ils ont donc compensé ce manque par un fort sentiment d'affiliation au groupe
de pairs et au monde de la rue dans lequel ils vivent.
Pour elle, la difficulté pour les professionnels va être de « contourner l'opposition monde de la rue –
institution ».52 En effet, les jeunes se retrouvent tiraillés par la prise en charge proposée par l'ASE et
imposée par la PJJ et l'appel de la rue et des pairs, qui font partie de leur repère, avec lesquels ils ont
évolué.
Lorsque les éducateurs travaillent en milieu ouvert, les rendez-vous manqués des jeunes font
partie du quotidien et du travail à mettre en place avec eux dans la prise en charge. Dans la situation
des MNA, le travail des professionnels se trouve impacté par l'absence de continuité du lien avec eux.
En effet, ils peuvent venir à un ou plusieurs rendez-vous, puis ne plus revenir. Il est donc compliqué
de pouvoir penser un projet avec eux. J'ai également pu constater la difficulté pour les MNA de
comprendre le sens des mesures pénales ordonnées par le JE, encore plus quand il s'agit d'un CJ avec
des obligations et des interdictions, comme celle de ne pas se rendre sur un lieu ou de ne pas rencontrer
telle personne. Lors d'un entretien un MNA a pu dire après qu'on lui ait présenté le CJ, qu'il ne
comprenait pas qu'on puisse l'empêcher d'aller quelque part, lui qui a toujours été où il voulait.
J'ai, lors d'une audience, rencontré une JE qui expliquait tenir compte de la situation de vie des MNA
dans les obligations et les interdictions qu'elle ordonnait dans le CJ. Aussi, quand le jeune est placé
en hébergement, elle fait le choix de ne pas mettre l'obligation de respecter le cadre horaire de la
structure car elle sait qu'il faudra du temps pour qu'il les intègre au vu de ses habitudes de vie.
Avec Amir, nous avons eu le sentiment qu'il était pris entre l'envie de trouver sa place au foyer
et l'appel de l'extérieur. Il fuguait pour retrouver d'autres MNA dans la rue et se faisait souvent à ces
moments-là, interpeller par la police pour de nouvelles infractions.
Les MNA qui se trouvent dans l'errance inquiètent les éducateurs car au-delà de la difficulté à
être en lien avec eux dans la durée, ils se mettent également en danger. Dans la situation d'Amir
comme d'Ali, ils semblaient « happés » par l'extérieur, nous faisions l'hypothèse que des réseaux les
contactaient pour qu'ils aillent commettre des délits. D'ailleurs lors d'entretiens, les deux jeunes ont
confirmé à demi-mots ce que nous pensions.
Vivre dans la rue, avec d'autres MNA, la consommation de produits stupéfiants, leur errance, en font
52LECONTE Juliette. Op. Cit. pp. 53-61 (Consulté en février 2018)
32
un public particulièrement vulnérable. Dans un article, Dominique Lodwick qui a crée une association
accueillant des MNA relève qu'« ils [les jeunes errants] sont parmi les mineurs isolés les plus
démunis »53 de par leur parcours migratoire et de vie fait de traumatismes.
Avec les MNA, les éducateurs sont dans l'incertitude de les voir au prochain rendez-vous et il
est compliqué de créer une relation éducative avec eux dans la durée. Et une question revient sans
cesse : Comment arriver à ancrer ces jeunes quelque part ?
Après avoir envisagé les difficultés rencontrées dans la prise en charge des MNA ainsi que leurs
origines, il s'agit à présent, de s'interroger sur les ressources sur lesquels les éducateurs peuvent
s'appuyer dans le cadre de l'accompagnement de ces mineurs en milieu ouvert.
53LODWICK Dominique. « Jeunes errants », retour sur l'histoire d'une association. 2016, p. 71
33
Partie 3. L'expérimentation et la nécessité de repenser les pratiques
pour prendre en charge les MNA
Une fois la mise en lumière des diverses difficultés dans la prise en charge des mineurs, je
souhaite penser les ressources sur lesquelles les éducateurs peuvent s'appuyer (I) et proposer un outil
qui pourrait être utile aussi bien aux professionnels qu'aux jeunes (II).
I. Les ressources à mettre en œuvre
Le travail éducatif des éducateurs en milieu ouvert (A) qui commence dès l'accueil (B) puis à travers
les entretiens (C) peut être repensé afin d'entrer en relation plus facilement avec les MNA. Des outils
existants déjà peuvent également être utilisés par les éducateurs (D). Ces derniers ont la possibilité
de diversifier leurs pratiques pour créer un lien avec ces jeunes (E) tout en tenant compte de leur
temporalité (F).
A. Le travail éducatif
Dans un document datant de mars 2018, l'association France Terre d'Asile relevait dans
l'accompagnement des MNA, que « le travail éducatif consiste alors à construire un projet à la fois
réaliste et qui réponde aux aspirations du jeune ».54 De mes constats, la prise en charge des MNA
au-delà du nombre, renvoie l'éducateur à de nombreuses difficultés et à l'impuissance « parce que
l'on ne sait pas faire avec ces jeunes ».
Ce travail de mémoire, m'a permis de prendre du recul sur ces situations et de les voir autrement.
Certes, ces mineurs ont un parcours migratoire et une histoire faits de traumatismes et de ruptures,
mais ce sont aussi des adolescents qui ont besoin d'un soutien, d'être en confiance avec des adultes
fiables qui les réassurent afin de devenir des jeunes gens avec des ressources et des compétences sur
lesquels ils peuvent s'appuyer. Il me paraît essentiel de pouvoir se décaler de ces difficultés qui
conduisent à les mettre à l'écart, et de se recentrer sur l'objectivité qui doit guider les professionnels
dans le travail avec les MNA.
Il faut donc revenir au cœur de métier qui est celui de les accompagner dans le cadre d'une
mesure pénale confiée par le JE, et de penser à la façon de les prendre en charge mieux pour les ancrer
54 Association France Terre d'Asile. Mineurs isolés étrangers : l'insertion professionnelle par l'apprentissage. p.8
(Consulté en avril 2018)
34
quelque part. La définition d'ancrer au sens figuré est « enraciner »55, il s'agit bien d'aider ces jeunes
à trouver leur place et à s'insérer dans la société. Leur intégration passe par l'insertion scolaire et
sociale mais également par une prise en compte par les éducateurs de leur individualité. Le sens visé
est qu'ils passent du statut de MNA à sujet de leur vie et de leur avenir à travers un accompagnement
individualisé. L'éducateur doit percevoir leur passé, leurs projets, rêves et espoirs. Il nous faut
remettre le jeune au cœur de la prise en charge et envisager la manière dont l'éducateur peut agir dans
l'espace qui est délimité par nos missions.
Il s'agit de prises en charge singulières, qui nécessitent de s'adapter, mais les missions restent
les mêmes. Le professionnel doit aller à la rencontre de ces jeunes en étant authentique et en ayant
envie découvrir la personnalité qui se cache derrière le statut MNA.
B. Repenser l'accueil des MNA en milieu ouvert
Il peut être intéressant de penser à l'accueil des MNA au sein de l'UEMO afin qu'ils se sentent
rassurés lors de la première rencontre.
L'accueil dans toute prise en charge (MNA ou mineur de droit commun) a pour but de rencontrer une
première fois le mineur et sa famille, de lui présenter le service, les mesures ordonnées par le juge et
d'expliquer le cadre d'intervention et le rôle de l'éducateur référent.
Lors du premier entretien avec un MNA, la présence d'un interprète n'est pas un préalable requis.
Parfois les éducateurs ne font pas appel à l'organisme d'interprétariat parce qu'ils ne savent pas si le
jeune va se présenter au service et s'il maîtrise le français. Il y a deux cas de figure pour les
convocations à un premier entretien : ou le jeune ressort du tribunal après la mise en examen avec
une convocation lui expliquant en français qu'il est attendu dans le cadre de l'article 12-356 à l'UEMO
avec une date et une heure, ou l'éducateur référent envoie une convocation à son lieu d'hébergement,
à savoir l'hôtel ou la structure l'accueillant.
L'intérêt de faire venir un interprète est de s'assurer que le MNA comprend les mesures ordonnées par
le juge, ainsi que le rôle et les missions d'accompagnement et de protection de l'éducateur, tout en
posant le cadre pénal. Ça peut être également l'occasion de lui expliquer la Justice des mineurs en
France, la suite de la procédure pénale et de revenir avec lui sur l'audience avec le JE et sa garde à
55LAROUSSE. Définition : ancrer (Consulté en avril 2018) 56 ARTICLE 12-3 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante : « En cas de prononcé d'une décision
exécutoire ordonnant une mesure ou une sanction éducatives prévues aux articles 8, 10-2, 10-3, 12-1, 15, 15-1, 16 bis, 16
ter et 19, à l'exception des décisions de placement, ou prononçant une peine autre qu'une peine ferme privative de liberté,
il est remis au mineur et à ses représentants légaux présents, à l'issue de leur audition ou de l'audience, un avis de
convocation à comparaître, dans un délai maximal de cinq jours ouvrables, devant le service de la protection judiciaire de
la jeunesse désigné pour la mise en œuvre de la décision. Ce service se trouve ainsi saisi de la mise en œuvre de la
mesure. »
35
vue. La présence de l'interprète assure également à l'éducateur que le jeune a compris pourquoi il lui
est demandé de se rendre au service.
C'est un temps où l'éducateur peut s'assurer que le jeune à un endroit où dormir et manger. Le travail
avec les MNA sera compliqué tant que leurs besoins élémentaires ne seront pas pourvus.
Pour éviter les confusions, l'interprète pourra également lui expliquer que nous ne sommes ni
de la police, ni mandatés pour vérifier son âge. Isabelle estime qu'il est « important lors du premier
entretien que le MNA reparte en ayant compris le message que l'on doit lui faire passer afin d'éviter
l'accumulation de dossiers au pénal ».57
Sa présence permettra peut-être au MNA d'être plus aisément en lien avec l'éducateur en facilitant sa
compréhension de notre cadre d'intervention, qu'il se sente rassuré et en confiance. Pour Julien
Bricaud, « le temps de l'accueil suspend l'exigence de l'aveu : dans ce lieu, on peut dire des choses
vraies ou fausses, on peut s'y taire aussi ».58
Je pense que lors de ce premier entretien il est important de prendre le temps de présenter au
MNA le service, les professionnels présents et la façon dont les rendez-vous vont être pensés avec
l'éducateur référent : la fréquence des entretiens, leurs durées, lui préciser qu'il se rendra au service
mais pourra aussi être amener à se déplacer pour entreprendre des démarches sur l'extérieur, et
l'informer sur la présence de l'interprète. L'idée est de poser un cadre contenant et rassurant au MNA,
dans lequel il puisse sentir en confiance et se projeter afin qu'il revienne, même si c'est une des
difficultés de ce public là. L'ANESM (Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des
établissements et services sociaux et médico-sociaux) relève que « l'accompagnement à l'intégration
passe par une première phase de construction de la relation, préalable à la mise en confiance
mutuelle du jeune et des professionnels. Ce travail se fait concomitamment à l'installation du MNA
dans l'établissement/service ».59 La relation de confiance avec le MNA, peut être encore plus qu'avec
un autre jeune au vu de son parcours de vie, se construira de façon progressive grâce à la continuité
de la relation.
C. L'entrée en relation avec les MNA par le biais de l'entretien
La lecture de l'ouvrage de Julien Bricaud, et notamment un passage sur l'entretien, intitulé « un
57ANNEXE N°3 58BRICAUD Julien. Op cit. 2012, pp.119-120 59ANESM. L'accompagnement des mineurs non accompagnés dits « mineurs isolés étrangers ». (Consulté en janvier
2018)
36
instrument utile mais délicat : l'entretien »60, m'a permis de m'interroger sur cet outil du travail utilisé
quotidiennement par les éducateurs en milieu ouvert pour entrer en relation avec les jeunes comme
avec les familles. Pour Francis Danvers, l'entretien est « une situation provisoire d'interaction et
d'inter-influence essentiellement verbales, entre deux personnes en contact direct avec un objectif
préalablement posé ».61 L'entretien est donc basé sur la dissymétrie, l'éducateur dirige la parole et le
jeune en face interagit. De nombreuses choses se jouent à travers ces échanges, au-delà de la
discussion et de la parole, il y a le ressenti, les émotions, le non verbal qui va induire des réactions
chez l'interlocuteur.
Carl Rogers, psychologue américain à travers sa méthode « l'Approche Centrée sur la
Personne » met en avant l'importance de l'écoute authentique, empathique et sans jugement dans la
relation d'aide. D'après lui, l'entretien peut se comprendre sur deux niveaux : un niveau intellectuel à
travers le discours, et un niveau émotionnel basé sur les ressentis. L'éducateur doit alors être
entièrement disponible durant l'entretien avec le jeune afin d'être attentif aux messages verbaux et
non-verbaux et être dans ce que le psychologue appelle « l'écoute active ». Elle permet au
professionnel d'entendre ce qui est dit et de percevoir ce qui est tu.
Il paraît essentiel dans la prise en charge des MNA et à travers les entretiens notamment, qu'ils
trouvent leur place, eux qui n'en ont nulle part, et qu'ils se sentent écoutés. L'objectif dans le travail
éducatif est de mettre en réflexion le mineur et de faire avec ce qu'il est en capacité de nous apporter.
Avec ces jeunes, les éducateurs ont conscience que cela peut prendre plus de temps qu'avec les autres
mineurs, au vu de leur parcours migratoire et de leur vécu. Un cadre sécurisant est alors essentiel afin
qu'ils puissent se livrer et qu'une confiance mutuelle s'installe entre lui et l'éducateur. Ce dernier va
aussi contribuer à la création de la relation éducative en respectant ce que le jeune ne souhaite pas
confier et en apportant du crédit à ce qu'il va évoquer.
Dans cet espace de parole, et grâce à la posture bienveillante du professionnel, le MNA va pouvoir
déposer des éléments de son parcours, les mettre en mot et les penser / panser avec l'aide de l'éducateur.
Dans son article « les voies de l'entretien », Constance Schneider évoque l'importance de
préparer l'entretien en amont, en pensant au lieu, au temps que l'on se fixe, en définissant le ou les
objectif(s). Ainsi, l'éducateur va créer un cadre rassurant et contenant pour le jeune, mais également
pour lui puisqu'il va pouvoir s'appuyer sur ce qu'il s'est fixé pour pouvoir mener son entretien.62 La
préparation de l'entretien peut également permettre au professionnel de ne pas tomber dans l'écueil
60BRICAUD Julien. Op cit. 2012, p.120 61DANVERS Francis. 700 mots clefs pour l’Éducation. 1992, p.145 62SCHNEIDER Constance. Les voies de l'entretien. 2007, pp 38-40
37
« question-réponse » qui n'aurait certainement pas de sens pour le MNA et qui pourrait lui faire penser
aux interrogatoires de police ou à l'évaluation de la MEOMIE. Ce travail en amont peut permettre par
ailleurs de penser aux axes que l'éducateur souhaite mettre progressivement en place avec le mineur,
de gérer la durée de l'entretien et d'éviter de laisser la place au soupçon.
Julien Bricaud évoque dans son ouvrage, un travers dans lequel l'éducateur peut tomber afin de
se défaire du soupçon, qui serait de chercher à tout savoir des jeunes qu'il prend en charge, avec l'idée
qu'il est essentiel de connaître la vérité pour arriver à une prise en charge parfaite. L'auteur parle d'une
« impossible transparence »63, il est des vérités impossibles à dire et face à des traumatismes, la
mémoire se réapproprie les événements pour les rendre supportables. Les professionnels doivent
accepter de ne pas tout connaître et de tout maîtriser de la situation des MNA, d'apprendre à travailler
avec ce qu'ils veulent et peuvent nous dire, en respectant leurs paroles. Parfois, le temps et la
construction d'une relation solide peut permettre au jeune de se livrer, mais pour certains, le secret ne
pourra pas être levé.
D. S'appuyer sur des outils existants pour prendre en charge les MNA
Durant mon stage, je me suis questionnée sur la possibilité et l'intérêt de mettre en place un
travail entre les éducateurs recevant les MNA et la psychologue présente sur la structure. Cette
dernière reçoit uniquement les mineurs de droit commun dans le cadre des Mesures Judiciaires
d'Investigation Éducative64 (MJIE) ou lorsqu'un éducateur estime qu'il serait bénéfique pour le jeune
de la rencontrer pour des entretiens,
Lorsque je me suis rendue sur un service dans un autre département, semblable à celui de la MEOMIE,
accueillant donc des MNA au civil (phase de mise à l'abri provisoire, évaluation et prise en charge)
et au pénal (en soutien aux éducateurs PJJ), je me suis donc intéressée à leur pratique et à l'intervention
de la psychologue de la structure auprès des MNA. Cette professionnelle m'a expliqué qu'elle recevait
en entretien aussi bien des MNA que des jeunes majeurs anciennement MNA suivis dans le cadre
d'un contrat jeune majeur par l'ASE. Ces derniers lui sont orientés par les éducateurs dès qu'ils sentent
qu'un jeune aurait besoin d'un soutien psychologique. Elle le voit une première fois en lui expliquant
qu'elle est là pour le soutenir, elle utilise l'image du livre : « Quand une page est un peu déchiré, je
63BRICAUD Julien. Op cit. 2012, p.105 64MJIE : prévu à l'article 8 de l'ordonnance du 2 février 1945 qui « prévoit que le juge des enfants effectue toutes diligences
et investigations utiles pour parvenir à la connaissance de la personnalité du mineur ainsi que des moyens appropriés
à sa rééducation (situation matérielle et morale de la famille et conditions d’éducation, personnalité et antécédents du
mineur, fréquentation scolaire et attitude à l'école, santé, développement psychologique). Une note de la PJJ du 23
mars 2015 prévoit sa mise en œuvre et ses objectifs.
38
peux t'aider à la réparer en faisant des petits points, quand c'est trop important et qu'il faut faire des
gros points, je t'orienterai vers d'autres professionnels plus à même de pouvoir t'aider ». Elle travaille
donc en lien avec des structures extérieures.
Lors de ce premier entretien, elle pose un cadre rassurant en lui précisant que tout ce qui sera dit dans
son bureau restera ici, « comme dans une bulle ». Elle prend des notes durant l'échange uniquement
pour ne pas oublier ce qu'ils se sont dit d'un entretien à l'autre mais en aucun cas son éducateur y aura
accès et insiste bien sur le fait qu'elle ne fait aucun écrit au juge. Elle peut en faire uniquement pour
soutenir une demande d'asile si elle estime que ça peut être utile, et avant de le faire elle demande au
jeune s'il est d'accord et lui fait part du contenu. De plus, elle fait intervenir un interprète si nécessaire
en associant le jeune à cette décision.
Elle s'est étonnée que la psychologue du service sur lequel je suis, ne reçoive pas en entretien ces
jeunes, alors que pour elle «ils ont besoin d'un soutien psychologique pour pouvoir penser à leur
avenir et dépasser les traumatismes ».
Sur le service de milieu ouvert, la possibilité pour les éducateurs PJJ d'orienter les MNA vers
la psychologue de la structure pourrait être bénéfique dans leurs accompagnements. De plus, en
insistant auprès des jeunes sur le fait que la psychologue n'aura pas d'écrit à rendre au juge, cela
pourrait les autoriser à être plus libres dans l'échange et plus en confiance. Le travail en
pluridisciplinarité permettrait dans le même temps à l'éducateur de se sentir moins isolé dans ses
prises en charge, en ayant la possibilité d'échanger avec la psychologue et de penser ensemble à
l'accompagnement du jeune. Il peut être compliqué pour n'importe quel jeune d'aller voir un
psychologue, encore plus pour un MNA pour qui cette profession ne peut évoquer que la folie et le
danger. Cependant, s'il est en lien avec l'éducateur PJJ et s'il identifie le service comme étant un lieu
rassurant, cela peut faciliter la rencontre avec la psychologue.
En réfléchissant aux différents outils sur lesquels les éducateurs pourraient s'appuyer dans la
prise en charge des MNA, j'ai pensé au DIPC qui pourrait être rempli même en l'absence des parents.
Avec les mineurs de droit commun et en présence des représentants légaux, comme j'ai pu l'expliquer
précédemment, ce document est rempli rapidement après le début du suivi éducatif. Chaque partie (le
mineur, les parents et l'éducateur référent) fixe les attentes et les objectifs durant la prise en charge.
Le but est de donner des pistes de travail et d'amorcer l'élaboration autour du projet individualisé du
jeune. Il a vocation à être rediscuté tous les trois mois afin de faire le point sur la situation du mineur
et de se fixer d'autres objectifs.
Sur le service, j'ai pu observer que lors des premiers entretiens avec les MNA, ce document n'est pas
rempli par les professionnels, ces derniers ne pensant pas à le faire parce que le sens de la prise en
charge éducative et pénale n'est pas simple à dégager. Cependant, s'appuyer sur ce document dans
39
l'accompagnement de MNA pourrait permettre de penser à son avenir en se fixant des objectifs à
courts et moyens termes, et le remettre au cœur de la prise en charge en tant qu'acteur. Il s'agirait alors
de repenser la trame du DIPC de façon à simplifier la compréhension par le mineur, et de le faire en
présence de l'interprète pour être certain que le jeune comprend de quoi il s'agit. Un éducateur
spécialisé que j'ai eu l'occasion de rencontrer m'a expliqué qu'il utilisait ce document pour évoquer
les parents : « Tu penses que tes parents diraient quoi à ce sujet là ? Ou souhaiteraient quoi pour
toi ? ». Je pense que cette évocation des proches du MNA ne peut pas se faire avec tous les MNA,
selon leurs parcours et histoires, mais que cela peut être envisagé pour certains jeunes, et les amener
à prendre forme à travers les mots du mineur.
E. Entrer en lien autrement
Julien Bricaud invite à travers son ouvrage à « diversifier les pratiques »65 pour aller à la
rencontre de ces jeunes, en utilisant des activités de médiation, l'humour ou en s'appuyant sur les
centres d'intérêt du MNA.
La médiation va permettre d'ouvrir une autre porte d'entrée dans la relation entre le jeune et l'éducateur,
Dominique Dray évoque « la création d'un écart qui fasse tiers »66 entre eux. Pour lui, l'enjeu est
d'apprendre au jeune à entrer en relation autrement avec l'adulte.
Parfois la rencontre ne peut pas se faire lors d'un entretien derrière un bureau, c'est ce dont
témoigne Juliette Leconte : elle rencontre un MNA dans la rue car il était difficile et très oppressant
pour lui de rester dans une pièce. C'est à l'extérieur que la relation s'est nouée, le jeune était beaucoup
plus détendu et ils ont ainsi « pu aborder et travailler des aspects inenvisageables auparavant ».67
La façon dont va pouvoir se créer le lien de confiance par le jeu, les activités de médiation éducative,
a vraiment fait écho à mon identité professionnelle et à la manière dont je souhaiterais penser ce lien.
D'ailleurs Fernand Deligny ne disait-il pas : « Si tu veux les connaître vite, fais-les jouer. Si tu veux
leur apprendre à vivre, laisse les livres de côtés. Fais les jouer. Si tu veux qu'ils prennent goût au
travail, ne les lie pas à l'établi. Fais- les jouer. Si tu veux faire ton métier, fais-les jouer, jouer,
jouer. »68
La note du 10 février 2017 relative à l'adaptabilité des modalités de prise en charge qui « a pour
ambition d'encourager la capacité de créativité et d'innovation des équipes pluridisciplinaires afin
d'élargir le champ des possibles au bénéfice des jeunes »69 permet de penser autrement l'entrée en
65BRICAUD Julien. Op cit. 2012, p.125 66DRAY Dominique. Les médiations éducatives. 2010, pp 31-34 67LECONTE Juliette. Op cit. pp. 53-61 (Consulté en février 2018) 68DELIGNY Fernand. Graine de crapule suivi de Les vagabonds efficaces et les autres textes. 1998, p. 12 69SULTAN Catherine. Note du 10 février 2017 relative à l'adaptabilité des modalités de prise en charge. p.3
40
lien avec le jeune et également de penser l'accompagnement différemment.
En milieu ouvert, des sorties ponctuelles avec un groupe de jeunes peuvent être organisées,
pour aller visiter un musée, faire du sport, se rendre au cinéma… Il pourrait être intéressant que ces
temps là puissent être proposés aux MNA par les éducateurs pour les retrouver dans un autre cadre.
De par leur culture dans leurs pays d'origine, il est plus facile d'être en lien au sein d'un groupe que
dans une relation duelle, et ces projets donnent l'occasion aux mineurs de rencontrer d'autres jeunes
et d'avoir une autre relation à l'adulte.
De plus, les activités de médiation permettent le lien à l'autre, l'apprentissage de la langue, le respect,
la convivialité, de faire appel à son imagination, et sont valorisantes pour les participants.
L'utilisation de média permet aux professionnels de revenir dans du « savoir-faire » avec ces jeunes,
à des outils pratiques qu'ils ont l'habitude d'utiliser dans la prise en charge des autres jeunes et de
prendre de la hauteur sur ces situations.
F. La notion de temporalité dans l'accompagnement des MNA
La question de la temporalité se retrouve dans tous les accompagnements que les éducateurs
ont. Il y a le temps judiciaire mais également le temps dont chaque jeune a besoin pour avancer, qui
est différent pour chacun. Il est particulièrement précieux chez les MNA. Leur prise en charge
lorsqu'ils auront dix-huit ans par l'ASE sera différente s'ils sont arrivés en France avant ou après seize
ans. De plus la plupart demeure dans l'attente de savoir s'ils vont être reconnus mineur, s'ils pourront
rester en France à leur majorité, s'ils vont pouvoir intégrer une formation… Julien Bricaud parle de
« la temporalité dans laquelle ils vivent est comme suspendue : ils attendent. […] Quand l'avenir
devient imprévisible, on perd prise sur le présent ».70 De plus, les traumatismes qu'ils ont pu vivre
durant leur parcours migratoire vont venir perturber leur rapport au temps, « ils sont souvent
incapables de se souvenir de leur date d'arrivée, mélangent les événements, « ne savent pas » ».71
Lors de l'entretien avec Claire, cette dernière dit qu'avec les MNA, plus qu'avec les autres mineurs,
« il faut du temps pour eux. Ils doivent démontrer au JE qu'ils s'insèrent dans la société française,
qu'ils investissent et respectent la prise en charge, qu'ils apportent des choses car c'est ce qu'il attend
d'eux. Mais il n'y a rien de magique, l'hôtel, la difficulté de les voir en entretien, ça prendra du temps
pour qu'une relation de confiance se mette en place et que l'on puisse travailler ensemble. Mais ce
temps ils ne se le donnent pas et on ne leur donne pas non plus. »72
70BRICAUD Julien. Op cit. 2012, p. 163 71SILVESTRO-TEISSONNIERE Christel. Le point du vue d'une infirmière en MECS. 2016, p. 37 72ANNEXE N°2
41
Le temps se construit, il permet de se repérer dans son passé, dans son histoire familiale mais
également dans son lien à l'autre et à la société, et pour le MNA de se réapproprier son parcours de
vie et de s'inscrire en France dans un espace temps. Il est difficile pour les mineurs vivant à l'hôtel
d'avoir cette notion de temps puisqu'il n'y a pas des temps de rituel comme dans les hébergements
avec les levers, les repas, les autorisations de sortie et les couchers. Dans la prise en charge d'Amir,
depuis qu'il est retourné vivre en hôtel, l'éducatrice lui a donné un calendrier et un stylo afin qu'il se
repère dans le temps et qu'il puisse noter les rendez-vous.
Pour Claire Schiff, il s'agit d'aider le jeune à reconstruire une continuité temporelle et « à trouver la
destination de son voyage ».73
L'inscrire à une formation, à des cours de FLE vont mettre le MNA en marche en rythmant ses
journées, et diminuer la sensation de temps mort qu'il peut ressentir dans l'attente incertaine de son
avenir en France.
Après avoir pensé aux différents outils que les éducateurs de milieu ouvert peuvent se
réapproprier dans les prises en charge des MNA, il s'agit à présent de réfléchir à une expérimentation
que je souhaite mettre en place sur l'UEMO afin de répondre à mes hypothèses d'action.
II. Expérimentation : la création de répertoires
Le choix de mon expérimentation (A), puis les objectifs de mon expérimentation (B), et mise en
œuvre de cette dernière (C) ainsi que l'évaluation (D), seront abordés dans cette dernière partie.
A. L'idée d'un répertoire : un choix né de mes observations et d'un besoin
Lorsque j'ai dû penser à une expérimentation en milieu ouvert, je n'arrivais pas à me projeter
dans ce que je voulais faire. Je suis donc repartie des constats que j'ai faits sur mon terrain de stage et
je me suis demandé comment je pouvais agir, pour penser la prise en charge des MNA. A l'UEMO,
cette question là préoccupe, à juste titre, beaucoup les éducateurs.
Il y a beaucoup d'éléments sur lesquels je n'ai pas la main, tout comme les éducateurs du service : la
question des papiers, de la prise en charge par l'ASE, de l'hébergement…
A quelle place je peux trouver suffisamment d'espace pour pouvoir agir et pour répondre à un besoin
des professionnels ?
73SCHIFF Claire. Les jeunes primo-migrants : un rapport à la société distinct de celui des minorités ethniques. 2002, p.
225
42
Au cours des réunions institutionnelles, la question revenait souvent de la part des éducateurs
de ne pas savoir où orienter les MNA lorsqu'ils viennent sur le service et qu'ils ont des besoins
particuliers dans le domaine du soin ou de l'habillement par exemple. Ils ont connaissance, chacun de
leur côté, d'associations pouvant répondre à un besoin du jeune mais sans que ces données soient
centralisées, et sans connaître les modalités d'accueil au sein de ces structures. Chacun fait alors
comme il le peut à travers des recherches pour tenter de répondre aux questions et demandes du MNA,
et se trouve parfois démuni face à l'absence de réponses et d'informations actualisées.
Après avoir discuté avec les éducateurs de leurs besoins dans l'accompagnement des MNA, l'idée est
venue de créer un répertoire, qui centraliserait les informations nécessaires aux professionnels pour
pouvoir orienter les MNA vers différentes structures.
Puis, au travers de deux exemples, m'est venue l'idée de faire aussi un second répertoire mais
adapté aux mineurs. Tout d'abord, un MNA suivi à l'UEMO, a manqué deux rendez-vous au CASNAV
pour faire les tests scolaires car il n'a jamais trouvé l'adresse. Cette dernière lui avait été remise par la
MEOMIE, mais il a dû s'y rendre seul alors qu'il ne connaît pas la métropole.
De même, cet hiver, un MNA est arrivé au service tôt dans la matinée, accompagné d'un majeur. Ce
dernier l'avait rencontré près de la gare et l'a emmené à la police car étant mineur, il savait que le
jeune allait pouvoir être mis à l'abri. La police lui a donné l'adresse de l'UEMO, et les éducateurs l'ont
certes reçus, impuissants, n'ont pu que lui donner les coordonnées de la MEOMIE.
Avec ce répertoire, les éducateurs pourraient remettre ce document aux MNA, lors du premier
entretien ou à tout moment en fonction des besoins du jeune. Cet outil aiderait les MNA à se rendre
sur certaines structures et à connaître des associations pouvant les aider.
Il s'agit de deux répertoires, l'un à destination des professionnels et l'autre à destination des
MNA. Le fond sera le même, puisqu'il y aura les différentes structures présentes sur le territoire et
vers lesquelles les mineurs peuvent se rendre. Mais la forme sera différente, l'objectif étant de faciliter
la compréhension des mineurs, qu'ils puissent trouver les associations dont ils ont besoin et qu'ils
puissent s'y rendre facilement.
Je souhaite proposer un outil qui restera après mon départ de la structure et qui se pérennisera dans le
temps, si les éducateurs en voient l'utilité. .
43
B. Mes objectifs dans la création de ce répertoire
Objectifs pour le répertoire à destination des éducateurs
L'objectif est de répondre à un réel besoin des éducateurs dans la prise en charge des MNA, à
savoir :
Avoir un outil sur lequel les professionnels peuvent s'appuyer pour orienter les mineurs vers
des structures selon leurs besoins
Rendre plus lisible les partenaires à solliciter pour la prise en charge des MNA
Permettre de créer un lien avec le jeune à travers cet outil
Un seul document ressource qui centralise toutes les informations utiles afin d'éviter que les
professionnels perdent du temps à faire des recherches incertaines et qu'ils se sentent démunis
Avoir un outil adapté à la prise en charge des MNA
La création de ce répertoire évitera le sentiment d'impuissance des éducateurs face aux besoins
des MNA lorsque par exemple ils laissent le jeune repartir seul avec l'adresse de la MEOMIE
en poche
Avoir une meilleure connaissance des acteurs locaux pouvant aider les MNA et sortir de
l'isolement dans lequel les éducateurs se retrouvent parfois
Lutter contre le sentiment d'isolement rencontré par les éducateurs en contactant les
partenaires pour avoir des réponses à leurs questions
Objectifs pour le répertoire à destination des MNA
Avoir une vision d'ensemble des associations qui peuvent les aider
Permettre au jeune de se déplacer facilement dans la ville
Se sentir accueilli et dans un cadre bienveillant au sein de l'UEMO
L'aider à trouver les structures dont il aurait besoin pour répondre à ses demandes
C. La mise en œuvre et le contenu des répertoires
Pour réaliser ce projet, je vais tout d'abord recenser toutes les structures que je connais grâce à
mon travail de recherche pour ce mémoire et associer les éducateurs et professionnels de l'UEMO
pour mettre d'avoir une base de données pour commencer.
44
Ensuite, je prendrai contact auprès des différentes structures afin d'échanger avec elles sur leurs
missions, sur la façon dont elles interviennent auprès des MNA, et sur les différentes modalités de
prise en charge. Cela me permettra de recueillir les informations pratiques : adresse, horaire, contact.
Pour le répertoire à destination des éducateurs, il prendra la forme d'un tableau, organisé en
fonction des thèmes recherchés : santé, scolarité/formation, logement, habillement, denrées
alimentaires, interprétariat et services administratifs.
Pour chaque structure, seront précisés le nom, le lieu et l'adresse, le numéro de téléphone, les horaires
et également les conditions d'accueil et s'il faut prendre rendez-vous avant de se présenter.
Il sera sous la forme papier mais également sur un fichier informatique, afin qu'il puisse être
facilement corrigé. Lors de chaque modification, la nouvelle version du répertoire sera envoyée sur
les boîtes structurelles des professionnels, dans le but de posséder un outil toujours à jour.
L'outil à destination des jeunes, lui, ne sera pas sous la forme d'un tableau, je pense qu'il est
nécessaire de l'adapter aux MNA et qu'il soit simple et ludique. Il sera présenté sous la forme d'un
petit carnet, avec des mots-clefs et illustré dans le but d'être compris par tous les mineurs quelque soit
leur niveau de compréhension de la langue française.
Puis, pour chaque association, l'adresse sera non seulement notée mais il y aura également un plan,
avec les transports en commun les plus proches et comment s'y rendre à pied. Le but étant que le
jeune puisse visualiser la structure dans la ville et soit en capacité de se déplacer seul.
Je vais mener ce travail en collaboration avec l'adjoint administratif de l'UEMO afin de penser
ces outils à deux et qu'une fois partie du service, il puisse continuer à actualiser et à mettre à jour les
répertoires. De plus, ce dernier a des compétences dans le domaine de l'informatique, ce qui nous sera
fort utile pour la mise en forme des répertoires.
L'objectif par la suite, serait de pouvoir faire traduire ce guide à destination des MNA en fonction des
langues les plus couramment rencontrées dans la prise en charge de ces mineurs.
J'envisage de mettre ce support en place sur l'UEMO dans les prochaines semaines.
D. L'évaluation du projet en fonction de mes objectifs
L'évaluation permet de prendre du recul sur un projet, de relever les choses qui ont fonctionné
et celles à modifier, mais aussi d'observer si les objectifs initialement fixés ont été atteints ou non.
45
Elle sert également à pérenniser l'action selon les retombées. Pour toute démarche d'évaluation, il faut
du temps. Il est impossible d'évaluer un dispositif qui vient d'être mis en place.
Ce projet étant au stade de la réflexion et étant donné l'objet de mon expérimentation, je ne pourrais
pas l'évaluer dans le cadre de ce mémoire.
Cependant j'envisage de préparer un questionnaire à destination des éducateurs pour savoir : s'ils
utilisent les deux répertoires, le communiquent aux MNA, le trouvent facile d'accès pour les jeunes,
les retours qu'ils en ont mais aussi connaître les éléments qui manqueraient. Ce projet de questionnaire
serait utilisé par la suite, pour mesurer l'appropriation par les professionnels des répertoires, et pour
savoir si ce document les aide au quotidien dans l'accompagnement auprès des MNA.
46
Conclusion
Ce mémoire professionnel a pour objectif une meilleure compréhension de la prise en charge
des mineurs non accompagnés milieu ouvert. Il s'agit aussi de mettre en exergue les différents points
de difficultés rencontrés par les éducateurs, mais aussi les ressources dont ils disposent. Le sujet des
MNA cristallise beaucoup de réactions au sein de la société, puisqu'il interroge les pouvoirs publics
sur leurs capacités à mettre à l'abri des mineurs aux parcours faits de ruptures et de traumatismes.
Mes recherches m'ont permis de m'interroger sur ce qui posait problème dans
l'accompagnement des MNA, aussi bien du côté des professionnels que des jeunes. Le constat fait, il
était important pour moi de penser à des leviers d'action pour tenter de sortir de ces difficultés et de
remettre du sens dans la prise en charge de ces mineurs.
Un des éléments développé concerne le processus du soupçon qui entoure ses jeunes et la
légitimité de leur prise en charge. L'émergence de ce sentiment peut s'expliquer comme une façon de
se défendre de ces situations complexes qui viennent bousculer les pratiques des professionnels.
La place du mensonge chez les MNA est certes prégnante dans le récit de ces jeunes, mais il appartient
aux éducateurs de créer l'espace sécurisant dans lequel le jeune se sentira écouté.
En relisant récemment le Petit Prince d'Antoine de Saint-Exupéry, j'ai redécouvert cette phrase : « Les
grandes personnes aiment les chiffres. Quand vous leur parlez d'un nouvel ami, elles ne vous
questionnent jamais sur l'essentiel. Elles ne vous disent jamais : « quel est le son de sa voix ? Quels
sont les jeux qu'il préfère ? Est-ce qu'il collectionne les papillons ? » Elles vous demandent « Quel
âge a-t-il ? Combien a-t-il de frères ? Combien pèse-t-il ? Combien gagne son père ? » Alors
seulement elles croient le connaître ».74 Cette citation fait écho à l'ouvrage de Julien Bricaud75
lorsqu'il amène les professionnels à accepter de ne pas tout savoir des jeunes pris en charge, brisant
l'illusion que plus on recueillera d'informations sur ces situations, meilleure sera la prise en charge.
Une de mes interrogations était de savoir si les pratiques des éducateurs à la PJJ en milieu ouvert
sont adaptées à la prise en charge des MNA et à leur spécificité. A l’issue de mes recherches, je
m’aperçois que, certes le public des MNA est fait de singularités (principalement dû au parcours
migratoire), mais le travail des éducateurs tend vers les mêmes objectifs que dans toute autre prise en
74SAINT-EXUPÉRY Antoine. Le petit prince. 1999, p. 22 75BRICAUD Julien. Accueillir les jeunes migrants : les mineurs isolés étrangers à l'épreuve du soupçon. 2012
47
charge. Il nécessite de penser l'entrée en relation avec ce public mais aussi les pratiques, en n'éludant
pas la question de la famille malgré son absence.
Il appartient donc aux éducateurs de faire un pas de côté dans l'accompagnement des MNA afin de
remettre les jeunes au cœur des prises en charge et de les accompagner dans un projet individualisé
et réalisable. C'est en cela que Fernand Deligny prétendait que « l'éducateur est un créateur de
circonstances ».76
C'est ainsi que les professionnels pourront trouver du sens à ces prises en charge et éviter de tomber
dans l'écueil du soupçon ou de l’aveu.
Dans la situation d'Amir, j'ai été confrontée au sentiment d'impuissance, une première fois
lorsque l'établissement d'hébergement a demandé la main levée, puis lorsque la MEOMIE a cessé de
vouloir s'en préoccuper. J'ai alors pris conscience de l'importance de pouvoir évoquer ses états de fait
chargé de réactions émotionnelles en équipe afin de ne pas rester seule dans cette impasse.
Des institutions au sein de la métropole, où j'effectue mon stage, se sont emparées de la problématique
des MNA en convoquant tous les acteurs sociaux-éducatifs ayant à les prendre en charge d'une façon
ou d'une autre, afin d'essayer de trouver des solutions porteuses de projets. Ces espaces là permettent
de connaître les structures partenaire et de développer un réseau afin de sortir de l'isolement dans
lequel chacun s'enferme.
Une des missions de l'éducateur en milieu ouvert est de faire vivre la mémoire et le passé du jeune et
sa famille. Il est nécessaire qu'il puisse se représenter dans une temporalité et dans son histoire pour
pouvoir vivre au présent et commencer à se projeter en France.
Être force de proposition et faire appel à sa créativité permet d'entrer en relation avec des MNA
comme avec tout autre jeune.
Si par mes lectures et rencontres, ce travail de mémoire m'a permis de répondre à de nombreuses
questions que je me posais lors des prémices de ce projet, il en a soulevé d'autres : Quel avenir lors
de leur dix-huit ans ? Comment prendre en charge des mineurs victimes de la traite des êtres humains ?
76DELIGNY Fernand. Op. Cit. p. 37
BIBLIOGRAPHIE
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soupçon. 2ème éd. Lyon : Chronique sociale, 2012, 223 p.
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des jeunes isolés étrangers : dispositif national de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation.
Bulletin Officiel, n°2013-06 du 28 juin 2013, 11p.
MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Circulaire interministérielle du 25 janvier 2016 relative à la
mobilisation des services de l’État auprès des conseils départementaux concernant les mineurs
privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et les personnes se
présentant comme tels. Bulletin Officiel, n° 2016-01 du 29 janvier 2016
MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Décret n° 2016-840 du 24 juin 2016 pris en application de l'article
L. 221-2-2 du code de l'action sociale et des familles et relatif à l'accueil et aux conditions
d'évaluation de la situation des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection
de leur famille. Journal Officiel n°0148 du 26 juin 2016, texte n° 18
MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Arrêté du 28 juin 2016 pris en application du décret n°2016-840
du 24 juin 2016 relatif aux modalités de calcul de la clé de répartition des orientations des mineurs
privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille. Journal Officiel, n°0151
du 30 juin 2016, 2 p.
MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Arrêté du 23 septembre 2016 pris en application du décret n° 2016-
840 du 24 juin 2016 relatif à la composition et aux règles de fonctionnement du comité de suivi du
dispositif national de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation des mineurs privés temporairement
ou définitivement de la protection de leur famille. Journal Officiel, n° 0224 du 25 septembre 2016,
texte n° 10
MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Arrêté du 17 novembre 2016 pris en application du décret n°2016-
840 du 24 juin 2016 relatif aux modalités de l'évaluation des mineurs privés temporairement ou
définitivement de la protection de leur famille. Journal Officiel, n°0269 du 19 novembre 2016, 3 p.
MINISTÈRE DE LA JUSTICE. Circulaire du 1er novembre 2016 relative à la mise en œuvre
exceptionnelle d’un dispositif national d’orientation des mineurs non accompagnés dans le cadre
des opérations de démantèlement de la lande de Calais. Bulletin Officiel, n°2016-11 du 30
novembre 2016, 3 p.
ORDONNANCE. n°45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.
RESOLUTION DU CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE. du 26 juin 1997 concernant les
mineurs non accompagnés ressortissants de pays tiers. Journal Officiel, n°C221 du 19 juillet 1997,
7 p.
SULTAN Catherine. Note du 22 octobre 2015 relative à l'action éducative en milieu ouvert au sein
des services de la protection judiciaire de la jeunesse. Bulletin Officiel n°2015-11 du 30 novembre
2015, 13 p.
SULTAN Catherine. Note du 10 février 2017 relative à l'adaptabilité des modalités de prises en
charge. Bulletin Officiel n°2017-02 du 28 février 2017, 10 p.
Sources audiovisuelles – filmographie et autre lecture
MILLET Jonathan, Et toujours nous marcherons [document multimédia : téléfilm], 2017
SAINT-EXUPÉRY Antoine. Le Petit Prince. Gallimard, 1999, 97 p.
TOUBON Jacques, Les politiques publiques ne sont plus suffisamment efficaces contre l'exclusion
[document multimédia : émission de radio], 18 décembre 2017 par Nicole Demorand
LISTE DES SIGLES DE REFERENCE
ASE Aide Sociale à l'Enfance
CASNAV Centre Académique pour la Scolarisation des enfants allophones Nouvellement
Arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de Voyageurs
CJ Contrôle Judiciaire
COPJ Convocation par Officier de Police Judiciaire
CNAPE Convention Nationale des Associations de Protection de l'Enfant
DIPC Document Individuel de Prise en Charge
DPJJ Direction de la Protection Judiciaire de la Jeunesse
DT Direction Territorial
EPE Établissement de Placement Éducatif
EPM Établissement Pénitencier pour Mineur
GISTI Groupe d'Information et de Soutien des Immigrés
JAF Juge aux Affaires Familiales
JE Juge des Enfants
JI Juge d'Instruction
LSP Liberté Surveillée Préjudicielle
MEOMIE Mission d’Évaluation et d'Orientation des Mineurs Isolés Étrangers
MIE Mineur Isolé Étranger
MJIE Mesure Judiciaire d'Investigation Éducative
MMNA Mission Mineur Non Accompagné
MNA Mineur Non Accompagné
OPP Ordonnance de Placement Provisoire
PJJ Protection Judiciaire de la Jeunesse
RRSE Recueil de Renseignement Socio-Éducatif
RUE Responsable d'Unité Éducative
SEAT Service Éducatif Auprès du Tribunal
UEAJ Unité Éducative d'Activité de Jour
UEHC Unité Éducative d'Hébergement Collectif
UEMO Unité Éducative de Milieu Ouvert
VAD Visite A Domicile
ANNEXES
ANNEXE N°1 Encart méthodologique
ANNEXE N°2 Entretien avec l'éducatrice de l'UEMO, Claire
ANNEXE N°3 Entretien avec l'éducatrice de l'UEMO, Isabelle
ANNEXE N°4 Questionnaire à destination du Juge des Enfants
ANNEXE N°5 Ébauche de répertoire à destination des professionnels
ANNEXE N°6 Ébauche de répertoire à destination des MNA
ANNEXE N°7 Affiche collée dans les rues de C.
ANNEXE N°1
Encart méthodologique
A. De la question de départ à la problématique
Mes premiers questionnements sur la prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA)
sont nés dès le stage effectué entre les écrits et les oraux du concours d'éducateurs PJJ, lors de ma
rencontre avec un jeune en UEHC. Ce dernier sortant d'une hospitalisation, je me suis interrogée sur
le parcours migratoire qu'avait connu ce mineur, son arrivée en France, la barrière de la langue mettant
un frein à sa relation avec les éducateurs et la psychologue du service ainsi que la difficulté pour les
travailleurs sociaux de prendre en charge et d'aider ce jeune. Au cours de ma première année de
formation, j'ai entendu parler de cette problématique des MNA et de leur nombre qui évolue à la
hausse chaque année sur le territoire Rhône Ain, mais sans rencontrer ces jeunes sur mes terrains de
stage, qui se situaient en milieu rural.
Durant ma seconde année de formation, le service sur lequel je suis est le seul à prendre en
charge les mesures pénales des MNA. La situation de ces jeunes m'interpellant beaucoup, j'ai ainsi
fait le choix de travailler sur les spécificités de la prise en charge des MNA en milieu ouvert.
En échangeant avec les professionnels du service beaucoup d'interrogations ont émergé : Qui sont ces
jeunes arrivant de pays lointains ? Comment travailler avec ces mineurs sans pouvoir s'appuyer sur
leurs familles ? Quel travail mener avec eux quand on sait que leur minorité est contestée ? Relèvent-
ils plus de l'ASE ou de la PJJ dès lors qu'ils ont commis un délit ? Quel suivi psychologique mettre
en place pour ces jeunes ? Comment travailler la formation et l'insertion professionnelle alors qu'ils
n'ont pas de papiers d'identité ?
Sur mon service, j'ai ainsi pu rencontrer des MNA. J'ai constaté que leur récit de vie avait des
ressemblances : beaucoup sont originaires d'Algérie, leurs parents sont décédés, ils n'ont pas de frère
et sœur, vivaient à la rue dans leur pays et sont dans l'errance dans plusieurs pays européens. Qui sont
ces mineurs dont la PJJ a la charge ? En quoi ces prises en charge diffèrent-elles des autres ?
Durant des échanges avec différents professionnels, j'ai noté le constat qui est fait sur le territoire du
Rhône, à savoir : les MNA vont être plus rapidement incarcérés que les autres mineurs. Dès le premier
ou deuxième défèrement un mandat de dépôt est demandé par le Parquet. Comment est pensée
l'incarcération dans le cas des MNA ? Est-ce pour les sortir des réseaux, les mettre à l'abri, pour
garantir leur représentation devant la Justice ?
De plus j'ai également pu entendre et constater à plusieurs reprises que les Établissements de
Placements Éducatifs (EPE) allaient facilement accepter la demande d'admission d'un MNA alors que
pour d'autres mineurs, les éducateurs essuient de nombreux refus avant d'avoir une réponse positive.
Pourquoi ce choix est-il fait par les EPE de favoriser l'admission des MNA ?
Au travers de mes observations et réflexions sur ce sujet, la question de la nature du suivi éducatif,
vers un renforcement des modalités d'intervention s'est posée. Autrement dit, la prise en charge des
MNA nécessite-t-elle une révision des méthodes éducatives afin de répondre davantage aux besoins
particuliers de ces mineurs ? Au nom du principe d'égalité devant le service public, les éducateurs
devraient-ils prendre en charge indifféremment ces MNA, comme des jeunes de droit commun ?
Sur le fond, la réponse à ces questions s'oriente inévitablement vers le principe d'individualisation de
la prise en charge. Considérer les MNA en niant leurs traumatismes et leurs situations complexes
serait un non-sens pour le travail éducatif. Dès lors, à partir de cette hypothèse, émerge ma
problématique : Dans quelle mesure la prise en charge des MNA constitue-t-elle un enjeu nouveau
pour les éducateurs PJJ travaillant en milieu ouvert ?
B. L'élaboration des hypothèses de recherche
Pour arriver à élaborer mes hypothèses de recherche, je suis partie des difficultés mises en
lumières par les témoignages des éducateurs PJJ dans la prise en charge des MNA :
- La barrière de la langue
- La question des papiers d'identité qui va bloquer l'inscription dans une formation ou insertion
professionnelle
- L'errance dans laquelle peuvent être ces jeunes et donc la difficulté à les rencontrer
- Les problèmes de santé avec lesquelles arrivent les MNA, et les troubles psychologiques liés à leur
vécu au pays et durant le parcours migratoire
- Les addictions, les drogues, l'alcool mais également la prise de médicaments
- L'absence des parents sur le territoire
- Le discours que peut tenir le mineur sur son âge, son parcours migratoire, sa vie au pays, puis en
France, la place du mensonge qui peut entraîner le soupçon et la méfiance de la part des éducateurs.
- L'hébergement des MNA, pour la plupart en hôtel et l'absence d'interlocuteurs pour évoquer et
penser la situation de chaque jeune
- L'incertitude sur la situation de ces jeunes lorsqu'ils deviendront majeurs
En faisant état de ces difficultés dans la prise en charge des MNA par les éducateurs PJJ, cela m'a
permis de constater à quel point ces derniers pouvaient être désemparés face à ce public-là. En effet,
la spécificité des MNA étant qu'ils soient étrangers, seuls, sans représentants légaux sur le territoire
national fait d'eux un public différent de celui qui est habituellement pris en charge par la PJJ.
Aussi, j'ai pu élaborer deux hypothèses de recherche :
→ Les pratiques des éducateurs à la PJJ en milieu ouvert dans la prise en charge des MNA sont-elles
adaptées à leur spécificité ?
→ Quels besoins des MNA les éducateurs à la PJJ peuvent-ils répondre ?
C. Méthodes de recueil et d'analyse des données
Pour débuter mon travail d'observation et pouvoir orienter mes recherches en fonction des
constats fait sur mon lieu de stage, je me suis principalement appuyée sur mon carnet de bord. Il m'a
permis de noter les observations que je faisais lors d'entretiens entre un éducateur et un MNA, mon
ressentis et celui du professionnel, les difficultés rencontrées, les besoins des éducateurs comme du
jeune. J'ai également pu noter les constats qui étaient faits sur la problématique des MNA lors d'un
groupe de travail organisé par la Direction Territoriale (DT) et qui ont nourri ma réflexion. Étant en
co-référence avec un éducateur sur plusieurs mesures pénales concernant un MNA, mon carnet de
bord m'a permis de noter comment se déroulait cette prise en charge, ce qui fait nœud ou au contraire
ce qui se passait bien, et les points sur lesquels se renseigner. Toutes ces informations sont venues
nourrir ma réflexion et m'ont permises de m'appuyer sur des vécus de terrain pour les relater et les
analyser dans ce travail de mémoire professionnel. L'utilisation du carnet de bord m'a permis de
prendre également du recul sur les observations faites et de pouvoir faire des liens entre elles mais
également de les appréhender avec des concepts théoriques que mes lectures m'ont permis.
Ensuite, j'ai fait le choix d'interroger certains professionnels, de métiers différents, mais tous
ayant à prendre en charge et à travailler avec le public des MNA. J'ai ainsi fait le choix de mener des
entretiens semi-directifs, le but étant d'essayer d'orienter le moins possible les réponses de mon
interlocuteur, même si la neutralité sur un sujet aussi politique est difficile à garder. De plus, le choix
de cette méthode de recueil des données de l'entretien semi-directifs permettait à travers mes
questions de laisser la liberté de réponse au professionnel tout en me permettant de garder l'axe sur
lequel je venais l'interroger.
Ayant organisé des interviews avec des professions différentes, j'ai dû adapter à chaque fois ma trame
d'entretien en fonction de mes observations et qui pouvait confirmer ou infirmer mes hypothèses.
Je n'avais pas un temps imparti lors des entretiens, faisant surtout en fonction des nécessités de
service et du temps que chaque professionnel pouvait m'accorder. Afin d'expliquer le cadre, je
présentais au début de chaque entretien très rapidement le thème de mon mémoire professionnel et
pourquoi je souhaitais les rencontrer.
Il a été compliqué pour moi lors de certains entretiens de réussir à les contenir afin que la discussion
n'aille pas sur un versant dont j'avais délibérément fait le choix de ne pas aborder avec la personne
que j'avais face à moi. Au fur et à mesure de mes recherches et des échanges avec différentes
professions, j'ai pu affiner mes questions pour pouvoir aller plus loin dans la réflexion. Ça a été le cas
par exemple pour le dernier échange que j'ai eu avec un Procureur de la République. Cela m'a permis
d'aller plus loin dans les questions abordées compte tenu de ce que j'avais eu comme informations
auparavant, chose que je n'aurai pas pu faire si je l'avais interrogé en premier.
Après chaque entretien réalisé, je reprenais ce qui avait été exprimé afin de pouvoir analyser
les données récoltées. J'ai alors fait un tri dans les informations que j'ai pu recueillir, le but pour moi
étant de faire des liens avec des concepts étudiés et d'illustrer ces derniers par des paroles et des
expériences de terrain.
D. L'élaboration des hypothèses d'action
J'ai pu élaborer des hypothèses d'action grâce à mes lectures ainsi qu'en faisant le bilan de ce
qu'il faudrait mettre en place dans la structure sur laquelle je suis afin d'améliorer la prise en charge
des MNA par les éducateurs PJJ.
Je suis alors partie du constat qu'il est difficile pour les éducateurs PJJ d'entrer en lien avec ces jeunes,
du fait de leur parcours, de leur errance et de ce qu'ils comprennent également de la justice. Aussi
mettre en place des ateliers d'apprentissage de la langue française pourrait être un moyen d'être en
lien avec eux et une manière de les inscrire sur le territoire national en favorisant les moyens d'une
meilleure intégration. L'utilisation d'activité de médiations participe également à cette intégration.
De plus, renforcer le lien avec les partenaires du territoire en lien également avec les MNA
pourrait être envisagé afin d'éviter le sentiment d'isolement et d'impuissance que l'on peut retrouver
chez les éducateurs face aux difficultés rencontrées dans les prises en charge des MNA.
Puis, à la lumière de mes lectures, je me suis rendue compte dans les entretiens avec les jeunes,
que les éducateurs évoquent peu ou pas la question de sa famille. Une des principales raisons étant
que le MNA n'a pas de responsable légal sur le territoire national. Cependant il me semble important
de pouvoir faire vivre son passé à travers des mots afin qu'il puisse s'inscrire dans un parcours et se
projeter. Un travail en pluridisciplinarité ou avec un partenaire pourrait permettre de travailler avec
la famille du MNA.
Toutefois, une question reste en suspens mais ne fait pas partie des développements de ce mémoire :
est-ce qu'une procédure pénale et a fortiori, une prise en charge au sein de la PJJ ne viendraient-elles
pas compromettre leurs chances d'obtenir le statut de réfugié en France ?
E. Description de la phase d'expérimentation et évaluation envisagée
Lorsque j'ai dû penser à une expérimentation en milieu ouvert, je n'arrivais pas à me projeter
dans ce que je voulais faire. Je suis donc repartie des constats que j'ai fait sur mon terrain de stage et
je me suis demandée comment je pouvais agir pour penser la prise en charge des MNA.
Dans mes hypothèses d'action, certaines comme le travail avec la famille ou des ateliers avec des
MNA sur le service auraient été difficiles à mettre en place durant la partie pratique de la formation.
A quelle place je peux trouver suffisamment d'espace pour pouvoir agir et pour répondre à un besoin
des professionnels ?
Mon expérimentation est alors la création de deux répertoires l'un à destination des
professionnels, l'autre s'adressant aux MNA. Les éducateurs se retrouvent souvent démunis face à des
mineurs ayant des demandes spécifiques (santé, logement, alimentaire), ne sachant où les orienter. Ce
répertoire centraliserait les informations utiles et ils pourraient ainsi les orienter vers les structures
pouvaient les accueillir. Il prendra la forme d'un tableau, organisé en fonction des thèmes recherchés
(Santé, scolarité, logement, habillement, denrées alimentaires, interprétariat et services
administratifs). Cet outil permettra aux éducateurs d'être en contact avec des partenaires et de sortir
de l'isolement et de l'impuissance qu'ils peuvent ressentir dans l'accompagnement des MNA.
Le second répertoire à destination des MNA reprendra les différentes structures présentes sur
le territoire afin qu’ils puissent s'y rendre. La forme sera néanmoins différente, il sera sous la forme
d'un petit carnet illustré afin de le rendre ludique et facile d'utilisation malgré la barrière de la langue.
L'évaluation prendra la forme d'un questionnaire à destination des professionnels. Le but étant
de connaître l'usage qui est fait des répertoires, les retours positifs et négatifs, ce qui pourrait manquer
afin de l'améliorer, et pérenniser ce projet selon les retours faits.
F. Points forts et limites de la démarche
Ce travail de mémoire m'a permis d'observer la pratique des éducateurs dans les prises en charge des
MNA, les difficultés rencontrées et les ressources dont ils disposent. Je pense qu'en choisissant ce
thème, mes interrogations et mes observations ont permis à l'équipe d'échanger sur les difficultés que
chacun rencontrait à travers ces accompagnements, de sortir de l'isolement mais aussi de pouvoir
Cette démarche de recherches a été très riche et m'a permis d'acquérir des connaissances sur le
public des MNA que les éducateurs sont amenés à rencontrer et à prendre en charge. Je me posais de
nombreuses questions sur ces jeunes, sur les parcours migratoires, les enjeux, leurs avenirs en France,
auxquelles j'ai pu trouver des réponses au gré de mes lectures et échanges avec différents
professionnels.
Cependant, ce thème étant très vaste et touchant de nombreux domaines, j'ai dû faire des choix et
délimité le champ dans lequel je souhaitais inscrire ma réflexion. Les co-références que je mène sur
mon terrain de stage prennent du temps et demandent de l'investissement, j'ai donc fait le choix de
mettre de côté la question des difficultés psychologiques, de toxicomanie, du parcours migratoire et
de la traite des êtres humains. J'ai cependant abordé certaines d'entre elles succinctement dans mon
travail puisqu'elles font parties des problématiques que rencontrent les MNA, mais je n'ai pu les
développer d'avantage, chose que j'aurai souhaité faire.
Avec du recul, j'aurai souhaité, si j'avais disposé de plus de temps, porter la parole des MNA suivis
par le service dans ce mémoire.
ANNEXE N°2
Entretien réalisé le mardi 22 mars avec Claire77, éducatrice à l'Unité Éducative de Milieu Ouvert
de C.78
J'ai demandé à Claire si elle était disponible cet après-midi-là pour que nous puissions échanger dans
le cadre de mon mémoire sur la question des MNA. Nous avons convenu d'un horaire entre ses
rendez-vous. Nous nous sommes installées dans son bureau.
1. LG : Durant ta carrière à la PJJ, as-tu été amenée à prendre en charge des MNA ?
2. C : Ça remonte très loin, c'était au SEAT de B. près de l'aéroport D. dans les années 2000. Avec la
guerre au Rwanda, il y a beaucoup de monde qui arrivait via R., on les appelait les « 35 quatar », c'est
un texte de loi concernant les personnes en transit et qui ne sont pas encore autorisées à entrer sur le
territoire français. A cette époque, j'en rencontrais, mais ça n'était pas encore qualifié comme
aujourd'hui. Il y avait un autre regard qui était posé sur eux avec la guerre en Afrique : beaucoup
d'enfants orphelins, victimes, ceux mis dans un avion par la croix rouge. Les mineurs devaient passer
dans un Juge des enfants, on devait remplir un RRSE, la protection était accordée et ils étaient confiés
à l'ASE. Mais on ne les nommait pas. (silence) Ça n'était pas comme les MNA maintenant. En milieu
ouvert à P., la prise en charge des MNA est quelque chose sur laquelle il a fallu se pencher il y a
longtemps par rapport à Lyon. Ici c'est sectorisé.
Depuis deux ans, le nombre de MNA arrivant s'accélère et ça s'amplifie sur le territoire. Ici,
aujourd'hui, on en est à se demander qui doit les prendre en charge ? Les répartir ? De façon solidaire ?
A P., toutes ces questions s'étaient déjà posées et le maillage déjà pensé.
3. LG : Qu'est ce qui te marque le plus chez ces mineurs ?
4. C : Leur singularité. Et en même temps se sont des mineurs en danger ou délinquant, on sait faire,
mais là, la singularité du fait qu'ils soient dans l'errance, leur isolement. Peut-être à tort mais je dirai
qu'ils se situent entre deux eaux, on les voit au milieu ouvert car on a une ordonnance pénale pour
eux, mais la protection de l'enfance n'est pas pris en compte. Donc je parlerai de leur singularité.
5. LG : En quoi leur prise en charge est différente de celle des autres mineurs suivis à la PJJ ?
6. C : Avec les MNA, tout est différé. La première question que je me pose quand j'en rencontre un
s'est : Est-ce qu'il a un lieu d'habitation ? Où mange-t-il ? Toutes ces questions sont secondaires chez
un autre jeune, alors que pour eux c'est prioritaire. Est-ce qu'ils sont quelques parts chez eux ? En ça
c'est différent. Je dirai que toutes ces questions-là sont moins prioritaires pour les autres prises en
77
Dans un souci du respect de l'anonymat des usagers, l'ensemble des prénoms présents dans ce mémoire ont été changés.
78Structure anonymisée
charge que l'on a. Oui en fait c'est ça la question : le fait d'être isolé ne le lie nulle part, est-ce qu'il va
pouvoir venir jusqu'au service régulièrement ?
S'ils n'étaient pas si seuls dans leur quotidien et dans les démarches qu'ils doivent faire, on pourrait
décliner le cadre du milieu ouvert comme avec les autres.
7. LG : Quelles sont les difficultés que tu rencontres dans l'accompagnement des MNA ?
8. C : Ma difficulté est de ne pas m'emporter sur l'absence de moyens et de perspectives. Il faudrait
que l'on puisse les ancrer quelque part si possible, mais quid des papiers, quid de l'insertion. Quelles
perspectives ? On a la pression avant l'heure, avant leur majorité car ça peut être rapidement
compliqué. Nous avons peu de moyens. On se sent impuissant dans ces situations, on ne sait pas
comment les saisir, ce sont des jeunes qui sont ancrés nulle part, on est isolé.
9. LG : De quoi les éducateurs auraient-ils besoin ? Qu'est-ce qui manque dans ces prises en
charge ?
10. C : Ça serait de pouvoir leur trouver des lieux d'accueil, que ça soit plus facile, ne plus avoir
besoin de batailler et que des hébergements les prennent en charge. Il y a les hôtels ou les foyers pour
certains, l'hôtel peut être plus envisageable que pour d'autres, mais il faut que ça soit pensé. Que ça
ne soit pas la seule solution. Il est difficile d'inscrire ces MNA dans le droit commun et qu'elle passe
beaucoup de temps à faire des recherches et a appelé des structures sans avoir de résultats probants.
L'apprentissage de langue avec des ateliers de FLE manquent. Si on leur offrait une prise en charge
avec une scolarité, un toit et de quoi subvenir à leurs besoins, on ne se poserait pas toutes ces questions
et on ne serait pas réduit à leur renvoyer notre impuissance. J'ai une mesure pour un MNA, il souhaite
aller à l'école apprendre le français, il a été au rendez-vous au CIO, mais la date à laquelle il va
pouvoir passer les tests pour connaître son niveau est dans deux mois, je me demande ce qu'il va faire
pendant deux mois. Je comprends qu'il puisse être en colère. (silence)
Il faut du temps pour eux. Ils doivent démontrer au JE qu'ils s'insèrent dans la société française, qu'ils
investissent et respectent la prise en charge, qu'ils apportent des choses car c'est ce qu'il attend d'eux.
Mais il n'y a rien de magique, l'hôtel, la difficulté de les voir en entretien, ça prendra du temps pour
qu'une relation de confiance se mette en place et que l'on puisse travailler ensemble. Mais ce temps
ils ne se le donnent pas et on ne leur donne pas non plus.
11. LG : Est-ce que tu dirais que les éducateurs peuvent être isolés dans ces prises en charge ?
10. C : Oui, on est isolé comme les MNA peuvent l'être aussi, mais eux je pense que c'est affectif.
C'est pour cela qu'ils ont besoin d'être avec leurs pairs, le départ précipité, parfois ils ne sont pas
préparés à partir, les proches qui sont restés au pays, c'est vraiment compliqué pour eux.
Nous, l'isolement éducatif c'est plein de choses mis bout à bout. En milieu ouvert, comme tu le sais,
les éducateurs sont souvent le seul décisionnaire dans ses axes de travail, et encore plus avec les
MNA, avec le fait que tout est à créer, à faire. Ils sont là et puis on ne les voit plus, d’où la difficulté
de construire un projet éducatif. C'est assez « haché ». C'est un phénomène nouveau pour la
politique et on voit que c'est difficile. Mais nous qu'est-ce que l'on fait à notre place ? Quel sens on
met dans nos prises en charge ?
ANNEXE N°3
Entretien réalisé le mardi 03 avril avec Isabelle79, éducatrice à l'Unité Éducative de Milieu
Ouvert de C.80
Je souhaitais échanger avec Claire sur le sujet des MNA, puisque j'ai en co-référence avec elle le suivi
du jeune Amir. Nous nous sommes installées dans son bureau. Elle avait un rendez-vous ensuite mais
a pris le temps de répondre à mes questions.
1. LG : Durant ta carrière à la PJJ, as-tu été amenée à prendre en charge des MNA ?
2. I : Alors... (silence), je dirai que c'était en 1995 car j'étais en UEHC. Mais ça n'était pas du tout le
même public que celui que l'on a aujourd'hui. Il y avait beaucoup de jeunes arrivant de Chine,
d'Albanie, puis du Kosovo avec la guerre, et aussi d'Afrique centrale. Au foyer sur lequel j'étais avait
encore la double habilitation donc on les accueillait au civil. Ils pouvaient rester plusieurs mois. Après
2000, ils ne restaient qu'une semaine le temps que l'ASE leur trouve un hébergement. J'en garde
vraiment des bons souvenirs. On cuisinait ensemble, ils nous faisaient découvrir leurs plats. Il y avait
une bonne dynamique je trouve avec le civil et le pénal. On avait un équilibre et un rythme de vie. Ils
tempéraient beaucoup.
3. LG : Qu'est ce qui te marque le plus chez ces mineurs ?
4. I : Leur envie de vivre. Les ressources dont ils disposent malgré toutes les épreuves qu'ils ont
traversées. Pour certains, comme pour Amir le vécu de son parcours est trop douloureux et il ne peut
pas en parler. Mais il sourit quand même. Oui, c'est cette capacité de sourire.
5. LG : En quoi leur prise en charge est différente de celle des autres mineurs suivis à la PJJ ?
6. I : Il faut penser à des choses que l'on n'avait pas l'habitude de penser. Il faut penser à l'interprète
pour les entretiens, à leur culture, à l'éducation qu'ils ont eu. Il est important lors du premier entretien
que le MNA reparte en ayant compris le message que l'on doit lui faire passer afin d'éviter
l'accumulation de dossiers au pénal. Je pense qu'avec eux je mets une certaine distance.
L'histoire que les MNA nous racontent n'est pas authentique, ils récitent des choses, peut-être en
mêlant des éléments de vérité mais on n'arrive pas à démêler le vrai du faux. Je pense que ça vient
biaiser la relation de confiance entre l'éducateur et le jeune. Ils ont des parcours migratoires pour
beaucoup remplis de souffrance, et ils n'ont certainement pas dû rencontrer beaucoup d'adultes
bienveillants. Donc ils n'arrivent plus à faire confiance à des adultes. Ou peut-être avec du temps.
Mais il est compliqué de travailler sans la confiance.
79
Dans un souci du respect de l'anonymat des usagers, l'ensemble des prénoms présents dans ce mémoire ont été changés.
80Structure anonymisée
7. LG : Quelles sont les difficultés que tu rencontres dans l'accompagnement des MNA ?
8. I : Je dirai que ça serait la question de leur avenir. Je me sens parfois impuissante dans la prise en
charge de ses mineurs, quelle formation leur proposer ? Où les orienter lorsqu'ils ont besoin de voir
un psychologue ? J'ai l'impression de ne pas savoir faire avec ces jeunes. Dans la situation d'Amir par
exemple, l'insertion professionnelle et scolaire est difficile car on leur demande de tenir un rythme
qu'ils n'ont pour beaucoup plus ou peut-être jamais eu. Les dix-huit arrivent vite et on ne sait pas quoi
leur proposer.
Je pense que ce sont des jeunes qui ont une sacrée capacité de résilience, mais parfois on ne sait pas
comment les accompagner et vers qui les orienter. Ils ont aussi des problèmes psy il faudrait qu'ils
puissent être pris en charge et accompagnés. Regarde Amir, il en aurait besoin, il se scarifie d'après
les éducateurs du foyer, il aurait besoin d'aller voir la psychologue pour parler de ce qu'il a vécu avant
d'arriver jusqu'ici, mais il ne peut pas s'autoriser à parler librement.
L'entretien a été interrompu par des obligations du service et nous n'avons pas pu le reprendre.
ANNEXE N°4
Questionnaire sur lequel je me suis basée, le mercredi 07 mars 2018 pour mener l'entretien avec
un Juge des enfants
Nous avons, avec ma tutrice de stage et avec l'aval de la RUE et de la DS de l'UEMO, envoyé plusieurs
demandes aux différents JE du tribunal pour Enfants, expliquant le cadre de mon mémoire
professionnel et sollicitant ainsi un entretien avec eux.
Ce juge est le seul à avoir pris contact avec moi pour fixer une date d'entretien. Il m'a reçu en fin
d'après-midi dans son bureau, et n'a pas souhaité la diffusion de ses propos.
J'ai présenté succinctement le sujet de mon travail de recherches et nous avons commencé l'entretien.
1. Depuis combien de temps travaillez-vous en tant que Juge des Enfants dans ce tribunal ?
2. D'après vous, depuis quand la question des MNA prend-t-elle autant d'ampleur sur le territoire
du Rhône ?
3. Est-ce que vous avez constaté un changement dans la prise en charge des MNA, au pénal
comme au civil ?
4. D'après mes observations et les informations que j'ai pu récolter sur le terrain, il semblerait
qu'il y ait une propension à mettre les mineurs non accompagnés en EPM plus rapidement que
les autres jeunes, qu'en pensez-vous ? Si oui, pourquoi ?
5. Est-ce qu'il y a plus de tolérance vis-à-vis d'un mineur non accompagné lorsqu'il s'agit d'un
vol alimentaire ?
6. Est-ce que vous diriez que vous adaptez les obligations du CJ s'il s'agit d'un mineur non
accompagné ou non ? L'exemple me vient de l'obligation de respecter le placement, ainsi que
l'obligation de formation qui peut être compliquée à mettre en place avec l'absence pour
beaucoup de jeunes de documents d'identité.
7. Quelles sont les attentes que vous avez du travail éducatif adressé à la PJJ ? Sont-ils de même
nature que les autres jeunes ou différents ?
8. Est-ce qu'il saisit le juge des tutelles afin qu'il nomme un administrateur ad hoc ?
ANNEXE N°5
Ébauche de répertoire à destination des professionnels
Exemple concernant les partenaires prenant en charge les MNA dans le domaine de la santé
MEDECINE GENERALE
Nom de la
structure Lieu Adresse Téléphone
Horaire
d'ouverture Conditions
Prise de
rendez-
vous
Médecins du
monde
XX Rue de
Pierre 00.00.00.00.00
lundi au vendredi
: 8h -16h sans Non
PASS X Boulevard 00.00.00.00.00 lundi au vendredi
: 8h -17h sans Oui
SOINS DENTAIRE
Nom de la
structure Lieu Adresse Téléphone
Horaire
d'ouverture Conditions
Prise de
rendez-
vous
Centre de Santé
Dentaire 00.00.00.00.00
Tous les après-
midi
Soins
Gratuit Oui
VACCINATION
Nom de la
structure Lieu Adresse Téléphone
Horaire
d'ouverture Conditions
Prise de
rendez-
vous
Dispensaire de S. XX Chemin
du Moulin 00.00.00.00.00
Du lundi au
vendredi de 8h à
18h
Oui
ANNEXE N°6
Ébauche de répertoire à destination des MNA
Repas
Adresse :
3 rue du la M
0000 XXXXX
Téléphone :
00.00.00.00.00
Horaire :
Lundi au mardi : 11h30 – 14h00
Samedi : 12h00 – 15h00
Dimanche : 11h00 – 15h00
Plan d’accès :
Métro B : arrêt Pierre XXX
Bus 113, 11 : arrêt Pierre XXX
Médecin
Adresse :
35 rue du B
00000 XXXXX
Téléphone :
00.00.00.00
Horaire :
Lundi au mardi : 08h30 – 18h00
Samedi : 08h00 – 15h00
Dimanche : 08h00 – 12h00
Plan d’accès :
Métro B : arrêt Pierre XXX
Bus 113, 11 : arrêt Pierre XXX
ANNEXE N°7
Affiche collée dans les rues de L. à côté du tribunal
Photographie prise le 14 mars 2018
Le service de milieu ouvert, sur lequel j'évolue, m'a permis de rencontrer des mineurs non
accompagnés. La question de leur prise en charge et toutes ses difficultés m'ont amenée
à en faire mon thème de recherche.
Les éducateurs de la PJJ en UEMO se retrouvent souvent impuissants dans ces
accompagnements, ne sachant comment faire avec ce public singulier.
Je suis partie du cadre législatif pour m'attacher à étudier comment s'élaborait, ou pouvait
l'être, le travail avec ces mineurs, et amener un autre regard sur ces situations pour penser
autrement leur prise en charge.
Ce mémoire m'a emmenée sur le douloureux chemin de ces jeunes, chemin fait de
violences, d'incompréhensions, de soupçons mais aussi d'espoirs et m'a permis de
réfléchir aux outils à mettre en œuvre pour les aider au mieux dans leur souhait d'un avenir
plus serein.
Mots-clés : Public MNA ; Accompagnement ; Ressources ; Cadre légal et judiciaire ;
Errance ; Difficulté ; Pratiques éducatives