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Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollar
Travail de diplôme réalisé en vue de l’obtention du diplôme HES
par :
Christian BAILLIFARD
Conseiller au travail de diplôme :
José Ramirez, professeur
Genève, le 3 novembre 2006Haute École de Gestion de Genève (HEG-GE)
Filière Economie d’entreprise
Déclaration
Ce travail de diplôme est réalisé dans le cadre de l’examen final de la Haute école de
gestion de Genève, en vue de l’obtention du titre d’économiste d’entreprise. L’étudiant
accepte, le cas échéant, la clause de confidentialité. L'utilisation des conclusions et
recommandations formulées dans le travail de diplôme, sans préjuger de leur valeur,
n'engage ni la responsabilité de l'auteur, ni celle du conseiller au travail de diplôme, du
juré et de la HEG.
« J’atteste avoir réalisé seul le présent travail, sans avoir utilisé des sources autres que
celles citées dans la bibliographie. »
Fait à Genève, le 3 novembre 2006
Christian BAILLIFARD
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian i
Remerciements
Je souhaite exprimer mes sincères remerciements aux personnes qui m’ont permis, au
travers de leur compétence, de leurs conseils et de leur disponibilité, de réaliser ce
travail. Je remercie plus particulièrement Monsieur Denys Chamay, Madame Valérie
Lemaigre et Monsieur Daniel Pfund.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian ii
Sommaire
Dans le cadre de notre travail de diplôme, nous avons choisi de traiter de la durabilité
corrélation entre l’or et le dollar. Cela répond à notre intérêt pour les questions de
macro économie et cherche à répondre à certaines interrogations qui se posent dans
le domaine de la finance et plus particulièrement la gestion de fortune, domaine de
notre activité professionnelle.
Pour réaliser ce travail nous avons cherché à construire notre raisonnement sur la
relation fondamentale qu’il existe entre l’or et le dollar pour ensuite analyser les
différents déterminants de chacun des deux éléments étudiés. Nous avons ensuite
analysé la corrélation entre l’or et le dollar sur différentes périodes.
L’or et le dollar ont une histoire commune de plus de deux cents ans. Fixée à 20.67
USD l’once en 1900, la parité a évolué jusqu’en 1971, date à laquelle le dollar est
déclaré inconvertible. Le dollar est alors la monnaie la plus utilisée dans le monde, ce
qui lui confère un rôle particulier puisque la banque centrale américaine doit assurer la
prospérité des Etats-Unis tout en fournissant suffisamment de dollars au reste du
monde. Dès 1973, le dollar devient une monnaie à taux de change flottant.
Depuis cette date, le billet vert fluctue par rapport aux autres monnaies en fonction de
plusieurs facteurs. L’inflation est un déterminant essentiel du dollar, comme pour toute
autre monnaie d’ailleurs. La hausse générale et durable des prix est l’expression de la
perte de valeur de la monnaie. La variation des taux d’intérêt ainsi que l’état des
finances des USA conditionnent l’attractivité du dollar et sa valeur.
L’or, qui a longtemps été utilisé comme monnaie semble jouer aujourd’hui le rôle de
valeur refuge contre l’inflation et contre différentes craintes. Mais l’or est aussi
recherché pour diverses raisons, notamment dans la joaillerie, et comme source de
diversification de portefeuille
Notre analyse de corrélation nous a amené à constater que bien que les corrélations
sur 12 et 24 mois soient très utilisées, elles ne sont pas d’une grande pertinence. Les
fluctuations sont trop importantes, montrant des variations de court terme, alors que la
relation entre l’or et le dollar s’inscrit dans la longue durée. Les différents déterminants
de l’or et du dollar nous laissent penser que cette corrélation est durable.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian iii
Table des matières
Déclaration.......................................................................................................... iRemerciements..................................................................................................iiSommaire.......................................................................................................... iiiTable des matières........................................................................................... ivListe des Tableaux...........................................................................................viListe des Figures..............................................................................................viIntroduction........................................................................................................11. Histoire de la relation or-dollar..................................................................2
1.1 Naissance de la relation.............................................................................21.2 Rôle croissant du dollar dans les échanges internationaux..................3
1.2.1 L’émergence des Etats-Unis jusqu’en 1914......................................31.2.2 La première guerre mondiale et ses conséquences..........................41.2.3 La conférence de Gênes et l’entre-deux guerres..............................4
1.3 L’apogée du dollar......................................................................................61.3.1 Bretton Woods...................................................................................61.3.2 L’après-guerre et l’intensification du commerce mondial..................71.3.3 Les années 1960 et le problème des eurodollars..............................8
1.4 La démonétisation de l’or et le dollar mondial......................................111.4.1 Désordre monétaire et changes flottants.........................................111.4.2 Accords de la Jamaïque..................................................................111.4.3 Les pétrodollars...............................................................................121.4.4 La croissance par les déficits..........................................................13
2. Analyse du dollar et de l’or......................................................................152.1 Les déterminants du dollar......................................................................15
2.1.1 L’inflation..........................................................................................152.1.2 Les taux d’intérêt.............................................................................222.1.3 Les déficits américains....................................................................24
2.2 Les déterminants de l’or..........................................................................292.2.1 La production aurifère......................................................................292.2.2 La demande de joaillerie et industrielle...........................................322.2.3 L’inflation..........................................................................................342.2.4 Les taux d’intérêt et le marché boursier..........................................37
3. Analyse de la corrélation entre l’or et le dollar......................................41Conclusion.......................................................................................................46Bibliographie....................................................................................................48Annexe 1 Coefficient R^2 roulant sur 12 mois.............................................51Annexe 2 Développement du calcul relatif au carry trade...........................52Annexe 3 Evolution des taux directeurs US et EUR.....................................53
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian iv
Annexe 4 Les présidences et leur gestion du budget fédéral.....................54Annexe 5 Evolution de la production d’or depuis 1970...............................55Annexe 6 Evolution trimestrielle de demande de joaillerie par pays..........56Annexe 7 Evolution des réserves d’or officielles.........................................57Annexe 8 Questionnaire d’entretien..............................................................58
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian v
Liste des Tableaux
Tableau 1 Réserves d’or et marché des eurodollars.................................................9
Liste des Figures
Figure 1 Impact de différents facteurs inflationnistes................................................19
Figure 2 PIB réel vs M3………..................................................................................20
Figure 3 L’inflation et le dollar……….........................................................................21
Figure 4 Les taux réels et le dollar............................................................................24
Figure 5 Le déficit (surplus) budgétaire US et le dollar………..................................25
Figure 6 Production mondiale et prix de l’or………...................................................29
Figure 7 Composition de l’offre globale.....................................................................31
Figure 8 Rapport entre le prix de l’or et la demande industrielle et joaillière............33
Figure 9 Evolution de l’or et de l’inflation………........................................................35
Figure 10 Comparaison des variations de l’or et l’inflation..........................................35
Figure 11 Comparaison du portefeuille avec le marché………...................................39
Figure 12 Evolution de l’or et du dollar……….............................................................41
Figure 13 Corrélation roulante sur 120 mois...............................................................42
Figure 14 Corrélations roulantes sur 24 et 60 mois………..........................................43
Figure 15 Relation entre l’or et le dollar d’avril 2003 à mars 2005..............................44
Figure 16 Corrélation roulante sur 12 mois………......................................................45
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian vi
Introduction
La période à laquelle nous avons choisi de traiter de la relation entre l’or et le dollar
(septembre 2005) était marquée par une interrogation sur la corrélation entre ces deux
variables. On pouvait lire dans certains journaux que l’or et le dollar n’étaient plus
corrélés. Ce qui posait un problème important dans la mesure où cela remettait en
question une théorie communément admise qui dit que l’or et le dollar varient en sens
inverse.
Nous allons donc, au travers de ce rapport, chercher à savoir si l’or et le dollar sont
bien corrélés et si oui, cette corrélation est elle en train de disparaître ?
Ce travail s’articule autour de quatre points essentiels.
L’historique va nous permettre d’établir depuis quand et pourquoi on parle de
l’or et du dollar
Nous allons ensuite voir quels sont les éléments qui influencent le prix du dollar
par rapport aux autres monnaies, donc son taux de change
La troisième partie est consacrée aux facteurs qui influencent cette fois le prix
de l’or, ces facteurs influencent-ils durablement l’or ?
Finalement nous analyserons la corrélation entre le dollar et le métal précieux.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 1
1. Histoire de la relation or-dollar
1.1 Naissance de la relation Le nom dollar est issu de la contraction d’une ancienne monnaie autrichienne, le
Joachimsthaler. Celui-ci devient thaler, daler puis dollar.
En 1792, les Etats-Unis adoptent le bimétallisme or-argent. Chaque dollar peut être
converti librement et à taux fixe soit en or, soit en argent. Un dollar est défini comme
une pièce d’argent de 24,06 grammes ou 1,6037 grammes d’or fin1. La frappe des
deux métaux est libre, c’est-à-dire que les particuliers peuvent se présenter dans des
instituts d’émission avec des lingots d’argent ou d’or et obtenir des pièces en échange.
Alors que dès le début des années 1870 le monométallisme-or, ou étalon-or, se
généralise en Europe, ce n’est qu’en 1900 que les USA l’instituent officiellement en
promulguant le Gold Standard Act. Désormais, le dollar n’est convertible qu’en or, une
once d’or (31.103g) vaut 20.67 dollars2.
L’émission des billets de banque se fait à cette période par une multitude de banques
commerciales indépendantes, ce qui entraîne un foisonnement de billets tous différents
les uns des autres.
En 1913, le Federal Reserve Act crée le Federal Reserve System qui attribue
l’émission des billets de banque à la seule Réserve Fédérale Américaine (Fed). Le
nouveau système lui attribue également la responsabilité de la politique générale du
crédit. Cette banque centrale chapeaute les banques qui veulent bien faire partie de ce
système. Elle leur permet de créer des succursales à l’étranger afin de renforcer
l’utilisation du dollar dans les échanges internationaux3.
1.2 Rôle croissant du dollar dans les échanges internationaux
1.2.1 L’émergence des Etats-Unis jusqu’en 1914
Jusqu’en 1914, la Grande-Bretagne est prédominante dans les échanges
internationaux. Elle possède des nombreuses colonies éparpillées tout autour du
1 DENIZET, Jean. Le dollar, histoire du système monétaire international depuis 1945. Paris, Fayard, 1985. p. 10
2 WORLD GOLD COUNCIL. Word Gold Council [en ligne], http://www.gold.org (consulté le 21.08.2006)
3 FOUET, Monique. Le dollar. Paris, Editions La Découverte, 1985. p. 14-15
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 2
globe, ce qui lui impose une flotte importante. La Grande-Bretagne bénéficie aussi des
avancées techniques de la révolution industrielle qui la touche avant les autres pays.
Elle importe énormément de matières premières qu’elle transforme et revend. Elle
assure ainsi une large part du commerce mondial. Beaucoup de paiements se font dès
lors en livre sterling. L’accroissement des transactions ainsi que l’énorme besoin de
financement entraîne une forte croissance du système bancaire anglais.
L’économie américaine, elle, passe du statut de colonie agricole au début du XIXème
siècle à celui de puissance industrielle en 1914. Cette évolution rapide tient à quatre
facteurs essentiels4 :
L’expansionnisme : les Etats-Unis ont su s’octroyer la mainmise sur l’Amérique
latine, notamment au travers de la doctrine Monroe, d’où provient le fameux
« l’Amérique aux Américains »,
Le protectionnisme : des droits de douane protègent les industries naissantes,
ils concernent essentiellement l’Europe,
L’immigration : les USA ont bénéficié d’une immigration importante, ce qui à
permis d’avoir de la main-d’œuvre en suffisance et une demande intérieure
croissante,
Des ressources naturelles importantes : ressources énergétiques, agricoles,
mines d’or.
La forte croissance des USA entraîne un afflux important de capitaux en provenance
d’Europe.
Jusqu’en 1914, le système généralisé de l’étalon-or assure la stabilité des taux de
change. En effet, chaque monnaie est définie par rapport à une quantité d’or. Ainsi,
une once d’or équivaut à 20,67 dollars ou 4,25 livres5. Il est dès lors aisé d’en déduire
le taux de change entre ces deux monnaies : 4,86 dollars pour 1 livre.
4 ROBIN, Emilia. Le dollar et la puissance financière des Etats-Unis au XXème siècle. In : Ecole Normale Supérieure : Serveur élèves [en ligne]. Modifié le 4 mars 2002. http://www.eleves.ens.fr/home/robin/histoire/contemp/dollar.html. (consulté le 21.08.2006)
5 WORLD GOLD COUNCIL. Word Gold Council [en ligne], http://www.gold.org (consulté le 24.08.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 3
1.2.2 La première guerre mondiale et ses conséquences
La première guerre mondiale impose aux pays belligérants des dépenses colossales.
Afin de financer leurs dépenses d’armements ceux-ci sont amenés à mettre en
circulation une grande quantité de monnaie, créant ainsi de fortes pressions
inflationnistes. La convertibilité en or de la monnaie est suspendue.
Dans le même temps, la guerre stimule l’appareil de production américain. En effet, les
USA fournissent massivement les Alliés, ce qui engendre une croissance importante
de leurs exportations. Cette forte demande a également pour conséquence de
favoriser l’émergence de nouvelles techniques et technologies de production. On
assiste à l’apparition de l’organisation scientifique du travail6. Les USA sont désormais
à l’avant-garde des techniques de production, ce qui renforce leur statut de puissance
industrielle.
L’excédent commercial important des Etats-Unis leur permet d’accroître leurs réserves
d’or, ils détiennent en 1918 environ 50%7 du stock d’or mondial. Du statut de débiteur
mondial avant la guerre, ils sont au sortir de la guerre créditeurs net vis-à-vis du
monde.
L’hégémonie commerciale et financière de la Grande-Bretagne est rudement affectée
par la guerre. Les réserves d’or européennes ont considérablement diminué et le
retour à la convertibilité en or de la monnaie pour les particuliers ne peut se faire, au
contraire des USA qui la réinstaure en 1919.
1.2.3 La conférence de Gênes et l’entre-deux guerres
Les pays d’Europe n’ont plus beaucoup d’or et ne parviennent pas à rétablir le système
de l’étalon-or. Les monnaies varient fortement entre elles, ce qui entrave les échanges
internationaux. Les puissances européennes souhaitent un retour à la stabilité des
changes.
En 1922, la Grande-Bretagne convoque les principales puissances européennes et
propose la mise en place d’un système d’étalon change-or (Gold Exchange Standard).
Celui-ci se fonde sur un principe qui était déjà en vigueur avant la guerre : la possibilité
pour les banques centrales de détenir des réserves soit en or soit en devises
convertibles en or (la livre et de plus en plus le dollar)8.
6 FOUET, Monique. Le dollar. Paris, Editions La Découverte, 1985. p. 217 Ibid.8 LELART, Michel. Le système monétaire international. Paris, Editions La Découverte,
1991. p 24
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 4
L’entre-deux guerres est marqué par une succession de crises, notamment la crise des
années 1930. Les pays européen se relèvent difficilement de la guerre. Les systèmes
de l’étalon-or et de l’étalon change-or imposent des règles strictes en matière
d’émission de monnaie.
Alors que la « planche à billets » a fonctionné à plein régime durant la guerre, les
années qui suivent sont marquées par le besoin de retrouver une certaine stabilité
monétaire. Les pays s’efforcent de rééquilibrer leur masse monétaire, notamment par
une politique restrictive. La monnaie en circulation ne permet pas de relancer les
économies et il s’en suit une vague de dévaluations que l’on peut qualifier de
compétitives, chaque pays cherchant à rendre ses exportations moins chères. En
janvier 1934, le dollar est dévalué de 40% et l’once d’or vaut désormais 35$9. Les
citoyens américains ne peuvent plus acheter ou vendre de l’or.
9 FOUET, Monique. Le dollar. Paris, Editions La Découverte, 1985. p. 28
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 5
1.3 L’apogée du dollar
1.3.1 Bretton Woods10
A la fin de la seconde guerre mondiale, les USA et le dollar jouissent d’une position
très favorable. Les Etats-Unis ont un rôle prédominant dans les échanges
internationaux et le dollar parvient aisément à contrebalancer le rôle de la livre.
Néanmoins, pour ne pas rencontrer les mêmes problèmes d’instabilité monétaire que
durant l’entre-deux guerres, ceux-ci appellent à la tenue d’une conférence
internationale. Cette conférence se tient à Bretton Woods en 1944 et oppose deux
thèses :
Celle de John Maynard Keynes a pour ambition de créer une entité
supranationale, une sorte de banque internationale de compensation. Cet
organisme permettrait à la Grande-Bretagne de se libérer de son rôle monétaire
tout en évitant de le transférer aux USA. L’idée de Keynes est d’instituer une
organisation capable de gérer les transactions internationales sur la base du
clearing. Chaque pays membre dispose d’un compte courant auprès de cette
institution qui est débité ou crédité en fonction du sens de la transaction. Celles-
ci sont comptabilisées dans une unité monétaire fictive, le « bancor ». Les
déséquilibres de long terme peuvent être corrigés par exemple par des
modifications des droits de douane, favorisant ainsi les exportations ou les
importations, ou d’autres mesures telles les dévaluations ou réévaluations de la
monnaie.
La théorie de Harry Dexter White diffère de celle de Keynes sur divers points. Il
prévoit ainsi la création d’un fonds monétaire. Ce fonds est alimenté par le
versement des quotes-parts de chaque pays signataire. Les trois fonctions de
cet institut sont d’assurer la stabilité des monnaies, en effet chaque pays peut
échanger sa monnaie contre une autre ; accorder des facilités de crédit bien
définies quant à ses limites ; faciliter les ajustements lorsqu’un pays est trop
fortement débiteur de ce fonds.
Au final, les Accords de Bretton Woods débouchent sur la création d’un nouveau
système monétaire international et constituent les statuts du Fonds Monétaire
International (FMI).
10 LELART, Michel. Le système monétaire international. Paris, Editions La Découverte, 1991. p 26-45
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 6
Désormais, la stabilité des changes devient une priorité. Les monnaies sont définies
soit par rapport à une quantité d’or soit par rapport à la parité-or du dollar du 1er juillet
1944 (35 dollars l’once). Ainsi, le dollar devient une référence dans le système
monétaire international, on dit du dollar qu’il est « as good as gold ». Néanmoins, les
monnaies définies par rapport au dollar ne seraient pas sujettes aux fluctuations de
cours engendrées par un changement de parité or-dollar, étant donné que celles-ci
sont définies par rapport à la parité or-dollar d’une date précise. La monnaie
américaine ne devient donc pas un étalon de mesure à proprement parler, ce rôle étant
toujours attribué à l’or. Il est important se signaler qu’à l’exception du dollar, les
monnaies ne sont plus convertibles en or.
Chaque pays est tenu de maintenir sa monnaie à la parité définie avec l’or ou le dollar
avec une marge de 1%. Ainsi, comme le dollar n’est défini que par rapport à l’or, les
Etats-Unis n’ont pas à s’occuper de compenser les fluctuations de leur monnaie avec
les autres. Ce système monétaire que nous pouvons qualifier de régime de changes
fixes permet, malgré tout, des ajustements ponctuels afin de corriger des déséquilibres
fondamentaux (dévaluation ou réévaluation), mais sous des conditions strictes.
La liberté des paiements est une notion fondamentale des Accords de Bretton Woods.
Cette liberté impose une levée des mesures visant à freiner les flux de capitaux entre
les pays. Il est désormais plus facile pour un résident d’un Etat de se procurer de la
monnaie étrangère pour effectuer des paiements dans le cadre de transactions
internationales. Ceci à pour but de favoriser le développement du commerce mondial.
Bretton Woods au travers du FMI institue également un système de prêts possible aux
Etats membres, et ceci afin de leur permettre de traverser des difficultés économiques
temporaires. Chaque pays signataire est tenu, comme dans l’idée de White, de verser
une quote-part au FMI pour alimenter ce fonds, 25% en or et le reste en devise
nationale.
1.3.2 L’après-guerre et l’intensification du commerce mondial
La deuxième guerre mondiale n’a fait qu’accentuer l’écart de puissance entre les USA
et les pays européens. Les premiers ont à nouveau fortement contribué à l’effort de
guerre des seconds. L’Europe est à genoux. Cette situation n’est pas favorable aux
américains pour deux raisons majeures :
l’Europe affaiblie est à la merci de l’ennemi communiste,
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 7
les Etats-Unis recherchent des débouchés pour leur production industrielle et
souhaitent une Europe capable d’honorer une partie des dettes contractées
durant la guerre.
C’est principalement pour ces deux raisons qu’en 1947, les Etats-Unis vont mettre sur
pieds le plan Marshall. Ce plan constitue une aide financière massive accordée à
l’Europe pour lui permettre de se reconstruire11.
Une Europe forte saura résister à « l’ennemi communiste » et la demande de produits
de consommation permettra de dynamiser l’économie américaine. C’est aussi dans cet
esprit d’accroissement du commerce des USA vers l’Europe que sont signés, la même
année, les accords du GATT (General Agreement on Tariffs and Trade). Le but de ces
accords est de lever une partie des barrières douanières entre ces deux économies.
La balance des paiements américaine devient déficitaire à cette période. Cette
situation est due non pas à la balance commerciale, largement bénéficiaire, mais à la
balance des capitaux. En effet, la lutte contre le communisme joue à ce moment-là un
rôle clé dans la mesure où cela force les Etats-Unis à investir massivement à
l’étranger. La guerre de Corée, les alliances militaires (OTAN) et les aides accordées à
l’Europe renforcent la présence et la puissance américaines12.
Ces paiements se font en dollars, ce qui ne pose aucun problème aux USA, leurs
réserves d’or sont considérables et de surcroît, le dollar jouit, en raison notamment de
sa convertibilité en or et de la force économique américaine, d’une confiance absolue.
Les dollars détenus dans les banques étrangères augmentent.
1.3.3 Les années 1960 et le problème des eurodollars
Dès la fin des années 1950, le miracle économique se produit. L’Europe se redresse
rapidement, le commerce international s’intensifie. Les pays européens ne sont plus
tributaires des aides américaines et parviennent même à dégager un léger excédent
de leur balance des paiements. Cette bonne santé économique à pour conséquence
un recul des exportations américaines. De plus, La guerre froide qui s’amorce
engendre des dépenses militaires toujours plus importantes.
11 DENIZET, Jean. Le dollar, histoire du système monétaire international depuis 1945. Paris, Fayard, 1985. p. 43-49
12 ROBIN Emilia. Le dollar et la puissance financière des Etats-Unis au XXème siècle. In : Ecole Normale Supérieure : Serveur élèves [en ligne]. Modifié le 4 mars 2002. http://www.eleves.ens.fr/home/robin/histoire/contemp/smi.html. (consulté le 22.08.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 8
Les deux éléments cités ci-dessus entraînent des déséquilibres importants dans de la
balance des paiements des USA. Ce phénomène est encore accentué par
l’établissement de filiales en Europe des entreprises américaines. Le marché y est très
porteur et la main d’œuvre encore relativement bon marché. Les transactions entre la
maison mère et la filiale provoquent un afflux de dollars des USA vers l’Europe.
Les déficits américains successifs provoquent un exode de dollar et d’or qui
s’accumulent rapidement dans les banques européennes. Cet exode est d’autant plus
marqué que les banques américaines rémunèrent peu les avoirs en dollar et prêtent à
taux élevé. Les banques européennes profitent de cette marge d’intérêts élevée pour
proposer des conditions plus attractives. Les dollars affluent, notamment du bloc
soviétique qui craint que ses avoirs en dollars ne soit bloqués dans les banques
américaines. Ces dollars détenus hors des Etats-Unis sont ce que l’on appelle les
« eurodollars »13.
Tabeau 1Réserves d’or et marché des eurodollars (en milliards USD)
Années 1948 1952 1956 1960 1962 1964 1966 1968 1970
Or mondial 34.0 35.4 37.8 40.4 41.3 42.8 43.1 45.3 42.4
Aux USA 24.3 23.2 22.1 17.8 16.0 15.4 13.1 12.0 11.4
En Europe 4.9 6.0 9.0 15.8 18.4 20.2 22.6 21.6 20.2
Eurodollars 7.5 13.0 25.0 46.0
Sources : World Gold Council et FOUCOU, Philippe. (1973. p 32)
Le tableau ci-dessus illustre la situation des Etats-Unis après la deuxième guerre
mondiale. Nous pouvons aisément voir à quel point la diminution des stocks d’or
américains est importante. Comme nous l’avons dit plus haut, l’Europe en est le
destinataire et bénéficiaire majeur. Ce tableau met également en évidence la
proportion grandissante des eurodollars par rapport aux réserves américaines.
Le dollar devient la monnaie du commerce international et monnaie de réserve. C’est
l’age d’or du système Bretton Woods.
Au début des années 1960, la situation se détériore. La guerre du Vietnam engendre à
nouveau des besoins militaires colossaux, tant financiers que matériels. L’industrie
13 FAUGERE, Jean-Pierre. La crise du système monétaire international. Paris, Minerve, 1987. p. 87
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 9
américaine est à cette époque en plein essor et la demande additionnelle massive
qu’occasionne la guerre va faire fortement grimper les prix.
Les déficits américains doivent impérativement être jugulés. La situation économique
américaine montre que le dollar est surévalué. Il se crée en 1961 le pool de l’or,
composé de huit pays (la République Fédérale d’Allemagne, la Belgique, la France, les
Pays-bas, la Suisse, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l’Italie). Ce pool a pour but
d’éviter la spéculation sur l’or en intervenant sur ce marché pour assurer la parité or-
dollar. L’or négocié sur le marché libre de l’or, rouvert en 1954 a toujours été très voisin
de la parité. Mais à la fin des années 1960 la spéculation sur le métal commence14.
Cette spéculation devient importante dès lors que les dévaluations se succèdent,
notamment la livre, et que la confiance envers le dollar diminue. En 1967, le pool de
l’or est dissout et dès 1968 la possibilité pour les détenteurs privés de convertir le
dollar en or est supprimée. On crée cette même année un double marché de l’or. L’or
destiné aux banques centrales reste fixé au taux de 35$ l’once alors que l’or négocié
sur le marché libre fluctue en fonction de l’offre et de la demande.
La situation n’est plus tenable pour les Etats-Unis, les demandes des banques
centrales de convertir leurs dollars en or se font de plus en plus nombreuses. Au bord
de l’asphyxie, le gouvernement américain obtient en 1969 la création des Droits de
Tirage Spéciaux (DTS). Ces DTS peuvent êtres obtenus par tous les Etats membres
du FMI et qui souhaitent convertir une partie de leurs dollars. En effet, ils ont la même
parité-or que le dollar, mais en revanche ne peuvent pas être échangé contre de l’or.
Cette « nouvelle monnaie » est une monnaie de réserve, elle peut également être
utilisée dans les échanges internationaux mais uniquement par les banques centrales.
Elle permet aux USA de ne pas assécher leurs réserves d’or en convertissant les
dollars en or.
Le 15 août 1971, Nixon déclare le dollar inconvertible.
14 LELART, Michel. Le système monétaire international. Paris, Editions La Découverte, 1991. p 57-58
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 10
1.4 La démonétisation de l’or et le dollar mondial
1.4.1 Désordre monétaire et changes flottants
Le début des années 1970 est marqué par une grande instabilité monétaire. Les USA
sont en période de stagflation, ils cherchent dès lors à freiner les importations et
stimuler les exportations. Ils estiment que certaines monnaies (livre, mark, yen, franc
français) sont sous-évalués et demandent qu’une correction des parités soit faite.
Le dollar est dévalué de 8.6% à fin 1971, la parité du dollar est désormais de 38$
l’once. La marge de fluctuation entre les monnaies de 1% dictée par les Accords de
Bretton Woods passe à 2.25%15.
Ce système de changes fixes impose de nombreuses interventions des banques
centrales sur les marchés des changes. Elles doivent soutenir leur monnaie contre la
spéculation qui devient toujours plus importante. Le déséquilibre entre le mark et le
dollar est difficile à soutenir. En effet, les taux d’intérêt sont bien plus élevés en
Allemagne qu’aux USA, ce qui entraîne un afflux de capitaux vers l’Allemagne. De
plus, les spéculateurs sentent bien que la banque centrale allemande ne parviendra
pas à maintenir le taux de change à la parité et continuent d’acheter massivement le
mark. Ne parvenant plus à contrôler sa monnaie, la banque centrale d’Allemagne doit,
en 1973, se résigner à laisser flotter sa monnaie.
Cet événement entraîne beaucoup de banques centrales à laisser également les
règles de l’offre et de la demande fixer leur taux de change.
1.4.2 Accords de la Jamaïque
En janvier 1976, une conférence est organisée à Kingston (Jamaïque) afin de
réorganiser le système monétaire international. Deux modifications majeures sont
décidées :
Le flottement des monnaies, qui existe depuis 1973, est officiellement institué
L’or est démonétisé. Désormais, Les monnaies ne doivent plus faire référence
à l’or, ce qui va dans le même sens que le flottement des monnaies. Mais la
référence à l’or est aussi supprimée dans le cadre du FMI. Alors que les DTS
étaient libellés en or, désormais ils représentent un rapport à un panier de
monnaies (42% dollar, 19% deutsche mark (DM), la livre, le franc français (FF)
15 LELART, Michel. Le système monétaire international. Paris, Editions La Découverte, 1991. p 67
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 11
et le yen chacun 13%)16. On supprime aussi la valeur officielle de l’or, ce qui
implique que si une banque centrale veut acquérir ou vendre de l’or, elle doit le
faire au prix du marché.
Le communiqué du Comité intérimaire du FMI ci-dessous nous informe des nouveaux
mécanismes de changes possibles :
« Dans le cadre d'un système monétaire international du type qui prévaut le 1er janvier 1976, des mécanismes de change peuvent comprendre (I) le maintien de la part d'un membre d'une parité pour sa devise par rapport au Droit de Tirage Spécial ou tout autre dénominateur, autre que l'or, choisi par le membre en question, ou (II) des arrangements de coopération par lesquels les pays membres maintiennent la valeur de leur devise en relation avec la valeur de la devise ou des devises d'autres pays membres, ou (III) d'autres mécanismes de change choisis par le membre. »17
A la suite de ces accords de la Jamaïque, l’or redevient une matière première. Le FMI
vent aux enchères ses positions en or. Le paiement des quotes-parts au FMI se fait
désormais selon le modèle 25% en monnaie nationale et 75% en devises étrangères.
1.4.3 Les pétrodollars
Comme nous l’avons vu plus haut, durant la première moitié des années 1970,
l’économie américaine est moribonde. Les exportations sont en baisse en raison de la
cherté du dollar. Les réévaluations ainsi que le système des changes flottants induisent
une baisse du dollar par rapport aux autres monnaies.
Le cours du dollar passe de 4 DM pour 1 dollar en 1971 à 1,72 DM pour 1 dollar en
1978. La chute du cours du dollar par rapport au franc français est aussi importante
puisqu’en 1971, 1 dollar vaut 5,55 FF et de 1972 à 1978 il varie entre 5,25 et 3,85 FF.
Idem pour le dollar-franc suisse (CHF), 4,32 CHF pour 1 dollar en 1971 et 2,39 CHF
pour 1 dollar en 197818.
Ces chiffres nous montrent à quel point le cours du dollar chute en quelques années.
Cette situation est à l’avantage des Etats-Unis qui voient leurs exportations devenir
nettement plus compétitives qu’auparavant. En revanche, cette dépréciation de la
16 FAUGERE, Jean-Pierre. La crise du système monétaire international. Paris, Minerve, 1987. p. 87
17 EUROPEAN NAVIGATOR. European Navigator, la référence multimédia sur l’histoire de l’Europe [en ligne]. www.ena.lu Cconsulté le 31.08.2006)
18 FAUGERE, Jean-Pierre. La crise du système monétaire international. Paris, Minerve, 1987. p. 114et BANQUE NATIONALE SUISSE. Banque nationale suisse [en ligne]. http://www.snb.ch (consulté le 30.08.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 12
monnaie à des conséquences inflationnistes. En effet, les importations sont plus
chères pour les USA et donc les matières importées entrant dans la fabrication de
produits engendrent des coût plus élevés, d’où inflation par les coûts.
Durant les années 1970, l’inflation vient aussi des chocs pétroliers qui ont pour
conséquence des hausses brutales des prix du pétrole. En 1973, suite au
déclenchement de la guerre du Kippour le prix du pétrole passe de 3$ à 12$ le baril. Le
deuxième choc pétrolier se produit en 1978 suite à la révolution islamique en Iran et à
l’invasion de l’Iran par l’Irak, l’or noir passe à plus de 35$ le baril19. La hausse du
pétrole a pour conséquence majeure une redistribution des réserves de dollars.
Comme le pétrole se paie en dollars, une grande quantité de cette monnaie prend la
direction des pays du Golf persique, ce qui amène l’appellation de pétrodollars. Ce
phénomène renforce la dispersion des dollars dans le monde et de ce fait accroît
encore son rôle de monnaie internationale.
A la fin des années 1970, le cours du dollar est très bas par rapport aux principales
monnaies. L’inflation est galopante, une intervention pour renforcer le dollar est
obligatoire. Au début des années 1980, les taux d’intérêts montent très fortement pour
atteindre 19%, l’emprunt d’argent devient très onéreux. De plus, les salaires, qui sont
également source d’inflation, sont fortement mis sous pression. La demande de
consommation en est du même coup réduite. Cumulés à une baisse des prix du
pétrole, ces différents facteurs entraînent une baisse de l’inflation et une hausse du
cours du dollar.
1.4.4 La croissance par les déficits
Elu en 1980, Ronald Regan entend relancer l’économie de son pays et assainir les
finances. Il prend 3 mesures distinctes20 :
Réduction de l’imposition des ménages afin de stimuler l’épargne et accroître
les investissements des entreprises
Augmentation des dépenses militaires pour relancer la consommation
Suppression des déficits dès 1984
La première de ces mesures n’engendre pas d’épargne mais accélère la
consommation. La deuxième est aussi source de forte croissance de la demande.
L’économie américaine est grandement dynamisée, mais cette croissance se fait au
19 WTRG ECONOMICS. WTRG Economics [en ligne]. http://www.wtrg.com. (consulté le 30.08.2006)
20 FOUET, Monique. Le dollar. Paris, Editions La Découverte, 1985. p. 84
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 13
détriment du budget de l’Etat. En effet, l’augmentation des dépenses militaires couplée
avec la diminution des recettes fiscales créent un déficit budgétaire énorme. En 1985,
le déficit annuel approche les 220 millions de dollars21.
Le cours du billet vert augmente jusqu’en 1985 sur fonds de spéculation et de
croissance artificielle. Cette année là, une réunion à lieu à New York pour ralentir la
hausse du dollar. Cette réunion est un succès puisque celui-ci se replie jusque dans
les années 1995.
La fin des années 1990 correspond à la croissance phénoménale engendrée par
l’apparition des nouvelles technologies. Les USA accusent un déficit commercial
gigantesque, ce qui fait dire à Marian Stepczynski :
« Rien a changé depuis le début des années 80. Les Etats-Unis fournissent complaisamment au reste du monde tous les actifs financiers dont ce dernier a besoin pour placer son épargne… et le reste du monde permet aux consommateurs américains d’acheter à crédit les marchandises qu’il fabrique. 22»
Le 1er janvier 1999, l’euro est mis en circulation. Celui-ci qui a pour but de faciliter les
échanges entre pays de l’Union Européenne et participe à la construction de l’Union.
Cette monnaie pourrait, à terme concurrencer le dollar. « Reste que les trois quarts des
échanges commerciaux sont libellés en billets verts, tout comme 83% des transactions
financières et 63% des réserves de change. Le dollar a deux atouts de poids, […] : il
est devenu la monnaie des échanges internationaux et on ne bouleverse pas comme
ça ce genre de traditions. En outre, il ouvre le plus grand marché financier du
monde.23 »
21 CONGRESSIONAL BUDGET OFFICE. Congressional Budget Office [en ligne]. www.cbo.gov (consulté le 02.09.2006)
22 LECHYPRE, Emmanuel. La fantastique histoire du dollar. L’Expansion, mars 2004, numéro 684, p. 70-76
23 Ibid.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 14
2. Analyse du dollar et de l’or Le chapitre précédent nous montre que le dollar et l’or on un passé commun de plus
de 200 ans. Dans ce chapitre, nous allons tenter de montrer quels sont les facteurs, ou
déterminants, qui influencent l’évolution du dollar et de l’or. Il est important de signaler
que ces facteurs on certes une influence sur l’or et/ou le dollar, mais il serait erroné de
penser qu’ils justifient à eux seuls les variations de prix, tant le marché des capitaux et
des matières premières est complexe. En effet, sur ces marchés, la psychologie des
acteurs du marché est essentielle.
2.1 Les déterminants du dollar Pour analyser l’évolution du prix du dollar nous utilisons le « dollar price index / major
currencies » qui représente la valeur du dollar par rapport à un panier de monnaies. Il
est défini comme suit : “The major currencies index is a weighted average of the
foreign exchange values of the U.S. dollar against a subset of currencies in the broad
index that circulate widely outside the country of issue.[…].24”
2.1.1 L’inflation
Parmi les facteurs influençant l’évolution du dollar, l’inflation est certainement l’un des
plus importants. Celle-ci résulte de l’augmentation des prix des produits et services et
entraîne une diminution du pouvoir d’achat. En effet, le consommateur américain qui a
un revenu non indexé à l’inflation ou l’agent économique25 qui possède des dollars
pourra acheter moins de produits avec une quantité fixe d’argent si le prix de ceux-ci
augmente. Il y a une perte de pouvoir d’achat donc perte de valeur de la monnaie.
L’INSEE nous donne la définition suivante : « L'inflation est la perte du pouvoir d'achat
de la monnaie qui se traduit par une augmentation générale et durable des prix.26 »
Une inflation modérée n’est pas néfaste et est généralement considérée comme la
conséquence de la croissance économique. En revanche, s’il y a inflation sans
croissance économique, on parle alors de stagflation, ou si la hausse des prix est
importante, elle engendre la crainte d’une plus forte perte de pouvoir d’achat et donc
fait perdre de son attrait à la monnaie. Les détenteurs de dollars vont chercher à se
24 BOARD OF GOVERNORS OF THE FEDERAL RESERVE SYSTEM. Board of the Governors of the federal reserve system[en ligne]. (consulté le 05.09.2006)
25 Toute personne ou entité qui intervient sur le marché26 INSEE. Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques [en ligne].
(consulté le 05.09.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 15
débarrasser de cette monnaie, ce qui a pour conséquence une baisse de la demande
et une hausse de l’offre de monnaie. Cela se traduit par une baisse de la valeur de la
monnaie relativement aux autres, provoquant une baisse du taux de change.
L’inflation est un phénomène complexe sur lequel les économistes se penchent depuis
longtemps. La théorie généralement admise aujourd’hui est celle de Milton Friedman
selon laquelle « l’inflation est, toujours et partout, un phénomène monétaire, et il n’y a
pas, par conséquent, de lutte contre l’inflation sans politique monétaire restrictive27 ».
Dans cette explication, Milton Friedman nous dit que l’inflation ne peut pas être
maîtrisée sans une politique active de restriction monétaire, donc sans intervention de
la banque centrale sur l’offre de monnaie.
Dans son article intitulé « Monetarism », Allan Meltzer met en évidence
que « sustained money growth in excess of the growth of output produces inflation; to
end inflation or produce deflation, money growth must fall below the growth of
output28 ». Il nous dit que l’inflation provient de l’excédent de monnaie par rapport à la
variation de la production. Il inclut donc dans sa réflexion la notion d’ »output » pour
nous dire que l’accroissement monétaire n’est pas inflationniste s’il s’accompagne
d’une croissance de la production dans des proportions semblables.
Selon ces deux théories, le contrôle de l’inflation de fait par une observation étroite de
la masse monétaire en circulation. Cette tâche relève de la compétence des banques
centrales. Elles ont un rôle déterminant sur la masse monétaire. Elle peut avoir une
politique monétaire expansive ou restrictive. Lorsqu’il n’y a pas de crainte liée à
l’inflation et que l’économie a besoin de liquidités, elle peut pratiquer une politique
monétaire expansive et agir sur la masse monétaire de deux manières :
En participant directement à la création monétaire. Elle dispose pour cela de la
possibilité d’acheter soit de l’or, soit des devises ou encore d’accorder des
crédits aux banques commerciales. Ce type d’intervention a une influence
directe sur la base monétaire29 puisqu’en achetant de l’or ou des devises, elle
met de la monnaie nationale sur le marché, tout comme lorsqu’elle accorde des
crédits aux banques commerciales30. L’effet contraire peut être obtenu par
l’opération inverse.
27 FAUGERE, Jean-Pierre. La monnaie et la politique monétaire. Paris, Editions du Seuil, 1996, p. 81
28 MELTZER, Allan H.. Monetarism. In : The consise encyclopedia of economics and liberty [en ligne]. Modifié en 2002. http://www.econlib.org/library/Enc/Monetarism.html (consulté le 09.09.2006)
29 La base monétaire est constituée des billets de banque et des comptes de virements
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 16
En encourageant l’accroissement de la masse monétaire. Elle le fait au travers
de différents moyens, essentiellement par sa politique de taux d’intérêts (des
taux d’intérêt bas encouragent l’emprunt donc la création de monnaie) (nous y
reviendrons au chapitre suivant), une diminution des réserves obligatoires
minimales des banques commerciales et des mesures d’accompagnement
dans l’octroi de crédits31.
Si l’inflation résulte de l’accroissement rapide de la masse monétaire, il n’en demeure
pas moins important de noter que différents facteurs peuvent influencer à court terme
l’évolution des prix. Les prix matières premières ainsi que le niveau des salaires ont
une influence sur l’évolution des prix. En effet, ces deux éléments entrent dans le
processus de production d’une grande quantité respectivement de tous les biens et
services. Le caractère inflationniste des salaires résulte dans l’augmentation de ceux-
ci, sans augmentation de productivité. Le surcoût engendré produit de l’inflation.
Selon Allan Meltzer, sans augmentation parallèle de la masse monétaire, cette inflation
n’est que temporaire. Si nous observons le cas du pétrole, il nous dit que «[…] oil
shocks can change the price level, but if money growth remains moderate, the surge in
prices will be temporary and short-lived 32». En d’autres termes, le prix du pétrole
produit de l’inflation s’il s’accompagne d’un accroissement important de la masse
monétaire, sans cela, il s’agit d’une montée temporaire des prix.
Pour illustrer ces propos, nous allons analyser différents graphiques. Il est important,
avant toute, chose définir les divers indices que nous utilisons.
le CPI ou Consumer Price Index est un indice de l’inflation américaine, il
mesure les “[…] changes in the prices paid by urban consumers for a
representative basket of goods and services33”. Bien que cet indice soit
contesté par certains économistes34 pour son approche trop rigide du panier
30 RAMIREZ, José. Monnaie, banque et inflation. Cours de Macroéconomie 2004-2005, p. 34-37
31 DEISS, Joseph. Initiation à l’économie politique. Fribourg, Editions Fragnière, 1992, p. 109-110
32 MELTZER, Allan H.. Monetarism. In : The consise encyclopedia of economics and liberty [en ligne]. Modifié en 2002. http://www.econlib.org/library/Enc/Monetarism.html (consulté le 09.09.2006)
33 US LABOR DEPARTMENT. Bureau of Labor Statistics [en ligne].http://www.bls.gov (consulté le 12.09.2006)
34 RANSON, David. Inflation In : The consise encyclopedia of economics and liberty [en ligne]. Modifié en 2002. http://www.econlib.org/library/Enc/Inflation.html (consulté le 13.09.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 17
type de biens, nous l’utiliserons pour mesurer l’évolution des prix à la
consommation aux USA, dans la mesure ou cet indice est à ce jour le plus
utilisé et semble malgré tout relativement bien représentatif de l’inflation
américaine.
M3 représente la masse monétaire au sens très large, soit la base monétaire,
les moyens de paiement rapidement mobilisables (dépôts d’épargne) ainsi que
les dépôts à terme35. Dans le cadre de ce travail, nous observons bien entendu
la masse monétaire en dollars.
L’ECI ou Employment Cost Index qui mesure le “change over time in labor
costs36”. Le but de cet indice est de montrer l’évolution du coût salarial pour
une heure travaillée.
Le PIB américain mesure l’ “output of goods and services produced by labor
and property located in the United States37” Dans le carde de nos analyses,
nous avons jugé plus pertinent de travailler avec le PIB à prix constants (prix
de 2000), dans la mesure où celui-ci rend compte de l’évolution réelle du PIB
et qu’il nous paraît plus judicieux de travailler avec un indice dont l’inflation en
est extraite.
Dans le but de montrer l’impact des différents facteurs produisant l’inflation nous avons
construit un graphique contenant les trois sources importantes que nous avons
identifiées : la croissance de M3, le niveau des prix du pétrole et le coût horaire d’une
heure de travail. Nous les avons mis en parallèle avec l’accroissement de l’inflation.
Par souci de lisibilité, nous avons fait un autre graphique, en page 20, pour illustrer le
propos d’Allan Meltzer concernant le rapport entre la production et la masse monétaire.
Le graphique ci-après montre les variations des quatre éléments cités plus haut :
l’inflation (CPI), la masse monétaire (M3), le coût de l’emploi (ECI) et le pétrole. Les
trois premiers sont gradués par l’échelle de gauche et le pétrole par celle de droite. Les
quatre courbes ont été construites sous forme de moyennes mobiles à 2 ans afin de
rendre la lecture du graphique plus aisée.
35 RAMIREZ, José. Monnaie, banque et inflation. Cours de Macroéconomie 2004-2005, p. 42
36 US LABOR DEPARTMENT. Bureau of Labor Statistics [en ligne].http://www.bls.gov (consulté le 14.09.2006)
37 ECONOMIC AND STATISTIC ADMINISTRATION. Economic Indicators . Gov [en ligne]. http://www.economicindicators.gov (consulté le 14.09.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 18
Il est intéressant de constater que les variations de l’inflation, de la masse monétaire
ainsi que du coût de l’emploi sont toutes positives, nous pouvons donc dire que sur
une moyenne à deux ans, ces indices ne diminuent jamais, mais plutôt croissent plus
ou moins rapidement. Ce graphique nous permet de voir que l’inflation est fortement
liée au prix du pétrole, nous le voyons clairement de 1974 à 1990. Durant cette
période, l’accroissement monétaire était aussi important, et la combinaison de ces
deux éléments est certainement pour une grande part à l’origine du taux d’inflation
élevé, ce qui va dans le sens de la théorie d’Allan Meltzer citée plus haut.
Figure 1Impact de différents facteurs inflationnistes
Sources : Federal Reserve Board, US Department of Labor, Inflationdata.com
Par la suite, il semble que l’impact de ce couple de facteurs soit plus faible. Cela peut
être dû au poids toujours plus important des services dans l’économie, les coûts de
production du secteur tertiaire sont essentiellement composés par les salaires. La
croissance du coût de l’emploi est relativement stable et n’occasionne donc pas de
brusques variations de l’inflation.
Comme nous l’avons mentionné au début de ce chapitre, l’économie est un
environnement très complexe et il serait illusoire de vouloir expliquer toutes les
variations d’un phénomène tel que l’inflation. Seule une succession de pistes à
explorer et d’hypothèses permet de penser quel impact a eu chaque élément.
Dans ce sens, un graphique nous semble également pertinent pour analyser l’inflation.
Il met en relation les variations annuelles du PIB réel et de M3 avec la variation
annuelle de l’inflation.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 19
Figure 2PIB réel vs M3
Sources : Bureau of Economic Analysis, Federal Reserve Board, Bureau of Labor Statistics
Nous voyons que plus le différentiel positif entre la variation du PIB et celle de M3 est
grand, plus l’inflation a tendance à s’accroître. Il met en évidence l’analyse d’Allan
Meltzer qui nous dit qu’une augmentation plus rapide de la masse monétaire par
rapport à la production crée des pressions inflationnistes.
Ce graphique semble également donner une des raisons pour lesquelles l’inflation est
modérée des années 1990 à 2000. En effet, la forte variation de M3 à cette période est
accompagnée d’une augmentation plus nette du PIB. En effet, la fin des années 1990
est une période de forte croissance économique, matérialisée par l’énorme
engouement et la consommation à grande échelle des nouvelles technologies. Cet
essor économique voit les transactions augmenter fortement et nécessite comme
durant toute période de croissance une masse monétaire qui soit capable de remplir
son rôle de règlement des échanges38.
Les deux graphiques que nous venons d’étudier nous apportent des éléments de
réponse pour comprendre l’évolution de l’inflation ces 30 dernières années.
Nous allons maintenant voir quel est l’impact de l’inflation sur le dollar. Nous l’avons vu
au début de ce chapitre, l’inflation entraîne une perte de pouvoir d’achat de la monnaie.
Il est donc tout naturel de penser que l’inflation a un rôle négatif sur la valeur de la
monnaie, donc sur le taux de change.
38 FAUGERE, Jean-Pierre. La monnaie et la politique monétaire. Paris, Editions du Seuil, 1996, p. 3
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 20
Le graphique ci-dessous tend à montrer qu’il y a une corrélation entre l’inflation et le
dollar. Nous avons comparé l’indice CPI au dollar Index. Afin de rendre le graphique
plus lisible, nous avons mis en parallèle la variation annuelle en pourcent de l’inflation
et le dollar index en USD. Il en résulte une relation négative claire : lorsque l’inflation
accélère, le dollar se replie.
Figure 3L’inflation et le dollar
Sources : US Department of Labor, Federal Reserve Board
Nous avons toutefois tenu à vérifier ce qui visuellement ressemble à une évidence et
avons calculé le coefficient de détermination (R^2) roulant sur 12 mois entre le CPI et
le Dollar Index39. Le chiffre obtenu varie en fonction des périodes mais il se situe à une
moyenne de 0.85, ce qui nous confirme que la relation est forte.
Ce graphique nous permet de voir que l’inflation est bien l’un des éléments centraux
dans l’évaluation d’une monnaie. Lorsque le dollar perd de son pouvoir d’achat il est
moins attractif aux yeux des investisseurs. Nous voyons qu’au milieu des années 1980,
alors que l’inflation est relativement basse, le dollar atteint des sommets, la situation
semble la même au début des années 2000.
2.1.2 Les taux d’intérêt
Comme nous l’avons vu plus haut, la fixation des taux d’intérêts est un instrument de
politique monétaire des banques centrales. En période d’inflation, la banque centrale
39 Pour le graphique, voir annexe 1
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 21
peut augmenter le taux d’intérêt du marché monétaire et du taux d’escompte40 pour
rendre le crédit plus coûteux. Les banques commerciales empruntent dès lors l’argent
à un taux d’intérêt plus élevé et doivent donc répercuter cette charge sur leurs clients.
Les agents économiques seront amenés à moins emprunter du fait de la cherté de
l’argent et auront tendance à placer leur argent pour bénéficier d’une rémunération
avantageuse du capital.
La rationalité économique veut que l’argent soit placé là où le taux d’intérêt réel est le
plus élevé. Ceci implique que la monnaie qui offre le taux le plus attractif sera plus
demandée.
A titre de premier exemple, nous aborderons brièvement la notion de carry trade. Cette
technique financière à caractère hautement spéculatif consiste à emprunter de l’argent
dans une devise à faible taux de loyer, comme le yen ou le franc suisse, et à l’investir
dans une monnaie qui offre un rendement élevé, comme par exemple la couronne
islandaise.
En effet, la rémunération d’un dépôt sur un an de 10 millions de yens (environ 100'000
francs) ne rapporte que 0.291%41 brut (taux nominal) par an alors que ce même
montant peut être placé à un taux de 13.575%42 brut par an en couronne islandaise. Le
spéculateur va donc emprunter en yen à un taux d’intérêt d’environ 1.625%43, le placer
en couronne islandaise sur un an et faire le change inverse au terme de la période.
Le taux d’inflation en Islande se situe vers les 4%44 et a probablement influencé le taux
de change puisque sur un an le cours de la couronne islandaise a perdu 4,8%45 par
rapport au yen. Malgré tout, le spéculateur a ainsi pu réaliser une marge confortable de
6.4%46. L’opération peut se faire aussi avec le dollar, le rendement est moins élevé
mais le risque est également plus faible.
40 FAUGERE, Jean-Pierre. La monnaie et la politique monétaire. Paris. Le Seuil, 1996. p. 49
41 BANQUE DU JAPON. Bank of Japan [en ligne]. http://www.boj.or.jp (consulté le 12.10.2006)
42 BANQUE CENTRALE D’ISLANDE. Central Bank of Iceland [en ligne]. http://www.sedlabanki.is (consulté le 12.10.2006)
43 BANQUE DU JAPON. Bank of Japan [en ligne]. http://www.boj.or.jp (consulté le 12.10.2006)
44 BANQUE CENTRALE D’ISLANDE. Central Bank of Iceland [en ligne]. http://www.sedlabanki.is (consulté le 12.10.2006)
45 Ibid.46 Voir calcul en annexe 2
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 22
L’opération de carry trade peut également se faire en empruntant une devise à bas
loyer pour profiter d’une hausse des marchés actions. Ce genre d’investissement a un
impact à court terme positif sur la devise qui est achetée, en effet le spéculateur qui
achète une action Google achète par la même occasion du dollar, ce qui augmente la
demande de dollar. La conséquence devrait donc être une hausse du dollar.
Si le principe du carry trade réside dans l’emprunt d’une devise pour investir dans une
autre, il existe une manière bien plus simple et moins risquée de profiter d’une
différence de taux d’intérêt : placer un capital existant dans une monnaie à
rémunération plus élevée. Il s’agit là de placer les avoirs d’une caisse de pension par
exemple à un taux avantageux. Nous allons comparer l’euro et le dollar, ces deux
monnaies sont en effet les deux monnaies les plus recherchées.
Pour évaluer l’attractivité d’un placement en euro ou en dollar, l’investisseur doit
connaître le taux d’intérêt nominal, soit le taux auquel le dépôt est rémunéré ainsi que
le taux d’inflation. Par souci de simplification nous avons pris le taux directeur de la
Fed pour le dollar et celui de la BCE de 1999 à 2006 et le discount rate de la
Bundesbank de 1991 à 1999 pour l’euro47. (Pour la zone européenne, le CPI n’est
disponible qu’à partir de 1991).
Figure 4Les taux réels et le dollar
47 Un graphique des taux directeurs se trouve en annexe 3
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 23
Sources : Federal Reserve Board, Bundesbank, Banque Centrale Européenne
Nous pouvons voir sur ce graphique que le taux d’intérêt réel sur les placements en
dollars est supérieur aux taux en deutsche mark de 1994 à 2001 et en euro dès 2005.
A taux de change fixe, l’agent économique rationnel devrait donc favoriser un
placement en dollars. Il semble que le dollar ait profité de ce différentiel.
2.1.3 Les déficits américains
L’économie américaine est marquée depuis plusieurs décennies par des déficits
grandissants. Le premier d’entre eux est le déficit du budget fédéral. Celui-ci résulte
d’une insuffisance de recettes de l’Etat par rapport à ses dépenses. Comme nous
l’avons vu dans notre historique, ces larges déficits sont attribuables aux différents
programmes de relance de l’économie ainsi qu’aux énormes dépenses des guerre des
USA, notamment sous la présidence Regan et son projet de « guerre des étoiles », les
deux guerres en Irak ainsi que les dépenses frénétiques de l’administration Bush Jr.
Les allègements fiscaux accordés en vue de relancer l’économie à différents moments
de l’histoire américaine récente ont également contribué au creusement du déficit du
budget fédéral. Le graphique en annexe 4 permet de voir les différentes présidences
américaines et leur impact sur les finances des Etats-Unis.
L’accroissement de ce déficit implique une perte de confiance des investisseurs vis-à-
vis des emprunts émis par le gouvernement américain. En effet, plus le déficit
augmente, plus la charge de l’annuité augmente. La capacité de l’Etat à rembourser et
sa crédibilité diminuent, ce qui rend ses emprunts moins attractifs. Dès lors, les
emprunts nouvellement émis doivent proposer un taux d’intérêt plus élevé.
De plus, comme l’explique Roger Ferguson Jr (vice président de la Fed de 1999 à
2006) dans son discours du 20 avril 2005 « a larger fiscal deficit boosts domestic
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 24
demand, pushing up domestic interest rates relative to foreign rates ; this, in turn,
attracts investors and raises the value of the dollar ».
Nous voyons donc que deux raisons poussent les taux d’intérêt à la hausse :
la première, qui est imputable au rapport rendement/risque, exerce une
pression à la hausse sur les taux obligataires
la seconde a un effet direct sur les taux d’intérêt du marché monétaire, car « un
accroissement des dépenses budgétaires réduit l’épargne mondiale disponible
et induit une hausse du taux d’intérêt […].48 »
Chacune de ces hausses a un impact sur le dollar, dans la mesure où comme nous
l’avons vu au chapitre précédent, une hausse des taux d’intérêt attire les capitaux
étrangers. Les investisseurs cherchent un rendement plus élevé, ils achètent donc des
obligations en dollars ou placent leurs capitaux sur des comptes rémunérés en dollars,
ce qui augmente la demande de cette monnaie et entraîne une hausse du taux de
change.
Figure 5Le déficit (surplus) budgétaire US et le dollar
Sources : Federal Reserve Board, Bloomberg
Sur ce graphique, nous voyons clairement l’impact de la politique de Ronald Regan,
car comme nous l’avons mentionné, sa politique de relance a créé une demande
énorme engendrant ainsi une hausse du cours du dollar. Par contre le mécanisme
déficit budgétaire/dollar, ne permet pas d’expliquer pourquoi durant la présidence de
48 RAMIREZ José. Le modèle à prix flexibles : l’économie ouverte. Cours de macroéconomie 2004-2005. P 26
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 25
Bill Clinton ces deux variables sont en hausse. Mais comme nous l’avons vu plus haut,
ce renforcement du billet vert pourrait être imputé en partie au différentiel de taux
d’intérêt entre la zone euro et la zone USD.
On ne peut pas parler du déficit budgétaire sans parler du déficit des comptes
courants. La balance des comptes courants se compose des transactions avec
l’étranger des biens et services, des revenus des investissements et des transferts
unilatéraux.49 Trois approches sont généralement utilisées pour expliquer le déficit des
comptes courants50 :
La plus commune consiste à dire que la balance des comptes courants reflète
en gros la différence entre les importations et les exportations. Elle est donc
relativement similaire à la balance commerciale et dépend des mêmes
facteurs qu’elle :le taux de change, les prix et les revenus.
La deuxième et la troisième approches peuvent être résumée comme suit :
« By definition, when national saving falls below domestic investment - that is,
when the US does not have sufficient saving to finance its investment, and
therefore borrows from abroad- the current account is in deficit 51». Les
problèmes d’insuffisance d’épargne sont mis en cause.
Ces approches mettent l’accent sur le déséquilibre qu’il peut y avoir entre les capitaux
à disposition et les capitaux dépensés. Les chiffres récents montrent que le déficit des
comptes courants américains atteint les 8000 milliards de dollars52, environ 800
milliards de plus rien que pour cette année, soit 7% du PIB53. Il absorbe à lui seul 75%
49 STEIN, Herbert. Balance of payments. In : The consise encyclopedia of economics and liberty [en ligne]. Modifié en 2002.http://www.econlib.org/library/Enc/BalanceofPayments.html (consulté le 13.09.2006)
50 FERGUSON, Roger Jr, US current accounts deficit: causes and consequences. In : The federal reserve board [en ligne]. Modifié le 20 avril 2005 http://www.federalreserve.gov/boarddocs/Speeches/2005/20050420/default.htm (consulté le 18.10.2006)
51 CAVALLO Michele. Understanding the twin deficits : new approaches, new results. FRBSF Economic Letter [en ligne]. 2005, Num. 2005-16.(consulté le 18.10.2006) http://www.frbsf.org/publications/economics/letter/2005/el2005-16.pdf
52 PINGUELY Nicolas.Les déficits américains feront-ils dérailler l’économie mondiale ? Le Temps, 21 novembre 2005, p. 17
53 BERGSTEN, Fred. The dollar and the twin deficits. In : Goldman Sachs [en ligne]. Modifié le 22 septembre 2005. http://www2.goldmansachs.com/our_firm/our_culture/corporate_citizenship/gmi/images/GMI_Panels/Bergsten_paper.pdf (consulté le 17 octobre 2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 26
de l’excès d’épargne du Japon, de la Chine, de l’Allemagne et des autres pays ayant
un surplus dans leurs comptes courants54.
Ce déficit n’est pas un danger à court terme dans la mesure où il y a de l’argent
extérieur pour le financer. Néanmoins, ce déficit représente une dette qu’il faudra
honorer. Il représente une menace sur le long terme et c’est pourquoi les autorités
américaines cherchent à le faire diminuer, d’une part en améliorant les finances
fédérales (le budget), d’autre part en cherchant à améliorer leur balance commerciale
en favorisant leurs exportations. Nous l’avons vu plus haut, le solde de la balance
commerciale dépend fortement du taux de change. En effet, un dollar plus faible rend
les exportations américaines moins chères et les importations plus onéreuses.
Nous voyons donc que ce déficit favorise une baisse du dollar. Mais attention,
contrairement aux phénomènes que nous avons étudié plus haut, le déficit des
comptes courants ne provoque pas à lui seul un mécanisme d’ajustement de la valeur
du dollar, mais il peut impliquer une réaction politique en faveur d’une baisse du dollar.
Cette réaction peut se concrétiser par une baisse des taux d’intérêts, ce qui comme
nous l’avons dit plus haut, peut entraîner un désintérêt des agents économiques en
raison de la faible rémunération des placements.
Les trois déterminants que nous avons analysés dans ce chapitre sont les facteurs qui
influencent le plus directement la valeur du dollar. Nous l’avons vu, chacun d’eux ne
peut à lui seul expliquer les variations du billet vert, mais participe à cette évolution.
Beaucoup d’autres variables affectent le cours du dollar, comme le rôle de soutient des
cours par les banques centrales qui détiennent encore beaucoup de dollars. Une
baisse trop forte de celui-ci ferait baisser le montant des avoirs de réserve. C’est
pourquoi les banques centrales peuvent influer sur le cours en faisant des achats
massifs de dollars. En cas de vente importante, le cours est affecté.
L’arrivée d’une monnaie forte, comme l’Euro peut constituer une menace pour le dollar,
car les banques centrales cherchent à diversifier les avoirs et en ce sens, une monnaie
stable et qui est celle d’une puissance économique comme l’Europe est attrayante. Le
Yen joue aussi ce rôle de monnaie de réserve. Le Yuan ne possède encore pas les
qualités suffisantes pour être une monnaie de réserve dans la mesure où il n’est pas
complètement flottant et qu’il parait sujet à de gros enjeux politico-économiques.55
54 THE ECONOMIST. Economist.com [en ligne].www.economist.com (consulté le 18.10.2006)
55 Selon entretien avec Mme Valérie LEMAIGRE, entretien du 2 octobre 2006
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 27
Nous aurions pu évoquer aussi les attentes et les anticipations des marchés financiers
qui s’ils perçoivent un potentiel de croissance aux USA auront tendance à investir dans
des titres américains, poussant ainsi le dollar à la hausse.
Les variations du dollar sont liées à une multitude d’influences et il serait difficile de
vouloir toutes les expliquer. Un phénomène aussi complexe ne peut être démontré par
quelques graphiques, nous avons néanmoins tenté d’en comprendre les grandes
articulations.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 28
2.2 Les déterminants de l’or Nous l’avons vu dans la partie historique, l’or, après avoir été utilisé comme monnaie
d’échange a progressivement été supplantée dans cette fonction par la monnaie, que
ce soit sous la forme de billets ou de monnaie scripturale. La situation est relativement
similaire en ce qui concerne les réserves des banques centrales, les devises ont pris
une part de plus en plus importante dans la composition de ces réserves. L’or,
aujourd’hui, est principalement utilisé dans la joaillerie, comme avoir de réserve
(banques centrales et particuliers) et dans l’électronique.
Dans ce chapitre nous allons tenter d’expliquer quels sont les facteurs qui influencent
le cours de l’or.
2.2.1 La production aurifère
Avant d’analyser la production mondiale d’or, il est important de signaler que
contrairement à d’autres produits, l’or ne se consomme pas. La production est utilisée
à diverses fins, mais demeure en tout temps réutilisable ou recyclable. Ainsi la
problématique de la production et de l’offre d’or ne se pose pas dans les mêmes
termes que pour celle de biens consommés, donc dégradés, comme le pétrole par
exemple.
Le graphique ci-dessous nous montre en bleu la production mondiale annuelle d’or en
tonnes/an et le prix de l’or (prix annuel) en rouge.
Figure 6Production mondiale et prix de l’or
Source :US Geological Survey, World Gold Council
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 29
Nous pouvons constater sur le tableau que la production est en augmentation
relativement régulière, hormis les fléchissements dus aux deux guerres mondiales et
celui des années 1970 à 1975 due à une baisse de 30% de la production de l’Afrique
du Sud qui représente alors 67% de la production mondiale56.
La part prépondérante qu’occupent l’ex-URSS et surtout l’Afrique du Sud en 1970
(80% de la production mondiale à eux deux) va s’estomper au cours de la fin du siècle
et ces deux pays ne pèsent plus que 21% en 200457. L’arrivée progressive de
nouveaux producteurs, tels le Brésil, le Ghana ou l’Indonésie, permettent de diversifier
les approvisionnements, ce qui rend la production moins sujette aux variations d’un
pays en particulier, variations pouvant avoir pour raison des problèmes politiques,
comme ce fut le cas du Zimbabwe à la fin des années 1970, ou lors de l’éclatement de
l’ex-URSS dès 1989.
L’un des aspects les plus problématiques de la production d’or provient de la lenteur du
processus. En effet, « avant d’arriver au stade de la production, plusieurs années
d’études préalables, d’évaluation de réserves de minerais, de mise au point d’un
programme de développement, de travaux d’engineering sont nécessaires de sorte
qu’entre la décision d’investir et le premier gramme d’or obtenu, il s’écoulera plus de 5
ans.58 »
De plus, les investissements représentent des coûts énormes. Le financement des
différentes études, de l’exploration, de l’extraction, du raffinage et du transport font
s’élever le coût moyen de production d’une once d’or (31.103g) à 269$59, ce montant
varie selon la nature du filon et suivant que la mine soit en surface ou souterraine.
Ces deux aspects rendent la production relativement peu flexible. Celle-ci peut par
contre être influencée sur le moyen terme, notamment par le niveau de prix de l’or.
Ainsi, un prix élevé de l’once peut rendre les démarches d’investissement plus
attractives, dans la perspective pour les entreprises minières de réaliser des profits
substantiels. Nous pouvons voir sur le graphique de la page précédente que la
production d’or à fortement augmenté à la fin des années 1980, ceci pourrait être en
56 GOLDSHEET MINING DIRECTORY. Goldsheet Mining Directory [en ligne]., www.goldsheetlinks.com (consulté le 22.10.2006)
57 Voir graphiques en annexe 558 WILMOTS-VANDENDAELE, André. Le marché de l’or. Paris. Economica, 1985. p. 2159 WORLD GOLD COUNCIL. Word Gold Council [en ligne], http://www.gold.org
(consulté le 15.10.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 30
partie la conséquence d’investissements massifs décidés au début des années 1980,
lorsque les prix de l’or atteignaient des prix records.
A l’inverse, on peut aussi penser que la croissance plus marquée des quantités
produites dès la fin des années 1980 a eu un impact sur le niveau de prix de l’or.
Toutefois, pour pouvoir déterminer avec plus de certitude l’influence réelle de la
production sur le prix de l’once, il est essentiel de savoir quelle a été l’évolution de
l’offre totale ainsi que de la demande durant cette même période.
L‘offre totale se compose de l’offre des producteurs d’or, des ventes des banques
centrales et autres institutions (ventes « officielles ») et du recyclage60. (Les données
relatives aux deux dernières variables ne sont disponibles qu’à partir de 1989).
Figure 7Composition de l’offre globale
Source : Bloomberg
Nous voyons clairement sur ce graphique que la production annuelle représente la plus
grande part de l’offre. Nous pouvons donc déterminer que dans le mécanisme de
l’offre/demande, la production joue un rôle important. Un fléchissement marqué de la
production peut donc faire augmenter le cours de l’or, alors qu’un excès d’offre peut
peser sur le cours. Il est intéressant de noter que les quantités d’or recyclées ainsi que
les ventes officielles (nous y reviendrons plus tard) ont tendance à augmenter lorsque
les prix montent. Sur ce graphique nous pouvons constater que les quantités diminuent
jusqu’à la fin des années 1990 (à l’exception de 1998 pour le recyclage) et repartent à
la hausse dès le début des années 2000.
60 WORLD GOLD COUNCIL. Word Gold Council [en ligne], http://www.gold.org (consulté le 02.10.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 31
Après avoir analysé l’offre de métal jaune, il convient de se pencher sur les
composants de la demande.
2.2.2 La demande de joaillerie et industrielle
Aujourd’hui, la joaillerie représente de loin la plus grande part de la demande, environ
70%61. Depuis 1989, cette demande a été relativement stable puisqu’elle oscille entre
65% et 80%62 de la demande totale. Le plus gros consommateur de bijoux en or est
sans conteste l’Inde. Sur le schéma situé en annexe n° 6 nous pouvons voir qu’environ
25% de la demande de joaillerie provient de ce pays. L’or occupe une place importante
dans les festivités traditionnelles indiennes.
Les USA occupent le second rang avec un volume d’environ 350 tonnes pour 200563.
Ensuite vient la Chine avec 250 tonnes. Ce marché est très récent puisque jusqu’en
2003 le contrôle et les régulations concernant la vente d’or aux particuliers étaient très
contraignants. Les pays du Moyen-Orient son également très friands de bijoux en or.
La demande industrielle se compose des besoins issus du domaine de l’électronique
ainsi que de la dentisterie. Cette demande représente environ 11% du total64. Les
propriétés physiques de l’or (haute conductivité thermique et électrique) en font un
métal très performant dans le domaine de l’électronique.
Pour déterminer l’impact du cumul de la demande de joaillerie et de la demande
industrielle, nous avons construit un graphique mettant en parallèle cette demande et
le prix de l’or.
Figure 8Rapport entre le prix de l’or et la demande industrielle et joaillière
61 Bloomberg62 Ibid.63 WORLD GOLD COUNCIL. Word Gold Council [en ligne], http://www.gold.org
(consulté le 03.10.2006)64 WORLD GOLD COUNCIL. Word Gold Council [en ligne], http://www.gold.org
(consulté le 03.10.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 32
Source : World Gold Council
Ce graphique semble nous montrer que le prix de l’or baisse lorsque la demande
augmente. Pour être plus sûr de cette relation, nous avons calculé l’indice de
corrélation de ces deux variables et il apparaît qu’elles sont négativement corrélées
(-0.58) avec un coefficient de détermination de 0.34 qui nous montre que la relation est
solide. Nous pouvons dès lors en conclure que la demande provenant de la joaillerie et
de l’industrie n’ont que très peu ou pas d’impact sur le prix de l’or et que c’est bien
l’inverse qui se produit. Autrement dit, c’est le prix de l’or qui influence les quantités
demandées. En effet, lorsque la demande d’or augmente, selon les lois de l’offre et de
la demande, le prix de l’or devrait monter et ce d’autant plus que si l’on se réfère à la
figure 7, nous voyons qu’entre 1997 et 2003 les quantités offertes sont été assez
stables. Or, c’est bien l’effet inverse qui se produit, d’où l’hypothèse que nous avons
émise plus haut.
Nous voyons donc que le 80% de la demande globale n’a qu’une influence modérée
sur le prix de l’or. Cela confirme les propos de Mme Lemaigre65 qui nous a précisé que
la demande industrielle ne pèse que très peu sur les prix de l’or. De plus, la demande
provenant des banques centrales est assez faible. En effet, depuis le début des
années 1970, les réserves d’or détenues par les banques centrales et les institutions
internationales, comme le FMI, sont restées stables et dès le milieu des années 1990
elles ont diminué66.
Nous pouvons dès lors nous poser la question quels sont les facteurs qui ont une
influence sensible le prix de l’or.
65 Selon entretien avec Mme Valérie LEMAIGRE, entretien du 2 octobre 200666 Voir graphique en annexe 7
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 33
2.2.3 L’inflation
Comme nous l’avons vu plus haut, l’inflation est une perte de pouvoir d’achat de la
monnaie. Elle se traduit par une augmentation générale et durable des prix et influence
la valeur de l’or et d’autres actifs tangibles comme les biens immobiliers, les objets
d’art et les pierres précieuses.
En effet, lorsqu’un bien se déprécie (la monnaie) il faut alors l’échanger contre un autre
bien, qui lui, saura conserver ses propriétés et sa valeur. C’est pour cela qu’en période
de hausse généralisée des prix, lorsque la monnaie ne remplit plus sa fonction de
« réserve de valeur », ce type de biens est plus recherché.
Le métal jaune possède plusieurs particularités qui en font un bien particulièrement
adapté à cette mission de valeur refuge. Si nous revenons aux trois fonctions de la
monnaie (unité de compte, intermédiaire dans les échanges et réserve de valeur67),
nous constatons qu’il remplit ces trois fonctions.
L’or est une unité de compte puisqu’il est possible de le fondre pour en faire
des unités suffisamment petites pour pouvoir régler toutes les transactions, ce
qui n’est pas le cas d’une œuvre d’art ou d’un immeuble.
Ensuite, l’or peut servir d’intermédiaire dans les échanges dans la mesure ou
son acceptabilité est totale dans toutes les régions du monde et que sa
valorisation se fait tous les jours sur différentes places de bourse. Ce n’est pas
le cas pour une propriété immobilière ou une œuvre d’art, dont la valorisation
contient une part de subjectivité.
Enfin, l’or ne s’oxyde pas, ne se dégrade pas et conserve donc ses propriétés
et sa valeur.
Il est indéniable que l’or est le bien qui se prête le mieux au rôle de refuge de valeur.
Néanmoins, ce métal est sujet à des fluctuations relativement importantes comme
nous pouvons le voir sur le graphique ci-après. De plus, il est aisé de constater que
l’évolution de l’or par rapport à l’inflation est plus que proportionnelle.
Figure 9Evolution de l’or et de l’inflation
67 DEISS, Joseph. Initiation à l’économie politique. Fribourg, Editions Fragnière, 1992, p. 93
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 34
Source : Federal Reserve Board, World Gold Council
De janvier 1971 à août 2006, l’indice d’inflation est passé de 37.88 à 194.14, soit une
progression de 512%, alors que dans le même temps le prix de l’or passait de 37.88 à
632.33 soit une augmentation de 1569%.
Par contre si l’on compare les variations de l’inflation et celles de l’or sur cette période,
on constate qu’elles sont assez similaires tout en étant plus marquées pour l’or.
Figure 10Comparaison des variations de l’or et de l’inflation
Sources : Federal Reserve Board, World Gold Council
Nous voyons que l’or (échelle de droite) varie dans le même sens que l’inflation
(échelle de gauche) mais dans des proportions différentes. Nous avons calculé un
indice de corrélation (0.44) qui nous montre qu’il y bien un rapport entre les deux
variables. Le R^2 est de 0.19.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 35
En fait, nous pouvons dire que l’or ne varie pas simplement en fonction de l’inflation
mais comme nous le dit André WILMOTS-VANDENDAELE, « l’engouement pour le
placement-or est déterminé par l’anticipation et par la crainte de l’inflation bien plus que
par son niveau réel »68. Ainsi, la forte hausse des prix de l’or au début des années
1980 peut être attribuée d’une part à l’augmentation importante de l’inflation mais aussi
au fait que « most people didn’t believe their politicians and central bankers who
pledged they would control inflation.69 »
L’or représente une valeur refuge, comme nous le montre le graphique ci-dessus et
l’indice de corrélation mais sa valeur peut être exagérée en fonction des attentes
inflationnistes des agents économiques.
Il est important de se pencher sur la question de la qualité de « hedge » de l’inflation
que peut représenter un placement en or. Plusieurs études et analystes nous disent
que l’or représente une excellente couverture contre l’inflation. En considérant ce que
nous avons dit plus haut, l’or représente probablement un des meilleurs moyens de se
protéger contre une monnaie qui perd de sa valeur. Néanmoins, il est essentiel de
déterminer l’horizon d’investissement pour connaître la capacité réelle de l’or à
préserver de l’érosion monétaire.
Si l’on se place sur un horizon de court terme, 5 ans par exemple, il est très important
de bien déterminer le moment d’achat. Nous pouvons facilement voir sur la figure 9
que si l’achat est fait à un moment inopportun, l’or ne fait pas office de couverture. Si
l’on considère, par exemple, un achat d’or effectué en septembre 1980 à 674.84 USD
qui est revendu 5 ans plus tard, soit en septembre 1985 à 324.5 USD, cela représente
une perte de 62%. C’est loin de couvrir l’inflation.
Si le placement est effectué sur un horizon de moyen terme, 20 ans par exemple, la
situation est identique à la première. En effet, l’once achetée en septembre 1980 et
revendue en septembre 2000 (520.30 USD) a perdu 22.9% de sa valeur.
En revanche, si le placement est effectué pour une longue durée, plus de 50 ans, il est
extrêmement difficile de savoir quel peut être le résultat. Les données dont nous
disposons sur la valeur de l’or « en vente libre » ne remontent que jusqu’en 1968 (les
citoyens américains ne peuvent en acquérir que depuis 1975). Il est n’est donc pas
68 WILMOTS-VANDENDAELE, André. Le marché de l’or. Paris. Economica, 1985. p. 5769 Proquest [en ligne]. Toronto : Maclean’s, 15 septembre 2003.
http://proquest.umi.com/pqdweb?did=408577991&sid=3&Fmt=3&clientld=58690&RQT=309&VName=PQD
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 36
indiqué, à notre sens, d’émettre des hypothèses sur la qualité de couverture que l’or
sur une période aussi longue.
Nous pouvons dire, en définitive, que l’or est bien influencé par le niveau d’inflation ou
la crainte de celle-ci, mais qu’il ne constitue pas forcément un bon moyen de s’en
protéger.
2.2.4 Les taux d’intérêt et le marché boursier
Les taux d’intérêts semblent avoir une influence moindre sur le prix de l’or. En effet,
l’un des rôles essentiels de l’or est celui de la diversification des risques.
Contrairement à d’autres placements (actions, obligations, placement sur marché
monétaire), l’or ne rapporte ni intérêt ni dividende. Le seul moyen d’obtenir une plus
value est de l’acheter à un cours inférieur à celui auquel il sera revendu.
Lorsque les taux d’intérêt réels sont élevés, il est intéressant de placer sont argent soit
sur le marché monétaire soit en obligations. Le risque est modéré voire quasi-nul et le
rendement intéressant. Ceci implique que certains investisseurs recherchent le
rendement avec un risque modéré plutôt que d’espérer réaliser une plus value sur des
transactions d’or.
En ce qui concerne le marché des actions, il semble que lorsque celui-ci se porte bien,
les investissements en or soient en diminution. « Il existe une explication rationnelle
aux mouvements divergents de l’or et des actions industrielles : les bourses de valeurs
mobilières sont le plus souvent favorablement influencées par une vision optimiste de
l’avenir de l’économie, tandis que l’engouement en faveur du métal précieux va de pair
avec des appréhensions pour l’avenir.70 »
Toutefois, comme nous l’avons dit plus haut, l’or reste un bon instrument de
diversification du risque et il est recherché dans ce but.
Prenons l’exemple théorique un portefeuille composé exclusivement d’actions d’un
indice. Par définition, l’indice, qui représente le marché, a un bêta71 de 1. C'est-à-dire,
une sensibilité au marché de 1, ce qui signifie que pour une variation de 1% du
marché, celui-ci bougera de 1% également, c’est logique.
Comme notre portefeuille est composé uniquement de l’indice, son risque est élevé. En
effet, comme il n’est pas diversifié, le portefeuille est exclusivement lié au risque du
70 WILMOTS-VANDENDAELE, André. Le marché de l’or. Paris. Economica, 1985. p. 7471 Bêta = (Cov(Rpf;Rm))/Var(Rm), où R représente le rendement
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 37
marché. Pour diversifier le risque, donc diminuer ce risque, il faut inclure dans le
portefeuille un actif qui fera baisser le bêta du portefeuille. Il faut ajouter un actif qui a
une corrélation nulle ou négative.
Nous avons calculé le bêta de l’or par rapport au marché (nous avons pris l’indice S&P
500 comme indice de marché). Sur une période de 10 ans, en prenant les variations
mensuelles de l’or et du S&P 500, nous arrivons à un bêta de l’or de -0.08, ce qui veut
dire que lorsque le marché monte de 1%, l’or baisse de 0.08%.
Nous avons calculé l’impact d’une allocation de 20% d’or et 80% de S&P 500 sur la
sensibilité d’un portefeuille sur une période de 10 ans (novembre 1996 à juillet 2006) :
le bêta passe de 1 à 0.91. Cela montre bien que si l’on incorpore de l’or dans un
portefeuille, la sensibilité est moindre.
La diminution du risque n’entraîne pas forcément une diminution du rendement du
portefeuille. Le graphique ci-dessous nous montre l’évolution sur 10 ans du portefeuille
que nous avons construit plus haut. Nous l’avons vu, le risque est passé de 1 à 0.91
alors que suivant le graphique ci-dessous le rendement est équivalent au terme de la
période d’observation.
Figure 11Comparaison du portefeuille avec le marché
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 38
Sources : Bloomberg, World Gold Council
Le graphique ci dessus nous montre que l’allocation 80%-20% atténue les fluctuations
du portefeuille. Cela se confirme par la volatilité72 que nous avons calculé : Elle se
situe à 4.49% pour l’indice S&P 500 alors que celle du portefeuille est à 3.6%.
Cette diversification du risque n’empêche pas le portefeuille de réaliser un rendement
similaire à celui de l’indice sur une période de 10 ans. Nous pouvons en conclure que
ce portefeuille est plus attractif puisque pour un degré de risque inférieur il propose un
rendement similaire. Nous voyons donc que l’or peut représenter une bonne
opportunité dans la gestion de fortune. Cela explique en partie l’engouement qu’il
suscite auprès des investisseurs.
Nous avons donc vu dans ce chapitre que l’or est attractif à plus d’un titre. Il est utilisé
à dans la création de bijoux, possède des propriétés physiques qui en font un excellent
matériau pour l’électronique et la dentisterie, peut constituer une réserve de valeur en
cas d’inflation (à la condition de l’acheter à un moment adéquat) et enfin comme nous
venons de le voir permet de diversifier le risque de portefeuille.
Il faut aussi noter que, tout comme pour le dollar, le prix de l’or peut encore être
influencé par une multitude de facteurs. L’incertitude politique, par exemple, peut avoir
un impact sur le prix de l’or. Lorsque une crise apparaît et que celle-ci peut avoir des
conséquences néfastes, le besoin de sécuriser une part de son patrimoine amène
souvent les investisseurs à convertir une partie de leurs avoirs en or. Ceci entraîne une
hausse de la demande, donc une hausse du cours.
72 La volatilité mesure l’instabilité d’un cours (elle se mesure par la racine carrée de la variance)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 39
La crainte semble être un déterminant essentiel de l’or. La crainte de l’inflation, la
crainte liée à des événements politiques, la crainte d’une récession. Ce facteur
psychologique explique, en partie du moins, les exagérations que nous avons pu
observer. Ce constat fait dire à (André WILMOTS-VANDENDAELE, 1985 p.35) que
« la seule certitude que l’on puisse dégager de l’observation du passé, c’est l’effet
cumulatif des inquiétudes politiques et économiques ; en se combinant, une
intervention russe dans un pays de l’Est, une hausse du prix du pétrole, une
augmentation plus élevée que prévue du coût de la vie provoqueront une vigoureuse
réaction et une hausse du métal jaune, alors qu’un seul de ces facteurs laissera les
bourses des métaux précieux plus ou moins indifférentes. 73»
Après avoir analysé séparément l’or et le dollar, nous allons essayer de déterminer
dans le prochain chapitre si ces variables sont liées et si oui, dans quelles proportions.
73 WILMOTS-VANDENDAELE, André. Le marché de l’or. Paris. Economica, 1985. p. 35
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 40
3. Analyse de la corrélation entre l’or et le dollarLes chapitres qui précèdent nous montrent que les valeurs de l’or et du dollar sont
influencées par différents facteurs. Nous l’avons vu, l’inflation joue un rôle essentiel
pour chacun d’eux. Lorsque celle-ci s’accélère, le dollar a tendance à baisser alors que
l’or évolue dans le même sens. Mais l’inflation n’est pas l’unique moteur des
changements dans le prix du dollar et de l’or. Nous l’avons rappelé, beaucoup
d’éléments participent à ces variations. Nous pouvons dès lors nous demander si ces
déterminants différents n’affectent pas la relation négative qu’il pourrait y avoir entre
ces deux variables. Nous allons donc effectuer une analyse de leur corrélation.
Graphiquement, il semble que cette corrélation se confirme. Nous pouvons le voir sur
leur évolution mensuelle, lorsque le dollar (échelle de droite) baisse, l’or (échelle de
gauche) à tendance à monter et inversement.
Figure 12Evolution de l’or et du dollar
Sources : Federal Reserve Board, World Gold Council
Pour étudier plus en détail la corrélation entre l’or et le dollar nous allons procéder de
deux manières 74: La première consiste à calculer une corrélation statique, c'est-à-dire
une étude sur les variations de l’or et du dollar une période fixe de 20 ans par exemple.
Nous avons délibérément choisi de ne pas trop utiliser cette méthode qui nous semble
trop hasardeuse dans le choix des périodes. Nous privilégierons la seconde méthode
74 Méthode d’analyse identique à celle utilisée par le World Gold Council dans leur document intitulé : Commodity Prices and the influence of the US dollar
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 41
qui nous semble plus pertinente. Elle nous permet d’effectuer des calculs
systématiques sur toutes les périodes en calculant des corrélations roulantes (« rolling
correlation ») sur une période que l’on définit (nous optons pour des périodicités
standards, soit 12 mois, 24 mois, 60 mois et 120 mois). Cela nous permettra de voir
l’évolution dans le temps de la corrélation.
Nous allons donc commencer notre étude par l’analyse statique de corrélation sur la
période la plus étendue (janvier 1973 à juillet 2006). L’indice obtenu est de -0.32 avec
un R^2 de 0.10. Cette statistique peut être considéré comme significative et montre
que sur une longue période, en dépit des brusques variations de la fin des années
1970 et de 2005-2006, il y a bel et bien une relation inverse entre le dollar et l’or. Cette
étude de long terme montre que ce lien n’est pas le fruit du hasard mais relève bien
d’une relation fondamentale.
Les graphiques ci-après vont nous permettre d’observer l’évolution de la corrélation sur
des périodes définies. Il est très important de noter que toutes les valeurs qui se situent
entre -0.223 et +0.22375 ont un coefficient de détermination inférieur à 0.05, ce qui
signifie que la relation n’est pas significative.
Le graphique ci-dessous montre l’évolution de la corrélation sur des intervalles de 120
mois, soit 10 ans. A titre d’exemple, le coefficient de corrélation entre l’or et le dollar
durant le cycle de 1973 à 1983 est de -0.35.
Figure 13Corrélation roulante sur 120 mois
Source : Federal Reserve Board, World Gold Council
75 le R^2 doit être supérieur à 0.05 pour que la corrélation soit jugée significative. Comme le R^ 2 est le carré de la corrélation, cela implique que toutes les valeurs qui se trouvent dans l’intervalle -0.223; +0.223 doivent être écartées
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 42
Ce graphique permet de constater que durant la période janvier 1995 à janvier 2003,
sur un cycle antérieur de 10 ans, la relation entre l’or et le dollar est faible puisqu’elle
est inférieure à [-0.30]. Par contre elle se renforce dès 2003. Le taux de significativité
est élevé puisque 278 observations sur 283 ont au R^ 2 supérieur à 0.05, soit 98%. Ce
pourcentage nous montre que même si la corrélation est durant certaines périodes peu
élevée, la tendance peut être considérée comme durable.
Si l’on regarde le graphique représentant les corrélations à 60 et 24 mois, on peut
aisément observer que plus la période d’observation est courte plus les coefficients
sont volatils. Nous avons dénombré pour le cycle de 24 mois 275 observations sur 379
(soit 73%) qui ont un R^ 2 supérieur à 0.05 et 266 sur 343 (soit 78%) pour le cycle de
60 mois. Sur les 275 observations significatives des mesures sur 24 mois, 8 donnent
une corrélation positive entre l’or et le dollar.
Figure 14Corrélations roulantes sur 24 et 60 mois
Sources : Federal Reserve Board, World Gold Council
Nous le voyons sur le graphique, il s’agit des points qui se situent entre novembre
1994 et septembre 1995. Cela signifie que durant ces périodes (novembre 1992 à
novembre 1994 et ainsi de suite jusqu’à septembre 1993 à septembre 1995) l’or variait
dans le même sens que le dollar. L’étude des deux variables à ces moments donnés
ne permet pas d’établir quels ont été les facteurs déterminants à cette époque. En
effet, l’inflation est en baisse, l’offre globale d’or est en hausse, la demande globale est
stable et l’or monte. Cela montre une nouvelle fois que toutes les variations ne
s’expliquent pas que pas pur logique économique. Peut-être pourrait-on attribuer une
partie de la hausse de l’or à la crainte qu’a suscité la guerre qui a sévit sur le continent
européen, et qui aboutit à l’éclatement de la Yougoslavie. Le point où la relation est la
plus forte est en mars 2005. A cette date, la corrélation des variations mensuelles sur 2
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 43
ans est de -0.72. Nous voyons sur le graphique ci-dessous le rapport entre le prix de
l’or et le dollar index de avril 2003 à mars 2005.
Figure 15
Relation entre l’or et le dollar d’avril 2003 à mars 2005
Sources : Federal Reserve Board, World Gold Council
Ce graphique montre bien que durant la période étudiée, la relation est forte, en effet,
les différentes observations sont très peu éloignées de la droite de régression. Nous
avons calculé la pente de cette droite : elle est de -6.72, ce qui signifie que pour une
baisse de 1 du dollar index, le prix de l’or monte de 6.72 USD. Cela se vérifie, par
exemple si l’on prend le premier point en haut à gauche (85.06 ; 442.08) et le dernier
point en bas à droite (101.39 ; 328.18), nous constatons que le dollar index est passé
de 85.06 à 101.39, soit une hausse de 16.33 et l’or a baissé de 442.08 USD à 328.18
USD, soit une baisse de 113.9. Si l’on divise -113.9 par 16.33, on arrive bien à la pente
de la droite de régression que nous avons trouvée.
Finalement nous allons voir comment évolue la corrélation sur 12 mois. La figure en
page suivante nous permet de constater que cette courbe est la plus volatile des 4
séries que nous avons analysées. Les valeurs oscillent entre -0.89 (période avril 2004-
mars 2005) et +0.84 (juin 1993-mai1994). Pour cette série de données, on constate
que 281 valeurs sont significatives sur un total de 391, soit 72%. Nous pouvons donc
en déduire que des 4 périodes que nous avons observé, le cycle de 12 mois est le
moins représentatif.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 44
Figure 16Corrélation roulante sur 12 mois
Sources : Federal Reserve Board, World Gold Council
Le graphique ci-dessus illustre bien les disparités entre les valeurs qu’il peut y avoir si
l’on étudie des périodes courtes, voire trop courtes pour ce genre de phénomène.
Nous constatons donc que l’or est le dollar ont une relation de longue durée. Il nous
semble, au travers de cette analyse, que l’étude de la relation entre le dollar et le métal
jaune doit tenir compte des mécanismes d’ajustements lents et complexes ainsi que
des décisions parfois impulsives et irrationnelles qui peuvent pousser à l’achat d’or ou
de dollars. Sur l’analyse de court terme, les divergences passagères occasionnées par
des événements ponctuels ont un impact significatif sur la corrélation alors qu’elles
sont gommées si l’on observe le phénomène dans son ensemble. Il nous paraît dès
lors préférable de retenir la tendance de long terme qui nous permet d’affirmer que l’or
et le dollar sont bien négativement corrélés et que cette relation fondamentale est
amenée à durer.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 45
Conclusion
Nous avons essayé de montrer dans quelle mesure l’or, qui à un long passé
monétaire, est utilisé comme réserve de valeur lorsque le dollar perd de son attrait.
Nous l’avons vu, l’or joue un rôle essentiel lorsqu’il y a de l’inflation (réelle ou
anticipée), comme instrument de diversification, mais aussi lorsqu’il y a des craintes
quant à certains événements. Les différentes corrélations entre l’or et le dollar que
nous avons analysées nous amènent à penser que cette relation est durable.
Nous l’avons vu, la corrélation sur des cycles de long terme est significative alors que
lorsque nous l’analysons sur des périodes plus courtes les statistiques perdent de leur
intérêt. Nous l’avons vu, les corrélations sur des cycles de 12 et 24 mois n’on pas la
pertinence d’une relation sur 5 ou 10 ans pour un phénomène aussi complexe. Selon
nous, elles ne rendent pas compte de la réelle tendance qu’il semble exister entre le
dollar et l’or. Pourtant, les corrélations sur 12 et 24 mois sont parmi celles qui sont le
plus souvent utilisées dans les analyses financières.
Nous sommes d’avis que les facteurs prédominants de l’évolution de l’or sont et
resteront l’inflation et l’accumulation de craintes. La demande de joaillerie est plus un
facteur dépendant du prix du métal jaune et non l’inverse, ce qui nous laisse penser
que l’éventuelle hausse de la demande asiatique n’aura qu’un effet très modéré. Quant
à la demande des banques centrales, elle est assez stable et proportionnellement
faible. A moins d’effectuer des transactions massives, elle ne devrait pas impacter trop
fortement le cours de l’or.
Ce travail nous a permis de mieux connaître des mécanismes comme l’inflation,
l’impact des variations de taux d’intérêt et la relation entre l’or et le dollar. Il nous a
aussi fait prendre conscience que la source d’information est essentielle dans tout
travail de recherche. Nous avons notamment été surpris de constater lors de nos
différentes recherches sur internet qu’une majorité de documents sur l’or avaient pour
source les études du World Gold Council. Or cette société est “ […] an organisation
formed and founded by the world’s leading gold mining companies with the aim of
stimulating and maximizing the demand for, and holding of, gold by custumers,
investors, industry and the official sector76”. Nous avons donc essayé de prendre les
précautions adéquates pour ne pas utiliser une information qui pourrait être biaisée.
76 WORLD GOLD COUNCIL. Word Gold Council [en ligne], http://www.gold.org (consulté le 03.08.2006)
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 46
Nous avons donc choisi de ne prendre sur ce site que des données brutes et avons lu
et utilisé leur rapports avec toute la prudence nécessaire.
De plus, nous avons appris que les statistiques sont un outil qu’il faut manipuler et
interpréter avec prudence.
En effet, la période à laquelle nous avons choisi la thématique de l’étude que nous
présentons aujourd’hui, était animée par une vive inquiétude quant à la possible
décorrélation entre l’or et le dollar. Il nous apparaît aujourd’hui que ces deux variables
sont bien corrélées et que même si la corrélation à très court terme était en baisse,
elles étaient bien corrélées à cette période. Nos recherches nous ont donc amené à
modifier le titre de notre travail pour analyser la durabilité de la corrélation et non de la
décorrélation entre l’or et le dollar.
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 47
Bibliographie
Ouvrages de référence
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Articles de journaux
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LECHYPRE, Emmanuel. La fantastique histoire du dollar. L’Expansion, mars 2004, numéro 684, 6 pages
Supports de cours
RAMIREZ José. Le modèle à prix flexibles : l’économie ouverte. Cours de macroéconomie 2004-2005. 36 pages
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Base de données bibliographiques en ligne
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Ressource électronique
BLOOMBERG
Entretiens
Madame LEMAIGRE, Valérie. Stratégiste commodities chez LODH & Cie. Entretien du 02 octobre 2006
Monsieur CHAMAY, Denys. Senior Partner chez The Forum Finance Group SA. Entretiens des 22 février 2006 et 28 septembre 2006
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 50
Annexe 1Coefficient R^2 roulant sur 12 mois
Source : Federal Reserve Board
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 51
Annexe 2Développement du calcul relatif au carry trade
Montant initial en Yen
Montant disponible en Yen après déduction du taux d’emprunt (1.625%)
Montant total (en équivalent Yen) après placement en couronne islandaise d’une année aux taux de 13.575%
Montant final après déduction de la perte de change Yen-Couronne slandaise (-4.8%)
Gain réalisé en % (10'636’639/10'000'000)
10'000’000 9'837’500 11'172’941 10'636’639 6.37%
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 52
Annexe 3Evolution des taux directeurs US et EUR
Sources : Federal Reserve Board, Deutsche Bundesbank, Banque centrale Européenne
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 53
Annexe 4Les présidences et leur gestion du budget fédéral
Source : The Social Concerns Committee of the Unitarian Church of Staten Island
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 54
Annexe 5Evolution de la production d’or depuis 1970
Source : Goldsheet Mining Data
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 55
Annexe 6Evolution trimestrielle de demande de joaillerie par
pays
Source World Gold Council
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 56
Annexe 7Evolution des réserves d’or officielles
Source : World Gold Council
Analyse de la durabilité de la corrélation entre l’or et le dollarBAILLIFARD, Christian 57
Annexe 8Questionnaire d’entretien
L’Euro et/ou le Yen, pourraient-ils à terme contrebalancer le rôle du dollar dans les
réserves des banques centrales ?
Un effondrement du dollar est-il possible ?
La demande d’or destinée à la joaillerie est en pleine croissance, notamment en Asie,
cette demande est-elle durable ?
Qu’en est-il de la demande des banques centrales ? Certaines banques centrales
vendent une partie de leurs réserves alors que d’autres souhaitent augmenter leurs
réserves d’or
Où pensez-vous que le prix de l’or se situera dans 1 an, 5 ans ? Et pourquoi ?
L’or est-il une réelle protection contre l’inflation ?
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