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TOMBOUCTOU, LA LIBERTÉ D’UNE CITÉ SECRÈTE «LE MAG», 20 PAGES D’ENQUÊTES, DE CHRONIQUES, DE BD… Télé, tablette, ordinateur Les petits dans la cour d’écrans Un rapport de l’Académie des sciences défend l’utilité du numérique dans l’apprentissage des enfants, tant à l’école qu’à la maison. PAGES 2-4 AVEC CE NUMÉRO, «NEXT» L’accord entre la France et le géant du Net a été annoncé hier par l’Elysée. PAGE 20 Google lâche 60 millions à la presse ET PLUS DE CINÉMA, MODE, DESIGN, ET MUSIQUE SUR NEXT.LIBERATION.FR musique la dernière ruse de l’industrie du disque mode pierre hardy, secret chausseur portfolio à berlin, balade d’hiver business des stars mortes bientôt sur scène idées l’année gatsby, pourquoi, comment récit : pierre le-tan par simon liberati, et inversement + N O 50 next.liberation.fr pop-culture / mode / lifestyle / idées / récits ana girardot dans la tête d’une jeune actrice SAMEDI 2 FÉVRIER, AVEC LIBÉRATION FORUM DE GRENOBLE: LES JEUNES AU CENTRE DU DÉBAT CAHIER CENTRAL FRED DUFOUR . AFP 2,60 EUROS. PREMIÈRE ÉDITION N O 9868 SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 WWW.LIBERATION.FR IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCEAllemagne 2,30 €, Andorre 1,60 €, Autriche 2,80 €, Belgique 3€, Canada 4,50 $, Danemark 27 Kr, DOM 2,40 €, Espagne 2,30 €, Etats-Unis 5$, Finlande 2,70 €, Grande-Bretagne 2,80 £, Grèce 2,70 €, Irlande 2,40 €, Israël 20 ILS, Italie 2,30 €, Luxembourg 3€, Maroc 17 Dh, Norvège 27 Kr, Pays-Bas 2,30 €, Portugal (cont.) 2,40 €, Slovénie 2,70 €, Suède 24 Kr, Suisse 5 FS, TOM 420 CFP, Tunisie 2,40 DT, Zone CFA 2 000 CFA.

Elm...Liberation Du Samedi 02 Et Dimanche 03 Fevrier 2013

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Liberation Du Samedi 02 Et Dimanche 03 Fevrier 2013

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TOMBOUCTOU,LA LIBERTÉ D’UNE

CITÉ SECRÈTE«LE MAG», 20 PAGES D’ENQUÊTES,

DE CHRONIQUES, DE BD…

Télé, tablette,ordinateur

Lespetitsdanslacourd’écrans

Un rapport de l’Académie des sciences défend l’utilité du numériquedans l’apprentissage des enfants, tant à l’école qu’à la maison. PAGES 2­4

AVEC CE NUMÉRO, «NEXT»

L’accord entrela France et le géantdu Net a été annoncéhier par l’Elysée.

PAGE 20

Google lâche60 millionsà la presse

ET PLUS DE CINÉMA, MODE, DESIGN, ET MUSIQUE SUR NEXT.LIBERATION.FR

musiquela dernière ruse de l’industrie du disquemodepierre hardy, secret chausseurportfolioà berlin, balade d’hiver

businessdes stars mortes bientôt sur scèneidéesl’année gatsby, pourquoi, comment

récit : pierre le-tan par simon liberati, et inversement

+

NO50

next.liberation.fr

pop-culture / mode / lifestyle / idées / récits

ana girardotdans la têted’une jeuneactrice

SAMEDI 2 FÉVRIER, AVEC LIBÉRATION

FORUM DEGRENOBLE:LES JEUNESAU CENTREDU DÉBATCAHIER CENTRAL

FRED

DU

FOU

R.A

FP

•2,60 EUROS. PREMIÈRE ÉDITION NO9868 SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 WWW.LIBERATION.FR

IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCEAllemagne 2,30 €, Andorre 1,60 €, Autriche 2,80 €, Belgique 3 €, Canada 4,50 $, Danemark 27 Kr, DOM 2,40 €, Espagne 2,30 €, Etats­Unis 5 $, Finlande 2,70 €, Grande­Bretagne 2,80 £, Grèce 2,70 €,Irlande 2,40 €, Israël 20 ILS, Italie 2,30 €, Luxembourg 3 €, Maroc 17 Dh, Norvège 27 Kr, Pays­Bas 2,30 €, Portugal (cont.) 2,40 €, Slovénie 2,70 €, Suède 24 Kr, Suisse 5 FS, TOM 420 CFP, Tunisie 2,40 DT, Zone CFA 2 000 CFA.

Par ÉRIC DECOUTY

Instructions

Rassurer les parents n’estpas la moindre vertu durapport de l’Académie dessciences. Non, la télé, lesordinateurs, les tablettes,les jeux vidéo n’ont paspour conséquence deramollir jusqu’àl’irréversible la cervellede nos enfants ! Certes,les académiciens qui nemanquent pas de bon senscommun rappellent qu’ilfaut rester prudent etsavoir modérer les usagespour «préserver l’équilibreet la santé» desgarnements. Maisl’essentiel est ailleurs.Et notamment dansl’affirmation que les outilsnumériques auraient surles enfants une influenceformidable dans leurrelation aux savoirs, dansleurs apprentissages etleur socialisation. Lepsychiatre Serge Tisseronaffirme même que «lesécrans amplifient tout ceque la culture du livreimprimé laisse de côté».S’il convient de prendreavec une certaineprécaution des conclusionsqui méritent encorevalidation, nul ne peutplus contester l’outilpédagogique essentiel queconstitue le numérique engénéral, et les tablettes enparticulier. Mais l’analyserestera partiellement vainesi des réponses concrètesne lui sont pas données. Sila révolution numériquedont parle Tisseron negagne pas toutes les écoles.Si les enfants des villes etdes champs ne peuventaccéder aux mêmesmoyens. L’enjeu estd’importance, car une foisbalayée la dangerosité desécrans, pointe désormaisle risque d’une éducationnumérique à plusieursvitesses.

ÉDITORIAL Un rapport de l’Académie des sciences met à bas la plupart desclichés sur l’influence des écrans dans le développement des petits.

Les enfants au jardinnumériqueU n front large comme un pare-brise, un

AK-47 glissé dans la barboteuse, desmembres inférieurs atrophiés et despouces maousses comme des poêlons

à raclette. C’est – en gros – le portrait bien tropsouvent dessiné du lardon d’aujourd’hui, crou-lant sous l’avalanche des écrans: télé, console de

jeux vidéo, ordinateur,Facebook, smartphone etdésormais tablette. No-

cive, l’avalanche, évidemment… PsychologiesMagazine relaie d’ailleurs, ce mois-ci, l’appel àla vigilance de cinquante experts «face à l’utilisa-tion abusive des écrans», accompagné de huit pa-ges anxiogènes sur le sujet. Mais voilà qu’un rap-port intitulé l’Enfant et les écrans vient faire unsort aux idées reçues. Oui, les jeux vidéo «peuventstimuler de nombreuses compétences». Oui, les ré-seaux sociaux «peuvent être un espace d’expéri-mentation et d’innovation». Ce rapport n’est pasl’œuvre d’une bande de hippies geeko-libertai-res, mais de l’Académie des sciences qui, sous laplume de Jean-François Bach, Olivier Houdé,Pierre Léna et Serge Tisseron (1), dessine «un che-min de raison», rappelant sans cesse l’évidence,à savoir la nécessité d’un encadrement parentalet scolaire dans les activités numériques de ceuxque Michel Serres appelle joliment les «petitspoucets» et «petites poucettes». Mesurée, rensei-gnée, mais aussi enthousiaste vis-à-vis du numé-rique voire parfois fascinée, cette somme dressela liste des «meilleurs services que nous puissionsrendre à cet enfant du siècle nouveau».

LA VILAINE TÉLÉBouh, la vilaine télé ! S’il y a un écran à proposduquel les choses ne changent pas, c’est bien lepetit. Qu’on pourrait résumer ainsi: la télé, c’estpas pour les enfants. Et surtout pas les plus jeu-nes. Ainsi, indique le rapport, «l’exposition pas-sive et isolée aux écrans –y compris l’exposition auxDVD spécialement commercialisés pour enrichirprécocement le vocabulaire – n’aide pas les bébésà apprendre le langage». Et ça ne s’arrange pasavec l’âge, assure l’Académie, évoquant des«conséquences problématiques bien au-delà des

premières années: prise de poids, déficit de concen-tration et d’attention, risque d’adopter une attitudepassive face au monde…» Le rapport quantifie lesrisques. Plus de deux heures par jour? 7% de di-minution de l’intérêt en classe et 6% sur les habi-letés en mathématiques à l’âge de 10 ans.

LA GENTILLE TABLETTECe sont les stars de l’avis. Ordinateurs, consolesde jeu, smartphones et tablettes, tous ces sup-ports issus de la culture numérique vont accom-pagner l’enfant durant sa croissance et son ap-prentissage. Dès la préface, Jean-Pierre Bach,secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences,établit que «cette évolution, qui apparaîtaujourd’hui irréversible, a des effets positifs considé-rables en améliorant tout à la fois l’acquisition desconnaissances et des savoir-faire, mais aussi encontribuant à la formation de la pensée et à l’inser-tion sociale des enfants et adolescents». L’avis re-vient d’abord sur l’impressionnante collectiond’idées reçues qui entoure les usages numériquesdes enfants. La violence des jeux vidéo (lire ci-contre) et la supposée addiction à ces nouveauxusages numérique sont ainsi remis en perspec-tive. Sans nier ces problématiques. Ainsi, «l’isole-ment dans les écrans devient problématique s’il n’estpas utilisé pour trouver du plaisir, comme les activi-tés distractives normales, mais pour fuir un déplai-sir». En clair, si votre ado s’éclate à monter sonelfe de la nuit au niveau 85 dans World of Warcraft,pas la peine de paniquer.Mieux vaut donc s’intéresser aux effets bénéfi-ques. Les jeux vidéo d’action améliorent la «ca-pacité d’attention, de concentration et de prise ra-

pide de décision», certains logiciels peuvent«éveiller et exercer les capacités d’attention visuellesélective, de dénombrement, de catégorisation» et,pour l’adolescent, les outils numériques ont «unepuissance inédite pour mettre le cerveau en “modehypothético-déductif” et explorer tous les mondespossibles».L’Académie stipule cependant régulièrement queces qualités ne valent que dans le cadre d’une uti-lisation modérée et dans un environnement enca-dré, surtout pour les plus petits. Avec ces précau-tions, même les bébés (moins de 3 ans) peuventprofiter de la révolution numérique, et c’est grâceaux petites dernières de la grande famille desécrans: les tablettes tactiles. «Elles peuvent contri-buer, dans un contexte relationnel, […] à l’éveil pré-coce des bébés au monde des écrans. C’est le formatle plus proche de leur intelligence.» Les tablettessont d’ailleurs régulièrement encensées dans lerapport, ce qui est un peu surprenant. Le supportest encore jeune (l’iPad a tout juste 3 ans), et n’estpas vraiment arrivé à maturité. On a du coup par-fois l’impression que sa mise en avant relève plusde la fascination que du constat scientifique.

LA GROSSE TÊTE INTERNETAu fait, c’est bien joli tout ça, mais Internetrend-il bête? C’est la grande question mais, pourl’Académie des sciences, «l’angoisse actuelle surce sujet ne doit pas faire céder à la caricature». Enprenant bien soin de préserver des périodes deréflexion «sans écran», plus posées, l’utilisationdu Net permet d’exercer «l’intelligence fluide etrapide». Avec le Web, les écrans font aussi dansle social, et le rapport n’ignore pas que la majoritédes enfants s’inscrivent sur Facebook (pourtantinterdit au moins de 13 ans) dès qu’ils le peuvent.Selon l’Académie, les bénéfices des réseaux so-ciaux sont nombreux: c’est une cour de récré, ilspermettent de nouvelles formes de mise en scènede soi et de l’intimité, ainsi qu’un renforcementdes relations sociales existantes et de l’estime desoi. Les dérives, comme la surexposition de soiou le cyber-harcèlement, sont aussi abordées etmontrent la nécessaire implication des parents.Mauvaise nouvelle pour eux, ils ont toujoursbeaucoup de boulot: actifs ou pas, les écrans neseront jamais de bonnes nounous. •(1) Paru aux éditions Le Pommier, 17€.

Par ERWAN CARIO, RAPHAËL GARRIGOSet ISABELLE ROBERTS L’ESSENTIEL

LE CONTEXTEL’Académie des sciences considèreque les outils numériques peuvent aiderau développement des enfants.

L’ENJEUL’accès aux ordinateurs et tablettes restetrès inégalitaire dans les écoles.

REPÈRES

Source : Médiamétrie Etud

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009

Les enfants de 4 à 14 ans ont passé en moyenne

par jourdevant la télévision

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TÉLÉVISIONen 2011

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Cré

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RESEAUXSOCIAUX en 2011JEUXVIDÉO

pour l’ensemblede la population

Hcontre des enfants de 9 à 17 ans possèdent une console de jeu des

15-17 ansdes

13-15 ans

déclarent posséder

un profil sur Facebook,

réseau social le plus

populaireen France

des11-13 ans

DÉCRYPTAGE

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 20132 • EVENEMENT

Les conclusions de l’Académiecontredisent la supposée nocivitépour les enfants.

Les jeux vidéomaniés avec adresse

Q uand il aborde laquestion des jeuxvidéo, le rapportl’Enfant et les écrans

de l’Académie des sciencesprend une salubre précau-tion: il n’affirme rien de ca-tégorique. C’est déjà unénorme progrès, qui permetd’éviter l’écueil rencontrépar la plupart des études déjàproduites: leur partialité. Dece point de vue, davantagequ’un document conclusif etprescriptif, c’est plutôt unrapport à accueillir commeune base de réflexion, met-tant à plat tous les aspects dudébat avec une sérénité assezremarquable.Car ce débat n’est pas neuf.Les jeux vidéo sont accusésde nocivité pratiquement de-puis leur origine. On leur a

reproché pêle-mêle d’êtreviolents et, donc, de générerà leur tour de la violence,d’être addictifs et, par con-séquent, de désociabiliser lesjoueurs, d’être une vaste en-treprise de décervelage etainsi de favoriser l’échecscolaire, etc.Phénomène. Revenant surchacun de ces points, l’Aca-démie présente le grand mé-rite de les repenser en termesscientifiques et, surtout,contextualisés. Il serait eneffet vain de vouloir disso-cier l’usage des jeux vidéo (etses éventuels effets indésira-bles), des autres pratiquesnumériques. Ainsi replacédans le contexte générald’une inflation des écrans etimages, le jeu vidéo apparaîtenfin pour ce qu’il est : unphénomène culturel où sereflètent, se diffractent, par-fois s’accentuent, les mœursde la société tout entière.Cette forme assez nouvellede relativisme produit aussiun contre-effet positif pour

l’image du jeu vidéo. Dèsqu’on l’observe un peu ri-goureusement, on constatecette évidence: il est dans lanature même du jeu de faireprogresser les capacités co-gnitives du joueur. D’unecertaine façon, toute l’his-toire du game-design pour-rait se résumer à cela: le dé-veloppement d’un jeu, c’estl’art de dessiner une courbed’apprentissage.Maladroit. Même lesjoueurs les moins assidus ontpu constater cette tautolo-gie : il suffit de jouer pourprogresser et développer sadextérité. Des études parcel-laires ont mis depuis long-temps en valeur l’espèced’avantage compétitif dontjouissent les joueurs, commela plus grande rapidité de

certains ré-flexes ou, ainsique le rapporten fait état, «lastimulation den o m b re u s e scompétences

telles que la réflexion stratégi-que, le sens de l’innovation etla créativité».Le débat sur la violence estsans doute le plus complexeet embarrassant pour l’in-dustrie, même si une prise deconscience a émergé, no-tamment aux Etats-Unis où,en plein débat sur les abusliés au port d’armes, de for-tes voix du game-design sesont fait entendre pour ap-peler à plus de responsabili-tés. C’est aussi sur ce pointque le rapport est le plus ma-ladroit, notamment quand ilpose, ainsi formulée, lafausse question : «Pourquoicertains joueurs choisissent-ilsdes produits ne contenant pasde scènes de violence etd’autres des spectacles ou desjeux de guerre ?» En réalité,ce sont souvent les mêmesjoueurs qui varient tout sim-plement leurs plaisirs… Lemeilleur ennemi des jeux vi-déo reste l’ignorance danslaquelle ils sont tenus.

OLIVIER SÉGURETLa tablette tactile participerait «à l’éveil précoce des bébés au monde des écrans». PHOTO JÉROMINE DERIGNY. ARGOS. PICTURETANK

On constate cette évidence,il est dans la nature mêmedu jeu de faire progresser lescapacités cognitives du joueur.

«Le danger principal des réseaux sociauxest de ne pas pouvoir effacer les tracesqu’on y laisse, même si on le désire.Une éducation précoce à leurs dangers,mais aussi à leurs modèles économiques,est indispensable.»Extrait du rapport L’Enfant et les écrans.

L’ACADÉMIE DES SCIENCESBranche de l’Institut de France –aux côtés de l’Académiefrançaise, de l’Académie des inscriptions et belles­lettres,de l’Académie des beaux­arts et de l’Académie dessciences morales et politiques–, elle veille au développe­ment des sciences et conseille les gouvernements. L’Aca­démie compte 249 membres, tous scientifiques, et estprésidée par le paléontologue Philippe Taquet.

«Aucune étude ne permetpourtant à ce jour d’affirmerqu’existe une addictionaux écrans, notammentpour ce qui concerneles adolescents.»Extrait du rapport l’Enfant et les écrans.

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 • 3

Un plan de formation est prévupour pallier un usage trop timide.

L’Educationnationale, unecopie à bas débit

V incent Peillon le rap-pelait en décembredans Libération : il

«compte sur le plan numériquepour réduire les inégalités».Selon le ministre de l’Educa-tion nationale, cela concerneprincipalement «le raccorde-ment à très haut débit des zo-nes rurales, l’installation dumatériel, sa maintenance, oula formation des professeurs».Le développement d’«une fi-lière de production de logicielsnumériques, insuffisante enFrance», n’est pas non plusexclu.Un des grands volets de laréforme numérique con-cerne donc la formation auxdifférents usages de l’outilpar les enseignants – en es-saimant via une plateformeles pratiques des profs inno-vants – et, en parallèle, uneéducation accrue des élèvesaux nouveaux médias ettechnologies, qu’ils prati-quent sans complètement lesmaîtriser. Un service de sou-tien va être mis en place dèsla rentrée de septembre, enmathématiques et en anglais,pour 30 000 élèves. Mais ceplan pourra-t-il améliorer lefait que la moitié des ensei-gnants ne se servent d’ordi-nateurs qu’une fois de tempsen temps ?Méfiance. L’état des lieuxn’est guère encourageant.Selon une enquête TNSSofres-Savoir livre de no-vembre 2011, en France, 16%des enseignants utilisent desmanuels numériques qui nereprésentent que 1%du chif-fre d’affaires des éditeurs delivres scolaires. Ces supportsnumériques sont pourtant15% moins cher à produireque les manuels «papier»,notamment à cause de lasuppression des coûts d’im-pression, de distribution etde stockage.Les professeurs des écolessont, a priori, les moins inté-ressés par les écrans, seul unsur douze utilise les manuelsnumériques. Les enseignantsse méfient de ces outils: 40%craignent les pannes intem-pestives, 32% constatent unmanque d’équipement pro-fessionnel, et 30% des nou-veaux utilisateurs regrettentun manque de formation.Dans cette même enquêteTNS Sofres-Savoir livre, laFrance se classe 24e sur 28

concernant les usages du nu-mérique dans l’éducation.C’est, en revanche, un peumeilleur en terme d’équipe-ment, où l’Hexagone arriveà la 8e place. A titre de com-paraison, prouvant le grandécart numérique existantentre les pays, au Danemark,les élèves peuvent passer leurbac avec leur ordinateurconnecté. On en est loin,chez nous.Alternatifs. Mais tout n’estpas perdu, des expériencesexistent déjà. Quelquesexemples de manuels alter-natifs sont disponibles surInternet, parfois gratuite-ment. A l’image notammentdes manuels du Grip (Grou-pement de recherches inter-professionnelles sur les pro-grammes) mis en ligne parun réseau d’instituteurs op-posés aux méthodes globalesou semi-globales; ou de ceuxde Sésamath, association deprofesseurs de mathémati-ques créée en 2001.Dans l’académie de Nancy-Metz, sélectionnée en 2009par le ministère de l’Educa-tion pour le «développementdes usages numériques àl’école», le collège Jacques-Callot, à Neuves-Maisons(Meurthe-et-Moselle), faitfigure d’exemple. Cet éta-blissement de la banlieuenancéienne de 685 élèves(dont une soixantaine enSegpa, section d’enseigne-ment général et profession-nel) est doté de deux sallesinformatiques, d’une sallemultimédia, de tableauxblancs interactifs pour cha-que discipline. En 2010,l’établissement a distribuéaux élèves de cinquième desnetbooks, ceux de sixième etde quatrième expérimentantles manuels numériques. Lecarnet de bord des profes-seurs est tenu sur un portailvirtuel que chacun peut con-sulter. Dans le rapport«l’Enfant et les écrans», ilest question de «repenser» lapédagogie indépendammentde leur introduction: «Leursrichesses propres sont de faci-liter la mise en jeu de diversesformes de motivation suscepti-bles de renforcer les comporte-ments d’apprentissage, de sti-muler les diverses formesd’intelligence et de solliciter lacuriosité enfantine.»

DIDIER ARNAUD

La Waldorf School, issue de la méthode Steiner, bannit ordinateurs,iPad et télé jusqu’au lycée, au profit d’activités avec les professeurs.

Dans la Silicon Valley,l’école fait écran noirC’ est une petite école lovée dans

le cœur de la Silicon Valley, àquelques dizaines de kilomè-

tres de San Francisco. Sur son site web,la Waldorf School of the Peninsula dé-crit ainsi sa mission : «Permettre auxenfants de développer leur propre indivi-dualité et augmenter leur capacité à pen-ser, ressentir et agir.» Jusque-là, riende bien particulier si ce n’est qu’ici, aucarrefour mondial de la high-tech,l’école interdit tout simplement lesécrans dans ses classes. De tous types:ordinateurs, iPad ou télévision. «Celapeut paraître un peu paradoxal car lagrande majorité de nos parents tra-vaillent dans le secteur de l’informatique,reconnaît Lucy Valentine Wurtz, l’unedes directrices. Mais en même temps,c’est aussi peut-être parce qu’ils sontdevant des écrans toute la journée qu’ilspréfèrent que leur fille ou leur fils ne fas-sent pas la même chose.»«Dialogue». La Waldorf School of thePeninsula est l’une des 160 écoles auxEtats-Unis ayant adopté la méthodeSteiner-Waldorf, du nom du philoso-phe autrichien Rudolf Steiner, né auXIXe siècle, et selon lequel l’éducationdoit se faire notamment à travers lesactivités artistiques et manuelles.«Nous considérons que les enfants ontbesoin de cuisiner ou de jouer avec desmatériaux plutôt qued’être placés devantdes ordinateurs pen-dant des heures, pour-suit Lucy ValentineWurtz. Nous privilé-gions aussi l’interac-tion avec le professeur,afin de développer ledialogue et les facultés

de réaction. A ce que je sache, il n’y a en-core aucun élément tangible qui montrequ’on reçoit une meilleure éducation avecdes dizaines d’ordinateurs ou d’iPaddans les classes.»Le débat est en réalité l’un des plus vifsqui agitent le petit monde de l’ensei-gnement depuis près de vingt ans auxEtats-Unis. En 1997, un comité descientifiques mis en place sous la pré-sidence de Bill Clinton avait ainsi lancéun appel urgent à la modernisation desclasses américaines, assurant notam-ment qu’elles devaient s’équiper en

nouvelles technologies. Depuis, desdizaines de milliers de classes ont ac-quis des ordinateurs et ont fait d’Inter-net un outil de recherche.Mais la polémique s’est poursuiviechez les professionnels de l’enseigne-ment. Entre ceux qui estiment que cestechnologies n’ont rien apporté auxélèves, réduisant même leurs capacitésde concentration. Et les autres, qui as-surent que les enfants doivent être

confrontés très vite auxécrans parce qu’ils sontdésormais partout. Ap-ple par exemple, lorsde l’une de ses derniè-res conférences à SanFrancisco, s’est félicitéque plus de 2500 clas-ses à travers le pays sesoient dotées d’iPad

durant les deux dernières années.«Pour moi, c’est un débat qui ne devraitmême pas exister, relève Daniel Ed-wards, un éducateur qui tient un blogsur l’éducation et les technologies. Lesenfants devraient tous avoir un iPad, neserait-ce que pour avoir d’autres pers-pectives.»Enthousiasme. A Los Altos, LucyValentine Wurtz précise cependant quel’éducation Waldorf n’a pas d’opposi-tion de principe aux technologies :«Nous considérons qu’il y a un âge avantd’être exposés aux écrans. Nous n’avons

pas d’ordinateurs àl’école élémentaireet au collège. Maisau lycée, les étu-diants sont encou-ragés à les utiliserà la maison pourfaire leurs devoirs

et, dans certains cas, les professeurspermettent même que l’on prenne des no-tes sur un ordinateur portable.»Une étude réalisée l’année dernièreauprès de plusieurs écoles maternellesdu Maine qui avaient donné un iPad à266 enfants a démontré que ces der-niers faisaient preuve d’un plus grandenthousiasme à apprendre. Elle n’étaitcependant pas assez large pour en tirerdes conclusions nationales. «Il ne fautpas oublier que les écrans, quels qu’ilssoient, sont des outils et ne remplacerontjamais l’humain, assure Patrice May-nard, l’une des représentantes de l’As-sociation nationale des écoles Waldorfaux Etats-Unis. Placez un enfant seuldevant un écran et il n’en sera pas forcé-ment plus intelligent.»

De notre correspondant à New YorkFABRICE ROUSSELOT

En 2011, à la Waldorf School of the Peninsula, à Los Altos, au cœur de la Silicon Valley. PHOTO JIM WILSON.NYT.REDUX REA

«A ce que je sache, il n’y a encore aucunélément tangible qui montre qu’on reçoitune meilleure éducation avec des dizainesd’ordinateurs ou d’iPad dans les classes.»Lucy Valentine Wurtz de la Waldorf School

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Sacramento

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LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 20134 • EVENEMENT

Hortefeux attaqueValls: encore raté

«On indiquequ’on va procéderau recrutementde 6000 policierset gendarmes.En réalité, ce n’estpas 6000 en pluscomme on pourraitle croire. […] [Onrecrute] simplement120 policierset gendarmes.»Brice Hortefeuxle 27 janvier sur Europe 1

D epuis son arrivée auministère de l’Inté-rieur, Manuel Valls est

parfois accusé de jouer lamême partition que ses pré-décesseurs. Pourtant, auxyeux de l’un d’entre eux,Brice Hortefeux, en poste dejuin 2009 à février 2011, lebilan du ministre socialisteest loin d’être fameux. Pourle vice-président de l’UMP,invité dimanche dernier sur

Europe 1, «der-rière la vigueurdes mots, il y a

la faiblesse des actes qui abou-tit à un échec dangereux pourles Français». Et de citer unexemple d’esbroufe médiati-que, celui de la hausse deseffectifs de police et de gen-darmerie. «J’ai ici la dépêchedans laquelle on indique qu’onva procéder au recrutementde 6 000 policiers et gendar-mes. Le chiffre est spectacu-laire. Je vais vous faire l’éco-nomie de la démonstration,mais en réalité lorsque vousdémontez tout cela, vous vousapercevez que ce n’est pas6 000 en plus, comme onpourrait le croire, comme c’estindiqué dans la dépêche, maisqu’on aboutit au recrutementsimplement de 120 policiers etgendarmes titulaires.»

E st-ce parce qu’il a étéministre de l’Intérieurà l’époque de la RGPP

(révision générale des politi-ques publiques) et de la sup-pression de postes de poli-ciers et de gendarmes ? Lefait est que Brice Hortefeux

INTOX

veut absolument avoir lapeau de Manuel Valls sur laquestion des effectifs. Al’automne, l’ancien ministrede l’Intérieur avait déjà ac-cusé son successeur d’uneentourloupe sur le sujet.Alors que le gouvernementpromettait 500 recrutementssupplémentaires dans la po-lice et la gendarmerie, Hor-tefeux avait crié à la super-cherie, affirmant que cesrecrutements étaient loin decompenser la baisse des ef-fectifs programmée par ladroite dans le cadre du non-remplacement de départs à laretraite, qui allait, selon lui,se poursuivre discrètementsous la gauche. Raté : le mi-nistère de l’Intérieur avaitbien prévu 500 recrute-ments… en plus du rempla-cement de la totalité des dé-parts. Cinq mois plus tard,Hortefeux revient à l’assaut.Il dénonce à nouveau lacommunication trompeuse

de ManuelValls, quise vante-

rait de créer 6 000 postes,alors que les effectifs des po-liciers et gendarmes supplé-mentaires ne va, selon lui,progresser que de 120 uni-tés… soit cinquante foismoins. Encore raté. Car simensonge il y a, il est à nou-veau du côté d’Hortefeux.Manuel Valls n’a jamais pro-mis 6000 postes supplémen-taires. Il a expliqué très clai-rement la situation. La«dépêche» qu’évoque Horte-feux est en réalité une inter-view accordée à Nice Matinen octobre, où le ministrede l’Intérieur affirme: «Nousavons décidé de mettre fin aunon-remplacement des poli-ciers et des gendarmes quipartent à la retraite. Plus de10 000 postes ont été suppri-més ces cinq dernières années.En 2013, nous remplaceronstous les départs à la retraite etcréerons 500 postes de plus,soit au total, plus de 6000 re-crutements de gardiens de lapaix et de gendarmes.» Bref,il faut déployer des trésors demauvaise foi pour affirmerque Valls essaye de laissercroire aux Français qu’il y a«6000 [policiers et gendar-mes] en plus […]».L’autre problème, c’est queles deux ministres n’arriventpas au même nombre de re-crues effectives. Valls évoque

DÉSINTOX

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donc 500 nouveaux postes,quand Hortefeux en voit 120.L’ancien ministre n’a pas ré-pondu à nos questions sur lamanière dont il aboutit à cerésultat. La loi de finan-ces 2013 est, elle, assez clairesur le sujet: «Le ministère del’Intérieur bénéficiera égale-ment, pour les missions de sé-curité de la police nationale et

de la gendarmerie nationale,de 480 créations d’emplois dès2013.» A périmètre constant,la hausse est de 192 emplois àtemps plein pour la gendar-merie nationale et de 288pour la police. Soit le totalde 480 annoncé par la loi definances et arrondi à 500 parManuel Valls.

BAPTISTE BOUTHIER

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REPORTAGEDANSLESSILICONALLÉESDE

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Projet7:Mise en page 1 01/02/13 13:31 Page1 Désintox traque tous les jours les petitset gros mensonges du débat public enpartenariat avec Libération et 2P2L. Unepastille d’impartialité à retrouver du lundi aujeudi sur Arte dans l’émission 28 minuteset sur le blog Desintox.blogs.liberation.fr

SUR LIBÉRATION.FR•LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 • 5

TripoliMisrata

ALG

ÉRIE

ÉGY

PTE

TCHADNIGER

L I B Y E

Benghazi

400 km400 km400 km400 km

CYRÉNAÏQUE

FEZZAN

LIBYESuperficiePopulationPIB par habitantCoissance du PIBEspérance de vie64e sur 187 sur l’indicateur dedéveloppement humain (IDH) Sources : FMI 2012, Pnud 2011

1 759 540 km2

6,61 millions10 022 €+ 121,9 %74,8 ans

REPÈRES «Il n’y a pas une véritableliberté ou une véritabledémocratie sans stabiliténi sécurité.»

David Cameron Premier ministrebritannique, lors d’une visite surpriseà Tripoli, jeudi

Libye:danslapoudrièredeBenghaziLes attentats se multiplient dans la villeberceau de la révolution. Islamistes,ex-kadhafistes et criminels de droitcommun sont tour à tour accusés.Par MATHIEU GALTIEREnvoyé spécial à Benghazi

L es Anglais ont tiré les premiers. Lasemaine dernière, le ministère bri-tannique des Affaires étrangères ademandé à ses ressortissants de quit-

ter Benghazi en raison d’une «menace spéci-fique et imminente». L’Allemagne, l’Australie,le Canada, entre autres, ont suivi. Dans lafoulée, le Quai d’Orsay a mis en garde contredes «menaces terroristes». Résultat, les Occi-dentaux ont déserté la capitale de la Cyrénaï-que. Après la mort de l’ambassa-deur américain le 11 septembre etl’attentat raté contre le consul ita-lien le 12 janvier, le berceau de la révolutionlibyenne est devenu une ville de tous les dan-gers pour les chancelleries. Et elles ne sontpas les seules visées.

BOMBE. Depuis dix-huit mois, les attaquesà la bombe contre des bâtiments publics et lesenlèvements de policiers se sont multipliés.Après l’échec de la démobilisation des briga-des et le demi-succès de la prise par l’arméede Bani Walid –considéré comme le dernierbastion kadhafiste–, les violences à Benghaziconstituent un nouveau défi pour le Congrèset le gouvernement, fragiles institutions is-sues de la transition démocratique. Jusqu’ici,aucun attentat n’a été revendiqué. Mais lessuspects ne manquent pas. En dresser la listerevient à énumérer les maux qui gangrènentla Libye: la population accuse les islamistes,ces derniers dénoncent un complot d’ancienskadhafistes et les autorités locales pointentdu doigt les criminels de droit commun relâ-chés pendant la révolution. Certains fédéra-

listes –qui militent pour une autonomie dela Cyrénaïque– participent même à la mêléeen dénonçant l’incurie de Tripoli. Abeir Im-neina, professeure de science politique àl’université de Benghazi, n’est pas surprisepar ce capharnaüm. La deuxième ville de Li-bye est un enjeu stratégique. «Tripoli a le pou-voir politique, Misrata possède les armes et Ben-ghazi représente le pouls social du pays. Pour lecontrôler, il faut avoir la main sur la ville.»Sur la terrasse de l’hôtel Tibesti, fleurant bonl’architecture soviétique, la vue est imprena-ble sur la capitale de la Cyrénaïque et ses

630000 habitants. Au pied du bâ-timent, le long de la voie rapide,un tag se détache: «Oui au fédéra-

lisme. Non aux Frères musulmans qui travaillentpour le Qatar.» Dans la rue, dans les cafés,«islamistes» est le mot qui se murmure leplus. Dès qu’une voiture aux vitres teintéesralentit devant le commissariat de Fayyad,les policiers se figent. En décembre, unebombe a endommagé le mur d’enceinte. Lescoupables ne font aucun doute pour l’agentAbdelhafid Awami: les islamistes d’Ansar al-Charia («les défenseurs de la Charia»). «Lesislamistes nous défient, enrage le policier. Ilsveulent contrôler le pays, comme en Egypte eten Tunisie.»La brigade est déjà soupçonnée d’avoir parti-cipé à l’attaque du consulat américain à Ben-ghazi le 11 septembre. La population l’avaitalors chassée de la ville. Aujourd’hui, Ansaral-Charia est toujours là même si, officielle-ment, ses membres ne s’occupent plus de lasécurité des bâtiments publics. «Ansar al-Charia, comme beaucoup de milices, regroupedes jeunes chômeurs à qui on donne du pouvoir,des armes, détaille Abeir Imneina. Ils sont fi-

nancés par l’étranger et il est probable qu’Al-Qaeda soit derrière tout ça. Mais ce n’est pasla seule. La milice du 17 Février, par exemple,est financée par le Qatar, tout le monde le sait.»

COMPLOT. Frères musulmans, Al-Qaeda,Qatar: Ahmed Zlitni refuse les amalgames.L’ancien capitaine rebelle est aujourd’hui leporte-parole de l’Union des musulmans,parfois décrite comme la branche civiled’Ansar al-Charia. «Mes amis d’Ansar al-Charia n’ont aucun lien avec l’étranger ou lesFrères musulmans. Ce sont de simples musul-mans qui pensent que le Coran doit faire loi enLibye. S’ils obtiennent ce qu’ils veulent, ils arrê-teront de se battre.» Ansar al-Charia n’est pasla seule organisation islamiste visée.Le 2 janvier, deux policiers disparaissent. LeConseil suprême de sécurité (SSC) est accusé

par l’un des proches des policiers. Le SCC estl’une des brigades qui a signé un accord avecle gouvernement pour avoir une existence lé-gale. Mais certaines de ses factions, prochesdes radicaux religieux, refusent de faire allé-geance aux autorités. Des militants auraientparticipé à la destruction de mausolées soufisà Tripoli en août. Cependant, selon AhmedZlitni, les terroristes seraient plutôt à cher-cher du côté des loyalistes de l’ancien «roides rois d’Afrique». «Avant la révolution, onaccusait toujours les islamistes et aujourd’hui,c’est la même chose. Ce n’est pas un hasard.»Pour lui, le complot est limpide: les kadha-fistes tuent des policiers plus ou moinsmouillés avec l’ancien régime pour faire por-ter le chapeau aux islamistes.Oussama el-Cherif, chargé de la communi-cation au sein du conseil local de Benghazi,

REPORTAGE

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 20136 • MONDE

La Libye ne peut empêcher l’arrivéede groupes radicaux venant du Mali.

Le pays à lafrontière du chaosL a guerre au Mali va-t-elle

déstabiliser un peu plus laLibye ? Le représentant des

Nations unies à Tripoli, Tarek Mi-tri, s’en est inquiété mardi devantle Conseil de sécurité. «L’opposi-tion de groupes armés radicaux àl’intervention militaire au Mali pour-rait aggraver la situation, étantdonné les affiliations ethniques ouidéologiques [avec des groupes li-byens] et la porosité des frontières»,a-t-il affirmé. Une crainte renfor-cée par la dégradation de la sécu-rité dans l’est de la Libye, où desmilices islamistes se sont implan-tées (lire page ci-contre). Selon Ta-rek Mitri, certains de leurs com-battants pourraient décider de sevenger de l’intervention françaiseen commettant des attentats enLibye. Ces milices pourraient éga-lement accueillir des membresd’Al-Qaeda au Maghreb islamique(Aqmi) et de sesalliés d’Ansar ed-Dine qui ont fuidevant l’avancéedes armées fran-çaise et malienne.Si ces craintessont à confirmer,une chose est sûre : l’Etat libyenn’a pas les moyens d’empêcher lescombattants actifs dans le Sahelde circuler sur son territoire. Aquelques semaines du deuxièmeanniversaire de la révolution, il neparvient pas à asseoir son autoritéet reste incapable de contrôler lesmilices formées d’ex-rebelles.Insurgés. Depuis la mort deMuammar al-Kadhafi en octo-bre 2011 à Syrte, le gouvernementtente d’intégrer les ex-révolution-naires dans la police et l’arméenationales. Mais la tâche s’avèreplus complexe et longue queprévu. A ce jour, 200000 anciensinsurgés armés restent indépen-dants, selon Tarek Mitri. Plus in-quiétant, ceux qui ont rejoint lesrangs des forces nationalesn’obéissent pas toujours aux or-dres de leurs autorités.Pour gagner du temps, l’Etat li-byen a enrôlé les ex-révolution-naires brigade par brigade, ouunité par unité. Des groupes decombattants restent ainsi loyauxà leurs anciens commandants quiles dirigeaient durant la révolu-

tion. La même logique a prévalulors de la création du Comité desécurité suprême (SSC), censé in-carner une nouvelle force d’élite.Résultat, ses membres sont régu-lièrement accusés d’agir hors detout contrôle et suspectés d’exac-tions, dont des meurtres.Toubous. Cette incapacité à gérerles ex-rebelles explique en partiela porosité des frontières du sud dupays. Le gouvernement en a délé-gué la surveillance d’une sectionmajeure aux Toubous, une ethnienoire également présente au Tchadet au Niger. Mais leurs responsa-bles se plaignent du manque demoyens alloués par le gouverne-ment et affirment avoir interpelléà plusieurs reprises les pays occi-dentaux. Ils viennent peut-êtred’être entendus par l’Union euro-péenne, qui a annoncé jeudi lelancement d’une mission de deux

ans pour aider la Libye à contrôlerses frontières.Tripoli devra aussi régler les con-flits entre Toubous et tribus ara-bes. Le plus grave a duré plusieursmois et fait des centaines de mortsà Koufra, dans le sud-est. Le gou-vernement a fini par réagir en en-voyant des brigades islamistes deBenghazi, accusées depuis par lesToubous d’en avoir profité pourétendre leur contrôle. Des heurtséclatent enfin régulièrement à Se-bha, la principale ville du sud, oùles Toubous, marginalisés sousKadhafi, qui leur refusait des pa-piers d’identité, s’estiment tou-jours délaissés par Tripoli.Dépassées, les autorités libyennesont décidé à la mi-décembre defermer les frontières avec le Sou-dan, le Tchad, le Niger et l’Algérieavant de déclarer le sud de la Libye«zone militaire fermée». Une dé-claration qui n’a pas rassuré le re-présentant des Nations unies. «Lasécurité le long des frontières libyen-nes reste particulièrement préoccu-pante», a-t-il déclaré mardi.

LUC MATHIEU

1,6 millionde barils de pétrole sont produits en Libye chaquejour. Le pays, quatrième producteur du continentafricain, a ainsi retrouvé son niveau de productiond’avant­guerre.

w 20 octobre 2011 Exécution de Muammaral­Kadhafi.w 7 juillet 2012 Premières élections législa­tives libres.w 11 septembre L’ambassadeur des Etats­Unis ainsi que trois autres agents améri­cains sont tués dans un attentat contre le

consulat américain à Benghazi. Desextrémistes auraient profité d’unemanifestation contre le film anti­islaml’Innocence des musulmans.w 12 janvier 2013 Le consul d’Italie àBenghazi échappe à une attaque de tirscontre sa voiture blindée.

Le gouvernement tente d’intégrerles ex-révolutionnaires dansla police et l’armée nationales.Mais la tâche s’avère pluscomplexe et longue que prévu.

trace une troisième piste: celle des criminelsde droit commun. Au début de la révolution,Kadhafi avait fait relâcher 3000 prisonnierspour mater la rébellion. Aujourd’hui, seuls30% auraient retrouvé leurs geôles. «Les in-vestigations ne sont pas finies. Mais les attaquescontre les commissariats pourraient venir de cesanciens détenus qui cherchent à se venger»,avance-t-il.

CLUEDO. Le colonel Moustapha Raqiq, nou-veau chef de la sécurité, est chargé de résou-dre ce Cluedo benghaziote. Un suspect a étéarrêté concernant le meurtre de son prédé-cesseur, le colonel Fradj al-Dersi, le 20 no-vembre. Durant sa détention, il a reçu près de70 messages codés sur son téléphone porta-ble, laissant présager d’une implication d’Al-Qaeda, selon une source de la sécurité. «Pour

l’instant, nous ne connaissons pas les responsa-bles, nuance Raqiq. Une chose est sûre, ceuxqui organisent ces attaques ne veulent pas quenous nous rendions maîtres de la sécurité.» Ilreconnaît néanmoins que la piste de terroris-tes islamistes est possible: «Ceux qui font desbombes artisanales sont organisés. C’est untravail criminel qui peut venir d’eux. Le gouver-nement travaille sur cette possibilité.» Pourajouter à la confusion, des fédéralistes radi-caux essaient de tirer profit de cette instabi-lité. «Le gouvernement ne fait rien pour nousaider. Lors d’une manifestation [le 20 décem-bre après l’arrestation du suspect du meurtrede Fradj al-Dersi, ndlr], quatre personnes sontmortes et Tripoli ne s’est même pas excusé !»s’insurge Oussama Buera. Ce jeune militantrêve d’une vraie indépendance pour la Cyré-naïque, «par les armes s’il le faut». •

Une voiturede policedétruite parune explosiondevant lecommissariatde Fayyad,à Benghazi le12 décembre.Quatrepoliciers ontété blessésdans l’attaque.PHOTO ESAMOMRAN AL­FETORI. REUTERS

ANSAR AL­CHARIACe groupe salafiste prônel’instauration d’un Etat islamique.Délogé de son QG de Benghazien septembre, il a annoncé sadissolution. La milice, devenueclandestine, a cependant reven­diqué plusieurs attaques depuis.

LES ATTAQUES DEPUIS LA MORT DE KADHAFI

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 MONDE • 7

Les forces d’autodéfense japonaises lors d’un exercice à Gotemba (près de Tokyo), au mois d’août. PHOTO KOJI SASAHARA. AP

LeJaponappuiesurladéfenseLe Premier ministre, Shinzo Abe, veut augmenter le budget militaire et compte s’attaquerà la Constitution pacifiste du pays. Une riposte aux provocations de Pékin sur les îles Senkaku.

L e Japon muscle son armée.Pour la première fois de-puis onze ans, l’archipel seprépare à aug-

menter son budget mili-taire au moment où il faitface à des «actes provocateurs quoti-diens de la Chine» autour des îlesSenkaku, selon l’expression d’unresponsable ministériel japonais.Un officiel qui dit «redouter un acci-dent, un dérapage» et ajoute que leJapon «est en train de renforcer le ni-veau d’alerte dans la région». Lebudget devrait atteindre 4750 mil-liards de yens (près de 40 milliardsd’euros) pour l’exercice 2013-2014.En consacrant 40 milliards de yenssupplémentaires à sa défense,Tokyo a décidé d’embaucher287 personnels militaires, qui re-joindront les 230000 forces d’auto-défense japonaises.

«ESCALADE». Selon le ministère dela Défense, ces troupes devront«améliorer la préparation des unitésen charge du renseignement, de lasurveillance et la sécurité dans la ré-gion Sud-Ouest», où se trouvent lesîlots Senkaku, que la Chine nommeDiaoyu. Avec cet effort, Tokyo en-tend afficher sa volonté «très fermede sauvegarder sa souveraineté sur

ces territoires» contre les agisse-ments de son voisin chinois. «Nousdevons prêter une grande attentionaux activités de la Chine qui se sontintensifiées en mer et dans les airsautour du Japon, précise le ministère

nippon de la Défense danssa présentation de budget,y compris avec des incur-

sions dans nos eaux territoriales etnotre espace aérien.»En décembre et surtout à la mi-jan-vier, avions chinois et japonaiss’étaient livrés à des poursuites aé-riennes aux abords des îlots dispu-tés. Depuis septembre et le rachatpar Tokyo de trois îles à un proprié-taire privé nippon, «l’escalade sepoursuit, note un fonctionnaire ja-ponais. La Chine essaye de changerle statu quo par une démonstration deforce.» Dans cette montée en dé-fense, Tokyo va déployer des avionsde reconnaissance Awacs. D’ici à lafin 2015, il projette aussi de créerune force spéciale de 600 hommeset 12 navires, rien que pour sur-veiller les Senkaku.Revenu en force au pouvoir avecson très conservateur Parti libéral-démocrate, le Premier ministreShinzo Abe veut renforcer son ar-mée. Au risque de fâcher ses voi-sins, il a réaffirmé jeudi son inten-tion de modifier la Constitutionpacifiste qui limite le rôle et les ac-tivités des forces d’autodéfense ja-

ponaises. Signe d’un activisme tousazimuts, les autorités nippones ontmultiplié les initiatives sur le ter-rain diplomatique ces derniersjours. Elles ont dépêché en Chinedes envoyés spéciaux pour «trouverune sortie de crise et conserver descanaux de communication», dit-onà Tokyo.Fervent nationaliste qui a fait cam-pagne à l’automne sur la protection

de la nation et des «magnifiquesmers» japonaises, Shinzo Abe s’estdit ouvert à une rencontre avec seshomologues chinois : «Il pourraitêtre nécessaire de rétablir la relation,en commençant par un sommet», aconfié Abe lors d’une interview té-lévisée, mardi.Xi Jinping, le nouveau chef del’Etat chinois a fait savoir qu’il«envisageait sérieusement» l’orga-

nisation d’une telle rencontre.Mais, à part des discussions pourrelancer des échanges économi-ques amputés par six mois de criseet des manifestations violentes àl’automne, on voit mal ce quepourraient négocier les deux nou-veaux leaders de l’Asie. Lundi, lorsd’un discours devant des cadres duPC, Xi Jinping a énoncé un point devue très ferme sur les questionsterritoriales et de sécurité. «Aucunpays étranger ne devrait nourrir l’es-poir que nous allons négocier sur lecœur de nos intérêts nationaux, adéclaré Xi, sans mentionner nom-mément la crise diplomatique avecTokyo. Ils ne devraient pas non plusnourrir l’espoir que nous allons por-ter atteinte à la souveraineté de notrepays, sa sécurité et son développe-ment.» Le lendemain, Abe ne s’estguère montré plus avenant aprèsavoir proposé la tenue d’un som-met bilatéral : «Les îles Senkakusont nos terres, et la Chine a entreprisdes actions provocatrices contre el-les. […] Il n’y a pas de place pour lanégociation sur cette question.»

«LAC DE PÉKIN». Tokyo estime quela stratégie à long terme de la Chinevise à faire reconnaître au Japonl’existence d’une dispute territo-riale. En décembre, Shinzo Abe ad’ailleurs signé une tribune passéeinaperçue dénonçant les visées dePékin et une «approche douce qui nedoit tromper personne. En faisantcroire que la présence de ces bateaux[autour des Senkaku] est normale, laChine cherche à établir sa juridictiondans les eaux entourant les îlescomme un fait accompli.» Regret-tant que la «mer de Chine méridio-nale semble en passe de devenir un“lac de Pékin”», Abe appelle le Ja-pon à «ne pas céder» face à la mon-tée des périls et à «l’expansion ma-ritime et territoriale de la Chine». Etsuggère que l’archipel élabore unestratégie de sécurité avec l’Austra-lie, l’Inde et les Etats-Unis, aveclesquels ils formeraient un «dia-mant pour préserver les biens com-muns maritimes de l’océan Indien àl’ouest du Pacifique».Ces revendications sécuritaires etcette fermeté affichée visent égale-ment la Corée du Nord, «facteurcritique de déstabilisation dans la ré-gion», selon le ministère nippon dela Défense. Le régime de KimJong-un a réussi un tir de missilelongue-portée en décembre et ditvouloir procéder à un troisième es-sai nucléaire pour manifester sa co-lère à l’encontre des dernièressanctions des Nations unies. LeJapon s’apprête à renforcer unepartie de sa défense antimissile ba-listique et envisage d’introduire denouvelles mesures contre le régimede Pyongyang. •

Par ARNAUD VAULERINEnvoyé spécial à Tokyo

ANALYSE

Tokyo

Merdu Japon

MerJaune

Mer de Chine

OcéanPacifique

CHINE

JAPON

TAIWAN

Pékin

Iles Senkaku(ou Diaoyu)

500 kmJAPON

RADARLa fusée japonaise H2A aplacé en orbite un nouveausatellite radar espion, diman­che dernier, afin de compléterla surveillance et la défensede son territoire facenotamment à la menacenord­coréenne.

L’article 9 de la Constitutionjaponaise en vigueur depuis1947 stipule que le peuplenippon «renonce pour toujoursà la guerre en tant que droitsouverain de l’Etat, ou à lamenace, ou à l’emploi de laforce comme moyen derèglement des conflitsinternationaux».

REPÈRES

340milliards de dollars (environ261 milliards d’euros), c’estle montant des échangescommerciaux entre la Chineet le Japon en 2011.

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 20138 • MONDE

Par FRANÇOIS MUSSEAU

Dix-huit ans decorruption mis au jourdans le parti de Rajoy

U n KO debout : voilàl’état actuel du Partipopulaire (PP, con-

servateurs), aux commandesdepuis décembre 2011, qui nesait pas comment contrer lespreuves de la plus grande af-faire de corruption de cesdernières décennies. Dansson édition de jeudi, le quo-tidien El País publiait des do-cuments attestant d’une tré-sorerie occulte de laformation entre 1990et 2008. A en croire ces in-formations chocs, tous lesdirigeants du PP ont reçu enmains propres des sobre suel-dos (des «salaires addition-nels») non déclarés au fisc.Ces allégations s’inscriventdans le cadre d’un énormescandale de corruption, l’af-faire Gürtel, qui a éclatéen 2009 et éclabousse desleaders conservateurs.

Le même journal indiquaitvendredi que 70% de cespots-de-vin (soit 5 millionsd’euros) provenaient d’en-treprises immobilières. Cer-tains «bienfaiteurs» ontpayé jusqu’à 400 000 eurospar an. Cette pratique auraitcommencé au début desannées 90, alors que leconservateur José María Az-nar était au pouvoir. D’aprèsles bordereaux de règlement,tous les cadres du partiauraient reçu de cet argent«noir». L’actuel chef dugouvernement, Mariano Ra-joy, aurait lui-même ainsiperçu 25 000 euros annuelsdepuis 2001.Ce dernier élude les ques-tions gênantes – il devaitcependant s’exprimer sa-medi sur le sujet- et la direc-tion du PP nie en bloc. Ainsi,Dolores de Cospedal, la nu-

méro 2 de cette formation, aannoncé des actions en jus-tice contre le quotidienEl País pour avoir publié «desdocuments inventés». Dénon-çant une «conspiration» pourfaire tomber le parti au pou-voir, elle a signalé que, danssa formation, «il n’existequ’une comptabilité, transpa-rente, unique et soumise autribunal des comptes».

L’ennui pour les conserva-teurs, c’est que la presse dedroite – comme El Mundo –corrobore les révélationsd’El País. Mais surtout quedes experts ont authentifiéles écritures figurant sur lesdocuments, comme celle del’ancien trésorier, Luis Bar-cenas, actuellement mis enexamen pour avoir détenu22 millions d’euros sur uncompte en Suisse. Conscientde la gravité de la situation,le procureur général d’Espa-gne, Eduardo Torres-Dulce,a estimé vendredi qu’«il y amatière à enquêter sur cesdocuments de trésorerieocculte».L’échiquier politique exigequasi unanimement des ex-plications au Parti populaire.«Rajoy doit préciser aux Espa-gnols s’il a touché de l’argentlégal ou illégal», a martelé lechef de l’opposition socia-liste, Pérez Rubalcaba. Lesécolo-communistes, eux,ont réclamé la mise en placed’une commission d’en-quête. Dans une Espagne enpleine récession, la crédibi-lité du parti au pouvoir est auplus bas. Emilio Botín, prési-dent de la première banquedu pays, Santander, s’attris-tait vendredi: «Ce déballagede corruption n’augure rien debon pour l’Espagne.» •

VU DE MADRID

TURQUIE Un kamikaze a faitexploser une bombe devantl’ambassade des Etats-Unisà Ankara, vendredi. L’atten-tat a tué un agent de sécuritéturc et blessé gravement unefemme. Les autorités accu-sent l’extrême gauche.

MEXIQUE Une explosion estsurvenue, jeudi, au siège dela compagnie pétrolière Pe-mex, à Mexico. Le bilans’élevait dans la soirée à32 morts et 121 blessés. Lessecouristes poursuivaientleurs recherches vendredi.

L’ Egypte a connu ven-dredi une nouvellejournée de mobilisa-

tion. Au Caire et dans plu-sieurs villes du pays, desmilliers de personnes ontdéfilé en scandant des slo-gans hostiles au présidentMohamed Morsi. Devant lepalais présidentiel où étaientréunis des révolutionnaires,des heurts ont éclaté en find’après-midi, laissant crain-dre une nouvelle nuit d’em-brasement. D’autant que, se-lon plusieurs sources, desislamistes étaient à leur touren route vers le palais. Dansla soirée, le gouvernementfaisait état d’au moins unmort, 18 blessés et de 20 ar-restations.Ces manifestations se sonttenues à l’issue d’une se-maine de violence au coursde laquelle près de 60 per-sonnes ont perdu la vie.L’anniversaire des deux ansde la révolution, le 25 jan-vier, a donné lieu à plusieurs

jours d’affrontements entredes jeunes et les forces del’ordre. Mais c’est surtout leverdict du massacre du stadede Port-Saïd(1) –21 person-nes condamnées à mort– quia occasionné les incidents lesplus sanglants. Quarantepersonnes ont été tuées dansdes clash avec la police.Les événements de la se-maine ont montré un peuplus la faiblesse de l’exécutif,contesté par la rue, maisaussi par la police et l’armée.L’heure est désormais audialogue. A l’initiative d’Al-Azhar, haute autorité de l’is-lam sunnite, plusieurs partispolitiques, des libéraux auxislamistes, se sont rassemblésafin de trouver une issue àcette interminable crise poli-tique et institutionnelle.Le Parti de la liberté et de lajustice, branche politique desFrères musulmans à laquelleappartient Morsi, a pris partà cette réunion, par l’inter-médiaire de Saad el-Katatni,

président de l’Assemblée na-tionale dissoute. Le Front dusalut national (FSN) était re-présenté par l’ancien Nobelde la paix, Mohamed el-Ba-radeï. Ce dernier avait re-fusé, un peu plus tôt dans lasemaine, la main tendue parMorsi, au motif que lesconditions pour un dialoguenational n’étaient pas réu-nies. Les différentes partiesont signé un texte commundans lequel ils dénoncent laviolence.Certains groupes révolution-naires ont rejeté ce qu’ilsconsidèrent comme unsimulacre d’union nationaleayant pour seul fin dejustifier une politique sécu-ritaire et de criminaliser lesmanifestants.De notre correspondant au Caire

MARWAN CHAHINE

(1)Le 2 février 2012, à l’issued’un match de football,74 supporteurs de l’équiped’Al­Ahly avaient été tuéspar les ultras locaux.

Egypte: ledialoguenefaitpastairelaviolenceHEURTS La mobilisation continue malgré le texte signépar les islamistes et les libéraux pour sortir de la crise.

Les troupes françaises rejointes parcelles de la Mission de soutien au Mali(Misma) doivent se préparer dans larégion de Kidal «à affronter l’ennemi»,selon Gregory Mann, spécialiste duMali à l’université Columbia (Etats-Unis) : «Sur le plan politique et mili-taire, c’est maintenant le gros mor-ceau.» Selon des sources sécuritairesmaliennes, les forces islamistes se se-

raient regroupées dans les grottes del’Adrar des Ifoghas, qui servaient déjàde sanctuaire aux preneurs d’otagesd’Al-Qaeda au Maghreb islamique etaux trafiquants de drogue ou de ciga-rettes. Des armes, du carburant, desvivres seraient entreposés dans destunnels, mis à l’abri bien avant la re-traite précipitée des islamistes de Gaoet Tombouctou. «C’est du matériel de

guerre plutôt lourd, voire supérieur à laplupart des armées ouest-africaines»,croit savoir James Bevan, directeur dela société britannique Conflict Arma-ment Research. Samedi François Hol-lande devait se rendre au Mali accom-pagné des ministres Laurent Fabius,Jean-Yves Le Drian et Pascal Canfin.(Lire également pages IV à VII du Magen cahier central et sur Libération.fr)

A RETOUR SUR LA PRISE DE KIDAL PAR LES FORCES FRANÇAISES ET AFRICAINES

Les islamistes maliens prêts à résister

Pas d’air frais, pasde pétards. C’est en toutcas ce que souhaiteraientles autorités chinoises.A l’approche du Nouvel Anet de ses traditionnellesfêtes, Pékin a demandéaux habitants de limiter lestirs de feux d’artifice «afind’améliorer la qualité del’air et de créer un environ­nement favorable». Cha­que année, les Pékinois,comme l’ensemble de lapopulation chinoise, utili­sent pétards et fuséespour éliminer les mauvaisesprits et célébrer le nou­vel an. Ces tirs effectuésdurant plusieurs joursalourdissent de milliardsde particules le ciel, déjàtrès fortement pollué parles usines à charbon et lesvoitures. En janvier, la capi­tale a déjà connu plusieurspics de pollution atmos­phérique. Leur densité iné­dite a engendré dans leshôpitaux un afflux impor­tant de patients en insuffi­sance respiratoire. Ceconstat a poussé les auto­rités à réduire le nombrede lieux de vente de maté­riel pyrotechnique, et àmettre en garde les habi­tants. Reste à espérer queles mauvais esprits crain­dront autant la pollutionatmosphérique que lesdétonationspyrotechniques.

POLLUTIONOU PÉTARDS,PÉKIN DOITCHOISIR

L’HISTOIRE

420000C’est le nombre de Syriens de la région de Homs(ouest), qui ont besoin d’un aide humanitaireimmédiate, selon l’ONU. Il s’agit pour moitié d’enfants.

«Si la démocratiegrecque ne réagitpas efficacementmaintenant, ce serabeaucoup plusdifficile plus tard.»Nils Muizniekscommissaire aux droitsde l’homme du Conseil del’Europe, en référence auxactes xénophobes imputésau parti Aube Dorée

Des manifestants devant le palais présidentiel au Caire, vendredi. PHOTO KHALED DESOUKI. AFP

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 MONDEXPRESSO • 9

AgricultureetlittératuresontlesdeuxmamellesdeLeMaireL’ex-ministre, dans «Jours de pouvoir», revient sur ses années dans l’orbitede Sarkozy. Monologues, bruits de coulisse… la politique, c’est tout un roman.

C e vendredi 8 mars 2011, lechef de l’Etat vole vers leMorbihan. Dans le Fal-con 7X, avion d’affaires

haut de gamme de la maison Das-sault, il a invité le maire de Nancy,André Rossinot, et deux deses ministres, Philippe Ri-chert et Bruno Le Maire. Ni-colas Sarkozy sait-il qu’un écrivainest du voyage? Deux ans après, unlivre paraît. Et nous voilà, lecteurs,dans le Falcon présidentiel.Devant son bol de fromage blanc etune assiette de chouquettes, voiciSarkozy qui monologue: «Moi je metiens; modeste; petit; je laboure […]C’est une longue route la présiden-tielle. Qu’ils s’agitent tous ! Qu’ilss’agitent.» Il s’interrompt, de-

mande à son médecin une pastillepour la gorge, jette un coup d’œilsur le Figaro du jour, photo du papeà la une: «La dernière fois, on a dis-cuté dans son bureau tous les deuxune heure. […] Une heure avec lepape ! Je lui ai demandé pourquoi ilcroyait. Il m’a répondu : parce que

c’est raisonnable. Il m’a ré-pondu ça. […] C’est un sujetqui me passionne. La raison

dans la foi – le pari pascalien ensomme.» Il jette un regard sur Ros-sinot: «C’est essentiel, non, André,la vie, la mort ? – Oui.» Un petittemps. André Rossinot continue :«Tu sais qu’à Paimpol il y a un trèsbon maire radical? –Alors là, André,Je sens qu’on atterrit. On atterrit trèsvite.»Ainsi va Jours de pouvoir (Galli-mard), récit de Bruno Le Maire.

Journal d’un ministre de l’Agricul-ture, c’est aussi l’œuvre d’un écri-vain qui donne à voir le pouvoir telqu’il est : hésitant et obstiné, par-fois comique, souvent impuissant.Aussi ambitieux –prétentieux, di-sent certains qui trouveront là dequoi nourrir leurs préventions– enlittérature qu’en politique, Le Mairene veut pas être confondu avec cespoliticiens qui font des livres.Agrégé de lettres avant d’être énar-que, il est fier de ses amitiés litté-raires. En toutes circonstances, lesconseillers en charge de son agendadoivent libérer, pour l’écriture, aumoins une heure par jour.

GRIMACES. Son livre ne dit rien, oubien peu de choses, sur le choc desambitions à droite. Guère plus surle combat contre l’adversaire so-

cialiste. Et rien du tout, surtout, surle mal qu’il pense de la dernièrecampagne présidentielle et ses slo-gans maurrassiens dictés par Pa-trick Buisson.«La vérité du pouvoir est dans sonexercice», écrit Le Maire. Il raconteles mots, les gestes, les grimaces, ledécor. L’exercice n’est pas sans ris-ques. A chaque page ou presque, ily aurait de quoi nourrir des petitséchos embarrassants. Vendredi7 janvier 2011, l’Airbus présidentielest au-dessus de l’Atlantique. LePrésident parle beaucoup: du der-nier déplacement du général deGaulle, en 1970 – «Il est allé en Es-pagne voir Franco. Vous vous imagi-nez ?» Il est, note Le Maire,«comme un héritier qui se demandepourquoi son ancêtre, pourtant si glo-rieux, un jour a commis pareil er-

reur». Il parle aussi de Merkel :«Mamie, elle a du mal en ce moment.Mais il faut reconnaître, elle fait letravail.» Un mois plus tôt, il essaiede vendre le Rafale au Premier mi-nistre indien : «Nous avons lemeilleur avion du monde. Qui le con-teste ? […] Croyez-moi quand on esttrop dépendant d’un seul pays, onn’est plus indépendant.» Un moisplus tard, il en fait des tonnes faceà son homologue turc qui se désoledu blocage français sur l’adhésionà l’UE : «La Turquie est un grandpays. Un pays que j’aime. Dans lefonds, je suis un peu turc, mon grand-père est né dans la même villequ’Atatürk : Salonique.»

RÉFUGIÉS. Le Maire se verra repro-cher de trahir la confiance de ceuxqui le croyaient ministre de l’Agri-culture. Il scandalisera les gro-gnards chiraquiens qui supporte-ront mal le récit pathétique ettendre d’une visite chez l’ex-prési-dent. Le Maire parle agriculture,Chirac s’intéresse surtout à la jeuneCamille, qui l’accompagne : «Taconseillère parlementaire ? On peutdire que tu ne te mouches pas ducoude.» Le Maire prend congé. Chi-rac le rappelle: «Eh ministre! Minis-tre ! Tu as oublié ton manteau.» DeBerlin, Rio, Helsinki ou Addis-Abeba, il ramène les brefs plans sé-quences de ses joggings matinaux.Il raconte la naissance de son qua-trième fils, à Paris. Et quatre joursplus tard, dans un camp de réfugiéssomaliens, la mort de cet «enfantau visage de vieillard» qui «mâche etremâche une salive épaisse et blan-châtre».«La politique nourrit mon écriture etelle la bride. La littérature tend sonmiroir à mon action politique et elle lajuge», écrit l’élu de l’Eure. Oùcommence la politique, où finit lalittérature? Il s’avoue «incapable»de trancher. Il espère juste ne pasdevoir choisir. A l’entendre, ce livreserait une entreprise démocratique:les Français ont «le droit de savoircomment ça se passe» et il se trouveque l’écrivain est «celui qui capte lemieux la réalité du pouvoir». De fait,le lecteur ne boude pas ce portraitsaisissant d’un Sarkozy colérique etséducteur, toujours en quête de ré-confort et d’assentiment.Le monde politique supportera-t-illongtemps ce mélange inédit desgenres ? Pas sûr. Le Maire lui-même y mettra peut-être fin, luiqui ne met pas de limite à son am-bition politique. Un verre de Bour-gogne à la main, son ami Domini-que de Villepin lui recommande dese «blinder»: «Vous devez apprendrele masque. Le masque, en politique,c’est ce qui compte. Plus on vousfrappe, plus vous souriez.» Le con-seil pourrait être utile. •

ParALAIN AUFFRAY

RÉCIT

Bruno Le Maire (de profil), lors de la visite d’une exploitation viticole, à Vouvray (Indre­et­Loire), avec Sarkozy, en avril. PHOTO LAURENT TROUDE

Bruno Le Maire a aussi publiéle Ministre (Grasset, 2004),Des hommes d’Etat (Grasset,2008), Sans mémoire, le présentse vide (Gallimard, 2010), Nourrirla planète, avec Véronique Auger,(Le Cherche midi, 2011), Musiqueabsolue. Une répétition avecCarlos Kleiber (Gallimard, 2012).

REPÈRES «Il est possible que jem’abstienne […]Pourquoi? Parce que jesuis favorable à l’égalitédes droits.»Bruno Le Maire à propos du textesur le mariage pour tous, mercredi

15 avril 1969 naissance à Neuilly.1998 sort de l’ENA. 2006 direc­teur de cabinet du Premier minis­tre Dominique de Villepin.2007 député UMP de l’Eure(réélu en 2012). 2008 secrétaired’Etat aux Affaires européennes.2009 ministre de l’Agriculture(reconduit en 2010).

UNE DÉMISSIONREVENDIQUÉEIssu du corps diplomatique, BrunoLe Maire a démissionné le1er octobre du ministère desAffaires étrangères. «Me voici unhomme politique libre!» avait écritle député de l’Eure sur Twitter.

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 201310 • FRANCE

«NKM, ça vient desortir, ça ressemblebeaucoup à uneopérationmarketing.»Jean­François Legaretprésident du groupe UMPau Conseil de Paris et mairedu Ierarrondissement,à propos de la possiblecandidature de l’ancienneministre UMP NathalieKosciusko­Morizet à lamairie de Paris

78%des ouvriers se disentopposés au droit de votedes étrangers aux élec­tions locales, tandis que57% des cadres supérieursy seraient favorables, selonun sondage BVA pouri­Télé, réalisé les 31 janvieret 1er février auprès d’unéchantillon représentatifde 1079 Français.

U n geste d’apaisementen euros sonnantset trébuchants. Con-

fronté à la crispation dumonde enseignant sur fondde réforme à la hussarde dela semaine de quatre jours–un projet plébiscité par lesFrançais –, le ministre del’Education, Vincent Peillon,s’apprêterait, selon les Echos,à débloquer une indemnitéannuelle de 400 euros pourchacun des 300000 profes-seurs des écoles (soit120 millions d’euros). Rue deGrenelle, où les syndicats se-ront reçus lundi, le ministèrea juste indiqué que depuisplusieurs mois «des discus-sions avaient lieu avec les syn-dicats sur tous les sujets», leministre précisant que l’idée«d’avoir une attention parti-culière pour les professeurs desécoles […] est dans l’air depuislongtemps».Cette prime reprendrait lemodèle de l’indemnité desuivi et d’orientation des

élèves (Isoe), que perçoiventaujourd’hui les professeursdu secondaire. Et elle vise-rait à harmoniser les rému-nérations du primaire et dusecondaire. Son annonce,dont Peillon réserve la pri-meur aux syndicats, pourraitintervenir d’ici une quin-zaine de jours. Après le con-grès de la FSU, principale or-ganisation syndicale del’éducation.Par communiqué, la secré-taire générale de l’UMP, Mi-chèle Tabarot, a dénoncé une«mesure d’affichage visant àacheter la paix sociale». Tan-dis qu’après la journée demobilisation des fonction-naires – et donc des ensei-gnants–, jeudi, sur la ques-tion du pouvoir d’achat, leSNUipp-FSU, principal syn-dicat du primaire, avait ap-pelé vendredi à une grèvenationale le mardi 12 février.Il réclamé un report de la ré-forme des rythmes scolairesà la rentrée 2014, «pour une

vraie réforme réussie», et de-mande que le décret d’amé-nagement du temps scolaire,paru le 26 janvier au Journalofficiel, soit revu. D’autressyndicats minoritaires ap-pellent également à la grèvele 12 février, en demandantl’abandon du projet de loisur l’école.Lors d’un déplacement, ven-dredi, avec Vincent Peillondans une école d’Evry (Es-sonne), qui fait partie des ra-res communes à avoir décidéd’appliquer le retour à la se-maine de 4,5 jours dès larentrée 2013, le Premier mi-nistre s’est dit «convaincu»qu’il est possible de «réussir»la réorganisation des ryth-mes scolaires à conditiond’apporter «des réponses»aux questions «concrètes».Sans s’avancer plus avant,Ayrault a assuré que «tout lemonde a bien compris l’enjeu:la réussite de l’enfant.»

JONATHAN BOUCHET-PETERSEN (avec AFP)

VersuneprimeenprimairepourlesprofsÉDUCATION L’indemnité s’élèverait à 400 euros par an,alors que le SNUipp-FSU appelle à la grève le 12 février.

Vice­président du Frontnational et candidat mal­heureux à la succession deJean­Marie Le Pen à la têtedu FN, Bruno Gollnisch serevendique gaulois etn’hésite donc pas à selivrer à des gauloiseries pasforcément du meilleurgoût. Dans un geste qu’il alui­même qualifié de «rabe­laisien», le député euro­péen n’a ainsi pas hésité àmontrer ses fesses, jeudi,lors d’une séance du con­seil régional de Rhônes­Al­pes. Une exhibition de son«séant», destinée à protes­ter contre l’octroi de sub­ventions par l’institutionrégionale à un site permet­tant de télécharger deschansons jugées «porno­graphiques» par une autreélue régionale frontiste,Liliane Boury.

LE STRIP­TEASE«RABELAISIEN»DE GOLLNISCH

L’HISTOIRE

Jean­Marc Ayrault et Vincent Peillon à Evry vendredi. PHOTO THOMAS. SAMSON. AFP

Par CHARLOTTE ROTMAN

Hors sujet, la GPAélectrise la droite

«Ç a tourne en rond»,glisse Claude Barto-lone, le président del’Assemblée natio-

nale, en sortant de l’hémi-cycle. «On est lassés», con-firme un député PS. Hier, ladroite a remis en marche sagrande lessiveuse. En moderecyclage. A quelques excep-tions près, dont le très in-ventif UMP Hervé Mariton,jamais à court d’un conceptnouveau –comme hier celuid’«asile conjugal» –, de trèsnombreux députés de droiteont concentré leur interven-tion sur la gestation pourautrui (GPA).

Hors sujet alors que le texteen débat porte sur le ma-riage? Peu leur importe. De-puis la découverte d’une cir-culaire de la garde desSceaux demandant la déli-vrance de papiers d’identitéfrançais à des enfants fran-çais, même s’ils sont nés parGPA à l’étranger, l’UMP n’enfinit pas de ronger cet os. Lesmêmes arguments sont réu-tilisés d’une intervention àl’autre. Philippe Gosselinressort son équation fétiche:«Mariage + adoption = PMAet GPA». L’expression «che-val de Troie» revient aussiplusieurs fois, tout commel’accusation de «marchandi-sation du corps». ChristianJacob, chef de file des dépu-tés UMP, fait, lui, lectured’une lettre que FrançoisHollande lui a adressée, pourexpliquer que la circulairen’était pas «une reconnais-

sance de la GPA», à laquellele président de la Républiqueest opposé. La FN MarionMaréchal-Le Pen emboîteelle aussi le pas sur les mèresporteuses, applaudie par desdéputés de l’opposition.

Interruptions de séance à ré-pétition, rappels au règle-ment en veux-tu en voilà,courroux opportuns… tout ypasse. Gérald Darmanin,l’un des benjamins UMP del’hémicycle, a le mérite del’honnêteté: «L’art de la gué-rilla parlementaire, nous lepratiquerons dans l’intérêt dupeuple.» En face, une cer-taine lassitude. «J’aimeraisqu’on parle du texte, se désolel’ancienne garde des SceauxElisabeth Guigou. L’opposi-tion ne fait que déplacer le dé-bat.» Christiane Taubiraparle, elle, «d’efforts de déri-vation», tandis que BrunoLe Roux, patron du groupePS, accuse la droite d’«atti-ser les peurs» : «Je regretteque tout soit utilisé pour qu’ondiscute de tout… sauf du con-tenu du texte.»

Pour Bernard Roman, députéPS du Nord, le disque rayé dela droite –dont le spectre dela GPA– montre que celle-cia «perdu la bataille politique».En séance, il tonne, dans uneffort (vain) pour recentrerle débat : «Au nom de quoivous vous opposez à l’égalitédes droits entre les couples ho-mosexuels et les couples hété-rosexuels? Parlez-nous de ça,c’est ça le sujet.» •

VU DE L’ASSEMBLÉE

275 000 nouveaux auditeurs* !Merci d’être près de 4 millions* à nous écouter

francebleu.fr

* Source Médiamétrie enquête 126 000, nov-déc 2012 / 2011, ensemble des 13 ans et plus, lundi/vendredi, 5 h-24 h.

vu d’ici

A lire notre récit des débats à l’Assemblée, vendredimatin, et notre enquête «Les députés d’outre­merboudent le mariage pour tous». A retrouver «Grandmesse réac contre le mariage pour tous», un reportageen BD de Riad Sattouf. A découvrir notre quiz sur lesamendements les plus loufoques.

• SUR LIBÉRATION.FR

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 FRANCEXPRESSO • 11

Autribunalcorrectionnel, lesintégristescathosrécitentleurbréviaireJugés pour avoir perturbé une pièce de Castellucci, les prévenus ont dénoncé un «blasphème».

I ls sont étudiants, con-ducteur de travaux,magasinier, maquilleurou cadre supérieur.

Et tous catholiques intégris-tes. Vendredi à Paris, ilsétaient jugés pour avoir per-turbé le déroulement d’unepièce qu’ils jugeaient «blas-phématoire».Le 22 octobre 2011 et les jourssuivants, ils avaient inter-

rompu la repré-sentation de lapièce de Romeo

Castellucci Sur le concept duvisage du fils de Dieu, authéâtre du Rond-Point, à Pa-ris. Ils avaient jeté des œufs,balancé des boules puantes,fait jouer leurs sifflets à rou-lettes. Ils étaient montés surscène, obligeant les respon-sables du théâtre à stopper lareprésentation. Ils avaientbalancé des insultes comme«merde à la République, non àla christianophobie», «laFrance, c’est nous»… Durantla même semaine, des cen-taines de manifestants por-tant crucifix, chapelets etbannières du Sacré-Cœurs’étaient rassemblés devantle théâtre à l’appel de mou-vements tels que Civitas, leRenouveau français et ausside Frigide Barjot et ses rosesblanches. Les mêmes qui semobilisent aujourd’hui con-tre le projet de loi sur le ma-riage pour tous.

SUPPORTEURS. Mais oncompte également parmi lesprévenus des supporteurs ul-tras du Paris-Saint Germain.Un d’entre eux a déjà étécondamné en 2011 pour avoirdéployé cette fameuse ban-derole «pédophiles, chô-meurs, consanguins : bienve-nue chez les Cht’is», lors d’unmatch contre Lens en 2008au Stade de France (Seine-Saint-Denis).Des 34 personnes renvoyées,seulement 18 sont présentesvendredi à l’audience devant

la vingt-quatrième chambredu tribunal correctionnel deParis. Ils ont entre 25 et35 ans. Prévenus «d’entravede manière concertée à la li-berté d’expression, par voiesde fait, destruction ou dégra-dation et violences». Ils sesuccèdent à la barre en cra-vate et veste, le cheveu maî-trisé. Beaucoup fréquententSaint-Nicolas-du-Chardon-net, principal lieu de culteparisien des catholiques tra-

ditionalistes. Ils connaissentl’Ave Maria sur le bout desdoigts, le Je croisen Dieu dans tou-tes les versions, ycompris latine.Le travail de laprésidente, Chris-tine Servella-Huertas, consis-tera à établir si ces intégristesavaient prévu leur coup ets’étaient organisés pour ve-nir perturber les représenta-

tions. C’est d’abord surl’achat groupé des billets

qu’elle essaie de les confon-dre, puisque le plan montraitqu’ils s’étaient retrouvés surla même rangée au théâtre

du Rond-Point. Mais ellen’obtient que peu de certitu-des de ce côté-là. Ils disentqu’ils se sont procuré lesbillets «à la sauvette», qu’onleur a proposé de les leurdonner, qu’ils les ont achetésau «guichet du théâtre».Tous s’insurgent contre le«blasphème» fait à leur reli-gion. «J’ai vu le vieil homme,comme si c’était Dieu le Père,et un plus jeune, qui lui torcheles fesses [il s’agit de Jésus,

ndlr]. Un catholique ne peutaccepter de telles matières [desexcréments, ndlr] sur ce quereprésente le Christ», dit undes prévenus. Un autreajoute : «C’était peu ragoû-tant, cela m’a rappelé monpère qui était atteint d’un can-cer, dans ses derniers instants.J’ai trouvé cela déviant […]. Jeme demandais si ce que jevoyais était possible. Je cher-chais désespérément l’artisti-que. Le mec, il chie du début àla fin. C’est assez traumatisantcomme spectacle.» Un troi-sième raconte : «Le vieillardétait fesses nues devant le vi-sage du Christ. Mon seuil detolérance était dépassé.»

«PETIT TOPO». Alors, ils sesont levés à l’appel du sifflet,sont montés sur scène. L’una crié : «C’est de la merde,vous devriez avoir honte.» Unautre a renchéri: «La catho-phobie, ça suffit. Sales gau-chos, bobos. A bas la Républi-que.» Un troisième: «J’ai ditau public qu’ils étaient abrutis,car ils insultaient la religionchrétienne.» Un quatrième :«J’ai fait un petit topo un peumoral car ils ne savent pas cequ’ils font. J’ai dit que certai-nes personnes s’étaient éga-rées.» Les avocats volentsouvent à leur secours.Me Jérôme Triomphe argu-mente sur un thème rabâ-ché: «Les termes islamopho-bie et homophobie sont bienplus souvent utilisés que celuide christianophobie.»La présidente mène les débatsavec diligence. Elle s’étonnefaussement que la plupart desprévenus «voient mal, sententmal et entendent mal», à pro-pos des faits qui se sont dé-roulés. Ils encourent trois ansde prison et 45 000 eurosd’amende. L’audience, initia-lement prévue en mars 2012,avait été reportée deux foispour des raisons de procé-dure, notamment une ques-tion prioritaire de constitu-tionnalité. Elle se poursuivrale 15 février. •

Par DIDIER ARNAUD

«Le vieillard était fessesnues devant le visagedu Christ. Mon seuil detolérance était dépassé.»Un des prévenus vendredi

RÉCIT

34prévenus sont poursuivisdevant le tribunal pourentrave à la libertéd’expression. Ils n’étaientque 18 présents vendredi.

REPÈRES «Le principede la libertéd’expression nesouffre aucuneexception.»Me Alexis Gublinavocat de la Ville de Paris

QU’EN DIT LA LOI?Article 431­1 du code pénal: «Le fait d’entraver, d’unemanière concertée et à l’aide de coups, violences,voies de fait, destructions ou dégradations au sensdu présent code, l’exercice de la liberté d’expression,du travail, d’association, de réunion ou de manifestationest puni de trois ans d’emprisonnement et de45000 euros d’amende.»

En décembre 2011, tou­jours au théâtre du Rond­Point, une autre pièce,Golgota Picnic, de RodrigoGarcia, avait déclenchél’ire des cathos tradis.Ils en avaient égalementperturbé les représenta­tions à Toulouse.

A Villeneuve d’Ascq,où était jouée lapièce de Castellucci,le 29 novembre 2011.PHOTO PHILIPPEHUGUEN. AFP

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 201312 • FRANCE

VIOLENCE Un médecin venupour une consultation cettesemaine à Villetaneuse (Sei-ne-Saint-Denis) a été rouéde coups par trois personnesqui lui ont volé sa voiture etdont l’un a été condamnévendredi à deux ans de pri-son ferme.

GARDE À VUE Marc Machin,acquitté après avoir passé àtort sept ans en prison pourle meurtre d’une femme qu’iln’avait pas commis, a été in-terpellé et placé en garde àvue vendredi, soupçonnéd’être impliqué dans une af-faire de vol de portable.

SUICIDE La disparition deLudivine a connu un dé-nouement tragique ven-dredi, au troisième jour desrecherches, avec la décou-verte de l’adolescente pen-due dans un bois à quelquescentaines de mètres de lamaison de ses parents, dansle village de Pernant (Aisne).

RECONVERSION Empêtrédans son divorce, le princeKarim Aga Khan s’est offertles services d’un nouvel avo-cat en la personne de NicolasSarkozy, libéré de ses obliga-tions politiques, selon l’heb-domadaire Marianne.

«On constate unvent de panique.Il y a une grandeinquiétude desjeunes femmes,qui ne savent pasforcément quel typede pilule ellesprennent.»Carine Favier présidentedu Planning familial

30candidats se sont présen­tés à la seconde procé­dure pour succéderau défunt directeurde Sciences­Po RichardDescoings a annoncél’école, vendredi, sanscommuniquer leurs noms.La ministre de l’Enseigne­ment supérieur et de laRecherche, GenevièveFioraso, avait refusé finnovembre 2012 de validerl’élection d’Hervé Crès.

J uste avant de s’envolerpour le Mali, pour aller«dire à nos soldats tout no-

tre soutien», François Hol-lande a fait une visite de ter-rain sur le thème dulogement, vendredi à Ermontet Eaubonne dans leVal-d’Oise. Une visite au pasde course, le temps de fairequelques annonces en faveurde la construction, en com-pagnie de la ministre du Lo-gement, Cécile Duflot. Lechef de l’Etat a indiqué qu’ilvoulait notamment mettre enplace un dispositif fiscalincitant les investisseurs ins-titutionnels (sociétés d’assu-rance, banques…) à cons-truire des logements àvocation locative pour abon-der l’offre dans les villes où ily a une pénurie.Autre annonce très atten-due: le taux de TVA appliquéaux constructions de HLM vaêtre réexaminé. Le taux ac-tuel de 7% devrait passer à

10% l’an prochain. Mais lesbailleurs sociaux font valoirque cette hausse risque depeser sur leurs finances,alors qu’on leur «demande deconstruire davantage». Ils ré-clament une TVA au tauxminoré de 5%. «Des arbitra-ges seront rendus dans les se-maines qui viennent», a pré-cisé François Hollande,soulignant l’importance duBTP (activité non délocali-sable) pour l’économie :«Chaque logement construitc’est deux emplois. Si on réus-sit à faire 30000 à 40000 lo-gements de plus c’est très bonpour l’activité.»Il a cependant reconnu quel’objectif de construction de500 000 logements par an(dont 150 000 sociaux) «nesera pas atteint cette année».Mais espère y parvenir d’ici«la fin du quinquennat». Lerythme actuel est plutôt del’ordre de 350 000. La datechoisie pour cette visite de

chantier n’a rien d’anodin:elle fait écho à la présentationle jour même du rapport de laFondation Abbé-Pierre sur«L’état du mal logement enFrance». Le document décritune situation qui s’aggrave«sur tous les fronts», en rai-son notamment de la criseéconomique (lire Libérationdu 25 janvier). La veille decette publication, les respon-sables de la fondation ont étéreçus pendant près d’uneheure à l’Elysée.Dans le Val-d’Oise, Hollandea visité une zone d’aménage-ment de cinq hectares à che-val sur Ermont et Eaubonne,située au pied de la gare, fa-cilitant ainsi la mobilité deshabitants. L’opération se faitdans un cadre intercommu-nal, elle mélange habitat etactivité économique et toustypes de logements : acces-sion à la propriété, locatifprivé, locatif HLM.

TONINO SERAFINI

HollandeetDuflot,effetbœufsurlestoitsLOGEMENT Visite de chantier express, vendredi, pourannoncer des mesures en faveur de la construction

Un enseignant d’un lycéeproche d’Avesnes­sur­Helpe (Nord) est poursuivipar la justice pour extor­sion, après avoir exigé deparents qu’ils lui remettentjusqu’à 10000 euros pouréviter à leur fils d’êtreexclu. Interpellé mardi avecsa compagne, le professeura été «placé sous contrôlejudiciaire et est interditd’accès à tout établisse­ment scolaire» jusqu’à sacomparution le 27 février,a indiqué le procureurd’Avesnes­sur­Helpe,Bernard Beffy. Le père del’élève a porté plaintele 11 janvier, au lendemaind’un conseil de discipline,lors duquel son fils a étédéfinitivement mis à laporte du lycée.

UN PROF ACCUSÉDE RACKETDE PARENTS

L’HISTOIRE

La ministre et le chef de l’Etat, vendredi, à Ermont­Eaubonne. PHOTO PHILIPPE WOJAZER. AFP

«Un homme sans patience est une lampesans huile», disait feu Sa SaintetéHamsah Manarah, alias le gourou duMandarom, Gilbert Bourdin. Et la pa-tience a des vertus: ayant saisi la Coureuropéenne des droits de l’homme(CEDH) en 2007, la secte du Manda-rom a fait condamner jeudi la Franceà lui verser 3,6 millions d’euros pourdes redressements fiscaux concernant

des dons d’adeptes «aumistes». Pourla cour, la France a porté atteinte à laliberté de religion, en ne reconnais-sant pas leur caractère cultuel, et enles taxant à 60%, au lieu de lesexempter. Le Mandarom tient là sa re-vanche contre un Etat de mécréantsqui, en 2001, avait détruit la statue de33 mètres érigée sans permis par lasecte à Castellane (Alpes-de-Haute-

Provence), à l’image de son «messiecosmoplanétaire». Et qui avait jetéBourdin, «l’Avatar lumineux de syn-thèse», 17 jours en détention provi-soire en 1995, après des plaintes pourviols d’anciennes adeptes. Ces pour-suites se sont éteintes quand il a quittéson «véhicule de chair» en 1998. Sonâme navigue depuis dans les cieux. Ets’alourdit d’un joli pactole. M.H.

A RETOUR SUR DES DIFFÉRENDS FISCAUX ARBITRÉS À STRASBOURG

La vengeance du gourou du MandaromPar JEAN­MANUEL ESCARNOTet PATRICIA TOURANCHEAU

La trace de MohamedMerah se perd dansles secrets des services

A lors que l’enquête surles sept assassinatscommis par Moha-

med Merah piétine, les fa-milles des militaires tués ontréclamé au ministre de l’In-térieur la levée du secret surdes documents des servicesde renseignements intérieur(DCRI) et extérieur (DGSE)pour permettre l’identifica-tion d’autres complices. L’undes deux salafistes de la ré-gion toulousaine interpellésmardi a été relâché et lagarde à vue du second a étéprolongée jusqu’à samedi.

Un isolement très relatifSi Merah a «tué seul»,comme l’a assuré ManuelValls, ce n’est pas un jiha-diste «isolé» : «Ses contactsen France ou à l’étranger ontforgé ce processus de radicali-sation qui l’a amené à tuer.»Albert Chennouf, père d’unparachutiste tué, approuve:«C’est Merah qui appuie sur lagâchette, mais il faut chercherceux qui lui ont mis le flingueentre les mains» : «Je remerciele juge Trévidic et le ministre del’Intérieur d’adhérer à mathèse, à savoir que Merah n’estpas un loup solitaire, moi qui leclame depuis le 17 mars.»

Un futur agent double ?Son avocate, Béatrice Du-breuil, ne croit pas que Me-rah ait été «un agent double,mais la DCRI voulait le recru-ter, c’est sûr. C’est gravissimeque la surveillance de Merah sesoit arrêtée après son débrie-fing», le 14 novembre 2011, àson retour du Pakistan. Lacentrale parisienne a bel etbien demandé début 2012 au«RI» de Toulouse «de l’éva-

luer» en vue de l’infiltrerdans les réseaux islamistes.Mais les officiers régionauxl’ont jugé «trop dangereux etabsolument pas fiable».

Des indices qui circulentmal dans les agencesMe Olivier Morice, pour la fa-mille du parachutiste Moha-med Legouade, veut ensavoir plus sur les connais-sances des services sur Me-rah. Une note de la DGSE du23 mars, en partie déclassi-fiée, atteste qu’une «source»l’avait informée des inten-tions du jihadiste: «Un Fran-çais d’origine arabe entre auPakistan avec un visa de troismois. Il aurait été accueilli àson arrivée par Harakat ul-Moudjahidin [HUM, groupeterroriste islamiste, ndlr] etaurait fait part de son intentionde prendre part au Jihad et demourir en martyr. Estimonsaujourd’hui que l’individumentionné par la source pour-rait être Mohamed Merah.»Dans un courrier du 18 jan-vier aux juges, Manuel Vallsexplique que «la localisationde Mohamed Merah à Mirans-hah le 29 septembre 2011 a ef-fectivement été obtenue desservices américains», mais«postérieurement aux faits».A croire que les Américains,voire la DGSE, ont caché desindices essentiels à la DCRI.Les familles souhaitent creu-ser la révélation de l’Express,qui ne figure pas en procé-dure, sur un appel des Amé-ricains à Paris en janvier 2012pour alerter sur la présenceau Pakistan d’un Françaisayant appelé le groupe terro-riste HUM puis deux interlo-cuteurs à… Toulouse. •

DÉCRYPTAGE

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 FRANCEXPRESSO • 13

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1988

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Enquête Manuscrits, le filon d’Aristophil Page VIII

BD Le dessin de combat, un art martial et mortel Page XII

Carte Les gens du nord, perpétuels exclus du Mali Page XVII

leMagSAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013

www.liberation.fr

Tout surTombouctou

Voyage à travers les âges dans la cité malienne libéréeet où se rend le président français ce week-end.

Une «perle du désert» immortaliséepar la photographe Françoise Huguier.

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013II • LE MAG SOMMAIRE

HISTOIRE

Un MalienRetourà TombouctouVisite à travers les âgesde la cité malienne,où le président français,François Hollande,se rend ce week­end.BENOÎT TESSIER .REUTERS

ENQUÊTE

Gérard LhéritierDu chiffreavec des lettresLe patron d’Aristophil surfesur la vague des manuscrits,enchérissant et revendantà la découpe. Certainsbibliophiles s’inquiètent.DR

BOURRE­PAF

BachelorLe célibat de l’ailesur NT1Le Dr Garriberts replongedans ses archives alors queTop Chef, Star Ac et autresperles de la télé­réalité sedéchaînent cette semaine.JULIEN CAUVIN

LA SEMAINE DE L’ÉCRIVAIN

Philippe dela GenardièreLa voix intérieureL’auteur écoute les mots,ces bêtes vivantes, les sonsde Dusapin, un textede Pontalis, qui le relientà la réalité du monde.DR

JE ME SOUVIENS

Maurice Pialat«Je rêve d’un film,un type meurt…»Le 11 janvier 2003,entouré de ses procheset de sa garde – Depardieu,Huppert, Toscan – lecinéaste s’éteint à 77 ans.PIERRE GUILLAUD. AFP

BD

Olivier TexierLa gommequi dégommeDéfenseurs du croquispréparatoire et adeptes dela ligne claire s’affrontentpour le nouvel art martialdu dessin de combat.DESSIN OLIVIER TEXIER

LE CASTING DU 2 FÉVRIER 2013PAGE VIII PAGE IV PAGE XVIIIPAGE XVPAGE XIIPAGE XX

«VU DES ÉTATS­UNIS» SÉLECTIONNÉ PAR PETER KUPER

«Le jihad va durer centans.» La scène se passeau Pakistan, un hommesoumis à la torture de laCIA lance cette prophétieà ses tortionnaires, et ça sepasse dans le dernier film,époustouflant, de lacinéaste américaineKathryn Bigelow. ZeroDark Thirty raconte latraque réelle et sans pitiéd’Oussama ben Laden.Pas seulement. C’est unfilm sur la guerre totalemenée par l’Occidentcontre le terrorismeislamiste, celui qui viseles non-musulmans– en langue d’assassin, les«païens» du monde entier.En rappelant l’opérationcommando qui liquida BenLaden, le film plonge dansun abîme de perplexité,et c’est sa force: on voitclairement les limites dela lutte antiterroriste,puisque la mort du patrond’Al-Qaeda n’a pas mis un

terme aux atrocitésislamistes. Et l’on songeaussitôt aux troupesfrançaises envoyées auMali aux prises avec «ses»jihadistes. De là-bas, lesreporters livrent uneréflexion qui pourraitprêter à rire si elle n’endisait pas long sur ce quevit la population malienne.«Enfin, on va pouvoirressortir notre paquet decigarettes» revient commeun soulagement ultime etsurréaliste de musulmansépouvantés par d’autresmusulmans, et quipréfèrent parler du droitde fumer quand ils saventtous qu’ils ont échappéà des exécutions et desmutilations expéditives.L’histoire de Tombouctouest celle du Mali, de l’islamen Afrique noire, de sesluttes intestines, de satolérance. Un autremonde? Non, un autrecontinent.

Jihad africain

ÉDITO

Par BÉATRICE VALLAEYS

Artiste: Anthony Freda, inédit. «La Corée du Nord montre aux Etats­Unis sa puissance militaire».

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 CHRONIQUES LE MAG • III

VOX POPULI

Par MATHIEU LINDON

Mali, des armesde crocodiles

Au moins sur un point, notre guerre auMali ressemble à celles menées parGeorge W. Bush : on ne voit aucunmort. C’est comme si notre matériel

meurtrier ne tuait personne, qu’il s’agissaitd’armes de dissuasion individuelle. Le drapeaufrançais fait figure d’épouvantail dans le désertet les islamistes se sauvent comme desmoineaux devant l’étendard pas sanglant etlevé. Ce ne sont même plus des frappeschirurgicales mais homéopathiques. Çan’empêche que nous sommes de grandsvendeurs d’armes. Comme le tabac, çarapporte des sommes considérables à l’Etat. Ily a des inconvénients, certes, mais ce n’est pasnon plus la faute de l’Etat si des gens persistentà fumer. Ce qui a été livré aux Libyens seretrouve, dévoyé, dans des mains malintentionnées au Mali où de mauvais coucheursreprochent à l’ancienne puissance colonialed’organiser un safari anti-islamiste. Mais il nefaut pas oublier que, chez nous, les marchandsd’armes sont les hérauts de la viedémocratique, via leurs investissements dansles campagnes électorales et leursparticipations financières dans la liberté de lapresse. Sans doute ont-ils un service après-vente à la Darty : si on trouve plus sanglantailleurs, ils remboursent la différence.On vend nos armes en toute bonne consciencecar elles sont pour les peuples, pour lesopprimés, nous ne produisons que des missilesintelligents. Pas juste des armes, des armesjustes. L’emploi doit être délicat pour lesdictateurs qui se fourvoient à les acheter. Malutilisées, elles peuvent avoir un effetboomerang. Car il y a un mésusage des armes :s’en servir contre son peuple, comme Bacharal-Assad, est pire que contre un peuple voisin.En plus, il y a les bombes sales, insultes aucapitalisme. On n’a pas le droit de fabriquerses armes au noir sans payer les charges, lesvalises, les pots-de-vin. On imagine la réactiondu président syrien quand ses généraux luidisent que ce sera l’apocalypse pour lui s’ilutilise les armes chimiques. «Quoi ?», doit direAl-Assad indigné. «Ils réagissent calmementpour 60 000 morts et ils vont faire un fromagepour 30 000 ?»Si, au Moyen-Age, un vendeur ambulantproposait des armes exclusivement de défenseet qu’un type achetait cent haches, trentemassues, cinquante poignards défensifs etvingt litres de poison, on s’interrogerait peut-être sur ce client. C’est toujours pareil : leproblème n’est pas de vendre des armes,excellente initiative pour l’économie et lasécurité, mais que d’autres les achètent. C’estd’ailleurs une prouesse qu’avec des armes dedéfense notre armée ait réussi à passertellement vite à l’attaque. De toute façon, levendeur décline toute responsabilité. Lesarmes sont comme les médicaments, il y atoujours un risque d’overdose, de bad trip. Maisla notice est sans ambiguïté : ces armes sontpour la paix. Elles sont dangereuses pour lesdictateurs de moins de trois ans, contre-indiquées en cas de faiblesse islamiste et à nepas laisser à la portée des adultes. En cas defièvres trop intenses, consultez votre vendeur.Les effets indésirables sont légion. •

REGARDER VOIR

Par GÉRARD LEFORT

Le feu à la trousseL

e héros de cette photo-graphie n’est pas lepersonnage officiel quel’on y voit. Certes, les

physionomistes de la politi-que et singulièrement lesscrutateurs du Parti socialisteidentifient Jean-ChristopheCambadélis qui, depuis qu’ila pris un râteau à la tête duPS, se vit comme la mémoirevive du parti. Mais pour peuqu’on n’ait pas pris PS enpremière langue, on pourraitconfondre Cambadélis avecn’importe quel «décideur»prêt à bondir sur un plateautélé ou grimper à une tribune(en l’occurrence, celle desjournées parlementaires duPS, les 19 et 20 septembre2012). Donc sauf votre res-pect, J.-C. C., ce n’est pasvotre trombine qui nous at-

tire, mais ce qu’on est entrain de lui faire. Tout porte àcroire en effet que la per-sonne qui se penche et s’af-faire sur le visage de Camba-

délis est en train de lemaquiller. Ce que l’intéresséà l’air de subir avec une cer-taine absence, voire résigna-tion, au fond des yeux.Il est vrai que ce n’est plus dutout la mode pour les hom-mes publics de se maquiller,alors qu’à la cour des rois deFrance, le moindre marquisfrisait le sapin de Noël, inclu-

ded les guirlandes et les bou-les dans la perruque. De cepoint de vue historique,pourquoi nos hommes politi-ques contemporains, tou-

jours en quête depetite différence,ne se jettent-ilspas sur la trousseà maquillage? Onne demande pas lePérou (nom decode : le cabaret

Chez Michou), mais rien queHollande avec un soupçon derouge à lèvres (le rouge, lePS, tu penses !) et des faux-cils (et marteau, pour faireplaisir à Mélenchon), il y afort à parier que la cote depopularité du Président con-tinuerait à remonter, en toutcas dans le cœur de l’amicale«Zaza Napoli for ever».Et François Fillon, avec uneperruque Dalida (époqueGigi l’amoroso) et des créolestoutes simples aux oreilles: làaussi, on peut espérer que,bien au-delà des teintures ducheveu noir corbeau un poildiscutables, son charismes’en trouverait renforcé.Sarkozy, par contre… mêmeen sœur cachée de MireilleMathieu, on a du mal àl’imaginer. Quant à MarineLe Pen, tout indique que,question maquillage (entreautres, de l’histoire), elle n’a

rien à apprendre de per-sonne, sinon de son papa.Retour à la case départ :pourquoi les politiques sefont-ils maquiller pour«passer» à télé? D’évidencepour paraître plus jeune, plusbeau, plus désirable. Indui-sant de ce fait que le vieux,c’est moche et imbaisable, cequi est non seulement malpoli, mais faux.Du coup, on songe au pre-mier épisode de Batman,réalisé par Tim Burton, oùl’infâme Joker avait réussi àempoisonner tous les pro-duits d’hygiène de GothamCity. Résultat, des journalis-tes télé obligés de présenterles infos le cheveu gras (pourles femmes), la barbe de troisjours (pour les hommes) etles dents pleines de petitsbouts de salade (pour tout lemonde). Effet hilarant ga-ranti.D’où l’idée : quitte à se rap-procher du peuple, pourquoine pas coucher avec lui? Parexemple, en généralisantl’interview politique au sautdu lit. Tignasse en vrac, py-jama Mickey un peu limite etle reste aussi. Humain ensomme. La télé n’ayant pasencore inventé l’odorama,l’haleine de mérou faisandéne devrait pas poser de pro-blème. •

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Cambadélis,unfauxsagesurson«nuage»L’ex-rival de Harlem Désir campe, dans un PS renouvelé, le rôlede l’ancien qui agrège la mémoire socialiste. Et il ne ménage passes piques contre les «mauvais» ministres et le Front de gauche.

Par LILIAN ALEMAGNA

A peine arrivé, sa veste poséesur le portemanteau, Jean-Christophe Cambadélisplane. Son rôle au sein du PS,

près de cinq mois après s’être fait coiffersur la ligne par Harlem Désir pour suc-céder à Martine Aubry à la tête du PS?«Moi ? Je suis le cloud», plaisante-t-ilavant de s’asseoir dans le canapé de sonbureau de responsable du secteur inter-national du PS. On le fait répéter pourêtre sûr d’avoir bien entendu : «Lecloud! Le nuage!» Soit celui qui récolteet garde les données socialistes.

«SAGE RÉACTIF». Du haut de ses 61 ans,il se veut une des mémoires de ce partià la direction rajeunie et où tous lespoids lourds sont partis au gouverne-ment et ont délaissé le siège du PS, ruede Solférino. «L’aile gauche m’appelle le“sage réactif”», poursuit-il, aux anges…L’ex-lieutenant de Dominique Strauss-Kahn, se dit «heureux». Sans rancune,

Après avoir fait le choix d’ignorer le leader du Frontde gauche, les socialistes se décident à riposter.

Le PS monte au frontcontre MélenchonO n attendait une réponse de Harlem

Désir à Jean-Luc Mélenchon. Maisdevant les secrétaires de section réu-

nis samedi au palais de la Mutualité, à Paris,le chef du Parti socialiste s’est contenté d’ap-peler à «l’unité de la gauche» et à «refus[er]la théorie des deux gauches, qui joueraient cha-cune la défaite de l’autre». Après une nouvellemontée de fièvre, la semaine passée, entresocialistes et mélenchonistes, le premier se-crétaire a choisi de calmer le jeu.Reste que le cas de l’ex-camarade «Jean-Luc» et du Front de gauche pose désormaisquestion au PS. Comment répondre aux tirsde barrage communistes au Sénat, privantla gauche de majorité, et aux accusations«d’austérité» qui font douter jusque dans lesrangs des militants socialistes? Jusqu’à pré-sent, les responsables du PS avaient fait lechoix d’ignorer Mélenchon, se bornant à cri-

tiquer les communistes lorsqu’ils s’oppo-saient au Sénat tout en disant qu’ils se calme-raient à l’approche des municipales… «Maison répond à tout maintenant. On ne laisse rienpasser», explique Carlos da Silva, député del’Essonne et proche de Manuel Valls.Mercredi, Mélenchon décrit un Hollande qui«pédale» lorsque Merkel «tient le guidon». LePS répond en tirs croisés: Alain Vidalies, mi-nistre chargé des Relations avec le Parlement,se demande qui «à l’intérieur du Front de gau-che […] tient le guidon et qui pédale» entrePierre Laurent, chef du PCF, et Mélenchon.Le député de Paris Jean-Christophe Camba-

délis se fend, lui, d’une lettre ouverte à sonancien camarade chez les trotskistes-lam-bertistes: «Nous attendons un satisfecit qui nevient jamais, écrit-il. Comme hier l’extrêmegauche, tu considères l’UMP et le PS comme unbloc à combattre en bloc.»Enfin, chargé pour le PS du lien avec lesautres partis, Luc Carvounas reproche alorsà Mélenchon de mener une «échappée vers lessommets de la démagogie et du populisme». «Aforce de vouloir mettre le feu à la plaine, Mélen-chon est le pyromane de la gauche», a-t-ilpoursuivi, samedi, demandant au PCF de«clarifier» son positionnement.Pourquoi se décider à riposter? Parce que lescommunistes ont leur congrès dans deux se-maines et qu’une pression pour insister surleurs contradictions internes –alors qu’ils di-rigent nombre de collectivités locales avecle PS– permet d’engager le rapport de force

avant la constitution des listesd’union pour les municipales.Mais d’autres ne «partagent pasce côté frontal». «Jean-Luccogne. Oui, bon… sa ligne n’estpas nouvelle, tempère Christo-phe Borgel, chargé des élections

au PS. La contradiction entre le PCF et Mélen-chon va monter au moment des municipales.Comment pourra-t-il appeler au vote sanctionquand ils défendront avec nous le bilan des mu-nicipalités?» Numéro 2 du PS, Guillaume Ba-chelay plaide pour «des propositions commu-nes qui soient utiles aux salariés», comme celleconcernant la reprise de sites rentables. Dequoi donner des gages à des électeurs tentésde sanctionner le PS. Deux stratégies, unmême objectif : rester la «gauche concrète»et démontrer que c’est l’autre qui ne veut pasl’unité. Un classique à gauche.

L.A.

«Mais on répond à tout maintenant.On ne laisse rien passer.»Carlos da Silva député de l’Essonne et prochede Manuel Valls

jure-t-il, de n’avoir pas été couronnépremier secrétaire par les grands chefssocialistes. Dans ce choix par défaut dequi garde Solférino le temps que les ca-marades sont aux affaires, les hollandaishistoriques (comme Stéphane Le Foll),Vincent Peillon ou encore Manuel Vallsont préféré placer Harlem Désir. Cam-badélis et ses «coups» ? «Ils n’ont pasvoulu lui laisser l’appareil, de crainte qu’ilne le confisque», explique un cadre. Deson côté, Martine Aubry voulait surtoutune bonne place –au final numéro 2–pour son ex-plume et cheville ouvrièredu «projet» socialiste, le fabiusienGuillaume Bachelay.Déçu de ne pas obtenir ce qu’il estimaitlui être dû ? «En 1997, lorsque Jospinchoisi Hollande pour s’occuper du PS,Jean-Christophe était dansl’amertume totale», rappelleChristophe Borgel, passé,comme «Camba» par les réseaux étu-diants de l’Unef-ID avant d’entrer auPS. «Là, il n’est pas du tout dans cet étatd’esprit», assure-t-il.Pourtant, jusqu’aux fêtes de Noël, Cam-badélis ne manquait pas une occasiond’allumer ses camarades. Comme lors-qu’en décembre, dans le Figaro, au len-demain des défaites aux législatives par-tielles, il demande à ce que son parti«rectifie le tir» : «Si le PS ne fait pas depolitique, il sera zappé, s’alarmait-il. Ilmanque au PS une démarche collective.»Cambadélis s’amusait alors à dire en offaux journalistes ou à écrire sur son blogce qu’il ferait s’il était à la place de Désir.Ce dernier écrit aux parlementaires pourdéfendre le droit de vote des étrangers?«Camba» se plaît à souligner qu’il a déjàlancé sa propre pétition et qu’elle ap-proche les 100000 signatures. Et le jouroù Désir lance une grande campagne duPS en faveur du mariage et de l’adoptionpour tous, lui envoie un post de blog in-titulé«Au PS: encore un effort !» «Ledroit de vote, c’est fait. Le mariage pourtous, c’est fait, écrivait-il. Il faut mainte-nant lancer une campagne pour le renché-rissement des licenciements et la présencedes syndicats dans les conseils d’adminis-tration des entreprises.»Bon client, le député de Paris fait alorsle tour des plateaux télé et commenceà agacer sérieusement Harlem Désir. Lemardi soir, en bureau national (BN), ilintervient sur les questions internatio-nales pour glisser quelques «petites pi-ques», comme le dit le chef des séna-teurs PS, François Rebsamen. «Lui etBachelay étaient toujours dans la différen-ciation, rapporte Emmanuel Maurel, undes chefs de file de l’aile gauche. Ils des-sinaient ce que pourrait être une autregestion du PS.» La presse commence àl’appeler «le premier secrétaire bis»…

«INCONTESTABLE». Mais, depuis larentrée, tout en restant aux avant-pos-tes médiatiques, Cambadélis lève le piedcontre son premier secrétaire. «La rela-tion s’est dégelée», observe Luc Carvou-nas, proche de Valls et très présent dans

l’entourage de Désir. L’ex-lieutenant deDSK fait mine de laisser penser que lestensions ne les concernent pas : «Laguerre n’a pas lieu, dit-il. C’était surtoutdes querelles d’entourage. Maintenant, jesuis libre. Je fais des choses que Harlem nepeut pas faire.» Comme critiquer le mi-nistre de l’Education, Vincent Peillon,qui «n’a pas toujours le doigté néces-saire» dans les discussions avec les syn-dicats d’enseignants, a-t-il lancé la se-maine dernière. Ou bien comme écrirepubliquement à son ancien camaradesocialiste et militant de la même cha-pelle trotskiste, Jean-Luc Mélenchon(lire ci-contre).«Il est rentré dans le rang, se réjouit-ondans l’entourage de Désir. Jean-Christo-phe prétendait avoir toujours un coup

d’avance. Mais là, sur Mélen-chon, il a plutôt un temps de re-tard.» A l’étage du premier

secrétaire, on estime surtout que «leslogiques institutionnelles du parti ont re-pris le dessus». Soutien sur le Mali, dé-placement la semaine dernière au Cairepour le Forum arabe social-démocrate,préparation avec Désir des électionseuropéennes de 2014 et d’un voyage àBerlin mi-février… «Jean-Christophes’est trouvé un truc dans lequel il est bon,incontestable et incontesté, appuie SarahProust, jeune membre de la directionentrée en politique sous l’aile de Cam-badélis. Il n’a aucune plus-value d’allerfaire le poil à gratter au BN.» «Il a aussisenti que personne ne le suivrait sur le che-min d’une expression solitaire», poursuitun député.

COURANT. Car si Cambadélis a un pointcommun avec Désir, c’est le manqued’entourage consistant. Il n’a jamais étéchef de courant. S’il a été l’artisan, avecClaude Bartolone, des «reconstruc-teurs» pour pousser la candidatureAubry au congrès de Reims en 2008, iln’a pas réussi à en tirer un vrai courant.«Fabius a son réseau. Le reste est autourde Martine», explique un membre de ladirection. Et depuis l’épisode du Sofitel,la strauss-kahnie a explosé. «Jean-Christophe fait aussi beaucoup de chosesseul, pointe cet élu. Vous ne pouvez pasagréger avec une logique aussi critique.»Cambadélis serait-il alors voué à resterdans son bureau du secteur internatio-nal du PS durant tout le quinquennat?«Je pense qu’il veut un ministère. Claire-ment», dit-on chez Désir. «Il a deuxperspectives, analyse Borgel. Soit il entredans un prochain gouvernement, soit il vavers la présidence du Parti socialiste euro-péen.» Après le départ d’Aubry, Cam-badélis a reçu, en lot de consolation, lavice-présidence du PSE. Son chef, lebulgare Sergueï Stanichev, pourrait luilaisser la place après des législatives cetété dans son pays. Ministre ou figure dela social-démocratie européenne ?Cambadélis n’en espérait pas tant sousHollande. Sur son canapé, toujoursaussi souriant, l’ancien lambertiste a cequ’il voulait : «Je suis considéré.» •

ENQUÊTE

Jean­ChrisopheCambadélis lorsdes journéesparlementairesdu PS,le 19 septembre.PHOTO MARCCHAUMEIL.

w 14 août 1951 Naissance à Neuilly­sur­Seine (Hauts­de­Seine).w 1971 Adhère à l’OCI, organisationtrotskiste­lambertiste, sous le pseudode «Kostas».w 1980 à 1984 Président de l’Unef­ID,syndicat étudiant dans la mouvancede la gauche non communiste.w 1986 Adhère au Parti socialiste.

w 1988 à 1993, et depuis 1997 DéputéPS de Paris.w 2008 Nommé, après le congrèsde Reims, secrétaire national du PSà l’Europe et à l’international.w Eté 2012 Candidat pour prendrela tête du Parti socialiste.w Octobre 2012 Vice­présidentdu Parti socialiste européen (PSE).

REPÈRES «Nous attendons unsatisfecit qui ne vient jamais,comme si tu étanchais ta soifd’absolu à l’eau salée de tonamertume.»Lettre ouverte de Cambadélisà Jean­Luc Mélenchon, le 25 janvier

«Notre parti doit être encampagne permanente pourle changement. Nous devonsexpliquer la cohérencede ce qui est fait.»Harlem Désir premier secrétairedu Parti socialiste, samedi

«Nous sommes les ayants droitde la victoire, Hollande n’aurait pasgagné sans nous. […] Nous nousproposons comme la force de relèveface à un PS […] dont le seul projetest de réduire la dépense publique.»Jean­Luc Mélenchon le 24 janvier

LIBÉRATION LUNDI 28 JANVIER 2013 LIBÉRATION LUNDI 28 JANVIER 201312 • FRANCE FRANCE • 13

Et Fillon, avec une perruqueDalida, époque Gigil’amoroso, et des créolestoutes simples aux oreilles…

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Libération du lundi 28 janvier.

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013IV • LE MAG HISTOIRE

C’est où Tombouctou ? Laquestion s’est posée souspression de l’actualité. Enaméricain, on dit «fromhere to Timbuktu» pour par-ler d’un endroit inaccessi-ble. Tombouctou commePétaouchnok ? Un lieu

mental, aussi loin que l’imaginaire peut porter? C’estun nom à divaguer, comme Zanzibar ou Valparaiso,qui fait écho à la mythologie des villes englouties, Ys,Ur, ou, le désert aidant, Iram, l’Atlantis des sables.Il n’est pas nécessaire d’aller à Tombouctou pour laconnaître. Il serait indécent de prétendre la connaîtreparce qu’on y est allé. Tombouctou est un mystère,comme les Grecs l’entendaient: secrète et initiatique.Venir au rendez-vous de Tombouctou, c’est tremblerqu’au premier contact la rencontre soit aussi déce-vante qu’une petite annonce sentimentale. Elle sepromettait belle et jeune, elle est vieille et abîmée.

Tombouctou n’a pas attendu son occupation par descinglés d’Allah pour se dégrader. Avant la SecondeGuerre mondiale, du temps du Soudan inventé par lesFrançais, elle voit passer dans ses palmeraies girafeset hippopotames. Il y avait donc de l’eau, beaucoupd’eau.Aujourd’hui, les puits plongent à des dizaines de mè-tres de profondeur. La faute à la nature et aux hom-mes: sécheresses à répétition, troupeaux pléthoriquesde chèvres et de chameaux, exploitation du moindrebrin d’herbe. Et le désert qui avance, comme dans laChanson d’Azima, le tube de Michel Berger, qui tournale clip à Tombouctou. Au gré de ses crues et décrues,le fleuve Niger a reculé d’une dizaine de kilomètreset le port de Tombouctou est l’un des moult fantômesde la ville.Se rendre à Tombouctou, c’est s’y abandonner, sur-tout la nuit, quand au détour d’une pleine lune, sedessine, splendeur en pisé, la silhouette de la mosquéede Sankoré. C’est aussi profiter de l’obscurité pour seconfondre avec ses habitants qui pratiquent, depuisle XIVe siècle, l’art explosif des frontières emmêlées

Après dix moisd’occupation par lesjihadistes, la ville a étélibérée lundi. Invitationau voyage dans une cité

secrète etinitiatique,conquisepuisdélaissée.

Bamako

MALI

Tombouctou

500 km500 km

BURKINABURKINAFASOFASOGUINÉEGUINÉE

NIGERNIGER

MAURITANIE

BURKINAFASOGUINÉE

NIGER

Par GÉRARD LEFORT

Tombouctou de bout

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 HISTOIRE LE MAG • V

A gauche, l’entrée dessoldats françaisdans Tombouctou, lundi.A droite, des cartes postalesdatant de l’époquecoloniale.Ci­dessous,des capturesd’écran d’une vidéo datéedu 1er juillet 2012, où l’on voitdes islamistes détruire lemausolée d’un saint.PHOTOS ARNAUD ROINE.ECPAD. AP.AFP. COLLECTIONS DUPONDT.AKG­IMAGES

(début du sud et fin du nord), des contacts polythéis-tes (islam, animisme, christianisme) et du parler po-lyglotte (bambara, français, tamasheq). La ville futmarocaine (entre les XVIe et XVIIe siècles), cela se voità la facture des portes. Elle fut arabe et érudite, celase lit aux milliers de manuscrits (astronomie, mathé-matiques, philosophie), entassés dans des bibliothè-ques et qui sidèrent René Caillé, explorateur françaisinfiltré à Tombouctou en 1828. La ville fut une com-mune de l’administration française jusqu’à l’indépen-dance, en 1960, cela se découvre à quelques vestigescoloniaux (marché couvert, poste…)Poussière d’empires (du Ghana, du Songhaï, de laFrance), charnière de tous les trafics africains du passé(sel et esclavage), Tombouctou survit mais revit quandTouaregs, Bozos, Songhais se confondent en une seulecouleur : celle de l’hospitalité et de l’humour. Onsonge à Baudelaire quand il rêve de métropole: «Four-millante cité, cité pleine de rêves, /Où le spectre en pleinjour raccroche le passant!/Les mystères partout coulentcomme des sèves / Dans les canaux étroits du colossepuissant.» •

en bout

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013VI • LE MAG HISTOIRE

TOMBOUCTOU DE BOUT EN BOUT

Ci­contre, degauche à droite:un pêcheur bozosur le fleuveNiger,en février 1989,extrait du livreSur les traces del’Afrique fantôme.de laphotographeFrançoiseHuguier; lamosquée deSankoré, en 1988.Enfant devantla maison del’explorateurfrançais RenéCaillé, premierOccidental àdécouvrirTombouctouen 1828.PHOTOS FRANÇOISEHUGUIER. AGENCE VU

Ci­contreet au centre:en 1994, surle tournagede Waati(«le Temps»),du réalisateurmalienSouleymaneCissé.A droite: en 1988,à Tombouctou.PHOTOS FRANÇOISEHUGUIER. AGENCE VU

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 HISTOIRE LE MAG • VII

Françoise Huguierévoque sa rencontreavec la ville:

«Entrel’arabe etl’africain»

D epuis plus de vingt ans,la photographe FrançoiseHuguier a fait du Mali

son second pays natal. Saconnaissance du pays s’est for-gée à l’africaine, comme on pa-labre: un mélange de légendes,de rumeurs plus ou moins lou-foques, de vraies infos et d’hu-mour, toujours. En 1988, ellevisite Tombouctou pour la pre-mière fois.«Quand on vient de Bamako, ondit “monter à Tombouctou”.C’est plus qu’une montée, c’estune ascension. D’abord, la cha-leur qui oblige à voyager de nuit.Ensuite, l’absence de routes: dusable, de vagues pistes. J’avaisrencontré un conducteur qui, dutemps de la colonie française,avait été le chauffeur d’un capi-taine. Avec lui, ce fut simple :plein pot, tout droit! Sur place,je rencontre des membres d’uneONG qui tentent de sédentariserles Touaregs en leur apprenant laculture du sorgho. Transformerun homme des pistes en hommedes champs: échec total.«Ce que je vois tout de suite,c’est l’architecture: pas seule-ment les mosquées en pisé, lesplus belles d’Afrique, mais lesmaisons, dans un style qui mé-lange l’arabe et l’africain. Lesintérieurs sont organisés àl’arabe autour d’un patio. Le solest fait de plaques de sel recou-vertes d’une fine couche de sa-ble qu’on renouvelle tous lesjours. Je découvre égalementque la population est aussi mé-langée que cette architecture :les Bozos, pêcheurs du fleuveNiger –Tombouctou fut aussi unport –, les Touaregs voyageurset les Arabes –on dit “les Maro-cains” – qui commercent.«En 1994, je reviens à Tom-bouctou pour le tournage deWaati, de Souleymane Cissé,cette fois en avion militaire carla tension s’est accrue entre lesTouaregs et la population «né-gro-africaine», les secondsétant les anciens esclaves despremiers. Le tournage est sousla protection de l’armée. A l’aé-roport, une vieille griotte apos-trophe des haut gradés de l’ar-mée malienne: “Bande de porcs,vous nous prenez tout.” Personnene bouge. C’est une saynète ty-piquement malienne: le droit duplus pauvre d’engueuler les pluspuissants.»

Recueilli par G.L.

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013VIII • LE MAG ENQUÊTE

La société Aristophil est-elleen train de s’imposer dans lemonde de la culture? En toutcas, le leader de l’achat-vente des autographes estporté par une vague mon-tante. Huit ans après l’ouver-ture de son musée des lettres

et manuscrits, boulevard Saint-Germain (Pa-ris, VIIe), il vient de reprendre, pour28,5 millions d’euros, l’hôtel de la Salle, ruede l’Université (VIIe). L’immeuble abritait ladirection des douanes, si bien qu’il offre unerevanche symbolique à savourer au «prési-dent fondateur» d’Aristophil, Gérard Lhéri-tier, lequel eut quelquefois maille à partiravec l’Etat et la justice.Ses 1 700 m2 doivent accueillir des exposi-tions, abriter un club d’adhérents et un ob-servatoire du marché «du patrimoine écrit»,ouvert aux spécialistes et aux journalistes,nous a expliqué ce patron de 64 ans. Volu-bile, rond et charmant, partageant son tempsentre Paris et Nice, l’homme semble loin dela réputation sulfureuse que lui prête le mi-lieu de la bibliophilie. Ce gestionnaire de pa-trimoine s’est fait la main sur la joaillerie, lescourriers de la guerre de 1870 et la philatélie.Cette dernière affaire lui fit connaître,avoue-t-il, «la pire période de sa vie», quandil fut impliqué dans le scandale dit des tim-bres de Monaco. Qui lui valut une mise en

Par VINCENT NOCE

Aristophilgavé en lettres

d’or

Spécialisée dans l’achat et la vente de manuscrits,la société propose d’acquérir des autographes en indivision.Un marché juteux qui profite du flou juridique.

Lettre de Napoléon Ier à Joséphine,datée de l’an IV (1796). A droite,un portrait du général Bonapartepar Jacques­Louis David vers 1797.PHOTOS COLL. PRIVÉE. MUSÉE DES LETTRESET MANUSCRITS. PARIS. ADOC­PHOTOS

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 ENQUÊTE LE MAG • IX

examen pour escroquerie puis abus de con-fiance, un séjour de deux semaines à la pri-son de Grasse en 1996, avant d’obtenir unerelaxe au terme de dix années d’instructionchaotique.

Un stock de 80000 piècesAujourd’hui, ce fils de plombier lorrain, fierd’avoir reçu un prix du patron autodidacte,applique avec succès ses recettes au marchéconfidentiel de l’autographe. Il acquiert desoriginaux célèbres, tels le Manifeste du sur-réalisme ou le testament de Louis XVI, qu’il«découpe» virtuellement en plusieurs cen-taines de parts. Celles-ci sont proposées auxépargnants par un réseau de courtiers, traitépar un partenaire, auquel il reverse undixième du revenu. Pour une commissiontournant autour de 5%, l’épouse du préfetou l’assureur local placent des parts, généra-lement pour cinq ans, en faisant miroiter desplus-values d’au moins 8% par an. Quinzemille personnes en France ont ainsi confiéleurs économies à Aristophil, qui étend sesactivités au livre ancien et même au tableau.La société ne souffre pas de la crise, et même,elle en profite. Réparti entre le fondateur etses deux enfants, le capital a été porté auprintemps de 5 à 15 millions d’euros, prélevéssur les bénéfices. Ceux-ci ont presque décu-plé en quatre ans, atteignant 23 millionsen 2011. Pour un chiffre d’affaires de162 millions, dont la croissance oscille selonles années entre 28 et 67%. Sans compter le

développement de filiales en Suisse et en Bel-gique, où elle a ouvert un autre musée.Magazine, expositions, catalogues et ouvra-ges illustrés: cet ovni entend bien désormaisoccuper le champ culturel. Il étale ses fleu-rons, sur les 80 000 pièces de son stock, enun livre de promotion doré par Gallimard (1).En octobre, à l’hôtel Salomon de Rothschild(VIIIe), il a tenu ses premières «Rencontresinternationales des lettres et manuscrits»,avec une belle brochette d’invités: Jean La-couture, Richard Berry, Jean-Louis Debré,

Christophe Bourseiller, Franz-Olivier Gies-bert ou Patrick Poivre d’Arvor. Journalistes-animateurs, comédiens et musiciens «rétri-bués», précise la société, de même que lesmédias partenaires, via des achats d’espace,le site plutôt confidentiel du Quotidien del’art, mais aussi le Point, Lire ou France Cul-ture.PPDA tient une place à part, en s’affichantcomme compagnon de route de Lhéritier.Présenté comme «le parrain» de son musée,il joue le Monsieur Loyal dans les promotionsde ses produits financiers, au côté d’un pro-

fesseur de droit, Jean-Jacques Daigre, d’unexpert près la cour d’appel de Paris, ThierryBodin, et d’un dynamique libraire, Jean-Claude Vrain (2).

1,5 million pour les archivesde Romain Gary

Le 9 novembre, Lhéritier a remis au maire deNice, Christian Estrosi, un «don historique»(Nice-Matin) : le discours dactylographiéprononcé par le général de Gaulle dans laville libérée, le 9 avril 1945. Il n’était pas

moins fier d’être invitéau «dîner des mé-cènes» qu’organisechaque année la Biblio-thèque nationale deFrance (BNF). C’étaitbien le moins aprèsavoir accepté 2,5 mil-lions d’euros pour l’ac-

quisition d’un manuscrit enluminé, la Vie desainte Catherine d’Alexandrie. Et alors quel’institution sollicite aujourd’hui une nou-velle contribution (1,85 million) pour l’achatdes archives de Michel Foucault (3). Aristo-phil confie aussi à la BNF ses précieux docu-ments pour qu’elle puisse les numériser.Ainsi de ses prises à la vente chez Christie’s,le 29 octobre 2012.Comme à son accoutumée, la firme a fait cejour-là s’envoler les enchères. L’exposé desthèses de Newton par la marquise du Châteleta frôlé le million d’euros. Dans les semaines

qui suivirent, elle a encore déboursé 1 millionpour deux courriers de Napoléon ainsi que letiers d’une vente de livres à Drouot. En 2010,elle a mis 1,5 million sur la table pour con-vaincre le fils de Romain Gary, Diego, de luicéder les archives de son père, qu’il est allérechercher à l’Institut mémoires de l’éditioncontemporaine (Imec), où elles étaient dépo-sées et recensées. En 2009, Aristophil ditavoir investi 2 millions pour récupérer auprèsd’un Américain la Déclaration à tous lesFrançais de Louis XVI, à la veille de sa fuitede Versailles. En 2008, la maison fit grandbruit en dépensant 3,6 millions pour neufmanuscrits d’André Breton, dont celui duManifeste du surréalisme de 1924. Tout récem-ment, un libraire de province a eu la surprisede sa vie en entendant un représentant luiproposer d’acquérir tout son fond d’un coup.A l’inverse, quand Aristophil s’abstient d’en-chérir, comme ce fut le cas à Drouot le14 novembre dernier, c’est la catastrophe: lecommissaire-priseur attendait 1 million dela vente, c’est à peine si elle a dépassé150000 euros. Sur 65 lots, 49 lui sont restéssur les bras. Personne n’a levé la main pourle texte corrigé par Marguerite Duras del’Amant. Il se trouve que l’expert de cettevente, Frédéric Castaing, n’a jamais cachéson opposition aux méthodes d’Aristophil.«Sa marchandise ne m’intéresse pas, lâcheLhéritier, il nous a toujours mis des bâ-tons dans les roues, je ne vois paspourquoi je lui ferais un cadeau.»

Gérard Lhéritier s’est fait la main sur lajoaillerie, les courriers de la guerre de 1870et la philatélie. Cette dernière affaire lui valutune mise en examen pour escroquerie puis abusde confiance et un séjour de deux semainesà la prison de Grasse.

Une lettre deCharles de Gaulle(ici en 1958)au présidentdu Conseil PierreLaval en 1935.PHOTOS COLL.PRIVÉE. MUSÉEDES LETTRES ETMANUSCRITS. PARIS.GEORGESDUDOGNON. ADOC­PHOTOS

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013X • LE MAG ENQUÊTE

Pour autant, «il n’y a pas de marché fictif» surlequel vogueraient ses placements collectifs,s’emporte-t-il. «Nous ne faisons pas exploserles enchères, c’est une contre-vérité», pour-suit-il, assurant que plus de 80% de sesachats, en nombre, sont négociés avec desmarchands ou des particuliers. Même un li-braire qui a étroitement travaillé avec lui està demi-convaincu: «Il y a de quoi être inquiet,tout cela peut tourner vinaigre du jour au lende-main.»

«Système à la Madoff»Un petit coup de tonnerre s’est bien fait en-tendre sous les cieux belges avec l’annonced’une instruction pour escroquerie et blan-chiment. La police a débarqué le 6 novembreau siège d’Aristophil et à son musée, saisis-sant des pièces comptables et disques durs.Pour la RTBF, la firme, qui compte3 000 clients dans le pays, aurait été soup-çonnée de faire miroiter «de fabuleux bénéfi-ces» qu’elle financerait par une chaîne «denouveaux investisseurs, et ainsi de suite». La«comparaison épouvantable» avec «un sys-tème à la Madoff» a fait bondir la société, quiproclame son mécanisme de ventes «complè-tement transparent et conforme à la législation,tant française que belge», se disant victimed’une manigance. Non sans raison apparem-ment, puisque, le 10 janvier, elle annonçaitavoir obtenu la récusation du magistrat, dé-cision rarissime.Néanmoins, à Paris, le 12 décembre, l’Auto-rité des marchés financiers (AMF) affichaitune «mise en garde du public» envers «les pla-

cements atypiques proposés aux épargnantsdans des secteurs aussi divers que les lettres etmanuscrits, les œuvres d’art, les panneaux so-laires, les timbres, le vin, les diamants et autressecteurs de niche». Ce qu’on appelle «des in-termédiations sur des biens», qui ont la couleuret l’odeur des placements financiers, sans enoffrir les garanties. Et qui bénéficient d’unflou juridique qui n’a jamais été dissipé.Aristophil n’est pas spécifiquement désigné.Cependant, par deux fois, il y a une demi-douzaine d’années, l’AMF avait appelé lesconsommateurs «à la plus grande prudence»à l’égard de ses propositions alléchantes,alertant même la justice. Mais le tribunal arelaxé la société, estimant qu’«aucun motifjuridique» n’avait été «apporté» aux soup-çons à son encontre. Le parquet n’a pas faitappel. L’AMF, qui n’avait pas été invitée às’expliquer devant les juges, a dû retirer sesalertes de son site.Depuis, «nous nous sommes mis en conformitéavec ses recommandations», tient à soulignerGérard Lhéritier. Apparemment, sans apai-ser toutes les craintes. Président de laCompagnie des conseils en gestion de patri-moine indépendants, Jean-Pierre Rondeauspécifie avoir interdit à ses «adhérents detraiter avec Aristophil». «Nous avons un devoirde protection du client, mais aussi de notre pro-fession», expose-t-il. Il craint que GérardLhéritier «ne fasse miroiter des retours sur in-vestissement irréalistes» en faisant «le marchétout seul» (4).En écho, le Syndicat de la librairie ancienneappelle régulièrement ses membres à «s’abs-tenir de prêter la main à des opérations pure-ment spéculatives, qui sapent la confiance ennotre métier». «Il n’est pas dans notre rôle decritiquer telle ou telle société, mais de faire ob-server que, en aucun cas, il n’est possible de

prédire la valeur d’un bien dans cinq ans», as-sène sa présidente, Anne Lamort.Pour l’avocat de Gérard Lhéritier, Me FrancisTriboulet, tout ce qui lui est reproché, c’est«son flair» : «En vérité, il a été le premier à sepositionner sur un marché qui sommeillait, quigardera longtemps un très fort potentiel decroissance alors que l’écran d’ordinateur aremplacé la feuille de papier.» A ses yeux, lesreproches de «bulle spéculative» et de«système pyramidal» ne tiennent pas: «Ma-doff détournait l’argent de ses clients, tandisque les souscripteurs d’Aristophil sont proprié-taires d’un bien.»Le cas du manuscrit Einstein-Besso concen-tre les caractéristiques du système. Ces54 pages de formules mathématiques échan-

gées entre Albert Einstein et Michele Bessoen 1913 et 1914, quand ils cherchaient la clédes anomalies de l’orbite de Mercure, furentacquises fin 2002 pour 560 000 euros chezChristie’s, à New York. Elles avaient étépayées 400000 euros, six ans plus tôt. Déjà,la revue Nature parlait de «petite fortune».Aristophil a divisé le lot en copropriété, pourvingt fois plus cher: 12 millions d’euros, ré-partis entre près de 400 copropriétaires. Lasociété a envisagé de proposer ce même do-cument aux épargnants en 2011, en Suisse,à 24 millions d’euros cette fois, découpés enparts d’un peu plus de 4000 euros, assortiesd’une «promesse d’intérêt» de 40% en cinq

ans. Autrement dit, en 2016, ces feuilletscouverts de chiffres auraient-ils pu atteindre35 millions, 65 fois la mise initiale, un prixrecord pour un écrit.

Un hybride mi­acteur culturelmi­marchand

En l’occurrence, la mécanique a grippé.Lhéritier affirme que le second investisse-ment n’a jamais dépassé le stade du «pro-jet» : «Nous avons fait machine arrière, car laloi en Suisse ne permet pas de proposer une in-division comme en France.» Le droit helvéti-que autorise pourtant bien les indivisions àterme, même si elles sont strictement enca-drées. Il y a quelques mois encore, cesfeuillets circulaient sur le marché à Genève,

où ils ont été proposés àquelques grands hommesd’affaires, dont l’un confien’avoir «prêté aucun intérêt àcette liasse, proposée à un prixridicule». Aujourd’hui, Lhé-ritier affirme l’avoir reven-due «à un collectionneur quine veut pas communiquer».

Mais dans son fameux livre Gallimard, ilavance une autre version: il assurait l’avoircédée, pour 24 millions, «à des collection-neurs privés», si bien que, dans cette valsedes millions, on peine un peu à s’y retrouver.Qui avance ces valeurs ? Gérard Lhéritier alui-même signé l’estimation donnée à laLloyd’s pour assurance. Physicien et histo-rien des sciences, Jean-Jacques Samueli con-naît bien ce texte: «Il est incomplet. C’est untissu d’erreurs de calcul, tout est faux, mêmela masse du soleil. Il est très intéressant pour-tant, car c’est un essai majeur d’application dela théorie de la relativité générale. Mais, enfin,ce n’est pas la théorie elle-même, qu’Einstein

«Il n’est pas dans notre rôle de critiquertelle ou telle société, mais de faire observerque, en aucun cas, il n’est possible deprédire la valeur d’un bien dans cinq ans.»Anne Lamort présidente du Syndicat de la librairie ancienne

Des calculsd’Albert Einstein(ici vers 1940)pour sa théoriede la relativité.PHOTOS ADOC­PHOTOS. COLL.PRIVÉE. MUSÉE DESLETTRES ETMANUSCRITS. PARIS

ARISTOPHIL GAVÉEN LETTRES D’OR

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 BD • I

PARTOUTENEUROPEJEUNES,DÉBATTEZ-VOUS!

DEUXJOURSDEDÉBATSLES1ER ET2FÉVRIERÀGRENOBLECAHIERSPÉCIAL

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LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013

Par NICOLAS DEMORANDet PHILIPPE DOUROUX

Moteurs

Pour cette nouvelle édition duForum de Grenoble, les «étatsgénéraux du renouveau»(EGR) ont muté en «étatsgénéraux de la République».En ce début de quinquennat,alors que le nouveauprésident leur a dédié denombreux discours, et a ditvouloir en faire la priorité desa politique, les jeunes vontêtre les moteurs exclusifs denos débats. Pour une fois.Main dans la main avec larédaction de Libération, unevingtaine d’associations, defondations et de think tanks,vont dessiner pendant deuxjours les contours d’unpaysage de la jeunesse, desjeunesses, françaises eteuropéennes. Surtout ne pasparler d’eux en leur nom ! Ilsauront les micros, et ils sontbien décidés à se faireentendre, comprendre, à êtreles acteurs du débat, peut-être des combats,évidemment de leur propredestin. L’enquête Viavoicepour Libération et Animafacque nous publions en appuide ce forum donne à ce titrede précieuses indications.Comme par exemple lesentiment, pour 59% desjeunes personnes interrogées,qu’un réel conflit degénérations structuredésormais l’espace social. Pascelui des années 60 avec sonlot de révolutionsidéologiques maissimplement celui deshéritiers qui constatent queleurs parents ont dilapidé lesbiens communs. Nonseulement les aînés n’ont paslaissé d’argent mais ils ont enplus bousillé le patrimoineécologique. Alors, désespérésles enfants ? Pas du tout. Maispeu enclins aux grandesrévolutions romantiques dontils ne peuvent que constaterles échecs successifs, locaux,nationaux et mondiaux. Auxgrands idéaux, cette enquêteindique qu’ils préfèrent partirde bases connues,maîtrisables et réalistes,celles qui relèvent desrelations humaines. Ilsveulent changer leur vie pourchanger la vie. Rousseauistesen diable, les jeunes pensentque l’homme est bon, et quec’est en le rendant encoremeilleur, au quotidien, que laplanète sera comme ils ne larêvent plus mais néanmoinsun peu plus proche de cellepour laquelle ils se débattentencore. A eux de jouerdésormais : le témoin leur estpassé à Grenoble.

ÉDITORIAL

LAJEUNESSESECONJUGUEÀLAVOIEACTIVEIndignés, engagés, inventifs, responsables… En Europe et jusqu’àTunis, les 18-30 ans font face à leur avenir autant qu’à la crise.

L e sort de la jeunesse se sera-t-il améliorédurant son quinquennat ? C’est sur ceseul critère que le candidat et désormais

président Hollande a demandé aux Français dele juger au terme de son mandat. Un mantra.Mais alors que la crise les touche de plein fouetet que leur avenir, quel qu’il soit, est devanteux, quel est l’état d’esprit des jeunes aujour-d’hui, dans une société française régulièrementdécrite comme précarisée, clivée et de moinsen moins solidaire ?Un an après une première vague riche d’ensei-gnements, l’institut Viavoice a de nouveauausculté pour Libération et Animafac cette réa-lité – la jeunesse – dont le discours politiqueparle communément au singulier alors qu’onne peut la comprendre qu’en l’appréhendantau pluriel. Car si elle a bien des valeurs ou desaspirations communes et quelques inquiétudespartagées, la jeunesse n’a surtout rien d’un«ensemble homogène», rappelle François Mi-quet-Marty, directeur associé de Viavoice. Elleest même d’abord diverse et disparate.

Notre sondage (1) met ainsi en évidence quatretribus bien distinctes au sein des 18-25 ans,chacune ayant une situation et des aspirationspropres.

Les jeunes en rupture (25%), qui sont lesplus pessimistes et se sentent les moins inté-grés, sont surtout préoccupés par la nécessitéde trouver un emploi. Ils perçoivent l’Europecomme une cause de la crise économique. Lesaspirants (22%), qui sont les plus jeunes etsouvent des étudiants, ont, eux, encore unecertaine confiance dans l’avenir, tandis que lesindépendants (24%), qui sont les plus âgéset s’assument financièrement, sont les plus at-tachés à la famille et les plus indignés par les«personnes qui profitent du système». Enfin, lesintégrés (29%), qui sont les plus nombreux,

sont les plus aisés, les plus urbains et ceux queles discriminations préoccupent le plus. A l’in-verse des «indépendants», eux sont d’abordindignés par les évadés fiscaux.

«Quatre mondes» de la jeunesse,comme les décrit François Mi-quet-Marty, qui sont loin d’avoirla même confiance dans la possi-bilité d’améliorer les choses enFrance. Mais malgré tout – et lechiffre peut étonner –, les18-25 ans de notre sondage se di-

sent majoritairement «plutôt heureux» à titrepersonnel (67%). Ce qui ne les empêche pas,dans une apparente contradiction, d’affirmerqu’ils ne se sentent pas pris en compte (67%)par leurs aînés et d’être 63% à anticiper qu’ilsne vivront pas mieux que leurs parents. Unconstat qui les amène à définir les contoursd’une nouvelle forme d’engagement (lire pagessuivantes). •

(1) Etude réalisée en ligne du 18 au 23 janvier,auprès d’un échantillon de 1004 personnes,représentatif de la population âgée de 18 à 25 ansrésidant en France métropolitaine.

Par JONATHAN BOUCHET­PETERSEN

Si elle a des valeurs et des inquiétudespartagées, la jeunesse n’a rien d’un«ensemble homogène», rappelle FrançoisMiquet-Marty, de Viavoice. Elle est mêmed’abord diverse et disparate.

S2 • ÉTATS GÉNÉRAUX DE GRENOBLE

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013

Performances à Prague, Républiquetchèque (1ere et 3e photos); Graz,Autriche, (2e); Santa Cruz de la Zarza,Espagne (4e) , dans le cadre de lacampagne «Information ici etmaintenant», organisée en 2012 parl’Eryica, l’Agence européenne pourl’information et le conseil des jeunes, enpartenariat avec le Conseil de l’Europesur le droit de la jeunesse à l’information(www.informationrightnow. eu).Un concours de photos via Facebook aégalement été organisé autour du thème«Young People Are Asking». Les imagessont visibles sur www.facebook.com/informationrightnow/photos_stream.PHOTOS PAN­EUROPEAN ACTION DAY. NIDM,INJUVE, BUNDESNETZWERK OSTERREICHISCHEJUGENDINFOS, NIDM.

BONHEUR

M ais comment les 18-25 ansfont-ils pour être 67% àse déclarer «heureux» à

titre personnel ? Il y a un an, ilsétaient déjà 69% dans ce cas. Ets’ils ne sont que 8% à se déclarer«très heureux», et donc 59% à re-lativiser leur bonheur, le chiffreen reste «frappant» pour FrançoisMiquet-Marty, directeur associéde Viavoice. D’autant plus que lesFrançais, dans leur ensemble, sontl’un des peuples les plus pessimis-tes au monde, et que les jeunesn’échappent pas à cette tendance:63% d’entre eux pensent qu’ils nevivront pas mieux que leurs pa-rents. Un chiffre qui monte à 71%dans les villes moyennes et à 66%dans les communes rurales, là oùle sentiment d’exclusion est leplus fort. Plus l’autonomie desjeunes est réelle, plus ils se décla-rent heureux.Mais ce déclassement ou cette sta-gnation sociale généralisée, àforce de se l’entendre prédire de-puis leur naissance dans un con-texte persistant de croissance (aumieux) molle, les 18-25 ans sem-blent les avoir intégrés comme unétat de fait, une donnée structu-

relle de leur existence et de leurdevenir. Entre lucidité etfatalisme.Cette difficulté à trouver une placedans la société comme sur le mar-ché du travail s’illustre par unautre chiffre marquant: les jeunesde notre sondage sont 67% à con-sidérer que la société dans laquelleils vivent ne les prend pas encompte, qu’elle les laisse sur lebord du chemin. Et cette dimen-sion relativise leur rapport aubonheur.Les quatre tribus identifiées parViavoice se distribuent en effet surune «courbe du bonheur» : les«jeunes en rupture» sont seule-ment 47% à se dire heureux, les«aspirants» 56%, les «indépen-dants» 69% et les «intégrés» 90%.En creux, c’est donc aussi unenouvelle définition du bonheurqui émerge. Interrogés sur leursprincipales activités pendant leurtemps libre, les jeunes placent entête le temps passé avec leurs amis(48%), le visionnage de films oude séries (44%) et les moments enfamille (36%). Et si c’était cela lebonheur en temps de crise ?

J. B.-P.

Heureux entre luciditéet fatalisme

NSPP

Pas du toutheureux

Pas vraimentheureux

Assezheureux

Trèsheureux

HEUREUX

PASHEUREUX

LESENTIMENTDEBONHEURPERSONNELGlobalement, en ce moment, diriez-vous que vous êtes…

LESENTIMENTD'ÊTREPRISENCOMPTEActuellement, dans la société française, vous sentez-vous…

AVENIRPERSONNELPensez-vous vivre mieux que vos parents?

Villes de plus de

100 000 habitants

Communesrurales

Villes de 2000à 20 000 habitants

Villes de 20 000à 100 000 habitants

Sondage Viavoice pour «Libération» réalisée en ligne du 18 au 23 janvier 2013. Échantillon de 1 004 personnes, représentatif de la population âgée de 18 à 25 ans résidant en France métropolitaine. Représentativité par la méthode des quotas appliquée aux critères suivants : sexe, âge, statut socioprofessionnel.

Sondage dejanvier 2013

Rappelsfévrier 2012

Rappels février 2012

SOUS-TOTALDESRÉPONSES

Base : ensemble de l’échantillon

18-25 ans

Base : ensemble de l’échantillon

18-25 ans

dont :

PRISENCOMPTE

PASPRISENCOMPTE

Ne se prononce

pas

Ne se prononce

pas

dont : dont :

NON

Moins de 20 ans

En cours d’études

OUI

ÉTATS GÉNÉRAUX DE GRENOBLE • S3

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013

FONDATION COPERNICLa fondation rassemble des universitaires,des fonctionnaires, des militants et desacteurs du mouvement social, des res­ponsables politiques, pour «remettre àl’endroit ce que le libéralisme fait fonc­tionner à l’envers». Son travail a pour butl’élaboration de propositions alternativesconcrètes.

ANIMAFACCe réseau national d’associations étudian­tes vise à promouvoir l’engagement asso­ciatif et à accompagner les bénévolesdans la réalisation de leurs projets. Il met àleur disposition une large palette d’outils(formations, guides et fiches pratiques,kits de campagne) élaborés à partir del’expérience du réseau.

LES ASSOS

ENGAGEMENT

E ntre l’organisation atomiséedu travail et, plus encore,leurs difficultés à accéder à

l’emploi, les 18-25 ans auraientbien des raisons d’être égoïstes.Or, si leur engagement est d’abordindividuel et ne passe que très mi-noritairement par la voie syndi-cale ou associative (27% privilé-gient l’action politique, et 22%l’action collective), il ne faut pasle confondre avec de l’individua-lisme. Mais si, hier, l’enjeu pourla jeunesse était d’abord de chan-ger le monde ou même la vie, leurspectre et leur ambition semblentmoins absolus, plus concrets.Il existe dans la jeunesse une «as-piration à un nouvel engagement parl’éthique personnelle, par l’exem-ple», souligne Miquet-Marty, deViavoice. L’élément le plus attendupar les jeunes au sein d’une sociétéidéale est le respect entre les gens(50%), devant l’emploi (41%) et laqualité de vie (36%). «L’envie do-minante face au monde actuel con-

siste à s’occuper de ses proches oude ceux qu’on aime (45%)», précisele sondeur, qui fait de ce «soft en-gagement» une «ambition pacifi-que» exigeante dans ses finalités,mais qui ne passe plus culturelle-ment par un recours au rapport deforce. Et encore moins par la vio-lence. Ce qui indigne le plus lesjeunes interrogés, en particulierceux de la tribu des «indépen-dants», ce sont «les personnes quiprofitent du système d’aides socia-les» (40%), juste devant «la diffi-culté à trouver du travail» (37%) oula pauvreté (26%).Tandis que «la course à la rentabi-lité des grandes entreprises» (6%)ou le pouvoir de ces celles-ci (5%)sont relégués dans les profondeursde ce classement des indignations.Et entre volontarisme et opti-misme, les jeunes sont 66% à ju-ger que «si on le veut il est toujourspossible d’améliorer les choses enFrance».

J. B.-P.

S’impliquer perso,sans être individualiste NON

OUI

Agglomérationparisienne

Villes de plus de100 000 habitants

dont :

LECONFLITDEGÉNÉRATIONA votre avis, dans la France d’aujourd’hui, existe-t-il un conflit entre les générations ?

PRENDRESAVIEENMAINQuel type d'action envisageriez-vous pour améliorez votre quotidien ?*

Sondage Viavoice pour «Libération» réalisé en ligne du 18 au 23 janvier 2013. Échantillon de 1 004 personnes, représentatif de la population âgée de 18 à 25 ans résidant en France métropolitaine. Représentativité par

la méthode des quotas appliquée aux critères suivants : sexe, âge, statut socioprofessionnel.

Ne se prononce pas

Communesrurales

Villes de moins de 20 000 habitants

dont :

L'action personnelle : chacun, en montrant l'exemple dans sa vie personnelle, peut contribuer à changer les choses

L'action en tant que consommateur : boyco, sélection de produits

L'action politique : vote, parti, militantisme

L'action collective : manifestations dans la rue, mouvements sociaux, "Anonymes", "Indignés"

L'action des associations et des organisations caritatives

L'action culturelle : livres, films, musiques

L'action syndicale et les grèves

L'action sur des réseaux sociaux, des blogs ou des forums

Autres

Ne se prononce pas

Base : ensemble de l’échantillon

18-25 ans

POSSIBILITÉD'AMÉLIORERLESCHOSESDe laquelle des deux opinions suivantes vous sentez-vous le plus proche ?

Ne se prononce pas

Base : ensemble de l’échantillon

18-25 ans

* Quatre réponses possibles, total

supérieur à 100 %

* Deux réponses possibles, total

supérieur à 100 %.

LESFACTEURSD'INDIGNATIONPersonnellement, qu’est-ce qui vous indigne le plus, en France aujourd’hui ?*

SIONLEVEUTILESTTOUJOURSPOSSIBLED’AMÉLIORERVRAIMENTLESCHOSESENFRANCE DÉSORMAIS

LESCONTRAINTESSONTTELLES

QU’ILESTPRESQUEIMPOSSIBLE

D’AMÉLIORERVRAIMENTLES

CHOSESENFRANCE

Base : ensemble de l’échantillon

18-25 ans

Base : ensemble de l’échantillon

18-25 ans

Les personnes qui profitent du système d'aides sociales

La difficulté à trouver du travail

Le manque de respect entre les gens

La pauvreté, les SDF

L'insécurité des biens et des personnes

Le comportement des dirigeants politiques

L'accroissement des inégalités

Le déclin de la France

La dégradation de la situation des gens

Les salaires des grands patrons

Le terrorisme international

Les discriminations subies par certains

La société de consommation

Les Français qui quient la France pour échapper au fisc

La pollution

La destruction d'écosystèmes

La réchauffement climatique

La spéculation boursière

La course à la rentabilité des grandes entreprises

Le pouvoir des grandes entreprises

Rien / Ne se prononce pas

CONFLIT GÉNÉRATIONNEL

U n fossé générationnel. L’undes enseignements ma-jeurs de notre sondage –et

l’un des plus sombres – est que67% des jeunes interrogés par Via-voice ne se sentent pas «pris encompte». Pour eux la société fran-çaise paraît fermée et dirigée pardes générations qui leur lèguentun héritage dont ils se seraientbien passés.François Miquet-Marty évoque la«perception dominante d’un conflitde générations entre les jeunes etleurs aînés». 59% des 18-25 ansestiment ainsi être confrontésà «un conflit de générations» et cesentiment est particulièrementfort dans la tribu des «jeunes enrupture», indignés par leur diffi-culté à trouver du travail.«Mais à la différence des années 60,[ce conflit de générations] ne s’ap-parente pas à un combat d’idéaux,ou à une confrontation des modernescontre les anciens», pointe le patron

de Viavoice. Ce conflit trouved’abord sa source dans le rejet dontles jeunes générations se sententvictimes. Et de demander qu’onleur laisse leur chance et que leursaînés leur fassent un peu de place.Les 18-25 ans sont ainsi 63% à es-timer qu’ils devraient avoir da-vantage de pouvoir dans les entre-prises, 62% dans le systèmeéducatif et 56% en politique. Lesjeunes reprochent aussi aux géné-rations qui les ont précédés de leurlaisser un lourd passif écologique(72%) et économique (68%).Autre signe du fossé: la perceptionque les jeunes ont de l’Europe.Loin du «plus jamais ça» de leursaînés, ils sont ainsi 51% à la définirpar l’euro, et seulement 20%comme un continent de paix. Cequi explique peut-être que les18-25 ans ne soient que 10% à sedéfinir surtout comme des Euro-péens.

J. B.-P.

Et encore mercipour toutes les dettes

EUROPANOVACette association a été fondée par de jeu­nes actifs européens qui souhaitent accé­lérer la marche vers une puissancepublique européenne démocratique, éco­nomique et sociale, capable de résisteraux crises et au repli sur soi. Elle s’engagepour une mondialisation respectueuse desindividus, des cultures et de la planète.

C’est accompagné de seize associa­tions, think tanks et fondations queLibération élabore les états généraux.Ils partagent un souci de concourir àune démocratie vivante. Les voici pré­sentés en quelques mots. Leur profes­sion de foi est sur Libération.fr.

S4 • ÉTATS GÉNÉRAUX DE GRENOBLE

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013

J ean-François Miralles est le directeurde l’association d’éducation populaireCap Berriat.Quel est le projet de Cap Berriat?

Nous considérons qu’il faut rompre avec unsystème qui veut, soit que l’on se contented’occuper les jeunes, soit que l’on chercheà faire en sorte qu’ils s’insèrent rapidementdans la société, sans se préoccuper de savoirs’ils sont contents. Notre objectif politique etphilosophique est de les aider à s’émanciper,à devenir des adultes autonomes.Comment?Notre projet n’est pas de proposer ni d’ani-mer. Il faut préparer les 16-30 ans à prendrela relève, les rênes de la démocratie, de l’éco-nomie et de la culture. Avec le vieillissementde la population, ces jeunes vont être de plusen plus minoritaires. Or, la société ne permetpas à cette génération d’exprimer son poten-tiel.En quoi sont-ils contraints?Les jeunes sont soumis à une injonction dedécider rapidement de leur avenir. Les choix

faits entre 16 et 25-30 ans conditionnent lescinquante années suivantes. On ne leur laissepas le temps d’expérimenter, d’essayer, defaire des erreurs. L’une de nos missions à CapBerriat est de leur offrir un accompagnementleur permettant de prendre des initiatives, decréer et de participer à la trans-formation de la société dans unedémarche de solidarité, sansoublier de se faire plaisir et, indi-rectement, de prendre confianceen soi. Si un garçon ou une fillenous dit qu’il, ou elle, a envie dedévelopper un projet, on lui dit«vas-y; en revanche, c’est à toi de bosser carc’est toi qui sauras le mieux faire avancer tonidée». Nous lui proposons un environnementpour mener son projet à bien. Nous sommesun lieu d’accompagnement, de ressources,de valorisation des projets et de dynamiquescollectives. Car, et c’est notre deuxième axe,nous accueillons dans nos locaux une pépi-nière d’associations. Nous en hébergeons 120au quotidien. Nous sommes des facilitateurs.

Quel profil de jeunes accueillez-vous ?Nous pratiquons un accueil universel. Tousles jeunes peuvent avoir des projets et aucunn’est «catégorisé». Les collectivités localesnous disent cependant que le problème résidedans les quartiers populaires. C’est pourquoi

nous avons créé pour le publicjeune de quartiers un projet visantà favoriser l’émergence d’initiati-ves. Nous allons à leur rencontre,leur permettant de s’exprimersans contrainte afin de capter leursenvies, et de les accompagner.D’où Cap Berriat tire-t-elle ses

ressources?Notre budget est de 500 000 euros dont unpeu moins de 400000 euros de subventionsde l’Etat, de la région et du département, del’Union européenne. Nous avons onze sala-riés. Nous savons que nous ne pouvons plustout attendre des subventions car les financesdes collectivités locales sont en crise. Et pareffet ricochet, les subventions aux associa-tions risquent de baisser ou de disparaître.

Nous envisageons de créer des ateliers soli-daires entre associations afin de mutualiserles ressources, les dépenses et les risquesnous permettant de faire face, et de recueillirdes fonds des habitants, des entreprises oudes comités d’entreprise.Cap Berriat est l’auteur d’une forme d’inter-pellation et d’expression baptisée «Le ring dessujets qui fâchent». Quelle en est l’idée?Il s’agit de faire dialoguer des élus, des habi-tants, des jeunes sur un vrai ring sans cher-cher le consensus. Ça marche un peu commeun théâtre, quand les gens montent sur lering, ils peuvent s’exprimer librement. Maisil faut beaucoup travailler en amont pour quecela fonctionne. On doit définir des thèmes,trouver des personnes qui ne sont pas d’ac-cord entre elles, préciser les règles à l’avanceet surtout bien animer et cadencer le débat.Pour le Forum Libération, c’est la Mission jeu-nesse de la Villeneuve qui l’organise (1).

Recueilli parCATHERINE COROLLER (à Grenoble)

(1) Samedi après­midi, lire page VII.

E lle dit avec un grand sourire qu’en cemoment sa vie est une «cata» tellementelle est «précaire». Mais elle n’a pas

l’air de s’en faire plus que ça. «Si on regardebien, il y a toujours des gens dans des situationsbien pire», commente-t-elle. Ferial Boudou-dou, 24 ans, dégage une énergie intense. Sielle tire le diable par la queue, c’est qu’elletravaille avec un contrat d’aide à l’emploi«50 heures payées 24, soit 700 euros». Anima-trice à l’Association départementale d’infor-mation et initiative jeunesse (Adiij) de Gre-noble (Isère), elle prépare un brevetprofessionnel de la jeunesse, de l’éducationpopulaire et du sport.«Potager». Son rêve serait de vivre à lacampagne «avec [s]es petites tomates». «Ona un projet de colocation avec des amis. Onvoudrait avoir un potager avec une yourte, or-ganiser des débats le dimanche avec des villa-geois et des ateliers pour les enfants, et une sallede répétition pour faire de la musique.»Il y a une dizaine d’années, Ferial Boudoudouétait en grande difficulté. Après une scolarité

primaire réussie, elle est envoyée dans un«collège de quartier», tandis que ses camara-des français de souche intègrent un établisse-ment de centre-ville. Les années qui suiventsont rock’n’roll. «J’étais provocatrice, vul-gaire, violente.» Son seul «loisir»:«bénévole à la Croix-Rouge».«Bonne qu’à faire de la couture»,décrète la conseillère principaled’éducation, et Ferial Boudoudouatterrit dans un lycée pro pourpréparer un BEP métiers de lamode. Qu’elle obtient. Le métierne lui déplaît pas, «mais je mesuis cousu un doigt avec une machine, et j’aiarrêté là».Son père est absent, sa mère malade. «J’avaisbesoin de trouver un travail.» Ce sera d’abordserveuse. «J’ai découvert l’exploitation sau-vage des salariés.» Elle change d’employeurs.Tombe dans un escalier, se retrouve licenciéeet va devant les prud’hommes. «J’ai gagné,mais je ne voulais plus être serveuse.»Entre-temps, elle s’est mise à la guitare.

«C’est devenu ma raison de vivre.» Son réper-toire est éclectique : métal, rap, jazz, hip-hop. Elle propose à une MJC d’être anima-trice bénévole et finit par être embauchée.«Après six mois, on m’a proposé une formation

de préqualification aux métiers dusport et de l’animation.»Dans le même temps, Ferial Bou-doudou a créé avec d’autres jeunesune association à caractère ci-toyen, les Divers’gens. Les pre-mières rencontres ont lieu chez lesuns et les autres. «On demandait àchacun de venir avec des thémati-

ques et des problématiques qu’il avait envied’aborder.» Le vote blanc ou la peine demort. Des règles sont établies : «Celui quisuggère le thème modère le débat.» Les partici-pants se multiplient. «Au début, on était unequinzaine et on s’est retrouvés à 50.»La notoriété des Divers’gens et de Ferial Bou-doudou s’accroît. Les collectivités locales luiconfient l’animation de débats. Puis, la villede Grenoble lui propose d’accompagner une

dizaine de jeunes en Tunisie (1), et un autreen Grèce, dans le cadre d’un projet interna-tional. «On se construit avec les autres et àpartir des autres. J’aime bien me confronter àla différence», dit-elle.«Engagée». Au retour, Ferial Boudoudoucrée avec des participants à ces voyages lecollectif Jeunesse 2bout. «C’est aujourd’huiun groupe en construction, qui s’accorde à direqu’il ne vit pas dans un monde qui lui ressemble,et que ce n’est pas en croisant les bras qu’il lechangera. Il faut agir», peut-on lire sur sapage Internet. Du côté de ses principes, FerialBoudoudou défend «une décroissance généralede la société, et se propose de trouver une autreforme de démocratie». Pour autant, elle nevote pas. «Je suis très engagée», se défend-elle. Ajoutant, désabusée: «Si je ne vote pas,c’est que je sais que le pouvoir n’appartient pasaux politiques…»

C. C. (à Grenoble)

(1) Férial Boudoudou participe au débat«Printemps arabe, un modèle pour les jeunes?»vendredi de 18h30 à 20heures.

DR

Férial Boudoudou. De galères en petits boulots,la combativité mise en mots

GREENPRIDECette association a pour objectif de sensi­biliser le grand public, les entreprises etles collectivités aux liens entre environne­ment et santé de manière festive et ludi­que. Le lien entre épidémies modernes etpollution est trop méconnu. Greenpridese mobilise pour que chacun connaisse lesenjeux et envisage des solutions.

FONDATION JEAN­JAURÈSDepuis vingt ans, les membres de la Fon­dation Jean­Jaurès entreprennent desactions dans le monde visant à former lepersonnel politique et à soutenir des ini­tiatives prometteuses. Les objectifs: cons­truire un monde plus démocratique,inventer les idées de demain et compren­dre l’histoire sociale et ouvrière.

JETS D’ENCREAvec ou sans moyens, avec ou sansappuis, mais toujours avec la rage et leplaisir de s’exprimer, les jeunes prennentla parole et créent des journaux dansleurs lieux de vie. C’est pour cela que Jetsd’encre consacre son activité à la recon­naissance des journaux réalisés par lesjeunes de 12 à 25 ans.

DR

Cap Berriat. S’engager auprès des jeunes, leur donnerles moyens. Et les placer devant leurs responsabilités.

GRENOBLE

LES GRACQUESCes hommes et ces femmes engagés àgauche, de toutes professions et généra­tions veut contribuer en tant que groupede réflexion et de pression à la moderni­sation de la gauche. Dans ce but, sesmembres signent des analyses et des pro­positions pour contribuer à l’avènementdes idées réformistes.

ÉTATS GÉNÉRAUX DE GRENOBLE • S5

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013

11h15-11h30Cérémonie d’ouvertureJean-Paul Angot directeur de la MC2Michel Destot maire de GrenobleVincent Giret directeur délégué de larédaction de Libération

11h30-13hEt si les jeunes étaient descitoyens comme les autres?Nadia Bellaoui présidente de laConférence permanente descoordinations associativesMichel Destot maire de GrenobleValérie Fourneyron ministre dela Jeunesse et des SportsCécile van de Velde sociologue EHESSOrganisé par La Ligue de l’enseignementModéré par Vincent Giret (Libération)

Quelles perspectivespour les jeunes des zonesurbaines sensiblesen Europe?Rushanara Ali parlementairebritannique, députée travailliste deBethnal Green et BowMariam Cissé conseillère municipale deClichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis)François Lamy ministre de la VilleOrganisé par l’Institut Montaigne et laFondation Jean-JaurèsModéré par Gilles Kepel

Jeunes en difficulté:comment s’en sortir?Jean-Marc Borello président du directoiredu Groupe SOSMarie Derain adjointe au Défenseur desdroitsOrganisé par le Groupe SOSModéré par Florence Rizzo (SynLab)

Le développement durableest-il déjà has been?Alice Audouin responsable dudéveloppement durable d’Havas MediaYannick Jadot député européen EE-LVEdouard Raffin vice-président du Réseaufrançais des étudiants pour ledéveloppement durableOrganisé par les Gracques et le Groupe SOSModéré par Mathieu Taugourdeau(Groupe SOS)

13h-14hQuand la musique rime avecengagement…Oxmo Puccino rappeur, ambassadeur del’Unicef.Avec la participation de lycéens de la Citéscolaire internationale et de jeunesambassadeurs de l’Unicef.Modéré par Rachid Laïreche (Libération)

14h30-16hDécrochage scolaire:à quoi se raccrocher?Marie-Cécile Bloch fondatrice du Collègelycée élitaire pour tousGeorge Pau-Langevin ministre déléguéeà la Réussite éducativeAvec la participation d’élèves du Clept.Organisé par les Fondations Jean-Jaurès etCopernicModéré par Philippe Douroux (Libération)

Que fait l’Europe faceà l’emploi des jeunes?Vanessa Debiais-Sainton chef d’équipeErasmus de la Commission européenneMathilde Lemoine directrice des Etudeséconomiques d’HSBC FranceAbdelbasset Zitouni président de l’ANJEOrganisé par la Fondation Robert-Schumanet EuropaNovaModéré par Magali Balent, (FondationRobert-Schuman)

Jeunes et police,après l’affrontement?Sihame Assebague porte-parole ducollectif Stop le contrôle au facièsFabien Jobard directeur du Centre derecherches sociologiques sur le droit etles institutions pénalesHélène Vincent adjointe au maire deGrenoble, chargée de la jeunesseOrganisé par Terra NovaModéré par Alice Géraud (Libération)

Et si on pensait à la paritégénérationnelle?Olivier Bourhis délégué général duRéseau national des Junior AssociationsFrédéric Pairault délégué général AnacejBernard Spitz président des GracquesOrganisé par la Ligue de l’enseignement etles GracquesModéré par Arnaud Tiercelin (Ligue del’enseignement)

Quelle mobilité pourdésenclaver la jeunesse?Florence Gilbert présidente dela commission Jeunes et éducationroutière au Conseil national de lasécurité routièreYacine Kara PDG d’EcolotransClaire Martin fondatrice du programmeRenault MobilizOrganisé par les Gracques et le Groupe SOSModéré par Cécile Pavageau (les Gracques)

16h30-18hDiversité et parité au cœurdu changement?Pascal Blanchard historien, chercheur aulaboratoire communication et politique(CNRS)Lilian Thuram président de la FondationLilian Thuram Education contre leracismeOrganisé par les GracquesModéré par Marie-Laure Sauty de Chalon(présidente d’Aufeminin.com)

Inégalités homme-femme,la crise n’arrange rien?Christine Ehrel chercheuse au Centred’études de l’emploiSylvie François directrice généraleadjointe de La Poste, chargée desressources humainesMichel Sapin ministre du Travail, del’Emploi, de la Formation professionnelleet du Dialogue socialOrganisé par la Fondation Copernic et TerraNovaModéré par Vincent Giret (Libération)

Culture numériqueet jeunesse inculte?Marc Le Glatin comédien, auteur deInternet, un séisme dans la culture ?Olivier Tesquet journalisteHortense Vinet photographe, membre ducollectif de plasticiens Faux AmisOrganisé par la Ligue de l’enseignement etTerra Nova

Animé par Xavier de la Portepour son émission Place de laToile sur France Culture

Service civique pour tous!Martin Hirsch président de l’Agence duservice civique. Avec la participation dejeunes en service civique.Organisé par La Ligue de l’enseignement,Unis-Cité et AnimafacModéré par Alexandra Schwartzbrod,(Libération)

18h30-20hPrintemps arabes:un modèle pour les jeunes?Ferial Boudoudou membre del’association les Divers’GensAtef Hermessi membre du Relais pourl’émergence d’une jeunesse socialeorganiséeSelim Kharrat directeur exécutif d’Al-BawsalaDenis Simonneau directeur des relationseuropéennes et internationales de GDFSuezOrganisé par la Ligue de l’enseignementModéré par David Lopez (Ligue del’enseignement)

Jusqu’où l’environnementpèse sur la santé?André Cicolella chercheur en santéenvironnementaleDominique Gombert directeur de ladirection de l’évaluation des risques del’AnsesOrganisé par GreenprideModéré par Eric Favereau (Libération)

Existe-t-il un sentimentd’appartenance à l’Europe?Mélanie Gros association CalliopesGuillaume Klossa présidentd’EuropaNovaPeter Matjasic président du Forumeuropéen de la jeunesseOrganisé par EuropaNova et la FondationRobert-SchumanModéré par Philippe Perchoc

20h-21hRencontre autourde l’actualitéavec Nicolas Demorand directeur de lapublication et de la rédaction deLibération, et des journalistes deLibération

VENDREDI 1ER FÉVRIER

18h30-20h«I Like Europe», uneexpérience de radio liveDe Aurélie Charon productrice àFrance Culture et Caroline Gilletproductrice à France Inter.Sons, récits et interviews en direct, àpartir de la série radiophonique I LikeEurope diffusée cet été sur France Inter(lire ci-contre).Avec deux «personnages» de la série :Gal Hurvitz, étudiante enthéâtre à Paris, israélienne et, depuispeu, polonaiseAmra Plasto, étudiante en droità Sarajevo, bosniaque

18h-19h30 à l’Espace 600de la VilleneuveDes sportifs exemplaires?Myriam Chomaz championned’Europe de boxe actuelle CTN de laFédération française de boxeVikash Dhorasoo ancien joueur de footinternationalPatrick Mignon responsable duLaboratoire de sociologie du sport del’InsepOrganisé par le Groupe SOSet Terra NovaModéré par David Blough (Sport sansfrontières)Juste après le débat, le café associatifle Barathym accueille le groupe desalsa Calle San Miguel.

S6 • ÉTATS GÉNÉRAUX DE GRENOBLE

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013

Une autre économie est-ellepossible?Anne-Cécile Ragot directrice associéed’Alternatives & AlliancesPatrick Viveret philosophe et essayistealtermondialisteOrganisé par GreenprideModéré par Philippe Douroux (Libération)

Le renouveau del’engagement féministe?Marion Lafon militante Attac et Marchemondiale des femmesSafia Lebdi membre des FemenWarda Sadoudi présidente deHébergement, orientation, médiation,écoute (Home)Organisé par la Fondation CopernicModéré par Pierre Hivernat (Libération)

10h-11h30Pour une autre justicedes mineurs?Pierre Joxe avocat, défenseur du droit desmineursCatherine Sultan présidente du tribunalpour enfants de Créteil (Val-de-Marne)Organisé par la Fondation Copernic et laLigue des droits de l’hommeModéré par Evelyne Sire-Marin

Quelle école idéalepour l’Europe?François Dubet sociologueBruno Julliard ancien conseiller duministre de l’Education nationale, adjointà la culture de la Mairie de ParisPhilippe Sultan membre de la FondationCopernicAvec la participation de lycéens de la Citéscolaire internationale.Organisé par les Fondations Jean-Jaurès etCopernicModéré par Alexandra Schwartzbrod,(Libération)

Atelier d’écriturejournalistiquePour les lycéens de la Cité scolaireinternationale, animé par Edouard Daniel(Jets d’encre)

12h-13h30Débattez-vous! Indignez-vous! Barrez-vous! Maisque font les jeunes?Mouloud Achour chroniqueur à Canal+,coauteur de la tribune «Jeunes de France,barrez-vous !»Frédéric Maillot fondateur del’association RSKP à l’île de la RéunionFelix Marquardt fondateur des Dîners del’Atlantique, coauteur de la tribune«Jeunes de France, barrez-vous !»Gilles Vanderpooten rédacteur en chef deReporter d’espoirsOrganisé par Animafac

Animé par Martin Quenehenpour son émission Grantanfisur France Culture

Les médias s’intéressent-ilsaux jeunes?Nicolas Demorand directeur de lapublication et de la rédaction deLibérationEric Valmir journaliste à France InterEmmanuelle Vulin rédactrice en chef dujournal lycéen Rom’ue-MéningesOrganisé par Jets d’encreModéré par Edouard Daniel (Jets d’encre)

Famille, je vous hais!Familles, je vous aime?Marion Athiel présidente du Planningfamilial du RhôneCaroline Mécary avocate au barreaude ParisOrganisé et animé par les étudiants del’association GEM en débat, de l’ESCGrenoble

12h-14h15A combien s’élève la detteécolo?Projection du film Super Trash (2012),suivi d’un débat avec :Eric Allodi expert de l’innovationtechnologique pour l’élimination desdéchetsMartin Esposito réalisateur de Super TrashMichèle Rivasi eurodéputée EE-LVOrganisé par GreenprideModéré par Philippe Douroux (Libération)

14h30-16hComment faire monterles jeunes dans les grandesentreprises?Karine Berger députée PSBernard Emsellem directeur généraldélégué Ecomobilité de la SNCFJacques Galvani membre des GracquesOrganisé par les GracquesModéré par Alexandra Schwartzbrod,(Libération)

Un nouveau modèled’intégration pour les jeunesissus de l’immigration?Tareq Oubrou recteur de la mosquée deBordeauxJean-Claude Sommaire ancien secrétairegénéral du Haut Conseil à l’intégrationOrganisé par le Pacte civiqueModéré par Jean-Claude Devèze (le Pactecivique)

Internet: quellesrévolutions?Mehdi Benchoufi fondateur du Club JadeSabine Blanc journaliste webJérémie Zimmermann cofondateur etporte-parole de la Quadrature du NetModéré par Christelle de Crémiers

Les jeunes ne s’engagentplus, ils vont versl’entreprise sociale!Alain Lipietz économiste, membre duparti EE-LVCaroline Sost fondatrice et directrice deLiving School, école écocitoyenneinnovanteOrganisé par le Groupe SOS et la FondationCopernicModéré par Vincent Giret (Libération)

16h30-18hA quand un enseignementsupérieur européen?Philippe Aghion économiste, via Skypedepuis HarvardVanessa Debiais Santon chefd’équipe Erasmus de la CommissioneuropéenneGeneviève Fioraso ministre del’Enseignement supérieurOrganisé par le Mouvement européenModéré par Lucille Rieux (AEGEE)

Y a-t-il meilleurobservatoire des inégalitésque le logementdes jeunes?Jean-Baptiste Eyraud porte-parole deDroit au logementClaire Guichet membre du Cese,rapporteure de l’avis «Le logementautonome des jeunes»Florian Maillebuau chargé de l’habitatà l’Union nationale pour l’habitatdes jeunesWilly Pelletier sociologue, coordinateurgénéral de la Fondation CopernicOrganisé par les Gracques et la FondationCopernicModéré par Tonino Serafini (Libération)

Pendant les deux jours du forum,le public pourra écouter ou réécouterla série de reportages I like Europedans le studio de danse de la MC2.Diffusés l’été dernier sur France Inter,les neuf documentaires de 55 minutesseront cette fois­ci enrichis de photos.Parties à la rencontre des jeunesde 20 ans qui font bouger leVieux Continent, Aurélie Charonet Caroline Gillet posent les questionsliées à la création artistique,l’immigration, la vie nocturne, lareligion, le travail, la famille, lasexualité, le rapport à la politique et lamontée de l’extrême droite, oul’histoire de nos parents et grands­parents…

«ILIKEEUROPE»L’EXPOSONORE

Né des heurts de l’été 2010 dans lequartier de la Villeneuve, à Grenoble,BatukaVI est un ensemble de batucada–ces percussions brésiliennes de rue–composé d’une cinquantaine d’enfants etd’adolescents du quartier. Il constituel’épicentre de BatukaVI & Cie, unprogramme d’éducation à la citoyennetéinternationale visant à créer du lien et àvaloriser l’image du quartier et de seshabitants. Il s’articule autour d’un travailsur les cultures brésiliennes (batucada,capoeira, maculele, etc.) à travers desateliers, des sorties, des stages, destournées et des échanges internationaux.Deux sets seront proposés par unetrentaine de jeunes, vendredià 18 heures et samedi à 16 heures entrele bar et le parvis de la MC2.

PERCUSSIONSBRÉSILIENNES

SAMEDI 2 FÉVRIER

13h30–14h30:Jeunes et médias: expliquons­nous!Avec Farid Boulassel directeur de laradio locale News FMGérard Fourgeaud journaliste à FranceBleu IsèreLuis Pedro responsable du bureau deGrenoble du Dauphiné libéréet Hélène Vincent adjointe à lajeunesse de la ville de Grenoble

16h–16h30:Les jeunes et le sport de haut niveau:le parcours d’un combattant…Avec Hussein Bayram boxeurSylvie Drulhon adjointe au sport de laVille de Grenobleet Rebecca Ramanich judoka

Le Ring est situé au bar de la MC2.

LE RINGDES SUJETSQUI FÂCHENT

ÉTATS GÉNÉRAUX DE GRENOBLE • S7

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013

U n séisme dans leur existence.Pour Ana Jimenez comme pourAndrés Muñoz, tout juste la

trentaine, c’est ce que représente uncertain 15 mai 2011. Le «15M», dont leseffets allaient se faire sentir de WallStreet à Tel-Aviv. Ce jour-là, des dizai-nes d’Indignés madrilènes ont occupéla Puerta del Sol, le centre névralgique,pour y planter leurs tentes et y resterplusieurs semaines.Spontanément, il s’agissait de manifes-ter haut et fort une colère sourde contrela politique d’austérité, les coupes bud-gétaires dans l’éducation et la santé, etl’impuissance complice de la classe po-litique.Depuis l’adolescence, Andrés, salarié àAmnesty International, anarchiste, a

toujours battu le pavé. «Cette occupa-tion de Sol, je pensais que ce n’en étaitqu’une de plus. Je passais par là tous lesjours, c’était sur mon chemin vers le tra-vail. Et puis j’ai vu les gens camper. Ça aété un déclic.» Dans la tête de ce barbucostaud se produisent deux prises deconscience : primo, la lutte collectiveest possible; secundo, l’indignation estglobale, transversale.Coopération. Ce jour fondateur, Anane connaît pas encore Andrés, mais elleaussi sent que sa vie prend du sens.Consultante en coopération, elle a ar-penté de nombreux pays africains, elleaime son travail. «J’avais la sensationd’aider, mais de façon superficielle : jereste un temps sur un projet puis je rentreen Espagne. Avec le 15M, j’ai senti que je

pouvais apporter ma pierre à un édifice,dans mon pays.» Mince, regard intense,Ana participe à l’extension du 15 M versles quartiers périphériques. Dans lesien, à Malasaña, 700 personnes en-thousiastes sont présentes en juin 2011,lors de l’assemblée générale. «C’étaitextraordinaire. Avant, je ne connaissaisrien de mon quartier, de ses habitants, demes voisins.»Au fil des mois, le mouvement a perdude son influx à Malasaña, mais Ana faitpartie du noyau dur: elle ne rate aucuneassemblée du samedi, a intégré «la ban-que du temps» (échange d’activités nonmonétarisées), dynamisé des servicescitoyens (soupes populaires, dons devêtements ou de meubles…) et participéà l’élaboration du «boniato» (littérale-ment «patate douce»), la monnaie so-ciale des Indignés de Madrid. «J’aiconnu des gens que jamais je n’aurais ren-contrés, des artistes, des profs, des ca-dres, des personnes âgées. Je me suis liéed’amitié avec une sexagénaire américainequi me donne des cours d’anglais gratui-tement, dans le cadre de la banque dutemps.» Les Indignés de la capitale or-ganisent régulièrement des assembléesinter-quartiers pour échanger les expé-riences. C’est au cours d’un de ces ras-semblements qu’elle a rencontréAndrés. «On partageait les mêmes idées,la même indignation contre cette sociétéinjuste. L’osmose fut immédiate, unmiracle.»Comme elle, Andrés apprécie ces réu-nions où chacun s’écoute, où l’on peuts’emparer du micro pour défendre son

point de vue, où le consensus nécessiteparfois des heures entières de patientespalabres. Comme elle, il découvre l’ap-port des personnes âgées, plus lentes,plus précises aussi.«En côtoyant des pa-pis de 70 ans, dit-il, j’ai appris commentennuyer les pouvoirs en place, quelles dé-marches administratives sont indispensa-bles, à quelles portes frapper. Un shoot depragmatisme.»Projets soutenables. Aux yeux d’An-drés et d’Ana, la force du 15 M est aussid’avoir laissé une trace dans des indi-gnations citoyennes qui aujourd’hui ledépassent, comme la mobilisation, de-puis janvier, contre la privatisation dusecteur de la santé. Depuis qu’ils se sontrencontrés, leur vie a été chamboulée.Et pas seulement parce qu’ils viennentd’emménager ensemble et qu’elle estenceinte de deux mois.Fini le consumérisme et les actions irré-fléchies. Andrés et d’Ana ont retiré leurargent de leurs comptes pour le placerdans Triodos, une banque qui financedes projets soutenables. Ils ne fréquen-tent presque plus le Carrefour du coin,mais se ravitaillent auprès d’un groupequi distribue à Madrid les produits ma-raîchers et la viande de petits produc-teurs ou éleveurs «écologiques». Ilsn’honorent plus les factures d’électri-cité au géant Endesa, mais à une coopé-rative dont les factures correspondentà de l’énergie renouvelable. Avec le15M, c’est leur mode qui a été totale-ment bouleversé.

De notre correspondant à MadridFRANÇOIS MUSSEAU

L’occupation de la Puerta del Sol,en mai 2011, a fait basculer

la planète des Indignés, et la vied’Ana et d’Andrés.

Manifestation, à Madrid, le 18 octobre, contre la restriction des budgets alloués à l’éducation. Quasi dix­huit mois plus tôt, le 15 mai 2011, des manifestants s’élevaientcontre la politique d’austérité et l’impuissance complice de la classe politique en plantant leurs tentes à la Puerta del Sol. PHOTO DANIEL OCHOA DE OLZA. AP

LIGUE DE L’ENSEIGNEMENTLaïque et indépendante, la Ligue agitau quotidien pour faire vivre la citoyen­neté en favorisant l’accès de tous à l’édu­cation, la culture, les loisirs ou le sporttout au long de la vie. Les jeunes s’y inves­tissent comme volontaires en contratd’engagement éducatif ou en servicecivique.

INSTITUT MONTAIGNECe laboratoire d’idées élabore des propo­sitions concrètes autour de quatre axes:action publique, cohésion sociale, compé­titivité et finances publiques. Adressésaux pouvoirs publics, ses travaux sont lefruit d’une méthode d’analyse et derecherche ouverte sur les comparaisonsinternationales.

MOUVEMENT EUROPÉENCette association regroupe, au­delà deleur appartenance politique, des individuset des associations qui souhaitent s’enga­ger en faveur d’une construction euro­péenne plus intégrée et plus proche descitoyens. Elle a notamment mis sur piedles programmes Europe à l’école et Euro­député à l’école.

MADRID

LIGUE DES DROITS DE L’HOMMENée en 1898 pendant l’affaire Dreyfus, ellese revendique comme une associationgénéraliste attachée à l’universalité et àl’indivisibilité des droits politiques écono­miques, sociaux et culturels. Par ses réfé­rences constantes aux déclarations desdroits de l’homme de 1789, 1793 et 1948,elle affirme que la liberté ne se divise pas.

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D epuis 1953, une enquête à grandeéchelle sonde à intervalle régulier lesattentes, les préoccupations, les es-

pérances, les habitudes et le comportementsocial des Allemands âgés de 12 à 25 ans. Ladernière étude, réalisée en 2010, porte surla politique (l’intérêt pour la politique est enlégère augmentation), l’engagement social(en augmentation, notamment envers lesplus âgés), la globalisation (généralementperçue de façon plutôt positive), l’opti-misme (en hausse), la religion (facteur né-gligeable), les valeurs (les jeunes sont prag-matiques, mais pas dociles), et la famille(valeur refuge). Mathias Albert, sociologueà l’université de Bielefeld, coauteur del’étude (1), détaille la réalité ou l’absence desentiment européen chez ses jeunes com-patriotes.Quel intérêt portent aujourd’hui les jeunesAllemands à l’Europe?Traditionnellement, on peut dire que le sujetde l’unité européenne ne les intéresse pasbeaucoup. Spontanément, ils ne citent pasl’UE comme l’un des sujets qui les intéres-sent. Mais si on leur demande de façon cibléece qu’ils en pensent, on voit que l’image del’Union européenne est plutôt positive, et onne note aucune montée du scepticisme aucours des dernières années, malgré les crisesfinancières et de l’euro. C’est comme si ellesn’avaient pas d’effet. C’est vraiment un traitspécifique de la jeunesse allemande par rap-port aux jeunes des autres pays de l’UE.

Ailleurs en Europe, on voit augmenter lescepticisme des jeunes vis-à-vis de l’Uniondepuis 2008.Comment expliquez-vous cela?Même s’ils voient qu’il y a des problèmes, lesjeunes Allemands font preuve d’un opti-misme pragmatique. Il faut dire que le chô-mage des jeunes est très faible dans le pays.Aujourd’hui, ceux d’entre eux qui ont uneformation professionnelle ou universitaireont de bonnes chances de trouver un travailà la fin de leurs études. Les eurosceptiques setrouvent plutôt dans la catégorie des 10 à 15%de jeunes qui quittent le système scolaire

sans diplôme, ou avec une formation insuffi-sante. Eux ont peu de chances de trouver unemploi.Mais ils sont aussi particulièrement peu politi-sés. Le passé nazi de l’Allemagne et la volontéde se rapprocher de ses voisins joue-t-il égale-ment un rôle?Pas chez les jeunes. C’était le cas pour leursgrands-parents, et dans une moindre mesurepour leurs parents. L’origine de l’UE, la vo-lonté de réconciliation, jouent un rôle de plusen plus ténu en Allemagne. Les jeunesd’aujourd’hui ont un système de valeurs trèspragmatiques. D’un côté, ils sont adeptes de

valeurs traditionnelles, plutôt conservatri-ces, comme la famille, les amis ou la fidélité.De l’autre, ils n’ont pas une conception dumonde, au sens politique du terme, très con-servatrice. Leur mot d’ordre pourrait être :«Oui, il y a des problèmes, mais soutenu parma famille ou mes amis, je trouverai bien unesolution.»Il n’y a donc pas de radicalisation politique…Au contraire. Les jeunes ici diront souventqu’ils n’ont pas confiance dans les partis po-litiques, mais ils ne se radicalisent pas pourautant. Ces dernières années, il n’y a pas euen Allemagne de grands mouvements de pro-testation de la jeunesse. Les seules manifes-tations d’envergure auxquelles on a assistévisaient à s’opposer à la construction d’unegare, à Stuttgart [en 2010, ndlr] ! Et cen’étaient pas les jeunes qui ont manifestémais plutôt leurs parents ou leurs grands-pa-rents ! Les jeunes sont critiques envers leseffets de la globalisation concernant l’envi-ronnement, ou la pauvreté dans les pays dutiers-monde. Mais de façon différenciée. Ilsvoient aussi les effets positifs. Personne icine manifesterait contre un restaurantMcDonald.

Recueilli parNATHALIE VERSIEUX (à Berlin)

(1) Les trois dernières versions de l’étude, financéepar le groupe pétrolier Shell, ont été menées parl’institut de sociologie de l’université de Bielefeld,auprès d’un échantillon représentatifde 2604 jeunes âgés de 12 à 25 ans.

A Berlin, en 2009, lors du vingtième anniversaire de la chute du mur. Le mot d’ordre des jeunes Allemands pourraient aujourd’hui être:«Oui, il y a des problèmes, mais soutenu par ma famille ou mes amis, je trouverai bien une solution.» PHOTO FABRIZIO BENSCH. REUTERS

Qu’attendent les jeunesAllemands de l’Europe?Pas grand-chose, même si leurregard sur l’UE est plutôt positif.

BERLIN

275 000 nouveaux auditeurs* !Merci d’être près de 4 millions* à nous écouter

francebleu.fr

* Source Médiamétrie enquête 126 000, nov-déc 2012 / 2011, ensemble des 13 ans et plus, lundi/vendredi, 5 h-24 h.

vu d’ici

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C e soir-là, Liam Taylor avaitpris sa tente pour s’installersur le parvis de la cathédrale

Saint-Paul, au cœur de Londres. Ce15 octobre 2011, inspiré par le mou-vement «Occupy Wall Street» en-tamé un mois plus tôt à New York,environ 3 000 manifestants pre-naient place sur l’esplanade. PourLiam, 26 ans, professeur dans le se-condaire, commençaient alorscinq semaines d’occupation. Cha-que matin, il filait prendre unedouche chez lui avant de se rendreà son école dans l’East End.

Des fenêtres de sa classe, il peutvoir les tours de Canary Wharf, lequartier ultramoderne où se con-centre la finance mondiale. Ecole etbuildings sont situés dans le mêmedistrict, Tower Hamlets, mais n’ap-partiennent pas du tout au mêmemonde, car ce quartier d’affairesest aussi le plus pauvre de Londres.«L’immeuble de la Barclays est enface de la cour de récréation del’école, où 80% des fonds alloués ausport ont été coupés pour caused’austérité», explique Liam.Après le démantèlement du cam-

pement, le 28 février 2012, surgitl’idée des «Occupy Tours», des ba-lades touristiques d’un genre parti-culier. Trois circuits dans les quar-tiers symboles de la puissance de lafinance: la City de Londres, le cœurhistorique; Canary Wharf, son ex-tension; et le quartier chic de May-fair, où se trouve la plus grandeconcentration de hedge funds aumonde.Touristes. Trois fois par mois,Liam attend ses «clients» à l’entréed’une station de métro. Les visitessont gratuites, ouvertes à tous, et

attirent parfois 25 personnes. Etu-diants, activistes, simples touristes,parfois une anthropologue mexi-caine ou un régulateur financiersuédois : le mélange peut être dé-tonnant. Pendant deux heures, ilssuivent un parcours précis qui re-trace l’histoire du secteur bancairebritannique. Avec un arrêt devantl’entrée de chaque établissementfinancier significatif, assorti d’uneexplication de texte : qu’est-cequ’un produit dérivé? Que s’est-ilpassé avec tel produit financier ?Quels scandales ont touché tellebanque… L’idée est «d’éduquer,d’expliquer à quel point les relationsentre le monde politique et financiersont devenues totalement imbriquées,de rendre cet univers un peu plus con-cret», explique notre guide.A Canary Wharf, il s’arrête devantle bâtiment de la banque d’affairesJP Morgan, anciennement occupépar Lehman Brothers, raconte lafaillite de ce dernier, puis passe de-vant les locaux de Moody’s pourexpliquer comment les agences denotation, avant la crise financièrede 2008, n’ont pas fait leur travailet n’ont rien vu venir.«Pour notre première sortie, il y avait20 personnes, 10 journalistes avecdes caméras… et une vingtaine

d’agents de sécurité et de policiers»,rigole Liam. La surveillance poli-cière s’est aujourd’hui relâchée,mais «les gardes à l’entrée des ban-ques continuent de fermer les portesquand ils nous voient arriver, mêmesi nous ne sommes que trois».«Dickens».Le plus jouissif, recon-naît-il, «c’est lorsque le circuit s’ar-rête devant l’entrée d’une banque vers17 heures et que les salariés qui s’ap-prêtent à rentrer chez eux ne peuventplus sortir de l’établissement et necomprennent pas pourquoi». Les vi-sites ont un tel succès que Liam etdeux autres volontaires veulent lesmultiplier. Ils songent à louer unbus à impériale et forment uneéquipe de vingt «guides».Au début de ces excursions, enmontrant les beaux gratte-ciel deCanary Wharf, Liam cite souventC.S. Lewis, l’auteur, entre autres,du Monde de Narnia. «Les pires hor-reurs ne naissent pas dans ces sordi-des nids à crime que Dickens aimaitdécrire. Elles sont conçues et plani-fiées dans des bureaux clairs et or-donnés, propres et moquettés, par deshommes discrets en col blanc, onglesmanucurés, rasés de près et qui n’ontpas besoin d’élever la voix.»

De notre correspondante à LondresSONIA DELESALLE-STOLPER

Ces jeunes Britanniques dénoncent les coupes budgétaires du gouvernement Cameron en manifestant au cœur de la City (ici, le 12 novembre). Liam Taylor, prof etguide du «Occupy Tours», affirme: «Il faut expliquer à quel point les relations entre les mondes politique et financier sont devenues imbriquées.» PHOTO MATT DUNHAM. AP

FONDATIONROBERT­SCHUMANCentre de recherches, cette fon­dation œuvre en faveurde la construction européenne.Elle réalise des études sur l’Unionet ses politiques et en promeutle contenu en France, en Europeet dans le monde. Elle provoque,enrichit et stimule le débateuropéen par ses recherches,ses publications et sesconférences.

GROUPE SOSConstruit autour d’activités liéesà la lutte contre les exclusions, leGroupe SOS a diversifié progres­sivement ses interventions.Depuis vingt­huit ans, il déve­loppe des dispositifs d’excellencepour tous, y compris les plusdémunis, et répond aux besoinsfondamentaux de la société: lasanté, les seniors, la jeunesse,l’emploi, les solidarités. Il compte300 établissements en France.

TERRA NOVACe think tank indépendanta pour objectif de produire et dediffuser des solutions politiquesinnovantes, en France eten Europe. Il veut contribuer à larénovation des idées progressis­tes à travers la publication derapports et d’essais comportantdes propositions de politiquespubliques. Plus généralement , ilcontribue à l’animation du débatdémocratique, à la vie des idées.

UNIS­CITÉC’est l’association pionnièredu service civique. Présente dansune cinquantaine de villes elle apour objectif : que tous les jeu­nes, de toutes origines socialeset de tous niveaux d’études, con­sacrent un moment de leur vie àla collectivité. Le programme deservice civique permet de ras­sembler des jeunes qui tra­vaillent en équipe sur différentesmissions de solidarité.

Liam, 26 ans, fait visiter les hautslieux de la finance pour expliquerson impact sur notre quotidien.

LONDRESLE PACTE CIVIQUELe Pacte civique propose unedémarche volontariste à ceux quisont indignés par les inégalités etle règne de la finance; qui sontconscients des limites de lanature face au productivisme et àla pollution de biens communs;qui sont inquiets de la montée dela dette, du chômage, de l’exclu­sion, des violences; ou encore quisont choqués par la dégradationde notre démocratie.

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C onfrontée à une économieminée par l’austérité et à unchômage frappant 56% des

15-24 ans et 34% des 25-34 ans auniveau national, la jeunesse deThessalonique, métropole portuairedu nord de la Grèce, cherche lesmoyens de se construire un avenir.Martha, 30 ans, travaillait commevendeuse depuis la fin de ses étudesd’agronomie, en 2007. Alors,quand le gouvernement a mis enplace un programme de location deterres agricoles pour 50 euros parhectare et par an, elle s’est dit«pourquoi pas». En mai, elle s’estvue attribuer un demi-hectare.«C’est petit, le terrain est caillouteuxet il a fallu terrasser, mais c’est un

début et cela nous fera un revenu»,dit-elle, en soulignant que les em-ployeurs de son mari, égalementagronome, lui doivent neuf mois desalaire sur 2012.Pour Ghiorghos qui, à 26 ans, setrouve à la tête de 5,5 ha, c’est aussile début d’un retour rêvé à la na-ture. Mais un début difficile, car«l’opération a été très mal préparée,certains se sont retrouvés avec desmarécages et d’autres n’ont pas eu latotalité des terrains promis». Et puisles aides promises aux nouveauxpaysans par le gouvernement res-tent pour le moment lettre morte.Anarchie. Vanghélis, Nikos, Poly-xène et Thanassis, eux, n’attendentrien de l’Etat. Ils sont une douzaine

d’adeptes de l’action collective,âgés de 25 à 35 ans, à tester les re-cettes de la cuisine régionale et del’anarchie dans le restaurant qu’ilsont ouvert il y a six mois, dans lequartier dit des avocats, où setrouve le palais de justice. Pourdémarrer, chacun a apporté12 000 euros et sa force de travail.«Au départ, l’initiative avait unebase idéologique et politique», expli-que Vanghélis, le cuistot, quittantbrièvement ses fourneaux. Au fil dela crise, l’idée s’est cependant avé-rée économiquement judicieuse.«Comme j’avais travaillé dansd’autres restaurants, je me suis renducompte que les relations avec les pa-trons devenaient de plus en plus ten-

dues, poursuit le chef. En plus, lessalaires sont de plus en plus bas,alors qu’ici tout le monde est payé5 euros de l’heure quel que soit sonposte.» La coopérative assure ainsià ses membres un salaire mensuelde 800 euros alors que le Smic-jeu-nes est à peine supérieur à500 euros.Ailleurs. «Ce que j’ai étudié n’existetout simplement pas en Grèce!» s’in-digne Eleni. Après cinq ans de facà Corfou pour obtenir un diplômesur les techniques de l’image et duson, cette fille unique de 26 ans estrevenue habiter chez ses parents àSalonique. Aujourd’hui, elle se pré-pare à partir en Ecosse pour y sui-vre un troisième cycle. «Assez pro-

tégée», comme elle le reconnaît,par ses parents qui ont les moyensde financer son cursus écossais, ellen’a pas participé aux manifesta-tions contre l’austérité, par «peurde se faire tabasser». Pour elle,«l’idéal serait de faire des études àl’étranger et d’y rester pourtravailler».Son cousin Nikos s’apprête, lui, àpartir dans quelques jours pour Bu-dapest où «le stage pratique desix mois d’Erasmus est rémunéré350 euros alors qu’en Grèce, ce seraità peine 100». Une fois obtenu sonDUT d’agronome, lui aussi veut al-ler chercher fortune ailleurs, et «lestage s’inscrit dans ce projet». Ilcompte en tout cas se rendre chezun ami, installé depuis un mois àVienne, qui «apprend l’allemand etcherche n’importe quel travail, mêmecomme serveur» : «Il n’en pouvaitplus ici.»Au total 70% des diplômés disentvouloir quitter le pays pourtravailler. A l’ordre des médecinsde Thessalonique, on assure que«tous les jours des praticiensviennent chercher des attestationspour envoyer leurs candidatures àl’étranger».

Envoyé spécial à ThessaloniquePHILIPPE CERGEL

En Grèce, le chômage frappe plus de 56% des 15­24 ans (ici, une manif de lycéens en octobre 2011), et le tiers des 25­34 ans. Souvent poussés à l’exil ou contraints deretourner habiter chez leurs parents, ils vivent chaque nouveau plan d’austérité comme une hypothèque de plus sur leur avenir. PHOTO JOHN KOLESIDIS. REUTERS

Retour à la terre, travail coopératif, exil… Face à lacrise, les jeunes Grecs sont en quête d’échappatoires.

THESSALONIQUE

les étudiantsont enfin leur WEBMEDIA !

francecultureplus.fr

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ÉTATS GÉNÉRAUX DE GRENOBLE • S11

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013

Maison de la Culture de GrenobleMC24, rue Paul­Claudel38100 GrenobleAccès tram: ligne A, arrêt MC2Billetterie: 0476007900.Standard: 0476007979.

Réservations:Entrée libre et gratuitesur réservation dans la limitedes places disponibles.Sur www.mc2grenoble.fr et auxguichets de la MC2 pendant toutela durée de l’événement.

Restaurant: Le bar et le restaurantle Bistrot, situés dans la MC2, serontouverts tout au long du Forum.Renseignements: 0476007954.

Librairie: La libraire le Square s’installedans le hall de la MC2.

INFOS PRATIQUES

Suivez les Etats Généraux de laRépublique en direct sur Liberation.fr.Au menu : vidéos, diaporamas,reportages et interviews réalisés par lesétudiants du master de journalisme deSciences­Po Grenoble et de l’Ecole dejournalisme de Grenoble.

Retrouvez les débatssur l’antenne de FranceCulture et sur le siteFranceculture.fr :

Place de la Toile, émission animée parXavier de la Porte. Enregistrement enpublic du débat «Culture numérique etjeunesse inculte» le vendredi 1er févrierde 16h30­18 heures. Diffusion sur FranceCulture le samedi 2 février à 18h10.Grantanfi, émission animée par MartinQuenehen. Enregistrement en public dudébat «Débattez­vous! Indignez­vous!Barrez­vous! Mais que font les jeunes?»le samedi 2 février de 12 heures à 13h30.Diffusion sur France Culture,le mercredi 6 février à 15 heures.Ecoutez, réécoutez et podcastezles émissions sur Franceculture.fr.

Retrouvez les EtatsGénéraux de laRépublique dans leséditions d’information12/13, 19/20, Soir 3 etsur Alpes.france3.fr.

Chaîne parlementaireet politique, LCPaffirme au quotidien

sa dimension citoyenne et varie lesécritures pour décrypter et analyser auquotidien l’actualité. Réécoutez VincentGiret, directeur délégué de la rédactionde «Libération» dans l’émission«Politique matin» sur Lcp.fr.

Retrouvez Vincent Gireten direct des studiosde France Bleu Isèrele vendredi 1er février

à 7h50. Le même jour, assistezà l’émission le Café de la presse de18 heures à 18h30 en direct de la MC2.

SUIVRE LES DÉBATSSUR LIBÉRATION.FRET AVEC NOSPARTENAIRES MÉDIAS

«P lénière prévue à 9 heures.Il est 9 h 25, et il y a 23 dé-putés dans la salle.»

«15 h 35 : la séance, programméepour 15 heures, n’a toujours pascommencé.» «15h55: la présidencevient de prendre place. Les députésrejoignent leur siège.» Dans sescomptes rendus des travaux del’Assemblée constituante tuni-sienne, publiés en direct sur son filTwitter, l’association Al-Bawsala(«la boussole») ne manque jamaisde souligner les retards et absen-ces chroniques des députés, élusen octobre 2011 pour rédiger unenouvelle loi fondamentale.La pression que l’association acontribué à exercer a fini parpayer, un peu: «Ils essaient d’êtreplus présents», note Emna Che-bâane, «juriste geek» de 21 ans,chargée de tweeter les débats surla Constitution. Parmi les milliersd’associations créées après la ré-

volution, Al-Bawsala s’est rapide-ment imposée comme l’une decelles qui pèsent.Opiniâtre. Avec Marsad, sonobservatoire de l’Assembléeconstituante, l’ONG tunisiennepousse les nouveaux élus à latransparence. «Nous travaillons àun changement de posture des poli-tiques, explique son directeurexécutif, Selim Kharrat (1). Il fautqu’ils comprennent qu’un vote n’estpas un blanc-seing, ils doivent ren-dre des comptes.» «D’une certainemanière, nous luttons contre l’ancienrégime, les réflexes d’opacité et delangue de bois», poursuit NabilYahyaoui, le développeur du sitemarsad.tn, sur lequel on trouve unannuaire des députés –avec possi-bilité de leur poser des ques-tions –, une revue de presse, unecartographie de l’hémicycle…Surtout, Marsad publie les résul-tats des votes, élu par élu, et tous

les documents que l’équipe arriveà récupérer. Les responsablesavaient promis la transparence, lerèglement de l’Assemblée garantitl’accès aux rapports. Mais concrè-tement, rien n’a bougé. Pour lesvotes, il a fallu bricoler un sys-tème, faute de liste nominative.Pour les documents, l’ONG doitcompter sur la bonne volontéd’une demi-douzaine de députésacquis à sa cause.A l’origine du projet, il y a AmiraYahyaoui, 28 ans. Aux avant-pos-tes de la lutte contre la censuresous Ben Ali, cette jeune femmepétillante et opiniâtre, fille du jugedissident Mokhtar Yahyaoui, aquitté Paris pour rentrer à Tunis enjanvier 2012. «J’ai eu des proposi-tions d’ONG étrangères, mais c’étaitimportant de fonder une organisa-tion tunisienne pour montrer que lesgens qui croient à la démocratie nesont pas que des Américains ou desSuédois», souligne-t-elle.L’association a pris ses quartiersdans un appartement de l’emblé-matique avenue Bourguiba.Sept personnes ont été recrutées.«La moyenne d’âge est de 26 ans»,précise Selim Kharrat. Celle desdéputés se situe, elle, autour de50 ans. Alors qu’environ 40% dela population a moins de 25 ans, lesjeunes peinent à trouver leur placedans les partis, les institutions etmême les associations.Pour Amira, «c’est très importantd’avoir l’arrogance de la jeunesse.On s’approprie l’Assemblée, on n’apas de limites avec les députés, saufla politesse. On considère qu’ils tra-vaillent pour nous». Selim, qui a luiaussi tout plaqué à Paris, ajoute :«Les nouveaux responsables vien-nent de partis qui étaient dans lasurvie et se cachaient par peur de larépression. Ça n’a plus lieu d’être.

Ils voudraient faire du neuf avec duvieux, alors que les jeunes sont plusenclins à la rupture.»Hormis Selim et Amira, tous sontdes novices de l’engagement. Pasfranchement portés sur la politi-que –qui «dégoûte la majorité desjeunes», estime Emna Chebâane–,mais soucieux de s’investir dans latransition, de rompre avec «cetteculture de l’indifférence», expliqueGhada Louhichi, chef du projetMarsad.Partie civile. Al-Bawsala orga-nise aussi des rencontres dans lesquartiers populaires, dans lesvilles de l’intérieur, «dans lesendroits à l’écart du débat constitu-tionnel», résume Selim. La mise enscène est pensée pour une vraieconfrontation : «On va dans lescafés, les petites salles, en plein air.Les élus sont près du public, jamaissur des estrades ou derrière unetable. Ils ne font pas d’exposé, cesont les citoyens qui posent leursquestions», détaille-t-il.L’ONG a encore plein d’idées entête: une fois la Constitution adop-tée, elle entend se porter partie ci-vile pour «casser l’arsenal législatifde la dictature», explique Selim. Unprojet «d’organisation de commu-nautés» est en germe, pour aiderles citoyens à se regrouper. Enfin,l’équipe rôde un dispositif pointupour la dernière étape de laConstitution : un panorama duvote, article par article. Détails dessuffrages, absentéisme, retards…«On va faire des classements,comme à l’école, indique Amira. Çava être horrible pour les élus.»

De notre correspondante à TunisÉLODIE AUFFRAY

(1) Selim Kharrat prendra partau débat «Printemps arabes:un modèle pour les jeunes?»,à 18h30, le 1er février à Grenoble.

Les jeunes membres del’ONG Al-Bawsala tententd’obliger les députés dela Constituante tunisienneà rendre des comptes.

TUNISJeunes, diplômés et chômeurs, ils avaient été aux avant­postes de la révolution de 2011. Faute d’amélioration notable de leursconditions de vie, ils continuent régulièrement de manifester, comme ici, en mai 2012, à Tunis. Alors que 40% de la populationa moins de 25 ans, la jeunesse peine aussi à trouver sa place dans les partis et les institutions. PHOTO FETHI BELAID. AFP

S12 • ÉTATS GÉNÉRAUX DE GRENOBLE

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 ENQUÊTE LE MAG • XI

a publiée à Berlin puis à Leipzig en 1915-1916.[…] Il n’existe pas de marché proprement dit dudocument scientifique, car ces documents sontrares. La valeur de celui-ci est certainementplus importante, et aussi plus difficile à évaluer.Mais, aux enchères, les papiers de la maind’Einstein, généralement peu importants scien-tifiquement, ne dépassent pas quelques dizainesde milliers, voire quelques milliers d’euros»,fait-il remarquer.«Nous avons des experts attitrés qui ont eux-mêmes rédigé les estimations de nos pièces»,réagit Lhéritier, en citant Thierry Bodin etAlain Nicolas. Pourtant, même la premièreestimation déjà fabuleuse de 12 millions avaitdonné lieu en 2003 à des échanges acrimo-nieux avec ce dernier. Après s’être rétracté,il concluait que le manuscrit valait en réalitéun peu plus de 1,8 million, ce qui aurait étédéjà beaucoup. Aujourd’hui, cet expert vou-drait bien faire savoir qu’il a «pris ses distan-ces avec tout cela».Mais Lhéritier cite un autre spécialiste: Jean-Claude Vrain est devenu un fidèle d’Aristo-phil, auquel il a essayé de vendre le rouleaudes Cent Vingt Journées de Sodome écrit parle marquis de Sade à la Bastille. La négocia-tion n’a pas abouti: volé aux Noailles en 1982,ce trésor de la littérature a été passé en con-trebande en Suisse, si bien qu’il aurait étéconfisqué dès le franchissement de la fron-tière (5). Grande gueule virtuose, figure atta-chante du métier, dont il se veut un «électronlibre», Vrain a longtemps dit pis que pendrede Lhéritier. Mais quand il l’a rencontré, il aété séduit par le personnage: «Je ne sais riende ses mécanismes financiers, et je ne veux pasles connaître. Mais il prend une place laissée li-bre par les institutions publiques et la BNF, quin’ont plus un sou pour valoriser leur patri-moine.» Mi-acteur culturel, mi-marchand,

cet hybride occuperait ainsi un vide entrel’affaiblissement de la puissance publique etle recul de la librairie traditionnelle.Mais sur quels critères avoir approuvé l’esti-mation des feuillets Einstein-Besso, lui quiest plutôt connu pour sa connaissance dusurréalisme? Jean-Claude Vrain ne démentpas sa réputation: «Ce prix reflète ma fascina-tion pour ce document. Il me touche et me parle,cela me suffit. Je suis complètement indépen-dant. D’autres experts disent le contraire, jen’en ai rien à foutre. Je l’estime à 24 millions,et j’emmerde le monde.»

Un placement échappant à l’ISFIl faut espérer que les souscripteurs ont bienlu l’article VII des contrats, stipulant que lasociété se réserve «l’option» de reprendreleurs parts, mais sans obligation de rachat deson côté. Elle contourne l’obstacle en procla-mant «avoir toujours systématiquement rachetéses collections, au prix majoré défini contrac-tuellement». Elle prend également soin defaire signer un document à ses clients, certi-fiant qu’ils ont bien examiné le contrat. Ellea même remboursé sans discuter des mécon-tents qui se plaignaient de n’avoir pas biencompris ce passage.Dans la réalité, ses représentants incitentaussi les souscripteurs à se reporter sur lesnouveaux fonds, créés chaque année : oùtrouveront-ils un placement échappant àl’ISF, à 8% d’intérêt? Ainsi, l’un des derniersinvestissements phares a-t-il été «réservéuniquement» aux «clients actuels et à leur fa-mille»: celui des «manuscrits secrets du géné-ral de Gaulle à Londres».Pour ces 313 messages et notes rédigés parle chef de la France libre de 1940 à 1942,100 épargnants se sont partagé 1500 parts à5000 euros chacune, pour verser 7,5 millions

au pot. Assorties d’une «promesse de vente auprix nominal augmenté de 8,75% par année».Petit souci : la société n’est plus en posses-sion du bien dont elle est censée assurer lagarde. L’Etat l’a fait saisir, estimant qu’ilfaisait partie du patrimoine inaliénable desarchives publiques (Libération du 11 novem-bre 2011).Ces dossiers «oubliés» ne l’étaient pas pourtout le monde. Ils avaient été gardés par lasecrétaire du Général à Londres, Marie-Thé-rèse Guinet-Desseignet. Aristophil les aachetés à son fils, Jean-Claude Chalumeau.«Ma mère, explique-t-il, m’a toujours ditavoir proposé après la guerre de rendre ces pa-piers au Général, qui lui a dit de les conserver.»Version que le directeur des Archives deFrance, Hervé Lemoine, juge «impossible àcroire» alors que le grand homme prenait laprécaution de remettre l’intégralité de ses«archives de guerre» à l’Etat. Aujourd’hui,Jean-Claude Chalumeau nous avoue : «Iln’existe aucun document écrit» à l’appui dudire maternel.La procédure a donné lieu à quelques péripé-ties cocasses. Fin 2011, François Fillon devaithonorer de sa présence le vernissage de l’ex-position des «Manuscrits secrets». Averti àla dernière minute, le chef du gouvernementdut précipitamment annuler sa venue boule-vard Saint-Germain. Deux ministres, Frédé-ric Lefebvre et Michèle Alliot-Marie, répon-dirent quand même à l’invitation.Neuf mois plus tard, à la requête du tribunal,devant une employée en pleurs, la conserva-trice des Archives fit saisir les pièces expo-sées, dans leurs chemises de présentation.«A mon arrivée aux Archives, rue des Francs-Bourgeois, quand j’ai sorti les télégrammes, ra-conte-t-elle, je me suis aperçue que [les che-mises] contenaient… des photocopies. Il fallut

refaire une démarche auprès d’Aristophil, pourqu’elle consente enfin à se dessaisir des origi-naux, qu’elle a fini par déposer à la BNF.»Histoire de bien souligner les rapports «deconfiance» noués avec son président, BrunoRacine. «Je constate que Lhéritier a toujourstenu sa parole», estime ce dernier, en faisantobserver que les mécénats sont soumis àl’aval des ministères de la Culture et duBudget. Lui que sa nature incline plutôt à fa-voriser des solutions amiables avoue qu’il«encouragerait» bien son mécène à «séparersa structure d’opérateur financier de ses activi-tés culturelles, qui pourraient se retrouver sousl’égide d’une fondation». Et il garde un regardsoucieux sur une collection de manuscritsqui compte des trésors de l’Histoire.

Ceinture et bretellesLe procès des archives De Gaulle suit soncours. Lhéritier se dit sûr de gagner. A sesyeux, il s’agit de brouillons d’un officier re-belle: «Rien à voir avec un chef d’Etat, qui, lui,était à Vichy.» Au pire, il se dit couvert parl’assurance, tout en ayant le temps de provi-sionner la perte dans ses bilans. Ceinture etbretelles. Il vaudrait mieux, car, dans ce cas,au lieu d’approcher les 11 millions espérés àl’échéance 2016, la valeur de l’investisse-ment tomberait à zéro. Les clients ont-ils étérenseignés par avance de ce péril ? •

(1) «L’Or des manuscrits», à paraître en mars.(2) Voir la présentation d’Aristophil sur YouTube.(3) Au titre du mécénat, la société déduit 90% deces sommes de son impôt. En revanche, cetteformule ne s’appliquerait pas à la remise dudocument à la ville de Nice, qui s’apparenteraità la restitution d’un document à caractère public.Ce que les Archives nationales n’ont pas manquéde rappeler.(4) «Que choisir?» du 31 mars 2011.(5) «Le Monde» du 10 octobre 2012.

Le manuscritdu Manifestedu surréalisme(1924) d’AndréBreton (ici vers1950), acquisen 2008 parAristophil. PHOTOSCOLL. PRIVÉE MUSÉEDES LETTRES ETMANUSCRITS. PARIS.ALBUM. AKG

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013XII • LE MAG BD

KO aux planches

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 BD LE MAG • XIII

O livier Texier vit à Nantes, oùil est né en 1972. Lorsqu’ilne surveille pas les rues desa ville dans son costume

du justicier Girafe et qu’il ne se livre pasà des combats de catch de dessin orga-nisés par la Fédération nantaise offi-cielle, il est graphiste dans une mairie.Si cet auteur autodidacte aime faire legrand écart entre la SF (Croisière cosmos,Delcourt) et le dessin trash (Campigne,

au Dernier Cri), il excelle dans l’art dustrip, où son humour incisif, tordu etabsurde est tout sauf conventionnel! Sasérie Grotesk, publiée dans Psikopat, estun sommet du genre et sera rééditéecette année (Même pas mal).Autre parution très attendue, Marv etJohnny, BD de baston hallucinogène (lesRequins Marteaux), dont on pourra, surlettre de motivation, devenir l’un despersonnages! Salué par la critique et ses

pairs, cet auteur reste en marge de lareconnaissance du grand public, maisc’est justement la marge qu’il se plaît àexplorer. Prolifique, il promet aussipour 2013 un livre des cons (Humus), etsera au sommaire de la revue numéri-que Professeur Cyclope. •http://otexier.blogspot.com

Chaque premier samedi du mois,une BD dans «Le Mag».D

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LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013XIV • LE MAG LIRE

Week-end

Voilà un journaliste – ils ne sont paslégion– qui, très jeune, eut un tro-pisme allemand. Des parents, etsurtout une mère juive, l’ont élevé

dans le culte de la réconciliation: allemandpremière langue (et on ne discute pas), uncorrespondant outre-Rhin à l’adolescence,des voyages réguliers, et même une premièrevie d’ingénieur à Tübingen, chez des équipe-mentiers automobiles. Et dans sa deuxièmevie de journaliste, cette fois en France,Guillaume Duval, rédacteur en chef du men-suel Alternatives économiques, enrage d’en-tendre répéter à l’envi la rengaine du «mo-dèle allemand», remède miracle à notredéclin fatal : comme si une religion de lamonnaie combinée à «une austérité de fer» età la capacité de nos voisins à accepter sansbroncher de lourds sacrifices devaient cons-tituer l’alpha et l’oméga des politiques publi-ques de toute l’Union européenne.On se trompe sur l’Allemagne, lourdement,affirme Duval dans Made in Germany, et les

Allemands aussi d’ailleurs, aveugles à saisirvraiment ce qui fait aujourd’hui leur forceéconomique et la qualité de leur démocratie.Comme hier Nicolas Sarkozy lors de la cam-pagne électorale,de bonnes âmes,de plus en plusnombreuses, ex-hortent FrançoisHollande à mar-cher sur les pas deGerhard Schröderet de s’attaquer– à la hache sipossible – à notreEtat social. L’auteur dénonce une «mystifica-tion» qui voudrait que l’ex-chancelier soit«LE sauveur de l’économie allemande».Dans un réquisitoire au cordeau, Duval me-sure les effets de chacune des mesures du fa-meux «Agenda 2010», que Schröder détaillaen 2003 devant le Bundestag : baisse descharges patronales, facilitation des licencie-

ments, durcissement de l’assurance chô-mage, développement massif des petits bou-lots, réduction des retraites futures… Uneattaque tous azimuts et sans précédent contre

le système socialdéveloppé depuisBismarck. «Ensept ans seule-ment, tranche Du-val, le social-dé-mocrate Schröder aréussi l’exploit defaire de l’Allema-gne un pays plusinégalitaire encore

que la France.» Loin de l’avoir réinventé, l’ex-plosion des inégalités et de la pauvreté a aucontraire fragilisé le modèle allemand.Au fil de son enquête, l’auteur met à jour les«vraies causes» des succès allemands qui de-vraient, eux, nous inspirer vraiment: la co-détermination et les pouvoirs étendus recon-nus aux salariés dans les entreprises, un

management moins autoritaire et hiérarchi-que, la valorisation du travail industriel, unemobilité sociale plus grande dans un pays quiignore nos fameuses grandes écoles, un sys-tème éducatif moins fondé sur la concur-rence permanente et la sélection par l’échec,une organisation équilibrée des territoires,un fédéralisme tempéré, un appétit réel pourles contre-pouvoirs… Duval a raison : il y amieux à faire qu’«une instrumentalisation pro-pagandiste» du modèle allemand et, davan-tage que l’économie de ce grand pays, c’estsa «société» qui devrait nous inspirer. •

de l’univers, on se réfugia dans les rê-ves, les contes et l’imaginaire – quin’avaient jamais disparu – avec Alice del’autre côté du miroir, Dorothée au paysd’Oz, John Carter, Ellen Ripley ou lesNa’vis de la planète Pandora.Ce sont tous ces Voyages imaginaires, deJules Verne à James Cameron que l’histo-rien de l’art et de la photographie FaridAbdelouahab fait revivre dans ce beau-livre. Plus de cinquante destinations,issues de l’imagination des plus grandsauteurs (Edgar Poe, Georges Méliès,David Cronenberg, Ray Bradbury…) etclassées par thème – îles insolites, cen-tre de la Terre, mondes oubliés, universparallèles, rêves et visions… Une pro-menade onirique à travers le temps, lesâges et les civilisations, les angoisses etles utopies, la poésie et la technologie.Bienvenue au pays de nulle part.

FABRICE DROUZY

IMAGINATIONGALOPANTES

Une invitation auvoyage dans

les universinsolites de

cinquante auteurs.

D ans l’Antiquité et au Moyen Age, lesmarins suivaient les côtes et nes’aventuraient guère vers l’horizon

inconnu. La Terre était plate, tout le mondele savait, et les îles lointaines, aux confinsde la mer, peuplées de monstres et de chi-mères (hybrides de la mythologie et desanimaux marins entraperçus par les navi-gateurs les plus hardis). Plus tard, la cartedes océans se fit plus précise. Mais il restades lieux oubliés, des îles cachées, dessommets inaccessibles où avaient survécules dinosaures, les Atlantes, les mystérieu-ses cités d’or…Quand il fallut bien convenir que tous lescontinents étaient cartographiés, toutes lesterres explorées, on se tourna alors versl’espace, ses monstres verts ou bleus, sessoucoupes et ses trous noirs… Des universglacés ou brûlants, avec ou sans gravité, oùtoutes les rencontres étaient possibles. Etlorsque la science détrôna la science-fic-tion, que les télescopes et les rayons infra-rouge eurent raison des dernières énigmes

La Découverte australe par un homme volant, de Restif de la Bretonne,gravure de Louis Binet, 1781. MAISON D’AILLEURS. AGENCE MARTIENNE

VOYAGESIMAGINAIRESde FARIDABDELOUAHABArthaud,208 pp., 29,90 €.

MADE IN GERMANYde GUILLAUME DUVALSeuil, 240 pp., 17 €.

Le vrai modèleallemand est social

Par VINCENT GIRET

LA CITÉ DES LIVRES

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 LIRE LE MAG • XV

LÉGENDEOBAMA,UN PASSÉ À VENIR

Publié lors des élections, ce livre se litencore mieux un lendemain de cérémo-nie d’investiture. Sorti du feu éditorialde la campagne, l’ouvrage rigoureux decet historien et sociologue américainincite à la pause. Comme l’expliquedans sa préface l’universitaire Denis La-corne, chaque candidat se construit un«récit national» et Obama, s’il est cer-tes très différent de ses prédécesseurs,n’échappe pas à la règle.Thomas Sugrue relève ainsi les référen-ces fréquentes – on pourrait presqueparler de surtitrage– à un certain héri-tage historique, de Jefferson à MartinLuther King en passant par Lincoln. Cespécialiste de l’histoire des relations ra-ciales aux Etats-Unis décrypte aussi labiographie et les «légendes» du prési-dent : de son enfance à Hawaï jusqu’àChicago, où cet homme «sans racines»peut enfin s’arrimer à l’histoire de lalutte pour les droits civiques.Le passage par Harvard est égalementfructueux, Obama y arrive en pleinebataille à propos de l’affirmative action,à tel point qu’on surnomme l’universitéle «Beyrouth de l’enseignement du droit».Sa position médiane ainsi que son senspolitique lui permettent d’être élu à ladirection de la célèbre revue de droit.Le bilan du premier mandat n’est nulle-ment élogieux car, pour Sugrue, l’élec-tion d’Obama n’exempte en rien lesEtats-Unis du racisme et il reste beau-coup à faire dans une société encore trèsloin du post-racial, concept tellementà la mode depuis 2008. Mais, comme leconclut l’auteur, Obama –souvent sus-pecté «d’altérité» (socialiste, crypto-musulman…), manière de masquer unressentiment explicitement racial –n’est paradoxalement pas toujours lemieux placé pour agir en ce domaine.C’est d’ailleurs une citation de Faulk-ner, extraite de son discours de Phila-delphie en 2004, qui ouvre le livre: «Lepassé n’est pas mort et enterré. Il n’estmême pas passé.»

CATHERINE CALVET

LE POIDS DU PASSÉde THOMAS SUGRUEEdition Farenheit,174 pp., 16 euros.

PHILIPPEDE LAGENARDIÈREAprès un séjouren Iran commelecteur defrançais(1974­1976),Philippe dela Genardièretravaille dansl’édition etcollabore àdiverses revues(Digraphe, laQuinzainelittéraire), puisdevientpensionnairede la VillaMédicis, de 1984à 1986. Il estl’auteur de plusd’une douzainede livres. Il a étécouronné pourl’ensemble deson œuvre et areçu le grandprix Poncettonde la Société desgens de lettresà l’occasion dela publicationde l’Année del’éclipse (SabineWespieser,2008). Ont paruchez Actes Sud:Morbidezza,Gazo, Legs,le Tombeaude Samson,Simples mortelset toutdernièrement:Roma/Roman.

Tous les samedisl’actualité vuepar un écrivain,un intellectuel,un artiste…La semaineprochaine:Nicolas Debon.

LA SEMAINE DE… PHILIPPE DE LA GENARDIÈRE

SAMEDI LA VOIX INTÉRIEUREPoser la voix, puis recommencer chaque jour de la se-maine, et tenter, avec ces petites bêtes vivantes que sontles mots, d’attraper quelque chose de la réalité dumonde. La question étant de savoir où est la réalité, etoù la vie d’un homme entre en contact avec ce que lesinstances d’une époque désignent comme le réel. Ainsi,ce matin, alors que je me levais, les voix de la nuit conti-nuaient de me parler, et il a fallu un bon moment avantqu’elles ne s’effacent derrière la «rumeur du monde»,celle que tout un chacun perçoit (bruits de circulation,sirènes de police, cris d’oiseaux…) –puis, finalement,derrière la voix des ondes. Celle qui dit le réel «par-tagé», c’est-à-dire l’actualité, la marche du monde, etsa cacophonie, qui dit la démesure de l’espace, dutemps et des hommes: guerres raciales en Afrique, dé-rive des révolutions arabes, multiplication des gangsimposant leur loi en Amérique latine…Est-ce cela le réel? Est-ce que ça n’est pas aussi cettevoix «intérieure», qui, sitôt débranchés les appareilspar lesquels je suis connecté au monde, fait entendreson timbre sourd, et demande avec insistance: «Qui estlà ? Qui parle ? Et de quoi ?» Du réel, justement, maisinvisible, et échappant à toute actualité, qui seraitcomme de la neige pure, où le bruit de mes pas réveille-rait ce son oublié, mais familier, de ma présence aumonde.

DIMANCHE LES YEUX DES VIEILLARDSDe la neige, il y en avait dans les jardins de la maisonde retraite où je me suis rendu. Du silence aussi, et dela voix intérieure, derrière ces visages impénétrables,juchés sur leur carcasse déglinguée, avec ces deux petitscercles de lumière, tout brûlants, et à vif, qui parlentdéjà de ce «pays éloigné» qu’ils ont entrevu. Quoi deplus violent que la certitude de notre mort à venir? Etpourtant, il n’est pas de réalité à laquelle nous ne résis-tions davantage, nous la repoussons de toutes nos for-ces, alors même qu’elle surgit à tout instant, qu’elleremplit cette actualité dont nous faisons notre miel. Lamort comme reportage, comme «fiction», cela nousparle, nous passionne. Mais lorsqu’elle s’invite dans no-tre vie, même dissimulée derrière la maladie, alors noussommes pétrifiés, incapables de l’accueillir.Ainsi m’a-t-il fallu du temps, dans cette maison où mamère finira ses jours (elle est née avant la guerre de 14,a vécu toute l’épopée d’un siècle, et cependant elle auraconnu l’humanité sous son visage le plus hideux, celuid’Auschwitz, et de Hiroshima), pour vaincre mes peurset m’habituer à la présence de ce grand corps maladeautour de moi. Désormais, je peux regarder avec bien-veillance ces vieillards que je prenais pour des étran-gers, je peux même entrer dans la lumière de leurs yeuxet de ces lointains dont ils sont déjà familiers.

LUNDI L’ESPRIT DE CONVERSATIONLa voix, de nouveau. Celle de Jean-Bertrand Pontalis,décédé récemment, et que des rediffusions à la radio ontmise à l’honneur. Cet homme, du moins dans son grandâge, avait une voix étonnamment musicale, dont le tonet l’élocution évoquent cet ancien art de la conversa-tion, subtil mélange d’intelligence et de complaisance,bref, d’«esprit», puisque c’est cela qui nous a long-temps caractérisés, en France, aux yeux des autres. Lavoix de Pontalis, c’est cette ligne «mélodique» quiprend plaisir à cheminer et qu’on entend chez Proust,mais c’est aussi celle qui court dans les textes de Diderotet que Jean Starobinski, avant-hier, devant Alain Fin-kielkraut, opposait au travail «harmonique» chez Rous-seau. Celle, ironique, tout compte fait, d’un de cesbeaux esprits sortis de la Rue d’Ulm et qui aimait plusque tout imiter la voix de ses anciens maîtres à penser(Sartre, Lacan) pour agrémenter sa conversation.

MARDI LE MIRACLE DE L’AUTREPlutôt que du réel, mieux vaudrait parler du vivant. Caril est le visage heureux de la réalité, l’expérience chaquejour recommencée de la ville, de la rue et de l’«autre»–de sa présence. Oui, le miracle de la vie est là: je suisun corps à moi seul, avec ses artères et ses veines, sesaffects, mais clos sur lui-même. Or, dès que je me pro-jette au-dehors, dès que je vais à la rencontre du monde,je me sens «vivant». Et la rue, pour le marcheur que jesuis, est ce lieu de tous les possibles, où les plus minus-cules éclats de réalité se mettent à vibrer, où peut s’en-tendre la respiration de l’autre, mon semblable, celuidont je cherche à attraper le regard, parce que son re-gard, et le sien seul, peut éclairer mes pas. Hélas, cespassants que je croisais naguère – dont le bref regard,ironique ou amoureux parfois, me donnait matière àrêver – ont changé de corps et leur façon d’habiter lemonde. Plus de regard, plus de dehors –l’homme post-moderne s’est retranché dans ses réseaux, il n’est pluspossible de l’atteindre «physiquement».

MERCREDI LA SCÈNE D’ÉCRITURELa voix, encore. La mienne: j’ai enregistré les premièrespages de Roma/Roman sur le site d’Actes Sud. Lire, selire –j’ai toujours ressenti l’exercice (intime, impudi-que) comme un enjeu musical. Comme si les textesétaient des partitions et devaient donner lieu à des per-formances (certains s’y risquent, quand je ne fais quecourir, moi, après les voix d’Alain Cuny ou de Maria Ca-sarès). Et pourtant, il n’y a pas de public lorsqu’on écrit,tout juste son double, embusqué dans un coin de la page,qui accompagne vos libres investigations dans ce réelcaché qui n’est pas celui de l’«actualité». Mais quel estdonc le réel de l’écrivain? La littérature (l’art) dit-elleautre chose de la réalité que ce qu’en disent les médias?

JEUDI À L’AUNE DE LA NOTORIÉTÉQuestion qui se repose à chaque sortie de livre: quel estle statut de la littérature en 2013? Et partant, quelle estla place de l’écrivain dans notre société, si tant est qu’ilcompte encore, et qu’on ne réduise pas son rôle à celuid’une quelconque icône médiatique, auprès de laquelleil fera pâle figure. Le problème est là: l’artiste est main-tenant jugé à l’aune de sa «notoriété», il n’est plus seulà mettre son nom au bas de la page (ou du tableau),n’importe quel faiseur peut apposer sa «griffe» sur levêtement ou le spectacle qu’il a produit –et la signaturede l’écrivain ne vaut plus grand-chose à la Bourse desvaleurs culturelles. Toute création a sa légitimité, celledu designer autant que celle du couturier, tout vauttout, c’est la victoire de la démocratie, plus de hiérar-chie, ni dans ce qu’on appelait les arts ni même dansl’actualité. Dont acte.

VENDREDI SUBTILITÉ DES SONSLa voix, encore. Celle de Pascal Dusapin: ses Etudes pourpiano, enregistrées par Vanessa Wagner, que j’écouteavec passion, heureux de renouer avec la musique con-temporaine, dont je fus un auditeur attentif dans les an-nées 70, et néanmoins désenchanté, les arts savantsayant dû s’effacer devant la culture de masse. Difficiled’aborder la chose avec sérénité. Oui, l’avancée destroupes françaises au Mali a objectivement plus d’im-portance qu’une partition musicale, qu’un nombre li-mité de gens apprécieront. Et cependant, la subtilité deces sons, l’extrême précision de leur agencement, bref,tout cet extraordinaire travail harmonique n’est pasqu’une affaire de plaisir réservé à une élite. Il touche àla «connaissance», et par là même concerne l’humanitétout entière, quand bien même elle ne devrait jamaisentendre ces Etudes ni même prononcer le nom de Pas-cal Dusapin. C’est tout l’honneur de l’artiste, il fait sienle silence du monde. •

Les éclats de réalité se mettent à vibrer

DR

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013XVI • LE MAG LIRE

DAVID PETRAEUS,UN BEAU JOUR DANSLA VALLÉE DU TIGREde RÉGIS LE SOMMIEREditions Erick Bonnier,228 pp, 20 €.

DE TOUS LES FRONTSÀ L’AFFRONTDu Vietnam à l’Afghanistan, la carrière du général Petraeus,ex-directeur de la CIA, tombé pour une banale liaison.

P ourquoi lire la biogra-phie d’un général amé-ricain, fût-il le plus

emblématique de l’époque,foudroyé en pleine ascensionà la suite de quelques turpi-tudes sexuelles ? Parce quederrière la vie et les œuvresde ce héros d’aujourd’hui,du moins jusqu’à sa chute, cesont les arcanes de la pluspuissante armée du mondequi se découvrent et qu’àl’heure des échecs en Irak etmême en Afghanistan, elleest un bon complément auxtraités de géopolitique qui nesauraient tout expliquer surles pourquoi et les commentdes guerres.David Howell Petraeusn’était pas a priori destiné àfaire le choix des armes.C’est un fils de marin hollan-dais, strictement presbyté-rien, qui, bloqué par laguerre aux Etats-Unis, s’estcourageusement engagédans la marine marchandeaméricaine pour des mis-sions particulièrement ris-quées dans l’Atlantique –elleperdra 45000 hommes pen-dant le conflit. Sa mère, My-riam, est l’une des rares jeu-

nes filles de sa génération àavoir dépassé le stade du se-condaire dans ses études.C’est probablement d’elleque le futur officier tiendrason goût pour les choses del’esprit. Au physique, lui-même n’a rien d’imposant etil est plutôt timide. Et au lieude se distinguer dans le foot-ball américain, comme levoudrait le cursus du mâled’outre-Atlantique, il choisitle foot européen, qui y estconsidéré comme un sportde filles. C’est par cette dis-cipline qu’il rejoindra

l’équipe des cadets à WestPoint, l’orgueilleuse acadé-mie militaire, où l’on va jus-qu’à prétendre que l’histoireest faite par ceux qui y ontétudié.C’est cette école, où la disci-pline confine à l’absurde,sans autre finalité que de tra-vailler l’esprit de corps, et oùl’entraînement y est terrible,qui va le révéler, lui et ses rê-ves de gloire. Arrivé à WestPoint en pleine défaite auVietnam, il n’aura de cessede vouloir laver l’arméeaméricaine de cet affront.Plus tard, à Princeton, il ap-prendra la nécessité de con-fronter les points de vue.Comme soldat, Petraeus vase découvrir parachutistehors pair. En 1976, l’officier,dont la francophilie doitbeaucoup à sa femme –elle afait une thèse sur Mauriac–,décroche son brevet de para-chutisme de l’armée fran-çaise. Et découvre l’exis-tence d’un autre para, legénéral Marcel Bigeard.L’admiration pour l’ancienrésistant et perdant magnifi-que de Dien Bien Phu et sastratégie de contre-insurrec-

tion est immédiate. C’est engrande partie cette doctrinequi lui permettra de sortirl’armée américaine du piègeirakien après des années deguerre menée de façon ab-surde. C’est encore celle-ciqu’il adaptera au bourbierafghan, avec un succèsbeaucoup plus mitigé qu’ilreconnaît volontiers : «Rienn’y est acquis, rien n’y est fa-cile. L’Afghanistan est dur, etdur tout le temps.»Passionnante, parce quenourrie de rencontres sur lesterrains irakien et afghan, labiographie s’achève sur ceterrible constat: après avoirpassé une dizaine d’années àfaire évoluer les doctrinesmilitaires pour les amener àprendre en compte «le ter-reau humain», le général hu-maniste est nommé à la têtede la CIA, dont l’une desprincipales missions est d’as-sassiner à coups de dronesaveugles des terroristes pré-sumés, en violation de toutesles règles internationales. Lachute du héros, à cause d’unebanale liaison, est donc ve-nue à point nommé.

JEAN-PIERRE PERRIN

INVESTIGATIONL’HISTOIREASSASSINESi les Etats ont souvent fait appel à la justice pouréliminer les personnages célèbres qui les gênaient,à travers de grands procès aux verdicts connusd’avance –que l’on se souvienne de Jeanne d’Arc,Fouquet, Marie-Antoinette ou Dreyfus (1) –, lesopposants au pouvoir n’ont pas ces facilités. D’où

le recours moins subtil,mais terriblement efficace,à l’assassinat pour se dé-barrasser des «despotes» etdes «tyrans» afin de chan-ger la face d’un pays. C’estle sujet d’étude du journa-liste Jean-Christophe Buis-son qui, dans un livre froi-dement intitulé Assassinés,revient sur la vie et surtoutla mort d’une quinzaine dechefs d’Etat ou têtes cou-ronnées malheureux.Des «classiques» César,Henri III, Nicolas II ou Sissiaux moins connus: le Con-golais Patrice Lumumba ou

Engelbert Dollfuss (chancelier autrichien, fascistemais antinazi, assassiné par ces derniers en 1934),en passant par Robespierre, Lincoln ou Ceau-sescu… chaque chapitre est élaboré à partir destructures narratives différentes (narration classi-que ou récits à partir du point de vue de la victimeou du bourreau…) dans un compte à rebours fatal–car pour les assassins aussi, les histoires de mortfinissent mal, en général…A l’heure de la surprotection des dirigeants politi-ques et aussi –heureusement– de mœurs moinssauvages dans nombre de pays occidentaux, cetouvrage historique bien mené rappelle ainsi quependant longtemps la première place de l’Etat asouvent rimé avec assassinat.

F.D.(1) «Les Grands Procès de l’histoire», édition Omnibus.Lire «Libération» du 19 janvier.

MÉMENTO

LES CHOIX BDDU CAHIER LIVRESLe maire du Havre retrouvé mort une feuille de ca-nabis en travers du gosier: ambiance mouette pourCommandant Achab. L’Ours à la jambe debois, de Douay et Piatzszek (Casterman). La viepose un lapin, ou Matt Groening avant les Simp-son: Un gros livre d’enfer (Fetjaine). Le grandroux avec une humeur noire, héros des seventiesquébécoises, envoie le napalm : Red Ketchup.L’Intégrale, t.1, de Réal Godbout et Pierre Four-nier (La Pastèque). Autres sons de cloches cana-diens : les blagues de Guy Delisle dans le Guidedu mauvais père (Delcourt) et l’autofiction Sus­ceptible, de Geneviève Castrée (L’Apocalypse).Quand un fan de Carl Barks, l’inventeur du canardle plus riche du monde, prolongeait l’aventureavec profit: la Grande Epopée de Picsou. Inté­grale t.1, de Don Rosa (Glénat). Des hommes dé-plumés et des oiseaux déprimés s’interrogent surle sens de l’existence: Big Questions, de l’Améri-cain Anders Nilsen (L’Association).

ASSASSINÉSde JEAN­CHRISTOPHEBUISSONPerrin, 354 pp., 21 €.

David Petraeus, l’ancien patron de la CIA, le 31 janvier 2012 à Washington DC. PHOTO KAREN BLEIER. AFP

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 COMPRENDRE LE MAG • XVII

Il est incontournable actuellement: Pierre Boilley,historien, spécialiste de l’Afrique subsahariennecontemporaine, du Sahara et des peuples noma-des comme les Touaregs, dirige le Centre d’études

des mondes africains. Carte du Mali à l’appui, ildécrypte les origines historiques du conflit.Quand et comment les frontières du Mali ont-ellesété tracées?Contrairement à ce qu’on entend partout, ellesn’ont pas été tracées à la Conférence de Berlin de1884-1885, où il était principalement question derègles du commerce entre Européens sur les bas-sins des fleuves Congo et Niger. C’est plus tardqu’il a été question des différentes zones d’in-fluence qui se transformeront en frontières. Desmissions de délimitation se rendirent sur le terrainpour les faire passer par des zones où elles étaientacceptées par les populations.Celle avec la Mauritanie serait l’exemple parfait defrontière coloniale…Sur le continent, la majorité des frontières sontd’origine coloniale et, de toute évidence, les fron-tières naturelles n’existent pas. Elles sont décidées

par un pouvoir, même si elles coïncident parfoisavec un fleuve ou une montagne. La frontière ac-tuelle avec la Mauritanie date de 1942, lorsquel’administration française décide de rendre laMauritanie (cette partie du Soudan français) plushomogène «ethniquement». Cette frontière à an-gle droit permettait aux Maures de se retrouver ausein de la même colonie. Celle avec l’Algérie esttracée au cordeau dans les lieux désertiques mais,à l’est, elle devient sinueuse quand elle séparedeux pôles politiques: celui des Touaregs du Hog-gar (Tamanrasset) et celui des Touaregs de Kidal.Si les frontières ne sont pas en cause, quelles sontles racines historiques du conflit?Les segments de frontières raccordés les uns auxautres finissent par créer un espace qui, lui, est ar-tificiel. Celui de l’ex-Soudan français est devenu,sans changer, celui du Mali à l’indépendance. Déjàà l’époque coloniale, la partie nord du Soudanfrançais était considérée comme une zone peuutile, on n’y avait pas découvert de pétrole. Celaa eu un effet pervers et déstabilisant pour la suite:alors qu’au sud on a scolarisé, construit des routes,

des infrastructures, rien ne s’est fait au nord.A la décolonisation, tous les grands leaders indé-pendantistes, puis toutes les élites, étaient du sud.Ainsi, le premier chef d’Etat, Modibo Keita, venaitdu sud. Ce déséquilibre fut encore accentué quandModibo Keita a instauré une politique socialiste etcontré une hiérarchie touareg jugée féodale. Ceuxdu nord ont vu arriver du sud une nouvelle admi-nistration qu’ils ne connaissaient pas, ils ont eul’impression d’être colonisés une seconde fois. Dès1963-1964, une rébellion prit de l’ampleur quandle nord envoya l’armée qui écrasa, non seulementles rebelles, mais aussi la population civile. LeMali, suite à ces événements, a imposé au nord uneadministration militaire et policière jusqu’à la ré-bellion de 1990, avec toutes les humiliations et ex-clusions que cela peut impliquer.Les grandes sécheresses des années 70 et 80 n’ontfait que creuser le fossé. Le sud était pauvre, maisle nord encore plus. Des milliers de jeunes du nordsont donc partis, une minorité en Algérie, mais laplupart en Libye, à l’époque riche et accueillante.Khadafi a alors recruté des Touaregs pour son ar-mée. Ils ont été employés au Tchad, en Palestine…Ils ont profité de cet exil pour s’organiser politi-quement, de façon clandestine, afin d’améliorerleur situation dans le nord du Mali.Un peu comme aujourd’hui?Non, la rébellion touareg des années 90 était inté-grationniste, il n’était pas question d’indépen-dance, mais juste d’acquérir les mêmes droitsqu’au sud: pouvoir entrer dans l’armée, avoir unereprésentation politique, un développement éco-nomique, des routes… Dans le pacte signé en 1991,un statut particulier d’autonomie est accordé, afind’éviter que le nord soit de nouveau administré parl’armée et la police. Ce pacte fut respecté en partieet 3500 combattants touaregs et maures furent in-tégrés dans l’armée. Il y a eu une ouverture politi-que, mais pas de statut particulier, seulement unegrande décentralisation dans tout le pays. Le voletdéveloppement fut juste ébauché, et il n’y a tou-jours pas de routes au nord au-delà de Gao. L’Etatn’a pas réussi à ancrer son nord avec le sud, ne se-rait-ce que symboliquement par une route.Il y eut pourtant des empires très organisés?L’empire du Mali puis l’empire Songhaï furent lapreuve que des entités politiques multiculturellesétaient viables. Le roman national malien est crééà partir de la domination Bambara sur l’empire duMali. C’était l’un des plus puissants et les plus ri-ches. Très décentralisé, la sécurité y régnait, ainsiqu’une certaine prospérité. Il est tombé pour lais-ser la place à l’empire Songhaï au XVe siècle. Lastructure étatique est donc possible dans un en-semble constitué de nomades et de sédentaires,mais seulement si l’Etat est impartial. Ce qui n’amalheureusement pas été le cas au Mali.Quel est le risque de polarisation ethnique?La population malienne a une tradition de coexis-tence entre différents groupes culturels. Mais laméfiance des gens du nord est très grande, c’estle cinquième grand mouvement de rébellion, etchaque répression s’est accompagnée de massa-cres. Ceux du sud considèrent le nord comme unpays étranger. C’était un lieu de relégation. Il yavait d’ailleurs deux grands pénitenciers, dont l’unà Kidal qui fut longtemps une ville fermée. Je n’aipu y pénétrer qu’en 1994, alors que j’allais au Malidepuis les années 70. Rien ne sera réglé sans unegrande conférence regroupant toutes les parties,toutes les populations, et reprenant l’esprit dupacte de 1991 pour faire en sorte qu’il soit appliqué,qu’il y ait enfin un vrai développement au nord,et ce sous garantie internationale.

Recueilli par CATHERINE CALVET

Le Mali a-t-il toujours perdu le nord?

POINTS DE VUE ET CARTES DU MONDE

GEOATLAS - Copyright1998 Graphi-Ogre0 km 100 200 300 400 km

Conakry

Niamey

OuagadougouBamako

Freetown

Tamenghest

KorhogoOdienné

SéguélaBouaké

Bondoukou

Man

Voinjama

Sanniquellie

Bobo Dioulasso

OuahigouyaDori

DiapagaFadaNgourmaKoudougou

Atakpamé

Sokodé

Lama-Kara

Dapango

Nzérékoré

Kankan

Faranah

Labé

MamouKindia

Tambacounda

'Ayoûnel 'Atroûs

KiaNéma

Sélibaby

Kaédi

Aleg

Tidjikja

Atâr

Akjoujt

Fdérik

Bolgatanga

Tamale

Sunyani

Lokoja

Birnin Kebbi

Sokoto

Minna

Llorin

OshogboIbadan

Natitingou

Tahoua

Dosso

TillaberiKayes

Sikasso

Ségou

Mopti

Tombouctou

Gao

Kidal

Makeni

KenemaBo

Tessalit

Abeïbara

Ti-n-Essako

Bourem

Ménaka

Ansongo

Gourma-RharousGoundam

Niafounké

Douentza

Bandiagara

KoroBankas

Djénné

TénenkouNiono

Ké Macina

Barouéli

Bla

SanTominian

Kadiolo

KolondiébaYanfolila

Bougouni

YorossoKoutialaDioïla

Kangaba

Koulikoro

BanambaKolokani

Mourdiah

NaraNioro du Sahel

Diéma

Bafoulabé

KitaKeniéba

NIGERIA

B E N I N

G H A N A

C O T ED ' I V O I R E

T O G O

L I B E R I A

GUINEE

MAURITANIE

ALGERIE

NIGER

B U R K I N A F A S O

K A Y E S

KOULIKORO

SIKASSO

SÉGOU

MOPTI

G A O

T O M B O U C T O U

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LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013XVIII • LE MAG REGARDER

L’INDIGNÉSaine colère que celle de cet internautepiochée telle quelle par Télé Loisirs surTwitter: «La TV g le sentiment que c NOPITIÉ les chiffres dirigent tout malheureu-sement…» L’indignados en question,c’est William Carnimolla, ci-devantmollah du capiton dans l’émission Belletoute nue (M6) où des femmes appren-nent à ne plus se sentir grosses en semettant à poil devant tout le monde.Fallait y penser. Et c’est la possible sup-pression de ce concept pourtant irré-prochable qui indigne notre Carni-molla. Will, notre conseil : sublime tacolère en te mettant à poil, chéri.

L’INSPIRÉEDans la nouvelle série de France 2 TigerLily (Libération de mercredi), Lio campeMuriel, lesbienne, ancienne star durock des années 80 et animatrice téléqui se fait virer après son coming out endirect. Un rôle pour lequel Lio déclareà Télé 2 Semaines s’être inspirée d’AnneSinclair. Alors bon, soit c’est une supervacherie, soit elle confond avec Sin-clair, le chanteur.

L’IRRITÉAh tiens, Jean-Luc Ronchonchon dansles Instants télé? C’est que le leader duFront de gauche s’est plaint auprès deRémy Pflimlin, président de France Té-lévisions, avec copie au Conseil supé-rieur de l’audiovisuel (CSA), d’un docusur Robespierre diffusé sur France 3,«offensant et grossier plaidoyer à chargecontre la Révolution de 1789, truffé d’er-reurs et dangereusement orienté vers unebanalisation de l’idée de génocide». Biendit, Jean-Luc, mais jette donc un œil auGrand Plongeon, pour voir quel sort TF1a fait subir à la mémoire de Marat.

MAUVAISENOUVELLEMisère de l’après-TF1, Thomas Huguesl’a confessé à Télé 2 Semaines : «AFrance 5, je suis plus qu’heureux.»

MAUVAISENOUVELLEMisère de l’après-TF1, Laurence Ferrarise produira dimanche dans une salletoulousaine pour une lecture de Babar.

INSTANTS TÉLÉ

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6

La cérémonie des rosses

BOURRE­PAF

Par RAPHAËL GARRIGOS et ISABELLE ROBERTS

Adriano «El Bachelojo», ou le retour du gentleman cabrioleur sur NT1. JULIEN KNAUB. TMC

Perte d’un être cher, plan social, dé-ménagement, divorce, brusque ap-parition d’une frange au front de Mi-chelle Obama… Il est des moments

où la vie vous saute à la gueule. Et là, devantvos yeux exorbités façon Orange mécaniquepar cet accident du destin, défile votreexistence, 25 images/seconde, la vie, lamort, la mort, la vie, intense essorage réti-nien dont vous sortez rompu. Eh bien nous,cette semaine, parcourant Télé Poche d’unemain, nous grattant la tête de l’autre, pre-nant des notes d’une troisième et buvant uncafé froid de la dernière (n’oubliez pas quele Dr Garriberts a quatre mains), la vie nousa sauté à la gueule. Comme un court-circuitneuronal, on a tout vu. Ce samedi soir surTF1? The Voice 2. Lundi sur M6? Top Chef 4.Lundi encore, mais sur NT1 ? Bachelor, legentleman célibataire 4, après trois éditionssur la Six. Et qu’a-t-on appris cette se-maine? Que D8 allait, après quatre saisonssur M6, nous balancer un Popstars 5. Qu’a-t-on regardé mardi toujours sur D8? Nou-velle Star. 9, oui 9. Et jeudi sur NRJ12? StarAcademy. 9 itou. Et nous, au cours de cettemisérable existence, combien de foisavons-nous, année après année, écrit surTop Chef, Bachelor, Starac ? L’heure d’uneintrospection est venue : voici Garri-berts 33, soit l’addition de toutes les Nou-vellevoicepopstaracotopbachelor.

133 fois «Star Academy»C’est à la mode, démarrons par un petit trotà data, un plongeon dans nos propres don-nées. En croisant, sur un logiciel de la Nasa,tous les articles écrits par nos pommes avecles termes «Bachelor», «Starac», etc.,nous parvenons à ce résultat (gaffe, ce sontles simples occurrences desdits termesdans les archives de Libération, pas forcé-ment des articles entièrement consacrés àces œuvres audiovisuelles). A 40 reprises,nous avons trempé nos plumes dans cetteplaie de Bachelor depuis son apparitionen 2003. Et 133 fois avons-nous écrit «StarAcademy» dans Libération (désolés, JipéSartre). Bon, avec les dédéfis, forcément,ça douille vite : 154 mentions de NouvelleStar. Quatre saisons seulement mais tout demême 51 occurrences de Popstars (faut direque c’était bien, Popstars, enfin pas la sai-son avec Sheryfa Luna). Pareil, ça n’a com-mencé que l’année dernière, mais nousavons déjà parlé de The Voice à 26 reprises,mais 16 fois seulement de Top Chef. Bizarre,des fois, on ne se comprend pas nous-mê-mes. Avant de nous vouer aux gémonies etde nous dénoncer à la Haute Autorité dujournalimse, sachez que, par comparaison,David Pujadas apparaît dans 121 articles,Patrick Poivre d’Arvor dans 144 et le Con-seil supérieur de l’audiovisuel (CSA) dans492 (hé ben). Et «zob» dans 4 (mais bon).

«Je kiiiffe les moustaaaches»Après cette analyse pointue des chiffres, undécryptage sémantique s’impose en com-mençant, fraîcheur de l’arrivage oblige, parBachelor, de retour sur NT1 depuis lundi.Les avons-nous aimés, ces beaux et riches

célibataires qui, à la faveur de la missionhumanitaire de M6, devaient trouver uneépouse parmi une vingtaine de candidatesau terme d’émouvantes cérémonies de larose. «Trois neuneus», écrivîmes-nous desBachelor Olivier, Steven et Karl, nous attar-dant sur le premier: «De grandes oreilles, lementon en galoche et l’œil bovino-ferro-viaire». Et les prétendantes qui, à nous re-lire, voulaient voir «leur prénom inscrit enpetites lettres d’argent sur la Carte bleue dumonsieur»? «Oie blanche», «gourgandinesen lamé en or», «brochette de dindes»,«garce», voire «T-Rex de la drague». Joie:avec le nouveau Bachelor, rien n’a changé.Lui, Adriano, est espagnol, comme l’indi-que son accent («Tou est touyours aussibelle»), nous le qualifierons donc d’«El Ba-chelojo». Elles, pêchées au lancer dans lebanc de morues où nagent les candidatesde télé-réalité de TF1, maison mère de NT1:des seins, des fesses, des haines, des Debo-rah. Et déjà des phrases cultes : «Il a desmoustaaaches ! Il a des moustaaaches ! Jekiiiffe les moustaaaches !» A prononcer enfaisant pipi dans son string panthère doré.

Ventriloque de nulle partBien sûr, à se regarder ainsi le nombril dansle rétroviseur, des remords nous saisissent– et quelques crampes aussi. Qui nous aautorisés à affirmer que les finalistes de StarAcademy 3, Elodie et Michal, «chantentcomme des nouilles»? Qu’ils ont «autant decharisme qu’une huître»? Qu’ils partagent«le côté lymphatique et baveux» des escar-gots? Et de quel droit avons-nous, au seulprétexte qu’il se disait «ventriloque du cul»,traité le staracadémycien Jipé de «philis-tin»? C’était rétrospectivement totalement

injuste au vu de l’actuelle neuvième saison,diffusée sur NRJ 12. Là, on ne chante pluscomme des nouilles mais, telle Nancy,comme un canard sous hélium. Ici, Tonyn’est ventriloque de nulle part et les sonssortant de sa bouche sont tels qu’aucun Ta-tayet n’assumerait le play-back. Là, pas deNikos tentant de pansementiser sa présen-tation défaillante à coups de «jusqu’aubout», mais une Tonya Kinzinger crampon-née à son prompteur au point de déclamerles indications scéniques qui y sont inscri-tes. Ici, walou de Kamel Ouali, mais unHaspop dont nous avons déjà raillé le pseu-donyme gastrique. Et encore toutes nos ex-cuses à Georges-Alain, bisous.

Marxisto­hypeQuant à Nouvelle Star, il faudra un jour unechambre spéciale au tribunal de La Hayepour juger notre coupable tendresse à sonendroit. Des «chanteurs moins crève-tym-pans» qu’à Starac, osions-nous alors, allantjusqu’à célébrer «les chante-petit» de M6dans une allégorie marxisto-hype du télé-crochet. Ah, ils sont beaux, les journaleux,maintenant que Nouvelle Star, désormaissur D8, est incapable d’aligner deux pres-tations sans faussetés. Qu’on y chante duCatherine Lara et du Gérard Lenorman aupremier degré quand nous nous extasiionsdu troisième dont Julien Doré parait Dalida.Nous voilà bien, aujourd’hui contraints dereconnaître à Benjamin Castaldi la classed’un Marcello face à l’actuel présentateur,Cyril Hanouna. Et, nous tancez-vous, cettelamentable connivence à l’endroit de celuiaffublé du ridicule sobriquet de Dédé? Non,quand même pas, nous sommes encoredans le déni. Enfin, dans le dédéni. •

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 CHRONIQUES LE MAG • XIX

Nous avons, êtres humains, unetelle passion pour l’obéissanceque, comparés à nous, les cani-ches peuvent faire figure de re-

belles. Si en temps de guerre ou de crisepolitique majeure, nous sommes capa-bles de devenir les plus horribles des as-sassins et des tortionnaires, ce n’est pasparce que nous sommes «mauvais»,comme certains esprits calcifiés par lemoralisme le prétendent, mais parceque nous sommes obéissants. Nousobéissons même aux bourreaux quivont nous assassiner, nous et nos en-fants, sans protester. Notre aptitude àobéir dépasse de loin le souci que nousprêtons à nos intérêts vitaux les plusélémentaires.Oui, la passion d’obéir est chez l’espècehumaine beaucoup plus forte que sonégoïsme. L’humanité devrait être défi-nie par sa capacité inouïe à l’obéissanceplus que par son pouvoir de raisonner.Ou, plutôt, par un terrible instinct quila pousse à mettre son pouvoir de rai-sonner au service de l’obéissance, cequi explique que le génie est rare. En-chaînée au cadre étroit des normes aux-quelles nous obéissons, la pensée nepeut être que chétive, grise et uniforme.La perception que nous avons de nous-mêmes et du monde est davantage dé-terminée par la forme de nos cages quepar la puissance de notre raison souve-raine. C’est pourquoi le pouvoir de ré-sister peut être considéré comme unmiracle et comme un mystère.C’est pour l’analyser que Pierre Bayardlui a consacré son bouleversant essaiAurais-je été résistant ou bourreau ?publié aux Editions de Minuit (Libéra-tion du 17 janvier). En s’appuyant surun voyage fictif dans une autre vie quela sienne pendant l’occupation alle-mande, Pierre Bayard analyse la «bifur-cation» qui s’opère dans certaines viesfaisant que, soudain, un être humain,au lieu d’obéir aux normes construitespar d’autres, devient inventeur, créa-teur, bâtisseur de règles auxquelles il vas’assujettir. Il sort alors de son «cadre»vital et devient un autre. Comme sicette faculté si rare et si précieuse per-mettait aux humains non seulement derésister, d’inventer de nouveaux pro-blèmes, d’avoir du courage, mais aussi,dans le même temps, d’accoucherd’eux-mêmes. Et ce, non pas pouravoir des récompenses économiques oude la reconnaissance sociale, mais pouréprouver le vertige métaphysiqued’être un homme et non pas un canicheintelligent.De tous les exemples que Pierre Bayardétudie, celui d’Aristides de Sousa Men-des, consul à Bordeaux en 1940, est leplus éloquent. Après avoir compris,grâce aux avertissements d’un rabbin

qui était son ami, que les Juifs couraientle risque d’être exterminés, il signa desmilliers de visas pour les sauver en dé-sobéissant aux ordres écrits de Salazar.Et même après que ce dernier l’eut ré-voqué de ses fonctions, Sousa Mendescontinua de signer des visas comme unautomate obéissant aux ordres qu’ils’était lui-même donnés. Mais avant deprendre cette décision de désobéir,Sousa Mendes se sentit très fatigué etalla se coucher. Il dormit pendant troisjours et trois nuits, et c’est à son réveilqu’il était devenu un autre. Non plus lemodeste Sousa Mendes que sa mèreavait mis au monde, mais celui qui allaitsauver de la mort 30 000 personnesalors que le destin funeste des Juifsn’était pas encore connu. Il a vu ce queles autres ne pouvaient voir, aveuglésqu’ils étaient par la peur et la paresse,ces deux filles hideuses de l’obéissance.Grâce à sa «bifurcation», Sousa Mendesétait en mesure de comprendre la por-tée du plan des bourreaux.Si ce livre est si puissant, c’est parcequ’il nous permet non pas de nousaveugler par les actions héroïques decertaines personnes, mais plutôt d’exa-miner d’un point de vue presque formella nature de leur geste. Que signifie ré-sister, désobéir, alors qu’aucune auto-rité, qu’aucun groupe ne nous sert deréférence? Et ces questions valent pourles cas extrêmes comme celui de la Se-conde Guerre mondiale, mais aussi pourles sociétés pacifiques comme la nôtre.Des sociétés où les injustices et les souf-frances sont moins graves, mais où ellesexistent tout autant à cause de notrepassion pour l’obéissance. Des sociétésqui, paradoxalement, se sont donnécomme régime politique la démocratie,régime où le peuple et donc chacund’entre nous est censé inventer les nor-mes auxquelles il obéit.Mais ce peuple ne sait même pas que cesnormes – de celles qui distribuent desrichesses à celles qui organisent les fa-milles – ne sont pas nécessaires. Cepeuple ignore que la presque totalité desnormes, aussi bien juridiques que so-ciales, sont modifiables. Plus encore. Aforce d’obéir, ce peuple ne sait mêmeplus ce qui le fait vraiment souffrir.Une société qui prendrait la démocratieau sérieux devrait faire en sorte queprolifèrent des individus comme SousaMendes. Ce serait une société terrible-ment difficile à gouverner, et par mo-ments fort désagréable à vivre. Mais ils’agirait d’une telle révolution, aussibien politique que métaphysique, dansl’histoire humaine que même les chiensse mettraient à parler. L’on découvrirace jour-là que s’ils se sont tus jus-qu’alors, c’est pour mieux obéir à leursmaîtres. •

L’obéissance si vile

À CONTRESENS

Par MARCELA IACUB

Le consul Sousa Mendes et le rabbin Haïm Kruger vers 1940. COMITÉ SOUSA MENDES. FAMILLE DE SOUSA MENDES

275 000 nouveaux auditeurs* !Merci d’être près de 4 millions* à nous écouter

francebleu.fr

* Source Médiamétrie enquête 126 000, nov-déc 2012 / 2011, ensemble des 13 ans et plus, lundi/vendredi, 5 h-24 h.

vu d’ici

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013XX • LE MAG JE ME SOUVIENS

et usait les patiences. Une méthode de pousse-au-crime,mais une méthode tout de même, longtemps rodée sur lesuns et les autres. Elle atteindra son paroxysme sur A nosamours, où Pialat ne se contenta plus de composer à partirdes alliances et des divisions, mais s’en servit pour faire ren-

trer par la fenêtre (d’habitudeclôturée) de la maison-fiction desétats (de crise) littéralement do-cumentaires.Le film, vingt ans plus tard, con-tinue d’influencer tout le jeunecinéma français. Sont devenues

des cas d’école les scènes d’hystérie entre Evelyne Ker (quijoue la mère) et Sandrine Bonnaire, que l’on dit «non simu-lées» (encore qu’Evelyne Ker l’ait toujours nié), précisémentparce que Pialat, sur le set, oubliait volontairement de s’oc-cuper de l’actrice pour chouchouter la toute jeune Bonnaire,

obtenant à terme l’impressionnant résultat escompté. Antho-logique, surtout, l’avant-dernière scène du film où, alors quese déroule une scène de table «à la française», Maurice Pialat(qui jouait le rôle du père volatilisé) surgit au beau milieu dela séquence, sans que quiconque parmi ses acteurs n’eût étéprévenu, la scène ne figurant ni dans le scénario ni sur le plande tournage. Profitant de la surprise, il règle des comptes avecles personnages joués par Dominique Besnehard (le frère),le critique de cinéma (et aujourd’hui producteur) PhilippeCarcassonne (en beau-frère lettré), Cyril Collard (en futurcocu du moment), SandrineBonnaire et Evelyne Ker, àmoins que ça ne soit avec lespersonnes elles-mêmes, lediscours évoluant toujours àdeux niveaux.Les échanges de regards pa-niqués entre Carcassonne etBesnehard, la colère de Ker(«Fous le camp, qu’est-ce quetu viens nous emmerder!»), lemalaise généralisé portentl’ambiguïté à un niveau depuissance encore inédit enFrance (les Etats-Unisavaient Cassavetes). Pialattouchant là physiquement,sensuellement, à ce qu’AlainPhilippon (dans le Blanc desorigines, éditions YellowNow, 2002) décrit commequelque chose «d’arraché aucinéma», où Pialat est «à lafois le maître et la proie desforces qu’il a mises en mouve-ment». Un chaos organiséqui a longtemps (de Nous nevieillirons pas ensemble à Po-lice) maturé, contaminantchez lui le montage (les fauxraccords dans le mouvementde Yann Dedet), la photo(avec ses scories : caméraportée-tremblée, image gra-nuleuse, accidents lumi-neux, un cadre à la fois serré,obstrué par le corps de l’ac-teur, mais se réservant tou-jours un angle pour que sur-gisse un bouleversement,une irruption), le jeu des ac-teurs (Depardieu, Yanne,Bonnaire, en alter ego mar-lous-voyelles).A partir de Sous le soleil deSatan (1987), le combat dePialat par corps à corps, quel’on peut juger gagné parKO-chaos, se fait métaphy-sique : les films deviennentles témoins moins charnels de la partie mystique que l’artistedésormais préfère livrer avec le cosmos. La solitude rempla-çant tout, inutile de rejouer un méthodique «avec les uns,contre les autres». Les trois derniers Pialat sont des films pré-posthumes. L’odeur de soufre a froidi, c’est l’intérieur de lamaison qui, in fine, brûle. •

P ersonne n’a mieux résumé la méthode Pialat queJean Eustache. Là où, samedi, les télés se sont répan-dues sur l’exceptionnel caractère de chieur de Pialat,l’auteur de la Maman et la

Putain n’aura eu besoin, en fé-vrier 1981, que d’une phrase pourvoir Maurice Pialat par-delà l’ho-rizon de sa colère. Une phrase sim-ple, une phrase de cinéaste : «Onpeut imaginer qu’il joue les acteursles uns par rapport aux autres.»Il est de notoriété publique que, sur ses tournages, Pialatgueulait, faisait l’enfer, distribuait les gifles, balançait lesinsultes, virait acteurs, techniciens, figurants, brisait lesmonteurs (dix sur A nos amours, en 1983), cassait les pieds

Par PHILIPPE AZOURY (Libération du 13 janvier 2003).

Caméra portée-tremblée et cadreserré mais se réservant toujoursun angle pour que surgisse unbouleversement, une irruption.

Dans lesarchives de«Libé», il y

a dix ans.Célèbre pour

ses colères,sa directionaffective et

musclée,MauricePialat a

révélé ouconfirmé

deuxgénérations

d’acteurs.Le cinéaste

s’est éteint àson domicile

parisien àl’âge de77 ans.

Chaos sur le plateau

FIGURETUTÉLAIRELa disparition, il y a dixans, de Maurice Pialatlaissait le cinémafrançais orphelin deson père symboliquele plus puissant.Comme l’expliquaitce jour­là à Libérationson producteur DanielToscan du Plantier(qui devait lui aussidisparaître un moisplus tard) : «Noussommes aujourd’huitous orphelins de cepère qui nous répétaitne pas vouloirle devenir. Le voilàdésormais padrepadrone de toute lafamille disparate ducinéma, à la façon d’unRossellini en Italie etd’un Renoir en France,ses seules vraiesréférences.»Depuis, Maurice Pialatest lui­même devenuune référence,revendiquée par toutun pan du cinémafrançais. Son influencen’a cessé de croîtreauprès d’auteurs aussidivers que CédricKahn, Bruno Dumontou Laurent Achard,mais aussi auprèsde femmes cinéastes :Patricia Mazuy,Noémie Lvovsky,Catherine Breillat…O.St

les étudiantsont enfin leur WEBMEDIA !

francecultureplus.fr

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O n le croyait enterré: il remonte à lasurface. Le sulfureux dossier dugaz de schiste a été rouvert jeudipar l’Office parlementaire d’éva-

luation des choix scientifiques ettechnologiques (Opecst) qui adonné son feu vert pour «évaluerles techniques d’extraction alternatives à lafracturation hydraulique», interdite en Francedepuis juillet 2011. Chargés du rapport? Ledéputé (PS) Christian Bataille, spécialiste dunucléaire ; le sénateur (UMP) Jean-ClaudeLenoir, cadre d’EDF. Ils estiment (commebeaucoup à «tous les niveaux du pouvoir»,selon Lenoir) «précipitée» la loi de 2011. Etferraillent contre «l’osbcurantisme» d’un mo-ratoire qui interdit de «s’intéresser aux res-sources de notre sous-sol». Le ton est donné…L’Opecst est-il le lieu où «les lobbys sont om-niprésents», voire un «repaire de scientistes»,comme l’assurent Michèle Rivasi et DenisBaupin, d’Europe Ecologie-les Verts(EE-LV) ? «Un lieu où les élus prennent leursresponsabilités et dont les rapports ont toujoursfait autorité», élude Lenoir.

LE GOUVERNEMENT LOUVOIE­T­IL ?Les députés de l’Opecst surfent sur les ambi-guïtés de l’exécutif. «Il n’y a pas eu de syn-chronisation, mais le bon sens l’a emporté»,souffle Lenoir. Dès le 22 août, Jean-Marc Ay-rault se dit «favorable à un débat public» sur«les solutions non polluantes». Le 15 septem-

bre, François Hollande rejette sept «demandesde permis», au motif que «personne ne peutaffirmer [que la fracturation] est exempte de ris-ques lourds». Deux jours plus tard, bémol. Sonministre du Redressement productif, ArnaudMontebourg, estime «que le gaz de schiste»n’est «pas condamné en soi»: «si la recherche

évolue», il faudra en reparler. Ceque fait, le 5 novembre, le rapportGallois sur la compétitivité. Illico,

Matignon annonce que «cette proposition n’estpas retenue»: «La ligne édictée par le présidentde la République reste inchangée.» Maisle 13 novembre, lui-même rouvre le débat:«Je laisse les entreprises, les chercheurs tra-

vailler. Et je prendrais mes responsabilités si une[nouvelle] technique apparaît.» La veille,l’Agence internationale de l’énergie publiaitun rapport glorifiant l’impact économique dugaz de schiste aux Etats-Unis…

EXISTE­T­IL DES ALTERNATIVESÀ LA FRACTURATION HYDRAULIQUE ?Tout dépend de la définition retenue… Lestechniques vraiment différentes (sans injec-tion d’eau ni de produits chimiques) neseront pas opérationnelles avant «une dizained’années», explique le Pr Gilles Pijaudier-Ca-bot, chercheur à l’université de Pau. Son laboa travaillé pendant six ans avec Total sur lafracturation de la roche par arc électrique,jusqu’à ce que le pétrolier annonce, le 11 jan-vier, que la technologie n’était pas encoremûre. D’autres pistes sont à l’étude, commele chauffage, l’utilisation de microchargesexplosives ou l’injection de gaz. Mais elles nesont pas encore au point ou peuvent poser

problème (stockage de gaz en surface). Lesdéputés de l’Opecst classent, eux, parmi les«alternatives» l’«amélioration» de la fractu-ration hydraulique. Pour convaincre les poli-tiques et les citoyens, les industrielstravaillent d’arrache-pied à la rendre pluspropre (réduction de la consommation d’eau,retraitement, remplacement des additifschimiques, etc.). Plusieurs briques technolo-giques sont au point. Bruno Courme, direc-teur Europe des gaz de schiste chez Total,assure que des améliorations significativessont possibles «d’ici trois à cinq ans».

DE NOUVEAUX REMOUS EN PERSPECTIVEAU SEIN DE LA GAUCHE ?Qu’elle soit justifiée ou non sur le plan envi-ronnemental, une éventuelle réhabilitationde la fracturation hydraulique ferait hurler lesdétracteurs des gaz de schiste. S’ils s’y oppo-sent, c’est avant tout parce que cet hydrocar-bure bon marché encouragerait la consom-mation d’énergie fossile, donc leréchauffement climatique. «Mieux vaut inves-tir dans le renouvelable», indique Denis Bau-pin. Qu’ils émargent au PS ou chez EE-LV, lesopposants estiment donc qu’il est inutile deconsacrer des années à chercher d’hypothé-tiques alternatives à la fracturation. «On perddu temps, on crée de la confusion et des tensionsinutiles au sein de la majorité», déplore l’éluécologiste François de Rugy.Personne ne doute des conclusions du futurrapport des deux députés, dont la sénatrice(PS) Laurence Rossignol dénonce le «voile desubjectivité»: «Leur mission, c’est d’accréditerl’idée dans le grand public que le problème estuniquement technique, alors qu’il est écologi-que, donc politique.» Chez Total, on partagel’idée qu’une discussion technique ne suffitpas. Et qu’il faut d’abord un débat pour sa-voir si les Français veulent ou non exploitercette nouvelle ressource. •

EAU GAZEAU

NAPPE PHRÉATIQUE

De l'eau, du sable et des détergents sont injectés dans le conduit sous haute pression afin de fracturer la roche et libérer le gaz.

Stockage du gaz, du sable et de l'eauSystème de dépollution

des matériaux utilisés

UNEINFRASTRUCTURETRÈSLOURDE

FRACTUREDELAROCHE

LAFRACTURATIONHYDRAULIQUE

Le mélange gaz de schiste et eau remonte à la surface par le puits. Il peut contenir sel, métaux lourds et éléments radioactifs, sources de pollution pour la nappe phréatique.

Les schistes sont des roches à l'aspect feuilleté lorsqu’elles sont situées entre 2 000 et 3 000 mètres de profondeur, elles peuvent contenir des gaz et du pétrole dans leurs pores.

Par LAURE BRETTON, CHRISTIANLOSSON et YANN PHILIPPIN

DÉCRYPTAGE

Deux députés, jugés proches des industrielspar plusieurs élus, sont chargés d’évaluerles techniques alternatives d’extraction.

Legazdeschisterestedansl’air

REPÈRE

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LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 201314 • ECONOMIE

+1,10 % / 3 773,53 PTS2 792 853 330€ -13,85%

STMICROELECTRONI.MICHELINGEMALTO

Les 3 plus fortesUNIBAIL-RODAMCOVEOLIA ENVIRON.

Les 2 plus basses

+1,01 %14 000,23+1,08 %3 175,91+1,12 %6 347,24

+0,47 %11 191,34

Le Crédit agricole paie le prix de sesdérives des années 2000. La banquea annoncé vendredi une dépréciationdu montant de ses très nombreux ac-tifs achetés au prix fort durant la bullefinancière. Ses comptes 2012, qui se-ront publiés intégralement le 20 fé-vrier, intégreront une perte de2,5 milliards d’euros. Celle-ci est dueà une réévaluation à la baisse de la va-

leur comptable de sa banque de fi-nancement et d’investissement, de safiliale en courtage Newedge, de sonactivité de crédit à la consommation,ainsi que de ses filiales en banque dedétail en Italie et au Portugal. Celas’ajoute à des éléments exceptionnelsde 1,3 milliard qui vont aussi affecterses résultats. Le groupe précise queces charges «n’affectent ni sa solvabi-

lité ni sa liquidité» et sont «sans impactsur la trésorerie, celle-ci ayant été dé-caissée lors de l’acquisition des sociétésconcernées». Sur l’année 2012, laperte devrait être record (a priori plusde 5 milliards). Au troisième trimes-tre, la banque avait déjà annoncé uneperte de 2,5 milliards d’euros, égale-ment due à des dépréciations d’actifs.

N.Co.

G À CHAUD EN DÉPRÉCIANT SES ACTIFS, LA BANQUE ESSUIE UNE FORTE PERTE

Le Crédit agricole solde la bulle financière

A l’heure où la Frances’apprête à voter uneloi qui ne gêne en rien

les banques (Libération dejeudi), les Pays-Bas mon-trent qu’une politique beau-coup plus ferme est possible.Le gouvernement néerlan-dais a annoncé vendrediqu’il nationalisait en urgencele quatrième établissementfinancier du pays, pour lesauver de la faillite. Et sur-tout qu’il allait expropriersans indemnisation les ac-tionnaires et certains créan-ciers de la banque.L’expropriation, cette me-sure d’inspiration marxiste,est mise en œuvre par unpays européen, de plus di-rigé par un gouvernement li-béral.L’établissement en questions’appelle SNS Reaal. Il estplombé par sa filiale immo-bilière, Property Finance, quia accumulé les pertes à causede sa politique laxiste en ma-

tière de prêts. La banquecentrale néerlandaise luiavait donné jusqu’au 31 jan-vier pour redresser sa situa-tion, en s’adossant à ungroupe privé. Faute de solu-tion à cette date, le gouver-nement a décidé de la natio-naliser.Cela va coûter à l’Etat néer-landais 3,7 milliards d’euros.C’est Jeroen Dijsselbloem, leministre des Finances etnouveau patron de l’Euro-groupe, qui a annoncé l’opé-ration. «Je peux comprendrela réticence des gens quand onvoit qu’une grande sommed’argent est nécessaire poursauver une banque, surtoutalors que nous traversons unepériode financièrement diffi-cile», a déclaré le nouveau«patron» des ministres desFinances de la zone euro.Du coup, pas question queles contribuables assumentseuls la facture. Comme l’aajouté Dijsselbloem, l’Etat a

imposé au privé de contri-buer à hauteur de 2 milliardsd’euros. Les banques néer-landaises devront verser unmilliard, via un impôt ex-ceptionnel en 2014. Et, envertu de la nouvelle loi dite«d’intervention» (adoptée enjuin 2012), les actionnaires etles détenteurs de certainesobligations (dont le rem-boursement n’est pas priori-taire) seront expropriés. Cequi permettra à l’Etat d’éco-nomiser un milliard supplé-mentaire.L’opération risque cependantd’être contestée. L’Associa-tion néerlandaise des inves-tisseurs envisage de saisir lajustice : «Je suis choqué etabasourdi, a déclaré son di-recteur, Jan Maarten Slagter.Nous soutenons le principe queles investisseurs prennent desrisques et l’idée d’un partagedes pertes. Mais pas quandl’Etat intervient comme cela.»

NICOLAS CORI

Banques: lesPays-Basosentl’expropriationFINANCE Le gouvernement néerlandais a choiside nationaliser sans indemnisation SNS Reaal.

Arnaud Montebourg est décidément compréhensif avecRenault, dont l’Etat est le premier actionnaire avec 15%du capital. Dans un entretien vendredi à la Voix du Nord,le ministre du Redressement productif a encouragéles syndicats à signer un accord de compétitivitéafin d’éviter la fermeture d’usines en France, commele menace la direction. «Ce sont des propositions quipeuvent être discutées mais qui me paraissent être,par rapport aux risques que court l’industrie françaiseet européenne, des efforts modérés», a­t­il déclaré alorsqu’il était interrogé sur le gel des salaires, la plus grandeproductivité et la mobilité prônée par le constructeurautomobile. Et de conseiller aux partenaires sociauxde «s’emparer de toutes les possibilités de cet accordpour négocier des contreparties sérieuses, des élémentsde protection supplémentaires». Si Arnaud Montebourgespère limiter la casse chez Renault, la dégringoladedu marché français se poursuit avec un nouveau reculde 15% des ventes de véhicules neufs en janvier.VICTOR BROUARD et MOÏSETTE LOUBELO PHOTO AFP

ARNAUD MONTEBOURG PRESSE LESSYNDICATS DE SIGNER CHEZ RENAULT

LES GENS

DETTE Le Congrès américaina approuvé le report jusqu’enmai de l’échéance du plafondde la dette, donnant plus detrois mois aux démocrates etrépublicains pour s’entendresur le budget.

LUXE Le Qatar a finalisé lerachat de 4 grands noms del’hôtellerie française, l’Hôteldu Louvre et le Concorde La-fayette à Paris, le Martinez àCannes et le Palais de la Mé-diterranée à Nice. Il a confié

leur gestion à l’américainHyatt Hotels.

EMPLOI Le constructeur in-formatique HP va supprimer850 postes sur 1 100 à Rüs-selsheim en Allemagne.

ÉNERGIE Le géant gazierrusse Gazprom va abaisserses tarifs pour ses clientseuropéens affectés par lacrise avec un recul attendude 8 % de ses prix pour laFrance.

«On peutconsidérer qu’ona déjà fait beaucoupd’efforts et être à3,5% en fin d’annéeplutôt qu’à 3% neme choquerait pas.Je pense que c’estquelque chose quipeut être acceptablepour l’économie.»François Baroinancien ministre (UMP)de l’Economie, à proposdu déficit public, vendredi

En Belgique, certains ontdéjà sorti la calculette pourchiffrer combien la succes­sion de Bernard Arnaultpourrait rapporter au platpays. «S’il y a des taxes del’ordre de 7%, qui sont lestaxes pour les donationsprivées, au moment où illéguera cet argent à sesenfants, cela représenteraplus d’un milliard d’eurospour Bruxelles, si cettedonation y est établie», lan­çait vendredi le députécentriste Georges Dallema­gne, président de la com­mission des naturalisations,le groupe de parlementai­res qui va statuer sur lademande de nationalitébelge du patron de LVMH.Mais rien ne dit que lacapitale belge, par ailleursfort désargentée, va tou­cher le jackpot. Il faudraiten effet que la quatrièmefortune mondiale –dontLibération a révélé le trans­fert de son patrimoine per­sonnel en Belgique–se domicilie fiscalementoutre­Quiévrain. Or, il ajuré qu’il continuerait àpayer ses impôts enFrance. Sans parvenir àempêcher le plat pays desaliver à l’idée d’accueillirson héritage.

BERNARDARNAULT FAITSALIVERBRUXELLES

L’HISTOIRE

145000emplois seraient créés grâce au crédit d’impôt compé­titivité d’ici à 2017, selon l’Observatoire français desconjonctures économiques (OFCE). C’est deux foismoins que la prévision du gouvernement qui anticipe lacréation de 300000 emplois sur cinq ans.

Le ministre des Finances, Jeroen Dijsselbloem, vendredi à La Haye. PHOTO REUTERS

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 ECONOMIEXPRESSO • 15

SixNations:lescolossesdeRomeInvaincus cet automne, les Bleusdébutent dimanche en Italieun Tournoi dont ils sont,avec l’Angleterre, les favoris.Par GILLES RENAULT

M i-janvier, alors qu’onen était encore àl’heure des spécula-tions, le sélectionneur

du XV de France, Philippe Saint-André (PSA), se demandait dansquel état de fraîcheur il récupéreraitdes joueurs qui, pour l’essentiel,avaient pété le feu lors des test-matchs de novembre. De fait, aprèsl’enchaînement Top 14 etH Cup, il y a eu un peu decasse. Touché aux ischio-jambiers, le Toulousain VincentClerc ratera (au moins) le matchd’ouverture du Tournoi des six na-tions. Quant à l’arrière castraisBrice Dulin, l’étoile montante durugby hexagonal, opéré des adduc-teurs, il devra patienter jus-qu’en 2014 (tout comme son collè-gue biarrot Wenceslas Lauret) pourdécouvrir la ferveur et le charme decette épreuve. Fulgence Ouedraogoet Louis Picamoles, eux, ont rejointle groupe en boitillant, mais cela neles empêche pas d’être embeddedpour l’édition 2013 qui démarre ceweek-end.

LAPALISSADE. Dernier baromètrefiable, la série des test-matchs denovembre (une des deux confron-tations annuelles entre hémisphè-

res nord et sud) a mis du baumeau cœur à plusieurs équipes. L’Ita-lie a donné des sueurs froides àl’Australie (19-22). L’Irlande a faitquasiment jeu égal avec l’Afriquedu Sud et pulvérisé l’Argentine. Etl’Angleterre a laissé tout le mondepantois en terrassant la Nouvelle-Zélande avec la manière (38-21).Mais une seule nation européenneest restée invaincue cet automne:la France qui, à défaut d’avoir défié

les Blacks et les Springboks,a dompté les deux adver-saires qui avaient pris la

sale manie de lui procurer leplus de désillusions: l’Australie etl’Argentine. Classés meilleureéquipe du Vieux Continent au clas-sement IRB (5e), voici les Bleusaffublés d’un statut de favoris quePhilippe Saint-André rechigne àendosser. Par «humilité» et aussiparce que, les années impaires, laFrance se déplace en Angleterreet en Irlande.En outre, observe PSA, «l’Italie con-tinue de se rapprocher du très haut ni-veau [cela fait plus de dix ans que lamême phrase circule, ndlr]. Et jedoute fort qu’après sept défaites d’af-filée, le pays de Galles [affaibli parune dizaine de blessés] aitl’intention de continuer longtempsainsi». Manque juste un mot sympapour l’Ecosse, que le rugby du

XXIe siècle a réduit au rôle de figu-rant –et ça n’est pas le remplace-ment du sélectionneur Andy Ro-binson par l’Australien ScottJohnson qui devrait suffire à inver-ser la tendance –, et l’on pourraporter un toast à cette lapalissadedu sport voulant qu’il ne faut jamaissous-estimer un adversaire.Cela dit, personne ne comprendraitque la France foire la compétition.L’an dernier, elle avait déçu en ter-minant à une piètre quatrièmeplace. «Nous avions sans doute voulutransmettre trop d’informations à ungroupe qui sortait d’une Coupe dumonde très dure sur le plan physiqueet mental», plaide aujourd’hui Phi-lippe Saint-André qui a depuismarqué des points, en réalisant uneosmose entre cadres tenaces, novi-ces crânes et revenants affûtés, qui

RÉCIT

7défaites d’affilée: c’est le jolirecord du pays de Galles depuissa victoire dans le dernier Tour­noi des six nations, avec GrandChelem.

LES AUTRES MATCHSSamedi, les Gallois reçoiventl’Irlande (14h30, France 2), qu’ilsont battue lors de leurs trois der­nières confrontations. L’Angle­terre, en pleine bourre, accueillel’Ecosse (17h, France 2), qui n’y aplus gagné depuis vingt ans.

REPÈRES L’ÉQUIPE D’ITALIETobias Botes à la place d’EdoardoGori à la mêlée est la seule sur­prise dévoilée vendredi par lesélectionneur de l’Italie, JacquesBrunel, qui a reconduit l’essentielde l’équipe qui a fait tremblerl’Australie en novembre. Luciano

Orquera, brillant contre lesBlacks et les Wallabies, joueraà l’ouverture. En première ligne,Brunel a choisi Martin Castrogio­vanni et Andrea Lo Cicero (quifêtera sa 99e sélection). En tout,9 joueurs du XV de départ ontparticipé à la victoire d’il y a deuxans contre la France.

L’équipe de France à l’entraînement, mercredi, à Marcoussis (Essonne). PHOTO FRANCK FIFE.AFP

forment un ensemble à l’hétérogé-néité cohérente, fondée sur unesaine émulation.

CULOT. Dans chacun de ces sous-ensembles, trois hommes symboli-sent l’humeur. D’abord, l’anciencapitaine Thierry Dusautoir quePSA, astucieux communicant, adestitué de son brassard tout en luifaisant comprendre qu’il pouvaits’estimer heureux d’être dans lashort list après presque un an d’ab-sence (repos, puis blessure). En-suite Maxime Machenaud, demi demêlée du Racing Métro, «décou-verte» 2012 dont, en seulementcinq sélections, on a pu apprécierle mélange de sang-froid et de cu-lot… en sachant qu’au moindre flé-chissement, le Clermontois MorganParra est prêt à bondir du banc où

est plus ou moins relégué. Et enfin,le centre Mathieu Bastareaud qui,au sortir d’un long purgatoire, a re-trouvé la gnaque –et la ligne– de-puis son transfert de Paris à Toulon(alors entraîné par… PSA).Ces trois-là, plus vingt autresjoueurs, ont décollé ce samedi ma-tin d’Orly, direction Rome où, di-manche, ils débutent le Tournoicontre l’Italie (16 heures, surFrance 2). Il y a deux ans, les Bleusy avaient connu l’un des plus vio-lents trous d’air de l’ère Lièvremont–sinon de toute leur histoire– enperdant 21-22. Mais ça n’était pasau même stade de l’épreuve (qua-trième journée), ni dans la mêmeenceinte (on est passé de Flaminioau Stadio Olimpico). Et la dynami-que n’était probablement pas lamême non plus. •

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 201316 • SPORTS

Le Clermontois Wesley Fofana aborde lematch contre l’Italie à un poste inhabituel.

«Je ne joue jamaisà l’aile, même pasà l’entraînement»I l n’a pas fallu

longtemps à Wes-ley Fofana pour

s’imposer commeun rouage essentieldu XV de France.Formé au Paris uni-versité club (PUC), levéloce Clermontois(depuis 2008) a déjàinscrit cinq essais endix sélections chezles Bleus. Et il n’a pour ainsi dire plusquitté le maillot frappé du coq depuissa première apparition, l’année der-nière à la même époque, contrel’équipe d’Italie au Stade de France(30-12). En pleine forme avec sonclub, Fofana occupe le poste de troisquarts centre. Sauf chezles Bleus, où le sélection-neur Philippe Saint-An-dré a choisi d’associer Florian Fritz àMaxime Mermoz à son poste fétiche,pour le titulariser à l’aile. Wesley Fo-fana n’en a pas fait tout un fromage.Et pour cause: il n’a pas le choix. Cequi ne l’empêche pas de camper surses positions, tout en se déclarantprêt à galoper, bon gré mal gré. En-tretien à la veille de son embarque-ment pour l’Italie, deuxième Tournoides six nations de sa carrière.Prêt pour l’aile?Je reste un trois-quarts centre. Je tra-vaille beaucoup à ce poste et je necompte pas lâcher l’affaire. AClermont, je ne joue jamais à l’aile,même pas à l’entraînement. Ce nesont pas les mêmes types de courses,notamment en défense. Je suispersuadé que je ne choperai pasle virus. Sur le terrain, dimanche,il me faudra donc trouver d’autresrepères, faire attention à ce quartde seconde où je pourrais avoir leréflexe naturel de me replacer vers lecentre. Et aussi pas mal commu-niquer avec Yoann Huget, qui alui-même peu l’occasion d’évoluerarrière [c’est la première fois de sacarrière internationale que le Toulou-sain, habituellement ailier, sera titu-laire à ce poste, ndlr].Philippe Saint-André connaît mon

sentiment, nousavons déjà pas maléchangé sur la ques-tion. Après, je saisqu’il y a des blesséset qu’une certainepolyvalence est né-cessaire. J’essaied’être patient et jeme dis qu’il faut sa-vourer le bonheurd’être titulaire.

Comment vous sentez-vous physi-quement, après un rythme automnalintensif entre sélection nationale,Top 14 et H Cup?Bien, a priori. Mais nous avons destemps de jeu assez effarants et celan’est pas sans présenter un danger

pour l’organisme. Je croisque derrière, avec Napo-lioni Nalaga, je suis à

Clermont celui qui a le plus joué.Donc, j’échange beaucoup sur le su-jet avec le préparateur physique duclub. Ce qui n’empêche pas le corpsde pouvoir craquer un jour, sansqu’on le sente forcément venir.Jouer l’Italie en premier match, cen’est pas la pire façon d’entrer dansle tournoi.La seule chose que je sais, c’est quenous aurons à cœur de bien débuterla compétition et que cela n’est pasun hasard si, chaque année, nousdisons qu’il s’agit d’un adversairesolide.Gardez-vous un souvenir, en tant quespectateur, de l’historique défaitede la France à Rome, en 2011?Pas trop, je ne sais même plus oùj’avais regardé le match. Je me sou-viens juste que cela avait fait l’effetd’une bombe. Mais la page est tour-née et nous n’en parlons pas entrenous.Peut-on considérer la France commefavorite du tournoi?A titre personnel, cela m’est égal.Présentez-nous comme favoris ousimples outsiders, peu importe: nouspartons avec l’ambition de gérercette compétition le mieux possible,et donc de la gagner.

Recueilli par G.R. (à Marcoussis)

1617181920212223

GiazzonDe MarchiCiadiniPavanelloDerbyshireGoriBurtonCanale

1617181920212223

KayserDebatyDucalconTaofifenuaChoulyParraTrinh-DucBastareaud

Remplaçants

FRANCE

ITALIE

Michalak

Szarzewski

HugetFritz

Forestier

Picamoles DusautoirOuedraogo

Papé(Cap.)

Maestri

Mas

Mermoz FofanaFall

Machenaud

MasiVendii Benvenuti Sgarbi McLean

Orquera

FavaroParisse

(Cap.) ZanniMinto

Lo CiceroGhiraldiniCastrogiovanni

Botes

Geldenhuys

Remplaçants

ITALIE - FRANCEDimanche à 16 heures au Stadio Olimpico

AFP

LE CALENDRIER DU TOURNOISamedi 2 février, 14h30 Galles­Irlande. 17 heures Angleterre­Ecosse.Dimanche 3 février, 16 heures Italie­France.Samedi 9 février, 15h30 Ecosse­Italie. 18 heures France­Galles.Dimanche 10 février, 16 heures Irlande­Angleterre.Samedi 23 février, 15h30 Italie­Galles. 18 heures Angleterre­France.Dimanche 24 février, 15 heures Ecosse­Irlande.Samedi 9 mars, 15h30 Ecosse­Galles. 18 heures Irlande­France.Dimanche 10 mars, 16 heures Angleterre­Italie.Samedi 16 mars, 15h30 Italie­Irlande. 18 heures Galles­Angleterre.21 heures France­Ecosse.

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Le CarnetChristiane Nouygues

0140105245

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CARNET

naiSSance

Bébé bélugaAvu le jour la nuit

CommeMozart, et la pluieBienvenue a toi,MACEO

DécèS

Mercredi 30 janvier

Cyril DELUERMOZest parti interviewer Elvis

nous lui rendrons hommageà la Coupole duPère Lachaise

mardi 5 février à 14H30

Talons hauts pour les filleset lunettes noirespour les autres...

MmeCaroline FAIVREsa compagne

a la douleur de vous informerdudécès de

M. Jean-ClaudeMAES

- artiste peintre, cinéaste,céramiste -

survenu le 29 janvier 2013 àl'hôpital St Louis (Paris)Ses obsèques auront lieu lemardi 5 février 2013 à 11 h

au crématoriumdu cimetièreduPère Lachaise.

Cet avis tient lieu defaire-part.

Tel : 01 46 0808 78

SouvenirS

" Ceux que nous pleuronsne sont pas les absents,ce sont les invisibles "

Victor Hugo

Maxime31 Janvier 1984 / 2 Février 2011

Le Carnet

Tél. 01 40 10 52 45Fax. 01 40 10 52 35

Vous pouvez nous faire parvenirvos textes par e.mail :

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INTERVIEW

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 SPORTS • 17

On l’appelait «le Poulet» pour ses jambes maigrichonnes.En 2007, le Danois Michael Rasmussen avait quitté leTour de France alors qu’il était en jaune, exclu par sonéquipe hollandaise, Rabobank, sans avoir été contrôlépositif, mais sur des rumeurs de dopage. Et voici qu’ildéballe tout. «Je me suis dopé pendant douze ans», de1998 à 2010, a­t­il avoué jeudi, à la télé danoise, en annon­çant qu’il arrêtait la compétition. Il a énuméré les substan­ces: EPO, hormones de croissance, testostérone,insuline, cortisone et transfusions sanguines. Désormaisâgé de 38 ans, il veut collaborer avec les autorités «pourfaire place nette». Il a donc commencé à balancer, livrantà l’agence antidopage néerlandaise «les noms des cou­reurs impliqués dans des affaires de dopage», selon unmembre de l’instance, Herman Ram. Rasmussen a toutdétaillé: «Nous savons maintenant beaucoup mieux, parexemple, comment ils parvenaient à éviter les contrôles»,a expliqué Ram. PHOTO AFP

«LE POULET» MICHAEL RASMUSSENBALANCE SUR LE DOPAGE

FORMULE 1 L’écurie Cater-ham a confirmé vendrediqu’elle engageait le Néerlan-dais Giedo Van der Gardepour épauler le FrançaisCharles Pic. Un peu plus tôt,le Brésilien Luiz Razia avaitrévélé avoir trouvé un accordavec Marussia pour disputerla saison qui débuterale 17 mars à Melbourne. Sil’équipe russe confirme cetterecrue, un seul volant resteraà attribuer : celui de ladeuxième Force India, pourlequel le Français Jules Bian-chi a ses chances.

HAND Nikola Karabatic s’estengagé vendredi avec le clubd’Aix-en-Provence. Mis enexamen dans une affaire deparis suspects, il a rompuson contrat avec Montpellier.«Nikola s’est engagé jusqu’au30 juin», a annoncé Chris-tian Salomez, le présidentd’Aix, avant-dernier de D1.L’international y rejoint sonfrère Luka.

TENNIS En Coupe Davis, laFrance mène 2-0 face à Is-raël. Jo-Wilfried Tsonga aapporté le premier point,vendredi à Rouen, en domi-nant Amir Weintraub (6-3,6-3, 4-6, 7-5). Richard Gas-quet a ensuite disposé deDudi Sela (6-3, 6-2, 6-2).

FOOT La 23e journée de Li-gue 1 se joue sans Beckham.Alors que le PSG se déplaçaitvendredi soir à Toulouse sanssa star engagée jeudi, ses ri-vaux Lyon et Marseille dis-puteront dimanche, à Ajac-cio et contre Nancy, desmatchs a priori à leur portée.Vendredi Toulouse-PSG (nonparvenu). Samedi, 17 heuresLorient-Rennes ; 20 heuresLille-Troyes, Sochaux-Saint-Etienne, Brest-Nice, Bor-deaux-Valenciennes et Bas-tia-Evian-Thonon.Dimanche, 14 heures Ajac-cio-Lyon : 17 heures Mont-pellier-Reims ; 21 heuresMarseille-Nancy.

«Je suis dans un port minier. Il y ades bateaux, j’ai aussi vu des gens du port.Certains sont venus, ils avaient un peu peurpour moi, mais tout le monde est d’accordpour que je reste ici. Tout le monde estau courant qu’il y a un bateau du VendéeGlobe dans ce mouillage!»Jean­Pierre Dick (Vibrac­Paprec 3) au mouillage dans l’ansede San Ciprián (Galice). Il devrait repartir dimanche matin,après le coup de vent, pour les Sables­d’Olonne.

10euros: c’est la somme quepourrait percevoir DavidBeckham, la nouvellerecrue du PSG, sur cha­que maillot floqué à sonnom et vendu par le club.A 110 euros le bout de chif­fon, la part de 10% lui reve­nant fera rapidement deBeckham un homme –iln’est plus vraiment joueur–un peu plus riche encore.En quatre ans, le RealMadrid avait réussi à enrefourguer un petit million.En cinq mois, le PSG peutespérer sortir 125000 piè­ces de ses ateliers de cou­ture. Soit un gros milliond’euros pour le numéro 32.

C’ est un monstrecomme le sport n’enfait plus. Un ogre qui

a gagné ses galons sur les ter-rains de foot américain àcoups d’épaule ravageurs etde tacles féroces. Un anti-héros au passé sulfureux, ac-cusé de meurtre il y a plusd’une décennie, et qui atrouvé Dieu sur le chemin desa rédemption. A 37 ans, RayLewis, le linebacker (défen-seur) légendaire des Balti-more Ravens, est la star in-contestée du 47e Superbowl,qui opposera son équipe aux49ers de San Francisco (en di-rect sur W9 à partir de mi-nuit dans la nuit de diman-che à lundi).Ray Lewis a annoncé qu’àl’issue du match, il mettraitun terme à sa carrière entaméil y a dix-sept ans. La presseaméricaine se demande s’ilfaut se désespérer de perdreun joueur formidable, capa-ble d’incendier tout un stade,ou se réjouir d’en finir avecles controverses. «Lewis theBeast», comme on le sur-nomme, a répondu à sa ma-nière cette semaine en faisantla couverture de Sports Illus-trated, avec une ultime polé-mique. «Est-ce que Dieu sepréoccupe de savoir qui vagagner le Superbowl?» s’in-terroge le magazine, mon-trant le joueur en prière.Cerf. Selon Sports Illustra-ted, le linebacker, qui a ratéla plus grande partie de lasaison à cause de ligamentsdéchirés aux triceps, est re-venu sur les terrains grâce à

un produit interdit, que l’ontrouve dans les bois de cerf.Lewis a nié en bloc, rejetant«des stupidités sans fonde-ment». L’incident n’est quele dernier en date d’une car-rière hors du commun, loindes contes de fées à la TomBrady ou Eli Manning, lesdeux quarterbacks modèlesdes Patriots de la Nouvelle-Angleterre et des Giants deNew York.Arrivé en 1996 à Baltimore– qu’il n’a jamais quitté –,Lewis avait déjà eu des pro-blèmes quand deux des qua-tre femmes avec qui il a eusix enfants l’avaient accuséde violence. Sans que la po-

lice ne donne suite. Maisc’est en janvier 2000, lorsd’une fête organisée aprèsle Superbowl à Atlanta, queLewis connaîtra de sérieuxennuis. A une sortie de boîtede nuit, il se retrouve avecdes amis au milieu d’une al-tercation qui tourne mal.Deux hommes tombent, poi-gnardés à mort, avant que lelinebacker ne prenne la fuitedans une limousine.Inculpé de meurtre, Lewiséchappera à la prison en pas-sant un accord avec les forcesde l’ordre et en témoignantcontre deux de ses amis, en-suite acquittés faute de preu-ves. Mais l’affaire lui a tou-

jours collé à la peau. Il y aquelques semaines, alors queBaltimore créait la surpriseen accédant à la finale avecune équipe d’outsiders, l’undes fils de Lewis a reçu unmessage anonyme sur Twit-ter: «Cela fait quoi d’avoir unpère qui a tué quelqu’un ?»Ecureuil. Depuis, Lewis afait pénitence. Ayant décou-vert la foi, il est devenu leleader spirituel des Ravens,avec qui il a gagné le Super-bowl en 2001. Avant chaquematch, il entre sur le terrainen effectuant sa fameuse«danse de l’écureuil». Puisil passe de longues minutes àmotiver ses coéquipiers, ras-

semblés autour delui. Pour son come-back après sa bles-sure début janvier,il a eu droit à uneovation magistraledu public. Certains

pensent que sans lui, les Ra-vens ne seraient pas làaujourd’hui.Au New York Times, il a ditqu’il aimait se comparer àDavid. Celui qui combat Go-liath, et David le pêcheuraussi, qui a commis l’adultèreavec Bethsabée, avant defaire assassiner son mari. «Siles gens me disent que je suisleur idole, je leur dis de faire at-tention, poursuivait-il. Je leurdis de suivre mes conseils, maisde ne pas prendre le même che-min que moi, de ne pas traver-ser les mêmes tempêtes.»

De notre correspondantà New York

FABRICE ROUSSELOT

RayLewis, lederniertourde«Beast»SUPERBOWL Le défenseur star de Baltimore plaque toutaprès la finale de foot américain, dimanche.

Les démêlés entrel’ancienne star du footballargentin Diego Maradonaet le fisc italien sont loind’être terminés. Ce derniera en effet démenti jeuditoute absolution del’ancienne idole de Naples,condamnée en 2005 pourfraude fiscale à verser37,2 millions d’euros, dont23,5 d’intérêts. La commis­sion chargée d’examinerle jugement de Maradona«n’a ni annulé ni déclaréprescrite» sa condamna­tion, ni même «modifié ladette de Diego ArmandoMaradona à l’égard du fiscitalien», a affirmé l’agencede recouvrement desimpôts. Qui a menacé deporter plainte contre«El Pibe de Oro», qu’elleaccuse de multiplier les«annonces fallacieuses».La justice italienne avaitdécidé en novembre 2011de reprendre à zéro leprocès pour des erreursde procédure. Vendredi,Angelo Pisani, l’avocat,de l’ancien joueur, avaitannoncé que son clientavait gagné la bataille etpourrait «revenir en Italieen homme libre», ajoutantqu’il allait à son tour pour­suivre l’agence chargée durecouvrement du fisc pour«le préjudice porté à sonimage et à son patri­moine». Et réclamer lemême montant que celuidemandé par le fisc italien.Erreur, donc: Maradona,deux fois champion d’Italieavec Naples (1987 et 1990),devra attendre avant depouvoir retrouvercette ville.

LE FISC NELÂCHE PASMARADONA

L’HISTOIRE

LES GENS

Le linebacker a passé ses dix­sept années de carrière à Baltimore. PHOTO PATRICK SEMANSKY.AP

Accusé de meurtre, RayLewis a échappé à la prisonen passant un accord avecles forces de l’ordre.

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NÉGOS La firme de Mountain View a signé vendredi à l’Elyséeun accord l’engageant à mettre en place un fonds pour les éditeurs.

Google et la presse,60 millions d’accalmie

F rançois Hollande? Le ven-dredi, il réconcilie Googleet la presse ; le samedi, ilfait le chef de guerre au

Mali… Car c’est sous l’égide du pré-sident de la République en per-sonne qu’a été a signé un accordentre la presse française et la nationGoogle. En présence du chef de cetEtat-là, Eric Schmidt. A l’Elysée, leprotocole place d’ailleurs Hollandeet Schmidt au même rang d’impor-tance: côte à côte, pupitres identi-ques. La teneur de l’accord, obtenuin extremis après trois mois de né-gociations, tient en un chiffre :60 millions d’euros, versés parGoogle pour alimenter un fondsdestiné à «faciliter la transition de lapresse vers le monde numérique».Selon François Hollande, «il s’est

produit [vendredi] un événementmondial». Rien de moins. Pour EricSchmidt, il s’agit d’«un accord his-torique dans l’intérêt du peuple fran-çais». Et pour Nathalie Collin, duNouvel Observateur, qui menait lesnégociations au nom de l’IPG, l’as-sociation de la presse d’informationpolitique et générale, «c’est le pre-mier pas d’un géant d’Internet versles éditeurs». Ce premier pas pour-rait même, estime Hollande, «ser-vir de modèle à la fois pour des payset des secteurs culturels».

BROUZOUFS. Dans les faits, Googlemettra en place un fonds doté de60 millions d’euros, tirés de sa pro-pre poche. Laquelle est profonde,puisqu’on estime à 1,4 milliardd’euros les bénéfices publicitairesréalisés rien qu’en France par legéant. Mais attention, ces 60 mil-lions ne sont pas destinés à combler

les trous des trésoreries défaillantesde la presse française. Les journauxdevront soumettre à ce fonds desprojets choisis «selon leur mérite etleur capacité de transition vers le nu-mérique», a indiqué vendredi àl’Elysée Marc Schwartz, le média-teur chargé de faire le Casque bleuentre Google et la presse. Un porte-parole du moteur de recherche apar la suite précisé que ce fonds«sélectionnerait des initiatives pro-metteuses qui permettront de faireémerger en ligne de nouveaux conte-nus digitaux».Le fonds sera dirigé par un conseild’administration composé de«personnalités indépendantes»,condition sine qua non pour unejuste allocation des brouzoufs. Etpour qui les pépettes ? «Pas pourla presse de divertissement ou dedistraction», a expliqué MarcSchwartz. Seuls pourront postuler

les titres d’information générale etpolitique (c’est-à-dire les quoti-diens nationaux ainsi que les news-magazines), la presse quotidiennerégionale, sans oublier les sitesd’infos en ligne. Ce qui risque defaire beaucoup de monde pour60 millions d’euros. D’autant quela somme est allouée par Googleune fois pour toutes. Et après ?François Hollande y est allé de sablagounette: «Lorsque le fonds seraépuisé, nous nous retrouverons avecle président de Google pour une pro-chaine conférence de presse.»

BROUTILLES. L’accord signé ven-dredi comprend un autre volet, surlequel Hollande et Schmidt se sontfaits d’une discrétion de violette. Ilsn’en ont même pas parlé, laissantle soin à un porte-parole de Googled’annoncer ces broutilles-là. Quisont d’importance: l’accord con-

sistera aussi à «conclure des accordscommerciaux avec les éditeurs pourles aider à tirer le meilleur parti d’In-ternet et accroître leurs revenus en li-gne, au moyen de solutions publici-taires». Toutes gentiment fourniespar Google, au risque pour les jour-naux français de se retrouver tota-lement dépendants du géant.Un autre aspect du dossier a étéégalement savamment balayé sousles épais tapis élyséens: les reven-dications des éditeurs. La négocia-tion s’est lancée en octobre, surl’exigence des journaux de voircréer un droit d’auteur dit «voisin»dont s’acquitteraient les moteursde recherche, à commencer parGoogle (92% de parts de marché enFrance), en échange de l’indexationde leurs contenus. En Belgique, oùun conflit analogue a opposé Goo-gle aux éditeurs, un accord a finipar être trouvé en décembre, maisqui ne prévoit pas non plus de paie-ment pour les contenus. Pas fou,Google qui ne voulait surtout pasd’une rente à vie versée à la presse.60 millions d’euros, c’est unesomme, mais le moteur s’en tirebien, puisque les droits d’auteur etla taxe dont le menaçait le gouver-nement sont évacués. Quant àHollande, il n’est pas contraint demettre en route une loi juridique-ment délicate.Vendredi, l’Elysée n’a pas non plusabordé le dossier bien peu diploma-tique de l’exotique fiscalité de Goo-gle. François Hollande, Eric Sch-midt, les éditeurs, tout le mondeétait content. Il sera bien temps dese refâcher plus tard. •

Par RAPHAËL GARRIGOSet ISABELLE ROBERTS

Le directeur exécutif de Google,Eric Schmidt, et François

Hollande, vendredi à l’Elysée.PHOTO PHILIPPE WOJAZER. AFP

SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 201320 • ECRANS&MEDIAS

A LA TELE SAMEDI20h50. The voice, la plus belle voix.Divertissementprésenté par Nikos Aliagas.23h05. The voice.Au cœur des coulisses.Divertissementprésenté par Karine Ferri.23h55. The voice : le concert.1h50. Columbo.Poids mort.Série.

20h50. Générations en folie.Divertissementprésenté par Nagui.22h55. CD’Aujourd’hui.23h00. On n’est pascouché.Magazine présenté parLaurent Ruquier.2h05. Hebdo musiquemag.Magazine.2h30. La parenthèseinattendue.Magazine.

20h45. CommissaireMagellan.Téléfilm d’ÉtienneDhaene :Un instant d’égarementAvec Jacques Spiesser,Moon Dailly.22h15. La fille del’autre.Téléfilm de HarryCleven.Avec Anne Parillaud,Virginie Lavalou.23h45. Météo.23h50. Soir 3.

20h55. Le pacte.Thriller américain deRoger Donaldson,105mn, 2011.Avec Nicolas Cage,January Jones.22h40. Jour de CAN.Sport.23h15. Jour de foot.Magazine présenté parMessaoud Benterki.0h05. Le journal duhard.0h20. Infirmières sansculotte.

20h50. Lise Meitner,mère de la bombeatomique.Documentaire.21h40. Marie Curie, au-delà du mythe.Documentaire.22h35. Spirou.L’aventurehumoristique.Documentaire.23h30. Ralf König, roi de la BD gay.Documentaire.0h10. Tracks.

20h50. The Glades.Série américaine :Jim’s anatomy,La vérité nue,De vilains petitssecrets,Le cirque de l’étrange,En pleine tempête,L’odeur de la canne àsucre.Avec Matt Passmore.1h50. Supernatural.Rendez-vous avec lamort.Série.

20h45. Football :Olympique Lyonnais /FC Juvisy.D1 féminine.Sport.22h45. Les chevaliersdu Fiel : vacancesd’enfer.Spectacle avec Éric Carrière et Francis Ginibre.0h30. Les Francofolies2010.Dominique A.Spectacle.

20h35. Échappéesbelles.Gabon : la grande forêt.Magazine.22h05. Les routes del’impossible.Tadjikistan : sueursfroides.Documentaire.22h55. L’oeil et la main.Magazine.23h20. Dr CAC.Magazine.23h50. Déserts.Documentaire.

20h40. Les bonobos.Pièce de théâtre deLaurent Baffie.Avec Marc Fayet, Alain Bouzigues.22h55. 17e sansascenseur.Magazine présenté par Laurent Baffie.23h50. Zemmour & Naulleau.Magazine.0h45. Paris Dernière.1h45. Programmes dela nuit.

20h50. FlorenceLarrieu, le juge est une femme.Téléfilm français :Bon pour accord.Avec Florence Pernel,Frédéric Diefenthal.22h35. FlorenceLarrieu, le juge est une femme.La face cachée.Téléfilm.0h10. X-Files : auxfrontières du réel.

20h45. New Yorksection criminelle.Série américaine :Disparition,Dernier recours,La dernière soirée,Requiem pour unassassin,Plaisirs défendus.Avec Kathryn Erbe.0h55. Suspect n°1 .Magazine.2h50. Une passionobsédante : Éloïse oula passion dangereuse.

20h50. Les Simpson.La vengeance est unplat qui se mange troisfois,Little big Lisa,Homer s’engage,Moe nia Lisa,Un monde trop parfait,Le roi du ring.Série.23h20. Les ch’tis à Las Vegas.L’hebdo n° 4.Télé-réalité.1h50. Météo.

20h45. Fort Boyard.Caméra Café /Association Autour desWilliams.Divertissement.22h35. Chérie, j’airétréci les gosses.Série américaine :Chérie, la maison veutnous tuer,Chérie, je suis hanté.Avec Thomas Dekker,Peter Scolari.0h00. Dessins animés.Jeunesse.

20h50. The event.Série américaine :Le cauchemar d’Elias,Supernova,Sacrifices,Une solution perenne.Avec Jason Ritter.0h15. Paranormal files.Fantômes : quand lesmorts reviennent nousvoir ?Documentaire.1h45. Touche pas à monposte !

20h45. Alcatraz.Série américaine :Sonny Burnett,Webb Porter,Clarence Montgomery,Les frères Ames.Avec Sarah Jones,Jorge Garcia.0h05. Catch américainSmack Down.Sport.1h50. Catch américainRaw.Sport.

20h50. Turbulences en plein vol.Téléfilm de Fred Olen Ray.Avec Casper Van Dien,Brad Dourif.22h30. Direct action.Téléfilm de Sidney J. Furie.Avec Dolph Lundgren.0h10. Tennis.21e Open GDF Suez : 1/2 finale.Sport.

DIMANCHE20h50. Letransporteur.Film d'action franco-américain de CoreyYuen, Louis Letterier,92mn, 2002.Avec Jason Statham,Shu Qi.22h35. Les experts :Manhattan.Série américaine :Plan d’évasion,Le dernier combat,Comme des grands.Avec Gary Sinise.

20h45. Shutter island.Thriller américain deMartin Scorsese, 137mn,2008.Avec Mark Ruffalo, Ben Kingsley.23h00. Non élucidé.L’Affaire Magalie Part.Magazine présenté parArnaud Poivre d'Arvoret Jean-Marc Bloch.0h30. Journal de lanuit.0h45. Histoirescourtes.

20h45. Jackson Brodie,détective privé.Téléfilm britannique :À quand les bonnesnouvelles ?Avec Jason Isaacs,Natasha Little.22h35. Soir 3.22h55. InspecteurGently.La guerre dessentiments.Téléfilm.0h25. ThereseDesqueyroux.

21h00. Football :Marseille / Nancy.23e journée duchampionnat de France de Ligue 1.Sport.22h55. CFC le débrief.Sport.23h15. L’équipe dudimanche.Magazine.0h05. Le journal desjeux vidéo.0h30. Le vol descigognes.

20h50. Les tribulationsd’un Chinois en Chine.Comédie française dePhilippe De Broca,104mn, 1965.Avec Jean-PaulBelmondo, Ursula Andress.22h35. Dans latourmente.Drame de MarleenGorris, 90mn, 2009.Avec Emily Watson.0h20. Occupation - 1 & 2.

20h50. Capital.Gaspillage alimentaire :révélations sur unimmense gâchis !Magazine présenté parThomas Sotto.23h00. Enquêteexclusive.Obésité : enquête surl’Amérique XXL.Magazine présenté parBernard De laVillardière.0h25. Zemmour etNaulleau.

20h45. Danny the dog.Film d'action de LouisLetterier, 103mn, 2004.Avec Kerry Condon,Dylan Brown.22h15. Le serpent.Thriller français d’ÉricBarbier, 119mn, 2006.Avec Yvan Attal, ClovisCornillac.0h10. La cité de Dieu.Film.5h00. Plus belle la vie.4 épisodes.Série.

20h35. Épargne,placements : commentprotéger son argent ?Documentaire.21h30. C’est notreaffaire.Magazine.22h00. Liban - Desguerres et des hommes.Épisode 2 : 1982 - 1990Documentaire.23h00. La grandelibrairie.0h00. Un Viking enAfrique du Sud.

20h40. Lie to meSérie américaine :Alter ego,Femmes sousinfluence,Marchands d’espoir,Les infiltrés.Avec Tim Roth.23h45. Spartacus : les dieux de l’arène.Conséquences,L’amère fin.Série.1h55. Programmes de la nuit.

20h50. Tellement Vrai.Matthieu Delormeaus’invite chez vousMagazine présenté parMatthieu Delormeau.22h35. Tellement Vrai.Belle -mère : pour lemeilleur et surtout lepire !Magazine.0h20. Tellement Vrai.Magazine.2h25. Poker.Jeu.

20h45. New Yorkpolice judiciaire.Série américaine :Une femme en colère,Ma meilleure ennemie,Liberté écourtée.Avec Sam Waterston,Jesse L Martin.23h20. Fan des années 70.Années 1978, 1979, 1974& 1975.Divertissement.2h55. Perverse Léa -Visages dangereux.

20h50. Le marginal.Film d'action françaisde Jacques Deray,100mn, 1983.Avec Jean-PaulBelmondo, Henry Silva.22h40. Spartacus : le sang des gladiateurs.Série américaine :Tuez-les tous.Avec Andy Whitfield,Lucy Lawless.23h55. Météo.0h00. Super Bowl 2013.Sport.

20h45. Angélique et le sultan.Film d’aventures deBernard Borderie,105mn, 1968.Avec Michèle Mercier,Robert Hossein.22h30. IndomptableAngélique.Film d’aventures deBernard Borderie,95mn, 1967.Avec Michèle Mercier,Robert Hossein.0h00. Dessins animés.

20h50. Lessentiments.Comédie dramatiquefrançaise de NoémieLvovsky, 90mn, 2003.Avec Nathalie Baye,Jean-Pierre Bacri.22h30. Germinal.Drame français deClaude Berri, 1993.Avec GérardDepardieu, Miou-Miou.1h10. Touche pas à monposte !

20h45. Ça reste entre nous.Comédie française deMartin Lamotte, 86mn,1997.Avec Sam Karmann.22h25. Profiler.Série américaine :Le repaire de Jack,L’ombre des archanges -parties 1 & 2.Avec Robert Davi.1h00. Eva ou lavengeance brûlante.

20h50. Nouvelle star.3e prime time à "L’arche Saint-Germain"Divertissementprésenté par Cyril Hanouna.23h00. Nouvelle star,ça continue.Divertissementprésenté par Enora Malagré.23h50. Dilemmecharnel.Téléfilm.

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Il était une filleFrance 3, 22h15Comment avoir un gniardquand on ne peut pas? LaFille de l’autre, bonne fic­tion, est dans l’actu: il estquestion de vol d’enfant.

Il était un flicFrance Ô, 22h20Chouette, après Canal+,voici la bonne série britan­nique Luther en gratos: unflic noir à la cravate rougeet aux nerfs en pelote.

Il était un fiefféArte, 23h30Tiens, un bon petit portraitdu dessinateur allemandRalf König, roi de la BD gay,auteur entre autres deCouilles de taureau.

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Il était un filmFrance 5, 8h458h45! Quelle belle expo­sition pour la série docuIl était une fois, ce matinconsacrée au Charmediscret de la bourgeoisie.

Il était une finFrance 2, 20h45Le film de ScorseseShutter Island souffre­t­ilun deuxième visionnagevu qu’à la fin, on découvreque… mais chut.

Il était une foisFrance 5, 22 heuresCe moment gênant oùtu t’aperçois qu’en histoiredu Liban, tu es nul. Zou:la suite du bon docu Liban,des guerres et hommes.

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LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 201322 • ANNONCES

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MontpellierMarseille

Strasbourg

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MontpellierMarseille

Nice

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NuageuxSoleil Couvert FaibleModéréFort

CalmePeu agitée

AgitéeAverses Pluie

Éclaircies

Orage

0,6 m/10º

LLEE MMAATTIINN Vents tempétueux autourdu golfe du Lion. Ailleurs, la neiges'invite dès 300 à 600 m desPyrénées aux reliefs de l'est.

LL’’AAPPRRÈÈSS--MMIIDDII Les vents restent vio-lents près de la Méditerranée. Sur lereste du pays, il fera froid avec de laneige à très basse altitude dans l'est.

-10°/0° 1°/5° 6°/10° 11°/15° 16°/20° 21°/25° 26°/30° 31°/35° 36°/40°

FRANCE MIN/MAX

LilleCaenBrestNantesParisNiceStrasbourg

FRANCE MIN/MAX

DijonLyonBordeauxAjaccioToulouseMontpellierMarseille

SÉLECTION MIN/MAX

AlgerBruxellesJérusalem LondresBerlinMadridNew York

Neige

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SAMEDI

Pluies faibles et bruines s'installentsur le nord du pays. Ciel bien dégagédans le sud-est en raison des ventsviolents qui persistent.

DIMANCHE Un front aénué circulera sur laFrance. Temps gris avec parfois quel-ques goues. Mistral en Méditer-ranée.

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LIBÉRATIONwww.liberation.fr11, rue Béranger 75154Paris cedex 03 Tél. : 01 42 76 17 89 Edité par la SARLLibération SARL au capital de 8726182 €.11, rue Béranger, 75003ParisRCS Paris : 382.028.199Durée : 50 ans à compter du 3 juin 1991.

CogérantsNicolas DemorandPhilippe Nicolas Associée unique SA InvestissementsPresse au capital de 18 098 355 €.Président du directoire Nicolas DemorandPhilippe Nicolas

Directeur de lapublication et de la rédaction Nicolas Demorand Directeur délégué de la rédaction Vincent GiretDirecteurs adjoints de la rédaction Stéphanie AubertSylvain BourmeauEric DecoutyFrançois SergentDirectrice adjointede la rédaction,chargée du magazineBéatrice VallaeysRédacteurs en chefChristophe Boulard(technique) Gérard LefortFabrice RousselotFrançoise-Marie Santucci(Next)Directeurs artistiques Alain BlaiseMartin Le ChevallierRédacteurs en chefadjoints Michel Becquembois(édition)Jacky Durand (société)

Olivier Costemalle et Richard Poirot(éditions électroniques)Jean-Christophe Féraud (éco-futur)Luc Peillon (économie)Nathalie Raulin (politique)Mina Rouabah (photo)Marc Semo (monde)Bayon (culture)Sibylle Vincendon etFabrice Drouzy (spéciaux)Pascal Virot (politique)Directeur administratif et financierChloé NicolasDirecteur commercial Philippe [email protected] dudéveloppement Pierre Hivernat

ABONNEMENTSMarie-Pierre Lamotte03 44 62 52 [email protected] abonnement 1 anFrance métropolitaine :371€.

PuBLICITÉ Directrice générale de LIBERATION MEDIAS Marie Giraud Libération Medias. 11, rueBéranger, 75003 Paris. Tél. : 01 44 78 30 68Amaury médias25, avenue Michelet93405 Saint-Ouen CedexTél.01 40 10 53 [email protected] annonces.Carnet.

IMPRESSIONCila (Héric)Cimp (Escalquens)Midi-print (Gallargues)Nancy Print (Nancy)POP (La Courneuve),Imprimé en France Tirage du 01/01/13:157 936 exemplaires.

Membre de OJD-Diffusion Contrôle.CPPP: 1115C 80064.ISSN 0335-1793.

Nous informons nos lecteursque la responsabilité du jour -nal ne saurait être engagéeen cas de non-restitution dedocuments

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LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 JEUX­METEO • 23

BUSINESS Opportuniste, le label a réédité un coffretde raretés à seulement 100 exemplaires dans l’uniquebut de prolonger les droits sur ces titres pendantvingt ans. Un cas d’école qui fait tache d’huile.

Sony-Dylan,noces d’or…et d’argentC’ était la bonne affaire de la fin

2012 pour les fans de BobDylan : 86 chansons rares,des prises de studio et des

démos négligées, enregistrées en 1962et 1963 pour Columbia Records, ras-semblées dans un coffret vendu pourune trentaine d’euros : The 50th Anni-versary Collection.Le seul problème était de mettre la maindessus, puisque Sony Music n’a distri-bué l’objet qu’à 100 exemplaires pourla France, l’Allemagne, la Grande-Bre-tagne et la Suède. Bizarre… Pourquoi nepas en tirer quelques milliers pour sa-tisfaire le public du héros folk ?Aujourd’hui, The 50th Anniversary Col-lection se revend pour plusieurs centai-nes d’euros sur eBay.La réponse à ces incohérences se trouvedans le sous-titre de cette compilationsortie en urgence: «The Copyright Ex-tension Collection Vol. I». Sony a ouver-tement publié ces enregistrements pourempêcher qu’ils ne tombent dans le do-maine public en 2013, soit cinquanteans après leur première (et unique) pu-blication officielle.

RÉTROACTIF. La manœuvre n’est pasglorieuse, mais du moins n’est-elle pasmaquillée. La major a décliné notreproposition d’interview sur le sujetmais s’est exprimée récemment dansles pages du magazine Rolling Stone :«En Europe, les droits sur les enregistre-ments ont récemment été prolongés decinquante à soixante-dix ans pour toutesles œuvres de 1963 et au-delà, expliqueun cadre de Sony. Mais elles sont soumi-

ses à une clause de “use it or lose it”,c’est-à-dire que si vous n’avez pas publiéces enregistrements au cours de leurs cin-quante premières années, vous ne pouvezpas obtenir la prolongation [des droitspour vingt ans]. […] L’intérêt de maintenirun copyright sur tout ça, c’est que nousavons l’intention d’en faire quelque chosedans l’avenir. Ce n’était pas le bon mo-ment pour le faire tout de suite, alors que[Bob Dylan] vient de sortir son nouvel al-bum, Tempest.»Cette affaire un peu technique prend sasource dans une directive adoptée parle Parlement européen le 27 septem-bre 2011, qui entrera en vigueur en no-vembre prochain avec effet rétroactifpour l’ensemble de 2013. Ce texte a étéarraché par l’industrie de la musique,qui n’a de cesse, en Europe comme auxEtats-Unis, de prolonger artificielle-ment les divers droits de la musique afinde sanctuariser ses revenus. Cette fois,il s’agit d’étendre les droits des artistesinterprètes et des producteurs sur lesenregistrements (les «phonogram-mes»), dont la durée est donc passée decinquante ans à soixante-dix ans aprèsla première mise à disposition du pu-blic. En conséquence, les enregistre-ments de 1962 sont tombés dans le do-maine public le 1er janvier, alors queceux de 1963 ne basculerontqu’en 2033… à la seule condition qu’ilsaient été exploités au moins une foisdepuis leur première publication.C’est la fameuse clause du «use it or loseit», et c’est pour s’éviter ce désagré-ment avec les titres rares de Dylan queSony a décidé de publier un disque encatastrophe, avec pochette plastiquebricolée et livret de feuilles A4 agrafées.

Depuis des lustres, les industries du ci-néma ou de la musique sont, commeSony, largement opposées aux princi-pes du domaine public, qui «offre» lescréations à la communauté une fois leurcycle économique et artistique effectué.Et elles ne sont pas les seules à défendreleurs revenus en se moquant bien desapports du domaine public à la propa-gation de la culture (lire ci-contre).«Le domaine public est un problème parcequ’il empêche les producteurs de valoriserleur catalogue», nous expliquait ainsirécemment David el Sayegh, directeurgénéral du Syndicat national de l’édi-tion phonographique (Snep). En 2008,au début des débats sur l’extension desdroits dans l’Union européenne, leSnep, qui militait carrément pour uneextension à quatre-vingt-quinze anssur le modèle américain, avançait que«les enregistrements fixés au début desannées 60 représentent encore près de 5%de parts de marché dans la vente desphonogrammes en Europe.»

EXTENSION. Finalement, ce sont «seu-lement» les enregistrements de 1962qui ont donc basculé dans le domainepublic en Europe. Les autres attendront.En France, il s’agit du début des yéyés,des chansons enregistrées par EddyMitchell ou Sylvie Vartan. Mais ontrouve aussi du plus lourd, comme lepremier 45-tours des Beatles, qui con-tient les morceaux Love Me Do et P.S.I Love You. Celui-ci a déjà été publié entout début d’année par deux petits la-bels, dont Pristine Classical, habituelle-ment spécialisé dans l’édition d’œuvresnégligées de musique classique. Soncréateur, installé en pleine Dordogne,a choisi de republier – gratuitement –ces deux titres symboliques pour s’op-poser à l’extension des droits sur lesphonogrammes. «Lorsqu’un enregistre-ment tombe dans le domaine public, celalève de nombreuses barrières financièrespour des petites entreprises comme lanôtre, spécialisée dans une musique de ni-che. Nous en vivons directement», com-mente Andrew Rose, le fondateur dePristine Classical.En 2011, certains musiciens britanni-ques avaient également considéré quela nouvelle directive européenne pour-rait, in fine, nuire aux artistes. Emme-née par Nick Mason de Pink Floyd et EdO’Brien de Radiohead, la Featured Ar-tists Coalition, qui défend les droits desartistes outre-Manche, avait ainsi es-timé que le texte protège avant tout lesproducteurs «en prolongeant de vingtans les contrats qui lient les artistes» avecleur maison de disques. Sans parler dufait que de très nombreux artistes inter-prètes, peu au fait du droit (et de leursdroits), se sont fait embobiner par leurentourage et ont cédé leurs droitscontre une somme fixe.Selon le Center for Intellectual PropertyPolicy and Management de l’universitéde Bournemouth, dans le Sud de l’An-gleterre, ce sont ainsi «72% des bénéfi-ces financiers» générés par la directivede 2011 qui pourraient finir dans la po-che des maisons de disques, et non pasdans celles des artistes. •

Par SOPHIAN FANEN LEXIQUE

DOMAINE PUBLICEn matière de propriétéintellectuelle, ilregroupe les créations(musique, film, écrit…)libres de droit ou dontles droits se sont éteintsaprès une période pré­vue par la loi.

DROIT D’AUTEURIl mêle droit moral etmonopole d’exploitation,confiés à son auteur.Originellement protégécinquante ans après lamort de l’auteur afin debénéficier à ses héri­tiers, il a été étendu en2006, également parune directive euro­péenne, à soixante­dix ans après son décès.

DROITS VOISINSIls regroupent entreautres les droits desartistes interprètes et ledroit du (ou des)producteur. Ils ont étémodifiés en 1985 pourassurer une meilleurerémunération des inter­prètes, notamment lorsde la diffusion de leurtravail à la radio.

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 201324 •

CULTURE

Le juriste Lionel Maurel défendl’idée de «biens communs»:

«Le domainepublic est aussiun moteuréconomique»C onservateur à la Bi-

bliothèque d’histoireinternationale con-

temporaine, juriste et cofon-dateur de la plateformeSavoirsCom1 qui se mobilisepour la défense des «bienscommuns de l’existence»,Lionel Maurel décrypte ré-gulièrement surson blog (1) les at-taques qui visentle domaine public.Comment analy-sez-vous cette «af-faire» Sony-Dy-lan?C’est carrémentune provocation, puisqu’ilsont sous-titré ce disque «TheCopyright Extension Collec-tion». Plus largement, la gra-tuité dérange profondémentles industries culturelles.Pour elles, dans la musiquecomme dans d’autres sec-teurs, c’est quelque chosequ’il faut combattre. Donc, ilfaut combattre le domainepublic comme le piratage oules exceptions pédagogiques[qui permettent d’utiliser uneœuvre à des fins d’éducation etde recherche sans avoir à ver-ser de droits d’auteur, ndlr].L’argument qui dit qu’uneœuvre tombée dans le do-maine public devient moinsdisponible tient-il?Non. Déjà, le domaine publicest aussi un moteur écono-mique, car si on lève le mo-nopole sur l’exploitationd’un film, d’un livre ou d’undisque, davantage de per-sonnes peuvent la publier.Par exemple, les livres deStefan Sweig sont arrivésdans le domaine public [le1er janvier, ndlr], et on voitdéjà que cela entraîne denouvelles éditions, absolu-ment pas une déshérence deson œuvre. Egalement, le do-maine public facilite la réap-propriation des œuvres, leremix. Sur Kickstarter,un projet d’adaptation deHamlet sous la forme d’un li-vre numérique «dont vous

êtes le héros» est devenu leprojet éditorial le mieux fi-nancé de l’histoire de la pla-teforme… alors que plusieurséditeurs l’ont refusé! Le do-maine public permet aussi àune maison d’édition commePublie.net de redécouvrir desouvrages de science-fiction

oubliés, qui da-tent de bien avantJules Verne.Internet a-t-ilchangé la percep-tion du domainepublic?Il subit des atta-ques régulières

depuis longtemps, mais ellessont plus facilement percep-tibles aujourd’hui grâce à In-ternet. Il y a sur le réseau unesensibilité plus forte vis-à-vis de ces problématiques decirculation des œuvres, no-tamment parmi ceux qui dé-fendent le logiciel libre ou lalibre circulation des infor-mations, comme Wikipédia.Mais dans le même temps, lanumérisation fragilise aussile domaine public: beaucoupde musées ou de bibliothè-ques ajoutent une couchede copyright sur la versionnumérisée de tableaux ou delivres qui sont dans le do-maine public… C’est avanttout pour ça qu’il est interditde photographier les ta-bleaux du musée d’Orsay.La Bibliothèque nationale deFrance vient également de si-gner un accord qui exclut dudomaine public une partie deson fonds numérisé…Il s’agit des deux gros ac-cords qui ont mis du temps àaboutir, par lesquels la BNFconfie la numérisationd’œuvres [des livres ancienset des vinyles, ndlr] à des en-treprises privées qui aurontl’exclusivité de leur exploita-tion commerciale pendantdix ans. C’est-à-dire qu’onprivatise des œuvres quiappartiennent à tous.

Recueilli par S.Fa.(1) www.scinfolex.wordpress.com

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Bob Dylanau ColumbiaStudio pour

l’enregistrementde son premieralbum, en 1961.PHOTO MICHAELOCHS ARCHIVES.

GETTY IMAGES

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 CULTURE • 25

WORLD Le hérautkabyle défendralundi et mardison dernier albumà l’Olympia.IDIR CD: NEVEO (Sony).En concert lundi et mardi à 20h30à l’Olympia, 28, bd des Capucines,75009. Rens.: www.olympiahall.com

L e troubadour est contrarié.Dans le village d’Ile-de-France où il habite, la neige

qui bloquait l’entrée du garage l’acontraint à gagner la gare à pied,et il est arrivé en retard au premierrendez-vous de sa journée promo.La neige est pourtant un élémentfamilier aux Kabyles. «Elle faitpartie de notre imaginaire collectif,confirme Idir. Comme les monta-gnes du Djurjura, on la retrouvedans nos poèmes, qui lui attribuentparfois une âme.» Se reporter à unvers tiré de la plus célèbre de seschansons, A Vava Inouva : «De-hors, la neige habite la nuit…»Idir, de son vrai nom Hamid Che-riet, né en 1949 à Aït Lahcène, à35 km de Tizi-Ouzou, capitale dela Grande-Kabylie, publie un nou-veau chapitre d’une discographieclairsemée: si l’on excepte les CDréalisés avec une pléiade d’invités(Identités, la France des Couleurs),Neveo est son quatrième disquesolo : soit moins d’un par décen-nie, puisqu’il a commencé à enre-gistrer en 1975.«Je ne parle pas quand je n’ai rien àdire», explique cet homme calmeet posé, qui s’exprime après ré-flexion, dans un français souventorné des images poétiques propresà la langue amazigh. «J’ai eu lachance d’avoir une grand-mère etune mère poétesses, ajoute-t-il. Onvenait de loin pour les écouter. J’aibaigné dans l’atmosphère magiquedes veillées où l’on racontait descontes et des énigmes. Dans une so-ciété de culture orale, la valeur dumot est immense. La capacité à ci-seler les mots, à inventer des ima-ges, est aujourd’hui encore très pri-sée chez nous.»Lycée. Un rythme de fête ouvre lenouveau disque, avec flûte et per-cussions en vedette. «La flûte a étémon premier instrument, poursuitIdir. Au village, les enfants que nousétions se transformaient en bergersdès la sortie de l’école. Et tailler uneflûte dans un roseau allait de soi.Quand une mélodie me vient, je lateste d’abord à la flûte.»La guitare folk, qui a accompagnéle renouveau de la chanson ka-

byle, est venue bien plus tard,quand Idir déménagea à Algerpour entrer au lycée. «Un coopé-rant français m’a enseigné les pre-miers accords. Mais j’ai vite cherchéà reproduire sur les cordes les ca-dences des percussions traditionnel-les : le tambourin et le bendir.»L’installation dans la capitale, quilui permet d’apprendre l’arabe,marque aussi sa prise de cons-cience sur la nécessité de défendrela culture kabyle: «No-tre pays était un cham-pion du tiers-monde, lephare des non-alignés.Mais ce pouvoir qui prô-nait la souveraineté despeuples nous brimait,nous les Kabyles, dansnotre langue, notre culture. La ré-volte qui habitait les Kabyles, je l’aiexprimée par la chanson.»Chanté en kabyle et un peu enfrançais, Neveo s’ouvre à des hori-zons très divers, et plutôt inatten-dus: l’Hymne à la joie, de Beetho-ven, malicieusement rebaptiséClin d’œil à Ludwig, est joué à laflûte nay et au bendir. Les arran-

gements de cordes de Frank Eulry,artisan du Lys and Love de LaurentVoulzy, magnifient deux mélodiesde la Renaissance, Plaisir d’Amouret Scarborough Fair.Combat. Le soin dans la réalisa-tion est d’ailleurs une constantechez Idir: dans les années 70-80,ses 33-tours étaient enregistrésavec la crème de studios parisiens.«Quand je suis arrivé d’Algérie, té-moigne le chanteur, sorti de mon

couscous, je ne connaissais pasgrand-chose. J’ai eu la chance derencontrer Claude Dejacques, ungrand directeur artistique de lavieille école.» La patte de ce pro-ducteur, disparu en 1998, lié à lacarrière de Barbara et de biend’autres, est présente dans lescouleurs funky, psyché, voiredisco, des chansons de cette épo-

que, qui méritent redécouverte.Disque «intime» pour son auteur,Neveo compte aussi une chansoncomposée par la fille d’Idir, Ta-nina Cheriet, chantée en duo, eten français, avec son père. Et ledisque s’achève avec Naissance dumonde, où l’on entend la voix de lamère du chanteur, celle qui l’a«armé culturellement». Elle estmorte en 2012, à 92 ans.Militant toujours aussi actif de ladéfense de sa culture, Idir déplorequ’aujourd’hui «il y ait de plus enplus de mots arabes dans le kabyleque parlent les jeunes». Pour lui, lecombat culturel ne s’arrête pas.«La culture kabyle est attaquée,dit-il, même si elle est désormaisreconnue par la Constitution, etqu’il existe une télé en langue ama-zigh. Mais cette chaîne véhicule desséries du Moyen-Orient empreintesde religion qui n’ont rien à voir avecnotre identité. Les spectateurs de-viennent arabophones, mais en ka-byle. C’est un piège, une attaque in-sidieuse du pouvoir», conclut-ilavec amertume.

FRANÇOIS-XAVIER GOMEZ

Neveo est le quatrième disquesolo du compositeur né en 1949,soit moins d’un par décennie,puisqu’il a commencéà enregistrer en 1975.

S uite à notre l’article du21 janvier sur les turbulen-ces autour du groupe con-

golais Staff Benda Bilili, le di-recteur de Run Productionsnous apporte les précisions sui-vantes :«Dans Libération du 21 janvier,Jimmy Kibibi (que nous n’avonsjamais rencontré), prétendantparler au nom du managementdu groupe Staff Benda Bilili, dé-clarait à propos des musiciens:“Ce sont des handicapés anal-phabètes traités comme du bé-tail.” Nous, la société Run Pro-ductions, qui sommes sur lesroutes depuis trois ans avec leStaff Benda Bilili et qui avonspartagé la vie des musicienspartout sur la planète, nous dé-clarons gravement diffamés parces propos humiliants.«Nous avons toujours veillé à laqualité de l’accueil, au confortpersonnel et artistique de cesmusiciens, invités par les plusgrands festivals et centresculturels à travers le monde, quiont tout fait pour les recevoirdans les meilleures conditions.Tous les contrats signés avec lesorganisateurs de concerts pré-voyaient un accueil adapté et dequalité pour ces musicienshandicapés. Ces propos sontaussi démentis par les musicienseux-mêmes, traités d’analpha-bètes alors que plusieurs lisentet écrivent en français.«Contrairement aux propos te-nus par M. Kibibi dans le mêmearticle, Run Productions certifiesur l’honneur que la totalité dessommes dues au titre des con-certs donnés pour l’année 2012a été intégralement réglée surfactures, dans le total respectdes contrats de représentationscénique. Ces propos menson-gers et diffamatoires ont égale-ment été tenus auprès de nospartenaires qui devaient ac-cueillir la prochaine tournéeeuropéenne du Staff Benda Bi-lili, annulée suite au départ decertains musiciens du groupe,pour les raisons clairement ex-pliquées dans l’article de Libé-ration.«Il s’agit là d’une grave atteinteà la réputation et à l’honneur denotre société et de son person-nel. Plainte en diffamation a étédéposée, et nous nous réservonsle droit de porter plainte pourtentative d’escroquerie.»

Droitde réponse

Idir en touteintimité

Chanté en kabyle et un peu en français, Neveo s’ouvre à des horizons divers. PHOTO KLAUS ROETHLISBERGER

M E R C R E D I 6 F E V R I E R AV E C L I B E R A T I O N

Le magazine de la culture et des loisirspour les petits et pour les grands

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Dans ce numéro, notre concours «Invente la couverture de ton livre» en partenariat avec le Salon du Livre de Paris.

bandeau_Parismomes_84_bandeau Paris Mômes hsete2006 29/01/13 17:30 Page1

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 201326 • CULTURE

L’auditorium de Bordeaux comporte 1449 places. PHOTO PIERRE ANDRIEU. AFP

A deux ans de l’ouver-ture attendue de laPhilharmonie de Pa-

ris, deux auditoriums vien-nent successivement decompléter le parc de sallesfrançaises dévolues au réper-toire symphonique: celui deLille, inauguré le 9 janvier,après deux ans de travaux, etcelui de Bordeaux, dont laconstruction a pris huit anset qui a ouvert le 31 janvier,en présence du maire de laville, Alain Juppé, et des re-présentants de la région.Parking. Si Lille s’est con-tenté de transformer l’archi-tecture intérieure de sonauditorium Les Siècles,comme cela a étéfait à la SallePleyel, pour uncoût de 17 mil-lions d’euros,Bordeaux a offertà son orchestre,résidant au Palais des Sports,une salle nouvelle pour27 millions d’euros (dont 7apportés par l’Etat, et 1,5 parle conseil régional). Unesomme modique renduepossible par divers facteurs:pas de frais de façade et unemutualisation des coûtsgrâce à la construction d’unparking de sept niveaux, debureaux (800 m2) et d’ap-partements (2 500 m2) dansle bâtiment qui abritait

auparavant un complexe desalles de cinéma Gaumont.A l’origine du projet,l’homme d’affaires MichelOhayon et l’architecte Mi-chel Pétuaud-Létang, ayantdéjà réalisé ensemble desprojets à Bordeaux, commele Grand Hôtel et des espacescommerciaux. Séduit par laperspective d’offrir en pleinCours Clemenceau une sallede 1 449 places, le maire adécidé de l’acquérir en«Vefa» (vente en état de fu-tur achèvement) et d’enconfier la programmation àl’Opéra national de Bor-deaux, dont dépend l’or-chestre symphonique.

Avec sa haute façade en por-tiques blancs et panneaux deverre, évoquant une bouti-que Chanel, l’auditorium,qu’on découvrait jeudi, s’in-tègre avec goût dans le centrecommerçant et touristiquede la ville. A l’intérieur, uncompromis heureux a ététrouvé entre l’architecturedite en «boîte à chaussures»et l’architecture «en vigno-ble». Le volume acoustiquesemble réduit pour un or-

chestre symphonique, maisl’on a appris à se méfier duhiatus entre ce que l’on voitet ce que l’on entend.Archet. A 20h30, le chefKwamé Ryan lance l’ouver-ture du Candide de Bernstein.D’emblée, on perçoit des dé-séquilibres entre les cordessonnant ternes et timides etles vents et cuivres surexpo-sés par l’acoustique, jusqu’àla stridulation. Le piano deBertrand Chamayou, dans leConcerto n°2 de Saint-Saëns,sonne ensuite écrasé et privéde ses harmoniques, mêmelorsque le musicien offre enbis la Fille aux cheveux de lin,de Debussy. Après l’entracte,on est littéralement assourdipar les percussions ouvrantla belle pièce de PeterEötvös. Le plus problémati-que restant les contrebasses.Ce que confirme la Suite del’Oiseau de Feu de Stravinski.On sait que l’ONB n’est pasle Philharmonique de Berlin,mais autant en pizzicati qu’àl’archet, le registre grave estinexistant, hormis un filetd’infrabasses indistinctes.Sonnant criard et aigu, of-frant un spectre chromatiqueet un temps de réverbérationégalement courts, ce qui estlié, cet auditorium n’est pasune réussite.

Envoyé spécial à BordeauxÉRIC DAHAN

PHILHARMONIE Inaugurée jeudi, la nouvelle sallede concerts offre une acoustique décevante.

Bordeaux: l’auditoriumrate le coche

D’emblée, on percevaitjeudi des déséquilibresentre cordes timideset vents surexposés.

En résidence cette saison àla Ferme du Buisson, quiest à l’origine du projet, leCabaret contemporainpropose ce samedi uneexpérience insolite. TitréWet Sounds, le concert dusoir se déroulera en effetdans l’eau de la piscine deTorcy, riante bourgade deSeine­et­Marne à laquelleon ne pense pas assezcomme idée de sortie duweek­end, et où pourtantl’artiste Joel Cahen et lachanteuse Rebecca Hiwox,accompagnés de deux DJ(Grégory Cervello etGuillaume Dorson), vontcréer en direct unemusique électroacoustiquecomposée spécialementpour la circonstance(avec, en bonus, la piècede Steve Reich ElectricCounterpoint pour guitareseule et bande). Prévuepour durer trois heures, lareprésentation est accessi­ble dans l’eau (maillot etbonnet exigés), où le sonse propage 4,5 fois plusvite que dans l’air, ou àl’extérieur du bassin (tenuede ville conseillée).Baptêmes de plongéeset natation synchroniséecompléteront l’offre,proposée au tarif uniquede 5 euros. Il est possiblede réserver. G.R.Rens.: 01 64 62 77 77.

CONCERTAQUATIQUEÀ TORCY

L’HISTOIRE

Dropkick Murphys Punk etcornemuse (1re partie: DidierWampas) Zénith, parc de laVillette, 75019. Sam, 19h30.

Hadouk Trio Groove végétalavec doudouk, kora, waterphoneSalle Gaveau, 45, rue La Boétie,75008. Sam, 20h30.

Burnt Sugar The ArkestraChamber Codirigé par GregTate et Vernon Reid, 2 concertsThéâtre Jean­Vilar, Vitry­sur­Seine (94). Dim, 16h & 20h.

Divine Pocket Bouncers Funkygroove du combo franco­US(MC Jester, Sanz, Nickerson) ;Serge Teyssot­Gay (1re partie)Java, 105, rue du Faubourg­du­Temple, 75011. Dim, 17h.

Histoire(s) d’amour Une«lecture musicale» écrite parArnaud Cathrine, avec cinqinterprètes dont BarbaraCarlotti, Jeanne Cherhalet Florent Marchet ThéâtreSorano, 35, allée Jules­Guesde,Toulouse (31). Sam 20h.

MÉMENTO

Uderzo soutient Depardieu«Si j’avais eu vingt ans de moins, j’aurais fait pareil que Gégé.»C’est en ces termes que le père d’Astérix a absous l’exil fiscalde l’interprète d’Obélix lors d’une master class tenue ven-dredi au festival de la bande dessinée d’Angoulême.

Les Frac fêtent leurs 30 ansPour célébrer leur trentenaire, les Fonds régionaux d’art con-temporain organisent à partir d’avril une constellation d’ex-pos à travers toute la France, l’anniversaire devant culminercet automne à Toulouse avec un «grand événement collectif».

Le Misanthrope inverséque compose GérardLanvin dans la pièce filméeAmitiés sincères pourraitêtre un rôle de sa vie.A la hauteur du héros, pluscomplexe qu’il n’en a l’air,Walter (Orsini…), Lanvin

joue notablement ce pote débordant d’affection au bonsens gênant, caractère entier confinant au vrai con. «Gar­dez­moi de mes amis…» Trente ans et plus que cet Alcesteau cœur gros comme ça tyrannise son monde sous pré­texte d’amour –et voilà que tout craque. Le zèbre Zoucanne, écœuré des carottes; «ma fleur», 20 ans, qui en asoupé des poupous à papa, veut du radada; les amissacrés jouent double jeu... la vie n’est pas aussi simplequ’un joint de WC. Très moliéresque dans sa problémati­que de la passion juvénile source de conflit avec lesparents (ici aussi peu crédible que «l’écrivain»), le boule­vard bobo (PS, thuné, gay, lettré, sexagénaire…) fait la partbelle à Lanvin –comme au bon vin, soit dit en note laca­nienne. Entre deux quiproquos à mi­ami et un envoiœnologique à Dumas, le désarroi du beauf­titre confrontéà sa réalité odieuse, émeut. BAYON PHOTO JÉRÔME PREBOIS«Amitiés sincères», de Stephan Archinard et François Prévot­Leygonie. Avec Gérard Lanvin, Jean­Hugues Anglade,Wladimir Yordanoff, Ana Girardot… 1h45. En salles.

«AMITIÉSSINCÈRES»UN PEU SERRÉES

LE FILM DU DIMANCHE

La petite renarde rusée

nouveLLe produCtionCoproduction avec l’opéra de Lille

Janácekˇ

direction musicale Friedemann Layer

mise en scène robert Carsen

Chœurs et Maîtrise de l’onr

orchestre symphonique de Mulhouse

strasbourg opéra MuLhouse La FiLature

08 02 03 03

www.operanationaldurhin.eu

LIBÉRATION SAMEDI 2 ET DIMANCHE 3 FÉVRIER 2013 CULTURE • 27

BRAVO !Les 10 000 salariés et les 2 000 délégués du Groupe Macif

félicitent François Gabart pour sa superbe victoire au Vendée Globe 2012/2013.

La Macif est une entreprise d’économie sociale construite sur un modèle qui allie bénéfi ce social et performance économique. Le Groupe Macif couvre les besoins de près de 5 millions de sociétaires en Assurances, Banque, Santé.

Plus d’informations sur www.macif.fr

MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERÇANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE ET DES CADRES ET SALARIÉS DE L’INDUSTRIE ET DU COMMERCE. Société d’assurance mutuelle à cotisations variables. Entreprise régie par le Code des assurances. Siège social : 2 et 4, rue de Pied-de-Fond, 79000 Niort. Inscrite au registre des démarcheurs bancaires et fi nanciers sous le no 2103371860HQ. Intermédiaire en opérations de banque pour le compte exclusif de Socram Banque.

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LIBÉRATION • 248 x 330 mm SP FU • Visuel : VICTOIRE • Remise le 29 janv. 2013 • Parution : 1er fév. 2013 BoF • BAT • ...

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