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Henry de Waroquier
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Exposition
Photographies et destruction- Henry de Waroquier
Galerie Les Atamanes
www.lesatamanes.com
Mars 2013
Au milieu des années trente, Henry de Waroquier
(1881-1970) entame, une démarche novatrice qui fait de
lui un des pionniers de ce mouvement qu’en art
contemporain on connait sous le nom d’art éphémère.
Obsédé par le désir de protéger son originalité créatrice
des jugements hâtifs et des courants réducteurs du
snobisme parisien, Henry de Waroquier fut un artiste
double.
La partie la plus apparente de son œuvre, celle qui
connut de son vivant un remarquable succès et lui
apporta l’indépendance financière, est constituée de
travaux harmonieux et calmes, à l’effet décoratif appuyé.
Ses paysages vénitiens structurés selon les gouts
stylistiques en vogue lors de leur exécution en sont la
parfaite représentation.
La Salute d’Henry de Waroquier
http://www.lesatamanes.com/oeuvres/la-salute-dhenry-de-waroquier
Mais dès 1934, ceux qui prenaient la peine de
pousser les portes de son atelier découvraient une
œuvre tourmentée, obsessionnelle, dévorée d’angoisse,
dont la richesse n’a pas encore été pleinement
reconnue.
Cette œuvre a été fort peu diffusée, car Waroquier ne se
souciait pas de faire connaitre ces tableaux où il jetait la
totalité de son âme. Il faut aller voir la Tragédie, fresque
qui orne le Palais de Chaillot, pour se rendre compte de
l’intensité que déployait cet immense artiste.
Cette œuvre secrète, commencée alors que l’artiste
venait de dépasser la cinquantaine, devient vite si
foisonnante que Waroquier ressent le besoin de
l’organiser et d’en garder trace. Il se met à photographier
chacune de ses réalisations et à annoter
méticuleusement les tirages à l’encre. Par un de ces
étonnants miracles de l’inspiration, ce qui avait
commencé comme un moyen d’archivage nécessaire
devient vite pour l’artiste un mode d’expression à part
entière.
Dans ses Visages aux multiples variations ou dans
ses chimères fantastiques, Waroquier se met à
rechercher l’image de sa sculpture, son idée plus que sa
réalisation. Le reflet capturé à travers l’objectif lui devient
bientôt plus cher que la pesante matérialité de l’objet
sorti de ses mains. Bientôt, il cesse de transposer en
plâtre ses sculptures en plastiline, de sauver de la
destruction ses plâtres originaux. S’il ne cesse pas
d’avoir recours au bronze ou à la pierre, il se met à
s’intéresser aux matériaux éphémères. C’est ainsi que
naissent de fugitives réalisations en papier déchirés, ou
tracées à la craie sur des tessons réutilisés à l’infini.
L’inventivité de Waroquier n’a plus de limite.
Eponges, légumes du potager se métamorphosent sous
ses doigts. Souvent, il met en scène ses sculptures dans
des scènes d’action, organise entre elles des dialogues
savoureux. Chaque fois la photographie garde la trace
de l’œuvre que Waroquier s’empresse de détruire.
A certaines occasions, Waroquier fait appel à des
photographes professionnels pour compléter sa
démarche, notamment à Marc Vaux, lorsqu’il veut
obtenir certains effets.
La comparaison avec ses propres clichés nous
permet de prendre la mesure de l’originalité de
Waroquier dans le traitement de la lumière. L’artiste ne
recherche jamais la perfection de l’éclairage. Mettre en
valeur sa sculpture lui semble une attitude servile.
Au contraire, il utilise le jeu des ombres et de la
lumière comme un nouveau matériau sur lequel créer. Il
se bat avec les ombres, provoque les reflets, joue sans
remords avec des expositions limites. De même, les
tirages qu’il réalise lui-même sont volontairement
imparfaits, les taches d’eau, les piquages et les traces
de colle s’insèrent d’eux-mêmes dans le processus
créatif.
Voici une sélection de ses œuvres, illustrées de poèmes
autour de deux thèmes chers à Henry de Waroquier :
- Les visages humains qu’il voit comme un miroir du
tragique
- Les grotesques, hybrides et animaux chimériques,
produits d’expérimentations sans cesse
renouvelées.
Je vis un ange blanc qui passait sur ma tête ;
Son vol éblouissant apaisait la tempête,
Et faisait taire au loin la mer pleine de bruit.
- Qu’est-ce que tu viens faire, ange, dans cette nuit ?
Lui dis-je. – Il répondit : - Je viens prendre ton âme-
Et j’eus peur, car je vis que c’était une femme ;
Et je lui dis, tremblant et lui tendant les bras :
- Que me restera-t-il ? car tu t’envoleras. –
Il ne répondit pas. Le ciel que l’ombre assiège
S’éteignait… - Si tu prends mon âme, m’écriais-je,
Ou l’emporteras-tu ? montre-moi dans quel lieu –
Il se taisait toujours. – Ô passant du ciel bleu,
Es-tu la mort ? lui dis-je, ou bien es-tu la vie ?-
Et la nuit augmentait sur mon âme ravie,
Et l’ange devint noir, et dit : - Je suis l’amour.
Mais son front sombre était plus charmant que le jour,
Et je voyais, dans l’ombre où brillaient ses prunelles,
Les astres à travers les plumes de ses ailes.
Victor Hugo, Les contemplations.Livre V, 18.
L'ange au cube d'Henry de Waroquier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/lange-au-cube-dhenry-de-waroquier
1935 Photographie
Tirage argentique, épreuve unique Prix : 730.00 euros
Masque pâle sans au front une pierrerie Ni funèbre laurier au delà de la mort,
Quelle parole est morte à la lèvre meurtrie De quel aveu pour que la lèvre en saigne encor?
Masque éperdu vers les étoiles,
Son intacte blancheur de marbre a vaincu l'ombre Et la face s'exhume éternelle de l'ombre
Blanche et grave sous les étoiles.
Masque plus pâle que l'aurore Et la lune aux étangs mirée et faciale,
Etrange et frustre et d'une douceur faciale Ainsi qu'une lune d'aurore.
Masque ébloui sous le soleil
Fixe et grave d'une candeur inaltérée, Nulle soif n'a disjoint la lèvre inaltérée
Rouge fruit gorgé de soleil.
Masque sans larme sous la pluie Où la pluie aux soirs d'ombre éperdument ruisselle,
Paupières closes d'où rien autre ne ruisselle Que les froides larmes de pluie.
Henri de Régnier. 44 poèmes.
Masque de femme vu de face de Marc Vaux http://www.lesatamanes.com/oeuvres/masque-de-femme-vu-de-face-de-marc-vaux
Photographie
Tirage argentique Prix : 420.00 euros
J'ai mes statues.
Les siècles me les ont léguées: les siècles de mon attente, les siècles de mes découragements, les siècles de mon indéfinie, de mon inétouffable espérance les ont
faites.
Et maintenant elles sont là.
Point ne sais-je toujours le sens de leur représentation.
Leur origine m'est inconnue et se perd dans la nuit de ma vie,
où seules leurs formes ont été préservées de l'inexorable balaiement.
Mais elles sont là, et durcit leur marbre chaque année davantage , blanchissant sur le fond obscur des masses
oubliées.
Henri Michaux, Epreuves, exorcismes, 1940-1944
Visage de femme d'Henry de Waroquier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/visage-de-femme-dhenry-de-waroquier
1935
Photographie Tirage argentique collé en plein sur une feuille de papier
chiffon gaufré Prix : 430.00 euros
Tes yeux sont revenus d’un pays arbitraire
Où nul n’a jamais su ce que c’est qu’un regard
Ni connu la beauté des yeux, beauté des pierres,
Celle des gouttes d’eau, des perles en placards,
Des pierres nues et sans squelette, ô ma statue.
Le soleil aveuglant te tient lieu de miroir
Et s’il semble obéir aux puissance du soir
C’est que ma tête est close, ô statue abattue
Par mon amour et par mes ruses de sauvage.
Mon désir immobile est ton dernier soutien
Et je t’emporte sans bataille, ô mon image,
Rompue à ma faiblesse et prise dans mes liens.
Paul ÉLUARD, "Mourir de ne pas mourir"
Visage ethnique d'Henry de Waroquier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/visage-ethnique-dhenry-de-waroquier
Photographie
Tirage argentique collé en plein sur une feuille de papier chiffon gaufré
Prix : 230.00 euros
Et l'Atréide, élevant la voix, ordonna aux Argiens de s'armer ; et lui-même se couvrit de l'airain éclatant. (…)
Et il mit un casque chevelu orné de quatre cônes et d'aigrettes de crin qui s'agitaient terriblement. Et il prit deux lances solides aux pointes d'airain qui brillaient jusqu'à l'Ouranos. Et Athènaiè et Hèrè éveillèrent un grand bruit pour honorer le roi de la riche Mykènè.
L’Illiade, Homère, chant XI
Visage d'homme barbu d'Henry de Waroquier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/visage-dhomme-barbu-dhenry-de-waroquier
1934
Photographie Tirage argentique collé en plein sur une feuille de papier
chiffon gaufré Prix : 580.00 euros
La girafe et la girouette, Vent du sud et vent de l’est,
Tendent leur cou vers l’alouette, Vent du nord et vent de l’ouest.
Toutes deux vivent près du ciel, Vent du sud et vent de l’est, À la hauteur des hirondelles,
Vent du nord et vent de l’ouest.
Et l’hirondelle pirouette, Vent du sud et vent de l’est,
En été sur les girouettes, Vent du nord et vent de l’ouest.
L’hirondelle, fait, des paraphes, Vent du sud et vent de l’est,
Tout l’hiver autour des girafes, Vent du nord et vent de l’ouest
Robert DESNOS, La Girafe, Recueil : "Chantefables et chantefleurs"
Girafes ailées d'Henry de Waroquier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/girafes-ailees-dhenry-de-waroquier
1934
Photographie Tirage argentique collé en plein sur une feuille de papier
chiffon gaufré Prix : 550.00 euros
Voici le rhinocérossignol, cette bête grosse comme le
villol (ce dernier vit en ville, différemment de son
confrère) présente cette drôle de corne proéminente en
plein bec. Et, comme il entend exprimer désir et joie, il
se met à siffler : l'éminente corne est percée de sept
orifices, ceci permet de sonner les notes do ré mi sol si
(le rhinocérossignol doit être très expérimenté s'il espère
siffler les sept notes).
Rhinocérossignol, comme tes sons sonnent! Comme tes
mélodies sont belles ! Elles semblent être de Pergolèse,
de Chopin, voir de Prokofiev. Ton sifflet émerveille
Terpsichore. Siffle, siffle encore, je te prie.
Anthologie de l’OuLiPo, JR et OS
Chimère d'Henry de Waroquier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/chimere-dhenry-de-waroquier
1934
Photographie Tirage argentique collé en plein sur une feuille de papier
chiffon gaufré Prix : 580.00 euros
L’homme des frontières En toute sa vie n’ouvre pas même un livre;
Mais il sait courir à la chasse; il est adroit, fort et hardi. A l’automne son cheval est gras, l’herbe de ses prairies
lui convient à merveille; Quand il galope il n’a plus d’ombre.
Quel air superbe et dédaigneux! Son fouet sonore frappe la neige, ou résonne dans l’étui
doré. Animé par un vin généreux, il appelle son faucon et sort
au loin dans la campagne. Son arc, arrondi sous un effort puissant, ne se détend
jamais dans le vide; Deux oiseaux tombent souvent ensemble, abattus d’un
seul coup par la flèche sifflante. Les gens, au bord de la mer, se rangent tous pour lui
faire place, Car sa vaillance et son humeur guerrière sont bien
connues dans le Gobi. Combien nos lettrés diffèrent de ces promeneurs
intrépides! Eux qui blanchissent sur les livres, derrière un rideau
tiré; Et, en vérité, pour quoi faire?
Li Bai . À cheval! à cheval et en chasse! Poème de
l’époque des Tang
Guerrier et monture d'Henry de Waroquier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/guerrier-et-monture-dhenry-de-waroquier
1934
Photographie Tirage argentique collé en plein sur une feuille de papier
chiffon gaufré Prix : 480.00 euros
« Suzanne [la femme de l’artiste] sait mon désir. Au
retour de mon premier voyage en Grèce, elle dépose sur
ma table trente pains de cire. Je me jette sur cette
manne. Je la pétris en des formes tour à tour détruites et
renouvelées. Entre-temps, je prends des clichés.
Quelques épreuves agrandies, voilà ce qui me reste.»
Henry de Waroquier , Octobre 1934