Formation Enseignement Orientations En

Embed Size (px)

Citation preview

  • Avertissement

    Pour faciliter la consultation lcran, les pages blanches du document imprim (quicorrespondent aux pages 2, 10,12, 14, 16, 32, 42, 44, 46, 48, 54, 56, 58, 60, 68, 90, 102,124, 130, 136, 138, 140, 142, 144, 146, 148, 150, 152, 154, 156, 158, 160, 162, 164,166, 172, 176, 180, 182, 184, 186, 190, 192, 194, 196, 198, 200, 202, 204, 210, 212,214, 222, 226 et 228) ont t retires de la version PDF. On ne sinquitera donc pas deleur absence si on imprime le document.

    La pagination du fichier PDF est ainsi demeure en tous points conforme celle deloriginal.

  • Les orientations

    Les compte

    nces

    prof

    essi

    onn

    elle

    s

    La formation l'enseignement

    69-2

    099

    La fo

    rmat

    ion

    l'e

    nsei

    gnem

    ent

  • Les orientations

    Les comptencesprofessionnelles

    La formation l'enseignement

  • ii

    CONCEPTION ET RDACTION :

    Marielle Anne MartinetResponsable de la formation initiale du personnel enseignantMinistre de lducationGouvernement du Qubec

    Danielle RaymondChercheuse associe au Centre de recherche interuniversitairesur la formation de la profession enseignante (CRIFPE)ProfesseureDpartement de pdagogieFacult dducationUniversit de Sherbrooke

    Clermont GauthierProfesseurDpartement dtudes en enseignement et apprentissageTitulaire de la Chaire de recherche du Canada en formation des matresFacult des sciences de lducationUniversit Laval

    RVISION LINGUISTIQUE :

    Service des publicationsMinistre de lducationGouvernement du Qubec

    Gouvernement du QubecMinistre de lducation, 2001 00-1152

    ISBN : 2-550-37336-7

    Dpt lgal Bibliothque nationale du Qubec, 2001

  • Des transformations importantes sont prsentement en coursdans tout le systme dducation, et ce, essentiellement en vuedamliorer la qualit de la formation et daugmenter le taux derussite des lves du Qubec. Ces changements concernant lcole,tout comme ceux touchant la socit qubcoise dans son ensemble,font de plus en plus appel lautonomie professionnelle desenseignantes et des enseignants.

    Voil pourquoi le document dorientation que je proposerelativement la formation des matres pour lenseignement primaireet secondaire inscrit rsolument cette dernire dans une perspectivede professionnalisation. Il est certain que des efforts notables ont djt faits, en ce qui concerne la formation des matres, au cours de ladernire dcennie. Jinvite les universits aller encore plus loin. Laformation lenseignement doit prparer les futures enseignantes etles futurs enseignants accomplir des actes caractre professionneldont profiteront tous les lves du Qubec. Cest dans cette directionque nous conduit le rfrentiel de comptences professionnelles de laprofession enseignante.

    Le document que je rends disponible a fait lobjet dune vasteconsultation auprs des diffrents partenaires du monde delducation. Il constitue dsormais le document officiel du ministrede lducation en matire de formation des matres pour la formationgnrale.

    Aussi, je demande au Comit dagrment des programmes deformation lenseignement (CAPFE) de procder un rappel desprogrammes de formation actuels et dexaminer les nouveauxprogrammes qui lui seront soumis la lumire du document intitulLa formation lenseignement Les orientations Les comptencesprofessionnelles. Je lui demande de sassurer que les programmesquil recommande comme menant lautorisation denseignerrespectent les orientations du Ministre et permettent latteinte descomptences professionnelles vises.

  • Jinsiste plus particulirement auprs du CAPFE pour quil porteune attention spciale aux moyens mis en uvre dans lesprogrammes de formation en ce qui concerne la languedenseignement, afin que la socit qubcoise soit assure que lesfutures enseignantes et les futurs enseignants atteignent un niveaude comptence lev au terme de leur formation initiale. Il en est demme pour la matrise de la langue seconde, pour ceux et celles quise destinent cet enseignement.

    De plus, afin de garantir la cohrence et le caractre professionnelde la formation lenseignement, je souhaite que le CAPFE assureune vigilance lgard dune matrise duvre unique de la formation lenseignement. Cette matrise duvre devrait permettre laconcertation entre les facults ou dpartements des sciences delducation et les facults ou dpartements disciplinaires ainsi quunpartenariat efficace entre le milieu universitaire et le rseau scolaire.Cest ainsi, je crois, que nous pourrons former des matres quisauront rpondre aux besoins de la socit qubcoise en matiredducation.

    Cest donc en toute confiance que je demande aux diverspartenaires et plus particulirement aux universits dunir leursefforts pour la formation dune relve professionnelle enenseignement. Je profite de loccasion pour les remercier tous ettoutes de la qualit des avis prsents lors de la consultationnationale.

    Le ministre dtat lducationet la Jeunesse,

    FRANOIS LEGAULT

  • Table des matires

    v

    TABLE DES MATIRES

    Page

    INTRODUCTION..............................................................................................................ix

    1 L'VOLUTION DE LA PRATIQUE DE L'ENSEIGNEMENT .......................................... 3

    1.1 Une cole avec une autonomie accrue .................................................................. 31.2 Une cole avec de nouvelles missions ................................................................... 41.3 Un effectif scolaire de plus en plus diversifi ........................................................ 51.4 Une cellule familiale modifie ............................................................................... 51.5 Un march de l'emploi mtamorphos .................................................................. 61.6 Un savoir clat et sa transmission diversifie...................................................... 71.7 Une recherche dans le domaine de l'enseignement transforme........................... 81.8 Une formation des matres adapter.................................................................... 9

    2 LES ORIENTATIONS GNRALES ...........................................................................13

    2.1 La professionnalisation .......................................................................................172.1.1 Le concept de professionnalisation .............................................................17

    2.1.1.1 La professionnalit ........................................................................172.1.1.2 Le professionnisme........................................................................18

    2.1.2 Les anciennes formes de professionnalit ...................................................192.1.2.1 Le matre improvis .......................................................................192.1.2.2 Le matre artisan ...........................................................................202.1.2.3 Le matre scientifique ....................................................................21

    2.1.3 Un nouveau modle de professionnalit : le matre professionnel ...............222.1.3.1 Des comptences en fonction de la nouvelle qualification requise..232.1.3.2 La complexit de lacte denseigner ................................................242.1.3.3 Une formation intgre et ancre dans des lieux de pratique ........252.1.3.4 Une formation polyvalente.............................................................262.1.3.5 Des liens entre la recherche et la formation...................................272.1.3.6 Un appel au partenariat et la concertation entre les instances

    et les personnes concernes ..........................................................282.2 Lapproche culturelle de lenseignement ..............................................................33

    2.2.1 Le concept de culture .................................................................................332.2.1.1 La culture comme objet .................................................................332.2.1.2 La culture comme rapport .............................................................35

    2.2.2 Le rle du matre cultiv.............................................................................372.2.2.1 Le matre hritier...........................................................................382.2.2.2 Le matre critique ..........................................................................392.2.2.3 Le matre interprte.......................................................................39

    2.2.3 La formation du matre cultiv ...................................................................39

  • La formation l'enseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    vi

    3 LES COMPTENCES PROFESSIONNELLES ............................................................ 45

    3.1 Le concept de comptences professionnelles....................................................... 493.1.1 Les caractristiques lies au concept de comptence ................................. 50

    3.1.1.1 La comptence se dploie en contexte professionnel rel............... 503.1.1.2 La comptence se situe sur un continuum qui va du simple au

    complexe ...................................................................................... 503.1.1.3 La comptence se fonde sur un ensemble de ressources............... 513.1.1.4 La comptence est de lordre du savoir-mobiliser en contexte

    daction professionnelle ................................................................ 513.1.1.5 La comptence comme savoir-agir est une pratique

    intentionnelle ............................................................................... 523.1.1.6 La comptence est un savoir-agir russi, efficace, efficient et

    immdiat qui se manifeste de faon rcurrente............................. 523.1.1.7 La comptence constitue un projet, une finalit sans fin .............. 53

    3.2 Le rfrentiel de comptences professionnelles de la profession enseignante ...... 57

    COMPTENCE NO 1 ....................................................................................................... 61COMPTENCE NO 2 ....................................................................................................... 69COMPTENCE NO 3 ....................................................................................................... 75COMPTENCE NO 4 ....................................................................................................... 85COMPTENCE NO 5 ....................................................................................................... 91COMPTENCE NO 6 ....................................................................................................... 97COMPTENCE NO 7 ..................................................................................................... 103COMPTENCE NO 8 ..................................................................................................... 107COMPTENCE NO 9 ..................................................................................................... 113COMPTENCE NO 10 ................................................................................................... 119COMPTENCE NO 11 ................................................................................................... 125COMPTENCE NO 12 ................................................................................................... 131

    TABLEAU SYNTHSE ................................................................................................. 135

    COMPTENCE NO 1 ..................................................................................................... 137COMPTENCE NO 2 ..................................................................................................... 139COMPTENCE NO 3 ..................................................................................................... 141COMPTENCE NO 4 ..................................................................................................... 143COMPTENCE NO 5 ..................................................................................................... 145COMPTENCE NO 6 ..................................................................................................... 147COMPTENCE NO 7 ..................................................................................................... 149COMPTENCE NO 8 ..................................................................................................... 151COMPTENCE NO 9 ..................................................................................................... 153COMPTENCE NO 10 ................................................................................................... 155COMPTENCE NO 11 ................................................................................................... 157COMPTENCE NO 12 ................................................................................................... 159

  • Table des matires

    vii

    4 LES PROFILS DE SORTIE ......................................................................................163

    4.1 Des profils de sortie en fonction des domaines d'apprentissage .........................1674.1.1 Le baccalaurat en ducation prscolaire et en enseignement primaire

    (BEPEP)....................................................................................................1694.1.2 Le baccalaurat en enseignement secondaire (BES)..................................173

    4.1.2.1 Le domaine d'apprentissage des langues .....................................1734.1.2.2 Le domaine d'apprentissage de la mathmatique, de la science et

    de la technologie..........................................................................1774.1.2.3 Le domaine d'apprentissage de l'univers social ............................1834.1.2.4 Le domaine d'apprentissage du dveloppement personnel ...........187

    4.1.3 Le baccalaurat en enseignement des arts................................................1934.1.4 Le baccalaurat en enseignement de lducation physique et la sant ...1974.1.5 Le baccalaurat en enseignement de langlais, langue seconde, ou du

    franais, langue seconde ..........................................................................2014.1.6 Le baccalaurat en adaptation scolaire.....................................................205

    4.1.6.1 L'adaptation de l'enseignement pour les jeunes ...........................2054.1.6.2 L'adaptation de l'enseignement pour les adultes..........................2084.1.6.3 La formation l'enseignement .....................................................209

    5 L'LABORATION DES PROGRAMMES DANS UNE PERSPECTIVE DEDVELOPPEMENT DE COMPTENCES PROFESSIONNELLES .............................215

    5.1 La formation lenseignement dans une optique de professionnalisation ..........2155.2 La formation lenseignement dans une optique dapproche culturelle de

    lenseignement ..................................................................................................2175.3 La formation lenseignement partir dune approche par comptences

    professionnelles.................................................................................................2185.4 Lorganisation de la formation ...........................................................................219

    ANNEXE ...................................................................................................................... 223

    BIBLIOGRAPHIE ......................................................................................................... 227

  • Introduction

    ix

    INTRODUCTION

    es nouvelles ralits politiques, sociales, dmographiques, conomiques et culturellesont oblig la socit rflchir sur lcole, sa mission et son organisation. Cest ainsi

    que les tats gnraux sur lducation, vaste processus de consultation amorc auprintemps de 1995, ont permis de faire l'expos de la situation concernant lducation auQubec.

    Au terme de ses travaux, la Commission des tats gnraux sur l'ducation tentait declarifier les finalits ducatives de l'cole et proposait ainsi de recentrer sa mission surtrois axes : l'instruction, la socialisation et la qualification. De plus, elle dgageait uncertain nombre de chantiers prioritaires au regard de l'avenir de l'ducation au Qubec.

    la suite de la publication du rapport final de la Commission des tats gnraux surl'ducation (Commission des tats gnraux sur lducation 1996), le ministre del'ducation rendait publiques les grandes orientations de la rforme qui allait s'amorcerdans le systme ducatif. L'ensemble de la socit qubcoise, et non seulement le milieuscolaire, tait alors convi dployer les efforts voulus pour augmenter le taux dediplomation des lves, et ce, tous les ordres d'enseignement. Le plan d'action ministrielpour la rforme de l'ducation, publi en 1997, dfinissait sept lignes d'action cet gard :intervenir ds la petite enfance, enseigner les matires essentielles, donner plusd'autonomie l'cole, soutenir l'cole montralaise, intensifier la rforme de la formationprofessionnelle et technique, consolider et rationaliser l'enseignement suprieur et donnerun meilleur accs la formation continue (Ministre de l'ducation 1997 : 1). En 1997, leministre de l'ducation publiait galement l'nonc de politique ducative qui prcise leschangements apporter dans les coles primaires et secondaires du Qubec.

    C'est dans ce contexte que s'inscrit le prsent document sur la formation l'ensei-gnement. Mme si la formation des matres a connu des changements importants aucours de la dernire dcennie, il nen demeure pas moins que les programmes deformation des futurs enseignants et enseignantes ne peuvent ignorer les transformationsen cours dans tout le systme dducation. En effet, parmi les lignes daction proposespar la rforme, certaines ont une incidence notable sur la formation initiale lenseignement. Il convenait donc dharmoniser la formation des matres aux changementstouchant le systme dans son ensemble et de la rendre ainsi mieux adapte aux nouvellesralits qui dfiniront le monde scolaire pour les annes venir.

    En ce sens, les adaptations apportes la formation des matres ne dcoulent pas tantd'une valuation systmatique de la rforme effectue au cours de la dernire dcennieque d'une volont d'harmoniser la formation l'enseignement avec les changements encours dans les coles du Qubec. Ce faisant, elle devrait permettre ainsi aux universitsde former des futurs matres qui sauront rpondre, de manire pertinente, critique etcrative, aux besoins ducatifs de la socit.

    Cest pourquoi le ministre de l'ducation du Qubec dfinit, dans le prsent document, lesorientations de la formation lenseignement, les comptences professionnelles attenduesau terme de la formation initiale et les profils de sortie. L'tablissement de ces balisesconstitue la premire tape d'un processus qui comprend ensuite l'laboration des

    L

  • La formation l'enseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    x

    programmes par les universits, lagrment de ces programmes par le Comit d'agrmentdes programmes de formation l'enseignement (CAPFE) et la reconnaissance d'aptitude l'enseignement.

    Le prsent document porte sur les programmes de formation la profession ensei-gnante pour lducation prscolaire et lenseignement primaire, lenseignement secondaire(formation gnrale), l'enseignement des arts, l'enseignement de l'ducation physique et la sant, l'enseignement des langues secondes et l'adaptation scolaire.

    Les orientations, le rfrentiel de comptences professionnelles et les profils de sortieprennent appui, dune part, sur les lignes directrices de la rforme et, dautre part, surdes tudes, des recherches et des expriences rcentes en matire de formation desmatres. Aussi, les analyses et les recommandations prsentes dans les nombreux avis etmmoires soumis par des associations, des tablissements et des organismes qubcoisde mme que les commentaires des personnes venant du milieu tant universitaire quescolaire ont constitu une source importante de rflexion et dinspiration. En prsentantce document, le ministre de l'ducation n'a d'autre but que d'assurer aux futursenseignants et enseignantes les bases professionnelles ncessaires leur pratique, touten respectant la responsabilit quont les universits d'laborer leurs programmes etd'amnager leurs structures de formation. En agissant ainsi, il est fidle sa missionpremire, qui est de veiller assurer, avec tous les partenaires concerns, une ducationde qualit l'ensemble des lves du Qubec.

  • Chapitre 1

    Lvolution

    de la pratique

    de lenseignement

  • L'volution de la pratique de l'enseignement

    3

    1 L'VOLUTION DE LA PRATIQUE DE L'ENSEIGNEMENT

    enseignement a longtemps t abord de manire abstraite, comme si cetteoccupation ne mettait en scne quun matre formel charg de faire

    apprendre un objet de savoir aseptis un sujet dsincarn dans un contexte a-social et a-historique. Pourtant, la situation est tout autre. Le matre est unacteur social et son travail est soumis de multiples pressions internes, dansson lieu mme de travail, et externes, provenant de la socit, qui influent surson rle, sur ceux qui il s'adresse, cest--dire les lves, et sur ce qu'il doitleur faire apprendre. La classe, loin dtre un lieu clos, libre des influencesextrieures, est traverse, ptrie, en son sein mme par toute une srie dephnomnes qui colorent sa nature et son fonctionnement. En ce sens, le travailde lenseignante ou de l'enseignant daujourdhui a volu considrablement etest porteur de tensions nouvelles qui posent des dfis particuliers aux matres etaux tablissements d'enseignement.

    Sans prtendre exposer de manire exhaustive et en profondeur tous lesphnomnes qui traversent le systme ducatif et la socit, il importe d'enrappeler un certain nombre qui touchent de manire particulire les ensei-gnantes et les enseignants et, partant, les tablissements qui se consacrent laformation des matres.

    1.1 Une cole avec une autonomie accrue

    Une caractristique importante des socits contemporaines est la transfor-mation du rle de ltat. Alors quil ny a pas si longtemps, au moment de laRvolution tranquille, ltat occupait une place centrale dans toutes les sphresde la socit, on assiste depuis quelques annes une remise en question deson importance et de sa fonction.

    Au Qubec, la transformation du rle de ltat se traduit notamment par unetentative de dcentralisation plus marque o les instances locales hritent denouveaux pouvoirs et responsabilits. Les conseils dtablissement en sontlexemple le plus marquant dans le monde scolaire depuis ladoption de lanouvelle Loi sur linstruction publique.

    La plus grande autonomie accorde lcole sappuie notamment sur lareconnaissance de lautonomie professionnelle du personnel enseignant. Il estdonc appel collaborer activement avec les autres membres de lquipe-cole etde la communaut ducative. Sur certains objets, le cadre lgislatif lui confremme une responsabilit exclusive. Plus prcisment, le personnel enseignantparticipe la dfinition du projet ducatif, de la politique dencadrement deslves, des modalits dapplication du rgime pdagogique et des orientationsgnrales en matire denrichissement et dadaptation des programmes; il prendpart galement la dtermination des rgles de conduite et des mesures descurit, du temps allou chaque matire, de la programmation des activitsducatives et des programmes des services complmentaires. Enfin, il fait des

    L

  • La formation l'enseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    4

    propositions en matire de programmes dtudes internes, de critres relatifs limplantation de nouvelles mthodes pdagogiques, de choix de manuelsscolaires et de matriel didactique, de normes et de modalits dvaluation ainsique de rgles pour le classement des lves et le passage dun cycle lautre auprimaire.

    Force est de constater que dsormais le champ de comptences professionnellesrequises des enseignantes et des enseignants par la rforme de l'ducation s'estconsidrablement largi et dborde le cadre plus troit de la classe. En raison dela mise en place des conseils d'tablissement, le personnel enseignant est appel exercer de nouveaux rles qui l'amnent s'ouvrir la communaut.

    1.2 Une cole avec de nouvelles missions

    Les consultations et les dbats mens l'occasion des tats gnraux surl'ducation ont conduit notamment la redfinition des missions de l'cole.Ainsi, dans le but de favoriser la russite du plus grand nombre d'lves, leministre de l'ducation dfinit dans son nonc de politique ducative(1997b :9) le champ d'action de l'cole partir de trois missions : instruireavec une volont raffirme, socialiser pour apprendre mieux vivre ensemble etqualifier selon des voies diverses . Diffrents chantiers instaurs au moment dela rforme du curriculum ont une incidence certaine sur le rle des enseignanteset des enseignants et, par ricochet, sur les comptences professionnelles dvelopper en formation initiale.

    D'abord, la conception de lapprentissage vhicule dans le programme deformation de l'cole qubcoise sinscrit dans la perspective socioconstructivisteet situe ainsi llve au centre du processus dapprentissage. Celui-ci devientlacteur principal de ses apprentissages. De telles perspectives modifient le rletraditionnel du matre. De transmetteur de savoirs, il devient davantage unguide qui accompagne l'lve dans la construction de ses savoirs.

    Laxe des comptences retenu pour llaboration du programme de formation et ledcoupage de lorganisation scolaire en cycles dapprentissage transforment aussi lerle du matre. Dans une perspective de dveloppement de comptences, lesenseignantes et les enseignants sont appels travailler en collaboration avec lesmembres de l'quipe pdagogique ou avec leurs pairs qui enseignent d'autresdisciplines aux mmes lves. Dans une organisation en cycles d'apprentissage, lagestion du parcours scolaire des lves se doit en quelque sorte d'tre aussiassume en collaboration avec les autres membres de lquipe pdagogique et delquipe-cole. De telles vises amnent les enseignantes et les enseignants rviserleurs rapports aux savoirs : les savoirs disciplinaires, les savoirs scolaires et lescomptences dvelopper chez les lves. Elles orientent galement le personnelenseignant vers le partage de lexpertise professionnelle, le partage deresponsabilits dcisionnelles et le travail dquipe.

    Le nouveau milieu ducatif accorde une attention particulire chaque lve.Un enseignement plus adapt s'avre ncessaire, notamment pour les lves endifficult d'adaptation ou d'apprentissage et les lves handicaps. L'intgration

  • L'volution de la pratique de l'enseignement

    5

    de ces lves, pour plusieurs, en classe ordinaire touche lensemble dupersonnel enseignant et une comptence simpose relativement ladaptation delenseignement aux caractristiques et aux besoins de ces lves.

    Soulignons aussi les besoins de formation des lves adultes et leur ncessaireprise en considration dans le systme ducatif. Les travaux excuts en vue dela mise en uvre du plan d'action ministriel et de l'accs la formationcontinue ciblent les neuf premires annes de scolarit comme prioritimmdiate. Cette formation de base commune favorisera leur participationactive la vie sociale, conomique et culturelle de la socit et devient le soclesur lequel une personne construit ses apprentissages tout au long de sa vie (Ministre de l'ducation 2000 : 1).

    1.3 Un effectif scolaire de plus en plus diversifi

    Sur le plan dmographique, on constate le caractre de plus en plus diversifi dela population qubcoise. De faon historique, l'effectif scolaire qubcois taitconstitu de Canadiens franais, de Canadiens anglais et d'Amrindiens.Cependant, le phnomne de l'immigration des deux derniers sicles a modifisensiblement la composition de l'effectif scolaire. On trouve de nos jours, plus de150 langues maternelles dans le rseau scolaire, dont plusieurs de familleslinguistiques diffrentes du franais. Par ailleurs, toutes les grandes confessionsy sont reprsentes. Bien que cette ralit touche de faon particulire la rgionde Montral, la diversit ethnoculturelle, linguistique et religieuse se rpartitdans l'ensemble du rseau scolaire et se traduit par une varit de situations. Ilserait sans doute plus appropri demployer dsormais l'expression populationsscolaires au pluriel tant les cohortes dlves sont htrognes sur le plan descultures, des acquis scolaires, de la motivation et des modes de fonctionnement.

    Dans le mme ordre dides, une autre caractristique de la socit actuelle quimrite dtre signale a trait l'mergence de la pluralit sous toutes ses formes.La diversit de la composition culturelle de la socit qubcoise met l'cole enprsence d'une pluralit des origines, des coutumes et des traditions. On assistemaintenant au foisonnement des valeurs morales et spirituelles ou, encore,d'options politiques et philosophiques.

    Le milieu scolaire, comme la socit dont il est une des composantes, doitdsormais prendre acte de cette diversit, composer avec une pluralit de pointsde vue, de valeurs et de comportements, favoriser la comprhension etl'ouverture sur les diffrences ainsi qu'une nouvelle cohsion sociale. Ceslments remettent en question directement le personnel enseignant qui doittre en mesure de comprendre cette ralit afin d'accueillir des lves auxcultures premires diversifies et de saisir leurs points de repre en vue demieux leur faciliter le passage une culture seconde.

    1.4 Une cellule familiale modifie

    Des transformations importantes concernent les familles. Notons en particulierque celles-ci ne sont plus exclusivement fondes sur le mariage, qu'elles sont

  • La formation l'enseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    6

    plus instables qu'autrefois et qu'elles sont de plus en plus souvent mono-parentales ou reconstitues. De mme, le nombre de familles o les deuxconjoints ont un travail rmunr ne cesse d'augmenter. Ces changementsentranent une srie de consquences psychologiques et sociales qui ne sont passans influer sur lcole. Par exemple, la consquence la plus manifeste deschangements dans la vie familiale a trait aux attentes entretenues l'gard del'cole afin qu'elle accomplisse des tches rserves autrefois aux familles. Cesattentes touchent notamment la formation morale et civique, l'ducation lasexualit, la scurit routire, la consommation, la garde en dehors des heuresde cours, l'alimentation des enfants en milieu dfavoris et la prvention de laviolence et de la consommation d'alcool ou de drogues.

    De mme, les changements dans la conception de l'autorit parentale et lesattentes de plus en plus grandes des parents l'gard de leurs enfantsrequirent de la part des enseignantes et des enseignants de mme que desautres membres du personnel de l'cole qu'ils assument davantage des rles deguides, de conseillres et de conseillers ainsi que d'accompagnatrices etd'accompagnateurs auprs des lves, en plus des rles traditionnels de l'colelis l'acquisition de connaissances, au dveloppement d'habilets gnriques et l'intgration des savoirs. Aussi, l'cole doit mettre au point avec les parents,individuellement et structurellement, des modalits de fonctionnement dans lerespect des rles et des attributions de chacune et de chacun.

    Plus encore, le rapport lautorit ne sest pas transform seulement dans lafamille. lcole, les enseignantes et les enseignants vivent parfois difficilementleurs relations avec les lves. Cest pourquoi toute la dimension de la gestion dela classe revt une importance de premier plan. Entre le laisser-faire etlautoritarisme, il y a un espace de relations dvelopper lcole pour quelapprentissage et lducation adviennent. Ce nouveau rapport lautorit met enscne de manire complexe la composante thique du travail enseignant et lesdiffrents facteurs lis la gestion de classe.

    1.5 Un march de l'emploi mtamorphos

    Des changements rapides et importants se manifestent sur le march de lemploiet convergent tous dans le sens d'un rehaussement du niveau de formation debase requis pour fonctionner, de faon active, dans la socit et obtenir unemploi. Ils ont une incidence directe sur le rle, les missions et lefonctionnement de l'cole.

    Dune part, les entreprises se positionnent pour faire face aux exigences de lamondialisation et de la nouvelle conomie du savoir. Les tablissementsd'enseignement ne peuvent, par l'entremise de la formation initiale, assurer unequalification qui garantirait la personne diplme une comptence assuretout au long de sa vie professionnelle. La formation continue devient ainsi unencessit pour ces adultes qui devront continuer apprendre leur vie durant.Dautre part, lintroduction massive de la technologie dans plusieurs secteurs dela socit a des effets importants sur le niveau de scolarit requis pour occuperun emploi. Enfin, la diminution de la main-d'uvre active, amene par la

  • L'volution de la pratique de l'enseignement

    7

    conjoncture dmographique, ne pourra que contribuer mettre une pressionaccrue sur lintroduction des technologies sur le march de l'emploi. Dans un telcontexte, l'accent est mis, outre sur les missions d'instruction et de socialisationde l'cole, sur la qualification des lves.

    Soulignons, de faon particulire, les difficults prouves par les entreprisesqubcoises en ce qui concerne le recrutement de personnel qualifi en matirede science et de technologie. Bien quaux preuves nationales et internationalesles jeunes Qubcoises et Qubcois du secondaire obtiennent de bonsrsultats, le taux d'lves qui disposent, la fin de leurs tudes secondaires, despralables requis pour accder aux programmes du collgial dans les secteurs caractre scientifique et technologique se situe moins de 20 p. 100.

    1.6 Un savoir clat et sa transmission diversifie

    Plus personne ne peut prtendre, comme une certaine poque, matriserlensemble des connaissances de son temps. La production acclre du savoir,la spcialisation et la fragmentation des connaissances rendent impossible ledveloppement desprits universels. Cela ne signifie pas pour autant que londoive faire lconomie de points de repre fondamentaux pour pouvoircomprendre ou critiquer une socit en mutation constante ou encore s'yadapter. En cela, lcole est vise de manire directe.

    Les contenus culturels des programmes de formation ainsi qu'une approcheculturelle de l'enseignement doivent permettre aux lves de sorienter dans lavie. Cest pourquoi il importe de les mettre en contact avec la diversit dupatrimoine constitu dans les divers domaines de la culture et de leur permettredaccder aux productions humaines les plus importantes. Par unapprofondissement progressif des disciplines enseignes, ils pourront nonseulement acqurir les connaissances issues de ces diffrents champs maisaussi tablir des liens entre elles afin de mieux comprendre leur monde et syinsrer en tant que citoyennes et citoyens critiques, cratifs et responsables.

    Lcole na plus le monopole de la transmission et de la diffusion des savoirs,comme ctait le cas autrefois. L'volution rapide des moyens de communicationfacilite grandement l'accs l'information et bouleverse le rle traditionnel del'cole comme lieu privilgi d'apprentissage. Force est d'admettre que d'autressources et modes daccs aux savoirs (il ny a pas si longtemps la tlvision et,actuellement, le micro-ordinateur) concurrencent dsormais les enseignantes etles enseignants et peuvent mme remettre en question la particularit et lapertinence de certains actes qu'ils accomplissent. Cependant, en dpit desapports rels que les technologies peuvent engendrer au regard delapprentissage et de lenseignement, les dangers sont bien prsents de se laissersduire par l'aspect superficiel ou divertissant des choses au dtriment dudveloppement dune pense organise, dune solide culture et dunedistanciation critique. ce propos, le personnel enseignant a un rle important jouer.

  • La formation l'enseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    8

    Aussi, la prsence d'adultes dans le systme ducatif amne les tablissementsd'enseignement prendre en considration les apprentissages effectus endehors du cadre officiel de l'cole. Les diverses expriences tires de leur viepersonnelle ou de leur milieu de travail sont souvent une source importanted'apprentissage et ces acquis exprientiels ou extrascolaires mritent d'trereconnus officiellement par le monde scolaire.

    1.7 Une recherche dans le domaine de l'enseignementtransforme

    Un autre lment d'importance se doit d'tre signal : la transformation de larecherche consacre l'enseignement. D'une recherche dcontextualise, produiteen dehors des salles de classe et dont les rsultats taient peu transfrables dansla pratique, elle s'est transforme progressivement pour prendre en considrationles situations relles du travail enseignant. Les rsultats peuvent ainsi tre d'unerelle pertinence didactique et pdagogique dans la pratique.

    En effet, du dbut du XXe sicle jusqu'au milieu des annes 50, la recherche dasnle domaine de l'enseignement se droulait en dehors de la classe. On pouvait, titre d'exemple, chercher par diffrents types de questionnaires mettre envidence les qualits d'une enseignante ou d'un enseignant efficace ou encorecomparer l'efficacit de diffrentes mthodes par l'analyse des rsultats des lves.Toutefois, la recherche se droulait sans observation vritable en salle de classe etsans documentation du processus d'enseignement-apprentissage, si bien que lesrsultats ne prsentaient qu'une faible utilit dans la pratique (Medley 1972).

    Des changements ont commenc merger au milieu des annes 50 lorsqu'ontt mis en place des systmes d'observation dans les classes. En consignant, parexemple, la frquence de tel ou tel comportement de l'enseignante ou del'enseignant, la recherche s'appuyait dsormais sur l'observation relle de ce quise passait en classe. Cependant, bien que ce type de recherche ait t trspopulaire l'poque, cela na pas t d'une vritable utilit dans la pratique, carces recherches se limitaient l'observation des comportements sans les mettreen rapport avec l'apprentissage des lves (Rosenshine 1971).

    Cependant, au dbut des annes 70, plusieurs chercheurs ont pos la questionsuivante : l'enseignante ou l'enseignant fait-il une diffrence pour favoriserl'apprentissage des lves? Autrement dit, y a-t-il un effet enseignant (Durand1996)? Cette proccupation a t au cur d'un important mouvement derecherche sur l'enseignement appel processus-produit . Pour rpondre cettequestion, il fallait dsormais conduire les recherches dans les classes et observerle comportement des enseignantes et des enseignants auprs de leur grouped'lves. Les chercheurs devaient galement mettre en relation les compor-tements des enseignantes et des enseignants (processus) avec la performancedes lves des preuves standardises (produit). Les recherches du typeprocessus-produit ouvraient ainsi de nouvelles perspectives o les rsultats dela recherche pouvaient prsenter une certaine forme de pertinence aux yeux despraticiennes et des praticiens et rduire ds lors le foss entre la thorie et lapratique.

  • L'volution de la pratique de l'enseignement

    9

    Au dbut des annes 80, la publication de plusieurs rapports amricains astimul encore davantage la recherche dans le domaine de l'enseignement. Pourles membres du groupe Holmes (1986) notamment, la professionnalisation del'enseignement passe, entre autres choses, par la formalisation de l'occupation,c'est--dire par la recherche dont les rsultats peuvent tre rinvestis dans lapratique. Les recherches conduites dans les classes sont actuellement plusnombreuses qu'auparavant et les synthses sur les rsultats de recherche quisont publies prsentent une pertinence et un intrt rels pour la pratique. Ellesne pourront donc que contribuer au mouvement de professionnalisation del'enseignement.

    1.8 Une formation des matres adapter

    La socit qubcoise a t traverse, au cours des dernires annes, par unesrie de phnomnes qui ont fait merger de nouveaux problmes et denouveaux besoins. L'cole, subissant profondment les contrecoups de ceschangements, sest vue interroge tant dans sa mission que dans sonfonctionnement. Pour mieux faire face ces nouvelles ralits, le systmedducation a d procder un examen en profondeur de ses orientations et deses pratiques et a tent dapporter, dans le contexte de la rforme en cours, lescorrectifs qui simposaient.

    Les changements oprs dans la socit engendrent des tensions nouvelles etfont voluer de faon importante le travail du matre. Ce travail exige ledveloppement de comptences professionnelles de haut niveau qui ne peuventtre acquises au gr des essais et des erreurs mais doivent plutt tre apprisessystmatiquement au cours de la formation dune professionnelle ou d'unprofessionnel cultiv.

  • Chapitre 2

    Les

    orientations

    gnrales

  • Les orientations gnrales

    13

    2 LES ORIENTATIONS GNRALES

    e prsent document dorientations inscrit rsolument la formation lensei-gnement dans une double perspective : celle de la professionnalisation et

    celle de lapproche culturelle de lenseignement.

    tant donn la prolifration des discours sur le concept de professionnalisation, ilconvient, en premier lieu, de clarifier la signification qui lui est attribue. Laprofessionnalisation renvoie dabord au processus de dveloppement duneprofessionnalit. Celle-ci comporte plusieurs dimensions lies au dveloppement descomptences ncessaires la professionnalisation dune occupation : la mobilisationde savoirs professionnels, lapprentissage continu, lefficacit et lefficience despersonnes, le partage de lexpertise entre les membres du groupe concern et laformalisation des savoirs de la pratique. La professionnalisation fait rfrence ensuiteau professionnisme, cest--dire la qute dune reconnaissance sociale et lgale dunstatut.

    Aprs la prsentation du concept, les anciennes dfinitions de la professionnalitsont exposes. Au fil du temps, lenseignement a pris en effet divers visages pouren arriver la naissance dune nouvelle lgitimit, celle de laprofessionnalisation. Ainsi, au matre improvis, davant le XVIIe sicle,succdent le matre artisan, pendant presque 300 ans, et le matre scientifiquedu XXe sicle. lore du troisime millnaire, cest la notion du matreprofessionnel qui permet de dcrire de la faon la plus approprie la nouvellecaractristique du travail enseignant.

    La section sur la professionnalisation se termine par la prsentation dunnouveau modle de professionnalit en matire d'enseignement. Ce modle apour objet de donner un sens la formation lenseignement en lorientant parrapport six axes : les comptences requises dans le nouveau milieu ducatif, lacomplexit de lacte denseigner, la formation intgre et ancre dans des lieuxde pratique, la formation polyvalente, les liens entre la recherche et la formationainsi que le partenariat et la concertation.

    La section sur lapproche culturelle de lenseignement aborde le concept de laculture sous deux angles, soit la culture comme objet et la culture commerapport. La culture comme objet comporte deux dimensions : dune part, unedimension descriptive o lon trouve la culture premire, au sens anthropologique,et la culture seconde, soit celle qui se rfre aux uvres et aux productions delhumanit; dautre part, une dimension normative o lon trouve, pour unespace-temps donn, les choix dune socit au regard des objets de culturecaractrisant une personne cultive forme par le processus de scolarisation. Laculture comme rapport traite successivement de la construction dun rapport aumonde, dun rapport autrui et dun rapport soi. Par la suite, on y examine lerle du matre comme celui dun passeur culturel; le matre devient alors hritier,critique et interprte d'objets de culture ou de savoirs, autrement dit, celui quicre des rapports. Cette section sur lapproche culturelle de lenseignement estcomplte par le sens que devrait prendre la formation dun matre cultiv.

    L

  • 2.1 La professionnalisation

  • La professionnalisation

    17

    2.1 La professionnalisation

    2.1.1 Le concept de professionnalisation

    Le concept de professionnalisation renvoie deux types de processus quisarticulent lun par rapport lautre : le premier, interne, fait rfrence ce quecertains appellent la professionnalit , et le second, externe, renvoie ce queBourdoncle (1991) nomme le professionnisme . Ces deux logiques se mani-festent non seulement de manire diffrente mais aussi complmentaire (Lang1999).

    2.1.1.1 La professionnalit

    Dabord, la professionnalisation exprime lide du dveloppement et de laconstruction de comptences ncessaires lexercice dune profession. Cescomptences se manifestent dans laction dun groupe donn. Dans lesprofessions institues, les comptences requirent, sans sy rduire cependant,des savoirs issus des diverses disciplines comme autant de ressourcessoutenant laction. Le processus de professionnalisation implique donc unediffrence majeure en ce qui a trait la tradition de formation universitaire ausens o former dans la discipline et former lacquisition de comptencesprofessionnelles napparaissent plus dsormais comme des activits identiques.Luniversit est donc porteuse de tensions en son sein mme : dune part, ellesinscrit dans une logique scientifique qui dcoule de sa mission classique de seconsacrer lavancement des connaissances et, dautre part, elle poursuit aussides objectifs lis une logique professionnelle qui a pour objet de former despersonnes de haut calibre dans un secteur dactivit prcis. Le premier sens duconcept de professionnalisation comme processus interne de construction duneprofessionnalit comporte plusieurs dimensions.

    La mobilisation de savoirs professionnels spcifiquesLa professionnalisation implique la mobilisation par les personnes concernesdun certain nombre de savoirs, de savoir-faire et dattitudes propres uneoccupation donne. Les ressources mobilises, dans le contexte mme du travail,constituent la professionnalit. Cette dernire est ainsi lensemble descaractristiques dune profession qui renvoient la nature plus ou moins leveet rationalise des savoirs et des habilets utiliss dans lexercice professionnel : La professionnalisation en tant que construction dune professionnalit vise une matrise pratique et un certain degr de rationalisation du procs detravail (Lang 1999 : 29).

    Lapprentissage continuLes personnes formes en vue dune occupation donne ne sont pas dentre dejeu, au sortir de leur formation, des praticiennes et des praticiens achevs. Ellescontinuent acqurir progressivement, au cours des ans, de lexprience ainsique de la formation continue et accdent mme, dans certains cas, une formedexpertise. Ainsi, la professionnalisation est un processus dapprentissage

  • La formation lenseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    18

    dynamique et continu. Cet apprentissage nest jamais termin compte tenu de lacomplexit des situations et de la mouvance des contextes qui dterminent lagirprofessionnel.

    Lefficacit et lefficience des personnesProfessionnaliser une occupation signifie atteindre une certaine comptencepratique dans lexercice de la fonction. On sattend que la professionnelle ou leprofessionnel sache faire; autrement dit, la professionnalisation implique lacombinaison et la mobilisation de savoirs, dattitudes, de techniques, destratgies (tactiques) pour lexcution de tches prcises. Plus encore, ellencessite une certaine conomie de moyens : la personne professionnelle nedispose pas de tout son temps ni de toutes les ressources financires oumatrielles pour agir. Son action se situe plutt dans un rseau de contraintes lintrieur desquelles elle construit des solutions ralistes pour faire face auxproblmes prouvs.

    Le partage de lexpertiseLa professionnalisation implique une forme de partage de lexpertiseprofessionnelle par un groupe de personnes. Ce partage ne stend passeulement aux savoirs ou aux savoir-faire mais aussi une certaine attitudethique, une manire commune daborder les situations et dy faire face. Cetteculture partage, ou culture commune, constitue une sorte de code du groupeprofessionnel exprimant ses valeurs, ses croyances, ses attitudes et sesreprsentations au sujet du travail.

    Des savoirs de la pratique formalissLa professionnalisation exige des savoirs transmissibles, cest--dire des savoirsde la pratique formaliss pouvant sacqurir dans une formation. Il y a ainsidans la professionnalisation une rationalisation du processus de travail quiexplicite, donc rend visibles et publics les savoirs tacites et les savoir-faire despraticiennes et des praticiens et, plus encore, une formalisation qui rendpossible leur acquisition dans un processus de formation.

    2.1.1.2 Le professionnisme

    Le concept de professionnalisation renvoie aussi un second sens, davantagesocial et externe. Il fait rfrence la revendication dun statut social distinctdans la division du travail.

    Une reconnaissance sociale et lgaleLa professionnalisation implique alors la mise en place, par un groupe depersonnes, de stratgies en vue de faire reconnatre par la socit des qualitsprcises, complexes et difficiles acqurir, qui leur confreraient un certainmonopole sur lexercice dun ensemble dactivits et une forme de prestige. Cesecond processus correspond ce que Bourdoncle (1991) a traduit par le terme professionnisme , qui dsigne lensemble des stratgies dployes par un groupe

  • La professionnalisation

    19

    pour transformer le statut de certaines activits en leur donnant une sorte devaleur dchange contre une srie de privilges matriels ou symboliques.

    Anciennement, la sociologie des professions faisait lhypothse dune sorte deprocessus linaire de professionnalisation calqu sur les normes et modles desprofessions librales dj tablies. Or, la sociologie contemporaine desprofessions a montr que le processus de professionnalisation ne consiste pas faire correspondre une occupation des normes idales figes, normes qui nevalent, en vrit, que pour les plus anciennes professions et qui ne sont pasconformes la trajectoire suivie par dautres corps demploi qui se sontprofessionnaliss. La professionnalisation consiste plutt en une stratgiedynamique et diffrencie de positionnement social dun corps demploi toujoursen mouvance. Cette vision dynamique du processus ne signifie pas pour autantque nimporte quel groupe, mettant en place une formation de longue dure ousautoproclamant profession, pourrait se voir reconnatre un statut profession-nel. Comme le souligne Chapoulie (1973), la reconnaissance dun tel statut estlie lidologie dominante dune socit une poque donne et, actuellement,compte tenu de limportance prpondrante de la science dans les activitshumaines, la dtermination dun statut professionnel se fonde davantage sur lanorme du savoir dit scientifique (Lang 1999). Cest pourquoi la formalisationrigoureuse du procs de travail revt une importance stratgique et conduit ausecond sens du processus de professionnalisation, le professionnisme.

    ***

    La professionnalisation constitue une dmarche de construction dune identitsociale. Les deux processus, interne et externe, sont irrductibles mais articulslun par rapport lautre. La reconnaissance sociale ne peut exister sansformalisation de la pratique et la formalisation ne peut faire lconomie de lamise en place de stratgies menant lobtention dun statut professionnel quireconnat la valeur du service rendu et qui confre un certain monopole lexercice professionnel. La transmission de pratiques formalises lors de laformation initiale participe donc la professionnalisation dune occupation et sa reconnaissance sociale.

    2.1.2 Les anciennes formes de professionnalit

    la suite de pressions constantes et diverses, la fois internes au mondescolaire et externes, cest--dire en jeu dans la socit, le travail enseignant sestprogressivement modifi et a pris diverses formes.

    2.1.2.1 Le matre improvis

    Avant le XVIIe sicle en Europe, au moment o l'ducation en milieu scolairentait pas encore formalise et sadressait un public restreint, la connaissancede la matire faisait foi de tout en fait d'enseignement. Quiconque, par exemple,savait lire pouvait enseigner la lecture et simproviser ainsi matre dcole sansautre forme de prparation. On le comprend aisment, lenseignement taitencore peu organis et laiss le plus souvent aux alas des initiativesindividuelles. La ncessit dune connaissance particulire, autre que celle du

  • La formation lenseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    20

    contenu enseigner, ne se posait pas. Les groupes dlves ntaient pasnombreux et lenseignement pouvait se faire pratiquement sous le mode duprceptorat. La formation des matres nexistait pas ni ne se posait commencessit. On enseignait comme on avait vu enseigner, selon le procd sculairede la logique du contenu, du simple au complexe.

    2.1.2.2 Le matre artisan

    partir du XVIIe sicle, les premires tentatives de formation des matrescommencent merger. La raison semble tenir ce que sous les effetsconjugus de la rforme protestante, de la contre-rforme catholique, dunnouveau souci de lenfance ainsi que des problmes de dlinquance dans lesvilles, la ncessit denvoyer les enfants du peuple lcole et de fonder descoles se fasse sentir (Gauthier et Tardif 1996). Toutefois, l'augmentation dunombre denfants scolariser ne va pas sans crer des problmes pour lesenseignants dans leurs classes. En effet, la mthode en vigueur jusqualors, dumoins dans les petites coles, tait celle qui tait dite au singulier o unmatre faisait venir tour de rle chacun des lves. Or, avec la hausse dunombre denfants dans les classes, la pdagogie au singulier devenait dsormaisimpossible, et il fallait trouver une faon diffrente de procder. Alors, commentfaire pour enseigner ces groupes dsormais plus nombreux? Aussi, lespdagogues du temps ont imagin une solution originale : il faut enseigner avecmthode et cest dans la Nature quelle repose. Cependant la nature dont onparle alors est une nature surnaturelle, une nature parfaitement ordonne par leCrateur. Il faut suivre la nature, disait Comenius, mais la nature est commeune horloge, cest--dire sans dsordre.

    La pdagogie qui se met en place se fonde alors sur cette vision ordonne dumonde. On y ajoute cependant un ingrdient de taille : les trucs et recettes dumtier des meilleurs matres qui sont consigns dans les premiers traits depdagogie. Ces trucs et recettes sont ordonns dans cette vision du monde btiesur un contrle total des lves en vue den faire des tres polics, instruits etchrtiens.

    Tout le milieu scolaire est investi par cette idologie de la mthode ordonne entous points : contrle du temps, de lespace, des dplacements, de la posture,des rcompenses, des punitions, des prsences, du groupe (enseignementsimultan). Et cela vaut tant pour les protestants que pour les catholiques auprimaire et galement pour les lves du secondaire, par exemple, dans lescollges des Jsuites.

    Deux faits importants mritent cependant dtre signals. Dune part, on prendalors conscience que la connaissance disciplinaire ne fait pas foi de tout, mmesi elle constitue encore un trait fondamental du mtier, et quil y a dautres typesde savoirs quil importe de connatre pour bien enseigner. Dautre part, onreconnat que ces savoirs sapprennent. lpoque, cet apprentissage se faitsurtout par compagnonnage auprs dun matre aguerri qui assure la formationde lapprenti. De cette formalisation de la manire denseigner est issu unmodle de professionnalit particulier : la pdagogie traditionnelle. Cette manire

  • La professionnalisation

    21

    artisanale et uniforme de faire la classe, dailleurs encore prsente de nos jours,sest rpandue partout en Occident et mme au-del, notamment souslinfluence des diffrentes communauts religieuses.

    2.1.2.3 Le matre scientifique

    la fin du XIXe sicle et surtout au dbut du XXe sicle, la critique lendroit dela pdagogie traditionnelle, centre sur le matre, sur le contrle total de llveet sur les contenus transmettre, prend de lampleur. Lidal poursuivi estdsormais de mettre en place un autre type de professionnalit, soit la pdagogienouvelle. Deux lments sont alors dterminants : limportance grandissante dela science dans les dbats pdagogiques et la ncessit de mettre en avant unprojet pdagogique centr sur lenfant.

    Leffet combin de ces deux facteurs, centration sur la science et sur lenfant, vafaire en sorte quune discipline occupera le haut du pav durant tout le XXesicle : la psychologie. Cette dernire se veut la fois science et en mme tempstourne vers ltude de l'enfant, de ses besoins et de son dveloppement. Cestau dbut du XXe sicle que lon voit apparatre en France les premires chairesde pdagogie luniversit, que lon dfinit comme suit : la pdagogie est lascience de lducation. Lintention lpoque tait nette : faire de la pdagogieune science et du pdagogue, un scientifique. On faisait valoir dans lesarguments proposant cette rvolution copernicienne que la traditionpdagogique comportait des erreurs que la science sefforcerait de corriger. Cestainsi, par exemple, que Claparde, fondateur de lInstitut Jean-Jacques-Rousseau Genve, disait que, de la connaissance scientifique des lois dudveloppement de lenfant, on pourrait par la suite dduire des applicationspdagogiques dans les classes. Tout comme la psychologie en tant que disciplinede rfrence sest subdivise en de nombreuses coles de pense, il en a t demme pour les modles pdagogiques qui ont t aussi nombreux quediversifis. On pourrait, grosso modo, les regrouper en deux grandes catgories,soit les approches exprimentales et les approches exprientielles, selon que lonmet davantage laccent sur la dimension scientifique ou sur la dimensiondaccompagnement des besoins de lenfant. la premire correspond le modlepositiviste, dont le behaviorisme est lexemple le plus clatant, et, la seconde, ilest possible dassocier la psychologie humaniste et ses drivs.

    Accusant un dcalage par rapport ce qui se passait en Europe ou aux tats-Unis au dbut du sicle, le Qubec a connu sa rvolution en la matire la findes annes 60 et a cr des facults des sciences de lducation. Quoiquelgrement diffrente, lidologie scientiste tait encore prsente sur au moinsdeux plans. Dune part, on voulait donner aux futurs matres une formation plusuniversitaire, scientifique, cest--dire plus avance sur le plan des connais-sances disciplinaires. Cela marquait, par consquent, la fin des coles normales.Sur ce premier point, durant la priode 1970-1990, les universits ont bnficidune grande marge de manuvre dans la construction de leurs programmes.Cela a eu pour consquence que la perspective de formation lenseignement at souvent noye dans une logique disciplinaire, dans une fragmentation decours sans trop de liens entre eux ni avec l'occupation laquelle ils devaientprparer les tudiantes et les tudiants. Dautre part, on voulait une formation

  • La formation lenseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    22

    qui prendrait ses distances par rapport aux trucs et recettes des colesnormales. Comme la formation psychopdagogique tait souvent donne par despersonnes issues du champ de la psychologie, pas ncessairement familiarisesavec le contexte de lenseignement, on sappuyait souvent sur la prsomptionque la connaissance de certaines thories psychologiques se transfrerait delle-mme dans la pratique enseignante. On postulait de manire implicite quelenseignante ou lenseignant allait faire automatiquement la transposition quisimposait dans le contexte de sa classe.

    Toutefois, au cours des annes 70 et 80, il sest avr que les notions enseignesdans les cours de pdagogie et de didactique ne se transfraient pas vraimentdans la pratique en classe. Lutopie scientiste a chou, tout comme le modlede professionnalit propos en vue de renverser la pdagogie traditionnelle. Cetchec na pas t, par contre, sans effet sur la reprsentation de lapprentissagede la fonction denseignant chez diffrentes personnes. En effet, cela a contribu,en premier lieu, renforcer lide quenseigner sapprend sur le tas, par essais eterreurs, et non partir de lapplication de recherches conduites luniversit.Ensuite, cela a raffermi lide quenseigner est dabord et avant tout une affairede connaissance de la discipline et que le reste, la pdagogie, quantitngligeable, se rduit lexprience acquise, la passion pour la matire ouencore aux dons individuels.

    Au dbut des annes 90, le ministre de lducation a entrepris une rformemajeure concernant la formation des matres. Cette rforme, dont lurgence avaitt reconnue par tous les partenaires, avait pour objet de faire de lactedenseigner un acte professionnel. Il fallait donc poser autrement le problme dela formation du personnel enseignant et procder diffremment tant dans lesprogrammes et les approches de formation que dans les objets et mthodes derecherche.

    2.1.3 Un nouveau modle de professionnalit :le matre professionnel

    La rforme de la formation lenseignement enclenche depuis 1993 stipulaitque lautonomie et la responsabilit, caractristiques de la pratiqueprofessionnelle des enseignantes et des enseignants, commandaient uneformation initiale solide qui les rende aptes exploiter leur aptitude larflexion critique et contribuer de faon active lvolution des connaissancesrelatives la pratique de lenseignement (Ministre de l'ducation 1993 : 13).

    La rforme de lducation des annes 2000 fait appel, de faon accrue, lautonomie professionnelle des enseignantes et des enseignants. Comme nouslavons vu auparavant, la diversification des populations scolaires, laccroisse-ment des problmes sociaux de mme que les tensions issues des changementstechnologiques et de la mondialisation de lconomie exercent des pressionsintenses sur les enseignantes et les enseignants chargs de la formation deslves. Le travail de lenseignant salourdit de charges sociales et de dilemmesquil lui est dornavant impossible de rsoudre seul derrire les portes closes dela classe (Messing, Seifert et Escalona 1997). Des ententes de collaborationmultilatrales sont ncessaires. Des formes d'harmonisation doivent se crer

  • La professionnalisation

    23

    entre les instances et les mandats de manire runir la profession enseignante,la formation lenseignement et la recherche sur lenseignement autour devises communes. Pour sa part, la formation doit se rapprocher des exigences ducontexte rel de la pratique et prendre davantage en considration lefonctionnement du matre en action, notamment par l'entremise de lanalyserflexive. Quant la recherche, une plus grande part doit, entre autres choses,se faire sur des objets proches de la pratique professionnelle et dont les rsultatspeuvent tre intgrs dans les programmes de formation lenseignement.

    Prcisons toutefois que le projet de professionnalisation est une hypothse detravail qui soulve de multiples enjeux : pistmologiques, politiques,institutionnels, conomiques, sociaux. En outre, il est plutt nouveau dans lechamp de lenseignement, do la relative absence de donnes sur desexpriences concrtes. En effet, il nexiste pas aujourdhui de modle achev dudveloppement dune pratique professionnelle rflchie, mais bien plutt desinterrogations sur les savoirs, les comptences requises par une telle pratique etaccessibles en formation (Lang 1999 : 199). Quoi quil en soit, le mouvement deprofessionnalisation dborde largement les frontires du Qubec et a pris unedimension internationale (Tardif, Lessard et Gauthier 1998). Il y a donc unesorte de convergence dans divers pays pour examiner cette question et rformerles pratiques de formation. Cest pourquoi il convient dexaminer quelquesdimensions de ce nouveau modle de professionnalit dans le contextequbcois, et ce, en vue de donner un sens une formation qui veut fairemerger une nouvelle culture professionnelle.

    2.1.3.1 Des comptences en fonctionde la nouvelle qualification requise

    Le nouveau contexte scolaire accentue la ncessit de professionnaliser lactedenseignement. En effet, la rforme de lducation comporte plusieurs lmentsqui modifient le rle de lenseignante et de lenseignant ainsi que la nature et lasignification des comptences ncessaires pour enseigner. Il importe de rappelerbrivement quelques-uns de ces lments importants dont lautonomie accruede lcole, la conception de lapprentissage qui situe llve au centre duprocessus, l'laboration des programmes de formation selon une approche parcomptences, lorganisation scolaire en cycles dapprentissage et la politiquedune cole adapte tous les lves.

    Lautonomie accrue de lcole ainsi que la participation active du personnelenseignant au conseil dtablissement situent laction pdagogique desenseignantes et des enseignants bien au-del des limites de la classe et requiertde travailler en collaboration. Leur expertise professionnelle est requise surplusieurs plans en matire de services ducatifs.

    La nouvelle conception de lapprentissage qui fait de llve le principal artisandans le processus dapprentissage exige de nouvelles approches pdagogiques etfaons de faire auprs des lves. Le matre doit adapter son enseignement enfonction de la progression de chacun des lves; il doit se centrer sur llve-apprenant afin de modifier son rapport aux savoirs et de favoriser ainsi leuracquisition.

  • La formation lenseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    24

    Les programmes dtudes dfinis par comptences et lorganisation scolaire encycles dapprentissage amnent les enseignantes et les enseignants assumercertaines tches de faon diffrente et dvelopper de nouvelles comptences.Faire quipe avec les collgues qui interviennent auprs des lves dun mmecycle ou avec des collgues qui enseignent d'autres disciplines prend uneimportance particulire dans le dveloppement et lvaluation de comptencesstalant sur plus dune anne scolaire.

    Le nouveau contexte social et scolaire implique la reconnaissance du caractreinteractif du travail enseignant (Tardif et Lessard 1999). Contrairement auspcialiste des disciplines (chimiste, physicien), le matre ne travaille pas avecdes objets inertes : il intervient sur des sujets vivants et dans ce cas-ci sociaux.Les lves daujourdhui ne sont plus des tres dociles et soumis lautorit dumatre. Ils rsistent son influence, ils veulent faire autre chose, agir autrementou un autre moment : Le savoir du matre ne lui donne plus, aux yeux deslves, le droit inconditionnel exercer une autorit intellectuelle et obtenirleur attention, leur confiance et leur docilit. Descendus de leur pidestal, lesenseignants doivent mriter jour aprs jour le crdit et linfluence qui leurtaient acquis davance (Joxe cit dans Lang 1999 : 129).

    Ainsi, puisque le rle du matre est autre et que les contextes dintervention sontdiffrents, des ressources (savoirs, savoir-faire, savoir-tre) sont requises pourexercer la profession. La certification dans une discipline nest plus commeautrefois le seul gage de la qualification, cest--dire de la comptence pourenseigner : Une acadmisation de la formation ne suffit pas promouvoir lemodle du professionnel (Lang 1999 : 168). En effet, la nouvelle qualificationrequise exige une comptence plus complexe et constitue la base dune nouvelleprofessionnalit.

    2.1.3.2 La complexit de lacte denseigner

    La nouvelle professionnalit diffre dune conception positiviste de la pratiqueprofessionnelle dfinie comme lapplication de thories scientifiques la solutionde problmes techniques en milieu contrl. La situation denseignement secaractrise plutt par lambigut, le flou, la complexit, lincertitude etlindtermin. Une approche techniciste de rsolution de problmes ne peut doncpas fonctionner. Lide est plutt den arriver construire le problme pourmieux y faire face : Il y a l un dplacement essentiel des fondementsintellectuels de lenseignement : des dmarches interprtatives et procduralestendent remplacer les dmarches prescriptives de lancien modle; plus encore,la psychologie perd son statut de rfrence unique, externe aux pratiques, auprofit dapproches multidisciplinaires des pratiques, et dun dveloppement dun langage de la recherche en situation de classe (Lang 1999 : 172). Latechnicit du mtier doit donc tre envisage comme limite et la professionnelleou le professionnel ne peut faire lconomie de lexercice de son jugement encontexte et en faisant appel diverses ressources (Gauthier et autres 1997).

    tant donn que la professionnelle ou le professionnel de lenseignement agit surdes problmes sur lesquels il a un contrle limit et dont la solution estincertaine, sa responsabilit ne peut tre fonde sur les rsultats

  • La professionnalisation

    25

    dapprentissage des lves, mais elle doit plutt tre tablie partir du critre dela mise en uvre des meilleurs moyens possible, dans les limites de soncontexte, pour les faire apprendre. En effet, la professionnelle ou le professionnelde l'enseignement ne peut tre tenu seul responsable des rsultats des lvesquelles que soient les situations. Ainsi, tout comme le mdecin ne peut trel'unique responsable du retour la sant d'un de ses patients, l'enseignante oul'enseignant ne peut tre tenu entirement responsable de la russite de seslves. une norme claire de rsultat pratique (la bonne rponse), qui dfinit ceque lon attend dun technicien ayant la matrise de toutes les variables duprocessus, correspond plutt, en ce qui concerne lenseignante ou lenseignantprofessionnel dont le contrle sur les contraintes de laction est limit, unethique de la responsabilit (Lang 1999 : 171). La rforme de lducation, enaccentuant lexercice de lautonomie professionnelle des enseignantes et desenseignants, tant dans la classe que dans lcole, sollicite dautant plus leurresponsabilit.

    2.1.3.3 Une formation intgre et ancredans des lieux de pratique

    Le projet de professionnalisation a pour objet de promouvoir une formationintgre. Former un matre n'est pas seulement soumettre une tudiante ou untudiant un agrgat de cours sans liens entre eux et sans lien avec laprofession exercer. Articuler nest pas juxtaposer et organiser la formation detelle sorte que ses diffrentes composantes soient vues, de faon concomitante,durant la mme anne, ne garantit aucunement une intgration des savoirs.

    C'est pourquoi un accent plus fort est mis non seulement sur une meilleureintgration entre les cours vise thorique et ceux de nature plus pratiquemais aussi entre ces derniers et les conditions relles d'exercice de la professiondans lesquelles le futur matre aura travailler. titre dexemple, les savoirs denature plus disciplinaire doivent tre en lien avec les contenus du programme deformation enseigner lcole. Des situations ducatives doivent tre prvuespour permettre la mobilisation de ces savoirs dans le contexte du dveloppementdune comptence professionnelle, telle la conception dune situation dappren-tissage pour des lves. Enfin, cette comptence doit pouvoir sexercer dans uncontexte rel, celui de la classe, lors des stages. Cela suppose que les formateursuniversitaires travaillent davantage sur le terrain pour pouvoir accompagner lesstagiaires dans le dveloppement de leurs comptences. Toutefois, mme depuisla refonte de la formation des matres, on note quencore trop peu de formatricesou de formateurs universitaires s'engagent dans la formation pratique (Lessard1996 : 10) :

    La relative absence de formateurs universitaires lencadrement desstages pose problme et interroge notre capacit implanter une formationprofessionnelle vritablement intgre. En effet, comment travailler demanire efficace en milieu universitaire sur des savoir-faire psycho-pdagogiques et didactiques si cela nest pas en lien direct avec lactivit deformation en milieu scolaire? Comment concevoir une formation didactiquevritablement pratique si le didacticien nest pas, un moment duprocessus de formation, sur le terrain des classes et des coles avec ses

  • La formation lenseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    26

    tudiantes et tudiants? Comment institutionnaliser une approche rflexivede lenseignement si nous dissocions formation thorique le domaine desuniversitaires et formation pratique le domaine des praticienschevronns? Comment faire avancer la pdagogie si nous demeuronsloigns de la pratique, de ses contraintes et de ses contextes?

    Une formation professionnalisante est fortement ancre dans les lieux dexercice.Elle implique une sorte dalternance intgrative (Malglaive 1994) qui permetdarticuler ensemble, dans le mme temps et non dans des processus deformation spars, la formation aux savoirs et la formation aux savoir-faire dansle contexte rel de laction. Elle diffre dun modle de juxtaposition qui consiste faire suivre la formation pratique la formation dans les savoirs homologus ouencore dun modle appuy sur une relation dapplication entre des savoirs reuset des stages.

    Limportance accrue accorde la formation pratique constitue un des apportsles plus positifs de la rforme de la formation des matres du dbut des annes90. Cependant, lorganisation de la formation pratique ncessite des effortsconsidrables tant de la part du rseau universitaire que de celui du rseauscolaire. Dans certains milieux scolaires, la capacit daccueil des stagiairespour certains profils de formation a atteint un seuil critique, alors que dautresmilieux souhaitent en accueillir davantage. Aussi, sans mettre en cause lesvises de la formation pratique, il est souhaitable dintroduire une plus grandesouplesse dans la nature et le modle dorganisation et dencadrement desactivits ducatives lies la formation pratique.

    Les universits et le milieu scolaire sont invits intensifier leurs relations departenariat en vue de trouver des solutions permettant de maintenir la formationpratique comme une composante essentielle de la formation lenseignement. cet effet, il y a lieu dexaminer, entre autres, diverses formes dactivits, diversmodles dorganisation et de supervision, divers lieux de stage qui pourraientcontribuer assurer une formation pratique tous les futurs matres.

    2.1.3.4 Une formation polyvalente

    Lun des principes qui sous-tend une formation professionnelle a trait lapolyvalence de cette formation. En effet, on sattend que la professionnelle ou leprofessionnel soit une personne qui a dvelopp des comptences varies luipermettant dassumer diverses fonctions et tches et de s'occuper de situationsprofessionnelles complexes.

    Pour la professionnelle ou le professionnel de lenseignement, la polyvalence dela formation prend son sens dans la nature et la gamme des comptences dvelopper, le milieu dintervention o sexerce la profession et les domainesdenseignement matriser.

    Le rfrentiel de comptencesDans le prsent document, le rfrentiel de comptences de la professionenseignante est structur autour de douze comptences professionnelles. Pour

  • La professionnalisation

    27

    exercer la profession, lenseignante ou lenseignant doit avoir dvelopp desniveaux de matrise diffrents, selon quil est dbutant ou plus expriment, cetensemble de comptences.

    Ainsi, la formation lenseignement, parce quelle porte sur le dveloppement demultiples comptences lies diverses fonctions de la profession, peut treconsidre comme une formation polyvalente. Effectivement, titre dexemple,concevoir des situations denseignement-apprentissage, piloter ces activitsauprs dun groupe dlves, valuer les apprentissages de ces derniers, adapterlenseignement des besoins particuliers, grer un groupe-classe ou encoretravailler en collaboration avec lquipe-cole, les parents et les partenaires etsengager dans son dveloppement professionnel font appel un large ventailde comptences dployer dans des situations professionnelles diffrentes.

    Le milieu dinterventionQui plus est, ces comptences ncessaires la pratique quotidienne sexercentdans des contextes parfois fort diffrents. Alors que des enseignantes et desenseignants interviennent auprs des jeunes enfants, dautres le font auprsdadolescentes ou dadolescents ou encore dadultes. De mme, plusieurs sontappels travailler avec des lves prsentant des difficults dapprentissage oude comportement ou encore un handicap. Certaines et certains enseignent dansdes milieux socioconomiques dfavoriss. Enfin, dautres exercent leur pro-fession dans des milieux multiculturels ou multiethniques. De toute vidence, laprofession enseignante exige une adaptation significative des interventions enfonction des ordres denseignement, des populations scolaires et des groupes oudes personnes prsentant des caractristiques particulires. Ces contextesdintervention varis, lorsqu'ils sont pris en considration dans la formation lenseignement, constituent un trait caractristique de la nature polyvalente decette formation.

    Le domaine denseignementEnfin, les comptences lies lexercice de la profession font appel desressources (savoirs, savoir-faire, savoir-tre) associes notamment aux diffrentsdomaines denseignement et domaines dapprentissage. Des enseignantes et desenseignants interviennent dans plusieurs domaines dapprentissage. titredexemple, pour lducation prscolaire et lenseignement primaire, cespersonnes enseignent, quelques exceptions prs, lensemble des disciplinesprvues dans le rgime pdagogique. Pour lenseignement secondaire oulenseignement des spcialits, elles peuvent intervenir dans un seul domainedapprentissage ou encore dans une ou plusieurs disciplines. Cet aspect de laformation lenseignement constitue galement un trait caractristique de lapolyvalence de la formation.

    2.1.3.5 Des liens entre la recherche et la formation

    La professionnalisation permet galement de faire davantage le lien entre larecherche et la formation. Au moment o la formation des matres est passedes coles normales l'universit, la recherche dans le domaine del'enseignement tait pratiquement inexistante (Gauthier et autres 1997). Il y

  • La formation lenseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    28

    avait bien sr des recherches axes sur la psychologie, souventdcontextualises, du type laboratoire, mais peu de recherches consacres l'enseignement prenant en considration la complexit du contexte rel de laclasse. Il en va de mme pour la recherche sur la formation lenseignementdont lexistence et le dveloppement ont t lis au transfert de la formation desmatres luniversit.

    Cependant, la situation a beaucoup volu depuis les 30 dernires annes. Larecherche a pris de la maturit dans les facults d'ducation. On dnombre denos jours nettement plus de recherches, plus rigoureusement faites et davantagecentres sur le travail enseignant en contexte rel avec pour heureuseconsquence que le savoir professionnel de lenseignement se formalise de plusen plus. Le travail enseignant peut tre dcrit, analys, compar et mis enrelation avec l'apprentissage des lves. On peut dsormais mieux comprendre lanature et la pertinence de certaines pratiques enseignantes en vue de favoriserlapprentissage des lves. On sait, par exemple, que la gestion de classe est unevariable qui influe particulirement sur l'apprentissage et que le savoirdexprience comporte ses limites. Dans une vise de professionnalisation, larecherche non seulement propos des pratiques d'enseignement mais aussi ausujet des dispositifs de formation doit y occuper une place importante et lesrsultats doivent tre rinvestis dans la formation des futurs matres.

    2.1.3.6 Un appel au partenariat et la concertationentre les instances et les personnes concernes

    La professionnalisation de lenseignement implique une relation de partenariatentre plusieurs univers, des mondes ayant souvent chacun leurs propres viseset leurs propres problmes. Les changements majeurs apports lors de larcente rforme de la formation l'enseignement et la ncessit d'une forme decollaboration entre les rseaux scolaires et universitaires pour assurer avecsuccs limplantation des stages ont permis, dans certains milieux, denclencherle dveloppement de relations de partenariat soutenues et de mettre en place desstructures de concertation entre lcole et les instances responsables de laformation pratique dans les facults dducation. Cependant, une vritablerelation de partenariat doit aller bien au-del de la collaboration tablie entre lesresponsables de stages tant universitaires que scolaires et les matres associs.Une vritable relation de partenariat doit prendre appui sur lappropriationdune vision commune de la formation du matre professionnel et sur ladfinition et le partage des rles respectifs, et ce, dans un contexte de bnficesmutuels. Cette relation de partenariat ne peut se btir sans la participation desdirections des diverses instances, des rseaux, des formatrices et des formateursuniversitaires (y inclus les professeurs de diffrentes disciplines qui travaillent la formation des enseignantes et des enseignants) ainsi que des praticiennes etdes praticiens chevronns. Pour former des professionnelles et des profes-sionnels de lenseignement, le milieu universitaire doit avoir davantage loccasionde se frotter la ralit scolaire, tout comme le rseau scolaire doit aller au-delde lexprimentation isole de pratiques nouvelles et conduire de faon plussystmatique la rflexion ou la recherche sur ces pratiques.

  • La professionnalisation

    29

    La professionnalisation ncessite galement un travail de concertation lintrieur mme de luniversit. Elle touche le corps professoral, tant desfacults dducation que des autres facults, engag dans lun ou lautre desprogrammes de formation. Une approche culturelle de lenseignement ne pourrasinstaurer dans les coles et dans la formation des matres si les groupes deformateurs et de formatrices nincluent pas la participation active et continue deprofesseurs enseignant diffrentes disciplines dans la slection et lagencementdes savoirs relatifs aux apprentissages viss pour les lves. En ce sens, la visedun programme professionnalisant suppose que les intervenants et lesintervenantes conoivent leurs activits de formation dune manire diffrente.La fragmentation de la formation maintes fois dnonce na pu que nuire laformation dune culture commune et dune identit partage (Lang 1999;Raymond 1998).

    Dj plusieurs facults (mdecine, gnie) ont mis en avant des modles deformation intgrs qui font appel dune manire diffrente aux disciplinesclassiques. Des tentatives intressantes ont t aussi faites en ce sens par lesfacults de diffrentes disciplines dans le secteur de la formation lenseignement. Ces efforts mritent dtre souligns. Cependant, il est possibledaller plus loin. Alors que lancienne professionnalit se fondait presqueexclusivement sur un rapport au savoir acadmique, la nouvelle sappuie pluttsur un rapport au savoir professionnel. Cest pourquoi il apparat essentiel demarquer une diffrence entre la formation dun chimiste, par exemple, et laformation dune enseignante ou dun enseignant de chimie. Il faut biencomprendre quil ne sagit pas de nier limportance de la connaissancedisciplinaire dans la formation des enseignantes et des enseignants, mais biende lorienter dans la vise de formation dune professionnelle ou d'unprofessionnel de lenseignement de cette discipline. Le contenu disciplinaireoffert doit donc tre rinterprt partir des critres de profondeur, dtendue etde pertinence au regard de ce qui sera enseign dans le programme scolaire.Encore l, il ne sagit pas de rduire la formation disciplinaire aux contenus duprogramme enseign dans les coles. Les savoirs disciplinaires retenir pour laformation des matres doivent plutt tre repenss partir du projet deprofessionnalisation et complts notamment par des lments relatifs lhistoire des disciplines, lpistmologie et la mise en relation avec lesdisciplines voisines, lments requis par lapproche culturelle de lenseignementde la rforme du programme scolaire. plus forte raison ds lors, dans lecontexte qubcois, le savoir-enseigner relve dune pratique qui ne se rduit pasaux savoirs disciplinaires mme s'il leur est foncirement li (Lang 1999; Tardif,Lessard et Gauthier 1998). En ce sens, la formation disciplinaire doit dsormaisse rattacher lexercice de la profession denseignant et denseignante ainsiquau mode dinsertion de cette discipline dans le curriculum scolaire (Lang1999 : 178) :

    Une formation professionnalisante tente de construire un savoirenseigner , i.e. une culture professionnelle intgrant des savoirs, desschmes daction, des attitudes; elle prtend dpasser les clivagestraditionnels entre formation acadmique, mthodologique, didactique,pratique, etc. : elle vise surmonter les juxtapositions et les disjonctions,traditionnelles dans la formation des enseignants, entre les diffrentes

  • La formation lenseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    30

    institutions (universit, cole professionnelle, tablissement de stage oudexercice), leurs fonctions (production et diffusion des connaissances,construction dune identit, de capacits, etc.), les types dintervenants(enseignant-chercheur, formateur institutionnel , formateur de terrain,pairs), les modalits dvaluation, etc. Elle implique donc ncessairementdes confrontations dacteurs ayant des positions institutionnelles, descomptences et des proccupations diffrentes : une formation profession-nalisante tente donc de nouvelles articulations entre les lieux traditionnelsde formation.

  • 2.2 Lapproche culturellede lenseignement

  • L'approche culturelle de l'enseignement

    33

    2.2 Lapproche culturelle de lenseignement

    Dans L'cole, tout un programme. nonc de politique ducative (1997a), leministre de l'ducation insiste particulirement sur la dimension culturelle dela rforme. En vue de rehausser le niveau culturel du programme de formationdes coles, il est mentionn, dans ce document, que la rvision desprogrammes dtudes prvoira explicitement lintgration de la dimensionculturelle dans les disciplines (1997a : 13). Plus encore, il est indiqu que lonfavorisera une approche culturelle pour enseigner ces matires (1997a : 13).Cette approche culturelle de l'enseignement touche de manire complexe etprofonde le personnel enseignant quant au rle quil aura jouer et, parricochet, les formatrices et les formateurs de matres dans leurs programmes etactivits de formation initiale et continue. Que peut donc signifier une approche culturelle de lenseignement ? Et quelles en sont les consquencessur la formation lenseignement? Rpondre ces questions exige dentre dejeu que lon approfondisse le sens et la porte du terme culture .

    2.2.1 Le concept de culture

    Chercher prciser la signification du mot culture , cest se heurter ds ledpart une exceptionnelle polysmie. Kroeber et Kluckhohn auraient en effetrpertori un champ smantique fort tendu, comportant pas moins de 160dfinitions du terme de 1871 1950 (Simard 1995), et ce, sans compter laprolifration des discours sur la culture des 40 dernires annes. Si ces diversesacceptions droutent au premier abord, le concept de culture peut cependanttre trait de manire simple.

    2.2.1.1 La culture comme objet

    En premier lieu, la culture peut tre reprsente en tant quobjet et tre analyseselon deux perspectives : comme objet construit (sens descriptif) et comme objetdsir (sens normatif).

    Le sens descriptif : la culture premire et la culture secondeLes concepts de culture premire et de culture seconde, tels qu'ils sont dcrits parFernand Dumont, permettent de distinguer deux significations au mot culture quand on la pense comme un objet construit. En effet, pour lui, la culturepremire est un donn. Les hommes s'y meuvent dans la familiarit dessignifications, des modles et des idaux convenus : des schmas d'action, descoutumes, tout un rseau par o l'on se reconnat spontanment dans le mondecomme dans sa maison (Dumont 1968 : 51). En ce sens, la culture premire,construite et intriorise par osmose, prend un sens collectif, anthropologique etqui correspond aux modes de vie, aux comportements, aux attitudes et auxcroyances d'une socit. Cette conception de la culture premire, aussi appele sociologique , renvoie l'ensemble des traits caractristiques du mode de vied'une socit, d'une communaut ou d'un groupe, y compris les aspects que l'onpeut considrer comme les plus quotidiens, les plus triviaux ou les plus inavouables (Forquin 1989 : 9).

  • La formation lenseignement Les orientations Les comptences professionnelles

    34

    La culture comme objet au sens descriptif peut aussi tre comprise autrement.Elle prend alors la signification de distance, de second regard sur le rel ou,comme la nomme Dumont, de culture seconde : Quand je prends la parole [...]je reprends aussi mon compte une certaine distance entre un sens premier dumonde dissmin dans la praxis propre mon contexte collectif et un universsecond o ma communaut historique tche de se donner, comme horizon, un