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Enoch Kalenga, dix ans, dort sous une moustiquaire dans sa maison du quartier Filtisaf de Kalemie. Crédit : Benoit Almeras-Martino / UNICEF, 2014. DES PRATIQUES POUR LA VIE La promotion des Pratiques Familiales Essentielles dans le district du Tanganyika

Guide des bonnes pratiques n°17: Des pratiques pour la vie

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Guide des bonnes pratiques

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  • Enoch Kalenga, dix ans, dort sous une moustiquaire dans sa maison du quartier Filtisaf de Kalemie.Crdit : Benoit Almeras-Martino / UNICEF, 2014.

    DES PRATIQUES POUR LA VIE

    La promotion des Pratiques Familiales Essentielles dans le district du Tanganyika

  • Situ au nord de la province du Katanga, le distr ict du Tanganyika possde les indicateurs parmi les moins bons de la Rpubl ique dmocratique du Congo, selon l Enqute Dmographique et de Sant mene en 2013 par le gouvernement congolais avec lappui dUNICEF.

    Ainsi, dans le distr ict du Tanganyika, seul un enfant sur cent (0,9%) serait enregistr l Etat-Civi l1, du fait de l loignement et du mauvais fonctionnement des services de l tat civi l . Cinq femmes sur six (84%) accoucheraient galement en dehors des structures de sant, pour des raisons dloignement, et sans assistance de personnel qual if i2.

    Seul un enfant sur huit (13,8%) serait correctement vaccin3. l image de l ensemble de la province du Katanga, le distr ict du Tanganyika compte notamment beaucoup de groupes rfractaires la vaccination.

    Ces indicateurs tendent dmontrer un l ien distendu entre les structures 1 25% au niveau national - EDS 20132 EDS 2013.3 vaccination contre BCG, DTCoq (3 doses), Polio (4 doses), Rouge-ole.

    de l Etat, surtout les structures sanitaires, et les famil les qui se tournent vers dautres acteurs de confiance comme leur entourage et leurs gl ises.

    Afin dencourager la vaccination de routine et, plus largement, promouvoir les prat iques famil ia les essentiel les, l UNICEF a impl iqu les diffrentes strates de la communaut dans ses activits de Communication Pour le Dveloppement.

    LE CONTEXTE

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    Martha Nyota allaite son fils Kabange (5 mois) dans son domicile de Kalemie. Kabange a t vaccin grce aux activits de sensibilisation menes par les partenaires dUNICEF.

  • LES PERSONNELS DES STRUCTURES DE SANTfont la promotion des pratiques familiales essentielles de manire routinire auprs des femmes enceintes et des jeunes mres qui frquentent les Consultations prnatales et postnatales.

    LES ENSEIGNANTS DES COLESfont la promotion des pratiques familiales essentielles auprs des lves, notamment le lavage des mains et lutilisation de la moustiquaire.

    LES RELAIS COMMUNAUTAIRES ET LES ASSOCIATIONSeffectuent quant eux des visites domicile dans les familles pour identifier les problmes et les sensibiliser ladoption des pratiques familiales essentielles.

    LES CONFESSIONS RELIGIEUSESqui ont un lien plus intime avec les familles sont elles aussi engages dans un travail de promotion des pratiques familiales essentielles. Les prdicateurs (pasteurs et imams, entre autres) tiennent des causeries ducatives aprs les runions religieuses.

    LES MDIASdiffusent des programmes courts prenregistrs et des missions de libre-antenne sur la promotion des pratiques familiales essentielles pendant des heures de grande coute (avant les informations notamment). Dans certains villages ou quartiers, des clubs dcoute organisent des discussions autour des missions diffuses.

    Les activits de promotion des pratiques familiales essentielles sont effectues par une multitude dacteurs. Aprs avoir t form, lensemble de ces acteurs diffuse les messages de promotion des pratiques familiales essentielles auprs des familles. Le travail est ainsi rparti :

    COMMENT A MARCHE ?

    Par leurs actions, ils effectuent un plaidoyer plus ou moins direct auprs des AUTORITS POLITIQUES, ADMINISTRATIVES ET MORALES (leaders religieux, proches parents, personnes influentes), pour que ces derniers incitent les familles galement ladoption de pratiques familiales essentielles.

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  • Avant, je naimais pas la vaccination : on disait que les enfants tombaient malades, quils allaient avoir de la fivre, quils feraient de lanmie

    Martha Nyota grne tranquillement la longue liste des rumeurs sur la vaccination, pendant quelle allaite son petit garon, contre le mur de sa maison en terre.

    Elle-mme croyait ces rumeurs. Mais ctait avant de tomber enceinte de ses jumeaux, Kabange et Kyungu et de recevoir les visites de Lonard Mabingo, relais communautaire de laire de sant Clinique Niche de Kalemie.

    AU DBUT, CTAIT UN DRANGEMENTIl est venu plusieurs fois pour donner des conseils sur le fait quil fallait dormir sous une moustiquaire, bien se laver les mains, allaiter exclusivement les enfants

    pendant six mois, et les vacciner. Il montait la pente chaque semaine pour me rendre visite, ctait vraiment difficile! Quand il venait, je trouvais que ctait un drangement

    Je me suis habitue progressivement. Il ma donn des coupons pour aller faire vacciner mes jumeaux, et puis jentendais aussi les programmes la radio qui mincitaient le faire mais je ne voulais toujours pas aller au Centre de Sant. La personne qui ma vraiment convaincue, cest ma mre.

    QUE TOUT LE MONDE SOIT CONSEILLAssise sur une chaise en plastique dans le salon minuscule, Elisabeth, la grand-mre des jumeaux Kyungu et Kabange, confirme : je lui ai dit que Lonard marchait beaucoup, quil faisait beaucoup defforts et que ctait une preuve quil ne disait pas de mensonges mes petits-

    enfants avaient aussi le droit dtre vaccin comme les autres enfants!

    et finalement, autant par respect pour sa mre que pour les informations quelle avait reues, Martha a fini par accepter daller au Centre de Sant. Jai vu que les vaccins navaient pas fait de mal aux enfants. Maintenant jessaie de parler mes voisines pour les convaincre que les rumeurs ne sont pas vraies.

    Elisabeth est convaincue de limportance de la sensibilisation: Avant, il ny avait pas de difficult pour la vaccination, tout le monde tait daccord avec a. Mais avec larrive des organismes, avec les vaccinations forces, il y a beaucoup de mfiance qui sest installe, il y a beaucoup de rumeurs qui circulent. Il faut quil y ait plus de sensibilisation dans les quartiers et que tout le monde soit bien conseill.

    C O N VA I N C R E M A RT H A : U N E H I S TO I R E D I N F LU E N C E

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  • Une tude anthropologique sur les rsistances la vaccination dans le district du Tanganyika a t mene en juillet 2014 pour identifier les dterminants des rsistances aux vaccinations1.

    3200 Relais Communautaires et 144 Infirmiers Titulaires des Centres de Sant ont t forms aux Pratiques Familiales Essentielles.

    1155 animateurs de base, appartenant 5 confessions religieuses diffrentes, ont t forms la promotion des pratiques familiales essentielles auprs des familles dans 11 zones de sant du district du Tanganyika. Par leurs diffrentes activits, ils ont touch plus de 124 000 familles.

    Un partenariat a t labor avec 12 radios de proximit, qui ont adapt leur grille de programmes pour y inclure des programmes courts, des jeux, des fictions et des missions interactives autour des Pratiques Familiales Essentielles. Au total, prs de 2000 programmes ont t effectivement 1 Les principaux motifs de refus de vaccination avancs par les familles sont par ordre dimportance: (i) la religion (56,7 %), (ii) la crainte des effets secondaires - rels ou supposs - (39, 3 %), lassociation entre le vaccin et un poison (31 %), la crainte que le vaccin provoque de lanmie (28,6 %), le manque de confiance dans le personnel mdical (27,9 %) et enfin le contexte inadquat de la vaccination - enfants absents, endormis, (18,9 %).

    diffuss autour des carrefours dinformation. Dans le district du Tanganyika, une femme sur trois et un homme sur deux coutent la radio au moins une fois par semaine selon lEnqute Dmographique et de Sant. 29 clubs dcoute dj oprationnels facilitent le suivi des missions.

    12 Enfants Reporters effectuent des activits de plaidoyer auprs des autorits politiques et administratives afin de les impliquer dans la promotion des pratiques familiales essentielles, dans la systmatisation de linscription des enfants lcole et dans la lutte contre le mariage prcoce. Ils animent en outre des missions interactives sur les tlvisions et radios partenaires de lUNICEF dans le district du Tanganyika.

    8 Organisations Assise Communautaire (associations notamment) ont t formes la promotion des Pratiques Familiales Essentielles dans le district du Tanganyika.

    Le pourcentage des enfants non vaccins par refus des gardiens denfants est pass de 11% 6% de janvier 2012 octobre 2013 dans le seul district du Tanganyika2.2 daprs le suivi de routine de lOrganisation Mondiale de la Sant.

    Le District sanitaire du Tanganyika a labor un systme de coupons de vaccination pour inciter les familles faire vacciner ses enfants.

    Concrtement, chaque relais communautaire distribue, dans le quartier ou village quil couvre, des coupons de vaccination aux familles des enfants non-vaccins ou en retard par rapport au calendrier vaccinal.

    chaque fois que lenfant est vaccin, son coupon est remis au centre de sant qui soccupe du suivi du calendrier vaccinal.

    Ce systme permet aux centres de sant didentifier les familles qui ne sont pas venues dposer leur coupon et qui nont donc pas fait vacciner leurs enfants. Ces familles sont alors visites nouveau par les relais communautaires.

    Si plusieurs familles sont identifies dans une mme rue, le relais communautaire peut organiser une sance dinformation publique.

    Depuis dcembre 2013, les coupons ont permis de rcuprer 10 257 enfants pour la vaccination.

    INNOVATION : DES COUPONS POUR MIEUX SUIVRE LA VACCINATION

    CE QUI A T ACCOMPLI

    Coupons de vaccination utiliss en Avril 2014 dans le Centre de Sant Clinique Niche de Kalemie.

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  • REPETER LES MESSAGES DE PROMOTIONLa promotion des pratiques familiales essentielles au travers de diffrents canaux est largement considre comme lun des facteurs facilitant leur adoption. Dans le cas de la vaccination, la rptition des messages provenant de sources diffrentes a permis de vaincre les rsistances.

    ETRE PROCHE DES GENSLe canal de communication le plus efficace est celui du porte--porte, ralis par des personnes connues dans le quartier ou le village concern et rgulirement. Egalement, lutilisation du parrainage est une mthode efficace puisque laccompagnement est ralis par les voisins eux-mmes.

    SE SERVIR DE LINFLUENCE PERSONNELLESi la rptition des messages est essentielle, cest souvent une personne dinfluence du mnage (leader religieux, voisin, parent) qui relaie et renforce le message et parvient convaincre la personne cible dadopter les pratiques familiales essentielles, plus particulirement la vaccination.

    LACCOMPAGNEMENT DES FAMILLES PAR LES ACTEURS DE COMMUNICATION DE BASELes visites rgulires aux familles constituent lun des facteurs permettant de les convaincre dadopter les pratiques familiales essentielles. Lutilisation du parrainage est une mthode efficace puisque laccompagnement est ralis par les voisins eux-mmes.

    Les acteurs communautaires soutenus par UNICEF ont mis en place une approche de parrainage pour promouvoir les pratiques familiales essentielles.

    Dans le quartier Majengo de Kalemie, la Croix-Rouge Congolaise sappuie ainsi sur un Club des Mres pour faciliter ladoption des pratiques familiales essentielles dans les familles. Nolla Mokonta raconte comment elle a intgr ce club trs ouvert.

    Je voyais les mres passer dans le quartier et donner des conseils aux familles. ai voulu en faire partie pour aider mes voisines.

    Je connaissais bien ce quil fallait faire - avoir une bonne hygine, bien se laver les mains, allaiter son enfant au sein pendant les six premiers mois de sa vie, dormir sous une moustiquaire, le faire vacciner, lenregistrer ltat-civil... Quand jai intgr le Club des Mres, jai t forme, jai amlior ces connaissances pour les partager avec les autres.

    La maison de Nolla est un modle quelle utilise pour sensibiliser ses voisines: elle y montre sa station de lavage des mains (faite avec une simple bassine et un bidon), et les lits bien couverts par les moustiquaires.

    Lactivit de Nolla rend dailleurs ses enfants trs fiers. Pour Joseph, cest laide quelle apporte aux autres que japprcie. Bibiche, quant elle, voit sa mre comme un exemple qui va minspirer aussi pour plus tard.

    N O L L A , U N E VO I S I N E M O D L ELA DCOUVERTE : CE QUI MARCHE

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  • UNICEF et le gouvernement de la Rpubl ique dmocratique du Congo souhaitent avant tout rduire la mortal it infanti le conformment aux objectifs du mil lnaire pour le dveloppement et au plan daction qui ls ont sign conjointement. Les acteurs de communication de base souhaitent que les prat iques famil ia les essentiel les soient promues par les communauts el les-mmes pour que tous les enfants soient protgs contre les maladies vitables et qui ls soient enregistrs l Etat-Civi l .

    LEXTENSION DES ACTIVITS DE PROMOTION DES PRATIQUES FAMILIALES ESSENTIELLESLun des dfis soulevs par les responsables des services de sant du distr ict est celui de l accessibi l i t aux zones les plus recules, pour des questions de scurit et de moyens. Lloignement des structures tat iques rclame davantage dactions it inrantes des services de sant et dEtat-Civi l selon eux. Par ai l leurs, un mai l lage plus serr des quart iers et des vi l lages par les relais communautaires est vivement souhait af in de rduire le nombre de famil les manques.

    UN DIALOGUE ACCRU ENTRE LES ACTEURS DE COMMUNICATION DE BASELes actions de promotion des prat iques famil ia les essentiel les, menes en paral l le par les acteurs concerns, ne le sont pas de manire conjointe. Des interactions entre les acteurs sont ncessaires pour renforcer les messages et l ut i l isat ion des structures de sant et dEtat-Civi l .

    LE SUIVI DES EFFETS DE LA PROMOTION DES PRATIQUES FAMILIALES ESSENTIELLESUn mei l leur suivi est ncessaire pour prouver l adoption des prat iques famil ia les essentiel les, part icul irement entrave par la pauvret des famil les.

    LE RVE : LA VISION DU FUTUR

    Mon rve, cest de voir les habitants sapproprier notre

    travail pour quils garantissent eux-mmes leur bonne sant.

    - Wasso Walonga, Relais Communautaire du village de Kalenga Mission (Zone de Sant Tabac Congo)

    Ce que jaime, cest la confiance que la communaut maccorde

    suite mes conseils - je suis devenue un membre de la famille

    pour beaucoup de gens.

    - Adnive Singini, animatrice de base au sein de la communaut catholique de Kalemie.

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  • Une fille de 6 mois se fait immuniser pendant la vaccination de routine au Centre de Sant Undugu de Kalemie.Crdit : Benoit Almeras-Martino / UNICEF, 2014.