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UNIVERSIT DE LA MANOUBA
Institut Suprieur De Comptabilit & dAdministration Des Entreprises (ISCAE)
Analyse de lEffet de lAdoption des Normes
Comptables Internationales sur le Dveloppement
et la Performance des Marchs Financiers mergents
Thse prpare lInstitut Suprieur de Comptabilit & dAdministration des Entreprises de lUniversit de la Manouba, Tunisie
Par Karim MHEDHBI
Pour lobtention dun doctorat en sciences comptables
Sous la direction du Professeur Mustapha ZGHAL (Universit dOttawa, Canada)
Janvier 2010
I
Analyse de leffet de ladoption des normes comptables internationales sur le
dveloppement et la performance des marchs financiers mergents
Rsum:
Lune des grandes mtamorphoses qui ont caractris le paysage comptable international, ces
dernires annes, est ladoption des normes comptables internationales (IAS/IFRS) par un
nombre considrable et croissant des pays en dveloppement. Pour la majorit de ces nations,
lapplication des IAS/IFRS reprsente une transition vers une nouvelle philosophie comptable
qui, fonde principalement sur la communication dune information financire de qualit et utile
la prise de dcision, considre les investisseurs intervenant sur les marchs financiers comme
les utilisateurs privilgis des tats financiers. Lobjectif de cette tude est danalyser les consquences de ladoption des normes comptables
internationales sur le dveloppement et la performance des marchs financiers localiss dans les
pays en dveloppement (marchs financiers mergents).
Les rsultats de nos analyses, bass sur un chantillon compos de 38 pays en dveloppement
march financier, indiquent que ladoption des normes comptables internationales a entran des
consquences positives et significatives sur la variable dveloppement des marchs financiers
mergents. Cependant, la variable performance des marchs financiers mergents, bien quelle
ait subi un impact positif, ses valeurs ne sont pas significativement diffrentes entre la priode
qui prcde lutilisation des normes comptables internationale et celle qui la suit.
Mots cls: marchs financiers mergents; normes comptables internationales; consquences
conomiques
II
Analyzing the effect of the adoption of international accounting standards on the
development and performance of emerging capital markets
Abstract:
The recent adoption of international accounting standards (IAS/IFRS) by a significant and
growing number of developing countries is one of the most important changes in the
international accounting field. For most of these nations, the application of IAS/IFRS represents
a transition to a new accounting paradigm. This paradigm, based primarily on the
communication of financial information of good quality and useful for decision-making,
considers investors involved in capital markets as the privileged users of financial statements.
The objective of this study is to analyze the consequences of the adoption of international
accounting standards on the development and performance of capital markets located in
developing countries (emerging capital markets).
The results of our analyses, based on a sample of 38 developing countries with capital markets,
indicate that the adoption of international accounting standards has led to significant positive
changes in the development of their emerging capital markets. However, although the adoption of
such standards had a positive impact, the values of the performance of emerging capital markets,
in the periods before and after the use of international accounting standards, were not
significantly different.
Keywords: emerging capital markets; international accounting standards; economic
consequences
III
TABLE DES MATIRES
Liste des abrviations utilises.......................VIII
Liste des figures..................................IX
Liste des tableaux.................................X
Introduction Gnrale..1
Chapitre I : La normalisation comptable internationale..........9
Introduction....10
Section I : Le concept de la normalisation comptable.....12
1. Dfinition dune norme comptable..12
2. Les objectifs de la normalisation comptable...12
3. Les approches de normalisation comptable.13
3.1. La formulation des normes comptables par le secteur public...14
3.2. La formulation des normes comptables par le secteur priv.........15
3.3. La formulation des normes comptables par le march priv....15
4. Normes comptables et facteurs environnementaux.16
4.1. Le systme lgal....17
4.2. La fiscalit.....17
4.3. Linflation......17
4.4. Le niveau du dveloppement conomique....17
4.5. Le mode de financement des entreprises...18
4.6. La culture.......18
Section II : La disparit des pratiques comptables lchelle internationale......21
1. Exemples des disparits comptables lchelle internationale..22
1.1. Le traitement comptable des frais de recherche et de dveloppement..... 22
1.2. Le traitement comptable des stocks...23
1.3. Le traitement comptable des contrats de construction.......23
1.4. Le traitement comptable du crdit bail......24
1.5. Le traitement comptable des immobilisations corporelles....25
1.6. Les lments des tats financiers...26
IV
2. Consquences de la diversit comptable internationale.27
3. Remdes la diversit des pratiques comptables...30
3.1. Ladoption des normes locales.......31
3.1.1. Ladoption pure et simple des normes locales...31
3.1.2. Ladoption avec rconciliation......31
3.2. Lharmonisation comptable rgionale.......32
3.2.1. Le systme comptable ouest africain.....32
3.2.2. Lharmonisation comptable europenne.......33
3.2.2.1. La quatrime directive......33
3.2.2.2. La septime directive........33
3.2.2.3. La huitime directive....34
3.3. Lharmonisation comptable internationale........35
3.3.1. LOrganisation des Nations Unies.....35
3.3.2. LOrganisation pour la Coopration et le Dveloppement conomique...36
Section III: LInternational Accounting Standards Board...............36
1. Constitution et objectifs37
2. Stratgies dharmonisation comptable..37
3. Structure de lIASB..39
4. Processus dadoption des normes comptables..41
5. Les normes comptables de lIASB...43
6. La reconnaissance internationale de lIASB.45
6.1. Accord entre lOICV et lIASB.....45
6.2. Application des normes comptables internationales dans le contexte europen.......47
6.3. Utilisation des IAS/IFRS par les firmes multinationales...48
6.4. Utilisation des IAS/IFRS par les pays...49
Conclusion.......51
Rfrences52
Chapitre II : La pertinence des normes comptables internationales pour les pays en
dveloppement....56
Introduction....57
Section I : La comptabilit dans les pays en dveloppement.......58
V
Section II : Attitudes lgard de ladoption des normes comptables internationales....73
1. Motivations et avantages de lharmonisation comptable internationale...74
1.1. Motifs conomiques de lharmonisation comptable internationale.......74
1.2. Les bienfaits de lharmonisation comptable internationale.......79
2. Obstacles lharmonisation comptable internationale.83
Section III : Lutilit des normes comptables internationales pour les pays en dveloppement.88
1. Pour ladoption des normes de lIASB par les pays en dveloppement...88
2. Contre ladoption des normes de lIASB par les pays en dveloppement...91
Conclusion...95
Rfrences96
Chapitre III : Les consquences conomiques de ladoption des normes comptables
internationales.......101
Introduction......102
Section I : Consquences conomiques de ladoption des nouvelles normes comptables....103
Section II : Caractristiques et philosophie des normes comptables internationales....111
Section III : Normes comptables et marchs financiers....117
1. Utilit dun march financier dans une conomie.117
1.1. Quest-ce quun march financier?..........117
1.2. Les bienfaits de la mise en place dun march financier.....120
1.3. Variables conditionnant le bon fonctionnement dun march financier.....123
2. Rle de linformation financire dans le fonctionnement dun march financier.126
2.1. Information financire et asymtrie dinformation....126 2.2. Information financire et cot de capital.......130
2.3. Information financire et gouvernance dentreprise.....131
Conclusion.....135
Rfrences..137
Chapitre IV : Problmatique et objectif de la recherche, revue de la littrature et hypothses
de la recherche..141
Introduction......142
Section I : Problmatique, objectif et utilit potentielle de la recherche ..142
1. Problmatique de la recherche...142
VI
2. Objectif de la recherche.143
3. Utilit potentielle de la recherche..143
Section II : Revue de la littrature.144
1. La pertinence des IAS/IFRS pour les pays en dveloppement sur le plan empirique..144
2. Consquences de lutilisation des IAS/IFRS de par le monde.147
3. Impact de ladoption des IAS/IFRS sur les marchs financiers mergents..151
Section III: Hypothses de la recherche....154
1. IAS/IFRS et dveloppement des marchs financiers mergents..155
2. IAS/IFRS et performance des marchs financiers mergents..161
Conclusion.....164
Rfrence...166
Chapitre V : Mthodologie et rsultats empiriques de la recherche...171
Introduction......172
Section I : chantillon de ltude et sources de donnes...172
Section II : Mesures du dveloppement et de la performance des marchs financiers.174
1. Mesures de la variable dveloppement dun march financier ...175
2. Mesure de la variable performance dun march financier .177
2.1. Le ratio cours sur bnfice (PER) : dfinition et signification ....177
2.2. Le PER et linformation comptable......178
2.3. Recherches internationales traitant du PER......180
Section III: Mthode danalyse statistique....181
1. Analyse statistique prliminaire...181
2. Analyse statistique multivarie.............................................................................................181
Section IV : Prsentation et analyse des rsultats empiriques...182
1. Statistiques descriptives des variables..182
2. Caractristiques des variables avant et aprs ladoption des IAS/IFRS...184
3. Comparaison des variables avant et aprs ladoption des IAS/IFRS...185
4. Rgression linaire...186
4.1. Identification des variables de contrle....187
4.2. Modle conomtrique tester.....188
4.3. Rsultats de la rgression statistique....192
VII
4.3.1. tude de la multicolinarit entre les variables explicatives.......192
4.3.2. Prsentation des rsultats du modle...195
Conclusion.....199
Rfrence...200
Conclusion Gnrale.....207
Annexes......212
VIII
LISTE DES ABRVIATIONS UTILISES
A.A.A: American Accounting Association
FASB: Financial Accounting Standard Board
FMI: Fonds Montaire International
IASB: International Accounting Standards Board
IASC: International Accounting Standards committee
IAS: International Accounting Standards
ICGN: International Corporate Governance Network
IFAC: International Federation of Accountants
IFC: International Financial Corporation
IFRS: International Financial Reporting Standards
JOCE: Journal Officiel des Communauts Europennes
PER : Ratio cours sur le bnfice
PBR : Ratio valeur du march sur valeur comptable des capitaux propres
PIB : Produit Intrieur Brut
PNB : Produit National Brut
OCDE : LOrganisation pour la Coopration et le Dveloppement conomique
OICVM : LOrganisation Internationale des Commissions des Valeurs Mobilires
ONU : LOrganisation des Nations Unies
SEC : Securities and Exchange Commission
SFAS: Statement of Financial Accounting Standard
IX
LISTE DES FIGURES
Figure 1.1 : Effet de lenvironnement sur les systmes comptables
Figure 1.2 : Solutions la diversit comptable internationale
Figure 1.3 : volution de lactivit de lIASB
Figure 1.4 : Fonctionnement de la structure de lIASB
Figure 1.5 : Procdure dadoption dune norme comptable par lIASB
Figure 2.1 : Cadre thorique pour le transfert international de la technologie comptable
Figure 3.1 : Consquences conomiques de linformation financire
Figure 3.2 : Le march primaire
Figure 3.3 : Raisons de la mise en place dun march financier
Figure 3.4 : Facteurs assurant le dveloppement dun march financier
Figure 3.5 : Information financire, march financier et croissance conomique
Figure 3.6 : Canaux travers lesquels linformation comptable et financire peut affecter
la performance conomique
Figure 4.1 : Adoption des IAS/IFRS et dveloppement des marchs financiers mergents
Figure 4.2 : Adoption des IAS/IFRS et performance des marchs financiers mergents
Figure 5.1 : Le PER pour une action, pour une entreprise et pour un march financier
Figure 5.2 : IAS/IFRS et PER
Figure 5.3 : Mthode danalyse statistique prliminaire
X
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1.1 : La comptabilisation des frais de recherche et de dveloppement
Tableau 1.2 : La comptabilisation des stocks
Tableau 1.3 : La comptabilisation du contrat de construction
Tableau 1.4 : La comptabilisation du crdit bail
Tableau 1.5 : La comptabilisation des immobilisations corporelles
Tableau 1.6 : Moyens de communication de linformation financire
Tableau 1.7 : Liste des normes IAS/IFRS applicables en 2009
Tableau 1.8 : Exemples de firmes appliquant les normes comptables IAS/IFRS
Tableau 2.1 : volution du commerce international par rgion
Tableau 2.2 : Classification des plus grandes entreprises multinationales selon leurs actifs
dtenus ltranger
Tableau 2.3 : Nombre de socits cotes en 2005
Tableau 3.1 : Positionnement de lIASB entre les modles comptables continental et anglo-saxon
Tableau 5.1 : Slection de lchantillon de ltude
Tableau 5.2 : Prsentation des pays de lchantillon par rgion
Tableau 5.3 : Oprationnalisation de la variable dveloppement du march financier
Tableau 5.4 : Statistiques descriptives des variables de lchantillon
Tableau 5.5 : Statistiques descriptives des variables avant et aprs ladoption des IAS/IFRS
Tableau 5.6 : Les rsultats du test de Wilcoxon
Tableau 5.7 : Matrice de corrlation entre les variables
Tableau 5.8 : Les rsultats du test VIF
Tableau 5.9 : Les rsultats des tests de Fisher et dHausman
Tableau 5.10 : Les rsultats de la rgression statistique
1
INTRODUCTION GNRALE
I- Contexte et motivations de la recherche :
Afin dassurer la production dune information financire utile la prise de dcision
conomique, la plupart des pays se sont dots dun ensemble de normes comptables servant
ltablissement des rapports financiers. En effet, lutilisation dun langage comptable commun
par toutes les entreprises exerant dans un mme espace conomique permet aux diffrents
utilisateurs de suivre les activits de ces entits dans le temps et dans lespace et de prendre, par
consquent, des dcisions raisonnes.
Dvelopps dans des contextes nationaux, les standards comptables sont gnralement influencs
par les conditions conomiques, sociales, juridiques et culturelles propres chaque tat et sont,
ainsi, diffrents dun pays lautre. Dans certains, notamment ceux anglo-saxons, la
comptabilit, rglemente par des professionnels comptables, sadresse essentiellement aux
investisseurs et met laccent notamment sur les principes de la juste reprsentation et de limage
fidle. Par contre, dans certains pays faisant partie du modle comptable continental, les rgles
comptables sont tablies par les pouvoirs publics, linformation financire soriente
essentiellement aux cranciers et la priorit est accorde au principe de prudence.
Ces diffrences ont fait que les entreprises dorigines diffrentes appliquent des pratiques
diverses pour la prparation et la communication de leurs tats financiers; ce qui a rendu difficile,
dans un contexte caractris par linternationalisation croissante des activits conomiques et la
mondialisation des entreprises et des marchs conomiques et financiers, la comparaison de la
performance des entreprises dans le temps et dans lespace, et constitu un vritable handicap
pour le dveloppement des oprations dinvestissement lchelle mondiale.
Consciente de cette ralit ainsi que de la ncessit dadapter la comptabilit financire son
nouvel environnement, la communaut comptable et financire a tent de trouver des remdes
permettant damliorer la comparabilit, la pertinence ainsi que la fiabilit de linformation
financire et fournir aux diffrents dcideurs nationaux et internationaux un produit
informationnel relativement homogne. Bien que plusieurs actions aient t employes,
lharmonisation comptable internationale a constitu le principal changement des dernires
2
annes. Le but primordial de ce programme tait de btir un ensemble de normes comptables qui
puissent tre appliques dans le monde entier.
Pour parvenir cet objectif, plusieurs formules ont t envisages. LOrganisation pour la
Coopration et le Dveloppement conomique et lOrganisation des Nations Unies sont deux
exemples dorganismes internationaux qui ont ralis des efforts pour faciliter la comparaison des
tats financiers lchelle internationale. Cependant, leurs contributions ont t limites des
activits dinformation et dinfluence et leurs programmes nont pas abouti des rsultats
comparables ceux raliss par le conseil des normes comptables internationales, plus connu
sous le sigle IASB qui convient sa dsignation en anglais : International Accounting Standards
Board. Fond en 1973 par les organisations professionnelles de lAllemagne Fdrale, de
lAustralie, du Canada, des tats-Unis, de la France, du Japon, du Mexique, des Pays-Bas ainsi
que de la Grande-Bretagne, cet organisme a tent de contribuer au processus dharmonisation
comptable internationale essentiellement par la prparation et la publication des normes
comptables internationales (IAS/IFRS).
Comme toute nouvelle structure, lIASC, devenu lIASB en 2001, a rencontr au dbut de
ses travaux des difficults multiples dues notamment la rticence de certains organismes
nationaux de normalisation comptable quant lapplication de ses normes et ses actions. Mais,
avec lappui quil a trouv auprs de plusieurs organismes internationaux et nationaux influents
dans le monde comptable, cet organisme a ralis des rsultats considrables et a fait des progrs
srieux vers lharmonisation des pratiques comptables au niveau mondial. Ceux-ci se
manifestent, entre autres, par le nombre relativement important de firmes multinationales qui
appliquent les IAS/IFRS pour ltablissement des tats financiers et de pays, surtout ceux en
dveloppement, qui ont dcid dadopter ces normes dans leurs propres lgislations comptables.
Bien quil existe un certain consensus sur les bienfaits de lutilisation des normes de
lIASB par les entreprises multinationales, ladoption de ces standards, linverse, par les pays
en dveloppement a fait lobjet de controverse dans la littrature comptable. Il existe
principalement deux coles de pense. Les adeptes de la premire militent en faveur de la
convergence de la comptabilit dans les pays en dveloppement vers les IAS/IFRS et pensent que
cette stratgie est trs bnfique pour lamlioration de leurs situations conomiques. Alors que
les partisans de la deuxime cole sopposent vivement lengagement de ces pays dans le
3
programme dharmonisation comptable internationale et estiment que les normes de lIASB ne
sont pas adquates leur contexte conomique.
Trancher entre ces deux coles de pense et fournir des lments de rponse la question
relative lutilit et la pertinence des normes comptables internationales pour les pays en
dveloppement constitue, prsentement, les domaines sur lesquels les chercheurs, concerns par
la comptabilit dans ces tats, devraient accorder plus dattention. Lune des dmarches leurs
dispositions pour parvenir ces buts est lexamen des consquences de ladoption des IAS/IFRS
sur la ralit conomique des pays en dveloppement. Ces normes comptables sont pertinentes
pour ces pays dans la mesure o elles contribuent lamlioration de la qualit de linformation
financire communique par les socits et elles produisent des consquences conomiques
positives. Au niveau de la littrature comptable, il a t largement admis que les changements des
rgles et des mthodes comptables ont gnralement des consquences conomiques, notamment
sur la position financire et la performance des entreprises, sur les politiques des dirigeants, sur
les choix et les dcisions des investisseurs ainsi que sur lactivit des marchs financiers. Selon
cette logique, ladoption des normes comptables internationales dans le contexte des pays en
dveloppement pourrait avoir des effets sur les diffrents aspects sensibles aux modifications des
systmes comptables.
Traiter de toutes les consquences conomiques potentielles de la stratgie dadoption des
IAS/IFRS par les pays en dveloppement est un but difficile atteindre pour plusieurs raisons
dont la difficult dvaluer les impacts de ce choix sur certaines variables et labsence parfois des
fondements thoriques permettant dtablir le rapport entre les variations observes sur certains
lments et ladoption des normes de lIASB. La meilleure dmarche serait didentifier, avant
toute analyse empirique, les domaines sur lesquels ces standards ont plus de chance de produire
des effets.
Pour ce faire, nous avons procd lanalyse de la philosophie et des caractristiques des
IAS/IFRS. Cette tape nous a permis de constater que ces normes comptables, en prsentant des
similarits multiples avec les rgles applicables dans les pays anglo-saxons, ont tendance
favoriser et servir en premier lieu les acteurs sur les marchs financiers et de dcider, par
consquent, danalyser les consquences conomiques de ladoption des normes de lIASB sur la
4
situation des marchs financiers localiss dans les pays en dveloppement (marchs financiers
mergents). Ce choix est justifi, en plus de la nature des normes comptables internationales qui
sorientent essentiellement aux marchs financiers, par lexistence dun fondement thorique
solide tablissant le lien entre linformation financire et le fonctionnement des marchs
financiers et par les rsultats des tudes antrieures telle que la recherche de Zeghal et Mhedhbi
(2006)1. Ces chercheurs, en tentant didentifier les facteurs qui expliquent ladoption des normes
comptables internationales par les pays en dveloppement, ont trouv que la prsence dun
march financier constitue la principale variable qui motive ces tats appliquer ces standards.
II- Objectif de la recherche : Lune des grandes mtamorphoses qui ont caractris le paysage comptable international
ces dernires annes est ladoption des normes comptables internationales par un nombre
considrable et croissant des pays en dveloppement. Pour la majorit de ces nations,
lapplication de ces standards reprsente une transition vers une nouvelle philosophie comptable
qui, fonde principalement sur la communication dune information financire de qualit et utile
la prise de dcision, considre les diffrents intervenants sur les marchs financiers comme les
utilisateurs privilgis des tats financiers.
La tendance des normes comptables de lIASB servir et favoriser en premier lieu les divers
acteurs oprant sur les marchs financiers nous a motivs pour raliser une tude ayant pour
objectif lvaluation des consquences de ladoption des IAS/IFRS sur le dveloppement et la
performance des marchs financiers mergents.
III- Utilit potentielle de la recherche :
La revue des tudes antrieures nous a permis de constater essentiellement que le nombre
de travaux examinant les consquences de ladoption des IAS/IFRS sur les marchs financiers
mergents est relativement minime. Ainsi, la problmatique relie aux effets de lintroduction des
normes comptables de lIASB sur ces marchs demeure peu exploite.
1 Zeghal, D. et Mhedhbi, K. (2006). Analysis of the factors affecting the adoption of international accounting standards by developing countries. The International Journal of Accounting, 41, 373-386.
5
La ralisation dune tude empirique portant sur un ensemble de pays et traitant de limpact de
ladoption des normes comptables internationales prsente un intrt majeur pour diverses parties
dont essentiellement :
Les pays en dveloppement march financier qui ont adopt les IAS/IFRS. Cette
recherche permet dvaluer leur stratgie dadoption des normes comptables internationales pour
leurs marchs financiers;
Les pays en dveloppement march financier qui nont pas converg vers les travaux de
lIASB. Les rsultats de cette tude peuvent tre dterminants dans le choix de leurs systmes
comptables;
LIASB. Cette recherche peut laider dfinir sa politique en matire de normalisation
comptable internationale;
Plusieurs organismes internationaux dont la Banque Mondiale ; lIFAC ; le FMI et
lIOSCO, soutiennent les actions de lIASB et sont pour ladoption de ses normes comptables par
les pays en dveloppement. Ce travail de recherche peut les emmener renforcer leur position
quant ladoption des IAS/IFRS par ces pays ou la rviser; et
Les investisseurs internationaux qui veulent se renseigner, entre autres, sur la contribution
des IAS/IFRS dans lamlioration de la qualit de linformation financire communique par les
socits dans le contexte des marchs financiers mergents. IV- Les hypothses vrifier de la recherche :
Sur la base des travaux de recherche antrieurs, nous avons choisi de focaliser lanalyse
sur deux principales variables largement exploites par la littrature comptable et financire,
savoir le dveloppement et la performance dun march financier. Ces deux variables ont servi
la formulation des hypothses de la recherche.
Surtout travers la contribution attendue des normes de lIASB dans lamlioration de la qualit
de linformation financire communique par les socits cotes, nous avons anticip que :
H. 1 : Ladoption des IAS/IFRS va affecter positivement le dveloppement des marchs
financiers mergents; et
6
H. 2 : Ladoption des IAS/IFRS va affecter positivement la performance des marchs
financiers mergents.
V- Mthodologie de la recherche :
Pour tester empiriquement leffet de ladoption des normes comptables de lIASB sur le
dveloppement et la performance des marchs financiers mergents, nous avons eu recours une
mthode danalyse statistique compose de deux principales tapes :
Analyse statistique univarie : au sein de cette premire tape et aprs avoir procd
lanalyse descriptive de chacune des mesures retenues dans cette tude, nous avons procd la
comparaison de celles-ci avant et aprs ladoption des normes comptables internationales.
Analyse statistique multivarie : si une diffrence significative entre les moyennes avant
et aprs ladoption des IAS/IFRS est dtecte, nous passerons une deuxime tape de lanalyse
statistique (analyse statistique multivarie) dans laquelle nous essayerons dtudier limpact de
ladoption de ces normes sur le dveloppement et la performance des marchs financiers
mergents, aprs avoir intgr dans un modle tous les autres facteurs (variables de contrle) qui
sont susceptibles daffecter la variation des variables tudies.
VI- Principaux rsultats de la recherche :
Les analyses statistiques fondes sur un chantillon compos de 38 pays en
dveloppement march financier et qui ont adopt les IAS/IFRS nous ont permis de dgager les
rsultats suivants :
Rsultats de lanalyse statistique univarie : nous avons trouv que ladoption des
normes de lIASB a entran des consquences positives et significatives sur la variable
dveloppement des marchs financiers mergents. Cependant, la variable performance des
marchs financiers mergents, bien quelle ait subi un impact positif, ses valeurs entre les deux
priodes examines ne sont pas significativement diffrentes. Ces aboutissements ont orient la
dmarche mene au niveau de lanalyse statistique multivarie.
Rsultats de lanalyse statistique multivarie : dans cette partie, nous nous sommes
concentrs sur lexamen du lien entre ladoption des IAS/IFRS et le dveloppement des marchs
financiers mergents. En estimant un modle en donnes de panel qui tient compte des autres
7
dterminants macroconomiques du niveau de dveloppement dun march financier, nous avons
constat que ladoption des normes de lIASB a affect positivement et significativement
lactivit des marchs financiers mergents.
Dans lensemble, les rsultats trouvs nous ont conduits confirmer la premire hypothse
relative leffet des normes comptables internationales sur le dveloppement des marchs
financiers mergents et infirmer celle concernant limpact de ces normes sur la performance de
ces marchs. VI- Organisation de la recherche :
Ce travail de recherche est structur en cinq chapitres. Le premier chapitre traite de
lvolution de la normalisation comptable nationale vers celle internationale et surtout des efforts
de lIASB dans le processus dharmonisation comptable internationale (chapitre I : la
normalisation comptable internationale). La dcision de plusieurs pays en dveloppement de
sengager dans ce programme et dadopter les normes de cet organisme international nous a
motivs pour consacrer le deuxime chapitre lanalyse de la pertinence des IAS/IFRS pour ces
tats, via une revue des tudes conduites en la matire (chapitre II : la pertinence des normes
comptables internationales pour les pays en dveloppement).
En optant pour la ralisation dune tude empirique portant sur les effets de la stratgie
dadoption des normes comptables de lIASB sur la ralit conomique des pays en
dveloppement, nous avons rdig un troisime chapitre prsentant les consquences
conomiques potentielles de ladoption des normes comptables internationales (chapitre III : les
consquences conomiques de ladoption des normes comptables internationales). Le
dveloppement de ce chapitre a t fait pour deux principales raisons, savoir : la justification de
la ralisation de cette tude sur le plan thorique et aussi lidentification des domaines sur
lesquels les IAS/IFRS ont plus de chance de produire des consquences. Le quatrime chapitre
expose lobjectif, la problmatique, la revue de la littrature et les hypothses de la recherche
(chapitre IV : problmatique et objectif de la recherche, revue de la littrature et hypothses de
la recherche) et le dernier chapitre prsente la mthodologie et les rsultats empiriques de ltude
(chapitre V : Mthodologie et rsultats empiriques de la recherche).
8
Structure de la thse :
Chapitre I : La normalisation comptable internationale
Expliquer lvolution de la normalisation comptable nationale vers celle internationale
Traiter des efforts de lIASB dans le processus dharmonisation comptable internationale
Chapitre II : La pertinence des normes comptables internationales pour les pays
en dveloppement
Analyser la question relative lutilit des IAS/IFRS pour les pays en dveloppement
Chapitre III : Les consquences conomiques de ladoption des normes
comptables internationales
Justifier la ralisation de la recherche sur le plan thorique
Identifier les domaines sur lesquels les IAS/IFRS ont plus de chance de produire des effets
Chapitre IV : Problmatique et objectif de la recherche, revue de la littrature
et hypothses de la recherche
H.1 : Ladoption des IAS/IFRS va affecter positivement le dveloppement des marchs financiers mergents
H.2 : Ladoption des IAS/IFRS va affecter positivement la performance des marchs financiers mergents
Chapitre V : Mthodologie et rsultats empiriques de la recherche
chantillon de ltude : 38 marchs financiers mergents Mthode danalyse statistique : comparaison de moyennes
et estimation dun modle en donnes de panel
La tendance des IAS/IFRS servir en premier lieu les utilisateurs des marchs financiers
La prsence dun march financier reprsente la principale variable qui explique la stratgie dadoption des normes de lIASB par les pays en dveloppement (Zeghal et Mhedhbi, 2006)
Lexistence dun fondement thorique solide tablissant le lien entre linformation financire et le fonctionnement dun march financier
Analyser les effets de ladoption des IAS/IFRS sur les marchs financiers
Reconnaissance internationale des travaux de lIASB
Le besoin de raliser des tudes empiriques portant sur les consquences de ladoption des
IAS/IFRS pour les pays en dveloppement
Accord entre lOICV et lIASB
Application des IAS/IFRS dans lUnion Europenne
Utilisation des IAS/IFRS par les firmes multinationales
Adoption des IAS/IFRS par les pays en dveloppement
Tester les hypothses de la recherche sur le plan empirique
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CHAPITRE I:
LA NORMALISATON COMPTABLE
INTERNATIONALE
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Introduction
Fournir une information financire utile la prise de dcision conomique est lobjectif
fondamental de la comptabilit financire. Afin datteindre cette finalit, la plupart des pays se
sont dots dun ensemble de normes comptables servant ltablissement des rapports financiers.
Au fait, lutilisation dun langage comptable commun par toutes les entreprises oprant dans un
mme espace conomique permet aux diffrents utilisateurs de suivre les activits de ces entits
dans le temps et dans lespace et de prendre, par consquent, des dcisions raisonnes.
labores dans des contextes nationaux, les normes comptables et les mcanismes qui les
tablissent sont influencs gnralement par les conditions conomiques, sociales, juridiques et
culturelles propres chaque tat et sont ainsi diffrents dun pays lautre. Dans certains tats,
notamment ceux anglo-saxons, la comptabilit, rglemente par des professionnels comptables,
soriente essentiellement vers les investisseurs. Dans dautres, loppos, notamment les pays
faisant partie du modle continental, les rgles comptables sont labores par les pouvoirs publics
et linformation financire sadresse principalement aux cranciers. Ces diffrences ont fait que
les firmes dorigines diffrentes appliquent des rgles et des pratiques divergentes pour la
prparation et la communication de leurs tats financiers et ont rendu difficile, dans un contexte
caractris par le dveloppement des changes internationaux, la comparaison de la performance
des entreprises dans le temps et dans lespace lchelle mondiale.
Les dernires annes ont t marques, entre autres, par linternationalisation des
conomies, lacclration considrable des mouvements internationaux de capitaux, lapparition
et la multiplication des entreprises multinationales et le dveloppement des oprations
dinvestissement lchelle internationale. Gns par la diversit des rgles et des pratiques
comptables entre les pays, ces vnements ont rendu ncessaire la recherche des solutions
permettant aux investisseurs de comprendre et de comparer les rapports comptables des entits
dorigines diffrentes et de diversifier, gographiquement, leur placement, et aux entreprises
multinationales de rduire les cots dtablissement des rapprochements exigs par les diffrentes
instances nationales.
Motive par le besoin daccrotre la comparabilit et la transparence de linformation
comptable lchelle internationale, la communaut comptable et financire a avanc et appliqu
diffrents remdes dont lharmonisation des normes et des pratiques comptables lchelle
11
internationale. Ayant pour but de btir un ensemble de normes comptables qui puissent tre
appliques dans le monde entier, cette solution tait au cur des proccupations de plusieurs
acteurs dont essentiellement lInternational Accounting Standards Committee (IASC), devenu en
2001 lInternational Accounting Standards Board (IASB). Fond en 1973 par les organisations
professionnelles de lAllemagne fdrale, de lAustralie, du Canada, des tats-Unis, de la
France, du Japon, du Mexique, des Pays-Bas ainsi que de la Grande-Bretagne, cet organisme a
contribu dans le processus dharmonisation comptable internationale surtout par la prparation
et la publication des normes comptables internationales (IAS/IFRS) qui sont devenues une sorte
de rfrence dans le monde entier et qui ont reu (et reoivent encore) lappui de plusieurs
organismes internationaux.
Lobjectif primordial de ce premier chapitre est dexpliquer le passage de la normalisation
comptable nationale vers celle internationale. Pour ce faire, nous analyserons dabord le concept
de la normalisation comptable (Section I), nous tudierons ensuite la question relative la
diversit des pratiques comptables lchelle internationale (Section II) et nous terminerons,
enfin, par la prsentation de lIASB et de ses principales ralisations (Section III).
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Section I : LE CONCEPT DE LA NORMALISATION
COMPTABLE
Dans cette section, aprs avoir prsent la dfinition dune norme comptable (1), nous
traitons des principaux objectifs de la normalisation comptable (2) et des diffrentes approches
utilises pour la formulation des normes comptables (3). Nous terminons par lanalyse de la
relation entre le dveloppement des systmes comptables et lenvironnement (4).
1. Dfinition dune norme comptable :
Formules gnralement sur la base des postulats2 et des principes comptables3, les normes comptables constituent des rgles prcises sur la manire denregistrer, de classifier et de
prsenter linformation financire4. Leur application permet aux prparateurs des tats financiers
de bien accomplir leur tche et aux diffrents utilisateurs, surtout ceux externes, davoir
lassurance que linformation financire communique est pertinente et fiable.
En principe, toute norme comptable doit renfermer les trois principales composantes
suivantes5 ;
- une description dtaille de la difficult rsoudre ;
- une exposition, fonde sur une thorie, des solutions susceptibles de rsoudre le
problme ; et
- une prsentation argumente de la solution adopte.
2. Les objectifs de la normalisation comptable : tant donn son rle crucial dans la prise de dcision, la comptabilit a commenc se normaliser pendant la premire partie de XXme sicle6. Au cours de cette priode, lobjectif
principal du processus de normalisation, travers la mise en place des normes comptables, tait
2 Les postulats sont des hypothses fondamentales qui dcoulent habituellement des observations ralises sur lenvironnement conomique, juridique, politique et social, sur les besoins des utilisateurs et sur les objectifs de linformation financire. 3 Les principes comptables sont des guides pour ltablissement des normes comptables. Ils ont un ordre de gnralit moins grand que les postulats comptables. 4 Lauzon, L. (1985). Le cadre thorique de la comptabilit financire. Gatan Morin diteur, Qubec, Canada. 5 Belkaoui, A. (1984). Thorie comptable. 2me dition, Presses de lUniversit du Qubec, Qubec. Page 57. 6 Obert, R. (2003). Pratiques des normes IAS/IFRS. Dunod, Paris, page 1.
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la production des informations homognes sur lactivit des entreprises afin de permettre aux
tats dexercer sur elles un contrle conomique et fiscal.
Avec le dveloppement de lactivit des entreprises et limportance de la contribution
des initiatives prives dans les circuits conomiques, la formulation des normes comptables a
pour finalit, en plus daider les comptables nationaux dans llaboration des tats de synthses
macro-conomiques, de reprsenter fidlement lensemble des vnements conomiques
rencontrs par une entreprise lors de lexercice de ses activits. Une telle reprsentation permet
aux diffrents utilisateurs externes de linformation financire de suivre lactivit dune entit
dans le temps et dans lespace et galement aux responsables des firmes de raliser
systmatiquement les diffrentes analyses utiles la prise de dcision.
Cependant, pour que les objectifs prcits soient atteints avec succs et pour assurer la
production des normes comptables adquates, il est intressant voire indispensable que les
normalisateurs respectent, lors de laccomplissement de leur mission, certains principes
fondamentaux7, dont notamment :
Les normes comptables formules doivent tre cohrentes avec le cadre conceptuel et les
objectifs de linformation financire ;
La tche de normalisation doit tre assure par un organe qui a suffisamment dautorit et
dindpendance pour viter toute influence politique ;
Linstance de normalisation doit disposer des comptences et des ressources ncessaires
la production des normes comptables de qualit ;
Lorgane de normalisation doit tre attach la dfense de lintrt public ; et
Ltablissement des normes comptables doit suivre une procdure bien arrte dans le
souci de garantir la participation et la contribution de toutes les parties intresses.
3. Les approches de normalisation comptable :
La tche de ltablissement des normes comptables peut tre assure par le secteur
public (3.1), par le secteur priv (3.2) ou aussi par le march libre (3.3)8.
7 Skinner, Ross M. et Milbun, J. Alex. (2003). Normes comptables : analyses et concepts. ditions du Renouveau Pdagogique Inc, Canada. Pages 800 et 801. 8Belkaoui, A. (1984). Thorie comptable. 2me dition, Presses de lUniversit du Qubec, Qubec. Page 57.
14
3.1. La formulation des normes comptables par le secteur public :
Au sein de cette approche, les normes comptables sont tablies par ltat ou par un
organisme tatique. Ceux qui sont pour ce modle de normalisation comptable fondent leur
position sur plusieurs arguments dont les suivants :
Ltablissement des normes comptables par le secteur public est justifi par le
besoin de protger lintrt public ;
La rglementation des normes comptables par le secteur public est ncessaire pour
la cration dun niveau de divulgation indispensable la prise de dcision ;
Le secteur public jouit du pouvoir et de lautorit indispensables pour limposition
des normes formules ;
Les organismes publics sont indpendants des auteurs des tats financiers ; et
Les organismes publics peuvent faire appel des personnes de formations varies
pour la formulation des normes comptables.
En revanche, ceux qui sont contre ltablissement des normes comptables par le secteur
public avancent, entre autres, les arguments suivants :
Lorgane public peut ne pas tre sensible aux cots des exigences quil impose aux
entreprises en matire de prparation et de prsentation de linformation financire ;
Lorgane public peut tre sensible aux pressions politiques et risque, par consquent,
de formuler des normes comptables orientes vers des fins autres que la satisfaction des besoins
des diffrents utilisateurs de linformation financire ;
La normalisation comptable par le secteur public, par la mise en place de rgles
rigides, peut limiter lexercice des jugements professionnels ;
La rglementation par le secteur public peut dmotiver toute recherche et
exprimentation en comptabilit ; et
Vu que la normalisation comptable ne constitue pas une priorit de ltat, les
normes comptables peuvent ne pas tre en harmonie avec lvolution de lenvironnement.
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3.2. La formulation des normes comptables par le secteur priv :
Ltablissement des normes comptables par le secteur priv est fond sur lhypothse
que lintrt public est mieux servi par le secteur priv9. Le recours cette approche prsente des
avantages dont :
Les organismes privs regroupent, gnralement, des gens qui ont des
connaissances techniques indispensables la formulation des normes comptables ;
Les organes privs sont trs sensibles aux besoins des diffrents utilisateurs ; et
Les organismes privs ont une trs bonne connaissance de lenvironnement
conomique.
galement, ce modle recle des imperfections dont notamment :
Le secteur priv na pas le pouvoir et lautorit pour imposer ses normes ;
Les organes privs souffrent du manque de connaissance thorique ; et
Les travaux des organismes privs sont influencs par les grands cabinets dexperts-
comptables et les grandes entreprises.
3.3. La formulation des normes comptables par le march priv : Au sein de cette approche10, aucun organe nest mandat pour ltablissement des
normes comptables. Celles-ci voluent selon les conditions du march comme tous les autres
biens et services. Sur la base de la demande manant des utilisateurs et de loffre des producteurs
de linformation financire, le march dtermine les types dinformations communiquer et les
normes comptables appliquer pour produire lesdites informations.
Ce modle prsente certains avantages :
Les entreprises ont la libert de choisir les mthodes comptables les mieux adaptes
leurs situations ;
Lorsque lenvironnement volue, les entreprises ont la possibilit dexprimenter
des nouvelles mthodes comptables ; et
Les entreprises ont tendance divulguer des informations suffisantes pour satisfaire
les besoins des diffrents utilisateurs.
9 Idem, page 73. 10 Cette approche a exist, par exemple, aux tats-Unis avant les annes 1930 (Skinner et Milburn, 2003).
16
Cependant, des critiques ont t adresses lgard de cette approche :
Les pratiques comptables peuvent tre diffrentes dune entit lautre, ce qui peut
entraner, par consquent, un problme au niveau de la comparabilit des rapports publis ;
Les dirigeants dentreprises exercent un monopole sur linformation financire ; et
En laissant la responsabilit exclusivement aux prparateurs dtats financiers, il y a
un risque que linformation financire ne sera jamais communique de faon optimale.
4. Normes comptables et facteurs environnementaux :
Les objectifs de la comptabilit financire et les processus suivis pour la mise en place des
normes comptables diffrent, gnralement, dun pays lautre. Ces diffrences sont dues,
essentiellement, la relation troite entre la comptabilit financire et lenvironnement avec
toutes ses composantes. Chaque pays dfinit, compte tenu de ses conditions
environnementales, une srie de normes comptables.
La littrature comptable (Alhashim et Arpan, 199211; Cooke et Wallace, 199012; Doupnik
et Perera, 200713; Doupnik et Salter, 199514; Gray et Radebaugh, 199715; Gernon et al.,
199716; Iqbal, 200217; Nobes, 199818; et Nobes et Parker, 200619) nous a propos plusieurs
facteurs environnementaux qui peuvent expliquer le choix dun systme comptable20 par un
pays dont notamment : le systme lgal (4.1); la fiscalit (4.2); linflation (4.3); le niveau du
dveloppement conomique (4.4); le mode de financement des entreprises (4.5) et la culture
(4.6).
11 Alhashim, D. et Arpan, J. (1992). International dimensions of accounting. 3me dition, Pws-Kent Publishing Company, Boston. 12 Cooke, T. et Wallace, O. (1990). Financial disclosure regulation and its environment: a review and further analysis. Journal of Accounting and Public Policy, 9, 79-110. 13 Doupnik, T. et Perera, H. (2007). International accounting. McGraw-Hill/Irwin companies. 14Doupnik, T. et Salter, S. (1995). External environment, culture, and accounting practice: a preliminary test of a general model of international accounting development. The International Journal of Accounting, 30, 189-207. 15 Gray, S. et Radebaugh, L. (1997). International accounting and multinational enterprises. 4me dition, John Wiley & Sons, Inc. 16 Gernon, H., Meek, G. et Mueller, G. (1997). Accounting: an international perspective. 4me dition, Irwin. 17 Iqbal, Z. (2002). International accounting: a global perspective. 2me dition, South-Western. 18 Nobes, C. (1998). Towards a general model of the reasons for international differences in financial reporting. Abacus, 34 (2), 162-187. 19 Nobes, C. et Parker, R. (2006). Comparative international accounting. 9me dition, Prentice Hall. 20 Selon Nobes (1998), un systme comptable reprsente lensemble de normes et de pratiques comptables appliques par les entreprises dans un pays.
17
4.1. Le systme lgal :
Sur le plan juridique, il a t tabli quil existe une distinction entre les pays de droit
codifi et ceux de droit coutumier (pays de common law). Dans les tats de droit crit, comme
la France et lAllemagne, les rgles comptables, incluses gnralement dans des lois, sont trs
dtailles et laissent, par consquent, peu de place au jugement professionnel des comptables.
En revanche, dans les pays de common law, comme le Canada, les tats-Unis et la Grande-
Bretagne, les normes comptables, labores gnralement par des organismes professionnels,
se limitent noncer les principes gnraux. Les comptables ont, ainsi, plus de latitude pour
exercer leur jugement professionnel.
4.2. La fiscalit :
Dans les pays o il existe un lien troit entre la comptabilit financire et la fiscalit, les
entreprises ont tendance aligner leur comptabilit sur les rgles fiscales, puisque uniquement
les charges comptabilises sont fiscalement dductibles. Cependant, dans les pays o le
rsultat fiscal est dtermin indpendamment du rsultat comptable, ladoption des rgles
comptables est guide par des considrations autres que fiscales.
4.3. Linflation :
Le niveau dinflation dans un pays affecte essentiellement les mthodes dvaluation. Les
pays qui enregistrent des taux dinflation levs, comme ceux de lAmrique du Sud, ont
tendance adopter des mthodes de rvaluation dactifs. A linverse, lvaluation au cot
historique est la rgle dans les pays o linflation est faible.
4.4. Le niveau du dveloppement conomique :
Selon Adhikari et Tondkar (1992)21, le niveau du dveloppement conomique a un effet
significatif sur le dveloppement des systmes comptables. Les pays qui enregistrent un
niveau de croissance conomique lev ont, gnralement, des entreprises et des activits
conomiques dont la taille et la complexit ncessitent un systme comptable sophistiqu 21 Adhikari, A. et Tondkar, R. (1992). Environmental factors influencing accounting disclosure requirements of global stocks exchanges. Journal of International Financial Management and Accounting, 4 (2), 75-103.
18
permettant de rpondre aux besoins des diffrents prparateurs et utilisateurs des tats
financiers.
Doupnik et Salter (1995)22 ont test empiriquement la relation entre le niveau du
dveloppement conomique et les systmes comptables et ont fini par trouver que les rgles et
les principes comptables sont fortement dpendants de la situation conomique dun pays.
4.5. Le mode de financement des entreprises :
Dans les pays o le financement des entreprises est assur essentiellement par le march
de capitaux, les investisseurs, ayant droit une information financire de qualit, exercent une
influence notable sur le dveloppement des systmes comptables. Ainsi, lors de
ltablissement des normes comptables, laccent est mis sur la mise en place des rgles
comptables permettant de traduire le plus fidlement possible la situation conomique de
lentreprise. Cependant, dans les pays dont le financement par emprunt reprsente la principale
source de fonds orients linvestissement, limportance est accorde la protection des
cranciers et au principe de la prudence.
4.6. La culture :
Plusieurs auteurs ont tent de traiter de leffet de la culture sur le dveloppement des
systmes comptables nationaux, en sappuyant essentiellement sur les travaux dHofstede
(1980)23, spcialiste des cultures. Ce dernier, en recueillant des donnes auprs des employs
dune multinationale amricaine (IBM) oprant dans plus de 50 pays, a identifi les quatre
dimensions culturelles suivantes :
22Doupnik, T. et Salter, S. (1995). External environment, culture, and accounting practice: a preliminary test of a general model of international accounting development. The International Journal of Accounting, 30, 189-207. 23 Hofstede, G. (1980). Cultures consequences. Beverly Hills: Sage Publications.
19
Lindividualisme/Collectivisme : Cette variable traduit le degr dindpendance entre
les membres dune socit. Dans une culture individualiste, lindividu doit compter
essentiellement sur lui-mme.
Distance au pouvoir : Ce facteur renseigne sur le niveau dacceptation des ingalits
du pouvoir. Les individus dune socit dont la distance au pouvoir est importante,
acceptent plus aisment des ingalits du pouvoir imposes et non justifies.
Aversion pour lincertitude : Cette dimension mesure le niveau daversion pour
lincertitude et le risque dune socit.
Masculinit/fminit : Cette variable traduit le degr de masculinit. Dans une
socit, dont le niveau de masculinit est faible, laccent est mis, entre autres, sur les
relations sociales et la qualit de vie.
Gray (1988)24 a essay dexaminer la correspondance entre les valeurs culturelles
identifies par Hofstede (1980)25 et les systmes comptables tudis selon les quatre dimensions
suivantes :
Professionnalisme/contrle lgal : Cette dimension distingue les pays qui favorisent
le jugement des professionnels comptables de ceux qui sont pour la conformit aux
dispositions lgales.
Uniformit/flexibilit : Appliquer les mmes mthodes comptables toutes les
firmes ou laisser une grande flexibilit pour tenir compte des circonstances particulires.
Prudence/optimisme : Cette variable diffrencie les pays qui prfrent une
valuation prudente de ceux qui privilgient une pratique optimiste et librale.
Secret/transparence : Communication limite de linformation ou bien tendance
une large publication et une diffusion transparente.
24 Gray, S. J. (1988). Towards a theory of cultural influence on the development of accounting systems internationally. Abacus, 24, 1-15. 25 Hofstede, G. (1980). Cultures consequences. Beverly Hills: Sage Publications.
20
Aprs avoir reli ces dimensions comptables aux diffrentes valeurs culturelles, il a pu
formuler les quatre hypothses non testes suivantes :
i- Plus laversion pour lincertitude et la distance au pouvoir sont faibles et plus le niveau
dindividualisme est lev, plus les systmes comptables sont tablis par des
professionnels.
ii- Plus le niveau dindividualisme est faible et plus la distance au pouvoir et laversion pour
lincertitude sont leves, plus la comptabilit financire est uniforme.
iii- Plus lindividualisme et la masculinit sont faibles et plus laversion pour lincertitude est
leve, plus les pratiques comptables sont marques par une forte prudence.
iv- Plus lindividualisme et la masculinit sont faibles et plus laversion pour lincertitude et
la distance au pouvoir sont importantes, plus linformation comptable est
confidentielle.
Mode de financement
des firmes
Inflation Systme lgal Culture Niveau du dveloppement
conomique
Figure 1.1 : Effet de lenvironnement sur les systmes comptables
La littrature comptable a avanc un ensemble de facteurs environnementaux pour
expliquer le dveloppement et lvolution des systmes comptables nationaux. Ces derniers
Systmes comptables
21
subissent des impacts varis de chacun de ces facteurs, mais ils sont, essentiellement, les produits
de linteraction entre ces diffrentes variables26.
Fournir des informations utiles la prise de dcision est la tche capitale attribue la
comptabilit financire. Cependant, pour que cette mission soit ralise avec succs, la
comptabilit doit tre normalise. Aujourdhui, la plupart des tats se sont dots des normes
comptables qui sont influences gnralement par lenvironnement dans lequel elles ont t
dveloppes. Au fait, les rgles et pratiques en usage dans un pays sont orientes, en grande
partie, par ses conditions conomiques, sociales, juridiques et culturelles. Cette situation, en
donnant naissance des pratiques comptables divergentes lchelle internationale, cre des
difficults (dans un contexte caractris par la mondialisation croissante des conomies et la
globalisation accrue des marchs de capitaux) aux investisseurs, aux entreprises et aux
gouvernements.
Section II : LA DISPARIT DES PRATIQUES COMPTABLES
A LCHELLE INTERNATIONALE La varit des approches employes et des objectifs viss par les normalisateurs
comptables nationaux a abouti lapplication des pratiques comptables divergentes lchelle
internationale. Aprs avoir expos des exemples de pratiques marquant la disparit comptable
lchelle internationale (1), nous examinons quelques tudes qui ont tent dvaluer les
consquences de cette disparit (2). Les diffrentes initiatives qui ont t envisages pour limiter
les rpercussions ngatives de la diversit comptable au niveau international ont fait lobjet de la
dernire partie de cette section (3).
26 Doupnik, T. et Salter, S. (1995). External environment, culture, and accounting practice: a preliminary test of a general model of international accounting development. The International Journal of Accounting, 30, 189-207.
22
1. Exemples des disparits comptables lchelle internationale : Lanalyse des pratiques comptables lchelle internationale a soulign lexistence de
plusieurs diffrences se rattachant notamment : au traitement des frais de recherche et de
dveloppement (1.1), au traitement comptable des stocks (1.2), au traitement comptable des
contrats de construction (1.3), au traitement comptable du crdit bail (1.4), au traitement des
immobilisations corporelles (1.5) et aux lments dtats financiers (1.6).
1.1. Le traitement comptable des frais de recherche et de dveloppement :
Lactivit de recherche correspond aux travaux originaux accomplis dans lobjectif
dacqurir une comprhension et des connaissances scientifiques ou techniques nouvelles27.
Lapplication des rsultats trouvs, durant la phase de recherche, la production de
matriaux, de procds, de services nouveaux ou substantiellement amliors, avant le
commencement dune production commercialisable ou dune utilisation en interne, reprsente
lactivit de dveloppement28.
Le traitement comptable des frais lis ces deux activits a fait lobjet de plusieurs
divergences lchelle internationale. A titre indicatif, comme le montre le tableau (1.1), il est
possible dinscrire lactif les frais de dveloppement en France et au Japon. En revanche, cette
possibilit est interdite en Allemagne et aux tats-Unis.
Tableau 1.1 : La comptabilisation des frais de recherche et de dveloppement (Source : Raffournier et al., 199729)
Pays Comptabilisation des frais de recherche et de dveloppement Allemagne - Linscription lactif des frais de recherche et de dveloppement est interdite. Australie - Activation possible des frais de recherche appliqus et de dveloppement sous
certaines conditions. tats-Unis - Linscription lactif des frais de recherche et de dveloppement est interdite. France - Activation possible des frais de dveloppement sous certaines conditions. Japon - Activation possible des frais de recherche et de dveloppement. Royaume-Uni - Activation possible des frais de dveloppement sous certaines conditions. Tunisie30 - Activation possible des dpenses de dveloppement sous certaines conditions.
27 Raffournier, B. (2005). Les normes comptables internationales (IFRS/IAS). 2me dition, Economica, Paris. Page 386. 28 Idem, page 387. 29 Raffournier, B., Haller, A. et Walton, P. (1997). Comptabilit internationale. dition Vuibert, Paris. Pages 409 et 410. 30 Linformation relative la position tunisienne a t collecte auprs du systme comptable tunisien. Page 179.
23
1.2. Le traitement comptable des stocks :
Les stocks sont dfinis comme des lments dactifs dtenus par une entreprise pour
tre vendus dans le cadre de lactivit normale ou aussi pour tre consomms au cours du
processus de production ou pendant la prestation de services31.
Pour traiter des stocks au niveau des tats financiers, des alternatives multiples sont la
disposition des comptables. Ces derniers disposent de plusieurs mthodes de valorisation (cot
moyen pondr (CMP), premier entr premier sorti [first in, first out (FIFO)], dernier entr
premier sorti [last in, first out (LIFO)]etc.), dvaluation (cot historique, valeur de march,
valeur ralisable nette32etc.), et mme de prsentation.
Tableau 1.2 : La comptabilisation des stocks (Source : Raffournier et al., 199733)
Pays Comptabilisation des stocks Allemagne - Mthodes de valorisation autorises : FIFO, LIFO, CMP et cot standard.
- valuation au minimum du cot et de la valeur de march. tats-Unis - Mthodes de valorisation autorises : FIFO, LIFO et CMP.
- valuation la valeur ralisable nette ou au minimum du cot et de la valeur de march. France - Mthodes de valorisation non-autorises : LIFO (autorise uniquement dans les comptes
consolids). - valuation au minimum du cot et de la valeur de march.
Japon - Mthodes de valorisation autorises : FIFO, LIFO et CMP. - valuation au cot.
Tunisie34 -Mthodes de valorisation permises : CMP et FIFO. - valuation au minimum du cot historique et de la valeur de ralisation nette.
1.3. Le traitement comptable des contrats de construction :
Le contrat de construction est une convention qui a pour objet la construction dun bien
ou dun ensemble de biens troitement lis ou interdpendants en ce qui concerne leur
conception, leur technologie, leur fonction ou leur utilisation finale35.
31 Raffournier, B. (2005). Les normes comptables internationales (IFRS/IAS). 2me dition, Economica, Paris. Page 46. 32 La valeur ralisable nette (ou la valeur de ralisation nette) est le prix estim ralisable dans des conditions normales de vente, diminu des cots ncessaires pour achever le bien et raliser la vente. 33 Raffournier, B., Haller, A. et Walton, P. (1997). Comptabilit internationale. dition Vuibert, Paris. Pages 417 et 418. 34 PricewaterhouseCoopers. (2004). Similarits & divergences : Une comparaison entre les normes comptables internationales (IFRS), amricaines (US-GAAP) et tunisiennes (NCT). Corporate Reporting Group, Pricewaterhouse, Tunis Office. Page 74.
24
Lune des spcificits de ce type de contrat est quil se ralise gnralement sur
plusieurs exercices. Ds lors, il se pose le problme de la rpartition des charges et des produits
sur les diffrentes priodes concernes. Pour traiter de cette difficult, diverses mthodes sont la
disposition des comptables dont la mthode du pourcentage davancement36 et celle de
terminaison des travaux37.
En Australie et aux tats-Unis, les prparateurs des tats financiers sont tenus
dappliquer la mthode du pourcentage davancement si certaines conditions sont runies. En
revanche, cest la mthode de terminaison des travaux qui est exige en Allemagne. De plus, dans
certains pays comme la Belgique et le Japon, les comptables se dotent dune libert lors du choix
de la mthode appliquer pour la comptabilisation des contrats de construction.
Tableau 1.3 : La comptabilisation du contrat de construction (Source : Raffournier et al., 199738)
Pays Comptabilisation du contrat de construction Allemagne - Mthode de terminaison de travaux obligatoire Australie - Mthode de pourcentage davancement exige sous certaines conditions. Mthode de
terminaison de travaux si non. Belgique - Libert de choix entre les deux mthodes. tats-Unis - Mme traitement que celui en Australie. Italie - Mthode de pourcentage davancement recommande sous certaines conditions.
Utilisation possible de lautre mthode. Japon - Libert du choix entre les deux mthodes. Tunisie39 - Mthode de pourcentage davancement exige sous certaines conditions. Si non,
constater les revenus concurrence des cots comptabiliss et jugs rcuprables.
1.4. Le traitement comptable du crdit bail :
Le contrat de location financement est une convention par laquelle un bailleur cde un
locataire (preneur) le droit dutiliser un bien contre une srie de versements40. Ce type
35Raffournier, B. (2005). Les normes comptables internationales (IFRS/IAS). 2me dition, Economica, Paris. Page 97. 36 Cette premire mthode rpartit le bnfice du contrat sur la priode de construction au prorata des travaux effectus. 37 Cette deuxime mthode enregistre la totalit du bnfice du contrat lorsque celui-ci est achev. 38 Raffournier, B., Haller, A. et Walton, P. (1997). Comptabilit internationale. dition Vuibert, Paris. Pages 417 et 418. 39 PricewaterhouseCoopers. (2004). Similarits & divergences : Une comparaison entre les normes comptables internationales (IFRS), amricaines (US-GAAP) et tunisiennes (NCT). Corporate Reporting Group, Pricewaterhouse, Tunis Office. Page 52. 40 Raffournier, B. (2005). Les normes comptables internationales (IFRS/IAS). 2me dition, Economica, Paris. Page 149.
25
dopration reprsente un exemple qui illustre une certaine discordance entre la ralit
conomique et celle juridique. En effet, malgr que le bien appartienne lgalement au bailleur, le
locataire bnficie des avantages et subit les risques inhrents la proprit de ce bien. Ainsi, ce
dernier doit tre comptabilis parmi les actifs du bailleur selon les tenants de la vision juridique
de la comptabilit et parmi ceux du locataire selon les partisans de la conception conomique.
LAustralie, le Japon et les tats-Unis, constituent des exemples de pays qui ont retenu
lapproche conomique. En ce sens, les locataires, dans ces pays, sont tenus dinscrire les biens
acquis travers un contrat de location financement parmi leurs actifs. Cependant, en optant pour
lapproche juridique, certains pays dont lHongrie, naccordent pas la possibilit aux preneurs de
figurer les biens acquis en leasing au bilan.
Tableau 1.4 : La comptabilisation du crdit bail (Source : Raffournier et al., 199741)
Pays Comptabilisation du crdit bail Australie - Chez le locataire : comptabilisation de lactif et de la dette au bilan.
- Chez le bailleur : comptabilisation dune crance. tats-Unis - Mme traitement que lAustralie. Hongrie - Les biens acquis en leasing ne sont pas comptabiliss au bilan du locataire. Japon - Mme traitement que lAustralie. Tunisie42 - Absence de norme traitant des contrats de location financement.
1.5. Le traitement comptable des immobilisations corporelles :
Les immobilisations corporelles sont dfinies comme des lments dactifs qui,
exploites pendant plus dun exercice comptable, sont dtenues pour tre utilises dans la
production de biens ou la fourniture de services, pour tre loues des tiers ou aussi pour tre
exploites dans des fins administratives43.
Ltude de leur traitement comptable de par le monde a mis en exergue lexistence de
plusieurs diffrences dont celles relatives leur rvaluation et leur amortissement.
41 Raffournier, B., Haller, A. et Walton, P. (1997). Comptabilit internationale. dition Vuibert, Paris. Pages 418 et 419. 42 PricewaterhouseCoopers. (2004). Similarits & divergences : Une comparaison entre les normes comptables internationales (IFRS), amricaines (US-GAAP) et tunisiennes (NCT). Corporate Reporting Group, Pricewaterhouse, Tunis Office. Page 87. 43 Raffournier, B. (2005). Les normes comptables internationales (IFRS/IAS). 2me dition, Economica, Paris. Page 131.
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Tableau 1.5 : La comptabilisation des immobilisations corporelles (Source : Raffournier et al., 199744)
Pays Comptabilisation des immobilisations corporelles Belgique - La rvaluation des actifs est autorise sous certaines conditions.
- Influence forte de la fiscalit sur le choix des dures damortissement. - Utilisation frquente de la mthode damortissement linaire et de celle dgressive.
tats-Unis - La rvaluation des actifs est interdite - Les dures damortissement sont indpendantes des considrations fiscales. - Plusieurs mthodes damortissement sont admises.
France - La rvaluation des actifs est possible. - Influence notable de la fiscalit sur les choix des dures damortissement surtout au niveau des comptes individuels.
Italie - La rvaluation des actifs est possible uniquement en cas de loi spciale. - Les dures damortissement sont fortement influences par des considrations fiscales dans les comptes individuels. - La mthode damortissement linaire est couramment pratique.
Royaume-Uni
- La rvaluation des actifs est autorise. - Les dures damortissement ne sont pas influences par des considrations fiscales. - Plusieurs mthodes damortissement sont admises.
Tunisie45 - La rvaluation des actifs nest pas permise. - Plusieurs mthodes damortissement sont admises.
1.6. Les lments des tats financiers :
Les diffrences comptables entre les pays ne se limitent pas uniquement aux rgles de
mesure et de comptabilisation de certains lments, mais, elles stendent aussi aux supports de
divulgation de linformation financire. Ces derniers varient considrablement dun pays lautre
au niveau de leur contenu et de leur forme de prsentation.
Le tableau (1.6) expose les documents exigs des tats financiers en Allemagne, en
Australie, en Espagne, aux tats-Unis, en France et en Tunisie.
44 Raffournier, B., Haller, A. et Walton, P. (1997). Comptabilit internationale. dition Vuibert, Paris. Pages 413 et 414. 45 PricewaterhouseCoopers. (2004). Similarits & divergences : Une comparaison entre les normes comptables internationales (IFRS), amricaines (US-GAAP) et tunisiennes (NCT). Corporate Reporting Group, Pricewaterhouse, Tunis Office. Page 65.
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Tableau 1.6 : Moyens de communication de linformation financire (Source : Raffournier et al., 199746)
Pays Moyens de communication de linformation financire Allemagne - Bilan, compte de rsultat et annexes. Tableau de financement non obligatoire. Australie - Bilan, compte de rsultat, tableau de flux de trsorerie et annexes. Espagne - Bilan, compte de rsultat et annexes qui doivent comprendre entre autres un tableau de
variation de fonds de roulement. tats-Unis - Bilan, compte de rsultat, tableau de flux de trsorerie, tableau de variation de capitaux
propres et annexes. France - Bilan, compte de rsultat, tableau de financement obligatoire pour les socits dune
certaine taille et annexes. Tunisie47 - Bilan, tat de rsultat, tableau de flux de trsorerie et annexes.
A travers lapplication des normes et rgles comptables identiques par toutes les
entreprises, les normalisateurs nationaux ont pu limiter les incidences de la diversit des pratiques
comptables et amliorer la comparabilit et la qualit de linformation financire produite
lchelle nationale. Cependant, en optant pour des approches varies de normalisation et en visant
des buts diffrents, ces acteurs ont cr un problme de comparabilit de linformation financire
au niveau international en adoptant des pratiques comptables diffrentes.
Dans cette partie, nous avons fourni concrtement des exemples qui marquent la
multiplicit des traitements comptables dfinis par les pays et qui soulignent par consquent,
lexistence des problmes comptables lchelle internationale qui ncessitent dtre valus et
tudis.
2. Consquences de la diversit comptable internationale :
Afin dvaluer les consquences de la diversit des pratiques comptables
internationales, plusieurs travaux de recherche ont t mens lchelle internationale.
Dans le contexte europen, Gray (1980)48 a tent dexaminer limpact de la diversit des
pratiques comptables sur le rsultat des entreprises en utilisant lapproche applique par
46 Raffournier, B., Haller, A. et Walton, P. (1997). Comptabilit internationale. dition Vuibert, Paris. Pages 407et 408. 47 Linformation relative la position tunisienne a t collecte auprs du systme comptable tunisien. Page 21. 48 Gray, S. (1980). The impact of international accounting differences from security-analysis perspective: some european evidence. Journal of Accounting research, 18, 64-76.
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lEuropean Federation Of Financial Analysts Societies (EFFAS). Celle-ci permet de dterminer,
partir des tats financiers et aprs certains ajustements, un rsultat permettant de comparer la
performance des firmes dorigine diffrente.
A partir du rsultat publi (RP) et de celui retrait (RR), Gray (1980)49 a dfini un indice
I = 1-
R
PR
RRR , qui mesure le degr de prudence (conservatisme) au niveau de la dtermination
du rsultat dune entreprise50. En analysant les bnfices divulgus par 15 entreprises franaises,
28 allemandes et 29 britanniques sur la priode allant de 1972 1975, Gray (1980)51 a pu
conclure que le niveau de conservatisme est relativement plus lev en France et en Allemagne
quen Grande-Bretagne.
Dans le mme contexte et afin dvaluer leffet de la diversit comptable sur la
comparabilit des donnes comptables, Joos et Lang (1994)52, en calculant les ratios rsultat
ordinaire/capitaux propres, rsultat ordinaire/capitalisation boursire et capitaux
propres/capitalisation boursire de 172 firmes allemandes, 228 franaises et 675 britanniques, ont
conclu que ces trois indicateurs sont plus levs en Grande-Bretagne quen France et en
Allemagne. Les diffrences comptables peuvent, ainsi, fausser la comparaison de la performance
des entreprises de nationalits diffrentes, base sur les ratios.
Epps et Oh (1997)53 ont essay de comparer le contenu informatif du rsultat des
entreprises dorigine diffrente. En tudiant lassociation entre le cours boursier et le rsultat
comptable dun chantillon dentreprises amricaines et trangres, ils ont trouv que les tats
financiers des entreprises provenant des pays de type "macro54" ont un contenu informatif
infrieur ceux des socits amricaines. Toutefois, lassociation entre la valeur boursire et le
rsultat comptable est plus importante pour les socits issues des pays de type "micro" que pour
49 Idem. 50 Une valeur suprieure 1 signifie que le rsultat publi est plus lev que celui dtermin selon la mthode de lEFFAS. 51 Idem. 52 Joos, P. et Lang, M. (1994). The effects of accounting diversity: evidence from European Union. Journal of Accounting Research, 32 (supplment), 141-168. 53 Epps, R. et Oh, J. (1997). Market perception of foreign financial reports: differential earnings response coefficients between U. S. and Foreign GAAP. Journal of International Accounting, Auditing and Taxation, 6, 49-74. 54 Dans cette tude, les auteurs ont fait la distinction, sur la base des travaux prcdents, entre les pays de type "macro" o les principales rgles comptables sont incluses dans des lois et les pays de type "micro" o la tche de dveloppement des normes comptables est confie aux professionnels.
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les firmes amricaines. Ainsi, la perception du contenu informatif sur le march amricain est
affecte, entre autres, par lappartenance gographique dune entreprise.
Alford et al. (1993)55 ont analys le contenu informatif du rsultat comptable de
plusieurs entreprises dans leurs pays dorigine. A travers essentiellement ltude de la relation
entre le rendement boursier et les bnfices comptables, les auteurs ont trouv que les rsultats en
Australie, en France, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas, ont un contenu informatif plus lev
quaux tats-Unis. Cependant, les donnes comptables des entreprises amricaines se sont
avres plus informatives que celles des firmes allemandes, danoises, italiennes et sudoises. En
outre, les rsultats empiriques de cette tude nont pas dtect des diffrences significatives entre
les firmes oprant en Belgique, au Canada, au Japon, au Norvge et en Suisse et celles
amricaines.
Lensemble des travaux prcdents a t limit principalement ltude de leffet de la
disparit des rgles comptables lchelle internationale sur le rsultat comptable et les ratios de
rentabilit. Afin de dpasser cette faiblesse, Lanez et Callao (2000)56 ont effectu une recherche
visant tudier les rpercussions de la diversit comptable internationale sur les ratios de
liquidit, endettement, solvabilit et rentabilit et, par consquent, sur lanalyse et linterprtation
des tats financiers lchelle internationale. Sur la base dun chantillon compos de 30 grandes
entreprises espagnoles cotes, les auteurs ont calcul ces diffrents ratios selon les rgles
comptables espagnoles et les ont compars ceux dtermins selon les principes comptables
pratiqus dans dautres pays57 (Allemagne, tats-Unis, France, Grande-Bretagne et Japon). Leur
analyse statistique leur a permis de dgager que la situation des firmes en termes de liquidit,
solvabilit, endettement et rentabilit, dpend fortement des principes comptables appliqus pour
la production des tats financiers et de conclure que la diversit comptable internationale
reprsente un handicap majeur pour lanalyse et linterprtation de linformation financire au
niveau international et le dveloppement des oprations dinvestissement lchelle mondiale.
55 Alford, A., Jones, J. et Zmijewski, M. (1993). The relative informativeness of accounting disclosures in different countries. Journal of Accounting Research, 31 (supplment), 183-223. 56 Lanez, J. et Callao, S. (2000). The effects of accounting diversity on international financial analysis: empirical evidence. The International Journal of Accounting, 35 (1), 65-83. 57 Les auteurs ont retenu les pratiques comptables suivantes : traitement comptable des immobilisations corporelles, traitement comptable du goodwill ngatif, traitement comptable du goodwill positif, traitement comptable des frais de recherche, traitement comptable des frais de dveloppement, traitement comptable des gains de change, traitement comptable des pertes de change, calcul de limpt et valuation des immobilisations corporelles, comme base pour le retraitement des tats financiers.
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Les tudes cites prcdemment ainsi que dautres ont mis en exergue les rpercussions ngatives de la diversit comptable internationale sur plusieurs aspects dont notamment la mesure
de la performance des entreprises dorigines diffrentes, le contenu informatif des donnes
comptables et les activits danalyse financire conduite lchelle internationale.
Dans le souci de fournir une information financire comparable et utile pour les
diffrents intervenants, plusieurs initiatives ont t entreprises lchelle nationale, rgionale et
internationale58.
3. Remdes la diversit des pratiques comptables :
Afin dassurer la communication dune information financire comprhensible et
comparable lchelle internationale et de limiter les effets ngatifs causs par les diffrences
comptables internationales, plusieurs solutions ont t avances dont essentiellement : ladoption
des normes comptables locales (3.1), lharmonisation comptable rgionale (3.2) et
lharmonisation comptable internationale (3.3).
Figure 1.2 : Solutions la diversit comptable internationale
58 Adhikari, R., Hora, J. et Tondkar, R. (1997). International accounting standards in capital markets. Journal of International Accounting Auditing & Taxation, 6(2), 171-190.
Diversit comptable internationale
Adoption des normes locales (les normes
amricaines, par exemple)
Harmonisation comptable rgionale
Harmonisation comptable internationale
Adoption pure et simple
Adoption avec rconciliation
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3.1. Ladoption des normes locales :
Selon cette premire solution, les entreprises trangres sont tenues, soit dtablir des
tats financiers selon les rgles applicables dans le pays de financement : cest ladoption pure et
simple des normes locales59, soit deffectuer des rapprochements entre les rsultats et les capitaux
propres tablis selon les normes du pays dorigine et ceux obtenus en appliquant le rfrentiel du
pays du financement : cest ladoption avec rconciliation60.
3.1.1. Ladoption pure et simple des normes locales :
Dans le souci dassurer la protection des investisseurs, les autorits charges de la
surveillance des marchs financiers peuvent imposer aux entreprises trangres, qui souhaitent se
procurer le financement ncessaire leurs activits, de publier des tats financiers selon les rgles
applicables aux entreprises nationales.
Cette alternative a t adopte, par exemple, aux tats-Unis par la SEC61 qui exige des
socits trangres de communiquer des comptes selon les normes amricaines.
3.1.2. Ladoption avec rconciliation :
Dans ce cas, les entreprises trangres sont tenues de rapprocher les rsultats et les
capitaux propres prpars sur la base des rgles du pays dorigine et ceux trouvs en utilisant les
normes en vigueur dans le pays de financement62. Un tel rapprochement peut tre fait, entre
autres, par la publication en annexes des tableaux de passage entre les rsultats et les capitaux
propres tablis partir des principes comptables du pays dorigine et ceux dgags selon les
normes locales.
Gnralement, le recours cette possibilit aboutit la communication des rsultats
totalement diffrents pour une mme anne, ce qui peut affecter, par consquent, la crdibilit de
linformation financire divulgue. A titre indicatif, la comptabilit de la socit allemande
59 Simon, C. et Stolowy, H. (1999). Vingt ans dharmonisation comptable internationale. Document du travail, version 2. 60 Idem. 61 Cre en 1934, la SEC est lorgane de surveillance et de contrle des marchs financiers amricains. Elle a pour mission principale la protection de lpargne. 62 La SEC, titre indicatif, offre la possibilit de publier un document (le Forum 20-F) qui compare le rsultat de la firme trangre celui qui aurait t dgag selon les normes amricaines (les US GAAP).
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Daimler Benz tablie, en 1993, partir des normes allemandes a dgag un bnfice de 615
millions de DM et un dficit de 1839 millions de DM selon les rgles amricaines63.
3.2. Lharmonisation comptable rgionale :
Lharmonisation comptable est dfinie comme un processus institutionnel, ayant pour
objet de mettre en convergence les normes et les pratiques nationales et, par consquent, de
faciliter la comparaison des tats comptables produits par des entreprises de pays diffrents64 .