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La Lettre du Défenseur des droits – Juillet / Août 2015 Sommaire La Lettre du Défenseur des droits – Juillet / Août 2015 ......................................................... 1 Edito ................................................................................................................................................... 2 Zoom - Lutte contre les discriminations .................................................................................. 3 L'action du Défenseur des droits ............................................................................................... 7 En bref ............................................................................................................................................. 11 Vie des territoires ......................................................................................................................... 17 Actualité du droit .......................................................................................................................... 18 Décisions du Défenseur ......................................................................................................... 18 Veille jurisprudentielle ............................................................................................................ 20

La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Page 1: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

La Lettre du Deacutefenseur des droits ndash Juillet Aoucirct 2015

Sommaire La Lettre du Deacutefenseur des droits ndash Juillet Aoucirct 2015 1

Edito 2

Zoom - Lutte contre les discriminations 3

Laction du Deacutefenseur des droits 7

En bref 11

Vie des territoires 17

Actualiteacute du droit 18

Deacutecisions du Deacutefenseur 18

Veille jurisprudentielle 20

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Edito

Au terme de ma premiegravere anneacutee de mandat jrsquoai souhaiteacute que ce numeacutero drsquoeacuteteacute soit consacreacute agrave la lutte contre les discriminations qui constitue lrsquoune de mes prioriteacutes drsquoaction pour les anneacutees agrave venir

En ces temps de crise les intoleacuterances prospegraverent et les steacutereacuteotypes sont partout agrave lrsquoœuvre Or les discriminations creacuteent structurent augmentent les ineacutegaliteacutes elles divisent et fragilisent la socieacuteteacute toute entiegravere Il y a donc urgence agrave amplifier la preacutevention la lutte contre les discriminations et la promotion de lrsquoeacutegaliteacute

Dans ce combat le Deacutefenseur des droits est en premiegravere ligne Au quotidien des experts du droit traitent des cas de discrimination agrave Paris comme sur lrsquoensemble du territoire franccedilais via la preacutesence de pregraves de 400 deacuteleacutegueacutes Pour autant comme je lrsquoai preacuteconiseacute il faut deacutepasser le traitement individuel et les sanctions isoleacutees qui nrsquoont qursquoun impact ponctuel bien qursquoillustratif Jrsquoai ainsi soutenu lrsquoadoption drsquoune proceacutedure permettant lrsquoaction de groupe en matiegravere de discrimination et jrsquoai eu lrsquooccasion drsquoen preacuteciser les modaliteacutes dans le cadre de mon audition au Parlement Il faut en effet des sanctions financiegraveres dissuasives pour que le maintien des ineacutegaliteacutes de traitement coucircte plus cher que leur correction

Parallegravelement notre institution srsquoattache agrave mener une politique de promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ainsi il srsquoagit de mieux informer le grand public et de garantir un meilleur accegraves aux droits aux personnes les plus vulneacuterables mais aussi de contribuer agrave la formation des acteurs professionnels et agrave leur accompagnement pour changer leurs pratiques Notre deacutemarche srsquoappuie eacutegalement sur des partenariats sur la collaboration avec les associations et sur des eacutechanges avec nos homologues eacutetrangers comme le Centre interfeacutedeacuteral pour lrsquoeacutegaliteacute des chances de Belgique qui a partageacute avec nous son expertise

En cette peacuteriode estivale la lutte contre les discriminations reste pour notre institution une urgence et une prioriteacute Le lancement le 15 septembre prochain de la plateforme laquo Egaliteacute contre racisme raquo marquera une nouvelle eacutetape dans cette mobilisation

Jacques Toubon

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Zoom - Lutte contre les discriminations

Eacutegaliteacute femmes-hommes le Deacutefenseur srsquoengage et dialogue avec les associations

Lors de la 5e reacuteunion de ce comiteacute le 16 juin dernier les

repreacutesentants associatifs ont fait part de leurs sujets de preacuteoccupation De nombreuses theacutematiques souleveacutees font eacutecho aux prioriteacutes actuelles du Deacutefenseur et viendront alimenter son action La question du droit au seacutejour des femmes eacutetrangegraveres victimes de violence viendra ainsi nourrir le futur rapport du Deacutefenseur sur les droits des eacutetrangers Le projet de loi relatif au dialogue social et au soutien agrave lrsquoactiviteacute des salarieacutes et lrsquoeacutevolution des obligations des employeurs en matiegravere drsquoeacutegaliteacute femmes-hommes suscite une vigilance commune des associations comme de notre institution

Par ailleurs le Deacutefenseur des droits a informeacute les membres du comiteacute de certaines positions prises dans le cadre drsquoauditions et drsquoavis sur des projets et propositions de loi Ainsi il a par exemple indiqueacute qursquoil avait pris position contre le deacutelit de racolage et contre la peacutenalisation des clients des mesures deacutefavorables agrave lrsquoaccegraves des prostitueacutees agrave leurs droits fondamentaux Il a eacutegalement rappeleacute qursquoil srsquoeacutetait engageacute dans le cadre du projet de loi santeacute pour la suppression de la clause de conscience et du deacutelai de reacuteflexion pour lrsquoIVG ce dernier ndash qui allongeait inutilement le parcours des femmes souhaitant recourir agrave un avortement ndash ayant eacuteteacute finalement supprimeacute Jacques Toubon a eacutegalement souligneacute qursquoil avait pris position en faveur de lrsquoouverture de la PMA agrave toutes les femmes en couple ou ceacutelibataires

Les eacutechanges ont eacutegalement porteacute sur les difficulteacutes rencontreacutees par les femmes handicapeacutees en matiegravere drsquoaccegraves agrave lrsquoemploi Le Deacutefenseur a engageacute une prise de contact avec les institutions concerneacutees

Parmi lrsquoensemble des deacutecisions et actions de promotion du Deacutefenseur eacutevoqueacutees agrave cette occasion a eacuteteacute preacutesenteacutee une nouvelle fiche-ressource Evaluer les emplois agrave preacutedominance feacuteminine sans discriminer destineacutee agrave lrsquoensemble des acteurs de lrsquoeacutegaliteacute femmes-hommes et des acteurs de lrsquoemploi Cette fiche a eacuteteacute eacutelaboreacutee dans le sillage du Guide pour une eacutevaluation non-discriminante des emplois agrave preacutedominance feacuteminine publieacute en mars 2013 et des multiples seacuteances de sensibilisation qui ont eacuteteacute reacutealiseacutees depuis sur le terrain

La fiche rappelle le cadre juridique du principe laquo un salaire eacutegal pour un travail de valeur eacutegale raquo qui tient compte de la seacutegreacutegation sexuelle tregraves forte qui preacutevaut encore en matiegravere drsquoemploi (les femmes nrsquooccupent pas les mecircmes emplois que les hommes) et souligne lrsquoimportance de mettre en œuvre ce principe pour une juste eacutevaluation des emplois occupeacutes par des femmes Les biais sexistes preacutevalent encore dans les actions de peseacutee de lrsquoemploi de lrsquoeacutetablissement drsquoune fiche de poste agrave celui drsquoune offre drsquoemploi en passant par lrsquoeacutevaluation annuelle les classifications professionnelles ou cadres drsquoemploi dans la fonction publique qui deacuteterminent le socle des salaires et reacutemuneacuterations Ainsi de nombreuses compeacutetences mobiliseacutees ne sont pas prises en compte et eacutevalueacutees notamment parce qursquoelles correspondent agrave des qualiteacutes que lrsquoon pense indument inneacutees chez les femmes (et donc gratuites) La peacutenibiliteacute de nombreux emplois feacuteminins que lrsquoon songe par exemple aux caissiegraveres ou aux infirmiegraveres est eacutegalement souvent consideacuterablement sous-eacutevalueacutee la peacutenibiliteacute se reacuteduisant alors aux efforts physiques massifs et ponctuels typiques des emplois masculins

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Discrimination agrave raison de la preacutecariteacute sociale lrsquoenjeu de lrsquoeffectiviteacute des nouveaux critegraveres de discrimination

Prenant exemple sur la mise en œuvre de la loi sur lrsquointerdiction de discrimination agrave raison du lieu de reacutesidence adopteacutee en feacutevrier 2014 le Deacutefenseur attire lrsquoattention du leacutegislateur sur la question de la porteacutee effective de cette nouvelle protection

En effet les saisines du Deacutefenseur reacutevegravelent que quoique le critegravere du lieu de reacutesidence ait eacuteteacute creacuteeacute pour reacutepondre aux situations de discrimination agrave lrsquoembauche des jeunes des quartiers il est solliciteacute pour deacutenoncer la tarification des services offerts par les communes ou les discriminations

territoriales dans les services publics et tregraves peu pour reacutepondre aux difficulteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquoembauche initialement viseacutees

Or il apparaicirct qursquoaucune eacutetude drsquoimpact sur le nouveau critegravere du lieu de reacutesidence ou sur celui de la preacutecariteacute sociale nrsquoait eacuteteacute reacutealiseacutee pour deacutefinir les situations effectives qui seraient susceptibles de faire lrsquoobjet drsquoun recours Or le risque drsquoeacutechec des recours pourrait srsquoaveacuterer tregraves important

Le Deacutefenseur des droits estime que la deacutefinition du concept viseacute par les termes laquo preacutecariteacute sociale raquo devrait ecirctre revue car elle fait glisser lrsquoideacutee de prise en compte de la pauvreteacute vers celle de prise en compte de la preacutecariteacute situation ambigueuml qui ne peut se caracteacuteriser exclusivement par la situation de pauvreteacute ou par la condition sociale (expression retenue par le leacutegislateur du Queacutebec) des inteacuteresseacutes vocables ayant tous une porteacutee diffeacuterente Il apparait que le terme de preacutecariteacute emporte une relativiteacute de la situation viseacutee et une varieacuteteacute de situations qursquoil conviendrait de preacuteciser pour mieux deacutefinir lrsquoobjet de la protection rechercheacutee par le leacutegislateur

La France remplit ses obligations internationales au regard de la lutte contre la pauvreteacute et lrsquoeacutegaliteacute de traitement des personnes les plus preacutecaires par lrsquoensemble de ses politiques publiques de lutte contre lrsquoexclusion ses dispositifs de prise en charge et le principe geacuteneacuteral de lrsquoeacutegaliteacute drsquoaccegraves aux services publics Elle megravene eacutegalement une veacuteritable politique drsquoaccegraves au droit agrave laquelle concourt le Deacutefenseur des droits

Ce dernier traite plusieurs dizaines de milliers de dossiers de personnes en situation de grande preacutecariteacute par an au titre de sa compeacutetence en matiegravere drsquoaccegraves aux services publics

Il constate que le principe drsquoeacutegal drsquoaccegraves aux services publics et les droits speacutecifiquement proteacutegeacutes comme le droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence ou le droit agrave lrsquoeacutecole sont deacutejagrave pris en compte par le droit commun Cependant le public viseacute par la grande preacutecariteacute fait face agrave une beaucoup de difficulteacutes agrave faire valoir ses droits et cette situation justifierait la mise en œuvre drsquoune veacuteritable politique publique drsquoaccegraves aux droits eacuteconomiques sociaux et culturels

Il apparaicirct que la mise en œuvre drsquoune prohibition de discrimination ne permettra pas par elle-mecircme drsquoeacutelargir lrsquoefficaciteacute de la protection des droits des personnes en situation de grande preacutecariteacute Elle permettra dans de rares cas de rechercher la sanction peacutenale agrave la condition qursquoil soit possible drsquoeacutetablir et de deacutenoncer une volonteacute aveacutereacutee drsquoexclusion et de refus de droit Reste que la discrimination aveacutereacutee reste tregraves difficile agrave mettre en œuvre pour tous les critegraveres de discrimination

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Traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi le Deacutefenseur rencontre la Chambre criminelle de la Cour de cassation

Le 4 juin 2015 le Deacutefenseur des droits srsquoest exprimeacute devant lrsquoensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour de cassation afin drsquoeacutevoquer le traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi

Pour caracteacuteriser un deacutelit de discrimination il convient drsquoen eacutetablir trois eacuteleacutements son critegravere son champ et son intentionnaliteacute Ainsi il srsquoagit drsquoabord de comprendre sur quels eacuteleacutements srsquoest fondeacute lrsquoemployeur pour opeacuterer un traitement ineacutegal et de voir auquel des 20 critegraveres de

discrimination prohibeacutes par la loi (handicap sexe originehellip) ils correspondent Il srsquoagit ensuite de deacuteterminer srsquoil srsquoagit drsquoun acte viseacute par la loi En matiegravere drsquoemploi seuls sont viseacutes les refus drsquoembauche la sanction et le licenciement Il faut enfin en eacutetablir lrsquointentionnaliteacute le preacutevenu a-t-il eu conscience de prendre en consideacuteration ce critegravere pour arrecircter sa deacutecision Cet eacuteleacutement ne doit pas ecirctre confondu avec le mobile ndash les raisons qui ont pousseacute agrave commettre ce deacutelit

Le Deacutefenseur a tout particuliegraverement insisteacute sur la question du harcegravelement il a rappeleacute qursquoil nrsquoexistait pas dans le Code peacutenal drsquoinfraction de harcegravelement discriminatoire De ce fait les magistrats sont contraints drsquoopeacuterer un choix quant au fondement des poursuites La discrimination (articles 225-1 et 2 du Code peacutenal) eacutetant plus seacutevegraverement sanctionneacutee que le harcegravelement moral (article 222-33-2) le Deacutefenseur estime que cette caracteacuterisation doit ecirctre privileacutegieacutee en vertu du principe selon lequel les faits doivent ecirctre reacuteprimeacutes sous leur plus haute expression peacutenale

Or le Deacutefenseur des droits a rappeleacute la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle les deacutecisions de lrsquoemployeur affectant la carriegravere ou la reacutemuneacuteration drsquoun salarieacute sans qursquoelles preacutesentent neacutecessairement un caractegravere disciplinaire peuvent constituer si elles sont infondeacutees des sanctions discriminatoires au sens de lrsquoarticle 225-2 alineacutea 3 du Code peacutenal Interpreacuteteacute agrave la lumiegravere de cet arrecirct le deacutelit de discrimination peut permettre drsquoappreacutehender les faits deacutegradant les conditions de travail du salarieacute

Crsquoest cette approche qui a eacuteteacute retenue dans le cadre des deux avis rendus agrave la demande des Parquets de Lille et de Versailles dans des affaires portant sur des faits de harcegravelement moral et de discrimination

Recours collectif en matiegravere de discrimination le Deacutefenseur reste favorable mais vigilant

Un recours collectif est une action en justice qui facilite lrsquoaccegraves aux droits des victimes en deacutemultipliant lrsquoeffet drsquoun jugement sur un groupe de personnes Le Deacutefenseur srsquoeacutetait deacutejagrave positionneacute sur lrsquoinstauration drsquoune action de groupe en matiegravere de discrimination dans un avis du 31 octobre 2013 il srsquoy disait favorable sous reacuteserve de la reacuteunion de conditions techniques juridiques et budgeacutetaires neacutecessaires agrave lrsquoefficaciteacute du recours

Dans son avis du 2 juin 2015 le Deacutefenseur des droits insiste particuliegraverement sur trois points

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Ainsi il srsquointeacuteresse drsquoabord agrave lrsquoobjet de la proposition de loi si les dispositions proteacutegeant contre les 20 critegraveres de discrimination sont nombreuses elles sont heacuteteacuterogegravenes et tous les critegraveres nrsquoont pas le mecircme niveau de protection Lrsquoadoption drsquoune loi instaurant un recours collectif dans cette matiegravere pourrait ecirctre lrsquooccasion drsquounifier ces diffeacuterents niveaux de protection et le reacutegime juridique de la lutte contre les discriminations

Par ailleurs le Deacutefenseur des droits estime que le recours collectif ne devrait pas ecirctre reacuteserveacute uniquement aux associations et aux syndicats comme le suggegravere la proposition de loi En effet si certaines victimes de discrimination ne trouvent pas de tels appuis et si lrsquoexpertise sur le sujet souleveacute nrsquoeacutetait pas repreacutesenteacutee au sein des associations elles ne pourraient pas avoir accegraves agrave ce dispositif drsquoaccegraves aux droits

De plus le droit des discriminations est un contentieux complexe et lourd srsquoinscrivant dans les relations humaines dont les enjeux ne se limitent pas agrave des consideacuterations techniques Il est douteux que les associations puissent supporter le poids de ce monopole de faccedilon durable

Crsquoest eacutegalement pour faciliter cet accegraves aux droits des personnes victimes de discrimination que le Deacutefenseur des droits recommande de scinder le recours collectif en deux phases Ainsi dans une premiegravere eacutetape du contentieux collectif le juge pourrait deacuteterminer si la situation invoqueacutee est repreacutesentative ou non drsquoune situation pouvant faire lrsquoobjet drsquoun jugement de principe agrave porteacutee collective une seconde eacutetape consisterait en un examen de fond dans lequel pourrait se deacuteployer le deacutebat contradictoire

La porteacutee collective donne du poids agrave une proceacutedure et permet agrave celle-ci drsquoemporter un investissement massif en deacutefense Scinder la proceacutedure crsquoest favoriser ndash pour plus drsquoefficaciteacute judiciaire ndash la preacutecision des caracteacuteristiques de ces contentieux par la jurisprudence et eacuteviter de faire traicircner une proceacutedure qui ne remplirait pas les exigences requises pour avoir une porteacutee collective Crsquoest preacutevoir dans le cadre de la proceacutedure une eacutetape qui tranche la question de la porteacutee collective du recours et de ce fait favoriser le regraveglement de situations de discrimination agrave cause de lrsquoenjeu financier de la condamnation eacuteventuelle

Enfin le Deacutefenseur des droits souligne qursquoil ne souhaite pas ecirctre lui-mecircme impliqueacute dans la proceacutedure drsquoaction de groupe en tant que partie car le principe drsquoeacutegaliteacute des armes lrsquoobligerait alors agrave abandonner ses pouvoirs drsquoenquecircte et son statut drsquoamicus curiae qui lui garantissent aujourdrsquohui son indeacutependance

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Laction du Deacutefenseur des droits

La Deacutefenseure des enfants aux Assises de la protection de lrsquoenfance

Lrsquoeacutedition 2014 des Assises srsquoeacutetait acheveacutee sur les teacutemoignages de jeunes ayant eacuteteacute accompagneacutes dans le cadre de lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance Ils avaient pointeacute les forces et faiblesses de leur parcours

Cette eacutedition 2015 srsquoest attacheacutee speacutecifiquement aux pistes drsquoameacutelioration souhaitables et aux innovations possibles et existantes pour rendre les parcours de ces jeunes plus faciles et mieux les proteacuteger en tant qursquoenfants mais aussi que futurs adultes

Geneviegraveve Avenard Deacutefenseure des enfants a apporteacute son expertise lors de la table ronde pleacuteniegravere intituleacutee laquo Le regard des meacutedias un risque agrave prendre raquo aux cocircteacutes notamment drsquoEmmanuelle Bercot actrice sceacutenariste du film Polisse et reacutealisatrice de La tecircte haute

Marie Lieberherr cheffe du pocircle Protection des personnes ndash Deacutefense des enfants a pour sa part participeacute agrave lrsquoatelier consacreacute au laquo Projet pour lrsquoenfant (PPE) quelles innovations quelle prise de risques raquo suite agrave lrsquoeacutetude meneacutee par le Deacutefenseur des droits sur la mise en place de ces PPE par les conseils deacutepartementaux

Le stand du Deacutefenseur des droits ouvert durant les deux jours a fait lrsquoobjet drsquoune grande affluence et a permis de nombreux eacutechanges avec les professionnels de lrsquoenfance Les outils de communication pour la deacutefense et la promotion des droits de lrsquoenfant ont eacuteteacute particuliegraverement appreacutecieacutes

Lutte contre le racisme le Deacutefenseur se rend au Centre Interfeacutedeacuteral pour lrsquoeacutegaliteacute des chances de Belgique

Lrsquoobjectif de cette rencontre eacutetait drsquoeacutechanger sur la porteacutee de lrsquoaction du Centre en matiegravere de lutte contre les propos et crimes racistes Bien que cette theacutematique soit situeacutee agrave la peacuteripheacuterie de son champ drsquoaction le Deacutefenseur y porte un vif inteacuterecirct en teacutemoigne le deacuteveloppement du projet laquo Egaliteacute contre racisme raquo qui vise agrave rassembler sur un mecircme site internet de nombreuses

ressources de lutte contre le racisme et les discriminations et qui verra le jour en septembre

A lrsquoinstar de cette plateforme le site internet du Centre fournit des outils aux personnes qui ne sont pas personnellement confronteacutees agrave un acte de racisme mais qui veulent le signaler

Le Centre a eacutegalement mis en place une page web donnant des clefs pour diffuser un contre-discours face aux chaicircnes drsquoemails agrave caractegravere raciste toujours dans la perspective

drsquoinformer et de donner des outils au grand public pour mieux lutter contre les discours racistes

En somme cette rencontre qui a permis drsquoeacutechanger sur les outils deacuteveloppeacutes par le Centre en matiegravere de lutte contre le racisme a eacuteteacute extrecircmement enrichissante pour nourrir le projet de la plateforme laquo Egaliteacute contre racisme raquo et les orientations du Deacutefenseur des Droits

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Deux fillettes retenues en zone drsquoattente agrave Roissy

Le 8 juin dernier le Reacuteseau Education Sans Frontiegraveres a saisi le Deacutefenseur des droits pour la petite Fanta jeune Ivoirienne de trois ans et demi retenue depuis plusieurs jours sans ses parents en zone drsquoattente agrave Roissy[1]

Le Deacutefenseur srsquoest donc tourneacute vers la personne en charge de lrsquoenfant agrave Roissy pour veacuterifier les proceacutedures en cours Le 10 juin 5 jours apregraves son entreacutee dans la zone la petite Fanta a eacuteteacute libeacutereacutee et remise agrave ses parents Le Deacutefenseur des droits poursuit aujourdrsquohui son enquecircte sur les circonstances drsquoune retenue qui lui paraicirct irreacuteguliegravere

De mecircme Andreacuteane acircgeacutee de 6 ans a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoune proceacutedure de retenue dans la zone drsquoattente de Roissy du 6 au 9 juin La fillette franccedilaise qui voyageait seule revenait du Cameroun et un agent de controcircle a estimeacute qursquoelle ne correspondait pas agrave la photo figurant sur ses papiers Cette fois le Deacutefenseur des droits srsquoest saisi drsquooffice degraves qursquoil en a eu connaissance Une enquecircte est en cours

Ces deux cas deacutemontrent que la retenue drsquoenfants mecircme tregraves jeunes en zone drsquoattente est une reacutealiteacute qui perdure Conscient de cette reacutealiteacute le Deacutefenseur des droits avait deacutejagrave dans son avis au Parlement de novembre 2014 relatif agrave la reacuteforme de lrsquoasile recommandeacute la fin des privations de liberteacute agrave la frontiegravere pour tous les mineurs isoleacutes demandeurs drsquoasile quelle que soit leur nationaliteacute et leur admission en France avant drsquoeacuteclaircir leur situation

A lrsquooccasion du retour du projet de loi sur lrsquoasile le droit des eacutetrangers devant lrsquoAssembleacutee nationale le 26 juin il a recommandeacute que le recours agrave la reacutetention des mineurs isoleacutes ou non soit proscrit et que cette interdiction qui ne devrait souffrir drsquoexception soit inscrite dans la loi

Par ailleurs dans son rapport sur le suivi de la Convention Internationale des droits de lrsquoEnfant publieacute le 9 juin le Deacutefenseur des droits recommande drsquoinscrire dans la loi lrsquointerdiction sur lrsquoensemble du territoire franccedilais des mesures privatives de liberteacute pour les enfants de migrants qursquoils soient placeacutes en zone drsquoattente ou en centre de reacutetention administrative

Le Deacutefenseur des droits est aujourdrsquohui encore saisi de cas similaires Ces derniegraveres semaines ce sont les dossiers de trois familles placeacutees en centre de reacutetention administrative qui lui sont parvenus Loin de baisser sa vigilance il veille agrave rappeler son positionnement notamment aupregraves des preacutefectures

[1] Crsquoest dans cette zone que sont regroupeacutees les personnes en situation irreacuteguliegravere souhaitant entrer en France avant drsquoecirctre reacuteachemineacutees agrave lrsquoeacutetranger ou accepteacutees en France

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Solidays 2015 le Deacutefenseur au Village Solidariteacute

Preacutesent depuis plusieurs anneacutees au Village Solidariteacute ndash qui regroupe une centaine drsquoassociations et drsquoONG ndash le Deacutefenseur des droits a cette anneacutee proposeacute aux visiteurs de laquo casser du preacutejugeacute raquo avec le jeu laquo Chamboule tous tes preacutejugeacutes raquo laquo Les noirs ont le rythme dans la peau raquo laquo Les Roms sont des voleurs raquo laquo Les femmes sont sensibles raquohellip autant de steacutereacuteotypes qui nrsquoont pas manqueacute de faire reacuteagir les participants et permis agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits de faire mieux comprendre le risque que constitue une discrimination

Tregraves curieux des missions du Deacutefenseur des droits les 15-30 ans ont abordeacute avec nous des sujets tregraves divers comme les discriminations LGBT lrsquoaccegraves au logement et agrave lrsquoemploi lrsquoaccegraves agrave la santeacute ou encore la promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ils ont eacutegalement pu se photographier en laquo super-heacuteros Deacutefenseur des droits raquo et envoyer leurs images sur les reacuteseaux sociaux

Le Deacutefenseur des droits aux Solidays crsquoest donc un moment drsquoeacutechange simple et ludique avec des jeunes citoyens deacutesireux de mieux comprendre leurs droits Agrave lrsquoanneacutee prochaine

Acteurs et actrices des droits de lrsquoenfant faites labelliser votre projet

Vous avez preacutevu un projet de promotion des droits de lrsquoenfant avant ou pour le 20 novembre prochain date de la journeacutee internationale des droits de lrsquoenfant

Dans le cadre du 25e anniversaire de la Convention des droits

de lrsquoenfant le Deacutefenseur des droits a deacutejagrave labelliseacute pregraves de 100 projets dans toute la France

Profitez des derniegraveres semaines pour nous transmettre votre dossier de labellisation et participer automatiquement agrave la

seacutelection des plus beaux projets 2015 en faveur des droits de lrsquoenfant en France

Vous trouverez plus de renseignements sur notre site internet http25anscdedefenseurdesdroitsfrindexhtml

10

Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 2: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Edito

Au terme de ma premiegravere anneacutee de mandat jrsquoai souhaiteacute que ce numeacutero drsquoeacuteteacute soit consacreacute agrave la lutte contre les discriminations qui constitue lrsquoune de mes prioriteacutes drsquoaction pour les anneacutees agrave venir

En ces temps de crise les intoleacuterances prospegraverent et les steacutereacuteotypes sont partout agrave lrsquoœuvre Or les discriminations creacuteent structurent augmentent les ineacutegaliteacutes elles divisent et fragilisent la socieacuteteacute toute entiegravere Il y a donc urgence agrave amplifier la preacutevention la lutte contre les discriminations et la promotion de lrsquoeacutegaliteacute

Dans ce combat le Deacutefenseur des droits est en premiegravere ligne Au quotidien des experts du droit traitent des cas de discrimination agrave Paris comme sur lrsquoensemble du territoire franccedilais via la preacutesence de pregraves de 400 deacuteleacutegueacutes Pour autant comme je lrsquoai preacuteconiseacute il faut deacutepasser le traitement individuel et les sanctions isoleacutees qui nrsquoont qursquoun impact ponctuel bien qursquoillustratif Jrsquoai ainsi soutenu lrsquoadoption drsquoune proceacutedure permettant lrsquoaction de groupe en matiegravere de discrimination et jrsquoai eu lrsquooccasion drsquoen preacuteciser les modaliteacutes dans le cadre de mon audition au Parlement Il faut en effet des sanctions financiegraveres dissuasives pour que le maintien des ineacutegaliteacutes de traitement coucircte plus cher que leur correction

Parallegravelement notre institution srsquoattache agrave mener une politique de promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ainsi il srsquoagit de mieux informer le grand public et de garantir un meilleur accegraves aux droits aux personnes les plus vulneacuterables mais aussi de contribuer agrave la formation des acteurs professionnels et agrave leur accompagnement pour changer leurs pratiques Notre deacutemarche srsquoappuie eacutegalement sur des partenariats sur la collaboration avec les associations et sur des eacutechanges avec nos homologues eacutetrangers comme le Centre interfeacutedeacuteral pour lrsquoeacutegaliteacute des chances de Belgique qui a partageacute avec nous son expertise

En cette peacuteriode estivale la lutte contre les discriminations reste pour notre institution une urgence et une prioriteacute Le lancement le 15 septembre prochain de la plateforme laquo Egaliteacute contre racisme raquo marquera une nouvelle eacutetape dans cette mobilisation

Jacques Toubon

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Zoom - Lutte contre les discriminations

Eacutegaliteacute femmes-hommes le Deacutefenseur srsquoengage et dialogue avec les associations

Lors de la 5e reacuteunion de ce comiteacute le 16 juin dernier les

repreacutesentants associatifs ont fait part de leurs sujets de preacuteoccupation De nombreuses theacutematiques souleveacutees font eacutecho aux prioriteacutes actuelles du Deacutefenseur et viendront alimenter son action La question du droit au seacutejour des femmes eacutetrangegraveres victimes de violence viendra ainsi nourrir le futur rapport du Deacutefenseur sur les droits des eacutetrangers Le projet de loi relatif au dialogue social et au soutien agrave lrsquoactiviteacute des salarieacutes et lrsquoeacutevolution des obligations des employeurs en matiegravere drsquoeacutegaliteacute femmes-hommes suscite une vigilance commune des associations comme de notre institution

Par ailleurs le Deacutefenseur des droits a informeacute les membres du comiteacute de certaines positions prises dans le cadre drsquoauditions et drsquoavis sur des projets et propositions de loi Ainsi il a par exemple indiqueacute qursquoil avait pris position contre le deacutelit de racolage et contre la peacutenalisation des clients des mesures deacutefavorables agrave lrsquoaccegraves des prostitueacutees agrave leurs droits fondamentaux Il a eacutegalement rappeleacute qursquoil srsquoeacutetait engageacute dans le cadre du projet de loi santeacute pour la suppression de la clause de conscience et du deacutelai de reacuteflexion pour lrsquoIVG ce dernier ndash qui allongeait inutilement le parcours des femmes souhaitant recourir agrave un avortement ndash ayant eacuteteacute finalement supprimeacute Jacques Toubon a eacutegalement souligneacute qursquoil avait pris position en faveur de lrsquoouverture de la PMA agrave toutes les femmes en couple ou ceacutelibataires

Les eacutechanges ont eacutegalement porteacute sur les difficulteacutes rencontreacutees par les femmes handicapeacutees en matiegravere drsquoaccegraves agrave lrsquoemploi Le Deacutefenseur a engageacute une prise de contact avec les institutions concerneacutees

Parmi lrsquoensemble des deacutecisions et actions de promotion du Deacutefenseur eacutevoqueacutees agrave cette occasion a eacuteteacute preacutesenteacutee une nouvelle fiche-ressource Evaluer les emplois agrave preacutedominance feacuteminine sans discriminer destineacutee agrave lrsquoensemble des acteurs de lrsquoeacutegaliteacute femmes-hommes et des acteurs de lrsquoemploi Cette fiche a eacuteteacute eacutelaboreacutee dans le sillage du Guide pour une eacutevaluation non-discriminante des emplois agrave preacutedominance feacuteminine publieacute en mars 2013 et des multiples seacuteances de sensibilisation qui ont eacuteteacute reacutealiseacutees depuis sur le terrain

La fiche rappelle le cadre juridique du principe laquo un salaire eacutegal pour un travail de valeur eacutegale raquo qui tient compte de la seacutegreacutegation sexuelle tregraves forte qui preacutevaut encore en matiegravere drsquoemploi (les femmes nrsquooccupent pas les mecircmes emplois que les hommes) et souligne lrsquoimportance de mettre en œuvre ce principe pour une juste eacutevaluation des emplois occupeacutes par des femmes Les biais sexistes preacutevalent encore dans les actions de peseacutee de lrsquoemploi de lrsquoeacutetablissement drsquoune fiche de poste agrave celui drsquoune offre drsquoemploi en passant par lrsquoeacutevaluation annuelle les classifications professionnelles ou cadres drsquoemploi dans la fonction publique qui deacuteterminent le socle des salaires et reacutemuneacuterations Ainsi de nombreuses compeacutetences mobiliseacutees ne sont pas prises en compte et eacutevalueacutees notamment parce qursquoelles correspondent agrave des qualiteacutes que lrsquoon pense indument inneacutees chez les femmes (et donc gratuites) La peacutenibiliteacute de nombreux emplois feacuteminins que lrsquoon songe par exemple aux caissiegraveres ou aux infirmiegraveres est eacutegalement souvent consideacuterablement sous-eacutevalueacutee la peacutenibiliteacute se reacuteduisant alors aux efforts physiques massifs et ponctuels typiques des emplois masculins

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Discrimination agrave raison de la preacutecariteacute sociale lrsquoenjeu de lrsquoeffectiviteacute des nouveaux critegraveres de discrimination

Prenant exemple sur la mise en œuvre de la loi sur lrsquointerdiction de discrimination agrave raison du lieu de reacutesidence adopteacutee en feacutevrier 2014 le Deacutefenseur attire lrsquoattention du leacutegislateur sur la question de la porteacutee effective de cette nouvelle protection

En effet les saisines du Deacutefenseur reacutevegravelent que quoique le critegravere du lieu de reacutesidence ait eacuteteacute creacuteeacute pour reacutepondre aux situations de discrimination agrave lrsquoembauche des jeunes des quartiers il est solliciteacute pour deacutenoncer la tarification des services offerts par les communes ou les discriminations

territoriales dans les services publics et tregraves peu pour reacutepondre aux difficulteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquoembauche initialement viseacutees

Or il apparaicirct qursquoaucune eacutetude drsquoimpact sur le nouveau critegravere du lieu de reacutesidence ou sur celui de la preacutecariteacute sociale nrsquoait eacuteteacute reacutealiseacutee pour deacutefinir les situations effectives qui seraient susceptibles de faire lrsquoobjet drsquoun recours Or le risque drsquoeacutechec des recours pourrait srsquoaveacuterer tregraves important

Le Deacutefenseur des droits estime que la deacutefinition du concept viseacute par les termes laquo preacutecariteacute sociale raquo devrait ecirctre revue car elle fait glisser lrsquoideacutee de prise en compte de la pauvreteacute vers celle de prise en compte de la preacutecariteacute situation ambigueuml qui ne peut se caracteacuteriser exclusivement par la situation de pauvreteacute ou par la condition sociale (expression retenue par le leacutegislateur du Queacutebec) des inteacuteresseacutes vocables ayant tous une porteacutee diffeacuterente Il apparait que le terme de preacutecariteacute emporte une relativiteacute de la situation viseacutee et une varieacuteteacute de situations qursquoil conviendrait de preacuteciser pour mieux deacutefinir lrsquoobjet de la protection rechercheacutee par le leacutegislateur

La France remplit ses obligations internationales au regard de la lutte contre la pauvreteacute et lrsquoeacutegaliteacute de traitement des personnes les plus preacutecaires par lrsquoensemble de ses politiques publiques de lutte contre lrsquoexclusion ses dispositifs de prise en charge et le principe geacuteneacuteral de lrsquoeacutegaliteacute drsquoaccegraves aux services publics Elle megravene eacutegalement une veacuteritable politique drsquoaccegraves au droit agrave laquelle concourt le Deacutefenseur des droits

Ce dernier traite plusieurs dizaines de milliers de dossiers de personnes en situation de grande preacutecariteacute par an au titre de sa compeacutetence en matiegravere drsquoaccegraves aux services publics

Il constate que le principe drsquoeacutegal drsquoaccegraves aux services publics et les droits speacutecifiquement proteacutegeacutes comme le droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence ou le droit agrave lrsquoeacutecole sont deacutejagrave pris en compte par le droit commun Cependant le public viseacute par la grande preacutecariteacute fait face agrave une beaucoup de difficulteacutes agrave faire valoir ses droits et cette situation justifierait la mise en œuvre drsquoune veacuteritable politique publique drsquoaccegraves aux droits eacuteconomiques sociaux et culturels

Il apparaicirct que la mise en œuvre drsquoune prohibition de discrimination ne permettra pas par elle-mecircme drsquoeacutelargir lrsquoefficaciteacute de la protection des droits des personnes en situation de grande preacutecariteacute Elle permettra dans de rares cas de rechercher la sanction peacutenale agrave la condition qursquoil soit possible drsquoeacutetablir et de deacutenoncer une volonteacute aveacutereacutee drsquoexclusion et de refus de droit Reste que la discrimination aveacutereacutee reste tregraves difficile agrave mettre en œuvre pour tous les critegraveres de discrimination

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Traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi le Deacutefenseur rencontre la Chambre criminelle de la Cour de cassation

Le 4 juin 2015 le Deacutefenseur des droits srsquoest exprimeacute devant lrsquoensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour de cassation afin drsquoeacutevoquer le traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi

Pour caracteacuteriser un deacutelit de discrimination il convient drsquoen eacutetablir trois eacuteleacutements son critegravere son champ et son intentionnaliteacute Ainsi il srsquoagit drsquoabord de comprendre sur quels eacuteleacutements srsquoest fondeacute lrsquoemployeur pour opeacuterer un traitement ineacutegal et de voir auquel des 20 critegraveres de

discrimination prohibeacutes par la loi (handicap sexe originehellip) ils correspondent Il srsquoagit ensuite de deacuteterminer srsquoil srsquoagit drsquoun acte viseacute par la loi En matiegravere drsquoemploi seuls sont viseacutes les refus drsquoembauche la sanction et le licenciement Il faut enfin en eacutetablir lrsquointentionnaliteacute le preacutevenu a-t-il eu conscience de prendre en consideacuteration ce critegravere pour arrecircter sa deacutecision Cet eacuteleacutement ne doit pas ecirctre confondu avec le mobile ndash les raisons qui ont pousseacute agrave commettre ce deacutelit

Le Deacutefenseur a tout particuliegraverement insisteacute sur la question du harcegravelement il a rappeleacute qursquoil nrsquoexistait pas dans le Code peacutenal drsquoinfraction de harcegravelement discriminatoire De ce fait les magistrats sont contraints drsquoopeacuterer un choix quant au fondement des poursuites La discrimination (articles 225-1 et 2 du Code peacutenal) eacutetant plus seacutevegraverement sanctionneacutee que le harcegravelement moral (article 222-33-2) le Deacutefenseur estime que cette caracteacuterisation doit ecirctre privileacutegieacutee en vertu du principe selon lequel les faits doivent ecirctre reacuteprimeacutes sous leur plus haute expression peacutenale

Or le Deacutefenseur des droits a rappeleacute la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle les deacutecisions de lrsquoemployeur affectant la carriegravere ou la reacutemuneacuteration drsquoun salarieacute sans qursquoelles preacutesentent neacutecessairement un caractegravere disciplinaire peuvent constituer si elles sont infondeacutees des sanctions discriminatoires au sens de lrsquoarticle 225-2 alineacutea 3 du Code peacutenal Interpreacuteteacute agrave la lumiegravere de cet arrecirct le deacutelit de discrimination peut permettre drsquoappreacutehender les faits deacutegradant les conditions de travail du salarieacute

Crsquoest cette approche qui a eacuteteacute retenue dans le cadre des deux avis rendus agrave la demande des Parquets de Lille et de Versailles dans des affaires portant sur des faits de harcegravelement moral et de discrimination

Recours collectif en matiegravere de discrimination le Deacutefenseur reste favorable mais vigilant

Un recours collectif est une action en justice qui facilite lrsquoaccegraves aux droits des victimes en deacutemultipliant lrsquoeffet drsquoun jugement sur un groupe de personnes Le Deacutefenseur srsquoeacutetait deacutejagrave positionneacute sur lrsquoinstauration drsquoune action de groupe en matiegravere de discrimination dans un avis du 31 octobre 2013 il srsquoy disait favorable sous reacuteserve de la reacuteunion de conditions techniques juridiques et budgeacutetaires neacutecessaires agrave lrsquoefficaciteacute du recours

Dans son avis du 2 juin 2015 le Deacutefenseur des droits insiste particuliegraverement sur trois points

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Ainsi il srsquointeacuteresse drsquoabord agrave lrsquoobjet de la proposition de loi si les dispositions proteacutegeant contre les 20 critegraveres de discrimination sont nombreuses elles sont heacuteteacuterogegravenes et tous les critegraveres nrsquoont pas le mecircme niveau de protection Lrsquoadoption drsquoune loi instaurant un recours collectif dans cette matiegravere pourrait ecirctre lrsquooccasion drsquounifier ces diffeacuterents niveaux de protection et le reacutegime juridique de la lutte contre les discriminations

Par ailleurs le Deacutefenseur des droits estime que le recours collectif ne devrait pas ecirctre reacuteserveacute uniquement aux associations et aux syndicats comme le suggegravere la proposition de loi En effet si certaines victimes de discrimination ne trouvent pas de tels appuis et si lrsquoexpertise sur le sujet souleveacute nrsquoeacutetait pas repreacutesenteacutee au sein des associations elles ne pourraient pas avoir accegraves agrave ce dispositif drsquoaccegraves aux droits

De plus le droit des discriminations est un contentieux complexe et lourd srsquoinscrivant dans les relations humaines dont les enjeux ne se limitent pas agrave des consideacuterations techniques Il est douteux que les associations puissent supporter le poids de ce monopole de faccedilon durable

Crsquoest eacutegalement pour faciliter cet accegraves aux droits des personnes victimes de discrimination que le Deacutefenseur des droits recommande de scinder le recours collectif en deux phases Ainsi dans une premiegravere eacutetape du contentieux collectif le juge pourrait deacuteterminer si la situation invoqueacutee est repreacutesentative ou non drsquoune situation pouvant faire lrsquoobjet drsquoun jugement de principe agrave porteacutee collective une seconde eacutetape consisterait en un examen de fond dans lequel pourrait se deacuteployer le deacutebat contradictoire

La porteacutee collective donne du poids agrave une proceacutedure et permet agrave celle-ci drsquoemporter un investissement massif en deacutefense Scinder la proceacutedure crsquoest favoriser ndash pour plus drsquoefficaciteacute judiciaire ndash la preacutecision des caracteacuteristiques de ces contentieux par la jurisprudence et eacuteviter de faire traicircner une proceacutedure qui ne remplirait pas les exigences requises pour avoir une porteacutee collective Crsquoest preacutevoir dans le cadre de la proceacutedure une eacutetape qui tranche la question de la porteacutee collective du recours et de ce fait favoriser le regraveglement de situations de discrimination agrave cause de lrsquoenjeu financier de la condamnation eacuteventuelle

Enfin le Deacutefenseur des droits souligne qursquoil ne souhaite pas ecirctre lui-mecircme impliqueacute dans la proceacutedure drsquoaction de groupe en tant que partie car le principe drsquoeacutegaliteacute des armes lrsquoobligerait alors agrave abandonner ses pouvoirs drsquoenquecircte et son statut drsquoamicus curiae qui lui garantissent aujourdrsquohui son indeacutependance

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Laction du Deacutefenseur des droits

La Deacutefenseure des enfants aux Assises de la protection de lrsquoenfance

Lrsquoeacutedition 2014 des Assises srsquoeacutetait acheveacutee sur les teacutemoignages de jeunes ayant eacuteteacute accompagneacutes dans le cadre de lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance Ils avaient pointeacute les forces et faiblesses de leur parcours

Cette eacutedition 2015 srsquoest attacheacutee speacutecifiquement aux pistes drsquoameacutelioration souhaitables et aux innovations possibles et existantes pour rendre les parcours de ces jeunes plus faciles et mieux les proteacuteger en tant qursquoenfants mais aussi que futurs adultes

Geneviegraveve Avenard Deacutefenseure des enfants a apporteacute son expertise lors de la table ronde pleacuteniegravere intituleacutee laquo Le regard des meacutedias un risque agrave prendre raquo aux cocircteacutes notamment drsquoEmmanuelle Bercot actrice sceacutenariste du film Polisse et reacutealisatrice de La tecircte haute

Marie Lieberherr cheffe du pocircle Protection des personnes ndash Deacutefense des enfants a pour sa part participeacute agrave lrsquoatelier consacreacute au laquo Projet pour lrsquoenfant (PPE) quelles innovations quelle prise de risques raquo suite agrave lrsquoeacutetude meneacutee par le Deacutefenseur des droits sur la mise en place de ces PPE par les conseils deacutepartementaux

Le stand du Deacutefenseur des droits ouvert durant les deux jours a fait lrsquoobjet drsquoune grande affluence et a permis de nombreux eacutechanges avec les professionnels de lrsquoenfance Les outils de communication pour la deacutefense et la promotion des droits de lrsquoenfant ont eacuteteacute particuliegraverement appreacutecieacutes

Lutte contre le racisme le Deacutefenseur se rend au Centre Interfeacutedeacuteral pour lrsquoeacutegaliteacute des chances de Belgique

Lrsquoobjectif de cette rencontre eacutetait drsquoeacutechanger sur la porteacutee de lrsquoaction du Centre en matiegravere de lutte contre les propos et crimes racistes Bien que cette theacutematique soit situeacutee agrave la peacuteripheacuterie de son champ drsquoaction le Deacutefenseur y porte un vif inteacuterecirct en teacutemoigne le deacuteveloppement du projet laquo Egaliteacute contre racisme raquo qui vise agrave rassembler sur un mecircme site internet de nombreuses

ressources de lutte contre le racisme et les discriminations et qui verra le jour en septembre

A lrsquoinstar de cette plateforme le site internet du Centre fournit des outils aux personnes qui ne sont pas personnellement confronteacutees agrave un acte de racisme mais qui veulent le signaler

Le Centre a eacutegalement mis en place une page web donnant des clefs pour diffuser un contre-discours face aux chaicircnes drsquoemails agrave caractegravere raciste toujours dans la perspective

drsquoinformer et de donner des outils au grand public pour mieux lutter contre les discours racistes

En somme cette rencontre qui a permis drsquoeacutechanger sur les outils deacuteveloppeacutes par le Centre en matiegravere de lutte contre le racisme a eacuteteacute extrecircmement enrichissante pour nourrir le projet de la plateforme laquo Egaliteacute contre racisme raquo et les orientations du Deacutefenseur des Droits

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Deux fillettes retenues en zone drsquoattente agrave Roissy

Le 8 juin dernier le Reacuteseau Education Sans Frontiegraveres a saisi le Deacutefenseur des droits pour la petite Fanta jeune Ivoirienne de trois ans et demi retenue depuis plusieurs jours sans ses parents en zone drsquoattente agrave Roissy[1]

Le Deacutefenseur srsquoest donc tourneacute vers la personne en charge de lrsquoenfant agrave Roissy pour veacuterifier les proceacutedures en cours Le 10 juin 5 jours apregraves son entreacutee dans la zone la petite Fanta a eacuteteacute libeacutereacutee et remise agrave ses parents Le Deacutefenseur des droits poursuit aujourdrsquohui son enquecircte sur les circonstances drsquoune retenue qui lui paraicirct irreacuteguliegravere

De mecircme Andreacuteane acircgeacutee de 6 ans a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoune proceacutedure de retenue dans la zone drsquoattente de Roissy du 6 au 9 juin La fillette franccedilaise qui voyageait seule revenait du Cameroun et un agent de controcircle a estimeacute qursquoelle ne correspondait pas agrave la photo figurant sur ses papiers Cette fois le Deacutefenseur des droits srsquoest saisi drsquooffice degraves qursquoil en a eu connaissance Une enquecircte est en cours

Ces deux cas deacutemontrent que la retenue drsquoenfants mecircme tregraves jeunes en zone drsquoattente est une reacutealiteacute qui perdure Conscient de cette reacutealiteacute le Deacutefenseur des droits avait deacutejagrave dans son avis au Parlement de novembre 2014 relatif agrave la reacuteforme de lrsquoasile recommandeacute la fin des privations de liberteacute agrave la frontiegravere pour tous les mineurs isoleacutes demandeurs drsquoasile quelle que soit leur nationaliteacute et leur admission en France avant drsquoeacuteclaircir leur situation

A lrsquooccasion du retour du projet de loi sur lrsquoasile le droit des eacutetrangers devant lrsquoAssembleacutee nationale le 26 juin il a recommandeacute que le recours agrave la reacutetention des mineurs isoleacutes ou non soit proscrit et que cette interdiction qui ne devrait souffrir drsquoexception soit inscrite dans la loi

Par ailleurs dans son rapport sur le suivi de la Convention Internationale des droits de lrsquoEnfant publieacute le 9 juin le Deacutefenseur des droits recommande drsquoinscrire dans la loi lrsquointerdiction sur lrsquoensemble du territoire franccedilais des mesures privatives de liberteacute pour les enfants de migrants qursquoils soient placeacutes en zone drsquoattente ou en centre de reacutetention administrative

Le Deacutefenseur des droits est aujourdrsquohui encore saisi de cas similaires Ces derniegraveres semaines ce sont les dossiers de trois familles placeacutees en centre de reacutetention administrative qui lui sont parvenus Loin de baisser sa vigilance il veille agrave rappeler son positionnement notamment aupregraves des preacutefectures

[1] Crsquoest dans cette zone que sont regroupeacutees les personnes en situation irreacuteguliegravere souhaitant entrer en France avant drsquoecirctre reacuteachemineacutees agrave lrsquoeacutetranger ou accepteacutees en France

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Solidays 2015 le Deacutefenseur au Village Solidariteacute

Preacutesent depuis plusieurs anneacutees au Village Solidariteacute ndash qui regroupe une centaine drsquoassociations et drsquoONG ndash le Deacutefenseur des droits a cette anneacutee proposeacute aux visiteurs de laquo casser du preacutejugeacute raquo avec le jeu laquo Chamboule tous tes preacutejugeacutes raquo laquo Les noirs ont le rythme dans la peau raquo laquo Les Roms sont des voleurs raquo laquo Les femmes sont sensibles raquohellip autant de steacutereacuteotypes qui nrsquoont pas manqueacute de faire reacuteagir les participants et permis agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits de faire mieux comprendre le risque que constitue une discrimination

Tregraves curieux des missions du Deacutefenseur des droits les 15-30 ans ont abordeacute avec nous des sujets tregraves divers comme les discriminations LGBT lrsquoaccegraves au logement et agrave lrsquoemploi lrsquoaccegraves agrave la santeacute ou encore la promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ils ont eacutegalement pu se photographier en laquo super-heacuteros Deacutefenseur des droits raquo et envoyer leurs images sur les reacuteseaux sociaux

Le Deacutefenseur des droits aux Solidays crsquoest donc un moment drsquoeacutechange simple et ludique avec des jeunes citoyens deacutesireux de mieux comprendre leurs droits Agrave lrsquoanneacutee prochaine

Acteurs et actrices des droits de lrsquoenfant faites labelliser votre projet

Vous avez preacutevu un projet de promotion des droits de lrsquoenfant avant ou pour le 20 novembre prochain date de la journeacutee internationale des droits de lrsquoenfant

Dans le cadre du 25e anniversaire de la Convention des droits

de lrsquoenfant le Deacutefenseur des droits a deacutejagrave labelliseacute pregraves de 100 projets dans toute la France

Profitez des derniegraveres semaines pour nous transmettre votre dossier de labellisation et participer automatiquement agrave la

seacutelection des plus beaux projets 2015 en faveur des droits de lrsquoenfant en France

Vous trouverez plus de renseignements sur notre site internet http25anscdedefenseurdesdroitsfrindexhtml

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Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 3: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Zoom - Lutte contre les discriminations

Eacutegaliteacute femmes-hommes le Deacutefenseur srsquoengage et dialogue avec les associations

Lors de la 5e reacuteunion de ce comiteacute le 16 juin dernier les

repreacutesentants associatifs ont fait part de leurs sujets de preacuteoccupation De nombreuses theacutematiques souleveacutees font eacutecho aux prioriteacutes actuelles du Deacutefenseur et viendront alimenter son action La question du droit au seacutejour des femmes eacutetrangegraveres victimes de violence viendra ainsi nourrir le futur rapport du Deacutefenseur sur les droits des eacutetrangers Le projet de loi relatif au dialogue social et au soutien agrave lrsquoactiviteacute des salarieacutes et lrsquoeacutevolution des obligations des employeurs en matiegravere drsquoeacutegaliteacute femmes-hommes suscite une vigilance commune des associations comme de notre institution

Par ailleurs le Deacutefenseur des droits a informeacute les membres du comiteacute de certaines positions prises dans le cadre drsquoauditions et drsquoavis sur des projets et propositions de loi Ainsi il a par exemple indiqueacute qursquoil avait pris position contre le deacutelit de racolage et contre la peacutenalisation des clients des mesures deacutefavorables agrave lrsquoaccegraves des prostitueacutees agrave leurs droits fondamentaux Il a eacutegalement rappeleacute qursquoil srsquoeacutetait engageacute dans le cadre du projet de loi santeacute pour la suppression de la clause de conscience et du deacutelai de reacuteflexion pour lrsquoIVG ce dernier ndash qui allongeait inutilement le parcours des femmes souhaitant recourir agrave un avortement ndash ayant eacuteteacute finalement supprimeacute Jacques Toubon a eacutegalement souligneacute qursquoil avait pris position en faveur de lrsquoouverture de la PMA agrave toutes les femmes en couple ou ceacutelibataires

Les eacutechanges ont eacutegalement porteacute sur les difficulteacutes rencontreacutees par les femmes handicapeacutees en matiegravere drsquoaccegraves agrave lrsquoemploi Le Deacutefenseur a engageacute une prise de contact avec les institutions concerneacutees

Parmi lrsquoensemble des deacutecisions et actions de promotion du Deacutefenseur eacutevoqueacutees agrave cette occasion a eacuteteacute preacutesenteacutee une nouvelle fiche-ressource Evaluer les emplois agrave preacutedominance feacuteminine sans discriminer destineacutee agrave lrsquoensemble des acteurs de lrsquoeacutegaliteacute femmes-hommes et des acteurs de lrsquoemploi Cette fiche a eacuteteacute eacutelaboreacutee dans le sillage du Guide pour une eacutevaluation non-discriminante des emplois agrave preacutedominance feacuteminine publieacute en mars 2013 et des multiples seacuteances de sensibilisation qui ont eacuteteacute reacutealiseacutees depuis sur le terrain

La fiche rappelle le cadre juridique du principe laquo un salaire eacutegal pour un travail de valeur eacutegale raquo qui tient compte de la seacutegreacutegation sexuelle tregraves forte qui preacutevaut encore en matiegravere drsquoemploi (les femmes nrsquooccupent pas les mecircmes emplois que les hommes) et souligne lrsquoimportance de mettre en œuvre ce principe pour une juste eacutevaluation des emplois occupeacutes par des femmes Les biais sexistes preacutevalent encore dans les actions de peseacutee de lrsquoemploi de lrsquoeacutetablissement drsquoune fiche de poste agrave celui drsquoune offre drsquoemploi en passant par lrsquoeacutevaluation annuelle les classifications professionnelles ou cadres drsquoemploi dans la fonction publique qui deacuteterminent le socle des salaires et reacutemuneacuterations Ainsi de nombreuses compeacutetences mobiliseacutees ne sont pas prises en compte et eacutevalueacutees notamment parce qursquoelles correspondent agrave des qualiteacutes que lrsquoon pense indument inneacutees chez les femmes (et donc gratuites) La peacutenibiliteacute de nombreux emplois feacuteminins que lrsquoon songe par exemple aux caissiegraveres ou aux infirmiegraveres est eacutegalement souvent consideacuterablement sous-eacutevalueacutee la peacutenibiliteacute se reacuteduisant alors aux efforts physiques massifs et ponctuels typiques des emplois masculins

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Discrimination agrave raison de la preacutecariteacute sociale lrsquoenjeu de lrsquoeffectiviteacute des nouveaux critegraveres de discrimination

Prenant exemple sur la mise en œuvre de la loi sur lrsquointerdiction de discrimination agrave raison du lieu de reacutesidence adopteacutee en feacutevrier 2014 le Deacutefenseur attire lrsquoattention du leacutegislateur sur la question de la porteacutee effective de cette nouvelle protection

En effet les saisines du Deacutefenseur reacutevegravelent que quoique le critegravere du lieu de reacutesidence ait eacuteteacute creacuteeacute pour reacutepondre aux situations de discrimination agrave lrsquoembauche des jeunes des quartiers il est solliciteacute pour deacutenoncer la tarification des services offerts par les communes ou les discriminations

territoriales dans les services publics et tregraves peu pour reacutepondre aux difficulteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquoembauche initialement viseacutees

Or il apparaicirct qursquoaucune eacutetude drsquoimpact sur le nouveau critegravere du lieu de reacutesidence ou sur celui de la preacutecariteacute sociale nrsquoait eacuteteacute reacutealiseacutee pour deacutefinir les situations effectives qui seraient susceptibles de faire lrsquoobjet drsquoun recours Or le risque drsquoeacutechec des recours pourrait srsquoaveacuterer tregraves important

Le Deacutefenseur des droits estime que la deacutefinition du concept viseacute par les termes laquo preacutecariteacute sociale raquo devrait ecirctre revue car elle fait glisser lrsquoideacutee de prise en compte de la pauvreteacute vers celle de prise en compte de la preacutecariteacute situation ambigueuml qui ne peut se caracteacuteriser exclusivement par la situation de pauvreteacute ou par la condition sociale (expression retenue par le leacutegislateur du Queacutebec) des inteacuteresseacutes vocables ayant tous une porteacutee diffeacuterente Il apparait que le terme de preacutecariteacute emporte une relativiteacute de la situation viseacutee et une varieacuteteacute de situations qursquoil conviendrait de preacuteciser pour mieux deacutefinir lrsquoobjet de la protection rechercheacutee par le leacutegislateur

La France remplit ses obligations internationales au regard de la lutte contre la pauvreteacute et lrsquoeacutegaliteacute de traitement des personnes les plus preacutecaires par lrsquoensemble de ses politiques publiques de lutte contre lrsquoexclusion ses dispositifs de prise en charge et le principe geacuteneacuteral de lrsquoeacutegaliteacute drsquoaccegraves aux services publics Elle megravene eacutegalement une veacuteritable politique drsquoaccegraves au droit agrave laquelle concourt le Deacutefenseur des droits

Ce dernier traite plusieurs dizaines de milliers de dossiers de personnes en situation de grande preacutecariteacute par an au titre de sa compeacutetence en matiegravere drsquoaccegraves aux services publics

Il constate que le principe drsquoeacutegal drsquoaccegraves aux services publics et les droits speacutecifiquement proteacutegeacutes comme le droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence ou le droit agrave lrsquoeacutecole sont deacutejagrave pris en compte par le droit commun Cependant le public viseacute par la grande preacutecariteacute fait face agrave une beaucoup de difficulteacutes agrave faire valoir ses droits et cette situation justifierait la mise en œuvre drsquoune veacuteritable politique publique drsquoaccegraves aux droits eacuteconomiques sociaux et culturels

Il apparaicirct que la mise en œuvre drsquoune prohibition de discrimination ne permettra pas par elle-mecircme drsquoeacutelargir lrsquoefficaciteacute de la protection des droits des personnes en situation de grande preacutecariteacute Elle permettra dans de rares cas de rechercher la sanction peacutenale agrave la condition qursquoil soit possible drsquoeacutetablir et de deacutenoncer une volonteacute aveacutereacutee drsquoexclusion et de refus de droit Reste que la discrimination aveacutereacutee reste tregraves difficile agrave mettre en œuvre pour tous les critegraveres de discrimination

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Traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi le Deacutefenseur rencontre la Chambre criminelle de la Cour de cassation

Le 4 juin 2015 le Deacutefenseur des droits srsquoest exprimeacute devant lrsquoensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour de cassation afin drsquoeacutevoquer le traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi

Pour caracteacuteriser un deacutelit de discrimination il convient drsquoen eacutetablir trois eacuteleacutements son critegravere son champ et son intentionnaliteacute Ainsi il srsquoagit drsquoabord de comprendre sur quels eacuteleacutements srsquoest fondeacute lrsquoemployeur pour opeacuterer un traitement ineacutegal et de voir auquel des 20 critegraveres de

discrimination prohibeacutes par la loi (handicap sexe originehellip) ils correspondent Il srsquoagit ensuite de deacuteterminer srsquoil srsquoagit drsquoun acte viseacute par la loi En matiegravere drsquoemploi seuls sont viseacutes les refus drsquoembauche la sanction et le licenciement Il faut enfin en eacutetablir lrsquointentionnaliteacute le preacutevenu a-t-il eu conscience de prendre en consideacuteration ce critegravere pour arrecircter sa deacutecision Cet eacuteleacutement ne doit pas ecirctre confondu avec le mobile ndash les raisons qui ont pousseacute agrave commettre ce deacutelit

Le Deacutefenseur a tout particuliegraverement insisteacute sur la question du harcegravelement il a rappeleacute qursquoil nrsquoexistait pas dans le Code peacutenal drsquoinfraction de harcegravelement discriminatoire De ce fait les magistrats sont contraints drsquoopeacuterer un choix quant au fondement des poursuites La discrimination (articles 225-1 et 2 du Code peacutenal) eacutetant plus seacutevegraverement sanctionneacutee que le harcegravelement moral (article 222-33-2) le Deacutefenseur estime que cette caracteacuterisation doit ecirctre privileacutegieacutee en vertu du principe selon lequel les faits doivent ecirctre reacuteprimeacutes sous leur plus haute expression peacutenale

Or le Deacutefenseur des droits a rappeleacute la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle les deacutecisions de lrsquoemployeur affectant la carriegravere ou la reacutemuneacuteration drsquoun salarieacute sans qursquoelles preacutesentent neacutecessairement un caractegravere disciplinaire peuvent constituer si elles sont infondeacutees des sanctions discriminatoires au sens de lrsquoarticle 225-2 alineacutea 3 du Code peacutenal Interpreacuteteacute agrave la lumiegravere de cet arrecirct le deacutelit de discrimination peut permettre drsquoappreacutehender les faits deacutegradant les conditions de travail du salarieacute

Crsquoest cette approche qui a eacuteteacute retenue dans le cadre des deux avis rendus agrave la demande des Parquets de Lille et de Versailles dans des affaires portant sur des faits de harcegravelement moral et de discrimination

Recours collectif en matiegravere de discrimination le Deacutefenseur reste favorable mais vigilant

Un recours collectif est une action en justice qui facilite lrsquoaccegraves aux droits des victimes en deacutemultipliant lrsquoeffet drsquoun jugement sur un groupe de personnes Le Deacutefenseur srsquoeacutetait deacutejagrave positionneacute sur lrsquoinstauration drsquoune action de groupe en matiegravere de discrimination dans un avis du 31 octobre 2013 il srsquoy disait favorable sous reacuteserve de la reacuteunion de conditions techniques juridiques et budgeacutetaires neacutecessaires agrave lrsquoefficaciteacute du recours

Dans son avis du 2 juin 2015 le Deacutefenseur des droits insiste particuliegraverement sur trois points

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Ainsi il srsquointeacuteresse drsquoabord agrave lrsquoobjet de la proposition de loi si les dispositions proteacutegeant contre les 20 critegraveres de discrimination sont nombreuses elles sont heacuteteacuterogegravenes et tous les critegraveres nrsquoont pas le mecircme niveau de protection Lrsquoadoption drsquoune loi instaurant un recours collectif dans cette matiegravere pourrait ecirctre lrsquooccasion drsquounifier ces diffeacuterents niveaux de protection et le reacutegime juridique de la lutte contre les discriminations

Par ailleurs le Deacutefenseur des droits estime que le recours collectif ne devrait pas ecirctre reacuteserveacute uniquement aux associations et aux syndicats comme le suggegravere la proposition de loi En effet si certaines victimes de discrimination ne trouvent pas de tels appuis et si lrsquoexpertise sur le sujet souleveacute nrsquoeacutetait pas repreacutesenteacutee au sein des associations elles ne pourraient pas avoir accegraves agrave ce dispositif drsquoaccegraves aux droits

De plus le droit des discriminations est un contentieux complexe et lourd srsquoinscrivant dans les relations humaines dont les enjeux ne se limitent pas agrave des consideacuterations techniques Il est douteux que les associations puissent supporter le poids de ce monopole de faccedilon durable

Crsquoest eacutegalement pour faciliter cet accegraves aux droits des personnes victimes de discrimination que le Deacutefenseur des droits recommande de scinder le recours collectif en deux phases Ainsi dans une premiegravere eacutetape du contentieux collectif le juge pourrait deacuteterminer si la situation invoqueacutee est repreacutesentative ou non drsquoune situation pouvant faire lrsquoobjet drsquoun jugement de principe agrave porteacutee collective une seconde eacutetape consisterait en un examen de fond dans lequel pourrait se deacuteployer le deacutebat contradictoire

La porteacutee collective donne du poids agrave une proceacutedure et permet agrave celle-ci drsquoemporter un investissement massif en deacutefense Scinder la proceacutedure crsquoest favoriser ndash pour plus drsquoefficaciteacute judiciaire ndash la preacutecision des caracteacuteristiques de ces contentieux par la jurisprudence et eacuteviter de faire traicircner une proceacutedure qui ne remplirait pas les exigences requises pour avoir une porteacutee collective Crsquoest preacutevoir dans le cadre de la proceacutedure une eacutetape qui tranche la question de la porteacutee collective du recours et de ce fait favoriser le regraveglement de situations de discrimination agrave cause de lrsquoenjeu financier de la condamnation eacuteventuelle

Enfin le Deacutefenseur des droits souligne qursquoil ne souhaite pas ecirctre lui-mecircme impliqueacute dans la proceacutedure drsquoaction de groupe en tant que partie car le principe drsquoeacutegaliteacute des armes lrsquoobligerait alors agrave abandonner ses pouvoirs drsquoenquecircte et son statut drsquoamicus curiae qui lui garantissent aujourdrsquohui son indeacutependance

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Laction du Deacutefenseur des droits

La Deacutefenseure des enfants aux Assises de la protection de lrsquoenfance

Lrsquoeacutedition 2014 des Assises srsquoeacutetait acheveacutee sur les teacutemoignages de jeunes ayant eacuteteacute accompagneacutes dans le cadre de lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance Ils avaient pointeacute les forces et faiblesses de leur parcours

Cette eacutedition 2015 srsquoest attacheacutee speacutecifiquement aux pistes drsquoameacutelioration souhaitables et aux innovations possibles et existantes pour rendre les parcours de ces jeunes plus faciles et mieux les proteacuteger en tant qursquoenfants mais aussi que futurs adultes

Geneviegraveve Avenard Deacutefenseure des enfants a apporteacute son expertise lors de la table ronde pleacuteniegravere intituleacutee laquo Le regard des meacutedias un risque agrave prendre raquo aux cocircteacutes notamment drsquoEmmanuelle Bercot actrice sceacutenariste du film Polisse et reacutealisatrice de La tecircte haute

Marie Lieberherr cheffe du pocircle Protection des personnes ndash Deacutefense des enfants a pour sa part participeacute agrave lrsquoatelier consacreacute au laquo Projet pour lrsquoenfant (PPE) quelles innovations quelle prise de risques raquo suite agrave lrsquoeacutetude meneacutee par le Deacutefenseur des droits sur la mise en place de ces PPE par les conseils deacutepartementaux

Le stand du Deacutefenseur des droits ouvert durant les deux jours a fait lrsquoobjet drsquoune grande affluence et a permis de nombreux eacutechanges avec les professionnels de lrsquoenfance Les outils de communication pour la deacutefense et la promotion des droits de lrsquoenfant ont eacuteteacute particuliegraverement appreacutecieacutes

Lutte contre le racisme le Deacutefenseur se rend au Centre Interfeacutedeacuteral pour lrsquoeacutegaliteacute des chances de Belgique

Lrsquoobjectif de cette rencontre eacutetait drsquoeacutechanger sur la porteacutee de lrsquoaction du Centre en matiegravere de lutte contre les propos et crimes racistes Bien que cette theacutematique soit situeacutee agrave la peacuteripheacuterie de son champ drsquoaction le Deacutefenseur y porte un vif inteacuterecirct en teacutemoigne le deacuteveloppement du projet laquo Egaliteacute contre racisme raquo qui vise agrave rassembler sur un mecircme site internet de nombreuses

ressources de lutte contre le racisme et les discriminations et qui verra le jour en septembre

A lrsquoinstar de cette plateforme le site internet du Centre fournit des outils aux personnes qui ne sont pas personnellement confronteacutees agrave un acte de racisme mais qui veulent le signaler

Le Centre a eacutegalement mis en place une page web donnant des clefs pour diffuser un contre-discours face aux chaicircnes drsquoemails agrave caractegravere raciste toujours dans la perspective

drsquoinformer et de donner des outils au grand public pour mieux lutter contre les discours racistes

En somme cette rencontre qui a permis drsquoeacutechanger sur les outils deacuteveloppeacutes par le Centre en matiegravere de lutte contre le racisme a eacuteteacute extrecircmement enrichissante pour nourrir le projet de la plateforme laquo Egaliteacute contre racisme raquo et les orientations du Deacutefenseur des Droits

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Deux fillettes retenues en zone drsquoattente agrave Roissy

Le 8 juin dernier le Reacuteseau Education Sans Frontiegraveres a saisi le Deacutefenseur des droits pour la petite Fanta jeune Ivoirienne de trois ans et demi retenue depuis plusieurs jours sans ses parents en zone drsquoattente agrave Roissy[1]

Le Deacutefenseur srsquoest donc tourneacute vers la personne en charge de lrsquoenfant agrave Roissy pour veacuterifier les proceacutedures en cours Le 10 juin 5 jours apregraves son entreacutee dans la zone la petite Fanta a eacuteteacute libeacutereacutee et remise agrave ses parents Le Deacutefenseur des droits poursuit aujourdrsquohui son enquecircte sur les circonstances drsquoune retenue qui lui paraicirct irreacuteguliegravere

De mecircme Andreacuteane acircgeacutee de 6 ans a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoune proceacutedure de retenue dans la zone drsquoattente de Roissy du 6 au 9 juin La fillette franccedilaise qui voyageait seule revenait du Cameroun et un agent de controcircle a estimeacute qursquoelle ne correspondait pas agrave la photo figurant sur ses papiers Cette fois le Deacutefenseur des droits srsquoest saisi drsquooffice degraves qursquoil en a eu connaissance Une enquecircte est en cours

Ces deux cas deacutemontrent que la retenue drsquoenfants mecircme tregraves jeunes en zone drsquoattente est une reacutealiteacute qui perdure Conscient de cette reacutealiteacute le Deacutefenseur des droits avait deacutejagrave dans son avis au Parlement de novembre 2014 relatif agrave la reacuteforme de lrsquoasile recommandeacute la fin des privations de liberteacute agrave la frontiegravere pour tous les mineurs isoleacutes demandeurs drsquoasile quelle que soit leur nationaliteacute et leur admission en France avant drsquoeacuteclaircir leur situation

A lrsquooccasion du retour du projet de loi sur lrsquoasile le droit des eacutetrangers devant lrsquoAssembleacutee nationale le 26 juin il a recommandeacute que le recours agrave la reacutetention des mineurs isoleacutes ou non soit proscrit et que cette interdiction qui ne devrait souffrir drsquoexception soit inscrite dans la loi

Par ailleurs dans son rapport sur le suivi de la Convention Internationale des droits de lrsquoEnfant publieacute le 9 juin le Deacutefenseur des droits recommande drsquoinscrire dans la loi lrsquointerdiction sur lrsquoensemble du territoire franccedilais des mesures privatives de liberteacute pour les enfants de migrants qursquoils soient placeacutes en zone drsquoattente ou en centre de reacutetention administrative

Le Deacutefenseur des droits est aujourdrsquohui encore saisi de cas similaires Ces derniegraveres semaines ce sont les dossiers de trois familles placeacutees en centre de reacutetention administrative qui lui sont parvenus Loin de baisser sa vigilance il veille agrave rappeler son positionnement notamment aupregraves des preacutefectures

[1] Crsquoest dans cette zone que sont regroupeacutees les personnes en situation irreacuteguliegravere souhaitant entrer en France avant drsquoecirctre reacuteachemineacutees agrave lrsquoeacutetranger ou accepteacutees en France

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Solidays 2015 le Deacutefenseur au Village Solidariteacute

Preacutesent depuis plusieurs anneacutees au Village Solidariteacute ndash qui regroupe une centaine drsquoassociations et drsquoONG ndash le Deacutefenseur des droits a cette anneacutee proposeacute aux visiteurs de laquo casser du preacutejugeacute raquo avec le jeu laquo Chamboule tous tes preacutejugeacutes raquo laquo Les noirs ont le rythme dans la peau raquo laquo Les Roms sont des voleurs raquo laquo Les femmes sont sensibles raquohellip autant de steacutereacuteotypes qui nrsquoont pas manqueacute de faire reacuteagir les participants et permis agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits de faire mieux comprendre le risque que constitue une discrimination

Tregraves curieux des missions du Deacutefenseur des droits les 15-30 ans ont abordeacute avec nous des sujets tregraves divers comme les discriminations LGBT lrsquoaccegraves au logement et agrave lrsquoemploi lrsquoaccegraves agrave la santeacute ou encore la promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ils ont eacutegalement pu se photographier en laquo super-heacuteros Deacutefenseur des droits raquo et envoyer leurs images sur les reacuteseaux sociaux

Le Deacutefenseur des droits aux Solidays crsquoest donc un moment drsquoeacutechange simple et ludique avec des jeunes citoyens deacutesireux de mieux comprendre leurs droits Agrave lrsquoanneacutee prochaine

Acteurs et actrices des droits de lrsquoenfant faites labelliser votre projet

Vous avez preacutevu un projet de promotion des droits de lrsquoenfant avant ou pour le 20 novembre prochain date de la journeacutee internationale des droits de lrsquoenfant

Dans le cadre du 25e anniversaire de la Convention des droits

de lrsquoenfant le Deacutefenseur des droits a deacutejagrave labelliseacute pregraves de 100 projets dans toute la France

Profitez des derniegraveres semaines pour nous transmettre votre dossier de labellisation et participer automatiquement agrave la

seacutelection des plus beaux projets 2015 en faveur des droits de lrsquoenfant en France

Vous trouverez plus de renseignements sur notre site internet http25anscdedefenseurdesdroitsfrindexhtml

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Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 4: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Discrimination agrave raison de la preacutecariteacute sociale lrsquoenjeu de lrsquoeffectiviteacute des nouveaux critegraveres de discrimination

Prenant exemple sur la mise en œuvre de la loi sur lrsquointerdiction de discrimination agrave raison du lieu de reacutesidence adopteacutee en feacutevrier 2014 le Deacutefenseur attire lrsquoattention du leacutegislateur sur la question de la porteacutee effective de cette nouvelle protection

En effet les saisines du Deacutefenseur reacutevegravelent que quoique le critegravere du lieu de reacutesidence ait eacuteteacute creacuteeacute pour reacutepondre aux situations de discrimination agrave lrsquoembauche des jeunes des quartiers il est solliciteacute pour deacutenoncer la tarification des services offerts par les communes ou les discriminations

territoriales dans les services publics et tregraves peu pour reacutepondre aux difficulteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquoembauche initialement viseacutees

Or il apparaicirct qursquoaucune eacutetude drsquoimpact sur le nouveau critegravere du lieu de reacutesidence ou sur celui de la preacutecariteacute sociale nrsquoait eacuteteacute reacutealiseacutee pour deacutefinir les situations effectives qui seraient susceptibles de faire lrsquoobjet drsquoun recours Or le risque drsquoeacutechec des recours pourrait srsquoaveacuterer tregraves important

Le Deacutefenseur des droits estime que la deacutefinition du concept viseacute par les termes laquo preacutecariteacute sociale raquo devrait ecirctre revue car elle fait glisser lrsquoideacutee de prise en compte de la pauvreteacute vers celle de prise en compte de la preacutecariteacute situation ambigueuml qui ne peut se caracteacuteriser exclusivement par la situation de pauvreteacute ou par la condition sociale (expression retenue par le leacutegislateur du Queacutebec) des inteacuteresseacutes vocables ayant tous une porteacutee diffeacuterente Il apparait que le terme de preacutecariteacute emporte une relativiteacute de la situation viseacutee et une varieacuteteacute de situations qursquoil conviendrait de preacuteciser pour mieux deacutefinir lrsquoobjet de la protection rechercheacutee par le leacutegislateur

La France remplit ses obligations internationales au regard de la lutte contre la pauvreteacute et lrsquoeacutegaliteacute de traitement des personnes les plus preacutecaires par lrsquoensemble de ses politiques publiques de lutte contre lrsquoexclusion ses dispositifs de prise en charge et le principe geacuteneacuteral de lrsquoeacutegaliteacute drsquoaccegraves aux services publics Elle megravene eacutegalement une veacuteritable politique drsquoaccegraves au droit agrave laquelle concourt le Deacutefenseur des droits

Ce dernier traite plusieurs dizaines de milliers de dossiers de personnes en situation de grande preacutecariteacute par an au titre de sa compeacutetence en matiegravere drsquoaccegraves aux services publics

Il constate que le principe drsquoeacutegal drsquoaccegraves aux services publics et les droits speacutecifiquement proteacutegeacutes comme le droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence ou le droit agrave lrsquoeacutecole sont deacutejagrave pris en compte par le droit commun Cependant le public viseacute par la grande preacutecariteacute fait face agrave une beaucoup de difficulteacutes agrave faire valoir ses droits et cette situation justifierait la mise en œuvre drsquoune veacuteritable politique publique drsquoaccegraves aux droits eacuteconomiques sociaux et culturels

Il apparaicirct que la mise en œuvre drsquoune prohibition de discrimination ne permettra pas par elle-mecircme drsquoeacutelargir lrsquoefficaciteacute de la protection des droits des personnes en situation de grande preacutecariteacute Elle permettra dans de rares cas de rechercher la sanction peacutenale agrave la condition qursquoil soit possible drsquoeacutetablir et de deacutenoncer une volonteacute aveacutereacutee drsquoexclusion et de refus de droit Reste que la discrimination aveacutereacutee reste tregraves difficile agrave mettre en œuvre pour tous les critegraveres de discrimination

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Traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi le Deacutefenseur rencontre la Chambre criminelle de la Cour de cassation

Le 4 juin 2015 le Deacutefenseur des droits srsquoest exprimeacute devant lrsquoensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour de cassation afin drsquoeacutevoquer le traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi

Pour caracteacuteriser un deacutelit de discrimination il convient drsquoen eacutetablir trois eacuteleacutements son critegravere son champ et son intentionnaliteacute Ainsi il srsquoagit drsquoabord de comprendre sur quels eacuteleacutements srsquoest fondeacute lrsquoemployeur pour opeacuterer un traitement ineacutegal et de voir auquel des 20 critegraveres de

discrimination prohibeacutes par la loi (handicap sexe originehellip) ils correspondent Il srsquoagit ensuite de deacuteterminer srsquoil srsquoagit drsquoun acte viseacute par la loi En matiegravere drsquoemploi seuls sont viseacutes les refus drsquoembauche la sanction et le licenciement Il faut enfin en eacutetablir lrsquointentionnaliteacute le preacutevenu a-t-il eu conscience de prendre en consideacuteration ce critegravere pour arrecircter sa deacutecision Cet eacuteleacutement ne doit pas ecirctre confondu avec le mobile ndash les raisons qui ont pousseacute agrave commettre ce deacutelit

Le Deacutefenseur a tout particuliegraverement insisteacute sur la question du harcegravelement il a rappeleacute qursquoil nrsquoexistait pas dans le Code peacutenal drsquoinfraction de harcegravelement discriminatoire De ce fait les magistrats sont contraints drsquoopeacuterer un choix quant au fondement des poursuites La discrimination (articles 225-1 et 2 du Code peacutenal) eacutetant plus seacutevegraverement sanctionneacutee que le harcegravelement moral (article 222-33-2) le Deacutefenseur estime que cette caracteacuterisation doit ecirctre privileacutegieacutee en vertu du principe selon lequel les faits doivent ecirctre reacuteprimeacutes sous leur plus haute expression peacutenale

Or le Deacutefenseur des droits a rappeleacute la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle les deacutecisions de lrsquoemployeur affectant la carriegravere ou la reacutemuneacuteration drsquoun salarieacute sans qursquoelles preacutesentent neacutecessairement un caractegravere disciplinaire peuvent constituer si elles sont infondeacutees des sanctions discriminatoires au sens de lrsquoarticle 225-2 alineacutea 3 du Code peacutenal Interpreacuteteacute agrave la lumiegravere de cet arrecirct le deacutelit de discrimination peut permettre drsquoappreacutehender les faits deacutegradant les conditions de travail du salarieacute

Crsquoest cette approche qui a eacuteteacute retenue dans le cadre des deux avis rendus agrave la demande des Parquets de Lille et de Versailles dans des affaires portant sur des faits de harcegravelement moral et de discrimination

Recours collectif en matiegravere de discrimination le Deacutefenseur reste favorable mais vigilant

Un recours collectif est une action en justice qui facilite lrsquoaccegraves aux droits des victimes en deacutemultipliant lrsquoeffet drsquoun jugement sur un groupe de personnes Le Deacutefenseur srsquoeacutetait deacutejagrave positionneacute sur lrsquoinstauration drsquoune action de groupe en matiegravere de discrimination dans un avis du 31 octobre 2013 il srsquoy disait favorable sous reacuteserve de la reacuteunion de conditions techniques juridiques et budgeacutetaires neacutecessaires agrave lrsquoefficaciteacute du recours

Dans son avis du 2 juin 2015 le Deacutefenseur des droits insiste particuliegraverement sur trois points

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Ainsi il srsquointeacuteresse drsquoabord agrave lrsquoobjet de la proposition de loi si les dispositions proteacutegeant contre les 20 critegraveres de discrimination sont nombreuses elles sont heacuteteacuterogegravenes et tous les critegraveres nrsquoont pas le mecircme niveau de protection Lrsquoadoption drsquoune loi instaurant un recours collectif dans cette matiegravere pourrait ecirctre lrsquooccasion drsquounifier ces diffeacuterents niveaux de protection et le reacutegime juridique de la lutte contre les discriminations

Par ailleurs le Deacutefenseur des droits estime que le recours collectif ne devrait pas ecirctre reacuteserveacute uniquement aux associations et aux syndicats comme le suggegravere la proposition de loi En effet si certaines victimes de discrimination ne trouvent pas de tels appuis et si lrsquoexpertise sur le sujet souleveacute nrsquoeacutetait pas repreacutesenteacutee au sein des associations elles ne pourraient pas avoir accegraves agrave ce dispositif drsquoaccegraves aux droits

De plus le droit des discriminations est un contentieux complexe et lourd srsquoinscrivant dans les relations humaines dont les enjeux ne se limitent pas agrave des consideacuterations techniques Il est douteux que les associations puissent supporter le poids de ce monopole de faccedilon durable

Crsquoest eacutegalement pour faciliter cet accegraves aux droits des personnes victimes de discrimination que le Deacutefenseur des droits recommande de scinder le recours collectif en deux phases Ainsi dans une premiegravere eacutetape du contentieux collectif le juge pourrait deacuteterminer si la situation invoqueacutee est repreacutesentative ou non drsquoune situation pouvant faire lrsquoobjet drsquoun jugement de principe agrave porteacutee collective une seconde eacutetape consisterait en un examen de fond dans lequel pourrait se deacuteployer le deacutebat contradictoire

La porteacutee collective donne du poids agrave une proceacutedure et permet agrave celle-ci drsquoemporter un investissement massif en deacutefense Scinder la proceacutedure crsquoest favoriser ndash pour plus drsquoefficaciteacute judiciaire ndash la preacutecision des caracteacuteristiques de ces contentieux par la jurisprudence et eacuteviter de faire traicircner une proceacutedure qui ne remplirait pas les exigences requises pour avoir une porteacutee collective Crsquoest preacutevoir dans le cadre de la proceacutedure une eacutetape qui tranche la question de la porteacutee collective du recours et de ce fait favoriser le regraveglement de situations de discrimination agrave cause de lrsquoenjeu financier de la condamnation eacuteventuelle

Enfin le Deacutefenseur des droits souligne qursquoil ne souhaite pas ecirctre lui-mecircme impliqueacute dans la proceacutedure drsquoaction de groupe en tant que partie car le principe drsquoeacutegaliteacute des armes lrsquoobligerait alors agrave abandonner ses pouvoirs drsquoenquecircte et son statut drsquoamicus curiae qui lui garantissent aujourdrsquohui son indeacutependance

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Laction du Deacutefenseur des droits

La Deacutefenseure des enfants aux Assises de la protection de lrsquoenfance

Lrsquoeacutedition 2014 des Assises srsquoeacutetait acheveacutee sur les teacutemoignages de jeunes ayant eacuteteacute accompagneacutes dans le cadre de lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance Ils avaient pointeacute les forces et faiblesses de leur parcours

Cette eacutedition 2015 srsquoest attacheacutee speacutecifiquement aux pistes drsquoameacutelioration souhaitables et aux innovations possibles et existantes pour rendre les parcours de ces jeunes plus faciles et mieux les proteacuteger en tant qursquoenfants mais aussi que futurs adultes

Geneviegraveve Avenard Deacutefenseure des enfants a apporteacute son expertise lors de la table ronde pleacuteniegravere intituleacutee laquo Le regard des meacutedias un risque agrave prendre raquo aux cocircteacutes notamment drsquoEmmanuelle Bercot actrice sceacutenariste du film Polisse et reacutealisatrice de La tecircte haute

Marie Lieberherr cheffe du pocircle Protection des personnes ndash Deacutefense des enfants a pour sa part participeacute agrave lrsquoatelier consacreacute au laquo Projet pour lrsquoenfant (PPE) quelles innovations quelle prise de risques raquo suite agrave lrsquoeacutetude meneacutee par le Deacutefenseur des droits sur la mise en place de ces PPE par les conseils deacutepartementaux

Le stand du Deacutefenseur des droits ouvert durant les deux jours a fait lrsquoobjet drsquoune grande affluence et a permis de nombreux eacutechanges avec les professionnels de lrsquoenfance Les outils de communication pour la deacutefense et la promotion des droits de lrsquoenfant ont eacuteteacute particuliegraverement appreacutecieacutes

Lutte contre le racisme le Deacutefenseur se rend au Centre Interfeacutedeacuteral pour lrsquoeacutegaliteacute des chances de Belgique

Lrsquoobjectif de cette rencontre eacutetait drsquoeacutechanger sur la porteacutee de lrsquoaction du Centre en matiegravere de lutte contre les propos et crimes racistes Bien que cette theacutematique soit situeacutee agrave la peacuteripheacuterie de son champ drsquoaction le Deacutefenseur y porte un vif inteacuterecirct en teacutemoigne le deacuteveloppement du projet laquo Egaliteacute contre racisme raquo qui vise agrave rassembler sur un mecircme site internet de nombreuses

ressources de lutte contre le racisme et les discriminations et qui verra le jour en septembre

A lrsquoinstar de cette plateforme le site internet du Centre fournit des outils aux personnes qui ne sont pas personnellement confronteacutees agrave un acte de racisme mais qui veulent le signaler

Le Centre a eacutegalement mis en place une page web donnant des clefs pour diffuser un contre-discours face aux chaicircnes drsquoemails agrave caractegravere raciste toujours dans la perspective

drsquoinformer et de donner des outils au grand public pour mieux lutter contre les discours racistes

En somme cette rencontre qui a permis drsquoeacutechanger sur les outils deacuteveloppeacutes par le Centre en matiegravere de lutte contre le racisme a eacuteteacute extrecircmement enrichissante pour nourrir le projet de la plateforme laquo Egaliteacute contre racisme raquo et les orientations du Deacutefenseur des Droits

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Deux fillettes retenues en zone drsquoattente agrave Roissy

Le 8 juin dernier le Reacuteseau Education Sans Frontiegraveres a saisi le Deacutefenseur des droits pour la petite Fanta jeune Ivoirienne de trois ans et demi retenue depuis plusieurs jours sans ses parents en zone drsquoattente agrave Roissy[1]

Le Deacutefenseur srsquoest donc tourneacute vers la personne en charge de lrsquoenfant agrave Roissy pour veacuterifier les proceacutedures en cours Le 10 juin 5 jours apregraves son entreacutee dans la zone la petite Fanta a eacuteteacute libeacutereacutee et remise agrave ses parents Le Deacutefenseur des droits poursuit aujourdrsquohui son enquecircte sur les circonstances drsquoune retenue qui lui paraicirct irreacuteguliegravere

De mecircme Andreacuteane acircgeacutee de 6 ans a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoune proceacutedure de retenue dans la zone drsquoattente de Roissy du 6 au 9 juin La fillette franccedilaise qui voyageait seule revenait du Cameroun et un agent de controcircle a estimeacute qursquoelle ne correspondait pas agrave la photo figurant sur ses papiers Cette fois le Deacutefenseur des droits srsquoest saisi drsquooffice degraves qursquoil en a eu connaissance Une enquecircte est en cours

Ces deux cas deacutemontrent que la retenue drsquoenfants mecircme tregraves jeunes en zone drsquoattente est une reacutealiteacute qui perdure Conscient de cette reacutealiteacute le Deacutefenseur des droits avait deacutejagrave dans son avis au Parlement de novembre 2014 relatif agrave la reacuteforme de lrsquoasile recommandeacute la fin des privations de liberteacute agrave la frontiegravere pour tous les mineurs isoleacutes demandeurs drsquoasile quelle que soit leur nationaliteacute et leur admission en France avant drsquoeacuteclaircir leur situation

A lrsquooccasion du retour du projet de loi sur lrsquoasile le droit des eacutetrangers devant lrsquoAssembleacutee nationale le 26 juin il a recommandeacute que le recours agrave la reacutetention des mineurs isoleacutes ou non soit proscrit et que cette interdiction qui ne devrait souffrir drsquoexception soit inscrite dans la loi

Par ailleurs dans son rapport sur le suivi de la Convention Internationale des droits de lrsquoEnfant publieacute le 9 juin le Deacutefenseur des droits recommande drsquoinscrire dans la loi lrsquointerdiction sur lrsquoensemble du territoire franccedilais des mesures privatives de liberteacute pour les enfants de migrants qursquoils soient placeacutes en zone drsquoattente ou en centre de reacutetention administrative

Le Deacutefenseur des droits est aujourdrsquohui encore saisi de cas similaires Ces derniegraveres semaines ce sont les dossiers de trois familles placeacutees en centre de reacutetention administrative qui lui sont parvenus Loin de baisser sa vigilance il veille agrave rappeler son positionnement notamment aupregraves des preacutefectures

[1] Crsquoest dans cette zone que sont regroupeacutees les personnes en situation irreacuteguliegravere souhaitant entrer en France avant drsquoecirctre reacuteachemineacutees agrave lrsquoeacutetranger ou accepteacutees en France

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Solidays 2015 le Deacutefenseur au Village Solidariteacute

Preacutesent depuis plusieurs anneacutees au Village Solidariteacute ndash qui regroupe une centaine drsquoassociations et drsquoONG ndash le Deacutefenseur des droits a cette anneacutee proposeacute aux visiteurs de laquo casser du preacutejugeacute raquo avec le jeu laquo Chamboule tous tes preacutejugeacutes raquo laquo Les noirs ont le rythme dans la peau raquo laquo Les Roms sont des voleurs raquo laquo Les femmes sont sensibles raquohellip autant de steacutereacuteotypes qui nrsquoont pas manqueacute de faire reacuteagir les participants et permis agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits de faire mieux comprendre le risque que constitue une discrimination

Tregraves curieux des missions du Deacutefenseur des droits les 15-30 ans ont abordeacute avec nous des sujets tregraves divers comme les discriminations LGBT lrsquoaccegraves au logement et agrave lrsquoemploi lrsquoaccegraves agrave la santeacute ou encore la promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ils ont eacutegalement pu se photographier en laquo super-heacuteros Deacutefenseur des droits raquo et envoyer leurs images sur les reacuteseaux sociaux

Le Deacutefenseur des droits aux Solidays crsquoest donc un moment drsquoeacutechange simple et ludique avec des jeunes citoyens deacutesireux de mieux comprendre leurs droits Agrave lrsquoanneacutee prochaine

Acteurs et actrices des droits de lrsquoenfant faites labelliser votre projet

Vous avez preacutevu un projet de promotion des droits de lrsquoenfant avant ou pour le 20 novembre prochain date de la journeacutee internationale des droits de lrsquoenfant

Dans le cadre du 25e anniversaire de la Convention des droits

de lrsquoenfant le Deacutefenseur des droits a deacutejagrave labelliseacute pregraves de 100 projets dans toute la France

Profitez des derniegraveres semaines pour nous transmettre votre dossier de labellisation et participer automatiquement agrave la

seacutelection des plus beaux projets 2015 en faveur des droits de lrsquoenfant en France

Vous trouverez plus de renseignements sur notre site internet http25anscdedefenseurdesdroitsfrindexhtml

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Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 5: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi le Deacutefenseur rencontre la Chambre criminelle de la Cour de cassation

Le 4 juin 2015 le Deacutefenseur des droits srsquoest exprimeacute devant lrsquoensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour de cassation afin drsquoeacutevoquer le traitement peacutenal des discriminations dans lrsquoemploi

Pour caracteacuteriser un deacutelit de discrimination il convient drsquoen eacutetablir trois eacuteleacutements son critegravere son champ et son intentionnaliteacute Ainsi il srsquoagit drsquoabord de comprendre sur quels eacuteleacutements srsquoest fondeacute lrsquoemployeur pour opeacuterer un traitement ineacutegal et de voir auquel des 20 critegraveres de

discrimination prohibeacutes par la loi (handicap sexe originehellip) ils correspondent Il srsquoagit ensuite de deacuteterminer srsquoil srsquoagit drsquoun acte viseacute par la loi En matiegravere drsquoemploi seuls sont viseacutes les refus drsquoembauche la sanction et le licenciement Il faut enfin en eacutetablir lrsquointentionnaliteacute le preacutevenu a-t-il eu conscience de prendre en consideacuteration ce critegravere pour arrecircter sa deacutecision Cet eacuteleacutement ne doit pas ecirctre confondu avec le mobile ndash les raisons qui ont pousseacute agrave commettre ce deacutelit

Le Deacutefenseur a tout particuliegraverement insisteacute sur la question du harcegravelement il a rappeleacute qursquoil nrsquoexistait pas dans le Code peacutenal drsquoinfraction de harcegravelement discriminatoire De ce fait les magistrats sont contraints drsquoopeacuterer un choix quant au fondement des poursuites La discrimination (articles 225-1 et 2 du Code peacutenal) eacutetant plus seacutevegraverement sanctionneacutee que le harcegravelement moral (article 222-33-2) le Deacutefenseur estime que cette caracteacuterisation doit ecirctre privileacutegieacutee en vertu du principe selon lequel les faits doivent ecirctre reacuteprimeacutes sous leur plus haute expression peacutenale

Or le Deacutefenseur des droits a rappeleacute la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle les deacutecisions de lrsquoemployeur affectant la carriegravere ou la reacutemuneacuteration drsquoun salarieacute sans qursquoelles preacutesentent neacutecessairement un caractegravere disciplinaire peuvent constituer si elles sont infondeacutees des sanctions discriminatoires au sens de lrsquoarticle 225-2 alineacutea 3 du Code peacutenal Interpreacuteteacute agrave la lumiegravere de cet arrecirct le deacutelit de discrimination peut permettre drsquoappreacutehender les faits deacutegradant les conditions de travail du salarieacute

Crsquoest cette approche qui a eacuteteacute retenue dans le cadre des deux avis rendus agrave la demande des Parquets de Lille et de Versailles dans des affaires portant sur des faits de harcegravelement moral et de discrimination

Recours collectif en matiegravere de discrimination le Deacutefenseur reste favorable mais vigilant

Un recours collectif est une action en justice qui facilite lrsquoaccegraves aux droits des victimes en deacutemultipliant lrsquoeffet drsquoun jugement sur un groupe de personnes Le Deacutefenseur srsquoeacutetait deacutejagrave positionneacute sur lrsquoinstauration drsquoune action de groupe en matiegravere de discrimination dans un avis du 31 octobre 2013 il srsquoy disait favorable sous reacuteserve de la reacuteunion de conditions techniques juridiques et budgeacutetaires neacutecessaires agrave lrsquoefficaciteacute du recours

Dans son avis du 2 juin 2015 le Deacutefenseur des droits insiste particuliegraverement sur trois points

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Ainsi il srsquointeacuteresse drsquoabord agrave lrsquoobjet de la proposition de loi si les dispositions proteacutegeant contre les 20 critegraveres de discrimination sont nombreuses elles sont heacuteteacuterogegravenes et tous les critegraveres nrsquoont pas le mecircme niveau de protection Lrsquoadoption drsquoune loi instaurant un recours collectif dans cette matiegravere pourrait ecirctre lrsquooccasion drsquounifier ces diffeacuterents niveaux de protection et le reacutegime juridique de la lutte contre les discriminations

Par ailleurs le Deacutefenseur des droits estime que le recours collectif ne devrait pas ecirctre reacuteserveacute uniquement aux associations et aux syndicats comme le suggegravere la proposition de loi En effet si certaines victimes de discrimination ne trouvent pas de tels appuis et si lrsquoexpertise sur le sujet souleveacute nrsquoeacutetait pas repreacutesenteacutee au sein des associations elles ne pourraient pas avoir accegraves agrave ce dispositif drsquoaccegraves aux droits

De plus le droit des discriminations est un contentieux complexe et lourd srsquoinscrivant dans les relations humaines dont les enjeux ne se limitent pas agrave des consideacuterations techniques Il est douteux que les associations puissent supporter le poids de ce monopole de faccedilon durable

Crsquoest eacutegalement pour faciliter cet accegraves aux droits des personnes victimes de discrimination que le Deacutefenseur des droits recommande de scinder le recours collectif en deux phases Ainsi dans une premiegravere eacutetape du contentieux collectif le juge pourrait deacuteterminer si la situation invoqueacutee est repreacutesentative ou non drsquoune situation pouvant faire lrsquoobjet drsquoun jugement de principe agrave porteacutee collective une seconde eacutetape consisterait en un examen de fond dans lequel pourrait se deacuteployer le deacutebat contradictoire

La porteacutee collective donne du poids agrave une proceacutedure et permet agrave celle-ci drsquoemporter un investissement massif en deacutefense Scinder la proceacutedure crsquoest favoriser ndash pour plus drsquoefficaciteacute judiciaire ndash la preacutecision des caracteacuteristiques de ces contentieux par la jurisprudence et eacuteviter de faire traicircner une proceacutedure qui ne remplirait pas les exigences requises pour avoir une porteacutee collective Crsquoest preacutevoir dans le cadre de la proceacutedure une eacutetape qui tranche la question de la porteacutee collective du recours et de ce fait favoriser le regraveglement de situations de discrimination agrave cause de lrsquoenjeu financier de la condamnation eacuteventuelle

Enfin le Deacutefenseur des droits souligne qursquoil ne souhaite pas ecirctre lui-mecircme impliqueacute dans la proceacutedure drsquoaction de groupe en tant que partie car le principe drsquoeacutegaliteacute des armes lrsquoobligerait alors agrave abandonner ses pouvoirs drsquoenquecircte et son statut drsquoamicus curiae qui lui garantissent aujourdrsquohui son indeacutependance

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Laction du Deacutefenseur des droits

La Deacutefenseure des enfants aux Assises de la protection de lrsquoenfance

Lrsquoeacutedition 2014 des Assises srsquoeacutetait acheveacutee sur les teacutemoignages de jeunes ayant eacuteteacute accompagneacutes dans le cadre de lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance Ils avaient pointeacute les forces et faiblesses de leur parcours

Cette eacutedition 2015 srsquoest attacheacutee speacutecifiquement aux pistes drsquoameacutelioration souhaitables et aux innovations possibles et existantes pour rendre les parcours de ces jeunes plus faciles et mieux les proteacuteger en tant qursquoenfants mais aussi que futurs adultes

Geneviegraveve Avenard Deacutefenseure des enfants a apporteacute son expertise lors de la table ronde pleacuteniegravere intituleacutee laquo Le regard des meacutedias un risque agrave prendre raquo aux cocircteacutes notamment drsquoEmmanuelle Bercot actrice sceacutenariste du film Polisse et reacutealisatrice de La tecircte haute

Marie Lieberherr cheffe du pocircle Protection des personnes ndash Deacutefense des enfants a pour sa part participeacute agrave lrsquoatelier consacreacute au laquo Projet pour lrsquoenfant (PPE) quelles innovations quelle prise de risques raquo suite agrave lrsquoeacutetude meneacutee par le Deacutefenseur des droits sur la mise en place de ces PPE par les conseils deacutepartementaux

Le stand du Deacutefenseur des droits ouvert durant les deux jours a fait lrsquoobjet drsquoune grande affluence et a permis de nombreux eacutechanges avec les professionnels de lrsquoenfance Les outils de communication pour la deacutefense et la promotion des droits de lrsquoenfant ont eacuteteacute particuliegraverement appreacutecieacutes

Lutte contre le racisme le Deacutefenseur se rend au Centre Interfeacutedeacuteral pour lrsquoeacutegaliteacute des chances de Belgique

Lrsquoobjectif de cette rencontre eacutetait drsquoeacutechanger sur la porteacutee de lrsquoaction du Centre en matiegravere de lutte contre les propos et crimes racistes Bien que cette theacutematique soit situeacutee agrave la peacuteripheacuterie de son champ drsquoaction le Deacutefenseur y porte un vif inteacuterecirct en teacutemoigne le deacuteveloppement du projet laquo Egaliteacute contre racisme raquo qui vise agrave rassembler sur un mecircme site internet de nombreuses

ressources de lutte contre le racisme et les discriminations et qui verra le jour en septembre

A lrsquoinstar de cette plateforme le site internet du Centre fournit des outils aux personnes qui ne sont pas personnellement confronteacutees agrave un acte de racisme mais qui veulent le signaler

Le Centre a eacutegalement mis en place une page web donnant des clefs pour diffuser un contre-discours face aux chaicircnes drsquoemails agrave caractegravere raciste toujours dans la perspective

drsquoinformer et de donner des outils au grand public pour mieux lutter contre les discours racistes

En somme cette rencontre qui a permis drsquoeacutechanger sur les outils deacuteveloppeacutes par le Centre en matiegravere de lutte contre le racisme a eacuteteacute extrecircmement enrichissante pour nourrir le projet de la plateforme laquo Egaliteacute contre racisme raquo et les orientations du Deacutefenseur des Droits

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Deux fillettes retenues en zone drsquoattente agrave Roissy

Le 8 juin dernier le Reacuteseau Education Sans Frontiegraveres a saisi le Deacutefenseur des droits pour la petite Fanta jeune Ivoirienne de trois ans et demi retenue depuis plusieurs jours sans ses parents en zone drsquoattente agrave Roissy[1]

Le Deacutefenseur srsquoest donc tourneacute vers la personne en charge de lrsquoenfant agrave Roissy pour veacuterifier les proceacutedures en cours Le 10 juin 5 jours apregraves son entreacutee dans la zone la petite Fanta a eacuteteacute libeacutereacutee et remise agrave ses parents Le Deacutefenseur des droits poursuit aujourdrsquohui son enquecircte sur les circonstances drsquoune retenue qui lui paraicirct irreacuteguliegravere

De mecircme Andreacuteane acircgeacutee de 6 ans a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoune proceacutedure de retenue dans la zone drsquoattente de Roissy du 6 au 9 juin La fillette franccedilaise qui voyageait seule revenait du Cameroun et un agent de controcircle a estimeacute qursquoelle ne correspondait pas agrave la photo figurant sur ses papiers Cette fois le Deacutefenseur des droits srsquoest saisi drsquooffice degraves qursquoil en a eu connaissance Une enquecircte est en cours

Ces deux cas deacutemontrent que la retenue drsquoenfants mecircme tregraves jeunes en zone drsquoattente est une reacutealiteacute qui perdure Conscient de cette reacutealiteacute le Deacutefenseur des droits avait deacutejagrave dans son avis au Parlement de novembre 2014 relatif agrave la reacuteforme de lrsquoasile recommandeacute la fin des privations de liberteacute agrave la frontiegravere pour tous les mineurs isoleacutes demandeurs drsquoasile quelle que soit leur nationaliteacute et leur admission en France avant drsquoeacuteclaircir leur situation

A lrsquooccasion du retour du projet de loi sur lrsquoasile le droit des eacutetrangers devant lrsquoAssembleacutee nationale le 26 juin il a recommandeacute que le recours agrave la reacutetention des mineurs isoleacutes ou non soit proscrit et que cette interdiction qui ne devrait souffrir drsquoexception soit inscrite dans la loi

Par ailleurs dans son rapport sur le suivi de la Convention Internationale des droits de lrsquoEnfant publieacute le 9 juin le Deacutefenseur des droits recommande drsquoinscrire dans la loi lrsquointerdiction sur lrsquoensemble du territoire franccedilais des mesures privatives de liberteacute pour les enfants de migrants qursquoils soient placeacutes en zone drsquoattente ou en centre de reacutetention administrative

Le Deacutefenseur des droits est aujourdrsquohui encore saisi de cas similaires Ces derniegraveres semaines ce sont les dossiers de trois familles placeacutees en centre de reacutetention administrative qui lui sont parvenus Loin de baisser sa vigilance il veille agrave rappeler son positionnement notamment aupregraves des preacutefectures

[1] Crsquoest dans cette zone que sont regroupeacutees les personnes en situation irreacuteguliegravere souhaitant entrer en France avant drsquoecirctre reacuteachemineacutees agrave lrsquoeacutetranger ou accepteacutees en France

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Solidays 2015 le Deacutefenseur au Village Solidariteacute

Preacutesent depuis plusieurs anneacutees au Village Solidariteacute ndash qui regroupe une centaine drsquoassociations et drsquoONG ndash le Deacutefenseur des droits a cette anneacutee proposeacute aux visiteurs de laquo casser du preacutejugeacute raquo avec le jeu laquo Chamboule tous tes preacutejugeacutes raquo laquo Les noirs ont le rythme dans la peau raquo laquo Les Roms sont des voleurs raquo laquo Les femmes sont sensibles raquohellip autant de steacutereacuteotypes qui nrsquoont pas manqueacute de faire reacuteagir les participants et permis agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits de faire mieux comprendre le risque que constitue une discrimination

Tregraves curieux des missions du Deacutefenseur des droits les 15-30 ans ont abordeacute avec nous des sujets tregraves divers comme les discriminations LGBT lrsquoaccegraves au logement et agrave lrsquoemploi lrsquoaccegraves agrave la santeacute ou encore la promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ils ont eacutegalement pu se photographier en laquo super-heacuteros Deacutefenseur des droits raquo et envoyer leurs images sur les reacuteseaux sociaux

Le Deacutefenseur des droits aux Solidays crsquoest donc un moment drsquoeacutechange simple et ludique avec des jeunes citoyens deacutesireux de mieux comprendre leurs droits Agrave lrsquoanneacutee prochaine

Acteurs et actrices des droits de lrsquoenfant faites labelliser votre projet

Vous avez preacutevu un projet de promotion des droits de lrsquoenfant avant ou pour le 20 novembre prochain date de la journeacutee internationale des droits de lrsquoenfant

Dans le cadre du 25e anniversaire de la Convention des droits

de lrsquoenfant le Deacutefenseur des droits a deacutejagrave labelliseacute pregraves de 100 projets dans toute la France

Profitez des derniegraveres semaines pour nous transmettre votre dossier de labellisation et participer automatiquement agrave la

seacutelection des plus beaux projets 2015 en faveur des droits de lrsquoenfant en France

Vous trouverez plus de renseignements sur notre site internet http25anscdedefenseurdesdroitsfrindexhtml

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Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 6: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Ainsi il srsquointeacuteresse drsquoabord agrave lrsquoobjet de la proposition de loi si les dispositions proteacutegeant contre les 20 critegraveres de discrimination sont nombreuses elles sont heacuteteacuterogegravenes et tous les critegraveres nrsquoont pas le mecircme niveau de protection Lrsquoadoption drsquoune loi instaurant un recours collectif dans cette matiegravere pourrait ecirctre lrsquooccasion drsquounifier ces diffeacuterents niveaux de protection et le reacutegime juridique de la lutte contre les discriminations

Par ailleurs le Deacutefenseur des droits estime que le recours collectif ne devrait pas ecirctre reacuteserveacute uniquement aux associations et aux syndicats comme le suggegravere la proposition de loi En effet si certaines victimes de discrimination ne trouvent pas de tels appuis et si lrsquoexpertise sur le sujet souleveacute nrsquoeacutetait pas repreacutesenteacutee au sein des associations elles ne pourraient pas avoir accegraves agrave ce dispositif drsquoaccegraves aux droits

De plus le droit des discriminations est un contentieux complexe et lourd srsquoinscrivant dans les relations humaines dont les enjeux ne se limitent pas agrave des consideacuterations techniques Il est douteux que les associations puissent supporter le poids de ce monopole de faccedilon durable

Crsquoest eacutegalement pour faciliter cet accegraves aux droits des personnes victimes de discrimination que le Deacutefenseur des droits recommande de scinder le recours collectif en deux phases Ainsi dans une premiegravere eacutetape du contentieux collectif le juge pourrait deacuteterminer si la situation invoqueacutee est repreacutesentative ou non drsquoune situation pouvant faire lrsquoobjet drsquoun jugement de principe agrave porteacutee collective une seconde eacutetape consisterait en un examen de fond dans lequel pourrait se deacuteployer le deacutebat contradictoire

La porteacutee collective donne du poids agrave une proceacutedure et permet agrave celle-ci drsquoemporter un investissement massif en deacutefense Scinder la proceacutedure crsquoest favoriser ndash pour plus drsquoefficaciteacute judiciaire ndash la preacutecision des caracteacuteristiques de ces contentieux par la jurisprudence et eacuteviter de faire traicircner une proceacutedure qui ne remplirait pas les exigences requises pour avoir une porteacutee collective Crsquoest preacutevoir dans le cadre de la proceacutedure une eacutetape qui tranche la question de la porteacutee collective du recours et de ce fait favoriser le regraveglement de situations de discrimination agrave cause de lrsquoenjeu financier de la condamnation eacuteventuelle

Enfin le Deacutefenseur des droits souligne qursquoil ne souhaite pas ecirctre lui-mecircme impliqueacute dans la proceacutedure drsquoaction de groupe en tant que partie car le principe drsquoeacutegaliteacute des armes lrsquoobligerait alors agrave abandonner ses pouvoirs drsquoenquecircte et son statut drsquoamicus curiae qui lui garantissent aujourdrsquohui son indeacutependance

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Laction du Deacutefenseur des droits

La Deacutefenseure des enfants aux Assises de la protection de lrsquoenfance

Lrsquoeacutedition 2014 des Assises srsquoeacutetait acheveacutee sur les teacutemoignages de jeunes ayant eacuteteacute accompagneacutes dans le cadre de lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance Ils avaient pointeacute les forces et faiblesses de leur parcours

Cette eacutedition 2015 srsquoest attacheacutee speacutecifiquement aux pistes drsquoameacutelioration souhaitables et aux innovations possibles et existantes pour rendre les parcours de ces jeunes plus faciles et mieux les proteacuteger en tant qursquoenfants mais aussi que futurs adultes

Geneviegraveve Avenard Deacutefenseure des enfants a apporteacute son expertise lors de la table ronde pleacuteniegravere intituleacutee laquo Le regard des meacutedias un risque agrave prendre raquo aux cocircteacutes notamment drsquoEmmanuelle Bercot actrice sceacutenariste du film Polisse et reacutealisatrice de La tecircte haute

Marie Lieberherr cheffe du pocircle Protection des personnes ndash Deacutefense des enfants a pour sa part participeacute agrave lrsquoatelier consacreacute au laquo Projet pour lrsquoenfant (PPE) quelles innovations quelle prise de risques raquo suite agrave lrsquoeacutetude meneacutee par le Deacutefenseur des droits sur la mise en place de ces PPE par les conseils deacutepartementaux

Le stand du Deacutefenseur des droits ouvert durant les deux jours a fait lrsquoobjet drsquoune grande affluence et a permis de nombreux eacutechanges avec les professionnels de lrsquoenfance Les outils de communication pour la deacutefense et la promotion des droits de lrsquoenfant ont eacuteteacute particuliegraverement appreacutecieacutes

Lutte contre le racisme le Deacutefenseur se rend au Centre Interfeacutedeacuteral pour lrsquoeacutegaliteacute des chances de Belgique

Lrsquoobjectif de cette rencontre eacutetait drsquoeacutechanger sur la porteacutee de lrsquoaction du Centre en matiegravere de lutte contre les propos et crimes racistes Bien que cette theacutematique soit situeacutee agrave la peacuteripheacuterie de son champ drsquoaction le Deacutefenseur y porte un vif inteacuterecirct en teacutemoigne le deacuteveloppement du projet laquo Egaliteacute contre racisme raquo qui vise agrave rassembler sur un mecircme site internet de nombreuses

ressources de lutte contre le racisme et les discriminations et qui verra le jour en septembre

A lrsquoinstar de cette plateforme le site internet du Centre fournit des outils aux personnes qui ne sont pas personnellement confronteacutees agrave un acte de racisme mais qui veulent le signaler

Le Centre a eacutegalement mis en place une page web donnant des clefs pour diffuser un contre-discours face aux chaicircnes drsquoemails agrave caractegravere raciste toujours dans la perspective

drsquoinformer et de donner des outils au grand public pour mieux lutter contre les discours racistes

En somme cette rencontre qui a permis drsquoeacutechanger sur les outils deacuteveloppeacutes par le Centre en matiegravere de lutte contre le racisme a eacuteteacute extrecircmement enrichissante pour nourrir le projet de la plateforme laquo Egaliteacute contre racisme raquo et les orientations du Deacutefenseur des Droits

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Deux fillettes retenues en zone drsquoattente agrave Roissy

Le 8 juin dernier le Reacuteseau Education Sans Frontiegraveres a saisi le Deacutefenseur des droits pour la petite Fanta jeune Ivoirienne de trois ans et demi retenue depuis plusieurs jours sans ses parents en zone drsquoattente agrave Roissy[1]

Le Deacutefenseur srsquoest donc tourneacute vers la personne en charge de lrsquoenfant agrave Roissy pour veacuterifier les proceacutedures en cours Le 10 juin 5 jours apregraves son entreacutee dans la zone la petite Fanta a eacuteteacute libeacutereacutee et remise agrave ses parents Le Deacutefenseur des droits poursuit aujourdrsquohui son enquecircte sur les circonstances drsquoune retenue qui lui paraicirct irreacuteguliegravere

De mecircme Andreacuteane acircgeacutee de 6 ans a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoune proceacutedure de retenue dans la zone drsquoattente de Roissy du 6 au 9 juin La fillette franccedilaise qui voyageait seule revenait du Cameroun et un agent de controcircle a estimeacute qursquoelle ne correspondait pas agrave la photo figurant sur ses papiers Cette fois le Deacutefenseur des droits srsquoest saisi drsquooffice degraves qursquoil en a eu connaissance Une enquecircte est en cours

Ces deux cas deacutemontrent que la retenue drsquoenfants mecircme tregraves jeunes en zone drsquoattente est une reacutealiteacute qui perdure Conscient de cette reacutealiteacute le Deacutefenseur des droits avait deacutejagrave dans son avis au Parlement de novembre 2014 relatif agrave la reacuteforme de lrsquoasile recommandeacute la fin des privations de liberteacute agrave la frontiegravere pour tous les mineurs isoleacutes demandeurs drsquoasile quelle que soit leur nationaliteacute et leur admission en France avant drsquoeacuteclaircir leur situation

A lrsquooccasion du retour du projet de loi sur lrsquoasile le droit des eacutetrangers devant lrsquoAssembleacutee nationale le 26 juin il a recommandeacute que le recours agrave la reacutetention des mineurs isoleacutes ou non soit proscrit et que cette interdiction qui ne devrait souffrir drsquoexception soit inscrite dans la loi

Par ailleurs dans son rapport sur le suivi de la Convention Internationale des droits de lrsquoEnfant publieacute le 9 juin le Deacutefenseur des droits recommande drsquoinscrire dans la loi lrsquointerdiction sur lrsquoensemble du territoire franccedilais des mesures privatives de liberteacute pour les enfants de migrants qursquoils soient placeacutes en zone drsquoattente ou en centre de reacutetention administrative

Le Deacutefenseur des droits est aujourdrsquohui encore saisi de cas similaires Ces derniegraveres semaines ce sont les dossiers de trois familles placeacutees en centre de reacutetention administrative qui lui sont parvenus Loin de baisser sa vigilance il veille agrave rappeler son positionnement notamment aupregraves des preacutefectures

[1] Crsquoest dans cette zone que sont regroupeacutees les personnes en situation irreacuteguliegravere souhaitant entrer en France avant drsquoecirctre reacuteachemineacutees agrave lrsquoeacutetranger ou accepteacutees en France

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Solidays 2015 le Deacutefenseur au Village Solidariteacute

Preacutesent depuis plusieurs anneacutees au Village Solidariteacute ndash qui regroupe une centaine drsquoassociations et drsquoONG ndash le Deacutefenseur des droits a cette anneacutee proposeacute aux visiteurs de laquo casser du preacutejugeacute raquo avec le jeu laquo Chamboule tous tes preacutejugeacutes raquo laquo Les noirs ont le rythme dans la peau raquo laquo Les Roms sont des voleurs raquo laquo Les femmes sont sensibles raquohellip autant de steacutereacuteotypes qui nrsquoont pas manqueacute de faire reacuteagir les participants et permis agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits de faire mieux comprendre le risque que constitue une discrimination

Tregraves curieux des missions du Deacutefenseur des droits les 15-30 ans ont abordeacute avec nous des sujets tregraves divers comme les discriminations LGBT lrsquoaccegraves au logement et agrave lrsquoemploi lrsquoaccegraves agrave la santeacute ou encore la promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ils ont eacutegalement pu se photographier en laquo super-heacuteros Deacutefenseur des droits raquo et envoyer leurs images sur les reacuteseaux sociaux

Le Deacutefenseur des droits aux Solidays crsquoest donc un moment drsquoeacutechange simple et ludique avec des jeunes citoyens deacutesireux de mieux comprendre leurs droits Agrave lrsquoanneacutee prochaine

Acteurs et actrices des droits de lrsquoenfant faites labelliser votre projet

Vous avez preacutevu un projet de promotion des droits de lrsquoenfant avant ou pour le 20 novembre prochain date de la journeacutee internationale des droits de lrsquoenfant

Dans le cadre du 25e anniversaire de la Convention des droits

de lrsquoenfant le Deacutefenseur des droits a deacutejagrave labelliseacute pregraves de 100 projets dans toute la France

Profitez des derniegraveres semaines pour nous transmettre votre dossier de labellisation et participer automatiquement agrave la

seacutelection des plus beaux projets 2015 en faveur des droits de lrsquoenfant en France

Vous trouverez plus de renseignements sur notre site internet http25anscdedefenseurdesdroitsfrindexhtml

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Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 7: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Laction du Deacutefenseur des droits

La Deacutefenseure des enfants aux Assises de la protection de lrsquoenfance

Lrsquoeacutedition 2014 des Assises srsquoeacutetait acheveacutee sur les teacutemoignages de jeunes ayant eacuteteacute accompagneacutes dans le cadre de lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance Ils avaient pointeacute les forces et faiblesses de leur parcours

Cette eacutedition 2015 srsquoest attacheacutee speacutecifiquement aux pistes drsquoameacutelioration souhaitables et aux innovations possibles et existantes pour rendre les parcours de ces jeunes plus faciles et mieux les proteacuteger en tant qursquoenfants mais aussi que futurs adultes

Geneviegraveve Avenard Deacutefenseure des enfants a apporteacute son expertise lors de la table ronde pleacuteniegravere intituleacutee laquo Le regard des meacutedias un risque agrave prendre raquo aux cocircteacutes notamment drsquoEmmanuelle Bercot actrice sceacutenariste du film Polisse et reacutealisatrice de La tecircte haute

Marie Lieberherr cheffe du pocircle Protection des personnes ndash Deacutefense des enfants a pour sa part participeacute agrave lrsquoatelier consacreacute au laquo Projet pour lrsquoenfant (PPE) quelles innovations quelle prise de risques raquo suite agrave lrsquoeacutetude meneacutee par le Deacutefenseur des droits sur la mise en place de ces PPE par les conseils deacutepartementaux

Le stand du Deacutefenseur des droits ouvert durant les deux jours a fait lrsquoobjet drsquoune grande affluence et a permis de nombreux eacutechanges avec les professionnels de lrsquoenfance Les outils de communication pour la deacutefense et la promotion des droits de lrsquoenfant ont eacuteteacute particuliegraverement appreacutecieacutes

Lutte contre le racisme le Deacutefenseur se rend au Centre Interfeacutedeacuteral pour lrsquoeacutegaliteacute des chances de Belgique

Lrsquoobjectif de cette rencontre eacutetait drsquoeacutechanger sur la porteacutee de lrsquoaction du Centre en matiegravere de lutte contre les propos et crimes racistes Bien que cette theacutematique soit situeacutee agrave la peacuteripheacuterie de son champ drsquoaction le Deacutefenseur y porte un vif inteacuterecirct en teacutemoigne le deacuteveloppement du projet laquo Egaliteacute contre racisme raquo qui vise agrave rassembler sur un mecircme site internet de nombreuses

ressources de lutte contre le racisme et les discriminations et qui verra le jour en septembre

A lrsquoinstar de cette plateforme le site internet du Centre fournit des outils aux personnes qui ne sont pas personnellement confronteacutees agrave un acte de racisme mais qui veulent le signaler

Le Centre a eacutegalement mis en place une page web donnant des clefs pour diffuser un contre-discours face aux chaicircnes drsquoemails agrave caractegravere raciste toujours dans la perspective

drsquoinformer et de donner des outils au grand public pour mieux lutter contre les discours racistes

En somme cette rencontre qui a permis drsquoeacutechanger sur les outils deacuteveloppeacutes par le Centre en matiegravere de lutte contre le racisme a eacuteteacute extrecircmement enrichissante pour nourrir le projet de la plateforme laquo Egaliteacute contre racisme raquo et les orientations du Deacutefenseur des Droits

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Deux fillettes retenues en zone drsquoattente agrave Roissy

Le 8 juin dernier le Reacuteseau Education Sans Frontiegraveres a saisi le Deacutefenseur des droits pour la petite Fanta jeune Ivoirienne de trois ans et demi retenue depuis plusieurs jours sans ses parents en zone drsquoattente agrave Roissy[1]

Le Deacutefenseur srsquoest donc tourneacute vers la personne en charge de lrsquoenfant agrave Roissy pour veacuterifier les proceacutedures en cours Le 10 juin 5 jours apregraves son entreacutee dans la zone la petite Fanta a eacuteteacute libeacutereacutee et remise agrave ses parents Le Deacutefenseur des droits poursuit aujourdrsquohui son enquecircte sur les circonstances drsquoune retenue qui lui paraicirct irreacuteguliegravere

De mecircme Andreacuteane acircgeacutee de 6 ans a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoune proceacutedure de retenue dans la zone drsquoattente de Roissy du 6 au 9 juin La fillette franccedilaise qui voyageait seule revenait du Cameroun et un agent de controcircle a estimeacute qursquoelle ne correspondait pas agrave la photo figurant sur ses papiers Cette fois le Deacutefenseur des droits srsquoest saisi drsquooffice degraves qursquoil en a eu connaissance Une enquecircte est en cours

Ces deux cas deacutemontrent que la retenue drsquoenfants mecircme tregraves jeunes en zone drsquoattente est une reacutealiteacute qui perdure Conscient de cette reacutealiteacute le Deacutefenseur des droits avait deacutejagrave dans son avis au Parlement de novembre 2014 relatif agrave la reacuteforme de lrsquoasile recommandeacute la fin des privations de liberteacute agrave la frontiegravere pour tous les mineurs isoleacutes demandeurs drsquoasile quelle que soit leur nationaliteacute et leur admission en France avant drsquoeacuteclaircir leur situation

A lrsquooccasion du retour du projet de loi sur lrsquoasile le droit des eacutetrangers devant lrsquoAssembleacutee nationale le 26 juin il a recommandeacute que le recours agrave la reacutetention des mineurs isoleacutes ou non soit proscrit et que cette interdiction qui ne devrait souffrir drsquoexception soit inscrite dans la loi

Par ailleurs dans son rapport sur le suivi de la Convention Internationale des droits de lrsquoEnfant publieacute le 9 juin le Deacutefenseur des droits recommande drsquoinscrire dans la loi lrsquointerdiction sur lrsquoensemble du territoire franccedilais des mesures privatives de liberteacute pour les enfants de migrants qursquoils soient placeacutes en zone drsquoattente ou en centre de reacutetention administrative

Le Deacutefenseur des droits est aujourdrsquohui encore saisi de cas similaires Ces derniegraveres semaines ce sont les dossiers de trois familles placeacutees en centre de reacutetention administrative qui lui sont parvenus Loin de baisser sa vigilance il veille agrave rappeler son positionnement notamment aupregraves des preacutefectures

[1] Crsquoest dans cette zone que sont regroupeacutees les personnes en situation irreacuteguliegravere souhaitant entrer en France avant drsquoecirctre reacuteachemineacutees agrave lrsquoeacutetranger ou accepteacutees en France

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Solidays 2015 le Deacutefenseur au Village Solidariteacute

Preacutesent depuis plusieurs anneacutees au Village Solidariteacute ndash qui regroupe une centaine drsquoassociations et drsquoONG ndash le Deacutefenseur des droits a cette anneacutee proposeacute aux visiteurs de laquo casser du preacutejugeacute raquo avec le jeu laquo Chamboule tous tes preacutejugeacutes raquo laquo Les noirs ont le rythme dans la peau raquo laquo Les Roms sont des voleurs raquo laquo Les femmes sont sensibles raquohellip autant de steacutereacuteotypes qui nrsquoont pas manqueacute de faire reacuteagir les participants et permis agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits de faire mieux comprendre le risque que constitue une discrimination

Tregraves curieux des missions du Deacutefenseur des droits les 15-30 ans ont abordeacute avec nous des sujets tregraves divers comme les discriminations LGBT lrsquoaccegraves au logement et agrave lrsquoemploi lrsquoaccegraves agrave la santeacute ou encore la promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ils ont eacutegalement pu se photographier en laquo super-heacuteros Deacutefenseur des droits raquo et envoyer leurs images sur les reacuteseaux sociaux

Le Deacutefenseur des droits aux Solidays crsquoest donc un moment drsquoeacutechange simple et ludique avec des jeunes citoyens deacutesireux de mieux comprendre leurs droits Agrave lrsquoanneacutee prochaine

Acteurs et actrices des droits de lrsquoenfant faites labelliser votre projet

Vous avez preacutevu un projet de promotion des droits de lrsquoenfant avant ou pour le 20 novembre prochain date de la journeacutee internationale des droits de lrsquoenfant

Dans le cadre du 25e anniversaire de la Convention des droits

de lrsquoenfant le Deacutefenseur des droits a deacutejagrave labelliseacute pregraves de 100 projets dans toute la France

Profitez des derniegraveres semaines pour nous transmettre votre dossier de labellisation et participer automatiquement agrave la

seacutelection des plus beaux projets 2015 en faveur des droits de lrsquoenfant en France

Vous trouverez plus de renseignements sur notre site internet http25anscdedefenseurdesdroitsfrindexhtml

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Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 8: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Deux fillettes retenues en zone drsquoattente agrave Roissy

Le 8 juin dernier le Reacuteseau Education Sans Frontiegraveres a saisi le Deacutefenseur des droits pour la petite Fanta jeune Ivoirienne de trois ans et demi retenue depuis plusieurs jours sans ses parents en zone drsquoattente agrave Roissy[1]

Le Deacutefenseur srsquoest donc tourneacute vers la personne en charge de lrsquoenfant agrave Roissy pour veacuterifier les proceacutedures en cours Le 10 juin 5 jours apregraves son entreacutee dans la zone la petite Fanta a eacuteteacute libeacutereacutee et remise agrave ses parents Le Deacutefenseur des droits poursuit aujourdrsquohui son enquecircte sur les circonstances drsquoune retenue qui lui paraicirct irreacuteguliegravere

De mecircme Andreacuteane acircgeacutee de 6 ans a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoune proceacutedure de retenue dans la zone drsquoattente de Roissy du 6 au 9 juin La fillette franccedilaise qui voyageait seule revenait du Cameroun et un agent de controcircle a estimeacute qursquoelle ne correspondait pas agrave la photo figurant sur ses papiers Cette fois le Deacutefenseur des droits srsquoest saisi drsquooffice degraves qursquoil en a eu connaissance Une enquecircte est en cours

Ces deux cas deacutemontrent que la retenue drsquoenfants mecircme tregraves jeunes en zone drsquoattente est une reacutealiteacute qui perdure Conscient de cette reacutealiteacute le Deacutefenseur des droits avait deacutejagrave dans son avis au Parlement de novembre 2014 relatif agrave la reacuteforme de lrsquoasile recommandeacute la fin des privations de liberteacute agrave la frontiegravere pour tous les mineurs isoleacutes demandeurs drsquoasile quelle que soit leur nationaliteacute et leur admission en France avant drsquoeacuteclaircir leur situation

A lrsquooccasion du retour du projet de loi sur lrsquoasile le droit des eacutetrangers devant lrsquoAssembleacutee nationale le 26 juin il a recommandeacute que le recours agrave la reacutetention des mineurs isoleacutes ou non soit proscrit et que cette interdiction qui ne devrait souffrir drsquoexception soit inscrite dans la loi

Par ailleurs dans son rapport sur le suivi de la Convention Internationale des droits de lrsquoEnfant publieacute le 9 juin le Deacutefenseur des droits recommande drsquoinscrire dans la loi lrsquointerdiction sur lrsquoensemble du territoire franccedilais des mesures privatives de liberteacute pour les enfants de migrants qursquoils soient placeacutes en zone drsquoattente ou en centre de reacutetention administrative

Le Deacutefenseur des droits est aujourdrsquohui encore saisi de cas similaires Ces derniegraveres semaines ce sont les dossiers de trois familles placeacutees en centre de reacutetention administrative qui lui sont parvenus Loin de baisser sa vigilance il veille agrave rappeler son positionnement notamment aupregraves des preacutefectures

[1] Crsquoest dans cette zone que sont regroupeacutees les personnes en situation irreacuteguliegravere souhaitant entrer en France avant drsquoecirctre reacuteachemineacutees agrave lrsquoeacutetranger ou accepteacutees en France

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Solidays 2015 le Deacutefenseur au Village Solidariteacute

Preacutesent depuis plusieurs anneacutees au Village Solidariteacute ndash qui regroupe une centaine drsquoassociations et drsquoONG ndash le Deacutefenseur des droits a cette anneacutee proposeacute aux visiteurs de laquo casser du preacutejugeacute raquo avec le jeu laquo Chamboule tous tes preacutejugeacutes raquo laquo Les noirs ont le rythme dans la peau raquo laquo Les Roms sont des voleurs raquo laquo Les femmes sont sensibles raquohellip autant de steacutereacuteotypes qui nrsquoont pas manqueacute de faire reacuteagir les participants et permis agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits de faire mieux comprendre le risque que constitue une discrimination

Tregraves curieux des missions du Deacutefenseur des droits les 15-30 ans ont abordeacute avec nous des sujets tregraves divers comme les discriminations LGBT lrsquoaccegraves au logement et agrave lrsquoemploi lrsquoaccegraves agrave la santeacute ou encore la promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ils ont eacutegalement pu se photographier en laquo super-heacuteros Deacutefenseur des droits raquo et envoyer leurs images sur les reacuteseaux sociaux

Le Deacutefenseur des droits aux Solidays crsquoest donc un moment drsquoeacutechange simple et ludique avec des jeunes citoyens deacutesireux de mieux comprendre leurs droits Agrave lrsquoanneacutee prochaine

Acteurs et actrices des droits de lrsquoenfant faites labelliser votre projet

Vous avez preacutevu un projet de promotion des droits de lrsquoenfant avant ou pour le 20 novembre prochain date de la journeacutee internationale des droits de lrsquoenfant

Dans le cadre du 25e anniversaire de la Convention des droits

de lrsquoenfant le Deacutefenseur des droits a deacutejagrave labelliseacute pregraves de 100 projets dans toute la France

Profitez des derniegraveres semaines pour nous transmettre votre dossier de labellisation et participer automatiquement agrave la

seacutelection des plus beaux projets 2015 en faveur des droits de lrsquoenfant en France

Vous trouverez plus de renseignements sur notre site internet http25anscdedefenseurdesdroitsfrindexhtml

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Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 9: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Solidays 2015 le Deacutefenseur au Village Solidariteacute

Preacutesent depuis plusieurs anneacutees au Village Solidariteacute ndash qui regroupe une centaine drsquoassociations et drsquoONG ndash le Deacutefenseur des droits a cette anneacutee proposeacute aux visiteurs de laquo casser du preacutejugeacute raquo avec le jeu laquo Chamboule tous tes preacutejugeacutes raquo laquo Les noirs ont le rythme dans la peau raquo laquo Les Roms sont des voleurs raquo laquo Les femmes sont sensibles raquohellip autant de steacutereacuteotypes qui nrsquoont pas manqueacute de faire reacuteagir les participants et permis agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits de faire mieux comprendre le risque que constitue une discrimination

Tregraves curieux des missions du Deacutefenseur des droits les 15-30 ans ont abordeacute avec nous des sujets tregraves divers comme les discriminations LGBT lrsquoaccegraves au logement et agrave lrsquoemploi lrsquoaccegraves agrave la santeacute ou encore la promotion de lrsquoeacutegaliteacute Ils ont eacutegalement pu se photographier en laquo super-heacuteros Deacutefenseur des droits raquo et envoyer leurs images sur les reacuteseaux sociaux

Le Deacutefenseur des droits aux Solidays crsquoest donc un moment drsquoeacutechange simple et ludique avec des jeunes citoyens deacutesireux de mieux comprendre leurs droits Agrave lrsquoanneacutee prochaine

Acteurs et actrices des droits de lrsquoenfant faites labelliser votre projet

Vous avez preacutevu un projet de promotion des droits de lrsquoenfant avant ou pour le 20 novembre prochain date de la journeacutee internationale des droits de lrsquoenfant

Dans le cadre du 25e anniversaire de la Convention des droits

de lrsquoenfant le Deacutefenseur des droits a deacutejagrave labelliseacute pregraves de 100 projets dans toute la France

Profitez des derniegraveres semaines pour nous transmettre votre dossier de labellisation et participer automatiquement agrave la

seacutelection des plus beaux projets 2015 en faveur des droits de lrsquoenfant en France

Vous trouverez plus de renseignements sur notre site internet http25anscdedefenseurdesdroitsfrindexhtml

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Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 10: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Mise en œuvre en France de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant le Deacutefenseur dresse un bilan mitigeacute

Jusqursquoagrave lrsquoaudition de la France la proceacutedure devant le Comiteacute

preacutevoit une consultation continue de la socieacuteteacute civile des

organisations non gouvernementales et des institutions

nationales de deacutefense des droits de lrsquohomme qui sont inviteacutees

agrave deacuteposer leur rapport sur la mise en œuvre de la CIDE

Crsquoest dans le cadre de cette proceacutedure que srsquoest inscrite la remise du premier rapport drsquoappreacuteciation du Deacutefenseur des droits et de son adjointe la Deacutefenseure des enfants en feacutevrier 2015

Le Deacutefenseur des droits saisi de nombreuses reacuteclamations individuelles formule reacuteguliegraverement depuis sa creacuteation en 2011 observations analyses et recommandations sur le respect des droits de lrsquoenfant en France Forte de son expertise lrsquoinstitution a preacutepareacute son rapport drsquoappreacuteciation sur la mise en œuvre de lrsquoensemble des droits consacreacutes par la Convention qui couvrent tous les aspects de la vie des enfants

Les conclusions qursquoil tire de lrsquoanalyse de la situation des droits de lrsquoenfant en France sont en demi-teinte Si des progregraves ont eacuteteacute reacutealiseacutes dans diffeacuterents domaines (handicap protection de lrsquoenfance refondation de lrsquoeacutecole) ils doivent cependant ecirctre contrebalanceacutes par des difficulteacutes importantes daccegraves aux droits pour les enfants les plus vulneacuterables enfants pauvres enfants handicapeacutes enfants migrants seuls ou en famille Par ailleurs des ineacutegaliteacutes territoriales subsistent en particulier en matiegravere de protection de lrsquoenfance et drsquoaccegraves aux soins et agrave lrsquoeacuteducation Alors que nous ceacuteleacutebrons le 25

egraveme anniversaire de la Convention le Deacutefenseur des

droits deacuteplore la persistance drsquoune meacuteconnaissance globale de la Convention et lrsquoabsence de volonteacute de lrsquoEtat de placer de maniegravere effective les droits et lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant au cœur des politiques publiques afin de garantir agrave tous les enfants la mise en œuvre de la Convention

Des mesures concregravetes doivent ecirctre prises en ce sens et ce dans lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant et pour reacutepondre aux recommandations reacutepeacuteteacutees du Comiteacute des droits de lrsquoenfant Il est urgent aujourdrsquohui que soit eacutelaboreacutee et porteacutee de maniegravere collective une strateacutegie globale et coheacuterente en faveur de lrsquoenfance et de lrsquoadolescence Pourraient ecirctre drsquoores et deacutejagrave adopteacutees des mesures opeacuterationnelles telles que la prise en compte des droits de lrsquoenfant dans les eacutetudes drsquoimpact des projets de lois et le renforcement de la formation des professionnels de lrsquoenfance et de la jeunesse

Dans ce rapport le Deacutefenseur des droits appelle eacutegalement lrsquoEtat agrave acceacuteleacuterer le calendrier parlementaire concernant les projets drsquoenvergure en cours sur la protection de lrsquoenfance et la justice des mineurs En outre agrave la suite des attentats de janvier 2015 il est selon lui impeacuteratif que lrsquoaccent soit mis sur le droit agrave lrsquoeacuteducation afin de permettre agrave lrsquoensemble des enfants de deacutevelopper leurs capaciteacutes de reacuteflexion et leur sens critique

Ainsi le Deacutefenseur des droits qui formule 128 recommandations dans son rapport souhaite que la France prenne toutes les dispositions neacutecessaires pour garantir la mise en application concregravete de la CIDE sur lrsquoensemble du territoire y compris outre-mer

En juin 2015 la Deacutefenseure des enfants a preacutesenteacute ce rapport au Comiteacute des droits de lrsquoenfant lors de la reacuteunion de preacute-session de lrsquoONU et a reacutepondu aux cocircteacutes de nombreux acteurs des droits de lrsquoenfant aux questions des membres du Comiteacute

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 11: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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En bref

Refus de soins opposeacutes aux personnes seacuteropositives une enquecircte drsquoAIDES appuie les recommandations du Deacutefenseur

Reacutealiseacutee en avril 2015 lrsquoopeacuteration a testeacute 440 cabinets de chirurgiens-dentistes et 116 cabinets de gyneacutecologie choisis aleacuteatoirement dans 20 villes franccedilaises en simulant la prise drsquoun rendez-vous de controcircle Le Deacutefenseur des droits avait eacuteteacute solliciteacute en amont afin drsquoapporter son expertise sur la meacutethodologie appliqueacutee

Le testing reacutevegravele que des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes lieacutes au VIH sont opposeacutes agrave un patient seacuteropositif sur trois par les chirurgiens-dentistes De plus on observe des situations de discrimination et de dispariteacute de traitement en raison du statut

seacuterologique dans 168 des cas

Les reacutesultats soulignent une vraie meacuteconnaissance de la part des professionnels de santeacute des risques reacuteels de transmission du VIH ainsi qursquoune freacutequente atteinte au secret meacutedical (mention de la seacuteropositiviteacute dans le carnet de rendez-vous)

Face agrave de tels reacutesultats il apparait neacutecessaire drsquoameacuteliorer lrsquoinformation et la formation des praticiens sur ces questions Par ailleurs un eacutelargissement de la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion doit ecirctre mis en place ainsi qursquoun ameacutenagement de la charge de la preuve crsquoest ce qursquoavait deacutejagrave recommandeacute le Deacutefenseur des droits dans son rapport sur les refus de soins publieacute en mars 2014

Ces reacutesultats srsquoinscrivent dans lrsquoactualiteacute leacutegislative avec le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute qui preacutevoit dans son article 19 des mesures pour observer les refus de soins illeacutegaux Dans le cadre de ses auditions le Deacutefenseur des droits a pu faire part de son regret quant aux mesures proposeacutees qui lui semblent insuffisantes pour lutter contre les refus de soins

Gracircce au Deacutefenseur lrsquoidentiteacute sexuelle pour la premiegravere fois invoqueacutee dans une condamnation pour discrimination

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de nature agrave la rendre recevable agrave

intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 12: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

[1] CE 22 feacutevrier 2012 ndeg 343410 Chambre reacutegionale drsquoagriculture PACA Dans le mecircme sens Cour de Cass chsoc 22 septembre 2011 ndeg X 10-20415

[2] Conclusions sur CE 11 avril 2012 ndeg322326 DALO

[3] Arrecircts du 13 juillet 2007 ndeg 294195 Soc Tissot 295761 Riviera 297742 Abric

Gracircce agrave une note du Conseil drsquoEtat les observations du Deacutefenseur devant le juge seront agrave preacutesent mieux prises en compte

Ce reacutecit ressemble agrave celui drsquoun des nombreux cas que le Deacutefenseur traite au quotidien En reacutealiteacute ce jugement a une porteacutee particuliegravere la juridiction a accordeacute dans son jugement une place nouvelle aux observations du Deacutefenseur

Avant de se prononcer sur le fond de lrsquoaffaire le juge a en effet rappeleacute que laquo (hellip) le Deacutefenseur des droits (hellip) srsquoest reacuteguliegraverement associeacute aux conclusions preacutesenteacutees par le requeacuterant (hellip) par son objet statutaire et son action cette institution justifie en cette qualiteacute drsquoun inteacuterecirct suffisant de

nature agrave la rendre recevable agrave intervenir dans la preacutesente instance (hellip) par suite son intervention peut ecirctre admise raquo

Conformeacutement agrave lrsquoarticle 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Deacutefenseur des droits ce dernier peut deacutecider de son propre chef de preacutesenter des observations devant le juge (ce qui eacutetait ici le cas) en tant qursquolaquo observateur sui generis raquo[1] laquo expert ou amicus curia [ami de la Cour] pour eacuteclairer le juge sur les questions de discriminations dont [il] est en charge raquo[2] Il nrsquoest donc pas comme semble lrsquoindiquer le tribunal un intervenant ndash ce rappel du juge nrsquoen reste pas moins inteacuteressant

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 13: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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De fait pendant longtemps le juge administratif nrsquoa accordeacute que peu de place aux observations de la Halde puis du Deacutefenseur ne les visant parfois mecircme pas mecircme lorsque ces observations eacutetaient suivies par le juge

Le 24 avril 2015 la Secreacutetaire geacuteneacuterale du Conseil drsquoEtat a adresseacute une note de service aux membres des juridictions administratives concernant leurs rapports avec le Deacutefenseur des droits Parce qursquoil accorde une place notable aux observations du Deacutefenseur le jugement du TA de Lille sur le cas du professeur drsquoEPS illustre bien lrsquoapplication de cette note

Un autre jugement prononceacute quelques jours plus tard ndash le 4 juin ndash vient aussi illustrer la mise en pratique de la note du Conseil drsquoEtat Le juge administratif y mentionne de maniegravere originale et nouvelle qursquoil laquo nrsquoincombe pas (hellip) agrave lrsquooffice du juge administratif ni de controcircler lrsquoopportuniteacute de la deacutecision du Deacutefenseur des droits de preacutesenter des observations devant un tribunal judiciaire ni drsquoexaminer la leacutegaliteacute des appreacuteciations porteacutees par le Deacutefenseur des droits sur un litige donneacute raquo Ce jugement est lagrave encore bienvenu car il devrait permettre au Deacutefenseur des droits drsquoexercer son travail pleinement sans que des contentieux souvent chronophages et juridiquement non fondeacutes ne soient engageacutes agrave lrsquoencontre de ses deacutecisions En effet jusque-lagrave malgreacute 3 arrecircts du Conseil drsquoEtat de 2007[3] le doute eacutetait permis concernant la nature juridique des deacutecisions du Deacutefenseur portant notamment observations devant le juge

Etat civil drsquoenfants neacutes de GPA suivant les observations du Deacutefenseur la Cour de cassation a rendu sa deacutecision

Dans deux arrecircts tregraves attendus du 3 juillet 2015[1] lrsquoAssembleacutee

pleacuteniegravere de la Cour de cassation a valideacute la transcription dans

les registres de lrsquoeacutetat civil franccedilais drsquoactes de naissance

drsquoenfants neacutes drsquoune convention de gestation pour autrui (GPA)

La Cour estime qursquoune telle convention ndash interdite en

France ndash ne doit pas faire obstacle agrave la reconnaissance de la

filiation des enfants neacutes de ce mode de conception faisant

ainsi preacutevaloir sur toute autre consideacuteration lrsquointeacuterecirct

supeacuterieur de lrsquoenfant[2] et le droit au respect de la vie

priveacutee[3]

Par cette deacutecision la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence de 2011 et de 2013 qui faisait jusqursquoagrave ce jour obstacle agrave la reconnaissance de tout lien de filiation entre lrsquoenfant neacute drsquoune GPA et ses parents[4] Elle tire ainsi les conseacutequences des arrecircts Mennesson et Labassee (26 juin 2014) de la Cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme qui ont condamneacute la France pour non-respect du droit au respect de la vie priveacutee et de lrsquoidentiteacute des enfants

Cependant la Cour de cassation statue ici sur deux cas particuliers ougrave les enfants disposaient drsquoactes de naissance faisant apparaicirctre le nom du pegravere biologique ayant reconnu la paterniteacute de lrsquoenfant et le nom de la megravere ayant accoucheacute Elle ne srsquoest donc pas prononceacutee sur la question de la reconnaissance de la filiation de lrsquoenfant agrave lrsquoeacutegard du parent drsquointention dont le nom peut apparaicirctre sur les actes de naissance eacutetrangers Les prochains contentieux permettront de trancher cette question

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 14: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Le 5 juin 2015 le Deacutefenseur des droits avait deacuteposeacute ses observations devant la Cour de cassation agrave ce sujet Il consideacuterait que pour que lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant soit respecteacute lrsquoenfant neacute agrave lrsquoeacutetranger drsquoune GPA devait pouvoir jouir drsquoune filiation complegravete identique agrave celle eacutetablie leacutegalement agrave lrsquoeacutetranger et qui soit conforme agrave la reacutealiteacute agrave la fois biologique et sociale

[1] Arrecircts ndeg619 et 620 du 3 juillet 2015 [2] garanti par lrsquoarticle 3-1 de la Convention relative aux droits de lrsquoenfant [3] proteacutegeacute par lrsquoarticle 8 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme [4] Cass Civ 1re 29 juin 1994 Bulletin 1994 I no 226 p 164 Civ 1re 6 avril 2011 ndeg09-66486 10-19053 09-17130 Civ 1re 13 septembre 2013 ndeg 12-18315 12-30128 19 mars 2014 ndeg 13-50005

laquo Violences - Parlons jeunes raquo un projet pour et par les jeunes

Lrsquoensemble de ces productions a drsquoailleurs eacuteteacute preacutesenteacute par les deux ambassadeurs franccedilais du projet Olivier et Peterson lors drsquoune rencontre agrave Athegravenes les 29 et 30 juin 2015 Cette reacuteunion eacutetape cleacute a regroupeacute les 10 ambassadeurs des pays europeacuteens (Italie Belgique Geacuteorgie Malte Gregravecehellip) ayant participeacute au projet Tous ont pu y preacutesenter leurs travaux respectifs les thegravemes abordeacutes les professionnels rencontreacutes et ont fait des propositions aux Deacutefenseurs europeacuteens des enfants Ces derniegraveres seront ensuite reprises dans la deacuteclaration du reacuteseau ENOC qui sera formellement adopteacutee lors de la rencontre annuelle des membres en septembre 2015

agrave Amsterdam

Plus largement cette rencontre a eacuteteacute riche pour les jeunes puisqursquoils ont eacuteteacute inviteacutes agrave participer agrave une seacuteance de musique au cours de laquelle ils ont composeacute une chanson sur le thegraveme laquo stoppons les violences raquo creacuteeacute un graffiti laquo Stop violence against children raquo enregistreacute des messages agrave lrsquoattention des Deacutefenseurs et participeacute aux visites culturelles organiseacutees par lrsquoeacutequipe grecque

Enfin la videacuteo de 5 minutes qui reacutesume toute lrsquoopeacuteration laquo Parlons Jeunes raquo et les avis des jeunes est deacutesormais disponible sur notre site Elle sera ensuite inteacutegreacutee agrave une videacuteo-documentaire du reacuteseau ENOC permettant de diffuser la voix des jeunes au niveau europeacuteen et de sensibiliser les autoriteacutes locales nationales et europeacuteennes agrave la theacutematique des violences envers les enfants

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 15: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Controcircles drsquoidentiteacute discriminatoires la cour drsquoappel suit les observations du Deacutefenseur

Dans ses arrecircts du 24 juin la Cour drsquoappel a consideacutereacute qursquoun controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires ndash en particulier la race ou lrsquoorigine ndash constitue une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement qui est garanti agrave tous et toutes et une violation flagrante des droits fondamentaux qui par lagrave mecircme constitue une faute lourde qui engage la responsabiliteacute de lrsquoEtat pour fonctionnement deacutefectueux du service public de la justice[1]

En outre la leacutegislation nrsquoimposant aucune obligation de reacutedaction de procegraves-verbal drsquoenregistrement ou de reacuteceacutepisseacute il y a de fait une absence de traccedilabiliteacute des controcircles drsquoidentiteacute qui constitue une entrave au controcircle juridictionnel effectif Dans ces conditions la cour a estimeacute que pour contester utilement un controcircle drsquoidentiteacute susceptible drsquoecirctre discriminatoire un ameacutenagement de la charge de la preuve eacutetait neacutecessaire

En lrsquoespegravece la responsabiliteacute de lrsquoEtat a eacuteteacute retenue en faveur de cinq reacuteclamations ougrave des attestations eacutetablissaient une pratique discriminatoire dans le choix des personnes controcirclleacutees en reprenant plusieurs des arguments deacuteveloppeacutes par le Deacutefenseur

Ces arrecircts constituent une avanceacutee significative dans la lutte contre les discriminations

[1] sur le fondement de lrsquoarticle L141-1 du code de lrsquoorganisation judiciaire

Une deacuteleacutegation du Deacutefenseur agrave la rencontre des laquo Experts raquo

Le 8 juillet dernier une deacuteleacutegation du Deacutefenseur des droits a visiteacute les nouveaux locaux du Pocircle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) inaugureacutes le 21 mai 2015 par le Ministre de lrsquoInteacuterieur Bernard Cazeneuve Deacutesormais installeacutes agrave Pontoise laquo les Experts raquo ont accueilli ce 8 juillet Claudine Angeli-Troccaz adjointe du Deacutefenseur en charge de la deacuteontologie de la seacutecuriteacute et quatre juristes du pocircle Deacuteontologie de la seacutecuriteacute dont son chef Benoicirct Narbey Des membres de lrsquoInspection Geacuteneacuterale des services judiciaires eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette rencontre a eacuteteacute lrsquooccasion pour le Geacuteneacuteral de division Jacques Hebrard commandant du PJGN et porteur de ce projet depuis 2003 de preacutesenter de maniegravere exhaustive agrave lrsquoeacutequipe du Deacutefenseur des droits sur place les trois grandes uniteacutes que regroupe ce complexe drsquoenvergure agrave vocation interdisciplinaire la criminalistique (techniques drsquoinvestigation telle que la balistique les recherches ADNhellip) le renseignement criminel et la lutte contre la criminaliteacute numeacuterique

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 16: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Le Deacutefenseur des Droits agrave lrsquoAssembleacutee Geacuteneacuterale de la Croix Rouge

Au cœur du laquo Village de lrsquoengagement citoyen raquo des agents du Deacutefenseur ainsi que trois deacuteleacutegueacutes territoriaux ont pu rencontrer les eacutelus deacutepartementaux et reacutegionaux de la Croix Rouge

Cette journeacutee placeacutee sous le signe de lrsquoeacutechange visait agrave mieux faire connaicirctre le Deacutefenseur et son reacuteseau territorial aux responsables locaux de la Croix Rouge Lrsquoenjeu principal eacutetait drsquoencourager les rencontres entre deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur et beacuteneacutevoles de la Croix Rouge afin de faciliter la mise en œuvre effective de la convention de partenariat qui preacutevoit

lrsquoaccueil de deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur au sein des locaux de lrsquoassociation

Afin drsquoecirctre visible par tous les publics et en particulier les plus deacutefavoriseacutes le Deacutefenseur a eacutegalement participeacute agrave lrsquoatelier laquo favoriser lrsquoaccegraves agrave la citoyenneteacute raquo Cet atelier destineacute notamment agrave sensibiliser les eacutelus de la Croix Rouge aux missions du Deacutefenseur des droits devait permettre aux beacuteneacutevoles de lrsquoassociation drsquoorienter leurs beacuteneacuteficiaires vers les deacuteleacutegueacutes du Deacutefenseur dans les situations qui srsquoy precirctent et reacuteciproquement

Cette rencontre srsquoinscrit ainsi dans une logique plus globale de renforcement des liens avec la Croix Rouge avec comme perspectives la reacutealisation drsquoactions communes telles que la formation de beacuteneacutevoles de la Croix Rouge par des repreacutesentants du Deacutefenseur ou encore le rapprochement des jeunes en service civique aupregraves de la Croix Rouge et de ceux du Deacutefenseur les Jeunes Ambassadeurs des Droits des Enfants et pour lrsquoEgaliteacute (JADE)

A lrsquoissue de cette journeacutee lrsquoopeacuteration srsquoest reacuteveacuteleacutee non seulement ludique et enrichissante mais eacutegalement tregraves constructive pour la suite des relations entre nos deux organisations

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 17: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Vie des territoires

Le Deacutefenseur agrave la journeacutee portes ouvertes du Parlement europeacuteen

Daniel HERMENT deacuteleacutegueacute du Deacutefenseur des droits agrave Colmar eacutegalement animateur de la reacutegion Alsace a accepteacute de contribuer agrave cette action

Cette journeacutee a eacuteteacute un reacuteel succegraves plus de 20 000 visiteurs ont visiteacute les diffeacuterents stands avec des deacutelais dattente pour peacuteneacutetrer dans lenceinte du Parlement pouvant deacutepasser deux heures agrave certains moments de la journeacutee

Cet eacuteveacutenement a eacuteteacute lrsquooccasion pour lrsquoanimateur reacutegional de diffuser des bonnes pratiques et drsquoeacutechanger avec de nombreux visiteurs franccedilais et eacutetrangers sur le rocircle du Deacutefenseur des droits et des deacuteleacutegueacutes en reacutegion Il a reacutepondu eacutegalement agrave des cas concrets qui lui eacutetaient soumis

Par ailleurs le deacuteleacutegueacute a particuliegraverement appreacutecieacute la qualiteacute de laccueil qui lui a eacuteteacute reacuteserveacute par le Meacutediateur europeacuteen augurant drsquoun partenariat constructif Il se reacutejouit eacutegalement drsquoavoir pu nouer des contacts avec les repreacutesentants de la Commission des peacutetitions du Bundestag installeacutee agrave Stuttgart (Bade-Wurtemberg) en charge des dossiers de meacutediation avec les services publics au sein de ce land qui eacutetaient eacutegalement preacutesents

Cette action particuliegraverement reacuteussie devrait ecirctre renouveleacutee lrsquoan prochain

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

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Actualiteacute du droit

Deacutecisions du Deacutefenseur

Deacutecision MDS-2015-139 du 21 mai 2015 relative agrave la divulgation drsquoune interpellation agrave un employeur par un fonctionnaire de police

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi par une eacuteducatrice speacutecialiseacutee de la divulgation par un commandant de police des circonstances de son interpellation pour des faits drsquoivresse publique et manifeste La reacuteclamante qui eacutetait employeacutee sous contrat agrave dureacutee deacutetermineacutee se plaignait eacutegalement de ce que cette divulgation ait aneacuteanti ses chances de renouvellement de contrat Lrsquoenquecircte a permis de confirmer que lrsquointerpellation viseacutee a bien eacuteteacute divulgueacutee agrave lrsquoemployeur de la reacuteclamante par le commandant de police et que partant ce dernier avait violeacute les obligations de discreacutetion et secret professionnels auquel est tenu tout fonctionnaire de police en vertu de lrsquoarticle 11 du code de deacuteontologie Indeacutependamment des conseacutequences que cette divulgation a pu avoir sur les chances de renouvellement de contrat de la reacuteclamante du fait de cette seule deacutemarche le comportement fautif est constitueacute Le Deacutefenseur des droits recommande que des poursuites disciplinaires soient engageacutees agrave lrsquoencontre du commandant mis en cause

Deacutecision MDS-2015-005 du 20 mai 2015 Maintien en zone drsquoattente et tentative drsquoeacuteloignement du territoire franccedilais drsquoune personne eacutetrangegravere

Interpelleacute agrave lrsquoaeacuteroport de Marseille-Provence par la police aux frontiegraveres agrave sa descente drsquoun vol en provenance de Casablanca le 7 mars 2011 M X srsquoest vu notifier un refus drsquoentreacutee sur le territoire franccedilais ainsi que son maintien en zone drsquoattente pour permettre son deacutepart du territoire Il se plaint drsquoavoir attendu plus drsquoune heure le 7 mars 2011 pour que sa demande drsquoasile soit enregistreacutee puis le 14 mars 2011 de ne pas avoir eacuteteacute transfeacutereacute pour assister agrave lrsquoaudience du tribunal administratif statuant sur sa requecircte en annulation du refus drsquoentreacutee M X deacutenonce eacutegalement une tentative drsquoeacuteloignement le 18 mars 2011 en violation drsquoune deacutecision de la cour europeacuteenne des droits de lrsquohomme (CEDH) qui avait prononceacute en sa faveur la suspension de tout eacuteloignement du territoire Il se plaint aussi de violences lors de cette tentative drsquoeacuteloignement du 18 mars 2011 Libeacutereacute de la zone drsquoattente le 18 mars 2011 en fin de journeacutee M X deacutenonce une sortie sans avoir pu reacutealiser les examens meacutedicaux qui lui avaient eacuteteacute prescrits et sans deacutelivrance du visa de reacutegularisation de sa situation administrative sur le territoire franccedilais Enfin il se plaint que les agents qui lrsquoont escorteacute agrave la sortie lui aient jeteacute au visage lrsquoenveloppe contenant ses documents personnels Le Deacutefenseur des droits agrave lrsquoissue de son enquecircte nrsquoa pas releveacute de manquement agrave la deacuteontologie de la part des services de la police aux frontiegraveres concerneacutes Toutefois afin drsquoeacuteviter la reacuteiteacuteration de la situation dans laquelle M X srsquoest retrouveacute en ce qursquoil allait ecirctre eacuteloigneacute alors qursquoune deacutecision contraire de la cour europeacuteenne avait eacuteteacute rendue quelques heures plus tocirct le Deacutefenseur des droits recommande qursquoune reacuteflexion soit engageacutee afin drsquoameacuteliorer les deacutelais de transmission par le ministegravere de lrsquointeacuterieur aux services concerneacutes (zone drsquoattente centre ou local de reacutetention administrative) des deacutecisions de suspension drsquoeacuteloignement de la CEDH Le Deacutefenseur des droits recommande eacutegalement degraves lors qursquoune demande drsquoexamen meacutedical est formuleacutee par un eacutetranger maintenu en zone drsquoattente que ce dernier beacuteneacuteficie

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

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sans deacutelai de la visite meacutedicale solliciteacutee nonobstant toute sortie imminente de la zone drsquoattente en raison du succegraves drsquoun recours contentieux Enfin degraves lors que la mesure drsquoeacuteloignement drsquoune personne maintenue en zone drsquoattente est suspendue en raison drsquoune recommandation en ce sens de la CEDH le Deacutefenseur des droits recommande que le visa de reacutegularisation preacutevu agrave lrsquoarticle L 224-1 du CESEDA soit deacutelivreacute agrave la personne beacuteneacuteficiaire de la recommandation de la cour agrave sa sortie de zone drsquoattente

Deacutecision MLD-2015-013 du 7 avril 2015 Refus de location discriminatoire en raison de lrsquoorigine Transaction peacutenale

La responsable dune agence immobiliegravere a signaleacute au Deacutefenseur des droits le comportement dune proprieacutetaire qui aurait refuseacute de louer un appartement agrave sa cliente en raison de son patronyme de son origine et de son appartenance agrave une race et agrave une religion deacutetermineacutee Le test de discrimination a permis de constater que la proprieacutetaire ne souhaitait louer son bien quagrave des personnes laquo drsquoorigine raquo franccedilaise mais ni agrave des africains ni agrave des musulmans Le test a permis de deacutemontrer le comportement intentionnellement discriminatoire dans lrsquooffre de logement locatif Le Deacutefenseur des droits constate le deacutelit de subordination de la fourniture drsquoun bien ou drsquoun service agrave une condition fondeacutee sur lrsquoorigine lrsquoappartenance ou non vraie ou supposeacutee agrave une race ou religion deacutetermineacutee des personnes physiques candidates agrave la location deacutelit preacutevu et reacuteprimeacute par les articles 225-1 et 225-2 du code peacutenal et partant que sa responsabiliteacute peacutenale peut ecirctre engageacutee Compte tenu du comportement reacuteveacuteleacute par lrsquoenquecircte le Deacutefenseur des droits deacutecide conformeacutement agrave lrsquoarticle de la loi ndeg 2011-333 du 29 mars 2011 de proposer une transaction peacutenale

Deacutecision MDE-MSP-MLD-2015-154 du 8 juin 2015 Droit agrave lrsquoheacutebergement drsquourgence des personnes deacutebouteacutees du droit drsquoasile Observations devant le Conseil drsquoEtat

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi du refus des pouvoirs publics de maintenir un heacutebergement drsquourgence agrave la suite de rejet de sa demande drsquoasile agrave une famille kosovare comptant trois enfants scolariseacutes dont deux mineures acircgeacutees de 16 et 14 ans Lrsquoune des trois enfants souffre drsquoun handicap seacutevegravere et ne peut se deacuteplacer qursquoen fauteuil roulant Les demandes de titres de seacutejour de la famille sont en cours drsquoinstruction Lrsquoaffaire qui a fait lrsquoobjet drsquoun rejet par ordonnance du juge des reacutefeacutereacutes est porteacutee en appel devant le Conseil drsquoEtat Le Deacutefenseur des droits deacutecide de preacutesenter ses observations devant la Haute juridiction et vient rappeler le caractegravere inconditionnel du droit agrave un logement drsquourgence reconnu comme une liberteacute fondamentale Il considegravere ainsi que le refus drsquoaccorder un logement drsquourgence agrave une famille dont lrsquoune des enfants est en situation de handicap et dont lrsquoeacutetat de santeacute exige des soins particuliers apparaicirct contraire en particulier agrave lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant consacreacute agrave lrsquoarticle 3-1 de la Convention des droits de lrsquoenfant lrsquoarticle 31-2 de la Charte sociale europeacuteenne reacuteviseacutee son article E ainsi que les articles L 345-2 et suivants du Code de lrsquoaction sociale et des familles Ce refus parait eacutegalement ecirctre contestable au regard des articles 3 8 et 14 de la Convention europeacuteenne des droits de lrsquohomme

Deacutecision MDS-2015-138 du 21 mai 2015 Deacuteontologie de la seacutecuriteacute

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 20: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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poursuite en moto

Le Deacutefenseur des droits a eacuteteacute saisi des violences commises par des fonctionnaires de police lors dune interpellation M X qui a eacuteteacute interpelleacute apregraves une chute de sa moto-cross a affirmeacute que son accident avait eacuteteacute causeacute deacutelibeacutereacutement par des policiers en civil circulant en voiture banaliseacutee Il sest eacutegalement plaint drsquoavoir reccedilu des coups immeacutediatement apregraves sa chute De nombreux teacutemoignages concordants attestent que lrsquoeacutequipage de police a percuteacute avec son veacutehicule la moto afin dinterpeller le motard ce qui caracteacuterise un usage disproportionneacute de la force en regard des faits qui lui eacutetaient reprocheacutes (circulation sur un veacutehicule non homologueacute non-port du casque et refus drsquoobtempeacuterer) et du danger qursquoils lui ont fait encourir alors qursquoil circulait sur une moto sans casque Degraves lors le Deacutefenseur des droits recommande des poursuites disciplinaires Il rappelle que ce comportement fautif est de nature agrave engager la responsabiliteacute de lrsquoEtat lrsquoadministration ayant en effet lrsquoobligation de reacuteparer peacutecuniairement les dommages causeacutes par ses agents et par suite que le reacuteclamant serait fondeacute agrave demander reacuteparation et ecirctre indemniseacute En cas de refus de lrsquoadministration de faire droit agrave cette demande il pourrait alors saisir le juge administratif compeacutetent en la matiegravere Dans cette hypothegravese le Deacutefenseur des droits pourrait preacutesenter des observations Srsquoagissant des conditions de lrsquointerpellation apregraves la chute agrave moto en lrsquoabsence de constatations meacutedicales corroborant les alleacutegations du reacuteclamant et les teacutemoignages des passants le caractegravere disproportionneacute de la force utiliseacutee pour lrsquointerpeller nrsquoest pas eacutetabli

Veille jurisprudentielle

Cour drsquoappel de Paris du 24 juin 2015 et MSP-MDS-MLD-2015-021 du 3 feacutevrier 2015 Controcircle drsquoidentiteacute Discrimination en raison de lrsquoorigine

Dans ses arrecircts du 24 juin 2015 la Cour drsquoappel a suivi les observations du Deacutefenseur des droits accueilli lrsquoappel dans 5 dossiers et rejeteacute dans 8 dossiers

Elle souligne que les controcircles drsquoidentiteacute doivent ecirctre opeacutereacutes dans le respect des droits fondamentaux de la personne et donc du principe drsquoeacutegaliteacute de traitement sans discrimination et que ce principe de non-discrimination est au cœur de la protection internationale des droits de lrsquohomme Les Etats doivent non seulement srsquoabstenir de discriminer mais doivent prendre toute mesure neacutecessaire pour eacuteviter toute discrimination

Elle souligne qursquoelle est fondeacutee agrave examiner les appels le Conseil constitutionnel ayant confieacute au juge judiciaire de veiller au respect des droits fondamentaux

Un controcircle drsquoidentiteacute opeacutereacute sur des motifs discriminatoires fondeacutes notamment sur la race ou lrsquoorigine porte une atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute de traitement en violation flagrante des droits fondamentaux et constitue neacutecessairement une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

Pour ecirctre effectif le recours doit permettre agrave lrsquointeacuteresseacute de faire la deacutemonstration de la faute Or la loi ne permettant aucune traccedilabiliteacute des controcircles le cadre juridique constitue une entrave au controcircle juridictionnel entrave susceptible de priver la personne de recours effectif qui justifie un recours agrave lrsquoameacutenagement de la charge de la preuve Conformeacutement agrave la jurisprudence de la Cour europeacuteenne la personne controcircleacutee doit preacutesenter un faisceau

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 21: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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de circonstances graves preacutecises et concordantes qui en retour exigent que lrsquoautoriteacute publique deacutemontre le caractegravere justifieacute du controcircle

Les statistiques et eacutetudes existantes reacuteveacutelant qursquoune certaine population issue des quartiers deacutefavoriseacutes est sur-controcircleacutee constituent un eacuteleacutement drsquoappreacuteciation mais il doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements de faits sur les circonstances du controcircle

En preacutesence drsquoattestation reacuteveacutelant un controcircle cibleacute de personnes en fonction de leur apparence physique eacutetrangegravere lrsquoautoriteacute publique doit pouvoir deacutemontrer en quoi le controcircle systeacutematique et exclusif drsquoun type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine est justifieacute par des circonstances preacutecises et particuliegraveres A deacutefaut de telle preuve mecircme si le controcircle se deacuteroule sans propos humiliant ou insultant le controcircle preacutesente un caractegravere discriminatoire caracteacuterisant une faute lourde engageant la responsabiliteacute de lrsquoEtat

La Cour a estimeacute que dans le cas ougrave un controcircle est effectueacute dans les conditions leacutegales la preuve par attestation drsquoun ou plusieurs teacutemoins suffit mecircme lorsque ces teacutemoins ont eux- mecircme eacuteteacute controcircleacutes La Cour estime que les attestations qui preacutesentent des eacuteleacutements preacutecis sur les critegraveres de seacutelection des controcircles systeacutematiques et fondeacutes sur lrsquoapparence physique ciblant exclusivement les personnes drsquoorigine nord-africaine ou africaine permettent drsquoeacutetablir la preacutesomption de discrimination

La Cour drsquoappel a estimeacute que le recours au profilage racial est connu et documenteacute comme une pratique reacutepandue mais que ce fait doit ecirctre corroboreacute par des eacuteleacutements speacutecifiques au controcircle mis en cause pour eacutetablir une preacutesomption de discrimination Ces eacuteleacutements doivent attester drsquoun recours au profilage par un choix discriminatoire des personnes controcircleacutees

Un simple teacutemoignage drsquoavoir assisteacute agrave un ou plusieurs controcircles et mecircme de violences verbales et drsquoinsultes non racistes est insuffisant pour eacutetablir la discrimination La Cour a retenu les justifications de lrsquoEtat mecircme lorsque le comportement des personnes controcircleacutees nrsquoeacutetait pas en cause dans tous les cas ougrave la zone ougrave le controcircle eacutetait effectueacute eacutetait dangereuse criminogegravene ou signaleacutee

En outre la Cour a accepteacute les justifications de lrsquoEtat fondeacutees sur un signalement concomitant de recherche de personnes drsquoorigines magreacutebines ayant effectueacute un vol et le comportement drsquoune personne sortant drsquoun immeuble en courant et vecirctue de maniegravere agrave ne pas ecirctre vue dans une zone sensible

Cour drsquoappel de Paris 4 juin 2015 Licenciement discriminatoire en raison du transsexualisme

Tout drsquoabord la Cour souligne qursquoil ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoemployeur un traitement discriminatoire pour avoir refuseacute de tenir compte du changement de sexe en nrsquoimposant pas agrave lrsquoensemble du personnel de la socieacuteteacute de reconnaicirctre lrsquointeacuteresseacute(e) comme femme alors qursquoagrave lrsquoeacutepoque de faits elle nrsquoavait pas changeacute de sexe ni meacutedicalement ni judiciairement En conseacutequence sa situation administrative nrsquoeacutetant pas modifieacutee lrsquointeacuteresseacute(e) ne pouvait ecirctre appeleacute(e) au moins officiellement que sous son identiteacute de naissance comme crsquoeacutetait le cas agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoentreprise avec toutes les administrations ou organismes quelconques La Cour ajoute que la salarieacutee ne pouvait pas imposer ni agrave son employeur ni agrave ses supeacuterieurs hieacuterarchiques ou collegravegues de lrsquoappeler sous le preacutenom feacuteminin sous lequel elle nrsquoeacutetait pas connue initialement comme elle le demandait expresseacutement en deacutecembre 2008

Par ailleurs la Cour estime que lrsquoemployeur a respecteacute son obligation de seacutecuriteacute en

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

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prenant les mesures neacutecessaires pour proteacuteger lrsquointeacuteresseacutee de la discrimination dont elle eacutetait victime de la part de ses collegravegues Elle relegraveve en outre que les instances et les autoriteacutes saisies (dont la Halde) de la situation de lrsquointeacuteresseacute nrsquoont pas donneacute suite aux plaintes de la salarieacutee pour discrimination et harcegravelement

Ensuite la Cour estime que lrsquoaccumulation des sanctions disciplinaires dont a fait lrsquoobjet la salarieacutee peut effectivement laisser supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination en raison de son identiteacute sexuelle Elle annule deux avertissements jugeacutes illicites lrsquoun eacutetait motiveacute par le fait que lrsquointeacuteresseacutee avait utiliseacute les toilettes pour femmes et lrsquoautre par le refus qursquoelle opposait au port des chaussures de seacutecuriteacute (homme) obligatoires En effet le juge estime que le premier avertissement eacutetait fondeacute sur la neacutegation de la maladie et du transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee pourtant attesteacutes par un certificat meacutedical De mecircme la Cour estime qursquoen refusant de fournir en janvier 2009 des chaussures de seacutecuriteacute adeacutequates compte tenu non de lrsquoeacutetat physique mais de lrsquoeacutetat mental de lrsquointeacuteresseacutee et en la sanctionnant agrave la suite de son refus de les porter lrsquoemployeur qui avait alors tous les eacuteleacutements drsquoappreacuteciation en main a nieacute les manifestations du transsexualisme et pris une sanction inadeacutequate meacutedicalement inopportune humainement et illicite juridiquement

La socieacuteteacute est condamneacutee agrave verser agrave lrsquointeacuteresseacutee une somme de 5000 euros au titre du preacutejudice moral discriminatoire reacutesultant de ces deux avertissements

Enfin la Cour estime que le licenciement nrsquoest pas fondeacute sur un motif discriminatoire Elle relegraveve que les injures profeacutereacutes par le collegravegue agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee nrsquoavaient pas de caractegravere sexiste et juge que ces insultes inadmissibles sur un lieu de travail qui constituaient une veacuteritable provocation nrsquoeacutetaient pas pour autant cibleacutees sur le transsexualisme de lrsquointeacuteresseacutee Elle estime que le licenciement eacutetait fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse les faits de violences commis par la salarieacutee sur son lieu de travail caracteacuterisent une faute grave justifiant la rupture immeacutediate du contrat de travail Elle relegraveve que lrsquoemployeur a tenu compte de la circonstance atteacutenuante de la provocation par le collegravegue et nrsquoa retenu qursquoune faute simple agrave lrsquoeacutegard de lrsquointeacuteresseacutee

Cour de cassation 10 juin 2015 Placement drsquoune mineure en raison de limpact des convictions du beau-pegravere adepte drsquoune secte

La requeacuterante conteste la deacutecision du juge drsquoappel qui a maintenu le placement agrave lrsquoaide sociale agrave lrsquoenfance de sa fille alors acircgeacutee de 5 ans

La Cour de cassation rejette son pourvoi

Elle approuve les juges du fond qui ont souverainement estimeacute que les principes de la doctrine lsquoraeacuteliennersquo mouvement auquel appartenait le beau-pegravere de la fillette agrave savoir la libeacuteration sexuelle des individus ainsi que leacuteveil sexuel des jeunes enfants devaient ecirctre mis en lien avec les comportements sexualiseacutes de lrsquoenfant Ces comportements qui ont eacuteteacute releveacutes tant par les services eacuteducatifs que par lrsquoexpert psychologue srsquoexpriment au moment du coucher mais eacutegalement en journeacutee agrave la vue drsquoautres enfants sans pudeur et dans nrsquoimporte quel espace

Par ailleurs les juges du fond ont constateacute que la place de la mineure au sein du couple formeacute par sa megravere et son beau-pegravere nrsquoeacutetait pas celle drsquoune enfant qursquoelle semblait faire partie du couple sans que la diffeacuterence de geacuteneacuteration soit toujours marqueacutee et que la place qursquoelle voulait prendre aupregraves de son beau-pegravere contrastait avec lrsquoattitude tregraves effaceacutee de sa megravere tandis que ses liens avec son pegravere avaient eacuteteacute totalement rompus par cette derniegravere

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

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La Cour de cassation estime que les juges du fond ont caracteacuteriseacute le danger justifiant le maintien de la mesure de placement sans porter atteinte agrave la liberteacute de conscience et de religion du beau-pegravere

Cour drsquoappel de Paris 19 Mars 2015 Discriminations multiples reconnaissance de discriminations dans le deacuteroulement de carriegravere fondeacutee sur lrsquoeacutetat de santeacute le handicap et les activiteacutes syndicales

La cour note

- que le salarieacute a eacuteteacute embaucheacute en qualiteacute dattacheacute opeacuterateur avec reconnaissance du statut de travailleur handicapeacute

- quen 2004 agrave lissue dun examen de compeacutetence il a eacuteteacute promu au poste dagent de maicirctrise

- que depuis sa carriegravere na pas eacutevolueacute agrave linverse de ses collegravegues de mecircme niveau de classification en 2004

- qursquoil est le seul de son niveau de qualificationreacutemuneacuteration lensemble des agents de la session de 2004 ou promu en 2004 ayant deacutejagrave eacutevolueacute

- quil ressort des attestations produites que depuis le 5 janvier 2011 date de sa deacutesignation par le Syndicat Sud rail en qualiteacute de deacuteleacutegueacute syndical les difficulteacutes relationnelles entre la direction et le salarieacute ont empireacute la premiegravere recommandant aux salarieacutes de se tenir agrave leacutecart du responsable syndical

- qursquoil a fait lrsquoobjet de nombreuses sanctions

La cour estime

- quau vu de ces eacuteleacutements il incombe en lespegravece agrave la SNCF de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs dun harcegravelement et que sa deacutecision est justifieacutee par des eacuteleacutements objectifs eacutetrangers agrave tout harcegravelement

- que le juge forme sa conviction apregraves avoir ordonneacute en cas de besoin toutes les mesures dinstruction quil estime utiles

En distinguant chaque eacuteleacutement la cour condamne la SNCF agrave payer les sommes suivantes

30000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour discrimination

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour harcegravelement moral

5000 euros agrave titre de dommages et inteacuterecircts pour manquement agrave lobligation de seacutecuriteacute

2500 euros au titre de larticle 700 du code de proceacutedure civile

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

Le Deacutefenseur des droits 7 rue Saint-Florentin

75409 Paris Cedex 08

Page 24: La Lettre du Défenseur des droits Juillet / Août 2015...Le 4 juin 2015, le Défenseur des droits s est exprimé devant l ensemble des conseillers de la Chambre criminelle de la Cour

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Cour de cassation 3 mars 2015 Harcegravelement et discrimination Reacuteparation du preacutejudice

En pratique les faits de harcegravelement et ceux de discrimination se confondent le harcegravelement eacutetant inspireacute de motifs discriminatoires ou agrave lrsquoinverse des propos discriminatoires eacutetant partie des faits de harcegravelement reprocheacutes

En lrsquoespegravece la salarieacutee pigiste avait agrave lrsquooccasion de ses congeacutes materniteacute subi une forte diminution de ses activiteacutes reacutedactionnelles par suite de faits reconnus comme proceacutedant agrave la fois du harcegravelement et de la discrimination La Cour drsquoappel avait proceacutedeacute agrave lrsquoattribution globale drsquoune reacuteparation mateacuterielle compensant la perte drsquoactiviteacute et drsquoune reacuteparation des preacutejudices moraux sans distinguer ce qui provenait du harcegravelement et de la discrimination

Lrsquoarrecirct est casseacute en ce qursquoil ne permettait pas de reacuteparer les conseacutequences du harcegravelement laquo lrsquoatteinte agrave la digniteacute et agrave la santeacute de la salarieacutee ayant conduit agrave un eacutetat drsquoinaptitude meacutedicalement constateacute raquo nrsquoavait pu ecirctre prise en compte Lrsquoarrecirct invite ainsi agrave distinguer avec plus de netteteacute non seulement les preacutejudices subis mais aussi les fautes commises ce que font trop rarement les juridictions

CEDH 27 janvier 2015 Ciorcan et autres c Roumanie Violences policiegraveres racistes agrave lrsquoencontre de personnes de la communauteacute Rom

Les autoriteacutes de lrsquoEacutetat ont de surcroicirct lrsquoobligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour deacutecouvrir srsquoil existait une motivation raciste et pour eacutetablir si des sentiments de haine ou des preacutejugeacutes fondeacutes sur lrsquoorigine ethnique ont joueacute un rocircle dans les eacuteveacutenements Crsquoest drsquoautant plus vrai souligne la Cour que lrsquoon est confronteacute agrave la situation de la Roumanie ougrave les discriminations agrave lrsquoeacutegard des Roms sont rapporteacutees par les instances internationales et les ONG

Ainsi les juges constatent agrave nouveau des deacutefauts dans lrsquoenquecircte une absence de questionnement sur lrsquoampleur de la mobilisation policiegravere sur lrsquoexistence drsquoeacuteventuels preacuteceacutedents attestant une hostiliteacute des chefs de police agrave lrsquoeacutegard des Roms En deacutefinitive ils retiennent agrave lrsquounanimiteacute une violation de lrsquoarticle 14 et des articles 2 et 3 dans leur volet proceacutedural

La Lettre du Deacutefenseur des droits ISSN 2272-0731

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