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Le quinoa, un aliment de base des Andes dans un marché dynamique Etude de cas Resumen ejecutivo

Le quinoa, un aliment de base des Andes dans un marché ... · nalisé sa production au profit du blé et de l’orge – allié à une culture difficile et aux prix bas à la production

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Le quinoa, un aliment de base des Andes dans un marché dynamiqueEtude de cas

Resumen ejecutivo

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responsAbility | Etude de cas: le quinoa 3

Note de synthèse

Nourriture de base depuis des millénaires dans les Andes, le quinoa a enregistré une forte hausse de sa consommation aux Etats-Unis et en Europe. La demande est telle qu’elle a provoqué une augmenta-tion rapide des prix et des volumes de production.

Cette flambée des prix du quinoa a bénéficié aux cultivateurs de Bolivie. Cependant, elle a aussi créé un climat commercial plus compétitif, qui s’est traduit par la propagation de pratiques agricoles non durables menaçant la viabilité à long terme de cette culture.

Les parties prenantes de Bolivie ont réalisé des progrès en encourageant une diffusion plus large d’une approche durable. En outre, un certain nombre d’entreprises demeurent engagées envers de saines pratiques agricoles, servant de modèles à ce secteur.

Irupana Andean Organic Foods, une entreprise dans laquelle responsAbility investit depuis 2013, compte plus de 200 petits paysans affiliés. Son objectif est d’abord de booster la consommation de grains récoltés dans les Andes, ensuite d’accroître la production de produits bios et à forte valeur ajoutée pour que les producteurs puissent accéder à des marchés prêts à payer plus et promouvoir la durabilité à long terme de ce secteur par un engagement envers des pratiques organiques et durables.

responsAbility a rencontré des producteurs qui travaillent avec Irupana afin de comprendre l’impact que cette organisation a sur leurs conditions de vie.

Ces producteurs ont confirmé l’engagement d’Irupana envers des pratiques agricoles durables. Ils ont aussi affirmé que la confiance qu’ils avaient envers Irupana était un point fort de leur relation commerciale avec elle.

Irupana est capable d’offrir un bon prix aux produc-teurs et de les payer rapidement, grâce au finance-ment que lui accordent des partenaires comme responsAbility. Par conséquent, cette organisation peut garantir un revenu plus élevé et plus prévisible aux paysans. Ces facteurs sont essentiels pour la continuité de cette relation de confiance qu’elle entretient avec ses producteurs. Irupana bénéficie aussi de la souplesse de responsAbility en matière de garanties et de son expérience du marché pour combler d’éventuelles lacunes de liquidités.

Le quinoa: un superaliment

Le quinoa contient beaucoup plus de protéines, de calcium, de magnésium, de potassium, de fer et de zinc ainsi que de vitamines A et E que le blé, le maïs, l’orge, le riz et l’avoine. En outre, le quinoa n’a pas de gluten et est la seule plante comestible connue à fournir les principaux acides aminés.

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responsAbility | Etude de cas: le quinoa4

Note de synthèse 3

Editorial 5

Le quinoa, de mère de tous les grains à superaliment 6

Irupana: engagée envers la durabilité 9

Nouvelles perspectives pour les producteurs de quinoa 12

Le rôle du partenaire financier 16

Sommaire

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responsAbility | Etude de cas: le quinoa 5

Depuis son lancement en 2011, le fonds de responsAbility dédié aux petites exploitations agri - coles a financé plus de 90 organisations enga - gées envers des pratiques durables tout au long de la chaîne de valeur agricole. Au début, les inves-tissements se concentraient sur le café, puis ils se sont progressivement étendus à d’autres matières premières agricoles. C’est ainsi que, depuis 2012, le fonds a plus que doublé, en termes relatifs, ses investissement dans les grains et les semences, qui s’élèvent désormais à 21,5% de ses actifs sous gestion. En fait, la croissance de la demande de financement par des organisations du quinoa en Bolivie et au Pérou a été un moteur important de cette tendance.

responsAbility souhaite établir des partenariats avec de telles organisations pour répondre à leur besoin grandissant de financement, en particulier parce que le boom de la consommation de quinoa crée des opportunités pour la production durable. Toutefois, des rapports suggèrent que la hausse de la demande mondiale pourrait également avoir certains effets négatifs.

Pour déterminer notre stratégie d’investissement dans la région, il est nécessaire d’éclaircir nombre de points importants. Nous avons notamment besoin de savoir si la hausse des prix du quinoa a rendu cet aliment de base inaccessible aux familles à bas revenu de Bolivie et du Pérou. Cette hausse bé-néficie-t-elle vraiment aux petits paysans et l’expan-sion rapide de la production constitue-t-elle une menace pour l’environnement et la viabilité à long terme de ce secteur? Telles sont, parmi d’autres,

les questions que nous devons nous poser. Ces questions ont amené notre équipe de recherche à réaliser une étude en profondeur du marché mondial du quinoa. Leur recherche a été complétée par des entretiens effectués sur place avec des producteurs affiliés à Irupana Andean Organic Foods (Irupana), une organisation bolivienne exportatrice de quinoa, avec laquelle responsAbility collabore depuis 2013.

Cette étude de cas vise à montrer comment le modèle d’affaires d’Irupana profite aux producteurs tout en s’opposant activement à certains effets négatifs du boom du quinoa. En même temps, cette étude démontre pourquoi l’accès à des facilités de financement offertes par des partenaires comme responsAbility est la clé du succès d’entreprises telles qu’Irupana.

L’investissement de responsAbility dans Irupana reflète notre engagement plus vaste envers l’encoura-gement à des modèles d’affaires novateurs qui combinent la durabilité financière avec des objectifs sociaux et/ou environnementaux.

Bonne lecture,

Gaëlle Bonnieux responsable Agriculture Debt Financing

Cher lecteur,

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responsAbility | Etude de cas: le quinoa6

«Mère de tous les grains» et plante sacrée pour les Incas, le quinoa a été cultivé depuis des milliers d’années par les populations andines. Ce grain a joué un rôle central dans les pratiques religieuses des sociétés précolombiennes. De nos jours, il demeure une source majeure d’alimentation pour des millions de gens en Bolivie, en Equateur, au Pérou et au Chili.

Demande internationale croissanteLe quinoa est resté quasiment inconnu en dehors de la région des Andes jusqu’aux années 1970. L’héritage de la colonisation espagnole – qui a margi-nalisé sa production au profit du blé et de l’orge – allié à une culture difficile et aux prix bas à la production a découragé sa culture et sa consommation ailleurs. Depuis quelques années cependant, le marché mondial du quinoa a été boule-versé. Ses qualités nutritives exceptionnelles ainsi que sa résistance et son adap-tabilité à des conditions climatiques et de sol extrêmes ont conduit l’Organisa-tion des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) à promouvoir le quinoa comme source alternative d’alimentation dans les pays souffrant d’insé-curité alimentaire aiguë. En même temps, pour répondre à la demande des consommateurs soucieux de leur santé, les exportations ont quadruplé entre 2007 et 2013, en s’élevant de 12 263 à 53 813 tonnes. Cette hausse a été par-ticulièrement forte en 2013, décrétée «Année internationale du quinoa» par l’ONU. Ces chiffres montrent que cette graine est passée du statut d’aliment de base amérindien à celui de superaliment omniprésent.

L’envol de la demande profite aux producteurs Tandis que la demande augmente rapidement aux Etats-Unis, au Canada et en Europe, la production reste concentrée sur les sols volcaniques fragiles des hauts plateaux de Bolivie et du Pérou. En 2013, ces deux pays fournissaient plus de 95% du quinoa consommé dans le monde. Des projets sont en cours pour étendre sa culture à d’autres lieux, mais il est peu probable que l’on assiste à une aug-mentation substantielle dans un proche avenir. Ce déséquilibre structurel entre production limitée et demande en forte progression provoque une flambée des prix (voir fig. 1).

En 2009, le prix moyen du quinoa traditionnel se situait à USD 30 par quintal. En décembre 2013, il avait décuplé à plus d’USD 300. Même s’il s’agit vrai-semblablement d’un plafond – en décembre 2014, le quinoa se négociait à entre USD 170 et USD 2001 – des prix élevés deviendront la norme à moyen terme. Les coûts de production ont aussi augmenté dans la foulée, car la compétition pour les ressources – travail, pesticides, engrais et machines – s’est intensifiée, mais la production reste profitable.

L’explosion de la demande s’est traduite par une augmentation appréciable des revenus des producteurs de la région. Près de 70% des habitants de l’Altiplano

Quinoa: de mère de tous les grains à superaliment

Une source alternative de nourriture pour les pays souffrant d’insécurité alimentaire

Quinoa: la «mère des grains» des Incas

95% de la production de quinoa sont concentrés dans l’Altiplano bolivien et péruvien

Les prix locaux ont décuplé entre 2009 et 2013

Forte hausse de la demande mondiale de quinoa entre 2007 et 2013

1 Mercadero, «Challapata Market Update», 25 novembre 2014.

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responsAbility | Etude de cas: le quinoa 7

bolivien et péruvien – dont la grande majorité sont des descendants amérindiens – vivent avec moins d’USD 1 par jour. Etant donné que pour la plupart d’entre eux, le quinoa est la première source de revenu,2 la hausse marquée de son prix a dégagé des augmentations notables de revenu pour une partie importante de cette population. Nombreux sont les habitants à pouvoir vivre maintenant de ma-nière plus confortable et plus digne (voir pages 12 ss pour plus de détails).

Modification des habitudes de consommation Passant de nourriture de base à superaliment, la transition du quinoa a égale-ment modifié les schémas de consommation locaux. Face à la hausse des prix, les foyers à bas revenus n’ont plus pu acheter de quinoa et se sont rabattus sur le pain et le riz, dont le prix n’a pas augmenté autant. Même les producteurs ont réduit leur consommation pour profiter des nouveaux prix. Sachant combien le quinoa est plus nutritif que le blé, le maïs, l’orge et le riz (voir encadré p. 3), cette évolution a suscité des craintes que la malnutrition ne s’aggrave.

Cette tendance mérite d’être surveillée de près, pourtant, les recherches indiquent que cet effet négatif a pu être exagéré. Tout d’abord, il convient de ne pas grossir l’importance du quinoa dans l’alimentation de la Bolivie en général. En effet, se-lon la FAO, Oruro est la seule province de ce pays à tenir compte de ce grain dans l’indice des prix à la consommation (IPC), ce qui signifie que d’une manière gé-nérale, la consommation de quinoa en dehors des régions productrices est très basse.3 Ensuite, la consommation de quinoa par habitant de la Bolivie a en fait augmenté ces six dernières années de 0,35 kg en 2008 à 2,00 kg en 2014.4 Cette progression s’explique par le fait que comme seule une partie de la production sa-tisfait aux exigences de l’exportation, l’accroissement de la production a rendu ce grain plus disponible à la consommation locale. Enfin, s’il est vrai que, vendant plus, les producteurs consomment moins de leur propre récolte, leur choix est par-faitement rationnel en reflétant les nouvelles réalités économiques. Tous les pro-ducteurs interrogés ont déclaré qu’ils pouvaient désormais acheter plus de viande et de légumes et même s’offrir parfois des produits de luxe.

Production, exportations et prix se sont envolés sur une courte période

La transition du quinoa à un superaliment a eu un effet sur la consommation locale

Le fort accroissement de la demande de quinoa s’est traduit par une hausse notable des revenus pour une grande partie de la population

2 Gigler, B. «Poverty, Inequality and Human Development of Indigenous Peoples of Bolivia», Georgetown Center for Latin American Studies, 2009.

3 FAO (2013) «Food Outlook: Biannual Report on Global Food Markets», juillet 2013, pp. 63 – 64. 4 Instituto Boliviano de Comercio Exterior (INE data), 2013.

Figure 1 : Essor du quinoa, exportations mondiales et prix

Bolivie Pérou Équateur FOB Arica (USD/t)

40 000

35 000

30 000

25 000

20 000

15 000

10 000

5000

0

8000

7000

6000

5000

4000

3000

2000

1000

02007 2009 2010 2011 2012 2013 2014*2008

Tonnes USD/ tonne

Source: FAO 2014/INE, * état août 2014

7

Depuis 2008, la consommation du quinoa par habitant de Bolivie a presque sextuplé

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Diffusion de pratiques agricoles non durables Comme le nombre de paysans et d’entreprises privées qui se battent pour gagner des parts de marché a augmenté, le boom du quinoa a aussi entraîné un climat commercial plus compétitif et plus incertain. Ce développement a accéléré la dif-fusion de pratiques agricoles peu respectueuses de l’environnement et suscep-tibles de mettre en danger la productivité à long terme de l’écosystème.

La culture du quinoa dans l’Altiplano bolivien s’étend très rapidement, passant de 51 000 hectares en 2009 à 120 000 en 2014. La production s’est déplacée des versants des Andes vers les plaines, qui contiennent moins d’argile, de matières organiques et d’éléments fertilisants. Des périodes de jachère de six à huit ans ont fait place à une production presque continue et l’utilisation de charrues à disques et de lourdes machines – qui sont inadaptées aux sols fragiles, volcaniques et sa-blonneux de la région – a augmenté5. Ces tendances ont été malencontreusement aggravées par le gouvernement, qui s’est fortement focalisé sur l’industrialisation dans le cadre de son Plan national de développement du quinoa.

En outre, la culture du quinoa est restée une activité largement pastorale jusque dans les années 1980. Depuis, les familles ont commencé à vendre leurs lamas et leurs moutons pour acheter des équipements et étendre la production aux pâ-turages. Cette tendance s’est accélérée ces dernières années, provoquant une chute brutale de la disponibilité d’engrais naturels, qui a nécessité de recourir plus à des solutions alternatives de moindre qualité. L’ensemble de ces pratiques a suscité des craintes quant à leur impact à long terme sur la fertilité du sol, met-tant directement en péril la durabilité de ce secteur.6 Comme le quinoa représente la principale source de revenus pour ces cultivateurs, cette évolution pourrait avoir de sérieuses conséquences pour les populations locales.

Malgré ces difficultés, plusieurs raisons incitent à demeurer optimiste. Tout d’abord, la Bolivie a lancé des recherches en matière de technologies et de pra-tiques, afin de pouvoir accroître l’efficacité des cultures tout en réduisant leur im-pact sur l’environnement. Plusieurs parties prenantes – incluant des coopératives de paysans, des prêteurs internationaux, le Centro de Tecnologías Sostenibles et des sociétés privées – collaborent pour transformer les méthodes de culture. Elles espèrent préserver les revenus supplémentaires engendrés par les petits cultiva-teurs de quinoa bio, tout en diminuant, voire inversant, l’impact sur l’environne-ment.7 Ensuite, un certain nombre d’entreprises restent engagées envers des pra-tiques agricoles saines, servant ainsi de modèle à l’ensemble du secteur. Irupana – qui bénéficie des investissements de responsAbility depuis 2013 – en offre un bon exemple.

La culture du quinoa s’est étendue rapidement en se mécanisant plus

L’accroissement des cultures risque d’avoir un impact préjudiciable à la fertilité à long terme des sols

Des parties prenantes encou-ragent des pratiques et technolo-gies durables pour aider à la transformation du secteur local

5 Kerssen, T. «Food Sovereignty and the Quinoa Boom in Bolivia», Journal of Peasant Studies, septembre 2013.6 Antonio, K. «The Challenges of Developing a Sustainable Agro-Industry in Bolivia: the Quinoa Market»,

Duke University, 2011.7 IDB et FOMIN. «Bolivia: Non-reimbursable Technical Cooperation Funding for the Sustainable Organic Production

in the Bolivian Highlands project», 24 juin 2014.

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Irupana Andean Organic Food développe de nouveaux marchés pour les produits agricoles

Un quinoa de grande qualité provient de plus de 200 petits producteurs affiliés

Irupana est impliquée dans plusieurs programmes gouverne-mentaux de sensibilisation à l’alimentation

Irupana: engagée envers la durabilité

Irupana Andean Organic Foods a été fondée en 1985 par Javier Hurtado, un ac-tiviste politique et un pionnier des méthodes organiques de culture. Il cherchait à donner le pouvoir aux communautés indigènes de sa Bolivie natale, tout en restaurant leur fierté dans la production alimentaire locale. Javier Hurtado s’est efforcé de développer de nouveaux marchés pour les produits agricoles en gé-nérant, dans la foulée, des opportunités économiques pour les producteurs. Il a été rejoint, en 1990, par Martha Cordero, une professeure et spécialiste en nu-trition, qui supervise, aujourd’hui, les activités de l’entreprise.

Cette organisation, qui a démarré comme une petite entreprise d’achat direct de café, est devenue l’une des principales sociétés du pays spécialisées dans la nourriture bio et naturelle. Elle fournit à la fois les marchés locaux et internatio-naux avec un large assortiment d’aliments andins, tels que le quinoa, l’ama-rante, le cañahua et le tarhui.

La connaissance approfondie que Javier Hurtado et Martha Cordero ont de l’éco-logie du pays, leur capacité de construire une relation de confiance avec les pro-ducteurs et leur engagement envers des produits bios de qualité irréprochable ont été les fondements de la réussite de l’entreprise.

Depuis 2013-2014, Irupana s’approvisionne en quinoa de grande qualité au-près d’un noyau de plus de 200 producteurs affiliés. La plupart sont de petits paysans qui cultivent chacun moins de deux hectares de terrain. En témoignage de son effet considérable et persistant sur la vie de ces producteurs, Irupana a été désignée, en 2002, comme l’une des principales entreprises sociales du monde par la Schwab Foundation for Social Entrepreneurship, une émanation du World Economic Forum.

Améliorer la sécurité alimentaire Au fil des ans, Irupana a prouvé son engagement envers l’amélioration de la sé-curité alimentaire locale, comme en témoigne sa participation à plusieurs pro-grammes de sensibilisation du public à l’importance de l’alimentation, élaborés par le gouvernement bolivien. En 2002, l’entreprise a développé une recette de pain enrichi aux céréales et légumes andins, qui est devenue un modèle de pe-tit-déjeuner dans le cadre du programme gouvernemental en faveur des cantines

Irupana Andean Organic Food

Fondation: 1985 Siège: El Alto, BolivieProducteurs affiliés: 200+ (quinoa)Produits de base: quinoa, amarante, cañahua et tarhuiMagasins locaux: 17Distinction: Schwab Foundation, Social Entrepreneurship, 2002

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Des mesures sont prises pour lutter contre la baisse de la consommation de quinoa par la population locale

Irupana défie la discrimination entourant la consommation de produits locaux en Bolivie

Des produits à valeur ajoutée sont distribués par 17 magasins locaux

Un engagement envers une production organique et durable fait partie intégrante de la philosophie d’Irupana

scolaires. Comme cette recette a été choisie par les écoliers eux-mêmes, elle a représenté une étape importante dans les efforts accomplis par Irupana en vue de rendre les ingrédients locaux appréciés par la population.

En 2007, Irupana a été sélectionnée pour produire de barres de céréales et des préparations favorisant l’allaitement maternel dans le cadre d’une extension des programmes gouvernementaux à l’alimentation scolaire et à la santé maternelle. En lien avec ces programmes, Irupana produit aujourd’hui 160 000 à 180 000 barres et 60 000 portions de préparations par mois, contribuant ainsi à lutter contre la baisse de la consommation locale de quinoa parmi les couches défa-vorisées de la population.

Transformer la perception du quinoa Ces activités ne sont pas seulement sensées au point de vue commercial, mais elles sont aussi au cœur de la mission d’Irupana qui consiste à contrer la discri-mination qui entoure la consommation de produits locaux. «En Bolivie, certaines personnes qualifient le quinoa de «comida de indios» (nourriture pour Indiens) pour le dénigrer,» explique Martha Cordero. «Associer l’identité indigène à un grave préjugé est un gros problème et nous nous employons jour après jour à changer cette perception. Nous cherchons à donner une nouvelle image au quinoa de manière à rendre les Boliviens fiers de leur héritage national.»

En plus de ces programmes nationaux, Irupana possède 17 magasins locaux qui vendent des produits à valeur ajoutée comme des barres de céréales, du lait et de la farine. Ces magasins donnent à Irupana une vaste présence pour combattre les stéréotypes négatifs associés au quinoa, tout en assurant la stabilité du mar-ché de ses produits. Pour garantir que ses produits correspondent bien au goût local, le directeur de la société voyage régulièrement sur l’Altiplano pour ren-contrer ses habitants et échanger des idées pour de nouvelles préparations. Si les exportations de quinoa représentent maintenant la majorité de ses revenus, Irupana tient à ce que la nourriture traditionnelle du pays soit aussi appréciée localement.

Concentrée sur des pratiques bios et durables Dès le début, Irupana s’est engagée envers la production durable et organique, considérant que celle-ci est partie intégrante de sa philosophie et essentielle au succès à long terme de son modèle d’affaires. Hormis sa participation aux pro-

Un producteur sur le marché de Challapata tient une poignée de quinoa. Alors que ce grain tend à être associé aux consommateurs occidentaux relativement riches et conscients de leur santé, sa consommation en Bolivie est souvent victime d’un préjugé.

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responsAbility | Etude de cas: le quinoa 11

Outre qu’elle réduit l’impact de la production sur l’environnement, la certification bio donne aux producteurs accès à des marchés plus stables et payant des prix plus élevés. Freddy, un producteur local qui travaille depuis près de vingt ans avec Iru-pana, affirme: «Les producteurs savent ce qu’ils font. Il est normal qu’ils s’efforcent de pousser la production au maximum en ce moment. C’est là où Irupana inter-vient. Elle les persuade en effet de l’intérêt à avoir une vision à longue échéance, en les convaincant qu’ils s’en sortiront mieux en s’engageant envers des pratiques plus durables. Car ils ont en Irupana un partenaire qui les accompagnera long-temps.»

Freddy a gagné une connaissance approfondie des méthodes de production bio quand il était employé d’Irupana. Aujourd’hui, il n’est pas seulement l’un des pro-ducteurs les plus fiables de la société, mais encore il gère une organisation dénom-mée AYNI qui fournit une assistance technique à cinq associations différentes de culture du quinoa, qui comptent chacune plus de trente producteurs. «Presque tout ce que je sais de la production organique, je l’ai appris d’Irupana et de son fondateur Javier Hurtado.»

grammes gouvernementaux précités, Irupana adhère aux principes écologiques dans l’ensemble de sa chaîne de valeur. Comme l’affirme Martha Cordero: «Nous sommes persuadés que toute la production agricole peut et doit reposer sur des principes organiques et durables et sur le concept que la relation entre l’homme et la nature devrait être basée sur la réciprocité. C’est pourquoi nous nous engageons pleinement envers la production bio, en collaborant étroitement avec nos produc-teurs de manière à s’assurer que nos activités améliorent à terme la sécurité ali-mentaire des populations indigènes.»8

Persuader les producteurs de continuer d’adhérer aux méthodes bios peut cepen-dant s’avérer difficile dans le contexte actuel où les prix du quinoa conventionnel sont élevés. Ce qui signifie que la prime pour le quinoa bio, dont le coût de produc-tion est beaucoup plus élevé, est faible. Irupana a adopté une stratégie à trois vo-lets pour encourager ses fournisseurs à cultiver bio. Premièrement, l’organisation subventionne l’achat de produits phytosanitaires et d’engrais organiques ainsi que de machines agricoles. Deuxièmement, elle fournit une assistance technique importante en organisant, trois fois par an, des séminaires sur la production orga-nique pour chacun de ses groupes de producteurs. Troisièmement, elle paie tous les coûts de la procédure d’obtention de la certification bio pour tous ses produc-teurs; ce qui représente un investissement conséquent car cette procédure prend au moins trois ans. Selon Primo, un agronome employé par Irupana, le calendrier pour convertir son champ à la production organique est le suivant:

Une stratégie à trois volets pour promouvoir la production bio parmi les fournisseurs

En agissant en tant que partenaire de long terme des producteurs, Irupana inspire confiance dans les pratiques durables

Une assistance technique sur les méthodes de production bio profite aux associations de culture du quinoa

Calendrier de la conversion de la production conventionnelle à la production bio

AN 1 Changer d’intrants et nettoyer le terrain des résidus conventionnels AN 2 Maintenir le terrain exempt de produits chimiques et autres impuretés AN 3 Achever la transition, maintenir le terrain exempt de résidus chimiquesAN 3 Faire évaluer le terrain pour obtenir la certification bio

Source: Irupana 2014

8 Mission et vision, Irupana (voir www.irupanabio.com).

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responsAbility | Etude de cas: le quinoa12

Comme indiqué plus haut, Irupana s’approvisionne en quinoa de grande qualité auprès d’un groupe de base de 200 producteurs affiliés, dont la plupart sont de petits paysans cultivant moins de deux hectares de terrain. Cette section étudie l’effet du boom du quinoa sur leurs revenus, soulignant pourquoi les producteurs d’Irupana sont particulièrement bien placés.

La hausse de la demande de quinoa a eu un impact fort et direct sur les reve-nus des producteurs. Sur la base des prix et des coûts de production actuels, un petit paysan possédant un hectare de terrain peut générer un profit net d’USD 1470 à 2780 par an.9 Ce qui signifie qu’avec deux hectares, il peut ga-gner près d’une fois et demie le salaire annule minimum du pays, qui a été re-levé à USD 2500 en avril 2014. En outre, les prix devraient chuter à USD 80 par quintal pour que la production ne soit plus rentable. Plusieurs études10 ainsi que des entretiens menés par l’auteur montrent que les revenus nets des producteurs sont aujourd’hui nettement plus élevés que dans les années écou-lées (voir fig. 2).

Nouvelles perspectives pour les producteurs de quinoa

9 Cela correspond à une étude réalisée en 2011 par Katherine Antonio qui a estimé le gain net à USD 1137 par hec-tare au prix de vente d’USD 95 par quintal. Antonio, K. «The Challenges of Developing a Sustainable Agro-Industry in Bolivia: the Quinoa Market», Duke University (2011), pp. 23 – 25.

10 Les exemples comprennent: E. Avitabile, «Impact of the Quinoa Boom on Bolivian Family Farmers», FAO, 2013.

Figure 2: Profitabilité de la culture du quinoa (par hectare), aux prix de 2014*

Source: Irupana 2014 * Hypothèse: production de16 quintaux par hectare (moyenne nationale); estimation des coûts de production du quinoa bio dans la partie haute de la fourchette, comprenant: travail, intrants, machines et transport.** Peuvent être considérés comme représentatifs du prix à la production.

Revenu Coûts de production Gain net (axe de dr.)

5000

4500

4000

3500

3000

2500

2000

1500

1000

500

0

3500

2800

2100

1400

700

0

Gai

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Prix de vente à Challapata, en USD (par quintal)**

Aux prix de 2014, un petit paysan avec 2 hectares de terrain peut gagner 1,5 fois le salaire minimum.

Les petits cultivateurs de quinoa profitent directement de leur coopération avec Irupana

Les producteurs ont vu leurs revenus croître de manière significative à la suite de la hausse de la demande

USD 170 USD 185 USD 200 US 215 USD 230 USD 245 USD 260 USD 275 USD 290

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De surcroît, les producteurs d’Irupana sont dans une position particulièrement bonne. Tout d’abord, Irupana paie à ses producteurs une prime de fidélité d’USD 7 à USD 15 par quintal. Ce qui signifie qu’ils gagnent un supplément d’USD 110 à USD 240 par hectare (dans l’hypothèse où ils produisent 16 quintaux par hectare, correspondant à la moyenne nationale). Ensuite, Irupana les aide à dé-gager un revenu supplémentaire dans la mesure où le quinoa bio se vend à un prix plus élevé que le quinoa conventionnel. Puis, grâce à ses équipements der-nier cri de lavage, de séchage et de tri – conçus et construits en Bolivie par le Centro de Producción de Tecnologías Sostenibles – Irupana peut traiter de plus grandes quantités de quinoa bio pour l’exportation. Ces équipements permettent ainsi aux producteurs de vendre une plus grande partie de leur récolte à des prix plus élevés. Enfin, les étroites relations qu’Irupana entretient avec des acheteurs internationaux fournissent à ses producteurs un accès stable au marché, ren-dant possible une planification à long terme.

Le boom du quinoa, l’expérience d’un producteur Max (27 ans) est un producteur de quinoa de Challapata en Bolivie. Aussi loin qu’il s’en souvienne, il a planté et récolté du quinoa, comme ses parents et ses grands-parents avant lui. Assis dans l’échoppe que sa famille possède mainte-nant dans le centre de Challapata. Max explique comment la flambée récente des prix du quinoa a changé sa vie.

«Dans ma vie de producteur de quinoa, il y a clairement un avant et un après. Quand j’étais jeune, nous avions de la peine à joindre les deux bouts par la vente du quinoa uniquement. Je me rappelle avoir vendu de l’eau à la gare routière d’Oruro pour gagner quelques sous. En grandissant, j’ai vu beaucoup de mes amis et membres de ma famille se rendre à La Paz pour y trouver du travail. Pour-tant, je suis resté avec mes parents et nous avons finalement réussi.

Depuis lors, Challapata a été transformé. Il y a plus de voitures et de camions, et nous pouvons nous payer certains luxes, comme des vacances sur les rives du lac Titicaca. Même si les coûts de production du quinoa ont augmenté ces der-nières années – le prix des engrais organiques ont décuplé, par exemple – il nous reste plus d’agent après la récolte qu’autrefois. J’ai ainsi pu m’acheter récem-ment une remorque pour aider à transporter mon quinoa des champs au marché et notre échoppe marche bien.

Cependant, cette flambée des prix a également apporté son lot de problèmes. Tout d’abord, bon nombre de personnes, qui ont quitté la région quand j’étais jeune, reviennent, revendiquant le droit de cultiver la terre. Certes, nous n’al-lons pas lutter là contre, mais cela provoque un ressentiment parmi ceux d’entre nous qui sont restés et il y a eu des conflits. A cela s’ajoute le fait que la contre-bande de quinoa en provenance du Pérou ne cesse d’augmenter, provoquant une chute des prix à Challapata.11 Enfin, de nouvelles sociétés s’établissent que nous ne connaissons pas ou en qui nous n’avons pas confiance.

Dans ce climat toujours plus incertain, notre relation avec Irupana prend d’au-tant plus d’importance. Cela fait maintenant plus de treize ans que je vends du quinoa à Martha Cordero. Elle nous connaît moi et ma famille et je la connais. Nous connaissons également Primo (l’agronome de la société) et Nikode (res-ponsable de l’approvisionnement), qui tous deux vivent ici à Challapata. Je sais que si je leur livre mon produit, je serai bien payé et à temps.»

11 C’est une question très controversée, les autorités péruviennes et boliviennes s’accusant mutuellement de contrebande. Cependant, des rapports récents sur le marché de Challapata semblent confirmer les dires de Max. En effet, les prix du quinoa ont chuté ces derniers mois à cause de la contrebande de produits provenant du Pérou. Pour en savoir plus: Valdez, C. «Influx of cheap Peruvian quinoa riles Bolivia», Associated Press, 21 novembre 2014, et d’autres articles.

Pour chaque quintal de quinoa, Irupana paie une prime de fidélité à ses producteurs affiliés

Le boom du quinoa a transformé la vie des producteurs, qui disposent désormais de plus de revenus après la récolte

La flambée des prix a également apporté son lot de problèmes

La relation avec Irupana est plus importante que jamais dans un climat toujours plus incertain

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Accès à du financement avant la récolte Outre ces avantages, Irupana demeure la seule source de financement avant la récolte pour la plupart de ses producteurs. Malgré un décret12 demandant au secteur financier d’accroître ses prêts à l’agriculture, ce n’est pas demain que les petits et moyens cultivateurs seront intégrés dans le système. Le secteur du quinoa demeure trop artisanal, fragmenté et volatil pour attirer les institutions financières classiques. Etant donné le peu d’importance des emprunts deman-dés par les petits paysans et les coûts très élevés de leur traitement (nécessitant souvent de longs voyages vers les zones rurales pour vérifier les activités géné-ratrices de revenus et les garanties), le risque est trop important et non rentable. Par conséquent, les banques ont augmenté leurs crédits aux grandes sociétés et organisations agricoles, laissant les petits producteurs en plan. Ce désavan-tage est d’autant plus grave que les petits cultivateurs ont désespérément be-soin de plus de financement avant la récolte pour améliorer sa qualité et son ren-dement.

Irupana investit un temps et des ressources considérables pour aider ses produc-teurs à remplir les formulaires de demande de prêt, à réunir les documents re-quis et à les accompagner à la banque. Comme l’explique Martha Cordero: «Outre notre intérêt personnel à aider les gens dont nous prenons soin, notre société bé-néficie également du meilleur accès de nos producteurs à du préfinancement. En effet, cela nous rassure que nous aurons suffisamment de produits de grande qualité pour satisfaire aux contrats préétablis avec nos acheteurs.» Tant que ces difficultés empêcheront les banques de soutenir plus directement les produc-teurs de quinoa, Irupana restera la seule source de préfinancement pour la plu-part de ses adhérents à court et à moyen terme.

Une relation basée sur la confianceAu-delà des avantages en termes de revenu, d’assistance technique et d’accès au financement, le facteur que les producteurs ont mentionné comme étant le plus important dans leur relation avec Irupana était la confiance. Comme indi-qué plus haut, l’augmentation du nombre de cultivateurs et d’entreprises pri-vées soucieux d’accroître leur part de marché a rendu ce commerce plus concur-rentiel et incertain. Un autre producteur local, Doña Ronaldina, explique: «Il y a actuellement tellement d’intermédiaires et de sociétés traversant Challapata, certains sont ici aujourd’hui et disparus demain, nous ne pouvons pas avoir confiance. L’un de mes amis a été berné de plusieurs quintaux de quinoa par l’une de ces sociétés. Un acheteur s’est rendu à sa ferme – lui évitant les coûts

12 Asamblea Legislativa Plurinacional de Bolivia. ‘Ley 393: Ley de Servicios Financieros’, 2013.

Les banques ont accru leurs crédits aux grandes sociétés agricoles, laissant les petits paysans en plan

En octroyant du financement avant la récolte, Irupana bénéficie d’un approvisionnement plus fiable en produits de grande qualité

La relation entre les producteurs et Irupana est basée sur la confiance

A g. Un champ de quinoa. A dr. Culture du quinoa, un superaliment, sur l’Altiplano bolivien

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et les tracas du transport jusqu’à Challapata – et lui a proposé un prix plus élevé. Ensuite, il est revenu la semaine suivante, et la suivante pendant quatre se-maines d’affilée. A la cinquième semaine, il a chargé son quinoa en promettant de revenir aussitôt pour le paiement. Mon ami ne l’a jamais revu. C’est pourquoi la confiance est si importante. Nous vendons notre quinoa à Martha et Nikode depuis plus de onze ans maintenant et avons toujours été bien payés et dans les temps.»

Afin de conserver la confiance de ses producteurs, Irupana doit être capable de leur verser des avances. Dans leur étude de la chaîne de valeur du quinoa, La-guna et al. ont découvert que dans les systèmes de contrat – utilisés par la plu-part des entreprises privées – les producteurs doivent attendre parfois plusieurs mois avant d’être intégralement payés. Cette situation montre que l’entreprise est en position de force pour négocier avec eux, ce qui est souvent très frustrant pour les producteurs13 Durant les interviews, ces derniers ont fréquemment loué Irupana de ne pas les faire attendre pour obtenir leur dû. Irupana a confirmé qu’elle pratique ainsi avec la plupart de ses producteurs. Toutefois, il est diffi-cile de maintenir les liquidités nécessaires afin de pouvoir les payer à la livrai-son. C’est pourquoi la relation entre responsAbility et Irupana est d’une impor-tance capitale.

Superaliment prêt à être expédié: sacs de quinoa blanc ou royal (chenopodium quinoa)

13 Laguna, P. et al. «Del Altiplano Sur Boliviano hasta el Mercado Global: Coordinación y Estructuras de Gobernancia en la Cadena de Valor de la Quinua Orgánica y del Comercio Justo», Agroalimentaria N° 22, janvier-juin (2006).

Irupana s’est engagée à traiter ses producteurs de manière équitable; ce qui implique de les payer rapidement

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L’arrivée d’acteurs disposant de ressources financières importantes et préoccu-pés uniquement par le rendement a mis la pression sur des sociétés comme Iru-pana. Avant de collaborer avec responsAbility, la faible disponibilité de finance-ments locaux faisait qu’Irupana avait des difficultés à payer ses producteurs à l’avance. Par conséquent, elle n’avait pas d’autre choix que de les régler qu’après avoir été elle-même payée par les importateurs, généralement trois à six mois plus tard. Cette situation menaçait doublement les objectifs sociaux et finan-ciers d’Irupana. Premièrement, elle mine le bien-être des cultivateurs dont le quinoa est, pour la plupart, l’unique source de revenu. Les retards de paiement perturbent leur vie quotidienne en les empêchant d’investir dans les intrants et le travail nécessaire à l’amélioration de la productivité de leur champ. Deuxiè-mement, si la relation entre Irupana et ses producteurs se détériore, la société a plus de peine à obtenir les produits dont elle a besoin pour remplir ses obliga-tions locales et internationales. Pour permettre à Irupana de couvrir ses besoins de liquidités à court terme et de payer ses producteurs à l’avance, responsAbility lui a octroyé, en août 2013, un prêt en fonds de roulement s’élevant à 1 million de dollars. Selon Martha Cor-dero: «Sans le crédit de responsAbility, nous n’aurions pas été en mesure de ré-gler nos producteurs à temps au prix qu’ils méritent. Comme le marché est de-venu très compétitif, nous aurions sans doute perdu certains producteurs au profit de concurrents qui ne partagent pas nos objectifs en matière sociale et en-vironnementale.»

Exigences de garantie souples pour faciliter un crédit Martha Cordero a ajouté que la société avait tenté d’obtenir un crédit en fonds de roulement, mais que sa demande avait été rejetée par manque de sûretés ap-propriées. Comme les prêteurs locaux n’acceptent en garantie que des actifs im-mobiliers ou des hypothèques – qu’Irupana avait déjà gagées pour étendre ses capacités de traitement – elle ne disposait plus d’autres moyens pour assurer le financement nécessaire. Le prêt de responsAbility, garanti par les contrats conclu avec des importateurs des Etats-Unis ou d’Europe, est arrivé à point nommé. Il a permis à Irupana de régler immédiatement ses producteurs, renforçant au pas-sage leurs relations et s’assurant leurs produits de qualité.

Irupana étend actuellement ses capacités de traitement, cherchant à tirer pro-fit de la hausse de la demande de biens à valeur ajoutée provenant des marchés nationaux et internationaux. Quant à responsAbility, il demeure un partenaire engagé tandis qu’Irupana subit une métamorphose passionnante.

Une relation exemplaire La relation que responsAbility entretient avec Irupana témoigne de son engage-ment plus large d’investir dans des entités qui enregistrent une réussite finan-

Le rôle du partenaire financier

Avant de travailler avec res- ponsAbility, Irupana avait de la peine à payer ses producteurs à l’avance en raison de la disponibilité limitée de finance-ment local

responsAbility a accepté les contrats d’exportation en garantie de son prêt à Irupana, lui donnant ainsi un accès important au financement

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cière en améliorant l’existence de vastes couches de la population par le biais de leurs produits et services. L’amélioration de la production, l’accès aux mar-chés, les relations commerciales et les positions de négociation des petits pro-ducteurs constituent l’un des côtés de l’approche de responsAbility. Mais de l’autre, la société dirige ses investissements exclusivement vers des organisa-tions opérant dans des secteurs liés au développement qui s’engagent envers des pratiques sociales et environnementales responsables. Etant donné la pres-sion extrême que le boom du quinoa exerce sur le tissu social et environnemen-tal des communautés de l’Altiplano bolivien, ces critères sont très importants. Soucieux de la dégradation des sols et de son impact sur la viabilité à long terme de cette agriculture, responsAbility a défini d’autres critères d’éligibilité qui ex-cluent tout investissement dans un producteur, transformateur ou exportateur bolivien de quinoa qui ne s’engage pas envers des pratiques bios et durables. responsAbility estime qu’il est essentiel de s’assurer que le quinoa reste, à long terme, une source stable de nourriture et de revenu pour les petits producteurs.

Conclusion Le quinoa est réputé pour être l’un des aliments les plus nutritifs au monde. Par conséquent, la demande va poursuivre sa progression entraînant un élargisse-ment des limites de sa zone de culture. Le quinoa est une plante résistante et adaptable, de sorte que d’autres pays vont développer et commercialiser des va-riétés adaptées à leurs propres écosystèmes. Mais dans un proche avenir, la pro-duction restera concentrée en Bolivie et au Pérou. Pour la culture locale, le bien-être des producteurs et la durabilité environnementale, cette extension de la production recèle des risques considérables. Il est dès lors important que les parties prenantes internationales soutiennent des projets et des modèles d’af-faires propres à réduire ces risques. En investissant dans des sociétés comme Irupana, responsAbility défend le développement de conditions de vie durables pour les cultivateurs de quinoa, tout en améliorant les perspectives à long terme de ce secteur.

La forte demande de quinoa profite aux producteurs mais recèle certains risques dont il convient de tenir compte pour assurer le développement durable de ce secteur

responsAbility cherche à investir dans des entités qui enregistrent une réussite financière en améliorant les conditions de vie de vastes couches de la population

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A propos de responsAbility

responsAbility Investments AG est, dans l’investissement servant au développe-ment, l’un des principaux gestionnaires d’actifs au monde, spécialisés dans les secteurs liés au développement des économies émergentes. Ces secteurs com-prennent les domaines de la finance, de l’agriculture, de l’énergie, de la santé et de la formation. responsAbility met du financement sous la forme de dette ou de prises de participation à la disposition d’entreprises non cotées dont les modèles d’affaires ciblent les couches à bas revenus de la population. Ce fai-sant, ces entreprises soutiennent la croissance économique et le progrès social. responsAbility offre aux investisseurs, tant privés qu’institutionnels, des solu-tions de placement gérées professionnellement. Fondé en 2003, responsAbility gère pour USD 2,6 milliards de fonds investis dans plus de 530 entreprises situées dans plus de 90 pays. La société, dont le siège est à Zurich, possède des bureaux à Hongkong, Lima, Luxembourg, Mumbai, Nairobi, Oslo et Paris. Parmi ses action-naires, elle compte de grands noms de la place financière suisse et ses propres col-laborateurs. responsAbility est soumis à la surveillance de l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers FINMA.

Par le biais de son fonds dédié à l’agriculture, responsAbility investit dans toute la chaîne de valeur agricole, en se concentrant sur les organisations qui mani-festent un engagement fort envers le négoce et/ou la production durables. Les in-vestissements sont en majorité réalisés dans des économies en développement et des marchés émergents. Ils sont diversifiés dans plus de trente matières premières agricoles. Le fonds gère actuellement plus de 80 millions de dollars, investis dans 76 organisations de 37 pays. Cette forte croissance et cette large diversification ont été obtenues grâce à une présence accrue de responsables des investissements sur les différents continents. Parmi les facteurs ayant contribué au succès de cette expansion, il y a lieu de citer la gestion active du portefeuille et l’efficacité de la procédure conjointe d’investissement.

Pour en savoir plus Cette étude ce cas est disponible sur le site www.responsAbility.com/multimedia/fr, de même que toutes les études, publications et webcasts de responsAbility.

A propos de l’auteur David Diaz est analyste en recherche auprès de responsAbility Invest ments AG. Il est titulaire d’une licence en économie et philosophie de l’Université de Columbia et d’un master de Politi - ques Publiques (Sécurité et Etudes des conflits) de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris (Sciences Po). Il est certifié «Expert

in Microfinance» par l’Ecole de Finance et Management de Francfort. Avant de rejoindre responsAbility en 2013, David Diaz a travaillé comme consultant auprès de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et en qualité d’assistant juridique auprès de Cleary Gottlieb Steen & Hamilton.

David Díaz, Research [email protected], +33 1 49 21 26 27

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