17
R ECHERCHE ET PERSPECTIVES Pédagogie Médicale 2011; 12 (2): 69–85 DOI: 10.1051/pmed/2011026 c 2011 EDP Sciences / Société Internationale Francophone d’Education Médicale Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne Medical schools in sub-Saharan Africa Fitzhugh Mullan 1 , Seble Frehywot, Francis Omaswa 18 , Eric Buch 2 , Candice Chen, S Ryan Greysen 3 , Travis Wassermann 1 , Diaa Eldin ElGaili Abubakr 4 , Magda Awases 19 , Charles Boelen 17 , Mohenou Jean-Marie Isidore Diomande 1 , Delanyo Dovlo 6 , Josefo Ferro 7 , Abraham Haileamlak 8 , Jehu Iputo 9 , Marian Jacobs 10 , Abdel Karim Koumar´ e 11 , Mwapatsa Mipando 12 , Gottleib Lobe Monekosso 13 , Emiola Oluwabunmi Olapade-Olaopa 14 , Paschalis Rugarabamu 15 , Nelson K Sewankambo 16 , Heather Ross 1 , Huda Ayas 1 , Selam Bedada Chale 1 , Soeurette Cyprien 1 , Jordan Cohen 1 , Tenagne Haile-Mariam 1 , Ellen Hamburger 1 , Laura Jolley 1 , Joseph C Kolars 20 , Gilbert Kombe 21 et Andre-Jacques Neusy 22 1 The George Washington University, Washington, DC, USA 2 University of Pretoria, Pretoria, Afrique du Sud 3 Yale University, New Haven, CT, USA 4 University of Gezira, Wad Madani, Soudan 5 University of Cocody, Abidjan, Côte d’Ivoire 6 World Health Organization, Geneva, Suisse 7 Catholic University of Mozambique, Beira, Mozambique 8 Jimma University, Jimma, Ethiopie 9 Walter Sisulu University, Mthatha, Afrique du Sud 10 University of Cape Town, Cape Town, Afrique du Sud 11 University of Mali, Bamako, Mali 12 University of Malawi, Blantyre, Malawi 13 Global Health Dialogue Foundation, Yaounde, Cameroun 14 University of Ibadan, Ibadan, Nigeria 15 Hubert Kairuki Memorial University, Dar Es Salaam, Tanzanie 16 Makerere University, Kampala, Ouganda 17 International Consultant in Health Systems and Personnel, Sciez-sur-Léman, France 18 African Center for Global Health and Social Transformation, Kampala, Ouganda 19 World Health Organization, Harare, Zimbabwe 20 University of Michigan Medical School, Ann Arbor, MI, USA 21 Abt Associates, Bethesda, MD, USA 22 New York University School of Medicine, New York, NY, USA Mots clés : Afrique subsaharienne ; facultés de médecine ; santé publique Résumé – Contexte, problématique et objectifs : Les nombres restreints de diplômés sortant d’écoles de médecine peu nombreuses, et l’émigration des diplômés vers d’autres pays contribuent au faible nombre de médecins présents en Afrique subsaharienne. L’étude La version princeps de cet article a été publiée en anglais dans The Lancet (Mullan F, Frehywot S, Omaswa F, Buch E, Chen C, Greysen SR et al. Medical Schools in Sub-Saharan Africa. Lancet 2011;337:1113-21. Copyright Elsevier, 2011). La présente traduction française a été eectuée par Odile Bosch 4602 Cornwallis Court 22309 Alexandria (VA), USA, et révisée au sein du comité de rédaction de Pédagogie Médicale ; bien qu’elle ait été eectuée avec la permission des éditions Elsevier, elle n’a pas révisée sous l’égide de cet éditeur. Article publié par EDP Sciences

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

RECHERCHE ET PERSPECTIVESPédagogie Médicale 2011; 12 (2): 69–85

DOI: 10.1051/pmed/2011026

c© 2011 EDP Sciences / Société Internationale Francophone d’Education Médicale

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne�

Medical schools in sub-Saharan AfricaFitzhugh Mullan1, Seble Frehywot, Francis Omaswa18, Eric Buch2, Candice Chen, S Ryan Greysen3,Travis Wassermann1, Diaa Eldin ElGaili Abubakr4, Magda Awases19, Charles Boelen17, Mohenou Jean-Marie IsidoreDiomande1, Delanyo Dovlo6, Josefo Ferro7, Abraham Haileamlak8, Jehu Iputo9, Marian Jacobs10, Abdel KarimKoumare11, Mwapatsa Mipando12, Gottleib Lobe Monekosso13, Emiola Oluwabunmi Olapade-Olaopa14, PaschalisRugarabamu15, Nelson K Sewankambo16, Heather Ross1, Huda Ayas1, Selam Bedada Chale1, Soeurette Cyprien1,Jordan Cohen1, Tenagne Haile-Mariam1, Ellen Hamburger1, Laura Jolley1, Joseph C Kolars20, Gilbert Kombe21

et Andre-Jacques Neusy22

1 The George Washington University, Washington, DC, USA2 University of Pretoria, Pretoria, Afrique du Sud3 Yale University, New Haven, CT, USA4 University of Gezira, Wad Madani, Soudan5 University of Cocody, Abidjan, Côte d’Ivoire6 World Health Organization, Geneva, Suisse7 Catholic University of Mozambique, Beira, Mozambique8 Jimma University, Jimma, Ethiopie9 Walter Sisulu University, Mthatha, Afrique du Sud

10 University of Cape Town, Cape Town, Afrique du Sud11 University of Mali, Bamako, Mali12 University of Malawi, Blantyre, Malawi13 Global Health Dialogue Foundation, Yaounde, Cameroun14 University of Ibadan, Ibadan, Nigeria15 Hubert Kairuki Memorial University, Dar Es Salaam, Tanzanie16 Makerere University, Kampala, Ouganda17 International Consultant in Health Systems and Personnel, Sciez-sur-Léman, France18 African Center for Global Health and Social Transformation, Kampala, Ouganda19 World Health Organization, Harare, Zimbabwe20 University of Michigan Medical School, Ann Arbor, MI, USA21 Abt Associates, Bethesda, MD, USA22 New York University School of Medicine, New York, NY, USA

Mots clés :Afrique subsaharienne ;facultés de médecine ;santé publique

Résumé – Contexte, problématique et objectifs : Les nombres restreints de diplôméssortant d’écoles de médecine peu nombreuses, et l’émigration des diplômés vers d’autrespays contribuent au faible nombre de médecins présents en Afrique subsaharienne. L’étude

� La version princeps de cet article a été publiée en anglais dans The Lancet (Mullan F, Frehywot S, Omaswa F, Buch E, Chen C,Greysen SR et al. Medical Schools in Sub-Saharan Africa. Lancet 2011;337:1113-21. Copyright Elsevier, 2011).La présente traduction française a été effectuée par Odile Bosch 4602 Cornwallis Court 22309 Alexandria (VA), USA, et révisée ausein du comité de rédaction de Pédagogie Médicale ; bien qu’elle ait été effectuée avec la permission des éditions Elsevier, elle n’apas révisée sous l’égide de cet éditeur.

Article publié par EDP Sciences

Page 2: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

70 F. Mullan et al.

sur les écoles de médecine en Afrique subsaharienne a examiné les défis, les innovations etles nouvelles tendances au regard de l’éducation en médecine dans la région. Méthodes :Nous avons retenu 168 écoles de médecine ; parmi les 146 qui ont été soumises à l’enquête,105 (72 %) ont répondu. Résultats : Les observations tirées de l’étude indiquaient que lespays mettaient en priorité l’éducation médicale dans le cadre du renforcement du secteur dela santé et nous avons constaté nombre d’innovations dans la préparation « pré-médicale »,l’éducation en équipe et l’usage créatif du soutien limité en matière de recherche. L’étudea aussi attiré l’attention sur le problème généralisé d’un effectif insuffisant de professeurscapables d’enseigner les sciences fondamentales et cliniques, d’une infrastructure physiquepeu développée et du manque d’accréditation externe. Les tendances enregistrées incluent lacroissance des écoles de médecine privées, l’éducation axée sur la communauté, les partena-riats internationaux et l’effet positif de la recherche pour le développement des professeurs.Dix recommandations orientent l’initiative de renforcement de l’éducation en médecine enAfrique subsaharienne.

Keywords:Sub-saharian Africa;medical schools;public health

Abstract – Context, problematic and objectives: Small numbers of graduates from fewmedical schools, and emigration of graduates to other countries, contribute to low physicianpresence in sub-Saharan Africa. The Sub-Saharan African Medical School Study examinedthe challenges, innovations, and emerging trends in medical education in the region. Meth-ods: We identified 168 medical schools; of the 146 surveyed, 105 (72%) responded. Results:Findings from the study showed that countries are prioritising medical education scale-up aspart of health-system strengthening, and we identified many innovations in premedical prepa-ration, team-based education, and creative use of scarce research support. The study alsodrew attention to ubiquitous faculty shortages in basic and clinical sciences, weak physicalinfrastructure, and little use of external accreditation. Patterns recorded include the growthof private medical schools, community-based education, and international partnerships, andthe benefit of research for faculty development. Ten recommendations provide guidance forefforts to strengthen medical education in sub-Saharan Africa.

Introduction

La santé en Afrique est importante au regard dela question de l’équité entre les hommes et est undéterminant de la réduction de la pauvreté et dudéveloppement humain. L’Afrique supporte 24 %du fardeau total mondial des maladies mais necompte que 3 % de l’effectif mondial en matièrede santé[1]. La Joint Learning Initiative [2] (initia-tive conjointe de recherche) et le Rapport mondialde la santé 2006[1] ont révélé la pénurie particuliè-rement grave des ressources humaines au sein dusecteur de la santé en Afrique. Les premières réac-tions à la prise de conscience de ces manques ontcomporté des demandes d’accroissement du nombredes professionnels de santé[3] et de cliniciens nonmédecins[4], ainsi qu’une réorientation des tâches

pour une utilisation plus efficace des cadres de pro-fessionnels existants[5]. L’attention porte désormaissur l’éducation et la fidélisation des docteurs en mé-decine en Afrique, non pas parce que les méde-cins résoudront les immenses besoins non satisfaitsdu continent en matière de santé mais par convic-tion qu’aucun système de santé ne peut fonction-ner sans un corps adéquat de médecins qui peuventjouer le rôle de cliniciens, de professionnels de santédu secteur public, de gérants, d’éducateurs et dedécideurs[6]. L’Afrique subsaharienne compte envi-ron 145 000 médecins[7] (5 % des 2 877 000 mé-decins en exercice en Europe) pour desservir unepopulation de 821 millions (plus que la popu-lation de l’Europe)[8]. Globalement, en Afriquesubsaharienne la proportion de médecins par rap-port à la population est de 18 pour 100 000, chiffre

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 3: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71

à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour100 000), le Brésil (170 pour 100 000) et la France(370 pour 100 000)[8]. Les pays d’Afrique les pluspauvres font face à des pénuries encore plus grandesà cet égard.

Les taux très faibles de médecins par rapportà la population dans les pays d’Afrique subsaha-rienne sont dus à nombre de facteurs, parmi lesquelsun faible nombre d’écoles de médecine (ce termeétant employé au sens générique pour désigner au-tant les écoles de médecine que les composantesmédicales des universités) d’où sort un nombre mo-deste de diplômés, l’émigration de nombreux diplô-més vers d’autres pays ou continents. Tout effort vi-sant à améliorer la performance du système de santédans ces pays doit envisager des options s’attachantà accroître la productivité des écoles de médecine età mieux fidéliser les diplômés dans leurs pays.

L’investissement stratégique dans l’éducationmédicale en Afrique subsaharienne suscite un in-térêt croissant à l’échelle nationale et internatio-nale mais il existe peu de données sur le statut desécoles de médecine ou sur les tendances au seinde l’éducation médicale dans l’ensemble du conti-nent. Par exemple, lorsque nous avons initialementpassé en revue toutes les bases de données pos-sibles relatives aux écoles de médecine en 2008(OMS, Institute for International Medical Educa-tion (Institut pour l’éducation médicale internatio-nale), Foundation for Advancement of InternationalMedical Education and Research (Fondation pour ledéveloppement de l’éducation et de la recherche mé-dicale internationales) et World Federation for Me-dical Education (Fédération mondiale pour l’éduca-tion médicale)), nous avons répertorié 103 écoles ;pourtant, notre travail d’enquête a révélé 168 écolesfonctionnant en Afrique subsaharienne. Ce manquede données et de perspective panafricaine pose ungros défi pour les gouvernements africains et les or-ganisations de bailleurs de fonds, qui cherchent às’atteler à la pénurie de médecins.

L’étude sur les écoles de médecine en Afriquesubsaharienne a tenu compte de cette lacune enmettant au point une base d’informations sur le

statut, les tendances et les perspectives au regardde l’éducation en médecine africaine pour les édu-cateurs, les décideurs et les organisations interna-tionales. La figure 1 souligne la structure, les par-ticipants et la séquence des activités qui composentcette étude.

Constats

Résultats généraux

Parmi les 168 écoles de médecine, 146 ont étécontactées avant la clôture de la période d’enquêtede l’étude en décembre 2009 ; 105 (72 %) écolesont répondu à cette dernière. (Toutes les écolescontactées sont indiquées dans le matériel éditorialcomplémentaire en ligne pp. 7–10.) Les pays de po-pulation nombreuse (p < 0,0001) et de grande su-perficie (p < 0,0001) comptaient plus d’écoles demédecine que les pays plus petits par régression li-néaire multiple, mais il n’y avait pas d’indicationde nette corrélation entre le produit intérieur brut(PIB) d’un pays par habitant, la région d’Afrique oula langue nationale et le nombre d’écoles de méde-cine qui s’y trouvaient. Les répondants à l’enquêteet les établissements visités sur place représentaienttoutes les régions d’Afrique subsaharienne et tousles principaux groupes linguistiques. Les donnéescollectées lors des visites des sites et de l’enquêtesont résumés en 13 catégories.

1. L’expansion de l’éducationmédicale

Plusieurs pays développent le champ de l’éducationmédicale dans le cadre du renforcement du secteurde la santé. Plusieurs gouvernements nationaux in-vestissent énormément dans les ressources humainespour la santé, produisant des plans stratégiques pourle domaine de la santé, qui incluent une augmenta-tion de l’effectif des professionnels de santé. L’édu-cation médicale est essentielle au développement

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 4: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

72 F. Mullan et al.

Fig. 1. Structure et méthodes de l’étude sur les écoles de médecine en Afrique subsaharienne.

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 5: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 73

Fig. 2. Dates de fondation des écoles de médecine en Afrique subsaharienne (cinq écoles n’ont pas répondu à l’enquête).

Fig. 3. Nombre d’étudiants en première année et nombre de diplômés dans les écoles de médecine en Afrique subsaharienne(2008). N varie parce que certaines écoles de médecine n’ont pas encore de médecins diplômés.

d’un effectif de professionnels de santé et s’ins-crit intégralement dans les plans de ressources hu-maines. Sept écoles de médecine qui ont répondu ontété fondées avant 1960 et 29 autres lors des décen-nies d’indépendance (1960–79). Le nombre a peuaugmenté pendant les années 80 mais 58 des écolesayant répondu ont ouvert leurs portes depuis 1990(figure 2).

Beaucoup d’écoles de médecine augmentent lenombre d’inscriptions d’étudiants. Cinquante-neufsur 78 (76 %) qui ont répondu ont fait état d’un

accroissement du nombre d’étudiants de premièreannée, par rapport à il y a cinq ans. Cinquante-sixsur 105 (53 %) ont fait part de projets d’accroisse-ment au cours des cinq prochaines années, 57 sur 96(59 %) ayant reçu l’ordre d’augmenter leurs inscrip-tions par les ministères de la santé ou de l’éducation.

Le nombre total actuel d’étudiants inscrits enpremière année dans 96 des écoles répondant àl’enquête est 18 349. Le nombre de diplômés dansles écoles qui ont répondu était de 7861 en 2008(figure 3). Ce nombre représente les diplômés

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 6: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

74 F. Mullan et al.

Fig. 4. Frais d’inscription et sources de revenus dans les écoles de médecine en Afrique subsaharienne.

sortant des 105 écoles de médecine qui ont ré-pondu à l’enquête. Nombre des écoles qui n’ontpas répondu à l’enquête sont privées ou récenteset leurs caractéristiques semblent indiquer que lenombre moyen de diplômés est moins grand pour les63 écoles n’ayant pas répondu que pour les écolesqui ont répondu. Ces données signifient qu’envi-ron 10 000 à 11 000 diplômés par an sortent desécoles de médecine en Afrique subsaharienne. Lesdifférences entre le nombre d’inscriptions et celuides diplômés sont surtout attribuables à l’ouvertureou à l’expansion d’écoles. Quelques universités ac-ceptent initialement un grand nombre d’étudiants etréduisent cet effectif en deuxième année. Cinquante-neuf écoles sur 84 (70 %) répondant à l’enquête ontdéclaré qu’au moins 80 % des étudiants inscrits enpremière année sortaient diplômés.

Le gouvernement éthiopien investit largementdans le plan d’amplification de l’effectif suivant lastratégie appelée « flood and retain » (forte augmen-tation et fidélisation), ce qui implique une augmen-tation considérable et rapide du nombre de profes-sionnels de santé formés et la prise de mesures defidélisation correspondantes. Le ministère de l’édu-cation a ordonné que toutes les écoles de médecineaugmentent la taille de leurs promotions. Ainsi, les

inscriptions en première année à Jimma University(Éthiopie) sont passées de 200 à 250 en 2009 etdevraient atteindre 350 en 2011. Le gouvernementappuie cette stratégie en investissant dans l’infra-structure matérielle, incluant la construction d’unnouvel hôpital universitaire. L’Hubert Kairuki Me-morial University en Tanzanie illustre l’augmenta-tion du secteur privé, en augmentant ses admissionsde 25 étudiants en première année de médecine, audépart en 1998, à 70 par an en 2010. Le gouverne-ment tanzanien a apporté son soutien en octroyantdes prêts et des bourses aux étudiants des écoles pri-vées, donnant les moyens à davantage d’étudiants depayer les droits d’inscription.

Dans toutes les écoles de médecine en Afriquesubsaharienne, les tarifs varient beaucoup. Neufécoles (9 %) répondant à l’enquête offrent une ins-cription gratuite, 47 (47 %) font payer 1000 $ USou moins par an et neuf (9 %) demandent plusde 5000 $. La plus grande partie des revenus desécoles privées proviennent des frais d’inscription ;les écoles publiques reçoivent la plupart de leursbudgets d’exploitation du gouvernement (figure 4).

En réponse à une question ouverte, les répon-dants devaient discerner les trois besoins majeursqui justifiaient une augmentation de la qualité et

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 7: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 75

Fig. 5. Localisation (estimation) des diplômés d’écoles de médecine d’Afrique subsaharienne cinq ans après leur diplôme(données exprimées en pourcentage sgnalé moyen de diplômés (N = 62).

du nombre de leurs diplômés. La page 11 du maté-riel éditorial complémentaire en ligne récapitule lesréponses. Les aspects se rapportant au corps profes-soral étaient le plus souvent identifiés comme essen-tiels pour améliorer la qualité des diplômés (35 ré-pondants sur 94 ont qualifié ce point comme étantle plus important). Les questions d’infrastructureétaient le plus souvent considérées comme impor-tantes pour améliorer le nombre de diplômés (37 ré-pondants sur 94 ont noté cette question comme laplus importante). Les éléments du curriculum étaientperçus comme ayant un impact sur la qualité, alorsque les améliorations des sites cliniques pouvaientaméliorer la quantité. Les réponses faisaient allu-sion aux problèmes budgétaires en lien avec les deuxquestions.

2. Effet du système de santé du pays

Lorsque la société civile est désorganisée et quel’efficacité de la gouvernance est réduite, l’édu-cation médicale et la fidélisation des médecinss’en trouvent affectées. Les diplômés de nom-breux pays refusent de travailler dans des régionsrurales à cause du manque d’appui clinique. Lesdiplômés de l’Ibadan University, par exemple, re-noncent aux emplois du vaste et crucial réseau

d’hôpitaux secondaires du Nigeria à cause des sa-laires et conditions de travail médiocres, ainsi quedes pénuries de fournitures, de personnel de soutienet d’équipement.

L’évaluation des stratégies de fidélisation a posédes défis parce que la plupart des systèmes de santéont peu de moyens permettant suivre les diplômésdes écoles de médecine. Quarante-sept sur 58 (81 %)répondants à l’enquête dont les écoles ont produitdes médecins diplômés ont dit qu’ils n’avaient pasde système de suivi mis en place. La figure 5 indiqueles endroits où se trouvent les diplômés des écolesde médecine cinq ans après l’obtention de leur di-plôme selon l’estimation de 62 écoles répondant àcette question de l’enquête. Le pourcentage estiméde diplômés exerçant la médecine générale en milieurural cinq ans après la fin de leurs études était incon-testablement corrélé à l’existence d’un programmede service obligatoire (p = 0,039), au faible nombrede programmes de troisième cycle d’études médi-cales (p = 0,016), et au fait que l’enseignement soitdispensé en français (p = 0,016) ; ces données ontété produites par analyse de co-variance, ANCOVA.Nous n’avons pas remarqué de corrélation impor-tante avec le PNB, l’existence d’un programme derecrutement ciblé pour les étudiants de milieu rural,le pourcentage de la population nationale en milieu

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 8: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

76 F. Mullan et al.

Tableau I. Groupe de travail : recommandations pour avancer et améliorer l’éducation médicale et la santé de la populationen Afrique subsaharienne.

1. Lancer des campagnes pour développer la capacité du corps professoral des écoles de médecine, incluant lerecrutement et la fidélisation

2. Accroître l’investissement au sein de l’infrastructure de l’éducation médicale3. Mettre en place des structures qui favoriseront la collaboration interministérielle pour l’éducation médicale4. Financer la recherche et la formation en matière de recherche dans les écoles de médecine5. Développer l’éducation axée sur la communauté basée sur les principes de soins de santé primaire6. Établir des programmes de 3e cycle d’éducation médicale au niveau régional et national afin de stimuler la

formation, l’excellence et la fidélisation7. Établir des organismes nationaux et régionaux qui se chargent de l’accréditation et de l’assurance de la qualité

de l’éducation médicale8. Augmenter l’investissement par les bailleurs de fonds au sein de l’éducation médicale en restant en phase avec

les besoins de santé nationaux9. Reconnaître et passer en revue le rôle croissant des institutions privées dans l’éducation médicale10. Revitaliser l’Association des écoles de médecine africaines

rural ou l’orientation du dispositif d’éducation sur lacommunauté. Nombre d’écoles et de pays tentent defaire face à l’émigration. Le service national est re-quis pour les diplômés du Mozambique, d’Afriquedu Sud, d’Éthiopie et du Nigeria afin d’obtenir unservice clinique de la part de tous les diplômés, bienque la mise en vigueur de ces exigences soit va-riable.

3. Pénuries au sein des installationsdes écoles de médecine

Les pénuries au sein des corps professoraux desécoles de médecine sont endémiques, probléma-tiques et aggravées par l’émigration des profession-nels de santé. Pratiquement toutes les écoles quenous avons visitées dans le cadre de cette enquêteindiquaient un certain manque de professeurs au re-gard des sciences fondamentales et cliniques. L’ef-fectif du personnel enseignant (salarié à temps com-plet ou partiel et bénévole) dans 51 parmi 98 écolesrépondant à l’enquête est inférieur à 100 ; environ lamoitié ont entre 52 (25e percentile) et 147 (75e per-centile) professeurs. Les salaires modestes, les op-tions limitées de carrière, les charges de cours im-portantes, les inscriptions croissantes et l’absenced’équipement et de personnel de soutien sont lesprincipaux obstacles à la fidélisation du corps pro-fessoral dans les universités.

Les pénuries aggravent encore les contraintespour le corps professoral et favorisent l’émigra-tion ou le changement d’affectation dans des or-ganisations privées ou des recherches de postesau sein d’organisations non gouvernementales. Lesmembres du corps professoral bien formés et accré-dités sont d’excellents candidats pour le recrutementà l’extérieur du pays, ce qui appauvrit à la fois lecorps des cliniciens et celui des professeurs.

Les salaires académiques restreignent sérieuse-ment le recrutement et la fidélisation du corps pro-fessoral. Dans beaucoup d’universités, le personnelclinique est payé suivant le même barème de traite-ment que d’autres professeurs d’université, qui estinférieur à celui des médecins du secteur public fixépar les ministères de la santé. Les opportunités de re-cherche sont souvent rares et les responsabilités deprofesseurs sont lourdes. À la Gezira University auSoudan, l’absence de spécialistes en sciences fon-damentales implique que les cliniciens doivent sou-vent enseigner les sciences fondamentales aux étu-diants en médecine. Beaucoup d’écoles dépendentde professeurs expatriés. Les membres du corps pro-fessoral fondateurs de la Walter Sisulu Universityen Afrique du Sud étaient originaires d’Ouganda,de Cuba et du Nigeria. Certaines écoles ont mis enplace des stratégies créatives afin de fidéliser leursprofesseurs, telle que la Hubert Kairuki Memorial

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 9: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 77

University en Tanzanie, qui offre des incitationscomme le logement gratuit, des indemnités pour lescommunications, du temps d’antenne gratuit et uneparticipation à des séminaires.

La Catholic University au Mozambique a cibléses efforts afin de former et d’aider le corps pro-fessoral de l’école de médecine. Aujourd’hui, plusde la moitié de leur corps professoral comprend desMozambicains, bien que l’université reste encore tri-butaire d’expatriés. À la Walter Sisulu University, lemanque de personnel clinicien est atténué en grandepartie par des partenariats avec des cliniciens deshôpitaux locaux, qui sont employés par le Départe-ment provincial de santé mais dont les contrats lesobligent à participer à l’enseignement.

La perte de professeurs au sein des écoles solli-citées dans le cadre de l’enquête était substantielle,avec en moyenne une perte de 10 % du person-nel en cinq ans, la moitié des écoles perdant entre6 % (25e percentile) et 18 % (75e percentile) deleur corps professoral en cinq ans. La principale rai-son donnée pour la perte de professeurs était l’émi-gration (matériel éditorial complémentaire en lignep. 12). Au terme de l’analyse par régression linéairemultiple, le pourcentage de postes de professeurs va-cants s’avère être le plus bas dans les pays doté d’unPIB par habitant élevé (p = 0,0084) et le plus élevédans les écoles de médecine publiques (p = 0,0099),par régression linéaire multiple. La plupart des ré-pondants (80 parmi 100) pensaient que la fidélisa-tion des médecins dans leur pays posait des diffi-cultés ; cependant, seuls 51 citaient des démarchesà prendre au niveau de l’université pour tenter de ré-soudre le problème ; les plus courantes étaient desaugmentations de salaires ou de primes (20 répon-dants), le renforcement des programmes pour l’édu-cation du troisième cycle (13) et la mise en œuvred’une éducation axée sur la communauté (9).

4. Les déficits d’infrastructureen éducation médicale

Les insuffisances concernant les infrastructures né-cessaires à l’éducation médicale sont omniprésentes

et restrictives. À la Jimma University, l’électri-cité, l’eau et les télécommunications ne sont pasfiables, nuisant à la formation et à l’innovation.À l’Ibadan University, les répondants ont fait partde leur inquiétude quant aux pannes d’électricitéquotidiennes. Les départements doivent acheter desgénérateurs pour assurer les fonctions cliniques etd’enseignement. À la Catholic University, les défisincluent un nombre insuffisants d’ordinateurs, des li-mitations de la connectivité à Internet et l’absencede foyers d’étudiants. Les logements inadéquats àproximité des sites cliniques posent aussi des pro-blèmes à la Walter Sisulu University et à l’Universitédu Mali.

L’expérience du College of Medicine au Malawiest un bon exemple du rôle des partenariats dansl’amélioration de l’infrastructure. Grâce à des fondsprovenant de Suède, de Norvège et du Fonds mon-dial de lutte contre le Sida, la tuberculose et la ma-laria, l’école a construit et amélioré des salles deconférence, des bibliothèques, des foyers, des ins-tallations informatiques, des bureaux et des zones deloisirs. Ces améliorations permettent de mieux faireface à des effectifs de classes plus nombreux, ainsiqu’à un corps professoral croissant.

L’enquête de l’étude a examiné la qualité et laquantité de ressources matérielles et de communi-cations précises. Par analyse en régression linéairemultiple ont été explorées les relations entre respec-tivement six scores rendant compte de diverses res-sources (les bâtiments, les bibliothèques, les labora-toires, les sites cliniques, Internet et la technologied’information et de communication moderne [TIC])et divers facteurs nationaux et institutionnels (ma-tériel éditorial complémentaire en ligne pp. 13–14).Un PIB élevé était associé à des scores élevés pourcinq des six ressources, les écoles plus anciennesayant obtenu un score élevé pour quatre des res-sources et les écoles publiques ayant évalué leursressources comme étant les pires pour trois des indi-cateurs. Les écoles dont les frais d’inscriptions sontles plus élevés ont fait état de ressources en TIC plusmodernes que celles dont les frais sont moins impor-tants.

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 10: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

78 F. Mullan et al.

5. Coordination entre les ministèresde l’éducation et de la santé

Une coordination insuffisante entre les ministères del’éducation et de la santé peut empêcher les écolesde médecine d’augmenter la capacité de l’effectif dusecteur de la santé. Ce problème était courant danspresque tous les pays que nous avons visités. Leministère de l’éducation procure généralement lesfonds pour les écoles médicales, alors que le minis-tère de la santé est le principal employeur des diplô-més sortant des écoles de médecine. Dans nombre depays, la planification coordonnée en matière de bud-gets, priorités et résultats entre les ministères de lasanté et de l’éducation est mauvaise, ce qui contri-bue à des curriculum inappropriés et la remise dediplômes à des médecins qui ne peuvent pas trou-ver d’emploi dans le pays. Au Mali et au Soudan, lenombre annuel de diplômés dépasse largement la ca-pacité du pays à embaucher de nouveaux médecins,malgré le besoin de services de santé.

Dans l’ensemble, les ministères de l’éducationsemblent plus efficaces à établir des priorités pourles écoles de médecine que les ministères de la santé.Parmi les répondants à l’enquête, 69 sur 100 ont ditque les ministères de l’éducation contribuaient lar-gement aux priorités ou en étaient les éléments mo-teurs majeurs alors que comparativement 49 sur 101déclarent que les ministères de la santé étaient descontributeurs sérieux ou principaux. Un répondantà l’enquête a mentionné qu’une innovation notableétait le transfert de la supervision de l’école du mi-nistère de l’éducation au ministère de la santé.

6. Accréditation et évaluationde la qualité

L’accréditation et l’évaluation de la qualité sont desdéveloppements importants pour normaliser l’édu-cation médicale et les capacités des médecins. Di-vers niveaux d’accréditation et de certification ontété remarqués dans les pays que nous avons visi-tés. En Éthiopie, il n’existe pas d’organisme d’ac-créditation continue pour les écoles de médecine.

L’accréditation n’est accordée que lors de la fon-dation d’une institution. Pourtant, nombre d’écolesfont état de progrès en matière d’accréditation desétablissements et de l’évaluation des diplômés. AuMozambique, la formation récente du Conseil médi-cal prévoit de mettre au point des normes d’accrédi-tation pour les écoles de médecine et des épreuvesd’évaluation externes pour les étudiants en méde-cine. La Commission tanzanienne pour les universi-tés visite les institutions une fois avant leur accrédi-tation, puis tous les quatre ans. Le Conseil médicaldu Malawi se sert de directives de la Communautéde développement sud-africaine pour l’assurance del’accréditation et de la qualité.

7. Planification éducationnelle axéesur les besoins nationauxen matière de santé

La planification de l’éducation axée sur les besoinsnationaux en matière de santé améliore la capacitédes diplômés en médecine à satisfaire ces besoins.Les écoles mettent l’accent sur des programmesd’éducation médicale orientés sur la communauté,pertinents ou privilégiant les priorités nationales.

De nombreuses écoles de médecine mettent aupoint des curriculums portant sur les problèmes desanté de priorité nationale et se servent d’expé-riences en milieu rural et axées sur la communautépour améliorer leurs programmes. Bien que cer-taines initiatives soient lancées par les écoles seules,beaucoup d’entre elles s’inscrivent dans le contextede priorités du gouvernement et des programmesde service national. Au Malawi, le curriculum estconçu pour immerger les étudiants dans les ques-tions de santé locales. Le curriculum se concentresur les maladies et les troubles de santé les pluscourants au Malawi et dans la région. À la GeziraUniversity, les cours axés sur la communauté repré-sentent 25 % des études et nombre de cours ont lieusur le terrain, y compris dans les hôpitaux de dis-tricts, les centres de santé communautaires, les cli-niques et chez les patients. La Catholic University

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 11: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 79

Fig. 6. Participation du corps professoral à la recherche financée par les subventions dans les écoles de médecine de l’Afriquesubsaharienne, par région.

a introduit une formation en gestion pour les étu-diants, reconnaissant que certains étudiants occupe-ront des postes administratifs en tant que respon-sables régionaux de santé publique ou médecin chefsd’hôpitaux une fois qu’ils seront diplômés.

8. Importance de la recherche

Au-delà de la création de nouvelles connaissances,la recherche est importante pour le développementdes corps professoraux des écoles de médecine, lafidélisation du personnel et le renforcement de l’in-frastructure. Nombre d’écoles ont déclaré que la re-cherche favorisait le recrutement et la fidélisation dupersonnel et attirait des partenaires extérieurs. Desécoles plus anciennes dotées de portefeuilles de re-cherche plus solides continuent à mettre au pointdes programmes de recherche grâce à des sourcesde financement existantes, permettant de former desmembres plus jeunes du corps professoral. Pourtant,bien que les écoles bien établies réussissent à rece-voir un appui financier pour la recherche, les écolesplus petites et récentes font face à des défis. Le per-sonnel du corps professoral de ces écoles est sou-vent plus jeune et n’a reçu ni la formation ni l’en-cadrement nécessaires pour obtenir avec succès des

subventions de recherches. En outre, les pénuriesde personnel dans beaucoup d’écoles augmentent lacharge de cours, limitant le temps disponible pourse livrer à la recherche. L’Université du Mali a vo-lontairement programmé sa capacité de recherchesur 30 ans. Les premiers membres du corps pro-fessoral ont été envoyés à l’étranger pour une for-mation de troisième cycle et les diplômés qui reve-naient étaient garantis d’avoir un soutien financier.Les membres actuels de l’équipe de recherche aca-démique enseignent à l’école de médecine, ce quiest bénéfique à la fois pour les professeurs et pourles étudiants. L’University of Malawi récupère 10 %des fonds indirects de tous les contrats de rechercheafin de créer une base financière pour la recherche.Leur centre de soutien de la recherche assiste lesprofesseurs pour la rédaction de demandes de sub-ventions, la conception de la recherche et la gestiondes subventions, ce qui, en retour, développe la ca-pacité de recherche de l’université et augmente lessalaires du corps professoral participant à recherche.Malgré ces exemples, dans la plupart des écoles demédecine en Afrique subsaharienne, moins de 10 %des membres du corps professoral prennent part àune recherche subventionnée (figure 6). Nous avonscomparé le pourcentage de membres participant àde la recherche financée par le biais de contrats

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 12: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

80 F. Mullan et al.

avec une série de variables prédictives potentiellespar régression linéaire multi variables. Bien que denombreuses universités fournissent plusieurs typesde soutien en matière de recherche (matériel édi-torial complémentaire en ligne p. 15), seuls deuxtypes (mise à disposition d’instruments de rechercheinstitutionnels renforcés tels que des comités de re-cherche ou d’éthique (p = 0,0002) et le finance-ment du temps consacré à la recherche (p = 0,049))étaient nettement corrélés à une proportion accruede membres du corps professoral participant à unerecherche financée par des subventions. L’existencede programmes de formation à la recherche (qu’ilssoient internes ou externes) n’était pas un facteurimportant. Nous avons remarqué des variations lin-guistiques révélant que les membres du corps pro-fessoral d’écoles utilisant l’anglais comme langued’instruction avaient le plus de chances de partici-per à la recherche (p = 0,027) et que ceux d’écolesutilisant l’arabe avaient le moins de chances de lefaire (p = 0,047).

9. Innovations dans le curriculum

Des innovations impressionnantes apparaissent dansles curriculums de nombre d’écoles. Les répon-dants à l’enquête ont fait état de plusieurs méthodesd’enseignement non traditionnelles utilisées dans lesécoles de médecine en Afrique subsaharienne, parmilesquelles une éducation axée sur la communauté,l’apprentissage par problèmes et l’apprentissage paréquipes pluridisciplinaires (matériel éditorial com-plémentaire en ligne p. 16). Ces trois méthodes édu-cationnelles ont tendance à être mises en œuvre en-semble. Les institutions basant leurs programmessur une part plus importante de l’une de ces mé-thodes d’instruction, quelle qu’elle soit, pendant lesannées précliniques avaient plus de probabilité d’uti-liser les autres méthodes pendant cette période (p <0,0001 pour chaque corrélation) et les institutionsprivilégiant l’apprentissage par équipes pluridisci-plinaires lors des années cliniques avaient la plusforte probabilité d’utiliser davantage l’apprentissage

par problèmes (p = 0,0003) et axé sur la commu-nauté (p < 0,0001) pendant cette période.

Une expérience structurée au sein de la com-munauté dans le cadre d’une éducation axée sur lacommunauté permet aux étudiants de se familiariseravec les populations mal desservies et prépare mieuxles diplômés à appréhender les problèmes de santénationaux. À la Jimma University, une perspectiveorientée vers la communauté est le pivot de la mis-sion éducationnelle, qui débute par un programmede formation axé sur la communauté. Les étudiantsen médecine commencent à travailler au sein de lacommunauté après avoir acquis la maîtrise de tâchesincluant la collecte de données, le diagnostic com-munautaire, l’analyse et la préparation d’un pland’intervention pour les problèmes locaux. À la fa-culté des sciences médicales de la Makerere Univer-sity, en Ouganda, un nouveau curriculum inclut uncontact régulier avec des patients des communau-tés rurales pendant toute la période des études demédecine.

À la Gezira University, le curriculum inclut uneorientation communautaire, qui sert de principe or-ganisateur pour les étudiants en médecine, le corpsprofessoral et les diplômés. Un sens de responsabi-lité sociale accompagne tous les aspects de l’éduca-tion, et la mission de l’école orientée sur la commu-nauté est présentée de façon bien visible à l’entréedu bâtiment de l’école de médecine. Lors de la vi-site de l’équipe à l’université, les membres du corpsprofessoral spécialisés en oncologie, néphrologie etpédiatrie ont fait état de l’effet continu des principesaxés sur la communauté dans leur travail.

10. Importance d’un programmede troisième cycle (post-gradué)en éducation médicale

Le troisième cycle des études médecine est un as-pect important de la stratégie de développementd’un système de santé national. Parmi les 96 répon-dants qui ont parlé de leurs programmes de troisièmecycle, 58 ont dit qu’ils offraient des programmes cli-niques post-gradués et 47 ont donné le nombre de

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 13: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 81

diplômés qui sortaient de ces programmes par an.Ces 47 programmes correspondaient à 1909 placespour des programmes cliniques de troisième cycle,ce nombre de place ne permettant d’accueillir quemoins de 25 % du total des 7861 diplômés concernéspar l’enquête. Les programmes de troisième cycleles plus couramment offerts étaient la médecine in-terne (14 % des places dites disponibles pour lesétudes médicales de troisième cycle), l’obstétriqueet la gynécologie (13 %), la pédiatrie (13 %), lessous-spécialités de chirurgie (11 %) et la chirurgiegénérale (11 %).

La Makerere University et l’Ibadan Universityoffrent des systèmes de troisième cycle d’étudesde médecine bien développés. D’autres écoles ontmoins de possibilités pour les étudiants de troisièmecycle, et l’offre concerne alors souvent la pédiatrie,la chirurgie et l’obstétrique/gynécologie, tandis quequelques unes n’ont aucun de ces programmes. Enaugmentant le nombre de ces derniers, les écoles ontpu fidéliser davantage de diplômés et employer cer-tains des diplômés récemment formés comme pro-fesseurs à la faculté. Certaines écoles mettent enœuvre ce que l’on appelle des programmes d’édu-cation de troisième cycle « sandwich » dans lesquelsles internes poursuivent le programme sur placemais effectuent une partie de leur formation au seind’un programme régional ou international. Ce prin-cipe vise à exposer les étudiants au travail cliniqueà l’étranger tout en atténuant la tendance des méde-cins à rester à l’étranger lorsque toute leur formationse déroule ailleurs.

11. Qualité des écoles secondaires

La variabilité de la qualité des écoles secondairescrée des problèmes pour les admissions aux écolesde médecine. Des systèmes solides d’éducation se-condaire sont des conditions nécessaires pour as-surer la réussite au sein des écoles de médecinemais dans nombre de pays la qualité de l’éducationsecondaire n’est pas à la hauteur. C’est pourquoicertaines écoles ont mis en place des programmespréparatoires ou de recrutement pour les élèves

défavorisés. La Catholic University, la HubertKairuki Memorial University et le College of Me-dicine au Malawi ont mis en œuvre des années pré-paratoires pour aider les élèves à être au niveau del’enseignement des écoles de médecine. La WalterSisulu University a établi des quotas par origine eth-nique afin de refléter les caractéristiques socioéco-nomiques d’Afrique du Sud et évalue les candidats àl’aide d’un système de notes qui inclut la motivationet l’engagement au service. En outre, le curriculumdu premier trimestre offre des cours de langue, uneformation en informatique, des cours de rattrapageen sciences fondamentales et une attention particu-lière sur la façon d’étudier. Un programme de men-torat entre pairs aide les étudiants à s’adapter à la viede campus.

12. Écoles de médecine privées

Malgré les défis à relever, les écoles de médecineprivées font partie de l’innovation et de la crois-sance qui se dessinent au sein de l’offre en éducationmédicale en Afrique subsaharienne. Les premièresécoles de médecine privées ont ouvert dans les an-nées 90 et les écoles privées constituent désormais21 % (22 sur 105) de toutes les écoles qui ont ré-pondu à l’enquête (figure 2). La recherche dans lesbases de données semble indiquer qu’un tiers (21 sur63) des écoles n’ayant pas répondu sont privées, cequi impliquerait que 26 % (43 sur 168) des écolesde médecine actuellement ouvertes sont privées. Lespartisans avancent que la privatisation de l’éducationmédicale s’aligne sur les tendances mondiales au re-gard de l’éducation, alors que d’autres répliquentque ce mouvement est surtout commercial et inévi-tablement inéquitable.

Deux des dix écoles visitées étaient des institu-tions privées. La Hubert Kairuki Memorial Univer-sity est une institution à but non lucratif fondée en1997, qui a la réputation de produire des médecinsdiplômés très compétents. Cette université a concluun partenariat avec les hôpitaux publics de districtafin de procurer aux étudiants d’autres sites d’en-seignement cliniques. La Catholic University est

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 14: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

82 F. Mullan et al.

une école confessionnelle à but non lucratif, fondéeen 1995. L’université est un modèle de collabora-tion réussie avec le gouvernement du Mozambique,l’Église Catholique et plusieurs organisations inter-nationales.

13. Partenariats internationaux

Les partenariats internationaux sont des ressourcesimportantes pour nombre d’écoles de médecine. Pra-tiquement toutes les écoles de médecine en Afriquesubsaharienne, parmi lesquelles toutes les écoles vi-sitées, œuvrent en collaboration localement et in-ternationalement, principalement avec des institu-tions en Europe, en Amérique du Nord et en Afrique(matériel éditorial complémentaire en ligne p. 17).L’Université du Mali travaille en coopération avecle gouvernement français, qui l’a aidée dans le cadrede ses programmes de services de santé axés surla communauté et pour la formation en matière desanté publique. Le Mali a également mis au pointdes partenariats de recherche avec des universitéseuropéennes, nord-américaines et d’autres universi-tés africaines. La Makerere University collabore de-puis longtemps ave des organisations académiqueset à but non lucratif étrangères. Ces associationsont contribué au renforcement des capacités de re-cherche et des programmes de formation de l’école.L’University of Malawi illustre la collaboration Sud-Sud, grâce à sa participation aux programmes de for-mation conjointe par le biais de la Southern AfricaHuman Capacity Development Coalition (Coalitionpour le développement des capacités humaines enAfrique du Sud).

Discussion

Nous avons constaté une croissance remarquable del’offre en éducation médicale dans la région au coursdes deux dernières décennies. Elle avait d’ailleurscommencé longtemps avant que la communauté in-ternationale ne s’intéresse à la pénurie grave des pro-fessionnels de santé dans la région. La décision prisepar nombre de pays d’investir dans la construction

de nouvelles écoles de médecine et d’agrandir cellesqui existent, l’intérêt intense que manifestent lesjeunes au regard des études de médecine et la créa-tion d’écoles de médecine privées sont des élémentsqui reflètent ce mouvement. Les obstacles rencon-trés lors de cette amplification, pourtant, restent nonnégligeables. En l’absence d’effectifs de profession-nels de santé plus importants et stables, il y a peu dechance de mettre fin à l’épidémie du Sida ou de réa-liser les « Objectifs du millénaire pour le dévelop-pement en Afrique ». De nombreuses organisationsinternationales (incluant le Plan d’urgence présiden-tiel pour l’aide au Sida, l’Organisation mondiale dela santé, la Banque mondiale, le Fonds mondial, lesagences d’aide bilatérale et les philanthropies) ontabouti à cette conclusion[9]. L’attention mondialeportée actuellement sur l’amplification de l’effectifdes professionnels de santé crée une opportunité fa-vorable à l’éducation médicale en Afrique subsaha-rienne.

Les effectifs ubiquitairement insuffisants desmembres du corps professoral et le mauvais état gé-néral de l’infrastructure des campus sont les obser-vations les plus notables révélées par cette étude.Ces conclusions ne surprennent personne parmiceux qui s’intéressent à l’éducation médicale dansla région. Les professeurs en sciences fondamen-tales et les cliniciens sont peu nombreux partout,limitant sérieusement le développement d’une édu-cation de qualité. Les manques les plus graves setrouvent souvent dans les laboratoires, les biblio-thèques, les salles de classe, les salles de confé-rence et les foyers d’étudiants. Les faiblesses desressources en nouvelles technologies éducatives eten bande passante sont particulièrement probléma-tiques, empêchant les étudiants d’aller au-delà desanciennes méthodes d’apprentissage au profit desdéveloppements modernes basé sur Internet. L’étudea constaté la régularité et l’échelle de ces problèmes,établissant un point de référence à partir duquel lesefforts de développement devront être examinés.

La convergence de l’attention mondiale et lescaractéristiques précises des obstacles auxquels seheurte l’expansion de l’éducation médicale créent

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 15: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 83

un moment opportun. Les autorités nationales et lespartenaires internationaux œuvrant avec les univer-sités et les écoles de médecine ont la possibilité decréer de nouvelles stratégies collaboratives en ma-tière d’investissement, mettant au point des engage-ments à long terme pour un financement conjointgrâce à des mécanismes tels que des fonds de do-tation pour l’amélioration du corps professoral, desfonds spéciaux pour les nouveaux laboratoires etles besoins informatiques, ou des financement d’en-semble pour appuyer les partenariats Nord-Sud ouSud-Sud entre les universités.

Un aspect non prévu de cette étude est l’oppor-tunité qu’elle a procurée aux responsables africainsde l’éducation médicale de se rencontrer et de tra-vailler ensemble. Deux fois auparavant (dans les an-nées 60 et 90) une Association des écoles de méde-cine africaine avait été lancée mais n’avait pas étémaintenue[10]. La plupart des politiques en matièred’éducation médicale en Afrique sont centrées surdes programmes et des problèmes internes aux pays,avec peu d’occasions de discuter les problèmes etd’envisager les solutions communs à l’échelon inter-états. Cette étude, qui a offert aux responsables del’éducation l’opportunité d’aller ailleurs en Afriquepour comparer les programmes et les politiques,s’est révélée être très instructive et très stimulante.Une association des écoles africaines de médecinerevitalisée serait en position de jouer un rôle im-portant dans l’expansion de l’éducation médicale enAfrique subsaharienne, incluant la collecte de don-nées pour les programmes existants, les rapports surles bonnes pratiques, le lancement d’initiatives pourl’accréditation et la certification et la mise à jourdes informations concernant les écoles médicalesactuelles et celles qui se sont créées. Cette étudea également observé un changement notable au re-gard du rôle de l’éducation médicale de troisièmecycle en Afrique subsaharienne. Les postes au seindes programmes de troisième cycle d’études mé-dicales ne sont pas nombreux dans la plupart despays d’Afrique. Nombre de diplômés africains cher-chant une formation plus poussée partent l’acquériren Europe et en Amérique du Nord et beaucoup ne

reviennent pas. Afin de former plus de diplômés enspécialités de base et de mettre fin à l’émigrationdes jeunes diplômés, de nombreux pays démarrentet élargissent des programmes d’éducation médicalede troisième cycle. Cette tendance sera essentiellepour constituer des cadres durables de médecins dequalité dans tous les pays et pour améliorer les corpsprofessoraux existants des écoles de médecine.

L’étude ne reprenait pas le modèle d’un travailprécédent mais a réussi à créer une stratégie uniquede collecte de données, susceptible d’être applicableà des études dans d’autres régions géographiquesdans lesquelles les informations sur l’éducation desprofessionnels de santé ne sont pas bien dévelop-pées. Les caractéristiques essentielles de la struc-ture de l’étude étaient : 1) la revue de la littératureet la réalisation d’entretiens avec des informateursclés afin de faire l’état des connaissances de base ;2) la mise en place d’un comité consultatif d’édu-cateurs et de responsables des politiques de la ré-gion pour être en mesure de dégager une perspec-tive, des conseils, d’analyser les observations et deformuler des conclusions ; 3) la collecte des donnéesavec des instruments qualitatifs (visites structuréesdes sites) et quantitatifs (enquête, engageant chaquefois la participation essentielle du comité consultatifet 4) un engagement solidaire (comité consultatif etsecrétariat) au moment de l’analyse, de la rédaction,des corrections et de la publication.

LimitesCette étude comporte plusieurs limites. Les docu-ments publiés sur l’éducation médicale en Afriqueétaient surtout en anglais. Les articles écrits en fran-çais étaient moins nombreux, et rares étaient ceuxen portugais et en arabe. Bien que des membres ducomité consultatif aient apporté leur aide pour tenterde trouver davantage d’articles en d’autres languesque l’anglais, il en a été trouvé peu. La prépondé-rance des membres et du personnel du comité anglo-phone consultatif limitait aussi l’usage de sourcesd’informations dans d’autres langues que l’anglais.Parmi les dix écoles visitées, deux (au Mali et enCôte d’Ivoire) étaient francophones (une de moins

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 16: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

84 F. Mullan et al.

que la parité de la population ne le justifierait), sixétaient anglophones, une était lusophone et une étaitde langue arabe. La sous-représentation des paysfrancophones a persisté malgré plusieurs tentativesd’établir des contacts avec des écoles de la Répu-blique démocratique du Congo, du Sénégal et duCameroun. De même, les réponses de l’enquête in-diquaient une sous-représentation de certaines ré-gions, avec des taux de réponse inférieurs dans despays tels que la République démocratique du Congo,l’Angola et le Soudan. Vingt-deux écoles n’ont pasété soumises à l’enquête parce qu’elles n’ont été dé-couvertes ou identifiées qu’une fois l’étude achevée.

Certaines limites de l’enquête sont égalementliées à la nature subjective de plusieurs questionset au caractère incomplet des réponses à plusieursquestions, de façon ponctuelle pour certaines écolesou de manière convergente pour des écoles d’unmême pays. Les questions portant par exemple sur laproportion de revenu provenant de diverses sources,sur les raisons de perte de personnel ou d’émigrationdes diplômés et sur les choix de pratiques des diplô-més étaient souvent des estimations données par lesrépondants plutôt que des réponses basées sur desdonnées factuelles. Ni l’enquête ni les visites de sitesn’évaluaient les compétences des diplômés à causede l’absence de normes régionales établies au regardde la qualité de l’éducation.

Les questions n’ayant pas obtenu de réponsedans les questionnaires qui ont été renvoyés sesont avérées problématiques. Il était compréhen-sible que certaines questions aient été omises pardes écoles précises, par exemple lorsqu’elles concer-naient les diplômés alors que les écoles n’en avaientpas encore. Lorsque les questions restaient sans ré-ponse de manière inexpliquée, des tentatives étaientfaites pour contacter les répondants et leur deman-der de finir de remplir le questionnaire. Le nombrede réponses à chaque question digne d’intérêt estdonné pour chaque conclusion. Dans certains cas,des réponses contradictoires portant sur les exi-gences nationales étaient formulées par des écolesdu même pays. Par exemple, pour huit pays possé-dant plusieurs écoles ayant répondu, des réponses

incohérentes concernant l’obligation de prestationsde service de la part des diplômés ont été recueillies.

Conclusions et recommandations

L’étude a analysé le mode de fonctionnement desécoles de médecine pendant une période de re-cherche de deux ans. Les membres du comitéconsultatif ont trouvé que les perspectives qu’ilsavaient mises à jour dans ce travail méritaient desrecommandations collectives concernant les actionsqui devraient être entreprises pour favoriser et amé-liorer l’éducation médicale et, en retour, la santéde la population en Afrique subsaharienne. Un en-semble de recommandations a été rédigé, distribuéà tous les participants de l’étude, débattu, modifié,et adopté lors d’une réunion d’étude à Dar es Salam,Tanzanie, le 16 avril 2010. Le groupe de travail a faitpart de ces recommandations. Nous espérons quele travail de l’étude sur les écoles de médecine enAfrique subsaharienne et ses recommandations ser-viront de catalyseur pour une innovation et un in-vestissement plus poussés en éducation médicale enAfrique subsaharienne. Cette action, à son tour, de-vrait contribuer à produire un effectif plus robustepour une amélioration de la santé en Afrique.

Contributions des co-auteurs

Tous les auteurs ont contribué à la recherche rappor-tée dans cet article. FM, SF, FO, SRG, EB et CC ontcontribué au projet de l’article ; FM, SF, CC, SRG,TW et HR ont participé à la rédaction de l’article ;EB, CC, FM, SF et TW ont participé à l’analyse desdonnées.

Conflits d’intérêt

FO, PR et NKS ont reçu une subvention de la Fon-dation de Bill & Melinda Gates. HA, SC, EB, CC,JC, SBC, SF, SRG, TH-M, EH, LJ, FM, HR et TWont reçu un salaire provenant indirectement de fondsoctroyés par la Fondation de Bill & Melinda Gates.AH, EB, MJ-MID, DEEA, JF, JI, MJ, GLM, EOO-O, FO et NKS ont reçu des honoraires provenant

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)

Page 17: Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne⋆ · Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 71 à comparer à ceux de pays comme l’Inde (60 pour 100000), le Brésil

Les écoles de médecine en Afrique subsaharienne 85

indirectement de la Fondation de Bill & MelindaGates. EH et A-JN ont reçu des honoraires d’ex-perts conseils provenant indirectement de la Fonda-tion de Bill & Melinda Gates. AH, HA, SBC, EB,CC, JC, SC, MJ-MID, DEEA, JF, SF, SRG, EH, JI,MJ, MM, GLM, FM, A-JN, HR, EOO-O, FO, PR etNKS ont bénéficié d’une prise en charge de leursfrais de déplacements au Symposium sur l’éduca-tion médicale africaine aux fins de l’étude. EB, CC,JC, MJ-MID, TH-M, JI, MJ, LJ, MM, GLM, FM,A-JN, EOO-O, FO, PR et NKS ont bénéficié d’uneprise en charge de leurs frais de déplacement pourla première réunion d’étude à Kampala, Ouganda,aux fins de l’étude. CC, JC, JI, MM, GlM, FM,AN, HR, EOO- O, FO, PR et and NKS ont béné-ficié d’une prise en charge de leur frais de dépla-cement pour les réunions dans le cadre des visitessur place, aux fins de l’étude. AH, EB, MJ, A-JN etNKS ont reçu des honoraires pour leur participationà la révision des activités telles que les comités desurveillance des données, l’analyse statistique, lescomités de validation des critères d’évaluation, etc.AH, EB et A-JN ont été rémunérés pour écrire ouréviser le rapport. AH et EB ont reçu un soutien ad-ministratif. Les auteurs suivants déclarent qu’ils ontreçu d’autres subventions ou attendent d’autres sub-ventions de la Fondation de Bill & Melinda Gates :CC ira en déplacement à une réunion à Kampala,Ouganda, en novembre 2010 ; NKS est sous-traitantdans le cadre d’une subvention pour le jumelage dela Makerere University avec la Johns Hopkins Uni-versity ; et MJ-MID et NKS ont reçu des fonds pourorganiser les visites de sites par l’équipe de l’étudedans leurs institutions. Tous les autres auteurs dé-clarent qu’ils n’ont aucun conflit d’intérêt.

Remerciements. Ce travail a reçu le soutien de la Fonda-tion de Bill & Melinda Gates.

Références

1. WHO. Working together for health; the World HealthReport 2006. Geneva: World Health Organization, 2006.

2. Joint Learning Initiative. Human resources for health: over-coming the crisis. Cambridge: Harvard University Press,2004.

3. Zuvekas A, Nolan L, Tumaylle C. Impact of commu-nity health workers on access, use of services and pa-tient knowledge and behaviour. Washington: Bureauof Primary Health Care, US Public Health Services,1998. [On line] Disponible sur : http://aspe.hhs.gov/pic/reports/hrsa/6355.pdf (accessed June24, 2010).

4. Mullan F, Frehywot S. Non-physician clinicians in 47 sub-Saharan African countries. Lancet 2007;370:2158-63.

5. WHO. Task shifting global recommendations and guide-lines. Geneva: World Health Organization, 2008. [Online] Disponible sur :http://data.unaids.org/pub/Manual/2007/ttr_taskshifting_en.pdf (accessed June 24, 2010).

6. WHO. Report on the WHO/PEPFAR planning meet-ing on scaling up nursing and medical educa-tion. Geneva: World Health Organization, 2009. [Online] Disponible sur : http://www.who.int/hrh/resources/scaling-up_planning_report.pdf(accessed June 24, 2010).

7. WHO. World health statistics 2010. Geneva: World HealthOrganization, 2010. [On line] Disponible sur :http://www.who.int/whosis/whostat/EN_WHS10_Full.pdf (accessed June 24, 2010).

8. Population Division of the Department of Economic andSocial Affairs of the United Nations Secretariat. Worldpopulation prospects: the 2008 revision. March, 2009.[On line] Disponible sur : http://esa.un.org/unpp(accessed June 1, 2010).

9. WHO and Global Health Workforce Alliance. Scaling up,saving lives: Task Force for Scaling Up Education andTraining for Health Workers. Geneva: World HealthOrganization and Global Health Workforce Alliance,2008. [On line ] Disponible sur : http://www.who.int/workforcealliance/documents/Global_Health%20FINAL%20REPORT.pdf (accessed June 10,2009).

10. Bowers JZ. Association of African medical schools. J MedEduc 1962;37:220-21.

** Pour de plus amples détails sur l’Étude sur les écolesde médecine en Afrique subsaharienne, voir http://SAMSS.org

Correspondance et offprints : Abdel Karim Koumaré. Faculté deMédecine de Pharmacie et d’Odonto Stomatologie, Universitéde Bamako, Bamako, Mali et Institut Africain de Formation enPédagogie, Recherche et Evaluation en Sciences de la Santé (IAF-PRESS), Quartier du Fleuve, Bamako, BP 05 Koulouba, Mali.Mailto : [email protected]

c© 2011 EDP Sciences / SIFEM Pédagogie Médicale 2011; 12 (2)