Loisy-Jesus y Tradicion Evangelic A

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    ALFRED LOISY

    JSUSET LA

    TRADITION VANGLIQUE

    PARISEMILE NOURRY, DITEUR

    62, RUE DES COLES (v)1910

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    JESUSET LA

    TRADITION VANGLIQUB

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    DU MME AUTEUR

    HisToKE DU Canon de l'Ancien^Testamext (1890), 1 vol.in-8, 260 pages 5 fr.

    Histoire du Canon du Nouveau Testament (1891), 1 vol.gr. in-8, 303 pages 15 fr.

    Histoire critique du texte et des versions de l'AncienTestament (1892-1893), 2 vol. in-8 puis.

    Les Mythes babyloniens et les premiers chapitres deLA Gense (1901), 1 vol. gr. in-8, xix-212 pages puis.

    tudes bibliques, troisime dition (1903), 1 vol. in-8,2i0 pages 3 fr.

    Les vangiles synoptiques (1907-1908), 2 vol. gr. in 8,1,014 et 818 pages 30 fr.

    Le quatrime vangile (1903), 1 vol. gr. in 8, 960 pages. puise.L'vangile et l'guse, quatrime dition (1908), 1 vol.

    in-12, xxxiv-280 pages 3 fr.Autour d'un petit livre (1904), 1 vol. in-12, xxxvi-300

    pages puis.Simples rflexions sur le dcret du Saint-Office La-

    mentahili sane exitu et sur l'Encyclique Pascendidominici gregis, deuxime dition (1908). 1 vol. in 12,307 pages 3 f r.

    Quelques lettres sur des questions actuelles et sur desVNEMENTS RCENTS (1908),! vol. in-12, 295 pagcs 3 fr.

    La Religion d'Isral, deuxime dition (1908), 1 vol.in-12, 297 pages 3 fr.

    Le^n d'ouverture du cours d'Histoire des religions auCollge de France (1909), in-12, 43 pages 75

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    ALFRED LOISY1 r

    JSUSET LATRADITION VANGLIQUE

    PARIS ^EMILE NOURRY, DITEUR ^ \\^62, RUE DES COLES (v^)

    1910 V^

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    6 la prdication de Jsus, le rle qu'il s'est attri-bu, la mort qu'il a subie. Il aime se persuaderque cet aveu dpourvu d'artifice ne le feraclasser par personne en dehors de la science etde la critique. Si ce malheur devait lui arriver,il se souviendrait que de telles sentences ne sontpas infaillibles et que bien peu de gens sontqualifis pour les porter.

    Cet opuscule est, pour le principal, une repro-duction, avec quelques additions et claircisse-ment, de trois (;hapilres de l'introduction uncommentaire des vangiles synoptiques, publiau commencement de l'anne 1908. On avaitrsum dans ces chapitres les conclusions del'analyse trs minutieuse laquelle on avait sou-mis les trois premiers vangiles, et l'on y avaittrait de la carrire de Jsus, de l'enseignementde Jsus, du caractre et du dveloppement dela tradition vanglique. Le dernier chapitre estici complt, en ce qui regarde l'Evangile deJean, par des indications empruntes surtout un commentaire du Quatrime vangile, publien 1903.

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    Il a sembl que la question pouvait intresserun assez grand nombre de lecteurs qui n'ontpas le temps de feuilleter les gros volumes descommentaires. Ces lecteurs, peut-tre con-vient-il de le dire ds l'abord, on ne les cherchepoint parmi les croyants, surtout les croyantscatholiques, dont on ne se propose aucunementd'inquiter la foi. Les croyants ne manquentpas de livres qui sont crits leur intention eto ils ne trouveront rien qui les choque. On aeu en vue ceux qui considrent le problmevang-lique sans aucune proccupation confes-sionnelle, comme relevant de la critique et dela philosophie religieuse au mme titre que toutautre problme de l'histoire des religions. Si cetcrit n'a rien d'une publication populaire, il esttel qu'on l'a souhait.On a cru pouvoir maintenir en gnral lesconclusions auxquelles on avait abouti dansles ouvrages prcits, c'est--dire que Ton n'apas jug devoir emprunter au quatrime- van-gile une indication quelconque touchant l'en-seignement de Jsus et les faits de son existence,mais qu'on a retenu le fond de la tradition quereprsententles trois premiers vangiles^ commeun tmoignage suffisamment authentique etcertain sur le sens que le Christ lui-mme attri-buait sa mission, sur l'objet de son enseigne-ment, sur les faits importants de son ministre.

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    _ 8 Tant s'en faut que l'on regarde comme dfini-

    tif et comme galement solide en toutes sesparties cet essai de reconstruction historique.Une tentative de ce genre comporte ncessaire-ment beaucoup d'hypothses et de conclusionsapproximatives. Mais il faudrait abandonnerl'tude de l'histoire, ou du moins se borner un simple catalogue des personnes dont l'exis-tence est garantie, et des faits particuliers quel'on est en mesure de situer gographiquementet chronologiquement, sans chercher com-prendre ni les ides, ni les intentions, ni lesvnements, si l'on veut qu'un expos historiquene contienne rien que de tout fait indubitable.Un programme si svre ne serait peut-tre pastrs rationnel. L'exprience critique, commetoutes les autres, est d'autant plus parfaite que lamesure des approximations est plus rduitedans ses oprations prliminaires et dans sesconclusions. Mais s'il n'y avait d'expriencesvalables que celles d'o l'approximation esttotalement absente, le champ de la science pour-rait tre bien rtrci, moins qu'il ne cesstd'tre.En un sujet comme celui qui nous occupe, eten bien d'autres suiets, la vrit de l'histoire nesaurait consister dans l'exacte prcision dedtails que les tmoignages ne garantissent passuffisamment, mais dans la valeur de donnes

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    9 gnrales qui ont une place ncessaire dans lachane de l'volution historique. Ainsi la datede la mort de Jsus n'est pas certaine quant aujour ni quant l'anne ; aucune parole du Christn'a t recueillie de sa bouche et couche imm-diatement par crit ; par consquent nulle d-claration de lui n'existe, un peu circonstancieet dveloppe, dont il soit permis de dire qu'ellecontient l'ide qu'il avait de son rle telmoment de son existence. Va-ton pour celaproclamer qu'on ne sait rien de l'existence deJsus, si ce n'est qu'il a d exister, qu'on ne saitrien de son enseignement, si ce n'est qu'il a dprcher, rien de ses esprances, si ce n'est qu'il ad tenter quelque nouveaut? Une pareille faonde prsenter ce qu'on sait de Jsus pourrait bientre une faon de l'obscurcir, au lieu de l'expli-quer. Car l'apparition de Jsus au temps duprocurateur Ponce Pilate est un fait aussi cer-tain que mille autres faits au sujet desquels nulne songe lever le moindre soupon ; il n'estpas douteux non plus qu'il ait annonc le prochain avnement du rgne de Dieu, un accom-plissement de l'esprance Isralite, puisque cetteide du rgne de Dieu, qui est l'ide fondamen-tale de la prdication du Christ dans les Synop-tiques, a t incontestablement celle de ses pre-miers disciples et de saint Paul, qui n'ont pasplus invent l'ide vanglique du royaume

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    10 cleste qu'ils n'ontinvent le personnage mmedu Matre dont ils s'autorisent; il n'est pas da-vantage contestable que Jsus se soit attribu uneplace part dans l'instauration de la cit nou-velle, puisque son supplice s'explique par lemotif assign sa condamnation, une prten-tion quelconque la royaut d'Isral, et qu'il estbeaucoup plus facile de comprendre ainsi comment ses disciples ont pu le croire ressucitaprs sa mort, et glorifi auprs de Dieu en qua-lit du Christ, que de les supposer imaginant larsurrection de Jsus et sa qualit messianique,sans qu'il leur et pralablement donn foi enlui comme Messie.

    L'histoire peut donc produire sur le fait duChrist autre chose que des dclarations d'igno-rance. Les traits gnraux de la physionomiehistorique de Jsus et ceux de sa carrire sedessinent assez clairement et assez srement.S'abstenir de les signaler serait manquer lavrit de l'histoire et non la servir. Mais cestraits ont eu dans la ralit une dterminationplus prcise, qu'on ne peut se dispenser de re-chercher dans les tmoignages un peu confusde la tradition ; car ils n'ont vritablement desens pour l'histoire que sous cette dtermina-tion et cette prcision. Jsus vivait, il est mortau temps de Ponce Pilate, mais dans quellesconditions? tait-ce un homme d'cole, ou bien

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    n a-t-il suivi l'inspiralion de son pcnie et s'est-ilcomport en prdicateur populaire ? A-t-il pr-elle longtemps, ou bien son action, si profondequ elle ait t sur certains esprits, n'a-telle rem-pli qu'une trs courte dure ? Que voulait-il enallant porter son vangile Jrusalem? Quellefut son attitude devant son juge et devant lamort? Jsus annonait le rgne de Dieu; maiscomment le comprenait-il? S'adressait-il auxseuls Juifs, ou bien avait-il en vue l'humanitentire? Est-ce une rforme morale qu'il tra-vaillait, ou bien attendait-il un coup de la puis-sance divine, une intervention cleste pourraliser sur la terre son idal de justice et debonheur? Jsus s'est dit Christ ; mais commentl'enlendait-il? Esprait-il tre roi d'une Jrusa-lem nouvelle, ou bien se considrait-il seule-ment comme le promoteur d'une rnovationreligieuse, ou bien auraitil pens donner sa vieen expiation pour les pchs des hommes, treune victime que Dieu choisissait et acceptaitpour leur salut ?Des questions de ce genre se posent propos

    de tout personnage qui a jou un rle importantdans l'histoire ; l'on y rpond selon les ren-seignements dont on dispose, et les garantiesqu'ils peuvent offrir. La vrit de ces rponsesparticulires est dans les nuances qu'on y met,nuances quant l'objet de ces rponses, pour

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    12 l'adapter, autant que possible aux conditions dela ralit ; nuances dont la proposition mme deces rponses, selon le degr de probabilitqu'elles peuvent prsenter. Il est invitable quela vrit du dtail soit moins assure que cellede l'ensemble ; mais la vrit mme de l'ensem-ble est assure seulement par le soin qu'on prenddu dtail. La vrit du tableau n'est pas srieu-sement compromise par quelques menus traitsqui se trouveront faux. Elle reste, en tout cas,plus grande que celle d'une toile qu'on auraitlaiss nue par crainte de se tromper en quelqueligne du dessin, d'accentuer ou d'attnuer plusque de raison l'clat de telle ou telle couleur.Ce n'est pas chose facile, assurment, que dese dbrouiller parmi le chaos des opinions dontfourmille l'exgse du Nouveau Testament. Maisce n'est pas de ce chaos qu'il s'agit; il s'agit destextes, que le travail des exgtes a contribuplus ou moins lucider, et qu'on n'est pasautoris considrer comme inintelligiblesparce que plusieurs les ont mal interprts. Sigrandes que soient les obscurits rellei del'histoire vanglique, elles sont moins nom-breuses qu'elles ne paraissent, et sans doute aussimoins considrables sur les points importants.L'embarras de l'exgse provient surtout de ceque de grands intrts religieux ont t lis jus-qu' prsent, dans l'esprit de beaucoup de com-

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    13 mentateurs, aux conclusions que l'on adopte encette matire. Il est peu d'exgtes qui ne ratta-chent leurs explications un systme religieuxqui leur parat ncessaire conserver ou inau-gurer. Toutes les contradictions qui rsultent dela diversit de ces systmes n'existent pas rel-lement pour l'historien qui ne prtend pas laqualit de thologien.

    11 n'est pas tmraire d'esquisser actuellementun aperu des premires origines du mouve-ment chrtien, si l'on demande seulement auxtextes ce qu'ils peuvent donner, et si l'on a soinaussi de prendre tout ce qu'ils peuvent fournir.L'tat de l'exgse critique n'est point tellementdsespr qu'elle ne puisse formuler que desdoutes ou des ngations sur le sujet du Christ.Voyons seulement oii elle en est.

    II

    Les principaux documents concernant leChrist sont les quatre vangiles. Les autres critsdu Nouveau Testament, surtout les ptres desaint Paul et les Actes des Aptres aident plutt comprendre le tmoignage vanglique, le

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    - 14 -critiquer, l'analyser, qu'il ne le compltentde faon apprciable.Parmi les vangiles, les trois premiers for-ment un groupe dont se distingue le quatrime.Il convient d'tudier celui-ci part, et les troisautres ensemble. Le contenu du quatrimevangile importe surtout l'histoire de la tra-dition vanglique et celle du christianismeprimitif. Celui des vangiles dits de saint Mat-thieu, de saint Marc et de saint Luc, concerneprincipalement l'histoire de Jsus.

    L'afQnit de ces trois vangiles est si intimeque l'on ne peut expliquer l'un sans toucher l'autre, et qu'ils ont pour ainsi dire une valeurcommune, fonde sur leur parent d'origine etla ressemblance de leur caractre. Ils ont encommun, dans une certaine mesure, le contenu,le plan, le langage et les moyens de rdaction.Ce rapport est facile constater si on les dis-pose sur trois colonnes parallles, en oprantcertaines transpositions : ils se trouvent ainsiconstituer une vue d'ensemble, une synopsede l'histoire vanglique, oii les variantes et lesparticularits de chaque tmoin peuvent trequalifies de secondaires. Del le nom de synop-tiques attribu, depuis plus d'un sicle, ces troisrelations apparentes. Le quatrime vangilen'entre pas dans ce cadre, il n'a ni le mmeobjet, ni le mme style. Pour mesurer par con-

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    15 traste l'intimil du lien qui existe entre Mat-thieu, Marc et Luc, on n'a qu' leur comparerJean.

    Il n'y a pas toutefois entre eux que des ressem-blances: la difficult du problme synoptiqueconsiste prcisment en ce que les trois van-^nles prsentent aussi de nombreuses diffrenceset que l'on doit rendre compte des unes et desautres.Dans les trois crits, la prdication de Jean-Baptiste sert d'introduction au ministre deJsus ; aprs son baptme et la tentation au d-sert, le Christ vient prcher en Galile ; dessries d'anecdotes, qui, pour la plupart n'ontpas entre elles de lien ncessaire, se succdentJusqu'au dpart du prophte pour Jrusalem ;les pripties du ministre hirosolymitain et ledrame de la passion se droulent dans le plustroit paralllisme. Cette conformit des rcitss'tend aux dtails, le cadre des anecdotes restantidentique, et jusqu'aux expressions et tournuresde phrase. Il en est de mme pour les discours,qui sont trs souvent reproduits, presque mot mot, par les trois vanglistes ou par deuxd'entre eux, bien qu'ils crivent en grec et queJsus ait parl en aramen. L'on se trouve enprsence d'un choix de faits et de sentencesdont la combinaison ne se fonde pas sur unechronologie consistante. Ni la correspondance de

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    16 ees arrangements, ni l'unit du langage ne peu-vent tre un effet du hasard.Mais on peut en dire autant des diffrences,

    qui ne sont pas moins videntes. Mme dansles parties communes, des variantes s'introdui-sent qui vont jusqu' la contradiction ; le mmercit se prsente avec des circonstances ou desdtails qui s'excluent mutuellement; la mmesentence reoit des applications diverses ; deslments particuliers dtruisent l'harmonie duparalllisme, comme il arrive pour les rcits dela rsurrection. A ct des parties communes,il y a celles qui appartiennent en propre cha-que vangile, ou qui se retrouvent seulement endeux d'entre eux. Si la plupart des rcits deMarc se rencontrent dans Matthieu et dans Luc,le second vangile a trs peu de discours com-parativement aux deux autres, et Luc a touteune srie d'instructions qui 'ne sont pas dansMatthieu; pour d'autres, qui lui sont communesavec Matthieu, ilVun cadre historique diffrent.Il arrive aussi que la'mme sentence revient endeux ou trois endroits du mme livre, commesi l'auteur n'avait pas craint de se rpter, ouqu'il et eu quelque raison de le faire. L'encha-nement des rcits offre, d'un vangile l'autre,les variations les plus singulires, et l'on enpeut dire autant des combinaisons de sentences.De mme, si les trois vanglistes ont en com-

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    17 mun une partie de leur vocabulaire, ils ont aussiune partie qui leur est propre.

    Voil l'ensemble infiniment complexe des rap-ports dont il s'agit d'expliquer l'origine et demesurer les consquences pour l'interprtationdes textes. Et voici maintenant les conclusionsauxquelles s'arrtent la plupart des critiques.En ce qui concerne l'origine des trois Synop-tiques, il semble certain que pas un d'eux nerepose directement et compltement sur unetradition orale ; qu'aucun n'est l'expression im-mdiate de souvenirs gards par les auditeursde Jsus et les tmoins de son existence. Ils ontderrire eux une tradition, mais ils ont exploitcette tradition l'tat de documents crits. L'at-tribution du premier vangile l'aptre Matthieuest insoutenable, ce livre tant une compilationde sources et ne pouvant en aucune faon treconsidr comme l'uvre d'un compagnon duChrist. L'attribution du second vangile undisciple de Pierre soulve de trs srieuses ob-jections et ne trouve aucun appui dans le livremme. Si le troisime vangile a t crit parLuc, disciple de Paul, on doit reconnatre quecette circonstance ne jette pas beaucoup de lu-mire sur sa composition, ses tendances et sonobjet. L'auteur du troisime vangile est lemme que celui des Actes : or, si ce livre con-tient pour une partie les souvenirs d'un auxi-

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    18 liaire de Paul, beaucoup jugent impossibled'admettre que l'ouvrage entier puisse avoir trdig par un disciple de l'Aptre.L'hypothse d'une source unique, o les trois

    Synoptiques auraient puis directement, et quiaurait contenu toute la masse des rcits etdes discours vangliques, est gratuite en elle-mme; elle ne rend pas compte du rapport desvangiles ni de leur origine. On ne voit paspourquoi d'une source abondante et homogneon aurait voulu faire des extraits incomplets,ni comment on et abouti les faire si divergents.L'hypothse de l'utilisation des vangiles plus

    anciens par les plus rcents, hypothse qui a euses partisans comme celle de la tradition et celledu i)rotvangile, n'est pas plus satisfaisante quecelles-ci, du moins si l'on veut s'y tenir exclu-sivement. La composition de Marc, en effet, nesaurait s'expliquer par sa dpendance l'gardde Matthieu seul, ou de Matthieu et de Luc; nicelle de Luc par sa dpendance l'gard deMatthieu seul ou de Matthieu et de Marc ; ni cellede Matthieu par sa dpendance l'gard deMarc seul ou de Marc et de Luc. Dans cettehypothse, le plus ancien des vangiles devraitprocder immdiatement de la tradition orale:aucun des trois Synoptiques n'est dans ce cas.lia exist des sources antrieures nos Evan-

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    20 hsitent la reconnatre. L'hypothse contraire,d'aprs laquelle celte source dpendrait de Marc,parat insoutenable.il semble douteux que cettesource ait contenu d'abord une esquisse de la car-rire de Jsus, et peut tre n'y trouvait-on, avecles discours du Christ, que certaines noticesrclames pour l'introduction de telle ou tellesentence. Bien que beaucoup regardent encorecomme originaux les rcits de Marc, on admetde plus en plus et il semble vident que le se-cond vangile est, comme les deux autres Synop-tiques, le rsultat d'un travail rdactionnel ex-cut sur des sources antrieures. L'vanglistea d utiliser une relation assez brve du minis-tre et de la passion de Jsus, et cette relation,qui sans doute n'encadrait pas l'objet de laprdication vanglique et doit tre considrecomme primitivement distincte du recueil dediscours, avait dj subi des retouches et desadditions avant d'entrer dans la rdaction deMarc. Les rcits inconciliables de Matthieu et deLuc sur la naissance de Jsus sont purementmythiques et lgendaires.On pense gnralement que le second van-gile remonte aux environs de l'an 70 ; Matthieu etLuc ne seraient pas de beaucoup antrieurs la

    fin du premier sicle, et de courtes additions yauraient encore t pratiques dans la premiremoiti du second sicle. Ces livres taient la

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    21 proprit des communauts chrtiennes, noncelles d'auteurs dtermins, dont un droit quel-conque aurait t respecter. Il est possible,croit-on, que la premire rdaction des discoursdu Christ soit de l'aptre Matthieu; que demme le rcit qui est la base du second Evan-gile soit d'un Marc, disciple de Pierre; que letroisime ait t attribu Luc, parce que ledisciple de Paul tait l'auteur du journal devoyage qui a t incorpor au livre desActes.

    C'est ainsi que l'analyse littraire en est venue dcomposer les trois premiers vangiles endivers lments de valeur historique ncessai-rement ingale. Plusieurs avaient cru d'abordet croient pouvoir encore s'en tenir la sourcecommune de Matthieu et de Luc pour les dis-cours de Jsus comme au tmoignage authen-tique de son enseignement, et aux rcits deMarc, communs aux trois Synoptiques, commeau tmoignage authentique touchant la vie duChrist. Mais la critique purement littraire nepouvait gure se fixer elle-mme un pointd'arrt. Tout n'est pas primitif dans les dis-cours communs Matthieu et Luc : on y trouvela scne de la tentation au dsert, qui ne sauraitpasser pour un tableau historique, et maintesparoles qu'il est difficile d'attribuer Jsus, entreautres la dclaration: Nul ne connat le Fils

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    __ 22si ce n'est le Pre, ni le Pre, si ce n'est le Fils ' ,qui est plutt une profession de foi chrtienne.Tout n'est pas primitif non plus dans les rcilsde Marc, et il ne sufft pas de rationaliser un peuceux du baptme de Jsus, de la multiplicationdes pains, de la transfiguration, de la dcouvertedu spulcre vide le surlendemain de la passion,pour rendre tout cela consistant aux yeux d'uncritique simplement prudent. Et sans tre in-discret, il est permis de demander si mme lesdocuments fondamentaux, dans la mesure oon pourrait les reconstituer, prsenteraient desgaranties suffisantes. Est-on sr que le premierrecueil de discours soit de l'aptre Matthieu, etque le premier canevas des rcits vienne del'aptre Pierre par son disciple Marc? En au-cune faon. Peut-on se fier des inconnus donton ignore s'ils taient bien renseigns et s'ilsmritent confiance? Toujours pouss dans lamme direction, et appliqu une dissectionde plus en plus minutieuse des textes, le travailcritique pourrait ne produire, et chez certains ilne produit comme rsultat qu'une longue sriede points d'interrogation. Reste savoir si cetravail critique est tout le travail de l'historien,et si cette mthode de dissection des textes estproportionne l'objet qu'elle poursuit. Mais il

    1. Matth. XI, 27; Luc, X. 22

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    23 nous faut dire encore ce qu'elle a donn en cequi rcf^arde le quatrime vangile.

    III

    Pour la critique litlroirc, la question del'vangile attribu l'aptre Jean est plus inso-luble encore, s'il est possible, que celle desSynoptiques.A diverses reprises pendant le xix^ sicle, desessais avaient t tents pour dmembrer le qua-trime vangile comme les trois premiers, ettcher d'y dcouvrir un fonds de tradition apos-latique, complt Ou recouvert ensuite par desadditions plus rcentes. Mais ces tentativesavaient chou. Pour mettre d'accord ceux quiprfraient les rcits joha uniques aux discours,et ceux qui prfraient les discours aux rcits,on avait fini par admettre assez gnralementque le tout tait de la mme main, et que, abs-traction faite de la section relative la Femmeadultre, morceau rejet de la tradition synopti-que, chouon nesaittropcommentdans le qua-trime Evangile, et du dernier chapitre, appen-dice probablementajoul aprs coup rcrit ori-ginal, l'uvre tait homogne d'un bout l'autre.

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    Dans les dernires annes, ces positions criti-ques ont t contestes et semblent mme plusieurs tout fait branles. Des exgles con-sidrables ont repris avec une nouvelle ardeurl'uvre de dissection o. il semblait que leursdevanciers eussent totalement chou. On com-mence parler couramment des sources et descouches rdactionnelles du quatrime vangile.Par malheur, le travail se poursuit dans les con-ditions les plus dfavorables, parce que l'on nepeut se guider que sur les indices fournis par lelivre mme, sans le contrle d'aucun documentparallle. C'est d'aprs les incohrences de lapense, les heurts de la rdaction, que les criti-ques essaient de restituer le document fonda-mental et les additions qui y ont t superposes.Besogne dlicate entre toutes, car le quatrimevangile n'est pas plus que les autres uneuvre de lettr : plus d'une explication peutsembler rendre compte des singularits de lacomposition. Tel dveloppement, qui paratsurajout dans un discours, est-il ncessairementd'une autre main que ce discours ? Le style est peu prs le mme d'un bout l'autre du livre.Si l'auteur ne l'a pas compos d'un seul jet, ets'il ne rdigeait pas des souvenirs, mais sespropres mditations, n'a-t-il pu commenter lui-mme ce qu'il avait crit une premire fois.^L'intention allgorique, vidente en beaucoup

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    26 d'endroits, n'expliquerait-elle pasauss-i certainessurcharges des rcits, que l'auteur aurait com-plts pour les rendre plus significatifs?

    Lorsqu'il s'agit de retrouver la forme qu'a puavoir dans sa rdaction originale la parabole duFestin \ il suffit de comparer les textes paralllesde Matthieu et de Luc pour tre en mesure dereconstituer d'abord avec leurs parties commu-nes le cadre primitif du rcit, puis de reconnatreles lments adventices et les retouches desrdactions particulires. Il n'en va pas de mmepour Jean. Dans le prologue si connu, parexemple, tel critique cartera comme secondairel'exorde : Au commencement tait le Verbe ,et indiquera le dbut de la source primitivedans les mots : (' Il y eut un homme, envo>^ deDieu, qui s'appelait Jean , etc. Tel autre main-tiendra l'exorde solennel et rejettera en suppl-ment les versets qui concernent Jean-Baptiste.Qui a raison? Et quelqu'un at-il raison? Lepremier doit avoir tort, car on ne conoit gureque l'vangliste ait pu crire : Jean vint entmoignage, pour tmoigner au sujet de lalumire * , s'il n'a rien dit auparavant de cettelumire. D'autre part, il n'est point vident quela mention de Jean- Baptiste soit interpole entrece qui est dit de la vie lumire des hommes

    1. Matth. xxii^ 2 14; Luc, xiv, 16-24.2. Jean, i, 7.

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    28 ttiques en ce qui concerne la distinction deslments primitifs et des lments secondairesde la rdaction. Peut-tre aussi russira ton dterminer avec plus de prcision le rapport desdiffrents lments avec la tradition synoptiqueconsidre dans ses sources et dans les vangilesmmes. 11 semble fort invraisemblable qu'ontire du quatrime vangile des ta'aits qui puis-sent clairer l'histoire de Jsus. L'vangilejohannique, en toutes ses parties, ne tend qu'l'exaltation du Christ immortel et laisse tomberdlibrment tout ce que la tradition synoptiqueretenait des traits qui ont caractris la per-sonne et l'activit de Jsus vivant.Mais la critique du quatrime vangile peutsembler certains esprits grosse de conclusions

    imprvues, qui bouleverseront ce que l'on sup-posait tre la base solide de la tradition synopti-que. Sait-on si elle ne dcouvrira pas une sourceancienne qui contredira les sources des Synop-tiques, et si elle ne sera pas oblige de conclureque les deux traditions ne sont pas plus solidesl'une que l'autre? N'est il pas prudent de direaujourd'hui qu'on ne sait rien de Jsus, puisquedemain peut-tre on sera contraint d'avouerqu'on ne possde son sujet que des lgendessans autorit, sans vrit, sans ralit ?

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    - 29

    IV

    L'emploi d'une mthode exclusivement litt-raire peut conduire ce scepticisme les critiquesdgags de toute thologie. S'ils y joignent parsurcrot une application superficielle de lamthode comparative en histoire des religions,ils seront amens sans trop de peine parler dumythe de Jsus. Il est suppos dans le prsentlivre que la critique historique n'a pas consi-drer que les textes, mais les choses que signi-fient les textes ; et que la mthode comparativen'a pas non plus qu' rapprocher des formes decroyance religieuse, mais voir la place que cescroyances ont tenue dans les religions o ellesont eu cours, hien pntrer le sens et la portede chacune, avant de la transporter en terme decomparaison dans l'lude synthtique des ph-nomnes religieux. A vrai dire, l'on considreque la lche de l'historien n'est pas termine,que celle mme du critique est seulement bau-che, quand le secret de la composition d'unlivre a t plus ou moins dml par l'analyse.Derrire les textes il y a leur signification, et

    derrire la signification des textes, il y a leschoses. Il ne s'agit pas seulement, devant un

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    30 livre tel que l'vangile selon saint Marc, parexemple, de discerner un document A, qui doittre le plus ancien ; puis un document ou unecouche rdactionnelle B, plus rcente et destineselon toute apparence complter ce que lapremire source semblait avoir d'insuffisant ;des fragments C, qui doivent avoir ! em-prunts au recueil de discours qu'ont utilisMatthieu et Luc ; enfin l'encadrement D, qu'adonn au tout le rdacteur. Ce qu'il faut voiraussi est le caractre propre, la tendance spciale,l'objet particulier de chacun des lments quiconstituent le livre. Et ce quoi finalement il fautparvenir est l'intelligence des condilions danslesquelles chacun de ces lments a pu se dfiniren un texte crit parce que ce qu'il exprime taitune pense vivante, foi d'un groupe religieux,partie intgrante d'un organisme social ou d'uneactivit tendant la formation d'un tel orga-nisme.La distinction des documents A, B, C, D, fon-

    de sur les particularits du langage, les inco-hrences de la composition, l'vidence, plus oumoins nette, des superpositions, sera un faitcurieux, mais sans grande porte si on ne pntrepas plus avant. Les tapes de la rdaction n'ontd'intrt qae parce qu'elles correspondent destapes d'opinion, etc'est le rle de ces ides dansl christianisme vivant qui donne vritablement

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    31 un sens aux opinions et une valeur aux textes.Les lments A, B, C, D ne nous disent rien quepar la varit de leur signification, et cette varitmme ne nous dit rien que par rapport au mou-vement de vie religieuse qu'elle reprsente.

    Soit A une simple notice concernant Jsus deNazareth, qui, aprs avoir recrut quelquesadhrents dans son pays de Galile, en prchantTavnement prochain du rgne de Dieu, a lcrucifi Jrusalem, par jugement de PoncePilate, comme prtendant la royaut sur lesJuifs. Soit B une srie de complments intercals dans la notice prcdente, et comprenant desrcits de miracles, ou bien des prdictions deJsus relatives aux simples faits de la notice.Soit G une autre srie de complments destins toffer la biographie, du Ghrist en donnantune ide de son enseignement. Soit D le pointde vue gnral de la compilation, tel qu'il r-sulte d'additions et relouches qui semblent im-putables au dernier rdacteur. Tout cela ne cor-respond pas seulement un tat d'esprit des in-dividus qui ont contribu au livre, mais aussi une mentalit commune du groupe religieuxdont ces individus faisaient partie; et la noticeinitiale, si elle concerne un personnage rel etrelate les traits dominants de sa carrire, doitaussi nous prsenter un homme dont l'esprit, Ipcaractre et les actes soient en rapport avec le

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    33 -tinien au commencemewit de l're chrtiennesont assez nonnbreux, explicites et clairs, pourqu'on puisse discerner quoi se rattachera dansle judasme l'Evangile de Jsus. Ce qui est plusdifficile est de reconnatre dans les sources chr-tiennes ce qu'a t le point de dpart du chris-tianisme. Les vangiles ne sont pas, en touterigueur, des documents historiques sur la car-rire de Jsus, ni des documents historiques surla vie de l'glise primitive ; ils traduisent desimpressions et des souvenirs concernant Jsus,impressions et souvenirs qui se sont progressive-ment transforms dans le mouvement de foiqui est la vie mme de l'glise naissante. Maisles tmoignages directs de cette vie ne font pascompltement dfaut et permettent, ce semble,de dterminer la physionomie historique deJsus dans son milieu juif, et l'volution de lafoi en Jsus-Christ dans le milieu chrtien.Bornons-nous au tmoignage le plus sr et lemoins discutable, celui de saint Paul dans sesEptres incontestes ou qui semblent incontes-tables. Nous tenons l un homme, une uvre, etune socit ou des socits religieuses en pleinexercice dvie et d'accroissement. Nous sommesaux environs de l'an 50, quelque vingt ans aprsla mort de Jsus, dont les disciples, dont les frresvivent encore. Jrusalem est, en apparence dumoins, le centre de la religion nouvelle^ mais il

    3

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    34 y a beaucoup de tiraillements entre Paul et lacommunaut apostolique. A Jrusalem, on nese fait pas l'ide que la foi en Jsus dispensede la Loi juive. Paul le soutient et il dfendvigoureusement une faon de voir qui est laraison d'tre de ce qu'il fait, du christianismequ'il organise. Dans ce conflit, ce qui est trssignificatif pour nous, c'est que l'autorit deJsus ne peut tre allgue par aucune des par-ties contendantes. Le fondateur prsum duchristianisme ne compte pas dans ce dbat oii sejoue l'avenir de sa religion. Ce n'est pas lui quia commenc ce qu'on fait Jrusalem, ni cequ'on fait Antioche. Il n'avait pas eu l'ided'organiser dans le judasme une religion quien serait distincte, et encore moins d'organiserune telle religion en dehors du judasme. Voildj un fait capital pour l'intelligence des van-giles.

    Qu'avait donc ralis Jsus avant sa mort?Presque rien, videmment. De cette uvre per-sonnelle Paul ne veut point parler, mais il ditqu'il n'en veut rien savoir; comme il n'en peutrien ignorer, c'est qu'elle semblait insignifiante.Et Paul le laisse clairement entendre. Selon lui.Dieu choisit ce qui est insens pour confondrela raison des prtendus sages, et ce qui est fai-ble pour confondre ce qui se croit fort. Jsusdonc n'avait rien dit d'extraordinaire ni rien

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    35 fait d'clatant. Il avait t crucifi : tel tait,selon son grand aptre, le seul fait notablede sa carrire. Mais cela encore, une existencevulgaire, couronne par un supplice infamant,est encore une donne capitale pour l'intelligence des vangiles.Cependant Jsus n'tait pas uq sclrat, et ce

    n'tait pas dans la complicit d'un crime ques'associaient avec lui ceux qui maintenant ex-ploitaient sa mmoire en fondant l'glise.Quelle ide commune relie ensemble Jsus,Pierre et Jacques, et ce prdicateur intrpidequi dclare ne pas plus se soucier de ce qu'a tJsus en vie que de ce qu'ont pu tre aussi ence temps-l, auprs de lui, et ce Pierre et ce Jac-ques, et aussi Jean, qui taient quelque chose dans la communaut de Jrusalem quandPaul, aprs une quinzaine d'annes de prdica-tion, s'en vint les voir, pour s'assurer qu'il necourait pas pour rien* ? Cette ide, on la con-nat. Paul et les aptres de Jrusalem s'accor-daient sur le point essentiel de leur foi, savoirque Jsus le Crucifi, maintenant Jsus le Ressus-cit, tait le Christ promis Isral, et qu'il vien-drait bientt inaugurer sur la terre le rgne deDieu. C'est cette foi que Paul avait adhr en seconvertissant, et cette foi procdait directementde celle que Jsus avait inspire ses disciples.

    1. Gal. II, 2, 6,

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    36 Seulement Paul en tait venu penser que, pourentrer dans le royaume, il suffisait d'embrasser lafoi du Cbiist; et son ide du Ctirist tait beau-coup plus large que celle des premiers aptres,qui regardaient Jsus comme le Sauveur d'Is-ral et pensaient que les croyants devaient treagrgs Isral pour tre sauvs, ou que tout aumoins les Juifs, mme aprs adhsion au Christ,n'taient pas dispenss de la Loi.

    Paul sait que Jsus a subi la mort par le cruci-fiement; il croit que Jsus est ressuscit; maisil ne dit pas que Jsus ait prdit sa mortel sarsurrection. H ne dit pas mme quelle a tl'occasion de son supplice; mais il ne parat pasdouteux que cette occasion ait t prcismentl'annonce de ce rgne de Dieu que prchaientles aptres et Paul lui-mme. C'est parce qu'ilsont la foi de Jsus que les aptres et Paul ontfoi en Jsus. Est-ce aussi de Jsus lui-mmequ'ils tiennent la foi qu'ils ont en Jsus, chefdu royaume? Paul ne le dit pas, et l'on nedoit point s'en tonner, puisqu'il n'a pas tdisciple du Christ. Mais son silence mme auneporte considrable. Paul n'ignore pas ce queJsus a enseign; il le cite comme autorit, parexemple, sur la question du divorce. S'il ne lecite pas sur l'article du rgne venir, c'est qu'iln'a pas besoin de le citer, et s'il ne parle pas dela faon particulire dont Jsus a prsent son

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    - 37 rle personnel dans l'avnement du royaume,c'est cfu'il ne veut pas en parler. Supposons,comme nous le dil l'vangile, que Jsus ait tcondamn mort comme prtendu roi desJuifs, et que la condamnation ait t rellementfonde sur ce que Jsus annonait le prochainavnement d'un rgne auquel lui-mme prsi-derait, on ne doit pas s'attendre ce que Paulrappelle cette circonstance. Il ne faut pas quela nouvelle religion se prsente comme unervolte contre l'autorit romaine, et que sonchef ait t un rebelle. On peut chercher d'au-tres explications au silence de saint Paul, onn'en trouvera pas de meilleure.La foi des premiers disciples en Jsus Messie,

    qui est prsuppose la conversion.de Paul, estinexplicable si elle n'est pas, d'une certaine ma-nire, antcdente la passion. Pour qu'il se soittrouv, aprs la mort de Jsus, un groupe de per-sonnes affirmant sa rsurrection et sa conscra-tion messianique par la rsurrection, il est aumoins vraisemblable que toutes ces personnesavaient du rgne venir et de ses conditionsune ide suffisamment prcise et ferme pourque la mort de leur Matre ne ft pas la ruine deleur foi, mais un simple accident que cette foidemeurait capable de surmonter et d'interp**-ter. Les disciples ont cru Jsus ressuscit et prt venir en Christ pour le grand rgne, parce

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    38 qu'ils avaient cru d'abord la manifestation pro-chaine du rgne avec Jsus comme Christ-roi.

    11 est donc certain que les premiers aptres etPaul ont continu la prdication de Jsus tou-chant l'avnement du rgne de Dieu, bien qu'ilsaient prch en de tout autres conditions quele Christ. De plus, la foi des premiers aptres etde Paul donne penser que Jsus lui mmes'tait attribu dans le prochain rgne le rleque ces croyants lui attribuent. Et ce fait etcette prsomption sont aussi d'importance capi-tale pour l'intelligence des vangiles.Nous pouvons, en effet, maintenant nous re-tourner vers Marc et nous y retrouver. Nousn'avons pas nous demander qui est Marc ouplutt quelles sont les mains croyantes qui sontcaches derrire nos signes A, B, C, D. Nous neconnatrons jamais leurs noms, et, si nous lesconnaissions, nous n'en serions pas plus avan-cs. Ces gens qui ont crit n'taient pas des lit-trateurs. Ce qu'ils disent ne leur est point per-sonnel. En eux nous entendons des groupes defidles, la tradition de ces groupes, et il n'y apas discuter autrement leur autorit. Cetteautorit, l'autorit des Synoptiques et de leurssources est celle des deux ou trois premires gn-rations chrtiennes, ni plus ni moins. C'est lafoi de ces gnrations qui parle. A nous de voirce que cette foi suppose de ralit.

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    39 Le tmoignag-e de Paul nous a montr comme

    fait initial du christianisme l'apparition de Jsus,fait juif, histoire de mdiocre relief, si ce n'estpar la mort honteuse de celui qui en fut le hros.C'est justement ce que signifiait notre noiice A.Le mme tmoignage de Paul nous a fait admet-tre comme certain que Jsus prchait l'avne-ment prochain du rgne de Dieu, et commevraisemblahle, qu'il fut condamn mort parl'autorit romaine pour s'tre adjug lui-mme, dans le nouvel ordre des choses, la placedu roi Messie. Pour ce qui est de la prdicationdu rgne de Dieu, notre notice A, notre docu-ment C s'accordent avec Paul, et la notice Anous dit positivement que Jsus a t condamn mort comme roi des Juifs. C'est donc ce quecroyait, ce que savait la premire gnrationchrtienne.

    D'autre part, nulle difficult placer dans soncadre juif l'apparition de Jsus, ramene cesproportions. Dans ce milieu palestinien o fer-mentaient l'esprance de la libration nationaleet tous les espoirs mystiques sems par les pro-phtes anciens, un artisan galilen s'est sentiune vocation de prophte, ou plutt la vocationdu librateur attendu, mais comprise en espritprophtique, toute de foi et de confiance enDieu ; il s'est presque aussitt, et fatalement,heurt aux pouvoirs tablis. Mais le petit groupe

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    40 d'adhrents qu'il avait recruts avant sa morttait assez affermi dans la foi que Jsus lui avaitcommunique, pour que la disparition duMatre n'ait pas eu d'autre effet que d'pargner sa parole enthousiaste le dmenti formel desvnements. Si Pilate l'et emprisonn ou en-voy en quelque pays lointain, ou laiss s'pui-ser dan^s une prdication mal coute, il ne ftpas devenu Christ dans le rgne de Dieu. Samort permit la foi des siens de lui donner leIrne que sa propre foi lui avait promis.

    Mais cette foi ne pouvait subsister qu' condi-tion de se dfendre, de grandir, de se rpandre,de rehausser le peu qu'avait t l'existence ter-restre du Christ et d'amasser sur sa personnetoutes les excellences que la foi elle-mmepouvait souhaiter. Paul et les autres aptrespratiquaient des exorcismes au nom de Jsussur certains malades. On racontait que Jsusavait fait de mme, et sans doute il l'avait faitrellement, avec plus d'assurance encore et plusde succs que ses disciples. On se le rappela.Dans les discours apostoliques des premierschapitres des Actes, chos des plus anciennesprdications chrtiennes, il est dit que Jsus apass en faisant le bien et en gurissant tousceux qui taient opprims par les dmons *. Onconoit que Paul n'ait pas arrt son attention

    1. AcT. X, 38.

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    41 sur des traits assez vulgaires et qui pouvaientmme lre compromettants. Mais des espritsmoins dlicats pouvaient y trouver un argu-ment. A cette proccupation correspond notredocument B, lecueil de souvenirs vagues,grossis, interprts. Et l'on comprend aussi,sans qu'il soit besoin d'y insister, comment lesexigences de l'apologtique ont suggr certainsrcits ; comment les premires thories christo-logiques en ont influenc d'autres et ont domintoute la rdaction.Ce qui avait surtout besoin d'tre expliquavec quelque dtail est la faon dont on peutprciser le point de dpart historique de lareligion chrtienne. L'on n'entrejprend pas icil'analyse critique des Evangiles, et le lecteur estpri de ne pas considrer A, B, C, D commereprsentant en toute rigueur les lmentsrdactionnels de Marc. Ce sont des figures des-tines faciliter l'explication de la mthodeque l'auteur a essay d'appliquer dans ses com-mentaires des vangiles et dans le prsent livre.Cette mthode ne consiste pas ngliger lacritique des textes, elle consiste ne pas s'yperdre et parvenir, moyennant l'examencritique des textes, la critique des choses.C'est, dira-ton, ce que tout le monde fait. C'estce que tout le monde a pens faire depuis qu'ily a des gens qui se mlent d'crire l'histoire.

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    42 La mthode historique n'en a pas moins eubesoin de se perfeclionner. La critique textuelle,la discussion des tmoignages ont ralis desprogrs considrables. Mais on ne peut pas, senri-ble-t-il, se dissimuler que, dans l'exgse bibliqueet la discussion des origines chrtiennes, lacritique tend se perdre dans le vide, parcequ'elle ne se lasse pas d'plucher les textes etqu'elle ne regarde pas autant leur objet. Lacomparaison des autres religions, qui devientla condilion indispensable d'une connaissanceplus approfondie de la religion juive et de lareligion chrtienne, tend, pour un motif ana-logue, devenir un principe de confusion. Lamultiplicit des termes comparer, htive-ment rapprochs, empche parfois de voir ceque chacun possde d'originalit relative, etde dmler ce qui dans le judasme et le chris-tianisme a t l'lment vital, dominant, assi-milateur, par lequel s'est maintenue l'unitorganique de ces religions, nonobstant lesinfluences subies et les emprunts raliss.

    Les considrations qui prcdent ne sont pas prendre pour une critique de l'exgse contem-poraine, bien moins encore des exgtes, mais

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    43 pour la nave explication de ratlitude que Toncroit devoirgarderici l'gard du problmevan-glique. On pense suivre une mthode vraimenthistorique, et l'on n'prouve pas le besoin de laqualiQer au moyen d'une autre pilhcte. Le motsociologique serait trop ambitieux, l'auteur neprtendant point au titre de sociologue; etil serait insuffisant, car l'objet de l'histoirereligieuse, comme on l'entend ici, ne se confondpas avec celui de la sociologie et n'y est pasenferm. On a eu cependant l'intention de biensaisir et de faire valoir l'aspect social de la ques-tion tudie. Bien qu'on ait eu souci de tous lesrapprochements utiles, on hsiterait aussi parler de mthode comparative, parce que lacomparaison n'est pas la fin mais le moyen deihistoire religieuse, et que l'objet de l'histoiren'est pas de placer toutes les religions sur lemme plan, pour qu'on les puisse voir toutesensemble dans une sorte de panorama construitartificiellement, mais de montrer chacune en saplace, claire par les autres, sans effacement deson individualit.

    Il est ais maintenant de comprendre ce quesignifient les trois chapitres du prsent volume.Laissant de ct les discussions de pure critique,sauf les rsumer dans les points essentiels, ona voulu prsenter au lecteur ce qu'on juge trela physionomie historique de Jsus et de sa

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    44 prdication, puis le travail de la pense chr-tienne sur ces donnes primitives o l'on doitvoir les souvenirs et la foi de ceux qui avaiententenduUe Christ et qui avaient t les tmoinsde sa vie et'de sa'mort.Tout n'est pas galement certain dans cetterestitution.' Pour ce qui regarde la carrire deJsus, les indications concernant le baptme,le sjour au dsert, les antcdents de la prdi-cation au bord du lac de Tibriade, sont passa-blement indcises. Ce qu'on a dit sur ce pointne dpasse pas les limites de la probabilit. Mais,bien que l'on considre comme artiliciel etpurement idal le rapport que la tradition asuppos entre Jean-Baptiste et Jsus en faisantde l'un le prcurseur immdiat et conscient del'autre, on n'a pas cru devoir contester toutrapport du Christ avec Jean, le fait du baptmesemblant attest d'abord indpendamment de lasignification que la tradition chrtienne y attachapendant un certain temps, le regardant commela conscration messianique de Jsus. Le rap-port chronologique des faits galilens n'est passolidement tabli. La prdication du Christ eutun certain succs, mais incomplet. Nous nesommes pas renseigns sur les dtails. L'hosti-lit du ttrarque Antipas parat atteste sulfi-samment, ainsi que la rserve garde par Jsusdans les derniers temps de son sjour en Galile.

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    45 Ce que Marc raconte ce sujet n'a gure putre invent. La scne de Csare de Philippe,avec la confession messianique de Pierre, semblepleinement historique : elle explique le voyagede Jrusalem et la condamnation de Jsus. Lercit, d'ailleurs, appartient au document fonda-monlal de Marc et ne peut pas tre assimil celui de la transfiguration, qui vient ensuite etque la tradition lui a donn pour commentaireavec la prophtie de la passion et la rprimande Pierre, en vue d'en corriger la significationprimitive. Le triomphe messianique du montdes Oliviers, l'expulsion des vendeurs du templesont des traits un peu suspects ; on les a conser-vs dans la trame du rcit parce que ces traitsne manquent pas de vraisemblance et que leprocs de Jsus suppose des manifestations dece genre. La condamnalion de Jsus, commeprtendu Messie, par Pilate, dans des conditionsjuridiquement inattaquables, parat un faitaussi certain qu'il est possible, tant donnesles circonstances historiques dans lesquelles ils'est accompli. Si ce fait pouvait tre rvoqu endoute, on n'aurait plus motif d'aflrmer l'exis-tence du Christ.Dans le chapitre sur l'enseignement de Jsus,l'on a mieux aim s'exposer lui attribuerquelque sentence ajoute dans la tradition qu'carter par une critique trop dfiante quelque

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    46 dbris authentique de sa prdication. L'on aretenu des discours vangliques tout ce quel'on croit avoir appartenu au plus ancien fondsde la source commune de Matthieu et de Luc,source qui a d tre exploite aussi par Marc.Cet enseignement, dans sa partie purementdoctrinale, touchant le royaume de Dieu, etdans sa partie morale, touchant les conditionsd'admission au royaume, forme un tout logique,procdant de la mme inspiration enthousiaste,parfaitement d'accord avec ce que l'on sait desactes du Christ et des causes de sa condamna-tion, conforme au tmoignage indirect et auxcitations formelles de Paul concernant la doctrine de Jsus.Le chapitre sur l'volution des souvenirs et d(

    la foi apostoliques dans la tradition chrtiennene pouvait tre qu'un aperu du travail quis'est accompli chez,les fidles de Jsus depuisa mort jusqu'au temps o nos quatre van-^giles ont acquis leur forme dfinitive, dans lapremire moiti du second sicle. Ici encoreon a tenu marquer les grandes lignes didveloppement, leur signification relle, la vi(et le mouvement de la foi.

    Et tout cela n'est qu'un essai dont on ne s(dissimule pas la hardiesse. Mais on ne voit paicette hardiesse dans l'intention de reprsente!le fait vanglique en sa forme native, avec des

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    47 documents que plusieurs dclarent tre devaleur et de sig-nifcation trop incertaines ; on lavoit dans la difficult inhrente toute reconsti-tution historique d'un pass lointain, difficultqui regarde plutt le discernement et l'intelli-gence des choses attestes que la discussion destmoignages au point de vue de l'origine et dela composition littraire.Des ouvrages en nombre infini ont t crits

    sur les Evangiles et sur le Christ. C'est pour-quoi l'on se dispensera de toute indicationbibliographique. Une bibliographie relativementcomplte se trouve dans les commentaires mentionns plus haut. On ne croit pas opportun dela reproduire ici. L'auteur doit beaucoup sesdevanciers ; mais il lui aurait t assez difficileet il n'tait peut tre pas bien ncessaire denoter partout ce qui a dj t dit ailleurs et designaler ce qu'il y a de personnel en ses conclu-sions. Il n'a pas cherch la nouveaut, il ne l'apas vite ; il a cherch la vrit et pratiqu lasincrit en un sujet qui est et qui restera long-temps encore dlicat traiter scientifiquement.11 pense y avoir apport l'impartialit la plusentire et gard le ton qui convient.Ce livre, d'ailleurs, n'est pas tel qu'il puisserallier maintenant beaucoup de suffrages. 11 luisuffit d'tre un livre honnte, et c'est ce titrequ'il se permet d'exister.

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    JSUSET LATRADITION KVANGLIQUE

    CHAPITRE PREMIER

    La carrire de Jsus

    Le milieu dans lequel Jsus a paru est mieuxconnu que la vie mme du Christ, et le cadre est iciplus facile tracer que le tableau. Il parat nan-moins possible d'indiquer, avec des garanties suffi-santes pour ce qui est de la substance des choses,les conditions dans lesquelles Jsus prcha d'aborden Galile, puis Jrusalem, quel but il se propo-sait dans sa prdication, quel titre il l'avait entre-prise et comment il trouva la mort.

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    C'est probablement au cours de l'an 28, sous lergne de Tibre, que Jsus commena en Galile prcher Tavnement imminent du rgne de Dieu.Depuis prs d'un sicle, l'indpendance conquisepar Judas Machabe et ses frres avait fait place la domination romaine. Le rgne de l'idumenHrode, sous la protection d'Auguste, n'avait putre considr comme une restauration de la natio-nalit juive *j encor l?etie ombre d'ailtonomie n'a-vait-elle pas tard disparatre ; non seulement leroyaume d'Hrode avait t partag sa mort entreti^bs de ses fils, mais la tnuvaise administration del'un d eux, Archlas, avaitfait rentrer Jrusalem etl Jude sous la gestion immdiate de l'autoritrotnainCi Ponce Pilale tait, depuis l'an 26, procu-rateur de Jude, subordonn au lgat de Syrie,tandis que la Galile continuait tre gouvernepar Hrode Antipas, et une autre rgion palesti-nteniie, au nord-est du lc de Tibriade, par Phi-lippe, autre fds d'Hrode le Grand.

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    51 La masse de la population juive tait loin d'tre

    rallie de cur la souverainet de Rome. Onavait pu le constater aprs la dposition d'Arch-laiis, en l'an 6 de notre re, lorsque le lgat Quiri-nius, pour organiser la leve des impts, fit faire lerecensement de la province qui venait d'tre admi-nistrativement runie l'empire. Un soulvementeut lieu, sous la conduite d'un certain Judas leGalilen, et le sentiment qui avait provoqu cettervolte ne s'teignit qu'aprs les pires catastrophes,la destruction de Jrusalem par Titus, et l'extermi-nation des Juifs au temps d'Hadrien.Ce fanatisme des zlotes, impatients de la domi-

    nation trangre, est distinguer de la pit despharisiens, gardiens scrupuleux de la traditicnreligieuse. Les plus ardents champions de l'ind-pendance nationale n'taient pas toujours de minu-tieux observateurs de la Loi; mais ils avaient cegenre de foi ardente, compatible souvent avec uneassez faible moralit, qui se rencontre dans lesmes troites et ignorantes. La religion la plus puredevient aisment une superstition aveugle, intol-rante et cruelle, chez ceux qui n'en saisissent que ledehors et en matrialisent les principes. La hauteide que les Juifs avaient de la leur, la grande esp-

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    52 rance qui s'y rattachait se tournaient chez plusieursen mpris des paens, en horreur du joug romain,en illusions dangereuses et en efforts insenss pourles raliser.

    Les pharisiens reprsentaient un parti religieuxplutt que politique, et mme en religion le phari-sasme tait une tendance caractristique de l'volu-lution interne du judasme, plutt qu'un particirconscrit au milieu de la nation juive. Sous ladomination persane, les Juifs s'taient organiss enune sorte de communaut religieuse dont la vie toutentire tait rgle par le code o Ton croyaitpossder les prescriptions rvles par Dieu aulgendaire Mose. De l procda tout naturellementle judasme lgaliste, strictement traditionnel,attach la lettre des prceptes au risque d'enngliger l'esprit, bientt pris de casuistique etversant dans le formalisme. Il prit consistance etvigueur, et mme il devint, pour la premire fois, fa-natique devant le pril que l'hellnisme, au temps desSleucides, faisait courir la religion traditionnelle.C'est partir du soulvement des Machabes que lepharisasme existe comme mouvement conscientde lui-mme et de son but, et son nom ne tarde pas entrer dans rhistoire. Les pharisiens jouent un

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    53 rle sous les derniers princes de la dynastie asmo-nenne. Ce sont les zlateurs de la Loi, les hommespieux, fidles toutes les observances. Les docteursde la Loi mosaque, guides spirituels de la nation,sont pour la plupart pharisiens. Tous croient larsurrection future des justes et attendent l'avne-ment du rgne de Dieu.A n'en juger que superficiellement d'aprs lesvangiles, on pourrait croire que les pharisienstaient un ramas d'hypocrites, les tartufes de laSynagogue. Outre que l'animosit du christianismeprimitif contre le judasme a pu accentuer l'a'ttitudehostile de Jsus l'gard des pharisiens, on ne doitpas oublier que Jsus lui-mme a signal surtoutrecueil du judasme pharisaque et fltri les dfautsde certains pharisiens. Le pharisasme d'alors taitle judasme en train de se figer dans le formalismelgal. Jsus, qui l'a si vivement critiqu, lui doitbeaucoup ; il a emprunt au judasme ce que celui-ci avait de plus vivant, l'esprance messianiqueet l'idal moral, en purant l'une et l'autre. Lechristianisme naissant doit aussi au pharisasmeses meilleures recrues : il suffit de nommer saintPaul. Il existait plus d'une catgorie de pharisiens,et il faut faire une distinction entre les simples

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    - u -croyants, sincrement pieux et fidles la tradition,parmi lesquels la prdication vanglique trouva desadhrents, elles docteurs, plus ou moins pdants etorgueilleux, qui furent les adversaires de Jsus etque |sus traita comme tels.Le sacerdoce liirosolymitain Tombait un corps

    riche et puissant, mais dont Tinflnence tait pluttd'ordre politique. Caste hrditaire et fern^e,affecte ^u service d'un sanc|,uaire dont les revenustaient considrables, les sadducens, ainsi nom-ms d'aprs leur anctre prsum, Sadoq, prtredu temple de Salomon, accomplissaient les fonctionsfituelles qui taient leur raison d'tre, piais ils nereprsentaient dans le judasme ni la religion vivanteni l'esprit de proslytisme. Types du fonctionnairesacr qui veille ^ur le corps de la religion sans engarder l'me, ils s'arrangeaient de la doniinationtrq^ngpre, qui respectait leurs privilges ; leuresprit positif trouvait un mdiocre attrait dan^l'esprance messianique et considrait comme unechimre la rsurrectiop des morts. La Loi, littrale-Tient interprte, autorisait leur rserve sur ces deuxpoints o fanatisme et pit cherchaient un appui.Sous la domination persane et sous la dominationgrecque, le grand-prtre avait t le premier per-

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    -v^ -sonnage de la nation ; les princes machabens, quiappartenaient la caste sacerdotale, avaient afTermileur pouvoir en assumant le ^ouveraifi pontificat.Depuis lia conqute romaine et spus Hrode, cettepuissance avait t brise par 1^ suppression del'hrdit ; le grand -prtre tait nomm et rvaqupar le chef politique. Linfluenedu grand-prtre etde l'aristocratie sacerdotale n'en tait pas moinsprpondrante dans le sanhdrin, sorte de conseilsuprme qui conservait, sous le contrle de l'auto-rit romaine, une juridiction assez tendue. Lessadducens devaient disparatre avec le temple et laville de Jrusalem ; c'est par les pharisiens surtoutque le judasme se perptua aprs la ruine dusanctuaire et de la cit.A l'cart dans des espces de pionastres, au^environs de la mer Mortp, vivaient les essniens,

    cnobites qui pratiquaient le clibat, s'abstenaientde viande, ne prenaient aucune part aux sacrifices.L'origine de ces communauts est incertaine. Ellessont issues du judasme, mais non probablementsans quelque influence trangre. En dehors dugrand courant de la vie juive, elles ne semblent pasavoir contribu directement au mouvement chrtien.Elles tmoignent du moins que des crations singU:

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    56 Hres pouvaient se produire au sein du judasme,nonobstant la puissance de la tradition. Il n'est pasprouv, et il est mme invraisemblable que Jean-Baptiste, prdicateur du prochain jugement de Dieu,soit sorti de cette secte contemplative, qui, pourautant [ue nous sommes informs, ne faisait quepeu ou point de place dans ses doctrines l'attentemessianique.

    Il

    Si Jsus avait environ trente ans quand il mourut,il tait n aprs la mort d'Hrode le Grand (4 avantl're chrtienne). Nazareth, sa patrie, appartenait la ttrarehie d'Antipas. C'est dans cette bourgadequ'il avait grandi. 11 ne frquenta sans doute jamaisles coles des rabbins ; mais peut-tre apprit-il lire auprs du hazzan, l'appariteur de la synagogue,fonctionnaire qui, ds ce temps-l, pouvait trematre d'cole, comme on le voit plus tard. Sesparents taient de condition modeste. Son preJoseph tait ouvrier en bois, charpentier, menuisier.

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    57 charron, et Jsus exera d'abord la mme profes-sion.Le sentiment religieux et l'esprance d'Isral

    avaient d s'emparer de son esprit ds Tge le plustendre et dominer sa jeunesse, puisqu'il se trouve, trente ans, libre de tout engagement, tout prt suivre la vocation qui le pousse hors de son atelier,du foyer paternel et de son pays natal. La lumireintrieure de sa conscience parat avoir t le prin-cipal de ses matres, celui qui l'aida comprendrelunivers comme le lieu de la lutte entre Dieu etSatan ; juger les hommes et les rpartir en deuxclasses, ceux qui sont dociles Dieu et ceux quis'abandonnent au mal; percevoir la significationde ce rgne de Dieu que tous attendaient et qu'il sesentit un jour appel lui-mme raliser. Les idesqu'on sait lui avoir t familires taient dans l'atmos-phre juive du temps. 11 n'eut qu' se les approprierdans une vue trs simple qui lui paraissait tre laconduite et le dessein de Dieu.Sa famille tait certainement pieuse ; mais l'ton-

    nement qu'y provoqua son entre en scne commeprdicateur de l'vangile montre que rien n'y avaitt moins prvu ni prpar que cette vocation sup-rieure. Quand il se mit annoncer le prochain

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    58 aynemenl du royaume cleste, sa mre Marie taitveuve, avec de nombreux enfants. Il n'est pas certainque Jsus ft l'an, car le plus ancien fonds desrcits de l'enfance dans Luc, o cette qualit lui estattribue, est dj tout lgendaire et influenc par lepassage d'Jsae o l'on trouva plus tard une prorphtie de la conception virginale. Aucun membre decette famille ne semble avoir adhr l'Evangileayant la mort de Jsus.Ce fut probablement Jean-Baptiste qui, sans le

    vouloir, donna l'veil la vocation du jeune char-pentier de Nazareth. La crise que traversait la Judeavait suscit un prophte. Jean prchait le repentiret donnait un baptme pour la rmission des pchs,en vue du grand jugement qui allait s'accomplir etdu rgne de Dieu qui allait venir. L'Eternel allaitprendre en main le van du laboureur, pour secouerle produit de sa moisson. Toute la menue pailles'envolerait au vent et serait brle. Le bon grainseul resterait pour le grenier du Seigneur. Celteprdication de terreur eut un grand retentissement;on venait de loin pour entendre Jean, qui se tenaitordinairement sur le bas Jourdain, baptisant dans lefleuve ceux que touchaient ses paroles ardentes.Jsus fut attir comme beaucoup d'autres, et peut-

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    -- ^i9 -tre par un intrt dj p]u puissant oliez liji quechez tout autre pq^ir ce rgne de justice dont leBaptiste prdisait la venue imniinente. Il sp fijtbaptiser et resta ensuite quelque temps au dscrj:.On ne saurait dire s'il eut avec Jean des relation^!

    suivies. 11 parat plus probable que non. Jl n'est pascertain davantage que l'instant de son baptme luiait donn la rvlation subite de sa vocation messia-nique. Ce rapport n'a rien d impossible, mais il a puaussi ivQ conu ou du moins prcis et amplifidans la tradition. Ce qui parat le plus vraisemblableest qu9 Jsus, de plus en plu^ domin par la proc:cupalion du royaume cleste, hant dj par lapense du rle capital qui lui incomberait dansl'tablissement de ce rgne divin, a pass quelquetemps dans la solitude. Un temps de rflexion et deprparation tait indispensable eptre Ja vie ducliarpentier et la nianife^tation du prdicateurvanglique. Pouss au dsert par le sentiment desa vpcaliQp, Jsus devait y tre poursuivi par uneconscience de plus en plus nette de celte vocation.L'ide s'empai'^it de lui, mais son enthpijsiasme nel'entranait pas ver^ l'entreprise hasardeuse d'unervolte main arme contre l'autorit romaine : lergne de Dieu allait venir, mais c'est la puissance

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    60 mme de Dieu qui Tintrodairait ; les hommes n'a-vaient qu' s'y prparer par le repentir, comme ledisait Jean. Un vnement dont Jsus ne pouvaitmanquer d'tre frapp, l'emprisonnement du Bap-tiste, fut ce qu'il semble, l'occasion qui lui fitprendre un parti dfinitif : puisque le prophte duroyaume tait condamn au silence, il allait leremplacer, et un titre d'autant meilleur qu'il sesentait prdestin lui-mme devenir le chef humaindu royaume, y remplir la fonction de Messie.La Galile, son pays d'origine, lui parut un

    terrain prfrable celui o Jean avait exerc sonactivit. Il lui tait assurment plus facile, tousgards, de commencer l son ministre que d'allertout de suite prcher Jrusalem. Jsus revint doncen Galile, mais non dans la rgion de Nazareth. Ilse mit enseigner au bord du lac de ibriade, Capharnam et dans les bourgs voisins. Ses pre-miers disciples furent recruts parmi les pcheursdu lac. Sa prdication ne diffrait pas sensiblementde celle du Baptiste ; lui aussi annonait le prochainavnement du royaume ; mais on dut sentir, ds ledbut, qu'il s'attribuait dans cet avnement uneplace considrable que Jean ne se rservait pas. Ilparlait comme ayant pouvoir , avec l'assurance

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    61 que lui donnait sa mission, et la force persuasived'une loquence qui jaillissait du cur. Rien neressemblait moins que cette parole vraiment inspire,vivante et pntrante, l'enseignement ordinairedes scribes ou docteurs de la Loi, qui discutaientdes problmes de casuistique, allguant l'autoritdes matres plus anciens et commentant minutieuse-ment le texte mosaque, avec abondance de distinc-tions et subtilits scolastiques. L'action personnelledu nouveau prophte fut plus dcisive sur une partiede ses auditeurs et non moins puissante sur l'imagi-nation populaire que n'avait t celle de Jean. Et cen'est pas seulement sa parole qui impressionnad'abord les masses : Jsus enseignait et il faisaitdes miracles.

    Il en faisait presque malgr lui. Ds son premiersjour Capharnam, on lui amne des malades gurir. Sa propre popularit l'effraie ; il craint quele thaumaturge ne lasse tort en lui au prdicateurdu royaume, et il s'loigne de Capharnam. Vaineprcaution. L'lan une fois donn, le mouvement nes'arrte pas ; Jsus veut prcher et convertir, il fautqu'il gurisse. Peut-tre alla-t-on mme jusqu' luiattribuer la rsurrection de morts, tout au moinscelle d'une jeune fille qu'on l'avait pri de gurir,

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    62 et qui aurait t morte quand on l'introduisit auprsd'elle. Etait-il en droit de se refuser au soulagementque Dieu oprait par ses mains? Il agissait avecune efficacit particulire sur la catgorie de maladesque l'on regardait comme spcialement possds dudmon, les malheureux atteints d'affections ner-veuses et de troubles crbraux, de drangementsd'esprit. 11 leur parlait avec autorit, ordonnait auxdmons de les laisser, et le calme revenait, au moinipour quelque temps, dans ces mes troubles einquites.

    L'on n*a aucune indication prcise touchant hdure de la prdication au bord du la.. On ne risquigure de se tromper en l'valuant quelques mois,Il est invraisemblable qu'elle ait t plus longue,d'une anne par exemple, ou davantage ; elle pour*rait, au contraire avoir t plus courte et n'avoiipas dpass quelques semaines. Le cadre gogra-phique a t aussi trs limit : Jsus a prch sur-tout Capharnam et dans les villages environnantsc'est--dire dans la rgion nord-ouest du lac deTibriade ; il ne semble pas tre jamais entr dansla ville mme de Tibriade ni dans les autres villesplus ou moins hellnises de la rgion. La traditionavait gard le souvenir d'une pointe infructueuse surI

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    63 Nazareth. Un prophte, n'est mpris que dansson pays, parmi ses parents et dans sa maison S),aurait dit Jsus devant rtoiihement ddaigneux deses concitoyens et l'incrdulit de sa famille, et iln'aurait pu faire aucun miracle en cet endroit.

    11 est vident que le mouvement vanglique nepouvait gagner eh extension et en intensit sansattirer l'attention du pouvoir politique, c'est--diresans tre immdiatement rprim. L'exemple deJean montre ce dont tiit capable cet gard letirarque Antipas, et celui de Jsus n'y contreditpoint. Jean avait t arrt, emprisonn, mis mort,parce que l'agitation produite par sa parole, et pelit-tre aussi la libert de son langage avaient inquit lesouverain de la Galile. C'est parce qu'il s'adressait de petites geis, dans un cercle restreint, en pr-chant une doctrine o rien n'tait menace directe oublme pour les autorits constitues, que Jsus apu suivre sans obstacle, pendant un certain temps,son inspiration.Au dbut, le nouveau prdicateur parla dans les

    synagogues. Chaque communaut jui\e avait alors,et depuis assez longtemps, une maison o l'on se

    1. Marc, vi, 4.

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    t)6 tout dire que le royaume tait proche. C'tait lethme fondamental de l'enseignement donn par leChrist lui-mme, et les disciples n'avaient qu' letraiter de la mme faon que leur Matre. Ils taientdouze, soit que le recrutement et fourni ce nombresans intention pralable, soit que le chiffre mmeait t fix pour marquer l'accomplissement despromesses de Dieu Isral, parce que l'Isral de latradition prophtique avait douze tribus. Fortuit ouvoulu, le rapport des Douze avec la destination del'vangile aux Juifs est attest par la tradition laplus ancienne, et rien n'empche d'en attribuer d'ide Jsus lui-mme.

    Jsus ne s'adressait qu'aux Juifs, et il ne semblepas avoir jamais eu la pense de porter l'Evangileaux paens. C'est Isral qu'avait t promis lergne de justice ; c'est Isral que le prophte deNazareth en annonait le prochain avnement. Lamission des Douze n'en atteste pas moins la con-fiance qu'il avait dans sa propre vocation et dans lesuccs de l'uvre vanglique. Le rsultat imm-diat de cette mission n'tait pas fait pour le dcou-rager. 11 semble que les envoys , les aptres, qui ce nom sans doute ne fut spcialement affectque plus tard, allant deux par deux dans les

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    - 67 -villages galilens o la l'enommede Jsus les avaitprcds, furent bien accueillis ; oi couta leur avt-tissement ; on leur prsenta des malades gurir,et il y eut des gurisons.

    III

    Cependant le progrs mme de TvaUgile devaitlui susciter de obstacles. La renomme de Jsus,augmente par la prdication des Douze, qui allaienten des lieux o leur matre n'tait jamais venu,arriva jusqu'au ttrarque Hrode Antipas, dont larsidence ordinaire tait Tibriade. Vu la prxi*-mit de Capharnam, le fait n'a rieti d'tonfint, etmme on doit supposer que, si le ttrarque n'a pSt inform plus tt du moUVemettt vanglique,c'est que Jsus li prcha pas longtemps seul aprsson arrive Capharnalim. Or il suffisait que l'auto*ril politique ft avertie pour tre inquite, etqu'elle ft inquite pour tre aussitt menaante.La crainte du ttrarque allait se reftcontrer avec

    \\ la haine des dvots. Car Jsus avait dj provoqu,

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    en mme temps que l'enthousiasme populaire, ladfiance, la jalousie et l'hostilit des docteurs offi-ciels de sa nation. Ce qu'il y avait en Galile depharisiens rigides et de scribes tait contre lui.tranger aux subtilits de l'enseignement rabbi-nique, sorti du peuple et parlant au peuple, pr-chant la religion qu'il avait au cur et non celle quitait dans les livres, interprtant au besoin l'Ecri-ture par sa conscience, au lieu d'en faire flchirl'esprit sous le poids de la lettre, Jsus ne trouvaitpas son auditoire parmi les puritains, mais pluttparmi les dclasss du judasme. 11 ne connaissaitqu'un empchement au rgne de Dieu, le pch ; aupch il ne connaissait qu'un remde, le repentir;mais le repentir tait suffisant, il tait absolumentefficace, parce que Dieu est bon et misricordieux,parce qu'il est le Pre. Ainsi l'Evangile du royaumecleste tait l'Evangile du pardon, on pourrait pres-que dire l'Evangile des pcheurs.Du systme de pratiques o la tradition des pha-

    risiens avait enchan la vie et la pit juives iln'tait que peu ou point question. Jsus avait mme,touchant le sabbat et les purifications lgales, desides qui pouvaient sembler rvolutionnaires. Lesabbat, disait-il, a t fait pour l'homme, et non

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    69 l'homme pour le sabbat *. Et propos des scru-pules pharisaques sur les aliments : Ce n'est pasce qui entre du dehors dans l'homme qui peut souil-ler l'homme, c'est ce qui sort de lui 2. Les p-cheurs venaient lui, et il leur garantissait lepardon de Dieu. Il frayait avec les publicains,ces collecteurs de l'impt romain, doublement sus-pects, raison de leur profession, et comme agentsde l'tranger. Il ne repoussait mme pas les femmesde mauvaise vie, et il allait jusqu' proclamer quetous ces gens sans loi prcderaient dans le royaumecleste les prtendus justes de la Loi. Il ne s'inter-disait pas de critiquer la pit pharisaque et detaxer d'hypocrisie les pharisiens. Selon lui, la vraiereligion tait celle du cur, et la vraie perfection,la charit prodigue en aumnes, dsintresse,sans prtentions, sans vanit.Rien d'tonnant ce que le mcontentement et

    l'hostilit des pharisiens aient grandi paralllement sa faveur auprs des masses. Antipas et les pha-risiens pouvaient s'entendre en un pril qui leur taitcommun. Peut tre s'entendirent-ils en effet. D'aprs

    1. Marc, ii, 27.2, Marc, vu, 15.

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    70 une tradition * qui d'ailleurs ne prsente pas toutesles garanties dsirables, ce seraient les pharisiensqui auraient fait connatre Jsus les sentimentsd'Antipas, l'instigation de celui-ci, pour dciderle gnant prdicateur quitter la Galile. On peutcroire qu'Antipas ne se souciait pas de recommencerl'affaire de Jean-Baptiste, et que le dpart ventuelde Jsus pour Jrusalem lui paraissait offrir le doubleavantage d'assurer la paix de sa principaut, et detransporter d'autres l'obligation de statuer sur lesort du nouveau prophte.

    Fort de sa mission divine, Jsus n'tait pas acces-sible la crainte. Les menaces plus ou moins astu-cieuses d'Hrode ne l'effrayrent pas plus que lahaine peine dguise des pharisiens. Mais il sen-tait maintenant que la terre de Galile se drobaiten quelque sorte sous ses pas. Ces foules qui l'avaientsuivi, il n avait pas tard voir qu'elles n'taientpoint srieusement converties. Un petit nombre,surtout parmi les pcheurs , avaient adhr sin-crement l'Evangile; le cur des autres n'tait paschang. L'intrt qu'ils portaient au prophte deNazareth n'allait pas beaucoup au del d'une curio-

    1. Luc, XIII, 31.

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    73 de gurir sa fille possde. Les enfants de Dieuc'taient les Juifs; et les chiens, c'taient les paens.On raconte, il est vrai que la femme, par une humbleet ingnieuse rplique, obtint ce qu'elle demandait.Mais la parole avait t dite. Si elle est authen-tique, elle tmoigne d'un sentiment qu'aurait puavouer le plus troit des pharisiens. Si elle traduitseulement une impression des plus anciens disci-ples, elle est encore considrer pour l'interprta-tion du sens que Jsus donnait sa mission.On ne sait combien dura ce voyage, mais il con-vient d'en tenir compte dans l'valuation approxima-

    tive du temps qui s'est coul entre les dbuts duministre galilen et la mort de Jsus. Si cet inter-mde se place la fin de Tan 28, Jsus a pu com-mencer prcher ds le printemps de la mmeanne. Quoi qu'il en soit, les semaines, peut-treles mois que les disciples passrent ainsi avec leurMatre dans la solitude et la paix, ne furent pasperdus pour l'uvre vanglique. Dans ces joursde vie commune et d'intimit, ils apprirent sans doute mieux connatre Jsus et s'attachrent davantage sa personne. On ne doit pas se les reprsentercomme des tudiants recevant les leons d'un pro-fesseur de thologie, mais comme les familiers d'un

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    74 envoy de Dieu. Sans parti pris du ct du Matreni du ct des disciples, la conversation roulait surle royaume cleste et sa venue prochaine. Jsusn'instruisait pas ses aptres, il entranait avec luices mes, plus rudes mais aussi naves que la sienne,vers la grande esprance qui l'attirait lui-mmeirrsistiblement. C'est ainsi sans doute que le rlequi lui appartenait dans la manifestation suprmes'claircit aux yeux des Douze, et qu'ils se trouv-rent disposs le saluer Christ, sans qu'il et lui-mme expressment dclar qu'il tait le Messie.La troupe vanglique revenait vers la Galilepar la valle du haut Jourdain ; elle stationnait prsde Csare de PhiHppe, l'ancienne ville de Dan,lorsque s'changrent les propos qui engageaientl'avenir de tous ses membres. On parlait des opi-nions diverses qui avaient cours dans le peuplegalilen au sujet de Jsus. L'numration de ceshypothses peut donner une ide de la mentalitjuive dans ce milieu, et mme de celle des Douzequi les rptent srieusement. D'aucuns soupon-naient que le prdicateur de Nazareth pourrait treJean-Baptiste ressuscit, d'autres tenaient pourElie revenu sur la terre, ou bien pour quelqueautre prophte ancien qui aurait t renvoy parmi

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    75 les vivants, ou seulement pour un prophte commeceux du temps jadis. Imaginations enfantines d'es-prits simples pour lesquels rien n'est incroyable, sice n'est peut-tre la prosaque ralit. Cependantceux qui vivent avec Jsus savent bien qu'il estJsus, et non Jean-Baptiste, lie ou Jrmie. Qu'estdonc Jsus pour eux ? Le Christ, rpond Simon-Pierre*. C'tait la persuasion de tous, et Jsus lui-mme la confirme, mais il veut qu'on garde, aumoins provisoirement, le secret sur ce point.

    IV

    Pourquoi les disciples ne s'taient-ils pas avissplus tt que Jsus tait le Messie? Pourquoi lui-mme ne le leur avait-il pas dit ds le commence-ment? D'o vient qu'il veut encore faire mystre decette qualit aprs que ses disciples la lui ont re-connue.

    L'hypothse radicale de certains critiques, selonlesquels Jsus lui-mme n'aurait jamais pens qu'il

    1. Marc, yiii, 29.

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    76 ft le Christ, et les disciples ne l'auraient cru qu'a-prs avoir acquis d'abord la foi la rsurrection deleur Matre, parat inadmissible. Si Jsus n'a past condamn mort comme roi des Juifs, c'est--dire comme Messie, sur son propre aveu , autantvaut soutenir qu'il n'a jamais exist. Car, si la tra-dition n'est pas juge recevable sur ce point, il n'enest pas d'autre o elle puisse paratre mieux garan-tie. Et les aptres n'ont-ils pas plutt cru que Jsustait ressuscit, parce qu'ils avaient cru d'abord qu'iltait le Christ. C'est la foi d'avant la rsurrec-tion qui a fait la foi de la rsurrection; et il a fallunon seulement que la premire foi ft d'une parti-culire intensit, mais qu'elle ft d'une particulirequalit, qu'elle n'et pas un objet vulgaire, pourtre en tat de produire la seconde. On expliquerabientt comment les premiers fidles et saint Paullui-mme ont pu dire que Jsus avait t fait Christet Seigneur par sa rsurrection. Le Christ de Paul,qui prexistait sa manifestation terrestre, n'estpourtant pas cens avoir ignor sa propre dignit.Le Christ des aptres galilens ne l'ignorait pasdavantage, et ces aptres avaient appris de Jsuslui-mme quelle fonction il tait appel dans leroyaume de Dieu.

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    78 trer: ils sont trop brefs et trop peu nombreux, leurexactitude est trop peu garantie dans la forme etdans le dtail, il est trop difficile de trouver leurplace respective dans l'ordre chronologique, pourqu'on puisse l'econstituer la suite des sentiments quianimrent Jsus depuis le commencement, avec lesvariations qui ont pu exister dans sa pense au sujetde sa mission. Si ces variations ont eu lieu, il n'ensubsiste aucune trace certaine.Assurment Thistorien ne saurait admettre que

    l'ide de sa vocation messianique se soit emparetout coup de Jsus sans que rien l'et prpare niamene, sans qu'elle ait subi ensuite aucune modifi-cation dans son esprit jusqu' l'instant o il mourutpour s'y tre livr. Mais tout le travail qui s'estproduit dans l'me du Christ avant qu'il se mt prcher nous chappe. Admettre qu'il a t d'abordproccup des conditions morales de l'admission auroyaume et qu'il a voulu tre, pour cette raison,le prdicateur du repentir, puisque la perspectivedu prochain avnement a influenc davantage i&apense et que de prophte il s'est cru appel devenir Messie, est se fier une conjecture gratuite,introduire dans la succession de l'histoire une dis-tinction qui existe surtout au point de vue logique

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    79 dans la conception du royaume, et sans doute aussicder la tentation de moraliser cette conceptionpar rduction de son lment eschatologique. Au-tant qu'on en peut juger, le Christ ne s'estjamais con-sidr comme un simple prdicateur de repentir etde pardon ; toujours il a parl duroyaume prochain,dii jugement imminent, et il n'a gure pu se dis*-penser de songer la place qui lui reviendrait dansce royaume. Jean lui-mme a dtermin sa posi-tion personnelle l'gard du royaume annonc : iltait le hraut du grand Juge. La situation de Jsustait autre que celle de Jean ; il n'tait pas que leprcurseur du royaume, il en faisait partie et noncertainement au titre commun d'lu, mais untitfe suprieur, qui ne pouvait gure tre diffrentde celui que Pierre lui a reconnu en le proclamantChrist.Ajoutons que le temps a d manquer pour une

    transformation profonde dans l'ide que Jsus s'estfaite de sa mission, vu le peu qu'a dur sa carrirepublique. L'explication la plus naturelle de l'initia-tiVe qu'il prend lorsque Jean-Baptiste est empri-sonn ne semble pas tre qu'il ait cru devoir uni-quement se substituer au prophte captif, maisqu'il pensait avoir qualit pour prparer l'avne-

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    -mo-ment (lu royaume prochain, en tant lui-mme lechef prdestin.Le fonds trs simple des ides et des sentiments

    qui constituent son Evangile parat acquis dsl'abord : conception religieuse et morale du royaumeet des conditions qui peuvent y donner accs; cons-cience intime d'une vocation et d'une autorit uni-ques pour faire valoir celte conception et en amenerl'accomplissement. Jsus arrive tout form pourson rle quand il commence prcher. Les obsta-cles qu'il a rencontrs ne lui ont rien appris sur lanature de sa mission ni sur le rapport de son minis-tre avec l'avnement du royaume et la place quilui reviendrait lui-mme dans le royaume une foisvenu ; il lui ont fait seulement pressentir, et encorene fut-ce peut tre que par intervalles et d'unemanire assez vague, les chances qu'avait le Messiede n'entrer dans sa gloire qu'en passant par lamort.

    Si Jsus, dans les discours et sentences que l'onpeut tenir pour l'expression la plus authentique desa pense et de son enseignement, parat surtoutoccup du royaume, non de sa personne ou de sonrle, s'il vite plutt de se dclarer Messie, et s'ilimpose ses disciples la rserve qu'il garde lui-

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    81 mme sur ce sujet, c'est qu'il n'tait pas encore dansce rle de Messie, c'est que les conditions prsentesde son existence et de son action n'taient pas cellesqui convenaient au vicaire de Dieu. En fait, il n'yavait pas de Christ tant qu'il n'y avait pas deroyaume. Le royaume tait proche, et aussi, par con-squent, la manifestation du Messie. Mais ce n'taitpas Jsus, c'tait au Pre cleste qu'il appartenaitd'amener le royaume et de manifester le Christ..Le Messie devait tre rvl tous dans l'avne-ment du royaume de Dieu. Un aveu prmatur nepouvait manquer de soulever un conflit avec les pou-voirs publics et d'lre compris par plusieurs commeun appel direct l'indpendance nationale. Mais cesdeux motifs ne suffiraient pas expliquer l'attitudeet le langage de Jsus. S'il ne se dclare pas Messie,c'est qu'il n'a pas lieu de se dclarer tel; c'est qu'ilne l'est pas encore effectivement ; il ne l'est qu'enexpectative, comme un roi qui n'aurait pas encorepris possession de son trne. Une affirmation abso-lue serait en contradiction avec sa situation actuelleet l'ide qu'il se fait lui-mme de la fonction mes-sianique. Il est la personne qui reviendra cettefonction, il est celui qui doit venir , comme leroyaume aussi est en train d'arriver : la confession

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    - 83 -tion, n'implique aucunement que ryangiste aitinvent les rcits. Tout porte croire qu'il les aseulement adapts au cadre qu'il leur donnait et rinlention qui les lui a fait raconter. La juste signi-fication de ces tableaux n'est donc pas dpendantedu trait final. Il en serait de mme pour la confessionde Pierre, si l'interdiction qui la suit tait un dtailsurajout. Et ici l'addition ne pourrait pas treinterprte en tmoignage de ce que personne avantla rsurrection de Jsus n'aurait suppos qu'il taitle Christ, la condamnation de Jsus comme roi desJuifs fournissant la preuve du contraire. L'vang-liste aurait eu seulement souci de montrer leChrist dfendant aux aptres de le dire Messie,parce qu'ils taient incapable de comprendre quecette qualit entranait de ncessit providentiellela mort et la rsurrection de l'envoy de Dieu ;le verset aurait t ajout pour le motif qui s'accusedans la suite de la rdaction.

    Celte partie du second vangile est heureusementde celles o il n'est pas trop difficile de dgager ducommentaire rdactionnel leg lments fournis parles sources primitives. Vu l'importance particuliredu passage qui renferme la confession messianique,jl convient de la citer avec le contexte qu'elle parat

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    84 avoir eu dans la relation qui est la base deMarc :

    Et il (Jsus) leur demanda : Et vous, qui me dites-voustre ? Rpondant, Pierre lui dit : Tu es le Christ. Et il leur dfendit svrement de parler ainsi de lui personne. Et il leur dit : En vrit je vous le dis, ily en a de ceux qui sont ici qui ne goteront pas la mortavant qu'ils voient le royaume de Dieu venant en puis-sance. Et ils l'interrogrent, disant: Les scribes disentqu'lie doit venir d'abord. Et il leur dit : lie, eneffet, venant d'abord, remet tout en ordre. Mais je vousdis qu'lie est venu, et qu'ils lui ont fait tout ce qu'ilsont voulu, selon qu'il est crit de lui ^

    Toutes ces dclarations se