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Article réalisé par Sarah OUSAID André Halbert Une délicieuse révélation Enfant, André Halbert arrive à Casablanca en 1954, sa vocation encore cachée. Aujourd’hui, ce sont six décennies qui se sont écoulées et le voilà un grand Chef. A 63 ans, il continue à séduire les papilles par sa gastronomie française aux penchants marocains, dans l’une des meilleures tables de la métropole, A ma Bretagne. A ma Bretagne, c’est d’abord une histoire de famille. Tout commence en 1954 lorsque Jacques Halbert, père d’An- dré Halbert, quitte la Normandie et s’installe à Casablanca avec sa petite famille pour s’occuper du parc à huitres appartenant à ses parents. A quelques centaines de mètres sur les rochers de Sidi Abderrahmane, se trouvait « à Ma Bretagne » que Jacques Halbert rache- ta en 1957. « Au départ, c’était un café hôtel où ma mère faisait une cuisine de ménagère », se remémore André Hal- bert, âgé de 7 ans à l’époque. Dans les années 60, Jacques Halbert commence à son tour à cuisiner... Comme un talent à polir Puis les choses ont évolué, à tel point qu’à l’âge de 36 ans, Jacques Halbert est pris de passion pour la cuisine et s’y consacre sérieu- sement. A ses côtés, André apprend le b.a.-ba de la cui- sine et continue à s’initier au métier jusqu’en 1968 où il effectue un stage auprès de Maître Jacques au Trianon, pâtisserie confise- rie Suisse considé- rée comme une des meilleure de l’épo- que à Casablanca. « C’est là où j’ai appris à travailler le choco- lat et la confiserie », se rappelle André. Suite à sa rencontre avec Raymond Oli- ver ou le « Ducasse de l’époque, qui a été le premier chef français à exporter la cuisine française aux Etats-Unis et au Japon », révèle André, Paris l’appelle en avril 1968 où il intègre directement Le Grand Vefour 3 étoiles Michelin. Durant ses cinq ans dans l’Hexagone, il apprend la boucherie en travaillant Aux Hal- les de Paris puis fait son entrée dans l’univers de la gastronomie française avec Guy Legay, Chef de Cuisine chez Le Doyen au Ritz Paris, devenu dès lors un ami. André Halbert côtoie également les talents de sa généra- tion, devenus aujourd’hui de grands noms : Gérard Besson, Gabriel Bis- cay, Christian Constant… En 1972, le jeune prodigue complète sa for- mation en rejoignant d’abord le chef du Taillevent Paris au Beau Rivage à Genève. Il continue à gravir les éche- lons jusqu’en 1976 où il repart avec sa toque de Chef de Cuisine. Mieux encore, participant au concours Pros- per Montagné, il fait un doublé en le remportant deux fois de suite (1976 et 1977). A mi-chemin entre la Suisse et le Maroc, André est appelé pour parti- ciper au concours de Meilleur Ouvrier de France. Une occasion qu’il laisse échapper volontairement. « J’ai décli- né l’invitation car je considérais que le vrai concours devait se faire auprès de mon père tous les jours. Tout le temps que j’ai passé avec lui était du bon- heur », confie le chef.

Maîtres Cuisiniers de France - Article réalisé par Sarah OUSAID … · 2017. 2. 7. · est pris de passion pour la cuisine et s’y consacre sérieu-sement. A ses côtés, André

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Page 1: Maîtres Cuisiniers de France - Article réalisé par Sarah OUSAID … · 2017. 2. 7. · est pris de passion pour la cuisine et s’y consacre sérieu-sement. A ses côtés, André

Article réalisé par Sarah OUSAID

André Halbert Une délicieuse révélation

Enfant, André Halbert arrive à Casablanca en 1954, sa vocation encore cachée. Aujourd’hui, ce sont six décennies qui se sont écoulées et le voilà un grand Chef. A 63 ans, il continue à séduire les papilles par sa gastronomie française aux penchants marocains, dans l’une des meilleures tables de la métropole, A ma Bretagne.

A ma Bretagne, c’est d’abord une histoire de famille. Tout commence en 1954 lorsque Jacques Halbert, père d’An-

dré Halbert, quitte la Normandie et s’installe à Casablanca avec sa petite famille pour s’occuper du parc à huitres appartenant à ses parents. A quelques centaines de mètres sur les rochers de Sidi Abderrahmane, se trouvait « à Ma

Bretagne » que Jacques Halbert rache-ta en 1957. « Au départ, c’était un café hôtel où ma mère faisait une cuisine de ménagère », se remémore André Hal-bert, âgé de 7 ans à l’époque. Dans les années 60, Jacques Halbert commence à son tour à cuisiner...

Comme un talent à polirPuis les choses ont évolué, à tel point

qu’à l’âge de 36 ans, Jacques Halbert est pris de passion pour la cuisine et s’y consacre sérieu-sement. A ses côtés, André apprend le b.a.-ba de la cui-sine et continue à s’initier au métier jusqu’en 1968 où il effectue un stage auprès de Maître Jacques au Trianon, pâtisserie confise-rie Suisse considé-rée comme une des meilleure de l’épo-que à Casablanca. « C’est là où j’ai appris à travailler le choco-lat et la confiserie », se rappelle André. Suite à sa rencontre avec Raymond Oli-ver ou le « Ducasse

de l’époque, qui a été le premier chef français à exporter la cuisine française aux Etats-Unis et au Japon », révèle André, Paris l’appelle en avril 1968 où il intègre directement Le Grand Vefour 3 étoiles Michelin. Durant ses cinq ans dans l’Hexagone, il apprend la boucherie en travaillant Aux Hal-les de Paris puis fait son entrée dans l’univers de la gastronomie française avec Guy Legay, Chef de Cuisine chez Le Doyen au Ritz Paris, devenu dès lors un ami. André Halbert côtoie également les talents de sa généra-tion, devenus aujourd’hui de grands noms : Gérard Besson, Gabriel Bis-cay, Christian Constant… En 1972, le jeune prodigue complète sa for-mation en rejoignant d’abord le chef du Taillevent Paris au Beau Rivage à Genève. Il continue à gravir les éche-lons jusqu’en 1976 où il repart avec sa toque de Chef de Cuisine. Mieux encore, participant au concours Pros-per Montagné, il fait un doublé en le remportant deux fois de suite (1976 et 1977). A mi-chemin entre la Suisse et le Maroc, André est appelé pour parti-ciper au concours de Meilleur Ouvrier de France. Une occasion qu’il laisse échapper volontairement. « J’ai décli-né l’invitation car je considérais que le vrai concours devait se faire auprès de mon père tous les jours. Tout le temps que j’ai passé avec lui était du bon-heur », confie le chef.

Page 2: Maîtres Cuisiniers de France - Article réalisé par Sarah OUSAID … · 2017. 2. 7. · est pris de passion pour la cuisine et s’y consacre sérieu-sement. A ses côtés, André

L’union fait la force !Ce qu’il fit. De retour à Casablanca, An-dré Halbert retourne au fourneau fami-lial. Avec son père, son plus grand par-tenaire, ils forment un duo redoutable et mettent tout en commun dans une rare complicité, animés par leur passion et leur envie de faire plaisir. « En cuisine, nous étions comme deux enfants gour-mands devant un énorme gâteau ! », plaisante André. Cette fusion leur a valu deux fois le prix de Meilleure Table de la grande cuisine française dans le conti-nent Africain en 1977 puis en 1978.Petit à petit, André se charge de res-ponsabilités à l’égard du restaurant jusqu’en 1987 où il prend officielle-ment les commandes. La disparition de Jacques Halbert trois ans plus tard ne l’a pas arrêté. Soutenu par son épouse Da-linda, André Halbert continue à hisser le drapeau de « sa Bretagne », notam-ment par l’innovation et la rénovation du restaurant. Sa renommée de prestige n’est plus à démontrer.

Une cuisine de coeurAu bel accueil réservé à sa cuisine, le chef n’a pas de secrets. Aimer son métier, respecter ses produits et savoir transmettre sa passion à travers ses plats sont les maîtres mots. Le plus, André se laisse influencer par les sa-veurs locales présentant ainsi une gas-tronomie française avec une touche marocaine. Sa pastilla au canard et aux pruneaux, ses craquants au cho-colat et à l’huile d’argan, son poisson au citron confit, ses sablés aux figues

de barbarie, à la menthe ou encore à la coriandre, traduisent sa cuisine mé-tisse et avant-gardiste dans les années 70. Ainsi, certaines de ses créations couronnées de succès

sont désormais des incontournables de la carte. Ensemble, André et Jac-ques avaient mis au point – à défaut

d’un vrai boudin blanc de noël- une recette fondante de boudin blanc au foie gras. « En mémoire de mon père avant qu’il nous quitte, j’avais prépa-ré un filet de sole aux huitres et aux petits légumes servi avec du beurre d’oursin. C’était un plat revisité réu-nissant tout ce qu’il aimait, ma plus belle création de cœur », se souvient le Chef, non sans émotion. Baptisé le filet de bar Jacques Halbert, ce plat est remis occasionnellement à la carte. Bien entendu, les vieux classi-

ques de la gastronomie française sont toujours les bienvenues, comme les quenelles « que nous faisons depuis une cinquantaine d’années, sachant que très peu de cuisiniers désirent ou savent encore les faire », remarque M. Halbert. Toujours à la recherche d’une cuisine d’inspiration et de plai-sir, André Halbert privilégie l’échange avec ses amis chefs. « Même lorsque nous sommes en vacances, nous nous retrouvons encore pour partager nos idées et nos découvertes», affirme ce dernier en citant notamment son ami Gabriel Biscal « avec qui j’ai eu le plus de partage, d’amour et de passion après mon père », avoue M. Halbert.Chez à Ma Bretagne, tout est fait mai-son. Cuisine, boulangerie et pâtisserie, les cartes « Gastro » et « Bistrot » of-frent la possibilité de « bien manger sans casser le porte feuille !», souligne M. Halbert.Avec sa terrasse et son jardin donnant sur l’océan, ce restaurant présente in-contestablement un des plus beaux cadres de restaurant de Casablanca. Longtemps considéré comme restau-rant d’affaires, A ma Bretagne déve-loppe davantage son activité événe-mentiel et réussit avec brio à s’adapter aux besoins de sa clientèle.