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ļ^VT

V

/

langue

W

I

JI

A-J

. sr

istoire

VALES

A-J

histoire

1

.ÇA

-J

histoire

.ÇA

N° 28

-PRINTEMPS

1995

X

LE CHOIX

Çã

DE

LA

SOLITUDE

^

f

duCentreevueNationalubliéeduvecLivreeconcoursetduC.N.R.S. JA1/iuCentreationaluLivre tduC.N.R.S. JA

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MÉDIÉVALES

Langue

Textes Histoire

Revue semestrielle

publiéepar

es PressesUniversitairese

Vincennes-Paris

III

avec

le

concours

u

CentreNational u Livre

et du

Centre

e la

Recherche

cientifique

fondée

arFrançois-J.

eaussart,

ernard

erquiglini,

rlando e

Rudder,

François acquesson,

laude

Jean,

dile

Redon

Directeure la publicationOdileREDON

Comité

de rédaction

SimonneABRAHAM-THISSE

Patrick OUCHERON

Alain BOUREAU

Monique

BOURIN

Geneviève ÜHRER-THIERRY

Lada HORDYNSKY-CAILLAT

BrunoLAURIOUX

DidierLETTLaurenceMOULINIER

Danièle SANSY

Conseil

scientifique

Jérôme

aschet,

Chiara

Frugoni,

Allen

J.

Grieco,

Christine

apostolle,

Michel

Pastoureau,

Danielle

Régnier-Bohler,

ernard

Rosenberger,

Barbara

Rosenwein,

imone

Roux,

Françoise

Sabban,

Thomas

Szabó,

Elisabeth

adora-Rio

© PUV, Saint-Denis,995

Couverture

dessinde MichelPastoureau

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MÉDIÉVALES 28

PRINTEMPS 1995

LE

CHOIX

DE LA

SOLITUDE

Parcours

érémitiques

dans les

pays

d'Occident

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CONSIGNES

AUX AUTEURS

A

-

Articles

Les textes seront remis

dactylographiés

u

imprimés

n

double

interligne,

n feuillets

e

1

800

signes 30 lignes

à 60

signes)

sur

for-

mat

21

X

29,7

cm. Le texte

t les notes seront

présentés

éparément,

les notes numérotées

n continu à

la

suite de

l'article. Les articles

(notes comprises)

ne

dépasseront

pas

45 000

signes

(y compris

les

blancs),saufconsignes pécifiques u responsable u numéro.Les dis-

quettes

seront fourniesdans un second

temps.

Normes de

présentation

Les mots et les citations

en latin

seront

présentées

n

italiques

ou

soulignés.

Les citations

hors

le

latin) figureront

ntre

guillemets.

Les illustrationseront

résentées part,

n

cliché

positif

oir et

blanc,

numérotées

t

avec une

légendedactylographiée.

e nombredes illus-

trations

par

articlene

dépassera pas

5.

Les

dessins

au

trait sont les

bienvenus.

Notes

Dans les notes et les références

ibliographiques,

n

respectera

les normes

uivantes

initiale u

prénom

de l'auteur n

capitales,

uivi

du nom de l'auteur en

petites

capitales

sauf

l'initiale en

capitale)

titre

'ouvrage

en

italiques

tome ou volume lieu et date

d'édition

pages.

Pour les

articles

e revue titre e l'article ntre

uillemets,

irec-

tement

uivi,

après

une

virgule sans

dans

ni

in),

du

titrede la revue

en italiques ou souligné tome ou volume année ; pages.

Pour

les articles nclus

dans

des

ouvrages

collectifs

actes

de col-

loques, mélanges...),

même

présentation

mais

le

titrede l'article

est

suivi

du

mot

dans,

puis

du nom de

l'éditeur

scientifique

en petites

capitales)

suivi de éd. ou

dir.,

et du

titrede

l'ouvrage

en italiques).

Pour

les éditionsdes textes

médiévaux,

e

prénom

et le

nom de

l'auteur seront n

petites apitales sauf

initiales,

n

capitales)

le

titre

du texte

en italiques)

sera

suivi du

prénom

et

du nom de

l'éditeur

scientifique

en

petitescapitales)

suivi

de éd. ou

dir.

B

-

Notes de lecture

On

indiquera

dans l'ordre

l'auteur,

e titre n

italiques y

com-

pris

'intégralité

es

sous-titres),

e lieu

d'édition,

a maison

d'édition,

la date

de

publication,

e nombre

de

pages,

le

nombre de

planches

et la

nature des index.

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SOMMAIRE N° 28 PRINTEMPS 1995

LE CHOIX DE LA SOLITUDE

Parcours

érémitiques

dans les

pays

d'Occident

Parcours

érémitiques

Odile REDON 5

Terreurs

t tourments. ormes d'érémitisme

n Italie centrale

entre e

xii« et le xme siècle

Sofia BOESCH GAJANO

11

La solitude

des ermites.

Enquête

en

milieu

alpin

Catherine

SANTSCHI 25

Entre le désir de la

montagne

et les

appels

du

village

Franco

d'Assergi,

ermitedu Gran Sasso

(xiii* siècle)

Stéphane

DI DOMENICO

41

Un Vénitien

u Mont-Saint-Michel

Anastase,

moine,

ermite t

confesseur

t

vers

1085)

Mathieu

ARNOUX

55

Érémitisme

t

«

inurbamento dans l'ordre camaldule à la

fin

du

Moyen Âge

Cécile CABY

79

Reliques

et

images

de saint

Galgano

à

Sienne

(xine-xve iècles)

Lucie GERNEZ

93

Bibliographie 1963-1994)

Sofia

BOESCH

GAJANO,

Cécile

CABY,

Odile

REDON

113

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4

SOMMAIRE

ESSAIS

ET

RECHERCHES

Sur les traces du

lynx

Élisabeth

HALNA-KLEIN

119

Bornes

et

limites

dans Paris

à la

fin

du

Moyen

Âge

Simone

ROUX

129

Abstracts 139

Notes

de

lecture

143

Mathieu

Arnoux,

Mineurs

férons

et maîtres de

forge

étude

sur^

a

production

du

fer

dans la

Norman-

die

du

Moyen Âge

xie-xve

iècles

(L. Feller)

;

Jeux,

sports

et divertissementsu

Moyen

Âge

et

à

l'âge

clas-

sique (D. Boisseuil)

;

Chiara

Frugoni,

Francesco e

l'invenzione

delle

stimmate Una

storia

per parole

e

immagini ino a Bonaventura Giotto A. Boureau) ;

Michel

Colardelle et Éric

Verdel

(dir.),

Les habi-

tats du lac de Paladru

(Isère)

dans leur

environnement

La

formation

d'un terroir u

XIe

iècle

(G. Comet)

;

Jacques

Krynen,

L'empire

du

roi. Idées et

croyances

politiques

en

France,

xine-xve

iècle

(P.

Bue).

Livres

reçus

155

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Médiévales

8,

printemps

995,

p.

5-9

Odile

REDON

PARCOURS ÉRÉMITIQUES

L homme seul n existe

pas

et Termite

ui

fait e choix de

quitter

la société des hommes rencontre

ant d obstacles à la solitude con-

templative u il

retrouve

oujours,

mortou

vif,

une société des hom-

mes car si son

rêve

de solitude

était

pleinement

éalisénul n aurait

de lui

gardé

a

mémoire. euls

peut-être

es

ermitages

nonymes

dont

les documents

portent

a

trace,

aux confinsdes terroirs

illageois

ou

dans les clairières, émoignent hommesou de femmes ui ontréussi

leur

départ

en

disparaissant

ans

escorte,

ans nom

et

sans souvenir.

Dans les

sociétés

chrétiennes,

es

parcours obligatoires

nt créé

un

stéréotype

e

l ermite,

dont le modèle est saint

Antoineet

qui

est

régulièrement

ctualisé,

u

cours

des siècles

médiévaux,

ans les récits

hagiographiques

t

dans

les textes ittéraires

entre

réalité,

magi-

naireet

folklore.Une femme u

plus

souvent

n homme

part

en

quête

du désert

en Occident e

désert

déal est

une

forêt,

de

préférence

dans un

relief

ccidenté,

emé de

roches et de

grottes,

el

que

l illus-

tre

iconographie

des Thébaïdes

aux

xivc

et

XVe

iècles. L ermite vit

de

cueillette,

n contact

t

souvent

n collaboration

vec

les

animaux.

De loin en loin il reçoit a visite de chrétiens, ui tombent ur lui

inopinément

u

qui

le cherchaient

our

l assister,

e

nourrir,

eman-

der

sa

bénédiction

u lui confier

inavouables

secrets.

Le diable s en

mêle,

sous

la forme ouventde séduisantes

réatures mais le brave

ermite ésiste

pas toujours).

Il

compose

aussi

avec

ses fidèlesou ses

disciples.

Les

articles

ui

suivent

t

les

recherches itées dans

la

bibliogra-

phie

montrent

ue

le

stéréotype

on s en

doutait

-

ne rend

pas

compte

des

multiples

vatars de

l érémitisme,

el

qu au Moyen

Age

il

s est

confronté ux

communautés

umaines,

ux institutionscclé-

siastiques

et aux réalités

politiques.Essayons

de

présenter

es voies

ouvertesdans ce volume et dans l historiographie roche.

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6

O.

REDON

Partir

Pour

devenir

rmite

l faut

quitter

e lieu de vie

qui

vous

a

été

donné et

renoncer

ux

présences

amilières érémitisme n

effet ime

avec

errance t

pèlerinage.

t si

Permite un moment rouve on

lieu,

l ermitage

n est

d abord

qu un

abri

précaire

une

grotte

mpruntée

à la

montagne

et à

peine

aménagée

ou une cabane de

branchages,

techniquement

udimentaire

t facilement

étruite,

ui peut

être aban-

donnée sans

regrets.

L échelle

de

l éloignement

arie

et

il

importepeu,

car tout

lieu,

dominépar une volonté,peut devenirun lieu de solitude,une cella

donnant

accès à la

contemplation

ivine. La

recluse

franchit

arfois

moins de

100 ou

200 m

de sa

maison au réclusoir

Chelidonia, elle,

quitte

son

pays,

fait le

pèlerinage

de Rome et choisit sa

montagne,

la Morra

Feronia,

le tout entre

Abruzzes et Latium. Franco monte

toujours

plus

haut sur

le Gran

Sasso.

Galgano, guidé

par

l archange

saint

Michel,

ne

s éloigne

que

de

quelques

kilomètres e son Chius-

dino natal dans les Monts

Métallifères,

ais

l

a fait ui

aussi

le

voyage

de Rome. Parcourant

de

plus

vastes

espaces,

Robert d Arbrissel a

migré

de la

Bretagne

vers

l Anjou

;

Bruno

(de Cologne), parti

de

Reims,

après

des

étapes

en désert

champenois, gagné

au cœur

des

Alpes le désert e Chartreuset terminéon parcours errestreu fond

de la Calabre.

Guillaume

dit de Mallevai

-

l ermitage

maremman

il

s était

arrêté,

pas

très loin de Grosseto

-

venait

peut-être

d Aquitaine

et avait

accompli

les

pèlerinages

de

Saint-Jacques

de

Galice,

de Jérusalem t

de Rome. Anastase suit d autres

grandspar-

cours

chrétiens e

l Adriatique

à

l Atlantique

et aux

Pyrénées

on

pourraitmultiplier

es

exemples.

Il

existe des

pôles

d attraction

our

les ermites

ui

ont

passé

le

temps

des

pèlerinages

des lieux

marqués par

une

sacralité

antique

comme

la Morra Feronia

ou

par

le souvenird un saint

exemplaire

comme

Benoît dans les

parages

de Subiaco.

Le

voisinage

des monas-

tères ttire ussi puisque es religieux éguliers euvent ssurerun sou-

tien

sacramentel

u

simplement hysique,

ndispensable

la

personne

isolée,

à Laurent

par

exemple qui,

en s enfermant

ans sa

cuirasse,

s est

littéralementendu a vie

impossible.

e désertdes ermites tou-

jours

un

sens,

lieu

d étape

proche

d une

route,

confins entre deux

dominations,

uis

à

partir

du

XIIIe

iècle

quelque

lieu de la transition

entre a ville bruissante

es activités

umaines t

l espace

hors es murs

où les hommes

se

dispersent.

e romantisme es

«

déserts fores-

tiers

et

montagneux

st seulement

une

perception posteriori

Le choix contrariéde la solitude

Le

départ

est

un refus t comme

tel

il

n est

pas

bien

accepté par

la

société

environnante. efus

des liens de solidarité

humaine,

refus

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PARCOURS

RÉMITIQUES

7

des

marques

et

des

distractions

e la vie

mondaine,

refus

du

confort,

exigence

de

redéfinition

ersonnelle

ace à

Dieu,

dans la

contempla-

tion,

et

à

la nature

créée,

dans la

pénitence.

L homme ou la

femme

qui

construit n tel

programme

t

s y

tient e

révèleforcément

omme

une

personnalitémarquante.

Dès lors

il

attire t

il

lui

est bien diffi-

cile

de rester eul. Un

entourage

pécifique

d admirateurs t

de fidè-

les attend

de

lui des directives t des

grâces

et lui

apporte

son aide.

Car

la

solitude est

dangereuse.

Dans

la

montagne

un

ours

peut

certes

conduire

à la

source de miel ou une biche

signaler

es herbes

toxiques,

mais les

loups risquentd attaquer

et les

glaces

d enfermer.

L assistancedivine t humainen est donc amais inutile. homme seul

est aussi confronté sa

propre

nature et aux

effets

ue peut

pro-

duire sur

lui une alimentation

éséquilibrée,

sauvage

»

;

surtout a

consommation herbes ruesà l exclusiond autres

liments

éveloppe

la mélancoliedu

tempérament

t

peut

porter

la

dépression

u à la

violence,

déchaîner es

appétits

exuelsou les

pulsions

meurtrières.e

diable avait beau

jeu d attaquer

homme

déséquilibré ar

la

solitude,

en tête à tête

ou au

corps

à

corps,

pour

briser a

rédemption éni-

tentielle on connaît les tentations e saint Antoine.

L Église

dans sa

sagesse

s efforçait

onc de

peupler

a

solitude

des

ermites,

e ramener es solitairesdans la

communauté,

de

sorte

que souvent érémitismentervientomme un momentdans une vie

sainte

plutôt

qu il

ne

s affirme

n vocation

absolue. Les

grands

fon-

dateurs n

témoignent

Benoît

avait

goûté

de la

solitude vant

d édic-

ter

la

Règle cénobitique qui

va

s imposer

à tout

l Occident,

Bruno

négociait

toujours

avec elle

pour

définir a

discipline

des

Chartreux,

Robert

d Arbrissel

t

François

d Assise

ne reniaient

as

leur

fuite ri-

ginelle.

Jusqu au

XVe

iècle les Camaldules sont

capables

de

réveiller

l écho

de la vocation

érémitique

de

Romuald,

leur

fondateur.

La

réintégration

e l ermite

eut

advenir vant ou

après

la

mort.

À

l extrême

fin

du

XIIe

iècle,

Galgano

avait

sans doute cherché

des

contacts

avec le

«

réseau

érémitique

des Guillelmites

ui

lui était

géographiquementroche, regardant ersla Maremme de Grosseto.

Mais

après

sa

mort Ordre des frères rmites e saint

Augustin, ui

fédère

u milieu

du

xiiie

siècle

a

plupart

des

ermitages

oscans,

capte

sa

Leggenda

tandis

que

le monastère

istercien,

tabli

au

pied

de la

colline

il

s était

retiré,

prend

son

nom et

diffuse on culte

vers

Sienne. Sa mémoire ertdonc deux

appareils religieux

t,

par

le

biais

des

Cisterciens,

lle

bénit

l expansion

siennoise en Maremme.

J évoquais

es

Augustins,

mieux connus et

pour

cette

raison

pres-

que

absents

de ce volume. La

règle augustinienne

mposée

en 1256

par

le

pape

Alexandre

V

à tous les

ermitages

autonomes résol-

vait de manière ntéressantee dilemmeentre a solitudeérémitiqueet le servicede la communauté hrétienne. es ermitages ubsistaient

dans les lieux solitaires

raditionnels,

hacun

peuplé

de

moins d une

dizaine

de

frères mais dans les

bourgs

et les villes étaient

créés de

nouveaux

couvents,

ui

n étaient

pas plus

isolés,

hors du

monde,

que

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8

O. REDON

Santa

Maria

degli Angeli

à Florence.

Les frères irculaient un lieu

à

l autre,

entre es bois et la ville.

Rappelons

brièvemente

parcours

du bienheureux

Agostino

Novello,

connu

surtout

pour

l effigie ue

traça

de lui Simone

Martini,

ccompagnée

e l illustration

e ses mira-

cles.

Juriste,

idèle du roi

Manfred,

rescapé

de la

bataille de

Béné-

vent

en

1266,

il

avait

regagné

a Sicile

et s était caché

dans un ermi-

tage

d aire

augustinienne.

ur le conseildes

frères

l

partit

ers a Tos-

cane et connut et

vécut successivement ans

plusieurs

rmitages

de

la

région

de Sienne. Dans

l un

d eux, Rosia,

il

est reconnu

par

un

ancien

condisciple

e

Bologne

et dès

lors sa vie est en

constant

alan-

cement ntre a solitudecontemplative u il désire,dans les bois tos-

cans,

et les lieux de

l action

ecclésiastique

le couvent

Sant Agostino

de Sienneet la cour

pontificale

e Rome

où,

prieur

énéral

e

l Ordre,

il

rédige

es constitutionsn 1290.

Il

réussit

finir

es

jours,

en

1309,

dans le lieu

solitairede San Leonardo al

Lago,

dans la forêt

voisine

de

Sienne,

mais son

corps

est ensuite

mporté

ans

l église

des

Augus-

tīns

de

Sienne,

honoré du retable

peint

par

Simone,

offert la

véné-

ration des fidèlesde la ville. Ce

parcours

entreretraite t

servicede

la

communauté hrétienne est

pas

sans

évoquer

celui

d Anastase,

en

d autres

lieux,

en d autres

temps.

En

marge

des

solutions

généra-

les

qui

tendent

oujours

au

regroupement

énobitique

t

-

au

temps

des ordresmendiants au servicede la communauté hrétienne ar

la

prédication

urtout,

es individus éussissent

réaliser,

ar

moments

au

moins,

eur

déal de solitude

pénitentielle

t

contemplative.

l inté-

rieurde

l Ordre

camaldule,

devenu

clairement

énobitique,

e

rappel

de

Camaldoli et le

nom d «

ermitage

renvoient

rincipalement

la

stricte bservance de la

Règle

du

fondateur.

La

réussitede

l Église

est moins

générale

au

niveau des

cultes.

Si

Franco,

mort,

rentre

éfinitivementu

village

d Assergi

qu il

fré-

quentait

e

son

vivant,

i

Galgano

et

Agostino

Novello

s intègrent

ans

le

panthéon

des

saints

patrons

de

Sienne,

au

contraire

endant plus

de

quatre

siècles la

hiérarchie choue à

faire

descendre

Chelidonia,vivantepuis morte,de son rocher u monastère.Un culte de fécon-

dité

antique

et

toujours

vivant

dans les

derniers

ièclesdu

Moyen

Âge

prolonge

la

farouche résistancede la

bienheureuse,

ichée dans

sa

montagne.

Au

xvic

siècle

seulement,

énorme

machine

ridentinean-

cée contre

es cultes

populaires

réussit faire

nlever

e

corps

de Che-

lidonia,

pour

lui

rendre nfin

des

honneurs

onvenables t

contrôlés

à

Subiaco,

au

monastèrede Sainte

Scholastique.

Nature et culture

Si l ermite

olklorique

st

quasiment

un homme

auvage,

ermite

de

l Église

est un

civilisateur.

e

plus

modeste

défrichait

ans

doute

un

petit

terrain

pour

se nourrir

mieux

l ermitage ugustinien

vait

ses

champs

et

ses

troupeaux.

En

territoire

iennois a

disposition

des

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PARCOURS

RÉMITIQUES

9

ermitages

ur les routes de

l expansion

vers a Maremme

méridionale

ne

laisse

guère

de doute sur leur

nsertion ans le

projet politique

de

la commune.

l

faut

s y

résigner

en

réalité,

ermite

médiéval

n est

pas plus

un

sauvage que

la forêt

n est

un

désert.

La

nature

s apprivoise

Pie

II,

allant

aux

thermes

de

Petriolo,

décrit

e lieu de

l ermitage

de Sant Antonio

d Ardenghesca

«

dans

une vallée

boisée,

fermée ux ventsdu

nord,

ouverte u

midi et à l ouest. Le montAmiata

empêche

de voir a

mer. Les

bois sont

pleins

de chênes

lièges,

de

châtaigniers

t

d yeuses,

dont les glands, à la saison, nourrissentes sangliersdont les

troupeaux

nt leur tanièredans la basse vallée.

Les

anciens,

qui

avaient trouvé dans

la

vallée

une

source

pérenne,

oupèrent

e

bois

tout autour

et

édifièrent n

pierre

de taille un

sanctuaire

dédié

à

saint

Antoine,

dont

l antiquité

mérite e

respect.

À

côté

ils construisirent

es cellules

pour

les

moines,

plantèrent

es

vignes,

ultivèrent es

jardins

et

greffèrent

es

arbres fruitiers.

En

ce lieu habitentdes frères e l ordre des

Ermites,

mais

pas

plus

de

quatre

ou

six,

car

il

faut aller loin

pour

demander

l aumône. Là

sont

envoyés

des hommes

xemplaires,

moureux

de la

solitude.

ls

préparent

ux-mêmes

e

vin

de leur

vigne

et

les légumesde leur ardin. Ils vont chercheres châtaignes ans

la forêt. ls

peuvent

ussi à l occasion se

procurer

e la

viande

en chassant.

Le

reste

eur est fourni

par

le frère

uêteur.

l

est

bien rare

qu arrive usque

là un hôte humain. Souvent

au con-

traireun

loup

ou

un

sanglier

e

présente

t il

est difficile e

défendre

ontreeux la

vigne.

Il

n est

pas prudent

de marcher

seul dans

la forêt.Celle-ci

cependant

ffre ne ombre

délicieuse

sous

les arbres

toujours

verts

*.

Au

XVe

iècle,

cette vision

pacifiée

de la nature environnant

l ermitage

elativise

e

paradoxe

de

1 «

ermitage

urbain des

Angeli.La forêt s est éloignée, les « ermites vaquent en leur jardin. Au

temps

de

l humanisme,

a

naturen est

plus

l auxiliairede la

pénitence

et

la

pénitence

n est

plus

l idéal des ermites.Reste la

solitude,

qui

se résout

dans

les

bibliothèques

u dans les

scriptoria

es Camaldu-

les et des

Augustins,

n face à face avec les textes

t avec

les

pages

à

lire,

à écrire

et à enluminer.

1. Enea ilvio

iccolomini,

apa

Pio

II,

I

commentarti,-21,

d. ettrad.

tal.

L.

Totaro,

2

vol.,Milan, 984, ,

pp.

1952-1955.

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Médiévales8,printemps995, p.11-23

Sofia BOESCH

GAJANO

TERREURS

ET

TOURMENTS. FORMES D'ÉRÉMITISME

EN

ITALIE CENTRALE ENTRE LE XIIe ET LE

XIIIe

SIÈCLE

Choix

de

vie,

choix de lieu

«

Les lieux

produisent

n effetdans

les cœurs

subtils

et il

y

a

une hiérarchie es demeures

orporelles

omme

l

y

a

une

hiérarchie

des demeures

pirituelles

,

disait Ibn Arabi au début

du

XIIe

iècle1.

À la mêmeépoque, la jeune Cleridonaou Clerdona,- diteplus tard

Chelidonia2

-

éprouvait

sans doute le même

sentiment

orsque,

si

Ton en croit sa

Vita,

elle errait dans la

montagne parmi d'âpres

rochers

n

quête

d'un lieu

longtemps

ésiré,

adapté

à

ses

exigences

spirituelles

t

matérielles

t au

choix de

vie

qu'elle

avait fait en

quit-

tant a famille t la maison3. Ce lieu

est identifié

râce

à

deux

réfé-

1. Cit.dans

M.

Chodkievicz,

es

sceaux

es aints.

rophétie

t sainteté

ans

la doctrine'Ibn

Arabi

Paris, 986,

.

18.

2. Cf. e commentaire

e

'historiene Subiaco

Maccarty

urCherubino

irzio,

Chronicon

ub

ácense,

. Allodi et E. Crostarosa

d., Rome, 885,

.

723.

On

trouveuelquesemarquesur 'histoireu nom ans esActa anctorumOct.VI,

p.

362 la formeChelidoniaest onsacrée

ar

e

Martyrologium

omanům.

ropy-

laeum

d Acta anctorumecembris

Bruxelles,940,

p.

451 et 452.

3. La Vita e a sainte

rmite,

iviséenhuitect

ones,

e

trouve

ux

238-247v°

du manuscrit

iturgique

onservé

la

bibliothèque

u

monastère

ainte

cholastique,

XXII,

4

il

appartenait

u monastèree SantaMariaMaddalenatSanta

leridona,

qui

avait téfondé la

fin

u

xiie

iècle

uxenvironse a

grotte

ù avait écu a

sainte

toù étaientonservéeses

eliques

247v°).

e texte

résenté

ans e manuscrit

est rès

robablement

'œuvre'unmoine e Subiaco

pour

ne

nalyse

lus

ppro-

fondie,

oir .

Boesch

ajano,

Chelidonia.

toria

i

un

culto,

paraîtrerochaine-

ment

Turin, osenberg

t

Sellier,

995)

t

Ead.,

«

Monastero,

ittà

campagna

il

culto

i S. ChelidoniaSubiaco

raXII e XVI secolo

,

dansCulto ei

antiistitu-

zioni

classi ociali

n età

preindustriale

S. BoeschGajano t L. Sebastiani

d.,

Rome/L'Aquila

984,

p.

227-260. ne

petite

ditione a Vita caractère

évotion-

nel,mais rès tile, étépubliéevec nregarda traductiontalienne,ue 'ai utili-

sée. Le texte

dité ansActa anctorumOct.

VI,

pp.

366-368

stde l'historiene

Subiaco

uglielmoapisacchi,édigéprès

e

milieuu

xvie

iècle,

eu

vanta trans-

lation

es

reliques

e a sainte e a

montagne

ers

'intérieure

'église

ainte cho-

lastique,

ù elles e trouvent

ujourd'hui.

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12 S.

BOESCHGA ANO

rences,

géographique

t

hagiographique

la Morra

Feronia est

située,

précise

notre

ource,

au-dessus

de

l'important

castello de

Subiaco,

appelé

ainsi

parce

que,

autrefois,

l

donnait

sur

un lac

qui

fut

quasi-

ment

consacré

par

les miracles

qu'y accomplit

saint

ßenoit.

Si on la

compare

aux récitsde

voyages, pérégrinations

t

pèleri-

nages

d'un

grand

nombre

de saints et de

saintes4,

a

biographie

de

l'ermite helidoniane

relate

que

des

déplacements

ssez

limités.

our-

tant,

a référence

ux lieux se révèle essentielle

our interpréter

on

choix

religieux

la Vitade Chelidonia onfirme

ans

équivoque

'inter-

action

entre

es

formes e la

vie

spirituelle

t

la

géographie eligieuse,

un lien dontl'importance été dernièrementoulignéepar l'historio-

graphie hagiographique5.

Bien

plus que

la

famille,

ce

qui -compte

c'est le lieu

d'origine,

a

patria

:

pour

Chelidonia le

Cicolano,

une

zone

montagneuse

t isolée

par rapport

u

réseau routier

ncien,

un

territoire

imitrophe,

mais

«

autre »6.

La but de Chelidonia

st,

dès

le

début,

a

vallée de

Subiaco,

sanc-

tifiée

par

la

présence

de saint Benoît.

Mais

ce

n'est

pas

vers

les

«

vrais

»

lieux

bénédictins,

eux

qui

avaient

accueilli Benoît et

gardé

la

mémoire e cette

présence

llustre,

ue

tend

a démarche

matérielle

et

spirituelle

e Chelidonia.

Le lieu

qu'elle

a

«

longtemps

ésiré

»

se

trouve ur les monts

qui

ferment

a

vallée

et

qui

se situent

l'opposé

(considérant ubiaco) de celui où s'élèvent es monastèresde saint

Benoît

et de

sainte

Scholastique

et où

se

trouve

e Sacro

Speco,

lieu

de

l'expérience rémitique

e

Benoît. On

perçoit

ès le

début une sorte

de

polarité patiale

entre a Morra Feronia

-

qui

portait

nscrit

ans

son nom le souvenir

d'une

sacralité

antique

et

naturelle,

t

qui par

sa

position septentrionale rotégeait

ffectivementa

vallée du mau-

4. Cf. A.

Vauchez,

a sainteté

n

Occidentuxderniers

iècles u

Moyen ge

d'après

es

rocès

e

canonisation

t esdocuments

agiographiques

Rome, FR,1988,

pp.

232-234.

5. M.

de

Certeau,

Hagiographie

,

dans

Encyclopaedia

niversalis

VIII,

Paris, 968, p.207-209,f. ussi d.,L'écritureel'histoire9aris, 975 É. Pat-

lagean,

À

Byzance.

ncienne

agiographie

t histoire

ociale

,

dans

AnnalesSC

1968,

p.

106-126.

.

Dalarun,

L'impossible

ainteté.a vie

retrouvéee Robert

d'Arbrissel

v.

1045-1116

,

fondateur

e Fontevrault

Paris, 985,

'intéresse

articu-

lièrementux

«

espaces

e

la

sainteté

;

cf.

aussi

d.,

Lapsus

inguae

La

légende

de

Claire

e

Rimini

Spolète,

994. our es

rapports

ainteté-cultes-lieux,

oir

uoghi

sacri

spazi

della antità

S.

BoeschG jano

et L. Scaraffia

d., Turin,

990.

6. Dans

a

première

ectio n

it

Ciculanorum

atriasanguine

lara

pâtre

au-

ferio,

matre lbasia rta

il

estdit dimissa

atriaspretis

um

mundo

arentibus,

heremum

etiit.

ans a secondeectio

pp.22-24),

ne

description

lus

détaillée

e

la

eunesse

e Chelidoniae termine

ar

a fuiteu

mondet a

longueuête

u ieu

Giratis

taque tque erspectis

rduis

montium

ocis tam d

cupitum

diu

desidera-

tum

in radicemont

s,

post

muitosabores

imiumque

efatigata,ui

dicitur

orra

locumevenitquidistai populoso ppidocuiSublacusomenst quoniamublacu itum stperquemMaurusiccis edibuslacido ueroubveniens,agistro

iubente,

ucurrit

elociter,

t n

rcemunitissima

evatus,

er

ria

ere

miliaria.

'évo-

cation u

miraclee Mauro e

rapporte

u miracle

aconté

ans

e

ivre

I

des

Dialo-

gues

e

Grégoire

e

Grand,

. De Vogüé

d., I,

Paris,

979

Sources

hrétiennes,

260),pp.

156-159.

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14

S.

BOESCHGA ANO

Sacro

Speco,

ces derniers

ne

faisaient

pas

vraiment

'objet

d'un

culte10.

Autour de

l'institution

ependantgravite

ne

petite

onstellation

de saints et de

saintes,

mais l'intensité

e

l'attraction

st trèsvariable

et la

gravitation

luctuante. a

sacralité

e

la vallée

exerçait

ans doute

une attraction

lus

forte

ue

l'institution

monastique,

dont la

proxi-

mité mmédiate

pouvait

même

paraître

dangereuse,

omme le

serait

l'éclat du soleil.

Dans

cette

constellation

mbiguë

se

trouve,

ntreXIe

et

XIIe

iècle,Pietro,

dit

de Trevi

la

ville où

il

finit

a

vie).

À

Subiaco

il

vécut

dans

le Castrum

près

de

l'église

Sant'Abbondio,

menantune

existence emblableà celle des ermites rbains.« Il aimaitbeaucoup

le

monastère,

rappelle

le

biographe,

et

s'y

rendait

fréquemment

.

Mais le

monastère e Subiaco n'attirait

as

le

bienheureux

ietro

vers

sa

communauté,

ont e rôle

apparaît

même

parfois

négatif

envers

lui.

Sa

sainteté u contraire

'épanouira

dans la

ville de

Trevi11.

Au

début du

XIIIe

iècle

un

troisième aint entre

dans l'orbite

du

monastère

e Subiaco :

Lorenzo,

dit

«

Loricato

»,

-

Laurent

'Encui-

rassé

-

,

parce

qu'il portaitpar pénitence

ne

cuirasse. Les

actes du

procès

de

canonisationdonnent

des

témoignages récieux

ur ce

per-

sonnage.

Le

28

novembre

1243,

quelques

mois

après

sa

mort

(le

16

août),

le

pontife

nnocent

V

avait

chargé

Giovanni,

vêque

ď

Ala-

tri,et Gregorio,prieurdu monastère e San Bartolomeode Trisulti,

d'ouvrir

une

enquête12.

La

précocité

du

procès

suggère

un

rapport

privilégié

vec

l'institution

monastique

qui

conserva e

corps

de Lau-

rent,

comme

il

est mentionnédans la

lettre

pontificale

relative à

l'ouverture

du

procès.

Quant

à

l'issue

négative,

on

peut

l'attribuer

à

P «

excès

»

ascétique,

mais sans doute

aussi au

trop

faible

prestige

religieux

e

l'institution

monastique, ui

ne fut

pas

en

mesure

d'exer-

cer de

fortes

pressions.

Parmi

les

témoins

nterrogés,

eux

qui

appartiennent

u

monde

monastique

sont

relativement

eu

nombreux

4

seulement)

mais ce

10.

d.,

«

Palombo

,

dans S

volumeité la

note

récédente

ol. 8-69

t

plus

généralement

.

Caraffa,

L'eremitismoella

Valle

ell'Alto

niene alle

rigini

l

secolo IX

»,

dans

Miscellanea

ntonio

iolanti

Rome,

964,

p.

223-237.

ur

e ren-

forcemente a sacralité

u Sacro

peco

n

relation

vec

e

pouvoir

e

'abbaye,

oir

P.

Delogu,

Territoriocultura

,

loc.

cit.

11.

La Vita e

Pietro été

ubliée

ans es

Acta

anctorumAoût

I,

pp.

641-644.

Pierantoni

mis ndoute

a date raditionnelle

e a

mort

1052)

t

proposé

e

siècle

suivant.f.

aussi

.

Caraffa, Pietro,remita,

rotettore

i

Trevi

,

dansBS

X,

col.

735-737.

12. Les actes

u

procès

e

canonisationont

ubliés

bien

ue

de

façon

nsa-

tisfaisante

dansBenedetto

IV,

«

De

servorumei

beatificatione

t

beatorum

canonizatione

,

dans

d.,

Opera

mnia

III,

app.

V, Prato,

840,

p.

662-693,

t

dans

W.

Gnandt, ita . Cleridoniaeirginis,. Laurentiinachoretaeecnont erviDeiHippolytiugnettionachiInnsbruck,902,p. 7-99d'où'ai citéous aforme

abrégée

Procès)

les

Acta anctorumAoût

II,

pp.

304-308,

n

publient

eulement

quelques

xtraits.

ur

Laurent,

oir .

Cignitti,

Lorenzo

oricato

,

dans

S,

VIII,

Rome,

966,

ol. 136-141et

surtout

.

Vauchez,

a

Sainteté...,

p.

cit.,

d indi-

cem.

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TERREURS

T

TOURMENTS

15

sont

des

figures

mportantes

comme

'abbé de

Subiaco et le

prieur

du Sacro

Speco.

Ils

précisent

es faitset

gestes

du

candidat à la

sain-

teté,

ses

déplacements

dans le

territoire e

Subiaco

contrôlé

par

l'abbaye,

son

séjour

à

Sant'Angelo

in

Balzis

;

ils

apportent

de nou-

veaux

témoignages

oncernant on

bref

éjour

au

monastère e

sainte

Scholastique,

son

départ

«

négocié

»

pour

la

grotte

de

Morrabotte

ils

confirment nfin

en tant

que

témoins

oculaires ses

pénitences

t

l'appareil qui

en était

'instrument.ls

précisent

insi un

choix érémi-

tique,

soutenu

matériellementt

religieusement

ar

le

complexe

béné-

dictin

t

plus

particulièrement

ar

la

communauté u

Sacro

Speco13.

La diversité es formesde vie érémitiques ui constellenta val-

lée de Subiaco nous amène à des

considérations 'ordre

plus général

qui,

au-delà de la culture

chrétienne,

ouchent ux

problèmes

exis-

tentiels,

nthropologiques,

ociaux. Je

voudrais

proposer

ci

quelques

réflexions ur le choix

religieux,

ur

la

gestionpersonnelle

e la sain-

teté

-

corps

et âme

-

,

sur les relations

ociales

et

institutionnelles,

à l'intérieur u

paramètre

éminin/masculin.e

«

couple

»

Chelidonia-

Laurent me

paraît adapté,

malgré

e

décalage

qui

les

sépare

dans le

temps,parce qu'il

est en

rapport

vec le

même

complexe

monastique.

Isolement et insertion

«

Elle

s'éloigne

furtivement...n retirant

es délices du

monde

le

pied qu'elle

n'avait

pourtant amais posé

dans

le

monde

»,

raconte

la Vita de Chelidonia. Dans le lieu

choisi,

«

elle ne trouva

pas

un

palais,

œuvre de

maçons

ou de

charpentiers.

lle ne

choisit

pas

non

plus

une

grotte

britée des

vents,

de

la

pluie,

du froidet de la

brû-

lure du

soleil,

comme on en trouve isément

ans les

montagnes.

lle

préféra

une caverne

exposée

aux

vents,

à l'eau et au

froid,

ouverte

aux

ours,

aux

sangliers

t aux autres

bêtes

sauvages,

une

habitation

creusée

à la

base

et au

sommet,

hérissée

de

pointesbroussailleuses,fendue de fissures profondes et tailladée de rigoles creuses et

aiguës

»14. La

description

met l'accent sur le contact avec la

nature

comme

état

pénitentiel riginel.

eules les

«

terreurs octurnes sem-

blent

échapper

à la dimension naturelleet

évoquent

la

projection

d'angoisses

intérieures

en

effet, ussitôt,

parmi

es

inspirateurs

es

terreurs

octurnes

pparaît

le diable.

Le monde naturelest

ici

décritcomme

un monde

inhospitalier,

dangereuxpour

le

corps

et

pour

l'âme

et,

par

même,

nstrument

de sainteté.Les bêtes féroces ouvent

évoquées

éveillent

une double

peur

celle

de la nature

nimée,

et celle du

péché.

«

Pendant a

nuit,

elle était souvent erroriséear

le hurlement

es loups, le grognement

13. Procès

op.

cit.,

pp.

92-96.

14.

Vita,

p.

cit.,

pp.

24-25.

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16

S.

BOESCHGAJANO

des

ours,

le

grommèlement

es

sangliers,

e

glapissement

es

renards,

les clameurs

des autres bêtes

sauvages.

Parfois c'était l'ennemi anti-

que,

le

démon,

qui prenait

'aspect

d'un animal ou la voix d'un

oiseau,

pour

tenter

'interrompre

es

prières

t de

la

terroriser,

spérant

insi

tuer cette

servante de

Dieu »15.

Tapage

des

démons,

silence

des

anges

«

...ils

s'agitent

t

se

déguisent

t créent e trouble... ils font

entendre

es

bruits,

es

éclats,

des

rires,

es sifflements

,

disait saint

Antoine,

e

grand

maître de la

lutte contre es

démons16.Forte de

son

exemple,

oute

'hagiographie

emplit

e

hurlements

émoniaques

la vie des saints. Même Benoît

n'y

avait

pas échappé,

et

notre

hagio-

graphene manquait certespas de modèles17.

«

Après

e vacarmedes bêtes

féroces,

es

voix

mélodieuses

t dou-

ces s'élevaient

pour

bénir

et louer Dieu.

»

Le silence

aussi fait

peur

quand

cessent es clameurs

ommencent onc les

chants

ngéliques ui

signalent

n nouveau

rapport

vec

le

surnaturel. u fluxmontant

es

prières

e l'ermite

épond

e fluxdescendant

e

la

grâce

de

Dieu,

qui

s'exprimepar

les suaves ondes sonores. Commencent

lors,

et seule-

ment

lors,

les

rapports

ociaux

le

rapport

vec le

surnaturel evient

manifeste.

Une sainteté onstruite

ar

et dans la

nature,

on la

perçoit

une

fois

de

plus

au momentde la

mort

«

Tandis

que s'approchait

a

fin

de la

sainte

vierge

Cleri-

dona une lumière éleste 'éleva

de

sa caverne

usqu'au

ciel,

de

cette

grotte

ont nous

avons

parlé

tant de

fois sans

pouvoir

ui

donner e nom de

cellule,

parce qu'on

ne

peut

appeler

cellule

un lieu

dénué de

protection,

xposé

aux

vents et aux

pluies.

Il

apparut

donc une immense t

indescriptible

plendeur

de flam-

beaux

invisibles,

t l'éclat était si intense

que

du

soir

jusqu'à

minuit dans tout le

territoire,

ar

tout le

pays

et

par

toute

l'abbaye

on

pouvait

marcher u

grand

our

comme

dans

la

plé-

nitudede

l'aurore, uste

avant

que

ne

se lève e soleil. Une

foule

innombrable e personnes uttémoinde ce fait... 'embrasement

qui

s'élevait du

lieu où la

céleste

vierge

s'était endormie

dans

le

Seigneur

'étendait

toujours

et

était

devenu si immense

que

non

seulementes

régions

nvironnantes,

ais

presque

e

monde

entiervit clairement t manifestemente

faisceau

enflammé e

ces

splendides

umières acrées. Ne

croyez

pas que

ce

spectacle

15.

bid.,

pp.

38-45.

16.

Vita ntonii

cap.

26 et28

je

cite

'après

'éditionVita

i Antonio

par

G. J.M.

Bartelink,

ansVite ei antiCh.Mohrmann

d., , Milan,

ondazione

Lorenzo alla, 974, p.60-61 t65-67.17.L'hagiographeappellexplicitementeaucoupe modèlesJean aptiste,

Antoine,aul,

Onuphre,

enoît).

'influencees

Dialogues

e

Grégoire

e

Grand,

p.

cit.

st videntecf.

S. Boesch

ajano,

Chelidonia

op.

cit.,

hap.

II

et

«

Demoni

e miracoliei

Dialogi

i

Gregorio agno

,

dans

Hagiographie

culturest société

iv-xii*

iècles, aris, 981,

p.

263-280.

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TERREURS

T

TOURMENTS

17

dura un

court nstant

our disparaître

n

un

clin

d'oeil,

comme

le

rayon

umineux

ue

vit

saint

Benoît à la mort de

saint Ger-

main,

évêque

de

Capoue.

Il

dura

au

contraire

usqu'à

minuit

de ce

jour-là

et tout le

monde le vit

alentour,

comme

e

l'ai

entendudire de

mes

propres

oreilles

en

présence

du saint

pon-

tife

Eugène

qui

demeurait lors à

Segni

».

Cette

splendeur

onstitue

a

«

canonisation de Chelidonia18

la

nature

promouvait

a saintetédans

la vie et

dans la mort.

Pour Laurent 'Encuirassé e choix

pénitentiel

st

«

provoqué

»,

c'est-à-dire u'il vient en expiationd'un homicide nvolontaire la

pénitence

révoit

ans

un

premier emps

un

pèlerinage

Saint-Jacques-

de-Compostelle,

t ensuite a retraite

rémitique

ans

le

Sublacense,

d'abord à

Sant'Angelo, puis

à Morrabotte au-dessus de la

grotte

de saint

Benoît

»,

comme raconte le

premier

émoin au

procès

de

canonisation,

e miles

sublacensis

Maginardo.

La

pénitence

ci

utilise

une machine

complexe

conçue

pour

la torture

u

corps.

Les

instru-

ments

e

pénitence

omprennent

a cuirasse

de

fer,

achée

sous

le

vête-

ment,

des cercles

de feraux

jambes,

au cou et aux

bras,

et une lame

de fer sur

la

tête,

reliée à

d'autres

lames

munies

de clous

qui

attei-

gnent

es

tempes,

a

nuque,

le menton et le nez19.

La description e ces instrumentse pénitence st le thèmepri-

vilégié

u

procès

de

canonisation,

t les

témoignages,

uivant e schéma

proposé

par

les

questionnaires,

onfirmenta

première

escription

u

ajoutent

des détails20.

n

est

frappé

par

l'attention

ortée

à la maté-

rialité

de

ces

objets. Sujet

à

l'usure,

nécessitant

e

fréquentes épara-

tions,

'attirail

de

pénitence

e

trouvedoté

d'une

identité

lui,

même

lorsqu'il

est

éloigné

du

corps

du saint21.

l

a

acquis

au contact du

corps

qu'il

contribuait sanctifier

ne sacralité

propre

et un

pouvoir

thaumaturgique

2

.

La

pénitence

e Laurent

ne consiste

pas

à

résister ux dures con-

ditions

naturelles ans

lesquelles

l

a choisi de

vivre,

mais à

s'impo-servolontairementes torturesorporellesu moyend'un équipement

complexe.

Le choix de Laurent st

donc contradictoire

il

exclut 'iso-

lement,

uisque

e

corps

mmobilisé

ans son

habillage

métallique

xige

des soins

et une assistance continuels

t les instrumentsréés

pour

la mortification

e la chair doivent

être entretenus

our

fonctionner

correctement.

Mais

tout choix

érémitique

st ambivalent

le

désir

de

s'isoler

porte toujours

en soi visibilité t

volonté de démonstration.

es cas

18. Vita

op.

cit.,

p.

52-59 la

description

récise

e a morttde a

manifesta-

tionnaturelleui 'accompagne

e trouve ans a dernière

ectio.

19. Procèsop. cit.,pp.68-69.

20. Procès

op.

cit.,

assim,

oir urtout

p.

92-93,

f. esobservationsAndré

Vauchez,

a

sainteté...,

p.

cit.,

n

particulier.

385.

21.

Procès,

p.

cit.,

pp.

75-76.

22.

bid.,

p.

88.

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18

S.

BOESCHGAJANO

étudiés ci confirment

a

règle,

mais sur

des modes

différents,

omme

nous allons

le voir.

Les

réseaux

relationnels

Le caractère

xceptionnel

e la vie

érémitique

xerce un attrait

qui apparaît

comme

une constante

e

l'hagiographie

sous toutes ses

formes érémitisme

ascine,

u'il

s'agisse

de

saint

Antoine,

des saints

de la

Thébaïde,

des saints

stylites

es déserts

de

Palestine

et

de

Syrieou des ermitesurbains qui commencent faire leur apparitionau

XIe

iècle.

Les fidèles

ffluent

utour

des

ermites,

ls souhaitent ui-

vre eur

exemple

ou

simplement

emander eur aide. Des communau-

tés entières 'en

remettent

leur

prestige pirituel

t à

leurs

pouvoirs

thaumaturgiques, our

trouver

guide

et

protection23.

i la

typologie

érémitique

st

pour

l'essentiel

omogène,

l

reste

ependant

es

varian-

tes en

ce

qui

concerne e

public

et les

bénéficiaires,

es

temps

et

les

modalitésde

l'échange,

es

formes e

médiation

parfois

en

cercles

concentriques

entre e saint

et son

environnement,

ompris

dans

le sens

géographique

et

humain.

Dans la Vita de Chelidonia e rapport vec le surnaturelmarque

la

première

manifestation es

pouvoirs thaumaturgiques24.

ommes

et

femmes

ommencent se

rendre u lieu où

s'est

retirée a

sainte,

avec leurs enfants.

Ainsi l'abandon

du monde conduit à l'instaura-

tion d'un nouveau

rapport

ocial,

plus

intense,

vec les hommes.Dans

le

cas

de

Chelidonia,

le

rapport

avec les

populations

environnantes

consiste d'abord à recevoir

l'ermite

reçoit

de ses visiteurs e

quoi

survivre.

lle ne se restaurait

n effet

ue lorsqu'on

lui

apportait

de

l'eau et

de

la

nourriture,

e

qui

arrivait

e

manière

rrégulière,

e sorte

que

l'hiver,

uand

la

neige

rendaitdifficile'accès à la

montagne,

lle

pouvait

rester

usqu'à quinze jours

sans se

nourrir.

À

l'acte de rece-

voirsuccède- dans la scansionnarrative le don en retour « elle

restaurait on

corps

avec ce

qu'on

lui offrait

t,

une

fois

qu'elle

avait

repris

des

forces,

elle redonnait

out

ce

qui

restaitde

boisson

et

de

nourriture ceux

qui

les

lui avaient

apportées,pour qu'ils

les redis-

tribuent ux

pauvres,

ou alors

elle le

gardait

pour

l'offrir

lle-même

aux

pauvres qui

avaient l'habitude

de venir

auprès

d'elle

».

Un cir-

cuit de biens matériels la

nourriture

st offerte l'ermite

pour

la

sustenter ce

qu'elle

n'a

pas

consommé retourne ux

pauvres

par

l'effetde sa charité.

La sainte devient insi la médiatrice e ces

rap-

23. Dans e volumeonsacréPérémitismetcomportantnebibliographie,l

suffite

renvoyer

ux auteurs

ui

sontdésormaises

classiques

É.

Patlagean,

P.

Brown,

.

Vauchez.

24. La reference

ndispensable

ur e

theme

st

oujours

.

Flusin,

Miraclet

hiérarchie

,

dans

Hagiographie

culturest société

op.

cit.

pp.

299-317.

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TERREURS T

TOURMENTS

19

ports,

celle

qui reçoit

et redistribue'élément

premier

e

subsistance,

helemosinarum elemosinatrix25

Or ce circuit

tranquille

dmet des

«

variantes . On

devine

en

arrière-plan

a

présence

de

seigneurs ui,

désireux

d'entrer n

contact

avec la

sainteté,

aissentdes traces concrètes e

leurs

faveurs,

notam-

menten

constituant n

petitpatrimoine

oncier

our

la

construction

du monastère ur le lieu où avait

vécu

la

sainte26.

l

existeaussi

des

médiateurs involontaires

;

nombreux ont ceux

qui

se rendent

la Morra des Monts Simbruini

ontre eur

propre gré,

les

serviteurs

par exemple.

Ces

derniers ont

parfois

tentés de

garder

pour

eux-

mêmes a nourriture estinée la sainte,en espérant a mangerau

retour.Mais ils

apprennent

a

peur quand

l'un

d'eux,

démasqué par

l'esprit

clairvoyant

e la

sainte,

retrouve e

poisson qu'il

avait

caché

mangé

aux vers et

gardé

par

des

serpents27.

ci le

modèle est bien

entendu aint

Benoît,

dont a

perception

distance tait

célébrée

dans

les

Dialogues

de

Grégoire

e Grand.

Mais les circuits

e

sont

pas

seulement

matériels

«

Les

hommes

comme

es

femmes ccouraient la

grotte

vec dévotion t

ils

y

con-

duisaient leurs enfants et d'autres

personnes

atteintesde

maladies

diverses.

Beaucoup,

eu

égard

à

leur

foi,

s'en retournaient

ains et

saufs,

après

avoir

reçu

la bénédiction e la

sainte.

Le

Seigneur...

a

opéré pour sa servante 'innombrablesmiracles . Le don de nourri-

ture entretenaitinsi une source de

thaumaturgie,

ussi

indispensable

que

la nourriture

edistribuéeux

pauvres

pour

la surviedes

person-

nes

et de la communauté28.

En ce

qui

concerne aurent

'Encuirassé

Morrabotte,

n ne

peut

pas

vraiment

arler

de

solitude

puisqu'il

était constamment

ssisté

par

les moines

et

les

disciples.

Et le modèle

érémitique révoit

ôt ou

tard

le

«

dévoilement

,

qui, d'après

de

nombreux

émoins,

rriva ci

peu

de

jours

après

l'installation e Laurent dans la

grotte,

uand

les ber-

gers qui

le nourrissaient évélèrent a

présence.

Les habitants

de

Subiaco

et des environs

ne

tardèrent

as

à

accourir,

tout à la

fois

bienfaiteurs ar l'offrandede nourrituret bénéficiaires es grâces

obtenues29.

Nous savons aussi

que

Laurent avait des

disciples, peu

nombreux

mais

stables,

qui

furent ités comme témoinsde la

sain-

25. Vita

op.

cit.,

pp.

28-33.

26. Les documentse

Subiaco ont onservés

la

bibliothèque

u

monastère

e

Sainte

cholastique.

utre'inventaire

nalytique

V.

Frederici,

La biblioteca

l'archivio

,

dans monasteri

i

Subiaco

II, Rome,

904,

p.

98

ss.,

l

faut onsulter

à la

bibliothèque

u

monastère'inventaireanuscrites

parchemins

oncernante

monastèree Sainte

leridona,

édigéar

sidore

e

Su en 1752. es

parchemins

es

plus

mportants

ont ités ans a note e mon rticle

onasteroloc.

it.,

p.

259-260

pour

ne

nalyseomplète

oirChelidonia

op.

cit.,

hap.

V.

27. Vitapp.30-33.28. Concernanta relationemmes-jeûne-nourriture,oir .Walker ynum,oly

Feast nd

Holy

ast.The

Religiousignificancef

Food oMedievalWomen

Berke-

ley/Los ngeles/Londres,

niversity

f California

ress,

987.

rad,

r.,

aris,

e

Cerf,

993.

29. Vita

p.

68.

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TERREURS

T

TOURMENTS

21

en rendant

grâce,

Laurent

eur adressa cette

prière

Je vous

prie,

mes

frères,

de ne

prendre

aucune

autre nourriture

aujourd'hui,

car en véritévous avez

reçu

les

dons

de Dieu.

Ayant pris

conscience

du

miracle,

ls s'en allèrent out

heureux,

en chantant

avec

dévotion

Te Deum

laudamus. Et

personne

n'eut besoin

de

boire

ni de

manger usqu'au

jour

suivant 35.

La conclusion

e la

procession pris

e

caractère 'un riteréservé

à

un

groupe

d'élus

qui

se nourrissent

es

«

dons de Dieu

»,

une nour-

riture

n soi

consacrée. Même s'il

n'y

a,

dans les

paroles

du

témoin,

aucune confusionavec l'Eucharistie, l n'en restepas moins que la

nature

des aliments le

pain

et le

vin

-

et la forme e leur

«

sacra-

lisation

»

-

une sorte de

consécration

par

la

prière

de Laurent

-

renvoient

u rite

eucharistique.

C'est ainsi

que

l'élite des fidèles

dut

percevoir

e

«

surcroît

de

grâce ajouté

au bénéfice ommun de la

procession36.

uant

aux

bergers,

ls

reçoivent

eulement es restesde

la nourriture.

insi les

premiers

émoins

t

les révélateurs

e la sain-

teté

de l'ermite sont

réduits

à une

présence

muette et

passive,

ils

deviennent

e

simples

bénéficiaires

e sa charité

matérielle,

andis

que

les

avantages pirituels

e cettenourriture

emblent éservés un

petit

nombre de

privilégiés.

On peut parlerd'une fonction ara-institutionnelle.es rapports

de Laurent

avec les fidèles ont

en effet odifiés.

Généreux

nvers es

pauvres,

l

détestait

'avarice au

point

de chasserun

disciple

du nom

d'Amato,

qui

s'était

rendu

coupable

d'avoir osé

«

demander

t rece-

voir

de ceux

qui

venaientà

la

grotte

plus que

la

quantité prescrite

par

Laurent

»37. Peut-être

'agit-il

d'une

petite

dîme,

une offrande

obligatoire

onsidérée

omme

e

«

prix

»

des

bénéficesmatériels

t

spi-

rituels ollicités

par

les

fidèles

Mais

c'est surtout

e rituel es

pénitencesmposées

pour

la

rémis-

sion

des

péchés

inscrits

ans le

corps

par

la maladie

qui

met en évi-

dence

la dimension

cclésiastique

de l'activité

de Laurent. On

peutmêmeparlerd'une véritablenteraction vec les fonctions u clergé

le

péché

d'adultère,

par

exemple,

semble

exiger

d'abord

une

expia-

tion

corporelle,

ous

forme

e maladie. Puis le

pécheur

ppelle

e

prê-

tre et se

rend avec

lui à

l'église

Sant'Andrea

de Subiaco

;

il

se

con-

fesse

au

pied

du Crucifix

t

reçoit

du

prêtre

e sacrement

e la

péni-

tence,

de

Dieu

la

grâce

en même

temps que

la

guérison.

l

retourne

auprès

du

saint

ermite

ui

lui

explique

ce

qui

s'est

passé38.

La con-

cession

de la

guérison

de la

part

de

Laurent

prévoit

ouvent

un rituel

pénitentiel

le

pécheur

doit allumer

des

ciergespour

la

Chandeleur

et assurer

a subsistance

e

trois, ix,

ou douze

pauvres,

u bien cons-

35. bid.,p. 77.

36. Sur a

pratique

ucharistique

u

Moyen ge,

oir a belle tude e M.

Rubin,

Corpus

hristi

Cambridge

niversity

ress,

991.

37.

Procès

op.

cit.,

p.

70.

38.

bid.,

p.

75.

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22

S. BOESCHGAJANO

truire ne

église39.

e

geste thaumaturgique

uit

souvent

a

symboli-

que

et la

gestuelle cclésiastiques

le

signe

de

la

croix est

l'intermé-

diaireentre

e

pouvoir ui

résidedans les membres u saintet la

mala-

die

qui

réside dans les membres

u fidèle. Et l'on

peut

dire a

même

chose des

prières

onservées

ans

un

Liber orationum écrit u

moins

en

partie par

le même Laurent40.

Rappelons

enfin a

complémenta-

rité

avec le

clergé

et les

moines,

médiateurs onstants ntre e

corps

malade et le

corps

saint

dans la vie et

dans

la

mort.

C'est

le

choix d'une formed'érémitisme

protégé

,

si l'on

peut

dire,

organiquement

nsérédans

un contexte

ommunautaire. vec

des

échanges le sanctuairebénédictin agneen sacralité t en prestige

l'ermite énéficie e soins

physiques

t son

pouvoir

pirituel

st

assisté.

«

La

sainteté

érémitique

st

probablement

elle

qui

au

Moyen

Âge

a recueilli e maximum 'adhésion

spontanée

de

la

part

des fidèles

,

disait

à

juste

titre André Vauchez41. Mais

c'est une sainteté aux

aspects multiples.

ans le cas

de Laurent

'Encuirassé,

lle

s'est cons-

truite vec le

concours

d'«

acteurs

divers,

mais la dévotion

des fidè-

les

y

apparaît plus

«

orientée

que

spontanément xprimée.

Et,

jus-

tement,

'il lui

manqua

un culte

officiel,

l

lui

manqua

aussi un

culte

populaire

il

faut attendre e

xvnie

siècle

pour que

son

corps

soit

transféré

u

Sacro

Speco.

Mais

cette

remarque

ne

prend

sens

que

replacéedans le contexte es cultesde la vallée de Subiaco et compa-

rée

en

particulier

u

cas

de Chelidonia.

La

saintetéde Chelidonia s'est construite

n

dehors de

tout

rap-

port

avec

l'institution.

lle n'eut

pas

besoin

de

moines

ni

de

clercs

pour appuyer

son

choix,

ni

pour

servirde

médiateurs

ntre elle

et

ses fidèles.

Il

suffitde

comparer

es deux

morts

la

mort

solitaire

de Chelidonia émeut a

nature

en une

immense

plendeur ui

atteste

sa sainteté Laurent

meurtveillé

par

ses

disciples

et tout

un entou-

rage

son

corps

est

ongtemps ardé

avant d'être

enseveli,

omme

pour

prouver

son efficacité

thaumaturgique

et

pour

en

solliciter

la

reconnaissance42.

'hagiographe

de la

sainte n'intervient

ue pourconfirmer ne saintetérendue évidentepar un phénomènenaturel

mais

cette sanction

mplique

un intérêt

our

la

dépouille

mortelle e

l'ermite,

disons

plutôt,

a nécessitéde

récupérer

es

reliques,

afin de

leur rendreun culte officiel l'intérieur e

l'espace

monastique.

Le récit de la

première

ranslation,

e

lendemainde

la mort de

la

sainte,

met

en

lumière

e contraste ntredeux

expressions

u senti-

ment

religieux

aux

exigences

du

monastère

'oppose

un

sentiment

diffus

ue je

dirais

«

populaire

,

dans

l'acception

ulturelle u

terme,

devant

lequel

le

puissant

monastère

e

voit contraint e céder.

Les

39. bid.,pp.72-73,4.40. Le manuscritst onservéu Sacro peco t l a été dité arW.Gnandt,

Liber rationumeati aurentiioricati onachi

ublacensis

Paderborn,

902 il

mérite

ne

nalyse

lus pprofondie.

41. A.

Vauchez,

a

sainteté...,

p.

cit.,

p.

384.

42.

Procès

op.

cit.,

pp.

85 et 86.

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TERREURS

T

TOURMENTS 23

intempéries ui

ne cessentde dévaster es récoltes ont unanimement

interprétées

omme

e

signe

d'une volonté

upérieure.

our

que

la

capi-

tulation

n'apparaisse

pas

comme une défaite

cuisante,

'hagiographe

place

dans la bouche même de la

sainte,

apparue

en rêve

à un

prê-

tre,

a volonté

que

son

corps

ne soit

pas

soustrait

la

montagne,

u

site naturel

de son

séjour

terrestre43.

La

victoire

populaire

»

sera

de

longue

durée,

puisqu'il

faudra

attendre

e milieu du

XVIe

iècle

et

l'application

des normes

mposées

par

le

Concile de Trente

pour

que

l'institution

monastique récupère

définitivement

e

corps

de

Chelidonia,

pour

le soustraire

nfinà un

culte incontrôlé, araliturgique, t non exemptde formesdéviantes,

comme

le laisse

entendre

'historiographie

u Sublacense44.

Entre-

temps,

un monastère éminin

vait

été édifié

à la

Morra

Feronia,

le

corps

de l'ermite ontinuait

'exercer

a virtus

haumaturgique,

et honneur

vait été rendu

à la

sainte

en la faisant

représenter

ans

le Sacro

Speco

inscrite n

pied

dans une mandorle

de

pierre,

evêtue

de l'habit

monastique

vec une auréole

bien visible

utour de la

tête

«

Cleridona

»

avait ainsi

trouvé

une

place

à l'intérieur e

l'espace

monastique,

les fidèles

pouvaient

venir

a

vénérer45.Mais seule-

menten

effigie,

ar son

corps

était

toujours

à-haut,

dans

la

monta-

gne,

objet

d'une

vénération

ui

faisait

d'elle

la

bienfaisante

rotec-

tricede toute a vallée et du Castrum e Subiaco, du haut de ce lieu

septentrional

se

dressent e hauts rochers

n

pierre

dure

»,

un

lieu

d'accès

difficile

ui,

«

s'il réduisait

es

visites,

n'empêchaitpas

pour

autant la

profonde

et extraordinaire

évotion

pietas) que

lui

vouaient les

habitants ̂ .

Un

homme et

une

femme,

eux

rapports

vec

la nature

et aussi

avec l'institution.

Traduit

de

l'italien

par

Lada

Hordynsky-Caillat

t Odile Redon

43.

Vita,

p.

cit.

pp.

46-55.

44.

«

Translatio

. Chelidoniae

irginis

,

dans Acta

SanctorumOct.

VI,

pp.

369-377.

l

s'agit

u

compte

endu

officielde a

translation

pérée

n 1578

l'attribution

Capisacchi

st rronée

comme

ussi

ans e cas

de a Vita

;

il

est u

contraireauteur

'une utre

édactionnsérée

ans on

«

Chroniconublacense

,

manuscrit

Bibliothèque

e Sainte

cholastique),

°

166r°-175r°.

45.

L

image

ait

artie

u

cycle

e a

fin u

xme

iecle

eint arMagister

onxo-

lus et sonatelier omainpour nedescriptionoirM. L. Cristiani esti, Gli

affreschi

elSacro

peco

,

dans monasterienedettini

i Subiaco

Milan,

ilvana

Ed.,

1982,

n

particulier

p.

120-132.

46. Translatio

op.

cit.,

p.

369.Ce

texte st

Fobjet

une

nalyse

u

chap.

VI

de Chelidonia

op.

cit.

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Médiévales8,printemps995, p.25-40

Catherine SANTSCHI

LA

SOLITUDE DES ERMITES.

ENQUÊTE EN MILIEU ALPIN

Parler de la solitude des

ermites,

u

XXe

iècle,

c est

d abord et

surtout

interroger

ur le sens des mots le

premier

ens du

mot

«

solitude

qui

figure

dans les

dictionnaires

modernes,

depuis

le

XIXe

iècle,

c est-à-dire ussi le

premier

ens

qui

vient à notre

esprit,

est

«

état d une

personne

qui

est seule ». Or

les Pères

du

Désert en

grec,JeanCassien, saint Benoît et les auteursmédiévaux n latin,et

même,

en

français,

es

spirituels

u XVIIe iècle tels Raneé ou les Soli-

taires de

Port-Royal,

ne l entendaient

as

de

cette oreille. Pour

eux,

une solitude est d abord

un

désert,

non

pas

un lieu

il

n y

a

per-

sonne,

mais

un lieu situé hors du

monde,

de la vie et de la hiérarchie

sociale,

un

lieu où

les

«

valeurs

du monde

-

pouvoir,

rgent,

iens

sociaux

de toutes ortes n ont

plus

cours

et font

place

à Dieu

seul.

Ainsi,

pour

en rester ux textes

lpins qui

font

objet

de notre

étude,

e mot solitudo a notamment

e

sens de

«

désert ou

paysage

dévasté

dans la Vita Severini

d Eugippe1.

Dans

la Vita

Columbani

abbatis

discipulorumque

ius

de

Jonas de

Bobbio,

les

termes

e here-

mus et de solitudo sont employés ndifféremmentour désigner e

désert ou des lieux

difficilementccessibles2. Dans la Vie de saint

Gall,

rédigée

u début

du

IXe

iècle

par

Wetti3,

ans la version

quel-

que peu

postérieure

e

Walahfrid

Strabon4,

dans

la

description

e

l Oberland

zuricois contenue dans

la Vie

de saint

Meinrad5,

e

mot

solitudo

aussi

le sens de

«

désert

. De

même,

deux siècles

plus

tard,

dans les

Coutumes de Chartreusede

Guigues

Ier6.

1.

Eugippe,

ie

de saint éverin

introduction,

exte

atin, raduction,

otes t

index

ar

Ph.

Régerat, aris, 991,Mémoire,L,

5

et

XLIV,

2.

2.

Jonas

e

Bobbio,

itae olumbanibbatis

iscipulorumque

ius lib.

,

11,

Br.

Krusch

d.,

dans

MGH,

S rer.

merov.,

.

IV,

Hanovre/Leipzig,

902,

p.

76-77.

3. Wetti, e Vita eatiGalli § 28 B.Kruschd., bid.p. 266).

4. Vita eatiGalli

uctore

Walahfr/do,

10

B.

Krusch

d.,

bid.

p. 272).

5.

AASSy

anv.

,

p.

382,

ol.

2.

6.

Guigues

er,

outumese

Chartreuse

introduction,

exte

ritique,

raduction

et notes

ar

un

Chartreux,aris,

984,

VII, 4,

p.

268.

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26

C. SANTSCHI

Un

désert aussi rebutant

ue possible

Ce

désert,

quel

est-il

Il doit

d abord être

rebutant

pour

le

monde,

pour

les séculiers.Non

seulement

Termite,

mais le

paysage

lui-même

doivent être mortifiés.Jean

Cassien

décrit

par exemple

e

territoiree

Panephysis,

n

Égypte,

utrefois

rospère

t

fécond,

puis

inondé

d eau

salée,

quelques

les

permettent

des

solitaires e

vivre

en

ermites7.

l

parle

ailleurs

de

l amertume

u

sable8. Sur le

modèle

de la

Palestine,

Élie,

puis Jean-Baptiste

e retirèrent

our

mener

une vie

ascétique

et

prophétique,

e

désert

des Pères du

Désert

est

chaud, aride, on peut y vivrepratiquement u. Les anachorètes ui

y

demeurent,

t

qui

exposent

Germain t à

son

compagnon

es con-

ditions d une bonne vie

érémitique,

ont

bien

conscients

ue

le cli-

mat

froid,

glacé

»,

des

pays alpins

ou de

l Europe

du

Nord

néces-

site un autre

type

de vêtement9.

Les déserts

lpins,

colonisés

par

saint

Séverin,

aint

Antoine

de

Lérins,

saint

Colomban,

saint Gali

et

leurs

successeurs

uisses,

tyro-

liens ou

provençaux

ont couverts

de

forêts,

l on rencontre

es

bêtes

sauvages

-

du

restefaciles

apprivoiser

,

de rochers t

aussi

de

ruines.Ce ne

sont

pas

forcément

es lieux

l homme n a

jamais

posé

le

pied.

Ainsi,

Colomban s installe à

Annegray

ans

«

un

vaste

désert nomméVosges, où se trouvaitun poste militaire n ruines

depuis ongtemps

,

encombré e

rochers,

ù

il

jeûne

jusqu à

en

être

physiquement

ffaibli,

ivantde la

parole

de Dieu

et de

l apport

mira-

culeux

de

vivres10.

À

environ huit milles

de là

se trouve un

autre

poste

militaire,

rès bien

construit,

vec une

source

d eau

chaude et

de

beaux

bâtiments,

ui

deviendra e

monastère e

Luxeuil.

C est aussi

un ancien

lieu de culte

païen, qui

n est

plus

alors

fréquenté ue

par

les bêtes

sauvages11.

À

Bregenz,

Colomban

et ses

compagnons

vivent

uelque

temps12,

Bobbio

dans les

Apennins,

il

construit

le

monastère

dans

lequel

il

mourra,

on

note

également

a

présence

de

ruines13.

En revanche, e désertde Saint-Gall,au bord de la Steinach,à

neuf

heuresde marche

de la citadelle

romaine

d Arbon

(Arbor

Felix),

est

totalement

auvage.

Neuf

heures,

c est en

effet e

temps

néces-

7.

Jean

assien,

onférences

XI, 3,

ntroduction,

exte

atin,

raductiont

notes

par

Dom

E.

Pichery,

aris, 955-1959,

.

II,

pp.

102-103.

8.

Ibid.,

XXIV,

(éd.

cit.,

.

Ill,

p. 173).

9.

Ibid.,

XXIV,

(éd.

cit.,

.

Ill,

pp. 178-179).

10. Jonas e

Bobbio,

itae

olumbanibbat

s

discipuiorumque

ius

I,

6-7

éd.

cit.,

pp.

12-1

trad,

rançaise

ar

A. de

Vogüé,

Jonas e

Bobbio,

Viede

saint

Colomban

t

de ses

disciplesAbbaye

e

Bellefontaine,

988,

p. 112-113).

11. bid. I, 10 éd.cit., . 76; traductionrançaise,. 119).12. La VitaGalli e Walahfridtrabon§§5-6) arle un ocus ntiquaetruc-

ture,

ervons

nteruinas

estigia

un ncien

ratoire,

édié

sainte

urèlie,

y

rouve

déjà éd.

cit.,

pp. 288-289)

cf. versione

Wetti,§ 5-6,

bid..

pp.

260-261.

13. Jonas e

Bobbio,

itae olumbaniib.

,

30

éd.

cit.,

pp.

106-107

trad,

française,

. 166).

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LA

SOLITUDE

DES ERMITES 27

saire

pour parcourir

une distance

de dix

kilomètres,

orsqu il n y

a

aucun

chemin,

ucune

piste,

si rudimentaireoit-elle.Ce désert

here-

mus)

est

«

âpre

et

humide,

l

a de hautes

montagnes

t

diversesbêtes

sauvages,

de très

nombreux

urs,

des

troupeaux

de

loups

et de

san-

gliers

14.

Mais

pour que

le

roi

Sigebertpuisse

conférer Gali

et à

ses successeurs

de

l abbaye

des

immunités

t

des

privilèges,

omme

il

le

fera

plus

tard,

n est-il

pas

nécessaire

que

ce lieu soit un

désert

intégral,

u il

n appartienne personne,

t soit

donc

possessio publici

juris

15

?

Quant

aux

Pères

du

Jura,

on admet

généralement

u ils

se sont

installés u milieudu Ve iècledans un vallon désert t ont construit

des bâtiments

ui

deviendront

e

«

monastèrede

Romain

»

(Roma-

nům

monasterium)

6.

Mais les fouilles

archéologiques

conduites

depuis

1986

à

l emplacement

es anciens bâtiments

monastiques

ont

aussi

mis

au

jour

des structures

ntérieures,

ualifiées

de

«

gallo-

romaines

,

qui témoignent

un

habitat et d une activité rtisanale

en

ces lieux

avant l installation

de moines ou d ermites17.

De son

côté, Amé,

moine

à

Saint-Maurice

d Agaune

au début

du

VIIe

iècle,

recherchant

le secretd un désert

lus

désert

(maioris

heremi

ecretum

xpetens),

ne trouve rien de

mieux

que

de

se

réfu-

gier

sur

une

étroite

plateforme,

ans les falaises

qui

surplombent

l abbaye, où il n y a mêmepas d eau et où l on doit lui apporter

de

l abbaye

la boisson et

la nourriture mais un corbeau vole le

pain

et le diable renverse

a cruche18.

Là,

le

désert

est vraiment

minéral,

mais

Saint-Maurice st situé ur

e

passage

des

Alpes,

de

nom-

breux

pèlerins

y

arrêtent

t

saint

Amé

ne

restera

ue

trois ans sur

son

rocher.

Le

désert,

d abord l Oberland

zuricois,

e col de

l Etzel,

puis

le

plateau

où sera

construite

abbaye

d Einsiedeln,

saint

Meinrad se

retire u

milieu

du IXe

iècle,

après

avoir

quitté abbaye

de Reiche-

nau

pour

se

consacrer

la

prière,

st

décrit omme une

«

forêt

om-

bre

»,

un

lieu difficile accès19.

Mais

il

s y

trouve

déjà

des

religieux,peut-être es ermites, ui l aident à bâtir son ermitage, t diverses

14. VitaGalli version

e

Wetti,

10

éd.

cit.,

. 262)

Vita

eatiGalli uctore

Walahfrido

I,

30

éd.

cit.,

pp.

291-292).

15.

Expression

tiliséeans

a versione

Walahfndtrabon21

éd.

it.,

.

300)

Wetti,

Vita

alli

21

éd.

cit.,

.

268)

n est

as

ussi

xplicite

il

ne

parle

ue

d une

silva

oniunctarbonensi

ago.

16. L édition

écentee a

Vie

esPères

u

Jura

intro.,

exte

rit.,

exique,

rad,

etnotes

ar

Fr.

Martine, aris, 968,

p.

68-97,

envisage

ue

a fondatione Saint-

Claude,

maisRomainmôtier

très ien

u figurerarmi

es fondationsuscitées

ar

saint omain

cf.

pp.

258-259,

ote

).

17. Ph.

Jaton,

.

Eggenberger,

.

Sarott,

pud

D.

Weidmann,

Chronique

archéologique988,Revue istoriqueaudoiset.97, 1989,p.158-163tplanches« Chroniquerchéologique989, ibid.,.98,1990,p.132-134« Chroniquerchéo-

logique

990,

bid.,

.

99,

1991,

p.

178-181.

18. Vita anciiAmati

on/esso

is,

Br.Krusch

d.,

dansMG

,

SS rer.mero.

t.

V,

op.

cit.,

pp.

215-221.

19.

AASS,

Janv.

I,

p.

382,

ol.

2.

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28 C. SANTSCHI

personnes

haritables,

otamment es

femmes,

ui

lui

fournissent

es

vivres nécessaires.

À

partir

u

XIIe

iècle,

a

croissance

émographique

e

l Occident

-

qu avaient

connue

longtemps

uparavant

es désertsde

Palestine,

de

Syrie

et

d Égypte,

où les

Pères

se

multipliaient

change

es don-

nées et

la

définition u

désert.

Sans doute

reste-t-il es lieux

inacces-

sibles ou difficilementccessibles

en

1440,

un

ancien haut

fonction-

naire des salines de Hall

im

Tyrol,

Hans

Frankenfurter,

e

retire

comme ermite u fond d une

vallée,

à Sankt

Magdalena

im

Halltal,

paysage

désolé,

minéral,

u sommet

d une

route

trèsraide. Mais cette

route conduisait ussi aux minesde sel de Hall et, si les lieuxparais-

sent austères t le climat

peu hospitalier,

a

compagnie

de

ses

anciens

administrés u

subordonnés

ne devait

guère

manquer

à cet

ermite t

au

«

frèreHenri

»

qui

habitait

avec

lui et le

servait20.

Enfin

e

désert

du canton d Obwald où

se retira

Nicolas de

Flüe,

le Ranft

et

le vallon de la

Melchaa,

dont

l atmosphère

de

recueille-

ment t de

patriotisme

st encore

aujourd hui

préservée

ar

une sorte

de miracle

permanent,

estait

hysiquement

t

géographiquement

out

proche

du

monde,

puisque

l ermitage

et la

chapelle

Sainte-Marie-

Madeleine furent

onstruits ur les terres

patrimoniales

e

l ermite,

à

cinq

minutesde marcheà

peine

de

sa

maison natale et de

la mai-

son où demeuraienta femme t ses dix enfants.En outre, e Ranft

était

pratiquement

ur l une des routes de

pèlerinage

conduisant

d Allemagne

vers les

grands

sanctuaires u Midi

de la France

et de

Saint-Jacques-de-Compostelle.

e

témoignage

un

pèlerin,

Hans von

Waldheim,

qui

revenait n

1474

d une

visite

à

la

Sainte-Baumede

Saint-Maximint à

Marseille,

nous

apprend ue

ces

paysages

de

Suisse

centrale

gardaient,

même

pour

des

ascètes,

un

caractère

effrayant,

notamment e mont

Pilate,

avec les

légendes

et la

malédiction

qui

l entouraient. our arriver u

Ranft,

e

pèlerin

raverse a

gorge

du

Rotzloch,

eyn grusam

Hochgebirge

où on ne

voit âme

qui

vive.

Plus

loin, il décrit e site de l ermitage omme« un lieu sauvage au pieddes

alpes

[c est-à-dire

es

pâturages

de haute

montagne],

habité

par

les

chamois et les

bouquetins

.

Mais

il

remarque

aussi

que lorsque

l ermite

veut

se

vouer à la

contemplation,

l

s enfonce

tout seul

dans

la

forêt

sauvage21,

e

qui

laisse

supposer

que

l ermitage

tait

trop

20. Attesté

otamment

ar

unenote

iographique

ontemporaine

t

par

e

texte

de a

règle

e vie

omposéeour

esdeux

onfrèresn 1452

ar

e

cardinal

icolas

de

Cuse,

vêque

e Brixen

textesubliésar

Hermann

allauer,

«

Johannes

ran-

kenfurter

nd ieWaldbrüderstatutenes

Nikolaus

on

Kues.

Münchener

uellen

ber

Johannesrankenfurter

,

dansCusanus

edächtnisschrift.

m

Auftrag

er

Rechts-

und taatswissenschaftlichen

akultät

erUniversität

nnsbrück,

. Grass

d.,

nns-

brück/Munich,970, p.375-379).21.Témoignageublié arRoberturrer, ruderlaus. ie ältesten

uellen

über en

eligen

ikolaus

on

lüe sein

eben

nd

einen

influss

Samen,

917-1921,

t.

,

pp.

56-67

la

description

ar

e

doyen

Einsiedeln

lbrechton

Bonstetten,

ui

renditisite

Nicolase

31

décembre

478,

ait

ussi essortira

sauvagerie

u ieu

(ibid.,

p. 79-90).

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30 C. SANTSCHI

donc la vie en communauté omme une

école,

préparant

es anacho-

rètes

à la lutte

héroïque

contre e diable.

Du

reste,

l

faut

observer

n

passantque pour

saintBenoîtcomme

pour

le

Maître,

a mise à l écart

de la

communauté,

isolement

pro-

prement

it,

sont

une

punition

l encontre

des

moines

qui

ont déso-

béi ou

péché

et

refusent

e reconnaîtreeur

faute.

Ils

mangent épa-

rés des autres

et leur

disgrâce

est

contagieuse

ceux

qui

auraient e

malheur de se solidariser vec eux seraient

galement

retranchés e

la

communauté,

usqu à

ce

qu ils

viennent

résipiscence29.

e

péni-

tentiel

de

saint

Colomban

prévoit

ussi

l isolement,

dans une cellule

séparée, ommepunition ourles moinesqui ontpéchécontre humi-

lité30.

Mais

tous ces auteursécrivent

our

des

cénobites même si leur

monastère

st

une

étape préparatoire

l anachorétisme,

ls admettent

que

tous

ne

sont

pas capables

de

partir

eul au

combat,

ni

même

capa-

bles

de le

vouloir. Le

cas,

relaté

par

Jean

Cassien,

de

l abbé

Jean,

qui

a renoncé

l érémitisme,

ù

pourtant

l

semblait

ien

réussir,

our

rentrer ans la

vie

communautaire31,

st très

caractéristique

il

invo-

que

d abord

l humilité,

puis

la difficulté e

maîtriser es

problèmes

matériels,

ui

deviennent nvahissants

ar

la

multiplication

es ana-

chorètesdans son

secteur,

t

finalement e

poids

des

visites,

qui

le

détournent e la contemplation t du servicede Dieu seul.

Les ermites

vivent-ils raiment

euls ?

Plus

encore,

dans

sa

Regula

solitariorum

édigéepour

les

reclus

au

cours

du

IXe

siècle32,

éutilisée u

xve

siècle

par

des

groupes

de

béguines

de

la

région saint-galloise33,

rimlaïc

définit es

solitaires

non

pas par

un

style

de vie

individualiste,

mais essentiellement

ar

le

fait

qu ils

ont tout

quitté

dans le monde

pour

suivre e

Christ34.

Mais si tous sont des

solitarii dans les

styles

de

vie on

distingue escénobitesdes retrusi les reclus,qui vivent euls,à l écart de la com-

munauté.

29. La

Règle

u

Maîtreéd.

cit.,

XIII

41-48,

.

II,

pp.

40-43

La

Règle

e

Saint

enoîtéd.

cit., § 23-27,

.

II,

pp.

542

et suiv.

30.

Regula

oenobialis. Columbanibbats

O. Seebass

d.,

dans

eitschriftür

Kirchengeschichte

t.

XVII,1897,

.

223,

f.

Saint

Colomban,

ègles

t

pénitentiels

monastiques

A. de Vogüé

d. et

trad., ellefontaine,989,

.

124

Viemonastique,

20).

31. Jean

assien,

onférences

XIX,

2-5

(éd.

it.,

.

Ill,

pp. 39-43).

32.

Cette

ègle

st

mprimée

ans a

Patrologie

atinet.

103,

p.

573-664

nous

la citonscid aprèséditionu en réparemeMarie-Christinehartier,ousa direc-tion uprofesseur. Riché l Universitée ParisX-Nanterre,uia bien oulu ous

en

communiquer

n

manuscrit,

e dont ous a

remercions.

33.

Il

existe eux ersions anuscritesune

raduction

llemandeu

xve

iècle

de

cette

ègle

la

Bibliothèque

e

Abbaye

e

Saint-Gall,

ous escotes

30

t 931.

34.

Grimlaïc,

egula

olitariorum

chap.

et VII.

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LA SOLITUDEDES ERMITES

31

Seuls

ou

plutôt

en

petit

nombre car

Grimlaïc

fait aussi

men-

tion de

disciples

avec

lesquels

le reclus

communique35

il

évoque

la

présence

fréquente

d un autre

reclus,

qui pose

le

problème

du

silence36,

ur

lequel

nous

reviendrons.

urtout,

dans un

chapitre

rès

important,

ntitulé

Quod

numquam

minus

quam

duo

simul sint

soli

tarii

XVII),

il

insiste ur la

nécessité

d une

société,

sur les

dangers

de

l isolement,

e

l égoïsme

t du

librearbitre.

l

faut notamment

ue

les

solitaires

uissent

encourager

mutuellement

u

service

ivin,

qu il

y

ait entre eux

une émulation sans

point

de

comparaison,

e soli-

taire

peut

se

croire

rrivé u sommet

de la

perfection.

ans avertisse-

ment, il ne se rend pas compte de ses éventuellesdéviations.En

l absence de

toute

ociété,

l

n y

a

pas

d exercice

ossible

de la

patience

et de

la charité37.

Mais

alors,

si la solitude

présente

ant d inconvénients

t de dan-

gers

matériels t

psychiques,

ourquoi

la

choisir

Si

les vertushéroï-

ques

suscitent

orgueil

et la désobéissance

et tuent

humilité,

pour-

quoi

obéir à

une telle vocation

?

Des ermites

alpins

»

répondent.

Guigues

er

e Chartreux lôt

ses

Coutumes

en

exposant

es

motivations e ceux

qui

ont

choisi de

vivre

a

majeure partie

du

temps

euls

en

cellule,

ne

se réunissant

ue

pour

certains

ffices ivins.

Tous les

exemples ibliques

Isaac,

Jacob,

Moïse, Élie, Élisée, Jérémie, ean-Baptiste),euxdes Pèresdu Désert

(Paul,

Antoine,

Hilarión et même

Benoît,

pourtant

xé sur

la vie

en

communauté)

montrent

ue

Dieu

s est

révélé ses serviteurs

orsqu ils

étaient

seuls,

dans le secret

de leur

chambre,

oin du monde et du

bruit,

dans

un silence

propice

à la méditation t

à la

prière38.

Mais

pour

les

Chartreux,

olitude

n est

pas

isolement.S il

y

a

des actes

iturgiques

n

cellule,

n solo

ou à

deux,

essentiel

e l office

divin a

lieu évidemment

l église,

dans

l assemblée des moines.

Et

tout

est

prévu

pour

cultiver

esprit

de la

communauté,

obéissance

et

la charité

ntre es

frères.

Cela est

particulièrement

rappant

ans

les

usages

à

l égard

des frères

malades

ou

mourants,

ans la manière

dont ls sontaccompagnés usqu à la fin, t dans les consolations ro-

diguées

aux survivants

ui,

le

jour

de

l ensevelissement,

e sont

pas

tenus

de

garder

a

cellule,

mais

mangent

nsemble

au

réfectoire39.

35.

bid.,

hap.

XVI.

36. Si autem

uo n unum

uerint

olitari

,

icut

multisn ocis oscitur

sse sit

inter

os silentium

ngensquies

magna

t caritas

erfecta.

int utem

inguli

n

in-

gulis elluliseparatisedanimo tfide c caritatenseparabiliteronjunctiibid.).37. bid., hap.XVII la pluparte ces onsidérationsontmpruntéeslarègle

de

saint

asile,

ui

était

articulièrement

égativel égard

e la vie

érémitique.

38. Guigues

er,

Coutumes

e

Chartreuse

op.

cit., §

LXXX,

4

et

suiv.,

pp.

286-295.

39.

bid., §

XII-XIV,

p.

188-197.

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32

C.

SANTSCHI

Solitudes

contrariées

La

solitude

donc,

et

le

silence,

pour

voir

Dieu face à

face,

si

tant

est

que

cela

se

puisse.

À

toutes es

époques,

et de diversesmaniè-

res,

l expérience

été

tentée,

u

moins

temporairement.

xaminons

ici la

trajectoire

e

quelques

saints

alpins

et leur

rapport

à la soli-

tude et

à

la communauté.

Saint

Séverin

mort

en

482),

l apôtre

du

Norique,

fondateur

e

couvents,

homme d action et

d autorité,

d abord cherché

une

«

vie

plus parfaite

dans

«

un désert

d Orient

»

non identifié lui-même

refusait e s exprimer ur son passé40.Forcé par une vocationsupé-

rieure e se consacrer l assistance

t à

la direction

pirituelle

t même

politique

des

populations

du

Norique,

il

est

continuellementiraillé

entre es

exigences

des

peuples

et

des

princes qui

se confient

lui,

et son

goût

pour

la

solitude,

qui

ne se

satisfait

ue

de

courtes

retrai-

tes

à un mille environde son monastèrede

Fauianae41.

Il

est d ail-

leurs aussitôt ramené aux

dures

réalitésdu monde

par

la

réputation

de ses

vertus,

ui

attirent

isiteurs t

demandeursde

conseils.

Pour

compenser

ette vocation

manquée,

il

enseignera

ses

moines

com-

ment on renonce au monde

pour

suivre

exemple

des

saints

Pères,

sans

retour,

sans

regarder

n arrière42. est

l exemple qu il

aura

donné durant outesa vie au servicedes populationsdu Norique ter-

roriséeset malmenées

par

les

grandes

nvasions.

Un

de

ses

disciples,

aint

Antoine de

Lérins,

a suivi un chemin

différent,

ui

le conduit du cénobitisme

l anachorétisme,

uis

de

nouveau vers la vie communautaire.D abord moine

à

Fauianae>

il

se met

après

la mort de Séverin au service

de.

son oncle

Constans,

évêque

de Lorch

(dans

le

Wurtemberg),

t se

distingue ar

son

humi-

lité et

la

rigueur

e son

ascèse.

Après

la mortde

Constans,

l

quitte

le

Norique

désolé

par

les barbares

païens

pour

s établiren

Valtelline,

au bord du lac de Come. Un

prêtre

nommé

Marius,

voyant

es ver-

tus,

veut le

placer

à la tête d un

grouped ecclésiastiques.

Mais

lui,fuyant et honneurcomme une coupe empoisonnée,va s installer

l autre bout

du

lac,

à

quelque

distancedu

tombeau du

martyr

élix,

dans un lieu totalement

naccessible,

ù il ne

trouve

que

deux vieil-

lards,

ermites omme ui.

Il

y

vivra

quelque

temps,

ecevant es

visions

célestes

et

des révélations

rophétiques.

Mais de

nouveau,

la renom-

mée de ses

vertus

scétiques

se

répand

dans le

monde,

et

il

se résout

à

finir

es

jours

dans

la

communautédes

moines de Lérins43.

Saint

Amé

aussi,

après

son

apprentissage

e trente

nnées dans

40.

Eugippe,

ie

de

saint éverin

op.

cit.,

.

54

lettre

Eugippe Paschase),

etpp.206-207Mémoire,X,4).41.Ibid.,pp. 188-189Mémoire,V,7).

42.

bid.,

pp.

206-207

Mémoire,

X,

4).

43.

Magnus

elix

Ennodius,

e

Vita eati ntonii

Fr.Vogel

d.,

dans

MGH,

Auct. nt. .

VII, Berlin,

885,

p.

185-190cf.

Bibliotheca

anctorum

t.

II,

Rome,

1962,

ol. 150-151

avecbibliographie).

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LA

SOLITUDEDES

ERMITES

33

la communautédes moines

d Agaune,

se retire ur son

rocher

pour

se consacrer

la

prière.

l

n y

est

pas

vraiment eul. L abbé lui

députe

un

frère, erinus,

ui

doit lui

apporter

de la nourrituret

de la

bois-

son. Mais

il le renvoieet

se

réjouit

même de

ce

que

le diable

a ren-

versé sa cruche

et

volé son

pain par

l intermédiaire un

corbeau,

l orientant

insi

vers une

ascèse et un

jeûne

plus

rigoureux.

Au

bout

de trois

ans,

il

est tiré de sa retraite

ar

un

disciple

de saint

Colom-

ban, Eustase,

abbé de

Luxeuil,

qui

revient

e Rome et est

séduit

par

ses vertus.

Lui

rappelant

e

passage

de

l Évangile

disant

qu une

lampe

ne doit

pas

être mise

sous

le

boisseau,

mais éclairer

tous

ceux

qui

sont dans la maison44,l le persuadede l accompagnerdans les Vos-

ges.

C est le début d une carrière écondede

prédicateur

t de

guide

spirituel.

Mais

après

avoir

participé

la fondationde

Remiremont,

il

a introduit a

laus

perennis

sur le modèle de ce

qu il

a

vu à

Saint-Maurice,

t

accepté

le rôle de

conducteur

pirituel,

l

conserve

cependant

on

goût

pour

la vie

solitaire.

l

se retire ous le creux

d un

rocher,

où on

lui tend un

peu

de nourriture u bout d une

ficelle.

Il n en

sort

que

le dimanche

pour prêcher

t lire

les Écritures ux

frères

t sœurs de Remiremont.

La compagniedes ermites

Dans les

Vosges

et à

proximité

u lac de

Constance,

Colomban

a donné

l exemple

de ces

longues

retraites,

assées

dans le

jeûne

et

la

prière,

oin de

la

troupe

des moines.

l

y

cherche

inspiration

ainsi,

en

se

retirant u désert vec Autierne t un

jeune

adolescent,

ur une

hauteur dominant

a

Moselle,

avec

un

seul

pain pour

douze

jours,

il

veut savoir si c est

bien la

volonté

de Dieu

qu Autierne

aille en

Irlande,

loin de son

pays45.

Une autre

fois,

il

passe cinquante ours

in

eadem solitudine

...)

non

lamen eo

in

loco en

compagnie

d un

seul

frère,Gall, qu il

envoie

pêcher

dans

le

Breuchin46. assons sur

les promenades olitaires ù Colomban rencontre urs et loups, qui

obéissent

ses

ordres,

mais

remarquons ue

le

saint st rarementeul

aux

alentoursde

Bregenz,

où il

jeûne

sévèrementous

un

rocher,

n

plein

désert,

l

a

un

«

assistant

(minister),

hagnoaldus,

futur vê-

que

de Laon. C est

Chagnoaldusqui,

sur

ordrede

Colomban et

pen-

dant

que

celui-ci

prie,

se

charge

de donner des ordresà un

ours

qui

mange

les fruits

e

la forêt t de

limiter

a

portionpour qu il

reste

quelque

chose à

manger

aux deux solitaires47.

Gali non

plus

n est

pas

absolument seul.

Au

moment où

il

s enfonce dans

les

bois

pour

s installer u bord de la

Steinach,

l

est

44. VitaAmationfessoriéd.cit.,p. 217, itant atth., , 15.

45.

Jonas e

Bobbio,

itae olumbanibbatis

iscipulorumque

ins ib.

,

11

éd.

cit.,

pp.

76-77 cf. trad,

rançaise,

p.

120-121).

46. bid.

trad, rançaise,p. 121-128).

47.

bid.,

ib.

,

27

B.

Krusch

d.,

p.

105

trad,

rançaise,

p. 161-162).

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34

C.

SANTSCHI

accompagnépar

un

diacre

nommé

Hiltiboldus,

ui

lui

rend

divers er-

vices. Mais

ce diacre lui

propose

à un

moment

donné de

retourner

à Arbon. Une

intéressante iscussion

s engage

alors entre

es deux

hommes48

Gall,

désirantrester eul

pour

se

consacrer la

prière,

demande

à

Hiltiboldusde

partir

e

premier

t

lui

promet

de le

rejoin-

dre

après

trois

ours.

Mais le diacre

hésiteà

laisser Gall

absolument

seul

;

comme l

n a

manifestement

as

la foi

qui

transporte

es mon-

tagnes,

l

craint

qu on

ne

l accuse d avoir

abandonné Gall à

tous les

dangers

de

la forêt

auvage.

Sur

ce

point,

la

version de

Walahfrid

Strabon

est

plus explicite

Hiltiboldus raint

u on

ne

l accuse d avoir

tué Gall pour le dépouiller.Mais Gall insiste, t 1 « athlètede Dieu »

demeuretrois

ours

dans un

jeûne

complet, pour

consacrer

ce

lieu,

déjà

destiné

u

service

pirituel,

la

privation

t à

l ascèse

(ut

videli-

cet locum

quem spiritali

militiae

providebat,

parsimoniae

consecra

ret

initiis).

ci

apparaît

la fonction

anctificatrice

u

jeûne

et

de la

prière

mais aussi la

différence

ntre

e

saint,

qui

reste

sans crainte

seul au

milieu

des bêtes

sauvages,

et

son

compagnon,

qui

est

sans

doute un brave

homme

mais

qui

s en tient

ux

règles

de

conduitedu

monde

on lui a dit

qu il

devait

accompagner

Gali et il

ne veut

pas

qu on

l accuse d avoir

manqué

à

ses

devoirsou

même d avoir

assas-

siné celui

qu il

devait

protéger.

Hiltiboldus, ommed ailleursChagnoaldusauprèsde Colomban,

a encore une

autre

fonction,

elle de

témoin. Si

les saints

restaient

seuls dans le

désert,

se faire

obéir des

ours et des

loups,

ils ne s en

vanteraient

ertainement

as

:

l humilité

st la

première

ondition

our

qu un

anachorète

puisse

suivre sa

vocation49.

Mais bien

que

les

saints eur

nterdisente

raconter es

prodiges

uxquels

ils ont

assisté,

les

témoinsviolent

cette

défense

et

proclament

ans le

monde,

évi-

demment

des fins

d édification,

es

vertus

héroïques

de leur

maître.

Presque

dans

chaque

vie

d ermite u de

reclus,

a

compagnie

un

serviteur u

d une

servante

araît

aller

de

soi.

Sainte

Wiborada,

qui

fut

d abord,

durant

quatre ans,

ermite

Saint-Gall,près de l égliseSt-Georges,puis se fitmurerdans un reclusoir ommuniquant vec

l église

St-Mangen,

ans le

faubourg

e

Saint-Gall,

vant

d être

marty-

risée

par

les

Hongrois

en

92650,

n

avait

deux,

qui

l accompagnaient

partout

avant

qu elle

se fit

enfermer.

Mais même

ainsi,

la

recluse vait

besoin

d une

servante.

Comme

on

ne

peut

pas

toujours compter

ur

les

apports bénévoles,

l

faut

s assurer

que

quelques personnes

xtérieures

pportent

égulièrement

de la nourriture.

ans

s imposer

l entretien un

nombreux

person-

nel,

incompatible

vec le

dépouillement

t

la

liberté

d esprit

propres

48.Wetti,VitaGalli§ 14 éd.cit., . 264 Walahfridtrabo, e vita anciiGalli. 14 éd. cit.,pp. 294-295).

49. Jean

assien,

onférences

II,

10-11

éd.

cit.,

.

I,

pp. 120-124).

50.

Vitae

anctaeWiboradae.ie

ältesten

ebensbeschreibungen

er

Heiligen

ibo-

rada W. Berschin

d.

et

trad., t-Gall, 983,

assim

.

Mitteilungen

ur

vaterländis-

chen

Geschichte

hrsg.

.

Historischen

erein

t-Gallen,

I).

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LA

SOLITUDEDES

ERMITES

35

à

un

solitaire,

a recluse

doit,

selon

Aelred de

Rievaulx

1110-1167)

un Cistercien

uteur

d une sorte de

règle

pour

les

recluses,

voir une

servante

gée, qui

ne

soit

ni

bavarde,

ni

querelleuse,

ni

vagabonde,

ni

encline

ux

racontars.

Cette

femmedoit

garder

a

porte

de la cel-

lule,

recevoir a

nourriture,

iltrer

es visites.Elle se fera

aider,

e

cas

échéant,

d une fille

plus

forte

pour

les

gros

travaux51. a

présence

d un

domestique

u d un

serviteurst

d autre

part ndispensable,

our

des raisons

évidentes,

tous les ermites

de

haute naissance

sans

aucune

aide

pratique,

en

effet,

omment

ller

seul

au

désertet maî-

triser es

problèmes

matériels,

i on

n a

pas

appris

à le

fairedans une

positionsubalterne Et si l on est dominépar les soucis matériels,

de

la

nourriture, tc.,

comment

e consacrer

la

prière

t à la con-

templation

Wiborada n a

pas

seulement es

servantes,

lle a

aussi

une

disci-

ple,

Rachilde,

désignée

comme sa

«

fille

spirituelle

52. Celle-ci

n est

pas,

si

l on ose

dire,

au même niveau de

sainteté

ue

les servantes.

Les servantes

euvent

t

doivent ller et

venir,

lles sont dans le monde

et leur

vocation est

d y

rester

pour protéger

e

repos

et le recueille-

ment

des

recluses,

andis

que

la

disciple

est

appelée

aux

mêmesvœux

de stabilité

t

d humilité

ue

la recluse

elle-même,

oire au

martyre.

Il

y

a entre a

recluse

t

sa

novice d une

part,

et les

servantes autre

part, a même différence e vocationqu entreMarie, qui s assied aux

pieds

du

Seigneurpour

l écouter,

et Marthe

qui

vaque

aux

soins du

ménage53.

est d ailleurs

le

modèle

de Marie

qu invoque

Wiborada

lorsqu elle

demande

à

l évêque

de Constance

de

la murerdans son

reclusoir54.

On

voit

par

ces

quelques

exemples lpins que

les

déserts

ne

sont

guère

vides

et le

sont

toujours

moins,

et

que

les ermitesne

sont

pas

réellement

euls.

Dangers

de la solitude

La solitude

absolue

n est

pas

sans

dangers

ni

sans tentations.

Indépendamment

es

dangers

matériels t

physiques,

dont les

textes

hagiographiques

ont

fréquemment

tat

pour

mettre n valeur héroï-

cité des vertus

rémitiques,

es

risques pirituels

ont mmenses t

plus

d un auteur les dénonce.

L orgueil,

hérésie,

instabilité u le

vagabondage,

a

paresse,

e

découragement,ivrognerie,

ont autantde démons

qui guettent

ana-

chorète

dans son

désert,

ans

guide spirituel,

ans

autre consolation

que

la

prière

t le travail. Jean Cassien les énumère t les

développe

51.Aelred eRievaulx,a vie e recluse.a prièreastoraletexteatin,ntro-

duction,

raductiont notes

ar

Ch.

Dumont, aris,

961,

p.

50-53.

52. Vitae anctaeWiboradaeéd.

cit.,

pp.

80-82, 0,

178-180.

53.

Luc,

X,

38-42

cf.

Jean,X, 1-40, II,

1-3.

54. Vitae anctae

Wiboradae,

d.

cit.,

p.

160.

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36

C. SANTSCHI

dans ses

Conférences

La liaison

essentielle

ui

existe entre es vices

et la vie solitaire

st affirmée

ans la

Conférence e l abbé

Serenus,

où Ton

rappelle que

les démons

furent

utrefois

eaucoup

plus

vio-

lents,

«

lorsque

le

désert

n était

encore

habité

que par

de rares soli-

taires.

Leur

violence,

ajoute-t-il,

tait alors si

sauvage qu à

peine

un

petit

nombre,

d une

vertu

bien

affermie t d un

âge

avancé,

pouvait

supporter

e

séjour

dans la solitude

55.

Serenus

indique quels

sont

les

remèdes,

orsqu il

explique

que

dans les

temps

anciens,

les

démons

étaient i

violents,

es cénobites e

relayaient

a nuit

pour

veil-

ler et les tenir

à

distance.

Ces démonssont aussi actifs aux époques suivantes. Saint Gall

les

entend alors

qu il pêche

en

solitairedans le lac de

Constance56.

On

voit,

par

son récit

magé,

qu ils

ont

pu

croître t embellir n toute

liberté ans ces

lieux abandonnés.

Gall

les chasse en

invoquant

e Sei-

gneur

t en faisant e

signe

de la

croix,

et

la communauté es

frères,

sous la direction

de

saint

Colomban,

se

joint

à

ses

prières

d action

de

grâce.

Une

fois

de

plus,

donc,

c est la communauté

ui

soutient

l individu dans sa lutte contre es démons.

Quant

aux animaux

qui

tiennent

ompagnie

aux

ermites,

ions

dans

les déserts

d Afrique

et du

Proche-Orient,

urs

et

loups

dans

les forêts

lpines,

eur rôle est assez

ambigu.

Ce

sont

des bêtes

féro-

ces, qui, de l extérieur, euvent paraîtremenaçantes.Mais, comme

on le voit dans les

Vies de

Jérôme,

des Pères du

Désert,

de

saint

Colomban et de ses

disciples,

es saints es

apprivoisent

ssez facile-

ment t obtiennent elles

certains ervices ainsi de l ours

qui

va cher-

cher du bois

pour

saint

Gali,

et

qui

figure

ur toutes es

représenta-

tions

du

personnage,

insi

que

sur les

armoiries

e

l abbaye

et de

la

ville de

Saint-Gall,

et

sur

celles du canton

d Appenzell,

ancien

sujet

de

l abbaye.

Mais les histoires

d animaux

ont

peut-être

n

autre

sens,

spiri-

tuel,

évoqué

non

sans

finessedans les

Méditationsde

Guigues

II

le

Chartreux57.

a

première

e

ces

méditations st consacrée à la soli-

tude celle du prophète nvoyé u désertpour apprendre écoute de

la

Parole dans le silence

t

l humilité58,

t celle du

Christ,

eul

parmi

les

hommes,

mais

avec le

Père

qui

l a

envoyé59.

Or

même s il

est

seul

et

silencieux

u

sens

physique

du

terme,

homme

qui

ne

sait

pas

faire

silence

en lui n est

pas

seul

spirituellement

«

Voici,

écrit e

Chartreux,

u il n y

a

aucun homme

avec

moi,

et

que pourtant e

55. Jean

assien,

onférences

VII,

23

(éd.

cit.,

.

I,

pp. 265-266).

56. Vita

Galli

uctore

ettino,

7

(éd.

cit.,

. 261)

Vita alli uctore

alah-

frido ib.

, §

7

(éd.

cit.

p. 290).

57. Guiguesi e Chartreux,ettresur a vie ontemplativeV chelleesmoi-nes). ouzeméditationsE. Colledge tJ. Walsh d.,Paris, 980nouveauirage),

DD.

26-131.

58.

Guigues

I

le Chartreux

ommentecidivers

assages,

ont

s., CXVIII,

1

Lam., II,

27-28

Is., LXVI,

2

; Ps., LXXXIV,

.

59.

Jean,

III,

16.

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LA

SOLITUDEDES

ERMITES

37

ne suis

pas

seul.

Je

suis

pour

moi-même ne

foule. J ai avec moi

mes

bêtes

sauvages que j ai

nourries

dans

mon

sein,

depuis

mon

enfance

(...)

et

même

dans

la

solitude

ou

dans le

désert]

lles ne veulent

pas

s éloigner

de moi

».

Et de les

comparer

ux

plaies d Égypte,grenouil-

les et mouches.

On

est

dans une

réalité

psychique

que

chacun a

pu expérimenter,

côté

de

laquelle

les

ours,

les

loups

et

même les

dragons

ou

les

démons,

auxquels

on a

donné un nom

pour

mieux

les

maîtriser,

araissent

bien

ingénus.

Les solitaires

rencontrent ncore

d autres difficultés ans leur

recherche u

silence,

vec

Dieu

pour

seule

compagnie.Lorsqu ils

sont

gratifiés e révélations, u lorsqu une onguevie de prière t d ascèse

leur a

procuré

a

paix

et la

sérénité,

onc aussi une

certaine utorité

morale,

ils attirent

e

nombreusesvisites.

Ainsi,

on est

frappé,

en

lisant es différentesersions

de la vie de sainte

Wiborada,

par

la vie

sociale active

qu elle

mène,

même

en étant

recluse.

Pauvres

et

estro-

piés

viennent

e

faire

nourrir,

uérir,

onseiller,

onsoler.

Lorsqu il

n y

a

pas

de

visites,

Wiborada

reçoit

des

apparitions

servantes,

moi-

nes ou ermites

éfunts,

ui prodiguent

es

avertissementsont

elle-

même

s empresse

de faire

bénéficier

eux à

qui

ils sont adressés

par

son

canal.

Lorsque

c est

le

diable

qui

se

montre,

l

est aussitôt

reconnu.

Dans ces conditions, l n est pas étonnant ue les auteurs soient

de

plus

en

plus

méfiants

l égard

des

vocations

de vie

solitaire.Ael-

red de

Rievaulx,

dans sa

Vie de

recluse

0

,

est hanté

par

le

bavardage

qui

se

développe

et

s épanouit

aux

alentoursdes

reclusoirs,

rès

des

fenestellae

donnant sur l extérieur. a

plupart

de ses

conseils visent

à

préserver

a recluse de

trop

de

visites.

Un moine du couvent e

Petershausen,

ans

le

faubourg

e

Cons-

tance,

qui

écrit

peu près

à

la même

époque qu Aelred

de

Rievaulx,

c est-à-dire

dans

le

troisième

uart

du

XIIe

siècle61, fait,

dans cet

ordre

d idées,

des observations ssez

négatives.

Le

moine de

Peters-

hausen

est un bénédictin. on

abbaye,

fondée

par l évêque

de

Cons-

tanceà la findu Xe iècle,a prisses premiersmodèles à Einsiedeln62.

À

l instarde la

règle

de saint

Benoît,

l fait

débuter a

chroniquepar

une série

de définitions

e

termes elatifs la vie

monastique

u

régu-

lière,

notamment es différents

ypes

de

réguliers,

moines,chanoines,

solitaires, eclus,

pèlerins,

tc. Des

solitaires,

l

dit

qu ils prennent

n

principe xemple

ur saint

Jean-Baptiste

t

sur la retraite t le

jeûne

du Christ

durant

quarante ours après

son

baptême,

mais

il

observe

que

les

solitairesde son

temps

ne vivent

guère

dans la

retraite,

ar

ils

reçoivent

a visitede foules

entières,

vec

lesquelles

ls

passent

eur

temps

en

bavardage.

Il

se demande

donc,

non sans une

certaine

ogi-

60. Éd.

cit.,

p.

50-62.

61.

Die

ChronikesKlostersetershausenO.

Feger

d.,

Sigmaringen,

978.

62. A.

Borst,

Mönche m Bodensee10-1525

Sigmaringen,

978,

p.

136

t

suiv.

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38

C. SANTSCHI

que,

comment

n

peut

se

dire solitaire

orsqu on

n est

pas

seul63.

En

quoi

il

s écarte

de la définition

e

Grimlaïc,

qui

faisait de solitarias

l équivalent

du

grec

monachos

sans

se

prononcer,

ce

stade,

sur la

question

du cénobitisme

u de l anachorétisme64.

Le moine de Petershausen

st

encore

plus

sévère

à

l égard

des

reclus.

En

théorie,

es

reclusont

pour

modèles

es nombreux aints

qui

se sont

fait

mprisonner

our

l amour du Christ t

qui

ont souvent té

visités

dans leur

prisonpar

le

Seigneur

ui-même u

par

ses

anges.

Ils

s enterrent

omme

le Christ

pour

ressusciter

vec lui. Mais en

prati-

que,

au

XIIe

iècle,

a vie

des

reclusest

bien différente. t le moine de

Petershausen e dénoncer, hez les reclusqu il a pu observer,es pro-

phéties

fallacieuses,

es foules

que

l on

attire

soi,

le

bavardage

conti-

nuel,

incapacité

demeurer eul

et en silence65. est

qu il

a eu

sous

les

yeux

de fâcheux

xemples.

i

les

ermites

u il

a

connus,

deux illet-

trés

et un

prêtre,

nt mené une vie

«

bonne

»,

en

revanche,

l

signale

le moineWalcounus

t deux

barbati

ratresconvers),

Meriboto t Hart-

mannus,

ui

se

sontfait nfermer

ans

un

reclusoir ces

hommes,

crit-

il,

«

étaient

d un caractère i

désagréable u ils

ne

pouvaient

demeurer

que

difficilement

n communauté

^.

Voilà une

accusation

ancée

contre es ermites

ui

se

répand

de

plus

en

plus,

mais

qui

a

toujours

existé. Ce

que

l on

reproche

ux

anachorètes, u plus exactementux fauxanachorètes, est de quit-

ter la

société

des autres

hommes non

pas pour

chercher

Dieu,

mais

par

égoïsme,

par orgueil,

par incapacité

à

supporter

es autres

et à

développer

a

chariténécessaire.

On

leur

prête

un

espritd indépen-

dance

qui

conduit tout droit

à l hérésie. Dès la mise sur

pied

de

l Inquisition,

es vocations

anachorétiques

ont

suspectées

d hérésie.

Un

amalgame

est fait entre es

ermites,

es

béguines

et les

lollards,

qui

amène

à taxer tout ce monde d hérésie67.

Nous n en donnerons

ci

qu un exemple,

tiré de nos matériaux

du domaine

alpin.

L ermiteHans

Frankenfurter,

ont nous avons

déjà

parlé,

avait un

frère,

Johannes

von

Gelnhausen,qui

avait été

prieurde l abbaye cisterciennee Stamsau Tyrol,avaitparticipé ctivement

au Concile de Bâle

puis

avait été

nommé,

entre oût 1433

et

juillet

1434,

abbé

de Maulbronn.

Il avait

renoncé à

cette

charge

en

143968

63.

Die

Chronik

es

Klosters

etershausenéd.

cit., 20,

p.

34.

64.

Ci-dessus,

.

30,

note 4.

65.

Die

Chronik

es

Klosters

etershausenéd.

cit., 21,

pp.

34-35.

66.

bid., § 36-37,

.

230.

67.

En

attendant

a liste

omplète

t

1

histoirees

béguinages

e Suisse

romise

pour

a section

X

de

Y

Helvetiaacra

voirBr.

Degler-Spengler,

ie

Beginen

n

Basel,Bâle,

1970,

t

J.-Cl.

chmitt,

ort

unehérésie

L Église

t es

clercs

ace

auxbéguinest auxbéghardsu Rhin upérieuru xiv au xv siècle Paris/LaHaye/Nework, 978Civilisationstsociétés,6).

68.

Nikolaus

rass,

Abgescheiden

eben.Via

ntiqua

nd evotio oderna

n

Auseinandersetzung

m ineWaldklause

m

Hochgebirge

irols.

ugleich

in

Beitrag

zum

Begarden-

nd

Beginentum

n

den

Ostalpen

,

dans

Cusanus

edächtnisschrift

op.

cit.

pp.

356-357.

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40

C.

SANTSCHI

ble dans ses

définitions,

iscuté,

voire contesté

ar

les meilleurs irec-

teurs

monastiques

t

par

les

théologiens,

ontrarié

ar

les vicissitudes

de

la

vie,

par

les

visiteurs,

nfléchi

ar

une

vocation

upérieure,

ana-

chorétisme

pparaît

comme

une solution

temporaire

certains

pro-

blèmes

spirituels,

ans une

oscillation

perpétuelle

ntre a vie

solitaire

et la vie en communauté.

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42

S.

DI DOMENICO

de

vingt

nnées

à San Giovanni

dans

l'observance

a

plus

stricte

e

la

règle

bénédictine.Mais

quand

le

monastère l'unanimité'élit

abbé,

à nouveau

il

refuse.

Enfin,

fracture

uprême

Franco décide de

quit-

ter la communautédes frères

t

s'éloigne

vers

les

pentes

du

Gran

Sasso.

Pour

réaliser on

idéal

de

solitude

l

se

met en

parfaite

on-

tradiction vec le vœu de stabilité

rononcé

uelques

années

plus

tôt.

En

effet,

l

va contre es

lois et la tradition

e

l'Église

:

l'érémitisme

n'est

pas pour

lui une

phase initiatique réparant l'épanouissement

dans

l'idéal

monastique

c'est

la voie la

plus parfaite

vers le salut.

Franco

décide

de tout

quitter,

fût-cede manière

clandestine,

pour

rejoindre e lieu de son nouveau choix de vie. Et c'est ainsi qu'une

nuit,

l

sort du

monastère,

hargé

du strict

minimum ses

vêtements,

son

bréviaire,

euf

pains,

une

poignée

de

sel,

une bouteille

t un réci-

pient

en terre

cuite3.

Dès

lors,

Franco va se trouverdans une

situationnouvelle

l'instabilité

era

la

règle.

Et celui

qui

avait

fait vœu de

stabilité n

endossant 'habit bénédictin e

livre

à

un

exil

perpétuel.

l

s'établit

d'abord

dans une

caverne,

ancienne demeure

d'un

ermite,

ue

lui a

indiquée

un

ours. L'ermite se

fond

peu

à

peu

dans la nature

qu'il

a choisie

pour

mener bien sa

vocation. Il

se nourrit

e

ses

fruits,

boit de son

eau,

et

agit

sur

elle

quand

elle le

menace

dans sa mani-

festation nimale la plus féroce, es loups4.Mais plus il se cache, et

plus

sa

réputation randit

sa vie est une

fuite

perpétuelle,

oujours

plus

loin des

hommes,

oujours

plus

haut.

Mais la

montagne,

omme

la

forêt,

n'est

pas

totalement ermée au

monde et

constamment

Franco

rencontre eux

qu'il

a fuis

que

ceux-ci

soient

attirés

par

sa

réputation

e

sainteté u

qu'ils vaquent

plus simplement

leurs occu-

pations

quotidiennes5. 'espace

naturel

devient

dès

lors lieu de ren-

contre

l'ermite,

ui

a fait e choix de fuir

es

hommes

pour

plonger

dans le

«

désert

,

tend à faire

communiquer

e

monde

sauvage

et

le

monde

civilisé.

Franco

décide enfin de

s'installer

dans une

caverne

située au-

dessus du villaged'Assergi. L'église paroissialeest desserviepar les

frères

u

monastère énédictin

'Assergi

uquel

elle

est

rattachée.

es

échanges

vec ce

village

se font

nombreux

Franco

s'y

rend

es

jours

de

fête,

et

des

religieux

ui rendent

parfois

visite,

pour

profiter

e

ses bons

conseils.

Dès

lors,

le

destinde

Franco et

celui

d'Assergi

ont

définitivement

iés.

Dans

la nuit du

quatre

au

cinq

juin

d'une

année

comprise

entre 1220

et

1230,

Franco

remet

on

âme

dans les

mains

du

Créateur. Et

aussitôt,

tout le

village

est

réveillé

par

une

série

de

signes

le

coq

chante

une heure

ndue,

es

cloches se

mettent

son-

ner

toutes

seules,

et une

étrange

ueur

s'échappe

de la

caverne de

3. Qui uis sitatisestibus,reviarionovemntasculoanius, um ogilloalis

flasculo,

parapside,

ormientibus

ratribus,

aute

ump

is,

grediens

onasterium,

nemoris

er

devia ubintravit.

4. Cf.

traduction

nfra

t

analyse

es

peintures.

5.

Ainsi

ranco encontre-t-il

ussi ien

es

pèlerinsu'un

bûcheron.

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ENTRE E DÉSIRDE LA

MONTAGNE

T

LES APPELS

DU VILLAGE

43

Permite.

La

population

out

entière,

lergérégulier ompris,

e

presse

alors

auprès

du saint

homme,

qui

est

ramené u

monastère

TAssergi

pour

y

être enseveli. Celui

qui

toute sa vie

avait

cherché fuir

es

hommes se

retrouve,

ès

son

décès,

réintégré

la

société

qu'il

avait

quittée.

Le

pouvoir

d'un saint homme sur

la nature

sauvage

La notion de solitude

propre

à toute

vie

érémitique

e

trouve

constamment emiseen cause quand on tientcomptedes nombreux

contacts

de

saint Franco avec la

société en

particulier

eux

qu'il

a

entretenus

vec

les

habitants

de

cet

espace

préurbain

que

constitue

le

Castrum

d'Assergi6.

Déjà

de

son

vivant,

Franco

apparaissait

comme un intermédiaire

ntre e monde et

le

monde

sauvage

et

hos-

tile de la chaîne du

Gran

Sasso. Les

gens qu'il

croisait

étaient

ussi

bien des

bûcherons,

des

pèlerins,

que

des

enfants

perdus.

L'ermite

apparaissait

omme un

éclaireur

u monde

civilisé u sein

de la

forêt

ou de la

montagne

a

plus

sauvage.

Un

médiateur

ntredeux mon-

des,

pas

seulement n

témoinde leur

affrontement

Franco

utilisait

sa

position

privilégiée

our

agir

sur e monde

qu'il

avait

quitté

omme

sur celuiqu'il avaitembrassé.Médiateur ntremondecivilisé tmonde

sauvage

donc,

mais surtout

ntercesseurntre

e

Créateur t

sa Créa-

tion.

Si

l'on

lit

les

miracles

réalisés

par

l'intercession e saint

Franco,

de

son

vivant,

on

remarque

a

prédominance

des

miracles d'action

sur

la nature.

Sur

sept

miracles

ecensés,

un seul

rapporte

une

guéri-

son.

Tous

les autres font état

de

protection

ontre es

dangers

de

la

montagne,

u'ils

soient iés aux animaux ou

aux

éléments

échaînés.

Une

avalanche,

un

éboulement,

a

chute d'un

arbre,

ou le

fléau

des

loups

dans le

village

sont autant

d'événements ù l'on

voit

agir

saint

Franco. Dans le récit

des miracles

qui

suivirent

mmédiatementa

mort,cettepersistance e l'action sur la naturedemeure la séche-

resse,

un enfant

perdu

en

forêt,

un moine

attaqué

par

une

horde de

voleurs

comparés

à

des

loups),

un

cierge

abandonné

qui

ne

provo-

que pas

d'incendie.

La Vita

rapporte

une

dernière

érie de

miracles

dits Moderna

Miracula

que

nous n'avons

pas

traduits ci.

On

y

voit

le

saint

agir

essentiellementomme

un

thaumaturge.

es

guérisons

l'emportent

ésormais sur tous

les autres

types

de

miracles

20

sur

28),

même si

persistent

ncore

des

miraclesde

protection

t

d'action

sur

la nature

mais aux

voleurset

aux

éléments

échaînés

s'ajoutent

des miraclesd'action

sur la

nature

domestiquée

un

nourrisson

st

préservé

'une

chute

provoquéepar

un

porc,

des chevaux

récalcitrants

sont domptés, a productiond'huile est augmentée.

6. Ce

Castrumait

artie

es

villagesui

contribueront

la

fondation

e a

ville

de

L'Aquila

n

1254.

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44

S.

DI DOMENICO

Cette série des

miracles

es

plus

récents e

rapproche

donc

des

recueils

classiques par

la

prédominance

es miracles

de

guérison

et

par

l'image

d'un saint

plus

proche

et

plus

conforme ux modèles.

L'homme

Franco était

un trait

d'union entre

Assergi

et

l'espace

sau-

vage

;

le saint

Franco devient

'intercesseur ntre es hommes

souf-

frants

t

le Dieu

guérisseur.

D'« eremitadel

Gran Sasso

»,

Franco

devient e saint

(patron)

d'Assergi.

Le culte

du saint

patron

d'Assergi

Après

avoir

pris

possession

du

corps

de

l'ermite,

le

village

d'Assergi s'appropria

son

culte

et le

voulut

pour patron.

Celui

qui

était né Franco

di Roio

devenait

pour

la

postérité

saint Franco

d'Assergi.

L'Église

ne

reconnut

amais

la

sainteté e

Franco,

et

il

fallut

attendre a

fin du

xvnic

siècle

pour

arriver une

reconnaissance

ffi-

cielle

du culte. Le

clergé

ocal

et la

population

furent t demeurent

les

garants

de

ce culte.

L'église

paroissiale

Santa Maria

in

Silice

que

les

moines bénédictins

vaient

quittée

dans

la

seconde moitié du

XIIIe

iècle

fut de

plus

en

plus appelée

église

San Franco. Statues et

peintures

leurirentur ses

murs,

tandis

que

la

crypte

ecevait 'urne

contenant es reliquesde l'ermite7. 'autel dédié à saintFranco dans

l'église

témoigne

du culte

qui

lui était voué et de la

perception

qu'avaient

de

l'espace

naturel

eux

qui

l'ont

érigé.

Cet autel

maintes

fois remanié

t restauré

la

dernière estauration ate

de

1901)

est orné

d'un

cycle

de six

peintures

ui évoquent

a vie et

les miraclesdu saint

ermite

Fig.

1).

Elles

datent de

la

première

moitié du

xvie

siècle et

elles sont

particulièrement

ntéressantes

ar

la manièredont le

pein-

trea

représenté

es

espaces

de

vie et d'action de

saint

Franco.

L'oppo-

sition

ntre

'espace

civilisé

t

l'espace

sauvage

est

trèsnette.Prenons

comme

exemples

deux de ces scènes

La

quatrième

cène

du

cycle

d'abord

(Fig.

2).

On

y

voit

repré-sentés troisépisodes de la vie de saint Franco. D'abord le moment

où l'ermite e trouva

face à face avec

sept

loups

féroces t les ren-

voya

d'un

signe

de croix. Le second

épisode évoqué

est celui du mira-

cle du bûcheron

Franco

apparaît

en

prière

à

genoux,

alors

que

l'imprudent

ûcheron

'échappe

devant 'arbre

qui

allait s'abattre

ur

lui,

représenté

oupé

mais

toujours

droit. Dernier

épisode

: Franco

fait sourdre 'eau au sommet

du Mont Vasto.

Cette

peinture

st

par-

ticulièrement

ntéressante

our l'organisation

es différentsieux. Dans

le

miracle

des

loups,

on voit

uxtaposés

l'ermite,

es

loups,

la

forêt,

les chasseurs

et le

village.

L'espace

est structuré ur

l'opposi-

7. D.

Gianfrancesco,

ssergi

S.

Franco,

remitaelGran asso

Rome,

980,

pp.

151-199l'auteurait ne

escription

étailléees

richesses

rtistiques

t rchitec-

turalese

Téglise

antaMaria

'Assergi,

t dresse n bilan

estravauxt restaura-

tions

ffectués

epuis

e

xme

iècle.

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ENTRE

E

DÉSIR

DE LA

MONTAGNET LES

APPELSDU

VILLAGE 45

tion

sauvage-civilisé

en

effet,

e

village

à droite

'oppose

à la mon-

tagne

vit Termite.Entre

ces deux

mondes existe

une

zone incer-

taine une zone

d'échange fréquentée

ussi bien

par

les

hommes

que

par

les

animaux,

et

constamment raversée

par

notre ermite.

La

cinquième

cène du

cycle

Fig. 3) évoque

elle

aussi trois

épi-

sodes.

Le

premier,

ien

que

cité

dans

le

cartouche,

st difficilement

visible

il

s'agit

de la cohabitation

de

saint Franco avec

une famille

d'ours.

Sur la

droite,

trois

pèlerins

ont

protégés

d'une

avalanche.

Enfin,

un enfant

perdu

est

retrouvé

là,

saint

Franco est

représenté

à deux

reprises

d'abord dans un milieu

auvage,

tenant

dans ses

bras

l'enfantqu'il a arraché aux griffes 'un loup que l'on voit fuir au

premier

plan

;

ensuite aux abords du

village d'Assergi,

alors

qu'il

remet 'enfant à ses

parents.

Saint Franco

apparaît

donc à travers es

représentations

opu-

laires,

comme une

présence

familièredans

les environs du

village

d'Assergi.

La

conception

ue

le

peintre

vait

de

l'espace transparaît

dans la manière dont

il

organisa

les scènes et les lieux

représentés.

L'opposition

entre e

village,

ieu de

civilisation,

t la nature

auvage

(forêt

et

montagne)

demeure. Mais

on

perçoit

aussi

la

relativité es

frontières

ntre

es mondes

car

elles sont

'objet

de

perpétuelles

odi-

fications

t

les

deux mondes

s'interpénétrent

onstamment. ans cet

espace indéfini vécu saint Franco8.

8. Cet rticle

eprend

n

partie

es onclusionse mon

mémoiree maîtriseS.

di

Domenico,

aintetét érémitismen talie entrale

la

fin

du

Moyen

ge

San

Franco

'Assergi

t San

Placido

i

Roio,

rmiteses

Abruzzes

sous

a direction

e

Mme

Odile

Redon),

l'Universitéaris

III,

1993.

Sources

Acta SanctorumJuin

, Venise,1695,

pp.

553-554

«

De

S.

Franco

eremita

.

Filippo

Ferrario,

Catalogas

anctorumtaliae

Milan,

1613.

Nardo de

Nardis,

Vitae miracoli

i

S. Franco

L'Aquila,

1640.

TommasoMaria

Salvatori,

In

Festo SanciiFranci

Rome,

1795

con-

tenudans e volume e la Bibliothèqueationale e Paris « Canonisations329

»,

livrets

722-2723).

Nicola

Tomei,

Dissertazione

opra gli

atti e il culto di

S. Franco

d'Assergi

Naples,

1791.

Vita

BeatiFranchi

f° 87-97

t 695-698 u manuscrit3 de la

Biblioteca

Alessandrina

e

Rome,

datant

du

xviie

iècle,

euvre u Père

Constantino

Caetani

(1560-1650).

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ENTRE E DÉSIR

DE LA

MONTAGNE

T

LES APPELSDU

VILLAGE

47

Fig.

2

et

3

-

Peinturesur e mur

de

l'autel

de San

Franco,

détails

Miracles es

sept oups,

du

bûcheron

mprudent,

e la

source.

Miracles

e l'enfant rraché

u

loup,

de l'avalanche t des ours.

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48 S.

DI

DOMENICO

Vie

de saint

Franco

ďAssergi*

Ainsi

commence

a vie du Bienheureux

ranco

En ces

temps

Frédéric,

oi

de

Sicile de la

lignée

des

Normands

reçut

a couronne

mpériale,

ous le Pontificat

'Hadrien,

son

filsGuil-

laume couronné

roi

de

Sicile,

une

fois vaincus

les Grecs

d'Apulie,

s'empara

de

Brindisi

t

soumit

PApulie

et

la Calabre d'un

bras

puis-

sant.

Alors

que

dominaient es nobles et

grands

barons sur les

pro-

vincesd'Amiternum t

de

Forconia,

dans un

«

castello

»

appelé

Roio

naquit

un enfant u nom de Franco dont

es

parents ouissaient

d'une

abondante fortune. l fut dès l'enfanceremplid'un espritde bonté

qui

en faisaitun enfanthumble t aimable. Il

futconfié

par

son

père

au

prêtre

Palmerio afin d'être instruit ans la

connaissance

des let-

tres.

Il

dépassait

tous les

condisciples

de son

âge

dans ce domaine

et était

considéré omme

plus

louable

encoredans sa

discipline

e vie.

Un

jour,

profitant

e l'absence

de

ses

parents,

on frère

îné,

outre-

passant

ses

droits,

e

contraignit

la

garde

du

troupeau

familial.

Mais

lui,

par

une

aspiration

acrée,

après

avoir livré e

troupeau

à lui-

même,

s'enfuit

u monastère an Giovanni di

Collimento.

Là,

il

fut

reçu

avec

une affectueuse

iété par

l'abbé

Luculano,

pour

lequel

ses

parents vaientun respect articulier,t il fut ussitôtdestiné l'étudedes lettres. l en arrivaà ce versetdu

prophète

« Heureuxceux

qui

habitent

a

demeure,

eigneur,

ls te loueront

dans les

siècles des siè-

cles

»,

puis

à

celui-ci

«

J'ai

choisi de vivreen

humble

dans

la mai-

son de mon

Dieu,

plutôtque

d'habiter

ous les

tentes

es

pécheurs

.

Il

prit

ussitôt

'habit

monastique,

'attachant

crupuleusement

obser-

ver

a

Règle

et,

une

fois

sa

profession

aite,

l

se

distingua ar

l'éclat

de

son humilité t de sa

discipline

de

vie.

Ses

parents

entèrent

plusieursreprises

de

le faire

revenir,

ar

les caresses et les

larmes,

mais

il

n'en

faisait

ucun cas et

s'adonnait

avec d'autant

plus

de dévotion à

la

religion.

Mais comme

l

recevait

d'eux sans relâche de nombreux iens, l les distribuait onsciencieu-

sement ux frères

u'il voyait

dans le

besoin et à

d'autres,

selon ce

verset

«

Il

dispersa

ses biens)

et les

donna aux

pauvres

». Ce

que

voyant,

e susdit

abbé

lui

demanda

pourquoi

il

accablait

ainsi ses

parents,

t Franco dit

«

Puisque je

suis leur

fils,

une bonne

partie

de leurs

richesses

me

sont dues ».

Seconde lecture

Quand

l'abbé,

dix

ans

après

'entrée u

jeune

garçon,

rriva

pieu-

sement au terme

de sa

vie,

tous les

frères 'accordèrent

pour

élire

*

Texten atin Vita eati ranciranscritearNicola omei ans a Disserta-zioneop.cit., p.54-63la partientituléejusdemmoderna iraculae la trans-

cription

'a

pas

été

raduiteci eneffeta

majorité

es

miraclesrécentsde

saint

Francoont e

type

haumaturgique,

onc

lus

onformesux

modèlesonnus

our

cette

ériode).

a

numération

ncomplète

es

ectiones

orrespond

la

transcription

de N. Tomei.

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ENTRE E DÉSIR

DE LA

MONTAGNE

T

LES

APPELSDU

VILLAGE 49

Franco commenouvelabbé

;

il

refusa lors totalement

abbatiat,

insi

que

toutes es

prélatures

uxquelles

on voulut e

nommer

ar

la suite.

Et

pendant vingt

nnées

il

rendit

grâce

à Dieu

dans

l'observance de

la

Règle.

Et

il

écoutait avec

la

plus

grande

dévotion

'hymne

dédiée

à

Jean-Baptiste,

ui depuis

sa

plus

tendre

enfance avait fui

l'agita-

tion

des villes et

avait recherché es

grottes

u

désert,

pour

éviter

u

moins

de

souiller

sa vie

par

des

paroles

légères.

Il

lut aussi

avec attention

es Vies des Saints

Pères et fut

enflammé

par l'Esprit

Saint.

Après

avoir obtenu avec

beaucoup

de

difficultés'autorisation

e

partir,

t avoir donné à chacun

des frères

en larmes e baiser de paix, il se leva au milieu de la nuit. Et muni

de ses habits

ordinaires,

'un

bréviaire,

e neuf

pains,

d'une

poignée

de

sel,

d'une

gourde

et

d'un

plat,

le

tout

pris

en cachette

lors

que

ses

frères

ormaient,

uittant

e

monastère,

l

s'aventura sur les che-

mins détournés

e la

forêt.Alors

qu'il

cherchait e lieu

propice

à son

installation,

a

bienveillance ivine

envoya

à sa

rencontre n

ours

:

il

découvrit au

plus profond

d'un bois une

caverne,

qu'avait

jusqu'alors

habitéeun saint

ermite,

ernée

par

des ronces

cérées,

insi

qu'une

souche de chêne creuse

remplie

d'une eau très claire. Et

là,

pieusement,

l

s'acquitta

de la

louange

divine et vécut

ongtemps,

e

se nourrissant

ue

des

neuf

pains qu'il

avait

apportés

insi

que

d'her-

bes et de glands. Le Seigneur,dispensateur e grâces, répondit ux

mérites

u

bienheureux

ar

de nombreuxmiracles.

L'ours dont nous

avons

déjà

parlé,

alors

qu'il

cherchaitde la

nourriture oin de la

grotte,

écouvrit

ne

pierre

reuse au

pied

d'un mont

où des

abeilles

avaient

fabriqué

du miel

qui y

coulait en abondance. L'ours

s'en res-

taura

légèrement, trempa

a

gueule

et revint

uprès

du

serviteur e

Dieu,

lui

indiquant

insi

sa

découverte.L'homme de

Dieu se hâta à

la suite

de

l'ours vers

le lieu

qu'il

lui avait

indiqué

il

prit

un

peu

de ce

miel

sans souffrir

e moins

du

monde de la

piqûre

des abeilles

et,

de retourdans sa

cellule,

l

vécut

durantun an de

quelques

fruits

aigressans aucun autre aliment.L'ours, quant à lui, fréquentaitrès

souvent

'endroit.

Mais

le

serviteur

u

Christ,

refusant

outes dou-

ceurs

du

goût,

fuyant

oigneusement

'endroit,

ne

s'y

rendit

plus.

Troisième ecture

Peu de

temps après,

alors

que

le serviteur e Dieu était recher-

ché avec

toujours

plus

d'insistance

par

les

fidèlesdes

régions

voisi-

nantes,

un

grand

rocher,

u

plus profond

du

bois,

s'était détachébru-

talement

e la

paroi

de la

montagne,

'écrasantau fond de

la

vallée,

et

il avait enfermé

ivants dans

une cavité de la

montagne inq

de

ces

fidèles.

Ne

voyant

aucune

possibilité

d'aide

humaine,

es autres

pèlerinsprièrent onguement t implorèrente secours de Dieu et de

l'homme de Dieu

par

de

pieuses prières

t,

se

plaçant

sous ce rocher

étonnamment

rand,

ls le soulevèrent omme s'il avait été très

éger.

Et

ceux

qui,

enfermés,

vaient frôlé a

mort,

'en sortirent

ndemnes.

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ENTRE

E

DÉSIR

DE

LA

MONTAGNE

T LES

APPELSDU VILLAGE

51

ses trois oursons

dans une

grotte

ous la

roche,

il

construisit ne

étroite

ellule,

et

il

y

vécut

ongtemps

vec l'ourse et ses

petits

deve-

nus adultes

comme avec

des animaux

familiers,

menantune

vie rude

et humble.

Là,

le

Seigneur

e

distinguapar

de nombreux

miracles.

En

effet,

andis

qu'il

se

dirigeait

vers le Castrum

'Assergi,

durant

la

période

des

moissons,

pour

y

recevoir e

sacrement

ominical,

à

savoir

le

corps

et le

sang (du Christ)

des mains du

prêtre,

l

tomba

sur un

loup enragéqui transportait

n

enfant,

nveloppé

dans ses lan-

ges, qu'il

avait arraché

à

son

berceau. Le

loup, après

avoir entendu

la voix

plaintive

du serviteur

e

Dieu,

déposa

l'enfant sain

et sauf

et s'enfuit.Le serviteuru Seigneur, ourant apidementers 'enfant,

le

prit

dans ses

bras et le rendit

ses

parents qui

le

cherchaient n

pleurs

en

rendant

grâce

à Dieu :

il

supplia

le Dieu vivant

pour

que

plus amais

dans

cette

région

des animaux de cette

spèce

ne

puissent

nuireaux

hommes. Le

Seigneur

xauça

la demande de son

serviteur,

et cette

région

demeura

alors

à

l'abri

et

protégée

des

morsuresdes

loups,

et elle l'est encore

grâce

aux mérites

u

serviteur e

Dieu,

qui,

pour

sa

part,

se rendait

oujours

ors des

principales

êtes n

l'église

de

Dieu

pour y

recevoir e

sacrement

ominical.

Cinq prêtres ieux

et

des

moines

ui rendaient

isite

pour

recevoir

uelqu'encouragement,

avec des

aumônes.

S'appuyantsurla renommée 'admirable ainteté e Franco,qui

s'était

répandue

dans la

province

des

Abruzzes,

de nombreuxhabi-

tants

de la

région,

escendant

ar

les

sentierse

mont

brupt ui porte

le nom de

Portella,

ui rendaient ouvent

visite,

remplis

de

piété.

Et,

alors

qu'un

certain

nombre d'entre eux se

hâtaient,

ors de la

fête

des

apôtres

Philippe

et

Jacques,

vers l'homme du

Seigneur,passant

par

un fossé

profond

reusé au

pied

dudit

mont,

ls

virent

ne masse

énorme

de

neige,

que vulgairement

n

appelle

gravara

qui

glissait

t

menaçait

de les renverser t de les

écraser

çarmi

eux,

un

prêtre

du

nom

de

Deodato,

poussé par

la

peur

dit

«

Ô

Franco,

très saint

ser-

viteur

de

Dieu,

viens à notre

secours,

nous

qui risquons

a mort en

ce chemin. Ils courbèrenta tête vers e sol en tremblant aussitôt,

la

masse,

qui

dévalait

depuis

e

sommet,

assa

au-dessus

d'eux comme

un oiseau sans

arrêter a course.

Car

Celui

qui

est

proche

de

ceux

qui

l'invoquent,

n'abandonne

pas

ceux

qui espèrent

n

Lui,

et

grâce

aux

mérites

du serviteur e

Dieu,

Il

les

préserva

d'un

aussi

terrible

malheur.

Et

se

dirigeant

ussitôtvers

e

serviteur e

Dieu,

ils

le trou-

vèrent

ui

venait

leur

rencontre,

achant

déjà

ce

qui

leur

était rrivé.

Ils

dirent

«

Dieu de

miséricorde,

t de toute

consolation,

e

Seigneur

nous

a

réconfortés

ans les tourments

ui

nous écrasaient c'est

pour-

quoi

nous nous

réjouissons

avec

toi,

son

serviteur,

'une

joie

spiri-

tuelle.

»

Et le serviteur

e

Dieu,

se

réjouissant

son

tour

dans

le

Sei-

gneur, es accueillit vec des paroles salutaires. ls s'en allèrent uel-

que

temps près, divulguant

e tels miracles.Nombreux ont ceux

qui,

opprimés

ar

diverses

maladies,

comme des

témoignages ignes

de foi

l'ont démontré

t le

prouvent,

recouvrirent

n

ces

temps

la

santé.

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52 S.

DI

DOMENICO

En

effet,

un

jour

de

fête,

devant une

assemblée

nombreuse,

Franco rendit Santorio del

Guasto,

qui, depuis quinze

ans,

ne

pou-

vait

plus

marcher,

a

capacité complète

et

parfaite

de se

déplacer.

Après

avoir

passé quinze

années

en

sa

demeure,

et

après

avoir,

à la manière es

ermites,

eçu

es sacrements

pirituels,

es mains

unies

en

croix,

durant a

nuit,

l

termina

a

vie dans le

Seigneur.

À

l'occa-

sion

de cette mort

bienheureuse,

ar

l'admirable

puissance

de

Dieu,

les

cloches du monastère anta

Maria

in

Silice,

en

avance sur

l'heure

habituelle,

ans

que quiconque

les

ait

sonnées,

se firent ntendre

us-

sitôt

et le chant du

coq

se fit entendre

galement.

Tous les moines

et le peuple,réveillés nsemble t mêlés es uns aux autres,virent n

direction e la cellule une lumièrebrillant omme une

escarboucle

ils

comprirent

ussitôt

'heureux

répas

du serviteur e

Dieu. Et

parce

qu'une

lumière vait

surgi

dans les ténèbres

our

les

hommes

u cœur

droit,

e

clergé

et le

peuple,

animés de

prières

et de

pieux soupirs,

accoururent u

plus

vite à la cellule.

Son

corps, qui dégageait

une

odeur suave comme celle

du

baume et de la

cannelle,

fut

transporté

solennellement

u monastère

vec

hymnes

t

cantiques par

ceux

qui

en

avaient

a force. Le lieu où se

trouve

ce

corps

brille

par

les nom-

breux miracles

qui s'y opèrent,

et

par

les nombreux

bienfaits

qu'obtiennent

eux

qui

supplientpieusement.

Au tempsoù, dans cetterégion, es moissonsproduisent es épis

chargés

de

fruits,

es

rayons

du soleil

inondaient out de leur cha-

leur,

à tel

point

que

les nombreux

pis,

avant

même d'avoir

produit

leur

fruit,

emblaient

brûler,

et

annonçaient

une

disette

à venir.

À

cause

de

cela,

des

prêtrespieux,

et des

gens

du

peuple,

surtout

es

plus âgés,

se hâtèrentvers

le tombeau du

bienheureux

Franco,

à

grands

renforts

e

prières

t de

suppliques

pieuses

et

pressantes.

Dès

leur

retour,

ls virent ussitôt

des

nuages chargés

de

pluie

dans le ciel.

Et

de

là,

une

pluie

providentielle

ortit,

ui

arrosa les moissons

deve-

nues

abondantes,

et riches n nombreux

ruits,

t ils se

réjouirent

n

priant

et en rendant

grâce

à Dieu et à saint

Franco.

Un hommed'Asserginommé Tommaso di Giacomo au lever du

soleil conduisait es boeufs t son

troupeau

ux

pâturages

e la forêt

or son

jeune

fils avait

peu après pris

e

même

chemin

l'insu

de

sa

mère,

mais

il

s'était

écarté du

chemin

de son

père.

S'étant

engagé

à

travers

'épaisse

forêt

touffue

d'arbres,

ayant

erré toute la

journée

de-ci

de-là,

fatiguépar

les

pleurs

et

l'épuisement,

près

le

coucher

du

soleil,

vaincu

par

le

sommeil,

l

s'endormit.Mais le

père,

de retour

le

soir,

demanda

à la mère

des nouvellesde

l'enfant et la mère de

même. Ne

l'ayant pas

retrouvé,

près

avoir

appelé

la familleet

les

voisins,

tous

coururent

ers la forêt vec cris et

flambeaux,

t mal-

gré

de

longuesrecherches,

ls ne

purent

retrouver

'enfant. Et pen-sant qu'il avait été dévorépar des ours ou des bêtes sauvages, s'en

retournant ans les

gémissements

t la

tristesse,

ls se rendirent

api-

dement

uprès

du

corps

du

serviteur u

Seigneur,

n

larmes,

n

implo-

rant sa

protection

miséricordieuse

our

l'enfant. Et

le matin

venu,

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ENTRE

E DÉSIRDE LA

MONTAGNE

T

LES APPELSDU

VILLAGE 53

ils découvrirent

'enfant

perdu

dans la

forêt,

ndemne.

Alors

qu'on

lui demandait

avec

qui

il

avait

passé

la nuit

précédente,

l

répondit

en

disant

«

Un certain moine

m'a donné hier

soir du

pain

et du

fromage,

l

a

passé

la nuit avec

moi,

et

après

le

lever du

soleil,

il

m'a conduit

en ce lieu et

m'a

dit

: Voici ton

père

et ta mère

qui

viennent

ta

rencontre,

e

crains

rien

;

et

il

s'en est

allé.

»

Un moine

nommé Salvato se

rendantà Rome

pour

visiter

es

demeures es

bienheureux

pôtres,

des

Évangélistes,

es

Martyrs,

es

Confesseurs

t des

Vierges,acquit auprès

de serviteurs

e Dieu

des

reliques,

grâce

à

son

ingéniosité

t avec l'aide de

Dieu,

pour

les don-

nerau monastère anta Maria in Silice,auquel il avait été voué depuis

l'enfance

et

que

pieusement

l

portait

en

grande

estime alors

que,

sur

le chemin

du

retour,

l

les

transportait,

l

fut encerclé

par

des

voleurs,

de sorte

qu'il

ne

pouvait espérer

ucun secours

ni

aide de

quiconque.

Mais,

après

qu'il

eut tracé

sur

eux

le

signe

de

croix,

et

que,

suppliant,

l eut

invoqué

le nom du

bienheureux

ranco,

aussi-

tôt les

voleurs

s'éloignèrent

près

lui avoir demandé

pardon.

Aussi

le moine

exulta

ardemment

n le

Seigneur,

t enrichit e monastère

en

apportant

es

reliques u'il

scella,

accompagnées

d'une

lettre,

ans

le tombeau

qui

contenait e

précieux

corps

de l'homme de Dieu.

Neuvièmelecture

Au

temps

des

semailles,

un hommede Barisciano

nomméDome-

nico travaillait

son

champ

avec son

bœuf

la

neuvième

eure étant

écoulée,

comme

il

avait terminé on

labeur,

il

s'endormit

fatigué

l'ombre

d'un arbre.

Se

sentant

urant on sommeilmenacé

par

un cau-

chemar

qui

avait

pris

'aspect

d'un homme

tout à fait

difforme,

l

se

réveilla

hébété

t terrorisé.

t

lorsqu'il

voulut e

lever,

l

s'aperçut

que

son

côté

droit avait

complètement

erdu

la

capacité

de se mouvoir.

Ramené chez

lui,

il

supporta

ce

handicap pendant

cinq

années,

sans

trouver

e

soulagement

ans aucun

remède.

Aussi,

comme

était

venu

le jour de commémorere trépasde l'homme de Dieu, il futportéà

son

tombeau,

grand

renfort

e

prières

t

de

dévotions, t,

par

la

grâce

du

bienheureux,

l

se

leva au milieu

de ceux

qui priaient,

otalement

guéri.

Et

c'est sur

ses

propres

ambes

qu'il accomplit

e

chemin du

retour.Aussi

longtemps

u'il

vécut,

chaque

année,

il

se rendit

pied

auprès

du

corps

bienheureux

our

l'honorer.

Dixième

lecture

Le sacristain

de cette

même

église

oublia

un

cierge

allumé sur

l'autel

de la

confession,

rès

de la cellule

repose

le

corps

du

ser-

viteurdu Seigneur, l'heure des complies.

Se

réveillant

u

point

du

jour, se souvenant u cierge tupidementaisséallumé,terrifié l'idée

que

les

parements

e l'autel

fussent otalement

rûlés,

l

se rendit n

hâte

auprès

de l'autel.

Il

découvrit

e

cierge

allumé

qui

n'avait

pro-

voqué

aucun

dégât,

et ne s'était

en aucune

manière consumé.

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Médiévales8,printemps995, p.55-78

Mathieu

ARNOUX

UN

VÉNITIEN AU MONT-SAINT-MICHEL

:

ANASTASE, MOINE, ERMITE ET CONFESSEUR

(t

VERS

1085)

Anastase

n'a

guère

suscité

la

curiosité

des

historiens.

Malgré

l'estime

et l'amitié

que

lui

portèrent

nselme du Bec ou

Hugues

de

Semur,

il

est resté dans

leur

ombre,

et

on ne

cite sa Vita

le

plus

souvent,

ue pour déplorer

on

imprécision

u

sujet

des

amis

d'Anas-

tase. Bienheureux bscur,sa réputation osthumede thaumaturge e

dépassa

pas

les limites

de Saint-Martin

'Oydes,

et

les

huguenotsy

mirent in en

dispersant

es

reliques.

C'est dans

le

presbytère

e cette

paroisse

proche

de Toulouse

que

l'évêque

de

Rieux découvrit

dans

les

dernières

nnées du

XVIIe

siècle

un manuscrit

e la Vita Anastasi

dont

il

procura

une

copie

à Mabillon1.

Ce récit ans

apprêt

écrit

par

le clerc

Gautier

l'intention

e

Pierre,

ous-diacre

e

l'église

d'Oydes,

et

de son

frère

Bernard date des

premières

nnées du

XIIe

iècle2.

L'absence

de

repères

chronologiques

précis

a

découragé

les

érudits,

1.

Bibliotheca

agiographica

atina

BHL)

n.

405-406,

d.

Mabillon,

cta anc-

torumrdinisancii enedict, VI/II, .487 rééd. ar esBollandistes,cta anc-

torum,

ct.

VII, 1136-1139,

t

Migne,

atrologie

atine

t.

149,

ol.

423-434

la

notice

e

YHistoireittérairee a France

t.

8,

pp.

162-167)eprend

es nformations

rassemblées

ar

Mabillon,

andis

ue

celles

u DictionnaireHistoire

t de

Géogra-

phie

cclésiastiques

t.

2,

col.

1469)

t de

P

ncyclopédie

atholicisme

t.

1,

p.

514)

n'ajoutent

ucune

récision

u dossierrès

rgumenté

onstitué

ar

es Bollandistes

dans

eur ommentaire

la Vita

t.

cit.

pp.

1125-1136).

n

peut

ussi e

passer

u

résumérès

loigné

e a

Vita

roposé

ar

P.

Golinelli

«

Negotiosus

ncausa ccle-

siae. anti

Santità

ello controra

mpero

papato

a

Gregorio

II

a Urbano

I

»,

dans

es

Fonctionses aints ans

e monde

ccidental

Rome,

991

Collection

e

l'ÉFR,

.

149), p.

259-284,

ux

pages

76-277.

2. Les

Bollandistes

n

situent

a rédactionntre

a mort

'Hugues

e

Semur,

n

1109,

t

sa

béatification,

n 1120

op.

cit.,

.

1125 on est

enté,

l'appui

e cette

datation,erapprocheresdestinatairese a Vita, etrus euotensiscclesieubdia-conus tBernardusraterius, es émoins'une onationaite la fin u XIeiècle

dans

a

paroisse

e Saint-Martin

'Oydes,

etrus e Doidas t Guillelmus

rater

ius

et

Benardus,

artulaire

e

'abbaye

e

Lézat,

d. P. Ourliac

t

A. M.Magnou

<

ol-

lectione documents

nédits,

érie n-8°t.

18,

2

vol.,

1984-1987),

.

1,

p.

15,

n° 14

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56

M.

ARNOUX

qui

se sont

peu

intéressés u

texte. C'est

pourtant

un documentfia-

ble

dont

l'auteur semble avoir

connu

Anastase,

et l'on

n'y repère

aucune contradiction

u inexactitude

rave.

D'autres

sources

e con-

firment

'ailleurs

en bien

des

points,

donnant

à

la

personnalité

e

l'ermite

un relief

qui

dépasse

la

simple description éographique

de

son

parcours.

Un ascète

et son

chemin les lieux et les

temps

L'errance racontéepar le clerc Gautierfrapped'abord par son

ampleur

le

parcours

de

son

héros

embrasse oute

'Europe,

et

il

con-

vientdans un

premier

emps

d'en

prendre

a mesure.

Anastase

naquit

à Venise

de

parents

llustres,

ui

le firent

nstruire

ans

les lettres

rec-

ques

et latines. Convaincu

dès

son

jeune âge

de la vanité des choses

de ce

monde,

il

s'appliqua

à la

prière,

e

força

au

jeûne

et

se

mit

en

quête

d'un

lieu

adapté

aux

exigences

d'une vie

ascétique.

Parvenu

au

Mont-Saint-Michel,

l

s'y

fit moine. Peu

après,

instruit e l'élec-

tion

simoniaque

de son

abbé,

il

se

retira

ur un

îlot

voisin,

il

vécut

quelque

temps

en ermite.

Hugues,

abbé

de

Cluny, ayant

entendu

parler

de

lui,

voulut le

rencontrerorsde l'un de ses voyageset le ramena avec lui dans son

abbaye.

Anastase

y

vécut,

dmiré

de

ses frères

our

l'austérité e son

existence

chaque

année,

il

se

retirait

e la

communauté

pour

vivre

en solitaire e

temps

du Carême.

À

la demande du

pape Grégoire,

Hugues

l'envoya

en

Espagne pour

convertires

Sarrasins

ar

la

parole

et

par l'exemple

il

leur

proposa, pour

les

convaincre,

de cheminer

dans un

brasier,

mais les

infidèles e dérobèrent u

défi,

et

Anastase,

déçu, reprit

e chemin de

Cluny.

Sept

années

après

son

retour,

'abbé

Hugues

le

prit

avec lui

lors

d'un

voyage

dans la

région

de

Toulouse,

pour y organiser

un

nou-

veau monastère.Profitant e

la

proximité

es

Pyrénées,

Anastase

se

retira vec l'assentimente son abbé sur la montagneAbriscola pro-

che de

Pamiers,

pour y

célébrer

e Carême

dans la solitude.

l

y

vécut

trois

ans,

édifiant e

peuple par

sa

vie et

ses

paroles.

Rappelé par

une

lettre e l'abbé

Hugues,

l

se

mit en

route

vers son

abbaye. Après

une halte dans

l'église

de Fredelas

il

procéda

à la translation u

corps

de saint

Antonin,

l

parvint usqu'à l'église

de Saint-Martin

d'Oydes.

C'est là

qu'il

mourut,

ntouréde la vénération

e

tous,

et

son

corps

ne tarda

pas

à

y opérer

des

guérisons

miraculeuses.

Les

repères hronologiques

ont

peu

nombreuxdans

le récit du

(donation,ers 091) tn°13 récapitulationes donationseçues,eproduisantnpartieen°14,vers 100). ien ue 'abbayeeLézat it cquis cette ccasionne

moitié e

l'église

aint-Martin,

l

ne

paraît as

qu'elle

oit ntervenueans

e culte

renduu bienheureux

rmite,

ui pparaît

ans e

textexclusivementocal rien 'indi-

que

n

particulierue

Gautier,

uteure a

Vitasoit

moine,

t

a

provenance

umanus-

crit e

plaide as

non

pluspour

ne

omposition

n

milieu

monastique.

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UN VÉNITIEN

U MONT-SAINT-MICHEL

57

clerc

Gautier,

qui

ne connut sans doute

Termite

ue

dans les

derniè-

res

années de sa

vie.

En

les confrontant

d'autres

ources,

l

est

pour-

tant

possible

de dater

approximativement

es

principales

tapes

de

son

cheminement. on arrivéeau

Mont-Saint-Michel e

peut

être datée

de

manière ertaine. on

départ

vers

'ermitage

e Tombelaine

st sûre-

ment à mettre en

rapport

avec

l'élection de

l'abbé

Renouf,

en

1057-1058,

qui

mit en

crise

la

communauté

montoise.

On

est tenté

de

fixer e début de son

séjour

à une

date

beaucoup

plus

ancienne,

si

c'est

bien lui

qui figure

parmi

es témoinsde la charte de

fonda-

tion de

l'abbaye

de

Bernay,

en 1025 .

Quelle

que

soit

la

date

rete-

nue, l'arrivée d'Anastase est de toutesfaçons liée à la présenceau

Mont d'abbés

italiens,

Guillaume de

Volpiano,

abbé de

facto

entre

1024 et

1031

ou

Suppo, présent

ans

l'abbaye

de 1033 à

10484. Son

séjour

sur

l'îlot

voisin de Tombelaine

ne dut

pas

se

prolonger

u-delà

de

1066,

lorsque

son

compagnon

de solitude Robert devint bbé

de

Saint-Vigor-de-Bayeux.

lus sûre est

la date

de son

voyage

en

Espa-

gne,

à

la demande de

Grégoire

VII,

pape

à

partir

de 1073. Le

séjour

en

Aquitaine, sept

ans

après

son

retour,

ne

peut

donc être

antérieur

à

1080,

et sa mort Saint-Martin

'Oydes,

trois ns

plus

tärd,

1083.

Malgré

la

part

d'hypothèse

e cette

chronologie,

lle

nous conduit

à

situer

a

parcours

d'Anastase dans

l'Europe

de la

réforme

régorienne,

dont il connut 'un des protagonistes, uguesde Semur,et à laquelle

il

participa,

d'après

d'autres sources relatives son

séjour

en

Nor-

mandie.

Les amis

de

Tombelaine

Quelques

documentsnormands

recoupent

n

effet es informa-

tions fournies

ar

la Vita et

complètent

e

manière

uggestive

es traits

du

portrait

e l'ermite. es historiens u Mont-Saint-Michel

nt

depuis

longtemps

oté

le

caractère ontestable

e

l'électionen 1057 ou 1058

de Renouf, lu au siègenon encorevacant de son prédécesseur uppo,

abbé de

Fruttuaria,

ui

avait dû abandonner

son

abbaye

en 1048 à

la

suite

d'une

cabale montée

par

certains

de

ses moines5.

L'accusa-

tion

de simonie

portée

par

Anastase ne

nous

a

pas

été

transmise

ar

les sources

normandes,

mais elle n'a rien

qui puisse

surprendre.

et

épisode

trouble ntraînaun schismede la

communauté,

ont

certains

3. M.

Fauroux,

ecueiles

ctes

esducs e

Normandie

Mémoires

e a

Société

des

ntiquaires

e Normandiet.

36),

Caen, 961,

°

35,

p.

131

cf. la

fin

e

'arti-

cle

'analyse

e cetteource.

ette

ypothèse

e datationst

ncompatible

vec a

pro-

position

aite

ar

P. Golinelli

art.

ité

upra

ote

,

à la

p.

276)

de

fixeruxenvi-

rons e 1020a naissanceeTermitemais ette roposition'est tayée'aucunargument.

4. Sur a

mainmise

esclercstaliensu

Mont,

f.J.

Laporte,

L'abbaye

ux

Xe

t

XIe

iècles

,

dans

Millénaire

onastique

u

Mont-Saint-Michelt.

1,

pp.

53-80,

aux

pp.

75-78.

5.

Ibid.,

p.

79-80.

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58 M.

ARNOUX

moines se retirèrentn

signe

de

protestation

ur l'îlot voisin

de Tom-

belaine. La

présence

d'Anastase

parmi

eux ne

fait aucun

doute,

au

témoignage

'une lettre 'Anselme

du Bec à

son ami le moine

Robert,

il lui

fait

part

de son

désir de rencontrer

nastase,

dont

il

a

entendu vanter es

éminentes

ualités

«

Aussi

je

t'en

supplie

me

recommandant lui-même n

mon

absence,

fais

moi

connaître

e

ton ami

Anastase,

dont tu

partages

a désirable

société. De la

sorte,

tu

jouiras

avec

moi

de son

amitié,

t

vous vous

partagerez

e service

ue je

te dois

;

ainsi, de ce jour et tantque nous vivrons, vec toi et grâce à

toi,

e pourraipour

ma

part

vénérer n cet ami un autre

Robert,

tandis

que

lui-même

rouvera

ussi Anselme son service.

ndi-

gne

comme

e

suis,

je

n'ose te demander e

que j'ai pourtant

l'audace de

désirer,

d'en user à

l'égard

d'Anastase comme un

autre

Robert,

et

que

lui-même

gisse

avec moi

comme

l

le fait

avec Robert.

En

effet,

on

parfum

uave,

qui

a

déjà

enchanté

tant d'habitantsde ce

pays,

enchantemon

âme au

point

de

me

donner e désir ardent

d'être

connu et

aimé

de

lui comme

je

l'ai connu et aimé

dès

que j'ai

entendu

parler

de lui6.

»

Le destinataire e cette

déclaration

passionnée

d'amitié nous est

bien connu. Il s'agitde Robertde Tombelaine, 'un des théologienses

plus originaux

e

l'église

normande7.Moine au

Mont-Saint-Michel,

l

prit

ar

la suite e nom de l'îlot où

il

s'étaitretiré

n

compagnie

'Anas-

tase

et où

il

poursuivait

on œuvrede

théologien

t son

enseignement.

Lui-mêmenous

a

témoigné

de

sa révérence

l'égard

de

son

compa-

gnon,

lui

attribuant n rôle

important

ans

I3

composition

de

son

ouvrage

fondamental,

e Commentaire u

Cantique

des

Cantiques

.

6. Éd. F.

Schmitt,

.

Anselmi

antuariensis

rchiepiscopipera

mniat

.

3,

Édimbourg,

946,

.

102-103,

°

3 :

quod

ut

fficacius

fßcias,recort

bsecrot

lli

sancto

iro

Anastasio

cuius

esiderabiliocietate

rueris,

e

ommendando

quantum

absentem

otes

notum

acias.

Utet llum

micumuummecum

ommunicest me

seruumuumumlio articipes.uatenusx hacdie dum iuimus,er eettecum

et

go

llum enerer

micumlterumobertům

t

lle

ossideat

eruumumdemnsel

mum.

uia

nim

on um

ignus

non udeo

etere

quod

amen

elle

resumo

,

ut

go

uelut lter obertus

utar

nastasioet

pse

me

ruatur

uasi

ltero

oberto.

Cuius

onus

dor am

er

muitos

uius

atriae

uauiter

iffususuanto

electabilius

animaemeae

ragrat

anto

psa

d eius micitiamt

notitiam

lagrai.

uas

am

x

quo

uitam ius

udiui,

abeo

t

amplectoruantumossum.

7.

L'identificationu destinataire

e la

lettre,

obertus

onachusà Robert

e

Tombelaine,

st ournie

ar

ne

losemarginale

u

ms.

London,

ambethalace

24,

qui précise

oberto

e Tumba

elene

ui

scripsitxpositionem

uper

antica

anti-

corum elle stde

surcroîtohérente

vec

'ensemblees nformations

e la lettre.

La

qualification

e

moine

ui

ui stdonné

ar

Anselme

onduit donner la lettre

unedate ntérieure

1066,

nnée ù Robert evintbbé

de Saint-

igor-de-Bayeux.

Sur e séjour e Robertu Mont-Saint-Micheltà Tombelaine,f. PaulQuivytJosephhiron, Roberte Tombelainet son ommentaireureCantiqueesCan-

tiques

,

dansMillénaire

onastique

u

Mont-Saint-Michelt.

2,

pp.

347-356.

8.

PL,

t.

150,

ol.1363

lettre

édicatoire

l

abbé

Anlroy

e

Saint-Wandrille,

un

des

disciples

e

Robert)

...rogauit

e ominusnastasiusdilectissimus

ater

t

domi-

nus

meus...

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UN VÉNITIEN

U

MONT-SAINT-MICHEL

59

Anastase

théologien.

La lettreDe

corpore

et

sanguine

Domini

Des

qualités

qui

firent'admiration

de ces

deux

grands

penseurs,

ne

subsiste

qu'un

court

témoignage,

une

lettre ur

le

problème

de

l'Eucharistie,

ditée en 1648

par

Luc

d'Achery

sous

le

titreDe ueri-

tate

corporis

et

sanguinis

Christi Domini

9.

L'auteur de ce

bref

exposé

de

doctrine,

moine

(frater

,

s'adresse à l'un de

ses

disciples

(

olim

karissimo

ilio),

devenu

abbé

(nunc,

Deo

propitio,

uenerabili

patri).

L'attribution

e cette œuvre à

Anastase,

généralement

ccep-

tée

par

les

historiens

ontemporains10,

ut

contestée u

xviie

siècle,

et mise en doute au siècle dernierpar les Bollandistes11.Aussi

convient-il

e

reprendre

'ensemble u

problème

ur de

nouveaux

frais,

en confrontant e

que

nous savons

d'Anastase avec

les

informations

données

par

le texte

ui-même t

par

sa tradition

manuscrite.

La

première

dition fut faite

par D'Achery,

dans une

annexe de

son édition des

œuvres

de

Lanfranc. Le

manuscrit

u'il

utilisa,

pro-

venant de

l'abbaye

Saint-Serge

t

Saint-Bacchus

d'Angers,

semble

aujourd'hui

perdu.

Sa

présentation

u texte

montre

qu'il

ignorait

l'existenceet la

biographie

de l'ermitede

Tombelaine12. ur la

foi

du

manuscrit,

l

fit

de l'auteur

un moine de

l'abbaye

Saint-Serge

t

proposa

de reconnaître ans

son destinataire n

abbé du

monastère

Saint-Aubin 'Angers,Girard. En 1665,un autreérudit,Du Boulay,

republia

a lettre

dans son histoire e

l'Université e

Paris,

à

partir,

semble-t-il,

u même

manuscrit13.

uelques

variantes

mineures,

ou-

vent

mauvaises,

par rapport

au texte

établi

par D'Achery

suggèrent

qu'il

s'était

reporté

u manuscrit

our

en

recopier

e

texte14

dans

l'ensemble

ependant,

on

interprétationlobale

du texte

t son attri-

bution

du texte à

un

certain

Anastase,

non

autrement

onnu,

con-

cordent vec les

hypothèses

e

son

prédécesseur.

On

peut

tenir

pour

probable que

le texte

ranscrit

ar

les deux

éditeurs

ortait

n

toutes

9.

PL,

t.

149,

ol. 433-434.

10. Cf. endernierieuM.Gibson,anfrancfBec>Oxford,978 la polémi-

que

sur

'authenticitést

voquée

p.

28)

par

J. de

Montclos,

anfranc

t

Bérenger

La

controverse

ucharistique

u

xi*

iècle

Spici

sacr.

ovan.y

7),

Louvain,

971,

ui

ne fait ucun

sage

u texte cf. aussi .

Ott,

Untersuchungen

ur

Theologischen

Briefliteratur

er

rühscholastik

Beiträge

ur

Geschichteer

hilosophie

nd

Theolo-

gie

des Mittelalterst.

34),

Münster,937,

.

11.

11.

Cf. sur e

point

es

remarques,

ouvent

ypercritiques,

aites

ar

es

Bollan-

distes

op.

cit.

pp.

1129-1130).

12. Beati

Lanfranchi

antuariensis

rchiepiscopl...

pera

mnia

Paris,1648,

«

Notae t

Obseruationesd vitam .

Lanfranchi

rchiepiscopi

,

pp.

21-23,

ote

(réédit.

.-P.

Migne,

L

t.

150,

ol.

63)

Elegantissimum

t

ectu

ignissimum

nti

quitatis

onumentume veritate

orporis

t

sanguinis

hristi

omini

n

venerabili

sacramento,

pistolam

icoAnastasiiuiusdam

onachi

si

conjecturae

iceatndul-

gere)

oenobiiS.

Sergii

t Bacchi

ndegavensistuafidem

uam

onfltetur,uveritevulgare.

13. C. E. du

Boulay,

Historia

Universitatisarisiens

s,

t.

1,

Paris,

1665,

pp.

462-463,

x ms.coenobii

ergiani.

14. Cf. n

particulier

a

leçon

antaque

lia

ntelligence

uce

ontre

autaque

ntel-

ligence

ance e

D'Achery.

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60

M. ARNOUX

lettres e nom Anastasius

rien en effet

ne

justifiait, lusieurs

décen-

nies avant la

publication

de la vie de

Termite,

u'on

attribuât rbi-

trairement n nom aussi

peu répandu

à un

personnage ui

n'eût

été

désigné

que par

son initiale.

La

lecturede dom

D'Achery

et de Du

Boulay

constitue

donc

pour

nous

une

lectio

difficilior

récieuse,

es

autresmanuscrits

e l'œuvrene

désignant

'auteur

que par

la

lettre .

Trois autres manuscrits

de la

lettre circulaient en

effet au

xviie

siècle,

dont un est

parvenu

usqu'à

nous. Le

premier, rovenant

de

l'abbaye

de

Saint-Ghislain,

ans le

Hainaut,

fut

utilisé

par

dom

Gerberon

qui plaça

la lettre

parmi

les

épîtres

nédites

d'Anselme de

Canterbury15.e texte ne portaiten effetque les initialesA et G

pour désigner

'auteuret le

destinataire,

ue

Gerberon

roposa

d'iden-

tifier

Anselmeet

à

l'abbé

de

Westminster ilbert

Crépin.

Un

autre

manuscrit u

XIIe

iècle

provenant

e la collection

de

Roger

de

Gai-

gnières,proche

du

précédent,

st

aujourd'hui

l'ultime

témoinmédié-

val du texte16. ne note

marginale joutée

au xvne

ou au xvnie

siè-

cle

y

fait

référence

l'édition

Gerberon17.

L'attribution Anselme

a,

par

la

suite,

été

repousséepar

la cri-

tique

anselmienne18. i

son

adresse G.

olim

karissimo

ilio

...nunc,

Deo

propitio,

uenerabili

atri

n'est

pas

sans

rapport

vec celle de

la

lettre

06

adressée

par

Anselme

Gilbert,

ors de

son élection

West-

minster olim diuinadispositione ilio... nuncDei gratiacoabbatiGis-

leberto,

raterAnselmus elle ne

présente

n aucun

cas la chaleur

de

sentiments

ui s'exprime

ans les

quelques

ettres

onservées 'Anselme

à

Gilbert.Le contenumême

et les

références

atristiques

e la

lettre,

étroitement

épendantes

de

Paschase

Radbert,

sont de

toutes

façons

15. Sancii nselmi...

pera

mnia

éd G.

Gerberon,aris, 675,

ettres

livre

IV,

n.

CV,

p.

452,

x ms.

Chisleniani.

f.

PL

t.

159,

ol.

254-255.

l

s'agit

u ms.

MMM

de la

bibliothèque

e

l'abbaye,

écrit

vec

précision

ans

e

catalogue

ressé

par

e

sous-prieurugustin

urot

ans a seconde

oitiéuxvme

iècle cf.

Katalog

der

Handschriftener Abtei on Saint-Ghislainm

Hennegau

,

dans

Serapeum

Cntelligenz-Blattn°5, 15mars 850), 850, ol.11,p.36.Cemanuscritembleis-

paru,

'après

es recherches'A.

Poncelet,

Annales e

l'abbaye

e

Saint-Ghislain

C

nnalesu Cercle

rchéologique

e Möns

t.

XXVI),

Möns, 897,

p.

387-388.

16.

Paris,

N

ms. at.

2707,

p.

119-123.

roche

u

ms.

de Saint-Ghislain

ar

sesvariantes

cf.

n

particulier

es

eçons

ante

blacionisontre

'Achery

antemmo-

lationis,

aptoquentelligencie

ontre

autaquentelligencie

ou

encore

n

diuino rtulo

contrendiuine

agine

rtulo

,

le manuscrit

arisien

'en

rapproche

ussi

ar

e choix

et a

disposition

esœuvres

u'il

ontient.es

deuxmanuscrits

ossèdent

neffetn

commune Liber e sacramentis

eophitorum

uquel

uccèdea lettree

corpore

t

sanguine

ominiuivie 'un hoix e sermons

'Yves e

Chartres,

t du De

archa

Noe

d'Hugues

e Saint-Victor.e manuscrit

arisien,pparemment

lus

ourt,

oint

des extes

'Augustin,

u

pseudo-

ugustin

t de.

aint

ernard,

andis

ue

e

manus-

crit e Saint-Ghislain

omprenait

nrecueile sentences

'Alcuin,

lusieurs

raitést

épîtrese saint érôme,tplurimaliaquaehicnimisrolixumoret.17. P. 119 Extat nterpera . (sic)Anselmipera D. Gab.Gerberondita

in

ib.

4

epistolarum,

pistola

05

p.

453.

18. Dès

1750,

nenotice e

V

Histoire

ittéraire

e

a France

t.

X,

p. 439)

vait

résumét

divulgué

es

remarques

e Mabillon

la

lettree

figureralus

ar

a

suite

dans ucune dition e la

correspondance

'Anselme.

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UN

VÉNITIEN

U

MONT-SAINT-MICHEL

61

incompatibles

vec une

date

postérieure

1085,

année de

l'élection

abbatiale de

Gilbert,

comme avec

l'attribution Anselme

à

cette

date,

la

polémique

eucharistique

vait

depuis

ongtemps

épassé

l'œu-

vre du

penseur arolingien

t l'abbé

du Bec-Hellouin

'aurait

pas

man-

qué

d'utiliser

'œuvre de son ami

et

prédécesseur

anfranc,

qui

avait

dès

1063 renouvelé

omplètement

a

problématique.

Ajoutons

qu'une

telle identification urait sûrement té

proposée par

Luc

D'Achery,

éditeurde

Lanfranc et

profond

connaisseurd'Anselme et

de

l'école

du

Bec,

si

elle avait été

compatible

avec le texte dont

il

disposait.

Mabillon

reprit

e

problème

dans le tome

IV

des

Annales

ordinis

sanciiBénédictin ù, s'appuyant ur a VitaAnastasi qu'il avaitaupa-

ravant

éditée,

et sur une autre

versionde la

lettre,

ontenue

dans

un

manuscrit e

la collectionde

Claude

Joly,

hanoine de

Notre-Dame-

de-Paris,

il

renouvelait a

question19.

Nous

ignorons

si le

nom

d'Anastase

était

porté

en

toutes lettresdans ce

manuscrit,

mais le

savant mauristene

proposa pas

de revenir

ur l'attribution

roposée

par

Luc

d'Achery.

Le

destinataire e

la

lettre tait

cette fois

désigné

par

la

lettreW ce

qui

détruisait es

hypothèses

aites

uparavant

par

D'Achery

et

Gerberon.Mabillon

proposa d'y

reconnaître

'abbé Guil-

laume

de

Cormeilles,

ncien moine du Bec.

Les

autres

nformations

transmises

ar

la

lettre u

sujet

de son

auteur,

a

qualité

d'enseignant

et sa conditionde simplemoine lui semblaient bsolument ohéren-

tes avec les

quelques

éléments vérés de la

biographie

de l'ermite.

La difficulté

rincipale osée par

ce texte st l'absence

d'éléments

chronologiques ui pourraient

ervir

e

guide pour

son

attribution t

sa datation.

L'hypothèse

de

Mabillon,

ouant

sur a très

grande

ncer-

tituderelative ux dates de la vie

d'Anastase

et de

l'abbatiat

de Guil-

laume

de

Cormeilles,

st

de

ce

fait

fragile

t

suspecte

entré

u Bec

en

même

tempsque

Lanfranc,

Guillaume

mourut eulement

n

1109,

et

n'est attesté

omme abbé

qu'en

1094,

après

la mort

d'Anastase20.

Il

faut en

outre,

pour que

soit

ustifiée

'adresseaffectueuse lim

filio

supposer qu'il

aurait

pu, lorsqu'il

était moine du

Bec,

accéder à

l'enseignemente l'ermite, ommeAnselme 'étaitproposéde le faire.

La

part

d'incertain st donc

importante,

ans

l'hypothèse

du

grand

historien.

Il

n'est

pourtant

pas

impossible

d'avancer une

propositionplus

convaincante,

t

plus

solide

en même

temps,

car tenant

compte

de

tous les éléments ransmis

ar

la

traditiondu texte. Bien

qu'aucun

des

manuscrits

ont

nous avons conservé es

leçons

ne

possède

une

véritable utoritésur les

autres,

on

doit mettre u

premier

ang

le

manuscrit

ngevin,

le

seul

à

nous avoir

conservé des noms

pour

19.

Annales

SB

éditione

1707,

.

IV,p.

513

le manuscritnquestionefigureas parmies manuscritse Claude olyt AntoineoiseldentifiésarLéo-

pold

Delisle

Le

cabinet

es

manuscritse a

Bibliothèque

ationale

Paris, 868,

.

1,

p.

538),

t ne

paraît as

être

arvenu

la

Bibliothèque

ationalevec e

fonds e

Notre-Dame-de-Paris

20. GalliaChristianat.

XIII,

col. 847.

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62

M. ARNOUX

l'auteur et le destinataire.Aucune motivation utre

qu'hypercritique

ne

peut

faire

rejeter

'attribution

u

texte un

certain

Anastase,

qui

est très

probablement

e moine

du

Mont-Saint-Michel.

n

ce

qui

con-

cerne e

destinataire,

a

leçon

W

fournie

par

le

manuscrit tilisé

par

Mabillon

conduit à

rejeter

ussi bien la

leçon

Gerardus,

relevée sur

le manuscrit

ngevin,

ue l'hypothèse

ilbertus

roposée

par

dom Ger-

beron.

La

conjecture

Willelmus

proposée

par

Mabillon,

outre son

caractère

aventuré,

oblige

à

négliger

a lecture faite

par D'Achery,

alors

qu'un

autre nom

permet

de tenir

compte

de toutes

les

leçons

tout en

fournissant

n destinataire

eaucoup plus

acceptable.

En

effet,

les initialesW et G pourraient iendésignerGariņus u Warinusabbé

de Saint-

igor-de-Cerisy

ès avant

1066,

alors

qu'

Anastase se

trou-

vait encore

dans

le

duché,

et

qui

avait

été

auparavant

moine au

Mont-

Saint-Michel21

même si l'on

ignore

à

peu près

tout de

sa

vie,

ces

quelques

informationsoïncident

arfaitement

vec

l'adresse de la let-

tre,

olim

filio

.. nunc

abbati.

Une

mélecture

ssez

simple

du nom

abrégé

de Gariņus

peut

en outre

expliquerpar

la

supposition

d'une

abréviation er

a

leçon

Gerardus

ransmise

ar D'Achery

et Du Boul-

lay.

L'hypothèse

d'une

lettre l'abbé de

Cerisy

permet

nfin,

sans

accumuler es

hypothèses,

e

proposer

une datation

assez

haute,

vers

le milieu du

XIe

siècle,

compatible

avec

le

contenu même du

texte,

indiscutablementié à la controverse ucharistique utourdes thèses

de

Bérenger

e

Tours,

mais

qui paraît

remonter

ux

premiers emps

de la

polémique.

Le court texte

rédigépar

Anastase ne

constitue

as

un

traité ur

l'Eucharistie,

mais une sorte de

confession,

omparable,

a

puissance

poétique

en

moins,

à celle contenue

dans

la

Confessio

theologica

de

Jean de

Fécamp22.

Refusant

es

garrula

Aristotelicorum el

Crisip-

peorum

argumenta

allusion

peut-être

ux

subtilités es théories éren-

gariennes,

ou les

prestiges

d'une

éloquence

cicéronienne,

Anastase

revendique

ne

approche

du

mystère ar

la

foi,

par

l'Écriture t

par

les

Pères,

sauvegardant

insi

la

simplicit

s,

clé du

jardin

de

la

parole

divine. La progression u texte est limpide.À l'exposé des paroles

de l'institution

ucharistique,

iréesdes

évangiles

t

brièvement om-

mentées,

uccèdent roiscitations

ttribuées trois

autorités

rrécusa-

bles

:

Cyprien,Augustin

t

Ambroise. Bien

que

tenant

es

témoigna-

ges pour

suffisants,

'ermiten'en

conseille

pas

moins à

son destina-

taireune

listede lectures

omplémentaires

Hilaire,

Grégoire

e

grand,

Cyrille,

éon le

grand,

Jérôme,

ède le

vénérable,

aschase

Radbert,

21.

D'après

obert

e

Torigni,

e immutatione

rdinis

onachorum.

e

abba-

tibus t abbatiis ormannorumt

aedificatione

aruméd.

L.

Delisle

dansChroni-

que

de Roberte

Torigni...

uivie e divers

pusculesistoriques

vol.

,

Rouen

Sociétéde L'histoireeNormandie)1873, . 195. 'abbéGarin igurearmiestémoinse

la fondatione a Trinitée Caen n

1066,

t

reçoit

ne

donation

our

'abbaye

e

Cerisy

ntre

035

t

1066

éd.

Fauroux,

ecueil

es actes

es ducsde Normandie

n° 169 t

231).

22. Pars

II,

51.

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UN

VÉNITIEN U MONT-SAINT-MICHEL

63

ainsi

qu'une

série d'autres textes

ugustiniens.

'abondance des réfé-

rences

patristiques

résentes

ans

un texte i

bref

mpressionne,

t

peut

faire llusion.

En

fait,

'ensemble

du dossier

utilisé

par

Anastase

pro-

vientdirectement

e Paschase

Radbert,

bbé de Corbie au

IXe

iècle,

dont

les

traités

eucharistiques,

isés

par

la

critique

de

Bérenger

de

Tours,

forment

'exposé

le

plus

complet

de

la doctrine

ucharistique

avant la

querelle

du

XIe

iècle.

L'usage

que

fait notre

auteur de cette

source

commune à

toute

la

polémique

anti-bérengarienne

'est

pourtant as

indifférentt nous

apporte

des

informations

mportantes.

e

Paschase, Anastase,

qui

ren-

voie son lecteur u traitéDe corporeet sanguineDomini pour une

information

lus

complète,

cite en fait

presqu'exclusivement

Epis-

tula

ad

Fridugardum

dans

laquelle

l'abbé

de Corbie

avait,

vers

856,

résumé

es

principaux

points

de

la doctrine

ucharistique

l'inten-

tion d'un

de ses

disciples,

moine de

Saint-Riquier23.

es

phrases

entières

de

ce court

traité

se

retrouvent insi dans le texte

¿'Anas-

tase.

Celui-ci

emprunte

n

particulier

u libellus

oint

à la

lettre,

ans

lequel

Paschase

avait rassemblé

'essentieldes textesdes Pères rela-

tifs

à

l'eucharistie,

a

plupart

de ses références. eules lès allusions

à

saint

Jérôme

t à

Bède le vénérable envoient u De

corpore

t san-

guine

Domini

que

l'ermiteutilise

peu,

bien

qu'il

l'ait

eu

sans

aucun

doute à sa disposition.La traditionmanuscrite e la lettrede Pas-

chase

est en

effet iée à celle des

troisième t

quatrième

ditions du

De

corpore

et

sanguine

Domini.

Le traité irculaitdans le duché de

Normandie

u

XIe

iècle,

et

servit

bondamment

Lanfranc et à

ses

disciples.

Le

texte

d'Anastase

permet

donc de

préciser

'édition

utili-

sée,

dont

subsistent ans

la

région

deux

témoinsdatés

du

XIIe

iècle,

provenant

des

abbayes

de

Jumièges

t Saint-Ouen

de Rouen24.

Il n'est d'ailleurs

pas

sûr

qu'Anastase

ait eu sous

les

yeux

un texte

correct

de Paschase

au

moment ù

il

composait

son texte des con-

fusions

de toutes

sortes

rendent es

citations nidentifiables

qui

ne

s'est

pas reporté

la source. C'est

ainsi

que

la citation

«

Hoc occi-

pite in pane quod pependitin ligno, et hoc occipite n calice quod

manauit

ex

latere

»,

deux fois

rapportée

saint

Augustin

dans la let-

tre de

Paschase,

se

trouve

par

Anastase attribuée

saint

Cyprien,

de

même

qu'il

donne à saint

Ambroise

a

phrase

«

Quia

ipsa

est caro

Christi n sacramento

t

sanguisque

in cruce

pependit

t

fluxit

latere

et

que

ex

uirgine

Maria

sumpta

est et

non

alia,

sed

ipsa

»,

qui appar-

tient u

commentaire

e l'abbé de

Corbie. Anastase n'est

guère

plus

fiable

quand

il cite le De

corpore

et

sanguine

Domini

: une lecture

trop

rapide

le

pousse

à inscrire ous

le

nom

ďExpositio

Exodi

une

23.PaschaseRadbert,e corpore

t

anguine

omini

t

Epistola

d

Fridugar-dum éd. B.Paul, TurnhoutCorpus hristianorum,ontinuatioedievais,16),

1969,

p.

2-131 t 145-173.

24.

Rouen,

ib.

mun.,

ms.1409 t

A 438 tous

es

ms.de

P

Epistola

d

Fridu-

gardum

ppartiennent

la famille

esms.

A,

C et

N

de a

classificatione B.

Paul,

op.

cit.

sur

ette lasse e

manuscrits,

f.

bid.,

p.

XXXII-XXXVI.

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64

M. ARNOUX

citation

de saint Jérôme xtraite

'un

sermon,

relatif

l

est

vrai à un

passage

de l'Exode. Le seul

apport particulier

e

l'ermite n matière

patristique

onsiste

eut-être

ans l'identification'une

citation e Bède

le Vénérable nsérée ans nom

d'auteur dans le

De

corpore

t

sanguine

Domini.

La contribution 'Anastase au débat

eucharistique

'est donc

pas

celle

d'un

théologien

udacieux,

encore moins celle d'un

lecteur

igoureux,

et

peut

sans

njustice

tre

ubliée u

profit

es

ouvrages

ien

plus

nova-

teurs de Lanfranc et de

Guimond d'Aversa. On

ne

peut

cependant

s'arrêter ce

point.

Parfaitement

ndépendant

e

l'enseignement

e Lan-

franc, ui s'appuie principalementur e traitéDe corpore tsanguine

Domini le texted'Anastase

lui

est

sûrement

ntérieur,

t la

référence

exclusive

l'

Epis

tuia ad

Fridugardum

ui confère ne

originalité

mar-

quée

dans

a

collection es textes

ntibérengariens.

e choix

solé

s'expli-

que

peut-être

ar

la

précocité

e la contribution

'Anastase,

'il est

vrai

qu'on peut

dater

son traitédes

années

1050,

avant

que

l'évolutionde

la

polémique

ait

permis

a mise

au

point

d'un

argumentaire

lus

effi-

cace. Plus

qu'une

étape

dans le

développement

u

débat,

l

marquerait

alors

un

point d'origine

de la réflexion

héologique,

la manièredu

texte,

rès

précoce

aussi,

de

la

Confession héologique

de l'abbé Jean

de

Fécamp.

Quoi

qu'il

en

soit,

l'élégance

de

la

construction e

l'épî-

tre, a clartéde son exposition t la puissancede conviction 'un rai-

sonnement

édigé

la manièred'un Credo

justifient

es

compliments

que

lui

adressa

son

premier

diteurLuc

D'Achery.

Les

sources

normandes

onnent onc

d'Anastase une

image

cohé-

rente,

e

situant ux côtés

de Jean de

Fécamp,

Lanfranc et Anselme

dans le

groupe

des clercs taliens

e

l'église

normande,

articulièrement

actifsdans

le

diocèse

d'Avranches,

ù l'abbé

Suppo

les avait

appelés

à

s'établir

ur es

bénéfices

u Mont-Saint-Michel. e

réseau extrême-

ment ctifmis en

place

dès les

premières

nnées du

XIe

siècle

par

Guil-

laume

de

Volpiano

à

partir

de

son

abbaye

de

Fécamp,

se

confondait

en de nombreux

oints

avec la zone

d'influence

lunisienne.Aussi le

départd'Anastasede son ermitage e Tombelaineet son adoption par

l'abbé de

Cluny

ne constituent-ils

as

tantune

rupture ue

le

prolon-

gement

d'une

expérience

monastique déjà

riche et féconde.

Anastase

et

Hugues

en

Aquitaine

Pour la

période qui

suit

e

départ

d'Anastase

de

Normandie ux

côtés de l'abbé de

Cluny,

a Vita

reste notre seule source. Une bio-

graphie

récente

d'Hugues

de

Semur,

tout en

déplorant

'absence de

repères hronologiquesprécis,accepte ou confirmees informationsdonnées

par

Gautier25. i le

voyage d'Hugues

en Normandie ou en

25. A.

Kohnle,

Abt

Hugo

von

Cluny

1049-1109

t

Sigmaringen,

993,

ux

pp.

191

t

301.

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66

M. ARNOUX

une notice

du

cartulairede

Lézat,

datable

des

années 1075-1081ne

faitmention

'aucune

abbaye

à

Predelas,

lors même

qu'elle

situe uc-

cessivementes biens-fonds

onnés aux moines in

uilla

Sancii Anto-

nini

de

Fredalez

in uilla de

Fredalez...

in

ipsa parrochia

Sancii

Antonini.

Des textes du

XIe

iècle

émergent

euls un

village

et une

paroisse

de

Predelas,

avec son

église paroissiale

dédiée à saint

Antonin29. e

voyage

de l'abbé

Hugues

et de l'ermite

Anastase

rap-

porté par

la

Vita

se

situe

ui aussi dans

les années

1080,

et

témoigne

de la volonté d'installer

ne

véritable

ommunauté

monastique

en

ce

lieu

:

«

Presque sept

années

s'étaient

écoulées

depuis

son retour

[à Cluny] quand

le

vénérable bbé voulut

se rendreen

Aqui-

taine à la

prière

de certains

rères,

aïcs

et

nobles,

qui

désiraient

renoncer u monde et

revêtir

'habit

monastique.

Aussi

prit-il

avec

lui

l'homme de Dieu

Anastase,

qui

était habile à

expliquer

l'écrituredivine et

savait exhorter t édifier

es frères.

Ayant

parcouru

a

plus

grande

partie

de

l'Aquitaine,

ls

parvinrent

nfin

dans la

région

de

Toulouse,

où le comte

du château de

Pamiers

s'apprêtait

adopter

'ordre

monastique

avec

sa

femme t

ses

fils.

»

Ce

que

fut

effectivement

e

prieuré

de

Fredelas ne nous est

pas

connu. l

apparaît

ependant

u'

Anastase

y reproduisit,

algré

es réti-

cences

de l'abbé

Hugues

le mode de

vie

qu'il

avait

adopté

à

Cluny

«

Déjà approchait

e

temps

l'homme de Dieu

Anastase

avait coutume de célébrer

e

Carême

dans la solitude de

lieux

escarpés.

Agité our

et nuit d'une

grande inquiétude,

l

jugea

les

montagnes

voisines

des

Pyrénées

convenables à son

projet

de célébrer e

Carême

et de

mener

uelque temps

a vie

d'ermite.

Cédant

malgré

ui à ses

prières,

ar

Anastase était comme le

bâton ou la colonnequi supportait es frères,'abbé donna son

accord.

Comme

il

savait sa constance

dans le

service

du

Sei-

gneur,

l

ne voulut

pas

retarder

'accomplissement

u vœu :

triste

et

contraint,

l

lui accorda ce

qu'il

demandait.

Comme

ils des-

cendaient tous

deux,

le

vénérable

abbé en larmes lui donna

l'accolade avec des

pleurs

et des

sanglots, 'adjurant

de ne

pas

oublier

les siens

et

d'intercéder

uprès

de

Dieu en faveur

des

autres

frères.

Puis,

le saluant une

dernière

fois,

il

rentraau

monastère.

La lettre nvoyéeà l'ermitepar son abbé, trois ans plus tard,semble refléter ne certaine

préoccupation

our

le moral de la com-

29. Cartulaire

e

'abbaye

e

Lézat

op.

cit.

note

,

t.

2,

pp.

393-394,

°

1547

les éditeurs'ont dentifiéucun es

toponymes

n

question.

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68 M. ARNOUX

les.

Elle

est surtout

pour

nous

un

document

précis

sur

les

rapports

entre

érémitisme

t

vie

régulière

ans

le

monde

bénédictin,

'autant

plus

révélateur

ue

son auteurn'est

pas

un

moine,

et

qu'il

écrit

près

que

les Clunisiens ient abandonné

la

région

de

Pamiers34.

es der-

nières

ignes

de

son

texte

llustrent

ien la

synthèse

riginale

t

équi-

librée

que

constitue

pour

lui l'existence

d'Anastase :

«

Ayant

parfait

sa

course,

prêt

à ceindre a

couronne de

justice

dans

la communautédes

saints,

moine,

ermite

t con-

fesseur,

l

partit

vers

le

Seigneur

e

17e

our

des calendes de

novembre.

L'alliance

des deux

termes,

moine et

ermite,

mérited'être

scru-

tée,

car le récitde Gautier montre

u'il

s'agit

d'une

constantede la

vie

d'Anastase

et

son

parcours

fait revenir

égulièrement

'expérience

de la vie solitairecomme un élémentnécessaireà

son

accomplisse-

ment

spirituel.

Si

l'apprentissage

d'austérité

auquel

il

consacre les

années de sa

jeunesse

ne

paraît

pas

comporter

e

période

érémitique,

il

se

place

sous le

triple igne

du

jeûne,

de la

veilleet

des

prières

ieiu-

niis,

uigiliis

et

orationibus), xpression ui

ne revient

as

moins

de

quatre

fois dans le

texte,

oujours propos

de

périodes

de

vie solitaire.

Le jeûne est pour Anastase une seconde nature dès son jeune

âge,

il

a renoncé u

vin

et

se

prive

de nourritureu

moins deux

ours

par

semaine,

n

temps

rdinaire.

es

privations

ont

multiples

durant

son

agonie,

il

refusede

recourir

l'apaisement

d'un

bain,

parce que

du

jour

de

sa conversion

monastique

l

a

renoncé à cet

usage.

Les

veilles t les

prières

ont

probablement

a

marque

particulière

e

l'exis-

tence

érémitique

sans

programme

i

horaire,

elles

rompent

vec le

temps

récurrent e la

règle,

et

exigent

une

suspension

de la vie en

collectivité.

Moine

attentif

l'esprit

de la

règle

et au

sens

profond

du

cycle liturgique,

Anastase a élu le

temps

de Carême

comme

moment

es

privations

xtrêmes

t

de la vie

solitaire.C'est

alors

qu'illaisse ses frères our s'établirdans des lieuxescarpés praerupta oca)

où il mène

sa

vie de

méditation

t

d'ascèse.

Que

le

temps

même de

l'ermite oit délié de toute référence

ollective,

on

ultime

éjour

dans

les

montagnes

yrénéennes

n

témoigne

parti pour

célébrerdans la

solitude es

jours

du

Carême,

Anastase ne

revient ers

les siens

que

trois ans

plus

tard,

rappelé par

une

lettre

ressante

de son

abbé. La

description ue

Gautiernous a laissée

de la vie

montagnarde

'Anas-

tase

frappe par

son

pouvoir

d'évocation

«

L'homme de Dieu Anastase

qui

ne désirait

as

autre

chose

que d'accomplir on vœu, se mit oyeusement n route vers es

montagnes.

Comme il s'en

approchait

et

que,

aucun obstacle

34.

Il

n'est onc

as possible

'affirmer,

ommee fait . Golinelli

u'il 'agit

d'un

exte

rovenant

e la

sphère

lunisienne

art.

ité la

note

).

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UN

VÉNITIEN

U MONT-SAINT-MICHEL 69

ne

s'y opposant,

on

pouvait

en

noter

tous les

détails,

l

choisit

pour

y

habiterun

sommet rès

élevé,

qu'on appelait

Abriscola

parce que

dans sa

région

l dominait

toutes

les

autres cimes.

Laissant alors dans

une

église

au

pied

de la

montagne

e frère

qu'il

avait emmené vec

lui,

il

la

gravit

eul

et

y

construisitvec

des

branchages

une cabane

étroite

t un

autel

pour y

offrir e

sacrifice.

Alors,

entre e froidet les

neiges

éternelles,

l

servait

le

Seigneur

t s'adonnait aux

jeûnes,

aux veilles t

aux

oraisons.

Il

ne

se

nourrissait

ue

d'eau et de

pain

cuit

sous

la

cendre,

qu'il

recevait n

quantité

nsuffisante

u frère

u'il

avait

laissé

au pied de la montagne.

Sa

vie

n'est

donc

pas

abandonnée aux

caprices

de la nature au-

vage

: de la

vallée où

il

s'est

établi et où viennent

arfois

e

rejoin-

dre d'autres

religieux,

n frère

ourvoit

la

maigre

itance

de l'ermite

installé

ur

la

montagne.

Cette communauté

édoublée,

associant un

eremus

au sommet

t une cella vouée au travail

dans

la vallée évo-

que

de manière

frappante 'organisation

maginéepar

saint Romuald

pour

les

ermitesde

Camaldoli,

dont l'activité aborieuse

et

produc-

tive des

frères u cenobium nstallé u bas de la

montagne rotégeait

la

tranquillité 'esprit

t l'ardeur à la

prière.

A

l'instardes Camaldu-

les, la vie solitaire 'Anastasen'exclutd'ailleurspas la sociétéd'autres

anachorètes

à Tombelaine

déjà,

il

partageait

a

retraite vec

son

ami

Robert

peut-être

es

disciples

e celui-ci

ivaient-ilsussi

à

leurs ôtés.

Sa retraite

montagnarde

'est

pas

désertique

non

plus,

et les visites

sont

fréquentes

«

Un

jour, ayant

achevé sa

prière,

'homme de Dieu

Anas-

tase était

sorti

de

sa

cellule et s'était assis au dehors

en

compa-

gnie

de deux frères

ui

étaient enus

e voir. Son

antique

ennemi

fut

à,

et

mit e

feu

à

sa

cellule et à

l'autel

qu'il

avait construit

pour y

offrir e sacrifice.

Mais l'homme

de

Dieu

veillait,

et

voyant e feu,yreconnut ne ruse de l'infâme nnemi. e levant

et marchantvers

la

cellule,

il ordonna à celui-ci de

se

retirer

et

éteignit

e feu d'un

signe

de croix.

»

La solitude

n'impose pas

non

plus

le

silence,et,

s'il refuse oute

forme

de

donation,

qui

le ferait entrer ans le circuit

de

l'échange

et des

pratiques

séculières,

Anastase

est,

malgré

ui,

un

intercesseur

et un

prédicateur our

les

habitants

de la

montagne

«

Comme

il

demeurait

à et

que

dans les alentours

n

par-

lait de la vie qu'il menait,beaucoup venaient e voirpour rece-voir de lui les

paroles

de vie et connaître a vie admirable,et

en

échange

de la nourriture ivine

qu'il prodiguait,

ls tentaient

de

le

nourrir

e nourritures

emporelles.

ais

lui

n'acceptait

ien

pour

son

corps

et refusait

oute nourriture e

qui

ne voulait

pas

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UN VÉNITIEN

U MONT-SAINT-MICHEL

71

ses dernières

nnées la

rappelle

avec

précision,

ans user des

péri-

phrases vagues

habituellement tilisées

par

les habitantsde la

Gaule

pour

désigner

es

régions

'au-delà des

Alpes,

ou

d'Italie,

et leurs

habi-

tants

Anastase est

vénitien,

t non

italien ou

transalpin.

on nom

est rare

dans les sources

vénitiennes,

mais

il

n'est

pas pour

autant

étranger

la tradition

agiographique

ocale :

c'est celui d'un

martyr

d'Aquilée,

vénéré illeurs ous le nom d'Anastase

de

Salone,

et dont

les

habitants e la Vénétie

honoraient es

reliques Split36.

e

patro-

nage

peu

courant,

insi

que

la culture

recque ue

ses

parents

ui

firent

acquérir37 uggèrent

es

originesgrecques

ou

dalmates

qui explique-

raient ussi peut-êtreon attirance our les retraitesnsulaires u mon-

tagnardes,

i

caractéristiques

e la tradition

monastique

orientale.

Son

parcours

e

porte

vers

'Occident,

u

plus

loin de

la ville

qui

l'avait vu naître

plus

rien dans sa vie

ne

révèle

qu'un

lien

subsiste

avec le lieu

natal. Résonnent

pourtant

dans

le

récit

de

son errance

bien des échos

de l'histoirevénitienne.

'exil

hors de la cité

natale,

la mission

auprès

des

infidèles,

a

profession

énédictine t la

prati-

que

de

la vie solitaire ont

par exemple

autant d'éléments

qui rap-

prochent

Anastase

de

son

aîné, Gérard,

moine

puis

abbé

de San Gior-

gio

Maggiore,

évêque

de

Csanàd,

compagnon

du

roi Étienneet évan-

gélisateur

e

la

Hongrie,

martyr

n

104638.

Mais

surtout,

a

biogra-

phied'Anastase faitécho de manière roublante un épisodefameux

de

l'histoire

cclésiastique

de Venise.

En

septembre

79

en

effet,

e

doge

Pietro Orseolo

avait

abandonné

nuitamment

a cité

pour

se réfu-

gier,

près

un

long parcours,

ans

l'abbaye

bénédictine e Saint-Michel

de

Cuxa,

dans les

Pyrénées,

ù

il

mourut

peu après

en odeur de sain-

teté.

Sans

doute est-ce

par

une ironie du

sort

qu'Anastase,

comme

auparavant

'Orseolo,

trouva dans une

abbaye

de confins

placée

sous

l'invocation

à Saint-Michel

e locum idoneum

ubi

monachorum

us

ciperet

habitům

9.

La

coïncidence es

deux

parcours

st

pourtant

ai-

36.

Andreae anduliVenetiarum

ucis hronicon

enetuméd. E. Pastorello

(RIS,t.XII, 1),pp.15et29. Aucun ersonnageortante nom 'apparaîtans es

chartesénitiennes

es

Xe

t

xie

iècles

ubliées

ar

e

«

Comitato

er

a

pubblicazione

delle

onti elative

lla storia i Venezia.

37.

Vita,

ol.

427 a

primaeuo

tudiisitterahbus

parentibus

raditus

st n

qui-

bus

ta uram

dhibuit

t

am

raecisuam

atinis

itterismnibusd

unguem

idere-

tur mbutus.

38.

Pour 'histoirencienne

e

l'église

énitienne,

n se

reportera

la

synthèse

récente

e Daniela

ando,

Una hiesa

i

frontiera.

e

istituzioni

cclesiastiche

ene-

ziane

nei

ecoli

VI-XII,

ologne,

994. urGérard e

Csanàd,

f.

es

recherchese

J.

Leclercq,

San Gerardo

i

Csanàd

il

monachesimo

,

dansV. Branca

éd.,

Venezia

Ungheria

elRinascimento

Florence,

973,

p.

3-22

sur

a vie

rémitique

voir la

p. 6),

et S.

Tramontin,

Problemi

giografici

t

profili

i santi

,

dans

F.

Tonon

d.,

La

Chiesa i

Venezia

ei ecoli

XI-XII

Contributi

lla storia ella

chiesa enezianat.2), Venise, 988, p.153-177.39.Par-delàeshistoiresingulièrese Pietro rseolotdAnastase,n nepeut

qu'être rappé

e a récurrencees

anctuairesédiés

saintMichel ans

esvies e

Romualdtde

Guillaumee

Volpiano,

i 'on

ajoute

uxdeux anctuaires

éjà

cités

ceux e

Saint-Michel

e a

Cluse,

ans e Piémont

aujourd'hui

acra

i

San

Michele)

et

du Monte

argano.

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72 M. ARNOUX

sissante,

puisque

le sanctuaire

de

Fredelas et

l'ermitage

ù

Anastase

vint se retirer e trouvent ans les

Pyrénées,

proximité

e

l'abbaye

de

Lézat,

où futmoine

Guarin,

par

la

suite

abbé de Saint-Michel-de-

Cuxa,

guide

et

protecteur

u

doge fugitif.

armi

es

compagnons

'exil

de celui-ci

figurait

ussi

Romuald,

fondateur u

début du

XIe

iècle

de la

congrégation

e

Camaldoli,

dont

'ermitage

ondé

par

Anastase

reproduisait

i

exactement

'organisation.

On ne sait rien de

la formation e l'ermiteni

de

ses

éventuels

contacts avec les moines

vénitiens,

ortement

nfluencés

ar

l'ensei-

gnement

e Romuald.

Cependant,

'aspect

«

romualdien du

parcours

d'Anastase est particulièrementaractéristique du saint ravennate,

dont

il

partage

la

double culture atine

et

grecque,

il

se

rapproche

à la fois

par

son instabilité

ui

le

pousse

régulièrement

ur les

rou-

tes,

mais aussi

par

sa fidélité ffichée la

règle

de saint

Benoît,

en

particulier

on attachement l'autorité

abbatiale

et à

l'obéissance

monastique, par

son souci

d'inscrire a

vie solitaire

dans un

projet

cénobitique,

voire

par

son attirance

pour

les

sites

extrêmes40. e

cadre du Mont-Saint-Michelonvenait

donc à

merveille

son entrée

dans la vie

monastique.

L'isolement du

sanctuaire,

a

violence de la

mer,

'existence 'une

longue

tradition

rémitique

taient utant

d'élé-

ments

séduisants41.

l

reste

cependant

à

expliquer

es

liens

entre

e

monastèrenormand et l'église vénitienne.

Ouverte tous les courantsde la

réforme

cclésiastique,

'église

normande vait vu affluer

es clercs

provenant

e toute a

Chrétienté,

et

Anastase n'était

pas

le seul oriental

s'y

être

arrêté.

En

effet,

u

momentmême

il

séjournait

u

Mont,

l'église

rouennaise ccueil-

lait un autreclerc

méditerranéen,

'ermite

iméon,

venu

du Sinai

pour

recueillir

es aumônes faites u

monastère

ainte-Catherine

ar

le

duc

de

Normandie,

Richard I. Ce

n'est

pas

ici le

lieu de raconter n

détail

l'odyssée

du

moine

grec,

qui

devait

par

la suite

terminer

es

jours

comme

reclus

la

Porta

Nigra

de

Trêves.

Notons

cependant

a

place

importante

enue

dans son

périple par

des

marchands

vénitiens en-

contrésau Caire, qui l'emmenèrent ans une croisière ragiquesur

le

Nil.

Remarquons

urtout

e rôle

essentiel

'un

célèbre

réformateur

bénédictin,Richard,

abbé de

Saint-Vanne de

Verdun,

rencontré

Antioche et

suivi

usqu'à

Jérusalem,

râce auquel

Siméon avait

pu

40. Sur les

caractéristiques

e

l'érémitisme

omualdien,

f. G.

Tabacco,

«

Romualdoi Ravenna

gli

nizi

eireremitismo

amaldolese

,

dans

'eremitismo

in Occidente

ei ecoliXI-XII

Atti

ella

econda

ettimana

nternazionale

i

studi,

La

Mendola,

0

août-6

eptembre

962),

Milan, 965,

p.

73-119.

41.

Sur

a

tradition

rémitique

es les

normandes,

f.

'articlee L.

Musset,

«

Essai

ur 'ancien

onachisme

nsulaireutour es

ôtes

u

Cotentin

tde

'Avran-

chin, dansNédélèqueries.ecueil 'articlesffertsYvesNédélecSociété 'His-toiretd'Archéologiee a Manche1994),p.351-366,uirassembleoutea biblio-

graphie

écenteur

Anastase

t

'ermitage

e

Tombelaine.n

passage

e

Y

Histoire

desLombards

e

Paul

Diacre,

elatif

ux

phénomènes

arinses

côtes e

Séquanie

et

d'AquitaineLivre

,

6),

montre

ue

a

réputation

e

la

région

vait

épassé

es

limitese la

province

e Rouen.

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UN

VÉNITIEN

U

MONT-SAINT-MICHEL

73

parvenir

Rouen42.Rien

n'indique que

le

voyage

ďAnastase

depuis

Venise

ait

connu les même

péripéties,

mais on

y

trouve

vec la

même

fonction

d'intermédiaire n

autre Bénédictin

llustre,

Guillaume de

Volpiano.

L'abbé de

Saint-Bénigne

e

Dijon, qui exerça

de

facto

l'autorité

abbatialeau

Mont-Saint-Michele 1023

usqu'à

sa

mort n

1031,

oua

sans

aucun

doute un rôle

important

ans le

départ

d'Anastase

de

sa

ville natale.

Raoul Glaber

évoque

dans sa

Vita de

Guillaume es ami-

tiés vénitiennes

e

l'abbé de

Dijon

:

le

patriarche

de

Grado,

Orso

Orseolo,

demanda

ainsi à

suivre e réformateur

ans son

monastère

soucieuxdu bien de son évêché,Guillaume ui enjoignitde rester ur

le

siège patriarcal43.

'autres Vénitiensdurent

ubir la

même

fasci-

nation. Le

chroniqueur

de

Saint-Bénigne

de

Dijon, évoquant

l'influence

uropéenne

xercée

par

son illustre

bbé,

insiste

particu-

lièrement

ur les

relations

qu'il

avait

établies avec

l'église

italienne,

et en

particulier

vec

les

ermites

e Ravenne.

C'est

sans

trop

de

sur-

prise que

nous

voyons

apparaître

dans la liste

des

religieux

ubjugués

par

l'abbé de

Dijon

un

certain

Anastase

«

Des abbés venaient n

grand

nombrede toutes

parts

pour

se soumettre

lui,

prêts

à

obéir

il

y

eut

parmi

eux Jean

de

Capoue, un autreJean,abbé du monastère aint-Apollinaire e

Ravenne, Benoît,

abbé du monastère

aint-Severde

Ravenne,

ainsi

qu'Anastase,

et

Marc,

et tant

d'autres

bbés

qu'il

serait

ong

d'énumérer.

...]

Eux-mêmes

nfin,

es

plus

saints

pères

et

doc-

teursdes

ermites,

omuald,

Guillaume t

Martin,

ue

la ville

de

Ravenne tenait n

grande

vénération,

t tous les

autres

que

ren-

ferme

'Italie,

recherchaienta

société

du

père

Guillaume44.

42. Vita

.

Symeonis

eclusi

reuir.

BHL

7963)

Acta

SanctorumJuin

,

pp.

88-89

un

exte

ouennais,

a

Translatio

tMiracula

anctae atharinae

BHL

1679

B), témoigne

u souveniraissé n Normandie

ar

iméonson

passage

Rouen

st

liéaux

origines

u

monastère

e La

Trinité-du-Mont,

uquel

iméononfiaes

reli-

quesde sainte atherine'Alexandrie,uidevaientar a suite ervir dénommer

l'emplacement

u monastère

le Mont-Sainte-Catherine.es

originesermaniques

u

premier

bbé e a

Trinité,

sembard

enere

eutonicus

suggèrent

ue

e rôle

e Richard

de

Saint-anne ans a créationu

monastère

ouennaise e

réduisit

as

à

une im-

pleprotection

ccordée Siméonors e son

voyage

ers

a Normandie.eremercie

François ougard

'avoir ttirémon ttentionur

es

textes

mportants.

43.

Rodulfi

labriVita

omniWillelmibbatiséd. N.

Bulst,

dans

Rodulfus

Glaber

pera

Oxford

edieval

exts),

xford,989,

.

296

quis

nim

mquam

lius

preter

umVeneticorum

entem

ntam mica

amiliaritate

abuit

[...]

Siquidem

rsus

illorum

atriarchapsius

ancii

atris

ecreuit

ffici

onachus,

ed

quia pse ispen-

diumllius

entisquod oret ro

tantibsentia

iri,

onsidéronslli n

uo

proposito

permanere

uasit.

44. Abbates

tiam

erplures

x diuersis

artibus

enientes

ponte

e

ipsi

ubiicie-

bant bedirearati interuos ueruntbbasJoannes,ietus apua us, lteruo-queJoannes,bbasmonasterii.Apollinarisnurbe auenna,enedictusuoquebbas

monasterii

. Seueri rbis

lassis,

nastasiustiam t Marcus t alii

abbates

lures

quos

ongum

st numerare.

...] psi

denique

ancii iri

patres

t

doctores

remita-

rum

xistentes,

ama

anctitatis

ongueateque

otificati

Romualduscilicet

Willel-

mus

c

Mārtiņus,

uos

n

magna

eneratione

abebat rbs

auenna,

eteriqueuos

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UN

VÉNITIEN

U MONT-SAINT-MICHEL

75

ment

vidente,

e même

que

la circulation

'une

communauté l'autre

de clercs

déléguéspar

l'abbé de

Fécamp pour

exercer 'autorité

bba-

tiale. C'est

ainsi

que

Thierry, uparavantprieur

de

Fécamp puis

abbé

de

Jumièges,

xerça

successivementa

charge

de

custos du

Mont-Saint-

Michel,

entre

1023 et

1025,

puis

d'abbé

de

Bernay

à

partir

de

1025

6

.

La

présence

de clercs liés

au

Mont-Saint-Michelors de la

dédicace

de

l'abbaye

de

Bernay

st donc

plus que

vraisemblable.Ces

trois

émoignages,

iés

au

personnage

e Guillaumede

Volpiano,

font

de l'erranced'Anastase

tout autre chose

qu'un

parcours

gyrovague

son arrivée

en Normandie llustre

e

fonctionnement

u

réseau créé

par l'abbé de Saint-Bénigne e Dijon, qui avait fait de l'église nor-

mande

le lieu

d'application

des

projets

réformateurs

maginéspar

les

clercs taliens.

Aux

côtés

de Jean de

Ravenne,

abbé de

Fécamp

et de

Dijon,

et de

Suppo,

abbé

de Fruttuaria t du

Mont-Saint-Michel,

l'ermite

vénitien enta

d'inculquer

aux clercs normands a culture t

les

idéaux

héritésde Romuald

et de

ses

compagnons47.

Il

est donc

possible

de

dessiner,

partir

de la Vita Anastasi un

portrait

ohérent e l'ermiteAnastase.

Tout au

long

de

son

parcours,

d'autres

documents

iennent onfirmer'exactitude u texte t en

pré-

ciser

les informations. e

personnagequi apparaît

à

la

lumière

de

l'ensembledes sourcesn'a pas grandien importance.Les historiens

de la

Normandie

u

ceux de

la

controverse

ucharistique

vaient

déjà

noté sa

présence

t

son

activité,

n le

reléguant

e

plus

souventdans

leurs notes

ou annexes.

À

le suivre

dans son

cheminement,

nastase

reste

un

personnage

e second

plan, toujoursplacé

en retrait

ar rap-

port

aux

grandspersonnages

ui

l'honorèrent

e leur

amitié. Promis

par

sa naissance

t sa culture

ux

plus

hautes

charges,

l

demeura

im-

ple

moine,

et ne connut

qu'une réputation

imitée,

malgré

une mort

exemplaire,

uivie

de miracles.

Cette

modestie

même fait le

prix

de

sa

biographie.

Malgré

son

originalité,

a carrière

monastique

d'Anas-

tase

n'est

pas

couronnée de succès éclatants

son

départ

du Mont-

Saint-Michel,près e retrait e l'abbé Suppo, marque 'échec des dis-

ciples

de

Guillaume de

Volpiano

dans la

grande abbaye

normande.

Moine clunisien

xemplaire,

l

ne fut

guèreplus

heureuxdans les mis-

sions

que

lui confia

Hugues

de

Cluny

les musulmans

d'Espagne

repoussèrent

a

prédication,

a communauté e

Fredelas ne

resta

pas

dans

l'obédience

clunisienne.L'obscurité

de

l'ermite

n'est donc

pas

imméritée

il ne fut

amais

qu'un

second

rôle dans la réforme.

46. N.

Bulst,

Untersuchungen...p.

cit.,

pp.

167-176.

47. La Vita

nastasi

pporte

onc ne

onfirmation

upplémentaire

uxremar-

quesde

Daniela ando

ce

sujet

«

unfilo

ottile

are

ttraversaree sceltemonas-

tiche i unPietroOrseolo,i unGiovanniradenigodi unMorosini,epropen-

sioni

eligiose

el

patriarca

rso

la viva ffezioneelducato ei onfrontiell'abate

di

San

Benigno,

n

filo

he

iunge

ino ll'ambiente

avennate,

eso ertilea un'aris-

tocraziaello

pirito

così icco i tradizioni

remitiche,

i

esperienze

onastichein-

novate

(op.

cit.

upra

ote

8,

à la

page135).

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76

M.

ARNOUX

Sa

présence

dans la

plupart

des combats essentiels

e son siècle

n'en

prend

que plus

de

relief

aux côtés

de Guillaume de

Volpiano

et de

Lanfranc,

l

est

de ceux

qui

font de la

province

de Rouen le

laboratoire

de

l'Église

nouvelle

il

participepar

la suite

à l'encadre-

ment

religieux

e

la

Reconquista

spagnole

t à

la

recréation

u

réseau

monastique

d'Aquitaine.

Son rôle

d'enseignant,

a contribution

u

débat

eucharistique,

e

même

que

la

dissidence

u'il

mena au

Mont-

Saint-Michel,

ux

côtés

de Robert

de

Tombelaine,

témoignent

'un

engagement

ctif dans

les débats

internes

e

l'Église,

il

emploie

la

culture et

les

qualités

intellectuelles

ui

lui

valent

l'admiration

d'Anselme ou d'Hugues de Semur. Moine modeste, l figuredans

l'entourage

de deux des

plus

actifs

propagateurs

de la

réforme,

t

l'abbé

de

Cluny

n'hésite

pas

à

lui confier ne mission

reçue

du

pape

Grégoire

VII.

À

sa

suite,

nous

pénétrons

donc

dans

le

groupe

mal

connu des réformateurs

e

base,

sans autorité

ni

célébrité son

par-

cours

prend

alors

toute sa

cohérence

pirituelle.

nastase en

effetne

semble

pas

avoir

poursuivi

durant

on erranced'autre idéal

que

celui

d'un

perfectionnement

ndividuelmis

au

service

de sa

communauté.

Romualdien

e formation

t de

comportement,

lunisien

ar

son

enga-

gement,

Anastase

présente

a

figure

xemplaire

des

simples

combat-

tants de l'Église grégorienne,ans lesquelsn'auraientpu s'étendre

l'Europe

entière es innovationsmisesau

point

par quelques

ascètes

dans les

cloîtres

et les

ermitages

'Italie centrale.

Annexe texte

e la

lettre e

corpore

t

sanguine

omini

Manuscrits

t éditions

P. :

Paris, BN,

ms.

lat.

2711,

p.

119-122

xiie

iècle).

Al

: éd. Luc

d'AcheryBeati

Lanfranchi

antuariensis

rchiepiscopl...

Opera

omnia

Paris,1648,

Notae t Obseruationes

d vitam . Lanfranchi

archiepiscopi, pp.21-23, ote experuetustoodiceMS. coenobiiS. Sergii

et Bacchi

Andegauensis.

A2

: éd.

C.

E. du

Boullay,

HistoriaUniversitatis

arisiensis,

.

1,

Paris,

1665,

pp.

462-463,

x MS.

coenobii

ergiani.

G.

: éd. Gabriel

erberon,

anciiAnselmi antuariensis

rchiepiscopl...

Opera

Paris,

1675,

pp.

452-453,

x Ms.

monasterii hisleniani.

M. : codexJolianus

ind. Jean

Mabillon,

AnnalesOSB t.

IV,

Paris,

1707,

p.

513.

DominoG.

1

abbati2

limkarissimo3

ilio,

nunc,

Deo

propicio,

enera-

bili

patri,

rater .4

Domini,

ui

est,

quod

habet5.

De

corpore

t

sanguine

omini

ussisti,

enerande

ater6,

t

quicquid

paruitasmea sentit,mmo7 uod credit, ostre anctitati8atefaciat. ec9

breuiter

ro

modulo

meo,

salua

fidei

puritate,

ccipiat10.

redo sacrosanc-

tum

orpus

ominicum

uod

in

altari

otidie x sacerdotisfficio

onsecra-

tur,

mni xecrata

ubitacione,

eram

ius arnem

sse,

ue

passa

est

n

cruce

et uerum

anguinemui

manauit

latere11,

t

ipsa

ueritas12estatur Caro

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78

M.

ARNOUX

de Doctrina hristiana

,

que

in

tricesimi

erti

salmi

itulo*

redictus

ater

Augustinus

xaminando

isputât48,

entilandoque49

xaminai.

Si

diligenter

uesieris,

nuenies

rocul

ubio,

ut

dixi,

mnes oncordare

et nullatenus iscordare.

euera

ui

ab

ubertate omus50 omini nebrian-

tur,

nichilmirum

i

eadem

ánete

t51

ure

mellito

utture

ructare

lorian-

tur. Ceterum

uper

his

que

te,

pater,

ubente,

ro

mea

quantulacumque

falcultacula52

ectore leno

fiducie

ixi,

humiliter

bsecro,

non mirerisi

garrula

ristotelicorumel

Cripsippeorum

rgumenta

rutinareel ex flumine

Tulliane

loquencie

iuulum

ucere

on53

erpendis,

ed memento

uia

sim-

pliciter

ructus

arpimus

n diuine

pagine54

rtulo

uorum

adices

loriose

fixe unt

n55

elo. Vale56.

Variantes

Geraldo

Al A2

;

W. M. 2abbati m.

P.

Carissimo m.

Al

A2. 4Anastasius

Al

A2. 5Domini... abet

om. G.

6pater

m. P. 7siueG.

8sanctitati

estrae

Al

A2. 9hoc A2.

10accipiet

2. nex latere

Al

A2. 12veritas

psa

Al

A2.

13sanguinem

eum . 14Et m.

Al A2.

15ergo

.

16hujusmodi

2

G. 17aliam

om. P. 18eum

. G. 19Christi

2. 20tanta

onsecrado .

Al A2.

21rationes

A2.

22complector

. 23uiuusm. G.

^dabo A2.

25uirtuten

marg.

al. ueri-

tate G.

26figura

l.

27aliud

om P. 28Christus

m.

P.

29quique

G.

30immolationis

l

A2.

31

um P.

32uel

igura

m. G.

33spiritu

anctoA2.

34uero m.

Al A2. 35uel m.

P.

36captoque

. G.

37tantaque

lia

intelligen-

ce luce A2. 38beatus

. 39doctor

2

^de latereG. 41est m.

Al

A2.

42Gerardel A2. 43ueracissimorumm A2, ^patribus m. P. Al A2. 45in

libro om. Al.

46

Augustinus

m. P.

Al

A2.

47quinto

.

48uentilat

.

49disputando

l

A2. 50domus

m. Al. 51et

m.

A2.

52facultate

2.

53nec .

54in iuinoP. G.

55in

m.

Al. 56valete

2.

Sources

EF

:

Paschase

Radbert,

Epistola

d

Fridugardum

éd. B.

Paul,

Turn-

hout

Corpus

Christ

anorum,

ontinuatio

edievalis,

6),

1969,

p.

145-173.

de

Corp.

Paschase

Radbert,

De

corpore

t

sanguine

omini

éd.

B.

Paul,

Turnhout

Corpus

Christianorum,

ontinuatiomedievalis

16),

1969,

p.

2-131.

alo.

6,

56 Mt.

26,

26

;

Me.

14,

22. *>Lc.

2,

19.

CEF,

21-24.

dEF,

69.

eIo.

6,

51.

fEF,

60-63.

EF,

145.

hEF,

148-149.

EF,

74.

*EF,

138-139.

EF,

140-143.

mEF,

52.

nEF,

205.

°EF,

224-225.

EF,

757.

Qde

Corp.

XXII,

15.

'de

Corp.

X,

27-54.

SEF 592.

lEF,

630.

«EF,

730.

VEF,

113-114.

WEF,

1.

XEF,

670.

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80

C. CABY

Parmi

ces fondations

à

l'image

de

Camaldoli,

celle

de

Santa

Maria

degli

Angeli

fournit,

n raison

de

l'exceptionnelle

onservation

de la

documentation,

n observatoire

rès

pertinent

ur

la

place

et

les formes

de

l'érémitisme

ans la

congrégation

amaldule

et

sur la

pérennité

'une

image

érémitique

e l'ordre

qui

constitue

'un

des fac-

teurs

du succès

des

Angeli

dans la

Florence de la

fin

du

Moyen

Âge.

Le

modèle

érémitique

de Camaldoli

Le 7 septembre293, e poèteGuittone 'Arezzoet le prieur éné-

ral de

Camaldoli,

Don

Frediano,

signent

un

compromis

par lequel

le

poète s'engage

à

verser

00 livres

pisanes

pour

la construction 'un

ermitage

ur

le

modèle

de celui

de Camaldoli4. La convention om-

porte

un ensemble

e

clauses,

définissant

récisément

es

rapports

ntre

la

nouvelle

fondation

t

l'ermitage

omualdin à la fois

une

identité

avec

le modèle

de

Camaldoli,

une

dépendance

irecte is-à-vis

u

caput

ordinis

mais

également

ne

certaine utonomie dans la

congrégation

du fait de la

spécificité

rémitique.

'attentiondu

poète pour

l'obser-

vance

érémitique

st d'ailleurs

oulignée ar

une

clause

précisant u'en

cas

de non

respect

de cette

condition,

e nouvel

ermitage

t ses

bâti-

mentsseraientconfiésaux « Frati della Continenza 5. Soumises à

l'approbation

du

majeur

et des

ermites e

Camaldoli,

ces conditions

sont

ratifiées e

14

uin

1295

après quelques

retouches6.

La

référence

Camaldoli

et l'affiliation

irecte

l'ermitage,

nvo-

quées

lors de la

plupart

des

fondations

rémitiques

ans

la

congréga-

tion,

témoignent

e la

pérennité

u

modèle de vie

solitaire

de l'ermi-

tage

des

Apennins,plusieurs

iècles

après

sa fondation t

alors

qu'il

est

devenu la

tête d'une

vaste

congrégation

à dominante

cénobitique7.

À

l'époque

est

fondé

le

«

romitorio de Santa

4. Ann. amald, V,App. 95-298surGuittone'Arezzot etteondation,oir

D.

M.

Federici,

storia

e Cavalieri audenti

Venise, 787, ,

pp.

335-336t

II,

pp.

135-137C.

Margueron,

echerches

urGuittone

'Arezzo

Paris,

966,

n

part,

pp.

71-75

L.

Ragusi,

Le

origini

el

monasteroi SantaMaria

egli

ngeli

ttra-

verso

documenti

ntichi

,

dans

Ambrogio

raversariamaldolese

el

VI

cente-

nario ellanascita

Camaldoli,987,

p.

30-44.

5.

ASFirenze,

ipl.Angeli,

293

ept.

voir .

Ragusi,

Le

origini

el

monas-

tero

i Santa

Maria

egliAngeli

,

loc. cit.

n

part. p.

37-41.

6.

ASFirenze,

ipl.Angeli

ad datam.

7.

Par

xemple,

Santa

Maria

i

Camaldolino

rès

e

Bologne,

ieu e réclusion

donné

l'ermitage

e Camaldolians

esdernièresécenniesu

xiie iècle

our u'y

soientdifiésn

ermitage

t un

oratoiret dont

es

supérieurs,

ocumentés

ans a

première

écennieu

xiiie

iècle ont

n certain

anson,

majeur

e

l'église,

t

un

prieur,

inôme

alqué

ur

celuide

l'ermitage

es

ApenninsReg.

Camald.

III,n°1382-1383,p. -5 n°1415,p.20-21 n°1422, .22 n°1424, .23 n°1439-40,

pp.

31-32).

ur e monastère

G.

Gentili,

L'antico

comparso

remo

i S. Maria

di Camaldoli

resso

ologna»,

trenna

torica

olognese

14,

1964,

p.

117-135

C.

Piana,

«

Monasteri

enedettini

aschili ellacittà diocesi

i

Bologna

el

medioevo

,

Ravennatensiat

X,

Cesène, 981,

p.

271-331,

n

part. p.

290-291.

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ÉRÉMITISME T

«

INURBAMENTO

81

Maria

degli Angeli,

'observance

érémitique

st

déjà

clairement

éfi-

nie

par

un

corpus

égislatif,

odification es

règles

de vie

des

premiers

ermites

e

Camaldoli,

renouvelée u

XIIIe

iècle

par

les

prieurs

Mar-

tin

II

(1248-1259)

et

Gérard

I

(1274-1291).

Comblant

l'absence

de

toute nstructioncrite e la

part

du

fondateur e

Camaldoli,

e

prieur

Rodophe

Ier

1074-1089)

enregistré

ar

écrit

'observance n

vigueur

à Camaldoli une

soixantaine

d'années

après

la mort

de

Romuald8.

Il

décrit

une

vie

érémitique lus tempérée ue

celle

prônée par

Pierre

Damien

mais,

comme

ui,

il

n'assigne

à la vie

cénobitique

u'un

rôle

préparatoire

l'entréeà

l'ermitage.

l

insiste

d'ailleurs sur le statut

ambigude la fondation-sœur e Camaldoli, Fontebuonoà quelques

kilomètres

n

contrebasde

l'ermitage,

ont

il

rappelle qu'elle

ne doit

pas

être

transformée

n

monastèremais

toujours

rester

n

hospitium.

En

1113,

orsque

e

pape

Pascal

II

reconnaît

fficiellementa

congré-

gation

de

Camaldoli,

il

souligne

a dualité de

son

observance,

à

la

fois

érémitique

t

cénobitique,

out en confirmant

a

prééminence

e

principe

es ermites t du

prieur

e

l'ermitage,

galement rieur éné-

ral

de la

congrégation9.

raisemblablement

ous le

pontificat

e Pas-

cal

II,

le

Liber

eremiîice

egule

de datation

et

d'attribution rèscon-

troversées,

écrit

avec

précision

es coutumes et

«

ordinamenti de

la vie

pratique

à

Camaldoli

(chapitres

1

à

37),

avant

de

consacrer

six chapitres chapitres 8 à 53) au prieur,choisi parmi les ermites

ou dans d'autres

communautés conditiontoutefois

u'il

ait

prati-

qué

la vie

érémitique.

La

prééminence

es ermites t de

l'ermitage

de

Camaldoli,

où les

abbés

et

prieurs

e

l'ordredoivent

e rendre ha-

que

année,

est ainsi confirmée10. la

fin

du

XIIe

iècle,

en

1188,

un

autre

prieur énéral,

Placide,

rédige

une nouvelle

version

peu

nova-

trice

-

des

constitutions11.

En

revanche,

u milieu du

XIIIe

iècle,

la

législation rémitique

est renouvelée

ar plusieurs

nitiatives

énéralices.

a

première

mane

du

prieur

Martin

II,

par

ailleurs

responsable

d'un tournant

énobiti-

que

de la

législation

amaldule,

mais

qui, pour l'usage particulier

e

San Mattia de Murano,édictédes constitutionsrémitiques. n 1243,

en

effet,

eux

ermites

e Camaldoli

reçoivent

e

l'évêque

de

Torcello

un

petit

établissement,

ocumenté

depuis

1220

et

situé

sur l'îlot de

8. Selona

tradition,

e

prieurublia

eux éries

e

constitutions,

une ite cons-

titutionsrèves

(Ann.

amald.

III,

App. 42-551)

t

'autre,

e iber eremitice

egule

dite constitutions

ongues(ibid.,

12-542).

es

Annalesamaldulesccordent

'anté-

rioritéux onstitutions

ongues1080)

uiviese

quelques

nnées

ar

esbrèves

1085).

Cette

hronologie

été nversée

epuis

e début u siècle

uis

otalementemise

n

cause

ar

W. Kurze t récemment

ar

G. Vedovato

voir

nfra

ote

0).

9.

Reg.

Camald.,

,

754 P.

Kehr,

Regestaontificum

omanorum

I

:

Ita-

lia

Pontificia

III, Rome-Berlin,906,

°

6,

p.

177.

10.Ann.Camald. II,App. 12-542commentaireinéaireans . Lugano, acongregazioneamaldoleseegliremitiiMonte oronaRome,e d.,1908,p. 5-53.

Sur a datationardiveuLiber remitice

egule

voirW.

Kurze,

Monasteri

nobiltà

op.

cit. en

part. p.

253-254tG.

Vedovato,

amaldolila sua

congregazione,p.

cit.,

p.

51-58 t 77-89.

11.

Ann.Camald

, IV,

127-129.

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82

C. CABY

Murano dans

la

lagune

proche

de

Venise.

Suivant

'exemple

des

pre-

miers

occupants

formés

l'ermitage

de

Camaldoli,

les

frères e San

Mattia

adoptent

un

style

de vie

érémitique,

econnu e

29

mai 1248

par

le

prieur

énéral

Martin

II

qui

décrète

olennellement

ue

S.

Mat-

tia sera désormais

ppelé

eremuset

qu'on y

mènera

une vie

érémiti-

que

dans la

réclusion,

auf

pour

la

récitation ommune des heures

à

l'église

c'est

cetteobservance

pécifique

u'il

fixedans des consti-

tutions

usage

local12.

Quelle

que

soit la

réalité

de l'observance

ré-

mitique

San Mattia

(les

sources

du

xivc

siècle aissent

peu

de doute

sur

la dérive

cénobitique),

cette

spécificité

istingue

es

Camaldules

de San Mattia aux yeuxdes Vénitiens, our esquels ls sont es « ermi-

tes

de Murano

»,

et leur vaut

une faveur

spéciale

de la

part

des

donateurs13.

e

succès

de la fondation

es ermites e Murano et

leur

autonomie au sein de

la

congrégation

amaldule se traduit

d'ailleurs

par

une

politique

d'essaimage

selon

un modèle

cistercien e filiation.

Les ermites

e Murano fondent

u réforment

uccessivementan Mat-

teo et Santa Caterina à Forlì

(1311)14,

San Giovanni

Battista de

Chiogga

(1322)

15,

San Giovanni Battista de Faenza

(1329)

16,

San

Giovanni Battista

de

la

Giudecca,

dans les

années

133017,

an Gio-

vanni Battista de

Bagnacavallo

(1336)

18,

et

enfin,

Santa Maria ou

San

Nicolò de Pesaro

(1360)

19.

Cette

intense ctivité

fondatrice,

la-

cée sous le signede l'ermitepar excellence,Jean-Baptiste,st recon-

nue,

le

3

juin

1370,

par

le

pape

Urbain

V

qui

confirme a

juridiction

de San Mattia

di Murano sur ses

suffragants20.

e constitue insi un

12.

Cité

par

F.

Corner,

cclesiae orcellanae

ntiquis

onumentisunc tiam

primum

ditisllustratae

désormais

ccl.

Tore.),

II,

Venise, 749,

p.

95-96

Ann.

Camal.

IV,

377.

ur

e

monastère,

oirMonasterienedettiniella

aguna

eneziana

éd. G.

Mazzucco,Venise, 983,

p.

80-82.

13. Voir es estamentsnfaveur

e S. Mattia

e

heremitanis

e

Murano,

u

con-

ventum

ratrum

eremitarume Muranodes

remitae san

Mathia

e

Murandes

fratres

eremitasanciiMathie

e Murano onservésans

ASVenezia,

. Mattia

i

Murano

Pergamene

-5.Au

xve

iècle,

es

formulese raréfient

rogressivement.

14. F.Corner, ccl. Tore, Ill, doc.N, pp.136-137.n 1311,e prieure

S.

Matteo

i

Murano

ublie

es onstitutions

articulières

our

ette

ondation,

odelées

sur elles e Martin

II :

Ann.Camald

, V,

282-286.

15. Ann.Camald

, V,

320 t

App.

38-441

Monasterienedettiniella

aguna

veneziana

pp.

93-94.

16.

A

l'origine

e cet

tablissement,

e

trouve

n

rmitee

Faenza,

imon e Pla-

nettis,

ui

fait on S. Mattia

i Murano e soi

et de sa

cellule,

ite

ella ancii

Eucleriiu Dioticleriiafin

u'y

oient ondés n oratoiret un cenobium..

For-

túnio,

Historiarum

amaldulensiumibri

res

Florence,575,

.

II,

lib.

II,

cap.

7

(d'après

n

actede

uin

1329,

nregistré

S.

Mattia)

Ann.Camald

, V,

339-341.

17. Voir

ASVenezia,

.

Michelen Isola

Pergamene

3B

;

F.

Corner,

ccl.

Veneti,

pp.

281-282

Ann. amald

, V,

368-372Monasterienedettiniella

aguna

veneziana

pp.

95-96.

18.Ann.Camald, V,App. 21-522la versioneFortúnioeprisearF. Cor-ner st rès onfuset nexacteF.Corner, ccl. Tore, III, p. 100.

19.Ann.Camald

,

VI,

59

App.

XII,

508-511.

20. Ann.Camald

,

VI, 107,

App.

XIX,

522-523F.

Corner,

ccl. Tore

, III,

doc.

P,

p.

139

Lettresommunes

'Urbain

,

éd. M. Hayez

t M. H.

Laurent,X,

Rome,

983,

°

26648,

.

247.

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ÉRÉMITISME

T

«

INURBAMENTO

83

réseau,

sinon

de réelle observance

érémitique,

u

moins de stricte

observance,

ue

les sources

vénitiennesonsacrent

omme

ordo Sancii

Mathie de

Muriano de Venetiis21. e

succès de ce

modèle se mesure

également

son

rayonnement

u

delà des

Apennins.

Ainsi,

e

7

juillet

1269,

e

majeur

de

Camaldoli

reçoit

dans

l'ordre

camaldule es ermi-

tes reclus

de S. Giovanni de Gaitanis et

leurs

cellules,

conformément

à

la

Règle

de saint

Benoît et aux

constitutions

amaldules,

mais l'acte

d'agrégation

précise

que

l'établissement era

soumis

à la

juridiction

de

l'ermitage,

des

ermites,

u

prieur

et de l'ordre

«

comme le sont

le lieu et les frères rmites

e San Mattia de

Venise

»

(sicut

unt

ocus

et fratresheremite ancti Mathie de Venetiis)12.

La seconde

nitiative e

mise

à

jour

des constitutions

rémitiques

est

due au

prieur

Gérard

I

qui place

au

premier lan

de son

généralat

la

réforme

e l'observance

rémitique

fin

de conserver

'ermitage

e

Camaldoli

«

tel un chef

doré,

splendide

t

étincelant ans son

antique

observance

t

pureté

23.

À

nouveau,

dans le

quatrième

ivrede

Mori-

bus

approuvé par

le

chapitre

e

Soci

(1279),

il

faitconsacrer

n

long

chapitre

e

statu sacre eremi

Camaldulensis

ui

cherche

protéger

a

quiétude

de

l'ermitage

e

toute

ntrusion xtérieuret de toutedéviance

intérieure24.

u

xive

siècle,

d'autres mesures

égislatives

isent

pro-

téger

t

à renforcera

spécificité

e la vocation

érémitique,

mais

der-

rière es mesures pparemmentonservatricese profilenta margina-

lisation

de

l'ermitage

e

Camaldoli,

bastion de l'érémitisme

ans une

congrégation

forte ominante

énobitique,

t e

renversementes

équi-

libres nternes

e l'ordre en faveurdes cénobites25.

Santa

Maria

degli Angeli

ou l'érémitisme n ville au

jour

le

jour.

En fait si les

constitutions,

orgées

ur

l'exemple

de Camaldoli

et

convergeant

vec

d'autres

données

documentaires,

ermettent

e

saisir e

mode de vie des habitants

de

l'ermitage

es

Apennins,

rmi-

tes

aperti

ou reclusenfermés

ans leur

cellule,

l

est extrêmementif-

ficilede mesurere degréd'observancedans les autres établissements

dits

érémitiques,

eux

que signalent

es actes

capitulaires

de

1360

et

ceux,

très

nombreux

par exemple

dans les

Marches,

que

révèle nci-

demment

a documentation26.

'un

des seuls

indices d'une obser-

21. Ann.Camald

,

V,

App.

26-529.

22.

ASFirenze,

iplomatico

amaldoli

1270

uillet

.

23. L'œuvre

e

divise

n deux

arties,

a

Vita

ratrum

remitarumamaldulensis

eremidatée u

13 ctobre

278

Ann.

amald

, VI,

App. 31-240)

t esMemoralia

eremitice

ite

atés

e 1278

Ann.

amald

, VI,

App.

12-223)

voir

.

Lugano,

a

congregazione

amaldolese

egli

remitii Monte orona

op.

cit.,

pp.

54-55.

24. Ann.Camald

,

VI,

App.

41-242.

25.

Voir e

tableau

ommaire

e cettevolutionans .

Pierucci,

Da "eremo"

a "cenobio"l'evoluzionenternaiFonte vellana,dans onte vellanaella ocietà

dei ecoli

V e XVI

Fonte

vellana,980,

p.

11-29,

n

part. p.

18-19.

26. Voir a

synthèsesouventonfuse)

u mode

e

vie

des

rmitese

'ermitage

de

Camaldolilaborée

ar

J.

Cacciamani,

La

réclusion

ans 'ordre

amaldule

,

Revue

'ascétique

t de

mystique

38, 1962,

p.

137-154t 273-287.

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84

C. CABY

vanee

plus rigoureuse

ar rapport

ux cenobio de

l'ordre est la fré-

quence

des

transferts,

n

provenance

de ces

établissements,

e moi-

nes ou

de convers

qui

n'en

supportent

lus

la

rigueur27.

'ermitage

de

Santa Maria

degli Angeli

de Florence

échappe

en

partie

à ce vide

documentaire

t constitue

e ce

fait un

point

d'observation

rès

per-

tinentde

l'érémitisme

amaldule au

XIVe

iècle28.

Par

son acte

de

fondation,

a communauté e Santa Maria

degli

Angeli

est contrainte u

respect

'une

réclusion évère

ui

exclut oute

sortie

de l'enceinte u

«

romitorio

. Peu à

peu,

cette

réclusion bso-

lue est

tempérée

t le

prieurgénéral

Bonaventure

utorise

même,

en

1320, les voyages à l'ermitagede Camaldoli29.Toutefois, l'obser-

vance

érémitique

emble avoir

été

respectée

vec

rigueur

u moins

jusqu'à

la fin du

XIVe

iècle,

ce

qui, compte

tenu du site urbain de

l'établissement,

nécessita

quelques

accommodements30. e site des

Angeli

fut aissé au choix

du

prieur

de

Camaldoli,

qui

confia à un

ermite,

on

Orlando,

'achat d'un

emplacement

u d'un

bâtiment

pte

à

l'installation

'un

ermitage31.

r,

le 31

mai

1295,

Don

Orlando sti-

pule

un contrat vec Alluodo

di

ChiarissimoAlluodo

auquel

il

achète

une

parcelleplantée

de

quelques

arbres,

dotée

d'un

puits,

d'une

petite

maison

et d'une

cabane,

située

dans les

marges

urbaines

de

Florence,

dans

la

paroisse

de S.

Michele Visdomini32. ien ne

perce

des

moti-

vations du choix insolitede l'ermite, inon la place de plus en plus

importante

e Florence dans la

congrégation

amaldule et un

phéno-

mène

d'adaptation

de

l'érémitisme

la ville

qui

fait de

l'ermiteun

modèle

religieux ompatible

vec la vie urbaine33. e

premier

ot est

progressivementgrandi

n

1295

et

1296,

afin

d'y

construire

e

novum

27. Les

registres

es

ettreses

prieurs

énéraux

ournissente

fréquents

xem-

ples

e

icence

e transfertn faveure moinesu de

converse

supportantlus

a

rigueur

t

a

réclusione

leur tablissement

le plus

ouventan

Mattia).

oir

ar

exemple

ASFirenze,RS,

Appendice

amaldoli

27,

324

1333)

ibid.

27,

342

(1332)

ibid., 9,

79r°

1341)

ibid.

29,

115v°-116r°

1343),

bid., 5,

2r°

(1365)

ibid.,

5,

9v°-10r°

1365).

28. La plupartes ourcesoncernant.Maria egli ngeliont onservéesux

archives'état e Florence

CRS,

86

et

Diplomatico

. Maria

egli

ngeli.

oir n

particulier

es

deux

ivrese mémoiresu monastère

ommencésu

xive

t

poursuivis

au

xve

iècle

CRS

86,

n° 95

et

96).

29. Ann.

Camald.,

,

312.

30. Le

métropolite

sidore,

acontant

on

éjour

Florence

our

e Concile e

1439,

crit

ncore

ue

esmoineses

Angeli

e ortent

amais,

mais e

fait

u'il joute

qu'aucun

aïcne es

pprocheinformation

ontredite

ar

a

plupart

es utresour-

ces)

nvite la

prudencePeregrinanoetropolitae

sidoři

d Concilium

lorentinům,

éd. L.

Krajcar,

Acta

lavica

oncila

lorentini,ome,

976,

p.

3-46,

n

part. .

28.

En

1431

ncore,

mbrogio

raversariésiste

ongtemps

ux

njonctions

u

pape

ui

ordonnante brisera clôture

our

e rendreu

chapitre

énéral

e Bertinoro

ui

l'élit

rieurénéral

A.

Traversari,

odoeporicon,

raduction

taliennee V.

Tam-

burini, lorence,985, .23.31.Ann.Camald, V,App. 00-301ASFirenze,ipl.Angeliad datam.

32. G.

Pampaloni,

irenze

l

tempo

i

Dante,Rome, 973,

p.

87-90.

33. G.

Casagrande,

Vita

eligiosa

emminile

n

talia entrale

,

dans

remi-

tismo el

rancescanesimo

edievale

Assise, 991,

p.

51-94,

ui

fournitne bon-

dante

ibliographie.

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ÉRÉMITISME

T

«

INURBAMENTO

85

locum

eremitichum

eremi Camaldulensisu

Comme le

rappelle

le

livrede

«

ricordanze

du

monastère,

outes es

parcelles

urent

nclo-

ses,

constituante

noyau

initialde la clôture

monastique,

ncore

très

réduit

par rapport

l'extension

u

monastère

l'époque

de

la rédac-

tion du

livre

1402)35.

En même

temps,

es ermites

èglent

es

pro-

blèmes

de

voisinage

concernant es murset les

fenêtres nvironnantes

ouvrant ur

leurs cloîtres36.

n

somme,

e

premier

éflexe

des frères

s installant

dans

une zone

récemment

ntégrée

ans la

terza

cerchia

florentine,

one de

peuplement

ncore

assez lâche mais

en

cours de

densification,

st

de

protéger

eur intimité

ar

la

constitution 'un

espace entièrementontrôlépar eux, entouréde murset d'un vaste

îlot

de verdure37. olontairement

égagés

sur des

parcelles

dont

on

supprime

oute

construction,

es

jardins

et

ces

vergers en

particulier

d'orangers)

contribuent

l'aménagement

n

ville d'un

espace

boisé

et

isolé,

reconstituant

e désert traditionnel es ermites38.

34.

ASFirenze,

ipl.Angeli

ad datam

3 documents)

G.

Pampaloni,

irenze

l

tempo

i Dante

pp.

90-92

Ann.Camaid.

V,

211.

35.

ASFirenze,

RS

86,

96,

f° 12r°-v°

«

Di

tutte

ueste eze

di

terra dorto

e

casefeciono

na

hiusura,

a uno ato rano

li

Alfani,

ioè ome

ggi

ira

l

muro

di sotto e volte

viene

er

esta

er

a barbiera

per ospitio

passava er

mezo

il pratelloelchiostrottraversonfinol muro he oggi ra a capella i sanctoBenedectola sagrestia,IIo orto isanctaMariaNuova, IIIo sopradettiinzo-

cheri

il s'agit

e maisonsnsuitechetées

ar

e monastèree Settimo'où

e

nom

de

Settimoonné

cette

one],

1111°

ia.

36.

En

1307,

e

prieur

on Romualdoonclutn accord t fraBartolomeo

i

Ugo

ldebrandini,

rèreu Tiers-Ordreranciscain

tmansionariusratoriiovellioci

de

Cafaggiuolo,

propos

'unmur

ntree

ardin

e SantaMaria

egliAngeli

t

le terrain

e

Y

ratorio

uovo e

Cafaggiolo

ASFirenze,ipl.

Angeli,

306 év.

0)

en

1322,

ccord

vec es

représentants

e

P

bbaye

isterciennee

Settimo,

ouveaux

propriétaires

es errains

ccupés

uparavant

ar

es

ertiaires,

ur

'ouverturee

qua-

tre enêtres

ans n

mur

on

ommun,

n lévationu-dessus'unmur

mitoyen

'envi-

ron

,70

m

de haut. ettimo

'engage

mureresfenêtresla demandee SantaMaria

degli ngeli

t à ne

pas percer

'autresuvertures

ans e mur

egardant

e

ardin

desCamaldules

ibid.,

322

uin

)

en

1360,

ccordvecBindo elfu

Lapo

Benini,

sonvoisin,'autorisantappuyerubois u des onstructionsontree muréparant

sa

propriété

e celle u

monastère,

e

ong

e a viadel

Castellaccio,

ans e

respect

de a

propriété

xclusiveu monastèreur

e

mur

ibid.,

359

anv.

2)

le 3 octobre

1368,

ccord

vec ra

Guido elfu

Báldese,

ospitalaríus

e S. Maria

uova,

ui

uto-

rise es

Camaldules

reconstruire,

leurs

rais,

nvieuxmur

ppartenantl'hôpital

et

séparant

on

ardin

e celui es

Camaldules,

condition

ue

a

propriété

u mur

reste

l'hôpital

ibid.,

368

ct.

).

37. La

politique

'acquisition

es errainsoisinse

poursuit

ans es nnées

330,

aidée

ar

esdonations

t es oblationsvoir

ASFirenze,

ipl.Angeli

1330 vr.

;

1331 ov.

1331

anv.

4

1331 év.

7 1331

uin

7. Elle

ontinue

un

rythme

moins

ffréné

ans a secondemoitié u

xive

iècle voir

ASFirenze,

RS

86, 96,

f°3r°-14r°t

ASFirenze,

ipl.Angeli

1358

uillet

3 1368

ept.

5. Le catasto e

1427

ffre

ne

hotographie

rès

arlante

e 'îlot amalduleonstitué

ar

es rmites

desAngelivoirASFirenze,atasto 85, °116r°-120v°).3». aur1 menagementes ardins,oirAbrirenze,ipt.Angeliîjuo rev.u

1322

uin

1368

ctobre

ibid.,

RS

86, 96,

13v°

diffacemmogni

osa e

facemmo

rto).

es

ardins

es

Angelipparaissent

rès lairementur a

vignette

e

SantaMaria

egli ngeli

ans e codex ustici

Florence,

ibliotecaeminariorci-

vescovile,

°

17v°,

f.

Fig.1).

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86

C. CABY

Fig.1 - Santa MariadegliAngeliFlorence).

Florence,

iblioteca el Seminariorcivescoville

Codex

Rustici,

°

17v°.

Outre ces

précautions

rchitecturales,

'organisation

e la

commu-

nauté est subordonnée

u

respect

de la

règle

de réclusion otale.

Les

frères

e

pouvant

entrer n contact vec

l'extérieur,

es

convers,

om-

mis ou

familiers,

niques

médiateurs vec le

monde,

sont très nom-

breux et

chargés

de

lourdes

responsabilités39.

En

fait,

au

quotidien,

a vie des ermites es

Angeli

ne se

distin-

gue

de

celle des

cénobitesde la

congrégation ue par

certaines

habi-

tudes spécifiques, ommel'usage de dortoirsdivisés en cellules ndi-viduelles,et surtoutpar une

conception

très austère des

règles

de

l'observance.

Lorsque,

en

1406,

à une date où

la réclusiondes

pre-

miers

emps

été

rompue,

es visiteurs e l'ordre

nterrogent

es moi-

nes,

il

s'en trouvedeux

pour

dénoncer

et

amollissement t en

parti-

culier a

prolifération

u

patrimoinemonastique,

ontraire,

elon

eux,

à la coutume des

origines

qui

était

de

vivre

d'aumônes40.

Ermitage

39. Enfévrier

406,

esvisiteurse 'ordrerouventS.

Maria

egli

ngeli

eFlo-

rence

9moinest13 onvers

ASFirenze,

R

,

Appendice

ama

doli, 0,

°

79r°-90r°)

en

1420,

'autres isiteurs

omptent

S. Mattia

moines, novices,

2

onverst

4

salariés

ibid.,

°

160v°-164v°)

et n

1481,

e

général

ietro

olfin

ompte

2

moines,

3 novicest9 laïcs ssociés des itresivers San Mattiaibid., °31Or-fin).

40.

ASFirenze,

RS,

Appendice

amaldoli

90,

°

80v°

t

84r°

quod

i

fieriotest

possessiones

endanturo

quod

e moremonasteriion st

ossessiones

abere

edde

elemosinis

ivere.

;

ou encore

quod

veliet

agismplectariaupertatemuam aciat

et

quod

non

n

tantumillatet

t n

possessionibus

t

bonis

mfmjobiliaribus

um on

sitde moremonasterii...

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ÉRÉMITISME T

«

INURBAMENTO

87

sur le

modèle de Camaldoli

ou,

plutôt,

monastèrede stricte bser-

vance,

S. Maria

degli

Angeli inaugure

une formule

originale

dont

témoigne

a

terminologie

e

désignant

t

qui passe

indifféremmente

monasterium

heremitorium

pour

préférer

e

plus

souvent

monaste-

rium heremitarum41

Paradoxalement,

out en

protégeant

eur

solitude,

es

ermites es

Angeli développent

es

rapports

troits

vec la

ville et sa

population,

au

point

qu'on peut reprendre

leur

égard

a

formule

utilisée

par

Anna

Benvenuti

propos

de certaines

pinzochere

toscanes

-

de

«

réclusion

ouverte

42.

Ce choix

s'exprime

dès

les

premières

tapes

de la constructionu monastère ar l'aménagement 'une « chiesetta

di fuori

,

sorte

d'avant-corps

de

l'église

monastique

réservé aux

femmes43.

es ermites

des

Angeli

s'attirent

apidement

a bienveil-

lance des

Florentins celle

des familles

populaires

des

paroisses

de San

Michele

Visdomini,

San Lorenzo

et

San Felice et

celle de la

commune

de

Florence,

protectrice

e

la

première

eure,

qui,

à

partir

du dernier iers

du

XIVe

iècle,

manifeste a confiance aux

frères n

les

chargeant

de

certaines

opérations

fiscales,

du

dépouillement

es

élections

et

peut-être

e la

protection

es

registres

ommunaux44.

En

outre,

es moines

sont

en contact

permanent

vec

des

grou-

pes

de dévots sur

lesquels

ils

exercent,

des

degrés

divers,

une sorte

de magistère pirituel.Les groupes es mieuxdocumentés ont ceux

que

mentionnent

es Vies de deux

bienheureux,

e

conversfra

Silves-

tro et sa

fille

spirituelle

aola,

rédigées

à

la

fin

du XIVe

iècle

par

un moine des

Angeli,

Zanobi Tantini.

En

effet,

elon cette tradition

hagiographique,

ilvestro,

ncien fraticelle es

collines

florentines

on-

verti l'érémitismenstitutionneln

tant

que

convers,

t

Paola,

fille

d'artisans

de la laine devenue

«

pinzochera

dans

la

petite

commu-

nauté

fémininede S.

Margherita

réée

à

son initiative n

face de

l'ermitage

amaldule, deviennent,

râce

à leurs dons de

prophétie

t

d'omniscience,

e véritables irecteurs

pirituels our

la

communauté

religieuse, our

les femmes

réquentant

. Maria

degli Angeli

et

pourdes cerclesde dévots.Ainsi, aux Cisterciens e Settimo,au cénacle

religieux

réuni

à San

Gaggio

par

Tommaso Corsini et aux

frères

Simone

da Cascia et

Jacopo

Passavanti,

Silvestro,

bien

qu9

l it

era-

tus

explique

es

mystères

ivins,

es

Écritures t le

moyen

d'atteindre

la vraie

vie

spirituelle45.

41. Avec

a

correspondanceour

es

frères,

its antôt onaci

tantôt eremite

tantôtes

deux.

42. A.

Benvenuti

api,

In

Castro oenitentiae.

Santità

società

emminile

nell'Italia

edievale

Rome, 990,

.

340.Les

«

pinzochere

sont

ssimilablesux er-

tiaires éminineses différentsrdresu

aux

«

sœurs e la

pénitence

.

43.

ASFirenze,

RS

86,

96,

12v°

«

La chiesetta

i

fuori

i

principio

llora

perchende i potesse arlareuando osse ecessitaondonne.44. R. C.Trexler, Honormonghieves. heTrust unctiont theUrban

Clergy

n the lorentine

epublic

,

dans

ssays resented

o

Myron

.

G

l

more,

d.

S.

Bertelli

t

G.

Ramakus,lorence,978, I,

pp.

317-334,

n

part.

p.

322-323.

45. Editiones Vies

ar

C.

Stolfi,

eggende

i

alcuni anti Beati

enerati

n

S. Maria

egli ngeli

i

Firenze

Scelta

i

curiositàetterarienedite rare al

secolo

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88

C. CABY

À

partir

de l'élection comme

prieur

du

Florentin

Filippo

Nelli

en

1322,

cette

ouverture st

accélérée

par

une

intense ctivité rtisti-

que puis

intellectuelle,

ui

fait du

monastère n lieu de

référence e

la culture

florentine la

fin

du

xive

siècle

et

dans la

première

moi-

tié du

XVe

iècle.

À

partir

des

années

1370,

le

scriptorium

e met à

produire systématiquement

our

l'extérieur,

profitant

de

l'énorme

capacité

de commandede

la ville de

Florence,

et

il

exerce,

usqu'aux

années

1440,

une domination

presque

absolue sur le marchédu

livre

liturgique

florentin46.

r,

si l'activité

des enlumineurs e déroule

principalement

ans

l'enceinte u

monastère,

on

développement

une

échelle commerciale mène certains rtistes rompre a traditionnelle

réclusion

des

Angeli,

momentanément u

pour

une

plus longue

période.

Le

peintre

Lorenzo Monaco

exerce

ainsi

presque

toute

son

activitéhors de

la

clôture47.

Dans

la lancée de cette ctivité

'écriture

t

d'enluminure,

anta

Maria

degli Angeli

devient,

ous

l'impulsion

décisive

du

prieur

Mat-

teo

Guidone,

un

centre ntellectuel

e

référence,

ultivant 'étude

des

textes

acrés,

en

particulier

es Pères

antiques,

et,

grâce

à la

présence

d'Ambrogio

Traversari,

uvertaux

innovationsde

l'humanisme. Le

monastère ccueille

alors dans ses

murs es lettrés

es

plus

en

vogue

à

Florence selon

le

libraire

Vespasiano

da

Bisticci,

parmi

les hom-

mes dignesde Florence,rares étaient ceux qui ne fréquentaient as

Ambrogio48.

Érémitisme

t

réforme

ans l'ordre

camaldule au XVe iècle

Mais le succès de Santa Maria

degli Angeli

ne tient

pas

seule-

ment

à son

rayonnement

ulturel.Le

monastère

ncarneun idéal de

solitude diffusé

partir

du

xive

siècle

par

les milieux

ettrés,

n liai-

son avec

les

réflexions ur les valeurs

respectives

e la vie

active et

de la vie contemplative,déal dont 'expression riomphe ans les dis-

cussions

de l'Académie florentine éunie

Camaldoli et

que

rapporte

XIII

al

XVIII,

.

52-53),

ologne,

864 C.

Caby,

La

saintetééminine

amaldule

au

Moyen

ge

autour e la b. Gherardescae Pise

,

Hagiographica

1

(1994),

pp.

235-269.

46. VoirG.

Farulli,

storia...

egli ngioli

i

Firenze

Lucques,

710,

p.

6-11

M.

G. Ciardi

Dupré al

Poggetto,

ntroduction

Codici

iturgici

iniatieiBene-

dettinin Toscana

Florence,982,

p.

15-30 t

a

bibliographie

itée ans

Ambrogio

Traversari,

n

monaco un monasteroell'umanesimo

iorentino

éd. S.

Frigerio,

Camaldoli,

988.

47.Voir a monographieeM.Eisenberg,orenzo onacoPrinceton,989.48. Vespasianoa Bisticci, ite iuominillustriel ecolo V,éd.A.Greco,

Florence,970,

.

451 sur

Ambrogio

raversari

t e cénacle umanistees

Angeli,

je

renvoie

l'ouvrage

ité ote 6et uxderniers

olloques

Ambrogio

raversari

amal-

dolese el VI centenario

ellanascita

1386-1986,amaldoli,

987 t

Ambrogio

ra-

versariel

VI

centenarioellanascitaéd. G. C.

Garfagnini,lorence,

988.

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ÉRÉMITISME T

«

INURBAMENTO

89

Cristoforo

Landino

dans les

Dissertationes

Camaldulenses49 Ce

mythe

humaniste

e

la vie

solitaire,

dont

certains

spects

recoupent

une faveur

populaire

ndéniable

pour

les

formes ustères

t

solitaires

de vie

religieuse,

st

une

des

composantes

de

l'attachement e Coluc-

cio Salutati au monastère

de Santa Maria

degli Angeli50.

Arrêtons-

nous ici sur un seul

témoignage

e la faveur e Salutati

pour

les ermi-

tes des

Angeli,qui

résume,

vec

éloquence,

e

paradoxe

de la vie soli-

taire en

ville. Dans une lettre

du

17

uin

1381,

la

commune

de

Flo-

rence

crit,

par

la

plume

de

son

chancelier,

u cardinal

Tommaso

Fri-

gnani,

visiteur

postolique

de l'ordre

camaldule,

pour

lui recomman-

der le monastère lorentin. 'est le prétexte un hommage ans par-

tage

de ces

ermites,

ui quittèrent

e désertdes

Apenninspour

vivre

la

solitude

au milieu des hommes51

Nous avons

dans notreville

un

monastère e l'ordrecamal-

dule, vénérable,

elon

nous,

par

la vertu

des

frères,

t

qui

est

couramment

ppelé

monastère

es ermites es

Anges.

Et ceux-

ci,

loin de

pouvoir

tre

omparés, euvent

tre ans conteste

ré-

férés

aux

ermites

du même ordre

que protège

lih

ermitage

entouré

e

hêtres u sommet

es monts

des

Apennins,

mais aussi

aux anachorètes

que

l'amertumede la

pénitence, 'application

à la contemplationu l'amour du règnecélestedispersent ans

les vastes

olitudes.

n

effet,

uel

effort a-t-il

près

s'êtreretiré

dans les

déserts,

ù ne

se

trouvent

i

hommes

ni

même

traces

d'hommes,

à vivre sans la

compagnie

des mortels

En

revan-

che,

les

nôtres,

es admirables rmites

ivant u

cœur d'une ville

des

plus peuplées,

une fois entrés

ans

ces murs rès

acrés,

res-

pectent

ce

point

la clôture

que depuis déjà presque

un

siècle

aucun d'eux n'en a franchi es

portespour

en sortir.

En

outre,

vivantdans la

plus

grande

ustérité estimentaire

t

dans l'abs-

tinence e toute

nourriture

arnée,

ls subsistent

râce

aux

aumô-

nes

de

chaque jour,

ils

fabriquent

ux-mêmes eurs

tissus,

ils

cultiventeurs ardins, et, sans cesse, soit ils sont plongés en

prière,

soit,

pour

surmonter

a

fragilité

e la chair et ne

pas

49. Dans 'abondante

ibliographie

ur e

sujet,e

ne citerai

ue

A.M.

Voci,

Petrarcala Vita

eligiosa

il

mito manistaella ita remitica

Rome,

983 t

récem-

ment,

. O.

Kristeller,

Teorie

manistiche

ella ita ttiva della ita

ontempla-

tiva

,

dans

io

I

e la

cultura

el

uo

tempo

éd. L. Rotondi

ecchi

arugi,Milan,

1991,

p.

13-27.

50. Sur es

rapports

ntre oluccio

alutati

t SantaMana

degi

Angeli,

oir

B.

Ignesti,

Coluccio alutati

i

Camaldolesi

,

dans

Ambrogio

raversariamal-

dolese

op.

cit.,

amaldoli,987,

p.

55-88

t

G.

Spinelli,

Monachesimo

società

traXIVeXV ecolo ell'ambienteiAmbrogioraversari, dansAmbrogioraver-sari, p cit. Florence,988, p.49-68.

51.

G.

Pistoni,

Un

modenesemico elPetrarca.

l

card.

ommaso

rignani,

con etteranedita

i Coluccioalutati

,

Atti

Memorieell'Accademiai

Scienze

LettereArti

i

Modena

XII

1954), p.

82-96,

ditione a

lettre

p.

94-96,

n

part,

pp.

94-95

our

'extraitité t traduit.

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Médiévales

8,

printemps

995,

p.

93-112

Lucie GERNEZ

RELIQUES ET IMAGES DE SAINT GALGANO À SIENNE

(XIIIe-XVe SIÈCLE)

Le nom de

«

San

Galgano

»

évoque aujourd'hui

une

abbatiale cis-

tercienne

chouée ux

portes

e la

Maremme,

une

trentaine e kilomè-

tres u sud-ouest

e Sienne.

L'atmosphère

omantique

u

lieu a

inspiré

nombre

'artistes

t,

récemment,

e

cinéaste ndrei

arkovsky

emprunté

le cadre de

l'édifice

pour

poser

en

son

centre a

dernière

mage

de

son

filmNostalghia1 Depuis quelques années les bâtiments e l'abbaye2

accueillent 'anciens

drogués

la

sortie

e leur

cure

de

désintoxication.

La nef est

amarrée au

pied

d'une

colline,

le mont

Siepi3

dans

une

plaine

cernée

de

bois.

Sur le

mont

Siepi,

une

chapelle

ronde

abrite

une

épée plantée

dans

la

roche.

L'épée,

de

facture

écente,

st

a

repro-

duction

de celle de saint

Galgano.

L'ermite

du mont

Siepi

Galgano

Guidotti taitné

en

1

148 à

Chiusdino,

n

«

castello

»

situé

à quelques kilomètres u montSiepi, dans une famillede chevaliers4.

1. Andrei

arkovsky,

ostalghia

1983.

Andrei

arkovsky

aconte

voir oulu

faire n

film

ur n

Russe, ortchakov,

n

ong oyage

'étudesn talie. e

cinéaste

écrit ans

esmémoires

«

L'Italie

ue

Gortchakov

erçoit

u momente

son

ragi-

que

conflitvec a réalité...'étale evantui en ruines

ajestueuses,

ui

semblent

comme

urgies

u néant

,

dansAndrei

arkovsky,

e

temps

cellé

Paris,

ditions

de

l'

Étoile/Cahiers

u

cinéma,989,

.

190.

2. Antonio

anestrelli,

abbazia

i

San

Galgano. onografia

torico-artistica

condocumenti

nediti

numerose

llustrazioni

Florence,

ratellilinari

ditori,896,

rééd.

istoia,

ellini

ditore,

989. côté e

'église

bbatialeuverte

tous

es

vents,

ont ubsisté

lusieurs

arties

u

couvent.

3. Le mont

iepi, ujourd'hui

it

Poggio

ella

Cappella

,

culmine

une

lti-

tude e 345m la chapellest l'altitudee338m carteGM 1/2500Chiusdino).4. Franco ardini,eggendai SantoGalgano onfessoreSienne,982,

.

30.

Dans 'introductionl'éditionu

manuscrit,

'auteur

ignale,

ans a

marge

u

manuscrit

(f°

117v°),

ndessin e CelsoCittadini

eproduisant

es rmes

e a familleuidotti.

Franco ardiniesdécritinsi

«

campo

'oro lla

banda

i

rosso .

Cesarmesra-

duisentne

ppartenancehevaleresque.

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94

L. GERNEZ

Il

est

venu

planter

dans le

roc son

épée

pour

en

faireune

croix,

choi-

sissantainsi le mont

Siepi pour y

menerune

vie

érémitique ndépen-

dante,

sans se rallier

à un ordre

religieux.

l

meurt en

ce

lieu en

décembre 1181.

L'évêque

Ugo

de

Volterra,

'empresse

lors de

demander

u

pape

l'ouverture 'une

enquête5, our préparer

a

canonisation

e

l'ermite,

dont la

fama

était

déjà largement épandue

dans la

région.

Dès

1185,

trois

prélats

ont

dépêchés ar

la curie

papale.

Parmi

es

vingt

émoins,

paraît

Dionigia,

la mère de

Galgano.

Elle

raconte

a vie de

son

fils

unique,

en

insistant ur sa conversion.

Galgano

lui avait

rapporté

es

apparitions uccessivesde saint Michel l'archangeavait incité Gal-

gano

à

se faire

chevalier,

puis

l'avait

conduit

sur le

mont

Siepi,

où le

jeune

homme ficha

son

épée qui prit

figure

de

croix,

puis

il

renonça

u

monde

pour

vivre

une vie

érémitique

ans

le

désert

ylves-

tre

de la Maremme

oscane.

À

un

moment,

l

prit

conseil

auprès

des

disciples

de Guillaume

de

Maleval,

implantés

u

sud

de la

Maremme.

Puis,

il

partit

n

pèlerinage our

Rome.

Il

rendit

isite u

pape, peut-

être

pour

lui

demander

'autorisationde

fonderun

ordre

érémitique.

En

retournant u mont

Siepi,

Galgano

trouva

son

ermitage

accagé.

Avec

l'aide des

compagnons qui

l'avaient

rejoint,

l

construisit

ne

chapelle

ronde

il

replanta

son

épée.Selon AndréVauchez6, es témoignages ecueillis our démontrer

la sainteté

de

Galgano

constituente

premier

rocès

de

canonisation

conservé.

Toutefois,

rien ne

prouve

que l'enquête

ait

débouché sur

une

canonisation

ffective. e textea

été

rapporté

par

l'érudit

sien-

nois

Sigismondo

izio

dans ses Historiae

enenses

b initiourbisSena-

rum

usque

ad annum

15281.

Il

est

conservé la

Bibliothèque

Com-

munale de

Sienne.

En

1220,

Roland de

Pise,

moine

cistercien,

édige

ne

Vitade

saint

Galgano,

directement

nspirée

es

témoignages

e

l'enquête.

Puis la

fin

du

XIIIe

et surtout e

xive

siècle voient

la

multiplication

es

«

leg-

gende

».

Ces

textes

n

latin ou en

languevulgaire ont 'œuvre de reli-gieuxflorentinsu siennois,vallombrosans u augustins.L'originede

leurs

auteursconfirme e caractère

oscan du

culte de

saint

Galgano.

Après

Franco Cardini8

qui

a édité a

Vita

augustinienne

n

lan-

gue

vulgaire,Eugenio

Susi9 a édité la

Vita

cistercienne n latin.

Les

5. Le

texte e

'enquête

été

publié ar

Fedor

chneider,

Der

Einsiedleral-

gan

von

Chiusdinonddie

Anfänge

on .

Galgan

,

Quellen

nd

orschungen

us

italianischen

rchivennd

ibliotheken

XVIII,

914-24,

p.

71-77,

ans

esnotesui-

vantes,

brégé

Procès.

6.

André

auchez,

a saintetén

Occidentux

derniers

iècles u

Moyen

ge

d'après

es

rocès

e

canonisation

t es

extes

agiographiques

Rome, 988,

p.

41-42.

7. BibliothèqueommunaleeSienne,. III. 6-13 textedité arFedor chnei-der,Procès.

8. Franco

ardini,

p.

cit.y

p.

101-111.

9.

Eugenio

usi,

L'eremita

ortese.an

Galgano

ra

mito

storia

ell'agiogra-

fia

toscana elXII

secolo,

polète,

entro

talianoi

Studi ull'Alto

edioevo,

993.

pp.

185-213. u début

e son

ouvrage,

usi

épertorie

es

différentes

ourcescrites.

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RELIQUES

T IMAGES

DE

SAINTGALGANO

SIENNE 95

travaux

des

deux

auteurs

ont révélé es liaisons

de la

légende

de saint

Galgano

avec

la tradition

ourtoise

de

la littérature

hevaleresque

0

et avec

la tradition

folklorique11.

À

la

mortde

Galgano,

le

lieu de son

ermitage

st devenuun

pôle

sensible

de la

piété

populaire

ocale

;

les

guérisons,

es libérations e

prisonniers

2

réalisées

par

Termite,

ssociées

à son mode de

vie,

ont

concouru

à la

réputation

es lieux et assuré

la

fama

locale.

Bientôt,

les

compagnons

de

Galgano

se

dispersent

n

Toscane13,

l'exception

de trois

disciples

qui

se

joignent

aux

Cisterciens,

enus

fonder,

au

pied

du

mont,

un

monastère.

chevée n

1224,

'abbaye prend

e relais

de l'ermitage t s'intitule an Galgano. Le lieu, entre Chiusdino et

Monticiano,

est

en

position

frontière

ntre es terres

de la commune

de

Sienne

et celles

de

l'évêque

ou de la

commune de Volterra.

En

matière

cclésiastique,

l

relève

de

Volterra,

u

politique,

de Sienne14.

Le monastère

ui

investite lieu va tisser

es liens serrés

vec la

com-

mune de

Sienne15 'est-à-dire

a

puissance

montante,

t

jouer

un rôle

économique,

dministratif

t

religieux

roissant.Dans

le même

temps

les

ermitages

e

multiplient

ans la Toscane

méridionale16.

Dans

ce

contexte,

u culte

rural t

populaire

des

reliqües

du saint

ermite,

va

peu

à

peu

se

juxtaposer

'élaboration d'un

spectaculaire

10. Lesexemplesont ombreux,ous ncitonsn le nommême eGalgano,

Galvanus

n

atin,

e

rapproche

ingulièrement

u nom e Gau

ain.

Dans

es

textes

ils ont ous

eux

londst

eunes

t es

parents

e

Galganoppartiennent

la che-

valerie

u

«

castello

de Chiusdino.

'aspect

ourtois

e la

légende

e

Galgano

st

surtout

is nvaleur

ans estextes

ardifs,

ar xemple

ans

'épisode

e a fiancée

Polissenae

Ci itella

ui

vient endreisite

Galgano

ur

e lieude son

ermitage.

Cette

cène st

iselée

ur

e

reliquaire

e a tête e

san

Galgano

Fig.

)

puis eprise

sur

ne

ablettee

bois

peinte

ar

Andrea

i Bartolo.

n

abordant

e

reliquaire

ous

évoquerons

et

pisode

e la

légende

e saint

Galgano ui

n'est

apporté,

ans es

textesonservés

t

répertoriés,

u'à partir

u

xvie

iècle,

f.

Gregorio

ombardelli,

Vita

el

gloriosissimo

.

Galgano

enese a

Chiusdino

Sienne,

d. Luca

Bonetti,

577.

11.

Quelques

xemples

la

présence

u cheval e

Galgano, ui, pour

Hubert

Damisch,

st

'instrumente

sa

conversion

Séminaire

ur

a

conversion,HESS, aris,

1989) les roisunitionsnfligéesuxmoinesuiviennentaccager'ermitagel'eau,

la foudre

t e

oup.

Le

loup ppartient

u

folkloreural t

ylvestre

t

l

est

ouvent

présent

ans es

récits

agiographiques

t les récits

opulaires,

f. G.

Ortalli,

«

Natura,

toria

mitografía

el

upo

nel

Medioevo

,

La cultura

XI,

dèe. 1973.

pp.

19-20.

12. Lesdifférents

émoins

u

Procès,

utre

ionigia,

ont es

miraculésils ont

tous oscans.

13. Selon

Benigno

an

Luijk,

Gli

eremiti

erinel

Dugento

on

particolare

riguardo

l territorio

isano

toscano.

riginisviluppo

d unione

BibliotecaelBol-

lettinotorico

isano,

ollana

torica,, Pise,

1968.

14.

Cf. Odile

Redon,

Uomini comunità

el contado enese el

Duecentoy

Sienne,

982,

ad.

L'espace

'une ité.

ienne

t e

pays

iennois

xiw-xrviècle),

Rome,

994.

15. Particulièrementntre 215 t 1320 ommea montréauraNeri, Abba-ziadi SanGalgano Siena1181-1320).eruna toria eirapportira Cistercenci

e

la

città

«

Tesi

di aurea

dactylographiée,

niversità

egli

tudi

i

Siena,

acoltà

di lettere

filosofia,

991-1992.

16.

Lecceto

gli

remi

gostiniani

n

terra

i

Siena,

Monte eiPaschi i

Siena,

Sienne,

990.

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96

L. GERNEZ

Fig.

1

-

Reliquaire

e la têtede saint

Galgano,

Sienne,

Museo

dell'Opera

el Duomo

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98

L. GERNEZ

tourelles

deux

étages

sont installésdes

anges.

Les

plaquettes

de

l'étage

inférieur,

hacune cadrée

dans

une

baie

gothique

rilobée,

ré-

sentent

es morceaux

hoisisde

la vie de

saint

Galgano que

nous étu-

dierons

plus

loin.

Entre

'étage

inférieur t

l'étage

médian des

demi-

plaquettes

présentent,

ans des

fenêtres

rilobées,

lternativemente

buste

de la

Vierge

u celui

du

Christ,

lanqué

du

buste

de deux

anges.

À

l'étage

médian,

derrière

es tablettes e verre

ransparent,

es édi-

cules

en

baie

gothique

accueillent

des

plaquettes

amovibles,

ciselées

de fenêtres

éminées.

Chaque

fenêtre

résente

eux

portraits

n

pied.

Seize

personnages

ont ainsi

ciselés en ronde bosse

;

on trouve

saint

Paul20, saint Pierre,deux saintes femmes t des saints apôtres. À

l'étage supérieur,

e

cycle

présente

e

parcours

de

l'âme

de l'ermite

après

sa mort.

Galgano y

est

présenté

uivi

par

des moines en habit

cistercien.

ette

fois

les différentescènes s'inscrivent ans des

fenê-

tres

trilobées.Les

plaques

du toit

qui

fermente

reliquaire

ont cou-

vertesd'ornements

n

filigrane

vec deux

séries de

plaquettes

trilo-

bées

présentant

es

têtes

d'ange

en émaux

champlevés

ui rappellent

les

miniatures

e Pietro

Lorenzetti.

Au

sommet

du

reliquaire

n

petit

temple

st

posé

sur

un nœud

plat

décoré de

filigranes,

l

est soutenu

par

une tribune ù sont

fixésdes oiseaux et d'autres

figures.

Ce

petit

édifice,

octogonal

comme

le

reliquaire,

st ouvert de

fenêtres

émi-

néesen arc aigu. Il estcouvert 'un toitpyramidal uquel a étéajouté

tardivement n crucifix.

La forme

octogonale

permet

une

lecturehorizontaledes

cycles

mais instaure

ussi une certaine

ontinuité ntre es

scènes

des diffé-

rents

tages.

La lecture

erticale es

images uperposées

évèle

n

effet

des

correspondances, articulièrement

ntre a vie de l'ermite

iselée

à

l'étage

inférieur t sa

glorification

résentée

l'étage

supérieur.

Comme nous

l'avons dit

plus

haut ce

reliquaire

est aussi une

monstrance.

es textes

rapportent

«

tous les

ans,

en

présence

d'un

grand

concours de

population,

a

tête est

respectueusementxposée

et offerte la

vénération, our qu'ils gardent

ans les

yeux

de

l'espritla mémoired'une telle vision>>21. es plaquettesde l'étage médian

du

reliquaire

ont amovibles.

Ôtées,

elles

laissaient entrevoir

a tête

du saint. De

plus lorsque

les

plaquettes

de

l'étage

médian sont

enle-

vées,

e

cadre

architectural

u

reliquaire

evient

égulier,

aisant lter-

ner en montantvers le

haut,

les

plaquettes

à

cadre

gothique

trilobé

simple

avec les

fenêtres

rilobées.

l

est

possible que

l'objet

ait

été

conçu

pour

rester

uvert

l'étage

médian,

car

d'autres éléments

eu-

vent confirmere rôle de monstrance

e ce

reliquaire,

n

particulier

20.

Saint aul tait n

«

guerrier

,

il a été

eté

ux

pieds

e son hevalors e

sa conversioncommeui,Galganooitmonterchevalourndescendre.on he-valpeuttrenvisagéomme'instrumente saconversion,f.Hubertamisch,émi-

naire

ur a

conversion,aris,

entre

homas

More,

991.

21.

Singulis

nnis,

ongregato

opulo

reverenter

stenditur

caput

ad hono-

remuttante

isionis...t habeant

n mentisculis

ircumscriptum

cité

ar

Eugenio

Susi,

p.

cit.,

p.

42.

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RELIQUES

T

IMAGES

DE SAINTGALGANO SIENNE 99

une couronne

conservée au musée

de l'Œuvre de la cathédrale de

Sienne. Constituée

e

huit

plaquettes

e cuivre maillées e bleu

foncé,

elle

porte

'inscription

«

S

Ghalgano

da

Chiuslino

. Cette couronne

pouvait

se

placer

autour

de

l'étage

médian du

reliquaire,

oit autour

du crâne22.

Ce

reliquaire

lui-même ait

'objet

de

représentations

ans les

années

postérieures,

t,

chaque

fois,

l

est

présenté

omme une

mons-

trance,

par

exemple

sur

un autre

objet

mentionné ans

l'inventaire

du trésor

de

l'abbaye

:

la crosse23

datée

des années

1330)

de l'abbé

de San

Galgano.

Dans le

décor de la base de

la

volute de

la

crosse,

l'artiste ciseléun reliquaire rchitecturalementimplifié, eprésenté

avec son

toit

ouvert24,

aissant

apercevoir

a tête du

«

santuccio

jusqu'aux

yeux,

figurés

rands

ouverts.Un siècle

plus

tard,

Giovanni

di Paolo

(1417-1482)

peint

un

portrait25

e saint

Galgano

en

pied,

portant

e

reliquaire

de sa

tête. Cette

fois,

l'objet

ressemble

out à

fait au

reliquaire

l'étage

médian

est

présenté

uvert,

sans les

pla-

quettes d'argent.

La

petite

aille

du tableau ne

permet

pas

de distin-

guer

si

le

peintre

cherché

représenter

es scènes ciselées sur les

diverses

plaquettes.

Revenons

au

programme

e

l'étage

inférieur e ce

«

reliquiario

tabernacolo

;

il

comporte

es scènes

suivantes,

n suivant

e

sens des

aiguillesd'une montre partir 'une première laquettedont e choix

s'impose

1

L'archange

saint

Michel

nvite e

jeune

chevalier entrer ans

une

maison,

qui peut figurer

a

chapelle

décrite

par

sa

mère

Dionigia

dans la seconde

vision.

La

Leggenda

a

repris

insi

le

passage

:

«

il

lui sembla

qu'il

entrait ous

terre t arrivait

u mont

Siepi

et,

sur

le

mont,

il

trouvait

douze

apôtres

dans une rotonde

26.

À

cette

scène

correspond

a

figure

iselée

l'étage

supérieur.

a

porte

de l'édi-

fice est

la

mêmemais

au dernier

tage,

c'est

la

porte

du

Paradis,

gar-

22.

Ce couronnement

e

a

relique

rouve

a

propremage

ur e

reliquaire

ême,

au troisièmeegistreù uneplaquetteontree Christosantne ouronneur a

tête

e

Galgano.

ette

laquette

e trouve

u-dessus

e a

scène

igurant

a visite

u

démon

ue

nous errons

lus

oin.Cf.

Catalogue,

l

gotico

Siena

op.

cit.,

iche

68,

«

Corona

i

San

Galgano

,

par

Elisabettaioni

Liserani,

p.

195-196.

23. Antonio

anestrelli,

p.

cit.,

p.

102. La crosse

e San

Galgano

st

aujourd'hui

onservée

u musée e l'Œuvre

e la cathédrale

e

Sienne,

f. Catalo-

gue,

l

gotico

Siena

op.

cit.,

iche

°

71

«

Pastorale

i San

Galgano

,

par

Gio-

vanna

amiani,

p.

205-208.

24. Nous

n avons

as

vérifiéi le toit u

reliquaire

e la tete e saint

algano

peut

'ouvrir,

ependant

ucune errure

e emble

e

permettre.

notre

vis,

a

figu-

rationur

a crossellustre

e manière

implifiée

e rôle e monstranceu

reliquaire.

25. Ce

portraitppartient

un

pilastre

eint

'une Maestà

conservéela Pina-

cothèque

ationale

e

Sienne,

f.Piero

orriti,

a Pinacoteca

i Siena.

dipinti

al

XII al XV secoloGênes, 977, ° 575. urGiovanniiPaolo, oir eithhristian-sen,Laurence.Kanter, arlBrandontrehller, aintingn Renaissanceiena.

1420-1500

catalogue

e

l'exposition

u

Metropolitan

useum

f

Art,

NewYork

1988-1989,

p.

168-169,

rad,

tal.,

Monte ei

Paschi i

Siena,

989.

26.

«

Parvele

i entrareottoterra

venire

n

Monte

iepi,

el

uale

monte/tro-

vavadodici

ppostoli

n una casa ritonda

,

Franco

ardini,

p.

cit.,

.

103.

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RELIQUES

T

IMAGESDE

SAINTGALGANO SIENNE

103

Fig.

3

-

Reliquaire

e la têtede saint

Galgano,

détail

La

mort

de

l'ermite, ienne,

Museo

dell'Opera

el

Duomo.

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104

L.

GERNEZ

têtesbarbues

se

penchent

ers

e

corps

du mort. Derrière e

religieux

agitant

'encensoir,

n

moinetient

une croix de

procession

t un autre

un bâton

de

pèlerinage35.

Cette

huitième

laquette

rouveune

correspondance

irecte vec

celle

de

l'étage

supérieur,

ui

présente

es

anges

portant

'âme

de

saint

Galgano.

La lecture

scendante

des

registres

conographiques

st une

invitation

suivre

e

parcours

e l'âme

de l'ermite. a scène

de la mort

consacre

e culte des

reliques

de

Galgano

;

les différents

rotagonistes

du culte sont

rassemblés

d'un

côté

les

compagnons

de

Galgano,

de

l'autre

les

évêques36

t

les

délégués

pontificaux

ui

ont

procédé

à

l'enquêteen vue de la canonisation, t,partagés ans l'image,des moi-

nes

cisterciens

ppartenant

l'Ordre commanditaire

e ce

reliquaire.

Une série37 e

tablettes

e

bois

de

petit

format

45

cm

x 45

cm),

peintes

sans doute

pour

un

usage

privé par

Andrea

di Bartolo

(1389-1428)

montre

ien

la filiation es

images

du

XVe

iècle

par rap-

port

au

reliquaire.

Andrea

reprend,

ntre

utres

scènes38,

a mort de

saint

Galgano

(Fig.

4).

Au

premier

plan Galgano,

ici aussi

auréolé,

gît

sur

une civière.

La couleur

permet

e

distinguer

ettement

es

Cis-

terciens n habit

blanc,

les

compagnons

de

Galgano

en habit

gris

et

les

prélats,

dont

la

magnifique

vêture

est

rendue

par

le

peintrequi

emprunte

à les

techniques

de l'orfèvrerie.

L'organisationde la scèneévoque les représentationse la mort

de saint

François

d'Assise,

et,

notammenta

fresque eintepar

Giotto

dans

la

basilique

inférieure

'Assise39.

Le vêtement e

Galgano

res-

35.

Bâton urmonté'une

orte e

coussinet

rrondi,

uiévoque

e

bourdones

pèlerins.

ais e

pourrait

tre ussi

nbâton e

procession

u de

confrérie,

oir

bjets

religieux.

éthodes

'analyse

tvocabulaire.

anada rance

RéunionesMusées atio-

naux,

aris

994,

.

123.

36.

Eugenio

usi,

p.

cit.,

uit

ombardelli,

ui

mentionnees

vêques

eMassa t

deVolterra.

ntonio

anestrelli,

p.

cit.,

appelle

e rôle

rimordial'Ugo

ei ala-

dini,

vêque

e

Volterra,

ort

n

1

84,

ui compris'importance

u

ieu rontière

u'était

le mont

iepl.

aire anoniser

algano,

'était

agner

n

protecteurour

on

diocèse,

à la imitee on hampepouvoir.n rouveroisvêqueseintsfresqueans 'édi-

fice

jouté

la

chapelle

onde u

mont

iepi, gauche

'une

Maestà

eintear

'atelier

d'Ambrogio

orenzettin

1334,

f.

Chiara

rugoni,

ietrot

Ambrogio

orenzetti

Flo-

rence,

988.

p.

44-47.

ans on

ntroduction

u

Procès,

édor

chneider

dentifieutre

les

vêques

ocaux

e cardinal

onrad e

Wittelsbach,

rchevêque

e

Mayence.

37.

Il

reste

ujourd'huipanneaux.

elon nzo

Carli,

l

museo

i Pisa

Pise,

1974,

es tablettes

evaientonstituer

ne

boîte

eliquaire

ais

nousne

partageons

pas

cette

ypothèse.

n

effeta

restauration

écente'a fait

pparaître

ucune race

de charnière

i

de

fermeture.

estableaux

ppartiennent

la

phase

inale e 'œuvre

du

peintre

vivement

olorés,

ls

présentent

hacun nefrise

e dentelleorée.

38. Andrea

i Bartolo

peint

es cenesuivantes

le

cheval

e

Galgano

rrete

par 'archange,

a mort u

saint

Fig.

),

e

sac

de

'ermitage,

aint

Michel

onduisant

Galgano

ur e mont

iepi, algano

aillantnebranche

vec on

pée,

a visite es

parents

ur e mont

iepi appartenant

la National

allery

f

reland,

oir

lus

aut

note 1).La nouvellerésentationes ablettesuMuseo ivico ePise esordonne

en suivant

otre

noncé,

ar

trois,

uperposées

deux.

Réuniesvec a tablettee

Dublin,

lles onneraient

omme

eux

enêtresomanes.

39.

Nousn'aurions

u

faire ucun

e ces

rapprochements

ans

es umières

e

Chiara

rugoni.

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RELIQUES

T

IMAGESDE

SAINTGALGANO

SIENNE

105

Fig.

4

-

Andrea

di

Bartolo

1389-1428),

La mortde saint

Galgano vers 1400-1420),

ablette

einte

45,2

x

45,2

cm),

Pise,

Museo

Civico.

semble à celui de

François.

Comme à

Assise,

les

compagnons

arri-

vent

sur

la

gauche

de

l'image, portant

e

même

type

de croix de

pro-

cession. La

basilique

sert de décor. D'un

côté,

les similitudes ntre

la

fresque

dirigée

par

Giotto et le

petitpanneau peint par

Andrea di

Bartolo

rappellent

a formation es

artistes iennois ur

e

grand

chan-

tier des

basiliques

franciscaines.

e

l'autre,

en

relation vec

les thè-

mes franciscains

t

cisterciens,

'élabore

l'image

de

Galgano

cheva-

lier converti.

Le

reliquaire

de la tête de saint

Galgano apparaît

bien comme

le lieu centralet

l'étape

fondamentale ans la

construction e l'ico-

nographie e l'ermite, eliée ux thèmes cclésiastiques t folkloriques

de

sa

vie,

lui-même

elayépar

la

peinture.

Par

son caractère

mobile,

l'objet suggère

es

déplacements

du culte rural.

Les mêmes

images

trouvent nsuitedes

supports

ivers

t

se

fixent

ans

les

lieux du

pou-

voir

politique,

au cœur de la ville de Sienne.

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RELIQUES

T IMAGESDE SAINTGALGANO SIENNE 107

A

&

c*

3>

£

F

uoüiaooao

G

H

X

T

K

Fig.

5

-

Vecchietta

1400-1480),

ortes

e

PArliquiera

A :

saintAnsano

B : bienheureuxmbroise ansedoni C : saintBernardin

D :

bienheureux

gostino

Novello

E :

bienheureuxndréGallerani

F

: saintVictor

G : sainte

Catherine

e

Sienne

H : bienheureuxierre ettinaioI : bienheureuxorore J saintGalganoK : saintCrescent, ienne, inacotecaNazionale.

Sano

d'Andrea. Vecchietta

a

représenté Galgano

entre

deux

arbustes43

ui évoquent

la forêt et dessinent sur lui

une

ogive

(Fig. ó)44.

Le chevalier

gardé

ses

éperons,

mais

a converti

a

cape

43. Lesdeux rbres

appellent

eut-être

esdeux

rbres

e

'apparition

u démon

à

Galgano

sur e

reliquaire,

ablette

°

6,

cf.

plus

haut.

44.

Agostino

ovello,

'autre rmitee ces

portes

mort

n

1309)

st

posé

ur

un ol

neutre,

ans

aysage.

u

contraire,

imone artini

1284-1344),

ans a

partie

centraleu

«

Retable u bienheureux

gostino

ovello

(1324),

onservéla Pina-

cothèqueationaleeSienne,vait einteportraitnpied ubienheureuxans n

paysage

ylvestre.

l

était

eut-être

mportant,

n

1445,

our

es Cisterciens

t

pour

la

commune,

e

présenter

n rmitee chevaliere

Chiusdino,

andis

ue

'ermite

gos-

tinoNovellotait

éjàprésent

Sienne

ar

a

tombet

par

e

retablee Simoneans

l'église

es

Augustins.

f.

Lecceto

gli

remi

gostiniani

nterrai

SienaMonte aschi

di

Siena,

ienne, 990,

p.

37-38.

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RELIQUES

T

IMAGES

DE

SAINT

GALGANO SIENNE

109

rouge

en

scapulaire,

en la

tournant

ur son

épaule.

Le

cheval est

absent.

Le

personnagepresque

aérien semble à

peine

posé

sur

le sol

rocheux,

uquel

le retient

eulement on

épée, qu'il

tient

olidement

plantée

dans

le roc du mont

Siepl. Galgano

est

le

seul

saint

repré-

senté sur

cette

porte

dans un

paysage,

introduisant

insi

le

contado

siennois45. errière ette

mage manquaient

es

reliques,

lors

que

les

autres saints

du

panthéon

iennois46 taient

présents ar

des

vestiges

physiques

derrière e

panneau qui

les

représentait47.

omme

si,

pour

notre

saint,

l'image

était

déjà

à elle seule

relique.

En

1461,

au Palazzo

pubblico

de

Sienne,

Vecchietta

irige

a déco-

ration fresque e la salle dite« della segreteria. De partet d'autre

d'une

Vierge

du

Bon

Secours,

il

ordonne des

portraits

'ermites le

bienheureux ranco de

Grotti,

Bernard Tolomei48

t saint

Galgano.

Le

nom de

chaque

saint

figure

u-dessous de son

portrait.

Galgano,

auréolé comme dans les

images

précédentes, orte

sa

cape

de

cheva-

lier sur son

épaule

comme un

scapulaire

t tient

on

épée plantée

dans

le roc. Le titulus

tipule

«

San

Galgano

da Siena

»

;

comme 'il avait

été

adopté par

la

ville,

dans l'effacement e

ses

origines

maremmanes.

Revenons

l'abbaye

de

San

Galgano,

entreMonticiano t

Chius-

dino. L'inventaire49

u

trésor de

l'abbaye

mentionnait

n

polypty-

que, œuvre de Giovanni di Paolo ; il est aujourd'hui conservéà la

Pinacothèque

de Sienne

(Fig.

7).

Dans l'état actuel du

polyptyque,

quatre

saints encadrent ne crucifixion50

saint

Galgano

est à droite.

Il

est

vêtu de sa

cape

rouge

repoussée

sur son

épaule

et

l'archange

saint

Michel chuchote à

son

oreille la tête

de son cheval blanc

se

montrede l'autre côté de son

visage.

Il

tient on

épée plantée

dans

45.

La

précision

u

paysageour

aint

Galgano eut 'expliquerar

on

choix

érémitique.

e caractère

ylvestre

u

portraiteut

ussi tre ne

façon

e tenir al-

gano

part

ans e

panthéon

rbainu

encore

n

procédé

our

ntroduire

e

cheva-

lier

armi

es

«

confrères.

46.Jusqu'en260,epanthéoniennoisst ominéar aViergessistéeespro-

tecteurs

ntiques,

aint

nsano,

aint

ictort

aint rescentà la

fin

u

xnie

iècle

arriventndré

allerani,

mbroise

ansedoni,

ierre

ettinaio,

oachimiccolomini

et

Agostino

ovello,

f.

André

auchez,

La

Communee

Sienne. es

ordres en-

diantst

e culte es aints. istoiret

nseignements

'une rise

,

Mélanges

e

'École

Française

e

Rome.

Moyen ge

I,

1977.

p.

757-762.

47.

L'Arliquiera

ontenait

es

reliques

uxquelles

orrespondaient

es

mages

t

les

ffigies

eproduites

ur

es

portes.

n trouvait

n

fragment

e a croix u

Christ,

un morceauu voile

e a

Vierge,

esos

du

bienheureux

orore,

n

doigt

u

bien-

heureux

mbroiseansedonit

une

ertèbre

ubienheureux

gostino

ovello.

ppa-

remment

anquaient

es

reliques

e saint

algano

t,

dans e

cas,

ommea montré

Chiara

rugoni,'imageFig.

)

était elle eule

elique,

.

Frugoni,

na

ontana

città

Turin, 983,

p.

95-97.

48. Fondateurumonastèree Monte liveto aggiore.49. A.Canestrelli, p. cit p. 145.

50. La crucifixionstdatée e

1440,

andis

ue

es aints

n

pieds

t a

prédelle

sont

atés es nnées

470. ansune

disposition

ntérieure,

es

portraits

taient

la-

cés au-dessus

e l'élément

e

la

prédelleui

s'y

rapportaitparexemple,

a

vision

de saint

ernard

e trouvaitous e

portrait

e saint

ernard.

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RELIQUES

T

IMAGES

DE SAINTGALGANO

SIENNE

111

de

l'ermitage

e

Galgano (Fig.

8),

une scène

qui

avait

déjà

été retenue

par

Andrea

di Bartolo. Cet

épisode

entre

opos

hagiographique

t folk-

lore est

rapporté

vec des détails

plus

ou moins

précis

ur

'identité es

moines52.

Giovanni

di Paolo

choisit

a simultanéité ntre a

punition

des

coupables

et la reconstructione

l'ermitage.

l

peint

sur

la

droite

de

l'image

es

châtiments

nfligés

ux fauteurs e troubles. 'un est fou-

droyé,

'autre se

noie dans

le

ruisseau

et le

troisième

st

attaqué par

un

loup.

Les textes taient

moins

précis

que

ne l'est la

représentation

iconographique,

auf

le

texte de la

«

leggenda qui précise

«

l'un

tomba

dans un ruisseau

t se

noya,

'autrefut

frappé

'une flèche éleste

qui le tua, puis vint un loup qui se jeta sur l'autre et le saisit au

bras

»53,

mais

il

ne donnait

pas

l'identitédes

religieux54.

Sur le thème

du

sac

de

l'ermitage,

Giovanni di

Paolo a

innové,

mais

pour

le

portrait

de

Galgano,

il

reprend

es thèmes

déjà

cons-

truits.

l

reste

fidèle

la matricede

l'iconographie

de saint

Galgano,

c'est-à-dire

u

reliquaire

t aux

sources

hagiographiques.

a

peinture

s'inscrit

dans

la tradition

de miniature

e l'orfèvrerie t des émaux

gothiques

siennois*.

Nous

n'avons

abordé ici

que

des

morceaux hoisis de

l'iconogra-

phie

de

Galgano

entre e

xnie et le

xve

siècle.

Le

reliquaire

e la tête

est le premier ieu précisde l'élaboration conographiquede la Leg-

genda

de

saint

Galgano,

qui,

comme son

nom

l'indique

est

destinée

à être

ue et entendue.Les

fastes

de l'art

gothique

siennois naissant

créent

des

images

qui

assurent

e relais des

reliques

le

reliquaire-

monstrance

st

le lieu du transfert es

reliques

aux

images.

Par sa

nature

même,

et

objet

«

donne ieu

»

au culte. Ce lieu mobile

ymbo-

lise,

par

les

processions

ntreSan

Galgano

et

Sienne,

e

déplacement

du

culte

et de ses

images

du mont

Siepi

vers l'intérieur

e la

ville,

en

passant

par

l'abbaye

de San

Galgano,

la mutation 'un culte

popu-

laire rural

en un culte

civique

raffiné.

Si

aujourd'hui

le

personnage

de

Galgano

est effacé dans

la

majestédu lieu, sa renommée n Toscane est tout actuelle. Chaque

lundi

de

Pâques,

une

procession

est

organisée

entre Chiusdino

et

l'abbaye

de

San

Galgano.

Le curé de Chiusdino

a créé

une

associa-

tion

qui

publie

en

petits

fascicules a

légende

de saint

Galagno

et son

image

autocollante55.

52.

Andreai

Bartolo,

ar

e

détail es

ostumes,

ésignait

esmalfaiteursomme

des

Bénédictins.

53.

«

Ll'uno

adde

n

uno iumicello

'acqua

annegò,

all'altroennena aetta

da ccielo

uciselo,

oi

venne no

upo

aventossi

ddosso

ll'altro

preseloer

o

braccio

,

Franco

ardini,

p.

cit.,

.

108.

54.Eugeniousi, p. cit.,p.25.* Nous emercionsa maisonensinieSienne,uinous aimablementommu-

niqué

es clichés

es

figures

, 3,

6,

8.

55. Nombreux

ont eux tcelles

ans aidede

qui e

ne

erai

amais

llee

egar-

der e

soleil

l'ombre e la nef e

San

Galgano

je

tiens les

remercier,

t tout

particulièrement

dile

Redon,

hiara

rugoni

t André auchez.

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Médiévales8,printemps995, p.119-128

Élisabeth

HALNA-KLEIN

SUR LES TRACES DU

LYNX

La

célébrité

du

lynx

est récente. Jadis en effet l

a été

plutôt

méconnu

par

les

populations

qui

ont vécu

près

de lui

;

les contes et

les dictons

'ont oublié mais les

préfixes

uc-lux-lutz

ignalent

ertains

lieux où sa

présence

'imposa,

à une

date

indéterminée,

urtout

dans

l'Est

de la France.

Il

fut à certaines

périodes l'objet

d'une

chasse

intense

pour

la valeur

de sa

fourrure.

«

Le

lynx

n'a

pas disparu

à cause des

modifications u

milieu,

écritR. Hainard, mais par la persécution irecte...Répandu autre-

fois dans toutes es contrées

'Europe,

le

lynx

n'existait

lus

en

France

que

dans les

montagnes

dès le

XVIIe

iècle.

En

Allemagne,

'Électeur

de

Saxe,

Jean-Georges

er,

n aurait tué de sa main

217

de 1611 à

1655.

On en abattit ncore

191

de

1656 à

1680.

Il

a

disparu

définiti-

vement

de

l'Allemagne

à

la fin

du

XIXe

iècle »*.

La réintroduction

u

lynx

n

Europe

occidentale enrichi

onsi-

dérablement

a

connaissance

de ce

félidé,

mais

elle a suscité

aussi

d'innombrables

débats

et

polémiques.

Plus

encore,

«

le

succès

ou

l'échec

de ces

opérations

de réintroduction),

oin de

ne

dépendre ue

des

aspects

biologiques (adaptation

des

espèces

à leur

nouveau bio-

tope), sont bien souvent iés à la questionde leur acceptabilitépar

les

populations

humaines concernées

2.

À

l'idée

de voir introduits

des

lynx

en

Alsace,

la fédération e chasse

du

Haut-Rhin

protestait,

comparant

ces félins

à

des braconniers

parce qu'ils s'attaqueraient

(sans

permis)

aux cerfs et aux chevreuils.

Ici

le discoursde la

chasse

introduit

'idée

d'une antinomie

ntre

lynx

et

cervidés,

mais

R. Hainard cite

des

exemples opposés

:

«

En

Pologne

où le

lynx

vait été décimé

pendant

a

PremièreGuerremon-

diale,

en raison

de la valeur de

sa

fourrure,

es

mesuresde

protec-

1. R.Hainard,Mammifèresauvages'Europet.1, Neuchâtel-Paris,987-1989,

pp.

306-307.

2. A.

Vourc'h,

Représentations

e l'animalt

perceptions

ociales e sa réin-

troductionle cas

du

ynx

es

Vosges

,

Revue

'écologie

erre-Vie

supplément

,

1990.

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120

E.

HALNA-KLEIN

tion ont été

prises

et

il

n'est

permis

de

chasser

qu'un

mois

par

an,

en hiver.

l

semble

que,

grâce

à cette

mesure,

e

nombreen

ait

aug-

menté. On en tuait de

plus

en

plus

et il

en revint

ans

les forêts ù

on

n'en avait

pas

tiré

depuis

de

nombreuses nnées.

En

général,

es

propriétaires

ont

les forêts taient

fréquentées

ar

ces

carnassiers

n

étaient si

heureux

qu'ils

ne

regrettaient

as

leurs

chevreuils 3.

La lecture t le

recoupement

e

certains critsdu

Moyen Âge

et

de

l'Antiquité

éclairent es contradictions 'une

lumière

ntéressante

et inattendue.

Un territoire ien marqué

Dans la

mythologie

réco-latine,

ynchus,

roi de

Scythie,

ente

d'assassiner

e

messager

de

la

déesse des

moissons

pour

lui voler les

semences,

promesse

des moissons des

hommes la

déesse transforme

l'hôte malveillant

n

lynx4.

Au

quatrième

iècle avant notre

ère,

Aristotementionne

e

lynx

dans

Y

Histoiredes animaux et

il

précise

ue

le mâle

«

urine

par

der-

rière,

omme e

lion,

le chameau et le

lièvre 5. Pline l'Ancien6

rap-

porte que

l'urine

du

lynx,

«

dans le

pays

où naît cet

animal

»,

une

fois

émise,

se

cristallise

n

pierres

précieuses,

appelées

lyncurium« semblables des escarboucles, t qui jettent 'éclat du feu» : mais

ces

richesses ont

reprises

l'homme,

et

si elles

sont

recouvertes e

terre,

e n'est

pas

pour

les

faire

fructifier,

el le

grain,

mais

pour

les

cacher

«

Les

lynx

aventtrèsbien ce

que

devient eur urine et

par

jalousie,

ils la recouvrent e

terre,

e

qui

a

pour

effet e la

solidifier

plus

vite ». Cette

pratique

est

rappelée

de

manuscrit n

manuscrit,

du

Physiologus fin

du

IIe

siècle), prototype

es

bestiaires u

Moyen

Âge,

aux

Étymologies

vne

siècle)

d'Isidore de

Séville7,

n

des termes

presque

nchangésusqu'au

BestiaireAshmole

xnie-xive

iècle)

«

leur

haine toute

viscérale

pour

le

genre

humain

est telle

qu'ils

se

refusent

à

ce

que

l'homme

profite

de leur excrétion 8.

Chez

l'abbesse Hil-degarde de Bingen, au XIIe iècle, dans la Physica l'urine du lynx

n'est

pas

évoquée

dans le

chapitre

du

lynx,

mais bien au

livre

des

pierres,

dans le

chapitre

De

Ligurio

;

traduisons

3.

Op.

cit.,

p.

309.

4.

Ovide,

Métamorphoses

IV,

traduit

ar

Georges

afaye,

aris,

es

Belles et-

tres, 968,

p.

161-162.

5.

Aristote,

istoireesAnimaux

II, 1,

t.

1,

traduit

ar

Pierre

ouis,

Paris,

Les

Belles

ettres,969,

.

51.

6.

Pline

'Ancien,

istoireaturelle

VIII,

57,

raduit

ar

A.

Ernout, aris,

es

Belles

ettres,

952,

.

71.

7. Isidore e

Seville,

tymologiae

XII,

traduit

ar

Jacques

ndré,

aris,

es

Belles ettres,986, , 20,pp. 102-104.8. Le Bestiaired'aprèse manuscrituBestiaireshmole511 ela Bodleian

Library

'Oxford,

raduit

ar

Marie-France

upuis,

ylvain

ouis,

Paris,

hilippe

Lebaud,

988,

.

62.

9.

Hildegarde e

Bingen,

hysica,

ubtilitatum

iversarum

aturarum

reatura-

rum ibri ovem

Patrologie

atine

t.

197,

ol.1262-1263.

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SUR

LES TRACES

DU

LYNX

121

«

Le

ligure

est

chaud.

Il

naît

d'une certaine

urine du

lynx

et

non de

toute 'urine.

Car

le

lynx

n'est

pas

un animal

lascif,

ni

libidineux,

i

malpropre,

mais

il

est,

d'une

certaine

manière,

tempéré.

Et sa

vigueur

st

si

forte

u'il

pénètre

même es

pier-

res,

et aussi

qu'il

a une

vue

aiguë

et

que

ses

yeux

ne

s'obscur-

cissent

pas

facilement.

t cette

pierre

ne naît

pas

toujours

de

son

urine,

mais seulement

uand

le

soleil

chauffe

puissamment

et

que

l'air est

léger

et doux

et

bien

tempéré.

Car alors

cet ani-

mal

se

réjouit,

à

cause

de la

chaleur

et

de la

pureté

du

soleil

et

à cause

de la suavité

du

bel

air,

et

alors,

lorsqu'il

veut

émet-

tre son urine, l creuse la terre vec ses pieds et il émetcette

urine

dans

ce

trou,

et

ainsi,

par

l'ardeur

du

soleil,

le

ligure

est

coagulé

et

croît.

Car de

la

pureté

du soleil

et

de la douceur

de

l'air

qui

traverse

et

animal en

le

touchant,

t de la

joie

de son

âme

et

de la

grande

force

u'il

a,

son

urine e

réchauffe t

ainsi

quand

il

l'émet

elle

est

coagulée

en cette

pierre,

de telle sorte

que

cette

coagulation

fasse

une

belle

pierre

dans

la

terre,

qui

est

plus

tendre

que

les

autres

pierres

.

Le

lynx

du

textede

Hildegarde

st

donc

un animal

positif,

tta-

ché à

produire

une belle

pierre,

nullement

aloux

ou

ennemi de

l'homme.

Comment

omprendre

es récits

fférents

l'urine

du

lynx

Au

Moyen

Âge,

en

Occident,

es

chats étaient

elativement

eu

nombreux

et

rares

sont

ceux

qui

ont

pu

observer

es

moeurs

mictionnelles

es

félidés

le

lynx

enterre

es

déjections,

comme

les

autres

chats. Mais

pourquoi

cette

urine se

transforme-t-elle

n

pierre

ici

ligurius

lyncurius

u

lyncurium

Certains

pensent

que

cette

escarboucle

est

en réalité

a tourma-

line.

Pline10

a

rapproche

de

l'ambre

«

aussi

la

plupart

des

auteurs

disent-ils

ue

le succin

est

produit

de

même sorte

». Faut-il

admettre

avec RobertHainard11 ue

cette

explication

st

à

mettre n

relation

avec les

gisements

'ambrede Ligurie,ou avec le transit ans le port

de

Gênes

de

l'ambre

baltique

?

Proposons

une

autre

lecture

de ces

différents

écits

le

lynx y

est

assez

cohérent,

ans

sa

représentation

ymbolique

avec

les

réser-

ves

faites

plus

haut

pour

le

texte

de la

Physica)

ennemi

des dieux

et

des

hommes,

l veut

garder

alousement

ses

joyaux

qu'il

enfouit

dans

la terre.

on

urine ristallisée

st

inutile

ux

hommes,

l'inverse

du

grain,

ui

aussi

enfoui

dans

la

terre,

mais

qui

produit

de riches

moissons.

10.

Pline,

op.

cit., ,

p.

71.

11. R.

Hainard,

p.

cit.,

p.

321.

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122

E.

HALNA-KLEIN

Taxinomie

Le territoire

marqué,

il

serait

prématuré

e

croire

ainsi identifié

ce

lynx.

Pline12

e nomme

yncum

t le

range

avec les

sphynx

parmi

les

monstresvenus

d'Éthiopie

«

L'Éthiopie produit

des

lynx

qui

sont

répandus

partout

t

des

sphynx,

nimaux à

poil

roux

avec deux

mammelles ur

la

poitrine,

t

beaucoup

d'autres

animaux

monstrueux .

Deux

chapitres

plus

haut13,

un court

passage

évoque

le

loup-cervier

«

C'est aux

jeux

de

Pompée

le

Grand

qu'on

exhiba

pour

la

première

ois e chama

que

les

Gaulois

appellent

ufius lupus

cerudrius)

il

a la

forme du

loup,

les taches du

pard

».

Isidore de

Séville14 crit

«

Lincis vientde

ce

que

cet

animal

est

rangé

dans

l'espèce

des loups. La bête a le dos marquéde taches comme le pard,mais elle ressemble u

loup

;

aussi celui-ci e nomme-t-il

u/cof

et

celle-là lincis».

Les

bestiaires

reproduisent

es

mêmes

notions,

ainsi celui

d'Ashmole15

«

Il

est une bête

appelée

lincis,

qui

fait

partie

de la race

des

loups.

C'est une

bête au

pelage bigarré,

omme e

pard,

mais

qui

ressemble u

loup

».

Le Livre du Trésor le bestiairede BrunettoLatini, au xiiiesiè-

cle,

range

le

lynx

au

chapitre

des

loups

:

«

Il

existe une autre

espèce

de

loups que

l'on

appelle

cer-

viers,

ou

lynx,

ui

sont

pommelés

de

taches noires

tout

comme

le

léopard

mais

pour

le

reste,

ls

sont

semblables

u

loup

»16.

Or,

dans le

Bestiaire

Ashmole17

l

est

écrit

«

le

loup symbolise

le Diable

»

:

est-ce à dire

que

le

lynx

symbolise

e

Diable ?

12.

Pline,

op.

cit., 0,

p.

48.

13. bid.14. sidore e Séville,op. cit., , 20, pp.102-103.

15.Le

Bestiaire

op.

cit

,

p.

62.

16.

Bestiairesu

Moyen

ge

traduit

ar

Gabriel

ianciotto,aris,

tock

lus,

1980,

p.

234-235.

17. Le

Bestiaire,

p.

cit

,

p.

78.

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SUR LES TRACESDU LYNX

123

Le

lynx

a

peut-être

té confondu avec d'autres

bêtes féroces

«

L

once

désigne

au

Moyen Âge

diverses

bêtes

féroces. Forme

apo-

copée

de

lonce

«

1

»

a été

pris pour

l'article ainsi

Y

once chez

Rutebeuf,

u'on peut

aussi

bien

ire once

Lonce remonte une

forme

féminine,

uncea dérivée du latin

classique lynx

.. »18.

À

la

fin du

Moyen

Âge,

le

lynx

est

rangé parmi

es

chats,

mais

encore,

sa

spécificité

'est

pas

nettement tablie au

XIVe

iècle,

Gaston Phébus

note

«

Toutefois,

l

y

a

diverses

spèces

de chats

sauvages spéciale-

ment,

l

y

en a

qui

sont

grands

comme

des

léopards,

et

on les

appelletantôt oups-cerviers,antôt hats-loups et c'estmal dit,

car ils

ne sont

ni

loups-cerviers

i

chats-loups.

l

vaudrait

mieux

les

appelerchats-léopards u'autrement,

ar ils ont

plus

de

traits

communs

avec le

léopard qu'avec

aucune autre bête »19.

Au

xvic

siècle,

dans son

glossaire

e la

vénerie,

Jacques

du Fouil-

loux

rapporte

à son tour

«

Cerviers sont chats

sauvages grands

comme

léopards»20.

Le

Moyen Âge

semble voir

distingué,

n

pelleterie,

es

petits

ynx

rouges

d'Europe

occidentale,

ppelés

ici luserue là

luberne,

ucerne

ou lucróte

1

,

des

grands

ynxgris

venus

du nord et de

l'est du con-

tinent, pparus trèstard sur le marché,seulement ntre e xve et le

xvie

siècle,

et vendus

bien

plus

cher,

sous

l'appellation

de loss ou

loess, luhs,

lixinae

pelles

22

.

Robert Delort23 ssimile

e

petit

ynx

rouge

d'Europe

occidentale

au

Lynx

pardina

lynx pardelle

d'Espagne.

Le

lynx

du

Nord

et

de

Russie

est,

lui,

Lynx lynx

La situationn'est

pas simplepour

autant

«

Notons

que

le

lynx

e

dit

en catalan

lop

cervall d'où les mots

cir-

bal et cerval

ce

qui

n'exclut

pas

la

présence

ur

le

sol

espagnol

du

félidé,

ppelé

précisément

serval",

légèrement

lus

grand

que

le

lynx

et

vivant actuellement

n

Afrique

24.

Robert

Hainard

rapporte

'autres

précisions

«

On n'a

pas

assez

de matériauxpour décidersi les lynxdu Nord et des Alpes appar-

tiennent

la même

sous-espèce.

Néanmoins,

Lavauden estime

qu'on

peut toujours

les

distinguer...

nfin,

l

semble bien

qu'il

en existait

autrefois

eux

sortes n

Europe

centrale

Flemming,

n

1719,

distin-

gue

les

lynx-chats

.. et les

lynx-veaux

..

»25

selon

leur robe.

18.

Oscar

loch

et

W.

Von

Wartburg,

ictionnaire

tymologique

e a

langue

française

t.

I, Paris, UF,

1932,

.

106.

19.

Gaston

hébus,

e livre

e

a chasse

traduit

ar

Robertt André

ossu

t,

Paris,

hilippe

ebaud, 986,

.

69.

20.

Jacques

u

Fouilloux,

a Vénerie

Fac-similé,aris,

oger

acosta, 979,

glossaire

ors-texte.

21.Robertelort,Le commercees ourruresn OccidentlafinduMoyenÂge 2 vol.,Rome, coleFrançaiseeRome, 978, p.25 et 1085.

22.

bid.,

pp.

25,

156 t

172-173.

23.

bid.,p.

172.

24.

bid.,p.

173.

25.

R.

Hainard,

p.

cit

,

p.

306.

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124 E.

HALNA-KLEIN

De même

que

les

chimères ont

infécondes,

e

mal-classé

qu'est

le

lynx

ne se

reproduit

uère

«

Selon

Pline,

il

ne met

bas

qu'une

fois

»

peut-on

ire

aussi

bien chez Isidore

que

dans les

bestiaires mais

chez

Pline,

nulle trace de

cette

égende.

Chez

Gaston Phébus

:

«

Ils

portent

t sont

en amour

comme es autres

hats,

mais

ils

ne

font

que

deux chatons. Ils demeurent

ans

le creux

des

arbres

t

y

font

eurs

itsde

fougères

t

d'herbes,

t le

chat mâle

aide à

nourrir

es

chatons de la même

façon

qu'un

loup

»26.

Chez Hildegardede Bingen, e texten'évoque ni la répétition es

bestiaires,

ni

le

ton,

déjà

très

moderne,

de la

description

e Gaston

Phébus. Elle

ne

classe

pas

le

lynx,

elle ne le

rattache

ni

au

pard,

ni

au

loup,

mais le

chapitre

du

lynx

suit immédiatementelui du

chat.

Son

lynx

est

chaud,

joueur,

solaire,

indépendant,

mprévisible.

«

De Luchs Le

lynx

est chaud et suit

sa

volonté,

faisant

ce

qu'il

veut,

et

il

se

réjouit

de la belle ambiance

splendide

t

du soleil de

l'été,

et

il

se

réjouit

aussi de la

belle

ambiance et

de la

neige

en hiver

mais

il

n'a

presqu'aucune

stabilité,

auf

celle

qui

se fait selon

l'équilibre

de l'air. Et

parce

qu'il

suit sa

volonté,pour cela, ses yeuxbrillent omme une étoiledans la

nuit »27.

L'instabilité

du

lynx,

on caractère

mprévisible

t

labile,

lui

sont-ils

attribués illeurs Brunetto

Latini

écrit dans le

Livre du

Trésor

«

C'est l'être

le

plus

oublieux

du monde

car,

lorsqu'il

est

en

trainde

manger

on

repas,

s'il lui

arrive

par

hasard de

regar-

der autre

chose,

il

oublie aussitôt e

qu'il

étaiten

trainde man-

ger,

si bien

qu'il

est

incapable

de

retrouver

a nourrituret

qu'il

la

perd

entièrement.

Mais chez

Hildegarde,

'humeurdu

lynx

hange

selon

l'ambiance

et

selon sa

volonté,

non selon l'oubli : et

sa

volonté donne

l'éclat à

son

regard

le vouloir et le voir se

rencontrent Or

dans l'écriture

des

manuscrits e

Hildegarde,

certaines

formes

du

verbe

volo

pou-

vaient être

confondues vec

certaines ormesdu

verbe video.

Faut-il

croire ussi à une

confusion ntrevisus et virtus

au

chapitre

e

ligu-

rio

et lire

alors non

plus

«... et

sa vertu...

»

mais

«

...

sa

vue est

si

forte

u'elle pénètre

même es

pierres...

28

?

Méprises

ou

paradig-

mes

homophoniques ui

servent révéler

es récitsdans le

récit,

es

relationsdans la relation

26. Gaston

hébus,

p.

cit.,

pp.

69-70.

27. Hildegardee

Bingen,

hysica,

ivres

à

VIII

traduits

ar

Elisabeth

lein,

Bâle,

Basler

ildegard

esellschaft,988,

.

237.

28.

Cf.

Physica,

.L. t.

197,

ol.1262-1263.

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SUR LES TRACESDU

LYNX

125

Des

yeux

de

lynx

Car dans les

yeux

du

lynx

e lit une autre

étymologie,

ne autre

appartenance

la

brillance.

«

L'emprunt

u mot

grec

XvyÇ

ffre u nominatif e

nombreu-

ses

variances

orthographiques...

incis la forme

d'Isidore,

est

pro-

che de

l'ancien

espagnol

Lince .. Mot

indo-européen

arm. lusanunk

anglo-saxon

ox

lit.

lùsis,

etc.,

sans

rapport

vec le nom

grec

du

loup,

XvkoÇ

t rattaché

énéralement

la racine euk

«

briller

,

pour

l'éclat

des

yeux...

»29.

Dans la mythologie recque, Lyncée KvyvevÇ)ritpartà l'expé-

dition

des

Argonautes,

ù

il

fututilisé

pour

sa vue

perçante

il

voyait

par exemple

à traversune

planche

de

chêne)30.

En

irlandais,

e

lynx,

ug

est

l'homonyme

u dieu

Lug

:

«

il

est

donc

possible

qu'il

ait été

considéré,

cause de sa vue

perçante

omme

un

symbole

ou une

image

de

Lug.

Les cordes

des

harpes

étaient en

boyau

de

lynx.

Leurs sons

étaient considérés

comme

divins

31.

Chez Brunetto

Latini,

dans

le Livre du Trésor la

clairvoyance

du

lynx

est

exprimée

n ces termes

«

Et la vue de cet

animal est

si

perçante

que

ses

yeux

traversentes

murs

et les

montagnes.

Brillance, clat,

pénétrance.

riller

omme

une étoile

dans la

nuit,

est-ce a mêmevertuque percer es planchesde chêne, les pierres t

les

murailles

En

tous cas aux

yeux

du

lynx

e

rapporte

a seule

idée

persistante

ur

le

lynx

de nos

jours,

dans le

français

ourant celui

qui

ne

sait

riendu

lynx

ait

ce

que signifie

avoir des

yeux

de

lynx

.

Cette

qualité

contribue-t-elle

rendre e

lynxplaisant, sympathique

Rien n'est

moins

sûr,

puisque

à la

clairvoyance

e celui-ci

qui perce

les murs

et

les

masques, répond

l'humiliationde celui-là

qui

voit

déjouées

ses

parades,

et

qui

est

vu

sans

voir.

Au terme

de ces

lectures,

nterrogeons-nous

à

quoi

sert e

lynx

au

Moyen Âge

?

Usages

du

lynx

Le

lynx

est-il

bon

à

manger

Nulle

mentionn'est faite de

cet

usage

dans les sources consul-

tées,

pourtant

a

chair

«

passe pour

bonne

et tendre 32.

Hildegarde

de

Bingen,

ui

détaille

oujours

es différents

sages

possibles

des

ani-

maux,

végétaux

t

minéraux

u'elle

étudie dans la

Physica

n'en

pro-

pose

aucune utilisation limentaire.

Par

contre,

elle

décrit

'intérêt

médicinal

du

lynx.

29.J.André, ote °149,sidore eSeville, tymologiaeXII,op.cit., . 103.30. Pierrerimal, ictionnairee amythologierecquetromaineParis, UF,

1988,

.

270.

31. Jean hevaliertAlain

Gheerbrant,

ictionnaire

es

ymboles

Paris,

af-

font, 982,

.

596.

32. Charles

.

Cornish,

es

animauxivants

u

monde

p.

64.

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SUR LES TRACESDU

LYNX

127

Est-il

pour

autant

une

«

bonne chasse

»

?

Gaston

Phébus

rapporte39

«

On

les chasse

peu,

si ce n'est

par

hasard

et

si les

chiens

en

trouvent n

d'aventure,

l ne

se

fait

pas longtemps

hasser,

mais aussitôt

se met en défense

ou monte

sur

un

arbre et

comme

l

ne fait

pas longue

fuite,

'en parlerai eu,

car

sa chasse

n'a

guère

de maîtrise .

Plus

loin,

il

contredit es

premières

ffirmations40

« Et s'il trouve 'autresgrands hatsque j'ai dit,qui ressem-

blent ux

léopards

t

qu'on appelle

oups-cerviers,

l

en aura bonne

chasse

et bons

abois

;

car c'est une bête

qui

fuit

ssez

longtemps

et se laisse

aboyer

commeun

sanglier.

l

doit alors

eter

tous ses

lévriers

ans

le

bois

avec les chiens ourants

t

envoyer

es

gens

à

pied,

armés

de

glaives,pour

aider

es

chiens t les

lévriers, u,

s'il

en

a,

des archers

u

des arbalétriers.

insi ls

pourront

e

tuer .

Jacques

du Fouilloux ne cite

pas

le

lynx

comme

gibier,

et

il

ne

mentionne

e

loup-cervierue

dans son

glossaire

es termes e vénerie.

Réflexions

Et si le

lynx

conduisait à

penser

?

Il ne

s'agit pas

ici de faire a

part

du vrai et de l'erreurdans

les

traditions

elatées

aux savoirs

naturalistes ur le

lynx

se mêlent

des

traits

qui

le

qualifient

ymboliquement.

Et

si

nous arrivons

montrer

ue

l'environnement

aturel est saisi comme

une

pièce

du

cosmos

qui

exige

un

partage

du

bien

et du

mal,

du licite

t de l'inter-

dit,

du sacré

et

du

profane,

nous

pourrons

spérer

définir

vec

plus

d'exactitude

a

portée

exacte de ces récits

41.

Chez Hildegarde, e schéma p. 128)ne peutêtre ppliqué.Même

si

elle

reprend

plusieurs

ermes

de la

tradition crite

l'urine et

sa

transformation,

a

clairvoyance

t

la brillancedu

regard

,

son

lynx

est

utile,

e

«

ligure

se

déterre,

t elle en donne es indicationsmédi-

cales.

Est-ce

pour

cela

que

son

lynx

n'est

pas

connoté

péjorativement

Il n'est

pas

un

loup,

il

n'est

pas

ennemi de l'homme

ni

jaloux

de

son

bien,

l

est

libre,

mprévisible,

eureux t doué. C'est dans d'autres

sources

de cette

époque, germaniques

u

irlandaises,

qu'il

faudrait

chercher

es traces

d'un vaste courant

atin véhiculant 'idée

d'un

lynx

diabolique

et rencontrant

es traditions

ocales

qui

conservent

u

lynx

d'autres

caractéristiques

t des

usages

précis.

39.

Gaston

hébus,

p.

cit.,

p.

69.

40.

bid.,

p.

149.

41. Marlene

lbert-Llorca,

ordre

es

hoses

Pans,

ditionsu

CTHS,

1991,

p.

132.

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128

E.

HALNA-KLEIN

L'INUTILE

Ce

qui

ne

peut

être

ni

récolté,

ni

chassé,

ni

mangé

Le

Diable

Le

lynx

L'urine

Le

ligure

MATIÈRE

ESPRIT

Le

pain Le grain

Le cerf

Dieu

Ce

qui peut

être

récolté,

chassé,

mangé

L'UTILE

Revenons

quelques

instants

nos

autres

récits.

La terrecontient

-

le

grain, qu'elle

révèle ous formede

moisson et

qui

devient

nourriture, tile à l'homme sous forme de pain,

-

l'urine du

lynx, ue

le

lynx

cache,

et

qui

de

ce fait

reste

nu-

tile à

l'homme,

même dans sa transformationn

pierre précieuse.

Le

lynx, Lynchus

avant sa

métamorphose,

eut voler

le

grain,

devenant insi l'ennemi

de l'homme et

celui

qui

menace le

pain.

Le

pain,

c'est la

nourriture,

'est

aussi la

communion

es

chrétiens,

'est

le

corps

du

Christ.

Le

lynx

fait donc

doublement

bstacle,

à la santé

et au salut. Le

cerf, ui,

est

l'ennemi du

serpent, u'il

fait sortirde

son trou en

soufflant

igoureusement

toutes es sources

mentionnées

rapportent

et attribut

certaines,

omme

Pline ou le

BestiaireAsh-

mole

disent

également

a

propriété

e la viande

de cerf

de conférer

longévité t prévention es fièvres ceuxqui en consomment éguliè-

rement.Le cerf est une

image christique,

e

que

vient renforcere

rite de la

chasse,

qui

en fait le sacrifice.

Le

lynx,

ui,

est une

image

du

Diable,

par

son

appartenance

la famille des

loups,

et c'est

lui

qui

menace le

cerf

se

place

e chasseur ans

cette

utte N'est-il

as

celui

qui

réserve

sa

«

bonnemort au

cerf,

u terme e la

grand-messeu'est

sa chasse

?

N'est-il

pas

celui

qui permet ue

la

communion-consommatione la

venaison

puisse

avoir lieu

?

Prêtre

t

serviteur e

l'animal

christique,

il

le

préserve

e l'infàmiede la morsure u

Mal-lynx.

Au-delà des arguments ynégétiques, aunistiques, conomiques,

écologiques que

certains

opposent

à la réintroduction u

lynx

dans

nos

pays, n'y

aurait-il

as

d'autres

réticences,

ui puisent

eurs sour-

ces dans ces

traditions,

nfouiesvoires

méprisées,

mais

part

construc-

tive

et

efficace de notre

maginaire

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Médiévales8,printemps995, p.129-137

Simone ROUX

BORNES

ET

LIMITES DANS

PARIS

À LA FIN DU MOYEN ÂGE*

Le territoire

e la

ville,

en

général,

se

qualifie

aisément

omme

espace

social,

parce que

créé

par

l enceintebâtie

qui

le limite

maté-

riellement.

n

sait

que

cette

définition

st loin de

correspondre

la

réalité

de

chaque

ville, mais,

comme dans le cas de

Paris

l image

est

exacte,

les

quelques

réflexions

ui

suivent

vont

s y

fonder. Elles ne

cherchent

as

à

préciser

histoirede l établissement

u

rempart

mais

celle des espaces internes u il englobe, eursrapports t leurssignifi-

cations.

On

peut

cependant partir

de

l enceinte

pour poser

le

problème

des

différents

spaces

sociaux en

jeu.

Son tracé et donc

son

emplace-

mentconcret

furent e résultat accords

et

de

compromis assés,

fin

XIIe et

début

xnic

siècle,

entre outes es

autorités

mpliquées

dans le

projet

et dans

sa réalisation l autorité

du

roi,

celle de la

ville,

œu-

vrant

pour

définir

n

espace

à la mesure de

la

capitale

du

royaume

capétien,

celle

des

seigneurs

u

sol,

notamment es

grandes

abbayes,

dont les

terres ont

en

parties

ncorporées

dans la ville et dont

les

droits

fonciers ommandentes droitsdes

propriétaires

rdinaires,

eux

sur qui les autorités omptentpour remplir e territoire mmuraillé

si

largement

éfini

t

construire

a ville. Dans ce

jeu

complexe,

rete-

nons le rôle

des

seigneurs

du sol

qu un exemple précis

va

préciser.

L enceinte de

la rive

gauche

fut financée

par

le

roi,

à la diffé-

rencede

celle de la rive

droite,

payée

par

les

habitants.Dans son

par-

cours

occidental

enceinte

raversait

es

terres

de

l abbaye

de Saint-

Germain-des-Prés.

n

tant

que seigneur

oncier,

abbaye

fut

dédom-

magée

de la cession du terrain la

ville et le roi avaient

pu

fairebâtir

le

rempart,puis

en

assurer

par

la suite

le

réaménagement

dans

la

seconde moitié

du

xive

siècle)

et le contrôle.

Pourtant,

en

plein

xviie

siècle

P

abbaye/seigneur

a

toujours pas

admis son

expropria-

*

Cet rticle

eprend

e texte une

ommunication

rononcée

l Universitée

Paris-

III,

au séminairehistoire édiévalet moderne

Espaces

aturels,

spaces

sociaux

,

en 1994.

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130

S. ROUX

tion totale.

En

1647,

elle contesteencore

le

droit de la ville et du

roi1.

Le débat a donné

lieu à

enquête

contradictoire,

menée

par

douze docteurs en

droit,

qui

réunissent es

arguments

u roi

et de

la

ville

d une

part

et ceux de

l abbaye

d autre

part.

Les

premiers

sti-

ment

que,

après

la

compensation

n

argent

reçue

ors

de la

construc-

tion,

l abbaye

a

perdu

tous ses droits sur

le

sol où

était établie

la

vieille enceinte.

L abbaye

soutient

e

contraire elle n a

pas

cédé la

totale

propriété

t conserve

un droit éminent omme

seigneur

oncier

et

haut-justicier.

lle

explique

« L on a trouvé bon de construire es murailles,des fos-

sés,

des

portes

t des

remparts

ans

(leurs)

fief t domaine.

Les-

dits abbés

et

religieux

ont souffertt le souffrent

ncore cause

de

la commodité

publique...

Mais cet

usage

et

occupation

n a

pas

étouffé,

upprimé,

ffacé, boli,

prescrit

e droit de la véri-

table et

juste propriété

desdits lieux et

places

».

Le débat révèleune

opiniâtreté uelque peu

anachronique.

e

bon

sens

et

l usage

constant

de cette bande de terrain

depuis

quatre

siè-

cles

et demi

paraissaient

voir tranché a

question

pourtant

abbaye

ne renonce

pas

: elle défend sa censive.

En effet,e souci de maintenira censivea occupé constamment

les

seigneurs

cclésiastiques

ui

se

partageaient espace parisien.

l

fal-

lait éviter out

abrègement,

ans les

terres

u

cœur de la

seigneurie

(c est

le cas

du

parcours

e l enceinte

ans les terres e Saint-Germain-

des-Prés)

mais

aussi aux

limites,

plus

menacées encore. Toute dimi-

nution

peut

être une

brèche

par

où s insinuent

es contestations ur

les droits fonciers

du

seigneur

t donc

des

profits ui

en

résultent,

mais aussi

d autres contestations

ur les

droits

économiques

et

les

droitsde

justice.

À

terme,

aisser s amoindrir a

seigneurie

st affai-

blir tout l ordre

social. C est

pourquoi,

avec une

persévérance

nlas-

sable,

les

seigneuries

cclésiastiques arisiennes

eillent

conserver u

à faire rétablir ous leurs droits.Même un empiétementmineur ur

leurs

prérogatives

st source

de

procès

et de demande

de

rétablisse-

ment.

Ici,

nous nous intéresserons

ux

questions

des limitesde

censive.

L espace parisien

au

Moyen Âge

est clairement

marqué

par

le rem-

part,

mais

à l intérieur

e ce territoire

éfini,

d autres

espaces

orga-

nisent a

géographie

urbaine les

paroisses, qui

ont servi

également

de cadre à la

levée des

tailles,

t

plus

tard es

quartiers,

ivisions

dmi-

nistratives t militaires

out à la

fois. Les débats et

enjeux que

leurs

délimitations

nt suscités n ont

guère marqué

les

sources documen-

taires

ui

nous restent.

n

revanche,

es

limites

e

censive

posentrégu-

1. Cf.

Topographie

istorique

u

vieux aris désormais

brégé

HVP,

par

A.

Berty

t L.-M.

Tisserand,

ome

II,

Région

ccidentalee

l Université,aris,

1887,

.

590.

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BORNES

T

LIMITESDANSPARISÀ LA FIN

DU MOYENÂGE

133

Rue du Fouarre en

1391 un

conseiller en la Chambre

des

Comptes

achète

pour

800

livres

ournoisune belle

maison

qui

s étend

sur trois

censi es : celle du

roi,

celle du

Temple

et celle de la Sor-

bonne.

La transaction ntraîne

également

e

paiement

des droits de

vente

et d ensaisinement ux

seigneurs, ropriétaires

minents,

mais

comment

épartir

a somme totale

?

On

fait

appel

à des

experts,

eux

de

la ville de

Paris,

maçons

et

charpentiersurés qui

visitent

es

lieux,

prennent

ans doute connaissance es

actes divers

ue chaque

seigneur

exhibe

pour

fonder

es droits

et

proposent

une

répartition

insi con-

çue

:

la

maison

occupe

une surface

de 213

toises

et demie et

17

pieds,

le roi est seigneurde 90 toiseset 15 pieds, le Temple de 92 toises et

demie et

la Sorbonnede

31

toises et

2

pieds.

Puis

ils estiment

es

ven-

tes et saisines

pour

une toise

à

11

sous

et 3

deniers

t

proposent,

ur

cette

base,

la

part qui

revient

chaque seigneur.

Rue

Saint-

acques,

c est la maison

du

«

Saumon

»

qui

est

objet

de débat

entre e

chapitre

de Notre-Dame

et le roi8. En

1386,

la

maison,

vendue

et

revendue,

été considérée omme dans

la

censive

du roi

qui,

par

le receveur

e

Paris,

a

perçu

la totalitédes droitsde

vente. Mais le

chapitreproteste

t

s oppose

en

faisant

valoir

qu une

partie

de

l immeuble tait

sur

sa censive

et

seigneurie, pour

raison

d une

grande

salle, cour,

jardin

derrière

,

moyennant

sous

parisis

de fondsde terre redevance recognitive es droits éminents ue le

chapitre

peut

sans doute

prouverpar

ses

livres

ensiers

onservant a

trace

de ce

paiement).

Sur ordre

de la Chambre des

Comptes,

une

enquête

est

ouverte tant

par

lettres

omme

par

témoins

t

veues

fai-

tes des

lieux

par plusieurs

fois

».

Après

remise

des

conclusions des

experts,

es

deux

parties

accordent

our

considérer

a

seigneurie

ndi-

vise

et

pour

partager

es ventes n deux

parts égales.

On

devine,

avec

ce cas

concret,

a

politique d empiétement

menée

par

les officiers u

roi

qui grignotent

es

prérogativeseigneuriales

t œuvrent insi à

une

simplification

l avantage

du roi

et,

en

revanche,

a

politique

des

sei-

gneurs cclésiastiques ui

ne s inclinent

as

et obtiennent

être réta-

blisdans leursdroits.Evidemment,ls ne gagnent as toujours t nous

ne

conservons

a trace

que

de leurs réussites

ar

l acte obtenu de la

sorte

sert,

par

la

suite,

de

preuve.

Rue de la Huchette

en 1409

plusieurs

documentséclairent

un

conflitde ce

genre

qui oppose l évêque

et la Grande Confrérie

ux

Bourgeois,

à

propos

d un bel

hôtel s étendant sur leurs

deux

censi-

ves.

On avait

abouti à un accord : un tiersde l immeuble tait consi-

déré

comme

relevantde la censive de

l évêque

et les deux tiers res-

tants

étaient

attribués la Grande

Confrérie.Solution

simple pour

les

calculs mais

qui

n a

pas

entièrement

atisfait

a

Grande Confré-

rie. L année suivante, lle

fait

mesurer hôtel,

visiter

t

expertiser

fin

7.

AN

S 6225.

8.

AN

S 52

b,

n° 1.

9.

AN

S 879.

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134

S. ROUX

de calculer e nombreexact de

toises

qui

lui

revient t

donc la

part

exacte

des ventes

qu elle peut percevoir.

Sans

doute le

désaccord de

ce

côté

a-t-il

été surmonté

mais,

en

1414,

l évêque

entame un

autre

procès

avec un voisin dont une

partie

de la

maison avait

été

incorpo-

rée à l hôtelet

qui

refuse e

payer

e

fondsde

terre ur a

partie

ncor-

porée. L évêque

doit

défendre es droits d un

autre

côté.

Il

étaitdifficile e

maintenires

limites

récises

es

censives,

ffa-

cées

par

les

modifications

es

constructions,

mais les

seigneurs

es

défendaient vec

acharnement.C était au

moment

des

transferts e

propriété,

uand

les

seigneurs,

ortsde

leurs

droits

éminents,

écla-

maient es venteset saisines,que la question se découvraitet qu il

fallait ui trouver

ne

réponse.

Les

choses

étaient

plus

simplesquand

les limites

estaient isibles

l extérieur,

ans la

rue,

lorsque

des bor-

nes

pouvaient

en

conserver a

place

exacte.

Histoires de

bornes

La borne

Saint-Benoît

Dans la partiede la rue Saint-Jacques ù s étaitétabli le collègede Cambrai10, côté du cimetière

aint-Benoît,

abbaye

de Sainte-

Genevièveest en

procès

à

propos

d une

masure

oignant

le

collège.

Avec les

«

malheurs du

premier

XVe

iècle,

la

maison

ruinée avait

été transformée

n

jardin,

mais ce

qui

importe

ci

est

que,

à la

suite

de

remaniements

uccessifs,

ne borne

marquant

a

limite

des terres

de

Sainte-Geneviève

vait été ôtée.

L abbaye/seigneur

ravaille à

la

faire

rétablir

ans sa

position

ancienne.

Pour

ce

faire,

elle

rassemble

des

témoignages11.

n

1482,

un

prêtre,

Jean

Wattier,

«

certifie

que

depuis

trente

six

ans ou

environ... il

a

demouré n la paroissede SaintBenoist... et a toujoursveu queles chanoinesfaisaient eur

procession

ar

dedans

un

cimetière...

et

au bout

duquel

cimetière

une

petite

place

commune

assise

en la

justice

de Saint

Benoist... et

laquelle

place

s estend

us-

ques

à une tournelle

e

pierre

ontre

aquelle

est eslevé un

mar-

mouzet de

pierre

qui

regarde

ur

une

borne,

laquelle

borne de

tous tems et

ancienneté

coustume

d estre

sur le

bort de la

chaussée de la

dite rue Saint

Jehan,

esquels

marmouzet,

orne,

ainsi

que

ledit

Wattier

oy

dire,

faisant

eparación

des

hautes

justices

de Saint

Benoist et de Sainte

Geneviève .

10. Voir .-M.

isserandt C.

Platon,

THVP

région

entralee

Université

Paris,

897,

p.

45-47.

1 AN

S 897

A. Les uteurse a THVP

utilisent

n

partie

es ctes

mais

égli-

gent

e

problème

e la borne.

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BORNES

T LIMITESDANS PARISÀ LA FIN

DU MOYEN

ÂGE 135

Le

témoignage

dû être conforté

par

des

preuves

écritesdont

nous

conservons

ar

ailleurs

quelques

traces. Un acte de 1345

2

évo-

que

une maison de cette rue

«

devant la

pierre

Saint

Benoist

»,

et

un autre

de 1360

13

mentionne a tournelle

t le

marmouset.

Pourtant,

six ans

plus

tard,

les

parties

en

litige

n ont

toujours

pas réglé

leur

différend.

abbaye

ajoute

alors des

témoignages

n

sa

faveur.Trois autres

personnes récisent ue

la

«

borneest en

forme

de

caillou,

...

qu elle

estoithors du

pavé

haulte d un

pied

et

demi ».

En revanche es

témoins,

prudents,

éclarentne

pas

savoir

qui

a

ôté

la borne.

Ils fondent eurs affirmationsur des

souvenirs

ersonnels

Nicolas Blondeau, laboureur demeurant rue Alixandre Langlois,

raconte

que

«

lui estant

eune

enffant,

l

a

joué

à la

crosse et

autres

jeux esquiez

il

convenoit

rapper

a

borne

»,

Laurent

Regnault,

maçon

demeurant

u mont

Saint-Hilaire,

rapporte que

«

quand

il

vouloit aller s esbattreen

quelques

lieux avec-

ques

ses

compaignons,

fin

qu ils

se

retrouvassent,

l

leur

disoit

qu ils

se

trouvassent la

dicte borne Saint

Benoist et là

se

assembloient

.

François

Morreau,

aboureurdemeurant ue

Saint-Jacques

joute

quant à lui que

«

il

y

a

apporté

des

corps

en terre

u

cymetière

e Saint

Benoist

et

pour

ce, lors,

on entroit n

ycelui cymetière

ar

le

boult d en hault... et

près

de la dicte

borne,

l

s est,

en

ce fai-

sant,

plusieurs

fois

reposé

sur

la

dicte borne ».

L abbaye

a eu

gain

de

cause,

moyennant uelques

accommode-

ments

avec le

collège

et le

chapitre

de

Saint-Benoît.L affaire

nous

permet

d entrevoir es

aspects

ordinairesde

la vie

quotidienne

ù la

pierre

de Saint-Benoît

intègre

naturellement.

lle

sert

pour

des

jeuxd enfant,on la choisit omme ieu de rendez-vous ar chacunsait où

elle se

trouve,

on

l utilise

comme une sorte

de

repose-pied uand

les

paroissiens

mènent

un cercueil au

cimetière,

ref elle fait

partie

du

paysage

et de l environnement amilier de la rue et de

tout le

voisinage.

Poser les bornes

Droits et

pratiques

oncrètes

e marient

ans ces

opérations

fon-

damentales.

e

sujet

mériteraitne

enquête pprofondie.

our

l heure,

je

me contenterai

e citer

deux textes

qui

débordentdu

cadre

pari-

sien mais qui peuventamorcer une réflexion ltérieure largie.

12.

AN

S 890A.

13.

AN

S

900.

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136

S. ROUX

Celui de

Philippe

de

Beaumanoir

d abord,

dans

ses Coutumesdu

BeauvaisisH. Il vient

d évoquer

les

litiges

t

les délits

dus aux

dépla-

cements

de

bornes

et

il

en arrive donc aux

droits

éminentsdes sei-

gneurs

en

cette matière.

Lorsque

le

bornage

intéressedeux

ou

plu-

sieurs

eigneurs,

eur accord

préalable

est

indispensable

t

il

se donne

après que

les

seigneurs

ient été

appelés

en

justice.

Ce

qui suppose

que, lorsque

le

bornage

se fait dans les

terresd une

seule

seigneurie,

cet accord

n est

pas

nécessaire

puisqu il

ne

s agit

alors

que

de

pos-

session

ubordonnée,

ont a

répartition

xacte

ne

peut

nuire

ux

droits

éminents u

seigneur.

Paysans

ou

citadins

s entendent u se

dispu-

tent ntre ux. Mais, ajoute Beaumanoir, l y a des villesoù, y com-

pris

dans ce

cas,

l accord

seigneurial

st nécessaire t il

convientde

se

plier

à la

coutume de la ville. On voit à

l œuvre ici

une

logique

tout à fait

ordinaire la

fin

du

XIIIe

iècle,

et on la

retrouve ivante

dans les

arguments

e

l abbaye

de

Saint-Germain-des-Prés,

u

milieu

du

xviie

siècle.

Nicolas de Lamare15 u début du

xviiie

siècle,

évoque

la

ques-

tion

par

un

détail concret

qu il apporte

dans son

développement

ur

les

usages

du

charbon

de

bois.

Il

explique que

«

l on s en servait

pour

marquer

es

limites es

seigneuries,celles des juridictions u des terres es particuliers l on faisait

à

leur extrémité n

profond

rou,

on en

emplissait

e fond

de

charbon de

bois et l on mettait

dessus

une

grosse pierre

fort

enfoncée. S il

survenait

nsuite

une

contestation u

sujet

des

limites,

n

levait

cette

pierre

t

le charbon

que

l on

trouvait

es-

sous en

son

entier,

près plusieurs

iècles,

était un

témoignage

qu elle y

avait été

posée exprès

pour

borne ».

Je ne

sais si le

procédé

était

employé

au

Moyen

Âge,

mais son

évocation

par

de

Lamare

indique

bien

l importance

u

problème

on

notera

ue

les limites

es

propriétés articulièrese sontcitées u aprèscelles des seigneuriest des juridictions. a hiérarchie es droits om-

mande la

hiérarchie es

espaces,

dans une

remarquable

ontinuité

u

XIIIe

au

xviiie

siècle.

Revenons

à

Paris.

L espace

vécu

au

quotidien

par

la

plupart

des

Parisiens est bien celui de la

censive/seigneurie

arce qu il

est celui

du droit

sur le sol et

les immeubles.

14. Philippe e

Beaumanoir,

outumese

Beauvaisis

éd. A.

Salmon,

aris,

1889,

éédition,970,

ome

,

§

851

«

Toutes

ens

ui

requièrent

onnage

e

doivent

avoir t bien

uuent

es

parties,

eles

acordent,

onner

ans

ustice,

es

ue

ce ne

soit n divers

eignourages

ù

il

ait

pluseurseigneurs

car n

devise e

pluseurs

ei-

gneursitenantepuuentonnerans esseigneurspeler. epourquantl i a plu-seurs iles n a conteé,out oit equ ils iegnentun eignourage,ù ilnepour-

roientonnerans eur

eigneur

t s ils

bonnoient,

amende

eroit e

LX

s. et

pour

ce se convient

l

garder

n

chascune

ile

elonc a

coustume.

15.

Nicolas

e

Lamare,

raité

e

police

Paris, 705-1738,

ivre

V,

titre

LIX,

tome

II,

p.

931.

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Médiévales8,printemps995, p.139-141

ABSTRACTS

Sofía

Boesch

Gajano,

Terror

nd Tonnent. orms f

Hermitism

n

Cen-

tral

taly

Between he 12th nd the 13th

Century

The

article

xplores

wo

xpressions

f

hermitism,

wo

xperiences

f the

holy

life n theValleyof Subiaco,sanctifiedytheradiatingnfluencef the

Monastery

f SaintBenedict.

n the

ate

eleventh

entury young

irl

named

Chelidonia ettled

n

a

remote

nd

rugged

avern n

the Simbruini

oun-

tains

n the

lopeopposite

he

monastery,

here he had little

ontactwith

the

monasticnstitutionut was revered

y

the

population

or

her saintli-

ness

during

er ifetimend for enturieso come. n the hirteenth

entury,

themore

enowned orenzoLoricato lso settledn

a

cavern,

ut near

the

Sacro

Speco,

where aintBenedict nce ived s a hermit.

helidonia hose

to brave

lone,

with he

help

of fast nd

prayer,

he

terrorsnd

dangers

of

hernatural

nvironment,

n the

«

margins

of themonasticnstitution.

Lorenzo hose

«

protected

form

f

hermitismhe

severely

ortifiedis

body,

but

to do so

required

he

onstantssistance f themonks. he

story

of these wo aintlyermits,man nd a womanwho ived centurypart,

illustrates

he

many-sided

elationship

f hermitismith

he monasticnsti-

tution,

opular

worship,

nd nature.

Catherine

antschi,

The Solitude f the Hermits.

n

Investigation

n

the

Alpine

Regions

Were

hermits

eally

lone? To answer his

question,

he author

xamines

the

different

ignificationsiven

o the

term

olitudo

n

a number f hermi-

tical

nd monastic ules nd describeshe

alpine

andscapes

where he her-

mits

ived,

s

depicted

n

hagiographie

nd other exts

rom

he

High

Middle

Ages o thefifteenthentury.tmaybe deduced rom his tudyhathermi-tism an bestbe defined

y

the haracteristichoice f arid nd

nhospitable

retreats

ather han

by

the

fact

of

living

lone. For various easons f a

psychological

rder,

monastic ules

prohibited

otal

solation,

onsidereds

a source

f

egotism, ride,

nd acedia.

ndeed,

n

practice,

hehermits

ften

had

one,

f

not everal

ompanions,

ovices,

r servants.

oreover,

he

ruly

saintly

ttractedo

many

isitors

hat

meditation,

ilence,

nd

prayer

were

disturbed

nd

endangered.

he

choiceof

solitude hus

mplies quest

for

an

equitable

alancebetween onsecrationo the service f God alone and

charity

oward

ne s

neighbor.

Stéphane

i

Domenico,

The Pull of the

Mountain,

heCall of the

Village

Francoof Assergi, ermit f Gran Sasso (13th entury)

In

the ate

thirteenth

entury,

ranco f

Assergi

hose he

steep

nd

craggy

Abruzzimountains

s a

retreat

o attainhis deal

of the

solitary

ife.The

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140

ABSTRACTS

Benedictine onk

ecame

hermit,

nd themountain ecamehis desert. t

was,

n

fact,

muchvisited

esert,

where he hermit s

resence ppears

s

a

projection

f the civilized

world nto

a natural

nd

wild

expanse.

After

his

death,

he

pioneer-hermit

ecame

he ntercessor-saintf the

village

f

Assergi,

s well as its

patron

aint.

All

the

anger

nd the

anguish

elt

by

themountain

opulations

ranspire

n

theaccounts f

themiracles f

Saint

Franco.

The

popular aintings

hich ecorate he ltar edicatedo the aint

and

represent

hedifferent

laces

which ad beenvisited

y

him

give

n idea

of the

perception

en had

of thesewild or civilized reas.

MathieuARNOUX,A Venetiann the Mont-Saint-MichelAnastasius,

Monk,

a

Hermit nd a

Confessor

t

circa

1085)

The career f the

hermit nastasius

s known

olely

rom vitawritten

n

the

early

welfth

entury,

nd which

was

generally

ot

veryhighly hought

of

by

historians.

owever,

comparison

ith ther

ources

as attested o

its

credibility

nd thrown

ight

pon

the ifeof thisVenitian

ho settled

n

the

Mont-Saint-Michelround

1023

nd then ived s

a hermit n the slet

of

Tombelaine,

romwhere

e followed

ugh

f Semur o

Cluny

eforeeav-

ing

forthe

Pyrenees,

here e continued

is

hermiticalifeand where e

died around

1085. Like other talian

lerics,

nd

particularly

nselm,

who

washisfriend,eplayed n importantôle ntheNormanhurch,nd took

part

n

the ucharistie

ontroversyy writing

short

reatise,

is

only

xtant

work.His

origins,

is eventful

xistence,

nd his

predisposition

or he oli-

tary

ifemake

him

true

disciple

f Saint

Romuald,

who had

such

a

pro-

found

nfluencen

theVenitianhurch. nastasius^

resence

n

Normandy,

probably

n William f

Volpiano s

nstigation,

nd

subsequently

is com-

mitmento the

Clunisians,

onfirmhe

spreading

nfluencef the hermitic

and monasticmovement

eyond

taly,

where t

originated.

Cécile Cab

y,

Hermitismnd

inurbamento

n

the

Camaldulensian rder

n

the Late

Middle

Ages

SeveralCamaldulensian

stablishments

ounded n

the

thirteenthnd four-

teenth enturies

ut

nto

practice

he hermitical odelof

Camaldoli,

hus

creating

movementf observance.

lthough

he

Camaldulensianonstitu-

tions,

laborated

n

the welfth

entury

nd

completed

n the ast

three eca-

des of the

thirteenth,

xpound

ruleof

lifeforthe

hermits,

hey ive

no

clear ndications to the

practical

pplication

f

the

observance.

The abundant ocumentation

reserved

o us

concerning

heFlorentineer-

mitage

f Santa

Maria

degliAngeli

ffers

n

enlighteningay-to-dayicture

of Camaldulensian

ermitism.ounded

oward

he

very

nd of the hirteenth

century,

his rban

hermitage

xemplified

form f

open

réclusionmuch

n

favorwith lorentine

ociety

nd

especially

ith

he hancellor

oluccio alu-

tati. But thefragileompromiseetween ermitismnd urban ifebecame

evident

n

the

earlyyears

f thefifteenth

entury

hen he

communityplit

and the schismatic

roup

founded new

hermitage

a

sign

hat he return

to observance

n

the Camaldulensian

rder

ontinuedo be

perceived

s a

return

o

hermitism.

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ABSTRACTS 141

Lucie

Gernez,

Relics

and

Images

of Saint

Galgano

n

Siena

(13th-14th

centuries)

In

the

ate twelfth

entury,hirty

ilometerso the

southwestf Siena near

theconfines

f the

Maremma,

algano

Guidotti,

knight

rom

hiusdino,

plunged

is sword ntothe rockof Mount

Siepi

n the

manner f a

cross

and chose o

live

as

a hermit. fter is deathMount

iepi

became

popu-

lar center

f

worship

where he faithfulame to

venerate

he relics f the

saintly

ermit. he

newly-founded

ult

nspired

rtistsnd the

conographie

cycle

f

the aint s ife

ngraved

n

the

reliquarynclosing

ishead

was soon

echoed

n

paintings

y

artistsuch s Andrea

i

Bartolo, ecchietta,

nd Gio-

vanni i Paolo. The mages f theknightonvertedo hermitismlso found

favor

with he

ruling

ircles f theCommune f

Siena,

who

conjugated

ts

efforts

ith hose f the

Abbey

f San

Galgano

o

promote

hecultof the

saint nd

integrate

im

nto the

pantheon

f the

city s

protectors.

Élizabeth

Halna-Klein,

On

the Tracesof the

Lynx

Through

he

ages,

the

ynx

ived

n

the forests nd mountainsf

Europe,

but

ts

relationship

o man remained

mbiguous. lready resent

n

Greek

and Roman

mythology

nd scientific

reatises,

uring

he Middle

Ages

the

lynx

was often

erceived

s an

evil,

diabolical

nd

jealous

animal,

seless

to its nvironmentnd to man. tinspired an s maginationnd wasthought

for

example

o

bury

ts

urine n the

earth,

where t was transformednto

carbuncles.

ysterious

nd

misunderstood,

tsclassificationas uncertain

nd

it was most

ften ssimilatednto he

wolf

family.

et Gaston

Phébus las-

ses

the

ynx

with he felids nd

Hildegard

f

Bingen

onsiderst as a

posi-

tive,

ndependent

nd useful nimal.

Hunted nd

trapped

or ts

fur,

he

ynx

had

all but

disappeared

rom

uropeby

theend of thenineteenth

entury.

Today

the

ynx

s better

nown,

ut ts reintroductionnto

ts

natural abi-

tat

in

Western

urope

till

gives

rise

to contradictionnd

controversy.

Simone

Roux,

Limits

nd

Boundary

tones

n

Paris

in

the Later Middle

Ages

Among

heboundaries hich

emarcated

hevarious ocial areas nside he

city

walls of

Paris

n

the aterMiddle

Ages,

those

pertaining

o

seigniorial

territories,

alled

«

censi

es

»,

had a

particularly

mportantignificance

or

most

arisians. hese

imits,

ndicated

y

boundary

tones nd

signs

n hou-

ses,

determined

he

geography

f the

ystem

f the and

administrationnd

designated

n which minentandowner s

roperty

ach

building

as situat-

ed.

More thanother

imits,

hose f

the

«

censives have eft vidence

n

the

writtenecords

f

the

mportantart

hey

layed

n

the

daily

ife f

the

capital.

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144

NOTES

DE LECTURE

Le

travail,

rès urveillé

ar

la

communauté,

uit es

rythmes

u

calendrier

agricole.

a mine ait

partie

es biens ommunauxu

village

t son

exploi-

tation

n entraîne

i

spécialisation

i

division u

travail.

Le minerai xtrait est

pas

exploité

ur

place,

mais

transporté

ersdes

forges,

arfois

ssez

éloignées

il

n y

a

pas,

à

Beaumont,

n

plein

Bocage,

de

disponibilités

n

bois,

pour exploitation

e

fours. e

commerce

u

minerai

est une

activité,

lle aussi

réglementée

t

surveillée

e

près,

xercée

ar

un

monde

intermédiaires

ui

le

transportent,

e stockentt

spéculent

ur ui.

Les conditions exercicee la

métallurgiehangent

u

début u

xvie

iè-

cle,

avec

insertione

nouveaux

cteurs,

eigneurs

t

bourgeois.

usqu à

a

fin

du

xve

iècle,

n

effet,

es

aristocratesaïcs se

désintéressente cette cti-

vité t, s ils ne la gênent as, ils n yvoient as un secteur e profit u il

serait ntéressante

promouvoir.

ls

se

heurtent,

l

est

vrai,

la

solidité e

l organisation

es

férons,

apable

de

lutter,

ur

e

plan

uridique

entend,

contre oute entativee mainmise

ar

des

seigneurs.

e ce

point

de

vue,

l échecdes Cisterciensans eurs entatives

our

nstaller

n Normandie ne

économie omaniale ttentive

la

mise n valeur

u

sous-sol st

remarqua-

ble.

Pour

des

raisons

ifférentes,

ommunautés

aysannes

t

autorités

oya-

les se

liguent, ar exemple,

ontre es

Cisterciense

Mortemer,

ont

acti-

vité

dévastatriceans la forêt e

Lyons

est

entravée.

Il

existe

ependant,

n tout

petit roupe

e

six ou

sept

seigneurs,

es

barons

ossiers,

ont es

privilèges

ont

usceptibles

e

remettren cause e

caractère

xclusivement

aysan

e l activité. es

seigneurs

étiennentn effet

le droitde fabriquere charbon e bois sanspayerde taxe et aussi celui

d exploiter

ne

forge.

es

férons,

uant

eux,

doivent

ayer

e charbon e

bois

au

prix

ort.

avantage conomique

étenu

ar

es barons

ossierseur

permet,

la fin

du

xve

iècle,

évincere

groupe

es férons.

usque

à,

tou-

tefois,

eule a valorisationes massifs oisés

es ntéresse

les

premières

orges

seigneuriales

pparaissent

ard,

la

fin

du

xive

iècle.

La

sidérurgie

ormandemanifestene

grande

italité

ommerciale.e

fer st de

bonne

qualité

t

il

est

recherché

our

des

usagesspécifiques.

l

est

exporté

ers e

Beauvaisis,

es

îles

britanniques,

a

Bretagne

t la

région

parisienne,

hacune es

régions

e

production,

e

pays

d Ouche,

e

pays

de

Bray

t le

Bocage

ayant

a

propre

one

d écoulement.

L évolution rutale

es conditions

e

la

production

la

fin

du

xve

iè-

cle, vec apparitionuprocédéndirect,emetncause ensemblee l orga-

nisation

ntérieure.

equérant lus d investissements,

a

nouvelle

echnique

fissure unité u

groupe

es

férons,

l intérieur

uquel

un

processus

e

dif-

férenciation

ociale se fait

our.

Désormais,

es

maîtres

e

grosses

orges

s opposent

ux maîtres es

forgelles.

ans les

années

1480-1490,

ensemble

de

la

production

st

pris

n main

par

es

fossiers,

euls

apables

e

pratiquer

des

investissements

uffisants

our

allerde

l extraction

usqu à

la commer-

cialisation es

produits

inis u

à ouvrer. a

corporation

es

férons e

survit

à elle-même

elle

perd

toute utonomie

u début

du

xvic

iècle.

Le

grand

ntérêtu travail e M.

Arnoux st de

mettren

rapport

ech-

niques

t

structures

ociales travers

ne

étude

ui apparaît

omme nevéri-

table

rchéologie

e

la société.

a

présentation

u il

fait es

férons,

n déca-

pantunehistoriographiencienne,ui s étaitplusou moins olontairement

trompé

ur a

nature

u

groupe,

st des

plus

réussies.

auteur

montreussi

la

capacité

organisation

t de

résistancees

communautés

aysannes,

ors

de la

seigneurie.

e

seigneur

a

pas, usqu au

début

de

l époque

moderne,

le

monopole

de

l initiative

conomique,

même

i,

en

fin

de

période,

l

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NOTES

DE

LECTURE

145

l acquiert, ar

a médiatione

l innovation,

e

replaçant

insi n

position

e

leader

ocial.

L activité

idérurgique

sttoutefois

emeurée,

u

xie

au

xve

iè-

cle,

en

Normandie,

xclusivement

aysanne,

ans

que

la

seigneurie uisse

l annexer,

la fois

parce ue

les communautés

y opposaient,

t

aussi

parce

que

les

seigneurs

y

voyaient

as

un secteur

e

profit articulièrement

nté-

ressant u

important.

Laurent

eller

Jeuxsports tdivertissementsu MoyenÂgeet à l âge classique.Actesdu

116e

ongrès

ational es

Sociétés

avantes,

hambéry,

991,Paris,CTHS,

1993,

298

p.

Ce

livre,

ui

rassemblees actesdu

congrès

es sociétés avantes

ui

s est

déroulé

Chambéry

n

1991,

st

divisé

n

cinq

parties ui évoquent

ucces-

sivement

es

eux,

es

sports

t es divertissementsntree

xnie

t e xviie iè-

cle.

JeanMichel

Mehl

qui

avait a

charge

e

présenter

e

rapport

ntroductif

du

colloque,

xpose

dans un

premieremps uelques-uns

es

problèmesro-

pres

l histoire

es

eux

et retrace

a

genèse

es travaux

usqu alors

éalisés

(pp.

6-7).

Rappelant

existence

ouvragesionniers

t

pour

ertainse

grande

qualité l ouvrage

e J.

Huizinga

Homo ludens

par exemple)

t

soulignant

la variété es approches ethnologiques,ociologiques,inguistiques...),l

remarque

ombien

e terme

jeu

»

est rebelle toute

définition

imple

t

préfère

dopter

e

senstrès

général

ue suggérait

.

Cailloisà savoir elui

d activité

libre,

éparée,

ncertaine,

mproductive,églée

t

fictive

(p.

8).

Notantde semblables

ifficultés

our

es termes

sports

et

«

divertisse-

ment

,

il

évoque

es obstacles

lever

our

mener

bienune recherche

ur

ces

thèmes,

out

particulièrement

es lacunes

e la documentationrchivisti-

que

et a

difficulté

analysepp. 9-10).

Enfin,

ressant ne

présentation

ri-

tique

de

la

bibliographie

écente,

l constate

importance

es

monographies,

trace eurs

imites,

éplore

absence études e

synthèse

pp. 11-17)

t

sug-

gère lusieurs

oies ncore

eu

ou

mal

explorées

ar

es

chercheurs

pp. 18-21).

L ensemble

es communications

ui

suivent

llustre

es

propos.

n

effet,

les études e synthèse sontrares. eulsRobert avreau t René Germain

dressentn

aperçu énéral

es

eux

et

des fêtes la

fin

u

Moyen

Âge,

ncore

se

limitent-ils

des zones

géographiques

lus

ou moins tendues au Poitou

pour

e

premier

pp.

25-45),

u centre e

la France

Auvergne,

ourbonnais,

Berry,

elay

et

Forez)

pour

e second

pp. 45-61).

Par

ailleurs,

ombreux

ont es articles ondés

ur

étude

de documen-

tations

articulières.

lusieurs ravaux

menés travers

analyse

e

sources

judiciaires

évèlent

ne fois ncore a richesse

t l intérêt

e ces fonds

our

l histoire

es

eux

à la

fin

du

MoyenÂge,

mais aussi

eurdifficile

nterpré-

tation. es onze ettres

e rémissions

ubliées ar

Annie aulnier

pp. 67-95)

lui

permettent

e dresser

n

portrait

ivant es activités

udiques

es

sujets

de Charles

I. Utilisant

uelques

données

rovenant

es

archives e Lille

(magistrateLille, udience u duc deBourgogne,uxquelles ajoutentelles

fournies

ar

quelques

ettrese

rémissions),

sabelle

aresys résente

n

aperçu

des

pratiques

ociales

iées aux

jeux

dans cetteville et dans

ses environs

(pp. 95-111).

Michel emoine

our

a

part,

e

penchant

urun

choix oeuvres

littéraires,

assemble

ans un

premier

emps

es allusions ux

sports

t aux

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146

NOTES

DE

LECTURE

divertissements

hez

quelques-uns

es

auteurs u

Haut

Moyen

Âge,

toutes

plus

ou moins

nspirées

ar

es

considérations

Isidore e

Séville ur es

eux

«

gymniques

,

ceux du

cirque

ou du théâtre

pp.

131-135).

uis

dans un

second

emps,

l

montreombienes mêmes

onsidérations

rennent

ne

place

particulière

ans œuvre

Hugues

de Saint

Victor

le

Didascaliconxiic

iè-

cle).

Les

remarques

ur e

sport

t les

jeux

théâtraux

insèrent

ans une

démarche

hilosophique,pistémologique.

es activités

portives

t

théâtra-

les ne sont

pas

condamnées,

ar ellesont

d une

part

une valeur

ivertissante

et

exemplaire

t,

d autre

art,

parce u elles

ont une

place

dans

a

connais-

sance t a classification

u savoir

pp.

139-141).

es

contributionse

Danièle

Alexandre-Bidon

pp.

143-156)

t de

Catherine

ouedo-Thomas

pp.

156-175)

présententtravers ne documentationssentiellementconographique,ais

aussi

archéologique,

outun ensemble activités

udiques

iées

oit à l hiver

(patinage,uge, ki...),

soit

l eau

(natation

t

outes

nautiques) our

a

fin

du

MoyenÂge

et

le débutde

l époque

moderne.

Toutefois,

e

colloque

assembleussi out n

ensemblee

monographies

et de mises u

point

ui

ne

manquent as

d intérêtt

tout

d abord,

a

con-

tribution

riginale

e

R.-H. Bautier

pp.

61-67).

En

effet,

appuyant

une

part

ur es

témoignages

e

contemporains

ui

désignaient

hilippe

Auguste

comme n

«

roi

chanceux

,

relisant autre

art

es

comptes

or et de

oyaux

du

chambrier,

autiere

Jeune,

uis

analysant

es

comportements

olitiques

du

souverain

l égard

e

ses

adversaires,

l

montre

ue

ce

prince

vraisem-

blablementté un

redoutable

oueur

d échec.

Succèdent

ce court

xposé,

deuxcommunicationsortantur a péninsulebérique,elle d Ana Maria

S.A.

Rodrigues

ui

trace n

portrait

es

eux

tauromachiques

n

Espagne

u

au

Portugal

la fin

du

MoyenÂge

pp.

181-193)

t

cellede

Maria-Joséalla

qui

décrit

es

eux

et

les

représentations

ratiquées

la

cour

d Espagne

la

même

poque pp.

281-289).

Jean-Pierre

eguay appelle

our

sa

part

ette

habitude^

ue prirent

es villesdu

royaume

e

France

d offrir,

la fin

du

MoyenÂge,

des

présents,

es

banquets

t des

fêtes

certains e

leurshôtes

(pp.

193-195). voquant

e

gouffreue représentaient

ien

ouvent

es

dépenses

pour

es

finances

rbaines,

l

dresse

n

tableaudes

différents

énéficiaires

de ces

largesses,

e roi

bien sûr mais

aussi tout

eux

qui

d une

manière

u

d une utre nt

pu

rendre n service la

ville

pp.

196-199).

l

s attarde

nsuite

sur es

préparatifs

es

réceptions

t

surtout

ur es

différents

adeaux t

les

repas, ccordant ne arge lace la descriptiones mets ervispp.200-214).

Autre

orme e

divertissement,

a danse st

évoquée

par

Catherine

ngrassia

dans un

article

ichementocumenté.

lle

retrace a

courte

histoire e la

«

basse

danse

qui

fut

pratiquée

ans les

milieux

ristocratiques

ntre e

xive

iècle t

e milieu

u

xvic

iècle.

tudiant

es

quelques

raités

e

«

basse-

dance

conservés,

lledécrit ne

chorégraphie

xtrêmement

récise

ui

était

coordonnée

ar

quelques

ccordsmusicaux

pp.

216-229).

lle

conclut

ue

la

connaissancees

pas

nécessitait

n

apprentissage

articulier

t

que

la

pra-

tique

de la

«

basse-danse

constituait

raisemblablementn

spectacle,

ne

représentation

e

choix

our

es

observateurs

pp.

233-234).

nfin,

.-P.Jour-

dan

évoque

e

rituel es fêtes

hevaleresques

n

Bourgogne.

l

présente

on

seulement

organisation

es

combats

t

eur

njeu

savoir

amour e la dame

- auquel e substituerogressivementa reconnaissanceu princeu du sei-

gneur

,

la fortune

t a

renommée

pp.

258-266),

mais

ussi e

prix

e

sem-

blables

ntreprises

pp.

267-273).

a

richesset a

variété e

ces

communica-

tions

et de celles

que je

n ai

pas

la

place

de citer

fontde

ces actes

de

colloque

un

ouvrage

éussi

ui

constitue ne

étape

sur e chemin

e la

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NOTES

DE

LECTURE

147

connaissancees

eux,

des

sports

t des

divertissements,

elle

que

l a tracé

J.M.

Mehl dans son

rapport

ntroductif.

DidierBoisseuil

Chiara

Frugoni,

Francesco

l invenzione

elle stimmate. na storia

per

parole

immaginiino

a Bonaventura Giotto

Turin,

inaudi,

993

Saggi

780),

XXIII-431

.

et

180

llustrations

ors-texte.

Disons-le

ans

embages

le

gros

ivrede

Chiara

Frugoni

st un chef-

d œuvre.

out

d abord,

l

rassemblet

analyse

n énorme ossier ocumen-

taire ur

es

représentations

es

stigmates

t de

la

sainteté

e

François

Assise

durant

e siècle

ui

a

suivi

a mort

1226-

ers

330).

Ensuite,

l

propose

ne

réflexion

rofonde

ur es

rapports omplexes

ntre

extes,

mages

t tradi-

tion.

Enfin,

l

construit

ne

hypothèse

euve ur es sens

divergents

ttribués

à la

stigmatisation

e

François.

ans les limites

un

compte

endu,

e

me

cantonnerai

ce

dernier

spect,

ans

pouvoir

aire

n

uste

sort

ux minu-

tieuses

nalyses images

t de

textes

ui

apportent

n

grand

ombre indi-

cationsnouvelles

datations,

ttributions,

iliationse

modèles,

ypologies.

Le

livre onstitue

ésormais

encyclopédie

aisonnéet

critique

es

représen-

tations e François u xnie iècle.

Peu

après

a mort u

saint,

l automne

226,

e frère lie de

Cortone,

vicaire

énéral

e

l ordre,

nnonce

événement ses

frères,

ans une courte

lettre

ncyclique

t

fait onnaître n

«

miraclenouï

;

François

st

apparu

avant

a mort

vec es

cinqplaies

du Christ

ur on

propre

orps.

Le

phéno-

mène urnaturel

taitdemeuré

aché

par

la volonté

xpresse

e

François

seulsdeux

ou

trois

ompagnons

roches

uraient

u

apercevoir

u toucher

les

blessures

acrées.

a nouveauté

u miracle

st certaine comme

e note

l auteur,

a

contemplation

e la

Passiondu

Christ,

u

xiie

iècle,

impliquait

pas

d autre

hénomène

hysique

ue

les

armes e

compassion.

e motmême

de

stigmate,

epris

e Paul

(Gai.

6,

17),

étaitdemeuré

ratiquement

ans

emploi

urant

e

MoyenÂge.

Le

phénomène

e

fut

d ailleurs

as

accueilli

sansréticencesdesdoutes, es bruits e supercheriee développèrentapi-

dement

Grégoire

X,

qui

avait mis a

stigmatisation

ans

sa bullede

cano-

nisation

répondit

n

en affirmantolennellement

authenticité

iraculeuse

en

1237.Neuf

bulles

ontificales

a confirmèrent

u cours u

XIIIe iècle.Dès

lors,

e

miraclee

banalisa,

uisque

es

stigmatisés

e

comptèrent

ar

dizaines.

La

grande

écouvertee Chiara

rugoni

onsiste

n a mise

u

jour

d une

forte

ension

ans

interprétation

u

phénomène.

lle

distingue

eux

tradi-

tions

pposées

ès

l origine.

un

côté,

a traditionssued Elie

de Cortone

donneun

sens

mimétique

ux

stigmates

les

blessures

puncturae)

e

Fran-

çois reproduisent

assivement

elles

du Christ.

À

l opposé,

une autre radi-

tion,

ssue

du frère

éon,

proche

ompagnon

e

François,

aitdes

stigmates

une

mitation

ctive

es souffrances

e Jésus. our

Thomasde

Celano,

pre-

mier iographeu saint, l ne s agissait as de « blessurespuncturae) ais

de clous

eux-mêmes

aits e

sa chair . On

voit es

enjeux

de

ce

débat la

tendance

a

plus

nstitutionnellee l ordre

end

divinisere saint n le

dotant

d attributs

hristiques

onnés n

signe

élection,

andis

ue

les tendances

adi-

cales

les

futurs

zelanti

,

puis

es

«

spirituels

) privilégient

imitationolon-

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148 NOTES

DE

LECTURE

taire t douloureusee

l Évangile.

ous avonsdonc

ffaire un élément

ré-

coce et essentiel e distinction

ntre es

tendances e

l ordre,

ien

antérieur

à la

question

e la

pauvreté

bsolue. Cette

polarité

tait

passée naperçue

jusqu aux

travaux e Chiara

Frugoni arce

qu elle

avait

été

soigneusement

expurgée

es sources ranciscaines.a

tradition

agiographique

ranciscaine

a fait

objet

d un

contrôle trict u

xiiic

iècle on

connaît

a décision

e

saint

Bonaventure,

ffectiven

1263,

de

réécrirea vie du

saint n

faisant

détruirees

biographies

récédentes

édigéesar

Thomas

e

Celano.Plus

géné-

ralement,

a

transmission

crite es

témoignages

ur

François

fait

objet

de contrôlest de censures

ystématiques.

a version

e

Léon sur a

stigma-

tisation est onnue

u indirectement,

ansdes

chroniques,

u

tardivement,

parun billet robablementutographecrit la findes années1250.Mais

comme e montre hiara

rugoni,

a tradition

icturale,

oins

ontrôlée,

ar

nature

lus

ocale t

donc

moins

érilleuse,

conservé

es traces

lus

nciennes

de

l interprétation

activiste

de

la

stigmatisation.

es

témoignagesermet-

tentde reconstituern

scénario

omplexe.

Seloncette

ersion,

a

stigmatisation

ut ieu ors

d une

retraitee Fran-

çois

ur e

mont

Arverne,

ansdoute n

1224,

u terme

une

ongue ngoisse.

Cette etraitee

40

ours,

de

l Assomption

la

SaintMichel

15

août-29

ep-

tembre),voque

la fois e

eûnechristique

t e

Carême. a scène

met ux

prises

e saint t le

séraphin,nge

de

rang uprême,

u cours

d une

appari-

tionet

d un

dialogue ui

renvoie la

transfiguration

u Christ u bien

à

la lutte e Jacob vec

ange et

en

ce

sens,

es

stigmates

appellent

a

clau-

dication ictorieuset humble eJacob). emessageuséraphinrône aban-

don à la volonté u

Père

et

suggère

n autre

parallèle

hristique,

elui

de

l angoisse

u

Mont des

Oliviers dès

lors,

es

stigmates

iennent

ieu de la

sueur e

sang,

xpression

urnaturelleun

désir

perdu

t

effrayé

e se

con-

former

la

providence

ivine. a version

ormalisée,

Élie

à

Bonaventure,

rectifie

outes es circonstances

ar

e texte t

par

image

le

séraphin rend

de

plus

en

plus

allure

d un

crucifié t tend

s identifier

u

Christ,

ans

une cènenon

plusd épreuve,

aisde

reconnaissance.

onaventure,

n fixant

la

stigmatisation

u

jour

de l Exaltation e la

croix

le

14

septembre)

chève

de

transférere modèledu moment e la

transfiguration

u

de la veillée

angoissée

u

Mont des Oliviers ers e

temps

u calvaire.

Les

représentations

icturales

es

panneaux

e Pescia

Bonaventure

er-

linghieri,235) t de la chapelle ardi Florence, ers1243)ontgardé race

de la version u frère

éon,mais,

la

fin

u xnie

iècle,

es

fresques

e

Giotto

achevèrent

imposer

a

version conventuelle

de la

stigmatisation.

hiara

Frugoni

découvertn artifice

emarquable

e

Giotto

our

figurer

a

concep-

tion

«

passive

des

stigmates.

ans les

fresques

e la

basilique upérieure

d Assise

vers

290)

t surun

panneau

onservéu

Louvre

vers

300),

Giotto

matérialise

impression

es

stigmates

ur e

corps

de

François

ar

des

rayons

issusdes

blessures u Christ

hérubinique.

es

rayons

e

croisent

par

exem-

ple

a blessure

u

pied

droit u Christ e

porte

ers e

pied

gauche

e Fran-

çois.

Or,

dans a

fresque

e la

chapelle

ardide

Florence

vers 330),

Giotto

choisit

e relier e

pied

droit u Christ u

pied

droit u saint.

La

première

solution

résentaitrançois

omme

image

u Christ

n

miroir,

lors

que

la

secondeuppose nesuperposition,npassage u moule, ui accentue idée

d une

conformité

iraculeuse.

l

ne

s agitpas

là d une

ubtilité

e

l interpré-

tation

ontemporaine

Chiara

Frugoni

relevé

ue

Catherine

e

Sienne,

n

peu plus

ard,

evendique

ne

tigmatisation

orale

n miroir

ui

fait

boutir

la

blessure

hristique

u flancdroit ers on

propre

œur,

gauche.

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NOTESDE

LECTURE

149

On

comprend

ès ors e titre e

l ouvrage

on

peut arler

une inven-

tion

des

stigmates

i l on saisit

ue

le

phénomène,apporté prèscoup,

ne

prenait

ens

que

dans

des

systèmes

interprétationomplexes,

ort

réci-

sément

eliés ux

débats nstitutionnelsans ordre ranciscaint

dans

Eglise.

La démonstration

st éblouissantet éclaire

un

our

nouveau ette

ameuse

question

ranciscaine,

i centrale u XIIIe

iècle.

On

pourrait

dosser

a

question

es

stigmates

un

ensemble

lus

vaste

de

questions

ui dépassent

e milieu ranciscain..

Frugoni

noté lle-même

que

la

stigmatisation

taitdans air du

temps Jacques

e

Vitry

arle

des

blessures

hristiques

e Marie

d Oignies

n

1215

mais,

malheureusement,

es

incertitudes

emeurent

uant

la

datation u

texte)

des

hérétiques,

ers

222,

sontcondamnés ours être nfligésolontairementes blessures l imita-

tion de

cellesdu Christ.

n

1201,

e

pape

Innocent

II,

dans sa

décrétale

Majores

construit

ne théorie u

baptême ui

use

de

l image

du

character

de

l impression

nvisibleaissée ur e

corps

du

baptisé.

lus

généralement,

au

xine

iècle,

e

multiplient

es

marques

élection,

e

ségrégation

u de

reconnaissance

signes

es

uifs

et des

prostituées,éveloppement

es noms

de

famille tables

omplétant

e nom

propre

nique

voir es travaux iri-

gés

par

Monique

Bourin naissance

e la

signature

voir es recherches

de Béatrice

raenkel

,

théories

colastiques

ur es

auréoles es saints u

paradis,

tc.).

Sans

glisser

ans

un

sémiologisme

acile,

n

peut

e

demander

si cet essor

du

marquage

e

désigne lus

émergence

une

conception

ou-

velledu

sujet

dans

tous

es sensdu

mot)

ur

e

modèle e la

personne

rini-

taire unenature otée ssentiellement,t nonaccidentellement,attributs.

Par

ailleurs,

e débat ur

origine

es

stigmates

uvrit e nouvelles

ers-

pectives

la findu

xmc

iècle

C.

Frugoni

relevé,

ansun

sermon e Jac-

ques

de

Voragine

vers 280)

une

esquisse

explication

aturalistee la

stig-

matisation,

ui

serait ue à

une véhémence

articulière

e

l imagination

e

François.

Mais cette

xplication

a riende réducteur

i

d hostile Fran-

çois.

On

en trouve

es

parallèles

hez es

théologiens

ranciscainses années

1270 t

1280

Roger

Mar

ton,

Jean

Peckham,

Matthieu

Acquasparta),

ui

expliquent

a mort u Christ

n termesurnaturels

la

véhémence

xception-

nelle

de

l imagination

e Jésus ccélère

e

processus

aturel e son

agonie.

Encore

ers

1320,

e

franciscaincotiste

t conventuel

ierre homas

prouve

la nécessité

e réfuter

explication

e la

stigmatisation

ar imagination

ur-

naturellee François. e qui se profilelors,dans un univers ù se rappro-

chent

urieusement

es savants aturalistes

t es

spirituels,

est

autonomie

du

sujet mystique,

pte

à

produire

es

miracles.

L histoire

résentéear

C.

Frugoni

arrête ur e

triomphe

e Bonaven-

ture,

relayéemagnifiquement

ar

les

images

de Giotto.

Mais on

peut

se

demander

i

les

aspirations

es

«

zelanti

,

illustrées

ar

des

mages

es années

1230et

1240

ne furent

as

poursuivies

ans e mondedes

Spirituels,

ans

les années

280 t

1290.J en

prendrai

n

seul

exemple

Pierre e JeanOlivi

(disciple

un Bonaventure

ue e

crois

rop ystématiquement

angé

u côté

de la

norme

onventuelle

ar

C.

Frugoni)

robablement

ers

1287,

rédigea

un commentaire

ur

Jean,

onnud Ubertin

e

Casai,

qui

affirmait

ue

la

cinquième laie

du

Christ,

rovoquée

ar

e

coup

de

lance,

pouvait

voir té

antérieuresa mort,malgréa lettre utexte e Jean.Cette ffirmationar-

die,

qui

devait

tre

ondamnée u concile

de Vienne n

1311,

vait

arge-

ment

irculé

on en trouve

race hezun

groupe

e laïcs

provençaux

e Mar-

seille

la findu

xnie iècle.

L enjeu

en

est clair

il

s agissait

e rattacher

l ensemble

es

plaies

du Christ

et

donc

a totalité es

stigmates

e

François)

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150

NOTES

DE

LECTURE

à la vie

active,

la véhémence

ropre

es deux

grands

ouffrants.'est dire

la

vigueur

e ce

grand

ébat i

magnifiquement

xhumé es archives

extuel-

les et

iconographiquesar

Chiara

Frugoni.

Alain Boureau

MichelColardelle et Éric

Verdel

(sous

la dir.

de),

Les

habitats

u

lac

de Paladru

Isère)

dans leurenvironnement.a

formation

'un

terroir

u

XIe iècle, Paris,Éditions e la Maison des Sciencesde l'Homme,1993,

416

p.,

ili.,

tabi.,

cartes

Documents 'archéologie

rançaise,

°

40).

Le livre

epuis ongtemps

ttendu

ur

e

lac

de

Paladruet les fouilles

de

Charavines st un monument

n

lui-même.

Monumental 'abord

par

l'importance

es fouilles

u'il rapporte20

ans,

une

équipe

d'une

cinquan-

taine

de

chercheurs,

2

collaborateurs

our

ce

volume),

monumental

ar

l'ampleur

matérielleu livre

416

p.

des

DAF,

près

de 300

figures,

artes

et

photos.

ous

es médiévistesonnaissent

éjà peu

ou

prou

e

sitede Pala-

dru,

pn

originalité

t

la relative

xhaustivitée la

fouille.Mais voicienfin

livrés 'ensemble es résultatses

recherches,

u

plus

précisément

e

récit e

ces

recherchesans eur

méthode,

eur

vancée,

eurs

données

rutes,

vec,

presque omme n supplément,eur nterprétationistorique.

Dès

l'avant-propos,

es

directeurs,

ichel

Colardelle t

Éric Verdel

ré-

cisent

e

propos

ils

ontfait netrès

rande lace

aux

sciences

e l'environ-

nement t ont eu le

souci d'étudier

on

pas

un

site mais un

terrain,

fin

de

comprendre

omment

'est

opérée

a

transformation

u milieu aturel

ui

a

mené l'Occident

ue

nousconnaissons. 'est

une étude e l'homme

ans

son

milieu,

ans son

écosystème,

ans sa

niche

cologique u'ils

ont

voulue

et

réalisée. ne substantielle

ntroduction

éographique,

rchivistique,résente

le

pays

de Paladru t

expose

a

méthodologiearticulière

ces

fouilles uba-

quatiques

20

p.).

Le

chapitre porte

ur

es

terroirs

t les climats

90 p.).

C'est en fait a

premièreartie,

ar on a fait

e

choix,

iscutable,

e

présen-

ter e texte

elon

a

numérotationécimale

u'affectionnent

es

sciences

ures...

La deuxième artie oncerne'habitat178p.), vient nsuite neévocation

des autres ites lentour

52 p.),

et enfin 5

pages

d'interprétation.

'histo-

rien

ue je

suis est

quelquepeu

désarçonné

ar

ce

plan

l'auteur

e

la

pré-

face,

Christian

oudineau,

ussi).

Mais,

d'avoir

résisté l'enviede

sauter

d'emblée

l'interprétation

e

la

fouillem'a

beaucoup ppris.

La

premièreartie

ur

es terroirst les climats st

une étude

des nom-

breux édimentst des

carottagesui

en ont

été tirés.

lle

met

n relief n

«

eut sédimentaire

pardon

M. Toubon

)

vers

'an Mil

qui

montre ne

rup-

ture

historique

ans

'écosystème

acustre. a

végétation

ctuelle st

ongue-

ment

tudiée,

insi

que

les

potentialités

es terroirs

dont

a

cartographie

st

d'utilisation

ifficile),

t e

chapitre

.4.1

estun

très tile

xposé

ur es

fon-

dements e

la

discipline

aléopalynologique.

'étudedes

macrorestes

récise

les espèces ultivées,elle des restes sseux, 'élevage,a consommatione

viande t de

poisson.

On

explique

ussi e

processus ui

permet

'inféreres

événements

limatiques partir

e la concentration

'180 et

l'on

apporte

ainsi

un nouvel

ndice

our

ffirmer

ne sécheresse

lus

grande

n l'an Mil

que

de

nos

jours.

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158 LIVRES

REÇUS

buch aus Süditalienvom

Beginn

des 16.

Jahrhunderts

Genève,

éd.

Droz

(Kölner

Romanistische

rbeitenNeue

Folge

-

Helf 70

herausgegeben

om Romanischen

eminarder

Universität

öln),

1994.

Maurizio Tuli

ani,

Osti,

avventori malandrini

Alberghi,

ocande

e

taverne Siena e nel suo contado tra

Trecento

Quattrocento

préface par

Giovanni

Cherubini

Sienne,

Protagon

editori

tos-

cani,

1994.

Voici Maître Eckhart études réunies

par

Émilie Zum Brunn :

Gre-

noble,

Jérôme

Milion,

1994.

WürzburgerMedizinhistorische itteilungen, and 12, hrsg.Michael

Holler et Gundolf

Keil

:

Würzburg,

önigshausen

Neumann,

1994.

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Numéros

parus

1

Mass-mediaet

Moyen

Age.

1982).

Épuisé

2

Gautier de

Coinci

le texte

du Miracle.

1982).

Épuisé

3

Trajectoires

du

sens.

1983)

4

Ordres

t

désordres. tudes édiées

Jacques

e Goff.

1983).

Épuisé

5 Nourritures.1983). Épuisé^

6 Au

pays

d'Arthur.

1984).

Épuisé

7

MoyenAge,

mode

d'emploi.

1984).

Épuisé

8 Le

souci du

corps.

1985).

Épuisé

9

Langues.

1985).

Épuisé

10

Moyen

Age

et

histoire

politique.

Mots,

modes,

ymboles,

truc-

tures.

Avant-propos

e

Georges

Duby.

1986).

Épuisé

11 A

l'école de la lettre.

1986)

12

Tous les chemins mènent

Byzance.

Études dédiées

à Michel

Mollat.

1987)

13

Apprendre

e

Moyen

Age

aujourd'hui.

Épuisé

14 La culture

ur

le

marché.

1988)15 Le premierMoyenAge. 1988)

16/17

Plantes,

mets et mots :

dialogues

avec

A. -G.

Haudricourt.

(1989)

18

Espaces

du

MoyenAge.

1990)

19

Liens de famille.Vivreet choisir a

parenté.

1990)

20

Sagas

et

chroniques

u

Nord.

1991)

21 L'an mil

rythmes

t

acteursd'une croissance.

1991)

22/23

Pour

l'image.

1992)

24

La renommée.

1993)

25

La

voix

et l'écriture.

1993)

26

Savoirs d'anciens.

1994)

27 Du bonusagede la souffrance.1994)

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SOMMAIRE

N° 28 PRINTEMPS 1995

LE

CHOIX

DE LA

SOLITUDE

Parcours

érémitiques

dans

les

pays

d'Occident

Parcours

rémitiques

Odile REDON

5

Terreurs

t tourments.ormesd'érémitismen Italie centrale ntre

le XIIe

t e XIIIe iècle

Sofia BOESCH GAJANO

11

La solitude es ermites.

nquête

n

milieu

lpin

Catherine

ANTSCHI

25

Entre e désir de la montagne t les appels du village : Franco

d'Assergi,

rmite u Gran asso

(XIIIe iècle)

Stéphane

I DOMENICO

41

Un Vénitien

u Mont-Saint-Michel

Anastase, moine,

ermite t

confesseur

t

vers

1085)

MathieuARNOUX

55

Érémitisme t

«

inurbamento dans

l'ordre

amaldule à la

fin

du

MoyenÂge

Cécile

CAB Y

79