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no.39, year 2011

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  • MATICA SRPSKADepartment of Visual Arts

    Copyright , , 2011

  • ISSN 0352-6844 / UDK 7 (05)

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    ( )

    ()

    (RUDOLF KLEIN, ) (BISSERA PENTCHEVA, USA, )

    2011

  • C O N T E N T S

    , , ARTICLES, TREATISES, CONTRIBUTIONS

    1. Draginja Simi Lazar, SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT- -NICOLAS DE CURTEA DE ARgE (ROUMANIE) , . ()Draginja Simi Lazar, ON THE OCCASION OF DATINg FRESCOES IN ST. NIKOLAS CHURCH IN CURTEA DE ARgE (ROMANIA) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    2. Petrula Kostovska, THE CONCEPT OF HOPE FOR SALVATION AND AKAKIOS MONASTIC PROgRAMME IN ST. NICHOLAS AT MANASTIR , - . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    3. , - Jasmina Jaki, THE ARCHITECTURE OF THE STAROBEEJSKA FIRST SAVINgS AND LOANS BANK . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    4. , : - Igor Borozan, BETwEEN SELF-STAgINg AND PRESENTATION: PORTRAIT OF qUEEN NATALIJA OBRENOVI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    5. , : Branislav Cvetkovi, BETwEEN THE PRIVATE AND THE PUBLIC: STEVA MIHAI-LOVI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    6. , 19451952Jasna Jovanov, COLLECTION OF PAVLE BELJANSKI 19451952 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    7. , Dragan alovi, VISION OF A NEw SOCIETy IN yUgOSLAV POST-wAR ART . . . . . . . .

    8. Davor Dalto, THE CONCEPT OF AUTHORSHIP IN VISUAL ARTS: MAIN CONTEMPORARy APPROACHES , - XX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    9. , , Iva Patrnkov, CyRIL KUTLK PAINTER OF PORTRAITS, gENRES AND HISTORICAL MOTIVES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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  • 10. Aleksandar Kadijevi, NEwER SERBIAN ARCHITECTURE AND ITS AUDIENCE , . . . . . .

    11. a . , O AA EOA EAJA AE-E OJAO EAAIvan R. Markovi, SyNDICATE HOME IN BELgRADE EXPLICATION OF ARCHITECTURE OF SOCIAL REALISM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    12. Dragan Bulatovi, CULTURAL HERITAgE AS A BRAND OR MUSEUM AS ECONOMy OF A wISH , brand . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    REVIEwS

    1. , : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2. , : 18. . . . . . .3. , : 18761923 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .4. , : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5. , : : . . . . . . .6. , : : 19451968 . . . . .

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  • , , ARTICLES, TREATISES, CONTRIBUTIONS

  • UDC 75.052(498)15/18

    DRAgINJA SIMI LAzARInstitut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO) is located in Paris, France.

    / Original scientific paper

    Sur une datation des fresques de lglise de Saint-Nicolas de Curtea de Arge (Roumanie)

    ABSTRACT: Ce texte propose une lecture critique dun article, dans lequel un auteur prtend que les peintres serbes avaient repeints au XVe sicle certaines fresques de lglise de Curtea de Arge en Valachie roumaine. Ce travail relve la minceur des arguments exposs dans cet article et lintention de son auteur de lancer tout prix une nouvelle thse sur lorigine de ces peintures. Daprs tous les chercheurs roumains et les arguments qui simposent, ce monument dorigine constantinopolitaine est peint au XIVe sicle et na pas t retouch avant le XVIIIe.

    MOTS CLS: Fresques byzantines, Curtea de Arge, monuments serbes, Constanti-nople.

    En dpit des nombreuses recherches publies au cours du XX e sicle sur lglise roumaine de Saint-Nicolas de Curtea de Arge, la datation des fresques de cet important monument (construit avant 1352), a longtemps pos problme. La question de la date de leur excution, plusieurs fois souleve au cours du dernier sicle, na cess dintriguer les chercheurs et les restaurateurs. Les tudes datant des annes 20 et 30 du XXe sicle1, compltes ensuite par divers auteurs2, ont trouv leur aboutissement dans le travail de recherche et de clarification, publi en 1979 par Carmen Laura Dumitrescu. Historienne et historienne de lart, cet auteur a reconstitu le cadre historique de ce monument, son aspect architectural dorigine et dat lexcution des fresques pendant le rgne du vovode Radu Ier vers 1376/7, avec une extension possible jusquen 13823. Elle a complt son analyse par une recherche iconographique et

    1 Recueil des tudes parues la suite des restaurations et des fouilles archologiques du dbut du XXe sicle, Curtea Domneasc din Arge, Buletinul Comisiunii Monumentelor Istorice, Bucarest 1923 (cit dornavant Buletinul). Suit une importante monographie illustr de A. TAFRALI, Monuments byzantins de Curtea de Arge, Texte, Atlas, Paris 1931, mais certains points de vue de cet auteur ont t discuts ultrieurement. La date finale de la construction du monument, 1351/52, est dtermine grce une inscription incise sur le mur Nord du naos.

    2 Pour la peinture voir surtout, M. A. MUSICESCU et gr. IONESCU, Biserica Domneasc din Curtea de Arge, Bucarest 1976; Carmen Laura DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses sur un monument roumain: lglise Saint-Nicolae-Domnesc de Curtea de Arge, Revue Roumaine dHistoire de lArt (RRHA), 16 (1979), Bucarest, 363, avec la bibliographie antrieure.

    3 Ibidem, n. 189, o lauteur avance la possibilit de lextension de cette date en rapport avec la domination de Radu Ier sur le territoire de Vidin jusqu 1382. Voir aussi, IDEM, Le Vovode donateur de la fresque de Saint-Nicolae--Domnesc (Arge) et le problme de sa domination sur Vidin au XIV e sicle, Revue des Etudes Sud-Est Europennes

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  • DRAgINJA SIMI LAzAR *

    stylistique, comparative avec les peintures dautres monuments de lpoque palologue4. Les quatre volumes illustrs de la monographie sur Chora Kahri Djami (1321), publis en 1966 et en 19755, lui ont permis de prciser et multiplier les analogies de certains scnes dArge avec ceux des mosaques de la capitale byzantine, pour renforcer lhypothse de la provenance constantinopolitaine de latelier qui a dcor le monument valaque. Postrieurement, deux autres datations ont t avances pour les peintures de Curtea des Arge: 1364 par D. Barbu6 et 13651369 par N. Constantinescu7.

    La datation propose par Carmen Laura Dumitrescu a t rcemment reprise par lhis-torien S. Iosipescu8. Elle est dailleurs proche de celle de Svetozar Radoji, tablie daprs les donnes stylistiques9. Trois principaux peintres ont t distingus Arge par Carmen Dumi-trescu: le premier matre serait surtout lauteur des personnages lancs reprsents dans un mouvement presque dansant, le deuxime, plus conservateur, se caractrise par la rigueur symtrique et plus statique de ses compositions, le troisime, auteur du cycle de Saint-Nicolas dans le narthex, trahit une manire de faire plus fruste10.

    Lors de mes recherches sur les peintures de lglise serbe de Kaleni (1418?1427), je me suis intresse quelques scnes des fresques de Saint-Nicolas de Curtea de Arge. Il sagis-sait du cycle de lEnfance du Christ, dont la scne rarissime Le Recensement de Quirinius (o apparaissent la Vierge et Joseph) nest figure en peinture murale qu Chora, Arge et Kaleni11. Ce travail a apport des donnes complmentaires sur les similitudes de quelques pisodes figurs dans les deux dernires glises, pour poser la question de leur lien commun avec les modles utiliss dans lglise du Christ de Chora Constantinople.

    Les minents chercheurs qui ont contribu la monographie The Kariye Djami recon-naissent les liens iconographiques dune partie des peintures de Curtea de Arge avec les mosaques du monastre de Chora, de mme quavec certaines fresques de Kaleni. Paul A.

    (RESEE), 17 (1979), 541558. Parmi les chercheurs roumains datant la dcoration dArge au rgne de Radu Ier, il y a eu V. Drghiceanu, D. Onciul, P. P. Panaitescu et gr. Ionescu (Voir la bibliographie dans C. L. Dumitrescu, Anciennes et nouvelles hypothses, note 1). Dernirement, lhistorien S. Iosipescu (voir infra, note 8), a adopt les rsultats des recherches de C. L. Dumitrescu, en apportant un lment nouveau concernant linscription au-dessus du tableau des fondateurs, qui renforce encore le bien-fond de lidentification de Radu Ier comme donateur des peintures.

    4 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 1823.5 P. UNDERwOOD, The Kariye Djami 13, New york 1966; P. A. UNDERwOOD (d.), The Kariye Djami,

    Studies, 4 (nombreux auteurs), Londres 1975.6 D. BARBU, Pictura mural din ara Romneasc n secolul al XIV-lea, Bucarest 1986; IDEM, Les sources

    byzantines de la peinture murale en Valachie au XIV e sicle, Cahiers balkaniques, 21 (1994), 719.7 N. CONSTANTINESCU, Curtea de Arge (12001400). Asupra nceputurilor Tarii Romaneti, Bucarest 1984,

    surtout 143155.8 S. IOSIPESCU, Comisiunea Monumentelor Istorice initiatoarea cercetrilor de arheologie medieval Spaturile

    de la Curtea de Arge, Revista Monumentelor Istorice, LXI (1992), n 2, Bucarest (1998), 2334 (2628), rs. fr. 34. Le chef restaurateur des fresques dArge, Dan Mohanu, confirme cette datation dans le mme n de la mme revue. Cf. D. MOHANU et C. BALAN, Unele consideraii privind cercetrile de la Biserica Domneasc din Curtea de Arge Timpanul de vest al naosului i inscripiile descoperite, Revista, LXI, 5365, rs. fr. 60.

    9 Cf. S. RADOJI, Der Klassizismus und ihm entgegengesetzten Tendenzen in der Malerei des 14. Jahrhunderts bei den orthodoxen Balkanslawen und den Rumnen, Actes du XIV Congrs international des tudes byzantines, (sept. 1971), I, Bucarest (1974), 189205. Lauteur situe (p. 199) les peintures dArge entre 1375 et 1385. Voir aussi, M. CHATzIDAKIS, Classicisme et tendances populaires au XIVe sicle. Les recherches sur lvolution du style, Actes du XIV Congrs international, I, 153188.

    10 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 5052. 11 D. SIMI-LAzAR, Observations sur le rapport entre les dcors de Kaleni, de Kahri Djami et de Curtea de

    Arge, Cahiers Archologiques, 34 (1986), 143160.

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  • * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

    Underwood attribue cette parent, soit la circulation des Cahiers de modles copis dans ou partir de la capitale, soit une inspiration commune issue dune autre source livresque qui aurait contenu les schmas en question12. Jacqueline Lafontaine-Dosogne remarque les mmes similitudes et suppose quil sagit de linfluence directe de Chora sur les deux monuments13. Otto Demus discute plus largement du rle des ateliers constantinopolitains dans la diaspora depuis le dbut de la domination latine et relve la marque des mosaques de Chora sur les fresques de Curtea des Arge14. Il rappelle quaprs 1261, la diaspora artistique ne retrouve plus les mmes conditions de travail dans la capitale, qui a vu migrer deux gnrations dartistes15.

    A la suite de ces recherches approfondies, compltes ensuite par les nouvelles prci-sions concernant le monument de Curtea de Arge, il semblait que lorigine et la datation des fresques tait rsolue. Pourtant, dans deux articles, Ana Dumitrescu ( ne pas confondre avec Carmen Laura Dumitrescu), avance une nouvelle datation des fresques, excutes selon elle, au XVe sicle par des artistes serbes16. Si son argumentation savrait fonde, ce serait une dcouverte de taille...

    Ana Dumitrescu construit sa nouvelle thse en dformant les lments puiss dans deux-trois articles et sur les cahiers des dessins de trois des monuments serbes da la rgion de la Morava, publis par Branislav ivkovi. Elle appuie son raisonnement sur les similitudes de quelques scnes isoles, disperses dans lglise valaque, en les comparant avec leurs analo-gues serbes, alors quil sagit de reprsentations courantes dans toute la peinture palologue. Mise part la fragilit dune telle argumentation pour ltablissement dune nouvelle datation et de lorigine des ateliers des peintres, Ana Dumitrescu mentionne parmi les images cites, certaines scnes presque disparues en Serbie. Sa dmonstration concernant Arge est base sur des photographies, frquemment doubles de dessins de lauteur, mais dans leur majeure partie, ces documents ne prsentent que les parties centrales des pisodes mentionns. Ainsi tronques, ces reprsentations occultent les divergences qui les distinguent des scnes serbes correspondantes. Du fait que les reprsentations byzantines sont codifies, les ressemblances et dissemblances ne peuvent apparatre qu travers des dtails, tels que ceux du fond architec-tural ou de lemplacement des personnages, ce que ne montre pas la documentation illustre choisie par lauteur. Les photos reproduites dans ses articles soulvent aussi un doute quant sa connaissance directe du monument valaque, car on les retrouve avec les mmes fragments, dans les publications prcdentes17. En se fixant aux seules analogies en Serbie, Ana Dumi-trescu occulte systmatiquement les liens iconographiques de ces mmes scnes avec Chora

    12 P. UNDERwOOD, The Kariye Djami 1, op. cit., 87 (et n. 1), 94, 95 (et n.1); IDEM, in The Kariye 4, op. cit., 280288.

    13 J. LAFONTAINE-DOSOgNE, in The Kariye 4, 205, 220, 223 sq., (239). Jai exprim mon dsaccord avec cet auteur sur son avis concernant Kaleni, dont les fresques, selon elle, taient la copie directe de Chora. Jai pro-pos de nuancer la notion dinfluence, ne sagissant pas selon moi de la copie des mosaques, mais de lutilisation des Cahiers de modles (SIMI-LAzAR, Observations, op. cit., 149153, 157).

    14 O. DEMUS, in The Kariye 4, 134143 (143). 15 Ibidem, 143 sq.16 Ana DUMITRESCU, Une nouvelle datation des peintures murales de Curtea de Arge. Origine de leur

    iconographie, Cahiers Archologiques, 37 (1989), 135162; IDEM, Une iconographie peu habituelle: les saints militaires sigeant. Le cas de Saint-Nicolas dArge, Byzantion, 59 (1989), 4863.

    17 Les mmes documents photographiques provenant de lInstitut des Monuments Historiques de Bucarest, taient pralablement illustrs entre autres in, MUSUCSCU et IONESCU, Biserica domneasc; Carmen Laura DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses; BARBU, Pictura mural.

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  • de Constantinople et ne tient pas compte de lopinion des chercheurs roumains et des restau-rateurs, qui tous saccordent pour fixer au XIVe sicle lensemble des peintures de ce monument18. Lauteur ne donne, par ailleurs, aucune explication la dispersion incohrente dans la vaste glise, des scnes quelle attribue des artistes serbes ni la prtendue deuxime couche des pisodes mentionns. Elle tient encore moins compte de lobservation des restaurateurs, qui considrent quen dehors des repeints effectus entre le XVIIIe et le XXe sicle, rien nindique que la peinture initiale ait t retouche auparavant19.

    Les publications dAna Dumitrescu nauraient gure mrit de retenir lattention, si sa construction dune nouvelle datation des fresques de Curtea de Arge navait t admise, sans discussion, par un certain nombre de chercheurs, surtout en Serbie, tandis que les auteurs roumains nont apparemment donn aucun crdit cette datation. Du fait quil sagit du mo-nument valaque du XIVe sicle le plus connu, ce silence devrait au moins amener examiner avec attention cette nouvelle thse, qui soulve aussi dune manire gnrale la question de la transmission des modles picturaux lpoque palologue. Cest ce que je me propose de faire au regard de largumentation dAna Dumitrescu.

    * * *

    Le premier des deux articles dAna Dumitrescu, Une nouvelle datation des peintures murales de Curtea de Arge attribue des peintres serbes du XVe sicle la dcoration de quelques pisodes de LEnfance de la Vierge (narthex), de La Vie publique du Christ (naos, murs sud et nord), de la Passion du Christ (naos, mur sud) et de la Dormition de la Vierge (naos, mur ouest). Lauteur y joint un aperu confus sur des soi-disant repeints qui auraient t effectus par une quipe serbe dans la prothse et dans le narthex. On peut remarquer demble que les ressemblances iconographiques reconnues entre Arge et le monument serbe de Kaleni, concernant le cycle de lEnfance du Christ (naos, mur sud et ouest), sont ignores dans cet article, dont lorigine constantinopolitaine est vidente20.

    La Prsentation de la Vierge au temple (narthex, tympan porte ouest) est illustre par A.D.* par un fragment extrait de la composition dArge, qui montre zacharie pench vers la

    18 D. MOHANU, Nouvelles donnes concernant la stratigraphie des peintures murales de lglise princire Saint-Nicolas de Curtea de Arge, Revue roumaine dhistoire de lart, 21 (1984), 3555. Cf. supra, notes 13, 69.

    19 MOHANU, Nouvelles donnes, 38. Lauteur dcrit la technique du support des fresques et lemploi du pigment bleu lapis lazuli dans la couche du XIV e sicle, le mlange de lal secco avec lalfresco sur les restaurations des XVIII e et XIX e sicles et enfin, la prsence du blanc de zinc employ au XX e sicle. Une grande partie de ces peintures tardives a t enleve. Voir MOHANU et BALAN, Unele consideraii, op. cit. D. Mohanu rappelle, dans le rsum franais (p. 60), lhistorique des restaurations faites au dbut du XVIIIe sicle, ensuite vers 1750 (zographe Radu), puis en 1827 (zographe Pandlimon) et enfin en 1915 (peintre Norocea). Dans un seul endroit, un raccord al fresco situ sur le mur occidental du naos entre la Transfiguration et lEnfance du Christ, indique une reprise du XIV e sicle, qui peut tre soit la limite dune giornata, soit la limite entre une anne et la suivante de la mme campagne de dcoration (p. 53, 58/ et n. 14).

    20 Les chercheurs roumains et serbes avaient remarqu depuis longtemps les similitudes entre certains pisodes dArge avec les glises serbes de la Morava (notamment Kaleni), en tant que reflet de Chora. Voir P. P. PANAITESCU, Inscriptiunile religioase greceti, in Buletinul, 161171 (170); I. MIHAIL, Pictura Bisericii Domneti din Curtea-de-Arge, in Buletinul, 172189 (176); V. R. PETKOVI, Manastir Kaleni, Vrac 1926, 8284. Travail plus rcent, SIMI-LAzAR, Observations, op. cit.

    * Ana Dumitrescu est cite dornavant, dans le texte, sous labrviation A.D.

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    DRAgINJA SIMI LAzAR *

  • Vierge21. Recherchant les analogies en Serbie, elle rvle une mconnaissance tonnante des monuments de la rgion, de mme que de ltendue du cycle de lEnfance de la Vierge. Elle rapproche cette Prsentation de celle de lglise de la Vierge de Studenica22, mentionnant ainsi un monument o cet pisode nexiste pas, le cycle en question tant reprsent dans lautre glise de Studenica, celle du Roi. On peut comprendre une confusion entre deux mo-numents rigs en un mme lieu lorsquil sagit de fondations secondaires, mais comment ladmettre pour deux glises aussi connues et tudies lune que lautre? En transfrant La Prsentation de la Vierge au temple de lglise du Roi (1314) lglise de la Vierge (1208/9), lauteur montre son ignorance de lvolution du cycle, qui entre dans les programmes serbes plusieurs dcennies aprs la dcoration de lglise ddie la Vierge. Les informations sur ce cycle sont largement donnes par Jacqueline Lafontaine-Dosogne dans son Enfance de la Vierge et par gordana Babi dans sa monographie sur lglise du Roi Studenica, sans parler des albums de g. Millet et A. Frolow et des deux ouvrages collectifs plus rcents, concernant lensemble des fondations de ce site monastique23. A.D. se contente de se rfrer louvrage ancien et de caractre gnral de Vladimir Petkovi, La peinture serbe du Moyen Age, en faisant une mauvaise lecture des lgendes24. Elle limite lexistence de la Prsentation du XIVe sicle aux cycles de Chilandari et de graanica 25, alors que limage figure dans de nombreux monuments byzantins et sous une forme inchange. Son schma ne diverge que par lemplacement des parents de la Vierge devant ou derrire les jeunes filles26, dtail qui napparat pas sur le fragment illustr par A.D. Lauteur ne note pas la prsence de cet pisode, entre autres, Chora, o les mmes protagonistes sont amplement rpartis sur la vote spacieuse du narthex27.

    Les Fianailles de Marie (narthex, mur ouest, fig. 1c), illustrant les fragments des pisodes Arges et Kaleni (fig. 1b, 1d), justifierait selon elle les analogies de ces deux peintures28. A.D. affirme avoir t frappe par laspect stylistique de cette scne Arge, dont les personnages

    21 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, fig. 2. Scne entire, in Buletinul, fig. 290; TAFRALI, Monu-ments, pl. CX/4.

    22 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 138 (et n. 27 29).23 J. LAFONTAINE-DOSOgNE, Iconographie de lEnfance de la Vierge dans lempire byzantin et en Occident,

    Bruxelles 1964, 4453; g. BABI, Kraljeva crkva u Studenici, Belgrade 1987, 174, 175, fig. 127, XXVII, dess. p. 239; g. MILLET et A. FROLOw, La peinture du Moyen Age en Yougoslavie, I, pl. 3247, III, pl. 5470 (Prsentation, pl. 60/2). Deux ouvrages sont consacrs lensemble des glises de Studenica, cf. g. BABI, V. KORA et S. IRKOVI, Studenica, Belgrade 1986, commentaire sur lglise de la Vierge, 6285, sur lglise du Roi, 102140 (Prsentation fig. 110); M. KAANIN, M. ANAK-MEDI, J. MAKSIMOVI, B. TODI et M. AKOTA, Manastir Studenica, Bel-grade 1986, commentaire sur lglise de la Vierge, 137176 (rs. fr. 255257); sur lglise du Roi, 197224 (rs. fr. 257258 (Prsentation fig. 162, 176).

    24 Cf. V. R. PETKOVI, La peinture serbe du Moyen ge, Belgrade, I, II (1930, 1934), I, 3841, fig. 39a. Dans cet ancien ouvrage les lgendes sont compltes dans le texte et sa table des matires intitule lglise de la Vierge Studenica, Eglise de Nemanja et celle du Roi Studenica, Eglise de Milutin.

    25 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 138 (et n. 29).26 LAFONTAINE-DOSOgNE, Iconographie de lEnfance, op. cit., nombreuses ill.; IDEM, in The Kariye 4,

    fig. 1720. Sur la disposition des compagnes de la Vierge, D. SIMI-LAzAR, Kaleni et la dernire priode de la peinture byzantine, SkopjeParis 1995, 119 (= IDEM, Kaleni, Slikarstvo, istorija, Kragujevac 2000, 183, 184). Pour lvolution de cette iconographie dans les Balkans, C. gROzDANOV, Sur la composition de la prsentation de la Vierge au Temple dans la peinture byzantine la fin du XIII et vers 1300, Zograf 26 (1997), 5564.

    27 Cf. UNDERwOOD, The Kariye 2 (Mosaics), fig. 91.28 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 138, fig. 35. Scne entire dArges, in Buletinul, fig. 289; TAFRALI,

    Monuments, pl. CIX/2; scne de Kaleni, supra, note 11 et 26.

    13

    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

  • sont anims par le drap des vtements29, sans citer la premire avoir insist sur la parti-cularit stylistique de ces draps30. Pour justifier sa dcouverte de lanalogie de cette scne dArge avec Kaleni, A.D. reprend le dessin publi par B. ivkovi (fig. 1 a), dj reproduit par ailleurs dans un article prcdent31, en ne copiant que sa partie centrale (fig. 1 b). Elle intitule ce dessin daprs B. ivkovi32, alors que ce dessinateur a videmment reprsent

    29 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 138.30 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 50. Lauteur rcapitule les observations des

    chercheurs concernant le style des fresques dArge, en accordant une attention particulire lopinion de S. Radoji. 31 Cf. B. IVKOVI, Kaleni, Crtei fresaka, Belgrade 1982, VINarthex / 28, 29; SIMI-LAzAR, Observations,

    144, 145, dess. 1.32 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, fig. 5.

    Fig. 1 c. Fianailles de Marie. Curtea de Arge, photo daprs Buletinul1 . , , Buletinul

    Fig. 1 d. Fianailles de Marie. Curtea de Arge, dessin, illustration dAna Dumitrescu

    1 . , , e

    Fig. 1 b. Fianailles de Marie. Kaleni, dessin intitul par Ana Dumitrescu daprs ivkovi

    1 . , ,

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    DRAgINJA SIMI LAzAR *

  • la scne entire. Elle ne montre pas, non plus, lensemble de la scne dArges, mais repro-duit seulement ses personnages (fig. 1 d)33. Elle occulte ainsi les diffrences concernant le nombre des baldaquins, un seul Arge et deux Kaleni, et la forme des architectures de larrire plan des prtendants, angulaire Arge (typique du XIVe sicle) et arrondie Kaleni (plus courante au XVe). Alors que cest laspect du fond architectural qui renseigne, entre autre lments iconographiques, sur lvolution des reprsentations selon les po-ques, lauteur ne montre que les parties cen-trales des scnes, qui demeurent presque inchanges depuis lglise de la Vierge de la Pribleptos Ohrid (= Saint-Clment, 1294/95)34. Ce monument macdonien annonce les nombreuses nouveauts iconographiques qui seront introduites au cours du XIVe sicle dans les Balkans, concernant notamment le cycle de lEnfance de la Vierge. Dans ces reprsenta-tions, o lon figure le prtre en prire et le groupe avec Joseph et les prtendants, la diff-rence nest observable que daprs lemplacement du prtre et le nombre des baldaquins. Ainsi, un seul baldaquin abrite le prtre en prire devant les btons et celle du prtre devant les pr-tendants dans lglise de la Pribleptos dOhrid, ce qui est galement le cas Arge35, tandis qu Staro Nagoriino (131318), Chora et Kaleni36, ce sont deux baldaquins qui enca-drent la double prsence du prtre. La documentation prsente par A.D. dissimule ces dis-semblances entre Arge et Kaleni.

    La Multiplication des pains (naos, mur nord, fig. 2 a) illustre par le dessin dun seul fragment37 (fig. 2 c), donne une fausse image de cette vaste composition, bien conserve Arge. Contenant cinq pisodes en frise, cette scne du monument valaque est frquemment repro-duite dans son ensemble38. Elle occupe par exemple, une double page dans le volume 4 The Kariye Djami, avec le commentaire de Paul Underwood39 qui relve limportance de Curtea de Arge pour la reconstitution de cette scne, en partie endommage, sur la vote de lexonarthex de lglise du Christ de Chora (fig. 2 b). La comparaison de limage dArge avec celle de Constantinople cette dernire publie dans le volume 2 The Kariye Djami 40 atteste clairement

    33 Ibidem, fig. 4.34 Javais soulign cette filire, SIMI-LAzAR, Observations, 145146. Cf. P. MILJKOVI-PEPEK, Deloto

    na zografite Mihailo i Eutihij, Skopje 1967, fig. 34; g. MILLET et A. FROLOw, La peinture du Moyen ge en You-goslavie, III, Paris 1964, Pl. I/4; LAFONTAINE-DOSOgNE, Iconographie, 44, pl. VII/ fig. 23.

    35 Pour Pribleptos, cf. MILJKOVI-PEPEK, Deloto, fig. 34.36 Cf. MILJKOVI-PEPEK, fig. 35; UNDERwOOD, The Kariye 2, fig. 95, 96; SIMI-LAzAR, Observations,

    fig. 1.37 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 145, fig. 14.38 Cf. Buletinul, fig. 266; TAFRALI, Monuments, pl. XLIVXLVI; MUSICESCU et IONESCU, Biserica Domneasc,

    fig. sans numro. Cf. infra, note 39.39 UNDERwOOD, in The Kariye 4, 285289, fig. 22. 40 UNDERwOOD, The Kariye 2, fig. 118.

    Fig. 1 a. Fianailles de Marie. Kaleni, dessin daprs ivkovi, in Kaleni

    1 a. , , ,

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    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

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    quun mme modle a t utilis dans les deux cas; un Cahier de dessins copis daprs les mosaques de Chora, ayant probablement servi Arge41. On discerne dans le monument constantinopolitain les fragments suivants: le Christ en prire plac devant deux corbeilles, le Christ distribuant le pain par linterm-diaire de deux disciples au groupe des gens assis, le Christ assis donnant le pain trois aptres, et enfin, un fragment en partie dt-rior, de gens assis. Ce dernier pisode est identifiable daprs liconographie dArge, avec Pierre distribuant le pain. Une place va-cante au centre de la composition constanti-nopolitaine, correspondant un pisode en-tirement dtrior, peut tre restitue grce la frise dArge. Seuls quelques dtails, tels les enfants participant ces partages, sont diffremment rpartis Chora et Arge, suivant la configuration de lespace. Cette similitude vidente des pisodes dans les deux monuments, signale par de nombreux auteurs, nest que passagrement voque par A.D.,

    qui cherche tout prix des analogies seulement en Serbie, en loccurrence inexactes. Fixant son attention sur un seul des cinq groupes dArge (fig. 2 c) dont lquivalent est bien conserv Kahri , elle dcouvre sa vraie parent en Serbie, Ravanica (vers 1387, fig. 2 d), et Sisojevac (aprs 1402, fig. 2 e). Il se trouve que le fragment dessin par A.D. le premier des cinq groupes ne figure pas Ravanica et encore moins Sisojevac. Par ailleurs, deux disciples

    41 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 48 (et n. 144).

    Fig. 2 a. Multiplication des pains. Curtea de Arge, photo daprs Buletinul2 a. , , Buletinul

    Fig. 2 c. Multiplication des pains. Curtea de Arge, dessin, illustration dAna Dumitrescu

    2 . , , e

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    Fig. 2 b. Multiplication des pains. Chora, photo daprs Underwood, in The Kar. Djami 22 . , , , The Kar. Djami, 2

    Fig. 2 d. Multiplication des pains. Ravanica, dessin daprs ivkovi, in Ravanica2 . , , ,

    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

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    entre le Christ et les gens assis sont ramens en un seul dans le dessin de A.D., tablissant ainsi une confusion avec le dernier groupe de la composition de Ravanica, o Pierre distribue le pain aux gens assis42. Cette riche reprsentation de la Multiplication, indubita-blement constantinopolitaine, reprise Arge et Ravanica, na pu arriver en Valachie travers la Serbie, le schma de Ravanica tant rduit par rapport aux deux autres, ceux de la capitale et de la Valachie. La date de ce monument serbe ne convenant pas lobjectif de A.D., elle cherche ses analogies au XVe sicle, pour sarrter Sisojevac, dont la

    Multiplication suit un modle diffrent, peine discernable sur des fresques dlaves et peine visibles. On ny aperoit que quelques traces des corbeilles et des silhouettes, ce qui nempche pas A.D. daffirmer que la vraie parent de notre composition se trouve sur les murs de Rava-nica et Sisojevac... ordonns dune manire proche de celle de Saint-Nicolas dArge43, occul-tant avec une assurance extraordinaire le vrai modle, celui de Chora.

    Il faut noter que lpisode de La Multiplication des pains est figur sur dautres fresques serbes du XVe sicle, ce qui a dj t signal pour Resava (= Manasija, avant 1418) et Kaleni44. Mais dans ces deux monuments serbes, les groupes sont distribus diffremment qu Arge et Chora. Ceci tant facilement vrifiable dans les publications existantes, il tait plus ais A.D. de choisir son analogie Sisojevac, dont les fresques, difficilement reproductibles en ce qui concerne les registres suprieurs, sont cites dans les ouvrages sans tre illustres. Vojislav Djuri avait signal une ressemblance des cycles et des compositions illustrs Siso-jevac et Ravanica, en rappelant lorigine thessalonicienne de certaines peintures de la rgion de la Morava45. A. Dumitrescu simplifie lobservation du professeur serbe pour lutiliser en y joignant Curtea de Arge et ajouter au passage, sans la moindre preuve, que les mmes artistes auraient travaill dans les deux glises serbes46. Enfin, pour minimiser les similitudes frap-

    42 Cf. IVKOVI, Ravanica, Crtei fresaka, Belgrade 1990, p. 39 (1re d. 1981).43 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 145 (et n. 48); D. MILISAVLJEVI, Sisojevac, crtei fresaka,

    Beograd 2008. Je remercie Dragana Milisavljevi qui ma aimablement communique ses dessins avant leur publication. Les copies des fresques en possession du Muse des fresques de Belgrade, offrent galement quelques claircissements sur ces peintures de grande qualit, gravement endommages.

    44 Cf. SIMI-LAzAR, Observations, 147 (et n. 17). Les illustrations pour Kalenic, UNDERwOOD, in The Kariye 4, fig. 26; B. IVKOVI, Kaleni, Crtei fresaka, Espace occidental de la nef/ 15; D. SIMI-LAzAR, Kaleni et la dernire priode, op. cit., dess. p. 102 (= IDEM, Kaleni, Slikarstvo, Istorija, op. cit., dess. p. 167). Pour Resava, B. IVKOVI, Manasija, Crtei fresaka (Les dessins des fresques), Belgrade 1983, VII/2 (Partie occidentale du naos).

    45 V. J. DJURI, Solunsko poreklo resavskog ivopisa, Zbornik radova Vizantolokog instituta (ZRVI), 65, n 6 (1960), 111128, rs. fr. 127128; IDEM, Freske crkvice sv. Besrebrenika despota Jovana Ugljese u Vatopedu i njihov znaaj za ispitivanje solunskog porekla resavskog ivopisa, ZRVI, 64, n 7 (1961), 125137, rs. fr. 137; IDEM, La peinture murale de Resava, in LEcole de la Morava et son temps, Symposium de Resava 1968, Belgrade 1972, 277291 (cf. 285 et n. 18).

    46 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 145 (et n. 48).

    Fig. 2 e. Multiplication des pains. Sisojevac, dessin D. Milisavljevi

    2 e. , , .

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    pantes de la Multiplication des pains entre Chora et Arge et pour trouver des liens en faveur de la Serbie moravienne, elle sappuie sur une remarque puise dans louvrage aujourdhui dpass de A. Tafrali, crit au temps o les mosaques constantinopolitaines ntaient pas encore publies, alors quau dbut de son article, elle naccordait aucune foi cet auteur47.

    Les Noces de Cana (naos, trave centrale, ouest, fig. 3 a) suggrent par A.D. des ana-logies aussi dpourvues de fondement que lexemple prcdent48. Lauteur commente limage parfaitement conserve Arge, sans la reproduire dans son article, pour la comparer la scne correspondante de lglise serbe de la Sainte-Trinit de Resava (fig. 3 b). Elle sattribue une nouvelle fois, en les dformant, des observations faites par dautres chercheurs et elle passe encore sous silence le volume 4 The Kariye Djami, o Paul Underwood, dans une ana-lyse dtaille, rapproche cette scne dArge de celle de lglise du Christ de Chora (fig. 3 c). Cet auteur reproduit dans son ouvrage dautres reprsentations analogues, dont celles du Ms. Iviron 5, fol. 363v (milieu du XIIIe sicle), de Saint-Nicolas-Orphanos de Thessalonique (131020)

    47 Ibidem, 136 (et n. 1214), 145 (et n. 47).48 Ibidem, 146 (et n. 56, 57).

    Fig. 3 a. Noces de Cana. Curtea de Arge, fragment, photo daprs Underwood, in The Kar. Djami 43 a. , , , The Kar. Djami, 4

    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

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    et de Saint-Nikita de uer en Macdoine (vers 1321), ce dernier monument montrant un plus grand nombre de convives49. A tous ses exemples sajoutent les fragments de la reprsentation de Chora illustrs dans le vo-lume 2 de sa collection50. Ces illustrations attestent les analogies videntes entre Arge et Chora, o lpisode du miracle du vin est bien conserv et les fragments de la scne du repas correspondent ceux du monument valaque: le suppedaneum, les restes des si-ges du Christ et de son disciple, et les pieds de la table nuptiale. On avait dj soulign ces analogies, y compris lpisode rare, celui de la mise a mort du veau51. Mais A.D. omet ce dernier dtail et ne prsente que ses ides personnelles Elle constate, que lpisode a t reprsent de la mme faon Mana-sija [= Resava] [...] comme dans le cas du Cycle de lEnfance du Christ [...] selon une icono-graphie constantinopolitaine pratique dans

    la rgion de la Morava au dbut du XVe sicle52, en dformant ainsi linformation provenant dun autre article concernant le rayonnement de Constantinople dans les Balkans53. Obser-vons qu Resava il ne reste aucune trace de lpisode avec le vin, que la partie du repas nest pas entirement conserve et quon ny discerne pas le dtail rare avec lgorgement du veau54. A.D. sattribue ainsi, une nouvelle fois, une information puise chez un autre auteur; repousse Chora au second plan et formule ainsi sa nouvelle hypothse.

    La Mise au tombeau prsente par A.D. en trois croquis similaires, figure les scnes dArge (naos, tympan nord), de Saint-Andr sur la Treska (= Andrea, 1388/89) et de Kopo-rin (fin de la premire dbut de la deuxime dcennie du XVe sicle). Elle est invoque par A.D, comme une preuve de litinraire parcouru par latelier des lves du matre Jovan, de-puis la Macdoine (Andrea) jusqu Arge, en passant par Ljubostinja (1405) et Koporin, en

    49 Cf. UNDERwOOD, The Kariye Djami 4, 282284, fig. 17 (Arge), 18 (Iviron 5), 19 (Orphanos), 20 (uer). Cf. aussi, H. BUCHTAL et H. BELTINg, Patronage in Thirteenth Century Constantinople. Un Atelier of Late Byzantine Book Illumination and Calligraphy, washington 1978, 63/ n. 21; A. TzITOURIDOU, O Z , Thessalonique 1986, fig. 50; MILLET, FROLOw, La peinture, III, op. cit., pl. 38; Buletinul, fig. 260; TAFRALI, Monuments, pl. LXVIII/1, 2.

    50 Cf. UNDERwOOD, The Kariye Djami, 2 (The Mosaics), fig. 117 (p. 228236).51 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 48 (et n. 143).52 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 146 (et n. 57). 53 Cf. SIMI-LAzAR, Observations, 147 (et n. 17), o on lit: Certaines scnes de lEnfance [...], des Noces de

    Cana et de la Multiplication [...] Kahri Djami et Manasija, proviennent des mmes modles que les scnes cor-respondantes Curtea de Arge.

    54 Cf. B. IVKOVI, Manasija, IV Sanctuaire Mur Sud/12.

    Fig. 3 b. Noces de Cana. Resava, dessin daprs ivkovi, in Manasija

    3 . , , ,

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    Serbie centrale55. Carmen Laura Dumitrescu avait dj signal certaines parents stylistiques entre les fresques macdoniennes dAndrea et une partie de celles dArge, en insistant sur la formation classique constantinopolitaine, autant de Jovan que des principaux peintres dArge56. A partir de cette indication et en reprenant un article sur Jovan bien illustr de Vojislav Djuric auquel se rfrait dj son homonyme A.D. reprend une ancienne thse de lminent professeur de Belgrade, selon laquelle les matres dAndrea avaient peint les fresques

    55 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 145 (et n. 4951), fig. 15. Image reproduite, in TAFRALI, Monuments, pl. L/3, LI/2.

    56 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 55 (et n. 178180). Lauteur remarque lesprit classique de ces peintures, caractris par un certain expressionnisme des formes et des couleurs, qui est leur dnominateur commun.

    Fig. 3 c. Noces de Cana. Chora, fragment, photo daprs Underwood, in The Kar. Djami 23 . , , ., , The Kar. Djami, 2

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    de Ljubostinja et de Koporin, dans la rgion de la Morava57, ce qui sest avr vrai pour Lju-bostinja, mais non pour Koporin. A.D. dcalque les photographies de la Mise au tombeau publies dans cet article, qui rapprochent liconographie de cet pisode dAndrea de celle de Koporin. Elle y ajoute lexemple dArge pour prolonger litinraire de cet atelier jusquen Valachie, pensant prouver de la sorte son origine serbe et argumenter sa nouvelle datation des fresques de Curtea de Arge. Les nettoyages des fresques et les nouvelles recherches sur Ko-porin de Milan Radujko ont cependant montr la fragilit de la liaison suppose entre les peintures de ce monastre et celles dAndrea. Ce dernier auteur fonde son argumentation sur le fait que la peinture dAndrea est plus caractrise par le graphisme et celle de Koporin par la couleur et que les traits stylistiques de cette dernire peinture nont pas de parallle dans lart de la Morava. Il exclut dautre part, tout rapprochement entre les fresques de Koporin et celles de Ljubostinja58. A.D. na pas pu tenir compte de ces divergences, puisquelle ne semble pas avoir eu une connaissance directe de ces fresques. La rcente monographie de Jadranka Prolovi sur Saint-Andr sur la Treska complte la connaissance du schma iconographique de la Mise au tombeau qui se prsente sous une forme identique depuis la fin du XIe-dbut XIIe sicle aux Saints Anargyres Kastoria 59. On y voit la Vierge aidant transporter le corps de son fils la manire du Thrne, formule iconographique interprte par A.D. comme un lment tardobyzantin, alors quelle est atteste depuis au moins deux sicles. J. Prolovi la releve galement en Bulgarie (Berende [jusquau milieu du XIVe sicle] et Ivanovo [vers 1360]) et en Russie (Kovalevo, 1380)60, avant sa figuration Arge, Andrea et Koporin.

    La Prire sur le Mont des oliviers (mur Est du collatral Sud, fig. 4 a) est compare dans cet article aux scnes dAndrea (fig. 4 b) et de Koporin (fig. 4 c)61, mais ces deux pisodes comparatifs ne sont pas illustrs. Il se trouve que le chercheur belgradois des annes 30, Djordje Mano-zisi, avait signal dans un article sommaire sur Koporin, la reprise dans cette glise de quelques modles utiliss Andrea62, ce qui concerne entre autres, lpisode de la Prire. quant celui dArge, quA.D. associe ces deux exemples, le Christ y est dispos diffremment et les aptres y sont serrs dans la moiti droite de la composition63, diffrence non ngligeable

    57 V. J. DJURI, Radionica mitropolita Jovana zografa, Zograf 3 (1969), 1833. Lauteur publie les photos de la Mise au tombeau, de Saint-Andr sur la Treska (fig. p. 29) et de Koporin (fig. p. 28). Il nous renseigne sur limportant travail des deux frres, Jovan et Makarije, opr dans la dernire dcennie du XIVe sicle en Macdoine. Voir aussi, g. BABI-DJORDJEVI et V. J. DJURI, Polet umetnosti, in Istorija srpskog naroda, II, Belgrade 1982, 144191, (sur latelier de Jovan, 154156). Le mtropolite Jovan a laiss sa signature (avec celle de son lve grigorije) au-dessus de la prothse dAndrea. Une autre inscription est conserve au-dessus du portail du naos, renseignant sur le fondateur du monument, le prince Andrea (Andr), frre du roi Marko. Cf. infra, notes 7173. Voir S. DJURI, Ljubostinja, Belgrade 1985, 108110, rs. fr. 136.

    58 Cf. M. RADUJKO, Koporin, Belgrade 2006, 283. Lauteur considre que les peintures de Koporin traduisent leur poque. Je remercie vivement Milan Radujko pour les photos et dessins, dont certains figurent dans cet article.

    59 J. PROLOVI, Die Kirche des Heiligen Andreas an der Treska, Vienne 1997, 161162, fig. 33. Lauteur date les fresques de Kastoria vers 1180. Cf. S. PELEKANIDIS et M. CHATzIDAKIS, Kastoria, Athnes 1985, 33/ fig. 12.

    60 PROLOVI, Die Kirche, 162, dess. 44 (Treska), fig. 136 (Kovalevo); E. BAKALOVA, Stenopisite na crkvata pri selo Berende, Sofia 1976 (rs. fr. 133135), 42, fig. 23, 52. gabriel Millet relve cette formule iconographique dans les miniatures, cf. g. MILLET, Recherches sur liconographie de lvangile aux XIV, XV et XVI sicles daprs les monuments de Mistra, de la Macdoine et du Mont Athos, Paris 1916 (1960), 491, fig. 524526.

    61 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 146 (et n. 6061), fig. 16.62 Dj. MANO-zISI, Manastir Koporin, Starinar VIIIIX (193334), 210218 (217), rs. fr. 217218.63 Pour Arge, cf. Buletinul, fig. 248; TAFRALI, Monuments, pl. LXXI bis/2; C. L. DUMITRESCU, Anciennes

    et nouvelles hypothses, fig. 20; MUSICESCU et IONESCU, Biserica Domneasc, fig. sans numros; BARBU, Pictura mural, fig. 30. Pour Andrea, DEMUS, in The Kariye Djami 4, fig. 55; PROLOVI, Die Kirche, 154, fig. 58, dess. 29.

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    pour un schma qui ne varie que par lempla-cement de Jsus ou lespacement des disciples. Dans la Prire dAndrea et de Koporin, le groupe des disciples se distingue par la fluidit des volumes et la transparence des draps, la facture du premier pouvant tre rapproche de la mme reprsentation Matei (vers 1350)64. Allongs et endormis, les disciples voquent dans ces fresques macdoniennes les banquets antiques, avec une note potique qui se retrouve dans dautres uvres de la rgion. Rien de tel nest observable dans cette scne Arge, ce qui nempche pas A.D. daffirmer que le vrai modle de la composition dArge est la pein-ture faite Andrea. Daprs elle le modle a servi une fois Koporin comme dans le cas du Lavement des pieds et une deuxime fois Arge et que par consquent, cette dernire devait se situer lextrme fin du XIVe sicle, sinon au dbut du XVe65.

    64 Cf. MILLET, La peinture du Moyen Age en Yougoslavie, IV, Paris 1969, pl. 33/ fig. 68 et photos personnelles. Voir aussi, E. DIMITROVA, Manastir Mateje, Skopje 2002, rs. angl. 273287, rs. fr. 289295 (lauteur a tabli la nouvelle datation des peintures de Matei, vers 1350).

    65 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 146 (et n. 61).

    Fig. 4 a. Prire sur le Mont des oliviers. Curtea de Arge, photo daprs Buletinul

    4 a. , , Buletinul

    Fig. 4 b. Prire sur le Mont des oliviers. Andra, dessin daprs Prolovi in Die Kirche4 . , ,

    , Die Kirche

    Fig. 4 c. Prire sur le Mont des oliviers. Koporin, photo V. Popovi

    4 . , , .

    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

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    Le Lavement des pieds (mur du collatral Est, fig. 5 a), offre loccasion A.D. de pour-suivre encore plus le jeu arbitraire des analogies entre les reprsentations dArge, dAndrea (fig. 5 b) et de Koporin, o elle retrouve la mme iconographie66. Il ne subsiste pourtant de cette scne Koporin que deux fragments difficilement perceptibles, qui ne peuvent tre re-connus que comme les traces de deux tuniques et du buste du Christ, identifiables si lon connat bien le programme iconographique du monument. Ces deux taches ont t rcemment identifies par Milan Radujko67. A.D. a pourtant russi trouver Arge une analogie avec cet pisode qui nexiste plus, en sappuyant sur les documents personnels de Svetlana Tomekovi68! Dautre part, la scne du Lavement, bien conserve Andrea (fig. 5 b), qui tmoigne des qualits artistiques du peintre Jovan, prsente un arrire-plan architectural aux amples formes arrondies69, contrastant avec la gomtrie angulaire des architectures peintes de Curtea de Arge (fig. 5 a)70. Enfin, le style de ces deux peintures nindique aucunement la provenance dun atelier commun.

    66 Ibidem, 146, (et n. 58, 59), fig. 17. 67 Cf. RADUJKO, Koporin, op. cit., 191. Le dessin prt par lauteur ne montre que deux taches.68 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 146 (et n. 59).69 Cf. PROLOVI, Die Kirche, 152154, dess. 29, fig. 54. Sur latelier de Jovan et ses parallles, 4251, 214231.70 Cf. Buletinul, fig. 241; TAFRALI, Monuments, pl. LXXI bis/2; MUSICESCU et IONESCU, Biserica

    Domneasc, fig. sans numro; C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, fig. 20; BARBU, Pictura mural, fig. 26.

    Fig. 5 a. Lavement des pieds. Curtea de Arge, photo daprs Buletinul5 a. , , Buletinul

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    Rappelons que le mtropolite Jovan est considr depuis longtemps comme le plus important peintre macdonien des der-nires dcennies du XIVe sicle. Il a dcor avec son frre, le moine Makarije et son lve, grigorije, lglise de Saint-Andr sur la Treska. Vojislav Djuri percevait dans la peinture de Jovan la marque de la phase finale de la Renaissance des Palologues, caractrise par lexpression accentue des personnages et les mouvements un peu ba-roques des corps et des draperies, tendance apparue dans la deuxime moiti du XIVe sicle. Il signale lemploi de quelques mod-les similaires Treska et Koporin, et pr-sume que Jovan avait acquis sa formation dans un grand centre artistique byzantin71. Si la signature de son frre Makarije, releve dans le monastre de Ljubostinja (14025), atteste que celui-ci y a travaill72, rien nin-dique quil soit pass Koporin. Un autre courant, potique et lgiaque, qui sexprime depuis le milieu du XIVe sicle dans les uvres picturales des Balkans, a laiss ses traces dans un groupe de monuments macdoniens, dont Matei est lexemple le plus clatant.73 Ce style qui marque la phase terminale de lpoque des Palologues, pntrera dans le groupe de la Morava. Au sein de ces nouvelles tendances, Koporin se distingue par son individualit propre74.

    La Trahison de Judas (naos, mur Sud, fig. 6 a) serait aussi selon A.D. dinspiration iconographique moravienne75, lauteur se focalisant une fois de plus sur la Serbie propos dun schma iconographique courant et commun tout lart des Palologues. Les extraits des compositions dArge et de Koporin, prsents par lauteur, ne montrent que leurs figures

    71 V. J. DJURI, Radionica mitropolita Jovana. Lauteur suppose que le centre de cet atelier se trouvait dans le monastre de zrze, que Jovan fut mtropolite et peintre lpoque des rois Vukain et Marko et quil avait sans doute dcd aprs la mort du roi Marko, la bataille de Rovine en 1395. A la suite de linvasion turque de la Macdoine, Ma-karije va monter dans la Serbie de la Morava, o il signera son travail dans le monastre de Ljubostinja. Voir PRO LOVI, Die Kirche, 223231, o lauteur distingue le travail des deux matres dAndrea, relve leurs traits distinctifs, confirme lorigine constantinopolitaine des fresques et note certains de leurs points communs avec les peintures de Mistra.

    72 S. DJURI, Ljubostinja, op. cit., 108110. Lauteur confirme la formation de cet atelier dans un grand centre byzantin, peut-tre Constantinople. Il suppose que les artistes ayant dcor Koporin taient proches de latelier de Makarije, mais ceci na pas t confirm. Cf. RADUJKO, Koporin, op. cit., 194, 282283 sq., qui en discute largement.

    73 Ce courant stylistique est remarqu dans ltage du narthex de Sainte-Sophie dOhrid (peintre Jovan Thorijanos), Ljuboten et Dradnja. Cf. V. J. DJURI, Lglise de Sainte Sophie Ohrid, Belgrade 1963, XXIII, fig. 4148; IDEM, Vizantijske freske u Jugoslaviji, Belgrade 1974, 69; C. gROzDANOV, Ohridsko zidno slikarstvo XIV veka, Belgrade 1980, 5354, 7780, 100101, rs. fr. 183217 (208216); M. RADUJKO, Dradnjanski manastiri sv. Nikole, Zograf, 24 (1995), 2537 (36 et n. 91, 92), rs. angl. 37; E. DIMITROVA, Manastir Mateje, op. cit., 229247 (rs. 283284, 294).

    74 RADUJKO, Koporin, op. cit., 286293.75 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 146, 148 (et n. 6266), fig. 17, 18.

    Fig. 5 b. Lavement des pieds. Andra, photo daprs Prolovi, in Die Kirche5 . , ,

    , Die Kirche

    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

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    centrales, dont un dessin imprcis reprsente lpisode de Koporin. Ces illustrations ne repro-duisent pas clairement les arrire-plans, celui de Koporin napparaissant pas et celui de la scne dArge dvoilant peine les casques des soldats. Lauteur attribue ce dernier dtail, sans justification, la main dun deuxime matre, tandis que les soldats sont coiffs de casques dans dautres scnes dArges mais napparaissent sur aucune des scnes de Trahison, quelle considre comme analogues. Elle fixe son attention sur la tte du Christ dtourn de Juda, semblable Arge (fig. 6 a) et Koporin (fig. 6 b), exemples auxquelles elle associe la scne dAndrea (fig. 6 c), o, au contraire, le Christ regarde vers les spectateurs. Elle retrouve lan-tcdent de la position du Christ dtourn de Judas Arilje (1296), Saint Nicolas Orphanos de Thessalonique (13101320)76 et inclut dans le mme groupe lglise du Christ Verria (1315), qui montre linverse, le Christ tourn dans la direction de Juda, posture qui se trouve galement dans les glises macdoniennes de Milutin77. Aprs son classement arbitraire et

    76 Ibidem, Loc. cit. Lpisode dArge reproduit, in Buletinul, fig. 283; TAFRALI, Monuments, pl. LXXVIII/2; BARBU, Pictura mural, fig. 43. Pour Saint-Andr sur la Treska, cf. PROLOVI, Die Kirche, 154156, dess. 30; pour Koporin, MANO-zISI, Manastir Koporin, 216, fig. 7; RADUJKO, Koporin, op. cit., 194, fig. 8, sch. 9. Cf. g. MILLET et A. FROLOw, La peinture du Moyen ge en Yougoslavie, II, Paris 1957, pl. 76/1 (Arilje); IVKOVI, Arilje, 8/17; D. VOJVODI, Zidno slikarstvo crkve Svetog Ahilija u Arilju / Wall Paintings of the Church of Saint Achilleos in Arilje, Belgrade 2005, 130131, fig. XI, 15; TzITOURIDOU, O zwgrafikos, op. cit., fig. 35.

    77 Pour Veria, cf. S. PELEKANIDES, Kallierghs, Athnes 1973, (rs. angl. 123164), 132, fig. 24. Pour les glises de Milutin: la Vierge Pribleptos dOhrid (cf. MILLET et FROLOw, La peinture, III, op. cit., pl. 7/ 1, 2; MILJKOVI--PEPEK, Deloto, pl. XVI); Vatopedi (Ibidem, fig. 123); Saint Nikita de uer (cf. MILLET et FROLOw, La peinture,

    Fig. 6 a. Trahison de Judas. Curtea de Arge, photo daprs Buletinul6 a. , , Buletinul

    DRAgINJA SIMI LAzAR *

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    erron, focalis sur la tte du Christ dtourne de Judas, A.D. conclut que ce qui semblait dmontrer une filiation macdonienne est en fait une iconographie serbe de lextrme fin du XIVe sicle et du dbut du XVe sicle inspire par les uvres du mtropolite Jovan78. On pourrait se demander en quoi la direction de la tte du Christ serait le seul repre tablissant les liens entre les deux peintures et comment il serait possible de ngliger leur style? Celui dArges se distingue par un volume plastique et celui de Koporin par les silhouettes plus plates, fluides et remarquablement colores. On peut noter en passant que les personnages secondaires de cette scne sont presque identiques dans les peintures palologues, o ils accomplissent les mmes gestes, les uns soulevant des bras arms, dautres les dirigeant vers le Christ, et avec Pierre coupant loreille de Malchus. On peut remarquer un trait distinctif de cette reprsentation Saint-Nicolas-Orphanos et Koporin, o les armes brandies par les soldats romains se dtachent avec clat sur le fond, composant une remarquable perspective.

    La Dormition de la Vierge (naos, mur ouest) montre un seul fragment de la composition dArge, avec la photo double dun dessin. On ny discerne pas les lments nigmatiques noncs par lauteur79, sagissant en effet dune reprsentation trs riche. Les pisodes com-plmentaires, les derniers jours de la Vierge et le groupe des anges-soldats placs prs du lit

    III, pl. 43/ 3); Staro Nagoriino (Ibidem, pl. 85/ 34). Les emplacements de Juda et du Christ sont inverss Rudenica (cf. PETKOVI, La peinture serbe, I, pl. CXCI) de mme qu Ivanovo (cf. A. gRABAR, Les fresques dIvanovo et lart des Palologues, in Lart de la fin de lantiquit et du Moyen Age, 2, Paris 1968, 841846, fig. 198/a).

    78 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 148 (et n. 6266).79Ibidem, 148, fig. 19a, 19b.

    Fig. 6 b. Trahison de Judas. Koporin, photo V. Popovi

    6 . , , .

    Fig. 6 c. Trahison de Judas. Andra, dessin daprs Prolovi in Die Kirche

    6 . , , , Die Kirche

    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

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    (qui constitue sans doute lnigme pour A.D.) et dautres dtails iconographiques ont t dj examins par ses prdcesseurs80. Pour le groupe des anges-militaires figurs dans la Dormition depuis le dbut du XIVe sicle, en Macdoine (Saint-Euthyme Thessalonique et Saint-Anasthase Kastoria) et Mistra (Privleptos et Sainte-Sophie), Andr Xyngopoulos la situs dans le cadre du rpertoire byzantin dorigine constantinopolitaine. Mais A.D. ne voit dans cette image quune inspiration moravienne, en justifiant ce choix par la prsence des anges-soldats Ravanica (vers 1387)81, tandis quils sont apparemment absents des autres monuments de la Morava. Les anges-soldats, figurs dans une cohorte qui descend jusquau lit de la Vierge, sont incorpors, entre autres, dans la Dormition de lglise du Roi Studenica et graanica82, pour constituer un groupe part prs du lit de la Vierge et non seulement Arge et Ravanica; ils apparaissent ainsi dans les peintures de Macdoine, de Mistra, et aussi de Donja Kamenica83, exemples quA.D. ne remarque pas. Tous ces monuments remontent la deuxime moiti du XIVe sicle, ce qui ne joue pas en faveur de la datation des fresques dArge au XVe sicle, encore moins par lintermdiaire des monuments serbes qui ne repr-sentent pas ce dtail cette priode. La scne de la Dormition Arge renferme par contre un lment intressant, qui nest pas relev dans lnonc des particularits iconographiques du monument, le chrubin au-dessus du Christ portant lme de la Vierge. Il apparat aussi Resava, mais il a dabord t reprsent Chora84.

    Le cycle de lEnfance du Christ85 (naos, mur Sud), document-cl pour les similitudes entre Arge et Chora, est peine mentionn par lauteur. Lensemble comporte un pisode rare, celui du Recensement de Joseph et de la Vierge devant Quirinius, discut par de nom-breux chercheurs ds le dbut du XXe sicle86. Cette scne nest connue dans lart mural que dans lexonarthex de Chora87, sur le mur sud Arge88 et dans le narthex de Kaleni89. Son importance a t dgage lors de la reconstitution des fragments disparus des mosaques

    80 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 4142 (et n. 116, 117), 49 (et n. 145147), fig. 23. Voir A. XyNgOPOULOS, Thessalonique et la peinture macdonienne, Athnes 1955, 7174. Le professeur grec avait remarqu (p. 73) que liconographie macdonienne figurant les anges-soldats se dveloppe davantage Mistra quen Serbie. Il relve leur prsence prs du lit de la Vierge, Thessalonique (chapelle Saint-Euthyme [1303] de lglise de Saint-Dmetrios), Mistra (Pribleptos [3e quart du XIVe sicle] et Sainte-Sophie [2e moiti du XIVe sicle]) et Kastoria (Saint-Athanase [1384/5]). Cf. MILLET, Mistra, op. cit., pl. 116/4 (Pribleptos), 134/4 (Sainte-Sophie); PE-LEKANIDIS et CHATzIDAKIS, Kastoria, op. cit., 106119, fig. p. 115/9. La scne dArges, in Buletinul, fig. 253; TAFRALI, Monuments, pl. LXII/1; BARBU, Pictura mural, fig. 36.

    81 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 148 (et n. 70), fig. 19 a, b; IVKOVI, Ravanica, p. 36 (VI/15); cf. note 80.

    82 Cf. BABI, Kraljeva crkva, fig. 91, 111, dess. VIII; IVKOVI, Gracanica, Naos. Espace en bas de la coupole/ Ct occidental/ 10).

    83 Cf. IVKOVI, Donja Kamenica, Crtei fresaka, Belgrade 1987, III/2.84 Cf. UNDERwOOD, The Kariye, 2, fig. 185; IVKOVI, Manasija, fig. VII/1.85 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 146 (et n. 5254), 151.86 P. P. PANAITESCU, Inscriptiunile religioase, in Buletinul, 167, 170; I. MIHAIL, Pictura Bisericii Domneti,

    in Buletinul, 175176; PETKOVI, Manastir Kaleni, op. cit., 8284; Ch. DIEHL, Manuel de lart byzantin II, Paris 1926, 831.

    87 Cf. UNDERwOOD, The Kariye 2, fig. 101.88 Cf. Buletinul, fig. 282; TAFRALI, Monuments, pl. LXXV/1, LXXVI; LAFONTAINE-DOSOgNE, Iconographie

    of the Cycle of the Infancy of Christ, in The Kariye 4, fig. 36; MUSICESCU et IONESCU, Biserica Domneasc, fig. sans numros.

    89 Cf. SIMI-LAzAR, Observations, fig. 9 (pour Chora et Arge, fig. 8, 10). Bonne reproduction de Kaleni, in IDEM, Kaleni et la dernire priode, op. cit., fig. XXXVI (= IDEM, Kaleni. Slikarstvo, istorija, op. cit., fig. XLI).

    DRAgINJA SIMI LAzAR *

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    constantinopolitaines et mise en vidence par les chercheurs depuis les annes 30 du XXe sicle, en particulier par V. R. Petkovi, travaux complts rcemment par Jacque-line Lafontaine-Dosogne, Carmen Laura Dumitrescu et enfin, moi-mme90. Du fait que tous ces auteurs situent lorigine de cette scne Chora et quA.D. cherche tablir une filire avec la seule Serbie, elle se sert dune remarque provenant dun autre article qui concerne les analogies de certaines sc-nes de lglise du Christ Chora avec celles de la Sainte Trinit Resava91. Elle sappro-prie et dforme ces observations sur les si-militudes et les divergences qui existent entre les cycles de LEnfance Resava, Kaleni et Arge, par rapport Chora pour mettre laccent sur laxe Serbie-Valachie92. Le fait est que certains fragments rares conservs Resava se rattachent au cycle constantinopo-litain, de mme que les pisodes correspon-dants, mieux visibles Arge. Cependant, la seule composition du cycle de lEnfance entirement conserve Resava, les Mages devant Hrode, (fig. 7 c) est incomplte au regard de celles de Chora (fig. 7 b) et dArge (fig. 7 a) et ne pouvait donc servir de modle direct aux peintres de lglise roumaine. Larrire plan de cet pisode est complt Chora et Arge par des mages galopant cheval, inexistants Resava faute despace disponible93, mais celle-ci tant date au XVe sicle, A.D. lui octroie fermement sa prfrence.

    Le cycle des Apparitions du Christ (bma), tant identique Arge et Kaleni94, A.D. reprend une remarque dj faite, en la prsentant comme sienne et en lenrichissant dune observation sur la prsence du sujet la fin du XIVe sicle Pe95. Ce faisant, elle runit les quatre monuments du patriarcat de Pe en un seul,96 en ne signalant que deux exemples dun

    90 Cf. supra, notes 20, 86; LAFONTAINE-DOSOgNE, in The Kariye Djami 4, 207; C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 48 (et n. 141, 142); SIMI-LAzAR, Observations, 151154 (et n. 4449).

    91 SIMI-LAzAR, Observations, 147 (et n. 1517).92 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 146 (et n. 54).93 Pour Arge, cf. Buletinul, fig. 282; TAFRALI, Monuments, pl. LXXV/2; LAFONTAINE-DOSOgNE, The

    Kariye Djami 4, fig. 44; MUSICESCU et IONESCU, Biserica Domneasc, fig. sans numros. Pour Kahri, UNDER-wOOD, The Kariye Djami 2, fig. 103. Pour Resava, IVKOVI, Manasija, III Votes / 14.

    94 Cf. SIMI-LAzAR, Observations, 147 (et n. 14). Voir aussi, infra, note 98. Pour Arge cf. Buletinul, figs. 203205; TAFRALI, Monuments, pl. XXVIIIXXIX, XXXV/1, 2, XXXVI/2.

    95 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 150 (et n. 81).96 Pour les quatre glises de Pe, les Saints-Aptres, Saint-Dimitri, Sainte-Vierge et Saint-Nicolas et le narthex

    commun aux trois premires, V. J. DJURI, avec S. IRKOVI et V. KORA, Peka patrijarija, Belgrade 1990

    Fig. 7 a. Mages devant Hrode. Curtea de Arge, photo daprs Lafontaine-Dosogne, in The Kar. Djami 4

    7 a. , , -, The Kar. Djami, 4

    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

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    thme largement rpandu en Serbie. Elle tombe de nouveau dans le pige de lancien ouvrage de Vladimir Petkovi, o cet ensemble monastique est intitul Patriarcat de Pe, les lgen-des exactes tant mentionnes lintrieur du livre. La scne reproduite dans cet ouvrage provient de lglise de la Vierge (peinte vers 1335 et non, comme A.D. lcrit, la fin du XIVe sicle)97. Dautre part, liconographie des Apparitions du Christ est reprsente au cours des XIVe et XV sicle dans un grand nombre de monuments serbes et se prsente comme une particularit locale, ce qui est amplement illustr dans la monographie sur Kaleni98, publie par ailleurs, aprs la parution de larticle de A.D. Lemplacement du cycle dans le bma, contenant les mmes modles Arge et Kaleni, laisse supposer leur origine dans un mo-dle commun, constantinopolitain.

    (Les apparitions du Christ sont figures dans lglise des Saints-Aptres (vers 1260), (fig. 30, 31) et dans celle de la Vierge (p. 148).

    97 Cf. V. R. PETKOVI, La peinture serbe, op. cit., I. Il sagit de la fig. 72a. et non 730v selon lindication de A.D. dans sa note 81. La mention des trois glises du patriarcat de Pe avec leur exonarthex est releve dans cet ouvrage (3841) et la prcision de leurs dates exactes dans larticle de Carmen Laura Dumitrescu, o cet auteur les comparait avec Arge (Anciennes et nouvelles hypothses, 55 [et n. 181]).

    98 SIMI-LAzAR, Kaleni et la dernire priode, op. cit., 6265 (= IDEM, Kaleni. Slikarstvo, Istorija, op. cit., 115117).

    Fig. 7 b. Mages devant Hrode. Chora, photo daprs Underwood, in The Kar. Djami 27 . , , A, The Kar. Djami, 2

    DRAgINJA SIMI LAzAR *

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    On pourrait joindre ces exemples dana-logies localises dans le bma, un dtail pro-venant dun modle commun de la Communion de vin Arge et Kaleni, qui a trait laspect des aptres et au drap de leurs tuniques. Lanimation est plus accentue Arge99 et moins marqu Kaleni, o lagitation est attnue conformment dautres critres esthtiques en vigueur au XVe sicle100.

    A propos du Jugement dernier dArge (narthex, mur Est et consoles des arcs), A.D. affirme lexistence de deux couches de pein-tures superposes, la seconde couche ayant selon elle, transform la Disis eschatologique (narthex, tympan est) en Disis votive. Rien de tel nest justifi par les recherches et conclu-sions des restaurateurs rcentes, poutant ci-tes par lauteur. Rien ne justifie non plus son opinion selon laquelle les reprsentations des Conciles cumniques (votes) et les scnes de la Vie de saint Nicolas (mur Est) auraient empit sur le programme initial du Jugement dernier. A.D. pose pourtant ceci pour acquis et considre comme seul pro-blme, celui de la datation de cette prtendue deuxime couche de fresques101. Elle ne tient pas compte des rapports des restaurateurs, qui ont constat que les seuls repeints dans lensemble des fresques ont t excuts des poques tardives, cest--dire au XVIIIe-XXe sicle, dans les espaces o les peintures originales du XIVe avaient t abmes, surtout au registre infrieur102. Lopinion de A.D. sur la destruction partielle du Jugement dernier par lintroduction ultrieure de la vie de saint Nicolas et des Conciles oecumniques, est en dsaccord non seulement avec les conclusions des restaurateurs, mais aussi avec les analyses stylistiques prcdentes103. A.D. tente dexpliquer la prsence de limage de Saint-Nicolas

    99 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 50, fig. 12. Lauteur attribue cette reprsentation au peintre n 1. Cf. Buletinul, fig. 213; TAFRALI, Monuments, pl. XXXIX/2.

    100 Cf. SIMI-LAzAR, Kaleni et la dernire priode, fig. VIII (= IDEM, Kaleni. Slikarstvo, istorija, fig. VII).101 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 141142, 157, fig. 69. Illustrations, in Buletinul, fig. 202, 286288,

    291299; TAFRALI, Monuments, pl. XCVIII/1,2, CICVIII, CX/1; MUSICESCU et IONESCU, Biserica Domneasc, fig. sans numros; BARBU, Pictura mural, fig. 59, 6375.

    102 Le restaurateur remarque une ceinture torse ajoute tardivement, qui surmonte la Vie de saint Nicolas et les portions de Jugement dernier. Voir MOHANU, Nouvelles donnes, op. cit., 36.

    103 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 46 (et n. 134), 52.

    Fig. 7 c. Mages devant Hrode. Resava, dessin daprs ivkovi, in Manasija7 . , , ,

    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

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    dans le narthex de Curtea de Arge comme substitut de saint Jean-Baptiste dans la Disis (entoure du Jugement dernier). En fait, la reprsentation rpte de saint Nicolas galement dans la conque absidale du bma, prs de la Vierge et dans le Cycle de sa Vie dans le narthex, sexplique logiquement quand on sait que lglise tait ddie Saint-Nicolas et quil tait le patron du vovode Nicolas Alexandre (13521364), fondateur de la construction, reprsent en tant que dfunt lors du Jugement dernier au sein de la Disis sous la protection de son saint patron, qui intercde pour lui104.

    Rappelons galement ici que dans le cycle de Saint-Nicolas reprsent dans le narthex, les inscriptions sont en slavon, langue de lglise de lpoque. quelques rares inscriptions en slavon apparaissent aussi dans le bma. Les autres inscriptions dans le naos et dans le narthex sont en grec105.

    Les lacunes du cycle de la Vie de Prodrome (prothse) auraient t selon A.D. rem-plies au XVe sicle par des scnes de lEnseignement du Christ106. La lgret de cette affir-mation illustre la mthode gnrale de sa dmonstration. Une fois de plus, elle na pas tenu compte des travaux des restaurateurs qui ont dcrit les techniques picturales utilises par les peintres au XIVe sicle et nont trouv aucun repeint avant le XVIIIe sicle107. Dautre part, lenchevtrement des reprsentations de la Vie du Prodrome et du Ministre du Christ dans la prothse cest--dire la runion des deux cycles est la traduction du message vanglique, annonc par saint Jean et accompli par Jsus. Tout ceci a t clairci par Carmen Dumitrescu, qui a expliqu lemplacement de ces deux thmes. Le sacrifice du Prcurseur, par lillustra-tion de la scne de sa dcapitation est plac logiquement dans la prothse, lieu du sacrifice eucharistique108.

    Les considrations de A.D. autour du Christ mort envelopp de bandelettes (prothse) la mnent aborder la liturgie pour soutenir que cette image sinspire du service du Jeudi saint109, autre exemple de sa mconnaissance des sujets liturgiques, en dpit des nombreuses tudes sur la question, quelle semble ignorer110.

    104 Ibidem, 1316, fig. 7, 8. Carmen Laura Dumitrescu insiste sur lidentification propose par quelques-uns de ses ses prdcesseurs, du petit personnage figur en proskinse dans la Disis, comme tant le vovode Nicolas Alexandre, sous le rgne duquel (13521364) la construction de ldifice stait acheve et qui tait dcd au moment de la dcoration. Son pouse, de confession catholique, ne pouvait pas y tre figure.

    105 Avant de devenir la langue officielle de lEtat, le slavon tait lpoque qui nous intresse la langue de lglise, en raison des liens historiques de la Valachie avec la Bulgarie de Tirnovo. On constate que dans cette mme quipe compose principalement de matres grecs (dirigs par les peintres n 1 et n 2), un peintre dorigine sud-slave (peintre n 3) a excut dans le narthex le cycle de Saint-Nicolas, dont les fresques se distinguent par leurs inscriptions slaves et par la qualit moindre de la peinture. Sur ces problmes, voir C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 1921, 5253. Pour les inscriptions, P. P. PANAITESCU, Inscriptiunile religioase, in Buletinul, 161171; V. BRATU-LESCU, Inscripii slave religioase din Biserica Domneasc, in Buletinul, 192; MOHANU et BALAN, Unele consideraii, op. cit., 6265 (Balan). Pour la domination valaque sur la Bulgarie de Vidin et lidentification de Radu Ier en tant que donateur des fresques, C. L. DUMITRESCU, Le Vovode donateur, op. cit., RESEE, 550558, surtout 154 (et n. 98).

    106 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 149 (et n. 73).107 MOHANU, Nouvelles donnes, 38. Cf. supra, note 18, 19.108 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 3034. 109 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 150 (et n. 7477). Image reproduite, in Buletinul, fig. 226; TAFRALI,

    Monuments, XL/1; MUSICESCU et IONESCU, Biserica Domneasc, fig. sans numro; BARBU, Pictura mural, fig. 25.

    110 Ana Dumitrescu commente incorrectement louvrage de I. D. STEFANESCU, Lillustration des liturgies dans lart de Byzance et de lOrient, Bruxelles 1932, 50. Les tudes incontournables sur le sujet du Christ mort ne

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    Pour occulter les recherches de Carmen Laura Dumitrescu, quelle cite incompltement lorsquelle ne les reprend pas son compte, elle remplace son nom par limpersonnel on a dit.... Cest par exemple le cas du tableau votif, o cet auteur identifie, en sappuyant sur ses propres recherches historiques, le vovode Radu Ier (137782)111. A.D. veut y reconnatre le prince Vladis-lav en justifiant son choix dans ces termes: lenchanement des copies censes tre fidles est tel point long et compliqu que nous trouvons inutile de lanalyser en dtail (sic!)112. A partir de ses ides prconues et sur quelques vagues descriptions de costumes, elle pense galement recon-natre dans le personnage en proskynse reprsent dans la Disis, le vovode Mirea lAncien (!) la place de Nicolas Alexandre113, en dpit de la prsence de saint Nicolas dans cette Disis.

    Pour complter son argumentation, A.D. sappuie sur la thse des chercheurs du dbut du XXe sicle, qui tablissaient un lien troit entre le monastre de Cozia (1387) et lart de la Morava114 et elle passe sous silence le seul travail rcent qui fait autorit sur les peintures de ce monastre, celui de gordana Babi. Celle-ci a minutieusement analys, scne par scne, lAcathiste du narthex de Cozia (1390), pour conclure qu lexception de ce monument, ses formules iconographiques laconiques ne sont pas connues en dehors de la capitale byzantine. Cette origine constantinopolitaine figure dans le titre mme de son article115.

    Au terme de ce parcours, Ana Dumitrescu tire une conclusion trs ferme: du fait que la premire couche de peinture se trouvait Arge en mauvais tat, des peintres de lEcole de la Morava sont venus au XVe sicle pour redcorer le monument. Ce fait simpose lauteur avec une telle vidence, quil ne lui reste quun seul problme rgler, celui de prciser qui a fait venir ces artistes serbes et quel moment. Lvnement stant produit, selon elle, au XVe sicle, ce ne pouvait tre que lune des deux autorits du lieu et du moment, le prince Mirea lAncien (13861418) ou le mtropolite116.

    sont pas connues par lauteur. Principalement D. PALLAS, Die Passion und Bestattung Christi in Byzanz. Der Ritus das Bild, Munich 1965; S. DUFRENNE, Images du dcor de la prothse, REB 26 (1968), 279310; H. BELTINg, An Image and Its Function in the Liturgy: The Man of Sorrows in Byzantium, DOP 3435 (19801981), 16; IDEM, Das Bild und sein Publikum im Mittelalter, Berlin 1981 (= Limage et son public au Moyen Age, Paris 1988). Voir aussi, R. TAFT, Divine Liturgies Human Problems in Byzantium, Armenia, Syria and Palestine, Variorum Collected Studies Series, Aldershot, 2001. Le thme du Christ de Piti se retrouve dans le mme cadre liturgique, cf. entre autres, D. SIMI--LAzAR, Le Christ de Piti vivant. Lexemple de Kaleni, Zograf 20 (1989), 8194; A. VASILIOU, Licne invisible ou le seuil liturgique du regard, Revue roumaine dhistoire de lart, Serie Beaux arts, 3637 (19992000), 1930.

    111 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 1823, fig. 4; IDEM, Le vovode donateur, RESEE, op. cit., 545548, fig. 1, 2. Identification de Radu Ier, in Buletinul, passim, fig. 37; IOSIPESCU, Comisiunea Monumentelor Istorice (1998), op. cit., passim.

    112 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 156, 157 (et n. 110), fig. 27. 113 Ibidem, 157158 (et n. 111112). Cf. supra, note 104.114 Ibidem, 154 (et n. 98).115 g. BABI, Liconographie constantinopolitaine de lAcathiste de la Vierge Cozia (Valachie), ZRVI, XIVe/XVe

    (1973), 173189. Lauteur exclut catgoriquement lexistence dune influence serbe sur ces peintures, en ces termes: Ces lments archaques loignent la peinture de Cozia des fresques du XIVe sicle connues en Serbie, en Macdoine o Thessalonique (p. 180) et cette peinture apporte des renseignements prcieux sur la peinture constantinopolitaine du XIVe sicle, qui nous est toujours mal connue (p. 189).

    116 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 154 (n. 97101). On peut supposer que lide de faire de Mircea lancien (13861418) le commanditaire des peintures, trouve son origine dans une hypothse formule par Carmen Laura Dumitrescu (Anciennes et nouvelles hypothses, 4245 et n. 119126, fig. 26), selon laquelle Mircea serait intervenu en un seul endroit de lglise sur la face Est du pilier Nord-Est. En dtruisant une petite silhouette en prire au pied dun Christ bnissant, avec sur le registre infrieur, la tte de leffigie dun personnage connu sous le nom de Chevalier sans tte. La raison serait dordre dynastique, par souci de ne pas lgitimer la branche vovodale issue de son frre, Dan Ier.

    * SUR UNE DATATION DES FRESqUES DE LgLISE DE SAINT-NICOLAS...

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    Ana Dumitrescu ne justifie nullement son affirmation de la prsence de cette suppose quipe serbe Arge. Les similitudes de quelques schmas iconographiques diversement r-partis sur les murs de Ravanica, Koporin, Resava et Kaleni avec leurs correspondants dis-perss Arge, ne sont nullement une preuve que les peintres de lEcole de la Morava sont venus dcorer de nouveau lglise valaque117. On ne trouve, en effet, aucune unit stylistique entre Arge et les fresques de ces quatre monuments moraviens, qui nappartiennent pas une cole dtermine ni ne portent lempreinte dun seul atelier. Chacune de ces dcorations se distingue par son caractre propre et si quelques similitudes existent, elles sont dues au contexte stylistique de lpoque. Aucun chercheur serbe ne sest aventur identifier clairement les quipes qui ont travaill dans lun ou lautre des monuments de la rgion. Seul Vojislav Djuri, fort de sa connaissance intime de lensemble des fresques, jusque dans la facture personnelle de chaque peintre, la tent, sans dailleurs y parvenir pleinement.

    Rappelons encore que la question des ressemblances des schmas iconographiques constantinopolitains avec ceux de Macdoine, de Serbie et de Valachie, a fait lobjet dune tude approfondie par les chercheurs contributeurs au volume 4 de Kariye Djami. Ils ont minutieu-sement reconstitu, grce aux pisodes de lEnfance du Christ, bien conservs Arge et Kaleni, et de celui de la Multiplication, intact Arge, lintgralit des scnes des mosaques endommages de Chora. En consquence, les liens de ces fresques avec les mosaques de la capitale sont fermement tablis. Des lments nouveaux nont pas t apports par Ana Dumitrescu, qui, pour accrditer sa nouvelle thse, passe sous silence les contributions de ses prdcesseurs, tout en les utilisant ou en les dformant selon ses convenances.

    La question qui se pose est de savoir comment ces modles se sont rpandus. Des analo-gies videntes ressortent de lobservation du cycle des Apparitions du Christ ralis selon les mmes schmas et situ dans les mmes emplacements Arge et Kaleni, de celui de lEn-fance du Christ, figur dans ces deux glises et Chora, et enfin, de quelques fragments de lEnfance conservs Arge et Resava selon les modles de la capitale. La rponse la plus vraisemblable est que les peintres auraient utilis des carnets desquisses, transports lors de leurs prgrinations. Ces esquisses pouvaient tre copies daprs des fresques, mosaques, manuscrits enlumins ou des icnes, selon le lieu dapprentissage des peintres. Chaque matre dquipe devait en disposer et les transmettre leurs lves et confrres, ce qui explique la diffusion de schmas identiques dans des monuments byzantins loigns dans le temps et dans lespace. Ce mode de transmission a t considr comme le moyen habituel de leur expansion depuis la capitale vers les autres rgions byzantines, par Paul Underwood et par Otto Demus118, ce dernier mettant laccent sur le rle des manuscrits enlumins. Carmen Laura Dumitrescu sest penche, quant elle, sur le problme des Cahiers de modles en ce qui concerne Arge et moi-mme pour Kaleni119.

    Si dautre part, on cherche tablir lorigine des scnes communment reprises et diffu-ses, presque sans variation, dans de nombreux monuments, lexemple des pisodes de la Passion du Christ, rien ne justifie de situer arbitrairement cette origine en un lieu particulier, en loccurrence la Serbie. Dautres scnes, plus rares, pouvaient par contre, attirer lattention

    117 A. DUMITRESCU, Une nouvelle datation, 154 (et n. 98).118 P. UNDERwOOD, in The Kariye 1, 87 (et n. 1), 9496; O. DEMUS, in The Kariye 4, 121, 134136, 142. 119 C. L. DUMITRESCU, Anciennes et nouvelles hypothses, 47; SIMI-LAzAR, Observations, passim, 157.

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    par lexistence danalogies intressantes entre les monuments serbes et Arge, comme cls de reconstitution dune trame iconographique perdue. Lexemple des Apparitions permet de rtablir les scnes dtruites Kaleni laide des fresques dArge et celui du Recensement relie Curtea de Arge et Kaleni Chora. Dans ces conditions, leur provenance constantino-politaine ne fait aucun doute, mais ces vidences sont ignors par Ana Dumitrescu. quant aux pisodes de la Multiplication et des Noces Cana, bien conservs Arge, qui donnent des informations prcieuses sur les fragments disparus Chora, elles sont compars par A.D. avec les fresques de Resava, alors que labsence de quelques dtails sur ces dernires, montre que les schmas du monument serbe nont pu tre le modle de ceux de lglise valaque.

    Dans un second article, Une iconographie peu habituelle: les saints militaires sigeant. Le cas de saint-Nicolas dArge120, dont le sujet est celui des saints militaires trnant, A.D. accentue la singularit de sa mthodologie. quelques saints militaires sont reprsents trnant sur le deuxime registre des piliers de lglise de Saint-Nicolas de Curtea des Arge. Lauteur en don-ne une description dtaille, suivie dun rappel de lvolution du thme, avec un recensement des figurations des saints assis, dans lart de tradition constantinopolitaine, relevs depuis le XIIe sicle121. Le lecteur sattend alors une tude qui mnerait une conclusion, au lieu de quoi A.D. se contente de le renvoyer au rsultat de son prcdent article122, en apportant un nouvel argu-ment. Pour avancer sa thse sur la prsence dartistes serbes en Valachie, elle imagine des faits historiques qui nexistent pas, concernant la migration des Serbes vers le nord. On lit dans son expos Il est bien connu quaprs la dfaite serbe de Kosovo en 1389, commence une migration vers le nord. Les nombreux rfugis serbes sont ainsi arriv jusquen Hongrie. Il est logique que parmi ceux qui se sont arrts en Valachie il y ait eu un grand nombre dartistes, plus dpen-dants de la religion123. Dune part, le chemin ordinaire de la Serbie la Hongrie ne passe pas par la Valachie. Dautre part, les sources historiques nattestent une migration de Serbes vers la Hongrie qu partir du dernier quart du XVe sicle, lorsque les descendants de la dernire famille rgnante serbe, les Brankovi y trouvrent refuge124. Enfin, la prsence significative de Serbes en Valachie nest releve qu partir du dbut du XVIe sicle125, notamment lorsque la princesse serbe Despina Brankovi devient lpouse du vovode Neagoe Basarab126.

    120 A. DUMITRESCU, Une iconographie peu habituelle, Byzantion, 59, op. cit., fig. 16. Reproductions des personnages, in Buletinul, fig. 216, 224, 225, 251/a, b; TAFRALI, Monuments, XCIII/1,2, XCIV/1,2; MUSICESCU et IONESCU, Biserica Domneasc, fig. sans numros; BARBU, Pictura mural, fig. 53, 55, 56.

    121 A. DUMITRESCU, Une iconographie peu habituelle, 5259, o est note lexistence dune effigie de Saint Dimitri de Thessalonique date au VIIe sicle, aujourdhui disparue.

    122 Ibidem, 62 (et n. 34).123 Ibidem, note 38, avec rfrence louvrage de y. RADONITCH, Histoire des Serbes de Hongrie, Paris 1919,

    30 sq., traitant des rfugis serbes en Hongrie. 124 Il est question de Vuk grgurevi, petit-fils du dernier despote serbe, Djurdje Brankovi, entr au service du

    roi de Hongrie, Mathias Corvin. Cest partir de 1480 que le roi attire dans son pays un nombre important de familles serbes. Voir Istorija srpskog naroda, II, op. cit.: IRKOVI, 374, 389. Cf. aussi, S. IRKOVI, O despotu Vuku grgureviu, Zbornik za likovne umetnosti, 6, Novi Sad (1970), 283290.

    125 Istorija srpskog naroda, II: IRKOVI, 461; V. J. DJURI, 540. Limmigration serbe est cette poque surtout prsente en Hongrie mridionale.

    126 Une nouvelle glise, mtropolitaine, a t rebtie et inaugure Curtea de Arge en 1517, fondation de Neagoe Basarab. La dcoration acheve aprs sa mort, en 1526, reprsentait dans le narthex un tableau votif qui le montrait offrant la maquette de lglise, avec son pouse Despina Brankovi et leurs enfants (mur Sud), conserv actuellement au Muse National dHistoire de Bucarest. Sur le mur Est taient peints les commanditaires des fresques, Radu de la Afumati

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    Pour Ana Dumitrescu cependant, la prsence dartistes serbes en Valachie au dbut du XVe sicle est un fait acquis, dont elle tire un nouvel argument lappui de sa thse. Elle voit dans laspect pensif et lattitude dfaitiste des saints militaires reprsents, le reflet dune tristesse due la perte dindpendance de la Serbie: des saints militaires pensifs, assis, ne pouvaient traduire ltat desprit de seigneurs valaques victorieux, mais seulement de guerriers serbes vaincus.127 On pourrait objecter que la tristesse devait tre un sentiment assez rpandu dans les Balkans du XVe sicle et en outre que les reprsentations de saints guerriers trnant ne sont gure releves en Serbie mais quon en trouve par contre ailleurs dans lart byzantin, jusquen Russie, ce quelle a dailleurs indiqu dans les pages prcdentes de cet article.

    * * *

    Face cette image de dsolation donne par Ana Dumitrescu, il convient de faire un bref rappel de la situation culturelle de la Serbie entre la bataille de Kosovo (1389) et les annes 30 du XVe sicle, lorsque la prosprit conomique du pays, semi indpendant, ouvre une priode de grand essor culturel128, marque par le mcnat du prince rgnant Stphane Lazarevic et de ses seigneurs. Les nombreux monuments rigs et dcors cette poque comptent parmi les plus intressants du Moyen ge finissant. En dehors des fondations prestigieuses situes autour de la rivire Morava Ravanica, Ljubostinja, Resava et Kaleni dcores par les grands ma-tres de lpoque, on compte un nombre apprciable de monuments fonds par des seigneurs, dont certains sont luvre dartistes de qualit. Les publications belgradoises ont recens ces peintures depuis la premire moiti du XXe sicle129. Leur premier aperu global a t publi dans les annes 6070, dabord par Svetozar Radoji130 et ensuite par Vojislav J. Djuri131. Ce dernier a fait un inventaire succinct de toutes les fresques moraviennes et complt ce travail par une tude crite avec gordana Babi, dont le titre Polet umetnosti (Lenvol de lart) 132 voque lintensit de la cration artistique dans la Serbie de lpoque. Tania Velmans, dans son rcent livre sur la peinture byzantine, rappelle la grande valeur des fresques de ce groupe

    (le gendre de Neagoe), son pouse et leur fille. Dans le mme narthex taient reprsents dautres vovodes, mais aussi le prince serbe Lazar Hrebeljanovi, qui soutenait avec son pouse Milica la maquette de sa fondation, Ravanica, accompa-gns de leurs deux enfants (mur Sud). La prsence des saints serbes Simon-Nemanja et Sava (mur Nord) avec celle de la famille de Lazar, mettait en vidence la parent de Despina avec la dynastie serbe et en mme temps rendait hommage au prince Lazar, martyr et symbole de la lutte contre les Ottomans. Voir C. L. DUMITRESCU, Fondateurs et iconographie au XVIe sicle en Valachie, Revue roumaine dHistoire de lart, XIV (1977), 2147 (2426), fig. 2, 3, 1820; Carmen Laura DUMITRESCU, Pictura mural din ara Romneasc n veacul al XVI-lea (Mural Painting in 16th Century Wallachia), Bucarest 1978, rs. angl., Iconography and Founders, 116117, pl. 23. A lexception des effigies des fondateurs, les fragments des autres groupes (de mme que leurs dessins copis par le peintre Tattarescu en 1860), sont conservs au Muse National dArt de Bucarest. Les portraits existant aujourdhui dans lglise mtropolitaine sont des copies.

    127 A. DUMITRESCU, Une iconographie peu habituelle, op. cit., 62, 63 (et n. 37, 38).128 Nouvel ouvrage bilingue (en serbe et en anglais) sur les richesses conomiques et culturelles de la Serbie

    entre la fin du XIV et le dbut du XV sicle, V. JOVANOVI, S. IRKOVI, E. zEEVI, V. IVANIEVI et V. RADI, novo Brdo, Belgrade 2004.

    129 Toute la bibliographie sur les monuments moraviens publie avant 1970, in V. J. DJURI, Vizantijske freske u Jugoslaviji, Belgrade 1974, 221225 (19752 = Byzantinische Fresken in Jugoslawien, Munich 1976).

    130 S. RADOJI, Staro srpsko slikarstvo, Belgrade 1966, 175203 131 V. J. DJURI, Moravsko slikarstvo La peinture de lEcole de la Morava, Belgrade 1968; IDEM, Vizantijske

    freske, op. cit., 91105. 132 g. BABI-DJORDJEVI et V. J. DJURI, Polet umetnosti, in Istorija II, op. cit., avec le commentaire sur

    la situation artistique en Serbie.

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    de monuments133. Le colloque international lEcole de la Morava et son temps134, avait recueilli un ensemble dtudes comparatives, situant lart serbe dans un cadre plus large. De nouvelles monographies135 et des articles publis dans les revues belgradoises136 apportent un clairage supplmentaire sur quelques-unes de ces peintures.

    La thse de Vojislav J. Djuri sur lorigine thessalonicienne des peintures de Resava a eu un trs grand retentissement137. grand connaisseur du style des peintures balkaniques mdi-vales, cet auteur a mis en relation quelques personnages figurs Resava avec ceux de Thes-salonique, en particulier dans les glises des Saints-Aptres et de Saint-Elie (monastre Nea Moni). Il a mis lhypothse que les artistes grecs de ce monument auraient aussi travaille en Serbie, mais les recherches les plus rcentes tendent ne pas dissocier lart de Thessalonique de celui de Constantinople. La remarque dOtto Demus sur le rle de Thessalonique dans la transmission de la peinture byzantine lpoque de lEmpire latin Constantinople, est aussi pertinente que son constat du non-retour de certains ateliers constantinopolitains aprs deux gnrations dartistes en errance138. Cet auteur a mis en vidence limportance des peintres itinrants dans le rayonnement de Constantinople lors de sa dernire phase artistique139, qui ont, dune manire directe ou indirecte, contribu la formation de matres autochtones dans lespace byzantin. Parmi les fresques de cette dernire priode byzantine on trouve quelques chefs duvres, tmoignant que lart issu de la Mtropole a continu de donner des fruits dans les dernires dcennies du XIVe sicle et les premires du XVe. Ces monuments ne refltent ni un art unifi ni une cole. Parmi l