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Projet d’élèves ingénieurs n°3
Stratégie d’adaptation de l’agriculture du Gard au changement climatique.
Par GUIGUE Antonin, KERGOAT Hélène, REDIFI Issam, THURET Hélène
Année de soutenance : 2013
Organisme commanditaire : Chambre d’agriculture du Gard
Projet d’élèves ingénieurs
n°3
Stratégie d’adaptation de l’agriculture du Gard au changement climatique
Par GUIGUE Antonin, KERGOAT Hélène, REDIFI Issam, THURET Hélène
Année de soutenance : 2013
Rapport préparé sous la direction de :
Mr Jean-Michel LEGAVE (INRA)
Présenté le : 10/01/2013
Devant le jury :
Chantal MICHEL, Représentante
scientifique
Christian PINET, Représentant
professionnel
Christine MARZOLF, Animatrice
Organisme commanditaire : Chambre
d’agriculture du Gard.
Tuteur projet : Mr Jean-Luc BRIAL
2
Avertissement
Le présent document rend compte d’un travail d’investigation et d’analyse réalisé dans le
cadre d’une activité pédagogique. Le Projet d’élèves ingénieurs fait partie du tronc commun de la formation ingénieur, il débute en fin de première année d’école (bac+3) et se termine au cours de la deuxième année ; les
étudiants concernés ne sont pas alors spécialisés et c’est pour beaucoup d’entre eux le premier
travail d’ordre professionnel. Le temps imparti à la rédaction apparaît souvent limité eu égard à la complexité du sujet. Au lecteur ainsi averti d’en tenir compte dans la prise en compte de cette production
intellectuelle
3
Résumé
Le changement climatique est aujourd’hui au centre des débats au niveau national
comme mondial. Les événements climatiques extrêmes (sécheresses, inondations), présents dans le Gard, posent question quant à leur évolution dans le futur. L’agriculture en est une
des premières victimes du fait de sa dépendance aux conditions climatiques pour la production. C’est dans ces conditions que la Chambre d’agriculture du Gard a désiré initier un projet de réflexion à propos de l’adaptation aux effets du changement climatique sur
l’ensemble de l’agriculture du Gard.
L’étude de références bibliographiques et de données climatiques a permis de réaliser un état des lieux à l’échelle mondiale puis locale du changement climatique. Il ressort une
grande diversité de situation entre les zones du globe. Ses impacts ont été caractérisés notamment à l’échelle du Gard.
La seconde partie du projet a consisté en la rencontre d’acteurs de l’agriculture
gardoise (élus de la Chambre d’agriculture, agriculteurs et techniciens) dans le but de comprendre les problématiques communes ou spécifiques à chaque filière. A l’issue de ces
rencontres, nous avons établi des thématiques à débattre. Il ressort que le maintien de l’agriculture dans le Gard passe principalement par une gestion intelligente, concertée de l’eau
car l’agriculture au niveau méditerranéen n’est plus envisageable sans irrigation. L’orientation
de l’agriculture dans le Gard comme à l’échelle nationale passe par des choix politiques.
Mots clés
Changement climatique Elevage Arboriculture Viticulture Grandes cultures Irrigation Incertitude
4
Remerciements
Nous tenons à remercier Jean-Luc BRIAL, de la Chambre d’Agriculture du Gard, pour
son soutien et sa confiance dans le projet. Sa volonté de travailler avec des étudiants a toujours été visible.
Nous remercions également Jean-Michel LEGAVE pour nous avoir guidé et aidé tout au long de notre travail.
Mais aussi toutes les personnes rencontrées (agriculteurs, techniciens, spécialistes) qui ont accepté volontiers de répondre à nos interrogations et ont montré un réel intérêt pour nos recherches.
Nos remerciements se tournent aussi vers Géraldine CHAMUSSY, responsable PEI de SupAgro, pour son rôle dans la mise en place du projet.
5
Table des matières
Avertissement ....................................................................................................................................... 2
Résumé ................................................................................................................................................. 3
Remerciements ..................................................................................................................................... 4
Table des matières ................................................................................................................................ 5
Glossaire ............................................................................................................................................... 7
Sigles et acronymes .............................................................................................................................. 8
Introduction .......................................................................................................................................... 9
1. Contexte général/global de notre projet .......................................................................... 10
1.1. Présentation de l’organisme commanditaire et des destinataires du projet ...... 10
1.2. Différentes approches et considérations pour étudier le changement climatique 10
1.2.1. Différents modèles pour aborder le changement climatique ................... 10
1.2.2. Une gestion de l’incertitude nécessaire .................................................... 11
1.3. Notre méthode de travail. ................................................................................. 11
2. Etat des lieux du changement climatique ........................................................................ 12
2.1. Un changement, des changements climatiques ? .............................................. 12
2.2. Description à l’échelle mondiale ...................................................................... 13
2.2.1. L’effet de serre : à la base du changement climatique ............................. 13
2.2.2. Réchauffement climatique ....................................................................... 14
2.2.3. Conséquences en cascade ......................................................................... 14
2.3. Description à l’échelle méditerranéenne, du Gard ........................................... 15
2.3.1. Températures ............................................................................................ 15
2.3.2. ETP........................................................................................................... 17
2.3.3. Pluviométrie ............................................................................................. 18
2.3.4. Elévation du niveau des mers ................................................................... 19
3. L’agriculture du Gard : un secteur sensible au changement climatique ......................... 19
3.1. Situation actuelle du Gard ................................................................................ 19
3.2. La perception générale des agriculteurs ........................................................... 21
4. Des enjeux et conséquences différents selon les cultures ............................................... 23
4.1. Les grandes cultures ......................................................................................... 23
4.1.1. Les effets du changement climatique ....................................................... 23
4.1.2. Facteurs de vulnérabilité de la filière ....................................................... 23
4.1.3. Moyens d’adaptation ................................................................................ 24
4.2. L’arboriculture .................................................................................................. 24
4.2.1. Facteurs de vulnérabilité .......................................................................... 24
4.2.2. 2 exemples d’impact du changement climatique sur la filière arboricole 26
4.2.2.1. Phénologie ........................................................................................... 26
4.2.2.2. Développement du parasitisme ........................................................... 28
4.2.3. Adaptations possibles aux effets du changement climatique ................... 28
4.3. La viticulture ..................................................................................................... 29
4.3.1. Des conséquences du changement climatique déjà visibles sur la filière viticole 29
4.3.2. Contexte socio-économique ..................................................................... 30
6
4.3.3. Les adaptations et opportunités possibles ................................................ 31
4.4. L’élevage .......................................................................................................... 32
4.4.1. Conséquences sur la production fourragère (quantité, saisonnalité) ........ 32
4.4.2. Solutions envisageables ........................................................................... 34
4.4.3. Hautes températures ................................................................................. 35
4.4.4. Solutions envisageables ........................................................................... 36
4.4.5. Maladies émergentes ................................................................................ 38
4.5. Conclusion ........................................................................................................ 39
5. Une problématique commune majeure : la gestion de l’eau ........................................... 40
5.1. Les sources d’eau dans le Gard ........................................................................ 40
5.2. La gestion de l’eau du Rhône ........................................................................... 44
5.3. La gestion des eaux de pluie ............................................................................. 45
5.4. La réduction des pertes ..................................................................................... 46
6. Hiérarchisation des questions soulevées et préconisations ............................................. 47
6.1. Bilan par importance et par urgence des actions à mettre en place : diagramme d’Eisenhower .................................................................................................................. 47
6.1.1. Une étude selon différents critères. .......................................................... 47
6.1.2. Classement dans un diagramme d’Eisenhower. ....................................... 49
6.2. Bilan des préconisations ................................................................................... 50
Références bibliographiques .............................................................................................................. 55
Annexes .............................................................................................................................................. 58
7
Glossaire
GIEC : Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat. Organisme intergouvernemental, ouvert à tous les pays membres de l'ONU. Il « a pour mission d’évaluer,
sans parti-pris et de façon méthodique, claire et objective, les informations d’ordre
scientifique, technique et socio-économique qui nous sont nécessaires pour mieux comprendre les risques liés au changement climatique d’origine humaine, cerner plus précisément les
conséquences possibles de ce changement et envisager d’éventuelles stratégies d’adaptation et
d’atténuation.
ADAGE : Adaptation de l’Agriculture et des Ecosystèmes Anthropisés au Changement
Climatique.
CLIMATOR : Changement climatique, agriculture et forêt en France : simulations d'impacts sur les principales espèces
CLIMFOUREL : Adaptation des systèmes fourragers et d'élevage péri-méditerranéens aux changements et aléas climatiques, un projet tri-régional Rhône-Alpes, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées.
8
Sigles et acronymes
AGRESTE : Outil statistique du Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt
AOC : Appellation d’Origine Contrôlée
BRL : Bas-Rhône Languedoc
CA : Chambre d’agriculture
CTIFL : Centre Technique Interprofessionnel des Fruits et Légumes
ETP : Evapotranspiration potentielle
GES : Gaz à effet de serre
HR : Humidité Relative
INAO : Institut National de l’Origine et de la Qualité
INRA : Institut National de Recherche Agronomique
OIE : Organisation mondiale de la Santé Animale
ONERC : Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique
ONF : Office National des Forêts
PAC : Politique Agricole Commune
PRG : Potentiel de Réchauffement Global
SAU : Surface Agricole Utile (ha). Elle est composée des terres arables (grandes cultures, maraîchage, …), des surfaces toujours en herbe (prairies permanentes) et des cultures
pérennes (vignes, vergers).
THI : Index Température-Humidité
9
Introduction
Le changement climatique est aujourd’hui une notion très importante dans la plupart
des sociétés, notamment grâce à de nombreuses publications scientifiques dont celles du GIEC. L’opinion publique, bien que sensibilisée aux enjeux que cela implique ou impliquera, en a une vision plutôt floue. Le changement climatique est ainsi souvent réduit au seul réchauffement climatique.
La sphère politique se penche de plus en plus sur la question avec, par exemple, la mise en place du Grenelle de l’Environnement (2007), pour répondre à la crise climatique et
écologique de grande ampleur que la France traversait. Le Grenelle a débouché sur une série de lois. Il a fixé des objectifs de lutte contre les changements, de préservation de la biodiversité et des milieux naturels et de transition vers une nouvelle économie, moins consommatrice en ressources naturelles.
Le monde de la recherche travaille actuellement sur la relation entre agriculture et changement climatique aux travers de projets d’envergure (CLIMATOR, ADAGE, CLIMFOUREL, …). L’agriculture, très dépendante des conditions climatiques, voit se
profiler de nombreux changements qui modifieront les conditions de production et donc le travail des agriculteurs. Ces recherches sont nécessaires pour que l’agriculture locale mais aussi de plus grande échelle puissent continuer à nourrir la société.
Le projet « Adaptation de l’agriculture du Gard aux effets du changement climatique », commandité par la Chambre d’agriculture du Gard, s’inscrit pleinement dans ce cadre-là. En effet, l’agriculture de demain ne peut être dissociée du changement climatique. De plus, le Gard est un département où l’agriculture est omniprésente : 12 400 exploitants dont 5000 à titre principal et une SAU de 160 200 ha, pour une surface de 5900 km² et de plus de 700 000 habitants. Elle est influencée par le climat méditerranéen et est représentée par des productions emblématiques telles que : la viticulture, l’arboriculture (abricot, pêche),
l’élevage (AOC Pélardon), les grandes cultures (blé dur, riz). Ce département est aussi connu pour des épisodes climatiques exceptionnels comme les crues, les sécheresses. Le Gard dispose d’une géographie unique avec les Cévennes, la mer et les plaines fournissant des
paysages variés, qui sont autant d’atouts que de faiblesses pour l’agriculture.
Le changement climatique apparaît comme une notion générale où il est difficile de mettre des données, des faits précis. Le projet consiste ainsi tout d’abord en la caractérisation et l’étude de ses impacts sur les différentes cultures à l’échelle du Gard.Notre rôle a ensuite été de caractériser ce changement climatique puis d’évaluer ce qu’il implique sur les différents types d’agriculture du Gard. Le but étant de questionner, de faire débattre les différents
acteurs des filières pour arriver à des solutions applicables par les agriculteurs.
Dans un 1er temps, nous replacerons notre sujet de travail dans un cadre plus global. Ensuite, nous détaillerons le changement climatique, de l’échelle mondiale à l’échelle du Gard. Puis,
nous décrirons les différents types de culture et les impacts du changement climatique. Et enfin, nous donnerons des pistes de réflexion, et des outils d’aides à la prise de décision pour
une future adaptation.
10
1. Contexte général/global de notre projet
1.1. Présentation de l’organisme commanditaire et des
destinataires du projet
Le projet « Stratégie d’adaptation de l’agriculture du Gard au changement climatique» a été commandité par la Chambre d’agriculture du Gard, représentée par Jean-Luc BRIAL qui en est le directeur adjoint.
Elle est constituée d’un bureau composé d’agriculteurs élus par leurs pairs et de salariés (directeur, technicien,…). La Chambre d’agriculture a de nombreuses missions. Elle est le porte-parole des intérêts agricoles auprès des pouvoirs publics (représentants de l’Etat,
collectivités locales, parlementaires, …). Elle participe également à des commissions consultatives sur de nombreux thèmes comme : l’orientation agricole, l’environnement,
l’urbanisme, … . Elle intervient auprès des élus et administrations afin de faire prendre en compte l’intérêt du monde agricole et rural ou de faire valoir et reconnaître la place de l’agriculture sur les territoires. Elle propose aussi des services (information, expertise, appui technique, conseil, …) individuels ou collectifs aux agriculteurs, salariés agricoles,
collectivités locales.
Le changement climatique est aujourd’hui reconnu et impacte déjà les différentes activités
humaines. En raison de sa dépendance au climat, l’agriculture est la première concernée et
celle du Gard est particulièrement exposée de par les excès du climat méditerranéen. C’est
pourquoi la Chambre d’agriculture souhaite évaluer les risques et/ou bénéfices du changement climatique sur l’agriculture du Gard. Notre projet sera clôturé par des préconisations d’adaptation de l’agriculture au changement
climatique. Ces éléments permettront aux élus de la Chambre d’agriculture d’orienter leur
stratégie d’intervention, de services et de conseils auprès des agriculteurs.
1.2. Différentes approches et considérations pour étudier le
changement climatique
1.2.1. Différents modèles pour aborder le changement climatique
Plusieurs méthodes de réflexions peuvent être utilisées pour aborder le changement climatique. En effet, derrière lui se cachent de nombreuses définitions et visions. L’étude du
changement climatique s’est donc réalisée au travers de différents modèles qui ont tous leur utilisation spécifique. En 2009, s’est mis en place un atelier de réflexion, ADAGE, sur
L’Adaptation de l’Agriculture et des Ecosystèmes anthropisés au changement climatique. Il
synthétise toutes les méthodes de réflexion pour traiter des changements climatiques et leur cadre d’utilisation. Différents modèles ont pu être décrits.
Les modèles biophysiques permettent à partir d’observation sur le terrain de dégager des
critères d’évaluation des changements observables. Ils peuvent être utilisés à l’échelle de la
11
parcelle ou de la région(en intégrant plus de variables). Cependant, une incertitude forte existe sur les scénarios que l’on peut conclure à partir de ces observations.
La mise en place d’indicateurs agro-climatiques permet ensuite de vérifier les modèles et de les ajuster.
L’analogie spatio-temporelle se base sur une comparaison d’évènements climatiques. On suppose que lorsqu’un évènement se produit, il peut se reproduire dans le futur si des
conditions similaires sont observées. C’est le cas par exemple, d’un dérèglement climatique
majeur comme la canicule et la sécheresse de 2003.
Enfin la mise en place d’expertise se situe en aval de toutes ces recherches. Elle permet un
transfert d’informations de la recherche vers les collectivités locales pour la mise en place d’adaptations concrètes. Elle est très peu sujette à un transfert d’information inverse qui
permettrait cependant une vérification de la justesse des adaptations mises en place.
1.2.2. Une gestion de l’incertitude nécessaire
Le caractère commun à tous ces modèles est qu’ils possèdent chacun une source
d’incertitude. En effet aborder, le changement climatique implique de mettre en évidence et d’accepter l’existence d’une incertitude. Il faut à la fois en tenir compte et les réduire. Cette citation de Nadine BRISSON, actrice importante du projet ANR-ADAGE, illustre la nécessité de la gestion de l’incertitude : « Malgré toutes les précautions que l’on a prises dans la
restitution de ces résultats en termes d’incertitudes - on a bien montré qu’il pesait sur nos
résultats un certain flou lié aux incertitudes–il se dessine toutefois des grandes tendances. Et je pense que dès aujourd’hui les décideurs peuvent les avoir en tête.». Il est donc nécessaire
d’accepter des incertitudes lors de l’étude du changement climatique
On peut cependant distinguer deux types d’incertitudes : celles dues à une erreur d’estimation
et celles dues à une méconnaissance du futur. Il y a une nécessité de traiter les connaissances insuffisantes par des analyses. Les erreurs d’estimation doivent être réduites pour limiter les
variations entre les prévisions.
1.3. Notre méthode de travail.
Pour pouvoir répondre à la problématique initiale, nous nous sommes appuyés sur plusieurs de ces méthodes. En effet à travers nos études bibliographiques, nous avons pu étudier des modèles biophysiques nous permettant d’avoir des données concrètes et de dégager des
indicateurs précis montrant un changement climatique. Nous avons ainsi pu tirer diverses tendances quant aux conséquences sur toutes les cultures du Gard.
Par ailleurs l’interview de techniciens de la Chambre d’agriculture et de professionnels agricoles a apporté une autre vision du changement climatique. Nous avons ainsi pu évaluer la perception de ces changements climatiques à l’échelle de la parcelle, de la région. Les préconisations de la recherche ont pu être confrontées aux problématiques réellement
12
observées par les acteurs du monde agricole. Des pistes d’action pour le futur sont ainsi
ressorties.
Ainsi c’est l’analyse comparative de ces deux sources principales d’informations qui nous a
permis de tirer des conclusions.
2. Etat des lieux du changement climatique
2.1. Un changement, des changements climatiques ?
Le changement climatique est souvent confondu avec le réchauffement climatique. C’est en effet sa forme la plus perceptible à l’échelle humaine et c’est d’ailleurs
historiquement le sujet qui a été l’objet de la première recherche scientifique sur un éventuel
changement climatique et qui a permis d’ouvrir le débat. Pourtant, il est loin de se résumer à des seuls changements de température. Le changement climatique a lieu sur la totalité de la planète mais revêt des formes très diverses. Nous ne pouvons parler d’un changement
climatique mais de tendances de changements climatiques pour un endroit donné. De plus, malgré les études de plus en plus nombreuses, et comme nous l’avons soulevé précédemment,
la part d’incertitude sur le climat futur est relativement élevée. Il n’existe pas une réalité mais différents points de vue entre les problématiques posées et les méthodes utilisées pour y répondre.
De nombreuses définitions ont été élaborées afin d’essayer d’éclaircir cette notion. Celle de
l’OIE (Organisation mondiale de la Santé Animale) parue dans son rapport de 2009 nous semble particulièrement intéressante.
Le climat change de façon naturelle (âges glaciaires, …), mais le phénomène actuel a pour
particularité sa vitesse. Diverses études scientifiques montrent que cette rapidité est due aux activités humaines, c’est pourquoi l’activité humaine est primordiale dans la définition du
changement climatique étudié dans ce rapport.
Même si cela devient marginal, il existe des sceptiques, non convaincus de l’existence du
changement climatique. L’organisation internationale du GIEC a fait de son mieux pour
pallier aux erreurs scientifiques. Les rapports sont relus par près de 2400 experts des 193 pays
Changement climatique : Evolution du climat attribuée directement ou indirectement à l’activité humaine, de nature à modifier la composition de l’atmosphère terrestre et intervenant
en plus de la variabilité naturelle du climat observée sur des périodes comparables. Nous avons considéré que certains aspects de la variabilité du climat, notamment l’augmentation de la
fréquence et de l’intensité des événements extrêmes tels que les sécheresses et les inondations
étaient imputables au changement climatique [20].
13
membres et par leur gouvernement. Six scénarios ont été réalisés avec bien évidemment à chaque fois des intervalles d’erreurs explicités. Même si les erreurs scientifiques ne sont pas à
exclure et que les scénarios envisagés ne sont pas forcément ceux auxquels nous allons nous confronter dans le futur, une grande confiance est accordée aux rapports du GIEC et à leurs prévisions.
Nous allons essayer dans les parties suivantes de résumer les résultats actuels des recherches sur le changement climatique selon la définition précédente. Nous nous intéresserons tout d’abord à l’échelle mondiale, puis plus précisément à l’échelle méditerranéenne et du Gard.
2.2. Description à l’échelle mondiale
2.2.1. L’effet de serre : à la base du changement climatique
Le changement climatique est la conséquence des activités humaines. Plus précisément, c’est l’explosion de l’émission de gaz à effet de serre qui engendre tous les phénomènes actuels.
Graphe 1 : Teneurs en CO2 atmosphériques déduites des mesures sur des carottes glaciaires [Source : GIEC]
Depuis la révolution industrielle on constate sur le graphe 1 une explosion des émissions du CO2. Entre 1970 et 2004, les émissions globales de gaz à effet de serre ont augmenté de 70% [16]. La révolution industrielle avec le début de la combustion fossile, mais aussi la déforestation est responsable de cette explosion. Le CO2 est un gaz à effet de serre, c’est-à-dire qu’il a la particularité d’être partiellement opaque au rayonnement infrarouge émis par la
surface de la terre. C’est la chaleur émise par celle-ci en réponse au rayonnement solaire. On appelle cette caractéristique le forçage radiatif. De tels gaz empêchent la chaleur de repartir vers l’espace et agissent ainsi comme une serre. Bien qu’étant le plus connu, le CO2 n’est pas
toutefois l’unique gaz à effet de serre. L’annexe 3A présente les autres gaz d’origine anthropique.
La diminution de l’émission des gaz à effet de serre est ainsi incontournable dans l’établissement de projets de développement durable. L’une des difficultés de ce levier d’action est la vision à long terme requise et la constance dans les efforts même si les
14
améliorations ne sont pas apparentes. En effet, si l’on arrête totalement les émissions de GES maintenant, les températures vont augmenter pendant encore plusieurs siècles [22].
2.2.2. Réchauffement climatique
La conséquence directe de l’augmentation de la concentration des gaz à effet de serre est l’augmentation des températures. Il est important de relever que l’effet de serre est parfois
sous-estimé car les augmentations de températures sont modérées par les aérosols ou ensemble de particules, solides ou liquides, d'une substance chimique donnée en suspension dans un milieu gazeux. Ils réfléchissent des rayons du soleil donc abaissent la température.
L’augmentation de température moyenne mondiale observée est de 0.74°C depuis 100 ans (1906-2005) avec une franche accélération ces dernières années [16]. L’un des objectifs
principaux du GIEC est d’anticiper les changements en établissant des modèles du changement climatique. Cet exercice est extrêmement complexe et dépend des politiques environnementales de l’ensemble des pays, notamment concernant l’émission des gaz à effet
de serre. Pour pallier à ces incertitudes, le GIEC a basé ses modèles sur six scénarios différents. Des conclusions dans ces six scénarios semblent se recouper.
Le réchauffement ne sera pas homogène d’une région à l’autre, il sera nettement plus
important sur les continents que sur l’océan. Ceci a pour conséquence directe une augmentation des températures plus marquée dans l’hémisphère Nord qui a un taux
continent/eau élevé [Annexe 3B].
2.2.3. Conséquences en cascade
Le réchauffement climatique est loin d’être le seul changement observé. Nous allons
essayer dans ce paragraphe de balayer les conséquences les plus importantes du changement climatique sans avoir la prétention ni l’objectif d’être exhaustifs. Mais la plupart d’entre eux ont un lien direct établi avec l’augmentation des températures. Celle-ci entraine des bouleversements dans les circuits des masses d’air et d’eau et provoquant par exemple des
cyclones d’une force importante [16]. A l’image de l’augmentation des températures, la
totalité des climats tendent à la régionalisation et la saisonnalité. Les pluies seront en effet plus importantes aux pôles et à l’équateur, et réduites entre ces régions. Elles seront moins fréquentes mais plus intenses [annexe 3C].
La ressource en eau se voit considérablement affectée. Dans certaines régions, les précipitations manqueront alors que dans d’autres, elles seront trop importantes.
Parallèlement, l’ETP augmente donc le besoin en eau. D’ici 2050, 60 à 75% du globe sera concerné par le stress hydrique [14]. Les changements des conditions du milieu de vie des espèces entrainent la migration de certaines voire l’extinction pour d’autres. C’est ainsi que des maladies présentes initialement en Afrique se retrouvent en Europe.
Des zones entières sont menacées avec le changement climatique. A cause de la fonte des glaces et de la dilatation de l’eau sous l’effet de l’augmentation de température, il est attendu
jusqu’à entre 18cm et 60cm d’élévation du niveau des mers d’ici 2100 [16]. Des zones
15
côtières seront englouties mais les conséquences pourront être visibles aussi sur les terres étant émergées avec l’augmentation de la salinité des sols. Ceci sera d’autant plus visible aux
embouchures.
Ainsi avons-nous pu balayer dans ce paragraphe les différentes formes du changement climatique, les modèles réalisés et les conséquences attendues à long terme, dans l’état actuel
de la recherche. Selon le rapport du GIEC, toutes les variables climatiques sont affectées, les conclusions pouvant être différentes d’une région à l’autre. C’est pourquoi nous nous
attacherons dans le paragraphe suivant à un état des lieux du changement climatique à l’échelle locale.
2.3. Description à l’échelle méditerranéenne, du Gard
Nous allons dans ce paragraphe analyser les indicateurs agro-climatiques de l’ETP, la pluviométrie et la température.
2.3.1. Températures
► Températures annuelles
Les données météorologiques de ce paragraphe sont tirées de la station de Balandran, station expérimentale du CTIFL située sur la Costière de Nîmes. Elles s’étalent de 1966 à
2011. L’utilisation d’une seule station semble être pertinente car on ne s’attend pas à de grandes variations de la température à l’échelle du département. Nous garderons toutefois en
tête, le possible effet tampon de la mer aux variations de températures dans les zones côtières.
Dans une première approche de l’analyse de température, nous nous sommes intéressés à sa moyenne annuelle. Sur le graphe 2 ci-dessous, on observe une forte augmentation des températures depuis 1966. Un décrochage remarquable a lieu entre 1987 et 1988. Dans chacune des deux périodes, les courbes oscillent autour de leur courbe de tendance linéaire, ce qui justifie de comparer ces dernières pour comparer les deux périodes. On conclut par ce procédé à un réchauffement d’au moins 1,2°C entre les deux périodes. Les pentes des courbes de tendances ne sont pas significatives et ne peuvent donc pas être analysées.
Graphe 2 : Variation de la température annuelle moyenne à Balandran 1966-2011. [Source des données : INRA]
16
Le projet CLIMFOUREL met toutefois en évidence trois périodes depuis 1901 à l’échelle du
Grand Sud: - 1901-1945, réchauffement lent à environ 0 ,1°C/décennie - 1945-1979 stagnation à un léger refroidissement non significatif à -0,04°C/décennie - 1979-2009 réchauffement rapide à +0,5°C/décennie
Les résultats de la courbe du graphe 2 montrent pourtant un réchauffement modéré sur cette dernière période. Pour avoir une meilleure vision des changements de température, nous avons donc effectué une analyse du réchauffement climatique sur une dizaine de station sur la période 1996-2009. La méthode utilisée est la régression linéaire. Les résultats en annexe 3Da montrent qu’à l’échelle du Gard, le réchauffement est d’au moins
0,63°C/décennie sur la période étudiée. Enfin, on observe sur le graphe 2 des différences entre les années consécutives plus importantes dans le deuxième intervalle. Les températures y oscillent autour de la courbe de tendance en pics rapprochés. On y observe aussi une alternance d’année « chaude » (>15,2°C) / année « froide » (<15,2°C) tous les ans ou les deux ans. Cette alternance de température est l’une des formes du dérèglement climatique.
► Températures mensuelles
Nous avons utilisé les remarques précédentes pour analyser l’évolution des
températures mensuelles. Le graphe 3 compare les températures mensuelles (minimales, moyennes et maximales) de la période 1966-1987 et 1988-2011 (écarts de la moyenne de ces températures entre ces deux périodes). Les températures moyennes montrent très clairement un réchauffement climatique d’entre
1°C et 2°C sur toute l’année (sauf septembre), avec une importance particulière en mai et
août. Les températures minimales sont encore plus affectées.
Graphe 3 : Evolution des températures mensuelles entre les périodes 1966-1987 et 1988-2011
17
Météo France a établi le modèle ARPEGE qui modélise l’évolution des températures à
l’échelle régionale selon les scénarios du GIEC. Voici les résultats du Grand Sud-Est :
Table 1 : prévisions des températures dans le Languedoc-Roussillon
[Source : MEDCIE Grand Sud-Est]
Dans tous les cas, on s’attend à un réchauffement plus important en été qu’en hiver.
► Jours chauds et gel
Nous avons ensuite étudié le nombre de jours par an ayant une température maximale supérieure ou égale à 35°C (cf annexe 3Db). Comme pour les températures annuelles, on observe un décrochage important entre 1987 et 1988. La deuxième période est marquée par des années avec une fréquence plus importante des jours où les températures ont atteint 35°C par rapport à la première. Très peu d’années n’ont pas de jours ayant atteint 35°C. Actuellement, en moyenne 15% des jours d’une année ont une température maximale
supérieure à 30°C. Météo France prévoit une augmentation du nombre de jours avec des températures estivales maximales supérieures ou égales à 35°C, jusqu’à 6 et 19 jours de plus à
l’horizon 2050 dans le delta du Rhône et un accroissement du nombre de jours présentant un
caractère caniculaire.
L’ONERC défini un jour de gel comme un jour où la température est descendue en dessous de 0°C. Nous avons utilisé cette définition pour montrer une légère baisse du nombre de jours de gel depuis 1996 (annexe 3Dc). Météo France a réalisé des graphes similaires à celui présenté précédemment sur le nombre de jours de gel. On observe notamment qu’à Nancy et Toulouse,
la tendance est aussi à la diminution de ces jours. Cela conforte notre constatation de cette diminution à Nîmes et permet de prévoir la poursuite de cette diminution à l’échelle Française.
2.3.2. ETP
L’ETP mesure le pouvoir évaporant du climat. C’est l'eau susceptible d'être perdue
par un gazon quand elle n'est pas facteur limitant. Les résultats de ce paragraphe sont tirés de l’étude climatique réalisée par le projet CLIMFOUREL. La formule d’ETP utilisée est celle de Penman-Monteith, la référence internationale. L’ETP annuelle et estivale (mai-juin-juillet-aout) a très fortement augmenté depuis 30 ans. En effet depuis 1980, l’ETP annuelle des
plaines intérieures (Languedoc, Rhône, Sud-Ouest) a augmenté de 240 mm, (soit 20% à 25% de plus) dont 150 mm en été ce qui représente 60% à 80% de l’augmentation totale. Cette évolution de l’ETP est due à celle de paramètres (rayonnement, température moyenne, hygrométrie de l’air, vitesse du vent,…).
18
2.3.3. Pluviométrie
Nous allons dans ce paragraphe étudier la pluviométrie. Les conséquences du changement climatique sur les ressources en eau seront traitées dans la partie dédiée à ce sujet.
► Précipitations annuelles
Le projet CLIMFOUREL a étudié les précipitations annuelles à l’échelle du Sud de la France (14 stations de Météo France) et a pu mettre en évidence une diminution depuis 1950 de 54 mm. Elle sera décrite plus précisément dans le paragraphe d’analyse des précipitations
mensuelles suivant. Aussi, les Travaux du GIEC (2007, scénario A1B) prévoient sur la région du Languedoc-Roussillon jusqu’à moins 180 mm par an à l’horizon 2050 et 275 mm par an à l’horizon 2080.
► Évènements pluvieux extrêmes
Le Gard et quelques départements de la côte méditerranéenne sont soumis à des phénomènes pluviométriques automnaux importants : les épisodes Cévenols, phénomène mettant en jeux des processus physiques spécifiques, et plus généralement des orages violents. Nous avons pu mettre en évidence une augmentation de 40% des évènements de plus de 200 mm/j et de 50% des évènements de plus de 400 mm/j depuis 1960 [annexe 3De]. De tels chiffres de cumuls de précipitation réfèrent à des épisodes extrêmement violents, les précipitations annuelles dans le Sud de la France étant de l’ordre de grandeur de 700 mm/an.
► Précipitations saisonnières et mensuelles
Le projet CLIMFOUREL a mis en évidence à l’échelle du Sud de la France une baisse
des précipitations de 11% (-54 mm) sur la période hiver-printemps-été alors qu’en automne
celles-ci ne changent pas. Cette tendance est d’ailleurs signalée et plus nette aux basses latitudes méditerranéennes (sud de l’Espagne et de l’Italie, Grèce, Israël, Maroc) [8].
On peut donc s’attendre à une éventuelle évolution dans les baisses des précipitations en
hiver-printemps-été.
Graphe 4 : Précipitations mensuelles entre les périodes 1966-1987 et
1988-2011à Nîmes
19
Toutefois, l’ensemble des départements du Sud de la France ne sont pas soumis aux
évènements pluvieux extrêmes. Il convient donc d’analyser plus précisément les précipitations
automnales dans le Gard. Nous avons vu précédemment que les mois d’automne sont marqués par une augmentation de l’intensité et de la fréquence des événements pluvieux extrêmes. Or
on ne remarque pas d’augmentation du cumul des précipitations durant ces mois [Graphe 4]. Ainsi les pluies sont concentrées en évènements pluvieux de grande ampleur et entrecoupées de périodes sèches.
Le scénario B1 du GIEC prévoit d’ailleurs pour le Languedoc-Roussillon une augmentation des durées des sécheresses qui s’étendraient jusqu’à 40% du temps à l’horizon 2050 pour l’ouest de la région.
2.3.4. Elévation du niveau des mers
Pour finir, l’élévation du niveau des mers menace particulièrement la Camargue. Plusieurs travaux s’accordent sur une élévation d’au moins 1 m d’ici 2100 à l’échelle
nationale ou régionale (annexe 3-D-f). La carte annexe 3-D-g montre l’ensemble des points de la côte Gardoise et ses alentours au-dessous de 1 m d’altitude. De plus, bien avant que la Camargue soit sous l’eau on rencontrera de plus en plus loin dans les terres des problèmes de
salinité. Pour conclure, le changement climatique est déjà perceptible dans le
département. Les températures ont considérablement augmenté (+1,2°C depuis 1966),
les jours à forte chaleur sont beaucoup plus fréquents à l’inverse des gels qui le sont moins. On peut s’attendre à une augmentation des températures d’au moins 1°C d’ici 2030. L’ETP a augmenté de plus de 20% depuis 1980. 70% de cette augmentation se réalise en été. Paralèllement, la pluviométrie annuelle a un peu diminué, le GIEC prévoit
une baisse de 180 mm à l’horizon 2050. Les pluies se concentrent sur quelques
évènements violents séparés par des périodes sèches. Ces épisodes extrêmes sont de plus
en plus fréquents et de plus en plus violents. Pour finir, la variabilité intra-annuelle
comme inter-annuelle augmente et il devient difficile de prévoir le climat du mois
suivant, de l’année suivante.
3. L’agriculture du Gard : un secteur sensible au changement
climatique
3.1. Situation actuelle du Gard
Compte tenu des surfaces exploitées (175 322 ha, soit 30 % de la superficie du département en 2009), de la population active concernée (6% de l’emploi total), du poids
économique du secteur (7% du PIB et 13 % des exportations), de son impact sur les paysages, l’agriculture occupe une place importante dans le Gard [26]. Il contribue à environ 28% du potentiel de production de la région Languedoc-Roussillon. L'agriculture, dans le Gard, représente une population totale de 12 545 personnes, accompagnées dans leur activité par
20
16 339 salariés occasionnels [27].
Ce qui porte la population agricole de « production » à environ 28 884 personnes et en ajoutant 4569 salariés de l'industrie agroalimentaire. C’est une branche économique qui
emploie dans son ensemble environ 33 453 gardois (données datant de 2008). L'activité agricole de production représentait en 2009, 614,64 millions d'euros qui se répartissent comme suit : · 571,06 millions € pour les produits végétaux (céréales, vignes, fruits et légumes et
autres…) · 24,73 millions € pour les animaux (ovins, caprins, bovins, équins, volailles, etc.) · 18,85 millions € pour les services
L’agriculture diversifiée du Gard s’explique par des paysages variés s’étalant du pied du Massif Central à la mer méditerranée. Ce département compte de nombreuses cultures permanentes (arbres fruitiers, vignes) ainsi que de grandes cultures, principalement du blé dur (environ 20 000 ha). La culture du riz est présente dans le sud du département, en Camargue. Cette culture est emblématique, avec une appellation d’origine protégée (riz de Camargue), du
département même si les volumes produits sont peu importants (sur environ 5300 ha).
La viticulture (25% de la SAU) est surtout présente au nord de Nîmes. Il existe 7 appellations viticoles dans le département (Costières de Nîmes, Côtes du Rhône…).
Les productions fruitières ne disposent pas d’appellations et sont plus concentrées à l’est et au
sud du département. Les principales espèces cultivées sont l’abricot et la pêche. La filière fruit
est dans un contexte économique difficile avec des prix très faibles qui permettent difficilement d’en vivre. Les conditions de production au niveau de la Costière, avec de l’eau (réseau du Bas-Rhône), des températures élevées et un bon ensoleillement sont cependant excellentes.
Bien que peu important dans le département, il existe également de l’élevage, qui est
principalement situé dans le nord-ouest du Gard. L’élevage ovin laitier est présent avec le Pélardon (fromage AOC). Il est produit dans une aire délimitée qui s'étend des Cévennes et Garrigues de la Lozère, du Gard et de l'Hérault jusqu'à la Montagne Noire et les Hautes Corbières de l'Aude. Les chèvres valorisent les parcours, c’est un système souple. L’élevage
allaitant est présent avec les moutons, les bovins et aussi les taureaux en Camargue avec l’appellation taureau de Camargue. Les moutons pâturent dans le Gard toute l'année sauf en
été où ils transhument dans les Alpes ou dans les Cévennes. La filière équine tend à s’accroitre actuellement. Le cheptel départemental est composé d’environ 49 000 caprins et ovins et de 9000 bovins.
L’oignon doux, l’olive sont eux aussi valorisés au travers d’appellations.
Les céréales, les oléagineux, et les prairies temporaires ont augmenté alors que les protéagineux et les cultures florales sont restés constants. Les cultures fruitières, du fait d’un
contexte économiquement difficile ont reculé. Le constat est le même pour la vigne (recul en partie favorisé par la prime à l’arrachage).
21
Dans le Languedoc-Roussillon, depuis 1980, une diminution de la SAU a été observée avec une diminution du territoire agricole non cultivé. Parallèlement, la superficie en bois, peupleraies et forêts a augmenté. Le territoire non agricole a progressé avec l’urbanisation, la
création d’axes autoroutiers de grande ampleur, …
3.2. La perception générale des agriculteurs
Sauf à de rares exceptions, le changement climatique est perçu aux échelles des exploitations. Les acteurs distinguent bien les deux aspects du changement climatique, à savoir une augmentation de la variabilité intra et interannuelle mais aussi l’observation de
tendances générales. La crainte liée à des événements ponctuels comme les sécheresses ou les inondations est de plus en plus grande.
Un dérèglement climatique est souvent souligné : des orages plus isolés mais plus puissants, une augmentation des températures, une précocité des cultures. Les données présentées précédemment se trouvent confortées par les observations des agriculteurs. Des changements significatifs sont observés avec une vraie possibilité de comparaison notamment sur des cultures pérennes comme la vigne datant de plus de 30 ans.
Il existe un handicap naturel qui n’est pas nouveau dans la région mais qui semble s’amplifier : peu de pluie durant le printemps et l’été, contre des évènements pluvieux extrêmes en automne et en hiver. Cette eau est présentée comme inutile car inutilisable pour l’agriculture : elle s’évacue principalement par ruissellement jusqu’à la mer sans avoir le
temps de s’infiltrer dans le sol et donc de remplir la réserve utile. La tendance évoquée par
tous les acteurs est que la quantité d’eau tombée est sensiblement la même mais avec des
Carte 1: Répartition des cultures dans le Gard
[Source : Agreste – Recensement agricole 2010]
22
fréquences différentes. Il n’y a quasiment plus de pluies à partir de la fin du printemps jusqu’à
fin août. La quantité de précipitations (600-800 mm/an) bien que loin d’être faible ne permet
pas, par sa répartition, de produire sereinement toute l’année. L’eau apparaît donc comme l’élément majeur pour l’agriculture face au changement climatique pour sécuriser la quantité
et la qualité des productions.
Cette problématique est plus inquiétante pour les agriculteurs qui ne disposent pas d’eau pour
irriguer et qui n’ont donc pas d’effets compensatoires aux aléas climatiques. Le changement
climatique se présente donc comme une réalité concrète mais où les mécanismes sont peu compris. L’évocation d’une adaptation dans le futur apparaît donc difficile. Il n’est plus
possible d’avoir une vision sur les 2-3 prochaines années en raison de ces aléas.
Les agriculteurs sont donc conscients que le changement climatique entraîne et entraînera des modifications profondes dans la gestion des cultures. Les changements en général sont de plus en plus rapides et demandent une réadaptation constante des agriculteurs. Cependant, la nécessité de changement est aussi due à tout l’environnement socio-économique.
Le changement climatique n’est pas la seule problématique abordée. En effet, l’économie est
un thème qui revient souvent. L’agriculture du Gard est aujourd’hui soumise à une
concurrence exacerbée : les intrants et la main d’œuvre sont par exemple beaucoup plus chers qu’en Espagne. Ceci pénalise entre autres fortement l’arboriculture. Il y a nécessité d’une
harmonisation européenne même si celle-ci paraît très difficile à mettre en œuvre à l’heure
actuelle.
La réponse à ces problématiques passe par des décisions politiques qui ne dépendent que très peu des agriculteurs. Celles-ci influenceront le maintien et la pérennité de l’agriculture dans le
département mais aussi à l’échelle nationale.
Dans le Gard, l’urbanisation croissante (autoroute, quartiers résidentiels, …) consomme des
terres agricoles.
Un constat s’impose aujourd’hui dans le Gard : le nombre d’agriculteurs ne cesse de
diminuer. De plus, la population agricole a beaucoup vieilli et est peu remplacée (350 départs à la retraite pour 30 installations aidées en 2011). La principale préoccupation de nombreux agriculteurs est aujourd’hui la transmission de leur exploitation.
Ce ne sont plus des agriculteurs mais des propriétaires agricoles (spéculation sur les terrains à bâtir). Le changement climatique n’est ainsi pas l’élément majeur de la baisse du nombre
d’agriculteurs dans le département mais aussi dans toute la France mais il pourra y contribuer de manière plus importante dans le futur.
Les préoccupations des agriculteurs du Gard tournent autour de problématiques communes même s’il existe de nombreuses différences entre les filières. Nous détaillerons celles-ci ultérieurement dans la partie 4.
23
4. Des enjeux et conséquences différents selon les cultures
Le changement climatique touche toutes les cultures du Gard. Même si l’implantation
de chaque filière, les modalités de développement et les sensibilités spécifiques donnent une particularité à chaque culture, des effets généraux peuvent être dégagés. Des modifications climatiques peuvent toucher de façon générale toutes les productions, c’est le cas d’une
modification de l’atmosphère. En effet, la tendance générale d’une augmentation de la
quantité de carbone dans l’atmosphère entraine des conséquences sur toutes les productions
végétales qui augmentent leur efficacité photosynthétique. On peut donc s’attendre à une
augmentation des rendements. Chaque modification entraîne donc des effets qu’ils soient
positifs ou négatifs. Certaines vont être limitées à un type de culture. Chaque changement climatique doit ainsi être étudié de façon à déterminer quelle culture il touche, à quelle échelle spatio-temporelle et quelles modifications (bénéfiques ou non) il entraîne.
Ainsi nous avons pu mettre en évidence des craintes grandissantes et des opportunités en
fonction des divers changements climatiques.
4.1. Les grandes cultures
Les grandes cultures, principalement le blé dur, occupent une place importante dans l’agriculture du Gard. Cette filière est comme les autres soumises aux conditions climatiques
méditerranéennes.
4.1.1. Les effets du changement climatique
Le changement climatique est surtout observé grâce à deux indicateurs agro climatiques : la date de semis et la reprise de végétation au printemps. Si le semis est réalisé trop tard, les rendements ne seront pas intéressants. S’il est fait trop tôt, on observe un
emballement de la végétation au cours de l’hiver. Ceci peut entraîner une plus grande vulnérabilité aux gels. La date de semis est maintenant beaucoup plus tardive (mi-novembre) en raison d’automnes
plus secs et chauds. Les cultures de fin août/début septembre sont ainsi plus difficiles à mettre en place à cause d’une diminution des orages. La moisson se réalise une semaine plus tôt qu’il y a 30 ans et ceci est en augmentation depuis
une dizaine d’années. Il semblerait qu’il y ait un passage pluvieux jusqu’à mai puis une
période beaucoup plus sèche. Pour le riz, il y a des problèmes de montée du niveau de la mer. Le milieu artificiel se présente comme un subtil équilibre entre les entrées du Rhône et les eaux de mer. A l’avenir,
avec l’élévation du niveau de la mer, des terres pourraient devenir impropres à l’agriculture.
4.1.2. Facteurs de vulnérabilité de la filière
La principale vulnérabilité de la filière réside dans l’acceptation et la gestion de
l’incertitude. Il est par exemple difficile d’établir des itinéraires techniques répétables sur plusieurs années car chaque année est différente au niveau du climat. Il existe une grande
24
différence entre les exploitations en sec et en irrigation. Sur les cultures en sec, tout ajout d’intrants est vu comme un coup de poker. Son utilité se verra quelques semaines plus tard si les conditions climatiques sont celles attendues. Sans eau, les exploitations sont de plus en plus fragiles. Sur les cultures irriguées, il y a beaucoup moins d’hasard, l’incertitude est
faible. Les effets des aléas climatiques sont réduits par les apports d’eau. L’irrigation est
rentable mais elle est mieux valorisée sur des cultures de fruits et légumes que sur les grandes cultures. Les exploitations nouvellement irriguées ont donc tendance à diminuer la surface allouée aux grandes cultures.
4.1.3. Moyens d’adaptation
La filière a globalement des moyens d’adaptation : - le levier « date de semis » qui est très intéressant (même si l’on perd des jours
« semables »). - les exploitations bien équipées peuvent réalisés les chantiers rapidement lorsque les
conditions sont optimales. - le semis direct permet de gagner du temps et de garder une certaine humidité dans le
sol, ce qui peut être intéressant quand le semis est réalisé en période sèche. - les exploitations peuvent facilement changer de production d’une année à l’autre car
ces cultures sont annuelles et les aides PAC ne sont pas liées à la culture. Celles-ci encouragent donc une diversification. L’établissement d’un zonage méditerranéen, caractérisé
par des indicateurs climatiques pertinents, pourrait permettre de montrer les difficultés de production dans le Gard. Le but étant d’obtenir des aides supplémentaires en montrant les
handicaps naturels de la région.
4.2. L’arboriculture
L’arboriculture, par l’intermédiaire de quelques productions renommées comme l’abricot, a
un poids économique très important dans l’agriculture du département. Alors que la filière est
aujourd’hui touchée de plein fouet par la mondialisation, elle doit de plus faire face aux
multiples impacts du changement climatique qui modifient entre autres le cycle de production des cultures pérennes.
4.2.1. Facteurs de vulnérabilité
La filière arboricole présente plusieurs facteurs de vulnérabilité :
- Pérennité :
De l’arbre : Le caractère de pérennité d’un bon nombre d’espèces horticoles (arbres et arbustes fruitiers, vignes, diverses espèces légumières et ornementales) constitue indirectement un facteur de vulnérabilité en mettant en jeu des investissements coûteux et de long terme pour la mise en place de ces cultures (matériel végétal, infrastructures). Une adaptation rapide est donc difficile puisque le changement d’espèce ou de variété demande
des investissements à long terme.
L’évolution variétale au cours des dernières décennies a été très peu orienté vers la prise en
25
compte de l’adaptation climatique, notamment au niveau du cultivar essentiellement amélioré
pour l’attrait commercial des fruits (coloration, calibre), ce qui a pu même accroître la
vulnérabilité climatique. De plus, les phénomènes extrêmes (inondation, sécheresse, grêle, gel) peuvent avoir aussi des effets à long terme en réduisant la capacité de production durant plusieurs années et ainsi fragiliser fortement l’exploitation.
De la filière au sein de l’exploitation : Il convient aussi de citer le phénomène d’alternance
des arbres fruitiers. En effet, la production d’une année n influe les rendements de l’année
n+1. Ainsi une année n à forts rendements peut induire une année n+1 à faible rendement. Les calibres et la qualité sont ainsi affectés. Une capacité irrégulière à satisfaire des demandes (rendement, qualité, calibres) peut conduire à des pertes définitives de débouchés commerciaux, les fournisseurs s’approvisionnant ailleurs.
- Impact de la température sur le cycle annuel : La température a de multiples influences sur l’organogenèse florale, la dormance et la fructification. Les impacts durant un
cycle peuvent avoir des conséquences sur plusieurs années (sur la croissance et la ramification). Le réchauffement climatique modifie la végétation et la floraison. La levée de dormance est plus lente et le développement post-dormance est plus rapide. La phénologie de l’arbre est donc changée.
- Notion de la région de production, terroir : La reconnaissance d’un bassin de
production pour une culture pérenne est très important sur le plan économique, notamment celles faisant l’objet de produits typés largement consommés. Un tel lien entre production et
aire géographique constitue un frein supplémentaire en matière d’adaptation si cette dernière
nécessite des déplacements d’ampleur notable des aires de culture, due notamment au
changement climatique.
- Besoin en irrigation : De nombreuses espèces utilisées en arboriculture ont besoin d’un apport régulier en eau d’irrigation pour assurer les rendements et les qualités attendus. Les cultures fruitières et légumières en régions méditerranéennes sont tout particulièrement exigeantes en alimentation hydrique estivale du fait du manque de précipitations, ce qui peut les mettre en concurrence avec les besoins d’autres activités consommatrices, agricoles et touristiques. A l’échelle du Gard, de nombreuses tensions existent entre les différents acteurs
notamment au moment des mesures de restriction d’utilisation de l’eau.
- La sensibilité aux excès d’eau (en lien avec une plus grande fréquence des inondations) : C’est également une caractéristique courante en arboriculture tant au niveau
racinaire (asphyxie) qu’aérien (parasitisme). Le département du Gard est d’autant plus
soumis à ce problème avec l’accroissement de l’intensité et de la fréquence des évènements
pluvieux extrêmes. Les cultures pérennes sont ainsi soumises à des épisodes de sécheresses intenses et à des excès d’eau dans des laps de temps parfois très courts.
- Produits frais peu stockables : Les productions arboricoles ont souvent pour but de satisfaire des demandes en frais. L’arboriculture fruitière française est caractérisée par sa très
faible orientation vers la transformation des fruits (pour la plupart périssables) sous forme de produits industriels peu périssables. Les produits ne sont donc pas stockables très longtemps, contrairement aux cultures annuelles, ce qui les rend plus dépendants du marché. Parfois même, les récoltes ne sont pas réalisées pour éviter de payer de la main d’œuvre pour une vente qui se fera à perte. Les fruits sont donc laissés sur les arbres et y pourrissent. Il est
26
difficile voire impossible pour les producteurs de « spéculer » sur leur production.
Enfin, comme vu précédemment, la qualité des produits (calibrage, couleur, arôme…)
constitue aussi un point important pour la vente alors que ces composantes sont dépendantes des conditions climatiques qu’ont subies les cultures et des conditions de stockage, conditionnement.
La filière arboricole est donc très vulnérable structurellement. Cette vulnérabilité
pourrait s’amplifier avec le changement climatique. Des impacts ont déjà été observés.
4.2.2. 2 exemples d’impact du changement climatique sur la filière
arboricole
4.2.2.1. Phénologie
On constate une avancée de la floraison pour de nombreuses espèces arboricoles, celle-ci résultant de plusieurs phénomènes contraires.
Dans le cas du pommier ‘Golden Delicious’ les avancées moyennes depuis la fin des années 80 peuvent être estimées à 6-7 jours sur le pourtour Méditerranéen (Languedoc). Par ailleurs, les simulations par modélisation de la date de fin de levée de dormance des bourgeons floraux (satisfaction des besoins en froid) ont révélé chez le pommier une tendance vers des levées de dormance plus tardives depuis la fin des années 80 en Languedoc (plus 5-7 jours à Nîmes) [1].
Malgré cet impact attendu (mais non visible) sur la dormance en régions méridionales et océaniques, contribuant à retarder la floraison, cette dernière y aurait été cependant avancée du fait d’un impact plus intense de raccourcissement de la période de croissance florale s’étendant de la fin de la dormance à la phase de floraison. Ce second impact résulterait d’un
réchauffement assez marqué en hiver (période essentielle pour la satisfaction des besoins en chaleur) particulièrement en régions méridionales comme à Nîmes.
Figure 1: Représentation des évolutions moyennes de la durée de levée de dormance et de la durée de
croissance florale sous l’influence du réchauffement climatique dans deux régions à climats contrastés,
permettant de rendre compte des avancées moyennes du début de floraison (F1) du pommier Golden Delicious
selon un modèle sélectionné de simulation de la date de fin de levée de dormance [Legave et al., 2008].
Les avancées de floraison ne sont pas sans conséquences : même si le nombre de jours de gel tend à diminuer, le risque induit par de gel printanier s’accroitrait car les arbres sont moins
27
protégés du fait de leur avancée phénologique. Aussi, il devient de plus en plus fréquent qu’un
gel intervienne après un épisode chaud (fluctuations des températures), ce qui contribue à l’avancée des phénologies lors d’un épisode de gel. On constate aussi un endurcissement faible lié aux températures douces en automne. Les arbres ne sont parfois pas assez protégés lors de leur dormance pour passer le gel. En régions méridionales, moins gélives et présentant des avancées de floraison plus réduites, ce risque resterait faible et pourrait même diminuer avec l’augmentation du réchauffement (levée de dormance encore plus tardive et fréquence du gel encore plus faible). Toutefois, ce risque demeure toujours possible dans ces régions avec des conséquences graves (gel de mars 2008 dans le Gard, ayant contribué à une faible production d’abricots). L’influence du réchauffement sur la durée de développement du fruit reste encore peu étudiée, bien que des résultats ponctuels montrent, comme pour la vigne, des tendances vers des durées plus courtes notamment en régions méditerranéennes pour des espèces à maturité précoce (abricotier, pêcher).
Avec l’augmentation des températures moyennes, la satisfaction des besoins en froid pose
question. L’avortement n’est pas la conséquence d’une satisfaction ‘insuffisante’ des besoins
en froid (idée reçue non prouvée) mais est probablement lié à des épisodes de chaleur excessive à l’approche de la floraison [LEGAVE, 1978 ; RODRIGO et HERRERO, 2002]. Des levées de dormance de tardiveté inédite ont été observées au cours de la décennie actuelle (2001, 2007) en régions méditerranéennes pour certains arbres fruitiers. Cela a conduit à des désordres physiologiques inédits (durées excessives de floraison, irrégularités de végétation) préjudiciables à la régularité et à la qualité de la production (mauvaise concordance de floraison, étalement de maturité des fruits). De tels évènements peuvent être considérés comme des prémices d’une situation à venir de comportements d’improductivité, tels que
ceux rencontrés en climats tropicaux et subtropicaux pour les espèces pérennes présentant une phase de dormance.
Graphe 5: Evolution annuelle de la durée de croissance du fruit (floraison à récolte) pour le pommier Golden Delicious [source: V. Mathieu] et le pêcher Alexandra [source C. Hilaire] dans les conditions
climatiques du Languedoc (Nîmes)
28
Des différences variétales, tant pour l’époque de floraison (besoins en froid et en chaleur) que
pour la croissance du fruit (besoins en chaleur), pourraient se combiner différemment en fonction de différences de réchauffement entre régions. Ceci pourrait conduire à des modifications significatives de ces calendriers par région, et donc à des conséquences socio-économiques face aux spécificités régionales de l’arboriculture fruitière.
Les sécheresses des années 1990 et plus récemment de 2003 et 2005 ont eu des conséquences relativement limitées (perte de production estimée à moins de 15% à la suite de la sécheresse 2003), en raison d’une irrigation largement développée (sur 74% du verger français). Les
risques d’asphyxie racinaire dans un contexte d’inondations croissantes (1999, 2002-03-06) restent également limités notamment grâce au progrès génétique en matière de porte-greffes tolérants (sélections INRA). Toutefois, l’intensification attendue des différences spatio-temporelles de pluviométrie va conduire à des disponibilités réduites en eau d’irrigation, bien
que la faible superficie du verger français (140 000 ha) comparée à celles des cultures annuelles irriguées (maïs) pourrait être mise en avant pour limiter cette réduction. Dans un futur de stress hydriques probablement plus fréquents, des conséquences défavorables sur la qualité et la régularité de production sont cependant à envisager, et viendraient aggraver la situation d’irrégularité de certaines espèces comme l’abricotier.
4.2.2.2. Développement du parasitisme
L’évolution du parasitisme sous l’influence des changements climatiques constitue
probablement un enjeu particulièrement important pour l’arboriculture fruitière. En effet, cette vaste question a été très peu étudiée, bien que les impacts attendus commencent à se manifester sous forme de remontée vers le nord (ex. Stemphyliose du poirier), d’augmentation
du nombre de générations (ex. Carpocapse du pommier), d’évènements inédits (ex.
températures élevées en avril 2007 suivies d’une attaque précoce de feu bactérien), voire de désynchronisations (hôte/parasite, prédateur/proie).
4.2.3. Adaptations possibles aux effets du changement climatique
Il existe des adaptations possibles aux effets du changement climatique :
- La voie la plus immédiate consiste à adapter les techniques culturales: taille tardive (évitement face aux risques de gel et d’avortement floral), mise en œuvre de l’irrigation de
précision pour réduire les volumes d’irrigation et réaliser des apports plus réguliers
(possibilité de réduction de l’irrigation de 20 à 30% sans pénaliser la production, selon des
travaux de l’INRA). Toutefois, l’ensemble des adaptations des techniques culturales ne pourra
suffire pour faire face à l’ampleur attendue des impacts.
- L’adaptation des cultures (choix des variétés et espèces) et des structures de production (système de culture) est susceptible d’offrir des possibilités, mais ceci entrainera
des bouleversements des spécificités régionales sur les plans économiques et sociaux. En effet, cette stratégie peut aboutir régionalement à des changements profonds des gammes variétales et même à des changements d’orientation quant aux espèces principalement
cultivées. Les choix visant l’adaptation climatique devront être raisonnés à différents niveaux
d’échelle (l’exploitation, la région, le niveau national, voire l’Europe). Simplement à l’échelle
29
du Gard, des modifications sont possibles : des zones disposent de toutes les conditions nécessaires (eau, soleil, lumière, température) comme la Costière de Nîmes pour produire des denrées de qualité et en quantité. De nouvelles opportunités commerciales pourraient résulter de ces choix (espèce méridionale pouvant être cultivée plus au nord). La nécessité économique (et environnementale) de ne pas produire trop loin des sites de consommation (les transports étant des sources d’émissions de gaz à effets de serre) pourrait servir les
intérêts des arboriculteurs du département et des alentours. L’adaptation des systèmes de
production pourrait notamment porter sur la répartition des cultures, les techniques d’irrigation, la maîtrise des parasites.
- L’adaptation par voie génétique apparaît également comme une solution. Il faudra
cependant ne pas se limiter à améliorer seulement les caractères habituels (rendement, calibre, couleur, arômes) mais aussi la capacité de production, de résistance à des conditions de production difficiles. Ceci nécessitera davantage de collaborations entre les acteurs de la recherche et de la production.
La filière arboricole est déjà très touchée par le changement climatique avec des
différences notables dans le cycle de production, par exemple, avec l’avancée de la date de floraison.
Bien que le manque d’eau estival se fasse de plus en plus ressentir, ce n’est pas le principal problème des exploitations car beaucoup disposent de l’irrigation pour sécuriser la production. De nombreuses cultures pérennes « en sec » comme l’abricot ne sont plus viables à l’heure actuelle dans le département. La production semble donc se restreindre aux seules zones où un apport d’eau (par le Rhône, par des réserves
collinaires ou par d’autres cours d’eau) est envisageable et possible économiquement.
4.3. La viticulture
L’ensemble du paragraphe sur l’arboriculture est applicable à la viticulture. En effet, la vigne
est une plante pérenne soumis aux mêmes contraintes que les arbres fruitiers face au changement climatique. Nous détaillerons dans ce paragraphe uniquement les spécificités de la viticulture par rapport à l’arboriculture en général.
4.3.1. Des conséquences du changement climatique déjà visibles sur la
filière viticole
L’ensemble des viticulteurs que nous avons rencontrés se sont accordés pour dire que
leurs vendanges se sont vues avancées de 3 semaines depuis 50 ans. Ces chiffres ont notamment été observés sur des vignes qui n’avaient pas subi de changement de pratiques culturales depuis 50 ans. Les raisons de ce phénomène sont les mêmes que ceux décrits dans le paragraphe sur l’arboriculture.
Les rendements anciennement stables sont maintenant très inégaux d’une année sur l’autre.
De nombreuses raisons peuvent expliquer ceci. Tout d’abord, le stress hydrique est de plus en
30
plus marqué et fréquent, et de moins en moins maîtrisé par les exploitants n’ayant pas accès à
l’irrigation. Ce phénomène, couplé à de nombreux autres entraine un changement de la composition des vins. Certains cépages comme les Grenaches ont d’ailleurs du être remplacés
car ils ne satisfaisaient plus les critères des consommateurs. Les effets accrus du gel cités précédemment sont la seconde cause de l’instabilité des rendements. La dernière cause est l’augmentation de l’occurrence et de la force des inondations. Comme décrit dans la partie précédente, ces dernières asphyxient les racines et tuent les pieds avec des conséquences ravageuses sur toute une région.
Une autre conséquence du changement climatique est la difficulté de rencontrer des conditions permettant les vendanges. En effet, les températures sont souvent trop élevées pour pouvoir vendanger dans de bonnes conditions. Des températures élevées ont de plus un impact sur la maturation des raisins. C’est la période essentielle pour la qualité future de la récolte (BONNARDOT, 1996), par la synthèse des composés organiques influençant la typicité du vin (sucres, acidité, polyphénols, anthocyanes, précurseurs d’arômes). Les
relations entre les facteurs chaleur et lumière et les composés phénoliques sont extrêmement complexes. La coloration des raisins rouges dépend de la température. Des températures trop basses ou trop élevées sont associées à une faible coloration. En particulier, l’effet négatif des
températures minimales élevées en période de maturation du raisin est souvent souligné (KLIEWER, 1973 ; MORI et al., 2005) : l’indice de Fraîcheur des nuits, défini comme la
moyenne des minima thermiques durant le mois de septembre pour l’hémisphère nord
(TONIETTO et Carbonneau, 2004), permet d’évaluer les conditions nycthermiques pendant la
maturation. Sur la fraîcheur des nuits, TOMANA et al. (1979) observent l’augmentation de la
teneur en anthocyanes par des températures nocturnes plus fraîches. Selon CARBONNEAU et al. (1992), il apparaît que l’accumulation des anthocyanes dans les pellicules est favorisée
par un état de stress hydrique modéré de la plante, par des températures diurnes relativement élevées mais sans excès, avec probablement une interaction positive avec des températures nocturnes fraîches. Des sols plus secs provoquent aussi une augmentation dans le plant de vigne du niveau d'une hormone particulière, l'acide abscissique, qui favorise la maturation.
Enfin, l’augmentation de la sécheresse est favorable aux agriculteurs dans la lutte contre le
mildiou. En effet, celui-ci est de moins en moins fréquent, sauf en cas d’inondation.
4.3.2. Contexte socio-économique
Avant d’essayer de trouver des adaptations possibles, il convient de s’intéresser au
contexte socio-économique de la filière. La filière a connu une crise face à la concurrence internationale. La PAC lança des politiques d’arrachages à partir de 1953 pour y répondre en proposant des subventions à l’arrachage. 20 000 ha ont ainsi étés arrachés en 3 ans en région Languedoc-Roussillon. Ceci a permis une évolution de la production de la région vers la qualité. Depuis 2012, l’arrachage continue mais n’est plus subventionné. Parfois, l’arrachage n’est pas rentable et la parcelle est laissée à l’abandon. Cela pose d’ailleurs de nombreux problèmes sanitaires, les parcelles abandonnées étant facilement contaminées, devenant vectrices de nombreux parasites ou maladies, qu’elles transmettent par la suite aux parcelles les plus proches. L’arrachage a permis d’orienter la filière vers la qualité, de la restructurer
totalement mais elle souffre toujours d’un manque d’organisation. Un autre évènement est aussi susceptible de bouleverser la filière. L’Europe débat actuellement sur la suppression des droits de plantation pour la vigne. Ces droits permettent
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actuellement de réguler le marché et d’éviter le surplus de production. La suppression de ces
droits entrainerait non seulement une explosion de la concurrence nationale et internationale, mais aussi peut-être une diminution de la qualité du vin français.
4.3.3. Les adaptations et opportunités possibles
Le premier levier d’action pour l’adaptation de la filière au changement climatique est le
changement des pratiques culturales. Le temps des vignes « propres » à sol nu semble révolu et devrait laisser place à des vignes enherbées. En effet, il n’est plus adapté aux conditions
actuelles contrairement à l’enherbement qui a de multiples points positifs autant pour l’adaptation de la filière que pour des questions environnementales. Elle permet tout d’abord
de pousser les racines à s’étendre en profondeur par concurrence avec l’herbe. Les vignes sont
ainsi mieux préparées à une période sèche car elles pourront puiser de l’eau plus
profondément dans le sol. La concurrence crée par l’herbe est maîtrisable par la tonte de celle-ci. De multiples stratégies de tontes sont possibles en fonction des conditions propres à chaque parcelle. Les résidus de tonte peuvent être laissés sur place pour apporter de la matière organique au sol lors de sa dégradation et donc diminuer les intrants. Ceci peut être aussi réalisé avec les résidus de taille s’ils sont broyés sur place. Le travail du sol inter-rang n’est
plus fait et réduit donc les émissions de gaz à effet de serre lors de la combustion des carburants. L’enherbement a aussi pour avantage majeur sur les sols nus de limiter le ruissellement et l’érosion. L’eau est interceptée par les brins d’herbe et longe leur tige jusque
dans le sol. De plus la terre est fixée par l’herbe, ce qui est particulièrement intéressant face à
l’accroissement de l’intensité des évènements de pluie extrêmes.
Enfin, les espèces semées peuvent être des légumineuses, utiles par leurs propriétés fixatrices de l’azote de l’air pour améliorer la composition des sols en limitant les intrants.
Des espèces à « fleurs » peuvent être choisies pour plusieurs raisons. Cela participe à l’entretien et l’amélioration du paysage. Cette pratique prend aussi soin de la filière du tourisme viticole en attirant les visiteurs dans une région de belles vignes et la vente directe peut s’en voir améliorée. La renommée des vignobles est essentielle car ce n’est que grâce à
elle et à la fidélité de ses clients qu’une exploitation viticole est viable.
Pour lutter contre la difficulté de trouver un moment favorable aux vendanges, certains viticulteurs ont d’ores et déjà modifié leur méthode de travail et vendangent dorénavant de nuit. Le travail de nuit peut être une alternative intéressante, nous le détaillerons à la fin de cette partie.
D’autres pratiques peuvent être mises en place pour aider la filière à s’adapter. Les vignes
nécessitent un stress hydrique pour produire des vins de qualité. Mais ce stress doit être modéré, maîtrisé et n’intervenir qu’à des moments clés de la maturation.
Idéalement, les vignes sont soumises à deux stress. Le premier en juillet pour freiner le développement de l’appareil végétatif au profit de l’appareil reproductif. Le deuxième, quinze jours avant les vendanges, qui entraine le flétrissement des grains et la concentration des solutés. Un stress hydrique trop intense suivi de pluies peut même faire éclater les grains. De plus, bien que résistantes à la sècheresse, les vignes sont parfois desséchées. Il est possible de limiter les effets de la sècheresse, en amont en aidant les vignes à être adaptées avec par exemple l’enherbement, mais aussi en réduisant les pertes par évaporation par diminution de
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la surface foliaire. Toutefois, la règlementation régissant les titres AOC est très stricte à cet égard et une grande surface foliaire est parfois demandée. La réduction des effets de la sécheresse n’est toutefois souvent pas suffisante, sauf dans de rares cas. On peut notamment citer des vignes implantées sur des terrains argileux, qui retiennent bien l’eau. Mais dans la majorité des cas, l’irrigation est devenue essentielle pour sécuriser les productions. Bien sur,
les quantités seront modérées et le goutte-à-goutte permettra une bonne rentabilisation de l’eau. Cependant la législation sur l’irrigation des vignes est actuellement très encadrée,
notamment pour les vins AOC.
Pour finir, à long terme il conviendrait d’utiliser des espèces intrinsèquement plus adaptées.
On pourra par exemple implanter des espèces plus tardives. C’est ici qu’intervient la
recherche.
La filière viticole est déjà touchée par le changement climatique. De nombreux leviers
d’action sont possibles à court terme comme à long terme. L’adaptation des systèmes de production est primordiale dans un premier temps. Trop d’exploitations sont encore dans un système qui les rend considérablement vulnérables au climat ou qui ne prennent
pas en compte les enjeux d’aujourd’hui (sols nus, irrigation non raisonnée, …). Ces changements sont toutefois freinés pour des raisons économiques. Enfin, on s’aperçoit que l’irrigation est devenue primordiale pour la sécurisation des productions et de leur
qualité.
4.4. L’élevage
L’élevage, présent principalement dans le Nord du Gard, est comme dans tout le Sud de la France soumis à de multiples contraintes climatiques (sécheresses, pluies torrentielles). Dans quelle mesure l’élevage y est-t-il sensible ? Quels en sont les impacts présents et futurs du changement climatique ? Comment peut-on s’y adapter ? Le projet CLIMFOUREL tente de répondre à ces problématiques. Il émet aussi des voies d’amélioration pour les agriculteurs même s’il n’existe pas de solutions durables. La principale solution réside dans l’adaptation
des systèmes actuels au travers de pratiques culturales, d’itinéraires techniques aux aléas
climatiques qui tendront à devenir de plus en plus fréquents. L'acceptation et la préparation de la variabilité est un élément essentiel car l'élevage aura beau s'adapter le plus possible aux changements climatiques il existera toujours et de plus en plus une part d'inconnue.
4.4.1. Conséquences sur la production fourragère (quantité,
saisonnalité)
- Quantité
Globalement sur l’année, la baisse de production est de 11% entre 1980 et 2008. Le réchauffement a pour conséquence de raccourcir les cycles de végétation, donc de rendre plus précoces les récoltes (si les conditions sont favorables). Pour les cultures fauchées, le réchauffement a pour effet d'augmenter le nombre d'utilisations possibles. Cela a en principe pour conséquence d'augmenter les productions tant que d'autres limitations (alimentation hydrique) n'apparaissent pas.
33
Les diminutions de précipitations ont, elles, un effet sensible de réduction de production, surtout si on est sur des sols à faible réserve, une culture à faible profondeur d'enracinement (la prairie de graminées).
Les besoins du troupeau dans un système d’élevage donné étant relativement constants,
l’éleveur doit anticiper chaque année la sécheresse à venir en se basant non pas sur une
production fourragère moyenne, mais sur un risque de sécheresse accepté, quitte à avoir un excès de fourrage en année humide ou normale.
- Saisonnalité
La production de l’herbe au printemps est très importante (72% de l’herbe produite durant
l’année). Les stocks de l'année sont donc réalisés au printemps. Cette proportion a augmenté depuis 1980 et le phénomène tendra à s’amplifier dans le futur. En effet, la pousse estivale est
limitée du fait de faibles précipitations. Si celles-ci sont insuffisantes à l’automne, la production d’herbe à cette période de l’année s’en ressent fortement et est même inexistante
s'il n'y a pas de précipitations. Lorsque la période sèche est précédée par un sur-pâturage, la reprise de la végétation est hétérogène, avec des "trous" de sol nu, qui laissent la place à des espèces invasives indésirables. La qualité des prairies et même leur pérennité peuvent alors être compromises, et dans de nombreux cas ces dégradations prolongent l’effet sécheresse
jusqu’au printemps suivant. Certains agriculteurs ne misent ainsi plus sur la production automnale pour éviter de compromettre la production de l’année suivante par sur pâturage. Les agriculteurs doivent donc disposer de stocks durant l’été pour faire face à la biomasse
manquante dans les prairies.
Il faut noter que le réchauffement climatique s’accompagne d’un effet positif qui est une
avancée de la phénologie d’environ 10 jours, ce qui pourrait et devrait permettre une mise à
l’herbe plus précoce des animaux au printemps. L'itinéraire technique « déprimage, fauche, pâture » devrait ainsi voir sa surface augmenté.
Graphe 6: Tendances de
la production d'une
prairie moyenne péri-
méditerranéenne de 1980 à 2008
[Source :
CLIMFOUREL]
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4.4.2. Solutions envisageables
De nombreuses solutions sont envisageables selon les exploitations pour faire face à cette baisse :
- Réduire le chargement animal, ce qui impose soit de trouver des terrains agricoles viables économiquement (surface, trajet) et dans le temps (problème de l’urbanisation et de la
spéculation sur les terrains agricoles). Ceci s'applique plus particulièrement aux élevages extensifs qui sont plus dépendants de la pousse de l'herbe que les élevages intensifs qui basent une partie de l'alimentation sur de l'ensilage. La mise en pension dans des zones parfois éloignées de bêtes durant les périodes critiques est un point intéressant, mais elle nécessite une coopération entre les agriculteurs. La mise en estive n'est pas toujours intéressante économiquement : il est parfois plus simple de produire quelques hectares de fourrages supplémentaires.
L’autre possibilité réside dans la diminution de la taille du troupeau (avec un chargement parfois trop faible au printemps) mais ceci n’est pas forcément possible du fait d’une baisse
du revenu. Ceci pose des questions au niveau du nombre d’agriculteurs : veut-on avoir des agriculteurs avec un revenu décent mais en faible nombre (avec un tissu rural faible) ou nombreux mais avec des revenus faibles ?
- Adapter la conduite du troupeau en fonction de la disponibilité en herbe. Les marges de manœuvre se situent au niveau du type d’animal produit, de sa capacité à tolérer
des périodes de sous-alimentation chroniques et à effectuer des croissances compensatrices ultérieures, du choix des périodes des mises bas, du choix des races, etc. Ces éléments qui jouent sur la "demande" fourragère ne peuvent à eux seuls procurer un niveau d’adaptation
suffisant face à la variabilité importante de l’offre liée aux aléas de la sécheresse. Ces adaptations ne sont pas toujours possibles. Par exemple, le cahier des charges en Pélardon impose une production de fromages avec du lait frais d’où une production laitière répartie sur l’année pour une meilleure visibilité de la coopérative vis à vis des acheteurs. Ceci implique d'avoir des bêtes en lactation durant toute l'année.
- L'arrachage de vignes peut être une solution pour pallier le manque de terres agricoles mais ceci est très coûteux. De plus, les aides à l'arrachage n'existent plus aujourd'hui, il est presque plus intéressant de laisser la vigne en l'état que de l'arracher.
- Le sylvopastoralisme est une solution qui existe mais ne peut pas modifier en profondeur la structure de l'exploitation. En effet, le droit de pâturer des espaces forestiers est occasionnel et dépend du bon vouloir de l'ONF, de la commune ou de propriétaires privés. Les contrats sont souvent précaires et peuvent être résiliés pour plusieurs raisons (sur pâturage, défaut de gardiennage,...) mais une surface forestière peut être rapidement mobilisée par l’agriculteur. De plus le loyer est faible voire nul. Néanmoins, cette solution n'est pas viable pour des animaux laitiers car la valeur alimentaire de ces terres n'est pas très grande : ce sont des parcours. Cette solution doit donc être réservée à des animaux allaitants ou à des animaux pas encore en production.
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- Acheter des stocks pour faire face à des événements climatiques exceptionnels (qui le sont de moins en moins). On estime qu’une bonne sécurité doit être assurée par une demi-année de stocks d’avance. Ce point est intéressant mais il est compliqué de mettre en œuvre
une contractualisation entre les éleveurs et les vendeurs de fourrages. En effet, l’offre et la
demande ne sont en général pas identiques. La demande est variable selon une année sèche ou pluvieuse, les éleveurs n’achetant que quand ils en ont besoin. Des contrats de ce type entre
agriculteurs et éleveurs en Ardèche ont été mis en place mais ce fut un échec. Des éleveurs qui doivent acheter tous les ans sont plus réceptifs à des contrats car ils ont une bonne vision des stocks qui vont manquer. Paradoxalement, c’est avec des sécheresses répétées tous les ans qu’un système bien structuré pourrait se mettre en place. L’achat d’ensilage est aussi possible
même si le coût du trajet et le conditionnement rapide de l’ensilage sont des freins importants.
On estime à 100 km la distance maximale recommandable. Dans l’Aveyron, il existe un
système bien organisé avec des maïsiculteurs du Tarn.
- Utiliser des variétés méditerranéennes. Les variétés tempérées sont actuellement majoritairement utilisées, les recherches ne sont pas portées sur les variétés de région sèche car le marché n’est pas assez porteur en termes de quantité. L’idée de François LELIEVRE (chercheur INRA) est de travailler sur les deux en même temps pour voir s’il y a des
différences entre les deux en fonction des événements climatiques possibles (gelée tardive, sécheresse). Ces variétés sont censées être plus à même de résister à des événements climatiques typiques du sud-est. Ceci n’est valable que pour des prairies temporaires alors que
le Gard compte surtout des prairies permanentes.
- Implanter des espèces fourragères comme le sorgho, espèce biologiquement proche du maïs, mais dont l’enracinement est particulièrement efficace en profondeur et qui maintient
son activité photosynthétique et transpiratoire pour une gamme étendue d’états hydriques du
sol. Si une irrigation est possible la culture du maïs reste la solution pour sécuriser la ration. Lorsque le maïs n’est pas irrigué, la fluctuation de ses rendements en ensilage peut atteindre
50% en situation très sèche. Ces productions ont un effet tampon sur les stocks : en année sèche la culture est utilisée pour nourrir les animaux, en année pluvieuse elle est utilisée partiellement (le reste étant vendu).
4.4.3. Hautes températures
Les animaux d’élevage sont plus ou moins sensibles aux écarts de température. Les bovins sont par exemple plus sensibles aux températures élevées qu’aux températures
négatives. Face à l’augmentation du nombre d’épisodes caniculaires observés et prévus par les
scientifiques, cet aspect du réchauffement climatique devient préoccupant. Bien qu’il soit la
plupart du temps sous-estimé dans les élevages, il affecte fortement la production animale (croissance, production laitière). La bibliographie sur le sujet en France est relativement limitée. De nombreuses recherches ont été menées à l’étranger, notamment aux Etats-Unis, en Israël ou au Brésil. Elles portent principalement sur les vaches laitières mais certains résultats sont transposables à l’élevage allaitant. La performance du bétail est affecté par le stress thermique car un animal ayant des difficultés à perdre de la chaleur va diminuer sa production de chaleur en diminuant la quantité ingérée (HUBER, 1996; DAVIS et al., 2003; MADER et al., 2004). La température critique est dépendante de nombreux facteurs comme le niveau de production, l’avancée de la
gestation, le mouvement d’air autour des animaux et l’humidité relative de l’air (AHARONI
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et al., 2002; MADER et al., 2006). A titre d’exemple, le bien-être des vaches laitières peut-être évalué par l’index température-humidité (THI). Il est utilisé comme un indicateur du degré de stress causé par les conditions climatiques (HAHN and MADER, 1997; BRAY et al., 1997; BrROWN-BRANDL et al., 2004), parce que le THI incorpore les effets de la température ambiante et de l’humidité
relative. Les facteurs thermiques sont la température, l’humidité, la vitesse du vent et le
niveau de radiation.
Plus faible est l’humidité et plus le bétail pourra résister à des températures élevées. D’autres
facteurs peuvent impacter le stress thermique. Le rayonnement solaire augmente le THI. Le vent peut le diminuer de quelques degrés car il amène de l’air froid au contact de l’animal tout en évacuant de la chaleur. Certains animaux sont plus résistants aux stress thermiques notamment par leur capacité d’acclimatation à des conditions climatiques chaudes. L’Aubrac,
grâce à sa rusticité, semble ainsi mieux résister aux hautes températures que la Salers.
Les conditions climatiques permettent d’évaluer le stress thermique des bovins : 1. Températures élevées suivant un épisode très pluvieux. C’est la combinaison de la
température et de l’humidité qui détermine la sévérité du stress thermique. Des jours où la
température dépasse 27 °C après de gros épisodes pluvieux (HR élevée) peuvent être un avertissement d’un stress thermique des animaux, surtout si le vent devient calme ou que le bétail est confiné dans une étable. 2. La plus forte probabilité de stress thermique se situe durant l’été. Une situation d’urgence
peut se présenter si la température de l’air est supérieure à 36°C et l’HR supérieure à 30%. 3. Un risque potentiel de stress thermique existe quand il n’y a pas de refroidissement la nuit
(la température ne descend pas en-dessous de 20°C). 4. L’observation des bovins dira quand ils ne seront pas bien vis à vis de la chaleur. Les animaux vont commencer à se déplacer dans le parc à la recherche d’une zone d’ombre. Les
vaches qui ont un stress hydrique moyen vont avoir une respiration rapide et superficielle. Celles qui ont un stress thermique avancé ouvriront plus la bouche (rythme respiratoire augmente jusqu’à plus de 100 respirations par minute). Elles peuvent trébucher pendant
qu’elles marchent et recherchent une zone fraîche, comme de l’eau pour s’immerger. Les
troupeaux qui ont très chaud tendent à se regrouper pour chercher de l’ombre produite par les
autres animaux. Elles peuvent aussi rester vers les zones d’abreuvement, pas seulement pour
boire mais pour se rafraîchir elles-mêmes. Si la température corporelle augmente, les animaux peuvent s’effondrer et tomber dans le coma. La mort arrivant juste après.
4.4.4. Solutions envisageables
Des solutions, parfois très simples, existent pour limiter le stress thermique des animaux :
- Ombre
Une simple ombre en été permet de protéger les animaux contre le rayonnement solaire. La plus efficace source d’ombre provient des arbres et autres plantes. Ils procurent non seulement
une protection contre la lumière du soleil mais aussi un effet refroidissant avec l’évaporation
de vapeur d’eau par les feuilles [Hahn 1985]. L’ombre a un effet bénéfique sur la réponse physiologique des bovins à la chaleur. La température corporelle, le rythme cardiaque et respiratoire diminuent quand de l’ombre est disponible durant l’été. Il est également important
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de souligner que la couleur du pelage joue un rôle important. Les bovins dont le pelage est de couleur noire sont davantage exposés à un risque de coup de chaleur.
- Ventilation Le mouvement d’air augmente le taux de pertes de chaleur par unité de surface bovine, tant
que la température de l’air est plus faible que la température de la peau de l’animal. La
ventilation réduit la température corporelle et le rythme respiratoire, et améliore le gain en poids. Cependant, si la température de l’air est supérieure à celle du cuir, il gagnera de la chaleur de l’air environnant. Pour des températures d’air au-delà de 39°C, la ventilation devient une source de stress thermique pour les vaches laitières. L’idée de refroidir certaines
parties des animaux (la tête et le cou) par de l’air froid a été testée, elle améliore la quantité ingérée (les heures d’ingestion), tout en diminuant la température corporelle et le rythme respiratoire [SAITOU et al.1989].
- Brumisation AII et al. (1998) ont décrit un système évaporatif reposant sur l’utilisation de vapeur d’eau et
de ventilateurs. La brume se dépose sur le poil des bovins et le rend humide. Le ventilateur est ensuite utilisé pour évaporer cette eau, ce qui utilise de l’énergie. Les résultats montrent une
augmentation de la production laitière de l’ordre de 0.66 – 1.90 kg/jour pour des vaches produisant 20 – 25 kg/jour.
- Pâturage de nuit Alors que la température et la radiation solaire diminuent avec l’avancée du jour, la
température du toit reste élevée. BERMAN (2005) estime que la structure des étables en Israël augmente de 3°C en moyenne la température ambiante dans l’étable. Par voie de
conséquence, la température corporelle et le rythme respiratoire restent élevés. Des vaches confinées dans une étable maintiennent un rythme cardiaque rapide durant la nuit au contraire du pâturage de nuit où ces paramètres physiologiques diminuent rapidement. C’est le résultat
d’une diminution des radiations de chaleur de l’étable et de l’augmentation des pertes de
chaleur par les animaux. Il faut cependant que la température de l’air durant la nuit descende
en-dessous de 20°C.
- Besoins énergétiques Alors que les besoins énergétiques augmentent avec la température pour réguler la température corporelle, le stress thermique diminue l’ingestion. Pour cette raison, il est donc important d’augmenter la valeur énergétique de la ration pour maintenir un apport énergétique
suffisant. KURIHARA(1996) a montré que l’augmentation de température a des effets moins
importants pour des rations très métabolisables. Il importe également de rappeler que plus leur productivité est élevée, plus les animaux doivent évacuer de la chaleur, et par conséquent, plus leur seuil de tolérance à des températures élevées s’abaisse.
- Modifier les périodes d’alimentation
La seconde stratégie alimentaire est de moins nourrir les animaux le matin et plus le soir pour augmenter la quantité ingérée. Les vaches qui pâturent vont adapter et augmenter le temps passé à pâturer de 2 h avant la tombée de la nuit et de 2h après la levée du jour.
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- Eau fraîche abondante
De l’eau fraîche doit être disponible en abondance. L’eau permet de garder la température
corporelle dans les normales tout en maintenant la consommation alimentaire. L’augmentation des quantités d’eau absorbées augmente la production d’urine et donc les pertes en certains minéraux comme le sodium, le potassium et le magnésium. Les vaches doivent donc avoir à disposition des blocs de sel dans les endroits qu’elles fréquentent.
De nombreux indicateurs existent pour déterminer l’intensité du stress thermique des
animaux mais ils sont sujets à discussion. Le moyen le plus simple pour évaluer la
sensibilité des animaux aux hautes températures reste l’observation et le suivi quotidien des animaux. Des solutions plus ou moins coûteuses existent pour limiter ce stress.
4.4.5. Maladies émergentes
La diminution et ou la saisonnalité de la pousse de l’herbe n’est pas le seul problème
auquel sont confrontés les élevages. Des maladies jusqu’à alors non présentes sur le territoire
français font aujourd’hui leur apparition, ce qui est préoccupant pour la santé des troupeaux. Mais existe-t-il un lien étroit entre changement climatique et apparition de ces maladies ? Le 25 mai 2009, 174 Pays et Territoires Membres de l’OIE (Organisation mondiale de la Santé Animale), ont lancé un avertissement sur l’émergence et la réémergence des maladies
animales consécutives aux changements climatiques, phénomène aggravé par la globalisation des échanges commerciaux. On peut citer la fièvre de la Vallée du Rift, la fièvre catarrhale du mouton et le virus du Nil. Certaines sont transmissibles à l’homme (ce que l’on appelle des
zoonoses). Elles sont susceptibles d’impacts économiques importants sur les élevages. Une distinction est faite entre le changement climatique et le changement environnemental. Sa définition est la suivante : recouvre les évolutions touchant les principaux systèmes physiques et biologiques, intervenant naturellement ou sous l’influence des activités humaines. Elle inclut des aspects tels que les changements d'utilisation des terres et leur dégradation (déforestation, défrichement, conversion de zones humides, dégradation des sols), les changements qualitatifs et quantitatifs affectant l’eau (surutilisation et pollution des ressources en eau), la pollution de l’air et les changements au niveau de la biodiversité
(extinction d’espèces). L’OEI distingue deux types de maladie infectieuse : - Maladie infectieuse émergente : nouvelle maladie infectieuse résultant de l’évolution ou de
la transformation d'un agent pathogène ou d'un parasite existant, donnant lieu à un changement au niveau des hôtes, des vecteurs, du pouvoir pathogène ou des souches. Il peut aussi s’agir de la survenue d'une maladie inconnue jusqu'alors. - Maladie infectieuse ré-émergente : Maladie infectieuse connue qui se déplace, étend son aire géographique, augmente le nombre de ses hôtes ou connaît un accroissement significatif de son incidence. De nombreuses causes peuvent-être à l’origine de la présence de nouvelles maladies (changement climatique, mondialisation, changement environnemental (artificialisation du milieu …) …). Il n’y a pour l’instant pas eu de liens directs de cause à effet entre le changement climatique et les maladies infectieuses.
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Les effets du changement climatique sont donc nombreux sur la filière élevage,
notamment au niveau de la pousse de l’herbe avec une augmentation des périodes de non-pousse de l’herbe.
Des solutions existent mais ceci nécessite une coordination entre les acteurs de
l’agriculture mais aussi avec les pouvoirs publics pour, par exemple, créer des réserves
collinaires qui sont indispensables pour stocker l’eau.
Il n’y a cependant pas de solutions miracle aux problématiques rencontrées par l’élevage, elles risquent même d’empirer dans le futur.
Le développement de maladies comme la fièvre catarrhale ovine pose aussi questions
bien que le lien avec le changement climatique ne soit pas formellement établi.
A un degré moindre, l’augmentation de la fréquence des canicules peut entrainer une
baisse de production dans les troupeaux. Mais de nombreuses solutions ont vu le jour,
principalement dans des pays soumis à des climats tropicaux.
4.5. Conclusion
Nous avons donc vu dans cette partie que les filières sont chacune sujettes à des enjeux différents. Toutefois, on peut soulever des similarités. Comme vu précédemment, l’augmentation du taux de dioxyde de carbone tend à augmenter les rendements, bien que ce
phénomène soit compensé par d’autres qui tendent à diminuer ceux-ci. L’irrigation est le paramètre le plus important sécurisant les exploitations face au changement climatique. Il semble ainsi primordial de réorganiser les parcelles pour faciliter la mise en place des installations d’irrigation. Enfin, le travail de nuit est une bonne alternative pour résoudre certains problèmes. Le vin craint en effet l’oxydation et le rayonnement solaire augmente
cette oxydation et donc dégrade le raisin. Elle est aussi plus favorable à l’épandage des
intrants pour les mêmes raisons de températures mais aussi car les vents sont généralement plus faibles. Le travail de nuit nécessite toutefois un équipement particulier (tracteurs équipés de phares, lampes frontales…) et on est confrontés à certaines contraintes qui n’existe pas de
jour, comme l’impossibilité de travailler à proximité d’habitations à cause du tapage nocturne.
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5. Une problématique commune majeure : la gestion de l’eau
La gestion de l’eau, et surtout de sa quantité disponible, est vite arrivée au centre de notre réflexion. En effet, la gestion de l’eau a toujours été considérée comme primordiale par les
collectivités. Que ce soit les crues et inondations liées aux épisodes cévenols, les sécheresses d’été ou le risque de remontée du niveau de la mer, toutes les données bibliographiques confirment l’intérêt de ces problématiques. La gestion de l’eau aborde plusieurs thématiques et peut être résumée à quatre aspects principaux :
- la ressource. - la quantité. - la qualité - la question du milieu: marais, étangs de Camargue.
Ainsi la gestion de l’eau est une problématique qui touche toutes les échelles mais de façons différentes, ce qui permet d’identifier des situations différentes dans le Gard. Le nord du Gard est une zone très pluvieuse mais souffre d’un manque d’eau durant la période estivale. En revanche, le sud du département dispose d’eau d’irrigation principalement par le réseau du
Bas-Rhône. Mais c’est aussi chaque exploitation qui doit être sensibilisée et prendre des décisions en fonctions des particularités de son parcellaire. Il faut donc toujours garder en tête cette diversité présente à toutes les échelles : entre les territoires mais aussi entre les exploitations.
Nous réaliserons d’abord un bilan des ressources disponibles et les effets sur celles-ci du changement climatique. Nous mettrons ensuite en évidence les pertes et les problèmes d’utilisation puis nous envisagerons des solutions et des perspectives d’action.
5.1. Les sources d’eau dans le Gard Nous décrirons successivement les principales ressources et leur évolution.
- Un conflit d’intérêt autour de la ressource en eau Quel que soit la nature de sa ressource, l’eau est confrontée à des conflits d’intérêt
permanent : agriculteurs, particuliers, industriels, l’eau est au cœur de toutes les
problématiques. Dans tous les cas, l’eau potable aura la priorité.
- La pluviométrie
Comme abordé précédemment, les pluies ont tendance à diminuer à long terme. Le Gard bénéficie à ce propos d’un avantage majeur. Le nord-ouest est l’une des régions les plus humides de France [annexe 4-A]. Toutefois, l’abondance de pluie en automne pendant les
épisodes cévenols associée à un manque de pluie le reste de l’année est et restera le problème
central. En effet, les périodes de sècheresse sont plus importantes et plus longues, alors que les évènements pluvieux extrêmes induisent des graves inondations et détériorations des cultures. De plus, cette masse d’eau n’est pas considérée comme utile car elle ruisselle et tombe directement dans la mer sans avoir été utilisée. Parfois elle ne contribue même pas ou
41
très faiblement au remplissage des nappes. Le déficit en pluviosité lors des mois d’été
entraîne une baisse plus ou moins importante du niveau des nappes et du débit des cours d’eau.
Malheureusement, comme on l’a vu dans la partie précédente, les orages se font de plus en plus intenses et isolés.
- Les nappes phréatiques Le Gard possède plusieurs nappes phréatiques : la Vistrenque (325 km² de surface), la petite nappe des Costières de Bellegarde (72 km²) et les petites nappes des Costières de Saint-Gilles (147 km²). Les nappes sont majoritairement utilisées pour l’eau potable. Le nombre de
forage est difficile à évaluer car souvent non déclarés. Depuis quelques temps, les arrêtés préfectoraux sur les nappes se font de plus en plus fréquents. Ceci n’est toutefois pas
synonyme d’une plus grande diminution du niveau des nappes car de strictes politiques de prévention sont appliquées. Les nappes ne sont pas au plus bas de leur histoire. Par exemple au forage Mas Faget (nappe de la Vistrenque), le niveau piézométrique est descendu plusieurs fois en dessous de 7 m NGF avant 1995, alors qu’après 1995 il n’est jamais descendu en dessous de 8 m NGF [annexe 4-B-a]. Toutefois, depuis quelques années, ce niveau tend à diminuer même si les fluctuations importantes rendent difficile l’interprétation des graphiques
[annexe 4-B].
Description Utilisation Problème
Commun à
toutes les
nappes
Réservoirs d’eau souterraine de
5 à 25m d’épaisseur. Affleurant
le plateau des Costières et recouverts par 10m de limon dans la plaine du Vistre et du Vidourle
-Irrigation -Alimente en eau potable plus de 130 000 personnes - Facilement accessible
-Valeur la plus basse depuis 10 ans due à un déficit hydrique important -Fluctuations du niveau -Vulnérable à la pollution par les nitrates d’origine
agricole. Le problème plus qualitatif que quantitatif.
Nappe de la
Vistrenque
- 325 km² -Principale ressource du secteur Costières : plaine du Vistre et du Vidourle, jusqu’à Aigues-Mortes -Débit régulièrement faible
Costières
de Saint-
Gilles
-147 km² au pied du flanc sud des Costières et sous les limons récents du Rhône
Costières
de
Bellegarde
-72 km², s’écoule sur le versant Nord-Est des Costières puis sous les limons récents du Rhône
Urgonien -Valeur la plus basse
depuis 10 ans Table 2 : Description des nappes du Gard
42
Carte 2: Suivi de la ressource en eau
[Source : DDR/service eau et Rivière]
- Les cours d’eau
Le suivi des cours d’eau dans le Gard est important et nécessaire puisque leur utilisation est fréquente notamment pour l’agriculture avec des débits d’étiage très faibles.
Des tensions existent entre les différents utilisateurs de la ressource en eau. Lors de restrictions d’usage, les agriculteurs ont souvent l’impression qu’ils sont les premiers touchés
par ces mesures, qu’ils sont les premiers à faire des efforts pour limiter leur consommation en eau. Par exemple, du fait du déficit en pluie jusqu’à la mi-octobre et du faible débit et niveau des cours d’eau et nappes, le Gard est passé, jusqu’au 15 Septembre 2012, en vigilance de niveau
I (une première depuis 1961). Ceci signifie une restriction d’usage de l’eau pour l’arrosage et
l’irrigation de 8h à 20h.
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44
Le Rhône constitue une source très importante d’eau d’irrigation pour l’agriculture dans le
Gard. Sa présence permet à tout un territoire de bénéficier de conditions hydriques de grande qualité. L’eau du Rhône est très abondante et semble « inépuisable » pour le moment (moins de 2% de son débit est utilisé). En effet, 12 m³/s sont prélevés alors que le débit le plus faible lors de l’étiage est de 600 m³/s. De plus, le Gard se situe à son embouchure et ne porte préjudice à personne en utilisant son eau. Toutefois la notion de « Rhône ressource inépuisable » est à nuancer. Des problèmes de salinité apparemment liés à la diminution de son débit existent : « L’été dernier, en Camargue, le sel est remonté jusqu’à Arles, des rizières
ont été grillées » affirme Martin GUESPERAU en 2012 [26]. Des problèmes de crues sont aussi à prévoir « la neige va tomber en couche moins épaisse, fondre plus tôt et céder sa place à la pluie. Le fleuve devrait en conséquence connaître des crues sévères à la fin de l’hiver et
de longues périodes de sécheresse jusqu’à l’automne. Plusieurs modèles envisagent, à
l’horizon 2030, une diminution de 20% à 50% de la durée annuelle d’enneigement dans les
Alpes du Sud à 1800 mètres d’altitude ; de 10% à 15% dans le nord du massif. A 1200 mètres c’est pire. Les débits […] du Rhône pourraient donc rapidement et fortement chuter. » [26]. L’eau du Rhône est la plus abondante et la plus facile à exploiter (acheminement par réseau
hydraulique) et présente en cela un gros potentiel. Il convient toutefois donc de surveiller son état et son débit lors des années à venir.
Finalement, le Gard possède de nombreuses ressources. Certaines sont fragiles de par la faible quantité d’eau en période d’étiage et l’augmentation de la demande du fait du changement climatique et de l’augmentation de la population. Elles méritent donc d’être utilisées de
manière modérée. D’autres sont plus abondantes mais difficilement utilisables. Les fortes
précipitations annuelles au Nord sont souvent inutiles et ruissellent directement jusqu’à la
mer. Une des pistes de réflexion de ce rapport est donc la manière d’utiliser cette eau
abondante. A l’Est le Rhône est une ressource encore plus abondante. La problématique est
son acheminement.
5.2. La gestion de l’eau du Rhône Comme vu précédemment, le Rhône possède un fort potentiel, son eau n’étant utilisée qu’à 2%. Le réseau hydraulique régional possédé par BRL est fortement développé et permet d’alimenter de nombreuses zones (cf figure 3). En période estivale, plus de la moitié des surfaces irriguées de la région le sont par ce réseau (plus de 70 000 ha). Toutefois, seulement le sud du Gard est alimenté. Le réseau de BRL est actuellement
sous-exploité, l’objectif était de pousser les agriculteurs à utiliser l’eau du Bas-Rhône. L’eau fournie par BRL est moins chère que l’eau des retenues collinaires. Ceci implique notamment des
problèmes de gaspillage de l’eau, ce qui est paradoxal par rapport à d’autres zones du Gard.
Carte 3: Description du réseau de BRL
45
Des projets d’extension du réseau ont donc été légitimement initiés. En effet, le réseau actuel prélève 12 m³/s alors que ses canalisations ont une capacité de 75 m³/s. Le projet Aqua Domitia est ainsi en cours de réalisation. Il prévoit l’extension du réseau à l’Ouest et
permettra ainsi d’alimenter agriculteurs et villes en eau. Le projet d’extension vers Alès a au
contraire été avorté pour causes de financements. En effet, contrairement au projet Aqua Domitia, il était majoritairement destiné aux agriculteurs. Les financements sont donc difficiles à trouver car les personnes touchées sont beaucoup moins nombreuse, les subventions sont moins importantes car celles-ci sont plus axées sur des projets visant l’alimentation en eau potable des habitants.
5.3. La gestion des eaux de pluie
Comme vu précédemment, à cause du changement climatique, les eaux de pluies sont moins efficaces pour l’agriculture. La solution envisageable est le stockage de ces eaux de pluies qui
arrivent abondamment pour ne pas qu’elles retournent directement à la mer et qu’elles servent à surmonter les périodes de sécheresse de plus en plus fréquentes.
Deux modes de stockage majeurs sont :
► Barrage : Cette solution permettrait un apport et une gestion privilégiée de l’eau. Cependant, la mise en
place d’une telle œuvre entrainerait des modifications sociales, économiques et environnementales très importantes. On ne parle quasiment plus de barrages aujourd’hui. ► Une retenue collinaire est un petit plan d’eau (éventuellement un ruisseau) captant les eaux pluviales sans restitution immédiate. C’est la solution qui paraît la plus facilement envisageable et
diffusable. Elles sont principalement alimentées par les eaux pluviales et les ruisseaux et sont utilisées essentiellement pour l'irrigation des cultures. Elles permettent de se prémunir de l'aléa climatique. Cependant, la création de ces retenues n’est pas aisée pour de multiples
raisons : - Contrainte réglementaire : Elles sont impossibles sur des cours
d’eau, seulement sur des petits écoulements. - Contraintes foncières: Il est nécessaire d’avoir l’accord des propriétaires de chaque
rive. - Contraintes de terrain : L’étanchéité naturelle (argile) permet de réduire les coûts. Les
Cévennes sont composées de schiste, de sable. Le coût pour étanchéifier la retenue serait très important. La présence d’un bon matériau permet de réduire fortement les
coûts de la retenue. - Contrainte financière : Ces projets sont très couteux. Les agriculteurs peuvent
rarement les financer sans aides ou subventions. La création d’un stockage doit être
marquée par une réflexion sur la dépense énergétique afin de limiter les coûts de fonctionnement. Certains paraissent aberrants énergétiquement.
Figure 2 : Une retenue collinaire
46
- Contraintes environnementales : Les retenues doivent laisser passer les poissons. C’est
pourquoi les barrages sont interdits sur les cours d’eau. Les contraintes sont plus
importants dans les zones NATURA 2000 et zones inondables. De même dans les zones boisées, où l’autorisation de défrichement est nécessaire.
De plus, il y a dégradation de la qualité des eaux due à la stagnation, modification des conditions climatiques locales et altération du régime hydrologique. Il y a également des risques concernant les biens et usages à l'aval, l’impact paysager, etc. Les vraies retenues collinaires (digue avec déversoir de crue et une étanchéité naturelle, pente douce) sont au nombre de 10 dans le Gard. Elles ont une capacité de 10 000 à 50 000 m³ avec un coût de 5 à 8 €/m³ d’eau. Il existe d’autres ouvrages de stockage dans les Cévennes (environ 80), mais ils concernent de
plus petits volumes : 1500 à 2 000 m³ avec un coût de 15 €/m³ d’eau. Ils sont réalisés avec un
revêtement plastique et utilisés essentiellement pour l’usage personnel. De nombreux projets de bassins (environ 30) existent, bien qu’il faille au moins 6 mois pour
que le projet aboutisse (de l’idée au début des travaux).
► Les forages profonds permettent de prélever de l’eau dans des nappes profondes. Ils sont pour l’instant peu développés. Ceux-ci semblent être une solution intéressante pour les Cévennes.
5.4. La réduction des pertes
La gestion de ces ressources n’est pas toujours optimale. En effet, il existe des pertes dues au matériel utilisé. Le changement climatique ne va pas améliorer la situation comme cela a été vu avec une augmentation de l’ETP.
· Les professionnels nous ont énoncé qu’il y avait de multiples pertes sur le réseau hydrique. Certains ont même évoqué la nécessité de travaux généraux de révisions qui sont malheureusement très couteux.
· De nouvelles techniques d’irrigation, comme la micro-irrigation, permettent de gagner en efficacité et de limiter les pertes. Un gain de l’ordre de 20% par rapport à
l’aspersion est évoqué.
L’irrigation doit se raisonner au niveau des coûts énergétiques de transport de l’eau : il faudrait établir une « ceinture d’irrigation » pour limiter au maximum les frais de fonctionnement. Ceci implique des remembrements autour des ouvrages hydrauliques, opérations qui sont longues et compliquées pour satisfaire tous les acteurs. Physiquement (avec un système gravitaire) il est possible de créer de tels ouvrages, le problème vient du financement essentiellement. Ceci pose moins de problème quand ces réseaux sont utilisés pour l’eau potable. Il existe une vraie différence entre le nord et le sud du département
pour l’accessibilité à la ressource en eau. Les choix concernant la ressource en eau ne reposent plus (ou très peu) sur
l’agriculture car elle est incapable de financer seule ces projets. C’est une question de politique publique : veut-on maintenir une agriculture dans la région et si oui quelle
agriculture ? Les investissements sont là (autoroutes, trains,..) mais ils ne concernent
que très peu l’agriculture.
47
6. Hiérarchisation des questions soulevées et préconisations
6.1. Bilan par importance et par urgence des actions à mettre en
place : diagramme d’Eisenhower
6.1.1. Une étude selon différents critères.
Après avoir montré l'existence de différents impacts du changement climatique et leurs possibles conséquences sur l’agriculture, nous avons cherché à les hiérarchiser selon leur urgence et leur importance. Cependant, ils sont variés, concernent différentes populations et ont des enjeux propres.
Chaque impact est étudié de manière à dégager des risques et/ou des opportunités. Notre objectif a été d'établir une liste de critères communs afin de hiérarchiser les impacts le plus objectivement possible. Les critères étudiés sont :
• le coût engendré. Il peut-être direct (rendement, …) ou indirect (social, …).
• la gravité. Dans quelle mesure affecte-t-elle l’exploitation, la filière ? Nous étudions les aspects qualitatifs et quantitatifs
• l’échelle. Est-ce une problématique au niveau de l’exploitation, du bassin de production, du département ?
• la marge de manœuvre. L’exploitation, la filière peut-elle arriver à faire face, à rester pérenne avec ce problème ? Existe-t-il des solutions ?
• incertitude des fréquences et intensités. Quelle est l’intensité de l’impact ? Quelle est sa probabilité d’apparition ? A quel point son apparition est prévisible ?
Ainsi, chaque impact a pu être étudié avec des critères communs. Nous avons pu étudier les conséquences les plus caractéristiques par filière.
► En élevage :
- Rendements fourragers plus faible : C’est un problème qui engendre de nombreux coûts
puisque il y a ensuite nécessité d’avoir des stocks. Des solutions sont identifiées mais
demandent des modifications profondes du parcellaire, de la conduite des troupeaux, des espèces utilisées. Ce problème est de plus en plus fréquent et pose de nombreuses questions pour l’avenir. S’il n’est pas résolu rapidement, la filière de l’élevage sera de plus en plus
fragilisée.
-La saisonnalité de la production de fourrage : L’herbe pousse actuellement seulement au printemps et à l’automne s’il y a des précipitations. La majeure partie des stocks est donc
réalisée au printemps et est consommée durant la période estivale. Ceci impose une gestion particulière des fourrages sur l’exploitation, il est nécessaire d’anticiper la période suivante.
Le pâturage d’hiver pourrait aussi être éventuellement plus utilisé avec la modification des conditions climatiques.
48
- Le stress thermique des animaux: C’est un problème très chronique (épisodes de canicule) mais peu mis en avant pour l’instant en France. Ces hautes températures entraînent une baisse de la production et de la croissance des animaux d’élevage. Les conséquences économiques
ne sont pas négligeables même si elles sont pour l’instant peu chiffrées. Des solutions relativement faciles à mettre en œuvre existent.
- Les maladies émergentes : La fréquence d’apparition tend à augmenter même si il y a une
forte capacité de résistance via des traitements médicaux performants. La prévision de l’apparition et de l’évolution de ces maladies est difficile car beaucoup de paramètres dans la
dynamique des maladies ne sont pas encore connus. Il n’existe pas de lien formel entre
maladies émergentes et changement climatique.
► En viticulture :
- L’avancée de la floraison et de la maturité : Elle entraine une augmentation du degré d’alcool et une modification des arômes dans les vins, qui engendre de nombreuses conséquences sur la vinification et sur la commercialisation. Ceci peut être relativement préjudiciable si le vin ne satisfait plus les critères des consommateurs mais peut toutefois aussi être une opportunité pour l’implantation de nouveaux cépages. L’avancée de la floraison
et de la maturité tendrait à devenir un phénomène de plus en plus fréquent du fait de l’avancée
du cycle de production, et de l’augmentation des températures estivales.
- Sécheresse excessive (besoin en irrigation) : L’augmentation de l’ETP, des périodes de sècheresse, et la variabilité temporelle de ces dernières sont la cause de ce phénomène. Le stress hydrique non contrôlé est extrêmement fréquent lorsque les vignes ne sont pas irrigables. A faible intensité, il entraine la concentration des sucres dans les grains et donc un changement de la composition des vins, avec les conséquences citées précédemment. L’adaptation se réalise via l’irrigation, plus ou moins facile à mettre en place selon la zone.
- Asphyxie racinaire accrue : Elle est rare car due aux inondations mais elle peut-être dévastatrice sur toute une région selon l’importance de l’inondation. Les coûts sont extrêmement élevés si les pieds sont tués. Ces risques sont souvent limités aux zones inondables et n’ont d’autres choix que d’être accepté car il n’existe pas de moyens pour les
éviter. Mais des politiques de réduction de la vulnérabilité aux inondations doivent être renforcées y compris à l’échelle de l’exploitation agricole.
- Parasitisme accru : C’est un phénomène aussi associé à la quantité d’eau sur la parcelle.
Lorsqu’une inondation n’a pas détruit le pied, il est fort probable que l’excès d’eau ait
entrainé une prolifération de parasites comme par exemple le mildiou.
► En arboriculture :
- Tendance vers des levées de dormance plus tardives : Les risques économiques sont relativement faibles même si on peut observer une perte de récolte. C’est un phénomène déjà
très présent dans les pays tropicaux. La non-satisfaction des besoins en froid va augmenter dans le Gard avec l’augmentation des températures hivernales. Les effets ne se font pour
l’instant que peu sentir. A l’inverse, ces températures plus élevées favorisent aussi une durée
plus faible de la croissance florale entre la fin de la dormance et la phase de floraison. Les
49
deux effets sont donc antagonistes et leur évolution est incertaine.
- Avancée de floraison (gel printanier) et de maturité : Ce phénomène est relativement peu fréquent mais qui a un fort impact économique sur la production. C’est un chronique dans le Fard. C’est un aléa climatique auquel il y a peu de solutions efficaces, il faut faire avec. Cependant, quelques pratiques permettent d’en limiter l’impact : aspersion sur frondaison, chaufferettes, éoliennes… L’avancée de la date de floraison et les hivers plus chauds vont
modifier la gravité de ce risque.
- Parasitisme et maladies accrus : Les changements climatiques impactent sur le développement et l’apparition de nouveaux parasites et maladies avec par exemple une augmentation du nombre de cycle de développement de parasites durant l’année. Ces phénomènes sont accentués pendant les périodes de fortes pluies.
- Effet des températures élevées sur la floraison et la fructification : Des effets directs peuvent être observés sur la qualité des fruits et leur forme. Il y a par exemple l’apparition de nécroses ou la mise en place de doubles fruits.
► En grande culture :
- Des avancées phénologiques : ce phénomène est la conséquence de plusieurs autres impacts. On a pu ainsi observer une avancée des moissons de 30 jours en 50 ans. La diifficulté pour les agriculteurs est donc d’adapter en conséquence la date de semis, principale marge de manœuvre. La date de semis est parfois perçue par les agriculteurs comme un « coup de poker » puisque l’incertitude est très grande.
- Les irrégularités de production : On observe une grande diversité entre les parcelles irriguées ou non qui entraîne une forte démotivation des agriculteurs. Le rendement est incertain en cultures non irriguées car elles sont plus sensibles aux variations climatiques, il n’y a pas
d’eau d’appoint pour compenser le déficit hydrique estival. On peut les limiter en adaptant les pratiques culturales (semis direct,…), les espèces et variétés utilisées.
6.1.2. Classement dans un diagramme d’Eisenhower.
Après avoir décrit tous les impacts, nous avons ainsi une vision plus générale. Nous pouvons donc caractériser chaque impact selon son degré d’urgence et d’importance. Nous les avons donc rangés dans une matrice d’Eisenhower. Elle permet de dégager quatre grandes sous-catégories en fonction de l’importance et de l’urgence de chaque impact :
-la catégorie A : Impacts importants, actions à engager rapidement avec des moyens importants -la catégorie B : Impacts importants, actions à engager plus tardivement avec des moyens importants -la catégorie C : Impacts d’importance ponctuelle, actions à engager rapidement avec des moyens ciblés -la catégorie D : Impacts d’importance ponctuelle, actions à engager plus tardivement avec des moyens limités
50
Le classement des différents impacts dans la matrice d’Eisenhower est aussi basé sur une part
de subjectivité que nous avons essayé de limiter au maximum avec l’établissement des
critères précédents.
6.2. Bilan des préconisations
Maintenant que nous avons rangés tous les impacts dans la matrice d’Eisenhower, il faut
trouver des moyens d’adaptation. Au cours de cette étude de nombreuses préconisations ont pu être soulevées. Il faut bien savoir que chaque solution va pouvoir toucher un ou plusieurs impacts. L’idée de notre projet est donc de donner des outils d’aides à la décision pour les
autorités.
Pour chaque solution, nous étudierons rapidement si la solution est réalisable, à quel prix et à quelle échéance. Elles sont synthétisées et triées par filière dans la table ci-dessous.
On remarquera que de nombreuses solutions sont difficiles à mettre en place voire impossibles à cause de contraintes réglementaires. Ces dernières sont parfois non-adaptées ou trop nombreuses face à un environnement changeant et des situations toutes plus différentes les unes que les autres. On citera notamment l’incohérence des réglementations AOC vis-à-vis du changement climatique. Il est par exemple demandé une surface foliaire élevée ce qui augmente l’évapotranspiration de la vigne et augmente les risques de stress hydrique non contrôlé.
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53
Conclusion
Nous avons constaté dans cette étude que le changement climatique à l’échelle du Gard, au-delà du réchauffement, concerne la réduction des pluies utiles et l’augmentation de
l’évapotranspiration potentielle. Toutefois, on observe une variabilité accrue du climat qui instaure une forte variabilité. L’acceptation de cette incertitude est un enjeu majeur pour la pérennité de l’agriculture.
La répartition actuelle des précipitations ne va d’ailleurs pas aller en s’améliorant selon les
prévisions climatiques. L’irrigation semble donc être l’élément indispensable pour produire aujourd’hui et demain, tant au niveau de la quantité que de la qualité dans les conditions méditerranéennes. L’accessibilité de la ressource en eau est, au même titre que la qualité
agronomique des sols, un point essentiel sur lequel il faudra se baser pour implanter des cultures.
Il faut donc raisonner sur les réseaux d’eau existants ou en projet pour savoir quelles zones
seront à soutenir pour implanter des cultures. Des projets ambitieux tels que des retenues collinaires doivent être étudiés dans des zones adaptées tout en respectant les contraintes environnementales inhérentes. Néanmoins, les zones qui ne disposent pas ou de peu d’eau,
comme les Cévennes, ne doivent pas rester à la marge car il existe des systèmes qui valorisent plutôt bien ces espaces. Il faut éviter une agriculture à « deux vitesses » dans le département : celle qui dispose de l’irrigation et celle qui n’en dispose pas.
La problématique de la gestion de l’eau dépasse le simple cadre de l’agriculture. En effet,
avec l’augmentation de la population et donc de ses besoins comment gérer les ressources ? Des choix, parfois difficiles, devront être faits pour protéger l’eau et ses écosystèmes dans le Gard. Le stockage d’eau à terme pourrait ainsi voir le jour pour la distribution d’eau potable.
L’importance de s’adapter et l’urgence ne sont pas les mêmes selon les différents filières de l’agriculture du Gard car elles n’ont pas la même sensibilité aux effets du changement
climatique. La réflexion doit donc se faire au niveau du type d’agriculture voire même au
niveau de l’exploitation car chacune est différemment sensible. Le rôle de la Chambre
d’agriculture est donc prépondérant pour conseiller les agriculteurs sur les orientations à
prendre.
La plupart des terres avec un bon potentiel agronomique sont aujourd’hui utilisées par l’agriculture. Les terres les moins intéressantes d’un point de vue agronomique sont occupées par la garrigue et la forêt mais elles peuvent servir de parcours pour l’élevage des petits
ruminants. Cette répartition pourrait être amenée à changer avec l’eau d’irrigation. L’arboriculture dans les environs de Saint Gilles (sud du Gard) en est l’exemple parfait : les sols ne permettraient pas, sans irrigation, de faire de l’arboriculture. Ceci ouvre des
perspectives pour l’avenir mais le défrichement, déboisement s’accompagne de nombreuses
contraintes réglementaires, environnementales.
Des solutions parfois simples existent pour limiter les effets du changement climatique mais elles ne solutionneront pas le problème à long terme si les changements climatiques sont effectivement importants et irréversibles.
54
A long terme, la relocalisation des cultures dans le Gard et à plus grande échelle s’annonce
comme difficile à mettre en place en raison des nombreuses contraintes réglementaires, foncières, environnementales. Elle nécessite de plus une coopération, qui n’est pas toujours
facile, entre les différents acteurs (propriétaires fonciers, agriculteurs, élus). La Chambre d’agriculture a et aura un important rôle à jouer en étant l’interface entre ces acteurs. Un choix entre l’agriculture et l’urbanisation au moins sur certains secteurs est nécessaire pour
préserver le potentiel agricole qui constitue une richesse du département. Le projet doit être vu comme le début d’une réflexion future de la Chambre d’agriculture. Mr Brial voit ce projet comme les fondations de l’adaptation de l’agriculture du Gard au changement climatique.
55
Références bibliographiques
● Arboriculture :
[1] Jean-Michel Legave, 2009. Comment faire face aux changements climatiques en arboriculture fruitière ? Innovations Agronomiques, 7, p.165-177.
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[3] Yann Guedon, Jean-Michel Legave, 2008. Analyzing the time-course variation of apple
and pear tree dates of flowering stages in the global warming context. Ecological modeling, 219, p.189-199.
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[4] Hans R.Schultz, 2000. Climate change and viticulture: a European perspective on
climatology, carbon dioxide and UV-B effects. Australian Journal of Grape and Wine Research, 6, p.2-12. [5] Madelin Malika, Bois Benjamin et Chabin Jean-Pierre, Modification des conditions de maturation du raisin en Bourgogne viticole liée au réchauffement climatique, EchoGéo, 14 | 2010, mis en ligne le 13 décembre 2010, consulté le 05 décembre 2012. Disponible sur internet : http://echogeo.revues.org/12176 ; DOI : 10.4000/echogeo.12176 [6] Carbonneau Alain, Tonietto Jorge, . Régime thermique en période de maturation du raisin
dans le géoclimat viticole. SESSION II – Intervention n° 11, 11 p. Disponible sur internet : www.cnpuv.embrapa.br/publica/artigos/tonietto-sizv4.pdf
● Agriculture:
[7] Seguin Bernard, 2010. Coup de chaud sur l’agriculture. Paris, Delachaux et Niestlé, 205p. Collection : Changer d’ère.
● Elevage:
CLIMFOUREL [8] Lelièvre F., Sala S., Ruget F., Volaire F., 2011). Evolution climatique du Sud de la
France 1950 2009,
56
Projet CLIMFOUREL PSDR 3, Régions L R, M P, R A. Série Les Focus PSDR3.
[9] Felten Benoît, Duru Michel, Martin Guillaume, Sautier Marion, 2011. Changement
climatique en Midi-Pyrénées et conséquences sur la croissance de l’herbe. Projet CLIMFOUREL, Midi-Pyrénées, Série Les Focus PSDR3.
[10] MOULIN Charles-Henri, 2011. Accompagner l’adaptation des systèmes d’élevage péri-
méditerranéens aux changements et aléas climatiques, Projet PSDR, Régions L R, M P, R A. Série Les 4 pages PSDR3.
[11] Declerce Sylvain, MOULIN Charles-Henri, Tchakerian Edmond, 2011. Solutions
collectives d’adaptation aux aléas climatiques pour les élevages de la zone péri-
médtiterranéenne, Projet PSDR, Régions L R, M P, R A. Série Les Focus PSDR3.
Hautes températures
[12] Broucek Jan et al., 2009. Effect of high temperature on milk production of cows from free-stall housing with natural ventilation, Slovak J. Anim. Sci., 42, p.167-173.
[13] Robert J. Collier, Rosemarie B. Zimbelman, 2007. Heat Stress Effects on Cattle: What
We Know and What We Don’t Know: 22nd Annual Southwest Nutrition & Management
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[14] Dagorn Toma, 2003. Les vaches sont parées pour la canicule, PLM, juin 2003, p.14-18.
[15] Bonnefoy Jean-Michel, 2009. Prévenir le stress thermique de la vache laitière, L’éleveur
laitier, 171, p.50-51
● Etat des lieux du changement climatique :
[16] K. Pachauri Rajendra, Reisinger Andy et al., 2007. Bilan 2007 des changements climatiques: rapport de synthèse. GIEC, 114p. Disponible sur internet: www.ipcc.ch/pdf/assessmentreport/ar4/syr/ar4syrfr.pdf.
[17] Ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement, 2000. Impacts potentiels
du changement climatique en France au XXIème siècle, 2ème édition, 128p.
[18] Exbalin Jacques, 2009. Le réchauffement climatique à la portée de tous : les causes, les
réalités et les conséquences en France. Paris, L’Harmattan, 323p.
[19] Auteurs non connus, 2006. Climat : ce qui va changer. La Recherche, 399, p.31-88.
[20] Black Peter, Nunn Mike, 2009. Conséquences du changement climatique et des
modifications environnementales sur les maladies animales émergentes ou ré-émergentes et
57
sur la production animale. Rapport de la conférence de l’OIE 2009, 54p. Disponible sur
internet : http://www.oie.int/doc/ged/D9755.PDF.
[21] Jouzel Jean, Debroise Anne, 2007. Le climat : jeu dangereux, dernières nouvelles de la planète. Paris, Dunod. Quai des sciences, 220p.
[22] Adolphe Nicolas, 2004. 2050 rendez-vous à risques. Paris, Belin. Bibliothèque scientifique, Pour la science.
[23] Décamps Henri, 2010.Evénements climatiques extrêmes : réduire la vulnérabilité des
systèmes écologiques et sociaux. Les Ulis, EDP Sciences, 194p.
[24] Barbault Robert, Foucault Alain, 2010. Changements climatiques et biodiversité. Paris, Vuibert, 282p.
● Eau :
[25] BRL (Bas-Rhône Languedoc), 2012. Le transfert des eaux du Rhône : maîtriser l’eau …
du fleuve jusqu’au client consommateur. Nîmes, BRL, 4p.
● Autres :
[26] AGRESTE 2007
[27] www.gard.chambagri.fr/le-gard
58
Annexes
Annexe 1 Gestion de projet ......................................................................................................... 59 A. Descriptif du PEI ........................................................................................................... 59 B. Cahier des charges ......................................................................................................... 60 C. Budget prévisionnel ....................................................................................................... 63 D. Budget réel .................................................................................................................... 64 E. Compte-rendu du commité de cadrage .......................................................................... 65 F. Rapport d'étape ............................................................................................................... 67 Annexe 2 Typologie des outils et méthodes utilisés pour étudier le changement
climatique .................................................................................................................. 71 Annexe 3 Changement climatique .............................................................................................. 72 A. Principaux gaz à effet de serre ...................................................................................... 72 B. Projection du GIEC pour le changement de la T°C moyenne relatif à 1980-1999 ....... 73 C. Projection du GIEC pour le changement des précipitations relatif à 1980-1999 .......... 74 D. Analyse du changement climatique dans le Gard ......................................................... 75 Annexe 4 La ressource en eau dans le Gard ............................................................................... 78 A. Répartition de la pluie ................................................................................................... 78 B. Evolution piézométrique des nappes ............................................................................. 79
Annexe 5 Entretiens .................................................................................................................... 80 A. Localisation des agriculteurs et techniciens rencontrés ................................................ 80 B. Compte-rendus des entretiens ........................................................................................ 81 Annexe 6 Analyse impacts Développement durable du projet ................................................. 106
59
Annexe 1 Gestion de projet A- Descriptif du PEI
60
Annexe 1 Gestion de projet B- Cahier des charges
UE H PROJETS D'ELEVES INGENIEURS Commanditaire : Chambre d'agriculture du Gard
Etudiants : GUIGUE ANTONIN / KERGOAT HÉLÈNE / REDIFI ISSAM / THURET-BENOIST HÉLÈNE
Problématique et objectifs du projet
1 Enjeux : - Réaliser un état des lieux objectif sur le changement climatique avec un focus sur la région Languedoc-Roussillon et le département du Gard. - Envisager les contraintes et les opportunités liées à ce changement pour l’agriculture du Gard (notamment vis-à-vis de la concurrence). - Proposer les grands axes d’un plan d’actions pour adapter l’agriculture du département au changement climatique. - Proposer une mise en pratique sur une parcelle.
2 Identification des risques et opportunités (matrice SWOT + analyse) ?
3 Aucune confidentialité n’est attendue pour ce projet.
Intitulé du Projet : Stratégie d'adaptation de l'agriculture du Gard au changement climatique
61
Présentation du contexte du projet
· Commanditaire : CHAMBRE D’AGRICULTURE DU GARD. Elle est située à Nîmes, préfecture du département du Gard. Elle a pour mission principale d'être l'interlocuteur des agriculteurs auprès des pouvoirs publics. Elle donne des avis sur les projets d'aménagement du territoire. Cet établissement public conseille les agriculteurs sur le plan technique, sur l'installation, sur le foncier et propose des formations. Organigramme : Un bureau, constitué d'agriculteurs, élit un président et des vice-présidents. Le service administratif (directeur, services techniques, comptable,...) applique leurs orientations, décisions. · Éléments du contexte : le changement climatique, particulièrement dans le Sud de la France, impacte déjà fortement l'agriculture du fait de sa dépendance au climat. Le Gard est soumis à de nombreux aléas climatiques (inondations, sécheresses) vecteurs d'incertitudes pour l'agriculture. · L'étude est réalisée sur le département du Gard(30) · Les acteurs (parties prenantes):
- Jean-Luc BRIAL (Directeur adjoint de la chambre d'agriculture du Gard, directeur de la SERFEL) : commanditaire
- Jean-Michel LEGAVE (chercheur à l’INRA, Recherches Fruits et Changement Climatique) : tuteur campus
· Les compétences à mobiliser: - Synthétiser des données - Communiquer - Gestion du calendrier - Gestion du budget - Gestion d'un projet - Analyser · Les contacts à établir, personnes ressources (professionnels, chercheurs…) - Chambre d'agriculture du Gard (experts préconisés par Jean-Luc BRIAL). - Dominique GRANIER (président chambre d'agriculture). - Météo France. - SupAgro (PEI précédents et documents sur la méthodologie à tenir). - Conseil Général.
Nature et organisation du travail
· Actions à conduire (3R) 1. Planning
- 16 Avril au 1 juin 2012 : rédaction du cahier des charges, travail bibliographique sur le changement climatique à l'échelle globale et locale.
- 10 mai 2012 : comité de cadrage.
- Du 17 Mai au 3 Juin 2012 : les étudiants sont absents pour cause de stage en
62
exploitation agricole.
- 1er juin : remise de la synthèse bibliographique avec livraison d’un diaporama définissant le contexte, la méthodologie, et l’architecture du projet.
- Début juin : validation des interviews.
- Du 3 au 29 juin : entretiens avec des professionnels.
- Du 30 Juin au 2 Septembre 2012 : les étudiants sont absents pour cause de stage en exploitation agricole.
- Septembre : entretiens avec des techniciens.
- Octobre : mise en application sur au moins 1 étude de cas 15 jours dédiés au projet.
- 1er Novembre au 30 Novembre 2012 : rédaction du projet.
- Entre le 15 et le 20 Novembre 2012 : 3ème réunion tripartite, 3 jours dédiés au projet.
- Décembre 2012 : 2 jours dédiés au projet.
- Mi-décembre 2012 : rendu du rapport.
- Mi-décembre au 3 Janvier 2013 : préparation de l’oral.
- Janvier : 2-3 jours dédiés au projet.
- 3, 4 ou 5 Janvier 2013 : soutenance blanche.
- 10 Janvier 2013 : soutenance finale devant le jury.
- 15 au 20 Janvier 2013 : remise des livrables aux commanditaires
· Budget prévisionnel
· Rôles et responsabilités de chacun des membres du groupe pour le management du PEI : Communication : Hélène KERGOAT Gestion des réunions : Issam REDIFI Tenue du planning : Antonin GUIGUE Tenue du budget : Hélène THURET · L’avancement du projet sera notamment évalué par M BRIAL et M LEGAVE à qui les élèves présenteront régulièrement l’avancée de leurs travaux.
Résultats visés, produits livrables
- Nature des résultats : analyse et interprétation des données, étude, travail de prospection. Ce projet a pour but d'impacter sur les pratiques agricoles du département en orientant l'agriculture actuelle vers une plus adaptée aux effets du changement climatique à court terme (10-15 ans). Le projet a aussi pour but de remettre en valeur certaines zones agricoles en déprise et qui pourraient profiter du changement climatique pour avoir de nouveaux atouts. Cela pourrait permettre de dynamiser l'agriculture du Gard ou du moins de la maintenir. - Livrables (dates de réception par le commanditaire) : - Synthèse des résultats sur les références bibliographiques : état des lieux du changement climatique à l'échelle mondiale et locale (début juin). - Rapport de synthèse sur les préconisations pour l'agriculture du Gard (janvier 2013). - Présentation du projet de réimplantation de l'agriculture dans une zone en déprise.
63
Annexe 1 Gestion de projet C- Budget prévisionnel annexé à la convention
COMMANDITAIRE : CHAMBRE D'AGRICULTURE DU GARD TITRE DU PROJET : STRATEGIE D'ADAPTATION DE L'AGRICULTURE DU GARD AU CHANGEMENT
CLIMATIQUE ETUDIANTS : GUIGUE ANTONIN / KERGOAT HÉLÈNE / REDIFI ISSAM / THURET BENOIST HÉLÈNE DEPLACEMENTS
Dates prévisionnelles
Lieu Objet Nombre de déplacements
Distance A/R en
km
Péage Parking
Nombre de personnes
Coût par déplacement (1)
19/03/2012 CIRAD, Montpellier Prise de contact avec le tuteur
1 22 0 4 5.5
19/03/12 Chambre agriculture, Nîmes
Prise de contact avec le commanditaire
1
110 6 4 33.5
27/04/12 Chambre agriculture, Nîmes
Réunion tripartite 1 110 6 4 33.5
Début juin Chambre agriculture, Nîmes
Rencontre avec des professionnels
10 110 6 2*2
10*33.5
Courant Septembre
Chambre agriculture, Nîmes
Rencontre avec des spécialistes et
responsables des différentes cultures
10 Environ 110
6 2*2 6*33.5
Courant Novembre
Nîmes Etude des exemples concrets (ex : zone de
la Costières)
6 Environ 110
6 2*2 6*33.5
TOTAL DEPLACEMENTS
809
Puissance du véhicule : 5 CV (1) : Indemnités kilométriques : 5 CV et moins : 0.25€/km 6-7 CV : 0.32 €/km 8CV : 0.35 €/km Indemnités repas et nuitées sur facture
TELEPHONE Estimation du nombre et de la durée des appels en local, national, international et vers un portable : ____________________________ (Si utilisation du téléphone de la salle PEI, compter un forfait minimal de 15 euros)
TOTAL TELEPHONE
40
REPROGRAPHIE Environ 11 exemplaires photocopiés N&B et couleur
TOTAL REPROGRAPHIE
150
ACHATS DIVERS, AUTRE Photographies aériennes, cartes topographiques, ouvrages, commande d’études, … A préciser :
- Données climatiques de météo France TOTAL
DOCUMENTS
LOGISTIQUE ET FRAIS DE GESTION ADMINISTRATIVE FRAIS FIXES : Facturés obligatoirement pour tous les projets : Pour les conventions avec mémoire (gestion des remboursements des dépenses liées au projet par SupAgro) : 150 € Pour les conventions directes (gestion des remboursements des dépenses liées au projet par le commanditaire): 75€
TOTAL GESTION LOGISTIQUE
150
MONTANT TOTAL en € (1500 euros maximum)
1 149.5
64
Annexe 1 Gestion de projet D- Budget réel
COMMANDITAIRE : CHAMBRE D'AGRICULTURE DU GARD TITRE DU PROJET : STRATEGIE D'ADAPTATION DE L'AGRICULTURE DU GARD AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ETUDIANTS : GUIGUE ANTONIN / KERGOAT HÉLÈNE / REDIFI ISSAM / THURET BENOIST HÉLÈNE
DEPLACEMENTS Lieu Objet Nombre de
déplacements
Distance A/R en km
Péage Parking
Frais de restauration
Chambre d’Agriculture du Gard (Nîmes)
Interview de spécialistes, d’agriculteurs, d’élus (Mr CAVALIER, Mr BUISSON, Mr PICOT, Mr
BOISSON, Mr PINOT, Mr ANGELRAS) Réunion avec le commanditaire.
Session diverse à la chambre.
8 110 Entre 5.80 et 6
de péage +1 * 2€ parking
1 * 35.10
CIRAD (La Valette) Rencontre avec le tuteur 2 5 0 0
Mairie de Générac et cave à vin à Chusclan
Interview de Mr TOUZELLIER et de Mr RIVIER 1 260 11.10 0
BRL (Nîmes) Interview de Mr GONTARD 1 110 5.8 0
Aspères Interview de Mr GRANIER 1 95 1.20 0
Nîmes et Vauvert Interview de Mr PIANETTI et de Mme
RESSOUCHE 1 115 5.40 1 * 25
St Gilles Interview de Mr PROIE 1 30 2.80 0
Chambre d’Agriculture d’Alès Interview de Mr HINCELIN 1 230 5.80 0
TOTAL 15 458.75 79.10 60.1
TOTAL DEPLACEMENTS
597.95€
Puissance du véhicule : 5 CV (1) : Indemnités kilométriques : 5 CV et moins : 0.25€/km 6-7 CV : 0.32 €/km 8CV : 0.35 €/km Indemnités repas et nuitées sur facture
TELEPHONE Estimation du nombre et de la durée des appels en local, national, international et vers un portable : (Si utilisation du téléphone de la salle PEI, compter un forfait minimal de 15 euros)
TOTAL TELEPHONE
40€
REPROGRAPHIE Environ 11 exemplaires photocopiés N&B et couleur
TOTAL REPROGRAPHIE
150€
ACHATS DIVERS, AUTRE Photographies aériennes, cartes topographiques, ouvrages, commande d’études, … A préciser : 2 cartes de reprographie de 200 unités pour travailler le rapport
et les divers documents à lire TOTAL DOCUMENTS 40€
LOGISTIQUE ET FRAIS DE GESTION ADMINISTRATIVE FRAIS FIXES : Facturés obligatoirement pour tous les projets : Pour les conventions avec mémoire (gestion des remboursements des dépenses liées au projet par SupAgro) : 150 € Pour les conventions directes (gestion des remboursements des dépenses liées au projet par le commanditaire): 75€
TOTAL GESTION LOGISTIQUE
150€
MONTANT TOTAL en € (1500 euros maximum) 977.95€
65
Annexe 1 Gestion de projet E- Compte-rendu du comité de cadrage
Présents : Jean-Luc BRIAL : Directeur Adjoint Chambre d’agriculture du Gard (commanditaire) Jean-Michel LEGAVE: Enseignant (Tuteur Campus) - Montpellier SupAgro Isabelle MICHEL : Enseignante (Représentante scientifique) -Montpellier SupAgro Christian PINET : Conseiller (Représentant professionnel) - Chambre d'Agriculture du Gard Géraldine CHAMUSSY: Chargée de missions PEI (Animatrice) - Montpellier SupAgro Antonin GUIGUE : (Membre équipe PEI) – Montpellier Supagro Issam REDIFI : (Membre équipe PEI) – Montpellier Supagro Hélène THURET : (Membre équipe PEI) – Montpellier Supagro Hélène KERGOAT : (Membre équipe PEI) s’excuse pour son absence. Après une présentation du projet par les étudiants, les membres du jury ont pu présenter leurs commentaires : - Mr BRIAL souligne l’intérêt et l’engagement des étudiants dans le projet. Il rappelle l’importance politique de celui-ci dans le projet stratégique de la chambre d’agriculture du Gard. Il faut que le projet soit en accord avec la demande des élus et des agriculteurs. L’environnement socio-économique est donc très important à prendre en considération. Il regrette l’absence de F.BUISSON (élu à la Chambre d’Agriculture) pour cause de travail,
particulièrement intéressé par le projet. - Mr PINET propose des conseils pour le déroulement des interviews à réaliser dans le cadre du cahier des charges. Il conseille de commencer les interviews par les professionnels pour fixer le cadre politique puis interviewer dans un deuxième temps les techniciens. Il ressort que plusieurs agriculteurs avec des activités et des lieux de production différents seront interrogés. - Mme MICHEL regrette de ne pas avoir reçu le cahier des charges avant la réunion. Elle met en évidence le flou concernant la deuxième partie du projet : l’ « étude de cas de la Costière de Nîmes ». - Mr LEGAVE propose de se concentrer sur quelques faits économiques précis. Il rappelle l’éternelle confrontation entre environnement climatique et évolution climatique. Il propose la
réalisation d’un dossier rassemblant toutes les données précises de la bibliographie. Il nous conseille de se concentrer sur les données pluviométriques. Les prévisions doivent être jusqu'au moins l'horizon 2050 même si le but est de fournir à la Chambre d'agriculture des orientations pour les 10-15 prochaines années. A partir de ces données (pluviométrie, variations de T°C, …), les élèves pourraient présenter
avant chaque interview, des données marquantes afin de faire réagir et intéresser les personnes interrogées. Ainsi le travail des étudiants doit se concentrer sur la synthèse de la bibliographie réalisée et la réalisation du cadre d’entretien (à faire valider par l’ensemble du jury). Le projet pourrait donc se réaliser en trois temps :
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1) interviews des professionnels 2) interviews des représentants des filières 3) ressortir des idées, des tendances pour initier des débats.
Le jury rappelle que les préconisations peuvent prendre la forme de questions. - Mme CHAMUSSY conseille de réaliser un diagramme de Gant, pour aider les élèves dans leur organisation.
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Annexe 1 Gestion de projet F- Rapports d’étapes
◘ Réunion tri-partite du 27/04/12
Ordre du jour : 1. Présentation de la synthèse bibliographique sur le changement climatique avec focus sur le Gard 2. Définition de la problématique, et de la méthodologie du projet 3. Projet de cahier des charges 1. Présentation de la synthèse bibliographique sur le changement climatique avec focus sur le Gard Les étudiants ont présenté les conséquences du changement climatique à différentes échelles (mondiale, méditerranéenne et régionale), en l’absence d’une adaptation du modèle agriculture actuel. Il reste à trouver des données plus précises et affiner les conclusions à l’échelle du Gard. 2. Définition de la problématique, et de la méthodologie du projet Il existe une forte incertitude liée au changement climatique et à ses conséquences ; le but du projet est de tenter de la minimiser, de la gérer et de s’adapter. Ceci étant relativement vaste,
les contours du projet ont été dessinés un peu plus précisément. - Le projet sera centré autour de la thématique de l’eau, paramètre intéressant car dépendant de tous les autres et particulièrement problématique dans le Gard (sécheresse, inondation et crue, réserve en eau, …). Les autres paramètres, comme la température et l’ETP,
seront secondaires, mais resteront étudiés. - La totalité des cultures emblématiques du Gard sont à analyser. - Les préconisations ont pour visée une adaptation de l’agriculture en 2025-2030. - « Adaptation » est un mot clé primordial de ce projet, bien qu’ambigu. Nous le verrons
ici comme adaptation des types de cultures (relocalisation des cultures et des systèmes de conduites). - Le projet devra prendre en compte des considérations économiques et sociales qualitatives. Les étudiants s’appuieront sur les travaux réalisés et sur des témoignages récoltés. Quelques remarques, pistes de réflexions, témoignages et point de vue ont d’ores et déjà été
émis lors de la réunion : ◦ Pluie/ ressource en eau : ►La nappe de la Vistrenque alimente en eau 150 000 personnes et permet l’irrigation de nombreuses cultures. Est-il possible de créer un bassin de stockage, de redimensionner celui actuel afin de pallier
les apports importants d’eau de pluie en un temps réduit ?
►Le Gard a une importante ressource en eau : le Bas Rhône est encore peu utilisée pour l'instant (1 à 2%). ►Sécheresse, inondation. Quelles sont les préconisations possibles ? ►Dans le département, il existe des zones équipées en irrigation, seules 40% sont utilisées.
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◦ Les filières emblématiques du Gard à analyser sont : ► Arboriculture : Christian PINET et Jean-Michel LEGAVE devraient pouvoir définir avec nous les préconisations concernant l’arboriculture. Ils ont notamment souligné qu’il n’y a plus de place pour les cultures de fruit en sec. ► Productions animales (pâturage, fourrage) : le projet CLIMFOUREL devrait contenir les informations nécessaires. ► Viticulture. ► Grandes cultures : Mr PIANETTI (chambre d’agriculture) pourra nous aider
sur ce sujet. 3. Projet de cahier des charges - finaliser l’état des lieux à l’échelle du Gard. - réaliser des enquêtes auprès des personnes ressources communiquées par Jean-Luc BRIAL. - établir les préconisations. - éventuellement les appliquer sur une voire deux études de cas théoriques (sans s’occuper des
problèmes liés à la réalisation et à la permission de réalisation) : - zone de la costière, déjà équipée en termes d’irrigation, quelles cultures
mettre ? Il faudra se renseigner sur les retenues collinaires : dimensionnements, utilités (remplissage en 1 fois lors des grosses pluies) mais ne pas s’occuper des formalités administratives (long, difficile). - deuxième zone près du Rhône où il n’y a pas besoin de retenues
collinaires. Le but étant de redynamiser une zone en déprise et d’utiliser des possibles changements
apportés par le changement climatique qui pourraient devenir des atouts pour la zone. Pistes à explorer : retenues collinaires avec Anne-lise GALTIER et Muriel LEROUX.
◘ Réunion tri-partite du 15/10/2012
Mr BRIAL demande la présence des étudiants à la session de chambre le 10/12/12 pour présenter devant les élus le travail effectué. Peut-on parler de dichotomie pour l’eau entre le nord et le sud? Il faut éviter de parler d’opposition afin d’éviter une scission entre les populations. Le changement climatique touche tout le monde mais il existe de grandes différences de perception et de sensibilisation entre les différentes zones du Gard. Pour chaque culture voir si il y a une rupture brutale probablement à faire (élevage) ou continue vu que les effets se font moins sentir (arboriculture et viticulture). Pour cela il est nécessaire de hiérarchiser les différents impacts du changement climatique (attentes des élus de la Chambre). Travail à faire : 1-Synthèse des différents impacts avec des chiffres précis. 2-Clarifier les questions qui se posent. Remarque : -« Levier espèces plutôt que variétés » est à nuancer. A court terme les variétés ne vont pas
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changer alors qu’à long terme les espèces cultivées pourront être amenées à évoluer mais il y a un risque d’augmentation de l’incertitude. -Arboriculture de montagne : travail de diversification sur la pomme la Reinette du Vigan. La coopérative origine Cévennes. Mais il existe des problèmes comme celui de la conservation. -Rechercher des possibilités de diversification au sein d’une exploitation, par exemple dans
l’élevage. -Rechercher de la bibliographie sur les effets des températures extrêmes sur les animaux (voir professeurs de SupAgro et exemples dans les pays étrangers). -Relier l’augmentation de fréquence des maladies et le changement climatique est très
difficile et peut-être sujet à controverse. -Regarder dans d’autres pays plus chaud, comme le Brésil, ce qu’il y a eu comme problèmes et les adaptations mises en place pour toutes les cultures (ex : pommier). -Faire une synthèse de la variation de l’ETP/pluviométrie et des pluies utiles/inutiles pour
l’agriculture. Utiliser des courbes parlantes (sources, titre, échelles). Voir ceci avec Thierry PIANETTI. -Projet Aqua Domitia (BRL) : pas trop d’influence dans le Gard donc ne pas en parler. -S’informer sur Arvalis pour les céréales : Monsieur Philippe GATE. -Ne pas oublier de mentionner la source de chaque information. Formes : Etre plus convaincant. Faire apparaître les contrastes. Pour la conclusion : faire ressortir les interactions : sociologie / changement climatique / agriculteurs. Ex : gestion quantitative de l’eau dans le bassin versant de la Cèze. Parler du manque de lien entre la recherche et l’agriculture. Contacts / lecture : JL BRIAL doit nous donner le contact d’un ou deux éleveurs supplémentaires à rencontrer. Article de JM LEGAVE dans Innovations agronomiques, 2009 sur les alternances des arbres fruitiers. Coopérative Origine Cévennes Florence VOLAIRE, CNRS : remplaçante de Mr LELIEVRE. Eau : Données, informations plus précises sur les retenues collinaires (réussite locale ?) viendront en rencontrant Muriel LEROUX de la CA. Fondamentaux à rappeler sur les économies d’eau. Etre plus percutant, précis sur la question de l’eau. Se renseigner sur les problèmes de l’utilisation de l’eau dans le bassin de la Cèze où conflit de
gestion quantitative. Changement climatique : Rappeler les composantes du changement climatique :
· Réchauffement global
· Variabilité qui augmente
· Pluviométrie
· Phénomènes extrêmes (excès d’eau, …)
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Grandes cultures : Citer le riz, qui occupe une place importante en Camargue. Arboriculture : Voir l’interaction entre endurcissement et douceur. Evolution phénologique due à la dormance, à la maturation. Présentation 10 décembre : Objectif : présenter devant les élus notre travail pour susciter un débat. Plan de la présentation et du rapport :
1. Replacement du projet dans un cadre plus global avec ADAGE
2. S’appuyer sur quelques chiffres précis et marquants : pluviométrie, température (moyenne, variabilité), ETP. Indiquer les sources. Utiliser ce qu’on a déjà fait plus les
données de CLIMFOUREL.
3. Grands groupes de culture : hiérarchiser l’urgence de l’adaptation et voir les questions à se poser à court et long terme. 1 ou 2 chiffres/courbes marquants par culture.
Exemple de l’arboriculture : chiffres clés (levée de dormance, …)/dire pas de
perception immédiate puis variation/ Questions importantes à se poser : Quel niveau de perception pour l’agriculteur ? Quelles modifications immédiates et à long terme ?
4. L’eau
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Annexe 2 Typologie des outils et méthodes utilisés pour étudier le changement climatique [source : ADAGE]
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Annexe 3 Changement climatique A- Les principaux gaz à effet de serre
[Source : GIEC]
(*)PRG : Potentiel de Réchauffement Global. Indice mis en place par le GIEC permettant de comparer la part de responsabilité d’un gaz dans le processus d’effet de serre par rapport au dioxyde de carbone. Il prend en compte à la fois la manière dont le gaz considéré piégera le rayonnement infrarouge et sa durée de vie dans l’atmosphère. Sa valeur indique ainsi la contribution relative au réchauffement de la planète d’une émission ponctuelle d’une tonne d’un gaz sur une période donnée, par rapport à celle d’une émission ponctuelle d’une tonne de
CO2 sur la même période.
Gaz Quantité
Durée de vie dans l’atmosph
ère (ans)
PRG (*)
Sources anthropiques 20 100 500
vapeur d'eau (H2O) 3%0 8
dioxyde de carbone (CO2)
387ppm 15-200 1 1 1
Centrales énergétiques (29,5%), industrie (20,6%), transport (19,2%)
méthane (CH4)
1,7 ppm 12 72 25 7,6
Production agricole (40%), extraction et distribution des énergies fossiles (29,6%), élimination et traitement des déchets (18,1%)
protoxyde d'azote (N2O)
0,311 ppm
114 289 298 153
Production agricole (62,0%), combustion de biomasse et exploitation des terres (26,0%)
ozone troposphérique (O3)
10
Transport, industrie (phénomène smog ou brume grise se formant au-dessus des villes)
chlorofluorocarbures (CFC)
0,503 ppb
130 6200-7100
Industrie (n’existe pas à l’état naturel dans
l’atmosphère)
tétrafluorométhane (CF4)
0,070 ppb
50 000 6500 Industrie (n’existe pas à l’état naturel dans
l’armosphère)
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Annexe 3 Changement climatique B- Projection du GIEC pour le changement de la
température moyenne relatif à 1980-1999
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Annexe 3 Changement climatique C- Projection du GIEC pour le changement des
précipitations relatif à 1980-1999
Changements relatifs des précipitations (en %) durant la période 2090-2099, en fonction de
données de 1980-1999.
Les valeurs sont des moyennes multi-modèles basées sur le scénario A1B pour les périodes de décembre à février (à gauche) et de juin à août (à droite).
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Annexe 3 Changement climatique D- Analyse du changement climatique dans le Gard
Annexe 3-D-a : Réchauffement par décennie sur la période 1996-2009 différentes stations du Gard [source : Chambre d’Agriculture du Gard]
Annexe 3-D-b : Nombre de jours par an où la température a atteint 35°C à Nîmes (station Balandran) [source : CIRAD]
Station
Réchauffement par décennie sur
la période 1996-2009 (°C)
Aigues mortes 0,987
Cardet 0,961
Carvillargues 0,503
Chusclan 0,546
Meynes 0,374
Nimes 0,278
Pont Saint Esprit 0,491
La Rouvière 1,147
St christol 0,48
St Gilles 0,56
Vestric et Candiac 1,097
Le vigan 0,605
Ville vieille 0,195
Moyenne 0,632
75
76
Annexe 3-D-c : Nombre de jours de gel (où la température a été en dessous de 0°C) à Nîmes (station Balandran) [source: CIRAD] Annexe 3-D-d : Précipitation annuelles à Nîmes (station Balandran) [source : Chambre d’Agriculture du Gard]
Annexe 3- D- e : Nombre d’épisodes pluviométriques extrêmes sur deux périodes dans le
Gard [source: Météo-France]
Cumul des précipitations supérieur à
200mm 400mm 1960-1979 73 8 1992-2011 101 12
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Annexe 3-D-f : Elévation du niveau des mers à l’horizon 2100
Etude Elévation estimée
Echelle nationale
Plusieurs travaux de recherche et publications
+35m à +5m
GIEC (tous scénarios confondus)
+0,18m à +0,6m
ONERC (Météo France)
+1m
Echelle régionale Response, MISEEVA
+1m
Annexe 3-D-g : Points de la côte gardoise et ses alentours au dessous d’1m d’altitude [source : simulateur google)
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Annexe 4 La ressource en eau dans le Gard A- Répartition de la pluviométrie
Cumul des précipitations (1951-1990) [Météo France]
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Annexe 4 La ressource en eau dans le Gard B- Evolution piézométrique des nappes
Evolution piézométrique de la nappe de la Vistrenque forage mas Faget [Syndicat mixte Vistrenque et Costières]
Evolution piézométrique au forage mas Garons [Syndicat mixte Vistrenque et Costières]
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Annexe 5 Entretiens A- Localisation des agriculteurs et techniciens
rencontrés
AGRICULTEURS
TECHNICIENS
Mr BOISSON St Laurent la Vernède Viticulture + arboriculture Mr BUISSON Potelières Elevage + céréales Mr CAVALIER Vallabrègues Arboriculture Mr GRANIER Aspères Viticulture Mr RIVIER Chusclan Viticulture Mr PROIE St Gilles Arboriculture Mr ANGELRAS Costières Viticulture Mr HINCELIN Garrigue de Lussan berger
Mr PIANETTI CA Nîmes Grandes cultures Mr PICOT CA Nîmes Pôle eau, territoire et élevage Mr PINET CA Nîmes Arboriculture Mr MOULIN SupAgro CLIMFOUREL Mr GONTARD BRL Eau et irrigation Mme LEROUX CA Nîmes Eau Mr ANGELRAS IFV Changement climatique Mme RESSOUCHE Nappe de la Vistrenque
80808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080808080
Mr BOISSON - vigne + arbres fruitiers
Mr BUISSON - élevage + céréales
Mr CAVALIER - arboriculture
Mr GRANIER - viticulture
Mr RIVIER - viticulture
Mr PROI - arboriculture
Mr ANGELRAS – viticulture (costières)
Mr HINCELIN – berger (garrigue)
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Annexe 5 Entretiens B- Comptes-rendus des entretiens
Annexe 5-B-a : Compte rendu de l’entretien avec Bernard ANGELRAS
Bernard ANGELRAS président du pôle Rhône méditerranée de l’INAO, président de
l’IFV (Institut Français du Vin), président de l’ODG (Organisme de Défense et de Gestion) Costière de Nîmes et fait partie du conseil des spécialistes en viticulture de FranceAgriMer. B. ANGELRAS est donc un homme très occupé, mais cela ne l’empêche pas de tenir son
exploitation, sur la Costière de vigne et de grandes cultures familiale avec son fils. Les vignes de son exploitation sont labellisées AB et AOC.
Son exploitation a la particularité d’être à la pointe de la technologie. Ceci permet à B.
ANGELRAS une gestion raisonnée de ses vignes et ceci avec précision, sécurité et rapidité. Il possède par exemple un tracteur équipé d’un GPS qui l’aide à établir en temps réel sa trajectoire par exemple lors de l’épandage d’un produit. Le GPS l’aide à ne pas traiter deux
fois au même endroit. La cabine du tracteur est d’ailleurs étanche et sécurise le conducteur. B
ANGELRAS ne taille pas ses vignes à la main. Il possède une tailleuse qui lui permet de passer 15h sur un hectare au lieu de 5 jours. Ce matériel de haute technologie a été subventionné à 40% par la région et l’Europe.
B. ANGELRAS est convaincu du changement climatique qu’il perçoit autant par le réchauffement que par le dérèglement. Il s’applique à s’adapter et anticiper au mieux les
conséquences.
La présence de l’eau est tout d’abord primordiale dans la sécurisation de l’exploitation. L’eau
du bas Rhône est en effet accessible et présente l’avantage d’avoir très peu de chances d’être
soumise à des restrictions. L’équipement d’une parcelle coûte environ 6 000€/ha. C’est un
investissement, mais qui est vite rentabilisé, surtout si l’eau est celle du bas-Rhône. L’eau en
elle-même n’est d’ailleurs pas très chère et son utilisation peut-être optimisée. Les parcelles sont équipées de goutte à goutte. Le goutte à goutte permet une gestion raisonnée de l’eau
mais a aussi d’autres avantages. On peut notamment citer la diminution des maladies car
l’appareil aérien n’est pas mouillé. Sur quelques parcelles, B. ANGELRAS a enterré les tuyaux à 70 cm. Ce procédé a de nombreux avantages. Cela permet d’optimiser l’irrigation,
d’éviter la dégradation des tuyaux (rongeurs, chasseurs…), mais aussi de travailler le sol inter-pied.
Le sol inter-rang n’est pas travaillé car il est enherbé pour éviter le ruissellement, l’érosion,
améliorer la pénétration de l’eau dans le sol, pousser les racines à s’allonger en profondeur,
diminuer les émissions de carbone d’un travail du sol et enfin pour des soucis de paysage. B ANGELRAS pense en effet que la notion de paysage est primordiale pour le développement de la filière viticole de demain. En effet cela favorise le tourisme et donc améliore les ventes et surtout les circuits courts. B. ANGELRAS pense même qu’il faut planter des fleurs
légumineuses en enherbement inter-rang, ce qu’il a déjà réalisé sur certaines de ces parcelles.
Ceci a le double intérêt d’améliorer le paysage et d’utiliser les propriétés fixatrices de l’azote.
82
D’autres pratiques culturales peuvent aider à l’adaptation au changement climatique. Pour
pallier à l’évapotranspiration accrue, B. ANGELRAS préconise de diminuer la surface foliaire. Mais ceci entre en contradiction avec les normes AOC qui définit des surfaces foliaires telles qu’elles doivent avoir une certaine taille. B. ANGELRAS soutient que ces normes sont à repenser.
Comme de plus en plus de viticulteurs, B. ANGELRAS effectue certains travaux de nuit. L’épandage des intrants est ainsi optimisé car la température et le vent sont plus faibles que la journée. Les vendanges se font aussi de nuit pour ne pas a avoir à refroidir les grains de trop de degrés pour pouvoir les stocker. Travailler la nuit entraine de nombreuses contraintes. Il faut avoir un équipement adapté (phares sur les tracteurs, lampes frontales…), éviter les
tapages nocturnes si travail mécanique près des habitations. C’est aussi une grosse contrainte
pour la gestion de l’emploi du temps de l’exploitant et des salariés.
A long terme, B. ANGELRAS pense que les parcelles devraient être remembrées afin de limiter les coûts d’installation des équipements d’irrigation. La question de l’irrigation en sec
se pose.
Enfin, l’amélioration génétique est primordiale pour l’adaptation au changement climatique.
Le changement global entraîne aussi de nombreuses conséquences positives, il permet par exemple de diminuer les intrants. Par exemple, les pluies étant plus séparées, le mildiou se développe beaucoup moins.
Enfin, nous avons abordé le sujet de la Costière. Bien qu’irriguée, cette zone présente le taux
de friches le plus important du Gard. On y cultivait de la vigne et des fruits mais la concurrence internationale et surtout espagnole a bouleversé le marché des fruits. De nombreux vergers on ainsi été abandonnés. Le sol de la Costière étant relativement pauvre, il n’est pas possible d’y faire de la grande culture ni de l’élevage. L’endroit est plutôt adapté à la
vigne mais les plantations sont très réglementées et il faut faire attention à ne pas bouleverser le marché. Il est envisageable de faire du maraichage sur cette zone.
Annexe 5-B-b : Compte rendu de l’entretien avec Jean-Paul BOISSON
JP. BOISSON n’est plus agriculteur, il a abandonné ce métier pour diverses raisons,
notamment la non concordance entre la charge de travail et la rentabilité de celui-ci.
JP. BOISSON s’est installé en 1991, en cultivant vignes et arbres fruitiers (cerises, abricots, reines claudes, figues…). En 2000, il crée un GAEC avec vente directe : le domaine Natura, dont la particularité est que les consommateurs viennent directement se servir sur les arbres. Ce mode de fonctionnement a été adopté pour diverses raisons. Tout d’abord, il réduit
considérablement la main d’œuvre nécessaire. Ensuite, il est en accord avec les convictions de JP. BOISSON, dans le sens où il permet d’éduquer le consommateur. La cave du domaine
Natura se situe au niveau de la caisse de sortie. Les clients y passent donc obligatoirement. Les vins proposés sont de toutes gammes.
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L’exploitation n’est pas labélisée Bio et JP. BOISSON ne souhaite pas l’être. Pour autant,
l’un des objectifs principaux de JP. BOISSON est le respect de l’environnement. Il préfère par
exemple avoir recours une fois à du désherbant plutôt que de labourer plusieurs fois entre les vignes et émettre les quantités de carbone inhérentes à cette pratique.
La totalité des cultures se fait en sec. Les sols argileux sur lesquelles elles sont implantées permettent une bonne rétention d’eau. Grace à ces sols et à des pratiques culturales adaptées JP. BOISSON ne considère pas le problème de l’eau comme un majeur.
JP. BOISSON est sceptique quant au changement climatique. Hormis une éventuelle occurrence accrue de phénomènes extrêmes (des orages plus violents mais plus ponctuels et isolés), il ne perçoit pas de changement climatique.
Il s’attache toutefois à une anticipation et une adaptation de son exploitation. Comme dit
précédemment, ses pratiques culturales sont orientées vers une diminution des besoins en eau. Pour les vignes, cela commence dès la plantation. Il plante celles-ci sur un terrain enherbé pour leur imposer une concurrence et favoriser la croissance en profondeur des racines. Elles vont ainsi pouvoir puiser les ressources d’eau en profondeur. JP. BOISSON laisse toujours de l’herbe entre ses rangées de vignes pour entretenir cette concurrence. Il ne tondra pas avant la
fin du printemps et laissera les résidus de tonte sur place. Les sarments seront aussi broyés sur place. Cela permet de réduire considérablement la nécessité des apports externes de matière organique, et ainsi de ne pas avoir recours à l’utilisation d’engrais. Aussi, grâce à ces
pratiques les vignes ne nécessitent qu’un léger entretien mécanique du sol, les vers de terres et
micro-organismes étant attirés par la dégradation de l’herbe coupée et des sarments. JP. BOISSON recherche à produire des vins de qualité. Il a pour cela diminué ses rendements jusqu’à 30 à 50 hL/hJP. Il relève que les sols argileux semblent très bien adaptés à la
production de vignes de qualité en sec.
JP. BOISSON déconseille la production de melons en sec, car non-rentables. Il relève que la figue, bien que gourmand en eau est une production rustique, sans besoins de traitements et avec une concurrence économique actuelle faible.
Les préoccupations de JP. BOISSON ne s’orientent pas en premier vers le changement
climatique. Il considère que le frein premier de l’agriculture est les lobbys politico-économiques. Les agriculteurs se situent au milieu d’une longue chaine allant de l’industrie de la production d’amendements jusqu’aux supermarchés par exemple. La rentabilité de
l’agriculture s’en voit profondément amputée. Pour ces raisons, JP. BOISSON a décidé de quitter le métier d’agriculteur.
Pour finir, nous avons abordé lors de cet entretien la gestion de l’information. Tout au long de
sa carrière, JP. BOISSON a attaché une importance particulière à l’actualité de la recherche
et à l’information. Selon lui de nombreuses sources sont disponibles (réunions techniques,
techniciens de la chambre d’agriculture, magasines…). Il est important que l’agriculteur fasse
la démarche vers l’information et ce n’est pas toujours le cas.
84
Annexe 5-B-c : Compte rendu de l’entretien avec Frédéric BUISSON
Frédéric BUISSON est un éleveur et céréalier membre du bureau de la chambre d’agriculture
du Gard.
Il nous a tout d’abord parlé de l’indice d’aridité de l’UNEP, qu’il considère comme clé dans
l’adaptation de l’agriculture du Gard face au changement climatique. En effet, il évoque
l’importance de cet indice pour les dossiers administratifs et l’obtention de primes de risques
dans le cadre de la législation européenne. L’indice est défini par : IA=P/PET
Avec : IA = Indice d’aridité de l’UNEP PET= évapotranspiration potentielle totale annuelle (mm) P= précipitation totale annuelle (mm)
Cette définition n’est pas pertinente car elle ne prend en compte que des données annuelles.
Or si l’on prend l’exemple du Gard avec les épisodes cévenols, ces fortes précipitations n'ont
que peu d'intérêt pour les cultures du fait de leur date (automne) et de leur intensité à part si elles sont stockées dans des retenues collinaires. L'agriculture est concernée par l'ETP seulement au printemps et en été. Les pluies d'avril-mai suffisent généralement à faire les stocks. On voit clairement qu’il faut s’intéresser à la répartition temporelle des précipitations
et à l’évapotranspiration potentielle. Ainsi, selon cette définition, le Gard n’est pas reconnu
comme une région à risque. D’autres facteurs ne sont pas pris en compte dans cette définition, comme l’environnement biophysique.
Les chiffres montrent bien que la répartition temporelle des précipitations est primordiale. Par exemple, un hiver dont les précipitations étaient de l’ordre de 1000 L/m² s’est suivit d’un
classement en sécheresse le printemps suivant. A l’inverse, un autre hiver relativement sec
(10 L/m² de précipitations) a été suivit de pluies printanières utiles ce qui a limité le stress hydrique.
La commission européenne veut restreindre à 8 critères pour choisir la répartition des aides PAC, la chambre d'agriculture veut inclure cet indice d'aridité. Motivée par des raisons socio-économiques Myriam GASPARD veut apporter quelques précisions à cet indice pour obtenir une zone climat méditerranéen en reprenant le critère sur la seule période printemps/été => climat méditerranéen
La mise en application se fera en 2015.
Les aides sont un soutien à la consommation mais ce point n’est pas ressenti par les consommateurs. Les modifications de la PAC auront de lourdes conséquences sur l’agriculture du Gard. Une analyse de 35 exploitations gardoises en 2010 montre que sur un
ha de terres labourables, il y a 160 euros de résultat +450 euros/ha d'aides/an. On va progressivement passer à 250-260 euros/ha d’aides en 5 ans, il n'y aura quasiment pas de revenu pour l'agriculteur d'où l'idée de ce supplément d'aide publique.
L'agriculture est aujourd'hui dépendante d'un système où les aides sont indispensables pour en vivre. Les prix sont dépendants des cours mondiaux. Peu d’agriculteurs peuvent produire
aujourd’hui sans aides, la Beauce le pourrait (étude Arvalis) alors qu’elle touche beaucoup
85
d’aides. S'il n'y a pas d'arbitrage par les aides publiques on va droit dans le mur : « on produit à des coûts mondiaux qui ne veulent rien dire ».
Nous nous sommes ensuite intéressés à la question des grandes cultures et de l’élevage. Les
aides PAC ont induit une forte spécialisation des grandes cultures vers le blé dur, tendant sur la monoculture avec des rendements d'environ 47 q/ha. Aujourd’hui l’aide n’est plus lié à une
culture spéciale (DPU). Les Le département bénéficie d’un supplément d'aides du aux
handicaps (ICHN).
Les rendements français en blé ont tendances à stagner avec un risque de décroissance, même s’il y a un fort potentiel génétique. Ce phénomène est tout d’abord dû au plan écophyto
2018 avec comme objectif la réduction d'ici 2018 de la moitié des pesticides utilisés. Le changement climatique a surement lui aussi une part de responsabilité. Ce ressenti est confirmé par l’élevage. En effet, on peut montrer qu’un climat aride entraine une baisse de la
production de matière sèche. L’émergence de nouvelles maladies est aussi un facteur
important de baisse des rendements, qui semble lié au changement global. En effet, des maladies migrent vers le Nord et d’autres totalement nouvelles apparaissent. On peut citer le
BVD qui atteint la moitié des troupeaux du Languedoc Roussillon ou le virus de la mosaïque du melon.
La question de l’eau pour les éleveurs est primordiale. En effet, le changement climatique bouleverse cette filière. On constate qu’une fois qu’il y a eu le retrait de l'atelier élevage dans
une exploitation, il n’est jamais remis en place.
Le changement climatique est directement perceptible. En effet, la période de récolte des fourrages est de plus en plus courte mais il y a plus de regain de prairies naturelles à l'automne. Il faut alors éviter le sur pâturage à l'automne car ceci affecte la pousse de l'herbe lors de la campagne suivante. Une aide à l'alimentation en été est nécessaire même si le printemps a été pluvieux. Les climats arides ne sont pas adaptés aux pâturages. Dans les pays orientaux par exemple les exploitations fonctionnent en zéro pâturage.
Pour palier le manque de fourrage il est possible de s’adresser à l’action collective (ASA)
pour l'irrigation sur la Cèze. Mais elle ne fonctionne pas correctement. Il dispose d’eau
d’irrigation de deux manières : - droit au prélèvement dans un cours d'eau sur Ozonnais, déclaré en 2006 - retenue collinaire utilisée avec 2 autres agriculteurs. Elle a été construite sur des
matériaux étanches après extraction de terre. La capacité est de 27000 m³ de stockage. Le projet a été aidé à 80%, il n'a coûté que 2euros/ m³ contre 5 ou 6 ailleurs.
Le remplissage n'a jamais posé de problèmes à part la première année (1990). Elle se remplit parfois en quelques jours seulement. La création de retenues collinaires est sûrement la solution sous ces climats même si c'est plus compliqué aujourd'hui du fait des coûts plus élevés. Les agriculteurs seuls ne peuvent financer ces projets.
On a assisté à une augmentation du nombre de tête à cause de l’aide à la tête (PMTVA). Les
éleveurs savent de toute façon qu'ils ne sont pas autosuffisants mais la PMTVA finance les achats de fourrage. L'effet climat est tamponné quand le chargement est plus faible. Les élevages de piémont, de montagne sont très dépendants vis à vis de la paille, du fourrage. Le
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problème de F.BUISSON n'est pas le même : il produit des céréales et des fourrages, ceci lui confère une certaine souplesse dans les stocks. Économiquement il est plus intéressant de produire trois ha de plus de fourrages que d'aller en estive. Il y a 40-45 jours d'été qui sont difficiles, les animaux ne pâturent alors plus car il n'y a plus d'herbe sur pied. Un affouragement en vert aide peut-être les animaux à passer ces fortes températures avec la fraîcheur des aliments.
Des solutions existent, certaines sont mises en place sur l’exploitation : - Contractualisation achat/vente fourrages : Il existe des contrats de ce type pour
l'AOC Pélardon. Anciennement l'utilisation de foin de Crau était illimitée, du foin de luzerne était vendu. La luzerne fait en plus bien le vide sanitaire pour le blé (4 ans de luzerne est mieux qu'un an d’une autre plante annuelle). Mais ceci nécessite un suréquipement important car la fenêtre de tir est courte (semis avant grosses chaleurs de juin). Un tiers de la valeur marchande du fourrage est dû au coût de transport pour des trajets lointains. Le fourrage livré sera d'au moins 200 euros/t vu les charges. Comment l'éleveur peut-il répercuter ces coûts s'il n'a pas une production à haute valeur ajoutée ?
- Implantation de RGI (Ray Grass Italien), qui est une valeur plus sûre pour constituer un stock d'ensilage. Il y a eu un problème variétal cette année sur l’exploitation. Le RGI a épié fin novembre ce qui est nouveau. Il profite pleinement des pluies hivernales. La luzerne et les graminées résistent également plutôt bien.
- En cas de sécheresse, la solidarité paille se met en place - « on ne réinvente pas comme ça les filières » : une réorganisation est très longue à
mettre en place en raison de la complexité des filières - Circuit court : les volumes sont souvent faibles donc c’est un peu décevant
économiquement. De plus, les structures sont toujours à la limite des contrôles vétérinaires. - Hautes températures : l’effet racial joue beaucoup, les Aubrac résistent apparemment
mieux à la chaleur que les Salers. La mise en estive des animaux peut aussi être une solution.
Annexe 5-B-d : Compte rendu de l’entretien avec Philippe CAVALIER
Mr P. CAVALIER est situé dans une région arboricole depuis des générations mais la conjoncture actuelle entraine une diminution des surfaces.
Philippe CAVALIER tient une exploitation spécialisée dans l’arboriculture (cerise, pêche et
abricot) de 12 ha. Il s’installe en 1990 près du Rhône et bénéficie donc de sols alluviaux. Mr CAVALIER est aussi membre du bureau de la chambre d’agriculture du Gard.
Mr CAVALIER soulève diverses pressions sur la filière arboricole. Il établi en première position, la concurrence internationale et surtout celle de l’Espagne. La main d’œuvre y est
très peu chère. Des accords bilatéraux Afrique Nord/Sud ont aussi leur importance. Il place ensuite par ordre décroissant d’importance : le manque d’organisation de la filière, le rapport
des forces amont-aval, le levier Consommation à activer (freins dans la tête des consommateurs, variabilité des prix préjudiciables), et la nécessité de nombreux investissements lors de l’installation de l’exploitant (immobilisations, foncier…). La pression
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urbaine concurrence aussi de manière non négligeable la totalité du secteur primaire du Gard. Enfin, l’arboriculture subit une pression sanitaire plus importante que les autres filières avec l’apparition de nouveaux ravageurs.
Concernant le changement climatique, P. CAVALIER perçoit concrètement le changement climatique. Les risques de gels se font de plus en plus fréquents et en 25 ans, ses récoltes ont avancé de 10 jours. A l’échelle du département, il relève des problèmes de sècheresse accrus notamment sur la Cèze et le Gardon. Parallèlement, la demande en eau d’irrigation et eau
potable augmente. Il est important de travailler sur les rapports eau potable/eau d’irrigation pour parer à ces conflits d’intérêt.
Enfin, le réseau d’acheminement de l’eau induit d’énormes pertes, de l’ordre de 30%. Mais la
rénovation de celui-ci est extrêmement délicate et couteuse. Un projet a été initié : celui d’amener l’eau du Rhône. Le monde agricole n’a toutefois pas les moyens de financer un tel
projet.
P. CAVALIER est conscient des conséquences du changement climatique et s’attache à
adapter ses pratiques culturales. Quand cela lui est possible, il irrigue la nuit. Il choisit des espèces précoces, ce qui lui permet aussi et surtout une meilleure rentabilité. L’utilisation de
la précocité n’est toutefois réalisable que sur des terrains irrigués. L’irrigation est un facteur
déterminant et discriminant des exploitants arboricoles.
P. CAVALIER préconise plusieurs pistes. Il faut selon lui, travailler sur le changement d’espèce cultivée plutôt que de variété. L’éducation des consommateurs est aussi primordiale
et est un levier clé pour aider et soutenir les agriculteurs. Ces premiers et surtout les jeunes ne sont pas sensibilisés aux questions de la santé et de la qualité des produits. Le secteur fruit et légume du Gard est de qualité. Sa survie et son expansion dépendent de la demande des consommateurs. « Je pense à l'avenir en termes de contrats ». Il faut travailler sur divers vecteurs de communication comme par exemple les publicités ou les labels. Il convient toutefois de noter qu’il est difficile d’assurer une qualité constante des fruits et légumes. C’est
une problématique clé du secteur de qualité dans la fidélisation de la clientèle.
Concernant la gestion de l’information entre la recherche et les exploitants, P. CAVALIER relève un manque de collaboration. Il existe des réunions entre les différents acteurs mais pas de projets collaboratifs. « La rapidité des transferts d’information est aussi importante que la
qualité des recherches » explique-t-il
Il rappelle les sujets de recherche intéressants : -la technicité par rapport à la production -La recherche marketing pour toucher les consommateurs -les recherches de quelques qualités prépondérantes des fruits et légumes.
Pour conclure, P. CAVALIER est conscient des changements climatiques qui touchent ces cultures de façon plus ou moins directes (variabilité climatique, importance des risques de gel, gestion des inondations et des sécheresses…) mais ceci ne reste pas l’un de ses principaux objectifs (problèmes de concurrence, des législations trop strictes et rigidité des acteurs amont/aval).
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Il est aussi conscient de la nécessité d’une adaptation des pratiques culturales mais ne semble
pas préoccupé à sa mise en place. Il souligne un « transfert non optimal » de connaissances tirées de la recherche. Il annonce ne pas connaitre les scénarios proposés sur la région
Il semble intéressé par une valorisation de bonnes pratiques culturales environnementales (labels, pubs,..) même s’il semble dire que cela dépend beaucoup des ressources de chaque
agriculteur.
Il rappelle aussi son intérêt de sa position au sein de la chambre d’agriculture pour ne plus « avoir la tête dans le guidon ». En effet, il semble que les décisions environnementales ne peuvent pas se faire à l’échelle de l’exploitant. Il souligne à plusieurs reprises l’importance
des contrats pour faire avancer les choses.
Annexe 5-B-e : Compte rendu de l’entretien avec François GONTARD
François GONTARD, spécialiste des ouvrages hydrauliques et des apports en eau dans le Gard, est salarié par le groupe BRL.
Le problème majeur de l’eau dans le Gard est son accessibilité. Il existe diverses ressources comme des barrages et des nappes. Cependant ces ressources sont fragiles de par la faible quantité d’eau en période d’étiage et l’augmentation de la demande du fait du changement climatique et de l’augmentation de la population. La ressource la plus importante est l’eau du
Rhône. Le réseau hydraulique régional est fortement développé et permet d’alimenter de
nombreuses zones. Il est aussi bien utilisé pour l’eau potable que pour l’irrigation des zones
cultivées.
Il n’y a pas de problèmes concernant la ressource, en effet le Rhône présent à proximité est très abondant et « inépuisable » pour le moment (<2% de son débit utilisé). 12 m³/s sont en effet prélevés or le débit le plus faible lors de l’étiage est de 600 m³/s. Actuellement, les canalisations ont une capacité de 75 m³/s. Les agriculteurs à proximité de ce réseau bénéficient donc d’un accès à l’eau à coût modéré. La ressource permet l’extension du réseau
mais les agriculteurs qui en auraient besoin n’ont pas les moyens de le financer. Des projets ont ainsi été abandonnés comme l’extension du canal de Nîmes à Alès.
On constate pourtant qu’un autre projet tout aussi conséquent semble prospérer : le projet aqua domitia. Il prévoit une extension à l’ouest du réseau. Mais les problématiques sont totalement différentes. A l’ouest, le réseau alimenterait de nombreux habitants en eau potable et donc les financements ont été trouvés : agriculteurs, BRL, région, département, collectivité.
L’eau du Rhône est dans l’ensemble de bonne qualité. Les canaux jouent d’ailleurs le rôle de
décanteurs.
Pour F. GONTARD, la résolution de la majorité des problèmes de l’eau dans le Gard se fera
grâce à l’exploitation de l’eau du Rhône par l’extension des réseaux. Avec des pressions de
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plus en plus fortes, les financements seront surement plus faciles à trouver. Il considère les retenues collinaires comme trop onéreuses et trop ponctuelles pour pouvoir être une réelle solution. Il préconise de former les agriculteurs à l’économie de l’eau, abandonner petit à petit les cultures gourmandes en eau et concentrer l’agriculture sur les zones irriguées.
Concernant le changement climatique, F. GONTARD remarque que le besoin en eau est très hétérogène d’une année sur l’autre à cause de la fluctuation de la pluviométrie et de l’ETP. Il
n’y a pas de tendance flagrante dans le temps. De plus, il serait intéressant de mener une étude
sur l’efficacité des pluies. Lors de gros orages, beaucoup d’eau ruisselle jusqu’à la mer sans
avoir été utilisée. De plus, les pluies ne tombent pas forcement à des moments propices pour les cultures.
Annexe 5-B-f : Compte rendu de l’entretien avec Dominique GRANIER
Dominique GRANIER exploite le domaine Mas GRANIER - à proximité de Lunel. C’est aussi le président de la chambre d’agriculture. Son exploitation est une entreprise familiale. Elle comprend 40 ha de vigne, vinifiée sur place + 50 ha de terres (tournesol, semences, blé dur, truffes). La vigne est l’activité principale. L’exploitation est tournée vers
l’étranger (20 % du chiffre d’affaires) mais aussi à une clientèle locale (25% du chiffre
d’affaires au caveau).
Les vendanges se font à la machine depuis 1982, date à laquelle D. GRANIER a commencé à travailler sur la ferme. L’incidence climatique est nettement visible sur une vigne plantée depuis 50 ans : entre 1982 et 1992 la vendange se passait vers le 10-15 octobre à 12°C-13°C ; sur les 15 dernières années elle s’est réalisée avant le 15 septembre à 14°Cs. Il n’y a pas
d’arrosage, tout est identique depuis 1982 sur cette parcelle (mêmes ouvriers, même labour, mêmes intrants. Il y a eu parfois des vendanges au 15 août sur du Chardonnay.
Les aléas climatiques perceptibles sont les : - Grosses pluies : qui entraînent des inondations dévastatrices. Les pluies sont rares
durant tout l’été mais sont diluviennes à l’automne (parfois 100 mm d’eau/h). Cette eau est inutile à l’agriculture car elle ne s’infiltre que très peu dans le sol et va ainsi directement dans
la mer. Exemple : sur une pluie d’une demi-heure 50mm sont tombés, 10mm ont été absorbés et 40mm ont ruisselé. La quantité de précipitations sur une année n’a pas évolué. C’est la
répartition à l’intérieure d’une année qui a changé. La quasi-totalité des précipitations ont lieu lors des grosses pluies.
- Sécheresses : Les pluies ne sont pas utiles aussi à cause de leur date. A l’inverse, des
précipitations bien situées peuvent diminuer l’effet séchant. Par exemple, en 2012, après 5
mois de sécheresse de novembre à avril il a plu 400 mm qui ont permis de ne pas irriguer le tournesol. La pluie de printemps peut suffire pour la production estivale.
L’exploitation irrigue la vigne et les grandes cultures grâce à l’eau du Rhône. L’irrigation de
la vigne est aujourd’hui une nécessité car il y a dans la plupart des parcelles très peu de sols. Mais des sols très profonds ne nécessitent pas d’irrigation. Il n’y avait pas un ha irrigué en
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1982. L’irrigation permet un panel de rendements impossibles sans irrigation. La vigne reçoit
environ 1-2 mm/jour. L’irrigation au goutte à goutte permet d’économiser de l’eau par rapport
à d’autres techniques comme le canon (30 à 40 mm en 7 jours). La différence entre une vigne
irriguée et non irriguée est impressionnante au niveau des feuilles, des raisins. Les pratiques culturales ont un impact important sur l’état hydrique du sol (en limitant les sols nus par
exemple). La nature du sol est toutefois très importante dans les besoins en irrigation.
L’eau n’est pas un problème pour l’exploitation avec l’eau du Rhône qui permet de sécuriser
les récoltes en quantité et en qualité. Il y a tout pour réussir : du soleil, de la terre et de l’eau.
Les solutions pour contrer le déficit hydrique sont : 1) le stockage de l'eau 2) l’adaptation des systèmes de cultures pour éviter le gaspillage : goutte à goutte, pratiques culturales (labourer plutôt que désherber)… 3) l’utilisation de l’eau du Rhône
La construction de barrages est aujourd’hui obsolète du fait des coûts et des précautions
environnementales. L’avenir réside plus dans des retenues collinaires à taille humaine (5000 ha irriguables au maximum) mais qui restent cependant très chères. Actuellement, il n’y a
plus d’argent et plus de volonté pour réaliser de tels projets. Le climat change, il faut stocker
l’eau d’hiver là où elle tombe et l’utiliser plus efficacement.
Sans l’eau du Rhône, l’exploitation familiale de D. GRANIER ne serait plus viable. C’est
aussi à sa renommée et à la fidélité de ses clients que D. GRANIER doit son chiffre d’affaire.
La principale préoccupation de D. GRANIER est la transmission de son exploitation mais aussi de l’agriculture en général. Très peu de jeunes agriculteurs s’installent. Ce métier est
très particulier et difficile, peu attrayant pour la nouvelle génération très urbaine. La situation du Languedoc-Roussillon est compliquée avec des secteurs comme l’arboriculture en crise.
Une taxe carbone forte pourrait être une solution au problème de la concurrence étrangère. Le défi de demain sera de produire pour plus de 7 milliards de personnes. Qui aura la terre pour produire ? Les asiatiques, américains investissent massivement dans la terre en Afrique.
Annexe 5-B-g : Compte rendu de l’entretien avec Luc HINCELIN
Luc HINCELIN gère son exploitation d’élevage d’embouche avec sa femme qui l’aide
pour la commercialisation de la viande. Il est situé à Lussan en zone garrigue. Il possède 480 brebis tarasconnaises. Ce sont des brebis très rustiques, qui valorisent bien les parcours. Les moutons ne transhument pas et ne reçoivent pas de complémentation au pâturage. La vente se réalise entièrement en vente directe auprès de 600 particuliers principalement après mi-avril. La viande est valorisée à 13 euros/kg avec une plus-value de 15 euros/agneau. Le nombre d’agneaux produit par an permet de dégager un revenu.15 à 20 agneaux sont tués chaque semaine. L’abattoir est situé à Alès et le produit est livré à domicile.
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En garrigue, la réglementation stipule que les brebis doivent être gardées. L. HINCELIN peut installer des clôtures mais seulement en période hors-chasse car il est conventionné avec la mairie et l’ONF. Les brebis ne pâturent pas l’été dans les bois car le risque d’incendies est
important.
L’exploitation comprend 45 ha de terres labourables autour de la bergerie en prairies
temporaires (luzerne, sainfoin, ray-grass) et 400 ha de parcours. L. HINCELIN récolte du foin bio sur 20 ha chez un ami en échange de fumier. Aucune irrigation n’est possible.
L. HINCELIN a fait évoluer la conduite de son exploitation en fonction du changement climatique. Celui-ci est clairement visible à l’échelle de l’exploitation. Avant 1998, il était
possible de réaliser trois bonnes coupes de fourrages. Depuis la canicule de 2002, une seule grosse coupe au printemps est réalisée. Il n’est pas intéressant économiquement de faucher les
secondes coupes si il y a peu de stock sur pied. L’éleveur préfère faire pâturer les brebis. S’il
ne pleut pas au 10 mai, il n’y aura pas de première coupe. Le but étant alors d’avoir le
maximum de volume. Les automnes sont de moins en moins pluvieux au moins jusqu’à fin
septembre. Depuis 3-4 ans, les éleveurs ne se soucient plus de la météo pour faire les foins début mai car il fait toujours beau. Ceci n’était pas le cas avant, il y avait une certaine
pression. Ce sont ces sécheresses d’automne qui sont les plus inquiétantes. Les automnes ont été globalement très secs sur les dix dernières années. En 2012 par exemple il n’y a pas eu
d’herbe avant le premier octobre. Les brebis étaient sur les parcours au mois de septembre car
il n’y avait pas assez d’herbe dans les prairies temporaires. La quantité d’herbe disponible est
cependant très variable dans le département. Le manque de pluviométrie est plus exceptionnel que le froid car il y a toujours eu des périodes de froid. Il peut geler parfois jusqu’au 8 mai. Il
y a de plus en plus de précipitations très intenses sur un temps réduit (par exemple 200 mm en 3h) puis plus rien pendant des mois. Les garrigues ont été beaucoup sollicitées entre 2003 et 2007 avec les épisodes secs. Il faut ainsi plus de surface pour ne pas abîmer les parcours. Il y a cependant toujours à manger dans les parcours. La garrigue ne nécessite pas beaucoup pour avoir des stocks car le sol est très superficiel.. La base de l’alimentation dans la garrigue est
la filante de Montpellier (Elle ne pousse qu’une fois dans l’année et est similaire aux touffes
de fétuque). Toutefois, les animaux la mangent, même lorsqu’elle est sèche. Elle permet un
bon engraissement des agneaux au printemps car elle est très riche. Les parcours ont perdu de leur valeur suite aux sécheresses de 2003, 2007, 2011. La filante de Montpellier semble régresser. Le changement climatique est surtout visible sur les parcours.
Avant deux agnelages étaient réalisés (printemps et automne) alors que maintenant seulement un au printemps. Jusqu’à mi-janvier les brebis pâturent sans complémentation mais sont rentrées la nuit. Tous les éleveurs qui font des agnelages en automne laissent les animaux à l’intérieur alors qu’avec son système ce n’est pas le cas. Les brebis vides nécessitent moins
d’apports, elles ont seulement des besoins d’entretiens. Par exemple, elles ont seulement
besoin de paille à volonté et de 400g de grains par jour. Les apports alimentaires sont donc moins importants. Le pic des besoins est couplé à la pousse de l’herbe au printemps. Le
changement climatique est donc directement visible et induit des conséquences importantes sur l’élevage. A cause du dérèglement, il n’est plus possible d’avoir une vision sur les 2-3 prochaines années. L’incertitude est forte.
L. HINCELIN s’attache à s’adapter à ces changements. D’autant plus qu’il n’a pas la sécurité
de l’eau. Il travaille tout d’abord sur la nature des prairies temporaires. Elles sont composées
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de sainfoin, luzerne, raygrass ou céréales immatures (par exemple de avoine qui repousse à l’automne après une récolte au printemps). Le sainfoin a la particularité d’avoir de bons
rendements en bio. Il a aussi une bonne résistance en sec. La luzerne quant à elle nécessite beaucoup de traitements. L.HINCELIN n’en sème quasiment plus. S’il pleut, le raygrass permet de faire des stocks. Les bonnes conditions ne sont rencontrées qu’une année sur trois.
Les sols sont argileux donc ils ne peuvent être travaillés quand les conditions sont humides : le labour est réalisé l’hiver et le semis au printemps.
L’irrigation n’est pas intéressante économiquement pour produire seulement de l’herbe. Avec
l’irrigation, il est possible de réaliser 3-4 coupes durant l’année.
A l’échelle du Gard, il y a un peu plus d’ovins que de bovins. Les Causses sont connues pour
leur élevage laitier ainsi qu’un peu de bovins allaitants en Aubrac. A l’inverse, de l’élevage
ovin et caprin est réalisé dans les Cévennes. Il y a de moins en moins de troupeaux dans la garrigue.
Le loup est présent dans la région. Dans les Cévennes, les troupeaux ne sont pas gardables. Les troupeaux pâturent en lâché dirigé. Le système est ainsi en danger avec la présence du loup. Les contraintes sont moindres dans les estives car il y a en permanence un berger et l’utilisation d’un parc de nuit.
Le Gard n’est pas un département d’élevage, il n’y a par exemple qu’un seul technicien
élevage à la Chambre d’Agriculture. Les mouvements collectifs sont inexistants, les éleveurs sont très individualistes. L.HINCELIN est quasiment le seul à engraisser les agneaux alors que la demande est là. Des circuits courts pourraient s’implanter dans la région. Il aimerait
lancer l’Agneau des Cévennes pour offrir une vrai visibilité au produit mais personne ne
semble vouloir s’engager.
Annexe 5-B-h : Compte rendu de l’entretien avec Muriel LEROUX
Muriel LEROUX travaille à la chambre d’agriculture en tant que spécialiste au pôle
eau.
Elle a fait un état des lieux de l’état de l’eau dans le Gard. D’après elle, les arrêtés de
sécheresse sont de plus en plus fréquents mais pas forcement lié à l’état du cours d’eau. En
effet, la DDT (Direction Départementale des Territoires) est en veille sur ce domaine. Ils agissent le plus en amont possible. La dégradation n’est pas flagrante dans la plupart des
cours d’eau. Mais les acteurs visent à anticiper la situation.
Cette dégradation du débit est présente sur tous les cours d’eau, mais essentiellement sur la
Cèze, le Gardon et l’Hérault. Le Vidourle, quant à lui, à un débit très faible toute l’année.
Des études du volume maximal prélevable par secteur sont réalisées. Les résultats
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engendreraient une réduction de 30 à 50% des consommations agricoles.
Il faut donc trouver des solutions pour perpétuer l’agriculture : - Les forages profonds : Prélever l’eau dans des nappes profondes. Cette méthode est peu développée pour le moment. Mais elle semble être une solution de stockage pour les Cévennes. En ce qui concerne la nappe de la Vistrenque, le problème est plus qualitatif (pollution par les nitrates) que quantitatif. Il y a toujours des fluctuations du niveau des nappes.
- Les retenues collinaires : peuvent être la solution idéale. Cependant, elles engendrent différents problèmes :
o Contrainte réglementaire : elles sont impossibles sur les cours d’eau, seulement sur des
petits écoulements. o Contraintes foncières : il est nécessaire d’avoir l’accord des propriétaires de chacune
des rives. o Contraintes de terrain : l’étanchéité naturelle des sols (argile) permet de réduire les
coûts. Dans les Cévennes, le sol est composé de schiste, de sable, le coût pour étanchéifier serait trop important. o Contrainte financière o Contraintes environnementales : doit laisser passer les poissons. L’absence de barrage sur cours d’eau est donc obligatoire. Par rapport aux zones inondables, a Natura 2000, autorisation de défrichement si zones boisées.
Les vraies retenues collinaires (digue avec déversoir de crue + étanchéité naturelle, pente douce) sont au nombre de 10 dans le Gard. Elles peuvent stocker entre 10 000 et 50 000 m³. Le prix de l’eau est de l’ordre de 5 à 8 € le m3.
Il existe de nombreux autres ouvrages de stockage dans les Cévennes (80) mais elles sont plus petits en terme de volume : entre 1500 et 2 000 m3. Le prix des ouvrages est beaucoup plus élevé (15 €/m³).
Dans les Cévennes, le sol est fait de schistes et de sable et la pente est forte. Les retenues collinaires ne semblent pas adapter.
Les retenues semblent être une solution mais plus spécifique à l’usage personnel.
Il y a de nombreux projets de bassins (30) dans le Gard.
Un projet de retenue collinaire nécessite 6 mois à un an avant d’aboutir.
- Le Rhône est utilisé en partie comme substitution à la Cèze, au Gardon. Cependant, on ne peut pas acheminer er l’eau du Rhône sur tout le département en raison du relief.
Le réseau équipé de BRL est sous exploité du fait de sa construction qui n’a pas tenue assez
compte des besoins. Ce qui est paradoxal, c’est le manque de demande des agriculteurs sur les zones équipées en irrigation.
Le coût d’eau de BRL est beaucoup moins cher que celle des retenues collinaires.
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- L’irrigation : il y a un gain probable de 20% entre l’irrigation par aspersion et la
micro-irrigation. La micro-irrigation est mieux vu par le grand public.
En conclusion, nous pouvons dire que la majorité des cultures ne se feront plus sans eau. D’après Mme LEROUX, le zonage des cultures est utopique. En effet, les agriculteurs ne voudront pas changer de cultures ou de lieux.
Annexe 5-B-i : compte rendu de l’entretien avec Charles-Henri MOULIN
Charles-Henri MOULIN est enseignant-chercheur à Supagro-INRA. Il a travaillé en tant que coordonnateur scientifique sur le projet CLIMFOUREL.
CH. MOULIN considère que des actions collectives pour aider les éleveurs à s’adapter au
changement climatique peuvent être menées.
Actions collectives :
L’apport de paille dans la ration est à envisager seulement pour les bovins viande, elle permet d’assurer le fonctionnement du rumen. Elle est à compléter avec un aliment énergétique
comme le tourteau.
Il est difficulté de mettre en place un groupe d’aide, les éleveurs ont souvent un comportement opportuniste. La demande est variable selon les années et les aléas climatiques, d’où des difficultés pour contractualiser la vente de paille. Existence de contrats entre
agriculteurs et éleveurs en Ardèche mais ce fut un échec. Des éleveurs qui doivent acheter tous les ans sont plus réceptifs à des contrats.
Les projets de pâture, fauche loin du siège de l’exploitation soit en individuel soit en collectif
nécessitent une coordination entre les acteurs territoriaux.
L’achat/vente d’ensilage est dans l’Aveyron, un système bien organisé avec des maïsiculteurs
du Tarn. La distance maximale est estimée à 100 km pour ne pas augmenter trop fortement les coûts.
L’usage de la forêt se limite à l’espace allaitant. La situation est différente selon les départements. ONF ne gère pas que la forêt : pelouses alpines par exemple qui sont louées à des agriculteurs.
Le projet CLIMFOUREL en Aveyron a été possible car c’est un département avec une
dynamique agricole forte. Ceci n’est pas réalisable partout. L’action a été portée par la
Chambre d’agriculture.
Variétés méditerranéennes :
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Utilisation de variétés tempérées actuellement surtout, les recherches ne sont pas portées sur les variétés de région sèche car le marché n’est pas assez porteur. L’idée de François LELIEVRE (chercheur à l’INRA) est de travailler sur les deux en même temps pour voir s’il
y a des différences entre les deux en fonction des événements climatiques possibles (gelée tardive, sécheresse). Attention, ce n’est valable que pour des prairies temporaires alors que le Gard compte surtout des prairies permanentes.
Réduction chargement animal :
Ceci ne va pas révolutionner le problème mais c’est un levier possible. Les caprins dans le
Gard sont soit laitier soit fromager. Le cahier des charges en Pélardon impose une production de fromages avec du lait frais d’où une production laitière répartie sur l’année pour une
meilleure visibilité de la coopérative au niveau des acheteurs. La commercialisation des agneaux gras est moins sujette à ceci car la France est largement déficitaire en ces produits.
Augmentation surface :
Pose question au niveau du nombre d’agriculteurs que l’on veut maintenir et de leur salaire. Si
beaucoup de surface par exploitation : tissu agricole faible. Si peu de surface par exploitation : quel revenu agricole en tirer ?
Annexe 5-B-j : Compte rendu de l’entretien avec Thierry PIANETTI
Thierry PIANETTI est technicien grandes cultures à la Chambre d’agriculture du
Gard.
En Camargue, le riz est particulièrement présent, on observe des cultures sèches sur le reste du département. Il y a des problèmes de montée du niveau de la mer. Le milieu artificiel se présente comme un subtil équilibre entre les entrées du Rhône et les eaux de mer.
Il distingue trois types de grandes cultures sur le département : - Autour du Rhône : La culture du tournesol y est très développée et présente de forts intérêts économiques. - Autour des Coteaux : Le rendement y est beaucoup plus faible. La culture du pois chiche se développe - Tous les périmètres irrigués : Depuis 1985, l’arrachage des vignes au nord du Gard a
entraîné une augmentation des terres pour la grande culture. Une baisse des revenus a entraîné une arrivée de l’irrigation. Aujourd’hui un tiers des surfaces irriguées sont destinées aux
légumes de plein champs, un tiers aux vignes et un tiers pour les grandes cultures.
-Perceptions du changement climatique :
Le changement climatique est surtout observé grâce à deux indicateurs agro climatiques : la date de semis et la reprise de végétation au printemps. Si le semis est réalisé trop tard, le blé
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dur n’aura pas les rendements escomptés. Si le semis est réalisé trop tôt, on observe un
emballement de la végétation au cours de l’hiver.
La date de semis est maintenant beaucoup plus tardive (mi-novembre). Les cultures de fin août/début septembre sont maintenant plus difficiles à mettre en place à cause d’une
diminution des orages.
La moisson se réalise une semaine plus tôt qu’il y a 30 ans et ceci est en augmentation depuis
une dizaine d’années. Il semblerait qu’il y ait un passage pluvieux jusqu’à mai puis une
période beaucoup plus sèche. Après mi-septembre, « l’été indien » est plus chaud et plus sec.
La conclusion est que tout est difficile à prévoir.
L’adaptabilité de la filière : -le levier « date de semis » qui est très intéressant. (Même si l’on perd des jours « semables ») - les exploitations sur équipées peuvent travailler dans les conditions climatiques optimales -certains agriculteurs tentent le semis direct qui permet de gagner du temps -les aides PAC (DPU) permettent une diversification et donc de produire les cultures les plus rémunératrices
La gestion de l’incertitude :
« Ça démotive » car il est difficile de caler des itinéraires techniques. Il existe une grande différence entre les exploitations en sec et en irrigation. Sur les cultures en sec, tout ajout d’intrants est vu comme un coup de poker. Les agriculteurs attendent pour semer et parfois
c’est trop tard. Il y a un vrai problème de motivation. « Sans eau, on est de plus en plus fragile ». Sur les cultures irriguées, il y a beaucoup moins d’hasard, l’incertitude est faible.
L’irrigation permet de sécuriser les rendements. Cependant, elle est mieux valorisée sur des
cultures de fruits et légumes. Les exploitations nouvellement irriguées ont donc tendance à diminuer au fur et à mesure le parcellaire destiné aux grandes cultures.
Le classement de la zone comme « zone à handicaps » pourrait être particulièrement intéressant pour l’obtention d’aides supplémentaires. Cependant ce sont des négociations tenues au niveau européen. Les intérêts de chacun ne sont pas au même niveau. La réponse n’aura pas lieu avant fin 2013. Certains élus comprennent l’enjeu de l’eau mais cela est très
récent.
Le lien avec la recherche :
Il espère que le projet CLIMFOUREL fera réagir les gens sur l’enjeu de l’eau et regrette la
diffusion pas assez généralisés des résultats. En effet, CLIMFOUREL est l’un des seuls
projets de recherche qui répond à la demande des chambres d’agricultures. Il faut développer
ce genre d’initiatives.
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Annexe 5-B-k : Compte rendu de l’entretien avec Xavier PICOT
Xavier PICOT est responsable du pôle eau, territoire et élevage à la Chambre d’Agriculture du Gard.
Nous avons tout d’abord abordé la question de l’eau. 4 thématiques semblent ressortir : la ressource, la quantité, la qualité de l'eau, notamment avec la nappe de la Vistrenque et la question du milieu (marais, étangs de Camargue)
L'important n'est pas la quantité de pluie tombée, qui a très peu évolué, mais la répartition de celle-ci. Deux solutions majeures existent pour l'agriculture plus une troisième pour l’instant
peu envisageable: -stockage pluvial de l'eau d'automne et d'hiver par des retenues collinaires, la topologie du Gard s’y prêtant assez bien. Ceci nécessite des fonds privés et publics car l'agriculteur n'est pas capable de le financer seul. La difficulté principale de cette solution réside donc dans la recherche de financements. De plus, à partir d’une certaine surface, la
construction de tels ouvrages est soumise à autorisation. Les structures devront être bien réfléchies, utilisables par le plus grand nombre d’agriculteurs possibles et le plus près possible
des terres irriguées, on parle de « ceinture irriguée » (cordon de terres irriguées autour de la ressource en eau). Ceci implique des remembrements autour des ouvrages hydrauliques, opérations qui sont longues et compliquées pour satisfaire tous les acteurs. De nouveau, acheminer l’eau entre deux points très éloignés n’est pas une solution viable du point de vue de la dépense énergétique si le réseau n'est pas gravitaire. -utilisation de la ressource en eau abondante qu'est le Rhône. Mais acheminer l’eau
entre deux points très éloignés n’est pas une solution viable du point de vue de la dépense
énergétique si le réseau n'est pas gravitaire. -utilisation des eaux non conventionnelles (eaux de station d'épuration, d'usines, de mines) après traitement. Cette solution se heurte à la culture française mais n'est pas négligeable. Par exemple, 60 millions de m3 d'eaux usées produites par Nîmes ne sont pas réutilisés.
Le projet de mener un aqueduc jusqu’à Alès paraît peu envisageable du point de vue
énergétique : il faudrait au moins 4 stations de pompage. A l’inverse les 2m de précipitations annuelles chaque année sur Les Cévennes appuient la solution du stockage de l’eau. Mais la
question du stockage de l’eau est tabou, le projet ayant déjà été envisagé et abandonné il y a
20 ans. Pourtant, la pratique montre que ce projet est réalisable. Le point négatif est que l’eau sera chère : au-delà de 0.30 euros/m3.
L’irrigation est la meilleure réponse au changement climatique et diminue considérablement
ses effets sur l’agriculture.
Nous avons ensuite considéré la question de l’élevage. L'élevage est la filière qui en souffrira le plus dans le futur avec l'augmentation de l'aridité. L'évolution des pâtures est assez surprenante.
La première préoccupation du monde agricole doit être l'adaptation des systèmes (modification des ventes, calendrier de travail, cultures produites) aux nouvelles contraintes. Ce n'est pas en changeant quelques éléments par rapport à aujourd'hui que les problèmes
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seront réglés, les changements doivent être réalisés en profondeur.
La diversité des exploitations du département est un avantage et un inconvénient. Il faut trouver des réponses aux problématiques de chaque filière.
L'arrivée d'espèces exotiques qui pourraient être cultivées dans le Gard paraît un peu fantasque pour l’instant.
L’approvisionnement en fourrage des élevages est un problème récurent. Il accompagne les sécheresses. 4 types d’élevage (plus un moins important) sont présents dans le Gard : -caprin lait : système souple, bien valorisé. L'alimentation se fait sur les parcours au printemps. Quelques élevages produisent leurs fourrages, en général ils sont très dépendants de l'extérieur. -mouton allaitant : pâturage dans le Gard toute l'année sauf en été où ils transhument dans les Alpes ou Cévennes car il n'y a plus d'herbe dans le Gard. -bovin viande : indissociable de la production fourragère -filière équine : idem avec une demande qui tend à s'accroitre -taureaux de Camargue
Ce sont des systèmes extensifs particuliers qui occupent bien l'espace. Il y a un jeu d'offre et de demande selon les années (achat lors des années sèches, pas d'achat lors d'années pluvieuses). Il existe une vraie réflexion sur la contractualisation. De plus, de très bons fourrages sont possibles avec les eaux du Rhône.
Débouchés agricoles :
Les Contrats territoriaux environnementaux (CTE) ont été remplacés par les MAE. Il est difficile de construire un modèle économique avec ça. Il existe des mesures plus locales comme des contractualisations. Ex : RFF (réseau ferré de France) et chambre d’agriculture-> financement de la production de luzerne (avec arrachage de vergers) car construction voies ferrés sur terres agricoles. Le but est de créer du lien et un complément de revenu.
Les circuits courts sont possibles techniquement mais difficiles à mettre en œuvre : -métiers différents (faire de la vente s’apprend, nécessite certaines qualités) -pas d’outils logistiques : chaîne de froid, nettoyage, début conditionnement produits. De grosses entreprises ont le marché. -espace libéral : concurrence européenne entre autres. L’intégration du bilan carbone
limiterait la commercialisation de produits venant de loin.
Il faut tempérer le développement des circuits courts car il n’y aura pas de la place pour 3000
agriculteurs. Par exemple la quantité de pommes consommées dans un restaurant scolaire de Nîmes est de 20 tonnes, soit un demi-hectare de vergers.
Il faut faire de la production, être compétitif. Il y a de la place pour l’intensif écologique. Le
sol a été un peu oublié sur les 15 dernières années.
Relation chercheurs-monde agricole :
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L’écart entre les deux est grand. Les laboratoires travaillent sur des techniques qui ne concernent pas ou peu les agriculteurs.
NATURA 2000 (1/3 de la surface du Gard) a fait découvrir un gisement de biodiversité remarquable. Les agriculteurs et chasseurs notent un appauvrissement global du petit gibier de plaine. L’enherbement des vignes permet indirectement de limiter cette perte tout en apportant
une tenue du sol non négligeable pour le passage des engins agricoles. Les maladies subies par les agriculteurs dues au produits phytosanitaires et leur prix a fait évolué les consciences. Il existe un vrai brassage sociétal entre les agriculteurs et le reste de la société dans le Gard.
Réflexion sur le changement climatique :
-forêt :
Elle a grandi (+ 15% en 15 ans). Elle stocke de la biomasse si elle est bien entretenue. Il n’y a
pas beaucoup de réflexion dans la plaine sur l’expansion de la forêt. La garrigue est un peu
idéalisée. Il y a une réflexion à avoir sur des espèces intéressantes. La forêt crée des microclimats plus humides qui peuvent être utiles pour le futur (en lien avec le changement climatique).
La Chambre travail sur l’agroforesterie, la production d’huile végétale pour remplacer le
pétrole.
-les agriculteurs jouent sur la séquestration du carbone dans le sol. La fixation est importante avec les prairies. La connaissance du sol contribue à cette séquestration.
La population agricole a beaucoup vieilli (350 départs à la retraite pour 30 installations aidées). Ce ne sont plus des agriculteurs mais des propriétaires agricoles (spéculation sur les terrains à bâtir). On n’incite pas actuellement les gens à s’installer. Il y a eu cependant plus de
200 demandes pour l’atelier installation de la chambre d’agriculture en 2011.
Le vin de qualité, l’oignon doux sont des secteurs qui résistent bien. Au sud de Nîmes, sur la Costière, en Camargue la résistance est faible.
La Costière de Nîmes présente de nombreux avantages : -l'eau est à disposition -contexte pédo-climatique exceptionnel avec pas de gel sur la partie Sud, ce qui en fait une zone où la culture primeur est intéressant. -un vaste panel de cultures est possible -> bien pour circuit court
Néanmoins, elle est très convoitée pour l'urbanisation. Un choix doit être fait, les élus doivent avoir le courage de sanctuariser le lieu.
Très peu de régions en Languedoc-Roussillon ont autant d'atouts.
Le développement des fruits à noyaux dans les années 1980 a fragilisé le territoire avec des grosses exploitations qui n’ont pu faire face aux coûts de production.
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Annexe 5-B-l : Compte rendu de l’entretien avec Christian PINET
Christian PINET est responsable de la filière arboriculture, arbres fruitiers à la CA du Gard.
C. PINET s’est proposé de faire un état des lieux de la situation de l’arboriculture et de l’eau
dans le Gard en 2012. Il soulève tout d’abord la question de la baisse des rendements liée au stress hydrique, notamment rendements dans le milieu viticole. De plus, le niveau des nappes phréatiques est très bas. La nappe de la Vistrenque est d’ailleurs soumise à la première
restriction de l’histoire. Les précipitations entre janvier et octobre, date de notre entretien, ne
dépasse pas 350 mm.
Pour autant, l’année 2012 est une année record en rendement pour l’abricot car les conditions climatiques très favorable sur le Gard. Il y a eu un grand froid avant la levée de dormance, un automne doux et un printemps pluvieux. De plus, les conditions ayant été défavorables dans les régions concurrentes, les exploitants du Gard ont pu bénéficier de l’augmentation des prix
faces à la non présence de la concurrence. Ce concours de circonstance n’est toutefois qu’un
évènement ponctuel.
3500 ha d’abricot sont plantés dans le Gard. L’abricot semble être une filière d’avenir. Il n’y a
toutefois pas d’exploitation basée sur cette seule filière et les abricots sont toujours en association avec pêchers ou cerisiers. La Costière représente d’ailleurs une énorme
exploitation de pêche, qui est permise par la présence de l’irrigation. Les abricots du Gard
sont de plusieurs variétés, différentes de celles cultivées en Espagne.
L’année record de 2012 sur les abricots est toutefois à contrebalancer par la crise générale sur
les fruits à noyau. Cette filière subit la concurrence espagnole, mais aussi la pression des aléas climatiques auxquels elle est particulièrement vulnérable (gel après levée de dormance, quantité de froid parfois non atteinte …)
Le pêcher semble se montrer plus plastique aux variations climatiques, moins perturbé que l’abricotier et le cerisier.
De façon plus générale, aujourd’hui les conditions climatiques sont de moins en moins homogènes temporellement et spatialement. On constate toutefois que des orages de grêle très localisés sont de plus en plus présents. Ces dernières années, le climat dans le sud a tout de même montré quelques tendances : un automne doux, un hiver avec des alternances chaud-froid, un printemps froid et humide, un été très chaud.
Ceci a pour conséquence surs l’arboriculture une avancée moyenne de la floraison de 2 à 3 semaines depuis les années 1980-1990. Pour le moment, les arbres fruitiers s’adaptent
relativement bien aux nouvelles conditions climatiques. Mais on craint qu’un jour le froid ne
soit pas assez intense pour la levée de dormance. De plus, les fluctuations chaud-froid en hiver rendent les arbres très vulnérables aux gels qui se produisent de plus en plus fréquemment après la levée de dormance. On constate enfin un endurcissement faible lié aux températures douces en automne et les gels sont d’autant plus dévastateurs.
Il convient alors de bien choisir ses variétés pour que la phénologie permette une bonne
101
résistance au gel. Il faut pour cela utiliser des variétés lowchiling. L’avancée de la maturité
amène aussi les exploitants à revoir leur itinéraire technique.
Quelques cultures encore anecdotiques dans le Gard ont peut-être de l’avenir ou du moins
méritent notre attention. On peut citer par exemple le kaki, la cerise, le noisetier, la grenade. La grenade se cultive relativement bien et tous les sous-produits peuvent être utilisés pour du sirop, etc… La figue peut aussi sembler intéressante. Le figuier est très résistant, et pour l’instant ses fruits se vendent bien et à bon prix. Mais ce marché haut de gamme n’est permis
que parce que la concurrence est très faible. Une augmentation de la production entrainera surement la destruction de cette niche actuelle et une surproduction. De plus, le figuier a des besoins très élevés en eau.
Le premier axe d’action est l’économie de l’eau. Les terrains irrigués comme la
Costière réalisent un gros gaspillage de l’eau. Le phénomène inverse a lieu dans Garrigues où il n’y a pas d’accès à l’eau. On y observe la disparition des vergers en sec. Il est en effet
quasiment impossible de produire des fruits à noyaux sans irrigation. Celle-ci permet d’étaler
la production jusqu’à fin aout pour les espèces tardives et donc contourner la concurrence internationale. On peut ainsi se demander si l’on va vers une relocalisation des cultures et une
spécialisation des zones.
Annexe 5-B-m : Compte rendu de l’entretien avec Alexandre PROIE
Alexandre PROIE tient une exploitation à Saint Gilles de 85 ha de pêche et d’abricot
qu’il a créée en 1996. Il s’est installé dans la région pour profiter de conditions culturales
qu’il n’avait pas dans la Drôme. Aucun agrandissement n’est prévu. Il travaille seul avec sa femme. Il réalise le conditionnement sur l’exploitation avec une capacité de 800 m² de
stockage
Nous avons tout d’abord abordé la question du changement climatique. Très peu de grandes
tendances sont observées car le climat est très variable. Les saisons apparaissent moins définies qu’avant. Quelques évènements sont à relever, notamment le froid du mois de février
2012 a été vital pour la floraison. Les gels d’hiver sont peu fréquents (1998-2001-2008-2012) mais ravageurs. En 2008, seulement 15 % du tonnage a été réalisé du fait des événements climatiques. Les agriculteurs peuvent être tentés de souscrire des assurances récoltes, grêles mais celles-ci sont très onéreuses (8 à 12 % du capital). Il n’y a plus d’aides de l’état
aujourd’hui en cas de problèmes.
A. PROIE s’informe de l’actualité des recherches scientifiques. Il participe d’ailleurs au
programme Efipêche (enregistrement des temps de travaux, des rendements, des calibres) pour se situer par rapport aux autres et voir si le travail est réalisé correctement.
L’ensemble des cultures de l’exploitation sont irriguées. L’irrigation est raisonnée et calculée
en fonction des besoins des plantes et est réalisée en aspersion ou en micro-aspersion. Approximativement, un ha de pêcher a besoin de 5000 m3/an. La production de pêche sans
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eau est impossible et le rendement en abricot serait très faible, même si les sols de la Costières sont profonds. L’eau est très chère comparativement à la Drôme (trois fois moins chère), à
cause apparemment du coût des installations d’acheminement et leur maintenance. L’objectif
est donc de réduire le volume d’eau d’irrigation par le biais des installations. Par rapport à
l’aspersion, le microjet permet de réduire de 30% les volumes. Le paiement de l’eau se fait de la façon suivante : cotisation annuelle d’abonnement au mètre cube et paiement de la
consommation au mètre cube. Toutes les plantations de vigne implantées dans la zone sont irriguées pour obtenir le rendement visé et diminuer le degré d’alcool des vins. Le vin est majoritaire sur la Costières, la pêche est de moins en moins présente du fait de la situation économique de la filière. Il y a également beaucoup de centres équestres et de maraîchage.
Au niveau économique, 2012 est une année normale pour la pêche, le marché n’était pas non
plus saturé en volume pour les abricots. Mais ces dernières années étaient très mauvaises pour la pêche à cause de la concurrence, les ventes se faisaient parfois à perte. Les Espagnols vendent par exemple des pêches à 0,60 euros/kg ce qui est inférieur au prix de production des pêches françaises. Le cahier des charges est relativement strict mais il n’apporte pas de plus
value, c’est simplement un « droit » de travailler avec les GMS. Les circuits courts peuvent être une solution mais seulement pour les petites exploitations. Il est impossible de vendre 85 ha de vergers en circuit court. La filière est toutefois en train de se réorganiser. Les pêchers sont peu à peu arrachés et remplacés par des abricots qui sont nettement plus rentables. Mais ceci implique des modifications dans le calendrier de travail. De plus, la réorganisation de la filière arboricole est difficile du fait que les productions ne débutent que 3 ans après la plantation. Cette particularité rend cette filière beaucoup plus vulnérable aux aléas climatiques que les cultures annuelles qui peuvent être changées d’une année sur l’autre. De plus, les
fruits étant une denrée périssable, ils sont vendus dans des situations qui ne sont pas toujours avantageuses. Ensuite, l’installation hors-cadre familial est aujourd’hui impossible. La
création de l’exploitation de A. PROIE en 1996 ne serait pas réalisable aujourd’hui. En tenant
compte de la plantation, de l’irrigation, des intrants, de l’entretien amener un ha de verger à production coûte aujourd’hui de 20 000€ à 25 000€ alors qu’en 1996 15 000€ suffisaient. De
plus, les banques ne veulent plus financer ce type d’investissement. La pression foncière est
aussi importante avec les centre-équestres et l’urbanisation. Le coût de production peut encore être réduit mais certaines étapes comme la récolte ne peuvent se faire avec une machine. La différence avec l’Espagne se fait au niveau du coût du travail : 6-8 euros/h en Espagne contre 13 euros/h en France. Or ce coût ne va pas diminuer en France avec la d’exonération sur les heures supplémentaires de l’ordre de 1,6 €/h prévue au mois de janvier. Ceci et à démultiplier
par le 100 saisonniers (principalement étrangers) que l’exploitation emploie de mi-avril jusqu’à fin septembre. Malheureusement, une homogénéisation au niveau européen paraît un peu utopique.
Annexe 5-B-n : Compte rendu de l’entretien avec Sophie RESSOUCHE
S. RESSOUCHE est employée par le Syndicat mixte des nappes Vistrenque et Costières.
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Le syndicat mixte des nappes Vistrenque et Costières s’occupe de suivre l’état de ces nappes.
Il existe plusieurs nappes dans le Gard : la nappe de la Vistrenque, la nappe de l’Urgonien, les
nappes des Costières et bien sur les nappes alluviales. De nombreux prélèvements sont effectués sur la nappe. Il est difficile de les chiffrer car pour les prélèvements agricoles et particuliers, ils ne sont souvent pas déclarés. Voici les chiffres et estimations actuels : - collectivité : 14 millions m³/an - industrie : 3,2 millions m³/an - agricoles : estimation 4 à 9 millions m³/an - particuliers : estimation 2 à 3 millions m³/an
Actuellement, on observe une recharge moindre des ressources en eaux souterraines. En effet, les étés sont plus secs et plus chauds. De plus en plus d’arrêtés préfectoraux sont déposés sur
les nappes. Mais S. RESSOUCHE ne s’inquiète pas actuellement de l’état des nappes. En
effet, selon les piézomètres, les nappes ont déjà été aussi basses, voir plus encore. En théorie, les nappes devraient encore moins se recharger dans le futur. En effet, les évènements pluvieux se concentrant en évènements extrêmes, l’eau ruissellerait et ne participerai pas bien
au remplissage des nappes. Mais les phénomènes de remplissage des nappes sont complexes et mal connus. Un des projets du syndicat mixte est la caractérisation du fonctionnement des nappes. Il devrait être clos dans 2 ou 3 ans. Un autre paramètre difficile à prévoir est le taux de nitrate futur. En effet, si les nappes sont moins remplies, les nitrates devraient être plus concentrés. Mais moins de remplissage des nappes signifie moins de lessivage des nitrates. On ne sait donc pas si nous allons nous confronter à une hausse du taux de nitrates ou à une baisse. Il est possible que cela dépende de chaque évènement pluvieux.
Nous avons ensuite abordé la question des autres ressources en eau. S. RESSOUCHE a un avis mitigé sur les réserves collinaires. En effet, la capacité de rétention d’eau est relativement
réduite. De plus elles ont de forts impacts sur l’environnement. Elles ralentissent
l’écoulement des cours d’eau. Concernant l’eau du Rhône, il ne faut pas la considérer comme
une ressource inépuisable. En effet, en prélevant trop, on diminue le débit du fleuve et on rencontre très vite des problèmes de salinité de plus en plus loin dans les terres. Le Rhône a ainsi été soumis récemment à un arrêté sécheresse. S. RESSOUCHE nous a transmis plusieurs documents très utiles à notre compréhension de la ressource en eau dans le Gard.
Annexe 5-B-o : Compte rendu de l’entretien avec Claude RIVIER
Claude RIVIER est président de la coopérative des vignerons de Chusclan. Il est aussi premier vice-président de la CA.
Les raisins rouges sont très concentrés en sucre. Le stress hydrique permet d’augmenter la
concentration de ces derniers, mais aussi des tanins et des aromes. Cependant il doit être maîtrisé. Il est bénéfique s’il intervient environ 30 jours avant les vendanges. Les millésimes
trop secs voient leurs rendements diminuer et leurs aromes disparaître.
Un stress hydrique trop intense suivit de pluies peut même faire éclater les grains.
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Idéalement, les vignes sont soumises à deux stress. Le premier en juillet pour freiner le développement de l’appareil végétatif au profit de l’appareil reproductif. Le deuxième quinze
jours avant les vendanges, qui entraine le flétrissement des grains et la concentration des solutés.
Il y a eu des politiques d’arrachage depuis 1963 et de restructuration des sols pour répondre à la crise viticole. 20 000 ha ont ainsi étés arrachés en 3 ans, subventionnés par la PAC. Ceci a permis une évolution de la production de la région vers la qualité. Depuis 2012, l’arrachage
continue mais n’est plus subventionné. Parfois, il est plus rentable de ne pas arracher une
parcelle et de la laisser à l’abandon. Cela pose de nombreux problèmes sanitaires, les parcelles abandonnées étant facilement contaminées, devenant vecteur de nombreux parasites ou maladies, qu’elles transmettent par la suite aux parcelles les plus proches. La
réglementation permet d’imposer de défricher les terrains en bordure de bois pour cause risque incendie, mais c’est le seul cas.
Pour continuer sur l’aspect historique tout en commençant à aborder la question du
changement climatique, C. RIVIER releva que durant les années 40 à 90, les rendements sont quantitativement stables. Depuis 10 ans, il existe de nombreuses catastrophes (liées au climat méditerranéen : sècheresses, inondations, gel). 2002 fut d’ailleurs l’année de la plus forte
inondation jamais connue dans la région. Durant l’hiver 2011, les températures restèrent
élevées jusqu’au 10 février puis -10°C accompagné d’un fort mistral pendant 3 semaines, qui
entrainaient un ressenti de -20°C. Les vignes ne s’étant pas suffisamment endurcies au froid à
cause des températures douces on très mal survécu, particulièrement les vieilles vignes qui ont connut un taux de mortalité de 15% à 30%. C. RIVIER conclut que depuis 10 ans, on ressent dans la région un impact climatique fort.
D’une façon plus globale, les vendanges ont été avancées de 3 semaines par rapport à
l’époque de son père. Les changements climatiques ont entrainé des changements dans la composition des vins. Par exemple, le vin de Grenache contient actuellement plus de sucres qu’auparavant ce qui induit un taux d’alcool trop élevé. Ce cépage a donc été remplacé. Mais
pour réaliser un changement de cépage tout en gardant une AOC, il faut 10 ans (recherche, développement, nouveau cépage, nouveaux fruits …). Toutefois, l’un des aspects positifs du
changement climatique est la possibilité nouvelle de faire du cépage tardif. De plus, les raisins qui ne mûrissaient pas avant pourront mûrir.
Il existe toutefois un handicap naturel dans la région : les précipitations sont espacées mais intenses, ce sont les évènements Cévenols (600-800 mm/an). Ce handicap se trouve de plus en plus renforcé.
Pour lutter contre ce handicap, C. RIVIER préconise l’irrigation. Le Rhône n’est d’ailleurs
qu’à 6 km. Cependant les parcelles ne sont pas équipées. Un projet d’acheminement de l’eau
du Rhône et d’équipement des parcelles avait été envisagé mais avorté par manque de financements. Toutefois, la situation a changé et les pressions environnementales se font de plus en plus importantes, ce qui peut être bénéfique à la réalisation du projet. Si le projet reprend, il faudra qu’il touche aussi bien les industriels que les agriculteurs. Ceci facilitera la recherche de financements.
Les barrages sont devenus inenvisageables en France, pour des raisons écologiques et
105
sociales. Le projet du barrage sur la Cèze en est d’ailleurs le témoin. La haute vallée de la Cèze va d’ailleurs devenir site Natura 2000. Les pompages vont donc être interdits.
Beaucoup de gens soutiennent que la vigne n’a pas besoin d’irrigation. Mais c’est
aujourd’hui, une nécessité pour réguler les rendements, atténuer la sécheresse, garantir la qualité du vin (problème au niveau des AOC).
Le changement climatique est une grande préoccupation de C. RIVIER. Mais ce n’est pas la
seule. Les crises viticole et économique, et le manque d’organisation se rajoutent à ce
paysage. Ils expliquent en partie les problèmes de revenus des viticulteurs. Pour palier aux crises, les prix ont été diminués. (Ex : AOC Côtes du Rhône : En 2000: 130 €/hL, en 2004: 80 €/hL). La rentabilité s’en est trouvée affectée et des arrachages encouragés par les subventions
citées précédemment s’en sont suivis. Les prix ont remonté depuis 2010 (exemple : AOC Côtes du Rhône : en 2012: 110 €/hL).
Un autre évènement est aussi susceptible de bouleverser la filière. L’Europe débat
actuellement sur la suppression des droits à l’implantation pour la vigne. Actuellement, ces
droits permettent de réguler le marché et d’éviter le surplus de production. La suppression de
ces droits entraînerait non seulement une explosion de la concurrence nationale et internationale, mais aussi peut-être une diminution de la qualité du vin français.
Nous avons conclu l’entretien en abordant la question de la communication avec le milieu de
la recherche. La communication est bonne et on a plutôt parfois à faire face à de la surinformation.
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Annexe 6 Analyse impacts Développement Durable du projet
Notre projet s’inscrit pleinement dans une politique de développement durable puisqu’il traite
des trois grands domaines relatifs au développement durable : l’économie, l’écologie et le
social. Ceci est vrai sur plusieurs thèmes (basés sur la stratégie Nationale du DD et la norme ISO 26000) GOUVERNANCE
L’objectif du projet est de faire réfléchir, débattre les différents acteurs des filières à propos de l’avenir de l’agriculture dans le Gard. Le projet va permettre de réveiller les esprits sur la
nécessité de prises de décisions communes quant à la question du changement climatique. Notre projet se situe en amont, avant la mise en place d’un atelier de réfléxion sur cette
problématique. Par ailleurs, la CA essaie cependant de faire valoir les spécificités climatiques du Gard et du sud de la France en général en militant pour que la PAC tienne compte d’un indice d’aridité
comptabilisant seulement les pluies et évapotranspirations du printemps-automne. Ceci présente un intérêt majeur pour la classification du Gard comme zone à handicap.
SOCIETE
C’est surtout la sensibilisation des particuliers et des élus au changement climatique qui risquent d’être modifiés. Même si chacun avait déjà sa propre sensibilité au changement climatique c’est surtout l’idée d’une nécessité d’avancer dans la même direction qui ressort de
notre projet. Les consommateurs doivent comprendre les enjeux sociétaux qui pèsent sur l’agriculture. Les
agriculteurs doivent communiquer sur leur métier, leurs pratiques pour faire réfléchir et interpeller. Il en va, à plus grande échelle, de l’autonomie alimentaire d’un pays. Comment se
nourrira-t-on quand nous n’aurons plus les moyens d’importer des produits de l’étranger ? ENVIRONNEMENT L’agriculture est une filière très consommatrice en eau : arrosage, irrigation, pompage, … . Le but du projet est d’adapter l’agriculture du Gard au changement climatique. De nombreux conseils portant sur la gestion de la ressource en eau ont pu être dégagés pour gaspiller au minimum et optimiser l’eau de pluie. Afin de récupérer l’eau de pluie, plusieurs projets de création réserves collinaires sont
envisageables. ECONOMIE : Une meilleure utilisation et gestion de l’eau pourrait permettre à plus d’agriculteurs de tirer un
revenu décent de leur activité en sécurisant les rendements des productions en quantité et en qualité. Néanmoins la volatilité actuelle que connaissent les prix à cause de la mondialisation ne rend pas claire l’évolution de l’agriculture du Gard si bien que l’agriculture a souvent
l’impression de se vivre « jour le jour ».
Résumé
Le changement climatique est aujourd’hui au centre des débats au niveau national comme
mondial. Les événements climatiques extrêmes (sécheresses, inondations), présents dans le Gard,
posent question quant à leur évolution dans le futur. L’agriculture en est une des premières victimes
du fait de sa dépendance aux conditions climatiques pour la production. C’est dans ces conditions
que la Chambre d’Agriculture du Gard a désiré initier un projet de réflexion à propos de l’adaptation
aux effets du changement climatique sur l’ensemble de l’agriculture du Gard.
L’étude de références bibliographiques et de données climatiques a permis de réaliser un
état des lieux à l’échelle mondiale puis locale du changement climatique. Il ressort une grande
diversité de situation entre les zones du globe. Ses impacts ont été caractérisés notamment à
l’échelle du Gard.
La seconde partie du projet a consisté en la rencontre d’acteurs de l’agriculture gardoise
(élus de la Chambre d’Agriculture, agriculteurs et techniciens) dans le but de comprendre les
problématiques communes ou spécifiques à chaque filière. A l’issue de ces rencontres, nous avons
établi des thématiques à débattre. Il ressort que le maintien de l’agriculture dans le Gard passe
principalement par une gestion intelligente, concertée de l’eau car l’agriculture au niveau
méditerranéen n’est plus envisageable sans irrigation. L’orientation de l’agriculture dans le Gard
comme à l’échelle nationale passe par des choix politiques.
Mots clés
Changement climatique
Elevage
Arboriculture
Viticulture
Grande culture
Irrigation
Incertitude
Pour citer cet ouvrage : [KERGOAT Hélène, GUIGUE Antonin, REDIFI Issam, THURET Hélène, 2013.Changement climatique et conséquences sur l’agriculture du Gard. Projet d’élèves ingénieurs n°3. Montpellier SupAgro. 45 pages] Montpellier SupAgro, Centre international d'études supérieures en sciences agronomiques de Montpellier, 2 place Pierre Viala, 34060 Montpellier cedex 02. http://www.supagro.fr