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MeganHarold

INSUPPORTABLE...MAISÀTOMBER!

Volume6

ZORA_006

1.Secretdefamille

Lesrésultatsdutestdepaternitéd’Emmasontenfinlà…MaispourquoinepaslesdonneràNeil?Qu’est-cequinepeutpasêtreditpartéléphone?

Etilfallaitqu’ilstombentmaintenant!Enpleinefêtedefamille,alorsquemonpèresorttoutjustedel’hôpitaletquejemesensprêteàmerapprocherdelui!Quenoussommestousensemble,mesamis,mafamille,EmmaetNeil,quenouspartageonsunvraimomentdebonheur!

Mais il faut lever les doutes. Savoir si Martin Caine est le père d’Emma ou si c’est un autrehomme…

Ilfautqu’onsachesiMartinamentious’iladitvrai...

Ilfautqu’onsache.Maintenant!

JemetourneversNicolemaiselleadéjàcompris.

–Allez-y,c’estimportant!mepousse-t-elleenvoyantmonhésitation.–Mais…etPapa?–Jeluiexpliquerai.Filezmaintenant!–NeditesrienàEmma,intervientNeil.Onluiparleraànotreretour!

L’hélicoptèredeNeilesttoujourslàetnousentronsàl'intérieur.Quandnousnousélevonsdanslesairs, je regarde le haras rétrécir sous mes yeux. Les résultats sont tombés, il s’agit de l’avenird’Emma.Nous étions heureux tous ensemble il y a cinqminutes. J’ai peur que nous ne soyons ànouveaubouleversésparcequenousallonsapprendre.

Neilesttenduluiaussi.

–Ilsauraientpumeparlerautéléphone!s’agace-t-il.–Peut-êtrequ’ilsontautrechoseàt’apprendre?dis-jedoucementpouressayerdel’apaiser.–J’espèrequ’ilsnemefontpasvenirjustepourmedirequejenesuispaslàpèred’Emma…Jele

saisdéjà!

J’attrapemontéléphonepourenvoyerunmessagecommunàFloreetEmilio.

[Désoléepourledépartprécipité!Lesrésultatsdutestsontarrivésetimpossibledelesobtenirpartéléphone.NeditesrienàEmma,onnesaitpascequinousattend.Nora.]

[T’inquiète,ongèreEmma!Emilio][Tenez-nousaucourant!Flore]

***

Àlaclinique,noussommesaussitôtemmenésdanslebureaudumédecinquis’estoccupédenouslorsdesprélèvements.Neiln’apaslâchémamain,encoremoinsdesserrélamâchoire.Devantnostêtesinquiètes,ledocteurdécided’allerdroitaubut.

–Neil,vousn’êtespaslepèred’Emma,commence-t-il.Maisvouslesaviezdéjà.Onapoussénosrecherchesavecuntestdefiliation,commevousnousl’aviezdemandé,etnousvousavonstrouvéunliendeparenté.

–Jecroissavoircequevousallezm’annoncer…souffleNeil.–Emmaestvotredemi-sœur,cequisignifie…–Quemonpèreestaussiceluid’Emma,termineNeil,froidement.–C’estexact. Iln’yapasdedoutepossible, le testADNest trèsprobant.Sivoussouhaitezêtre

vraimentsûrs,ilfaudraitquevotrepèreviennefaireletestdepaternité,nousexpliquelemédecin.

Neiletmoiéchangeonsunregard.Martinaétéabjectquandilaparléd’Ellen,lamèred’Emma,ladernièrefois.Ilasurtoutniél’avoirmiseenceinte…

Est-cequ’ilseraitpossiblequ’ilnel’aitjamaissu?J’aicommeundoute…

Jecroisplutôtqu’ilnousamentietqu’ilasalilamémoired’Ellenpourseprotéger!

Jesuisécœurée.S’ilétaitenfacedemoi,jenesaispascequejepourraisluifaire!Jenesuispasune violentemais là… Et Emma qui hérite du pire des salauds comme père ! Qui ne s’occuperad’ailleursjamaisd’elle!

JesensqueNeilprendsurluienprésencedumédecin,maisjem’attendsàcequ’ilexplosedèsquenousseronsseuls.

Aprèsquelqueséchangesaveclui,ilnousquitteenfinpournouslaisserdiscuter.Neilsembleavoirreçuuncoupdemassue.Le regard fixéaumur, il resteunmomentsilencieux. Il lui fautdu tempspourencaisser.Jerespecteça.Jenesaismêmepasquoidire.

–Mon père nous amenti sur tout !Comment est-ce qu’il a pu coucher avec unemineure et lamettre enceinte ?! finit-il par exploser, poings serrés, sourcils froncés en se levant brusquement.Pourquoiest-cequ’Ellennem’enajamaisparlé?!

–Tun’avaisquedix-septans,qu’est-cequetuauraispufaire?–Jecomprendsmieuxlafuited’Ellenetsafamille…Cettegrossesseétaitsordide!Monpèreadû

acheterlesilencedesBradford,imaginelescandalesiças’étaitsu!Ilauraitfinienprison!Enpleinecampagneélectorale,cettegrossesseéclaboussaittoutlemonde!

–Nolant’aprispourlepèred’Emmaetdoncpourleresponsabledeleurfuite.Ilacruquec’étaitàcausedetoiqu’ilavaitdûpartiretmettrefinàsacarrièreici!pensé-jetouthaut.

–Lemalentenduétaitfacile…Ellenetmoipassionsbeaucoupdetempsensemble,sesouvientNeil.S’ilavaitsuquec’étaitMartin,ils’enseraitprisàlui.

Il esthorsde luiet jene suispasenmesurede lecalmer.Martinnenousa sortiqu’un tissudemensonges. Une vie a été brisée, une famille complète a été bouleversée parce que Caine père acouchéavecunemineure.

Etl’amépriséeensuite…

C’estignoble!EtEllen?Qu’est-cequ’ellearessenti?Ill’atraitéecommeunemoinsquerien…

–SiEllenm’avaitparlé,j’auraispulesaider,nousn’enserionspaslà,murmureNeil.

Peut-être quemes grands-parents seraient encore vivants…Tout s’est écroulé dans nos vies dèsl’instantoùEllenadécouvertqu’elleétaitenceinte…

Commemesdominosquitombentlesunsaprèslesautres…

–Jedoisallervoirmonpère.Maintenant!Qu’ilm’expliquecequ’ilafait!ditNeilenouvrantlaporte,muéparlacolère.

Dansl’étatoùsetrouveNeil,jecrainslepire.Maisjen’arriveraipasàenlevercetteidéedesatête.Impossibledeleretenir,ilestbeaucouptropdécidéàendécoudreavecsonpère.

IlnenousfautpasvingtminutespourrejoindrelesbureauxdeMartinCaine.JesuisNeil,inquièteà l'idéede levoirperdrecomplètementsonsang-froidetenvenirauxmains.Jesuisrévoltée,moiaussi,devoircommentsonpèreaputraiterdesêtreshumainsavecautantdeméprisetd’indifférence.Maisjenemefaisaucuneillusion.MartinCainen’estpasdugenreàserepentir,nimêmeavouersesfautes.Jecrainsquenousallionscettefoisencorenousheurtercontreunmur.

DevantlaportedubureaudesonpèreetalorsqueNeilentresanss’annoncernifrapper,j’hésiteàlesuivre.Cesontdeshistoiresdefamille,c’estpeut-êtreprivé?

Ohetpuismerde!J’aiétédirectementmêléeàtoutça!Çameconcerneaussi!

–Çadevientunehabitudechez toidedébarquer ici ! lanceMartinàNeilen levant la têtedesesdossiers.Alors,dequoiviens-tum’accusercette fois?Nora,vousêtes làaussi !Si j’avais suquenousferionsuneréuniondefamille,j’auraispréparéquelquespetiteschosesàgrignoter!

Cettefaçonqu’iladejoueravecnosnerfsàchaquefois…

–Etmoi,j’auraispuemmenertafille!lâcheNeilsansprendredegants.–Mafille?Encoreundetesdélires?demandeMartin,sarcastique.–Tusaistrèsbiendequijeparle!exploseNeilsifortquej’ensursaute.Tusavaisqu’Ellenétait

enceinteetquetuétaislepèredecetenfant!–Tunesaisriendutout!s’énerveMartinàsontourentapantdupoingsursonbureaupourfaire

tairesonfils.–C’estterminé!Tunepeuxplusmentir!LestestsADNsontlàpourprouvertapaternité.Tune

peuxplusnier,c’estfini!assèneNeilavecunsourireglacial.Noussavonscequetuasfaitetcequetuvaux…Riendutout!

Martinnerépondpas,maisilbouillonne.Sent-ilqueleventestentraindetourner?

–TuaspayélesBradfordpourqu’ilssetaisent,c’estça?!demandeNeilensebaissantau-dessus

dubureaupourfairefaceàMartin.–J’aifaitcequ’ilyavaitdemieuxpourvousprotéger,tamèreettoi!s’écrieMartin,passantdu

rouge-colèreaublanc-peur.–Pourteprotégertoiettesaffaires!Nememêlepasàtoutça!–Tuneterendspascomptedel’impactqu’auraitpuavoircettegrossessesurtonavenir!J’aifait

cequ’ilfallait!craqueMartin.J’aiverséunepensionpourcetteenfant,etunegrosse.LesBradfordn’ontjamaismanquéderienetc’estgrâceàmoi!

–Commentpeux-tutraiterlesgenscommedespions…souffleNeil,écœuré.–Ilsn’ontpasbeaucouphésité,crois-moi!–Tun’achèteraspaslesilencedetonfils!Necomptepassurmoipourcacherl’existencedema

sœur!continueNeil,enfonçantsonpèreàchaquemot.Jevaism’occuperd’elle,lapréserverdetoietdecettesordidehistoire.Jevaisessayerdeluifaireoublierlegéniteurqu’ellea!

–Tumemenaces?! J’aidesavocats, jemedéfendrai ! Je traînerai ta chèrepetiteEllendans laboue ! sedéfendMartin, l’œilmauvais.Tachèrepetite sœur regretterad’êtrevenue jusqu’icipourconnaîtresafamille!Légalement,jesuissonpère,j’aitouslesdroitssurelle!

–Tunelatoucheraspas!Nideprès,nideloin!Jetrouveraiunmoyenpourquetupaies!MaisjeprotégeraiEmma,partouslesmoyens!

Lesdeuxhommessejaugentduregard.L’unestnobleetvictorieux,l’autres’enfoncedoucementdanssonfauteuil.Martinn’estqu’audébutdesachute.Legouffres’ouvresoussespiedsetiln’aurabientôtplusrienpourseraccrocheretéviter ladescenteauxenfers.C’est terminé.Pour luien toutcas.

–Quandjepenseàtoutcequenousavonstraversécesdernièressemaines,partafaute!reprendNeil.Cen’est pasmoi queNolan aurait dûmenacer,mais toi !C’est toi qui aurais dû te sentir endanger,pasmoi,niNora!Etsesgrands-parentsn’auraientjamaisdûmourirdelasorte!

Enprononçantmonnom,Neilsetourneversmoi,blême.

–JecomprendspourquoiNolannevoulaitpasdenotrebonheur,pourquoiilcherchaitàcequetumequittes.Parcequ’ilcroyaitqu’Ellenetluiavaientétémalheureux…parmafaute!

Puissetournantdenouveauverssonpère:

–Tuasbrisédesviesettun’enasrienàfaire!Tuméprisestoutlemonde!Sij’avaiscomprisplustôtcequ’ilsepassait,onauraitpuaiderNolan!Maistuaspréférémentirencoreetencore!

Neils’éloignedubureausansquittersonpèredesyeux.

–Considèrequetun’asplusdefils.Etn’essaiemêmepasdepenserquetupourraisaussiavoirunefille.C’esttroptard.

Martinnerépondrien.Ilsemontreimpassiblemaintenant.Neiltournelestalonsets’enva.Çanepouvait pas finir autrement entre eux, et c’est ce que Neil pouvait faire de mieux. Quitterdéfinitivementcettefamilleaveclaquelleiln’arienencommun.NeplusrienavoiràfaireaveclesCaine.

Neilvientdeselibérerdeleurinfluence.Ilvaexisterpourluimaintenant.

Quandjevaispourlesuivre,lavoixdeMartinmefaitsursauter.

–AufaitNora,pourvotrehôtel,monoffretienttoujours!

Jeneréagispastoutdesuite,surprise.Lorsquejefinisparcomprendre,jemeretiensdenepasmejetersurluietluidiretoutcequej'aisurlecœur.

Sonfilsvientderompretoutlienavecluietc’esttoutcequeçaluifait?!

Lemépris…Moiaussijesaisjouercettecarte!

***

Dansletaxiquinousramènechezlui,Neilestrefermésurlui-même.Silencieux,leregardperdudehors, il semble régler ses comptes avec lui-même, faire le point. Je n’osepas l’interrompre.Cemomentluiappartient.

Cen’estqu’unefoisarrivédanssonsalonqueNeilfinitparouvrirlesvannes.Ilabesoindetoutlâcher.

–Monpère…Jenesupportepascequ’ilafait…Touscesdramesqu’onauraitpuéviters’ilavaitétéplusresponsable!Nolan…Tesgrands-parents…Nora,jemesenstellementcoupableparrapportàtoi.TuasétéenpremièrelignepourdeshistoiresquineconcernaientquelesCaine…

–Tunepeuxpast’envouloir,tunesavaisriendetoutça,répliqué-jeenmeglissantdanssesbras.Maintenant,ilfautpenseràEmma,etàcommentonvaluiannoncerça:«SalutEmma,tonpèreestunpauvretypequiadétruittoutetafamille.Maistoutvabien,tuasundemi-frère!»

Neil secoue la tête. Avec le caractère de notre petit hérisson, il va falloir y aller très, trèsdoucement!

–Tun’esplustoutseulmaintenant,continué-jeplusdoucement.Tuessonfrère,ellecomptesurtoi.CommeEllenl’afaitenl’envoyantverstoi.

–Ellen!Jeluienveuxdenepasm’avoirparlé,nousétionsamis!s’insurgeNeil.–Elledevaitavoirhonte…Etjepensequeçaneservaitplusàrienderéveillerlesvieuxdémonssi

elleavaittrouvéunéquilibreavecsafille,ladéfends-je.

Nous restonsunmomentdans lesbras l’unde l’autre.Neil s’apaisedoucement.Lanuit l’aiderasansdouteàtournerlapageetàallerdel’avant.Laviolencedecetéchangeavecsonpèreserapeut-êtredifficileàoublier.

J’appelleleharaspourdonnerquelquesnouvelles.Lafêtedoitêtreterminéeetl’hélico,renvoyéparNeil, a dû ramenerEmilio, Flore etLevison àNewYork. Je tombe surNicole quim’apprendqu’Emmaaposéquelquesquestionssurnotredépartprécipité,maisqu’ilsonttousréussiànoyerlepoisson.

–Nousviendronsdemaindèsquepossible,déclaré-je.Nousluidironstoutauharas.–Prenezvotretemps,merépond-elledesavoixbienveillante.Nousseronslàpourvousaiderà

traverserça.–EtPapa?Pastropfatiguéparsafête?–Tu le connais, il avoulu semontrer fortmais il s’est endormidans son fauteuil ! Il était très

contentdevousentoutcas!–Ohoui,jeleconnaisbien!Ilvavouloirenfaireplusqu’ilnepeut!–Comptesurmoipourl’enempêcher!ritNicoleavantderaccrocher.

JerejoinsNeildanssachambreetmeglissecontrelui.Toutçanousaépuisés.Maisnoussommesensemble,noussommesdeuxàaffrontercettenouvellesituation.

C’estànousderéparerlepassémaintenant…

2.Aucœurdelanuit

Neilestdéjàautéléphonequandjelerejoinscematin.Jen’entendsquedesbribesdesadiscussionmais je comprends qu’il s’agit d’Emma. Quand il me retrouve quelques instants plus tard, il estsouriantmaisencoreunpeutendu.

J’aihâtequ’ilretrouvesafougue!Quecepoidsdupassélequitte,pourdebon…

– J’ai du nouveau ! dit-il en prenant le temps de m’embrasser tendrement. Emma était sous laresponsabilité de Nolan après le décès d’Ellen. L’avocat qui s’occupe d’elle me demande de larameneràSanFranciscopourlaplacerenfamilled’accueil.

–Tuneluiaspasditquetufaisaispartiedesafamille?demandé-je,inquiète.– Je lui ai expliqué rapidement que la situation avait évolué et promis que je le rappellerai. Je

pensequ’ilfaudraqu’onaillelà-baspourréglertouslespapiers.–On?–Nemelaissepasyallerseul,c’estasseznouveaupourmoi,cettenouvelleresponsabilité…–Tevoilàpromuaurangde«GrandFrère»!Queleffetçafait?plaisanté-je.–Peur…grimaceNeil. Jeme sens incapable d’élever une ado…Tume connais, je ne suis pas

quelqu’undetrèsfréquentable…–Tuvasdevoirarrêterde te faire remarquer !acquiescé-jeensouriant.Tes frasques, tescoups

médiatiques,finis!–Maisjeneveuxpas!protesteNeil.

J’éclatederiredevantsatêtepaniquée.

–Pourquoichanger?Tudéfendsdesidéesjustes,çameparaîtêtreunbonexemplepouruneado!Et tu es le mieux placé pour savoir ce que donne une éducation trop rigide ! ajouté-je pourl’encourager.

–Etmesvoyages?Montravail?Jeseraiabsentpourelle!Çaaussi,jesaiscequeçadonne.Ellemedétesteraavantsamajorité!

–Tul’emmèneraspendantsesvacances?Lerêvepouruneado,voirdupays,rencontrerd’autrescultures!Jesuissûrequetuyarriverastrèsbien.

–J’aimeraisêtreaussiconfiantquetoi,ditNeil,dubitatif.–Etjeserailà!IlyaEmilio,Flore,mêmeLevison…Tun’espastoutseulavecEmma,lerassuré-

je.Tum’asaidéepourl’hôtel,c’estàmontour.Iln’yariend’insurmontableàtoutça.Ceserajusteunpeucompliquéaudébut,ilfaudratrouverquelquesajustements,maisçaira.

C’estdingue,jenesuismêmepasinquiètepourl’avenir!C’estparcequ’ilsedessineauxcôtésdeNeilqueriennem’effraie?

Jesavaisquel’amourrendaveugle,maislà…Jem’apprêteàl’aideràéleveruneado!

Neilplongesonbeauregardbleudanslemien.J’arriveàluiarracherunsourire.

–J’ail’impressionqu’onestentraindefonderunefamillesanspasserparlacaseneufmois,mesouffle-t-il.

–J’aidubol,jeneseraipaslaméchantebelle-mère!Justeunesortedegrandesœur!répliqué-jeenriant.

–Ettuesprêteàvivreçaavecmoi?medemandeNeilànouveautrèssérieux.Aveclecaractèrequ’ellea,çarisqued’être…mouvementé…

–Jecroisqu’onavécupirecesderniers temps…Etje t’aime,alors jesuisprêteàbeaucoupdechosespourtoi!

–Jevaisdéfinitivementm’attacheràtoi,faisattention!–Parcequeçan’étaitpasdéjàfait?!

Nous rions tous les deux, heureux de nous retrouver sur lamême longueur d’onde, et de nousretrouvertoutcourtpourunmomententête-à-têteavantlesprochainsjoursquis’annoncentchargés.JemelaissemêmeallerquandNeilm’entraînedanssachambre,unpetitsourireencoin.

***

Avantde repartirauharas, j’envoieunmessageàBettinapourprendredesnouvellesde l’hôtel.Elle gère à la perfection, mais je la sens un peu stressée quand même. Bien qu’elle soit ultra-compétente,leHellingtonabesoindemondepours’occuperdelui.Lesclientsaussi!

Ilfautabsolumentquejemeconsacredenouveauàl’hôtelquandtoutseracalmé.

Àl’approcheduharas,nouséchangeonsun regard tendu.CommentEmmavaprendre tout ça?Commentest-cequ’ellevaréagir?Moncœurseserre,jesuistristepourelle.Jesaisqu’ons’apprêteàluioffrirunavenirsereinoùellenedevraitmanquerderien,maisellen’enaurapasconsciencetoutdesuite.

Ellevaavoirbesoindetemps…

Neiladécidéqu’illuiparlerait.Ilestdésormaissaseulefamille,ilacomprisetacceptécerôle,mêmesicen’estpasencore très simpledans sa tête.Toutefois ilveutprendrecette responsabilité,fairemieuxquesonpèreaussi.Neiln’estpasunhommeàfuirdevantlesobstacles.

Unrapide«jet’aime»murmuréetnousdescendonsdelavoiture.Nicolenousaccueillesurlepasdelaporte,sonéternelsourireauxlèvres.

–Vousvoilà!J’aipréparéuncaféetquelquesbiscuits,dit-elleenfermantlaportederrièrenous.EmmaestavecLouisetRobertdanslesécuriespourlemoment.Vousêtesprêtsàluiannoncer?

–Oui,répondNeilens’asseyantdevantunetassevide.C’estànousdejouermaintenant.

Nicolehochelatête.Jeluiaitoutracontéautéléphone.

–Jevaislachercher,ajoute-t-elleaprèsnousavoirserviuncafé.Jeneseraipastrèsloinsivousavezbesoindemoi.

Lestressmonte,jemesensàlaported’unorald’examen.Neilestétonnammentplusserein.IlasortilesrésultatsdestestsADNetlesaposéssurlatable.

Despasprécipitéssurlegravier,dehors,sefontentendre.Emmaestvenueencourant.Lorsqu’elleentredanslacuisine,entenued’équitation,ellealesyeuxgrandsouvertsd’impatience.

–Alors?!demande-t-elleaussitôt,sansmêmeprendreletempsdedirebonjour.–Assieds-toiEmma,nousdevonsparler,luiproposeNeil,trèscalmement.

L’adojetteunregardversmoipuissetourneversNeil.Jelasenstendue.

Depuisletempsqu’elleattendaitça…

–Emma,jenesuispastonpèremaisnoussommesbiendelamêmefamille,commenceNeil.Jesuis tondemi-frère et nous avons lemêmepère,MartinCaine.Tunepourras pas compter sur luipours’occuperdetoi,maismoi,je…

– Vous devez être contents ! l’interrompt-elle en criant presque. Vous allez pouvoir vousdébarrasser demoimaintenant !Me renvoyer à San Francisco ! J’ai perdumamère, je n’ai pluspersonne!Jesaisquemononcleestmort,jesaiscequ’ilafait!Jenesuispasunbébé,jesaislirelesjournaux!Jen’aipluspersonne,maisjenepartiraipasaveclesservicessociaux!

Sansattendreunequelconqueréactiondenotrepart,Emmas’enfuitdelamaisonencourant.Neiletmoiéchangeonsunregardinquiet.Cetteréactionsoudaineneprésageriendebon!

–Ilfautterminercettediscussion,medit-ilenselevant.

Jehochelatêteetnouspartonsdelamaisonàlarecherched’Emma.L’adoestrapide,impossibledemettrelamaindessus.Nicolenousrejointetnousapprendqu’ellenel’apasvuepasser.Louis,auloin,nousfaitsignedesécuriesetvientversnousencourant.

–Qu’est-ce qu’il s’est passé avec Emma ? nous demande-t-il, inquiet. Elle vient de prendre uncheval,elleestpartieendirectiondelaforêt!

–Ilfautlarattraper,lanuitvabientôttomber,rétorqué-jeaussitôtenregardantleciel.Onvientdeluiapprendrequiétaitsonpèreetelleatrèsmalréagi!

–OK,jevaispréparerleschevaux!Ellerisquelachutesiellen’estpasconcentrée!lanceLouisenseprécipitantverslesboxes.

–Jeviensavecvous!intervientNeil.–Toi?Maistunesaispasmonteràcheval!–C’estàmoid’aller lachercher ! insisteNeil. Jedoisêtre là,elledoitvoirque je suis làpour

elle!–Cen’estpasentebrisantlesvertèbresquetuluiserastrèsutile!riposté-je.– Neil a raison Nora, il doit être là, nous interrompt Louis. Prends ce cheval, pars devant, je

m’occupedelui!

JeregardeLouisavecsurprise.Illedéfendmaintenant?!

Jeneperdspasdetempsetsautesurlechevalquevientdesellermonami.J’aijusteletempsde

croiser le regard inquiet de mon père quand il sort de son bureau. Je dois absolument retrouverEmmaavantlanuit.Ceseratropdangereuxpourelleetpournoussionnevoitriendutout!

J’aibeaucoupchevauchédanscesboisquandj’étaisplusjeune,j’enconnaistousleschemins.EnrevanchesiEmmaacoupéets’estengagéedanslaforêt,jevaisavoirplusdemalàlaretrouver.Lalumièrebaisse,ilfaitdeplusenplussombre.J’essaied’allervite,derepérersatraceenmêmetemps.Lessabotsdesonchevalontlaissédesempreintesdanslaterrehumide.

Pourvuquecesoitelleetpasuncavalierdel’après-midi!

Emma,arrête-toi!

Derrièremoi,j’entendslesvoixdeNeiletLouisappelersonnom.Ilsvontmoinsvite,forcément.Je m’arrête, j’essaie d’écouter. Un cheval au galop fait un bruit sourd et dans ces bois, le son atendanceàrésonner.

–Emma!crié-jeàmontour.

Sielleestlancéeàviveallure,ellenepeutpasnousentendre…

J’ai peur qu’elle ne heurte une branche, qu’elle fasse unemauvaise chute, qu’elle se brise unevertèbre…

Elleesttropjeunepourfinirenfauteuil!

Jemeremetsaugalopàmontour,m’éloignantunpeuplusdanslaforêt.J’ail’impressionquelanuit tombebeaucoupplusviteaujourd’hui!Louism’ainstalléunefrontalesurmabombeavantdemeladonner.Jepeuxvoiroùjevais.Cen’estpasdutoutlecasd’Emma!

Qu’est-cequiestentraindesepasserdanssatête?SiseulementelleavaitécoutéNeil!

Ellesesentabandonnée,ellepeutfairen’importequoi!

Çabougedevantmoi. Jeplisse les yeuxpourvoir cequi vient àma rencontre, espérant à voixhautequecesoitEmma.

Merde!

C’estsonchevaletilestseul!Ilpasseàcôtédemoiàtoutevitesse,effrayantmamonturequejepeineàmaîtriser.IlestarrivéquelquechoseàEmma!

S’ilpouvaitparleretmedireoùellesetrouve!

L’inquiétudegagneduterrainsurmonsang-froid.Elleadûtomber,elleapuseblesseretelleestincapable de rentrer. J’avance doucement, j’appelle. Je continue de suivre les traces au sol.L’obscuritéestpresquecomplète.Jebifurquesurunpetitsentier,m’enfonceaumilieudesarbres.

Là!

Ellegîtausol!

Jedescendsdemonchevaletl’attacheàlapremièrebranchevenue.

Cen’estpasdutoutlemomentdeleperdreluiaussi!

Je me précipite sur Emma. Elle semble avoir perdu connaissance. Heureusement, dans saprécipitation,elleapenséàmettreunebombesursatête.Jenepeuxpaslabougeraurisquedeluifairemal. Je n’arrive pas nonplus à voir sonvisage, tourné vers le sol. Je sais seulement qu’ellerespireetqu’elleaquelqueségratignuressurlesmains.

–ÇavaallerEmma,jesuislà,luidis-jedoucement.

J’essaiedegardermoncalme.Ilfautappelerlessecoursmaintenant!

Moncœurbatàcentàl’heuredansmapoitrine.JemelèveetappelleLouisetNeildetoutesmesforces.Pourvuqu’ilssoientdansleboncoindelaforêt,jesuispartiesansmonportable!

J’entendsungalopetvoisarriverunelumière.C’estLouis!

–Elleestlà!crié-jeaussitôt.Retourneauharas,appellelessecours!Elleaperduconnaissance!–Jefonce!s’écrieLouisàsontourenrebroussantchemin.

Neilarriveplusdoucementetdescendtantbienquemaldesoncheval.Ilaprisungrosrisqueenessayantdenoussuivre,luiquinesaitpasdutoutmonter.

–Nelatouchepas,lepréviens-jelorsqu’ilseprécipitesurEmma.Jel’aitrouvéecommeça.Onnepeutrienfairedeplusqu’attendre.

Jedécrochelessellesdeschevauxpourattraperlestapisquilesprotègent.Emmanedoitpasavoirfroid,tantpispourleurconfort!Jelesposedélicatementsurlajeunefilleeteffleuresescheveux.

–TienslecoupEmma,lessecoursarrivent!–Pasdedoute,elleadusangCainedanslesveinesàréagirauquartdetourcommeça,souffle

Neil,sanssourire.

Pasunseulinstantilnelaquittedesyeux.Nousrestonssilencieuxdanslanuit.Seulesleslumièresdenoslampesnouséclairent.Autourdenous, lecalmeestcomplet.Parfois, lebruitd’unebranchequisecasse,d’unanimalquipasse,ouleschevauxquis’agitentviennentromprelesilence.Ilfaitsifroid…Jefrissonne,souffledansmesmains.L’attenteestinterminable.

Soudain,lebruitd’unhélico.

–Lessecours,dis-jetouthaut.– Un hélicoptère ? Mais il ne va jamais réussir à atterrir dans cette forêt ! s’inquiète Neil en

regardantautourdelui.– Il y a une clairièreplushaut, onymet les chevaux en été… Ils vont venir vitemaintenant, le

rassuré-je.

Etjenemenspas.Nousentendonsrapidementlesvoixdessauveteurs.

–Parici!crié-je.

Aumêmemoment,Louisnousrejointaugalop,essoufflé.

L’équipedesecouristesarriveetnousnousécartonspour la laisser travailler.Délicatement, l’und’entreeuxausculteEmma.Sonvisageestimpassible.

–Onl’emmène!lance-t-ilàsescollègues.

Lacivièreestposéeparterre,auxcôtésd’Emma.Aprèsluiavoirmisuneimpressionnanteattellequiimmobilisesatête,sanuqueetsondos,ilslabougenttrèsdoucement.Jeretiensmonsouffle.Àmescôtés,jesensNeilsecrisper.

Lechefdessecouristessetournealorsversnous.

–Ondoitluifairedesradiospoursavoircequ’ellea,nousapprend-ilrapidement.Quivientavecnous?

–Moi!s’écrieNeil.Jesuissonfrère!

C’estunvéritablecriducœurquivientdesortirdesabouche.

Luiquidoutaitencorecematin…

Ilseretourneversmoietm’embrasserapidement.

–Jeterejoinsàl’hôpital,luidis-jeavantdelevoirpartiràlasuitedessecouristes.

Nousattendonsunpeu,Louisetmoi,incapablesdebougeravantledépartdel’hélicoptère.Puisjecraque. L’adrénaline retombe. Toutes les tensions de cette recherche, le stress, la peur, j’ai besoind’évacuer.Louismeprenddanssesbras,m’offrantleréconfortd’unami.

–Elleestentredebonnesmainsmaintenant,meconsole-t-il.

Je souffleunboncoupet essuiemes larmesdu reversde lamanche. Jen’ai plusqu’uneenvie,retrouverNeilàl’hôpital,voirEmma.

Etespérerqu’ellen’aitrien!

QuandNicolenousentendarriver,elleseprécipiteversnous.

–Vateréchauffer,jem’occupedeschevaux,melanceLouisenattrapantlesrênesdemamonture.

Je rentre dans lamaisonoùunenouvelle tasse fumantem’attend.Monpère est là lui aussi. Sestraitssonttirés,ilal’airfatigué.Vieilliaussi.

–Alors?medemande-t-ilinquiet.– Les secours viennent de l’emmener, déclaré-je en collantmes doigts sur la tasse. Je dois les

rejoindreàl’hôpital.–Tuessûrequetupeuxconduire?m’interrogeNicole.–Oui,çavaaller…

Nicoles’empressedemepréparerquelquessandwichsetunthermosdecafé.Ellemetendtoutçaaumomentoùjepasselaporte,avantdemeserrerdanssesbras.

–Appelle-nousdèsquetuasdunouveau!Nousl’aimonscettepetite!

Je faisdémarrer lavoituredeNeil. Je faisunepetiteprièreàmamère,àmesgrands-parents,àEllenaussi.Emmaaencoretellementdechosesàvivreavecnous!

3.Oscassésmaiscœursentiers

Auxurgencesdel’hôpital,jeretrouveNeil,assisdansuncouloir.Quandilm’aperçoit,sonvisagesedétend.Ilsouritmême!

–Alors?luidemandé-jelorsqu’ilmeprenddanssesbras.–Ellea reprisconnaissancedans l’hélicoptère,m’apprend-il. Je la regardaiset j’aisentiqu’elle

serraitmamain…J’aitentédelarassurerlepluspossible.–Tuétaislàpourelle,ellel’acompris,dis-jedoucement,presqueémue.Elleestoùmaintenant?–Elle passe des examens, des radios.Onm’a demandé d’attendre là et je n’ai aucune nouvelle

depuis!

Neils’écartedemoiets’approchedubureaudesinfirmières.Ilestinquiet,profondémentinquiet.Jelesuisaussi,maisjenepeuxpasm’empêcherderemarqueràquelpointilsembleinvesti,touché,responsabled’Emma.Ilpensaitnepasyarriver.

Etçaparaîttellementnaturelfinalement!

–MonsieurCaine?appelleunevoixdansnotredos.

Nousnousretournonsd’unseulmouvement.

–Jesuislemédecinquis’estoccupéd’Emma,dit-ilennousserrantlamain.Rassurez-vous,ellevabien.Ellesouffred’unlégertraumatismecrânien,etalepoignetcassé,c’esttout!

–Est-cequ’onpeutlavoir?demandeNeil.–Biensûr.Onlagardejustepourlanuit,maisellepourrasortirdemain,terminelemédecind’un

tonrassurant.

Letonchaleureuxdumédecinnousenlèveunechapedeplombsurnosépaules.

Emmavabien…

Nousentronsdoucementdansunechambreà la lumière tamisée.Lesstoressont tirésetseule lalampeprèsdulitestallumée.Quandj’aperçoisEmmadanscegrandlit, jenepeuxm’empêcherdemeprécipitersurelleetdelaprendredansmesbras.

–Tunousasfaitpeur!

Emmabaisse les yeux, un peu honteuse.Neil ne s’approche pas tout de suite. Il reste en retrait,silencieux. L’adolescente ne dit rien non plus. Son regard va de l’un à l’autre. Est-elle encorecontrariéeparcequ’onluiadit?Est-cequ’ellenousenveutencore?!Jenesupportepascetteidée,aprèsl’inquiétudequ’onvientdevivre.J’explose.

– Tu aurais pu te blesser, te faire très mal ! Tu n’es plus toute seule Emma, nous sommes là

maintenant,àtescôtés.Nousn’avonspasl’intentiondet’abandonner,nideterenvoyerd’oùtuviens,déclaré-jesubmergéeparmonaffectionpourelle.

J’essaiedemereprendre,d’êtreclairepourqu’ellecomprennequenous tenonsàelleetqu’elledoitnousfaireconfiance.

–Neiln’estpastonpère,maisilrestedetafamille!C’esttonfrèreetjepeuxt’assurerqu’ilestexceptionnel.Iln’apaseupeurdemonteràchevalpourpartiràtarecherche,ettusaisquecen’estpasdutoutsontruc!Tuasvucequeçaadonnéàlafête!

–C’estpour çaque j’aipréféré rentrer enhélicoptère, ajouteNeil en s’approchant, sourire auxlèvres.

Emmasouritàsontour,sesouvenantsansdoutedesperformancesdeNeilcommecavalier.Jemepoussedulitpourlaisserlaplaceàcenouveaugrandfrère.

–Maintenantquetunepeuxplusfuir,jevaisterminercequejevoulaistediretoutàl’heure,luidit-ildoucement.Jem’occupedetoidésormais.Jevaismettretouslespapiersenordre.Cen’estpeut-êtrepascequetuattendais,maistoietmoi,onvadevoirapprendreàvivreensemble.Saufsitun’aspasenvieousilavieàNewYorknetetentepas.TupeuxretourneràSanFrancisco,jem’occuperaidetout.C’esttoiquichoisis.Situdécidesderester, jetepréviens, jenesuispastrèsdoué.Maisjepeuxfairedesefforts.Qu’est-cequetuenpenses?

Perdue dans son grand lit, Emma fait plus petite fille que jamais.Notre petit hérisson semet àpleurerdoucement.QuandNeill’attirecontrelui,toutsonchagrins’exprimeenfin.Toutcequ’elleaenduré,lamortdesamère,sonvoyage,lestensions,ladéception,toutressort.Lavoirdanscetétatmeserrelecœur.J’essuieunelarme.

–Jeveuxbienrester,murmure-t-elleentredeuxsanglots.

Enfin!

–Lasoiréeaétélongue,repose-toiEmma,ajouté-jeenluiprenantlamain.Onreparleradetoutçademain,d’accord?

Jel’embrasseavantdesortirdelachambre,suivieparNeil.

–Jevaisresteravecellecettenuit,medit-il,visiblementheureuxetsoulagé.–Toiquidoutaisd’êtreunbongrandfrère,tusaisexactementcommentt’yprendre,luisoufflé-je,

unpoiltaquine.–Onenreparleraauxprochainesrencontresparents-profs,grimace-t-il.–Ungrandmomentàvenir,jelesens!memoqué-jeouvertement.Jeviensvouschercherdemain,

appelle-moiquandvousserezprêts.–Passivite,rétorque-t-ilenm’attirantcontrelui.Jenet’aipasremerciéepourcequetuasfaitce

soir!

Cetendrebaiser,ceregardàtomber,riennepouvaitmefaireplusdebienpouroublierlestressdecettesoirée.SerrerNeilcontremoiamêmeledonderéveillerdespulsionsimprobablesaprèsceque

nousvenonsdevivre.

L’emmeneretnousinstallerdansladépendance,commeladernièrefois…

–Jemerattraperai,mesouffleNeilaucreuxdel’oreille.

Nousnousquittonssurcettepromesse,petitssouriresauxlèvresetdesidéespleinlatête.

***

Nous rentrons aussitôt au haras après la sortie de l’hôpital. Tout lemonde nous y attend.Nousn’avonspasencorediscutédel’avenird’Emma,lesdernièresvingt-quatreheuresnenousenontpasvraimentlaisséletemps…

Sonretourestdignedeceluidemonpère.Nicoleaencoreunefoistoutprisenmainetapréparéun repas gargantuesque.MêmeEmilio a fait le voyage, inquiet pour sa petite protégée.Àvoir lescernes et les traits tirés de Neil, j’imagine que le fauteuil où il a passé la nuit n’a pas été trèsconfortable.

–Sij’avaissu,jeseraisvenutetenircompagnieàl’hôpital,lâcheEmilioàNeildansunclind’œillourddesous-entendus.

Toutlemondeéclatederire.

–Alors,vousgardezlapetite?demandemonami.–Onlagardeetavecsonconsentement,répondNeilenregardantEmma.–Çameva!ajouteEmilio.J’aitoujoursvouluêtretonton!–Toi,tonton?!memoqué-je.–Parfaitement!réplique-t-il.D’ailleursEmma,jeteproposededevenirmacoéquipière.Tuaimes

lesdominos?Cellequej’avaisadisparu…–Ohçava!Jen’aipaseuletemps,c’esttout!medéfends-jeenluijetantmaservietteàlatête.–Dominos?demandeEmma,étonnée.–Ont’expliquera,intervientNeil,sourireauxlèvres.–Etlecheval?Tut’ymetsquandNeil?Tuasvuqueçapouvaitêtreutile,lanceLouisàl’autre

boutdelatable.–Emmam’apromisdenepasrecommencer,jen’aiplusbesoind’apprendre!–MêmeEmiliotientmieuxàchevalquetoi,lâcheEmmaenriant.–Jenerelèveraipasce«même»,maisc’estvrai,j’aiunmeilleurstylequelui!acquiesceEmilio.–Ici,toutlemondesaitmonter.C’estunetradition!commentemonpèreleplussérieusementdu

monde.–Lepatriarcheaparlé!déclareNicoleenexplosantderire.–AttentionNeil,situveuxplaireàbeau-papa…lecharrieEmilio.–J’aicomprislemessage!répondNeilenmedécrochantunregardamusé.

Ilneripostepas…Ilamêmel’aird’accepterdeseplieràlavolontédemonpère…Unepreuvedeplusqu’iltientvraimentàmoi!

Jebaisse lesyeuxsurmonassiettedevantcettenouvelleévidence.C’estpresqueunedéclarationpublique!Jesuistroublée…

L’ambianceestautoppendantcedéjeuner.Nousavonstousbesoinderire.EmilioentraîneEmmaetLouisdanslesécuries.Nousrestonstouslesquatre,Neil,monpère,Nicoleetmoipouraborderl’avenirdelajeunefille.Lesérieuxdelasituationnousplongedanslaréalité.

–Etmaintenant?demandeNicole.–Ilfauts’occuperdespapiers,régulariserlasituationd’Emma,répondNeil.J’aidemandéàmes

avocatsdepréparerundocumentpourqueMartinrenoncecomplètementàsesdroitssurEmma.Ilesthorsdequestionqu’ilaitunquelconquepouvoirsurelle!

–Ettucroisqu’ilvalesigner?lequestionné-jeàmontour.– Je lui fais un cadeau, répond Neil, amer. Sa signature contre mon silence. Il échappe à ses

responsabilités,saréputationserapréservée.C’estleprixquejesuisprêtàpayerpourmettreEmmaàl’abri,etpourneplusjamaisavoiràlecroiser.

LavoixdeNeilestdure,glaciale,quandilévoquesonpère.Iln’yapasderetourpossibleentreeux.Jesuisimpressionnéeparlafaçondontilprendleschosesenmain.Lechienfouserait-ilentraindes’assagir?Des’adapteràsesnouvellesresponsabilités?Sonregardbleusiprofond,sescheveuxenbataille,sesyeuxpétillants,ilrestepourtantlemêmehommebeauetsexyquimefaitchavireràchaquefoisqu’ilmesourit.

Maisquelquechoseachangéetçaluivaterriblementbien!

–Laissez-nousEmmapendantquevousvousoccupezdespapiers,proposeNicolealorsquemonpèrehochelatêtepourmontrerqu’ilestd’accord.Ceseraplussimple.

– Merci Nicole. Vous avez fait énormément pour moi, je ne l’oublierai pas, lui glisse Neil,reconnaissant.

Nousne partons pas tout de suite, profitant de ces instants ensemble.Emilio etLouis entraînentmêmeNeilpourluiexpliquerquelquesthéoriessurleschevaux,cequinousvautbiendesfousrires.MêmeEmma,désormaisdétendue,osecharriersonfrèreetriredelui.

Je ne sais pas si un jourNeil pourra chevaucher fièrement à nos côtés,mais en tout cas, il nemanquepasdeprofsmotivés!

Aumomentdudépart,lesaurevoirsontunpeumaladroitsentrelefrèreetlasœur.

–Profitedecesvacances,c’estbientôtl’école!Tuasdéjàtropmanquélescours!luiditNeil,unsourireperfidesurleslèvres.

– Et voilà, ça commence ! École, devoirs, chambre rangée… relève Emilio derrière nous.Heureusementquetontonestlà!Shopping,sorties…

–Oubliepasqu’ellen’apasencore l’âgepour lesboîtesdenuit, l’interromptNeilenagitant ledoigt.

–Oui,oui!obtempèreEmiliosanscacherleclind’œilqu’iladresseàEmma.

Notre petit hérisson nous quitte tout demême en nous serrant rapidement contre elle. Ses yeux

bleus,commeceuxdeNeil,pétillent.Elleneleditpas,maisjesensqu’elleahâtedecommencersanouvellevie.

***

AussitôtrentrésàNewYork,nousnousposonstouslesdeuxdansuncoinpourpassernosappels.JeprendsdesnouvellesdeBettinaetdeFlorealorsqueNeilrèglel’organisationdenotrevoyageàSanFrancisco.

L’hôtelvabien,lesréservationscontinuentd’arriver.Maispleindechosesrestentensuspens.

Montravailmemanqueaussi…

JetiensabsolumentàdévelopperlerayonnementduHellington.Etpourça,ilfautqueFloreetmoidiscutionssérieusementdutravailquejeluiaiproposé.Mameilleureamien’attendd’ailleursqueçapoursechercherunappartets’installerdéfinitivement.AvecLevison,toutsemblealleraumieux!

J’aihâtedepouvoirlancernospetitessoiréesentrefillespourparlerdetoutça!JesuissûrequeBettinaetFlores’entendrontbienenplus!

Neilfinitparmerejoindre.

–L’avocatnousattenddemain,medit-ilens’asseyantdanslecanapé,àmescôtés.–Doncdemain,toutestréglé?–Jel’espère!Qu’ontournelapageunebonnefoispourtoutes!

Neilm’attirecontreluietm’entouredesesbras.

–Lejetestprêtpourdemain,onadonctoutelanuitpourpenserànous,meglisse-t-ilencaressantmescheveux.

–Ourattrapertesheuresdesommeil!–Jedormiraidansl’avion!

Puisantdanssesréservesd’énergie,Neilsejettelittéralementsurmoi.Biensûr,jeneluttepas.

4.Journald’unevie

–Jemesensunpeutropcalmeencemoment,m’avoueNeilalorsquenoussurvolonslesÉtats-Unis.

– Se lancer comme tu le fais dans la charge d’une ado, c’est quandmême un énorme défi, luirappelé-je.

– C’est vrai.Ma vie risque d’être pimentée pendant quelque temps ! sourit-il. Quelques bonnescausesàdéfendreenplusicietlàetceserajusteparfait!Maréputationm’yoblige!

–NeilCaineneseraitpasNeilCainesanssesfrasquesetsesinterventionsoriginales!assuré-je.TuasprévenuEmma?

–Rappelle-toi,elleaditqu’ellesavait lire les journaux!Elleestdéjàaucourant, répliqueNeil.Défendresesconvictions,c’estunbonprincipeàtransmettrenon?

J’éclatederire.

LenatureldeNeilseréveille.Etsonprochaincouprisqued’êtreexceptionnel!

Hâtederetrouverça!

Avecle tempsdevolet ledécalagehoraire,nousatterrissonsversonzeheuresàSanFrancisco.L’airestplusdouxicietunrayondesoleilnousaccueillepournoussouhaiterlabienvenue.

Dessignespournousdirequetoutvabiensepasser?

Unevoiturenousconduitaussitôtchezl’avocatd’Ellen,JackRobbins,aucœurdelaville.

–MonsieurCaine,jevousattendais,dit-ilennousaccueillantdansunbureaubaignéparlalumièredusoleil.

Grand,légèrementgrisonnant,lacinquantaine,ilm’inspireaussitôtconfiance.

–VoiciNoraPreston,macompagne,meprésenteNeilavantque l’avocatnefasseuneobjectionquantàmaprésenceici.Vouspouvezparlerdevantelle,jen’aiaucunsecret.

Jesuisflattéeparl’officialisationdenotrerelationdevantunhommededroit.L’avocathochelatêteetmesouritavantdesortird’untiroirundossierportantlenomd’EllenBradford.

–Aveclesfêtesdefind’annéeetlescongésdetoutlemondeici,onaprisunpeuderetardsurletraitementdenosdossiers,nousapprend-il.EllenBradforda laisséun rapidemotdans lequel elledemandedevouslaisserceci.

Nousregardons,surpris,Robbinssortiruneclédesonenveloppemarron.

–Ellem’amentionnédanssontestament?répèteNeil,perplexe.

–Onnepeutpasappelerçauntestament,elleaétéprisedecourtparlamaladie.Elleajusteeuletempsd’écrireunmotoùeffectivement,elleparledevous,précisel’avocat.

–Etvoussavezcequecettecléouvre?demandeNeilenl'observant.–Un petit coffre que nous avons en notre possession. Il semblait très important pourMadame

Bradfordquesoncontenunesoitouvertqueparvous.Ellenousl’aconfiéetnousademandédevousleremettrepersonnellement.

Encoreunesurprise…Bonneoumauvaise?

–Concernantsafille,étantdonnéquevousêtesaujourd’huisaseulefamilleproche,j’aipréparélespapierspourquevousdeveniezletuteurlégal.Votreavocatm’atransmishiersoirlerenoncementdeMartinCaine.Toutestenordre.Vousavezjusteàparapheretàsignercesdocuments.

Martinn’apastraînépourabandonnersafille…Ilm’écœure!

Neilprendletempsdelireetapposesasignaturesurladernièrepage.

Çayest,Emmaestsousnotreresponsabilité…C’esténorme!Etçaapourtantl’aird’unesimpleformalité!

–Jefaispasservotredossieràunjuge.Çanedevraitpasprendretropdetemps,votrecasestassezsimple,continuel’avocat,trèssûrdelui.

Simple?Surlepapieroui,enréalité…c’étaitlaconquêtedel’Everest!

– Je vais vous emmener dans une petite salle privée pour vous laisser découvrir le contenu ducoffre.Prenezvotretemps.Sivousavezbesoindemoi,n’hésitezpas.

L’avocatnousconduitdansunpetitsalon,trèsclasseettrèslumineuxluiaussi.Toutefoiscen’estpasladécoquinousintéresse.Unpetitcoffre,uneboîteàbijouxpeut-être,estposésurlatable.

–Qu’est-cequ’elleabienputelaisser?demandé-jeenmurmurant,impressionnéeparl’objet.–Jen’enaiaucuneidée,merépondNeil.

Nous échangeons un regard et il glisse la clé dans la serrure. La petite boîte ne contient qu’uncarnet,queNeilattrapeavecbeaucoupderespect.Illefeuilletteetblêmit.

–Sonjournalintime…

Unelettretombeausol.ElleestadresséeelleaussiàNeil.

–Ellel’aécritepeudetempsavantsamort,dit-ilens’asseyantsurunebanquette.–Jevaistelaisserliretoutçatranquillement.–Non,reste!Jen’airienàtecacher.Tuasautantledroitdesavoirquemoi,meretientNeilparla

main,sondouxregardposésurmoi.

Jem’assoisàsescôtés.Jesuispresqueémuededécouvrirl’écriture,leslignesd’Ellen.C’estun

peucommesijelarencontrais,quejefaisaissaconnaissance.

«MoncherNeil,

Jereprendscontactavectoidanslepiremomentquisoit.Jesuismaladeetcecanceradéjàgagnélapartie.Jedoisd’abordm’excuser.Jen’aipaseulecouragedet’appeler,det’expliqueràl’époquece départ précipité. Pardonne-moi, j’étais jeune, mes parents avaient l’emprise sur moi. Engrandissant,j’aipenséqu’ilétaittroptard…

Aujourd’hui,jem’enremetsàtoi.Ouplutôt,jeremetsmafille,Emma,entretesmains.Jesaisquecetteresponsabilitéesténorme,maisjen’aipasd’autrechoix.MesparentssontmortsetNolan,monfrère,n’estpastrèsstable.Jemesouviensdenotreamitié,detesvaleurs.Jesuispersuadéequ’ellesn’ontpaschangé.TuesdevenulegrandNeilCaine, jenedoutepasunseul instantque tu ferascequ’ilfautpourEmma.J’airefusétamaintendue.Situveuxbienmelatendreànouveau…

Emmaestmafilleetcelledetonpère.Jesaisqu’ilnelareconnaîtrapas.Qu’ilnousafaitexileràl’autreboutdupayspourgardersaréputationintacte.Emmaestdonctademi-sœur.Elleestdouce,ouverte,généreuse…Jemerefusedevoirlestraitsdesonpèrebiologique, jepréfèrevoirlestiens.Prendssoind’elles’ilteplaît.

Jen’aiditàpersonnequiétaitsonpère.Jete laisselalibertédeluiannoncer, jesaisqu’elle teposeradesquestionsàcesujet.Nousavionsréussià trouverunéquilibre toutes lesdeux,notrevieétaitsimplemaisheureuse.Lecanceratoutbouleversé.

Neil,tuasétémonmeilleurami,quisaitcommentauraitpuêtrenotreviesij’avaissutenirtêteàmesparents,tonpère,àlapressionsociale…J’aigâchélaviedemafamille,lacarrièredemonpère,celledemonfrère.Jenepeuxpasréparerça.MaisjedoisaiderEmma,unedernièrefois…Confie-luimon journal intime. Toute son histoire y est. Tu peux le lire aussi, tu apprendras ainsi àmieux laconnaître.Dis-luiquejel’aimeetquejeneseraijamaistrèsloin.

MerciNeil, de tout ce que tu pourras faire pour elle.Qu’elle soit heureuse. Je partirai le cœurmoinslourdenlasachantsoustaprotection.

Ellen»

LeslarmescoulentsurmesjouesetNeilserrelamâchoire.Cettelettreestmagnifique,humbleetpleined’espoir.Commentnepasregretterd’avoirappriscettehistoiresitard?

Est-cequ’elleestpartieplussereine?Laissersafillederrièreelle,sansêtresûrequesademandesoitentendue…

Iln’existepasdeplusbellepreuvedeconfiance.

JeposemamainsurlegenoudeNeil.Cequ’ilfaitaujourd’huipourEmmadoiteffacertouslesregrets.

Sansdireunmot,Neil ouvre le journal intimeet commenceà leparcourir.Elle a commencéà

l’écrireàses16ans.

«8novembre2001

Cet homme m’attire mais je sais que je n’ai pas le droit. J’aimerais pouvoir lutter contre cessentiments, jen’yarrivepas.Est-cequeje l’intéressemoiaussi?Malgréladifférenced’âge?Ilal’airsiheureuxquandilmevoit.Est-cequejemetrompe?Jemeberced’illusions?Maisjevoisbiensesregards…SiNeilapprendquej’enpincepoursonpère,ilvaêtrefurieux!Jedoisoublierçaetpasseràautrechose.MitchPattersonm’ainvitéepourlebaldefind’année.Iln’estpassimalqueça…»

«22novembre2001

Jecroisquejesuisamoureuse!Ilesttellementattentionné!Ilm’écoute,metrouvebelle,ilmefaitrire.Ilm’amêmeoffertunemontresublime!Ilveutm’inviteràdéjeunerunmidi,j’aiaccepté.Maisçadoitresterentrenous.Jesaisqu’ilestmarié,qu’ilestplusvieux,quec’estlepèredemonmeilleurami,maisc’estplusfortquemoi!Quandilm’acaressélajambe,j’aisenticettedouleurdansmonventre…J’aihâted’êtreàdemainpourleretrouver!»

LecorpsdeNeilsecrispe.Etjelecomprends…

«23novembre2001

Je n’en reviens pas… Il m’a emmenée dans une chambre d’hôtel après le déjeuner. C’étaitinattendu!Jemesuissentiefemmedanssesbras.Est-cequej’aiétéàlahauteur?Ilatellementplusd’expériencequemoi…Maisilnemeconsidèrepascommeunegamine.Jenesaispasquoifaire…Attendrequ’ilm’appelle?Jeveuxlerevoir!Demain,cesoir,maintenant!Siseulementjepouvaisenparleràmescopines!»

–Jevaisvomir,lâcheNeilentresesdents,enpassantlespagesdujournal.Ill’amanipuléepourlamettredanssonlit,çacrèvelesyeux!

«5décembre2001

Maisqu’est-cequejevaisfaire?Neilnousavus!J’aitrophonte.Ilm’avaitjuréquepersonneneserait là ! C’était la première fois qu’il me demandait de venir chez lui. Il n’en pouvait plus deschambresd’hôtels,ildisaitqueçadevenaitrisqué…Jel’aiécouté.JenepourraijamaisplusregarderNeildanslesyeux!»

Neilfaitunepauseetfermelesyeux.

–Tuessûrquetuveuxcontinuer?luidemandé-jedoucement.–Jeveuxtoutsavoir,toutcomprendre,répond-ilenreprenantlalecture.

«28décembre2001

J’aiduretard.J’éviteNeil.Martinneveutplusmevoir.Ilm’ajetéeladernièrefois,m’aditqu’il

s’était lassédemoi.Jedoissourirepour lacampagnedemonpère,maisplusrienneva.Jepleuretouslessoirs,etjenepeuxpasenparler.Commentjem’ensors?!»

«2janvier2002

Jesuisenceinte…Bonneannée.»

«4janvier

Ilm’aclaqué laporteaunezquand je luiaiannoncé.Jenesuismêmepassurprise.J’aibesoind’aide…Neilmemanque,j’aitoutgâché.Ilsauraitquoifaire,lui…»

«21janvier2002

Je ne supporte plus l’ambiance ici. Mon père voulait que j’avorte, ma mère a refusécatégoriquement.C’estcontresesprincipes.Etmoi?Jeveuxcebébé?»

«30janvier2002

Jeveuxlegarder.Ilfaitpartiedemoi…Jenepeuxpasexpliquer.C’estçaêtreunemaman?»

Ellenasuspendul’écrituredesonjournalpendantplusieurssemaines.Jen’oseimaginercequ’elleadûendureraveccefardeau.Ellereprendl’écritureenfévrier.

« Je suis unemerde.Unemerde enceinte.On part pour fuir la honte.Martin a payé pour notresilence. Il ne veut pas entendre parler de ce bébé. Mes parents ont accepté, on s’en va. Plus decampagne pour mon père, plus de sport pour mon frère. Nolan ne me parle plus… Mes parentss’engueulent tous les jours. Jen’aimêmepas revuNeil.Onpart demainpourSanFrancisco. Si jemourais,ceseraittellementplussimple!Maisjenepeuxpas…J’aimedéjàcepetitbébé…»

«25septembre2002

Emmaest née, elle estmagnifique. Je ne regrette pas de l’avoir gardée.Quand j’ai vu sonpetitvisage…Ellea lesyeuxbleus.Jeneveuxpasqu’elleressembleàMartin, jepréfèrepenseràNeil.J’aimeraistellementluiparlerdesademi-sœur…Maiscommentest-cequ’ilréagirait?»

Lasuitedespagesdujournalparlepourl’essentield’Emma.Ellenracontetout,sespremierspas,ses premiersmots, ses premiers jours d’école. Elle a élevé sa fille toute seule grâce à la pensionverséeparMartin.Sesparentsn’apparaissentpasbeaucoupdanssavie.Nolan,lui,estinvisible.

Ellenlaisseàsafilleunmagnifiquecadeau.Dessouvenirspleind’amour.

Neilcontinuedefeuilleterlejournalets’arrêtebrusquementsurunpassage.

«14janvier2014

Neilétaitenville.Jel’aivudeloininaugurerlenouveauthéâtre.Iln’apasbeaucoupchangé,ilatoujourscesourireespiègle.Jen’aipasosél’approcher,est-cequej’auraisdû?Luiparlerd’Emma

etrisquerdeledécevoirànouveau?J’auraispuluimentir…Maisonnementpasàunami.Pourquoiremuerlepassé?Jesuisbienicimaintenant,jevaisbien,mafilleaussi.Peut-êtrequ’unjourj’auraiplusdecourage?»

– Jeme souviens de ce projet, se rappelleNeil, les yeuxdans le vague. J’ai passé beaucoupdetempsàSanFrancisco.Etelleétaitlà…

–Commentest-cequetuauraisréagisielleétaitvenueteprésentertapetitesœur?Lafilledetonpère?

–Jen’enaiaucuneidée,merépond-ilensecouantlatête.J’auraispeut-êtreétéencolère?–Elleaeupeurdeça,personnenepeutluienvouloir.Sonfrèreetsesparentsluiont tournéle

dos, elle ne voulait pas vivre ça avec toi. T’éviter, lui laisser croire qu’elle ne te perdait pasdéfinitivement.

–Lesregretsneserventplusàriendetoutefaçon,ajoute-t-ilenreprenantlefildesalecture.

Lesdernièrespagesdu journalsont tachées,commesielleavaitpleuréetque les larmesétaienttombéessurlesfeuilles.

« Je sens que c’est la fin. Je n’auraismêmepas pume battre contre ce foutu cancer.MapetiteEmma… Je lui ai parlé de Neil. Elle doit au moins savoir que quelque part sur cette terre il y aquelqu’unquipeutprendresoind’elle.JeneveuxpasluiparlerdeMartin.Jenetienspasàcequ’illarejetteelleaussi.Çafaitsimal!Neil…Ilfautquejepréparemondépart.Quejem’organise.Vite.Jenepeuxpaslaissermafilletouteseule.MonEmma,moncœur…Jel’aimesifort…»

Iln’yaplusrienaprèsça.Lirecesderniersmots,c’estcommeluitenirlamainsursesderniersinstantsdevie.Lespagesvidesquisuiventmarquentlafind’uneexistence.C’estlamort,lenéant.

Cettelecturenousavidés.

Nousnebougeonspas,nousneparlonspas.Laprésenced’Ellenest si fortequ’unmotpourraitl’évaporer.Nousrestonsainsiquelquesminutesàécouterlesilence.

–Jecroisqu’ilest tempsdepartird’ici,ditNeil toutbas.Nousavons toutcequenoussommesvenuschercher.

Quandnoussortonsducabinetde l’avocat, lesoleilnouscaressedesesdouxrayonsd’hiver.Jeprends une grande inspiration et souffle un bon coup. J’ai besoin d’évacuer lamélancolie quimeserrelecœur.

–J’aimeraisfaireunedernièrechose,meglisseNeil.Allervoirlatombed’Ellen.Après,ceseravraimentfini.

Jemesuretoutel’importancedecedésirauregardintensequ’ilposesurmoi.Jesuisincapablederefusersarequêteetnouspartonspourlecimetière,celuiquenousaindiquél’avocataumomentdepartir.

***

Latombeestsimple.

EllenBradford.

Je pense à la tombe demamère, à celle demes grands-parents. À cette douleur qu’on ressentquandonlitcesnomsàjamaisgravés.Neilestvenupourserecueillir,pourluiparlerpeut-être?

Nous reviendrons avec Emma, c’est certain, mais, en attendant, je lui fais la promesse dem’occuperdesafilleetdeveillersurelle.

LorsqueNeilserelève,jeremarquesestraitsmoinstirés.Ilmesourit.

–Ilesttempsdepenserànotreavenir,medit-ilenm’entraînantloind’ici.

ÀbientôtEllen…Tuneserasjamaisvraimentloindenous…

***

Neilaréservéunesuitedansundeshôtelslesplusluxueuxdelaville.LavuedenotrechambredonnesurlabaiedeSanFrancisco.C’estmagnifiqueetleslumièresdusoleildéclinantilluminentleciel.

Aprèslesémotionsfortesdelajournée,cehavredepaixestbienvenu!

Ilnousfautencorepasserquelquescoupsdetéléphone,prévenirmonpèreetNicolequetouts’estbienpassé.QuandNeil discute quelques instants avecEmma, il lui parle de samère et de la lettrequ’elleluialaissée,àlui.Iln’oubliepasd’évoqueravecellel’organisationdesprochainessemaines,dontl’école!

–Je luiparlede l’école,mais jecroisque jevaisyallermoiaussiàreculons!m’avoue-t-ilenraccrochant.Jedétestelesystèmescolaire!

–Troprigide,c’estça?demandé-jeensouriant.–Troprigide,tropstrict!Iln’yapasdeplacepourlalibertéd’expression!Ilfautsefondredans

unmoule…–Toutcequetuaimes!–Fêtonsl’école,lesresponsabilités,lespetitscopains,lamodeettouslesproblèmesdefillepour

lesquelsjenesuisabsolumentpaspréparé!ditNeil,amuséenmetendantunecoupe.–Ilyauradesmomentssympas,jet’assure!

JerisdevantlamouedeNeil.

Peut-êtrequeçaauraitétéplussimplesiEmmaavaitétéungarçon…

Uneombrepassedanssonregard.Jesaisqu’ilpensedenouveauàEllen.Difficilepourmoiaussidenepaslaissermespenséesvagabonderverselle.

–Commentai-jepunerienvoir?Sij’avaissutoutçaplustôt,j’auraispuêtrelà…Jeneseraispas

seulementletuteurd’Emma,jeseraisdéjàsafamille!–Çanesertàriend’imaginercequetuauraispufaire…Cequicompte,c’estmaintenant!Tues

safamilleàprésent!Mêmesivousneportezpaslemêmenom!–Jenepensaispasqu’unjour,jepuisseavoirl’envied’apparteniràunefamille…C’estgrâceà

toi tout ça. J’ai l’impression que je peux construire la mienne, avec Emma, avec toi… Si tu esd’accord…

–Tuveuxquejefassepartiedevotreclan?demandé-jeenessayantdeplaisanter,touchéeparsesmots.

–Totalement,jeveuxquetuyprennesuneplaceimportante.J’aichangéNora.Jen’aiplusbesoindecouriraprèsquelquechose,jen’aiplusrienàprouver.Saufpeut-êtreàtoi,ajoute-t-ilenm’attirantprèsdelui.

–Àmoi?–Jeveuxteprouverquejepeuxêtreunfrère,quejenetiensplusàrisquermaviepourn’importe

quoi,j’aiEmmamaintenant.Maisjet’aitoiaussi,etjeneveuxpasrisquerdeteperdre.–Tun’asrienàmeprouver,Neil.Jetefaisconfiance,tuesl’hommeleplusdroitquejeconnaisse.

Maisneperdspasnonpluscepetitgraindefoliequit’anime!–Celui-là?C’estgrâceàluiquejet’aiséduitequandtum’estombéedessuslapremièrefois,je

n’aipasdutoutl’intentiondeleperdre!

Cen’étaitpasutiledemerappelercemomentd’anthologie!

Oui,maissanslui…

Neilmeserrecontreluietplongesonvisagedansmescheveux.Ilm’afaitlaplusbelledéclarationquisoit.

Faire partie de la famille deNeil, lui qui a longtemps fui ce concept, c’est ce qu’il y a de plusmerveilleuxàentendre.

Çaetquandilmeditqu’ilm’aimeavecsonpetitregardintense…

Ilm’entraîneverslabaievitréepourregarderlecoucherdesoleil.

–Cesoir,c’estnotremoment,medit-ilderrièremoi.Notreparenthèsedanslaviedefouquinousattend.

–Unmomentdecalme?–Calme?Jenel’envisageaispascommeça,maissitupréfèreslouerunfilm…

Jemeretournepourregarderlesourirecoquinquem’adresseNeil.

–J’optepourlefilm!ledéfié-je.–OK!Jepensequetunepourraspasteconcentrerdessusmaiscommetuveux…–Ahoui,ettucomptesfairequoi?–Dansl’ordre:tedéshabiller,t’embrassercommeundieu,caressertesseins,t’embrasserencore

unefoiscommeundieu…énumère-t-ilsursesdoigts.– Tu peux essayer, mais je ne suis pas sûre de ta technique, rétorqué-je amusée, en feignant

l’indifférence.–Tusaisquejenerésistepasàundéfi.–Alors…Convaincs-moi!

Monregardestprovocateurquandj’attrapelatélécommande.

Chercherunfilm,gardertoutemonattentionsurl’écran.Luttercontrecetteenvieviolentedeluisauterdessus!

Résister!

Je navigue dans les menus à l’aveugle. Je ne sais absolument pas ce que je cherche, mais jecontinuededéfierNeil.Ilm’observeluiaussi,j’ensuissûre.Sijedétournemesyeux,jeseraibattue.Sijecroisesonregardardent,sijevoisseslèvresentrouvertes…

Film!Écran!

Ils’approchedoucementdemoi,justeassezpourquejepuissesentirsonparfummasculin,celuiquim’enivreàchaquefois.Celuiquim’inviteàvouloirembrassersapeau…J’entendssarespiration.Ilnemetouchepas,nemefrôlemêmepas.J’entendscommeunbruissement.

Ilestentraindesedéshabiller!

Nepasdétournerlesyeux,nepasregardercecorpsquis’offreàmoi!

Neilviselatéléquandiljettesonpull,pourêtresûrquejecomprendscequ’ilestentraindefaire.PuissonT-shirt.J’imaginelepetitsourirequ’ildoitavoiraucoindeslèvres.J’essaiederéprimerlemien, tant bien quemal.Cette image de lui torse nu s’impose devantmes yeux. Je n’aimêmepasbesoindelevoirpourretrouversespectoraux,sesépaules,sesabdominaux,nimêmedeletoucherpoursentirsapeau.Moncerveausesouvientdetoutetmepasselefilm«Strip-teasebyNeil»surl’écran.

Quidenousdeuxprovoquel’autre?Lui,àmoitiénu,àmescôtés?Oumoiquitentesurtoutdeluttercontremoi-même?

Etilnes’arrêtepaslà,décidéàmetorturerjusqu’aubout.

C’estmoiquiaivoulujouer…

J’entendssaceinture,lafermetureÉclairdesonpantalon.S’ilneterminepasdanslatélé,iltombeen revanche à mes pieds. Je me mords les lèvres. Neil est donc maintenant en boxer à quelquescentimètresdemoi.Jepourraisletoucher,leregardermême,pourvoirs’ilressentlamêmetensionquemoi.

–Tutrouvesunfilmintéressant?medemande-t-iltrèsinnocemment,lavoixunpeurauque.–Tropdechoix…arrivé-jeàdireenessayantdemeconcentrersurlatélé.–OK…

Ilfaitunpasversmoi.Ilnemetouchepasencore,maisc’estpire,ilm’effleure.Jesenslachaleurdesoncorpsm’irradier,sonodeurestomniprésenteautourdemoi.

Maispourquoijem’infligeça?!

Délicatement, ildéboutonnemoncardigan,puismachemise.Le toutavecune infinie sensualité.Sonpouceeffleuremonsein,provoquantdansmondosunfrissonque jenepeux luicacher. Je lesenssourire.Ilgagneduterrain.Ilgagnelapartietoutcourt.

Maisjerésiste.Jeveuxvoirjusqu’oùilpeutaller…Oùilveutaller!

Lezipdemajupearendulesarmessanscombattreetmoncollantafuidevantl’assautdesdoigtsexpertsdeNeil.

Trèsbien,jepeuxaussiregarderunfilmenculotte,chemisierouvert…

Biensûr…

Jen’aiqu’uneenvie,c’estdejetercettetélécommandeetdesautersurcethomme!

Il seplacederrièremoi,poussemescheveux sur le côté et tire légèrement surmeshabitspourembrassermanuque.Ses lèvres s’attardent, glissent de lanaissancedemes cheveuxà celledemacolonne,puisversmesoreilles.Sonsoufflechaudsursesbaisershumides,jenepeuxpasétoufferlegémissementquececontactmeprocure.Jefermelesyeux,baisselatête.Neilnecomptepass’arrêterlà.Autourdesesmainsd’entrerenscène,detouchermonventre,matailleetderemonterversmesseins.Ilnem’effleureplusmaintenant,ilmecaressepourdebonavecl’assuranceduconquérantenpassederemporterunnouveauterritoire.

Moncorps.

Etcommesiçan’étaitpassuffisant,Neilportelecoupdegrâceàmonultimerésistance.Quandsamainsemetàexplorerladentelledemaculotte,quesesdoigtsviennenttaquinermonentrejambe,latélécommandetombeausol,surleshabits.

–Tuasfaittomberquelquechose,remarque-t-ilenmordantmaintenantmesépaules.–Tuasraison…Jevaislaramasser,dis-jedoucementenmeretournant.

Jenecomptepasdéposerlesarmescomplètement.J’ailesmoyensdemebattremoiaussi!

Jeme retourne et descends, le regard accroché au sien. Neil devinemes intentions, un sourirecoquinsedessinesurseslèvres.Arrivéeàsataille,jefaisglissersonboxersurseschevilles.Sansperdreuneseuleseconde,j’attrapeentremesmainssonsexedressé,l’embrasse,passemalanguesursonextrémité.

Au-dessusdemoi,Neil flancheunpeuetplonge sesdoigtsdansmescheveuxcommes’il avaitbesoindetrouverunsoutien.

TouchébelApollon!Tesrésistancessontlégères!

Jem’amuse de l’effet que je viens de produire sur lui. Encouragée à l’idée de le voir flanchercomplètement,jememetsàlelécherunpeuplusvite,unpeuplusfort,jusqu’àcequ’ilentredansmabouche.Sesdoigtssecrispent,jecontinue.Mesmainsagrippentsesfesses,ilestcomplètementàmamerci.Au-dessusdemoi,sarespirationsefaitplushaletante,ilgrognedeplaisirmême.

L’excitationmevrillelebasduventre,jesensmonentrejambeenfeu,réclamantqu’ons’occupedeluiaussi.JesensNeildeplusenplustendu,maisjenetienspasàcequ’ilpartecommeça.Ilfautquesondésirsoitprolongé,qu’ilsenteunpeudefrustrationpourqu’ilmepossèdeavecencoreplusdeforce.

Alorsjem’écartedoucementdelui,remonteversseslèvresenembrassantsonventre,sontorse,son menton, sa bouche. Neil me serre contre lui et m’embrasse avec fougue. Nos langues secherchent, s’emmêlent. De ses mains libres, mon amant fait glisser mes derniers habits sur mesépaules,ensevelissantdéfinitivementcettetélécommandesousunmonceaudetissus.Ildégrafemonsoutien-gorge, il est comme fou, pris d’une passion dévorante. Sa bouche lâche la mienne pours’attaqueràmoncou,àmesseins.Ilmordmestétons,lestitilleavecsalangue.Samaindansmondosmefaitlégèrementbasculerenarrière.Lesfrissonsdeplaisirmesubmergent.

Jenerêveplusqued’unechose:sentirsapeaucontrelamienne,mefrotteràlui.Jemeredresse.LesyeuxplongésdansceuxdeNeil, j’agrippesamainetlafaitdoucementglisserversmaculotte,puissousle tissu,entremesjambes.Jesenssesdoigtssurmatoisonhumide.Neilmedécrocheunsourireravageur,ilacompris.

Ilmecaressedebasenhaut,pressemonclitoris,alorsquesesdoigtss’immiscentchaquefoisunpeuplusloinentremeslèvres.Jem’accrocheàsesépaules,fermelesyeux.Toutemaconcentrationsefixesurcequ’ilsepasselà,dansmonintimité.Neilmetientetmedonneleplaisirquej’attends.

Petitàpetit,sesdoigtsmepénètrent.Iljoue.Nes’aventurepasplusloinquel’entréedemonsexe.C’enesttroppourmoi.Jeposemamainfermementsurlasienneetlepousseàs’attarderunpeupluslongtemps,àentrerenmoi.Jeleguidemaisilreprendrapidementlecontrôle.Cettefois,jesenssesdoigtsenmoi,sescaresses intimesquimefontgémir, la têteenarrière,quimepoussentàplantermesonglesunpeuplusdanslapeaudesesépaules.Ilbougeenmoi,jereçoismilleetunedécharges.L’orgasmemonte,exploseentresesdoigts.

–Ondiraitquetupréfèreslecontenudemesprogrammes,mesouffleNeilenmeserrantcontrelui.

Jereprendsmonsouffle,latêteposéecontresontorse.J’entendssoncœurbattre,pluscalmequelemien.

– J’ai bien aimé ce premier épisode, mais j’ai besoin d’en voir d’autres pour être totalementconvaincue,murmuré-jeenmemordantlalèvre.

Sesmainsposéessurmesfesses,sousmaculotte,Neilmeregardeetsourit.

–J’aidenombreuxscénariosenstock…–Surprends-moi!

Ces deuxmots rallument le feu dans ses yeux. Ilme domine comme un animal sauvage prêt àfondresursaproie.

Saufquejen’aipaspeuretquejen'attendsqueça,qu’ilmedévore!

Ilme retourne et plaquemes fesses contre son sexe. Je n’en peux plus de cette culotte ! Jemebaissepourl’enlever,offrantunevuemagnifiqueàNeilsurmachutedereins.

Qu’ilprendpouruneinvitation.

C’est moi qui prends l’initiative, je veux essayer autre chose avec lui, découvrir de nouvellespositions.Fairel’amourautrement,pousserplusloinleplaisir.

Toujoursderrièremoi,jel’entraîneverslecanapéleplusproche.Jejetteunregardenarrière,noscorpstoujourscollésl’unàl’autre.Neilsaitexactementoùjeveuxenvenir.Ilm’embrasselecoindes lèvres,memord lementon. Jemebaisse légèrementpourprendreappuicontre ledossier,mecambrecequ’ilfautpourluilaisserfairelereste…

Neiljouelescénarioàlaperfection.Sesmainscaressentmondos,seposentsurmataille.Puissonsexeseglisseenmoi.Ilmepénètreetcommenceàmedonnerdescoupsdebassin,deplusenplusrapidesetforts.Jemecambreencore,sesdoigtss’intéressentauxmiens.Cettesensationdepuissancequ’ildégagedansmondos,sescaressessurmapoitrine,jeperdslecontrôle.Jebougeaveclui,nosgémissementssefontécho.Nousnemaîtrisonsplusrien,nosinstinctsontprislerelais.

PuisNeils’écarte,meredressecontreluipourmemordreànouveaulanuque.Pasquestionpourlui de s’arrêter là. Il s’assoit dans le canapé, m’entraîne sur lui. Je m’empale sur son sexe avecimpatience,mes fesseseffleurent sescuissesàchaquemouvement. Jebougesans faiblir, électriséeparlesfrissonsquitraversentmonintimité.LabouchedeNeils’estplaquéesurmonsein,elletitille,tire surmes tétons.Très vite, l’orgasme s’annonce,mais je vois passer dans les yeuxdeNeil unelueurcoquine.

Pascommeça,pastoutdesuite…

De ses brasmusclés, ilme renverse sur le côté,m’allonge sur le canapé. Il pivote à son tour,relèvemes cuisses.Etmepénètre ànouveau. Je l’embrasse, accrochée à lui, suspendue à son cou.Notre va-et-vient est moins rapide. Neil sait exactement comment aller chercher mon orgasme,interrompu et retranché dans un coin. Lentement, par à-coups, il l’apprivoise. Mon clitoris frottecontrelanaissancedesonsexe,accentuantmonplaisir.Cetabordagegagnedoucementenintensité.Loin, dansma plus profonde intimité, je sens la vague gronder, frémir, et tout emporter sur sonpassage.J’explose,lesyeuxplongésdansceuxdemonamant.Puissant,monplaisirs’immiscedansmesveines,danstoutmoncorps.

Neil me laisse le temps d’apprécier mon moment avant de repartir de plus belle. Je jette mesdernières forcespour l’accompagner,pourbougermonbassinàsonrythme.Puissonsexefrémit,

mon amant stoppe son assaut. Le temps s’arrête… et l’orgasme le submerge à son tour dans underniergrognementanimal.

Neils’écrouleàmescôtés.Surlabanquetteexiguëducanapé,ilmecouvreàmoitiédesoncorpschaud.Jemelovedanssesbras,aucreuxdesesépaules.Ilm’entouredessiensdansunepositiontrèsprotectrice.Jen’aipasfroid,jesuisjustebiencommeça.Soncœurcettefois,batunpeuplusvite.Jel’écoutereprendreunrythmenormal,doucement.

–L’épisodedeuxt’amieuxconvaincue?medemande-t-ilencaressantmescheveux.–J’accrochetotalementàl’histoire,répliqué-jeensouriant.–Jecroisquelehérosn’apasencoretoutdévoilé…Pourlesbesoinsdel’intrigue…–Iln’adoncpasencoredonnélemeilleurdelui-même?C’étaitpourtantassez…exceptionnel…–Sapartenairel’aideàsesurpasseraussi.Ellel’inspire!

Neilm’adresseunsouriretrèsérotiqueenpassantleboutdesesdoigtssurmonventre.

–Ellel’inspiretoutletemps,c’estincroyable?!s’exclame-t-il,amusé.

J’attrapeuncoussinetluidonneunlégercoupsurlatête.

–Etmonfilm?!–Tuasperdu la télécommande, iln’yaplusdefilm!dit-ilenfaisantminedese jetersurmoi.

L’épisodetroisvacommencer!

JerisquandNeilsemetàmedévorerlecou.

L’épisodetrois…Etlequatreaussi?!

5.Épilogue

ToutNewYorkestenébullition!S’yprendreauderniermomentpourfairesesachatsdeNoël,quellebonne idée…S’il y en aunequiprofitede la cohuegénérale, c’est bienEmma !C’est sonpremierNoëlicietelleseréjouitdetout:despèresNoëlquiagitentleursclochesàchaquecoinderue,desilluminations,desvitrines…Emilioluiafaitdécouvrirtoutçacesdernièressemaines,maisellenes’enlassepas!Etsajoieestcommunicative!

–Ilnousmanquequiencore?medemande-t-elleenmerattrapant.–OnaNicoleetmonpère,ilresteencoreEmilio,Flore,Andrew,BettinaetLouis!soupiré-je.–EtNeil?–C’estbon!Jeluioffrelelivre«Comprendrel’adolescence»,dis-jeenriant.–Cool!Siçapeutl’aideràsedétendre!

Emmaseprécipitedansunmagasindefringues,etmemontreuneécharpemulticolore.

–PourBettina!s’exclame-t-elle.

Je valide. J’adore faire les boutiques avecEmma.Elle a le coup d’œil, ne perd pas de temps àtergiverser.Ellesaitcequ’elleveut.

Età17heuresun24décembre,c’estungrosatout!

Rayonparfumerie,nouschoisissons toutes lesdeuxuncadeaupourFlore.Nousjouonsaveclesvaporisateurscommedeuxgamines,avantdetrouverlebon.PourLouis,unevestepolairenoustapedansl’œil.C’estexactementcequ’illuifautpourleharas.

–Jemechargeducadeaud’Emilio,melanceEmmaavantdemequitterbrusquement.

Je souris. Ils sont inséparables tous les deux etEmilio tient parfaitement le rôle de tontonqu’ils’estdonné.Onnesaitpastoutcequisepasseentreeux,maisleurcomplicitéestbelleàvoir!

Emmarevient,visiblementfièred’elle.

–Tuluiasprisquoi?

EllememontreunT-shirt«Jesuisunseriallover».

–C’estuntrucentrevous?Uneprivatejoke?demandé-jeamusée.–C’estça!Ilcomprendra!

OK…Ilfaudraquandmêmequej'entouchedeuxmotsàEmilio!J’espèrequ’ilnedévoilepastouslesdétailsdesesconquêtes!

Lecadeaud’Andrewestsimpleàtrouver.Finmélomane,iladorelePhilarmoniquedeNewYork,maisn’yaencorejamaismislespiedscettesaison.

PourEmma,c’estlecadeaudel’ennui.

Ilmeresteàtrouverquelquespetitscadeauxpourl’équipedel’hôtel.Ilsm’ontsoutenuetoutecetteannéeetilesthorsdequestiondelesoublier.Sanseux,jeneseraiscertainementpaslààcourirlesrues!

–Jecroisqu’onatout,dis-jeàEmmaensortantdeladernièreboutique.–Etlemien?medemande-t-ellelaboucheencœur.–Oublié!Onn’aplusletempsdetoutefaçon.Tuenaurasdeuxl’anprochain,OK?

Je l’entends râler dans mon dos. J’éprouve un plaisir presque sadique de la voir froncer sessourcilsetprendreunemoueboudeuse.

Lesadosetleseconddegré…

Àl’hôtelaussi,c’estl’effervescence.Nousaffichonspresquecompletetnosclientss’apprêtentàrejoindreleurfamillepourleréveillon.Notreservicedeconciergerieestdébordé.Ilfauttrouverlescadeauxdedernièreminute,quandcenesontpaslestenuesdefêtesoulescoiffeurs!

Difficile de jongler entre la fête privée que nous organisons et les allées et venues des clients.C’estunegrandepremière.FêterNoëlestdéjàunévénementpourmoi,çan’estpasarrivédepuisdesannées.Etenplusici…

–Toutlemondeestarrivé?demandé-jeàBree,àlaréception.–Oui,tous.Ilssontinstallésdansleursuite.–MerciBree!Etnepartezpastroptard,l’équipedenuitestlàpourvousremplacer!

Jesuissurexcitée,commesi j’avaisbudes litresdecaféine.MonpèreetNicolesont là,commeFloreetAndrew,Louis,Emilio…SolveigetMarcusontaccepténotreinvitation,Kaitoaussi, l’amijaponaisdeNeil.Emmanem’apasquitté.

– Je ne connais pas les amis deNeil, ils sont sympas ?medemande-t-elle en entrant dansmonbureau.

–SolveigetMarcussontadorables.Kaitoestplusréservé,maisilaquelquesbonneshistoiresàteracontersurNeil.

AvecKaitoetEmilioàlamêmetable,Neilrisquedesefairecharrier…Etpasqu’unpeu!

–Tupeuxmettretouslespaquetssouslesapindanslasalledurestaurant?Jedoisterminerdeuxtroistrucsavantdepouvoirsouffler,dis-jeàEmmaavantqu’elleneparte.

Nousavonsfaitduchemin,elleetmoi.Audébut,elleétaittrèsaccrochéeàNeiletpetitàpetitellearéussiàs’ouvriràmoi.Quandilestenvoyage,ellevientici.Elleasasuiteattitrée,unevraie«suited’ado ». Elle a géré sa déco toute seule mais il a fallu batailler pour qu’elle n’accroche pas un

«Défensed’entrer»ouunetêtedemortsursaporte.Cependanttoutceciestprovisoire.Bientôt,nousemménagerons tous les trois dans un immense appartement à deux pas d’ici. Neil m’a fait cettesurpriseunsoir,ilyadeuxmois.Ilsesentprêtàvivredansmonjoyeuxbazar!J’aihâtemaisjen’enmènepas large…Lavieàdeux,c’estnouveaupourmoi,pour lui.C’estvertigineusementexcitantcommesituation!

–Onferme?meproposeBettinaenpassantlatêtedansmonbureau.Onabienméritéunepetitecoupe,non?

–Onferme!accepté-je.Laisse-moijusteletempsdepasserunerobe,d’effacermescernes,etjeterejoins!

Lehalldel’hôtelsevideluiaussi.Commeons’yattendait,lesclientsfêtentNoëlàl’extérieur.Onleurafaitpasserunenotedetoutefaçon,lesprévenantquelerestaurantétaitprivatisépour«soiréefamiliale ». Je n’en reviens toujours pas ! Jem’apprête à fêterNoël ! Pire, c’estNeil qui en a eul’idée!LesBahamasnesontplusd’actualité,ilvoulaitêtreentourécetteannée.Plusdefêteensolosuruneîle!Jemesuislaisséconvaincre.MesrapportsavecmonpèresesontaméliorésetNicoleesttoujoursaussiaccueillantequandellenousinviteauharas.

Toutachangéenunan.Profondémentchangé…

Neilestenvoyageetdoitnousrejoindreunpeuplustard.Danslachambrequejenousairéservée,jepasseunerobefourreaunoire,attachemescheveux,memaquilleaussi.J’attrapelecollierdemesgrands-parentsetlesbouclesd’oreillesoffertesparNeil.Ilfautqu’ilssoientlàeuxaussi.

Surmes talons, je redescends trouverBettina,assiseaubar.Quandellemevoitarriverdansmarobe de soirée, elle ne peut s’empêcher de siffler, et commander deux coupes de champagne auserveur.

–Àcettefolleannée!dit-elleenlevantsonverre,sourireauxlèvres.–Non,àtoi,machèreadjointe!rectifié-je.Tuasfaituntravailénormepourrelancerlenavire.

Sanstoi,toutauraitétépluscompliqué!– Puisque c’est le moment des fleurs, tu peux peut-être m’accorder une petite augmentation ?

ajoute-t-elleenriant.–Fais-moiunedemandeofficielle,jeverraicequejepeuxfaire!

Noustrinquons.

–Bonallez,jefile!Profitezbiendevotresoirée,cen’estquandmêmepastouslesansqu’onfêteNoëlchezlesPreston,semoque-t-elleendescendantdesontabouret.

–Çapourraitpeut-êtredevenirunetradition!rétorqué-jeenriantàmontour.Maisattends,j’aiuncadeaupourtoi!ChoisiparEmmad’ailleurs!

Jemeprécipite sous le sapinpour attraper lepetit paquet.QuandBettinadécouvre soncontenu,ellenepeuts’empêcherdepousseruncrideplaisir.

Bettina…Toujourstrèsextravertie…Toutn’apaschangéfinalement!

–Remercielapetite!Elleatrèsbongoût!

Bettinamequittepourrejoindrelessiens.Cettesoiréecommenceonnepeutmieux!

Àlaportedurestaurant,jemedonnel’impressiondefairel’hôtessed’accueil.Jesuisimpatientedevoirdébarquertoutlemondeetdecommencercettefête.Encoreplusd’avoirNeilàmescôtés.Ilarriveencoreàmemanquer!

Signequejel’aimetoujours,peut-êtremêmeplus!

Monpèrearrive,dansunsmoking.C’estlapremièrefoisquejelevoissurson31.Avecsacanne,boitant un peu, les séquelles de son AVC, il a fière allure. Et Nicole à son bras, dans une robebordeaux,irradiedebonheur.Aveclarééducationdemonpère,latransitionavecLouis,quis’occupecomplètementduharasmaintenant,ilsn’ontjamaisprisletempsdevenirvoirl’hôtel.

–Papa,quelleallure!letaquiné-jeenl’embrassant.–J’ail’impressiond’êtredéguisé!râle-t-il,bourru,commed’habitude.

Oupresque.Sonœilpétille!

–QuelhôtelmagnifiqueNora !meglisseNicole.Vosgrands-parentsdoiventêtre fiersd’où ilssont!

–Merci Nicole, j’espère…Venez, j’ai quelque chose à vous montrer avant que tout le monden’arrive.

Dans le hall de l’hôtel, près de la porte d’entrée, j’ai fait installer des portraits demes grands-parentsetceluidemamère.LeHellingtonestunehistoiredefamille, lesclientsquiviennentici lesavent.

– Papa, dis-je enme tournant vers lui, domptant tant bien quemalmon émotion. Est-ce que tuseraisd’accordpourfairepartiedecemur?Nicoleettoi,j’aimeraisvousavoir,vousaussi.

Maproposition inattendueébranlemonbourrudepère. Je levois respirer fort,prendre sur lui.Nicolealeslarmesauxyeuxetneditrien.Elleregardemonpèreavecbeaucoupd’amour.

–D’accord,maispasensmoking!acceptemonpère,lamaintremblantesursacanne.

Jel’embrasse.Jesaisqu’iln’aimepasleseffusionsmaisj’aienviedeleserrercontremoi.Aprèstout,c’estlasoiréedespremièresfois!

–Onpleuredéjàici?sefaitentendrelavoixfamilièred’Emilioderrièrenous.–Tutombesbien,j’aideuxmotsàtedire,répliqué-jeenessuyantunelarmeduboutdesdoigts,

pourfairediversion.

JelaissemonpèreetNicoleprendrelechemindurestaurantetj’attrapeEmilioparlebras.

–J’espèrequetuyvasmolloquandtuparlesàEmmadetesconquêtes,lehouspillé-jegentiment.

–Moi?Etsic’étaitellequimeparlaitdessiennes?rétorque-t-il.–Non!Tuveuxdireque…Emmaadespetitscopains?–Jenedisriendutoutmoi!Jesuisunetombe!–Mais…Emilio!–Ah,voicilaplusbelle!s’exclame-t-ilenapercevantjustementl’adovenirànous.Sauve-moides

griffesdeTatieNora!

EmmaéclatederireetentraîneEmilioverslebar.

–Emmaal’airépanoui,meglisseNicolequandjelarejoins.Ellevoittoujourslepsychologue?–Oui,toujours.Lepsyditquec’estbonpourelle,vutoutcequ’elleavécu…

Nouspensions,ànotreretourdeSanFrancisco,quetoutrentreraitdansl’ordre.Nousétionssansdoute un peu naïfs.Emma est tombée dans une profonde dépression, pleurant lamort de samère,posantbeaucoupdequestionssursongéniteur.Nousavonsétédépasséspartantdemal-être.Neilluia proposé de voir un psychologue, elle a accepté. Elle a remonté la pente et aujourd’hui, elle vamieux.Toutn’estpasréglédanssatête,elleaperduunandesascolarité.Maiselleafaitduchemin.

Etdanslebonsens!

–Etl’école,elles’yfait?medemandeNicole.–CellequeluiatrouvéeNeilestvraimenttop!Elleapleind’amis,sesnotessontbonnesetelle

peut y faire toutes les activités qu’elle souhaite. Mais elle attend les prochaines vacances avecimpatiencepourpouvoirremonteràcheval!

–C’est une bonne cavalière, intervientmonpère.Vous devriez penser à la faire concourir. J’aijustementuntrèsbonchevalpourelle!

–J’enparleraiàNeil,tuconnaissonamourpourleschevaux!luirappelé-jeenriant.–Iln’atoujourspasdigérésadernièrechute?–Ehnon!

SouvenirmémorablequecejouroùNeilavolédanslacarrière.Heureusementsansblessure!

Maisils’estjuréderecommencer!

–Tusaisqu’ellepeutvenirquandelleveut,merappelleNicole.Ellemetdelaviedanslamaison!–VousavezdéjàLouis!–Alorslui,ilfaudral’aideràtrouverunefemme!lâchemonpèreleplussérieusementdumonde.

Iln’yapasqueleschevauxdanslavie.–Justement,levoilà!

Louisentreàsontourdanslagrandesalledurestaurant.Lesserveurscommencentaussiàentreren scène, portant les coupes de champagne et les amuse-bouches. Je lorgne du côté d’Emilio etd’Emma.

Qu’ilnecommencepasàluifaireboiredel’alcoolàquatorzeans!

Louisn’estpasseul,sasœur,Flore,lesuitdequelquespas.

–Levisonn’estpasavectoi?luidemandé-jeenlaserrantcontremoi.–Non,maisilnedevraitplustarder.Tusaiscequec’est,lesenquêtes…–Voshommessontcaptivésparleurboulot!constateLouis.Vousdevriezvousméfier!–C’estl’hommequinesortplusdesacampagnequiditça?lerembarreFlore.Jesuisétonnéede

tevoirici.–Ilparaîtqu’ilfautt’aideràtetrouverunefemme,ajouté-je.J’aientendudirequetupassaistrop

detempsavecteschevaux!–Quiaputedireça?medemandeLouis,presquevexé.–Monpère!Etsilui,bourreaudetravail,commenceàledire,c’estquetudevraispeut-êtrelever

lepied!– Si tu veux, on peut t’aider, te sortir, dans la ville, avec lemonde, des gens à qui parler… le

pousseducoudeFlore.–Àmoinsquetunerencontresunebellecavalière,supposé-jeenlui lançantunclind’œil.Mon

pèrepeutmêmefairel’entremetteursionluidemande.–J’admirebeaucouptonpère,maispourça,jemedébrouillerai!

Nous faisons sonnernos coupesde champagne entre elles quanddeuxmains seposent surmesyeux.

–Cetterobevousvamerveilleusementbien,mademoisellePreston,meglisseunevoixchaudeaucreuxdel’oreille.Jenevoispasvotrecavalierdansl’assemblée,vousêtesdonclibre.

–Moncavalierest leseulet l’uniquequej’attends,répliqué-jeenmeretournantpourembrasserNeil.Iln’yaqueluiquejeveux.

Nousnousembrassons,longtemps,souslesyeuxdenosproches.Unesemainequenousnenoussommespasvus,letempscommençaitàdevenirunpeutroplong.

–Tum’asmanqué,medit-ilenplongeantsonregardintensedanslemien.–Toiaussi…BienvenuedansnotrefêtedeNoël!

Sansmequitter,Neil salue tout lemonde et déposeunbaiser sur le front d’Emma.Ellepeste àchaque fois,maisellene s’échappe jamaisquand il s’approche.Elleaimecettemarqued’affectionqu’ilnedonnequ’àelle.

SolveigetMarcussontarrivéseuxaussi,encompagniedeKaitoetdesanouvellecompagne,unejeuneJaponaisequinemaîtrisepasencoretrèsbiennotrelangue.Ladistancequinousséparetousnenouspermetpasdenousvoiraussisouventquenousaimerions.Maisquandilssontlà,toutlemondeprofiteàfond!

L’arrivée du bon dernier, Andrew, notre inspecteur Levison, est salué par des cris lancés parEmilioetrépétésparLouis.

Pouruneentréediscrète,ilrepassera!

EtEmilio,sursalancée,faittintersacoupe.

–Excusez-moi!J’aimeraisporteruntoast!

Silence.Untoastdesapart?Jem’attendsaupire!

–J’aimeraissaluercettefêtedeNoëlquenouspassonstousensemble!Maisaussivousannoncerunenouvelleimportante.Noraainscritnotreéquipeàunconcoursdebâtisseurs!Pourceuxquin’ontpassuivi,onaratélamentablementledernier.

–Cetteannée,promis,jem’entraîne!J’aifaitunplanning!rétorqué-jepourmedéfendre.–Jevousprendstousàtémoin!Ellel’adit!

Alors que je pense qu’il en a terminé avec cette histoire, je voisEmilio tenter d’expliquer à lajeuneJaponaisecequesontlesdominos.SouslesregardshilaresdeKaitoetdeNeil.

J’aihonte…

–Explique-luique«lesdominos,c’estcommeledesign»!demandeEmilioàKaito.–Maisquiapudireça?relèveleJaponais.–Tonpote,NeilCaine,legranddesigner!répond-ilavecemphase.–Situsorsmesproposdeleurcontexte…çaneveutplusriendire,riposteNeil,amusé.–Parlons-enducontexte!Neilestvenunousvoirnousentraînerunefois.Unvraigosse!Onl’a

laissétoutseulàlafin!Ilvoulaittesterlesloisdelagravité,essayerdecréeruntrucdesign…–Tuasfaitça?!ritMarcus.–J’aiessayé,avoueNeilenhaussantlesépaules.Maisjen’aipaslapatiencepourça!

LeNorvégien luidonneuneclaquedans ledos.C’estvraiqu’ilyaeudesgrandsmomentscesderniersmois.

– Si onm’avait dit un jour queNeil s’amuserait avec des dominos… ajoute Solveig, un largesourireauxlèvres.Tut’escalmé,ontevoitmoinsdanslesjournaux!

–Jechoisismieuxmescombats,avanceNeil.–Tut’assagis,c’estbien,continue-t-elle.Maistuastoujourstonadorablespontanéité.

Solveiginsistesurlemot«adorable»avecsonpetitaccent.

Neilm’entraîne à l’écart pourme serrer contre lui.De là oùnous sommes, nouspouvonsvoirtoutelasalle.

–Tupeuxêtrefièredetoutcequetuasaccomplicetteannéepourquetoutlemondesoitlà,medit-iltoutbasdesadoucevoixchaude.

–Tupeuxl’êtreaussi…Tut’esouvertàmafamille,tuasaccueilliàbrasouvertsEmma.C’estunpasénorme!AutantqueceNoëlpournousdeux!

–Tuassumemontreruneautreconceptiondelafamille, loindescodes…Tuasdesamis,unebelle-mère,unpère,unebelle-sœur…Tuprendstoutlemonde,sansexceptionetçadonneça!Uneassembléequirespirelebonheuretlabienveillance.Cen’estplusducôtédesCainequ’ontrouveraça!Mamèrem’alaisséunmessage,ilsdivorcent.

–Tucompteslarappeler?–Non.J’aifaituntraitsureuxilyaunan,jenevaispasrevenirlà-dessus.

Nousrestonsl’uncontrel’autreunpetitmoment.Avectoutcequ’onavécu,nousavonsapprisànouspréserver,ànousoffrirdutemps,desbullesintimesoùpersonnenepeutentrer.Nousensortonschaquefoisreboostés,prêtsàremontersurlering.

–Etsionoffraitlescadeaux?lancelapetitevoixd’Emma.

Nous rejoignons l’assistanceaumomentoù lespaquetscirculent.Tout lemondeparleenmêmetemps,s’embrasse,rit.Jen’avaispasvécuçadepuisdesannées!L’émotionmegagneet,parréflexe,jeportemamainàmoncollier.

Ilsauraientétéheureuxdevoirça…

–Onne lesoubliepas tusais,meglisseFloreens’arrêtantprèsdemoi.Jesaisque tupensesàeux…Ilsnousmanquentàtous.

–Oui,soufflé-jeunboncoup.Pensonsauprésent!Alors,Andrewettoi?Vosprojets?–Onatrouvéunappart,çayest!s’exclame-t-elle.Unjob,unamoureux,mameilleureamieprès

demoi…J’aiétégâtée.–Tescampagnesdecom’marchentvraimentbien!J’aifaitlebonchoixent’engageant!–Etc’estpasfini!Jevaismedéfoncerpourqueçagrimpeencore!MavieiciàNewYork,jela

doisenpartiegrâceàtoi!

Floremeserredanssesbras.Leplaisirestpartagé.J’ailongtempsrêvédenossoiréesentrefilles.Ellessontdevenuesrécurrentes!Unvrairituel!

– Excusez-moi, se fait entendre Neil. On va vous distribuer une petite enveloppe, je vousdemanderaisdenepasl’ouvrirtoutdesuite.

–Tusaiscequec’est?medemandeFloreenrecevantlasienne.–Jen’enaiaucuneidée,réponds-jeenregardantmapropreenveloppe.

Qu’est-cequ’ilapréparé?

Jem’approchedelui,curieusedevantsonsouriremystérieux.

–C’estbon?Toutlemondealasienne?Alorsvouspouvezouvrir!

Jenemelefaispasdiredeuxfois!Jedéchirel’enveloppeettombesurunbilletd’avion.

Destination:lesBahamas!

Jeregardeautourdemoi.Toutlemondealemême.Emma,monpère,Nicole,tous…

Etjecomprends!Neilvientdéfinitivementdememontrerqu’ilveutd’unefamille.

LesBahamasnesontplusunedestinationpourledesignersolitaire,ceserabientôtunedestinationfamiliale!

–Nora,commenceNeilense tournantversmoi.Jesaisque je t’