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Théologie Trinitaire et Christologique de Nicée à Chalcédoine et Jean Calvin

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G e n è v e , s e p t e m b r e 2 0 1 1

THÉOLOGIETRINITAIREETCHRISTOLOGIQUE

DENICÉEÀCHALCÉDOINEETJEANCALVINJoaquínJavierEstebanMartínezÉtudiantaprèsdel’Institutd’étudessupérieuresenthéologieorthodoxe(Chambésy,Genève)

Théologie

systematiqueChristologie

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THÉOLOGIETRINITAIREETCHRISTOLOGIQUEDENICÉEÀCHALCÉDOINEETJEANCALVIN

1

Tabledesmatières

Introduction.....................................................................................................................................................2

Termestrinitairesetchristologiques...................................................................................................2

Termesbibliques.......................................................................................................................................2

Termesnonbibliques.............................................................................................................................3

Ladéfinitiondefoinicéenne.....................................................................................................................6

LadéfinitiondeChalcédoine.....................................................................................................................6

Calvinetlathéologienicéenneetchalcédonienne..........................................................................8

Positiontrinitairecalvinienne.............................................................................................................8

LachristologiedeCalvin.....................................................................................................................10

Conclusion......................................................................................................................................................12

Bibliographie................................................................................................................................................13

 

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2

Introduction

Ce travail fut écrit dans le cadre du cours de Théologie systématique – Christologie, cours

imparti à la Faculté Autonome de Théologie de l’Université de Genève. Il essaie de mettre en

rapport les positions théologiques traditionnelles de l’âge patristique, si importantes dans la

théologie dogmatique orthodoxe, et des positions théologiques réformées –et plus

concrètement calviniennes–, comme elles sont expliquées à l’Université de Genève.

Nous avons trouvé des difficultés, premièrement à cause de la connaissance partielle de la

théologie calvinienne. Deuxièmement, on a constaté que les enjeux théologiques du

réformateur ne se trouvaient pas dans les formulations dogmatiques des conciles

œcuméniques, mais plutôt dans d’autres aspects théologiques qui sont apparues dans l’époque

post-patristique, suite aux positions de la théologie scholastique. Néanmoins, nous avons

essayé de discerner et exposer la liaison entre la théologie calvinienne et l’enseignement

patristique de l’Église primitive, en utilisant parfois des concepts et notions nommés dans le

cadre de notre cours.

Termestrinitairesetchristologiques

La double croyance, qu’il existe un seul Dieu trinitaire, Père, Fils et Saint Esprit, et que Jésus

Christ, le Fils de Dieu, est le Messie et rédempteur annoncé par les prophètes, est lefondement de la foi chrétienne. Cette croyance a été révélée aux hommes dans la Sainte

Écriture et interprétée par les Pères de l’Église pendant les premiers siècles du christianisme,

notamment dans les conciles œcuméniques de Nicée (325) à Constantinople III (680-681).

Il nous faudra premièrement nommer et expliquer certains termes théologiques utilisés dans

les sciences trinitaires et christologiques. Ensuite nous allons exposer comment la foi a été

exprimée par les conciles œcuméniques. Finalement on analysera la position du réformateur

Jean Calvin (1509-1563) concernant ces sujets.

Dans la terminologie théologique trinitaire et christologique, on fait la distinction entre les

termes bibliques et ceux provenant de la philosophie.

Termesbibliques

Dans la Sainte Écriture on trouve plusieurs termes qui ont permi, déjà du début du

christianisme, de créer une base et référence pour la foi chrétienne, essentiellement la

croyance en un Dieu trinitaire et la reconnaissance de la divinité de Jésus de Nazareth commele Messie, le Christ. Nous allons nommer simplement certains d’entre eux :

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§  Dieu le Père, la première personne de la Trinité.

§  Jésus Christ, le Fils unique de Dieu, deuxième personne de la Trinité, le « Λόγος »

(Verbe) divin, le Fils de l’homme.

§  Saint Esprit, le paraclet (le consolateur), la troisième personne de la Trinité.§  Κύριος, Seigneur, terme appliqué tant au Père qu’au Fils.

Termesnonbibliques

La théologie chrétienne, dans son développement tout au long de l’histoire, a du utiliser des

termes, non présents dans la Sainte Écriture, pour préciser les termes ou concepts bibliques,

définir avec précision les vérités de la foi et en même temps rejeter les affirmations hérétiques.

Pensons, par exemple, au terme « ὁμοούσιος » (consubstantiel), à l’aide duquel l’hérésie

d’un Arius a pu être démasquée. Pour cette raison, l’utilisation de ces termes par les Pères del’Église et les théologiens, a toujours été justifiée.

Or, ces termes conduisent à « dénaturer » le Christianisme : Ils introduisent une théologie

« technique » ou scholastique, et n’ont pas la portée affectif des mots bibliques, utilisés dans

la liturgie. Cette absence représente et constitue une perte (Sprachverlust) de spiritualité. Pour

illustrer cette affirmation, on compare la formule liturgique « Dieu est amour » (1 Jn 4, 16)

avec le concept théologique « deux natures : la nature humaine et la nature divine, sont

hypostasiées dans la seule personne (ou hypostase) du Verbe de Dieu ». Cette dernière

expression n’a pas de pouvoir symbolique et est incapable de nourrir le spiritualité.

Souvent ces termes théologiques non bibliques furent empruntés à la philosophie grecque, en

y changeant le sens. Pour cette raison l’Occident chrétien s’est toujours méfié des théologiens

orientaux, en les accusant d’hellénisation du Christianisme.

Les quatre termes philosophico-théologiques les plus utilisés, autant en théologie trinitaire

qu’en christologie, que nous analyserons par la suite, sont : « πρόσωπον/persona »(personne), « οὐσία/substantia » (essence), « φύσις/natura » (nature) et

« ὑπόστασις/hypostasis » (hypostase).

On remarque néanmoins que pendant les trois premiers siècles du christianisme la

terminologie théologique était assez confuse, et la signification de ces termes n’était pas

toujours parfaitement définie. Il fallut donc préciser les termes et clarifier les concepts.

Pendant le IVe siècle la signification des quatre termes référés ci-dessus sera définitivement

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fixée, en raison des querelles christologiques ariennes qui eurent comme conséquence des

discussions théologiques des deux premiers conciles œcuméniques. 

§  Le terme « οὐσία » (essence) provient étymologiquement du verbe εἶναι (être) et il

est pourtant mis en relation avec l’existence. De plus la version latine substantia,

essence, provient du verbe esse, être. En français, le terme οὐσία a été traduit

substance (du latin substantia) ou, plus correctement, essence.

Pour Aristote, essence est toute chose qui a une existence.

Dans le sens chrétien, l’essence est ce qu’ont en commun toutes les personnes

trinitaires ; Père, Fils et Saint Esprit partagent la même essence divine.

Le terme nicéen « ὁμοούσιος » (consubstantiel), mot clef pendant tout le IVe siècle

dans les luttes entre orthodoxes et ariens, exprime parfaitement la relation intrinsèque

entre Jésus Christ et le Père. Tous les deux –comme d’ailleurs aussi le Saint Esprit–

partagent la même essence divine.

§  Le terme « ὑπόστασις » (hypostase) est un substantif verbal qui provient du verbe

ὑφίστημι (signifiant -entre autres- je pose comme fondement ou je me charge). Il est

donc mis en relation plutôt avec le mode d’existence de quelque chose. Tout comme la

version latine « substance », provenant de la préposition sub et le verbe sto.

La signification du terme hypostase a évoluée tout au long de l’histoire, même dans le

christianisme, comme nous allons le développer ci-dessous.

Dans l’antiquité, le terme hypostase fut très tôt utilisé comme terme scientifique

spécialisé, par Platon, Aristote, Plotin et d’autres. Chez Aristote, l’hypostase signifie

quelque chose qui a une existence propre et distinguée des autres.

L’utilisation chrétienne du terme hypostase est assez proche de la définition

aristotélicienne. Néanmoins, sa signification a évoluée tout au long des années.

Dans les textes patristiques primitifs, avant les Pères Cappadociens, le terme

hypostase fut utilisé pour se référer à la nature ou aux propriétés divines, et il était

presque synonyme d’essence et de nature.

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Selon la théologie des Pères Cappadociens, les termes essence et hypostase ne sont

pas des synonymes.  Essence est ce qu’il y a en commun dans les trois personnes

trinitaires, et hypostase est ce qu’il y a de particulier dans chaque personne et qui les

distingue. Notons que pour les Cappadociens encore essence et nature sont dessynonymes.

Basile de Césarée de Cappadoce (330-379) fut le premier père de l’Église qui affirmait

que le terme hypostase, appliqué à Dieu, signifiait ce qui distingue, par les propriétés

hypostatiques, chacune des personnes de la Trinité. Il affirme que dans la Trinité il y a

une essence divine, une nature divine, et trois hypostases distinguées qui se

manifestent dans trois personnes. Ainsi, il éloigne la signification du terme hypostase 

de celle d’essence pour la rapprocher à celle de  personne. Dans son œuvre « Contre

Eunome », Basile justifie ce changement en introduisant le terme « ἐνέργεια »

(énergie), la grâce divine. En effet, se sont les énergies divines, non-créées, celles qui

expriment la relation essentielle des trois personnes de la Trinité.

Depuis le IVe siècle, on fait la distinction et l’on utilise le terme hypostase 

différemment en parlant de Dieu, en général (sens trinitaire), ou en parlant de Jésus

Christ (sens christologique).

Ainsi, dans le sens trinitaire, chaque hypostase de la Trinité est reconnue par ses

propriétés hypostatiques : Le Père pour son innascibilité, c.-à-d., pour être

inengendré ; le Fils, pour être né; et le Saint Esprit pour être procédé du Père.

Dans le sens christologique, on parle de l’hypostase simple du Verbe de Dieu, dans

laquelle sont hypostasiés ses deux natures. En effet, le terme « ἐνυπόστατον » (dans

l’une hypostase), utilisé déjà par Athanase d’Alexandrie mais développé

postérieurement par Léonce de Byzance (VIe s.), Jean le Grammarien (VIe s.) et,

surtout, Jean Damascène (680-755), exprime la subsistance réelle de plusieurs natures

dans une seule hypostase.

§  Le terme « πρόσωπον » (personne) était d’abord un terme théâtrale qui signifiait

masque.

Il a été utilisé dans un sens théologique du début de la Chrétienté, en différenciant

chaque personne (ou hypostase) trinitaire. Mais son usage par Sabellius (IIe s.) et ses

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adeptes modalistes, avec le sens primitif de masque ou mode de révélation de Dieu,

causait la méfiance des Pères orthodoxes, et bientôt on a préféré utiliser hypostase au

lieu de personne.

§  Le terme « φύσις » (nature), dans le sens chrétien, est synonyme d’essence, du début

du christianisme.

Cependant le terme acquière une signification spéciale des le IVe Concile

Œcuménique, où l’on parlera de l’union hypostatique des deux natures de Christ,

l’humaine et la divine, comme nous allons le voir dans le paragraphe correspondant.

Ladéfinitiondefoinicéenne

L’an 325 fut célébré à Nicée de Bithynie le Ier Concile Œcuménique, où l’on a exprimé, dans

le Symbole de Foi, une première partie de la maturation théologique chrétienne des premiers

siècles. Le côté christologique de Nicée est décisif pour le dogme chrétien, parce qu’il affirme

et confirme la divinité de Jésus Christ, en tant qu’« ὁμοούσιος  τῷ  Πατρί » (de la même

essence que le Père). Cette reconnaissance balaya tous les expressions hérétiques précédentes

(docétisme, modalisme, arianisme, etc.). Néanmoins, la théologie trinitaire orthodoxe va être

complétée quelques années plus tard, lors du IIe Concile Œcuménique de Constantinople le

451, avec la reconnaissance de la divinité du Saint Esprit contre les tendances de ses

adversaires, dit « pneumatomaques ».

LadéfinitiondeChalcédoine

À Chalcédoine de Bithynie fut célébré en l’an 451 le IV e Concile Œcuménique. La définition

de foi de Chalcédoine constitue une étape décisive dans l’élaboration du dogme chrétien. Le

noyau du concile fut la christologie, et plus concrètement, l’humanité de Jésus Christ et

comment expliquer l’union, dans la personne et l’hypostase de Jésus Christ, de sa naturehumaine avec sa nature divine.

Dans la définition de Chalcédoine on affirme que le Christ, Fils unique-engendré et Seigneur,

est une seule personne (ou une seule hypostase), unique sujet dans lequel s’hypostasient deux

natures, la divine et l’humaine, et ce, sans confusion, sans changement, sans division et sans

séparation : « [Nous enseignons que nous confessons] un seul et même Christ, Fils, Seigneur,

l’Unique-Engendré, reconnu en deux natures, sans confusion, sans changement, sans division

et sans séparation, la différence des natures n’étant nullement supprimée à cause de l'union, la

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propriété de l’une et l’autre nature étant bien plutôt sauvegardée et concourant à une seule

personne et une seule hypostase, un Christ ne se fractionnant ni se divisant en deux personnes,

mais un seul et même Fils, Unique-Engendré, Dieu Verbe, Seigneur Jésus-Christ »1.

Certains chrétiens, pour des raisons pas toujours exclusivement théologiques, n’ont pas

accepté les décisions de Chalcédoine. Suite au concile, ces églises, dites antichalcédoniennes,

se sont séparées de l’Église orthodoxe. Ce sont les Églises copte (en Égypte), abyssinienne

(en Éthiopie), syro-jacobite (au Prochain Orient), malabar (en Inde) et arménienne, lesquelles

aujourd’hui analysent ses positions en vue d’une possible réconciliation et retour au sein de

l’Église.

L’union hypostatique, c.-à-d. l’union des deux natures dans une seule personne (ou une seulehypostase), a comme conséquence la « communication des idiomes » (ou des propriétés), une

doctrine fondamentale de la christologie. Les « idiomes » (grec ἰδίωμα) sont, respectivement,

les propriétés que le Christ possède en vertu de sa nature divine ou les propriétés qu’il

possède en vertu de sa nature humaine.

La communication des propriétés, c’est l’attribution au Christ, désigné par un nom qui le

signifie comme personne de nature divine, d’une propriété qui lui appartient en vertu de son

humanité (par exemple : « le Verbe a souffert ») ; et, corrélativement, c’est l’attribution au

Christ, désigné par un nom qui le signifie comme personne dans sa nature humaine, d’une

propriété qui lui revient en vertu de sa divinité (« celui qui est né de Marie est le Fils de Dieu).

Un exemple très typique : Marie est la « Théotokos », la mère de Dieu ; ici une propriété

humaine, naître d’une femme, est attribuée au Christ désigné par un nom qui le signifie

comme personne de nature divine, Fils de Dieu.

Le fondement de la communication des propriétés, c’est l’union selon l’hypostase, et pas

selon la nature. Cette communication des propriétés exprime l’être même du Christ, sa

personne (ou hypostase) divine incarnée qui subsiste dans la nature divine et dans la nature

humaine. Finalement, cette communication des propriétés a lieu là où s’effectue l’union elle-

même, c.-à-d. dans la personne (ou hypostase) en laquelle les natures se sont unies.

La communication des propriétés n’est pas un artifice de langage, mais une caractéristique

réelle de l’être de Jésus Christ. Nous allons voir, dans le chapitre dédié à la christologie

1 Les conciles œcuméniques, Les Décrets, p. 199.

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calvinienne, comment le réformateur ne considère pas la dimension réelle de la

communication des propriétés, mais qu’il la qualifie simplement comme une façon de parler.

Calvinetlathéologienicéenneetchalcédonienne

Commençons cette introduction à la pensée trinitaire et christologique de Calvin en liaison

avec le chapitre précèdent sur la terminologie théologique que l’on vient de voir. En effet, à

propos des termes Trinité, substance (= essence) et hypostase -tous les trois absents de

l’Écriture-, le réformateur dit : « Si certains sont si remplis de scrupules qu’ils ne puissent

recevoir ces noms, toutefois nul d’entre eux, malgré qu’il en ait, ne pourra nier, quand

l’Écriture parle d’un Dieu, qu’il ne faille entendre une unité de substance [= essence] ; quand

elle dit que le Père, le Fils et le Saint Esprit sont trois, qu’elle ne dénote trois personnes en

cette Trinité. Quand cela sera confessé sans astuce, il ne doit pas nous chaloir des mots. Mais

 j’ai expérimenté depuis longtemps et plusieurs fois que ceux qui s’acharnent à débattre

tellement des mots nourrissent quelque venin caché »2.

Calvin a du se positionner aussi bien face aux biblicistes qu’aux traditionalistes. Les premiers

critiquaient que l’on importe en théologie une terminologie non biblique. Pour Calvin, la

Bible constitue indubitablement une règle de pensée, et elle n’interdit pas que soient employés

des termes qui lui sont étrangers, lorsqu’ils expriment fidèlement la doctrine biblique. Les

traditionalistes affirmaient que le vocabulaire biblique, consacré par l’usage, est non

seulement licite mais obligatoire. Calvin leurs répond qu’il s’en est fallu de beaucoup que la

terminologie ait toujours été commune : que l’on revienne, par exemple, aux convictions

définies à l’âge patristique.

Nous allons décrire par la suite la position trinitaire et christologique de Calvin.

Positiontrinitairecalvinienne

Les querelles mettant aux prises Calvin avec certains des antitrinitaires de son temps, commeValentino Gentile, Pierre Caroli et, surtout, Michel Servet, expliquent l’enjeu du réformateur

pour la question trinitaire.

La pensée trinitaire de Calvin, parfaitement orthodoxe, est exprimée dans le passage suivant :

« Le Père, le Fils et le Saint Esprit sont un seul Dieu, et toutefois … le Fils n’est pas le Père,

ni l’Esprit le Fils, mais … il y a distinction de propriétés » 3. Calvin est d’accord avec la

2 Institution I, XIII, 5.3 Ibidem.

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tradition orthodoxe, que le Père, le Fils et le Saint Esprit sont trois personnes réellement

distinctes mais partageant une même essence.

La démonstration calvinienne de la divinité du Fils et de l’Esprit Saint est de nature

exégétique, sur la base de la foi et de la révélation scripturaire, et non d’une enquête de la

raison laissée à elle seule, « car l’âme reconnaît indubitablement, et pour ainsi dire, touche à

la main la présence de Dieu, là où elle se sent vivifiée, illuminée, sauvée, justifiée et

sanctifiée »4. La question de la divinité d’une personne trinitaire n’est pas de pure théorie,

mais une affaire qui engage l’existence même du fidèle. Par conséquent, on attribuera à Dieu

toute action dont l’Écriture dit qu’elle le vivifie, l’illumine, le sauve, le justifie et le sanctifie.

Pour cela, les « preuves » calviniennes de la divinité des personnes trinitaires doivent être

relues. Ainsi, à propos du Fils, constatant que les bénédictions qui figurent en tête des épîtres

apostoliques font appel aux bénéfices du Christ, et remarquant par ailleurs que ces bénéfices

ne sont autres que ceux dont Dieu est l’auteur, il en réfère à la divinité du Fils. Il en va de

même de l’Esprit : tout fidèle « expérimente » le fait d’être constamment vivifié et régénéré,

action dont Dieu seul peut être la source ; or l’Écriture affirme que cette œuvre est le fait de

l’Esprit ; ainsi établit-on la divinité de l’Esprit.

Concernant la distinction des trois personnes en partageant la même essence : Calvin éclaircitcette état des choses, apparemment contradictoire, en utilisant le concept de « résidence » :

« J’appelle “ Personne ” une résidence en l’essence de Dieu, laquelle étant rapportée aux

autres est distincte d’elles d’une propriété incommunicable. Or ce mot de “ résidence ” doit

être pris en un autre sens que celui d’“ essence ”. Car si la Parole était simplement Dieu et

n’avait rien en propre, Saint Jean eût mal dit qu’elle a toujours été en Dieu (Jn 1, 1). Quand il

ajoute ensuite qu’elle est Dieu lui-même, il entend cela de l’essence unique »5. On voit ici

comment le concept de « résidence » agit. D’une part, toute résidence est une résidence

auprès de, selon l’expression johannique, ou en quelque chose. Ici, ce quelque chose est

l’essence. Parler d’une personne comme d’une résidence en une essence revient ainsi à parler

du mode de subsistance de cette essence, c.-à-d. de l’hypostase. L’emploi de ce terme permet

ainsi d’affirmer la consubstantialité des personnes. Mais par ailleurs, parler de résidence en

une essence suppose une distinction entre l’essence et son mode de subsistance. Les trois

personnes partagent certes la même essence, elles n’en gardent pas moins des propriétés que

4 Ibid. I, XIII, 13.5 Ibid. I, XIII, 6.

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Calvin qualifie de l’adjectif traditionnel d’« incommunicables ». En effet, si le Père et le Fils

sont Dieu, seul le Fils est mort et ressuscité, nullement le Père. Et dans la mesura où le Fils a

parlé de l’Esprit en disant qu’il serait un autre consolateur (Jn 14, 16 ; 15, 26), la distinction

entre le Fils et le Saint Esprit est bien une distinction réelle, et non une distinction purementnominale. 

La distinction réelle des personnes impose à l’esprit humain de concevoir l’existence d’un

ordre au sein de la Trinité. La position du Père est d’être la cause efficiente de tout agir. Cette

notion est parfaitement orthodoxe, étant donné que le rôle hypostatique de Dieu le Père est

d’être l’« αἰτία » (cause). La position du Fils, Sagesse de Dieu, est d’être la raison (ou

Λόγος). Quant à l’Esprit Saint, c’est celui d’être l’exécutant. Ainsi peut-on rendre compte,

premièrement, de la conception du Fils par le Père et du fait que l’Esprit procède du Père6 et,

deuxièmement, du fait que c’est bien le même Dieu qui agit, en prégnant l’initiative (comme

Père), pour une raison précise (en tant que Fils) et sur un mode déterminé (par l’opération du

Saint Esprit).

LachristologiedeCalvin

La pensée christologique de Calvin se centre beaucoup plus sur l’œuvre rédemptrice du Christ

que sur sa personne. En effet, certains chercheurs affirment que les développements

proprement christologiques de Calvin relatifs à la personne du Christ, frappent par leur

sobriété7. La base de la doctrine christologique calvinienne suit les énoncés principaux des

grands conciles christologiques des IVe et Ve siècles, notamment celui de Chalcédoine.

Comme on l’a vu ci-dessus, dans la personne du Christ les deux natures, l’humaine et la

divine, sont hypostasiées dans l’unique sujet qui est le Verbe de Dieu. Nous ne reviendrons

pas sur la divinité du Christ. Quand à son humanité, Calvin partage l’affirmation

fondamentale que l’on trouve dans He 4, 15 : « lui qui a été éprouvé en tout, d’une manièresemblable, à l’exception du péché ». En soulignant la pleine humanité du Christ, Calvin

combat toute forme de docétisme. Il explique l’exemption de tout péché, non pas par le

caractère extraordinaire de sa naissance virginale, mais par l’œuvre de Dieu et la

sanctification du Saint Esprit. Sur ces points la christologie calvinienne reste parfaitement

orthodoxe.

6 Selon Vial et la position traditionnelle catholique romaine, l’Esprit procède du Père et du Fils (filioque). Or,comme théologien orthodoxe, nous ne pouvons pas accepter cette position.7 Ainsi p.ex. Marc Vial, « Jean Calvin », p. 100.

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En accord avec la formulation chalcédonienne « sans division et sans séparation », en

référence à l’union hypostatique, Calvin s’oppose à l’hérésie de Nestorius de Constantinople

(428-431), car une telle position revient davantage à séparer les deux natures qu’à les

distinguer et aboutir à imaginer « un Christ double »8.

Néanmoins la spécificité de la christologie de Calvin se manifeste surtout dans l’accentuation

des éléments « sans confusion » et « sans changement » de la formulation chalcédonienne.

Calvin rejette la position emblématiquement représentée par Eutychès (Ve s.), condamné à

Chalcédoine. Le refus de toute indistinction des natures s’exprime dans ce que la tradition

calviniste a appelé l’« extra calvinisticum », dont le passage suivant constitue la base

fondamentale : « Car bien qu’il [le Christ] ait uni son essence infinie [i.e. divine] à notre

nature, c’était toutefois sans clôture ni prison. Car il est descendu miraculeusement du ciel, de

telle sorte qu’il y est demeuré ; et pareillement il a été miraculeusement porté dans le ventre

de la vierge, a séjourné dans le monde, a été crucifié, cependant que selon sa divinité il a

toujours rempli le monde comme auparavant »9. En d’autres termes : « Tout en étant unie à la

nature humaine dans la personne du Christ, la nature divine n’en gardait pas moins ses

propriétés, son infinité (dans l’espace comme dans le temps) : Unie à la nature humaine dans

une seule hypostase, elle n’y était pas pour autant “ localisée ” au sens strict ; dans le temps

même de l’Incarnation, le Verbe divin garde sa nature infinie : Il est , jusques et y compris en

dehors (extra) de la chair du Christ »10.

Une telle option explique la compréhension non « réaliste » de la doctrine traditionnelle dite

de la « communication des propriétés», dont on a parlé plus haut. Selon Calvin, le transfert

des propriétés, loin d’être un état de choses réel, n’est qu’une « forme de parler »11. De ce que

les écrivains bibliques disent, comme en Jn 3, 13 par exemple, que « nul n’est monté au ciel

hormis celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme », il ne faut pas en conclure que

c’est là une prérogative réelle du Christ en sa nature humaine ; « mais d’autant que lui-même

était Dieu et homme, au regard de l’union des deux natures, il attribuait à l’une ce qui était à

l’autre »12. En un mot, se justifiant par la considération de la personne, et non d’une nature,

l’énoncé sur la présence, hors du monde, de la nature humaine du Christ est l’expression

8 Calvin, Institution II, XIV, 4.9 Ibid. II, XIII, 4.10 Marc Vial, « Jean Calvin », p. 102.11 Calvin, Institution II, XIV, 1.12 Ibid. II, XIV, 2.

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d’une attribution logique, non d’une propriété de la substance : D’un effet de langage, non

d’une caractéristique réelle.

Conclusion

La théologie trinitaire et christologique de Calvin suit, en grandes lignes, celle des conciles

œcuméniques. Elle est pourtant orthodoxe, même s’il y a certaines particularités, comme

l’« extra calvinisticum » que l’on vient de voir.

Or, on pense que l’enjeu théologique du réformateur n’était pas de mettre en doute les vérités

de la foi trinitaires et christologiques, acceptées d’ailleurs unanimement depuis l’antiquité

tardive par le quasi totalité de l’Église ; mais plutôt il s’occupait d’autres aspects théologiques,

en dehors de l’objectif de ce travail. Néanmoins, Calvin a contribué à l’acceptation de la

doctrine traditionnelle là où le doute existait (Jean Servet et les autres antitrinitaires de

l’époque). Sa contribution reste pourtant positive.

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Bibliographie

I.  Sources

§  Bible de Jérusalem, Les Éditions du Cerf, Paris 2009.

§  Nestle, E. – Aland, K., Novum Testamentum Græce, Deutsche Bibelstiftung,Stuttgart, 261979.

§  Les conciles œcuméniques, Les Décrets, t. II-1 : Nicée à Latran V, éd. G.

Alberingo et alii, Paris 1994.

§  Jean Calvin, Institution de la religion chrestienne, éd J. Pannier, 4 vols. Paris

1936-1939.

II.  Monographies

§ Marc Vial, « Jean Calvin – Introduction à sa pensée théologique », Labor etFides, Genève 2008.