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Cet article est disponible en ligne en format HTML à l’adresse : http://www.cairn.info/article.php?ID_REVUE=RFG&ID_NUMPUBLIE=RFG_142&ID_ARTICLE=RFG_142_0043 Oliver Williamson et la théorie des coûts de transaction par Michel GHERTMAN | Lavoisier | Revue française de gestion 2003/1 - n° 142 ISSN 0338-4551 | pages 43 à 63 Pour citer cet article : — ghertman M., Oliver Williamson et la théorie des coûts de transaction, Revue française de gestion 2003/1, n° 142, p. 43-63. Distribution électronique Cairn pour Lavoisier. © Lavoisier. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

Théorie des coûts de transaction

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Oliver Williamson et la théorie des coûts de transaction

par Michel GHERTMAN

| Lavoisier | Revue française de gestion2003/1 - n° 142ISSN 0338-4551 | pages 43 à 63

Pour citer cet article : — ghertman M., Oliver Williamson et la théorie des coûts de transaction, Revue française de gestion 2003/1, n° 142, p. 43-63.

Distribution électronique Cairn pour Lavoisier.© Lavoisier. Tous droits réservés pour tous pays.La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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Oliver Williamson a

consacré sa vie à la

recherche théorique sur les

coûts de transaction. Il est

parti d’une analyse de deux

formes extrêmes de modes

de gouvernance le marché

et la firme avant d’étudier

les formes hybrides comme

les alliances et les contrats.

Il a ainsi pu établir des

propositions normatives

permettant aux agents

économiques de choisir les

modes de gouvernance qui

serviront d’institutions pour

leurs transactions aux

moindres coûts.

Oliver Williamson occupe une place très particu-lière parmi les grands auteurs du management.Il est le seul ayant à la fois :

– construit les fondements de la théorie des coûts detransaction, basée sur le principe normatif qu’économi-ser sur les coûts de transaction est préférable au gas-pillage résultant de choix guidés par le hasard ou « l’in-tuition managériale »,– déduit des principes normatifs concernant le choix exantepar les agents économiques des modes de gouver-nance, qui serviront d’institutions pour leurs transac-tions réaliséesex post,– entraîné plusieurs centaines de travaux empiriques,en économie, finance, marketing et stratégie par deschercheurs soucieux de tester statistiquement les pro-positions normatives produites par son architecturethéorique.Les trois contributions ci-dessus s’enrichissent réguliè-rement de nouveaux apports théoriques et empiriquesproduits par des chercheurs en économie et manage-ment. L’influence de l’économie des coûts de transaction(ECT) ne se fait pas sentir uniquement parmi les thèsesde doctorat et les publications académiques, mais égale-ment au sein des cours d’économie et des manuels demanagement.L’impact sur les agents économiques est peut-être pluslent à se propager, mais il est bien réel grâce à deux

M A N A G E M E N T :L E S C O N S T R U C T E U R S PAR MICHEL GHERTMAN

Oliver Williamsonet la théorie des coûtsde transaction*

* L’auteur remercie Claude Ménard pour ses commentaires.

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partnersde Mc Kinsey (Stuckey et White,1993) pour les décisions d’intégration verti-cale et un directeur de Betents Consultants(Ghertman, 2000) pour le choix d’un modede présence à l’étranger. Il a été essentielpour le changement de la jurisprudenceaméricaine concernant l’intégration verti-cale et les contrats de franchise (William-son, 1975).Oliver Williamson occupe une place uniqueparmi les fondateurs de l’économie néo-institutionnelle. C’est le seul à s’intéresserau management interne de l’entreprise aumême titre qu’aux autres institutions del’économie. Puisque les transactions peu-vent être véhiculées par des institutions (oumodes de gouvernance) comme le marché(système de prix), des formes hybrides(contrats) ou bien par l’entreprise (au seinmême de l’organisation), chacun des modesdoit être analysé avec les mêmes concepts,de façon à pouvoir être ensuite comparé àd’autres avec les mêmes instruments demesure. Son intérêt pour le management etson insistance à mesurer les dimensions destransactions et des modes de gouvernancele distinguent de Coase, North ou Akerlof.Pour bien le situer au sein de la pensée néo-institutionnelle, il est utile de résumer trèsbrièvement les travaux des prix Nobeld’économie de cette obédience : Coase(1991) et North (1993). On peut y rattacherAkerlof (2002), pour l’asymétrie d’infor-mation et la sélection adverse.C’est Coase (1937, 1984, 1988, 1997) qui alégitimé l’existence de la firme aux yeuxdes économistes libéraux, fervents admira-teurs du « marché » comme seule institutionéconomique efficace. Est-il utile de rappe-ler que leurs écrits prônent la « main invi-sible » d’un système de prix dans lequell’entreprise est réduite à une fonction de

production, sans mécanisme de coordina-tion interne, ni management, donc avec descoûts de transaction égaux à zéro?Demsetz (1967) ironisait en faisant réfé-rence au « marché » comme à un état idéalde Nirvana. Pour Coase, si la firme existe,c’est que, dans certaines circonstances,mais pas dans toutes, elle permet l’exécu-tion de transactions à des coûts inférieurs àceux du « marché ». Ce qui caractérise lafirme, c’est l’absence d’un système de prix,remplacé par un mécanisme interne decoordination. La main invisible des prixcède la place à celle, bien visible, des pro-priétaires et dirigeants. Les lois dessciences physiques, avec le calcul margina-liste de l’optimum des néo-classiques peu-vent dès lors céder la place aux stratégiesdes êtres humains et à leur observation parles sciences sociales. La qualité des diri-geants, des consultants et des professeursde management ne sont plus des variablesnégligeables.North (1981, 1990, 1994) est un historiendes institutions de l’économie dont lacontribution principale est d’avoir expliquépourquoi la croissance économique existedans certains pays et pas dans les autres.L’environnement institutionnel formel(pouvoir politique, légal et administratif) etinformel (culture, normes, valeurs) déter-mine les règles du jeu économique, qui ser-vent d’incitations pour les entrepreneurs.Lorsque l’environnement institutionnel estcrédible, les incitations sont positives, lestransactions entre agents économiques s’in-tensifient, leur coût unitaire baisse, l’inves-tissement et la croissance sont au rendez-vous. Lorsque les incitations sont peucrédibles, lorsque le politique est dictatorialet s’approprie par la force la rente des entre-preneurs, c’est l’inverse qui se produit avec

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son cortège de sous-développement et depauvreté. Chez North, comme pour la plu-part des néo-institutionnalistes, c’est lepolitique qui définit les règles du jeu écono-mique, à l’inverse des libéraux et desmarxistes.Akerlof, prix Nobel 2002, est très cité pourson article de 1970 sur les « citrons » (enanglais : « lemons », terme argotique signi-fiant « nanard » ou rebut). Il démontre quedans un système de prix, l’asymétrie d’in-formation entre vendeurs et acheteursamène les premiers à garder les bons pro-duits et à sélectionner les mauvais pour lesvendre. Le vendeur est en effet souvent leseul à posséder l’information lui permettantde faire la distinction entre ses qualités deproduits. Il peut vendre ainsi les mauvais aumême prix que les bons. Le « marché » faitdonc une sélection adverse, ou de façonplus imagée « la main invisible se met ledoigt dans l’œil ».Williamson intègre bien les apports deNorth, Coase et Akerlof : l’environnementinstitutionnel détermine les règles du jeupour le choix des modes de gouvernance(Williamson, 1998). La firme et le marchésont les deux institutions de l’économiequ’il analyse en premier (1975) avant d’yrajouter les formes hybrides (1985, 1994).L’asymétrie d’information est l’une desformes de l’opportunisme ex-ante (1985,1994).Il réunit tous ces éléments avec d’autrespour constituer son architecture théorique.Nous traiterons les attributs (ou caractéris-tiques) des transactions dans une premièrepartie, les caractéristiques des modes degouvernance dans une seconde avant desélectionner quelques travaux empiriquesqui ont permis des avancées dans l’utili-sation de l’ECT pour le management.

I. – LES ATTRIBUTSDES TRANSACTIONS

Puisque les transactions entre agents écono-miques peuvent utiliser comme supportinstitutionnel des modes de gouvernancedifférents, nous analyserons les caractéris-tiques des transactions avant celles desmodes de gouvernance.La transaction, ou échange, implique aumoins deux agents, qu’il s’agisse de plu-sieurs firmes ou d’unités opérationnellesdifférentes au sein de la même organisation.Le niveau d’analyse n’est donc pas l’indi-vidu (comme en psychologie), la firme(comme dans la théorie de la ressource), lecontrat (comme en droit) ou le marché(comme dans la théorie néo-classique) maisbien la transaction. Chaque partenaire sedistingue par la maîtrise d’une technologiedifférente, dans les cas d’un acheteur etd’un fournisseur faisant partie de firmesindépendantes ou des départements R&D etproduction de la même entreprise, parexemple.Puisque les transactions sont engagées etconclues par des êtres humains, lesaxiomes comportementaux (rationalitélimitée et opportunisme) doivent être pré-cisés avant d’analyser les attributs destransactions.

Axiomes comportementaux :rationalité limitée et opportunisme

C’est Simon (1947) qui a développé leconcept de rationalité limitée, c’est-à-direl’incapacité à être totalement informé et àcomprendre et prévoir les réactions desemployés, des fournisseurs, des clients etdes concurrents. En effet, eux-mêmes nesavent pas forcément à l’avance ce qu’ilsvont faire. Williamson a repris ce concepten rendant hommage à Simon.

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La rationalité limitée ne fait pas l’objet decontroverse.Il n’en va pas de même pour le deuxièmeaxiome behavioriste, apporté par Alchian etDemsetz (1972) et repris par Williamson(1975). Il s’agit de l’opportunisme, c’est-à-dire la volonté des individus d’agir dansleur propre intérêt en trompant éventuelle-ment autrui d’une façon volontaire. L’op-portunisme peut s’exercer ex-ante encachant des informations ou des intentionsou ex-posten saisissant les éléments non-écrits du contrat ou de la situation interne àl’entreprise pour tirer avantage d’événe-ments imprévus. Ce concept a été critiquéviolemment par ceux qui cherchent à établirune théorie économique sur la base de lanotion de confiance (Goshal et Moran1996). Oliver Williamson y a répondupatiemment et dans le détail (Williamson,1996 ; 1999). Une grande partie des élé-ments de sa réplique était déjà incluse dansune « digression » de trois pages sur l’op-portunisme (Williamson, 1985) probable-ment non lue ou mal comprise par sesdétracteurs. Ghertman (2000) l’a soulignéde façon humoristique et partiellement sar-castique en ajoutant que Ghoshal et Moran(1996) auraient dû plutôt critiquer Alchianet Demsetz (1972), puisqu’ils sont les créa-teurs du concept, repris ensuite dans lesnombreux travaux de Williamson.Ce n’est pas parce que l’on affirme quel’opportunisme existe, que l’on est parti-san de son développement. Il existe, laconfiance aussi. Toutefois ni l’un ni l’autrene sont inscrits sur le T-shirt du partenaireavec lequel on va réaliser une transactionéconomique, et si il l’était, l’informationn’en serait pas fiable pour autant. Laconfiance n’est donc pas un concept opé-rationnel pour choisir entre des modes de

gouvernance. Il faut bien se prémunircontre le risque d’opportunisme. Si laconfiance existait entre tous, il ne seraitpas nécessaire d’écrire des contrats, nid’avoir tant d’avocats, surtout aux États-Unis. Toutefois, dans la gestion interne desorganisations, plus la confiance existeentre les partenaires et plus leur sentimentd’appartenance et d’identité est forte, plusl’organisation sera efficace. Toutefois, lescontrats de travail sont quand même néces-saires. Sinon les employés subiraient desrisques d’opportunisme de la part de leursemployeurs et vice-versa. Les premiersréagiraient en passant une grande partie deleur temps à en abaisser les effets négatifs,en travaillant de façon moins efficace, etles seconds en faisant varier à la baisse lesniveaux de rémunération. La productivitéen serait lourdement affectée. De la mêmefaçon, l’accroissement de la confiancelorsque des formes hybrides sont choisies,diminue le coût de leurs transactions, enparticulier par l’échange volontaired’otages (Williamson, 1985), synonymed’intensité accrue de la spécificité desactifs (voir infra).

Les attributs des transactions

Les attributs des transactions, en tant quedéterminants des coûts de transaction, sontdes éléments essentiels pour l’arbitrageentre les modes de gouvernance.Trois attributs sont utilisés par Williamson :la spécificité des actifs, l’incertitude et lafréquence.La spécificité des actifs est le concept ayantdonné lieu au plus grand nombre de tra-vaux empiriques (Klein et Shelanski, 1995,Masten, 1996). Un actif est dit spécifique,lorsqu’un agent économique y aura investid’une façon volontaire pour une transac-

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tion donnée et qu’il ne pourra être redé-ployé pour une autre transaction sans uncoût élevé. On imagine mal un réseau fer-roviaire ou de télécommunications installéau Mexique dans l’objet de transactionsavec un opérateur de chemins de fer ou detélécommunications mexicain qui puisseêtre redéployé ensuite dans un autre pays.On comparera donc le niveau de spécificitédes actifs, pour une transaction donnée.Dans le cas d’une vente d’appareils de télé-phones fixes ou portables par contre, sil’opérateur mexicain change d’avis, onpourra facilement les redéployer vis-à-visd’un autre client. L’une des transactionsaura donc une spécificité des actifs supé-rieure à celle de l’autre. On voit déjà parcet exemple qu’il n’est pas nécessaired’avoir un instrument pour mesurer defaçon cardinale les coûts de transactionpour les deux modes de gouvernance sous-jacents aux deux exemples ci-dessus : lecontrat récurrent pour un réseau et lecontrat de court terme pour les appareils detéléphone. On aura simplement effectué làun choix ordinal et discret sur une basequalitative et comparative sans passer parun instrument de mesure commun commeune devise ou un nombre de kilogrammes.Plusieurs types de spécificité des actifsexistent : la spécificité de site, physique,sur mesure, de marque et humaine. Cettedernière est la plus importante surtout dansles industries à haute technologie ainsi quedans les services. Elle aura donc certaine-ment le plus de poids dans l’évaluation oula prévision des modes de gouvernancechoisis dans ces industries.Comme l’indiquait Ghertman (1994) : « Leconcept de spécificité des actifs est particu-lièrement important puisqu’il influence defaçon très substantielle les coûts de transac-

tion mais également la nature du produit etde la technologie qui feront l’objet de latransaction. La spécificité des actifsinfluence donc le résultat des transactionsen termes de choix stratégiques et des coûtsde production. Plus les actifs seront spéci-fiques à une transaction entre deux parte-naires, plus l’un et l’autre seront prêts àfaire des investissements importants quipermettront des choix technologiquesd’avant-garde et donc des économiesd’échelle et de champ. Un accroissementéventuel des coûts de transaction d’uncontrat évolutif par rapport à un contratrécurrent ou une solution de marché pourraêtre largement compensé par le bon choixde la technologie et du produit qui permet-tront d’améliorer la position concurrentielleet/ou diminuer les coûts de production ».L’incertitude se divise en deux compo-santes. La première est l’incertitude internequi recouvre la complexité et le caractèretacite des tâches que l’entreprise effectue eninterne ou que deux firmes différenteseffectuent lors d’une transaction de trans-fert de technologies. La deuxième est l’in-certitude externe qui comprend l’incerti-tude technologique, l’incertitude légaleréglementaire et fiscale, et l’incertitudeconcurrentielle.Les transactions peuvent être fréquentescomme lors des approvisionnements d’unrestaurant ou peu fréquentes ou mêmeuniques comme dans le cas de la construc-tion d’un barrage ou d’une université. Plusles biens échangés sont standards, c’est-à-dire ayant un très faible niveau de spéci-ficité des actifs, et d’incertitude interne,plus les transactions seront fréquentes, plusle marché sera le mode de gouvernancechoisi. Par contre, plus la spécificité desactifs et l’incertitude interne seront élevées

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et la fréquence des transactions sera faible,plus on aura affaire à un contrat ou à uneopération interne au sein d’une hiérarchie.La fréquence n’est pas forcément l’attributdes transactions le plus important lors duchoix d’un mode de gouvernance.Une grande partie des travaux de William-son, surtout avant son article de 1991 dansAdministrative Science Quarterly,établitdes propositions théoriques normatives surles relations entre attributs des transactionset modes de gouvernance. La spécificitédes actifs y joue un rôle central. Pour seprémunir contre des coûts de transactionélevés dus à l’opportunisme des agents,aux différentes formes d’incertitude ou àune fréquence élevée pour des produitssans cesse renouvelés pour rester inno-vants, il est nécessaire que les engagementsréciproques soient crédibles pour les deuxpartis (North (1990) traite de la crédibilitédes engagements de l’environnement insti-tutionnel pour les agents économiquesalors que Williamson utilise le mêmeconcept pour les transactions entre diffé-rents agents). La situation d’otages mutuels(Williamson, 1985), fondée sur une spéci-ficité réciproque élevée, devient une baseautrement crédible qu’un sentiment deconfiance, toujours sujet à erreur d’appré-ciation ou à transformation en sentiment deméfiance. Plus l’opportunisme et les incer-titudes sont élevés, plus la spécificité desactifs doit être intense, moins les agentsauront recours au marché. Avec un niveauélevé de spécificité des actifs, plus l’incer-titude sur leur durée de vie est faible etceteris paribus, plus le besoin de les renou-veler est élevé, plus l’un des agents auraintérêt à intégrer l’autre. La coordinationinterne par la firme remplace alors lecontrat récurrent. En situation d’otage uni-

latéral, l’agent ayant investi de son côtédans un actif spécifique à la transaction,sans réciprocité, devra se prémunir contrel’opportunisme de l’autre agent sur le par-tage de la rente, quelle que soit l’incerti-tude sur la durée de vie des actifs. L’inté-gration verticale est alors recommandée.Puisque plusieurs attributs des transac-tions, considérés comme des variablesindépendantes, influencent les modes degouvernance utilisés – la variable dépen-dante – le nombre de relations peut s’avé-rer important et complexe à élaborer. C’estprécisément de là que viennent les oppor-tunités de travaux empiriques. L’ECTappliquée aux modes de gouvernance apermis l’élaboration de nombreuses hypo-thèses dérivées de la théorie et susceptiblesde tests statistiques sur des données empi-riques. La plupart des quatre cents travauxcorroborant l’essentiel des propositions del’ECT, mentionnés par Williamson (1999),concerne les relations entre attributs etmodes de gouvernance.

II. – LES CARACTÉRISTIQUESDES MODES DE GOUVERNANCE

Nous passerons successivement en revueles trois modes de gouvernance : le marché,la firme (ou hiérarchie) et les formeshybrides, avant d’examiner leurs troiscaractéristiques : types de droit de réfé-rence, nature de leur adaptabilité et instru-ments de management. Ensuite nous analy-serons la méthode de choix discret desmodes de gouvernance.

1. Les trois modes de gouvernance

Le concept de marché entraîne de nom-breux malentendus car il a des sens variés etparfois divergents. Pour les partenaires

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signant un contrat, « ils concluent un mar-ché ». Pour une entreprise soumissionnant àune offre publique d’achat, lorsqu’elle aréussi, elle a « obtenu un marché », c’est-à-dire dans ce cas-là, un client. En marketingun « marché » représente un ensemble declients. En stratégie un « marché » est soitun couple produit-clients ou une triadetechnologie-produit-clients ou bien encorele terrain sur lequel les entreprises s’affron-tent pour obtenir des clients ou des res-sources. La théorie des coûts de transactionn’utilise aucun des sens ci-dessus puis-qu’elle s’en tient au concept de marché del’économie néo-classique, c’est-à-dire unsystème de prix dans lequel la firme est unefonction de production. Puisque marché,hybride et hiérarchie (ou firme) sont desmodes de gouvernance distincts et doncmutuellement exclusifs.Les firmes se font concurrence pour desclients ou des ressources. Estimer que laconcurrence entre des firmes (niveau despécificité des actifs conséquents) d’unmarché (système des prix, spécificité desactifs inexistante) ne peut qu’engendrer uneconfusion conceptuelle. Lorsque deuxentreprises se vendent des produits, ellespeuvent utiliser le marché si les produitssont standard ou bien une forme hybridecomme le contrat, récurrent ou évolutif, encas de transactions répétitives pour la sous-traitance. Ménard (1995) a précisé cesconcepts dans un article faisant autorité.La hiérarchie est le concept utilisé parWilliamson (1975, 1985, 1995) pour parlerde ce que l’on appelle la firme ou l’entre-prise. Le concept de hiérarchie se distinguede celui de « marché » par le « fiat », c’est-à-dire l’acte d’autorité ou ordre qui tientlieu de mécanisme interne de coordinationpour Williamson. Les théoriciens de l’orga-

nisation, Barnard (1938), Simon (1947,1991) ou Mintzberg (1986), considèrentl’organisation comme un lieu peuplé d’ac-teurs ayant un objectif commun et desobjectifs individuels différents, et réunispar des mécanismes de coordination. Ladécision de participer ou son contraire, lapossibilité de rester à son poste de travailen faisant le moins possible, vient deSimon (1947). La coordination vient deCoase (1937) et Barnard (1938). North(1990) cite plusieurs auteurs pour expli-quer le rôle de l’organisation : Marglin(1974) qui y voit un instrument pourexploiter les travailleurs, Williamson(1975, 1985) qui s’en sert comme d’unoutil pour résoudre les problèmes de spéci-ficité des actifs et d’opportunisme (voirdéfinitions plus haut) et Barzel (1982) pourréduire les coûts de mesure et de contrôlede l’activité économique. Les théoriciensde l’organisation et les économistes yvoient donc des objectifs multiples etvariés. En plus, l’organisation peut diffici-lement être réduite à une seule variable(Ghertman, 1994). La description de la hié-rarchie comme un lieu d’exercice du« fiat » ne correspond plus aux prescrip-tions du management moderne (Hammer etChampy, 1993 ; Ostroff et Smith, 1993)mais plutôt à celles de Fayol (1916). Tou-tefois, elle est nécessaire selon Williamson(1985) pour distinguer les formes de gou-vernance discrètes que sont le marché, lahiérarchie et les formes hybrides. L’utili-sation d’autres mécanismes de coordina-tion, comme une identité commune avecdes processus consensuels, toujours souscontrainte de décision de recrutement ou delicenciement pris par la hiérarchie nechange rien à la nature discrète (au sensalgébrique) des modes de gouvernance.

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Le premier effort de Williamson a étéd’isoler les deux formes extrêmes : la hié-rarchie et le marché. Il a analysé lesformes hybrides plus tard (Williamson,1985). Elles sont plus complexes à étudieret nombreuses : contrat de fourniture oude vente à court terme, contrat récurrent àplus long terme, accord de licence defabrication de sous-traitance de franchiseou de marque. Les alliances sont desformes composites de contrats, éventuel-lement nombreux, et de hiérarchiesconjointes (filiales communes).

2. Les caractéristiques des modes de gouvernance

Elles se composent des types de droit deréférence, des modes d’adaptation et desinstruments de management.

Les droits de référence

La branche williamsonienne de l’ECT nefait pas seulement appel à l’économie et à lasociologie des organisations, mais égale-ment au droit, dont chaque type sert de sup-port de référence et d’instance lors delitiges éventuels pour chacun des troismodes de gouvernance.Le contrat classique s’applique à la transac-tion néo-classique idéale par le marché. Lestransactions se font sur le marché au comp-tant, elles restent essentiellement moné-taires, comme sur des commodités normées(devises, matières premières). L’identitédes partis importe peu. Les produits, leurqualité et les délais sont standards. En casde litige, le tribunal peut porter un jugementsans connaissance des métiers des partis.Le contrat néo-classique utilise l’arbitrageen cas de litige. Il nécessite une plus grandeconnaissance des métiers des partis à quil’arbitre peut demander des explications

orales. Les agents sont des entités juridi-quement indépendantes mais reliées par uncontrat évolutif plus souple que le néo-clas-sique. Il permet des adaptations en cas devariation des conditions contractuelles. Ilest utilisé pour les formes hybrides.La retenue (forebearance) constitue le droitde référence implicite au sein des entre-prises. Le rejet fréquent ou systématiquedes compromis par une division, un dépar-tement ou un service est interprété commeun refus de coopérer avec les autres plutôtqu’une adhésion forte à la stratégie ou àl’éthique de l’entreprise. De même, les tri-bunaux se refusent à intervenir dans unlitige entre deux départements de la mêmefirme. Ils doivent se mettre d’accord ou enréférer au niveau supérieur de la hiérarchieen cas de litige. La firme est en quelquesorte sa propre juridiction d’appel.

Les types d’adaptabilité

Williamson (1991) prend comme point dedépart les points de vue de Hayek et de Bar-nard sur le changement et l’adaptation.Hayek (1945) considère le changementcomme cause unique des problèmes écono-miques, dont le principal pour la société estl’adaptation de temps et de lieu. Le méca-nisme des prix est l’instrument idéal pour yrépondre. Barnard (1938) constate parallè-lement que le problème principal de l’orga-nisation est de s’adapter à des circonstanceschangeantes. Cette « merveille qu’est lemarché » (Hayek) a comme pendant « lamerveille de l’organisation » (Barnard).Williamson (1991) les met d’accord en pro-posant deux types d’adaptation différents,répondant chacun à des objets distincts.L’adaptabilité autonome (A) concerne lesquantités de commodités standards échan-gées en fonction des changements de prix.

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L’adaptabilité bilatérale (B) concerne lacoordination des actions et investissementsdes partenaires de l’échange au sein de lafirme pour créer des produits différents ounouveaux avec des caractéristiques de qua-lité, de performance et de service variantselon les catégories de clients visés. Le prixn’est plus la seule variable déterminant lesquantités échangées. En plus, l’adaptabilitébilatérale explique pourquoi certains pro-duits sont créés ou abandonnés et pasd’autres.

Les instruments de management

Deux types d’instruments sont retenus parWilliamson : l’intensité des incitations etl’importance de la bureaucratie. Le marchéest le mode de gouvernance qui incorporeles incitations les plus fortes. Le chef d’en-treprise est plus motivé pour travailler effi-cacement et d’une façon longue et intensequ’un employé. L’intensité des incitationsdiminue lorsque l’on va de la forme de gou-vernance marché vers les formes hybridespuis vers la hiérarchie. C’est l’inverse quiest vrai pour la bureaucratie. Plus l’organi-sation est importante, plus les coûts bureau-cratiques seront élevés. Les coûts de tran-saction vont donc en croissant de la formemarché vers la forme hiérarchie. C’est lamême chose pour les incitations puisqueplus les incitations sont fortes, moins lescoûts de transaction sont élevés. Donc, dansla plupart des cas, plus on ira vers la hiérar-chie, plus les coûts de transaction dûs auxinstruments de management seront élevés.L’ECT utilise le concept d’incitationcomme instrument de management, ayantdes intensités différentes selon les modes degouvernance. Cela distingue l’ECT de lathéorie de l’agence (Jensen et Meckling,1972), où les incitations constituent le

mécanisme central chargé de régler les ten-sions entre le principal et ses agents au seinde la firme. L’ECT emploie en outre unearchitecture plus étendue.

3. L’analyse discrète des modes de gouvernance

Pour justifier l’abandon de l’approche mar-ginaliste des néo-classiques qui recherchentun optimum sur deux fonctions en continu(utilité du consommateur et production),Williamson (1991) utilise une citation deHerbert Simon (1978) qui fournit de trèssolides arguments pour adopter l’analysediscrète, au sens algébrique du terme :« Au fur et à mesure que l’économie s’étendau-delà de la théorie des prix et de sa pré-occupation principale pour des quantités decommodité et d’argent, on y observe undéplacement d’une analyse très quanti-tative, au sein de laquelle l’analyse margi-naliste joue un rôle central, vers une ana-lyse plus qualitative des institutions quieffectue une comparaison des alternativesstructurelles discrètes… De telles analysespeuvent souvent être menées à bien sans unappareillage mathématique avancé ou lecalcul marginaliste. En général, des argu-ments plus simples suffisent pour démon-trer une inégalité entre deux quantités queceux nécessités pour stipuler les conditionsqui permettent à ces quantités d’être égalesà la marge. » (Simon, 1978)Les principes de l’analyse discrète demodes de gouvernance alternatifs provien-nent de l’article d’Oliver Williamson dansAdministrative Science Quarterly(1991).Les instruments de management, les typesd’adaptabilité et le droit de référence sontévalués selon leur niveau d’intensité pourchacun des modes de gouvernance. Celadonne le tableau suivant :

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L’intensité des incitations varie de fortepour le marché (++) à faible pour la firme(0). C’est l’inverse pour le contrôle bureau-cratique. L’intensité de l’adaptabilité (A)varie de forte à faible du marché à la firme.C’est l’inverse pour l’adaptabilité (B). Lapossibilité d’intervention d’un tribunalvarie de fort pour le marché à faible pour lafirme. Toutes les intensités adoptent unevaleur intermédiaire pour les formeshybrides, quelle que soit la caractéristiquedu mode de gouvernance examiné.L’analyse comparative des formes de gou-vernance discrètes établit bien à la fois lasupériorité du « marché » sur la firme en casde spécificité des actifs nulle et l’inférioritémarginale du marché pour tout accroisse-ment du niveau de spécificité des actifs.Williamson (1991) le fait en positionnantl’égalité suivante :

M = M (k ;θ)

où M est le coût de gouvernance par lemarchék le niveau de spécificité des actifsθ un vecteur de paramètres (ou détermi-nants externes provenant de l’environne-ment institutionnel) changeant le niveau despécificité des actifs.Si k = O et H = le coût de gouvernance parla firme, on obtient :M (O) < H (O) et en prenant la dérivée :

M’ > H’ > O

III. – TRAVAUX EMPIRIQUES

Nous traiterons successivement les applica-tions de l’ECT pour la politique concurren-tielle, les décisions des entreprises et larecherche académique empirique. Cettepartie est volontairement brève puisque cetarticle est consacré à Williamson. Il ne peutdonc pas couvrir de façon exhaustive lestravaux empiriques utilisant l’ECT.

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Tableau 1

COMMENT DISTINGUER LES ATTRIBUTS DES MODES DE GOUVERNANCE

Mode de gouvernanceAttributs

Marché Hybride Firme

Instrumentsde management :Intensité des incitations ++ + 0Contrôle administratif(ou bureaucratique) 0 + ++

Type d’adaptabilité :Autonome (A) ++ + 0Bilatérale (B) 0 + ++

Droit de référence ++ + 0

Source : traduit et adapté de Williamson O. (1991).

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1. La politique concurrentielle

Comme Coase (1972) l’avait remarqué,pendant les années 1950-1970, les tribu-naux américains appliquaient les prescrip-tions de la théorie néo-classique pour s’op-poser à nombre de fusions-acquisitions(Williamson, 1982). La taille des grandesentreprises était censée leur donner unavantage sur les petites et accroissait lesbarrières à l’entrée, diminuant ainsi l’inten-sité concurrentielle (pouvoir de marché).Aucune considération des économies réali-sées n’était prise en compte. Si la doctrinesous-jacente à la politique de la concur-rence n’avait pas changé aux États-Unis,puis en Europe, les vagues de fusions-acquisitions des trois dernières décenniesdu vingtième siècle n’auraient probable-ment pas eu lieu. Une application à la lettrede la théorie des prix privilégie le niveau deconcurrence le plus élevé, hors considéra-tions d’économie ou de bien-être social. Lepremier article de Williamson dans l’Ame-rican Economic Review(1968) montrebien que la politique concurrentielle libé-rale a un coût très élevé pour l’économie etle bien-être américain. Elle privilégie lemarché de façon dogmatique alors que plusde hiérarchie serait nécessaire. Williamsona été suivi par beaucoup d’autres, y com-pris Bain (1968). Ce changement de doc-trine a amené les tribunaux à réviser leursjugements dans les années suivantes. Uneréorganisation de la section anti-trust dudépartement de la justice des États-Unis,que Williamson a conseillé à ce moment-là,a considérablement diminué le nombred’actions en justice s’opposant aux fusions.Après cette réorganisation, les économistesdonnaient leur avis avant le dépôt deplainte plutôt qu’après, uniquement dans lebut d’étayer le point de vue anti-fusions

des juristes (Williamson, 1985). Le guidedes fusions-acquisitions publié par ledépartement de la Justice (1984) entérinebien l’objectif d’économiser sur les coûtsde transaction, alors que c’était l’inverseauparavant.Le deuxième article de Williamson dansl’ American Economic Review(1971) traitede l’intégration verticale comme un moyend’économiser sur les coûts de transactionen accroissant le niveau de spécificité desactifs (s.a.), ce qui n’aurait pas été possibleavec un contrat bilatéral. L’une des entre-prises se trouverait en effet à la merci del’opportunisme de l’autre. Le choix dumode de gouvernance affecte simultané-ment le niveau de s.a. et celui des prix(Williamson, 1985), ainsi que le choixtechnologique.L’influence de l’ECT s’est également éten-due aux formes hybrides : accords de fran-chise ou de licence de fabrication. En 1967,Schwinn, un fabricant de bicyclettes, se vitinterdire le maintien de prix identiques etd’un niveau standard de qualité pour sesdistributeurs, toujours au nom de l’intérêtde maintenir une concurrence vigoureuse.Dix ans plus tard avec le cas GTE-Sylvania(lampes électriques) la jurisprudence futinversée en acceptant l’importance desinvestissements spécifiques du franchiseurdans la qualité de ses produits et dans laréputation de sa marque. Sans contrôle, latentation d’un franchisé à se comporter enpassager clandestin (free-rider) est trèsforte. Baisser la qualité accroît ses margeset entraîne de faibles risques d’en êtreconsidéré comme responsable. Par contre,l’effet de réputation négatif diffuse sur latotalité de la marque. Baisser légèrementles prix fait accroître son chiffre d’affairesd’une façon conséquente et plus que com-

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penser ses baisses de marge. Si McDonald’set Jean-Louis David ont pu utiliser la fran-chise pour une globalisation rapide, c’estgrâce à l’acceptation par les responsablesde la politique concurrentielle du rôle char-nière de la spécificité des actifs dans lechoix des modes de gouvernance. Peu declients de McDonald’s ou de Jean-LouisDavid savent qu’ils ne doivent pas seule-ment prix bas et qualité standards à la stra-tégie de ces firmes, mais également à unchangement de doctrine de la politiqueconcurrentielle et donc à Oliver William-son. Dans ce domaine, l’ECT a bien aidé lastratégie des entreprises, non pas en lui pro-posant de nouveaux modèles de raisonne-ment ou d’organisation interne, mais enmodifiant son environnement institutionnel,ce qui s’avère aussi important, sinon plus.Dans la lignée d’Oliver Williamson,d’autres travaux ont permis d’évaluer l’effi-cacité de certaines politiques publiques oude les améliorer : Levy et Spiller (1994),Ghertman et Quélin (1995) pour les télé-communications, Delmas, Ghertman etHeiman (1997) pour le nucléaire civil, Shir-ley (2001) et Ménard (2001) pour la poli-tique de l’eau dans les pays en voie de déve-loppement, Glachant (2002) pourl’électricité en Europe, Delmas (2002) pourla diffusion des normes de gestion de l’en-vironnement en Europe et aux États-Unis.Tous ces travaux montrent l’intérêt d’uneanalyse fine des modes de gouvernance etde leur environnement institutionnel pour ladéfinition de politiques concurrentielles etindustrielles avec un objectif de bien-êtresocial. Aucun n’adopte le dogmatisme despolitiques d’origine néo-libérale oumarxiste. Déréglementations et privatisa-tions ou nationalisations systématiques nesont pas forcément de bons ou mauvais

choix. C’est à l’analyse néo-institutionnellede proposer des solutions au cas par cas.

2. Applications pratiquespour les entrepriseset l’enseignement du management

a) Intégration verticale

L’application la plus connue concerne leschoix d’intégration verticale. Elle provientde deux partenaires australiens de Mc Kin-sey : Stuckey et White (1993) qui l’ont uti-lisé pour de nombreux travaux de conseil.Elle a été analysée par Ghertman (2000).Stuckey et White débutent par une formed’analyse de secteur industriel pour y réper-torier les types de transactions et leursagents. Ils repèrent ensuite les échecs dumarché dus à un niveau élevé de spécificitédes actifs, à des oligopoles ou monopolesbilatéraux, à une incertitude ou une fré-quence élevées des transactions. Ils exami-nent ensuite les différentes chaînes devaleur successives du début jusqu’à la find’une filière industrielle pour y localiser lesfirmes bénéficiant des profits les plus élevéset les asymétries de rapports de force.Celles se trouvant en position de faiblesseont intérêt à acheter leur fournisseur ouclient si le prix de l’acquisition est inférieurà l’espérance actualisée de la rente acquise.Stuckey et White quantifient ensuite lescoûts d’investissement, de transaction, lesrisques et la coordination interne, sans indi-quer comment pour les deux derniers.

b) Modes de présence à l’étranger

La deuxième application proposée parGhertman (2000), est plus proche de l’ana-lyse discrète de modes de gouvernancealternatifs de Williamson (1991). Elleconcerne le choix des modes de présence àl’étranger.

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Sa méthode utilise de façon complémen-taire les deux approches successives deWilliamson : la sélection d’un mode degouvernance adapté aux attributs des tran-sactions, pour économiser sur leurs coûts etles choix de cohérence (discriminating ali-gnement) entre les modes de gouvernanceet leurs caractéristiques. Spécificité desactifs, incertitude et fréquence sont les attri-buts des transactions alors que l’adaptabi-lité (A ou B) est l’une des principales carac-téristiques (ou attributs) des modes degouvernance. L’adaptabilité ayant pourobjet les attributs (ou caractéristiques) destransactions, l’approche par les attributs destransactions et celle par ceux des modes degouvernance doivent donner le même résul-tat. Analyser les attributs des transactions etles types d’adaptabilité serait redondant.Puisque les premiers sont des abstractionsplus fines que les types d’adaptabilité, ils

pourront être classés de façon ordinale plusfacilement lors d’applications concrètes.C’est pourquoi Ghertman (2000) utilise letableau 2 comme cadre d’analyse, influencépar une version préliminaire (WorkingPaper) de l’article de Williamson (ASQ,1991). Parmi les attributs des modes degouvernance, il ne retient que les instru-ments de management.Après avoir répertorié les transactions dusecteur, empruntant ainsi à Stuckey etWhite, cette méthode propose un classe-ment ordinal pour tous les attributs en fonc-tion des modes de présence sélectionnés.Ensuite les attributs essentiels, le plus sou-vent spécificité des actifs et/ou incertitude,sont retenus, permettant de faire le choixéconomisant sur les coûts de transaction. Letableau 2, qui sert d’exemple, permet defaire le choix ex-antede la filiale à 100 %utilisant cette méthode.

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Tableau 2

CHOIX DE MODE DE GOUVERNANCE POUR LA PRODUCTION DANS UN PAYSÉTRANGER EN SITUATION DE FORTE SPÉCIFICITÉ DES ACTIFS,

FORTE INCERTITUDE INTERNE ET FRÉQUENCE ÉLEVÉE

Mode de gouvernance Filiale Filiale Licence Contratà 100 % commune de fabrication d’export

Attributs (1) (2) (3) (4)

ComportementauxRationalité limitée 4 3 2 1Opportunisme 2 3 4 1

TransactionsSpécificité des actifs 1 2 3 4Incertitude Interne 2 3 4 1Fréquence 1 2 3 4

Modes de gouvernance(instruments de management)

Incitation 1 2 4 3Bureaucratie 3 4 2 1

1 : coût de transaction (CT) le plus faible ; 2 : CT faible ; 3 : CT élevé ; 4 : CT le plus élevé.

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Par contre, si la spécificité des actifs estfaible, l’incertitude interne faible grâce àune expérience importante du transfert detechnologie par licence et la fréquencefaible, c’est la licence de fabrication quiaura les coûts de transaction les plus bas.Les valeurs ordinales de la colonne (3)seront les plus faibles et la licence de fabri-cation sera le choix recommandé.L’analyse insiste sur la nécessité de sépareractifs marketing et de production. Leurniveau de spécificité des actifs et d’incerti-tude ne sont pas forcément identiques, requé-rant parfois un mode de présence différentpour la distribution et l’approvisionnement.Tandis que l’analyse par les coûts de pro-duction se concentre sur les composantesdu prix de revient prévisible au moment duchoix de mode de gouvernance, l’analysepar les coûts de transaction s’intéresse auxrelations entre les parties prenantes à latransaction qui ont un impact sur l’évolu-tion future des composantes du prix derevient, y compris le partage de la renteentre les partenaires. Prendre comme based’un choix l’analyse par les coûts de pro-duction, c’est utiliser une valeur comptablehistorique pour prévoir une évolution futureen condition d’incertitude. L’analyse par lescoûts de transaction incorpore certains élé-ments d’adaptation à ces conditions d’in-certitude. C’est en cela qu’elle est plus ins-trumentale que celle par les coûts deproduction. À long terme, dans l’optiqued’une analyse stratégique d’une présence àl’étranger elle doit être retenue en prioritélorsque les deux approches donnent desrésultats différents.Cette méthode de choix se prête parfaite-ment à un enseignement utilisant laméthode des cas. Par exemple, les mini-cas« Danone Yogurts (A, B et C) » (Cas

Groupe HEC, SPE : 658-MK-A 02-01 ;659-MK-A 04-01 ; 660-MK-A 04-01 maiségalement Staabucks Corporation (A) pourl’intégration verticale (Grant et Neupert,1999) et certainement beaucoup d’autres.Le choix ordinal discret est plus naturelpour des cadres et dirigeants que pour desétudiants à l’expérience professionnellerestreinte. Les premiers ont l’habitude deschoix qualitatifs, en partie subjectifs, baséssur leur connaissance du métier. Lesseconds ne sont pas encore libérés de lalégitimation par la quantification.

3. La recherche académique empirique

Elle a porté sur les relations entre attributsdes transaction et modes de gouvernance.Plus la spécificité des actifs est élevée, plusl’intégration verticale sera choisie. C’est ceque Monteverde et Teece (1982) ont testépositivement dans l’industrie automobile.La plupart des travaux empiriques testantla relation entre attributs des coûts de tran-saction et modes de gouvernance, a concluque plus l’incertitude interne était élevée,plus les entreprises ont tendance à choisirdes transactions internes, c’est-à-dire l’in-tégration verticale par rapport à des tran-sactions de marché ou même à des transac-tions hybrides. Par contre, lorsqu’en mêmetemps l’incertitude externe est très élevée,la relation devient plus complexe. Si l’in-dustrie est mature et que l’incertitudeexterne est d’ordre réglementaire, commedans les pays à risque politique élevé, l’en-treprise aura tendance à éviter la hiérarchiepour ne pas exposer inutilement des actifs.Elle recourra à ce moment-là à l’une desnombreuses formes contractuelles dispo-nibles. Par contre si l’industrie est en émer-gence et que l’incertitude externe provientà la fois de nouvelles découvertes techno-

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logiques, de concurrence entre technolo-gies et d’incertitudes réglementaires, l’en-treprise aura tendance à choisir les formeshybrides plutôt que le contrat ou l’intégra-tion verticale, (Delmas 1996). Delmas,Ghertman et Obadia, (1997) ont préciséque cette conclusion n’est valable quelorsque la firme possède des compétencesfaibles ou moyennes. Par contre, lors-qu’elles sont fortes, la firme choisit plutôtl’intégration verticale. Coeurderoy etGhertman (1997) l’ont confirmé pour lesservices informatiques.Plusieurs travaux empiriques sur les filialescommunes à l’étranger (Hennart, 1991) ontvalidé les relations préconisées par l’ECT.Une revue de la littérature académiqueempirique a été faite par Coeurderoy etQuélin (1997). Un autre développementempirique réalisé par des chercheurs utili-sant la théorie d’Oliver Williamson permetde mesurer les coûts de transaction en inter-viewant les dirigeants de sociétés pour esti-mer le temps qu’ils consacrent à des tran-sactions individualisées. Les temps sonttranscrits en coûts à l’aide de techniquesstatistiques. Le premier travail réalisé en cesens a été effectué par Masten, Meehan etSnyder (1991). Dans le cas de la construc-tion d’un navire marchand, ils ont estiméque les coûts de transaction dus au face àface entre le maître d’œuvre, les sous-trai-tants et ces derniers entre eux, représen-taient 17 % du coût total du navire. Cescoûts de face à face n’incluent pas les coûtsde management internes aux maîtresd’œuvre et à chacun des sous-traitants.Un avenir de plus en plus prometteur estassuré aux recherches faisant appel à l’éco-nomie des coûts de transaction puisque lacritique faite quant à son manque d’opéra-tionnalité a perdu beaucoup de sa valeur.

L’attribution de valeurs cardinales est pos-sible (Masten et al., 1991 ; Stuckey etWhite, 1993). L’évaluation ordinale dis-crète reste toutefois plus économe pourl’aide aux décisions stratégiques.L’utilisation de l’ECT pour examiner defaçon empirique les résultats sur la perfor-mance de la firme de déviations par rapportà la norme de cohérence entre les attributsdes transactions et le mode de gouvernance,économisant sur les coûts de transaction,est une préoccupation empirique récente(Masten, 1993 ; D’Aveni et Ravenscraft,1994 ; Leiblein et al., 2002). Elle amènel’ECT sur une des questions centrales de lastratégie d’entreprise.Diverses mesures de la performance, dontla performance technologique (Leiblein etal., 2002) diminuent lorsque le mode degouvernance utilisé s’écarte de la prescrip-tion de l’ECT.

CONCLUSION

En près de quarante années de publicationsdans les revues les plus prestigieuses enéconomie, droit et management, OliverWilliamson a créé les bases d’une architec-ture théorique particulièrement solide.Les transactions sont l’objet et l’unitéd’analyse, ce qui permet une améliorationdes connaissances sur les formes hybridesqui représentent la plus grande partie destransactions (Hennart, 1993), dont lesalliances qui continuent de croître. Dunning(1995) considère que nous vivons uneépoque de « capitalisme d’alliance ».Les transactions possèdent des attributsdont l’intensité, mesurée en coûts de tran-saction, varie selon les modes de gouver-nance, ou institutions de l’économie, utili-sés comme supports permettant de

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s’adapter aux variations de paramètres del’environnement institutionnel. L’objectifnormatif est d’économiser sur les coûts detransaction, en choisissant le mode de gou-vernance approprié. Le choix se fait entreplusieurs modes discrets avec un classe-ment ordinal de chacun des attributs. Lesconcepts utilisés sont nombreux : environ-nement institutionnel informel et formel,institutions de l’économie (ou modes degouvernance), opportunisme (ex anteou expost), asymétrie d’information, rationalitélimitée, spécificité des actifs, incertitude(de plusieurs sources), fréquence, engage-ments crédibles, otage(s) unilatéral oumutuels, incitations, bureaucratie, fiat,transformation fondamentale.Pas étonnant que les barrières à l’entrée dece champ théorique soient élevées et quecertains (Ghoshal et Moran, 1996) seconcentrent à critiquer, de façon souventmaladroite ou peu sérieuse, une seulevariable, pour éviter de faire l’effort d’ap-prendre et de tout comprendre avant depouvoir critiquer de façon constructive.Pourtant l’enjeu est d’importance. SansWilliamson, difficile de comprendre lesformidables vagues de fusions-acquisitionsou le développement accéléré et mondialdes franchisés du fast-food de l’hôtellerieou des salons de coiffure. En effet, il a jouéun rôle charnière pour le changement dedoctrine des tribunaux, prenant en comptela spécificité des actifs comme moyend’économie.

Son influence sur le management s’accroîtgrâce au développement d’outils pratiques etde leur enseignement par la méthode des cas.Les cabinets de conseil y jouent leur rôle.La réussite de l’ECT est aussi flagrantepour la recherche académique empirique.Plus de quatre cents articles (Williamson,1999) au minimum, sans compter les thèseset mémoires.L’horizon est encore vaste : tester les pro-positions sur les attributs des modes de gou-vernance, faire des travaux théoriques etempiriques sur les changements des modesde gouvernance. Les bases établies parWilliamson en font un grand classique dumanagement, mais aussi de l’économie etdu droit, dont l’influence se fera certaine-ment sentir pendant plusieurs générations.La solidité de l’architecture théorique del’ECT et son attrait pour les acteurs de la vieéconomique – grâce à des concepts prochesdu vécu des décideurs – n’en font pas pourautant la seule théorie utilisée en manage-ment. La théorie de l’agence pour la finance(Jensen et Meckling, 1972), la théorie de laressource en stratégie ont une utilité com-plémentaire. Leur niveau d’analyse, leursobjectifs et les concepts diffèrent tout en serecoupant parfois. L’approche par les res-sources et compétences devra être étalonnéepar rapport aux critères d’exigence théo-riques et empiriques établis par l’ECT. Lesdoctorants en sont persuadés après avoir lul’article d’Oliver Williamson à ce sujet dansle Strategic Management Journal (1999).

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