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653 LE NEWS TANK DE VAE SOLIS CORPORATE N°3 - FÉVRIER 2009
Industrie pharmaceutique :
les labos dans la tourmente
Lobbying : trafic d’influence
ou démocratie participative ?
La crise financière…tragédie de la parole ?
Dossier :Obama : retour
sur une campagned’un genre nouveau
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EPolices : - Titre : Helvetica Neue bold modifiée- Corporate : Helvetica Neue medium
Couleurs :- Gris clair : C31 - M15 - J6 - N35 / (N 54%) - Gris foncé : C31 - M15 - J6 - N66 / (N 85%)
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corporate
Vae Solis Corporate 15, rue Henri Heine75016 ParisTél. : 01 53 92 80 00Email : [email protected]
Évolutions rapides du contexte concurrentiel ou politique, crises financières,sociales ou sanitaires, fusions, acquisitions, restructurations, enjeux d’opinion :en tant que dirigeant vous êtes quotidiennement confrontés à l’impératif de lagestion de ces changements.
Votre réputation est en prise directe avec l’actualité (économique, sociale, réglementaireou médiatique), exposée en permanence à ce contexte mouvant ; elle accède de faità un niveau de priorité stratégique qui implique sa prise en compte au sein dupremier cercle de la gouvernance.
Dans ce nouvel univers, la gestion des relations avec les leaders d’opinion estessentielle.
Éviter les crises ou les transformer en opportunités, avoir une connaissanceapprofondie de votre environnement et disposer d’une capacité d’influenceréelle, mieux définir votre identité et enrichir vos relations avec les partiesprenantes… autant d’avantages concurrentiels et de conditions de la création devaleur.
Force d’analyse et de veille (économique, concurrentielle, réglementaire et sociétale),conseil stratégique, dispositifs d’information, gestion de crise, relationspresse d’influence, affaires publiques, communication financière : autant demoyens pour Vae Solis Corporate de servir votre stratégie de croissance dans unmonde ouvert, porteur de risques et d’opportunités.
Arnaud Dupui-Castérès Corinne Dubos Antoine Boulay Laurent Porta
www.vae-solis.com
www.gestiondecrise.com
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SOM
MA
IRE
L’année 2008 aura été d’une richesse et d’une densité hors norme pour qui s’intéresse
à l’actualité sous toutes ses formes et à l’opinion publique. Une année de paradoxes
et de vents forts dont les points cardinaux auront été :
- Le Nord avec l’affaire Kerviel pour ce système, ce personnage et les contrôles
de cette banque qui l’ont perdu.
- L’Ouest avec la faillite de Lehman Brothers et la crise de confiance qui vient d’un
horizon qui a toujours porté les valeurs d’optimisme et de confiance dans l’avenir.
- Le Sud avec l’élection de Barack Obama pour la ferveur, l’espoir qu’il suscite.
- L’Est avec les Jeux olympiques de Beijing venant d’un lointain orient qui inquiète
et qui fascine.
Une année aux sensations fortes qui prouve encore une fois que tout est fragile.
Une année qui prouve que le travail de fond et de longue haleine sera toujours
le meilleur investissement. Une année qui aura l’avantage de dégonfler certains bonus
et d’éviter quelques malus.
Une année qui nous montre aussi quelques voies pour se préparer et se protéger dans
un contexte de tensions, pour ne pas rester passif face aux événements, mais faire
de la crise une opportunité. Les analyses d’événements ou des phénomènes
marquants de l’année passée que nous vous proposons dans cette édition sont faits
pour vous aider à réussir pleinement 2009.
Arnaud Dupui-Castérès
Président
653Directeur de la publication :
Arnaud Dupui-Castérès
Rédacteur en chef :
Corinne Dubos
Secrétaire de rédaction :
Myriam Robert
Conception/Réalisation :
Anne-Sophie Méry
Crédits photos :
AFP Photo / CNES (p. 2-25 :
Christophe Urbain, 2008 ;
p. 26 : Pixprostudio/Oualid Ben
Salem, 2008 - P. Collot, 2008 -
Cyrille Dupont, 2006) / DR /
Getty Images / Institut Pasteur /
Sipa / Zoomevent : F. Criquet.
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EPolices : - Titre : Helvetica Neue bold modifiée- Corporate : Helvetica Neue medium
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4 2008 EN DATES
6 DÉCRYPTAGEUne présidence de crises, mais après ?
La communication de crise gouvernementale se trouve une place de choix
11 STRATÉGIEIndustrie pharmaceutique : les labos dans la tourmente
14 DOSSIERObama : retour sur une campagne d’un genre nouveau
18 2008 EN BRÈVES
20 ARRÊT SUR IMAGEUn monde s’éveille… un autre s’effondre !
22 C’EST DANS L’AIRAssureurs et Communicants : les nouveaux partenariats de la gestion des crises
25 À SUIVRECommunication spatiale : le rêve devenu réalité
27 SAVOIR PLUSLobbying : trafic d’influence ou démocratie participative ?
30 TOUT LE MONDE EN PARLELa crise financière… tragédie de la parole ?
33 EN APARTÉL’année où la Chine s’est éveillée
2 365° | n° 3 | Février 2009
25
30
16
Une présidence de crises, mais après ?
Entretien avec Franck Louvrier, conseiller en communication de Nicolas Sarkozy
Communication spatiale : le rêve devenu réalité
La crise financière… tragédie de la parole ?
6
14DOSSIER : Obama, retour sur une campagne d’un genre nouveau
365° | n° 3 | Février 2009 3
Janvier
23/01 : “trader-fraudeur” à la Une ; la SG sort l’affaire Kerviel.
Février
28/02 : “Bienvenue chez les Ch’tis”pulvérise tous les records.
Mars
02/03 : Medvedev s’installe au Kremlin.
Pression pré-JO : manifestations réprimées au Tibet.
9 et16/03 : élections municipales en France.
Juillet
01/07 : la présidence française de l’Union s’ouvre…
02/07 : Ingrid Betancourt est libreaprès six années de détention.
09/07 : incident nucléaire à la centrale du Tricastin.
17/07 : l’Iphone débarque en France et fait un carton.
Avril
01/04 : Red Bull débarque en France.
07/04 : parcours du combattant pour la flamme olympique à Paris.
Mai
12/05 : la terre tremble dans la province du Sichuan.
25/05 : atterrissage sur Mars de la sonde spatialePhoenix qui apporte, pour la première fois,
la preuve qu'il existe bien de l'eau à l'état solide sur cette planète.
Septembre
12-13/09 : la France accueille Benoît XVI.
15/09 : Lehman Brothers dépose le bilan… la crise financière affole les places
boursières du monde entier.
Décembre
02/12 : le cabinet d’avocat Taj organise son grand colloque annuel : “Stratégies fiscales des États”
et des entreprises ; interactions, oppositions.
10/12 : la déclaration universelle des droits de l’homme a 60 ans.
21/12 : succès du 42ème lancement d'une Ariane 5.
Novembre
04/11 : Yes he can ! Barack Obama est élu à la présidence des États-Unis.
14/11 : l’Institut Pasteur fête ses 120 ans.
22/11 : élections PS, Aubry devanceRoyal d’une courte tête.
Octobre
01/10 : Gérard Larcher, nouveau président du Sénat.
04/10 : crise financière, Sarkozy réunit un G4 extraordinaire, à Paris, avec l’Allemagne, l’Italie
et le Royaume-Uni.
05/10 : le CNRS se réforme et se relooke.
20/10 : Sœur Emmanuelle nous quitte.
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2008
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2008
2008 en dates
4 365° | n° 3 | Février 2009 365° | n° 3 | Février 2009 5
Juin
10/06 : Numericable et Completel annoncent la nomination de
Pierre Danon en tant que CEO commun à la tête des deux sociétés.
Août
07-12/08 : la guerre russo-géorgienne a bouleversé la donne
géopolitique dans le Caucase et malmené les relations entre
la Russie et l'Occident.
8-24/08 : la Chine accueille les JO.
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Pilier intergouvernemental du triangle institu-
tionnel communautaire, le Conseil des ministres
de l’Union voit chaque semestre s’effectuer à
sa tête une rotation. C’est ainsi que la France
succéda à la Slovénie avant de passer les rênes
à la République tchèque le 1er janvier 2009.
Affaire de symboles, ces six mois reviennent,
par facilité de langage, à une “présidence de
l’Union européenne”. En matière de communi-
cation, ce détail sémantique a son importance,
d’autant que le terme “présidence” revêt des
connotations bien différentes à Paris et à
Bruxelles. On analyse davantage une capacité
à diriger, à décider, à déployer les attraits de sa
puissance lorsqu’il s’agit de gouverner une
nation. On prête plus attention à l’aptitude à
impulser, à s’élever et à faciliter les compromis
lorsqu’il s’agit d’une institution intergouverne-
mentale. Et ceci, d’autant que les institutions
bruxelloises comptent leur lot de pratiques et
de procédures visant à assurer le bon fonction-
nement d’une mécanique complexe reposant
largement sur les petits pas.
Pourtant, dès le départ, la France avait affiché
son intention de les bousculer. Nicolas Sarkozy
affirmait ainsi devant le Parlement européen,
en novembre 2007, que “l’Europe ne peut
pas être tenue à l’écart de la vie, à l’écart des
sentiments et à l’écart des passions humaines”.
Dans une assemblée rompue à une certaine
technicité des débats, ces paroles ont marqué
les esprits. Elles ont suscité des attentes,
l’Europe étant paralysée par ses impossibles
réformes institutionnelles, mais aussi beaucoup
d’appréhensions, l’arrogance, le peu de goût
français pour le compromis et la personnalité
du futur président n’étant pas pour plaire à
tout le monde, en particulier à Berlin.
Une présidence politique s’annonçait donc.
Les circonstances exceptionnelles de ce
second semestre 2008 en auront révélé tout
le sens.
Le tournant de la crise institutionnelle
Avant même son commencement officiel, la
présidence française ne manquait pas de thèmes
de travail. Préparé en commun avec les deux prési-
dences suivantes pour 18 mois, son programme
visait en priorité à mettre en œuvre les réformes
institutionnelles du Traité de Lisbonne avant 2009,
à poser les jalons d’une réforme de la PAC, à faire
adopter une politique européenne de l’immigra-
tion et de l’asile, à parvenir à un accord sur le
paquet climat-énergie ou encore à relancer
l’Europe de la défense. La France s’était aussi fixé
ses propres priorités : réaliser l’Union pour la
Méditerranée et remettre à l’ordre du jour la
question de la gouvernance économique.
Bien qu’en grande partie mis en œuvre, ce
n’est pourtant pas ce programme officiel qui
marquera le rythme d’une présidence française
aux prises avec une inédite succession de trois
crises majeures.
Le “non” irlandais au Traité de Lisbonne lors du
référendum organisé le 12 juin fut un premier
pavé dans la mare, Paris ayant fait de sa mise
en œuvre la pierre angulaire d’une relance
dont la France aurait pu s’auréoler. Déjà ratifié
par 25 États membres, le Traité semblait
pourtant en bonne voie.
Les réformes prévues par ce Traité, adopté sous
présidence portugaise un an auparavant après
un compromis inespéré, sont le préalable au
déblocage institutionnel d’une Union plombée
par près de 10 ans d’atermoiements, de retour
des égoïsmes nationaux et de double jeu des
gouvernements vis-à-vis de leurs opinions :
nomination d’un président stable du Conseil,
extension de la co-décision entre le Conseil et
le Parlement, ou encore création d’un poste de
Haut représentant, véritable “ministre des
Affaires étrangères” de l’UE… La mise en
œuvre de ces réformes, favorisant une compé-
tition pour l’accès aux postes de pouvoir, aurait
pour vertu principale de remettre dans l’Union
ce qui lui fait défaut : de la politique, maître
mot de la présidence française.
Paris se devait, certes, de trouver une réponse
immédiate à cette crise, mais surtout de faire
face au risque de “flottement” annoncé de ses
six mois de présidence.
Ainsi, dans un premier temps, il fallait envoyer
sans tarder un signal à l’Irlande et aux autres
États membres quant à la poursuite du
processus de ratification du Traité. Jouant des
effets d’annonce (“L’Irlande devra revoter”) et
des allers-retours entre Paris, Dublin et
quelques autres capitales pour s’expliquer,
Nicolas Sarkozy aura finalement convaincu les
Irlandais de repasser par les urnes en 2009,
non sans concéder quelques contreparties.
Dans un second temps, il s’agissait de réorien-
ter les ambitions du semestre et de savoir
comment aborder le fonctionnement des insti-
tutions, maintenant que les enjeux sur lesquels
la présidence française comptait bâtir son
succès s’effaçaient. Les circonstances apporte-
ront d’elles-mêmes les réponses à cette
question dès août 2008, ouvrant la voie à une
politisation rarement vue des affaires euro-
péennes. Une opportunité inattendue qui laissera
le champ libre à l’hyperactivité du président
français, tour à tour embarrassant, séduisant
ou agaçant ses partenaires, et modifiant l’équi-
libre des institutions européennes.
La gestion des crises russo-géorgienne
et financière
La crise russo-géorgienne aura été la première
des crises externes à l’Union gérée par la prési-
dence française. Alors que celle-ci atteignait
son paroxysme le 8 août avec l’intervention
militaire russe, la diplomatie française prit l’ini-
tiative de se rendre directement à Moscou,
parvenant à arracher un accord de cessez-le-
feu le 12 août aux deux parties au nom de
l’Union européenne, en moins d’une semaine.
Une méthode particulièrement inhabituelle qui
repose sur l’effet de surprise et l’inversion des
processus de décision classiques.
La présidence française a en effet attaché
davantage d’importance à la résolution des
problèmes immédiats plutôt qu’à la manière de
les aborder, permettant à l’Europe de s’imposer
comme médiateur privilégié et maître de
l’agenda diplomatique, au détriment des États-
Unis, dont les dirigeants ont été pris de court.
Nicolas Sarkozy aura donné la priorité au face-
à-face direct et à la prise de décision plutôt que
de passer par des phases préalables de négo-
ciation. Il aura réussi à imposer un leadership
européen avant d’aller chercher un consensus
parmi les 27.
Alors que la guerre en Irak avait rappelé à quel
point l’unité de l’Europe sur la scène interna-
tionale s’avérait fragile, l’épisode de la crise
russo-géorgienne aura révélé de manière inat-
tendue sa capacité à résoudre un conflit dans
son voisinage, sa capacité à parler d’une seule
voix et à peser face à une Russie à la fois
décomplexée, âpre à défendre ses intérêts et
toujours prompte à tirer parti des divisions
entre États membres.
Cette “diplomatie du culot”, comme l’ont
qualifié nombre d’observateurs français et
étrangers, trouvera un prolongement avec
l’éclatement de la crise financière. Et une fois
encore donnera l’occasion d’afficher un leader-
ship et, si ce n’est une véritable cohésion, du
moins un semblant d’unité européenne.
Ainsi, quelques jours après l’annonce de la
faillite de Lehman Brothers aux États-Unis le
15 septembre, et alors même que les aléas
de l’adoption du plan Paulson donnaient
le sentiment d’hésitation outre-Atlantique,
Nicolas Sarkozy convia à un mini-sommet à
Paris les chefs d’État allemand, italien et
britannique pour le 4 octobre. Au cours de
cette réunion des États européens membres du
G8, les quatre “grands” annoncèrent la mise en
œuvre coordonnée de leurs plans de soutien
aux banques en difficulté. Bien que cette initia-
tive n’ait qu’un contenu très limité et n’ait pas
beaucoup plu aux autres – plus “petits” – États
membres, Espagne en tête, elle avait le mérite
d’afficher un front commun sur le plan écono-
mique. Dans un contexte où la confiance est
mère de tous les équilibres, cet affichage fut
un vrai “coup” de communication de crise.
Tout comme le fut, en conclusion de ce G4,
l’appel pour la tenue d’un G20 censé poser les
jalons d’une refondation du système financier
international.
Le sommet du G20 du 15 novembre fut d’ailleurs
l’occasion de renforcer encore le sentiment d’un
leadership européen. Endossant la responsabilité
de son initiative, Nicolas Sarkozy parviendra à
imposer ses conditions – une réunion des pays
qui comptent au-delà du traditionnel G8, une
UNE PRÉSIDENCE DE CRISES,mais après ?
Du 1er juillet au 31 décembre 2008, la France aura eu la tâche délicate d’assumer la présidence du Conseilde l’Union européenne. Remarquée pour ses succès diplomatiques et l’activisme de Nicolas Sarkozy, cetteprésidence, saluée pour sa gestion des crises, aura bouleversé le fonctionnement d’une Union réputée enpanne de projet et incapable d’assumer un leadership collectif. Après ces six mois marqués par des chocsconsidérables sur les plans géopolitique, institutionnel, économique, voire idéologique, elle annoncerait,selon l’expression de Jean-Pierre Jouyet, ancien secrétaire d’État aux Affaires européennes, le passage del’Europe “de l’influence à la puissance”. Une vision à prendre avec précaution car si les crises sont unfacteur déterminant du changement, elles ne sauraient suffire à le rendre durable.
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Une présidence “politique”
Mathieu Collet est par ailleursPrésident-fondateur d’Euros du Village.
Pour en savoir plus : www.eurosduvillage.eu
présence exigée de l’Espagne, un programme de
travail (réforme de la gouvernance mondiale,
développement durable, respect des engage-
ments sur les objectifs du millénaire) tout en
mettant les États-Unis face à leurs responsabilités
économiques, environnementales et en matière
de développement.
La crise à l’appui du rapport de force
franco-allemand
Capitalisant sur ce contexte et le renforcement
de sa légitimité, la France avança par la suite
ses pions sur le volet des solutions européennes
à la crise en reprenant son cheval de bataille
pour le projet européen : la mise en place
d’une gouvernance économique de l’UE qui
irait de pair avec un assouplissement des critères
de Maastricht et de la politique monétaire de la
zone euro. Une démarche principalement destinée
à mettre l’Allemagne au pied du mur, celle-ci
faisant de l’orthodoxie budgétaire et de la lutte
contre l’inflation les piliers d’une politique
économique qu’elle conduit plutôt isolément
depuis la fin des années 90.
C’est à Londres que Nicolas Sarkozy ira trouver un
allié de circonstance, retrouvant Gordon Brown
début décembre, en compagnie du président de
la Commission européenne, José Manuel Barroso,
pour une réunion de travail visant à déterminer
une “boîte à outils” européenne pour faire face à
la crise de façon coordonnée. Un nouveau signal
donné à l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la
France lui ayant déjà reproché la timidité de son
plan de relance, deux fois moins important en
moyens nouveaux que les leurs.
Ce ne sera d’ailleurs pas la seule fois que la
France trouvera le moyen d’isoler ou de
contourner l’Allemagne durant ces six mois.
Outre les différences de style de leurs dirigeants,
qui ne s’apprécient guère, les divergences
entre la France et l’Allemagne sont aujourd’hui
l’un des principaux obstacles à l’efficacité de
l’action de l’UE et aux progrès du projet
européen. Aussi, si l’action de la présidence
française s’est avérée particulièrement utile à
court terme, il semble évident que celle-ci ne
suffira pas à ancrer durablement les change-
ments dont l’Europe a besoin.
Le défi du long terme
Si le volontarisme de la présidence française
dans la gestion des crises fut très largement
salué par la presse européenne et mondiale, il
n’en reste pas moins qu’il aura reposé en
grande partie sur une habile communication,
une maîtrise de l’agenda et un concours de
circonstances exceptionnel que certains n’ont
pas hésité à qualifier de “cadeau du ciel”.
Crises d’ensemble de dimension régionale ou
mondiale, urgence des situations, faiblesse
du gouvernement de Washington en période
électorale, effacement de la Commission euro-
péenne derrière le Conseil, isolement relatif de
l’Allemagne sont autant d’éléments laissant
une grande marge de manœuvre au chef de
l’État français et dont il aura su adroitement
tirer profit.
Quoi qu’il en soit, ces six mois à la tête de
l’Union auront fait bouger les lignes et pour-
raient annoncer de véritables changements.
“Les hommes n'acceptent le changement que
dans la nécessité et ils ne voient la nécessité que
dans la crise”, disait Robert Schuman. Or, rien
ne garantit que la nécessité d’une Europe plus
forte l’emporte sur la nécessité de solutions
nationales, et il n’est pas certain que la
dynamique initiée par la présidence française
puisse perdurer, pour plusieurs raisons.
D’abord, parce qu’il n’est pas exclu que
l’urgence de la situation liée au contexte de crise
économique soit atténuée par l’effet des plans
de relance ou d’une décélération de la récession
en Europe. Quid du sentiment de nécessité
en cas de “normalisation” de la situation écono-
mique, aussi mauvaise soit-elle ?
Concomitamment, parce que la gestion des
crises par la présidence française aura
davantage mis l’accent sur les manques de
l’Europe que les moyens de les combler.
Si l’interprétation qui prévaut à Paris veut que
la crise impose l’instauration d’une véritable
gouvernance économique, ce point de vue est
loin de l’emporter parmi ses partenaires, qu’il
s’agisse de l’Allemagne dans la zone euro ou
surtout de la Grande-Bretagne.
Enfin, parce que depuis la fin de la Commission
Delors et les grandes heures du moteur franco-
allemand, les temps de présidences exercées
par de grands pays fondateurs sont des
moments singuliers de la vie de l’Union ; on en
attend une impulsion forte sur les volets de
l’achèvement institutionnel, de son approfon-
dissement ou de son élargissement. Or, d’une
part, la France n’aura pas eu l’occasion de
graver dans le marbre de telles avancées, et,
d’autre part, les présidences suivantes –
tchèque, suédoise – n’auront certainement ni
les moyens, ni la légitimité ou même l’ambition
d’imposer le même volontarisme.
À cet égard, l’affaiblissement de la Commission
européenne est particulièrement problémati-
que, et la donne de l’équilibre institutionnel
constitue une autre limite potentielle à
l’“héritage” de la présidence française. Ces six
mois auront en effet été le point d’orgue de
l’effacement de la Commission derrière le
Conseil, constaté sous la présidence de José
Manuel Barroso.
“Ce qui manque à l’Europe, ce ne sont pas des
institutions, ce sont des visages”, se plaisait à
souligner Nicolas Sarkozy. De son côté, Hans-Gert
Pöttering, président du Parlement européen, lui
avait rétorqué, en décembre dernier : “Rien ne
se fera sans les hommes, mais rien ne durera sans
les institutions.” Une phrase de Jean Monnet, qui
pourrait avoir le dernier mot.
Mathieu Collet
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Voici en cinq points synthétiques une lecture
des enjeux et perspectives que le Livre blanc
“Défense et Sécurité nationale” pose, et leurs
impacts en matière de stratégie d’information
et de communication de crise au niveau
gouvernemental.
1. La menace a changé, la nécessité
d’une réponse structurée
Autrefois clairement identifié et localisé,
“l’ennemi” est aujourd’hui incernable. La nature
des menaces qui pèsent sur la France a considé-
rablement évolué en près d’un demi-siècle, de
sorte qu’aujourd’hui, l’absence d’ennemi struc-
turant fait place à des menaces, nombreuses,
nouvelles, de nature et d’origine diverses.
Ainsi, les nouveaux risques (terrorisme, maladies
infectieuses, catastrophes naturelles, rupture
technique ou technologique, pollutions…)
constituent autant de défis et de zones de
vulnérabilité en matière de sécurité civile.
À la différence des crises internationales dans
lesquelles l’armée fait face à un “prescripteur”
clair et unique en la personne du chef de l’État,
qui peut choisir d’engager ou non les forces
françaises, les crises de sécurité civile s’impo-
sent à la puissance publique, qui a obligation
de les traiter. [En outre, elles impliquent nombre
d’intervenants étatiques, autorités nationales et
locales, avec le concours d’opérateurs locaux
(collectivités, entreprises…)]. Ces crises ont
dans un premier temps engendré des réponses
sectorielles fondées sur des approches techni-
ques spécifiques.
Protéiformes, invisibles, multiples, les menaces
d’aujourd’hui mobilisent nombre d’intervenants
et rendent absolument nécessaires les principes
d’unité de pilotage, de cohérence et de coordi-
nation accrues, dans la gestion opérationnelle
de moyens mis en œuvre forcément complexes.
L’efficacité du dispositif et la rapidité du “retour
à la normale” dépendent donc d’un pilotage
interministériel fort et cohérent.
2. La sécurité, nouvelle donne
de la gouvernance des crises
Parce que le monde et ses menaces ont changé,
l’État opère une mutation stratégique d’appré-
hension et d’anticipation des crises : de la
défense à la sécurité. Au-delà des implications
structurelles que cela comporte sur la désigna-
tion d’un gestionnaire interministériel référent
de la crise, c’est aussi le signe d’une nouvelle
hiérarchisation donnée aux grandes fonctions
stratégiques, où l’anticipation, la prévention, la
protection prennent le pas sur la dissuasion ou
l’action distante autrefois fonctions centrales.
Anticiper, se protéger et accroître la capacité
de résistance de la société tout entière. Le
concept de résilience fonde aujourd’hui la
stratégie de sécurité nationale.
3. La résilience, du concept à la pratique
Accroître la capacité de résistance et de “reprise
en main” des individus, des organisations, des
pouvoirs publics, au traumatisme d’une crise,
c’est faire de chacun une partie prenante, un
acteur de la bonne gestion et de résolution de
la crise. Cela sous-entend un travail préalable
de préparation, de formation, d’information du
citoyen, qui doit acquérir une véritable “culture
du risque” pour, le moment venu, être en
mesure de mobiliser chacun et d’organiser les
moyens de manière optimale.
D’un concept, il faut aujourd’hui faire une
réalité. L’information et la communication
trouvent ici toute leur légitimité.
365° | n° 3 | Février 2009 9
Le Livre blanc “Défense et Sécurité nationale”, demandé par le président de la République en tout débutde mandat, a été publié en juin 2008. Il dresse la stratégie gouvernementale de protection du territoire,des personnes et des intérêts français. L’information et la communication y trouvent une place de choix.
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DÉCRYPTA
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LA COMMUNICATION DE CRISEGOUVERNEMENTALE
se trouve une place de choix
À l’heure où le déficit de l’Assurance Maladie ne cesse de se creuser,où le système de soins est en péril, les professionnels de santé commeles patients sont aujourd’hui sommés d’apporter leur contribution pour sauvegarder un modèle de solidarité nationale fragilisé. Aupremier rang des contributeurs de poids, l’industrie pharmaceutique.Et pourtant, malgré des efforts sonnants et trébuchants pourcombler le déficit, les laboratoires souffrent d’un déficit d’imageauprès de l’opinion et des pouvoirs publics. Explications.
Pretoria
Afrique du Sud, 5 mars 2001. Un procès s’ouvre
devant la Haute Cour de Justice de Pretoria.
Trente-neuf laboratoires pharmaceutiques s’opposent
au gouvernement. En cause : une loi de 1997 sur
le médicament qui porte atteinte aux droits d'ex-
clusivité détenus grâce aux brevets. Sous la
pression internationale, les laboratoires décident
finalement de retirer leur plainte. Mais le mal est
fait. L’opinion publique ne pardonne pas aux
industriels d’avoir fait le choix de défendre leurs
intérêts commerciaux face au traitement des
malades. Sur fond de Sida et de pauvreté, le choc
est rude. L’image des laboratoires est gravement
écornée, auprès de l’opinion comme des pouvoirs
publics français. Elle porte encore aujourd’hui les
stigmates de ce qu’on a coutume d’appeler dans
le milieu “l’affaire Pretoria”.
Le temps de la remise en question
L’après-Pretoria a accéléré la remise en question
de l’industrie pharmaceutique dans son
ensemble, dans un contexte de bouleversements
plus structurels : découvertes de nouvelles
molécules en berne, brevets des blockbusters1
arrivant à leur terme les uns après les autres,
concurrence toujours plus forte des génériques.
Autant d’éléments qui aboutissent aujourd’hui
à la refonte progressive du business model de
l’industrie pharmaceutique… Et constituent
dans le même temps une occasion de redorer
l’image des laboratoires, à travers une fine
redéfinition de leur place au sein du système
de santé.
Le LIR : des laboratoires au service du
système de soins
Comment redorer l’image d’une industrie qui a
jusqu’alors été privée de toute publicité ? (Voir
encadré p.13). Par les faits. C’est précisément ce
qu’a compris le LIR2. Acteur du système de
santé : telle est la façon dont se définit cette
association regroupant 13 filiales françaises de
laboratoires étrangers parmi lesquels GlaxoSmith-
Kline, Roche, Pfizer ou encore Lilly. Organisée sur
le modèle d’un groupe de réflexion, l’association
se positionne comme un lieu d’échange au service
de l’ensemble des acteurs publics et privés,
dans le but de favoriser dialogue et réflexion
sur l’avenir du système de soins français.
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INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE :les labos dans la tourmente
1- Un médicament “blockbuster” est un médicament qui génère un chiffre d'affaires de plus d'un milliard de dollars au laboratoirepharmaceutique qui le commercialise.
2- Laboratoires Internationaux de Recherche.
4. La communication, partie prenante
de la gestion de crise
Parce qu’elle permet de construire la confiance, de
sensibiliser et d’expliquer en amont, de mobiliser
et diffuser les instructions et consignes le moment
venu, la communication devient partie intégrante
de toute stratégie de sécurité nationale.
Elle est à la fois une donnée stratégique et un
moyen de gestion opérationnel.
Une donnée stratégique, parce qu’elle
participe de la bonne gouvernance, du devoir
de transparence, du droit à l’information, de la
nécessité de former, de l’instauration d’une
confiance réciproque absolument nécessaire
qu’impose la gestion de crise.
Ainsi, la communication trouve dorénavant une
place systématique dans la planification des
crises, concrétisée par des volets dédiés dans
les plans d’action gouvernementaux (plan
pandémie grippale, plan canicule…).
Un moyen de gestion opérationnel, avant,
pendant et après la crise. Parce que la commu-
nication définit les messages et organise les
moyens de les diffuser, tant entre les gestion-
naires politiques et publics, qu’avec les parties
prenantes externes (entreprises, collectivités,
citoyens…). Le rôle des médias devient ici
central. Ils doivent devenir un partenaire
naturel de la prévention et de la gestion.
Développer la vigilance, informer des risques et
des mesures de prévention, de protection,
diffuser rapidement les premiers reflexes,
autant de buts assignés à la communication
pour servir l’objectif de résilience et la capacité
d’une prise en charge au niveau individuel d’un
dispositif collectif.
5. Quels impacts pour la communication
de crise au niveau gouvernemental ?
La diversification des menaces accroît la
dimension pluridisciplinaire, multisectorielle de
la gestion de crise. Cela implique un effort
croissant de coordination, d’organisation, de
préparation. Au plan global de la gestion,
comme au plan spécifique de la communication.
Le Service d’Information du Gouvernement a
intégré depuis plusieurs années cette nouvelle
donne de la communication, et la place de la
communication interministérielle de crise est
officiellement consacrée en 2006 (circulaire du
23 mars), avec la création d’un département de
communication de crise, qui travaille en
relation avec le Secrétariat général de la
Défense nationale (SGDN).
La communication gouvernementale de crise a
souffert de longues années d’une faible prise
en considération de son rôle stratégique, et
d’erreurs de gestion ou de non-communica-
tion. Les choses ont changé et la préparation
du risque de pandémie grippale aviaire aura
notamment permis à la communication
gouvernementale d’opérer une véritable
mutation, stratégique et opérationnelle.
L’enjeu de la reconquête : la prégnance de
longues années d’errance
Il y a eu le parfum du scandale ou le déni de
responsabilité (sang contaminé…), le mensonge
ou la minimisation des faits (Tchernobyl…),
plus tard encore les erreurs ou la mauvaise
mesure de la situation (canicule) et la commu-
nication de crise gouvernementale s’en est
évidemment trouvé discréditée et la réputation
des autorités mise à mal.
De sorte que nous sommes, aujourd’hui
encore, en phase de déficit de confiance dans
la parole des autorités et dans l’obligation de
devoir faire la preuve de la responsabilité et de
la transparence au plus haut niveau de l’État.
Les études d’opinion en témoignent. Lorsqu’on
interroge les Français sur la crédibilité qu’ils
accordent à la parole des différentes parties
prenantes dans les crises, les autorités en
général, le gouvernement, en particulier, arrive
en bout de course, se disputant les dernières
places avec les entreprises, quand le haut du
podium revient aux experts, aux scientifiques
et aux associations !
Un tournant récent : la communication de
crise s’organise et le fait savoir
Les temps ont changé et la communication de
crise gouvernementale a su tirer les leçons des
erreurs du passé. Une structure dédiée au SIG,
des fonctions de communicants de crise qui
apparaissent dans les administrations… et des
plans d’anticipation des risques qui intègrent
aujourd’hui le volet “communication” dans les
dispositifs de gestion !
La culture du risque et la communication de
crise se déploient et, avec elles, les process, les
outils et les bonnes pratiques.
On voit d’ailleurs que lorsque l’information et
la communication sont intégrées au dispositif
d’anticipation, que des messages sont diffusés
largement, que la préparation elle-même est
médiatisée, que des porte-parole battent le
terrain médiatique, la confiance dans la
capacité des autorités à faire face à la crise est
là. L’exemple du risque de pandémie grippale
aviaire est ici particulièrement parlant : la
mobilisation des acteurs, la communication
active du gouvernement, la préparation… ont
payé. La France est l’un des pays les mieux
préparés et les Français saluent l’action des
autorités sur le sujet.
Une mission devenue stratégique, une
dimension opérationnelle à renforcer
Stratégiquement, elle doit concourir à l’objectif
central de protection et de sécurisation de la
France, des Français et de leurs intérêts.
Professionnalisation, systématisation, la
communication y trouve également une
nouvelle légitimité fonctionnelle, avant,
pendant et après les crises. Une opérationna-
lité qui, si elle est en cours, doit encore être
organisée, optimisée, validée, mieux partagée.
Les conditions de l’efficacité
En matière de communication de crise, pas de
recettes miracles. Informer sans inquiéter,
rassurer sans minimiser, mobiliser sans susciter
de panique, les écueils sont nombreux et les
points d’équilibre parfois difficiles à trouver.
Mais quelques principes, dans la droite ligne
des principes de gestion de la crise tels que la
stratégie de sécurité nationale les prévoit,
doivent s’appliquer :
- Capacité d’intervention rapide.
- Unité de gestion.
- Continuité et permanence.
La tendance amorcée se trouve aujourd’hui
confortée par le poids que confère la stratégie de
sécurité nationale, au travers du Livre blanc
“Défense et Sécurité nationale”, à l’information et
à la communication.
Corinne Dubos
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LE “PAQUET MÉDICAMENT”ou comment ne pas abuser de la publicité
La Commission européenne a en effet adopté
le 10 décembre 2008 un ensemble de textes
dit “Paquet médicament”, qui contient entre
autres une proposition de directive et une
proposition de règlement traitant de l’informa-
tion sur les médicaments délivrés sur ordonnance
à destination des patients.
En clair, l'industrie pharmaceutique pourra
acheter des espaces publicitaires afin de vanter
les caractéristiques de ses produits – en particulier
leurs indications thérapeutiques – à partir du
moment où elles auront été validées par les
organismes de contrôle. Les fabricants auraient
également toute latitude pour citer des essais
réalisés par leurs soins. Seule limite à ce
nouveau dispositif : la communication serait
cantonnée aux sites Internet visés par les
autorités et à la presse “santé”.
La presse écrite grand public est exclue, et le
contrôle par les autorités de santé obligatoire.
Dans les faits, ces changements d’envergure
sont une vraie respiration pour l’industrie phar-
maceutique pour qui la seule communication
sur ce type de médicaments consistait en la
visite médicale et la presse spécialisée : les
sites Internet santé sont parmi les plus
fréquentés, et la presse santé connaît une
diffusion tout à fait honorable.
Dans la même veine, un autre “cadeau” lui a
été récemment accordé : la très discutée loi
audiovisuelle a donné naissance à un décret
signé le 19 décembre 2008, dont un article
permet “aux entreprises qui ont notamment
pour activité la fabrication ou la vente de
médicaments ou la fourniture de traitements
médicaux d'accéder au parrainage [des
émissions télévisées] dans la seule mesure de
la promotion de leur nom ou leur image”.
Cette nouvelle possibilité qui leur est offerte
doit être prise avec précaution… La publicité,
si elle est efficace au plan commercial, n’est
pas forcément le moyen le mieux à même de
redresser une image ou une réputation au plan
corporate.
La manière dont les choses se sont déroulées lors
des travaux de la Commission européenne est
assez révélatrice de la méfiance qui perdure
à l’égard de l’industrie pharmaceutique. La
publication de ce Paquet avait été plusieurs fois
reportée à cause de désaccords au sein de la
Commission européenne, et du mécontentement
de nombreuses associations de consommateurs
qui craignaient que cette directive ouvre un
boulevard aux laboratoires pharmaceutiques
en libéralisant la publicité sur les médicaments.
Après trois ans d’âpres discussions avec tous les
acteurs de la santé, la Commission européenne
a fini par trouver un compromis, la disposition
concernant l’information des patients et la
contrefaçon étant d’ailleurs plus restrictive que
celle souhaitée par l’industrie pharmaceutique.
Mais pour le Bureau Européen des Unions de
Consommateurs (BEUC), qui fédère les associa-
tions de consommateurs au niveau européen,
cette disposition ne reste qu'une façon de légaliser
la publicité pour les médicaments délivrés sur
ordonnance, et d’accorder à l'industrie phar-
maceutique les moyens de pousser le grand
public à la consommation et d’engranger
toujours plus de bénéfices sur le dos des
systèmes d'assurance maladie.
Une réaction de défiance relayée par les asso-
ciations françaises et par la Mutualité française,
qui oublient que les États membres n’ont pas à
transposer immédiatement cette disposition :
une directive fixe un but à atteindre, mais laisse
aux États le choix des moyens pour y arriver. Et
le Paquet médicament n’est pour l’instant
qu’une proposition de la Commission euro-
péenne ; le Parlement et le Conseil européens
l’adopteront en codécision, et gageons que ce
processus juridique donnera lieu à un intense
lobbying pendant au moins un ou deux ans.
Pendant ce temps, gare à ne pas anéantir les
efforts déployés ces dernières années par les
laboratoires : le dialogue avec les pouvoirs
publics et les associations de patients a payé,
et la possibilité de faire de la publicité doit être
considérée comme une chance, dont il ne
faudra pas abuser. Aux laboratoires pharma-
ceutiques de profiter de cette opportunité tout
en gardant un équilibre nécessaire entre la part
de chiffre d’affaires consacrée au marketing et
celle consacrée à la R&D. Et surtout, contribuer
doit rester le maître mot en matière d’action et
de communication.
Sarah Weisz
Des propositions qui signent la bonne foi
des laboratoires
Ce type d’initiative illustre le véritable virage
opéré par l’industrie pharmaceutique. On
assiste là à un changement de registre assez
clair : les laboratoires sont passés de la reven-
dication, de la défense de leurs intérêts à
la contribution et à l’ouverture. Dialogue,
conduite de réflexions qui couvrent l’ensemble
du secteur de la santé, il n’est plus question du
seul médicament. Les laboratoires entendent
par là contribuer, mettre leur expertise au
service de la décision publique pour une
meilleure efficience globale de notre système
de soins.
Dans cette optique, les laboratoires planchent
sur des sujets aussi divers que les moyens de
lever les freins qui existent actuellement entre
la recherche publique et privée ou la réforme
de l’Assurance Maladie, et formulent des
propositions afin de trouver de nouvelles
sources d’économie pour réduire le déficit ou
renforcer la dynamique de recherche en France.
Pfizer s’engage pour la prévention
Un grand nom de l’industrie pharmaceutique
s’est également illustré à travers son engage-
ment en faveur de la prévention. Créée en 2005
sous l’égide de la Fondation de France, la
Fondation Pfizer soutient en effet activement
une multitude d’actions d’éducation à la santé,
de formation et d’information dans ce
domaine. Depuis maintenant cinq ans, le labo-
ratoire est à l’initiative d’un rendez-vous
annuel consacré à la prévention et destiné à
l’ensemble des acteurs régionaux de la santé :
“La Conférence des Acteurs de la Prévention –
CAP”. Ces CAP, dont les programmes sont
élaborés chaque année par un comité d’experts
indépendants constitué de représentants du
monde institutionnel et du monde médical,
sont aujourd’hui un rendez-vous majeur et
attendu pour les acteurs de la santé en région.
La reconnaissance des pouvoirs publics
Ouverture, prise en compte des contraintes
budgétaires de l’Assurance Maladie, implica-
tion forte dans les réflexions sur le système de
santé, les laboratoires affichent aujourd’hui
clairement leur volonté de se positionner
comme des partenaires des pouvoirs publics en
matière de politique de santé. Signe du succès
de ce type d’initiative, l’opération Bon Usage
des Soins conduite sous la triple égide du LIR,
de l’Agence française de sécurité sanitaire des
produits de santé (Afssaps) et de la très offi-
cielle Haute Autorité de Santé (HAS) en 2005
visant à améliorer la prise en charge des
patients par la réduction des usages inappro-
priés de médicaments. Contribution forte à la
réforme de l’Assurance Maladie, cette collabo-
ration fut remarquée dans le milieu de la santé,
au sein duquel la HAS est connue pour sa
farouche indépendance et sa distance vis-à-vis
des structures privées.
Contrainte au silence dans un contexte
sensible, l’industrie pharmaceutique a pourtant
su, à force d’actions plus orientées vers le
service de l’intérêt général, rétablir son image
auprès des décideurs. Mais dans un contexte
de restructuration massive du secteur et à
l’heure où les plans sociaux se multiplient dans
les plus grands laboratoires, la reconquête de
l’opinion s’annonce plus ardue. L’industrie
pharmaceutique n’a donc pas encore fini de
faire parler d’elle…
Djamila Chekhar
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S’il était une règle immuable
en matière de publicité sur
les médicaments délivrés
sur ordonnance, c’était bien
l’interdiction pour l’industrie
pharmaceutique de s’adres-
ser au grand public. Mais les
choses pourraient bientôt
changer… De quoi satisfaire
les laboratoires qui, depuis
plusieurs années, tentent de
redorer leur image par leur
action sociétale, mais consi-
dèrent encore leur liberté de
parole trop limitée, et d’ali-
menter la colère de leurs
détracteurs.
“L’Obamania” ? Au-delà de l’intérêt – sans
précédent –, de nombreux Européens pour une
campagne présidentielle américaine, il s’agit
surtout d’une véritable révolution au pays des
Insurgés. En effet, Barack Obama et ses “spin
doctors”, David Axelrod et David Plouffe, ont
abordé cette campagne en février 2007 avec des
objectifs bien précis. Car il ne faudrait pas croire
que la décontraction affichée du candidat
démocrate “black and white” n’était pas mise en
scène ! Dans cette joute électorale, rien n’a été
laissé au hasard et tout a été soigneusement
pesé et soupesé, évalué et réévalué.
Le “storytelling”
Janvier 2003. Pour David Axelrod, la campagne
présidentielle débute là. Il commence une collec-
tion vidéo qui va s’avérer très utile : celle des
interventions publiques de son poulain, un
certain Barack Obama. À l’époque, Barack
Obama apparaît tout juste sur la scène politique
nationale américaine. Dès lors, pourquoi l’enre-
gistrer et le filmer ? Tout simplement pour
donner aux téléspectateurs le sentiment qu’ils
appartiennent depuis longtemps au cercle
intime du candidat. D’images d’archives à des
micros-trottoirs apparemment improvisés, réalisés
tout au long de la campagne, David Axelrod va
faire un mixte subtil, et ainsi développer un
concept novateur : le “storytelling”. L’objectif
n’est plus de “vendre” un programme ou de
convaincre du bien-fondé des réformes à faire,
mais bien de “construire” l’image d’un leader
capable de “faire”. Illustration de ce candidat
qui se raconte, plus qu’il ne propose ? À 46 ans,
il a déjà deux autobiographies à son actif ! Une
analyse que David Axelrod résume d’une phrase
lapidaire mais symptomatique : “Si nous menons
une campagne conventionnelle et présentons une
candidature conventionnelle, nous allons à
l’échec.” Vingt et un mois de campagne plus
tard, la théorie de David Axelrod est devenue
réalité : Barack Obama est entré dans le quotidien
des Américains.
Le changement : un leitmotiv efficace
Mais dépeindre un leader ne peut suffire pour
gagner. Que doit dire ce candidat pour séduire et
faire voter en sa faveur ? Les messages doivent
être simples. Ils doivent à la fois répondre aux
aspirations des citoyens et leur donner le
sentiment que seul ce candidat peut résoudre
leurs soucis quotidiens. Barack Obama va donc
porter l’espoir du changement à travers des
slogans percutants, tels que “Change we can
believe in it” (Le changement nous pouvons y
croire) ou “You can make the difference” (Vous
pouvez faire la différence). Il répond ainsi à l’as-
piration de rupture des électeurs, lassés ou déçus
par quinze ans d’administration Bush, père et
fils. Dans le même temps, l’équipe du sénateur
de l’Illinois implique les citoyens qui veulent s’in-
vestir en politique, mais n’y sont jamais vraiment
invités. En la circonstance, l’équipe d’Obama
reprend et développe une idée qui a déjà été
utilisée par Howard Dean… en 2004.
La stratégie du “Movement”…
Ainsi, plus de sept cents permanences de
campagne (dont les membres suivent une
formation au sein des “Camps Obama”) vont
travailler sur le terrain à incarner les vertus de
rassembleur de Barack Obama. Le nom de cette
stratégie est révélateur de son contenu : “The
Movement”, un réseau de bénévoles et une
armée de militants pour que la politique revienne
aux citoyens. Et s’adresse à eux. Multipliant les
réunions de terrain, ces fans du candidat vont
travailler en parallèle d’un média trop longtemps
délaissé : le Net. Et ainsi marier les actions de
terrain avec un réseau inédit sur la Toile.
Barack Obama va poursuivre sur la Toile deux
buts bien distincts l’un de l’autre. Tout d’abord,
tisser un réseau de soutien de plus de trois
millions d’internautes ! L’objectif est d’associer
chaque citoyen et, c’est là le second objectif, le
solliciter financièrement. Le paradoxe est que
l’argent récolté sur le Net sera – le plus souvent
– utilisé pour financer les spots du candidat sur
les médias traditionnels, notamment à la télévi-
sion aux heures de grande audience. Le résultat
de cette campagne sur le Net est l’apparition de
nombreux blogs mais aussi la multiplication de
films courts, où l’on aperçoit Barack Obama
entouré de familles américaines auxquelles il
répond directement. C’est le petit déjeuner du
président Valéry Giscard d’Estaing avec les
éboueurs de la rue du Faubourg Saint-Honoré !
Mais en version net 2.0.
Le mercredi 29 octobre 2008, le candidat
démocrate lance une opération de communica-
tion. Son opération la plus ambitieuse depuis
l’achat, l’été précédent, de cinq millions de
dollars d’espaces publicitaires durant les Jeux
olympiques de Pékin. Ce 29 octobre, son équipe
orchestre la diffusion simultanée de près d’une
demi-heure de promotion de Barack Obama sur
sept chaînes de télévision, dont les trois “majors”,
CBS, NBC et Fox. Coût estimé par les experts de
cette promotion de vingt-cinq minutes, qui aurait
touché plus de 33 millions de téléspectateurs ? 45
millions de dollars. Un chiffre que l’équipe du
vainqueur du scrutin du 4 novembre 2008 ne
confirme pas. Mais n’infirme pas non plus. Seule
certitude : ce que l’on retient de ce court métrage
tourné par Davis Guggenheim est le ton à la fois
passionné et posé de l’homme providentiel, le
seul capable de satisfaire et sécuriser une opinion
publique déprimée.
Une campagne à 630 millions de dollars
Au-delà des outils, nouveaux ou utilisés de
façon novatrice, cette victoire a une autre expli-
cation. Barack Obama est parvenu à récolter un
budget de 630 millions de dollars ! Une
enveloppe qui lui permet d’occuper ondes
radios et chaînes de télévision, tant locales que
nationales. Une enveloppe qui lui permet de
recruter des équipes de terrain et de les former.
Face à ce raz de marée financier et militant, John
McCain et sa photogénique colistière Sarah
Palin ne vont pas faire le poids. Et ne vont pas
parvenir, réellement, durablement, à sortir la
tête et leur campagne de l’actualité immédiate.
Face à la campagne multicanaux des Démocrates,
qui vont user du Net, de mailings SMS, de Facebook
(Barack Obama y compte plus de 400 000 amis)
ou encore des “médias classiques”, les conser-
vateurs apparaissent comme passéistes. Et
naturellement démodés.
Une presse indépendante
Une autre explication de la victoire de Barack
Obama tient au regard des journalistes sur le
candidat. Tout le monde le sait : les hommes poli-
tiques et leurs entourages ne savent que faire pour
séduire les journalistes. Il faut qu’ils leur apparais-
sent sympas, intelligents, volontaires, etc. Barack
Obama n’a, lui, joué aucune comédie. Il a laissé
les journalistes voir en lui ce qu’ils avaient envie de
voir. Un homme libre en somme…
Denis Boulard / Marie-Gabrielle SorinBarack Obama est donc le quarante-quatrième président des États-Unis. Nous ne reviendrons pas icisur sa personnalité hors norme, les défis qui l’attendent ou les espoirs qui expliquent sa victoire surle républicain John McCain. D’autres s’y sont d’ores et déjà risqués et de nombreux livres vont passerau crible son élection et ses conséquences, des succès attendus mais aussi des échecs prévisibles,tant l’espoir est grand ! A contrario, peu a été fait sur l’une des composantes de sa campagne, la communication. Pour la première fois, Franck Louvrier, le conseiller presse du président de laRépublique Nicolas Sarkozy, tire pour 365° les enseignements de “l’Obamania”.
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OBAMA : retour sur une campagne d’un genre nouveau
La mobilisation en chiffres
21 mois de campagne
700 permanences
1 millionde personnes qui donnent leur numéro de
portable pour s’abonner aux alertes SMS
2 millionsde profils créés sur Mybarackobama.com
3 millionsde donateurs
5 millionsde supporters sur Myspace et Facebook
13 millionsd’adresses mail collectées
630 millionsde dollars de dons,
dont 500 levés grâce à Internet
La victoire de Barack Obama n’est-elle pas
d’abord celle de la communication ? À moins
que ce ne soit celle de l’argent ?
C’est d’abord la victoire du peuple américain et
d’un candidat qui a su se montrer meilleur que
ses concurrents. On ne peut pas réduire une
campagne électorale à des questions de commu-
nication ou d’argent. La victoire d’Obama est celle
d’une parole politique qui a su se rendre crédible,
d’un homme de qualité qui a su incarner une
certaine modernité, d’un projet marqué par l’am-
bition du renouveau.
Si le président élu est un excellent communicant,
c’est lié à ses qualités personnelles, mais surtout au
fait qu’il porte un projet travaillé, clair et cohérent,
là où ses concurrents ont souvent manqué de
clarté, de réactivité ou parfois de projet.
Côté argent, il est vrai que la levée de fonds record
de Barack Obama (150 millions de dollars pour le
seul mois de septembre 2008) lui a permis de
déployer sa campagne au-delà de la sphère d’in-
fluence traditionnelle du Parti démocrate. Que ce
soit par l’achat de publicités sur les télévisions et
radios locales, ou par la présence de ses équipes
dans les États du Sud et du Centre, Barack Obama
a su se rendre incontournable dans des territoires
où le Parti démocrate n’avait pas pour habitude
d’être fortement présent. D’une certaine façon, on
peut considérer que cet argent lui a permis de
faire campagne dans des États clés, comme la
Virginie ou l’Indiana, où ses prédécesseurs
mettaient à peine les pieds.
Cependant, une telle conclusion serait un peu
simpliste et ignorerait deux choses. Premièrement,
si l’argent permet de faire campagne, il n’est pas
un gage de victoire et c’est la mobilisation des
bénévoles dans les “Swing States” qui a sans
doute fait pencher la balance. Deuxièmement,
l’origine des fonds récoltés par Obama (majoritai-
rement des petites sommes données par les
citoyens) fait de la somme finale un argument non
seulement économique, mais également politique.
C’est l’expression et la concrétisation du plébiscite
des masses (“grassroots”). Ainsi, il faut remettre les
choses dans l’ordre. L’argent n’a pas été la cause
mais la conséquence d’une campagne réussie, d’un
projet et d’une personnalité convaincante que les
citoyens américains ont voulu soutenir par leur
temps et/ou leur argent.
Quelle place a occupé la communication dans
cette campagne ?
Il est vrai que l’essentiel des budgets de
campagne a été affecté à l’achat d’espace publi-
citaire à la télévision. Mais si les chiffres sont
impressionnants et marquent une croissance
significative par rapport à 2004 (plus de 200
millions de dollars dépensés en publicité télévisée
pour Obama entre septembre et octobre 2008,
contre 120 pour McCain), le phénomène en lui-
même n’a rien de nouveau.
Il est de tradition aux États-Unis de donner (et
d’assumer) une très grande importance à la
communication. Au final, la victoire revient à celui
qui a le mieux su incarner l’Amérique à un moment
de son histoire, et cette dimension d’incarnation
passe évidemment par la communication. Un tel
phénomène ne date pas d’hier, et a même précédé
aux États-Unis la diffusion des outils de la
communication et de l’information de masse.
George Washington ne faisait pas de télévision ou
de radio, mais les historiens n’ont eu de cesse de
souligner qu’il était un homme au physique
impressionnant, dont les proportions étaient telles
qu’il était immédiatement reconnaissable comme
le président des États-Unis, même au milieu d’une
foule qui ne connaissait pas son visage. Si les outils
de la communication évoluent, l’importance de
l’image n’a donc rien de nouveau aux États-Unis.
Cette campagne, et la place qui y ont occupé
Internet et les sms, marque-t-elle un tournant
dans la communication politique ?
Les Démocrates ont-ils été des précurseurs
avec cette campagne ?
La stratégie d’Obama sur Internet a été saluée
pour son caractère innovant. En 2007, la
campagne de Nicolas Sarkozy avait innové par
l’utilisation que nous avions faite de la vidéo sur
Internet. L’apparition de la web télé NSTV (Nicolas
Sarkozy Télévision) sur le site de campagne inau-
gurait une nouvelle ère pour la vie politique
française. En effet, les candidats peuvent mainte-
nant construire leur propre média de diffusion sur
Internet – en l’occurrence leur propre chaîne de
télévision – chose d’autant plus nouvelle que
contrairement aux Américains (et pour de très
bonnes raisons), nous n’acceptons pas la publicité
politique en France sur les médias traditionnels.
La campagne d’Obama est passée au niveau
supérieur dans la mesure où elle a su exploiter le
potentiel du Web 2.0, c'est-à-dire l’interactivité
et la dynamique sociale des réseaux. Si nous
avons été la première campagne Dailymotion,
Barack Obama a conduit la première campagne
Facebook. En utilisant le web social, le candidat
démocrate a su faire d’Internet plus qu’un simple
support pour médiatiser le candidat : un vrai
outil pour mobiliser les citoyens. La campagne
en ligne d’Obama, c’est sans doute la première à
faire le lien entre le en-ligne et le hors-ligne. Je
l’appelle pour ma part la première campagne
“intégrée”.
Vous êtes en charge de la communication du
président. Quels enseignements tirez-vous de
cette campagne ? Est-elle transposable en
France pour le prochain scrutin présidentiel ?
Chaque pays a son histoire et ses institutions, qui
s’incarnent dans des règles électorales. En France,
nous n’admettons pas la publicité politique, car
nous considérons qu’un candidat n’est pas un
bien de consommation et qu’une élection ne doit
pas être soumise aux lois du marché publicitaire.
C’est le principe de l’égalité qui prime, de sorte
que nous n’avons pas à attacher autant d’impor-
tance à l’argent ou à la publicité dans l’élection
présidentielle française. Il ne s’agit pas de trans-
poser la situation américaine, seulement de tirer
les leçons de ce que cette expérience peut nous
apprendre sur la démocratie.
Si la campagne d’Obama nous apprend quelque
chose, c’est d’abord qu’Internet n’est pas
seulement un média ou un simple outil de
communication. La démonstration est faite que
derrière l’internaute virtuel et anonyme se cache
un citoyen réel et incarné qui a envie de s’investir.
Barack Obama a ainsi fait tomber la barrière qui
séparait Internet du terrain. Paradoxalement, ma
conclusion serait que sa campagne a banalisé
l’usage d’Internet, là où des expériences passées
avaient essayé de faire de la “web campagne”
une campagne parallèle, virtuelle, sans prise avec
la réalité du terrain, du militantisme ou des
rassemblements populaires.
Ne nous y trompons pas, ce n’est pas la techno-
logie ou la communication qui ont fait la
victoire d’Obama, mais bien son projet et ses
idées. L’Histoire retiendra son discours de
Philadelphie (“For a more perfect Union”), plus
que le site MyBarackObama.com. De ce point
de vue, les campagnes d’Obama et de Sarkozy
se ressemblent dans leur classicisme : le cœur
de l’affaire reste un individu, porteur d’un
projet et d’une ambition pour son pays, qui
s’incarnent dans un message clair. Une
campagne électorale, c’est d’abord un moment
de fraternité et de chaleur humaine. On ne
substituera jamais l’e-mail à la poignée de main,
ou le “chat” au discours prononcé dans les
rassemblements populaires.
ENTRETIEN AVECFRANCK LOUVRIER
conseiller en communication
de Nicolas Sarkozy
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Une campagne réussie, c’est une histoire
dont le candidat est le héros crédible.
Réussir la double incarnation du rêve
américain et la proximité du quotidien.
Web et terrain sont deux canaux essen-
tiels pour mobiliser.
La communication passe par une image
et des formules simples.
Le candidat doit parler de lui et faire
parler de lui.
Convaincre les siens compte moins que
convaincre ceux qui doutent.
Cinquante donateurs à un dollar comptent
plus qu’un seul donateur à cent dollars.
Propos recueillis par Denis Boulard / Marie-Gabrielle Sorin
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7Les sept règles de la victoire
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50 milliards de dollars : Madoff, lafraude planétaire. La nouvelle a fait l'effet
d'une bombe dans le monde entier. Du jamais
vu ! L'arrestation de Bernard Madoff, conseiller
en investissements à Wall Street et ancien P-DG
de la Bourse Nasdaq, accusé d'avoir monté
une gigantesque fraude portant sur quelque
50 milliards de dollars.
Jean-Luc Mélenchon à
propos de l’engoue-
ment pour la cause
tibétaine, le 9 avril :
“Vous le trouvez
sympathique parce
que vous avez lu
Tintin au Tibet !”
La présidence française de l’Union européenne
s’est ouverte avec faste et la présence à Paris
d’une quarantaine de chefs d’État et de gouver-
nement pour le sommet fondateur de l’Unionpour la Méditerranée. Le “Processus de
Barcelone : Union pour la Méditerranée”, avait
été officiellement adopté par le Conseil européen
le 13 mars 2008. La nouvelle institution doit
prendre son essor sur six projets mobilisateurs :
la dépollution de la Méditerranée, les autoroutes
maritimes et terrestres, la protection civile
pour répondre aux catastrophes naturelles, une
université euro-méditerranéenne, l’énergie solaire
et une “initiative méditerranéenne de dévelop-
pement des affaires”…
En conjuguant revirement et goujaterie,
Bernard Kouchner déclare au sujet dusecrétariat d’État aux droits del’homme : “il y a contradiction permanente
entre les droits de l'homme et la politique
étrangère d'un État, même en France”. “Cette
contradiction peut être féconde mais fallait-il lui
donner un caractère gouvernemental en créant ce
secrétariat d'Etat ? Je ne le crois plus et c'est une
erreur de ma part de l'avoir proposé à Nicolas
Sarkozy”, poursuit-il. “On ne peut pas diriger la
politique extérieure d'un pays uniquement en
fonction des droits de l'homme. Diriger un pays
éloigne évidemment d'un certain angélisme”,
ajoute-t-il.
Sarkozy en visite chez Medvedev. Discussions
tendues sur l’accord de paix en Géorgie : “On
s'en va. Ce n'est pas négociable. Nous ne pouvons
pas accepter l'invasion d'un pays indépendant”.
Un journaliste irakien lance ses chaus-sures sur le président Bush… Lors d'une
conférence de presse donnée par W à Bagdad,
le 14 décembre dernier : l'homme a jeté ses
chaussures à la face du président US sous le
nez des agents de sécurité, immobiles.
Heureusement, W garde d'excellents réflexes et
a esquivé la savate… Mountazer al-Zaïdi,
l'agresseur à la chaussure de George W. Bush
en Irak, sera jugé à partir du 31 décembre
prochain pour "agression contre un chef d'État
étranger en visite officielle", par la cour crimi-
nelle centrale d'Irak, spécialisée dans les
affaires de terrorisme. Le journaliste de la
chaîne de télévision irakienne risque entre 5 et
15 ans de prison.
Le Canard se dévoile… Enquête de deux journa-
listes sur les coulisses du Canard Enchaîné.
Le 19 novembre 2008, Karl Laske et Laurent
Valdiguié ont publié chez Stock “Le vraiCanard”, une enquête sur les coulisses de
l'hebdomadaire satirique, son fonctionnement
et ses scoops… et ses sources de droite, de
gauche, passées et actuelles.
Contestée mais votée, à l’arrachée, laréforme de l’audiovisuel public composée
de deux projets de loi, prévoit, entre autres, la
suppression de la publicité sur les chaînes de
télévision publiques après 20h00 à partir du
5 janvier et la nomination de leurs P-DG en
Conseil des ministres.
Et du côté de la presse, des états généraux
lancés par Nicolas Sarkozy pour tenter de
remédier à la situation économique de la presse
en crise…
Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnierlauréats du prix Nobel de médecine 2008 pour
leurs travaux portant sur la découverte du rétro-
virus responsable du sida, en 1983, à l'Institut
Pasteur.
Dati et les mineurs en prison : la
ministre de la Justice qui lançait une réforme
visant à durcir les sanctions judiciaires à l'en-
contre des mineurs et a notamment défendu
le passage de la responsabilité pénale à 12 ans.
Cette mesure préconisée par la commission
présidée par André Varinard relève “du bon
sens”, estimait le Garde des Sceaux.
Désavouée très vite par le Premier ministre
François Fillon : “Je crois qu'il faut que les
choses soient très très claires : je suis totalement
hostile à ce que l'on mette en prison des enfants
de 12 ans et le gouvernement n'a pas de projet
pour modifier la législation en ce sens”, a-t-il dit
lors d'une conférence de presse consacrée au
plan de relance.
La diversité regagne les devants de lascène politique, en devenant un impératif
démocratique : ils sont issus de l’immigration
et s’affichent aux plus hautes responsabilités
politiques, économiques, administratives… il y
a avait eu en 2007, nos ministres (Rama,
Fadela, Rachida), cette année on salue
notamment les arrivées de Pierre N’Gahanne,
nommé préfet des Alpes de Haute-Provence,
celle de Nacer Meddah, préfet de Seine-Saint-
Denis… et la nomination de Yazid Sabeg, cet
industriel, d’origine algérienne, au poste de
Haut commissaire à la diversité, et à l’égalité,
qui doit apporter des solutions concrètes pour
endiguer le fléau des discriminations, via un
arsenal de mesures.
La communication de Domenech : rupture
avec l’opinion. En pleine crise footballistique,
Domenech occulte l’échec présent en parlant déjà
de l’avenir… et nie la déception des Français en
affichant son bonheur privé par une demande en
mariage en direct ! La tactique du tacle : pics,
ironie, le sélectionneur fait de l’obstruction et de
l’affrontement défensif vis-à-vis des journalistes.
Une habitude qui lasse et qui fâche…
Hirsch fait voter le RSA… Définitivement
adopté par le Parlement le 27 novembre pour
remplacer le RMI, le revenu de solidarité active
entrera en vigueur le 1er juillet 2009, après
trois ans et demi de bataille de l'ex-président
d'Emmaüs et actuel Haut commissaire aux soli-
darités actives…
- David-Anthony Delavoët, précédemment
directeur adjoint de cabinet de la secrétaire
générale du ministère de l’Intérieur et
des Collectivités territoriales ; il a été
sous-préfet, directeur de cabinet du
préfet de la Vendée.
- Le Docteur Jean-Louis Malvy, expert de la
communication médicale et de la gestion
de crise, fondateur de Saatchi Healthcare
et ancien associé du cabinet MGVM ;
www.gestiondecrise.com, un nouveau
site pour Vae Solis Corporate… En
faisant l’acquisition du site internet
gestiondecrise.com, site d’information du
cabinet de conseil MGVM, Vae Solis
renforce son offre en prévention des
risques et gestion de crise.
Comment les journalistes politiques
apprécient la communication des
personnalités politiques ? Qui a le
meilleur style ? Qui est le plus efficace
pour faire passer ses messages ?
Entretiens des équipes de Vae Solis avec
une trentaine de grandes signatures poli-
tiques des médias qui dressent le portrait
et leur top 5 des meilleurs communicants
de la classe politique française ! À
paraître en ce début 2009.
La montée en puissance continue… Une
à trois minutes pour télécharger un film vidéo…
c’est désormais possible avec la fibre optiquequi se déploie partout en France : 138 000 foyers
bénéficiaient déjà du Très Haut Débit par la fibre
optique en juin 2008, dont 104 000 abonnés
Numericable, leader en France.
Le chiffre
La phrase
La bonne nouvelle
La gaffe
L’homme & la femme
Il l’a fait
Le coup de gueule
Le coup de pompe
L’imprévu
Un pas en avant, trois pas en arrière…
Le top
Le tuyau Du côté des médias
Le flop
Ils rejoignent Vae Solis
À consulter
À suivre
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un autre s’effondre !
L’été 2008 aura vu les yeux du monde se tourner tour à tour vers une Chine en pleine expansion, suscitant lespassions, entre fascination et appréhension… et vers un monde occidental constatant avec inquiétude les limiteset le déclin de son système financier…
Un monde s’éveille…
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Cérémonie d’ouverture - JO Beijing - Août 2008 Bourse de Frankfurt - Septembre 2008
Pourquoi ce partenariat privilégié avec
un cabinet de conseil en prévention des
risques et gestion de crises ?
Il nous semblait fondamental de proposer un
service complet, amont / aval, et ce, en s’alliant
les services d’un partenaire ayant les mêmes
prérequis de qualité que nous et pouvant
apporter une expertise probante à nos clients.
La démonstration d’une véritable valeur
ajoutée lors d’un sinistre, qui est l’étape de
matérialisation de notre métier, est fondamen-
tale pour nous différencier sur un marché
assurance concurrentiel.
Dans l’inconscient collectif, les assureurs sont
surtout attendus sur leur capacité à dédom-
mager les sinistres et moins sur l’aspect
prévention ou aide à la gestion. Aviez-vous
senti une attente particulière de vos clients
pour ce type d’accompagnement ?
D’une part, offrir du soutien, de la prévention,
correspond réellement à une attente des
clients, mais plus encore, c’est un devoir de
notre part. C’est en se focalisant sur cet aspect
de notre métier que nous pourrons lui rendre
ses lettres de noblesse. Un client qui a une
vision stratégique et à long terme de son entre-
prise pense forcément “prévention”, et ce dans
chaque domaine.
Les grands clients l’ont complètement intégré
dans leur business model et les moins grands,
souvent faute de moyens et non de volonté,
attendent de leur assureur, parce qu’il est
partie prenante, une aide pour bénéficier de la
même protection.
Est-ce un élément différenciant pour
Nassau ou une évolution logique du
métier d’assureur imposée par la situation
économique actuelle ?
C’est un élément différenciant pour nous, bien
évidemment. Bien que le groupe ait plus de
cinquante ans d’existence, nous sommes
entrés sur le marché français en 2006. Pour
avoir une légitimité sur ce marché, il nous
fallait des garanties haut de gamme et des
conditions adaptées, mais aussi des plus qui
remporteraient l’adhésion des clients.
En même temps, les assureurs gagnent
beaucoup à avoir en portefeuille des clients
“équipés”, dont on est certain de la valeur du
conseil en cas de problème.
Offrir les conseils de Vae Solis à des clients est
une force pour tous. Par exemple, une PME n’y
aurait peut-être pas eu accès car elle aurait
privilégié un conseil local et moins réputé,
entrant dans des contraintes budgétaires bien
réelles. Nassau sait que les intérêts de ses
clients, et indirectement les siens, seront
défendus par un partenaire de premier plan et
Vae Solis enrichit son expérience de situations
nouvelles.
Vous disposez d’une offre “contamination
de produits”. Les problèmes sanitaires,
fortement soumis à la pression médiatique,
font-ils parti des menaces les plus
importantes pour les entreprises ?
Il me semble que pour une entreprise agro-
alimentaire, cette offre est au cœur de leurs
préoccupations. Les industriels de l’agroali-
mentaire consacrent beaucoup de temps et
d’argent à la sécurité sanitaire et savent bien
quelles désastreuses conséquences, à la fois
économiques et sur leur image, aurait une
contamination. Aujourd’hui, cette couverture
est à mon sens tout aussi indispensable qu’une
responsabilité civile.
Le produit offre de l’assistance et cela aussi
devient déterminant de nos jours. Les consul-
tants vont aider l’entreprise dans un moment
de stress intense à prendre les meilleures
décisions possibles, à tête froide, avec toute
leur expérience de ces situations sans pour
autant délaisser les activités non touchées,
dans un seul but : juguler les crises dont sont
victimes ces sociétés pour limiter l’impact sur
leur solidité financière et sur leur réputation
lorsque l’incident est médiatisé.
Le risque médiatique est, à raison, source d’in-
quiétude pour tout dirigeant d’entreprise parce
que souvent mal maîtrisé et méconnu. À l’ère
de l’information en temps réel, la communica-
tion de crise peut se retourner sévèrement
contre l’entreprise ou, si elle est bien gérée,
peut aussi contribuer à la renforcer.
Comment voyez-vous l’évolution du
métier d’assureur dans les prochaines
années ?
C’est une question particulièrement difficile à
l’aube de 2009. Les réassureurs et les assureurs
souhaitent que le marché reparte à la hausse et
vont avoir besoin d’équilibrer leurs résultats du
fait de leurs résultats financiers aujourd’hui
négatifs, et les clients vont subir une crise qui
mettra à mal leur trésorerie, voire leur entre-
prise. Comment tout cela va-t-il se concilier ?
Ma conviction est que, plus qu’hier, un assureur
doit être un véritable partenaire dans l’accom-
pagnement de ses clients. Il me semble que
notre marché d’assurance évoluera de plus
en plus souvent vers des produits hybrides,
assurance et assistance, car cela correspond à
une nécessité. Quand un produit d’assurance
comporte de l’assistance, cette partie-là est
toujours l’argument fort et décisif pour le client.
Propos recueillis par Lionel Benatia
ENTRETIEN AVEC VÉRONIQUE PEROTTINO,directrice du développement de Nassau Assurances*
Nassau est une société européenne créée depuis plus
de cinquante ans, non cotée et indépendante des
marchés financiers, et fortement capitalisée. Les diri-
geants du groupe sont “propriétaires” et apportent
une vision à dix ou vingt ans suivant les projets et des
exigences de qualit qui ont forgé, au fil des années, la
réputation et la pérennité de la compagnie.
*
Pour plus d’information sur le Capital Réputation, voir “365° n°1”.
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Tous unis face à la crise ?
Fait étonnant, par le passé, ces différents acteurs
se sont rarement associés pour fournir aux entre-
prises une solution complète. Pourtant, il serait
logique de voir apparaître des offres communes
de la part de ces professionnels ayant chacun une
expertise propre pour faire face à des événements
extraordinaires. Même si tous interviennent sur
des enjeux particulièrement sensibles à un
moment clé pour la pérennité des organisations
qu’ils accompagnent, ils ne réalisent que
rarement des stratégies globales et concertées.
Ce manque de concertation peut parfois nuire à
une vision globale de la stratégie de résolution
de la crise. Par ailleurs, la multiplication des
conseils peut, épisodiquement, perturber le
dialogue et faire perdre du temps à un moment
ou l’on en manque cruellement.
Au contraire, une action mutualisée et
concertée des partenaires gagnera en impact,
en rapidité et en efficacité… pour le bénéfice
des entreprises conseillées.
Vers plus de symbiose sur le terrain judiciaire
Les mœurs évoluent pourtant progressivement
sur le terrain judiciaire avec de plus en plus d’as-
sociation entre cabinets (de communication de
crise et d’avocats). En effet, si les stratégies de
défense judiciaire se sont doublées de stratégie
de défense médiatique, c’est que la sanction des
tribunaux ne vaut pas sanction de l’opinion.
Par conséquent, les avocats proposent à leurs
clients, depuis quelques années, l’intervention
de professionnels de la communication sensible.
Pollution, accidents, incendies, intoxications alimentaires… les entreprises sont évidemment confrontéesà une multitude de risques induits par leur activité quotidienne. Pour y faire face, elles ont à leurdisposition plusieurs types de partenaires. Des spécialistes qui peuvent intervenir à des momentsspécifiques et sur des secteurs particuliers : communication sensible/lobbying ; couverture/indemni-sation ; procédures judiciaires. Nous pourrions nous attendre à ce que ces différents partenairess’unissent pour proposer aux entreprises des solutions complètes. Pourtant, les partenariats ne sontpas toujours naturels… Quels liens entretiennent avocats, cabinets de gestion et de communicationde crise et assureurs ?
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ASSUREURS ET COMMUNICANTS : les nouveaux partenariats de la gestion des crises
ASSUREURS ET COMMUNICANTS : les nouveaux partenariats de la gestion des crises
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LE NEWS TANK DE LEO CORPORATE NOVEMBRE 2006 365LE NEWS TANK DE LEO CORPORATE NOVEMBRE 2006 3
À SU
IVRE…
Le Centre National d’Etudes Spatiales – CNES –
établissement public à caractère industriel et
commercial créé en 1961, est chargé de proposer
au gouvernement la politique spatiale française
et de la mettre en œuvre. Il a aussi un devoir de
transparence et de transmission des savoirs ; le
CNES se mobilise, depuis sa création, pour
concevoir des programmes d'information et de
diffusion de la culture spatiale au sein de toutes
les sphères d’opinion : scientifique, politique,
universitaire et scolaire et grand public.
En quelque cinquante ans d’aventure spatiale,
le CNES a participé aux grandes heures de la
conquête et a notamment doté l’Europe d’un
accès indépendant et fiable à l’espace, avec son
lanceur Ariane qui fête ses trente ans cette année.
Mais le CNES ne vit pas de ses succès histori-
ques. Son expertise est avérée et ses activités
ancrées dans le concret et le “durable”. Le
temps est venu de mieux expliquer ce en quoi
l’espace est utile et essentiel à la gestion des
grandes problématiques de société.
“De l’espace pour la Terre”
C’est avec cette signature adoptée par le CNES
il y a quelques années, que l’établissement a
amorcé sa mue : sortir de la sphère scientifique
et technique pour aller plus et mieux parler au
grand public. Expliquer ce qu’apporte l’espace
à la Terre, c’est informer et faire la pédagogie
des activités spatiales pas tant pour ce qu’elles
sont (des prouesses techniques) mais bien pour
ce qu’elles servent. La focale a changé : l’espace
fait certes encore rêver mais il est bel et bien
devenu une réalité pour chacun.
C’est le second temps de la communication
spatiale. Celui de la concrétisation et de la
matérialisation des apports du spatial à la vie
de tous les jours mais aussi, au niveau macro et
global, celui de la gestion et de la protection
de notre planète.
La communication se met au service des cinq
grands domaines d’applications spatiales
développées par le CNES et ses partenaires –
l’accès à l’espace, le développement durable,
les applications grand public, la sécurité et
la défense, la science – pour en révéler la
contribution sociétale au sens large (économi-
que, sociale, culturelle).
Donner de l’espace aux Français
L’espace, c’est une partie du patrimoine de
l’humanité et c’est au CNES qu’il revient de le
rendre accessible aux Français : un patrimoine
inestimable au plan technique mais aussi en
termes de culture scientifique et de connais-
sance qu’il a le devoir de transmettre et de
diffuser. Pour cela, il organise chaque année
différentes manifestations pour mieux faire
connaître ses activités et rapprocher les
Français de l’espace. Parmi ses nombreuses
initiatives, deux approches originales pour aller
surprendre les Français en investissant des
cadres non habituels.
COMMUNICATION SPATIALE : le rêve devenu réalité
Longtemps, l’espace, territoire de conquête, a incarné l’aventure humaine et scientifique moderne.Aujourd’hui, l’exploit s’est banalisé, normalisé. Et les acteurs, autrefois héros triomphants, sont devenus lesprofessionnels d’une activité dont on n’attend plus simplement qu’elle nous surprenne, mais qu’elle nous apporte,individuellement ou collectivement, quelque chose. C’est le signe évident du succès. C’est aussi le signe d’unetendance de fond à l’évaluation des activités publiques et de la mesure de leur contribution sociétale. L’espace n’y échappe pas.
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Les équipes ainsi constituées permettent de
couvrir toutes les menaces possibles et de
protéger au mieux la réputation des clients.
Sur le terrain des assurances, la révolution
est plus lente
Pourtant, fait déconcertant mais compréhensi-
ble dans un domaine particulièrement
concurrentiel, ce mécanisme n’a pas été naturel
dans le secteur pourtant comparable des assu-
rances. Les deux mondes du conseil et des
assureurs se sont longtemps ignorés. Les assu-
rances, fixées sur leur rôle de bouclier financier
en cas d’incidents, n’ont pas perçu, pendant
longtemps, les enjeux liés à la gestion de la
crise en elle-même. Les cabinets conseils, de
leur côté, voyaient mal l’intérêt de faire interve-
nir dans la gestion des crises un acteur dont le
seul intérêt (supposé) était de limiter les indem-
nités à verser au client à la fin de la procédure.
Pourtant, l’accélération de la médiatisation des
crises a permis, ces dernières années, de réunir
ces deux métiers. En effet, depuis quelques
années, les sinistres ont une plus large propen-
sion à se développer de manière négative. Les
incendies, les problèmes dans une chaîne de
production ou les accidents de transport
peuvent déclencher une crise sociale, des
empoisonnements de consommateurs ou des
drames humains auxquels l’entreprise n’est
pas préparée. La crise, qui n’est plus forcément
liée au cœur de métier de l’entreprise, nécessite
une gestion particulière qui dépasse le cadre
de l’indemnisation du sinistre. En ce qu’elles
menacent l’image de l’entreprise, de ses diri-
geants et de ses produits (son capital réputation),
ces crises ne peuvent plus être ignorées des
assureurs et des cabinets conseils. Une conver-
gence des ressources devient nécessaire.
L’assistance et l’indemnisation enfin réunies
Conscients de cette évolution et des enjeux de
gouvernance qui y sont liés, Vae Solis Corporate
et Nassau Assurances ont officialisé leur
partenariat en janvier 2008. L’objectif de ce
partenariat était de proposer aux PME et
aux grandes entreprises une solution complète
d’assistance et d’indemnisation.
Concrètement, une clause spécifique permet
aux clients de Nassau Assurances de bénéficier
de l’assistance de Vae Solis en cas de besoin.
L’entreprise concernée déclare alors le sinistre
auprès de sa compagnie d’assurance. En
concertation avec Nassau, la clause d’accompa-
gnement est déclenchée en cas de crise
majeure. Tous les services de gestion de crise
sont alors immédiatement activés : analyse stra-
tégique, conseils aux dirigeants, prise en
charge de la communication de crise, gestion
de la pression médiatique, disponibilité 24h/24
et 7 jours sur 7, etc.
Les moyens mis en œuvre rentrent alors dans le
cadre de son contrat d’assurance et est, par
conséquent, gratuit pour lui.
De son côté, l’assureur bénéficie du soutien de
professionnels, une aide qui permet bien souvent
de réduire les coûts induits par la crise, et par
corollaire le montant des remboursements, mais
surtout agit comme un élément de différentia-
tion sur un marché assurance concurrentiel.
Avec le temps, le partenariat assurance/cabinet
de conseil se révèle ainsi triplement gagnant :
gagnant pour l’assuré, qui bénéficie d’un
service d’une qualité optimale “clés en main” ;
gagnant pour l’assureur qui augmente l’attrac-
tivité de ses offres et se différencie sur son
marché ; gagnant enfin pour le cabinet de
conseil qui enrichit son expérience et accroît sa
visibilité en s’associant à un acteur majeur de
l’assurance. Une combinaison “win-win-win” !
Lionel Benatia
C’ES
TD
AN
SL’
AIR
L’espace dans la ville : sensibi-
lisation et initiation des jeunes
Chaque année, pendant l’été, le
CNES part à la rencontre des
jeunes et s’installe une semaine
durant dans leur ville pour y animer des ateliers :
lancer une microfusée, construire un robot
martien ou des instruments météo, découvrir le
système solaire et s’imaginer spationautes…
En 2008, une vingtaine de villes françaises ont
accueilli l’opération “L’espace dans ma ville”.
L’occasion pour les jeunes qui n’ont pas la
chance de partir en vacances de pratiquer les
sciences en s’amusant et pour le CNES de rendre
accessibles et mieux faire connaître ses activités.
L’observatoire de l’espace : quand l’espace
investit le champ culturel
Journée du Patrimoine mais aussi Nuit
Blanche, Fête de la science, chaque année le
CNES ouvre ses portes, diffuse ses images
extraordinaires, présente ses programmes et
permet aux Français de découvrir un univers
scientifique sous l’angle de la culture au sens
large.
Depuis sa création, l’Observatoire de l’espace a
placé le patrimoine culturel de l’espace au
cœur de ses initiatives afin de créer des passe-
relles entre l’espace et les autres domaines du
savoir. La valorisation de ce patrimoine
s’effectue notamment lors de l’organisation
d’expositions dans les musées ou d’opérations
spéciales comme celle conduite à Strasbourg
fin 2008 dans le cadre de la présidence
française de l’Union européenne. Une rencontre
placée sous le signe de la culture européenne
de l’espace en s’appuyant sur une triple vision,
historique, scientifique et sociologique de
l’univers spatial en Europe…
L’espace, constructeur d’Europe
La contribution du CNES au débat public se joue
aussi et d’abord au niveau stratégique et
politique : servir et défendre les intérêts nationaux
dans un contexte mondialisé, valoriser les exper-
tises de toute la communauté spatiale française
et continuer d’affirmer le rôle moteur de la France
dans la dynamique spatiale internationale.
Le CNES est sur tous les fronts.
Cette année 2008 fut particulièrement exemplaire
en la matière. La présidence française de l’Union
européenne aura permis au CNES et à la France de
se positionner en acteurs majeurs de la politique
spatiale européenne. La visite du président Sarkozy
au Centre Spatial Guyanais, la réunion en Guyane
des ministres européens en charge de l’espace, à
l’invitation de la ministre de la Recherche Valérie
Pécresse, celle des vingt-sept ambassadeurs auprès
de l’Union européenne ou encore la tenue deux
jours durant du forum GMES (Global Monitoring for
Environment and Security) qui aura permis de
présenter ce projet phare, principale contribution
européenne au vaste programme mondial d’obser-
vation de la Terre… Autant de moments forts, sur le
fond comme sur la forme, mobilisant l’énergie des
équipes de la communication du CNES au service de
l’image d’une France, moteur et leader de l’espace.
Le parcours du combattant d’un chef d’entre-
prise contraint aux démarches les plus longues
et complexes pour au moins informer le
gouvernement de sa situation et de ses
besoins, voilà ce que décrivait Sophie de
Menthon, la présidente du mouvement Ethic,
dans un article à la fois drôle et inquiétant sur
le lobbying paru dans Le Monde en mai 2008.
Fantasmes en tous genres
Les pressions inquiétantes dont tant de parle-
mentaires seraient les victimes plus ou moins
consentantes dans l’élaboration de la loi, c’est
le point de vue inverse qu’adoptaient Vincent
Nouzille et Hélène Constanty dans leur livre
paru lui aussi en 2008.
Visions apocalyptiques dans les deux cas, et
peut-être pas si contradictoires qu’il y paraît,
d’un exécutif incapable de prendre en compte
les besoins réels des acteurs économiques
tandis que le parlement, en charge en principe
d’exprimer l’intérêt général, se transforme en
arène où s’affrontent les intérêts particuliers
les plus crus.
Entre ces deux extrêmes – ou plutôt au-delà –
y a-t-il une place pour une autre réalité, celle
où les pouvoirs publics veilleraient sur le bien
commun tandis que les acteurs de la société –
associations, entreprises, acteurs sociaux, etc. –
auraient voix au chapitre quant aux décisions
qui les concernent. Ce monde existe-t-il ailleurs
que dans les manuels ou les discours pro domo
des associations de lobbyistes… ?
Pour faire court, quand on dit “lobbying”,
renvoie-t-on aux pratiques les plus détestables
de trafic d’influence ou évoque-t-on au contraire
une forme de démocratie participative ?
Tout chef d’entreprise est en même temps un
citoyen. Tous les jours, un arbitrage gouverne-
mental favorise un secteur concurrent (solaire
contre éolien, grande distribution contre petit
commerce, etc.), une collectivité choisit un
prestataire (JC Decaux plutôt que Clear
Le CNES est assez peu
connu des Français...
Comment l'expliquez vous
et en quoi cela lui est-il
préjudiciable ?
C'est un fait, les Français ne
connaissent pas massive-
ment le CNES et c'est bien dommage car c'est
un pôle d'excellence reconnu mondialement.
Les raisons en sont multiples et certaines histo-
riques. Je pense que le CNES a, par le passé,
montré trop de modestie, estimant que les
succès qu'il a générés (Ariane, Météosat,
Argos, SPOT...) étaient plus importants que sa
propre image. Mais nous sommes aujourd'hui
dans une société identitaire où il est essentiel
que les organismes aient une existence sociale,
pas seulement connue de leurs pairs et des
autorités de tutelle. Cela constitue forcément
un handicap car comment le public peut-il
soutenir l'action d'un organisme dont il
méconnaît l'existence ! C'est pourquoi nous
affichons aujourd'hui la communication vers le
grand public comme une priorité.
Quels sont vos objectifs en matière de
communication pour les trois ans à venir ?
Nos trois axes sont clairement identifiés et
complémentaires :
- accroître la notoriété du CNES et par consé-
quence agir sur son image de marque ;
- valoriser l'utilité du CNES comme grand
organisme français, moteur de l'Europe spatiale
et acteur majeur au niveau international ;
- expliquer le bénéfice de l'espace pour la
collectivité, face aux grandes problématiques
et aux enjeux de notre société.
Ces trois axes de communication s'appuient,
comme autant de preuves concrètes, sur la
réalité programmatique des années à venir.
Quelles sont les actions phares en 2009 ?
Elles sont, comme vous pouvez l'imaginer,
multiples et doivent d'abord s'appuyer sur un
renforcement de nos relations médias et sur un
site web dynamique qui a pour ambition d'être
une référence parmi les grands organismes
publics. Pour cela, compte tenu de ce que j'ai
décrit plus haut, il nous faut gagner la “bataille”
de l'image, et donc de la télévision, pour être
plus présent sur ce média principal. Mais nous
continuons à maintenir notre effort sur les
relations avec les élus en s'efforçant de les euro-
péaniser, les actions jeunesse, les expositions en
région, les publications... sans oublier le tradi-
tionnel Salon de l'air et de l'espace du Bourget,
en juin 2009. L'innovation de nos outils et la
professionnalisation de nos équipes sont une
exigence des prochaines années.
Propos recueillis par Corinne Dubos
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TROIS QUESTIONS À PIERRE TREFOURET,directeur de la communication, de l’éducation et des affaires publiques
Pour en savoir plus : www.cnes.fr
Un rapport parlementaire a proposé début 2008 la reconnaissance et l’organisation du lobbying à lafrançaise. Il est pour l’instant resté lettre morte. Le point sur cette pratique, à l’origine de tous lesfantasmes et pourtant indispensable à l’efficience de l’État… et à la démocratie !
LOBBYING : trafic d’influence ou démocratie participative ?
Corinne Dubos
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consultation préalable des lobbyistes par les
rapporteurs, un annuaire des parlementaires par
spécialisation et une révision du dispositif d'orga-
nisation des colloques au Palais Bourbon ou au
Luxembourg, trop souvent réduits à des opéra-
tions de marketing parlementaire.
Cette réforme verra-t-elle le jour dans notre
société de défiance où l’extrémisme des anti-
libéraux pousse de plus en plus d’acteurs
économiques à rechercher des solutions plus
expéditives et réciproquement ? Une compré-
hension mutuelle des intérêts communs de la
société et du marché finira-t-elle par voir le jour ?
C’est bien en fait ce qui est en jeu dans ce
débat.
Un lobbying à la fois socialement responsable
et décomplexé est, en tous les cas, nécessaire-
ment un mixte entre intelligence économique,
affaires publiques et communication. Il ne
s’agit donc de faire preuve ni de naïveté, ni de
confiance excessive sur la force de l’influence.
Combien de chefs d’entreprises accueillent les
lobbyistes en disant du décideur public ciblé “je
le connais très bien”… pour s’apercevoir
quelques mois plus tard que cette “connais-
sance” n’était pas suffisante !
La force du lobbying "démocratique" est donc
d’être beaucoup plus solide, dans ses effets,
qu’un simple jeu d’influence officieuse. Réussir
à apparaître comme le défenseur de l’intérêt
général équivaut à obtenir un “booster” d’in-
fluence sans équivalent. Les entreprises dont
c’est le cas ont mis dix ou vingt ans à gagner ce
statut, par des efforts constants et organisés.
Quelles seront ces icônes demain ? C’est impos-
sible à dire, mais une chose est certaine : elles
se construisent aujourd’hui.
Antoine Boulay
Channel pour le velib, Spie plutôt que Vinci
pour une autoroute, etc.), une disposition
législative soutient une activité plutôt qu’une
autre, etc.
Et inévitablement, le dirigeant dont l’entreprise
a été éconduite, ou le secteur défavorisé, se
révolte en prenant sincèrement les accents du
bon citoyen… Car sa position était la bonne,
son offre la meilleure, évidemment ! Et c’est le
lobbying du concurrent, toujours, qui est à
l’origine de l’échec.
En somme, une bonne définition du lobbying
dans un dictionnaire des idées reçues contem-
poraines serait la suivante : “Ensemble des
pratiques qui permettent aux mauvais de l’em-
porter dans les affaires.” Ce mouvement
d’opinion a atteint son sommet avec l’échec de
Paris pour les Jeux olympiques 2012. Car si
Londres a gagné, c’est bien sûr grâce aux
talents de la perfide Albion pour le… lobbying.
Le lobbying vu comme un trafic d’influence a
donc trois caractéristiques : l’opacité, la confusion
entre intérêt général et intérêt particulier, et
une issue défavorable à la collectivité (moindre
efficacité de la loi, moindre concurrence, etc.).
Or, si ces pratiques ont certainement cours
aujourd’hui comme hier dans certains cas, la
vie courante des lobbyistes d’entreprises ou
des consultants en affaires publiques leur est
contraire en tous points.
Elle implique en effet un haut degré de trans-
parence, la recherche de la cohérence entre
intérêt général et intérêt particulier, et de bons
résultats pour la collectivité en même temps
que pour l’entreprise ou le secteur d’activité
concerné. Certains dirigeants se sont créé un
accès direct et permanent aux pouvoirs
publics, d’autres non (voir encadré). Tel leader
de la grande distribution ou de l’accès à
Internet s’autoproclame militant du pouvoir
d’achat ou du haut débit pour tous, mais qui
peut croire qu’il n’abuse pas de sa position de
force pour favoriser ses propres intérêts ?
Comment ses concurrents, aussi bons ou
meilleurs "citoyens", peuvent-ils faire valoir
leurs points de vue ?
Le point sur la pratique
Tout l’enjeu est donc de maîtriser l’information
et l’argumentaire. Celui qui l’emporte, dans ce
lobbying-là, c’est celui qui est capable de
défendre une cause plus grande que lui, de
mettre en valeur la “part d’intérêt général”
qu’il détient.
Il faut cependant que le combat soit “à armes
égales”, qu’il y ait une réelle égalité des
chances entre les tenants des différentes
positions. C’est le cas, en fait, car la puissance
communicante des entreprises n’est pas sans
limites. Ceux que l’on pourrait appeler avec
humour les “antilibéraux paranoïaques” les
imaginent manipulant la presse en tant qu’an-
nonceurs ou à l’aide d’officines opaques et
discrètes, activant les parlementaires, qui n’ont
pas les moyens d’étude nécessaires, ou enfin
jouant avec les cabinets et les ministres, qui
n’ont pas le temps, etc.
À l’autre extrême du spectre, les “libéraux aigris”
(toujours avec humour) ont la vision inverse : on
ne les écoute jamais, l’administration est
jacobine et centralisatrice, les médias sont anti-
libéraux, ils n’aiment pas les entreprises, la
culture économique et financière des Français,
de l’administration, des politiques, des journa-
listes, est proche de zéro, on croira toujours
davantage un représentant syndical ou une
association (de riverains, de consommateurs,
etc.) qu’une entreprise et les politiques sont
souvent si méfiants qu’ils ne souhaitent même
pas entendre les industriels concernés par les
mesures qu’ils préparent…
Et pourtant, il est possible de faire valoir son
point de vue sans user de moyens inavouables,
mais à plusieurs conditions : que le point de
vue en question ait une base réelle, qu’il soit
étayé par des argumentaires factuels et
concrets sur le bénéfice collectif, le “welfare”,
qu’il soit exprimé simplement, et, surtout, qu’il
prenne en compte le point de vue des décideurs
(ministres, parlementaires, maires, etc.) et des
instructeurs de la décision (administrations,
autorités indépendantes, jurys, etc.).
Pour le dire autrement, si un mauvais dossier a
quelques chances de réussir grâce à un lobbying
qui s’apparenterait au trafic d’influence, un bon
dossier a besoin du lobbying "démocratique"
pour aboutir. Enfin, le risque d’image associé à
un lobbying politiquement incorrect est très
sérieux, et les conséquences sur l’entreprise ou le
secteur concerné sont excessivement durables.
Le secteur des services aux collectivités (eau,
déchets, etc.), s’il a totalement réformé ses
pratiques, est encore victime de ses errements
des années 80. Ils justifient encore aujourd’hui
de la part des politiques un traitement quasi
systématiquement hostile… avec des consé-
quences bien concrètes sur les contrats et le
chiffre d’affaires perdus.
Un pas vers la reconnaissance…
C’est dans ce contexte que Jean-Paul Charié,
député UMP du Loiret et rapporteur d'une
mission d'information de la commission des
Affaires économiques de l'Assemblée nationale
sur le développement du lobbying, a présenté au
début 2008 son Livre bleu sur le sujet. Il propose
un registre national des lobbyistes, une salle qui
leur serait réservée à l’Assemblée nationale, une
• Identifier les acteurs par une cartographie : alliés et adversaires,
instructeurs et décideurs, influenceurs et experts, etc.
• Comprendre les mécanismes de la prise de décision en recensant le
détail des positions et des critères de décision de chacun et assurer une
veille réglementaire et politique permanente.
• Prendre en compte les attentes des décideurs sur des sujets connexes,
et les satisfaire (projet d’intérêt local, environnement, nouvelles technolo-
gies, etc.).
• Élaborer un discours, illustré et concret, étayant la cohérence entre
l’objectif recherché et l’intérêt général.
• Ajouter une dimension sociétale, politique ou industrielle, ouverte sur
l’extérieur, à un discours toujours trop technique et orienté vers l’interne.
• Créer et consolider les réseaux d’alliés de manière systématique et
constante, d’abord de manière indirecte (sans lien immédiat avec l’objectif),
par la création ou la participation à un ou plusieurs think tanks, le mécénat,
la mise en œuvre de programmes de responsabilité sociétale, etc.
• Engager un programme de rendez-vous intensifs auprès des décideurs :
rendez-vous avec les conseillers ministériels ou les ministres, ainsi qu’avec
les équipes du Premier ministre et du président de la République le cas
échéant, auditions parlementaires, etc.
• Ne pas négliger les associations de collectivités locales, les groupes
d’intérêt distincts mais connexes, les associations de consommateurs, les
syndicats, etc.
• Assurer la cohérence entre la communication générale et les actions de
lobbying.
• Viser à faire porter sa position par des tiers reconnus et a priori
désintéressés (associations, autorités indépendantes, etc.).
Le “lobbying démocratique” en dix étapes
28 365° | n° 3 | Février 2009 365° | n° 3 | Février 2009 29
Dans l’imbroglio de crises économico-financiè-
res que nous vivons, il est difficile de s’y
retrouver. Une seule donnée persiste : la Crise
est là! Les médias nous le disent, nous le
répètent à longueur de pages ou d’ondes :
nous sommes en crise. Les hommes politiques
français, après un silence de dix jours, ont repris
le même refrain dès le 25 septembre 2008.
Difficile, dès lors, de se lever chaque matin
sans écouter les radios annoncer que des
mauvaises nouvelles, ou lire les journaux, aux
titres toujours plus évocateurs du thème “au
secours, tout s’écroule !”.
Il y en a certains qui se complaisent dans cet
état de déprime, et qui en rajoutent inutile-
ment. Cela s'appelle, en terme journalistique,
“faire monter la mayonnaise”. Fatalistes, ils
commentent en nous promettant toujours pire
demain. D’autres, peu nombreux, tentent de
garder un discours honnête, porter un regard
lucide mais optimiste sur la crise que nous
traversons.
Chacun parle, et, au travers de ses paroles,
tente d’influer sur l’opinion.
Impossible donc de passer sous silence l’événe-
ment qui obnubile tous les esprits ?
La Tribune s’y est essayée. Sursaut de mauvaise
conscience à la veille de Noël ? Désir de
remonter le moral des Français ? Nul ne sait.
Il n’empêche que la promesse de la “une” du
24 décembre 2008 ne mentait pas : nous
avions bien sous les yeux un numéro vierge du
mot “crise” ; mais au prix de quelles souffrances
linguistiques et stylistiques… périphrases,
synonymes, tout y est passé pour parler sans
la nommer de “Celle-Dont-On-Ne-Doit-Pas-
Prononcer-Le-Nom”.
Était-il déjà trop tard ? Certainement, tout
fonctionnait déjà, et fonctionne encore,
comme s’il fallait toujours plus parler de La
Crise, quitte à atteindre l’overdose…
Certainement, le poids de la parole n’a jamais
été aussi fort qu’en ce dernier trimestre 2008,
où tout a failli s’effondrer.
Dès lors, un constat s’impose : à l’aube de
l’année 2009, le moral des Français est au plus
bas, l’économie semble être figée et les mois à
venir s’ornent d’un camaïeu de gris. En un mot,
la confiance est en berne. La faute à qui ? À la
parole, bien sûr. Nos auteurs classiques nous
l’ont pourtant souvent rappelé. Racine, en tête !
La parole peut s’avérer plus destructrice que
salvatrice.
Alors fallait-il parler ? Se taire ? Oublier les
principes de la gestion et de la communication
de crise ?
La relecture des derniers mois de 2008 peut
aider à comprendre la manière dont la crise a
été appréhendée et quels réflexes son annonce
a générés.
Ainsi, à travers l’analyse des comportements, il
est possible d’évaluer si les principes de
prévention des risques et de bonne gestion de
la crise ont été appliqués.
Une crise vieille de dix-huit mois
qui génère des réflexes inattendus ?
Ou comment dénier les risques
Cette crise, peu de gens ont voulu l’anticiper.
Tout le monde fonctionnait comme s’il ne
voyait rien arriver. Or, dès février 2007, les
“subprimes” commencent à faire parler d’elles
et la crise s’amorce… le 17 février 2008 avec
la nationalisation de la banque britannique
Northern Rock, plusieurs signaux, de moins en
moins faibles, de crise imminente étaient
envoyés. Et quand elle s’est généralisée et a
dévalé dans nos médias avec une force et une
brutalité inégalées, personne n’a semblé
pouvoir ni la maîtriser, ni la contrôler, encore
moins l’orienter.
Cette sensation de perte totale de contrôle est
en fait assez révélatrice du comportement que
tout humain, dirigeants d’entreprises ou d’or-
ganisations compris, peut avoir spontanément
face aux risques : le déni. En cela, les dirigeants
rejoignent le lot commun et montrent par là-
même leur entière humanité.
Tout commence par un refus de croire à
son exposition réelle aux risques… Or,
qu’elles soient petites, grandes, prestigieuses,
toutes les entreprises sans exception sont
exposées à des risques quand bien même elles
s’estiment intouchables ou suffisamment
influentes, voire compétentes pour en
échapper.
… l’étape suivante s’apparente alors à un
refus d’anticipation des risques… Cet
aveuglement dispense généralement de tout
travail – certes fastidieux – de recensement
exhaustif et honnête des risques que les entre-
prises génèrent par leur simple activité. La
croissance est là, les parts de marché doivent
être gagnées ; alors à quoi bon prendre le
temps ou mettre les moyens d’estimer et
d’évaluer les risques collatéraux que la crois-
sance créée.
… pour se cristalliser sur un refus d’ad-
mettre ses erreurs, ses pertes. Ce syndrome,
bien connu des joueurs, se retrouve trop
souvent (et l’actualité de la Société Générale et
des Caisses d’Épargne l’a montré en 2008)
chez les financiers, traders en tête. Plus on
perd plus on essaye de se “refaire”. Or, quand
on refuse de connaître ses risques, le risque est
de s’enfermer dans les mêmes erreurs et de
reproduire les mêmes pertes.
“Parler ou se taire”, choix racinien.
Retour sur l’attitude des dirigeants
Après le silence observé durant les dix premiers
jours de la crise financière, Nicolas Sarkozy et
le gouvernement ont effectué un virage à 180°
dans leur stratégie de communication. En effet,
depuis le – désormais célèbre – discours de
Toulon (25 septembre 2008), le chef de l’État et
le Premier ministre ont multiplié les réunions et
déclarations, n’hésitant pas à insister sur la
dangerosité de cette crise.
Tant de communication, alors que le silence
semblait être la règle d’or, peut laisser perplexe
et donne matière à interrogation : doit-on
parler de la crise au risque de l’aggraver ?
Faire le choix de la transparence
Banques, sites nucléaires, grande distribution,
transport aérien... Autant d'univers confrontés
ces derniers mois à la communication de crise.
Autant, aussi, de dirigeants sommés de s’expli-
quer sur les faits. Et chacun de s’exécuter en
tentant de respecter le mieux possible la rhéto-
rique de crise : Transparence, Empathie,
Mobilisation. Malgré cela, certaines déclara-
tions à la presse peinent à convaincre. À croire
qu’à trop construire leur discours en direction
des marchés et des actionnaires, certains diri-
geants en oublient l’essentiel. Lors d’un
accident ou d’une malversation, plus que
l’annonce de l’ouverture d’une enquête ou de
l’envoi de premiers secours, l’opinion attend
d’un dirigeant qu’il soit spontanément en
sympathie avec elle. En communication de
crise, victimes, personnels, représentants de la
direction, simples témoins, deviennent les
acteurs d'une actualité où l’émotion prime sur
la raison. Qu’une réponse donne l’impression
de manquer d’authenticité et le public ne suit
plus ! Filmés en gros plan, un visage défait, une
main trop nerveuse, peuvent mettre à mal le
plus élaboré des plans de communication.
Communier avec le reste du pays dans une
même émotion partagée, telle est la règle de la
grande messe du 20 h.
Cette règle, dans la gestion de la Crise, les
pouvoirs publics, Élysée en tête, l’ont parfaite-
ment comprise.
Première salve tirée, le 25 septembre, par
Nicolas Sarkozy à Toulon : “Dire la vérité aux
Français, c’est leur dire que la crise n’est pas finie,
que ses conséquences seront durables. Dire la
vérité aux Français, c’est leur dire que la crise
actuelle aura des conséquences dans les mois qui
viennent sur la croissance, sur le chômage, sur le
pouvoir d’achat.”
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Depuis le 15 septembre 2008 et la faillite de la banque d’affaires Lehman Brothers, nous sommestous entrés dans le temps de la Crise. Crise financière, crise des banques, crise de l’industrie, crisede l’économie, crise de la consommation, etc. On ne sait plus à quelle crise se vouer ! En France, la force médiatique de cette crise est d’une ampleur telle qu’elle emplit, comme une déferlante, l’essentiel des médias depuis plusieurs mois et cela ne semble pas vouloir s’arrêter. De ce constat naissent plusieurs questions : trop d’information, de communication sur la crise engendrent-t-elles… la crise ? Les médias, premiers à réagir aux événements, ont-ils un temps d’avancesur nos dirigeants ? Une bonne gestion de crise doit-elle passer par autant de médiatisation ?Décryptage.
LA CRISE FINANCIÈRE… tragédie de la parole ?
Mais les indicateurs actuels et les tendances
futures ne doivent pas nous faire oublier que
2008 aura été l’année de la Chine sur bien des
aspects. Une année de reconnaissance interna-
tionale avec ses corollaires positifs et négatifs,
mais aussi une année de changements
profonds !
D’abord, la reconnaissance internationale par
le biais des Jeux olympiques, leur splendeur et
leur réussite. On oublie combien furent
nombreux ceux qui pensaient que la Chine
aurait bien des difficultés à être prête en temps
et en heure. Ce fut une organisation millimé-
trée pour un événement sans faute et
exceptionnel.
Ensuite, l’exigence de l’opinion publique
mondiale (à l’occasion des affrontements au
Tibet) face à un acteur qui a désormais toute sa
place sur la scène internationale. Il ne s’agit
pas ici de faire une évaluation géopolitique des
tensions entre les religieux tibétains et le
pouvoir central de Beijing. Mais il faut
souligner que l’opinion a réagi violemment
contre la Chine, parce qu’il y a une attente
nouvelle à l’égard d’une nation qui a pris une
place importante dans le monde. C’est presque
une forme de bizutage. Certes, l’exercice n’a
pas été totalement concluant ! On aurait aimé
voir la Chine mieux expliquer son action. Mais
il est incontestable que l’opinion publique
internationale a été entendue à Zhongnanhai.
Ce qui nous conduit au troisième point qui est
essentiel.
Enfin, les observateurs attentifs savent
désormais – et contrairement à ce que pensent
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bienvenue. “Cela aurait clairement eu un
impact beaucoup plus rapide sur les marchés.”
Comprendre : “Cela aurait pu contribuer à limiter
la chute du CAC 40 et des actions de certains
établissements de banque et d’assurance”,
affirme-t-il.
Pas sûr, lui répond Dominique Reynié, dans une
interview à 20minutes : “En ce qui concerne les
marchés, les politiques qui ont une influence se
trouvent aux États-Unis, juge-t-il. Au niveau
français et européen, l’important est de préserver
la confiance de l’opinion publique pour éviter la
panique.” D’où une prolifération de déclara-
tions sur la “solidité” du système français. Mais
si les mots sont importants, l’inaction est pire.
Nicolas Sarkozy se mobilise donc. En moins de
vingt jours, il convoque, rencontre, réunit,
propose et annonce un plan de sauvegarde.
Autant de signes envoyés afin de rassurer les
entreprises, les marchés et, au-delà, l’opinion. Et
tout le monde de saluer l’énergie déployée…
comme Alain Minc, qui, dans Le Parisien du
15 décembre, affirme que “nous sommes passés à
un millimètre du désastre”. Pour lui, si, au
lendemain du 12 octobre, lorsque le plan de
l’Eurogroupe a été présenté à l’Elysée, “les Bourses
du monde entier avaient mal réagi, le système se
serait effondré comme un château de cartes.”
L’acte salvateur ? Oui, tant qu’il est accompa-
gné de la parole pour l’expliquer, le rendre
accessible et compréhensible. La parole salva-
trice alors ? Peut-être, en tout cas plusieurs
éléments abondent dans ce sens. Au simple
niveau des particuliers, cela pourrait être une
piste d’explication à la sagesse comportemen-
tale de nos concitoyens, qui n’ont jamais
paniqué en allant massivement retirer leur
argent des banques de détail.
Si parler de la crise peut concrétiser la crise,
cela ne veut surtout pas dire qu’il ne faille pas
en parler. Enfouir la tête dans le sable est
souvent la meilleure manière de s’enliser… La
bonne solution est, comme souvent, dans la
recherche de l’équilibre. Il faut savoir aborder
les crises comme une donnée probable et
réaliste, savoir s’y préparer, y faire face et
surtout savoir les expliquer. En parler donc.
Phèdre battue en brèche en quelque sorte.
Laurent Porta
32 365° | n° 3 | Février 2009
Le plan français de lutte contre lacrise financière en quelques chiffres
320 Mds € : c’est le plafond degarantie accordée par l’État pourpermettre aux banques de se refinancer.
40 Mds € : c’est le plafond degarantie accordée par l’État pourrenforcer le capital des banques.
22 Mds € : c’est le montant du plande soutien au financement des PME.
30 000 : c’est le nombre delogements rachetés par l’État poursoutenir l’immobilier.
65L E N E W S T A N K D E L E O C O R P O R A T E N O V E M B R E 2 0 0 6365L E N E W S T A N K D E L E O C O R P O R A T E N O V E M B R E 2 0 0 63
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E “ “Propos présidentiels choisis :
- “Je vous ai toujours dit la vérité et j’ai agi”
- “De cette crise va naître un monde nouveau.
Je souhaite que nous nous fassions une place
dans le nouveau monde qui se construit”
- “Nous allons sortir renforcés de cette crise”
- “La crise est une épreuve, elle est aussi un défi”
- “Nous serons pragmatiques, attentifs, réactifs
et s'il faut faire davantage, nous le ferons,
mais en gardant notre sang froid”.
L’ANNÉEoù la Chine s’est éveillée
La crise financière aura des conséquences pour la Chine ; une croissanceralentie, un chômage en augmentation, des tensions sociales et politiques de plus en plus fortes. Ce n’est pas une bonne chose pour laChine et ce n’est vraiment pas une bonne nouvelle pour le reste dumonde !
Nier la gravité de la crise aurait été une erreur
monumentale, estiment les spécialistes, dont le
politologue Dominique Reynié. “Tout le monde a
rapidement compris son ampleur et la cacher
aurait engendré une suspicion de l’opinion. Dans
ce cas, la meilleure option semble être de parler et
d’agir.” D’autant que la France possède un
passif important en matière de “non-communi-
cation” de crise. En effet, est-il nécessaire
de rappeler les gestions calamiteuses de
Tchernobyl, du sang contaminé ou de la
canicule. Les traces de ces choix de non-infor-
mation ou de communication partielle sont
encore profondément ancrées dans les
mémoires et un parfum de défiance à l’égard
des institutions, en période de crise, continue
toujours à flotter sur l’Hexagone. Ainsi, en juin
2008, l’Observatoire des risques sanitaires
notait que seuls 3% des Français estimaient
que le gouvernement disait la vérité sur une
crise en matière de santé, et 86% qu’on leur
cachait quelque chose.
Cette logique, trop longtemps suivie, de silence
a donc entraîné des doutes et une rupture de
confiance avec l’opinion publique.
Alors, désormais, les pouvoirs publics optent
pour la transparence. Transparence, informa-
tion, explication : une communication d’un
nouveau genre est apparue.
Fin 2008, les prises de parole de Nicolas Sarkozy
ont contribué à donner du sens à cette crise
financière perçue comme lointaine et virtuelle par
l’opinion. Respectant ainsi l’adage : on craint
moins quelque chose que l’on comprend !
De petites phrases en déclarations, le leitmotiv
présidentiel fin 2008 était : rassurer sans démo-
biliser, alerter sans inquiéter, se montrer
présent.
Panique évitée ?
Cette stratégie de la transparence a toutefois
ses limites, selon Philippe Waechter, directeur
de la recherche économique chez Natixis Asset
Management. Ainsi, il déclarait dans Le Figaro,
le 1er octobre 2008 : “Elle peut être contre-
productive en générant une panique inutile.”
D’une manière générale, nos politiques ont
opté pour une communication à destination
des particuliers et non des marchés. Selon lui,
une déclaration rapide du chef de l’État au
moment de la faillite annoncée de Lehman
Brothers, le 15 septembre, aurait été la
beaucoup de “docteurs de la vertu” en
Occident – qu’il y a l’émergence en Chine
d’une opinion publique avec laquelle le
pouvoir doit composer. Sur l’affaire du Tibet, la
prégnance de cette opinion publique explique
pour une grande partie les décisions et
réactions du gouvernement chinois.
Ce phénomène, sous-estimé en Occident, ne
date pas de 2008. Il faut remonter à la crise du
SRAS en 2003, qui a très certainement eu
l’effet d’un déclencheur. Les cinq dernières
années ont vu se construire les mécanismes
d’une opinion publique chinoise proches de
ceux d’Occident. Cette émergence change
considérablement la manière dont le gouverne-
ment chinois gère médiatiquement les crises
que le pays connaît.
L’année 2008 aura été riche en crises souli-
gnant ce phénomène. La dernière en date
éclate en septembre 2008 : l’affaire du lait
chinois frelaté à la mélamine. Certains ont
fortement critiqué le gouvernement chinois
pour son manque de transparence : l’enquête
montre que les deux premières victimes de
cette crise remontent à mai et juillet 2008. Il se
passe donc quelques semaines entre l’appari-
tion des premiers cas mortels et la révélation
publique de l’affaire. Confronté à cette crise, le
groupe néo-zélandais Fonterra, qui détient
43% de la société Sanlu, l’un des fabricants de
lait concernés, explique qu’il a “essayé pendant
plusieurs semaines d’obtenir un rappel de produit,
mais les autorités chinoises n’ont rien fait”. Le
Premier ministre néo-zélandais monte au
créneau et enfonce le
clou : “Au niveau local, je
pense que la première
tendance a été de tenter
de couvrir l’affaire.”
Ne sont-ce pas des
arguments de défense
un peu faciles ? On peut
toujours avoir un doute
sur le fait que la tenue
des Jeux olympiques en
août 2008 a reculé de
quelques semaines la
révélation du scandale,
il n’en reste pas moins
que les autorités de
Beijing ont fait preuve
non seulement d’une réactivité, mais aussi
d’une transparence nouvelles. Certes, peut-
être pas encore idéales, mais l’évolution est
notable.
L’enquête a commencé immédiatement et la
justice a été saisie très rapidement ; les
sanctions contre les responsables sont tombées
à la mi-janvier 2009 avec trois condamnations à
mort, dont une avec sursis. Par ailleurs, Beijing
a reconnu, en décembre 2008, 295 000 enfants
intoxiqués, près de 160 enfants dans un état
grave… et une dizaine de décès.
Ce changement de comportement du gouver-
nement chinois n’est pas le résultat des
agitations de quelques bonnes âmes occiden-
tales, mais simplement la nécessité de devoir
gérer les crises face à une opinion publique
dont les ressorts ont bien des points communs
avec toutes les autres opinions publiques.
La mobilisation du gouvernement chinois
visait en priorité à réduire les risques sanitaires
pour les enfants, mais aussi à prendre des
sanctions dont l’objectif était bien d’apaiser la
douleur des familles de victimes et à rassurer
la population.
Deux autres événements en 2008 sont très
significatifs de cette évolution : le tremblement
de terre du Sichuan en mai 2008 et les
problèmes ferroviaires dans le Sud de la Chine.
Dans un cas comme dans l’autre, nous avons
pu voir les dirigeants de l’exécutif chinois aller
à la rencontre de la population et s’assurer
d’une “mise en scène” et d’une médiatisation
très forte. Le président Hu Jintao à la gare prin-
cipale de Guangdong harangue les foules pour
leur demander de prendre leur mal en
patience, et le Premier ministre, Wen Jiabao,
dans le Sichuan sur les lieux du tremblement
de terre, prend une pelle à la main pour
souligner la mobilisation du pouvoir central à
sauver les rescapés.
Le gouvernement chinois doit aussi “faire des
images” pour faire passer les messages à son
opinion publique. Il a, comme de nombreux
gouvernements, le souci de lui montrer son
écoute, sa mobilisation, sa proximité. Les
dirigeants chinois doivent gérer leur communi-
cation et prendre en compte cette nouvelle
composante essentielle. Il faut bien intégrer
cette donnée pour comprendre la politique
chinoise, ses évolutions intérieures et sa
politique internationale, notamment à l’égard
de la France.
Nous verrons si cet éveil aux enjeux de commu-
nication gouvernementale s’inscrit dans la
durée et si 2009 confirmera cette tendance,
mais d’ores et déjà ce ne sont pas les sujets qui
manquent, tant la place de la Chine dans la
crise financière et économique mondiale est
importante.
Arnaud Dupui-Castérès
34 365° | n° 3 | Février 2009
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