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Adaptation de" Candide ou l'optimisme" de VoltairePour le Théâtre de la Bataille
Texte adapté par Odile GLINEL en 2014Cette pièce a été jouée la première fois par le Théâtre de la Bataille à
la Maison Jacques PREVERT de Dieppe le 31 janvier 2015
tableau 1................................................................................................................................................1tableau 2 en Hollande............................................................................................................................8Tableau 3..............................................................................................................................................13Tableau 4 Lisbonne...............................................................................................................................18Tableau 5 – retrouvailles cunégonde...................................................................................................22Tableau 6 cadix.....................................................................................................................................26TABLEAU 7 arrivée à Buenos Ayres......................................................................................................30Tableau 8 – avec le baron jésuite commandant...................................................................................32Tableau 9 en Amérique du sud.............................................................................................................37Tableau 10 martin et les français.........................................................................................................41Tableau 11 Venise................................................................................................................................45Tableau 12 – cacambo a venise............................................................................................................47Tableau 13 happy end..........................................................................................................................49
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TABLEAU 1 PRÉSENTATION VOLTAIRE ET PERSONNAGES
VoltairePoète, philosophe, et bien d’autres choses encore, je suis Voltaire !Depuis toujours j’écris.Ecrire, c’est combattre, écrire, c’est agir ! Là où d’autres sortent leur épée, moi je brandis ma plume – au risque d’être menacé par une épée !Je suis bien ici, loin de Paris, loin de cette basse-cour, loin de ce bourbier de l’esprit. Si j’oubliais le froid de loup de ces montagnes, je pourrais me croire au paradis.
Valet 1Et vous n'y êtes pas ? Qu'est-ce qui vous manque en Suisse ?
VoltaireEh bien, Paris, cette question ! Paris me manque, qu'est-ce que vous croyez ?Bref, je suis un philosophe, mais je veux que tout le monde me comprenne ! Je donne de la vie aux idées et pour cela, le théâtre est très bien. Mais que d’embarras pour le faire jouer ! Que de pièces refusées par ces comédiens prétentieux du Théâtre français !
Valet 1Écrivez autre chose !
Valet 2Changez de plume !
VoltaireC'est ça : je vais écrire un conte, une de ces histoires qu’on a envie d’écouter jusqu’au bout...
Valet 1Quel genre d’histoire ?
VoltaireL'histoire d'un jeune héros, comme moi juste avant mon arrivée au collège des jésuites. Un enfant curieux, plutôt gai, qui veut juste qu’on entende ses questions. Candide, voilà ce que j’étais : je croyais que toute chose avait une explication.
2
Valet 2Et ce n'est pas le cas ?
VoltaireJugez plutôt : Ma mère est morte alors que j’avais 7 ans... Cyniques, les jésuites ont entrepris de donner raison à Dieu qui m'avait enlevé ma mère. Pas étonnant qu’ils soient capables de torturer, de tuer, au nom de Dieu !
Valet 2Comment allez-vous raconter votre histoire ?
VoltaireJe vais écrire du sérieux sur le ton de la farce, farcir un texte léger d’idées, contre-idées, coïonnerie, folies... de quoi me rendre ma liberté ! J’ai 64 ans après tout, et j’ai toujours la même envie de travailler à ma guise, sans me soucier des pisse-froid de la cour...
Valet 1Comme si vous vous en souciez encore !
VoltaireJ’imagine une chronique de mon temps… Je vais donc façonner un héros à mon image.
Valet 1Votre image ?
VoltaireAh, évidemment, pas celle qu’ils ont tous de moi à Paris !
Valet 1Un vieux cynique impertinent qui ne recule devant aucune infamie pour divulguer ses idées...
Valet 2L’usurier des puissants de ce monde, d’où sa grande fortune !
VoltaireElle n’est que la garantie de mon indépendance !
Valet 1Quel nom pour votre héros ?
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VoltaireCandide, il est, Candide il se nommera.
Valet 2Et où allez-vous l'installer ?
VoltaireVoyons… Je vais le faire vivre en Prusse, dans un château J'ai du partir de ce pays en urgence, inquiété par le roi philosophe !, mon ami Fréderic II. Puisque les Français ont commencé à faire la guerre aux Prussiens, ils apprécieront !
Valet 1L’histoire jugera.
VoltaireLa Prusse, donc, ou plutôt la Westphalie, une région de Prusse. Donnons à ce héros une petite vingtaine d’années, une figure avenante, un esprit simple…
Valet 1D’autres héros dans ce conte ?
VoltaireAttendez ! Candide vit dans un château, tout juste toléré par le baron et la baronne de Thunder Ten Tronckh, importants personnages du fait de leurs 72 quartiers de noblesse.L’importance de la baronne est palpable, disons 200 livres voir 300 ou même 350 livres ?
Candide aime regarder Cunégonde, la fille du baron ; elle est grasse, fraîche, appétissante. Donnons, pour faire bonne mesure, un frère cul-pincé à cette mignonne et l’histoire pourra commencer. Sans oublier la servante Paquette
Ah j’oubliais ! Un château, des barons, des jeunes gens, il faut un philosophe ! Voyons… inspiré de Leibniz, appelons-le Pangloss ! Il est Spé-cia-liste de métaphysico-théologo-cosmolonigologie.
Pangloss :
Il est démontré que les choses ne peuvent être autrement car tout étant fait pour une fin….
Voltaire :
Ah, le voilà déjà qui parle, avant qu’on l’interroge ! Un philosophe, je vous dis !
Pangloss :
4
…..tout est nécessairement fait pour la meilleure fin. Remarquez bien que les nez ont été faits pour porter des lunettes, aussi avons-nous des lunettes. Les pierres ont été formées pour être taillées pour en faire des châteaux, aussi monseigneur a –t-il un très beau château : par conséquent, ceux qui ont avancé que tout est bien ont dit une sottise ; il fallait dire que tout est au mieux.
Voltaire
attention : OUISTITI"
Candide écoutait attentivement et croyait innocemment: car il trouvait mademoiselle Cunégonde extrêmement belle, quoi qu'il ne prit jamais la hardiesse de lui dire. Il concluait qu'après le bonheur d'être baron de Tunder Ten Tronkh, le second degré de bonheur était d'être Mademoiselle Cunégonde, le troisième, de la voir tous les jours et le quatrième d'entendre Maitre Pangloss, le plus grand philosophe de la province et par conséquent de toute la terre.
Évidemment, ce bonheur d’enfant ne va pas durer, c’est trop beau !
Voltaire
Un jour, Cunégonde, en se promenant auprès du château, dans le parc, aperçut le docteur Pangloss qui donnait une leçon de physique expérimentale à Paquette, petite femme de chambre brune très jolie et très docile. Comme Mlle Cunégonde avait beaucoup de dispositions pour les sciences, elle observa, sans souffler, les expériences réitérées dont elle fut témoin ; elle vit clairement la raison suffisante du docteur, les effets et les causes,
Cunégonde :
Je vois clairement la raison suffisante de Maitre Pangloss, les raisons et les causes. J’aimerais être aussi savante, c’est pourquoi je dois vérifier scientifiquement si je peux être la raison suffisante de Candide… qui pourrait bien également être la mienne !
Voltaire
Elle rencontra Candide en revenant au château, elle rougit ; Candide rougit aussi.
Cunégonde
Bon…jour Can...dide
Candide
Beuh – bêêêê heu...
Voltaire
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Cunégonde laissa tomber son mouchoir, Candide le ramassa, elle lui prit la main, le jeune homme baisa la main de la jeune demoiselle; leurs bouches se rencontrèrent, leurs yeux s'enflammèrent, leurs genoux tremblèrent, leurs mains s'égarèrent.
M. le baron de Thunder-ten-tronckh passa auprès du paravent, et voyant cette cause et cet effet, chassa Candide du château à grands coups de pied dans le derrière ; Cunégonde fut souffletée par madame la baronne et tout fut consterné dans le plus beau et le plus agréable des châteaux.
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TABLEAU 2 EN HOLLANDEVoltaire
Bon, c’est fait. Voilà Candide chassé du paradis. Pour la première fois de sa vie il se retrouve sans souper, sans lit, sans personne au monde. Il marche longtemps, il pleure, il arrive à la ville voisine… donnons un joli nom à cette ville : ce sera Valdberghoff-trarbk-dikdorff. J’ai dit. C’est moi l’auteur, ou pas ?
Candide
Bon ça va, ça va !
Voltaire
Alors la scène se passe en Hollande, une guerre plus tard… dans un cabaret
Soldat
Je me souviens, la fois où on a enrôlé un imbécile dans une ville de Westphalie, …
Prostituée
Ah oui quelle ville?
Soldat
Valdberghoff-trarbk-dikdorff ! C’est vrai ! Je ne sais pas d’où il sortait, mais il n’a pas fallu deux verres de vin pour qu’il soit prêt à signer son engagement…
Prostituée
Penses-tu qu’il est toujours vivant?
Soldat
Ça m’étonnerait ! Il ne connaissait rien à rien
Prostituée
Et comment il s'appelait ton soldat de pacotille?
Soldat
Candide !
Candide
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On m’appelle ? Ah ! Vous, ici, en Hollande ? Alors tout est pour le mieux, maître Pangloss avait raison !
Prostituée
C'est lui candide?
Soldat
Oui c'est lui
Prostituée
Tu n'es pas mort ! Raconte-nous donc comment tu t’es sorti de cette guerre…
Candide
Oh, j’ai bien failli mourir avant même de la faire !
Je savais déjà hausser la baguette, baisser la baguette, tourner à droite, à gauche, doubler le pas, me coucher en joue, tirer sans plus recevoir aucun coup de bâton de mes supérieurs. Je sentais qu’un peu de solitude me ferait du bien. Comme me l’a enseigné mon bon maître Pangloss, je pensais que les jambes sont faites pour marcher librement. C’est pourquoi je m’étais un peu éloigné du régiment.
Très vite, quatre soldats me rattrapent, m’attachent et me mènent dans un cachot. On me demande alors ce que je préfère : être fouetté par tout le régiment, ou recevoir douze balles de plomb dans la cervelle. J’ai beau dire que ma libre volonté ne veut ni l'un ni l'autre, j’ai bien dû choisir…
Prostituée
Et t'as choisi les baguettes ?
Candide
Eh oui ! En vertu du don de Dieu qu'on nomme liberté, j’ai choisi de passer par les baguettes...
Après trois mille coups de baguette, je n’avais plus de peau depuis la nuque du cou jusqu'au cul. Je n’en pouvais plus, j’ai demandé qu’on ait la bonté de me casser la tête, pour en finir.
C’est alors que le roi des Bulgares est passé et s’est informé de mon crime ; il a vite compris que j’étais un jeune métaphysicien, fort ignorant des choses de ce monde. Il m’a donc accordé sa grâce. Un brave chirurgien m’a guéri en trois semaines.
Voltaire
Trois semaines, oui c’est ce qu’il faut pour guérir un dos cassé par les coups… j’en sais quelque chose, moi qui me suis fait rosser plus d’une fois par les domestiques de prétendus aristocrates.
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Candide (suite)
J’avais déjà un peu de peau et je pouvais marcher, quand le roi des Bulgares a livré bataille au roi des Abares.
Soldat
Ah oui, cette bataille là je l'ai vue.
Rien n'était si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux armées. Les trompettes, les fifres, les hautbois, les tambours, les canons, formaient une harmonie telle qu'il n'y en eut jamais en enfer.
Soldat
Les canons ont d’abord renversé à peu près six mille hommes de chaque côté ! Magnifique !
Prostituée
Et les mousquets ?
Soldat
Oui, les mousquets : 10 000 coquins y sont passés.
Prostituée
Et les baïonnettes ?
Soldat
Ah oui, les baïonnettes ! Encore quelques milliers d'hommes étendus pour faire le compte.
Candide
J’ai entendu dire que ce jour-là, au moins trente mille âmes y étaient restées ! Si ce monde-là est le meilleur des mondes possibles, comment sont les autres, je vous le demande ?
Prostituée
Et toi le métaphysicien, comment as-tu fait pour en réchapper ?
Candide
Oh c’est facile : j’avais tellement peur que je me suis caché dans un repli de terrain, d’où je n’ai pas bougé de toute la bataille
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Voltaire
Il tremblait comme un philosophe ! S’il n’est pas raisonnablement poltron, le philosophe s’expose aux pires désagréments !
Prostituée
Alors tu n’as rien vu ?
Candide
De la bataille, non. J’ai vu bien des horreurs, mais je n’ai fait qu’entendre la bataille. Et je me suis éclipsé pendant les Te deum
Voltaire
Les rois des deux côtés sont toujours contents de remercier Dieu pour la victoire.
Candide
En me relevant, je pris le parti d'aller raisonner ailleurs des effets et des causes. Je suis passé pendant des jours et des jours par-dessus des tas de morts et de mourants, traversant des villages en cendres : ici un village abare, là un village bulgare brûlé tous les deux selon les lois du droit public. Ici des vieillards criblés de coups regardaient mourir leurs femmes égorgées, tenant leurs enfants à leurs mamelles sanglantes ; là des filles éventrées après avoir assouvi les besoins naturels de quelques héros rendaient les derniers soupirs. C’est ainsi que, toujours marchant sur des membres palpitants ou à travers des ruines, je suis arrivé en Hollande où on m’avait dit que tout le monde était riche. Et je vous retrouve ! N’était Melle Cunégonde, dont je n’ai aucune nouvelle et mon bissac où je n’ai plus rien à manger, je trouverais que tout est au mieux !
TABLEAU 3
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Inquisiteur
La charité, la belle vertu ! Soyons charitables, faisons la charité !
Candide
Je n’ai rien à manger, je suis un soldat sans régiment, un philosophe sans maître, un amoureux sans belle…
Inquisiteur
Que venez-vous faire ici ? Y êtes-vous pour la bonne cause ?
Candide
Il n'y a point d'effet sans cause, tout est enchaîné et arrangé pour le mieux.
Inquisiteur
Mon ami, croyez-vous que le pape soit l'Antéchrist ?
Candide
Je ne l'avais pas encore entendu dire; mais je manque de pain.
Inquisiteur
Tu ne mérites pas d'en manger, va, coquin, va, misérable, ne m'approche plus de ta vie.
Voltaire
Mon héros est en bien mauvaise posture ! Sans pain, sans argent, sans Cunégonde, il va falloir l’aider un peu… il aurait besoin d’un bon génie, voyons ? Qui serait capable d’aider mon héros ? Je ne veux pas qu’il perde toute sa candeur en une seule fois ! Rescapé de la guerre, je ne peux le bloquer en Hollande comme je l’ai été à 19 ans, par la volonté de mon grondeur de père ?
En Hollande, justement, je connais une secte d’aimables personnes : ils attendent l’âge adulte pour être baptisés ; et même sans baptême, ils ne manquent pas d’humanité ! Ce sera donc Jacques, l’anabaptiste.
Jacques : (à part)
C’est pourtant un être à deux pieds, sans plumes, doté d’une âme ; quelle misère de le malmener ! Tiens mon ami ! Sans doute une histoire de fanatisme ordinaire
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Candide
Maître Pangloss m'avait bien dit que tout est au mieux dans ce monde...
Je peux travailler, pour peu que l’on me fasse confiance. Mais je suis bien fâché d’en être réduit à mendier mon pain, comme ce pauvre miséreux.
Pangloss
Hélas ! Ne reconnaissez-vous plus votre cher Pangloss ?
Candide
Vous, mon cher maître ! Vous, dans cet état horrible ! Que vous est-il arrivé ? Pourquoi n'êtes-vous plus dans le plus beau des châteaux ? Qu'est devenue Mlle Cunégonde, ce chef-d'œuvre de la nature ?
Pangloss
Elle est morte
Candide
Cunégonde est morte !
Ah ! Mais de quelle maladie est-elle morte ? Serait-ce de m'avoir vu chasser du château à grands coups de pied dans le derrière ?
Pangloss :
Elle a été éventrée par des soldats bulgares, après avoir été violée autant qu'on peut l'être ; son frère a été traité précisément comme sa sœur ; ils ont cassé la tête à monsieur le baron et madame la baronne a été coupée en morceaux ; et du château, il n'en est rien resté, pas un mouton, pas un canard ; mais nous avons été bien vengés, car les Abares en ont fait autant dans une baronnie bulgare.
Candide:
Mais quelle raison suffisante vous a mis dans un si piteux état ?
Pangloss
Hélas ! C’est l'amour ; l'amour, le consolateur du genre humain, le tendre amour.
Candide
Ha !, je l'ai connu, cet amour ; il m'a valu un baiser et vingt coups de pied au cul. Comment cette belle cause a-t-elle pu produire un si abominable effet sur vous ?
Pangloss
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O mon cher Candide ! Vous avez connu Paquette, cette jolie suivante de notre auguste baronne ; j'ai goûté dans ses bras les délices du paradis, qui ont produit ces tourments d'enfer dont vous me voyez dévoré. Paquette était infestée d’une maladie qu’elle tenait d'un cordelier très savant, qui l'avait eue d'une vieille comtesse, qui la tenait d'un page, qui l'avait reçue d'un jésuite, qui, étant novice, l'avait eue en droite ligne d'un des compagnons de Christophe Colomb. Pour moi, je ne la donnerai à personne, car je me meurs.
Candide :
Ô Pangloss ! Quelle étrange généalogie ! N’est-ce pas le diable qui en fut la souche ?
Pangloss
Point du tout, c'était une chose indispensable car si Colomb n'avait pas attrapé cette maladie dans une île de l'Amérique, nous n'aurions ni le chocolat ni la cochenille.
Candide
Voilà qui est admirable... mais il faut vous faire guérir.
Pangloss
Et comment le puis- je ? Je n'ai pas le sou, mon ami ; et nulle part on ne peut se faire saigner ou prendre un lavement sans payer.
Voltaire
Je reçois aujourd’hui des nouvelles de Paris ; Jean-Jacques Rousseau n’a pas apprécié mon poème sur le tremblement de terre de Lisbonne… il faudra donc que Candide aille voir ce que vivent les hommes quand la terre tremble. Un peu de souffrance pour Candide sera plus frappant que trois mille vers pour que Mossieu Rousseau comprenne enfin ma pensée !
Jacques l’anabaptiste
Je suis obligé d'aller à Lisbonne pour les affaires de mon commerce,
Nous allons nous y rendre tous ensemble, nous pourrons ainsi continuer à travailler en chemin.
Cap sur Lisbonne
Cap sur Lisbonne !
Pangloss
Tout est on ne peut mieux, vous ne pouvez le nier : nous voguons sur un bateau, fabriqué par la raison que la mer est profonde et que pour s’y déplacer il n’est point de routes. Tout est pour le mieux.
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Jacques
Je ne suis pas d’accord avec vous ! Il faut bien que les hommes aient un peu corrompu la nature, car ils ne sont point nés loups, et ils sont devenus loups. Dieu ne leur a donné ni canon ni baïonnettes, et ils se sont fait des baïonnettes et des canons. On oublie trop souvent que la Nature avait fait de nous des êtres bons et sensibles.
Voltaire
Est-ce assez comprendre ta philosophie, Mossieur Rousseau ?
L'anabaptiste Jacques
Le vent se lève, la tempête n’est pas loin, aidons les matelots qui ne suffisent plus à la tâche ! Allons, halez ce cordage ! Ho hisse !
Quelqu’un
Han
Candide
Hisse Etc…
L'anabaptiste (tombant à l’eau)
Au secours ! Je me noie !
Candide :
Regardez, notre bienfaiteur se noie ! Je vais aller le secourir !
Pangloss :
N’en faites rien ! Vous voyez bien que la rade de Lisbonne a été formée exprès pour que cet anabaptiste s'y noyât ! Car les malheurs particuliers font le bien général, de sorte que plus il y a de malheurs particuliers, plus tout est bien.
Voltaire
Le nez dans le ruisseau, c’est la faute à?
Tout le monde chante
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TABLEAU 4 LISBONNE
Voltaire
En direct de Lisbonne. De source sûre, un terrible tremblement de terre aurait ébranlé la ville. De l'hôtel où je me trouve, j'ai ressenti une la secousse fortement et j'ai entendu la vaisselle tinter dans les placards. Des témoins oculaires me rapportent que le port ainsi que le centre ville seraient dévastés; les maisons s'écrouleraient par milliers, jetant à la rue des dizaines de milliers de personnes: on m'apprend aussi qu'une immense vague aurait dévasté le port et recouvert le centre ville, noyant irrémédiablement ceux qui vivaient encore après l'écroulement des maisons
Candide :
Voici le dernier jour du monde ! Je suis blessé, je vais mourir ! Pangloss ! Procure-moi un peu de vin et d'huile ; je me meurs et veux le faire en chrétien.
Voltaire
Un expert va maintenant nous éclairer sur les raisons de cette catastrophe
Pangloss
Ce tremblement de terre n'est pas une chose nouvelle; la ville de Lima en Amérique éprouva les mêmes secousses l'année passée ; mêmes causes, mêmes effets : il y a certainement une traînée de soufre sous terre depuis Lima jusqu'à Lisbonne.
Candide
Rien n'est plus probable ; mais, pour Dieu, un peu d'huile et de vin, je me meurs
Pangloss
Comment, probable ? Je soutiens que la chose est démontrée.
Candide
Je te dis que je me meurs !
Pangloss
Tout est au mieux. Car, s'il y a un volcan à Lisbonne, il ne pouvait être ailleurs. Car il est impossible que les choses ne soient pas où elles sont. Car tout est bien.
Voltaire
Commence à m’énerver celui-là ! Je m’en vais lui clouer le bec, à ce pseudo-Leibniz, philosophe de malheur !
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Inquisiteur
Apparemment, monsieur ne croit pas au péché originel ; si tout est au mieux, il n'y a donc eu ni chute ni punition.
Pangloss
Je demande très humblement pardon à Votre Excellence, car la chute de l'homme et la malédiction entrent nécessairement dans le meilleur des mondes possibles.
Inquisiteur
Monsieur ne croit donc pas à la liberté ?
Pangloss
Votre Excellence m'excusera, la liberté peut subsister car il était nécessaire que nous fussions libres ; car enfin...
garde champêtre
Afin d’empêcher la terre de trembler, l’université de Coïmbre a décrété que quelques personnes allaient être brûlées à petit feu ! On en fessera publiquement quelques autres… Qu’on se saisisse des coupables !
Voltaire
Moi qui ai inventé tant de théâtre, je vais me réjouir à mettre en scène une des sinistres farces de l’inquisition… alors voyons… Revêtez-les d'un san-benito, ornez leurs têtes de mitres de papier : Pour Candide, une mitre avec diables sans queues ni griffes ; mais avec griffes et queues pour Pangloss, qui va mourir
Inquisiteur
Fessez-moi ce Candide en cadence !,
Inquisiteur
Qu’on brûle ces deux hommes qui n'ont point voulu manger de lard. Et le philosophe Pangloss, pendez-le donc !
Voltaire
Candide a donc été dûment prêché, fessé, absous et béni et…
Le même jour la terre tremble de nouveau avec un fracas épouvantable.
16
Candide :
Si c'est ici le meilleur des mondes possibles, que sont donc les autres ? Passe encore si je n'étais que fessé ! Mais voilà mon cher Pangloss pendu, voilà Jacques, mon cher anabaptiste, noyé et vous voilà, ma chère Cunégonde, avec le ventre fendu !
Une vieille
Mon fils, prenez courage, suivez-moi.
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TABLEAU 5 – RETROUVAILLES CUNÉGONDE
La vieille
Ôtez ce voile
Cunégonde
Bon… jour Can... dide
Candide
C’est vous, vous vivez ! En Portugal ! On ne vous a donc pas violée ? On ne vous a point fendu le ventre, comme le philosophe Pangloss me l'avait assuré ?
Cunégonde
Si fait, mais on ne meurt pas toujours de ces deux accidents.
Candide
Mais votre père et votre mère ont-ils été tués ?
Cunégonde
Il n'est que trop vrai...
Candide
Et votre frère ?
Cunégonde
Mon frère a été tué aussi.
Candide
Et pourquoi êtes-vous ici, en Portugal ?
Cunégonde
Vous savez déjà que les Bulgares ont attaqué notre beau château de Thunder-ten-tronckh. Ils ont égorgé mon père et mon frère et coupé ma mère par morceaux. Voyant qu'à ce spectacle j'avais perdu connaissance, un grand Bulgare se mit à me violer ; cela me fit revenir, je criai, je me débattis, je voulais lui arracher les yeux. Le brutal me donna un coup de couteau dans le flanc gauche dont je porte encore la marque.
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Candide
- Hélas ! J’espère bien la voir,
Cunégonde
- Vous la verrez...
Candide
Continuez !
Cunégonde
Un capitaine bulgare entra, tua le brutal sur mon corps, et m'emmena prisonnière. Je blanchissais ses chemises, faisais sa cuisine ; il me trouvait fort jolie ; il avait la peau blanche et douce. Au bout de trois mois il avait perdu tout son argent et il me vendit à un Juif nommé don Issacar, qui s'attacha beaucoup à ma personne, mais je lui ai mieux résisté qu'au soldat bulgare. Le Juif me mena ici pour m'apprivoiser.
Un jour à la messe, le grand inquisiteur m'aperçut et voulut me parler. Quand je lui appris ma naissance, il m’expliqua qu’il était au-dessous de mon rang d'appartenir à un Juif. On proposa à don Issacar de me céder au grand inquisiteur. Don Issacar, qui est le banquier de la cour, conclut un marché, par lequel la maison et moi leur appartiendraient à tous deux en commun : que le Juif aurait pour lui les lundis, mercredis et le jour du sabbat, et que l'inquisiteur aurait les autres jours de la semaine. Il y a six mois que cette convention subsiste. Pour moi, j'ai résisté jusqu'à présent à tous les deux.
Candide
Ah !
Cunégonde
Enfin, il plut à monsieur l'inquisiteur de célébrer un auto-da-fé et de m'y inviter. Je fus très bien placée ; on servit aux dames des rafraîchissements entre la messe et l'exécution. Mais quelle fut ma surprise de voir la figure de Pangloss ! puis je vous vis, tout nu. Votre peau est encore plus blanche
plus parfaite que celle de mon Bulgare. Quand vous eûtes été bien fessé, je recommandai à ma vieille d'avoir soin de vous. Elle a très bien exécuté sa mission ; et je goûte le plaisir de vous revoir, de vous entendre, de vous parler.
Don Issacar
Quoi ! Chienne de Galiléenne, ce n'est pas assez de monsieur l'inquisiteur ? Il faut que ce coquin partage aussi avec moi ?
Cunégonde
Sainte Vierge ! Qu’allons-nous devenir ? Un homme tué chez moi ! Si la justice vient, nous sommes perdus.
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Candide
Si Pangloss n'avait pas été pendu, il nous donnerait un bon conseil car c'était un grand philosophe.
L’inquisiteur
Il est plus de minuit, c’est mon tour ! … oh !
Cunégonde
En voici bien d'une autre, il n'y a plus de rémission ; notre dernière heure est venue. Comment avez-vous fait, vous qui êtes né si doux, pour tuer en deux minutes un Juif et un prélat ?
Candide
Ma belle demoiselle, quand on est amoureux, jaloux et fouetté par l'Inquisition, on ne se connaît plus.
La vieille
Il y a trois chevaux dans l'écurie : que Candide les prépare ; montons vite à cheval, quoique je ne puisse me tenir que sur une fesse. Voyageons pendant la fraîcheur de la nuit jusqu’au port de Cadix.
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TABLEAU 6 CADIXVoltaire
Cadix… c’est de là que sont partis les Espagnols, faire la guerre aux jésuites régnant au Paraguay. J’ai d’ailleurs moi-même financé l’an dernier un de leurs vaisseaux…
Quand il s’agit de lutter contre les jésuites, je réponds présent, évidemment ! Candide peut bien monter à bord du Pascal, puisque ce bateau m’appartient !
La vieille
Mon général, cet homme connaît l’exercice à la bulgare, il pourra tout à fait vous commander une compagnie !
Voltaire
Eh bien te voilà capitaine ! Embarque sans attendre !
Candide
Nous allons dans un autre univers, c'est sans doute dans celui-là que tout est bien.
Cap vers un autre univers!
Cunégonde
Je vous aime de tout mon cœur, Candide, mais j'ai encore l'âme tout effarouchée de ce que j'ai vu, de ce que j'ai éprouvé.
Candide
Tout ira bien ! La mer de ce nouveau monde vaut déjà mieux que les mers de notre Europe ; elle est plus calme, les vents plus constants. C'est certainement le nouveau monde qui est le meilleur des univers possibles.
Cunégonde
Dieu le veuille ! Mais j'ai été si horriblement malheureuse dans le mien que mon cœur est presque fermé à l'espérance.
La vieille
Vous vous plaignez, hélas ! Vous n'avez pas éprouvé des infortunes telles que les miennes.
Cunégonde
Hélas ! Ma bonne, en malheurs, vous ne pourrez l'emporter sur moi, qui suis née baronne avec soixante et douze quartiers.
La vieille
Mademoiselle, vous ne savez pas quelle est ma naissance ; et si je vous montrais mon derrière, vous ne parleriez pas comme vous faites.
21
Je suis la fille du pape Urbain X, élevée dans un palais merveilleux. J’étais d’une beauté incomparable... ma gorge était blanche, ferme, taillée comme celle de la Vénus de Médicis.
Je fus fiancée à un prince, aussi beau que moi. Je l'aimais comme on aime pour la première fois. On allait célébrer les noces quand une vieille marquise qui avait été sa maîtresse l'invita à prendre du chocolat chez elle et le fit mourir en moins de deux heures.
Ma mère, au désespoir, voulut nous éloigner de cette ville. Nous nous embarquâmes.
Voilà qu'un bateau corsaire nous aborde. Nos soldats se mettent tous à genoux en jetant leurs armes, en bons soldats du pape.
Aussitôt on nous dépouille, nous étions tous nus comme des singes. Pour moi, j'étais ravissante et j'étais pucelle ; je ne le suis pas restée longtemps.
Mais passons.
Nous abordâmes au Maroc, où cinquante fils de l'empereur Muley - Ismaël se battaient ; ça faisait cinquante guerres civiles, un carnage continuel dans tout l'empire.
Je vis ma mère déchirée, coupée en morceaux. Tout le monde fut tué et je demeurai mourante sur un tas de morts. Tout cela, sans qu'on manquât aux cinq prières par jour ordonnées par Mahomet.
Quelque temps plus tard je suis vendue comme esclave à Alger, puis à Tunis, et revendue à Tripoli, à Alexandrie, puis à Smyrne, et ensuite à Constantinople. Un janissaire m’emmène à la fin dans la ville d’Azof assiégée par les Russes. Au bout de quelques jours, les janissaires sont affamés et ils décident de manger les femmes.
Un imam très pieux leur dit alors « Coupez seulement une fesse à chacune des dames, vous ferez très bonne chère ; vous en aurez encore autant dans quelques jours. »
Les Janissaires ont à peine terminé ce ragoût de fesses que les Russes arrivent ; pas un janissaire n’en réchappe.
Moi, je m'enfuis ; j’ai longtemps été servante de cabaret à Riga et dans d’autres villes : j'ai vieilli dans la misère, avec la moitié de mon derrière, me souvenant toujours que j'étais fille d'un pape.
J'ai fini par être servante chez don Issacar ; il me mit auprès de vous, ma belle demoiselle ; dès lors, j'ai été plus occupée de vos aventures que des miennes. Je ne vous aurais même jamais parlé de mes malheurs s'il n'était d'usage dans un vaisseau de conter des histoires pour se désennuyer.
Cunégonde
Quelle histoire ! La fille du pape ! Je vous suis très obligée de me soutenir dans les épreuves que je traverse.
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TABLEAU 7 ARRIVÉE À BUENOS AYRES
Candide
Nous voici arrivés dans le port de Buenos Ayres !
Allons voir les autorités !
Garde champêtre
Place au gouverneur Don Fernando d’Ibaraa, y Figueora, y Mascarenes, y Lampourdos, y Souza.
Le gouverneur
Cette bonitissima dama est-elle votre épouse ?
Candide
Mlle Cunégonde doit m’épouser, et nous supplions Votre Excellence de daigner célébrer notre noce
Le gouverneur
Allez rrrapidamente faire la rrrevue de votrre compagnie !
Le gouverneur, à Cunégonde
Dès que je vous ai vue, mon âme s’est enflammée.
Tango
Dès demain, je vous épouserai, à la face de l’Église, ou autrement si vous préférez.
Tango
Cunégonde
Accordez-moi seulement un quart d’heure pour me recueillir
Que vous en semble à vous, qui êtes fille de pape et avez de l’expérience ?
La vieille
Mademoiselle, vous n’avez pas un sou ; il ne tient qu’à vous d’être la femme du plus grand seigneur de l’Amérique méridionale qui a une très belle moustache. J’avoue que, si j’étais à votre place, je n’hésiterais pas à épouser monsieur le gouverneur.
Candide,
Un vaisseau vient d’arriver de Cadix, un vaisseau du roi d’Espagne, on le dit à ma recherche ! La mort de l’inquisiteur et de don Issacar sont déjà connues, et on veut me ramener en Espagne pour m’y pendre !
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La vieille
Fuyez, ou dans une heure vous allez être capturé
Voltaire
Je te donne un valet, Cacambo. Il est Espagnol pour un quart, né d'un métis dans le Tucuman, il a été enfant de chœur, sacristain, matelot, moine, facteur, soldat, laquais... enfin, il sait tout faire !
Voilà un homme qu’on aimerait avoir pour secrétaire ! Il ne lui manque que la philosophie !
La vieille
Vous n'avez rien à craindre, ce n'est pas vous qui avez tué ; d'ailleurs, le gouverneur, qui vous aime, ne souffrira pas qu'on vous maltraite ; demeurez ici sans bouger.
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TABLEAU 8 – AVEC LE COLONEL BARON JÉSUITE
Candide
O ma chère Cunégonde ! Faut-il vous abandonner alors que monsieur le gouverneur va faire nos noces ! Cunégonde, que deviendrez-vous ? –
Cacambo
Elle deviendra ce qu'elle pourra ; les femmes ne sont jamais embarrassées d'elles-mêmes, Dieu y pourvoit. Courons.
Candide
Où me mènes-tu ? Où allons-nous ? Que ferons-nous sans Cunégonde ?
Cacambo
Par saint Jacques de Compostelle, vous alliez faire la guerre contre les jésuites ? allons la faire pour eux. Ils seront charmés d'avoir un capitaine qui fasse l'exercice à la bulgare . Allez mon maître, en route pour le Paraguay !
Candide
Tu connais donc le Paraguay ?
Cacambo
Eh vraiment oui ! C'est une chose admirable que cet état. Les pères jésuites y possèdent tout, et les peuples rien ; c'est le chef-d’œuvre de la raison et de la justice.
Cacambo
Monsieur le révérend-père jésuite cet homme est allemand et comme moi, il meurt de faim.
Colonel Jésuite
Vous êtes donc allemand ?
Candide
Oui, mon Révérend Père
Colonel jésuite
Et de quel pays d'Allemagne êtes-vous ?
Candide
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De la province de Westphalie : je suis né dans le château de Thunder-ten-tronckh.
Colonel jésuite
Ô ciel ! Est-il possible ?
Candide
Quel miracle !
Colonel jésuite
Serait-ce vous ?
Candide
Quoi ! Serait-ce vous, le frère de Cunégonde ! Vous, jésuite au Paraguay !
Colonel jésuite
Grâces à Dieu, à saint Ignace mille fois !!!
Candide
Vous seriez bien plus étonné si je vous disais que Mlle Cunégonde, votre sœur est pleine de santé.
Colonel jésuite
Où cela ?
Candide
Dans votre voisinage, chez M. le gouverneur de Buenos-Aires ; et moi, qui venait pour vous faire la guerre.
Colonel jésuite
Je suis par une succession d’aventures peu communes devenu ici au Paraguay prêtre en même temps que colonel. Nous allons vivement excommunier et exterminer les troupes du roi d'Espagne qui arrivent en Paraguay. C’est la Providence qui vous envoie pour nous seconder, mon frère, mon sauveur ! Mais est-il bien vrai que ma chère sœur Cunégonde soit dans le voisinage, chez le gouverneur de Buenos-Aires ?
Candide
Je vous jure que c’est là que je l’ai laissée, rien n’est plus vrai !
Colonel jésuite
Ah ! Peut-être pourrons-nous entrer ensemble en vainqueurs dans la ville et reprendre ma sœur Cunégonde.
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Candide
C'est tout ce que je souhaite, car je comptais l'épouser, et je l'espère encore.
Colonel jésuite
Vous, insolent ! Vous auriez l'impudence d'épouser ma sœur qui a soixante et douze quartiers ! Petit effronté !
Candide
Mon Révérend Père, tous les quartiers du monde n'y font rien ; j'ai tiré votre sœur des bras d'un Juif et d'un inquisiteur ; par ailleurs, elle veut m'épouser. Maître Pangloss m'a toujours dit que les hommes sont égaux, et assurément je l'épouserai.
Colonel jésuite
C'est ce que nous verrons, coquin !
Candide,
Hélas ! Mon Dieu, j'ai tué mon ami ; je suis le meilleur homme du monde, et voilà déjà trois hommes que je tue, parmi lesquels deux prêtres.
Voltaire
Ce baron confit dans le respect d’ancêtres prétendument nobles commençait à m’échauffer les oreilles avec ses quartiers de noblesse !
Cacambo
Malheur, qu’avez-vous fait ?
Candide
Il ne nous reste qu'à vendre cher notre vie : il faut mourir les armes à la main.
Cacambo
Laissez-moi faire
Cacambo, prend la robe de jésuite que portait le baron, la met sur le corps de Candide
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TABLEAU 9 EN AMÉRIQUE DU SUD
Cacambo
Vous voyez que cet hémisphère-ci ne vaut pas mieux que l'autre : retournons en Europe par le plus court chemin.
Galopons, mon maître ; tout le monde vous prendra pour un jesuite qui va donner des ordres ; et nous aurons passé les frontières avant qu'on puisse courir après nous.
Place, place pour le révérend père jésuite.
Candide
Comment y retourner ? Et où aller ? Dans mon pays, les Bulgares et les Abares égorgent tout ; si je retourne en Portugal, j'y suis brûlé ; si nous restons dans ce pays-ci, nous risquons à tout moment d'être mis en broche. Et comment se résoudre à quitter la partie du monde que Mlle Cunégonde habite ?
Candide
Eh, mon Dieu ! Que fais- tu là, mon ami, dans l'état horrible où je te vois ?
Le nègre
J'attends mon maître, M. Vanderdendur, le fameux négociant armateur.
Candide
Est-ce M. Vanderdendur qui t'a traité ainsi ?
Le nègre
Oui, monsieur, c'est l'usage. Quand nous travaillons aux sucreries, et que la meule nous attrape le doigt, on nous coupe la main ; quand nous voulons nous enfuir, on nous coupe la jambe : je me suis trouvé dans les deux cas. Et c'est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe.
Voltaire
Candide continue ses aventures échevelées, en quête de Cunégonde et du meilleur des mondes. En fuite de chez les jésuites du Paraguay, il cherche un bateau pour le ramener en Europe.
Mon pauvre héros n’a pas encore appris à se taire et raconte à qui veut l’entendre ses aventures, bonnes et mauvaises fortunes.
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Dans un cabaret, il tombe sur l’armateur hollandais, m. Vanderdendur, qui s’apprête à appareiller pour Venise. Cet armateur s’intéresse au récit du voyage de Candide en Eldorado, pays qui ressemble furieusement au meilleur des mondes!
CandideAlors qu’avec mon valet, nous voulions nous diriger vers Cayenne, un passage secret entre deux murailles de rochers nous a conduits tout droit vers un pays d'une richesse extraordinaire, l’Eldorado, ancienne patrie des Incas. C’est un lieu où tout le monde est heureux, où n’existe ni cour de justice ni prison, puisque tout le monde a ce qu’il lui faut... Où chacun est libre de remercier Dieu comme il l’entend...J’ai vu là-bas des enfants jouer au palet avec des rubis, des émeraudes et de l’or comme si c’étaient de vulgaires cailloux.
m. Vanderdendur Vous en avez sur vous, vous en avez rapporté ?
CandideOui, ils nous ont laissés nous servir autant que nous le voulions… Nous en possédions, en partant de ce pays...
m. VanderdendurComment ça, vous n’en avez plus ? Passez votre chemin, monsieur – vous me faites perdre mon temps !
CandideNous en avions beaucoup plus, il me reste cependant plus de trésors que n'en aura jamais le roi d'Espagne…
m. VanderdendurContinuez, continuez, je vous entends bien ! L’or, les rubis, où sont-ils ?
Candide
Ah ça, mais rien d’autre que l’or ne vous intéresse donc ? A quoi bon vivre si on ne s’intéresse pas au monde où l’on vit ?
Combien voulez-vous, pour me mener en droiture à Venise, moi et mon bagage ?
Vanderdendur
Dix mille piastres.
Candide
D’accord !
Vanderdendur
Oh ! Oh ! Cet étranger donne dix mille piastres tout d'un coup ! Il faut qu'il soit bien riche.
Je ne peux en réalité vous emmener à moins de vingt mille.
Candide
Eh bien ! Vous les aurez
Vanderdendur
Ouais ! vingt mille piastres aussi aisément que dix mille.
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En vérité, pas moins de trente mille piastres pour aller à Venise.
Candide
« Vous en aurez donc trente mille »
Vanderdendur
Oh ! oh ! trente mille piastres ne coûtent rien à cet homme-ci ; faisons-nous d'abord payer les trente mille piastres, et puis nous verrons.
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TABLEAU 10 MARTIN ET LES FRANÇAIS
Voltaire
J’en ai assez de la naïveté de mon pauvre Candide ! Depuis que son ange gardien Cacambo est parti, chargé d’or et de diamants, chercher Cunégonde, il a du mal à survivre.
Je vais lui donner un ami philosophe, un coach comme on dit maintenant ! De mes deux années d’exil en Angleterre, il me reste quelques mots de bon anglais, faut pas croire ! Bref, il faudrait à Candide un de ces philosophes qui ont mis les théories à l’épreuve de la vie, un homme d’expérience… quelqu’un comme moi, quoi !
Candide
Je viens de trouver un vaisseau français sur le point de partir pour Bordeaux, j’y ai loué une place au juste prix. Mais je cherche un honnête homme pour m’accompagner… un ami, quelqu’un qui ait des malheurs à raconter pendant le voyage… tant qu’à faire, je le voudrais plutôt dégoûté de la vie.
Voltaire
Alors, montrez-vous un peu tous… qui a le plus de malheurs à raconter à M. Candide ? Poussez pas, on écoutera tout le monde ! Toi là-bas, montre-toi, on dirait que tu me ressembles un peu ? Ah non, pas assez vieux ! Toi, quel est ton malheur ?
Martin
J’ai travaillé pour des libraires hollandais !
Voltaire
Comme je te comprends ! Tous des filous !
Martin
Pourchassé par les souverains de toute l'Europe, par les Jésuites et par l'Eglise toute entière, par les Jansénistes de Suisse et les calvinistes de Prusse... Je suis l'homme qu'il te faut, mon cher Candide !
Candide
J’espère que vos malheurs me désennuieront pendant le voyage.
Cap sur le port de Dieppe
Martin
Je l’espère aussi. La vérité est que je suis manichéen.
Candide
Vous vous moquez de moi, il n'y a plus de manichéens dans le monde.
Martin
Je ne peux penser autrement.
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Candide
Il faut que vous ayez le diable au corps,
Martin
Le diable se mêle si fort des affaires de ce monde qu'il pourrait bien être dans mon corps, comme partout ailleurs. En réalité, j'en ai tant vu, tant éprouvé, que je suis manichéen.
Candide
Il y a pourtant du bon, regardez : nous parlons, nous échangeons des idées, nous nous consolons !
Martin
Peut-être, mais à quoi bon finalement ?
Candide
vous n’avez rien à espérer alors que moi, j’ai l’espoir de revoir Mlle Cunégonde ; en plus, j’ai encore un peu d'or dans mes poches… Au fond, je me demande si Pangloss n’avait pas raison : ne trouvez-vous pas que la vie est on ne peut mieux ?
Marin
terre ! terre!
Candide
Nous approchons les côtes de France, vous connaissez les Français ?
Martin
Ah oui, je les connais ! En France, la principale occupation est l'amour, la seconde de médire, et la troisième de dire des sottises.
Candide
Mais, monsieur Martin, avez-vous vu Paris ?
Martin -
Oui, j'ai vu Paris :c'est une drôle d'atmosphère c'est un chaos, où tout le monde cherche le plaisir, et où presque personne ne le trouve ; d’ailleurs, les Français ne sont pas faits pour la liberté. Ils en abuseraient.
Flute "ah ça ira"
Voltaire, aux comédiens :
Pas encore, 1789, ça, c’est seulement dans trente ans !
Candide.
Est-il vrai qu'on rit toujours à Paris ?
Martin
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Oui, on y fait en riant les actions les plus détestables. Les Français sont menteurs, fourbes, perfides, ingrats, brigands, faibles, volages, lâches, envieux, gourmands, ivrognes, avares, ambitieux, sanguinaires, calomniateurs, débauchés, fanatiques, hypocrites et sots…
Candide
Ouh la la ! Allons directement à Venise,
Cap sur Venise
Marin
Barre à tribord Cap sur Venise
Candide
Cacambo doit m'y ramener Cunégonde !
Martin
Vous êtes bien simple, en vérité, de vous figurer qu'un valet métis avec cinq ou six millions en poche ira chercher votre maîtresse au bout du monde et vous l'amènera à Venise. S'il la trouve, il la prendra pour lui. S'il ne la trouve pas, il en prendra une autre : je vous conseille d’oublier bien vite Cacambo et Cunégonde.
Candide
Votre manichéisme vous conduit au désespoir ! À quoi bon une philosophie qui ne vous aide pas à vivre ?
Martin
Soit ! Soyons optimistes ! On dit qu’à Venise on reçoit très bien les étrangers qui ont beaucoup d'argent ; je n'en ai point, vous en avez, je vous suivrai partout.
Voltaire (à part)
Martin est sage : il parle en philosophe !
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TABLEAU 11 VENISE
VoltaireA Venise, Candide et Martin cherchent Cacambo et Cunégonde dans tous les cabarets de la ville.
Paquette, arrivant près de CandideEh quoi ! Monsieur Candide ne reconnaît plus Paquette !
Candide
C’est vous ? Paquette, c'est donc vous qui avez mis le docteur Pangloss dans le bel état où je l'ai vu ?
Paquette
Hélas ! Monsieur, je vois que vous êtes instruit de tout. Il m’est arrivé de nombreux malheurs qui m’ont conduite ici, où j’exerce ce métier abominable qui vous paraît si plaisant à vous autres hommes, et qui n'est pour nous qu'un abîme de misères. Ah ! Monsieur, si vous pouviez vous imaginer ce que c'est ! être obligée de caresser un vieux marchand, un avocat, un moine, un gondolier, un abbé ; être souvent réduite à emprunter une jupe pour aller se la faire lever par un homme dégoûtant ; être volée par l'un de ce qu'on a gagné avec l'autre ; n'avoir en perspective qu'une vieillesse affreuse, un hôpital et un fumier... en réalité, je suis une des plus malheureuses créatures du monde.
Candide
Mais, vous aviez l'air si gai, si content ; je ne comprends pas !
Paquette
Ah ! Monsieur, c'est encore là une des misères du métier. J'ai été hier volée et battue par un officier, et il faut aujourd'hui que je paraisse de bonne humeur pour continuer à plaire. Elle part
Candide
Vu comme cela... Quant à moi, une chose me console : je vois qu'on retrouve souvent les gens qu'on ne croyait jamais retrouver ; il se pourra bien faire que je rencontre aussi Cunégonde.
Martin
Je souhaite qu'elle fasse un jour votre bonheur ; mais c'est de quoi je doute fort.
Candide
Vous êtes bien dur,
Martin
C'est que j'ai vécu…
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TABLEAU 12 – CACAMBO À VENISE
Cacambo
Mon Maître , je vous retrouve enfin
Candide
Ah c'est toi Cacambo
Cunégonde est ici, sans doute ? Eh bien ! Lui as-tu acheté un palais ? Est-elle toujours un prodige de beauté ? M'aime-t-elle toujours ? Mène-moi mourir de joie avec elle.
Cacambo
Mon cher maître, Cunégonde lave les écuelles chez un prince qui a très peu d'écuelles ; mais ce qui est bien plus triste, c'est qu'elle est devenue , c'est qu'elle est devenue horriblement laide.
Les comédiens
Ah non, Voltaire ! C’est notre Cunégonde chérie, tu n’as pas le droit de l’enlaidir ! Voltaire, viens ici, qu’on s’explique !
Voltaire
On m’appelle ? Une mutinerie, que se passe-t-il ?
Un comédien
Cunégonde est notre bien-aimée à tous ! Tu ne peux pas l’enlaidir !
Voltaire
Il faut bien que je libère mon benêt de Candide de son asservissement amoureux ! On est philosophe ou on ne l’est pas !
Candide
Ah ! Belle ou laide, je suis honnête homme, et mon devoir est de l'aimer toujours. Mais dis-moi, comment peut-elle être réduite à cet état si abject avec les cinq ou six millions que je t’avais confiés ?
Cacambo
Bon, il m'a fallu donner deux millions au Gouverneur de Buenos Ayres : vous savez ! le senior Don Fernando, de trucmuche, de machin chose, de coquin de sort…
Candide
Et pourquoi?
Cacambo
pour lui reprendre Mademoiselle Cunégonde pardi.
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Candide
et ensuite
Cacambo
Un pirate nous a bravement dépouillés de tout le reste
Candide :
Et alors ?
Cacambo
Et…. il nous a vendu comme esclaves.
Candide :
Et alors ?
Cacambo
Mademoiselle Cunégonde, la vieille et moi-même avons été rachetés par un prince; le prince aux écuelles
Candide
Que d'épouvantables calamités enchaînées les unes aux autres ! Mais, grâce aux quelques diamants qui me restent, je délivrerai Cunégonde. C'est bien dommage qu'elle soit devenue si laide.
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TABLEAU 13 HAPPY ENDVoltaire
J’arrive enfin au bout de l’aventure ; il faut à présent qu’ils se retrouvent tous, afin qu’ils inventent la philosophie que j’entrevois aujourd’hui : au fond, rien n’importe vraiment sinon de faire le bien autour de soi.
Pour moi, je suis las des querelles entre philosophes… Rousseau me fatigue vraiment. Que ne se tait-il ! Il m’accuse d’être athée, alors que je remercie Dieu chaque jour de la vie qu’il m’accorde ! Mais Mossieu Rousseau ne vise qu’à me discréditer auprès de l’église, afin qu’on me jette à la voirie une fois que j’aurai trépassé… s’il continue à m’accuser ainsi d’athéisme, je dévoilerai le gros secret que je sais sur lui !
Après tout, lui qui veut m’apprendre la vertu, lui qui me trouve trop riche pour être philosophe, n’a-t-il pas abandonné les cinq enfants qu’il a eus avec sa concubine ? Là, c’est dit ! Il fallait que ça sorte !
Revenons à Candide... il a acquis quelques arpents de terre en Propontide... Alors, voyons, qui va assister à la naissance d’un monde meilleur ?
Les comédiens
Moi, moi, moi !
Voltaire
Moi, moi, attendez un peu que je réfléchisse. Alors, voyons, il faut à la fin…
Candide, évidemment Paquette ,Cacambo et la vieille, et même Pangloss, qu’il faut bien que je fasse revenir, afin qu'il donne l'avis éclairé des pseudo-philosophes... je sais, il est mort pendu dans l'autodafé de Lisbonne ! Disons que la corde pour le pendre était distendue par la pluie, ce qui l'a empêché de périr vraiment. Cunégonde et son idiot de frère, le baron. Oui, je sais lui aussi est mort puisque Candide l'a gratifié d'un coup d'épée, mais comme le dit Cunégonde, on ne meurt pas toujours de ce genre d'accident.
Cunégonde
Vous m’avez promis maintes fois de m’épouser, il serait temps d’honorer votre promesse, monsieur Candide !
Candide
Je vais donc épouser votre sœur, qui me le demande instamment comme vous le constatez !
Le baron
Je ne souffrirai jamais une telle bassesse ...
Candide
Maître fou, j'ai payé la rançon de ta sœur, elle est laide, j'ai la bonté d'en faire ma femme, et tu prétends encore t'y opposer ! Je te retuerais si j'en croyais ma colère.
Le baron
Tu peux me tuer encore, mais tu n'épouseras pas ma sœur de mon vivant.
Candide
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Que vous en semble, mes amis ? Celui-là et ses quartiers de noblesse...
Cacambo
Jetons-le à la mer !ou bien Rendez-le aux pères jésuites, ils sauront quoi faire de lui !
Pâquette
La peste soit des moines et de tous leurs avatars !
Voltaire
Candide épouse donc sa Cunégonde, par fidélité à sa parole. Pangloss retrouve Paquette Cacambo reste au service de son maitre Candide et la vieille au service de Cunégonde tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes et notre histoire se finit là
NOIR
Voltaire
Lumière ! lumière!
Si nous étions chez Molière, la pièce s’arrêterait là.
Mais Molière est mort ….depuis 86 ans ! Et moi je ne suis pas Molière
Alors imaginons:
voilà la situation
Candide, est marié avec sa Cunégonde, ils vivent tous ensemble à Constantinople grâce aux diamants rapportés de l'Eldorado .
Mais , friponné par quelques, financeurs, préteurs, usuriers, et autres profiteurs,
Cacambo
Des banquiers quoi!
Voltaire
il ne lui reste bientôt plus rien qu'une petite métairie.
Sa Cunégonde devient tous les jours plus laide, plus acariâtre et plus insupportable.
Cunégonde (à la vieille)
N'oubliez pas que je suis fille de baron, que ma famille possède 72 quartiers de noblesse et que vous me devez obéissance
La vieille
Qu'est ce que votre noblesse ? vous êtes d'une laideur effroyable et vous n'avez plus un sou en poche, moi je suis la fille d'un pape ! c'est vous qui me devez le respect
Cacambo
Taisez-vous! péronnelles que vous êtes! Vous commencez à m'escagasser les oreilles, je suis bien assez fatigué comme cela et je ne supporte plus vos chamailleries interminables
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Voltaire
Pangloss, au désespoir, se lamente de ne pouvoir briller dans quelque université d'Allemagne.
Pangloss
Que ne suis-je en la bonne ville de Leipzig ou de Mayence, où je serais reconnu, à l’instar de mon maître Leibniz! Enfin en un lieu où mon mérite serait fêté à sa juste valeur... car je ne suis pas certain qu'ici mon malheur particulier serve la cause générale
Voltaire
La plupart du temps l'ennui est excessif ……. Très excessif!!! Très très excessif!!!! Tellement excessif que la vieille leur dit un jour :
La vieille
Je voudrais savoir lequel est le pire, ou d'être violée par des pirates nègres, d'avoir une fesse coupée, d'être fouetté et pendu dans un auto-da-fé, ou bien de rester ici à ne rien faire ?
Candide
C'est une grande question...
Pangloss
L’homme est-il né pour vivre dans les convulsions de l'inquiétude? ou dans la léthargie de l'ennui?......... Il faut réfléchir à cette question très grave !
Candide
Prenons une bêche, cultivons ! Le travail éloignera de nous trois grands maux : l'ennui, le vice, et le besoin. Oui, il faut cultiver ce jardin !
Voltaire
Oui c'est ça il faut cultiver notre jardin
Et maintenant, ne venez pas me reprocher ce que vous avez entendu ! J'aime écrire librement et je continuerai aussi longtemps que je vivrai. C’est pourquoi je vous affirme devant Bouddha, Dieu, Vishnou et les autres )………. que je ne suis pas l’auteur de cette... coïonnerie !
Cacambo
On n’aura qu’à dire qu’on a trouvé ce manuscrit dans la poche d’un médecin allemand, M. le docteur Ralph, mort À MINDEN, en L'AN DE GRÂCE 1759.
Voltaire
Voilà, c’est ça : un médecin allemand en est l’auteur.
Quant à moi, je retourne cultiver...Les comédiens
Ah non tais-toi
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