Présentation d’IBON sur :
LES ACCORDS DE LIBRE ECHANGE AU 21e SIECLE
TROQUER NOTRE AVENIR POUR LE PROFIT DES ENTREPRISES ET LE
PILLAGE
IBONInternational
ISBN978-971-9657-04-0
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@ IBON International 2015
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comprenant les citations est remise à l’organisation.
En tant qu’ONG internationale, la Fondation IBON essaie de répondre à la demande
internationale pour soutenir les besoins de renforcement de capacité et de plaidoyer des
organisations populaires et des organisations de base dans les domaines de la recherche et de
l’éducation en liaison avec des initiatives et réseaux internationaux
IBON International initie et met en œuvre des programmes internationaux, développe et
accueille des réseaux internationaux, engage et participe à des campagnes d’action
internationales et met en place des bureaux régionaux et nationaux là où cela se révèle
nécessaire et pertinent.
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Paul S Allen
Fuzheado
Sommaire
Avant-propos
Chapitre 1 :
L’Impérialismeet l’OMC
v
1
Chapitre 2 : Au-delà de l’OMC :
Un nouvel accord de commerce en ascension
17
Chapitre 3 : Les Grandes orientations des nouveaux ALE 47
Chapitre 4 : Ampleur et conséquences 74
Chapitre 5 : La Résistance des peuples 104
Avant propos
De nouveaux accords de libre-échange à travers les régions sont
actuellement négociés. Ceux-ci auront des répercussionssur les
populations du Nord et du Sud, et sur l’économie mondiale du futur.
Toutefois, ces accords ne profiteront pas à la majorité démocratique et ne
sauveront pas l’économie mondiale de la crise.
Ces accords sont conçus pour répondre aux besoins et intérêts
croissants des multinationales. Ils sont souvent annoncéscomme des
« partenariats », tels que l’Accord de Partenariat transatlantique et le
Partenariat transatlantique d’investissement et de commerce. Toutefois,
ceux-ci sont loin d’être des partenariats équitables. Ils sont mis en œuvre
et dirigés par l’élite des sociétés internationales, les États-Unis et l’Union
européenne.
Les nouveaux accords de libre-échange sont négociés en secret. Mais
que cachent-ils exactement au public ? Ce nouveau manuel d’IBON
International révèle que les pays industriels avancés essaient de relancer
leur libéralisation encore inachevée et la libération de leurs agendas. Cela
comprend des règles nouvelles et élargies sur les services, les
règlementations, la compétition, les investissements et la protection des
investisseurs. Ces propositions de politiques mèneront à une concentration
encore plus importante des richesses et des pouvoirs entre les mains des
grandes entreprises, tandis que les importants acquis obtenus par
l’affirmation collective des peuples de leurs droits reculent. Ces acquis
comprennent des politiques qui assurent le bien-être des travailleurs, qui
régulent le comportement des entreprises et qui protègent
l’environnement.
Le Chapitre 1 de ce manuel est divisé en trois volets principaux. Le
premier volet offre un résumé historique de la montée des institutions
multilatérales (FMI, Banque mondiale et Organisation mondiale du
travail) et présente les règles que ces dernières ont édictées pour leur
permettre de façonner et de gouverner l’économie mondiale. Le deuxième
volet se concentre sur les tentatives échouées des pays développés pour
étendre la juridiction de l’OMC à de nouvelles zones et au-delà du
commerce. Le troisième volet documente l’impasse actuelle que
rencontrent les négociations de l’OMC, et les conflits fratricides entre les
pays développés et ceux en voie de développement.
vii
viii
Le Chapitre 2 raconte l’ascension des accords commerciaux bilatéraux
et régionaux, en commençant par l’Accord de libre-échange canado-
américain (ALE) et l’Accord de libre-échange nord-américain. Ce chapitre
sert également d’introduction à ce que l’on appelle les accords de libre
change du 21e siècle, en particulier le TTIP, le TPP, l’AECG et l’ACS.
Le Chapitre 3 soutient que les nouveaux accords de libre-échange sont
un mélange de marchés proposés et négociés par les pays développés au
sein du régime commercial multilatéral et d’anciens accords de libre-
échange plurilatéraux et régionaux/bilatéraux – particulièrement ceux
menés par les États-Unis. Cinq éléments communs à ces nouveaux accords
de libre-échange sont identifiés, tels que les droits accrus des investisseurs,
la dérégulation, la privatisation, la libéralisation et l’expropriation
capitaliste des biens communs.
Le Chapitre 4 décrit les impacts et les conséquences des nouveaux
accords de libre-échange. Il y est présenté la manière dont ces accords
vont mener à l’érosion des droits et libertés socio-économiques des
populations et à la perte de crédibilité des organes de gouvernance. Ce
chapitre souligne la portée de ces nouveaux accords commerciaux, même
pour les populations des pays qui ne font pas partie des négociations.
Enfin, le Chapitre 5 offre un guide pratique destiné aux activistes pour
que ceux-ci puissent construire des stratégies globales et efficaces pour
faire échouer les accords. Ces stratégies comprennent des points sur
l’éducation et misent sur la sensibilisation entre les secteurs et les
communautés. Elles encouragent la construction d’organisations et la
création d’alliances, et elles appellent à la mobilisation.
Ce manuel est publié pour aider les organisations et les mouvements
dans leurs efforts actuels d’éducation et de campagne contre les nouveaux
accords de libre-échange. Il offre une analyse profonde des contextes et
caractéristiques de ces marchés afin de répondre aux défis consistant à
combler l’écart dans les informations publiques, au vu du manque d’accès
aux textes. Le manuel est une contribution d’IBON International pour la
construction collective d’une résistance à l’égard des nouveaux accords de
libre-échange – en particulier –, et contre la mondialisation impérialiste –
en général.
C H A P I T R E 1
L’Impérialisme et l’OMC
Aujourd’hui, de nouveaux accords de libre-échange sont élaborés. Ceux-ci
vont mettre les superpuissances mondiales et leurs entreprises transnationales
au centre de leurs propres domaines stratégiques, en traversant les deux rives du
Pacifique jusqu’àl’Europe de l’Est. Toutefois, loin d’être des moyens d’ouvrir
le monde plus d’intensification commerciale et de libérer le capitalisme de ses
propres chaines, ces accords – orchestrés avant tout par l’impérialisme
américain – ne conduiront qu’à la concentration des ressources, des richesses et
des pouvoirs entre les mains d’une élite mondiale restreinte.
FMI – BM – OMC : une Troïka pour le monopole de la domination capitaliste
La mondialisation n’est pas un phénomène nouveau. Au début du 16e
siècle, les principales puissances marchandes, telles que l’Angleterre et les
Pays-Bas, ont entrepris des conquêtes territoriales en Extrême Orient, dans
les Amériques et en Afrique. Ces projets coloniaux étaient motivés par des
ambitions capitalistes, dont le but était d’étendre constamment les marchés
pour leurs marchandises, de sécuriser les sources de matériaux bruts –
notamment les minerais, le pétrole et les produits issus de l’agriculture –,
et de dominer la concurrence. Souvent, la conquête de ces colonies se
faisait par la répression violente des populations locales.
Vers la fin du 19e siècle, les crises de compétition et de commerce se sont
traduites par la concentration du capital et l’émergence de monopoles comme
force dominante dans les pays capitalistes industrialisés. Le capital industriel a
alors fusionné avec le capital bancaire, conduisant à une croissance du
capitalisme sans précédent. L’exportation du capital excédentaire acquit une
importance cruciale sur l’exportation des marchandises excédentaires, rendant
le rôle du capital financier indispensable.
1
2
Les trusts internationaux de monopoles (cartels, syndicats, etc.)
augmentèrent. Au début du 20e siècle, le capitalisme de monopole ou
impérialisme moderne avait complètement divisé le monde. En dehors des
pays impérialistes, les territoires étaient divisés en colonies, semi-colonies
et dépendances territoriales. Le morcellement du monde entre les grandes
puissances prit fin au cours des Première et Seconde Guerres mondiales.
Les Institutions multilatérales ont joué un rôle important dans le
façonnement et la gouvernance du régime économique mondial dans ce
processus. Alors que les États impérialistes avaient recours de temps en
temps à l’occupation directe et à l’intervention militaire « pour remettre
à leur place les récalcitrants », les puissances dominantes exerçaient
également des règles coloniales indirectes en assurant la soumission
économique des pays les plus faibles, par le biais des diktats du FMI, de
la BM et de l’AGETAC/OMC.
FMIBM et les Programmes d’Ajustement Structurel(SAPS)
Les Institutions internationales qui naquirent de la conférence de
Bretton Woods en 1044 étaient le résultat d’une tentative des Nations
alliées de créer un système économique post-Seconde Guerre mondiale.
Ce système devait être flexible, stable, favorable à la croissance du capital,
et il devait rester en dehors des pressions nationalistes qui avaient
débouché sur deux guerres mondiales en l’espace-temps d’une génération
(Balaam &Veseth, 2000). Ces institutions étaient donc le Fonds monétaire
international (FMI) et la Banque internationale pour la reconstruction et le
développement (BIRD, connue plus tard sous le nom de Banque
mondiale).
En tant qu’organe supranational, le FMI devait remplir deux tâches :
réguler les taux auxquels les devises étaient échangées parmi les États
membres et assurer la stabilité internationale en accordant des prêts en cas
de crise dans la balance des paiements des États membres. Pour utiliser les
prêts du FMI, les gouvernements devaient adopter une série de politiques
économiques et de mesures financières basées sur ce que le FMI estimait
promouvoir la stabilité économique, augmenter les capacités du
gouvernement à empocher des intérêts et à rembourser les emprunts. Ces
politiques et mesures faisaient appel à la version néolibérale de l’économie
néoclassique, laquelle requiert la réduction des entraves tarifaires sur les
importations, augmente les taux d’intérêt afin de refroidir l’économie et de réduire
l’inflation, à l’imposition de mesures d’austérité qui réduisaient les services
gouvernementaux, et à la suppression des subsides de l’État qui maintenaient bas
les prix de la nourriture.(Peet,2003).
3
La Banque mondiale a, à la base, consacré ses efforts à la
reconstruction d’une économie ravagée par la guerre en Europe, après la
Seconde Guerre mondiale, en jouant le rôle de bailleur direct pour les
projets de développement. À partir des années 1950, la Banque commence
à fournir des « prêts au développement » aux pays en développement et
aux pays les moins
avancés(Balaam&Veseth,2000)(Hobden,2002).En1979,le président de la
Banque mondiale, Robert McNamara, annonce que la banque aura recours
aux prêtsprogrammes pour inciter les pays bénéficiaires à entreprendre des
réformes. Ces réformes impliquent des ajustements dans les schémas de
développement et les structures économiques afin de promouvoir
l’exportation et la libéralisation des échanges (Peet, 2003). Suivant
l’initiative de son associé principal, le FMI, les prêts d’ajustement
structurel (PAS) de la Banque mondiale ont pour but de corriger les
problèmes structurels profondsen consentant des prêts en fonction de
politiques (plutôt qu’en fonction des projets), s’étalant sur plusieurs
années.
Ainsi, une division du travail entre le FMI et la BM avait abouti : le
Fonds était une « institution de balance des paiements », avec une
orientation à court terme, tandis que la Banque était une institution de
développement, avec une approche à long terme.
AGETAC/OMC et Libéralisation du commerce
Une autre institution importante qui vient compléter la troïka des
institutions internationales pour assurer le contrôle impérialiste est l’OMC.
L’OMC est la version institutionnalisée de l’AGETAC, accord signé par
23 gouvernements en 1947. Les États-Unis voulaient la création d’une
troisième organisation internationale pour réglementer le commerce et
compléter le travail du FMI et de la Banque mondiale. L’organisation
alors suggérée aurait comme objectif de libéraliser le commerce, en
particulier dans l’intérêt des grandes entreprises d’exportation. Un de ses
objectifs plus larges serait de créer une économie de marché dérégulée et
favorable aux grandes multinationales.
L’AGETAC réglementait le commerce de marchandise (matières
premières) par le biais de principes négociés de libéralisation, d’accès
équitable au marché, de réciprocité, de non-discrimination et de
transparence. En bref, c’était une tentative de promotion de l’application
des principes de « libre-échange » à un niveau mondial. Entre 1948 et
1994, l’AGETACédicte les règles à la majeure partie du monde du
commerce (IBON Databank and Research Center, 2005). En 1995, à la
clôture du cycle d’Uruguay, l’AGETAC est remplacé par l’OMC. C’est
4
l’ouverture d’une nouvelle ère dans l’histoire mondiale du commerce,
dans une nouvelle ère de mondialisation néolibérale (Peet,2003).
L’OMC s’inscrit dans le discours de l’école néoclassique de la
libéralisation du commerce ou de la libération de la circulation
internationale des marchandises, et plus récemment des services, sous
contrôle gouvernemental. La libéralisation du commerce des tarifs et
autres restrictions gouvernementales permettra aux multinationales de
fonctionner plus librement à un niveau mondial et conduira à une
croissance économique plus rapide, dont bénéficiera tout le monde.
L’OMC a poursuivi et développé le principe fondamental de l’AGETAC
selon lequel les biens exportés doivent pouvoir entrer librement dans le
pays importateur. Ainsi, l’organisation offre un cadre de négociations sur
les niveaux des droits de douane (avec comme but la suppression
définitive de tout tarif douanier), les obstacles non tarifaires et les autres
domaines qui n’étaient pas couverts par l’AGETAC.
Au cours de son existence, l’OMC a conduit à l’élimination
généralisée des barrières de protection du commerce international telles
que les interdictions d’importation, les quotas d’importation, les tarifs
douaniers, etc. Elle a également intégré un nombre toujours plus grand de
pays dans le régime de commerce international et soumis des secteurs de
différents types jusque là protégés ou non affectés, comme l’agriculture,
les services, les investissements, les procédures douanières et les brevets.
Parmi les accords majeurs et controversés mis en place par l’OMC au
lendemain du Cycle de l’Uruguay, l’on trouve les accords sur
l’agriculture, sur les aspects commerciaux des droits de propriété
intellectuelle et celui sur les mesures concernant les investissements et
liées au commerce.
L’Accord sur l’agriculture (AsA) est le premier accord multilatéral
dédié au secteur de l’agriculture. Cet accord comprend des disciplines sur
l’accès au marché ou sur les restrictionsà l’importation, sur le soutien
interne ou gouvernemental aux producteurs nationaux et sur les subsides à
l’exportation ou le soutien gouvernemental a l’exportation. L’accord
réduit la protection des tarifs douaniers pour les petits agriculteurs, qui
représentent une source majeure de revenus dans les pays en voie de
développement, tout en permettant aux pays riches de continuer à
subventionner l’agriculture chez eux en passant d’un type de subside à un
autre.
En réponse à la tendance grandissante du commerce dans le service,
l’OMC a établi l’Accord général sur le commerce des services (AGSC)
pour étendre des règles et engagements convenus au niveau international
des échanges de services. L’AGETAC faisait déjà l’ébauche de provisions
relatives au commerce de services sous les nouveaux accords de libre-
échange, notamment le traitement équitable entre les partenaires de
5
commerce sur base du principe de non-discrimination, le traitement
national ou l’extension des traitements favorables donnés aux fournisseurs
nationaux de services, l’affaiblissement des pouvoirs réglementaires du
gouvernement par le biais de la législation, des codes réglementaires, des
décisions administratives ou même des pratiques non écrites, et la
privatisation des services fournis par l’État.
L’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui
touchent au commerce (ADPIC) a quant à lui offert une protection de la
propriété intellectuelle des entreprises. Il précise l’applicabilité des
principes des bases de l’AGETAC, conjointement avec ceux qui existent
déjà dans les accords internationaux, sur les provisions des droits sur la
propriété intellectuelle, l’application de ces droits et les principes de
règlement des différends multilatéraux. L’ADPIC est devenu l’une des
composantes du Cycle de l’Uruguay, principalement par le lobbying des
États-Unis et de ses entreprises transnationales, notamment l’industrie
pharmaceutique et biotechnologique. L’ADPIC a mis au point le dogme
de « libre échange » adopté par l’OMC comme celui promouvant les droits
des entreprises, éliminant l’intervention de l’État dans le commerce et les
investissements, et protégeant les intérêts et les propriétés des entreprises.
Enfin, l’Accord sur les mesures concernant les investissements et liées
au commerce (MIC), qui traite des mesures d’investissement qui semblent
« restreindre et fausser » le commerce, avait en fait pour but de déréguler
les investissements et était très peu lié au commerce. Il permettait à ses
adhérents de ne pas se plier à des MIC qui ne seraient pas compatibles
avec des provisions de l’AGETAC liées au traitement national (exigences
de contenu local et d’équilibre de commerce) et à l’interdiction de
restrictions quantitatives sur l’importation et l’exportation (restrictions des
exigences d’équilibre des échanges sur l’importation, des restrictions sur
les échanges conduisant à des restrictions sur l’importation, et les
exigences internes impliquant des restrictions sur les exportations).
Le programme inachevé de l’OMC pour un capital de monopole : les enjeux de Singapour
Même lors de la toute première Conférence ministérielle de l’OMC en
1996, les gouvernements du Nord, menés par les États-Unis et l’Union
européenne, poussaient déjà vers un champ d’action plus large et une
augmentation des pouvoirs de l’OMC. Derrière ce programme se
trouvaient les entreprises qui incitaient à inclure plus de questions non
économiques dans l’OMC, telles que les investissements, la politique de
concurrence et la suppression des réglementations par rapport au
commerce d’un pays à l’autre. Ces quatre priorités politiques de pays
développés formaient ce qu’on appelle les « questions de Singapour » qui
ont été établies lors de la Conférence ministérielle de 1996.
6
Selon Martin Khor, le fil rouge des priorités politiques des questions
de Singapour était l’élargissement des droits des entreprises étrangères
pour que celles-ci puissent accéder au marché des pays en développement
par le biais de leurs produits et de leurs investissements. Pour ce faire, il
fallait également réduire au maximum les droits des gouvernements hôtes
à réglementer les investisseurs étrangers et interdire à ces gouvernements
d’établir des mesures favorisant les entreprises locales(2003).
Investissements
À l’heure actuelle, l’AGCS et les MIC offrent aux investisseurs
étrangers quelques marges de manœuvre en termes d’accès et d’opération.
Toutefois, la libéralisation complète des investissements n’est pas assurée.
Les FTN ne sont pas encore complètement protégées comme elles
voudraient l’être.
Concernant les investissements, l’UE (appuyée par les États-Unis)
soutient l’inclusion de nouvelles règles commerciales afin d’accorder aux
investisseurs étrangers de nouveaux droits pour entrer dans les pays plus
facilement et pour y opérer librement (IBON Databank and Research
Center, 2005). La Commission européenne a proposé, à l’occasion de la
Conférence ministérielle de Singapour, de négocier un accord multilatéral
sur les investissements et d’intégrer un tel accord dans l’OMC.
Depuis le début des années 1980, les États-Unis réclament des règles
plus strictes concernant les investissements. Toutefois, une opposition des
pays en développement au sein de l’AGETAC signifiait que la
libéralisation complète ne pouvait être accomplie (Woolcock,2003). Les
États-Unis ont rencontré plus de succès avec l’Accord de libre-échange
nord-américain (ALENA), par le biais duquel ils ont réussi à établir des
normes élevées pour la protection des investissements, notamment contre
la régulation gouvernementale qui refusait aux investisseurs les avantages
attendus.
L’accomplissement d’un accord multilatéral sur les investissements a
suivi une approche à deux voies. Les négociations de l’accord multilatéral
sur les investissements (AMI) sont lancées par l’OCDE en 1995, alors que
l’Accord multilatéral d’investissement est proposé à l’OMC.
En principe, l’AMI devait faciliter la circulation des capitaux, à la fois
des liquidités et des produits, au travers des frontières internationales en
restreignant les lois des pays participants qui étaient considérées comme
faisant obstacle à ces flux de capitaux. Il présentait également une
disposition pour un mécanisme de règlement des différends entre
investisseurs et État, similaire à celui de l’ALENA. Celui-ci accorde le
droit aux investisseurs d’entreprendre des poursuites judiciaires contre les
gouvernements nationaux et introduit un système d’indemnité monétaire
7
en cas de violation du contrat.
Pour les partisans de l’AMI, un ensemble de règles mondiales
gouvernant les investissements étaient plus que nécessaire afin de bloquer
la libéralisation qui s’était déjà déployée au cours des deux dernières
décennies. Il était également urgent de protéger les droits des investisseurs
à avoir un accès libre, égal et sûr aux marchés, et de résoudre les conflits
entre les gouvernements et les firmes transnationales. L’AMI devait
réduire les effets de distorsions des politiques tels que l’obligation pour les
firmes étrangères de former des partenariats avec les entreprises locales,
ou les exigences de performance qui obligeaient les FTN à répondre à une
discipline autre que celles des forces du marché. En outre, la
compensation obligatoire et ponctuelle de l’AMI par rapport à
l’expropriation sert d’encouragement à l’attention des investisseurs
étrangers dans les nations pourvues d’institutions moins stables (Sforza-
Roderick, Nova, &Weisbrot).
D’autre part, les opposants soutenaient que l’AMI restreindrait
sérieusement la capacité des gouvernements à façonner des politiques
d’investissements servant des visées sociales, économiques et
environnementales. L’AMI conférerait une protection juridique
contraignante aux firmes, mais ne leur imposerait pas d’obligations
contraignantes en rapport avec les droits du travail, les normes
environnementales ou les pratiques commerciales anticoncurrentielles
(IBON Databank and Research Center, 2005). En augmentant la capacité
des investisseurs à faire circuler leur production aux quatre coins du
monde, l’AMI encouragerait un « nivellement par le bas » au seinmême
des pays, en essayant d’attirer les investissements étrangers directs. Il
exercerait également une pression pour diminuer les niveaux de vie et
affaiblirait, si pas éliminerait, les cadres réglementaires. Même le droit
réglementaire qui n’est pas directement en conflit avec l’AMI pourrait être
menacé par une compétition de plus en plus féroce pour le capital (Sforza-
Roderick, Nova, & Weisbrot).
Compétition
L’UE a encouragé un nouvel accord limitant la législation et les
pratiques nationales dans les pays du tiers monde favorisant les entreprises
locales sur base du fait qu’elles étaient en contradiction avec la libre
concurrence. Par exemple, des politiques qui confèrent des droits
d’importation ou de distribution aux entreprises locales (notamment les
entreprises d’État et les firmes publiques et contrôlées par l’État) ou des
pratiques au sein des firmes locales, permettant de tirer des bénéfices en
matière de marketing, pourraient être remises en question et imposées
avec des sanctions adéquates.
L’UE maintient que les principes de l’OMC sur le traitement national
8
et la non-discrimination devraient être appliqués à la politique
concurrentielle (IBON Databank and Research Center, 2005). Les
entreprises ou produits étrangers devraient pouvoir être en compétition de
manière égale avec les firmes locales. Pour ce faire, les politiques qui se
révèlent pro-local devront être supprimées ou éliminées. Même les
entreprises publiques et les firmes d’État qui bénéficient, par défaut, de
droits exclusifs en matière de commerce, de subventions et de faveurs
politiques, devraient être démantelées en accord avec les préceptes du
marché libre.
Marchés publics
Les États-Unis exigent la mise en place d’un accord pour libéraliser les
marchés publics, et ce afin d’offrir aux entreprises un accès égal à la part
importante du commerce très lucratif de fourniture de matériel et d’obtenir
des contrats pour des services publics dans le tiers monde. Pour le
moment, les membres de l’OMC sont autorisés à exempter les marchés
publics des règles d’accès au marché de l’OMC, à moins qu’un membre
de l’OMC ne rejoigne volontairement l’Accord plurilatéral relatif aux
marchés publics. Peu de pays en développementen sont membres, vu que
ceux-ci considèrent comme inacceptable le fait d’intégrer les marchés
publics et les aspects d’accès dans l’OMC (Khor,2003).
Si un accord sur les marchés publics avait été mis en œuvre comme les
pays en développement le voulaient, les politiques de dépenses publiques,
les décisions et les procédures auraient été soumises au principe de
traitement national. Cela signifie que le gouvernement n’aurait plus été en
mesure d’accorder sa préférence ou des avantages aux citoyens et aux
entreprises locales. Les offres pour les biens, les contrats et les projets
(notamment les accords de privatisation) auraient été ouvertes aux
entreprises étrangères qui devraient bénéficier des mêmes opportunités
que les entreprises locales. Si les firmes étrangères considéraient que les
décisions prises par le gouvernement favorisaient injustement les firmes
locales, elles pouvaient porter l’affaire devant le tribunal de l’OMC
Facilitation du commerce
Cet accord devait faciliter l’exportation pour les pays en
développement vers les pays développés et vice versa. La facilitation du
commerce désigne un vaste ensemble de réformes (dans les politiques, les
procédures opérationnelles et les infrastructures) dont le but est de réduire
la complexité et les coûts de procédure dans le commerce international :
de passer la commande à la circulation des biens et des services du
vendeur (exportateur) vers l’acheteur (importateur), en passant par les
paiements (IBON International, 2013). L’objectif principal est de faire en
sorte que les pays en développement adoptent les mêmes règles et
procédures que les pays développés.
9
De nombreux pays sous-développés se sont opposés aux engagements
sur la facilitation du commerce parce qu’ils s’inquiétaient grandement de
la dépense des faibles ressources et de la vulnérabilité à contester des
procédures. Cet accord fait fi des disparités au sein des ressources
administratives, financières et humaines entre les pays développés et en
développement (Khor, 2003). Il profiterait également grandement à des
firmes telles que la Société Générale de Surveillance (SGS), une FTN de
certification, de test et d’inspection suisse. De plus, certains
gouvernements ont remis en cause la nécessité de nouvelles règles, tandis
que d’autres estimaient que l’administration douanière était une question
qui pouvait être gérée à un niveau national(IBONDatabankandResearch
Center,2005).La facilitation du commerce ne devrait pas être sujette à des
règles et obligations juridiquement contraignantes vis-à-vis de l’OMC, car
cela imposerait aux pays en développement à entamer des programmes
qu’ils ne peuvent pas se permettre et qui ne sont pas prioritaires
(Khor,2003).
La majorité des pays du tiers monde se sont opposés aux négociations
pour l’accord sur ces quatre enjeux. Toutefois, les pays développés
parvenus à un compromis en mettant sur pied des groupes de travail pour
discuter de ces problèmes.
En 1997, les négociations de l’AMI de l’OCDE ont été paralysées et se
sont finalement soldées par un échec à cause de l’opposition farouche due
aux critiques des mouvements populaires, des organisations non
gouvernementales et de quelques gouvernements, notamment les
gouvernements français et canadien.
L’AMI a également essuyé quelques revers avec un groupe de plus de
20 pays sous-développés mené par l’Inde qui a bloqué la mise en place
d’un accord global sur les investissements dans l’OMC. Néanmoins, à la
demande des pays industrialisés, l’OMC a maintenu un « groupe de
travail » qui doit étudier la relation entre commerce et investissements et
qui, ainsi, garde la question présente dans les esprits de l’OMC (IBON
Databank and Research Center,2005).
Certains progrès semblent avoir été accomplis concernant la question
de la facilitation du commerce après la Neuvième conférence ministérielle
de l’OMC à Bali en 2013 (voir plus bas), mais certains pays en
développement, en particulier l’Inde, auraient manifesté des hésitations
après un premier témoignage de soutien.
L’État actuel de l’OMC
Récemment, le régime de commerce multilatéral a traversé une crise
existentielle. Le succès de l’ère de l’AGETAC n’a pas perduré. Bien que
10
l’OMC ait attiré de nombreux nouveaux membres, notamment la Chine et
la Russie, les négociations apparaissent de plus en plus compliquées à
gérer et à contrôler pour les puissances impérialistes. La résistance du tiers
monde ainsi que l’influence grandissante des économies avancées du Sud
ont également conduit à une concurrence géopolitique, menaçant la
position dominante des puissances industrielles traditionnelles.
Le cycle de Doha pour le développement
L’OMC essaie actuellement de finaliser le cycle de Doha pour le
développement (CDD) qui a commencé en novembre 2001. Un total de
159 pays ont participé aux négociations qui traitaient du commerce des
biens agricoles et industriels, des services, de l’accès au marché public et
des droits de la propriété intellectuelle. Les rencontres suivantes se sont
déroulées à Cancún (Mexique) en 2003 et à Hong Kong en 2005. Des
négociations connexes se sont tenues à Paris (France) – également en 2005
–, à Potsdam (Allemagne) en 2007 et à Genève (Suisse) en 2004, 2006 et
2008.
Avant 2001, les pays développés avaient demandé un autre cycle de
pourparlers sur la libéralisation du commerce pendant la Troisième
conférence ministérielle de l’OMC à Seattle en novembre 2009. Cela a été
reçu avec des protestations massives de la part des travailleurs, des
agriculteurs, des étudiants, des environnementalistes, des groupes de
femmes et des larges mouvements anticapitalistes. Les représentants des
pays en développement se sont montrés tout aussi résistants, exprimant
leur opposition concernant leur exclusion des pourparlersalors que les
États-Unis et l’Union européenne voulaient conclure un accord mutuel sur
l’agriculture. Les protestataires ont réussi à faire annule la réunion de
l’OMC, forçant les négociateurs à se relocaliser à Doha, au Qatar. Les
manifestations qui se sont tenues lors de la Troisième conférence
ministérielle de l’OMC sont largement connues comme « la bataille de
Seattle ».
Depuis sa création, les négociations du CDD ont été marquées par des
désaccords chroniques entre les États membres. Les différends les plus
importants surviennent entre les pays développés, notamment entre l’UE,
les États-Unis et le Japon et l’Afrique du Sud. Les divisions les plus
fâcheuses concernent l’agriculture, les tarifs douaniers et les obstacles non
tarifaires, les services et les recours commerciaux.
Le CDD opère sur l’idée d’une entreprise unique, signifiant que « rien
n’est convenu tant que tout n’est pas convenu » (McClanahan, 2012). Si
les pourparlers pour l’une des nombreuses questions de commerce
traversent une impasse, alors l’ensemble des négociations ne peut pas
avancer. En 2008, lors d’une réunion de haut niveau à Genève, ils sont
presque arrivés à un accord. Toutefois, après 10 jours, un désaccord a fait
11
surface entre les États-Unis et l’Inde concernant les règles gouvernant la
libéralisation agricole.
De nombreux pays en développement ont demandé une révision des
accords de l’OMC lors du cycle de l’Uruguay, avant que des négociations
ne soient entreprises dans d’autres domaines. Parmi leurs arguments, ils
avancent les effets néfastes sur les pays en développement des politiques
de l’OMC, notamment l’ADPIC qui augmente le coût des produits de
consommation tels que les médicaments, et empêchent la progression des
innovations et des technologies. Le MIC est également visé : celui-ci
interdit des mesures d’investissement telles que les politiques de contenu
local. Enfin, l’Accord sur l’agriculture, qui autorise les pays en
développement à maintenir leur haute protection par le biais d’un soutien
et des tarifs douaniers nationaux tout en attendant de ces pays qu’ils
libéralisent leurs importations alimentaires, est dans le viseur des pays en
développement(Khor,2007).
Contrairement à ce qui s’était passé durant les négociations du cycle
de l’Uruguay, les pays en développement subissent une grande pression de
la part de leurs citoyens et se montrent donc plus prudents en s’engageant
auprès de l’OMC, en particulier compte tenu :
(a) du caractère constant des engagements pris à l’OMC et(b) des actions
commerciales des autres membres, si le membre engagé ne tient pas ses
promesses (Naranayan, 2013). En tenant compte de cela, les pays en
développement essaient de résister aux pressions et requêtes
déraisonnables qui entravent à leurs propres attentes de développement.
Entre-temps, les États-Unis, l’Union européenne et d’autres pays
développés ont requis un plus grand accès au secteur industriel des pays en
développement tout en conservant certaines mesures de protection pour
leurs propres secteurs agricoles. Ils voulaient également étendre les actuels
accords concernant la libéralisation du secteur des services établis dans le
cadre de l’AGCS. Les pays en développement n’étaient pas vraiment
enthousiastes à l’idée des propositions présentées étant donné que leurs
avantagespotentiels seraient relativement faibles alors que les coûts
potentiels dus à la perte de souveraineté pour déployer des politiques de
développement seraient élevés (Gallagher,2008).Pour les pays développés,
le succès économique potentiel d’économies en développement plus
grandes signifie qu’il est temps pour eux d’arrêter leur rôle de
« libéralisateurs » du commerce (Barbee & Lester,2014).
Les deux côtés ont refusé de résoudre ces problèmes : l’OMC a jusque
maintenant échoué à apporter un accord global. Depuis 13 ans, le CDD est
paralysé.
12
Le Paquet de Bali
Suite à la conclusion décevante du CDD, les pays développés et les
institutions financières internationales conduites par le FMI et la BM ont
utilisé les crises économiques et alimentaires pour faire pression sur les pays
en développement et les pousser à revenir autour de la table des
négociations.
En décembre 2013, la neuvième Conférence ministérielle de l’OMC à
Bali (Indonésie) aboutit à un nouveau paquet de commerce qui faisait
partie du CDD. Au début de la Conférence, certains pays membres et la
société civile ont mis tous leurs espoirs sur les contre-propositions du
Groupe 33 (G33) des pays en développement pour tourner les négociations
en faveur des pays et secteurs pauvres tels que le secteur agricole.
L’Inde a d’abord déclaré que sa sécurité alimentaire n’était pas
négociable dans ses objections à une provision sur l’agriculture qui
entrerait en conflit avec son nouveau projet de loi sur la sécurité
alimentaire.
Cuba, avec la Bolivie, le Nicaragua et le Venezuela, a entre temps
insisté sur le fait que le texte lié à la transparence et à la non-discrimination
(embargo américain sur Cuba) avait été oublié (Third World Network,
2014).
À la dernière minute, l’Inde et les pays d’Amérique latine ont fait
marche arrière sur leurs positions. L’Inde s’est finalement arrêtée sur une
soi-disant « clause de paix » qui autorise les subventions aux agriculteurs
pendant une période temporaire (Third World Network, 2014).
L’inquiétude de Cuba a été abordée dans le texte révisé de la Déclaration
ministérielle de Bali avec l’inclusion d’un paragraphe réaffirmant le
principe de non-discrimination de l’AGETAC.
Le nouvel accord comprenait quelques-unes des meilleures promesses
d’effort en matière de problèmes liés aux pays les moins avancés en
matière d’agriculture, mais l’élément le plus important approuvé dans le
paquet de Bali était l’accord sur la facilitation du commerce. Il correspond
à l’une des demandes clés des pays développés lors de la Conférence
ministérielle de Singapour.
En pratique, toutefois, l’accord était plus favorable aux pays
développés qui présentaient des capacités de production et d’exportation
plus importantes (IBON International, 2013). Premièrement, l’accord
limitait grandement les subventions pour la culture du grain des
13
gouvernements des pays en développement. Ces subventions sont
nécessaires pour assurer les programmes de stockage alimentaire, et les
réduire compromettrait leur souveraineté alimentaire. Ensuite, l’AFC
signifierait simplement que les pays en développement, dont l’industrie et
l’agriculture fragiles étaient ébranlées par les conséquences d’un
commerce inégal, seraient d’autant plus affaiblis par le déluge accéléré de
biens et de services en provenance des pays développés. Pour ce faire, il
faudrait que les pays en développement mettent en place un ensemble de
règles reflétant la pratique actuelle de facilitation du commerce des pays
développés. Le projet de texte et la version adoptée du paquet de Bali ne
demandaient pas de changement au niveau des lois ou des réglementations
des pays en développement, « mais seulement dans les pays en
développement qui devraient contracter des coûts supplémentaires dus à
des infrastructures – sans aucun avantage pour
eux »(ThirdWorldNetwork,2015).De plus, l’AFC devrait créer de
nouveaux marchés –pour les douanes et le traitement des expéditions des
multinationales et devrait normalement conduire à la privatisation future
des ports, des opérations de douane et du traitement des expéditions.
Après la Conférence ministérielle de Bali, les pourparlers de l’OMC
sont une fois de plus sur la sellette. Lors de la réunion des ministres du
Commerce en juin 2015 à Paris, l’Inde a exprimé son mécontentement
concernant les faibles avancées des discussions sur les autres éléments du
paquet de Bali. Parmi ceux-ci se trouvaient la solution permanente à la
proposition pour la sécurité alimentaire et les priorités de développement
pour les pays les moins avancés (Ganguly,2015), telles que la baisse
significative ou carrément l’abandon des tarifs douaniers et l’amélioration
des mesures d’accès au marché pour les exportations des PMA.
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15
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C H A P I T R E 2
Au-delà de l’OMC : Un nouvel accord de commerce en ascension
Les institutions multinationalesn’ont jamais été envisagées comme
étant un moyen exclusif par lequel la libéralisation du commerce serait
facilitée. Le blocage des négociations de l’OMC a accru l’importance des
autres voies pour les pays développés et leursentreprises, afin qu’ils
poursuivent le programme qu’ils n’ont jusqu’à présent pas réussi à tenir
par le biais de moyens multilatéraux. Les nouveaux accords de libre-
échange représentent le point d’orgue de nombreuses tentatives
d’impérialisme pour élargir et approfondir l’étendue du libre-échange
néolibéral par des biais bilatéraux, régionaux ou plurilatéraux.
Accords de libre-échange : L’OMC : plus d’engagements, moins de flexibilité
L’AGETAC reconnaissait la constitution d’accords d’intégration
économique entre les pays et les régions et anticipait le fait que les pays
négocieraient à la fois des « zones de libre-échange » et des « unions
douanières » dans le contexte de commerce de biens (Barbee & Lester,2014).
Les accords commerciaux régionaux (ACR) sont des accords qui sont
généralement signés entre des pays voisins, tandis que les accords
commerciaux bilatéraux sont des accords entre deux parties, qui peuvent
être un pays, un bloc commercial ou un groupe informel de pays.
Les accords commerciaux régionaux ou bilatéraux ont pour but de
supprimer les tarifs douaniers, les quotas sur l’importation et les
préférences sur les biens et services échangés entre des pays membres.
17
18
En éliminant les tarifs douaniers, les pays parties à un ALE sont exemptés
des règles tarifaires des clauses de la nation la plus favorisée (NPF). La
clause NPFstipule que les pays disposant du statut NPF ne doivent pas être
désavantagéspar le pays porteur par rapport à tout autre pays disposant du
même statut.
Les membres de l’OMC sont tenus de faire part des ACR auxquels ils
prennent part. Depuis le 7 avril 2015, 612 notifications d’ACR (en
comptabilisant les biens, les services et les adhésions séparément) ont été
enregistrées par l’AGECTA/OMC. Parmi celles-ci, 406 étaient déjà en
vigueur. Ces chiffres de l’OMC correspondent aux 449 ACR physiques
(en comptabilisant les biens, services et adhésions ensemble), dont 262
sont actuellement en vigueur (World Trade Organisation,2015).
Les accords commerciaux régionaux bilatéraux offrent aux pays
capitalistes développés une plus grande liberté en comparaison avec ceux
qui sont liés à l’OMC pour gagner l’accès aux marchés de partenaires
commerciaux proches et qui monopolisent les ressources sous des termes
façonnés et déterminés par leurs propres intérêts, sans être confrontés aux
défenseurs majeurs des pays du Sud.
Pour les pays développés, les accords scellés par l’OMC ne
correspondent pas aux attentes. Ce que les États-Unis n’ont pas réussi à
accomplir dans les régimes multilatéraux, tels que la méthode de la liste
négative, des propositions immobiles, d’autres évolutions, des
propositions pour l’ADPIC et le MIC, ils ont maintenant davantage la
possibilité de le faire par le biais d’accords de libre-échange.
Par exemple, lors des négociations qui ont conduit à l’adoption de
l’AGCS, les États-Unis ont fortement encouragé la méthode de la liste
négative pour couvrir tous les secteurs sauf ceux spécifiquement
dispensés. La plupart des gouvernements du Sud étaient opposés à la
méthode de la liste négative et demandaient une certaine flexibilité pour
déterminer quels secteurs devaient être impliqués. Le résultat final de
l’AGCS tient à une approche hybride pour la couverture des secteurs et
des mesures, combinée à la fois avec les méthodes de la « liste positive »
et la « liste négative ». Bien que ce passage de l’AGCS soit une étape
importante pour les pays en développement qui poussent à la libéralisation
des services, cette victoire est incomplète puisqu’elle porte les marques
des pressions et des tiraillements entre les pays développés et ceux en
développement.
19
Prémisses des accords de libre-échange
Selon Jane Kelsey (2008), les accords de libre-échange sont apparus
par vague correspondant à des moments critiques dans les négociations
multilatérales (pp. 50- 51).
La première vague a vu l’inclusion des services dans les traités
commerciaux bilatéraux en 1987 avec l’Accord de libre-échange canado-
américain (ALE) et l’annexe des services àl’Accord commercial de
rapprochement des relations économiques entre l’Australie et la Nouvelle-
Zélande (ANZCERTA en anglais). Tous les gouvernements impliqués dans
les accords étaient les principaux promoteurs de l’AGCS et ont recours aux
négociations bilatérales pour mettre en œuvre des propositions pour le cycle
de l’Uruguay. En 1994, le contenu et l’architecture de ces accords vont plus
loin que le compromis qu’était l’AGCS.
La deuxième vague s’est déroulée à la fin des années 1980 quand le
cycle de l’Uruguay était paralysé. Les États-Unis et le Canada ont, avec le
Mexique, élargi l’ALE pour lancer l’Accord de libre-échange nord-
américain (ALENA). Cet accord est entré en vigueur le 1er janvier 1994,
supplantant l’Accord de libre-échange canado-américain.
L’ALENA se pose en rupture profonde avec les ALE basiques à ce moment
puisqu’il va au-delà de la réduction des tarifs douaniers et des quotas sur
l’importation. Les tarifs douaniers au sein de l’Amérique du Nord étaient déjà
très bas à l’époque où l’ALENA a été négocié (US
CongressionalDelegation,2003).L’accord a essentiellement pour objet
d’accorder des privilèges et une protection aux entreprises et aux
investisseurs. Au-delà du traitement égalitaire pour les entreprises
étrangères et nationales, il garantit également le droit des entreprises à
un « traitement juste et équitable ainsi qu’à une protection et une
sécurité complète » en accord avec le droit international. En outre,
l’accord exige des États qu’ils récompensent les investisseurs qui ont
« directement ou indirectement » nationalisé ou exproprié un
investissement, ou qui ont pris des mesures « équivalentes à la
nationalisation ou à l’expropriation » (American FederationofLabor-
CongressofIndustrialOrganisations,2014,p.3).Le mécanisme contraignant
de ces droits était l’outil légal puissant connu comme le Mécanisme de
règlement des différends entre investisseurs et États (abrégé ISDS en
anglais), précurseur des autres versions de l’ISDS inscrites dans différents
accords commerciaux régionaux et bilatéraux aujourd’hui.
L’ALENA a ouvert les mesures réglementaires aux enjeux supranationaux,
obligeant les États à protéger les droits à la propriété intellectuelle, à établir des
20
règles pour le commerce des services, notamment la non-discrimination et le
droit d’accès, et à restreindre les exigences du gouvernement concernant les
marchés publics (p. 3). Ce qui était à l’origine des questions examinées au
travers de processus nationaux publics, telles que la sécurité alimentaire,
les brevets et les copyrights, l’utilisation du sol et les ressources naturelles,
l’accréditation professionnelle, la passation des marchés du gouvernement
et la réglementation du secteur des services dans des domaines tels que les
soins de santé, les services financiers, l’énergie et la télécommunication,
sont devenues des sujets de contestation pour les entreprises privées et ont
été portées devant des groupes d’arbitrage privés composés de trois
particuliers (non-responsables).
De l’autre côté de l’Atlantique, en 1993, la nouvelle Union européenne
se transforme en un énorme marché interne avec une libre circulation des
biens, des personnes, des services et des capitaux(Kelsey,2008).Bien qu’il
se soit largement étendu, en passant d’un ALE et d’union douanière à un
marché unique, l’union monétaire à l’adhésion limitée, l’Union
européenne (UE) est un bon exemple d’une intégration régionale et d’une
collaboration économique (Barbee & Lester, 2014). L’UE est aujourd’hui
le bloc de commerce le plus développé, avec ses 28 États membres.
L’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Japon ne voulaient pas être
laissés de côté (Kelsey,2008).En 1989, l’Australie initie une série de
réunions des ministres du Commerce du Japon, des pays ANASE, des
États-Unis et du Canada. En 1994, la Coopération économique pour
l’Asie-Pacifique (CEAP) établit les objectifs du libre-échange et de
l’investissement dans des biens et services parmi les économies les plus
riches de la région d’ici à 2010, et le reste pour 2020.
Ces évolutions ont été interrompues par une accalmie à la moitié des
années 1990 avec la mise en œuvre de l’OMC et avec l’intérêt des États-
Unis et de l’Europe centrés sur les négociations de l’AGCS sur la
télécommunication et les services financiers.
La vague actuelle a commencé à la fin des années 1990, en même
temps que la crise d’Asie de l’Est, l’effondrement de la Conférence
ministérielle de Seattle et le manque de progrès dans le cycle de Doha sur
le développement.Ces accords bilatéraux et régionaux sont aujourd’hui
dominés par les États-Unis et l’UE.
Les accords de libre-échange du 21e siècle : un aperçu
Récemment, des accords commerciaux régionaux et bilatéraux sont
apparus comme un moyen de sortir de l’impasse dans laquelle se trouvait
l’OMC et de conserver l’élan pour libéraliser. Ces nouveaux accords de
libre-échange sont médiatisés comme étant la référence absolue pour les
21
accords du 21e siècle. Contrairement aux accords conclus à l’OMC, où les
propositions des pays développés sont toujours confrontées à la résistance
des gouvernements sceptiques des pays en développement, les nouveaux
accords de libre-échange offrent un large champ aux pays en
développement et leurs entreprises pour exercer des pressions concertées
pour influencer l’adoption de politiques économiques néolibérales à la fois
dans les économies développées et celles en développement (Gathii,2011).
Cette section se concentre sur les principaux accords de commerce, à
savoir le Partenariat transatlantique d’investissement et de commerce
(abrégé TTIP en anglais), l’Accord économique et commercial global
entre le Canada et l’UE (AECG), le Partenariat transpacifique (TPP) et
l’Accord sur le commerce des services (ACS).
Le Partenariat transatlantique d’investissement et de commerce (TTIP)
Le Partenariat transatlantique d’investissement et de commerce (TTIP)
est une vaste négociation commerciale bilatérale qui se tient –
principalement en secret – entre l’Union européenne et les États-Unis. Le
président américain Barack Obama est le premier a avoir annoncé
publiquement, lors de son discours de l’état de l’Union en février 2013,
l’intention de lancer le TTIP.
Les États-Unis et l’UE détiennent ensemble 60 % du PNB mondial,
33 % du commerce mondial de biens et 42 % du commerce mondial de
services. Une zone de libre-échange entre les deux représenterait
potentiellement le plus grand accord de libre-échange régional de
l’histoire, couvrant 46 % du PNB mondial (InternationalMonetary Fund,
2013).
Les investissements des États-Unis dans l’UE sont trois fois plus
importants que les investissements américains dans toute l’Asie. Les
investissements européens aux États-Unis sont, quant à eux, huit fois plus
élevés que ceux réalisés en Inde et en Chine ensemble. Les transferts
internes semblent constituer un tiers de tous les échanges transatlantiques.
Les États-Unis et l’UE sont les plus grands partenaires commerciaux de la
plupart des pays du monde et représentent un tiers des flux commerciaux
mondiaux(Commission européenne,2015).
Comme l’admettent des responsables des deux côtés, l’objectif
premier du TTIP n’est pas de faciliter le commerce en supprimant les
tarifs douaniers entre l’UE et les E.-U., étant donné que les tarifs
actuellement appliqués sont déjà très bas (moins de trois pour cent). L’idée
maitresse de cet accord est de retirer ou de diminuer les limitations
réglementaires qui réduisent les profits potentiels des entreprises
transnationales sur les deux rives de l’Atlantique.
22
L’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’UE
L’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’UE
(AECG) est un accord bilatéral de libre-échange entre le Canada et
l’Union européenne. En septembre 2014, le Canada et l’UE ont annoncé la
conclusion des négociations bien que l’accord soit toujours en attente de
l’approbation du Conseil de l’UE et du Parlement européen. Si l’AECG
est adopté, il prendra effet en 2016 au plus tôt, moment auquel les
échanges commerciaux bilatéraux de biens et de services devraient
augmenter de 23 pour cent, soit 26 milliards d’euros, et 99 pour cent des
tarifs douaniers devraient être supprimés (Commission
européenne,2015).L’AECG est de loin l’initiative bilatérale canadienne la plus
importante, et on s’attend à ce que celle-ci surpasse l’ALENA.
L’AECG est construit sur l’Accord d’échange de renseignements fiscaux
Canada UE (abrégé TIEA en anglais) dont le but était d’aller au-delà des
problèmes d’accès au marché traditionnel, tels que la facilitation du commerce
et des investissements, la compétition, les services financiers, l’e-commerce, les
sciences et technologies et la coopération réglementaire. Le TIEA a duré
jusqu’en 2006, moment où le Canada et l’UE décidèrent de suspendre les
négociations.
23
L’Accord de partenariat transpacifique (TPP)
Le Partenariat transpacifique ou TPP est un traité régional
réglementaire et d’investissement. Cet accord implique des pays tels que
l’Australie, le Brunei, le Canada, le Chili, le Japon, la Malaisie, le
Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour, les États-Unis et le
Vietnam. Les défenseurs du TPP expliquent que l’accord instaurera la
« référence absolue » pour les accords de commerce à venir au 21e siècle.
L’histoire de l’accord proposé remonte à 2005 et portait alors le nom
de Partenariat stratégique transpacifique (abrégé TPSEP en anglais, ou
P4)et rassemblait à la base le Chili, la Nouvelle-Zélande, Singapour et le
Brunei. En septembre 2008, le représentant américain pour le commerce
annonce que les États-Unis vont négocier leur entrée dans l’accord du P4,
normalement à partir de mars 2009. En novembre 2008, les
gouvernements autralien, péruvien et vietnamien annoncent également
leur inclusion, tandis que les gouvernements chilien et américain exercent
de fortes pressions sur le gouvernement coréen pur que celui rejoigne
aussi l’accord. Ainsi se dresse le spectre d’un accord P4, aujourd’hui
appelé accord de Partenariat transpacifique (TPP) et qui se transforme en
un accord aussi large que l’APEC, de libre-échange global, confirmé par
l’administration Obama. La mise en œuvre du TPP est au cœur de
l’agenda du président américain dans le cadre du « Pivot asiatique » pour
les États-Unis.
Selon les estimations, l’ensemble du PNB des actuelles parties au TPP
s’élève à environ 27,5 billions de dollars, comprenant 40 pour cent du
PNB mondial total et un tiers du commerce global. De ce montant, les
États-Unis représentent approximativement 15,5 billions de dollars, soit
près de 60 pour cent du PNB du TPP. La taille de l’économie américaine
et l’importance stratégique pour les autres parties indiquent que l’approche
des E.-U. par rapport au TPP constituera le point de départ pour les
négociations et influencera grandement les résultats.
À l’instar du TTIP, le TPP est négocié en secret. Ainsi, la plupart des
informations proviennent de documents qui ont fait l’objet d’une fuite.
Contrairement aux précédents accords commerciaux, le public n’a pas
accès au texte. Les législateurs n’ont le droit de voir que des parties du
texte et sur demande formelle. Ils n’ont pas le droit de prendre de notes ni
d’en faire des copies. Ils ne peuvent pas parler publiquement de ce qu’ils
ont lu. En revanche, plus de 600 conseillers d’entreprise ont accès au
document sur leur ordinateur, et ce en direct pendant les négociations.
24
Parties aux négociations du TPP
Pays Statut Date
Brunei Premier signataire Juin 2005
Chili Premier signataire Juin 2005
Nouvelle Zélande Premier signataire Juin 2005
Singapour Premier signataire Juin 2005
Etats-Unis Premier signataire Février 2008
Australie Premier signataire Février 2008
Pérou Premier signataire Février 2008
Vietnam Premier signataire Février 2008
Malaisie Premier signataire Octobre 2010
Mexique En négociation Octobre 2010
Canada Premier signataire Octobre 2010
Japon Premier signataire Mars 2013
Taiwan A annoncé son intérêt Septembre 2013
République de Corée A annoncé son intérêt Novembre 2013 Source :Wikipedia
Alors que le TPP est négocié comme un accord de commerce, seuls 5
des 29 chapitres traitent de commerce traditionnel. Les autres chapitres
abordent des politiques que les entreprises ont longtemps essayé
d’appliquer, sans jamais y arriver, afin d’avancer par le biais de la
législation au niveau national et/ou par le biais de l’Organisation mondiale
du travail (OMC). Certaines d’entre elles comprennent des protections de
brevet et de propriété, de la dérégulation financière, une position juridique
plus grande pour les investisseurs et les entreprises et l’affaiblissement de
ce que l’on appelle les entreprises publiques.
Accord sur le commerce des services (ACS)
L’Accord sur le commerce des services (ACS) est un traité
commercial international proposé dont le but est de libéraliser
substantiellement les investissements mondiaux au niveau du commerce et
des services. Composé à l’origine de 16 membres, l’ACS s’élargit ensuite
à 24 membres. Les pays négociants sont tous membres de l’Organisation
mondiale du travail (OMC) et représentent la plus grande part des
adhérents à l’Organisation de coopération et de développement
économiques, en plus de huit pays en développement.
Rubriques du TPP
Accès au marché des biens
Textiles et vêtements
Douanes
Facilitation du commerce
Sanitaire and Phytosanitaire(quarantaine)
Obstacles techniques au commerce (étiquetagesandstandards)
Recours commerciaux
Subventions
Droit des marchés publics
Investissements
Services transnationaux
Services financiers
Télécommunications
E-commerce
Mouvement temporaire des personnes physiques
Droits à la propriété intellectuelle
Travail
Environnement
Développement
Capacités commerciales
Compétition
Entreprises publiques
Chaines logistiques
Transparence
Cohérence réglementaire
Dotation initiale
Règlement des différends
Exceptions
Disposition finales
26
Le lobbying des entreprises pour le TPP.En février 2011, les
membres de la US Business Coalition pour le TPP écrit à l’assistant
du président en matière de politique économique afin de mettre en
lumière la priorité qu’ils accordent à « mettre en œuvre un accord de
haute qualité et commercialement viable par le biais d’un partenariat
transpacifique ». La lettre indique qu’il était « vital de créer de
nouvelles possibilités pour nos industries… dans les décennies à
venir dans la région Asie Pacifique à forte croissance ».
Ils ajoutent que « le leadership américain au plus haut niveau est
nécessaire pour résister aux appels qui demandent aux Etats-Unis
d’abaisser les normes, de diminuer l’accès aux marchés ou les failles
que nos pays peuvent utiliser pour refuser l’accès aux biens et
services américains… Les règles que le TPP établit maintenant vont
façonner le modèle pour les relations commerciales entre les Etats-
Unis et l’Asie pacifique pour les décennies à venir ».
La lettre demande que l’accès au marché soit global, qu’il
couvre tous les secteurs et sous-secteurs, notamment toutes les
formes de commerce, à la fois traditionnel et numérique. Tout
accord devrait aussi présenter « … la meilleure protection de la
propriété intellectuelle afin de que ces droits soient mis en œuvre de
manière efficace et transparente dans les pays du TPP ».
Les entreprises veulent également « une protection forte des
investissements, des dispositions relatives à l’accès au marché et un
règlement de différend investisseur/Etat et Etat/Etat. Tous ces
éléments doivent être réunis afin d’installer un environnement légal
sécurisé, stable et non-discriminatoire pour les investissements
américains à l’étranger… »
La lettre réclame « une circulation des biens et service
ponctuelle, efficace, sécurisée et sûre dans le processus de
production et de chaîne logistique » ainsi qu’un TPP qui instaurerait
des « limitations règlementaires qui agissent – intentionnellement ou
non – comme des barrières commerciales par le biais de l’adoption
d’engagements à maintenir des systèmes de réglementation
transparents, efficaces, scientifiques et fondés sur le risque,
applicables et cohérents entre eux ».
27
Ensemble, ils s’appellent eux-mêmes les « Très Bons Amis des Services »
(en anglaise “Really Good Friends of Services (RGFS)”). Les membres de
l’ACS représentent un énorme marché de servicesavec près de 1,6 milliards
de personnes et un PNB groupé de plus de 50 billions de dollars en 2013 –
près de deux tiers de l’économie mondiale. En 2013, ces pays ont exporté
plus de 3,6 billions de dollars de services.
Comme expliqué précédemment, l’AGCS est le traité de l’OMC qui
devait étendre le système de commerce multilatéral au secteur des
services. Avec l’évolution des services technologiques, le changement des
les pratiques commerciales et une intégration globale plus poussée,
l’AGCS était quand même vu comme une limite pour les pays en
développement dans des domaines tels que l’accès au marché, les marchés
publics de services, la non-discrimination en termes de libéralisation totale
et la dérégulation des services. Ces dispositions ont fortement été
opposées au moment où l’AGCS était négocié. Certaines n’ont finalement
pas été incluses dans le résultat final à cause de la pression publique. Les
manifestations à Seattle contre la Conférence ministérielle de l’OMC en
1999 marque le point culminant du mécontentement des peuples.
Les défenseurs de l’ACS expriment leurs frustrations vis-à-vis du
processus lent des services de libéralisation lors du cycle de Doha. En
outre, ils voient l’ACS comme un moyen de libéralisation davantage les
services. Par le biais du processus de l’ACS, cette « coalition des
volontaires » espère contourner les négociations bloquées du cycle de
Doha afin de créer un bloc pro-libéralisation au sein de l’OMC.
Ils veulent également assurer que « les industries publiques
rivalisent dans des conditions équitables avec les entreprises
privées et étrangères ».
Enfin, le US Business Council pour le TPP demande que
« les États-Unis établissent des normes élevées, de bonnes
protections et un accès optimal au marché pour tous les secteurs
clés de l’économie américaine au travers des négociations du
TPP.
Cette lettre a été signée par les 100 entreprises, organisations
et associations américaines les plus puissantes.
Lifted from TPPA :It’s (Not) Our Future, page 11. Consulté le 26
juin 2015 sur le site internet It’s Our Future
NZ :http ://www.itsourfuture.org. nz/wp-
content/uploads/2012/09/TPPA-Booklet-1.pdf
28
Groupe de Revenu
Parties
Pays à revenu élevé
Australie,Canada,Chili,Taipei chinois,Union européenne, Hong Kong, Islande, Israël,
Japon, Liechtenstein,NouvelleZélande,Norvège,Républi
quedeCorée, Suisse, Etats-Unis,Uruguay.
Pays à revenu intermédiaire
Colombie,CostaRica,Mexique,Panama,Pérou,Turquie
Pays à faible revenu
Pakistan,Paraguay
Source :Wikipedia
Les négociations de l’ACS sont définies dans le programme des
entreprises pour l’utilisation des accords de commerce comme plan pour
rendre la privatisation non réversible, pour pousser aux fusions-
acquisitions et à la dérégulation afin d’assurer un plus grand contrôle
corporatif et le lucre des économies nationales et mondiales. L’accord
proposé est le résultat direct d’une pression systématique exercées par les
FTN sur les opérations financières, l’énergie, les transports, la
communication, la construction, le commerce, l’ingénierie, la distribution
de l’eau, la comptabilité, le marketing, la publicité, l’assurance, le
divertissement, les musées, l’éducation, la santé, les services funéraires et
les autres secteurs de services travaillant avec des groupes de lobby tels
que l’US Coalition of Service Industries (USCSI), l’équipe ACS et le
European Services Forum (ESF). Les RGFS ont déjà eu des échanges
intensifs concernant ces domaines, qui devraient aller beaucoup plus loin
que l’AGCS existant.
ALE en contexte : Une Compétition interimpérialiste pour de nouvelles possibilités d’appropriation et de profit
Les puissances impérialistes menées par les États-Unis, l’Union
européenne et le Japon – et leurs grandes entreprises –, couvent
actuellement ces nouveaux accords de libre-échange afin de renforcer
davantage le programme de libéralisation. Ces nouveaux accords de libre-
échange vont permettre d’accélérer le processus de transfert des
ressources, actifs et biens publics aux propriétés des entreprises ; ainsi que
le contrôle qui ‘est devenu l’une des premières politiques des décisions
économiques mondiales depuis les années 1980.
Entreprises et groupes d’intérêt derrière « l’Equipe ACS »
ENTREPRISESS/GROUPES D’INTERET INDUSTRIE
21ST CENTURYFOX Media
ACEGROUP Assurance
AFLAC Assurance
AIG Assurance
AMERICANCOUNCILOFLIFEINSURERS Assurance
AMERICANFARMBUREAUFEDERATION Agriculture
AMERICANINSURANCEASSOCIATION Assurance
AMWAY Transports etLogistique
AT&T Telecom
BSA|THESOFTWAREALLIANCE Hardware
C&MINTERNATIONAL Services commerciaux CommercialServices CASSIDY,LEVY,&KENT Services commerciaux
CHUBBCORPORATION Assurance
CISCOSYSTEMS,INC. Hardware
CITIGROUP Opérations bancaires
COALITION OF SERVICESINDUSTRIES Services
CONSUMERS ELECTRONICASSOCIATION Electronique
COMPUTERANDCOMMUNICATIONS INDUSTRYASSOCIATION
Telecom/Hardware/IT
COUNCIL FOR GLOBALIMMIGRATION Services commerciaux
COUNCILOFINSURANCEAGENTSAND BROKERS
Assurance/Finance
DELOITTE Finance
EBAYINC. Détail discrétionnaire
EMERGENCY COMMITTEE FOR AMERICANTRADE
Services
EXPRESSASSOCIATIONOFAMERICA Transports etLogistique
FEDEX Transports etLogistique
GOOGLE Media
HP Hardware
IBM Services technologiques
INFORMATION TECHNOLOGYINDUSTRY COUNCIL
Services technologiques
Source :TeamTiSAWebSite
Entreprises et groupes d’intérêt derrière « l’Equipe ACS »
ENTREPRISESS/GROUPES D’INTERET INDUSTRIE
INTEL Semi-conducteurs
JPMORGANCHASE Opérations bancaires
KING&SPALDING Services commerciaux
KYLE HOUSEGROUP Services commerciaux
LIBERTYMUTUAL Assurance
MANCHESTERTRADE Domaine financier
MASTERCARD Domaine financier
METLIFE,INC Assurance
MICROSOFT Software
MOTION PICTURE ASSOCIATIONOF AMERICA
Media
NATIONAL FOREIGN TRADECOUNCIL Services commerciaux
NATIONAL RETAILFEDERATION Détail
ORACLECORPORATION Software
PROPERTY CASUALTY INSURERS ASSOCIATION OFAMERICA
Assurance
PRUDENTIAL Assurance
RETAIL INDUSTRY LEADERS ASSOCIATION
Détail
SANDLERTRAVIS&ROSENBERG Services commerciaux
SOFTWARE & INFORMATION INDUSTRY ASSOCIATION
Software/IT
TECHAMERICA Software
TYCO Equipements électriques
UNITED STATES COUNCILFOR INTERNATIONALBUSINESS
Services commerciaux
UPS Transports etlogistique
U.S.CHAMBEROFCOMMERCE Services commerciaux
VERIZON Télécommunication
VISAINTERNATIONAL Domaine financier
WAL-MART Consommation de base
THEWALTDISNEYCOMPANY Media
WESTERNDIGITAL Hardware
WHITE&CASE Services commerciaux Source :TeamTiSAWebSite
31
Nombre des propositions des nouveaux accords de libre-échange
requièrent la corporatisation des biens et services publics. Ceux-ci doivent
être soumis à la logique du marché. De manière générale, ces accords
commerciaux mettent en œuvre le programme de libéralisation par le biais
de :
• La Dérégulation des services privés et publics en déclarant la
régulation nationale comme distorsions commerciales
• L’accès égal aux fournisseurs étrangers privés pour le financement
public des services
• L’interdiction pour les gouvernements de protéger la santé
publique et la sécurité environnementale en contrôlant le nombre
de fournisseurs de services dans certains secteurs
• La proscription de disposition gouvernementale exclusive
concernant les services publics et compensation requise à
l’attention des fournisseurs de services privés en cas de (potentiel)
gain manqué
• L’interdiction pour les gouvernements d’établir ou de maintenir
des exigences sur les conditions de travail pour les employés des
fournisseurs de services du gouvernement
• L’autorisation pour les entreprises étrangères et les gouvernements
de contester des lois liées à la santé et à la sécurité des travailleurs,
des lois sur les effectifs, les normes professionnelles et les
règlementations d’intérêt public comme les barrières au commerce
(Citizens Trade Campaign, 2015)
L’économiste politique et activiste David Harvey recourt au terme
« accumulation par dépossession » pour décrire le saccage des valeurs du
monde
– À la fois les humains et la nature – dans cette quête insatiable des
capitalistes pour le profit. L’accumulation par la dépossession qui se
poursuit à cette époque de la mondialisation néolibérale permet de
comprendre comment la distinction de classe dans le capitalisme a conduit
à l’expropriation des producteurs directs suite à la privatisation des
moyens de production (outils, machines, usines et terres). Cette
privatisation a contribué à la création d’une multitude de gens sans
propriété ou moyens à l’exception de leur force de travail. Ce processus
continue aujourd’hui avec la privatisation de ce qui était les services
publics à l’attention des entreprises lucratives : l’eau, l’éducation et les
32
soins de santé ; le recours au système du crédit international (en particulier
le FMI/la Banque mondiale) comme moyen de transfert de richesse du
Sud au Nord ; et l’utilisation des droits à la propriété intellectuelle pour
modifier ce qui était autrefois détenu en commun (par exemple : les terres
et les semences).
Le déplacement des populations de paysans et la formation d’un
prolétariat sans terre se sont accélérés dans des pays tels que le
Mexique et l’Inde au cours des trente dernières années. De
nombreuses ressources, autrefois propriétés communes, telles que
l’eau, ont été privatisées (souvent à l’insistance de la Banque
mondiale) et ont conduit, dans la logique capitaliste
d’accumulation, à la suppression de formes alternatives (indigènes
et même, dans le cas des États-Unis, les petites productions) de
production et de consommation. Les industries nationalisées ont
été privatisées. L’agriculture familiale a été avalée par
l’agroalimentaire.
—Harvey, 2003
Une autre force motrice favorisant les accords de libre-échange est
l’importance croissante du secteur de services dans l’économie mondiale.
Comme les pays développés perdent leur avantage concurrentiel dans la
fabrication, ils cherchent maintenant à créer de nouveaux marchés par le
biais de services. Aujourd’hui, les services constituent les éléments les
plus dynamiques des économies des pays développés. Pour les pays de
l’OCDE, les services comptent pour 60 à 70 pour cent du PNB.
Depuis le 18e siècle, le secteur manufacturier est le moteur principal de
la croissance économique dans les pays industrialisés. Toutefois, à partir
des années 1960, le capitalisme industriel commence à se défaire des
grands fabricants américains et des autres pays riches industrialisés,
transférant les parts à faible valeur de leur production vers les pays
pauvres en développement. La production industrielle continue alorsà
puiser dans les meilleurs matériaux bruts, technologies, force de travail bon
marché, marchés et compétition minimisée. Comme les chaines de production
internationalement intégrées grandissent, les activités principales de production, la
consommation, la circulation – même celle du capital –, la force de travail, les
matériaux bruts, la gestion des informations, la technologie et les marchés
s’organisent mieux à une échelle mondiale par le biais de réseaux entre les agents
économiques. Cette transformationaccentue progressivement le poids
économique et transforme la fonction des services, notamment les
transports, la communication, l’échange de données et la gestion, les
transferts financiers et technologiques, le stockage et la vente en gros et la
vente au détail. (Kelsey,2008)
D’importants gains commerciaux sont à prévoir si la libéralisation du
commerce et des investissements dans les services est menée avec succès
33
(Hufbauer & Scott, 2013).
Pour les États-Unis, le ratio actuel des exportations par rapport aux
ventes pour les services commerciaux échangeables s’élève seulement à
0,04. Par contre, le ratio est de 0,2 pour les manufactures. Si les obstacles
politiques aux services commerciaux étaient surmontés, facilitant une
augmentation du ratio des exportations par rapport aux ventes à 0,1 – la
moitié du ratio des manufactures – l’exportation des services
commerciaux pourrait croître de 300 milliards de dollars par an. De la
même façon, l’exportation mondiale de services échangeables indique des
gains de 1,1 milliard de dollars. Les profits de cette ampleur
représenteraient une augmentation de 6 pour cent dans le total des
exportations mondiales des biens et des services.
Le tableau ci-dessous montre les estimations des gains pour les pays
OCDE dus à la libéralisation du commerce des services. En supposant une
augmentation du ratio des exportations par rapport aux ventes à 0,1, les
pays de l’OCDE pourraient tirer des gains d’exportation potentiels
s’élevant à 720 milliards de dollars. Les États-Unis pourraient bénéficier
de la plus grande part de ces gains, quelque 41 pour cent ou 296 milliards
de nouvelles exportations, suivis par le Japon avec 13 pour cent ou 92
milliards de dollars.
En combinant tous les pays, cela se traduirait par un gain de près de
1,1 milliard de dollars –plus des deuxtiers revenant aux pays de l’OCDE.
Un service économique mondialisé nécessite un régime légal
uniformisé et global pour faciliter son expansion. Une cible logiquedes
puissantes entreprises qui négocient le « commerce des services » sont dès
lors les lois, les politiques et les règlementations qui gouvernent les
services à l’intérieur des frontières nationales. Ces frontières sont vues par
les sociétés de services comme des « barrières » à leur expansion. Ce
sentiment a été confirmé par le Secrétariat de l’OMC lors de sa
déclaration, dans laquelle il a été expliqué que le but du commerce des
services est de discipliner les pouvoirs réglementaires des gouvernements
« parce qu’une part aussi importante du commerce des services s’installe
dans les économies nationales… Ses exigences vont, dès le début,
nécessairement influencer les lois et règlementations nationales comme ça
a été le cas avec l’AGCS seulement au cours des dernières années »
(WorldTrade Organisation,2006).
Selon Bronwyn Morgan, les accords de commerce des services sont
des exemples de « métaréglementation » qui cherchent à réguler le
processus de régulation lui-même, à institutionnaliser la gouvernance
promarché et à l’incorporer dans la prise de décision gouvernementale (in
Kelsey, 2008). Ces accords de commerce présentent des caractéristiques
semblables à une Constitution et lies les mains de ses successeurs en
34
explorant des alternatives pour réguler les services de leur pays.
Gains estimés de l’exportation grâce à la libéralisation des services,2010
Pays
PNB (milliards de $)
Intermédiation
financière,
immobilier,
location,
activités
commerciale1
(pour cent du
PNB)
Valeur
ajoutée
estimée des
services
échangeable2(
milliards de $)
Gains
d’exportation estimés3
(milliards de $)
Allemagne 3259 30 993 60
Australie* 1132 32 356 21
Autriche 377 24 90 5
Belgique 467 30 142 8
Canada* 1577 26 410 25
Chili 216 21 45 3
Corée 1,014 19 193 12
Danemark 312 27 84 5
Espagne 1,383 23 316 19
Estonie 19 24 4 0
Etats-Unis* 14,447 34 4,937 296
Finlande 236 24 57 3
France 2549 34 867 52
Grèce 299 20 61 4
Hongrie 129 23 30 2
Islande* 13 37 5 0
Irlande* 205 28 57 3
Israël* 217 28 61 4
Italie* 2,044 28 580 35
Japon 5,488 28 1,534 92
Luxembourg 53 51 27 2
Mexique* 1,036 21 216 13
Pays-Bas 774 28 215 13
Nouvelle Zélande*
142 30 43 3
p.d. : pas disponible Source : Hufbauer&Scott(2013).PayofffromtheWorldTradeAgenda.PetersonInstituteforInternational Economics
35
Gains estimés de l’exportation grâce à la libéralisation des services, 2010
Pays
PNB (milliards de $)
Intermédiation
financière,
immobilier,
location,
activités
commerciale1
(pour cent du
PNB)
Valeur
ajoutée
estimée des
services
échangeable2(milliards
de $)
Gains
d’exportation estimés3
(milliards de $)
Norvège 418 20 82 5
Pologne 470 18 85 5
Portugal 227 23 52 3
République slovaque
87 19 17 1
République tchèque
198 18 36 2
Royaume Uni
2,252 34 758 45
Slovénie 47 23 11 1
Suède 462 25 113 7
Suisse 529 23 121 7
Turquie 731 22 162 10
Total OCDE 42,881 30 12,750 766
Total du reste du monde
20,325 p.d. p.d. 363
Total mondial*l 63,136 p.d. p.d. 1,129 p.d. : pas disponible Source : Hufbauer & Scott (2013). Payoff from the World Trade Agenda. Peterson Institute for International Economics
Nouvelle ruée des puissances mondiales vers les territoires
Les nouveaux accords de libre-échange qui sont négociés reflètent la
compétition grandissante pour l’hégémonie économique et politique à
travers les régions du monde. Loin d’être un moyen pour le monde de
s’ouvrir à davantage d’intensification commerciale et de libérer le
capitalisme de ses propres entraves, ces nouveaux accordsde libre-échange
risquent de diviser le monde en deux blocs ou plus, déclenchant une
guerre économique entre eux (Morley,2014).
36
Au cours des vingt dernières années, les parts de l’UE dans le
commerce mondial sont tombées de 45 pour cent à plus ou moins 34 pour
cent et présentent les signes d’un plus grand déclin. La pression due à
l’essor de production et aux bas salaires en Chine se fait de plus en plus
sentir. Le pouvoir économique faiblissant est d’autant plus exacerbé par
une pertinence politique de l’UE à la baisse, comme le montre sa défaite
dans la crise en Crimée.
Les pressions actuelles des États-Unis pour accord de libre-échange
avec l’UE par le biais du TTIP permettraient de marier le capital européen
à celui des États-Unis dans un front commun contre la Chine et la Russie.
Pour l’Europe de l’Ouest, cela représente une occasion de renoncer à son
économie faiblissant et son importance politique :
Les dirigeants européens ne voient pas d’autre choix que de se lier
aux États-Unis, plus grande puissance militaire et politique unifiée,
afin de négocier fructueusement les eaux agitées d’un « siècle
pacifique ». D’un point de vue économique, ces dirigeants espèrent
également utiliser le TTIP non pas tellement comme une source de
croissance générale, mais plutôt comme une couverture légale pour
leurs mesures d’austérité appliquées à la classe ouvrière, vu qu’ils
veulent que la force de travail européenne devienne aussi
« efficace » que celle de Chine.
—Morley,2014
Ne voulant pas être en reste, la Russie choisit sa propre voie en
établissant une Union économique eurasiatique (UEEA). Le traité a été
signé le 29 mars 2014 par le Belarus, le Kazakhstan et la Russie, et est
entré en vigueur le 1er janvier 2015. L’Arménie y a adhéré le 2 janvier
2015 tandis que le Kirghizstan devrait le joindre en mai.
Conçu à l’image de l’UE, ce traité présente un organe exécutif, la
Commission économique eurasiatique exécutif, basé à Moscou et un
organe politique, le Conseil économique eurasiatique suprême, où les
dirigeants des États membres prennent des décisions à l’unanimité.
L’UEEA comprend la libre circulation des travailleurs et un marché
unique pour la construction, le détail et le tourisme. Au cours des dix
prochaines années, il vise à créer une cour à Minsk, un régulateur
financier à Astana, et à ouvrir des bureaux de la Commission
économique eurasiatique à Astana, Bichkek, Minsk et Erevan. Il vise
également à lancer la libre circulation des capitaux, biens et services et
à étendre son marché unique à 40 autres secteurs, le prochain étant le
secteur pharmaceutique en 2016.
37
La Russie prépare actuellement les négociations avec les dirigeants
européens pour les convaincre de préférer l’UEEA au TTIP. L’ours russe
explique qu’un nouveau bloc dirigé par la Russie est un meilleur et plus
naturel partenaire que les E.-U. (Durden,2015).
Le TPP est encore plus alimenté par la géopolitique que le TTIP. Il est
« l’élément central de la doctrine du ‘Pivot asiatique’ » qui occupe les
think tanks et les décideurs politiques à Washington.
La doctrine du Pivot asiatique des États Unis arrive à une période où
les E.-U. sont profondément empêtrés dans une crise impérialiste
provoquée par ses guerres d’occupation ratées au Moyen-Orient ainsi que
par la grande récession qui a suivi l’explosion de la bulle immobilière mi-
2007.
En revanche, la Chine enregistre des taux de croissance annuels à deux
chiffres. Le pays a misé sur une politique du « Go Out » et a conclu des
accords de commerce et d’investissement en Afrique. Même en Amérique
latine, « l’arrière-cour » très privée des États-Unis, la Chine est devenue le
plus grand partenaire commercial et la plus importante source
d’investissement de capital dans les infrastructures pour transporter des
matériaux bruts en Chine (Chang,2013).
Sur la scène internationale, la Chine s’est forgé une réputation de
champion des pays en développement. Considérée comme l’une des
figures de proue du groupe des 77 pays en développement (G77), la Chine
est considérée comme l’un des coordinateurs des intérêts des pays en
développement lors du cycle de Doha pour le développement et lors des
différents sommets pour le climat. Ashley Smith explique que,
paradoxalement, la Chine est elle-même impliquée dans de nombreux
conflits avec d’autres puissances émergentes telles que le Brésil, où le
secteur manufacturier est de plus en plus amoindri par les exportations
chinoises. Toutefois, l’Empire du Milieu continue d’élargir ses alliances
au-delà la zone d’influence américaine afin d’inclure ceux avec lesquels
les E.-U. sont économiquement intégrés, comme le Japon parmi
d’autres(Smith,2013).
En réponse, en janvier 2012, le président américain Barack Obama a
présenté une nouvelle orientation stratégique de défense appelée
« Maintenir le leadership américain : Priorités pour la défense du 21e
siècle ». Il a également annoncé que 60 % des ressources militaires
américaines passeraient de l’Irak et de l’Afghanistan au Pacifique, en par
le biais d’un déploiement stratégique autour de la Chine. Avec ces
mesures, les E.-U. espèrent réorienter leur positionnement stratégique dans
la région.
39
Pour ce faire, les États-Unis rassemblent des pays dans la région pour former un bloc
politique contre la Chine. Les E.-U. maintiennent des alliances fortes avec de grandes
puissances telles que l’Australie, le Japon et la Corée du Sud. Ils possèdent également des
partisans inébranlables comme la Thaïlande et les Philippines tout en accomplissant des
percées diplomatiques avec l’Inde, l’Indonésie et le Vietnam.
Les E.-U. essaient également de convaincre des pays d’abandonner le camp de la
Chine. Cela s’est transformé en des décennies d’isolation politique pour le Myanmar dans
le but d’influencer ce pays pour qu’il transfère sa loyauté politique et économique aux
États-Unis. En réponse, le Myanmar a suspendu ses contrats avec Beijing pour mettre sur
pied un projet hydroélectrique – de 3,6 milliards de dollars – sur la rivière Irradaway et
qui aurait fourni de l’énergie à la Chine (Chanda, 2012). Les E.-U. ont poursuivi la même
stratégie avec le Cambodge qui a reçu, au cours des trente dernières années, 2,1 milliards
de dollars de la Chine. En 2012, le Cambodge a alors reçu 70 millions de dollars d’aide
des États-Unis pour améliorer la santé, l’éducation, la gouvernance et la croissance
économique. Pour symboliser l’importance d’avoir ramené le Myanmar et le Cambodge
dans le camp américain, Obama a visité ces pays – en même temps que la Thaïlande –
après sa victoire présidentielle en 2012.
En outre, les États-Unis continuent d’entretenir les hostilités entre la Chine et de
nombreux États asiatiques. Dans ces conflits entre la Chine et d’autres États asiatiques sur
des îles stratégiques dans les mers au sud et à l’est de l’Empire du Milieu, les E.-U. se
projettent eux-mêmes en tant que médiateur et en tant qu’allier des puissances les plus
faibles. Les États-Unis utilisent aussi le programme nucléaire nord-coréen pour retenir la
Corée du Sud qui, jusqu’à peu, s’éloignait du camp américain à cause de ses liens
économiques cruciaux avec la Chine.
Les États-Unis participent également aux organismes multilatéraux dans la région,
notamment l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE), la Coopération
économique pour l’Asie-Pacifique (abrégé APEC en anglais) et le Sommet de l’Asie
orientale
Ce qui complète cette adaptabilité de la politique américaine, c’est l’expansion des
accords régionaux et bilatéraux afin de contrarier l’intégration économique de l’Asie par
la Chine. En 2011, l’Accord de libre-échange entre les E.-U. et la Corée (KORUS) est
ratifié. Selon le Bureau du représentant américain au commerce, l’accord représente « un
modèle pour les accords commerciaux pour le reste de la région, et souligne
l’engagement et l’implication des États-Unis dans la région Asie-Pacifique ».
Le TPP est le projet américain le plus ambitieux pour se positionner en tant
qu’alternative à la Chine. Dans une étude commandée par le ministère de la Défense des
États-Unis, le Centre des études stratégiques et internationales (CSIS) révèle que
41
le caractère intrinsèquement impérialiste du TPP. L’étude met en avant le
fait que cet accord « pourrait jeter les bases d’une architecture durable du
libre-échangetranspacifique qui soutiendrait l’influence des États-Unis sur
la région et son accès. Les E.-U. espèrent au bout du compte transformer
cette région en un bloc commercial, l’Accord de libre-échange Asie-
Pacifique. Si cela se confirmait, cet accord serait le plus grand accord
commercial depuis l’ALENA ».
La Chine est prête à contrer les manœuvres américaines avec de
nombreux accords commerciaux bilatéraux et multilatéraux. La Chine, le
Japon et la Corée du Sud essaient de mettre en place un cadre pour un
accord commercial à trois, même si les tensions politiques restent
importantes (Brereton-Fukui & Sekiguchi,2012).
Qui plus est, la Chine poursuit son Partenariat économique régional
global (RCEP) comme contrepoids au TPP américain. L’ALE mené par la
Chine comprend l’Australie, le Japon, l’Inde, la Corée du Sud, la nouvelle
Zélande et les dix États membres de l’ANASE. Plusieurs cycles de
négociation se sont déjà déroulés, pratiquement sans débats publics.
Selon David P. Goldman, de plus e plus de membres potentiels du TPP
rejoignent le RCEP dirigé par la Chine (2012). La première raison à ce
phénomène est l’influence sur le déclin des États-Unis en Asie et
l’importance croissante de la Chine. Les exportations chinoises en Asie
ont bondi de 50 pour cent depuis leur pic avant la crise, alors que les
exportations vers les États-Unis ont augmenté de 15 pour cent. Les
exportations chinoises en Asie s’élèvent à 90 milliards de dollars et sont
trois fois plus importantes que celles vers les E.-U.
En 2002, la Chine a importé cinq fois plus en provenance de l’Asie
qu’en provenance des États-Unis. En 2012, l’Empire du Milieu, c’était dix
fois plus. Par conséquent, les devises asiatiques ont commencé à
s’échanger plus facilement avec le yuan chinois qu’avec le dollar
américain. Selon ArvindSubramanian et MartinKessler :
L’essor d’un pays à domination économique entraine souvent un
changement de statut de sa devise, qui devient un point de
référence, avec d’autres devises la suivant de manière implicite ou
explicite. Pour un échantillon comprenant les économies de
marché émergentes, on remarque qu’au cours des deux dernières
années, le yuan est de plus en plus devenu une devise de référence.
Nous estimonsqu’il présente un degré assez élevé de corrélation
avec les autres devises.
42
Source :AustralianStrategicPolicyInstitute
Le déclin de la manufacture et l’investissement des États-Unis
dans le high-tech,
Le déclin de la production manufacturière et des investissements
américains dans le high-tech et la haute plus-value des industries
fournissant ce type de pays asiatiques industriels requis pour constituer
leur capacité industrielle expliquent la présence économique faiblissante
des États-Unis dans la région.
Un certain nombre d’analystes attend du RCEP qu’il soit plus
favorable aux pays à faible et moyen revenu dans la région, avec moins de
demandes de déréglementation et une baisse des réductions dans les
limites commerciales, en particulier pour les pays les moins développés.
Toutefois, le texte divulgué des propositions du Japon et de la Corée
du Sud pour le RCEP met en doute l’affirmation selon laquelle cet accord
est une alternative mieux intentionnée que le TPP.
En février 2015, un texte japonais qui avait fuité (daté d’octobre 2014)
propose la protection du monopole au-delà des obligations des accords et
lois déjà existants sur la propriété intellectuelle dans de nombreux pays
RCEP. Parmi les dispositions controversées se trouvent celles qui
cherchent à élargir et allonger les monopoles de brevet, à étendre les
43
restrictions sur l’utilisation des données d’essai clinique pour soutenir
l’approbation commerciale des médicaments génériques, et à autoriser la
saisie de médicaments génériques en cours de transport – même ceux
soupçonnés d’enfreindre les lois de PI dans le pays de transit. Le 3 juin
2015, une proposition sud-coréenne sur la PI divulguée ajoutait l’octroi de
dommages-intérêts pour les infractions de brevet déterminées en fonction
de la valeur revendiquée par le détenteur du brevet (The
Conversation,2015).
Exportations Chine vers Asie vs E.-U. Importations chinoises des E.-U. et de
l’Asie(source : Bloomberg)
Ouvrages cités
American Federation of Labor - Congress of IndustrialOrganisations.
(2014). NAFTA at 20. Washington D.C. :AFL-CIO.
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C H A P I T R E 3
Les Grandes orientations des nouveaux ALE
Quelles sont les grandes orientations des nouveaux accords de libre-
échange ? De quelle manière concrète ces nouveaux accords vont-ils
conduire à une plus grande concentration des ressources, des richesses et
des pouvoirs entre les mains des nations impérialistes et leurs entreprises
transnationales ? Comment les nouveaux accords de libre-échange violent-
ils la démocratie et la souveraineté des peuples du Sud ?
Dans cette partie, il est expliqué que les nouveaux accords de libre-
échange sont un patchwork des accords proposés par les pays développés,
négociés dans le cadre d’un régime commercial multilatéral représenté par
l’OMC, et d’accords commerciaux régionaux/bilatéraux et plurilatéraux
actuels et passés, en particulier ceux menés par les États-Unis. Ces
nouveaux accords de libre-échange comprennent des politiques pour
améliorer les droits des investisseurs, la dérégulation, la privatisation, la
libéralisation et l’expropriation capitalistedes biens communs.
Toujours plus de droits pour les investisseurs
Le nouvel ensemble de droits et mesures prévu par les nouveaux
accords de libre-échange pour protéger les investissements étrangers
représente le cadre général de la mondialisation néolibérale, qui cherche à
réduire et éliminer les obstacles à la libéralisation totale des
investissements. Les aspects substantiels de la libéralisation des
investissements et de la protection des investisseurs comprennent
l’élargissement du champ des investissements et des investisseurs, la non-
discrimination, le traitement juste et équitable, l’expropriation et un
instrument juridiquement contraignant à travers un mécanisme de
règlement des différends investisseur/État.
47
48
Définition large des investisseurs et des investissements
Dans les nouveaux accords de libre-échange, tout type d’actif qu’un
investisseur détient ou contrôle, directementou indirectement, présente les
caractéristiques d’un investissement. Parmi ces caractéristiques, on
comprend l’engagement de capital ou d’autres ressources, l’attente de
gains ou de bénéfice et l’hypothèse de risque. D’autre part, un investisseur
est une partie, une personne physique ou une entreprise dépendante d’une
partie, autre que d’une branche d’un bureau de représentation, qui cherche
à faire, est en train de faire ou a fait un investissement sur le territoire de
l’autre partie. Une « entreprise d’une partie » est une entreprise constituée
ou organisée sous la législation d’une partie et qui présente des activités
commerciales sur le territoire de cette partie.
La définition d’un investissement est « basée sur l’actif ». Cela signifie
qu’il est lié aux intérêts et valeurs économiques et non pas aux entreprises.
Cette définition couvre également les instruments de dette, les
participations aux concessions et contrats, les droits de propriété
intellectuelle et les réclamations d’argent ou les réclamations sous un
contrat ayant une valeur financière(Krajewski,2014).
Un intérêt durable dans les entreprises étrangères n’est pas
spécialement un élément d’investissement. Cela signifie que même les
placements de portefeuille à court terme pour des raisons spéculatives ou
des instruments de dette souveraine acquis par des investisseurs
spéculatifs entrent dans cette définition.
Cette définition délibérément large des termes « investissement » et
« investisseur » pose différents problèmes. Cela pourrait permettre
d’attaquer en justice les entreprises pour un vaste éventail de politiques
antidiscriminatoires nationales devant des tribunaux étrangers. Parmi ces
politiques, on pense à celles liées à la santé, à l’utilisation des territoires,
aux permis réglementaires, les droits sur la propriété intellectuelle, le droit
aux marchés publics, la réglementation des instruments financiers tels que
les dérivés, les contrats pour exploiter des services et autres(Public
Citizen, 2012). L’utilisation vague des termes « activités commerciales »
peut encourager « le magasinage de conventions » et permettre aux firmes,
même celles basées dans des pays qui ne font pas partie des accords de
libre-échange, de profiter des privilèges extraordinaires destinés aux
investisseurs étrangers
Par exemple, il y a énormément de compagnies d’exploitation
pétrolière et gazière dont les quartiers généraux ou les bureaux se trouvent
au Canada et qui ont commencé des recherches de gaz de schiste en
49
Europe. Bien que ces firmes ne soient pas canadiennes, il suffit qu’une
filiale se situe au Canada pour qu’elles défient les interdictions et les
réglementations en matière de fracturation. De plus, il est simple pour ces
compagnies de changer de nationalité et de tirer profit de l’AECG
(Eberhardt, Feodoroff, Lui, Olivet, &Trew, 2013). De la même manière,
les investisseurs allemands basés dans l’un des pays signataires du TPP
pourraient poursuivre en justice un autre signataire dans un tribunal
étranger pour exiger une compensation en vertu de ce texte.
À la lumière des critiques publiques, certains accords de libre-échange
ont modifié l’application de cette définition pour les entreprises qui ont
des activités commerciales « importantes ». Toutefois, la notion est encore
très vague. La décision de savoir si les activités d’une entreprise sont
suffisantes ou non pour la transformer en investisseur d’un pays peut être
laissée à l’appréciation d’un tribunal des investissements. En fait, le terme
« activités commerciales importantes » est également présent dans de
nombreux accords de libre-échange comme mesure contre les
investisseurs non basés dans l’un des pays parties qui profitent des
avantages de l’accord. Toutefois, cela s’est avéré être trop faible, puisqu’il
suffit de disposer d’une équipe d’une ou deux personnes et d’une trace
documentaire dans le pays d’origine revendiqué pour que le seuil des
« activités commerciales importantes » soit dépassé.
Non-discrimination
En général, les chapitres de protection des investissements contiennent
deux principes de non-discrimination : le principe de la nation la plus
favorisée (MFN en anglais) et le traitement national. Le MFN contraint les
parties à l’accord à traiter les investisseurs étrangers d’un autre pays de la
même manière qu’elles traitent les investisseurs de l’autre partie de
l’accord. Le traitement national, d’autre part, interdit un traitement
national plus favorable par rapport aux investissements étrangers. Nous
pouvons déjà clairement constater que la non-discrimination est une
extension du programme du MAI lié aux investissements et à la
concurrence.
Une expérience concrète des accords d’investissement existants a
montré que la norme du traitement MFN peut être problématique. Par le
passé, des tribunaux pour les investissements ont autorisé des investisseurs
à baser leurs réclamations sur des clauses plus favorables dans d’autres
accords de protection des investissements. Ainsi, ils arguaient que refuser
ce traitement s’avérerait moins favorable comparé au traitement accordé
dans l’autre chapitre sur les investissements (Krajewski,2014).
En 1996, un groupe d’investisseurs malaisiens appelé MTD a décidé
de construire une toute nouvelle communauté planifiée en dehors de
Santiago, au Chili. Toutefois, en 1997, les responsables du zonage chiliens
50
ont commencé à émettre des craintes concernant les conséquences
écologiques du développement. En 2004, un tribunal chargé de trancher
entre l’État et un investisseur a exigé du Chili qu’il verse au MTD une
somme s’élevant à près de 6 millions de dollars. Le tribunal a basé sa
conclusion sur ce que l’on appelle la disposition « du traitement juste et
équitable » tirée du traité bilatéral d’investissement entre le Chili et la
Croatie(PublicCitizen).
En bref, le traitement MFN dans les nouveaux accords de libre-
échange élargirait le champ de protection des investissements au-delà des
normes établies dans l’accord respectif (importation des normes)
(Krajewski, 2014).De plus, la clause MFN permettrait de créer « un effet
dynamique d’engrenage où les droits des investisseurs et les obligations de
l’État s’étendraient bien au-delà de ce qui se trouve dans les chapitres sur
l’investissement et les services financiers » (Kelsey,2010).
Un autre problème qui a été soulevé par rapport à la non-
discrimination est la question du traitement national. Cette obligation
couvre l’établissement, l’acquisition, la gestion, l’entretien, l’utilisation,
l’appréciation et la vente ou l’élimination de leurs investissements sur
leurs territoires.
L’acquisition peut être un important outil de développement pour
soutenir des objectifs de politiques plus larges tels que les programmes
alimentaires, le soutien aux agriculteurs locaux, aux petites et moyennes
entreprises, encourager les énergies vertes, etc. Selon l’OMC, les achats
gouvernementaux comptent pour 10 à 15 pour cent du PNB dans les pays
développés(Organisation mondiale du travail, 2015). Les gouvernements
sont, généralement, les plus grands acheteurs de biens et de services de
l’économie. Ainsi, à cause des grandes sommes d’argent investies,
l’acquisition est devenue un problème majeur dans la plupart des accords
de libre-échange.
Avec le traitement national intégré dans les nouveaux accords de libre-
échange, les gouvernements élus réduits au niveau des conseils scolaires
doivent libéraliser l’acquisition aux grandes entreprises. L’acquisition devrait
généralement comprendre des projets majeurs de construction et
d’infrastructure, des véhicules de transport, de l’alimentation et de
l’équipement de bureau.
Il sera interdit aux municipalités de favoriser les compagnies locales,
les biens ou les travailleurs, à moins que cela soit spécifiquement identifié
et protégé dans l’accord. Elles n’auront plus la possibilité de fabriquer et
de mettre en place des réglementations environnementales ou sociales qui
entreraient en conflit avec le « droit au profit » des grandes entreprises. En
somme, cela annulerait le droit des futurs gouvernements à prendre des
décisions dans l’intérêt général.
51
Les municipalités vont devoir faire face àune augmentation des
coûts administratifs, incluant :
• Fournir au gouvernement fédéral des informations et des
statistiques concernant les pratiques d’acquisition ;
• Publier des annonces détaillées des acquisitions prévues et la
passation des marchés ;
• Fournir des soumissionnaires non retenus à temps pour donner
suite à leur décision.
Le traitement national va même limiter ceux qui ne discriminent pas
en faveur des fournisseurs locaux. Un élément préoccupant pour
l’approvisionnement en services publics est l’interdiction de
« monopoles » et de « fournisseurs exclusifs ». Les activités économiques,
comme l’approvisionnement en électricité ou en eau, sont comprises dans
le champ d’application.
L’AECG a maintenu une formulation vague concernant les exceptions
au traitement national pour les services publics dans l’ALENA et l’AGCS,
tout en combinant les dispositions très ambitieuses de ces accords et en les
étendant à d’autres domaines. Comme l’ALENA, le chapitre de l’AECG
sur les investissements comprend une large définition des investissements
pour lesquels les gouvernements sont obligés de payer une compensation
monétaire s’ils perdent un procès ISDS. Les investisseurs dans
l’ALENA/AECG ne sont pas seulement ceux qui ont déjà des
investissements, mais aussi ceux qui « cherchent à » investir.
L’interdiction de l’AECG de poser des limites sur l’accès aux marchés limite
même ceux qui ne discriminent pas en faveur des fournisseurs locaux. Un
élément préoccupant pour l’approvisionnement en services publics est
l’interdiction de « monopoles » et de « fournisseurs exclusifs ». Les
activités économiques, comme l’approvisionnement en électricité ou en
eau, sont comprises dans le champ d’application.
Alors que l’AECG prétend dispenser « les activités tenues dans
l’exercice de l’autorité gouvernementale », des problèmes subsistent
puisque ces activités sont définies comme n’étant celles « conduites ni sur
une base commerciale ni en compétition avec un ou plusieurs opérateurs
économiques ». Cette exception est très restreinte si l’on considère, par
exemple, que les universités publiques peuvent être vues comme
concurrentielles pour les étudiants avec les universités privées.
En adoptant une structure descendante où le défaut est la libéralisation
de tous les secteurs, sauf si explicitement exclus, les services publics sont
52
menacés. Ceci, combiné à un mécanisme « d’engrenage » dans lequel les
secteurs qui ont été engagés dans la libéralisation ne peuvent pas faire
marche arrière, assure que la libéralisation et la déréglementation soient
permanentes.
Traitement juste et équitable (TJE)
Le traitement juste et équitable (TJE) est une norme de protection
traditionnelle des investissements présente dans presque toutes les
conventions de placement (Krajewski, 2014). L’application de cette norme
dans les précédents cas de litiges de placement est devenue un moyen de
dissuasion efficace contre la législation nationale et les mesures
réglementaires.
Au cœur du TJE se trouvent les « attentes légitimes » qui peuvent se
baser sur le cadre légal en général ou sur le comportement de
représentants. Sous le TJE, un tribunal « peut tenir compte du fait qu’une
partie a fait une représentation particulière à un investisseur pour inciter à
un investissement visé, ce qui a induit une attente légitime, et sur laquelle
l’investisseur s’est basé pour décider de faire ou de conserver
l’investissement visé, mais que la partie a de fait été contrariée. »
Cette clarification est largement faussée en faveur des investisseurs et
représente une menace claire aux droits du gouvernement à réglementer, et
particulièrement à modifier ou renforcer les approches réglementaires en
réponse à des circonstances changeantes, de nouvelles connaissances, au
comportement des investisseurs, à la perception du risque dans la
population et la prise de décision démocratique. Cette définition distingue
les « attentes légitimes » que les investisseurs peuvent avoir pour leurs
investissements comme une question d’interprétation que les tribunaux
peuvent prendre en considération – même au-delà des questions liées à
l’intérêt général (Sinclair,Trew, & Mertins-Kirkwood,2014).
Les réglementations financières que certains gouvernements ont mises
en place dans le contexte de la crise économique mondiale de 2008 sont
exposées à être annulées. Ainsi, des législations nationales risquent de
répondre au modèle de dérégulation extrême qui est à l’origine de la crise.
Le TJE va en effet empêcher les pays d’interdire les instruments
financiers risqués tels que les dérives qui ont conduit au renflouement
gouvernemental de 183 milliards de dollars de l’AIG. Il va également
interdire l’utilisation de pare-feu, de contrôles des capitaux et de taxes sur
les transactions financières. Si les gouvernements se montrent insistants,
les firmes étrangères auront la possibilité de les attaquer directement
devant des tribunaux étrangers et de demander une compensation des
contribuables.
53
Expropriation
Par le passé, sous la législation nationale et internationale, les
gouvernements étaient obligés de compenser l’expropriation appliquée à la
confiscation physique de biens immobiliers, par exemple, lorsqu’un
gouvernement doit exproprier des terres pour faire de la place pour
l’agrandissement d’une route. Toutefois, dans les nouveaux accords de
libre-échange, l’expropriation indirecte a été ajoutée aux actions couvertes
par le gouvernement qui réduit simplement la valeur de l’investissement
étranger (Public Citizen,2012).
La disposition sur l’expropriation indirecte dans les conventions de
placement a été invoquée par les grandes entreprises pour exiger une
compensation basée sur l’impact de la mesure gouvernementale sur la
valeur de l’investissement, sans tenir compte de s’il y a eu une quelconque
appropriation d’actif par le gouvernement. Cela va à l’encontre des
pratiques existantes de nombreuses nations qui offrent des compensations
seulement en cas de réelles saisies d’actifs, et non pas quand un actif a été
défavorablement touché par une mesure réglementaire ou une législation
(Public Citizen,2012).
En 1996, l’entreprise américaine Metalclad a intenté une poursuite
d’investisseur contre le gouvernement du Mexique qui demandait la
fermeture d’une usine de traitement des déchets après qu’une vérification
géologique ait dénoncé une sévère menace pour les ressources locales
d’eau. Le tribunal d’investisseur a statué que l’annulation du permis de
zonage au niveau étatique constituait une expropriation réglementaire et a
exigé du gouvernement que celui-ci paie des dommages à hauteur de 16,7
millions de dollars.
William Greider révèle que l’inclusion de « l’expropriation indirecte »
dans les pactes commerciaux faisait partie d’une « stratégie de longue date
consciencieusement élaborée par les entreprises » pour redéfinir « la
réglementation publique comme une “prise” gouvernementale de la
propriété privée qui nécessite une compensation » (2001). Il ajoute que les
conséquences sont nombreuses :
Puisque toute réglementation a inévitablement des conséquences
économiques sur les actifs privés, cette doctrine est un moyen de
réduire la portée des gouvernements modernes et de paralyser
l’État régulateur – en sapant les protections établies de longue date
pour le bien-être social et la justice économique, les valeurs
environnementales et les droits individuels. Les défenseurs de
droite affirment franchement cet objectif – celui de restaurer la
54
primauté de la propriété contre les droits sociétaux plus larges.
Mécanismes de règlement des différends entre investisseurs et États
L’application par le privé des privilèges et droits accordés aux
investisseurs étrangers passe par un mécanisme « de règlement des
différends entre investisseurs et États » (investor-state dispute system en
anglais, abrégé ISDS). Ce mécanisme est au cœur des demandes des
entreprises transnationales et multinationales dans les négociations pour
les nouveaux accords de libre-échange.
Alors que les dispositions d’un chapitre sur les investissements dans
les accords de libre-échangedéfinissent les conditions pour savoir si ou
non les politiques nationales vont à l’encontre de la réglementation
internationale qui gouverne la libéralisation des investissements, les
dispositions sur le règlement des différends déterminent si une telle
violation peut conduire à une décision juridiquement contraignante
(Krajewski,2014).
Grâce à l’ISDS, les entreprises et les investisseurs étrangers peuvent
éviter les cours et législations nationales. Ils peuvent également
directement poursuivre en justice les gouvernements pour exiger des
compensations des contribuables pour les politiques sur la santé,
l’environnement, la finance et autres intérêts généraux considérés comme
préjudiciables aux entreprises « qui attendent des bénéfices futurs ».
Avant les années 1980, le règlement des différends dans les
conventions de placement internationales était basé sur une procédure
interétatique. Les options d’un investisseur pour régler un problème
étaient limitées aux suivantes : 1) négocier directement avec le
gouvernement hôte ; 2) poursuivre en justice le gouvernement hôte devant
un de ses propres tribunaux où a défense de l’immunité souveraine est
facilement disponible ; 3) exiger du gouvernement d’origine qu’il négocie
diplomatiquement avec le gouvernement hôte ; ou 4) réclamer au
gouvernement d’origine qu’il défende les réclamations comme si c’étaient
les siennes devant la Cour internationale de justice, dans le cas où la CIJ
est compétente (Tietje,2014).
Dans les années 1990, notamment à travers les conventions bilatérales
de placement (CBP) et l’ALENA, le règlement des différends entre Etats
est remplacé par un nouveau mécanisme. Les entreprises étrangères
peuvent déposer des plaintes directement auprès de l’État hôte devant un
tribunal ad hoc (Krajewski, 2014). Selon les estimations de l’OCDE, 93
pour cent de toutes les CBP existantes contiennent des dispositions ISDS
(Tietje,2014).
55
En 2012, la CNUCED a reporté 58 nouveaux cas, ce qui constitue le
nombre le plus élevé de différends connus causés par des traités jamais
déposés en un an. Ce chiffre confirme que les investisseurs étrangers ont
de plus en plus recours à l’arbitrage entre investisseur et État. Dans 66
pour cent des nouveaux cas, les répondants sont des économies en
développement ou en transition. La majorité des nouveaux cas (64 %)
provient de pays (Conférence des Nations unies sur le Commerce et le
Développement, 2013). Les moyennes et grandes multinationales
comptent pour 50 pour cent des réclamations (OCDE, 2012).
Les plaignants ont défié une large gamme de mesures
gouvernementales, notamment celles liées aux révocations des licences,
aux failles dans les contrats d’investissements, aux irrégularités dans les
appels d’offres publics, aux changements dans les cadres réglementaires
nationaux, au retrait de subventions précédemment accordées, aux
expropriations directes des investissements, aux mesures (Conférence des
Nations unies sur le Commerce et le Développement,2013).
Selon le site Internet ExposeTheTPP.org, des tribunaux ont déjà
réclamé 3,5 milliards de dollars dans les cas opposant investisseurs et
États, en accord avec des accords américains existants. Parmi ces
compensations, on trouve des paiements pour des interdictions de
substances dangereuses, des politiques d’utilisation des terres, des règles
forestières, etc
La majorité des cas ont été traité par le biais du Centre international
pour le règlement des différends sur les investissements (International
Centre for SettlementofInvestmentDisputes en anglais, abrégéICSID),tla
Commission des Nations Unies pour le droit commercial international
(UNCITRAL), la Chambre de Commerce de Stockholm et la Chambre de
commerce internationale (Conférence des Nations unies sur le Commerce
et le Développement,2013).
Les procédures ISDS sont entourées du plu grand secret. Les tribunaux
se tiennent à huis clos et la publication des sentences n’est pas obligatoire.
Les informations telles que le nom du plaignant ne sont en général pas
publiées (Krajewski,2014).
Le manque de transparence dans les procédures est d’autant plus
amplifié par la sélection et le rôle des arbitres. Chaque partie contestante
choisit un arbitre, tandis qu’un président neutre a été validé par les deux
parties. Les arbitres ne sont pas des juges permanents avec des salaires
fixes et une indépendance personnelle, mais ce sont des avocats, juges,
diplomates ou membre d’un corps académique en exercice. Vu la nature
très particulière du domaine, le nombre d’individus ayant gagné
suffisamment d’expérience en remplissant une telle fonction est très
réduit. Selon une étude, près de la moitié de tous les cas connus ont été
56
tranchés par un groupe de seulement 15 avocats (Corporate Europe
Observatory,2012).
L’impartialité des arbitres a également été remise en question par de
nombreuses personnes. En effet, de nombreux arbitres jouent également le
rôle de conseiller auprès d’investisseurs. Cela conduit à des conflits
d’intérêts et à une partialité institutionnelle de l’ISDS en faveur des
investisseurs (Krajewski,2014).
Cas connus d’ISDS
Source : UNCTAD2013
En temps normal, la réglementation internationale requiert
l’exploration de remèdes légaux nationaux avant d’avoir recours à une
juridiction internationale. Cette règle est toujours la même dans les
procédures devant les cours des droits de l’homme telles que la Cour
internationale de justice. Ce système vise à permettre à un État de rectifier
un abus international par le biais de son propre système afin de se tourner
57
vers une juridiction internationale ou une instance arbitrale
(Krajewski,2014).
Toutefois, cela ne s’applique pas au droit international de
l’investissement. La plupart des chapitres protégeant l’investissement
n’exigent pas de l’investisseur qu’il cherche un remède local avant de se
tourner vers organe judiciaire international. L’idée même d’un ISDS est de
fournir aux investisseurs un mécanisme pour directement appliquer des
droits substantifs qui ne dépendent pas de processus judiciaires
internationaux.
De nombreuses critiques ont été formulées par rapport au biais pro-
entreprise du ISDS et ses conséquences néfastes sur la souveraineté
nationale et étatique (Corporate Europe Observatory,2014).
Les gouvernements vont éprouver des difficultés à mettre en œuvre de
nouvelles politiques, puisqu’il sera impossible de prédire la façon dont un
tribunal les situera par rapport aux réclamations de bénéfices des
entreprises. En bref, les intérêts des grandes entreprises définiront et
façonneront dorénavant les lois et l’élaboration des politiques des pays, et
non pas les droits et le bien-être des peuples.
La souveraineté judiciaire des pays sera réduite à zéro, vu que les
investisseurs décideront de porter les affaires devant un tribunal
international, où les possibilités de gagner et de renversement sont plus
élevées et plus faisables.
L’ISDS bafoue le principe d’égalité devant la loi. Alors que les
entreprises étrangères auront accès à cet univers légal parallèle qui leur
accorde une protection juridictionnelle de la propriété, des droits et des
procédures, les sociétés nationales n’y auront pas droit.
Alors que les grandes sociétés peuvent poursuivre en justice les
gouvernements, les gouvernements ne peuvent pas poursuivre les grandes
entreprises pour leurs abus et violations des droits de l’homme. En outre,
étant donné que les gouvernements ne peuvent pas intenter de procès aux
investisseurs, les arbitres sont encouragés à rester aux côtés des
investisseurs et à donner des jugements pro-investisseurs pour attirer
davantage de cas et plus de revenus pour le futur.
Enfin, il n’existe pas d’appel extérieur ou de révision par une cour
indépendante. Les décisions sont finales et exécutoires et ne peuvent être
annulées que pour des raisons procédurales extrêmement limitées.
58
Invasion des entreprises dans l’espace politique des gouvernements
La cohérence réglementaire a un long « pedigree institutionnel » qui
peut être remonté au mouvement de réforme néolibérale des années 1970
et 1980. La question de mettre en place un cadre réglementaire limité pour
faciliter le commerce international et la libéralisation des investissements
est abordée dans la plupart des grands accords de libre-échange. Ce cadre
réglementaire est examiné à la fois dans un chapitre à part et dans les
différents groupes de négociation tels que ceux liés aux normes sanitaires
et physiosanitaires et aux entraves techniques aux échanges(Draper, Lacey,
& Ramkolowan,2014).
La cohérence réglementaire vise l’approche institutionnelle et
procédurale à la réglementation nationale. Dans ce contexte, « cohérence »
fait référence aux décisions réglementaires internes et aux choix de l’État
opérés par le biais de l’imposition de discipline sur sa structure
bureaucratique, ses processus de prise de décision et ses critères. En bref,
la cohérence réglementaire interfère avec la fonction première des
gouvernements qui consiste à légiférer les règles sur les domaines relatifs
aux politiques publiques nationales, tels que la santé et la sécurité, les
codes environnementaux, la réglementation du travail, les codes du
bâtiment, le zonage, etc. Ces propositions sont déjà en dehors du champ
des négociations commerciales puisqu’elles ont été entendues avant et
qu’elles enfreignent le droit des gouvernements à structurer leur
bureaucratie et leurs procédures.
Dans le contexte des négociations de l’ACS, la National Retail
Foundation, une organisation qui fait du lobby pour les grandes entreprises
transnationales de vente au détail, attend le RGFS « pour travailler à
l’assouplissement des réglementations qui affectent la vente au détail,
notamment les restrictions de taille et les heures de travail, qui bien
qu’elles ne soient pas discriminatoires influent sur la capacité de la grande
distribution à atteindre une plus grande efficacité opérationnelle… » Wal-
Mart, par exemple, explique que l’ACS devrait comprendre des
interdictions de restriction sur les « situations géographiques » des
magasins, défiant toutes les autorités de zonage des gouvernements locaux
(Gould,2014).
En se basant sur le texte divulgué du chapitre du TPP sur la cohérence
réglementaire, les gouvernements nationaux devront établir un organe
formel central pour coordonner les politiques et les processus de prise de
décision de la structure gouvernementale dans son ensemble. Selon Jane
Kelsey, cet organe jouira d’un statut supérieur dans la hiérarchie du
gouvernement central pour coordonner, superviser et critiquer le travail
des autres agences de réglementation afin d’assurer de bonnes pratiques
59
réglementaires (2011).
L’analyse d’impact de la réglementation (AIR) sera utilisée dans les
réglementations en développement. Dans une présentation aux parties
prenantes de l’APEC, le gouvernement américain a défini l’AIR comme
un mécanisme qui « évalue les conséquences anticipées de la
réglementation et estime les bénéfices et coûts associés ». Alors que cela
paraît assez anodin, l’AIR se concentre en fait plus sur le « fardeau » des
entreprises que sur le bien-être public.
L’Australie, la Nouvelle-Zélandeet les États-Unis présentent déjà une
structure similaire à celle proposée dans le TPP. Dans les « lignes
directrices des meilleures pratiques » australiennes, il est recommandé
qu’une série d’options de politiques faisables soit d’abord envisagée,
notamment l’autoréglementation, la co-réglementation et la non-
réglementation, et que leurs avantages et coûts soient évalués. Cela
signifie que l’autoréglementation et la non-réglementation ont la priorité
sur les politiques initiées par le gouvernement ou sur les codes
réglementaires. De plus, il est stipulé que l’action du gouvernement ne
doit pas « en faire trop » et que l’intervention des marchés ne doit pas être
mal comprise et conduire à l’échec des marchésde remplir les objectifs
sociaux ou d’égalité ».
Cela s’avère similaire au test de nécessité : un programme prioritaire
des lobbys d’entreprises dans les négociations de l’ACS. La Global
Federation of Insurance Associations (GFIA) a déclaré que l’ACS devrait
exiger que les obligations de service universel ne soient pas plus lourdes
que nécessaire pour le genre de service universel défini par le membre.
Les obligations de service universel sont des réglementations qui
permettent aux populations pauvres et qui travaillent dur, telles que les
résidents des régions rurales, d’avoir accès aux services. Un test de
nécessité pourrait soumettre les réglementations sur l’accès universel aux
services à un enjeu commercial s’il existait des alternatives moins
onéreuses pour les entreprises.
Un règlement des différends doit évaluer si l’objectif d’un
gouvernement pour mettre en place l’accès universel à un service est assez
important pour justifier son impact non négligeable sur le commerce. Il
sera déterminé si les réglementations sont efficaces pour mettre en œuvre
l’accès universel. De plus, il sera décidé s’il existe des alternatives moins
onéreuses pour les entreprises et raisonnablement disponibles pour que les
gouvernements puissent les entreprendre. Les réglementations des
gouvernements peuvent échouer à un test de nécessité pour toutes ces
raisons.
Entre temps, une mesure introduite dans le TTIP est la « coopération
réglementaire » (voir tableau ci-dessous). La coopération réglementaire est
60
un grand projet commercial. En 2012, Business Europe et la Chambre de
commerce américaine ont tenu des réunions avec la Commission
européenne pour avancer leurs propositions. La coopération réglementaire
décrit un procédé d’harmonisation desréglementations déjà existantes pour
les deux parties négociantes afin d’assurer que les biens produits d’une
part peuvent être exportés de l’autre côté sans exigences
additionnelles(Corporate Europe Observatory,2015).
Toutefois, la « coopération réglementaire »n’est pas simplement une
harmonisation. Elle implique également le retrait ou la rétrogradation de
certaines normes sociales et environnementales qui ont été établies grâce à
la résistance collective des peuples à travers l’histoire. Parmi ces sujets de
résistance, on trouve les droits du travail, les règles de sécurité alimentaire
(notamment les restrictions sur les OGM), les réglementations sur
l’utilisation des produits chimiques toxiques, les lois de protection des
données et les nouvelles protections bancaires introduites à la lumière de
la crise financière de 2008.
Puisque le consensus sur certaines questions épineuses comme la
sécurité alimentaire, les produits chimiques et la réglementation financière
pourrait ne pas être dégagé pendant le TTIP, la coopération réglementaire
peut offrir une certaine flexibilité aux groupes commerciaux et aux
régulateurs pour établir des normes une fois que le TTIP sera conclu, sur
le long terme et sans bénéficier de l’examen du public.
La Commission européenne utilise le terme neutre « partie intéressée »
pour faire référence aux groupes qui sont impliqués dans les questions de
réglementation. Les parties intéressées peuvent comprendre tous les
groupes, notamment les syndicats, les groupes de consommateurs, les
agriculteurs et les groupes environnementaux, mais aussi les grandes
entreprises. Cela signifie qu’il existe une autre voie pour les lobbyistes
d’entreprise pour influencer l’élaboration des politiques publiques.
Privatisation
Dans les années 1990, l’accent était porté, dans de nombreux pays, sur
la privatisation des entreprises publiques. Dans les nouveaux accords de
libre-échange, l’accent semble s’être déplacé vers l’harmonisation du
terrain de jeu entre les acteurs économiques du privé et du public et vers
l’adhésion des entreprises publiques aux cadres de gouvernance des
grandes entreprises (Draper, Lacey, & Ramkolowan,2014).
Dans le contexte des négociations du TPP, la discipline sur les
entreprises publiques est, selon Kelsey, une initiative américaine qui va à
l’encontre du modèle chinois de capitalisme soutenu par l’État.
61
La rigueur qui gouverne les entreprises publiques est basée sur le
concept clé de la « neutralité compétitive » pour promouvoir une
compétition efficace entre les entreprises privées et publiques et pour
assurer que les entreprises publiques ou gouvernementales et les grandes
sociétés contrôlées travaillent dans des conditions de concurrence
équitable (Kelsey,2012).
La neutralité compétitive cible particulièrement les « avantages » dont
jouissent les entreprises publiques, notamment l’accès au capital low cost
par le biais de prêts subventionnés, de taux à bas intérêt, d’obligations du
gouvernement avec des garanties implicites, de traitements fiscaux
avantageux (avec des coûts de transactions plus bas), à une protection
contre la faillite et un soutien de renflouement, des taux préférentiels pour
les services tels que l’électricité et l’eau, développement d’infrastructure
ciblé, tels que les routes et les voies ferrées, les marchés publics des
entreprises d’État, les subventions pour les opérations, etc.
Les entreprises publiques seront réorganisées comme si elles étaient
des entreprises privées. Le conseil d’administration sera constitué à partir
de personnalités du secteur privé quiserontrémunéréesselon les taux
appliqués dans le secteur privé. Le directeur général sera nommé par un
représentant du conseil, généralement issu du secteur privé également, et
bénéficiant d’un salaire aux mêmes taux que ceux appliqués dans le
secteur privé. Il ou elle sera l’employeur/se de tous les autres membres du
personnel, lesquels seront traités comme dans le privé et non pas comme
des fonctionnaires gouvernementaux.
Le cadre législatif des entreprises publiques fixera les objectifs
prioritaires pour agir comme une entreprise commerciale. Ses
responsabilités envers les communautés et les employés seront soumises à
l’objectif commercial. La disposition d’activités noncommerciales sera
traitée séparément et financée sur une base de recouvrement intégral des
coûts.
L’objectif principal de la neutralité compétitive est de défaire
progressivement les entreprises d’État de leur bien public intégral. Les
services sociaux fournis par les entreprises publiques seront supprimés
s’ils ne sont pas rentables.
C’est une stratégie efficace pour préparer un secteur donné à une
concurrence accrue du fait d’une future libéralisation du commerce. Cette
libéralisation est soit engagée par le gouvernement en question,soit ce
gouvernement essaie de s’engager des négociations commerciales en
cours. Curieusement, la suppression graduelle des entreprises publiques ou
l’élimination de leur statut privilégié s’est avérée être au cœur des
négociations d’adhésion de l’OMC.
62
Comment la coopération réglementaire renforce les grandes entreprises
L’analyse du Corporate Europe Observatory sur le texte divulgué de l’accord proposé met en lumière la façon dont la coopération réglementaire va offrir aux groupes commerciaux de nouveaux outils pour influencer les résultats des lois et réglementations actuelles et à venir
1. Actes planifiés d’informations préliminaires/
Avertissement précoce
Les entreprises doivent être informées et impliquées dans la planification et la finalisation de toute nouvelle réglementation ou législation qui pourrait avoir une incidence sur leur fonctionnement et bénéfices. Leur contribution doit être prise en compte lors de la finalisation de la proposition.
2. Evaluations d’impact Les nouvelles réglementations doivent être soumises à une évaluation d’impact orientée essentiellement vers les entreprises et non les citoyens. Une nouvelle réglementation/législation doit évaluer :
• La façon dont elle se rapporte aux instruments internationaux
• La façon dont elle tient compte des règles existantes ou à venir de l’autre partie
• L’impact qu’elle aura sur le commerce ou les investissements
3.Echanges réglementaires
Un « échange réglementaire » ou dialogue doit se dérouler si l’une des parties n’est pas satisfaite des effets d’une règle proposée pour ses intérêts commerciaux
4. Organe de coopération réglementaire (OCR)
Un organe responsable de la coopération réglementaire et qui examine de manière approfondie les propositions des entreprises sur des réglementations actuelles et à venir (article 5). Il examine également les réglementations existantes pour s’assurer que tout le processus de convergence entre l’UE et les E.-U. avance. Il peut se baser sur le travail des groupes de travail sectoriel où les entreprises disposent d’un accès spécial ou bien où les entreprises peuvent développer leur propre proposition.
Source :CorporateEuropeObservatory(2015)
63
Droits de propriété intellectuelle
Les chapitres du TPP et du TTIP qui ont fuité et relatifs aux droits de
propriété intellectuelle révèlent les nouvelles règles strictes en matière de
brevet qui auront des répercussions profondes dans tous les secteurs. Elles
présentent des dispositions sur le copyright, les brevets et les marques
déposées en vue de renforcer le contrôle des entreprises sur la
connaissance aux dépens de l’accès du public.
Semences
Si les négociations aboutissent favorablement, les nouvelles règles de
DPI empêcheront les agriculteurs de sauver et d’utiliser des semences qui
présentent du matériel végétal breveté, même pour leur consommation
personnelle. Les nouvelles règles de DPI vont également empêcher les
producteurs d’utiliser des semences de plantes qui contiennent du matériel
végétal breveté pour chercher et développer de nouvelles variétés. La
plupart des systèmes de protection des variétés végétales (PVV)
permettent aux agriculteurs de garder et réutiliser des semences (à des fins
non commerciales) et autorisent les producteurs à utiliser des variétés de
plantes protégées pour chercher et développer de nouvelles variétés. En
revanche, les brevets des inventions portant sur des plantes peuvent
comporter quelques exceptions. Ces nouvelles règles entrent en
contradiction avec les régimes DPI existants de nombreuses parties aux
négociations et peuvent s’avérer préjudiciables pour la souveraineté
alimentaire et leurs populations(Public Citizen,2014).
Médicaments
Le chapitre du TPP sur le DPI pourrait devenir le pacte commercial le
plus dangereux jamais conclu pour l’accès aux médicaments dans les pays
en développement. Le TPPs’apprête à imposer des dispositions relatives à
la propriété intellectuelle qui dépassent les paramètres des accords
internationaux (p. ex. : Aspects des droits de propriété intellectuelle qui
touchent au commerce ou ADPIC) (Médecins Sans Frontières,2013).
Dans la disposition soumise, le TPP autorise le brevetage de
modifications de vieux médicaments (méthode appelée « evergreening »),
même en l’absence d’intérêts thérapeutiques. Certains pays interdisent ou
limitent aujourd’hui l’evergreening puisque cette pratique maintient les
médicaments à des prix élevés et retarde la disponibilité de médicaments
génériques moins chers.
64
Le brevetage de méthodes médicales telles que les méthodes
chirurgicales, thérapeutiques et diagnostiques sera également requis. Cette
mesure pourrait augmenter la responsabilité médicale et les coûts de
l’activité médicale, réduisant ainsi l’accès des populations aux procédures
médicales.
La possibilité de récuserdes brevets faibles ou non valablessera
également limitée et ne seraenvisagée qu’une fois les brevets déjà délivrés.
Les sociétés pharmaceutiques déposent des brevets sur différents aspects
du même médicament pour éviter la concurrence avec les génériques le
plus longtemps possible. Ainsi, l’interdiction d’une procédure
d’opposition avant la délivrance risque de conduire à des médicaments
plus chers et il sera plus compliqué de récuser des brevets faibles ou non
valables.
Entre-temps, l’exclusivité des données signifie que les régulateurs de
sécurité des médicaments n’auront pas accès aux données cliniques
existantes pour donner l’autorisation de commercialisation de
médicaments génériques ou biosimilaires. Cette exclusivité conférera un
statut de monopole aux médicaments même après l’expiration des brevets
et le délai supplémentaire imposé à la concurrence générique.
Bien plus alarmant encore, le TPP exigera l’extension des brevets à 25
ans pour compenser les délais des processus de dépôt. Les années
supplémentaires permettront aux compagnies pharmaceutiques de
conserver une position de monopole et de continuer à imposer des prix
élevés, sans concurrence générique.
Confidentialité des données
Dans le cadre de la proposition du TPP, les fournisseurs d’accès à
Internet (FAI) pourraient être contraints d’espionner l’activité de ses
utilisateurs, de retirer certains contenus de la toile et d’empêcher l’accès à
certains contenus générés par les utilisateurs comme les vidéos YouTube,
même si c’est à des fins personnelles ou éducatives. Télécharger des
documents protégés à des fins non commerciales entrainerait des amendes
adaptées. La création et le partage de contenu généré par les utilisateurs
feraient face à des nouvelles limites puisque la propriété intellectuelle des
contenus créés par des entreprises serait étendue à minimum 120 ans.
Selon un document de la Commission européenne qui a fuité, le
TTIP pourrait réintroduire les éléments centraux de l’Accord
commercial anti-contrefaçon (ACAC) déjà rejeté par le Parlement
européen en 2012. L’ACAC a largement été condamné à travers
l’Europe comme étant une attaque à l’encontre des libertés civiles. Tout
comme le TPP, l’ACAC aurait exigé des fournisseurs d’accès à Internet
qu’ils surveillent les activités en ligne et qu’ils dénoncent toute
65
personne suspectée de violer les dispositions relatives aux droits
d’auteur (Hilary,2014).
Les E.-U. font également pression pour conserver la terminologie et
assurer un « flux de données à travers les frontières » qui empêchera les
gouvernements étrangers de conserver des données au niveau national.
Selon le site Internet du Bureau du représentant américain au commerce,
« les exigences conduisant à un Internet unique et mondial, notamment
celles qui garantissent les flux transfrontaliers de données, conformément
aux intérêts légitimes des gouvernements pour la réglementation à des fins
de protection de la vie privée » sont une priorité absolue du régime Obama
dans les négociations commerciales.
En attendant, la Commission européenne a déjà dilué les règles de
l’UE sur la confidentialité des données afin d’ouvrir la voie à une
cohérence réglementaire conforme au TTIP.
On se rappellera qu’en juin 2013, l’ancien employé de la National
Security Agency (E.-U.) et lanceur d’alerte Edward Snowden dévoilait au
grand jour les activités d’espionnage des États-Unis contre plusieurs
gouvernements européens. Si cette proposition est adoptée, il sera plus
facile pour la NSA d’installer un logiciel ou matériel d’interception de
signal puisque les serveurs seront plus proches et plus accessibles.
Libéralisation de l’agriculture
L’un des buts principaux des négociations des nouveaux accords de
libre-échange est d’éviter la paralysie de l’OMC et d’engager davantage la
libéralisation de l’agriculture. Toutefois, alors que leur but est de réduire
les droits de douane pour l’agriculture, ils étendent également « la
protection des investisseurs par rapport aux consommateurs et agriculteurs
et la restriction des capacités des gouvernements à utiliser une politique
publique pour refaçonner les systèmes alimentaires » (Institute for
Agriculture and Trade Policy,2013).
Par exemple, l’introduction d’un mécanisme ISDS aura des
conséquences sur les politiques agricoles des pays. Les gouvernements (et
en particulier ceux des pays en développement et qui ont une importante
base agricole) vont devenir vulnérables face aux cas de litige avec des
firmes agricoles étrangères. En effet, les gouvernements seront
impuissants s’ils prennent, par exemple, des initiatives jugées comme
limitant injustement les profits projetés des investisseurs étrangers tels que
la mise en place de barrières à l’importation pour promouvoir l’agriculture
locale. Cela s’est déjà passé au Mexique avec l’ALENA, quand le
gouvernement mexicain a mis en place des barrières commerciales au
sirop de maïs. Trois entreprises étrangères ont, dans le cadre de trois
66
procès différents, poursuivi le gouvernement mexicain. Le Mexique a été
contraint de compenser les firmes pour un total de 169,28 millions de
dollars.
Les répercussions sur la sécurité alimentaire suscitent également de
vives inquiétudes au sein de nombreux groupes de consommateurs. Si les
actions précédentes des États-Unis lors d’autres forums commerciaux
servent de référence pour ce qu’ils sont en train d’essayer de négocier
aujourd’hui dans le TTIP et le TPP, il semble très probable qu’ils essaient
également d’établir des normes de sécurité alimentaire dans d’autres pays
pour les réduire à leur plus petit dénominateur commun. Des groupes de
consommateurs et le Congrès américain à plusieurs reprises sonné
l’alarme en disant que le TTIP et le TPPouvriraient la voie à des crevettes
importées du Vietnam sans répondre aux questions soulevées concernant
la sécurité et les impacts environnementaux de leur production.
Les conditions imposées aux investisseurs en leur demandant de
répondre à certains objectifs précis par rapport à leurs opérations dans le
pays hôte seront également levées. Avec cette restriction, les pays se
verront offrir des alternatives limitées pour réduire la vulnérabilité face
aux mouvements volatils dans les marchés internationaux et instaurer des
restrictions dans la construction de systèmes alimentaires locaux intégrés.
De nouvelles règles de passation empêcheront les gouvernements de
favoriser les fournisseurs locaux par rapport aux entreprises étrangères
dans les contrats publics. Les caractéristiques techniques seront aussi
supprimées dans les offres vu que celles-ci sont considérées comme des
limites ou des entorses pas nécessaires pour l’approvisionnement en biens
et en services. Les programmes publics tels que l’alimentation scolaire,
qui nécessitent le recours à une alimentation produite localement et
durablement ou à une alimentation provenant de petits agriculteurs,
risquent d’être injustement discriminés face aux fournisseurs étrangers.
Une libéralisation-piège
Les nouveaux accords de libre-échange contiennent des clauses qui
assurent progressivement une libéralisation à un niveau supérieur. Cela
concerne surtout les négociations pour la libéralisation des services de
l’ACS, bien que certains points de ces clauses soient également présents
dans le TPP, le TTIP et l’AECG. La plupart de ces clauses ont été
élaborées sur proposition des États-Unis lors des négociations de
l’AGETAC/OMC, mais n’ont pas été adoptées parce que les pays en
développement s’y étaient opposés.
67
Negativelisting
Les E.-U. ont introduit au sein de l’OMC la politique appelée approche
du « negative listing » pour le traitement national. Les obligations en
matière de traitement national sont ainsi appliquées automatiquement à
toutes les mesures et tous les secteurs à moins qu’un gouvernement les
rejette explicitement. Bien que l’AGCS ait fini par avoir des dispositions
qui gouvernaient tous les services, la requête des E.-U. pour un accord
vertical a été rejetée. À la place, l’AGCS a adopté une structure
ascendante – une approche « liste positive » - où les pays peuvent choisir
les services qu’ils veulent engager pour l’accès au marché et le traitement
national.
La plupart des accords de libre-échange dirigés par les E.-U. ont
recours à l’approche du « negative listing » pour le traitement national et
l’accès au marché. Les parties doivent lister tous les services qu’elles
veulent exclure du traitement national. Toute politique publique que le
gouvernement manque à protéger, même par erreur, peut être contestée.
Cette approche verticale du traitement national et de l’accès au marché
a des conséquences de déréglementation particulièrement graves. Les pays
ne sont pas seulement contraints de fournir un traitement identique aux
entreprises nationales et étrangères, mais ils doivent également offrir les
mêmes conditions de concurrence. Cette exigence crée de l’incertitude
puisque ce n’est pas toujours très clair quand les politiques confèrent un
avantage injustifié à une entreprise plutôt qu’à une autre.
Impasse et effet de cliquet
Une clause suspensive indique qu’aucune nouvelle réglementation soi-
disant « restrictive sur le plan commercial » ne peut être introduite dans
les secteurs impliqués. Par exemple, si des entreprises étrangères se
voyaient attribuer les droits de travailler dans le secteur de la
télécommunication, les nouveaux accords de libre-échange scelleraient ce
droit de manière permanente. Une disposition « à effet de cliquet »
indique, quant à elle, que toute libéralisation d’un secteur de service suite
à l’entrée en vigueur d’un accord doit être maintenue définitivement et
appliquée à toutes les parties. Par exemple, un pays propose de libéraliser
la vente de cigarettes et assouplit les restrictions sur la publicité du tabac.
Les labels, le recours aux illustrations sanitaires et les restrictions sur les
publicités à la télévision ont été utilisés par de nombreux gouvernements
pour décourager leurs populations de fumer. Si cela a été fait, c’est à cause
des nombreux effets nocifs qu’a le tabac sur la santé et des coûts que les
gouvernements doivent supporter en matière de soin de santé. Si, dans le
futur, un pays veut changer une telle politique, il ne pourra pas puisque
toute étape qu’il pourrait franchir pour libéraliser la vente de cigarette
deviendrait permanente.
68
Assurer l’avenir
Une autre caractéristique clé des nouveaux accords de libre-échangeest
la condition selon laquelle tout service doit être complètement et
automatiquement couvert par l’accès au marché et l’engagement national.
Ceci est particulièrement vrai dans les négociations de l’ACS. Selon le
témoignage de la Coalition of Services Industries, « l’ACS devrait assurer
que “tout nouveau service qu’il est possible d’échanger grâce à
l’innovation technologique dans une catégorie couverte peut être fourni
sans autres négociations” ». Une clause assurant l’avenir empêche
principalement un gouvernement de décider s’il veut alimenter la capacité
du pays à se développer ou si un service doit être fourni par le
gouvernement ou des organismes sans but lucratif.
69
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C H A P I T R E 4
Ampleur et conséquences
Quels sont les enjeux pour les peuples du Sud que présentent ces nouveaux accords de libre-échange ?
Pour les quelques pays en développement impliqués, ces nouveaux
accords de libre-échange signifieraient un approfondissement et une
intensification des relations d’exploitation entre le Nord et le Sud, ainsi
que l’aggravation des inégalités entre les deux. L’importation de produits
manufacturés et agricoles et de services depuis les pays en
développement,à des tarifs douaniers extrêmement réduits ou même à
zéro,risque de détruire le secteur agricole et les nouvelles petites et
moyennes entreprises, et finalement toute chance d’industrialisation
autodéterminée. L’espace politique des gouvernements et leur capacité à
adopter des règlementations pourraient être gravement réduits si pas
supprimés, offrant alors aux grandes entreprises étrangères l’accès
incontrôlé aux richesses naturelles et à la main-d’œuvre bon marché, mais
aussi aux fonds publics et aux ressources gouvernementales. Les pays en
développement seront plus vulnérables à la contagion de la récession
économique actuelle des E.-U. et aux économies européennes, avec une
exposition accrue aux actifs et investissements toxiques causés par la
libéralisation des banques et du secteur financier.
L’expérience du Mexique dans l’Accord de libre-échange nord-
américain, sur base duquel la plupart des propositions des nombreux
accords de libre-échange actuels ont été modélisées, est un exemple
affligeant de la façon dont les économies des pays en développement
seraient traitées dans ces accords de libre-échange.
Selon le U.S. Bureau of Labor Statistics, le salaire horaire moyen des
travailleurs de l’industrie mexicaine ne s’élevait qu’à 4,53 $ en
2011.(Perez- Rocha & Rojo, 2013). En revanche, leurs homologues
américains gagnaient 26,87 $.
74
75
GDP per-capita,PPP
Source :La Banque mondiale
La moitié des emplois créés dans le secteur formel de 1993 à 2004 ne
présentait pas l’ensemble de base des avantages tels que la sécurité sociale,
la prime annuelle et les deux semaines de congé comme stipulé par le droit
du travail mexicain. Cette violation des droits est le résultat d’une stratégie
économique destinée à attirer des emplois manufacturiers sur une base de
salaires bas et d’avantages minimes (si pas inexistants).
Zepeda, Wiseet Gallagher (2009) font remarquer que la concurrence
entre les importations des producteurs de produits de maïs vendus moins
chers etles prix réels a diminué de 50 pour cent après que le Mexique a
accéléré la libéralisation conformément au programme de l’ALENA pour
les produits sensibles. Au vu du peu de possibilités qui s’offrait aux
agriculteurs dans l’économie formelle dans ce processus, l’économie
informelle est passée de 52 pour cent en 1992 à 57 pour cent en 2004. La
migration vers les États-Unis a également augmenté par rapport aux
chiffres pré-ALENA, passant de 350.000 à 500.000 au début des
années 2000.
Selon Perez-Rocha, pendant l’ALENA, le Mexique a été confronté à son
taux de croissance économique le plus lent par rapport à toute autre stratégie
économique adoptée depuis les années 1930. De 1994 à 2013, le produit
intérieur brut du Mexique par habitant a augmenté d’un taux dérisoire de
0,89 pour cent par année… Pendant l’ALENA, l’économie mexicaine a crû
bien plus lentement que celle de n’importe quel autre pays d’Amérique
latine. Ainsi, dire que l’ALENA a profité à l’économie mexicaine est un
mythe. Cet accord a favorisé le commerce et les investissements, mais il n’a
pas réussi à produire une croissance réelle ni à créer des emplois. L’un des
76
problèmes est que l’ALENA a essentiellement créé une économie
d’exportation pour les grandes entreprises transnationales, et non pas pour
l’industrie mexicaine en tant que telle.
Il ajoute que l’ALENA n’a pas seulement « inondé le Mexique de maïs
importé et de céréales bon marché venant des États-Unis », mais il a aussi
« détruit les industries mexicaines elles-mêmes. » (dans Kolhatkar,2014).
Et vu que le Mexique est intimement lié aux États-Unis à cause de cet
accord, la Grande récession de 2008 a accentué l’économie mexicaine à la
baisse, qui a souffert bien plus que tout autre pays d’Amérique latine
(Weisbrot, 2014).
JeffFaux(2003),a raconté comment l’ALENA avait privatisé et ouvert
les banques mexicaines aux intérêts étrangers pour rendre le capital
disponible pour les firmes nationales dans les marchés nationaux.Les
banques ont été bradées à des acteurs du « capitalisme de copinage »et
quand le peso mexicain s’est effondré un an après l’adoption de l’ALENA,
ces établissements financiers ont été confortablement renfloués par le
gouvernement avec plus de 60 milliards de dollars, issus des poches du
contribuable. Ces banques ont ensuite été revendues par les capitalistes
« de copinage » avec de belles marges bénéficiaires à des investisseurs
étrangers. Roberto Hernandez, un investisseur politiquement influent, peut
constituer un bon exemple. En effet, il a acheté la deuxième plus grande
banque mexicaine pour 3,2 milliards de dollars et l’a vendue 12,5
milliards de dollars à CitiGroup.
Près de quatre-vingt-cinq pour cent du système bancaire du pays a été
cédé à des étrangers, mais le prêt aux entreprises mexicaines est passé de
10 pour cent du PIB en 1994 à 0,3 pour cent en 2000. La priorité des
banquiers étrangers était de recueillir des dépôts et d’établir des prêts à
l’intention des consommateurs à des taux d’intérêt élevés, empêchant ainsi
l’économie interne de se développer(2003).
Risques encourus par les pays du Sud ne prenant pas part aux négociations
Un sujet important qui a été oublié dans beaucoup de discussions
concerne les répercussions des nouveaux accords de libre-échange sur le
reste du monde, et en particulier sur les pays en développement. L’une des
raisons de cette lacune est que la majorité de ce type d’accord est
principalement construite entre des parties issues de pays en
développement. Quelques partenaires commerciaux traditionnels des pays
en développement sont aussi compris, mais la plupart sont de grands
absents.
77
Toutefois, les peuples du Sud ont beaucoup de préoccupation, même si la
majorité des pays de la région ne prennent pas part aux négociations.
Comme discuté dans le chapitre 2, le principal moteur des actuelles
négociations de libre-échange est la position économique sur le déclin des
E.-U. et de l’UE dans le monde politique. Les États-Unis et l’UE ont pour
objectif d’établir une référence absolue pour tous les accords de libre-
échange du 21e siècle en imposant leurs conditions aux autres pays. Si des
pays désirent se joindre au TPP ou au TTIP, ils devront adopter les
conditions commerciales existantes au lieu de les négocier
multilatéralement. Selon Sanya Reid-Smith du Third World Network, dans
les « trade clubs » dont font partie les États-Unis, ceux-ci essaient en
général de « soutirer un prix élevé » aux pays qui adoptent le traité plus
tard(Rosa Luxemburg-Stiftung, 2014). Dans le processus d’adhésion à
l’OMC ou à l’ACS, où la permission de tousles membres existants est
requise, les E.-U. formulent toutes sortes de demandes, à caractère
commercial ou non, avant qu’un pays ne soit accepté. On constate des
tendances similaires lorsqu’un pays veut rejoindre un accord de libre-
échange américain ; les États-Unis ont en général une longue liste
d’exigences et politiques économiques et non économiques que le pays
demandeur doit remplir.
Par exemple, le TPP sera utilisé pour créer de nouvelles normes
renforcées d’application mondiale. Les non-membres du TPP seront
probablement invités à se joindre au partenariat comme « condition pour
des accords commerciaux bilatéraux » ou « seront évalués contre les
normes d’exécution de la propriété intellectuelle du TPP ». (Electronic
FrontierFoundation).
De la même façon, le chapitre du TPP sur les entreprises publiques
cible particulièrement la Chine et l’Inde qui ne participent pas au pacte.
Toutefois, selon Elisabeth Drake, le TPP est vu comme une « chance »
d’établir des règles pour les entreprises publiques qui « pourraient
éventuellement servir de base à des négociations sur les mêmes sujets avec
la Chine » (in Kelsey, 2012).
Dans le cas où le TPP et le TTIP sont menés à terme avec succès, il y a
une compréhension commune selon laquelle même si ces négociations ont
été conduites sous l’égide de l’OMC, les propositions seront à nouveau
mises sur le tapis lorsque l’accord aura amassé des critiques à cause de
l’arrêt des pourparlers.
Ces nouveaux accords de libre-échange ne vont pas seulement devenir
des nouvelles plateformes pour les pays développés comme les États-Unis,
78
et redynamiser le programme commercial qu’ils n’arrivaient pas à
conclure au sein du système commercial multilatéral d’avant. Ils vont
également lancer un message fort : « le libéralisme économique et
politique reste le principe d’organisation le plus apprécié et le meilleur
pour le 21e siècle. » (Ham, 2013).
Quelles répercussions de ces nouveaux accords de libre-échange sur les droits des gens et leur bien-être ?
Gouvernement et entreprises promeuvent avec empressement les
nouveaux accords de libre-échange en promettant des emplois, une plus
grande richesse et prospérité économique, alors même qu’ils traitent
l’ensemble du processus dans le plus grand secret et loin de l’examen du
public. Toutefois, ces promesses sont les mêmes que celles formulées par
les défenseurs de l’ALECU, l’ALECA et l’ALENA lorsqu’ils essayaient
de vendre ces accords au public. À ce propos, les nouveaux accords de
libre-échange empruntent largement la terminologie et les termes de leurs
prédécesseurs, gagnant de la sorte le surnom de « NAFTA aux stéroïdes ».
Les expériences concrètes des populations pauvres et ouvrières du
monde montrent que les nouveaux accords de libre-échange ne vont
seulement approfondir et intensifier la pauvreté, la dépossession et les
inégalités, mais risquent de faire reculer les gains durement acquis (ou tout
ce qu’il en reste) de la classe ouvrière et de la majorité démocratique au
cours du siècle dernier.
Atteintes à l’agriculture nationale et à la souveraineté alimentaire
Le secteur agricole des pays en développement est souvent le plus
dévasté par les accords de libre-échange. Une part importante de la
population est touchée soit par la subsistance soit par l’agriculture
commerciale. Sans la protection nécessaire contre le déluge d’importations
agricoles bon marchéet subventionnées, les importations des pays
développés peuvent facilement faire s’écrouler les prix intérieurs, et mettre
fin aux activités de nombreux agriculteurs des pays du sud. Dans
l’ALENA, les importations agricoles subventionnées des États-Unis ont
couté au Mexique un million d’emplois entre 1991 et 2000, plus un autre
million dans le secteur agricole dans son ensemble (American Federation
of Labor-Congress of Industrial Organisations,2014).
Soutenir l’idée d’une libéralisation de l’agriculture est l’hypothèse
fondamentale que vu que les pays en développement sont principalement
agricoles, ils exercent un « avantage concurrentiel » sur les pays
développés industrialisés. Seloncet axe de développement néolibéral, la
libéralisationagricole augmenterait la production de cultures destinées à
79
l’exportation et accentuerait la concurrence, ce qui a son tour conduirait à
une qualité et une efficacité améliorée de la production et à des produits
moins chers pour les pauvres.
En réalité, la libéralisation de l’agriculture a fait perdre à de nombreux
pays en développement leur souveraineté alimentaire. Les accords de
libre-échange ont radicalement transformé les économies en
développement, qui autrefois étaient de grands producteurs alimentaires en
importateurs nets de produits alimentaires des nations riches et
industrialisées. L’Indonésie et les Philippines, par exemple, étaient les plus
grands exportateurs de riz. L’effort en faveur de l’autosuffisance de ces
pays, par le passé, était vu comme une protection face aux populations à
croissance rapide et la fluctuation des prix de leurs produits sur le marché
mondial. Avec ce changement vers une production de céréales
alimentaires de moindre valeur pour une consommation intérieure et une
culture commerciale, ces pays sont maintenant devenus les plus grands
importateurs de riz.
Hormis l’invasion des marchés locaux par des importations bon
marché en provenance de pays étrangers, l’entrée de produits alimentaires
peu fiables à cause de la suppression d’étiquetage approprié et de
contrôles frontaliers négligés est également préoccupante. Les compagnies
agricoles, par exemple, ne seront plus tenues d’indiquer si leurs produits
ont été alimentés aux OGM ou non. D’autre part, l’augmentation des
importations de produits alimentaires du Canada et du Mexique vers les
États-Unis, suite à la mise en place de l’ALENA, a été accompagnée d’une
augmentation de maladies d’origine alimentaire. Cela proviendrait du
manque d’inspection des importations agricoles sur le territoire nord-
américain.
L’existence d’agro-entreprises monopolistiques dans le secteur
représente également un enjeu dont les accords de libre-échange ne
tiennent pas compte, selon l’Institutefor Agriculture and Trade Policy
(Kuhn-Hansen, 2013). Aux États-Unis, seules quatre entreprises dirigent
plus de 80 pour cent de l’industrie de la viande tandis qu’en Nouvelle
Zélande, Fonterra contrôle près de 90 pour cent de l’industrie laitière. Au
niveau mondial, Monsanto, DuPont et Syngenta dirigent ensemble 57 pour
cent du marché des semences commerciales, tandis que Wal-Mart domine
les supermarchés et les chaines de vente au détail dans de nombreux pays.
Toutefois, la plupart des accords de libre-échange en cours de négociation
se concentrent sur la déformation et les subventions des entreprises
publiques (majoritairement dans les pays en développement), tout en
ignorant l’énorme pouvoir économique des agro-entreprises et grandes
firmes.
Le parti pris pour les FTN pro-agro dans les accords de libre-échange
est accentué avec l’inclusion des propositions ADPIC longtemps promues
80
par Monsanto et Syngenta. Les nouveaux accords de libre-échange vont
empêcher les agriculteurs d’échanger, de garder et de vendre des semences
protégées, les empêchant ainsi de cultiver et de vendre des cultures
améliorées. On comprend donc les conséquences désastreuses de ces
propositions si l’on tient compte du fait que dans les pays en
développement « la filière informelle des semences compte souvent pour
98 pour cent de l’approvisionnement en semences » et que dans le monde
entier, « au moins 1,5 milliard de personnes dépendent de l’agriculture à
petite échelle comme moyen de subsistance » (Public Citizen, 2014). Les
restrictions des DPI sur les matières végétales brevetées vont avoir une
incidence négative sur le droit des gens à l’alimentation. En effet, les
semences vont devenir plus chères, ce qui pourrait réduire le nombre de
revenus de ménage disponibles pour l’alimentation, les soins de santé ou
l’éducation (Berne Declaration,2014).
Selon le rapporteur Spécial sur le droit à l’alimentation des Nations
Unies, Olivier de Schutter, même si les agriculteurs dans les pays en
développement élargissent leur accès aux variétés végétales protégées, un
tel accès peut s’avérer désastreux pour eux sur le long terme (2009).
Toujours d’après M. de Schutter, de meilleures performances des variétés
commerciales de semences dépendent d’apports tels que les fertiliseurs et
la disponibilité de l’eau. Les agriculteurs pourront se retrouver coincés
dans le cercle vicieux des dettes à cause d’une mauvaise récolte et de
l’incapacité à rembourser leurs prêts. Ceci se vérifie notamment pour les
agriculteurs qui se sont tournés vers la monoculture, déjà à cause d’une
augmentation des revenus à certaines saisons,mais moins stables au cours
des années. De plus, les variétés commerciales de semences pourraient ne
pas être adaptées aux environnements particuliers dans lesquels les
variétés des agriculteurs seraient plus appropriées.
Le renforcement du DPI sur les variétés végétales peut réduire la
diversité génétique et la disponibilité des produits agricoles, et risque de
menacer la souveraineté alimentaire dans les pays en développement
(Public Citizen, 2014). À l’heure actuelle, peu de recherches ont été
menées sur les nouvelles variétés de cultures nécessaires aux pays en
développement comme le maïs tropical, le sorgho, le millet, les bananes,
le manioc, les arachides, les oléagineux, les pommes de terre ou encore les
patates douces. Le renforcement des DPI sur les végétaux pourrait réduire
la diversité génétique nécessaire à la structure socio-économique des
nations en développement. Comme le rappelle de Schutter : « la structure
oligopolistique du marché (des producteurs) pourrait priver les pauvres
agriculteurs d’un accès aux ressources productives de semences
essentielles pour leur subsistance. Les prix de l’alimentation pourraient
augmenter, et rendre ainsi la nourriture moins abordable pour les
pauvres » (De Schutter,2009).
Atteintes aux droits des travailleurs et des migrants
81
Le TPP, le TTIP et l’ACS sont vendus par les gouvernements et les
entreprises avec des promesses d’emplois et de prospérité de part et
d’autre des frontières. Toutefois, si les vingt dernières années d’accords de
libre-échange se révèlent instructives, les perspectives pour des millions
de travailleurs semblent bien sombres. Les nouveaux accords de libre-
échange vont porter atteinte à la sécurité d’emploi, aux salaires et aux
avantages, à la sécurité du travail des travailleurs, et vont affaiblir leurs
droits en général. Ces accords encourageront également la migration des
travailleurs et promouvront la discrimination à l’égard des migrants et des
travailleuses.
Par exemple, Jeff Faux (2013) a révélé la façon dont l’ALENA a
déplacé des travailleurs de part et d’autre de la frontière entre le Mexique
et les États-Unis, a réduit les salaires, affaibli les syndicats et posé les
termes d’une économie mondiale néolibérale. L’ALENA a causé la perte
de quelque 700 000 emplois (dont les 3/5, soit près de 415 000 étaient
dans le secteur manufacturier) aux États-Unis, parce que les entreprises se
sont relocalisées au Mexique pour profiter des salaires bas dans la zone
maquiladora du pays. Les travailleurs qui ont réussi à obtenir un autre
emploi se sont retrouvés dans des secteurs qui offrent des salaires
moindreset peu d’avantages, comme la restauration rapide ou la vente
(American Federation of Labor-Congress of Industrial Organisations,
2014). Le salaire moyen de ceux qui ont retrouvé du boulot a diminué de
13 à 11 % (Scott, 2011).
De tels changements industriels n’ont pas automatiquement profité aux
travailleurs mexicains pour autant. Bien que la main d’œuvre mexicaine
ait augmenté de 9,8 pour cent entre 1998 et 2007, ces chiffres n’ont pas pu
compenser les pertes dans le secteur agricole, qui a diminué de 23,97 pour
cent, passant de 7,5 millions de travailleurs à 5,7 millions (Otero,2011).
Un scénario similaire risque de se répéter avec le TPP. Récemment,
Obama et Nike ont promis la création de 10 000 emplois si le TPP était
approuvé. Toutefois, Lydia DePillis, journaliste au Washington Post,
conteste cette déclaration (2015). Elle explique que Nike ne dépend
presque exclusivement que de manufacturiers étrangers pour ses produits
et continue à avoir recours à l’externalisation. Par exemple, la marque a
annoncé fermer l’une de ses usines aux États-Unis pour la remplacer avec
un site de production au Honduras.
De même, l’ALENA a augmenté le pouvoir des grandes entreprises à
exercer une pression sur les travailleurs, afin que ceux-ci acceptent des
salaires plus bas et des avantages moindres (Faux, 2013), causant une
course vers le bas. Les travailleurs étaient montés les uns contre les autres,
avec les grandes firmes qui pouvaient supprimer les niveaux de
rémunération des travailleurs mexicains pour diminuer les coûts de la
82
main-d’œuvre américaine. Le changement de l’emploi bien payé dans le
secteur manufacturier à l’emploi mal payé du secteur des services a
augmenté le nombre de personnes cherchant un travail dans ce secteur,
conduisant à une stagnation généralisée des salaires (Public Citizen,
2013).
Malgré le déclin de la situation, l’écart entre le travailleur typique
américain et le mexicain reste important. Les Mexicains continuent à
recevoir à peu près 30 pour cent du salaire qu’une personne gagne
auxÉtats-Unis. Les travailleurs dans les maquiladoras (zones franches
industrielles d’exportation), dont beaucoup sont des femmes, souffrent
d’une exploitation grave. Ils ne jouissent pas de droits du travail, n’ont pas
d’avantages en matière de soins de santé, et travaillent jusqu’à 12 heures
par jour. Les femmes y sont discriminées : elles doivent subir un test de
grossesse avant de soumettre leur candidature pour un emploi.
La concurrence accrue entre les travailleurs, à la fois des pays
développés et de ceux en développement, va certainement favoriser les
dirigeants d’entreprise et leur permettre de minimiser le contrôle social sur
les marchés pour la protection du travail, et ce afin que les bénéfices
soient, eux, maximisés. Ce processus va réduire, si pas anéantir, les acquis
obtenus par les mouvements de travailleurs et des syndicats pour le
compte de la classe ouvrière.
L’architecture de dérégulation du libre-échange, couplée à la
protection des investisseurs,va permettre aux entreprises de faire pression
sur les gouvernements pour que ceux-ci modifient leurs politiques de
protection sociale et de l’emploi. Ce faisant, elles pourront faire du
chantage à ces mêmes gouvernements pour qu’ils concèdent des
allègements fiscaux et autres subventions aux grandes entreprises. En
utilisant la tactique de la carotte et du bâton, ces grandes entreprises
pourront soit séduire les gouvernements avec de prétendus emplois et
taxes générés par leurs investissements, soit les menacer de poursuites
judiciaires ou de transfert de production vers un pays du Sud où l’un des
« avantages concurrentiels » est la répression de la main-d’œuvre
organisée.
Selon Robert Scott, à l’époque de l’ALENA, les entreprises n’ont pas
arrêté de menacer de fermer des usines et de les déplacer à l’étranger, tout
en négociant avec les travailleurs les salaires et les conditions de travail,
avec des conséquences directes sur les positions de négociations des
travailleurs. Citant une enquête de 1992 du Wall Street Journal, Scott
révèle qu’un quart des presque 500 chefs d’entreprise américains ont
admis qu’ils étaient « très à même » ou « songeaient probablement » à
utiliser l’ALENA comme « argument de négociation » pour diminuer les
salaires. Il ajoute également que plus de 50 % de tous les employeurs ont
menacé de fermer toutes, ou certaines, de leurs usines pendant des
84
TradeUnionDensity
Unionizationrateshavedeclinedinallthreecountries.
Source :OrganisationforEconomicCooperationandDevelopment
Les menaces de fermeture des usines lors des élections de l’accréditation
syndicale du National Labor Relations Board (NLRB) « ont près de doublé
après la mise en application de l’ALENA. Les menaces sont plus présentes
dans le secteur des communications mobiles, où les employeurs peuvent
menacer, de façon vraisemblable, de fermer ou de déplacer les activités en
réponse à des actions syndicales » (Thehighpriceof‘free’
trade :NAFTA’sfailurehascosttheUnitedStatesjobsacrossthenation,2003).
Par conséquent, la densité syndicale dans les trois pays s’est rapidement
amenuisée depuis la mise en place de l’ALENA.
De la même façon, en Nouvelle Zélande, le gouvernement a modifié la
législation du travail, sous la pression du conglomérat Time Warner, lors
du tournage du film « Le Hobbit ». En réponse à la menace inquiétante
proférée par Time Warner de changer le lieu du tournage, le gouvernement
a autorisé l’entreprise à déchoir les acteurs de leur droit à se syndiquer, à
faire la grève et à les priver d’avantages tels que des congés payés et des
indemnités de maladies.
Le Vietnam, l’un des pays négociant le TPP, est considéré comme une
alternative de main-d’œuvre bon marché, moins chère même que la main-
d’œuvre chinoise. Les syndicats syndicats indépendants y sont interdits et
les travailleurs vietnamiens sont payés environ d’un tiers à la moitié moins
85
que les travailleurs chinois. Le TPPrisque de dresser les travailleurs
américains contre la main-d’œuvre vietnamienne sous-payée et réprimée,
perpétuant ainsi le nivellement vers le bas
Avec les efforts menés pour pousser les nouveaux accords de libre-
échange à contrôler le pouvoir de réglementation des gouvernements, la
main-d’œuvre devra être adaptée aux flux de production puisque les
entreprises jugent cela nécessaire même si cela va à l’encontre des normes de
travail établies. Ce processus est appelé la flexibilisation du travail. C’est un
mécanisme grâce auquel les entreprises ne s’engagent plus à offrir à leurs
employés un emploi stable et sur le long terme, et cherchent à la place des
relations d’emplois flexibles qui leur permettent d’augmenter ou de diminuer
leur main-d’œuvre et réaffecter des employés facilement (Stone,2006).
Les capitalistes ont eu recours à différentes tactiques pour rendre le
travail flexible. Semaines de travail compressé, réduction des jours de
travail, rotation des travailleurs, horaires coupés, départs forcés, congés
flexibles ont été mis en place pour réduire les heures payées aux
travailleurs et pour maximiser l’accumulation de gains des capitalistes. La
contractualisation du travail a servi d’écran de fumée légal aux capitalistes
pour réduire davantage le coût de la main-d’œuvre et pour éviter de payer
les prestations gouvernementales normalement prévues pour les employés
normaux. Les travailleurs ont également été exposés à différents dangers
liés à la santé et à la sécurité. La sécurité, la santé et les conditions de vie
des travailleurs ont été affaiblies pour le bien de la libre circulation des
capitaux.
De même, l’arrivée massive de produits manufacturés bon marché vers
des pays moins développés, qui ne disposent pas de la technologie et des
financements pour rivaliser avec les subventions octroyées aux pays plus
développés pur leurs industries et secteurs, peut détruire les industries
manufacturières et l’agriculture locales. Ces importations, ainsi, conduire
à l’intensification de l’exode rurale et de la migration vers l’étranger des
personnes qui cherchent de nouvelles sources de subsistance. D’autres
problèmes existants vont être accentués, tels que l’exode des cerveaux, la
sécurité internationale, le surpeuplement des centres urbains, l’insécurité
alimentaire, la pression à la baisse sur les salaires, et même des
discriminations ethniques et raciales à l’encontre des travailleurs migrants.
Les pertes massives essuyées par le secteur agricole mexicain sont à
l’origine d’une migration sans précédent des ouvriers agricoles vers les
zones industrielles à la fois aux Etats-Unis et au Canada. Selon Public
Citizen, le flux annuel d’immigrants du Mexique vers les Etats-Unis a plus
de doublé depuis 1993 (avant l’ALENA), passant de 370 000 à 770 000 en
2000, ce qui correspond à une augmentation de 108 pour cent (Public
Citizen, 2013). Cela a créé une grande réserve de travailleurs vulnérables
prêts à accepter des salaires très bas, accentuant encore la pression vers le
86 bas sur les salaires.
Atteintes aux femmes
Les nouveaux accords de libre-échangereprésentent de nouvelles
menaces pour les femmes. On s’attend à ce qu’ils renforcent le système
patriarcal et accélèrent la paupérisation des femmes à travers des formes
plus subtiles et sophistiquées d’exclusion.
La destruction de moyens de subsistance due à la libéralisation des
industries et de l’agriculture va pousser encore plus de femmes dans les
pays en développement à accepter des emplois informels, tels que le
travail de sous-traitance, l’appui dans les petites entreprises familiales,
vendeuse ambulante, éboueuse, et parfois, prostituée. Ces emplois
représentent une précarité d’emploi, une rémunération faible, irrégulière
ou inexistante, peu ou pas d’accès à la sécurité ou à la protection sociale,
capacité limitée à organiser l’application des normes internationales de
travail et des droits de (Chant and Pedwell 2008). Elles font également
face à un certain nombre de dangers sérieux liés à la santé et à la sécurité,
notamment des conditions de travail dangereuses, la violence sexuelle et la
vulnérabilité face au VIH/SIDA.
Selon un rapport du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, les
femmes travailleuses représentent 20 à 30% des environ 450 millions
d’ouvriers agricoles salariés. La majorité de travailleuses agricoles
appartiennent en général au segment « périphérique » de la force de travail
composée de travailleurs non qualifiés, sans contrat de travail formel, et
dont le travail est d’ordinaire saisonnier ou temporaire.
Avec la mise en place de politiques internationales de libre-échange, les
firmes transnationales peuvent tirer profit des grandes réserves de main-
d’œuvre féminine. En partant des zones rurales vers les zones urbaines, ou
de pays pauvres vers des pays riches, les femmes seront forcées de chercher
du travail comme migrantes régularisées ou sans papier pour répondre à des
exigences de production à n’importe quel prix. Dans les nations en
développement, les femmes se sont révélées être, pour les grandes firmes
transnationales, des sources de main-d’œuvre rentable. Les cas des
travailleuses des maquiladoras au Mexique ou des travailleuses dans les
nombreux ateliers clandestins en Asie du Sud-Est en sont la preuve.
Le travail domestique est une industrie alimentée par les femmes.
Aujourd’hui, il existe au moins 53 millions de travailleurs domestiques
dans le monde, don 83% sont des femmes. Le travail domestique est l’un
des moteurs principaux de la migration féminine dans le monde. (Asia
Pacific Forum on Women, Law and Development 2010). Alors que les
industries dans les pays en développement croulent sous la libéralisation
du marché et que les salaires des ouvriers chutent considérablement, de
87
plus de plus de femmes risquent d’être contraintes de prendre un emploi
domestique comme femme de ménage ou gardienne dans les pays
étrangers plus riches.
Atteintes aux services sociaux et aux biens publics
L’atteinte des entreprises aux services sociaux et aux biens publics est
une arme à double tranchant qui va amoindrir les capacités financières du
gouvernement pour répondre aux responsabilités en matière des droits de
l’homme vis-à-vis de leurs circonscriptions, tout en faisant pression sur les
gouvernements pour que ceux-ci ouvrent les services à la concurrence sur
le marché libre.
Contrairement aux règles de l’OMC/AGCS dans le cadre desquels les
services libéralisés doivent être explicitement inclus dans le programme
d’engagement national, les nouveaux accords de libre-échange adoptent
une approche bien plus agressive. Ainsi, tous les services sont compris
sauf ceux qui ont été spécifiquement écartés dans les négociations. Avec
l’ALEAC, les pays d’Amérique centrale ont laissé leurs secteurs de
services grands ouverts pour les entreprises américaines, alors que les
négociateurs commerciaux américains se sont limités à leurs engagements
précédemment pris pour l’OMC/AGCS. Cela signifie que bien que les
Etats-Unis maintiennent des protections pour leurs secteurs de services, les
pays d’Amérique centrale ont exposé les leurs, révélant des disparités
inhérentes dans les négociations entre les pays pauvres et riches
(James,2011).
Pour de nombreux pays en développement, les recettes publiques liées
au commerce sont des sources importantes pour de nombreux services
publics. Elles permettent d’assurer une stabilité macroéconomique et de
favoriser des résultats, tels que la réduction de la pauvreté et les dépenses
publiques favorisant le bien-être. Selon l’Indicateur mondial de
développement, les recettes liées au commerce (provenant par exemple
des droits de douane, des taxes à l’exportation, de l’impôt sur les bénéfices
liés à l’exportation, etc.) dans les pays à revenu faible et moyen varient de
3 à 20 pour cent des recettes publiques totales(World Bank, 2013). Les
nouveaux accords de livre échange vont éliminer une source majeure des
revenus gouvernementaux en éliminant les droits de douane. Cela va
inévitablement conduire à une diminution des dépenses sociales pour
l’éducation, les soins de santé et autres services sociaux indispensables, et
cela va augmenter la pression exercée sur les gouvernements pour qu’ils
privatisent.
Les nouveaux accords de libre-échange cherchent également à
redéfinir entièrement la signification du commerce, afin d’y inclure un
certain nombre d’autres activités telles que les services généralement
fournis par le gouvernement, comme l’éducation, la santé, l’eau,
88 l’électricité, la télécommunication, etc. Ces accords vont commercialiser
les services sociaux, et en faire des unités échangeables pour lesquelles les
investisseurs pourront se faire concurrence. Les investisseurs étrangers se
verront garantir les droits de non-discrimination des nations les plus
favorisées et bénéficieront du traitement national. Ils jouiront également
d’un droit à l’arbitrage en cas de litige couvert par l’accord. Vu que les
services seront fournis par le biais du marché plutôt que par l’Etat, le
public sera de moins en moins en mesure de tenir le gouvernement pour
responsable.
Cette situation ne va faire qu’accentuer la vulnérabilité des pauvres des
villes et des campagnes, des peuples autochtones, des femmes, des jeunes
et des autres groupes marginalisés qui pourraient bénéficier d’une certaine
protection grâce aux services sociaux, aux services publics et aux
infrastructure en temps de crise et pour faire face aux prix grimpants des
nécessités de base.
Par exemple, les résidents de Buenos Aires, en Argentine, ont dû payer
des factures d’eau plus élevées après que la compagnie des eaux
américaine Azurix aie repris l’exploitation de la station d’eau. Lorsque le
gouvernement local a essayé de réguler les prix de l’eau, Azurix avec
l’aide du bureau d’avocats King & Spalding lui a intenté un procès. Le
tribunal investisseur/Etat a tranché en faveur de la compagnie des eaux et
lui a accordé 165 millions de dollars prélevés sur les taxes publiques
argentines.
Les nouveaux accords de libre-échange vont également mettre en
danger les droits des citoyens à avoir accès à l’éducation. Ce droit de base
ainsi que les services sociaux que les gouvernements devraient assurer
vont être à vendre une fois que les entreprises auront décidé d’en profiter.
Libéraliser le secteur de l’éducation soulève également la question de
savoir si le système éducatif produit des diplômés dont on a besoin pour le
véritable développement industriel, et non pas seulement des travailleurs
qualifiés pour les multinationales. Maintenant déjà, le gouvernement
vietnamien autorise les investissements étrangers dans son secteur éducatif
pour répondre aux grandes multinationales qui ont besoin de main-
d’œuvre qualifiée et bon marché.
Atteintes à la santé publique
Les nouveaux accords de libre-échange semblent être une nouvelle
menace pour la santé publique, notamment pour les personnes dans les
pays en développement. Alors que les grandes firmes pharmaceutiques
sont prêtes à augmenter les prix des médicaments de première importance
par le biais de monopole de brevets, la santé et la sécurité des peuples et
des communautés risque grandement d’être compromise si les
réglementations qui assurent la responsabilisation et le comportement des
89
entreprises sont supprimées.
Selon Médecins Sans Frontières, la concurrence des génériques est
importante pour réduire les prix des médicaments dans les pays pauvres
(Médecins Sans Frontières, 2013). Les initiatives internationales de
traitement, telles que le Fonds mondial de lutte contre le sida, la
tuberculose et la malaria, UNITAID et l’UNICEF dépendant grandement
des médicaments génériques bon marché. De plus, la concurrence des
génériques s’est montrée primordiale pour diminuer le prix des
médicaments antiviraux de première génération de 99 pour cent, aidant
près de 8 millions de personnes à obtenir un traitement conte le sida/VIH.
Les nouveaux accords de libre-échange vont affaiblir, entre autres, la
concurrence des génériqueset étendre les droits des brevets des grandes
compagnies pharmaceutiques à 25 ans et leur permettre ainsi de gonfler
artificiellement les prix des médicaments. Le sida étant la cause principale
de mortalité chez les femmes en âge de procréer au niveau mondial, et la
discrimination contre la communauté LGTB les empêchant d’avoir accès
aux soins et services médicaux, des médicaments plus chers vont conduire
à plus de perte humaine encore.
Les efforts nationaux et mondiaux des gouvernements pour
réglementer les actions des entreprises pour assurer la santé et la sécurité
publiques vont être mis en péril par l’ensemble de privilèges et de droits
extraordinaires accordés aux investisseurs étrangers au travers du
mécanisme de règlement des différends entre investisseur et Etat.
Par exemple, lorsque l’Uruguay et l’Australie ont commencé à
appliquer la convention cadre de l’Organisation mondiale de la santé pour
la lutte anti-tabac1, signée par 167 pays et qui requiert des emballages
neutres et des messages de prévention, Philip Morris a lancé des
poursuites judiciaires contre les deux pays.
Un autre cas est celui de l’Ethyl Corporation qui lancé un procès
contre le Canada quand ce dernier a décidé d’interdire avant tout nouvel
essai l’utilisation duméthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyl
(MMT), un agent antidétonant utilisé pour améliorer les performances
d’un moteur, mais qui contient du manganèse, une neurotoxine connue. Le
24 juin 1998, la commission de l’ALENA a rejeté la plainte déposée par le
Canada, forçant ce dernier à retirer son interdiction sur le MMT et à payer
à Ethyl Corporation 13 millions dollars de frais de justice et
d’indemnisation.
1La convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé pour la lutte anti-tabac a pour objectif de « protéger les
générations actuelles et à venir des terribles conséquences sur la santé, le social, l’environnement et l’économie de ka
consommation de tabac et de l’exposition à la fumée de tabac, en proposant un cadre pour des mesures de lutte anti-tabac. Ces mesures doivent être mises en œuvre à un niveau national et international afin de réduire régulièrement et
sensiblement la prédominance de la consommation de tabac et l’exposition à la fumée de tabac (Organisation
mondiale de la santé, 2003).
90
Source :WaningB,DiedrichsenE&MoonS.Alifelinetotreatment :theroleofIndiangenericmanufacturersin
supplyingantiretroviralmedecinestodevelopingcountries.2010.JournaloftheInternationalAIDSSociety,13 :35
Les nouveaux accords de libre-échange vont mettre en péril la sécurité
alimentaire, vu que les normes vont être réduites à leur plus petit commun
dénominateur et les politiques d’étiquetage vont être prises sous les tirs
pour des entraves aux échanges. Les importations de produits alimentaires
seront autorisées si un pays exportateur affirme que son régime de sécurité
est « équivalent » à celui du pays importateur, et cela même s’il viole les
principes clés de la législation en matière d’alimentation du pays
importateur. Cela équivaut à externaliser les inspectionsde denrées
alimentaires nationales dans d’autres pays du globe, en mettant en danger
la santé du public.
Citant une étude de 1994 menée par
CouncilforAgriculturalScienceandTechnology, Global Trade Watch note
qu’entre 6,5 et 81 millions de cas de maladies alimentaires se déclarent
chaque année aux Etats-Unis, dont 9000 se soldent par un décès. Le
nombre de maladies transmises par les aliments et provenant de fruits,
légumes et jus frais a considérablement augmenté au cours des dix
dernières années.
La montée en flèche de cas de maladies transmises par les aliments
peut être liés à différents phénomènes : comportement humain, industrie,
adoption de certains microbes et mondialisation croissante de
l’approvisionnement alimentaire. Le chercheur Nicols Fox a exprimé son
accord avec cette observation, expliquant que « notre alimentation est
aussi sûre que le pays dont elle provient… Le commerce est comme le
passeport des pathogènes ». Depuis 1990, les foyers de maladies dues à
des aliments ont été multiples aux Etats-Unis. Les alimentés importés ont
contenu de la shigellose dans des oignons verts importés, de la salmonelle
91
dans du cantaloup ou des semences de luzernes importés, de la cyclospora
dans des framboises importées, et le choléra dans des noix de coco
importées également.
Atteintes à l’environnement
Selon des études scientifiques, si l’on veut éviter un changement
climatique catastrophique, 80 pour cent des énergies fossiles du monde
doivent rester sous terre. Ceci va bien entendu à l’encontre des intérêts des
entreprises de combustibles fossiles. Dans les nouveaux accords de libre-
échange, les entreprises auront le droit de poursuivre les gouvernements
qui seraient intervenus dans leurs affaires – que ce soit par l’adoption
d’objectifs pour réduire les émissions de carbone ou de législation
environnementale.
En fait, les précédents accords ont déjà conduit à des poursuites
concernant les carburants fossiles. En 2009, la compagnie d’énergie
suédoise Vattentall a lancé une affaire internationale en arbitrage contre
l’Allemagne concernant la construction d’une centrale au charbon sur une
rive de l’Elbe (Friends of the Earth Europe, 2014). La ville d’Hambourg a
établi un certain nombre de critères pour la construction de l’usine qui
avaient pour but de protéger les eaux du fleuve. Vattenfall a défendu que
ces exigences rendaient le projet irréalisable et a réclamé des
indemnisations à hauteur de 1,4 milliards €, sans les frais et intérêts. La
ville d’Hambourg a accepté de régler le différend avec la compagnie en
2011. Les normes environnementales ont été abaissées et un permis pour
la construction de l’usine a été délivré.
Dans un autre procès, en 2013, Lone Pine Resources, invoquant des
dispositions de l’ALENA, a poursuivi en justice la province canadienne de
Québec qui avait adopté une interdiction de fracturation. Selon la
compagnie, l’interdiction leur a coûté 250 milliards de dollars (Nelson,
2015). L’affaire est toujours en cours.
Le plus grand objectif de la déréglementation des politiques
environnementales est d’offrir aux grandes entreprises extractives un accès
illimité aux ressources naturelles des peuples du Sud. Cet accès sans
limites va les priver du droit d’utiliser leurs propres ressources naturelles
nécessaires au développement économique, et confronter leurs
communautés à des catastrophes environnementales.
Dans le cadre de l’ALENA, le gouvernement mexicain a amendé la
Constitution nationale en 1993 pour autoriser l’exploitation minière à ciel
ouvert, la propriété étrangère des compagnies impliquées dans
l’exploitation de ressources naturelles et la vente de terres ancestrales
protégées (Godoy, 2009).Les compagnies minières canadiennes, dont
92 Minera San Xavier, se sont lancées dans une acquisition frénétique de
permis pour les mines d’or et d’argent au Mexique. Toutefois, les
résidents locaux ont protesté, craignant que l’exploitation minière
n’appauvrisse et empoisonne les nappes phréatiques dont les gens
dépendent pour l’approvisionnement en eau. Le tribunal fédéral a statué
que l’exploitation minière ne pouvait avoir lieu parce qu’elle violait
d’importantes lois environnementales. Malgré cela, le gouvernement
mexicain a autorisé MSX à poursuivre ses activités. Après une autre série
de batailles légales et d’actions de désobéissance civile, le gouvernement
mexicain a été forcé de se plier aux exigences du peuple et a fermé la mine
en 2009. Pourtant, en 2010, on s’est rendu compte que MSX avait repris
ses activités avecle soutien de responsables mexicains et de l’ambassade
du Canada au Mexique
Atteintes aux peuples autochtones
Les peuples autochtones ont longtemps subi la dépossession et
l’exploitation conduites par les colonisateurs. A l’ère de la mondialisation
néolibérale, les peuples autochtones se sont retrouvés face à face à de
nouveaux explorateurs coloniaux – les firmes transnationales, les
investisseurs, les gouvernements et les institutions multilatérales – qui
cherchaient à piller et s’accaparer leurs terres et leurs ressources.,
Les investisseurs étrangers dans l’agriculture et les industries
extractives empiètent sur les terres ancestrales des peuples autochtones.
Ces peuples font obstacle à l’expansion de la mondialisation. Ils occupent
les derniers lieux sauvages sur Terre, où les ressources sont abondantes :
forêts, minéraux, eau et biodiversité (International Forum on
Globalisation, 2006). Selon des estimations, près de 50 % de l’or produit
entre 1995 et 2015, et jusqu’à 70 % de la production de cuivre d’ici à 2020
se dérouleront sur les territoires des peuples autochtones. Les nouveaux
accords commerciaux et investissements qui ont été établis requièrent
l’ouverture de territoires autrefois inaccessibles pour que ces ressources
naturelles soient extraites. En conséquence, les populations indigènes ont
été expulsées de leurs domaines ancestraux, privés d’espace de vie, de
ressources et de moyens d’existence au nom de la croissance économique.
En 1993, dans le cadre de la phase de transition vers l’ALENA, le
gouvernement mexicain a poussé à l’abrogation de l’article 27, qui
protégeait les territoires indiens de la vente ou de la privatisation. Par
conséquent, la population indigène du Mexique s’est retrouvée sans
protection en cas de perte de leurs territoires restant. Pour cette raison, les
zapatistes ont qualifié l’ALENA de « certificat de mort pour les peuples
indiens du Mexique ». Le 1er janvier 1994, jour où l’ALENA est entré en
vigueur, l’Armée zapatiste de libération nationale a déclaré la guerre au
93
gouvernement mexicain, prenant d’assaut et occupant quatre chefs-lieux à
Chiapas, au Mexique. Toutefois, leur rébellion ne dura que 12 jours
puisque les paysans pauvrement équipés ne pouvaient pas faire face à la
puissance de l’armée mexicaine, soutenue par les Etats-Unis. Arrestations
arbitraires, exécutions sommaires, torture et descentes de maison en maison
ont été autorisées par le gouvernement pour dompter toute rébellion à Chiapas
(Campbell,1996).
De plus, la privatisation des services sociaux de base, tels que la santé,
l’éducation et d’autres infrastructures très importantes, vont aggraver la
marginalisation et l’exclusion des populations autochtones.
Statistiquement, ces populations sont en moins bonne santé, ont moins de
possibilités d’éducation et une espérance de vie plus faible
Les règles améliorées proposées concernant les droits de propriété
intellectuelle vont grandement ébranler l’héritage intellectuel et culturel
des peuples indigènes. Les grandes entreprises vont acquérir le monopole
sur les brevets sur les formes de vie et les processus de création de vie
comme si c’étaient des innovations originales ou industrielles. L’ADPIC a
déjà eu des répercussions négatives sur les peuples autochtones. Par
exemple, les peuples autochtones cultivent et développent une flore locale
depuis des siècles. La vie végétale n’est pas censée être brevetée, mais les
compagnies pharmaceutiques et agrochimiques ont trouvé un moyen de le
breveter en extrayant des éléments des gènes des plantes et en en brevetant
les substances actives (DeGeer, 2002).
Atteintes à la démocratie et à la souveraineté nationale
Le 22 mai 2015, le président américain Barack Obama a eu la
possibilité d’obtenir une procédure accélérée de la part du Sénat
américain. Dans les coulisses, les multinationales les mieux établies au
monde ont ouvert les robinets à cash pour pousser les sénateurs à
approuver le projet de loi en procédure accélérée. Celle-ci va à l’encontre
des principes de démocratie et de la séparation des pouvoirs entre les
différentes branches du gouvernement. En limitant l’intervention du
Congrès à un rejet ou une acceptation de la formulation du président, ce
projet de loi accéléré empiète sur le mandat constitutionnel du Congrès qui
consiste à amender ou reconstruire des politiques de manière à ce que la
volonté du peuple soit représentée(Firestone,2015).
Le projet de loi en procédure accélérée comprend la confidentialité des
négociations, les dissimulant au public et n’offrant pas de place au débat.
La presse et le public n’ont toujours pas accès aux textes des accords
commerciaux tels que le TPP, le TTIP et l’ACS. Pourtant, les négociateurs
s’empressent de conclure des accords qui auront des répercussions
énormes sur notre quotidien. Même certains responsables publics, tels que
des membres du Congrès, ont un accès très limité aux textes. Les membres
94 du Congrès ne peuvent consulter le texte que s’ils se rendent dans un
espace privé pour le lire. Ils ne peuvent y amener ni téléphone, ni stylo, ni
papier
Premièrement, la proposition en faveur d’une coopération ou d’une
harmonisation réglementaire va conduire à l’affaiblissement de la
démocratie et des normes qui protège le peuple. En échange, les grandes
entreprises et les groupes de lobby se voient offrir la possibilité
d’influencer le résultat de la prise de décision, avec encore moins de
contrôle par les citoyens et de responsabilisation vis-à-vis des populations.
Les organes et comités réglementaires, qui comprennent des personnes
non élues et issues du privé tels que des technocrates et des lobbyistes de
grandes entreprises, vont jouir d’un statut supérieur dans la hiérarchie du
gouvernement central (Kelsey, Preliminary Analysis of the Draft TPP
Chapter on Domestic Coherence, 2011). Les parlements et les organes
gouvernementaux régionaux ne pourront plus être complètement
impliqués et les débats publics seront dangereusement mis à mal. Les
propositions de déréglementation, qui ont pour but de promouvoir l’intérêt
général, pourraient être stoppées avant même qu’elles ne soient présentées
aux tables de discussion, tandis que celles défendues dans l’intérêt des
puissantes entreprises pourraient être présentées comme fait accompli sans
possibilité d’amendement. La voix des citoyens et de leurs représentants
démocratiquement élus sera jugée inappropriée.
Deuxièmement, le célèbre mécanisme ISDS est un autre moyen rapide
pour les entreprises et de contourner les processus et institutions
démocratiques, d’empêcher les gouvernements d’exercer leur mandat pour
assurer le bien-être et la sécurité des peuples, violant ainsi la souveraineté
nationale des pays.
L’ISDS est nuisible à l’espace politique démocratique des
gouvernements. Pour mieux comprendre ce propos : chaque action des
banques centrales dans chaque pays conduit inévitablement à des pertes
pour certaines entreprises et à des gains pour d’autres. Toutefois, les
banques centrales sont chargées de prendre des décisions basées non pas
sur la façon dont une politique monétaire va affecter les entreprises
particulières, mais sur le bien-être et les perspectives financières et
économiques d’une nation entière. Si les accords de libre-échange sont
quand même adoptés, la liberté d’action des gouvernements est
compromise. Les tribunaux ISDS auront le pouvoir d’octroyer des
bénéfices perdus aux entreprises qui auraient été défavorisées par l’action
politique des banques centrales.
Un autre exemple qui illustre la façon dont l’ISDS restreint l’espace
politique des gouvernements souverains est l’affaire de
SalukaInvestments,une société d’investissements hollandaise. Celle-ci a
poursuivi en justice la République tchèque qui n’avait pas renfloué une
95
banque privée dans laquelle la société détenait des actions alors que le
gouvernement tchèque l’avait fait avec des banques où celui-ci avait des
actions. Saluka Investments a gagné le procès et s’est vu verser une
indemnisation de 236 milliards de dollars. Concrètement, les
gouvernements n’auront plus le choix si une grande crise financière se
déclare à l’avenir et devront renflouer les banques en faillite.
Alors que le « pouvoir positif » de d’adopter des lois n’entre pas dans
les compétences de l’ISDS, celui-ci détient le pouvoir de « paralyser l’acte
législatif » en bloquant la législation et en l’éloignant de certaines
alternatives qui pourraient être régies par des tribunaux ISDS. Ainsi, la
souveraineté nationale est efficacement ébranlée. Ce pouvoir législatif
négatif accordé aux tribunaux ISDS dirige et limite les pouvoirs législatifs
positifs des législateurs nationaux, fusionne les fonctions légales et
juridiques et rompt la séparation des pouvoirs garanties par les
constitutions nationales. Par conséquent, cette fusion est illimitée puisqu’il
s’agit d’une autorité qui pourrait être appliquée à toutes les questions
légales pertinents ou aux activités gouvernementales à tous les niveaux où
« les attentes de profit des entreprises peuvent être concernées ».
(Firestone, 2015).
Enfin, la souveraineté nationale sera englobée dans des organes ISDS
extérieurs aux gouvernements. Les nouveaux accords de libre-échange ne
présentent pas de dispositions légales claires autorisant les nations à
réglementer les multinationales et les investisseurs pour protéger le bien-
être public général sans l’ombre d’une menace de procès opposant
investisseur et Etat.
Atteintes aux petites et moyennes entreprises
Les nouveaux accords de libre-échange sont favorables aux
entreprises, mais personne du secteur des entreprises n’y participe. En
réalité, seules les grandes multinationales sont parties aux négociations,
tandis qu’un grand nombre de personnes de la « communauté des
entreprises durables », notamment les petites et moyennes entreprises, est
laissé de côté. Il va sans dire que l’opposition au sein des PME contre les
nouveaux accords de libre-échange est forte. Francesca Rheannon
explique que « les accords de libre-échange sont vus comme une menace
la capacité des entreprises durables à survivre et prospérer. En fait, de
nombreuses entreprises se demandent à propos de ces nouveaux accords :
« à qui profitent-ils ? » 2014).
La question posée par Rheannon est particulièrement urgente, étant
donné que la mondialisation néolibérale en cours, au lieu de créer une
« concurrence complète » démocratique entre les nombreuses petites et
moyennes entreprises qui jouissent de la « liberté de marché », ne profite
qu’aux grandes entreprises. Le marché n’est « libre » que pour les
96 capitalistes monopolistes, alors tout le reste est « condamné à une
existence de dépendance (sont concernés les producteurs, les travailleurs
et les consommateurs) ou complètement exclu du marché »
(Werlhof,2008).
C’est la raison pour laquelle les groupes de petites et moyennes
entreprises insistent sur l’importance pour les entreprises de prendre en
compte les externalités et de fonctionner selon les règles qui garantissent
l’équité, la transparence et la responsabilisation. Toutefois, selon David
Levine, co-fondateur et PDG du American Sustainable Business Council,
les nouveaux accords de libre-échange sont en train « de détruire les règles
qui ont permis de créer un terrain de jeu égal et équitable » et donnent « un
avantage concurrentiel déloyal à ceux qui ont le plus d’argent et le plus
d’influence politique. » (Rheannon,2014).
Un exemple clair de la manière dont les nouveaux accords de libre-
échange vont déstabiliser les petites et moyennes entreprises nationales est
la nouvelle règle qui requiert « le traitement national » tout en interdisant
des exigences de performance de la part des investisseurs étrangers ou
investissements concernant l’utilisation des biens ou services produits
localement dans les marchés du gouvernement. La directrice générale de
la Metro IndependentBusinessAlliance,MaryHamel, craint que la politique
n’étouffe les politiques d’approvisionnement local avec le gouvernement
municipal :
Nous savons qu’actuellement certains de nos organes
gouvernementaux disposent de politiques d’approvisionnement
local ou les envisagent, et nous savons donc que cela mettrait en
péril nous entreprises. Ces politiques risquent de mettre en danger
le travail que nous avons fourni pour insister auprès de nos
représentants élus sur l’importance de soutenir ces entreprises et de
leur octroyer, dans certains cas, des politiques
d’approvisionnement préférentielles ou de leur permettre d’entrer
dans de plus grandes entreprises, par exemple, dans certains
domaines qui sont dominés par les grandes multinationales. Toute
possibilité serait alors écartée.
—Rheannon, 2014
Il est toutefois trompeur de penser que le simple rétablissementde
règles de marché « justes et équitables » conduirait à un meilleur
fonctionnement de l’architecture du commerce. Les règles en matière
d’entente ont perdu leur potentiel depuis que les firmes transnationales –
et non pas le « marché » en tant que mécanisme anonyme ou « main
invisible » – sont celles qui définissent les normes sans aucun contrôle
politique(Werlhof, 2008). Les règles informaient et continuent à informer
le processus actuel de concentration de capitaux et le déplacement des
petites entreprises par les grands monopoles. Petites, moyennes et
97
certaines grandes entreprises sont poussées en dehors du marché, forcées
de se replier ou d’être avalées par des firmes transnationales qui dispose
d’un pouvoir financier plus grand.
98
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104
C H A P I T R E 5
La Résistance des peuples
La Résistance des peuples au programme néolibéral
Au cours des sept dernières années, le monde a été le théâtre
d’importants mouvements de protestation pour dénoncer les atteintes des
entreprises aux droits des peuples, à la suite de la crise financière de 2008.
La vague révolutionnaire de manifestation et de protestations contre
les régimes despotiques dans le monde arabe a marqué l’avènement de ce
que l’on appelle aujourd’hui le printemps arabe. Sur la place Tahrir, en
Égypte, des millions de gens se sont rassemblés et élevés contre la
corruption généralisée, la brutalité étatique, les faibles salaires et
l’inflation des prix des denrées alimentaires. À Bahreïn, des centaines de
milliers de manifestants se sont mobilisés pour exiger une plus grande
liberté politique, l’égalité et les droits de l’homme.
En Turquie, ce qui était à la base une manifestation contre le plan du
gouvernement, qui visait à démolir le parc Taksim Gezi - vieux de 75 ans -
et à construire à la place un centre commercial, s’est transformée en
mouvement démocratique populaire. Les manifestants ont prouvé qu’ils
avaient conscience de l’adhésion indéfectible du gouvernement aux
politiques néolibérales. Ce même gouvernement qui privatise les biens
publics et vend les sociétés publiques aux firmes étrangères.
En Europe, de véhémentes protestations de masse se sont opposées
aux impositions d’austérité de la Banque centrale européenne, du Fonds
monétaire international et de la Banque mondiale dans la région, et contre
les plans de sauvetage subis par les contribuables donnés par les
gouvernements aux grandes banques et aux oligarques financiers et
commerciaux. En Espagne, huit millions d’indignados (foules d’indignés)
se sont rassemblés sur la place principale de Madrid, la Puerta del Sol,
appelant au rejet du système politique actuel, du capitalisme, des banques
et de la corruption politique.
105
En Grèce, un énorme mouvement de protestations est né en 2010 après
que le Premier ministre George Paparendou a promulgué une série de
mesures d’austérité, incluant des baisses de salaire dans le secteur public,
une réduction des pensions et une augmentation des taxes de valeur
ajoutée. Les mesures d’austérité faisaient partie des conditionnalités
néolibérales imposées par la Commission européenne, le FMI et la BCE
(généralement appelés la troïka) à la Grèce en échange d’un plan de
sauvetage qui devait résoudre la crise de la dette souveraine.
Les actions, qui ont duré jusqu’en 2012 se déclinaient sous différentes
formes : manifestations, grèves, sit-in, occupations et désobéissance civile.
En janvier 2015, la domination des partis conservateurs axés sur l’austérité
a été finalement défiée par la victoire du parti de gauche anti-austérité,
Syriza. Cette victoire a généré une vague d’espoir à travers l’Europe.
Finalement, le mouvement Occupy s’est répandu dans plus de 95 villes
à travers 82 pays autour du monde. Ce mouvement est l’apogée des
actions collectives menées par les peuples contre les injustices
économiques, politiques, écologiques et sociales de notre époque. Le
mouvement Occupy a mis en lumière la façon dont les grandes sociétés et
le système financier mondial contrôlent le monde d’une manière qui
défavorise grandement les minorités.
Aujourd’hui, la lutte des peuples continue malgré l’agression
néolibérale de l’UE et des E.-U. et leurs accords de libre-échange. Partoyt
dans le monde, la société civile, les organisations locales, les syndicats, les
partis politiques et même certains gouvernements mènent des actions de
sensibilisation et mobilisent les peuples pour que ceux-ci agissent contre le
retranchement d’un régime commercial mondial contrôlé par quelques
pays riches et leurs entreprises transnationales.
L’année dernière au Guatemala, des milliers d’indigènes, de
travailleurs, de paysans et de femmes ont manifesté et ont mis en place des
piquets de grève à l’extérieur du Congrès et de la Cour constitutionnelle à
Guatemala City. Ils appelaient les législateurs et le président Otto Perez
Molina à annuler la loi sur la protection des obtentions végétales (connue
comme la « loi Monsanto).
Cette loi offrait aux producteurs de semences transgéniques, comme
Monsanto et Syngenta, des droits de propriété rigides en cas de possession
ou d’échange des semences originales ou récoltées des variétés protégées
sans l’autorisation du reproducteur. Un droit de reproducteur s’étend « aux
variétés principalement dérivées d’une variété protégée ». Ainsi un
hybride fait à partir d’une semence protégée et d’une autre non protégée
106
appartient au producteur de la semence protégée(RT News,2014).
La loi Monsanto est une application de la convention internationale
appelée Union pour la protection des obtentions végétales (UPOV), une
disposition de 2005 de l’Accord de libre-échange d’Amérique centrale
(ALEAC) entre cinq pays d’Amérique centrale (Costa Rica, Salvador,
Guatemala, Honduras et Nicaragua) et la République dominicaine.
Leurs efforts n’ont pas été vains. Le 4 septembre 2014, le Congrès
guatémaltèque a finalement annulé la loi.
Le 18 avril 2015, des dizaines de milliers de protestataires à travers le
monde sont descendus dans les rues pour manifester contre les accords
commerciaux truqués, tels que le TTIP et le TPP. Appelé Journée
mondiale d’action contre les accords de libre-échange, l’évènement
consistait en 700 actions distinctes, notamment des rassemblements, des
marches et des déclarations publiques. Cet évènement marque sans doute
ce qui s’est révélé être la plus grande protestation contre le libre-échange
jusqu’à aujourd’hui(RT News,2015).
En Autriche, près de 22 000 personnes sont descendues dans les rues
de différentes villes pour manifester contre le TTIP. Elles estimaient que
cet accord allait causer du tort aux secteurs de l’agriculture et
pharmaceutique ainsi qu’aux consommateurs (Sandford,2015).
En Allemagne, 200 manifestations se sont déroulées et ont rassemblé
des milliers de gens à Berlin, Hambourg, Francfort et Stuttgart. Selon une
étude récente menée par YouGov, l’opposition au TTIP est élevée, avec
43 pour cent de la population qui pense que ce pacte serait préjudiciable
pour le pays (Deutsche Welle,2015).
Plusieurs milliers de gens ont également participé au rassemblement
contre le TTIP qui ont eu lieu à Bruxelles. Des partis et des organisations,
tels que Podemos, Die Linke et Syriza se sont joint à la protestation, ainsi
que plusieurs syndicats. À Madird, en Espagne, plus de 20 000 personnes
ont fait entendre leur voix. 4000 autres ont manifesté à Barcelone pour
dénoncer l’accord proposé (RT News,2015).
Aux États-Unis, c’est dans une dizaine de villes, de New York à San
Francisco, que des citoyens sont descendus dans les rues pour protester
contre la délocalisation des emplois, pour l’environnement, la santé et la
sécurité alimentaire (RT News,2015).
107
Les rassemblements de protestation contre le TPP ont également
massivement augmenté. En mars 2015, des milliers de personnes ont
défilé dans 22 villes et centre régionaux en Nouvelle-Zélande à l’occasion
de la Journée nationale d’action contre le TPP. C’est le cinquième
évènement du genre à avoir été tenu au cours des années précédentes,
après les manifestations de 2012 et de 2013. En Malaisie, l’opposition
contre l’accord dirigé par les États-Unis prend de l’ampleur. En 2014,
alors que Barack Obama s’exprimait lors d’une assemblée publique en
Malaisie, dans le cadre de sa tournée Asie-Pacifique, un groupe de
protestataires s’est levé en silence et a brandi des affiches anti-
TPP(Democracy Now,2014).
En Colombie, plusieurs milliers de paysans et de petits exploitants ont
défilé à travers les rues de Bogota pour s’opposer aux accords de libre-
échange de leur gouvernement avec l’Union européenne et les États-Unis,
qui étaient en train de les conduire tout droit vers la banqueroute
Au Salvador, trois municipalités ont, par le biais d’une consultation
populaire historique, interdit aux entreprises minières canadiennes
d’opérer dans leurs communautés (Cuffe,2015).Les consultations
municipales au Salvador ont été institutionnalisées comme moyen
d’exercer une démocratie locale et participative.
Pendant des dizaines d’années, les entreprises minières canadiennes
ont pillé les ressources naturelles de l’État salvadorien. Les résidents
locaux étaient expulsés et chassés de leurs maisons pour faire de la place
aux projets miniers. Après des décennies d’extraction, les entreprises sont
parties, laissant derrière elles des rivières, des nappes phréatiques et des
terres remplies de déchets toxiques.
En réponse à cela, les organisations locales et nationales ont entrepris
différentes activités, notamment des marches, des rassemblements, des
actions directes et des sabotages. Elles ont ainsi réussi à mettre dehors les
entreprises minières, mais elles voulaient également un cadre légal pour
assurer que ces entreprises ne reviennent plus jamais dans leurs
communautés.
Alors que ces énormes firmes peuvent sembler formidables, la
résistance collective et durable des gens est plus forte. Les mouvements
populaires forts restent des armes puissantes pour obtenir la justice
économique, le développement autodéterminé et une vraie justice, paix et
démocratie pour le présent et le futur. Comme Noam Chomsky l’a dit :
« Il n’y a pas de réponse magique, pas de méthode miraculeuse
108
pour résoudre les problèmes qui nous entourent, mais seulement ce
que nous connaissons : la recherche pour la compréhension de
l’éducation, l’organisation, l’action… et le genre d’engagement qui
persistera malgré les échecs et les victoires limitées, inspirées par
l’espoir d’un futur meilleur »
Que peut-on faire pour continuer la lutte ?
Il est impératif de valoriser la représentation et la force des
mouvements et secteurs qui s’opposent aux nouveaux accords de libre-
échange et à l’accaparement par les grosses sociétés des ressources
mondiales, des richesses et du futur.
À cette fin, l’organisation et les campagnes de masse sont vitales pour
que les travailleurs, les paysans, les femmes, les peuples autochtones, les
migrants, les petits et moyens entrepreneurs, les pauvres des villes, les
jeunes et le reste de la majorité démocratique soient en mesure d’exiger
collectivement des droits adaptés à leur subsistance, leur alimentation, leur
bien-être, leur santé et leur liberté. Des campagnes animées autour de ces
sujets ne vont pas seulement augmenter la pression sur les organes de
gouvernance locaux, nationaux et internationaux, mais vont aussi servir de
valeur stratégique essentielle pour encourage les peuples à joindre un
programme commun pour s’opposer à la mondialisation internationale et
pour construire une alternative au système économique mondial basé sur
la justice économique, sociale et environnementale, la solidarité, la
transparence et la responsabilisation face au peuple.
S’organiser
Le pouvoir des peuples qui s’opposent à la mondialisation impérialiste
doit être construit, consolidé et renforcé par le biais d’organisation de
masse de travailleurs, des paysans, despeuples autochtones, des pauvres
des villes, des migrants, entre autres.
Bâtir des organisations de masse
1. Travailleurs :Les syndicats représentent la source principale de
dirigeants et d’activistes pour le mouvement anti-néolibéral. La
mondialisation néolibérale s’est acharnéeà affaiblir la force et le
pouvoir du travail organisé à travers différents projets de
flexibilisation du travail. Ces politiques anti-travailleurs ont
conduit un chômage massif, au déclin des salaires et à des
réductions de prestations. Elles ont, d’autre part, augmenté la
vulnérabilité face à l’exploitation.
109
De nombreux syndicats très actifs dans le mouvement anti-
néolibéral représentent les travailleurs dans les industries qui sont
les plus concernées par le commerce, comme les ouvriers des
industries impliquées dans la production pour la consommation
nationale ou pour l’exportation. Ces travailleurs présentent des
intérêts directs dans les enjeux de l’accès au marché sous les
accords bilatéraux et multilatéraux de libre-échange.Ils ont aussi
une connaissance directe de la façon dont les accords de libre-
échange peuvent conduire à la destruction des industries, entrainant
des pertes d’emplois massives, une augmentation de la compétition
entre les travailleurs pour une poignée d’opportunités d’emploi, et
une plus grande marge pour que les capitalistes exploitent et tirent
plus de profit de leur travail. Ces effets concrets des accords de
libre-échange sur les travailleurs et leurs familles ont entravé
l’opposition des syndicats à la mondialisation néolibérale, mais ils
sont aussi la source d’une bonne partie de l’analyse et de la critique
contre le libre-échange
La perte d’emploi est un problème crucial pour les travailleurs,
mais les accords de libre-échange restent controversés pour
d’autres raisons également. La cohérence réglementaire, la sécurité
des consommateurs, les disciplines sur les entreprises collectives,
les ISDS obligatoires, le droit des marchés publics, et d’autres
nouvelles propositions annoncent une prise de contrôle imminente
par les grosses sociétés sur le secteur des services. Ainsi, les
syndicats de service public sont de plus en plus impliqués. Ils se
montrent inquiets face aux conséquences que les nouveaux accords
de libre-échange auront sur les lieux de travail, les salaires et les
prestations.
La collaboration entre les travailleurs industriels et les travailleurs
du service public est essentielle pour assurer une opposition ferme
des entreprises face aux accords de libre-échange néolibéraux.
2. Les pauvres des zones rurales :Les pauvres des zones rurales, à
savoir, entre autres, les petits producteurs et les paysans sans terre,
les ouvriers agricoles, les femmes paysannes et éleveurs, et les
pêcheurs forment la principale force mobilisatrice contre les
accords de libre-échange néolibéraux.
L’un des sujets clés de campagne pour les paysans est la
libéralisation de l’agriculture. Le programme de libéralisation a
constamment été dénoncé par le secteur rural pauvre dans le cadre
de différentes campagnes contre les accords de l’OMC, tels que
l’AoA, l’ADPIC, le MIC et l’AGCS.
110
Jusqu’à présent, leurs efforts, combinés à la lutte menée par les
autres secteurs, ont permis de paralyser l’OMC. Toutefois, les
impérialistes et leurs compagnies ont trouvé de nouvelles
ouvertures par le biais d’accords commerciaux régionaux et
bilatéraux.
Dans les nouveaux accords de libre-échange, la libéralisation de
l’agriculture est l’une des nombreuses politiques dangereuses à
laquelle le peuple rural doit faire face. Ces nouveaux accords
constituent une attaque sur tous les fronts contre les moyens de
subsistance des agriculteurs : des règles de droit à la PI, le droit aux
marchés publics, l’ISDS, la facilitation du commerce, la sécurité
des consommateurs, les règles de concurrence, etc.
Les pauvres des zones rurales sont directement opposés aux
acteurs politiques et économiques qui encouragent les nouveaux
accords de libre-échange, tels que les agro-FTN et les spéculateurs
financiers. Par conséquent, les enjeux pour les pauvres des zones
rurales sont de toute évidence importants.
Les agriculteurs des pays parties au TPP et au TTIP, comme le
Japon, le Pérou, la Malaisie, l’Australie et Taiwan, renforcent leurs
actions contre les accords de libre-échange par le biais de
mobilisation de masse et de piquets de grève. D’autres petits et
moyens think tanks d’agriculteurs ont présenté des critiques de
politiques et des positions de défense d’intérêts pour exiger des
actions de la part de leurs gouvernements et institutions contre le
TPP et le TTIP.
3. Les femmes :Le mouvement des femmes connaît une histoire riche et
militante de la lutte contre la mondialisation néolibérale.
Représentantes d’un secteur entrecroisé avec d’autres formations
socio-économiques, les femmes ont développé une perspective unique
sur la façon dont la mondialisation néolibérale a tiré profit de
l’oppression et de la marginalisation des femmes.
Aujourd’hui, les femmes sont actives dans divers mouvements de
campagne contre les nouveaux accords de libre-échange. Par exemple,
la Breast Cancer Action (campagne de sensibilisation au cancer du
sein) a produit une déclaration contre le TPP. Elle a également pointé
du doigt les problèmes que pose le TPP concernant l’accès aux
médicaments, la fracturation hydraulique et les substances nocives. Le
groupe a dénoncé le manque de transparence de l’accord, qui n’offre
pas « la réelle possibilité au public de réagir ou de formuler ses
111
craintes ! » (Sartor,2014).
4. Les peuples autochtones :la mondialisation a sans aucun doute eu
d’innombrables conséquences négatives sur les peuples
autochtones, dont la majorité se trouve au Sud. Alors que les
gouvernements de pays en développement concluent des accords
avec de grandes sociétés, les gouvernements occidentaux et les
institutions multilatérales, les peuples autochtones – déjà dans une
position désavantageuse –sont ceux qui risquent de souffrir le plus
des conséquences fâcheuses de ces accords.
À l’ère de la mondialisation néolibérale, les peuples autochtones se
retrouvent dans une bataille prolongée avec les nouveaux
explorateurs colons – les sociétés transnationales, les investisseurs,
les gouvernements, les institutions multilatérales – qui cherchent à
piller et s’accaparer leurs terres et ressources. Mais ces peuples
autochtones, qui ont traversé plusieurs guerres et qui se sont battus
pour leur identité et leur survie, refusent de se laisser faire.
Les peuples autochtones se sont montrés très actifs pour créer des
alliances avec d’autres mouvements anti-libre-échange afin
d’affirmer leurs droits à la terre et à l’autodétermination. Les
peuples autochtones d’Amérique latine ont largement contribué à
la réussite de la campagne pour empêcher le passage de la loi
Monsanto. Ils ont également participé aux différents forums et
marches pour le climat. Récemment, ils ont lancé la réoccupation
de terres ancestrales confisquées par des entreprises minières, des
investisseurs et spéculateurs financiers.
5. Les migrants :Les migrants constituent une importante force de
mobilisation contre la campagne de libre-échange menée par les
grosses sociétés. Nombre d’entre eux sont de pauvres paysans et
travailleurs qui ont été poussés à chercher du travail à l’étranger à
cause des politiques néfastes du commerce néolibéral. Dans leurs
pays d’accueil, ils font face à une grande discrimination raciale,
doivent accepter des salaires très bas et vivent dans des conditions
précaires.
Ainsi, les migrants se trouvent dans une situation unique : ils
doivent faire valoir, parmi les travailleurs et les peuples des pays
en développement, la détresse de leurs compatriotes et les effets du
libre-échange dans les pays en développement. Les migrants du
Sud et les peuples des pays en développement doivent s’unir et être
solidaires pour exercer une pression sur leurs gouvernements
respectifs et pour exiger une responsabilisation pour les
conséquences désastreuses des politiques commerciales et
économiques.
112
6. Les pauvres des villes :Les pauvres des villes sont la preuve
vivante de l’échec du paradigme économique néolibéral à tenir ses
promesses de développement et de croissance. L’importance
accordée par les accords de libre-échange à une plus grande
privatisation, financiarisation, libéralisation et dérégulation
continuera à participer à l’explosion démographique dans les villes
et les zones urbaines.
Les gouvernements et les autorités ont constamment cherché à
exorciser leur présence contestataire. Aux Philippines, les
communautés urbaines pauvres bravent les équipes de démolition
en tenue de combat comme dernière tentative pour sauver leurs
maisons et leurs moyens de subsistance. Au Cap, en Afrique du
Sud, 200 protestataires ont, en réponse à l’inaction de leur
gouvernement face à la situation dramatique, occupé des terres à
Khayelitsha, ont mesuré le terrain, les ont marqués avec des pneus
et ont commencé à creuser des tranchées. À Rio, les favelas
s’insurgent et réclament la dignité et des droits, malgré les
menaces de violence et de mort.
Le mouvement des pauvres citadins représente une force
importante dans les protestations de masse contre les politiques de
développement néolibérales. Leur énergie doit être mise à profit
pour bâtir un mouvement populaire contre les accords de libre-
échange.
7. Les environnementalistes :Les exigences du mouvement
environnementaliste sont profondément liées à la lutte contre la
mondialisation dirigée par les grosses sociétés. Du point de vue du
changement climatique, les nouveaux accords de libre-échange
vont concentrer les ressources entre les mains des dirigeants
d’entreprises. Ces accords vont également accentuer des modèles
de production et de consommation non viables conduisant le
monde vers des seuils critiques. Le 21 septembre 2014, environ
400 000 personnes ont défilé dans les rues de New York pour
exiger une action globale contre le changement climatique. De
nombreux éminents dirigeants des mouvements environnementaux,
notamment Naomi Klein et Ilana Solomon, ont souligné que
l’annulation d’accords de libre-échange tels que le TPP et le TTIP
était une étape cruciale pour sauver la planète (Dolan,2015).
8. Le consommateur :Les groupes de consommateurs craignent que,
sous les accords de libre-échange, la sécurité alimentaire et la
salubrité de l’eau ainsi que son accès, les soins de santé et les
médicaments, les données et la vie privée soient à la merci des
exigences commerciales des multinationales (Dolan,2015).
113
Récemment, des groupes de consommateurs ont produit une
déclaration ferme contre le TTIP et le TPP. Par exemple, Food and
Water Watch a déclaré que les nouveaux accords de libre-échange
allaient entrainer l’augmentation des prix des produits de base,
affaiblir les lois nationales et augmenter la financiarisation de la
nature. Le groupe a également expliqué que les accords étaient
« une prise de pouvoir des grosses sociétés et de leurs financiers »,
et qu’ils risquaient de compromettre les lois qui protègent
l’environnement, qui règlementent les grosses sociétés, qui
préservent la sécurité alimentaire, qui encouragent les énergies
renouvelables et qui empêchent les pratiques à risques telles que la
fracturation(Food and WaterWatch).
9. Les organisations religieuses :Les organisations religieuses sont
impliquées non seulement dans un travail humanitaire et
missionnaire, mais de plus en plus aussi dans des campagnes de
justice sociale plus larges, telles que pour les droits socio-
économiques et culturels. Selon Mike Dolan (2015) « Une
sensibilité antimondialisation néolibérale se répand peu à peu dans
les perspectives politiques et les programmes d’action
d’organisations religieuses de différentes natures. »
Par exemple, les sœurs de la Miséricorde ont soulevé des
objections à un accord de TPP à travers cinq conséquences
sociales : l’immigration, la non-violence, l’antiracisme, les femmes
et la terre.
L’Église unie du Christ, confession protestante, a publié une
déclaration en mars 2014 dans laquelle elle dénonce les accords de
libre-échange. Il y est expliqué que les accords sont des projets de
prise de contrôle par les grandes entreprises de la gouvernance et
de l’économie mondiale.
Récemment, des représentants de l’Église catholique ont émis des
critiques à l’encontre des accords de libre-échange. Lors de la
Conférence ministérielle de Bali en 2013, l’archevêque Tomasi a
désigné le TPP comme étant le type d’accord auquel l’Église
s’oppose. À Genève, le cardinal Peter Turkson a condamné le
modèle de libre-échange qui autorise l’évasion fiscale à un grand
nombre de sociétés, tout en exploitant les travailleurs et les
ressources naturelles
Alliances
Les groupes qui travaillent dans leurs secteurs respectifs doivent
commencer à mettre en lumière la façon dont ces accords de libre-
114
échangevont les affecter et aggraver les violations de leurs droits socio-
économiques et de leurs libertés civiles. Une étude concrète sur les enjeux
et les problèmes auxquels ils font face est importante pour énoncer des
stratégies et des messages clairs qui reflètent la réalité et le contexte. La
possibilité d’établir une relation de travail avec des organisations ou les
chefs de communautés déjà existantes doit également être envisagée.
Toutefois, bien qu’il soit capital de mettre en place une résistance
sectorielle, il est toujours nécessaire de lier et d’unir les efforts pour une
mobilisation large et unie basée sur une revendication commune afin de
combattre les accords de libre-échange. L’action collective est primordiale
pour construire un pôle contre-hégémonique populaire face à la
domination des firmes transnationales.
Les organisations devraient également explorer des liens avec des
représentants du gouvernement et des organes législatifs, avec les
délégations officielles auprès des organes multinationaux pour construire
des alliances tactiques. Les initiatives peuvent prendre diverses formes :
signature d’une pétition, tenue de forums ouverts et de conférences, visite
des édifices du parlement pour dialoguer avec des représentants. Les
gouvernements locaux qui ont commencé à mettre en œuvre des politiques
d’achat pour soutenir les campagnes « Achetez local ! » devraient être
identifiés pour d’éventuelles coopérations de campagne. Les aspects
communs dans ces alliances tactiques pourraient être entamés en mettant
l’accent sur la manière dont les nouveaux accords de libre-échange violent
la souveraineté nationale et étatique et les empêchent de représenter leurs
circonscriptions.
Les organisations devraient également tirer profit en impliquant
différents organes multilatéraux officiels qui expriment une attitude
relativement plus positive et une certaine ouverture vis-à-vis de la société
civile et de la participation des mouvements populaires, et des
contributions. Alors que la possibilité d’influencer les positions politiques
des représentants dans ces endroits peut s’avérer difficile, si pas
impossible, il y a toujours d’excellentes occasions d’élargir les
revendications et de gagner des sympathisants
Enfin, des alliances entre les peuples du Nord et du Sud doivent être
établies et renforcées. Alors que les défenseurs néolibéraux ont l’habitude
de parler des soi-disant avantages des accords de libre-échange pour
l’économie et les peuples des pays développés et en développement en
même temps, la réalité est toute autre. Ces accords ont conduit à une
course à l’abîme à un niveau mondial, à un bouleversement social massif
au Sud et au Nord, et ont affaibli les droits d’intérêts publics destinés à
protéger le peuple et l’environnement. Des réseaux mondiaux d’activistes
devraient être construits pour conduire des actions et des mobilisations
coordonnées à un niveau mondial.
115
Sensibilisation et mobilisation
Les éléments clés des organisations et mobilisations de masse des
divers secteurs sont la diffusion d’informations, la sensibilisation et les
campagnes.
Diffusion d’informations :De nos jours, les informations voyagent plus
vite et plus loin grâce aux médias en ligne. Différentes plateformes de
médias sociaux sont utilisées par des organisations pour inviter les gens à
des rassemblements et des activités et pour diffuser des nouvelles, des
documents éducatifs tels que des documents de documentation (dépliants,
brochures, graphiques et bandes dessinées)
Le site web lanceur d’alerte Wikileaks s’est montré plus qu’utile en
publiant les textes d’accords secrets qui, sans lui, n’auraient pas été rendus
disponibles à la consultation du public. Le média a également publié des
analyses détaillées et des critiques de ces accordset rédigées par des
organisations activistes et des think tanks tels que Public Citizen.
Des sites internet et blogs ont été créés pars diverses organisations et
alliances anti-libre-échange. Les dernières nouvelles et mises à jour sur les
analyses et pourparlers commerciaux peuvent être consultées sur ces
plateformes en ligne.
Des vidéos du déroulement des forums et des conventions sur les
nouveaux accords de libre-échange ont été rendus disponibles en ligne.
Ainsi, de plus en plus de personnes des quatre coins du monde peuvent rester
informées.
Les directives d’activistes ou les appels et emails d’instructions
nationales normales peuvent également être étudiés pour mettre à jour les
activistes concernant les dernières nouvelles et les possibilités d’action
(Dolan, 2015).Toutefois, les médias en ligne ne doivent pas remplacer les
campagnes et organisations populaires, qui sont aussi importantes.
Programmes éducatifs :Les programmes de sensibilisation de masse
doivent être conduits par des organisations au sein des secteurs et des
communautés avec lesquels elles travaillent. Contrairement à la diffusion
d’informations, les programmes éducatifs permettent des discussions
approfondies sur les enjeux ou les politiques, leur contexte mondial et les
causes profondes.
Les programmes éducatifs peuvent prendre la forme d’une conférence,
d’un forum ou de sessions d’étude. IBON International organise un
séminaire sur la mondialisation néolibérale. Ce séminaire remet dans son
contexte historique et politico-économique la question du libre-échange et
les politiques de libéralisation, de dérégulation et de privatisation qui y
116
sont liées.
Ces efforts éducatifs doivent être déployés parmi les syndicats, les
organisations agricoles, les organisations féministes, les organisations des
peuples autochtones, les environnementalistes, les groupes des pauvres des
villes, les activistes des droits de l’homme, les petites et moyennes
associations commerciales, les universitaires et les professionnels pour
réussir à bâtir un réseau de campagne multisectoriel pour faire front à la
mondialisation néolibérale.
Faire campagne :Les campagnes contre les nouveaux accords de libre-
échange font appel à différents types d’intervention et d’efforts qui se
soutiennent se complètent l’un l’autre
Récemment, de nombreuses organisations se sont concentrées sur des
actions indirectes à travers du lobbying et la défense de politiques. Dans le
cas du lobbying et de la défense de politiques, il est question de faire
pression sur les représentants et les institutions afin de revoir ou d’annuler
les politiques commerciales officielles qui conduisent à l’inégalité des
revenus, aux violations des droits de l’homme, à la mise en danger des
consommateurs, à la destruction de l’environnement, au changement
climatique et à la perte d’espace et de souveraineté politique. Le lobbying
et la défense des politiques contribuent à la diffusion des positions et des
exigences des peuples dans les instances et institutions officielles.
La lutte des paysans, des ouvriers agricoles et des pêcheurs a déjà
porté plusieurs fois ses fruits. De nombreux agriculteurs ont été en mesure
de résister à l’expulsion de leurs propres terres, de réduire la rente foncière
ou d’améliorer les conditions des ouvriers agricoles. D’autres ont organisé
des occupations de terre. Protestations et manifestations ont salué les
réunions des organisations pro-impérialistes comme l’OMC. Certains ont
même procédé à l’arrachage organisé de cultures OGM qui présageaient
leur asservissement aux grandes agro-FTN comme Monsanto et Syngenta.
Des travailleurs ont lancé un bon nombre de grèves, de campagnes
durables sur l’éducation politique, différentes formes de protestations pour
exprimer leur opposition irrévocable à la mondialisation impérialiste. Des
travailleurs ont mené la Bataille de Seattle contre l’OMC et les protestations
contre le Forum économique mondial en Australie et en Suisse. Ces
évènements démontrent l’efficacité et le potentiel d’actions coordonnées à un
niveau mondial par les travailleurs, en alliance avec d’autres forces
démocratiques de la société.
De la même façon, il y a une recrudescence d’organisation et de
mobilisation parmi les professionnels de la santé, les groupes de
117
consommateurs, les professeurs et équipe de l’enseignement public, et les
fonctionnaires gouvernementaux pour mettre fin à la privatisation des
services et des politiques, comme les partenariats public-privé.
Identifier les acteurs clés qui encouragent les nouveaux accords de
libre-échange et la mondialisation néolibérale s’avère tout aussi important.
Mettre en place des campagnes pour dénoncer les acteurs et politiques
néolibérales des institutions peut avoir un impact majeur sur le rejet des
politiques anti-peuple et les accords de commerce.
Firmes multinationales/transnationales : Les firmes
multinationales/transnationales sont les plus agressives et les fervents
défenseurs des nouveaux accords de libre-échange, puisqu’elles sont les
principales à en tirer profit. Parmi elles, on trouve : Wal-Mart, Fedex,
IBM, JP Morgan & Chase,
UPSetVerizon.Resistance :PeoplesagainstTransnationalCorporations est
un réseau de mouvements populaires et d’organisations de la société civile
dont le but est d’encourager la résistance civile contre l’impérialisme et les
FTN. Le réseau partage des informations sur les abus des FTN et sur les
soutienset luttes coordonnées des peuples sur le terrain.
Groupes de lobby des multinationales et transnationales :Les
multinationales et transnationales ont formé différentes coalitions et ont
déployé des groupes d’intérêts et de lobby, comme la US Business
Coalitions et l’Equipe ACS, pour faire pression sur les responsables
commerciaux, les dirigeants gouvernementaux et les institutions
mondiales. À travers les médias institutionnels, ils publient des articles et
des annonces pour influencer l’opinion publique en faveur des accords de
libre-échange.
L’État :L’État est l’exécuteur du décontrôle de la mondialisation
néolibérale. Contrairement à certaines idées reçues, l’État n’est pas affaibli
et n’a pas perdu en importance, il a simplement modifié son orientation,
vraisemblablement vers les politiques néolibérales, afin d’offrir une
protection politique et militaire à l’État, mais également pour assurer un
plus grand soutien économique et offrir des possibilités aux entreprises de
monopole. Ainsi, l’État reste une cible privilégiée à la fois de la défense et
les luttes ou dans une conjonction avec des luttes particulières contre les
grosses sociétés(Tujan,2001) :
• Les gouvernements des pays développés comme les États-Unis
d’Amérique, l’UE et le Japon ont constamment été les principaux
artisans des politiques néolibérales telles que l’AoA, l’ADPIC, le
MIC et l’AGCS. Aujourd’hui, en dehors du régime commercial
multilatéral, ils négocient des accords commerciaux régionaux et
bilatéraux et des accords d’investissement dans le but d’étendre ces
accords à plus de domaines encore que ceux déjà couverts par
118
l’OMC.
• Les mouvements populaires et la société civile a besoin de
faire pression sur les gouvernements des pays en développement
pour que ceux-ci prennent en considération les exigences de leur
population dans les négociations. Bien que les pays en
développement se soient en général montrés méfiants vis-à-vis des
manœuvres des pays développés, leur cohérence est douteuse.
Leurs changements de position durant la Conférence ministérielle
de l’OMC à Bali en constituent un exemple.
L’OMC et les Institutions financières internationales (FMI et
BM) :L’OMC, le FMI et la BM sont les instruments suprêmes de la
domination mondiale des entreprises, comme le montrent leurs histoires en
dents de scie. Ces institutions manquent de transparence et sont
confrontées à des problèmes de crédibilité et de responsabilisation. Les
pays développés continuent à exercer un pouvoir asymétrique dans la prise
de décision. Ces institutions ont également montré qu’elles étaient
vulnérables aux groupes de lobby des entreprises.
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