LE LANCEMENT'DE LA BETTERAVE A SUCREAU MAROC
PREMIERS RESULTATS
C. BOURGIN
SoMMerns
-- Introduction.- Intérêt de la betterave à sucre au Maroc- Yariétés eî' rendements.- Techniques culturales.- Echelonnemen, des récoltes.- Qualité industrielle des betteroves.- Conclusions.
INTRODUCTION
Dès 1957, le service de la Recherche Agronomique devait se pro-noncer sur les possibilités de culture de la betterave à sucre au Maroc etformuler ses conclusiols sur deux plans. D'abord sur le plan scientifique,car il était nécessaire de s'entourer des garanties que peuvént seules fournirla__recherche et I'expérimentation ; ensuite, sur le plan pratique, car ilfallait s'assurer que les recommandations des chercheurs- seraient appli-cables dans le milieu agricole marocain.
ces études devaient répondre, comme nous allons le voir, à plusieursobjectifs : la création d'une industrie sucrière marocaine, I'amdliorationdes structuîes agricoles traditionnelles et I'association plus étroite de I'agri-culture et de l'élevage.
Afin d'obtenir plus rapidement des résultats pratiques, le service dela Recherche Agronomique décida de coordonner la recherche expérimen-tale et les essais culturaux en milieu rural. on adopta pour prinôipe que,dans un premier stade, la recherche resterait simpre dans sei objéctifi et
at ero n" 1, pp. 163 à l7E, octobre 1961.
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dans ses techniques et que les essais culturaux seraient entrepris danstoutes les régions susceptibles de convenir à la betterave et dans chacunede ces régions, si possible, sur chaque type de sol.
Les années 57 et 58 furent consacrées à de premiers essais, à laconstitution d'une documentation, à la mise au point des méthodes detravail, ainsi qu'à I'acquisition des moyens nouveaux à mettre en Guvre.
En 1959 fut créée une société d'études, la Soumuc, dont legouvernement marocain fait partie intégrante et qui était destinée à mettreau point, dans la région du Gharb, un projet pour la création d'une pre-mière sucrerie marocaine.
La partie agronomique du projet, considérée comme base de I'en-semble, fut abordée en coopération, entre la Sotuesuc et le Service dela Recherche Agronomique et de I'Enseigrrement Agricole au Maroc. LaSotrLlsuc apportant sa comftence spécifrque en matière de betteraveet de sucrerie, et la Recherche Agronomique le résultat de ses étudespréalables, sa connaissance de I'agriculture et de l'écologie marocaines.
Dans les autres régions du Maroc la recherche était poursuivie parla seule Recherche Agronomique.
Dans le Gharb, I'expérimentation fut entreprise à la station des cul-tures irriguées de Sidi Slimane et sur trois champs d'essais, choisis à ceteffet sur tirs (sols noirs hydromorphes), sur dess (sols d'alluvions du Bethet du Sebou) et sur hamri (sols rouges).
Les essais entrepris par la méthode des blocs concernaient des compa-raisons de variétés, de peuplement, de dates de semis, de fumure etd'irrigation. Quant aux essais culturaux, ils furent implantés chez 50 agri-culteurs en 1959 et chez une centaine en 1960, répartis sur les 3 typesde sol précédents et sur les sables côtiers.
Dans les autres régions du Maroc pouvant convenir à la betterave,c'est-à-dire, principalement dans les pér.imètres irrigués du Tadla, desDoukkala, de la Basse Moulouya, les mêmes principes d'action furentsuivis, mais l'intensité des travaux fut beaucoup moins gratde que dansle Gharb, car les projets de I'Etat et des industriels Pour ces régions yétaient plus lointains.
Que ce soit dans le Gharb ou dans le reste du Maroc, les essaisculturaux ont tou$ été réalisés sous contrat avec les agriculteurs, L'admi-nistration, en conseillant les agriculteurs à partir d'une technique encorepeu assurée, pouvait craindre de les entraîner à des échecs, de dévaloriserà leurs yeux une spéculation pouvant être intéressante et donc de freinerle démarrage ultérieur des campagnes sucrières. Par contrat, les agricul-
LE LANCEMENT DE LA BETTERAVE A SUCRE AU MAROC 165
teurs recevaient I'assurance d'être indemnisés en cas d'échec, mais s'enga-geaient à suivre les directives des agents de la recherche chargés de lasurveillance des cultures. Ceux-ci effectuaient une visite chez chaqueagriculteur tous les quinze jours en relevant les observations nécessairesà la compréhension des résultats.
Ainsi, en s'engageant à vérifier chaque année dans la pratique agricolêla validité des résultats expérimentaux obtenus I'année précédente, larecherche évitait de perdre un temps précieux et se préparait à renseignerle plus rapidement possible les pouvoirs publics et les industriels sur leschances et les conditions du succès.
Sur tous les champs expérimentaux ou d'essais culturaux, des prélè-vements d'échantillons ont été réalisés statistiquement et à intervallesréguliers.
Les échantillons ont été analysés à la station centrale de recherchetechnologique où fonctionnent un laboratoire de chimie et une microsucrerie.
Les résultats obtenus jusqu'à présent, ont permis de définir les grandeslignes de ce que pourrait être la culture de la betterave au Maroc. Denombreux détails restent à préciser ; aussi le but de cet article est-il sim-plement de faire une mise au point provisoire sur une étude en pleineévolution.
INTERET DE LA BETTERAVE A SUCRE AU MAROC
La consommation de sucre du Maroc représente 32 kg par habitantsoit environ 350 000 tonnes par an, qui sont intégralement importées. Ceschiffres justifieraient déjà, à eux seuls, la création d'une industrie sucrièredont les débouchés seraient très larges sur le marché intérieur et quipermettrait de substantielles économies de devises. Mais cet aspect duproblème n'est ni le seul, ni sans doute, le plus important. La culture dela betterave sur une grande échelle pourrait présenter pour-l'agriculturemarocaine un intérêt considérable, notamment en facilitant la fusion, tou-jours souhaitée, mais pas encore réalisée, de l'agriculture et de l'élevage.
On aurait pu envisager pour alimenter la future industrie sucrièrede recourir à la canne à sucre qui fut largement cultivée, autrefois, dansle Souss. Mais cette plante, très exigeante en eau, ne peut réussir auMaroc qu'à I'irrigation et sa sensibilité au froid restreint encore les possi-bilités de sa culture. D'autre part, elle s'intègrerait moins facilement quela betterave dans les assolements, étant pluriannuelle et ne présentant pasles avantages d'une culture sarclée. Enfin et surtout, les sous-produits de
r66 C. BOI}RGIN
la culture et de I'industrie sucrière de canne ne sont pas susceptibles defournir des ressources fourragères aussi intéressantes que celles de la bet-t€rave. En effet, un hectare de betteraves, produisant 25 tonnes de racines,fournira, outre 3 à 4 tonnes de sucre cristallisé, 2,000 à 2.500 unitésfourragères sous forme de pulpes séchées mélassées. Cette production estlargement supérieure à ce que I'on peut attendre de cultures fourragèrestraditionnelles en sb@, telles que la vesce-avoine, et se rapproche des rende-ments de ceftaines cultures fourragères irriguées. Le terme de sous-produitsn'est donc pas tellement approprié, d'autant plus que les collets et les fanesreprésentent une production fourragère supplémentaire, dont I'utilisationdeviendra effective, lorsque I'agriculteur sera suffisamment averti.
L'élevage qui pouuait être associé à la culture d'un hectare de bette-raves permettrait d'apporter sur cette surface, environ 2O-tonnes de fumier.De l'élevage itinérant, il deviendrait donc possible de passer progressive-ment, dans la zone de culture betteravière, à un élevage intensif qui appor-terait une première solution au grave problème de l'équilibre agropastoral.Bien entendu, tout ceci ne sera pas obtenu très rapidement mais il y a làun moyen, grâce à une culture qui doit être rentable sur le plan individuelcomme sur le plan national, de faire accéder peu à peu le cultivateurmarocain à des disciplines agricoles qui lui sont restées étrangères jusqu'àce jour.
L'enjeu est donc considérable, et concerne au fond I'animation del'économie rurale dans de larges secteurs du Maroc agricole.
LES APTITUDES REGIONALES
La betterave peut se cultiver au Maroc sans appoint d'irrigation dansles régions où la pluviométrie moyenne annuelle est de 500 mm ou plus.
Etant donné que les pluies sont hivernales, il est nécessaire de recou-rir, efl culture sèche. à des semis d'automne qui sont possibles grâce à ladouceur de I'hiver, en particulier dans les plaines atlantiques.
Il apparaît nécessaire, dans les zones où la pluviométrie oscille entre450 et 500 mm, de se prémunir contre les risques dus à I'irrégularité duclimat en prévoyant des possibilités d'irrigation.
Dans les autres régions du Maroc, la culture n'est possible qu'àI'irrigation. En périmètre irrigué, deux campagnes sont possibles, l'unebasée sur des semis d'automne, I'autre sur des semis d'été. Les semis deprintemps sont à l'étude.
La carte ci-jointe schématise les grandes zones dans lesquelles laculture de la betterave est possible au Maroc. A I'intérieur de ,ces zones,
1 6 8 C. BOURGIN
Sur tous les autres sols, t irs, harnris, dess. les rendements et lesqualités de la betterave sont convenables. I l est apparu toutefois queI'excès d'eau était à craindre sur tirs et que les dess portvaient, à cause deleur tendance au < croûtage r> en surface, gêner soit la levée des jeunes
plants, soit la récolte des racines.
Ces difficultés ont été réglées dans la pratique ; les résultats obtenus
sont encourageants et permettent au Service de la Recherche d'appuyer
le projet de sucrerie à installer: dans le Gharb.
Dans les régions d'Had Kourt, Ouezzane, Arbaotta, Larache, Tétouan,
Tanger, des possibil i tés existent, mais I 'expérimentation n'y est pas encore
commencée.
Plaine de Meknès-Fès
f)ans cette région oùr la pluviométrie serait théoriquement suffisante
pour la culture de la betterave €n sec, les résultats obtenus n'ont pas été
encourageants, vraisemblablement à cause de températures trop bassespendant I 'hiver, et peut-être à cause de la nature des sols.
D'autre part les surfaces irrigables sont trop restreintes pour que la
création d'une sucrerie puisse être envisagée.
Les grands Périmètres irrigués
La culture de la betterave a été essayée dans les principaux périmètres
irrigués. Elle devrait y présenter I ' intérêt supplémentaire de pouvoir
s'échelonner dans le temps, ce qui permettrait d'étaler la période de récolte
et donc d'augmentet la âurée de la campagne industrielle.
Péfimètte du Befh
Nous I 'avons déjà mentionné. La betterave à sucre, semée'en automne
et irriguée, n'y donne pas des rendements nroyens très supérieurs à ceux
que fournit la culture en sec dans la même région, ntais l'irrigation doit
permettre des semis d'été qui fourniront des récoltes précoces.
Pétimètre du Todlo
L'expérimentation se poursuit à la station d'Ahl Souss sur les mêmes
bases qu'à Sidi Slimane. Des essais culturaux ont été effectués en colla-
boration avec I'Office des Irrigations.
Les résultats sont satisfaisants. La betterave à sttcre pclttrrait s' intégrer
facilernent clans l'assolernent des Beni-Amir - Beni-Motlssa. L'effort sera
poursuivi et accéléré, car les superficies irrigirées sont d'ores et déià sufl i-
santes pour que le ravitail lement rl 'une sncrerie puisse être envisagé'
I ,E I -ANCENIT.,NT DL- I ,A RE. 'TI 'ERAVI] A SUTJRE ATJ MAROC l 6 q
Périmètre des Doukkcla
L 'expér iment l l ion à la St i l t i l )n dc l lou laouane cs l i rès sat is Ia isantc
no',amment en ce qui concerne les semis d'été. Les essais culturaux n'ont
pas jrrsqu"ici donné les résultats que I 'cxpérimentation permettait d'espérer
.ur i"r cultivateurs n'ont pas encole une maîtrise sulïisante des techniques
de l ' irr igation. La superficie totalc des terres irriguées est d'ail leurs encore
trop faible pour pouvoir satisfaire dans nn proche avenir les besoins d'une
sucrerie. Lès esiais seront donc poursuivis en insistant sur la mise au
point des techniques cf irrigation
Périmètre de Ia Basse MoulouYq
Le Service de la Recherche Agronomique ne qisposant pas encore
de station expérimentale dans cette région, le programme de recherches
n'a pu y être aussi cornplet que dals les autres grands périmètres
irrigùés. Toutefois, une expérimentation restreinte a été entreprise avec
le concours de la station du Génie Rural de Bou Griba. Des essais cultu-
raux ont été menés, principalement dans les Centres de Travaux. Les
résultats sont très encourageants et permettent de bien augurer de I'avenir
de la betterave à sucre dans la Basse Moulouya, lorsque les superficies
irriguées auront atteint un développement sufÏisant'
VARIETES ET RENDEMENTS
Pius de quinze variétés ont été essayées depuis 1957' D'une manière
générale, il semble que les polyploÏdes aient un excellent comportement
sous un climat chaud. Exigeantes en eau, en lumière et en chaleur, ces
variétés fournissent des rendements élevés en racines et en sucre.
Parnr i les var ietes essa)ees pendant t ro is campagnes. nous c i terons
celles qui ont toujours donné satisfaction, en station expérimentale comme
en milleu rural. Nous ne ferons état que des rendements obtenus en
1959/1960, année qui a été particulièrement favorable au point de vue
des conditions climatiques, surtout dans le Gharb, car i l est diff ici le de
se référer aux résultats des deux premières campagnes pendant lesquelles
les techniques culturales, encore mal adaptées' ont été mises au point.
D'ail leurs les résultats escomptables de la campagne en cours permettent
d'afîirmer que ceux de 1959/1960, tout en ayant été favorisés par le
climat pour ce qui est de la culture sèche, ne doivent cependant pas être
considérés comme exceptionnels.
Polyx XP
Variété polyploïde d'origine bclge, elle est très productive et s'adaptearrssi bien à la culture sèche qu'à f irrigation. En 1959/1960, elle a produitdans les essais culturaux en sec du Gharb une moYenne par hectare de
170 C. BOURGIN
46 t de racines avec un rendement en sucre de 6,6 t. Son cycle véeétatifdure 240 à 250 jours. A l ' i r r igat ion. la Polyx Xp. donné égal-ementdes résultats remarquables en milieu rural : 32,5 t de racines et 5.2 t dcsucre en moyenne dans les Doukkala malgré les conditions déplorablesde culture, 4A lha de racines et 6,3 t/ha de sucre dans le Taâla, -12,5t/ha de racines et 8,5 t/ha de sucre dans la Basse Moulouya. Enfin, enstation expérimentale, à I ' irr igation, ses rendements sont voisins de ceuxde la Kle in N, avec 85,5 t , /ha de rac ines et 12,6 t /ha de sucre.
K leinw qnzleibe n P olyb eto
Cette variété polyploïde, d'origine allemande, a presque toujoursdonné d'excellents résultats en station expérimentale. En milieu rural, elleserait plutôt à conseil ler à I ' irr igation car ses besoins en eau semblentélevés. En 1959/ 1960, année pluvieuse pour le Gharb, elle y a fourni,en culture sèche, 44 t/ha de racines et I t/ha de sucre. En station exoé-rimentale, elle a produit, à I ' irr igation,65,7 t/ha de racines avec t1.: t lhade sucre.
Kleinwqnzleiben ÀI
variété diploïde d'origine allemande, elle a donné, en culture sèchedans le Gharb, de très bons résultat s en 1959 / 1960, produisant en moyennepar ha 46 tonnes de racines contenant 7,25 tonnes de sucre et ceci chezdes agriculteurs encore peu familiarisés avec cette culture. Elre n'a pasencore été suffisamment essayée à I'irrigation, en milieu rural, pour quedes chiffres puissent être avancés, mais, à la station de Bouraouane, dansles Doukkala, elle a fourni en culture irriguée Bi t/ha de racines avecun rendement en sucre de 13,2 t/ha ce qui donne une idée de ses possi-b i l i tés lorsque la cul ture est condui te d 'une manièrê impeccable. De typeprécoce, cette variété atteindrait sa richesse en sucre maximum au boutde 200 à 220 jours.
Zwqqnesse III et Hilleshôq " E > se sont très bien classées aussi, au coursdes gssais compar.lt i fs de variétés et sont comparables, si ce n'est supérieu-res, à Klein N.
Parmi ces variétés on peut espérer trouver celle qui donnera, mêmeen milieu rural, des rendements élevés. Il sera toutefois orudent de tablersur des rendements moyens inférieurs lorsque la culturè sera vulgarisée,car I'encadrement des cultivateurs sera plus difficile à réaliser que pendantle stade des essais culturaux. une moyenne de 25 t/ha de racines semble,en tous cas, un objectif possible à atteindre en quelques années.
Les essais de variétés se poursuivent. En particulier, res variétés detype u z >> et (< zz >> seront expérimentées largement sur la côte atlantiquedu Maroc.
LE LAJ..IÛ]:IMENI DE LA BETTERAVE A SUCRE AU MAROC 17r
T'NCHNIQIJES CULTURALES
Les techniques culturales devront varier, bien entendu, dans unecertaine mesure, suivant les sols et les régions et suivant que la culturesera sèche ou irriguée. Il n'entrerait pas dans le cadre de cette étude d'endévelopper tous les aspects. Nous verrons donc rapidement quelles devrontêtre les principales caractéristiques de la culture de la betterave à sucreau Maroc.
Place dans I'assolement.
Plante sarclée, la betterave doit venir en tête de rotation, après unejachère nue ou une culture fourragère. Contrairement à une opinion encoretrop répandue, elle est un excellent précédent pour le blé et nous avons euplusieurs fois I'occasion de constater que la sole de blé suivant une bette-rave à sucre procurait un rendement nettement supérieur à celui de culturesde cette céréale suivant une jachère travaillée. L'effet résiduel de lafumure y joue probablement un rôle non négligeable, mais la rentabilitéde la betterave permet et rend nécessaire cette fumure, dont les effetsultérieurs doivent donc être laissés à son crédit.
Préparation du sol et fumure.
Il est apparu nécessaire de travailler le sol sur 35 à 40 cm de pro-fondeur, en recherchant un état légèrement grumeleux du sel, sans arriverà l'état poudreux. Dans la pratique, les doses d'engrais appliquées ont étéen moyenne, de 600 kg par hectare de 1C-10-10 et ont donné partielle-ment satisfaction. Les essais comparatifs démontrent jusqu'à présent,I'efficacité de doses beaucoup plus fortes d'engrais. 1 000 à 1 200 kg de10-10-10 sont rçntables dans la majorité des ças. Les expérimentationsen cours permettront de définir avec plus de précision les fumures minéralesà appliquer à chaque type de sol.
L'apport de fumier est efficace mais il est encore rafement praticableen milieu rural.
Juste avant le semis, il cst nécessaire dans le Gharb d'appliquer ensurface un mélange de lindane et de borax.
Dates de gemis.
En culture sèche, dans le Gharb, le semis doit être effectué entrele 1"" novembre et le 25 décembre, Lorsque le sol est encore chaud etquand il est suffisamment humidifié, les graines germent en huit jours etle jeu4e plant se développe rapidement.
1 7 2 C. BOURGIN
En semant plus tôi ou plus tard, on risquc dc retarder beaucoup lagermination, cn raison du manque d'humidité ou de chaleur eC de provo-quer un mauvais clépart en végétation qui se répercutera sur les rende-ments. La Pcllvx X.P. et la Klein Polybeta soni à semer en premier ;la Klein N, plus précoce, pouvant être semée un peu plus tard que lesdeux autres.
A I ' irr igation, on peut jouer évidemment avec plus de sécurité surla date de semis. Des semis d'été, de fin juil let à septembre, permettentd'obtenir des récoltes à partir de fin mars et jusqu'à fin mai. Mais dessemis tardifs, en fin d'hiver, ne permettent pas cependant d'avoir desrécoltes beaucoup p.lus tardives que celles des semis d'automne et de débutd'hiver. En elTet, le cycle végétatif est raccourci par l 'é!évation de la tem-pérature et de I ' insolation et pour des semis très tardifs, on risque mêmed'obtenir des rendements anormalement bas en raison d'accidents d'ordrephysiologique provoqués par la chaleur.
Peuplement.
Le semis doit se faire en l ignes espacées de 0,50 m, en poquets ouen ligne, de façon que le peuplement à I 'hectare soit de 80 000 à 100 000plants après démariage.
En accord avec la plupart des résultats obtenus à l'étranger, il a étéconstaté au Maroc, I'influence primordiale des densités de population surle rendement et la qualité des racines. L'expérimentation a montré quele peuplement optimum devait se situer autour de 80 000 plants/ha, queles semis soient faits en poquets ou en ligne.
Conformément aux données classiques, l'expérience acquise au Maroca démontré I'intérêt du démariage précoce, ainsi que celui des binagesrépétés jusqu'à recouvrement complet du sol par le feuillage.
Irrigations.
Les techniques générales d'aménagement sont à respecter pour labetterave comme pour les autres cultures irriguées. Quoique d'autresdispositifs soient en cours d'étude, il semble que I'irrigation à la raie seraretenue et, dans certains cas, peut-être I'arrosage en pluie.
Les observations faites à ce jour ont bien mis en lumière la grandesensibilité de la betterave à I'excès d'humidité, provoquant une asphyxieau niveau du méristème terminal de la racine, accompagnée ou non, selonles cas, d'une pourriture du collet.
En matière de fréquence et de volume d'irrigations, des études détail-lées sont en cours.
LE LANCEMËNT DE I,A BETTERAVE A SUCRE AU MAROC t73
Pour la région du Gharb et pour les semis d'automne, la nécessitéd'irriguer n'apparaît que dans le secteur Sud-Est où la pluviométrie deprintemps risque d'être insuffisante. Dans ce cas, en général, I'irrigationde 6 à 700 m3/ha sera suffisante pour assurer une récolte normale.
Dans les périmètres irrigués, et selon l'époque de semis, 4 à 10 irri-gations peuvent être nécessaires; I'essentiel étant de maintenir le sol hurnideen permanence sans excès. L'arrêt des irrigations trois semaines avant la
récolte est préconisé.
ECHELONNEMENT DES RECOLTES
Pour augmenter la durée de la campagne sucrière' selon le væu desindustriels, l'échelonnement des récoltes aura une importance cnpitale. l,e
stockage des betteraves est dès à présent proscrit, la conservation des
racines après la récolte étant aléatoire.
Les récoltes correspondant ailx périodes normales de semis en sec
ou à I'irrigation interviennent, suivant les variétés et les dates exactes de
semis, entre début juin et fin juillet, au plus tard mi-août pour les variétés
les plus tardives. Nous avons vu qu'il n'est pas possible de prolonger cette
période. D'ailleurs au monent des fortes chaleurs, les betteraves se con-
servent très mal et la récolte est beaucoup plus délicate. Par contre, il
semble possible d'avancer la période de récolte grâce à des semis d'été en
irrigation. Les expériences réalisées en station ont montré, nous I'avonsvu, que des récoltes peuvent être envisagées, dans ce cas, dès la fin de
mars ou le début d'avril. De 75 jours, il serait ainsi ptlssible, au moins
théoriquement, d'allonger la campagne industrielle jusqu'à 130 jours
environ, ce qui serait extrêmement avantageux,
Il sera plus prudent de ne tabler que sur url maximum de 100 jours
pour établir les programmes, mais ces premières expériences nous permet-
tent d'espérer que ce chiffre ne sera pas, dans I'avenir, un rnaximum.
QUALITE INDUSTRIELLE DES BET'TDRAYES
Richesse en sucre.
Le taux de saccharose, qui varie beaucoup pendant la vie de labetterave, a évidemment une grande importance puisque c'est lui qui
détermine la valeur exacte de la récolte. Nous avons donc fait procéderrégulièrement à des analyses pour nous assurer que les betteraves produitesétaient d'une qualité convenable et pour déterminer la période optimumde récolte qui correspond au maximum de rendement en sucre parhectare.
1 7 4 C. BOURGIN
Toutes les variétés sélectionnées ont présenté des teneurs en saccha-rose de 15 à 20 o/a , ce qui est satisfaisant. La richesse en sucre varie avecl'évolution de la racine et passe par un maximum lors de la maturité phy-siologique, puis elle redescend assez rapidement. Le graphiclue ci-dessous(FrcunE II) représente les variations du taux de saccharose dans la racineen fonction de la durée de végétation pour la variété Klein N. cette courbea été établie avec les valeurs moyennes obtenues dans plus de 120 essaisde cette variété.
Il y aura donc lieu d'échelonner soigneusement les semis pour queles récoltes puissent se faire au moment le plus favorable sans qu'un stoc-kage soit nécessaire. Les expériences en cours seront poursuivies afin dedéterminer pour chaque variété et en fonction des conditions écologiqueset pédologiques, la période de récolte permettant d'obtenir le taux maxi-mum de saccharose.
Pureté.
On admet que le jus de pression doit avoir au minimum 85 % depureté. Ce critire n'est pas sans importance car les impuretés du jus,qui empêchent la cristallisation d'une partie du sucre, doivent être élimi-nées pendant le traitement industriel et cette élimination devient difticile-ment rentable lorsque ces impuretés dépassent le taux de 15 % par rapportau total sucre + impuretés.
La pureté du jus varie, comme la richesse en sucre, avec la date derécolte, donc avec l'état de maturation de la racine. Le graphique suivant(Ftcune III) indique l'évolution moyenne de la pureté pour des betteravessemées, dans le Gharb, vers le 1"'novembre.
Bien que ces premiers résultats ne puissent encore être considérésque comme approximatifs, nous pouvons remarquer que pour des bette-raves de la variété Klein N, une récolte effectuée 200 jours environ aprèsle semis, soit tn mai, permettrait d'associer le maximum de teneur ensucre.avec une pureté de plus de 9O Vo, voisine du maximum. Ainsi quepour la teneur en saccharose, des recherches sont en cours pour détermineil'évolution du taux de pureté de chaque variété dans les principales situa-tions écologiques.
D'ores et déjà, il apparaît que dans tout lç Maroc, lcs récoltes desbetteraves semées en automnç seront à arrêter vers le 15 août.
Signalons, pour terminer, que la station de tcchnologie du Centrede Recherches Agronomiques de Rabat nous permettra d'améliorçr notreconnaissance des qualités industrielles de nos betteraves. Des études com-paratives sur les variétés, sur I'emploi de chaux d'origines divelses, et surI'aptitude à la conservation des racines après arrachage sont en cours.
Frc. II.
19
1 E
'17
16
1 5
Evolution du taux de saccharose
Variété Klein N
200
Evolution de la pureté des jus
Valeurs moyennes
ioûns
116 I J O U R G I N
CONCLUSION
Il est possible d'ail irrner, dès maintenant, que la betterave à sucreest susceptible cle don::er au Maroc de bons résuliats.
I l est aussi vra isemblablc qu 'un échelonnernel t jud ic ieux des semrsâ I ' irr igation perrnettra d'obten;r dcs canrpagnes inclustrielles plus longuesque dans les pays i\ hiver froid,
Les possibil i tés en culture sèchc sont largcs dirns Ie Nord-Ouest duMaroc, avec cependant dcs précautions à prendre soit pilur les régions i\pluviométrie marginale soit pour les régions conlportaltt cles risques d'inon-dation. [..es espoirs en culture irn-quée sont encore plus grands, à condi-tion que les techniques d'irrigation en cours de mise au puint soient effec-tivement appliqtiées.
L.es r'épercussions que cette culture peut avoir sur les structuresagricoles devraient être très favorables. 'foutefois, i l ne faut pas se dissi-rnuler clue le pissage clu stade expérirnental à celui de la vulgarisationreste à franchir.
I i r Recherr :hc Agronomique a pu. en Lro is nnnucs reulement . s i t r . rcret meiire au po-nt les techniques essentielles de production à appliquer.La construction d'une plremière sucrerie peut dclnc être envisagée avecune sécur i té suf l isante.
Ceci n'a ctc possible que par la symbiose réalisée entre les chercheursct les praticicns. Aujclurd'hui, la Recherche est à nrênre de poursuivreencore plus à 1r nd sa nrission proprc, d'une plirt, et, d'autre part, peutparticiper largenrent i\ la formirtion des cadres que cctte nor-rvelle cultureva requérir.
J u i n 1 9 6 1 .
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ç:-ir dri l l J\.Âll jb[i., ,9^!1 iclr, j ,+r^It ., i j : i :r
.J-!1 ./;[Ji!l ù. Jl,il)lJ .[;Li- ,i.sl cit-.[*. é; orll ïcl-r,
;S-t.Yl je,: ç) g1l ,-i, _,eh J.,!l
nÉsulrÉ
L'autcur rappelle les raisorrs pour lesquelles le lancement de la culturede la betterave à sucre semble très intéressant, non seulement sur le planéconomique, rnais aussi pour moderniser I 'agriculture marocaine et I 'as-socier plus étroitement à l 'élevage.
Ii indique que, depuis 1957, la recherche expérimentale et les essaisen miiieu rural furent menés de front, pour gagner du temps. Après avoirmentionné les principales régions où la betterave a été essayée èt "n pt.-rnier l ieu le Gharb, i l rend compte des premiers essais en ce qui concerneles variétés, les techniques culturales, les rendements et les caràctéristiquesindustrielies des betteraves produites.
Les résultats de ces -essais semblent prometteurs. L'auteur estime
que la betterave à sucre peut largement réussir au Maroc, en culture sèchedans la .zone nord-ouest et à I ' irr igation dans les plaines plus arides. Lepassage de I 'expérimentatir:n à la vulgarisation peut être envisagé dèsmalntenant dans certains secteurs. F . M .
r78 C. BOURGIN
RESUMEN
El autor recuerda los motivos por los cuales la introduccidn delcultivo de la remolacha azucarera parece iuteresante, no solamente desdeel punto de vista econdmico, sino tanrbién en vista de modernizar laagricultura marroqui y asociarla mâs estreehamente a la crianza de ganado.
Indica que desde 1957, con objeto de ganar tiempo, se llevaron acabo simultaneamente las investigaciones experimentales y los entayos enel ambiente rural. Después de mencionar las principales regiones en lascuales la remolacha azûcarera ha sido ensayada, v en prirrier lugar elGharb, da cuenta de los primeros ensayos respecto a las variedades, lastécnicas culturales, los rendimientos y las caracteristicas industriales delas remolachas producidas.
Los resultados de estos ensayos parecen prometedores. El autor juzga
que la remolacha azucarera puede tener buen éxito en Marruecos, ensecano en la ârea del noroeste y en regadio en las llanuras mâs âridas. En
algunos sectores se puede considerar desde ahora pasar de la fase experi-mental a la de la vulgarizacidn.
J .G .
SUMMARY
The author reviews the reasons why the launching of sugar-beetgrowing looks very interesting, not only from an economical standpoint,
but also in order to modernize moroccan agriculture and to associate it
more closely with cattle breeding.
He points out that, since 1957, both experinrental research programs
and tests among the farmers have been carried out together in order to
save time.
After mentioning the main areas whère suger-beet has been tried, first
of all the Gharb area, he gives a record of the first variety trials, the
growing techniques, yields and industrial charaeteristics of the produced
sugar-beets.
The results of these trials seem promising. The author deems that
sugar-beet is likely to be successful in Morocco, without irrigation in the
northwestern region and with irrigation in the more arid plains. It is
believed that in certain areas from now onwards the experimental stage
could be safeiy followed by that of popularization.J .P .G .