M a n u e l s F ( f ) r a n c o p h o n e s
© Agence universitaire de la Francophonie
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Responsable de collection :Ciprian MIHALI (Université « Babes-Bolyai », Cluj-Napoca)
RĂ©dacteurs de lâouvrage :AndrĂ© CABANISJean-Marie CROUZATIERRuxandra IVANJacques SOPPELSA
Couverture :Carolina BANC
Correction : Ciprian JELER
Technorédaction :Lenke JANITSEK
Impression :IDEA Design & Print, Cluj
ISBN 978â973â7913â93â7
André Cabanis | Jean-Marie Crouzatier | Ruxandra Ivan | Jacques Soppelsa
MĂ©thodologie de la rechercheen droit international,
géopolitique et relations internationales
master et doctorat
Idea Design & PrintEditura, Cluj
2010
« Hobbes rappelait, dans son LĂ©viathan,que la parole est, avant tout, une âtrom-pette de guerreâ. Elle peut ĂȘtre aussi unefficace instrument de rassemblement. »
Jacques SOPPELSA1
_________________________1. Francophonie et relations internationales, Paris, Ăditions des archives contemporaines, 2009,
préface, p. 11.
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Préface
LâAgence universitaire de la Francophonie considĂšre que le soutien auxjeunes chercheurs â Ă©tudiants de maĂźtrise, doctorants et post-doctorants â estune prioritĂ©. Si dâores et dĂ©jĂ elle accorde Ă certains dâentre eux une boursede mobilitĂ©, elle a la ferme volontĂ© de les aider tous dans leur dĂ©marche scien-tifique.
Son objectif, Ă moyen et Ă long terme, est de prĂ©parer la relĂšve, non seule-ment dans les sept cent dix universitĂ©s membres de lâAUF, mais aussi danslâensemble des Ă©tablissements dâenseignement supĂ©rieur et de recherche dela Francophonie, une Francophonie qui ne cesse de sâĂ©tendre.
Dans la prochaine dĂ©cennie, de nombreux postes seront Ă pourvoir, quâilsâagisse de postes nouveaux ou de ceux occupĂ©s par les enseignants-cher-cheurs nommĂ©s dans les annĂ©es soixante-dix et quatre-vingts â pĂ©riode delâexpansion universitaire â qui auront atteint lâĂąge de la retraite.
La rĂ©daction dâun mĂ©moire de master, dâun doctorat ou de publicationspost-doctorales exige la maĂźtrise dâune mĂ©thodologie qui relĂšve Ă la fois dela transdisciplinaritĂ© et de la discipline scientifique quâil convient de faire pro-gresser. Mais au-delĂ de cet aspect, ces travaux ont une utilitĂ© sociĂ©tale etchaque auteur a, prĂ©alablement, Ă se poser cette question cruciale: les rĂ©sul-tats de la recherche sont-ils susceptibles de profiter, directement ou indirecte-ment, Ă la sociĂ©tĂ© locale, rĂ©gionale, nationale ou internationale ?
Le prĂ©sent ouvrage sâadresse prioritairement aux chercheurs en droit in-ternational, en relations internationales et en gĂ©opolitique. Mais il pourra aussiĂȘtre utile Ă des chercheurs dâautres disciplines. Je pense notamment auxphilosophes, aux anthropologues, aux historiens et aux sociologues. Il est, cetouvrage, le rĂ©sultat dâun travail collectif de longue haleine. Des spĂ©cialistesde renommĂ©e internationale se sont rĂ©unis en plusieurs ateliers. Ils se sontorganisĂ©s de maniĂšre Ă ce que leur rĂ©flexion puisse mĂ»rir et sâenrichir dâap-ports constants de nouvelles informations.
Toutefois, un manuel de mĂ©thodologie nâest pas un livre de recettes quâilsâagirait dâappliquer mĂ©caniquement. Tous les acteurs scientifiques sâac-cordent Ă penser quâil nâexiste aucune procĂ©dure gĂ©nĂ©rale et interchangeableque suivraient ou devraient suivre les chercheurs pour produire de nouvellesconnaissances. Le jeune chercheur devra donc faire preuve dâimagination etde crĂ©ativitĂ©. « Lâimagination est plus importante que le savoir », se plaisait
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Ă dire non un soixante-huitard nostalgique, mais Albert Einstein lui-mĂȘme,insistant ainsi sur lâimpact de la crĂ©ativitĂ© sur lâutilisation mĂȘme des savoirs.
La crĂ©ativitĂ©, câest la capacitĂ© dâinventer dâautres chemins, de sortir desschĂ©mas traditionnels pour relever de nouveaux dĂ©fis. Câest un processus men-tal qui implique la gĂ©nĂ©ration dâidĂ©es ou de concepts originaux, dâassocia-tions inĂ©dites entre des idĂ©es et des concepts prĂ©existants. Elle consiste aussiĂ dĂ©couvrir de nouveaux points de vue permettant de voir autrement ce quelâon connaissait dĂ©jĂ . La crĂ©ativitĂ© permet de dĂ©velopper cette pensĂ©e com-plexe qui gomme les ruptures traditionnelles entre les disciplines acadĂ©miquesafin de comprendre le monde qui nous entoure dans sa globalitĂ©, un mondefait dâenchevĂȘtrements et dâentrelacements. Aujourdâhui, la pluridisciplina-ritĂ© ou, mieux encore, lâinterdisciplinaritĂ© et la transdisciplinaritĂ© sont, plusque jamais, indispensables.
Chacun sait combien le mĂ©tier de chercheur est exigeant. Il ne peut sâexer-cer sans une grande curiositĂ© intellectuelle, sans une pensĂ©e et une analysecritiques, sans une argumentation rigoureuse, sans une approche originale,sans le sens de lâinitiative et de lâautonomie. Dans le cas de mĂ©moires de mas-ter et de doctorats, il faut en outre faire preuve de dĂ©termination et ĂȘtre ca-pable de terminer le travail dans les dĂ©lais fixĂ©s.
Mais tout cela nâest rien si lâenthousiasme pour la recherche scientifiquefait dĂ©faut, un enthousiasme constamment nourri au sein dâĂ©quipes dont lesmembres confirmĂ©s sont prĂȘts Ă partager leur passion avec les plus jeunes.Et pareilles Ă©quipes, quâil sâagisse du droit international, des relations inter-nationales et de la gĂ©opolitique, ou dâautres disciplines, existent dans toutela Francophonie.
Le prĂ©sent manuel est accompagnĂ© du vademecum de lâĂ©valuation. Certes,le mĂ©moire de master et la thĂšse de doctorat sont dĂ©jĂ Ă©valuĂ©s lors de la soute-nance. Mais dans de nombreux cas, il faudra procĂ©der Ă dâautres Ă©valuations.Par exemple, quand le jeune chercheur sollicitera une bourse de mobilitĂ© âĂ lâAgence universitaire de la Francophonie ou ailleurs â ou quand il souhaite-ra publier les rĂ©sultats de ses recherches dans une revue scientifique.
Il peut y avoir une part dâutopie dans le projet dâun quadrillage mĂ©tho-dique dâun champ de recherche aussi vaste et pointu que celui du droit in-ternational, des relations internationales et de la gĂ©opolitique, surtout si ongarde Ă lâesprit que ce champ ne se prĂ©sente pas comme un plan, mais commeun relief complexe. Cependant, nous nâen doutons pas, le prĂ©sent manuel nemanquera pas de fournir aux jeunes chercheurs des repĂšres solides suscep-tibles de les aider Ă mener leur recherche Ă bien.
Ce livre me semble pertinent dans la mesure oĂč le transfert dâintuitions,de concepts et de mĂ©thodes est lâun des aspects de la crĂ©ativitĂ© scientifique.
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Et sâil ne peut y avoir une mĂ©thodologie universelle de la crĂ©ativitĂ©, on peutnĂ©anmoins dĂ©gager, au moyen dâexemples, certaines lignes dâune sorte deprocessus par lequel Ă©merge lâinnovation.
Manfred PETERSMembre du Conseil scientifique de lâAgence universitaire de la Francophonie
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Avant-propos
Ce volume, destinĂ© principalement aux Ă©tudiants de master et aux docto-rants, est le rĂ©sultat dâune Ă©laboration collective, interdisciplinaire etinternationale francophone, soutenue par lâAgence universitaire de la Fran-cophonie. Il se veut une contribution Ă la rĂ©flexion menĂ©e au sein de la Fran-cophonie sur son projet et son avenir.
Madame RUXANDRA IVAN, politiste, professeur Ă lâUniversitĂ© de Bucarest,Bucarest (Roumanie), est lâauteur des dĂ©veloppements consacrĂ©s aux Rela-tions Internationales ; Monsieur JACQUES SOPPELSA, gĂ©opoliticien, professeurĂ lâUniversitĂ© de Paris I, Paris (France), a rĂ©digĂ© les parties consacrĂ©es Ă laGĂ©opolitique et Monsieur JEAN-MARIE CROUZATIER, juriste, professeur Ă lâUni-versitĂ© Toulouse 1 Capitole, Toulouse (France), celles consacrĂ©es au droit inter-national. Monsieur ANDRĂ CABANIS, professeur Ă lâUniversitĂ© Toulouse 1Capitole, Toulouse (France), a contribuĂ© Ă la rĂ©daction de lâintroduction et dela conclusion.
Les auteurs ont bĂ©nĂ©ficiĂ© du soutien du ComitĂ© de coordination et de suividu Programme thĂ©matique Aspects de lâĂtat de droit et dĂ©mocratie de lâAgenceuniversitaire de la Francophonie, Ă lâoccasion de deux sĂ©minaires de rĂ©-flexion du collectif « Francophonie, Ătats francophones et francophonie » quise sont tenus Ă GorĂ© (SĂ©nĂ©gal) en fĂ©vrier 2009 et Ă Cluj (Roumanie) en oc-tobre 2009. Outre les auteurs, ont participĂ© Ă ces sĂ©minaires le professeurMamadou Badji, UniversitĂ© Cheikh Anta Diop, Dakar (SĂ©nĂ©gal), et MonsieurClaude-Emmanuel Leroy, directeur dĂ©lĂ©guĂ©, Programme Aspects de lâĂtat dedroit et dĂ©mocratie, Agence universitaire de la Francophonie ; le professeurManfred Peters, FacultĂ©s universitaires Notre-Dame de la Paix, Namur (Bel-gique), le professeur Laurent Sermet, UniversitĂ© de la RĂ©union (France), etle professeur Rotha Ung, UniversitĂ© royale de droit et dâĂ©conomie, PhnomPenh (Cambodge), ont pris part au second sĂ©minaire de Cluj.
Monsieur Claude-Emmanuel Leroy, directeur dĂ©lĂ©guĂ© du ProgrammeAspects de lâĂtat de droit et dĂ©mocratie, a supervisĂ© ces rencontres et lâĂ©labora-tion de lâouvrage.
Les opinions exprimĂ©es nâengagent que leurs auteurs.
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Liste des abréviations, des acronymes et des sigles utilisés
A.C.C.T. Agence de coopĂ©ration culturelle et techniqueA.C.P. Ătats dâAfrique, des CaraĂŻbes et du PacifiqueA.E.F. Afrique Ă©quatoriale françaiseA.G. AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations uniesA.I.F. Agence intergouvernementale de la FrancophonieA.L.E.C.S.O. Organisation de la ligue arabe pour la culture, lâĂ©ducation et la scienceA.L.E.N.A. Association de libre Ă©change dâAmĂ©rique du NordA.N.Z.U.S. TraitĂ© dâassistance mutuelle Australie â Nouvelle-ZĂ©lande â Ătats-UnisA.O.F. Afrique occidentale françaiseA.P.D. Aide publique au dĂ©veloppementA.P.E.C. Asia-Pacific economic cooperationA.S.E.A.N. Association des nations dâAsie du Sud-EstA.U.F. Agence universitaire de la FrancophonieB.I.T. Bureau international du travailC.E.D.E.A.O. CommunautĂ© Ă©conomique des Ătats de lâAfrique de lâOuestC.I.J. Cour internationale de justiceC.S. Conseil de sĂ©curitĂ© des Nations uniesF.A.D. Force arabe de dissuasionF.I.N.U.L. Force intĂ©rimaire des Nations unies au LibanF.M.I. Fonds monĂ©taire internationalMercosur CommunautĂ© Ă©conomique des pays dâAmĂ©rique du SudO.E.A. Organisation des Ătats amĂ©ricainsO.I.F. Organisation internationale de la FrancophonieO.I.G. Organisation intergouvernementaleO.L.P. Organisation de libĂ©ration de la PalestineO.M.C. Organisation mondiale du commerceO.M.S. Organisation mondiale de la santĂ©O.N.G. Organisation non gouvernementaleO.N.U. Organisation des Nations uniesO.T.A.N. Organisation du TraitĂ© de lâAtlantique NordO.U.A. Organisation de lâunitĂ© africaineP.M.A. Pays les moins avancĂ©sP.M.E. Petites et moyennes entreprisesS.A.L.T. Strategic arms limitation talksU.A. Union africaineU.E. Union europĂ©enneU.N.E.S.C.O Organisation des Nations unies pour lâĂ©ducation, la science et la cultureU.R.S.S. Union des rĂ©publiques socialistes soviĂ©tiques
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Introduction
Lâobjet du prĂ©sent ouvrage â comme lâindique son titre â est de fournir unemĂ©thode de travail susceptible dâĂȘtre utilisĂ©e dans le cadre de toute Ă©tude rela-tive au domaine international, en insistant sur les avantages dâune approchepluridisciplinaire. Pour mieux en cerner lâintĂ©rĂȘt, il est nĂ©cessaire de re-prendre successivement chacun des termes qui composent son intitulĂ©.
Le terme « mĂ©thodologie » est dĂ©fini comme « lâĂ©tude des mĂ©thodespropres aux diffĂ©rentes sciences »1. Le but de la mĂ©thodologie nâest donc pasde fournir un enseignement portant sur le contenu dâune matiĂšre ou dâunediscipline, mais vise Ă apprendre Ă gĂ©rer rationnellement les connaissancesacquises dans une matiĂšre ou une discipline. Ceci suppose la connaissanceâ et la maĂźtrise â dâoutils mĂ©thodologiques adaptĂ©s aux objectifs scientifiqueset pĂ©dagogiques prĂ©alablement dĂ©finis. NĂ©anmoins, le choix dâune certainemĂ©thode implique le choix dâune certaine approche thĂ©orique : il est donc in-dispensable que le chercheur connaisse les courants thĂ©oriques dominantsdans sa discipline et les disciplines connexes reprĂ©sentĂ©es ici, car il (elle) devrase positionner par rapport Ă ces courants.
Cette mĂ©thodologie doit permettre de mener une « recherche » scientifique.La recherche est un processus qui sâĂ©tend dans le temps et recouvre plusieursĂ©tapes : lâexploration de la documentation existant sur un sujet ou un thĂšme,la dĂ©finition dâidĂ©es directrices ou dâorientations, la mise en place dâune problĂ©-matique, la construction dâun modĂšle dâanalyse, lâĂ©laboration dâun plan derĂ©daction, la rĂ©daction dâun texte argumentĂ© et appuyĂ© par des rĂ©fĂ©rences auxsources utilisĂ©es. La prĂ©sentation chronologique de ces Ă©tapes est ici faite pourla commoditĂ©, mais en rĂ©alitĂ© elles ne sont pas rigoureusement sĂ©parĂ©es etse chevauchent souvent.
La mĂ©thodologie de la recherche prĂ©sentĂ©e dans cet ouvrage sâappliqueplus prĂ©cisĂ©ment aux diffĂ©rentes disciplines concernĂ©es par le domaine « in-ternational ». Parce que la caractĂ©ristique premiĂšre de la francophonie est ladiversitĂ© (diversitĂ© des systĂšmes politiques et des cultures juridiques, notam-ment), il paraĂźt naturel que la formation, dans lâespace francophone, privilĂ©gieun processus de pluralitĂ© disciplinaire et une dĂ©marche comparative. Il
_________________________1. Armand Cuvillier, Vocabulaire philosophique, Paris, A. Colin, 1956, p. 117.
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sâagit de sensibiliser les Ă©tudiants francophones Ă de nouvelles perspectivesouvertes par dâautres disciplines, connexes de celles quâils Ă©tudient, et de lesconvaincre de lâenrichissement quâils peuvent retirer du processus dâinter-action entre disciplines. Tel est lâobjet du prĂ©sent ouvrage : ouvrir les Ă©tu-diants du domaine « international » aux apports des disciplines qui sâyrapportent : le droit (droit international), la science politique et la sociologie(Relations Internationales), la gĂ©ographie humaine et lâhistoire (la GĂ©opoli-tique) ; de plus fournir aux rĂ©dacteurs dâun mĂ©moire de master ou dâune thĂšsede doctorat dans ce domaine les outils mĂ©thodologiques propres Ă ces dif-fĂ©rentes disciplines pour quâils puissent, en les utilisant, enrichir leur rĂ©-flexion et leur travail.
Lâentreprise a dĂ©butĂ© en 2008, Ă lâinitiative dâun groupe de philosophes,politologues et juristes rĂ©unis au sein du collectif « GĂ©opolitique de la Fran-cophonie », avec la publication des rĂ©sultats dâune rĂ©flexion pluridisci-plinaire ; leur ouvrage intitulĂ© Francophonie et relations internationales2 avaitpour objectif de mettre en lumiĂšre le rĂŽle mĂ©connu dâune organisation inter-nationale (lâOIF) atypique.
Toute Ă©tude scientifique doit commencer par une dĂ©finition des termes dusujet Ă traiter. Et de ce point de vue, la premiĂšre difficultĂ© quâils ont rencon-trĂ©e tenait au caractĂšre polysĂ©mique du terme « francophonie ». Car si le terme« francophonie » â sans majuscule â renvoie Ă un mouvement, un ensembledâinstitutions non gouvernementales qui Ćuvrent directement ou indirecte-ment Ă promouvoir le français comme langue de travail, dâĂ©changes et de cul-ture, « Francophonie » â avec une majuscule â dĂ©signe des institutionsintergouvernementales crĂ©Ă©es par les soixante-dix « Ătats francophones » etrassemblĂ©es au sein de lâOrganisation internationale de la Francophonie. Cetteorganisation, souvent mĂ©connue, regroupe pourtant un tiers des membresde lâONU ; elle entretient des reprĂ©sentations permanentes Ă New York,GenĂšve, Bruxelles, et Addis Abeba ; elle est distinguĂ©e comme partenaire partoutes les OIGâŠ
Cette distinction entre francophonie et Francophonie nâapparaĂźt pas seule-ment logique mais chronologique, fondĂ©e sur lâĂ©volution suivante : câest lasociĂ©tĂ© civile (francophone) qui a gĂ©nĂ©rĂ© des institutions spĂ©cialisĂ©es que lesĂtats (francophones) ont couronnĂ©es par lâadjonction dâune organisationgĂ©nĂ©rale (Francophone).
Câest donc cet ensemble polymorphe « francophonie, Ătats francophoneset Francophonie » qui est lâobjet de lâĂ©tude.
_________________________2. Francophonie et relations internationales, Paris, Ăditions des archives contemporaines, 2009.
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La francophonie
Le lien Ă©vident est celui de la langue : le français. Le terme « francopho-nie » dĂ©signe donc un mouvement issu de la sociĂ©tĂ© civile, tous ceux qui âdepuis plus dâun siĂšcle â sâemploient Ă rĂ©pandre le français comme langue detravail, dâĂ©changes et de culture ; la francophonie est formĂ©e par des centainesdâĂ©tablissements scolaires, universitaires et culturels, des milliers de chercheurspartiellement ou entiĂšrement de langue française, des dizaines de milliers dâas-sociations qui se donnent pour mission la pratique et la diffusion du français :Ă©tablissements privĂ©s religieux ou laĂŻcs, alliances françaises, Ă©diteurs,acadĂ©mies et sociĂ©tĂ©s savantes, comitĂ©s et conseils, associations, fĂ©dĂ©rationset unions en tous genres qui permettent Ă 175 millions de personnes sur lescinq continents dâĂ©tudier (deuxiĂšme langue Ă©tudiĂ©e dans le monde) et de par-ler français (neuviĂšme langue parlĂ©e dans le monde). Certes, cet ensemble nâestpas toujours cohĂ©rent, en ce sens que la francophonie se dĂ©finit par rĂ©gions(la francophonie du Maghreb, celle de lâAfrique noire, de lâAsie, de lâEuropecentrale et orientale) ; mais il se dĂ©finit par une langue « en partage ». Et lasociĂ©tĂ© civile francophone â plurielle â se caractĂ©rise par sa vitalitĂ©.
LES ONG
La plupart des analyses portant sur les champs de la GĂ©opolitique, desRelations Internationales ou du droit international, privilĂ©gient depuisdes dĂ©cennies le concept dâ« Ătat-nation » ; ce constat, apparemmentbanal, eu Ă©gard Ă son omniprĂ©sence dans la saga planĂ©taire, tend ce-pendant Ă simplifier, voire Ă caricaturer les caractĂšres fondamentauxdu monde contemporain.Le rĂŽle des Ătats-nations est plus que jamais complĂ©tĂ©, modifiĂ©, voireperturbĂ©, par lâaction dâautres acteurs :â les organisations supra-Ă©tatiques « rĂ©gionales », de lâALENA Ă
lâUnion europĂ©enne, de lâAPEC au Mercosur, ou « thĂ©matiques »,comme lâOMS, lâOTAN ou lâOIF ;
â les firmes transnationales, naguĂšre baptisĂ©es « multinationales », etdont le poids gĂ©oĂ©conomique est trĂšs comparable avec celui de cer-tains Ătats-nations ;
â et, depuis deux ou trois gĂ©nĂ©rations, les « Organisations Non Gou-vernementales » (ONG).
Ces derniĂšres sont officiellement dĂ©finies par lâONU â rĂ©solution 288 bde fĂ©vrier 1950 â comme des « organisations qui ne sont pas crĂ©Ă©es parla voie dâaccords intergouvernementaux ». Cette dĂ©finition sâavĂšre de
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facto partielle et obsolĂšte, parce quâaujourdâhui, maintes ONG (etparmi les plus puissantes), sont souvent financĂ©es par des Ătats. Cons-tat qui fait apparaĂźtre aussi lâĂ©numĂ©ration « classique » des principauxcaractĂšres propres Ă une ONG comme naĂŻve, sinon hypocrite :â lâorigine privĂ©e de sa constitution ;â lâindĂ©pendance financiĂšre ;â le but non lucratif de son action ;â lâindĂ©pendance politique ;â la notion dâintĂ©rĂȘt public.Beaucoup dâauteurs se sont ralliĂ©s depuis la fin des annĂ©es 1990 Ă unedĂ©finition plus subtile, sinon plus sophistiquĂ©e, en distinguant troisgrands types dâONG :â les « Quangos » (« quasi non governmental organisations »), ONG
dĂ©pendant partiellement de subsides gouvernementaux ;â les « Dongos » (« donor organised NGOs »), strictement liĂ©es Ă leur
bailleur de fonds principal ;â et les « Gongos » (« government-organised NGOs »), gĂ©nĂ©rĂ©es par lesgouvernements, officiellement indĂ©pendantes, mais en rĂ©alitĂ© contrĂŽ-lĂ©es par ces derniers.Si les esquisses typologiques basĂ©es sur leurs modes dâaction nous pa-raissent dâun intĂ©rĂȘt trĂšs limitĂ©, un phĂ©nomĂšne rĂ©cent apparaĂźt, en re-vanche, incontestable : le poids croissant de leur rĂŽle sur lâĂ©chiquierinternational.Parmi les plus puissantes de ces dizaines, voire ces centaines, dâONG,se dĂ©gagent des organisations Ă but essentiellement « humanitaire » :â « caritatif » (pour ne citer que quelques exemples dâorigine « franco-
phone » : Médecins du Monde, Médecins sans FrontiÚres, Actioncontre la Faim) ;
â la lutte contre le sous-dĂ©veloppement (ATD Quart Monde) ; â des objectifs plus gĂ©nĂ©raux : promotion de lâĂ©cologie (Les Amis de la
Terre) ; lutte contre les violations des droits de lâhomme (AmnestyInternational, Otages du Monde).
Certaines, enfin, ont des buts fondamentalement « politiques » (ATTAC,Greenpeace) et sont, en rĂšgle gĂ©nĂ©rale (ceci expliquant sans doute ce-la), les organisations les plus controversĂ©es.Illustration rĂ©cente de lâaction et du dynamisme de certaines ONG, lePrix Nobel de la paix a Ă©tĂ© dĂ©cernĂ© Ă trois dâentre elles : Amnesty In-ternational, en 1977, Handicap International, en 1997, et MĂ©decinssans FrontiĂšres, en 1999.
Pourtant, la francophonie ne manque pas de sâinterroger sur son devenirĂ travers â pour faire simple â les perspectives dâutilisation du français. SansĂȘtre exagĂ©rĂ©ment pessimiste, lâon peut repĂ©rer, de ce point de vue, deux
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problĂšmes. Le premier rĂ©sulte du constat qui se fait jour dâune Ă©volution dela perception du fait francophone et de son intĂ©rĂȘt, en fonction des gĂ©nĂ©ra-tions, avec une tendance dans une partie de la jeunesse Ă considĂ©rer la mon-dialisation sous sa forme linguistique comme une tendance irrĂ©sistible, doncĂ soutenir quâil ne saurait y avoir quâune langue de communication au ni-veau international â lâanglais â et que les autres idiomes devraient se rĂ©signerĂ une fonction Ă©troitement locale, voire seulement familiale. Le second pro-blĂšme tient Ă ce que, chez nombre de francophones, y compris militants, estperceptible le sentiment de nâĂȘtre en mesure, au mieux, que de retarder la pro-gressive domination de lâanglais. Le combat pour la langue de MoliĂšre seraitparfois vĂ©cu comme un signe dâappartenance Ă une petite communautĂ© aupassĂ© prestigieux, porteuse de valeurs estimables mais frappĂ©e dâun irrĂ©mĂ©-diable dĂ©clin. Une vision rĂ©aliste de la perception de la francophonie par seslocuteurs mĂȘmes interdit de se dissimuler ces deux Ă©lĂ©ments et contraint Ă en tenir compte, malgrĂ© ceux qui refusent dâoublier que, pendant quelquesdeux cents ans, entre le TraitĂ© de Rastadt de 1714 et le TraitĂ© de Versailles de1918, le français fut la langue de la diplomatie.
Une trentaine de langues « majeures » dominent actuellement le monde,aux premiers rangs desquelles apparaissent (estimations trĂšs approximatives)le mandarin (1 200 millions de locuteurs), lâarabe (420 millions), lâhindi (370millions), lâanglais (340 millions), lâespagnol (220 millions), le bengali (200 mil-lions), le portugais (180 millions), le russe (176 millions), le français (175 mil-lions), lâallemand (100 millions)⊠Mais si ces donnĂ©es quantitatives sont loindâĂȘtre nĂ©gligeables, lâimportance qualitative des langues est tout autre : sanssous estimer le chinois, lâhindi ou le bengali, au-delĂ des locuteurs des dias-poras, des minoritĂ©s indiennes dâAfrique orientale et des « chinatowns » delâunivers anglo-saxon, il sâagit lĂ de langues dâusage essentiellement interne,mĂȘme si cet usage sâapplique Ă des « nations-continents ».
ParallĂšlement, de nombreuses langues ont beaucoup de difficultĂ©s Ă sâim-poser sur le plan mondial : lâallemand, le japonais, lâitalien, en dĂ©pit du dy-namisme Ă©conomique et commercial contemporain des trois grands vaincusdu Second Conflit mondial, sont, Ă quelques exceptions prĂšs, Ă©troitement con-finĂ©s Ă lâintĂ©rieur des frontiĂšres de leur pays dâorigine ; lâarabe progresse len-tement, mais rĂ©guliĂšrement, dans le sillage de lâIslam ; le russe, qui avaitĂ©tendu son emprise gĂ©ographique en corrĂ©lation avec lâexpansion de lâEm-pire soviĂ©tique, est (ceci expliquant cela) en voie de tassement ; et les languesibĂ©riques, en dĂ©pit de lâessor rĂ©cent de lâespagnol en AmĂ©rique du Nord, etde ses consĂ©quences sociĂ©tales et culturelles, connaissent un accroissementrĂ©cent qui ne reflĂšte guĂšre que les comportements dĂ©mographiques natalistesdes Ătats latino-amĂ©ricains.
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Et si lâOrganisation des Nations unies utilise officiellement six langues de tra-vail (lâanglais, le français, le russe, le chinois, lâarabe et lâespagnol), la quasi tota-litĂ© des organisations internationales ne sont rĂ©ellement concernĂ©es que par deuxoutils linguistiques, du BIT Ă lâUNESCO, du FMI au ComitĂ© Olympique :lâanglais et le français. Seules, ces deux langues sont prĂ©sentes sur les cinq con-tinents. Elles seules disposent vĂ©ritablement du statut international, un statutcapital dans la compĂ©tition Ă©conomique, politique et, a fortiori culturelle, du globe.Ă lâimage de feu le systĂšme bipolaire sĂ©crĂ©tĂ© au plan gĂ©opolitique par lâaprĂšsYalta, on peut souligner avec force la permanence dâun partage linguistique dumonde, perçu au plan des comportements, entre la langue de Shakespeare (ouplutĂŽt celle de lâOncle Sam) dâune part, la langue de MoliĂšre, dâautre part.
Lâanglo-amĂ©ricain est le vĂ©hicule privilĂ©giĂ© des Ă©changes internationaux :reflet sĂ©culaire de lâhĂ©ritage de lâEmpire britannique (Commonwealth) et, plusrĂ©cemment, de lâimpact Ă©conomique et politique de la superpuissance nord-amĂ©ricaine, la langue anglaise et son avatar, lâanglo-amĂ©ricain, constituentle premier outil de la communication internationale « classique » (Ă©changescommerciaux, transferts de technologies, systĂšmes audiovisuels).
Mais si 340 millions (seulement) de personnes partagent lâanglais commelangue dâusage sur la planĂšte â quatre fois moins que le chinois â, le rĂŽle rĂ©elde lâanglais est sans commune mesure avec ces donnĂ©es chiffrĂ©es.
VĂ©hicule politique et commercial, lâimpĂ©rialisme de lâanglo-amĂ©ricain setraduit aussi par un processus, frĂ©quemment dĂ©noncĂ©, dâinvasion culturelle.Lâanglais devient lâoutil quasi exclusif du monde scientifique. La passivitĂ©,voire la rĂ©signation, des scientifiques de langue française Ă lâĂ©gard de lâan-glo-amĂ©ricain confine parfois au pathĂ©tique. Il y a quelques annĂ©es, lâAcadĂ©miefrançaise des Sciences dĂ©cidait lâemploi de lâanglais dans ses compte-rendus :« Reconnaissant le rĂŽle essentiel de lâanglais dans les communications inter-nationales, spĂ©cialement dans les sciences, lâAcadĂ©mie a dĂ©cidĂ© de donnerune place beaucoup plus importante Ă lâanglais en favorisant les auteurs accep-tant de fournir une « abridged english version » de leur texte (sic). Plus rĂ©vĂ©la-teur encore : en 1970, 70 % des articles rĂ©digĂ©s par les scientifiques quĂ©bĂ©coislâĂ©taient en langue anglaise ; plus de 80 % Ă lâaube de lâan 2000.
ParallÚlement à la renaissance officielle de la Francophonie depuis quaranteans, le français semble toutefois regagner du terrain grùce à son implantationsur les cinq continents. Mais la progression dûment constatée du nombre delocuteurs de langue française est surtout le reflet direct de la poussée démo-graphique de certaines nations et singuliÚrement des pays africains.
Au-delĂ de ce « combat » entre français et anglo-amĂ©ricain, le monde con-temporain se caractĂ©rise par un paysage linguistique de plus en plus com-plexe. Certes, la plupart des Ătats ont tout naturellement tendance Ă ĂȘtre
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unilingues, quâils soient « mono-ethniques ou pluri-ethniques » : la langue« nationale » constitue depuis lâaube des temps modernes le ciment de lâu-nitĂ© dâun pays. Mais, en 2007, sur 190 Ătats souverains membres de lâONU,38 disposaient de deux langues officielles, et 13 de plus de deux.
BILINGUISME PAR JUXTAPOSITION
ET BILINGUISME PAR SUPERPOSITION
Le bilinguisme par juxtaposition : Câest notamment le cas de la Belgique oĂč, aprĂšs un siĂšcle de tensions(loin dâĂȘtre apaisĂ©es) les rĂ©formes constitutionnelles de la derniĂšre dĂ©-cennie reconnaissent trois types dâentitĂ©s : trois « rĂ©gions » (flamande,wallonne, et bruxelloise), trois « communautĂ©s culturelles » (nĂ©erlandaise,française et allemande) et cinq « conseils de communautĂ©s » : ces rĂ©formesjuxtaposent des ensembles territoriaux unilingues, sĂ©parĂ©s par desfrontiĂšres linguistiques. Câest aussi lâexemple de la ConfĂ©dĂ©ration helvĂ©-tique (quatre langues officielles depuis 1938 : le français, lâallemand,lâitalien et le romanche du canton des Grisons) ; ou celui du Canada oĂč,toutefois, depuis 1980, le bilinguisme officiel, faute de vĂ©ritable consen-sus de la part des anglophones, est comme noyĂ© dans une politique fĂ©dĂ©-rale de multiculturalisme thĂ©oriquement destinĂ© Ă permettre lâexpressiondes autres groupes linguistiques.Le bilinguisme par superposition :Câest notamment le cas de la FĂ©dĂ©ration de Russie, hĂ©ritiĂšre de lâURSS,oĂč toutes les langues parlĂ©es sous le rĂ©gime soviĂ©tique ont servi de fon-dements aux « nationalitĂ©s ethniques » ; ou celui de la Chine (56 « na-tionalitĂ©s »), de lâUnion Indienne (31 « Ă©tats linguistiques »), dâun certainnombre dâĂtats africains (qui ont conservĂ© comme langue officielle cellede lâancienne puissance coloniale et oĂč, Ă la notable exception du swahilien Tanzanie, au Kenya ou en Ouganda, les langues vernaculaires y sonttrop nombreuses pour pouvoir assumer le tĂŽle de langue nationale).Beaucoup plus original : le cas de lâIrlande : depuis lâadoption de la Cons-titution de 1937, lâEire dispose dâune seule langue officielle, le gaĂ«lique.Mais la « celtisation » de la rĂ©publique reste trĂšs faible et plus des troisquarts de ses habitants ne parlent, aujourdâhui, que lâanglais.Bilinguisme par juxtaposition ou par superposition contribuent Ă la com-plexitĂ© des situations rĂ©gionales pour plus de la moitiĂ© de la populationde la planĂšte. Source dâenrichissement au plan des Ă©changes ? Peut-ĂȘtre.Source de tensions et de conflits latents ou ouverts ? Plus sĂ»rement.
Mais la francophonie aujourdâhui ne se dĂ©finit pas seulement au regard dufrançais, sinon comment expliquer lâintĂ©rĂȘt que lui portent nombre dâEtats non
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francophones ? Par-delĂ la nĂ©cessitĂ© de la pluralitĂ© des langues, les organi-sations de la sociĂ©tĂ© civile francophone se sont naturellement intĂ©ressĂ©es Ă la prĂ©servation de la diversitĂ© culturelle et se sont mobilisĂ©es sur ce thĂšme.Ă une Ă©poque oĂč prĂ©dominent rationalisation Ă©conomique et standardisa-tion culturelle, la francophonie aurait pour mission de faire prĂ©valoir sur laplanĂšte la pluralitĂ© et la diversitĂ© qui doivent continuer de la caractĂ©riser :diversitĂ© des identitĂ©s nationales, des cultures politiques et juridiques, desvaleurs sociales. Encore faut-il sâentendre sur ce terme de diversitĂ©. Lâaccordpour sâen rĂ©clamer est dâautant plus facile Ă rĂ©aliser quâil sâagit de dĂ©noncerune influence extĂ©rieure considĂ©rĂ©e comme intrusive. Ainsi, sâagissant de laDĂ©claration de Bamako sur la diversitĂ© culturelle, il est Ă©vident que son Ă©la-boration a Ă©tĂ© rendue plus aisĂ©e par le refus, sur lequel tous sâaccordent, delâhĂ©gĂ©monie amĂ©ricaine dans le domaine des mĂ©dias. La diversitĂ© culturelleâ terme parfois prĂ©fĂ©rĂ© Ă celui dâexception culturelle, trop usitĂ© par la diplo-matie française â peut se rĂ©aliser Ă travers lâutilisation de la langue françaiseconsidĂ©rĂ©e comme un outil et certainement pas comme un but en soi. Dansle mĂȘme temps, un pays comme la France se met en porte Ă faux lorsquâil sefait le dĂ©fenseur Ă lâinternational dâune pluralitĂ© linguistique quâil combatdepuis des siĂšcles Ă lâintĂ©rieur de son propre territoire. Dâautres pays, ayantacquis leur indĂ©pendance depuis quelques dĂ©cennies, ont pu ĂȘtre tentĂ©s decommettre la mĂȘme erreur et de combattre leurs langues vernaculaires. UneĂ©tude rĂ©cente dont Le Monde sâest fait lâĂ©cho (3 octobre 2009) aboutit Ă la conclu-sion que, sâil existe 6000 Ă 7000 langues diffĂ©rentes sur la planĂšte, beaucoupsont en voie de rĂ©sorption, parlĂ©es par des communautĂ©s si peu nombreuses,Ă©touffĂ©es dans des ensembles si importants quâil en disparaĂźtrait de lâordredâune vingtaine par an. Sans que lâOIF puisse prĂ©tendre ĂȘtre en mesure dâas-surer une survie Ă des idiomes trop limitĂ©s, il est clair quâelle se veut commemoins au service du français que du maintien dâune pluralitĂ© linguistique. LapluralitĂ© se prĂ©sente ici Ă la fois comme une donnĂ©e et comme une valeur. Danscette perspective, la francophonie se rĂ©signerait Ă nâavoir quâune identitĂ©faible en ce quâelle nâimplique pas de rĂ©duction des diffĂ©rences.
Les Ătats francophones
Les soixante-dix Ătats et gouvernements francophones ont en communune triple diversitĂ© : spirituelle, câest-Ă -dire le sentiment dâappartenir Ă unemĂȘme communautĂ©, cette solidaritĂ© qui naĂźt du partage des valeurs communesaux divers individus et communautĂ©s francophones ; gĂ©ographique, câest-Ă -dire lâensemble des peuples, des hommes et des femmes dont la langue, mater-
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nelle, officielle, courante ou administrative, est le français ; politique enfin,puisque tous les types de rĂ©gimes politiques, tous les niveaux de libertĂ© sontreprĂ©sentĂ©s. Au-delĂ de cette diversitĂ©, les Ătats et gouvernements fran-cophones ont fait passer la francophonie dâun mouvement linguistique et cultu-rel Ă une rĂ©alitĂ© gĂ©opolitique, une zone dâinfluence (dont le pĂ©rimĂštre restedâailleurs Ă dĂ©terminer). Dans ce contexte, quâattendent les Ătats membresde lâOrganisation internationale de la Francophonie ? NĂ©e dans les annĂ©es1970, la Francophonie rĂ©pond-t-elle aux attentes de ses membres en ce dĂ©butdu XIXe siĂšcle ?
Lâincertitude sur ce point, comme sur lâĂ©volution institutionnelle de lâOIF,nâempĂȘche pas que, lors de chacun des sommets successifs, le nombre demembres augmente. La Francophonie sĂ©duit. LâOIF regroupe dĂ©jĂ 70 Ătatset gouvernements (53 membres, 3 associĂ©s et 14 observateurs), ce qui lui donneun poids non nĂ©gligeable sur la scĂšne mondiale. Les pays francophonessont membres des Nations unies et de ses institutions spĂ©cialisĂ©es. Les opĂ©ra-teurs francophones ont un statut reconnu par certaines de ces derniĂšres, tellelâUNESCO. Plusieurs Ătats francophones exercent une influence au sein duFMI et de la Banque mondiale. La France et le Canada font partie du G8. Lespays francophones reprĂ©sentent la moitiĂ© des membres de lâUnion euro-pĂ©enne, et sont nombreux parmi les pays ACP partenaires. Le Canada est lâundes trois membres de lâALENA. La proportion de pays francophones et« francisants » est importante au sein de lâUnion africaine, de la Ligue arabeet de la Commission de lâOcĂ©an indien. LâAUF entretient des bureaux rĂ©gio-naux dans toutes les parties du monde⊠Une Ă©tonnante vitalitĂ© qui ne re-pose ni sur lâobligation, ni sur des pressions, ni sur des intĂ©rĂȘts matĂ©riels. Uneillustration en a Ă©tĂ© lâĂ©largissement de lâOIF consĂ©cutif Ă lâeffondrement dubloc communiste ; lâarrivĂ©e rapide et massive des Ătats dâEurope centrale etorientale au sein des organisations rĂ©gionales « de lâOuest » â Union delâEurope occidentale, Organisation du TraitĂ© de lâAtlantique Nord, Union euro-pĂ©enne â sâest accompagnĂ©e pour beaucoup dâentre eux dâune adhĂ©sion Ă laFrancophonie au point quâils reprĂ©sentent dĂ©sormais la majoritĂ© absolue deses membres europĂ©ens ; leurs adhĂ©sions ont permis Ă lâorganisation de con-naĂźtre un accroissement spectaculaire du nombre de ses membres au coursdes annĂ©es 1990. Il ne semble pas quâils prĂ©sentent aujourdâhui un front com-mun dans les enceintes francophones, mais sâils y parvenaient, leur influencepolitique et normative pourrait ĂȘtre considĂ©rable.
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DATE DâADHĂSION Ă LA FRANCOPHONIE PAR RĂGION
(56 Ătats et 14 observateurs)
Afrique centraleBurundi ______________________ 1970Cameroun ____________________ 1991
(associé depuis 1975)Centrafrique ___________________ 1973Congo ________________________ 1981Congo RD _____________________ 1977Gabon ________________________ 1970Guinée équatoriale _____________ 1989Rwanda ______________________ 1970Sao Tomé et Principe ___________ 1999Tchad _________________________ 1970
Afrique de lâEst et OcĂ©an indien Comores ______________________ 1977Djibouti _______________________ 1977Madagascar ___________________ 1970Maurice _______________________ 1970Mozambique ** ________________ 2006Seychelles _____________________ 1976
Afrique du Nord et Moyen-Orient Egypte ________________________ 1983Liban _________________________ 1973Maroc ________________________ 1981Mauritanie ____________________ 1980Tunisie _______________________ 1970
Afrique de lâOuest BĂ©nin _________________________ 1970Burkina Faso __________________ 1970Cap-Vert ______________________ 1996CĂŽte dâIvoire __________________ 1970Ghana * _______________________ 2006GuinĂ©e _______________________ 1981GuinĂ©e Bissau _________________ 1979Mali __________________________ 1970Niger _________________________ 1970SĂ©nĂ©gal _______________________ 1970Togo __________________________ 1970
** Membres associés** Observateurs.
EuropeAlbanie _______________________ 1999Andorre _______________________ 2004Autriche ** ____________________ 2004Belgique** _____________________ 1970Bulgarie _______________________ 1993Chypre * ______________________ 2006Communauté française de Belgique ____________________ 1980Croatie ** ______________________ 2004Ex-République Yougoslave de Macédoine __________________ 2001France ________________________ 1970GrÚce _________________________ 2004Hongrie ** _____________________ 2004Lettonie ** _____________________ 2008Lituanie ** _____________________ 1999Luxembourg ___________________ 1970Moldavie ______________________ 1996Monaco _______________________ 1970Pologne ** _____________________ 1997République TchÚque ** __________ 1999Roumanie _____________________ 1993Serbie ** _______________________ 2006Slovaquie **____________________ 2002Slovénie ** _____________________ 1999Suisse _________________________ 1996Ukraine ** _____________________ 2006
Amérique-CaraïbesCanada________________________ 1970Canada Nouveau-Brunswick_____ 1977Canada Québec ________________ 1971Dominique ____________________ 1979Haïti __________________________ 1970Sainte-Lucie ___________________ 1981
Asie-PacifiqueArménie * _____________________ 2008Cambodge_____________________ 1993Géorgie ** _____________________ 2004Laos __________________________ 1991Thaïlande ** ___________________ 2008Vanuatu _______________________ 1979Vietnam _______________________ 1970
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Reste Ă sâinterroger avec rĂ©alisme et objectivitĂ© sur les prioritĂ©s des Ătats,par rapport Ă lâorganisation francophone, comme par rapport Ă des organisa-tions plus anciennes et mieux structurĂ©es. Il faut sâinterroger sur lâidentitĂ© fran-cophone et sur lâexistence Ă©ventuelle dâautres intĂ©rĂȘts communs que la langue,la culture et des valeurs politiques liĂ©es Ă la dĂ©mocratie et aux droits delâhomme. En rĂ©alitĂ©, chaque Ătat membre a ses propres intĂ©rĂȘts et ses motiva-tions spĂ©cifiques pour adhĂ©rer Ă la Francophonie. Les Ă©lĂ©ments communs sontparfois difficiles Ă repĂ©rer pour certains pays, tels par exemple lâAutriche, ob-servateur depuis 2004, et la ThaĂŻlande qui a demandĂ© le mĂȘme statut en 2008,et sans que lâĂ©vocation de ces deux nations ait aucun caractĂšre de stigmatisa-tion. Ce nâest pas leur faire insulte que de constater quâil est des gouverne-ments qui utilisent la Francophonie en termes dâalternative, par exemple pourfaire contrepoids Ă lâinfluence allemande en Europe centrale ou anglo-saxonneen Asie. Des motivations comparables peuvent pousser les Ătats lusophonesĂ se rapprocher de la Francophonie. Pour tous enfin, câest un moyen de fairepiĂšce au dĂ©sĂ©quilibre de la rĂ©partition des puissances militaire, politique etĂ©conomique entre les Ătats. Lâaffirmation sur la scĂšne internationale dâuneseule puissance hĂ©gĂ©monique incite ses dirigeants Ă contester le principe fon-damental de la structure institutionnelle crĂ©Ă©e en 1945 : la coopĂ©ration danstous les domaines de la vie internationale et plus particuliĂšrement la gestioncollĂ©giale de la sĂ©curitĂ© collective. Une rĂšgle essentielle du droit internatio-nal se trouve ainsi mise ouvertement en cause : celle de lâĂ©galitĂ© souverainedes Ătats. Les conditions illĂ©gales du bombardement de la Serbie et du Koso-vo, ainsi que de lâentrĂ©e des troupes nord-amĂ©ricaines en Irak ne peuvent querenforcer les inquiĂ©tudes de ceux qui prĂ©fĂšrent la situation â mĂȘme incer-taine â de lâĂ©quilibre des forces Ă celle de la sĂ©curitĂ© â illusoire â Ă lâombredâun empire. La plupart des Ătats francophones en font partie et cela expliquelâattachement de lâorganisation aux idĂ©es de diversitĂ© et de coopĂ©ration : desidĂ©es qui trouvent une application Ă©vidente dans le domaine culturel puis-quâelles sont le plus sĂ»r moyen de combattre lâappauvrissement linguistiquedans un contexte mondialisĂ© et uniformisateur ; mais au-delĂ des repĂšres etdu patrimoine culturels, elles sont essentielles pour structurer lâensemble dela vie internationale.
Les Ătats francophones y sont dâautant plus enclins que les obligations sontrares et la contrainte inexistante au sein de la Francophonie. Ainsi, cette fran-cophonie institutionnelle venant couronner des initiatives spĂ©cifiques remon-tĂ©es de la sociĂ©tĂ© civile (dans les domaines de lâenseignement des langues,de lâĂ©change dâinformations et de programmes entre mĂ©dias, dâopĂ©rationscommunes dans les domaines des formations et de la recherche universitaires,des contacts entre Ă©lusâŠ) permet dans une certaine mesure aux Ătats de
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rĂ©cupĂ©rer progressivement la mise. Il faut souligner que, dĂšs les indĂ©pen-dances, les autoritĂ©s constitutionnelles placĂ©es Ă la tĂȘte des nations dâAfriquenouvellement indĂ©pendantes sâĂ©taient employĂ©es Ă chercher les meilleuresstructures pour dĂ©velopper des actions communes entre elles et avec laFrance, sur les terrains culturels, Ă©conomiques et politiques. Pour sâen teniraux organisations les plus importantes, il y eut successivement, au cours desannĂ©es 1960, dâabord lâUnion africaine et malgache (UAM), puis lâOrganisa-tion commune africaine et malgache (OCAM). CâĂ©tait une francophonie quine disait encore son nom mais qui a prĂ©cĂ©dĂ© et prĂ©parĂ© lâAgence de coopĂ©ra-tion culturelle et technique entre pays utilisant le français. Dans cette perspec-tive, une interprĂ©tation cynique de lâĂ©volution des structures actuelles de lâOIFconduirait Ă soutenir que le rapport de forces aujourdâhui fait figure de re-vanche des Ătats, dĂ©possĂ©dĂ©s pendant quelques dizaines dâannĂ©es du con-trĂŽle effectif de lâinstitution francophone.
La Francophonie
Il faut concĂ©der dâemblĂ©e que la Francophonie est une organisation aty-pique.
Cet ensemble est atypique car les gouvernements des 21 Ătats qui signenten 1970 Ă Niamey le traitĂ© fondant lâAgence de coopĂ©ration culturelle et tech-nique (ACCT) ont le projet de crĂ©er un simple organe de coopĂ©ration culturelleet non une organisation internationale. Une longue pĂ©riode dâincertitude vadâailleurs durer jusquâĂ ce que le PrĂ©sident Mitterrand fasse passer un capĂ lâorganisation en organisant la premiĂšre « confĂ©rence des chefs dâĂtat et degouvernement des pays ayant le français en partage », mieux connue sousle nom de « sommet », en 1986 Ă Paris ; lâACCT compte alors 42 membres etles thĂšmes traitĂ©s portent sur les questions Ă©conomiques et de coopĂ©ration.Ă partir de la confĂ©rence de QuĂ©bec (1987), les sommets auront lieu rĂ©guliĂšre-ment tous les deux ans : en 1989, Ă Dakar, le sommet dĂ©cide notamment lacrĂ©ation de lâuniversitĂ© internationale de langue française Senghor dâAlexan-drie ; en 1991, Ă Paris, la Francophonie est institutionnalisĂ©e avec la crĂ©ationdâun conseil permanent de la Francophonie composĂ© de reprĂ©sentants deschefs dâĂtat et de gouvernement auprĂšs des instances francophones ; en 1997,Ă Hanoi, le sommet fait franchir Ă la francophonie une Ă©tape supplĂ©mentaireavec la crĂ©ation de lâAgence intergouvernementale de la Francophonie (AIF),dirigĂ©e par un secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral (Boutros Boutros-Ghali est Ă©lu secrĂ©taire gĂ©-nĂ©ral de la Francophonie pour quatre ans ; Abdou Diouf le remplace en 2002 ;il est rĂ©Ă©lu en 2006) ; en 2004, le Xe sommet de Ouagadougou dĂ©cide une
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rĂ©forme institutionnelle dâenvergure qui se traduit lâannĂ©e suivante par la crĂ©a-tion de lâOrganisation internationale de la Francophonie (OIF) qui remplacelâAIF et lâACCT. Mais cette organisation intergouvernementale est tout Ă faitdiffĂ©rente de ses homologues car elle ne repose pas sur un traitĂ© (sauf Ă consi-dĂ©rer â comme le font ses membres â que le TraitĂ© de Niamey est toujoursun fondement valide : ce qui est juridiquement contestable).
Cet ensemble est Ă©galement atypique parce quâen plus de sa mission na-turelle â la promotion de la langue française â la Francophonie contribue depuisles annĂ©es 1990 Ă lâeffort des Nations unies en faveur de la dĂ©mocratie et desdroits de lâhomme : par ses prises de position (DĂ©claration de Bamako, DĂ©-claration de Saint-Boniface), mais aussi par ses programmes dâaccompagne-ment des processus Ă©lectoraux, de consolidation de lâĂtat de droit, de promotionde la culture des droits de lâhomme, et de coopĂ©ration juridique et judiciaire.De plus, la Francophonie a liĂ© rĂ©cemment la question du respect de la dĂ©mo-cratie Ă celle de la « sĂ©curitĂ© humaine » et de la prĂ©vention des conflits (DĂ©-claration de Saint-Boniface). Pour comprendre ce processus, il faut revenir auxorigines de lâorganisation. Le dĂ©but de lâinstitutionnalisation de la Fran-cophonie sâest faite dans les annĂ©es 1970 et 1980, donc dans une pĂ©riode mar-quĂ©e par des tensions entre lâEst et lâOuest. Dans cette perspective et mĂȘmesi elles se voulaient autant que possible au-dessus de la mĂȘlĂ©e, mais ne fĂ»t-ceque par le rĂŽle quây jouaient le Canada-QuĂ©bec et la France, les structures fran-cophones apparaissaient comme liĂ©es au camp occidental, relais pour les va-leurs de ce dernier auprĂšs dâun certain nombre de gouvernements qui nâyauraient peut-ĂȘtre pas spontanĂ©ment adhĂ©rĂ©. Dans les annĂ©es 1990, avec lafin de lâĂ©quilibre bipolaire, la Francophonie a accompagnĂ© et parfois prĂ©cĂ©dĂ©un grand mouvement dâadhĂ©sion Ă des valeurs quasi mondiales, mĂȘlantexhortation au respect des droits de lâhomme, adhĂ©sion Ă la dĂ©mocratie et exal-tation des libertĂ©s dites de la troisiĂšme gĂ©nĂ©ration, au premier rang desquellescelles qui impliquent la dĂ©fense de lâenvironnement. Leur spĂ©cificitĂ© tient Ă lâidentitĂ© de leur titulaire qui est la personne humaine envisagĂ©e indĂ©pendam-ment de son rattachement Ă un Ătat (alors que traditionnellement lâindividusur le plan international nâa dâexistence que par le truchement de lâĂtat dontil dĂ©tient la nationalitĂ©) ; leur caractĂšre « objectif » entraĂźne une sĂ©rie de consĂ©-quences juridiques â par exemple le dĂ©veloppement de la justice internationaleĂ partir de 1993 â mais aussi politiques, notamment sur lâĂ©mergence de ce quâilest convenu dâappeler la sociĂ©tĂ© civile internationale. Cette question devait nĂ©-cessairement concerner la Francophonie, comme en tĂ©moigne, depuis lâadop-tion de la DĂ©claration de Bamako, ses affirmations rĂ©pĂ©tĂ©es sur lâimportancedes droits de lâhomme et de lâĂtat de droit et le lien Ă©tabli avec la dĂ©mocra-tie. La Francophonie contribue Ă lâeffort de promotion de la dĂ©mocratie qui
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est une prioritĂ© de lâOrganisation des Nations unies depuis les annĂ©es 1990,par ses prises de position3 mais aussi par ses programmes dâaccompagnementdes processus Ă©lectoraux, de consolidation de lâĂtat de droit, de promotionde la culture des droits de lâhomme, et de coopĂ©ration juridique et judiciaire.Ce dĂ©veloppement de la Francophonie sur la scĂšne politique internationaleimplique de se poser une sĂ©rie de questions relatives Ă ses prises de position :quelle est la dĂ©finition des notions de « dĂ©mocratie », de « droits de lâhomme »et dâ« Ătat de droit » dans les dĂ©clarations de la Francophonie ? Existe-t-il uneconception francophone originale par rapport Ă celles dâautres institutionsinternationales, dont lâOrganisation des Nations unies ?
Dans le mĂȘme temps, un deuxiĂšme Ă©lĂ©ment marquant dans lâĂ©volutionde la scĂšne internationale est lâaffirmation du principe du non recours Ă laforce. Il est bien sĂ»r possible de confronter ironiquement cette ambitionavec le nombre de conflits qui se seront dĂ©clarĂ©s ou auront durĂ© depuis lesannĂ©es 1970 ; mais il paraĂźt plus important de souligner que la Cour inter-nationale de justice a reconnu en 1986, dans lâaffaire opposant le Nicaraguaaux Ătats-Unis dâAmĂ©rique, que le principe a dĂ©sormais gagnĂ© le champ dudroit international, et que les Ătats sâaccordent Ă lui reconnaĂźtre un caractĂšreobligatoire, voire impĂ©ratif, en dĂ©pit de la grande frĂ©quence de ses violations.Son statut actuel au sein de lâordre juridique international ne pouvait lais-ser la Francophonie â dĂšs lors quâelle souhaitait passer dâune mission culturelleĂ un rĂŽle plus politique â insensible : ainsi sâexplique la DĂ©claration de Saint-Boniface et la volontĂ© Ă©noncĂ©e par lâorganisation de contribuer au maintiende la paix et de la sĂ©curitĂ© internationales. Certains sâinterrogent â de façonlĂ©gitime â sur la spĂ©cificitĂ© que la Francophonie pourrait Ă bon droit revendi-quer, dans cette ambiance de consensus mondial au moins apparent, autourdâun certain nombre de principes communs. Actuellement, la Francophoniese garde de se mĂȘler de tels problĂšmes autrement que par des prises de posi-tion figurant notamment dans les dĂ©clarations finales de ses Sommets tenustous les deux ans. Pourtant une rĂ©flexion sur les rapports entre Francopho-nie et relations internationales ne peut Ă©chapper Ă une interrogation, ne fĂ»t-ceque sous la forme dâune pierre dâattente, sur ce que pourrait ĂȘtre la place etle rĂŽle de la Francophonie dans un monde oĂč tensions, crises et conflits ten-dent Ă se multiplier. Compte tenu du caractĂšre insaisissable des rapports deforce sur bien de territoires, devra-t-elle prudemment sâen dĂ©sintĂ©resser,sauf sous forme de vaines admonestations adressĂ©es aux belligĂ©rants les pluscriminels ? Peut-on au contraire souhaiter, voire espĂ©rer que la souplesse de
_________________________3. Notamment Ă travers la DĂ©claration de Bamako et la DĂ©claration de Saint-Boniface.
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ses structures, la multiplicitĂ© de ses composantes et lâabsence de soupçon detentation impĂ©rialiste puissent faire reconnaĂźtre la Francophonie commeplus Ă mĂȘme que dâautres Ă apporter une contribution au retour Ă la paix surcertains territoires ?
Ces questionnements ne doivent toutefois pas faire perdre de vue lâessen-tiel : la francophonie pose la question du statut de lâindividu dans les relationsinternationales ; dans lâidĂ©al, il lui appartiendrait mĂȘme de lây rĂ©introduirechaque fois quâil en est absent. En mĂȘme temps, lâexistence dâune francophonietransnationale se heurte au constat que, plus lâorganisation sâengage sur leterrain des relations internationales, plus elle se rapproche de lâintergouverne-mental et plus elle risque de sâĂ©loigner de la sociĂ©tĂ© civile. Personne nâa in-tĂ©rĂȘt Ă ce que cette Ă©volution soit poussĂ©e trop loin dans la mesure oĂč ce sontles dynamiques de la francophonie qui rendent en grande partie lĂ©gitime unprojet inter-Ă©tatique en Francophonie.
La problĂ©matique Ă mettre en Ćuvre pour rĂ©aliser ce qui serait une vĂ©ri-table « gĂ©opolitique de la Francophonie » peut ĂȘtre schĂ©matisĂ©e sous laforme dâun triangle dont les trois sommets seraient : les Ătats (Ă©cartelĂ©sentre opportunitĂ© et volontĂ© politique), la Francophonie (câest-Ă -dire conçuecomme une organisation et confrontĂ©e au problĂšme de sa lĂ©gitimitĂ©) et la fran-cophonie (donc prise comme un Ă©lĂ©ment de la sociĂ©tĂ© civile et qui ne sauraitsâaffirmer quâen prĂ©servant soigneusement sa pluralitĂ©). Ce schĂ©ma se veutopĂ©ratoire, donc contribuant Ă apporter une rĂ©ponse Ă un certain nombre dequestions, et dâabord Ă celle des rapports entre dâune part lâopportunitĂ© oula volontĂ© politique et dâautre part la lĂ©gitimitĂ© institutionnelle et la plurali-tĂ© des rĂ©fĂ©rences identitaires. Autrement dit et pour prĂ©senter lâinterrogationsous une forme plus dĂ©veloppĂ©e : quâen est-il de la pluralitĂ© par rapport Ă la volontĂ© ou Ă lâopportunitĂ© politique et par rapport Ă la lĂ©gitimitĂ© et quâenest-il de la lĂ©gitimitĂ© par rapport Ă la pluralitĂ© et Ă la volontĂ© ou Ă lâopportu-nitĂ© politique ? Sâil est bien de la vocation de la Francophonie de placer lâindi-vidu au centre des relations internationales, se pose la question de savoir siles enjeux de la francophonie peuvent mobiliser les politiques nationales etles mettre au service de cette derniĂšre.
Francophonie
lĂ©gitimitĂ©dâune instance internationale
(niveau inter-Ă©tatique)
Ătats
volonté ou opportunitédes politiques nationales
(niveau Ă©tatique)
francophonie
pluralité des références identitaires
(niveau transnational et intra-Ă©tatique)
PREMIĂRE PARTIE
MĂ©thodologie pluridisciplinaire
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Ce manuel sâinspire de lâouvrage des professeurs Ădith Jaillardon etDominique Roussillon Outils pour la recherche juridique. MĂ©thodologie de la thĂšsede doctorat et du mĂ©moire de master en droit. Il consiste â comme lâont fait lesauteurs prĂ©citĂ©s, mais dans les domaines du droit international, des relationsinternationales et de la gĂ©opolitique â Ă proposer aux jeunes chercheurs desmodes dâorganisation rigoureuse et de solides mĂ©thodes de travail. Il prĂ©senteles Ă©tapes de la recherche susceptibles dâapporter une aide aussi bien pourla prĂ©paration dâun mĂ©moire de master que dâune thĂšse en vue de lâobten-tion du doctorat, ou pour lâĂ©laboration dâun article pouvant ĂȘtre lâobjet dâunepublication dans une revue scientifique.
Comme les auteurs prĂ©citĂ©s, il faut dâemblĂ©e affirmer quâen matiĂšre derecherche, il nâexiste pas une seule mĂ©thode possible et chacun doit se cons-truire la sienne ; de ce fait, personne ne peut prĂ©tendre enseigner de façonindiscutable la mĂ©thode permettant dâĂ©laborer et de rĂ©diger une thĂšse (ou unmĂ©moire). Mais il existe certains prĂ©ceptes et principes permettant dâĂ©viterde commettre des erreurs. Ces prĂ©ceptes et principes pratiques valent danstous les domaines, pour chacune des phases du travail de recherche : explo-ration, documentation, rĂ©flexion et rĂ©daction.
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CHAPITRE I.
Lâesprit de la recherche
Choisir de sâengager dans un travail de mĂ©moire de master ou de thĂšsede doctorat suppose prĂ©alablement dâavoir connaissance des difficultĂ©s dela tĂąche et des qualitĂ©s qui sont nĂ©cessaires pour les affronter avec succĂšs.
SECTION 1.La lucidité
Il faut dâabord savoir ĂȘtre honnĂȘte avec soi-mĂȘme sur ses propres capa-citĂ©s intellectuelles et son caractĂšre : le/la candidat(e) est-il (elle) capabledâĂ©crire quelques pages organisĂ©es sur un sujet donnĂ© ? A-t-il (elle) rĂ©digĂ©un travail de plusieurs dizaines de pages ? A-t-il (elle) la volontĂ© dâaller jus-quâau bout ? Le mĂ©moire de master et plus encore la thĂšse de doctorat reprĂ©-sentent en effet un travail lourd et long. Il est impĂ©ratif quâavant de se dĂ©cider,le/la candidat(e) prenne conscience du temps que va nĂ©cessiter la produc-tion dâun mĂ©moire (plusieurs mois) et dâune thĂšse (plusieurs annĂ©es). Peu-t-il (elle) consacrer lâessentiel de son temps pendant toute cette pĂ©riode Ă cettetĂąche ? Peut-il (elle) sâimposer une discipline de travail sur plusieurs moisou plusieurs annĂ©es ? La question vaut dâĂȘtre mĂ©ditĂ©e, non seulement dâunpoint de vue pratique (matĂ©riel, financier) mais aussi Ă©thique : en effet, le can-didat qui passe cinq, six annĂ©es â voire davantage â pour mener Ă bien le pro-jet de thĂšse aura ainsi « gelĂ© » un sujet qui aurait pu ĂȘtre traitĂ© par dâautresplus rapidement et mieux⊠Car la valeur dâun travail nâest pas forcĂ©mentproportionnelle au temps qui lui a Ă©tĂ© consacrĂ© : câest la qualitĂ© de lâĂ©crit quiest jugĂ©e au moment de la soutenance, et non le temps passĂ© Ă le prĂ©parer.
Ensuite, le choix du sujet est capital : parce que le candidat y consacreralâessentiel de son temps pendant plusieurs mois ou plusieurs annĂ©es ; maissurtout parce que ce choix conditionne la rĂ©ussite du projet professionnel pour-suivi Ă travers la thĂšse. Si elle a pour objectif lâorientation vers lâenseignementet la recherche, elle doit ĂȘtre un travail de rĂ©flexion thĂ©orique et dâanalyse ;si elle a pour objectif un emploi dans le secteur privĂ© ou le secteur public (ycompris international), le travail Ă rĂ©aliser sera vraisemblablement plus pra-tique et plus technique dans la prĂ©sentation et la rĂ©flexion sur les mĂ©canismes
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Ă©tudiĂ©s, portant sur un thĂšme de prĂ©fĂ©rence en liaison avec le secteur oĂč lâonsouhaite ĂȘtre embauchĂ©, donc susceptible dâintĂ©resser les employeurs poten-tiels. Le choix du sujet est donc un Ă©lĂ©ment capital du projet professionnel.Mais il est aussi un processus trĂšs personnel : il ne faut pas choisir un sujetuniquement pour des considĂ©rations dâopportunitĂ© professionnelle ; il fautĂȘtre passionnĂ© par son sujet. Si ce nâest pas le cas, il sera trĂšs difficile de lemener au bout. La premiĂšre des « Ă©tapes de la recherche » (voir plus loin) dĂ©critles conditions du choix dâun « bon » sujet. Ce choix suppose de ne pas se leur-rer sur ses propres possibilitĂ©s et sa volontĂ© de rĂ©ussir.
SECTION 2.La rigueur
Une fois entamĂ©e la recherche proprement dite, la qualitĂ© principaledâun(e) doctorant(e) est â outre la tĂ©nacitĂ© â sa capacitĂ© de maintenir un ni-veau Ă©levĂ© dâexigence. Il faut en effet beaucoup dâexigence dans la recherchedocumentaire Ă lâĂ©poque de lâordinateur et de lâInternet. Ce dernier est uneinĂ©puisable source dâinformations, mais aussi un invraisemblable bazar, no-tamment lorsquâil sâagit de questions internationales oĂč toutes sortes dâin-tervenants plus ou moins fiables et dĂ©sintĂ©ressĂ©s souhaitent sâimmiscer dansle dĂ©bat en y apportant des informations orientĂ©es. Il serait dommageable dene pas lâutiliser ; mais il faut le faire avec vigilance, en vĂ©rifiant toutes les infor-mations rĂ©coltĂ©es : en particulier la qualitĂ© de lâauteur, la nature du documentet la fiabilitĂ© du site. Et il faut le faire dans le cadre dâune dĂ©marche rĂ©flĂ©chieet organisĂ©e.
Le niveau dâexigence du candidat sâexprime Ă©galement au moment de larĂ©daction. Un conseil de base dans ce domaine : il ne faut pas hĂ©siter Ă com-mencer la rĂ©daction trĂšs tĂŽt, mĂȘme si les premiĂšres lignes ne seront sans doutepas dĂ©finitives. Trop dâĂ©tudiants ajournent la rĂ©daction (lâangoisse de lapage blanche), sous prĂ©texte de nâavoir pas fini la documentation (mais onne finit jamais une documentationâŠ), ou lâarrĂȘt du plan (mais le plan Ă©tabliau dĂ©but de la recherche sera sans cesse retouchĂ© et modifiĂ© par la suiteâŠ).Il faut au contraire procĂ©der de façon pragmatique et entamer la rĂ©dactiondâun chapitre, dâune section, voire dâun paragraphe (et peu importe la placede ce texte dans le mĂ©moire ou la thĂšse) dĂšs que la documentation recueil-lie permet de le faire. RĂ©diger quelques pages permet Ă lâauteur qui manquede confiance en ses capacitĂ©s de renforcer son assurance : ce qui nâest pas nĂ©gli-geable, mĂȘme si les inĂ©vitables remises en question ultĂ©rieures conduisentĂ corriger ces pages, voire Ă les refondre dans un texte diffĂ©rent. Car la
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rĂ©daction finale doit ĂȘtre soignĂ©e, du point de vue de la forme (style, ortho-graphe, ponctuation, prĂ©sentation des notes de bas de page ou de la biblio-graphie, etc.) et du fond (logique du raisonnement, pertinence des arguments,etc.).
NĂ©anmoins, le/la candidat(e) qui affronte ces difficultĂ©s nâest pas seul(e).Il (elle) bĂ©nĂ©ficie du soutien du directeur de thĂšse. En sâinscrivant en docto-rat, lâĂ©tudiant(e) signe en effet un contrat avec le directeur de recherche, dansle cadre fixĂ© par la charte des thĂšses (voir un modĂšle de charte des thĂšses enannexe). La charte des thĂšses dĂ©taille les droits et devoirs respectifs du doc-torant et du directeur lors des diffĂ©rentes Ă©tapes de la prĂ©paration dâune thĂšse(et mĂȘme aprĂšs la soutenance). De plus, lâĂ©tudiant intĂšgre une Ă©quipe de re-cherche et, plus largement, une Ă©cole doctorale, lieu dâencadrement pĂ©da-gogique des doctorants. FormĂ©es Ă partir dâune ou de plusieurs disciplinesvoisines, les Ă©coles doctorales comprennent les diffĂ©rents masters et lesĂ©quipes de recherche ou les laboratoires au sein desquels les doctorantseffectuent leurs recherches. Elles proposent des activitĂ©s spĂ©cifiques de for-mation mĂ©thodologique et des ateliers au cours desquels les thĂ©sards prĂ©-sentent lâĂ©tat de leur recherche aux autres doctorants. La recherche ne doiten aucun cas se dĂ©ployer comme une activitĂ© solitaire ; le partage et le dia-logue existent, ils sont mĂȘme indispensables pour faire avancer une rĂ©-flexion. Câest ainsi que se dĂ©veloppe entre les thĂ©sards une solidaritĂ© nĂ©e dela prise de conscience de problĂšmes communs constatĂ©s ensemble et de la com-paraison des solutions susceptibles dây ĂȘtre apportĂ©es, avec aussi une partdâĂ©mulation.
SECTION 3.La neutralité
Le niveau dâexigence doit se manifester aussi par rapport Ă lâapprochemĂ©thodologique : le travail produit doit ĂȘtre scientifique et non marquĂ© pardes orientations idĂ©ologiques. Le scientifique a pour mission dâobserver, dedĂ©crire, dâexpliquer les faits ou les situations, et non pas de les juger par rap-port Ă ses convictions personnelles : quâelles soient politiques, morales ouphilosophiques.
Comme tout individu, le chercheur a des prĂ©fĂ©rences personnelles, sansdoute ; de ce point de vue, on pourrait dire que lâobjectivitĂ© absolue nâexistepas : chacun est marquĂ© par ses expĂ©riences personnelles et ses propres ca-tĂ©gories de pensĂ©e. Le chercheur peut, bien sĂ»r, exprimer ses opinions si lesdĂ©veloppements le lui permettent et comme la dĂ©nomination mĂȘme de
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« thĂšse » y invite ; mais ces prises de position doivent toujours ĂȘtre argumen-tĂ©es scientifiquement. En dâautres termes, il faut bannir lâĂ©tude Ă charge, voirele pamphlet ; le travail prĂ©sentĂ© doit ĂȘtre honnĂȘte, câest-Ă -dire prĂ©senter lesdiffĂ©rentes facettes dâune situation ou les diffĂ©rents points de vue exprimĂ©ssur une question. Et si lâon choisit de privilĂ©gier lâun de ces points de vue, ilfaut expliquer les raisons qui motivent cette attitude.
Ce principe de neutralitĂ© semble aller de soi ; il nâest pourtant pas rare derelever dans des Ă©tudes « scientifiques » (articles ou ouvrages) des expres-sions qui trahissent les prĂ©jugĂ©s de lâauteur : le comportement de tel acteurest « malheureusement » en contradiction avec telle rĂšgle ; lâinterprĂ©tationfaite de tel texte est « regrettable ». Il sâagit lĂ de lâexpression de sentimentspersonnels qui ne peuvent faire lâobjet dâune discussion ou dâune rĂ©futationscientifique. Il faut donc les bannir et se limiter Ă constater, exposer, dĂ©mon-trer, sans fausser le raisonnement scientifique par lâexpression de sa propresubjectivitĂ©. La tentation est particuliĂšrement forte dans le domaine des Re-lations Internationales oĂč les prĂ©fĂ©rences personnelles et les prĂ©jugĂ©s peuventchercher une fausse justification dans une revendication dâappartenancenationale ou partisane qui serait mal placĂ©e dans un travail scientifique.
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CHAPITRE II.
LâĂ©thique de la recherche
Les exigences scientifiques et Ă©thiques de la recherche doctorale semblenta priori entretenir dâĂ©troites relations, alors quâelles se situent sur des niveauxdiffĂ©rents. En effet, lorsque lâĂ©thique ne suffit pas Ă rĂ©gler les comporte-ments, elle dĂ©bouche, quant Ă elle, sur le monde conflictuel du droit.
En ce qui concerne lâexigence scientifique, on pourrait trĂšs briĂšvement direquâelle signifie que le travail de recherche doctoral, assurĂ©ment, et celui deniveau master â dans une moindre mesure â repose sur des rĂšgles prĂ©ciseset rigoureuses de citation, sur la vĂ©rification systĂ©matique de la justesse dessources de « seconde main », sur lâanalyse la plus exhaustive possible desressources documentaires. Mais surtout, le travail doctoral a pour ambitionde produire un savoir inĂ©dit, car le doctorant doit offrir, avec la problĂ©ma-tique quâil a Ă©tablie, une lecture personnelle et nouvelle du sujet. La thĂšse nepeut jamais se rĂ©duire Ă une « Ćuvre » de compilation, aussi rĂ©ussie soit-elle.Entre la compilation et la thĂšse â mais pas nĂ©cessairement le mĂ©moire de mas-ter, mĂȘme de recherche â il nây a pas une diffĂ©rence de degrĂ© mais une diffĂ©-rence de nature.
La section de droit public du Comité français des universités, chargée dedélivrer la qualification préalable au recrutement des maßtres de conférences,a rendu publiques ses observations relatives à des dérives qui, en prenant uneampleur objectivement constatée, enlÚvent toute « scientificité » au travail doc-toral et relÚvent, par voie de conséquence, du domaine déontologique, voirejuridique dans le cas du plagiat.
RAPPORT ANNUEL DE LA SECTION DE DROIT PUBLIC
DU COMITĂ NATIONAL DES UNIVERSITĂS (EXTRAITS)
Montpellier, le 1er octobre 2009.
5°) Exigences dĂ©ontologiquesLa Section est au regret de devoir mettre en garde trĂšs formellement lescandidats contre la pratique, de moins en moins exceptionnelle, consis-tant pour un auteur Ă ne pas citer rigoureusement ses sources dâinfor-mation ou dâinspiration, certaines omissions pouvant relever de procĂ©dĂ©s
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non conformes Ă la dĂ©ontologie universitaire. Quelquefois mĂȘme, ellea dĂ» dĂ©plorer des cas plus ou moins caractĂ©risĂ©s de plagiat, qui consisteĂ recopier la lettre mĂȘme de ce qui a pu ĂȘtre Ă©crit antĂ©rieurement pardâautres auteurs, sans leur reconnaĂźtre, par des guillemets appropriĂ©s etpar une indication bibliographique convenable, la paternitĂ© des lignesen cause. Sans aller jusquâĂ ce point, il arrive trop souvent que les au-teurs, tout en citant leurs sources, les recopient plus ou moins textuelle-ment, mais sans utiliser les guillemets ou en les utilisant de maniĂšreponctuelle et parcimonieuse ; dans dâautres cas, pour se justifier implicite-ment â mais maladroitement â de ne pas recourir Ă cette conventiontypographique, ils sâappliquent Ă ne modifier que quelques mots dansla phrase dont ils ne sont pas les auteurs rĂ©els, citant simplement, en notesde bas de page, le nom des auteurs dont ils reprennent les propos, maisaussi, quelquefois, en oubliant de le mentionner ou en ne le faisantquâune seule fois, bien plus haut dans le texte, ou encore bien plus bas...Il est Ă peine nĂ©cessaire de souligner que ces pratiques sont inadmis-sibles et indignes dâuniversitaires, tout en desservant trĂšs fortement ceuxqui sây livrent...
Mais câest de lâĂ©thique de la recherche que nous voudrions parler pluslonguement ici. Plusieurs Ă©lĂ©ments participent, Ă des degrĂ©s divers, Ă la dĂ©fi-nition des comportements qui sont jugĂ©s acceptables dans lâunivers doctoral.
SECTION 1.Les relations entre le directeur de recherche
et le doctorant
Voici une question dĂ©licate, qui sâinscrit dans un processus nouveau,dynamique, de professionnalisation1. LâexpĂ©rience montre quâaucune direc-tion ne ressemble aux autres, car les sujets et les personnalitĂ©s des Ă©tudiantssont singuliers. La dimension psychologique des relations nâest pas nĂ©gligeableet des dĂ©bordements, de part et dâautre, peuvent se produire. Lorsquâune
_________________________1. Deux principes fondamentaux sont aujourdâhui reconnus dans la rĂ©glementation concernant
le doctorat : 1. le doctorat est une activitĂ© professionnelle ; 2. le doctorat doit permettre Ă sontitulaire dâexercer de nombreux mĂ©tiers Ă haute valeur ajoutĂ©e. ConsĂ©quence de ces principesfondamentaux, le doctorat sâinscrivant dans des enjeux qui dĂ©passent le simple couple doc-torant/encadrant, lâorganisation du doctorat dans la pratique doit ĂȘtre rĂ©gulĂ©e, et la chartedes thĂšses est ici le document de rĂ©fĂ©rence : Voir ConfĂ©dĂ©ration des Jeunes Chercheurs, Rap-port sur lâĂ©valuation des chartes des thĂšses des universitĂ©s françaises, Juin 2009.
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dissension survient, câest Ă lâĂ©tudiant dâexpliquer et de justifier ses positions.Lâenseignant-chercheur est dans une situation qui est objectivement plus favo-rable que celle de lâĂ©tudiant doctoral. Le premier fait partie dâun corps quiaura tendance, par un rĂ©flexe corporatiste, Ă le dĂ©fendre. Puis, il peut invo-quer le fameux principe dâindĂ©pendance des professeurs dâuniversitĂ© quisâentend de façon large2. Enfin, il nâest pas toujours aisĂ© dâĂ©tablir des manque-ments rĂ©els, au-delĂ de la qualification juridique, aux devoirs dâencadrement.
Depuis quelques annĂ©es, la jurisprudence administrative sâest consolidĂ©esur un terrain nouveau : celui des relations de direction de thĂšse portĂ©es enjustice. Ainsi, un candidat mĂ©content envers le ComitĂ© national des univer-sitĂ©s a plaidĂ© quâil nâavait pas bĂ©nĂ©ficiĂ© dâun « encadrement doctoral dignede ce nom » et le juge sâest interrogĂ© sur lâexistence dâune prĂ©tendue « fautede service dans lâencadrement de sa thĂšse » (Cour administrative dâappel,Marseille, 3 juillet 2008, n° 06MA01036). Il arrive que de telles plaintes soientjugĂ©es en faveur de lâĂ©tudiant. Ainsi, lors dâune affaire oĂč la thĂšse prĂȘte Ă ĂȘtresoutenue en 1998 donna lieu Ă un report non expliquĂ©. Le juge a estimĂ© quece report reposait sur des « considĂ©rations Ă©trangĂšres Ă lâapprĂ©ciation objec-tive que la directrice Ă©tait en droit de porter sur la valeur du travail ». Il a retenula faute de nature Ă engager la responsabilitĂ© de lâuniversitĂ© (Cour adminis-trative dâappel, Versailles, 18 octobre 2007, n° 05VE00800). Ăvidemment, detels cas extrĂȘmes, rarissimes au demeurant, doivent absolument ĂȘtre Ă©vitĂ©s.Des mĂ©canismes sont mis en Ćuvre pour les prĂ©venir. La vocation de la chartedes thĂšses est prĂ©cisĂ©ment de dĂ©finir a priori les obligations respectives desuns et des autres. Et puis, des pratiques dâexamen collectif sont mises en placedans les laboratoires de recherche et dans les Ă©coles doctorales, pour Ă©viterque le vis-Ă -vis, parfois trop personnalisĂ©, ne dĂ©bouche sur des mĂ©sententesdouloureuses.
Chacun doit prendre en compte lâĂ©tat dâesprit de lâautre : le directeur dethĂšse se met Ă la place du thĂ©sard pour lequel la rĂ©daction de la thĂšse devientune quasi-obsession pour des longues annĂ©es, la crainte dâune erreur qui pour-rait tout compromettre le poursuivant sans cesse, et sans lui donner ce con-fort de sâimaginer que lâon ne sâen prĂ©occupe pas autant que lui ; le thĂ©sardprend en compte le fait quâil nâest pas le seul solliciteur dâattention auprĂšsde son directeur de thĂšse et quâil est dâautres candidats dont il doit encadrerle travail mĂȘme si une rĂ©glementation relativement rĂ©cente limite le nombre
_________________________2. « le principe dâindĂ©pendance des professeurs de lâenseignement supĂ©rieur fait obstacle Ă
ce que le juge se prononce sur les apprĂ©ciations pĂ©dagogiques portĂ©es par un professeurde lâenseignement supĂ©rieur, directeur de thĂšse, sur la qualitĂ© du travail de son doctorant » :Cour administrative dâappel, Versailles, 18 octobre 2007, n° 05VE00800.
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dâinscriptions que chaque professeur peut accepter. En outre, un rapport tropfusionnel, voire affectif sur le plan intellectuel ne constitue pas forcĂ©ment labonne situation. Enfin, le directeur de thĂšse trouvera parfois une justificationa posteriori dâun suivi mesurĂ© dans la forte proportion de docteurs qui se sontmontrĂ©s extrĂȘmement pressants et prĂ©sents en phase dâĂ©laboration de la thĂšseet qui ne donnent plus aucun signe de vie, si fugace soit-il, une fois le titredĂ©livrĂ© et la nomination ou la promotion escomptĂ©e obtenue.
CHARTE DES THĂSES, UNIVERSITĂ DE LA RĂUNION, 2 JUIN 2009 (EXTRAITS)
2 â Sujet et faisabilitĂ© de la thĂšseLâinscription en thĂšse prĂ©cise le sujet, le contexte de la thĂšse et lâunitĂ©dâaccueil. Le sujet de thĂšse conduit Ă la rĂ©alisation dâun travail Ă la foisoriginal et formateur, dont la faisabilitĂ© sâinscrit dans le dĂ©lai prĂ©vu. Lechoix du sujet de thĂšse repose sur lâaccord entre le doctorant et le di-recteur de thĂšse, formalisĂ© au moment de lâinscription. Le directeur dethĂšse doit aider le doctorant Ă en dĂ©gager le caractĂšre novateur dansle contexte scientifique et sâassurer de son actualitĂ©. Le directeur de thĂšse,en collaboration avec le doctorant, dĂ©finit et rassemble les moyens Ă mettre en Ćuvre pour permettre la rĂ©alisation du travail (âŠ). Le doc-torant sâengage sur un temps et un rythme de travail. Il a vis-Ă -vis deson directeur de thĂšse un devoir dâinformation quant aux difficultĂ©s ren-contrĂ©es et Ă lâavancement de sa thĂšse. Il doit faire preuve dâinitiativedans la conduite de sa recherche dont il est le responsable.
3 â Encadrement et suivi de la thĂšseLe futur doctorant doit ĂȘtre informĂ© du nombre de thĂšses en cours quisont dirigĂ©es par le directeur quâil pressent. En effet, un directeur de thĂšsene peut encadrer efficacement, en parallĂšle, quâun nombre limitĂ© de doc-torants, sâil veut pouvoir suivre leur travail avec toute lâattention nĂ©ces-saire. Le doctorant a droit Ă un encadrement personnel de la part de sondirecteur de thĂšse, qui sâengage Ă lui consacrer une part significativede son temps. Il est nĂ©cessaire que le principe de rencontres rĂ©guliĂšreset frĂ©quentes soit arrĂȘtĂ© lors de lâaccord initial. Le doctorant sâengageĂ remettre Ă son directeur autant de notes dâĂ©tape quâen requiert sonsujet et, le cas Ă©chĂ©ant, Ă prĂ©senter ses travaux dans les sĂ©minaires dulaboratoire. Le directeur de thĂšse sâengage Ă suivre rĂ©guliĂšrement la pro-gression du travail et Ă dĂ©battre des orientations nouvelles quâil pour-ra prendre au vu des rĂ©sultats dĂ©jĂ acquis. Il a le devoir dâinformer ledoctorant des apprĂ©ciations positives ou des objections et des critiquesque son travail peut susciter.
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Le Conseil dâĂtat retient la valeur non contractuelle de la charte, ce qui nâen-traĂźne pas son absence de portĂ©e juridique. Ainsi, il a estimĂ© que les procĂ©-dures de mĂ©diation de la charte habilitent le prĂ©sident de lâuniversitĂ© Ă dĂ©signer un nouveau directeur de thĂšse (Conseil dâĂtat, Paris, 21 dĂ©cembre2001, n° 220997). Au-delĂ des aspects juridiques, la bonne relation de direc-tion est celle qui, au rythme propre du doctorant, fait progresser celui-ci dansun esprit de tolĂ©rance et dâobjectivitĂ© vers le stade final de la soutenance. Tropde docteurs dans les diverses branches des sciences sociales ont gardĂ© lamĂ©moire de rapports de forte confiance et mĂȘme dâamitiĂ© avec leur directeurde thĂšse â une relation quasi-ensoleillĂ©e qui a compensĂ© ce que le travail derecherche et de rĂ©daction a nĂ©cessairement de revĂȘche â pour que lâon ne sou-haite pas que ce soit ce genre de relations qui devinssent la rĂšgle plutĂŽt queles Ă©changes fondĂ©s sur lâappel Ă lâintervention des tribunaux. Il va de soi quelâĂ©tudiant est « propriĂ©taire » de son travail, dans le cadre du laboratoire quilâa accueilli.
SECTION 2.Le gel dâun sujet de thĂšse et la durĂ©e idoine
de la recherche doctorale
Lorsquâun sujet de thĂšse est choisi par un Ă©tudiant, il impose Ă son « dĂ©-tenteur » dâen faire la dĂ©claration au fichier national des thĂšses. Cette dĂ©cla-ration simple a pour effet de rendre publics, par les moyens informatiques,le titre du sujet, lâuniversitĂ© dâinscription et le nom du doctorant. Il arrive par-fois que le doctorant soit confrontĂ© Ă de comprĂ©hensibles difficultĂ©s, dâordrematĂ©riel, de santĂ© et de rĂ©alisation et quâun laps de temps plus ou moins longsâĂ©coule sans que la recherche nâavance, soit plusieurs annĂ©es. De ce fait, lesujet se trouve dans une situation dâentre-deux due Ă une forme dâindĂ©cision :il sâagit du gel du sujet, rendu public mais insuffisamment travaillĂ©. Cette situa-tion est prĂ©judiciable Ă lâĂ©gard de candidats Ă©ventuels qui voudraient traiterce sujet. RĂ©glementairement, rien ne sâoppose Ă ce que des sujets proches soientdĂ©posĂ©s et travaillĂ©s en mĂȘme temps, mĂȘme si des difficultĂ©s de concurrencedĂ©placĂ©e peuvent sâensuivre. Surtout, le gel est prĂ©judiciable au prĂ©tendu doc-torant. La situation de gel doit contraindre le « dĂ©tenteur » du sujet Ă se dĂ©ter-miner : soit lâabandon, soit lâengagement de poursuivre Ă son terme untravail commencĂ©. Formellement, lâabandon se traduit par une non-rĂ©inscrip-tion annuelle. Elle passe aussi, mais plus rarement dans la pratique, par unedĂ©claration dâabandon.
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Lâobservation empirique nous montre que les thĂšses en droit prennent sou-vent plus de temps que les thĂšses scientifiques. Le dĂ©lai Ă©norme de cinq annĂ©esy est frĂ©quent ! Lâambition politique contemporaine est de mettre fin aux situa-tions souvent inextricables de thĂšses « qui nâen finissent pas ». LâidĂ©al dâunethĂšse financiĂšrement aidĂ©e, rĂ©servĂ©e aux meilleurs Ă©tudiants, pour trois ansest affichĂ©. La rĂ©alitĂ© actuelle reste encore en deçà de cette dĂ©claration volon-tariste. Mais il est vrai quâil faut savoir clĂŽturer une thĂšse et rĂ©pondre, aussi,aux exigences scientifiques du sujet, du directeur de recherche. Pour contour-ner les obstacles des dĂ©lais dĂ©passĂ©s, du gel du sujet, il arrive que certainsdoctorants choisissent de ne pas se rĂ©inscrire, mĂȘme si lâintention de pour-suivre ou dâabandonner nâest pas claire dans leur esprit. Leur radiation estcensĂ©e sâensuivre. Mais il sâagit parfois dâune radiation fictive, car le docto-rant sâinscrit Ă nouveau, en une seconde annĂ©e 1, avec un sujet semblable. Cetabandon provisoire permet, en toute lĂ©galitĂ©, dâatteindre lâobjectif final.
SECTION 3.Le plagiat et ses conséquences
La tentation est grande, dans les disciplines juridiques, de recourir au co-pier-coller, qui prĂ©sente lâavantage apparent de gagner du temps. Les res-sources infinies offertes par lâInternet ont, en effet, considĂ©rablement affectĂ©la façon dont on rĂ©dige sa thĂšse. Ce « copier-coller » est, Ă©videmment, parfaite-ment contraire Ă lâexigence scientifique et Ă une dĂ©marche de rigueur. En unmot, inacceptable. LâUniversitĂ© royale de droit et dâĂ©conomie de PhnomPenh (Cambodge) Ă©prouve dâailleurs le besoin de faire signer au chercheurun engagement Ă©crit de non-plagiat avant dâentreprendre une recherche. LadifficultĂ© se situe au niveau de la preuve du plagiat, qui est pourtant de plusen plus facilitĂ©e par certains logiciels. La preuve Ă©tablie place, ensuite, lacommunautĂ© universitaire devant une difficultĂ© fondamentale : comment sanc-tionner de façon juste ce comportement ? Ă nos yeux, la plus grande sĂ©vĂ©ritĂ©doit ĂȘtre de mise dans cette situation. Lâaffaire suivante en tĂ©moigne. Ellemontre le cas de deux thĂšses successives portant sur un sujet semblable. Lâattri-bution de la qualification Ă la seconde thĂšse a conduit le ComitĂ© national desuniversitĂ©s Ă en retirer le bĂ©nĂ©fice lâannĂ©e suivante. Autant dire, la ruine dâunecarriĂšre universitaire !
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CONSEIL DâĂTAT, PARIS, 23 FĂVRIER 2009, N° 310277
ConsidĂ©rant que le 5 fĂ©vrier 2006, la section n° 2 du Conseil nationaldes universitĂ©s (CNU) a inscrit Mme AâB sur la liste de qualification auxfonctions de maĂźtre de confĂ©rences en prenant notamment en considĂ©-ration sa thĂšse soutenue en 2005, intitulĂ©e : La sĂ©curitĂ© sanitaire des ali-ments en droit international et communautaire. Rapports croisĂ©s et perspectivesdâharmonisation ; que, par la dĂ©libĂ©ration du 5 septembre 2007 dont MmeAâB demande lâannulation, la mĂȘme section a prononcĂ© le retrait de cetteinscription au motif quâelle aurait Ă©tĂ© obtenue par fraude, cette thĂšse com-portant, sans les citations appropriĂ©es, des emprunts nombreux etmanifestes Ă la thĂšse de Mme C publiĂ©e en 2002 sous le titre : Principede prĂ©caution et risque sanitaire. Recherche sur lâencadrement juridique de lâin-certitude scientifique ; (âŠ) que le travail reprend dans plusieurs de sesparties la mĂȘme structure formelle, rend compte dans des termes trĂšssemblables des objectifs recherchĂ©s par la rĂ©glementation et la jurispru-dence et de leur Ă©volution et comprend de nombreux et importants para-graphes exposant les propres rĂ©flexions de lâauteur qui sont rĂ©digĂ©sdans le mĂȘme ordre et avec les mĂȘmes termes que ceux contenus dansla thĂšse de Mme C, sans faire apparaĂźtre quâil sâagit de citations ; quâain-si, Mme AâB nâest pas fondĂ©e Ă soutenir que câest Ă tort que le CNU aretenu Ă son encontre une fraude consistant Ă prĂ©senter des travaux quiĂ©taient en rĂ©alitĂ© pour partie ceux dâun autre chercheur ; ConsidĂ©rantquâil rĂ©sulte de ce qui prĂ©cĂšde que Mme AâB nâest pas fondĂ©e Ă demander lâannulation de la dĂ©cision du 5 septembre 2007 par la-quelle le CNU a prononcĂ© le retrait de son inscription sur la liste de quali-fication aux fonctions de maĂźtre de confĂ©rences etc.
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CHAPITRE III.
Le dialogue des disciplines
Les prĂ©ceptes et principes pratiques qui viennent dâĂȘtre mentionnĂ©svalent dans tous les domaines, pour chacune des phases du travail de re-cherche : exploration, documentation, rĂ©flexion et rĂ©daction. NĂ©anmoins, ilexiste une mĂ©thodologie particuliĂšre Ă chaque discipline. Les disciplines quisont prĂ©sentĂ©es dans ce manuel peuvent paraĂźtre, au premier regard, voisineset mĂȘme confondues : « droit international public », « Relations Internatio-nales » et « GĂ©opolitique ». MalgrĂ© leur proximitĂ© â qui tient bien sĂ»r Ă leurintĂ©rĂȘt pour « lâinternational » â elles font rĂ©fĂ©rence Ă des concepts spĂ©cifiqueset utilisent des mĂ©thodes sensiblement diffĂ©rentes pour observer et rendrecompte des faits quâelles Ă©tudient. Elles ont donc un point de vue diffĂ©rentâ ou une perspective particuliĂšre â sur les objets de connaissance.
SECTION 1.Trois disciplines voisinesâŠ
A â LE DROIT INTERNATIONAL
Le droit international se dĂ©finit comme le droit applicable Ă la sociĂ©tĂ© inter-nationale, câest-Ă -dire un ensemble de rĂšgles et dâinstitutions destinĂ©es Ă rĂ©girles relations internationales ; Ă la diffĂ©rence du droit international privĂ© quiconcerne les rapports entre personnes privĂ©es, le droit international publicne sâapplique en principe quâaux entitĂ©s « publiques » que sont les Ătats etles organisations internationales.
Lâexpression « droit international » est ambivalente, car elle dĂ©signe nonseulement un ensemble de rĂšgles et dâinstitutions, mais aussi la science de cecorps de rĂšgles et dâinstitutions, la discipline qui les Ă©tudie : le droit interna-tional Ă©tudie des normes en termes dâobligation et de sanction, ou en termesdâeffectivitĂ© (qui permet de distinguer le caractĂšre dĂ©claratoire ou contraignantdâune norme) ; il Ă©tudie les institutions ou les situations de fait en utilisantdes concepts juridiques connus et dĂ©finis avec prĂ©cision : source, sujet, objet,attribution, compĂ©tence ou contrĂŽle⊠Sa mĂ©thode est juridique : elle consisteen une analyse du systĂšme normatif et institutionnel souvent conçu comme
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un « ordre » (et donc une analyse de lâarticulation entre ordres national et inter-national) et une interprĂ©tation du contenu des normes et du pouvoir des insti-tutions. Lâanalyse juridique dĂ©bouche quelquefois sur une description du rĂ©el,afin dâen amĂ©liorer la connaissance (le droit comme une science), mais ellevise le plus souvent Ă fonder une opinion consultative ou prescriptive (le droitcomme un art) ; mais, dans les deux cas, elle suppose lâapprentissage dâunecertaine logique formelle et dâune technique Ă©galement formalisĂ©e, dont lamaĂźtrise est indispensable (le droit comme discipline).
Le droit est dâabord une technique de rĂ©gulation sociale, formalisĂ©e pourdes raisons de fiabilitĂ© et de sĂ©curitĂ© : cette dĂ©finition est vraie de tous les sys-tĂšmes juridiques. Cependant, par rapport aux autres domaines du droit, ledroit international prĂ©sente des caractĂšres propres. Il y a une triple source deces particularitĂ©s du droit international.
Dâabord, la sociĂ©tĂ© internationale Ă laquelle il sâapplique prĂ©sente la parti-cularitĂ© dâĂȘtre un systĂšme juridique anarchique : elle ignore le phĂ©nomĂšnedu pouvoir lĂ©gal grĂące auquel, dans lâordre interne, lâĂtat produit des normesopposables Ă une collectivitĂ©, au nom de la supĂ©rioritĂ© de lâintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral âquâil prĂ©tend reprĂ©senter â par rapport Ă la multitude des intĂ©rĂȘts particuliers.En droit international, il nây a pas de « super-Ătat » pour reprĂ©senter lâintĂ©rĂȘtgĂ©nĂ©ral dâune « communautĂ© internationale » plus ou moins mythique, nide « loi » internationale pour encadrer les actes des Ătats. En fait, le systĂšmeinternational est Ă la fois lĂ©galement organisĂ© et anarchique : organisĂ© selonun mode lĂ©gal puisque le comportement des Ătats obĂ©it Ă des rĂšgles qui ledĂ©terminent au moins partiellement ; anarchique, en raison de lâabsence dâunjuge international obligatoire, mais aussi parce que ces Ătats, Ă©gaux et sou-verains, ne tolĂšrent ce mode lĂ©gal quâĂ condition quâaucun dâeux ne se voieopposer un Ă©lĂ©ment quelconque du systĂšme juridique international sâil nâapas consenti Ă la production de ses effets. Pour ces raisons, certains ont la tenta-tion de dĂ©nier la qualitĂ© de droit au droit international, car les rĂšgles interna-tionales seraient dĂ©pourvues de tout fondement obligatoire et seraient detoutes façons privĂ©es de sanction1. Cette nĂ©gation du droit international mĂ©-connaĂźt lâĂ©volution considĂ©rable quâil a connue rĂ©cemment, marquĂ©e notam-ment par la rĂ©activation du chapitre VII de la Charte des Nations unies(pouvoirs du Conseil de sĂ©curitĂ© en cas de rupture de la paix), la crĂ©ation des
_________________________1. Pour une rĂ©futation des arguments selon lesquels le droit international nâexiste pas, voir
Prosper Weil, « Le droit international en quĂȘte de son identitĂ© », Recueil des cours de lâAcadĂ©miede droit international de La Haye, 1992, vol. 237, notamment la premiĂšre partie : pp. 41â82. Con-sulter Ă©galement Pierre-Marie Dupuy, « LâunitĂ© de lâordre juridique international », Recueildes cours de lâAcadĂ©mie de droit international de La Haye, 2002, vol. 297, p. 25.
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juridictions pĂ©nales internationales ou lâexpansion du droit du commerce inter-national. Surtout, cette nĂ©gation, qui prend appui sur les caractĂ©ristiques dog-matiques des ordres juridiques internes, doit ĂȘtre replacĂ©e dans son justecontexte : le droit international nâest jamais, en raison de sa nature propre,rĂ©ductible Ă un droit national. Dans cette perspective, les rapports de systĂšmeentre droit international et droits internes sont nĂ©cessairement caractĂ©risĂ©spar le dualisme, soit la sĂ©paration stricte.
DeuxiĂšmement, la spĂ©cificitĂ© du droit international est due Ă la polyvalencedes traditions juridiques et culturelles dont cette technique tire ses origines :il sâagit surtout de celle de la « Common law » propre aux pays angloâsaxons,qui privilĂ©gie la procĂ©dure et le rĂŽle du juge, et de celle des droits « romano-germaniques » fondĂ©s moins sur le prĂ©cĂ©dent judiciaire que sur lâapport dulĂ©gislateur. Ces droits sont nĂ©s dans des contextes historiques, sociaux et cul-turels variĂ©s ; les rĂšgles quâils Ă©noncent sont donc diffĂ©rentes, et les solutionsquâils apportent aux problĂšmes juridiques sont bien spĂ©cifiques. De plus, lamultiplicitĂ© des droits ne tient pas seulement Ă la variĂ©tĂ© des rĂšgles quâils com-portent : chaque droit constituant un systĂšme, il utilise un certain vocabulaire,et comporte lâemploi de certaines techniques et de certaines mĂ©thodes. Il estdonc liĂ© Ă un univers culturel et idĂ©ologique quâil reflĂšte. Or la traduction destermes et des expressions juridiques est en elle-mĂȘme une difficultĂ© pour quine maĂźtrise pas parfaitement les langues Ă©trangĂšres ; dâautant que les formulesemployĂ©es par les thĂ©oriciens et praticiens du droit sont souvent elliptiqueset ne rendent pas toujours compte de la rĂ©alitĂ©. Une autre difficultĂ© tient Ă lâĂ©-trangetĂ© de la pensĂ©e juridique lorsquâelle relĂšve dâune aire culturelle trĂšsĂ©loignĂ©e ou diffĂ©rente de la sienne : car, comme nous lâavons dĂ©jĂ dit, le droitest liĂ© Ă une certaine conception de lâordre social qui dĂ©termine ses fonctions.
Enfin, le droit international prĂ©sente des traits particulier car, plus encoreque les autres branches du droit, il est traversĂ© par des courants idĂ©ologiquesdivers, instrumentalisĂ© par des volontĂ©s politiques concurrentes et morcelĂ©par des stratĂ©gies normatives contradictoires. De ce point de vue, un problĂšmede mĂ©thode se pose trĂšs vite Ă lâinternationaliste dĂ©butant : quelle place faire,dans lâanalyse dâune norme juridique, au contexte historique, politique,Ă©conomique et social ? Beaucoup de juristes ont choisi de se cantonner dansla seule analyse des aspects formels du phĂ©nomĂšne juridique, convaincus quetel est le rĂŽle du juriste et que cette dĂ©marche « positiviste » leur permet deprĂ©server leur neutralitĂ©. Ils oublient cependant les fondements philoso-phiques et les prolongements pratiques du mouvement auquel ils se rat-tachent : en particulier, lâidĂ©e selon laquelle la validitĂ© formelle dâun actejuridique lui confĂšrerait sa valeur positive ; en dâautres termes, ce qui est Ă©tablipar lâĂtat, Ă©tant lĂ©gal, serait nĂ©cessairement lĂ©gitime en soi : cette affirmation
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est loin dâĂȘtre neutre puisquâelle fait de lâĂtat lâauteur et lâordonnateurexclusif de lâordre juridique international en excluant les entitĂ©s non pourvuesde personnalitĂ© juridique internationale ; puisquâelle nâenvisage que lesactes qui procĂšdent du mĂȘme auteur Ă©tatique (le traitĂ©, secondairement la cou-tume et les principes gĂ©nĂ©raux du droit) ; puisque, enfin, elle justifie lâanar-chie de lâordre juridique international car, en dehors de la volontĂ© de lâĂtat,il nây aurait pas de droit. Le clivage ainsi prĂ©sentĂ© oppose le positivisme ju-ridique au jusnaturalisme qui postule lâexistence dâune loi naturelle su-pĂ©rieure au droit positif et Ă laquelle ce dernier doit ĂȘtre conforme puisquâelleserait la manifestation de la justice. Certes, le positivisme ne peut ĂȘtre rejetĂ©avec trop de lĂ©gĂšretĂ© : il faut nĂ©cessairement distinguer le droit tel quâil est(droit positif) du droit tel quâil devrait ĂȘtre (morale) ; il faut Ă©galement pro-cĂ©der Ă une analyse technique et formelle dâune norme ou dâun phĂ©nomĂšnejuridique puisquâen effet le droit est une discipline technique. Mais câest unediscipline au service dâun projet politique et/ou social. Elle doit doncprendre en compte la diversitĂ© des Ă©lĂ©ments permettant dâexpliquer les Ă©vo-lutions de lâordre juridique, qui traduit Ă©videment les Ă©volutions de la sociĂ©tĂ©quâil est appelĂ© Ă rĂ©guler.
Mais il y a dâautres clivages encore plus spĂ©cifiques au droit internatio-nal. Lâun des plus fondamentaux est celui opposant le volontarisme et lâob-jectivisme. Le volontarisme est une doctrine construite sur lâidĂ©e que le droitinternational est fondĂ© sur la volontĂ© des Ătats2 ; le droit international seraitdonc un ordre juridique de type contractuel, fondĂ© sur lâĂ©galitĂ© souverainede tous les Ătats. Selon les tenants de lâobjectivisme, le droit est au contrairefondĂ© sur les nĂ©cessitĂ©s sociales et il doit son contenu et son caractĂšre obli-gatoire Ă celles-ci3. Ce ne serait donc pas la volontĂ© des Ătats mais les nĂ©-cessitĂ©s et les diffĂ©rents types de solidaritĂ© sociale qui provoqueraient â etjustifieraient â la crĂ©ation du droit international ; ce dernier sâimposerait alorsmĂȘme aux Ătats qui le refusent. Ces deux courants, fondamentaux pourcomprendre la thĂ©orie du droit international, ont de multiples significa-tions. Le courant objectiviste, qui sâinscrit dans le devenir contemporain dudroit international, veut dire que le droit prĂ©existe Ă la loi internationale posi-tive. Surtout, il facilite lâapparition de valeurs communes, sous-tendant unecommunautĂ© internationale virtuelle, crĂ©ant une tension Ă laquelle le volon-tarisme dominant se heurte. En revanche, ce dernier pose que la loi interna-tionale forme et est Ă la base du droit.
_________________________2. Patrick Daillier et Alain Pellet, Droit international public, Paris, LGDJ, 1994, p. 98.
3. Ibid., p. 105.
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Le chercheur en droit international ne peut Ă©luder ce clivage, car son choixde lâune des deux thĂ©ories induit des mĂ©thodes de recherche diffĂ©rentes : faceĂ une situation ou un phĂ©nomĂšne donnĂ©s, lâapproche volontariste privilĂ©giela volontĂ© des Ătats concernĂ©s ; la source de rĂ©fĂ©rence sera le traitĂ© et, dansune moindre mesure, le droit dĂ©rivĂ© des organisations internationales (parcequâelles sont inter-Ă©tatiques). Lâapproche objectiviste prendra Ă©galement encompte la volontĂ© des Ătats, mais aussi les dĂ©terminants politiques et sociauxtels quâils sont exprimĂ©s dans la coutume ou les principes gĂ©nĂ©raux dudroit.
Un autre clivage important est celui opposant les approches rĂ©aliste et idĂ©a-liste : câest un clivage Ă©galement prĂ©sent dans la thĂ©orie des Relations Interna-tionales. Lâapproche idĂ©aliste se caractĂ©rise par lâimportance quâelle accordeaux valeurs et aux normes pour expliquer les points de vue et les comporte-ments des acteurs internationaux : le droit international serait donc un facteurstructurant de la vie internationale, prenant une place toujours plus importante(compĂ©tences Ă©largies des institutions et organisations internationales, protec-tion plus grande des droits de lâhomme sur le plan rĂ©gional et universel, pro-grĂšs de la justice internationale) au dĂ©triment de lâancienne figure de lâĂtat.Ce renforcement du rĂŽle du droit international serait de nature Ă favoriserla paix et le dĂ©veloppement international. Lâapproche rĂ©aliste se garde biendâidĂ©aliser les valeurs et le droit, et privilĂ©gie, au contraire, une analyse dela rĂ©alitĂ© internationale fondĂ©e sur les faits, les intĂ©rĂȘts et les rapports de force.De ce point de vue, le droit international joue un rĂŽle marginal ; il est, plusprĂ©cisĂ©ment, un Ă©lĂ©ment â parmi dâautres â quâutilisent les Ătats pour faireavancer leurs intĂ©rĂȘts ; mais en lâabsence dâun pouvoir international suscep-tible de sanctionner les manquements Ă ses rĂšgles, ce droit international nedispose dâaucune autonomie par rapport aux Ătats. « La paix par le droit »est donc une formule creuse qui cache mal la perpĂ©tuation des rapports depuissance.
Courant doctrinalDegrĂ© dâachĂšvement
juridique des relationsinternationales
Nature des normes
Doctrine volontariste Société internationaleDroits et obligations
subjectives
Doctrine objectivisteCommunautéinternationale
Jus cogens, obligationserga omnes
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Bien dâautres choix thĂ©oriques et donc mĂ©thodologiques pourraient ĂȘtreexposĂ©s, mais ne le seront pas dans le cadre limitĂ© de cet ouvrage4. LâĂ©tudedu droit international peut donc suivre des orientations mĂ©thodologiques sen-siblement diffĂ©rentes selon la thĂ©orie privilĂ©giĂ©e. Mais il faut souligner que,sur le plan scientifique, aucune de ces thĂ©ories ne peut se prĂ©tendre supĂ©rieureaux autres : un chercheur ne peut donc pas ĂȘtre critiquĂ© pour ses choix, pourvuquâils soient explicitĂ©s et argumentĂ©s. Dâautant que, dâune maniĂšre ou dâuneautre, toutes ces thĂ©ories considĂšrent que la connaissance des autres sciencessociales (sociologie, psychologie sociale, science politique, histoire) et notam-ment celles qui sâintĂ©ressent Ă lâinternational (Relations Internationales,GĂ©opolitique) est indispensable5.
B â LES RELATIONS INTERNATIONALES
Le statut de la discipline des Relations Internationales et, par consĂ©quent,celui de sa mĂ©thodologie est beaucoup plus prĂ©caire que le statut du droit,voire du droit international. Certains auteurs contestent le caractĂšre discipli-naire des Relations Internationales, en les considĂ©rant comme un sous-do-maine de la science politique. Nous allons nĂ©anmoins nous situer du cĂŽtĂ© deceux pour lesquels les Relations Internationales sont une discipline de pleindroit, tout en Ă©tant conscient de ses faiblesses, dues Ă sa nouveautĂ© (notonsque la premiĂšre chaire de Relations Internationales est fondĂ©e en 1919 Ă Aberystwith, ce qui rend la discipline assez rĂ©cente) et aux controverses per-manentes entre les thĂ©oriciens des diffĂ©rents paradigmes portant sur le but,lâobjet et la mĂ©thode des Relations Internationales. En effet, il nây a pas en-core de consensus parmi les thĂ©oriciens Ă lâĂ©gard de ces aspects ; nous allonsdonc commencer par expliquer les points de vue des paradigmes les plus im-portants, ainsi que les dĂ©bats majeurs auxquels leurs thĂ©oriciens se livrent.
Faisons dâabord la distinction entre « Relations Internationales », avec ma-juscules, qui dĂ©signe la thĂ©orie, la discipline scientifique, et « relations interna-tionales », qui dĂ©signe simplement les relations entre les Ătats. La distinctionest reprise de la littĂ©rature anglo-saxonne, oĂč câest lâacronyme « IR » qui sâestconsolidĂ© comme dĂ©signant la thĂ©orie des Relations Internationales. Câest
_________________________4. Voir Olivier Corten, MĂ©thodologie du droit international public, Bruxelles, Ăditions de lâULB,
2009, premiĂšre partie, chapitre 1.
5. Sur tous ces points, voir lâintroduction de Pierre-Marie Martin, Les Ă©checs du droit interna-tional, Paris, PUF, « Que sais-je ? », n° 3151 ; et celle de Jean Combacau, Le droit des traitĂ©s,PUF, « Que sais-je ? », n° 2613.
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toujours la littĂ©rature anglo-saxonne qui a produit la plupart des thĂ©ories etdes dĂ©bats dans la discipline. Pour ce qui est de lâespace francophone, Ray-mond Aron est celui qui ouvre le dĂ©bat thĂ©orique, en fondant une praxĂ©olo-gie des relations internationales6 ; lâaccompagnent aussi dâimportantshistoriens des relations internationales, comme Pierre Renouvin7 ou PhilippeMoreau Defarges8. RĂ©cemment, une sorte de synthĂšse sâest opĂ©rĂ©e entre leslittĂ©ratures française et angloâsaxonne, comme en tĂ©moignent les Ă©crits deDario Battistella9 ou FrĂ©dĂ©ric Charillon10.
Lâessence des relations internationales est fondĂ©e sur lâexistence de rela-tions rĂ©guliĂšres entre des entitĂ©s titulaires de souverainetĂ© Ă©tatique11 et surla distinction entre un ordre interne Ă lâĂtat, hiĂ©rarchique et unitaire, et unordre international qui est anarchique sans ĂȘtre pourtant chaotique. Cetteapproche exclut de notre domaine dâĂ©tude les situations conflictuelles Ă lâin-tĂ©rieur des Ătats, comme, par exemple, la guerre civile. Cependant, lâĂ©volu-tion politique des derniĂšres dĂ©cennies efface de plus en plus la distinction entre« interne » et « international », en raison de la permĂ©abilitĂ© croissante des fron-tiĂšres, du dĂ©clin de la capacitĂ© des Ătats Ă contrĂŽler les flux dâĂ©changes quiles traversent, ainsi que de lâimportance idĂ©ologique toujours plus grande don-nĂ©e Ă la notion dâ« ingĂ©rence humanitaire », censĂ©e permettre lâinterventionde la communautĂ© internationale dans des situations de conflit interne pourprotĂ©ger les droits de lâhomme. Le dĂ©bat sur le conflit entre la souverainetĂ©Ă©tatique et le droit dâingĂ©rence humanitaire est un exemple qui illustre la ma-niĂšre dont les Relations Internationales et le droit international partagent, entant que disciplines, le mĂȘme champ dâĂ©tude. Dâautres disciplines inter-viennent dans la rĂ©flexion du chercheur en Relations Internationales, tellesque lâhistoire, la science politique ou la GĂ©opolitique.
Le premier problĂšme que doit rĂ©soudre lâĂ©tudiant qui Ă©crit une thĂšse enRelations Internationales est de choisir un paradigme pour situer son approchethĂ©orique. Le choix du paradigme nâest pas alĂ©atoire, car il repose sur des convic-tions ontologiques et Ă©pistĂ©mologiques. Puisque la discipline nâest pas encore
_________________________6. Raymond Aron, Paix et guerre entre les nations, Paris, Calmann-LĂ©vy, 1962; « Quâest-ce quâune
thĂ©orie des Relations Internationales ? », in Revue Française de Sciences Politiques, vol. 17,n° 5, 1967, pp. 837â861.
7. Pierre Renouvin, Histoire des relations internationales, Paris, Hachette, 1954. 8. Philippe Moreau Defarges, Relations Internationales, Paris, Seuil, 2007.9. Dario Batistella, Théorie des Relations Internationales, Paris, Presses de Sciences Po, 2003.
10. Frédéric Charillon (dir.), Les Relations Internationales, Paris, La Documentation Française,2006.
11. Dario Batistella, op. cit., p. 23.
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consolidĂ©e, les diffĂ©rents auteurs dĂ©battent encore des questions liĂ©es Ă lâob-jet de la discipline, Ă la possibilitĂ© de forger une « grande thĂ©orie », et aux mĂ©-thodes, qualitatives ou quantitatives, qui doivent ĂȘtre utilisĂ©es pour mieuxcomprendre les relations internationales. La question ontologique porte surles acteurs que lâon considĂšre les plus significatifs dans les relations interna-tionales et leur identitĂ© (en rĂ©pondant Ă la question : quelle est la rĂ©alitĂ© quelâon doit connaĂźtre ?), tandis que la question Ă©pistĂ©mologique porte sur la possi-bilitĂ© mĂȘme de la connaissance de cette rĂ©alitĂ© (comment peut-on connaĂźtreles relations internationales ?). Les thĂ©ories selon lesquelles la rĂ©alitĂ© est don-nĂ©e (et il revient au chercheur de lâinvestiguer par les moyens traditionnelsde la science positiviste) sont des thĂ©ories rationalistes, tandis que les thĂ©oriesqui soutiennent que les relations internationales, ainsi que les identitĂ©s et in-tĂ©rĂȘts Ă©tatiques sont socialement construits, et quâil est impossible de faire unedistinction entre faits et valeurs â donc, quâune connaissance objective desrelations internationales nâest pas envisageable â, sont des thĂ©ories rĂ©flexi-vistes12..
Le noyau de la discipline est reprĂ©sentĂ© par les thĂ©ories rationalistes ; lesthĂ©ories rĂ©flexivistes sont assez rĂ©centes. Datant des annĂ©es 1990, elles appa-raissent comme une rĂ©ponse Ă lâĂ©chec des thĂ©ories existantes Ă prĂ©dire la finde la guerre froide. Encore assez peu dĂ©veloppĂ©es, elles souffrent dâune ca-rence importante : lâimpossibilitĂ© de proposer un modĂšle positif de recherchedes relations internationales. Elle ne font que contester les approches exis-tantes et dĂ©construire les modalitĂ©s dâexercice de la puissance. Pourtant,elles peuvent sâavĂ©rer prometteuses pour un monde dans lequel la globalisa-tion croissante renverse les paradigmes traditionnels de constitution des re-lations entre les acteurs internationaux.
Parmi les thĂ©ories rationalistes, le rĂ©alisme politique est de loin la thĂ©oriela plus influente dans lâhistoire de la discipline. FondĂ© par E. H. Carr et HansMorgenthau dans la premiĂšre moitiĂ© du XXe siĂšcle, le rĂ©alisme politique reposesur quelques assomptions fondamentales : les principaux acteurs des rela-tions internationales sont les Ătats ; le systĂšme international est anarchiqueou, autrement dit, il nây a pas dâautoritĂ© au-dessus de la souverainetĂ© Ă©tatique ;par consĂ©quent, les Ătats sont Ă©gaux du point de vue lĂ©gal et conceptuel. Lebut premier de tout Ătat est la survie et la maximisation de la puissance. Danstoute circonstance, les actions des Ătats vont ĂȘtre dictĂ©es par lâintĂ©rĂȘt natio-nal dĂ©fini en termes de puissance, en dehors des contraintes de la morale ou
_________________________12. Cette distinction qui fait école a été avancée pour la premiÚre fois par Robert Keohane,
« International Institutions: Two Approaches », in International Studies Quarterly, Vol. 32,n° 4, 1988, pp. 379â396.
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du droit. Le rĂ©alisme politique conteste la pertinence du droit international,dont le respect ne peut ĂȘtre garanti par aucune autoritĂ© capable dâimposerdes sanctions : câest le corollaire de lâanarchie internationale. Lorsque la coo-pĂ©ration entre les Ătats existe, elle est justifiĂ©e uniquement par des intĂ©rĂȘtspartagĂ©s, comme dans le cas des alliances militaires. La coopĂ©ration est tou-jours un jeu Ă somme nulle, car un Ătat peut gagner uniquement aux dĂ©pensdes autres. Le rĂ©alisme nâaccorde aucune crĂ©dibilitĂ© aux institutions internatio-nales, qui ne seraient que la transposition de la distribution de la puissancedans le systĂšme13. Dans cette logique, ce sont les Ătats les plus puissants quiutilisent les institutions pour faire prĂ©valoir leurs intĂ©rĂȘts.
Cette approche a Ă©tĂ© contestĂ©e par le paradigme libĂ©ral, qui part de lâidĂ©eque lâĂ©tat naturel du systĂšme international nâest pas la guerre, comme lepensent les rĂ©alistes, mais que lâintĂ©rĂȘt primordial des Ătats est la paix, qui leurpermet le dĂ©veloppement et la prospĂ©ritĂ© Ă©conomique. Car pour les libĂ©raux,lâintĂ©rĂȘt vital des Ătats nâest pas la maximisation de la puissance, mais de laprospĂ©ritĂ©. Les Ătats ont une tendance naturelle Ă coopĂ©rer afin dâobtenir desbĂ©nĂ©fices, sans se soucier de savoir si les autres Ătats gagnent davantagegrĂące Ă la coopĂ©ration. Les institutions ont un rĂŽle essentiel dans la structura-tion du systĂšme international, en rendant plus facile cette coopĂ©ration et enempĂȘchant lâapparition des guerres. Il est quatre modifications que les insti-tutions opĂšrent dans lâenvironnement international : elles permettent une pro-jection de la coopĂ©ration dans lâavenir, en limitant le risque de dĂ©fection ; ellesfacilitent des nĂ©gociations dans lesquelles les problĂ©matiques sont liĂ©es (issue-linkage) ; elles augmentent le niveau dâinformation qui existe dans le systĂšme(ainsi, lâincertitude sur les intentions des autres est limitĂ©e) ; finalement, ellesrĂ©duisent les coĂ»ts de transaction14. Pour les libĂ©raux, les institutions de-viennent des acteurs de plein droit dans les relations internationales (Ă la dif-fĂ©rence du rĂ©alisme, qui ne considĂšre que les Ătats comme acteurs pertinents).
Un dernier paradigme que nous devons rappeler ici est le constructi-visme, apparu au dĂ©but des annĂ©es 1990 Ă la faveur de lâenthousiasme sus-citĂ© par la fin de la guerre froide. Le constructivisme se prĂ©sente comme unpont entre les thĂ©ories rationalistes, telles que le rĂ©alisme et le libĂ©ralisme, etles thĂ©ories rĂ©flexivistes, telles que la thĂ©orie critique, le marxisme ou le post-modernisme. Du rationalisme, le constructivisme reprend lâĂ©pistĂ©mologie posi-tiviste, câest-Ă -dire la conviction que la rĂ©alitĂ© sociale peut ĂȘtre connue avecles moyens de la science. Mais, Ă la diffĂ©rence des rationalistes, lâontologie_________________________13. John Mearsheimer, « The False Promise of International Institutions », in International Secu-
rity, Vol. 19, n° 3, 1994â1995, pp. 5â49.
14. Ibid.
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des constructivistes part de lâidĂ©e que la rĂ©alitĂ© nâest pas donnĂ©e une fois pourtoutes, attendant seulement Ă ĂȘtre dĂ©couverte ; elle est dans un processus per-manent de construction et re-construction Ă travers lâintersubjectivitĂ©. PlusprĂ©cisĂ©ment, en ce qui concerne le systĂšme des Ătats, ceux-ci nâont pas dâin-tĂ©rĂȘts et dâidentitĂ©s Ă©tablies une fois pour toutes ; leurs intĂ©rĂȘts et identitĂ©schangent en fonction des perceptions quâils ont des autres Ătats. Toute rĂ©a-litĂ© est construction sociale ; par consĂ©quent, si lâanarchie internationaleexiste, elle existe parce que les Ătats croient quâelle existe15. Dans cette approche,le rĂŽle des perceptions des Ătats, des normes et valeurs partagĂ©es, des idĂ©esqui circulent au niveau international est essentiel pour la construction des iden-titĂ©s et des intĂ©rĂȘts des Ătats.
Ces trois paradigmes constituent « le courant principal » des Relations In-ternationales. Quant aux autres â les thĂ©ories rĂ©flexivistes ou post-positi-vistes â, elles nâont pas encore rĂ©ussi Ă proposer de modĂšles cohĂ©rents derecherche, en se maintenant plutĂŽt Ă un niveau mĂ©tathĂ©orique de rĂ©flexion.Câest pourquoi le chercheur dĂ©butant en Relations Internationales aura du malĂ appliquer lâune ou lâautre de ces thĂ©ories â quâil sâagisse de la thĂ©orie critique,du post-modernisme ou mĂȘme du fĂ©minisme â Ă des Ă©tudes de cas prĂ©cis.
On peut Ă©galement dĂ©crire lâhistoire de la discipline des Relations Interna-tionales sous lâangle des quatre grands dĂ©bats qui ont divisĂ© les thĂ©oriciens.Le premier dĂ©bat sĂ©pare les idĂ©alistes des rĂ©alistes ; il a lieu avant la DeuxiĂšmeGuerre mondiale, et se structure autour de la question : quel est le but dâunescience des relations internationales ? Pour les idĂ©alistes, la rĂ©ponse est nor-mative : le but est dâempĂȘcher la guerre et crĂ©er un monde de la paix. Pourles rĂ©alistes, il ne sâagit que dâune tentative de comprendre et dĂ©crire une rĂ©a-litĂ© permanente : lâĂ©tat conflictuel des Ătats dans un systĂšme international anar-chique.
Le deuxiĂšme grand dĂ©bat est stimulĂ© par lâessor du bĂ©haviorisme dansles sciences sociales aux annĂ©es 1950â60 et porte sur les mĂ©thodes les plusappropriĂ©es pour lâĂ©tude des relations internationales. Ce dĂ©bat oppose,dâune part, les adeptes des nouvelles mĂ©thodes mathĂ©matiques appliquĂ©esaux sciences de lâhomme, et de lâautre part ceux qui croient que lâapprochebĂ©havioriste ne fait que compliquer la tentative de comprĂ©hension dâune rĂ©ali-tĂ© mieux apprĂ©hendĂ©e par les mĂ©thodes traditionnelles des disciplinescomme lâhistoire, la philosophie ou le droit.
Le troisiĂšme dĂ©bat survient dans les annĂ©es 1970 et concerne lâobjet de ladiscipline des Relations Internationales. Les rĂ©alistes se focalisent uniquement_________________________15. Alexander Wendt, Social Theory of International Politics, Cambridge, Cambridge Universi-
ty Press, 1999.
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sur les relations entre les Ătats souverains, tandis que les marxistes et les trans-nationalistes soutiennent quâil faut Ă©tudier les relations entre tous les typesdâacteurs, et notamment entre les classes sociales.
Le dernier grand dĂ©bat, qui a lieu durant les annĂ©es 1990 autour de la ques-tion « Comment peut-on Ă©tudier les relations internationales ? », oppose lesrationalistes et les post-positivistes, qui sont tentĂ©s de rĂ©pondre quâune vraiescience des Relations Internationales nâest pas possible16.
Le chercheur en Relations Internationales doit donc commencer sa dĂ©-marche en se situant par rapport Ă ces paradigmes et ces dĂ©bats. Cette clarifi-cation thĂ©orique lui permettra dâĂ©viter lâĂ©clectisme et dâavoir une approchecohĂ©rente de son objet dâĂ©tude17.
C â LA GĂOPOLITIQUE
Il convient de ne pas confondre la « gĂ©opolitique » avec la « gĂ©ographiepolitique » imaginĂ©e par lâAllemand Friedrich Ratzel, en 1897 : la gĂ©ographiepolitique a pour objectif majeur dâanalyser les interactions entre le pouvoirpolitique et ses structures, dâune part, lâespace stricto sensu dâautre part. EllesâintĂ©resse en prioritĂ© aux Ătats pour sâefforcer de dĂ©finir comment les condi-tions gĂ©ographiques influencent les relations internationales. Ă la diffĂ©rencede la gĂ©ographie politique qui dĂ©crit donc lâorganisation du monde divisĂ© enĂtats, Ă un moment donnĂ©, la GĂ©opolitique tente de relier entre eux les princi-paux facteurs dynamiques rendant compte de ladite organisation pour abou-tir Ă la synthĂšse dâune situation politique existante et de ses potentialitĂ©s18.
Espace et temps : telles sont les donnĂ©es majeures de la rĂ©flexion gĂ©opoli-tique. Parmi ces facteurs susceptibles dâĂȘtre qualifiĂ©s de « tendances lourdes »,certains sont relativement stables (localisation, donnĂ©es orographiques,gabarit du territoire, position dâenclave ou dâexclave, facteurs climatiques,hydrologiques, biogĂ©ographiques, etc.). Dâautres, plus instables dans letemps, concernent la palette, fort diversifiĂ©e, des thĂšmes Ă©margeant auchapitre de la GĂ©ographie humaine et de lâHistoire, comme la prĂ©sence deressources naturelles, les comportements dĂ©mographiques Ă long terme, lesstructures politico-sociĂ©tales ou gĂ©o-Ă©conomiques.
_________________________16. Ce compte-rendu des débats entre les paradigmes est repris de Dario Batistella, op. cit.
17. Une excellente introduction Ă lâĂ©tude des RI est le livre de Dario Batistella que nousvenons de citer.
18. DĂ©finitions extraites de Jacques Soppelsa et al., Lexique de GĂ©opolitique, Paris, Dalloz, 1988.
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Tendances lourdes qui peuvent ĂȘtre brutalement perturbĂ©es par lâappari-tion de variables, par dĂ©finition strictement localisĂ©es dans le temps : un coupdâĂtat peut en quelques heures faire basculer une dĂ©mocratie dans le campdes dictatures ; une intervention extĂ©rieure destinĂ©e Ă Ă©radiquer des pandĂ©-mies peut modifier drastiquement des donnĂ©es dĂ©mographiques sĂ©culaires :en 1947, Ceylan (aujourdâhui Sri Lanka), rĂ©vĂ©lait des taux de mortalitĂ© delâordre 2,5 % ; en 1949, ils passaient sous la barre des 1 % ; entre temps, lâar-mĂ©e amĂ©ricaine, soucieuse de protĂ©ger les GIâs dans les bases en cours dâins-tallation dans le pays face au danger communiste avait modifiĂ© le monde ruralcinghalais par une utilisation massive de DDT.
Historiquement, au-delĂ de sa dĂ©finition, et des avatars quâelle a subis du-rant lâentre-deux-guerres, la discipline GĂ©opolitique est partagĂ©e entre deuxtendances :
PremiĂšre tendance : considĂ©rer que les tendances lourdes, et tout particu-liĂšrement les donnĂ©es gĂ©ographiques doivent ĂȘtre prises prioritairement encompte dans le champ des analyses : la « position », par exemple. Elle a com-mandĂ©, par le biais des distances, le facteur « communications terrestres etmaritimes » en jouant avec lâespace et ses contraintes jusquâĂ lâaube de duXXe siĂšcle ; lâaccĂšs Ă la mer notamment, a constituĂ© une condition sine qua nonde lâexpansion dâune nation ; tĂ©moins le rĂŽle tenu par Mare Nostrum dans lâAn-tiquitĂ©, le mariage sĂ©culaire de lâOcĂ©an et de la puissance britannique, ou la« course Ă la mer » dâun Pierre le Grand. Câest dans ce contexte aussi quâappa-raĂźt la place historique des dĂ©troits et des isthmes : les dĂ©troits au doubleintĂ©rĂȘt stratĂ©gique et Ă©conomique, points dâancrages et points dâescales,illustrĂ©s en particulier par la Sonde, le Bosphore, les Dardanelles, Gibraltarou le Sund ; les isthmes (Corinthe, Schlesvig), souvent revitalisĂ©s (et ce nâestpas un hasard) par la politique dâamĂ©nagement des canaux transocĂ©aniquesde la seconde moitiĂ© du XIXe siĂšcle (Suez, Panama).
Souvenons nous de la leçon inaugurale de Jules Michelet, en Sorbonne,consacrĂ©e Ă la Grande-Bretagne : « Messieurs, (il nây avait pas, Ă cette Ă©poque,de jeunes filles dans la vĂ©nĂ©rable enceinteâŠ), la Grande-Bretagne est une Ăźle.Mon cours est achevĂ©. » Et le cĂ©lĂšbre historien faisait mine, non sans humour,de disparaĂźtre !
Seconde tendance : refuser dâoctroyer un rĂŽle de premier plan Ă ces ten-dances lourdes du fait de lâapparition ou de lâĂ©panouissement de certainesvariables contemporaines. Depuis un demi-siĂšcle et la « saga du nuclĂ©aire »,certains auteurs soulignent, non sans finesse â bien que lâargument concernemoins la GĂ©opolitique que sa sĆur cadette, la GĂ©ostratĂ©gie â que lâatome, dansle cas (certes, et fort heureusement, trĂšs hypothĂ©tique !) dâun conflit nuclĂ©aire,ignore la taille dâun territoire, sa position, la prĂ©sence ou lâabsence de littoraux
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ou dâobstacles orographiques (lâapparition de lâarme nuclĂ©aire a potentielle-ment mis Ă la retraite, par exemple, le plus constant et valeureux dĂ©fenseurde la Russie, le cĂ©lĂ©brissime GĂ©nĂ©ral Hiver).
DâAlexandre le Grand au Vietnamien Giap, en passant par Jules CĂ©sar, Ri-chelieu, Vauban, FrĂ©dĂ©ric II ou Bismarck, la liste est longue des « stratĂšgeset hommes dâĂtat » privilĂ©giant le dĂ©terminisme physique, un concept quia servi de trame de rĂ©fĂ©rence Ă nombre de GĂ©opoliticiens du XXe siĂšcle. Mais,depuis le milieu de ce dernier, hĂ©ritiers des visions prophĂ©tiques de lâĂcos-sais McKinder, dâautres spĂ©cialistes ont donc tendu Ă relĂ©guer ce dernier Ă lâarriĂšre plan, au profit de facteurs conjoncturels.
Un consensus sâest progressivement Ă©tabli entre les deux « Ă©coles », pouraboutir aujourdâhui Ă un constat : la prĂ©dominance de trois thĂšmes majeurs :lâuniversalisation des facteurs Ă©conomiques et idĂ©ologiques ; les sĂ©quelles(encore tenaces) du double processus historique de colonisation et de dĂ©co-lonisation ; la multiplication des « facteurs variables ».
Ce double faisceau de causes rendant compte de la spĂ©cificitĂ© de telle outelle situation gĂ©opolitique, « tendances lourdes » et « variables contempo-raines » constitue ainsi lâĂ©pine dorsale de la mĂ©thodologie de la recherche enGĂ©opolitique.
SECTION 2.âŠaux mĂ©thodes souvent semblablesâŠ
Il ressort des dĂ©finitions de ces trois disciplines, quâil existe entre elles sinonune convergence, du moins des relations Ă©troites ; ce sont des disciplines voi-sines dont les mĂ©thodes visent Ă produire des connaissances Ă©quilibrĂ©es etcomplĂ©mentaires sur leur objet dâĂ©tude.
A â UN OBJECTIF COMMUN
Outre leur champ dâĂ©tude â lâinternational â, les trois disciplines se re-trouvent dâabord sur lâobjectif poursuivi par la recherche : il sâagit bien sĂ»rde rendre compte de la façon la plus prĂ©cise possible du rĂ©el afin dâen amĂ©-liorer la connaissance ; mais cette recherche nâest pas nĂ©cessairement dĂ©s-intĂ©ressĂ©e : elle peut Ă©galement viser Ă fonder une opinion consultative ouprescriptive Ă lâintention des pouvoirs ou/et du public ; dans tous les cas,elle suppose la maĂźtrise dâune certaine logique formelle et dâune techniquedistincte, scientifiquement validĂ©e. Les trois disciplines relĂšvent en effet des
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sciences sociales oĂč les connaissances se construisent Ă lâappui de cadres thĂ©o-riques et mĂ©thodologiques explicites, Ă©laborĂ©s de façon pragmatique, et sontĂ©tayĂ©es par une observation des faits concrets.
Relevant des sciences sociales, les trois disciplines considĂšrent que pour ĂȘtrevalides, les connaissances doivent ĂȘtre produites selon certaines rĂšgles et cer-taines procĂ©dures rigoureuses (problĂ©matique argumentĂ©e, dĂ©finition prĂ©-cise des concepts, mise Ă lâĂ©preuve dâhypothĂšses, observations systĂ©matiques).
Les phĂ©nomĂšnes ou situations Ă©tudiĂ©s sont alors observĂ©s sous un angledĂ©fini par les concepts thĂ©oriques et expliquĂ©s par le chercheur au terme decette observation particuliĂšre : autrement dit, dans les trois disciplines, il nepeut y avoir de constatation satisfaisante sans la construction prĂ©alable dâuncadre thĂ©orique de rĂ©fĂ©rence. Certes, lâarticulation entre la thĂ©orie et lâobserva-tion peut adopter des modalitĂ©s diffĂ©rentes selon la discipline considĂ©rĂ©e ;mais la rĂ©alisation dâun schĂ©ma conceptuel est indispensable.
Lorsque les hypothĂšses ou propositions prĂ©sentĂ©es par le chercheur sontsusceptibles dâĂȘtre vĂ©rifiĂ©es par la rĂ©alitĂ©, elles sont alors qualifiĂ©es de scien-tifiques.
B â DES APPROCHES COMPLĂMENTAIRES
Plus encore, les trois disciplines peuvent se complĂ©ter : le droit internatio-nal prĂ©tend analyser lâarticulation entre ordres national et international et four-nir lâinterprĂ©tation du contenu des normes et du pouvoir des institutions. Orcette dĂ©marche descriptive ou normative ne permet pas dâapprĂ©hender tousles phĂ©nomĂšnes relatifs Ă une situation ou Ă une question, dâautant que se pose,comme toujours en matiĂšre juridique et plus encore dans le domaine inter-national, la question de la plus ou moins bonne application de la rĂšgle de droit.Les Relations Internationales constituent alors un apport apprĂ©ciablepuisquâelles tentent dâexpliquer la conduite et le fonctionnement des relationsentre les nations, les organisations internationales et les diffĂ©rents acteurs trans-nationaux Ă lâaide de grilles de lectures alternatives rendant compte de la com-plexitĂ© des phĂ©nomĂšnes internationaux. Quant Ă la GĂ©opolitique, elle rencontreles deux disciplines prĂ©cĂ©dentes dans leur dĂ©marche, mais y ajoute son in-tĂ©rĂȘt pour lâespace (ressources naturelles, comportements dĂ©mographiquesĂ long terme, structures politiques et sociĂ©tales, tendances gĂ©o-Ă©conomiques)et le temps (notamment les perspectives historiques de longue durĂ©e). Ainsile rĂ©el peut-il ĂȘtre observĂ© et analysĂ© sous des facettes diffĂ©rentes â ou desangles diffĂ©rents â mais complĂ©mentaires.
Les relations entre ces disciplines peuvent-elles aller â au-delĂ de cette con-vergence â jusquâĂ une vĂ©ritable interpĂ©nĂ©tration ? Une approche interdis-
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ciplinaire fait appel Ă plusieurs disciplines mais, au lieu de dĂ©velopper despoints de vue successifs, elle intĂšgre lâutilisation de ces disciplines dans uneapproche unique qui les associe de maniĂšre cohĂ©rente. Il semble que cette « in-terdisciplinaritĂ© » apporterait Ă chacune dâelles dâapprĂ©ciables bĂ©nĂ©fices quiconcernent les mĂ©thodes et mĂȘme le contenu. Il est cependant permis dâendouter pour des raisons Ă la fois thĂ©oriques et pratiques.
Du point de vue thĂ©orique, lâinterdisciplinaritĂ© est un idĂ©al impossible Ă atteindre. Certes, la critique de la fragmentation des objets de connaissance,du fractionnement du processus de comprĂ©hension des phĂ©nomĂšnes et dela parcellisation du savoir est justifiĂ©e : la plupart des spĂ©cialistes des sciencessociales regrettent la trop grande spĂ©cialisation des points de vue sur la rĂ©a-litĂ© et lâĂ©miettement des disciplines. LâinterdisciplinaritĂ© viendrait alors rap-peler aux scientifiques qui lâauraient oubliĂ© que câest le point de vue qui crĂ©elâobjet ; elle permettrait de dĂ©cloisonner lâobservation et le travail scientifiquerĂ©alisĂ©s par chacune des disciplines. Mais lâentreprise est-elle possible ? Lechercheur peut-il utiliser des concepts, des mĂ©thodes et des thĂ©ories forgĂ©esau sein dâautres disciplines que la sienne pour les faire travailler sur son objetdâĂ©tude ? Cela suppose la capacitĂ© de sâapproprier concepts, mĂ©thodes et thĂ©o-ries, câest-Ă -dire disposer du vocabulaire et des connaissances nĂ©cessaires Ă leur maĂźtrise. Or pour un chercheur en sciences sociales, qui aura suivi uncursus « classique » et donc cloisonnĂ© Ă une discipline, lâentreprise exige uninvestissement intellectuel important⊠Mais mĂȘme sâil consent cet effort, ilsera confrontĂ© Ă un autre problĂšme : celui de la cohĂ©rence Ă©pistĂ©mologique.Car aucune discipline ne peut se prĂ©valoir dâune objectivitĂ© absolue ; chaquediscipline repose sur un certain nombre dâaxiomes, implicites ou explicites,qui sont indĂ©montrables mais qui doivent former un ensemble cohĂ©rent. Com-ment assurer la cohĂ©rence dâune approche vĂ©ritablement interdisciplinaire ?Seul remĂšde : pour « fonctionner », lâinterdisciplinaritĂ© suppose que lâon choi-sisse une « discipline maĂźtresse » qui encadre lâensemble du raisonnementscientifique. Mais ce nâest plus de lâinterdisciplinaritĂ©âŠ
Du point de vue pratique, lâinterdisciplinaritĂ© entre droit international,Relations Internationales et GĂ©opolitique nâest ni souhaitable ni possible. Sâilsâagit de dĂ©velopper un corpus de concepts communs, de partager un mĂȘmelangage et de crĂ©er un modĂšle analytique nouveau pour examiner la rĂ©ali-tĂ©, le risque est de dĂ©penser beaucoup dâĂ©nergie pour Ă©laborer un langageĂ©sotĂ©rique au service dâanalyses moins percutantes que celles menĂ©es danschaque discipline, ce qui nâest pas souhaitable. Ce nâest pas non plus pos-sible car, au-delĂ de leurs mĂ©thodes somme toute semblables, les trois dis-ciplines privilĂ©gient des dĂ©marches ponctuellement spĂ©cifiques.
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SECTION 3.âŠmais dont les dĂ©marches
sont occasionnellement spécifiques
Les relations entre le droit international, les Relations Internationales etla GĂ©opolitique ne se bornent pas Ă la convergence Ă©voquĂ©e plus haut ; il fautconstater des divergences de mĂ©thodes et des dĂ©marches ponctuellement spĂ©-cifiques. Pour sâen convaincre, il nâest pas inutile dâexposer tour Ă tour la dĂ©-marche du chercheur en droit international, la mĂ©thodologie de la rechercheen Relations Internationales et celle que propose la GĂ©opolitique.
A â LA MĂTHODE DE LA RECHERCHE EN DROIT INTERNATIONAL
La recherche en droit international pose des problĂšmes spĂ©cifiques quitiennent Ă la valeur des sources utilisĂ©es et Ă lâinterprĂ©tation qui en est faitepar le chercheur.
Si en thĂ©orie, les spĂ©cialistes considĂšrent quâil nâexiste pas de hiĂ©rarchieentre les sources du droit international, il est facile de constater quâen pra-tique, lâutilisation de sources conventionnelles (les traitĂ©s) offre moins de priseĂ la critique et que ces derniĂšres sont donc privilĂ©giĂ©es. En revanche, un raison-nement consistant Ă Ă©tablir lâexistence dâune rĂšgle coutumiĂšre ou dâun prin-cipe gĂ©nĂ©ral du droit peut toujours faire lâobjet de controverse ; la citation dâunjugement peut toujours faire lâobjet de contestation (en rĂ©fĂ©rence Ă la jurispru-dence de la juridiction concernĂ©e).
Mais le problĂšme mĂ©thodologique capital reste celui de lâinterprĂ©tationdu droit. LâinterprĂ©tation est une Ă©tape essentielle de la recherche en droit inter-national et la plus difficile : la collecte des sources est relativement simple alorsque leur interprĂ©tation est bien plus complexe. Les manuels lui accordent ce-pendant peu dâimportance, sans doute en raison de la survivance dâune con-ception positiviste du phĂ©nomĂšne : lâinterprĂ©tation serait une opĂ©rationpassive consistant Ă consacrer le sens, qualifiĂ© de « clair » ou « dâĂ©vident »,du texte concernĂ© ; elle ne pourrait dĂ©boucher que sur une seule solutionjuridique correcte. En rĂ©alitĂ©, quelle que soit la prĂ©cision des textes considĂ©-rĂ©s, il nâexiste jamais une seule interprĂ©tation possible ; les thĂ©ories contempo-raines de lâinterprĂ©tation insistent au contraire sur la marge considĂ©rable demanĆuvre dont dispose lâinterprĂšte : en lâoccurrence, le chercheur. Il nâexistedonc pas dâinterprĂ©tation qui sâimposerait a priori. Cependant, ceci ne signi-fie pas que toutes les interprĂ©tations se valent : certaines interprĂ©tationspeuvent ĂȘtre prĂ©fĂ©rĂ©es Ă dâautres parce quâelles sont plus correctement
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motivĂ©es. La convention de Vienne sur le droit des traitĂ©s comprend trois ar-ticles (31, 32 et 33) relatifs Ă lâinterprĂ©tation des traitĂ©s ; les rĂšgles gĂ©nĂ©rales etles moyens dâinterprĂ©tation qui y sont Ă©noncĂ©s peuvent ĂȘtre utilisĂ©s pourdâautres types de textes ou de sources. Il faut dâabord prendre en compte letexte de la disposition (et interprĂ©ter les termes utilisĂ©s selon le sens ordinaire ;un terme ne sera entendu dans un sens particulier que sâil est entendu quetelle Ă©tait lâintention des parties) et le contexte (dĂ©fini dans lâarticle 31, par.2, comme « tout accord ayant rapport au traitĂ© » et « tout instrument Ă©tabliĂ lâoccasion de la conclusion du traité⊠» : il ne sâagit donc pas du contextehistorique). Il convient ensuite de prendre en compte « toute rĂšgle pertinentede droit international applicable dans les relations entre les parties », ainsique tout accord ultĂ©rieur relatif Ă lâapplication du traitĂ©. Il faut enfin prendreen compte lâobjet et le but du traitĂ© (ou plus gĂ©nĂ©ralement du texte concernĂ©) :câest sur ce point que la latitude du chercheur est la plus grande. Ă titre demoyens complĂ©mentaires, lâarticle 32 mentionne « les travaux prĂ©para-toires » et « les circonstances dans lesquelles le traitĂ© a Ă©tĂ© conclu ».
B â LA MĂTHODE DE LA RECHERCHE EN RELATIONS INTERNATIONALES
La mĂ©thode propre Ă la discipline des Relations Internationales prĂ©supposecertaines clarifications thĂ©oriques, ainsi quâune articulation rĂ©ussie entre le mo-dĂšle thĂ©orique et lâobjet empirique. Cinq pas thĂ©oriques sont indispensables:
â une clarification Ă©pistĂ©mologique et ontologique ;â choisir un niveau dâanalyse : individuel, Ă©tatique, systĂ©mique ;â faire une option en ce qui concerne la dichotomie agence-structure ;â choisir la thĂ©orie/le modĂšle le plus appropriĂ© Ă lâobjet dâĂ©tude ;â Ă©mettre des hypothĂšses.
Ăcrire un travail de recherche en Relations Internationales prĂ©supposeessentiellement dâarticuler un certain nombre dâĂ©noncĂ©s thĂ©oriques avec les don-nĂ©es empiriques offertes par la rĂ©alitĂ© que le chercheur se propose dâĂ©tudier,de comprendre et dâexpliquer. Si cette articulation entre la thĂ©orie et les don-nĂ©es empiriques constitue le noyau de la mĂ©thode des Relations Interna-tionales, certaines clarifications concernant tant la dĂ©marche thĂ©orique, que lerapport du chercheur Ă la rĂ©alitĂ© Ă©tudiĂ©e sont nĂ©cessaires avant de commencer.
Deux questions prĂ©alables Ă tout positionnement par rapport Ă lâobjet dâĂ©-tude et par rapport Ă la thĂ©orie sont Ă poser :
â est-ce que la rĂ©alitĂ© sociale est donnĂ©e objectivement, une fois pourtoutes, et par consĂ©quent observable directement par le chercheur, ou
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bien est-elle dans un processus continu de re-construction ? Ou, plus sim-plement : la réalité est-elle bien « réelle » ? (la question ontologique) ;
â est-ce quâil est possible de connaĂźtre la rĂ©alitĂ© sociale de maniĂšre objec-tive, dans une dĂ©marche similaire Ă celle des sciences exactes, ou bienle chercheur construit son objet dâĂ©tude en fonction de ses propres va-leurs ? (la question Ă©pistĂ©mologique).
DĂšs quâil aura rĂ©pondu Ă ces questions, il sera plus facile au chercheur defaire un choix des thĂ©ories Ă employer pour confronter son objet dâĂ©tude, carce sont les deux questions principales qui divisent les diffĂ©rents paradigmesdes Relations Internationales.
Le deuxiĂšme pas consiste Ă choisir un niveau dâanalyse censĂ© mieux ren-dre compte du phĂ©nomĂšne que lâon tente dâexpliquer. Lâanalyse peut sesituer au niveau de lâindividu-dĂ©cideur, au niveau des processus dĂ©cision-nels au sein des Ătats ou au niveau systĂ©mique19. Ce choix facilitera Ă©gale-ment la dĂ©marche ultĂ©rieure, car une approche systĂ©mique penchera vers lestructuralisme, tandis que lâexplication qui met lâaccent sur la maniĂšre dontun Ătat prend des dĂ©cisions Ă lâintĂ©rieur de son systĂšme politique accorderaune place importante Ă lâagence.
TroisiĂšmement, le chercheur devra dĂ©cider sâil va opter pour une expli-cation structuraliste ou bien pour une explication qui met lâaccent sur la capa-citĂ© des Ătats de façonner leur environnement international.
En quatriĂšme lieu, il faut choisir une thĂ©orie ou un modĂšle dâanalyse. Cechoix doit ĂȘtre cohĂ©rent avec les options prĂ©alables du chercheur et, dâunecertaine maniĂšre, en dĂ©coule directement. Par exemple, si lâon croit que la rĂ©a-litĂ© est donnĂ©e, et quâelle peut ĂȘtre Ă©tudiĂ©e de maniĂšre objective en utilisantune dĂ©marche reprise des sciences de la nature, si lâon prĂ©fĂšre le niveau sys-tĂ©mique pour comprendre les relations entre les Ătats, et si on croit que la struc-ture de ce systĂšme dĂ©termine le comportement des Ătats, alors, presquecertainement, on est un nĂ©o-rĂ©aliste, et on doit donc chercher au sein de ceparadigme le modĂšle quâon va appliquer Ă ces donnĂ©es empiriques.
Finalement, le cinquiĂšme pas thĂ©orique consiste Ă formuler des hypo-thĂšses qui lient la thĂ©orie pour laquelle on a optĂ© avec le phĂ©nomĂšne que lâonveut Ă©tudier. Tout le long de la recherche, il faut faire attention Ă ne pasperdre de vue cette articulation permanente entre la thĂ©orie et les faits.
_________________________19. Cette typologie appartient Ă Kenneth Waltz, Man, the State, and War. A theoretical analysis,
New York, Columbia University Press, 1959. Il soutient cependant que le propre de ladémarche des RI serait le troisiÚme niveau, celui systémique.
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C â LA MĂTHODE DE LA RECHERCHE EN GĂOPOLITIQUE
Ă lâinstar des disciplines prĂ©cĂ©dentes, la GĂ©opolitique fait appel Ă une mĂ©-thode. En effet, pour observer objectivement une situation gĂ©opolitique, il fautune mĂ©thode solide et scientifique. Cette mĂ©thode est axĂ©e sur la prise encompte de plusieurs grilles dâanalyse offertes par des diverses disciplines20,comme la gĂ©ographie21 ou lâhistoire. Pour ce qui est de la science politique,lâon estime quâelle dĂ©voile une « triple complexification de la gĂ©opolitique :centrĂ©e sur les âgrandsâ, elle descend vers les âpetitsâ (micro-gĂ©opolitique) ;axĂ©e sur les masses, elle sâintĂ©resse aux rĂ©seaux (en particulier les diasporas) ;nâapprĂ©hendant traditionnellement que ce qui est immobile (les peuples iden-tifiĂ©s Ă un territoire), elle cherche Ă saisir ce qui bouge : les flux, les migra-tions. Lâappareil photo se fait camĂ©ra »22.
La GĂ©opolitique est un savoir pratique et opĂ©ratoire ayant pour fondementune mĂ©thode dâanalyse scientifique reposant sur la prise en compte de ce queJacques Soppelsa appelle dâune part, les « tendances lourdes » et dâautre part,les « variables contemporaines » de lâobjet dâĂ©tude.
Câest pourquoi la premiĂšre Ă©tape de la recherche portera sur le recense-ment le plus complet et le plus objectif possible des principaux paramĂštres,« quâils soient jugĂ©s importants et structurants du point de vue de leur in-fluence sur la dynamique du systĂšme, qui Ă©chappent Ă la maĂźtrise de lâacteuren charge de la rĂ©flexion et/ou qui soient porteurs dâincertitudes majeures. »Elle doit se traduire par une description objective des phĂ©nomĂšnes observĂ©s,parallĂšlement Ă lâĂ©laboration et Ă lâanalyse critique des sources.
La seconde Ă©tape doit permettre de distinguer les « tendances lourdes » etles « variables » : les premiĂšres constituent la toile de fond de la quĂȘte des fac-teurs explicatifs, les incertitudes pouvant susciter, en outre, les prĂ©missesdâune esquisse prospective.
Recenser, dĂ©crire, expliquer les caractĂšres fondamentaux dâune situationgĂ©opolitique : tout ceci peut (ou doit) ensuite dĂ©boucher, soit, en changeantdâĂ©chelle (notion capitale tant en GĂ©ographie politique quâen GĂ©opolitique),Ă nuancer les analyses prĂ©alables, soit Ă proposer des scenarii pour le procheavenir23.
_________________________20. Yves Lacoste, Géographie du sous-développement, Paris, PUF, 1965.
21. Yves Lacoste, La gĂ©ographie, ça sert dâabord Ă faire la guerre, Paris, Maspero, 1976.
22. Philippe Moreau Defarges, Dictionnaire de géopolitique, Paris, Armand Colin, 2002, p. 60.
23. François Thual, Méthodologie de la Géopolitique, Paris, Ellipses, 1996.
DEUXIĂME PARTIE
Les Ă©tapes de la recherche
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Le mĂ©moire de master et la thĂšse de doctorat sont des ouvrages scien-tifiques censĂ©s apporter un progrĂšs dans la connaissance : soit un Ă©clairageoriginal sur une question, soit la reconstruction dâun corpus explicatif, soitlâapprofondissement ou le renouvellement dâune analyse sur un point parti-culier. Câest dire quâils comportent, selon des proportions variables, des des-criptions et des analyses, mais aussi un apport personnel de lâauteur. CâestparticuliĂšrement le cas de la « thĂšse » puisque ce terme dĂ©signe non seule-ment un ouvrage composĂ© en vue de lâobtention du titre de docteur, mais aussiune proposition que lâon Ă©nonce et que lâon soutient. La thĂšse consiste en effetĂ exposer Ă lâintention dâautrui les rĂ©sultats dâune recherche et dâune rĂ©-flexion, de la maniĂšre la plus claire, la plus complĂšte et la plus prĂ©cise pos-sible. Or ces qualitĂ©s dĂ©pendent de la mĂ©thode de travail.
Chaque recherche est particuliĂšre ; chaque chercheur est confrontĂ© Ă desdifficultĂ©s singuliĂšres et doit sâadapter Ă des situations souvent imprĂ©vues.Mais en aucun cas il ne faut procĂ©der sur la base des seules intuitions ou desopportunitĂ©s du moment. Une recherche en sciences sociales suppose deprocĂ©der avec mĂ©thode : câest-Ă -dire respecter les principes gĂ©nĂ©raux du tra-vail scientifique et suivre une dĂ©marche scientifique. ProcĂ©der avec mĂ©thode,câest dâabord dĂ©terminer clairement lâobjectif Ă atteindre, ensuite Ă©tablir lasomme des opĂ©rations Ă rĂ©aliser et des matĂ©riaux Ă rassembler, enfin accom-plir ces opĂ©rations de façon ordonnĂ©e.
Lâobjectif de cet ouvrage est de prĂ©senter la dĂ©marche scientifique sous laforme de six Ă©tapes Ă parcourir ; le tableau ci-dessous indique prĂ©cisĂ©mentces Ă©tapes de la recherche et dĂ©crit les opĂ©rations Ă rĂ©aliser pour passer dâuneĂ©tape Ă lâautre. Il est certain quâune recherche concrĂšte nâest pas aussi mĂ©-canique et que les Ă©tapes â prĂ©sentĂ©es ici sĂ©parĂ©ment pour des raisons didac-tiques â se chevauchent souvent ; câest la raison pour laquelle les interactionspossibles seront soulignĂ©es par la suite.
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____________________________
1. Les Ă©tapes de la recherche ne sont pas isolĂ©es les unes des autres, et chaque Ă©tape peut fairelâobjet dâun renvoi Ă une Ă©tape antĂ©rieure.
2. Voir Ădith Jaillardon et Dominique Roussillon, Outils pour la recherche juridique. MĂ©thodolo-gie de la thĂšse de doctorat et du mĂ©moire de master en droit, coll. « Manuel », Ăditions desarchives contemporaines, Paris, 2006. Cet ouvrage a Ă©tĂ© publiĂ© avec le soutien du comitĂ©de coordination et de suivi du programme concernĂ©.
Droit international2
Les recherches exploratoires
Il sâagit de faire une pre-miĂšre dĂ©limitation dusujet. Cette Ă©tape doit per-mettre dâidentifier : les rĂ©fĂ©rences principalesconstituant la base futurede la documentation â les approches envisa-geables â les difficultĂ©sprĂ©visibles. Cette Ă©tapeoffre la possibilitĂ© dedĂ©finir une vue gĂ©nĂ©raledu travail projetĂ© et dedonner un titre (provi-soire) Ă la recherche.
GĂ©opolitique
Amorce de la recherche
La premiĂšre Ă©tape rĂ©sidedans lâidentification glo-bale du sujet, des sourcesprincipales, socles desrĂ©fĂ©rences bibliogra-phiques et des difficultĂ©ssusceptibles dâĂȘtre ren-contrĂ©es au cours deladite recherche.
RelationsInternationales
DĂ©finition de la ques-tion centrale
Le projet de recherchedoit exprimer le plusexactement possible, à travers cette question cen-trale, ce que le chercheursouhaite produire commeconnaissance, en développant de nou-velles connaissances ouen modifiant des connais-sances déjà existantes. La question centrale doitservir de fil conducteur à la recherche.
Identification de lâobjet dâanalyse ; quĂȘte des sources principales ; validation provisoire de la dĂ©marche.
Ătapes de la recherche1
Ătape n° 1
Ătape n° 1
DĂ©frichement du terrain
Le défrichement du ter-rain va permettre de fairele point sur les thÚmes quiont été dégagés. Il fautcommencer à préciser etapprofondir les quelquesidées directrices déjà dégagées.
Poursuite des recherchesexploratoires
DĂ©termination de lâaxemajeur (question centrale)de la thĂšse et desquestions connexes.Recherches iconogra-phiques. Elaboration de labibliographie et de lasitographie.
Travail dâexploration
Cette Ă©tape comprend desĂ©lĂ©ments de lecture (ver-sion papier et versionĂ©lectronique) et des entre-tiens. Le travail dâexplo-ration vise Ă actualiser lesconnaissances du cher-cheur sur lâobjet dâĂ©tude.Il sâagit Ă©galement de dĂ©-finir de nouvelles pers-pectives en vue de finali-ser la dĂ©finition de la pro-blĂ©matique.
Validation du thĂšme central et mise en valeur des questions qui sây rattachent ; hiĂ©rarchisation des sources et des rĂ©fĂ©rences bibliographiques.
Ătape n° 2
Ătape n° 2
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GĂ©opolitique
Définition de la problématique
Confirmation de lâidĂ©edirectrice. Ăliminationprogressive de certaineshypothĂšses hasardeuses ouerronĂ©es. PremiĂšresdĂ©terminations desfacteurs explicatifs.Utilisation systĂ©matiquedes outils cartogra-phiques et iconogra-phiques. Identification et utilisation des conceptsspĂ©cifiques.
RelationsInternationales
Définition de la problématique
La problĂ©matique peutĂȘtre dĂ©finie commelâapproche thĂ©orique quele chercheur dĂ©cidedâadopter pour analyserla (les) question(s)centrale(s).La problĂ©matique doitdonc permettre dâĂ©tablirun lien entre lathĂ©matique qui fait lâobjetde la recherche et lesressources thĂ©oriques quiseront utilisĂ©es.
Droit international
DĂ©finir les grandes orientations
Il sâagit de dresserlâinventaire prĂ©cis et dĂ©-taillĂ© de toutes lesquestions qui peuvent seposer, directement ouindirectement, Ă proposdu sujet traitĂ©. Quelquesquestions « simples »peuvent aider Ă dĂ©finirces grandes orientations :Pourquoi ? Comment ?Quels problĂšmes ? Avecquels effets ? La formula-tion dâhypothĂšses enrĂ©ponse (au moins provi-soire) Ă toutes ces ques-tions va contribuer Ă structurer le projet et Ă en dĂ©finir les grands axes.Câest la rĂ©flexion sur lesquestions ayant faitlâinventaire qui va faireĂ©merger les grandeslignes de la recherche,presque dâelles-mĂȘmes.
Ătapes de la recherche
Ătape n° 3
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Droit international
Construire son sujet
Construire son sujet, câestdĂ©finir les hypothĂšsesqui, au-delĂ des appa-rences et des Ă©vidences,vont permettre de sĂ©lec-tionner les Ă©lĂ©ments Ă prendre en compte, de lesinterprĂ©ter, de leur don-ner un sens, ce qui facili-tera la comprĂ©hension delâobjet dâĂ©tude et, Ă©ven-tuellement, contribuera Ă lâĂ©laboration dâune thĂ©o-rie. Propositions de rĂ©-ponses Ă des questionsbien posĂ©es, les « bonnes »hypothĂšses peuvent avoirdes origines diverses (lectures, changementsnormatifs, constructionintellectuelle, observa-tions empiriques, etc.),elles sont prĂ©cieuses carelles suggĂšrent des pistesde recherche. Ellespeuvent supposer lâexis-tence de ressemblances,de diffĂ©rences, de liensentre tels et tels mĂ©ca-nismes, de pistes pourexpliquer lâĂ©volution detelle institution ou de telmĂ©canisme juridiqueâŠ
GĂ©opolitique
Construction du sujet
Approfondissement de laquestion centrale et hiĂ©-rarchisation des ques-tions connexes. Poursuitede lâanalyse des facteurs.Identification des ten-dances lourdes et des va-riables contemporaines.Prise en compte systĂ©ma-tique de la notiondâĂ©chelle.
RelationsInternationales
Construction du modĂšle dâanalyse
Le modĂšle dâanalyse doitpermettre le passage de ladĂ©finition de la problĂ©-matique (approchethĂ©orique) au travaildâobservation (approcheopĂ©rationnelle). Le modĂšle dâanalyse in-tĂšgre dans sa dĂ©finitiondes concepts et des hypo-thĂšses qui sâarticulententre eux pour finaliserun cadre dâĂ©tudecohĂ©rent.
Ătapes de la recherche
Ătape n° 4
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Droit international
Ătablir son plan
Le plan sâest construitpeu Ă peu : 1° lâĂ©tablissement dâun
plan provisoire : idĂ©es directrices dĂ©ga-gĂ©es quâil faut organi-ser, articuler entreelles, Ă©ventuellementregrouper
2° le cadrage du plan :délimitation finale du sujet, ce qui sup-pose de faire des choixthéoriques, privilégiercertains axes, re-trancher ou ajouterpour donner à la thÚseson aspect définitif
3° LâĂ©tablissement du plan dĂ©finitif : quâest-ce qui mâest nĂ©-cessaire pour effectuerla dĂ©monstration sou-haitĂ©e ? Quâest-ce quimâest nĂ©cessaire poursuivre le « fil rouge »de ma dĂ©monstration,en le dĂ©roulant demaniĂšre prĂ©cise et per-tinente et en ne lâaban-donnant jamais ?
GĂ©opolitique
Ălaboration du plandĂ©taillĂ©
Construction progressivedu plan de la thĂšse.Articulation des parties et des chapitres.Confirmation de lâaccom-pagnement iconogra-phique.
RelationsInternationales
Travail dâobservationet dâanalyse de lâinfor-mation
Ce travail comprend lâen-semble des activitĂ©s parlesquelles le modĂšledâanalyse est testĂ©. Il sâagit de vĂ©rifier si lesrĂ©sultats obtenus corres-pondent aux hypothĂšsesformulĂ©es dans le modĂšledâanalyse, et, plus prĂ©-cisĂ©ment, si les rĂ©sultatsobtenus sont ceux prĂ©ala-blement dĂ©terminĂ©s.
Validation dĂ©finitive du plan de lâouvrage et travail de rĂ©daction.
Ătapes de la recherche
Ătape n° 5
Ătape n° 5
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Droit international
Conclusion de la recherche
La conclusion sert à fairele bilan du travail,dégager sesenseignements, évoquerses développements etperspectives ultérieurs.
GĂ©opolitique
Conclusion de la recherche
AprĂšs avoir dressĂ© lebilan de la recherche, laconclusion permet dâĂ©vo-quer des hypothĂšsesprospectives Ă court ou Ă moyen terme (Ă©laboration de diversscenarii).
RelationsInternationales
Conclusion de la recherche
La conclusion comprendun rappel du modĂšledâanalyse et une prĂ©sen-tation des connaissancesproduites par la re-cherche. Il sâagit ici demettre en Ă©vidence enquoi la recherche a per-mis de produire un sa-voir sur lâobjet dâĂ©tude,en dĂ©veloppant des nou-velles connaissances ouen modifiant des con-naissances dĂ©jĂ exis-tantes.
Bilan et perspectives.
Ătapes de la recherche
Ătape n° 6
Ătape n° 6
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CHAPITRE I.
Une démarche commune
Il existe plusieurs maniĂšres dâapprĂ©hender la pluralitĂ© disciplinaire ; onprivilĂ©giera ici, eu Ă©gard Ă nos objectifs pĂ©dagogiques, celle qui lie Ă©troitementladite pluralitĂ© au niveau dâinteraction entre les disciplines.
Le tableau ci-dessus prĂ©sente un double intĂ©rĂȘt pĂ©dagogique : montrer quedans les premiĂšres Ă©tapes et les Ă©tapes terminales de la recherche, les grandsprincipes mĂ©thodologiques sont trĂšs similaires et que lâutilisation des sourceset dâun certain nombre de concepts par lâĂ©tudiant ou lâĂ©quipe de recherche,quel que soit son champ disciplinaire dâorigine, obĂ©it Ă la mĂȘme logique etse traduira par lâenrichissement de ladite dĂ©marche. En revanche, les Ă©tapesintermĂ©diaires (3. la dĂ©finition de la problĂ©matique et 4. la construction dâunmodĂšle dâanalyse) demeurent spĂ©cifiques, ce qui a une double consĂ©quence :contribuer Ă nouveau Ă lâenrichissement de ladite dĂ©marche par lâutilisationpertinente de concepts et dâoutils spĂ©cifiques Ă dâautres disciplines ; Ă©viterdes dĂ©rives mĂ©thodologiques qui sâavĂ©reraient dommageables eu Ă©gard aucloisonnement actuel des disciplines et des structures de recherche caractĂ©-risant lâespace francophone.
En dĂ©pit de leur caractĂšre particulier, les trois disciplines partagent doncun champ commun : il sâagit des deux premiĂšres et des deux derniĂšresĂ©tapes du tableau mĂ©thodologique, câest-Ă -dire la dĂ©limitation du sujet (1),la validation du thĂšme central (2), la validation dĂ©finitive du plan (5), le bilanet les perspectives (6).
SECTION 1.La délimitation du sujet (étape 1)
Le premier problĂšme qui se pose au chercheur est de savoir comment com-mencer son travail. Il nâest en effet pas facile de traduire un intĂ©rĂȘt ou unecuriositĂ© assez vague et informulĂ©e en un projet de recherche. Pour limiterles hĂ©sitations et Ă©viter les errements, une technique consiste Ă choisir la ma-tiĂšre ou le domaine dans lequel se situera le sujet de la thĂšse ou du mĂ©moire.Et pour ce faire, il faut tenir compte de diffĂ©rents facteurs qui ne sont pas toussubjectifs.
Les facteurs personnels peuvent Ă©videmment jouer un rĂŽle important dansle choix du domaine, pour un mĂ©moire (travail dâune durĂ©e limitĂ©e Ă quelques
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mois), mais plus encore pour un travail de thĂšse (puisquâil sâagit dâune re-cherche durant plusieurs annĂ©es) : dâabord, la prĂ©fĂ©rence personnelle pourun domaine ou une discipline affirmĂ©e Ă lâoccasion des Ă©tudes antĂ©rieuresou des lectures ou encore des suggestions faites par un enseignant ; ensuite,la connaissance de ses propres capacitĂ©s, de ses aptitudes (par exemple, dansla mesure oĂč le travail de recherche se rĂ©alise Ă partir de textes ou, dâune ma-niĂšre gĂ©nĂ©rale, de documents de premiĂšre main, une connaissance de certaineslangues Ă©trangĂšres, indispensable pour traiter un sujet de droit internatio-nal, de Relations Internationales ou de GĂ©opolitique) et de ses limites (notam-ment la difficultĂ© de cumuler travail et recherche) ; enfin, le goĂ»t pour larecherche thĂ©orique : il faut en effet avoir un certain goĂ»t pour lâanalyse etle raisonnement quand on choisit la voie de la rechercheâŠ
Mais il ne faut pas nĂ©gliger les contraintes matĂ©rielles, qui ne dĂ©pendentpas du candidat : dâabord, lâaccĂšs Ă la documentation doit ĂȘtre aisĂ© ; une ra-pide recherche sur lâInternet permet de se faire une idĂ©e de la documenta-tion en ligne ou papier disponible, gratuitement ou non ; il faut Ă©galementprendre en compte les plus ou moins grandes facilitĂ©s de dĂ©placement et dâac-cĂšs aux lieux intĂ©ressants (par exemple, un sujet sur lâONU doit sâappuyersur la possibilitĂ© dâaccĂšs aux documents publiĂ©s et diffusĂ©s par lâONU et mĂȘmeĂ ceux qui ne font pas lâobjet dâune publication ; un sujet Ă forte dominantehistorique ne peut se rĂ©aliser sans lâaccĂšs aux archives pertinentes) ; enfin lesdĂ©marches prĂ©alables Ă une enquĂȘte ou Ă des entretiens peuvent prendre beau-coup de temps et nĂ©cessiter des moyens financiers. Il faut donc ĂȘtre rĂ©alisteet choisir de traiter une question en rapport avec les ressources personnelles,matĂ©rielles et techniques sur lesquelles on peut raisonnablement compter.
Ensuite et surtout, il importe de dĂ©finir prĂ©cisĂ©ment lâobjectif poursuiviĂ travers la thĂšse. Si la thĂšse a pour objectif lâorientation vers lâenseignementet la recherche, elle doit ĂȘtre un travail de haut niveau : le sujet doit dĂ©pas-ser la simple prĂ©sentation de mĂ©canismes ou institutions juridiques et/ou poli-tiques et sociales ; il doit mettre en Ă©vidence la rĂ©flexion thĂ©orique et lâanalyse.Si la thĂšse a pour objectif un emploi dans le secteur privĂ© ou le secteur pu-blic (y compris international), le travail Ă rĂ©aliser aura sans doute unemoindre ambition thĂ©orique et sera vraisemblablement plus pratique et plustechnique dans la prĂ©sentation et la rĂ©flexion sur les mĂ©canismes Ă©tudiĂ©s ; maisil ne pourra pas se contenter dâĂȘtre descriptif.
Dans le cadre de la matiĂšre ainsi identifiĂ©e (par exemple, le droit interna-tional), le choix devra porter sur un thĂšme de recherche (une idĂ©e gĂ©nĂ©ralequi peut donner lieu Ă de nombreuses dĂ©clinaisons : par exemple, lâagressionou la frontiĂšre, en droit international), puis sur un objet de recherche (un Ă©lĂ©-ment prĂ©cis du thĂšme de recherche : par exemple, lâagression commise par
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des acteurs non Ă©tatiques ; ou la fixation des frontiĂšres) et enfin un sujet (lâĂ©vo-lution des rĂšgles internationales concernant lâagression « indirecte » ; ou lafixation des frontiĂšres en Afrique). De nouveau, des critĂšres personnelspeuvent intervenir ici : lâintĂ©rĂȘt personnel pour le sujet, de mĂȘme que lâuti-litĂ© sur le plan professionnel ou pour lâorientation future, ou encore certainesaptitudes personnelles telles que la pratique de langues Ă©trangĂšres, lâacces-sibilitĂ© des moyens dâenquĂȘte, de recherche et de documentation...
Mais il faut aussi faire preuve de rĂ©alisme et choisir un sujet rĂ©alisable dansde bonnes conditions et conforme aux possibilitĂ©s du candidat. Les « bons »sujets sont ceux qui permettent Ă leur auteur de faire Ă©tat de sa connaissancede la littĂ©rature existante sur le thĂšme choisi, de montrer sa maĂźtrise des con-cepts et des thĂ©ories sur la question, de faire la dĂ©monstration scientifique,argumentĂ©e et logiquement exposĂ©e dâune « thĂšse » personnelle.
Une premiĂšre phase de prospection doit ĂȘtre engagĂ©e, qui va permettrede dĂ©gager un sujet disponible. Il faut prospecter avec mĂ©thode, rejeter unsujet dĂ©jĂ traitĂ©, achevĂ© ou publiĂ©. La premiĂšre dĂ©marche consiste Ă consul-ter le fichier central des thĂšses pour sâassurer quâaucune thĂšse nâa Ă©tĂ© enregis-trĂ©e ni soutenue sur le mĂȘme sujet et avec la mĂȘme approche. La deuxiĂšmedĂ©marche consiste Ă rechercher les ouvrages traitant du sujet, ainsi que lesarticles importants publiĂ©s dans les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. Ainsi est-il possiblede savoir avec certitude si un nouveau travail sâimpose ou est possible. Si telest le cas, il faut ensuite procĂ©der Ă la dĂ©limitation du sujet.
OpĂ©rer la dĂ©limitation du sujet, câest dĂ©terminer quelles devraient ĂȘtre laconception gĂ©nĂ©rale du sujet et ses principales caractĂ©ristiques. Il faut identi-fier les rĂ©fĂ©rences principales constituant la base future de la documentation ;cerner les contours du thĂšme Ă traiter ; dĂ©finir les approches envisageables ;prĂ©ciser quelques idĂ©es gĂ©nĂ©rales. Il ne sâagit certainement pas de faire unplan, mais de dĂ©finir une vue gĂ©nĂ©rale du travail projetĂ© et de donner un titre(provisoire) Ă la thĂšse. LâexpĂ©rience dĂ©montre que, dans la majoritĂ© des cas,il vaut mieux avoir au dĂ©part une conception large du sujet ; il sera toujourspossible par la suite de restreindre, si nĂ©cessaire, la visĂ©e et de centrer la re-cherche sur un nombre plus limitĂ© de questions parce que celles-ci auront paruplus intĂ©ressantes, plus nouvelles, se prĂȘtant plus facilement Ă des considĂ©-rations novatrices, reprĂ©sentant un vĂ©ritable apport thĂ©orique, etc. Parfoisaussi, câest le simple rĂ©alisme, la prise de conscience que le sujet est trop vastepour un travail de master ou de doctorat qui peut dĂ©terminer le candidat,en accord avec le directeur de recherche, de limiter son champ dâinvestiga-tion et dâanalyse. Le titre devra, bien entendu, ĂȘtre modifiĂ© en consĂ©quencepour Ă©viter le reproche, lors de la soutenance, de nâavoir traitĂ© quâune par-tie de la question.
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Mais dans tous les cas, le projet de recherche doit exprimer une questioncentrale ou un thĂšme central qui va servir de fil conducteur. Le chercheur doitsâefforcer de le dĂ©gager assez rapidement pour que le travail puisse dĂ©butersans retard et se structurer ; peu importe si ce fil conducteur ou thĂšme cen-tral semble banal ; peu importe si lâauteur change de perspective en cours deroute : ce point de dĂ©part est provisoire ; mais il est essentiel dâĂ©noncer le pro-jet de recherche sous la forme dâune question de dĂ©part dans laquelle le cher-cheur va exprimer le plus prĂ©cisĂ©ment possible ce quâil cherche Ă savoir etĂ comprendre. Cette question de dĂ©part doit donc ĂȘtre formulĂ©e le plus claire-ment possible et avec concision. Câest un bon moyen de prouver que le pro-jet est Ă la fois pertinent et faisable.
Questions : Quel est lâobjectif poursuivi en entamant le travail de la thĂšse ?Pouvez-vous Ă©tablir une liste de thĂšmes entretenant un rapport avecce sujet ?Pouvez-vous formuler une question de dĂ©part prĂ©cise et rĂ©aliste ?
SECTION 2.La validation du thĂšme central (Ă©tape 2)
à ce stade, deux tùches sont essentielles : défricher le terrain et définirles grandes orientations de la recherche. Le défrichement du terrain va per-mettre de faire le point sur les sources documentaires relatives aux thÚmesprincipaux dégagés précédemment. La définition des grandes orientationsde la recherche va constituer une opération déterminante pour mettre en évi-dence les points de repÚre qui vont guider dans la collecte des informationset constituer le support du travail.
Câest ainsi que le thĂšme central de lâĂ©tude pourra ĂȘtre validĂ©, tandis quâau-tour de lui les idĂ©es directrices et les perspectives principales commencerontĂ sâagencer.
Le dĂ©frichement du terrain permet de prĂ©ciser et dâapprofondir les quelquesidĂ©es directrices dĂ©jĂ dĂ©gagĂ©es. Les premiĂšres recherches doivent ĂȘtre mĂ©-thodiques et systĂ©matiques ; leur point de dĂ©part est la bibliographie quâil fautdĂ©velopper et exploiter par un choix de thĂšmes et de sources : les lectures per-mettent de faire le point sur les connaissances existantes concernant le sujet ;dans certaines des sciences sociales (par exemple en sociologie), les entretiensont Ă©galement une grande importance, car ils enrichissent les lectures person-
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nelles par le point de vue dâenseignants et dâexperts du domaine de rechercheconsidĂ©rĂ©, ou celui de tĂ©moins privilĂ©giĂ©s, ou encore celui du public ; ils per-mettent au chercheur de prendre conscience dâaspects du sujet auxquels seslectures ne lâavaient pas rendu sensible. Les recherches doivent ĂȘtre centrĂ©esautour des idĂ©es gĂ©nĂ©rales confirmĂ©es par la discussion avec le directeur derecherche et visent Ă actualiser les connaissances du chercheur sur le sujet etĂ imaginer des perspectives ; il faut donc mener de front les recherches biblio-graphiques, les entretiens Ă©ventuels et lâexploitation de ces rĂ©fĂ©rences, câest-Ă -dire la prise de notes. Il nâest pas nĂ©cessaire, Ă ce stade, dâaller au bout des pistesentrevues ; il sâagit en effet dâune sorte de tour dâhorizon. Lâobjectif est de menerdes recherches exploratoires sur les questions gĂ©nĂ©rales afin de pouvoir Ă©va-luer le travail Ă faire et de dĂ©finir ainsi les grandes orientations du projet.
Les grandes orientations du travail vont permettre dâaller plus loin. Ellespeuvent ĂȘtre dĂ©finies par quelques questions simples, mais dont les rĂ©ponsespeuvent ĂȘtre difficiles Ă vĂ©rifier :
Dans le cas dâune Ă©tude de nature sociologique, lâobservateur devra seposer les questions suivantes : Quoi observer ? (Quelles sont les donnĂ©es Ă rassembler ?) ; Qui observer ? (Quel est le champ de lâanalyse, la populationconsidĂ©rĂ©e ?) ; Comment observer ? (Quels sont les instruments dâobserva-tion et dâanalyse utilisĂ©s ?).
Dans le cas dâune analyse de nature juridique ou de science politique, lesquestions gĂ©nĂ©ralement retenues sont : Pourquoi ? (Pourquoi le fait, le mĂ©ca-nisme ou lâorganisme Ă©tudiĂ© a-t-il Ă©tĂ© crĂ©Ă©, dans quel but ?) ; Comment ?(Quelles sont les modalitĂ©s choisies pour sa mise en place par rapport Ă quellesautres modalitĂ©s possibles ou comparables dans lâhistoire ou dans dâautrespays ?) ; Quels problĂšmes le fait, le mĂ©canisme ou lâorganisme Ă©tudiĂ© a-t-ilrencontrĂ© lors de sa mise en place ? (Ă quelles limites liĂ©es au systĂšme exis-tant sâest-il heurtĂ© ? Des « effets pervers », câest-Ă -dire non prĂ©vus et lâayantfait dĂ©river par rapport Ă ses objectifs initiaux, ont-ils Ă©tĂ© constatĂ©s ?) ; Avecquels effets ? (Pour lâorganisme ou le mĂ©canisme lui-mĂȘme ? Sur son envi-ronnement ? Sur tel ou tel principe fondant traditionnellement le domaineconcernĂ© ? Sur lâensemble du systĂšme concernĂ© ?).
En somme, il sâagit de dresser lâinventaire prĂ©cis et dĂ©taillĂ© de toutes lesquestions qui peuvent se poser, directement ou indirectement, Ă propos dusujet Ă traiter.
Il faut donc faire le tour du sujet de la maniĂšre la plus exhaustive possi-ble et de nâoublier aucun Ă©lĂ©ment dans cet inventaire. Des omissions, surtoutsi elles sont importantes, font courir deux sortes de risques : dâune part, celuide se les voir reprocher le jour de la soutenance ; dâautre part, celui de faire
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perdre au travail une partie de son intĂ©rĂȘt puisque lâune de ses dimensionsnâaura pas Ă©tĂ© abordĂ©e.
La formulation dâhypothĂšses en rĂ©ponse (au moins provisoire) Ă toutesces questions va contribuer Ă structurer le projet et Ă en dĂ©finir les grands axeset les questions connexes. Câest la rĂ©flexion sur les questions dont on vientde faire lâinventaire qui va faire Ă©merger les grandes lignes de la recherche.Et ce sont ces grandes lignes qui vont, ensuite, constituer les bases Ă partirdesquelles la construction du sujet et la dĂ©finition du plan de la thĂšse (ou dumĂ©moire) pourront ĂȘtre initiĂ©es.
La validation du thĂšme central dĂ©coule logiquement lorsque la comprĂ©-hension du sujet a suffisamment progressĂ© : certains aspects se sont clarifiĂ©s,des idĂ©es nouvelles sont apparues (diffĂ©rentes, peut-ĂȘtre mĂȘme contradictoirespar rapport aux prĂ©cĂ©dentes), certaines questions se rĂ©vĂšlent sans intĂ©rĂȘt outrop marginales tandis que dâautres, au contraire, revĂȘtent une importanceimprĂ©vue et ouvrent des perspectives prometteuses de rĂ©flexion et dâanalyse ;la dĂ©finition du thĂšme central est donc indispensable pour hiĂ©rarchiser et trierlâinformation. Elle va aussi permettre de construire un systĂšme de questionset dâhypothĂšses fondĂ©es sur des outils mĂ©thodologiques ou des concepts aussirigoureux que possible.
Câest le moment de rĂ©diger un canevas, qui fixe les limites de lâĂ©tude, dĂ©finitses grands axes et en dĂ©termine lâorientation : soit quelques grandes ques-tions Ă Ă©lucider ; soit quelques grands domaines Ă Ă©tudier, en prĂ©cisant lesmoyens et les mĂ©thodes qui seront mis en Ćuvre. La rĂ©daction de ce canevasprĂ©sente deux avantages : Ă court terme, elle oblige le candidat Ă faire le pointdu travail dĂ©jĂ rĂ©alisĂ©, Ă clarifier et systĂ©matiser ses idĂ©es, Ă les ordonner selonleur importance, Ă les articuler entre elles comme une sorte dâargumentaire ;Ă long terme, le canevas sera constamment prĂ©sent pour commander la pour-suite de la recherche : sa consultation frĂ©quente Ă©vitera au candidat de tropsâĂ©loigner du sujet et de se disperser, et lâobligera Ă approfondir mĂ©thodique-ment le thĂšme central en triant les sources et les rĂ©fĂ©rences qui sây rapportent.Car le plan sommaire ou canevas sâarticule autour du thĂšme central qui doitpouvoir ĂȘtre formulĂ© en quelques lignes.
Le canevas doit ĂȘtre validĂ© par le directeur de recherche.
Questions : La recherche documentaire est-elle achevée ?Pouvez-vous formuler quelques hypothÚses de travail ?Le thÚme central est-il précisé ?
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SECTION 3.La validation définitive du plan et la rédaction (étape 5)
La construction du sujet (Ă©tape prĂ©cĂ©dente) permet lâĂ©tablissement du plan :les deux sont liĂ©s puisque ce sont lâapproche du sujet et la problĂ©matique adop-tĂ©es qui vont dĂ©terminer lâarchitecture gĂ©nĂ©rale du travail et donc le plan. Ilfaut en effet rĂ©pĂ©ter quâune thĂšse nâest pas une juxtaposition de thĂšmes ou dedescriptions mais une dĂ©monstration : un point de vue que lâon expose et quelâon soutient par des arguments.
Le plan est le support de la dĂ©monstration et de lâargumentation que veutmener lâauteur, il doit donc ĂȘtre clair, prĂ©cis, explicite de la problĂ©matique quâen-tend dĂ©velopper lâauteur. Sa pensĂ©e ainsi construite et mise en forme seramieux assimilĂ©e car plus aisĂ©ment comprĂ©hensible par le lecteur.
Le plan ne sâĂ©tablit pas en une seule fois ; il ne devient vraiment dĂ©fini-tif que lorsque lâouvrage est lui-mĂȘme terminĂ© (Benjamin Constant : « On nepeut travailler Ă un ouvrage quâaprĂšs en avoir fait le plan, et un plan ne peutĂȘtre bien fait quâaprĂšs que toutes les parties de lâouvrage sont achevĂ©es »).La rĂ©alisation dâune Ă©tude est un processus dynamique : il va donc Ă©voluer,se modifier au fur et Ă mesure de lâaugmentation de la documentation, delâaffinement de la connaissance et de la comprĂ©hension du sujet, mais ausside lâavancement de la rĂ©daction (il faut nĂ©anmoins quâil soit suffisammentprĂ©cisĂ© avant le dĂ©but de la rĂ©daction⊠Câest toute la difficultĂ©).
à son origine, se trouvent le canevas, puis le plan provisoire, qui aurontmis en évidence les points de repÚre, les idées directrices organisées, articu-lées entre elles, éventuellement regroupées. Ils ont été progressivement com-plétés et affinés.
Lorsque la phase de documentation est achevĂ©e, le « cadrage du plan »permet la dĂ©limitation finale du sujet. Câest le moment de faire le dernier triet choisir entre les diverses solutions possibles, de faire des choix thĂ©oriquesen privilĂ©giant certains axes, de retrancher ou dâajouter pour donner Ă la thĂšseson aspect dĂ©finitif. Lorsque le chercheur a utilisĂ© un modĂšle dâanalyse, câestle moment de vĂ©rifier que les rĂ©sultats obtenus correspondent aux hypo-thĂšses formulĂ©es dans le modĂšle dâanalyse.
Il sâagit donc de dĂ©limiter de façon prĂ©cise la portĂ©e du sujet : certains Ă©lĂ©-ments, Ă©ventuellement considĂ©rĂ©s comme marginaux au dĂ©but, ont pris delâimportance au cours des recherches ou, au contraire, des Ă©lĂ©ments quiavaient Ă©tĂ© surĂ©valuĂ©s au dĂ©but doivent ĂȘtre convoquĂ©s plutĂŽt en tantquâauxiliaires ou ĂȘtre Ă©liminĂ©s.
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Le sujet peut Ă©galement avoir Ă©tĂ© envisagĂ© de maniĂšre trop restrictive audĂ©but : il faut donc lui donner plus dâampleur, thĂ©orique par exemple. Inver-sement, le sujet a pu ĂȘtre au dĂ©part envisagĂ© de maniĂšre trop large : il convientdonc, sans en diminuer la portĂ©e thĂ©orique, de le restreindre et lui donner uneenvergure compatible avec la durĂ©e dâun travail de ce type (trois Ă quatre anspour une thĂšse, quelques mois pour un mĂ©moire). On lâa dit plus haut : câestaffaire de rĂ©alisme. Il nây a rien de dĂ©shonorant Ă calibrer un sujet en fonc-tion du temps disponible.
Il faut aussi tenir compte de lâactualitĂ©, câest-Ă -dire tout Ă©lĂ©ment nouveauintĂ©ressant le thĂšme de la recherche : lâactualitĂ© peut ĂȘtre prĂ©vue ou prĂ©visi-ble lorsquâelle consiste par exemple dans la publication dâun texte de droitinterne ou dâun accord international dont lâauteur connaissait la prĂ©parationen raison de ses recherches sur ce point ; elle est imprĂ©vue quand il sâagit dedĂ©cisions qui expriment un revirement ou une Ă©volution brutale, ou dâĂ©vĂ©ne-ments politiques ou sociaux, nationaux ou internationaux inattendus. Quelsque soient les aspects quâelle prend, lâactualitĂ© doit ĂȘtre prise en compte etincorporĂ©e dans le travail sous la forme et selon les modalitĂ©s les plus adap-tĂ©es aux besoins du sujet. Mais, en tout Ă©tat de cause, il est clair quâil ne fautrien construire sur des Ă©lĂ©ments pĂ©rimĂ©s ou dĂ©passĂ©s et quâune thĂšse doit ĂȘtreĂ jour au moment de la rĂ©daction. Il ne faut pas se lamenter dâun revirementjurisprudentiel, dâune rĂ©forme lĂ©gislative, dâune rĂ©volution politique : cettesurvenance donne de la valeur Ă un travail qui sera parmi les premiers Ă lâintĂ©-grer en son sein ; dâautant quâun tel Ă©vĂ©nement rend obsolĂšte tout ce qui a Ă©tĂ©Ă©crit sur le sujet auparavant.
Le plan se construit autour du thĂšme central : il sâagit dâune dĂ©monstra-tion qui utilise de façon prĂ©cise et pertinente les Ă©lĂ©ments en possession delâauteur. Il sâagit de ne retenir que les Ă©lĂ©ments qui sont nĂ©cessaires, et mĂȘmeindispensables, Ă cette dĂ©monstration.
LâĂ©tablissement du plan dĂ©finitif doit Ă©viter quelques Ă©cueils majeurs.Dâabord, le plan ne doit pas ĂȘtre artificiel ; il doit articuler des idĂ©es direc-trices Ă©troitement liĂ©es au sujet : articuler, câest-Ă -dire relier selon un schĂ©maou une progression logique. Il faut faire apparaĂźtre la rĂ©flexion de lâauteur etla dĂ©monstration qui la justifie.
Ensuite, le plan ne doit pas ĂȘtre simplement descriptif. Certes, des Ă©lĂ©mentsdescriptifs sont nĂ©cessaires, notamment pour des faits ou des organismes peuconnus. Mais ces observations et cette Ă©tude des faits doivent conduire Ă desrĂ©flexions ou analyses thĂ©oriques : câest ce qui constitue la thĂšse.
Ajoutons enfin que le plan doit Ă©viter les rĂ©pĂ©titions. Certes, il est toujourspossible de traiter dâun mĂȘme thĂšme dans des chapitres diffĂ©rents, mais Ă
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condition que ce soit sous des angles diffĂ©rents et que la dĂ©monstrationlâexige. Un plan qui contient des rĂ©pĂ©titions est, en gĂ©nĂ©ral, mauvais. Si onne peut pas dire que savoir Ă©viter les rĂ©pĂ©titions est toujours le signe dâunbon plan, on peut, en revanche, affirmer que ne pas savoir les Ă©viter est, Ă coupsĂ»r, le signe dâun mauvais plan.
Questions : Le plan définitif est-il achevé ?Que voulez-vous démontrer ?La démonstration apparaßt-elle clairement à la simple lecture duplan ?
SECTION 4.Le bilan et les perspectives (Ă©tape 6)
Comme lâintroduction gĂ©nĂ©rale, la conclusion gĂ©nĂ©rale est distincte du restedu texte ; elle ne comporte pas de subdivisions. Elle est courte (quelques pages),ce qui ne veut pas dire quâelle nâa pas dâimportance. Car la conclusion dâuntravail est la partie que les lecteurs lisent volontiers en premier lieu : ilsveulent, grĂące Ă la lecture de ces quelques pages, se faire une idĂ©e gĂ©nĂ©raleet prĂ©cise de lâintĂ©rĂȘt que la recherche prĂ©sente, sans devoir lire lâensemble ;ce nâest que si cette dĂ©couverte rapide les inspire quâils dĂ©cideront de lirelâensemble du travail. Câest pourquoi il convient de rĂ©diger la conclusion avecbeaucoup dâattention et dây faire apparaĂźtre les informations utiles aux lec-teurs potentiels.
La difficultĂ© de la conclusion gĂ©nĂ©rale est dâobliger le candidat Ă ramasserde façon condensĂ©e tout ce qui a le plus de relief dans son travail afin dâen mon-trer lâintĂ©rĂȘt. La conclusion contient lâessentiel de la « thĂšse » du candidat.
En contradiction avec la formule de Flaubert « la bĂȘtise câest de conclure »(mais il se plaçait sans doute sur le terrain littĂ©raire oĂč il ne faut fermer aucuneporte Ă lâimagination), conclure un mĂ©moire ou une thĂšse consiste donc Ă fairele bilan du travail rĂ©alisĂ© en rappelant la question de dĂ©part et le modĂšle dâana-lyse utilisĂ© ou la problĂ©matique dĂ©gagĂ©e, en relevant les observations effec-tuĂ©es et les rĂ©sultats obtenus, ou les idĂ©es essentielles autour du fil conducteuret en indiquant les enseignements que lâon peut en tirer ; il pourra sâagir deconfirmer les connaissances existantes sur la question, ou de revendiquer âen le justifiant â une modification de ces connaissances : un travail de recherchesociale est en effet susceptible dâapporter de nouvelles connaissances rela-tives Ă lâobjet dâanalyse, mais aussi de nouvelles connaissances thĂ©oriques(points de vue originaux, questionnements nouveaux).
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Conclure, câest aussi le moment de prendre parti et dâexprimer sa posi-tion personnelle, lorsque le sujet comporte un dĂ©bat entre opinions opposĂ©es.Il faut reprendre sa « thĂšse » et la mettre en valeur en rappelant les argumentsdĂ©veloppĂ©s tout au long de lâĂ©tude.
Conclure peut conduire enfin Ă Ă©voquer des perspectives sur la question(Ă©ventuellement des perspectives sur des applications pratiques), ou Ă envisa-ger des hypothĂšses prospectives Ă court ou moyen terme. Câest particuliĂšre-ment vrai en GĂ©opolitique : la derniĂšre partie pourra ĂȘtre articulĂ©e autour dedeux orientations complĂ©mentaires. Le changement dâĂ©chelle, tout dâabord.Un sujet consacrĂ© Ă lâUnion europĂ©enne devra plus que vraisemblablementdistinguer, aprĂšs la description des caractĂšres gĂ©opolitiques appliquĂ©s Ă lâen-semble de lâUnion et des facteurs rendant compte de leur spĂ©cificitĂ©, les Ă©lĂ©-ments concrets susceptibles dâĂȘtre appliquĂ©s, par exemple, aux membres delâUnion gravitant au sein de lâEurope Occidentale (« la vieille Europe » de Do-nald Rumsfeld) et aux nouveaux venus de lâEurope de lâEst, notamment lesex-DĂ©mocraties populaires. LâĂ©tude des flux migratoires vers ladite Union con-duira vraisemblablement Ă conclure quâils se conjuguent de maniĂšre diffĂ©rentedans les pays europĂ©ens de lâinterface mĂ©diterranĂ©en (de la GrĂšce Ă lâEspagneen passant par Chypre, lâItalie ou Malte) et dans les Ătats baltes ou scandinaves.
ParallĂšlement Ă ce changement dâĂ©chelle, rappelons que toute Ă©tude gĂ©o-politique doit en principe dĂ©boucher sur des perspectives, des projections (bienentendu Ă©tayĂ©es par des arguments solides) voire des scenarii esquissĂ©s pourle moyen terme. Ici aussi, il faudra non seulement raison garder mais sâabs-tenir de toute interprĂ©tation partiale et trop personnelle.
Concernant la bibliographie et les annexes, les mĂȘmes principes mĂ©thodo-logiques sâappliquent : une approche iconographique, mĂȘme sommaire, estsouvent la bienvenue. « Un croquis vaut mieux quâun long discours » rappe-lait frĂ©quemment NapolĂ©on Bonaparte. Encore faut-il que lâapproche carto-graphique respecte un certain nombre de « garde fous » : le terme de « carte »doit ĂȘtre rĂ©servĂ© Ă un document Ă©laborĂ© qui a pour objectif dâinformer et delocaliser avec prĂ©cision ; lâĂ©chelle et lâorientation doivent ĂȘtre systĂ©matique-ment prĂ©sentes. On pourra reprĂ©senter des « cartes » reprises intĂ©gralementdâun ouvrage publiĂ© (« cartes issues de⊠»), des cartes « amĂ©nagĂ©es » parlâauteur (« carte extraite deâŠ, et complĂ©tĂ©e par lâauteur ») voire des cartestotalement construites par lâauteur.
Le « croquis » correspond Ă lâinterprĂ©tation cartographique dâune problĂ©-matique autour de quelques grandes idĂ©es, via la localisation des phĂ©nomĂšnesĂ©tudiĂ©s.
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Le terme de « schĂ©ma cartographique » concerne un document cartogra-phique qui ne recherche pas une localisation prĂ©cise mais la simple visuali-sation dâune idĂ©e ou de plusieurs idĂ©es prĂ©cises.
Rappelons in fine, Ă ce propos, quelques banalitĂ©s, pas toujours inutiles :un croquis doit ĂȘtre lisible (les principaux phĂ©nomĂšnes doivent apparaĂźtreau premier coup dâĆil), Ă la fois clair et contrastĂ© ; il doit hiĂ©rarchiser les es-paces ; il doit ĂȘtre dĂ©monstratif et expressif en mettant en valeur ce que lâonveut dĂ©montrer. Bref, accompagnĂ© par une lĂ©gende structurĂ©e, il peut Ă la foisdĂ©crire le phĂ©nomĂšne et tenter de lâexpliquer.
Quant Ă la bibliographie, il est toujours nĂ©cessaire de la prĂ©senter de fa-çon ordonnĂ©e et classĂ©e. Il est notamment indispensable de distinguer lesouvrages fondamentaux, les ouvrages spĂ©cialisĂ©s, les articles⊠Un rapide com-mentaire personnalisĂ© desdites sources peut ĂȘtre envisagĂ©, Ă condition quâilne se cantonne pas Ă un banal rĂ©sumĂ© de lâouvrage concernĂ©.
Questions : La conclusion rĂ©sume-t-elle fidĂšlement la thĂšse ?Ăvoque-t-elle des perspectives ou des hypothĂšses prospectives ?Contient-elle des Ă©lĂ©ments qui pourraient ĂȘtre utiles Ă la dĂ©monstra-tion ?
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CHAPITRE II.
âŠmais des spĂ©cificitĂ©s Ă chaque discipline
La dĂ©finition de la problĂ©matique (Ă©tape 3) et la construction dâun modĂšledâanalyse (Ă©tape 4) font apparaĂźtre de nettes diffĂ©rences entre les approchesdisciplinaires, comme en tĂ©moigne le tableau synoptique ci-dessus. Ces dif-fĂ©rences rĂ©sultent de lâutilisation dâoutils et de concepts spĂ©cifiques, mais aussiplus profondĂ©ment de mĂ©thodes dâanalyse originales.
SECTION 1.La définition de la problématique (étape 3)
En droit, cette Ă©tape est souvent confondue avec la prĂ©cĂ©dente. Dans uneĂ©tude juridique, dĂ©finir la problĂ©matique consiste le plus souvent Ă dresserlâinventaire prĂ©cis et dĂ©taillĂ© de toutes les questions qui peuvent se poser, Ă formuler des hypothĂšses en rĂ©ponse (au moins provisoire) Ă toutes ces ques-tions, puis Ă dĂ©finir les grands axes et les questions connexes. La rĂ©flexionsur les questions dont on a fait lâinventaire fait alors Ă©merger les grandes lignesde la recherche : grandes lignes qui vont, ensuite, constituer les bases Ă par-tir desquelles la construction du sujet et la dĂ©finition du plan de la thĂšse (oudu mĂ©moire) pourront ĂȘtre initiĂ©es.
Cette lacune de beaucoup dâanalyses juridiques tient au positivisme domi-nant dans les sciences juridiques : les thĂ©ories explicatives sont perçues commeautant de tentations idĂ©ologiques pour un juriste Ă©pris avant tout de neutra-litĂ©. RĂ©sultat : beaucoup de juristes ont choisi de se cantonner Ă la seule ana-lyse des aspects formels des phĂ©nomĂšnes dans une dĂ©marche typiquement« positiviste ». Il nâen reste pas moins quâils « font de la thĂ©orie » sans le savoir :aborder les faits en termes de causalitĂ©, de structure, de rĂ©seau, comme le fontla plupart des Ă©tudes juridiques, câest adopter â sans le dire ou mĂȘme sans lesavoir â des approches dĂ©terminĂ©es (causale, structurale, fonctionnelle) etdonc un paradigme particulier (la dimension structurĂ©e du social).
Il nâen va pas de mĂȘme en Relations Internationales et en GĂ©opolitique.Dans ces deux disciplines, la problĂ©matique dĂ©signe la perspective thĂ©oriqueque lâauteur dĂ©cide, explicitement et de façon formalisĂ©e, dâadopter pour trai-ter le problĂšme posĂ© par la question de dĂ©part. Il sâagit de dĂ©finir lâangle sous
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lequel les phĂ©nomĂšnes vont ĂȘtre Ă©tudiĂ©s : la problĂ©matique fait donc le lienentre lâobjet dâĂ©tude et les outils thĂ©oriques dont dispose lâauteur pour lâĂ©tu-dier. Câest une Ă©tape difficile qui suppose de la part de lâĂ©tudiant une bonneconnaissance des principaux courants thĂ©oriques en sciences sociales, maisaussi la capacitĂ© de mobiliser ces thĂ©ories et concepts avec discernement etpertinence dans une recherche concrĂšte. Car il ne sâagit pas de plaquer surla rĂ©alitĂ© â de façon artificielle â une thĂ©orie toute faite. Il sâagit de lâutiliserpour Ă©clairer et ordonner les phĂ©nomĂšnes Ă©tudiĂ©s, ainsi que pour se poserles bonnes questions et choisir les bonnes pistes de recherche.
En effet, la recherche en sciences sociales doit tendre Ă dĂ©passer la simpledescription des faits (mĂȘme si une bonne description est une Ă©tape impor-tante) ; elle doit viser Ă expliquer les faits. Ceci suppose de les mettre en re-lation avec dâautres faits ou phĂ©nomĂšnes, actions, contextes, Ă©volutionshistoriques, stratĂ©gies globales ou individuelles, fonctions⊠Les diffĂ©rentesthĂ©ories sont censĂ©es aider Ă Ă©tablir un lien entre les donnĂ©es observĂ©es et leshypothĂšses explicatives.
Ă la diffĂ©rence du droit, qui met lâaccent sur la causalitĂ© et les structures,les Relations Internationales et la GĂ©opolitique privilĂ©gient la dimension pro-cessuelle et les concepts dynamiques que sont le mouvement, les interactions,les conflits, les stratĂ©gies, la production sociale, les rĂ©seaux⊠Ainsi lâanalysede GĂ©opolitique qui pourra comporter des descriptions en termes de « stocks »(le propre de la « gĂ©ographie politique ») comportera Ă©galement, lorsque lesujet sây prĂȘte, une analyse en termes de « flux » (Ă©volution des caractĂšres fon-damentaux du dit sujet dans le temps). Ces disciplines insistent Ă©galementsur le sens des phĂ©nomĂšnes sociaux : elles les abordent en termes de culture,dâidĂ©ologie, de reprĂ©sentations sociales ou de symbolique pour tenter de com-prendre la maniĂšre dont les acteurs â individus et groupes â se rattachent Ă©mo-tionnellement aux institutions qui les structurent.
Dans le cas des Relations Internationales, cette troisiĂšme Ă©tape de la re-cherche coĂŻncide avec une option pour le paradigme thĂ©orique dans lequelon a dĂ©cidĂ© dâinscrire son travail de recherche. Cette option devra sâaccom-pagner de quelques questionnements mĂ©tathĂ©oriques prĂ©alables, que nousavons dĂ©taillĂ©s dans la section consacrĂ©e Ă la spĂ©cificitĂ© de la mĂ©thode des Re-lations Internationales. Le paradigme thĂ©orique qui guidera le travail sera choisien fonction de la rĂ©ponse donnĂ©e Ă ces questions, ainsi quâen fonction des spĂ©-cificitĂ©s de lâobjet empirique. Par exemple, il est connu que les sujets liĂ©s Ă laguerre se prĂȘtent mieux Ă une analyse rĂ©aliste, que le paradigme libĂ©ral aapprofondi la question de la coopĂ©ration et des institutions, ou que le cons-tructivisme sâintĂ©resse de prĂ©fĂ©rence Ă la construction des identitĂ©s et des
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intĂ©rĂȘts Ă©tatiques. Lâapproche thĂ©orique devra donc Ă©tablir ce lien entre la vi-sion plus gĂ©nĂ©rale sur la recherche et lâobjet particulier dâĂ©tude.
Le choix dâune problĂ©matique sâeffectue progressivement et de façon prag-matique, Ă mesure de lâavancement de la recherche exploratoire et des lec-tures sur les thĂ©ories en prĂ©sence ; il faut en effet les comparer, mettre enĂ©vidence les diffĂ©rentes approches quâelles proposent ; il faut ensuite choisirune thĂ©orie qui permette de formaliser une problĂ©matique adaptĂ©e au sujetĂ©tudiĂ©.
Expliciter cette problĂ©matique offre lâoccasion de reformuler la questionde dĂ©part : il sâagit de recentrer lâobjet dâanalyse alors que la question de dĂ©partĂ©tait volontairement large ; il sâagit Ă©galement de la prĂ©ciser davantage auregard de lâoption thĂ©orique choisie pour formuler la problĂ©matique.
Questions : Ă quelle(s) thĂ©orie(s) se rattache votre analyse ?Quelle problĂ©matique jugez-vous la plus adaptĂ©e Ă votre sujet ?La question centrale de votre recherche ne doit-elle pas ĂȘtre reformulĂ©e ?
SECTION 2. La construction dâun modĂšle dâanalyse (Ă©tape 4)
La construction du modĂšle dâanalyse constitue la charniĂšre entre la pro-blĂ©matique retenue par le chercheur et son travail dâanalyse puis de rĂ©dac-tion. Ce modĂšle est composĂ© dâhypothĂšses et de concepts articulĂ©s entre eux.Les remarques introductives du paragraphe prĂ©cĂ©dent (Ă©tape 3) relatives Ă la discipline « droit » valent Ă©galement ici.
La recherche doit se structurer autour dâhypothĂšses : une fois formulĂ©es,ces derniĂšres permettent en effet au chercheur de sĂ©lectionner â parmi les nom-breuses donnĂ©es recueillies â celles qui sont pertinentes, câest-Ă -dire utiles Ă lâĂ©tude. Les hypothĂšses sont des propositions qui anticipent une relation entredeux termes (concepts ou phĂ©nomĂšnes) ; elles anticipent : câest dire quâellessont provisoires et nĂ©cessitent la vĂ©rification. Câest prĂ©cisĂ©ment lâobjet de lâob-servation : vĂ©rifier lâadĂ©quation de lâhypothĂšse aux donnĂ©es observĂ©es. Larecherche se prĂ©sente alors comme un incessant va-et-vient entre la rĂ©flexionthĂ©orique et lâobservation empirique.
Cette recherche suppose parallĂšlement la dĂ©finition de concepts, câest-Ă -dire des constructions abstraites qui visent Ă rendre compte du rĂ©el. La con-ceptualisation nâest pas une simple convention ; elle a une utilitĂ© pratique :celui de ne retenir de la rĂ©alitĂ© que ce qui en exprime lâessentiel pour le cher-cheur.
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Par exemple, en GĂ©opolitique, la quĂȘte des facteurs explicatifs conduit Ă dĂ©gager de la gamme des facteurs recensables, les « tendances lourdes » et les« variables contemporaines ». Les tendances lourdes, qui correspondent Ă desĂ©volutions observĂ©es sur une longue pĂ©riode, doivent prĂ©tendre Ă servir derĂ©fĂ©rence raisonnable Ă lâĂ©mission dâhypothĂšses, voire, ultĂ©rieurement, Ă lâĂ©vo-cation de perspectives Ă court ou moyen terme. Câest Ă partir de tendanceslourdes (et singuliĂšrement le binĂŽme incontournable « tendances lourdes liĂ©esĂ lâespace/tendances lourdes liĂ©es au temps ») que seront, dans une troisiĂšmepartie, esquissĂ©s les scenarii possibles. Les variables contemporaines (parfoisqualifiĂ©es « dâincertitudes majeures ») sont de facto des Ă©lĂ©ments dâĂ©valuationsusceptibles dâentraĂźner des fractures brutales face au rĂŽle tenu par certainestendances lourdes.
Pour ce qui est des Relations Internationales, cette Ă©tape suppose, en pre-mier lieu, la construction des hypothĂšses qui seraient des tentatives de don-ner une rĂ©ponse â provisoire â Ă la question de recherche initiale. Ces hypo-thĂšses doivent ĂȘtre cohĂ©rentes avec le paradigme thĂ©orique retenu â ellesdoivent mĂȘme ĂȘtre inspirĂ©es par le paradigme respectif. Ensuite, ces hypo-thĂšses doivent ĂȘtre articulĂ©es sous la forme dâun modĂšle dâanalyse â qui peutĂȘtre dĂ©jĂ existant dans la littĂ©rature, ou bien construit par le chercheur pourcorrespondre Ă son objet dâĂ©tude.
Questions : Quelles sont les hypothÚses retenues ?Quels sont les concepts utilisés ?Voyez-vous clairement les relations entre vos hypothÚses et les con-cepts ?
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CHAPITRE III.
La construction de la pluralité disciplinaire
Trois spĂ©cialistes (droit international, Relations Internationales et GĂ©opoli-tique) prĂ©sentent ci-aprĂšs la construction de plans de mĂ©moire ou de thĂšse :ils ont choisi un sujet thĂ©matique (La question des frontiĂšres en Afrique subsa-harienne) et un sujet spatial (Le fleuve Litani) traitĂ©s en parallĂšle. Il est ainsi pos-sible de comparer trois plans, chacun dans une discipline, afin dâapprĂ©cierles diffĂ©rences dâapproche et de mĂ©thode.
SECTION 1.La question des frontiĂšres en Afrique subsaharienne
A â DU POINT DE VUE DU DROIT INTERNATIONAL
La question des frontiĂšres en Afrique subsaharienne soulĂšve des problĂšmesjuridiques complexes : en effet, la plupart dâentre elles ont Ă©tĂ© imposĂ©es parle colonisateur et pourtant, bien que contestĂ©es, elles demeurent intangiblesdepuis la dĂ©colonisation.
La frontiĂšre peut ĂȘtre dĂ©finie comme la ligne oĂč commencent et oĂč fi-nissent les territoires de deux Ătats voisins ; elle dĂ©termine donc oĂč com-mencent et sâarrĂȘtent les compĂ©tences Ă©tatiques. Les frontiĂšres rĂ©sultentnormalement de compromis conventionnels nĂ©gociĂ©s entre les Ătats limi-trophes ; mais les procĂ©dĂ©s de fixation des frontiĂšres font quelquefois lâob-jet de dĂ©saccords et les affaires relatives au contentieux territorial sontnombreuses, comme en tĂ©moigne la jurisprudence de la Cour internationalede justice.
En Afrique subsaharienne, la question des frontiĂšres pose des problĂšmesspĂ©cifiques dans la mesure oĂč elles rĂ©sultent soit du partage des territoiresentre puissances coloniales (notamment Ă la suite du CongrĂšs de Berlin), soitdes dĂ©limitations administratives internes Ă lâancien empire colonial ou plusrarement dâaccords passĂ©s entre lâancienne mĂ©tropole et un autre Ătat. Danstous les cas, le colonisateur nâa pas tenu compte des identitĂ©s et des solidari-tĂ©s ethniques, sociales ou politiques des populations dans les sociĂ©tĂ©s afri-caines prĂ©-coloniales.
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AprĂšs la dĂ©colonisation, ces frontiĂšres ont bien sĂ»r Ă©tĂ© contestĂ©es ; pour-tant, lâOrganisation de lâunitĂ© africaine (aujourdâhui Union africaine) a pristrĂšs tĂŽt le parti de lâapplication du principe de lâuti possidetis juris, câest-Ă -direle choix du statu quo ante, afin de limiter les tensions liĂ©es aux contentieux ter-ritoriaux (RĂ©solution du Caire, juillet 1964). Cette position fait lâobjet dâun con-sensus (Ă lâexception notable de la tentative de sĂ©cession du Biafra en1967â1970), mais nâempĂȘche pas lâapparition de diffĂ©rends Ă lâoccasion des-quels la Cour internationale de justice a prĂ©cisĂ© le principe de lâintangibilitĂ©des frontiĂšres issues de la colonisation.
I. Des frontiĂšres imposĂ©es par le colonisateurâŠ
A. Le caractĂšre non conventionnel dâĂ©tablissement des frontiĂšresen Afrique subsaharienne
Les modes conventionnels et non conventionnels (unilatĂ©raux, juridiction-nels) dâĂ©tablissement des frontiĂšres.
Le CongrÚs de Berlin (Acte final de la Conférence de Berlin, 26 février 1885)et la délimitation des frontiÚres entre les empires coloniaux.
Les délimitations administratives internes aux empires coloniaux.
B. Le caractĂšre artificiel des frontiĂšres en Afrique subsaharienneFrontiĂšres « naturelles » et frontiĂšres « artificielles » ; principe de lâĂ©quitĂ©.Lâexemple de lâempire français : division entre lâAOF et lâAEF ; puis divi-
sion entre les douze colonies composant lâAOF.
II. âŠet maintenues depuis la dĂ©colonisation
A. Le principe stabilisateur de lâuti possidetis jurisLa mise en Ćuvre du principe en AmĂ©rique latine au XIXe siĂšcle, puis en
Afrique aprÚs la décolonisation.Un « principe général » pour la Cour internationale de justice (affaire Bur-
kina Faso/Mali, 1986).
B. Lâapplication du principe de lâuti possidetis juris en AfriqueSentence arbitrale « DĂ©termination de la frontiĂšre maritime GuinĂ©e-Bis-
sau/SĂ©nĂ©gal », 1989 ; Cour internationale de justice, « DiffĂ©rend frontalierLibye/Tchad Ă propos de la bande dâAouzou » (1994).
Les limites de lâapplication du principe en Afrique subsaharienne.
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Bibliographie sommaire
SociĂ©tĂ© française pour le droit international, La frontiĂšre, Paris, Pedone, 1980.CAFLISCH Lucius, « Essai dâune typologie des frontiĂšres », Relations internationales, n° 63, 1990,
pp. 265â293.GUILLAUME Gilbert, Les grandes crises internationales et le droit, Paris, Seuil, 1994.KOHEN Marcelo, « Les relations titres/effectivitĂ©s dans le contentieux territorial Ă la lumiĂšre
de la jurisprudence rĂ©cente », Revue gĂ©nĂ©rale de droit international public, vol. 108, nÂș 3, 2004,pp. 561â595.
TAVERNIER Paul, « Les diffĂ©rends frontaliers terrestres dans la jurisprudence de la CIJ », Annu-aire français de droit international, 2001, pp. 137â148.
B â DU POINT DE VUE DES RELATIONS INTERNATIONALES
La perspective des Relations Internationales sur la question des frontiĂšresen Afrique subsaharienne devra intĂ©grer des aperçus repris de la GĂ©opoli-tique, ce qui montre encore une fois le caractĂšre hybride de la discipline. LeproblĂšme le plus important liĂ© Ă la dĂ©limitation des frontiĂšres dans cette rĂ©gionconcerne lâincohĂ©rence ethnique des Ătats issus de la dĂ©colonisation. Les fron-tiĂšres arbitrairement tracĂ©es par les empires coloniaux avant leur retraite hĂątiveet, pour la plupart, dĂ©sorganisĂ©e de lâAfrique ne tiennent compte ni des fron-tiĂšres naturelles, ni des groupes ethniques et linguistiques souvent sĂ©parĂ©sbrutalement dans des Ătats diffĂ©rents. Câest la raison principale des conflitsexistant encore de nos jours entre les Ătats africains et des guerres civiles entreles populations qui ne se sentent pas solidaires dans des communautĂ©s poli-tiques artificielles. Plus quâailleurs dans le monde, Ă cause de la transversali-tĂ© des groupes ethniques, les guerres suivent dans cette rĂ©gion un schĂ©madans lequel un groupe ethnique vise la prise du pouvoir Ă lâaide des forcesarmĂ©es dâun Ătat voisin, comme câest le cas du conflit RwandaâCongo en 1996.
Une approche politique de la question des frontiĂšres en Afrique subsaha-rienne devra sâinterroger sur la maniĂšre dont la domination coloniale dâabord,puis la dĂ©colonisation se sont dĂ©roulĂ©es, ont influencĂ© la configuration des fron-tiĂšres et ont donnĂ© naissance aux conflits territoriaux. RĂ©sultant des nĂ©gociationspolitiques entre les empires coloniaux et des pressions pour la dĂ©colonisationexercĂ©es par les deux superpuissances de la guerre froide, plutĂŽt que dâune prĂ©oc-cupation pour la dĂ©limitation Ă©quitable, dans lâesprit de la justice, ces frontiĂšresse sont maintenues jusquâĂ nos jours Ă cause du danger reprĂ©sentĂ© pour la com-munautĂ© internationale par la mise en cause du statu quo.
Une consĂ©quence importante de la maniĂšre dont ces frontiĂšres ont Ă©tĂ© tra-cĂ©es est le manque de solidaritĂ© au sein des communautĂ©s politiques artifi-cielles ainsi crĂ©Ă©es. En dĂ©coule une quĂȘte permanente dâidentitĂ© de la part de
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ces communautĂ©s politiques, qui se traduit par des conflits rĂ©currents. Or,lâĂ©tat conflictuel est lâune des entraves les plus importantes au dĂ©veloppe-ment Ă©conomique, comme lâont bien montrĂ© les penseurs libĂ©raux.
Introduction
Question de recherche : quel est le lien entre la configuration des frontiÚresen Afrique subsaharienne, les conflits ethniques et le sous-développement ?
HypothĂšse : la configuration des frontiĂšres en Afrique subsaharienne estune cause indirecte du sous-dĂ©veloppement, car elle a empĂȘchĂ© la crĂ©ationde communautĂ©s politiques solidaires, capables de mettre en place un pro-jet politique commun.
Clarification conceptuelle et choix thĂ©orique : le rĂ©alisme politique et lathĂ©orie de lâĂ©quilibre de puissances, outils pour la comprĂ©hension de la con-figuration des frontiĂšres ; les thĂ©ories du dĂ©veloppement.
I. La dimension politique de la question des frontiĂšres
A. Aperçu historiqueComment peut-on expliquer la configuration des frontiÚres en Afrique sub-
saharienne ?â les colonies comme ressource de puissance pour la mĂ©tropole ;â les Ătats dâAfrique subsaharienne : crĂ©ation historique de haut en bas.
Ă la diffĂ©rence des Ătats europĂ©ens, dont la crĂ©ation a Ă©tĂ© lâaboutissementdâun long processus historique de formation de la nation, une crĂ©ationorganique de bas en haut, les Ătats dâAfrique subsaharienne ont Ă©tĂ© crĂ©Ă©sde maniĂšre artificielle. Les puissances coloniales ont essayĂ© dâappli-quer un modĂšle totalement inadaptĂ© pour la rĂ©gion, celui de lâĂtat-na-tion de type europĂ©en ;
â la dĂ©limitation des frontiĂšres est un jeu Ă somme nulle. Tout ce qui estgagnĂ© par une partie est perdu par les autres ;
â la dĂ©limitation des frontiĂšres, depuis le CongrĂšs de Berlin (1885) jusquâĂ la fin de la dĂ©colonisation, a Ă©tĂ© le rĂ©sultat de lâĂ©quilibre des puissancescoloniales.
B. Aperçu gĂ©ographiqueQuel est lâimpact de lâethnicitĂ©, de la langue et de la religion sur lâĂ©mer-
gence des conflits territoriaux en Afrique subsaharienne ?â les groupes ethniques en Afrique ;â les langues ;
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â les questions religieuses ;â les frontiĂšres en Afrique subsaharienne ne tiennent aucun compte des
clivages ethniques, linguistiques et religieux.
C. Le maintien du statu quoComment expliquer le maintien du statu quo en dĂ©pit de lâartificialitĂ©
des frontiĂšres ?â les diffĂ©rends territoriaux devant la CIJ ; â les implications politiques et juridiques pour la communautĂ© interna-
tionale de lâĂ©clatement possible des frontiĂšres en Afrique ;â le principe de lâintangibilitĂ© des frontiĂšres, garantie non pas de la jus-
tice internationale, mais de la stabilité.
II. FrontiÚres et développement
A. Les conditions du dĂ©veloppement Ă©conomiqueâ la paix ;â la stabilitĂ© du rĂ©gime politique ;â la prĂ©dictibilitĂ© de lâenvironnement.
B. Le dĂ©veloppement en Afrique subsaharienne. Ătude de cas
Bibliographie sommaire
AMSELLE Jean-Loup et MâBOKOLO Elikia (dir.), Au cĆur de lâethnie. Ethnies, tribalisme et Ătaten Afrique, Paris, La DĂ©couverte, 1999.
BACH Daniel (dir.), RĂ©gionalisation, mondialisation et fragmentation en Afrique subsaharienne, Paris,Karthala, 1998.
BAYART Jean-François, LâĂtat en Afrique. La politique du ventre, Paris, Fayard, 1989.BEJI Hele, Le DĂ©senchentement national. Essai sur la dĂ©colonisation, Paris, La DĂ©couverte, 1982.LEYMARIE Philippe et PERRET Thierry, Les 100 clĂ©s de lâAfrique, Paris, Hachette LittĂ©ratures,
2006.
C â DU POINT DE VUE DE LA GĂOPOLITIQUE
Deux remarques prĂ©alables : â lâambiguĂŻtĂ© du terme « frontiĂšre ». En langue française, ce terme recou-
vre en effet plusieurs rĂ©alitĂ©s, ce qui nâest pas le cas de lâanglais, qui dis-tingue la « frontiĂšre administrative » (« boundary »), frontiĂšre linĂ©aire,de la « zone frontiĂšre » ou « front » â the « frontier » (cf. lâouvrage cultede lâhistorien Frederick Turner quant Ă la « frontiĂšre » du Far West amĂ©-
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ricain, Ă la fin du XIXe siĂšcle). Les deux notions correspondent naturelle-ment Ă une rĂ©alitĂ© historique dans lâAfrique subsaharienne, mais sedĂ©clinent de maniĂšre disparate selon les rĂ©gions et les Ătats.
â la controverse rĂ©cente quant Ă la notion de « frontiĂšre naturelle » et de« frontiĂšre artificielle ». Ă lâĂ©chelle de la planĂšte, la quasi totalitĂ© des fron-tiĂšres, au sens linĂ©aire du terme, ne sont pas naturelles. Bien quâelles cor-respondent assez frĂ©quemment Ă des « rĂ©fĂ©rences naturelles » (fleuves,littoraux, crĂȘtes montagneuses), elles Ă©margent de fait â nâen dĂ©plaiseĂ Richelieu â Ă la dĂ©cision des hommes et, le plus souvent, de compro-mis entre peuples ou⊠belligĂ©rants.
En lâoccurrence, ce qui est profondĂ©ment original en Afrique subsaharienne,câest que lesdites frontiĂšres sont hĂ©tĂ©ronomes, câest-Ă -dire que leur tracĂ© a Ă©tĂ©dĂ©cidĂ© par des dĂ©cideurs extĂ©rieurs au continent.
I. Des frontiÚres spécifiques
A. LâAfrique subsaharienne, une mosaĂŻque dâĂtats « artificiels »LâAfrique, archĂ©type du « Tiers Monde » et de ses flĂ©aux, (au-delĂ dâindĂ©-
niables disparitĂ©s selon les ensembles rĂ©gionaux), apparaĂźt tout dâabord commeun vĂ©ritable kalĂ©idoscope de situations gĂ©opolitiques et gĂ©oĂ©conomiques,une juxtaposition dâĂtats-nations (si tant est que lâon puisse appliquer sansrĂ©serves ce concept au continent) ; un kalĂ©idoscope fruit de dĂ©coupages tech-niques ou « administratifs » extĂ©rieurs, arbitraires, et qui ont pu se chevau-cher au fil du temps : liens tribaux, poids des ethnies, cultures traditionnelles,foyers religieux⊠Les structures et les rĂ©gimes politiques se sont avĂ©rĂ©s trĂšsfragiles depuis un demi-siĂšcle. Depuis la vague dâaccessions Ă lâindĂ©pendancedes annĂ©es soixante, lâAfrique noire a Ă©tĂ© frappĂ©e par la « maladie chronique »de lâAmĂ©rique latine, le « pronunciamento ». PrĂšs dâune trentaine de coupsdâĂtat ont pu ĂȘtre ainsi recensĂ©s dans la zone subsaharienne, tant dans lesnations anglophones (Ghana, Nigeria, Liberia) que dans les pays francophones(Congo, BĂ©nin, Burkina Faso, Tchad, Mali, Niger).
B. âŠgĂ©nĂ©ratrice de multiples contentieux, voire de conflits ouvertsCette extrĂȘme fragilitĂ© caractĂ©rise des Ătats enfermĂ©s dans des frontiĂšres
trÚs « artificielles » (au tracé parfois rectiligne), frontiÚres ùprement dispu-tées et souvent à la source de conflits ouverts.
Depuis lâindĂ©pendance, lâAfrique subsaharienne a connu une successionpresque ininterrompue de guerres. On a pu dĂ©nombrer prĂšs de quatre mil-lions de morts au cours du dernier demi-siĂšcle : guĂ©rillas internes (ou conflitsintra-Ă©tatiques), souvent gĂ©nĂ©rĂ©es ou exacerbĂ©es par les Ătats voisins ; conflits
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de frontiĂšres, tout particuliĂšrement lorsque le tracĂ© de ces derniĂšres ignoresomptueusement la carte traditionnelle de la rĂ©partition des peuples et desethnies. Ces deux types de conflits ouverts se sont multipliĂ©s, en Afrique delâOuest (« conflit du Sahel » entre Mali et Haute Volta en 1974, guerre entrele Nigeria et le Cameroun en 1981) comme en Afrique australe (contentieuxangolo-namibien) ou orientale (Corne de lâAfrique oĂč ces deux types de con-flits ont pu parfois se combiner).
C. âŠdans un monde sous-dĂ©veloppĂ©, aux frontiĂšres permĂ©ables, tant au plan inter-Ă©tatique quâĂ celui des interventions extĂ©rieures
En ce domaine, au cours des derniĂšres dĂ©cennies, il faut souligner lâinter-ventionnisme croissant de puissances Ă©trangĂšres non europĂ©ennes, venantdamner le pion aux anciennes mĂ©tropoles : lâURSS, avant lâimplosion de lâem-pire (parfois par Cuba interposĂ©e, comme en Angola ou au Mozambique) ;les Ătats-Unis, peu prĂ©sents jusquâen 1975 (une seule intervention directe, en1960, au Katanga) mais dĂ©sormais actifs dans la plupart des pays africainsles moins dĂ©munis ; plus rĂ©cemment, la Chine Populaire.
II. Un faisceau diversifié de causes
A. Le caractÚre « aberrant » des frontiÚres confine à la caricature « Contemplez la mappemonde : avec ses frontiÚres taillées au cordeau,
lâAfrique des Ătats semble ĂȘtre crĂ©Ă©e des divagations dâun Dieu-gĂ©omĂštredevenu fou⊠La carte nâa pas de territoire ; elle rappelle seulement la pageblanche sur laquelle, Ă la rĂšgle et au compas, divers Ă©tablissements europĂ©ensse partagĂšrent, au XIXe siĂšcle, un continent. Les armĂ©es coloniales parties, lesfrontiĂšres sont restĂ©es » (AndrĂ© Glucksmann).
Les grandes puissances (CongrĂšs de Berlin), toutes idĂ©ologies confondues,ont largement contribuĂ©, aprĂšs les avoir crĂ©Ă©es, à « figer » les frontiĂšres dansune sorte dâĂ©ternitĂ©, en les proclamant intangibles, et en rendant imprescrip-tible le principe de non intervention dans les affaires des autres pays.
B. Un hĂ©ritage confortĂ© par les effets et les sĂ©quelles de la dĂ©colonisationĂ lâaube des annĂ©es soixante, le continent africain se divisait en zones dâin-
fluences : lâAfrique de lâOuest Ă la France, lâAfrique de lâEst au Royaume-Uni.En dĂ©pit de la prĂ©sence dâenclaves portugaises, hispaniques, belge, ou alle-mandes, la fracture majeure demeurait liĂ©e au partage historique du conti-nent entre mondes francophone et anglophone.
LâAfrique a connu quatre grandes vagues de dĂ©colonisation. Avec leursconsĂ©quences : la pĂ©rennitĂ© de la coopĂ©ration Ă©tablie entre les anciennes
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mĂ©tropoles et leurs anciennes colonies ; une coopĂ©ration technique, linguistique,culturelle, mais aussi des interventions de lâancienne puissance coloniale dansdes conflits, internes ou frontaliers (cf. le rĂŽle de la Grande-Bretagne au Zim-babwe ou de la France Ă Kolwesi ou dans le cadre de lâopĂ©ration Manta).
C. âŠet par lâessor de nouveaux facteurs dâinstabilitĂ©â lâactivisme rĂ©cent des Ătats-Unis et de la Chine Populaire semble directe-
ment liĂ© Ă la prĂ©sence de ressources naturelles en gĂ©nĂ©ral, dâhydrocarburesen particulier (cf. les tensions frontaliĂšres entre Nigeria et Cameroun, revi-vifiĂ©es, sur le littoral du Golfe de GuinĂ©e, par la dĂ©couverte et lâexploita-tion de colossales poches dâhydrocarbures) ;
â lâessor de lâislam, venant remettre en cause le classique binĂŽme religieux« christianisme-animismes » dans de nombreux Ătats proches du Saharaet du Sahel. Le facteur religieux aggrave les divisions dans maints paysde la zone : le Mali est peuplĂ© Ă 75 % de musulmans, le Niger Ă plus de80 % ; mais le Cameroun, par exemple, offre aujourdâhui le visage dâunĂtat formĂ© dâun Nord islamisĂ© « opposĂ© » Ă un Sud chrĂ©tien ou animiste,comme le Tchad (dont la frontiĂšre avec la Libye, tirĂ©e au cordeau, est cari-caturale) ou lâOuganda.
III. Les principales conséquences
A. Une controverse : les corollaires nĂ©gatifs du caractĂšre artificiel des frontiĂšres Le tracĂ© des frontiĂšres de lâAfrique subsaharienne a, depuis quarante ans,
suscitĂ© beaucoup de commentaires contradictoires. Boutros Boutros-GhalinâhĂ©sitait pas Ă affirmer (dans son ouvrage Les conflits de frontiĂšres en Afrique) :« Si les frontiĂšres africaines sont artificielles, il faut aussi reconnaĂźtre que pres-que toutes les frontiĂšres du monde le sont ». Alors que le PrĂ©sident somalien,en 1980, Ă©voquant ce thĂšme, dĂ©clarait : « Lâhistoire a montrĂ© que lâobstaclemajeur Ă lâunitĂ© africaine provient des frontiĂšres artificielles que les puissancescolonialistes ont imposĂ©es ».
B. La question des rĂ©fugiĂ©sParallĂšlement au facteur majeur de lâĂ©migration, lâĂ©tat endĂ©mique de sous-
dĂ©veloppement, et ses corollaires, de lâexode rural Ă lâanarchie macrocĂ©phale desagglomĂ©rations urbaines), les guĂ©rillas internes et les conflits inter-Ă©tatiques, essen-tiellement frontaliers, sont source dâaccĂ©lĂ©ration du phĂ©nomĂšne des rĂ©fugiĂ©s.
On estimait en 2005 Ă plus de 50 % du total mondial de rĂ©fugiĂ©s les per-sonnes dĂ©placĂ©es originaires de lâAfrique, notamment du Sahel et de laCorne orientale.
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Ă lâaube du XXIe siĂšcle, lâONU considĂ©rait ladite Corne comme « le plusvaste camp de rĂ©fugiĂ©s du monde ». Les confĂ©rences internationales sur lesrĂ©fugiĂ©s nâont guĂšre cessĂ© de se multiplier, avec des rĂ©sultats gĂ©nĂ©ralementdĂ©cevants. LâONU elle-mĂȘme estimait au tournant du siĂšcle « que de nom-breux pays hĂŽtes sont incapables de fournir les services de base Ă leurs pro-pres ressortissants, a fortiori aux rĂ©fugiĂ©s ». Mais, realpolitik oblige, en 2000,Ă lâĂ©chelle de lâAfrique, on pouvait chiffrer lâaide aux rĂ©fugiĂ©s Ă un prixcomparable Ă celui de quelques 250 chars de bataille. Alors mĂȘme que les ĂtatsconcernĂ©s en achetaient plus de 400 !
C. La solution : la promotion des organisations supra-Ă©tatiques ?Le bilan de lâaction des organisations multilatĂ©rales africaines demeure
indĂ©niablement modeste pour ce qui relĂšve des entitĂ©s sous-rĂ©gionales : laCommunautĂ© de lâAfrique de lâEst (Kenya, Tanzanie, Ouganda) crĂ©Ă©e en 1967a Ă©tĂ© supprimĂ©e en 1979 ; le TraitĂ© de Lusaka signĂ© en 1981 par treize Ătatsde la zone est restĂ© quasiment lettre morte ; lâOCAM (Organisation de la Com-munautĂ© africaine et malgache) a Ă©galement disparu ; la SADCC (regroupantles neuf Ătats dâAfrique australe) a connu un cinglant Ă©chec ; la CEDEAO etla CEAO (en Afrique de lâOuest) prĂ©sentent des bilans plus que mitigĂ©s.
En changeant dâĂ©chelle, lâOrganisation de lâUnitĂ© Africaine (OUA), crĂ©Ă©epar le TraitĂ© dâAddis Abeba, en 1963, avait connu quelques succĂšs (commela rĂ©solution du conflit MaliâBurkina Faso) mais beaucoup dâĂ©checs (Katan-ga, Biafra, Ogaden, Tchad, Sahara Occidental). Beaucoup trop fragile, dotĂ©ede maigres moyens, lâOUAa Ă©chouĂ© dans son objectif de concrĂ©tiser le « grandrĂȘve africain » des ancĂȘtres, de NâKrumah Ă Senghor. Son avatar, lâUnionAfricaine, fondĂ©e Ă Maputo en 2002, semble confirmer aujourdâhui lâĂ©cartcolossal qui persiste entre les ambitions dĂ©clarĂ©es et les rĂ©alitĂ©s de la gĂ©opoli-tique africaine.
Bibliographie sommaire
BART François, LâAfrique. Continent pluriel, Paris, SEDES, 2003.BRUNEL Sylvie, LâAfrique, Paris, BrĂ©al, 2003.DUBRESSON Alain et al., Les Afriques au sud du Sahara, Paris, Belin, 1994.DUBRESSON Alain, LâAfrique subsaharienne, Paris, A. Colin, 2003.FOUCHER Michel, Lâinvention des frontiĂšres, Paris, FEDN, 1987.MâBOKOLO Elikia, LâAfrique au XXe siĂšcle, Paris, Seuil, 1986.POURTIER Roland, Afriques noires, Paris, Hachette, 2003.
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SECTION 2.Le fleuve Litani
A â DU POINT DE VUE DU DROIT INTERNATIONAL
VoilĂ un sujet dont la formulation inspire peu le juriste. Le Litani est eneffet un fleuve de 200 kilomĂštres de long dont le bassin se trouve entiĂšrementen territoire libanais : il prend sa source dans la vallĂ©e de la Bekaa et se jettedans le Tyr. Ce cours dâeau doit sa renommĂ©e au conflit du Proche-Orient,plus prĂ©cisĂ©ment Ă la lutte pour le contrĂŽle des ressources hydrauliquesentre le Liban, la Syrie et IsraĂ«l, ce dernier en revendiquant sinon la posses-sion en tout cas le contrĂŽle. Le juriste a peu Ă dire sur cette situation, sauf Ă Ă©largir le champ dâanalyse pour traiter des conflits entre IsraĂ«l et le Liban, ainsique des opĂ©rations de maintien de la paix dans la rĂ©gion du Litani. Mais onconviendra que le traitement du sujet qui est prĂ©sentĂ© ici, du point de vuedu droit international, est assez artificielâŠ
DĂšs la publication de la DĂ©claration Balfour (1917), les dirigeants sionistesrĂ©clament lâintĂ©gration du bassin du Litani dans le territoire dâIsraĂ«l : demanderepoussĂ©e par Clemenceau qui lâintĂšgre dans le « grand Liban ». Aussi aprĂšsla crĂ©ation dâIsraĂ«l, ses dirigeants manifesteront-ils la volontĂ© constante derepousser les frontiĂšres de lâĂtat jusquâau Litani (et vers lâest sur les hauteursdu Golan : objectif atteint en 1967). Le 14 mars 1978, la premiĂšre invasion is-raĂ©lienne du Liban est dâailleurs baptisĂ©e « opĂ©ration Litani » ; officiellementdĂ©clenchĂ©e pour repousser de lâautre cĂŽtĂ© du fleuve les organisations pales-tiniennes implantĂ©es au sud du Liban, elle permet la mise en place dâune mi-lice anti-palestinienne dirigĂ©e par le major Haddad ; cette milice proclameen avril 1979 un Ătat du « Liban libre » sur les 800 km2 que lâarmĂ©e israĂ©lienneoccupe jusquâen 2000 en infraction Ă la rĂ©solution 425 du Conseil de sĂ©curitĂ©.En juin 1982, une nouvelle agression israĂ©lienne contre le Liban â lâopĂ©ration« Paix en GalilĂ©e » â est motivĂ©e par la volontĂ© de chasser lâOLP du Liban :lâarmĂ©e envahit le pays, assiĂšge Beyrouth de juin Ă aoĂ»t, puis installe un pou-voir phalangiste qui signe avec IsraĂ«l un traitĂ© de paix inĂ©gal. Le Liban sâen-fonce alors dans une spirale de dĂ©sintĂ©gration communautaire. Enfin enaoĂ»t 2006, le Litani est de nouveau au centre des combats entre IsraĂ«l et lemouvement Hezbollah, combats qui se solderont par des milliers de mortset de dĂ©placĂ©s, des destructions Ă©conomiques considĂ©rables et un dĂ©sastreĂ©cologique lorsque lâaviation israĂ©lienne bombarde les rĂ©serves de fioul dela centrale de Beyrouth et provoque le dĂ©versement en mer de 15.000 tonnesde mazout.
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Sans en ĂȘtre la cause principale, le Litani est donc au centre du conflit entreIsraĂ«l et le Liban ; il offre donc lâoccasion de revenir sur les aspects juridiquesde ce conflit depuis 1978.
I. « LâopĂ©ration Litani » et les interventions militaires israĂ©liennes au Liban
A. La justification dâIsraĂ«l par lâexercice de la lĂ©gitime dĂ©fenseJustification utilisĂ©e en 1978, 1982 et 2006 : les opĂ©rations militaires seraient
dirigĂ©es, non contre lâĂtat du Liban, mais contre des mouvements (OLP,Hezbollah).
La critique de lâargument est fournie par la Cour internationale de justice(dans son avis du 9 juillet 2004 sur les consĂ©quences juridiques de lâĂ©difica-tion dâun mur dans le territoire palestinien occupĂ©, elle estime que la lĂ©gitimedĂ©fense prĂ©vue Ă lâarticle 51 de la Charte des Nations unies ne peut sâexercerquâĂ lâencontre dâune agression de la part dâun Ătat) et du Conseil de sĂ©cu-ritĂ© qui dans chaque cas a critiquĂ© lâintensitĂ© et la durĂ©e des opĂ©rations mili-taires (principe de proportionnalitĂ©).
B. Lâinterdiction des reprĂ©sailles armĂ©esElles sont contraires au droit international, quâil sâagisse de la destruction
dâavions civils sur lâaĂ©roport de Beyrouth en 1978, de lâinvasion du pays en1982, ou encore du raid sur le QG palestinien en Tunisie en 1985 : illicĂ©itĂ©relevĂ©e par le Conseil de sĂ©curitĂ© et lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de lâONU.
De mĂȘme est interdite lâassistance aux insurgĂ©s lorsque ces derniers pren-nent le contrĂŽle dâune partie du territoire (comme lâassistance fournie par IsraĂ«lĂ lâarmĂ©e du Sud-Liban entre 1979 et 2000).
C. Les obligations de la puissance occupanteLes conventions de La Haye et de GenĂšve confĂšrent Ă lâoccupant des pou-
voirs Ă©tendus sur le territoire occupĂ© ; en contrepartie ce dernier doit assu-rer la sĂ©curitĂ© des habitants et sanctionner les actions criminelles des forcesarmĂ©es, rĂšgle renforcĂ©e par le premier protocole de GenĂšve de 1977 : son art.86 confirme la responsabilitĂ© de lâoccupant sâil nâa pas empĂȘchĂ© ou puni lescrimes de guerre (comme les massacres dans les camps palestiniens de Sabraet Chatila au Liban en 1982).
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II. La communauté internationale et le rétablissement de la paix au Liban
Le Liban prĂ©sente cette particularitĂ© dâavoir expĂ©rimentĂ© les trois modali-tĂ©s connues de forces de maintien de la paix.
A. Le maintien de la paix par une force rĂ©gionaleEn 1976, la Ligue arabe dĂ©cide dâĂ©tablir une force arabe de dissuasion au
Liban (les « casques verts ») pour tenter de mettre fin aux affrontements in-ternes. La tentative est peu convaincante puisque la FAD est rapidement rĂ©-duite au contingent syrienâŠ
B. Le maintien de la paix par les forces des Nations uniesEn mars 1978, lâinvasion israĂ©lienne provoque la mise en place de la FINUL :
opération de maintien de la paix.
C. Lâintervention dâune force multinationaleEn 1982, Ă la demande du gouvernement libanais, des forces multinationales
(Ătats-Unis, Royaume-Uni, France, Italie), sans lâaval des Nations unies, inter-viennent pour assurer lâĂ©vacuation des combattants palestiniens et des mem-bres de la FAD, puis pour rĂ©tablir lâautoritĂ© des instances Ă©tatiques libanaises.Cette « force multinationale de sĂ©curitĂ© » nâa pu mettre fin Ă la guerre civile.
Bibliographie sommaire
BROUILLET Alain, « La force multinationale dâinterposition Ă Beyrouth », Annuaire françaisde droit international, 1982, pp. 293â336.
FEUER Guy, « La force arabe de sĂ©curitĂ© au Liban », Annuaire français de droit international, 1976,pp. 51â61.
MAJZOUB Tarek, Les fleuves au Moyen-Orient, Paris, LâHarmattan, 1994.MARTINEZ Jean-Claude, « La force intĂ©rimaire des Nations unies au Liban », Annuaire
français de droit international, 1978, pp. 479â511.MOMTAZ Djamchid, « Le rĂ©gime juridique des ressources en eau des cours dâeau interna-
tionaux du Moyen-Orient », Annuaire français de droit international, 1993, pp. 874â897.
B â DU POINT DE VUE DES RELATIONS INTERNATIONALES
En 1919, lâOrganisation sioniste mondiale prĂ©sente Ă la ConfĂ©rence de paixde Paris une proposition de dĂ©limitation de la frontiĂšre de la Palestine pourinclure lâintĂ©gralitĂ© des ressources dâeau de la rĂ©gion (y compris le bassin dufleuve Litani dĂšs ses sources), considĂ©rĂ©es dâune importance vitale pour la
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Palestine. MĂȘme si la Grande-Bretagne a agrĂ©Ă© cette position, les pressionsde la France, qui se prĂ©valait des accords SkyesâPicot de 1916, ont dĂ©terminĂ©la ligne finale de frontiĂšre qui assignait le Litani au Liban. Câest le dĂ©but histo-rique des disputes sur lâeau du Litani, qui affectent encore les relations entreles Ătats de la rĂ©gion.
Lâimportance de lâeau est en effet cruciale dans le Moyen-Orient, puisquâilsâagit dâune ressource rare et dont dĂ©pendent les activitĂ©s Ă©conomiques. Onpeut donc dire que lâeau est une ressource de puissance pour tout Ătat de larĂ©gion, et que chacun a lâintĂ©rĂȘt vital de contrĂŽler cette ressource. LâĂtat dâIs-raĂ«l, crĂ©Ă© en 1948 sur un territoire qui nâest pas trĂšs favorable ni du point devue des ressources naturelles, ni du point de vue gĂ©ostratĂ©gique (le territoirenâa pas de profondeur et la sortie Ă la mer est trĂšs limitĂ©e), et ayant des voisinsqui ne reconnaissent pas son droit Ă lâexistence, a adoptĂ© dĂšs le dĂ©but une poli-tique qui visait lâaugmentation de ses ressources de puissance (y compris terri-toire, population et accĂšs Ă lâeau). Lâinvasion du Liban en 1978 peut sâinscriredans cette logique, spĂ©cifique au cas thĂ©orique du dilemme de la sĂ©curitĂ©.
Pourtant, la question de lâeau nâest quâune des motivations de lâinvasion,et probablement pas la plus importante. IsraĂ«l vise surtout la destruction desmilices palestiniennes qui sâĂ©taient installĂ©es au sud du Liban aprĂšs leur Ă©vic-tion de la Jordanie en 1971. AprĂšs 1964, lorsque IsraĂ«l crĂ©e le Grand conduitnational pour transporter les eaux du lac de TibĂ©riade, et surtout aprĂšs 1967,lorsque la Syrie perd complĂštement lâaccĂšs Ă ce lac, le fleuve Litani nâa plusla mĂȘme importance pour IsraĂ«l. Câest pourquoi nous sommes tentĂ©s de croireque la question de lâeau nâest que marginale dans les invasions israĂ©liennesdu Liban en 1978, 1982 et 2006.
Introduction
Question de recherche : pourquoi Israël envahit-il le Liban en 1978, 1982et 2006 ?
HypothĂšse : la raison principale est le contrĂŽle du bassin du fleuve Litani(la dĂ©monstration va rĂ©futer lâhypothĂšse initiale).
Aperçu thĂ©orique : le dilemme de la sĂ©curitĂ© ; lâeau comme ressource depuissance (lâeau, ressource rare au Moyen-Orient).
I. La question du fleuve Litani dans lâhistoire de la rĂ©gion
A. Le Litani : un fleuve disputĂ© dĂšs la fin de la PremiĂšre Guerre mondialeâ la proposition de lâOrganisation Sioniste Mondiale Ă la ConfĂ©rence de
paix de Paris (1919) ;
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â la rĂ©solution finale de la ConfĂ©rence de Paris ;â la partition du territoire de la Palestine.
B. Lâimportance de lâeau dans le processus de consolidation de lâĂtat dâIsraĂ«l
â le besoin dâattirer des nouveaux immigrants, dâoĂč la nĂ©cessitĂ© dâassu-rer des terres pour lâagriculture des kibboutzim ;
â la crĂ©ation des systĂšmes dâirrigation : le Grand conduit national (1964) ;â lâimportance de lâeau comme source dâĂ©nergie : les centrales hydroĂ©lec-
triques.
II. Les invasions israéliennes du Liban en 1978 et 1982 : quelques causes possibles
A. Les guĂ©rillas palestiniennes et lâOLPâ lâĂ©viction de lâOLP de la Jordanie en 1971 et son Ă©tablissement sur le ter-
ritoire libanais ;â lâautonomisation du Fatah dans le sud du Liban par rapport au gouverne-
ment de Beyrouth et les attaques des milices palestiniennes sur le terri-toire israélien ;
â Ă©tablissement des milices israĂ©liennes au sud du Liban et installation dugouvernement phalangiste.
B. La prĂ©vention de lâaugmentation de la puissance syrienneâ les conflits entre IsraĂ«l et la Syrie depuis 1948 jusquâĂ la « Guerre des six
jours » ;â lâemprise syrienne sur le Liban ;â la menace de lâaugmentation de lâinfluence syrienne dans la rĂ©gion.
C. La question de lâeauâ la diminution de lâimportance du bassin de Litani aprĂšs 1964 ;â les actions israĂ©liennes par rapport aux eaux du Litani aprĂšs lâinvasion
du Liban de 1978.
III. Lâinvasion israĂ©lienne du Liban en 2006
A. LâĂ©mergence du Hezbollahâ la crĂ©ation du Hezbollah comme « organisation de libĂ©ration nationale »
aprĂšs lâinvasion israĂ©lienne de 1982 ;â le Hezbollah : en mĂȘme temps organisation terroriste, parti politique
libanais et gouvernement de facto au sud du Liban ;
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â les liens du Hezbollah chiite avec lâIran : nouvelle menace pour lâĂtatisraĂ©lien ?
B. Lâinvasion de 2006 et la destruction du Hezbollahâ considĂ©rations de puissance : dĂ©truire le Hezbollah et prĂ©venir le con-
trĂŽle syrien sur le Liban ;â consĂ©quences de lâinvasion : aucune dĂ©marche en ce qui concerne le
Litani.
Conclusion : invalidation de lâhypothĂšse initiale.
Bibliographie sommaire
BLANC Pierre, « Le Liban, lâeau, la souverainetĂ© », in Confluences MĂ©diterranĂ©e, n° 58, Ă©tĂ© 2006,pp. 127â136.
DELALIEU Dimitri, « La nouvelle âGuerre du Libanâ : une consĂ©quence de lâimpuissance dela communautĂ© internationale ? », European Strategic Intelligence and Security Center,www.esisc.org.
ENCEL FrĂ©dĂ©ric et THUAL François, GĂ©opolitique dâIsraĂ«l, Paris, Seuil, 2006. MERMIER Franck et PICARD Elizabeth (dir.), Liban, une guerre de 33 jours, Paris, La DĂ©cou-
verte, 2007. SARKIS Jean, Histoire de la guerre du Liban, Paris, PUF, 1993.
C â DU POINT DE VUE DE LA GĂOPOLITIQUE
En dĂ©pit de son cours relativement modeste (moins de 200 kilomĂštres) aucĆur du Sud-Liban, le fleuve Litani a jouĂ© (et joue), du fait de sa localisationgĂ©ographique, un rĂŽle gĂ©opolitique et gĂ©ostratĂ©gique de tout premier plandepuis prĂšs dâun siĂšcle.
Il concrĂ©tise en effet un double dĂ©fi : au chapitre de la gĂ©opolitique de lâeau,dans un milieu physique semi aride, dâune part ; Ă celui de la donne stratĂ©gique(et singuliĂšrement au plan des relations bilatĂ©rales IsraĂ«lâLiban) dâautre part.
I. Le Litani, symbole contemporain dâun double dĂ©fi gĂ©opolitique
A. La question de lâeau :Elle est vitale au Proche-Orient, mais Ă des degrĂ©s variables. Le Liban est,
en la matiĂšre, relativement bien pourvu, et constitue le premier gisement enressources hydrauliques de la rĂ©gion, avec lâOronte, le Nahr al Kebir, voirele Jourdain (qui naĂźt de la confluence du Hasbani libanais et du Banyas), etdonc le Litani, qui se jette en MĂ©diterranĂ©e au sud de Saida.
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Le Litani reprĂ©sente 18 % des eaux libanaises et a un dĂ©bit de lâordre de940 hm3/an.
Le Liban est relativement privilĂ©giĂ© au plan de la donne hydrologique, cequi nâest pas, en revanche, le cas de ses voisins, et notamment dâIsraĂ«l. Au-jourdâhui, les ressources hydriques israĂ©liennes sont dĂ©jĂ surexploitĂ©es et lesressources intĂ©rieures en la matiĂšre couvrent moins de 60 % de ses besoins.Tel Aviv nâa guĂšre le choix, quant Ă sa quĂȘte de ressources complĂ©mentaires,quâentre trois opportunitĂ©s : lâacheminement de lâextĂ©rieur (Turquie), les tech-niques de dĂ©salinisation de lâeau de mer et, enfin, lâexploitation dâun bassinnon encore utilisé⊠le Litani.
B. Le Litani, au cĆur du Sud-Liban : une zone stratĂ©gique convoitĂ©eEn proie Ă des tensions et des contentieux Ă©margeant Ă sa gĂ©opolitique
interne, le Sud-Liban, eu Ă©gard Ă sa position gĂ©ographique, Ă la frontiĂšre (con-testĂ©e) dâIsraĂ«l, est aussi un vĂ©ritable kalĂ©idoscope, tant au plan du peuple-ment que de la donne religieuse, capitale dans la rĂ©gion : chiites, sunnites,druzes, chrĂ©tiens maronites, etc. cohabitent depuis des siĂšcles dans un con-texte permanent dâaffrontements.
Un contexte exacerbĂ© depuis quelques dĂ©cennies par lâimplantation dâor-ganisations et de mouvements palestiniens : OLP, Hezbollah.
C. Ce double dĂ©fi contribue Ă la vitalitĂ© du contentieux et des conflits israĂ©loâlibanais
La premiĂšre invasion israĂ©lienne au Sud-Liban, en mars 1978, prĂ©cisĂ©mentqualifiĂ©e « OpĂ©ration Litani » fut justifiĂ©e par le souci dâĂ©radiquer les organi-sations palestiniennes implantĂ©es dans le secteur. La consĂ©quence directe delâOpĂ©ration Litani est la crĂ©ation dâun « Ătat du Liban Libre », jusquâen 2000,sur les territoires occupĂ©s par lâarmĂ©e israĂ©lienne.
Le Litani va se trouver aussi au cĆur de lâopĂ©ration « Paix en GalilĂ©e » en1982 : une opĂ©ration qui remonte jusquâĂ Beyrouth. IsraĂ«l se retire du Libanen janvier 1985, mais conserve le contrĂŽle dâune zone oĂč est maintenue unemilice libanaise auxiliaire, et donc celui des eaux du Litani. Ce dernier, en aoĂ»t2006, se retrouve Ă nouveau au centre des combats entre lâarmĂ©e israĂ©lienneet le Hezbollah, prĂ©cisĂ©ment implantĂ© au Sud-Liban.
II. Du rĂŽle de lâeau et des considĂ©rations stratĂ©giques
A. La donne hydrologique :Au-delà du constat classique ⠫ un Liban riche en potentialités hydrauliques,
un Ătat dâIsraĂ«l pĂ©nalisĂ© par les conditions climatiques et orographiques » â
102
la question des liens hydrologiques entre le Litani et les conditions dâalimen-tation des sources du Jourdain reste controversĂ©e. Les gĂ©ologues ont soulevĂ©depuis longtemps le problĂšme (non totalement Ă©lucidĂ©) desdits liens. Le Has-bani pourrait ĂȘtre approvisionnĂ© en partie par des eaux souterraines provenantdu Litani, ce qui expliquerait la disparition de quelques 100 hm3/an ducours infĂ©rieur de ce dernier. HypothĂšse Ă©ventuellement lourde de consĂ©-quences : la gestion du cours amont du Litani par les Libanais pouvant ef-fectivement entraĂźner de sĂ©rieuses difficultĂ©s en aval, sur le bassin duJourdain, lui mĂȘme vital pour lâĂtat dâIsraĂ«l.
B. De Lord Balfour Ă lâOpĂ©ration Litani : une singuliĂšre constante !FidĂšles au souhait de ThĂ©odore Herzl, qui avait rappelĂ© Ă maintes re-
prises « lâincontournable nĂ©cessitĂ©, pour le futur Ătat israĂ©lien, de contrĂŽlerle fleuve Litani », dĂšs le lendemain de la DĂ©claration de Lord Balfour, en 1917,les reprĂ©sentants du mouvement sioniste revendiquent ce dernier. En 1920,Weizman, Ă©crivant Ă Lloyd George, souligne que « lâalimentation en eau dufutur Ătat juif doit provenir du Mont Hermon, des sources du Jourdain et duLitani ».
Une revendication qui va devenir une constante aprĂšs la crĂ©ation dâIsraĂ«l :en 1955, sept ans aprĂšs cette derniĂšre, par exemple, Tel Aviv refuse le planJohnson-Main qui, concentrĂ© sur la question du Jourdain, excluait le Litani.A contrario, dĂšs 1964, la Ligue arabe va tenter de concrĂ©tiser son ambitieuxprogramme « Barrage de lâUnitĂ© », visant Ă dĂ©tourner les eaux du Banyas versle Jourdain et du Hasbani vers le Litani. Un plan qui ne favorisait en dĂ©fini-tive que la Jordanie en ignorant les intĂ©rĂȘts de la Syrie, ce qui explique sansdoute la rapiditĂ© avec laquelle il sera abandonnĂ©.
C. Lâimbroglio des facteurs gĂ©opolitiques internes et externesLa pĂ©riode contemporaine, au-delĂ de cette constante, sâillustre de facto par
une multiplication des acteurs, internes et externes, et des facteurs rendantcompte de lâĂ©volution rĂ©cente de la question du Litani : facteurs internes auLiban, et notamment au Sud-Liban, avec lâexacerbation des tensions ethniqueset religieuses, la banalisation des activitĂ©s illicites (opium de la Bekaa, traficsdâarmes, structures mafieuses, expansion de la criminalitĂ© organisĂ©e) ; fac-teurs externes : lâopĂ©ration « Paix en GalilĂ©e » va se traduire par un spectacu-laire changement dâĂ©chelle quant aux acteurs concernĂ©s, avec la prĂ©sence(dĂ©sormais plus que trentenaire) des forces de maintien de la paix de lâOrga-nisation des Nations unies, la FINUL.
103
III. Bilan et perspectives :
A. Le Litani, illustration du thĂšme de la « lĂ©gitime dĂ©fense »Depuis la crĂ©ation de lâĂtat dâIsraĂ«l, 75 % des interventions armĂ©es hors
de ses frontiĂšres ont Ă©tĂ© assimilĂ©es par Tel Aviv Ă des cas de « lĂ©gitime dĂ©-fense » et 10 % Ă des cas de « lĂ©gitime dĂ©fense prĂ©ventive » dont lâopĂ©ration« Paix en GalilĂ©e ». DâoĂč la controverse, toujours dâactualitĂ© : oĂč sâarrĂȘte lanotion de « lĂ©gitime dĂ©fense prĂ©ventive », oĂč commence celle dâagression ?
B. De quelques perspectives au Sud-LibanLe Sud-Liban se caractĂ©rise, comme lâensemble du pays, mais plus encore,
par la permanence de son instabilité.Le fragile équilibre régional suscité, dÚs 1919, par le mandat français dé-
tachĂ© de la « Syrie historique » est dĂ©truit en 1985. La Syrie soutient tour Ă tour les diffĂ©rentes factions libanaises afin de jouer le rĂŽle de lâarbitre autopro-clamĂ© dans des conflits quâelle entretient. Depuis une vingtaine dâannĂ©es,Damas contrĂŽle de facto le Nord du Mont Liban, le Chouf, mais Ă©galementune partie du secteur mĂ©ridional, via les milices chiites.
C. En changeant dâĂ©chelle Au-delĂ du rĂŽle de ladite Syrie, a fortiori de lâaction indirecte des grandes
puissances (au premier rang desquelles les Ătats-Unis nâont cessĂ© de confirmerleur statut dâalliĂ© privilĂ©giĂ© dâIsraĂ«l, comme en tĂ©moigne par exemple la con-figuration du nouveau bouclier antimissile), le Sud-Liban en gĂ©nĂ©ral, et lebassin du Litani en particulier, constituent depuis trois dĂ©cennies un exem-ple tout Ă fait Ă©difiant du rĂŽle, des rĂ©sultats positifs et des Ă©checs de lâOrga-nisation des Nations unies, via la prĂ©sence des casques bleus de la FINUL.
Bibliographie sommaire
AMMOUN Denise, Histoire du Liban contemporain, Paris, Fayard, 1997.DâARMAILLĂ Bernadette, « Le bassin du Jourdain », StratĂ©giques, n° 70, 1998, pp. 145â174.AYEB Habib, Lâeau au Proche-Orient, Paris, Khartala, 1998.CHESNOT Christian, La bataille de lâeau au Proche-Orient, Paris, Khartala, 1998.GUILLOT Fabien, Les frontiĂšres chaudes, Caen, Presses de lâuniversitĂ©, 2003.KOLARS John, « Les ressources en eau du Liban », Monde arabe Maghreb-Machrek, n° 138, 1992,
pp. 11â26.LEBBOS Georges A., « Le Litani, au cĆur du conflit israĂ©lo-arabe », Les Cahiers de lâOrient, n° 44,
1996, pp. 31â42.MUTIN Georges, Lâeau dans le monde arabe, Paris, Ellipses, 2001.VAUMAS Etienne de, Le Liban : Ătude de gĂ©ographie physique, Paris, Firmin Didot, 1954.
TROISIĂME PARTIE
Pluralité disciplinaire ?
Ătudes de cas
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La pluralitĂ© disciplinaire pose un problĂšme de dĂ©limitation thĂ©orique. Eneffet, malgrĂ© lâabondante littĂ©rature portant sur ce sujet, certains concepts fon-damentaux liĂ©s aux recherches pluridisciplinaires ne sont pas clairement dĂ©fi-nis et sont loin de faire lâunanimitĂ© des spĂ©cialistes.
Il nâest donc pas inutile de nous attacher Ă regrouper les dĂ©finitions ou inter-prĂ©tations de ces concepts, qui sont au centre de lâanalyse.
CHAPITRE I.
Les modalités de la pluralitédisciplinaire
Il existe diffĂ©rentes modalitĂ©s pour mettre en Ćuvre la pluralitĂ© disci-plinaire : la premiĂšre approche est Ă©troitement liĂ©e au niveau dâinteractionentre les disciplines concernĂ©es et la seconde approche sâattache plus parti-culiĂšrement Ă dĂ©finir les modalitĂ©s dâintĂ©gration des disciplines concernĂ©esen fonction des caractĂ©ristiques propres Ă chaque activitĂ©.
SECTION 1.Le niveau dâinteraction entre disciplines
La premiĂšre maniĂšre dâapprĂ©hender la pluralitĂ© disciplinaire est Ă©troite-ment liĂ©e au niveau dâinteraction entre les disciplines : de la simple commu-nication Ă lâintĂ©gration totale des disciplines concernĂ©es.
Prenons tout dâabord la multidisciplinaritĂ©. Câest la forme la moins dĂ©-veloppĂ©e du processus dâintĂ©gration entre disciplines, la communicationentre les reprĂ©sentants des diverses disciplines Ă©tant des plus rĂ©duites. Ce-pendant, il peut apparaĂźtre que les projets de formation ou de recherche soientsi proches ou complĂ©mentaires, quâils offrent un terrain qui se rĂ©vĂšlera utilepour Ă©tablir des liens.
Quant à elle, la pluridisciplinarité est un processus qui se limite le plussouvent à une simple juxtaposition des différentes disciplines : si celles-ci
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dĂ©veloppent des analyses spĂ©cifiques en relation avec un objet dâĂ©tude quiserait commun, la pluridisciplinaritĂ© produit alors autant de savoirs surlâobjet dâĂ©tude que dâapproches diffĂ©rentes car propres Ă chaque disciplineconcernĂ©e.
En ce qui concerne lâinterdisciplinaritĂ©, elle apparaĂźt de plus en plus commeune nĂ©cessitĂ©. LâinterdisciplinaritĂ© peut sâentendre de la coopĂ©ration de dis-ciplines diverses, qui contribuent Ă une rĂ©alisation commune et qui, par leurassociation, permettent la production de nouveaux savoirs. Au sens strict, elleimplique la rencontre et la coopĂ©ration entre deux ou plusieurs disciplines,chacune dâelles apportant, au niveau des projets de formation ou de recherche,ses propres schĂ©mas conceptuels, sa façon de dĂ©finir les problĂšmes et ses mĂ©-thodes de recherche. Au sens large, lâinterdisciplinaritĂ© sous-entend un cer-tain degrĂ© dâintĂ©gration entre disciplines, entre diffĂ©rents domaines du savoiret entre diffĂ©rentes approches, ainsi que la mise en place dâun langage com-mun permettant des Ă©changes dâordre conceptuel et mĂ©thodologique.
LâinterdisciplinaritĂ© peut rĂ©pondre, non à « cette volontĂ© de confronter, dâar-ticuler, voire dâintĂ©grer, pour un objet ou un but commun de recherche »1, maisĂ une nĂ©cessitĂ© soit scientifique, soit sociĂ©tale. Faire « des ponts internes auxdisciplines »2 a un intĂ©rĂȘt si on doit traverser une riviĂšre et non simplementpour construire un nouveau pont au-dessus de cette riviĂšre. Lâinterdiscipli-naritĂ© ne doit pas se construire Ă partir de paradigmes dogmatiques quipeuvent rapidement engendrer des appauvrissements scientifiques.
Selon lâobjet dâĂ©tude et le niveau de la recherche, il appartiendra au cher-cheur ou Ă lâĂ©quipe de recherche de dĂ©finir le niveau dâinteraction adoptĂ©e :multidisciplinaritĂ© (communication), pluridisciplinaritĂ© (juxtaposition), inter-disciplinaritĂ© (coopĂ©ration). Le quatriĂšme niveau (transdisciplinaritĂ©) sup-pose un dĂ©cloisonnement rĂ©el des champs disciplinaires ; câest le processusle plus poussĂ© dâinteraction entre les disciplines concernĂ©es. La transdiscipli-naritĂ© implique un processus dâunification conceptuelle entre disciplines, cequi nous autorise Ă suggĂ©rer que la transdisciplinaritĂ© ne peut ĂȘtre envisagĂ©equâĂ lâĂ©chelle des Ă©tudes post-doctorales et dans le cadre dâune Ă©quipe derecherche.
_________________________1. D. Le Queau et al., Promouvoir lâinterdisciplinaritĂ© au CNRS, Paris, CNRS, 2005.
2. Ibid.
109
Section 2.Les modalitĂ©s dâintĂ©gration des disciplines
Lâautre maniĂšre de concevoir la pluralitĂ© disciplinaire est celle qui sâattacheĂ dĂ©finir les modalitĂ©s dâinteraction entre les diffĂ©rentes Ă©tapes qui rythmentet caractĂ©risent les recherches dĂ©veloppĂ©es dans les disciplines concernĂ©es.
Définition de la question centrale : le projet de recherche doit exprimer leplus exactement possible, à travers cette question centrale, ce que le chercheursouhaite produire comme connaissance, notamment en développant desnouvelles connaissances ou en modifiant des connaissances déjà existantes.La question centrale doit servir de fil conducteur à la recherche.
Travail dâexploration : cette Ă©tape comprend des Ă©lĂ©ments de lecture (ver-sion papier et version Ă©lectronique) et des entretiens. Le travail dâexplorationvise Ă actualiser les connaissances du chercheur sur lâobjet dâĂ©tude. Il sâagitĂ©galement de dĂ©finir de nouvelles perspectives en vue de finaliser la dĂ©fini-tion de la problĂ©matique.
DĂ©finition de la problĂ©matique : la problĂ©matique peut ĂȘtre dĂ©finie commelâapproche thĂ©orique que le chercheur dĂ©cide dâadopter pour analyser la (les)question(s) centrale(s). La problĂ©matique doit donc permettre dâĂ©tablir un lienentre la thĂ©matique qui fait lâobjet de la recherche et les ressources thĂ©oriquesqui seront utilisĂ©es.
Construction du modĂšle dâanalyse : le modĂšle dâanalyse doit permettrele passage de la dĂ©finition de la problĂ©matique (approche thĂ©orique) au tra-vail dâobservation (approche opĂ©rationnelle). Le modĂšle dâanalyse intĂšgre danssa dĂ©finition des concepts et des hypothĂšses qui sâarticulent entre eux pourfinaliser un cadre dâĂ©tude cohĂ©rent.
Travail dâobservation et dâanalyse de lâinformation : ce travail comprendlâensemble des activitĂ©s par lesquelles le modĂšle dâanalyse est testĂ©. Il sâagitde vĂ©rifier si les rĂ©sultats obtenus correspondent aux hypothĂšses formulĂ©esdans le modĂšle dâanalyse, plus prĂ©cisĂ©ment que les rĂ©sultats recueillis sontceux prĂ©alablement dĂ©terminĂ©s.
Conclusion de la recherche : la conclusion comprend un rappel du mo-dĂšle dâanalyse et une prĂ©sentation des connaissances produites par la re-cherche. Il sâagit ici de mettre en Ă©vidence en quoi la recherche a permis deproduire un savoir sur lâobjet dâĂ©tude, notamment en dĂ©veloppant des nou-velles connaissances ou en modifiant des connaissances dĂ©jĂ existantes.
Dans lâhypothĂšse oĂč la question centrale, et la dĂ©finition de la problĂ©ma-tique qui en dĂ©coule, ne peuvent pas ĂȘtre analysĂ©es Ă travers une seule disci-pline, la pluralitĂ© disciplinaire devient souhaitable. Dans ce cadre, les conceptsĂ©laborĂ©s au sein dâune discipline peuvent ĂȘtre mobilisĂ©s pour enrichir la
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recherche dans une autre discipline ; bien plus, une mĂ©thode propre Ă unediscipline peut ĂȘtre utilisĂ©e pour faire progresser la recherche dans dâautresdisciplines.
Ces prĂ©cisions faites, il nâest pas sans intĂ©rĂȘt de souligner lâimportance dela collaboration entre disciplines, de la pluralitĂ© disciplinaire. Loin dâĂȘtre unevogue passagĂšre, celle-ci sâanalyse comme une nĂ©cessitĂ© scientifique, Ă causede lâinterpĂ©nĂ©tration croissante entre les diffĂ©rents domaines du savoir, entreles disciplines concernĂ©es.
Ce manuel vise dĂšs lors Ă livrer aux Ă©tudiants de niveau master, auxdoctorants et aux post-doctorants quelques rĂšgles Ă©lĂ©mentaires en matiĂšrede recherche sâeffectuant dans un contexte de pluralitĂ© disciplinaire, et Ă lesorienter tout au long de leur processus dâĂ©criture, tant en fonction de leursprojets que des canons acadĂ©miques.
111
CHAPITRE II.
ĂlĂ©ments pour un plan commun
La pluralitĂ© disciplinaire peut enrichir les rĂ©sultats de la recherche, commele montrent les propositions de plans qui suivent : ces propositions portentsur des sujets qui supposent la maĂźtrise des outils mĂ©thodologiques et desconcepts des trois disciplines. Chacun des spĂ©cialistes apporte des Ă©lĂ©mentsâ tirĂ©s de sa propre discipline et en fonction de son propre point de vue â pourĂ©laborer un plan commun. Afin de bien prĂ©ciser les Ă©tapes de la dĂ©marche,les deux premiers sujets â « la DĂ©claration de Saint-Boniface » et « le site dePreah Vihear » â feront lâobjet dâun traitement sĂ©parĂ© ; câest au lecteur de re-grouper les Ă©lĂ©ments apportĂ©s par chaque spĂ©cialiste pour Ă©tablir un plan com-mun, sur le modĂšle de celui Ă©tabli sur le troisiĂšme sujet : « Francophonie etPacifique Sud ».
SECTION 1.La DĂ©claration de Saint-Boniface
A â ĂLĂMENTS JURIDIQUES POUR LâĂLABORATION DâUN PLAN COMMUN
Valeur juridique du texte :Du point de vue du droit international, câest une dĂ©claration : sa valeur
est politique, voire morale, mais elle nâa pas de valeur juridique contraignante :câest toute la diffĂ©rence entre une dĂ©claration et une convention.
Pour autant, elle exprime une position juridique commune des Ătatsmembres de lâOIF ; ces derniers ont entendu Ă©noncer une rĂšgle de droit. CetterĂ©solution a-t-elle Ă©tĂ© adoptĂ©e afin dâĂ©tablir une coutume ? Il faut pour celala mettre en relation avec les rĂ©solutions du Conseil de sĂ©curitĂ© et de lâAssem-blĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies relatives Ă la « responsabilitĂ© de protĂ©ger ».
Du point de vue du droit de lâOIF, il faut remarquer que cette dĂ©clarationa Ă©tĂ© adoptĂ©e le 14 mai 2006, dans le cadre de la ConfĂ©rence ministĂ©rielle dela Francophonie sur la prĂ©vention des conflits et la sĂ©curitĂ© humaine ; pas dansle cadre dâun sommet des chefs dâĂtat et de gouvernement. DiffĂ©rence dansle niveau de reprĂ©sentation des Ătats membres. Dâailleurs le XIe sommet quisuit la confĂ©rence ministĂ©rielle nâexamine pas la dĂ©clarationâŠ
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Formulation :Les termes utilisés soulignent le caractÚre déclaratoire et non obligatoire
du texte : les signataires « rappellent », « prennent acte », « rĂ©affirment », « con-firment », « soutiennent », « invitent », « encouragent », « demandent »âŠLorsquâils « sâengagent », câest Ă renforcer des actions de sensibilisation (art.19), Ă dĂ©velopper des actions de formation (art. 20), Ă dĂ©velopper unecoopĂ©ration entre eux (art. 22) ou Ă collaborer (art. 23)⊠Le texte fait pesersur les Ătats des obligations de moyens et non de rĂ©sultats : caractĂšre plusincitatif que contraignant.
Lorsquâils souhaitent le dĂ©veloppement dâinitiatives ou de moyens con-crets, les signataires « invitent » le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral Ă y procĂ©der.
Contenu du texte :Confirmation (par leur rappel) des déclarations de Bamako et de Ouaga-
dougou : dĂ©mocratie, Ătat de droit et droits de lâhomme.Nouveaux principes introduits : « sĂ©curitĂ© humaine » et « responsabilitĂ©
de protéger ».Lien établi entre tous ces éléments.Discussion des principes de « sécurité humaine » et « responsabilité de pro-
tĂ©ger » : apport original de la Francophonie dans leur dĂ©finition ? Dans leurmise en Ćuvre ?
Suivi de la dĂ©claration :Rappel de la mise en Ćuvre du processus dâobservation, dâĂ©valuation et
dâalerte prĂ©coce (Bamako) ; invitation au secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral Ă proposer desmodalitĂ©s pour conforter ce dispositif ; invitation au secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral pourla pleine utilisation des potentialitĂ©s du dispositif de Bamako en matiĂšre deprĂ©vention des conflits et de promotion de la paix, en sâassurant, notammentpar des Ă©valuations adĂ©quates, de lâefficacitĂ© des actions dans la mise en Ćuvreet le suivi des engagements consignĂ©s.
Ce dispositif dĂ©pend du bon vouloir des parties ; le mĂ©canisme de rĂšgle-ment repose sur des moyens diplomatiques. Il sâagit dâun mĂ©canisme con-sensualiste.
Examen critique des rapports de lâ « Observatoire » : comment qualifierla contribution de la Francophonie en matiĂšre de rĂšglement des crises et deconsolidation de la dĂ©mocratie ?
Documentation :Charte de la francophonie, 23 novembre 2005.DĂ©claration de Bamako, 3 novembre 2000.
113
DĂ©claration de Ouagadougou, 27 novembre 2004.DĂ©claration de Saint-Boniface, 14 mai 2006.Rapport dâactivitĂ© du SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de la Francophonie, De Ouagadougou Ă Bucarest,
2004â2006.DĂ©lĂ©gation Ă la DĂ©mocratie et aux Droits de lâHomme, Ătat des pratiques de la dĂ©mocratie, des
droits et des libertĂ©s dans lâespace francophone en 2004.DĂ©lĂ©gation Ă la DĂ©mocratie et aux Droits de lâHomme, Ătat des pratiques de la dĂ©mocratie, des
droits et des libertĂ©s dans lâespace francophone en 2006.DĂ©lĂ©gation Ă la Paix, Ă la DĂ©mocratie et aux Droits de lâHomme, Ătat des pratiques de la dĂ©mo-
cratie, des droits et des libertĂ©s dans lâespace francophone en 2008.
B â ĂLĂMENTS DE RELATIONS INTERNATIONALES
POUR LâĂLABORATION DâUN PLAN COMMUN
La DĂ©claration de Saint-Boniface sâinscrit dans le cadre des efforts faits parlâOIF pour assumer une mission politique qui complĂšte sa mission culturelleoriginaire. Lâintention dâexercer une influence dans les affaires internationalesest annoncĂ©e dans la DĂ©claration de Bamako (2000), et rĂ©itĂ©rĂ©e dans la DĂ©cla-ration de Ouagadougou, lors du Xe sommet de la Francophonie, en 2004. « Lapromotion de la paix, de la dĂ©mocratie et des droits de lâhomme » est une tĂącheessentiellement politique pour une organisation qui promettait, lors de sa fon-dation, de ne pas sâimmiscer dans les affaires internes de ses Ătats membres.
La DĂ©claration de Saint-Boniface : un miroir de lâanarchie kantienneLe constructivisme est la thĂ©orie qui peut rendre compte le mieux du con-
texte dans lequel cette dĂ©claration a Ă©tĂ© rĂ©digĂ©e. Alexander Wendt expliquela maniĂšre dont les perceptions des Ătats sur lâenvironnement internationalcontribuent Ă effectivement modifier cet environnement. Ainsi, si les Ătats sontorientĂ©s vers la puissance militaire, sâils sont mĂ©fiants Ă lâĂ©gard des intentionsdes autres Ătats, sâils croient se trouver dans un Ă©tat permanent de guerre,le systĂšme international sera une anarchie hobbesienne. Si les Ătats sont disposĂ©sĂ percevoir lâenvironnement comme Ă©tant non pas conflictuel, mais concur-rentiel, sâils acceptent la coopĂ©ration, et si finalement ils internalisent les normesdu droit international, lâanarchie sera lockĂ©enne. Enfin, lorsque le systĂšme in-ternational est entiĂšrement coopĂ©ratif, partageant une culture politique inter-nationaliste commune, fondĂ©e sur le respect des normes et lâamitiĂ© entre lesĂtats, il sâagit dâune anarchie kantienne. Les caractĂ©ristiques principales decelle-ci seront la sĂ©curitĂ© collective et les communautĂ©s de sĂ©curitĂ© plurielles.Câest de cet esprit que tĂ©moigne la DĂ©claration de Saint-Boniface. Un brefextrait du texte suffit Ă illustrer ce point : « lâinstauration du dialogue des cul-tures et civilisations, comme lâaffermissement de la solidaritĂ© entre les
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nations, sont de nature à réduire les tensions, à prévenir les conflits et à ren-forcer la lutte contre le terrorisme ».
La dĂ©claration est aussi un pas vers la consolidation de la norme interna-tionale visant le droit Ă lâingĂ©rence humanitaire, qui a suscitĂ© un vif dĂ©bat Ă cause de son incompatibilitĂ© avec le principe de la souverainetĂ© Ă©tatique.
Le grand nombre dâĂtats membres ou observateurs de lâOIF peut ĂȘtre unargument supplĂ©mentaire en faveur de lâidĂ©e que cette vision sur le systĂšmeinternational a des chances de gagner du terrain.
Les critiques du constructivismePourtant, plusieurs arguments peuvent ĂȘtre invoquĂ©s pour critiquer la pers-
pective de la section prĂ©cĂ©dente. Puisquâil sâagit dâune dĂ©claration, sa valeurjuridique est trĂšs faible et elle nâengage pas les Ătats membres. De plus, ellenâest pas signĂ©e par les chefs dâĂtats, mais par des ministres, ce qui rĂ©duitdavantage sa valeur politique. Les diffĂ©rends existant encore entre des Ătatsmembres de lâOIF contredisent lâexistence dâune culture politique interna-tionale qui sâinscrirait dans la typologie de lâanarchie kantienne. Une perspec-tive rĂ©aliste des Relations Internationales ignorerait complĂštement cettedĂ©claration, qui ne serait quâune tentative des Ătats membres de la Francopho-nie de gagner plus de visibilitĂ© et plus de poids sur la scĂšne internationale ;les rĂ©alistes montreraient que, pourtant, le chemin est trĂšs long jusquâĂ ce quelâOIF ait un vĂ©ritable poids.
Une Ă©tude approfondie sur les nĂ©gociations qui ont menĂ© Ă la signaturede la dĂ©claration, sur les travaux de la confĂ©rence, ainsi que sur la positionde chaque Ătat, rĂ©vĂ©lerait les mĂ©canismes politiques derriĂšre ce documentpublique et pourrait donner raison Ă lâune ou lâautre des deux positionsexposĂ©es plus haut.
Documentation :DĂ©claration de Bamako, 3 novembre 2000.DĂ©claration de Ouagadougou, 27 novembre 2004.DĂ©claration de Saint-Boniface, 14 mai 2006.WENDT Alexander, Social Theory of International Politics, Cambridge, Cambridge University
Press, 1999.
C â ĂLĂMENTS DE GĂOPOLITIQUE POUR LâĂLABORATION DâUN PLAN COMMUN
Au-delĂ de lâintĂ©rĂȘt strictement juridique prĂ©sentĂ© par ladite dĂ©claration,Ă©laborĂ©e par lâOIF le 14 mai 2006, et de la volontĂ© de cette derniĂšre de colla-borer sur tous les plans avec les organisations supra-Ă©tatiques dans leur
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souci dâĂ©radiquer maints flĂ©aux planĂ©taires, les rĂ©dacteurs de ladite dĂ©cla-ration mettent lâaccent, directement ou indirectement, sur trois thĂšmesgĂ©opolitiques majeurs Ă lâorĂ©e de ce nouveau siĂšcle :
â la pĂ©rennitĂ© des conflits ;â les alĂ©as du contrĂŽle des armements ;â lâaggravation de la fracture entre les pays nantis du Nord et les pays dĂ©-
munis du Sud.
I. La prĂ©vention des conflits, un objectif plus que jamais dâactualitĂ©
A. âŠeu Ă©gard Ă la multiplication des contentieux et des guerres ouvertes depuis un demi-siĂšcle
La pĂ©riode contemporaine se caractĂ©rise fondamentalement par un essorcroissant du nombre de conflits ouverts, parallĂšlement (mais ceci est loin dâĂȘtreĂ©tranger Ă cela) Ă une militarisation soutenue de la planĂšte.
Au cours de la pĂ©riode 1945â1975, le bilan concret Ă©tabli par les expertsde lâONU Ă©voquait 71 conflits de premier ordre, qui ont fait plus de 12 mil-lions de morts « directs » (5 millions entre 1945 et 1960, 7 millions entre 1960et 1975). Pour le dernier quart de siĂšcle, les estimations sâĂ©lĂšvent Ă©galementĂ quelques 5 millions. Avec un constat spatial supplĂ©mentaire Ă©difiant : surla centaine de pays affectĂ©s par un conflit armĂ© au cours des cinquante der-niĂšres annĂ©es, 87 % Ă©taient le fait de nations sous-dĂ©veloppĂ©es, dont 36 % pourles pays les moins avancĂ©s (PMA).
B. âŠengendrant une typologie Ă©difiante de conflits La multiplication de ces conflits ouverts sâest aussi traduite, via la « polĂ©-
mologie », par de nombreuses esquisses typologiques. On peut distinguernotamment :
â les conflits inter-Ă©tatiques ;â les conflits « post-coloniaux » ;â les conflits intra-Ă©tatiques.Les premiers, les plus « classiques » (ceux qui ont Ă©grenĂ© tragiquement lâhis-
toire de lâhumanitĂ© au cours des millĂ©naires), illustrĂ©s par les guerres de CorĂ©eou de la pĂ©ninsule indienne, ou par les conflagrations du Proche et du Moyen-Orient, sont dĂ©sormais minoritaires (25 % pour le dernier demi-siĂšcle) ; les se-conds, sĂ©quelles du processus de dĂ©colonisation, du Vietnam aux Afriquesfrancophones ou anglophones (Ă©galement de lâordre de 25 %) se sont naturelle-ment rarĂ©fiĂ©s Ă la fin du dernier siĂšcle, avec la quasi disparition des colonies.
Le troisiĂšme type (du Biafra au Bangladesh, de lâIndonĂ©sie au Cambodge,du Rwanda Ă la Somalie) concerne par essence des espaces gĂ©ographiques
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plus limitĂ©s. Ils sont devenus majoritaires. Plus rĂ©vĂ©lateur encore : un seulconflit ouvert a directement opposĂ© deux nations dĂ©veloppĂ©es du globe aucours du dernier tiers de siĂšcle : la Grande-Bretagne et lâArgentine, avec la« Guerre des Malouines », un cas de figure par ailleurs aberrantâŠ
La multiplication des conflits est donc, pour lâessentiel, lâapanage des con-trĂ©es du Tiers Monde en gĂ©nĂ©ral, et de « lâArc de crise » en particulier.
C. âŠet constituant un paradoxe fondamental, Ă lâheure du contrĂŽle des armementsCertes, et câest loin dâĂȘtre insignifiant, la planĂšte, depuis 1945, nâa pas connu
de troisiĂšme guerre mondiale. Constat directement liĂ© Ă lâaventure nuclĂ©aire,Ă la spĂ©cificitĂ© de lâarme atomique, et aux effets persistants du systĂšme bipo-laire et de la logique des Blocs, dĂ©sormais caducs.
La prolifĂ©ration des conflits localisĂ©s, en revanche, peut paraĂźtre paradoxale,puisque, depuis lâaube des annĂ©es soixante-dix, le monde via, notamment,les Ătats-Unis (dĂ©claration de Richard Nixon en janvier 1970) puis lâOrgani-sation des Nations unies, a proclamĂ© « la guerre Ă la guerre » et officialisĂ© lapromotion de la paix par la voie du dĂ©sarmement. Et alors que la plupart desĂtats dĂ©veloppĂ©s ont multipliĂ© signatures et ratifications de maints traitĂ©s rela-tifs au contrĂŽle des armements !
II. Les aléas de la promotion de la paix par la voie du désarmement
A. La « rĂ©volution » des annĂ©es soixante-dix De fait, la pĂ©riode des « seventies » sâest essentiellement illustrĂ©e, en
plein cĆur de la dĂ©tente, par des actes, certes significatifs, en matiĂšre de « con-trĂŽle » des armements. TĂ©moin lâĂ©difiant : le traitĂ© « SALT » (relatif auxarmements stratĂ©giques Ă portĂ©e intercontinentale), conclu en 1974 parMoscou et par Washington (et qui a, en rĂ©alitĂ©, abouti Ă une sophisticationspectaculaire desdites armes) ; tĂ©moins aussi les nombreux traitĂ©s multi-latĂ©raux, trĂšs souvent ponctuels, comme le TraitĂ© de Tatlelolco (non nuclĂ©ari-sation de lâAmĂ©rique Latine), la Convention sur lâenvironnement de 1972 oules accords destinĂ©s Ă interdire la fabrication de certains types dâarmes(armes biologiques, chimiquesâŠ).
B. Lâhypocrisie de la pĂ©riode contemporaine La plupart de ces traitĂ©s ou accords, dĂ»ment ratifiĂ©s (encore que le plus
important dâentre eux, celui relatif Ă lâinterdiction des essais nuclĂ©aires, at-tend depuis dix ans sa ratification par le CongrĂšs nord-amĂ©ricain) ont Ă©tĂ© sui-vis de peu dâeffets concrets.
117
TĂ©moin le thĂšme dramatique des mines antipersonnels, toujours dâactua-litĂ© : en 1973, les 112 signataires de la Convention sur lâinterdiction de cer-taines armes jugĂ©es « excessivement pernicieuses » (sic) ont ainsi mis horsla loi les « mines, piĂšges et autres engins analogues ». Ce qui nâa guĂšre em-pĂȘchĂ© les belligĂ©rants dans le monde de sâacharner Ă transformer rapidementune partie de la pĂ©ninsule indochinoise, ou les campagnes dâAngola ou duMozambique en des contrĂ©es particuliĂšrement riches en champs de minesantipersonnels.
C. Une situation pĂ©nalisant, dâabord, le Tiers MondeLes effets directs du systĂšme bipolaire, puis lâabandon progressif de toute
hypothĂšse de conflit direct entre les puissances du monde dĂ©veloppĂ©, arc-bou-tĂ©es sur la possession de lâarme nuclĂ©aire, sous peine de dĂ©clencher lâApoca-lypse, se sont donc traduits par une concentration soutenue des points chaudsdu globe dans les contrĂ©es dites « en voie de dĂ©veloppement ». Avec un co-rollaire direct : la sur-militarisation de ces « desesperados » du Tiers Monde,parallĂšlement Ă une montĂ©e en puissance des nations du Sud dans la hiĂ©rar-chie des acheteurs dâarmes et de systĂšmes dâarmes. Le Japon, premier des paysnantis du Nord en matiĂšre dâachat dâarmes, nâapparaĂźt quâau treiziĂšme rangdans la hiĂ©rarchie des acheteurs mondiaux en 2008.
III. Lâaggravation de la fracture entre pays du Nord et pays du Sud
A. Les ambiguĂŻtĂ©s de lâinĂ©gal dĂ©veloppement La notion dâinĂ©gal dĂ©veloppement, reprise par lâOIF, est ambiguĂ« : elle
masque mal (« politically correct » oblige) les disparitĂ©s de fait entre les Ătatsdu Sud (maints pays nâont guĂšre dĂ©collĂ© sur lâĂ©chelle de Rostow et il existedĂ©sormais un vĂ©ritable abĂźme entre certains PMA et les nantis du pĂ©trole, parexemple) ainsi que lâaggravation de la fracture entre Nord et Sud rĂ©vĂ©lĂ©e parla plupart des indicateurs Ă©conomiques et sociĂ©taux.
Certains indicateurs classiques sont particuliĂšrement Ă©loquents, telle lâes-pĂ©rance de vie Ă la naissance : la plupart des Ătats voisins de la rĂ©publique Sud-Africaine rĂ©vĂšlent aujourdâhui une espĂ©rance de vie se situant en deçà de labarriĂšre des 50 ans (42 ans pour le Lesotho, le Botswana ou le Zimbabwe, soitpratiquement la moitiĂ© de lâespĂ©rance de vie des nations de la « vieille Europe »).
B. Les caractĂšres fondamentaux du « sous-dĂ©veloppement »La pĂ©rennisation des conflits localisĂ©s, et leurs sĂ©quelles directes, sâa-
joutent à la longue litanie des fléaux du sous-développement (démographie
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mal contrĂŽlĂ©e, surpeuplement, sous-nutrition, malnutrition, maladies endĂ©-miques, Ă©pidĂ©mies, analphabĂ©tisme, exode rural, structures Ă©conomiquesparalysantes). Câest dans semblable contexte que sâinscrivent les effets directsde la multiplication des guerres.
Lâexemple des mines antipersonnels figure parmi les plus Ă©loquents :dans les campagnes du Nicaragua, criblĂ©es de mines par lâarmĂ©e US, sousla prĂ©sidence de Reagan, les « peones » sâhabituĂšrent dans leur chair Ă la gĂ©o-graphie des dites mines pour Ă©viter dans leur cheminement quotidien ces lieuxde mort, jusquâĂ lâarrivĂ©e du typhon El Nino qui, bouleversant les donnĂ©esmicro-gĂ©ographiques, sâest ingĂ©niĂ© Ă perturber ladite configuration, de tellesorte que les « peones » ont redĂ©couvert de maniĂšre dramatique les sĂ©quellesde la lutte des « contras » Ă lâĂ©gard des sandinistes et de lâapplication con-crĂšte de la doctrine Reagan relative aux conflits de « basse intensitĂ© ».
C. âŠet ses principales consĂ©quences en matiĂšre de prĂ©vention des conflitsEn 2005, le volume total des transactions en matiĂšre de matĂ©riel dâarme-
ment (soit le quart environ de lâensemble des budgets consacrĂ©s aux dĂ©-penses militaires de la planĂšte) Ă©tait estimĂ© Ă plus de cinquante fois le totaldes aides internationales aux programmes de type humanitaire. On comprendmieux le souhait de lâOIF de collaborer Ă la prĂ©vention des conflits et, enamont, Ă la promotion de la paix internationale et de la sĂ©curitĂ© humaine,encore bien hĂ©sitants Ă ce jour.
Documentation :BOUTHOUL Gaston, La Guerre, Paris, PUF, 1983.CEPII, Ăconomie mondiale : la fracture, Paris, Ăconomica, 1984.COHEN-TANUGI Laurent, Guerre ou Paix, Paris, Grasset, 2007.LACOSTE Yves, UnitĂ© et diversitĂ© du Tiers Monde, Paris, La DĂ©couverte, 1984.LE DIASCORN Yves, Le nouveau dĂ©sordre Ă©conomique mondial, Paris, Ellipses, 1995.RUFIN Jean-Christophe, LâEmpire et les nouveaux Barbares, Paris, LattĂšs, 1991.SOPPELSA Jacques, Des tensions et des armes, Paris, Publications de la Sorbonne, 1984.SOPPELSA Jacques, GĂ©opolitique de 1945 Ă nos jours, Paris, Sirey, 1994.
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Section 2.Le site de Preah Vihear
A â ĂLĂMENTS JURIDIQUES POUR LâĂLABORATION DâUN PLAN COMMUN
Le site de Preah Vihear, dĂ©diĂ© Ă Shiva, est composĂ© dâune sĂ©rie de sanc-tuaires reliĂ©s par un systĂšme de chaussĂ©es et dâescaliers sâĂ©tendant sur un axede 800 m ; il date de la premiĂšre moitiĂ© du XIe siĂšcle. Le temple se trouve aubord dâun plateau qui domine la plaine du Cambodge, sur la frontiĂšre entrece pays et la ThaĂŻlande. Il fait lâobjet dâun contentieux entre les deux pays.
LâarrĂȘt de la Cour internationale de justice, 15 juin 1962Ă la suite de lâoccupation du temple par un dĂ©tachement armĂ© thaĂŻ en
1958, le Cambodge avait saisi la CIJ sur le tracĂ© de la frontiĂšre Ă cet endroitet lâappartenance du temple. En 1904, une commission mixte franco-siamoise(la France exerçait Ă cette Ă©poque un protectorat sur le Cambodge) avaitdĂ©terminĂ© la frontiĂšre dans le secteur des Dangrek et indiquĂ© clairement quele temple de Preah Vihear et ses environs sont en terre cambodgienne ; dâailleurs,en 1907, la France et le Siam avaient conclu un traitĂ© qui sert de rĂ©fĂ©rence ju-ridique pour la souverainetĂ© cambodgienne sur Preah Vihear.
Câest lâargument principal de la CIJ pour confirmer la souverainetĂ© duCambodge sur le site de Preah Vihear : la convention du 13 fĂ©vrier 1904 a dĂ©fi-ni une ligne-frontiĂšre et « lorsque deux pays dĂ©finissent entre eux une fron-tiĂšre, un de leurs objectifs est dâarrĂȘter une solution stable et dĂ©finitive⊠Celaest impossible si le tracĂ© ainsi Ă©tabli peut ĂȘtre remis en cause Ă tout mo-ment⊠». De plus la preuve de la dĂ©limitation est apportĂ©e par une carte Ă©tabliedâun commun accord. La ThaĂŻlande fait valoir lâerreur sur les cartes annexĂ©es Ă la convention de dĂ©limitation ; or la Cour considĂšre que les qualitĂ©s et compĂ©tencesdes personnes qui ont vu la carte du cĂŽtĂ© des nĂ©gociateurs siamois rendent dif-ficile lâinvocation de lâerreur par la ThaĂŻlande et que son absence de contestationpendant des dĂ©cennies vaut acquiescement. Par leur conduite pendant cinquanteans, les deux parties ont reconnu la frontiĂšre dĂ©limitĂ©e en 1907.
La souverainetĂ© du Cambodge est donc confirmĂ©e par la CIJ en 1962. CettedĂ©cision nâa cependant pas fait cesser les revendications thaĂŻlandaises. La dĂ©li-mitation nâa dâailleurs pas Ă©tĂ© suivie dâune dĂ©marcation ni dâun abornementpartout.
Les affrontements de 2008 indiquent que la question de la dĂ©limitation desfrontiĂšres reste une question Ă©pineuse pour les deux Ătats. Dâailleurs, uneĂ©quipe mixte travaille Ă la dĂ©limitation des frontiĂšres terrestres depuis la
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signature dâun mĂ©morandum dâentente mutuelle en 2000. En attendant derĂ©gler lâĂ©pineux diffĂ©rend maritime⊠et pĂ©trolifĂšre.
Le dĂ©saccord sur lâinscription du temple au patrimoine mondial, 2005 Ă 2009Chef-dâĆuvre remarquable de lâarchitecture khmĂšre, le site a fait lâobjet
dâune demande dâinscription au patrimoine mondial par le gouvernementcambodgien en 2005, puis 2007 et 2008 : demande acceptĂ©e le 7 juillet 2008.Chaque demande a fait lâobjet dâune opposition de la ThaĂŻlande (qui rĂ©clameune gestion commune du site) et a relancĂ© le contentieux, jusquâĂ provoquerde brefs affrontements militaires entre juillet et dĂ©cembre 2008.
La Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturelet naturel a Ă©tĂ© adoptĂ©e par la ConfĂ©rence gĂ©nĂ©rale de lâUNESCO le 16 no-vembre 1972. Elle Ă©tablit et rĂ©vise rĂ©guliĂšrement une liste de centaines de sitesdans le monde qui font lâobjet dâune protection particuliĂšre. Lâinscription surla liste ne procure pas dâavantages matĂ©riels importants mais constitue unepublicitĂ© apprĂ©ciable.
Elle constitue de plus pour la ThaĂŻlande la confirmation du caractĂšre cam-bodgien du site, ce que son gouvernement refuse. Ă la suite de nĂ©gociationsen mai 2008, la partie cambodgienne a acceptĂ© que seul le temple soit nommĂ©au patrimoine et non lâensemble du site ; elle sâest en outre engagĂ©e Ă fournirune carte dĂ©limitant la superficie du monument. Au motif que la carte de PreahVihear retenue par la CIJ dans sa dĂ©cision de 1962 qui situe les bornes dedĂ©marcation entre les deux pays laisse non dĂ©limitĂ©e une zone de 5 km2 encontrebas du temple et que certaines bornes ont disparu pendant le conflitindochinois, le gouvernement thaĂŻlandais relance la question de la souverai-netĂ© sur certaines parties de la frontiĂšre, notamment sur ce site sensible dePreah Vihear.
Documentation :DĂ©cision de la Cour internationale de justice, 15 juin 1962, Rec. 1962, p. 6.COT Jean-Pierre, « Lâaffaire de Preah Vihear devant la Cour internationale de justice », An-
nuaire français de droit international, 1962, pp. 217-247.EISEMANN Pierre Michel et PAZARTZIS Photini, La jurisprudence de la CIJ, Paris, Pedone, 2008.JENNAR Raoul, Les frontiÚres du Cambodge contemporain, Paris, Maisonneuve et Larose, 2001.
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B â ĂLĂMENTS DE RELATIONS INTERNATIONALES
POUR LâĂLABORATION DâUN PLAN COMMUN
Aperçu historiqueLes disputes territoriales entre les entités politiques occupant le terri-
toire actuel du Cambodge et de la ThaĂŻlande datent du XVe siĂšcle. Lâinter-vention française au XIXe siĂšcle favorise une solution avantageuse pour lesKhmers, par les traitĂ©s de 1887 et 1893, qui assignent tous les territoires dela rive gauche du fleuve MĂ©kong Ă la France. Une nouvelle frontiĂšre est Ă©tablieen 1904, par laquelle le Siam renonce aux deux provinces de Battambang etSiem Reap. Le contexte politique de lâentre-deux guerres favorise le Siam, alliĂ©du Japon, mais il est encore une fois renversĂ© Ă la fin de la DeuxiĂšme Guerremondiale avec la dĂ©faite du Japon. La dispute Ă propos du site de Preah Vihearest favorisĂ©e par le fait quâune dĂ©marcation exacte du territoire nâa jamais Ă©tĂ©faite, les deux parties ne pouvant pas sâaccorder sur le mandat dâune commis-sion mixte chargĂ©e de tracer la frontiĂšre. Suite Ă lâinvasion thaĂŻlandaise dusite en 1954, le Cambodge dĂ©pose une plainte devant la CIJ en 1959. La so-lution est donnĂ©e en 1962 et donne raison au Cambodge, mais la ThaĂŻlandenâaccepte pas de se retirer. Dâailleurs, le vote de la Cour nâa pas Ă©tĂ© unanime :trois juges sur douze ont votĂ© contre. La dĂ©cision de la Cour a suscitĂ© desprotestations de la part des officiels et de lâopinion publique thaĂŻlandaise, quiont dĂ©plorĂ© aussi le manque de soutien de la part de leurs alliĂ©s dans la guerrefroide : les Ătats-Unis (Dean Acheson, ancien SecrĂ©taire dâĂtat, a plaidĂ© la causedu Cambodge devant la Cour). La ThaĂŻlande accepte de se retirer du PreahVihear seulement sous la menace de guerre de la part du Cambodge. En jan-vier 1963, les officiels cambodgiens ont repris possession du site.
LâannĂ©e 2008 a vu une nouvelle escalade du conflit, stimulĂ©e cette fois-cipar la demande, faite par le gouvernement cambodgien, dâinclusion du PreahVihear dans le patrimoine mondial.
Les enjeux de politique interneLe conflit sur le site de Preah Vihear met en lumiÚre le dilemme de la sécu-
ritĂ© dans lequel se trouvent les deux pays. Tandis que le Cambodge tĂ©moignedâune anxiĂ©tĂ© permanente concernant la possibilitĂ© de lâirrĂ©dentisme thaĂŻlan-dais, la ThaĂŻlande conteste jusquâĂ nos jours la dĂ©cision de la CIJ, quâelle con-sidĂšre mal fondĂ©e. Dâautres problĂšmes internes contribuent au maintien de cetĂ©tat de mĂ©fiance rĂ©ciproque entre les deux pays. Le Cambodge est un cas ty-pique de pays sans une tradition Ă©tatique consolidĂ©e, qui se sent menacĂ© detous les cĂŽtĂ©s : rappelons que le Cambodge a un diffĂ©rend frontalier avec le Viet-nam, mais aussi une significative minoritĂ© vietnamienne sur son territoire.
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Dâautre part, la ThaĂŻlande a, elle aussi, un diffĂ©rend important avec le Viet-nam, et elle a utilisĂ© le rĂ©gime des Khmer Rouge pour maintenir une zone-tampon. Si lâon pense Ă sa politique interne, le conflit avec le Cambodge aĂ©tĂ© un bon prĂ©texte pour justifier le rĂŽle primordial occupĂ© par lâarmĂ©e dansle rĂ©gime politique thaĂŻlandais. Au fur et Ă mesure que la prioritĂ© politiquemajeure se dĂ©place de la zone de la sĂ©curitĂ© nationale vers le dĂ©veloppementĂ©conomique, le rĂŽle de lâarmĂ©e diminue (surtout aprĂšs 1992). Cette prĂ©occu-pation pour le dĂ©veloppement, visible Ă partir de 1988, a contribuĂ© aussi Ă la diminution de lâimportance du site de Preah Vihear pour le gouvernementthaĂŻlandais.
DerniĂšrement, la question de Preah Vihear a Ă©tĂ© Ă nouveau instrumentali-sĂ©e dans la politique interne thaĂŻlandaise lorsque le premier ministre SamakSundaravej a Ă©tĂ© renversĂ© par lâopposition en 2008 et le nouveau gouverne-ment contestĂ© en 2009.
Les enjeux internationauxLe Cambodge et la Thaïlande ont été dans des camps différents lors de la
guerre froide, avec lâURSS et les Ătats-Unis respectivement (dĂ©jĂ pendant lapremiĂšre moitiĂ© du XXe siĂšcle, elles ne faisaient pas partie du mĂȘme camp,le Cambodge Ă©tant partie de la colonie française dâIndochine, tandis que leSiam Ă©tait alliĂ© au Japon). Cela peut avoir Ă©tĂ© un catalyseur du diffĂ©rend surPreah Vihear, les deux cĂŽtĂ©s ayant espĂ©rĂ© quâune intervention des grandespuissances allait faire pencher la balance en leur faveur. La ThaĂŻlande a Ă©tĂ©profondĂ©ment déçue par le manque de soutien de la part de son alliĂ©.
Un autre enjeu international important est la coopĂ©ration rĂ©gionale. La ThaĂŻ-lande est lâun des pays fondateurs de lâASEAN en 1967, tandis que le Cam-bodge y a adhĂ©rĂ© plus tard. La ThaĂŻlande sâefforce de sâassurer un rĂŽle de leaderrĂ©gional au sein de lâASEAN, tout en essayant dâĂ©chapper Ă lâinfluence de sesdeux alliĂ©s traditionnels, les Ătats-Unis et la Chine. Dâune part, cela peutavoir des effets positifs, car la ThaĂŻlande est obligĂ©e de montrer un engage-ment solide pour le multilatĂ©ralisme ; dâautre part, Ă long terme, lâeffet peutĂȘtre une consolidation du rĂŽle de ce pays dans la rĂ©gion, et par consĂ©quentune remontĂ©e de la spirale de la mĂ©fiance dans la relation avec le Cambodge.
Documentation :BUSZYNSKI Leszek, « Thailandâs Foreign Policy: Management of a Regional Vision », in Asian
Survey, vol. 34, n° 8, Aug. 1994, pp. 721â737. COURMONT BarthĂ©lĂ©my, « DiffĂ©rend frontalier CambodgeâThaĂŻlande difficilement arbitrĂ©
par lâUNESCO », Centre dâĂtudes Transatlantiques, Note Asie n° 30, juillet 2008. SINGH L. P., « The ThaiâCambodian Temple Dispute », in Asian Survey, vol. 2, n° 8, Oct. 1962,
pp. 23â26.
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C â ĂLĂMENTS DE GĂOPOLITIQUE POUR LâĂLABORATION DâUN PLAN COMMUN
Au-delĂ des Ă©vĂ©nements de lâĂ©tĂ© 2008, concomitants de lâinscription duTemple de Preah Vihear au Patrimoine mondial de lâUNESCO (sur prĂ©sen-tation du dossier par le Cambodge), des Ă©vĂ©nements qui ne sont pas non plustotalement sans relation avec les difficultĂ©s rĂ©centes de la gĂ©oĂ©conomie in-terne thaĂŻlandaise, ce contentieux autorise lâĂ©vocation de trois Ă©lĂ©ments gĂ©o-politiques majeurs :
Deux concrĂ©tisent le poids des « tendances lourdes » dans lâanalyse gĂ©o-politique : le rĂŽle de la gĂ©ographie physique et de sa traduction cartographique,le poids de lâhĂ©ritage historique ; le troisiĂšme (« variable contemporaine »)Ă©marge au constat actuel relatif aux disparitĂ©s de ces deux nations du TiersMonde au chapitre du dĂ©veloppement.
1. Du rÎle des facteurs physiques et de leur concrétisation par la carte Le Temple de Preah Vihear, dans la région orientale des Dangrek, a été érigé
sur une ligne de crĂȘte, naturellement liĂ©e au milieu orographique thaĂŻ et sur-plombant par une falaise relativement abrupte (dâoĂč son accĂšs malaisĂ©) lescampagnes cambodgiennes.
Mais la frontiĂšre Ă©tablie depuis plus dâun siĂšcle, et reconnue, au moinstacitement, par les deux adversaires potentiels jusquâĂ la fin des annĂ©es cin-quante, « dĂ©croche », dans le secteur du temple, de maniĂšre apparemmentaberrante. Ce dĂ©crochage a Ă©tĂ© inscrit dans les faits par la validation dâunecarte Ă©tablie en 1907.
2. De lâhĂ©ritage colonial En fait, câest lâarmĂ©e française qui, en 1907, a cartographiĂ© la frontiĂšre entre
le Cambodge (Ă lâĂ©poque, membre Ă part entiĂšre, au sein de lâIndochine, delâempire colonial français) et le Royaume du Siam. Le tracĂ© fut prĂ©sentĂ© uni-latĂ©ralement Ă Bangkok, qui ne le contesta guĂšre avant 1958 : contestation quiaboutira au jugement de la Cour internationale de justice en 1962, au profitde la partie cambodgienne.
Lâargument cartographique est un Ă©lĂ©ment assez constant dans lâhistoiredes revendications territoriales, a fortiori frontaliĂšres (tĂ©moin, par exemple,la remise en question de lâauthenticitĂ© des portulans portugais dans le con-tentieux argentino-britannique Ă lâorigine de la guerre des Malouines, ou desFalklands).
Le « dĂ©crochage » entre frontiĂšres naturelles et frontiĂšres administra-tives, clef de voĂ»te de la dispute du Temple de Preah Vihear, apparaĂźt rĂ©gu-liĂšrement dans la saga des controverses et des litiges bilatĂ©raux. Ă lâĂ©chelle,
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Ă nouveau, de lâAmĂ©rique Latine, rappelons le conflit de « la Laguna delDieserto », sur le flanc oriental des Andes patagonnes, entre le Chili, parti-san dâune frontiĂšre fixĂ©e sur la ligne de crĂȘte orographique, et lâArgentine,privilĂ©giant la ligne de crĂȘte militaire ; ou la guerre de 1995 entre lâĂquateuret le PĂ©rou dans la « Cordilliera del Condor », dĂ©clenchĂ©e, il est vrai, quelquesmois aprĂšs la dĂ©couverte de gisements dâhydrocarbures dans la rĂ©gion.
3. Deux situations gĂ©oĂ©conomiques, de part et dâautre dâune frontiĂšre Ă forte porositĂ©Le contentieux de Preah Vihear oppose, de facto, deux Ătats Ă la situation
Ă©conomique contemporaine fortement contrastĂ©e, tant Ă lâĂ©chelle des pays duTiers Monde, quâĂ celui, a fortiori, des nations Ă©grenĂ©es le long de « lâarc decrise ».
La ThaĂŻlande figure aujourdâhui dans la cohorte des « pays Ă©mergents »et le Cambodge piĂ©tine dans celle des « pays les moins avancĂ©s ».
En outre, ladite frontiĂšre se caractĂ©rise aussi par une indĂ©niable porositĂ©,Ă lâheure de lâessor des activitĂ©s criminelles organisĂ©es, et des trafics transfron-taliers illicites en tous genres, du trafic de drogues (depuis lâĂ©radication, aumoins partielle, de la culture du pavot dans une grande partie de la ThaĂŻlande)Ă celui des ĂȘtres humains, des espĂšces animales rares ou des systĂšmesdâarmes.
Documentation :JENNAR Raoul, Les frontiĂšres du Cambodge contemporain, Paris, Maisonneuve et Larose, 2001.LABRECQUE Georges, Les diffĂ©rends internationaux en Asie, Paris, lâHarmattan, 2006.
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CHAPITRE III.
Un plan pluridisciplinaire
Lâexercice dâapplication qui suit prĂ©sente trois plans uni-disciplinaires (ju-ridique, de Relations Internationales et GĂ©opolitique), puis une suggestionde plan pluridisciplinaire, sur un mĂȘme sujet : « Francophonie et PacifiqueSud ».
SECTION 1.Francophonie et Pacifique Sud :
du point de vue du droit international
Ce sujet est particuliĂšrement difficile Ă traiter du strict point de vue du droit in-ternational car il ne se prĂȘte pas Ă une analyse juridique. Le droit a peu Ă dire surcertaines questions. Le plan qui suit montre donc les limites dâune approche mono-disciplinaire sur certains sujets.
La Francophonie est peu prĂ©sente dans la rĂ©gion du Pacifique Sud, essen-tiellement par lâentremise des territoires de son principal contributeur : laFrance ; mais est-ce un atout ou un handicap ?
Le Pacifique Sud dont les limites gĂ©ographiques sont incertaines rassem-ble des Ătats peu viables Ă©conomiquement et politiquement (exceptĂ© lâAus-tralie, La Nouvelle-ZĂ©lande et les territoires français) : la rĂ©gion comprend neufdes douze pays les plus pauvres du monde, et ceux dont les populations sontles plus faibles : sept millions de personnes dans quinze pays (dont cinqpour la seule Papouasie-Nouvelle-GuinĂ©e). Ces micro-Ătats (Nauru : 20 km2)souvent fragmentĂ©s (Kiribati est formĂ© dâune trentaine dâatolls dissĂ©minĂ©s surdes millions de km2) soulĂšvent des problĂšmes juridiques particuliers, mais sontdes membres de lâONU et disposent dâune voix Ă lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale. Mal-grĂ© lâĂ©loignement et son Ă©tendue, le Pacifique Sud intĂ©resse la plupart desgrandes puissances, pour des raisons liĂ©es aux richesses maritimes maisaussi Ă la proximitĂ© de lâAntarctique (TraitĂ© de lâAntarctique, 1er dĂ©cembre 1959).
Le terme « Francophonie » dĂ©signe des institutions intergouvernementalesrassemblĂ©es au sein de lâOrganisation internationale de la Francophonie. Cetteorganisation, souvent mĂ©connue, regroupe pourtant un tiers des membres delâONU ; elle entretient des reprĂ©sentations permanentes Ă New York, GenĂšve,Bruxelles, et Addis Abeba ; elle est distinguĂ©e comme partenaire par toutes
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les OIG⊠Cet ensemble est atypique parce quâen plus de sa mission naturelleâ la promotion de la langue française et de lâĂ©ducation â la Francophonie a Ă©tĂ©en pointe dans lâadoption de la convention de lâUNESCO sur la protection dela diversitĂ© cultuelle ; elle contribue Ă©galement depuis les annĂ©es 1990 Ă lâef-fort des Nations unies en faveur de la dĂ©mocratie et des droits de lâhomme ;enfin, elle a liĂ© rĂ©cemment la question du respect de la dĂ©mocratie Ă celle dela « sĂ©curitĂ© humaine » et de la prĂ©vention des conflits. Câest dire quâelle estpassĂ©e en quelques annĂ©es dâun rĂŽle dâagence de coopĂ©ration technique et cul-turelle Ă un statut dâorganisation internationale politique.
La Francophonie ne compte dans le Pacifique Sud quâun seul membre :le Vanuatu, ancien condominium franco-britannique devenu indĂ©pendanten 1979 (et qui a adhĂ©rĂ© la mĂȘme annĂ©e Ă lâOIF). Câest la France Ă travers sesterritoires (Nouvelle-CalĂ©donie, PolynĂ©sie française, Wallis et Futuna) qui faitlâessentiel de la prĂ©sence francophone dans le Pacifique Sud. Cette prĂ©sencepourrait ĂȘtre le vecteur potentiel du dĂ©veloppement de la Francophoniedans cette rĂ©gion du monde ; mais il faut se demander si les relations diffi-ciles â voire conflictuelles â entre la France et les puissances rĂ©gionales ne cons-tituent pas plutĂŽt un obstacle Ă ce dĂ©veloppement.
I. Les territoires français, vecteur de la présence francophone dans le Pacifique Sud
Ă lâexception du Vanuatu (qui accueille une antenne de lâAgence univer-sitaire de la Francophonie), la Francophonie nâest prĂ©sente dans la rĂ©gion quâĂ travers les territoires français.
A. La diversitĂ© du statut des territoires françaisDepuis 2003 et la disparition de la notion de « territoire dâoutre-mer », Wal-
lis et Futuna est une collectivitĂ© dâoutre-mer, la PolynĂ©sie est un pays dâoutre-mer, et la Nouvelle-CalĂ©donie est une collectivitĂ© particuliĂšre rĂ©gie par le titreXIII de la constitution française. Cette Ă©volution contrastĂ©e vers davantagedâautonomie â voire vers lâindĂ©pendance â est largement due aux pressionsdes organisations rĂ©gionales.
B. La participation des territoires français aux associations régionalesIls sont membres de la Commission du Pacifique Sud, organisation inter-
nationale bilingue (anglais, français) fondĂ©e en 1947 et rebaptisĂ©e en 1997 « Se-crĂ©tariat gĂ©nĂ©ral de la communautĂ© du Pacifique » ; ils participent Ă©galementau Forum des Ăles du Pacifique, organisation politique rĂ©gionale : la Nouvelle-
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CalĂ©donie y a Ă©tĂ© admise comme observateur en 1999 ; elle est membre asso-ciĂ©e depuis 2006 en compagnie de la PolynĂ©sie française (Wallis et Futuna,qui nâa pas choisi la voie de lâautonomie, est observateur).
II. La France, obstacle au développement de la Francophonie dans le Pacifique Sud ?
A. La volontĂ© de coopĂ©ration de la FrancophonieLa Francophonie, qui se veut une communautĂ© culturelle, peut sâĂ©largir
dans la rĂ©gion : par lâadhĂ©sion de nouveaux membres, mais aussi en dĂ©velop-pant un partenariat, ou une association avec le Commonwealth qui compteplusieurs membres dans le Pacifique. Le Commonwealth partage en effet unmode dâorganisation comparable et les mĂȘmes valeurs politiques. Dâailleurs,une coopĂ©ration entre la Francophonie et le Commonwealth a dĂ©butĂ© en 1999,notamment par lâorganisation de rencontres et de colloques.
La promotion de la diversitĂ© culturelle suppose le renforcement des aireslinguistiques partout dans le monde ; et leur rapprochement est le plus sĂ»rmoyen de combattre lâappauvrissement linguistique dans un contexte mon-dialisĂ© et uniformisateur. Pour la Francophonie, lâaction contre lâuniformitĂ©passe par le partenariat avec ces aires linguistiques organisĂ©es dans le cadredâunions gĂ©oculturelles.
B. Les obstacles liés à la politique françaiseLes relations entre la France et les puissances régionales ont souvent été
difficiles : dâailleurs le Forum des Ăles du Pacifique est issu de lâoppositiondes pays de la rĂ©gion aux essais nuclĂ©aires français en PolynĂ©sie. Câest dansle cadre du Forum quâa Ă©tĂ© nĂ©gociĂ© et adoptĂ© le TraitĂ© de Rarotonga (6 aoĂ»t1985) instaurant une zone dĂ©nuclĂ©arisĂ©e en OcĂ©anie. La dĂ©cision française demettre un terme aux essais en 1996 a permis de renouer le dialogue, mais laFrance continue dâĂȘtre perçue comme une puissance extĂ©rieure. Dâautant quelâimportance des eaux territoriales françaises suscite la convoitiseâŠ
DĂšs lors on peut se demander si la prĂ©sence française nâest pas un obsta-cle plus quâun avantage pour le dĂ©veloppement de la Francophonie dans larĂ©gion.
Bibliographie sommaireBENSAAlain, RIVIERRE Jean-Claude (dir.), Le Pacifique. Un monde Ă©pars, Paris, LâHarmattan,
« Cahiers du Pacifique Sud contemporain », 1999.HAMELIN Christian, La tradition et lâĂtat, Paris, LâHarmattan, « Cahiers du Pacifique Sud con-
temporain », 2002.
128
SECTION 2.Francophonie et Pacifique Sud :
du point de vue des Relations Internationales
Le constat de la faible prĂ©sence de la Francophonie dans le Pacifique Suddoit sâaccompagner dâune investigation des causes de ce phĂ©nomĂšne.Celles-ci peuvent ĂȘtre recherchĂ©es soit au niveau des Ătats de la rĂ©gion, soitau niveau de la Francophonie elle-mĂȘme, soit au niveau du contexte rĂ©gional.
Ă deux exceptions notables â lâAustralie et la Nouvelle-ZĂ©lande â, les Ătatsdu Pacifique Sud sont des micro-Ătats. Or, les Relations Internationales ontdĂ©veloppĂ© une thĂ©orie qui dĂ©couvre des modĂšles de comportement spĂ©ci-fiques pour cette catĂ©gorie dâĂtats : ils ne sâimpliquent pas beaucoup dansles affaires internationales, militent pour la force du droit international, et leursobjectifs de politique Ă©trangĂšre sont trĂšs limitĂ©s. Or, si lâon observe les micro-Ătats du Pacifique Sud, on constate quâen effet ils tĂ©moignent de ce type decomportement. La plupart dâentre eux ont une tradition de non-militarisa-tion ; certains sâappuient sur des forces militaires Ă©trangĂšres (câest le cas dela MicronĂ©sie) ou bien se trouvent dans une situation de dĂ©pendance par rap-port Ă une grande puissance, tels la France, les Ătats-Unis, la Grande-Bretagneou lâAustralie. Câest pourquoi on peut considĂ©rer que, dans beaucoup de cas,leur politique Ă©trangĂšre est dĂ©pendante et quâils hĂ©siteront Ă entrer dans descoopĂ©rations internationales qui iraient Ă lâencontre des intĂ©rĂȘts de leurs pro-tecteurs. Or, la Francophonie est largement perçue, surtout dans les cerclesinfluencĂ©s par le rĂ©alisme (et ici on peut inclure le nĂ©o-conservatisme amĂ©ri-cain), comme une organisation qui sert principalement les intĂ©rĂȘts de laFrance, en diffusant son modĂšle culturel dans une logique de soft power.
Dâautre part, si lâon choisit de sâĂ©loigner de ce paradigme rĂ©aliste et de cher-cher une logique de coopĂ©ration, la participation de ces Ătats Ă la Francopho-nie pourrait sâavĂ©rer utile pour les deux cĂŽtĂ©s. Lâinclusion dans lâOIF pourraitapporter Ă ces Ătats une plus grande visibilitĂ© internationale, un accĂšs pluslarge aux institutions dâĂ©ducation des autres pays membres de la Francopho-nie et, surtout, la chance de bĂ©nĂ©ficier des expĂ©riences des autres Ătats mem-bres en matiĂšre de dĂ©veloppement, tenant compte du taux de la pauvretĂ© trĂšsĂ©levĂ© des micro-Ătats du Pacifique Sud. Ă son tour, lâOIF bĂ©nĂ©ficiera deplus de diversitĂ© culturelle, Ă©tant donnĂ© les traditions culturelles trĂšs forteset trĂšs particuliĂšres des Ăźles du Pacifique, mais aussi dâun poids politique accrudans la rĂ©gion et dans le monde.
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I. La faible présence de la Francophonie dans le Pacifique Sud
A. Les micro-Ătats et leur politique Ă©trangĂšreâ la thĂ©orie des micro-Ătats ;â la tradition de dĂ©militarisation des Ătats du Pacifique Sud ;â la faible prĂ©sence des autres organisations internationales dans la rĂ©gion :
ONU, puis uniquement le Forum des Ăles du Pacifique et le SecrĂ©tariatde la CommunautĂ© Pacifique.
B. Les essais nuclĂ©aires de la France dans le Pacifique Sudâ les divergences avec lâAustralie ;â les divergences avec la Nouvelle-ZĂ©lande.
C. Les autres influences dans la rĂ©gionâ les relations politiques des pays du Pacifique Sud avec les Ătats-Unis.
Lâinfluence culturelle amĂ©ricaine dans la rĂ©gion ;â le Commonwealth ;â lâAustralie, puissance rĂ©gionale. Le projet de lâUnion Pacifique.
II. Les avantages dâune prĂ©sence accrue de la Francophonie dans le Pacifique Sud
A. Pour les Ătats de la rĂ©gionâ la coopĂ©ration interuniversitaire comme vecteur du dĂ©veloppement. Le
rĂŽle des Ă©lites Ă©duquĂ©es ;â la diffusion des normes et des valeurs comme vecteur du dĂ©veloppement.
Lâapprentissage des bonnes pratiques dâadministration et de gouverne-ment. La promotion de la dĂ©mocratie et des droits de lâhomme.
B. Pour lâOrganisation internationale de la Francophonieâ du point de vue politique : un poids plus important dans la politique
internationale ; un nombre accru de voix dans lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale delâONU ; une influence accrue dans lâOcĂ©anie et la rĂ©gion Antarctique ;
â du point de vue culturel : la diversitĂ© culturelle, dimension essentiellede la Francophonie.
Bibliographie sommaireHEGARTY David et POLOMKAPeter (dir.), The Security of Oceania in the 1990s, Canberra, Strate-
gic and Defence Studies Centre, Australian National University, 1989. LOCKHART Douglas G. (dir.), The Development Process in Small Island States, London, Rout-
ledge, 1993.
130
TAGLIONI François, « La Francophonie ocĂ©anienne », in HermĂšs, n° 40, 2004, pp. 247â254. TONRA Ben, « Les petits pays ont aussi une politique Ă©trangĂšre », in CHARILLON FrĂ©dĂ©ric
(dir.), Politique Ă©trangĂšre. Nouveaux regards, Paris, Presses de Sciences Po, 2002, pp. 331â359.VERINE StĂ©phane, « La politique Ă©trangĂšre des micro-Ătats du Pacifique Sud », in Politique
Ă©trangĂšre, vol. LII, n° 1, 1997, pp. 102â104.
Section 3.Francophonie et Pacifique Sud :
du point de vue de la GĂ©opolitique
AprĂšs les incontournables dĂ©finitions gĂ©ographiques (quelles sont leslimites et les spĂ©cificitĂ©s du Pacifique Sud et des Ătats de la zone ?) et de la « fran-cophonie », lâapproche gĂ©opolitique du sujet peut difficilement ĂȘtre axĂ©e surun autre thĂšme que celui â tendances lourdes comme variables contempo-raines â de la confusion (surtout aux yeux des anglophones) des intĂ©rĂȘts fran-cophones et des intĂ©rĂȘts français.
I. Le Pacifique Sud : des données géopolitiques exceptionnelles
Le Pacifique dans son ensemble, le Pacifique Sud en particulier, constituentla seule aire (par ailleurs gigantesque) oĂč se rencontrent aujourdâhui tous lescas de figures gĂ©opolitiques, de la superpuissance (influence indirecte) auxnations les moins avancĂ©es.
Les Ătats-Unis, par ailleurs riverains du Pacifique Nord, sont plus que ja-mais (y compris via des accords privilĂ©giĂ©s comme lâANZUS), prĂ©sentsdans le Sud, oĂč cohabitent des « puissances moyennes » Ă Ă©conomie libĂ©rale(Australie, Nouvelle-ZĂ©lande), des Ătats en voie de dĂ©veloppement (IndonĂ©-sie), des PMA(Papouasie-Nouvelle-GuinĂ©e), des micro-Ătats (du Vanuatu auxSamoas, du Tonga au Tuvalu) et des territoires liĂ©s Ă une puissance euro-pĂ©enne, la France. Le triangle stratĂ©gique, Ă©conomique et politique de tout pre-mier ordre : Nouvelle-CalĂ©donie, PolynĂ©sie, Wallis et Futuna, au-delĂ desproblĂšmes de gĂ©opolitique interne que connaĂźt la Nouvelle-CalĂ©donie, cons-titue un sujet de prĂ©occupation majeur pour le binĂŽme anglophone « austra-loânĂ©o-zĂ©landais »...
Cette zone gigantesque et quasiment vide dâhommes (26 millions dâanglo-phones, cent fois moins de francophones) recense ainsi, par les alĂ©as de lâhis-toire, une trentaine dâĂtats-nations, dont 22 micro-Ătats.
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II. âŠavec, corollaire direct, une traduction gĂ©ostratĂ©gique originale
Si lâaffrontement Est-Ouest, clef de voĂ»te du systĂšme bipolaire, a naturelle-ment disparu avec lâimplosion de lâUnion SoviĂ©tique (Moscou avait multi-pliĂ© en son temps les points dâappui et dâinfiltration au Vanuatu, Ă Kiribati,en Nouvelle GuinĂ©e) lâaffrontement plus ou moins feutrĂ© entre les puissancesanglophones et la France est plus vivace que jamais.
En fait, la « fracture des langues » entre ces quelques vingt-six millions delocuteurs anglophones et moins de trois cent milles francophones constituesans doute lâĂ©lĂ©ment le plus constant dans lâĂ©volution rĂ©cente et contempo-raine de la zone. « Il est parfaitement incongru de parler français dans le Paci-fique Sud » pouvait dĂ©clarer, il y a quelques annĂ©es, le Premier MinistreNĂ©o-ZĂ©landais !
Cette « fracture » a jouĂ© un pĂŽle nullement nĂ©gligeable au plan religieux(eu Ă©gard au poids local des Ă©glises protestantes anglophones) et dans les ava-tars stratĂ©giques quâa connu la rĂ©gion au cours des vingt derniĂšres annĂ©es(tensions avec la Nouvelle-ZĂ©lande, Nouvelle-CalĂ©donie, politique nuclĂ©airede la France, notamment).
De facto, la francophobie manifestĂ©e ici masque peut-ĂȘtre tout simplementlâhostilitĂ© des deux puissances hĂ©ritiĂšres de lâEmpire britannique Ă lâĂ©gardde la France, obstacle Ă leur projection de puissance.
LâAustralie en particulier, Ătat-continent, face aux « vides » de lâOuest(OcĂ©an Indien) et du Sud (Antarctique, « gelĂ© » par lâapplication du traitĂ© Ă©po-nyme de 1959) et bloquĂ©e au Nord par lâIndonĂ©sie (tĂ©moins les rĂ©centes pĂ©-ripĂ©ties au sujet du Timor Oriental) ne dispose que dâune seule possibilitĂ©dâexpansion spatiale : lâEst ! Câest Ă dire vers le triangle des territoires françaisdĂ©jĂ Ă©voquĂ©.
En outre, depuis lâaccĂšs Ă lâindĂ©pendance de lâAlgĂ©rie, la France a procĂ©dĂ©durant plus de quatre dĂ©cennies Ă des expĂ©riences nuclĂ©aires du cĂŽtĂ© de Muru-roa qui nâont pas laissĂ© indiffĂ©rents ni Wellington, ni Canberra (cf. la poussĂ©ede francophobie exacerbĂ©e de lâĂ©tĂ© 1995 dans les principales agglomĂ©ra-tions australiennes aprĂšs la reprise des essais dĂ©cidĂ©e par Paris au lendemainde lâĂ©lection de Jacques Chirac).
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III. Une fracture linguistique qui resurgit sournoisement Ă travers les organisations supra-Ă©tatiques
âŠtout particuliĂšrement via la « CommunautĂ© du Pacifique Sud » et, plusĂ©difiant encore, lâexemple du Forum des Ăles du Pacifique Sud.
La Communauté du Pacifique Sud : Créée en 1947 sous le nom de Commission du Pacifique Sud, elle regrou-
pait Ă lâĂ©poque les six puissances industrialisĂ©es directement situĂ©es dans lazone (Australie et Nouvelle-ZĂ©lande) ou via leurs territoires (Grande-Bretagne,France, Ătats-Unis, Pays-Bas). Son but : coordonner les aides au dĂ©veloppe-ment, dans tous les domaines, de lâensemble de la zone.
Elle sâest progressivement Ă©toffĂ©e, avec les indĂ©pendances : 13 membresen 1990, 22 aujourdâhui, avec lâadhĂ©sion progressive de la quasi-totalitĂ© desmicro-Ătats de la rĂ©gion, des Cook au Vanuatu en passant par Niu, Nauri,les Samoas ou Tonga.
Le Forum des Ăles du Pacifique Sud :Le rĂŽle de la CommunautĂ©, au demeurant modeste, en dĂ©pit de la palette
officiellement affichĂ©e de ses missions, est dĂ©sormais relĂ©guĂ© Ă lâarriĂšre planau profit du Forum du Pacifique Sud, dont lâaction concrĂšte est beaucoup plusrĂ©vĂ©latrice des liens entre les « rĂ©serves » manifestĂ©es par maints Ătats de larĂ©gion Ă lâĂ©gard de la langue française et de la Francophonie, dâune part, etleur hostilitĂ© vis-Ă -vis de la France.
CrĂ©Ă© en 1971 sous le nom de « Forum du Pacifique Sud » (il changera denom en 2000) son objectif est clair : « lutter dans la rĂ©gion contre lâinfluencedes puissances impĂ©rialistes (les Ătats-Unis) ou colonialistes (la France) ».
Il recense aujourdâhui 16 Ătats indĂ©pendants. La Nouvelle-CalĂ©donie etla PolynĂ©sie française lui sont associĂ©es depuis 2006, date Ă laquelle le Foruma aussi obtenu le statut dâobservateur auprĂšs des Nations unies.
Le Forum, qui a maintes fois condamné les expériences nucléaires fran-çaises de Mururoa a obtenu, avec la bénédiction des Néo-Zélandais et desAustraliens, la signature du Traité de Rarotonga, en 1985, exigeant la dénu-cléarisation du Pacifique Sud (un traité directement inspiré des principes duTraité latino-américain de Tatlelolco).
Conclusion : MalgrĂ© lâarrĂȘt des essais nuclĂ©aires, lâhostilitĂ© de lâAustralie et de la Nou-
velle-ZĂ©lande nâa pas totalement cessĂ© Ă lâĂ©gard de la France au sein du Paci-fique Sud. Les relations de cette derniĂšre avec les membres du Forum se sont
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adoucies depuis 2006 ; mais, derriÚre la dénonciation plus ou moins larvéede la pratique de la langue de MoliÚre, on devine sans trop de mal les objec-tifs purement géopolitiques des descendants directs des colonies de forçatsde Sa Gracieuse Majesté.
Bibliographie sommaireBENSAAlain, RIVIERRE Jean-Claude (dir.), Le Pacifique. Un monde Ă©pars, Paris, LâHarmattan,
« Cahiers du Pacifique Sud contemporain », 1999.HALLIER Jean-Pierre, La Commission du Pacifique Sud, NoumĂ©a, 1997.HENNINGHAM Stephen, France and the South Pacific, Sydney, Allen & Unwin, 1992.MRGUDOVIC Nathalie, La France dans le Pacifique Sud, Paris, LâHarmattan, 2008.SOPPELSA Jacques, GĂ©opolitique de lâAsie-Pacifique, Paris, Ellipses, 2002.
SECTION 4. Francophonie et Pacifique Sud :
une suggestion de plan interdisciplinaire
Introduction : Rappel des définitions : le Pacifique Sud (et ses limites ambiguës) ; la Fran-
cophonie et la nécessité de distinguer « Francophonie » et « francophonie ».Question centrale : la France, atout ou obstacle de la F(f)rancophonie ?
1. Le Pacifique Sud : un monde majoritairement non francophoneâ des donnĂ©es gĂ©opolitiques, gĂ©oĂ©conomiques et gĂ©ostratĂ©giques excep-
tionnelles ;â un monde anglo-saxon ;â une prolifĂ©ration de micro-Ătats fragiles et « puissants » ; une « fracture
linguistique ».
2. La France, atout ou obstacle pour la Francophonie ?â la diversitĂ© de statuts des « territoires » français, depuis la disparition
des TOM ;â des atouts : de la coopĂ©ration Ă la promotion des droits de lâhomme ; de
lâenrichissement mutuel liĂ© Ă la diversitĂ© des cultures ;â des obstacles : francophobie et « hĂ©ritage » des essais nuclĂ©aires (cf. le
Traité de Rarotonga).
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3. Du changement dâĂ©chelle : France et Francophonie face aux acteurs non francophones du Pacifique Sud
â lâinfluence nord-amĂ©ricaine, lâANZUS ;â le Commonwealth ;â la spĂ©cificitĂ© des relations bilatĂ©rales : Australie, Nouvelle-ZĂ©lande,
micro-Ătats ;â les organisations rĂ©gionales : La CommunautĂ© du Pacifique Sud, le
Forum des Ăles du Pacifique Sud.
Conclusion : Perspectives : scenarii pour lâavenir ; lâAustralie, puissance rĂ©gionale au
dĂ©triment des intĂ©rĂȘts francophones ?
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Conclusion
De quelques perspectives
Avec les « perspectives », câest surtout mais pas exclusivement, de la con-clusion du travail de thĂšse, de mĂ©moire ou de rapport quâil sâagit, ouvrantde nouveaux horizons, que le corps du texte a Ă peine esquissĂ©s. Câest ce quilaisse au lecteur, donc Ă©galement aux Ă©valuateurs, lâultime impression. La con-clusion doit donc ĂȘtre particuliĂšrement soignĂ©e. LâexpĂ©rience montre que, dansbeaucoup de recherches universitaires, elle est souvent trop courte par rap-port au travail prĂ©sentĂ© et Ă ce que lâauteur pourrait valoriser, compte tenude tout ce quâil a dĂ©couvert. En mĂȘme temps, il nâest pas souhaitable de se bor-ner Ă rĂ©sumer ce qui a dĂ©jĂ Ă©tĂ© dit et que chacun est censĂ© avoir lu. Pour repren-dre une formule un peu simplificatrice : une conclusion sert « Ă fermer uneporte et Ă ouvrir une fenĂȘtre ». Sâagissant de la porte, il faut rĂ©ussir une syn-thĂšse qui ajoute quelque chose Ă ce qui prĂ©cĂšde. Sâagissant de la fenĂȘtre, ilconvient dâouvrir de nouvelles perspectives. Cinq thĂšmes, repĂ©rĂ©s dansnotre ouvrage sur la Francophonie et les relations internationales, peuvent four-nir une idĂ©e des questions que lâon doit se poser pour donner une autre dimen-sion Ă son Ă©tude, pour lâexhausser au moment de la finaliser.
Le premier thĂšme porte sur la lĂ©gitimitĂ© de lâorganisation et de lâinstitution-nalisation de la francophonie. Elle implique de dĂ©finir le point de vue desacteurs de la Francophonie et de la sociĂ©tĂ© civile. Elle suppose de rechercherles modalitĂ©s du processus dâinstitutionnalisation avec le passage progres-sif et parfois improvisĂ© de la sociĂ©tĂ© civile Ă lâinstitution, avec le souci de recons-tituer le processus qui a conduit, Ă partir dâactions jusque lĂ volontaires,diffuses et variĂ©es, Ă installer une institution apte Ă porter ces actions, Ă lesfĂ©dĂ©rer, Ă leur donner un sens commun pour lâensemble des membres. CettedĂ©marche doit sâappuyer sur lâappel Ă la thĂ©orie de lâinstitution, avec laquestion des rapports de pouvoirs et des reconnaissances mutuelles : câest,pour la Francophonie, un vĂ©ritable enjeu que de se faire reconnaĂźtre pardâautres institutions et de sĂ©lectionner celles avec lesquelles elle souhaite colla-borer. Il y a lĂ des choix qui nâont rien dâinsignifiant.
Parmi les questions que doit se poser lâĂ©tudiant traitant un sujet de droitinternational, de Relations Internationales ou de GĂ©opolitique, le problĂšmedes institutions est toujours prĂ©sent. Il prend des aspects particuliers dansle cadre de la Francophonie, ensemble complexe et atypique fondĂ© sur un traitĂ©
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fort ancien qui ne correspond plus aux Ă©quilibres actuels. Les protagonistesdu mouvement francophone sâefforcent de regrouper des initiatives disper-sĂ©es sans les contraindre, en sâappuyant sur les projets et les financementsde quelques Ătats dĂ©veloppĂ©s mais se plaçant dans une perspective claire-ment plurielle. Ces dĂ©fis ne sont pas spĂ©cifiques Ă la francophonie mais ilssont ici ressentis avec une particuliĂšre acuitĂ©. MĂȘme au-delĂ de la francopho-nie, il nâest guĂšre de questions internationales oĂč un minimum dâinstitution-nalisation, fĂ»t-ce Ă titre provisoire, ne soit utile, ne fĂ»t-ce que pour dĂ©passerles Ă©goĂŻsmes nationaux et introduire un nouveau partenaire qui sâefforce dâana-lyser les problĂšmes en terme dâintĂ©rĂȘts convergents et pas seulement derivalitĂ©s, en vue de tenter de dĂ©passer les conflits par la mise en place de vĂ©ri-tables opĂ©rations de coopĂ©ration. En mĂȘme temps, la tentation de rĂ©soudrechaque difficultĂ© ou de donner lâimpression de vouloir y apporter une solu-tion par une gesticulation mĂ©diatique dĂ©bouchant sur la crĂ©ation dâunestructure internationale ne constitue pas une panacĂ©e absolue. Nombre deconfĂ©rences internationales ne laissent rien dâautre que des institutionsmorts-nĂ©es lancĂ©es Ă grand fracas mais abandonnĂ©es tout de suite aprĂšs, Ă moins quâelles ne vivotent faute des relais financiers prĂ©vus Ă lâorigine. Il estsouvent utile pour lâĂ©tudiant de poser la question de la pertinence de la miseen place dâune structure internationale pour rĂ©soudre un problĂšme lorsquâunetelle structure nâexiste pas, et il est toujours nĂ©cessaire de sâinterroger sur lâef-ficacitĂ© de celles qui existent. Trop dâanalyses, et pas seulement celles des Ă©tu-diants, se bornent Ă dĂ©crire les organes et les procĂ©dures prĂ©vus par lestraitĂ©s internationaux fondateurs. Il est indispensable de tenter dâĂ©valuer leurcaractĂšre opĂ©rationnel : combien de rĂ©unions par an ? quels ordres du jour ?combien de rĂ©solutions adoptĂ©es ? dans quelles conditions ont-elles Ă©tĂ© sui-vies dâeffets ? Il est trop facile en droit international de se contenter de bonnesintentions et dâapparences trompeuses. On se souvient de lâalgarade du gĂ©-nĂ©ral de Gaulle prĂ©sidant un conseil des ministres et interrompant la commu-nication de son ministre des Affaires Ă©trangĂšres, Maurice Couve de Murville,qui se bornait Ă une plate Ă©numĂ©ration de prises de position insignifiantes :« Allez-vous cesser dâenfoncer des portes ouvertes en essayant de nous lesfaire prendre pour des arcs de triomphe ? ». Lâauteur dâun travail universi-taire, notamment, devra se livrer Ă cette Ă©valuation des institutions, modeste-ment mais sans dissimuler son jugement pour autant quâil soit fondĂ© sur toutesles donnĂ©es collectĂ©es.
Un deuxiĂšme thĂšme de rĂ©flexion porte sur la Francophonie revisitĂ©e Ă lalumiĂšre des thĂ©ories des relations internationales. Il sâagit dâĂ©tudier si laFrancophonie, avec sa vision et sa pratique, peut, dans ce domaine, ajouter
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sa contribution Ă celle des autres grands acteurs institutionnels. Cette ques-tion est rendue plus pertinente par le constat quâĂ partir des annĂ©es 2005-2006,Ă la volontĂ© des Nations unies dâintĂ©grer lâindividu dans ses prĂ©occupationssâest substituĂ© le retour des Ătats au premier plan. La place de la Francopho-nieâfrancophonie est confrontĂ©e aux mĂ©thodes du rĂ©alisme-nĂ©o-rĂ©alisme, duconstructivisme social, du nĂ©olibĂ©ralisme institutionnel, de lâĂ©cole anglaise(avec sa dimension historique et son appel aux institutions). Ces champs dâĂ©-tude supposent dâutiliser lâapproche des institutions dans leurs diversesthĂ©ories. Lâanalyse repose Ă©galement sur la dĂ©termination des rapports entrenormativisme et francophonie. Elle suppose dâexpliciter la connexion exis-tant entre lâapproche francophone et le rĂŽle de la sociĂ©tĂ© civile internationale,en se fondant sur les analyses Ă©laborĂ©es Ă propos des acteurs non-Ă©tatiquesdans les relations internationales. La rĂ©flexion doit en outre se rĂ©fĂ©rer Ă la thĂ©o-rie des « genres ».
Peut-ĂȘtre faudrait-il faire figurer cette dimension en tĂȘte des problĂ©matiquesĂ intĂ©grer. Se positionner par rapport aux grandes Ă©coles mĂ©thodologiquesauxquelles se rattachent les spĂ©cialistes des questions internationales doitapparaĂźtre au jeune chercheur comme un prĂ©alable indispensable. Lâon ne sau-rait le nier. En mĂȘme temps, il convient dâĂ©viter certains Ă©cueils Ă©pistĂ©molo-giques. La nĂ©cessitĂ© de connaĂźtre les grands courants et les grandes approchesen matiĂšre internationale est Ă©vidente pour un Ă©tudiant qui entend se consa-crer Ă ce domaine dâinvestigation. Il doit imaginer le mĂȘme niveau de connais-sances chez ses lecteurs et ne pas se complaire, en introduction ou ailleurs,dans une description exhaustive des grandes Ă©coles â ce qui aurait plutĂŽt saplace dans un manuel que dans une Ă©tude qui se veut originale et novatrice.Puisque la connaissance des grands courants constitue un prĂ©alable, te-nons-les pour connus. Pour autant, le jeune chercheur devra faire certainschoix : mĂȘme si les diverses mĂ©thodes ne sont pas toutes rigoureusement in-compatibles, Ă©tant parfois complĂ©mentaires, mĂȘme si certaines techniquesentendent faire le pont et faciliter des liens entre des approches a priori incom-patibles, mĂȘme sâil est parfois judicieux de confronter un mĂȘme problĂšme Ă plusieurs techniques dâanalyse, il est lĂ©gitime de se positionner par rapportaux grands clivages qui divisent la doctrine actuelle. Encore convient-il, unefois le choix effectuĂ©, de nâen pas oublier les termes et de les utiliser commeun fil directeur qui orientera toute la recherche. Il convient aussi de savoirparfois sâen dĂ©gager : la mĂ©thode doit jouer le rĂŽle de guide et non de lieu dâen-fermement. En tous cas, il faut la retrouver en fin dâĂ©tude, au niveau de laconclusion. Câest dâabord lâoccasion dâen Ă©valuer la pertinence, vĂ©rifiĂ©e aulong des pages et sans hĂ©siter Ă exprimer des rĂ©serves si lâĂ©tudiant en sentle besoin. Les dĂ©cisions Ă©pistĂ©mologiques Ă©clairent aussi les conclusions
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proposĂ©es et les perspectives ouvertes. Elles peuvent aussi jouer le rĂŽledâutiles excuses pour expliquer quâun aspect puisse paraĂźtre avoir Ă©tĂ© nĂ©gli-gĂ©, ou simplement insuffisamment approfondi.
Un troisiĂšme thĂšme dâinvestigation susceptible de prolonger la rĂ©flexionconduite dans cet ouvrage conduit Ă passer au crible de la critique le langageet le discours de la Francophonie. Une telle analyse doit ĂȘtre menĂ©e Ă partirdâune Ă©valuation des grands textes de la Francophonie en termes de thĂ©ma-tique et en se posant la question de la pertinence de ces discours, telles parexemple les dĂ©clarations de Bamako, du Luxembourg, de Ouagadougou, deSaint-Boniface, notamment en fonction du langage privilĂ©giĂ©. Lâon ne sauraitĂȘtre dupe de lâappel Ă certains termes, utilisĂ©s avec une Ă©vidence quâils nâontpas toujours. Il ne faut pas considĂ©rer comme relevant de la prĂ©somptionirrĂ©fragable lâaffirmation selon laquelle la Francophonie apporterait naturelle-ment du neuf au discours officiel. Il nâest pas insolent de se poser la questionde savoir si, dans certains cas, lâon ne serait pas en prĂ©sence dâune simple tra-duction en français, tardive et maladroite, de ce qui a Ă©tĂ© fait ailleurs depuislongtemps. Cet ouvrage nâa Ă aucun moment voulu prendre le ton de lâha-giographie ; ce nâest pas lâendroit dây succomber. Dans cette perspective, sâim-pose une analyse critique des termes utilisĂ©s de façon Ă rompre avec unedĂ©marche qui se borne trop souvent Ă une simple description. Câest lĂ quela francophonie peut apporter un Ă©lĂ©ment nouveau, par une attitude systĂ©ma-tique de suspicion Ă lâĂ©gard des mots, en Ă©vitant lâanalyse de texte en soi afinde privilĂ©gier une lecture critique, Ă©clairĂ©e, en outre, par une analyse du con-texte francophone.
Lâanalyse du discours en matiĂšre internationale est toujours fĂ©conde. Ellerenvoie Ă la prise en compte et Ă la comprĂ©hension de toute une hiĂ©rarchiede propos aux buts divers et avec des codes diffĂ©rents : il y a les dĂ©clarationssolennelles qui concluent les sommets, dâautant plus enthousiastes et promet-teuses que la force obligatoire est douteuse (ce qui facilite lâobtention dâunaccord gĂ©nĂ©ral) ; il y a les traitĂ©s, aux termes soigneusement pesĂ©s, rĂ©sultatde prĂ©occupations contradictoires, telles que la comprĂ©hension des engage-ments de tous est insĂ©parable du rappel des intĂ©rĂȘts de chacun et des marchan-dages finaux ; il y a les rĂ©solutions adoptĂ©es par des instances internationales,rĂ©sultat de nĂ©gociations dâautant plus difficiles que le temps est comptĂ© etquâune rĂ©daction rapide sâimpose, avec un vocabulaire trĂšs spĂ©cifique qui mĂȘledes formules telles que « manifestation dâune vive prĂ©occupation » ou « con-damnation avec la plus grande fermetĂ© », avec des Ă©quilibres tels que la vi-gueur des attendus compense la prudence des dĂ©cisions ; il y a les dĂ©clarationsproduites par les ministĂšres des Affaires Ă©trangĂšres des Ătats, occasion de
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prendre position ou, parfois et plus simplement, de prendre date, de don-ner des gages aux uns et aux autres avec les formules soigneusement balan-cĂ©es ; il y a, hors champ de la diplomatie, les dĂ©clarations politiques, effectuĂ©esĂ la tribune des assemblĂ©es parlementaires ou Ă lâoccasion de rĂ©ponses auxquestions posĂ©es par les mĂ©dias, sous le coup de lâurgence, de lâĂ©motion etdes attentes dâune opinion publique qui ne comprendrait pas lâabsence derĂ©actions rapides aux problĂšmes que pose lâactualitĂ©, Ă moins que certainsprotagonistes ne tentent de prĂ©senter cette absence comme un signe dâindif-fĂ©rence ou, au pire, de complicitĂ©. Ce serait une erreur majeure dâĂ©valuer Ă la mĂȘme aune les termes utilisĂ©s dans ces divers textes : Ă la prudence et Ă lâĂ©quilibre, parfois Ă la pusillanimitĂ© des uns correspond lâoutrance, lâexagĂ©ra-tion assumĂ©es des autres. Câest dans cet esprit que les propos sont tenus etquâil faut les Ă©couter. Câest ainsi quâils doivent ĂȘtre interprĂ©tĂ©s par les auteursdâune thĂšse, dâun mĂ©moire ou dâun exposĂ©. Pour ce qui est, en outre, de lâuti-lisation du français plutĂŽt que de lâanglais, elle ne doit pas conduire Ă nĂ©gli-ger lâutilisation de la documentation rĂ©digĂ©e dans dâautres langues : sur lamajoritĂ© des sujets portant sur les relations internationales, il est indispen-sable de se rĂ©fĂ©rer Ă des Ă©lĂ©ments de bibliographie en langues Ă©trangĂšres, passeulement pour le plaisir de la citation Ă©rudite mais en les utilisant pour lacomprĂ©hension des problĂšmes et pour un regard diffĂ©rent sur les rĂ©alitĂ©s inter-nationales.
Un quatriĂšme thĂšme liĂ© aux territoires et aux marges de la francophoniepasse Ă©videmment par un Ă©claircissement de cette notion de « marges », carac-tĂ©ristiques des grands Empires dont lâhistoire de lâhumanitĂ© a donnĂ© maintsexemples, avec des limites imprĂ©cises, avec, Ă la lisiĂšre, des espaces-tampondâautant plus attentivement surveillĂ©s, dâautant mieux garnis en troupes quâilsconstituaient une ligne de dĂ©fense Ă la fois rĂ©elle et symbolique, premier obs-tacle Ă toute agression extĂ©rieure. La notion paraĂźt adaptĂ©e Ă la Francopho-nie pour autant quâon lâallĂšge de toute connotation prĂ©torienne. Le conceptde territoire est pris ici dans un sens qui renvoie Ă la fois aux notions dâiden-titĂ©, de pĂ©rimĂštre⊠Pour reprendre lâidĂ©e de marges, il en est qui sont intĂ©-grĂ©es officiellement Ă la Francophonie, telles la Roumanie, lâAutriche ou laSlovaquie, tandis que dâautres, comme lâAlgĂ©rie, y sont liĂ©es seulement parleur francophonie. Se pose ici le problĂšme du multiculturalisme et celui, ini-maginable il y a quelques annĂ©es, des rapports entre langues, religions et fran-cophonie. Une question ne peut ĂȘtre Ă©ludĂ©e : celle de lâĂ©largissement de lafrancophonie, du risque de dilution auquel elle expose, de lâadĂ©quation desmoyens par rapport aux objectifs quâelle impose.
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Le thĂšme du territoire est Ă©videmment central en matiĂšre internationale :pendant des siĂšcles câest en termes de conquĂȘte de nouveaux espaces que sâap-prĂ©ciaient le succĂšs ou lâĂ©chec de la politique extĂ©rieure de telle puissance oude tel dirigeant. Si les pays occidentaux ont un peu rĂ©visĂ© cette conceptionet se placent davantage dans une perspective coĂ»t-avantage â ce qui peut lesconduire Ă accepter de se dĂ©lester de certaines zones â, en revanche le patrio-tisme en honneur dans les nouvelles nations peut conduire certains dirigeantsĂ se lancer dans des politiques de conquĂȘte censĂ©es attirer la bienveillancede leur opinion publique. Si lâon ajoute quâil est gĂ©nĂ©ralement acceptĂ©, de nosjours, que de nouveaux espaces Ă maĂźtriser sâoffrent aux Ătats, ceux liĂ©s audĂ©veloppement Ă©conomique ou Ă la recherche scientifique, lâon conviendraque le thĂšme du territoire est plus complexe quâil ne paraĂźt Ă premiĂšre vue.Qui plus est, la nouvelle configuration de la sociĂ©tĂ© internationale aboutit,comme il est indiquĂ© Ă propos de lâexemple de la francophonie, Ă ce que cer-taines zones aient des statuts spĂ©cifiques : espaces protecteurs Ă la lisiĂšre degrands ensembles, zones-tampon entre deux pays rivaux, territoires dispu-tĂ©s ou dont la possession est incertaine⊠Les instances internationales ne cher-chent pas nĂ©cessairement Ă clarifier ces situations ambiguĂ«s : dans certainscas, elles prĂ©fĂšrent geler le conflit en attendant quâun accord soit possible. Ajou-tons quâen liaison avec ces problĂšmes de statut, en gĂ©nĂ©ral juridiques maisparfois aussi Ă©pistĂ©mologiques, lâauteur dâune recherche universitaire doitsoigneusement prĂ©ciser le champ sur lequel porte son investigation. Ici, il sâa-git dâabord de territoire au sens premier du terme : dĂ©finir les pays concernĂ©spar lâĂ©tude, Ă lâexception des cas oĂč lâon prĂ©tend sâintĂ©resser Ă lâensemble dela planĂšte, ce qui nâest guĂšre possible que pour des questions fort limitĂ©es.En toutes hypothĂšses, il faut Ă©viter le reproche dâavoir oubliĂ© un territoire com-pris dans lâespace arrĂȘtĂ© comme sujet dâĂ©tude. On retrouve ici le problĂšmede la stricte dĂ©limitation de la recherche, ce qui doit ĂȘtre fait dâemblĂ©e, doncdĂšs le dĂ©but du rassemblement de la documentation. La dĂ©termination du pĂ©-rimĂštre peut faire lâobjet dâajustements par la suite, par extension ou rĂ©duction,en fonction des premiers rĂ©sultats, ce qui doit ĂȘtre de toutes façons clairementindiquĂ© pour que le lecteur sache, sans ĂȘtre exposĂ© Ă aucun doute, quel estle champ auquel la recherche est consacrĂ©e.
Un cinquiĂšme thĂšme consiste Ă prĂ©senter la Francophonie entre plurali-tĂ© et lĂ©gitimitĂ©. Il conduit Ă sâinterroger sur les rapports perçus et rĂ©els entreFrancophonie et perspectives de dĂ©veloppement Ă©conomique. Il suppose unecomparaison entre la Francophonie et le Commonwealth, ainsi quâavec lesmondes hispanophone et lusophone, en Afrique. Il renvoie aux questions delâimage et du regard de la francophonie du Sud ainsi que des attentes de cette
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francophonie du Sud, pour autant que lâon puisse dĂ©velopper significative-ment les possibilitĂ©s de coopĂ©ration, voire de solidaritĂ© entre les pays du Sud.Autres interrogations : quelle perception de la Francophonie, de la franco-philie et de la francophobie ? Est-on capable de dĂ©coupler la francophoniedâune relation bilatĂ©rale privilĂ©giĂ©e avec la France ? Quelle pourrait ĂȘtre lâau-tonomie de la francophonie par rapport Ă la France ? Enfin peut-on Ă©valuerle degrĂ© de prĂ©sence, dans la francophonie du Sud, dâun sentiment dâappar-tenance ?
Le thĂšme des rapports entre pluralitĂ© et lĂ©gitimitĂ© peut paraĂźtre assez spĂ©-cifique Ă la francophonie, regroupant des rĂ©alitĂ©s, des intĂ©rĂȘts et des attentesassez diffĂ©rents au point de faire douter de ce qui unit des Ătats et des peuplesaussi disparates. Il nâest pas inutile de faire prendre conscience, dans le cadredâun travail de recherche, quâil nây a pas lĂ une situation tout Ă fait exception-nelle. Câest, lĂ encore, le gĂ©nĂ©ral de Gaulle qui indique : « Au club des grands,nous trouvions, assis aux bonnes places, autant dâĂ©goĂŻsmes sacrĂ©s quâil y avaitde membres »1. La formule est utilisĂ©e Ă propos de lâorganisation dâaprĂšs laDeuxiĂšme Guerre mondiale mais elle est valable dans la plupart des cas defigure. Les participants Ă une organisation internationale, Ă un groupe de pres-sion permanent, Ă une coalition pour un objectif limitĂ© ont gĂ©nĂ©ralement desbuts fort divers et ce serait une manifestation de naĂŻvetĂ© dâimaginer lâexis-tence dâune affectio societatis sans nuage. En outre, les Ătats ne sont pas les seulsacteurs dans les relations internationales. Surtout aprĂšs la fin de lâĂ©quilibrebipolaire et la disparition dâun certain nombre de blocages, dâautres interve-nants sont apparus. Ils existaient auparavant mais leur rĂŽle sâest accru :organisations non gouvernementales qui sâefforcent de se faire reconnaĂźtreune lĂ©gitimitĂ© pour parler au nom de la sociĂ©tĂ© civile et qui sâĂ©rigent volon-tiers en tribunaux, se prĂ©tendant Ă ce titre fondĂ©es Ă Ă©valuer et Ă classer lesgouvernements ; lobbies et groupes de pression qui mĂȘlent dĂ©fense dâintĂ©rĂȘtsprivĂ©s et Ă©tudes globales censĂ©es renouveler les donnĂ©es de problĂšmes posĂ©sdepuis longtemps et quâils souhaitent voir rĂ©soudre dans le sens de leurs objec-tifs ; grandes entreprises avançant Ă visage plus ou moins masquĂ© et dont lâin-fluence ne peut ĂȘtre niĂ©e mĂȘme lorsque lâon nâen connaĂźt lâampleur exactequâaprĂšs un dĂ©lai favorable Ă ce que les langues se dĂ©lient. La description dumonde des relations internationales doit prendre en compte toutes ces va-riables : la pluralitĂ© est incontestable, la lĂ©gitimitĂ© doit parfois ĂȘtre cherchĂ©e.
_________________________1. MĂ©moires de guerre : Le Salut (1944â1946), Paris, Plon, 1959, p. 54.
ANNEXES
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Annexe 1Carte du monde représentant les pays
oĂč la langue française est utilisĂ©e
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Carte de lâOrganisation internationale de la Francophonie
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Annexe 2.DĂ©claration de Saint-Boniface (extraits)
Nous, Ministres et Chefs de dĂ©lĂ©gation des Ătats et gouvernements ayantle français en partage, rĂ©unis Ă Saint-Boniface les 13 et 14 mai 2006, dans lecadre de la ConfĂ©rence ministĂ©rielle de la Francophonie sur la prĂ©vention desconflits et la sĂ©curitĂ© humaine ;
Nous fondant sur les dispositions de la Charte de la Francophonie adop-tĂ©e Ă Antananarivo en novembre 2005 ainsi que sur les orientations dĂ©finiespar nos Chefs dâĂtat et de gouvernement dans le Cadre stratĂ©gique dĂ©cen-nal de la Francophonie, adoptĂ© lors du Sommet de Ouagadougou, en no-vembre 2004, et Rappelant en particulier les objectifs stratĂ©giques arrĂȘtĂ©sdans ce dernier, portant sur la consolidation de la dĂ©mocratie, des droits delâhomme et de lâĂtat de droit, ainsi que sur la prĂ©vention des conflits et lâac-compagnement des processus de sortie de crises, de transition dĂ©mocratiqueet de consolidation de la paix ;
Convaincus que, dans un monde plus que jamais interdĂ©pendant, confron-tĂ© Ă des dangers communs et Ă des menaces transnationales, le multilatĂ©ra-lisme demeure le cadre privilĂ©giĂ© de la coopĂ©ration internationale ; que laconstruction de la paix, le renforcement de la sĂ©curitĂ© collective et le dĂ©velop-pement durable Ă lâĂ©chelle mondiale sont une tĂąche commune qui doit serĂ©aliser dans le respect de la souverainetĂ© des Ătats, de lâĂ©galitĂ© des droits despeuples et de leur droit Ă disposer dâeux-mĂȘmes, et que le recours Ă la forceest du ressort ultime du Conseil de sĂ©curitĂ©, qui lâexerce dans le respect dela Charte des Nations unies et des rĂšgles du droit international ;
PersuadĂ©s que lâinstauration du dialogue des cultures et des civilisations,comme lâaffermissement de la solidaritĂ© entre les nations, sont de nature Ă rĂ©duire les tensions, Ă prĂ©venir les conflits et Ă renforcer la lutte contre le ter-rorisme ;
Convaincus Ă©galement que la prĂ©vention des crises et des conflits repose aussisur la sĂ©curitĂ© de lâindividu, la satisfaction de ses besoins vitaux, notammentcelui de vivre en paix, le respect de tous ses droits, y compris le droit au dĂ©ve-loppement, toutes exigences conditionnĂ©es par lâexistence dâun Ătat de droitdĂ©mocratique ;
Convaincus enfin que la sĂ©curitĂ©, la paix, le respect de tous les droits delâhomme â assortis de mĂ©canismes de garantie â, la dĂ©mocratie et le
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développement, composantes essentielles de la sécurité humaine, sontindissociables et constituent des objectifs liés et interdépendants ;
(...)
Rappelant en particulier le rĂŽle prĂ©curseur jouĂ© par la Francophonie dansla DĂ©claration de Ouagadougou (2004) sur la responsabilitĂ© de protĂ©ger et no-tamment en ce qui concerne celle des Ătats de protĂ©ger les populations surleurs territoires et la responsabilitĂ© de la communautĂ© internationale, lorsquâunĂtat nâest pas en mesure ou nâest pas disposĂ© Ă exercer cette responsabilitĂ©,de rĂ©agir, dans le cadre dâun mandat du Conseil de sĂ©curitĂ© des Nations unieset sous son Ă©gide, pour protĂ©ger les populations victimes de violations mas-sives des droits de lâhomme et du droit international humanitaire ;
Prenant acte avec satisfaction de la reconnaissance unanime par lesmembres de lâOrganisation des Nations unies au titre des dispositions desalinĂ©as 138 et 139 du Document final du Sommet mondial qui sâest tenu Ă NewYork en septembre 2005, du principe de la responsabilitĂ© de protĂ©ger les popu-lations contre le gĂ©nocide, les crimes de guerre, lâĂ©puration ethnique et lescrimes contre lâhumanitĂ© ;
Prenant acte, Ă cet Ă©gard, de la RĂ©solution 1674 du Conseil de sĂ©curitĂ© concer-nant le renforcement des efforts de protection des civils, en pĂ©riode de con-flit armĂ©, particuliĂšrement les femmes et les enfants, ainsi que la responsabilitĂ©et le rĂŽle dâaccompagnement de la communautĂ© internationale ;
(âŠ)
RĂ©itĂ©rons notre attachement Ă un systĂšme multilatĂ©ral actif, efficace et im-prĂ©gnĂ© des valeurs dĂ©mocratiques, fondĂ© sur le respect de lâintĂ©gritĂ© territo-riale, lâindĂ©pendance politique, la souverainetĂ© des Ătats et le principe de noningĂ©rence dans les affaires intĂ©rieures, et favorisant le rĂšglement pacifique desdiffĂ©rends et la renonciation au recours Ă la menace ou Ă lâemploi de la forcedans les relations internationales, conformĂ©ment au droit international ;
Soutenons avec intĂ©rĂȘt, dans ce contexte, les rĂ©flexions Ă venir auxNations unies visant lâĂ©tablissement de principes directeurs du recours Ă la force ;
Soulignons la responsabilitĂ© qui incombe Ă chaque Ătat de protĂ©ger les civilssur son territoire ou sur un territoire quâil contrĂŽle ;
RĂ©affirmons que cette responsabilitĂ© exige la protection des populationscontre le gĂ©nocide, les crimes de guerre, lâĂ©puration ethnique, et les crimescontre lâhumanitĂ©, ainsi que la poursuite en justice des auteurs de tels actes ;
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Confirmons la coopĂ©ration pleine et entiĂšre de la Francophonie Ă lâĂ©gardde ses membres qui le souhaitent, pour quâils sâacquittent de cette responsa-bilitĂ© ;
Soulignons la responsabilitĂ© de la communautĂ© internationale de rĂ©agirdâune façon opportune et dĂ©cisive, et en conformitĂ© avec la lĂ©galitĂ© interna-tionale, les principes de la Charte des Nations unies et les prĂ©rogatives dĂ©-volues au Conseil de sĂ©curitĂ© pour protĂ©ger les civils contre le gĂ©nocide, lescrimes de guerre, lâĂ©puration ethnique et les crimes contre lâhumanitĂ©, au casoĂč les moyens pacifiques sâavĂ©reraient insuffisants et oĂč il serait manifesteque les autoritĂ©s nationales ne protĂšgent pas leurs populations contre de telsactes ;
RĂ©affirmons notre volontĂ© de conforter lâaction prĂ©ventive de lâOrganisa-tion internationale de la Francophonie, telle que prĂ©vue par la DĂ©clarationde Bamako et dans le Programme dâaction annexĂ© Ă celle-ci, par une utilisa-tion optimale de ses capacitĂ©s, afin de lui permettre de jouer pleinement sonrĂŽle spĂ©cifique dans lâobservation, lâalerte prĂ©coce, la diplomatie prĂ©ventive,la gestion des crises, lâaccompagnement des transitions et la consolidationde la paix, et ce, dans le cadre dâune coopĂ©ration systĂ©matique et rationali-sĂ©e avec les Organisations internationales et rĂ©gionales ;
Confirmons notre volontĂ© politique dâagir et dâexercer pleinement notre res-ponsabilitĂ© de prĂ©venir lâĂ©clatement des crises et des conflits dans lâespacefrancophone, limiter leur propagation, faciliter leur rĂšglement pacifique ethĂąter le retour Ă une situation de paix durable par la mise en Ćuvre des dispo-sitions librement consenties au titre de la DĂ©claration de Bamako et des ins-truments internationaux auxquels nos Ătats sont parties ;
(...)
RĂ©affirmons que le dĂ©veloppement Ă©conomique et social est un Ă©lĂ©ment clĂ©de la prĂ©vention structurelle des crises et des conflits, et Soulignons Ă cet Ă©gardlâimportance dâune coopĂ©ration internationale solidaire, concertĂ©e et agissante ;
Sommes rĂ©solus Ă participer de façon active et concertĂ©e Ă la mise en placeet aux travaux des nouveaux organes instituĂ©s dans le cadre des Nations unies,Ă savoir le Conseil des droits de lâhomme et la Commission de consolidationde la paix, qui seront appelĂ©s Ă jouer, chacun dans leurs domaines, un rĂŽlede premier plan dans la promotion et la protection des droits de lâhomme,la prĂ©vention des conflits et la sauvegarde de la sĂ©curitĂ© humaine ;
Demandons Ă lâOrganisation internationale de la Francophonie de dĂ©velop-per, dans ce cadre, ses actions dâappui Ă la prĂ©sence et aux concertations denos dĂ©lĂ©guĂ©s ;
(...)
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Entendons mettre en Ćuvre notre dĂ©cision dâAntananarivo visant Ă assu-rer une plus forte participation de nos pays aux OpĂ©rations de maintien dela paix, en Ă©troite coopĂ©ration avec lâOrganisation des Nations unies et lesOrganisations rĂ©gionales compĂ©tentes ;
Entendons Ă©galement intensifier, Ă cette fin, les coopĂ©rations entre Ătatsmembres afin de renforcer les capacitĂ©s des Ătats dont les moyens sont insuffi-sants ;
Demandons Ă lâOrganisation internationale de la Francophonie de soutenircet effort des Ătats membres, en dĂ©veloppant, en partenariat avec les coopĂ©ra-tions bilatĂ©rales et multilatĂ©rales, des programmes de formation et en favo-risant les Ă©changes dâexpĂ©riences et de bonnes pratiques ;
(...)
Réitérons notre engagement à respecter et à faire respecter le droit inter-national humanitaire, notamment dans les situations de conflits armés, et à appliquer les résolutions 1265, 1296, 1325, 1612, 1674 du Conseil de sécurité ;
(...)
Saint-Boniface, le 14 mai 2006
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Annexe 3. Pratiques doctorales contemporaines
EXEMPLE DE CHARTE DES THĂSES : UNIVERSITĂS TOULOUSE I CAPITOLE, LE MIRAIL, PAUL SABATIER,
INP, INSA ET ISAE
CHARTE DES THĂSES
1. La charte formalise lâaccord conclu entre le/la doctorant(e), le/la directeur(trice)de thĂšse, de lâunitĂ© de recherche, de lâĂ©cole doctorale et lâĂ©tablissement auprĂšs duquelsâinscrit le/la doctorant(e).
Cette charte sâappuie sur les principes Ă©noncĂ©s par le MinistĂšre de lâĂduca-tion nationale, de lâenseignement supĂ©rieur et de la recherche Ă travers ses textesrĂ©glementaires (arrĂȘtĂ© du 3 septembre 1998 relatif Ă la charte des thĂšses, arrĂȘ-tĂ© du 7 aoĂ»t 2006 relatif Ă la formation doctorale, arrĂȘtĂ© du 6 janvier 2005 modi-fiĂ© par lâarrĂȘtĂ© du 7 aoĂ»t 2006 relatif Ă la cotutelle internationale de thĂšse), etles prĂ©cise pour tenir compte de la politique et des dispositifs dâaccompagne-ment de la thĂšse Ă©tablis dans le cadre du collĂšge doctoral du pĂŽle de rechercheet dâenseignement supĂ©rieur (PRES) « UniversitĂ© de Toulouse ».
Lâobjectif de cette charte est de responsabiliser les partenaires et de dĂ©finir les droitset devoirs de chacun(e).
Les diffĂ©rent(e)s partenaires engagĂ©(e)s par cette charte sont :â le/la doctorant(e) ;â le/la directeur(trice) de la thĂšse, qui a la responsabilitĂ© scientifique du tra-
vail, lâencadre, sâengage sur sa qualitĂ© et est reconnu(e) par une commu-nautĂ© scientifique, au sein de laquelle devront en particulier ĂȘtre trouvĂ©esles personnes en charge du rapport de thĂšse et les membres du jury ;
â lâĂ©quipe dâaccueil et lâunitĂ© de recherche au sein de laquelle le/la doctorant(e)effectue sa recherche, et dont il/elle doit au minimum respecter le rĂšgle-ment intĂ©rieur, les rĂšgles dâutilisation des outils et les Ă©ventuelles pra-tiques de confidentialitĂ© ;
â lâĂ©cole doctorale, portĂ©e par les Ă©tablissements dĂ©livrant le diplĂŽme natio-nal de docteur(e), qui regroupe les Ă©quipes accueillant les doctorant(e)sautour dâun projet de formation doctorale ;
â lâĂ©tablissement auprĂšs duquel est inscrit le/la doctorant(e), personnalitĂ©juridique qui a la responsabilitĂ© administrative de sa formation.
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La prĂ©paration dâune thĂšse sâinscrit dans le programme de formation dĂ©-fini par lâĂ©cole doctorale de rattachement de chaque doctorant(e) et elle obĂ©itaux conditions dâencadrement et aux exigences dâĂ©valuation que celle-cidĂ©finit.
Les Ă©tudiant(e)s prĂ©parant une thĂšse en cotutelle internationale bĂ©nĂ©ficientdes mĂȘmes droits et doivent rĂ©pondre aux exigences formalisĂ©es dans la con-vention signĂ©e Ă cet effet.
Les sites respectifs des Ă©coles doctorales proposent aux doctorant(e)s desinformations relatives aux parcours de formation quâelles offrent et aux uni-tĂ©s de recherche quâelles regroupent.
La prĂ©sente charte doit ĂȘtre signĂ©e, au moment de la premiĂšre inscription en thĂšse,par le/la doctorant(e), le/la directeur(trice) (ou les codirecteur(trice)s) de thĂšse, de lâuni-tĂ© de recherche et de lâĂ©cole doctorale.
Sommaire1. La thĂšse, Ă©tape dâun projet personnel et professionnel2. Avant lâinscription en doctorat3. DĂ©roulement de la thĂšse4. AprĂšs la soutenance de la thĂšse5. ProcĂ©dure de mĂ©diation
1. LA THĂSE, ĂTAPE DâUN PROJET PERSONNEL ET PROFESSIONNEL
La prĂ©paration dâune thĂšse doit sâinscrire dans le cadre dâun projet person-nel et professionnel clairement dĂ©fini dans ses buts comme dans ses exigences.Elle constitue une expĂ©rience professionnelle de recherche.
Il est recommandĂ© par lâarticle L 412â2 du code de la recherche que le tra-vail de thĂšse soit financĂ© ;
Le/la doctorant(e) est alors liĂ©(e) Ă la personnalitĂ© morale assurant le finan-cement, par un contrat dont les dispositions doivent ĂȘtre compatibles avecla prĂ©paration de la thĂšse et qui sâimposent Ă la doctorante ou au doctorant.Ă lâInstitut National Polytechnique de Toulouse (INPT), Ă lâInstitut Nationaldes Sciences AppliquĂ©es de Toulouse (INSA), Ă lâInstitut SupĂ©rieur de lâAĂ©ro-nautique et de lâEspace (ISAE), et Ă lâUniversitĂ© Paul Sabatier â Toulouse III(UPS), lâexistence dâun financement de trois annĂ©es est obligatoire pour lesdoctorant(e)s en formation initiale ; nĂ©anmoins, en ce qui concerne lâUPS, desdĂ©rogations Ă caractĂšre exceptionnel peuvent ĂȘtre accordĂ©es par le conseil scien-tifique de lâĂ©tablissement sur proposition du directeur ou de la directrice delâĂ©cole doctorale.
Dans les autres Ă©tablissements, le/la directeur(trice) de thĂšse et lâĂ©quipedâaccueil doivent sâefforcer dâen obtenir un.
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Les moyens Ă mettre en Ćuvre pour faciliter lâinsertion professionnelle duou de la futur(e) docteur(e) reposent aussi sur le projet professionnel du doc-torant ou de la doctorante. Ce projet doit donc ĂȘtre prĂ©cisĂ© dĂšs que possibleen concertation avec son directeur, sa directrice de thĂšse, afin que sa forma-tion soit adaptĂ©e. Les donnĂ©es sur le devenir professionnel des docteur(e)sformĂ©(e)s localement lui sont communiquĂ©es par son Ă©cole doctorale et/ouson Ă©tablissement.
ParallĂšlement, il incombe au doctorant, Ă la doctorante, en sâappuyant surlâĂ©cole doctorale et sur lâunitĂ© de recherche, de se prĂ©occuper de cette inser-tion en prenant contact avec dâĂ©ventuels futurs employeurs (entreprises, la-boratoires, universitĂ©s, en France ou Ă lâĂ©tranger). Cette stratĂ©gie sâappuierasur la participation aux Doctoriales et autres formations complĂ©mentaires pro-posĂ©es par les Ă©tablissements.
2. AVANT LâINSCRIPTION EN DOCTORAT
Le choix du sujet, les conditions de travail nĂ©cessaires Ă lâavancement dela recherche et la nature des tĂąches Ă effectuer au sein du laboratoire font lâob-jet dâun accord entre le/la candidat(e) et le/la directeur(trice) de thĂšse au mo-ment du dĂ©pĂŽt du dossier de candidature.
Le/la directeur(trice) de thĂšse prĂ©cise le sujet, son contexte scientifique,ainsi que lâĂ©quipe au sein de laquelle sâeffectue la recherche. La prĂ©parationde la thĂšse doit conduire Ă la rĂ©alisation dâun travail Ă la fois original et for-mateur, dont la faisabilitĂ© sâinscrit dans le dĂ©lai prĂ©vu, qui est de trois ans Ă temps plein. Le/la directeur(trice) de thĂšse doit informer le/la candidat(e)du nombre de thĂšse(s) quâil ou elle encadre ou co-encadre et du devenir pro-fessionnel des dernier(e)s docteur(e)s quâil ou elle a dirigĂ©(e)s. Il ou elle ren-seigne Ă©galement la personne candidate sur les dĂ©bouchĂ©s dans son domaine.
Le/la directeur(trice) de lâĂ©cole doctorale assure lâaccĂšs des futur(e)sdoctorant(e)s aux informations sur le programme des formations qui leur sontoffertes et sur le devenir professionnel des docteur(e)s formĂ©(e)s par lâĂ©coledoctorale.
Lorsque la thĂšse est financĂ©e, la source, le montant et la durĂ©e du finance-ment ainsi que les droits et contraintes affĂ©rents doivent ĂȘtre clairement dĂ©finis.En outre, les frais dâinscription et de couverture sociale doivent ĂȘtre prĂ©cisĂ©s.
3. DĂROULEMENT DE LA THĂSE
â Droits et devoirs des partenairesLe/la doctorant(e) :Le/la doctorant(e) remplit ses obligations administratives vis-Ă -vis de son
Ă©tablissement dâinscription.
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Il/elle est pleinement intĂ©grĂ©(e) dans son unitĂ© de recherche. Ă ce titre,il/elle a les mĂȘmes droits et devoirs que les autres membres de lâunitĂ© et parti-cipe aux tĂąches collectives inhĂ©rentes Ă la vie scientifique de son unitĂ©. Il/ellene saurait cependant pallier les insuffisances de lâencadrement technique delâunitĂ© de recherche et se voir imposer des tĂąches extĂ©rieures Ă son projet derecherche.
Le/la doctorant(e) sâengage sur un temps et un rythme de travail.Il/elle a vis-Ă -vis de son directeur, sa directrice de thĂšse, un devoir dâinfor-
mation quant aux rĂ©sultats obtenus et aux difficultĂ©s rencontrĂ©es lors de lâa-vancement de sa thĂšse. Il/elle sâengage Ă lui remettre autant de notes dâĂ©tapequâen requiert son sujet et Ă prĂ©senter ses travaux dans les sĂ©minaires delâĂ©quipe.
Le/la doctorant(e) bĂ©nĂ©ficie de formations complĂ©mentaires, proposĂ©esou validĂ©es par lâĂ©cole doctorale, qui poursuivront deux objectifs :
â accroĂźtre ses compĂ©tences dans son domaine de recherche et Ă©largir saculture scientifique (participation Ă des sĂ©minaires, ateliers, etc.)
â prĂ©parer son insertion professionnelle (formations linguistiques, âDoc-torialesâ, modules spĂ©cifiques, confĂ©rences dâintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ralâŠ).
Le/la directeur(trice) de la thĂšse :Le/la directeur(trice) de la thĂšse est responsable de lâencadrement scien-
tifique du doctorant, de la doctorante et sâengage Ă lui consacrer une part signi-ficative de son temps. SollicitĂ©(e) en raison dâune maĂźtrise reconnue duchamp de recherche concernĂ©, il/elle aide le/la doctorant(e) Ă dĂ©gager le carac-tĂšre novateur de son travail dans le contexte scientifique et sâassure de sonactualitĂ©. En concertation avec le doctorant ou la doctorante, il/elle dĂ©finitles diffĂ©rentes Ă©tapes du dĂ©roulement de la thĂšse et en assure un suivi rĂ©gu-lier. Il/elle veille en particulier aux Ă©ventuelles Ă©volutions du projet. Il/elledoit Ă©galement sâassurer que le/la doctorant(e) fait preuve dâesprit dâinitia-tive et de crĂ©ativitĂ©.
Le/la directeur(trice) de la thĂšse informe lâĂ©cole doctorale de tous alĂ©asdans le dĂ©roulement du travail, et veille Ă ce que la constitution des dossiersde rĂ©-inscription et de soutenance soit faite dans les dĂ©lais. Il lui appartienten particulier de planifier les publications.
Le/la directeur(trice) de lâunitĂ© de recherche :Le/la directeur(trice) de lâunitĂ© de recherche assure lâintĂ©gration du doc-
torant, de la doctorante qui a alors accĂšs aux mĂȘmes facilitĂ©s que les cher-cheur(e)s titulaires pour accomplir son travail de recherche : Ă©quipements,moyens, documentation, possibilitĂ© dâassister aux sĂ©minaires et confĂ©renceset de prĂ©senter son travail dans des rĂ©unions scientifiques.
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Le/la directeur(trice) de lâĂ©cole doctorale :Le/la directeur(trice) de lâĂ©cole doctorale met en Ćuvre un programme
de formations doctorales. Il/elle assure lâaccĂšs des doctorant(e)s aux informa-tions relatives Ă ces formations et au devenir professionnel des docteur(e)sformĂ©(e)s par lâĂ©cole doctorale.
Il/elle veille au respect de la charte de lâUniversitĂ© de Toulouse, et en par-ticulier aux conditions dâencadrement effectives. Il/elle peut organiser un suividu dĂ©roulement de la thĂšse (parrain, marraine, entretien Ă mi-parcoursâŠ).
LâĂ©tablissement dâinscription :LâĂ©tablissement dâinscription assure la gestion administrative de lâĂ©tu-
diant(e), la gestion de sa scolarité et de la soutenance de sa thÚse. Il luidélivre le diplÎme national de docteur(e).
Il est responsable du dĂ©pĂŽt, du signalement, de la diffusion et de lâarchi-vage de la thĂšse soutenue.
â Publications et communicationsLa qualitĂ© et lâimpact de la thĂšse peuvent se mesurer Ă travers les publica-
tions ou les brevets et les rapports industriels qui seront tirĂ©s du travail, quâilsâagisse de la thĂšse elle-mĂȘme ou dâarticles et de communications rĂ©alisĂ©s pen-dant ou aprĂšs la prĂ©paration du manuscrit.
La publication des rĂ©sultats dâun travail de thĂšse doit respecter les droitsdu doctorant, de la doctorante. La position du doctorant, de la doctorante par-mi les co-signataires dâune publication doit reflĂ©ter son investissement dansle travail.
Le/la doctorant(e) doit ĂȘtre incitĂ©(e) Ă publier et Ă prĂ©senter une ou descommunications scientifiques dans un congrĂšs Ă audience internationale.
â Conditions de fin de thĂšseUne thĂšse est une Ă©tape dans un processus de recherche. Celle-ci doit
respecter les Ă©chĂ©ances prĂ©vues, conformĂ©ment Ă lâesprit des Ă©tudes docto-rales et Ă lâintĂ©rĂȘt du doctorant, de la doctorante. La durĂ©e de rĂ©fĂ©rence deprĂ©paration dâune thĂšse est de trois ans Ă temps plein.
Au-delĂ de la troisiĂšme inscription, les demandes de dĂ©rogation soumisesĂ lâĂ©cole doctorale devront ĂȘtre assorties dâune lettre motivĂ©e du doctorant, dela doctorante, accompagnĂ©e dâun avis du directeur, de la directrice de la thĂšse,expliquant les raisons du retard et prĂ©cisant la date prĂ©visionnelle de soutenance.
Les dĂ©rogations sont accordĂ©es par le/la chef dâĂ©tablissement sur proposi-tion du directeur, de la directrice de lâĂ©cole doctorale.
Les dossiers de soutenance sont instruits par lâĂ©cole doctorale. Ils doiventrespecter les prĂ©-requis Ă©ventuellement fixĂ©s par lâĂ©cole doctorale et/ou
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lâĂ©tablissement en terme de production scientifique, de participation Ă lâen-seignement doctoral et de langues de rĂ©daction et de soutenance de la thĂšse.
4. APRĂS LA SOUTENANCE DE LA THĂSE
â DĂ©livrance du diplĂŽmePour obtenir le diplĂŽme de docteur(e) (ou une attestation de diplĂŽme), le/la
docteur(e) doit avoir dĂ©posĂ© auprĂšs de lâĂ©tablissement de soutenance le ma-nuscrit dĂ©finitif de thĂšse Ă©tabli aprĂšs prise en compte des demandes du juryde soutenance.
â Valorisation de la thĂšseAprĂšs la soutenance de la thĂšse, le/la directeur(trice) de thĂšse et le/la docto-
rant(e) se concertent pour procĂ©der, dans les dĂ©lais les plus brefs, Ă la publi-cation des rĂ©sultats des travaux qui nâont pas encore fait lâobjet dâunevalorisation.
Le/la doctorant(e) doit apparaßtre parmi les co-auteur(e)s des communi-cations, publications, brevets ou rapports industriels présentant pour la pre-miÚre fois des résultats issus de ses travaux de thÚse.
Le service de documentation de chaque Ă©tablissement dĂ©livrant le diplĂŽmede docteur(e), pourra assurer la mise en ligne de la thĂšse, aprĂšs signature parle/la docteur(e) dâun formulaire dâautorisation prĂ©sentant les garanties nĂ©-cessaires vis-Ă -vis du droit de propriĂ©tĂ© intellectuelle.
â Suivi de lâinsertion professionnelle du docteur(e)Les Ă©coles doctorales entretiennent des bases de donnĂ©es sur lâinsertion
et le parcours professionnel des docteur(e)s qui en sont issu(e)s. En con-sĂ©quence, les docteur(e)s sâengagent Ă informer lâĂ©cole doctorale de leur si-tuation et adresse professionnelle pendant au moins 5 ans aprĂšs la soutenancede la thĂšse. Ces bases de donnĂ©es centralisĂ©es au niveau de lâUniversitĂ© deToulouse, via le collĂšge doctoral de site, seront accessibles aux doctorant(e)set aux docteur(e)s de lâUniversitĂ© de Toulouse.
5. PROCĂDURE DE MĂDIATION
Tout conflit entre le/la doctorant(e) et son directeur, sa directrice de thĂšsedoit ĂȘtre portĂ© Ă la connaissance des directeurs(trices) de lâunitĂ© de rechercheet de lâĂ©cole doctorale, qui, en concertation, sâefforceront de rechercher unesolution. En cas de persistance du conflit, chaque signataire de cette chartepeut faire appel Ă un groupe de mĂ©diation qui, sans dessaisir quiconque deses responsabilitĂ©s, Ă©coute les parties et propose Ă son tour une solution en
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vue de lâachĂšvement de la thĂšse. La mission du groupe de mĂ©diation impliqueson impartialitĂ©.
Il est composĂ© de cinq membres :â le/la vice-prĂ©sident(e) du conseil scientifique de lâĂ©tablissement dâinscrip-
tion plus un ou une membre HDR de ce mĂȘme conseil dĂ©signĂ©(e) parle/la vice-prĂ©sident(e) ;
â deux doctorant(e)s dĂ©signĂ©(e)s par le/la chef dâĂ©tablissement parmiles Ă©lu(e)s des conseils de lâĂ©tablissement, de lâĂ©cole doctorale ou duPRES ;
â le/la directeur(trice) de lâĂ©cole doctorale.Si lâune de ces personnes est concernĂ©e par le conflit, un(e) supplĂ©ant(e)
la reprĂ©sentant sera dĂ©signĂ©(e) par les autres membres.En cas dâĂ©chec de la mĂ©diation, un dernier recours peut ĂȘtre dĂ©posĂ© au-
prĂšs du prĂ©sident ou de la prĂ©sidente/directeur(trice) de lâĂ©tablissement.
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Bibliographie sommaire
BIBLIOGRAPHIE POUR LA RECHERCHE EN DROIT INTERNATIONAL
BEAUD Olivier, Lâart de la thĂšse, Paris, La DĂ©couverte, 2006.BĂLANGER Michel, Droit international public, Paris, LGDJ, 2000.BERGEL Jean-Louis, MĂ©thodologie juridique, Paris, PUF, 2001.CORTEN Olivier, MĂ©thodologie du droit international public, Bruxelles, Ăditions de lâULB, 2009.JAILLARDON Ădith, ROUSSILLON Dominique, Outils pour la recherche juridique. MĂ©thodolo-
gie de la thĂšse de doctorat et du mĂ©moire de master en droit, Paris, Ăditions des archives con-temporaines, 2006.
QUIVY Raymond, VAN CAMPENHOUDT Luc, Manuel de recherche en sciences sociales, Paris,Dunod, 2006.
ROMI Raphaël, Méthodologie de la recherche en droit. Master et doctorat, Paris, Litec, 2006.Société française pour le droit international, Enseignement du droit international, recherche et pra-
tique, Paris, Pedone, 1997.
BIBLIOGRAPHIE POUR LA RECHERCHE EN RELATIONS INTERNATIONALES
BARREA Jean, Théories des Relations Internationales, Louvain-la-Neuve, Artel, 1994.BATTISTELLA Dario, Théories des Relations Internationales, Paris, Presses de Sciences Po, 2003. BURNHAM Peter, GILLAND Karin, GRANT Wyn, LAYTON-HENRY Zig, Research Methods
in Politics, Houndmills, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2004.CABANIS André, CROUZATIER Jean-Marie et al., Francophonie et relations internationales, Paris,
Ăditions des archives contemporaines, 2009. RAMEL FrĂ©dĂ©ric, CUMIN David, Philosophie des Relations Internationales, Paris, Presses de Sci-
ences Po, 2002. SMOUTS Marie-Claude, BATTISTELLA Dario, VENNESSON Pascal, Dictionnaire des relations
internationales: Approches, concepts, doctrines, Paris, Dalloz-Sirey, 2006.
BIBLIOGRAPHIE POUR LA RECHERCHE EN GĂOPOLITIQUE
CORDELLIER Serge, Dictionnaire historique et géopolitique du XXe siÚcle, Paris, La Découverte,2005.
LACOSTE Yves (dir.), Dictionnaire de GĂ©opolitique, Paris, Flammarion, 1995.LOROT Pascal et THUAL François, La gĂ©opolitique, Paris, Montchrestien, 1997.MONTBRIAL Thierry de et KLEIN Jean (dir.), Dictionnaire de StratĂ©gie, Paris, PUF, 2000.OâLOUGHLIN John, Dictionary of Geopolitics, New York, Greenwood, 1994.SOPPELSA Jacques, Lexique de GĂ©opolitique, Paris, Dalloz, 1988.SOPPELSA Jacques, GĂ©opolitique de 1945 Ă nos jours, Paris, Sirey, 1994.THUAL François, MĂ©thodologie de la GĂ©opolitique, Paris, Ellipses, 1996.
Table des matiĂšres
Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9Liste des abréviations, des acronymes et des sigles utilisés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
PREMIĂRE PARTIE. MĂ©thodologie pluridisciplinaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27CHAPITRE I. Lâesprit de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
SECTION 1. La lucidité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30SECTION 2. La rigueur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31SECTION 3. La neutralité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
CHAPITRE II. LâĂ©thique de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34SECTION 1. Les relations entre le directeur de recherche et le doctorant . . 35SECTION 2. Le gel dâun sujet de thĂšse et la durĂ©e idoine
de la recherche doctorale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38SECTION 3. Le plagiat et ses conséquences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
CHAPITRE III. Le dialogue des disciplines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41SECTION 1. Trois disciplines voisines⊠. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
A. Le droit international . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41B. Les Relations Internationales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46C. La GĂ©opolitique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
SECTION 2. âŠaux mĂ©thodes souvent semblables⊠. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53A. Un objectif commun . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53B. Des approches complĂ©mentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
SECTION 3. âŠmais dont les dĂ©marches sont occasionnellement spĂ©cifiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
A. La méthode de la recherche en droit international . . . . . . . . . . 56B. La méthode de la recherche en Relations Internationales . . . . 57C. La méthode de la recherche en Géopolitique . . . . . . . . . . . . . . 59
DEUXIĂME PARTIE. Les Ă©tapes de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61CHAPITRE I. Une dĂ©marche commune⊠. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
SECTION 1. La délimitation du sujet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69SECTION 2. La validation du thÚme central . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72SECTION 3. La validation définitive du plan et la rédaction . . . . . . . . . . . . 75SECTION 4. Le bilan et les perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
CHAPITRE II. âŠmais des spĂ©cificitĂ©s Ă chaque discipline . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80SECTION 1. La dĂ©finition de la problĂ©matique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80SECTION 2. La construction dâun modĂšle dâanalyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82
CHAPITRE III. La construction de la pluralité disciplinaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84SECTION 1. La question des frontiÚres en Afrique subsaharienne . . . . . . . 84
A. Du point de vue du droit international . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84B. Du point de vue des Relations Internationales . . . . . . . . . . . . 86C. Du point de vue de la GĂ©opolitique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88
SECTION 2. Le fleuve Litani . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93A. Du point de vue du droit international . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93B. Du point de vue des Relations Internationales . . . . . . . . . . . . 95C. Du point de vue de la GĂ©opolitique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98
TROISIĂME PARTIE. PluralitĂ© disciplinaire ? Ătudes de cas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103CHAPITRE I. Les modalitĂ©s de la pluralitĂ© disciplinaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105
SECTION 1. Le niveau dâintĂ©gration entre disciplines . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105SECTION 2. Les modalitĂ©s dâintĂ©gration des disciplines . . . . . . . . . . . . . . . . 107
CHAPITRE II. ĂlĂ©ments pour un plan commun . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109SECTION 1. La DĂ©claration de Saint-Boniface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109
A. ĂlĂ©ments juridiques pour lâĂ©laboration dâun plan commun 109B. ĂlĂ©ments de Relations Internationales
pour lâĂ©laboration dâun plan commun . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111C. ĂlĂ©ments de GĂ©opolitique pour lâĂ©laboration
dâun plan commun . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112SECTION 2. Le site de Preah Vihear . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117
A. ĂlĂ©ments juridiques pour lâĂ©laboration dâun plan commun 117B. ĂlĂ©ments de Relations Internationales pour lâĂ©laboration
dâun plan commun . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119C. ĂlĂ©ments de GĂ©opolitique pour lâĂ©laboration
dâun plan commun . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121
CHAPITRE III. Un plan pluridisciplinaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123SECTION 1. Francophonie et Pacifique Sud :
du point de vue du droit international . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123SECTION 2. Francophonie et Pacifique Sud :
du point de vue des Relations Internationales . . . . . . . . . . . . . 126SECTION 3. Francophonie et Pacifique Sud :
du point de vue de la GĂ©opolitique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 128SECTION 4. Francophonie et Pacifique Sud :
une suggestion de plan interdisciplinaire . . . . . . . . . . . . . . . . . 131
CONCLUSION. De quelques perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
ANNEXESAnnexe 1. Carte du monde représentant les pays
oĂč la langue française est utilisĂ©e . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143Carte de lâOrganisation internationale de la Francophonie . . . . . . . . . . . 144
Annexe 2. DĂ©claration de Saint-Boniface (extraits) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145Annexe 3. Pratiques doctorales contemporaines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157