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Feuillets de Radiologie © 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 119

Feuillets de Radiologie 2007, 47, n° 2,119-123© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Schwannome du plexus brachial

A. El Kharras, M. Lahutte, Y. Geffroy, C. Teriitehau, F. Minvielle, D. Jeanbourquin

Service d’Imagerie Médicale, Hôpital d’Instruction des Armées Percy, 101, avenue Henri-Barbusse, 92141 Clamart Cedex.

Correspondance :A. El Kharras,

Im. A7, Apt. n° 15,Résidence Menzeh, CYM,

10050 Rabat, Maroc.

Email : [email protected]

Observation

Monsieur H.C., âgé de 50 ans, a été hospitalisé pour la prise

en charge de paresthésies dans le territoire du nerf ulnaire

distal gauche évoluant depuis 3 ans sur un mode plus ou

moins chronique. La palpation a retrouvé une masse axillaire,

de consistance ferme, régulière, mobile sous la peau, dont la

pression était responsable de paresthésies dans le territoire

cubital. Le reste de l’examen, clinique et biologique, était

sans anomalie. L’échographie (fig. 1) a montré une masse

ovalaire bien limitée, d’échostructure hypoéchogène prédo-

minante avec quelques zones anéchogènes de type kystique.

Le scanner thoracique (fig. 2) réalisé avec injection intravei-

neuse de produit de contraste a retrouvé cette masse axillaire

isolée de densité tissulaire homogène. L’imagerie par réso-

nance magnétique en coupes sagittales (fig. 3) et coronales

(fig. 4) a montré une masse des parties molles du creux axil-

laire de 49 mm de diamètre, bien limitée, homogène, en iso-

signal sur la séquence en pondération en T1 par rapport aux

muscles de voisinage. Sur les coupes coronales en pondéra-

tion T2 (fig. 5) et sagittales après injection de gadolinium

(fig. 6), cette masse présentait un hypersignal hétérogène

avec une double composante tissulaire et kystique. Elle a des

rapports étroits avec le tronc antéro-inférieur du plexus bra-

chial, refoulant en haut et en arrière l’artère axillaire, en bas

et en avant la veine axillaire. Du fait de sa topographie, de ses

3333corrélations radio-pathologiques

Résumé SummaryLes auteurs rapportent un cas de schwannome du nerf cubital

révélé par une masse axillaire chez un patient de 50 ans. Réalisant

une revue de la littérature, ils soulignent la rareté de cette patholo-

gie, et l’intérêt de l’imagerie dans le bilan de cette affection.

Brachial plexus schwannoma.

A 50-year-old man presented a schwannoma of the ulnar nerve.

A review of the literature revealed the uncommon incidence of

this condition, and the usefulness of imaging for surveillance.

Mots-clés : Nerf périphérique, Tumeur Key words: Peripheral nerves, Tumor

Figure 1. Échographie de la région axillaire gauche. Masse ovalairebien limitée, d’échostructure hypoéchogène avec quelques zones ané-chogènes de type kystique.

Schwannome du plexus brachial

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rapports avec les éléments du plexus brachial et de ses carac-

téristiques en imagerie, le diagnostic de tumeur neurogène

développée au dépend du plexus brachial est évoqué. Le

patient a bénéficié d’une chirurgie qui permettait l’exérèse

complète d’une masse développée aux dépens d’une des

branches de division du plexus brachial (fig. 7 à 9).

L’examen anatomopathologique et immuno-histochimique

(fig. 10) a conclu à une tumeur conjonctive de type schwan-

nome remanié, sans critère de malignité.

Discussion

Les tumeurs nerveuses primitives du plexus brachial sont

rares [1] et les schwannomes représentent les tumeurs

bénignes les plus fréquentes des troncs nerveux périphériques

[2]. Il s’agit de tumeurs nerveuses encapsulées développées à

partir des cellules de la gaine de Schwann et ne contenant pas

de fibre collagène ou de tissu nerveux [3]. Elles s’observent à

tout âge, préférentiellement entre 30 et 40 ans, et siègent

Figure 2. TDM thoracique en coupe axiale. Masse axillaire gauche iso-lée, en avant de la veine et l’artère axillaire (flèche) à rehaussementhomogène.

Figure 4. IRM en coupe coronale en séquence pondérée T1. Masse axil-laire bien limitée, refoulant en haut l’artère axillaire (flèche noire) eten bas la veine axillaire (grosse flèche noire).

Figure 3. IRM en coupe sagittale en séquence pondérée T1. Massehomogène et isointense relative aux muscles de la paroi.

Figure 5. IRM en coupe coronal en pondération T2. Masse de signal hété-rogène avec zones en hypersignal (flèche noire). Noter le siège excentrédu plexus brachial (grosse flèche noire) par rapport à la masse.

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A. El Kharras et al.2222corrélations radio-pathologiques

sur le trajet des principaux troncs nerveux du membre supé-

rieur.

La croissance de la tumeur est lente et le diagnostic clinique est

souvent tardif. Elle se traduit par des douleurs spontanées de

type radiculaire ou local, des paresthésies ou des engourdisse-

ments du membre supérieur. La palpation montre une masse

de consistance ferme, non pulsatile et mobile [4]. Cette palpa-

tion peut produire des paresthésies sur le trajet du nerf affecté

qui correspond au signe de Tinel, aide précieuse au diagnostic

lorsqu’il est présent [1, 4]. Le diagnostic différentiel se fait avec

les adénopathies, les lipomes et les angiomes [5].

L’imagerie garde donc son intérêt dans le diagnostic et

l’exploration préopératoire des schwannomes du plexus bra-

chial [4, 5]. L’IRM est actuellement, l’examen de choix devant

toute suspicion de tumeur nerveuse du plexus brachial. Grâce

Figure 6. IRM en coupe sagittale T1 avec injection intraveineuse degadolinium qui montre la masse axillaire à double composante tissu-laire et kystique.

Figure 7. Vue chirurgicale du schwannome du plexus brachial. Les flèchesindiquent la partie distale du plexus brachial, et les sutures noiresindiquent la partie distale.

Figure 8. Vue chirurgicale. Dissection partielle des fascicules nerveux(flèche) passant en périphérie du schwannome.

Figure 9. Vue chirurgicale. Plexus brachial (flèche) après résection dela tumeur.

Figure 10. Coupe d’anatomopathologie (H.E.S × 100). Aspect deschwannome typique avec nodules de Verocay (flèche).

Schwannome du plexus brachial

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à son étude multiplanaire, à l’analyse du signal et à la recherche

de lésions associées dans le cadre d’une neurofibromatose,

elle fournit des renseignements précis sur l’origine de la

tumeur et sur son extension [6, 7]. La lésion est arrondie ou

ovoïde, fusiforme, bien délimitée, pouvant être très volumi-

neuse, située sur le trajet d’un nerf périphérique, hypointense

ou de signal intermédiaire en séquence pondérée T1. Sur les

séquences en pondération T2, le signal du schwannome est

variable, souvent en hypersignal hétérogène. Cet aspect

serait dû au pourcentage différent en tissu de type Antoni A

et Antoni B au sein de la tumeur. Une zone centrale de haut

signal peut s’observer en pondération T2 en rapport avec une

dégénérescence kystique [6]. Le rehaussement de signal est

variable après injection intraveineuse de gadolinium [8].

Dans certains cas, l’IRM permet de distinguer un schwannome

d’un neurofibrome, en précisant le caractère excentré de la

tumeur par apport au nerf d’origine dans le cas d’un schwan-

nome [6, 7]. Les aspects tomodensitométriques des schwan-

nomes ne sont pas spécifiques, la tumeur se présente sous

forme d’une masse tissulaire le plus souvent bien limitée par-

fois multilobulée, et le rehaussement de densité est variable

après injection d’iode. La littérature décrit aussi la possibilité

de suggérer le diagnostic de schwannome du plexus brachial

en pratiquant une ponction biopsie à l’aiguille fine avant le

traitement chirurgical [9]. Cependant le diagnostic de certi-

tude est réalisé par l’examen anatomopathologique après

exérèse complète de la lésion en montrant de nombreux élé-

ments cellulaires fusiformes agencés en contingents de type

A et de type B d’Antoni, ne contenant pas ou très peu d’élé-

ments nerveux intra lésionnels, et marquée par la présence

de la protéine S 100 (marqueur cytoplasmique de la cellule

de Schwann) [8, 10].

Le traitement est dans tous les cas chirurgical. La technique

microchirurgicale avec monitoring électrophysiologique et

sans curarisation est souhaitable. L’exérèse complète extra

capsulaire est souvent possible avec respect des fascicules

passant en périphérie [4, 5].

En conclusion, malgré le caractère rare, le diagnostic de

schwannome du plexus brachial doit être évoqué devant une

masse palpable supra claviculaire ou axillaire, et dans les cas

de névralgies cervicobrachiales persistantes. L’imagerie par

résonance magnétique est l’examen de choix dans le bilan

lésionnel préopératoire.

Références

1. Binder DK, Smith JS, Barbaro NM. Primary brachial plexus tumors:imaging, surgical, and pathological findings in 25 patients. NeurosurgFocus 2004; 16: E11.

2. Kim DH, Murovic JA, Tiel RL, Moes G, Kline DG. A series of 397 periphe-ral neural sheath tumors: 30-year experience at Louisiana State Uni-versity Health Sciences Center. J Neurosurg 2005; 102: 246-55.

3. Nuss DW, Battalora A. Schwannoma of the cervical plexus. Arch Oto-laryngol Head Neck Surg 1990; 116: 224-5.

4. Leal Filho MB, Aguiar A, de Almeida BR, Dantas Kda S, Vieira MA, daSilva RG jr. Schwannoma of brachial plexus: report of two cases. ArqNeuropsiquiatr 2004; 62: 162-6.

5. Maiuri F, Donzelli R, Benvenuti D, Sardo L, Cirillo S. Schwannomas ofthe brachial plexus: diagnostic and surgical problems. Zentralbl Neu-rochir 2001; 62: 93-7.

6. Rettenbacher T, Sogner P, Springer P, Fiegl M, Hussl H, zur Nedden D.Schwannoma of the brachial plexus: cross-sectional imaging diagnosisusing CT, sonography, and MR imaging. Eur Radiol 2003; 13: 1872-5.

7. Ku HC, Yeh CW. Cervical schwannoma: a case report and eight yearsreview. J Laryngol Otol 2000; 114: 414-7.

8. Kichari JR, Hussain SM, Den Hollander JC, Krestin GP. MR imaging ofthe brachial plexus: current imaging sequences, normal findings, andfindings in a spectrum of focal lesions with MR-pathologic correlation.Curr Probl Diagn Radiol 2003; 32: 88-101.

9. Saifuddin A. Imaging tumours of the brachial plexus. Skeletal Radiol2003; 32: 375-87.

10. Guerra MF, Campo FR, de Artinano FO, Perez JS. Schwannoma of thebrachial plexus: an unsual cause for a cervical mass. J Oral MaxillofacSurg 2001; 59: 942-4.

Schwannome du plexus brachial

3333test de formation médicale continue

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Qu’avez-vous retenu de cet article ?Testez si vous avez assimilé les points importants de cet article en répondant à ce questionnaire sous forme de QCM.

1. Le schwannome du plexus brachial est :

A : Une tumeur bénigne la plus rare des troncs

nerveux périphériques ;

B : Révélée souvent par des douleurs radiculaires

et des paresthésies ;

C : Son diagnostic est facilité par l’IRM ;

D : L’amyotrophie du membre supérieur concerné

est le principal signe révélateur ;

E : Rencontrée préférentiellement chez les

enfants.

2. Quelle est la proposition fausse ?

A : Le schwannome est une tumeur nerveuse

développée à partir des cellules de la gaine de

Schwann et contenant de fibre collagène et de

tissu nerveux ;

B : La croissance de la tumeur est rapide et le

diagnostic clinique est souvent précoce ;

C : Le signe de Tinel est précieux pour le

diagnostic ;

D : L’aspect microscopique est sous forme de

cellules fusiformes regroupées en nodules ;

E : L’étude immuno-histochimique n’est pas

indispensable.

3. Quelle est la proposition fausse ?

A : L’aspect en imagerie médical du Schwannome

du plexus brachial est très spécifique ;

B : La TDM représente l’examen de choix devant

toute suspicion de tumeur nerveuse du plexus

brachial ;

C : L’aspect en IRM est variable sur la séquence

pondérée en T2 ;

D : Le diagnostic de certitude est réalisé par

l’examen anatomopathologique ;

E : Le traitement est souvent chirurgical.

Réponses : p. 140


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