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Couturier Lycée Saint Michel
Quentin de Picpus
Terminale S Paris 12ème
Dossier option théâtre
Baccalauréat
« La comédie, c'est le sentiment d'être dedans et dehors ; c'est notre fascination pour la mécanique
mystérieuse de la scène, bien réelle devant nous, mais aussi fictive ; très intense mais aussi destinée à
s'évanouir après la représentation.»
Jean Tardieu - Extrait d'un Entretien avec Jean-Maurice de Montremy - Janvier 1993
Epreuve facultative de théâtre au baccalauréat - Finissez vos phrases - Tardieu Page 2
Présentation de la pièce choisie, Finissez vos phrases, ainsi que de son
auteur
Jean Tardieu
Jean Tardieu nait à Saint-Germain-de-Joux (ain) en 1903. Il grandit dans une famille d’artiste : sa
mère, Caroline Luigini, est musicienne, son père, Victor, peintre. Tout petit, il écrit déjà, fortement
influencé par Les Fables de La Fontaine et par les poèmes de Victor Hugo que sa mère lui lit le soir.
Passionné de musique et de peinture, il s’essaie à ces deux arts mais, conscient de son échec, il
découvre que l’écriture est sa « seule voie libre ». Après des études de lettres et de droit il publie ses
premiers poèmes en 1927. En 1932 il épouse Marie-Laure Blot.
Ce n'est qu'après 1945 qu'il se fait véritablement connaître. Dès le tournant des années cinquante, il
prend ses distances vis-à-vis du langage, et se lance dans l'aventure théâtrale. Il compose un grand
nombre de pièces en un acte qui allient la géométrie scénique et la discontinuité du langage
quotidien tout en continuant sa réflexion sur le langage.
Critique d'art, il produit également une somme non négligeable d'écrits sur la théorie poétique, ainsi
que des livres pour enfants et, cinq ans avant sa mort, une autobiographie au titre ironique : On vient
chercher Monsieur Jean. Il s’éteint en 1995.
Nous avons choisi avec ma partenaire de jouer Finissez vos phrases. Il s’agit d’une œuvre en 1acte,
une de ces fameuses pièces « éclair » que Tardieu a écrites comme Oswald et Zénaïde, Ce que parler
veut dire ou encore Conversation-sinfonietta. Ces pièces constituent un recueil intitulé « La comédie
du langage » ou le dramaturge nous permet d’apprécier toute la subtilité du français dans sa
diversité. Le point commun de ces pièces est que leur texte contient des tics de langage (des mots
inutiles ou des mots pour des autres dans les pièces éponymes), des omissions de mots (Finissez vos
Epreuve facultative de théâtre au baccalauréat - Finissez vos phrases - Tardieu Page 3
phrases) ou encore des apartés plus importants que le dialogue des personnages (Oswald et Zénaïde)
qui, à la première vue, peuvent rendre le texte incompréhensible alors qu’il n’en est rien.
En ce qui concerne Finissez vos phrases, il s’agit de la rencontre amoureuse de Monsieur A et
Madame B dont le dialogue est constitué de phrases inachevées : tous les mots "pleins", porteurs de
sens, sont tous, remplacés par des points de suspension ce qui laisse au public tout le loisir de les
compléter selon l’intrigue qui lui vient à l’esprit.
La pièce entière va être jouée lors du passage à l’oral mais pour respecter le temps imparti quelques
passages seront coupés (notamment la présence du serveur de café sur scène).
Le thème général de ce dossier sera consacré exclusivement à cette pièce. En effet, compte-tenu de
la nature du texte, la représentation peut-elle donner un sens à ce dialogue ?
A la 1ère
lecture, ce texte de théâtre de Jean Tardieu déroute par son énoncé : en effet, à aucun
moment, les deux personnages ne prononcent des phrases complètes. Pourtant, ce ne sont pas des
phrases incomplètes qui seraient terminées par des points de suspension marquant l'interruption du
propos d'un personnage par un autre ; ce ne sont pas non plus des phrases nominales. Ce sont des
phrases où l'on a fait l'économie du verbe («Lorsque vous me mieux»; «C'est comme si je»). Les
phrases complexes ne sont pas terminées («Je devine que»; «Parce que je vous»), ce qui permet de
ne pas justifier, de ne pas clore le raisonnement. On remarque en outre un grand nombre
d'interjections, d'exclamations, d'interrogations, d'expressions «toutes faites» qui permettent de
garder le contact (fonction phatique, qui permet au locuteur de garder contact avec l’allocutaire) et
qui renvoient directement aux usages et tics langagiers. Toutefois, malgré l'apparence, il ne s'agit pas
d'une suite incohérente et désordonnée de mots et de phrases. Le lecteur - ou le spectateur - est à
même de donner du sens à l'ensemble: la typographie caractéristique du texte théâtral permet
d'identifier le texte en tant que tel (personnages, dialogues, discours...); la ponctuation, abondante,
expressive, traduit des attitudes et des sentiments; les didascalies, nombreuses, systématiques,
apportent des informations qui viennent remplacer les manques des paroles; les temps verbaux -
passé, présent, futur - («Comment pouviez-vous?» ; «Je devine que»; «Vous saurez que..... ) ainsi que
les indicateurs temporels («depuis longtemps»; « Toujours» ; «Aujourd'hui» ) constituent le trame
narrative, même approximative et sommaire, d'une véritable histoire, en l'occurrence un dialogue
amoureux. Le lecteur est amené à construire lui-même l’histoire et à élaborer le sens: le jeu sur
l'implicite, sur le non-dit est poussé à l'extrême limite. Ainsi, l'auteur nous fait réfléchir à «La
comédie du langage» (cf. le titre du recueil).
Epreuve facultative de théâtre au baccalauréat - Finissez vos phrases - Tardieu Page 4
Voici quelques exemples d’interprétation suggérés par le texte :
- Oh ! chère amie…Quelle chance de vous…
- Très heureuse moi aussi. Très heureuse de…vraiment oui !
- Comment allez-vous, depuis que ? …
- Depuis que ? Eh bien ! J'ai continué, vous savez, j'ai continué à …
Dans cet extrait on peut analyser le rituel social via le sens des répétitions. En effet madame B se
répète souvent (heureuse/très heureuse, continué/continué à) à la différence de Monsieur A. Ce
dernier, bien que d’apparence timide puisqu’il est assez maladroit dans son entreprise de séduction,
semble plus habitué à parler. On pourrait donc supposer que Madame B serait d’origine plus
modeste ou que sa rencontre avec Monsieur A la perturbe énormément (était-elle amoureuse de lui
par le passé ?)
-Mais non, mais non : plutôt pas assez…
-Taisez-vous donc ! Vous n'allez pas nous… ?
- Non ! Non ! Je n'irai pas jusque-là !
La rupture produite par l’impératif fait évoluer le discours de Madame B puisque le « mais non » est
repris par « non ». Ainsi à partir de ce moment les protagonistes cessent de parler de leur passé pour
se concentrer sur la rencontre. On peut donc essayer de faire jouer les comédiens d’une manière
différente à partir de ce passage, Monsieur A pouvant se révéler plus entreprenant par exemple.
Tardieu écrit dans le préambule de « Un mot pour un autre » que « dans le commerce des humains
bien souvent les mouvements du corps, les intonations de la voix et l'expression du visage en disent
plus long que des paroles… ». Dans cette pièce tout est donc un travail de mime, la gestuelle est
beaucoup plus importante que le dialogue puisque c’est elle qui va poursuivre les points de
suspension de la pièce.
En conclusion on peut dire que la représentation permet de donner un sens au dialogue dans la
mesure dans la mesure où les paroles occupent une place secondaire. C’est ce que nous allons tâcher
de démontrer lors de notre passage à l’oral.
Epreuve facultative de théâtre au baccalauréat - Finissez vos phrases - Tardieu Page 5
Motivations et parcours théâtral
J’ai eu la chance d’avoir été emmené au théâtre très jeune par ma famille. En effet, le comité
d’entreprise de ma mère a proposé chaque année depuis bientôt 10ans, une sorte de formule pour
voir trois pièces de théâtre dans l’année. Dès lors ce qui au départ était une manière de passer le
temps est devenu une passion. J’étais fasciné par le jeu des acteurs et leurs costumes, il y avait
quelque chose qui les grandissait énormément. J’ai donc voulu faire du théâtre et je me suis inscrit à
des cours d’initiation en CM1 puis en CM2. Je n’ai pas trouvé une motivation très importante dans le
groupe ce qui m’a conduit à m’écarter de cette voie provisoirement. C’est pour cela que je n’ai pas
retenté l’expérience dans mes années collège.
Le vrai tournant a été marqué par mon arrivée en seconde au lycée Saint Michel de Picpus. Je savais
que l’association culturelle était très importante puisqu’elle avait en charge pas moins de huit pièces
de théâtre et comédies musicales par an. Je me suis donc inscrit dans un groupe de quatre élèves qui
devait jouer des pièces de Tardieu. J’ai été choisi pour jouer Oswald dans « Oswald et Zénaïde » et
Monsieur A dans « Finissez vos phrases ». C’est cette dernière pièce qui m’a demandé le plus
d’effort, le texte, constitué de phrases avortées, était très difficile à apprendre et j’ai eu du mal à
cerner le personnage. De plus mon metteur en scène était très exigeant, j’étais sans cesse remis en
question et au final ça m’a fait le plus grand bien. Je n’imaginais pas qu’il faille travailler autant, je
pensais avoir des facilités, ce n’était pas le cas, il a fallut tout apprendre. La meilleure récompense fut
les applaudissements du public les soirs de notre semaine de représentation dans l’auditorium du
lycée.
L’année suivante, je n’ai pas pu m’inscrire car j’étais sur liste d’attente, ce fut une grande déception,
c’est pour cette raison qu’à la rentrée de cette année je suis venu trois heures avant pour faire la
queue. Je me suis inscrit dans « Noces de Sang » de Federico Garcia Lorca. Nous étions 14 acteurs
sous la direction de deux metteurs en scènes, c’était une première pour moi car l’ambiance était
beaucoup plus détendue dans un groupe nombreux que dans mon groupe de seconde. Je suis arrivé
en terrain conquis et je pensais avoir de nouveau un rôle principal comme ce fut le cas la fois
précédente. En réalité j’ai hérité d’un rôle secondaire et j’ai été très déçu en apprenant la nouvelle.
En fin de compte ce fut une belle leçon d’humilité, j’ai été remis à ma place et je me suis investi plus
que jamais dans cette pièce pour essayer de jouer à la perfection mon rôle. J’ai découvert durant
toute cette année une solidarité et une complicité très forte entre acteurs et metteurs en scène qui
nous conduisent à passer très régulièrement des soirées tous ensemble alors que les représentations
et les cours ont cessé le 31mars.
Je pense donc que le théâtre, à travers ces quelques années de pratique, m’a apporté beaucoup
notamment au niveau de la position de la voix et de l’expression scénique. Ces atouts se sont révélés
payants lors des différents entretiens que j’ai du passer cette année.
Epreuve facultative de théâtre au baccalauréat - Finissez vos phrases - Tardieu Page 6
Spectacles vus
Une heure et demie de retard
Auteur : Gérard Sibleyras. Acteurs : Patrick Chesnais, Evelyne Buyle, Mise en scène de Bernard Murat THEATRE DES MATHURINS
Une Heure et Demie de Retard, c'est ce qu'il faudra à Pierre (Patrick Chesnais) et Laurence (Evelyne
Buyle) pour passer en revue - et en vitesse - les regrets et les angoisses d'une vie qui termine et qui
commence, celle d'un couple qui entre dans "la dernière ligne droite" après 30 ans de vie commune.
Au moment de partir dîner chez des amis, Laurence l'insatisfaite entraîne Pierre le satisfait dans un
ping-pong verbal à coups de reproches et de mots de réconfort, lui renvoyant frénétiquement mille
questions existentielles : la mort, la vie, les enfants, l'ennui, les choix, la réussite... Le spectateur en
aurait le tournis s'il n'y avait, soigneusement distillé, un humour convenu mais salvateur.
Une pièce qui n’a pas été très appréciée par la critique mais qui m’a pourtant plu, cela est sans doute
du au fait que j’apprécie beaucoup le travail effectué par M. Murat. Patrick Chesnais n’était
cependant pas très marqué dans son rôle, j’ai eu du mal à cerner son personnage, en revanche
Evelyne Buyle était parfaitement dans le ton, ne relâchant jamais son effort, elle présentait un
personnage juste, parfois attachant, ce qui dynamisait la pièce du début à la fin. Ce spectacle ne
m’était pas destiné en premier lieu mais plutôt à des couples ayant une longue expérience commune
et pourtant je me sentais impliqué, j’avais l’impression de connaître ces situations.
Joyeuses Pâques
Auteur : Poiret Acteurs : Pierre Arditi, Caroline Sihol, Barbara Schulz Réalisateurs : Jean Poiret et Bernard Murat Un soir, un homme, se trouvant seul à Paris pour le week-end de Pâques, ramène une jeune fille chez
lui. Mais, comme dans tout bon vaudeville, sa femme revient à l'improviste : une grève à l'aéroport lui
a fait annuler son voyage. Comment justifier alors la présence chez eux de cette belle jeune femme,
naturelle, vaguement dénudée, en pleine nuit ? Le mari prononce alors la première phrase qui lui
vient en tête : "C'est ma fille." Et tout le talent de Jean Poiret de se mettre en branle ; la femme,
compatissante, s'enquiert de la mère de cette nouvelle venue dans la famille, les mensonges se
multiplient, plongeant les personnages dans le plus grand embarras. Toute cette mécanique
fonctionne parfaitement, pour le plus grand plaisir des spectateurs venus assister nombreux aux
représentations de cette pièce mythique, mise en scène par Bernard Murat, avec Patrice Arditi au
mieux de sa forme entouré de Catherine Sihol et Monique Tarbès. Du grand boulevard. -- David Rault
Cette pièce traite d’une histoire au combien banale, un mari volage surpris par sa femme lors d’une
aventure extraconjugale et le spectacle dure 2h30… Cela ne semble pas palpitant à première vue,
c’est précisément ce que j’ai pensé en lisant le synopsis de la pièce, et pourtant… Force est
d’admettre que la performance des comédiens est largement à la hauteur, Pierre Arditi ne faiblit
jamais et j’ai ressenti une très grande complicité entre les acteurs. Quant au scénario, à la différence
d’un Feydeau où la situation change à chaque minute on se retrouve plutôt face à des poupées
Epreuve facultative de théâtre au baccalauréat - Finissez vos phrases - Tardieu Page 7
russes, la pièce se déroule, se nourrit d’elle même sans jamais mourir et les situations (bien que
souvent attendues) sont bien cocasses.
L’homme apparaît comme un enfant qui peine à se défendre, il enchaîne maladresses sur
maladresses pour notre plus grand plaisir. Comme le disait Arditi pour cette pièce « le vrai homme de
la pièce, c’est la femme ».
Deux sur la Balançoire
Auteur : William Gibson
Acteurs : Jean Dujardin, Alexandra Lamy
Mise en scène de Bernard Murat
THEATRE EDOUARD VII
Jerry Ryan est un avocat qui s'installe à New York suite à un divorce douloureux. Il va rencontrer Clara
Mosca, une jeune femme extravertie à l'esprit libre et au coeur d'or. Leur amour resistera-t-il aux
fantômes du passé ? Deux grands acteurs Jean Dujardin et Alexandra Lamy, réunis par un grand
metteur en scène, Bernard Murat, dans une pièce culte, superbement adaptée par Jean-Loup
Dabadie.
Je suis allé voir cette pièce en premier lieu parce que ça m’intéressait de voir Chouchou et Loulou
dans un autre registre et bien sûr parce que la mise en scène était signée Bernard Murat. C’est
précisément la mise en scène et les décors qui m’ont bluffés : le rideau s’ouvre sur l’appartement de
Jerry Ryan joué par Jean Dujardin, une scène sombre et assez dépouillée puisqu’elle contient un lit,
un téléphone, une fenêtre et derrière un mur noir. Au fur et à mesure de la montée du rideau ce mur
se fait de plus en plus transparent grâce à un jeu de lumière particulièrement soigné et on découvre
l’appartement de Clara Mosca (Alexandra Lamy). Ainsi tout au long de la pièce les comédiens
évoluent dans leurs appartements respectifs sans se voir et communiquant par téléphone. Le texte
démarre avec certaines notes d’humour puis bascule progressivement dans la tragédie. On trouve
donc un subtil équilibre entre le rire et l’émotion tragique véhiculés par ces deux comédiens aux
cours de ces 2h10 de spectacle sans entracte. Jean Dujardin est très bon dans son rôle, le personnage
a un terrible côté salaud contrebalancé par la pétillante Alexandra Lamy. En conclusion j’ai adoré ce
spectacle sans grossièreté, sans vulgarité et sans pitreries ridicules que l’on trouve parfois chez Jean
Dujardin.
Côté points négatifs, la pièce a un moment de creux au bout d’une heure mais c’est pour mieux
savourer le triste dénouement qui guette Alexandra Lamy à la fin et j’ai aussi trouvé les sièges de
l’orchestre très inconfortable mais est-ce que cela rentre réellement en ligne de compte pour juger
cette pièce ?...
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