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Date de parution :
5 mai 2015
LA MOBILITÉ 2.0
Comment les startups issues de l’économie collaborative opérant sur le secteur du transport
de passagers bousculent le marché des entreprises traditionnelles en France ?
AUTEUR :
GOUDÉ Robin
TUTEUR DE MÉMOIRE :
BOUCHER Ronald
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 3
AUTEUR :
Robin GOUDÉ
REMERCIEMENTS :
Je remercie l’ISTEC, le corps professoral, mon tuteur de mémoire, M. BOUCHER Ronald ainsi
que M.FIMBEL pour l’encadrement pédagogique apporté. Je tiens à adresser tous mes
remerciements aux différents intervenants et professionnels pour leurs contributions. Enfin, un
remerciement tout à fait particulier à M. NEVEUX Fabienne, CEO Colunching, pour son apport
de connaissances et contacts. Tous ont participé d’une manière ou d’une autre dans
l’élaboration du mémoire de recherche.
RÉSUMÉ :
Les entreprises traditionnelles opérant sur le secteur de la mobilité sont bousculées par une
nouvelle forme de concurrence s’inscrivant dans le phénomène de l’économie collaborative.
Grâce à de nouvelles technologies, des startups ont renversé le monopole acquis par certains
acteurs pour transformer le paysage des transports mais elles sont aussi le symbole du
changement de paradigme et de l’évolution des mentalités des individus. Suite à des
recherches, nous démontrerons comment ces startups issues de l’économie collaborative ont
monté leur business modèle tout en remuant les certitudes des acteurs traditionnels qui,
inexorablement, sont obligés de s’adapter eux aussi à ces nouveaux modèles.
MOTS CLEFS :
Économie collaborative, économie du partage, autopartage, covoiturage, entreprises
traditionnelles, mobilité, transport, start-up, transport.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 4
AUTHOR:
Robin GOUDÉ
ABSTRACT :
Traditional businesses operating in the mobility sector is shaken by a new form of competition
arising within the phenomenon of collaborative economy. With new technologies, startups
overthrew the monopoly acquired by certain actors to transform the landscape of transport but
they are also the symbol of the paradigm shift and changing individual attitudes. After some
research, we will demonstrate how these startups from the collaborative economy started their
business model while stirring the certainties of traditional players who are inexorably forced to
adapt also to these new models.
KEYWORDS :
Collaborative economics, sharing economy, car-sharing, traditional business, mobility,
transport, start-up, transport.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 5
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS .............................................................................................................. p.3
R�SUM� ............................................................................................................................... p.3
VOLUME 1�: M�MOIRE DE RECHERCHE …………………………………………………….. p.9
INTRODUCTION ................................................................................................................. p.10
PARTIE 1 : ÉTUDE DE L’ÉCONOMIE DU PARTAGE DANS LE SECTEUR DE LA
MOBILITÉ À TRAVERS LES SOURCES PROFESSIONNELLES ET ACADÉMIQUES ... p.14
Le transport à l’heure de l’économie collaborative ........................................................ p.14
A. Une société en complète transformation .................................................................... p.14
1. Le facteur de la crise de 2008 ......................................................................... p.14
2. La recherche du prix inférieur ......................................................................... p.16
3. Le développement du coût marginal zéro des nouvelles entreprises ……….. p.16
4. La démographie : vecteur de mobilité ............................................................. p.17
5. Changement de mentalité : vers une nouvelle conception du « way of life » . p.19
6. La mobilité au service des territoires et des français ...................................... p.20
7. La mobilité 2.0, la solution d’un monde en crise ............................................. p.21
B. L’avènement de la consommation collaborative dans le secteur de la mobilité ......... p.21
1. Les signes de transformations actuelles ......................................................... p.22
2. Un secteur en pleine expansion ...................................................................... p.24
3. Un marché à forte croissance ......................................................................... p.25
4. Nouveaux modes et usages des transports .................................................... p.27
5. L’essoufflement des entreprises traditionnelles : de l’oligopole à la scission
naturelle des marchés ..................................................................................... p.28
C. Les acteurs de la mobilité au service des individus .................................................... p.29
1. Des acteurs segmentés pour une mobilité optimale ....................................... p.29
2. Des offres en adéquation avec les attentes des individus .............................. p.32
3. Du pouvoir des entreprises à « l’empowerment » des consommateurs ......... p.32
4. La remise en question des acteurs traditionnels ............................................ p.34
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 6
D. Les fondements de l’économie collaborative dans le secteur de la mobilité ………… p.35
1. La recherche du gain financier ........................................................................ p.36
2. La confiance, assurance d’un nouveau mode de vie ..................................... p.37
3. La recherche d’humanisation des déplacements, nouvel eldorado ����.. p.38
4. Internet, l’outil virtuel au service de la mobilité ................................................ p.38
5. Le smartphone, l’une des principales innovations en matière de mobilité …... p.41
6. La notion de développement durable .............................................................. p.41
PARTIE 2 : ÉTUDE EMPIRIQUE AUPRÈS D’ACTEURS DE LA MOBILITÉ 2 .0 ……….. p.44
CHAPITRE 1�: Pr�sentation du dispositif empirique .������������� .. p.44
1. Modalités de déploiement retenues ................................................................ p.44
2. Justification de la méthodologie de la recherche ............................................ p.44
3. Forme des entretiens ...................................................................................... p.44
4. Echantillonnage .............................................................................................. p.45
5. Les thématiques abordées ............................................................................. p.45
CHAPITRE 2�: Les acteurs du transport collaboratif�: visions et opportunit�s .......... p.46
A. L’économie collaborative, un nouveau paradigme économique en plein essor dans le
secteur des transports ………………………………………………………………….………… p.46
1. Au départ, des constats simples ……………………………………………...….. p.46
2. Une opportunité business favorisée par le déclin des entreprises traditionnelles
du transport et de l’avènement de l’économie collaborative ………………….. p.48
3. Un vide législatif favorisant l’activité des startups …………………………….... p.50
4. Un schéma décentralisé pour un impact à grande échelle …………………… p.52
5. Une situation « Win-Win-Win », saint-graal de la mobilité 2.0 ……………….. p.53
B. La flexibilité des acteurs, pierre angulaire du secteur des transports collaboratifs ……. p.54
1. Une perméabilité permanente entre l’offre et la demande ………………….. p.54
2. Conjointement, une adéquation entre ressources et besoins ………………. P.56
3. Une adaptation aux nouvelles aspirations de la demande : sécurité, confiance et
proximité …………………………………………………………………………… p.57
4. La notion de temps réel et de fléxibilité des nouveaux acteurs ……………… p.58
5. La réponse à un besoin par une proposition de service à forte valeur ajoutée p.60
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 7
C. Une vision inédite du schéma entrepreneurial par le prisme du capital social …….…… p.61
1. Le capital social, une nouvelle composante indispensable …………………… p.61
2. Le profil de ses entrepreneurs sociaux : les acteurs du changement ………. p.64
3. Un rôle social à relativiser ………………………………………………………… p.66
PARTIE 3 : CONFRONTATION DES RÉSULTATS DES ENTRETIENS ET DE
L’INVESTIGATION DOCUMENTAIRE ……………………………………………………..…. p. 69
A. Le modèle économique du XXIem siècle ……………………………………………….…… p. 69
1. Les fondations de la nouvelle économie ………………………………………..… p. 69
2. Le modèle P2P : People-to-People ……………………………………………….. p.72
3. Des entrepreneurs axés sur une nouvelle conception des 4P …………………. P.74
4. La rentabilité économique des nouveaux modèles économiques ……………… p.76
B. L’apparition d’une nouvelle ère …………………………………………………………….… p.77
1. L’utilisation des ressources disponibles …………………………………………… p.77
2. Les valeurs fondamentales de l’économie du partage …………………………… p.77
3. La révolution numérique à l’âge de la troisième révolution industrielle ………... p. 78
CONCLUSION ………………………………………………………………………………….… p. 80
BIBLIOGRAPHIE ………………………………………………………………………………… p. 83
VOLUME 2�: ANNEXES OBLIGATOIRES ……………………………………………………. p.88
ANNEXE A : FICHES BIBLIOGRAPHIQUES ET BILIOMÉTRIQUES …………………….. p.89
ANNEXE B : FICHE DE TRAÇABILITÉ DES RECHERCHES DOCUMENTAIRES ….... p.173
ANNEXE C : TABLEAU CROISÉ DES CITATIONS …………………………….……….… p.178
ANNEXE D : IDENTIFICATION DES ENTREPRISES ET DES PERSONNES
RENCONTRÉES ……………………………………………………….………… p.179
RÉSULTAT BRUT DES ENTRETIENS ……………………………………………………… p. 183
VOLUME 3�: ANNEXES FACULTATIVES ……….………………………………………….. p.225
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 9
VOLUME 1 : MÉMOIRE DE RECHERCHE
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 10
La mobilité 2.0
Le capitalisme est resté figé dans une monotonie profitant à une élite affairiste. La crise de
2008 a entraîné la remise en question du capitalisme en l’état. Depuis son avènement au
XIXem siècle, c’est la première fois qu’un nouveau modèle économique se distingue :
l’économie collaborative. À l’heure de la co-révolution, c’est une toute nouvelle façon de vivre,
de consommer qui a fait son apparition. On ne parle plus de consommation de masse mais de
consommation collaborative, plus de management mais de management collaboratif, plus de
concurrence mais de coopétition, le tout dans une société civile et responsable. La société
collaborative redonne sens à nos actes, vers une société plus humaine et de partage.
La seconde révolution industrielle, fleuron de l’évolution technologique, fut une avancée
spectaculaire dans notre façon de vivre et consommer.
En 1916, il y avait aux Etats-Unis 3,4 millions de voitures immatriculées qui circulaient sur les
routes, c’était 23 millions en 19301. Rien qu’à lui, le secteur de l’automobile consommait :
« 20 % de l’acier, 12% de l’aluminium, 10 % du cuivre, 51 % du
plomb, 95 % du nickel, 35 % du zinc et 60 % du caoutchouc
utilisés aux État-Unis en 1933 »2.
La prolifération du nombre de voitures dans le monde fut spectaculaire. Aux Etats-Unis, le
financement de l’industrie automobile et des réseaux routiers a été pris en charge
majoritairement par le capital privé (Ford, General Motors et Chrysler). Cette révolution
industrielle a transformé l’économie de marché mais également l’organisation spatiale des
villes avec la création des banlieues. En réduisant le prix des biens et services et en
optimisant les chaînes de production durant le XXem siècle, ce système a permis le
développement de cette économie de transport, en faisant des gains d’efficacité et de
productivité. Au sommet de cette pyramide régnait une concentration de compagnies
pétrolières. Dans un temps où le monde était régi par le pétrole et la production en chaîne,
Ernest Bevin, homme d’État britannique, avait dit non sans humour :
« Le royaume des Cieux fonctionne peut-être à la vertu mais le
royaume de la terre fonctionne au pétrole ».
1 Daniel Yergin, Les Hommes du pétrole 2 Mowbray, Road to ruin, Philadelphie, 1969, p.15
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 11
Suite à l’industrialisation et l’électrification des territoires, de nombreuses entreprises se sont
accaparées des marchés cibles afin d’être seul représentant, ou à plusieurs, d’un produit pour
ne pas être concurrencé, en freinant les progrès technologiques. À l’image de cette démarche,
le cartel Phoebus, composé de Philips, General Electric, La Compagnie des Lampes, Osram,
Tungsram, Associated Electrical Industries, mis en place entre 1924 et 1939 a tenté de mettre
en place un oligopole sur la fabrication et la vente des lampes à incandescence. Alors qu’une
lampe pouvait fonctionner durant plusieurs années, le cartel a limité la durée de vie d’une
ampoule à 1000 heures. Le cartel Phoebus est, selon des experts, l’une des premières
tentatives en terme de recherche d’oligopole à grande échelle mais aussi le premier échec de
ce type. Cependant, le changement de paradigme entraîne une partielle transformation de
l’utilisation de ces ressources grâce aux différentes innovations constatées au tout début du
XXIem siècle.
Selon Kuhn, philosophe et historien des sciences, un paradigme est un système de croyances
et de postulats qui créent conjointement une vision du monde intégrée, unifiée, si
convaincante et impérieuse qu’on la confond avec la réalité même. Finalement, ce que l’on
tient comme vérité évidente ne peut être critiquée dans le sens où il paraît refléter l’ordre
naturel des choses, comme l’explique Jeremy Rifkin3. Nous nous sommes inscrits depuis
plusieurs décennies dans un modèle qui avait fait ses preuves et apporté abondance et
prospérité, que nous ne pouvions pas remettre en question étant donné sa réalité objective
dans nos vies. Son mécanisme est incrémenté dans nos comportements et notre vision du
monde, ainsi que dans l’économie mondiale, mais il fait face aujourd’hui à un nouveau
paradigme économique. Jeremy Rifkin explique que l’économie capitaliste est attaquée sur
deux fronts :
1. l’apparition du croisement de différentes données venant de différentes disciplines
(chimie, biologie, ingénierie, architecture, urbanisme, technologie de l’information
etc…) qui, contrairement au capitalisme, révèle de nouvelles lois ;
2. la propension de l’Internet des objets – l’Internet des objets ou IdO, qui représente
l’extension d’internet à des choses du monde physique.
Le socle du capitalisme reposait sur la richesse, la productivité, l’équilibre budgétaire et les
droits de propriété4. Dans la nouvelle conception de l’économie, le capital social devient tout
aussi important que le capital financier.
3 Jeremy Rifkin, La nouvelle société du coût marginal zéro, chap. I, p.22 4 J. Rifkin, La troisième révolution industrielle, chap. Capital financier contre capital social, p.309, l.11
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 12
La consommation collaborative, malgré ses déclinaisons multiples, se décrit en quelques
mots : l’usage plus que la propriété, « moins de biens plus de liens ». Elle est aujourd’hui une
réalité, pas encore appliquée par la majorité, mais reconnue mondialement. L’économie
collaborative prouve l’adaptation des individus à un contexte économique. Selon Jeremy
Rifkin :
« Nous entrons dans un monde partiellement au delà des marchés, où nous
apprenons à vivre ensemble, toujours plus interdépendants, sur un
communal collaboratif mondial.5 »
Quand on sait qu’une perçeuse ne sert que durant 12 minutes6 après son achat, et qu’une
voiture reste 92 % de son temps à l’arrêt, il est légitime de revoir notre façon de consommer et
d’acheter. On nous a appris à posséder, c’est une valeur in fine de la seconde révolution
industrielle. Mais aujourd’hui, le marché et la planète ont atteint leurs limites respectives. Il ne
s’agit plus de se poser la question si oui ou non l’économie collaborative sera le futur de
l’économie mais quelle sera l’alternative au capitalisme, même si l’économie collaborative a
fait un grand pas en avant.
Une définition unique de l’économie du partage est difficile à délimiter. Le magazine Forbes la
définit comme « tout système socio-économique reposant sur le partage d’actifs humains et
matériels » et estime le chiffre d’affaires de ce secteur à 3,5 milliards de dollars en 2014.
Quant à Rachel Botsman, celle-ci parle de « partage d’actifs sous-utilisés » et distingue 3
systèmes de consommation collaborative :
1. Système de service de produit (Product Service System) : avoir accès à un
produit sans en être le propriétaire (exemple : Zilok, location entre particuliers)
2. Marchés de redistribution (Redistribution markets) : la plateforme e-Bay en est le
meilleur exemple.
3. Styles de vie collaboratifs (Collaborative lifestyles) : avoir accès à un bien non
tangible ou service de particulier à particulier (couchsurfing, crowdfunding).
De nombreuses startups se sont créées sur ce modèle et elles ne sont pas toutes récentes.
Ebay s’inscrit dans ce modèle car elle part d’une intention simple, revendre entre particuliers
sur Internet, c’est ce que l’on nommera le pair à pair (peer to peer en anglais). Pour prendre
l’exemple le plus récent, Airbnb est un marché virtuel pour de la location d’espace de
particulier à particulier. Le concept provient d’un constat simple, l’inoccupation d’espaces 5 « La nouvelle société du coût marginal zéro », Jeremy Rifkin, LLL. 6 CNIID, nov 2011, Partager l’usage des objets et moins produire de déchets
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 13
libres. Alors que l’espace devient une denrée rare et chère pour les 7,2 milliards de personnes
vivants sur Terre, Airbnb a su mettre à profit l’espace inoccupé au service des individus.
Les startups sont le résultat d’idées ingénieuses d’une nouvelle génération impliquée dans les
problèmes que rencontrent les sociétés à ce jour. Ces startups sont l’essence d’une
alternative suite à un problème rencontré. Leur rôle, bien plus que rendre un service ou fournir
un produit, est de trouver une solution à un monde figé et voué à sa perte : retrouver l’équilibre
et assurer la pérennité des générations futures. C’est la recherche de la mutualisation des
risques et vers un renversement de la responsabilité que se tourne ce modèle.
L’observatoire Altimer Research a rédigé un constat simple en 2013, l’économie collaborative
modifie nos habitudes de consommations et bouleverse l’économie traditionnelle de manière
fondamentale.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 14
PARTIE 1 : ÉTUDE DE L’ÉCONOMIE DU PARTAGE DANS LE SECTEUR DE LA MOBILITÉ À TRAVERS LES SOURCES PROFESSIONNELLES ET ACADÉMIQUES
Le transport à l’heure de l’économie collaborative
Le monde actuel vit dans un nouveau paradigme économique auquel le marché doit répondre.
Cette mutation est en cours et transforme l’organisation de nos sociétés. La mobilité est
aujourd’hui devenue la valeur centrale qui structure le commerce et unifie nos échanges.
Selon l’essayiste américain, Jérémy Rifklin, nous sommes actuellement en train de passer de
la verticalité de l’ère charbon-pétrole à l’horizontalité de l’ère internet. À ce titre, il convient
d’examiner la conversion de nos sociétés face à l’émergence de l’économie collaborative (A).
Aujourd’hui, tous les secteurs d’activité sont touchés par ce nouveau modèle de partage,
notamment le secteur des transports. C’est dans ce domaine en particulier que l’économie
collaborative déploie une grande partie de ses ressources, remettant en cause tout un
système (B). Concrètement, ce mode de consommation, en pleine expansion dans le secteur
de la mobilité, nous amène à nous interroger sur l’identité de ces acteurs et leurs réelles
motivations dans ce nouveau schéma économique (C). Après avoir examiné ces multiples
bouleversements, il apparaît pertinent, en dernier lieu, de se pencher sur les principes et les
soubassements de cette économie particulière, dans le secteur des transports (D).
A. Une société en complète transformation
Nous sommes actuellement en train de vivre un bouleversement au sein de nos sociétés qui
se matérialise au niveau de nos modes de consommation. La consommation collaborative est
en train de concurrencer sérieusement le modèle capitalistique. Il convient de s’interroger sur
les origines et les manifestations de ce nouveau type d’économie.
1. La crise de 2008 : le point de rupture
Nos sociétés font face à des bouleversements, forts et nombreux, remettant en cause les
fondements traditionnels sur lesquels s’appuyaient les états et les sociétés, en matière
économique. La crise économique et financière de 2008 a été le principal déclencheur. La
crise des subprimes s'est déclenchée au deuxième semestre 2006 avec le krach des prêts
immobiliers (hypothécaires) à risque aux États-Unis (les subprimes), que les emprunteurs,
souvent de condition modeste, n'étaient plus capables de rembourser. La crise de 2008 est
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 15
venue amplifier une situation économique française déjà en perte, dans une économie en
manque de croissance et de réformes structurelles. Elle a entraîné l’apparition de nouvelles
formes de consommation où le facteur de solidarité est primordial. C’est surtout la crise de
confiance envers l’économie de marché qui a remis en cause ce système et la recherche de
nouvelles alternatives. Le socle sur lequel reposait l’économie capitaliste a vacillé : la
confiance a été perdue.
Les conséquences de la crise de 2008 sont encore présentes en France : stagnation de la
croissance totale, augmentation du nombre de chômeurs, dégradation des finances publiques,
augmentation de la dette publique, augmentation des impôts et prélèvements obligatoires
annuels… sans compter les différents crises politico-sociales (affaire Cahuzac etc…). 7 ans
après, les effets sont encore mesurables. Dans ce contexte, de nombreuse personnes ont
identifié ou proposé une nouvelle façon de consommer en dehors du champs d’application
des acteurs traditionnels.
C’est dans cette optique que Rachel Botsman7 met en relief l’ouverture des individus aux
nouveaux accès à la consommation : une consommation collaborative vouée à la recherche
du « prix prêt à payer » (plutôt que le prix imposé) et de lien social. Déçus par une économie
figée et élitiste, les individus se sont tournés vers une économie plus ouverte, plus
transparente et plus humaine. L’économie collaborative est un fait, elle pourrait être
considérée comme une suite logique au capitalisme et à la crise de 2008. De nombreux
experts et économistes convergent vers une même affirmation : la fin du consumérisme et le
changement de comportements.
Les monopoles du XXem siècles sont bousculés par une force incalculable, une économie
hybride, mi-marché, mi-communal : les communaux collaboratifs8. Le capitalisme a donné
depusi 2008 une image négative de son interprétation de la nature humaine, de sa politique,
de son économie et a entamé son lent déclin. Les différents États sont voués à une forte
coopération et une grande transparence, sous la pression d’un collectif organisé pour servir
l’intérêt général et non celle d’une élite.
Outre la crise économique et financière, il existe un autre facteur essentiel dans l’apparition de
la consommation collaborative.
7 Auteur du livre « What’s mine is yours ». 8 Communaux collaboratifs : nom traditionnel des terres gérées collectivement utilisé par Jeremy Rifkin pour définir les pratiques collaboratives actuelles du cyberespace.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 16
2. La recherche du prix inférieur ou du PPAP – prix prêt à payer.
Entre l’obsolescence programmée9 et les pratiques commerciales trompeuses qui induisent en
erreur le consommateur et le rende plus méfiant, son rapport à l’économie est devenu de plus
en plus méfiant. Selon l’observatoire Viavoice-BPCE10, à l’automne 2012, 57 % des français
estimaient que leur pouvoir d’achat allait baisser.
Suite à la crise de 2008, la première des conséquences a été la recherche du coût inférieur
avec le développement du low-cost (technique tarifaire consistant à décomposer tous les
éléments constitutifs du prix, pour les optimiser et les rendre optionnels pour le client11). Le
consommateur est de plus en plus soucieux de son avenir, de sa capacité de pouvoir subvenir
à ses besoins et à ceux de sa famille. La consommation collaborative et ses concepts ont su
apporter une réponse financière à cette inquiétude.
S’inscrivant dans le modèle de l’économie collaborative, les plateformes d’autopartage ont des
prix qui peuvent être jusqu’à 3 fois inférieurs au prix d’un billet de TGV pour le même trajet.
Les prix sont généralement inférieurs à ceux proposés par les acteurs traditionnels, les
acteurs de l’économie collaborative ayant moins de coûts fixes.
L’économie collaborative apporte donc des réponses à la baisse de pouvoir d’achat engendré
par la crise économique de 2008.
3. Le coût marginal zéro des nouvelles entreprises
Aujourd’hui, pas loin d’un tiers de l’humanité peut partager ses propres informations, vidéos,
textes, images, à un coût marginal proche de zéro. Avec l’Internet, nous avons eu accès à de
nombreuses opportunités. Internet a ainsi ouvert des portes dont l’accès était alors impossible.
Wikileaks, plateforme de partage pair à pair a pour objectif de divulguer des informations
confidentielles. Son but étant la transparence planétaire, il apporte des réponses ou du moins
des informations auxquelles nous n’aurions jamais eu accès auparavant.
La société du XXIem siècle tend vers une économie basée sur la recherche du coût zéro. Pour
exemple, alors que le troc était une pratique ancestrale, il revient de manière fondamentale
dans nos habitudes de consommation. À toujours produire plus, nous envahissons notre 9 Nom donné à l'ensemble des techniques visant à réduire la durée de vie ou d'utilisation d'un produit afin d'en augmenter le taux de remplacement 10 Baromètre Viavoice-BPCE 11 Dominique Beaulieu
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 17
espace personnel de biens que nous n’utilisons pas, nous les possédons seulement. Le troc
peut devenir un contre pouvoir à celui de l’argent.
Le coût marginal zéro entraîne une certaine gratuité dans l’acte d’achat. On peut citer
l’exemple de Kyle MacDonald qui a réussi à échanger une trombone rouge contre une maison
dans la ville de Kipling12. Il a utilisé les bases du commerce pour arriver à ses fins.
Les changements technologiques ou « innovations sismiques » comme les décrivent
Summers et Delong, réduisent considérablement les coûts marginaux. Ces transformations
vont être ce que l’électrification a été à la seconde révolution industrielle. Comme le dit J.
Rifkin, les entreprises qui sont inscrites dans un marché oligopolistique « ont tout intérêt à
bloquer le progrès pour protéger la valeur du capital investi dans une technologie dépassée. »
Les entreprises traditionnelles sont dépassées par les coûts auxquels elles font face.
Blablacar, premier concurrent de la SNCF, répertorie des coûts sensiblement plus faibles que
la SNCF pour une offre identique.
Comme l’a spécifié Jérémy Rifkin dans son livre La nouvelle société du coût marginal zéro :
« Comment une chaîne hôtelière gigantesque, avec ses coûts
fixes élevés, pourrait-elle concurrencer des millions d’espaces
privés partageables à des coûts marginaux faibles et même quasi
nuls ? ».
À l’image d’Airbnb, comment les grands constructeurs automobiles/loueurs de voitures, avec
leurs coûts fixes élevés, pourront-ils concurrencer des millions de voitures privées
partageables à des coûts marginaux faibles et même quasi nuls ? C’est ici toute la question de
l’économie collaborative.
4. La démographie : vecteur de mobilité
Nous sommes de plus en plus d’êtres humains à posséder une automobile à la recherche de
mobilité. Se déplacer est devenu depuis plusieurs décénies un élément fondamental dans la
vie d’un être humain. Hormis les pays très pauvres, les moyens de transports se sont
développés à une vitesse égale à celle de l ‘augmentation de la population afin de satisfaire
12 Le blog de Kyle MacDonald, One red paper clip, http://oneredpaperclip.blogspot.fr/
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 18
au mieux la demande en déplacements. La grande majorité des pays est équipée de moyens
de transport et d’infrastructures permettant de se déplacer. Aux Etats-Unis, on compte 770
voitures pour 1000 habitants13, soit environ 7 personnes sur 10 sont propriétaires d’une
voiture. En France, c’est 582 voitures pour 1000 habitants. En Chine, on compte 70 voitures
pour 1000 habitants.
La Chine, première puissance économique mondiale, est confrontée à l’augmentation rapide
de sa population, elle représente actuellement 19,2% de la population mondiale14. Aujourd’hui,
elle est confrontée à de nombreux problèmes quant aux déplacements de sa population et des
effets in fine : embouteillages géants15, niveau de pollution hautement élevé, saturation des
moyens de transport, sécurité routière, impact psychologique sur les automobilistes,
insuffisance de parkings. Le futur de la mobilité en Chine est un enjeu de taille. Avec l’éventuel
afflux de 100 millions de travailleurs ruraux vers les grandes villes en 2020, la Chine se doit
d’intégrer un système de transport intelligent et durable. Le futur de la mobilité en Chine est
déterminant. L’analyse de 7 facteurs constitutifs de la mobilité dont l’auto-partage apporte des
réponses aux problématiques que rencontrent de nombreux pays. Les véhicules électriques,
l’auto-partage et les applications liées aux transports vont connaissent une croissance
exponentielle16. Les nouvelles mobilités tel que le partage de vélos sont de nouvelles solutions
simples et efficaces.
En France, lors du séminaire de « La France en 2025 », Frédéric Cuvillier, Ministre délégué
aux Transports, a présenté son rapport qui mettait l’accent sur l’augmentation de la mobilité et
du trafic voyageur (1,7% par an17). Les besoins en mobilité dans les grandes métropoles ne
vont cesser d’augmenter d’ici les 12 prochaines années. La France, comme la plupart des
pays européens devront faire face à une recrudescence de la demande en déplacement. Cela
passera bien évidemment par la promotion des nouvelles technologies mais aussi par
l’ouverture à la concurrence. Différentes dispositions ont été mises en place à Paris par
exemple, le service d’autopartage Autolib’, défini comme une alternative à la voiture
individuelle et un service à forte valeur ajoutée de part les places de stationnement
disponibles et de ce service en trace direct18. Ce service de mobilité est initiateur, comme le
13 Étude réalisée par l’observatoire de Cetelem de l’Automobile. 14 Estimation de l'Institut national d'études démographiques 15 En 2010, un bouteillage géant de 100 km a contraint certains automobilistes a rester plus de 5 jours coincés sur l’autoroute (source : lemonde.fr) 16 PR Newswire, - Julie Zheng, Corporate Communication – China, Frost & Sullivan 17 Keolis, octobre 2013, La mobilité à l’heure du partage 18 Étude réalisé par ADEME pour Autolib disponible ici : http://6t.fr/download/AD_DossierPresse_140515.pdf
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 19
sont les Vélib’, du changement qu’opèrent les sociétés quant à la problématique de la mobilité
et de l’augmentation de la demande en déplacement.
Le 15 janvier 2015, le CEO de Blablacar, Frédéric Mazella a confirmé sur BFM Business son
intention de s’implanter en Inde après s’être implanté en Turquie en septembre 2014. En
raison de différents éléments : transports en commun saturés, augmentation du prix de
l’essence et surtout une population connectée, on constate que 75% des 15-34 ans sont
connectés. L’Inde est le deuxième pays le plus peuplé au monde avec 1,250 milliard
d’individus qui se déplacent et cherchent à optimiser leur déplacement. Frédéric Mazella s’est
exprimé sur le sujet :
« 23 millions de personnes se déplacent, chaque jour, en train en
Inde. Les transports sont chers et pas toujours disponibles. Il faut
s’y prendre à l’avance, sinon il n’y a plus de places »
La démographie est bien trop souvent un élément que l’on omet et pourtant, sa conséquence
sur la mobilité de demain sera le premier facteur des nouvelles innovations en terme de
mobilité 2.0.
5. Changement de mentalité : vers une nouvelle conception du « way of life »
Suite à la crise de 2008, le rêve de beaucoup d’américains19 s’est transformé en cauchemar.
Plusieurs millions de personnes ont perdu leur maison, leur travail, leur pouvoir d’achat, et par
la même occcasion, leur confiance en l’État. Thomas Friedman a écrit dans le New York
Times :
« 2008 fut le jour où nous nous écrasions contre le mur – quand la
mère nature et le marché ont dit ‘Vous n’irez pas plus loin’ »20
Rachel Botsman, affirme que nous sommes programmés pour partager et nous montre
comment des sites web tels que Zipcar ou Swaptree changent les règles du comportement
humain.
19 « American Dream » : est l'idée selon laquelle n'importe quelle personne vivant aux États-Unis, par son travail, son courage et sa détermination, peut devenir prospère. 20 « 2008 was when we hit the wall – when Mother Nature and the market both said : « No more » », traduction française, Robin Goudé.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 20
L’observatoire Cetelem21 a mis en avant une étude intéressante sur le rapport qu’entretiennent
les individus avec l’automobile. Un quart d’entre eux pense qu’une voiture sera la propriété de
plusieurs personnes et un autre quart pense que l’automobile ne sera plus un produit en soi,
mais un service que l’on rémunèrera à l’usage. Mais c’est 73 % de l’échantillon qui pense que
l’auto-partage ou covoiturage connaitra un véritable développement dans les prochaines
années.
Ce n’est pas qu’une simple vision subjective de la société mais une remise en cause du
monde dans lequel nous vivons et de notre comportement. Nous sommes les seules espèces
sur terre à payer pour vivre. Petit à petit, les individus sont de plus en plus nombreux à se
rendre compte du changement de paradigme. La réalité objective est en train d’être bousculée
par une nouvelle génération qui met en relief les nouvelles pratiques de consommation. Selon
Lauren Anderson, la consommation collaborative pourrait être au XXIem ce que la révolution
industrielle a été au XIXem siècle ; un changement profond. Reconnue à travers le monde, la
consommation collaborative est citée par le Time Magazine comme l’une des dix idées qui va
changer le monde et est désignée comme l’une des 12 tendances de consommation par
l’institut d’étude « Trendwatching ». Force est de constater que l’économie collaborative
répond à un besoin mais aussi à des enjeux environnementaux et sociétaux préoccupants.
6. La mobilité collaborative au service des territoires et des français
Le covoiturage, l’autopartage et autres pratiques de mobilité collaborative sont inscrits depuis
plusieurs années dans le paysage français mais son utilisation était restée géographiquement
limitée. De nombreuses communautés ou agglomérations ainsi que de nombreuses
entreprises ont mis en place un système de covoiturage. L’apparition des plateformes de
covoiturage sur internet a permis la mise en valeur de ces pratiques et surtout sa
popularisation auprès de particuliers.
La mobilité collaborative est prise au sérieux par le gouvernement car elle apparaît comme
une réponse aux problématiques de mobilité. Elle impulse un nouveau mode de transport qui
s’organise grâce à différents acteurs.
Ecolutis est une société « spécialiste du covoiturage en situation de mobilité pour les
collectivités et les entreprises ». Elle a notamment lancé la plateforme IDVROOM, le service
de covoiturage de proximité de la SNCF. De nombreux clients de la société, que ce soit des 21 Étude réalisée sur des individus : Allemagne, Belgique, Espagne, France, Italie, Portugal, Royaume-Uni et Turquie
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 21
communes, des universités, des agglomérations, des régions, des entreprises, des banques,
des lieux sportifs, des départements ou des aéroports ont fait appel à eux dans l’objectif de
développer une plateforme de covoiturage. On constate l’hétérogénéité des clients, ce qui
entraîne le développement de ce moyen de transport par et pour tout le monde.
De même, la communauté d’agglomération Sophia Antipolis, de Tours, de Castelroussine, de
Seine-Eure, la région de Charente maritime et l’Assemblée Nationale ont leur propre service
de covoiturage.
7. La mobilité 2.0, la solution d’un monde en crise : des transports à moindre
frais et sécurisé
L’avénement de ce que l’on nommera la mobilité 2.0 vient principalement du changement de
comportement suite à la crise de 2008. Les individus ont moins confiance en leur
gouvernement et porte un jugement dur face à leur capacité à régler les problèmes et
répondre aux besoins. Les nouvelles entreprises telles que Uber ou Blablacar proposent des
services qui répondent aux besoins des individus. Des services basés sur la confiance, une
confiance retranscrite à travers l’e-reputation. Ces nouvelles entreprises offrent un modèle qui
propose les mêmes services qu’une entreprise traditionnelle mais avec tous les avantages en
plus : rapidité, convivialité et prix intéressant.
L’économie du partage est la suite logique à un monde en crise. La perte de confiance subie
par les indidus obligent ceux-ci à se retourner vers un modèle alternatif. Hormis le fait que les
individus se tournent vers de nouvelles offres, ils y trouvent aussi un gain économique et
social auquel ne répondait plus le modèle traditionnel. Les prix des billets de trains sont
jusqu’à trois fois plus chers qu’une place dans une automobile partagée, d’où la désaffection
d’une partie des français les moins aisés pour les trains.
Le modèle de l’économie du partage a atteint une masse critique assez importante et a
apporté assez de preuves sociales22 pour prétendre être le renouveau de l’économie
d’aujourd’hui.
B. L’avènement de la consommation collaborative dans le secteur de la mobilité
22 « Social proofing » et « critic mass », 2 éléments crucials au développement d’une activité collaborative selon Rachel Botsman, chap 2 Groundswell, p.82, l.20.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 22
L’automobile était le cœur de la seconde révolution industrielle. Au tournant de la troisième
révolution industrielle, elle est encore au cœur des changements qui s’opèrent. L’automobile
rentre en ligne de mire des nouvelles préoccupations des individus : diminution de l’empreinte
carbone et économies d’énergie.
Une automobile reste la plupart du temps inactive. Au quotidien, elle sert à se déplacer d’un
point A à un point B puis du point B au point A. L’automobile, l’objet phare de la seconde
révolution industrielle est dans l’espace un moyen de transport qui a complètement modifié
notre façon de se déplacer : autonomie et flexibilité ont été le moteur du développement de
l’automobile. Il reste aujourd’hui le moyen de transport le plus utilisé au monde. Mais en terme
de temporalité, la façon d’utiliser l’automobile est remise en question à différents niveaux : les
coûts imputés (en moyenne, une voiture coûte de 400 à 500 euros par mois23 même
inutilisée), les enjeux environnementaux et la recherche de lien social.
La mobilité est la notion fondatrice de l‘économie du partage, c’est dans ce secteur que sont
apparues les premières pratiques collaboratives. Le covoiturage est une pratique qui existe
depuis plusieurs décennies mais qui trouve son avènement aujourd’hui.
1. Les signes de transformations actuelles
On assiste à la mise en valeur des communaux collaboratifs et de leur impact sur l’économie
traditionnelle. Comme l’a affirmé l’observatoire IPSOS24, les pratiques collaboratives ne sont
pas un phénomène de mode et sont amenées à se développer dans les années qui suivent de
manière exponentielle. La forte crise qui a touché l’économie mondiale a permis aux individus
de se retourner vers un outil pratique et parfois sans intermédiaire - Internet – pour partir à la
recherche de bons plans. La volonté des individus de s’écarter de la société de consommation
actuelle est forte et ne cesse de croître, les individus, tels que les locavores25, ont la volonté
de reprendre le contrôle de leur consommation. À cet égard, le collectif Oui Share s’est
construit sur cette volonté de partage, de collaboration et de contribution.
23 Vive la co-révolution, Pour une société collaborative, Anne-Sophie Novel et Stéphane Riot 24 IPSOS, Les français et les pratiques collaboratives, Janvier 2013 25 Individus prônant la consommation de nourrtiture produite dans un rayon allant de 100 à 250 km autour de son domicile
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 23
Dans le secteur du transport, selon l’observatoire Viavoice-BPCE 26 :
« 40 % des utilisateurs de voiture envisagent d’utiliser "de moins
en moins" leur voiture, 31 % des voyageurs en train de "moins"
prendre le train et 28 % des voyageurs aériens de "moins" prendre
l’avion. En revanche, 29 % des Français envisagent de "faire du
covoiturage pour des trajets longue distance avec des proches",
score singulièrement élevé en regard des intentions de restrictions
sur les transports traditionnels. »
Quand on sait que 400 millions de dollars ont été investis dans des start-ups de la
consommation collaborative en 2012 aux Etats-Unis, le mouvement n’est plus à ses débuts et
son impact n’est pas égal à zéro. Telle une fusion dite nucléaire, le mouvement se développe
dans les grandes capitales pour venir se greffer aux banlieues et dégager une forte énergie
jusque dans les provinces.
L’université du Michigan avait mis en relief une étude montrant le détachement des jeunes
générations à l’égard de la possession du permis de conduire ; entre 1983 et 2008, chez les
25-29 ans, la possession du permis de conduire a baissé de 10%.
Selon l’Observatoire Cetelem, l’automobile sera pour un quart d’entre nous un bien que l’on
possède à plusieurs et pour un autre quart, un service que l’on paie quand on en a besoin.
Cependant, elle restera tout de même un bien dont on restera l’unique propriétaire pour une
personne sur deux.
Alors qu’il y a 20 ans, l’automobile était majoritairement considérée comme un symbole
d’ascension et de réussite sociale, aujourd’hui, l’automobile est associée à la liberté,
l’indépendance et l’autonomie27 mais devient de plus en plus un lieu d’échanges et de lien
social.
Dans la tourmente que génère toute cette nouvelle économie, même Bill Ford, président
exécutif du géant de l’automobile Ford avait avoué dans un interview pour la CNN en 2009 :
26 Baromètre Viavoice-BPCE : Fêtes de fin d’année, transports : vers des réductions de dépenses et de nouveaux comportements économiques. 27 L’observatoire Cetelem
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 24
« L'avenir du transport sera un mélange de choses comme Zipcar,
les transports publics, et la propriété privée de la voiture. Non
seulement je ne crains pas cela, mais je pense que c’est une
grande opportunité pour nous de participer à la nature changeante
de la propriété de voiture28 ».
Dans ce contexte, on se rend compte de l’importance du phénomène auquel même les
constructeurs automobiles se sont soumis car, non ce n’est pas qu’une idée mais belle et bien
un service que de nombreux français utilise tous les jours.
2. Un secteur en pleine expansion
Suite à la crise pétrolière de 1973, aux Etats-Unis, beaucoup de travailleurs et étudiants ont
été encouragés à partager leur véhicule pour faire face à la crise. En Europe, ce sont dans les
années 1990 que le covoiturage s’est développé et provient de différentes mesures apportées
par les gouvernements pour augmenter le taux d’occupation des véhicules. En France, c’est
lors des grandes grèves en 1995 qui ont entrainé la paralysie des transports collectifs que la
propension d’individus utilisant le covoiturage est passée de 6 à 11%29.
Aux Etats-Unis, l’apparition d’entreprises d’autopartage n’en finit plus : City Wheels, Hourcar,
Philly Car Share, I-Go, City Car Share etc… La nouvelle mobilité s’installe, et ses réseaux à
but non lucratif permettent à des milliers d’usagers de se déplacer. Dans le monde, les
entreprises opérant sur le secteur du transport de passagers se développent : Communauto,
Transdev, LeCav, Suppershuttle, GoGet, Liftshare, Enterprise, Ouicar, Buzzcar, Drivy,
Koolicar, Zimride, Zipcar, WeCab (Taxi G7), Driver, Tripndrive, Allocab, Snapcar, Vadrouille-
covoiturage, Blablacar, covoiturage-libre, Djump, Heetch, Wayz Up, Lyft, Uber, Citygoo etc…
Toutes opèrent sur des marchés différents avec des offres différentes et certaines
particularités (cf benchmark des acteurs du transport de passager C.1.).
I-Go, aux Etats-Unis, propose même un service innovant avec la possibilité de réaliser un
trajet avec plusieurs moyens de transport en passant du train à la voiture et au vélo.
28 Phrase original : « The future of transportation will be blend of things like Zipcar, public transportation, and private car ownership. Not only do I not fear that, but I think it’s a great opportunity for us to participate in the changing nature of car ownership ». Brian Walsh, ‘Meet Dave, the man who never takes out the trash’, Time, 22 septembre 2008. 29 CERTU, Le covoiturage en France et en Europe, oct. 2007
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 25
Le covoiturage ou partage de trajet n’est pas un phénomène nouveau mais connaît son
apogée en cette période de crise économique, environnementale et sociale. Depuis 2008, le
covoiturage connait une croissance exponentielle. En 2013, 21 % des Français avaient déjà
eu recours au covoiturage et 41 % envisageaient d’y avoir recours30.
Preuve de l’intérêt des consommateurs pour le covoiturage, Blablacar, anciennement
covoiturage.fr, compte 10 millions de membres31. Son expansion est un phénomène mondial
(future implantation en Inde). Les pays comptant une forte hausse de leur population sont
confrontés à un véritable problème de mobilité. La mobilité 2.0 apporte une solution durable et
utile pour les pays en voie de développement.
L’expansion de la mobilité 2.0 n’en est qu’à ses débuts. Si l’on prend une étude récente, 46%
des conducteurs âgés de 18 à 24 ans ont déclaré qu’accéder à Internet était bien plus
important que posséder une voiture. Parmi les marques préférées par les jeunes, pas une
seule n’est une marque automobile. Les jeunes sont en train de changer la vision que l’on
avait auparavant de l’automobile.
Selon Keolis, 5,5 millions de personnes pourraient utiliser l’autopartage en Europe d’ici 2015.
3. Un marché à forte croissance
C’est 1,7 million de personnes qui aujourd’hui partagent des voitures dans 27 pays. Et selon
une étude de Frost and Sullivan, il y aura plus de 200 entreprises d’autopartage en Europe en
2020.
Dans un marché de crise économique, les nouvelles pratiques de consommation collaborative
s’amplifient. En France, c’est 21 % de la population qui a déjà eu recours au covoiturage selon
l’enquête IPSOS et CETELEM et 41 % des non pratiquants souhaitent y avoir recours.
L’économie collaborative a été plus financée que les réseaux sociaux tels que facebook,
twitter, linkedin, youtube et a atteint environ 11 milliards de dollars de financement contre
environ 6 milliards pour les réseaux sociaux.
30 IPSOS & Cetelem, enquête: « Partager sa voiture : une tendance mondiale », échantillon : 10 500 personnes (France, Allemagne, Belgique, Etats-Unis, Italie, Japon, Norvège, Suède, Grande Bretagne). 31 Blablacar.fr – Section blog
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 26
Uber est aujourd’hui valorisé à 40 milliards de dollars et est l’entreprise qui a été la plus
financée avec plus de 2 milliards de dollars (voir annexe 1 ci-dessous). Blablacar aussi
apparaît dans le panel des startups les plus financées. En 2014, de tous les secteurs, c’est le
transport qui a collecté le plus de fonds : 4 942 297 500 $ collectés32
Annexe 1 : Top 30 des startups de l’économie collaborative les plus financées
Dans une étude menée par l’Institut CSA en novembre 2014 pour Uber33,
« les Français font part de leur intérêt pour des offres de transport
complémentaires, à l’instar du transport partagé (54%) qui
consiste en un dispositif permettant aux particuliers de proposer
de transporter d’autres particuliers avec leur véhicule personnel
sur des trajets courts. Ce fort intérêt s’explique par les nombreux
avantages perçus, conjuguant économies, convivialité, souci de
l’environnement et diversité des dessertes. »
32 Ces données sont en accès libre sur Crunch base mais aussi via ce lien édité début janvier 2015 par Crowd Companies https://docs.google.com/a/mailistec.fr/spreadsheets/d/12xTPJNvdOZVzERueyA-dILGTtL_KWKTbmj6RyOg9XXs/edit#gid=1748340913 - 33 Institut CSA pour Uber, Les Français et le transport partagé, Nov 2014
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 27
Le transport partagé s’inscrit dans un mouvement de fond qui se traduit par l’appétence des
français en matière d’économie du partage :
« Une majorité de Français serait prête à proposer ce type de
services partagés (52%) principalement en matière de
covoiturage, de logement et de bricolage. »
Dans une autre mesure, et toujours de la même étude, ces moyens de transport affichent un
véritable intérêt financier pour les adhérents :
« Pour 83% des personnes interrogées (et 85% de ceux qui y ont
eu recours), le transport partagé améliore le pouvoir d’achat de
ceux qui l’utilise. 81% des sondés (90% chez les utilisateurs)
considèrent que c’est un moyen de se rendre dans des zones peu
ou pas desservies par les autres moyens de transport. 80% des
clients trouvent que c’est un mode de déplacement plus
pratique/flexible. »
Le marché de la mobilité 2.0 n’en est qu’à ses débuts, de nouvelles startups se montent tous
les jours sur des marchés de niches afin de répondre aux nouveaux usages et modes de
mobilité.
4. Nouveaux modes et usages de la mobilité
Les français ne confirment pas leur désamour pour l’automobile mais revendiquent une
utilisation différente de celle-ci. En effet, 7% des trajets en voiture ne sont pas réalisés dans
une voiture personnelle34.
Selon l'Observatoire des mobilités émergentes, les services de covoiturage feraient monter le
taux d’occupation moyen d’une voiture de 1,2 à 3,5. Un point positif quand on calcule le
nombre de places inoccupées dans une automobile à chaque trajet. Si chacun de nous roulait
à taux d’occupation complet, quand on sait qu’une voiture partagée enlève 7 voitures sur
l’autoroute, les problèmes liés aux goulots d’étranglements des réseaux routiers n’existeraient
plus et cela réduirait par la même occasion l’impact environnemental.
34 Chronos - Mobilité Cities - Enquête : les nouvelles mobilités, apanage des citadins
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 28
Le covoiturage ou partage de trajet n’est pas qu‘un effet de mode mais une réponse aux
problèmes de fond auxquels sont confrontés l’Homme. C’est pourquoi, inconsciemment,
l’usage que l’on fait de l’automobile diffère de celui des décennies précédentes.
La mobilité n’est plus simplement le déplacement d’un point A à un point B. C’est aujourd’hui
bien plus qu’un service mais un style de vie. Dans la recherche de rencontres réelles affichées
par les Français, la mobilité partagée est un moyen de rencontrer des personnes. Trouver la
mobilité qui nous convient est maintenant possible.
5. L’essoufflement des entreprises traditionnelles : de l’oligopole à la scission
naturelles des marchés
Les acteurs traditionnels voient s’abattre sur eux un tsunami de concurrence. L’impact de ses
nouveaux acteurs sur la scène du transport de passager est largement visible. À l’image des
taxis ou Avis, on constate que les individus tendent vers un réel rejet des acteurs
traditionnels : ces entreprises ne sont plus des lovemarks35 (cf annexe 2 ci-dessous). Les
acteurs traditionnels connaissent une véritable baisse de popularité. À l’inverse, les nouveaux
acteurs sont très appréciés par leur client car ils répondent aux aspirations de la demande.
Annexe 2 : « Love mark » entreprises traditionnelles VS startups issues de l’économie
collaborative
35 Lovemark, Concept publicitaire (Saatchi & Saatchi) selon lequel une marque doit commander le respect et une forte relation affective, en s’appuyant pour cela sur le mystère, la sensualité et l’intimité.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 29
L’utilisation des taxis était depuis longtemps l’une des principales fonction de la mobilité. Il
s’agissait des seuls acteurs présents sur le marché. Le taxi était à l’époque signe
d’affranchissement, d’ascension sociale et de richesse. Aujourd’hui, le taxi n’est plus une fin
en soi, nous convergeons vers un modèle plus collaboratif, où votre voisin vous conduira,
dans l’objecif de réduire tout trajet inutile.
La hausse des tarifs des transports en commun est inéluctable. Elle entraîne une fois de plus
l’abandon des individus pour ce genre de moyen de transport. Un classement, toute mobilité
confondue, a été réalisé par Mobilicities, le portail des transports publics et de la mobilité :
« Les transports en commun se retrouvent à l’avant-dernière place
du classement de satisfaction de toutes les formes de mobilité.
Les meilleures notes reviennent au covoiturage (7,8/7,9 selon que
l’on est conducteur ou covoitureur), à la voiture individuelle (7,6),
au deux-roues (7,4) et au VTC (7,3) qui dame le pion aux taxis (6),
dernier du classement. »
L’évolution technologique et le changement de mentalité opérés au sein des sociétés
entraînent la passage d’un modèle à un autre.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 30
C. Les acteurs de la mobilité au service des individus
Le match de l’économie collaborative contre les acteurs traditionnels bouleverse le paysage
des transports. Les acteurs de la mobilité 2.0 proposent des marchés plus spécifiques,
s’apparentant à des niches parfois.
1. Des acteurs segmentés pour une mobilité optimale
Des grands succès, tel que Blablacar, en passant par les services spécifiques comme Citygoo
jusqu’aux services locaux mis en place par les communautés, les acteurs de la mobilité 2.0
sont multiples.
Nous avons différencié 6 types de mobilité 2 .0 qui s’inscrivent dans l’économie du partage :
• Le covoiturage (Blablacar, covoiturage-libre.fr) ; en aucun cas les chauffeurs sont
des professionnels mais partagent leur trajet dans l’objectif d’augmenter le taux
d’occupation de leur automobile lors de trajet quotidien ;
• L’autopartage (Autolib’, Livop) : consiste à louer sa voiture ;
• Le taxi P2P (Uber, Lyft, Djump) ; il ne s’agit pas du cœur de métier des chauffeurs
mais une accréditation spécifique les lie à un contrat de travail ;
• La location de voiture de particuliers ;
• Le VTC ;
• La commande de taxi.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 32
2. Des offres en adéquation avec les attentes des individus
On dénombre 6 types de mobilité, à l’intérieur de chaque catégorie, chaque entreprise à sa
spécificité sur le marché. Par exemple, Wayzup propose du covoiturage domicile-travail,
Tripndrive du covoiturage aéroport-gare, Covoiturage-libre se différencie de par son offre en
stipulant être une plateforme complétement gratuite comparée à Blablacar. IDVROOM est une
plateforme développée par la société Ecolutis pour la SNCF afin de prendre le contre-pied à
Blablacar, elle opère sur des trajets domicile-gare. Cette offre de covoiturage est
« complémentaire de celle de la SNCF. Il s’agit de fluidifier le parcours client de bout en
bout », indique Barbara Dalibard, DG de SNCF Voyageurs. Le service de covoiturage courte
distance lancé en septembre 2014, est ciblé sur les trajets domicile-travail et permet,
notamment, de parcourir les derniers kilomètres qui séparent de la gare la plus proche. Les
services d’autopartage aussi se différencient sur leurs offres : Drivenow (Allemagne) est une
plateforme de location de voiture BMW, monautopartage.fr, seulement de voitures electriques,
enfin Driiveme est une plateforme d’autopartage pour le rapatriement de voiture de loueurs.
On constate que chaque service fonctionne autour d’un élément : aller d’un point A à un point
B. Tous proposent de converger d’un point A à un point B mais d’une certaine manière : avec
un chauffeur, en voiture seul, en passager avec un conducteur lambda…
Les innovations en terme d’offres de services sont multiples et ne cessent de se multiplier.
3. Du pouvoir des entreprises à l’« empowerment » des consommateurs
L’information est désormais partagée entre des millions de personnes qui ne se connaissent
même pas mais qui tendent vers un nouvel idéal. Twitter donne la possibilité de communiquer
rapidement et simplement auprès d’une large communauté ouverte et réceptive. Ces réseaux
confèrent aux consommateurs la possibilité de s’agréger à des groupes de plus en plus
importants et puissants face aux marques. Les réseaux donnent aussi la possibilté d’intervenir
directement avec la marque aux yeux de tous. L’implication sur les réseaux sociaux du
Président Obama lors de sa campagne en 2008 montre la propension prise par le numérique
aujourd’hui et met en relief l’impact que suppose internet sur les grandes décisions.
Marian Salzman, CEO chez Havas PR North America, considère que « les individus dirigent le
monde ». Un fait marquant comme lors des différentes immolations en Tunisie, notamment
celle d’un simple vendeur de fruit qui a changé le cours de l’histoire, symbolise ce pouvoir.
Ces nombreuses et tristes réalités ont été relayées par internet. Le Pape François lui-même
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 33
est sorti des conventions historiques pour écrire son premier tweet, un vrai bouleversement
dans sa relation aux fidèles via les nouvelles technologies mais une véritable avancée sociale.
Twitter est la caisse de résonnance de ses millions de voix qui peuvent s’exprimer à un coût
marginal très proche de zéro.
Les individus se sont forgés un pouvoir, le pouvoir d’exprimer leur opinion librement et
gratuitement, mais surtout de s’apercevoir qu’il partage parfois les mêmes besoins. Des
besoins qui ont été identifiés par les startups de la mobilité 2.0.
Du pouvoir des entreprises, on passe au pouvoir des consommateurs, car, finalement il n’y a
pas plus grand pouvoir que la masse, ces millions de gens qui achètent, consomment et
aiment les marques. Il y a plusieurs décennies, la demande se contentait de l’offre disponible,
aujourd’hui, l’offre s’adapte à la demande. Cette demande, changeante et de plus en plus
spécifique, pose de véritables problèmes aux entreprises traditionnelles, tels que les taxis.
L’offre des taxis est inadaptée. De la perception du métier (désagréable) à la satisfaction
client, le métier a pris 15 ans d’âge.
Aujourd’hui, le consommateur via son smartphone, première innovation dans la mobilité 2.0,
commande son chauffeur, connaît son temps d’attente et le prix à payer. Quand un taxi
traditionnel est introuvable, désagréable et cher, le chauffeur particulier est lui social,
géolocalisable et moins onéreux.
Quand le pouvoir d’une entreprise reposait sur son capital, le pouvoir d’une entreprise
collaborative repose sur son nombre de clients. Le rapport de la commission36 sur l’économie
immatérielle met bien en valeur les nouvelles priorités de l’économie du partage :
« Durant les Trente Glorieuses, le succès économique reposait
essentiellement sur la richesse en matières premières, sur les
industries manufacturières et sur le volume de capital matériel
dont disposait chaque Nation. Cela reste vrai, naturellement. Mais
de moins en moins. Aujourd’hui, la véritable richesse n’est pas
concrète, elle est abstraite. Elle n’est pas matérielle, elle est
immatérielle. C’est désormais la capacité à innover, à créer des
concepts et à produire des idées qui est devenu l’avantage
compétitif essentiel. Au capital matériel a succédé, dans les 36 Rapport de la commission sur l’économie immatérielle, L’économie immatérielle, la croissance de demain, Maurice Lévy et Jean Pierre Jouvet
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 34
critères essentiels de dynamisme économique, le capital
immatériel ou, pour le dire autrement, le capital des talents, de la
connaissance, du savoir. En fait, la vraie richesse d’un pays, ce
sont ses hommes et ses femmes. »
Le consommateur tend vers une nouvelle identité, celle du prosommateur et acquiert un
champs de décision non négligeable pour les entreprises.
4. La remise en question des acteurs traditionnels
La remise en question des acteurs tradtionnels est passée par une adaptation de leur propre
l’offre. Alors que les grands acteurs ont souvent freiné l’innovation pour capitaliser sur leur
marché, les nouvelles startups de la mobilité 2.0 ont bousculé leur business modèle par leurs
offres et leurs avancées technologiques.
Ainsi, Taxis G7 a développé une offre de taxi partagé ou privatisé pour les aéroports Roissy
CDG et Orly, Wecab :
« Avec WeCab, profitez d'un taxi Roissy CDG ou d'un taxi Orly à
prix fixe. Que ce soit en taxi partagé ou en taxi privatisé, vous
réservez en ligne et WeCab s'occupe de votre prise en charge et
de votre dépose en respectant les horaires définis. »
La SNCF a aussi fait appel à une entreprise spécialisée, Ecolutis, pour développer sa
plateforme de covoiturage du lieu de résidence à la gare la plus proche, IDVROOM.
IDVROOM n’est pas simplement un service de plus mais c’est tout une stratégie pour faire
face à son concurrent principal, Blablacar. Dans la continuité de cette stratégie, la SNCF a
aussi racheté 2 acteurs du covoiturage : easycovoiturage.com et 123envoiture.com.
Les nouvelles offres et comportements des acteurs traditionnels montrent bien qu’ils ont été
bousculés par ces nouveaux acteurs de la mobilité 2.0 (CQFD). Les acteurs de l’industrie de
l’automobile comme Peugeot ou Renault ont eux aussi mis en place leur propre système.
L’ancienne Responsable de la Recherche et du Développement et de la planification chez
General Motors avait affirmé que :
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 35
« Si l’on remplaçait les voitures personnelles par des voitures
partagées et coordonnées en réduisant d’environ 80% le nombre
de véhicules, on aurait le même niveau de mobilité, pour un
investissement moindre. »37
Malgré l’avancée des acteurs traditionnels dans l’économie du partage, la tentation
protectionniste des grands acteurs est toujours présente comme le sous-entend la Loi
Thévenoud, qui interdisait les VTC d’être repérés par les clients depuis leurs smartphones.
Aujourd’hui, confrontée à la réalité du marché, la loi est pleine de failles.
Cependant, les individus inscrits dans le paradigme capitaliste doivent laisser place à la
nouvelle génération. Thomas Paine, révolutionnaire américain a écrit :
« Chaque siècle, chaque génération doit avoir la même liberté
d’agir, dans tous les cas, que les siècles et générations qui l’ont
précédés ».
D. Les fondements de l’économie collaborative dans le secteur de la mobilité
La mobilité 2.0 repose sur différents éléments essentiels à son développement. La mobilité 2.0
est le fruit de nouvelles technologies, du conservatisme des acteurs traditionnels, de la
nouvelle demande, des nouveaux styles de vie et du changement de paradigme économique :
de l’éclipse du capitalisme à l’avènement de la consommation collaborative.
Le secteur du transport est le secteur le plus financé (cf : annexe 3), et son expansion n’est
pas prête de s‘arrêter. L’économie collaborative dans le secteur de la mobilité et dans la
plupart des autres secteurs aussi, repose sur un noyau dur que beaucoup d‘entreprises
traditionnelles n’ont pas évalué l’ampleur.
Annexe 3 : Le secteur du transport est le secteur le plus financé. Financement de l’économie
collaborative par industrie.
37 Janet Browne, Charles Darwin : The Power of place
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 36
1. La recherche de la réelle valeur du prix
Le covoiturage, le partage de trajet ou d’automobile engendrent des gains financiers pour les
utilisateurs. Partager une voiture c’est partager les dépenses liées à la maintenance, à la
consommation d’essence et aux assurances. Ces modèles s’inscrivent dans un cercle
vertueux de participation aux frais.
Dans une interview accordée par Frédéric Mazzella dans La tribune, celui-ci se questionne :
« Ne pensez-vous pas que la SNCF a perdu des clients à cause
de ses tarifs ? Regardez les prix des billets de trains, ils n'ont pas
cessé d'augmenter ces dernières années ! Qui aujourd'hui a
encore les moyens de prendre le train ? »
Et l’augmentation des prix n’est pas prête de s’arrêter : dans un article paru le 26 décembre
2014 dans l’Express, on parle d’une augmentation de 2,6 % des billets de train.
Les prosommateurs veulent retrouver le prix qu’ils sont prêts à payer et non pas le prix
imposé. Ils veulent estimer le prix de leur trajet, trouver l’adéquation entre temps, distance et
prix.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 37
2. La confiance entre inconnus, assurance d’un nouveau mode de vie
Comme vu précédemment, le socle sur lequel reposait l’économie capitaliste a vacillé, la
confiance a été perdue. Les individus se sont alors retournés vers une nouvelle forme de
confiance : la confiance entre inconnus d’une même communauté. Quoi de plus angoissant
que de faire confiance à un inconnu… et pourtant c’est sur quoi repose la consommation
collaborative.
On va acheter un produit sur e-Bay ou Le Bon Coin a un véritable inconnu. Pourtant, cet
inconnu est gage de confiance, il appartient à la même communauté que moi, c’est lui, c’est
moi, c’est l’autre qui n’est pas moi, c’est celui qui utilise les mêmes pratiques d’achat que moi
et qui donc fait partie de cette communauté qui partage les mêmes normes et croyances.
Cette personne est donc digne de confiance, si elle ne l’est pas, elle sera expulsée de la
communauté.
L’atout majeur de ces plateformes est donc l’e-reputation qui joue un rôle fondamental et qui
pourrait même à l’avenir apparaître sur nos futurs cartes d’identité. Chaque chauffeur
Snapcar, Djump, Heetch, Blablacar est noté et détient par conséquent une identité virtuelle.
Internet limite les intermédiaires, la confiance s’établit alors comme principe fondamental. Roo
Rogers, co-auteur de What’s mine is yours en est persuadé, la confiance est l’enjeu de taille
des entreprises collaboratives, il est évident que les individus veulent savoir avec qui ils vont
partager leur trajet, à qui ils vont louer leur voiture etc…38
En sachant que la SNCF fabrique ses TGV et construit les voies ferroviaires, comment est-il
possible que Blablacar, qui ne construit ni voiture, ni route, mais utilise les ressources de ces
membres, puisse être l’un des premiers concurrents de la SNCF ? Grande question qui
mériterait une étude approfondie, mais cela revient à la spécificité des biens communs et de
l’action collective. Elinor Ostrom, économiste et politologue américaine, « Prix Nobel »
d’économie en 2009, a dirigé ses travaux portant principalement sur la théorie de l'action
collective et la gestion des biens communs et des biens publics. L’étude a démontré que les
personnes qui utilisent un bien commun sont susceptibles de s’autogouverner à condition
qu’ils utilisent le bon outil pour coordonner des projets ou gérer de besoins spécifiques. Sur
les plateformes collaboratives, les notions de contrôle et d’intermédiaire s’effacent pour laisser
38 Article « Roo Rogers on what’s next in the sharing economy » 2011, fastcompany.com
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 38
place à la transparence et à la confiance entre les individus. Car, en soit, Blablacar, Uber, Lyft
ne sont simplement que des outils de mise en relation 2.0 pour un service donné.
3. La recherche d’humanisation dans les déplacements
Le socle sur lequel repose l’économie collaborative est indéniablemnt la recherche
d’humanisation. En sachant que mon voisin travaille au même endroit que moi, qu’il prend lui
aussi sa voiture pour se déplacer, pourquoi ne pas partager sa voiture ou la mienne afin de
n’utiliser qu’une seule voiture et faire sa connaissance ?
Les taxis sont malheureusement victimes de leur mauvaise image, peu locaces, parfois
désagréables, cette image a joué en leur défaveur. A l’inverse, la mobilité 2.0 permet de
rentrer quelque peu dans l’intimité du chauffeur ou « covoitureur » en connaissant son nom à
l’avance.
Mais c’est un phénomène sociétal auquel on assiste : le retour à l’humanisation des relations.
En premier lieu, Internet a tout d’abord été un moyen de partager et chercher des
informations. Puis avec l’ère 2.0, l’interactivité est apparue et Internet est devenu un media
d’interactions où les relations virtuelles se suffisaient à elles-même. Aujourd’hui, elle est
devenue un pont entre la relation virtuelle et la relation « In Real Life ». Blablacar met en
relation des « covoitureurs » avec des « covoiturés ». En fait, les plateformes tel que Blablacar
misent tout sur la recherche de lien social. Dans votre propre profil de « covoitureur », vous
pouvez informer si vous êtres locace, si vous acceptez les animaux, si vous voulez bien
écouter de la musique… Toutes ces informations renforcent la connaissance de l’autre et agit
comme un brise glace lors de la rencontre.
Ce besoin de « rencontre », par opposition au virtuel, s’inscrit donc dans une véritable
tendance de fond. Dans un cadre informel et sans enjeu prédéfini, les individus sont d’autant
plus ouverts et disposés à connaître l’autre.
4. Internet, l’outil virtuel au service de la mobilité
En 1999, on se connectait à l’ADSL pour la première fois via notre ordinateur pour une durée
limitée, aujourd’hui, nous sommes connectés 24H/24 et sur plusieurs objets à la fois
(téléphone, ordinateur, tablette, voiture…) et le tout en seulement 15 ans.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 39
Internet est sans aucun doute l’outil de la « troisième révolution industrielle39 ». Daniel Kaplan,
fondateur et délégué général de la FING (Fondation Internet Nouvelle Génération) nous
confirme que tous les secteurs d’activités ont implémenté le numérique dans leur modèle. Les
acteurs historiques ont bien inscrit le numérique dans leur business mais sans au fond
transformer leur modèle en profondeur. À l’inverse, les startups de l ‘économie collababorative
ont fondé leur modèle sur le numérique comme on peut le constater avec Uber où il est
indispensable de posséder un smartphone pour bénéficier des services proposés.
La montée en puissance des NTIC et des nouvelles formes de sociabilité, s’inscrivant sur le
modèle de Facebook ou Twitter, prouve l’évolution fondamentale des comportements des
individus - smartphones connectés, géolocalisation, paiement en ligne – amène les
entreprises à revoir leur modèle. Surfant sur ces évolutions, certaines entreprises ont compris
l’enjeu de l’utilisation de ces nouvelles technologies. La géolocalisation qui met en contact
chauffeur et client fut une révolution chez Uber, elle répondait à une problématique simple : le
temps d’attente d’un taxi. Bien plus que cela, Uber s’incrémente dans une nouvelle façon de
vivre s’alliant autour de 2 principes : la connectivité et la rapidité. Jeremy Rifkin souligne :
« Les nouveaux acteurs parviennent invariablement à percer en
introduisant des technologies révolutionnaires qui améliorent la
productivité et font baisser les prix de biens et de services
identiques ou substituables, et ils brisent la mainmise monopoliste
sur le marché »40
Pour se rendre compte de la validité de ses propos, il suffit de se prêter au jeu. Pour un même
trajet, le prix est 1,42 et jusqu’à 2 fois inférieurs entre l’utilisation du service Uber et un taxi41.
Avec Uber, on peut à la fois géolocaliser le client mais aussi le chauffeur, ce qui réduit les
coûts liés à la recherche d’un client. La connectivité est un atout majeur dans ce genre
d’entreprises où le modèle business repose essentiellement sur le numérique.
Il est vrai que la consommation collaborative n’aurait été possible sans l’Internet. Cette
économie de l’immatérielle a entrainé une évolution radicale dans les comportements, les
transactions et le mode d’achat des individus. Deux grands éléments ont été remis en
question suite à l’apparition de l’Internet : la notion d’espace et la notion de temps. 39 Titre du livre de Jeremy Rifkin, La troisième révolution industrielle, en référence au changement de paradigme : internet, internet des objets, énergies renouvables, consommation collaborative. 40 p.23 – l.3, La société nouvelle du coût marginal zéro 41 Expérience réalisée le 21 novembre 2014 / Trajet CDG/Houilles, même jour, même heure, même trajet : Coût du trajet UBER =19 euros – Coût du trajet Taxi = 27 euros.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 40
Aujourd’hui, Internet a quelque peu donné le don d’ubiquité aux acheteurs, car connectés,
ceux-ci peuvent être présents aux quatre coins du monde. Sur Internet, il est possible
d’acheter des produits en Pologne en faisant passer son adresse IP par la Grèce tout en
donnant une adresse de facturation en Allemagne et une adresse de livraison en France. La
notion d’espace est complètement modifiée par les nouvelles technologies. Enfin, l’Internet a
modifié l’espace temps, il est possible d’être en relation avec quelqu’un n’importe quand, et
n’importe où.
Mais en quoi Internet a-t-il servi dans la mobilité des individus ? Il existe 3 points essentiels
dans lequel le Web 2.0 est intervenu et a modifié certains comportements :
• Création de communautés : Internet a permis le regroupement d’individus autour d’un
centre d’intérêt ou problématique spécifique, créant ainsi des communautés. Internet a
donné le pouvoir à certaines communautés d’élargir leur influence et regrouper des
individus. Faire partie d’une communauté, c’est partager des normes et des croyances.
! Exemple : la communuté d’autostoppeurs a donné naissance au covoiturage.
• Géolocalisation : une technologie de pointe a apporté un renouveau dans l’économie,
la géolocalisation des individus. Se localiser ou géolocaliser est le corps de la mobilité
de demain.
• Information : Internet a donné accès à de nombreuses informations élargissant le
champs de connaissances des individus. Celui-ci souhaite en connaître davantage sur
la traçabilité des produits ou services auxquels il fait appel. Il n’est plus consommateur
mais prosommateur, il peut faire appel à un service de covoiturage et être lui-même
chauffeur le lendemain. Co-produire, co-créer, co-organiser, le prosommateur devient
acteur.
Dans une interview accordée par Frédéric Mazzella dans La tribune, celui-ci a dit :
« Je suis persuadé que si Internet était apparu en même temps
que la Ford T en 1908, nous ferions du covoiturage depuis 1909 !
Mais il fallait des réseaux connectés puissants, des téléphones
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 41
portables performants, car nous sommes dans la réactivité et la
mobilité.42 »
Internet est l’outil virtuel au service de la mobilité 2.0, il a été accompagné par la suite du
développement des téléphones intelligents ou smartphones qui régissent aujourd’hui le
secteur de la mobilité.
5. Le smartphone, l’une des principales innovations en matière de mobilité
Le smartphone est la deuxième innovation en matière de mobilité. Le smartphone est
l’élément clef de cette évolution technologique car toutes ces innovations sont dûes au
smartphone.
Le smartphone permet de :
• Localiser une borne de rechargement de voiture électrique (ChargeMap) ;
• Localiser une borne de rechargement d’un particulier de voiture électrique
(Plugshare) ;
• Réserver en ligne un service de location de voiture et se la faire livrer (Multicity) ;
• Louer la voiture d’un particulier à proximité ;
• Localiser un chauffeur à proximité (Uber) ;
• Localiser un client à proximité (Djump) ;
• Noter les membres et ainsi alimenter l’e-reputation ;
• Payer les trajets effectués.
Le smartphone est ce que la télécommande est à la télévision, le smartphone est la
télécommande de notre corps.
6. La notion de développement durable
Les pratiques écologiques ne concernent pas toutes les pratiques en matière de
consommation collaborative mais la mise en perspective de ce mode de vie conduit vers une
42 « Qui aujourd'hui a encore les moyens de prendre le train ? », La tribune, propos recueilli par Delphine Cuny.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 42
généralisation de ce concept qui ne demande pas nécessairement d’efforts supplémentaires
de la part de ses adeptes.
En 2009, une voiture partagée remplaçait 15 voitures sur les routes, et les personnes usant de
l’autopartage conduisait beaucoup moins. Le nombre moyen de voitures pour ces mêmes
personnes est passé de 0,47 à 0,2443.
Une réalité consciente ou inconsciente de l’économie du partage est son implication dans le
développement d’un écosystème. Nombreux seront les individus à se déplacer dans l’objectif
de maintenir la Terre comme une terre d’accueil pour les futures générations. On parle de
l’épuisement de certaines ressources naturelles qui rentrent dans la composition de la
construction des automobiles alors, l’autopartage n’est-il pas une pratique qui sera le futur de
nos déplacements ?
En France, l’ancien covoiturage.fr, renommé Blablacar, a estimé avoir économisé l’émission
de 180 000 tonnes de CO2 en 201044, un chiffre qui séduit intuitivement les adeptes mais
aussi les pouvoirs publics. En ce sens, cette nouvelle mobilité apporte des réponses et des
comportements qui visent à réduire l’émission de carbone.
Communauto, une entreprise du Québec, a annoncé avoir réduit de 13 000 tonnes les
émissions de CO2 grâce à son offre de service d’autopartage45.
Paul Hawken, entrepreneur, journaliste, et auteur, a estimé que pour 45 kilogrammes de
produit fabriqué cela créé 1450 kilogrammes de déchets produit. En sachant que 1 voiture sort
de l’usine toutes les minutes et pèse entre 500 kilos et 1 tonne, le calcul est rapidement
alarmant.
43 Ibid 44 Vive la co-révolution, Anne Sophie Novel, chap 1, p.80, l.9 45 A. Warren « If we don’t know how many building are out there, how can we plan cuts in emissions » Click Green.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 43
Synthèse de la première partie :
Dans un temps fait de diktats et de monopoles, la société est aujourd’hui en complète
transformation, elle converge vers un modèle qui semble apporter satisfaction à de
nombreux consommateurs. L’économie numérique et les nouvelles technologies ont
renversé les modèles économiques traditionnels. Hier, nous roulions dans notre
voiture, aujourd’hui, nous roulons dans la voiture d’un inconnu. Cette modification du
comportement des individus est la conséquence du changement de paradigme
économique que la société est en train de vivre.
Le XXem siècle fut le siècle de la révolution industrielle. Les grands acteurs de cette
révolution prônant comme Adam Smith la recherche de son intérêt personnel immédiat
sur le marché n’est aujourd’hui plus une réalité en soi. La théorie économique
développée à l’époque doit aujourd’hui se contraindre aux nouvelles obligations du
marché. L’automobile, emblème de cette révolution et de la propriété privée, devient un
espace de partage dont la possession n’est pas une mais multiple. Il est temps de
« mettre Adam Smith à la retraite ».
Pour résumer, voici ci-dessous une liste des facteurs auxquels s’attachent au mieux
l’agilité des modèles économiques des startups de la mobilité 2.0 et qui bousculent les
aspirations des acteurs traditionnels :
Changement de mentalité : le nouveau paradigme économique donne suite à un new
way of thinking commandité par la crise de 2008.
Confiance : la recherche de confiance.
Coût marginal zéro : nouvelle composition des coûts fixes liés à l’entreprise.
Crise économique : fracture économique et sociale entraînant la perte de confiance.
Démographie : phénomène entraînant la recrudescence de la mobilité des individus.
Développement durable : notion propre au nouveaux modes de déplacement.
Gain financier : les prix entre les nouveaux acteurs de la mobilité sont jusqu’à trois
fois moins chère que les acteurs traditionnels.
Humanisation des déplacements : offre combinant un service et l’opportunité de
créer du lien social.
Internet & Smartphone : nés avec la révolution numérique, Internet et les
smartphones révolutionnent la mobilié (connectivité, géolocalisation).
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 44
PARTIE 2 : ÉTUDE EMPIRIQUE AUPRÈS D’ACTEURS DE LA MOBILITÉ 2.0
CHAPITRE 1�: Pr�sentation du dispositif empirique
1. Modalit�s de d�ploiement retenues
Pour partir à la rencontre des différents intervenants, il fut important de mettre en place une
stratégie de prise de contact. L’identification des intervenants a été possible grâce à l’analyse
faite au préalable des acteurs de la mobilité 2.0. Une quarantaine d’acteurs ont été identifiés
pour une quarantaine de demandes d’interview. Linkedin, le réseau social professionnel, a été
l’outil principal de prise de contact. 8 interviews ont été réalisées dans un espace temps de 1,5
mois.
2. Justification de la méthodologie de la recherche
Après avoir dressé un portrait de l’économie collaborative dans le secteur de la mobilité et de
ses fondements à travers les études académiques et professionnelles, cette « enquête »
terrain doit permettre de collecter des données fiables auprès des professionnels du secteur.
Ces données permettront de dresser un portrait actualisé des facteurs de réussite des
entrepreneurs d’aujourd’hui dans ce secteur.
Ces recherches ont pour objectif de répondre à la question suivante : sur quoi repose le
business model de ces startups et quelle est leur véritable valeur ajoutée face aux acteurs
traditionnels ?
3. Formes des entretiens
L’étude repose sur des entretiens individuels semi-directifs, permettant de collecter des
données qualitatives. La problématique mise en exergue, cherche à comprendre de quelles
manières les startups de l’économie collaborative opérant sur le secteur du transport de
passager ont bousculé les acteurs traditionnels. Le guide d’entretien est conçu de manière à
collecter les appréciations et les avis argumentés des cibles interrogées. Les questions
ouvertes permettront aux interviewés d’exprimer leurs opinions personnelles, tandis que les
suggestions permettront de les confronter aux différentes hypothèses soulevées dans les
sources académiques et professionnelles. Le rôle des acteurs étant différent, le guide
d’entretien est modifié et adapté pour chaque intervenant.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 45
4. Echantillonnage
Afin de répondre précisément à la problématique de ce mémoire et y apporter une réponse
crédible, une rencontre avec les différents acteurs impliqués dans la mobilité 2.0 est
nécessaire. Ainsi, au cours de cette étape exploratoire, 8 experts de 8 entreprises ou
organisations distinctes ont été interrogés : le CEO de Heetch, l’ancien fondateur de Cityzen
Car racheté par Buzzcar, le fondateur et CEO de Citygoo, le service de covoiturage urbain, la
présidente de vadrouille-covoiturage...
Ces profils d’experts sont très variés, ils couvrent des secteurs du covoiturage mais aussi de
l’autopartage et apportent ainsi à cette étude une vraie richesse de points de vue.
Le dispositif empirique employé ne permet de généraliser les réponses apportées par les
professionnels. Cependant, il permet de discuter des théories académiques et éventuellement
apporter des éléments de réponses pertinents dans des secteurs d’activités précis.
5. Les th�matiques abord�es
Aux cours des entretiens, les thèmes abordées étaient les suivants : l’économie collaborative,
les acteurs traditionnels de la mobilité, la genèse de leurs projets, leurs constatations, leurs
stratégies, leurs modèles économiques, l’avenir de l’économie collaborative, leurs rôles etc.…
Les personnes interrogées :
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 46
CHAPITRE 2�: Les acteurs du transports collaboratifs, visions et opportunit�s
La lecture des différents entretiens révèle une véritable démocratisation de l’économie
collaborative dans le secteur des transports. L’essor de cette nouvelle économie est le résultat
d’entrepreneurs jeunes et dynamiques, soucieux d’apporter des valeurs communautaires
authentiques face la déliquescence programmée de l’économie traditionnelle. Un vent
nouveau souffle sur le secteur des transports ; l’économie de partage est en train de
révolutionner la mobilité, comme l’atteste les différents entrepreneurs interviewés.
A. L’économie collaborative, un nouveau paradigme économique en plein essor dans le
secteur des transports
La sharing economy a donné naissance à une vision objective des ressources et des besoins
de notre planète. Pourquoi ne pas voyager avec la voiture de mon voisin qui se déplace au
même endroit que moi ? Pourquoi ne pas louer la voiture de ma voisine qui ne l’utilise pas ?
L’utilisation des ressources est la problématique phare de l’économie collaborative, et cette
vision a permis le développement de nouveaux business model, renversant la vision
traditionnelle.
1. Au départ, des constats simples
La plupart des entreprises interrogées répondent à un besoin formulé personnellement mais
qui s’est vu être le besoin de milliers voire de millions de personnes. La mobilité traditionnelle
ne répondait pas à toutes les aspirations et est restée figée dans une offre unique et obsolète.
La logique oligopolistique des acteurs traditionnels a touché à sa fin quand l’économie
collaborative et ses acteurs ont mis en relief l’opportunité donnée par des millions de
personnes de partager leur automobile.
Dans la plupart des cas étudiés, l’histoire des startups est l’expression d’un besoin
personnelle et d’une problématique récurrente : comment puis-je me déplacer à moindre
coût ? Comment puis-je me déplacer d’un point A à un point B dans un cadre convivial, peu
onéreux et simple ?
Des prix trop élevés
Frédéric Mazella, dans cette logique, a développé son offre de covoiturage Blablacar. À
l’origine, il souhaitait se rendre en Normandie, compte tenu des prix pratiqués par le réseau
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 47
ferroviaire, il était impensable de faire appel à ce service surtout qu’il ne comprennait pas
pourquoi autant de gens circulaient seul dans leur automobile. Cet espace inoccupé était une
véritable perte, mais une véritable opportunité pour les entrepreneurs du XXIem siècle.
Les prix pratiqués par les acteurs traditionnels, que ce soit les taxis, les trains ou même les
loueurs de camping-car, ont été l’élément prescripteur de la recherche de ce que l’on
nommera le PPAP – prix prêt à payer – par les individus pour se déplacer. La plupart est
surpris par les prix pratiqués par les acteurs traditionnels de la mobilité, alors qu’il existe, peut-
être à côté de chez eux, une personne qui sera tout à fait prédisposée à louer son véhicule ou
un trajet à un tarif correct, le PPAP :
« J’ai été supris par les prix pratiqués qui sont de 200 à 300 euros
jours pour louer un camping-car en Grande-Bretagne, et je me
dis : il y a forcément un anglais qui serait content de louer son
véhicule s’il ne l’utilise pas, à un tarif correct ! »
Le PPAP – prix prêt à payer – est une formule qui met en perspective la prédisposition des
individus à payer un certain prix. Suite à la crise de confiance et les consommateurs ayant de
plus en plus conscience des dérivés orchestrés par les grandes firmes, le consommateur tend
vers une évaluation propre des biens qu’ils achètent ou consomment. Pour exemple, les
locavores comme vu précédemment, sont prêts à payer plus cher leur nourriture dans un
cadre spécifique : ils savent d’où viennent les produits qu’ils vont consommer. La notion de
PPAP s’exprime donc dans un sens ou dans un autre, c’est à dire un prix prêt à payer inférieur
ou supérieur au prix en vigueur. Ce constat est déterminant dans les nouveaux acteurs de la
mobilité 2.0.
Les embouteillages, bête noire des automobilistes
Logiquement, plus il y a de voitures, plus il y a de chances de créer des embouteillages, plus il
est probable de perdre du temps. Ces constatations, que l’on considère tous comme un
problème évident, certaines startups se sont construites autour de ce phénomène entre
autres :
« Ce phénomène d’embouteillage n’est pas l’objectif direct à court
terme mais c’est qu’il y ait moins de personnes qui soient coincées
dans les embouteillages toutes seules pour aller dans 80% des
cas, à la même destination… »
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 48
« Avez-vous déjà réussi à avoir un taxi la nuit sur Paris ? »,
Constation faite, Heetch se lance sur le créneau de la nuit et propose à des particuliers de
raccompagner des jeunes après leur soirée, car la nuit, l’offre de taxis est très limitée.
Les startups de la mobilité 2.0 répondent à des aspirations simples et récurrentes constatées
chez de nombreuses personnes : des espaces rentables inoccupés, des problèmes de la vie
quotidienne, des offres excessives, des observations, des constations etc…
Une vision réaliste des choses dans l’objectif de répondre à des problématiques ont permis
l’apparition de ces startups.
2. Une opportunité business favorisée par le déclin des entreprises traditionnelles
du transport et de l’avènement de la consommation collaborative
Les différentes actions menées par les acteurs traditionnels ne peuvent arrêter la déferlante
de nouveaux acteurs de la mobilité 2.0.
Pour répondre à la nouvelle concurrence exprimée par les nouveaux modes de déplacement,
iDTGV, filiale de SNCF, a mis en place la carte illimité, IDTGVMAX, permettant de prendre le
train en illimité à partir de 59,99 € par mois. Cependant, la carte illimité était limitée, et les
trajets ne pouvaient partir ou arriver seulement de la Gare de Lyon ou Montparnasse. De plus,
les 10 000 abonnées à la carte sont un nombre largement supérieur à l’offre de places
disponibles. Une offre qui ne fut pas en adéquation avec l’espérance des abonnés.
Pour beaucoup, le taxi semble être une disposition financière non négligeable ainsi qu’un
moyen de transport peu agréable et avec de nombreux problèmes : pas de paiement par carte
bancaire, tarifs excessifs, présence limitée…
« Au départ j’étais client UBER car il m’arrivait toujours des
mésaventures avec les taxis… »
De même, le car n’est pas le moyen de transport le plus utilisé, son offre de trajet étant limité
et peu convivial :
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 49
« Le car, il n’y en a pas beaucoup, c’est lent, et puis c’est pas
forcément l’expérience urbaine préférée. Il y a des gens qui
trouvent que le covoiturage est plus comfortable que le car.»
Les nouvelles entreprises de la mobilité 2.0 répondent à l’inefficacité des acteurs traditionnels
qui peuvent, à l’avenir, avoir un impact sur les transports en commun :
« Ça peut avoir, c’est un peu tôt pour le dire, un impact sur les
transports en communs surtout sur les réseaux d’autobus. Il y a
parfois des lignes de bus qui sont totalement vides, ou avec 1
personne à bord, c’est totalement inefficace, en terme de coûts et
de pollution. »
Aujourd’hui, les voitures partagées peuvent circuler sur les voies réservées aux bus et aux
taxis. Alors que le covoiturage est souvent vu comme un concurrent aus transports en
commun, il serait plus évident de la considérer comme complémentaire.
L’économie collaborative est une opportunité formidable pour les entrepreneurs de nos jours,
elle est ce à quoi les gens aspirent et comme le précise Teddy Pellerin :
« La seule chose que je sais, c’est que le monde a pris cette
direction là (du nouveau paradigme économique), c’est sûr et
certain. Je préfère y aller et voir comment ça se passe au lieu
d’être en dehors du jeu. »
L’opportunité offerte par l’économie collaborative répond à une nouvelle conception de l’offre
et de la demande par les ressources et les besoins. L’identification des nouveaux modes de
consommation, comme l’apparition du smartphone comme préalable à la mobilité 2.0, définit
de nouveaux modèles économiques basés avant tout sur les attentes des clients.
Les entreprises traditionnelles de la mobilité ont « beau crier et
faire des manifestations, elles ne pourront rien faire contre le
courant. Il va se passer la même chose pour les constructeurs
automobiles, il s’est passé la même chose pour la musique. »
À l’image de ce schéma (cf annexe 4) qui met en perspective la différence opérée par les
nouveaux acteurs :
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 50
Annexe 4 : « Something interesting is happening », infographie wetpaint.
De manière générale, les nouveaux modes de transports sont plus plébiscités par les individus
à la place des acteurs traditionnels tels que les taxis, les trains, les cars voire même les bus et
les transports en commun.
3. Un vide législatif favorisant l’activité des startups
Une constation univoque a pu être mis en relief. En effet, les différents acteurs de la mobilité
2.0 jouissent d’un vide législatif qui leur permet légalement d’opérer leurs activités. L’économie
collaborative est un concept nouveau qui n’a pas encore été encadré par des lois fixes et
claires. En témoigne les différents procès orchestrés contre Uber Pop.
Teddy Pellerin, CEO Heetch, a mis en relief 3 niveaux de légalité :
• Niveau 1 : comme le covoiturage ou l’échange de maisons qui sont l’utilisation normale
des ressources.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 51
• Niveau 2 : Heetch, Drivy, qui est la location d’un bien propre dans l’objectif de le
rembourser à une certaine hauteur.
• Niveau 3 : pour exemple, c’est comme si un particulier achetait 10 voitures et les
louaient sur une plateforme d’autopartage. C’est ici la limite de l’économie
collaborative : « c’est utiliser l’économie collaborative pour faire péter toutes les lois
sociales, tu travailles sans aucune loi. Il y a des lois qui permettent de réglementer le
marché du travail, notamment d’avoir la protection sociale ou d’avoir un certain
nombres de règles pour ne pas travailler 15h d’affilées, parce que ca peut être
dangereux. Il n’y a aucune règle, donc tu arrives et tu permets à quelqu'un de conduire
d’autres personnes, si possible pendant 24h d’affilées »
La plupart des acteurs du secteur des« taxis P2P » (Peer-to-Peer) respecte une limite de
rémunération des chauffeurs dans la limite du coût d’une voiture dans l’année. Cependant, les
limites imposées ne sont pas toujours vérifiables. La réglementation doit sans aucun doute
évoluer pour éviter les dérives que permettent l’économie collaborative. Cependant, le
problème n’est pas simplement politico-économique, il est aussi culturel. Dans d’autre pays,
les différentes formes de mobilité ont été réglementées :
« L’état pourrait taxer les chauffeurs. Aux États-Unis, c’est déjà le
cas avec Lyft, Uber, sur la feuille d’imposition à chaque fois que tu
fais une course, c’est déclaré. »
La réglementation est encore floue, il est ainsi plus facile pour les acteurs de la mobilité 2.0
d’exercer leurs activités. Le monde politique devrait s’emparer du sujet, inventer régulation et
fiscalité adaptées, et s’interroger sur les dispositions à prendre pour favoriser une
redistribution des revenus issus de l’économie du partage.
« Pour certains c’était devenu un métier à part entière sans
déclarer aucun revenu à l’état. Et ils s’en sortaient plutôt pas mal :
4500 euros par mois, hors commission. »
Dans ce contexte, la compagnie Uber a été condamnée par le tribunal correctionnel de Paris à
100 000 euros d’amende, les juges considérant que le service Uber Pop ne pouvait être
considéré comme du covoiturage car la tarification « ne correspond absolument pas à un
partage de frais mais s'apparente bien au paiement d'une course ».
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 52
Ces opportunités législatives, allant jusqu’à l’absence d’impôts sur les sociétés, sont un
moteur de l’économie collaborative. Le système législatif ne sait comment évaluer le bien privé
à une valeur commune. L’économie collaborative apporte une problématique de fond qui
pourrait peut-être remettre en question le système économique dans son ensemble.
4. Un schéma décentralisé pour un impact à grande échelle
La notion de schéma décentralisé est une des valeurs fondamentales de l’économie
collaborative. Car finalement, que possèdent-ils ? Que possèdent les nouveaux acteurs de la
mobilité 2.0 ? Quels sont leurs coûts de fonctionnement ? La réponse fait frissonner les
grands acteurs traditionnels.
La première partie de la réponse vient dans le fait que les acteurs de la mobilité 2.0 ne sont
pas prestataires mais mandataires. Et c’est de là que vient toute la différence avec les acteurs
traditionnels. Heetch, Blablacar, Je loue mon camping car, We drive, Buzzcar sont toutes des
plateformes web. Aucun d’entre eux ne possèdent des automobiles ou des concessions, ils
usent du numérique pour faire valoir leur service. Mais plus intéressant encore, aucun frais ne
sont engagés concernant l’entretien des véhicules car ce n’est par leur bien mais le nôtre :
« Les coûts d'achat, les efforts d'entretien des véhicules et les
tracas de recherche de places de stationnement sont
mutualisés. »
La mutualisation des ressources est un re-nouveau dans l’économie. Les acteurs traditionnels
usent de leurs mains d’œuvre, souvent coûteuses, pour arriver à leur fin : l’acte d’achat.
Temps imparti pour les commerciaux, coûts d’entretien du véhicule et réparations, tous ces
coûts sont calculés et amputés au chiffre d’affaires.
Prenons pour exemple la startup Je Loue Mon Calmping Car qui a levé, le 10 mars 2015, 550
000 euros auprès d’investisseurs privés dont Frédéric Mazzella, Stéphane Romanyszyn et
Arnaud Lecherf. Qui mieux que le propriétaire du camping-car peut réaliser la visite de sa
propre résidence secondaire ?
« Le propriétaire va faire l’état des lieux beaucoup mieux qu’un
professionnel, sans généraliser bien évidemment. La prise en
main dure en moyenne entre 1h et 2h chez nous, chez un loueur
pro, c’est de 30 minutes à 1 heure. Parce que chaque minute est
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 53
comptée chez un loueur donc il doit faire vite. En fait, l’expérience
utilisateur sera meilleure chez nous que chez un professionnel. »
La logique de décentralisation du schéma de fonctionnement des startups définit un nouveau
modèle économique qui met tout à la charge de l’intéressé. Celui-ci, ayant un lien de propriété
avec son automobile, tous les frais d’entretiens ou de réparations sont à sa charge. Quand les
acteurs traditionnels sont dans une logique de rentabilité de chaque trajet, les startups de la
mobilité 2.0 sont dans une logique de rentabilité de chaque client en étant simplement des
plateformes de mise en relation pour un besoin donné sans se préoccuper des charges
externes.
L’économie collaborative se base finalement sur ce que l’on possède déjà, sur ce que
l’économie traditionnelle nous a fourni. L’utilisation de nos ressources est la finalité des
nouveaux acteurs.
5. Une situation « Win-Win-Win », saint-graal de la mobilité 2.0
La mobilité 2.0 opère dans un cercle vertueux qui engage 3 entités. Tout d’abord, nous allons
avoir l’entité X qui cherche à se déplacer d’un point A à un point B, une deuxième entité Y qui
cherche à amortir le coût de son trajet et enfin une plateforme de mise en relation des 2
premières entités Z : l’équation est simple, X + Y = Z.
La situation « Win-Win » nous est expliqué par Patrick Robinson Clough, CEO Citygoo :
1. Permettre au passager de se déplacer à un prix convenable (PPAP);
2. Pour les conducteurs, offrir une indemnité financière réellement motivante.
Une des motivations principales de ce genre de réseau de transport est principalement
l’indemnité financière qui est perçue par les covoitureurs/chauffeurs.
La troisième composante du « Win-Win-Win » est en effet la startup en question qui se
satisfera d’une rentabilité financière suffisante. Chaque parti trouve son intérêt, qu’il soit
financier ou pratique. Il y a une synergie entre demandeur, offreur et mandataire.
En tant que mandataire d’une offre de service, les startups de la mobilité 2.0 sont des
plateformes de mise en relation. Les modèles économiques reposent généralement sur des
commissions prélevées sur chaque trajet à hauteur variable. Les commissions varient entre
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 54
10% à 30% du prix. Une startup de l’économie collaborative ne pourra être rentable que
lorsqu’elle atteindra la masse critique comme nous avions pu le voir dans la première partie.
La vraie problématique peut venir des commissions prélevées par les acteurs. Beaucoup de
startups ont évalué leurs commissions plus ou moins au même niveau mais d’autres ont des
commissions plus élevées :
« Au lancement de Uber pop, la rémunération au km était de 1,43
euro maintenant, elle n’est plus que de 0,93 euro (hors majoration
de prix). De ce fait, c’est moins rentable qu’avant mais on s’en sort
tout de même si les courses s’enchainent. Le seul bémol à cette
rémunération est sans doute la commission excessive de Uber :
26% »
À l’avenir, à l’image du prix psychologique, il sera peut-être intéressant d’étudier la
commission psychologique, nerf de la guerre entre les différents concurrents.
B. La flexibilité des acteurs, pierre angulaire du secteur des transports collaboratifs
Les transports collaboratifs se sont montés sur des modèles alliant une grande flexibilité à la
demande et à l’offre mais aussi aux ressources et besoins du marché. Cette synergie opérée
par les nouveaux acteurs propose une nouvelle façon d’appréhender le marché.
1. Une perméabilité permanente entre l’offre et la demande
Dans un monde régi par l’offre et la demande (la pierre angulaire de l’économie de marché),
les acteurs traditionnels se sont focalisés sur leur propre offre sans se soucier de l’évolution
de la demande. Inscrit dans une logique traditionnelle de réponse à un besoin de
déplacement, ils sont restés sourds aux évolutions du marché.
Dans ce contexte, on pouvait identifier des pics de demande en déplacement sans forcément
constater une offre pour y répondre. Heetch, le taxi P2P, s’est positionné sur le secteur de la
nuit, son offre est seulement disponible la nuit de 20 h à 6 h. Ayant observé des pics de
demande la nuit, notamment le week-end après les sorties de boîtes, il a focalisé son offre sur
cette cible pour aujourd’hui être un acteur à part entière :
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 55
« La demande varie beaucoup. Faible en semaine, des pics de
demande vont clairement exploser les soirs de WE. On se
retrouve alors avec quelques problèmes de répartition entre l’offre
et la demande. Ainsi, il y a des pics de demande qui ne sont pas
absorbés, tu as donc un effet d’aubaine. »
C’est la construction d’une économie intelligente autour d’effets d’aubaine visibles et
calculables auxquels les acteurs traditionnels ne répondent pas. Heetch répond à la
problématique d’adaptabilité de l’offre à la demande de déplacements la nuit, même si ces
pics de demande pourrait être contenus par l’ouverture des métros la nuit, le marché est très
réceptif à l’offre proposée.
La mobilité 2.0 est la réadaption de l’offre à la demande à l’image de Citygoo, acteur du
covoiturage urbain. Il étend son champs d’action au niveau des banlieues. Il s’attaque à un
double marché : l’offre de déplacement proposée par les banlieues qui est parfois limitée, et la
demande en déplacement, sachant qu’il est peu probable de mettre en place des transports
en commun dans des communes excentrées ou trop peu nombreuses. Citygoo envisage
d’apporter une solution viable :
« C’est impossible de proposer un service de transport en
commun satisfaisant en petite ou grande banlieue, d’où l’intérêt de
Citygoo, qui permet de répondre à ces contraintes et ces
absences de maillages transversaux notamment de banlieue à
banlieue »
Citygoo est une solution de transport qui apporte une réponse en partie aux usagers des
transports en communs sachant que les individus vont dans 80 % des cas dans la même
direction.
On constate que les nouveaux acteurs de la mobilité répondent à la demande que les acteurs
traditionnels ne canalisent pas, mais d’autre part, ils ont créé une offre qui renverse les lois
économiques. Ils donnent la possibilité aux demandeurs d’être eux mêmes des offreurs. Un
covoituré peut être un covoitureur et réciproquement, un covoitureur peut être un covoituré.
Selon leurs besoins, un individu peut être un offreur de trajet ou un demandeur de trajet, les
startups de la mobilité 2.0 ouvrent la demande à l’offre et l’offre à la demande. C’est un
schéma qui bouleverse les acteurs traditionnels, ceux-ci ayant une offre connue et une
demande variable. Les nouveaux acteurs ont une offre variable et une demande variable.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 56
Jouant sur la variabilité des deux indicateurs, ils opérent leurs activités et bousculent l’offre et
la demande.
2. Conjointement, une adéquation entre ressources et besoins
Hormis l’adaptabilité croisée de l’offre et de la demande exprimée par les nouveaux acteurs,
ils répondent à une utilisation combinée des ressources disponibles et besoins identifiés.
Selon Patrick Robinson Clough, il y aurait plus de 8 millions de trajets par jour en Ile-de-
France. Selon lui, c’est une ressource inexploitée d’autant plus que de nombreuses personnes
se plaignent aujourd’hui des transports en commun. Dans cette optique, Citygoo offre une
adéquation entre ressources et besoins en proposant un service de covoiturage en banlieue :
« Il y a plus de 8 millions de trajets quotidiens par jour en Ile-de-
France, en banlieues, qui sont effectués sans passagers à bord,
tous les jours : une ressource inexploitée »
L’opportunité offerte par cette ressource est d’autant plus grandissante quand on constate
que :
« 95 % des voitures n’ont aucun passager à bord dans les
grandes métropoles de France »
Ces startups de la mobilité 2.0 ne réfléchissent pas seulement en termes d’offre et de
demande, conjointement à ces données, elles allient ressources et besoins, deux données qui
font de leur service, un service qui répond à l’état du marché.
Offre Ressource Demande Besoin
- Transports en
commun
- Automobiles
- Autres
8 millions de trajets
par jour en Ile-de-
France
95% des
d’automobiles sont
sans passagers à
bord
Déplacement d’un
point A à un point B
Déplacement d’un
point A à un point B
Porte à porte
Rapidité, fluidité,
facilité de paiement
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 57
La ressource étant calculable et le besoin identifié, les startups de la mobilité 2.0 n’avaient
plus qu’à poser bagages et s’installer dans le paysage des transports.
3. Une adaptation aux nouvelles aspirations de la demande : sécurité,
confiance et proximité
Comme nous avons pu le voir dans la première partie, les habitudes de consommation ont
évolué. La mobilité est le secteur le plus financé dans l’économie collaborative et cet
indicateur est une constatation sans précédent de l’ampleur du phénomène. Consommer le
déplacement autrement, est-ce possible ? Les nouvelles aspirations des consommateurs ont-
elles joué un rôle dans l’évolution des habitudes de consommation ? On constate que le
consommateur tend vers de nouvelles priorités.
Aujourd’hui, le déplacement doit être plus précis, plus efficace, ce qui a été rendu possible
grâce à Internet et aux smartphones. Avant, on agitait le bras à la recherche d’un taxi.
Aujourd’hui on sort notre smartphone et on commande en quelques clics. Évidemment, la
révolution numérique a bouleversé nos habitudes de consommation mais d’autres facteurs
rentrent en jeu.
De crise économique en crise économique, les habitudes de consommation diffèrent. La crise
de 2008 a créé une perte de confiance notable en l’économie. Elle est à la croisée des
paradigmes économiques mais surtout aux changements de mentalité.
Le changement de mentalité a impliqué une nouvelle vision, une vision plus soucieuse et
craintive. Grâce à l’étude empirique, on constate que les nouveaux acteurs de la mobilité
répondent à un besoin : la recherche consciente ou inconsciente de sécurité.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 58
Sur n’importe laquelle des plateformes, une fiche d’identité
est consultable avant même d’avoir effectué son trajet. Ces
fiches profils sont des mines d’informations : prénom, âge,
voiture etc… Tout est disponible, il existe une véritable
transparence d’identité que ce soit pour le chauffeur que
pour le passager. Ainsi, on accède à ce que l’on nomme
communément l’e-reputation. Chaque chauffeur est noté et
évalué par ces précédents clients ce qui permet de définir la
qualité du service rendu. Un chauffeur mal noté sera exclu
de la communauté. Ci-joint, une fiche profil, relevé au
hasard, d’un covoitureur. Plusieurs informations sont
indiquées afin de laisser aux passagers la possibilité d’auto-
évaluer le conducteur.
Ces systèmes créent une relation de confiance par
anticipation entre chauffeur et passager qui n’existait pas
avant :
« Tu as l’impression que ton chauffeur te ressemble, alors que
dans un taxi, c’est l’’image de l’homme froid. Tu peux payer en
liquide, en carte, tu peux annuler, il n’y a pas de frais d’annulation.
Les drivers sont beaucoup plus permissifs. Ce chauffeur, c’est toi
en fait. »
Ce principe d’auto-évaluation et d’e-reputation permet aux consommateurs d’évaluer eux-
mêmes le taux de sécurité de leur trajet. Cette notion de sécurité est dans la continuité de la
recherche de confiance perdue. C’est un point essentiel dans la construction du nouveau
paradigme économique. Cet objectif de transparence est très plébicité par les nouveaux
acteurs.
« Je pense que tu as plus de sécurité sur des systèmes comme ça
de l’économie collaborative que sur d’autres systèmes. Tu sais où
tu mets les pieds, tu n’es pas dans la voiture d’un inconnu, tu es
dans la voiture d’une personne qui est clairement identifiée par
une plateforme où, nous, on a son permis, sa carte grise, son
assurance, on sait qui c’est, on voit ses trajets en temps réel, on
voit où il passe, tu sais à quelle heure, tu as tout, tu as toutes les
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 59
informations. De même pour un passager, tu connais sa
connexion sur facebook, tu as son numéro de téléphone, tu as sa
carte bancaire. Le risque de danger est très faible. »
On se pose alors la question : et si les taxis opéraient un tournant numérique et mettaient des
fiches profils consultables, deviendraient-ils un concurrent ?
« Bien sûr, il existe un faux débat à propos des taxis, considérant
Uber comme un conccurrent déloyal. Les taxis se trompent de
guerre, ils doivent se mettre à niveau pour répondre aux
aspirations de la demande. La demande a évolué, l’offre ne peut
rester la même. »
La système de covoiturage est une évolution de l’auto-stop. Objectivement, l’auto-stop pose
un problème de destination et subjectivement, il pose un problème quant à la personne que
nous allons emmener, qui est-elle ? Les startups de la mobilité 2.0 apportent une réponse
objective à ces élements : elles sécurisent le voyage.
« L’auto-stop pose un problème, c’est que les gens ils ne savent
pas où veut aller le passager, il y a des bonnes chances que vous
n’alliez pas dans la même direction. Surtout dans une métropole.
Et le deuxième aspect, les gens vont être inquiets de savoir qui est
cette personne qui fait du stop. Du coup, la nécessité de
sécuriser. »
Hormis la sécurité et la confiance retrouvées dans ce moyen de transport, la proximité
permise par la géolocalisation permet à ses acteurs 2.0 de proposer un service à forte valeur
ajoutée. La capacité à mettre en relation un chauffeur et un demandeur est quasiment
instantanée.
4. La notion de temps réel et de fléxibilité des nouveaux acteurs
Le prix reste l’élément principal de l’acquisition de clients. Cependant, une notion en
adéquation avec l’évolution numérique domine le secteur, il est quasiment toujours possible
d’avoir recours à un service des acteurs de la mobilité 2.0, ils sont pour la plupart disponibles
24h/24 7/7 :
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 60
« Le premier élément c’est le prix, deuxièmement c’est la fléxibilité,
parce qu’un loueur pro va louer du mardi au samedi au
éventuellement du lundi au vendredi. Jamais du mercredi jusqu’au
jeudi prochain. Nous, on dispose d’une énorme fléxibilité. »
La flexibilité opérée par les nouveaux acteurs n’a été possible que grâce à l’évolution
numérique. Elle bouscule de manière fondamentale les dispositions des acteurs traditionnels
et par la même définit le succès de ces plateformes collaboratives:
« La diversité d'utilisation, donc de besoins sur des créneaux
horaires différents selon les membres, est la clé du succès d'un tel
système. »
Dans l’espace temps, les acteurs de la mobilité 2.0 ont une infinie ressource qui les
avantagent. D’autres facettes importantes de cette nouvelle économie de la mobilité sont à
mettre en valeur :
- diffusion de l’information de façon anticipée: ils participent à la création d’un réseau
local ou global de transport par la diffusion à l’avance des informations concernant un
déplacement ou concernant la disponibilité d’un moyen de transport.
- création de lien par anticipation : la mise en ligne des profils crée un lien d’affection
de proximité post rencontre.
- notion de temps réel : avec les applications tels que Uber et Heetch, la notion de
temps réel est indispensable pour assurer la qualité de leur service. Ils opèrent leur
service en fonction de l’offre présente sur le marché, c’est-à-dire leur flotte de véhicule
qui est géolocalisable via un smartphone.
La notion de temps réel couplée à la flexibilité propose une nouvelle façon de se déplacer et
d’approcher la mobilité dans le temps.
5. La réponse à un besoin par une proposition de service à forte valeur
ajoutée
Dans la plupart des cas, chacun des acteurs souhaite répondre à un besoin par la mise en
place d’une véritable valeur ajoutée de leur service.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 61
« On se définit comme une appli qui permet aux jeunes de mieux
sortir la nuit, on ne se définit pas simplement comme un
transporteur, même pas du tout. On se définit comme une
application qui permet de mettre en relation des particuliers pour
partager des trajets la nuit »
Finalement, la façon de voir le transport non plus comme une commodité mais comme un
moment de partage est une véritble évolution des mentalités. Aujourd’hui, il est est clair que
nous considérons le temps de voyage comme une perte de temps. Et si ces nouveaux acteurs
opéraient un changement de mentalité et voyaient à travers le déplacement une composante
intégrante d’une sortie par la proposition d’un service à haute valeur ajoutée.
« Ça nous est déjà arrivé qu’il y ait des commentaires à la fin du
trajet, en mode « Trop cool, le meilleur moment de ma soirée, il
était dans la voiture ». C’est pas le but, mais on veut qu’il y ait ce
côté là pour s’intégrer dans la soirée et y contribuer. Pas voir le
transport comme une simple commodité, mais comme un des
moments qui est aussi important de la soirée. »
Dans un premier cas, l’indemnité financière proposée par les différentes plateformes est
intéressante et peut apparaître comme une source de revenu dans l’objectif de pallier aux
différentes dépenses émises par le fait de posséder une voiture. La valeur ajoutée de ce mode
de déplacement vient aussi du côté du covoitureur/chauffeur qui touche lui une indemnité
financière intéressante. On revient dans une certaine mesure à la situation de « Win-Win-
Win ».
C. Une vision inédite du schéma entrepreneurial par le prisme du capital social
L’optique de développement de ces startups ne passe pas simplement par une nouvelle
analyse des tendances mais aussi par l’application d’une vision propre au re-nouveau de
l’économie.
1. Le capital social, une nouvelle composante indispensable
Jeremy Rifkin parlait dans son livre, La société du coût marginal zéro, de capital financier
versus capital social qui pourrait faire référence plus généralement au capitalisme versus
l’économie collaborative. Le capital social est une nouvelle composante du schéma d’une
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 62
entreprise, on pourrait parler d’entreprise sociale. La génération d’Internet a défini une
nouvelle valeur : le droit d’être inclus. Cette notion a bousculé l’architecture des entreprises.
En effet, le capital social est la source de deux éléments :
- le renversement de la priorité hiérarchique,
- l’humain au centre des activités.
Renversement de la priorité hiérachique
C’est peut-être le renversement de priorité le plus notable entre les entreprises traditionnelles
et les startups de la mobilité 2.0. D’un modèle pyramidal qui préconisait le bien-être des
actionnaires, des salariés puis des clients, on s’interroge aujourd’hui avant tout de la
satisfaction des clients, celui des salariés, puis celui des actionnaires.
Prisme des priorités des acteurs traditionnels et des nouveaux acteurs :
Priorités des acteurs traditionnelles Priorités des acteurs 2.0
La priorité excercée par les nouveaux acteurs vient en complément des aspirations des
consommateurs : le sentiment d’être inclus et non exclus des activités de l’entreprise est
devenu primordial.
« Avoir le meilleur service, ok, le plus important maintenant c’est
comment tu traites tes clients, c’est très important. »
Cette inversion des priorités rentre dans la nouvelle conception du marché définie par
l’économie collaborative. Comme Laura Wagner nous le confie, les valeurs de Blablacar sont
primordiales, l’une d’elles reprend la notion du « client roi » :
Actionnaires+
Salariés+
Clients+
Clients+
Salariés+
Actionnaires+
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 63
« ‘Member is the boss’, les membres sont les boss, les clients sont
rois, pourquoi est-ce qu’on dit ça ? Parce qu’on écoute nos
membres, on a une équipe relation membre qui répond à 100 %
des messages de la communauté. On répond, c’est comme ça
qu’on améliore le concept. »
L’humain au centre des activités
Effectivement, la principale raison de l’utilisation du covoiturage ou de l’autopartage est la
recherche du gain financier comme l’ont prouvé les différentes études et interviews, mais il est
clair que beaucoup d’entre nous voulons développer une nouvelle façon de se déplacer.
Dans une certaine mesure, quand on sait que la recherche de sociabilité est le premier besoin
en tant qu’humain, on se rend compte que les startups de la mobilité 2.0 répondent à des
aspirations humaines fortes. La recherche de contact et de lien social seraient des
aspects/motivations que nous recherchons :
« Les barrières sociales tombent, et tu permets à des gens qui ne
se connaissent pas forcément de passer un bon moment
ensemble dans la voiture et de créer vraiment des liens. »
Certaines de ces startups ont pour ambition de remettre l’humain au centre des
préoccupations :
« C’est créer tout plein de choses humaines, du lien social. Des
discussions, de l’ouverture à l’autre, de l’optimisme, on a
beaucoup de feedback, ça redonne foi en l’humain. Ce côté
entraide etc… »
Les startups de la mobilité 2.0 ont un rôle social qu’ils usent ou pas dans leur communication
mais qui est existant :
« On a notamment beaucoup de conducteur de banlieues, et des
passagères du XVIeme pour le cliché. Et tu arrives à faire en sorte
que dans cette voiture ils parlent et ça se passent super bien, je
trouve ça super intéressant. On a un rôle social, et peut-être que
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 64
dans 5 ans, les gens se parleront dans le métro. On a un rôle
social si on devient gros. »
2. Le profil de ses entrepreneurs sociaux : les acteurs du changement
Au fil des interviews, force est de constater qu’un véritable mouvement de fond est en train de
naître. Il apparaît primordial de le mettre en valeur car il en est peut-être qu’à ses débuts mais
pourrait à l’avenir être un mouvement qui renversera bien plus que l’économie traditionnelle.
Ce mouvement est celui d’individus qui répondent à des désirs profonds.
La recherche d’impact positif sur la société
Dans une société figée et morose criblée d’évènements dramatiques, nombreux sont les
entrepreneurs à rechercher autre chose qu’un bureau et la sédentarité d’un poste
conventionnel. Beaucoup d’entre eux veulent s’inscrire dans une forme de mouvement qui a
pour but de changer les choses :
« J’ai toujours voulu que mon travail est un impact positif, et j’ai
toujours souhaité entreprendre. C’est les 2 conditions. Il est difficile
de travailler sur un projet qui ne nous plaît pas, c’est difficile à
accepter pour notre génération. »
Nous retrouvons une envie de faire bouger les choses et de renverser les règles dans l’espoir
de la concrétisation d’un mouvement positif et utile pour tous. En parallèle, ces personnes
s’attachent à un cadre de vie dans lequel ils y voient aussi leur propre épanouissement dans
un projet communautaire.
Rendre service
La plupart des startups de la mobilité 2.0 répondent à un besoin exprimé par des milliers voire
des millions de personnes. Le besoin en déplacement est, comme nous l’avons vu dans la
première partie, un besoin fondamental et en augmentation constante. Avec l’accès à Internet,
le déplacement 2.0 est en train de devenir ce que l’automobile était à la seconde révolution
industrielle ; le nouveau paradigme de la mobilité.
L’implantation en Inde de Blablacar est une expansion réfléchie qui va pouvoir rendre service
à des millions de gens. L’objectif étant in fine de donner la possibilité à des gens n’ayant soit
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 65
pas les moyens ou pas les infrastructures nécessaires pour se déplacer d’avoir accès à la
mobilité par des solutions simples et solidaires. Ces acteurs de la mobilité sont en train de
nouer des liens géographiques extraordinaires en créant un maillage de plus en plus
accessible. Rendre service reste l’une des motivations principales de ces entrepreneurs.
Tendre vers un monde meilleur grâce à l’économie collaborative
Dans une moindre mesure, l’économie collaborative donne accès à une façon plus saine et
intelligente de consommer nos ressources et nos biens. Car utiliser la voiture de son voisin,
c’est diviser par 2 l’émission de CO2 . Combinant ainsi l’utile à l’agréable par le partage social,
la finalité des projets, même si ce n’en est pas le but principal, permet d’une certaine manière
de tendre vers un monde meilleur.
« Et un moment le but est de rendre la société meilleure, et je
pense qu’elle est bien meilleure avec des plateformes
collaboratives. »
Valeurs communautaires et solidaires
Lorsque l’on sait que la plupart des startups sont la source de constatations personnelles, il
est légitime d’admettre que ces entreprepreneurs ont agi d’un point de vue personnel au
service du collectif. Ces valeurs communautaires et solidaires mises en relief par des individus
concernés ont permis de mettre en perspective des problématiques partagées afin de trouver
des solutions. Dans cet optique, beaucoup d’entre eux réfléchissent afin d’améliorer la vie
collective.
Entreprendre : un projet de vie
Entreprendre n’est pas une chose à prendre à la lègère, c’est une « expérience formidable et
pleine de rebondissement ». C’est savoir construire une équipe, qu’il y ait des gens qui croient
en un projet, qu’il y ait des gens qui soient motivés pour rejoindre un projet d’autant plus que
le changement de paradigme économique révèle des opportunités et des valeurs en
adéquation avec les aspirations des entrepreneurs :
« Le principe de la consommation collaborative me parle vraiment,
parce qu’on est en train de vivre un changement d’habitude de
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 66
consommation, ça part dans tous les sens et c’est super
passionnant d’être acteur de ce changement. »
Pour ces individus, entreprendre est un projet à forte valeur ajoutée, cela revèlerait presque
d’une nécessité dans leur développement personnel. La passion d’entreprendre est mise en
parallèle avec l’économie collaborative, permettant ainsi de laisser libre cours à leur
imagination.
3. Un rôle social à relativiser
En accusant d’une perspective plus large, on se rend compte aussi que le rôle social de ses
entreprises reste « limité à un échange monétaire ».
De manière globale, la majorité des acteurs « joue » du capital social ou rôle social comme
socle de la confiance entre les clients et eux pour limiter les freins que peuvent provoquer la
commande d’un service via Internet. En effet, celui-ci réduit les risques de refus et permet
d’instaurer un climat de confiance stable.
Dans la mesure où ces startups favorisent le lien social, il est évident qu’elles ont commencé
par « vendre » cette valeur ajoutée mais finalement, ce n’est pas l’argument principal de
vente. La principale motivation de l’utilisation de ces services de mobilité 2.0 est bien
évidemment le prix. Finalement, le rôle social est parfois une excuse, une façon « sympa » de
communiquer mais ce que recherche les gens réellement, c’est économiser sur le prix de
leurs déplacements.
« Mais il y a aussi l’image du covoiturage, avec des individus que
nous ne connaissons pas. Ca faisait partie de nos arguments
pour convaincre. Mais on ne misait pas tout là-dessus. C’est
aussi pour faire des économies, des gens le font parce qu’ils
n’ont pas envie de conduire la matin dans les bouchons. Il n’y a
pas de place à leur travail. La morale, l’enseignement, c’est que
c’est extrêment varié, les motivations sont extrêmement
variées. »
L’utilisation de cette nouvelle mobilité est avant tout faite pour faire des économies, elle
s’agrège d’une part de sociabilité qui met en valeur ce service.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 67
Synthèse de la deuxième partie :
Pour résumer, voici ci-dessous une liste de dispositions auxquelles s’attachent au
mieux l’agilité des modèles économiques des startups de la mobilité 2.0 :
Accessibilité : accès au service en quelques clics, sans déplacement.
Capital humain : image sur lequel repose les startups de la mobilité 2.0.
Capital social : communication à travers un engagement humain et solidaire.
Confiance : retranscrite par la transparence des parties, la confiance est le moteur de
ses nouvelles habitudes de déplacement.
Décentralisation : schéma du modèle économique définissant les acteurs comme
mandataires de service.
Flexibilité : faculté à proposer une offre indépendamment de la notion de temps.
Instantanéité : habilité à fournir une réponse à un besoin à un instant t.
Mutualisation : force du processus de l’économie collaborative, mise en commun des
ressources disponibles.
PPAP – Prix Prêt A Payer : prédisposition des individus a payer un certain prix.
Praticité : prise en main très rapide et intuitive.
Proximité : aptitude à offrir une offre de service la plus proche dans l’espace.
Transparence : capacité à fournir des informations précises et justes.
Temps réel : disposition à définir une offre de service en temps réel.
La synergie de tous ces éléments a créé une forme redoutable de service répondant
aux différentes évolutions du XXIèm siècle.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 68
PARTIE 3 : CONFRONTATION DES RÉSULTATS DE L’INVESTIGATION DOCUMENTAIRE
ET DES ENTRETIENS
Le secteur du transport est aujourd’hui en pleine refonte. La mobilité n’est plus l’affaire de
simples prestataires désireux d’apporter leur pierre à l’édifice à leur manière. En réalité, la
mobilité est devenue le nouvel axiome de la modernité, un modèle qui bouleverse de manière
considérable les entreprises traditionnelles du secteur.
Les diverses observations issues des entretiens sont des approfondissements pratiques des
données théoriques émises dans la première partie. La confrontation des deux parties a
permis de faire émerger l’existence de quelques divergences, voire contradictions entre les
données théoriques et empiriques mais elle a surtout mis en relief le modèle inédit sur lequel
repose les nouvelles entreprises de la mobilité issues de l’économie collaborative.
A. Le modèle économique du XXIeme siècle
Chaque chose a un temps, l’économie moderne est en train de modifier les fondations de
l’économie traditionnelle. Il s’agit d’une nouvelle conception de l’approche du modèle
économique. Le XXIeme siècle apporte son lot de révolutions et comme le dit Benoit Potier
Directeur Général d’Air Liquide, à propos d’Uber : « il se passe des choses actuellement qui
bouleversent l'environnement à une vitesse inégalée ».
1. Les fondations de la nouvelle économie
Les recherches effectuées ont permis d’étudier les différents facteurs qui ont bousculé les
acteurs traditionnels de la mobilité et de mettre en valeur les plus pertinents. Les conclusions
respectives de la première et seconde parties ont permis de mettre en évidence une analogie,
c’est à dire une similitude sur les critères de l’économie collaborative à l’aune de deux
approches différentes, théorique et pratique. Cette approche critique et sélective a permis de
synthétiser et conceptualiser les principaux facteurs illustrés par le graphique suivant :
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 69
Explication du graphique :
La zone verte foncée en arrière-plan représente le résultat des recherches effectuées lors de
l’investigation documentaire ; elle est constituée des éléments qui ont bousculé le modèle des
entreprises traditionnelles de mobilité. En effet, l’apparition d’Internet et des smartphones, par
exemple, ont fondamentalement transformé les business model. Chacun des 6 grands
facteurs est complété, dans la zone verte claire, par la composante/conséquence
fondamentale du premier critère. Ces composantes proviennent de l’analyse détaillée des
entretiens.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 70
Il convient à présent de revenir précisément sur chaque critère :
1. Internet : l’apparition d’Internet dans les années 90 a marqué un tournant dans
notre façon de vivre. C’est la création d’un immense maillage virtuel permettant
aux individus de se mettre en relation n’importe où et n’importe quand. Cet outil
conduit ainsi à une meilleure accessibilité.
2. Smartphone : les smartphones ont développé chez nous une nouvelle façon de
consommer mais aussi de nous percevoir dans le temps et dans l’espace. Les
réseaux 4G/3G et la géolocalisation permettent de localiser une personne en
temps réel. Ainsi, la proximité en temps réel devient le nerf des préoccupations.
Si je veux louer une voiture, je désire la louer le plus près de chez moi.
3. Confiance : la perte de confiance orchestrée par la crise de 2008 a développé un
sentiment de méfiance de la part des individus à l’égard du système économique
et financier. La transparence est une notion qui est devenue vitale dans le monde
de l’entreprise mais également chez les politiques. Instaurer ou restaurer la
confiance devient le crédo de chaque société.
4. Coût marginal zéro : Cette notion, développée par Jéremy Rifkin, est primordiale
pour les nouvelles startups car ces dernières, pour un même service, ont des
coûts inférieurs aux entreprises traditionnelles, du fait de la décentralisation des
coûts et de la mutualisation des ressources.
5. Crise économique : la crise économique de 2008 a entraîné une crise sociale
forte entraînant la méfiance des individus envers les marques, les États…
Aujourd’hui, de nombreuses entreprises misent sur leur capital social et humain
dans l’objectif d’humaniser l’entreprise, ce monstre froid pour paraphraser
Nietzsche.
6. Gain financier : la recherche de gain financier est, à coup sûr, la principale
motivation des individus. Dans cette optique, les startups de la mobilité 2.0
répondent avant tout au PPAP - Prix Prêt A Payer - par les individus pour un
service ou produit.
Le cercle met en valeur le conditionnement des nouveaux modèles économiques des startups
qui s’adaptent/usent des évolutions technologiques et s’ajustent aussi à la place de l’individu
dans le marché.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 71
La métaphore-graphique ci-dessous, représentant la partie émergée et imergée de l’iceberg,
permet de mettre en valeur les facteurs visibles et non-visibles du changement de paradigme
économique dans le secteur de la mobilité.
Ainsi, les modèles économiques nouvelles générations ne sont pas simplement qu’une
réponse à la crise de 2008 et à la perte de confiance mais un avancement en terme de
structure des coûts et de l’évolution des mentalités vis-à-vis des consommateurs. On
s’aperçoit que l’implication du client est une étape primordiale dans la construction d’une offre.
Dans le cas de la mobilité, l’utilisateur est acteur de sa demande défendue par le modèle
People-to-people.
2. Le modèle P2P : People-to-People
Comme l’a dit récemment Jeremiah Owiang : « Le B2B et le B2C n’existent plus. Ce qui
importe désormais, c’est le P2P, le people-to-people ». A l’aune de cette modernité naissante,
cette citation reprend les transformations que connaissent les sociétés aujourd’hui dans tous
les domaines. Dans le secteur de la mobilité, ce phénomène est encore plus présent et ne
cesse d’évoluer.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 72
Le modèle P2P reprend les fondamentaux de l’échange entre des individus. Cette relation
économique, fondée sur le lien social, est inédite et s’est développée de manière
exponentielle via l’utilisation des réseaux sociaux. En effet, la différence notable est la mise en
place d’un réseau virtuel permettant aux individus de rentrer en contact rapidement. Si l’on
devait schématiser la relation, voici ce que cela donnerait :
Les nouvelles startups ont adopté un schéma simple de mise en relation via une plateforme
web. Les individus se connectent alors entre eux directement sans passer par un
intermédiaire. Le modèle People-to-People est la nouvelle architecture des startups. Il est
caractéristique d’une nouvelle façon de consommer de la part des individus. La plateforme est
en effet un acteur quasi-transparent, facilitant la connection C2C. Internet a été un catalyseur
de ces nouvelles manières de se déplacer.
A l’époque où le marché capitaliste répondait à une demande par une offre, la perméabilité de
l’offre et de la demande à l’heure de l’économie du partage a offert un nouvel élan aux
sociétés. Alors qu’auparavant, l’offre et la demande demeuraient étanches l’une de l’autre,
cloisonnées dans des rôles précis, aujourd’’hui, on constate que ces deux réalités
économiques sont interchangeables. L’offre et la demande sont maintenant deux notions
complémentaires qui peuvent s’inverser : « je peux être l’offre (proposition de trajet) et je peux
être la demande (demandeur de trajet) ». Ce changement offre un nouvel horizon pour les
startups et multiplie leurs champs d’intervention. Ce mouvement a ébranlé durablement les
modèles traditionnels car il donne accès à un marché où l’offre est démultipliée.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 73
3. Des entrepreneurs focalisés sur une nouvelle conception des 4P
Les 4P – prix, place, produit, promotion – ont été complètement revisités par ces nouveaux
acteurs. La règle du marketing-mix connaît une véritable transformation et apparaît
pratiquement obsolète aujourd’hui.
Les 4P étaient jusque là utiles lorsque les marchés étaient en croissance, c’est à dire où
l’objectif était le développement et la mise en place d’une stratégie gagnante structurellement.
L’entreprise décidait quel produit allait être vendu, à quel prix, pour quel segment de
consommateur et par le biais de quel média. Ce cadre rigide a explosé avec l’avènement
d’internet. Le modèle paraît vétuste, sa limite est apparue avec et à cause d’Internet. Ce
dernier offre un espace de promotion beaucoup plus large et moins contrôlable que les
médias traditionnels. En outre, alors qu’auparavant, les entreprises se souciaient peu de la
satisfaction client, l’acte d’achat étant considéré comme valorisant et suffisant, on note
aujourd’hui que le contentement du consommateur doit perdurer dans la durée et Internet se
révèle à ce titre le vecteur central de revendication. Avec la saturation des marchés et des
nombreuses offres disponibles, la fidélisation du client est devenu le nerf de la guerre entre les
différents concurrents, c’est finalement le client qui décide de ce qui est bien pour lui ou non. Il
fonctionne par bouche-à-oreille. On revient alors au fonctionnement de la communication
People-to-People, sans intermédiaire.
Les 4P sont devenus obsolètes avec l’apparition de l’économie du partage, de l’économie
circulaire, de l’économie inclusive, de la co-création et des « makers » et également avec
l’avènement des communautés et des valeurs humaines. En conséquence, la confrontation
entre l’offre marketing et le marché, via ces nouvelles économies, a permis de faire émerger le
consommateur comme figure centrale de l’offre et la demande. Le consommateur est devenu
le process indispensable dans la construction d’une offre. Face à cette nouvelle réalité, les
professionnels de l’économie du partage doivent s’adapter quotidiennement afin de répondre
aux demandes et offres provenant directement du consommateur.
Ces nouveaux modèles ne sont finalement que des prestataires d’un service qui s’effectue
d’un individu à un autre individu, le People-to-People. De cette manière, on peut reprendre
l’analyse réalisée par Christian Dussart, auteur et professeur à HEC Montréal et HEC Paris, et
Jacques Nantel, professeur à HEC Montréal :
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 74
La prolifération de l’offre et de la demande ainsi que la suppression des goulots
d’étranglements montre la puissance du phénomène P2P. Comme il a été vu précédemment,
on constate un inversement des priorités, qui se voit aussi dans la prise de pouvoir des
acheteurs face aux distributeurs et aux fabricants. Le rapport de force n’est plus le même,
l’acheteur est celui qui décide.
La politique de prix orchestrée par les nouveaux acteurs tend vers un idéal du PPAP, le prix
étant sans doute l’élément le plus important dans la validation de l’acte d’achat. Ces acteurs
offrent des tarifs défiant toute concurrence et ce grâce à la décentralisation des coûts et la
mutualisation des ressources. L’acceptation du prix par le client est valorisée par le bénéfice
de l’offre. Le coup de maître revient aux acteurs de la mobilité 2.0 qui se désolidarisent
complètement de l’expérience réelle d’achat, celle-ci étant l’exercice de particuliers et non de
professionnels. En effet, l’état des lieux du véhicule sera réalisé par le propriétaire/
Les lois du marché évoluent et l’implication de la personne devient un point essentiel dans la
stratégie des entreprises. A cet égard, on peut parler des 3P : People – Planet – Profit,
expression développée par John Elkington en 1994. Il serait alors intéressant d’user de la
notion de partage, incrémentant alors un cinquième P.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 75
Finalement, les concepts et modèles économiques de construction d’un business model d’une
entreprise du XXem siècle s’adaptent difficilement à l’architecture des nouvelles startups qui se
construisent sur un idéal de consommation collaborative. Le changement de paradigme
entraîne avec lui la remise en question des principes de l’économie traditionnelle, et comme le
souligne Jeremy Rifkin, « il est temps de mettre Adam Smith à la retraite », la main invisible
autorégulatrice du marché commence à perdre de son efficacité.
4. La rentabilité économique des nouveaux modèles économiques
L’analogie faite entre les 2 parties permet aussi de mettre en valeur un business model plus
que rentable. Dans la presse, on voit apparaître, de plus en plus souvent, le terme
d’« ubérisation ». Ce néologisme est employé pour décrire les changements économiques
auxquels sont confrontés nos sociétés, en particulier dans le domaine de la mobilité, à travers
l’exemple topique de la société Uber.
Aujourd’hui, Uber est valorisé à plus de 40 milliards de dollars, c’est à dire la même
valorisation que Air Liquide, leader mondial des gaz, technologies et services pour l'industrie
et la santé. La différence entre ces 2 entités est notable : la première a mis 5 ans à être
estimée à cette valeur, et une centaine d’années pour la seconde.
La rentabilité fulgurante de ces nouveaux acteurs fait perdre pieds aux grands acteurs
traditionnels de la mobilité. Ce succès est d’autant plus impressionnant en sachant qu’il ne
s’agit au final que de mandataire de services :
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 76
La connexion People-to-People permet aux startups de s’affranchir de tous les coûts annexes
supportés par les entreprises traditionnelles : coût de l’automobile, coût de stockage des
automobiles, coût des commerciaux, frais d’entretien et de réparation par exemple. Le
business model est simple et revient donc à prélever une commission entre 10 à 30% du prix.
B. L’apparition d’une nouvelle ère
Apparemment, le monde s’est engagé dans une nouvelle voie qui repose sur les individus
avant tout. Ce mouvement apporte des modifications profondes construites autour de
problématiques générales et répondant à des besoins essentiels. Cette disruption met en jeu
une nouvelle vision des choses et des individus, en faveur d’un monde plus juste, grâce à une
utilisation intelligente des ressources disponibles.
1. L’utilisation mutualisée des ressources disponibles
Les prochaines générations voudront-elles posséder leur propre voiture en sachant qu’il
peuvent utiliser tous les modèles de voitures qu’ils souhaitent en louant une voiture différente
chaque jour ? Quel sera l’intérêt de posséder sa propre voiture ?
Aujourd’hui, dans certains états des Etats-Unis, il y a plus de voitures que d’habitants. Alors
au lieu de penser « fabrication d’un produit pour se déplacer », les nouvelles startups de
l’économie collaborative ont pensé « création d’un service pour se déplacer » par l’utilisation
des ressources disponibles. Chaque « client » use de ses ressources personnelles pour
proposer une offre et satisfaire une demande (dans le cas d’un covoitureur/chauffeur/loueur),
le client (passager non motorisé) ne dépend plus d’un prestataire. Le service est alors réalisé
par un particulier.
Alors que la propriété privée était, au XXeme siècle, signe de réussite sociale et le droit le plus
fondamental, le partage de la propriété au XXIeme siècle pourrait devenir la pierre angulaire de
l’économie, s’il ne l’est pas déjà.
2. La révolution numérique, mère de la troisième révolution industrielle
La révolution numérique met un point d’honneur à bouleverser les acteurs traditionnels. Le
phénomène d’accélération de la digitalisation de l’économie donne un coût d’arrêt aux
entreprises traditionnelles. La transition numérique est un tournant fondamental dans la vision
de l’économie mais aussi des sociétés en général. Les possibilités offertes par l’Internet
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 77
déterminent la nouvelle ère dans laquelle l’humanité s’inscrit. La dimension virtuelle
bouleverse les distances physiques, une carte géographique virtuelle est en train de se
construire établissant un maillage dense entre les individus.
La révolution numérique opère un changement capital instaurant la troisième révolution
industrielle.
3. Les valeurs, fondamentaux de l’économie du partage
L’économie du partage repose sur un ensemble de valeurs qui dépassent la sphère macro-
économique. Il s’agit d’une méthode inédite fondée non plus sur le simple échange marchand
mais sur la collaboration entre des individus en chair et en os. La notion de partage irrigue
ainsi l’ensemble de l’économie collaborative et en particulier, dans le secteur des transports.
La consommation collaborative est une révolution majeure au sens où elle redonne à
l’économie la part d’humanité qu’elle semblait avoir perdue avec l’avènement du capitalisme et
les crises financières récentes. Aujourd’hui, l’économie collaborative promet au consommateur
un véritable échange, un partage des responsabilité et une confiance aveugle. Ce sont autour
de ces notions - échange, confiance, interactivité – que s’articulent les entreprises de
transport.
Le résultat des entretiens effectués montrent que le capital social est une composante
indispensable aux startups. Le partage est capital dans ce nouvel modèle. L’usage plus que la
propriété est la philosophie de ces nouveaux modèles. Concrètement, l’individu partage ce
qu’il possède, en échange d’une contrepartie.
Mais ce modèle est loin d’être utopique et comporte des failles. En effet, les promesses de
l’économie collaborative ne doivent pas masquer les faiblesses de ce modèle.
Au vu des entretiens réalisés et des données analysées, il apparaît clairement que le modèle
imaginé se heurte à la réalité économique, sociale et humaine. Les valeurs prônées par
l’économie collaborative sont difficilement transposables, dans leur intégralité, au monde des
services.
A titre d’exemple, les startups, dans le domaine des transports, souhaitent mettre en valeur la
dimension écolo-responsable du partage des voitures. En vérité, cet argument se rapproche
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 78
davantage d’un discours marketing que d’une véritable volonté de l’entreprise. Pour ces
jeunes entrepreneurs, il s’agit souvent d’un argument commercial supplémentaire.
Ainsi, les services de la mobilité ne sont pas valorisables par le biais du développement
durable et de la préservation de l’écosystème. Dans un premier temps, ces services ont
valorisé cette cause, plébiscitée par les individus mais ce n’est pas la première raison de
l’utilisation de ce moyen de déplacement. Ce sont les earlys adopters qui, en premier, usaient
de cette distinction. Bien évidemment, le covoiturage offre la possibilité de réduire le nombre
de voitures sur les routes mais c’est une causalité peu valorisée. Le développement durable
n’est donc pas en soi un nouvel argument ce qui peut faire trembler les acteurs traditionnels.
En confrontant les données théoriques de la 1ere partie et les exemples concrets de la
deuxième partie, notamment les dérives possibles et actuelles concernant la réglementation
en particulier avec le droit du travail, certaines notions rentrent en contradiction avec les
valeurs prônées au départ :
• Confiance trop aveugle des utilisateurs ou bien la question de la sécurité ?
• La confiance semble innée mais qu’en est-il vraiment, est-ce une confiance de
façade ?
• Comment réagissent les entreprises lorsque surviennent des difficultés ?
D’une certaine manière, les plates-formes collaboratives commencent à ressembler aux
grandes entreprises. Le rachat de carpooling par Blablacar lui confère 90% du marché du
covoiturage. Les qualités du début (proximité, humain, partage) peuvent passer au second
plan car elles commencent à ressembler aux entreprises traditionnelles. Au-delà de ses
valeurs de partage mises en exergue par ces sociétés, ces dernières répondent avant tout et
surtout à une logique économique, comme le démontre leur rentabilité. Derrière l’économie
collaborative, se cache un souci avant tout capitalistique, gagner de l’argent par une
combinaison structurelle aussi vieille que la première révolution industrielle, un minimum de
coût pour un maximum de profit.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 79
CONCLUSION
Les nouveaux modèles de la mobilité s’inscrivent dans une logique de proximité,
d’instantanéité et de flexibilité plébiscité par les nouveaux consommateurs, tout en conjuguant
un modèle économique basé sur la décentralisation des coûts et la mutualisation des
ressources. L’émergence et la consolidation future de cette architecture inédite bouleversent
et remettent en cause le fonctionnement des entreprises traditionnelles dédiées au transport.
Les acteurs de la mobilité 2.0 représentent la figure moderne de ces entrepreneurs, décidés à
insuffler un nouvel élan à l’économie en place qui peut parfois apparaître comme sclérosée.
Mais cette révolution n’est pas limitée au seul domaine du transport. En effet, la conclusion de
cette étude est finalement applicable aux autres entités de l’économie collaborative. Le
transport de passagers est, comme on l’a vu, le secteur le plus financé de l’économie
collaborative et joue un rôle fondamental dans la fragilisation du rôle des acteurs traditionnels.
C’est pourquoi son étude apparaissait la plus pertinente car outre son rôle précurseur, le
secteur des transports est un exemple topique que l’on peut parfaitement transposer aux
autres domaines de l’économie collaborative tel que l’hôtellerie et Airbnb.
Ce mémoire de recherche a ainsi permis, à travers l’exemple des transports, d’avoir une
approche globale, critique et empirique de l’économie du partage. Cependant, il a fallu franchir
quelques obstacles.
La plus grande difficulté a été d’opérer une délimitation entre les 3 activités de la mobilité. En
effet, l’économie collaborative dans les transports ne repose pas sur un canevas unique. Au
contraire, elle se caractérise par sa multiplicité dans le choix des transports et le mode de
partage proposé. C’est ce qui fait sa richesse et sa complexité. L’analyse a donc du être
portée sur trois pratiques différentes les unes des autres, à savoir le covoiturage, l’autopartage
et les véhicules de tourisme avec chauffeurs. Au-delà des différences constatées et des
logiques propre à chacun, ces phénomènes ont permis d’illustrer la mobilité à l’heure actuelle.
La seconde difficulté réside dans le panel d’interviews réalisés. Malgré la qualité des
personnes interrogées, un nombre plus important d’entretiens aurait conforté les résultats. Il
faut savoir que les CEO d’une startup demeurent des cibles relativement difficile à obtenir.
Cependant, en tant qu’auteur-étudiant mais aussi jeune professionnel s’inscrivant dans
l’économie du partage dans la startup Colunching, les rencontres formelles et informelles ont
aussi permi le développement de ses constatations.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 80
Au-delà de ces pierres d’achoppement, l’intérêt de ce mémoire a été accru par son actualité
brûlante. En effet, l’économie de partage est un sujet d’actualité, dont les médias se sont
emparés avidement. L’exposition médiatique est d’autant plus grande qu’au-delà de son
caractère innovant et révolutionnaire, c’est un sujet qui touche au quotidien les français. A ce
titre, ce phénomène a été décrypté par les grands médias traditionnels, comme France 2.
C’est pourquoi je souhaite mettre à disposition deux articles, présents en annexe 1 et 2 du
volume 3. Ils retracent les deux grandes évolutions de la mobilité 2.0 : le changement
opératoire auquel doit faire face les anciens acteurs face à cette concurrence nouvelle et la
montée en puissance du covoiturage dans le monde. Le premier article est une étude de cas
de la Harvard Business Review (annexe 1) qui s’interroge sur la problématique suivante : « un
loueur automobile peut-il absorber sa start-up d’autopartage sans perdre de clients ? ». Le
second article du magazine Challenge est consacré à la start-up Blablacar (annexe 2).
L’économie est en train de changer de paradigme et la société n’est pas seulement
spectatrice mais actrice à part entière de ce changement en marche. Le livre de Jéremy
Rifkin, intitulé La nouvelle société du coût marginal zéro, l’internet des objets, l’émergence des
communaux collaboratifs et l’éclipse du capitalisme, constitue la bible de cette nouvelle
économie afin d’en comprendre tous les mécanismes et les subtilités.
�
La valeur de ce mémoire est d’avoir mis en relief les facteurs sur lesquels reposent les
modèles collaboratifs, à savoir la décentralisation des coûts et la mutualisation des
ressources. Plus encore, il semble intéressant d’étudier comment les acteurs traditionnels ont
répondu à cette concurrence. Par quelles stratégies ? Certains de ces grands acteurs ont lié
des partenariats avec ces jeunes enseignes, c’est le cas de Rent A Car avec Drivy, ou les ont
achetées. D’autres ont déployé leur propre système. On comprend alors qu’il est en train de
se passer quelque chose, le changement de paradigme est en train de s’opérer en adéquation
avec l’évolution numérique. Il est important de se rappeler que le numérique n’est apparu dans
nos vies que très récemment. Compte tenu des évolutions constatées aujourd’hui, quand
sera-t-il des évolutions de demain ? Les voitures électriques sans chauffeur remplaceront-
elles toutes formes de mobilité ? Nous sommes aux prémisses d’une nouvelle ère ; il est
important aujourd’hui de se projeter à court et moyen terme. Notre façon de vivre est impactée
par des modes et des usages qui n’ont de cesse de se modifier quotidiennement. �
Le changement n’est pas que fonctionnel, il est aussi humain. Les aspirations humaines
évoluent pour rendre le monde plus juste et équitable. Dans un monde régi par l’argent et le
pouvoir, la prolifération du People-to-People est la contradiction naissante du pouvoir de
l’argent. Le lien social, pilier de toute société, est en train de se renforcer par le biais
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 81
surprenant de l’économie. Alors que le marché a toujours été régi par l’idée de profit, dans une
logique purement capitalistique, l’économie collaborative tente d’y inscrire de l’humain et du
partage. En tout cas, c’est l’idée, sans doute, qui est proposée au départ de cette aventure. �
Enfin, l’économie collaborative dans le secteur des transports porte sur le devant de la scène
mondial les questions du développement durable et de la préservation de l’écosystème. Bien
que ces problématiques sur l’écologie ne soient pas ce qui fait le succès de ces modèles
auprès des individus, il le sera indéniablement pour celui des générations qui suivent, la
mienne en faisant partie46.
46 Lire p.425 à 433, Chapitre 13. La corne d’abondance durable, Une planète qui se réchauffe, Livre : « La nouvelle société du coût marginal zéro », Jeremy Rifkin.
Mémoire de recherche – La mobilité 2.0 – GOUDÉ Robin – ISTEC - 2015 82
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