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« Vivre avec un cancer » Difficile question ! Difficiles réponses !
Quel est le parcours de la personne atteinte
d’un cancer ? De l’annonce à la guérison, en passant par la
rechute, le retour à la maison… Phrases de patients vus en consultation. Ou phrases de proches…
« Coup de tonnerre dans un ciel serein ». Annonce du diagnostic : moment clé. Bien connu dans le monde médical ;
enseignement et recherches abondantes. Mais quelles attentes du patient ? (Catan, Ethique&Santé, 2004) ◦ Une connaissance mutuelle médecin/patient préalable ; ◦ Prise en considération des proches par le médecin ; ◦ Respect du désir d’information du patient ; ◦ Médecin empathique et disponible ; ◦ Annonce progressive et claire ; ◦ Présence des proches (si souhaitée) ; ◦ Absence de mensonge.
Sentiment de culpabilité… Très lié à la société dans laquelle
on vit… Des limites de la prévention,
lorsqu’on passe au soin…parce que ça n’est pas si simple !
Culture du corps jeune et en bonne santé. Deuil du corps jeune et en bonne santé. Deuil du fantasme d’immortalité. Transition de rôle, pas évidente à gérer. Une solution : en vouloir…mais à qui ? ◦ A soi ? ◦ A sa famille, au médecin : irritabilité, colère. ◦ A Dieu. ◦ Aux autres, à la société.
Entendre : « J’ai peur ». Peur de quoi ? ◦ De mourir. ◦ D’abandonner les autres. ◦ De dépendre des autres. ◦ De souffrir. ◦ D’être seul. ◦ De ne pas guérir.
Laisser le temps…même si le corps médical le regarde avec effroi…
Parler, entendre. Respecter…mais difficile pour le soignant!
Quelle image du cancer ? (Enquête EPAC, 2000)
« Cancer = ? » ◦ Chimiothérapie ◦ Mort ◦ Douleur
Vision négative des traitements médicaux. Vision négative de la médecine en général
(vaccins, MEDIATOR©, laboratoires, etc.) Donc rejet des solutions proposées.
L’œil du psychiatre : la phrase la plus courante pour masquer une souffrance psychique.
Rechercher un syndrome dépressif. Rechercher des idées suicidaires. Rechercher des symptômes
psychiatriques en général. Il n’y en a pas toujours ! Mais il y en
a parfois…
Comment l’annoncer à mon époux/se ? À mes parents ? À mes enfants ? À mon employeur ?
Pourquoi ne pas le travailler et en discuter en entretien avec le médecin ?
Que doivent savoir chacune de ces personnes ? Qui sera la personne la plus proche ? La
« personne de confiance » ? Adapter en fonction de l’âge. Ne pas aller plus
loin qu’on ne le sente. Le secret est source d’angoisse : « et si on le
découvrait ? »
La douleur : le plus insoutenable ? Vécue comme la présence du crabe. « Plus elle est forte, plus le cancer est fort. » Difficile à traiter, du fait de la composante
psychologique importante. Responsabilité des traitements ? Quelle douleur est acceptable ? Une douleur est-elle acceptable ?
Chute des cheveux, amaigrissement, plaies, mastectomie, stomies, amputations…
Image du corps dégradée. Liens avec l’estime de soi. (Dany, Psycho-onco, 2009)
Redonner sens au corps : aborder les sujets des perruques, des foulards, de pansements, de prothèses.
Réapprendre à prendre plaisir avec son corps.
« Comment porter un jean taille basse avec une stomie ? »
En profiter pour faire des choses « folles » : cheveux très courts ou très longs.
Deuil du corps passé ; réinvestissement du corps actuel.
Ne pas simplifier ou minimiser : « tout le monde le fait! ».
Mais accompagner l’évolution, être présent.
Baisse de la libido initiale, mais pas forcément chronique.
Peur de montrer le corps laid (sans sein, avec des cicatrices, avec les côtes saillantes, ou grossi sous corticoïdes, troubles de l’érection ou de l’éjaculation)
(Colson, Progrès en Uro, 2012)
Confiance dans le conjoint. Réapprentissage du corps nu. Chez la femme : inquiétude du corps non
désirable. ◦ Travail sur le corps, sur la mise en valeur, sur
l’acceptation. Chez l’homme : inquiétude du corps non
performant. ◦ Travail sur l’orgasme, les différents types, le corps
de l’autre, et les moyens complémentaires.
En parler au médecin. Des traitements ? En parler aux autres patients, aux
associations. Des trucs, des astuces. Toutes les positions ne seront peut être plus
possibles, mais d’autres si… Retrouver une vie de couple. Retrouver le plaisir.
L’hôpital devient la maison. Des liens se créent. Telle infirmière devient confidente ; telle
autre n’est pas aimée ; tel petit externe est mignon ; tel médecin est insupportable.
L’hôpital comme refuge. Mais l’hôpital n’est pas la vie ! Investir les permissions, les sorties.
L’hôpital devient la maison…de l’horreur. Equipes débordées, pas à l’écoute, voire
désagréables. Douleur non entendue, pas le temps pour
parler des inquiétudes. L’hôpital peut être malade aussi… En parler au médecin ; ce peut être
temporaire ; ce peut être une incompréhension.
Ou aller voir ailleurs…
Troubles du sommeil avant les consultations, sites internet toute la journée, tremblements, inquiétudes permanentes…
Très fréquent ; probablement même normal ? Mais envahissant dans la vie quotidienne ? Continuum entre normal et pathologique ; à
quel moment l’angoisse n’est plus adaptée ? A quel moment consulter ? Faire confiance aux professionnels. Donc
former les professionnels à la séméiologie psychiatrique…
« Et si vous alliez voir un psychologue ? »
« Ça y est, je deviens dingue! » Le psychologue est spécialiste
de la souffrance psychique. Cancer, douleurs, anxiété et
tristesse sont étroitement liés. Améliorer l’un sans l’autre est
difficile. Notion de prise en soins globale de l’être.
Trouver un espace de parole à distance de la famille et du médecin.
« Et si vous alliez voir un psychiatre ? » « Ça y est, cette fois, c’est sûr, je deviens
dingue! » Quand l’angoisse devient trouble anxieux,
quand la tristesse devient dépression… Le psychiatre est un spécialiste des troubles
mentaux. Il apporte son expertise dans le soin au patient dans sa globalité, avec l’oncologue et le reste de l’équipe.
Un autre espace de parole à part…
Hédonie... (Leknes, Nature, 2008)
Impact du plaisir sur la santé. Mieux vaut un plaisir ponctuel qu’un
déplaisir permanent. Traitements, contre-indications, ne
doivent pas empêcher de vivre. Oui à la coupe de champagne, oui au
petit morceau de foie gras, et oui à l’huitre.
MAIS…avec modération… Le plaisir ne doit pas être l’excuse
pour l’irresponsabilité.
Le cancer amène à des réflexions sombres : ◦ Je vais peut être mourir. ◦ Je vais peut être abandonner des êtres chers. ◦ Je vais peut être devenir inutile socialement.
Comment ne pas être triste ?! Réaction adaptée et normale… …qui doit trouver écho auprès des
professionnels !
Syndrome dépressif : tristesse…mais pas que! Décompensation dépressive dans les suites
de l’annonce d’une maladie grave. MALADIE dépressive, qui nécessite des soins. Médicament ? Pas sur une dépression légère,
mais oui sur les autres. Psychothérapie : l’occasion justement. Thérapie interpersonnelle ; transition de rôle.
On n’a jamais autant étudié le cerveau. On n’en jamais autant su sur le cerveau. On n’a jamais autant su qu’on ne savait rien sur
le cerveau. L’annonce d’une maladie grave impacte le
fonctionnement cérébral. En fonction de son vécu, de ses traumatismes
passés, de ses cicatrices cérébrales/psychiques. Certains réagissent par une dépression, d’autres
non. Personne ne le décide. Pas question de faiblesse ! Seule nécessité : ne pas le laisser de côté!
On avait fini par accorder toute confiance à son médecin.
On y croyait, on a tout fait bien ; on a même refusé la coupe de champagne.
Effondrement ; la médecine ne marche pas. Limites du soin ; pas forcément efficace au
premier coup. Individualités très fortes. Reprendre espoir après un premier échec. Y
croire de nouveau… très difficile.
Cercle vicieux : ◦ « ça ne marche pas ; ça ne marchera jamais ; je déprime
; l’organisme déprime ; les traitements sont moins efficaces ; ça ne marche pas… ».
Nécessité de rompre le cercle vicieux. Importance de l’entourage, familial et social. Importance de l’entourage médical. Importance de l’hédonie justement ! On a envie
de se battre si la vie qu’on mène est agréable… Il faut donc la rendre agréable pour donner
l’envie de se battre !
Le boulot d’aidant. Ne pas sous-estimer sa propre souffrance. Ne pas croire que parce que l’autre est le
« vrai » malade, on n’a pas le droit de craquer.
Vertu des groupes de parole. Se préserver un espace de communication
également. Pourquoi pas aller voir un « psy » aussi ?
Trouver sa place : Être présent aux consultations ? Aux
examens ? Aux entretiens ? Aux hospitalisations ?
Si l’autre le veut…mais si on le veut aussi. Accepter de ne pas pouvoir tout porter. Être à l’écoute. Savoir entendre. Sans
forcément répondre. Parce qu’on ne peut pas toujours répondre !
Ne pas minimiser : « ça va aller ! » Confier ses limites.
La maladie de l’enfant ; le plus insoutenable ? Quand un enfant nait, on ne remplace pas
des angoisses existantes par les nouvelles ; on les rajoute au stock existant!
La mort de l’enfant n’est pas naturelle dans la société.
Inacceptable ! Donc irrecevable ? Pourtant, il faut avancer! Car l’enfant a besoin
de ses parents pour le soutenir au cours de l’épreuve à venir ; notion de « tuteur de résilience ». (Paradis, Presse médicale, 2008)
Inversion des rôles : je deviens le parent de mon parent.
Quels bénéfices ? Résurgence de conflits anciens et cachés,
lorsqu’on devient « dominant » dans la relation. Difficultés à l’accepter pour le parent « initial ». La « bonne distance » de Winicott. Jusqu’où aller
? ◦ Il n’est peut être pas utile d’assister à l’examen de
prostate de son père…
« Vous êtes en rémission. » Qu’est ce que ça veut dire ? ◦ Un peu guéri ? ◦ Pas tout à fait ? ◦ Ça peut revenir ?
Là encore, confronté aux limites de la médecine…pour le patient comme pour le médecin !
Possible deuil symbolique : deuil du statut de malade.
Transition de rôle…pas toujours simple.
Rémission = épée de Damoclès… Chaque consultation est source d’angoisse. « La première grippe ressemble à l’état dans
lequel j’étais… » Et la vie peut devenir insupportable. « Et si… » Là encore, deuil de l’immortalité, puisqu’on a
été confronté à la mort.
Adolescents entre 14 et 25 ans, guéris d’une leucémie :
10% y pensent tous les jours. 30% a peur de la rechute. 90% disent avoir une vie agréable. 70% disent qu’ils auraient pu mourir. 85% disent que la maladie a été le moment le
plus important de leur vie. 75% disent qu’elle a modifié des choses au
sein de leur famille. (Vauvre, Archives de pédiatrie, 2005)
Vécu loin de la maladie… Il faut reprendre ses repères, sans chimio
hebdomadaire, sans consultation quotidienne. Parfois avoir réfléchi à la mort bouleverse les
idées, les priorités… Et se reconfronter à la vie « de tous les jours »
n’est pas forcément évident. Parfois, le malade était protégé par la famille
pendant la maladie ; on lui a caché les difficultés financières, les problèmes de santé de l’aîné, la mort de l’oncle…et on lui dit tout quand ça va mieux!
Premier retour au travail : ◦ « Comme tu as maigri ! » ◦ « Tu as l’air en forme ! » ◦ « Si ça ne va pas, n’hésite pas ! » ◦ « Il y a le dossier 432 à revoir, n’oublie pas ! » ◦ « Pendant ton congé, on t’a remplacé ! »
La vie a continué pendant qu’on souffrait. On peut nous avoir idéalisé / méprisé / oublié… Et il faut reprendre. Là encore et toujours, le rôle de l’entourage
social, familial, et éventuellement psychologique.
« Comment vivre avec un cancer ? » En vivant… Mot-clé : PLAISIR ! Comment vivre du plaisir en ayant un cancer ? Difficile…mais les conséquences
neurobiologiques sur l’organisme sont réelles!
Pas une injonction au plaisir (ce serait assez maladroit…) ; mais une recherche à deux (voir à plusieurs).
Encourager la prise de plaisir au maximum !
Mot-clé : COMMUNICATION et VERITE ! L’objectif du corps médical est de permettre
une vie la plus « normale » possible, non pas « malgré » la maladie (quelle qu’elle soit d’ailleurs), mais « avec » la maladie.
Ses ressentis, ses émotions, ses doutes, ses inquiétudes, ses colères….
Parler de tout avec son médecin ; parler de tout avec son patient.
Ne pas rester seul…