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Convention 2004 Acadie

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  • Rapport fi nal 1

    Table des matires du rapport fi nal

    1. Introduction et mise en contexte .......................................................................... 2

    2. Perspective historique ........................................................................................... 3

    3. Profi l de la Convention 2004................................................................................ 4

    4. Description des chantiers et des sous thmes ...................................................... 6

    5. Textes des confrenciers et confrencires de la table ronde ............................... 7

    6. Bilan des dlibrations des ateliers et recommandations .................................... 25

    7. Bilan des plnires des quatre chantiers .............................................................. 39

    8. Bilan de la sance plnire.................................................................................... 54

    9. Actions de suivis.................................................................................................... 58

    10. Conclusion ............................................................................................................ 59

    11. Annexes ................................................................................................................. 61

  • 2 Convention 2004

    1. Introduction et mise en contexte

    En souhaitant mettre sur pied une Convention de la socit acadienne en 2004, les leaders communautaires acadiens ont t anims par une vision commune, savoir la runion, dans un mme lieu et un moment prcis de notre histoire, des forces vives de lAcadie du Nouveau-Brunswick, le tout dans le but de sinscrire dans le prsent et prparer lavenir.

    Ce rendez-vous historique a runi environ 600 personnes de divers secteurs dactivits en provenance de lAcadie du Nouveau-Brunswick, de la Francophonie canadienne, de la France et de la Belgique.

    Lorganisation dun tel vnement a cr une occasion unique pour lensemble des organis-mes de participer une rfl exion sectorielle et globale. Une rfl exion qui dpasse les enjeux immdiats et conjoncturels et qui ose se projeter dans lavenir comme socit et comme nation.

    De plus, cette rfl exion sinscrit dans une dmarche visant identifi er les enjeux sociaux de la communaut acadienne du Nouveau-Brunswick, les partenariats possibles et ncessaires entre les secteurs ainsi que les structures de gouvernance indispensables aux collectivits vivant en rgion.

    Elle a galement permis la communaut de se doter dun projet de socit visant faon-ner lAcadie du Nouveau-Brunswick pour les dcennies venir.

    Cet vnement revt une grande importance pour la communaut acadienne parce quil aura des incidences directes dans chacune des rgions acadiennes au niveau conomique, social et culturel.

  • Rapport fi nal 3

    2. Perspective historique

    Au cours de son histoire, le peuple acadien a eu se positionner par rapport diverses for-mes tatiques. Ds le rgime franais, les Acadiens ont pris leur distance du rgime fodal en utilisant lespace de libert que constituait leur situation gographique en Amrique du Nord. Loin de la mre patrie, loin du pouvo r colonial de Qubec, ils se formrent une ind-pendance desprit qui marqua tant leur dveloppement social et conomique que culturel.

    Rappelons que la Dportation de notre peuple au 18e sicle a notamment t cause par la mise de lavant dune position innovatrice pour lpoque, la neutralit dans les confl its entre la France et lAngleterre. Sous le rgime anglais, leur dputation a propos cette position audacieuse une situation politique particulire. Peut-on y voir une premire articulation dun projet de socit? Malgr les vnements malheureux qui ont suivi, on peut trouver une source dinspiration dans cet effort de se tenir comme groupe indpendant des grandes puissances coloniales.

    Cest la fi n 19e sicle que sarticule dune faon plus cohrente ce projet de socit, dans ses dimensions sociales et institutionnelles autour des lites de lpoque dans le cadre des conventions dorientation nationale tenue en Acadie. Le vingtime sicle a vu se consolider le projet conomique avec la cration des coopratives ds ses dbuts et lpanouissement de lentrepreneuriat acadien dans sa deuxime partie. Accompagnant cette volution, laf-fi rmation dune culture originale et la reconnaissance politique a jet les bases qui nous permettent daffronter les enjeux qui se prsentent la socit acadienne en ce dbut de deuxime millnaire.

    partir de ce contexte historique, la Convention de la socit acadienne a tenu poursuivre la rfl exion sur notre avenir collectif, tant sur le plan social et culturel quconomique, et ce dans une perspective intersectorielle. SAANB DT-BV

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    3. Profi l de la Convention 2004

    3.1 Mise en contexte

    La Convention 2004 aura t loccasion, de clturer les clbrations du 400e, tout en par-tageant les rfl exions des diffrents secteurs dactivit et en sinterrogeant sur la structure de gouvernance dont lAcadie pourrait se doter pour assurer son plein panouissement. Ce faisant, la communaut acadienne du Nouveau-Brunswick clbrait 400 ans dhistoire en clarifi ant de faon innovatrice des partenariats et des stratgies multisectorielles de la socit actuelle, dans une perspective identitaire, culturelle et socio-conomique. Ce fut galement loccasion de faire le point sur les dveloppements et les ralisations acquis au cours des dernires annes et de sinterroger sur son avenir.

    Les maintes luttes quont menes les Acadiens et les Acadiennes au cours des dernires dcen-nies leur ont permis de se doter dinfrastructures et de mcanismes qui guident leur dvelop-pement. Mentionnons, entre autres, lobtention de la dualit en ducation, la cration du Conseil conomique du Nouveau-Brunswick, la force de ses institutions fi nancires, dont la Fdration des caisses populaires acadiennes et la cration de lUniversit de Moncton et de ses trois campus. La communaut acadienne sest galement dote dun mcanisme de concertation qui sappuie sur un plan de dveloppement global pour guider sa destine au sein de lensemble de ses secteurs dactivits. En effet, le Forum de concertation des organis-mes acadiens et francophones du Nouveau-Brunswick est le lieu privilgi o se discutent les grands enjeux et les dfi s de la communaut.

    Dans le contexte du 400e anniversaire et malgr toutes ces ralisations, la communaut acadienne du Nouveau-Brunswick a dimportantes proccupations et dfi s, dont lexode des cerveaux des rgions rurales vers les grands centres urbains, la dnatalit, lintgration des nouveaux arrivants, lassimilation, le manque dopportunits demplois pour les jeunes pro-fessionnels et un certain dsengagement envers une vision commune de la communaut. Voil autant de dfi s relever au cours des prochaines annes et des prochaines dcennies.

    Il demeure donc impratif de prsenter les enjeux les plus cruciaux de la communaut aca-dienne du Nouveau-Brunswick et les motifs qui poussent les leaders de la communaut se concerter sur son avenir.

    Il importe de mettre en place une structure politique visant permettre aux Acadiens et aux Acadiennes de sexprimer et de contrler leur destine en participant aux instances politi-ques et la gouvernance, ainsi qu la gestion du mouvement associatif. Les Acadiens et les Acadiennes doivent tre plus prsents sur lchiquier politique et la population acadienne doit poursuivre ses engagements politiques au sein des structures municipales. La popula-tion acadienne doit galement sengager au sein des conseils scolaires, des corporations hos-pitalires et de toute autre structure de gouverne qui affecte les diffrentes facettes de la vie quotidienne. En somme, la communaut acadienne doit prioriser la gouverne et la politique afi n dassurer son dveloppement long terme et de garantir son panouissement.

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    Enfi n, soulignons que lune des caractristiques fondamentales des Acadiens et des Acadiennes au cours des sicles a certainement t leur capacit dorganiser de grandes rfl exions leur permettant de faire le point sur leur dveloppement et de prciser des strat-gies pour faonner lavenir.

    3.2 La dmarche propose

    Ds le printemps 2004, des consultations ont eu lieu sur les enjeux actuels de la socit aca-dienne, en prparation de la Convention de la socit acadienne doctobre 2004.

    Dans un premier temps, le milieu associatif et la population ont t invits faire le bilan de lvolution des diffrents dossiers sectoriels et, dans un deuxime temps, rfl chir sur les avantages et les diffi cults relis la gouverne politique et la gouverne communautaire.

    Il fut convenu de mettre contribution les diffrentes sections de la SAANB pour recueillir les opinions de la population dans leur rgion respective. Pour ce qui est du secteur associa-tif, il a t consult via le Forum et ses membres.

    Selon chaque secteur, les forums de consultation devaient dresser un bilan de la situa-tion (maintien des acquis reculs gains) pour ensuite se poser la question savoir si la Communaut acadienne ne se porterait pas mieux en obtenant une plus grande autonomie et un meilleur espace de pouvoir et de gouvernance.

    Paralllement, un comit de travail devait approfondir certaines pistes dj identifi es de structures pouvant mener une plus grande autonomie (dualit, assemble communau-taire, etc.) afi n de faciliter la comprhension de ces concepts par un plus large auditoire et proposer des mcanismes dimplantation de telles structures, adaptes lAcadie du Nouveau-Brunswick.

    Un document synthse de ces rencontres a t rdig puis achemin aux participants la Convention 2004, permettant de mieux cerner les discussions et les rfl exions.

    lautomne 2004 lors de la Convention de la socit acadienne, les participants ont t invits statuer sur les meilleurs outils de gouvernance possibles pour lAcadie du Nouveau-Brunswick. Cette dmarche sancre sur la vision la base du PDG qui affi rme que LAcadie du Nouveau-Brunswick se veut une socit viable, moderne, prospre et autonome dont les instances de gouverne de la socit civile seront reconnues par les diffrents paliers de gouvernement .

    Ces stratgies de dveloppement dans lensemble des secteurs, notamment dans les domai-nes culturels et conomiques seront en synergie entre elles et arrimes celles des diffrents paliers de gouvernement. Les modles de gouvernance mis en place au sein de la socit civile et au sein de lappareil gouvernemental permettront une plus grande prise en charge par la communaut de son propre dveloppement.

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    4. Description des chantiers et des sous thmes

    La Convention de la socit acadienne a voulu runir les forces vives de lAcadie du Nouveau-Brunswick et, du mme souffl e, engager une rfl exion autour dun projet de socit articul lintrieur de quatre chantiers fondamentaux.

    Le premier chantier, Le dveloppement conomique communautaire, fut articul, dune part, autour de lentrepreneurship et des dfi s de la formation, de laccs au capital et des obstacles qui nuisent au dveloppement de lentrepreneuriat dans les rgions acadiennes. Dautre part, un deuxime atelier lintrieur de ce mme chantier examinait les dfi s autour de la problmatique du dveloppement rgional et des dfi s sous-jacents (la ruralit, le rapport Nord-Sud et les structures de dveloppement local). Enfi n, les participants et participantes se sont penchs sur les dimensions importantes dun regard holistique de la sant de lAcadie, et cela, travers les services mdicaux, lalphabtisation, la pauvret et la dmographie.

    Le deuxime chantier propos, La vitalit linguistique, artistique et culturelle, lanait, dune part, la discussion sur le secteur artistique et culturel comme lieu de production, de diffusion, de cration et de mise en march. Dautre part, ce chantier engageait les partici-pants et participantes discuter damnagement linguistique autant du ct des politiques mises en place par ltat que du comportement des individus. Enfi n, ce mme chantier pro-posait une discussion sur lidentit et de la diversit. Cette discussion fut entre autres faon-ne par les dfi s de limmigration, des mouvances de lidentit acadienne et de la capacit daccueil de la socit acadienne.

    Le troisime chantier, ducation et Savoir, amorait un change autour de lcole et la communaut. La discussion fut centre sur le lien communaut-cole; soit par les modles de gouverne, les amnagements comme les centres scolaires communautaires ou encore la pdagogie adapte nos milieux. Une deuxime discussion portait sur la recherche en Acadie, son fi nancement, ses lieux et ses rseaux. Enfi n, les participants et participantes ont choisi dexaminer le systme dducation comme structure globale de la petite enfance au postsecondaire tout en ciblant les dfi s des garderies, de laccessibilit aux tudes postsecon-daires et la place que doit occuper les ayant droits.

    Finalement, le quatrime chantier, La gouvernance, fut, dune part, le lieu de dlibration sur la gouvernance de la socit civile. Les participants et participantes se sont penchs sur les structures de reprsentation des organismes communautaires, lvolution du rapport avec les gouvernements ou encore sur le bien fond des ententes Canada-communauts. Dautre part, les participants et participantes ont pu rfl chir sur le rle des lu.e.s acadien.ne.s, sur les plans municipal, provincial et fdral, sans oublier les lu.e.s sigeant au sein des con-seils scolaires et des rgies de la sant. Existe-t-il un pouvoir gouvernemental acadien? Enfi n, les participants et participantes ont pu se pencher sur les dfi s de lgalit linguistique. Au lendemain dune nouvelle loi sur les langues offi cielles au Nouveau-Brunswick, en plus des acquis historiques des clauses constitutionnelles affi rmant lgalit des deux communauts linguistiques, sommes-nous plus prs de lgalit?

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    5. Textes des confrenciers et confrencires de la table ronde

    5.1 Commentaire sur le chantier de la gouvernance1 Chedly Belkhodja2

    Bonsoir. Je souhaite partager avec vous quelques ides pouvant peut tre servir de pistes. Il me semble important daller plus loin quune simple discussion autour des textes. Jaurais mme le got de dire quil faut ce soir faire drailler la convention : la convention ce nest pas un programme concoct par une quipe de consultants : cest un lieu de la parole.

    couter! Demble, je souhaite dire que les trois textes du chantier de la gouvernance sont porteurs dune rfl exion intressante sur le devenir du projet politique acadien. Il est vrai de dire que lobjet de la politique a volu depuis quelques annes. Le politique se trouve ailleurs que dans nos institutions politique malmenes; voir notamment lessor dune socit civile organise en communaut.

    Gino LeBlanc, Lise Ouellette et Pierre Foucher posent les bonnes questions : la socit aca-dienne a connu un dveloppement indniable au cours des dernires annes qui lamne rfl chir ses structures de reprsentation, sa place dans des relations de pouvoir : le ddoublement du pouvoir politique en Acadie, le rle croissant et plus lgitime de la socit civile, la vitalit communautaire, les nouvelles ralits de lAcadie francophone. Je dirai que les trois textes ont le mrite de proposer une approche globale de la question politique.

    Mais la chose qui me tracasse est la suivante : de nos jours, parle-t-on politique? Non de moins en moins. Il me semble que tout le problme rside l. Nous perdons lentement le langage politique pour parler dune autre faon. Cest la seule chose que je souhaite dire ce soir.

    La lecture des documents sur la gouvernance a provoqu chez moi une petite irritation: le politique se vide de son contenu. Nous ne parlons plus de faon politique. Notre vocabu-laire a tout simplement chang; il sadapte aux nouveaux langages de notre poque :

    Nous pratiquons deux langages :

    1. ouverture et fermeture

    2. politique du rapprochement

    Premirement, nous parlons le langage de louverture partir dune logique conomique. Le march structure notre comportement et notre langage. Voici les mots magiques de notre poque : ouverture, effi cacit, fl uidit, fl exibilit, comptitivit, rentabilit. Dans ce monde merveilleux, les individus, les communauts deviennent des catgories de consommateurs, une clientle devant faire preuve dadaptation. Il faut adopter ce langage de la quantifi ca-

    1. Ce texte est la version crite dune allocution prononce lors la Table ronde inaugurale de la Convention.

    2. Chedly Belkhodja est professeur agrg de science politique lUniversit de Moncton (Campus de Moncton).

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    tion : tout est calcul les objectifs doivent tre mesurs Leffet pervers du march, cest quil se propage partout. Il aboutit une prise de contrle du politique.

    Deuximement, nous employons une logique identitaire qui prcise les contours dune identit authentique et bien diffrente des autres. De faon paradoxale, louverture vers le global provoque un processus de la redcouverte de soi et de ses diffrences. Dans un monde ou tout semble aller trop vite, il y a cette volont fi xer lidentit, la diffrencier de lautre. Nous cherchons des origines, des racines. Nous cherchons tre singulier.

    Enfi n, nous parlons partir dune logique du rapprochement : voire lobsession vouloir se rapprocher; jai limpression que la politique se rduit une logique de rapprochement qui mne satisfaire les besoin de lindividu et non ceux du citoyen.

    Cest une politique vers le bas quon aime aujourdhui, une politique de proximit qui se propose de redfi nir le lien entre le pouvoir et les citoyens. Nous assistons en effet la mise en forme dune nouvelle politique plus participative et dcentralise, mais capable de se passer de ltat, jug comme encombrant. Devant des discours qui invitent de nouvelles formes de responsabilisation, les individus embarquent en plein dans le jeu la prise en main communautaire. Ils se mobilisent sur des enjeux bien particuliers. Ils ne font plus confi ance aux gouvernements et souhaitent arriver des solutions sur certains problmes bien spcifi -ques. Il faut questionner ce nouveau visage du politique. Nexiste-t-il pas un risque de faire de la politique une affaire de groupes dintrts comme les autres, dune politique mene par les intrts individuels?

    La gouvernance : la formule magique du politique : le nouveau langage politique qui cher-che tablir un nouveau rapport de confi ance avec lindividu : voire le triomphe du rseau, du networking.

    Ce qui minquite : le nouveau langage se propage partout : nous parlons un langage douverture et de fermeture en mme temps : Il faut bien le dire : ce langage est sournois, il sinstalle parmi nous et nous divise. Il nous rduit. Il ne faut pas croire que la logique du repli soit uniquement laffaire des autres : des socits non-dmocratiques.

    Au contraire, il faut constater que nos socits dmocratiques deviennent plus confl ictuelles, plus acerbes : les lignes de confl it sont plus dures. Mme ici, le nous se privatise. Chaque groupe articule un nous singulier (les artistes, les municipalits, les parents, la sant, les jeunes, les ans, les immigrants) et non le nous collectif dun projet politique dune socit. Ce qui me proccupe est la diffi cult ou lincapacit penser la rconciliation : la posture de la diffrence se retrouve dans lespace dmocratique. Le terrain de la rconciliation ne nous intresse pas il drange je pense au dbat escamot autour des Excuses et dun devoir de mmoire.

    En fait, je crois quil est important de cerner la politique comme un voyage, un trajet et non simplement un lieu de destination. Comme le souligne un auteur assez mconnu de nos jours, Bertrand de Jouvenel (De la politique pure), le politique aurait bien le mrite dtre vu tel un problme sans solution; le politique nest pas simplement un lieu mais un trajet, cest un exercice pdagogique faisant place la parole, la rencontre, au dbat, au dsaccord. Le

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    politique en Acadie, cest un voyage. Je pense des extraits du fi lm de Lonard Forest, un Soleil pas comme ailleurs : en 1972, on demande des militants nationalistes de dfi nir lAcadie de lan 2000. Je pense lescale de 1979, la CONA, la fi vre nationaliste, au grand moment nationaliste acadien. Le politique se dessine alors comme un idal attein-dre pour une socit travaille par des dbats par une certaine spontanit qui semble perdue aujourdhui.

    Que faut-il alors?

    Renouer (sapproprier) avec la radicalit du discours politique, avec un discours cratif, un discours porteur de sens. Nous ne crons plus! Nous adoptons des modles, des recettes. Nous cherchons des solutions au fameux dfi cit dmocratique. Nous adoptons un discours positif, triomphaliste et satisfait. Comme le souligne Michel Roy, ce nest pas de lhistoire mais de la comptabilit des ralisations qui permet la pense acadienne davancer dans un chemin lisse, sans embches, sans fracture. Comme le dit Pierre Foucher, il y a un grand risque de se complaire dans la fi ert et lmotion de lvnementiel mais dans une Acadie de plus en plus symbolique.

    Oui, nous avons obtenu des acquis importants depuis les annes soixante. Oui, la socit acadienne respire librement aujourdhui. Mais cela doit nous mener une autre tape, celle de la rsistance.

    Rsistance ne veut pas dire raction mais au contraire un acte de cration. Je vois deux axes de rsistance dvelopper :

    1. Il est urgent de rcuprer le politique selon une dmarche critique et confl icutelle. Nous vivons une sortie du politique. Un important travail doit tre fait autour de lide de dmocratie : que signifi e rellement la dmocratie? De plus en plus, la dmocratie semble se dfi nir autour de lapaisement comme si le confl it provoquait un malaise. Il y a comme une incapacit penser le confl it au centre de lespace dmocratique, comme si le dbat devenait tout simplement inutile. Il est venu le temps de dstabiliser les perceptions reues et renouer avec le principe du confl it, cest dire laction des forces contradictoires. Il faut comprendre ici que la vie dmocratique reste du domaine de linachev, du sans solution. Il faut questionner le pouvoir, les lieux du pouvoir.

    Voir ici la possibilit de construire des lieux de dlibration viables : une assemble populaire, une assemble nationale, une assemble de la parole : limportance de rduire la dimension sectorielle de la reprsentation de la socit civile. Il sagit ici douvrir la reprsentation : une extension de la dmocratie vers le volet populaire, vers la reprsentation des forces politiques : voire le modle dune assemble de citoyens.

    2. Il faut se rapproprier les notions de temps et despace. Comme le fait remarquer Marcel Gauchet3 nos socits se dfi nissent trop dans lactivit : sommes-nous devenus des socits qui valorisent strictement laccomplissement. Des socits ou lindividu agit de faon dconcertante il ne fait que agir. Nous narrivons plus nous projeter

    3. Marcel Gauchet, Le dmocratie contre elle-mme, Paris, Gallimard, 2002.

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    dans un temps collectif, dfi nir un vrai de projet de socit, lvnement ayant plu-tt cette tendance rduire la porte du geste linstantan, limmdiatet. Ce qui compte est donc de raliser lvnement et de passer ensuite une autre tape, cest dire un autre vnement, de 1999 2004 et ensuite 2005. Consquence de ce nou-veau rapport au temps-espace, cest que lvnement devient une formule marchande, une modlisation que lon applique partout, du tragique au festival, sur un rythme de plus en plus rapide.

    Il est donc urgent de penser le projet acadien dans le quotidien, dans un espace de normalit sans aucun complexe, par exemple, dans une prise de parole citoyenne sur des enjeux politi-ques comme la dfense dun espace public francophone ouvert et pluriel, dans une prise de contact avec lautre Je partage ici le propos de Pierre Foucher. Pour ma part, je prfre vivre dans le normal, le banal, le spontan, lphmre. Cest dans ce quotidien que lacadianit existe, par exemple, notre ligue de soccer amateur international sur le terrain de lcole de St-Henri : rencontre de la diversit acadienne et francophone, de linterculturel : discussions, rires, nervement, curiosit, intgration, reconnaissance. Au dbut, le regard est inquiet mais il sadoucit graduellement. Je termine en me rfrant encore Michel Roy : Lacadianit ce nest pas un acquis, cest un devenir. Cela ne peut aller sans un largissement de notre espace mental .

    5.2 Commentaire sur le chantier ducation et savoir 4 Nicole Gallant5

    Je voudrais commencer par remercier les organisateurs pour cette occasion de parler lAcadie , ou du moins une partie de lAcadie. En effet, il ne faudrait pas perdre de vue les absents de cette Convention et nous devons rester conscients que nous qui sommes ici cette fi n de semaine sommes ceux qui se sont sentis interpells par la Convention (alors que dautres, en Acadie depuis parfois 10 ou 20 ans, ne se sentent pas inclus dans un projet aca-dien ); nous sommes du Nouveau-Brunswick seulement (les Acadiens dailleurs, mme daussi prs que la Nouvelle-cosse, sont considrs comme des observateurs ) et nous sommes en outre un chantillon de lAcadie du Nouveau-Brunswick, ceux qui sont engags dans la communaut, que ce soit comme membre dune association ou titre individuel. Cela ne devrait toutefois pas nous empcher davoir dexcellentes discussions.

    On ma demand de vous parler du chantier sur lducation et le savoir. Il sagit dun enjeu crucial. Il est important pour nous, en tant que socit, den discuter, au lieu dabandonner ce domaine aux spcialistes (psychopdagogues et autres). Oui, bien sr, je suis moi-mme un peu spcialiste : je fais certaines recherches sur lcole et lducation (mme si je suis politologue et non psychopdagogue) et je suis professeure duniversit (mme si je ne suis pas enseignante dans une cole). Mais je vous parle aussi comme citoyenne, une citoyenne qui a vcu, comme beaucoup dentre vous, le systme scolaire francophone du Nouveau-Brunswick, dabord comme lve ( Champlain, Vanier, Mathieu-Martin, puis lUniversit de Moncton) et maintenant comme parent dun enfant qui vient de commencer la mater-

    4. Ce texte est la version crite dune allocution prononce lors la Table ronde inaugurale de la Convention.

    5. Nicole Gallant est professeure de science politique lUniversit de Moncton (Centre universitaire de Moncton).

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    nelle. Pour nous, citoyens, cest notre droit mais aussi notre devoir, collectivement, comme devoir, collectivement, comme devoirsocit, de dterminer les grandes fi nalits de lcole, fi nalits que les spcialistes auront pour tche de mettre en uvre6.

    Rappelons dabord que le rle de lcole est double. Le rle premier, et le plus vident, de lcole est celui de la scolarisation, qui consiste en la transmission de connaissances ou de savoirs, que les enseignants apprennent aux lves7, dans les diffrentes matires qui fi gurent au programme (grammaire, mathmatiques, sciences naturelles, et cetera). Mais lcole joue aussi un rle de socialisation des jeunes (apprentissage de lautorit abstraite, du fonction-nement de la vie en socit, et cetera). Ce rle de socialisation est important dans toutes les socits, mais il prend une dimension toute particulire en milieu minoritaire ou acadien. Cest surtout de cette fonction de socialisation particulire dont nous allons parler dans ce chantier de la Convention. Ce soir, jaborderais quelques grands thmes qui traversent les trois ateliers de ce chantier.

    La qualit en ducation

    Le premier grand thme, cest la qualit. Notre systme scolaire doit favoriser le dveloppe-ment dune culture de lexcellence . En particulier, il nous faut absolument trouver les moyens de contrer les tendances qui font que nos lves, compars aux autres lves du Canada, russissent moins bien au niveau secondaire : les lves francophones en milieu minoritaire ont un rendement plus faible que les autres Canadiens, en particulier en ce qui a trait lcriture8; nous avons au Nouveau-Brunswick le taux dchecs le plus lev au Canada et la situation est plus grave chez les lves francophones que chez les anglophones9. Ce nest pas cette situation que nous voulons. Ce que nous voulons, ce sont (au moins) les mmes niveaux que les autres Canadiens en mathmatiques, en sciences et dans toutes les disciplines. En particulier, nous devons trouver des moyens damliorer la qualit du franaiset d arrter de produire des analphabtes , comme disait Lise Ouellette RDI (le 1er octo-er octo-er

    bre 2004), en parlant des 60 % danalphabtes fonctionnels que rvlent des tudes sur le Nouveau-Brunswick francophone.

    6. Les objectifs et programmes scolaires ne sont pas des fi ns en soi; ils doivent rpondre aux grandes fi nalits ducatives de lcole acadienne . Voir Pierre Paillard, Rfl exion sur lcole acadienne : la recherche dun fondement et dune orientation , galit, Numro spcial Lcole acadienne , numro 11, hiver 1984, galit, Numro spcial Lcole acadienne , numro 11, hiver 1984, galitp. 81.

    7. En fait, selon la mode actuelle en ducation en Amrique du Nord, les enseignants accompagnent plutt les lves dans leur propre apprentissage de ces connaissances. Lenseignement est centr sur llve davantage que sur lenseignant, comme le souligne Elizabeth Coelho, Social integration of immigrant and refugee children , dans Educating Second Language Children, sous la direction de Fred Genesee, Cambridge : Cambridge University Press, 1994, p. 310.

    8. Conseil des ministres de lducation (Canada) Rsultats pancanadiens des lves francophones en milieu mino-ritaire au Programme dindicateurs du rendement scolaire (PIRS) Rapport analytique, 25 octobre 2004 (tude dirige par Rodrigue Landry et Ral Allard).

    9. Rsultats du Bulletin Fraser , rapports par lAcadie Nouvelle : Un taux dchecs alarmant , Cahier sp-cial, samedi 23 octobre 2004, p. 5; Le point sur lducation , ditorial, mardi 26 octobre 2004, p. 12.

  • 12 Convention 2004

    Comment faire pour obtenir cette qualit? Je dirais en valorisant et en exigeant. Il faut valo-riser la langue et en particulier la langue bien matrise, de mme que lcole. Cest nous riser la langue et en particulier la langue bien matrise, de mme que lcole. Cest nous riserde le faire : nous comme parents, mais aussi nous comme socit. Il faut aussi exiger, exiger, exiger rehausser la barre . Nous ne pouvons pas nous permettre de nous trouver des prtextes, comme quoi il serait normal dtre moins bons parce que on est juste des petits Acadiens . linverse, nous ne devons pas non plus nous contenter de peu, en tant trop positifs sur nos volutions. Oui, il y a eu de bons dveloppements et de nettes amliorations (le bac-calaurat international offert Mathieu-Martin en est un exemple au niveau des structures scolaires; autre exemple de progrs, mais sur le plan social : je croise souvent danciens camarades dcole qui parlaient beaucoup anglais ou, au mieux, franglais lpoque et qui maintenant ont le souci de parler uniquement en franais devant leurs enfants). Certes, il est important de faire du renforcement positif; il faut donc nous rjouir de ces volutions. Mais il faut aussi maintenir des attentes leves. Je le vois avec mes tudiants, exiger, a motive, et a conduit vers lexcellence.

    Cette valorisation et cette exigence de la qualit devraient se trouver dans nos coles et aussi partout dans la socit. Il faut que nous, comme parents surtout mais aussi comme socit, acceptions et mme souhaitions tre dpasss par nos enfants, ce qui inclut accepter que ceux-ci matrisent mieux la langue franaise que nous. Pour cela, il ne faut surtout pas que les parents, les voisins et les autres membres de la communaut peroivent cette amliora-tion du franais comme un rejet ou un abandon de la communaut. Ce choix ne signifi e pas abandonner sa communaut et vendre son me au diable dans le but damliorer ses conditions socioconomiques personnelles. Bien au contraire, il sagit l dun vritable engagement, un engagement envers la communaut et sa prennit. engagement, un engagement envers la communaut et sa prennit. engagement

    La francisation

    Le deuxime grand thme que je souhaite aborder est celui de la dmographie et un de ses corollaires en milieu scolaire, la francisation , cest--dire lenseignement du franais aux ayants droit , ces enfants qui ont le droit lcole franaise en vertu de la Charte cana-dienne des droits et liberts, mais qui ne parlent pas toujours le franais. Je ne suis pas dmographe, mais il me semble quon peut distinguer trois grandes portes dmographiques pour une communaut ou un peuple quelconque (des portes qui constituent chacune un type dentre et de sortie dans la population dun groupe donn). La plus vidente est la porte biologique, cest--dire la natalit et la mortalit. Un des moyens vidents pour un groupe donn daccrotre ses effectifs est daugmenter le nombre des naissances. Or, et fort heureusement, on ne fait plus aujourdhui des enfants par devoir patriotique . Nous pou-vons, par contre, tenter de faire reculer lchance du dcs, notamment en amliorant la sant10. Quoique lcole ait un rle jouer dans lamlioration de la sant publique, notam-ment en ce qui a trait aux habitudes de vie et la prvention, ce nest pas au niveau de la porte biologique que lcole a un vritable potentiel dmographique.

    Les deux autres portes sont plus intimement lies, dabord entre elles, mais aussi, dans le cas de la troisime, avec lcole. La seconde est gographique, il sagit de larrive dimmigrants

    10. Encore ici, videmment, la dmographie nest pas le moteur principal de ces efforts.

  • Rapport fi nal 13

    sur le territoire et, du ct des sorties, de lexode (auquel la culture de lexcellence voque plus haut pourrait tre un frein). Mais la prsence (ou labsence) sur le territoire ne suffi t pas tout fait, surtout en milieu minoritaire. Pour que larrive gographique devienne un facteur dmographique, il faut gnralement aussi passer par la troisime porte, qui est iden-titaire. En milieu minoritaire, cest le sentiment dappartenance qui fait gonfl er les rangs de la communaut11. Cest donc ici, au niveau des entres, que nous retrouvons les ayants droit et les immigrants voqus plus haut. En ce qui concerne les sorties identitaires (le rejet de lappartenance la communaut acadienne), encore ici nous pouvons y mettre un certain frein par la valorisation et la conscientisation.

    Mais je voudrais mtendre un moment sur les entres identitaires et le dfi de la francisa-tion. Certes, il se pose une foule de questions dordre pratique sur la francisation, auxquelles les experts et les intervenants fournissent diverses rponses, qui ne concordent pas toujours. Ainsi, on sinterroge sur le lieu le plus appropri et sur le comment de la francisation : est-il prfrable quelle se fasse en maternelle (publique) ou en garderie12? Faut-il plutt faire pas-ser ces enfants par limmersion franaise et ne les inclure dans nos coles quune fois franci-ss? Si oui, pendant leur passage en immersion, ils apprendraient certes le franais, mais ils resteraient chez les anglais , tant sur le plan numrique (donc dmographique) que sur le plan identitaire et culturel (en raison, dune part, du milieu social dans lequel ils baigne-raient et, dautre part, des contenus de programmes qui sont trs diffrents en immersion contrle par le secteur anglophone du Ministre de lducation de ceux dans nos coles francophones)13. Mais au-del de ces questions relativement pratiques se pose une question socitale plus fondamentale, et plus dlicate : est-ce que nous les voulons? Est-ce que nous voulons vraiment faire de nos coles des outils de recrutement? Pour certains de ces ayants droit qui ne parlent pas encore le franais, il est important, pour la socit acadienne, de faire les efforts pour les franciser et les inclure dans notre communaut. Mais pour dautres, quels que soient les efforts dploys, ils resteront de petits anglais , non seulement au niveau de la langue (et couter certains jeunes Acadiens parler dans nos coles du Sud-est, on ne voit pas toujours la diffrence), mais aussi au niveau identitaire justement. La prin-

    11. Sans lui, ces nouveaux arrivants intgrent plutt, ne serait-ce que dmographiquement, la communaut majoritaire.

    12. Les coles ont de nouvelles ressources en francisation cette anne, mais tre plong dans une classe fran-cophone est certainement diffi cile pour le jeune, chez qui les diffi cults de lapprentissage dune langue presque nouvelle sajoutent au dfi normal de ladaptation au milieu scolaire et sa routine. Au contraire, la Fdration canadienne des enseignants estime que le dveloppement des services en franais la petite enfance des communauts francophones du pays constitue le meilleur moyen de [ ] favoriser leur recrute-ment par lcole de langue franaise . Anne Gilbert, CIRCEM et FCE, La petite enfance : porte dentre lcole de langue franaise. Une vision nationale, Rapport fi nal de la recherche, CIRCEM, mars 2003, p. 27.

    13. Pour ces raisons, et bien quaucune tude statistique ne le dmontre, il me semble que les programmes dim-mersion peuvent tre considrs comme des foyers dassimilation des ayants droit. cet effet, rappelons les dbats autour de l affaire Grand-Sault au dbut des annes 1980, alors quune cole anglophone rcla-mait le droit dadmettre dans son programme dimmersion des enfants de langue maternelle franaise. ce sujet, voir Pierre Foucher, Analyse critique du jugement du juge Richard dans laffaire de Grand-Sault , galit, Numro spcial Lcole acadienne , numro 11, hiver 1984, pp. 107-114; le jugement lui-mme est galit, Numro spcial Lcole acadienne , numro 11, hiver 1984, pp. 107-114; le jugement lui-mme est galitreproduit dans le mme numro sous le titre Laffaire Grand-Sault , pp.129-153. De nos jours, les classes dimmersion dans les coles anglaises comptent de nombreux enfants ayants droit.

  • 14 Convention 2004

    cipale distinction entre les deux types dayants droit (cest--dire, si je puis dire les choses brutalement, entre ceux qui en valent la peine et les autres), cest lengagement des parents. En effet, cest lengagement des parents qui semble favoriser le plus la russite de llve en francisation notamment parce que les parents feront un suivi la maison, dans la mesure de leurs capacits et, par ricochet, lengagement de lenfant lui-mme et, donc, son senti-ment dappartenance la communaut francophone du Nouveau-Brunswick14.

    Le niveau prscolaire

    Un mot maintenant sur un troisime enjeu de lducation en Acadie : le prscolaire. Il est maintenant tabli quil sagit dune tape cruciale dans la construction du sentiment dap-partenance15. Pour cette raison, il est important que la socit prenne davantage en charge les services la petite enfance, en cessant de les considrer uniquement comme des services privs que les parents achtent pour pouvoir travailler. Les garderies font face dim-portantes diffi cults, qui peuvent nuire la qualit de leurs services, y compris sur le plan identitaire. En milieu minoritaire francophone au Canada, deux des principales diffi cults rencontres par les services la petite enfance sont lies, dune part, la formation et, dautre part, au niveau de langue : en somme, il est trs diffi cile de trouver du personnel qualifi qui matrise bien le franais, voire, dans certaines rgions, qui parle cette langue, ce qui oblige des choix souvent dchirants entre langue et formation 16.

    Encore ici, il faut pouvoir rehausser la barre de la qualit. Nous devons augmenter nos exigences en ce qui a trait au personnel auquel, comme socit, nous confi ons nos enfants. Lorsquils ne sont pas la maison, nos jeunes enfants doivent tre encadrs par du personnel qualifi aussi bien en technique de garde17 quen franais. Les programmes de formation en services la petite enfance doivent donc tre assortis dune bonne formation linguistique. Cela signifi e aussi quil faut pouvoir augmenter les salaires de cette profession, qui sont gnralement drisoires et qui constituent lune des principales raisons du taux de roulement du personnel dans les garderies, les employs prfrant souvent quitter leur poste ds quun emploi mieux rmunr leur est offert. Si nous voulons nous doter de services de garde de qualit, il sera donc ncessaire, comme socit, de mieux les fi nancer (soit directe-ment, par des subventions aux garderies, soit indirectement, par un remboursement partiel aux parents), afi n que les parents ne soient pas les seuls porter le fardeau conomique de ce choix de socit important.

    Or, dans la situation actuelle, il est diffi cile pour la socit acadienne de prendre de telles dcisions, cest--dire de prendre en charge les services la petite enfance, afi n de pouvoir

    14. ce sujet, voir Rodrigue Landry et Ral Allard, Lexogamie et le maintien de deux langues et de deux cultu-res : le rle de la francit familioscolaire , Revue des sciences de lducation, vol. XXII, no. 3, 1997, p. 561-592 et Sophie LeTouz, Lcole en milieu minoritaire. Pratique communautaires en petite enfance : Synthse des tudes de cas, CIRCEM, Universit dOttawa, mars 2003, p. 38.

    15. Vickie Coghlan et Joseph Yvon Thriault, Lapprentissage du franais en milieu minoritaire. Une revue documen-taire, CIRCEM, Universit dOttawa, juin 2002, p. 1; LeTouz, op. cit., p. 1.

    16. Gilbert, op. cit., 46. Voir aussi pp. 19 et 31, ainsi que LeTouz, op. cit., pp. 6, 15 et, surtout, 17-18.

    17. Pour linstant, au Nouveau-Brunswick, les cours de technique dducation en services de garde ne sof-frent que dans deux collges communautaires. En franais, il nest disponible qu Campbellton.

  • Rapport fi nal 15

    notamment fi nancer le choix de qualit voqu ci-haut, mais aussi afi n de pouvoir faciliter laccs des ressources pdagogiques adquates et en franais18. Pour que ce contrle col-lectif notre chelle acadienne soit possible, il faudrait que le contrle gouvernemental sur les services la petite enfance soit empreint dune plus grande dualit. Ceci pourrait se faire soit en plaant ces services sous la responsabilit du Ministre de lducation, qui, comme on le sait, connat dj la dualit, soit en instaurant la dualit dans dautres ministres, en loccurrence celui des Services familiaux et communautaires, dont relvent prsentement lessentiel des services la petite enfance19. Pour ne pas attendre que nos gouvernements se dcident tendre la dualit plus de champs daction, on pourrait aussi imaginer une prise en charge plus directe et plus gnralise par la socit civile (par le biais notamment de la nouvelle assemble dlibrante qui est propose cette Convention)20. Mais ceci suppose un important engagement de la part de la communaut acadienne.

    Lcole et lengagement

    En fait, il serait important de susciter un plus grand engagement de la communaut dans tous les niveaux de lducation. En effet, on constate que peu de parents sengagent dans les structures scolaires. Bien que cela soit dplorable, ce nest pas trs surprenant, dans la mesure o les parents sont dj trs occups sils sengagent activement (quoique individuellement) dans lducation de leur enfant. En fait, lengagement de la communaut dans le milieu scolaire devrait de toute faon tre beaucoup plus large et ne pas se limiter seulement aux parents. Il y a des questions sociales de lducation qui dpassent largement lexprience parentale. Il existe dj certaines structures scolaires qui accueillent en leur sein des reprsentants de la communaut, titre non professionnel, sans quils aient tre aussi des parents. Ainsi, il y a videmment les Conseils dducation de district (CED), qui sont lus, mais il y a aussi de la place pour des membres de la communaut non parents dans les nouveaux Comits parentaux dappui lcole, qui sont bnvoles. En outre, il existe aussi des occasions plus informelles et sporadiques pour la participation des gens de la communaut dans les coles de leur rgion. Notamment, il faudrait augmenter et largir la pratique qui consiste inviter des gens de la communaut dans les coles21.

    18. Certains centres de ressources pdagogiques prscolaires francophones existent dj, mais il faudrait trou-ver des moyens pour les pauler et les renforcer, car le matriel pdagogique est un des besoins criants des services la petite enfance. Voir, encore, LeTouz, op. cit., p. 19 et Gilbert, op. cit.

    19. Certaines responsabilits pour la petite enfance incombent aussi au Ministre de la sant et du mieux-tre.

    20. Dans la situation actuelle, les services de garde en franais sont gnralement crs linitiative de parents ou de groupes communautaires locaux spcialiss, mais rarement par des associations francophones provin-ciales. On attribue toutefois quelques projets ces associations, notamment en Ontario et en Alberta. Voir LeTouz, op. cit., p. 13-15 et Gilbert, op. cit., p. 15-16.

    21. Sur la participation de la communaut dans les coles, voir Lon Richard, Lcole lcoute de la commu-naut , galit, Numro spcial Lcole acadienne , numro 11, hiver 1984, pp. 103-106. Un programme galit, Numro spcial Lcole acadienne , numro 11, hiver 1984, pp. 103-106. Un programme galitassez systmatique le fait prsentement, mais dune manire partielle, lorsque les parents (ou grands-parents, et cetera) sont invits lcole pour une journe consacre leur enfant. Or, encore ici, le rapport entre communaut et cole se limite la parent, et ce, de deux manires : 1) seule la classe de cet enfant bnfi ciera de la prsentation du parent et 2) les membres de la communaut qui ne sont pas parents (au sens de parent) avec des lves ne sont pas concerns par cette mesure.

  • 16 Convention 2004

    Ceci tant dit, le dsengagement communautaire et social est loin dtre exclusif au secteur scolaire, et il est loin, aussi, dtre un phnomne propre lAcadie. En effet, on constate un peu partout en Occident une baisse de la participation des gens tant dans le secteur ducatif que dans lensemble des associations sociales22. Ce phnomne est certes complexe et il nexiste videmment pas une unique solution qui rglerait lensemble du problme23. Il me semble nanmoins que lcole peut faire partie de la solution. En effet, dans la mesure o ses enseignants sont eux-mmes sensibiliss cette dimension, lcole peut remplir un rle trs important dans la conscientisation des jeunes. Elle peut remplir ce rle notamment en ce qui a trait lengagement civique, justement. Toujours dans la mesure o les enseignants y sont sensibiliss, par conviction personnelle mais aussi par leur formation, ils peuvent et doivent conscientiser les lves sur leurs droits, en particulier linguistiques, et sur limpor-tance dexiger des services en franais, de mme que, plus globalement, sur la ncessit de se prendre en main collectivement.

    Au-del de la sensibilisation lengagement civique, lcole joue un rle crucial dans dautres formes de conscientisation, en particulier en ce qui a trait ce que jvoquais plus haut : la valorisation de la langue. Encore ici, cela signifi e que les enseignants doivent tre sensibles cette question. En particulier, ils doivent, dans ce domaine peut-tre plus que tout autre, chercher donner un bon exemple en sexprimant dans une langue, certes comprhensible, mais la plus impeccable possible. En somme, ils doivent eux-mmes utiliser un franais de qualit. Malheureusement, cela ne semble pas tre toujours le cas; cest parfois dsolant de lire la documentation en provenance des coles (mmos dactylographis ou commentaires des enseignants et des autres intervenants du milieu scolaire, y compris en littratie [sic]). Par moments, pour dire les choses franchement, cest sen arracher les cheveux. Dire que cest entre autres deux que nos enfants apprennent lire, crire et mme parler...

    Par ailleurs, lcole a aussi un rle de conscientisation remplir en ce qui a trait prparer le terrain de la diversit , comme lcrivait mon collgue Chedly Belkhodja dans son docu-diversit , comme lcrivait mon collgue Chedly Belkhodja dans son docu-diversitment prparatoire pour latelier Identit et diversit du chantier Vitalit linguistique, artistique et culturelle . En effet, lcole est un milieu propice pour favoriser le dvelop-pement dune identit inclusive. Certes, lidentit, on le sait, se forge dans toutes les sphres de la socit, et notamment dans la famille, mais on sait aussi que lcole peut jouer un rle important dans la construction identitaire de lindividu. Dans ce contexte, si nous souhaitons que la socit francophone du Nouveau-Brunswick souvre limmigration et la diversit, quelle soit accueillante et quelle intgre les nouveaux arrivants suffi samment pour quils choisissent de rester, alors lcole doit emboter le pas de cette transformation sociale en inculquant aux lves, je me rpte, une identit qui soit inclusive. Concrtement cela signifi e que les enseignants doivent utiliser des marqueurs identitaires quil est possible dacqurir (langue, territoire, participation sociale, sentiment dappartenance), au lieu de se rfrer aux origines, lhritage, lhrdit, au lieu de naissance, et cetera, pour dfi nir lap-partenance lAcadie ou, du moins, la communaut francophone du Nouveau-Brunswick.

    22. Pour une courte synthse de ces tendances, chiffres lappui, voir Robert D. Putnam, La socit civile en dclin : pourquoi? et aprs?, Ottawa : Centre canadien de gestion, 1996.

    23. Dans une explication qui semble trs plausible, Putnam (op. cit.) identifi e la tlvision comme le principal responsable de ce dsengagement.

  • Rapport fi nal 17

    Certes, il est important denseigner lhistoire nos lves; trop dentre eux en sont presque compltement ignorants. Je ne voudrais donc pas laisser croire que je voudrais que nous omettions lhistoire acadienne de nos programmes. Mais, au niveau identitaire, ce nest pas tant sur lhistoire de la Dportation, par exemple, quil faut concentrer notre attention. Il faut plutt nous concentrer sur qui nous sommes aujourdhui (plutt que sur qui taient nos anctres). Sur le plan historique, il faut certes tenir compte de ce quil reste aujourdhui de notre histoire dans ce que Rene Blanchar a appel notre psych collectif , mais le fait de rorienter notre rfl exion identitaire sur lAcadie daujourdhui, sans compter que cela risque daccrocher davantage des jeunes (qui vivent dans une culture de limmdiat transnatio-nal, si je puis dire), permet en outre de mettre laccent sur des caractres qui sacquirent. En effet, si les composantes de lidentit acadienne sacquirent, alors lidentit acadienne elle-mme pourra sacqurir et les Acadiens dadoption (quils viennent du Qubec ou de nimporte o dans le monde) pourront plus facilement se sentir chez eux ici, se sentir partie prenante de lAcadie, se sentir interpells par le projet collectif acadien... et ils viendront en plus grand nombre la prochaine Convention.

    Tout ce que je viens dnumrer sajoute au fardeau dj considrable qui pse sur les paules des enseignants. Pourtant, leur travail est un des piliers de notre socit (et devrait dailleurs tre revaloris pour cette raison). Pour quils soient outills convenablement pour faire ce travail de conscientisation et de valorisation, il leur faut une formation adquate. Je laisse aux spcialistes le soin de dvelopper les dtails dune pdagogie propre notre milieu minoritaire acadien, mais je prciserais quil me semble que, si cette pdagogie doit imp-rativement tenir compte des ralits du milieu, elle doit surtout pouvoir amener llve dpasser cette ralit, et participer pleinement la culture de lexcellence, quel que soit son milieu dorigine. En effet, tant la valorisation des variantes linguistiques locales qu une sensibilit aux ingalits sociales et leur lien avec lusage diffrenci des langues ne devraient pas conduire un populisme qui aurait fi nalement comme rsultat dinterdire aux milieux populaires lapprentissage du franais standard 24.

    La recherche en Acadie

    En dernier lieu, je me dois de glisser un mot sur latelier La recherche en Acadie . mon sens, ce thme comporte deux volets : la recherche en Acadie et la recherche sur lAcadie. La sur lAcadie. La surquestion principale concernant la recherche en Acadie, cest de savoir si nous voulons quil soit possible dexceller au point de pouvoir faire, par exemple, de la biologie de pointe tout en tant en Acadie. Cela contribuerait certes la culture de lexcellence que jvoquais plus haut et cela ralentirait vraisemblablement une partie de lexode de nos jeunes. Si tel est notre dsir, comme socit, alors il faudra nous doter des moyens de le faire, cest--dire les ressources, notamment fi nancires, et le temps pour des chercheurs spcialiss25. Si nous ne pouvons ou ne choisissons pas dinvestir dans la recherche de pointe en Acadie, alors il

    24. Coghlan et Thriault, op. cit., p. 13.

    25. Ladministration de lUniversit de Moncton semble tre bien inconsciente de cette ncessit (et de bien dautres, notamment celle de rduire, sinon au moins limiter les hausses des frais de scolarit) lorsque le recteur clame quelle na pas besoin de rclamer plus dargent en vertu de sa mission particulire comme institution francophone en milieu minoritaire. Voir LAcadie Nouvelle, jeudi 23 septembre 2004, p. 4.

  • 18 Convention 2004

    faudra oprer certains choix pour tablir des priorits. En effet, il est diffi cile pour une petite socit davoir des spcialistes de pointe dans tous les domaines.

    Que nous tablissions ou non des priorits en matire de recherche, la recherche sur lAca-sur lAca-surdie fi gurera toujours au tableau de nos activits. ce sujet, jaimerais simplement insister sur la ncessit, voque dans le document prparatoire de cet atelier sign par Jeanne dArc Gaudet, de comparer et de contextualiser nos recherches sur lAcadie. Par exemple, en examinant les efforts dorganisation de la socit civile en une ventuelle assemble dli-brante (dont nous discuterons cette fi n de semaine dans le chantier Gouvernance ), il serait utile de les comparer avec des efforts similaires faits par dautres minorits nationales, dans dautres contextes, que ce soit lAssemble communautaire fransaskoise ou les modes dorganisation des autochtones un peu partout dans le monde. Par ailleurs, dans tous les domaines des sciences humaines et sociales, mais en particulier dans la recherche sur lAca-die, il est important de trouver des moyens de faire part de nos analyses la socit civile et de communiquer avec elle. Cest ce que jai tent de faire ce soir.

    En guise de conclusion, jaimerais simplement insister encore sur les deux aspects qui me semblent les plus centraux pour ce chantier. Il me semble quil nous faut nous doter dune ducation de qualit et dune ducation fortement ancre dans une ducation de qualit et dune ducation fortement ancre dans une ducation de qualit communaut forte, communaut forte, communaut engage, faisant preuve de vitalit et envers laquelle lcole devrait renforcer lengagement des nou-velles gnrations. Notre avenir collectif en dpend. Il en va donc de notre responsabilit sociale collective.

    5.3 Commentaire sur le chantier vitalit linguistique, artistique et culturelle Rene Blanchar

    En prenant connaissance des trois textes de rfl exion du chantier vitalit linguistique, artis-tique et culturelle , je dois tre franche avec vous; je me suis demande Pourquoi? avoir pens moi pour ragir ces documents

    Si je me sens assez comptente pour commenter le texte rdig par David Lonergan portant sur le secteur artistique et culturel, en revanche, il me semble diffi cile, quand on nest pas un expert, de commenter des documents comme : Identit et diversit rdig par Chedly Belkhoja, et lamnagement linguistique , un texte dAnnette Boudreau.

    Ceci tant dit, je me sens nanmoins concerne par les propos des textes en question; dabord parce que je suis Acadienne, parce que je vis et travaille en franais et enfi n, parce que jhabite le Nord de la province du Nouveau-Brunswick. Aussi, bien sr, parce que jai le statut dartiste . Personnellement, jai toujours un peu de diffi cult avec le fait dtre dsi-gne comme une artiste parce que pour moi, accder au statut dartiste implique un parcours, un cheminement que je ne possde pas tout fait encore. Le statut dartiste , en ce qui me concerne, revt quelque chose de lordre du sacr. Je suis franchement plus con-fortable avec lide que je suis une artiste en devenir, chose que je serai probablement jusqu en devenir, chose que je serai probablement jusqu en devenirma mort mme si je compte vivre vielle, vielle, vieille En sant, il va sans dire! De toute faon, si vous rsidez dans le Nord du Nouveau-Brunswick, vous navez pas dautre choix que de rester en sant Surtout si vous habitez Caraquet, Saint Quentin ou Dalhousie

  • Rapport fi nal 19

    Donc, je ne prtends pas tre en mesure de commenter de manire claire et savante les textes de rfl exion. Or, je peux partager avec vous, de la manire la plus honnte possible, mon exprience en tant quartiste en perptuel devenir qui a dlibrment choisi de vivre en Acadie, plus prcisment Caraquet, ville qui a eu le culot de sautoproclamer Capitale de lAcadie ce qui en dit long sur ltat desprit de ses habitants.

    Jestime que cest un rel privilge que de pouvoir se pencher sur des enjeux aussi importants que la gouvernance, lducation, la culture et lconomie. vrai dire, quand on y pense, cest un luxe. Si lAcadie se donne les moyens de le faire, si elle a la volont, lnergie, les ressources intellectuelles et le talent ncessaire, cela doit vouloir dire que, quelque part, nous devons faire quelque chose de bien.

    Mes chers amis, je vais donc, sans plus tarder, essayer de vous stimuler en commentant, dans stimuler en commentant, dans stimulerun premier temps, le texte de Chedly Belkhodja sur lidentit et la diversit.

    Je relve tout dabord dans ce texte le passage suivant : Il me semble que le projet acadien des annes actuelles sinscrit dans deux nouveaux imaginaires du monde prsent. Une premire image est louverture sur le monde, lAcadie profi tant pleinement de la multiplication des rseaux dans dif-frents secteurs, soit conomique, culturel, social. Les mots qui prennent de limportance sont ceux douverture, de circulation, de communication, de fl uidit. Une seconde image est la posture identi-taire, voire diffrentialiste. De faon paradoxale, louverture vers le global provoque un processus de la redcouverte de soi et de ses diffrences .

    Louverture vers le global provoque un processus de la redcouverte de soi et de ses diffrences. Lide que louverture vers lautre passe par une meilleure connaissance de soi, de son iden-tit, de son histoire, me semble particulirement intressante, en ce moment, cause du 400e anniversaire de la fondation de lAcadie dune part, qui nous amne retracer nos ori-gines, mais aussi, cause du 250e anniversaire de la Dportation en 2005, qui est une date toute aussi importante; quon le veuille ou non, le nettoyage ethnique acadien est lun des vnements fondateurs de notre identit Le temps me semble donc propice cette qute, cette comprhension en profondeur de qui nous sommes.

    Dans mon prochain documentaire intitul 1755, Le souvenir ncessaire, je me suis pen-che avec le pote Serge Patrice Thibodeau et la productrice Ccile Chevrier, entre autres, sur la question de la Dportation, justement. Nous avons essay de comprendre, de dmystifi er ce triste vnement, de le qualifi er et de voir sil restait quelque chose de la Dportation dans notre psych collective Le rsultat de notre dmarche est assez tonnant et fort rv-lateur

    En ce qui me concerne, jestime que lexercice de revisiter notre histoire, de lassumer et de la comprendre est ncessaire parce quil nous permet, par exemple, de nous situer par rap-port lhistoire mondiale. Contrairement plusieurs, je suis convaincue que lAcadie doit passer par cette tape cruciale pour aller plus loin.

    En admettant que la Dportation ait t un nettoyage ethnique, le premier de lhistoire mon-diale moderne partir du sicle des lumires, notre perception du monde et de ce qui sy passe change forcment; notre regard sur la Palestine ou lex-Yougoslavie, par exemple, est

  • 20 Convention 2004

    diffrent, parce que tout coup, on tablit un lien direct avec lhistoire, on se situe en quelque sorte. Jimagine que, en faisant rfrence au texte de Chedly, a doit tre a chercher fi xer son identit .

    Il me semble que cest l une tape importante de notre cheminement car nous connaissons, en ce moment, un espce dge dor en Acadie. De toute vidence, notre reconnaissance sur dge dor en Acadie. De toute vidence, notre reconnaissance sur dge dorle plan national, voire international, na jamais t aussi grande. Or, personnellement cela minquite un peu parce que je me demande O allons-nous aller ensuite? Vers quoi, vers quel idal allons-nous tendre? Comment poursuivre notre formidable progression? vrai dire, je lignore, mais je crois quune partie de la rponse se trouve dans un retour la fois critique et profond sur qui nous sommes, non pas pour nous replier sur nous-mmes, mais au contraire, pour se librer dun poids que nous portons. Lorsque nous nions ce poids, nous sommes dans le mme processus de dni psychologique que les autres peuples de la plante qui comme nous ont subi des violences organises.

    Dans lanalyse de Chedly Belkhodja, il est question dimmigration Lauteur propose, entre autres, une plus grande ouverture sur la grande famille francophone. Ici, je peux tmoigner de mon exprience personnelle, puisque je partage ma vie depuis 12 ans avec un Franais. Jestime que nous nous en trouvons mutuellement grandi, cause de nos diffrences cul-turelles certes, mais aussi au contact de nos milieux respectifs. Il est certain que le fait de ctoyer dautres francophones de par le monde, si les rencontres seffectuent sous le couvert du respect et de louverture, ne peut savrer que bnfi que.

    Toutefois, lamour ntant pas toujours un facteur dterminant, je me demande, par ailleurs, lamour ntant pas toujours un facteur dterminant, je me demande, par ailleurs, lamour ntant pas toujours un facteur dterminant com-ment nous allons russir attirer des immigrants en rgion? Pour que les rgions deviennent ment nous allons russir attirer des immigrants en rgion? Pour que les rgions deviennent mentdes endroits attrayants pour les nouveaux arrivants, il faut dabord croire que les rgions ont un potentiel, quelles ont quelque chose offrir. Il faut aussi la volont politique nces-saire leur panouissement. Cela passe, entre autres, par la protection de lenvironnement. Personne ici ne va me convaincre que la prsence dun incinrateur toxique sur un territoire donn va savrer un atout supplmentaire pour attirer des nouvelles familles.

    Dans un mme ordre dides, il me semble vital de sassurer que les rgions continuent doffrir des services essentiels je pense videmment aux soins de sant. Quel immigrant dsireux de fonder une famille choisirait de sinstaller dans un territoire o lon envoie les femmes enceintes accoucher ailleurs? Cest pourtant cette ralit qui guette la Pninsule acadienne avec la rforme des soins de sant quon impose lensemble de la population rurale du Nouveau-Brunswick. En fermant le dpartement dobsttrique de lHpital lEn-fant-Jsus de Caraquet, il ny aura plus de naissances dans la Pninsule acadienne. mon avis, le jeune couple dimmigrants qui apprend que les femmes enceintes vont accoucher ailleurs, sinstalle ailleurs.

    Enfi n, la vitalit culturelle peut aussi savrer un aspect important pour limmigrant qui choisirait dhabiter une rgion donne Il faut donc encourager lexpression artistique et la valoriser. Un des grands dfi s contenu, selon moi, dans les concepts de globalisation et de mondialisation, rside dans le maintien, tant en rgion, quen milieu urbain, dune certaine intgrit culturelle et dun tissu social fort. Si lAcadie veut souvrir sur le monde et cela est tout

  • Rapport fi nal 21

    fait lgitime, elle doit faire preuve dune plus grande solidarit et veiller ce que TOUS les lments qui en font une culture unique soient prservs.

    Amnagement linguistique

    Le texte de Madame Annette Boudreau aborde la question de lamnagement linguistique. Jaimerais apporter deux remarques :

    La premire concerne la langue. Sil est vrai quil faut encourager, respecter, faire valoir la spcifi cit des langages acadiens, il faut aussi faire preuve de rigueur et douverture. La sp-cifi cit, si elle se rduit une srie de codes comprhensibles pour un petit groupe donn, me semble dangereuse parce quelle isole les individus. Ce quon veut dans le fond, cest tre compris par le plus grand nombre de gens possible. La langue la faon dont on sexprime refl te aussi qui nous sommes. Elle est directement lie lducation que nous recevons tant au sein de notre famille qu lcole. Je suis de ceux et celles qui pensent que le franais, on ne le connat jamais assez.

    On aborde aussi dans le texte de Madame Boudreau, la loi sur les langues offi cielles qui reconnat lgalit des deux communauts linguistiques. Dans les dispositions de cette loi, on mentionne laccs pour le contribuable, des soins de sant dans la langue de son choix. Il semblerait que le plan de restructuration de sant du ministre de la Sant et du Mieux tre du Nouveau-Brunswick, en ce qui a trait du moins au Nord du Nouveau-Brunswick, ne tienne pas compte de cette disposition de la loi.

    La rvision judiciaire, mise de lavant par la ville de Caraquet, me semble tre une dmarche extrmement importante pour lensemble des francophones de la province et elle doit tre appuye. On peut voir cette requte comme un test pour la loi sur les langues offi cielles. Il me semble que le Conseil de lamnagement linguistique du N.-B. se doit de suivre cette affaire de trs prs.

    Par ailleurs, je me permets une observation trs personnelle. Je trouve quil y a une dimen-sion symbolique importante dans la dmarche entreprise par la ville de Caraquet, car quon le veuille ou non, le jugement fera forcment offi ce de rfrence. On pourrait, la limite, tablir un parallle entre cette affaire et le jugement Marshall pour les communauts autoch-tones. Cest pourquoi, jestime que le jugement qui sera rendu en dcembre 2004 aura une incidence sur lensemble des communauts francophones de la province et non seulement sur les rsidents de la Pninsule acadienne. Ici comme ailleurs, il faut faire preuve de solida-rit et de vigilance.

    Le secteur artistique et culturel

    Dans lensemble, le texte de Monsieur David Lonergan aborde tous les aspects de la vie artistique et culturelle francophone au Nouveau-Brunswick. Personne ici, je pense, ne va remettre en question limportance de ce secteur pour le dveloppement de la communaut acadienne. ce compte, lAcadie ne peut esprer spanouir, sexprimer, sexporter, sans une communaut artistique et culturelle forte.

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    Quand on fait le choix artistique, politique et social de sinstaller en Acadie pour pratiquer son art, il faut avoir les reins solides. Le sous-fi nancement chronique du secteur artistique et culturel est malheureusement une ralit. Sans une vritable volont politique, nous narri-verons jamais renverser cette tendance. Nos rseaux de diffusion sont restreints et souvent limits dans leur effi cacit, encore l, faute de moyens.

    En matire de diffusion, je remarque quen gnral, on semble miser surtout sur les moyens conventionnels dont nous disposons. Puisque juvre dans le monde du cinma et de la tlvision, permettez-moi de prcher pour ma propre paroisse Il me semble que le vecteur de diffusion populaire par excellence demeure ce jour, la tlvision. Outre le fait quelle gnre des revenus importants pour les artistes et quelle permette une large diffusion de pratiquement toutes les formes darts, il est clair que la tlvision savre un outil nces-saire pour toute culture qui aspire son plein panouissement. Sans minimiser le rle crucial que joue la Tlvision de Radio-Canada pour la diffusion de la culture acadienne, jestime nanmoins que la mise sur pied dune tlvision proprement acadienne, voire no-brunswickoise, consisterait en un vritable progrs.

    En attendant, les conditions de survie du secteur artistique et culturel, nous les connaissons et nous les dnonons. Au-del de ces diffi cults, il faut malgr tout, me semble-t-il, tendre vers un idal. La place que nous faisons lart et la culture dans notre vie, le soutien que nous leur donnons, est la mesure de la socit que nous souhaitons btir. Si nous som-mes convaincus que lart et la culture sont indispensables notre dveloppement collectif, NOUS AVONS LE DEVOIR de faire en sorte quils fassent partie intgrante de notre vie, au mme titre que lducation, la gouvernance ou le dveloppement conomique.

    Lattitude que nous avons, vis--vis les arts et la culture, tmoigne de la perception que nous avons de nous-mmes en tant que socit. Lartiste a une grande responsabilit sociale. Malgr les diffi cults, il doit faire preuve dune certaine intransigeance par rapport son art car cest lui bien souvent qui propulse toute une socit vers lavant. Si nous avons pu tre intimids, une poque, par la fragilit de notre situation, si nous avons pu, par ailleurs, tre parfois satisfaits de nos ralisations, simplement parce que nous tions arrivs produire quelque chose, il me semble que cela nest plus de mise lheure actuelle. Nous nous devons de rehausser la barre!

    Lexprience de la socit acadienne, des organismes vocation culturelle et des artistes en gnral, doit dsormais transparatre dans la qualit des ralisations artistiques que nous produisons et dans les choix que nous faisons. Cela implique quil faille parfois avoir le cou-rage de dire non des projets qui tiolent notre intgrit artistique, car cela dteint forc-ment sur la socit dans laquelle nous vivons. Je rve du jour o nous aurons, par exemple, le courage de refuser de fter le 15 aot en diffr sur les ondes de notre tlvision nationale. Ce sera alors pour moi le signe dune vritable maturit et la preuve que nous savons dsor-vritable maturit et la preuve que nous savons dsor-vritable maturitmais ce que nous valons

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    5.4 Commentaire sur le chantier dveloppement conomique communautaire Yves Bourgeois

    Nous ne sommes pas plus mondialiss que 100 ans passs et notre conomie nest pas plus base sur le savoir non plus. Il est trs facile dexagrer la signifi cation des vnements courants base sur le savoir non plus. Il est trs facile dexagrer la signifi cation des vnements courants base sur le savoiret de notre vcu. Certains prtendent que nous entrons une re nouvelle o les technologies permettent de remplacer le face--face, que la gographie ne compte plus pour rien, quune entreprise peut se localiser nimporte o et que tout le monde pourra bientt travailler de chez soi. Bien au contraire, la mondialisation actuelle ne rend pas le lieu gographique dsuet, mais accentue plutt les liens dinterdpendance entre les localits, autant parmi les communauts acadiennes quentre nos communauts et les grands centres urbains cana-diens et mondiaux. Les dfi s gographiques deviennent plus importants.

    Dautres exagrations consistent dire que la cl de notre prosprit conomique dpend dabord et avant tout sur nos efforts en matire de recherche et de dveloppement (R+D). Bien que linnovation soit une composante importante de notre dveloppement cono-mique, elle nest pas la seule. Surtout, nous commettons une grande erreur de confondre linnovation avec le R+D. Celui-ci nest quun ensemble restreint dactivits par lesquelles innovent certaines entreprises. Pour la plupart des entreprises, linnovation (lintroduction ou lamlioration de nouveaux produits ou processus de production) se ralise grce une gamme dactivits beaucoup plus vastes et informelles.

    Si ces mises en garde sont apportes, cest parce que dans nos dlibrations lors de la Convention nous ne devons pas nous laisser emporter par les discours fantaisistes. Le dveloppement des rseaux de chemin de fer, du tlgraphe et dlectricit il y a un sicle a transform le littoral conomique acadien de faon beaucoup plus importante que le font les technologies de linformation aujourdhui. Cela tant dit, il reste que nous sommes en priode de mutation technologique modre, et lors de chacune de ces grandes priodes surgissent des pressions importantes en matire durbanisation. En dautres mots, nous ne devons pas manquer le bateau, sans pour autant se garrocher leau.

    Il importe de noter que nous sommes en train de revisiter un dbat quont eu Pascal Poirier et llite laque avec Mgr Richard et llite clricale il y a cent ans. Poirier suggrait de faon-ner la nouvelle ralit industrielle, mais Mgr Richard prchait la fondation de colonies agri-coles pour temprer les dangers de lindustrialisation et de lassimilation quil voyait dans les centres urbains. Bien que de ses efforts naquirent plusieurs villages tels Rogersville et St-Paul, en ralit nous avons perdu beaucoup plus dAcadiens qui drent migrer Montral, Toronto et aux tats-Unis alors que les emplois se craient dans leurs centres urbains. En dautres mots, les Acadiens se sont urbaniss il y a 100 ans aussi; cest juste quils lont fait en bonne partie lextrieur des Maritimes. Donnerons-nous nouveau raison Mgr Richard ou Pascal Poirier?

    Il nest pas question de prconiser un tel dveloppement plutt quun autre, mais de recon-prconiser un tel dveloppement plutt quun autre, mais de recon-prconisernatre quune urbanisation acadienne sacclre dj depuis quelques annes. Nous navons qu considrer combien dAcadiennes et Acadiens ns chez nous se dplacent prsentement dans les grands centres urbains en qute demplois et dducation. Reviennent-ils? Selon les derniers recensements, la rponse pour la plupart est non. La population no-brunswickoise

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    est stagnante en termes de nombres absolus et elle est en train de vieillir. Le fardeau que devra supporter la population active, tel que dfrayer les cots croissants de soins de sant, salourdit de faon inquitante. La solution dpend en grande partie de la croissance dmo-graphique et conomique de notre rgion. Encore une fois, a met en vidence les avantages des grands centres urbains. Cest grce limmigration que crot la population canadienne, mais cest dabord et avant tout en centres urbains que stablissent les immigrants. Ce sont aussi dans les centres urbains o se passe la grande partie de la croissance conomique au pays, et o se rendent jeunes travailleurs la qute demplois.

    Si nous dsirons toucher pleinement aux opportunits que nous offrent la mondialisation et la croissance conomique lie lconomie du savoir, alors nous devons reconnatre le rle important que jouent nos centres urbains et les dfi s de taille quils ont combler quand nous les comparons aux grands centres urbains du Canada et dailleurs. Ceci nimplique pas un dpeuplement de nos communauts rurales. Dune part, a ncessite une reconnaissance que plusieurs de nos communauts dites rurales sont fonctionnellement intgres (e.g. vil-lages dortoirs) avec les centres urbains avoisinants, tels Cocagne ou Barachois avec Dieppe et Moncton. Dautre part, dans les communauts rurales o un centre urbain est absent, le dfi est de travailler de concert, tel que dans le partage dinfrastructures physiques et sociales. Dans tous les cas, les querelles de clochers ne peuvent que nuire dans un contexte dcono-mie mondiale.

    Ce sont des choix trs diffi ciles qui nous sont demands, et durant nos dlibrations en cette Convention 2004, il sera plus facile de revendiquer que didentifi er les endroits o lon pourrait se contenter de moins.

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    6. Bilan des dlibrations des ateliers et recommandations

    THME : Lentrepreneurship acadien

    Les personnes prsentes latelier se sont dites en accord avec le contenu du document de rfl exion prpar par Pierre-Marcel Desjardins, mais on a soulign le manque de la recon-naissance des femmes et du besoin de promotion de cette ralit. On a galement besoin dune rfrence historique sur lvolution de lentrepreneurship acadien dont le pass est trs riche. Il est important de rpertorier la prsence des femmes en faisant une rfrence historique par le pass des femmes en entrepreneurship. De plus, lintgration des jeunes aux affaires est une priorit pour les annes venir. Ces derniers doivent avoir accs un nombre accr de programmes et un meilleur fi nancement.

    On a galement not quil serait important dlargir la dfi nition en incluant lentrepre-neurship individuel, lentrepreneurship familial et lentrepreneurship collectif.

    Il fut galement soulign que le leadership des jeunes est la base du succs et que le systme dducation doit contribuer activement la formation. Il y a des programmes favorisant lap-prentissage au leadership en affaires quil convient de bonifi er et de fi nancer davantage.

    Un dfi particulier est lentrepreneurship en milieu rural et le fait que les infrastructures exis-tantes soient mises profi t. On a suggr dutiliser au maximum les mcanismes en place et de rentabiliser les opportunits existantes. Il existe actuellement un dynamisme trs grand et il existe une culture dentrepreneurship sur laquelle on peut btir.

    Il sagit dune responsabilit partage et tous les intervenants doivent sy mettre afi n den-clencher une culture entrepreneuriale avec la collaboration des coles, des entrepreneurs, du CNB, des gouvernements et des diffrents intervenants. La communaut acadienne et les gens daffaires ont un rle crucial jouer pour stimuler une reprise de lconomie rurale.

    Il existe des duplications et des ddoublements tant au niveau des programmes existants qu celui des organismes vous la promotion de lentrepreneuriat acadien. Ce phno-mne se traduit par une multiplication des collectes de fonds et des activits de sollicitation et une utilisation abusive du bnvolat. On souligne galement que certaines entreprises ne sont pas ncessairement des modles et il faut voir amliorer la situation prsente en ce qui a trait lutilisation rationnelle des ressources humaines dans certains secteurs comme les pches. On suggre galement limportance dinvestir dans lalphabtisation en milieu de travail. Il existe galement des blocages face lentrepreneuriat et il est impratif de contrer ces blocages en amliorant les programmes destins aux jeunes.

    Dans latelier, on a vant les mrites du programme Jeunes Entrepreneurs et de ses succs. Il est cependant important den amliorer laspect linguistique.

    Les participants et les participantes ont galement valid les dfi s et les enjeux ainsi que le plan daction qui furent dvelopps lors du Forum 2004 du Conseil conomique du Nouveau-Brunswick. Ces lments furent prsents dans le document de rfl exion prpar

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    par le consultant. Parmi ces enjeux et ces dfi s, on a prsent le dveloppement urbain par rapport au besoin rural, linnovation et la transition vers une conomie du savoir par des actions de diversifi cation, la formation des ressources humaines, lexode des jeunes con-duisant une pnurie de main duvre en milieu rural, le fi nancement des entreprises, particulirement les risques plus levs en milieu rural, la question de la gouvernance et lamlioration des infrastructures.

    Pour palier aux situations dcrites ci-haut, il faudrait valider les enjeux et les pistes qui furent prsents lors du Forum organis par le CNB et assurer une meilleure prise en charge col-lective de la communaut daffaires.

    THME : Le dveloppement rgional

    On a soulign, dentre de jeu, que le dveloppement rgional est directement li la situa-tion dmographique. Les jeunes, qui sont forms dans les rgions, vont souvent travailler ailleurs. La grande majorit des nouveaux emplois crs ne ramnent pas ncessairement les gens au Nouveau-Brunswick. Des stratgies doivent tre labores afi n de rduire les tendances.

    Il serait important davoir des statistiques spcifi ques aux rgions acadiennes du Nouveau-Brunswick et dexaminer plus particulirement les iniquits en matire de dveloppement et des groupes comme les femmes. On note galement des disparits intra-rgionales en plus des diffrences entre les rgions.

    On a galement signal limportance davoir des donnes rcentes sur les diffrentes dimen-sions relies au dveloppement rgional. Certains ont soulign que la socit contempo-raine est plus axe sur lindividualisme et il y a moins dengagement sur le plan collectif. Il importe de dvelopper des stratgies et des mcanismes qui vont aider la mobilisation des gens et une plus grande prise de conscience collective.

    Les participants et les participantes latelier ont soulign que les ressources naturelles, qui sont la base de lconomie des rgions, sont souvent mal utilises et ne sont pas gres de faon rationnelle. On souligne galement quil existe des diffi cults trouver de la main duvre qualifi e; on se devra de prendre avantage des collges communautaires qui sont plus orients vers la formation des ressources humaines en fonction des besoins de la socit et du march du travail.

    Il fut galement question des cots levs de la formation postsecondaire et de lendette-ment des tudiants et des tudiantes. Une plus grande accessibilit aux tudes postsecondai-res serait un moyen daider combler les ingalits entre les rgions rurales de lAcadie et les rgions urbaines. Il est souvent diffi cile dappliquer une formule universelle une situation qui prsente plusieurs perspectives. Quant au dveloppement conomique, il est primordial que les rgions francophones en milieu rural doivent prendre les moyens pour faire la tran-sition la nouvelle conomie.

    Pour changer la situation actuelle au Nouveau-Brunswick, on a besoin dune force conomi-que dans chaque rgion de la province. Le leadership de chacune des rgions est important,

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    surtout si on russit mettre en uvre les principes relatifs la gouvernance locale. Les communauts acadiennes, entre autres, doivent avoir plus de pouvoir de dcision; elles doi-vent se doter des mcanismes et des outils qui feront en sorte que les communauts locales puissent se prendre en main et dvelopper leur conomie. On doit donc trouver des moyens pour que les communauts puissent dvelopper leur capacit communautaire.

    Il importe que les rgions rurales adoptent des stratgies globales au lieu de stratgies secto-rielles. Ces rgions doivent avoir un pouvoir de dcision rgionale avec une animation la communaut, base sur une vision long terme. On doit outiller les Agences de dveloppe-ment conomique communautaire (ADEC) pour implanter les stratgies qui ont t dve-loppes avec le concours et la participation de toutes les composantes de la communaut. Il sagit de renverser la tendance des gouvernements qui ont souvent une vision court terme et transformer le tout dans du dveloppement long terme.

    THME : Sant de nos communauts

    La sant de nos communauts passe invitablement par la sant des individus et vice-versa. Il sagit donc de permettre aux individus de participer la prise en charge collective.

    Lenjeu principal est la responsabilit des gens face leur sant avec une approche prven-tive. Il y a donc des besoins dinvestissements dans des programmes de prvention/appui du gouvernement. La centralisation des services contribue lexode rural et une plus grande responsabilit des services en milieu urbain. On voit ceci comme tant un pas de plus vers la privatisation des services de sant, ce qui serait trs ngatif pour les milieux ruraux en particulier.

    Il existe encore des disparits videntes dans les services de sant; une plus grande dmocra-tisation des services et une participation accrue de la communaut sont parmi les stratgies qui doivent tre explores. Plus de recherches avec des donnes quantitatives sont requises afi n dtre en mesure dagir de faon stratgique.

    Parmi les autres enjeux qui furent prsents par les participants et les participantes aux ate-liers, on note des lacunes en matire de lobbying, dimputabilit gouvernementale et un manque de cohsion entre les corporations hospitalires. La sant doit demeurer au premier plan des dossiers prioritaires de la communaut acadienne et la SAANB doit piloter ce dos-sier en collaboration avec ses partenaires. On a galement soulign les problmes associs lanalphabtisme et comment la formation de ces personnes est prioritaire. Des investisse-ments importants doivent donc tre faits dans ce sens.

    La mission prsente et accepte par les participants et les participantes est : La socit acadienne du Nouveau-Brunswick se doit davoir les capacits et le pouvoir de prendre en charge sa propre sant pour assumer pleinement sa destine . Pour atteindre cette mission, on a suggr lobtention de la dualit du Ministre de la sant partir du sous-ministre. On a aussi soulign que le ministre de la sant doit tre imputable pour ses actions. court terme, on souhaite dvelopper des groupes de concertation tous les paliers. On suggre galement que la formation des intervenants de la sant se fasse en franais et au Nouveau-Brunswick.

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    La question de la rforme des services en sant et limpact de ces actions sur le nord de la province a galement t lobjet de discussions et dchanges dans latelier. On a soulign quil est important dappuyer les dmarches de Caraquet et des autres communauts en dveloppant une solidarit communautaire.

    Parmi les stratgies labores, on a suggr lobtention et le maintien dun systme de sant public francophone de mme qualit dans les milieux ruraux et urbains en respectant la langue des citoyens et des citoyennes. On a aussi affi rm quil faut tenir compte de lenviron-nement sur la sant dans le dveloppement conomique; on propose aussi de dvelopper une politique de prvention et exiger des consultations relles dans la prise de dcisions. On a propos que les communauts dveloppent des comits de villes et de villages de lobby en sant. On prconise la mise en place de comits de loisir et sports dans les villages et les vil-les, comme mesure prventive en sant. De plus, un dossier dune importance signifi cative est lalphabtisation : les participants et les participantes ont soulign que les programmes dalphabtisation devraient tre sous la responsabilit de professionnels bien rmunrs en nombre suffi sant pour combattre lanalphabtisme.

    Les participants et les participantes latelier ont rsum les discussions en prsentant la synthse suivante : On veut une conomie acadienne qui soit suffi samment prospre pour assurer la richesse collective et la sant.

    THME : Amnagement linguistique

    La perspective prsente par le document de rfl exion, prpar par Annette Boudreau, ren-ferme des informations trs pertinentes et offre des pistes pour les discussions. Il sagit de permettre aux deux communauts linguistiques du Nouveau-Brunswick dtre sur un pied dgalit partir de ltablissement du Conseil de lamnagement linguistique au Nouveau-Brunswick. On y traite, entre autre, du paysage linguistique, du dveloppement de ressources et doutils linguistiques, de lintgration et du dveloppement du franais en milieu de tra-vail ainsi que des mesures pouvant inciter la population faire une plus grande utilisation de la langue franaise.

    Il importe de voir apparatre des mesures proactives quant aux services dans sa langue, mme si certains Francophones ont souvent tendance tre un peu timides cet gard. Il importe de dvelopper des programmes et des incitatifs permettant aux entreprises de publier et de saffi cher en franais. Les participants et les participantes ont galement soulign quil est important de sensibiliser la communaut acadienne la richesse du bilinguisme et la place de la langue franaise.

    Il est important de revendiquer des services de faon journalire, en ayant des actions indivi-duelles appuyes dactions collectives. On doit galement sensibiliser les entreprises anglo-phones vis--vis limpact conomique des Francophones. Il importe dadopter une approche plus globale afi n damener des changements. On a galement soulign que les municipalits francophones nont pas les outils lgislatifs pour faire valoir la langue franaise et donner la prdominance au franais. Les participants et les participantes ont galement soulign quil est important de sinspirer de ce qui se fait ailleurs afi n damliorer notre situation.

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    Un des dfi s souligns est que les Francophones doivent toujours demander des services en franais. Il ne faut pas avoir peur de demander des services dans sa langue. Le gouvernement provincial a la responsabilit de faire appliquer la loi sur le bilinguisme. On a galement soulign quil est important de faire le lien entre lamnagement linguistique et la planifi ca-tion du territoire, cest--dire une approche globale.

    Plusieurs actions collectives ont t proposes par les participants et les participantes late-lier. Il est notamment suggr davoir recours des exercices de sensibilisation par la voie des mdias et dinciter les gens acheter l o on offre des services en franais. De nombreuses suggestions furent prsentes; entre autre, une recommandation globale prcisant quil faut convaincre le gouvernement de soccuper de lamnagement linguistique partout dans la province.

    THME : Identit et diversit

    Les personnes prsentes latelier ont trouv le document prpar par C