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LE RAPPORT PUBLIC ANNUEL 2017 Les observations Synthèses

Cour des comptes - LE RAPPORT PUBLIC ANNUEL …La situation d’ensemble des finances publiques (à fin janvier 2017) S y n t h è s e s d u R a p p o r t p u b l i c a n n u e l 2

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LE RAPPORTPUBLIC ANNUEL

2017Les observations

Synthèses

g AVERTISSEMENT

Ces synthèses sont destinées à faciliter la lecture et l’utilisation durapport de la Cour des comptes.

Seul le rapport engage la Cour des comptes.

Les réponses des administrations, des organismes et collectivitésconcernés figurent à la suite du rapport.

L’ordre des synthèses correspond à celui des insertions du rapport.

Rendu public pour la première fois en 1832, le rapport annuel de la Cour descomptes constitue un moyen privilégié pour faire connaître les travaux de laCour et des chambres régionales et territoriales des comptes, ainsi que lesenseignements à en tirer. En 2017, il couvre un très large champ de l’actionpublique et de ses acteurs pour en identifier les progrès, les réussites. Il souligneles risques à maîtriser, pour renforcer son efficacité et son efficience.

Le rapport public annuel 2017 comporte deux tomes :

- le tome I expose les observations et recommandations issues d’une sélectionde contrôles et d’enquêtes réalisés en 2016 par la Cour et les chambresrégionales et territoriales des comptes ;

- le tome II présente l’organisation et les missions des juridictions financières,ainsi que les résultats de leur action et en particulier les suites données par lesadministrations, collectivités et autres organismes contrôlés aux observationset recommandations formulées les années précédentes.

Le rapport annuel de la Cour de discipline budgétaire et financière est annexéà ces deux tomes.

Le présent fascicule rassemble les synthèses des 17 rapports figurant dansle tome I « Les observations ».

Ces 17 textes sont regroupés par thème :

- première partie : les finances publiques (1) ;

- deuxième partie : les politiques publiques (11) ;

- troisième partie : la gestion publique (5).

Introduction

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Sommaire

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Les observations

Première partie - Les finances publiques

La situation d’ensemble des finances publiques(à fin janvier 2017) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .9

Deuxième partie - Les politiques publiques

Chapitre I - Emploi et solidarité

1 L'indemnisation amiable des victimes d'accidents médicaux :une mise en œuvre dévoyée, une remise en ordre impérative . . . .192 L’Ordre national des chirurgiens-dentistes : retrouver le sensde ses missions de service public . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .233 La formation professionnelle continue des salariés :construire une politique de contrôle et de lutte contre la fraude . . .26

Chapitre II - Énergie, développement durable et transports

1 L’écotaxe poids lourds : un échec stratégique,un abandon coûteux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .312 Le stationnement urbain : un chaînon manquantdans les politiques de mobilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .343 Le traitement des déchets ménagers en Île-de-France :des objectifs non remplis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .374 L'usine de traitement des déchets Amétyst de Montpellier :un pari sur un processus industriel complexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .42

Chapitre III - Éducation, universités

1 Le projet Paris-Saclay : le risque de dilution d’une grandeambition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .492 France business school : une fusion ratée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .53

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Chapitre IV - Territoires

1 La commune de Levallois-Perret et ses démembrements :une gestion imbriquée et opaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .592 Les collectivités locales d'Auvergne-Rhône-Alpes et le spectaclevivant : une politique dynamique, un financement sous tension,une gestion à rendre plus rigoureuse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .61

Troisième partie - La gestion publique

Chapitre I - La mise en œuvre des politiques régaliennes

1 Le renouvellement des moyens aériens et navals de la Douane :des échecs répétés et coûteux, une mutualisation à imposer . . . . . . .692 L’emploi des forces mobiles de la police et de la gendarmerienationales : des capacités en voie de saturation, un pilotageà renforcer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .723 L’action sociale au ministère de l’intérieur : une organisationcomplexe, des risques avérés, une efficacité contestable . . . . . . . . .77

Chapitre II - La conduite de projets

1 Le Muséum national d’histoire naturelle : une mutationinachevée, une institution fragilisée par le zoo de Vincennes . . . . .832 Les chambres d’agriculture : façonner un réseau efficace . . . . . . . . . . .88

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Première partie

Les finances publiques

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En 2016, une réduction modéréedu déficit, de nouveau facilitéepar la baisse des taux d’intérêt

Selon les dernières prévisions duGouvernement, la réduction dudéficit public entamée en 2010 s’estpoursuivie en 2016 (graphique ci-

dessous), mais le repli seraitmodeste : le solde public s’établiraità - 3,3 points de PIB (en améliorationde 0,2 point par rapport à 2015) et lesolde structurel, qui neutralise l'im-pact de la conjoncture, serait de- 1,5 point de PIB (en améliorationde 0,3 point).

Le solde des administrations publiques de 2000 à 2016 (en points de PIB)

Source : Cour des comptes d’après données de l’Insee jusqu’en 2015 et prévisiondu Gouvernement pour 2016

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La réduction du déficit de 0,2 point en2016 prévue par le Gouvernementprovient pour une large part de labaisse de la charge d’intérêts, résultantuniquement de la baisse des taux, ladette publique elle-même ne seréduisant pas. Le solde primaire,

c’est-à-dire hors charge d’intérêts, nediminuerait ainsi que très faiblement.Sur la période 2012-2016, plus de40 % de la réduction du déficitpublic est attribuable à la baissede la charge d’intérêts (graphiqueci-dessous).

Parts respectives de la variation du solde primaire et de celle de la charge d’intérêtsdans l’amélioration du solde public (en points de PIB)

Source : Cour des comptes d’après données de l’Insee jusqu’en 2015 et prévision duGouvernement pour 2016Note : le solde primaire est le solde public hors charge d’intérêts

Depuis 2010, une dépensepublique moins freinéeen France que dans la plupartdes pays européens

La comparaison de la situation françaiseavec celle de ses voisins européensrévèle le retard pris par la France dansl’ajustement de ses finances publiques.

La plupart de nos voisins présentent dessoldes effectif et structurel moinsdégradés que ceux de la France.

Le déficit public de la France(3,5 points de PIB) était plus élevé en2015 que celui de la plupart de nosvoisins européens. Seuls quatre Étatsmembres de l’Union européenneavaient un déficit supérieur : Grèce,

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Espagne, Portugal et Royaume-Uni.De même, selon les estimations de laCommission européenne, seuls troispays (Royaume-Uni, Espagne etBelgique) avaient un déficit structurelsupérieur ou égal à celui de la France(2,6 points de PIB).

La situation relative des financespubliques françaises s’est mêmedétériorée depuis 2010. À cette date,respectivement, 11 et 7 États membresde l’Union européenne présentaienten effet un déficit effectif et un déficitstructurel plus élevés que ceux de laFrance.

Évolution de l’écart du poids des dépenses publiques dans le PIB entre la Franceet le reste de la zone euro

Source : Cour des comptes d’après données d’Eurostat

Si la réduction des déficits a été pluslente en France que chez ses parte-naires, c’est notamment parce que lerythme d’évolution des dépenses y aété nettement supérieur à celui dureste de la zone euro ou de l’Unioneuropéenne (graphique ci-dessous).Parmi les 13 pays de l’Union européennede plus de cinq millions d’habitants,seules la Belgique, la Suède et laFinlande ont une croissance en volumede leurs dépenses publiques supérieureà la France sur la période 2010-2015,mais avec des déficits bien moindresque celui de la France en 2010.

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Un objectif de réduction du déficitpour 2017 plus ambitieux qu’en2016, mais très difficile à atteindre

Pour 2017, le Gouvernement prévoitune réduction du déficit public plusambitieuse qu’en 2016, de 0,6 pointde PIB, qui le ramènerait à 2,7 points dePIB. Cette prévision sera très difficile àatteindre.

L’évaluation des recettes publiquesparaît en effet optimiste. Elle repose surune prévision de croissance économiquejugée un peu élevée par le Haut Conseildes finances publiques. Elle supposede plus une croissance « spontanée »,c’est-à-dire à législation constante,des prélèvements obligatoires un peusupérieure à ce qu’une prévisionprudente exigerait.

La prévision de déficit intègre uneaccélération des dépenses publiques,sous l’effet notamment de mesurescatégorielles et de l’augmentation dela valeur du point de la fonctionpublique. Ainsi, les dépenses de l’Étathors charge d’intérêts et pensionsrebondiraient nettement en 2017(graphique ci-dessous), notammentsous l’effet de la progression de plusde 3 % de la masse salariale del’État, soit autant en un an que surl’ensemble de la période 2011 à2016. De même, la progression del’objectif national de dépensesd’assurance maladie (ONDAM) (+ 2,1 %contre + 1,75 % en 2016) traduitl’impact des mesures salariales et leseffets des augmentations de tarifsaccordées par la nouvelle conventionmédicale.

Évolution des dépenses de l’État hors charges d’intérêts et pensions prévue en projetde loi de finances (PLF) (en %, à champ constant)

Source : Cour des comptes d’après projets de loi de finances de chaqueannée

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Toutefois, la progression annoncée desdépenses publiques est probablementsous-estimée car certaines économiesaffichées ne pourront pas atteindreles montants attendus (notamment enmatière d’indemnisation du chômage),tandis que des risques importants dedépassement des objectifs pèsent surd’autres dépenses (dépenses de l’Étatet de l’ONDAM).

Au-delà de 2017, le rétablissementstructurel des finances publiquesprogrammé appelle des effortsd’une ampleur inéditesur les dépenses

Les projections pluriannuelles definances publiques associées au projetde loi de finances visent une réductionprogressive du déficit public de0,7 point de PIB par an en moyennede 2018 à 2020, permettant à laFrance de respecter son engagementde ramener à moyen terme son déficitstructurel en dessous de 0,5 point dePIB. Ces projections pluriannuellesmontrent que le respect de cet objectifimpose des efforts d’une ampleurinédite sur les dépenses : celles-cidevraient se stabiliser en volume(graphique ci-après, scénario duGouvernement), alors qu’elles ontcrû de 0,8 % entre 2010 et 2015 et de2,3 % sur les années 2000 à 2009, etque le Gouvernement prévoit encoreleur augmentation à 1,3 % en 2016et 0,8 % en 2017.

De plus, le scénario de croissanceretenu pour bâtir les projections plu-riannuelles de finances publiquesapparaît optimiste. Il s’appuie sur des

évaluations favorables de la croissancepotentielle et du déficit d’activité. Laprudence recommanderait, a minima,de retenir une évaluation de lacroissance potentielle et du déficitd’activité plus en ligne avec lesautres évaluations disponibles.

Ainsi la prise en compte des hypothèsesd’écart de production et de croissancepotentielle de la Commission euro-péenne impliquerait, pour respecter laprogrammation pluriannuelle, nonpas de stabiliser la dépense mais de lafaire baisser de 0,3 % en 2020(graphique ci-après, « scénario decroissance économique de laCommission »). Compte tenu desincertitudes fortes qui existent sur lamesure de l’écart d’activité, fairel’hypothèse que celui-ci seraitrésorbé dès 2017, et donc que lacroissance réelle serait égale à lacroissance potentielle, impliqueraitun effort supplémentaire sur lesdépenses d’environ 0,6 point par an parrapport à la trajectoire présentée par leGouvernement (graphique ci-après,« scénario de croissance égale à la crois-sance potentielle de la Commission »).

De plus, alors que la charge d’intérêtsaura contribué à modérer la dépenseentre 2010 et 2016 (à hauteur de0,4 point par an), on ne peut pascompter sur une poursuite de cet effet.Le potentiel de baisse supplémentairede la charge d’intérêts est aujourd’huilimité et le risque qu’elle remonte àun horizon de moyen terme n’est, àl’inverse, pas négligeable.

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Évolution des dépenses (en volume) requise pour respecter la trajectoirepluriannuelle du PLF 2017 selon le scénario économique

Source : Cour des comptes d’après données de la Commission européenne AMECO

Enfin, le projet de loi de finances pour2017 n’est porteur d’aucune économiestructurelle. Au contraire, les seulesmesures prises ayant un impactau-delà de 2017 devraient accroîtreles dépenses.

***

L’accentuation de l’effort de maîtrisedes dépenses, indispensable pourrespecter les objectifs que la Frances’est donnés, est réalisable. Depuis2010, le poids des dépensespubliques dans le PIB a diminué dansla zone euro hors France, alors qu’il s’estsimplement stabilisé dans notre pays.

Surtout, le niveau particulièrementélevé des dépenses publiques enFrance est loin de conduire à desrésultats à la hauteur des moyensengagés, comme l’illustrent les poli-tiques du logement, de la formationprofessionnelle ou de la santé. Lespouvoirs publics devront donc dans lesannées à venir s’attacher résolument àaméliorer l’efficience de la dépensepublique et, pour ce faire, effectuerdes choix explicites, s’appuyant sur unréexamen des missions assurées parles administrations publiques prisesdans leur ensemble et un meilleurciblage des politiques d’intervention.

Deuxième partie

Les politiques publiques

Chapitre I

Emploi et solidarité

1. L'indemnisation amiable des victimes d'accidents médicaux : une mise en œuvre dévoyée, une remise en ordreimpérative

2. L’Ordre national des chirurgiens-dentistes : retrouver le sensde ses missions de service public

3. La formation professionnelle continue des salariés : construireune politique de contrôle et de lutte contre la fraude

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1L'indemnisation amiable desvictimes d'accidents médicaux :une mise en œuvre dévoyée,une remise en ordre impérative

L’accident médical est défini commeun événement imprévu ayant entraînéun dommage anormal au regard del’évolution prévisible de l’état de santédu patient au cours d’un acte de soins,de prévention ou de diagnostic. Il peutêtre consécutif à une faute de techniquemédicale ou à un aléa thérapeutique,entendu comme la réalisation, endehors de toute faute du praticien oude l'établissement de santé, d'unrisque accidentel dont l’occurrenceest faible.

La réparation de l’aléathérapeutique, un progrèsessentiel pour les victimes

Avant 2002, l’indemnisation des accidentsmédicaux supposait l’établissementd’une responsabilité médicale. La loidu 4 mars 2002 relative aux droits desmalades et à la qualité du système desoins a constitué une novationimportante en organisant un systèmedérogatoire au droit commun de laresponsabilité par la réparationmême en l’absence de faute, pourtout accident médical d’une certainegravité.

La loi institue une procédureamiable pour l’indemnisationdes victimes d’accidents médicauxfautifs ou non fautifsPour éviter le développement ducontentieux, une procédure amiable estinstaurée. Pour la victime, elle estgratuite, sans obligation de ministèred’avocat et sans coût d’expertise,rapide, en moins d’un an, contradictoireet fondée sur des rapports d’expertsagréés. L’indemnisation est accordéepar une instance délocalisée et présidéepar un magistrat.

La procédure est réservée aux accidentsd’une certaine gravité et la victime peuty renoncer à tout moment pour choisirune procédure contentieuse.

L’organisation repose sur trois struc-tures, la Commission nationale desaccidents médicaux (CNAMed), autoritéscientifique chargée d’agréer lesexperts médicaux et d’harmoniser ledispositif ; des commissions deconciliation et d’indemnisation (CCI),chargées d’instruire les demandesd’indemnisation et un établissementpublic, l’Office national d’indemnisationdes accidents médicaux, des affectionsiatrogènes et des infections nosocomiales(ONIAM), chargé d’indemniser les victimessur le fondement des avis des CCI.

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Procédure d’indemnisation

Des résultats décevantsdus à la dérive de l’organisationinstitutionnelle reposantsur un établissement publicdéfaillant

Quinze ans après l’adoption de la loi,la procédure amiable est décevante.Malgré un nombre modeste dedemandeurs (4 500 sur 10 000 atten-dus), le taux de rejet des demandesest massif (76 %). De 2011 à 2015,5 700 accidents ont été admis dont3 000 au titre de l’aléa thérapeutique.

Après 4 ans, 58 % des victimes n’ontreçu qu’une offre partielle et à l’issuede cette période, elles n’ont guère dechance de recevoir le complément.Pour celles qui ont bénéficié d’uneoffre intégrale, le délai moyen s’établità 2 ans et 9 mois, supérieur aux 2 ansd’une procédure contentieuse depremière instance.

L’équilibre du dispositif a été dévoyéprincipalement par le rôle que s’estarrogé l’ONIAM, seule structuredisposant de la personnalité morale.Alors que l’office est chargé du calcul

Source : Cour des comptes

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et du paiement des indemnisations, ila conçu son rôle de manière extensiveen révisant les avis des CCI sur unebase médicale, compétence dont il nedispose pas, intervenant tel un assureurcherchant à limiter sa charge desinistre. Sur la base d’une procédureexcluant les victimes, en contradictionavec les principes posés par la loi,l’office rejette ainsi 8,5 % des avisfavorables des CCI qui ont pourtant éténotifiés aux victimes. Ces dernières sedétournent de la procédure amiable.

La CNAMed, institution sans moyens,n’a pas réussi à réguler le dispositif, nimême à établir une liste suffisanted’experts médicaux.

Cette application dévoyéede la loi se trouve amplifiéepar une gestion internetrès défaillante de l’ONIAM

Cette gestion, souvent irrégulière, secaractérise par le défaut de pilotage,un système d’information inefficace,la carence du recouvrement descréances de l’établissement, de naturepourtant à alléger la charge de l’assu-rance maladie, et une comptabilitéfausse.

Pour le Médiator®, l’ONIAM s’attribueles mérites du collège d’experts qui aaccordé en 2015 un avis favorable à41 % des demandeurs. En réalité, sonintervention consiste en un supportlogistique.

La victime oubliée doit êtrereplacée au centredes préoccupations

Le redressement de la gestion del’ONIAM apparaît en tout état decause comme un préalable absolu àl’attribution de toute nouvelle missionà l’établissement. En l’état actuel de sagestion, il serait aventureux de confierà l’ONIAM la mission d’indemniserles victimes de la Dépakine®, dontl’ampleur et les enjeux seraientencore plus importants que dansl’affaire du Médiator®. L’ONIAM doitimpérativement cesser de rejeter lesavis favorables des CCI sauf à finir dedécourager les victimes d’accidentsmédicaux et de remettre en cause lebien-fondé de la procédure amiable.

La CNAMed pourrait être déchargéede l’agrément des experts médicauxau bénéfice de la liste des expertsjudiciaires et se concentrer sur larégulation du système.

L’accompagnement des victimesdoit absolument être amélioré, parl’assistance plus systématique desassociations, voire des CCI ; par lamise en place d’un site de télécharge-ment des dossiers, à chaque étape dela procédure, et un accès facilité auxdossiers médicaux ; par l’instaurationd’astreintes pour retard de transmissionde pièces de la part des établissementsde soins et professionnels de santéconcernés, voire d’amendes pour délitd’entrave.

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Recommandations

1. restaurer la logique institutionnelleinitiale du dispositif d’indemnisationamiable en recourant à la loi pouraffirmer l’opposabilité des avis des CCIà l’ONIAM et pour confier à laCNAMed un triple rôle de garant de laqualité de l’expertise, d’harmonisationde la jurisprudence des CCI et d’ins-tance d’appel des avis de ces dernières ;

2. supprimer la liste nationaled’experts médicaux en l’alignantsur celle des experts judiciaires eten veillant à l’attractivité de leurexercice auprès des CCI et enorganisant leur formation continue ;

3. doter la CNAMed d’un budget pro-pre pour assurer son fonctionnementet celui des CCI ;

4. faciliter l’accès de la victime àl’indemnisation amiable en créantune plateforme de téléchargementsécurisé de toutes les pièces de laprocédure à toutes les étapes, eninstaurant un système d’astreinteen cas de retard, voire d’amendepénale en cas d’obstruction à l’accèsau dossier médical, et en examinantl’éventualité d’une prise en chargeforfaitaire des déplacements liés àl’expertise sur le fonds d’actionsociale de la CNAMTS ;

5. définir et mettre en œuvre sansdélai un plan de redressement de lagestion de l’ONIAM, préalable à toutenouvelle attribution de mission.

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2L’Ordre nationaldes chirurgiens-dentistes :retrouver le sens de ses missionsde service public

L’Ordre national des chirurgiens-dentistes, créé par l’ordonnance du 24 septembre 1945, compte prèsde 44 000 chirurgiens-dentistescotisants et dispose de 20 M€ decotisations annuelles. Sa missionpremière est de contrôler l’accès à laprofession et de s’assurer du respectdes règles de déontologie par les pra-ticiens. Il est doté de compétencesadministratives et juridictionnelles.

Une organisationet une gouvernance inadaptées

L’Ordre est organisé, en application dela loi, en conseils départementaux etconseils régionaux ou interrégionaux,placés sous le contrôle du conseilnational. Alors que l’essentiel destâches de l’Ordre s’effectue auniveau départemental, la question dela pertinence de l’échelon régionalest posée. Par ailleurs, la longévitédes dirigeants nationaux à leur poste,la surreprésentation des inactifs, lasous-représentation des femmes et laconcentration des pouvoirs au seindu bureau national au détriment del’instance plénière ont entretenu unmode de gouvernance autocentré.Un fonctionnement plus transparentet plus démocratique s’impose.

Un défaut de contrôleet de transparence

À l’exception des comptes du conseilnational et de quelques rares conseilsdépartementaux, la comptabilité del’Ordre des chirurgiens-dentistes nerépond pas aux exigences du plancomptable général. Elle n’a jamaisété soumise à certification par uncommissaire aux comptes et présentede nombreuses anomalies. Faute decomptes agrégés, l’Ordre n’a parailleurs aucune vision d’ensemblede sa situation financière ni de sonpatrimoine immobilier, pourtantestimé par la Cour à 50 M€. Il neconnaît pas l’état de ses dettes ni deses créances. Aucun dispositif decontrôle interne ne permet de garantirla réalité, l’exhaustivité et l’exactitudedes opérations. L’absence de maîtrisedes risques expose l’Ordre à deserreurs, des abus ou des fraudes.

Une conception discutablede l’exercice des missionsde service public

L’Ordre a délaissé une partie de sesmissions d’organisation et de contrôlede la profession dentaire au profit dela défense d’intérêts catégoriels qui

L’Ordre national des chirurgiens-dentistes :retrouver le sens de ses missionsde service public

ne lui incombe pas. Les missions decontrôle qui lui sont dévolues(contrôles en cabinet, contrôle desobligations de formation continue quiincombent aux praticiens, etc.) sontexercées de manière lacunaire.L’Ordre se consacre largement, encontravention avec l’ordonnance de1945, à mener un combat contrecertaines évolutions de l’exercice dela profession, comme les réseaux desoins mutualistes et les centresdentaires, accusés de concurrencedéloyale. Il entretient enfin avec certainssyndicats des relations particulièrementétroites qui sont de nature à porteratteinte à son devoir d’indépendanceet de neutralité.

Une réforme des juridictionsordinales inaboutie

Plusieurs éléments plaident en faveurd’une réforme visant à renforcerl’indépendance des juridictionsordinales : la double qualité demembre d’un conseil ordinal etd’assesseur au sein d’une chambredisciplinaire peut amener les membresà être à la fois juge et partie ; leconseiller d’État désigné pour présiderla chambre disciplinaire nationale estle même que celui choisi pour assisterle conseil national, ce qui n’est passatisfaisant du point de vue des règlesd’indépendance et d’impartialité ; lamoitié des présidents des chambresdisciplinaires de première instance sontrémunérés par l’Ordre, en contraventionavec les textes applicables précisémentinspirés par la volonté de garantirl’indépendance de ces magistrats ;enfin, alors qu’aucun texte ne la prévoitexplicitement, une rémunération est

également versée par l’Ordre auprésident de la chambre disciplinairenationale. Ce défaut de base légaledoit être corrigé.

Une hausse continue des cotisations en dépit d’une trésorerie largementexcédentaire

Le montant de la cotisation, fixé à417 € en 2016 pour les actifs, aprogressé de 14,25 % entre 2009et 2016, soit une hausse annuellemoyenne de 1,9 %, près de deux foissupérieure à l’indice des prix à laconsommation. Ces augmentationssont d’autant moins justifiéesqu’elles sont dictées par la nécessitéde financer des dépenses importantesde l’Ordre hors du champ de ses missionsde service public. De surcroît,l’Ordre dispose au total de près de30 M€ de placements financiers,soit l’équivalent d’une année etdemi de cotisations, et aurait pu utiliserces fonds pour financer ses besoinssans augmenter les cotisations.

Des dérives dans la gestion

Le principe du bénévolat de la fonctionordinale, posé par la loi du 21 juillet2009 portant réforme de l’hôpital etrelative aux patients, à la santé et auxterritoires (dite HPST), est apprécié demanière variable selon les conseilsdépartementaux. Au niveau national,le montant d’indemnités versées en2015 aux conseillers a, au total,dépassé 600 000 €, dont plus de400 000 € pour les huit membres dubureau qui bénéficient tous, en outre,d’un appartement de fonction.

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L’Ordre national des chirurgiens-dentistes :retrouver le sens de ses missions

de service public

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Recommandations

1. publier sans délai les textesd’application du mécanismed’alerte européenne des sanctionsprises à l’encontre d’un praticien,issu de la directive 2005/36/CE surla reconnaissance mutuelle desqualifications professionnelles ;

2. réformer l’organisation territorialede l’Ordre en confiant à l’échelondépartemental ou interdépartementaldes attributions administratives et enne confiant à l’échelon régional quedes attributions juridictionnelles ;

3. limiter le nombre de mandatssuccessifs au sein d’une mêmeinstance ordinale, instaurer la parité,prohiber le cumul des mandatssimultanés au niveau local et nationalet faire élire le conseil national etson président par l’ensemble despraticiens inscrits à l’Ordre ;

4. modifier la composition de lachambre disciplinaire nationalepour y faire siéger des conseillersdépartementaux élus en lieu etplace de conseillers nationaux ;

5. fixer par voie réglementaire lemontant et les modalités d’attributiondes indemnités susceptibles d’êtreallouées au président de la chambredisciplinaire nationale ;

6. prohiber l’exercice, par une mêmepersonne, des fonctions de présidentde la chambre disciplinaire nationaleet de conseiller des instancesnationales ;

7. rendre incompatibles les fonctionsordinales et les fonctions syndicales ;

8. engager sans tarder une remiseen ordre de la gestion :

- en imposant la publicité desindemnités et avantages de toutenature accordés aux conseillersordinaux sur une base nominative ;

- en soumettant l’Ordre à desprocédures d’achat conformes auxrègles de publicité et de mise enconcurrence prévues dans le projetd’ordonnance de l’article 212 de la loidu 26 janvier 2016 de modernisationde notre système de santé.

L’habitude a été prise de faire prendreen charge par l’Ordre bon nombre dedépenses sans rapport avec ses missions.Il en va ainsi de voyages d’agrément ouséjours en thalassothérapie effectuéspar les conseillers ou de l’achat denombreux cadeaux de luxe.

La politique d’achat est dénuée de touteformalisation. Le choix de prestatairesest fait dans une grande opacité etexpose l’Ordre à des surcoûts. Cettepratique est très éloignée des principesde l’ordonnance du 23 juillet 2015, auxquelsil est envisagé de soumettre les ordres.

3La formation professionnellecontinue des salariés : construireune politique de contrôleet de lutte contre la fraude

La Cour des comptes a mené uneenquête sur les dispositifs de contrôleet de lutte contre la fraude mis enplace par l’État et les organismesparitaires agréés (organismes pari-taires collecteurs agréés – OPCA – etorganismes paritaires agréés au titredu congé individuel de formation –OPACIF –), qui gèrent les dispositifs deformation professionnelle en faveurdes salariés, pour s’assurer de labonne utilisation des fonds consacréspar les entreprises à la formationprofessionnelle continue des salariés(environ 11,2 Md€ en 2014 dont6,3 Md€ d’achats directs et 4,8 Md€pris en charge par les OPCA). Auterme de son enquête, la Cour estimeque le système de contrôle actuel estdéfaillant et que les avancées issuesde la loi du 5 mars 2014 relative à laformation professionnelle, à l’emploiet à la démocratie sociale ne sont passuffisantes pour lutter efficacementcontre les risques de fraudes dans cesecteur.

Un secteur exposéà des risques d’irrégularitéset de fraudes

Le secteur de la formation professionnelleest très exposé au risque d’irrégularitéset de fraudes en raison notamment ducaractère immatériel des prestations et

de l’émiettement des acteurs (plus de75 000 prestataires de formation). Lafacilité d’accès au marché des presta-taires de formation et la simplicité desmécanismes permettant de frauder(majoration fictive du nombre d’heuresde formation ou du nombre de stagiairespar exemple) contribuent à rendre cesecteur sensible aux fraudes ; desmontages plus sophistiqués permettantdes escroqueries à grande échelle ontégalement été détectés.

Des risques accentuéspar des contrôles peu nombreuxet globalement inefficaces

Le contrôle par l’État des actions deformation professionnelle reste faibleau regard des masses financières enjeu et du nombre de structures àcontrôler (à peine 0,8 % des prestatairesde formation contrôlés en 2014).L’efficacité de l’action pâtit aussi dupilotage éclaté entre la délégationgénérale à l’emploi et à la formationprofessionnelle (DGEFP) et les directionsrégionales des entreprises, de laconcurrence, de la consommation,du travail et de l’emploi (Direccte). Iln’existe pas de programmationnationale des contrôles et la répartitiondes effectifs de contrôle n’est pasadaptée à la localisation de l’activitésur le territoire. Par ailleurs, les

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manquements les plus courants nesont quasiment jamais sanctionnés enraison de la lourdeur des procédures àmettre en œuvre.

Malgré l’obligation légale qui leurincombe et le niveau élevé de risquede fraudes, les organismes paritairesagréés mènent peu de contrôles etceux-ci sont la plupart du temps réali-sés sur pièces et a posteriori. Or, lescontrôles inopinés et sur place sontindispensables pour s’assurer de laréalité des prestations.

La nécessité d’une stratégiede contrôle associant l’Étatet les organismes agréés

La loi du 5 mars 2014 relative à laformation professionnelle, à l’emploiet à la démocratie sociale met l’accentsur la nécessité de garantir la qualitédes formations. La création d’un

référencement des prestataires deformation par les financeurs institu-tionnels des actions de formationdevrait limiter l’accès au marché destructures aux pratiques défaillantes.La portée de ce référencement,applicable à compter du 1er janvier2017, reste cependant limitée : il neconcerne qu’une partie des formations etn’exclut pas la possibilité de fraudes, ycompris par les prestataires référencés.

Si l’instauration d’une régulation par laqualité peut contribuer à l’avenir àréduire une partie des risques defraudes, cette perspective ne doit pas setraduire par une réduction des effortsde contrôle de l’État et des organismesparitaires agréés, mais doit être aucontraire l’occasion de construire unepolitique de contrôle et de luttecontre la fraude, associant l’ensembledes financeurs institutionnels de laformation professionnelle.

La formation professionnelle continuedes salariés : construire une politiquede contrôle et de lutte contre la fraude

Contrôles réalisés par les services de l’État en 2014

Source : Cour des comptes d’après données DGEFP

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La formation professionnelle continuedes salariés : construire une politiquede contrôle et de lutte contre la fraude

Recommandations

À l’État :

1. mettre en place une stratégie decontrôle fondée sur une program-mation annuelle et une organisationplus adaptée aux enjeux.

Aux organismes paritaires agréés :

2. définir une stratégie et des processusinternes de contrôle à la hauteur desrisques identifiés.

À l’État :

3. augmenter le nombre decontrôles sur les OPCA et les OPACIFet mener une démarche d’audit desprocédures de contrôles internes deces organismes.

À l’État et aux organismesparitaires agréés :

4. préciser, dans les conventionsd’objectifs et de moyens concluesentre l’État et les organismesparitaires agréés, les obligationsincombant à ces derniers enmatière de contrôle des actionsde formation et augmenter, au seinde l’enveloppe des frais de gestion,la part des dépenses consacrées aucontrôle et à la lutte contre lafraude.

À l’État :

5. autoriser les Direccte à prononcer,sur un fondement législatif, dessanctions administratives etfinancières en cas de manquementaux obligations imposées par lecode du travail.

Chapitre II

Énergie, développement durableet transports

1. L’écotaxe poids lourds : un échec stratégique, un abandoncoûteux

2. Le stationnement urbain : un chaînon manquant dans lespolitiques de mobilité

3. Le traitement des déchets ménagers en Île-de-France :des objectifs non remplis

4. L'usine de traitement des déchets Amétyst de Montpellier :un pari sur un processus industriel complexe

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Un instrument ambitieuxde la politique des transports

L’écotaxe poids lourds était l’un desgrands projets issus du Grenelle del’environnement : votée à la quasi-unanimité par le Parlement en 2009,elle s’appuyait sur le cadre commu-nautaire relatif à la tarification duréseau routier. Cet instrument novateuravait pour objectif de couvrir les coûtsd’usage du réseau routier national,hors autoroutes concédées à péage,et d’une partie du réseau routierlocal. Devant être acquittée par lespoids lourds, notamment étrangersen transit, cette taxe au kilomètres’appliquait sur un réseau d’environ15 000 km. L’État s’était engagé à cequ’elle ne pèse pas in fine sur lesentreprises de transport routier aumoyen d’un mécanisme de répercussionsur les clients finaux.

La mise en œuvre de l’écotaxe poidslourds avait été confiée, en octobre2011, au consortium Écomouv’ par uncontrat de partenariat public-privé.Elle devait rapporter près de 890 M€de recettes nettes annuelles auxadministrations publiques, dont684 M€ en faveur du financement desinfrastructures nationales de transport.

Sans revenir sur la négociation ducontrat de partenariat et sur les travauxparlementaires disponibles, la Cour a

souhaité établir un bilan de la gestiondu projet et du coût global de sonabandon.

Un abandon marquantune perte de vision stratégique

L’écotaxe poids lourds étant devenuela cible de fortes contestations àl’automne 2013, le Premier ministrea annoncé, le 29 octobre 2013, sa« suspension » dans la perspectivede son aménagement. Cette décision,qui ne disposait pas de fondementjuridique contractuel, a marqué ledébut d’une période d’atermoiements.La perte d’une vision stratégique auprofit d’intérêts de court terme s’estnotamment matérialisée par lavolonté de l’État de ne rien payer àÉcomouv’ en 2014 et de ne pastrancher définitivement entre lapoursuite ou l’arrêt du projet. Desdécisions porteuses de risquesjuridiques et financiers ont alors étéprises. La négociation d’un protocoled’accord avec Écomouv’, tardivementsigné le 20 juin 2014, a permis de serapprocher du cadre contractuel,mais a exposé l’État à des dépensesqu’il n’aurait pas eu à assumer enl’absence de « suspension » de l’écotaxepoids lourds.

L’aménagement de l’écotaxe n’a étéconçu qu’au printemps 2014, sous laforme du projet de péage de transit

1L’écotaxe poids lourds :un échec stratégique,un abandon coûteux

Un abandon très coûteux pourles finances publiques et uneperte de recettes compensée parune augmentation de la fiscalitépesant sur les automobilistes

L’abandon de l’écotaxe poids lourdss’avère très coûteux pour les financespubliques, tout d’abord en raison del’absence de perception de la recetteprévue (soit 9,8 Md€ sur la périoded’exploitation du contrat), ensuite,parce que cet abandon a entraîné desdépenses importantes pour l’État :

- il a été tenu d’indemniser les coûtsde sortie du contrat de partenariatavec Écomouv’, pour 958 M€ ;

- il a directement supporté des coûtsde pilotage, de mise en œuvre et degestion de l’abandon du projet, pourun montant d’environ 70 M€.

Les modalités de règlement des coûtsde sortie du contrat de partenariatavec Écomouv’, soit 958 M€, ne sont

pas favorables aux intérêts financiersde l’État. Ce dernier a en effetaccepté de supporter des dépensesdont le principe est contestable. Enoutre, pour minorer l’incidenceimmédiate de l’abandon de l’écotaxepoids lourds sur les comptes publics, ila décidé d’étaler le paiement d’unepartie de ces indemnités jusqu’en2024. Le surcoût de cet étalement, liénotamment aux intérêts de la dette,s’élève à 35 M€.

L’État a fait le choix de compenser laperte de recettes de l’écotaxe poidslourds par un accroissement de lafiscalité pétrolière. Cette compensationest insatisfaisante, tant du point devue budgétaire qu’au regard desobjectifs initialement poursuivis parl’écotaxe poids lourds.

D’une part, le rendement de l’aug-mentation de la taxe intérieure deconsommation des produits énergétiques(TICPE) masque une répartition inégalede son produit : si le budget général de

L’écotaxe poids lourds :un échec stratégique, un abandon coûteux

poids lourds. Le dispositif s’appuyaitsur un réseau taxé bien plus réduit,ce qui le rendait financièrement peusoutenable. Les oppositions à cenouveau projet ont perduré, et ontconduit à l’annonce de sa « suspension

sine die » par la ministre chargée del’environnement le 9 octobre 2014. Larésiliation du contrat de partenariatpassé avec la société Écomouv’ a éténotifiée le 30 octobre 2014, pour uneprise d’effet au 30 décembre 2014.

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Indemnités de sortie du contrat de partenariat

Source : Cour des comptes d’après données du ministère de l’environnement, de l’énergieet de la mer

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l’État bénéficie d’une surcompensationde la perte de recettes, tel n’est pas lecas pour les collectivités territorialesqui ne perçoivent pas les 160 M€escomptés par an.

D’autre part, le relèvement de laTICPE accroît les charges pesant surles poids lourds français tandis quela contribution des poids lourds

étrangers, qui représentent près de40 % du trafic, est très limitée (2 % duproduit). Les objectifs de l’écotaxepoids lourds ne sont donc pas atteints.Surtout, cette mesure transfère unecharge annuelle d’environ 650 M€vers les automobilistes, qui n’étaientpas concernés par l’écotaxe poidslourds et qui, dans les faits, financentson abandon.

Comparaison de la contribution annuelle par type d’usagers entre l’écotaxe poidslourds et le relèvement de fiscalité pétrolière

Source : Cour des comptes d’après CGEDD (2015, données 2013) et DGITM

Un échec industriel et socialaffectant la politique européenne des transports

L’écotaxe poids lourds laisse à lacharge de l’État plusieurs centaines demilliers d’équipements inutiles. Lesperspectives de réutilisation de cesbiens étant quasi nulles, l’État les aintégralement dépréciés dans sescomptes. Quelques actifs ont bien étévendus, mais pour des montantsallant de 2 % à 30 % de leur valeur à ladate de la résiliation du contrat.

Enfin, cet échec ne permet pas à laFrance d’améliorer la couverture descoûts d’usage de son réseau routier,

alors même que des instrumentséquivalents ont été mis en place dansce but avec succès dans plusieurspays européens, dont l’Allemagne,l’Autriche, la Pologne et, dernièrementen 2016, la Belgique.

Coûteux pour les finances publiqueset dommageable pour la cohérencede la politique des transports et de sonfinancement, l’abandon de l’écotaxepoids lourds constitue un gâchis.

Pour l’avenir, la Cour ne peut qu’inviterl’État à mieux anticiper, évaluer etgérer les risques inhérents à toutprojet de réforme dans un secteursensible comme celui des transports.

Après que les chambres régionales descomptes ont examiné les politiques destationnement urbain de 45 collectivitésterritoriales1, la Cour des comptes,constatant que les modes de régulationretenus sont inadaptés et les stratégieslocales souvent insuffisantes, formuletrois recommandations.

Une réponse institutionnelleinadaptée

Dans les agglomérations, la gestiondu stationnement urbain s’imposedepuis plusieurs décennies pourréguler l’occupation de l’espacepublic par les véhicules automobiles.

Cette gestion se traduit traditionnelle-ment par l’institution d’un stationnementpayant et par la construction de parcsen ouvrage. Parce que ces parkingsreprésentent un coût de constructionde plusieurs millions d’euros, leuréquilibre économique requiert unniveau suffisant de fréquentation,lequel ne peut être assuré que si lacollectivité organise de manière résolueun contrôle du stationnement sur lavoirie.

Quand ces conditions ne sont pasréunies, le stationnement irrégulier sedéveloppe, dégradant les conditionsde déplacement et conduisant la

collectivité à prendre en charge unepart importante des coûts généréspar le stationnement.

Les conditions de gestion du station-nement urbain sont donc essentielles,non seulement en termes de qualitéde vie quotidienne, mais également auregard d’enjeux collectifs.

La gestion du stationnement urbainimplique la combinaison de plusieursvolets de l’action publique locale :pouvoir de police, pour réglementerl’usage de la voirie, gestion d’ouvragesdédiés au stationnement, droit del’urbanisme pour poser les obligationsen termes d’habitat et dans leslocaux professionnels en termesd’emplacements de parking. Lesquestions de stationnement urbainappellent donc une véritableapproche stratégique qui prenne encompte les flux de déplacements auniveau de l’agglomération dans sonensemble.

À cet effet, la loi impose que lesactes pris dans ces domaines soientcompatibles avec les prescriptionsdes plans de déplacements urbains(PDU) portant sur la déterminationdes zones sujettes à stationnementréglementé et payant et la politiquetarifaire.

2Le stationnement urbain :un chaînon manquantdans les politiques de mobilité

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1 Dont Paris et des collectivités de région parisienne (communauté d’agglomération de GrandParis Seine Ouest, etc.), des grandes villes de province (Lyon, Lille, Toulouse, etc.) et des villes detaille moyenne (Le Havre, Chambéry, etc.)

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Le stationnement urbain :un chaînon manquant dans les politiques

de mobilité

Malgré ce cadre, la réponse institu-tionnelle apportée à la gestion dustationnement urbain est inadaptée.Les acteurs traditionnels en matièrede gestion du stationnement urbainsont les communes. Si un certainnombre de compétences ont ététransférées aux intercommunalités,l’exercice du pouvoir de police de lacirculation et du stationnementdemeure parmi les prérogatives dumaire, réserve faite du cas particulierde la Ville de Paris. Dans certains cas,cette organisation conduit à desincohérences dans l’organisation desflux de déplacements : ainsi en est-illorsque des communes voisines fontdes choix divergents quant à l’existenced’un stationnement payant sur la voirie.Cette organisation fait aussi parfoisobstacle à ce que les intercommunalitésexercent la plénitude des compétencesqui leur ont été déléguées par lescommunes en ce domaine.

Une meilleure gestion du stationnementurbain implique donc un partage pluscohérent des compétences au planlocal. La bonne appréhension des fluxde déplacements au niveau desagglomérations doit conduire à unrôle accru des autorités organisatricesde la mobilité, auxquelles il revient,dans le cadre des PDU, de définir lesprincipes d’organisation des transportset de circulation urbains.

Des stratégies locales maldéfinies et des mises en œuvredéfaillantes

On relève deux faiblesses principalesdans les stratégies des collectivitésterritoriales en matière de stationne-ment urbain : d’une part, ces stratégies

ne sont pas suffisamment encadréespar les PDU, ces derniers n’étant pasaussi prescriptifs que ce que la loiprévoit, d’autre part, les collectivitésconnaissent mal leur offre de station-nement et elles n’en déterminentgénéralement pas le coût.

La Cour recommande donc aux autoritésorganisatrices de la mobilité de veiller àce que les plans de déplacements urbainssoient suffisamment prescriptifs, et àinstituer des observatoires associantles usagers, de manière à collecter lesdonnées nécessaires à la gestion dustationnement.

Trois faiblesses sont par ailleurs relevéesdans la mise en œuvre de ces stratégieslocales.

En premier lieu, les tarifs pratiquéssur la voirie sont souvent inférieurs àceux en ouvrages, ce qui n’incite pasles automobilistes à fréquenter lesparkings.

En outre, les relations contrac-tuelles entre les collectivités etleurs délégataires de stationnementsont fréquemment déséquilibrées etle suivi assuré par les collectivitésinsuffisant.

Enfin et surtout, alors que les automobi-listes en France ne s’acquittent que trèspeu des droits de stationnement sur lavoirie, les contrôles du stationnementeffectués par les communes restentinsuffisants et très variables d’uneannée sur l’autre.

Cette carence dans les contrôlesfragilise l’ensemble des stratégieslocales de stationnement urbain.

Le stationnement urbain :un chaînon manquant dans les politiquesde mobilité

Pour y remédier, il est recommandé defaire évoluer la législation, de manièreà confier aux autorités organisatricesde la mobilité les pouvoirs de police etde contrôle du stationnement.

Ces adaptations apparaissent d’autantplus nécessaires qu’une réforme durégime de stationnement payant doitentrer en vigueur au début de l’année2018. Elle substitue aux amendesdont doivent s’acquitter actuellementles automobilistes ne payant pas leursdroits de stationnement, un forfait dit

de post stationnement, dont le montantest fixé par les collectivités territorialesdans la limite d’un plafond légal.

Cette réforme vise à renforcer lesprérogatives des collectivités territo-riales. Elle implique aussi pour l’Étatde créer une nouvelle juridiction, defaire évoluer le système informatiqueutilisé par l’Agence nationale detraitement automatisé des infractionset d’adapter les règles complexes quirégissent actuellement la répartitiondu produit des amendes.

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Recommandations

À l’État :

1. faire évoluer les dispositionsdu code général des collectivitésterritoriales de manière à prévoirun transfert des pouvoirs de policeet du contrôle du stationnementvers les autorités organisatrices dela mobilité.

Aux autorités organisatrices de lamobilité :

2. veiller à ce que les dispositionsde l’article L. 1214-2 du code destransports s’agissant du contenuprescriptif des plans de déplacementsurbains en matière de stationnementurbain soient effectivement misesen œuvre ;

3. constituer des observatoires dustationnement urbain réunissanttous les acteurs concernés afin decollationner et d’évaluer l’ensembledes données (connaissance de l’offre,enquêtes sur les besoins, coûts etrecettes liés au stationnementurbain, estimation des nuisances liéesau trafic automobile) nécessaires à laconception des stratégies locales enla matière.

Aux communes :

4. conduire de façon déterminée, etconstante dans la durée, les opérationsde contrôle du stationnement sur lavoirie.

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3Le traitement des déchetsménagers en Île-de-France :des objectifs non remplis

L’Île-de-France regroupe 12 millionsd’habitants produisant 5,52 millionsde tonnes de déchets ménagers etassimilés par an. L’organisation duservice public de gestion des déchetsy est marquée par les contraintes liéesà la forte densité de population encœur de région et par d’importantscontrastes entre la zone centrale de lamétropole du Grand Paris et le reste del’espace régional, essentiellement rural.

L’organisation institutionnelleet le financement sont peuadaptésL’organisation institutionnelle dutraitement des déchets est éclatéeentre 26 organismes, d’échelle trèsvariée. La région comprend le plusgrand syndicat de traitement d’Europe(l’agence métropolitaine des déchetsménagers – Syctom) qui couvre à luiseul 5,7 millions d’habitants soitprès de la moitié des déchetsfranciliens (44 %). 98 % de son terri-toire est inclus dans le périmètre dela métropole du Grand Paris. Encontraste, 12 syndicats couvrentchacun moins de 200 000 habitants.Faute d’amélioration des performancesde la collecte sélective, les capacitésd’incinération autorisées du Syctomsont actuellement insuffisantes. Poury faire face, celui-ci recourt à descoopérations avec des structuresvoisines.

La carte et l’organisation des syndicatsde traitement ne prennent pas du touten compte la recomposition de fonddu paysage de l’intercommunalité àfiscalité propre actuellement encours en Île-de-France. Les initiativesen matière de rationalisation del’organisation du traitement sontquasi inexistantes et la loi continueà autoriser une intercommunalité àadhérer à plusieurs syndicats detraitement à la fois, bloquant toutepossibilité d’évolution de l’organisationinstitutionnelle du traitement desdéchets en Île-de-France.

Le coût de gestion du service public desdéchets est de 72 € HT par habitant enÎle-de-France. S’il est en baisse, il restesupérieur au reste du territoire national(63 € HT par habitant). D’importantsécarts de coûts sont constatés entre lescollectivités franciliennes elles-mêmes.Ils s’expliquent essentiellement par lescontraintes liées au type d’habitat etaux choix des modalités de collecte etde traitement.

Le financement du service public degestion des déchets franciliens perçupar les collectivités territorialesd’Île-de-France s’élève à 1,5 Md€. Il està 95 % assumé par les contribuables,à travers la taxe d’enlèvement desordures ménagères. En termes demontant, les contributions des usagerspour assurer le service public sontsuffisantes, voire excessives danscertains cas.

Un rééquilibrage de la contribution aufinancement du service public desusagers vers les producteurs dedéchets assimilés et les producteursde produits mis sur le marché estnécessaire.

En effet, les déchets assimilés desadministrations, commerces et indus-tries représentent un quart desdéchets gérés par le service publicen Île-de-France. Or le financementspécifique appliqué à ces déchets,via la redevance spéciale, n’est

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Le traitement des déchets ménagersen Île-de-France : des objectifs non remplis

Les établissements de coopération locale franciliens exerçant la compétencede traitement des déchets au 1er janvier 2016

Source : Observatoire régional des déchets d’Île-de-France (Ordif)

appliqué que par 30 % des collectivitésfranciliennes et ne couvre que 5 % dufinancement total de la gestion desdéchets.

Si les producteurs de produits missur le marché contribuent désormaispartiellement au financement duservice public de gestion desdéchets (par le biais des filières deresponsabilité élargie du producteur) ;leur contribution en Île-de-France estinférieure à la moyenne nationale.

Le traitement des déchets ménagersen Île-de-France : des objectifs non remplis

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Les performances de traitementdes déchets sont en net décalageavec les moyennes nationaleset celles d’autres métropoleseuropéennes

Les performances en matière decollecte sélective et de recyclagesont inférieures aux moyennesnationales et à celles d’autresmétropoles européennes, quel quesoit le flux de déchets concerné.Le tri du verre (20 kg/habitant/an),des emballages légers (10,5 kg/habitant/an) et des papiers/cartons(12,5 kg/habitant/an) enregistre unfort retard. La qualité de la collectesélective est de surcroît très médiocre,le taux de refus de tri étant de 25,7 %à l’entrée des centres de traitement,sans amélioration depuis 2005. Lacollecte sélective des biodéchetsalimentaires des particuliers estinexistante alors que la loi prévoit sagénéralisation à l’horizon de 2025.

L’organisation des filières de traitementdes déchets est stable et trop peudiversifiée en Île-de-France.L’incinération reste le principal mode(60 %) de traitement des déchetsménagers et assimilés, le recours aurecyclage étant encore faible (26 %)et l’enfouissement (9 %) persistant.

Il est urgent d’atteindreles objectifs de performancefixés aux plans européen,national et régionalLa prévention est insuffisante

Les trois principaux financeurs enmatière de prévention de productionde déchets sont la région, l’Agence del’environnement et de la maîtrise de

l’énergie (ADEME) et le Syctom.D’importants soutiens ont été versés,notamment au titre de la mise enplace de 61 plans locaux de prévention(PLP) couvrant 83 % de la populationd’Île-de-France. Si la coordinationentre ces acteurs s’améliore, lesactions en matière de prévention desdéchets sont insuffisantes et leurpérennité n’est pas garantie.

La coordination est faible

Une coordination étroite entre l’échelonrégional et étatique est nécessaire dansle pilotage du traitement des déchetsfranciliens. La programmation régionaledes déchets ménagers, arrêtée en2009, n’a pris en considération ni lescontraintes des opérateurs publics ni lesspécificités et contrastes territoriaux. Leplan régional a fixé un plafond d’inciné-ration de 4,2 millions de tonnes par an.Mais l’attribution par l’État des capacitésd’incinération, suite à la fermetured’installations, s’est faite au fur et àmesure des demandes sans répondreà une logique d’ensemble. Le planrégional d’élimination des déchetsménagers et assimilés (Predma)couvre la période 2009 à 2019 et larégion a engagé en septembre 2016la procédure de renouvellement de saprogrammation en matière detraitement des déchets, conformémentau décret du 17 juin 2016.

La tarification doit être plusincitative

Comme souhaité par le législateur, latarification du service public degestion des déchets doit veiller à êtredavantage incitative. En Île-de-France,seules quatre collectivités en chargede la collecte des déchets appliquentune tarification incitative permettant

Le traitement des déchets ménagersen Île-de-France : des objectifs non remplis

de moduler la contribution desusagers selon la quantité de déchetsréellement produite. Les syndicats detraitement des déchets sont égalementpeu nombreux à déployer une tarificationincitative, dite de deuxième niveau,assise sur la performance de la collectesélective.

La participation financière des filièresde responsabilité élargie des producteurset leur représentativité en termes detonnages de déchets triés est trèsmarginale : seuls 8 % des déchetsménagers en Île-de-France sont pris encharge par les filières de responsabilitéélargie des producteurs.

Le tri sélectif doit être fortementrenforcé

Les lacunes de la région en matière detri sélectif des déchets sont en grandepartie liées à l’absence de mise à jourdes consignes de tri des déchets et aumanque d’actions de communication.Le schéma de collecte sélectif en Île-de-France s’appuie essentiellement sur lacollecte en porte-à-porte, plus coûteuseque l’apport volontaire des déchetsdans des bornes dédiées. La collectesélective bi-flux est prédominante,notamment en zone dense où elles’appuie, d’une part, sur un bac decollecte du verre et, d’autre part, surun bac de collecte des emballageslégers, papiers et cartons enmélanges. Or la collecte séparée detrois flux distincts est majoritairedans les pays européens pour desmotifs de performance : le verre, lesemballages légers et enfin les

papiers/cartons. La couverture duterritoire régional en déchèteries estd’une déchèterie pour 69 000 habitants,alors que l’ADEME évalue l’optimum àune déchèterie pour 30 000 habitantset que la moyenne, sur le reste duterritoire, est d’une déchèterie pour14 000 habitants.

Les filières de traitementdes déchets doivent évoluerrapidement

Ces filières vont être amenées àréaliser une profonde mutation pourinfléchir la répartition actuelle desmodes de traitement des déchets.La filière de tri est contrainte de semoderniser pour faire face à unemassification à venir du tri. La filièrede compostage et de méthanisationdes déchets est encore balbutiantealors que la généralisation du tri à lasource des biodéchets des particuliers,prévue pour 2025, lui offre de réellesperspectives de développement. Lesplateformes de transfert des déchetssont encore trop peu présentes pourpermettre de lisser les apports dedéchets vers les incinérateurs et ainsiréduire l’enfouissement des déchetsménagers et assimilés. La reconnais-sance récente par le législateur d’unenouvelle filière, permettant d’utiliserdes déchets secs pour fabriquer descombustibles solides de récupération,devrait ouvrir des perspectives deréduction de l’enfouissement desdéchets ménagers franciliensactuellement non recyclables.

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Recommandations

À L’État :

1. réorganiser la carte des syndicatsmixtes de traitement des déchets,en cohérence avec la réforme del’intercommunalité en Île-de-France.

À la région Île-de-France :

2. mettre en place une programma-tion régionale des déchets intégrantles spécificités territoriales et amé-liorer la coordination des acteurspublics dans sa mise en œuvre.

Aux collectivités et organismesconcernés :

3. optimiser le financement duservice public de gestion desdéchets en augmentant la contribu-tion financière des producteurs dedéchets mis sur le marché et endéveloppant la tarification incitative,au sein des collectivités situées horsdes zones denses de l’Île-de-Francedans un premier temps ;

4. développer le tri sélectif en faisantévoluer les schémas de collecte, enfaveur de l’apport volontaire et de lamise en place d’une collecte sélectiveprenant en compte quatre flux (verre,emballages légers, papiers/cartons etbiodéchets alimentaires) ;

5. adapter les filières de traitementdes déchets, notamment enmodernisant les centres de tri pourfaire face à l’extension du tri desplastiques et en renforcer lacompétitivité.

À l’État :

6. lever les incertitudes relatives à laréglementation des sous-produitsanimaux, afin de permettre ledéveloppement des filières decollecte et de traitement desbiodéchets alimentaires.

4L'usine de traitement des déchetsAmétyst de Montpellier :un pari sur un processusindustriel complexe

La création de l’usine Amétyst,un pari technique

La réglementation européenne toutcomme les lois dites du « Grenelle del’environnement » ont incité à amélio-rer la gestion des déchets. Le plandépartemental d’élimination desdéchets de l’Hérault avait donné lapriorité au recyclage et à la valorisation,dès 2001.

La communauté d’agglomération deMontpellier, devenue par la suiteMontpellier Méditerranée Métropole,était confrontée à un déficit d’exutoiresqui impliquait d’exporter annuellementprès de 150 000 tonnes de déchetshors du département.

Malgré des retours d’expériences limités,elle a décidé, dès 2003, de construire uneusine de tri mécano-biologique et deméthanisation, dénommée Amétyst,la plus importante unité de ce typeconstruite alors en France où saproximité avec des habitationsconstituait une première.

Or le territoire montpelliérain estconfronté à une problématique spécifique liée, d’une part, à l’insuffi-sance du tri amont des biodéchets et,d’autre part, aux difficultés croissantes

pour les collectivités territoriales àfaire accepter la présence sur leurterritoire d’un incinérateur ou d’unsite de stockage.

Le délégataire se voyait imposerplusieurs objectifs ambitieux deperformance en matière de transfor-mation en biogaz des biodéchets etdes déchets résiduels, ainsi qu’untaux minimal de transformation encompost pour ces derniers.

Il s’était de surcroît engagé sur descritères de qualité de l’ensembledes produits sortants et était tenude respecter des performancesenvironnementales en termes deniveaux de bruit et d’odeurs.

Un échec rapide

Dès son inauguration en juillet 2008,l’exploitation de l’usine a été affectéepar de nombreux dysfonctionnements,en particulier un mauvais rendementdes digesteurs, causé par un défautde qualité des déchets acheminés,d’importantes nuisances olfactives etle pullulement d’insectes, générantde nombreuses plaintes des riverains.La réception des travaux deconstruction a donc été refusée parla collectivité.

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Un incendie accidentel en septembre2011 a par la suite limité le fonction-nement de l’usine. Les travaux deréparation réalisés aux frais del’entreprise n’ont permis son redémarrage qu’à compter du 2 avril2012.

L’échec est industriel et financier.

Sur la période d’exécution du contrat(2008-2014), les résultats ont été endeçà des performances. Le dérapage aaussi été financier tant au stade de laconstruction qu’à celui de l’exploitation.

À l’origine, en octobre 2003, le budgetprévisionnel relatif à la constructiond’Amétyst avait été fixé à 57 M€ HT.

Puis les réserves émises lors de laréception de l’ouvrage, ainsi que lesdifficultés de fonctionnement

résultant de son défaut de conception,ont nécessité d’importants travauxsupplémentaires de mise aux normes,et au final le coût global de construc-tion de l’usine s’est élevé à 90,7 M€ HT.

La rémunération globale versée par lamétropole a été de 75,2 M€, plus dedeux fois celle prévue dans le compted’exploitation prévisionnel.

Elle n’a en outre reçu de son co-contractant quasiment aucuneredevance. Les sanctions pécuniairesprévues au contrat pour non-respectdes engagements de performancen’ont jamais été appliquées.

Le coût du traitement par Amétyst dela tonne de déchet ressort au moins à136 € HT. Par comparaison, le dernierréférentiel national publié parl’ADEME indique que la fourchette

L'usine de traitement des déchets Amétyst de Montpellier : un pari sur un processus

industriel complexe

Implantation de l’usine Amétyst

Source : Cour des comptes

L'usine de traitement des déchets Amétyst de Montpellier : un pari sur un processusindustriel complexe

haute du coût du traitement desordures ménagères résiduelles (OMR)(tous procédés confondus) est de122 € HT.

Une relance récentemais un procédé à l’avenirincertain

La métropole a choisi de résilier endécembre 2014 le contrat de délégationde service public et a dû verser uneindemnité de résiliation de 4,7 M€ audélégataire.

Elle n’a pas cherché à obtenirl’indemnisation de ses préjudicesd’exploitation et a supporté l’essentieldes surcoûts résultant des limitesconstructives de l’usine.

La collectivité a attribué, pour 10 ans, lenouveau contrat au même délégataire,au motif qu’il proposait des travaux demodernisation du site plus ambitieuxque ceux de ses concurrents. Il esttoutefois probable que les indemnitésde résiliation qu’il a perçues lui ontoffert des marges de manœuvre.

La déclinaison des objectifs duGrenelle de l’environnement aconduit à soutenir de nombreuxprojets de construction d’usines detri mécano-biologique méthanisation.

Toutefois, dans un rapport d’informationde juin 2010, le Sénat soulignait déjà lesimportantes difficultés auxquelles seheurtaient ces usines en raison desnombreuses étapes techniques exigéespar le processus. Leurs coûts d’investis-sement et d’exploitation apparaissaientégalement élevés dans un contexted’incertitudes tant réglementaires quesociales et économiques.

Aussi la loi du 17 août 2015 relative àla transition énergétique pour lacroissance verte préconise de généra-liser le tri à la source des biodéchets etdispose en conséquence que lacréation de nouvelles installationsde tri mécano-biologique, sans tri àla source des biodéchets traités, doitêtre évitée. Ce type d’installationn’est d’ailleurs plus éligible aux aidesde l’ADEME depuis deux ans.

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Recommandations

À la métropole de Montpellier :

1. améliorer le tri à la source pourmieux valoriser tout type de déchetspar une meilleure information desusagers.

À la métropole de Montpellieret à l’État :

2. renforcer l’efficacité des collectessélectives en développant notam-ment la collecte séparée desbiodéchets ;

3. se donner les moyens d’uncontrôle effectif de l’équilibreéconomique et financier des délé-gations de service public concluespour l’exploitation des usines detraitement mécano-biologique desordures ménagères résiduelles(OMR), en particulier en contrôlant

l’efficience des techniques misesen œuvre et le respect desobjectifs contractuels ;

4. évaluer le coût global de ce modede traitement et de valorisation desOMR en intégrant les coûts indirectsrésultant de l’amortissement desinstallations et du traitement desrefus ainsi que le risque économiqued’un arrêt de la commercialisationdes composts issus de ce process.

À la région Occitanie et à l’État :

5. veiller aux capacités du territoireen exutoires dès lors qu’en raisond’un taux de refus incompressible, laméthanisation des OMR ne constituepas une alternative aux modesultimes de traitement des déchets(incinération et enfouissement).

Chapitre III

Éducation, universités

1. Le projet Paris-Saclay : le risque de dilution d’une grandeambition

2. France business school : une fusion ratée

L’ambition de créer un pôlescientifique et technologiquede rang mondial

Site pionnier de l’aéronautique au débutdu XXème siècle, le plateau de Saclay etses environs ont vu s’implanter depuis laseconde guerre mondiale de nombreuxétablissements scientifiques et universi-taires : le Centre national de larecherche scientifique (CNRS) en 1946,l’Office national d’études et de recherchesaérospatiales (ONERA) en 1947, leCommissariat à l’énergie atomique (CEA)en 1952, l’université Paris-Sud, issue en1971 de la faculté des sciences d’Orsay, etl’École des hautes études commercialesde Paris (HEC) en 1964, l’École supérieure

d’électricité (Supélec) en 1975 et l’Écolepolytechnique en 1976. À la fin desannées 2000, le site concentrait déjàplus de 10 % de la recherche publiquefrançaise, toutes disciplines confondues,avec la perspective d’en rassembler àterme 15 %.

À partir du milieu des années 2000, l’Étata décidé de mieux exploiter ce potentielexceptionnel et a manifesté l’ambitionde créer sur le plateau de Saclay et dansses environs un pôle scientifique ettechnologique (ou « cluster ») de rangmondial. D’ici 2020, plusieurs grandesécoles1 rejoindront les établissementspublics2 et privés3 déjà présents sur ceterritoire.

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Le campus au sein du territoire de Saclay

1 ENS Cachan, École Centrale de Paris, AgroParisTech, Institut Mines Télécom, ENSAE.2 École polytechnique, ENSTA, HEC, IHES, Supélec, université Paris Sud, université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, CEA, CNRS, INRA, INRIA, INSERM, ONERA.3 Air Liquide, Danone, Horiba, Kraft Foods, Peugeot, Renault, Thalès, etc.

Source : Cour des comptes

Le projet Paris-Saclay :le risque de dilution d’une grande ambition

L’élaboration en 2009 de la loi sur leGrand Paris a accéléré la mise enœuvre de ce projet. L’État a alors prisla décision d’affecter à Paris-Saclay unniveau très élevé de financementpublic : près de 5,3 Md€ sontprogrammés à ce jour, dont 700 M€pour le volet scientifique, 2,6 Md€pour l’immobilier universitaire et2 Md€ pour les transports.

Le projet comporte trois volets, portéspar l’université Paris-Saclay et l’établis-sement public d’aménagement deParis-Saclay (EPAPS) : le regroupementdes établissements d’enseignementsupérieur et de recherche, l’aménagementurbain du site et son développementéconomique.

La réussite de ce « cluster » supposeque soient réunies trois conditionscumulatives :

- une organisation universitaire etscientifique capable de mettre enœuvre une stratégie globale, en vued’une reconnaissance internationale,selon les référentiels les pluscommunément admis dans lacommunauté internationale ;

- un campus urbain desservi par desmoyens de transport adéquats,disposant des logements et deséquipements nécessaires ;

- une gouvernance globale forte, àmême de surmonter les oppositions.

Des avancées inégales

Créée le 1er janvier 2015 sous la formed’une communauté d’universités etétablissements (COMUE), qui regroupe18 établissements d’enseignementsupérieur et de recherche, soit

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L’implantation des établissements de rechercheet d’enseignement supérieur sur le site de Saclay

Source : Cour des comptes

89 512 personnes, dont 10 676 ensei-gnants-chercheurs et plus de68 000 étudiants, l’université Paris-Saclay diplôme déjà sous son labeltous les doctorats et 80 % des masters,et a la volonté d’élaborer une stratégiede recherche unifiée à l’échelle de sonterritoire.

En revanche, l’objectif de développementéconomique a été peu poursuivi, que cesoit par l’université qui n’a pas réussià organiser la valorisation de larecherche, ou par l’EPAPS, qui n’a définique trop tardivement une stratégieen la matière.

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L’absence de stratégieet de gouvernance d’ensemble

Le pilotage du projet apparaît défaillant,alors que celui-ci rassemble unemultiplicité d’acteurs publics et privésdont les compétences, les périmètres,les moyens et parfois les intérêts sontdifférents, voire divergent. Aucunestructure ne permet de piloterglobalement le projet pour assurer lacohérence de ses trois volets.

Nombre d’étudiants sur le sitede Paris-Saclay

Source : Cour des comptes

Sur le plan académique, la candidaturede l’université Paris-Saclay a étéretenue en 2012 par le jury internationalchargé de sélectionner les « initiativesd’excellence » (IDEX), projet visant àsoutenir en nombre limité desopérations de regroupement universi-taire et scientifique de grandeampleur, financées par le programmed’investissements d’avenir (PIA).Toutefois, les membres de l’universitéParis-Saclay ont eu de grandesdifficultés pour s’accorder sur ceprojet puis pour le mener à son terme,alors que l’IDEX permet d’amorcer lestransformations structurantes pourl’avenir.

Concernant l’aménagement du site,l’EPAPS a dû composer avec lesacteurs locaux, initialement opposésau projet. Le « campus urbain » est endevenir et il existe un risque réel,malgré l’importance des moyenspublics engagés, que son attractivitésoit limitée par l’insuffisance destransports collectifs et le déficit delogements étudiants.

Des financements massifs,des besoins mal évalués

Le montant total des financementspublics prévus pour le projet (y comprisla future ligne 18 du métro) est estimépar la Cour à 5,262 Md€. Mais l’ensemblede ces financements n’est suivi paraucun service, alors que les montagesfinanciers sont souvent complexes, etque le coût final augmente au fur età mesure de la concrétisation desopérations. En outre, les pouvoirspublics se fondent sur les documentsétablis par l’EPAPS pour décider del’augmentation de certainescontributions financières, alors quela gestion de cet établissement estdéfaillante.

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Recommandations

À l’université Paris-Saclay :

1. déterminer rapidement un moded’organisation permettant d’atteindrel’objectif de création d’une universitéde rang mondial et de contribuer audéveloppement d’un « cluster » deniveau international.

À l’État :

2. désigner un responsable intermi-nistériel du projet de Paris-Saclay etasseoir réglementairement samission ;

Le projet de regroupementuniversitaire en suspens

Le projet d’« université intégrée »,élaboré dans le cadre de l’IDEX, estaujourd’hui en difficulté car il n’a pasété en mesure de surmonter la dualitédu système d’enseignement supérieurfrançais, marqué par la coexistencedes grandes écoles et des universités.Les insuffisances de la gouvernancecommune n’ont pas permis defranchir avec succès et sans réservel’étape de la période probatoire duprojet et un nouveau délai de18 mois lui a été accordé pour préci-ser le modèle d’université-cible et

3. établir une programmationprévisionnelle des financementscorrespondant aux besoins identifiés,afin d’en vérifier régulièrement lasoutenabilité.

Au directeur général de l’EPAPS :

4. doter l’établissement d’uneorganisation et des outils de gestionlui permettant d’assurer l’exercicede ses missions de manière fiable etefficace et d’en rendre compte à sonconseil d’administration ainsi qu’auxautorités de tutelle.

l’adhésion des établissements engagésà le construire. L’ensemble desacteurs concernés doivent mettre àprofit la prolongation de la périodeprobatoire qui leur a été consentiepour consolider le regroupement desétablissements dans le cadre de laCOMUE. Le projet de création dupôle académique et scientifique deSaclay, qui a mobilisé des fondspublics très importants, ne sauraitêtre remis en cause par un éventueléchec du processus de l’IDEX, et dessolutions pragmatiques doivent êtrerapidement imaginées et mises enœuvre pour prendre en compte lesdivergences internes et les dépasser.

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L’école supérieure de commerceFrance business school (FBS), crééesous forme associative le 6 juillet 2012par la réunion de l’École supérieure decommerce et de management(ESCEM) Tours-Orléans-Poitiers et desécoles supérieures de commerced’Amiens, de Brest et de Clermont-Ferrand, n’est pas parvenue à releverles défis que ses fondateurs lui avaientfixés. Après seulement deux annéesuniversitaires (2013-2014 et 2014-2015), l’association a été dissoute etplacée en liquidation amiable pardécision de l’assemblée générale du8 juin 2015. La chambre régionale descomptes Nouvelle Aquitaine a examinéles multiples causes de cet échec,lesquelles relèvent de la préparationdu projet et de la stratégie pédagogiquesuivie, d’une gestion défaillante qui n’estpas parvenue à relever avec succès lesdéfis posés par la fusion, et de lagouvernance même de l’association,dont l’organisation faisait intervenirun grand nombre de financeurs,directs ou indirects.

Un projet ambitieuxmais contrarié

Dès 2013, la Cour des comptes avaitobservé, dans son rapport publicannuel, les mutations et les enjeux del’enseignement supérieur commercialnon universitaire en soulignant les

défis posés par l’internationalisationdes études de gestion, notamment enmatière financière. Les écoles consulairesde milieu et de fin de classement ont dûadapter leurs projets pédagogiques àdes standards académiques élevésnécessitant un engagement financierafin de maintenir ou d’augmenter leurattractivité vis-à-vis des étudiantsfrançais et étrangers. C’est dans cecontexte que le projet de FBS a étéformulé puis mis en œuvre. Cettenouvelle école a été pensée commeune école unique mais décentralisée,reposant sur les réseaux et initiativeshistoriques des anciennes écoles. Or,l’entente entre les membres fondateursde l’école a pu être altérée par le modede gouvernance retenu, fondé sur laparité et l’égalité absolue entre lesmembres, alors que le montant descotisations était différent.

Par ailleurs, les compétences statuairesrespectives des organes de l’associationont été définies a minima. Les statutsne fixaient aucune règle précise enmatière financière ou de gestion desressources humaines. Les modalités degouvernance de l’école sont apparuesinefficientes et insusceptibles deremédier aux difficultés auxquellesl’école a été confrontée dès sa créationalors même qu’une délégation depouvoirs très large du président avaitété accordée au directeur général.

Le projet pédagogique duprogramme « grande école » de FBSa été conçu, puis mis en œuvre,comme un projet extrêmementinnovant. Le remplacement desconcours d’entrée par des « talentdays », procédure de recrutementlargement orale et reposant davantagesur les « savoir être » et la motivationdes étudiants que sur leurs connais-sances académiques, fut institué alorsque les contours pédagogiques précisdu programme « grande école »n’avaient pas été déterminés. Ce choix,ajouté à une forte augmentation desfrais de scolarité, a provoqué uneffondrement des recrutementsremettant en cause l’équilibrefinancier à court et moyen terme del’association. Enfin, l’ambition portéepar l’école a été fortement contrariéepar l’absence d’habilitation au gradede master de son programme« grande école ». Il est par ailleurs regret-table que le ministère de l’enseignementsupérieur et de la recherche n’ait pasdissuadé les écoles de s’engager dansla voie du programme unique habilitéalors que ce dernier ne remplissait pasles critères objectifs d’habilitation dufait de la sous-performance enmatière académique et de recherchede certaines écoles fondatrices.

Une gestion défaillante

L’association a également fait face àde graves difficultés de financement àla fois imputables à la très forte baissedes recrutements et à la réalisationd’un plan de financement peu réaliste.Les membres fondateurs ont transféréle patrimoine des écoles fondatriceslors de la création de l’associationmais la trésorerie active apportéeétait très largement insuffisante pour

couvrir les dépenses courantes del’école. En outre, le syndicat mixte del’ESCEM n’a signé son traité d’apportqu’avec beaucoup de retard ce qui aprivé l’école des financementsnécessaires au développementrapide de son activité.

Les difficultés de financement del’association ont été aggravées parune désorganisation totale de lacomptabilité. Le caractère défectueuxde l’organisation comptable, contraireà de nombreux principes, a d’ailleursentraîné un manque de sincérité descomptes qui a fait obstacle à leurcertification. Il apparaît par ailleursque l’association n’a pas respecté, àde très nombreuses reprises, lesrègles de la commande publique.

Le climat social de l’école a également puperturber le projet porté par l’association.En effet, les difficultés liées au transfertdes personnels des anciennes écoles,dotés de statuts différents, avaient malété envisagées. Les représentantssyndicaux ont ainsi intenté deuxrecours devant les tribunaux afin decontester leur transfert au sein del’association créée et surtout leurchangement de statut. Une solutionopérationnelle a été dégagée avant letransfert effectif au 1er janvier 2013, maisl'absence de concertation préalable et deformalisation fut préjudiciable au climatsocial. Plusieurs statuts de personnel ontaussi cohabité au sein de l'école, ce qui asingulièrement pu compliquer la gestionquotidienne des ressources humaines.Par ailleurs, la gestion du personnelde FBS n'a pas été centralisée, lesdifférences de statuts et de situationsont été traitées après la fusion desécoles, trop tardivement pour mettre enplace une gestion fédérée du personnel.

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La dissolution : de lourdesconséquences financièreset pédagogiques

Considérant l’échec des recrutementsde la rentrée 2014-2015, les membresde l’association ont souhaité mettrefin au projet FBS et ont voté pour sadissolution lors de l’assembléegénérale du 8 juin 2015. Un adminis-trateur judiciaire a alors été désignécomme liquidateur amiable. Lesécoles fondatrices ont déposé unedemande d’habilitation de leursfutures formations auprès du ministèrede l’enseignement supérieur et de larecherche. Seules les écoles supérieuresde commerce de Brest et de Clermont-Ferrand ont obtenu une reconnaissancede leurs formations et une habilitationau grade de master de leur diplôme« grande école », les demandes del’ESCEM et de l’école supérieure decommerce d’Amiens ayant été rejetées.Quatre-vingt-cinq étudiants ayantcontinué leur scolarité sur les sites del’ESCEM et d’Amiens n’ont pas étédiplômés d’une formation conférant le

grade de master contrairement àleurs anciens camarades, alorsmême qu’ils avaient acquitté9 000 € de droits d’inscription àFBS en 2013-2014 et 10 000 € en2014-2015.

Pour l’heure, la dissolution del’association a entraîné la suppressionde 181 emplois sur les campusd’Amiens et de l’ESCEM et le chiffragedu coût supporté par le contribuabledans la création, la vie et la liquidationde France business school est évaluéà plus de 36,6 M€.

***

Au regard des constats de défaillancedans la gouvernance et dans la gestionde France business school dressés parla Cour, CCI France devrait, dansl’exercice de ses missions de valorisationet d’information, faire connaître aux CCIles conditions nécessaires et suffisantesdes fusions entre écoles, notamment enmatière de plan de financement, deprojet pédagogique et de procéduresde contrôle.

Évaluation du surcoût final du projet France business school

* Dont 1 181 741 € supportés par la ville de Poitiers et le département de la VienneSource : Cour des comptes

Chapitre IV

Territoires

1. La commune de Levallois-Perret et ses démembrements :une gestion imbriquée et opaque

2. Les collectivités locales d'Auvergne-Rhône-Alpes et lespectacle vivant : une politique dynamique, un financementsous tension, une gestion à rendre plus rigoureuse

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La commune de Levallois-Perret, située àl’ouest de Paris dans le départementdes Hauts-de-Seine, compte environ65 000 habitants. Elle est la plusdensément peuplée de France etd’Europe. Son urbanisme et sa sociologieont considérablement évolué depuistrois décennies, à la suite des opérationsd’aménagement conduites par laSemarelp, la société d’économie mixtelocale dont la ville est l’actionnairemajoritaire. Elle abrite désormais unepopulation relativement aisée, quibénéficie de nombreux équipements etservices publics locaux.

Outre les relations étroites avec laSemarelp et ses filiales, la gestioncommunale se caractérise par le poidsimportant d’associations locales, qui

gèrent des services à la population(dans les domaines sportif, culturel,ou des loisirs) ou conduisent desactions en lien direct avec la ville.Fortement dépendantes des subven-tions communales, ces associationsparamunicipales, dans leur mode defonctionnement, ne se distinguent guèredes services communaux eux-mêmes.

Les incidences financières de ce moded’organisation locale sont substantielles.Ainsi, le fort niveau d’endettement dela commune (supérieur à 7 500 € parhabitant à la fin 2015, soit plus dequatre fois la moyenne des collectivitésde taille équivalente) est largement dûaux avances consenties à la Semarelppour mener à bien les opérationsd’aménagement. Il en résulte un risquesérieux pour les finances communales sil’équilibre économique de celles-ci n’estpas obtenu. De même, les subventionsaux associations paramunicipalesreprésentent une part significative dubudget de fonctionnement de la ville,d’ailleurs complétée par la mise à dispo-sition d’importants moyens matériels ethumains.

Ces liens étroits sont inégalementformalisés et ne donnent pas lieu à uneinformation exhaustive à l’assembléedélibérante, l’empêchant d’exercerpleinement son rôle de contrôle. Leslacunes concernent, notamment, leniveau des rémunérations et desavantages en nature perçus par lesélus administrateurs de la Semarelp,

Le territoire de la communede Levallois-Perret

Source : Cour des comptes

le bilan des cessions et des acquisitionsréalisées ou encore le recensement desengagements hors bilan pris par la ville. Lesconventions de financement conclues avecles associations subventionnées sont bientrop lacunaires au regard des montantsversés, privant de réelle portée pratiquecet outil de pilotage et de suivi del’action associative. De même, lesnombreux cumuls d’activités dontbénéficient des cadres communauxauprès des associations sont souventinsuffisamment fondés.

Enfin, les relations de la communeavec sa société d’économie mixte etles associations sont incertaines au

regard des principes de la commandepublique. La Semarelp a ainsi remportéle marché public de gestion dupatrimoine privé communal dansdes conditions n’ayant pas garantiune concurrence effective. Lamême observation est faite pour safiliale spécialisée Levaparc qui s’estvu confier la gestion de l’ensemblede l’offre de stationnement publicsur le territoire levalloisien. Pourl’association « Levallois communication »,la subvention versée par la communerémunère en fait une prestationaccomplie pour son compte sans miseen concurrence.

La commune de Levallois-Perretet ses démembrements : une gestion imbriquéeet opaque

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La ville de Levallois-Perret et ses satellites

Source : Cour des comptes

RecommandationsÀ la commune de Levallois-Perret :

1. mettre fin au démembrementexcessif, par le biais d’associationsparapubliques, des activités de servicesdédiées à la population levalloisienneet réintégrer celles-ci dans la gestionmunicipale pour permettre une imagefidèle et consolidée de leur gestionfinancière et comptable.

À l’État :

2. renforcer, de la part des servicesde l’État, la surveillance et le suivides actes de la commune deLevallois-Perret au titre descontrôles budgétaire et de légalité.

La part la plus significative des 7,6 Md€affectés par les collectivités locales auxdépenses culturelles est constituée parleur soutien au spectacle vivant.

Dans l’ancienne région Rhône-Alpes,370 M€ ont été consacrés au spectaclevivant en 2008. La chambre régionaledes comptes d’Auvergne-Rhône-Alpesa examiné la politique de plusieurscollectivités locales de son ressort1 enfaveur du spectacle vivant ainsi que lagestion de plusieurs opérateurs. Ils’agit non seulement de festivalscomme « Les Nuits de Fourvière » àLyon, « Jazz à Vienne », le festival demusique classique et de musiquesacrée de « La Chaise-Dieu », le festivalde théâtre de rue « Éclat » à Aurillac,ou le festival de musique française duXIXème siècle « Berlioz » en Isère, maisaussi de structures permanentes (lamaison de la culture de Grenoble –MC2 –, les théâtres de Villefranche-sur-Saône, de Bourg-en-Bresse, deVienne ou de Décines-Charpieu).

Des interventions multipleset peu évaluéesLes interventions des collectivitésterritoriales en faveur du spectaclevivant peuvent prendre des formes

différentes : si les grandes collectivitésinterviennent souvent à la fois engestion directe et en appui de structuresindépendantes, la politique culturelledes entités moyennes et petites estnécessairement plus ciblée. Quelle quesoit leur taille, ces interventions sontjustifiées non seulement par unevolonté de contribuer au développementd’œuvres culturelles et à leur diffusionau sein d’un large public, mais aussi parle souci de promouvoir des territoires.La mise en œuvre de ces orientationsstratégiques s’inscrit encore insuffisam-ment au sein de dispositifs d’évaluation.Des éléments aussi déterminants pourla réussite d’une politique en faveurdu spectacle vivant que le choix dudirecteur et de son projet artistique, lafixation d’objectifs précis par conventionentre collectivités et opérateurs ou ladéfinition d’une tarification adaptéegagneraient à être mieux évalués.

Un financement sous tensionqui appelle à une diversificationdes ressources

La part des financements publics, tousfinanceurs confondus, est, à quelquesexceptions près, très majoritaire dansles budgets des théâtres et festivals

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611 Annonay (communauté d’agglomération), Clermont-Ferrand (ville et communautéd’agglomération), Décines-Charpieu, Riom, Villefranche-sur-Saône, Villeurbanne, etc.

de l’échantillon. Parmi les collectivitéspubliques, les statistiques nationalesmettent en évidence la part prépondé-rante du bloc communal, qui représenteà lui seul les trois quarts du financementpublic, les communes et les intercom-munalités y consacrant respectivementen moyenne 8 % et 7 % de leur budget.Les départements et les régionsapportent également leur concours,lequel peut parfois être prépondérantcomme pour le festival Berlioz, auquelle département de l’Isère apporte une

part substantielle de financementpublic via l’Agence de diffusionartistique (AIDA).

L’État apporte sa contribution par lesoutien aux scènes labellisées (entre50 et 60 % du coût de fonctionnementdes centres dramatiques nationaux,comme le TNP qui reçoit 4,4 M€ sur untotal de subventions publiques de7,6 M€). Il intervient également par dessubventions spécifiques octroyées parles directions régionales des affairesculturelles (DRAC).

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Part du financement public dans les budgets2 en 2014

* ce montant inclut la valorisation des loyersSource : CRC Auvergne, Rhône-Alpes, d’après données fournies par les collectivités ouétablissements

Le transfert de compétence descommunes vers l’intercommunalitéest amorcé, comme à Annonay. Ildemeure modeste même si le publicdes théâtres et festivals de la villecentre vient souvent de l’ensemblede l’agglomération. La création desmétropoles ouvre néanmoins desperspectives : ainsi, la métropole deLyon a pris le relais du départementauprès des Nuits de Fourvière et,compte tenu de l’intérêt métropolitainde la MC2, la métropole de Grenoblepourrait se substituer à la communepour la financer.

Si le soutien des collectivités auspectacle vivant est important, sapérennité n’est en revanche pastoujours assurée. Le recentrage desdépartements sur leurs missionsessentielles a pu se traduire par uneréduction de leur contribution ausecteur culturel.

Les établissements publics decoopération culturelle (EPCC), créés àl’origine pour, notamment, stabiliser lefinancement, n’ont toujours pasatteint cet objectif puisque leurs sta-tuts ne déterminent que rarement leniveau des contributions respectivesdes membres.

2 Les chiffres peuvent être biaisés dans certains cas par les approximations nécessaires, notammenten ce qui concerne le ratio subvention / spectateur.

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Face au risque de diminution desressources publiques, l’État a mis enplace fin 2014 des pactes culturels,qui doivent permettre de sanctuariserles contributions de l’État sur trois anssi les partenaires signataires s’engagentà stabiliser leur contribution. Au total,sept pactes étaient signés en Auvergne-Rhône-Alpes fin 2015.

Si le financement public est indispensableau spectacle vivant, les contraintesfinancières auxquelles les collectivitéssont désormais confrontées impliquentla mobilisation d’autres ressources,qu’elles proviennent d’une optimisationde la politique tarifaire ou, plus margi-nalement, de l’apport de mécènes oud’entreprises partenaires.

Une gestion à rendreplus rigoureuse

Au-delà de la recherche de finance-ments complémentaires, une gestionplus rigoureuse des moyens dont lesstructures disposent peut être sourced’économies au travers de l’améliorationde la fiabilité de leurs comptes, d’unmeilleur encadrement de la commandepublique, de la mise en place de procé-dures de recrutement et de l’exerciced’une vigilance accrue sur les modalitésde recours aux intermittents. La chambrerégionale des comptes d’Auvergne,Rhône-Alpes a en effet relevé que si cerecours se révèle nécessaire au spectaclevivant, il n’en demeure pas moins, parfois,entaché de quelques abus.

Recommandations

Source : Cour des comptes – données INSEE

Aux collectivités territoriales :

1. améliorer les termes de lacontractualisation entre collectivi-tés et opérateurs par la définitiond’objectifs lisibles et mesurablesassortis d’indicateurs permettantd’évaluer les résultats obtenus.

Aux opérateurs de spectacle vivant :

2. mettre en place des procédures for-malisées en matière de commandepublique ;

3. veiller à mieux encadrer le recoursaux intermittents du spectacle.

Troisième partie

La gestion publique

Chapitre I

La mise en œuvredes politiques régaliennes

1. Le renouvellement des moyens aériens et navals de laDouane : des échecs répétés et coûteux, une mutualisationà imposer

2. L’emploi des forces mobiles de la police et de la gendarmerienationales : des capacités en voie de saturation, un pilotageà renforcer

3. L’action sociale au ministère de l’intérieur : une organisationcomplexe, des risques avérés, une efficacité contestable

Le renouvellement des moyensaériens et navals de la Douane :des échecs répétés et coûteux,une mutualisation à imposer

Des moyens significatifs au servicede missions interministérielles

Les missions centrales de la branche « surveillance » de la Douane portentsur la lutte contre les fraudes et trafics(stupéfiants, tabacs, contrefaçons,etc.). La Douane contribue aussi àd’autres missions conjointement avecd’autres services de l’État, par exemplela lutte contre les pollutions maritimes.

Pour réaliser ces missions, la Douanedispose de moyens aériens et navalsacquis et gérés par elle seule. En 2016,la Douane dispose de 38 bâtiments,de différents tonnages, répartis dans34 bases maritimes ; elle possèdeneuf hélicoptères, deux avionsmonomoteurs, sept avions bimoteursCessna F 406 basés sur six plateformesaéroportuaires et sept avions bimoteursBeechcraft King Air 350 non opéra-tionnels. Les moyens consacrés auxflottes aériennes et navales représententun effort important tant sur le planbudgétaire (la moitié des investissementsde la Douane) qu’humain : 850 douanierssont affectés à leur mise en œuvre.

Le renouvellement de la flotteaérienne : une méthode inadaptée,des retards accumulés

La Douane a décidé, après trente ansd’utilisation, de remplacer en bloc lesCessna utilisés pour la surveillancemaritime par des avions plusmodernes (Beechcraft King Air 350).Malgré l’importance des crédits requis(plus de 130 M€), la Douane a choiside gérer seule cette opération enprocédant elle-même aux acquisitions,étalées de 2011 à 2015, et en faisantintégrer sous sa responsabilitéexclusive les divers équipements(radars, scanners, optronique, etc.)dont ces appareils devaient êtredotés.

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Beechcraft King Air 350

Source : Douane

Six ans après la livraison du premierappareil, aucun n’est encore opérationnelet des incertitudes demeurent en ce quiconcerne l’installation d’équipements,pourtant déjà achetés, de détectiondes pollutions maritimes.

Dans l’intervalle, la Douane doit géreret entretenir deux flottes : celle desanciens appareils Cessna qui restentopérationnels et celle des nouveauxBeechcraft qui peuvent voler, maissans utilité opérationnelle puisqu’ilsne sont pas encore équipés des sys-tèmes de surveillance leur permettantd’accomplir leurs missions.

Le renouvellement partielde la flotte navale :des dysfonctionnementsrépétés

Dans le domaine naval, de 2011 à 2015,la Douane a procédé à l’acquisition d’unpatrouilleur garde-côtes, de septvedettes de surveillance rapprochée, dedeux vedettes de surveillance rapide,de deux embarcations semi-rigides etd’un intercepteur de type go fast. Seull’achat du patrouilleur garde-côten’appelle pas d’observation. Les troisautres opérations se sont en revanchecaractérisées par de nombreuxdysfonctionnements.

La livraison de la première vedette desurveillance rapprochée a été retardéede 18 mois en raison de problèmesélectriques dus à l’installation d’un fourde cuisine et de différents équipementsde confort non initialement prévus, maisdemandés par la brigade locale quidevait utiliser ce bateau.

S’agissant des deux vedettes rapidesdestinées à la direction régionalegarde-côtes (DRGC) de la zoneAntilles-Guyane, la Douane a laissécelle-ci formuler des exigences tech-niques difficiles à mettre en œuvre.Les options prises par le chantiernaval titulaire du marché pourappliquer le cahier des charges ontcompromis la navigabilité : lessystèmes de propulsion ont étésurdimensionnés pour compenser lamasse importante du bateau. Lesvedettes une fois réceptionnées sesont révélées peu manœuvrables,car elles ne viraient pas suffisammentaux vitesses requises. Après troisannées de vaines tentatives pouraméliorer les performances de cesbateaux, la Douane a fini par les retirerdu service opérationnel. Elles sontencore aujourd’hui sans emploi dansl’attente d’un hypothétique repreneur.

La même direction régionale garde-côtesavait aussi exprimé le besoin de disposerd’une embarcation très rapide, de typeintercepteur, pour lutter contre lacontrebande de stupéfiants perpétréeau moyen de bateaux de type go fast. LaDouane a lancé un marché auprès d’unintermédiaire américain, a payé laquasi- totalité du prix du bateau mais nel’a jamais reçu, son contractant ayantfait défaut. Par la suite, la Douane atardé à engager des procédurescontentieuses et pénales.

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Vedette de surveillance rapide

Source : Douane

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Recommandations

1. soumettre les décisions d’acquisi-tion de matériels aériens et navals àun arbitrage interministériel etconfier la réalisation de ces opéra-tions aux administrations disposantdes compétences et de l’expériencetechnique nécessaire ;

2. mutualiser la maintenance et lamise en œuvre des moyens aérienset navals de la Douane avec ceuxdéployés par les autres administra-tions participant au dispositif del’État en mer (marine nationale,gendarmerie maritime, affairesmaritimes).

Une mutualisation à organiser

Ces dysfonctionnements résultent d’évi-dentes défaillances dans l’organisation,la gestion et la supervision des projets.Les directeurs généraux successifs dela Douane n’ont pas pris conscience dumanque d’expertise interne, n’ont pasfait preuve d’une autorité suffisante àl’égard de leurs services locaux etcentraux et n’ont surveillé que demanière lointaine la réalisation deprogrammes pourtant essentiels à laréalisation des missions de la Douane

et très coûteux. Ils ont plutôt cherchéà couvrir les errements qu’à y réagir.

Ces faits manifestent aussi le caractèreinadapté de la pratique autarciquesuivie jusqu’à présent par la Douanepour acquérir et exploiter ses moyensaériens et navals. Elle doit y renonceret explorer toutes les possibilités demutualisation avec d’autres servicesde l’État, a fortiori quand elle concourtavec eux aux mêmes missions, dans lecadre d’un pilotage interministérielrenforcé.

Pour garantir le maintien ou le réta-blissement de l’ordre public, etassurer la sécurité publique, leGouvernement dispose de deux forcesspécialisées, placées sous l’autorité duministre de l’intérieur : la gendarmeriemobile, créée en 1921, composéeaujourd’hui de 108 escadrons (EGM)et les compagnies républicaines desécurité (CRS), instituées par décretdu 8 décembre 1944, au nombre de60. Ces deux forces, qui constituentensemble la réserve générale de laforce publique, comptaient en 2015,25 786 militaires et fonctionnairescivils, répartis presque égalemententre gendarmes mobiles et CRS, soitenviron 11 % des effectifs globaux dela gendarmerie et de la police.

Un élargissement continudes missions dans un contextesécuritaire à hauts risques

Le contexte sécuritaire français aconnu ces dernières années, et toutparticulièrement depuis 2015, uneévolution rapide, sous l’effet conjugué dela menace terroriste et de l’amplificationde la crise migratoire, qui appellent à lamobilisation et l’adaptation constantede l’emploi des forces.

La polyvalence, la technicité et ladisponibilité permanente des unitésmobiles permettent de les projeterrapidement en tout point du territoirenational pour accomplir des missionstrès variées. En 2002, les différentstypes de missions et les modalitésd’engagement des forces mobiles ontété définis dans une « doctrined’emploi » commune, dans la mesureoù escadrons de gendarmerie mobileet CRS sont pour l’essentielinterchangeables. Cette doctrine aété révisée en dernier lieu endécembre 2015.

Au cours des deux dernières décennies,l’emploi des forces mobiles s’est diversifiébien au-delà de leur spécialisationoriginelle en maintien de l’ordre. Ellesont été appelées à intervenir de plusen plus souvent pour des missionsdites de sécurisation, en appui auxunités territoriales de sécuritépublique, soit sur décision des directeursgénéraux dont elles dépendent, soit dansle cadre de plans nationaux renforcés(Vigipirate, plan national de sécurisationrenforcée, lutte contre l’immigrationclandestine). Elles exercent par ailleursdes missions dites « permanentes »,comme les missions en outre-mer –

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exclusivement dévolues à la gendarmeriemobile – ou les services d’ordre demanifestations sportives, culturellesou festives, qui immobilisent à unendroit donné un nombre élevéd’unités. Cependant, certaines missionscouramment confiées aux forcesmobiles apparaissent très éloignées deleur cœur de métier. Ainsi, pour les seulsCRS, les gardes statiques de bâtimentsconsidérés comme sensibles ontconsommé en moyenne cinq unités parjour depuis 2010 ; la surveillance desplages mobilise chaque été plus de450 maîtres-nageurs sauveteurs, soitl’équivalent de 3,5 compagnies renduesindisponibles pour leur compagnied’origine plus de trois mois par an.

L’élargissement continu des missionsdes forces mobiles depuis 2010,cumulé à leur usage intensif depuis2015, a coïncidé de surcroît avec lamise en application de la révisiongénérale des politiques publiques.Entre 2010 et 2015, les forces mobilesont été la catégorie d’emploi la plustouchée par la politique de déflationdes effectifs relevant du ministère del’intérieur. Les effectifs globaux réelsont baissé au total de 7,5 % sur lapériode, entraînant la suppressionde 15 escadrons de gendarmesmobiles et, pour les CRS, une diminutionsensible de la taille moyenne des unités,dont le nombre a été maintenu.

Cet effet de ciseaux entre l’intensificationde l’emploi et la réduction des effectifs aeu pour conséquences une diminutiondu temps consacré à la formationcollective et à l’entraînement et uneaugmentation de plus de 8 % du volumeannuel des heures supplémentairesentre 2010 et 2015, entraînant unehausse mécanique des rémunérations.

Sur le plan opérationnel, la réductiondu nombre de fonctionnaires ou demilitaires sur le terrain, avec pourtantun même nombre d’unités, a rendul’application des schémas tactiques pluscomplexe pour les autorités d’emploi.

Des capacités d’emploi saturées

Au regard du dispositif resserré à168 escadrons mobiles ou compagniesde CRS qui prévaut depuis 2012, lesunités dites « employées » (sur leterrain, en déplacement ou enformation) représentaient 55 % desforces en 2015 contre 52 % en 2012, uneunité mobile étant schématiquementsoit « employée », soit « neutralisée »pour récupération après une missionde longue durée ou en congés. Lerégime de récupération propre auxCRS et aux gendarmes mobiles constitueun élément déterminant du volumed’engagement maximal possible desunités. Depuis 2013, le plafond d’emploijournalier des unités mobiles est fixé à108 unités/jours. On constate que CRSet EGM ont été engagés continûment àce niveau, voire à un niveau légèrementsupérieur depuis cette date.

La part des unités disponibles à brefdélai est tombée à 2 % du total desforces en 2015, contre 5 % en 2010,alors qu’aux termes de leur doctrined’emploi, elles sont « une réservenationale à la disposition duGouvernement ». Cette notion de« réserve nationale » n’est pas définiepar les textes. Toutefois, dans uncontexte sécuritaire aggravé, il importede pouvoir assurer quotidiennement ladisponibilité d’un volant d’unitéseffectivement redéployables pour lemaintien de l’ordre, dans les conditions

L’emploi des forces mobiles de la policeet de la gendarmerie nationales : des capacitésen voie de saturation, un pilotage à renforcer

L’emploi des forces mobiles de la policeet de la gendarmerie nationales : des capacitésen voie de saturation, un pilotage à renforcer

prévues par la règlementation. De fait,la quasi-saturation des capacitésopérationnelles des forces mobiles acontraint l’État à renoncer à certainsdispositifs nationaux, parfois dans l’ur-gence, sans pour autant remettre àplat l’ensemble des missions confiéesà des unités hautement spécialisées etd’un coût supérieur à celui des unitésterritoriales.

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Part des unités de forces mobiles« disponibles » (pour les EGM,

unités en alerte ou sans mission ;pour les CRS, unités disponibles)

Source : Cour des comptes, d’après les donnéesde la DCCRS (Win emploi) et de la DGGN(Magister)

Un déséquilibre territorialpersistant entre implantationet emploi des forces, illustrépar le cas parisien

En métropole, les unités mobiles sontimplantées dans les différentes zonesde défense et de sécurité, selon unerépartition qui a peu varié depuisl’après-guerre. La cartographie réaliséepar la Cour de l’ensemble des forcesmobiles donne de prime abord l’imaged’une certaine complémentarité etd’une capacité de projection homo-gène sur l’ensemble du territoiremétropolitain. Cependant, au regard

des zones où l’emploi est le plusintense, à savoir la zone de compétencedu préfet de police de Paris et le Sud,cette organisation territoriale apparaîtfortement déséquilibrée. Le décalageentre zones d’implantation et d’emploiconduit aujourd’hui à une mobilitéexcessive, inflationniste sur le planbudgétaire (coûts de déplacementet d’hébergement, indemnisationjournalière d’absence temporaire desagents, surconsommation d’heuressupplémentaires) et coûteuse sur leplan social et environnemental.

Dans la zone de défense et de sécuritéde Paris, l’implantation des forcesmobiles représentait en moyenne surla période 2010-2015 13,8 % de leurrépartition sur l’ensemble du territoire,alors que leur emploi comptait pour38,4 % du total. Dans Paris intramuros, si le nombre d’évènementsnécessitant l’intervention de la forcepublique a connu une croissancemoyenne de 2,6 % par an depuis 2010, lesmanifestations ayant conduit à recouriraux forces mobiles ont progressé troisfois plus rapidement (8,8 %/an enmoyenne). Entre 2010 et 2015, lapremière catégorie d’emploi dans lacapitale était constituée par des gardesstatiques et par la tenue des pointsVigipirate, alors que la prise en charged’une garde statique par une unité deCRS à Paris représentait en 2015 unsurcoût mensuel net de 1,3 M€. Laseconde catégorie d’emploi recouvredes missions très diverses liées à l’ordrepublic, notamment les services d’ordredestinés à sécuriser les manifestationssportives et festives de grande ampleur,pour lesquelles le taux de sollicitationd’unités mobiles a pratiquement doubléentre 2010 et 2015.

Un renforcement nécessairedu pilotage opérationnelet budgétaire

En 2016, le Gouvernement a prisplusieurs mesures de rationalisationde l’emploi des forces mobiles et derecentralisation de leur gestionopérationnelle par l’unité de coordi-nation des forces mobiles, l’UCFM,dont les moyens ont été renforcés. Lesgardes statiques permanentes ontprogressivement été prises en charge

par les services territoriaux et lesmilitaires de l’opération « Sentinelle ».A Paris, un système de contingente-ment des forces mises à la dispositiondu préfet de police, dont les modalitésrestent à stabiliser, a été expérimenté.Ces mesures vont dans le bon sens.Cependant, la primauté de la vocationnationale des forces mobiles sur leszones de compétence de la policeet de la gendarmerie n’est pasencore actée pour les missions desécurisation, tout particulièrement enrégion parisienne.

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Siège de groupement

Escadron

Gendarmerie mobile

Unité de service général (USG)

Délégation

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95 - VAL-D'OISE95 - VAL-D'OISE95 - VAL-D'OISE

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100 km500 km 100 km Cour des comptes - SRPP/DL-2016Cour des comptes - SRPP/DL-2016

Implantation des forces mobiles au 1er janvier 2016

Source : Cour des comptes d’après données de la direction générale de la gendarmerie nationale(DGGN) et de la direction centrale des compagnies républicaines de sécurité

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À l’État :

1. veiller à maintenir quotidiennementun volant d’unités mobiles disponiblesou redéployables au moyen d’un seuildéfini par l’unité de coordination desforces mobiles ;

2. poursuivre le désengagementdes forces mobiles de missionspermanentes éloignées de leurscompétences spécifiques ;

3. faire primer la vocation nationaledes forces mobiles quand elles sontemployées à des missions de sécuri-sation, en supprimant la référenceaux zones de compétence de lapolice et de la gendarmerie dansl’allocation des unités ;

4. réviser le système de contingen-tement des forces mobiles mises àdisposition du préfet de police de Parisdéfini par instruction ministérielle, afinque le niveau de la dotation repré-sente un octroi minimal garanti d’uni-tés, compte étant tenu de l’utilisationdes moyens d’intervention propres dela préfecture ;

5. adopter une stratégie à moyenterme de rationalisation desimplantations géographiques desforces mobiles en fonction des lieuxd’emploi afin de limiter les déplacementsde longue distance et les coûts yafférents ;

6. préserver les temps de formationcollective et individuelle des forcesmobiles et définir un cadre de formationcommun aux deux forces.

Le Gouvernement a par ailleursprocédé à une reconstitution partielledes effectifs qui devrait permettrede retrouver fin 2017 les deux tiersdes postes supprimés entre 2010 et2015 dans les unités mobiles. Si leniveau de dépenses budgétaires des

forces mobiles, évalué à 1,81 Md€ en2015, hors investissement, a connu uneprogression en apparence modéréepar rapport à 2012 (3,3 %), ilconvient de l’apprécier au regard dela baisse des effectifs survenue surla même période.

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3L’action sociale au ministèrede l’intérieur : une organisationcomplexe, des risques avérés,une efficacité contestable

Définie par la loi du 13 juillet 1983modifiée, l’action sociale en faveur despersonnels de l’État vise à améliorerles conditions de vie des actifs etretraités, ainsi que celles de leursfamilles, notamment dans les domainesde la restauration, du logement, del’enfance et des loisirs. Elle vise aussi àaider ses bénéficiaires à faire face à dessituations difficiles. La mise en œuvrede l’action sociale obéit à plusieursprincipes : participation des agents ;universalité des prestations ; possibilitéde délégation à des organismes à butnon lucratif.

Une organisation inutilementcomplexe

L’action sociale du ministère de l’intérieurs’adresse en 2014 à 278 313 personnelsactifs (863 362 ressortissants en incluantles personnels inactifs). L’organisationsouffre d’une trop grande complexité etd’un émiettement. Au niveau central, elles’appuie sur une pluralité de servicesadministratifs (cinq sous-directions). Auniveau territorial, la superposition dedeux réseaux (un pour le ministère etun pour la gendarmerie) crée desredondances marquées par le fait que lesmilitaires de la gendarmerie nationale,

bien que dépendant organiquement duministère de l’intérieur, restent couvertspar l’action sociale de la défense,rattachée au secrétariat général duministère de la défense.

La loi du 3 janvier 2001 modifiéeconsacre l’intervention d’organismes auxstatuts variés (fondations, associations,mutuelles) dans la mise en œuvrede l’action sociale au sein des admi-nistrations, en leur accordant dessubventions et des mises à dispositionde moyens et de personnels en échangede l’accomplissement de missionssociales, culturelles, sportives et deloisirs. Le ministère de l’intérieur a, pararrêté du 22 juin 2009, délégué à troisorganismes partenaires principaux(Fondation Jean Moulin, Associationnationale d'action sociale – ANAS,Aide au handicap du ministère del’intérieur – AHMI) la mise en œuvrede prestations d’action sociale. Cettedésignation n’a pas empêché lapoursuite de très nombreux partenariatsnoués de longue date avec d’autresorganismes partenaires, au niveaunational et local, en si grand nombre(de l’ordre de 400) que le ministèren’est pas capable de procéder à unrecensement exhaustif.

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Répartition des dépenses d’action socialedu ministère de l’intérieur en 2014 (en M€)

*Incluant les dépenses de personnel des assistantsde service social.Source : Cour des comptes d’après donnéesdu ministère de l’intérieur

Une dépense significative

Les dépenses d’action sociale duministère peuvent être évaluées à111 M€ pour 2014. Ce total représentel’addition des prestations directementversées aux agents (58,86 M€), le coûtdu personnel de soutien (33,32 M€)et le montant des subventions auxorganismes partenaires (19,15 M€).Les coûts de structure sont donc loind’être négligeables : ainsi, lesdépenses de rémunération représentent30 % des dépenses totales d’actionsociale (en y incluant les salaires desassistants de service social).

La dépense annuelle moyenne est de400 € par agent, mais elle présentedes disparités : alors qu’elle s’élève à461 € hors gendarmerie, elle se limiteà 291,5 € par agent pour les100 488 personnels de gendarmerie(couverts par ailleurs partiellementpar l’action sociale du ministère de ladéfense).

Des risques qui remettenten cause le modèle de délégationaux organismes partenaires

Le contrôle des organismes partenairesqui bénéficient de financementspublics pour s’assurer de la qualité desprestations servies n’est pas efficace.Les conventions conclues avec lesorganismes manquent d’homogénéitéet ne sont pas toujours assortiesd’obligations claires. L’exercice de latutelle est morcelé entre plusieurssous-directions, ce qui génère despratiques disparates, jusqu’à certainscas de laisser-faire.

Les conditions de gestion de certainsorganismes partenaires génèrent desrisques financiers, susceptibles deremettre en cause leur pérennité, quela tutelle ne maîtrise pas. L’actionmême de certains organismes estaffectée d’irrégularités : modalitésd’achat de biens et services ; limitesaffectant l’activité de prêts.

Dans le cas de l’ANAS, malgré uneinterruption complète du dialogue degestion entre 2011 à 2015, et alorsque l’association ne répondait plus àses demandes, le ministère a continuéà augmenter les concours qu’il luiaccordait. Il n’a ainsi réagi que trèstardivement, après l’ouverture d’uneinformation judiciaire contre lesprincipaux dirigeants, et alors que ladétérioration rapide de la situation del’ANAS était visible à la seule lecturedes comptes annuels. Une lourde dérivede gestion a révélé des irrégularitésparticulièrement graves, relevant d’undétournement manifeste de l’objetassociatif, et qui a conduit à mettreen danger l’association elle-mêmeet à remettre en cause le caractèredésintéressé de sa gestion.

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Dans d’autres cas, l’administration amontré des difficultés à respecterl’équilibre nécessaire à une réelleautonomie des organismes partenaires.La fondation Louis Lépine, organismequi intervient au profit des agents dela préfecture de police de Paris, étaitprésidée par le préfet de policejusqu’en mai 2016 (date d’adoption denouveaux statuts). La fondationMaison de la gendarmerie, uniqueorganisme partenaire d’action socialede la gendarmerie nationale, restequant à elle très dépendante à l’égardde l’administration, puisqu’elle estencore présidée par le directeur généralde la gendarmerie nationale, qui estainsi en position de décider lui-même del’utilisation des subventions qu’ilalloue à la fondation.

Outre des subventions, ces organismesbénéficient de la part du ministère del’intérieur de concours sous forme demises à disposition de moyens (locaux,matériels, dépenses d’entretien…) et depersonnels qui ne sont ni systématique-ment remboursés ni valorisés dans lescomptes des organismes.

187,1 personnes en équivalent tempsplein (ETP) sont mises à dispositiondes organismes partenaires en 2014,dans certains cas au terme d’uneprocédure totalement opaque, endehors de tout cadre juridique ou àtitre gratuit. La Cour a relevé égalementplusieurs cas de mises à dispositionindues, la réalité de certains emploisproposés au sein des organismespartenaires n’ayant pu être démontrée.

Le ministère a annoncé en 2016 lamise en œuvre de plusieurs mesurespour renforcer le contrôle exercé surses organismes partenaires (tutelle

recentrée sur le secrétariat généraldu ministère, extinction des mises àdisposition de personnels, remise enordre du dialogue de gestion). Cesmesures, attendues, ne s’accompagnentpas encore d’une véritable révision desmissions confiées aux organismespartenaires ni d’une véritable évaluationde leurs conditions d’exécution.

Une politique à l’efficacitécontestable

La politique d’action sociale duministère, telle qu’elle est mise enœuvre, est génératrice d’inégalités.Tous les agents n’ont pas un égalaccès aux prestations mises enœuvre, soit en vertu d’inégalitésgéographiques (c’est ainsi qu’en2014, l’ÎIe-de-France absorbait 67 %des crédits d’action sociale du minis-tère), soit du fait des différences destatuts des personnels. Par ailleurs,des interrogations demeurent quantaux publics réellement touchés, ladélivrance de certaines prestationsapparaissant parfois bénéficier àquelques catégories d’agents mieuxinformés des dispositifs existants.

D’autre part, les prestations ne sontpas assez ciblées sur les besoinssocialement prioritaires. Faute d’outilsadaptés d’évaluation des besoins,l’efficacité et la pertinence desprestations proposées ne sont pasmesurées. L’évolution des besoins desressortissants est insuffisammentprise en compte, comme en témoignela désaffection pour les établissementsde centres de vacances familiauxexploités par les organismes partenaires,coûteux et peu fréquentés. Parfois, lanature de certaines prestationsapparaît très éloignée de l’action

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Recommandations

À l’État :

1. revoir l’organisation de l’actionsociale du ministère de l’intérieur,d’une part en supprimant la SDASAP-PN et d’autre part en déci-dant à titre définitif du rattachementde l’action sociale de la gendarmerienationale au ministère de l’intérieur ouau ministère de la défense (en entirant alors les conséquences entermes d’organisation et de cadrecontractuel) ;

2. redéfinir plus précisément lesfinalités de l’action sociale ens’appuyant sur une évaluation des

besoins et des carences constatéeset en veillant à prévenir les disparitésentre agents se trouvant dans dessituations comparables ;

3. revoir les délégations de missionsconsenties aux organismes partenaireset assurer les conditions d’un véritablecontrôle, à travers un dialogue degestion structuré autour deconventions pluriannuelles d’objectifset de moyens ;

4. ajuster les concours financiersaux besoins réels des organismespartenaires ; mettre un terme auxmises à disposition de personnels etde moyens non justifiées.

sociale telle que définie par la loi.Enfin, certaines actions, bien queprioritaires pour le ministère, sontconduites dans des conditions criti-quables et doivent être réformées auplus tôt, comme la Cour a pu leconstater au sujet de l’hébergementd’urgence des jeunes fonctionnaires de

police en région parisienne, pourtantannoncé au rang des priorités d’actionsociale du ministère.

Une révision d’ensemble de la politiquesuivie, incluant une évaluation desactions entreprises et des finalitéspoursuivies, s’impose.

Chapitre II

La conduite de projets

1. Le Muséum national d’histoire naturelle : une mutationinachevée, une institution fragilisée par le zoo de Vincennes

2. Les chambres d’agriculture : façonner un réseau efficace

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Le Muséum national d’histoirenaturelle est un établissementpublic national, doté de multiplesmissions : recherche (15 laboratoires),expertise auprès des pouvoirs publics,formation en master et doctorat,conservation de collections (66 millionsde biens à l’inventaire) et diffusion de laculture scientifique dans ses nombreuxmusées, zoos et jardins (3 millions

de visiteurs au total en 2015). Toutesces missions sont au service d’unmême objet : les sciences naturelleset les sciences de l’homme. LeMuséum est doté en 2015 d’un effectifde 1 692 agents et d’un budget de114 M€, dont 54,3 M€ provenant desubventions versées par les ministèreschargés respectivement de l’enseigne-ment supérieur et de l’environnement.

Dépenses et recettes du Muséum

Source : Cour des comptes

Un établissement en situationfinancière alarmante

En 2015, l’État a dû verser au Muséumnational d’histoire naturelle unesubvention exceptionnelle visant à

combler son déficit dû à la fréquentationinsuffisante du Parc zoologique de Paris,plus connu sous l’appellation de « zoode Vincennes ». Ce zoo, qui a rouverten avril 2014 après quatre années detravaux, a été entièrement rénové

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dans le cadre d’un partenariat public-privé. Selon le modèle économiqueretenu lors du montage de l’opération,les recettes de fréquentation devaientcouvrir la redevance annuelle due aupartenaire privé pendant 25 ans. Alorsque le Muséum prévoyait 1,7 milliond’entrées, le nombre de visiteurs nes’est établi qu’à 912 000 en 2015. Si lafréquentation du zoo ne se redresse pasau cours des prochaines années, sonexploitation représentera un déficitannuel de l’ordre de 7,4 M€.

Le Muséum est dans une situationfinancière alarmante, à un moment oùil a encore des besoins de financementimportants pour rénover son patri-moine, souvent encore très vétuste.C’est notamment le cas de la Galerie depaléontologie et d’anatomie comparéedu jardin des plantes, dont la rénovationest aujourd’hui impérative, sans que leMuséum ne dispose de scénario definancement.

Des choix stratégiques imprudents

Cette situation financière critique est laconséquence des choix d’investisse-ments opérés depuis 2007 par leMuséum et validés par sa tutelle, leministère chargé de l’enseignementsupérieur. Le Muséum a engagé larénovation du zoo de Vincennes sur labase d’hypothèses de fréquentationqui apparaissent aujourd’hui suresti-mées : 1,4 million de visiteurs par an,alors que la fréquentation n’avait pasdépassé 900 000 entrées depuis lesannées 1980. En outre, le zoo asouffert d’un accueil mitigé dupublic au moment de sa réouverturepour différentes raisons : animaux

peu visibles, espèces emblématiquesabsentes, tarifs perçus comme élevés.

Dans le même temps, le Muséum aengagé une deuxième opérationmajeure : la rénovation du musée del’Homme situé au Palais de Chaillot(2010-2015). Les insuffisances dans lapréparation de cette opération, tant surle plan technique que muséographique,ont entraîné des aléas lors du chantieret un quasi-doublement de son coût,qui est passé de 52,3 M€ à 92,3 M€.Pour couvrir ces surcoûts, le Muséum aconsommé ses marges de manœuvrefinancières, en utilisant notamment desproduits de cession de son patrimoine.

Un établissement difficileà réformer

Au-delà de ces problèmes financiers, leMuséum est marqué par une difficultéà moderniser son fonctionnement.Depuis 2001, les directeurs successifsont engagé un mouvement deréforme, demeuré inabouti, en vue demieux prendre en compte la diversitédes missions. La restructuration del’organisation de la recherche a ainsibuté sur l’opposition des représentantsdu personnel en 2012. Le Muséumconserve une activité d’enseignementen propre qui apparaît aujourd’huimarginale. Il comprend en 2015 plusd’enseignants-chercheurs (237) qued’étudiants en master (180).

En matière de gestion des collections, leMuséum a fait des progrès importantsen menant de grands chantiers commela rénovation complète de l’Herbiernational (5,6 millions de végétaux).Néanmoins, il conserve la quasi-totalitéde ses réserves dans le centre de Paris,dans des conditions pas toujours

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Source : Cour des comptes

Sites d’implantation du Muséum

satisfaisantes, alors que de grandsétablissements culturels parisiens ontsouvent opté pour une délocalisation.

Même s’il s’est séparé de certainesimplantations au cours des dernières

années, le Muséum gère encore denombreux sites à Paris et en région.Le coût de fonctionnement de cesstructures est parfois sans rapportavec leur fréquentation par le publicou leur intérêt scientifique.

Enfin, la période récente a été marquéepar un débat incessant sur le modèlede gouvernance de l’établissement.Après les dérives de gestion qui avaientmarqué la décennie 1990, leGouvernement avait opté pour la miseen place d’une direction générale

exécutive, qui n’était plus confiée à unscientifique, mais à un dirigeant avec unprofil de gestionnaire. Cette nouvellegouvernance n’a jamais été acceptéepar les représentants du personnel.Alors que réformer à nouveau les statutsn’apparaissait ni urgent, ni nécessaire,

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la tutelle a cédé aux demandes des repré-sentants du personnel en rétablissant unscientifique à la tête de l’établissementet en renforçant leur poids dans lesinstances. Cette crise de la gouvernance(2012-2015) aura, trois années durant, misà l’arrêt le mouvement de modernisationde l’établissement.

Des mesures de redressementà engager sans délai

Le Muséum doit engager rapidementdes actions afin de redresser sa situationfinancière. Cela passe par la définitiond’un nouveau modèle économique pourle zoo de Vincennes, qui ne saurait reposeruniquement sur la couverture par l’Étatd’un déficit constaté annuellement. Celaexige l’engagement d’efforts importantspour développer l’attractivité de cetéquipement.

L’amélioration de la gestion budgétaireet financière du Muséum doit égalementrester une priorité pour sa nouvellegouvernance, avec l’objectif de tirerparti des leviers de ressources propreset d’économies. À cet égard, le temps detravail du personnel non-enseignant,

actuellement inférieur de 8 % à la duréelégale, doit être remis à niveau. LeMuséum doit également passer enrevue ses implantations au regard deleur coût, de leur fréquentation et de leurintérêt pour ses missions, en envisageantdes cessions et des fermetures. À l’heureoù le Muséum a de grands besoinsd’investissement dans son patrimoine,la question d’une délocalisationd’une partie de ses réserves et de lavalorisation de son patrimoine foncierdans le quartier latin doit être étudiée.

Des questions plus structurantes doiventégalement faire l’objet de réformes.L’existence des corps spécifiquesd’enseignants-chercheurs (les maîtresde conférences et les professeurs duMuséum) ne paraît pas justifiée. Demême, la tutelle principale, confiée auministère chargé de l’enseignementsupérieur, n’est pas adaptée aux enjeuxde cet établissement. Elle devraitreposer sur les ministères chargés dela recherche et de la culture, reflétantla véritable nature du Muséum, qui, àla fois, mène des activités derecherche et gère un patrimoinescientifique prestigieux.

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RecommandationsÀ l’État :

1. formaliser des objectifs de perfor-mance pour la gestion du Muséumdans le cadre d’un nouveau contratpluriannuel définissant une trajectoirede retour à l’équilibre ;

2. supprimer les corps spécifiquesd’enseignants-chercheurs du Muséum ;

3. mettre en œuvre une réorganisa-tion de la tutelle administrative etbudgétaire de l’établissement.

Au Muséum national d’histoirenaturelle :

4. mettre en œuvre les mesuresd’attractivité nécessaires à l’augmen-tation de la fréquentation du zoo deVincennes ;

5. restructurer les sites du Muséumen région, en mettant en œuvre descessions ou en recentrant leuractivité ;

6. poursuivre la rénovation dupatrimoine en tirant parti de lavalorisation de l’îlot Poliveau ;

7. poursuivre la modernisation dela gestion afin de dégager deséconomies, notamment en favorisantles mutualisations, et développer lesressources propres ;

8. à partir de la comptabilité analytique,isoler la gestion du zoo de Vincennesafin de permettre d’apprécier laperformance de gestion du Muséumsur le reste de son périmètre.

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Les chambres d’agriculture, créées audébut du XXème siècle, sont enpleine mutation après être restéeslongtemps figées dans leurs rôlestraditionnels de représentation desintérêts agricoles et de conseil auxexploitants. Le ministère de l’agriculturevoit dans leur réseau un relais pourla mise en œuvre de ses politiquespubliques. Cependant, les chambresne sont pas encore dotées de tous lesmoyens qui garantiraient leur adaptationà l’exercice de leurs nouvelles missions. L’Étatdoit donc prendre toute sa part dans leparachèvement de cette évolution.

La Cour a réalisé un état des lieux duréseau, en mettant en exergue lespistes de réforme qui apparaissentindispensables. Elle s’est appuyée surdes données chiffrées globales donnantune image assez précise du réseau et deson évolution.

Le réseau connaît une évolutionde ses missions, à clarifierdans une stratégie d’ensemble

Les chambres d’agriculture s’acquittentde nombreuses missions qui peuventêtre classées en trois catégories : unemission de représentation, qui pèsepour près de 100 M€ par an, soit 15 %de leurs dépenses, une mission de

développement agricole, qui regroupede nombreux programmes et représente75 % de l’activité et un budget annuelde 550 M€, et des missions de servicepublic, qui mobilisent aujourd’hui plusde 10 % de leur effectif et 70 M€ dedépenses annuelles. Pour sa part,l’Assemblée permanente des chambresd'agriculture (APCA) peine à exercer lamission d’animation du réseau qui luiincombe aux termes de la loi. Cesmissions très diverses devraient êtreclarifiées, dans un cadre stratégiquepréalablement fixé qui permettraitaux chambres d’agriculture de définir,notamment, la place de leurs activitéss’exerçant dans le domaine concurrentielet d’éviter la persistance de doublons.

Le réseau des chambres d’agriculture est insuffisammentstructuré

À l’instar des autres réseaux consulaires,celui des chambres d’agriculture alancé, en 2008, les bases d’uneréforme qui ne commence à produireses premiers effets tangibles qu’en2016. Cette réorganisation, qui reposeprincipalement sur la montée en puissancedu niveau régional et sur la mutualisation,reste encore insuffisante et incertainequant à ses effets. Les établissements du

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Les chambres d’agriculture :façonner un réseau efficace

Source : Cour des comptes d’après données APCA (chambres d’agriculture) etrapport d’information de la commission des finances, de l’économie générale et ducontrôle budgétaire de l’Assemblée nationale sur les chambres consulaires, leursmissions et leurs financements du 16 septembre 2015 (CMA et CCI)

Source : Cour des comptes d’après données AGRESTE (comptes del’agriculture) et APCA (données sociales des chambres d’agriculture)

Principales données sur les réseaux consulaires

Évolution comparée du nombre des exploitations agricoles, des UTAT1

et des moyens humains des chambres d’agriculture

1 L’unité de travail annuelle (UTA), comparable à l’équivalent temps plein (ETP) des entreprisesou administrations, est égale au temps de travail d’une personne à temps complet pendant unan dans les exploitations agricoles. Les unités de travail annuelles totales (UTAT) rendentcompte de l’activité totale ainsi consacrée aux exploitations.

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réseau, qui devraient être incités àfusionner, sont encore trop nombreux(114), de même que leurs antenneslocales (373 antennes). Leur gouvernanceest complexe (4 200 élus y participent)et mériterait d’être allégée et simplifiée,en privilégiant le niveau régional,appelé à jouer à l’avenir un rôle moteur.En s’inspirant de ce qui existe déjà dansles autres réseaux consulaires, la tête deréseau (l’APCA) devrait être renforcée,de même que la tutelle qu’exerce l’État.Il faut donc poursuivre la réformeengagée, tout en saisissant l’occasionqu’offre la réorganisation du réseaupour revoir sa gouvernance.

L’équilibre financier du réseauest à restaurer

Sa situation financière, en fortedégradation depuis 2012, rend néces-saire une meilleure maîtrise desdépenses, le coût de fonctionnementdu réseau restant à un niveau élevé(720 M€ en 2014).

Tout d’abord, des réformes s’imposentpour mieux encadrer les dépenses depersonnel qui représentent 61 % descharges consolidées du réseau et necessent de croître. Ensuite, les moyensmatériels des chambres doiventégalement être revus, la prioritédevant être donnée à l’améliorationde la gestion des parcs automobile etimmobilier. Une meilleure maîtrise desdépenses d’intervention, notammentles subventions aux associations,apparaît également nécessaire. Pourparvenir à ces améliorations, leschambres doivent mieux utiliser leursoutils de gestion, notamment en

matière de prévision budgétaire et decomptabilité analytique, et développerle contrôle interne et l’évaluation.

Mais la situation financière du réseauappelle aussi une réforme de sonmode de financement qui pourraitdonner encore plus de sens à saréorganisation régionale.

Face à l’évolution très contrainte desressources fiscales et des subventionsqu’il perçoit, le réseau tend à développerses ressources provenant de la vente deprestations. Mais ces dernières ne sontpas illimitées et ne peuvent couvrir latotalité du champ d’action très large desétablissements publics administratifsque sont les chambres d’agriculture.

Compte tenu des fortes disparitésexistant entre les chambres, ilconviendrait de renforcer la solidaritéentre les membres du réseau. Lapéréquation mise en place dans lecadre du Fonds national de péréquationdes chambres d’agriculture (FNPCA),puis du Fonds national de solidarité etde péréquation (FNSP), reste toutefoisinsuffisante : longtemps négligeable,elle a été portée à 1 % des ressourcesfiscales en 2015, alors que le plafondautorisé par la loi dans le cadre duFNSP permettrait d’aller beaucoup plusloin (5 %).

Devant l’évolution du réseau deschambres d’agriculture, et face àl’aggravation de leurs problèmesfinanciers, les pouvoirs publicsdevraient en outre envisager uneréforme de la fiscalité de ces établis-sements publics tenant compte del’émergence du fait régional.

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Les chambres d’agriculture :façonner un réseau efficace

La compétence fiscale, actuellementattribuée aux chambres départemen-tales, devrait être transférée auniveau régional. Une telle réformegommerait une grande partie desdisparités affectant les distributionsdépartementales de la taxe additionnelleà la taxe sur le foncier non bâti (TATFNB)au sein du réseau. Il appartiendrait alorsaux chambres régionales de répartir laressource fiscale entre les chambres de la

région, dans les limites éventuellementfixées par la loi. Ce système permettraitd’instaurer, en plus de la péréquationnationale, une solidarité régionale.

Ainsi, la Cour appelle l’État à accompa-gner la réforme engagée, à améliorerla gouvernance du réseau, ainsi queson financement, par une révision desdispositions du code rural et de lapêche maritime.

Recommandations

1. encourager la fusion deschambres départementales ;

2. réduire le nombre des élus ausein des sessions des chambresd’agriculture en supprimant lescollèges 4 (anciens exploitants) et5 (groupements professionnelsagricoles) ;

3. faire mentionner explicitementdans le code rural et de la pêche

maritime la qualité de tête deréseau de l’APCA et son pouvoir dedéfinir la stratégie nationale duréseau ainsi que sa politiquegénérale en matière de gestion dupersonnel ;

4. transférer la compétence fiscaledu niveau départemental au niveaurégional.