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1 DROIT BANCAIRE Cours du professeur Philippe DUPICHOT Master I Fascicule de Travaux Dirigés Julie CRASTRE Chantal DONZEL Diana FLAMAND Sonia FELLACHE Delphine GUILLOTTE Thomas GIRY Aqdas MOHAMMAD Ingrid ROSHDAL Florent VINCENT

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DROIT BANCAIRE

Cours du professeur Philippe DUPICHOT

Master I Fascicule de Travaux Dirigés

Julie CRASTRE Chantal DONZEL Diana FLAMAND Sonia FELLACHE

Delphine GUILLOTTE Thomas GIRY

Aqdas MOHAMMAD Ingrid ROSHDAL Florent VINCENT

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Année universitaire 2017-2018

SOMMAIRE DU FASCICULE

Séance 1 - Introduction au droit bancaire - Histoire et économie bancaire – Méthodologie. Séance 2 - Agrément et monopole bancaire. Séance 3 - L’autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Séance 4 - Le compte : généralités (I). Séance 5 - Le compte : compte de dépôt et compte courant (II). Séance 6 - Les instruments de paiement : le chèque (I). Séance 7 - Les instruments de paiement : les paiements bancaires dématérialisés (II). Séance 8 - La responsabilité du banquier dispensateur de crédit. Séance 9 - Le refinancement (I) : L’escompte (lettre de change). Séance 10 - Le refinancement (II) : Les cessions de créances simplifiées et l’affacturage.

Droit bancaire – 2017/2018

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BIBLIOGRAPHIE GÉNÉRALE

MANUELS DE DROIT BANCAIRE T. BONNEAU, Droit bancaire, LGDJ, Coll. Domat Droit privé, 12ème éd., 2017, C. GAVALDA et J. STOUFFLET, Droit bancaire, LexisNexis, Manuels, 9ème éd., 2015, J. LASSERRE CAPDEVILLE, M. STORCK, R. ROUTIER, M. MIGNOT, J-PHILIPPE KOVAR, N. ERESEO, Droit Bancaire, 1ère éd., 2017, G. RIPERT, R. ROBLOT, P. DELEBECQUE, M. GERMAIN, Traité de droit commercial, LGDJ, 17ème éd., 2014, M. DE JUGLART, B. IPPOLITO, Traité de droit commercial, les effets de commerce, LGDJ, 11ème éd., 1995. S. PIEDELIEVRE, Instruments de crédit et de paiement, Dalloz, 9ème éd., 2016, R. BONHOMME, Instruments de crédit et de paiement, LGDJ, 11ème éd., 2015, P. NEAU-LEDUC, Droit bancaire, Dalloz, 5ème éd., 2015. CHRONIQUES DE JURISPRUDENCE (DROIT BANCAIRE) H. SYNVET ET D.R MARTIN, in : Dalloz, D. LEGEAIS, in : RTD COM, J. STOUFFLET et N. MATHEY in : Semaine Juridique, édition entreprises (JCP E) B. BURY et M. ROUSSILLE, in : Gazette du Palais, REVUES SPECIALISEES BANQUE & DROIT, JURISCLASSEUR BANQUE CREDIT BOURSE, REVUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER (RDBF), éd. LexisNexis BANQUE MAGAZINE, REVUE INTERNATIONALE DES SERVICES FINANCIERS (RISF), éd. Bruylant. CODES

- CODE MONETAIRE ET FINANCIER (CMF), 2017, 7ème éd., 2016, - CODE DE COMMERCE, 2018, 113ème éd., 2017 - CODE MONETAIRE ET FINANCIER (CMF), 2017, 11ème éd., 2016, - CODE DE COMMERCE, 2017, 29ème éd., 2016.

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Séance n° 1 INTRODUCTION AU DROIT BANCAIRE – HISTOIRE ET

ECONOMIE BANCAIRE – METHODOLOGIE.

METHODOLOGIE DE LA DISSERTATION ET DU COMMENTAIRE D’ARRÊT

INTRODUCTION AU DROIT BANCAIRE – HISTOIRE ET ECONOMIE BANCAIRE

- M. VILLEMONTAIX, Fiches de droit bancaire, 2ème éd., édition ELLIPSES, 2016 : « Introduction au Droit Bancaire », - A. PLESSIS, Histoire des banques de France, publié sur le site de la Fédération bancaire de France (FBF). - Repères d’économie bancaire, les nouveaux défis du financement de l’économie, sous la direction de Valérie Ohanissan et Timothée Waxin, Revue Banque, éd. Hors coll, parution juillet 2017. Doc. 1 : Article L 311-1 et L 311-2 du Code Monétaire et Financier (CMF) Doc. 2 : Article L 312-1 du CMF Doc. 3 : Article L 110-1 du CMF Doc. 2 : Article L 511-1 du CMF Doc. 3 : Article L 314-1 du CMF Doc. 4 : Article L 511-5 du CMF Doc. 5 : Article L 321-1 du CMF Doc. 6 : Article L 531-4 du CMF Doc. 7 : Article L 521-1 du CMF Doc. 8 : Article L 123-24 du CMF Doc. 9 : Cass, A.P, 9 octobre 2006, (JCP éd. G, 2006, II, 10175, note T. Bonneau) Doc. 10 : Cass. 1ère civ. 19 juin 2013, n°12-16.651 Doc 11 : Extraits du manuel de J. LASSERRE CAPDEVILLE, M. STORCK, R. ROUTIER, M. MIGNOT, J-PHILIPPE KOVAR, N. ERESEO, Droit Bancaire, 1ère éd., 2017 ACTUALITE EN DROIT BANCAIRE

V. de FILLIPIS, Shadow Banking, marchés à l’ombre, Libération, 3 août 2017. D. NORA, Crise des subprimes : la menace de la finance de l’ombre, Nouvel Obs, 9 août 2017 M. DAMGÉ, Le 9 août 2007, le début de la crise des subprimes, Le Monde, 9 août 2017 RABREAU, Shadow banking : tout comprendre sur la finance de l’ombre, Le Figaro, 26 août 2015.

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METHODOLOGIE DE LA DISSERTATION ET DU COMMENTAIRE D’ARRÊT

http://fiches.dalloz-etudiant.fr/methodologie/fiches-de-methodologie/detail/fiche/193/h/a4467b76e69d3b8ad5ab9f43cb74a3c5.html http://fiches.dalloz-etudiant.fr/methodologie/fiches-de-methodologie/detail/fiche/193/h/a4467b76e69d3b8ad5ab9f43cb74a3c5.html http://fiches.dalloz-etudiant.fr/methodologie/fiches-de-methodologie/detail/fiche/194/h/aad2aa1359541d9c51b9363d4afcd3db.html http://fiches.dalloz-etudiant.fr/methodologie/fiches-de-methodologie/detail/fiche/191/h/d214df06a0008c7648c51dbe817804fe.html INTRODUCTION AU DROIT BANCAIRE – HISTOIRE ET ECONOMIE BANCAIRE.

- M. VILLEMONTAIX, Fiches de droit bancaire, 2ème éd., édition ELLIPSES, 2016 : « Introduction au Droit Bancaire », - A. PLESSIS, Histoire des banques de France, publié sur le site de la Fédération bancaire de France (FBF). - Repères d’économie bancaire, les nouveaux défis du financement de l’économie, sous la direction de Valérie Ohanissan et Timothée Waxin, Revue Banque, éd. Hors coll, parution juillet 2017. Doc. 1 : Article L 311-1 et L 311-2 du Code Monétaire et Financier (CMF)

Les opérations de banque comprennent la réception de fonds remboursables du public, les opérations de crédit, ainsi que les services bancaires de paiement.

I. – Les établissements de crédit peuvent aussi effectuer les opérations connexes à leur activité telles que :

1. Les opérations de change ;

2. Les opérations sur or, métaux précieux et pièces ;

3. Le placement, la souscription, l'achat, la gestion, la garde et la vente de valeurs mobilières et de tout produit financier ;

4. Le conseil et l'assistance en matière de gestion de patrimoine ;

5. Le conseil et l'assistance en matière de gestion financière, l'ingénierie financière et d'une manière générale tous les services destinés à faciliter la création et le développement des entreprises, sous réserve des dispositions législatives relatives à l'exercice illégal de certaines professions ;

6. Les opérations de location simple de biens mobiliers ou immobiliers pour les établissements habilités à effectuer des opérations de crédit-bail ;

7. Les services de paiement mentionnés au II de l'article L. 314-1 ;

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8. L'émission et la gestion de monnaie électronique.

Lorsqu'il constitue la fourniture de services d'investissement au sens de l'article L. 321-1, l'exercice des opérations connexes et de l'activité de conservation est subordonné à l'agrément préalable prévu à l'article L. 532-1.

II. – Les sociétés de financement peuvent également effectuer les opérations connexes à leur activité mentionnées aux 1, 2, 5 et 6 du I

Doc. 2 : Article L 312-1 du CMF

I. – A droit à l'ouverture d'un compte de dépôt dans l'établissement de crédit de son choix, sous réserve d'être dépourvu d'un tel compte en France :

1° Toute personne physique ou morale domiciliée en France ;

2° Toute personne physique résidant légalement sur le territoire d'un autre Etat membre de l'Union européenne n'agissant pas pour des besoins professionnels ainsi que toute personne physique de nationalité française résidant hors de France.

II. – Pour les personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels, les établissements de crédit disposent, au sein de leur gamme de services, de prestations de base définies par décret.

Lorsque ces personnes sont en situation de fragilité financière au sens de l'article L. 312-1-3, elles se voient proposer l'offre spécifique mentionnée au même article dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.

Sous réserve du respect des dispositions du chapitre Ier du titre VI du livre V, l'établissement procède à l'ouverture du compte de dépôt demandée par les personnes mentionnées au premier alinéa du présent II au plus tard dans les six jours ouvrés à compter de la réception de l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires à cet effet.

L'établissement peut rejeter la demande d'ouverture de compte au motif que ces personnes peuvent bénéficier d'un compte de dépôt dans les conditions mentionnées au III.

Si l'établissement refuse l'ouverture du compte de dépôt, il communique au demandeur, gratuitement et par écrit, les motifs de ce refus en mentionnant, le cas échéant, la procédure prévue au III.

III. – En cas de refus de la part de l'établissement choisi d'ouvrir un tel compte à l'une des personnes mentionnées au I, celle-ci peut saisir la Banque de France afin qu'elle lui désigne un établissement de crédit situé à proximité de son domicile ou d'un autre lieu de son choix, en prenant en considération les parts de marché de chaque établissement concerné, dans un délai d'un jour ouvré à compter de la réception des pièces requises définies par arrêté.

L'établissement de crédit qui a refusé l'ouverture d'un compte remet systématiquement, gratuitement et sans délai, au demandeur une attestation de refus d'ouverture de compte et l'informe qu'il peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte.

Il lui propose, s'il s'agit d'une personne physique, d'agir en son nom et pour son compte en transmettant la demande de désignation d'un établissement de crédit à la Banque de France ainsi que les informations requises pour l'ouverture du compte. A la demande d'une personne physique, le département, la caisse d'allocations familiales, le centre communal ou

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intercommunal d'action sociale dont cette personne dépend, une association ou une fondation à but non lucratif dont l'objet est d'accompagner les personnes en difficulté ou de défendre les intérêts des familles ou une association de consommateurs agréée peut également transmettre en son nom et pour son compte la demande de désignation et les pièces requises à la Banque de France. Un décret détermine les conditions dans lesquelles les associations et fondations peuvent agir sur le fondement du présent alinéa.

Les établissements de crédit ainsi désignés par la Banque de France sont tenus d'offrir au titulaire du compte des services bancaires de base dont le contenu et les conditions tarifaires sont précisés par décret. Ils procèdent à l'ouverture du compte de dépôt dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires à cet effet.

L'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, mentionnée à l'article L. 511-29, adopte une charte d'accessibilité bancaire afin de renforcer l'effectivité du droit au compte. Cette charte précise les délais et les modalités de transmission, par les établissements de crédit à la Banque de France, des informations requises pour l'ouverture d'un compte. Elle définit les documents d'information que les établissements de crédit doivent mettre à disposition de la clientèle et les actions de formation qu'ils doivent réaliser. Elle fixe un modèle d'attestation de refus d'ouverture de compte.

La charte d'accessibilité bancaire, homologuée par arrêté du ministre chargé de l'économie, après avis du comité consultatif du secteur financier et du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, est applicable à tout établissement de crédit. Le contrôle du respect de la charte est assuré par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et relève de la procédure prévue à l'article L. 612-31.

IV. – L'établissement de crédit ne peut résilier unilatéralement la convention de compte de dépôt assorti des services bancaires de base, ouvert en application du III, que si l'une au moins des conditions suivantes est remplie :

1° Le client a délibérément utilisé son compte de dépôt pour des opérations que l'organisme a des raisons de soupçonner comme poursuivant des fins illégales ;

2° Le client a fourni des informations inexactes ;

3° Le client ne répond plus aux conditions de domicile ou de résidence définies au I ;

4° Le client a ultérieurement ouvert un deuxième compte de dépôt en France qui lui permet d'utiliser les services bancaires de base ;

5° Le client a fait preuve d'incivilités répétées envers le personnel de l'établissement de crédit ;

6° L'établissement est dans l'une des situations prévues à l'article L. 561-8.

Toute décision de résiliation à l'initiative de l'établissement de crédit fait l'objet d'une notification écrite motivée et adressée gratuitement au client. La décision de résiliation ne fait pas l'objet d'une motivation lorsque la notification est de nature à contrevenir aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public. La décision de résiliation à l'initiative de l'établissement est adressée, pour information, à la Banque de France.

Un délai minimum de deux mois de préavis est octroyé au titulaire du compte, sauf dans les cas mentionnés au 1° et au 2°.

L'établissement informe le client, au moment de la notification, de l'existence d'un service de relations avec la clientèle et de la médiation pour traiter les litiges éventuels liés à la résiliation de la convention de compte de dépôt.

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V. – Le présent article s'applique aux personnes inscrites aux fichiers gérés par la Banque de France en application de l'article L. 131-85 du présent code et de l'article L. 751-1 du code de la consommation.

Doc 3 : Article L 110-1 du CMF

La loi répute actes de commerce :

1° Tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en œuvre,

2° Tout achat de biens immeubles aux fins de les revendre, à moins que l'acquéreur n'ait agi en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre en bloc ou par locaux ;

3° Toutes opérations d'intermédiaire pour l'achat, la souscription ou la vente d'immeubles, de fonds de commerce, d'actions ou parts de sociétés immobilières ;

4° Toute entreprise de location de meubles ;

5° Toute entreprise de manufactures, de commission, de transport par terre ou par eau ;

6° Toute entreprise de fournitures, d'agence, bureaux d'affaires, établissements de ventes à l'encan, de spectacles publics ;

7° Toute opération de change, banque, courtage, activité d'émission et de gestion de monnaie électronique et tout service de paiement ;

8° Toutes les opérations de banques publiques ;

9° Toutes obligations entre négociants, marchands et banquiers ;

10° Entre toutes personnes, les lettres de change.

Doc. 2 : Article L 511-1 du CMF I.-Les établissements de crédit sont les entreprises dont l'activité consiste, pour leur propre compte et à titre de profession habituelle, à recevoir des fonds remboursables du public mentionnés à l'article L. 312-2 et à octroyer des crédits mentionnés à l'article L. 313-1.

II.-Les sociétés de financement sont des personnes morales, autres que des établissements de crédit, qui effectuent à titre de profession habituelle et pour leur propre compte des opérations de crédit dans les conditions et limites définies par leur agrément. Elles sont des établissements financiers au sens du 4 de l'article L. 511-21.

Doc. 3 : Article L 314-1 du CMF

Est un compte de paiement, un compte détenu au nom d'une ou de plusieurs personnes, utilisé aux fins de l'exécution d'opérations de paiement.

II. – Sont des services de paiement :

1° Les services permettant le versement d'espèces sur un compte de paiement et les opérations de gestion d'un compte de paiement ;

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2° Les services permettant le retrait d'espèces sur un compte de paiement et les opérations de gestion d'un compte de paiement ;

3° L'exécution des opérations de paiement suivantes associées à un compte de paiement :

a) Les prélèvements, y compris les prélèvements autorisés unitairement ;

b) Les opérations de paiement effectuées avec une carte de paiement ou un dispositif similaire ;

c) Les virements, y compris les ordres permanents ;

4° L'exécution des opérations de paiement suivantes associées à une ouverture de crédit :

a) Les prélèvements, y compris les prélèvements autorisés unitairement ;

b) Les opérations de paiement effectuées avec une carte de paiement ou un dispositif similaire ;

c) Les virements, y compris les ordres permanents ;

5° L'émission d'instruments de paiement et / ou l'acquisition d'ordres de paiement ;

6° Les services de transmission de fonds ;

7° L'exécution d'opérations de paiement, lorsque le consentement du payeur est donné au moyen de tout dispositif de télécommunication, numérique ou informatique et que le paiement est adressé à l'opérateur du système ou du réseau de télécommunication ou informatique, agissant uniquement en qualité d'intermédiaire entre l'utilisateur de services de paiement et le fournisseur de biens ou services.

III. – N'est pas considérée comme un service de paiement :

1° La réalisation d'opérations fondées sur l'un des documents suivants, tiré sur le prestataire de services de paiement en vue de mettre des fonds à la disposition du bénéficiaire :

a) Un titre de service sur support papier ;

b) Un chèque de voyage sur support papier ;

c) Un mandat postal sur support papier tel que défini par l'Union postale universelle ;

2° La réalisation des opérations de paiement liées au service d'actifs et de titres, notamment celles réalisées sur un compte sur livret, sur un compte mentionné au titre II du livre II, sur un compte à terme ou sur un compte-titre mentionné au chapitre Ier du titre 1er du livre II ainsi que sur un compte espèces qui lui est spécifiquement associé.

IV. – Constitue un support durable, tout instrument permettant à l'utilisateur de services de paiement de stocker les informations qui lui sont personnellement adressées, d'une manière telle que ces informations puissent être consultées ultérieurement pendant une période adaptée à leur finalité et reproduites à l'identique.

Doc. 5 : Article L 321-1 du CMF

Les services d'investissement portent sur les instruments financiers énumérés à l'article L. 211-1 et comprennent les services et activités suivants :

1. La réception et la transmission d'ordres pour le compte de tiers ;

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2.L'exécution d'ordres pour le compte de tiers ;

3. La négociation pour compte propre ;

4. La gestion de portefeuille pour le compte de tiers ;

5. Le conseil en investissement ;

6-1. La prise ferme ;

6-2. Le placement garanti ;

7. Le placement non garanti ;

8.L'exploitation d'un système multilatéral de négociation au sens de l'article L. 424-1.

Un décret précise la définition de ces services.

Les services rendus à l'Etat et à la Banque de France, dans le cadre des politiques de gestion de la monnaie, des taux de change, de la dette publique et des réserves de l'Etat ne sont pas soumis aux dispositions du présent code applicables aux services d'investissement mentionnés au présent article.

Doc. 6 : Article L 531-4 du CMF Les entreprises d'investissement sont des personnes morales, autres que les établissements de crédit, qui fournissent des services d'investissement à titre de profession habituelle. Doc. 7 : Article L 521-1 du CMF

I. - Les prestataires de services de paiement sont les établissements de paiement, les établissements de monnaie électronique et les établissements de crédit.

II. - Lorsqu'ils fournissent des services de paiement, les institutions et services suivants sont également considérés comme des prestataires de services de paiement, sans être soumis aux dispositions du chapitre II du présent titre et dans les limites des dispositions législatives qui, le cas échéant, les régissent :

a) La Banque de France, l'Institut d'émission des départements d'outre-mer et l'Institut d'émission d'outre-mer ;

b) Le Trésor public ;

c) La Caisse des dépôts et consignations.

Doc.8 : Article L 123-24 du CMF Tout commerçant est tenu de se faire ouvrir un compte dans un établissement de crédit ou dans un bureau de chèques postaux.

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Doc. 9 : Cass, A.P, 9 octobre 2006, (JCP éd. G, 2006, II, 10175, note T. Bonneau)

Statuant tant sur le pourvoi n S 06-11.056 formé par la société CDR créances (le CDR créances) venant aux droits de la Société de banque occidentale (la SDBO) que sur le pourvoi n Q 06-11.307 formé par la société Le Crédit lyonnais (le Crédit lyonnais), qui attaquent le même arrêt ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... avait, avec son épouse, organisé ses activités et son patrimoine autour de deux sociétés en nom collectif dont ils étaient les seuls associés, la société Financière et Immobilière Bernard X... (la société FIBT) et la société Groupe Bernard X... (la société GBT) ; que tandis que la première regroupait les divers actifs patrimoniaux des époux X..., la seconde détenait la majorité du capital de la société anonyme Bernard X... finance (la société BTF SA), elle-même détentrice des participations industrielles du groupe et notamment de celle acquise en juillet 1990 et janvier 1991, par l'intermédiaire de la société allemande BTF GmbH et avec le concours financier de la SDBO, dans le capital de la société Adidas ; que M. X... ayant décidé de cesser ses activités industrielles et commerciales, les sociétés GBT, FIBT et BTF SA ont, les 10 et 16 décembre 1992, conclu avec la SDBO un "mémorandum" puis une "lettre d'engagement" aux termes desquels la société BTF SA s'engageait de manière irrévocable à vendre, au plus tard le 15 février 1993 et pour un prix fixé à 2 085 000 000 francs, à toutes sociétés désignées par la SDBO et à première demande de celle-ci, la totalité de ses parts représentant 78 % du capital de la société BTF GmbH ainsi qu'à affecter l'intégralité du prix à percevoir de cette cession au remboursement des concours ayant bénéficié aux trois sociétés, lesquelles devaient par ailleurs fusionner au sein d'une société nouvelle ; que ce même 16 décembre 1992, la société BTF SA a confié à la SDBO, pour la même durée, le mandat irrévocable de solliciter des acquéreurs et de recevoir le prix ; que les cessions prévues sont intervenues le 12 février 1993 au profit de huit sociétés, parmi lesquelles la société Clinvest, filiale du Crédit lyonnais, qui, alors qu'elle était déjà titulaire de 10 % du capital de la société BTF GmbH, en a acquis 9,9 % supplémentaires, et la société Rice SA constituée par M. Y..., à l'aide pour certaines d'entre elles d'un prêt spécifique dit "à recours limité" accordé par le Crédit lyonnais et stipulant notamment qu'en cas de revente, la plus-value serait partagée à raison d'un tiers pour l'emprunteur et de deux tiers pour la banque ;

que le même jour, l'ensemble des cessionnaires a par ailleurs consenti à M. Y..., jusqu'au 31 décembre 1994, une promesse de cession de leurs acquisitions respectives pour un prix de 3 498 000 000 francs, option qui a été levée le 22 décembre 1994 ; que le mémorandum n'ayant pu être exécuté, non plus que le protocole signé le 13 mars 1994 avec le Crédit lyonnais pour mettre fin aux relations bancaires des intéressés et solder les comptes du groupe X..., les prêts accordés à celui-ci ont été rendus exigibles ; que les sociétés du groupe X... ont alors fait l'objet de procédures de redressement puis de liquidation judiciaires, bientôt poursuivies sous patrimoine commun, à l'exception de la société BTF SA qui, bénéficiant d'un plan de continuation, est devenue la Compagnie européenne de distribution et de pesage (la société CEDP) ; que reprochant au Crédit lyonnais et à la SDBO d'avoir abusivement soutenu le groupe X... et frauduleusement conclu, dès le mois de décembre 1992, "un accord secret de revente au double" avec M. Y..., les organes des procédures collectives ont recherché la responsabilité du Crédit lyonnais et de la SDBO ; qu'après avoir déclaré la société Mandataires judiciaires associés (la société MJA) et M. Z... recevables à agir, en leur qualité de mandataires liquidateurs des sociétés GBT, FIBT, BTF SA et Bernard X... gestion (la société BTG) ainsi que de M. et Mme X..., en réparation du préjudice subi par la société GBT et dit que, bien que n'ayant pas été partie au mandat, le Crédit lyonnais était obligé par celui-ci, la cour d'appel a jugé, tout d'abord, que les deux établissements de crédit avaient failli à leurs obligations de mandataires en se portant acquéreurs par personnes interposées des participations qu'ils étaient chargés de vendre ainsi qu'en manquant de loyauté envers le mandant qu'ils n'avaient pas informé des négociations en cours avec M. Y... et auquel ils n'avaient pas proposé les prêts à recours limité octroyés aux cessionnaires et, ensuite, que cette dernière faute avait fait perdre au groupe X... une chance de

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réaliser le gain dont il aurait bénéficié si, ayant obtenu le financement adéquat, il avait pu vendre directement les participations Adidas à M. Y... en décembre 1994 ; qu'appréciant ce préjudice au regard des conditions des prêts à recours limité, elle a en conséquence condamné la SDBO et le Crédit lyonnais à payer aux mandataires liquidateurs une indemnité de 135 000 000 euros égale, selon son calcul, au tiers de la différence existant entre le prix qui aurait pu être obtenu en décembre 1994 et celui perçu en février 1993, réservant sa décision quant à la réparation éventuelle du préjudice consécutif à la mise en liquidation judiciaire des entités du groupe X... et à l'incidence fiscale de sa décision ;

Sur le cinquième moyen du pourvoi formé par le CDR créances et le premier moyen du pourvoi formé par le Crédit lyonnais, qui sont préalables, réunis :

Attendu que le CDR créances et le Crédit lyonnais font grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable l'action engagée contre eux par la société MJA et M. Z..., agissant en leur qualité de mandataires liquidateurs des sociétés GBT, FIBT, BTF SA et BTG, ainsi que de M. et Mme X..., alors, selon le moyen développé par le CDR créances :

1 / que si l'existence d'un groupe de contrats peut justifier l'intérêt du tiers à agir à l'encontre d'une personne avec laquelle il n'est pas directement lié par un contrat, cette circonstance ne lui donne pas pour autant qualité pour exercer à son encontre une action de nature contractuelle ; qu'en l'espèce, les liquidateurs judiciaires de la SNC GBT fondaient leur action à l'encontre du Crédit lyonnais et du CDR créances sur la violation de leurs obligations contractuelles de mandataire, ainsi qu'en atteste le visa des articles 1116, 1134, 1596, 1991 et 1992 du code civil ; qu'en jugeant leur action recevable au motif inopérant qu'existait un lien indiscutable entre le mandat du 16 décembre 1992 et le mémorandum du 10 décembre 1992, la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil, ensemble l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

2 / qu'un tiers à un contrat ne saurait se prévaloir de la violation des obligations qu'il renferme sans établir que le manquement invoqué est également constitutif d'une faute à son égard ; qu'en l'espèce, le mémorandum du 10 décembre 1992 se bornait à prévoir l'affectation du prix de la cession future d'Adidas à l'apurement des dettes de la société BTF SA et de la SNC GBT à l'égard de la SDBO ; que ce mémorandum ne faisait référence ni aux modalités de la cession à intervenir, ni à l'existence d'un mandat entre BTF SA et la SDBO ; qu'en jugeant que, du seul fait de sa qualité de partie au mémorandum du 10 décembre 1992, la SNC GBT était fondée à demander réparation du préjudice que lui avait personnellement causé les manquements de la SDBO aux obligations d'information et de loyauté que mettait à sa charge le mandat qui lui avait été confié par la société BTF SA, la cour d'appel a violé les articles 1165 et 1382 du code civil ;

3 / que l'actionnaire d'une société est irrecevable à demander à un tiers la réparation d'un préjudice qui n'est que le corollaire d'un dommage infligé à cette société ; qu'en affirmant, au contraire, que les liquidateurs judiciaires de la SNC GBT, actionnaire majoritaire de la société BTF SA, étaient recevables à demander l'indemnisation du préjudice qu'ils estimaient avoir subi par ricochet à raison de l'exécution fautive du contrat du 16 décembre 1992, la cour d'appel a violé l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

4 / que le CDR créances rappelait dans ses conclusions que, selon les termes du mémorandum du 10 décembre 1992, l'affectation de la trésorerie disponible dégagée par la cession d'Adidas et des autres filiales industrielles de BTF SA au désendettement des SNC GBT et FIBT était subordonnée à la condition préalable d'une fusion des sociétés BTF SA, GBT et FIBT en une entité unique, cette condition étant nécessaire pour éviter un abus de biens sociaux au préjudice de BTF SA ; qu'elle soulignait encore que la société BTF SA avait expressément renoncé à la fusion envisagée, en raison de l'hostilité de ses actionnaires minoritaires, ce dont elle avait informé la SDBO et la COB par lettres des 28 janvier et 3 février 1993 ; qu'en se bornant à affirmer que la SNC GBT était recevable à critiquer les conditions d'exécution du mandat de

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vente d'Adidas du seul fait de sa qualité de partie au mémorandum du 10 décembre 1992 sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la renonciation de la société BTF SA au projet de fusion entre les trois sociétés concernées n'avait pas rendu le mémorandum caduc et privé la SNC GBT de tout intérêt à se plaindre des circonstances de la cession d'Adidas par sa filiale BTF SA, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

5 / que la réparation octroyée au demandeur ne peut excéder les limites dans lesquelles le juge a admis son intérêt à agir ; qu'il résulte des constatations mêmes de l'arrêt attaqué que la SNC GBT n'avait d'intérêt à agir qu'autant qu'une partie du prix de vente que la société BTF SA percevrait au titre de la cession d'Adidas serait affectée à l'extinction de ses dettes propres, dans les conditions prévues par le mémorandum du 10 décembre 1992 ; que l'arrêt attaqué, qui reconnaît lui-même que la SNC GBT n'avait pas qualité pour "demander la remontée de la plus-value qui aurait pu être réalisée par BTF SA à la suite de la vente d'Adidas", ne pouvait, sans méconnaître les conséquences de ses propres constatations et violer les articles 1382 du code civil et 31 du nouveau code de procédure civile, octroyer au seul profit de la SNC GBT une somme de 135 000 000 euros correspondant à la plus-value que le "Groupe X..." aurait réalisée si un prêt à recours limité lui avait été proposé ;

6 / qu'en omettant de préciser laquelle des entités du "Groupe X..." avait perdu une chance de réaliser cette plus-value et d'indiquer si cette entité était distincte du vendeur BTF SA, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de s'assurer que le préjudice dont elle ordonnait réparation était bien un préjudice personnel de la SNC GBT, distinct de celui subi par sa filiale BTF SA ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

7 / qu'une éventuelle acquisition par la SNC GBT des titres d'Adidas détenus par sa filiale BTF SA au moyen de prêts à recours limités consentis par le Crédit lyonnais aurait caractérisé un abus de biens sociaux par transfert illicite des plus-values latentes de l'actif d'une société cotée en bourse (BTF SA) au profit de l'un de ses actionnaires (SNC GBT), de sorte qu'en déclarant la SNC GBT recevable à appréhender, à titre de réparation, le produit de ce montage illicite, la cour d'appel a violé les articles L. 242-6 du code de commerce et 31 du nouveau code de procédure civile ;

et, selon le moyen développé par le Crédit lyonnais :

8 / qu'une société est irrecevable à demander l'indemnisation d'un préjudice subi par une autre société dont elle détient les parts sociales ; qu'en déclarant l'action exercée par les mandataires judiciaires de la SNC GBT en réparation d'un préjudice prétendument subi par la société BTF SA, société dont la SNC GBT avait été actionnaire, la cour d'appel a violé l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

9 / qu'ayant constaté la perte, par la SNC GBT, de sa qualité d'actionnaire de la société BTF SA depuis le 25 octobre 1995, par suite de l'attribution des actions de BTF à la SDBO, et dès lors qu'il était par ailleurs constant que l'instance engagée par les liquidateurs judiciaires du "Groupe X..." et des époux X... aux fins de condamnation du Crédit lyonnais, de SDBO et de Clinvest à leur payer une indemnité globale de 2 500 000 000 francs à raison de diverses fautes prétendues, avait été introduite par acte du 21 février 1996 soit postérieurement à la perte par la SNC GBT de sa qualité d'actionnaire de la société BTF SA, la cour d'appel, qui a refusé d'en déduire l'absence d'intérêt actuel de GBT et de ses liquidateurs à se plaindre des circonstances de la cession par la société BTF SA des parts de la société BTF GmbH, a violé l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

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10 / qu'en déduisant l'intérêt à agir de la SNC GBT et de ses liquidateurs de l'application d'un mémorandum prévoyant l'affectation par la société BTF SA du prix de la future cession d'Adidas au paiement des sommes dues par GBT à la SDBO, application hypothétique puisque dépendant de la possibilité pour BTF de réaliser effectivement cette affectation, une fois la cession réalisée, voire de sa volonté de respecter les termes du mémorandum, la cour d'appel a retenu un intérêt à agir purement éventuel, en violation de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

11 / qu'en ne recherchant pas, comme l'y avait invité le Crédit lyonnais, si l'exécution du mémorandum prévoyant une affectation du produit de la vente des parts de la société BTF GmbH, détenant elle-même Adidas, détenues par la société BTF SA au remboursement des concours consentis par la SDBO à la SNC GBT et à la SNC FIBT, n'était pas subordonnée à la réalisation préalable d'une condition tenant à la fusion de ces deux dernières sociétés et de la société BTF SA, dès lors que la société BTF SA était une société cotée et que la plus-value résultant de la cession des parts lui appartenant ne pouvait, sans lésion des intérêts des actionnaires minoritaires, être affectée au paiement des dettes de sociétés tierces, l'une d'elles étant la SNC GBT, fût-elle actionnaire de la société BTF SA, et si, en conséquence, l'abandon rapide du projet de fusion entre les trois sociétés concernées n'avait pas rendu le mémorandum caduc et privé la SNC GBT de tout intérêt, même purement éventuel, à se plaindre des circonstances de la cession par la société BTF SA de s parts de la société BTF GmbH, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

12 / qu'en affirmant purement et simplement que les mandataires judiciaires de la SNC GBT seraient recevables à solliciter l'indemnisation du préjudice par ricochet subi du fait de la prétendue exécution fautive du contrat du 16 décembre 1992, sans toutefois préciser aucunement la teneur de ce prétendu préjudice par ricochet, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni de leurs conclusions que le CDR créances et le Crédit lyonnais aient développé, à l'appui de leur contestation relative à la recevabilité de l'action des mandataires liquidateurs, les critiques évoquées par les quatrième, cinquième, sixième, septième, dixième et onzième branches du moyen, qui sont nouvelles et mélangées de fait et de droit ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt relève que les mandataires liquidateurs ne se bornaient pas à demander l'indemnisation de la perte éprouvée par la société GBT en sa qualité d'actionnaire de la société BTF SA mais qu'invoquant des manquements à la convention du 16 décembre 1992 par laquelle cette dernière société avait, en exécution du mémorandum du 10 décembre 1992 dont cette convention constituait la mise en oeuvre, chargé la SDBO de la cession de sa participation, ils sollicitaient en outre la réparation du préjudice subi par la société GBT pour avoir été privée d'une partie des fonds que le mémorandum avait prévu d'affecter au remboursement de ses propres dettes ; qu'en l'état de ces constatations dont il résulte que les mandataires liquidateurs, qui se prévalaient d'un préjudice propre à la société GBT, distinct de son préjudice d'actionnaire et susceptible d'être rattaché à des manquements aux conventions souscrites, avaient ainsi, dans cette mesure et abstraction faite du bien-fondé de leurs prétentions indifférent à ce stade, un intérêt à agir en responsabilité contre les établissements de crédit, la cour d'appel, qui n'encourt aucun des griefs articulés par les première, deuxième, troisième, huitième, neuvième et douzième branches, a exactement décidé que l'action, en tant qu'elle tendait à la réparation de ce préjudice personnel, était recevable ;

D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, est mal fondé pour le surplus ;

Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi formé par le CDR créances, réunis :

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Attendu que le CDR créances fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la SDBO avait manqué à ses obligations de mandataire, alors, selon le moyen :

1 / que la prohibition faite au mandataire de se porter contrepartie est d'intérêt privé et ne sanctionne que les opérations de contrepartie dissimulées au mandant ; qu'en l'espèce, les liquidateurs judiciaires des sociétés du "Groupe X..." n'avaient pas soutenu dans leurs conclusions que le renforcement par Clinvest de ses propres participations dans le capital de la société BTF GmbH (Adidas) réalisé par l'acquisition de 9,90 % supplémentaires, ait été constitutif d'une opération de contrepartie qui aurait été dissimulée au mandant et de ce fait illicite au regard de l'article 1596 du code civil ; qu'ils avaient, en outre, abandonné toute demande de ce chef contre la société CDR participations, venant aux droits de Clinvest, dans leurs dernières conclusions ; qu'en affirmant pourtant qu'il n'aurait pas été rendu compte au mandant de l'acquisition par Clinvest d'un bloc de titres de 9,90 % pour en déduire que cette acquisition était illicite au regard de l'article 1596 du code civil, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du nouveau code de procédure civile ;

2 / que la prohibition édictée par l'article 1596 du code civil n'a pas lieu de jouer lorsque le mandant consent à ce que le mandataire se porte contrepartie en ratifiant l'opération ; qu'en l'espèce, il indiquait dans ses conclusions que la société BTF SA était représentée par un mandataire ad hoc, un avocat, par le truchement duquel elle avait conclu l'acte du 12 février 1993 portant cession des 78 % qu'elle détenait dans le capital de la société BTF GmbH au profit de divers acquéreurs nommés incluant la société Clinvest pour 9,90 % ;

qu'en affirmant que cette acquisition d'un bloc de 9,90 % par Clinvest était illicite au regard de l'article 1596 du code civil, sans rechercher si la société BTF SA, mandante, n'avait pas consenti en connaissance de cause à vendre une partie de ses parts à Clinvest, dès lors qu'elle avait conclu l'acte de cession désignant celle-ci comme l'un des acquéreurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

3 / que seul l'octroi d'un droit d'intervention dans les affaires sociales au profit du prêteur de deniers est de nature à lui conférer la qualité d'associé de l'affaire qu'il finance ; qu'en l'espèce, il soulignait dans ses conclusions que les conventions de prêts à recours limité conclues entre le Crédit lyonnais et certains des acquéreurs des parts de la société BTF GmbH (Adidas) n'avaient conféré à la banque aucun droit d'intervention dans les affaires de la société cédée, chacun des emprunteurs demeurant libre d'exercer ses prérogatives d'associé à sa convenance, sans avoir de compte à rendre à la banque ; que, pour décider que le Crédit lyonnais s'était porté acquéreur des parts de la société BTF GmbH par personnes interposées, la cour d'appel a retenu que les acquéreurs de ces parts n'en étaient que les propriétaires apparents, dès lors qu'ils avaient conventionnellement renoncé à disposer librement de leurs parts et que la banque s'était elle-même réservée les deux tiers de la plus-value que pourrait dégager la revente de ces parts ; qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à justifier la disqualification de ces contrats de prêts en société, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que les prêts à recours limité aient conféré à la banque un droit d'intervention dans les affaires sociales de la société BTF GmbH, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1596, 1832 et 1892 du code civil ;

4 / que l'article 8-3 des conventions de prêt à recours limité prévoyait : "indépendamment de la réalisation de toute opération de cession, l'Emprunteur aura la faculté de rembourser par anticipation l'intégralité du présent prêt moyennant respect d'un délai de préavis de quinze jours. (...) Tout remboursement sera définitif et interviendra pour solde de tout compte." ; qu'il résulte des termes clairs et précis de cette disposition que les emprunteurs avaient la faculté de recouvrer à tout moment la libre disposition de leurs parts en se réservant l'intégralité d'une éventuelle plus-value en substituant un prêt classique au prêt à recours limité ; qu'en affirmant qu'il résultait de la combinaison des articles 8 et III des conventions de prêt que les emprunteurs, propriétaires apparents, ne resteraient en définitive en possession de leurs titres que si leur

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valeur s'avérait nulle, pour en déduire que cette opération constituait un portage, la cour d'appel a dénaturé les stipulations claires de l'article 8 des conventions de prêt à recours limité, en violation de l'article 1134 du code civil ;

5 / que le portage est la convention par laquelle une personne acquiert des titres pour le compte d'un donneur d'ordre qui s'engage à les lui racheter ou les faire racheter par un tiers à une date fixée et pour un prix minimal ; qu'en jugeant que les prêts consentis par le Crédit lyonnais à certains des acquéreurs des parts de la société BTF GmbH (Adidas) constituaient une opération de portage dans l'attente de la levée de l'option consentie jusqu'au 31 décembre 1994, à la demande de la banque, par tous les associés à M. Y..., cependant qu'elle constatait que M. Y... s'était seulement vu consentir une option d'achat à terme sur ces parts, ce dont il résultait que les co-acquéreurs d'Adidas n'étaient créanciers d'aucun engagement de rachat de leurs parts, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

6 / que le mandataire chargé de vendre des parts sociales n'est tenu de porter à la connaissance du mandant que les éléments de nature à conduire ce dernier à renoncer à la vente projetée ou à en réviser les conditions ; qu'en retenant qu'il entrait dans les obligations de la SDBO d'informer son mandant qu'un repreneur était "éventuellement acheteur" à un terme de deux ans pour un prix supérieur à celui fixé par le mandant, cependant qu'elle relevait qu'il ne s'agissait que d'une simple option d'achat, insusceptible de déboucher sur la moindre certitude d'une vente future, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 199 2 et 1147 du code civil ;

7 / que la cour d'appel qui reproche, de surcroît, au Crédit lyonnais de ne pas avoir informé M. Bernard X... qu'il était prêt à financer les acquéreurs d'Adidas, information de nature indifférente au mandant et que la banque n'avait pas à porter à sa connaissance viole derechef les articles 1992 e t 1147 du code civil ;

8 / qu'il en est d'autant plus ainsi que le banquier, tenu d'un devoir de confidentialité sur les affaires de ses correspondants, n'a pas à révéler, fût-ce à son propre mandant, les conventions privées conclues par les acquéreurs des parts sociales qu'il est chargé de vendre, dès lors qu'elles se rapportent à des opérations distinctes du contrat projeté ; qu'il lui est loisible de financer les acquéreurs sans être tenu d'en informer son mandant ; qu'en jugeant que le Crédit lyonnais avait commis une faute en s'abstenant de dévoiler à son mandant la circonstance que la banque était disposée à consentir un financement à certains des acquéreurs d'Adidas ainsi que les arrangements réciproques par lesquels certains de ces acquéreurs avaient consenti à l'un d'entre eux une option de rachat à terme de leurs actions, la cour d'appel a violé les articles 1992 et 1147 du code civil et L. 511-33 du code monétaire et financier ;

9 / que le mandataire n'est pas tenu d'attirer spécialement l'attention de son mandant sur des informations publiques d'ores et déjà connues de lui ; qu'en l'espèce, il versait aux débats, d'une part, un communiqué de presse du 4 février 1993, antérieur à la vente d'Adidas, par lequel M. Bernard X... avait, par avance, publiquement défendu la légitimité de l'intervention du Crédit lyonnais dans le financement des acquéreurs et, d'autre part, les déclarations par lesquelles Mme Gilberte A..., conseil habituel de M. X..., avait indiqué au sujet de l'option d'achat consentie par les co-acquéreurs d'Adidas à M. Y... : "Je connais évidemment la clause dès l'achat des parts de X.... Mais je ne me rappelle pas si je lui en ai parlé. Il est plus probable que j'en ai parlé à son adjoint Elie Fellous", PDG de la société BTF SA ; qu'en jugeant que le Crédit lyonnais avait méconnu ses obligations de mandataire en dissimulant de tels éléments, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si leur connaissance, par le mandant n'était pas suffisamment établie par les pièces susvisées, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 1992 et 1147 du code civil ;

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Mais attendu que, si l'arrêt relève tout d'abord que les banques ont commis des fautes en se portant cessionnaires des parts qu'elles avaient pour mandat de céder et en manquant à leur obligation d'informer loyalement leur mandant, il se borne ensuite, pour caractériser l'existence et apprécier l'étendue du préjudice causé par les manquements imputés au groupe Crédit lyonnais, à retenir que celui-ci n'a pas respecté ses obligations de banquier mandataire en s'abstenant de proposer au groupe X... le financement constitué par les prêts à recours limité consentis à certaines des sociétés cessionnaires ; que, la cour d'appel ayant ainsi retenu que cette abstention constituait la seule cause du préjudice dont elle accordait réparation, il ne peut lui être utilement reproché d'avoir relevé l'existence d'autres manquements qui ne constituent pas le soutien de sa décision ; que le moyen, inopérant, ne peut être accueilli ;

Mais sur le deuxième moyen du pourvoi formé par le Crédit lyonnais :

Vu les articles 1134 et 1165 du code civil ;

Attendu que pour retenir la responsabilité du Crédit lyonnais, l'arrêt retient que, bien qu'il n'ait pas été signataire du mandat ni d'aucune des conventions souscrites avec les sociétés GBT, FIBT et BTF SA en décembre 1992, cet établissement, qui s'était activement impliqué dans la conception et l'exécution de ces accords, notamment en consentant et en organisant les financements nécessaires au montage imaginé avec les coacquéreurs des participations Adidas, et qui avait même accepté de rendre compte de son action devant la presse et la commission d'enquête parlementaire chargée d'analyser l'opération, était obligé par le mandat ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que les mandataires liquidateurs, qui fondaient leur action sur des manquements aux articles 1116, 1134, 1596, 1991 et 1992 du code civil, avaient choisi d'agir sur le seul terrain contractuel, que les sociétés GBT, FIBT et BTF SA n'avaient traité, pour l'opération considérée, qu'avec la seule SDBO, personne morale distincte dont il n'était prétendu ni qu'elle aurait été fictive ni que son patrimoine se serait confondu avec celui de sa maison mère, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à faire apparaître que l'immixtion du Crédit lyonnais dans l'exécution du mandat délivré à sa filiale avait été de nature à créer pour les mandants une apparence trompeuse propre à leur permettre de croire légitimement que cet établissement était aussi leur cocontractant, ce dont elle aurait alors pu déduire que ce dernier était obligé par un mandat auquel il n'avait pas été partie, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le premier moyen du pourvoi formé par le CDR créances, pris en sa troisième branche, et le quatrième moyen du pourvoi formé par le Crédit lyonnais, pris en sa première branche, réunis :

Vu les articles 1134 et 1147 du code civil ;

Attendu que pour retenir la responsabilité du CDR créances et du Crédit lyonnais, l'arrêt retient que le groupe Crédit lyonnais avait manqué à ses obligations de banquier mandataire en s'abstenant de proposer au groupe X... le financement constitué par les prêts à recours limité qu'il avait octroyés à certains des cessionnaires des participations litigieuses ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'entre pas dans la mission du mandataire de financer l'opération pour laquelle il s'entremet et que, hors le cas où il est tenu par un engagement antérieur, le banquier est toujours libre, sans avoir à justifier sa décision qui est discrétionnaire, de proposer ou de consentir un crédit quelle qu'en soit la forme, de s'abstenir ou de refuser de le faire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel :

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Attendu que les mandataires liquidateurs demandent, dans le cas où une cassation serait prononcée sur l'un ou l'autre des pourvois principaux, de casser les dispositions de l'arrêt ayant limité la réparation du préjudice subi par le groupe X... au tiers du gain dont il avait été privé ;

Mais attendu que les termes de la cassation prononcée sur les pourvois principaux rendent le moyen sans objet ;

Et attendu que l'arrêt étant cassé en ce qu'il a retenu que les banques avaient commis une faute engageant leur responsabilité, il n'y a pas lieu de statuer sur les griefs critiquant l'appréciation du préjudice qui aurait été causé par cette faute ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement du chef des condamnations prononcées contre le CDR créances et le Crédit lyonnais, l'arrêt rendu le 30 septembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société MJA et M. Z..., ès qualités, aux dépens ;

Doc. 10 : Cass. 1ère civ. 19 juin 2013, n°12-16.651

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :

Vu l'article 1907, alinéa 2, du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation ;

Attendu qu'en application combinée de ces textes, le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en vertu d'une offre de prêt acceptée le 15 février 2005, M. X... a contracté auprès d'une banque un « prêt relais habitat révisable » d'une durée de vingt-quatre mois, remboursable en une seule échéance différée, moyennant un taux effectif global et un taux de période variable « donnés à titre indicatif en fonction de l'indice Moy. arithm./15 j. Euribor douze mois », les conditions générales du prêt précisant que « le calcul des intérêts dus est effectué sur la base d'une année de trois cent soixante jours (soit douze mois de trente jours) » ; qu'en raison de la défaillance de l'emprunteur, la société Compagnie européenne de garanties et de cautions (la société CEGC), qui s'était portée caution solidaire de ce prêt, a désintéressé la banque puis exercé une action subrogatoire contre le débiteur principal, lequel a opposé à la caution subrogée la nullité de la stipulation de l'intérêt nominal, calculé d'après l'année dite « lombarde » de trois cent soixante jours ;

Attendu que, pour rejeter cette exception et condamner M. X... à payer à la société CEGC la somme de 312 239,72 euros, l'arrêt retient que si le taux effectif global doit être calculé sur la base d'une année civile, rien n'interdit aux parties à un prêt de convenir d'un taux d'intérêt conventionnel conclu sur une autre base, que l'acte de prêt du 15 février 2005 stipulant expressément que les intérêts conventionnels seront calculés sur la base d'une année de trois cent soixante jours, c'est de manière inopérante que M. X... oppose à la caution, subrogée dans les droits de la banque créancière, la nullité de cette stipulation, s'agissant de modalités qui, librement convenues entre les parties, ne peuvent être remises en cause ;

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Qu'en statuant ainsi quand le prêt litigieux, visant expressément les articles L. 312-1 à L. 312-6 du code de la consommation, obéissait au régime du crédit immobilier consenti à un consommateur ou un non-professionnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE,

Doc 11 : Extraits du manuel de J. LASSERRE CAPDEVILLE, M. STORCK, R. ROUTIER, M. MIGNOT, J-PHILIPPE KOVAR, N. ERESEO, Droit Bancaire, 1ère éd., 2017 Histoire de la banque et du droit bancaire « Antiquité : le droit bancaire est une branche du droit ancienne. En effet, les opérations de paiement et de crédit qui vont de pair avec l'activité bancaire sont ancestrales..On en trouve ainsi des traces dans l’Antiquité. On peut citer les babyloniens (avec le code d'Hammourabi vers 1700 av. J.-C). les égyptiens ou encore les Phéniciens qui connaissaient ces opérations et cherchaient à les entencadrer. Il en a été de même à Rome lorsque le commerce s’y est développé. Les financiers de l'époque les Argentarii, pouvaient réaliser toute une série d'opérations à connotation bancaire : dépôts, crédits, tenue des comptes etc. Le droit romain reconnaissait ainsi la validité du contrat de prêt sous la forme d'une nexum ou et de la stipulatio tout en limitant le taux par crainte de pratiques usuraires. » « Moyen Âge : Si les invasions barbares ont réduit la vie économique et donc l'importance de l'activité bancaire, cette même économie a repris de l'importance au XIe siècle notamment dans certaines villes de l'Italie du Nord. A cette époque, les banques jouent un rôle essentiel d'intermédiaire pour permettre le règlement des échanges internationaux. Grâce à elle et aux outils qu'elles créent progressivement, notamment la lettre de change, le commerce peut se développer avec une sécurité plus grande le transport d'argent pour procéder au règlement des marchandises devenant inutile. Toutefois, force est de constater que les religions ont joué à cette époque un rôle essentiel sur la pratique bancaire et les règles en résultant. C'est ainsi que le droit canonique s’est plutôt montré hostile à l'activité bancaire et notamment en interdisant le prêt à intérêt. L'ancien trois n'a alors eu de cesse de faire respecter ce principe (Ordonnance de Saint-Louis en 1254, de Charles IX en 1560 ou encore d'Henri III en 1579) avant que certains actes royaux ne permettent d'en contourner l'interdiction à fin de pouvoir fixer des « placements à rente » ( Édit de Charles IX de 1572 ou déclaration du roi Henri IVde 1609).Il faudra attendre toutefois la révolution pour qu'il soit mis fin à cette prohibition du prêt à intérêt. En revanche le judaïsme comme le protestantisme ne sont pas opposés à ce prêt ce qui leur aura permis de développer leur activité bancaire à la même époque. Enfin, et malgré ces différences d'approches, le rôle du banquier se diversifie progressivement : d'intermédiaire dans les opérations de change de monnaie dans les foires, les banques deviennent dépositaires des fonds qu’on leur confie puis dispensateur de crédit. » « Renaissance : c'est néanmoins surtout à partir de la renaissance que les banques ont connu un véritable essor. Les grandes découvertes ont ainsi permis un afflux des métaux précieux et la prohibition du prêt à intérêt a connu des assouplissements. De grands banquiers privés ont alors fait leur apparition à cette époque, tels Jacques Cœur en France ou les Médicis à Florence. Au XVIIe siècle des établissements se créent sous forme de sociétés. Les billets de banque font leur apparition en Angleterre vers 1640. » « XIXe siècle : C'est au XIXe siècle, grâce a l'avènement du capitalisme et du libéralisme que le système bancaire se développe réellement en France, sans qu'une réglementation soit adoptée pour autant. Ainsi, en 1807, le code de commerce ne prévoit aucune disposition spécifique à la matière bancaire. […] Avec le second Empire, sont créées des grandes banques privées de dépôts, comme par exemple le Comptoir national d'Escompte de Paris (1860) le Crédit Lyonnais (1863) ou la Société générale (1864) […] avec la IIIe République, ce sont les banques d'affaires qui font leur apparition. On peut citer la Banque de Paris et des Pays-Bas (1872) […]Jusqu’à la crise économique de 1929 qui va entraîner la faillite de milliers d’entreprises, le secteur bancaire n'est soumis à aucune législation particulière. L’activité de la banque

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parvient à se développer librement. Cependant suite à cette crise aux conséquences internationales s'ouvre une période de dirigisme économique se traduisant par un interventionnisme étatique de plus en plus marqué. La loi du 19 juin 1930 sur la profession bancaire fut ainsi l'un des premiers textes cherchant à moraliser la profession de banquier notamment par le biais d’interdictions. Mais ces mesures, d’ordre négatif ne constituent pas un contrôle de la profession. Celui-ci n'existe qu'à partir du moment où l'activité de diverses banques se trouve orientée par d'autres que la propriétaire ou encore lorsque les opérations qu’elles concluent avec leur clientèle doivent respecter des règles de fond qui ne sont pas éditées par leurs propriétaires. Telles sont les deux voies dans lesquelles notre droit s'est orienté avec les lois des 13 et 14 juin 1941. Ces textes ont permis le contrôle des banques par des organismes professionnels qui édictent une réglementation assortie de peines disciplinaires. Les organismes professionnels sont alors composés d'un Comité permanent d'orientation professionnelle des banques, d'une Commission de contrôle et d'une Association professionnelle des banques. Cet encadrement juridique est important et va au-delà du simple contrôle des établissements de crédit. Le Conseil national du crédit peut, par exemple, ordonner à une banque de fermer telle ou telle succursale si les circonstances le justifient. A la fin du second conflit mondial, .l'État continue à assurer la direction du crédit pour orienter l'économie dans les activités jugés essentielles. Dans ce but est promulguée la loi du 2 décembre 1945 relative à la nationalisation et à l’organisation du crédit qui va modifier sans pour autant les abroger ; les lois des 13 et 14 juin 1941 Ces textes seront complétés par la suite à plusieurs reprises. […] » « Loi bancaire de 1984 :le système ainsi mis en place par les lois de juin 1941 et de décembre 1945 a cependant fini par se révéler de moins en moins adapté à l'évolution de la profession bancaire. La loi n°1984-46 du 24 janvier 984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit dite « loi bancaire » a alors été adoptée. Celle-ci vient définir un statut de base aux établissements de crédit tout en rénovant le dispositif institutionnel de l'organisation bancaire. Ce texte est notamment à l'origine d'un concept générique d'établissement de crédit couvrant différents types d’organisations. Plus concrètement, cette évolution s'est traduit par la fusion des banques de dépôts et des banques d'affaires et la banalisation des banques mutualistes et coopératives. Beaucoup de ces établissements de crédit se sont alors retrouvés dans la possibilité d'exercer, en plus des opérations de banque, des activités financières, d'abord à titre d'opérations connexes, puis, par la suite, comme prestataires de services d'investissement agréés. La constitution de «banques universelles » a donc été facilitée par la loi du 24 janvier 1984. Le contenu de ce texte, finalement codifié dans le Code monétaire et financier, a fait l'objet depuis lors de nombreuses évolutions. » ACTUALITE DE DROIT BANCAIRE

V. de FILLIPIS, Shadow Banking, marchés à l’ombre, Libération, 3 août 2017.

Dix ans après la crise des subprimes, la finance parallèle a résisté aux tentatives de

régulation des Etats et banques centrales : les opérations et prêts hors des radars n’ont

cessé de croître, pour atteindre près de 100 000 milliards de dollars, menaçant de nouveau

la stabilité financière mondiale.

«Shadow banking», marchés à l’ombre

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Elle est à l’origine de la déflagration financière de 2007 dont les effets se font encore ressentir

aujourd’hui. Pourtant, dix ans plus tard elle se porte à merveille. Elle, c’est la finance de l’ombre,

la finance parallèle, aussi connue sous le nom de shadow banking. La dernière étude du Conseil de

stabilité financière (CFS), parue mi-mai, dresse un tableau effrayant de cet univers financier qui

prospère à l’abri des réglementations bancaires. En 2015, la finance de l’ombre pesait 92

000 milliards de dollars selon le CFS (150 % du PIB mondial). Du jamais vu. «Elle continue sa

tendance à la hausse pour la septième année consécutive avec 3 800 milliards supplémentaires

en 2015», estiment les experts de l’organisme mandaté par le G20 depuis 2009 pour surveiller la

planète finance.

En 2002, le volume de cette véritable bombe à retardement hors de toute régulation ne dépassait

pas les 26 000 milliards de dollars. Mais cinq ans plus tard, en 2007, à la veille de la débâcle des

crédits subprimes aux Etats-Unis, le shadow banking s’est littéralement hypertrophié,

approchant les 63 000 milliards de dollars. La même année, les premières convulsions financières

riment déjà avec subprimes, titrisation, produits dérivés et surtout finance de l’ombre. Des

secousses qui annoncent une déconfiture, celle de Lehman Brothers, champion du monde de la

spéculation de haute voltige, mais qui s’écrase le 15 septembre 2008 contre le mur de la faillite.

La hantise du grand krach des années 30 est alors dans tous les esprits. Dix jours plus tard en

France, à Toulon, le président Nicolas Sarkozy promet de mettre la finance au

pas. «L’autorégulation pour régler tous les problèmes, c’est fini. Le laisser-faire, c’est fini. Le marché tout-

puissant qui a toujours raison, c’est fini», jure-t-il.

Mi-novembre 2008, les plus grands dirigeants politiques du monde se sont donné rendez-vous à

Washington le temps d’un G20. Jamais avares en déclarations, ils s’engagent dans un «plus

jamais ça». Le mythe d’une finance bienfaisante capable de s’autoréguler semble compter ses

jours. Car cette croyance s’est brisée sur les milliers de milliards engloutis par les Etats pour

sauver les banques, combattre la récession, au risque de voir s’envoler (comme ce fut le cas), le

niveau des dettes publiques et son corollaire : des politiques d’austérités pour redresser la barre

des comptes publics. Jamais la socialisation des pertes n’aura autant été le parfait reflet de la

privatisation des profits.

Boîte noire

Certes, depuis, le système bancaire est soumis à des règles, dites prudentielles, plus

contraignantes. Des prescriptions issues de «Bâle III», un ensemble de normes internationales

édictées après la crise par le comité de Bâle, ce forum qui rassemble les principales banques

centrales du monde. Des règles qui visent en particulier à obliger les banques à disposer de plus

de capitaux propres lorsqu’elles prêtent de l’argent à des particuliers ou des entreprises. Histoire

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de mieux pouvoir faire face aux éventuelles pertes provoquées par le non-recouvrement de ces

prêts, sans avoir à faire appel au contribuable en cas d’insolvabilité des prêteurs.

Mais dix ans plus tard, la finance de l’ombre continue de menacer la stabilité financière mondiale.

Avec 30 000 milliards d’euros échangés en 2015, les virtuoses du shadow banking sont

européens. Les Etats-Unis (26 000 milliards de dollars) leur emboîtent le pas, suivis du

Royaume-Uni. Quant à la Chine toute puissante, boîte noire de la finance, le montant des prêts et

autres opérations financières hors des radars y atteindrait les 8 000 milliards de dollars.

La cartographie de la finance de l’ombre ne recense que 28 pays, qui représentent 80 % du PIB

mondial. Petite nouveauté : la juridiction des îles Caïmans a pour la première fois communiqué

ses chiffres. Son shadow banking (6 000 milliards de dollars) s’y révèle plus important qu’au

Canada et au Japon (4 000 milliards). Les actifs de cette planque fiscale représentent 170 000 %

de son PIB ! Qui dit mieux ? Personne, même s’il est difficile pour autant de parler de record

mondial. Par nature opaque, cette finance n’est en effet qu’imparfaitement sondée. Le

Luxembourg, patrie du président de la commission européenne, Jean-Claude Juncker, a ainsi

refusé de participer aux travaux du CSF. En toute impunité, puisque rien n’oblige un Etat à

montrer patte blanche. En attendant, les sommes brassées dans ce système financier «parallèle»,

qui fait peser des risques de stabilité du fait de son intrication avec le système bancaire

traditionnel, atteignent 34 000 milliards de dollars.

Vulnérabilité

Pour mieux saisir cet ensemble d’acteurs de la finance de l’ombre, situé aux frontières des

banques et des marchés financiers, un petit rappel s’impose. D’ordinaire, les banques

«traditionnelles» financent des prêts avec les ressources qu’elles collectent auprès de leurs

déposants et avec leurs fonds propres. Les banques font donc ce que les spécialistes appellent

«une transformation d’échéance». Les crédits qu’elles consentent sont effectués à des échéances plus

longues que leurs ressources. Le système bancaire ne tient donc qu’à la stabilité de la confiance

des déposants. Si ces derniers, pris soudainement de panique, décident en grand nombre de

retirer leur épargne, tout le système bancaire s’effondre. C’est justement pour assurer la

confiance des déposants et la stabilité du système bancaire que des règles et des institutions ont

été créées dans la plupart des pays (garantie des dépôts, banque centrale comme prêteurs en

dernier ressort ou encore supervision prudentielle).

A l’inverse, le shadow banking regroupe un ensemble hétéroclite d’institutions non-bancaires qui

échappe donc aux règles du secteur. Et ce, alors qu’elles réalisent des activités de crédit et de

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transformation comparables à celles des banques. «Les acteurs du shadow banking n’ont donc pas

directement accès à une assurance de dépôts ni au refinancement des banques centrales», explique

Laurence Scialom, professeure d’économie à l’université Paris-X. Et sont donc potentiellement

beaucoup plus vulnérables au moindre choc.

Pourtant, nombreux sont ceux qui participent à cette finance parallèle : banques

d’investissement, fonds spéculatifs (hedge funds), ou fonds d’investissement (fonds mutuels, fonds

de pension, sociétés d’assurance).

«Certes, il est indéniable qu’il existe désormais une régulation à l’échelle des banques plus contraignante

qu’elle ne l’était avant la crise. L’ennui, c’est que cette régulation est encore trop compartimentée. Et elle

n’a pas totalement coupé le lien entre les banques et l’univers des "shadow bankers"», analyse Jean-

Michel Naulot, ex-banquier et ancien régulateur à l’Autorité des marchés financiers (AMF).

Soumises à la double pression des exigences toujours plus fortes de rendement des actionnaires

et des normes de supervision bancaires, les banques continuent en effet à chercher à accroître et

diversifier leur offre de financement. Pour satisfaire les exigences prudentielles, et en particulier

le ratio de fonds propres (de réserve en capital par rapport aux crédits accordés), elles sortent

donc de leurs bilans une partie des prêts les plus risqués.

C’est justement cette stratégie qui les a conduites à un usage massif des fameux produits dérivés

et des techniques financières telle la titrisation des créances. «La banque accorde des prêts et les

revend tout de suite à d’autres opérateurs financiers comme des hedge funds, des sociétés de gestion, des

fonds de pension, explique François Morin, professeur émérite d’économie à l’université Toulouse-

I. C’est ainsi que des crédits bancaires sont transformés en des titres négociables sur les marchés

financiers.» A l’autre bout de la chaîne financière se trouve l’ensemble des acteurs de la finance

parallèle (fonds de pension, fonds spéculatifs…) qui ont réussi à collecter une épargne en quête

de placements juteux et qui sont prêts à prendre le risque d’acheter les produits structurés. Il

existe donc une perméabilité entre banques régulées et shadow banking.

A lui seul, l’exemple chinois en dit long sur les risques que font courir les 8 000 milliards de

dollars brassés par la finance de l’ombre à l’ensemble de l’économie du pays. Avec des

rendements faibles du côté des banques, de plus en plus de Chinois, d’entreprises, de collectivités

locales confient une partie de leur trésorerie à des fonds spéculatifs qui investissent sur les

marchés financiers, dans des opérations immobilières ou qui accordent des crédits plus

facilement que ne le ferait le système bancaire régulé. Aucune contrainte de contrôle du risque

financier de l’emprunteur, pas de fonds de garantie, pas de soutien de la banque centrale en cas

de défaut de paiement. Pire, les prêteurs ignorent le plus souvent à quel projet est associé leur

investissement.

Exubérance

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A l’image de ce qui s’est passé aux Etats-Unis avant la crise des subprimes, le secteur bancaire de

l’ombre chinois, en pleine croissance (+ 31 % l’an passé) externalise le risque vers les marchés

financiers. Ils revendent le prêt à des tiers (collectivités locales, particuliers, entreprises…) qui

toucheront les intérêts élevés, en comparaison des placements financiers classiques.

Sous le coup de l’euphorie des rendements financiers bien plus élevés que ceux proposés par de

simples dépôts auprès du système bancaire chinois classique, les acteurs de la finance de l’ombre

oublient juste que ces placements ne sont absolument pas garantis. Qu’un accident financier

survienne dans ce monde de l’ombre et c’est la panique générale.

On connaît la suite de cette exubérance irrationnelle : dans un mouvement de mimétisme, tout le

monde voudra récupérer sa mise de départ, persuadé que le premier arrivé sera le premier servi.

Face à ce risque de débâcle générale, les fonds spéculatifs seront incapables de faire face aux

demandes de retraits des collectivités locales ou des particuliers. La défiance s’installera, et la

contagion se propagera. La crise des crédits pourris se transformera alors en crise de liquidités -

les banques refusant de se prêter les unes aux autres. Et en une nouvelle crise financière,

économique et sociale.

D. NORA, Crise des subprimes : la menace de la finance de l’ombre, Nouvel Obs, 9 août 2017

Dix ans après la crise des "subprimes", la bombe à fragmentation la plus dangereuse du

système financier mondial continue de gagner en puissance

A l’occasion de l’anniversaire de la crise de 2007, vous avez sûrement entendu - sans vraiment le comprendre - le

terme "shadow banking", le plus souvent traduit par "finance de l’ombre", "finance fantôme", ou - pour les moins

critiques - "finance parallèle". Tâchons d'éclairer ce concept obscur qui pourrait bien, à notre insu, déterminer notre

avenir économique.

De quoi parle-t-on ? Le Conseil de stabilité financière, (CSF), qui surveille l’industrie financière globale pour le

compte du G20, définit le shadow banking comme "le système d’intermédiation du crédit impliquant des entités et des

activités qui se trouvent potentiellement à l’extérieur du système bancaire".

Concrètement, il s’agit d’un ensemble d’opérateurs financiers non bancaires, ainsi que d’opérations hors bilan

d’établissements bancaires. Citons les fonds de gestion de fortune, les fonds spéculatifs (hedge funds), les fonds du

marché monétaire, les fonds de capital-investissement, les courtiers en tous genres, mais aussi une panoplie

renouvelée de "placements structurés", comme les CDS ("credit default swaps") de sinistre mémoire, au cœur de la

crise de 2007.

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Précisons que, contrairement à ce que semble suggérer son appellation, cette partie immergée de l’iceberg financier

mondial est parfaitement légale. Le Conseil de stabilité financière l’estime même utile : "Le financement par les non-

banques fournit une alternative de valeur au financement par les banques, et aide à soutenir l’activité économique

réelle", écrivent les experts en mai 2017. Un point de vue de moins en moins partagé, cependant, en dehors de

l’industrie financière.

Dangereux vases communicants

Le CSF reconnaît tout de même que le développement du shadow banking constitue un danger latent : "Si le

financement par les non-banques est impliqué dans des activités quasi bancaires, s’il transforme la maturité/liquidité

et crée un effet de levier financier, il peut devenir une source de risque systémique, à la fois directement et à travers

son interconnexion avec le système bancaire."

De fait, son développement est à la fois métastasique et opaque. La présidente de la Banque centrale américaine, Janet

Yellen, avait déclaré en 2014 que la régulation de la finance de l’ombre posait un "énorme défi". Or l’ex-économiste

en chef du FMI, Raghuram Rajan - l’un des rares experts à avoir prédit la crise - juge dans "les Echos" :

"Rien n’a été fait contre la finance de l’ombre, vers laquelle s’est déplacé le risque."

Explication: les banques - qui font appel à l’épargne publique - sont régulées. Elles sont soumises à la supervision des

banques centrales et dépendent de diverses autorités monétaires et gouvernementales. En contrepartie de quoi, elles

bénéficient de filets de sécurité en cas de défaillance : garantie des dépôts, banque centrale prêteuse en dernier

recours, etc. Elles seules sont, en principe, autorisées à émettre directement des crédits. Mais le problème est qu’il

existe une grande porosité entre ces entités bancaires traditionnelles, les investisseurs institutionnels (fonds de

pension, fonds mutuels, sociétés d’assurance) et les "non-banques" parallèles.

Par le biais d’une ingénierie financière de plus en plus créative (titrisation, activités hors bilan, prêt de titres, produits

à terme…) les capitaux circulent sans cesse entre ces trois pôles de la finance mondiale. Et l'on assiste à un

gigantesque jeu de vases communicants : plus on serre la vis réglementaire aux banques (ratio imposé de fonds

propres, limites aux opérations spéculatives…), plus elles ont tendance à refiler leurs actifs et opérations risqués à

cette nébuleuse de l’ombre, qui n’est pas sujette aux mêmes contraintes. Pire : en cas de pépin, cette finance de

l’ombre est "pro-cyclique", c’est-à-dire qu’elle aggrave la crise, plutôt que de jouer les contrepoids.

Problème : les autorités n’ont pas profité de la crise de 2007 pour faire le grand ménage. Et l’argent déversé à flot par

les banques centrales est venu indirectement nourrir cette industrie financière de l’ombre. Alors que cette sphère

financière parallèle s’était un peu dégonflée en 2008, elle "continue sa tendance à la hausse pour la 7e année

consécutive avec 3.800 milliards supplémentaire en 2015", expliquait le CSF en mai, dans son rapport annuel sur

la question.

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Résultat : fin 2015, le shadow banking représente selon le CSF 92.000 milliards de dollars, soit 150% du PIB

mondial… contre 140% avant 2007 !

Le Luxembourg, plus opaque que les îles Caïmans

L’autre révélation de cet audit du CSF est qu’avec 30.000 milliards de dollars estimés, l’Europe devance désormais les

Etats-Unis en terme de finance fantôme. Dans la zone euro, elle excédait même 200% du PIB, avec l’Irlande et les

Pays-Bas en tête de liste. Un chiffre encore très sous-estimé, puisque le Luxembourg ne daigne même pas participer à

l’enquête du CSF. Le paradis financier continental - patrie du Président de l’UE, Jean-Claude Juncker - est à cet

égard moins transparent que… les îles Caïmans !

Ce gonflement de la finance parallèle annonce-t-il, pour autant, la prochaine crise systémique ? Dans son rapport

d’évaluation des risques, publié le 3 juillet, le Conseil de stabilité se veut optimiste, jugeant que "les aspects

du shadow banking qui sont considérés comme ayant contribué à la crise financière globale ont significativement

décru, et ne posent généralement plus de risques pour la stabilité financière."

Klaas Knot, membre du CSF et président de la Banque centrale néerlandaise est cependant circonspect :

"Même si nous avons fait de grands progrès, les autorités doivent rester en alerte, quant aux risques générés

par le shadow banking."

Il poursuit : "Nous devons continuer à améliorer la disponibilité des données, l’analyse de risque et le partage

d’informations, pour être à même d’identifier à temps de nouvelles sources de vulnérabilités systémiques."

Comme l’expliquait le vice-président de la Fed, Stanley Fisher, en décembre 2015, dans une conférence sur les

risques de la finance de l’ombre :

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"Ce que l’on ne sait pas peut nous faire mal !"

Un volcan financier chinois ?

Et la boîte noire la plus opaque, ces temps-ci, est probablement la finance zombie chinoise : la banque centrale -

People’s Bank of China - a révélé cet été que les crédits hors bilan des établissements chinois avaient fait un bond

énorme en 2016, dépassant même à présent la somme de tous les crédits traditionnels.

Selon Patrick Chovanec, du fonds de gestion Silvercrest, cité par le quotidien britannique "Telegraph" :

"Les banques ont vendu ces produits sans en assumer le risque. Les investisseurs les ont achetés sans non

plus en assumer le risque. Ils pensent tous que le gouvernement va sauver tout le monde."

Le président chinois Xi, lui-même, a récemment tiré le signal d’alarme. Car la dette globale chinoise se monte à 280%

de son PIB…

M. DAMGÉ, Le 9 août 2007, le début de la crise des subprimes, Le Monde, 9 août 2017

Le 9 août 2007, le début de la crise des « subprimes »

Il y a dix ans, la banque BNP Paribas gelait les retraits de ses clients dans trois de ses fonds

monétaires et marquait le début de la plus grande crise financière de ce début de XXIe siècle.

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C’est un fait qui est souvent ignoré : la plus grande crise financière de ce début de

XXIe siècle a commencé le 9 août 2007… en France. Ce jour-là, BNP Paribas gèle les

retraits de ses clients dans trois de ses fonds d’investissement. La banque

tricolore reconnaît qu’elle ne peut plus valoriser les actifs détenus dans ces fonds, car ils ne

sont plus échangeables sur les marchés.

Baudouin Prot, le directeur général de BNP Paribas, avait pourtant assuré, le 1er août, que la

liquidité de ses produits (la capacité à être vendus ou achetés) était « totalement assurée ». Mais,

une semaine plus tard, les clients (des trésoriers d’entreprise et des grandes fortunes) ne peuvent

plus revendre leurs parts et récupérer leur investissement.

Cette décision est rarissime dans le monde de la gestion, car elle envoie un signal désastreux ;

confronté à des déboires similaires à la même période, l’assureur Axa avait choisi d’assurer la

liquidité de ses fonds en difficulté et de racheter les parts des clients qui

souhaitaient vendre. « Nous avons juste été la première banque internationale à dire que le roi était

nu », confiait un ancien dirigeant de BNP Paribas au Monde.

Où le grand public découvre les « subprimes »

A l’époque, comme pour Axa, les trois fonds BNP Paribas sont investis en grande partie dans

les « subprimes », des produits dérivés de prêts immobiliers à risque américains, dont le grand

public ne sait pas encore grand-chose.

Tout commence dans les années 2000 aux Etats-Unis. Des millions de ménages modestes y

contractent des emprunts à taux variables (les subprimes), gagés sur la valeur de biens

immobiliers, grâce à des sociétés de crédit peu regardantes sur la capacité de ces ménages

à rembourser. Lorsque les taux d’intérêt grimpent, ces ménages sont étranglés par les dettes.

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Sauf qu’au même moment, les prix de l’immobilier, qui connaissent une véritable bulle, se

retournent et les créditeurs ne peuvent plus se rembourser sur la revente des maisons. Et, entre-

temps, les subprimes ont été transformés (titrisés) en produits financiers complexes, eux-mêmes

rachetés par les banques du monde entier ; le risque se retrouve ainsi disséminé sur l’ensemble

de la planète.

Des signes avant-coureurs

En dehors de la décision malheureuse de BNP Paribas de pénaliser ses clients, d’autres signes

avant-coureurs peuvent être considérés comme des marqueurs des prémices de cette crise

mondiale. En février, la banque HSBC annonce des pertes liées aux subprimes. C’est le

premier « profit warning » de son histoire. Les impayés des crédits immobiliers à haut risque

amputeraient de 10,5 milliards de dollars ses bénéfices annuels. En avril, son principal

concurrent dans le secteur du subprime américain, New Century, se déclare en faillite.

En juin, deux fonds spéculatifs (hedge funds) gérés par la banque Bear Stearns enregistrent

de lourdes pertes et doivent fermer. Ces défaillances ont un effet domino, entraînant d’autres

plus petits fonds dans leur sillage, faisant craindre des pertes au sein même des établissements

les plus solides de Wall Street.

En juillet, deux banques allemandes, IKB et Sachsen LB, frôlent la faillite du fait de leurs

investissements aux Etats-Unis. Le gendarme de la Bourse allemande, la BaFin, juge alors que le

pays est « menacé de la plus grave crise financière depuis 1931 ». Le 18 août, la banque publique de

l’Etat de Saxe fait l’objet d’un plan de sauvetage exceptionnel. Pour éponger ses pertes, une

ligne de crédit de 17,3 milliards d’euros lui est accordée – deux fois plus que pour IKB. Sans ces

aides, les deux établissements spécialisés dans le financement des petites et

moyennes entreprises (PME) auraient mis la clé sous la porte.

Une prise de conscience tardive

En mai 2007, le directeur de la banque centrale américaine, Ben Bernanke, assure que la hausse

du taux de défaut sur les remboursements d’emprunts immobiliers ne sera pas préjudiciable à

l’économie américaine. Au moment même du premier choc, au début d’août, le président

américain George W. Bush estime qu’il y a « assez de liquidités » sur le marché.

Si la prise de conscience a été lente et tardive, les conséquences toutefois ne se font pas fait

attendre : un an plus tard, l’un des plus grands établissements de Wall Street fait savoir qu’il est

au bord de la faillite. Le 15 septembre 2008, le gouvernement américain laisse la banque

Lehman Brothers déposer le bilan, relançant ainsi l’onde de choc des subprimes sur l’économie

mondiale. Cette fois, les responsables politiques semblent prendre la mesure de

l’événement, Barack Obama évoquant « la crise financière la plus grave depuis la grande

dépression [de 1929] ».

Le décrochage des Bourses en 2007 ne se traduit pas immédiatement par une érosion continue

des cours, mais en deux ans les places boursières perdent presque la moitié de leur valeur. Elles

ne retrouvent leur niveau d’avant-crise qu’à partir de 2012 aux Etats-Unis. Il

faudra attendre deux années supplémentaires en France.

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Le 9 août 2007, en France, BNP Paribas gèle les retraits de ses clients dans trois de ses fonds

d’investissement.

La fin de la confiance

Le 9 août, c’est aussi le jour où les banques centrales entrent en scène pour éviter une

paralysie générale du marché interbancaire, celui sur lequel les banques se prêtent de l’argent

entre elles pour financer leurs opérations au jour le jour, un marché essentiel à l’activité

économique. Les banques centrales, qui leur prêtent aussi de l’argent régulièrement sous forme

d’enchères sur des montants définis à l’avance, sont cette fois obligées d’ouvrir grand les vannes

et de prêter bien plus que d’habitude : en deux jours, environ 290 milliards d’euros de liquidités

sont apportés au système bancaire international, un record.

Mais il ne s’agit pas que d’apporter de l’argent, il s’agit de restaurer la confiance, d’abord entre

les banques mais aussi avec les investisseurs que sont les entreprises, les fonds de pension ou les

nouvelles puissances financières chinoises et russes… Or, la confiance est rompue et ce

problème restera entier pendant plusieurs années, personne ne sachant combien les banques ont

investi exactement dans les subprimes, et les remèdes des banques centrales (baisses de taux,

injections de liquidités, etc.) n’étant que des pansements temporaires.

C’est d’ailleurs ce problème de confiance qui est notamment à l’origine des manipulations

frauduleuses du Libor, le taux interbancaire londonien : il s’agissait d’annoncer un taux

d’emprunt plus bas que celui des concurrents, car une banque qui reconnaissait qu’elle

empruntait (plus) cher (que les autres) risquait d’être immédiatement soupçonnée de fragilité,

alors qu’une banque saine devait réussir à emprunter à un taux bon marché.

Cette méfiance quant à la santé du système bancaire se répercutera jusque chez les particuliers,

dont certains incitent, en 2010, leurs compatriotes à retirer leur épargne des banques, à l’instar

de l’ancien footballeur Eric Cantona. Une initiative qui, si elle avait été suivie, aurait

pu provoquer une ruée aux guichets et l’effondrement de plusieurs établissements. C’est ce qui

avait conduit au sauvetage de la britannique Northern Rock en septembre 2007 : en pleine crise

des subprimes, des rumeurs courent sur son manque de solvabilité. On voit alors les

déposants faire la queue pour retirer leurs économies. Le gouvernement est contraint

de nationaliser l’établissement pour éviter sa disparition pure et simple.

Les conséquences sur l’économie réelle

En l’espace de quelques mois, la crise dépasse le cadre financier pour toucher l’économie dite

« réelle ». La crise des subprimes se mue en crise généralisée du crédit. Tout le système

financier commence à se gripper ; les banques ne se prêtent plus entre elles et ne prêtent plus

aux entreprises.

Autre conséquence, le repli des investisseurs vers des valeurs considérées moins risquées :

les matières premières, dont les cours s’embrasent. En 2008, l’indice FAO (Food

and Agriculture Organization of the United Nations, qui mesure la variation mensuelle des cours

internationaux d’un panier de denrées alimentaires) grimpe en un an de 50 %, et même de 87 %

pour les céréales, provoquant une vague d’émeutes de la faim.

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L’envolée des prix des matières premières affecte directement les industriels et les

consommateurs tout en stimulant l’inflation… ou plus exactement la stagflation, combinaison

d’inflation et de stagnation de la croissance. Un phénomène apparu dans les années 1970 après le

premier choc pétrolier, qui menace à nouveau les économies occidentales.

Des Etats-Unis à la Grèce, l’effet domino

Deux ans après le début de la crise des subprimes, l’onde de choc se propage jusqu’en Europe

avec des tensions inédites sur les marchés où se financent les Etats. Certains, comme la Grèce,

voient leur prime de risque exploser sur les marchés, la confiance des investisseurs ayant été

amoindrie par la révélation des déficits publics du pays.

En 2011, Athènes doit emprunter à 18 %, six fois plus que l’Allemagne. Après de longues

tergiversations à Bruxelles et à Francfort, c’est la zone euro qui se porte finalement au secours

d’Athènes. Mais le peuple grec paie encore aujourd’hui l’ardoise de la « crise des dettes », plan

d’austérité après plan d’austérité.

Au-delà des pays européens qui subissent cette crise du crédit de plein fouet (Grèce mais

aussi Portugal, Espagne, Italie, Irlande, etc.), c’est l’ensemble du Vieux Continent qui voit la

croissance s’éroder. Quelque 80 % des pays tombent en récession dans l’Union européenne.

Rigueur budgétaire, envolée du chômage de masse, notamment chez les jeunes, alimentent

l’euroscepticisme et la déception de nombre d’Européens, qui se tournent dans les années

suivantes vers le populisme. Il faudra attendre 2016 pour que la zone euro retrouve

durablement son niveau de croissance d’avant la crise.

RABREAU, Shadow banking : tout comprendre sur la finance de l’ombre, Le Figaro, 26 août 2015

DOSSIER «SHADOW BANKING» - La puissante finance parallèle est devenue indispensable au bon fonctionnement actuel de l'économie mondiale. Pourtant, elle n'est pas réglementée. Qu'est-ce que le «shadow banking»? Comment fonctionne-t-il? Représente-t-il un danger? Explications.

Le «shadow banking» est puissant, multiformes, évolutif, et omniprésent sur la planète finance. À tel point qu'il est devenu essentiel au bon fonctionnement du système capitaliste dans lequel vit le monde. Pourtant, il échappe encore à toute supervision... malgré les risques considérables qu'il présente. • Qu'est-ce que le «shadow banking»? Sur la planète finance, il y a le système bancaire classique et le «shadow banking». En français, on l'appelle la «finance de l'ombre» ou «la finance fantôme». Il s'agit en fait de tous les intermédiaires financiers qui sont en dehors du système bancaire traditionnel, et qui participent au financement de l'économie mondiale. Autrement dit, ce sont toutes les opérations financières qui se font hors des bilans des banques. • Quels sont les acteurs du «shadow banking»? Les acteurs du «shadow banking» sont les banques d'affaires, les hedge funds, les fonds de titrisation, les fonds monétaires, les fonds de pension, mutuels, d'assurance-vie, les fonds négociés en Bourse... Mais aussi, les entreprises de capital-investissement, les sociétés de

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garantie de crédit, les trusts de gestion d'actifs (immobiliers par exemple), les sociétés d'affacturage (crédit inter-entreprises), etc... Dans un sens encore plus large, le «shadow banking» peut regrouper les établissements de crédit-conso ou de crédit-auto, de micro-crédit, les sites de crowdfunding (financements participatifs), les plateformes de monnaies virtuelles (bitcoins par exemple). Ces entités, à la différence des banques traditionnelles, ne reçoivent pas de dépôts de la part des gens: elles ne fonctionnent que sur le crédit. Elles ne sont donc pas soumises à la réglementation bancaire traditionnelle, et leurs activités ne sont pas garanties par les États et les Banques centrales. • Quel est le poids de cette finance de l'ombre dans le monde? Difficile de cerner les contours du «shadow banking», donc de le mesurer parfaitement. Le Financial Stability Board (le Conseil de stabilité financière, créé en 2010 par le G20 après la crise des subprimes) a chiffré le marché à 75.000 milliards de dollars à fin 2013. C'est 5000 milliards de plus qu'en 2012. À fin 2014, il devrait avoir atteint les 80.000 milliards de dollars. Selon cette estimation, le «shadow banking» représente ainsi un quart des actifs financiers mondiaux, la moitié du poids du système bancaire traditionnel, et l'équivalent du PIB mondial annuel. Les États-Unis, la zone euro et le Royaume-Uni détiennent à eux seuls les trois-quarts des actifs qui relèvent du «shadow banking». Mais dans les BRICs et les pays émergents, particulièrement en Chine, en Inde, en Indonésie et en Russie, la «finance de l'ombre» progresse fortement. Du côté des acteurs du «shadow banking», les fonds d'investissements immobiliers et les hedge funds connaissent les expansions les plus fulgurantes. Il faut bien noter que ces calculs du FSB «ne prennent pas en compte les centres financiers offshore (les paradis fiscaux, ndlr), où la plupart des hedge funds sont domiciliés»... En réalité, aujourd'hui, la définition du «shadow banking», de ses activités et de ses acteurs, n'est toujours pas clairement établie et les travaux n'en sont qu'à leurs débuts. • Quand et comment le «shadow banking» s'est-il développé? Dans les années 1980, à l'époque de la libéralisation totale des marchés financiers - considérés comme «auto-régulants» -, la titrisation s'est développée, a-t-on pensé, pour mieux couvrir les risques de change et de taux. Sans cadre, ces montages financiers sont devenus complexes, excessifs... et spéculatifs. Donc risqués et systémiques. À chaque nouvelle crise, des réglementations bancaires sont décidées pour assurer la liquidité et la solvabilité des banques (donc, la viabilité du système). Problème: cette régulation fait perdre des marges de manœuvre et de la rentabilité aux banques. Ce qui les pousse, systématiquement, à la contourner. Comment? En retirant de leurs bilans (et donc des écrans radars des régulateurs) leurs actifs les plus risqués, en les titrisant et en les revendant en «produits dérivés» sur les marchés financiers, par l'intermédiaire d'établissements financiers. À partir des années 2000, avec l'essor d'Internet et de l'information, les acteurs de cette finance opaque et ultra-sophistiquée se sont multipliés. • Concrètement, comment ça marche? • Pourquoi le»shadow banking» est-il devenu indispensable? Le «shadow banking» répond à des contraintes et à des besoins auxquels sont confrontés les emprunteurs et les investisseurs, et auxquels les banques traditionnelles réglementées peuvent de moins en moins subvenir. Le «shadow banking» est ainsi devenu donc un palliatif qui nourrit la boucle crédit-consommation-croissance du modèle capitaliste. • Quels sont les dangers du «shadow banking»? Le «shadow banking» présente deux problèmes majeurs: son poids dans le financement global de l'économie et l'interdépendance des acteurs du «shadow banking» entre eux et avec le

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système bancaire traditionnel international. Ce qui signifie que si le «shadow banking» est systémique: s'il souffre, il entraîne avec lui le système bancaire «normal». La crise des subprimes de 2007 en est la preuve concrète. C'est d'ailleurs en août 2007, alors que la tornade des subprimes se formait, qu'un économiste de Pimco (le premier fonds obligataire au monde), Paul McCulley a utilisé pour la première fois le terme de «shadow banking» et prévenu des risques majeurs de «cette finance de l'ombre endettée jusqu'au cou». Un message alors passé inaperçu. Pourtant, un an plus tard, en septembre 2008, la banque américaine Lehman Brothers faisait faillite. Dans ce monde sans supervision, impossible d'anticiper sereinement les secousses et de prévenir les crises. Selon l'économiste Christian de Boissieu, «la crainte est grande qu'une crise immobilière en Chine, probable dans les deux à trois ans à venir compte tenu de la formation d'une bulle immobilière depuis des années, engendre des risques systémiques à la fois dans le système bancaire formel et dans le «shadow banking», avec un renforcement réciproque des risques.» • Pourquoi le «shadow banking» a encore de beaux jours devant lui? Comme le FMI le souligne dans son dernier rapport sur la stabilité financière (2014), le «shadow banking» «se développe quand les taux sont bas et que les investisseurs cherchent de plus gros rendements, quand il y a une forte demande d'actifs (de la part des assurances ou des fonds de pension par exemple) et quand la régulation bancaire se durcit». Soit, tout ce qui caractérise notre environnement actuel! Pire, aujourd'hui, les taux ne sont même pas bas, ils sont, pour certaines échéances courtes, carrément négatifs... Sept ans après la crise des subprimes, pour le Shadow Banking, «business is back». • Que font les régulateurs? La crise des subprimes consacre l'échec des politiques de régulation financière. En 2010, le G20 s'est saisi du «problème» et instauré Financial Stability Board pour étudier le «shadow banking» et le mesurer. Aux États-Unis, en Grande-Bretagne, et en Europe, des mesures éparses ont été prises. Au niveau international, Bâle III (la réforme dite de «Bâle III» vise à garantir un niveau minimum de capitaux propres afin d'assurer la solidité financière des banques) prévoit des limites à certaines activités du «shadow banking». Mais, rien n'est vraiment ni identifié ni contraignant... Le risque de réguler trop fort et trop directement serait de voir se développer le «shadow shadow banking», comme l'évoquent Constantin Mellios et Jean-Jacques Pluchart dans un livre intitulé Le Shadow Banking publié en 2015: «Le chantier de la régulation du Shadow Banking semble devoir faire appel à un travail de l'ombre, austère, rigoureux et de longue durée, impliquant du courage politique, de la diplomatie internationale, et de l'expertise financière et comptable». Vaste programme.

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Séance n° 2 AGRÉMENT ET MONOPOLE

LES NOTIONS ESSENTIELLES

Revoir les notions suivantes : opérations de crédit, services de paiement, fonds remboursables du public TEXTES APPLICABLES

Article L. 311-1, L. 511-1, L. 511-6, L. 511-7 et L. 571-3 du code monétaire et financier LES OPÉRATIONS DE BANQUE

Doc. 1 : Cass. Crim., 20 février 1984, n° 83-90.738, Bull. crim., n° 62. (extrait) - opération de crédit et cession de créances non échues. Doc. 2 : CE, statuant au contentieux, 6.2 SSR, 8 juillet 1987, n° 47192 (extrait) - opération de crédit et cession de créances non échues. Doc. 3 : Cass. Com., 2 novembre 2016, n°15-10.274, F.-D., Lexbase, n°5570BW9, H. Causse, « Du critère de l'opération de crédit désignant les crédits et délimitant les opération de banque », - locations financières. Doc. 4 : Cass. Crim., 22 février 2017, n° 15-85.799 - réception de fonds remboursables du public. Doc. 5 : Position ACPR 2014-P-01 du 29 janvier 2014 relative aux opérations sur bitcoins en France. LES CONTOURS DU MONOPOLE BANCAIRE

Doc. 6 : Cass. com., 3 décembre 2002, n° 00-16.957, Bull. Civ., IV, n° 182 ; D. 2003. 202 ; JCP.E.2003. 853, B. Dondero ; Petites affiches, 4 mars 2003, p. 12, E. C. ; RDBF 2003, n° 58, Crédot et Gérard ; RJDA 2003, n° 532 - la caractère « habituel » des opérations de banque. Doc. 7 : Cass. Com., 7 janvier 2004, Sté Fayet c/ Sté Centéa, pourvoi n° 01-02.481 (extrait) - - la caractère « habituel » des opérations de banque. Doc. 8 : Cass. Crim., 8 juillet 2015, n° 13-88.557 - l'application territoriale du monopole bancaire Doc. 9 : CJCE, 9 juillet 1997, aff. C-225/95, Parodi (extrait) - monopole bancaire et liberté d'établissement /de prestation de services. LES SANCTIONS CIVILES DE LA VIOLATION DU MONOPOLE BANCAIRE Doc. 10 : J. LASSERRE CAPDEVILLE, Les sanctions civiles de la violation du monopole bancaire : état des lieux et propositions, Banque & Droit, n°174, juillet-août 2017, p. 15. Doc. 11 : Cass., Ass. plén., 4 mars 2005, n° 03-11.725, Bull. A. P., n° 2; JCP éd. E, p. 690, T. Bonneau ; JCP éd. G., 2005, II, 10062, concl. R. de Gouttes ; D. 2005, p.836, X. Delpech; RTD com. 2005, p. 400, D. Legeais; RDBF, juill.-août 2005, n°4, 118, Crédot et Gérard ; D. 2006, p. 155, H. Synvet – Incidence du défaut d’agrément sur le contrat de prêt. Doc. 12 : Cass. Civ. 2e, 14 juin 2007, n° 05-21.166, Bull. civ. II, n° 155 – Incidence du défaut d’agrément sur le contrat d’assurance-vie. EXERCICE Commentaire de l'arrêt Cass. Com., 8 janvier 2008, n° 06-19.944.

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LES OPÉRATIONS DE BANQUE

Doc. 1 : Cass. crim., 20 février 1984, n°83-90.738, Bull. crim. n°62 (extrait) Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1, 6, 7, 11 de la loi du 14 juin 1941, 463 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; En ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu le coupable d'exercice irrégulier de l'activité d'établissement financier ; Aux motifs qu'il est exact, comme l'expose le prévenu, que la rémunération de la CEER n'était pas calculée selon le mode habituel d'un taux d'intérêt utilisé en matière de prêt d'argent, que toutefois l'avance des fonds faite par la CEER à ses clients était liée à la condition de l'engagement de ceux-ci au paiement d'une somme destinée tant à couvrir les frais exposés par la société qu'à assurer la rétribution du financement dont bénéficient immédiatement les clients de celle-ci, que, dès lors, les modalités de ladite rémunération, déterminée par les parties aux opérations en cause, sont sans importance sur la nature desdites opérations, que l'argumentation du prévenu du ce point ne peut donc qu'être rejetée ; Alors que, après avoir admis que la rémunération en termes d'intérêts ou d'agios calculés "pro rata temporis" de l'avance consentie, constituait l'un des éléments essentiels de l'opération de crédit au sens de la loi du 13 juin 1941, la Cour d'appel ne pouvait se borner à déclarer que les modalités de la rémunération forfaitaire de la CEER étaient sans influence sur la nature des opérations pratiquées par cet organisme, sans recherche si cette rémunération forfaitaire constituait ou non l'élément susvisés d'une opération de crédit ; Qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel n'a donc pas donné de base légale à sa décision Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1, 6, 7, 11 de la loi du 14 juin 1941, 27-2° et 21 de la loi du 13 juin 1941, 463 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; En ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'exercice irrégulier de l'activité d'établissement financier ; Aux motifs qu'il est contant, comme l'affirme X…, que les opérations d'achat de créances réalisées par la CEER libéraient les clients de cette société de l'obligation de la restitution des fonds qui leur étaient avancés, que si effectivement le paiement par le débiteur de la créance entre les mains de la CEER valait pour celle-ci le recouvrement des deniers qu'elle avait fournis au créancier cédant, cette circonstance ne saurait effacer le caractère intrinsèque de prêts d'argent que revêtaient les achats de créances dont la finalité était de permettre aux vendeurs de créances de percevoir immédiatement des sommes dont ils étaient créanciers à terme, que l'argumentation du prévenu sur ce point ne peut qu'être rejetée ; Alors qu'après avoir admis que la restitution maintenue sur la tête de celui qui a reçu l'avance constituait l'un de éléments de l'opération de crédit au sens de la loi du 13 juin 1941, la Cour d'appel ne pouvait se borner à déclarer que la circonstance que le paiement par le débiteur de la créance entre les mains de la CEER valait pour celle-ci le recouvrement des deniers qu'elle avait fournis au créancier cédant, et, dès lors, en l'absence de restitution de l'avance par celui qui l'avait reçue, ne saurait effacer le caractère intrinsèque de prêts d'argent de l'opération, sans rechercher si ladite circonstance entrait ou non dans le cadre de l'opération de crédit par elle définie ;

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Qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel n'a pas donné de base légal à sa décision ; (…) Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que la société "Compagnie Européennes d'Etudes et de Recouvrement" (CEER) fondée en 1970 sous forme d'une SARL puis transformée en société anonyme le 11 mars 1974, a été dès sa fondation dirigée par Gérard X… ; Que son objet consistait à effectuer des opérations d'achat au comptant de créances que lui cédait sa clientèle ; Que début 1980, la commission de contrôle des banques ayant estimé que cette société effectuait non une activité contentieuse, mais en réalité se livrait essentiellement à des achats de créances non échue, alors que selon elle ces opérations de crédit étaient réservées aux seules banques et établissements financiers régulièrement inscrits, a enjoint à la CEER, qui n'était pas agréée à cette fin, de renoncer immédiatement à son commerce et de liquider les opérations irrégulières en cours, puis a porté plainte contre elle en application des articles 1er, 6, 7, 11 de la loi du 14 juin 1941 et 21 de la loi du 13 juin 1941 ; Attendu que pour déclarer X… coupable de ces chefs, les juges du fond énoncent « qu'il résulte de l'information et des débats que le volume des créances non échues acquises par la CEER dépassait le taux de 50% pour l'ensemble des achats de créances effectués par cette société, pourcentage non contesté par X … » ; Que le dirigeant de la CEER « en procédant habituellement et jusqu'au 2 février 1981 à ces achats de créances non échues avait effectué des opérations de crédit à court et moyen terme au sens de l'article 27-2° de la loi du 13 juin 1941 » ; Que « les modalités de la rémunération perçue par la CEER étaient sans influence sur la nature des opérations auxquelles elle participait » ; Qu'il en était de même « pour l'absence d'obligation de restitution qui n'était pas imposée aux clients de la CEER lorsqu'ils avaient reçu le paiement subrogatif, cette circonstance ne pouvant effacer le caractère intrinsèque de prêts d'argent que revêtaient les achats de créances effectuées par la société en cause, la finalité de ceux-ci étant de permettre aux vendeurs de percevoir immédiatement des sommes dont ils n'étaient créanciers qu'à terme ». Attendu qu'en l'état de ces énonciations et constatations et alors d'ailleurs que les faits déclarés constants par l'arrêt s'analysent en escompte, prise en nantissement, ou encaissement d'effets de commerce, de chèques ou d'effets publics entrant dans les prévisions de l'article 27-2°, C, de la loi du 13 juin 1941, la Cour d'appel, loin d'encourir les griefs visés aux moyens, a donné une base légal à sa décision ; Que, dès lors, ces moyens ne sauraient être accueillis ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ; REJETTE LE POURVOI.

Doc. 2 : CE, statuant au contentieux, 6/2 SSR, 8 juillet 1987, n° 47192 (extrait) Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 30 septembre 1953 modifié par le décret n° 75 793 du 26 août 1975 : « Le Conseil d'Etat reste compétent pour connaître en premier et dernier ressort... 6° Des recours en annulation dirigés contre les décisions administratives des organismes collégiaux à compétence nationale » ; Considérant que la commission de contrôle des banques est un organisme collégial à compétence nationale ; que la décision attaquée, qui enjoint à la COMPAGNIE EUROPEENNE D'ETUDES ET DE RECOUVREMENT de cesser son activité d'achat des créances non contentieuses et de liquider les opérations en cours, est une décision administrative ; que, par suite, le tribunal

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administratif de Paris n'était pas compétent pour statuer sur la demande de cette société tendant à l'annulation de ladite décision ; que, dès lors, le jugement attaqué doit être annulé ; Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la COMPAGNIE EUROPEENNE D'ETUDES ET DE RECOUVREMENT devant le tribunal administratif de Paris ; (…) Sur la légalité interne : Considérant qu'au nombre des opérations visées l'article 27-2° de la loi du 13 juin 1941 figurent notamment les opérations de crédit à court ou moyen terme ; qu'il est constant que la COMPAGNIE EUROPEENNE D'ETUDES ET DE RECOUVREMENT pratiquait des opérations d'achat avec paiement comptant de créances non échues ; qu'en donnant à ses clients la possibilité de céder au comptant des créances non encore exigibles, elle leur proposait des opérations de crédit, dont les transferts de créances assuraient seulement l'exécution et la garantie ; que ces opérations, dont il n'est pas contesté qu'elles présentaient un caractère habituel, sont au nombre de celles visées à l'article 27-2° de la loi du 13 juin 1941 ; qu'en conséquence, la commission de contrôle des banques, informée de ce que la COMPAGNIE EUROPEENNE D'ETUDES ET DE RECOUVREMENT pratiquait des opérations de crédit sans être inscrite sur la liste des établissements financiers, a pu légalement lui enjoindre de cesser immédiatement ces activités et de liquider les opérations en cours ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, il y a lieu de rejeter la demande de la COMPAGNIE EUROPEENNE D'ETUDES ET DE RECOUVREMENT ; Article ler : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 6 octobre 1982 est annulé. Article 2 : La demande présentée par la COMPAGNIE EUROPEENNE D'ETUDES ET DE RECOUVREMENT devant le tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête devant le Conseil d'Etat sont rejetés. Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMPAGNIE EUROPEENNE D'ETUDES ET DE RECOUVREMENT et au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation.

Doc. 3 : Cass. com., 2 novembre 2016, n° 15-10.274, non publié au bulletin (extrait) Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 novembre 2014) et les productions, que la société Alexander Burkle, devenue Electis, a conclu en 2005 avec la société Europe Computer systèmes (ECS), devenue Econocom France, des contrats de location de produits informatiques avec services associés commandés à un fournisseur, dans la limite d'un montant global déterminé intitulé « capacité nette d'engagement » ; que ces contrats ont été cédés à la société Franfinance location ; que la société Electis a assigné la société Econocom et la société Franfinance location en demandant la requalification de ces contrats en contrats de crédit et leur annulation comme contraires à l'ordre public imposant leur conclusion par des établissements agréés ; Sur le premier moyen : Attendu que la société Electis fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes alors, selon le moyen, que constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne ; que le prêt consenti

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par un professionnel n'est pas un contrat réel et n'implique donc aucune remise de fonds directement à l'emprunteur ; qu'aux termes du contrat liant la société Electis à la société Econocom, portant sur la « location » de divers produits et de services, pour une période déterminée et un montant global maximum dénommé « capacité nette d'engagement », ou CNE, la société Electis devait commander auprès de ses propres fournisseurs « dans la limite de la CNE » des produits, au nom et pour le compte d'Econocom, et d'éventuels services associés, qu'elle s'engageait à « louer » auprès d'Econocom ; qu'Econocom réglait les produits et services concernés aux fournisseurs et prestataires de services choisis par Electis, et se faisait rembourser par le paiement de « loyers », comportant des intérêts, par la société Electis ; que la société Econocom, mettait ainsi, à titre onéreux, des fonds à la disposition de la société Electis en réglant directement ses fournisseurs et prestataires de services, tout en se faisant rembourser au moyen de mensualités dénommées loyers ; qu'en énonçant, pour écarter la qualification d'opération de crédit, que la société Econocom n'avait jamais remis de fonds à la société Electis, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, et violé l'article L. 313-1 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1892 du code civil ; Mais attendu qu'ayant relevé que les contrats avaient pour objet la location de matériel informatique et des prestations de services informatiques choisis par le locataire, dans une limite budgétaire fixée par le montant global déterminé, et que pesait sur le locataire la double obligation de payer les loyers et de restituer les matériels loués à l'échéance du contrat, la cour d'appel en a exactement déduit que la société Econocom n'avait pas, agissant à titre onéreux, mis des fonds à la disposition de la société Electis, de sorte que les contrats conclus ne constituaient pas des opérations de crédit ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le quatrième moyen, qui est préalable : Attendu que la société Electis fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que constitue une opération de crédit la location financière d'un bien dont la valeur réside tout entière dans l'usage, et dont la durée est voisine de la durée moyenne d'utilisation de la chose ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le contrat Capacity portait sur la location de matériels informatiques et progiciels dont l'obsolescence est particulièrement rapide et dont la valeur réside dans l'usage : «les contrats de location financière sont adaptés aux besoins, des clients lesquels sont confrontés à l'obsolescence rapide des équipements informatiques, qui n'ont quasiment plus de valeur à la fin du contrat, étant amortis et technologiquement dépassés ; d'ailleurs la fiche financière établie en avril 2005 entre les sociétés Econocom et Franfinance corrobore cette importante dépréciation du matériel et équipement puisque la société Econocom s'engage à racheter au terme du contrat Capacity le matériel et équipement pour la somme de 150 euros HT, alors qu'elle les a vendus à la société Franfinance au prix de 865 131 euros » ; qu'en retenant pourtant que la location financière litigieuse ne constituait pas une opération de crédit, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé l'article L. 313-1 du code monétaire et financier ; Mais attendu qu'ayant relevé que le contrat litigieux ne stipulait aucune option d'achat en faveur de la société Econocom, qui était tenue de restituer les matériels loués en fin de période de location, faisant ainsi ressortir que le locataire n'avait pas la possibilité d'acquérir tout ou partie des biens loués, moyennant un prix convenu tenant compte, au moins pour partie, des versements effectués à titre de loyers, la cour d'appel a exactement décidé que la location financière litigieuse ne constituait pas une opération de crédit-bail ni, plus généralement, une opération de location assortie d'une option d'achat, seules susceptibles d'être assimilées à des opérations de crédit par l'article L. 313-1 du code monétaire et financier ; que le moyen n'est pas fondé ;

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PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

Doc. 4 : Cass. crim., 22 février 2017, n° 15-85.799, non publié au bulletin (extrait) Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 511-5 et L. 312-2 du code monétaire et financier, 121-3 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale, contradiction de motifs ; En ce que la cour d'appel a reconnu M. X... coupable du délit d'exercice illégal de la profession de banquier par réception de fonds remboursables du public ; Aux motifs que l'article L. 511-1 du code monétaire et financier dispose, en son alinéa 1, qu'il est interdit à toute personne autre qu'un établissement de crédit ou une société de financement d'effectuer des opérations de crédit à titre habituel ; que l'alinéa 2 prévoit qu'il est, en outre, interdit à toute personne autre qu'un établissement de crédit de recevoir à titre habituel des fonds remboursables du public ou de fournir des services bancaires de paiement, la personne violant l'une de ces deux interdictions se rendant coupable d'exercice illégal de la profession de banquier, délit prévu et réprimé par l'article L. 571-3 du code monétaire et financier, champ des poursuites visées dans l'ordonnance de renvoi ; que la cour entend cependant souligner, liminairement, que l'acte de poursuite est particulièrement imprécis sur les faits exactement reprochés à M. X..., susceptibles de caractériser le délit d'exercice illégal de la profession de banquier ; qu'il appartient cependant à la juridiction répressive, saisie in rem, de rechercher au dossier d'information l'existence des faits, se situant dans la période de prévention, susceptibles de tomber sous le coup de cette qualification ; que le dossier d'information, qui a mis en évidence les intérêts financiers détenus par M. X... dans plusieurs sociétés, en tant qu'administrateur délégué de la SA Refuge Invest au Luxembourg, au sein d'Evropa, en tant que gérant de la SARL Immobat Consulting, salarié de la société Montesquieu, associé de la SARL Damec Pianissimo, gérant associé de la société Princeton Property, n'a pas permis, en dépit des investigations financières et patrimoniales qui ont été menées, d'établir que M. X... avait, « au travers de sociétés commerciales, démarché des clients français pour leur proposer des placements financiers entre janvier 2006 et février 2008, et qu'il avait pu prêter des fonds, via des SARL, à des promoteurs immobiliers, dans le but de réaliser des projets de construction avec promesse de rembourser des fonds avec intérêts » ; que la cour observe à cet égard que le raisonnement des premiers juges s'appuie sur des éléments issus de l'ordonnance de renvoi qui, dans un dossier conséquent dont tous les aspects n'ont pu, à l'évidence, être explorés, procèdent de déductions, non corroborées par le résultat des investigations ; que l'information a permis en revanche de faire apparaître que des particuliers, en l'occurrence des époux A...-B..., Mmes Michèle C..., épouse D... E... et Aurélie F..., née D... E..., étaient susceptibles d'avoir réalisé des placements financiers par l'intermédiaire de MM. X... et de H..., ou de MM. X... et de K...; qu'en droit, pour se rendre coupable du délit d'exercice illégal de la profession de banquier il faut, d'une part, ne pas avoir obtenu l'agrément nécessaire et, d'autre part, commettre habituellement des actes relevant du monopole de la profession de banquier ; que l'obligation de détenir un agrément résulte de la loi bancaire du 24 janvier 1984 dont l'objet visait, notamment, à protéger le monopole bancaire et les déposants en réservant certaines opérations à des établissements soumis au contrôle de l'Etat, offrant des garanties financières, de compétence et de moralité ; que l'agrément revêt donc un caractère obligatoire et depuis la loi bancaire de 1984, seules peuvent

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être agréées les personnes morales, peu important leur forme juridique ; que l'agrément est délivré par un organisme étatique, l'ACP, et à l'époque des faits le CECEI ; que la défense soutient en l'espèce que la société Refuge Invest, société de droit luxembourgeois, bénéficiait d'un agrément qui avait en réalité été délivré à Sébastien H...en avril 2006 par le Ministère des classes moyennes du Luxembourg, que Sébastien H...n'avait quitté Refuge Invest que le 22 février 2008, que les faits visés dans les poursuites avaient été commis entre 2006 et le 11 février 2008, donc à une période où les sociétés concernées avaient à leur tête des personnes agréées ; or, on ne retrouve aucune trace au dossier d'un agrément délivré à la société Refuge Invest ou encore à la société Princeton en tant que personnes morales par les autorités de contrôle luxembourgeoises pour effectuer des placements financiers au profit de particuliers ; que M. H...a du reste confirmé au cours de l'information qu'il n'avait pas l'agrément du comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement en France, que la Banque de France n'avait pas été avertie de l'autorisation de commerce qu'il aurait détenue au Luxembourg où il ne disposait pas non plus d'un agrément du comité de surveillance du secteur financier et que la société Refuge Invest ne disposait d'aucun agrément ; qu'à supposer en outre que cet agrément ait été obtenu, il était nécessaire, dès lors que les opérations financières concernées étaient conclues en France, que la Banque de France en ait été informée ; que, selon M. J..., adjoint du chef du service de la réglementation bancaire et financière, si les sociétés étrangères européennes qui bénéficient d'un agrément dans leur pays d'origine peuvent exercer légalement leur activité sur le territoire français, c'est à la condition d'en avoir informé le CECEI qui établit une liste en France des établissements étrangers européens qui sont en droit d'exercer sur le territoire français ; que, force est de constater que ni la société Refuge Invest, ni la société Princeton de laquelle M. X... était associé avec M. K..., ne remplissaient cette condition à la date des faits ; que, s'agissant du caractère habituel d'actes relevant du monopole bancaire, le délit d'exercice illégal de la profession de banquier peut être accompli par toute personne physique, ou par toute personne morale n'ayant pas obtenu l'agrément, sauf exceptions prévues à l'article L. 511-6 du code monétaire et financier dans le champ desquelles n'entrent pas les opérations effectuées par MM. X... et H...via la société Refuge Invest d'une part, et par MM. X... et K... via la société Princeton d'autre part qui accomplit des opérations de banque et notamment, réceptionne des fonds remboursables du public ; que, l'article 312-2 du code monétaire et financier définit la réception de fonds remboursables du public comme « les fonds qu'une personne recueille d'un tiers, notamment sous la forme de dépôt, avec le droit d'en disposer pour son propre compte, mais à charge pour elle de les restituer », peu important la nature juridique de l'opération qui a donné lieu à la remise et la durée de la remise et qu'ils s'agisse de fonds restituables à termes ou de dépôts à vue ; qu'en outre, la notion de public implique simplement que les fonds aient été remis par un tiers, c'est-à-dire par une personne juridique distincte ; que lorsqu'il a été entendu en garde à vue, M. X... a indiqué avoir rencontré en 2006 M. H..., qui exerçait une activité dans le domaine de la gestion de fortune et de patrimoine au Luxembourg, et avoir pour son compte, et moyennant commission, démarché des clients pour leur proposer des placements dans des sociétés luxembourgeoises sous forme de « compte courant participatif » ; que s'expliquant plus en détail devant le juge d'instruction, il a présenté ses activités comme « des opérations de marchand de biens » ne relevant pas de la profession de banquier dans la mesure où il n'y avait pas d'appel public à l'épargne et que les apporteurs avaient la qualité d'associés des sociétés ; qu'il a encore mentionné que les opérations consistaient à démarcher des clients français dans le but de les associer avec lui-même et M. H...dans des sociétés étrangères ou françaises afin qu'ils apportent des fonds destinés à grossir les comptes courants et le capital des sociétés, dans le but de réaliser des opérations immobilières générant des plus-values ; que bien conscient de ce que les époux A... n'avaient pas la qualité d'associés de la société Refuge Invest, il a qualifié de prêt l'apport de 660 000 euros consenti par ces derniers à la société Refuge Invest ; que, la chambre criminelle considère de manière constante que « la réception de fonds auprès du public sous forme de dépôts constitue, quelle que soit leur destination, une opération de banque au sens des articles 1 et 2 de la loi du 24 janvier 2004 » ; qu'en l'espèce, doivent donc indubitablement être

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qualifiés d'opérations de banque : les fonds qui ont été mis à la disposition de la société Refuge Invest par les époux A...-B..., par l'intermédiaire de MM. X... et de H...dans le cadre du « contrat de compte courant participatif », daté du 22 juin 2007 dont les modalités sont ci-dessus rappelées en détail ; les fonds qui ont été placés en novembre 2007 par M. Michèle C..., époux E... D... et son époux par l'intermédiaire de MM. X... et de K...dans la société Princeton au Luxembourg, d'un montant de 150 000 euros au taux annuel de 17 %, le fait que cette opération de placement n'ait suscité aucune difficulté (les époux E... D... ayant en effet été remboursés du capital et des intérêts avant l'échéance contractuellement prévue) étant indifférent au regard de la qualification retenue ; en revanche, hormis l'audition de M. Fabien D... Viger qui avait déclaré qu'au début de l'année 2007, sa soeur M. Aurélie F..., demeurant en Guadeloupe, avait effectué un placement par l'intermédiaire de MM. X... et H..., sans être certain du montant des fonds investis qui aurait été 100 000 euros, fonds qui auraient été remboursés en septembre 2007 par M. X... personnellement, le dossier d'information ne comporte aucun élément sur les conditions et la forme juridique du placement concerné ni même sur la société dans laquelle ces fonds auraient été investis ; que la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation considère quoiqu'il en soit de manière constante que deux actes suffisent à consommer l'habitude et que s'agissant du délit d'exercice illégal de la profession de banquier, il faut au moins deux opérations de banque distinctes, la caractérisation de l'habitude relevant du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond ; qu'en l'espèce, deux placements pouvant être qualifiés d'opération de banque au sens de l'article L. 312-2 du code monétaire et financier, ayant été mis à jour par le dossier d'information et ces opérations de placement impliquant M. X... d'une part, en sa qualité d'administrateur de la société Refuge Invest, en ce qu'il a personnellement signé le contrat de compte courant participatif, daté du 22 juin 2007, conclu par cette société avec les époux A... ; que d'autre part, en sa qualité d'associé de la société Princeton, en ce qu'il a participé à l'opération de placement conclue par les époux D... E... ; que l'infraction d'exercice illégal de la profession de banquier apparaît caractérisée en tous ses éléments constitutifs ; que c'est à juste titre par conséquent que les premiers juges, dont le jugement doit être confirmé, mais par substitution de motifs, ont retenu M. X... dans les liens de la prévention ; 1°) Alors que le délit d'exercice illégal de la profession de banquier par réception de fonds remboursables du public suppose que le prévenu ait reçu des fonds d'un tiers avec le droit d'en disposer pour son propre compte ; que la circonstance que les fonds ont été reçu à charge d'en faire un usage déterminé fait obstacle à la caractérisation de ce délit ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu M. X... dans les liens de la prévention alors qu'elle avait elle-même constaté que les fonds qu'il avait reçus des époux A...-B...étaient exclusivement destinés au financement d'un projet dans lequel ces derniers avaient souhaité investir, en sorte que ces fonds étaient affectés à un usage déterminé ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les textes susvisés ; 2°) Alors que tout arrêt en matière correctionnelle doit énoncer les faits dont le prévenu est jugé coupable et constater tous les éléments constitutifs de l'infraction ; que le délit d'exercice illégal de la profession de banquier par réception de fonds remboursables du public suppose que le prévenu ait reçu des fonds d'un tiers avec le droit d'en disposer pour son propre compte ; que pour considérer que les fonds reçus par M. X... des époux E... D... constituait une opération entrant dans le champ du monopole édicté par l'article L. 511-1 du code monétaire et financier, la cour d'appel s'est bornée à constater qu'« en l'espèce, doivent donc indubitablement être qualifiés d'opérations de banque : […] les fonds qui ont été placés en novembre 2007 par Mme Michèle C..., époux E... D... et son époux par l'intermédiaire de MM. X... et K... dans la société Princeton au Luxembourg, d'un montant de 150 000 euros au taux annuel de 17 %, le fait que cette opération de placement n'ait suscité aucune difficulté (les époux E... D... ayant en effet été remboursés du capital et des intérêts avant l'échéance contractuellement prévue) étant indifférent au regard de la qualification retenue » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher

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cependant si la société Princeton avait la libre disposition des fonds transférés à son bénéfice par les époux E... D... ou si, au contraire, ces fonds étaient affectés à un usage déterminé, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'ensemble des éléments constitutifs du délit d'exercice illégal de la profession de banquier par réception de fonds remboursables du public et partant, a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ; 3°) Alors, en tout état de cause, que tout arrêt en matière correctionnelle doit énoncer les faits dont le prévenu est jugé coupable et constater tous les éléments constitutifs de l'infraction ; que le délit d'exercice illégal de la profession de banquier est un délit intentionnel, dont l'existence suppose de caractériser que le prévenu savait qu'il agissait en violation du monopole conféré aux établissements de crédit par l'article L. 511-1 du code monétaire et financier ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est complètement abstenue de caractériser cet élément intentionnel, se bornant seulement à relever qu'« en droit, pour se rendre coupable du délit d'exercice illégal de la profession de banquier il faut, d'une part, ne pas avoir obtenu l'agrément nécessaire et, d'autre part, commettre habituellement des actes relevant du monopole de la profession de banquier » ; qu'en statuant ainsi, elle a violé les textes susvisés " ; Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable du délit d'exercice illégal de la profession de banquier pour avoir reçu à titre habituel des fonds remboursables du public, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen et retient, notamment, qu'il est établi que des particuliers ont remis des fonds au prévenu dans un but de placement financier réalisé par celui-ci, les fonds devant être restitués avec des intérêts à échéance convenue, sans que le prévenu n'ait obtenu l'agrément nécessaire en tant qu'établissement de crédit pour réaliser une telle opération ; Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que la réception habituelle de fonds auprès du public sous forme de dépôts, constitue, quelle que soit leur destination, une opération de banque au sens des articles L. 311-1 et L. 312-2 du code monétaire et financier, la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit reproché ; Que, dès lors, le moyen ne saurait être accueilli.

Doc. 5 : Position ACPR 2014-P-01 du 29 janvier 2014 relative aux opérations sur bitcoins en France Le développement du Bitcoin, et plus largement des monnaies virtuelles, le nombre d'alertes, en particulier criminelles, constatées notamment aux États-Unis, les risques de fraude et de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme particulièrement élevés s'agissant d'un instrument qui se prévaut de l'anonymat, ainsi que les éléments recueillis en France conduisent l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) à préciser la qualification des opérations réalisées à l'aide de Bitcoin au regard du droit monétaire et financier. Le fonctionnement du Bitcoin, ses risques pour les utilisateurs et les enjeux d'un encadrement réglementaire sont détaillés dans le Focus n° 10 du 5 décembre 2013 publié sur le site Internet de la Banque de France (www.banque-france.fr), ainsi que dans le communiqué d'alerte émis le 12 décembre 2013 par l'Autorité bancaire européenne (www.eba.europa.eu). En tant qu’autorité chargée de délivrer les agréments aux prestataires de services de paiement en France, l’ACPR a adopté la position suivante :

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Dans le cadre d’une opération d’achat/vente de Bitcoins contre une monnaie ayant cours légal, l'activité d’intermédiation consistant à recevoir des fonds de l'acheteur de Bitcoins pour les transférer au vendeur de Bitcoins relève de la fourniture de services de paiement. Exercer cette activité à titre habituel en France implique de disposer d'un agrément de prestataire de services de paiement (établissement de crédit, établissement de monnaie électronique ou établissement de paiement) délivré par l’ACPR. La délivrance de cet agrément impose le respect de conditions relatives notamment aux apporteurs de capitaux, à la gouvernance, à la structure financière et au niveau de fonds propres. Elle impose également que les entreprises agréées mettent en place (i) un dispositif de contrôle interne et (ii) des mesures de vigilance en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, adaptés à l’activité exercée et aux risques encourus.

LES CONTOURS DU MONOPOLE BANCAIRE

Doc. 6 : Cass. com., 3 décembre 2002, n° 00-16.957, Bull. Civ., IV, n° 182 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a prêté à M. Sébastien Y... diverses sommes, à neuf reprises, entre 1975 et 1984 ; que l'administrateur de la succession de M. X... a cédé à Mme A... la totalité de la créance de la succession X..., résultant de ces prêts, contre les ayants-cause de M. Y... ; que Mme A... a assigné les consorts Y... en paiement des créances cédées ; Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Vu l'article L. 511-5 du Code monétaire et financier ; Attendu que pour rejeter la demande de Mme A..., l'arrêt retient que caractérise l'exercice illégal de la profession de banquier le fait pour une personne non agréée de consentir à titre habituel sur la période comprise entre le 20 février 1975 et le 19 janvier 1984 neuf prêts successifs contenant la mise de fonds à titre onéreux à la disposition d'un même client, en des termes révélant chez le prêteur la connaissance des règles de droit applicables aux contrats ; Attendu qu'en se prononçant par de tels motifs, inopérants et insuffisants à caractériser le caractère habituel des opérations de banque effectuées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; (…) PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE.

Doc. 7 : Cass. Com., 7 janvier 2001, n°01-02.481, non publié au bulletin (extrait). Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte sous seing privé établi le 5 août 1992 à Anvers en Belgique et réitéré le même jour en la forme authentique à Paris, la banque de droit belge HSA, devenue la société Centéa, a consenti à la société française Fayet un prêt garanti par une inscription d'hypothèque sur un immeuble situé en France ; que la société Fayet n'ayant pas honoré ses engagements, la société Centéa lui a fait délivrer un commandement de saisie immobilière ; que, par dire, la société Fayet a invoqué la nullité du prêt au motif que

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l'établissement de crédit belge n'avait pas reçu l'agrément prévu par l'article 15 de la loi du 24 janvier 1984 pour effectuer des opérations de banque en France ; que la cour d'appel a rejeté cette prétention en retenant que le contrat s'était formé en Belgique, de sorte que le texte invoqué n'était pas applicable à l'opération litigieuse, qu'en outre l'obligation d'un agrément ne s'imposait pas à la banque belge, qui n'avait aucune structure implantée en France et n'y exerçait pas son activité de manière habituelle et qu'enfin, même en cas d'annulation du prêt, l'inscription d'hypothèque perdurerait jusqu'à la restitution des fonds empruntés ; (…) Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche : Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que pour exclure l'application des textes invoqués par la société Fayet, l'arrêt retient que l'acte sous seing privé stipule qu'il est signé en Belgique à Anvers, que l'offre de crédit a été envoyée en Belgique ainsi que son acceptation et que même si les gérants de la société Fayet indiquaient ne pas s'être rendus à Anvers en Belgique, c'est bien néanmoins dans cette ville que s'était réalisé l'accord de volontés du prêteur et de l'emprunteur ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société Centéa avait elle-même reconnu dans ses écritures avoir émis, depuis la Belgique, par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à la société Fayet dont il n'a jamais été discuté qu'elle était domiciliée en France, une offre de crédit que cette dernière lui avait retournée après l'avoir acceptée, ce dont il se déduisait que le contrat s'était formé en France et que la société HSA avait donc pratiqué en France des opérations de crédit, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation du texte précité ; Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche : Vu les articles 59, devenu l'article 49 du Traité instituant la Communauté européenne, 10 et 15 de la loi du 24 janvier 1984, devenus les articles L. 511-5 et L. 511-10 du Code monétaire et financier ; Attendu que pour rejeter les prétentions de la société Fayet, l'arrêt retient que l'agrément bancaire n'est exigé que pour les établissements de crédit étranger se livrant de manière habituelle à des opérations de crédit sur le territoire français ou y disposant de succursales, de filiales ou de structures pour exercer leur profession de banquier ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en application des articles 10 et 15 de la loi du 24 janvier 1984, devenus les articles L. 511-5 et L. 511-10 du Code monétaire et financier, la société Centéa, qui ne contestait pas être un établissement de crédit au sens commun des législations belge et française, devait, s'agissant d'un prêt consenti avant l'entrée en vigueur de la directive 89/646 du Conseil du 15 décembre 1989, obtenir l'agrément imposé par les textes susvisés pour exercer en France son activité, fût-ce à titre occasionnel et sous forme de libres prestations de service, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; Et sur le moyen unique, pris en sa cinquième branche : Vu les articles 59, devenu l'article 49 du Traité instituant la Communauté européenne, 10 et 15 de la loi du 24 janvier 1984, devenus les articles L. 511-5 et L. 511-10 du Code monétaire et financier ; Attendu que pour statuer comme il a fait, l'arrêt retient enfin que dans son arrêt du 9 juillet 1997, la Cour de justice des Communautés européennes a édicté que pour la période précédant

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l'entrée en vigueur de la Directive 89/646 CEE du Conseil du 15 décembre 1989, visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, l'article 59 du Traité CEE s'oppose à ce qu'un Etat membre impose à un établissement de crédit, déjà agréé dans un autre Etat membre, d'obtenir un agrément pour pouvoir accorder un prêt hypothécaire à une personne résidant sur son territoire, à moins que cet agrément s'impose à toute personne ou toute société exerçant une telle activité sur le territoire de l'Etat membre de destination, soit justifié par des raisons liées à l'intérêt général telles que la protection des consommateurs et soit objectivement nécessaire pour assurer le respect des règles applicables dans le secteur considéré et pour protéger les intérêts que ces règles ont pour but de sauvegarder, étant entendu que le même résultat ne pourrait pas être obtenu par des règles moins contraignantes et qu'il n'était pas démontré que de telles conditions soient réunies ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'agrément exigé par les articles 10 et 15 de la loi du 24 janvier 1984, devenus les articles L. 511-5 et L. 511-10 du Code monétaire et financier, était conforme aux trois conditions exigées, pour sa validité, par l'arrêt précité de la Cour de justice des Communautés européennes, notamment en ce qu'il devait être obtenu par toute personne ayant pour activité l'octroi de prêts hypothécaires en France et en ce que, pour l'accorder, le comité des établissements de crédit devait apprécier l'aptitude de l'entreprise requérante à réaliser ses objectifs de développement dans des conditions compatibles avec le bon fonctionnement du système bancaire et qui assurent à la clientèle une sécurité satisfaisante, conditions justifiant alors l'implantation de succursales, compte tenu des garanties que celles-ci offraient en l'absence de règles prudentielles suffisamment harmonisées au sein des Etats membres et de relations précisément organisées et effectivement mises en oeuvre entre les autorités de contrôle des pays concernés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 décembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen.

Doc. 8 : Cass. Crim., 8 juillet 2015, n° 13-88.557 Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 571-2 et L. 511-5, alinéa 1, du code monétaire et financier, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, insuffisance et contradiction de motifs, manque de base légale ; En ce que l'arrêt attaqué a confirmé la condamnation de M. X... du chef de complicité du délit d'exercice illégal de la profession de banquier commis par M. D...en l'aidant ou l'assistant sciemment dans sa préparation, facilitant ainsi la consommation de l'infraction ; Aux motifs que M. E... déposait plainte le 19 avril 2007 ; que, de double nationalité française et suisse, titulaire d'un très important patrimoine, ayant des comptes à la BNP agence des Chartrons à Bordeaux 33, M. E...rencontrait M. X..., directeur de l'agence depuis octobre 1999, qui lui proposait divers placements par l'intermédiaire de la BNP ; que M. E... cherchant des investissements plus rémunérateurs, aux fins de placements à l'étranger M. X... le mettait en relation avec un de ses clients et amis motocyclistes, M. D..., ayant diverses sociétés dont concernant le sport motocycliste, et une activité de placements financiers ; que M. D...présentait pratiquement à M. E..., en présence de M. X... sa méthode de travail de placement, fondée sur des

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calculs informatisés sur les transactions boursières et non sur les informations concernant les sociétés cotées, ses locaux à Bordeaux, et son équipe composée notamment du fils majeur de M. X..., travaillant sur le logiciel informatique de calcul permettant à M. D...la gestion des placements ; que le 11 février 2002, M. E... signait une convention de rémunération de compte courant avec Rocca Trading Industries Corporation, société sise à Luxembourg et susceptible d'avoir été constituée aux Iles Vierges britanniques, ayant pour co-titulaire M. D..., et le 5 mars 2002 transmettait aux fins de placements par cette société la somme de 150 000 euros de la Banque cantonale vaudoise par l'intermédiaire d'un compte au nom de M. X... à la National Westminster Bank à Londres ; qu'à la suite de cette opération, M. D...proposait à M. E... de lui donner la possibilité de travailler ses placements sur une ligne de crédit avec une garantie bancaire ; que le 7 janvier 2003, MM. D...et E...rencontraient le banquier de ce dernier à la Banque cantonale vaudoise en Suisse ; qu'ainsi, en janvier 2003, la Rocca Trading Industries Corporation de M. D..., par l'intermédiaire, fin janvier 2003, de la Banque générale du Luxembourg bénéficiait d'une ligne de crédit garantie par le compte de M. E... à la Banque cantonale vaudoise de 230 000 euros pour six mois ; que le 25 mars 2003, M. E...recevait 15 000 euros en rémunération de ses placements réalisés dans ce cadre ; qu'après la première prolongation de la garantie bancaire le 7 mars 2003, M. D...réalisait de nombreuses opérations sans lien avec des placements financiers amenant le compte de la Banque générale du Luxembourg à être à découvert de 223 000 euros, somme augmentée des intérêts débiteurs ; qu'alors que ce compte était débiteur, la garantie bancaire était finalement actionnée le 30 avril 2004, et le compte de M. E... à la Banque cantonale vaudoise était débité de 341 730, 30 francs suisses au profit de la Banque générale du Luxembourg ; qu'il apparaissait également sur le compte Banque générale de Rocca Trading Industries Corporation un virement le 22 décembre 2002 de 70 000 euros en provenance d'un compte ING de M. E... alors que M. D...était titulaire d'une procuration ; que M. D...quittait alors la France pour la Thaïlande pendant plusieurs années, sans contact avec M. E...; que le préjudice total de M. E... s'élevait à :-150 000 euros, le 5 mars 2002 de la Banque cantonale vaudoise au bénéfice de la National Westminster Bank sur un compte au nom de M. X...,-70 000 euros, le 20 décembre 2002 de la banque ING au bénéfice de la Banque générale du Luxembourg sur le compte de Rocca Trading Industries Corp,-230 000 euros, le 30 avril 2004 de la Banque cantonale vaudoise, au bénéfice de la Banque générale du Luxembourg, soit 450 000 euros moins les 15 000 euros d'intérêts perçus le 25 mars 2003 ; que le préjudice des onze autres victimes, impliquées par les agissements similaires de M. D...dans le reste de la procédure ne concernant pas M. X..., s'élevait à un total de 637 881 euros ; qu'en l'absence de comptabilité et documents versés par les prévenus, les sommes confiées par les victimes dont M. E... à M. D...aux fins d'investissements à l'étranger, étaient retrouvées versées au bénéfice de sociétés dirigées par des proches de M. D...; que notamment, la société Gua à Bordeaux ayant pour activité le commerce et la réparation de motos, la société Graal Finances à Paris, société AGF Finances à Paris, la société Perceval à Alès conseil en publicité, l'association sportive Club endurance à Cergy ; que M. X..., entre juillet 2001 et juin 2003, percevait de la part de M. D...et de ses sociétés, la somme de 62 674 euros sur un compte au Crédit mutuel ; que M. X..., appelant, relaxé du chef de complicité d'escroquerie à la suite du non-lieu en faveur de l'auteur principal, a été condamné du chef de complicité, d'abus de confiance au préjudice de M. E... et exercice illégal de la profession de banquier, commis par M. D..., tandis que M. D..., auteur principal, et sa compagne Mme G..., condamnés, ne sont pas appelants ; que le prévenu appelant fait notamment valoir que les faits concernant l'exercice illégal de la profession de banquier se sont déroulés notamment aux Iles Vierges et au Luxembourg et non en France, qu'en janvier 2002 M. X... ignorait l'interdiction de gérer de M. D...et son système frauduleux de prélèvement et de détournement de fonds, et qu'il ne découlait pas de sa profession de banquier l'obligation d'avoir un regard averti à l'égard de l'activité de M. D...ni à l'égard de la situation particulière de M. E... ; que répondant expressément aux observations du prévenu, du condamné et de la partie civile, pendant l'enquête et l'information, comme, assistés, devant le tribunal, ainsi qu'aux conclusions, par les énonciations, auxquelles il y a lieu de se référer expressément et par des

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motifs qui doivent être adoptés, le tribunal a exactement analysé les faits poursuivis et les éléments constitutifs des infractions, objet de la prévention telle que retenue par le tribunal, en procédant à une appréciation des éléments de preuve de la culpabilité du prévenu qui doit être approuvée, de même en ce qui concerne la peine, le préjudice et sa réparation, éléments dont les débats d'appel n'ont aucunement modifié le caractère déterminant ; que les motifs adoptés doivent être ainsi complétés à la suite des débats devant la cour d'appel ; que sur l'action publique, sur la culpabilité, M. D...a notamment reconnu le détournement de 1 149 718 euros, et ne pas avoir investi ces fonds versés par les victimes dont M. E... dans des placements à l'étranger mais les avoir dépensés dans d'autres activités le cas échéant sans rapport avec un investissement financier, dont dans des activités liées à la moto, ou pour son usage personnel ou celui de sa compagne, affirmant avoir perdu des sommes investies au Ghana ; qu'il a déclaré confirmer globalement les faits tels que décrits par la victime ; qu'il a nié l'escroquerie au préjudice de M. E..., et l'exercice illégal de la profession de banquier en l'absence d'appel public à l'épargne et en raison de son accréditation par les marchés financiers, et de son exercice à l'étranger ; que la prévention à l'encontre de M. X..., telle que retenue par le tribunal, n'est pas remise en cause ; que la relaxe du chef de complicité d'escroquerie, en l'absence de poursuite de l'auteur principal, est confirmée, il en est de-même de la condamnation pour complicité, de l'auteur M. D..., d'abus de confiance au préjudice de M. E... et d'exercice illégal de la profession de banquier concernant les faits du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2003 ; que M. X..., chef d'agence BNP depuis seize ans, travaillait dans cette banque depuis 1975 ; que MM. D...et E... étaient deux clients de son agence bancaire, et M. X... a agi à l'occasion de sa fonction professionnelle sans contrôle à l'égard de M. D...dont il ignorait tout en termes de placements financiers et de garanties professionnelles, mêlant relations et intérêts privés, activités professionnelles et placements financiers ; qu'à titre professionnel, M. X... n'ignorait pas qu'en France les placements financiers sont régis et contrôlés par des textes et des institutions précis, et que M. D...n'était pas habilité à procéder aux opérations qu'il réalisait, ce que le prévenu n'a jamais vérifié ou tenté de faire ; que si devant la cour d'appel, M. X... laisse entendre qu'il a pu être abusé par M. D..., il n'en demeure pas moins non seulement qu'il ne le désigne pas nominativement en qualité d'auteur d'infractions, mais également qu'il n'a pas déposé plainte contre quiconque, notamment des chefs de faux et usage, escroquerie ou abus de confiance, alors qu'il décrit avoir été victime de faits susceptibles de réaliser ces infractions ; que, par ailleurs, au début de l'enquête M. X... a cru bon adopter l'attitude consistant à nier de totale mauvaise foi tous les faits, notamment sur ses comptes à l'étranger, ses liens avec M. D...et les sommes reçues de lui, son intervention auprès de la victime, puis à ne répondre aux questions qu'en fonction des éléments qui lui étaient présentés, ce qui l'amenait finalement à admettre notamment que les déclarations de la victime étaient en grande partie exactes ; que selon M. E..., M. X... lui a, notamment, présenté M. D...comme étant un sous-traitant de la BNP, dit qu'il détenait des chèques de M. D...garantissant les fonds placés, souligné les avantages du placement aux risques nuls, assuré que tout l'argent passait par lui et qu'il négociait tout avec M. D...et avalisait ses propositions ; que la victime soulignait qu'à aucun moment M. D...n'était intervenu dans la préparation du premier placement, que si il avait fait ce placement c'est avec la caution de M. X..., qu'il le voyait chaque semaine, assistait à presque tous ses entretiens avec M. D..., ce que confirmait ce dernier précisant que M. X... était très protecteur de la victime ; que M. X... avait un fils travaillant, illégalement, en faveur de M. D...afin de développer le logiciel mathématique gérant les placements financiers, ayant été montré à la victime avant son transfert de fonds ; qu'il était porteur de parts dans la société civile immobilière Domaine Z..., gérée par Mme G... , compagne condamnée de M. D...; qu'il avait un compte à la Westminster Bank à Londres, et un à la Banque cantonale vaudoise et a accepté que les 150 000 euros versés par M. E... à destination de Rocca Trading Industries Corporation transitent par son propre compte à la National Westminster Bank ; qu'il a présenté M. E... à M. D..., aux fins de placements financiers, en sa qualité de directeur d'agence bancaire dans ses locaux professionnels ; que M. X... a organisé leur entretien technique ayant pour but le placement d'une somme importante à l'étranger,

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accompagné d'une visite des locaux de Rocca Trading Industries Corporation à Bordeaux, où travaillait son fils sur le logiciel de gestion des placements, ayant été utilisé par M. D...afin de convaincre M. E... de ses compétences ; qu'il a eu connaissance de la convention de rémunération de compte du 11 février 2002, selon la victime et M. D..., puisque selon M. E... elle a été signée devant lui ; que, selon M. D..., M. X... a fait souscrire le 7 mai 2002 une assurance vie près la compagnie Swiss Life à M. D...en sa faveur, afin de couvrir M. E... en cas de perte sur ses placements, ce que M. X... déclarait ignorer ; qu'entre juillet 2001 et juin 2003, M. X... percevait de la part de M. D...la somme de 62 674 euros, correspondant en partie au salaire de son fils et d'un ami de ce dernier pour leur travail non déclaré en faveur de M. D..., mais des opérations ne sont pas expliquées début 2003 correspondant sans doute à des revenus d'investissements ; que s'il est certain que l'argent versé par la victime venait de Banque cantonale vaudoise en Suisse à destination de Rocca Trading Industries Corporation, société sise à Luxembourg et susceptible d'avoir été constituée aux Iles Vierges britanniques, par l'intermédiaire d'un compte au nom de M. X... à la National Westminster Bank à Londres, il n'en demeure pas moins que tous les éléments préalables et accords amenant M. E... au transfert ont eu lieu à Bordeaux et que cet argent a été détourné notamment au profit de sociétés et activités en France, alors que les personnes de nationalité française concernées habitaient à Bordeaux ; qu'ainsi, les faits et les éléments constitutifs de la prévention telle que retenue par le tribunal sont établis, comme la culpabilité du prévenu, qui doit être relaxé du chef de complicité d'escroquerie, et condamné des chefs de complicité de l'abus de confiance au préjudice de M. E... et de l'exercice illégal de la profession de banquier commis par M. D...; Et aux motifs adoptés que sur les faits reprochés à M. D..., l'exercice illégal de la profession de banquier, il s'agit d'une activité financière, commencée avec la société Gua (dont l'objet social était la réparation de motos), puis continuée avec RTIC (Rocca Trading Industries Corp), consistant à faire souscrire aux victimes des comptes courants, avec promesse de rémunérations aux alentours de 10 % le prévenu réalisant des placements à la journée pour la partie non détournée ; qu'il a reconnu ne pas avoir de fonds au départ, ses premiers clients étant des proches, les intérêts étant perçus sur ses comptes personnels ; qu'il précisait également que les intérêts dégagés auraient servi à payer les clients en retour, et avoir commencé à prospecter pour avoir un agrément sur la commercialisation de produits boursier ; que néanmoins, à l'audience, il fait soutenir sa relaxe sur le fondement des dispositions de l'article L. 411-2 du code monétaire financier, soutenant qu'il s'agissait de fonds appartenant à un cercle d'investisseurs, sans appel public ; que cette argutie ne pourra qu'être écarté en rappelant tout d'abord qu'il ne s'est jamais agi d'émission ou de cession d'instruments financiers auprès d'investisseurs qualifiés ou d'un cercle restreint d'investisseurs, s'agissant au contraire de l'établissement de conventions individuelles de rémunération de comptes courants dans diverses sociétés, établie par le prévenu seul, en abusant d'ailleurs du nom d'un cabinet d'avocats luxembourgeois, sans respect du règlement général de l'AMF, auquel il serait resté soumis s'il était entré dans le cadre qu'il invoque désormais, et qui ne correspond pas à la réalité des faits ; qu'en sus, le prévenu a lui-même déclaré ignorer totalement la réglementation relative au conseil en investissement financier et au prestataire de service d'investissement ; qu'en faisant souscrire ces conventions, et en versant des rémunérations, il s'est rendu coupable des faits reprochés ; qu'il sera retenu dans les liens de cette prévention ; 2) que sur les faits reprochés à M. X... : c) qu'il est enfin reproché de s'être rendu complice du délit d'exercice illégal de la profession de banquier commis par M. D...en l'aidant et en l'assistant dans sa préparation ; que bien qu'il prétende être profane en matière de placements financiers, ce qui est peu crédible eu égard à ses fonctions de directeur d'agence BNP, et à ses certitudes affichées vis à vis de M. E..., il ne pouvait ignorer cette réglementation basique de sa profession ; qu'il a aidé à la commission de l'infraction par M. D..., par son action et les conseils prodigués ; qu'il sera également retenu dans les liens de cette prévention, et il sera statué à son encontre dans les termes du dispositif ;

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"1°) alors que le délit d'exercice illégal de la profession de banquier est une infraction d'habitude dont le point de départ du délai de prescription est fixé à la date du dernier acte constituant l'habitude ; que prévenu de s'être, entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2003, rendu complice du délit d'exercice illégal de la profession de banquier, au jour de la plainte le 19 avril 2007, l'action publique était prescrite ; qu'en condamnant le prévenu de ce chef, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; "2°) alors que subsidiairement, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance des motifs équivaut à leur absence ; que le monopole bancaire est territorial, au sens où les opérations de banque accomplies à l'étranger par une personne physique ou morale non agréée en France comme établissement de crédit ne contreviennent pas à la législation française et ne constituent pas le délit d'exercice illégal de la profession de banquier ; que le prévenu a fait valoir que l'argent avait été adressé depuis un compte en suisse sur un compte de transit dans une banque anglaise à destination de la société RTIC basée aux Iles vierges et détentrice d'un compte au Luxembourg ; qu'il ne ressort ni du jugement, ni de l'arrêt que les conventions individuelles de rémunération de comptes courants et le versement des rémunérations ait eu lieu en France ; qu'en retenant la complicité du délit d'exercice illégal de la profession de banquier, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ; (…) Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, et sur le second moyen : Attendu qu'en l'état de ces énonciations établissant, sans insuffisance ni contradiction, que, d'une part, les opérations de banque ont été, au moins en partie, réalisées en France, d'autre part, le prévenu a sciemment, en qualité d'intermédiaire, permis à M. D..., non habilité à procéder à de telles opérations, d'obtenir la remise, aux fins de placement financier, de fonds appartenant à M. E..., puis de les détourner, la cour d'appel a justifié sa décision ; D'où il suit que les moyens qui, pour le surplus, reviennent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ; REJETTE le pourvoi ;

Doc. 9 : CJCE, 9 juillet 1997, aff. C-225/95, Parodi (extrait) « L'opération consistant, pour une banque établie dans un État membre, à accorder un prêt hypothécaire à un emprunteur établi dans un autre État membre constitue une prestation de services liée à un mouvement de capital, dont la libération est à réaliser, conformément à l'article 61, paragraphe 2, du traité, en harmonie avec la libération progressive de la circulation des capitaux. A l'époque où la première directive du Conseil pour la mise en oeuvre de l'article 67 du traité, telle que modifiée par la deuxième directive 63/21, était en vigueur, l'octroi d'un tel prêt hypothécaire constituait un mouvement de capital en principe libéré par l'article 3, paragraphe 1, de la première directive. Il s'ensuit que, sans préjudice des restrictions de change qu'un État membre pouvait maintenir ou rétablir au titre de l'article 3, paragraphe 2, de la directive précitée, les règles relatives aux mouvements de capitaux n'étaient pas de nature à restreindre la liberté de conclure des prêts hypothécaires sous forme de prestations de services en vertu de l'article 59 du traité. Pour la période précédant l'entrée en vigueur de la deuxième directive 89/646, visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, l'article 59 du traité doit être interprété en

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ce sens qu'il s'oppose à ce qu'un État membre impose à un établissement de crédit, déjà agréé dans un autre État membre, d'obtenir un agrément pour pouvoir accorder un prêt hypothécaire à une personne résidant sur son territoire, à moins que cet agrément : - s'impose à toute personne ou à toute société exerçant une telle activité sur le territoire de l'État membre de destination ; - soit justifié par des raisons liées à l'intérêt général telles que la protection des consommateurs ; - et soit objectivement nécessaire pour assurer le respect des règles applicables dans le secteur considéré et pour protéger les intérêts que ces règles ont pour but de sauvegarder, étant entendu que le même résultat ne pourrait pas être obtenu par des règles moins contraignantes. Dans le cadre de son appréciation, le juge national doit notamment distinguer selon la nature de l'activité bancaire en cause et du risque encouru par le destinataire du service. En effet, la conclusion d'un contrat de prêt hypothécaire présente pour le consommateur des risques différents de ceux du dépôt de fonds auprès d'un établissement de crédit. En outre, la nécessité de protéger l'emprunteur varie en fonction de la nature des prêts hypothécaires et, dans certaines situations, en raison précisément des caractéristiques du prêt octroyé et de la qualité de l'emprunteur, il n'y a aucun besoin de protéger celui-ci par l'application des règles impératives de son droit national. Si l'exigence d'un agrément constitue une restriction à la libre prestation des services, l'exigence d'un établissement stable des prestataires de services est en fait la négation même de cette liberté. Elle a pour conséquence d'enlever tout effet utile à l'article 59 du traité, dont l'objet est précisément d'éliminer les restrictions à la libre prestation des services de la part de personnes non établies dans l'État sur le territoire duquel la prestation doit être fournie. Une telle exigence n'est admissible que si elle constitue une condition indispensable pour atteindre l'objectif recherché. »

LES SANCTIONS CIVILES DE LA VIOLATION DU MONOPOLE BANCAIRE

Doc. 10 : J. LASSERRE CAPDEVILLE, « Les sanctions civiles de la violation du monopole bancaire : état des lieux et propositions », Banque & Droit, n°174, juillet-août 2017, p. 15 L’article L. 511-5 du Code monétaire et financier envisage le monopole bancaire. L’article L. 571-3 du même code en réprime pénalement les violations de ce dernier. Mais des sanctions civiles sont-elles également envisageables ? La loi ne disant mot sur ce point, la jurisprudence a tenu à clarifier cette question. Or les arrêts rendus jusqu’ici n’échappent pas, selon nous, aux interrogations et aux critiques. Des propositions peuvent alors être formulées. 1. Le monopole bancaire1 a pour objet de réserver aux seuls établissements de crédit, agréés conformément à la loi2, l’accomplissement « à titre habituel »3 des opérations de banque.

1 Sur cette notion de monopole, v. Th. Bonneau, « Monopole bancaire et monopole des prestataires de services d’investissement » in Mélanges AEDBF-France, RB Édition, 1997, p. 37. 2 C. mon. fin., art. L. 511-10 et s. 3 Pour une jurisprudence bien établie, il y a « habitude », au sens de l’article L. 511-5, alinéa 1er, du Code monétaire et financier, si au moins deux personnes différentes ont pu bénéficier de crédits de la part d’un prêteur non agréé, Cass. crim. 2 mai 1994, n° 93-83.512 : Bull. crim. 1994, n° 158. – Cass. com. 3 déc. 2002, n° 00-16.957 : Bull. civ. 2002, IV, n° 182 ; D. 2003, p. 202, obs. A. Lienhard ; RTD com. 2003, p. 344, obs. D. legeais ; Banque et Droit 2003, n° 89, p. 55, obs. Th. Bonneau ; JCP E 2003, p. 953, note B. Dondéro. Une pluralité de « clients » doit donc pouvoir être relevée, Cass. crim. 17 oct. 2007, n° 07-81.038. – CA Versailles 15

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2. L’article L. 511-5 du Code monétaire et financier interdit ainsi « à toute personne autre qu’un établissement de crédit ou une société de financement d’effectuer des opérations de crédit à titre habituel », mais aussi « à toute personne autre qu’un établissement de crédit de recevoir à titre habituel des fonds remboursables du public ou de fournir des services bancaires de paiement ». Seul le bénéfice de l’agrément bancaire, désormais délivré par la Banque Centrale Européenne, permet alors à une personne morale de réaliser de telles opérations à titre habituel. 3. La notion de monopole bancaire pourrait laisser penser qu’un privilège, un avantage particulier, est reconnu à certaines personnes, en l’occurrence les personnes morales correctement agréées. Or, tel n’est pas exactement le cas. Il convient plutôt de voir, à travers ce monopole, une règle de protection, plus particulièrement de la clientèle des banques. Il se justifie d’abord par la nécessité de protéger les déposants, et notamment les garantir contre tout risque d’insolvabilité des établissements du secteur bancaire. Il permet encore de faciliter le contrôle de la distribution du crédit. 4. Ce monopole est cependant loin d’être absolu. Les articles L. 511-6 et L. 511-7 du Code monétaire et financier visent ainsi un certain nombre d’exceptions. D’une façon générale, le premier de ces textes prévoit des dérogations fondées sur la qualité de la personne qui en bénéficie, et le second énumère certaines opérations qui ne sont pas soumises, en elles-mêmes, au monopole. Ces dérogations, qui ont tendance à se développer4, répondent à des « nécessités pratiques, sociales et économiques »5. 5. En cas de violation de ce monopole, l’auteur encourt les sanctions du délit d’exercice illégal de la profession de banquier prévues par l’article L. 571-3 du Code monétaire et financier, soit 3 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende6. Les personnes morales peuvent, quant à elles, se voir infliger, en vertu de l’article 131-38 du Code pénal, une amende du quintuple du montant précité, c’est-à-dire 1 875 000 euros7. Le tribunal peut ordonner l’affichage ou la diffusion de la décision prononcée. Le délai de prescription de l’action publique ne commence à courir, concernant ce délit, qu’au moment où l’emprunteur a terminé de rembourser le prêteur8. 6. En outre, le non-respect du monopole bancaire peut donner lieu à intervention de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). En effet, selon l’article L. 613-24 du Code

sept. 2011, n° 10/08029 : LEDB, févr. 2012, p. 2, n° 003, obs. J. Lasserre Capdeville. Il en va différemment, en revanche, pour le complice du délit qui peut être sanctionné même s’il n’est intervenu que pour une seule opération de crédit à laquelle il a apporté son aide ou son assistance, Cass. crim. 19 mars 2008, n° 07-85.054 : Bull.crim. 2008, n° 70 ; D. 2008, p. 1665, note J. Lasserre Capdeville ; Dr. pénal 2008, comm. 79, obs. M. Véron et comm. 89, obs. J.-H. Robert. 4 Ces articles ont fait l’objet de plusieurs évolutions ces derniers mois. Citons, l’ordonnance n° 2017-484 du 6 avril 2017 ; l’ordonnance n° 2016-1408 du 20 octobre 2016 ; l’ordonnance n° 2016-520 du 28 avril 2016 ; l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ; la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 ; la loi n° 2015- 990 du 6 août 2015, ou encore l’ordonnance n° 214-559 du 30 mai 2014. – M. Roussille, « Que reste-t-il du monopole bancaire », in Mélanges AEDBF-France VI, RB Édition, 2013, p. 607. 5 S. Piedelièvre et E. Putman, Droit bancaire, éd. Economica, 2011, n° 106. 6 Pour quelques condamnations récentes, Cass. crim. 22 févr. 2017, n° 15-85.799 : Banque et Droit 2017, n° 172, p. 66, obs. J. Lasserre Capdeville. – Cass. crim. 14 déc. 2016, n° 16-80.059 : Banque et Droit 2017, n° 171, obs. J. Lasserre Capdeville ; LEDB févr. 2017, p. 7, obs. N. Mathey. – CA Rouen 20 avr. 2016, n° 14/00997 : Banque et Droit 2016, n° 168, p. 70, obs. J. Lasserre Capdeville. – Cass. crim. 8 juill. 2015, n° 13-88.557. – Cass. crim. 17 juin 2015, n° 14-80.977 : Banque et Droit 2015, n° 162, p. 92, obs. J. Lasserre Capdeville. – Cass. crim. 11 mars 2015, n° 13-88.250 : Banque et Droit 2015, n° 161, p. 80, obs. J. Lasserre Capdeville. – CA Douai 9 sept. 2014, n° 12/04054 : Banque et Droit 2015, n° 156, p. 62, obs. J. Lasserre Capdeville. – Pour une relaxe, Cass. crim. 4 mai 2017, n° 16-81.171 : Banque et Droit 2017, n° 173, p. 84, obs. J. Lasserre Capdeville. 7 Le même article L. 571-3 sanctionne des mêmes peines, le fait, pour une entreprise, autre qu’un établissement de crédit, d’utiliser une dénomination, une raison sociale, une publicité ou, d’une façon plus générale, des expressions faisant croire qu’elle est agréée en tant qu’établissement de crédit, ou de créer une confusion en la matière. – J. Lasserre Capdeville, Quelle utilité aux délits prévus par l’article L. 511-8 du Code monétaire et financier ? : Banque et Droit 2011, n° 139, p. 9. – V. par ex., Cass. crim. 11 janv. 1993, n° 92. 8 Cass. crim. 11 févr. 2009, n° 08-83.870 : Gaz. Pal., 17 octobre 2009, n° 290, p. 9, note J. Lasserre Capdeville. – Cass. crim. 22 sept. 2004, n° 03-87.452.

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monétaire et financier, « lorsqu’une entreprise […] enfreint l’une des interdictions définies à l’article L. 511-5 […], l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut, dans les conditions prévues à l’article L. 612-35, nommer un liquidateur auquel sont transférés tous les pouvoirs d’administration, de direction et de représentation de la personne morale ». La valeur juridique de cette disposition soulève néanmoins des interrogations. L’article paraît viser une mesure de police administrative. Mais n’allons-nous pas plus loin ? Est-ce qu’en nommant ce liquidateur l’Autorité ne prononce pas implicitement la liquidation ? Si tel était le cas, nous nous rapprocherions alors d’une sanction administrative9. 7. Enfin, quelles sont les sanctions civiles susceptibles d’être prononcées par le juge en cas de violation du monopole bancaire ? Les textes ne disent rien sur ce point. Il est alors revenu à la jurisprudence de clarifier l’état du droit en la matière, tant en ce qui concerne la nullité des opérations passées en violation de ce monopole (I.), qu’à propos de l’engagement de la responsabilité civile de l’auteur de l’infraction (II.). Les solutions retenues sont cependant loin d’être convaincantes. Des propositions peuvent alors être formulées. I. LA NULLITÉ DES OPÉRATIONS PASSÉES EN VIOLATION DU MONOPOLE BANCAIRE La solution progressivement dégagée par la jurisprudence de la Haute juridiction (1.) a une portée que l’on ne saurait exagérer (2.). Elle laisse alors la place à une proposition de réforme (3.). 1. La solution dégagée par la Cour de cassation 9. Une question s’est posée, à partir du début des années 1990, en présence de personnes ayant accompli des opérations de banque à titre habituel alors qu’elles n’étaient pas agréées comme établissements de crédit : les opérations en question peuvent-elles faire l’objet d’une annulation en justice ? 10. La loi ne disant absolument rien sur ce point, la Cour de cassation a été amenée à préciser l’état du droit. Or, pendant une quinzaine d’années, une divergence opposa la première chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation quant à la réponse à donner à cette question : si la dernière citée était favorable à l’annulation des opérations10, la première ne l’était absolument pas11. Force est d’ailleurs de constater que ces solutions présentent, toutes deux, des arguments solides. 11. En premier lieu, en faveur de l’absence de nullité, on peut estimer que la violation du monopole bancaire ne porte atteinte qu’à l’intérêt général et à celui de la profession de banquier que la loi a voulu protéger, et non aux clients cocontractants. La nullité peut alors paraître

9 Une autre lecture est cependant possible selon nous. Cette nomination ne serait-elle pas uniquement envisageable lorsque le juge pénal décide de prononcer, à titre de peine complémentaire, la dissolution de la personne morale ayant accompli de façon habituelle des opérations de banque alors qu’elle n’était pas agréée ? On peut légitimement s’interroger. 10 Cass. com. 19 nov. 1991, n° 90-10.270 : Bull. civ. 1991, IV, n° 347 ; Banque 1992, p. 426, obs. J.-L. Rives-Lange ; RTD com. 1992, p. 426, obs. M. Cabrillac et B. Teyssié ; D. 1993, somm. p. 53, obs. M. Vasseur ; RTD civ. 1992, p. 381, obs. J. Mestre. – Cass. com. 27 févr. 1996, n° 94-13.901 : D. aff. 1996, p. 552. – Cass. com. 20 oct. 1998, n° 93-17.988 : Bull. civ. 1998, IV, n° 246 ; D. 1999, p. 10, note B. Sousi ; RTD com. 1999, p. 166, obs. M. Cabrillac.– Cass. com. 27 févr. 2001, n° 98-20.819 : D. 2001, AJ p. 1097, obs. A. Lienhard ; D. 2002, somm. p. 636, obs. H. Synvet ; RD banc. fin. 2001, comm. 73, obs. F.-J. Crédot et Y. Gérard. – Cass. com. 13 mars 2001, n° 96-20.840 : RJDA 2001, n° 801. – Cass. com. 4 juin 2002, n° 00-16.915 : RD banc. fin. 2002, p. 181, obs. F.-J. Crédot et Y. Gérard ; JCP E 2003, 396, n° 1, obs. J. Stoufflet. – Cass. com. 2 juill. 2002, n° 00-21.404 : JCP E 2003, 396, n° 1, obs. J. Stoufflet. 11 Cass. civ. 1re, 13 oct. 1982, n° 81-13.090. – Cass. civ. 1re, 24 févr. 1993, n° 91-16.225 : JCP E 1993, 302, n° 2, obs. Ch. Gavalda et J. Stoufflet ; RD banc. bourse 1993, p. 126, obs. F.-J. Crédot et Y. Gérard. – Cass. civ. 1re, 30 mars 1994, n° 92-16.797 : Bull. civ. 1994, I, n° 125 ; RTD civ. 1995, p. 100, obs. J. Mestre.

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inadéquate. De même, l’absence de nullité est de nature à conforter les opérations accomplies hors de l’Union européenne, sans autorisation spéciale de l’État d’accueil, par les banques françaises. En outre, si les conventions ont été passées dans le strict respect du droit des obligations12, voire des dispositions régissant l’usure13, il ne devrait pas y avoir lieu de les remettre en cause. Enfin, la nullité n’aurait-elle pas, si elle était admise, des incidences dramatiques pour l’emprunteur qui devrait restituer au prêteur les sommes perçues de ce dernier ? Il se verrait peut-être dans l’obligation de revendre le bien acquis avec les fonds pour pouvoir restituer une partie de ces derniers. Le remède serait ici pire que le mal. 12. En second lieu, et à l’inverse, l’absence de nullité peut paraître préjudiciable, car de nature à affaiblir le monopole bancaire et à méconnaître l’intérêt des clients14. On peut d’ailleurs s’étonner de refuser d’annuler les actes et opérations conclus sans agrément, précisément si ce monopole existe et s’impose. Cela revient à le réduire à néant15. De plus, en quoi le monopole bancaire ne protégerait que les professionnels et l’intérêt général ? Nous avons peine à trouver une réponse à cette question. En outre, la nullité serait de nature à renforcer et compléter utilement les sanctions pénales encourues16. Elle contribuerait ainsi à la protection des consommateurs et même des professionnels contre les risques créés par des officines incontrôlées. Enfin, l’absence de nullité a pour inconvénient de permettre à l’auteur de l’infraction de s’enrichir de son forfait17. 13. Un arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation du 4 mars 2005 a souhaité alors mettre un terme à cette controverse jurisprudentielle18. En l’occurrence, un établissement de crédit belge avait consenti en 1986, à plusieurs clients français, des prêts par actes sous seing privé souscrits en Belgique. Ces prêts avaient été garantis par des inscriptions d’hypothèque sur des biens immobiliers. Les fonds avaient été remis par un chèque tiré par l’établissement en question sur une banque française. Plusieurs bénéficiaires des prêts en questions avaient cependant engagé contre la banque belge une instance tendant, notamment, à faire déclarer nuls les prêts et les inscriptions hypothécaires. 14. Une société actionnaire de l’un des bénéficiaires faisait alors grief à la cour d’appel de Versailles de l’avoir déclaré irrecevable à agir en nullité des prêts alors que les interdictions posées par l’article L. 511-5 du Code monétaire et financier sont d’ordre public et peuvent être invoquées par toute personne y ayant intérêt. La même société invoquait la nullité des prêts litigieux en ce qu’ils avaient été accordés par une banque n’ayant pas reçu l’agrément du Comité des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (CECEI), comme l’exigeait alors le droit français. Or, ce moyen est jugé non fondé par la Cour de cassation au motif que « la seule méconnaissance par un établissement de crédit de l’exigence d’agrément, au respect de laquelle

12 Songeons notamment à l’article 1128 du Code civil qui vise, aujourd’hui, le consentement des parties ; leur capacité de contracter ; un contenu licite et certain. Antérieurement à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, l’article 1108 visait, quant à lui : le consentement de la partie qui s’oblige ; sa capacité de contracter ; un objet certa in qui forme la matière de l’engagement ; une cause licite dans l’obligation. 13 C. consom., art. L. 314-6 et s. 14 Th. Bonneau, Droit bancaire : éd. Lextenso, 2015, 11e éd., n° 281. 15 M.-A. Frison-Roche, Nullité ou maintien du contrat et régulation du risque bancaire : RDC 2005, n° 4, p. 1046. 16 Ch. Gavalda et J. Stoufflet, Droit bancaire : éd. Litec, 2015, 9e éd., n° 62. 17 R. Routier, Obligations et responsabilités du banquier, Dalloz, coll. « Dalloz Action », 2011, 3e éd., n° 212.61. 18 Ass. plén., 4 mars 2005, n° 03-11.725 : Bull. civ. ass. plén. 2005, n° 2 ; JCP G 2005, II, 10062, concl. A.G. de Gouttes ; D. 2005, AJ p. 836, obs. X. Delpech ; D. 2005, jurispr. p. 785, obs. B. Sousi ; RTD com. 2005, p. 400, obs. D. Legeais ; JCP E 2005, p. 766, note Th. Bonneau ; D. 2006, Pan. p. 155 et 158, obs. H. Synvet ; RD banc. fin. 2005, comm. 118, obs. F.-J. Crédot et Y. Gérard ; Banque et Droit 2005, n° 101, p. 69, obs. Th. Bonneau ; LPA, 8 juin 2005, n° 113, p. 15, note M.-M. Ververka. – J. Stoufflet, Le défaut d’agrément bancaire n’entraîne pas la nullité des contrats conclus : RD banc. fin. 2005, p. 48.

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[…] les articles L. 511-10, L. 511-15 et L. 612-2 du Code monétaire et financier, subordonne l’exercice de son activité, n’est pas de nature à entraîner la nullité des contrats qu’il a conclus ». 15. Par la suite, cette solution a été réitérée à de nombreuses reprises tant par la chambre commerciale que la première chambre civile, en présence d’opérations réalisées par des établissements de crédit belges19 ou suisses20 dépourvus de l’agrément français exigé dans un tel cas21. Elle a été également confirmée à l’égard d’établissements de crédit français ayant passé des opérations de banque qui ne leur étaient pas permises22. Cette solution, qui paraît se démarquer de celles retenues en matière financière et d’assurance23, n’a cependant pas une portée illimitée. 2. La portée de la solution dégagée 16. Telle qu’elle est énoncée par l’assemblée plénière de la Cour de cassation, puis par sa première chambre et sa chambre commerciale, on pourrait penser que la solution dégagée, c’est-à-dire l’absence de nullité, demeure applicable à toutes les opérations de banque commises par n’importe quelle personne non agréée24. Tel n’est pourtant pas le cas. 17. En effet, et c’est à souligner, toutes les décisions visées précédemment concernaient des personnes morales qui étaient, au moins dans leur pays d’origine (Belgique ou Suisse en l’occurrence), des établissements de crédit. En conséquence, leurs clients demeuraient protégés par les dispositions légales et réglementaires s’imposant à ces établissements du fait de leur qualité. D’ailleurs, l’arrêt du 4 mars 2005 et les décisions l’ayant suivi mentionnent chaque fois «

19 Cass. com. 7 juin 2005, n° 04-13.303 : Bull. civ. 2005, IV, n° 125 ; RD banc. fin. 2005, comm. 118, obs. F.-J. Crédot et Y. Gérard ; RTD com. 2005, p. 574, obs. D. Legeais ; Banque et Droit 2005, n° 103, p. 68, obs. Th. Bonneau. – Cass. com. 31 oct. 2006, n° 05-12.195. – Cass. com. 28 nov. 2006, n° 04-19.244 : Bull. civ. 2006, IV, n° 230 ; D. 2007, AJ p. 13, obs. V. Avena-Robardet ; Banque et Droit 2007, n° 112, p. 30, obs. Th. Bonneau. – Cass. com. 24 avr. 2007, n° 05-21.998 : Bull. civ. 2007, IV, n° 110 ; Banque et Droit 2007, n° 114, p. 16, obs. Th. Bonneau. – Cass. com. 3 juill. 2007, n° 06-17.963. – Cass. com. 8 janv. 2008, n° 06-19.944. – Cass. civ. 1re, 31 janv. 2008, n° 04-20.151 : Bull. civ. 2008, I, n° 31 ; LPA, 10 avr. 2008, n° 73, p. 18, note J. Lasserre Capdeville ; Banque et Droit 2008, n° 119, p. 17, obs. Th. Bonneau. – Cass. civ. 1re, 13 nov. 2008, n° 05-19.459. – Cass. civ. 1re, 16 janv. 2013, n° 05-12.081 : CCC 2013, comm. 94, obs. G. Raymond ; LEDB mars 2013, p. 5, obs. R. Routier ; D. 2013, p. 890, note J. Lasserre Capdeville. – Cass. com. 19 févr. 2013, n° 11-27.124, 12-10.184, 12-14.365, 12-14.515 et 12-15.428. 20 Cass. com. 3 juill. 2007, n° 06-17.963 : D. 2007, AJ p. 2029, obs. V. Avena-Robardet ; RTD com. 2007, p. 814, obs. D. Legeais ; Dr. et patr. 2007, n° 162, p. 82, obs. Ph. Stoffel-Munck ; JCP E 2007, 2332, n° 3, obs. R. Routier ; Banque et Droit 2008, n° 119, p. 17, obs. Th. Bonneau ; D. 2008, Pan. p. 873, obs. H. Synvet. – Dans un sens proche, Cass. com. 22 mai 2013, n° 11-26.503 : JCP G 2013, 937, note J. Lasserre Capdeville. ; LEDB juill. 2013, p. 6, obs. R. Routier. 21 Concernant les succursales d’établissements belges les faits étaient antérieurs à la reconnaissance de l’agrément unique. 22 . Cass. com. 24 avr. 2007, n° 05-21.998 : JCP G 2007, IV, 2106 ; D. 2007, AJ p. 1417, obs. V. Avena-Robardet. Il s’agissait, en l’occurrence, d’une société de développement régional qui avait accordé un prêt à une SCI alors qu’elle ne pouvait le faire qu’à des entreprises. – De même, la solution a été retenue à propos de caisses régionales de Crédit Agricole qui avaient consenti des crédits alors que les caisses locales auraient pu le faire, et donc en contradiction avec l’article L. 512-33 du Code monétaire et financier, Cass. com. 26 janv. 2010, n° 08-70.332 : JCP E 2011, 1712, n° 6, obs. D. Hiez. – Cass. com. 7 févr. 2012, n° 11-10.833 : JCP G 2012, n° 16, 489, p. 793, note J. Lasserre Capdeville ; LEDB avr. 2012, p. 4, n° 040, obs. R. Routier. 23 A. Ricard, A défaut d’agrément, les opérations bancaires, financières et d’assurance doivent-elles subir le même sort ? : RD banc. fin. 2009, n° 6, étude 37, p. 40. – V. notamment, Cass. com. 4 nov. 2008, n° 07-19.805 : Bull. civ. 2008, IV, n° 187 ; D. 2008, AJ p. 2934, obs. X. Delpech ; RTD civ. 2009, p. 115, obs. B. Fages. Selon ce dernier, « en l’état de ces constatations et énonciations dont elle a pu déduire, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la première branche, que le contrat litigieux avait eu pour objet de permettre à Mme Y., présentée comme employée de la société GSD Gestion, d’exercer de manière autonome une activité propre de gestion de portefeuille pour laquelle elle ne disposait pas de l’agrément requis, la cour d’appel a retenu à bon droit que la nullité de ce contrat devait être prononcée en raison du caractère illicite de son objet ». 24 G. Decocq, Y. Gérard et J. Morel-Maroger, Droit bancaire, RB Édition, 2014, 2e éd., n° 96.

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la seule méconnaissance par un établissement de crédit de l’exigence d’agrément », et non par toute personne morale. On ne saurait, par conséquent, donner une portée trop générale à la solution évoquée ici. 18. Nous attendons dès lors qu’une décision soit rendue concernant des personnes méconnaissant le monopole bancaire qui n’aient pas également la qualité d’établissement de crédit. Songeons, par exemple, à un individu qui aurait pris l’habitude à prêter de l’argent à des personnes à un taux élevé (sans pour autant être usuraire) afin qu’ils puissent s’adonner à leur passion du jeu. Il est peu probable que les magistrats se prononcent en faveur de la validité des prêts en question, même si l’absence de fondement juridique rend la solution susceptible d’être retenue bien incertaine. 19. On regrettera que la Haute juridiction n’ait pas été interrogée sur ce point dans l’affaire ayant donné lieu à une décision de la chambre criminelle le 14 décembre 201625. En l’espèce, les services de police avaient découvert, à Paris, l’existence de deux cercles de jeux clandestins destinés à la communauté chinoise. Plusieurs personnes soupçonnées d’être impliquées dans l’organisation de ces jeux d’argent avaient été appréhendées, parmi lesquelles Mme Y., ressortissante chinoise vivant en France, gérante d’un restaurant dont elle possédait une partie du capital social. Plus concrètement, les investigations avaient révélé, d’une part, que des prêts étaient consentis moyennant un intérêt à des joueurs impécunieux, d’autre part, que les clients du restaurant de Mme Y. pouvaient s’y approvisionner en produits stupéfiants, enfin, que cet établissement recevait des prostituées. La cour d’appel de Paris l’avait alors reconnu coupable de proxénétisme aggravé, association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive, tenue illicite de maison de jeux et donc exercice illégal de la profession de banquier. Elle avait été condamnée à 4 ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende. La Cour de cassation rejette le pourvoi formé contre cette décision. En revanche, la Haute juridiction n’ayant pas été questionnée sur les sanctions civiles de cette violation du monopole bancaire, elle n’a pas pu prendre parti sur cette difficulté en présence de telles circonstances. Voilà une occasion manquée. Devant tant d’incertitudes : que faire ? 3. Proposition de réforme 20. Il y a, selon nous, la place à une évolution du droit en la matière afin de réellement décourager les personnes qui seraient tentées de réaliser des opérations de banque de façon habituelle sans être agréées. Cela permettrait de lutter efficacement contre les violations du monopole bancaire. Il serait dès lors utile que le législateur intervienne afin de prévoir des sanctions de nature civile à leur encontre. Notons bien cependant que devraient nécessairement y échapper les personnes morales agréées dans un pays de l’Espace économique européen, voire également en Suisse. En effet, dans la mesure où ceux-ci sont bien des établissements de crédit, leur comportement ne constitue pas une véritable atteinte au monopole bancaire mais un manquement aux limites de leur agrément. Cela est nettement moins grave, et ces établissements encourent, de toutes les façons, des sanctions de la part de leur autorité de supervision nationale. 21. Notons que le Gouvernement français a souhaité, un temps, clarifier l’état du droit en la matière. En 2007, un projet de loi en faveur des consommateurs prévoyait en effet de compléter par un nouvel alinéa l’article L. 511-5 du Code monétaire et financier qui aurait déclaré : « nulles les opérations réalisées sur le territoire français en violation des interdictions prévues aux deux alinéas précédents par des personnes autres que les établissements de crédit, les personnes mentionnées au premier alinéa de l’article L. 511-6 et les entreprises ou personnes morales ayant leur siège dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen et

25 Cass. crim. 14 déc. 2016, n° 16-80.059 : Banque et Droit 2017, n° 171, obs. J. Lasserre Capdeville ; LEDB févr. 2017, p. 7, obs. N. Mathey.

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ayant un statut comparable »26. La nullité n’aurait donc pas été générale du fait de l’exclusion d’un certain nombre de personnes, et en particulier des établissements de crédit ayant leur siège dans un État de l’Espace économique européen (EEE). Ainsi, seules les opérations consenties habituellement par des personnes physiques ou des personnes morales non agréées au sein de l’EEE auraient finalement fait l’objet d’une action en nullité. Cette évolution n’a cependant jamais vu le jour. En effet, le projet de loi fut retiré en raison de la présence, en son sein, d’une version étendue de « l’action de groupe ». Il a été remplacé, quelque temps plus tard, par le projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs qui n’a pas repris, et c’est regrettable, cette volonté de modifier l’article L. 511-5 du Code monétaire et financier. 22. Mais quelle sanction de nature civile pourrait être envisagée ici par le législateur pour les personnes physiques et morales qui ne sont pas, dans leur État d’origine, correctement agréées et qui réalisent des opérations de banque à titre habituel sur le sol français ? La nullité de la convention de prêt n’est pas, selon nous, adaptée. En effet, rappelons que cette dernière implique des restitutions qui peuvent se révéler très lourdes pour l’emprunteur27. Il pourrait alors être préféré une déchéance du droit aux intérêts du prêteur28 ou la substitution du taux légal29 au taux conventionnel après la nullité de la clause prévoyant ce dernier30. Ces solutions sont d’ailleurs parfaitement connues du droit du crédit. La déchéance se retrouve ainsi en matière de crédit à la consommation et de crédit immobilier31. La substitution du taux légal (suite à la nullité de la clause visant le taux conventionnel), quant à elle, est fréquemment retenue lorsque, en violation de l’article L. 314-5 du Code de la consommation, le taux effectif global n’est pas mentionné dans le contrat de prêt ou que celui-ci est erroné et que nous ne sommes pas en présence d’un crédit aux consommateurs32. Dans tous les cas, le recours à l’une de ces sanctions serait de nature à décourager les violations du monopole bancaire. Cela serait d’autant plus utile que la jurisprudence se montre également hostile, dans le même temps, à la possibilité d’engager la responsabilité civile de la personne ayant méconnu ce dernier.

26 Projet de loi en faveur des consommateurs, art. 18. Pour une présentation, Banque et Droit 2007, n° 111, p. 23, obs. Th. Bonneau. 27 Cette nullité a parfois été prononcée avec pour particularité de ne donner droit au prêteur qu’à la restitution de son capital sans pouvoir prétendre aux intérêts, Cass. com. 19 févr. 2013, n° 11-27.124, 12-10.184, 12-14.365, 12-14.515 et 12-15.428. 28 L’emprunteur ne serait alors tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu. Les sommes déjà perçues au titre des intérêts seraient, quant à elles, restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû. 29 . Depuis le 1er janvier 2015, le taux légal se décompose en deux taux. Un premier taux est ainsi applicable aux créances des particuliers personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels. Il est de 0,90 % au 1er semestre 2017. Le second taux est quant à lui applicable à tous les autres cas (principalement aux entreprises). Il est de 4,16 % pour la même période. 30 De même, concernant « la nullité ou la caducité des intérêts », R. Routier, op. cit., n° 212.61. 31 C. mon. fin., art. L. 341-1 et s. – V. par ex., Cass. civ. 1re, 18 févr. 2009, n° 05-16.774. – Cass. civ. 1re, 30 sept. 2010, n° 09-67.930 : Bull. civ. I, n° 180 ; LEDB nov. 2010, p. 5, obs. Routier ; Gaz. Pal., 4 nov. 2010, p. 9, note Lasserre Capdeville. – Cass. civ. 1re, 16 janv. 2013, n° 05-12.081 : D. 2013, p. 890, note J. Lasserre Capdeville. – Cass. civ. 1re, 24 avr. 2013, n° 12-14.377 : Bull. civ. 2013, I, n° 88 ; JCP G 2013, n° 26, 739, p. 1273, note J. Lasserre Capdeville ; LEDB juin 2013, p. 5, obs. R. Routier. – Cass. civ. 1re, 29 mai 2013, n° 11-24.278 : dalloz.fr, actualité, 20 juin 2013, obs. V. Avena-Robardet. – Cass. civ. 1re, 9 avr. 2015, n° 13-28.058. – Cass. civ. 1re, 25 févr. 2016, n° 14-29.838. 32 V. par ex., Cass. com. 17 janv. 2006, n° 04-11.100 : Bull. civ. 2006, IV, n° 11 ; Banque et Droit 2006, n° 107, obs. Th. Bonneau. – Cass. civ. 1re, 7 mars 2006, n° 04-10.876 : Bull. civ. 2006, I, n° 135 ; D. 2006, AJ p. 913, obs. V. Avena-Robardet ; RD banc. fin. 2006, comm. 93, obs. F.-J. Crédot et Th. Samin. – Cass. civ. 1re, 13 mars 2007, n° 05-20.111 : Bull. civ. 2007, I, n° 116 ; RTD com. 2007, p. 427, obs. D. Legeais. – Cass. civ. 1re, 19 sept. 2007, n° 06-16.964 : Bull. civ. 2007, I, n° 291 ; D. 2007, AJ p. 2466, obs. V. Avena-Robardet. – Cass. com. 30 oct. 2012, n° 11-23.034 : LEDB janv. 2013, p. 2, obs. R. Routier. – Cass. civ. 1re, 24 avr. 2013, n° 12-14.777 : JCP G 2013, 739, note J. Lasserre Capdeville. – Cass. civ. 1re, 27 nov. 2013, n° 12-22.115 : LEDB févr. 2014, p. 5, n° 009, obs. J. Lasserre Capdeville. Concernant le crédit immobilier, cette sanction se retrouve lorsque l’erreur figure dans l’acte authentique, Cass. civ. 1re, 18 févr. 2009, n° 05-16.774.

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II. L’ENGAGEMENT DE LA RESPONSABILITÉ CIVILE DE L’AUTEUR DE LA VIOLATION DU MONOPOLE BANCAIRE 23. La solution progressivement dégagée par la jurisprudence en la matière depuis plusieurs années (1.) n’échappe pas, selon nous, à la critique (2.). Sur ce point également, une évolution des règles applicables serait salutaire (3.). 1. La solution progressivement admise 24. Au-delà des incertitudes entourant la nullité des opérations passées en violation du monopole bancaire, une autre question a été posée aux juges en la matière : le client s’estimant victime d’une violation des règles protégeant ce monopole est-il en droit d’être indemnisé pour le préjudice subi en raison de la situation dénoncée ? 25. Se pose ici la question de la constitution de partie civile en présence du délit d’exercice illégal de la profession de banquier. Rappelons qu’en vertu de l’article 2 du Code de procédure pénale : « L’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction ». Un préjudice personnel et direct sera donc requis. Mais encore faut-il que les juges admettent l’exercice de l’action civile en présence du délit étudié. Or, la jurisprudence a dégagé des solutions différentes selon les époques. Trois périodes peuvent ainsi être distinguées. 26. Dans un premier temps, pour un arrêt de la chambre criminelle du 9 mai 197233, les délits d’exercice illégal de la profession de banquier et d’atteinte au monopole des banques sont caractérisés par le seul fait que des opérations visées par les articles 1er et 3 de la loi du 13 juin 194134 ont été pratiquées habituellement, pour son compte, par une personne ou un établissement qui n’est pas inscrit sur les listes des banques. Or, pour les magistrats, un tel fait « ne porte atteinte qu’à l’intérêt général et celui de la profession de banquier que la loi a voulu protéger ». Il n’est pas susceptible, en lui-même, « de constituer la cause génératrice du préjudice qui, éventuellement, peut résulter pour les déposants des infractions commises dans la gestion des fonds qu’ils ont confiés, au mépris des exigences de la loi, à une personne ou à un établissement non habilité à effectuer habituellement des opérations de banque ». Les créanciers concernés n’étaient donc pas recevables à se constituer parties civiles contre le notaire à qui ils avaient confié des fonds. Partant, ils ne pouvaient pas se voir allouer des dommages et intérêts pour réparer les préjudices invoqués. 27. Dans un second temps, la jurisprudence a semblé se montrer plus encline à admettre de telles actions. Tout d’abord, pour un arrêt de la chambre criminelle du 16 juin 199935, « si le délit d’exercice illégal de la profession de banquier porte atteinte à l’intérêt général, il peut également causer à des particuliers un préjudice personnel de nature à servir de fondement à une action civile devant la juridiction répressive »36. Certaines juridictions du fond ont ainsi parfaitement admis de telles actions37. La Cour de cassation a encore eu l’occasion de préciser, par une décision 3 juin 200438,

33 Cass. crim. 9 mai 1972, n° 71-90.997 : Bull. crim. 1972, n° 158 ; RTD civ. 1974, p. 426, obs. G. Durry. – V. également, Cass. crim. 7 nov. 1989, n° 88-84.058. 34 Loi n° 2-532 du 13 juin 1941, relative à la réglementation et à l’organisation de la profession bancaire : JO, 6 juill. 1941, p. 2830. 35 Cass. crim. 16 juin 1999, n° 98-83.734. 36 V. déjà, également, Cass. crim. 3 nov. 1994, n° 93-82.724 : Bull. crim. 1994, n° 345 ; JCP E 1996, I, 525, n° 1, obs. Ch. Gavalda et J. Stoufflet ; RTD com. 1995, p. 452, obs. M. Cabrillac. 37 V. par ex., CA Paris 25 janv. 2000 : Juris-Data n° 2000-111395. En l’espèce, le montant des dommages-intérêts s’élevait à 1 800 000 francs. 38 Cass. crim., 3 juin 2004, n° 03-83.514 : Bull. crim. 2004, n° 147 ; D. 2004, p. 2782, note B. Dondéro ; Banque et Droit 2004, n° 97, p. 81, obs. Th. Bonneau. En l’occurrence, les prêteurs n’avaient pas pu se méprendre sur la qualité des prévenus, brasseurs et non banquiers.

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que, pour cette action soit fondée, les plaignants ne devaient pas avoir eu recours en connaissance de cause à la personne exerçant illégalement la profession de banquier, s’affranchissant ainsi délibérément des garanties que pouvait leur offrir un véritable établissement de crédit. La Haute juridiction rappelle néanmoins dans cet arrêt que « le délit d’exercice illégal de la profession de banquier peut causer à des particuliers un préjudice personnel de nature à fonder l’exercice de l’action civile devant la juridiction répressive ». 28. Cependant, dans un dernier temps, la jurisprudence est revenue à une solution stricte. Cela est manifeste à la lecture d’une décision de la chambre criminelle du 11 février 200939. En l’espèce, M. X., qui exerçait la profession d’expert-comptable sous le couvert de la société Y., avait directement et par l’intermédiaire d’une société dont il détenait la totalité des parts, consenti, à des clients ayant des besoins de trésorerie ou désireux de procéder à des acquisitions, des prêts d’argent, moyennant le versement d’intérêts à des taux proches de l’usure. La cour d’appel de Bordeaux l’avait alors reconnu coupable d’exercice illégal de la profession de banquier et condamné à huit mois d’emprisonnement avec sursis, 20 000 euros d’amende, cinq d’interdiction professionnelle40. Les juges du fond s’étaient également prononcés sur les intérêts civils. 29. Ce dernier point est important. Après avoir déclaré M. X. coupable du délit précité, la cour d’appel l’avait en effet condamné à payer au Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables, qui avait été déclaré recevable en sa constitution de partie civile, les sommes d’un euro à titre de dommages et intérêts et mille euros pour frais de justice. Or, pour la Cour de cassation, en statuant de la sorte, les juges bordelais avaient méconnu le sens et la portée du principe voulant que « l’infraction à l’interdiction d’effectuer à titre habituel des opérations de banque ne porte atteinte qu’à l’intérêt général et à celui de la profession de banquier ». L’action civile de l’association était donc purement et simplement remise en cause par la Haute juridiction. 30. Dès lors, si l’on suit cet attendu, seule l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) devrait pouvoir encore se constituer partie civile en matière d’exercice illégal de la profession de banquier, dans la mesure selon l’article L. 612-16, II, du Code monétaire et financier, cette autorité « peut se constituer partie civile à tous les stades de la procédure pénale pour l’application des chapitres Ier à III du titre VII du livre V du présent code et des dispositions pénales du Code des assurances, du Code de la mutualité et du Code de la Sécurité Sociale ». Le délit qui nous occupe est donc concerné par cette disposition41. Ce dernier état de la jurisprudence, qui vient contredire le fléchissement observé lors de la phase précédente42, n’échappe pas à la critique. 2. Une solution critiquable 31. Tout d’abord, la solution retenue dans la décision du 11 février 2009 peut paraître excessivement générale. Ne pouvait-on pas simplement déclarer que la profession d’expert-comptable n’avait, en l’espèce, subi aucun préjudice direct ? De la sorte, la constitution de partie civile du Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables aurait pu être écartée sans fermer, pour autant, la porte à toute action de la part d’une éventuelle victime directe.

39 Cass. crim. 11 févr. 2009, n° 08-83.870 : Gaz. Pal., 17 octobre 2009, n° 290, p. 9, note J. Lasserre Capdeville ; Resp. civ. et ass. juin 2009, comm. 171. 40 La condamnation à cette peine complémentaire est cassée par la Cour de cassation dans la mesure où elle n’est pas prévue par l’article L. 571-3 du Code monétaire et financier. Or, pour l’article 111-3 du Code pénal, nul ne peut être puni d’une peine qui n’est pas prévue par la loi. La cassation ne soulève aucune critique sur ce point 41 Par le passé, la Commission bancaire pouvait également se constituer partie civile en présence de tels délits (C. mon. fin., ancien art. L. 613-24). – V. par ex., pour l’exercice illégal de la profession de banquier, CA Paris 22 janv. 2007 : Juris-Data n° 2007-332248. – De même, concernant l’exercice illégal d’intermédiaire en opérations de banque, CA Paris 29 mars 2006 : Juris-Data n° 2006-304298. 42 V. supra, n° 27.

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32. De plus, la solution retenue manque de cohérence si on la compare à d’autres décisions rendues à la même époque. En effet, il convient de noter que, quelques mois plus tard, les magistrats de la même chambre criminelle se sont montrés favorables à l’exercice d’une action civile menée par une victime directe d’un exercice illégal d’intermédiaire en opérations de banque43, c’est-à-dire une incrimination très proche44. Les juges précisent bien dans cet arrêt que ce délit « est susceptible de causer aux victimes un préjudice direct résultant de la privation des garanties attachées à l’agrément des établissements de crédit ». 33. La règle qui nous occupe, et que nous regrettons, va encore à l’encontre de l’évolution du droit qui cherche à faire disparaître, depuis plusieurs années, la catégorie des infractions d’intérêt général. Rappelons en effet qu’à une époque où elle interprétait strictement la notion de victime pénale, la chambre criminelle avait élaboré la notion d’infractions d’intérêt général45, constituée par des infractions lésant (ou censées léser) seulement l’intérêt de la société et non de telle personne déterminée46. Elles ne faisaient naître, en conséquence, aucune action civile. Dénuées alors de victime pénale, ces infractions conféraient au ministère public (ou à une autre autorité publique) le monopole de l’engagement de l’action publique et de la qualité de demandeur dans la procédure pénale. Cette théorie était largement appliquée à l’origine, notamment à propos des infractions à la législation économique. Or, aujourd’hui, cette situation a bien évolué. La chambre criminelle juge régulièrement que des infractions, par le passé considérées comme d’intérêt général, lèsent à présent à la fois l’intérêt général et l’intérêt particulier et se retrouvent ainsi classées dans la catégorie des infractions « ordinaires ». Citons en ce sens, par exemple, la non-assistance à personne en danger47, le délit de fuite48, la non-dénonciation de crime49, la construction sans permis50, les infractions en matière de plan local d’urbanisme51 ou encore la corruption passive52. Surtout, cette évolution peut également être constatée avec le délit d’exercice illégal de la profession d’expert-comptable53 ou encore celui d’exercice illégal de la médecine54, c’est-à-dire deux incriminations très comparables à celle qui nous occupe ! Une modification des règles applicables s’impose alors. 3. Proposition de réforme 34. Les infractions d’intérêt général sont progressivement en train de disparaître. Leur maintien ne peut se comprendre que dans un nombre restreint d’incriminations aujourd’hui, pour lesquelles seule la « société » est la victime de leur commission55. Or, il n’en va pas ainsi avec

43 Cass. crim. 2 déc. 2009, n° 09-81.088 : Gaz. Pal., 6 mars 2010, n° 65, p. 25, obs. J. Lasserre Capdeville ; Banque et Droit 2010, n° 130, p. 31, obs. Th. Bonneau ; RD banc. fin. 2010, comm. 67, obs. F.-J. Crédot et Th. Samin. On parle aujourd’hui d’intermédiaires en opérations de banques et en services de paiement (IOBSP). 44 C. mon. fin., art. L. 571-15. 45 S. Détraz, La théorie des infractions d’intérêt général : Procédures 2009, étude 10. 46 Cass. crim., 25 juill. 1913 : Suter-Siniard : DP 1915, 1, p. 150, note Nast. Aux termes de ce dernier, « le délit d’outrage aux bonnes moeurs ne lèse que la généralité des citoyens, en s’attaquant exclusivement à la morale publique et que par suite, il n’entraîne pas, en principe, de préjudice direct porté à tel ou tel individu ; […] il n’appartient donc qu’au ministère public de poursuivre ce délit ». 47 Cass. crim. 19 juin 1996, n° 95-81.945 : Bull. crim. 1996, n° 260 ; Cass. crim. 12 déc. 2006, n° 06-82.208. 48 Cass. crim. 18 oct. 1990, n° 89-84.152 : Bull. crim. 1990, n° 345. 49 Cass. crim. 27 févr. 2001, n° 00-84.532 : Bull. crim. 2001, n° 48. 50 Cass. crim. 17 janv. 1984, n° 81-92.858 : Bull. crim. 1984, n° 24. 51 Cass. crim. 18 déc. 1984, n° 84-90.062 : Bull. crim. 1984, n° 407. 52 Cass. crim. 1er déc. 1992, n° 91-84.656. 53 Cass. crim. 12 juill. 1994, n° 93-84.668 : Bull. crim. 1994, n° 275. 54 Cass. crim. 5 mai 2009, n° 08-82.660. 55 C’est ainsi que la jurisprudence n’a pas touché au caractère d’intérêt général, par exemple, du discrédit jeté sur une décision de justice, Cass. crim. 13 sept. 2005, n° 04-87.258 ; Cass. crim. 24 sept. 2008, n° 08-82.926 ; de la dénonciation mensongère d’infraction, Cass. crim. 20 janv. 2009, n° 08-82.357 : Bull. crim. 2009, n° 14 ;

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l’exercice illégal de la profession de banquier qui peut parfaitement entraîner un préjudice pour des clients trompés. 35. Peut-être faut-il voir dans la position de la Cour de cassation une confusion malheureuse des juges avec la solution observée plus haut concernant l’absence de nullité des opérations passées par certains auteurs de violations du monopole bancaire56. C’est, selon nous, regrettable : la validité des actes passés ne doit pas avoir une incidence sur la possibilité pour la personne ayant subi un préjudice personnel et direct d’exiger des dommages et intérêts en réparation de celui-ci. Il s’agit de deux hypothèses différentes que l’on ne saurait lier entre elles57. 36. Il serait donc heureux, selon nous, que les juges reviennent sur la jurisprudence issue de la décision du 11 février 200958 et que la responsabilité civile de l’auteur d’une violation du monopole bancaire puisse être retenue celle-ci a occasionné un préjudice personnel et direct à une victime, et notamment à un client. Il paraît ainsi plus conforme à l’évolution du droit que le juge pénal soit, à nouveau, à même de statuer sur la recevabilité de l’action civile en considération des données de l’espèce, et plus précisément en vérifiant si le demandeur a bien souffert d’un préjudice réparable au sens de l’article 2 du Code de procédure pénale59. Les évolutions précitées de la jurisprudence intéressant plusieurs délits d’exercices illégal60 et la décision rendue le 2 décembre 2009 par la chambre criminelle à propos des intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement61 nous laissent penser qu’un tel revirement n’est pas impossible à court terme.

Doc. 11 : Cass., Ass. plén., 4 mars 2005, n° 03-11.725, Bull. A. P., n° 2 Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 novembre 2002), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, 16 mai 2000, pourvoi n° G 98-14.038), que la Caisse hypothécaire anversoise (la Caisse), aux droits de laquelle se trouve la société Axa Bank, a consenti, en 1986, à M. Y... Z... X... et à la Société d'aménagement immobilier de Gascogne (SAIG), des prêts par actes sous seing privés souscrits en Belgique ; que ces actes ont été déposés au rang des minutes d'un notaire à Paris, par un acte authentique comportant affectation hypothécaire ; que les fonds ont été alors remis par un chèque tiré par la Caisse sur une banque française ; que M. Y... Z... X... et la société Lauga limited, en qualité d'actionnaire de la société SAIG, ont engagé contre la Caisse une instance tendant à faire déclarer nuls les prêts et les inscriptions hypothécaires et à faire reconnaître la responsabilité de celle-ci pour avoir contribué à l'échec de l'opération de promotion immobilière à Biarritz et Bidart, à laquelle le financement était destiné ; Sur le premier moyen du pourvoi principal : Attendu que la société Lauga limited fait grief à l'arrêt de la déclarer irrecevable à agir en nullité des prêts, alors, selon le moyen, que les interdictions posées par l'article L. 511-5 du Code

Procédures 2009, comm. 122, obs. J. Buisson ; de la contrebande et l’importation ou l’exportation sans déclaration, Cass. crim. 26 janv. 2005, n° 03-86.854 ; de l’atteinte au secret de la défense nationale, Cass. crim. 1er oct. 1996, n° 95-85.529 : Bull. crim. 1996, n° 338 ; Dr. pénal 1997, comm. 28, obs. A. Maron ; ou encore du refus d’obtempérer à une sommation de s’arrêter, Cass. crim. 9 nov. 2004, n° 03-83.681 : Bull. crim. 2004, n° 271 ; Procédures 2005, comm. 46, obs. J. Buisson. 56 V. supra, n° 15. 57 R. Routier, Obligations et responsabilités du banquier : Dalloz, coll. « Dalloz Action », 2011, 3e éd., n° 212.51. 58 V. supra, n° 28. 59 Cela ne sera, bien évidemment, pas automatique. Rappelons, que la commission du délit « ne suppose pas nécessairement pour les clients créanciers une perte financière », Cass. crim. 3 nov. 1994, n° 93-82.724 : Bull. crim. 1994, n° 345 ; JCP G 1995, II, 22445, note F. Pollaud-Dulian ; JCP E 1996, I, 525, n° 1, obs. Ch. Gavalda et J. Stoufflet. 60 V. supra, n° 33. 61 V. supra, n° 32.

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monétaire et financier sont d'ordre public et peuvent être invoquées par toute personne y ayant intérêt ; que la société Lauga limited invoquait la nullité des prêts litigieux en ce qu'ils avaient été accordés par une banque n'ayant pas reçu l'agrément du Comité des établissements de crédit, pris en application de ce texte ; qu'en décidant que la société Lauga limited, simple tiers aux dits contrats de prêts, n'était pas recevable à en demander la nullité, l'arrêt a violé les articles L. 511-5 et L. 511-10 du Code monétaire et financier, anciennement les articles 1 et 10 de la loi du 24 janvier 1984, ensemble l'article 6 du Code civil ; Mais attendu que la seule méconnaissance par un établissement de crédit de l'exigence d'agrément, au respect de laquelle l'article 15 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984, devenu les articles L. 511-10, L. 511-14 et L. 612-2 du Code monétaire et financier, subordonne l'exercice de son activité, n'est pas de nature à entraîner la nullité des contrats qu'il a conclus ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; […]

Doc. 12 : Cass., Civ.2e, 14 juin 2007, n° 05-21.166, Bull. civ. II, n°155 Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 12 mai 2005), que, le 29 novembre 1991 par l'intermédiaire de la société de courtage Cofia, M. et Mme X..., résidant en France, ont signé une offre de prêt au logement présentée par la Commerz Credit Bank, devenue la Commerzbank, de Saarbrucken (la banque) et ont souscrit une assurance-vie conclue avec la société Deutscher Lloyd, aux droits de laquelle est venue la société Generali Lloyd (l'assureur) ; que M. et Mme X..., après avoir cessé les remboursements en 1994, ont assigné devant un tribunal de grande instance la banque, l'assureur et la société Cofia en vue de voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts, subsidiairement la nullité du contrat de prêt et du contrat d'assurance, et ont mis en cause la responsabilité des trois intervenants à l'opération pour manquement à leur obligation d'information et de conseil ; Sur les deux premiers moyens réunis : Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la nullité du contrat d'assurance-vie pour violation de l'article 18 de la loi du 31 décembre 1989, alors, selon le moyen : (…) Sur le troisième moyen : Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait alors, selon le moyen, que ce n'est que par exception au principe de la liberté de prestation des services qu'une exigence d'agrément peut être admise, et à condition que l'agrément s'impose à toute personne ou société exerçant une telle activité sur le territoire de l'Etat membre destinataire, qu'il soit justifié par des raisons liées à l'intérêt général et qu'il soit objectivement nécessaire pour assurer le respect des règles applicables dans le secteur considéré pour protéger les intérêts que ces règles ont pour but de sauvegarder et à condition que le même résultat ne puisse être obtenu par des règles moins contraignantes, que le respect de ces conditions doit s'apprécier au cas par cas, de sorte : - qu'en se contentant de rappeler les termes de l'arrêt rendu par la Cour de justice des Communautés européennes le 4 décembre 1986, pour estimer que l'exigence d'agrément constituait une restriction admissible au principe de la libre prestation de services, sans vérifier concrètement que chacune des conditions d'une telle limitation de la liberté garantie par l'article 59 du Traité était réunie en l'espèce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 59 du Traité et de la jurisprudence qui s'y rapporte ; - qu'il faisait valoir dans ses conclusions que le régime d'agrément allemand était aussi protecteur que le régime français et prévoyait un contrôle équivalent au contrôle effectué par les

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autorités françaises ; qu'en ne répondant pas à ce chef précis des conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ; Mais attendu que l'arrêt retient que selon l'article L. 310-10 du code des assurances applicable à la date de conclusion du contrat le 29 novembre 1991, il est interdit de souscrire une assurance directe d'un risque concernant une personne, un bien ou une responsabilité situé sur le territoire de la République française auprès d'une entreprise étrangère qui ne s'est pas conformée aux prescriptions des articles L. 321-1 et L. 321-2 du même code ; qu'en vertu de la loi du 31 décembre 1989 portant adaptation du code des assurances à l'ouverture du marché européen, l'assureur devait obligatoirement disposer d'un agrément en France, ce dont il ne justifiait pas ; que selon les points 4 et 5 de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 4 décembre 1986 (Commission des Communautés contre République fédérale d'Allemagne affaire 205/84) l'exigence d'un agrément par un Etat membre est licite sous certaines conditions ; qu'il en résulte que l'exigence d'un agrément, reconnu par la directive 79/267 "assurance-vie", constituait une restriction admissible au principe de la libre prestation de services édicté par le Traité CE et qu'en conséquence, le contrat d'assurance-vie souscrit par les époux X... auprès de l'assureur allemand, dépourvu d'agrément, devait être annulé ; Que par ces constatations et énonciations, la cour d'appel, répondant aux conclusions des parties a légalement justifié sa décision ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

EXERCICE

Cass., com., 8 janvier 2008, n° 06-19.944 Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 20 mai 2003, pourvoi n° Z 00-13.730), que selon l'offre du 20 novembre 1991 la société de droit belge banque HSA actuellement dénommée banque Centéa (la banque) a accepté de financer un prêt de 2 118 600 francs sollicité par M. et Mme X..., qu'ils ont acceptée ; qu'un acte sous seing privé a été signé à Anvers pour la contrevaleur de cette somme ; que cette convention a été ultérieurement réitérée par acte authentique reçu à Paris, contenant promesse d'affectation hypothécaire et de nantissement de bons de capitalisation ; que M. et Mme X... n'ayant pas respecté leurs engagements, la banque a engagé à leur encontre une procédure de saisie immobilière à laquelle les emprunteurs ont opposé la nullité du commandement et celle de l'acte de prêt, faute pour la banque d'avoir obtenu l'agrément préalable exigé par l'article 15 de la loi du 24 janvier 1984, devenu L. 511-10 du code monétaire et financier ; Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré nul le prêt consenti à M. et Mme X..., constaté par acte authentique du 8 janvier 1992, et d'avoir décidé que M. et Mme X... sont uniquement redevables envers elle du solde dû en capital au 26 septembre 1994 après déduction de toutes les sommes versées en capital, intérêts et frais, avec les intérêts au taux légal sur cette somme résiduelle à compter de cette date alors, selon le moyen : que " pour la période précédant l'entrée en vigueur de la deuxième directive 89/646 CEE du 15 décembre 1989, l'article 59 du traité CEE doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose en principe à ce qu'un Etat-membre restreigne la libre prestation de services en imposant à un établissement de crédit, déjà agréé dans un autre Etat-membre, d'obtenir un agrément pour pouvoir exercer son activité en France ;

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qu'il s'oppose en principe à plus forte raison à ce qu'un Etat-membre anéantisse cette liberté en imposant en fait à l'établissement de crédit étranger de s'installer en France pour obtenir cet agrément ; que la législation française alors applicable constituait une négation de la liberté de prestation de services incompatible avec les dispositions du droit communautaire ; qu'en décidant néanmoins que la société Centéa était tenue d'obtenir un agrément pour réaliser en France des opérations de crédit, au motif qu'un tel agrément constituait une restriction à cette liberté compatible avec les dispositions du droit communautaire, la cour d'appel a violé l'article 59 du traité instituant la Communauté économique européenne, signé à Rome le 25 mars 1957 ; Mais attendu que le moyen, qui reproche à la juridiction de renvoi d'avoir statué conformément à l'arrêt de cassation qui la saisissait, est irrecevable ; Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche : Vu l'article 15 de la loi du 24 janvier 1984 devenu les articles L. 511-10, L. 511-14 et L. 612-2 du code monétaire et financier ; Attendu que la seule méconnaissance par un établissement de crédit de l'exigence d'agrément, au respect de laquelle l'article 15 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984, devenu les articles L. 511-10, L. 511-14 et L. 612-2 du code monétaire et financier, subordonne l'exercice de son activité, n'est pas de nature à entraîner la nullité des contrats qu'il a conclus ; Attendu que pour prononcer la nullité du prêt, la cour d'appel retient que même si la loi du 24 janvier 1984 ne prévoit pas expressément la nullité des opérations effectuées en contravention des règles qu'elle pose, son caractère d'ordre public permet à tout contractant de se prévaloir de l'irrégularité constatée pour soutenir la nullité du prêt, que cette nullité n'apparaît pas excessive au regard du droit communautaire compte tenu des conséquences financières limitées de cette sanction, et que la banque n'ayant pas obtenu l'agrément exigé à l'époque du prêt, c'est à bon droit que M. et Mme X... en demandent la nullité ; Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a réformé la décision déférée rejetant la demande de nullité du prêt et dit que M. X... et Mme Y... doivent régler à la société Centéa la somme restant due en capital au 26 septembre 1994 après déduction des sommes versées par eux en capital, intérêts conventionnels et frais d'emprunt, cette somme portant intérêt au taux légal à compter du 26 septembre 1994, l'arrêt rendu le 4 octobre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;

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Séance n° 3 L'AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL ET DE RÉSOLUTION

(ACPR) LES NOTIONS ESSENTIELLES

Revoir les notions suivantes : autorité indépendante administrative, juridiction TEXTES APPLICABLES

Articles L. 612-1 à L 612-50 du code monétaire et financier LA PROCÉDURE DE SANCTION DEVANT L'ACPR

Doc. 1 : D.R MARTIN / H. SYNVET, Droit bancaire, janvier 2011- décembre 2011, D, 2012.1908 (extraits). Doc. 2 : CEDH, 5ème sect., Affaire Dubus S.A. c. France, 11 juin 2009, n° 5242/04 (extraits). Doc. 3 : Cons. Constit., 2 décembre 2011, n° 2011-200 QPC, Banque populaire Côte d'Azur. Doc. 4 : CE, 6ème et 1ère ss-sect., 11 avril 2012, n° 336839, Banque populaire Côte d'Azur. Doc. 5 : ACP, comm. sanctions, 13 mai 2011, n°2010-06 bis. Doc. 6 : ACP, comm. sanctions, 10 janvier 2013, n°2012-04. Doc. 7 : ACP, comm. sanctions, 25 novembre 2013, n°2013-01. Doc. 8 : CE, 9ème et 10ème SSR, 20 janvier 2016, n°374950 (extraits). LE CONTRÔLE DE LÉGALITÉ DES RECOMMANDATIONS DE L'ACPR

Doc. 9 : O. DEXANT-DE BAILLIENCOURT, Le contrôle de légalité des recommandations de l’AMF et de l’ACPR, Bull. Joly bourse, 2016, n°12, page 543. Doc. 10 : CE, Ass., 21 mars 2016, n°368082, Faivesta Doc. 11 : CE, 9ème et 10ème chambres réunies, n°384297. EXERCICE

Commentaire de l'arrêt CE, 9ème et 10ème, 15 décembre 2014, n° 366640.

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LA PROCÉDURE DE SANCTION DEVANT l'ACPR

Doc. 1 : D.R MARTIN / H. SYNVET, « Droit bancaire, janvier 2011 - décembre 2011 », D, 26 juillet 2012, n°29, page 1908 Institutions bancaires 1 - Commission bancaire La pièce de théâtre qui se joue autour de l'ancienne Commission bancaire ne quitte pas l'affiche. Acte 1 : tout au long des années 2000, le Conseil d'Etat s'attache, par-delà des concessions mineures, à préserver la Commission bancaire face aux critiques qui mettent en doute son indépendance et son impartialité. Il juge, en particulier, que « la possibilité conférée à une juridiction ou à un organisme administratif qui, eu égard à sa nature, à sa composition et à ses attributions, peut être qualifié de tribunal au sens de l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de se saisir de son propre mouvement d'affaires qui entrent dans le domaine de compétence qui lui est attribué » n'est pas « en soi, contraire à l'exigence d'équité dans le procès énoncé par ces stipulations » (CE 20 oct. 2000, n° 180122, Sté Habib Bank Limited, D. 2001. 2665, note A. Louvaris, 1072, obs. M. Sousse, et 2002. 634, obs. H. Synvet ; AJDA 2000. 1071, note P. Subra de Bieusses, et 1001, chron. M. Guyomar et P. Collin ; RSC 2001. 598, obs. J. Riffault ; RTD com. 2001. 197, obs. M. Cabrillac). Acte 2 : par son célèbre arrêt Dubus (CEDH 11 juin 2009, n° 5242/04, D. 2009. 2247, note A. Couret ; AJDA 2009. 1936, chron. J.-F. Flauss ; AJ pénal 2009. 354, étude J. Lasserre Capdeville), la Cour européenne des droits de l'homme décide le contraire. Elle estime que « la requérante a pu nourrir des doutes sur la prise de décision par la Commission bancaire dès lors que celle-ci décida de la mise en accusation, formula des griefs à son encontre et finalement la sanctionna ». Acte 3 : dans une affaire CNCE, le Conseil d'Etat tire les conséquences de la jurisprudence de la Cour européenne (CE 8 nov. 2010, n° 329384, D. 2010. 2764, et 2011. 1643, obs. H. Synvet). Il juge que « la procédure menée par la Commission bancaire a méconnu l'exigence d'impartialité rappelée par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales », mais son rapporteur public exprime l'idée qu'« il ne serait guère opportun de faire une lecture intégriste de l'arrêt Dubus et de juger que, structurellement, la Commission bancaire méconnaît le principe d'impartialité ». Trois nouveaux actes se sont joués en 2011 et au début de l'année 2012. C'est une décision de la Commission bancaire du 18 décembre 2009, prononçant un blâme et une sanction pécuniaire de 600 000 € à l'encontre de la Banque populaire Côte d'Azur, qui est à leur origine. Tout d'abord, le Conseil d'Etat a, par un arrêt du 23 septembre 2011 (CE 23 sept. 2011, n° 336839, AJDA 2012. 232), renvoyé une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des anciens articles L. 613-1, alinéa 1er, L. 613-4, L. 613-6, L. 613-21 et L. 613-23, I, du code monétaire et financier - en bref des textes fondant le pouvoir de sanction de la Commission bancaire. C'était dire que, parallèlement aux faiblesses déjà constatées sur le terrain du droit européen, le système répressif bancaire pouvait également être fragile au regard de nos exigences constitutionnelles. Sans doute le Conseil d'Etat voulait-il, une fois pour toutes, vider l'abcès, en provoquant l'intervention d'une décision de portée générale. De fait, le Conseil constitutionnel s'est prononcé le 2 décembre 2011 (Cons. const., 2 déc. 2011, n°2011-200 QPC, JO 3 déc., p. 20496, AJDA 2012. 578, chron. M. Lombard, S. Nicinski et E. Glaser ; Constitutions 2012. 337, obs. O. Le Bot). Il a considéré que « les dispositions contestées, en organisant la

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Commission bancaire sans séparer en son sein, d'une part, les fonctions de poursuite des éventuels manquements des établissements de crédit aux dispositions législatives et réglementaires qui les régissent, et, d'autre part, les fonctions de jugement des mêmes manquements, qui peuvent faire l'objet de sanctions disciplinaires, méconnaissent le principe d'impartialité des juridictions ». En conséquence, dans le dispositif de sa décision, il déclare inconstitutionnelles les anciennes dispositions du code monétaire et financier visées dans la question prioritaire. Il précise que cette déclaration « prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu'elle est applicable à toutes les instances non définitivement jugées à cette date ». Ainsi conçue, cette décision aligne les solutions retenues sur le terrain de la constitutionnalité et sur celui de la conventionalité, ce qui est évidemment satisfaisant. Depuis l'origine, la Commission bancaire souffrait d'un vice majeur de conception, qui s'expliquait par une vision trop « régalienne » des choses. Ce chapitre de l'histoire de nos juridictions administratives est désormais clos. On regrettera simplement qu'il ait fallu attendre la décision n° 2011-200 QPC pour faire reconnaître que, structurellement, la Commission bancaire méconnaissait le principe d'impartialité, alors que, dans l'affaire CNCE, le rapporteur public du Conseil d'Etat, M. Pierre Collin, affirmait encore le contraire. Ceci n'exclut cependant pas la persistance d'une politique répressive, y compris pour des affaires antérieures à la création de l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP). Appelé à tirer les conséquences de la doctrine du Conseil constitutionnel, le Conseil d'Etat a logiquement annulé, par un arrêt du 11 avril 2012 (CE 11 avr. 2012, n° 336839), la décision de sanction qui avait été prononcée contre la Banque populaire Côte d'Azur. Mais il ne s'est pas arrêté là. Il a également envisagé la possibilité de l'engagement de nouvelles poursuites contre l'établissement de crédit, dans le cadre institué par l'ordonnance du 21 janvier 2010. A cet égard, il a considéré que « compte tenu du motif de non-conformité à la Constitution des dispositions du code monétaire et financier en cause retenu par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 2 décembre 2011, l'annulation de la décision attaquée ne fait pas obstacle à ce que l'ACP engage, en vertu de l'article L. 612-38 du code monétaire et financier et dans le respect des nouvelles règles de séparation des fonctions de contrôle et de sanction, une nouvelle procédure de sanction à l'encontre de la Banque populaire Côte d'Azur sur le fondement des actes de contrôle et de constatation accomplis par la Commission bancaire dont la validité doit être appréciée, en application du 2° du III de l'article 22 de l'ordonnance du 21 janvier 2010, au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date à laquelle ils ont été accomplis ; que, dans ce cas, il appartiendra à la Commission des sanctions de l'ACP, conformément au principe constitutionnel de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère, de faire application des dispositions de l'article L. 612-39 du code monétaire et financier issu de la même ordonnance dans la limite de l'échelle des sanctions en vigueur au moment de la commission du manquement le cas échéant retenu ». Autrement dit : - l'ACP peut engager de nouvelles poursuites pour des faits déjà jugés par la Commission bancaire ; - elle peut, à cet effet, se fonder sur les résultats des contrôles effectués par la Commission bancaire et qui avaient été à l'origine de la poursuite initiale ; - elle peut prononcer l'une des sanctions prévues par l'article L. 612-39 du code monétaire et financier, dans la limite de celles existant à l'époque des faits. Il s'agit, très clairement, d'empêcher qu'un établissement de crédit fautif ne bénéficie d'un effet absolutoire attaché à la déclaration d'inconstitutionnalité. La méthode utilisée à cette fin laisse toutefois perplexe. On ne peut s'empêcher de relever, tout d'abord, que le motif qui vient d'être reproduit ne trouve aucun écho dans le dispositif de l'arrêt. C'est qu'il n'était pas nécessaire à son soutien. En réalité, le Conseil d'Etat délivre une sorte de consultation à l'ACP, pour lui indiquer la voie à suivre si celle-ci souhaite réprimer des manquements déjà examinés par la Commission bancaire dans le cadre de

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procédures annulées. Ce comportement « pro-actif » est-il le signe d'une parfaite impartialité (puisque aussi bien la notion est au coeur de tous ces litiges) ? Ensuite, sur le fond, plusieurs objections viennent à l'esprit. La première touche à l'utilisation des rapports de contrôle et des actes de constatation effectués par feu la Commission bancaire dans le dossier. Il est vrai que l'article 22, III, 2°, de l'ordonnance du 21 janvier 2010 prévoit que « la validité des actes de constatation et de procédure accomplis antérieurement à la première réunion du collège de l'Autorité s'apprécie au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date à laquelle ils ont été pris ou accomplis ». Mais encore faut-il que les dispositions législatives ainsi visées ne soient pas inconstitutionnelles. Or, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution l'ancien article L. 613-1 du code monétaire et financier, qui disposait que : « La Commission bancaire est chargée de contrôler le respect par les établissements de crédit des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables et de sanctionner les manquements constatés ». C'est ainsi le pouvoir de contrôle de la Commission bancaire qui a perdu sa base légale depuis la décision du 2 décembre 2011. Sans doute le Conseil constitutionnel a-t-il précisé que la déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la publication de sa décision. Mais faut-il, pour concrétiser cette formule, se placer au jour du contrôle ou à celui de l'engagement de nouvelles poursuites ? En second lieu, le régime « transitoire » des sanctions dessiné par l'arrêt du 11 avril 2012 paraît un peu acrobatique. La vérité est que ne sont applicables à une infraction que les peines prévues à la date de sa commission, sauf intervention d'une loi pénale plus douce. Or, en l'espèce, l'ancien article L. 613-21 du code monétaire et financier, qui déterminait les sanctions susceptibles d'être prononcées par la Commission bancaire, a été déclaré inconstitutionnel. Les faits antérieurs à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 21 janvier 2010 ne peuvent donc plus être réprimés sur cette base. Evoquer, comme le fait le Conseil d'Etat, « la limite de l'échelle des sanctions en vigueur au moment de la commission du manquement le cas échéant retenue », est inopérant, puisque, depuis la décision n° 2011-200 QPC, cette échelle de sanctions est, comme l'ensemble de la disposition qui la prévoit, frappée d'inconstitutionnalité. Elle est donc abrogée pour l'avenir, selon l'article 62 de la Constitution, et ne peut plus être utilisée dans le processus répressif. Quant au vide ainsi créé, il ne saurait être comblé par le nouvel article L. 612-39 du code monétaire et financier, qui est d'application immédiate mais non rétroactive. On observera, pour finir, que le droit européen est le grand absent de la « consultation » délivrée par le Conseil d'Etat. Cela veut dire, concrètement, que si l'ACP saisit la perche qui lui est tendue, la Banque populaire Côte d'Azur pourra chercher de nouvelles munitions de ce côté.

Doc. 2 : CEDH, 5ème sect., Affaire Dubus S.A. c. France, 11 juin 2009 (extraits) Condamnation de la France pour le cumul, par la Commission bancaire, de fonctions administratives et d’un pouvoir de sanctions 53. La Cour rappelle qu’aux fins de l’article 6 § 1, l’impartialité doit s’apprécier selon une démarche subjective, essayant de déterminer la conviction personnelle de tel juge en telle occasion, et aussi selon une démarche objective amenant à s’assurer qu’il offrait des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime (voir, entre autres, Hauschildt c. Danemark, 24 mai 1989, § 46, série A n°154 et De Cubber c. Belgique, 26 octobre 1984, § 24, série A n°86). Quant à la première, la requérante ne l’a pas soulevée devant la Cour. Au demeurant, l’impartialité personnelle d’un magistrat se présume jusqu’à la preuve du contraire, non fournie en l’espèce. Reste donc l’appréciation objective qui consiste à se demander si indépendamment de la conduite personnelle du juge, certains faits vérifiables autorisent à suspecter l’impartialité de ce dernier. En la matière, même les apparences peuvent revêtir de l’importance. Il y va de la confiance que les tribunaux d’une société

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démocratique se doivent d’inspirer aux justiciables, à commencer, au pénal, par les prévenus (Didier, précité). 54. Elle rappelle également que les notions d’indépendance et d’impartialité objective sont étroitement liées (Kleyn et autres c. Pays-Bas ([GC], n°39343/98, 39651/98, 43147/98 et 46664/99, § 192, CEDH 2003-VI). 55. La Cour observe que la Commission bancaire exerce deux types de fonctions. La première est une fonction de contrôle, englobant un contrôle administratif et un pouvoir d’injonction, prévu par les articles L. 613-6, L. 613-15 et L. 613-16 du CMF selon lesquels « Le secrétariat général de la Commission bancaire, sur instruction de la Commission bancaire, effectue des contrôles sur pièces et place » et la Commission bancaire peut adresser une mise en garde, une recommandation ou une injonction. La seconde est disciplinaire et la Commission bancaire exerce son pouvoir de sanction en agissant à ce titre comme une « juridiction administrative ». 56. La Cour relève d’emblée l’imprécision des textes qui régissent la procédure devant la Commission bancaire, quant à la composition et aux prérogatives des organes appelés à exercer les différentes fonctions qui lui sont dévolues. 57. En particulier, il ne ressort pas du CMF, ni d’un éventuel règlement intérieur, de distinction claire entre les fonctions de poursuite, d’instruction et de sanction dans l’exercice du pouvoir juridictionnel de la Commission bancaire. Or, si le cumul des fonctions d’instruction et de jugement peut être compatible avec le respect de l’impartialité garanti par l’article 6 § 1 de la Convention, comme la Cour l’a jugé dans le cadre d’une procédure disciplinaire devant le Conseil des marchés financiers, autorité administrative indépendante similaire à la Commission bancaire, où était en cause la participation du rapporteur au délibéré du jugement (Didier, précité), ce cumul est subordonné à la nature et l’étendue des tâches du rapporteur durant la phase d’instruction, et notamment à l’absence d’accomplissement d’acte d’accusation de sa part. La Cour a rappelé à cette occasion que « le simple fait, pour un juge, d’avoir déjà pris des décisions avant le procès ne peut passer pour justifier en soi des appréhensions relativement à son impartialité. Ce qui compte est l’étendue des mesures adoptées par le juge avant le procès ». 58. La Cour doit donc rechercher si la Commission bancaire a pu décider de la sanction disciplinaire sans « préjugement », compte tenu des actes accomplis par elle au cours de la procédure. 59. Pour ce faire, la Cour rappellera brièvement le déroulement de la procédure disciplinaire en l’espèce. La décision de poursuivre et d’ouvrir une procédure à l’encontre de la requérante fut prise par procès-verbal du 28 septembre 2000 par le secrétaire général et la Commission bancaire tandis que la notification des griefs à son égard incomba à la Commission en la personne de son président le 24 novembre 2000 (paragraphes 12 et 13 ci-dessus). Quant à l’instruction de l’affaire, la Cour constate qu’elle n’est pas dévolue à une personne précise. La Commission s’est référée notamment au rapport d’inspection déposé par l’inspecteur R. et aux « analyses du secrétariat général » (paragraphes 11 et 13 ci-dessus). Au cours de la procédure juridictionnelle, le secrétariat général déposa un mémoire en réplique en réponse aux observations de la requérante (paragraphe 15 ci-dessus). Enfin, la décision de sanction fut prise par le président de la Commission bancaire et cinq membres de celle-ci après une audience publique et un délibéré. Le secrétaire général notifia à la requérante la sanction prononcée par la Commission (paragraphe 18 ci-dessus). 60. De cet enchaînement d’actes pris au cours de la procédure juridictionnelle, il résulte, de l’avis de la Cour, que la société requérante pouvait raisonnablement avoir l’impression que ce sont les mêmes personnes qui l’ont poursuivie et jugée. En témoigne particulièrement la phase d’ouverture de la procédure disciplinaire et de la notification des griefs où la confusion des rôles conforte ladite impression (paragraphes 12 et 13 ci-dessus). La requérante a pu nourrir des doutes sur la prise de décision par la Commission bancaire dès lors que celle-ci décida de la mise en accusation, formula les griefs à son encontre et finalement la sanctionna. La Cour s’accorde avec l’analyse du Conseil d’Etat, qui n’a pas remis en cause la faculté d’auto-saisine de la Commission bancaire, mais qui l’a subordonnée au respect du principe d’impartialité (paragraphe 27 ci-dessus), mais elle croit nécessaire d’encadrer plus précisément le pouvoir de se saisir d’office de manière à ce que soit effacée l’impression que la culpabilité de la requérante a été établie dès le stade de l’ouverture de la procédure.

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A cela, il faut ajouter que le rôle du secrétaire général accentue la confusion soulignée ci-dessus, même s’il n’apparaît pas être intervenu dans la prise de décision de la sanction (voir, en sens inverse, paragraphe 28 ci-dessus, CE n°238169). En effet, aux termes de l’article L. 613-6 du CMF, le secrétariat général effectue les contrôles sur instruction de la Commission bancaire, et la procédure disciplinaire est précisément engagée au vu des irrégularités constatées dans le cadre du contrôle administratif ; le secrétariat général, par son secrétaire, intervient ensuite dans la procédure juridictionnelle en adressant des observations en réponse aux écritures de la partie poursuivie. Enfin, c’est bien au nom de la Commission bancaire qui, au final prononcera la sanction, que l’inspection a été diligentée. 61. En résumé, la Cour n’est pas convaincue par l’affirmation du Gouvernement sur l’existence d’une séparation organique au sein de la Commission bancaire. Elle estime que la requérante pouvait nourrir des doutes objectivement fondés quant à l’indépendance et l’impartialité de la Commission du fait de l’absence de distinction claire entre ses différentes fonctions. 62. Partant, la Cour estime qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention.

Doc. 3 : Conseil constitutionnel, décision n° 2011-200 QPC du 2 décembre 2011, Banque populaire Côte d'Azur 1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 613-1 du code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 21 janvier 2010 susvisée : « La commission bancaire est chargée de contrôler le respect par les établissements de crédit des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables et de sanctionner les manquements constatés » ; 2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 613-4 du même code : « La commission bancaire délibère valablement lorsque la majorité absolue des membres qui la composent sont présents ou représentés. Sauf s'il y a urgence, elle ne délibère valablement en qualité de juridiction administrative que lorsque la totalité de ses membres sont présents ou représentés » ; 3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 613-6 du même code : « Le secrétariat général de la commission bancaire, sur instruction de la commission bancaire, effectue des contrôles sur pièces et sur place. La commission délibère périodiquement du programme des contrôles sur place. « Le secrétariat général de la Commission bancaire peut convoquer et entendre toute personne pour en obtenir des informations » ; 4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 613-21 du même code : « I. Si un établissement de crédit, un établissement de paiement, ou une des personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 613-2 a enfreint une disposition législative ou réglementaire afférente à son activité, n'a pas répondu à une recommandation ou n'a pas tenu compte d'une mise en garde ou encore n'a pas respecté les conditions particulières posées ou les engagements pris à l'occasion d'une demande d'agrément ou d'une autorisation ou dérogation prévue par les dispositions législatives ou réglementaires applicables aux établissements de crédit, aux établissements de paiement et aux entreprises d'investissement, la commission bancaire, sous réserve des compétences de l'Autorité des marchés financiers, peut prononcer l'une des sanctions disciplinaires suivantes : « 1. L'avertissement ; « 2. Le blâme ; « 3. L'interdiction, à titre temporaire ou définitif, d'effectuer certaines opérations et toutes autres limitations dans l'exercice de l'activité ; « 4. La suspension temporaire de l'une ou de plusieurs des personnes mentionnées à l'article L. 511-13, au huitième alinéa du II de l'article L. 522-6 et à l'article L. 532-2 avec ou sans nomination d'administrateur provisoire ; « 5. La démission d'office de l'une ou de plusieurs de ces mêmes personnes avec ou sans nomination d'administrateur provisoire ; « 6. La radiation de l'établissement de crédit, […] 5. Considérant qu'aux termes du paragraphe I de l'article L. 613-23 du même code : « Lorsque la commission bancaire statue en application de l'article L. 613-21, elle est une juridiction administrative » ;

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6. Considérant que, selon la société requérante, en ne prévoyant pas de séparation des pouvoirs de poursuite et de sanction au sein de la commission bancaire, ces dispositions méconnaissent les principes d'indépendance et d'impartialité des juridictions qui découlent de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; 7. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ; que les principes d'indépendance et d'impartialité sont indissociables de l'exercice de fonctions juridictionnelles ; 8. Considérant que les dispositions contestées, en organisant la Commission bancaire sans séparer en son sein, d'une part, les fonctions de poursuite des éventuels manquements des établissements de crédit aux dispositions législatives et réglementaires qui les régissent et, d'autre part, les fonctions de jugement des mêmes manquements, qui peuvent faire l'objet de sanctions disciplinaires, méconnaissent le principe d'impartialité des juridictions et, par suite, doivent être déclarées contraires à la Constitution ; 9. Considérant qu'en vertu de la seconde phrase du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution, il appartient au Conseil constitutionnel de déterminer les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition qu'il déclare inconstitutionnelle a produits sont susceptibles d'être remis en cause ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; que la présente déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu'elle est applicable à toutes les instances non définitivement jugées à cette date, DÉCIDE : Article 1er.- Le premier alinéa de l'article L. 613-1, les articles L. 613-4, L. 613-6, L. 613-21 et le paragraphe I de l'article L. 613-23 du code monétaire et financier, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d'agrément et de contrôle de la banque et de l'assurance, sont contraires à la Constitution.

Doc. 4 : CE, 6ème et 1ère ss-sect., 11 avril 2012 – Banque populaire Côte d'Azur Considérant qu'aux termes de l'article L. 613-1 du code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d'agrément et de contrôle de la banque et de l'assurance : " La commission bancaire est chargée de contrôler le respect par les établissements de crédit des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables et de sanctionner les manquements constatés (...) " ; que l'article L. 613-2 du même code dispose : " La commission bancaire veille également au respect des dispositions législatives et réglementaires prévues par le présent code ou qui prévoient expressément son contrôle par les prestataires de services d'investissement (...). Elle sanctionne les manquements constatés dans les conditions prévues à l'article L. 613-21 (...) " ; que l'article L. 613-4 du même code, dans sa rédaction alors applicable, précise que : " La commission bancaire délibère valablement lorsque la majorité absolue des membres qui la composent sont présents ou représentés. Sauf s'il y a urgence, elle ne délibère valablement en qualité de juridiction administrative que lorsque la totalité de ses membres sont présents ou représentés. " ; qu'aux termes de l'article L. 613-6 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le secrétariat général de la commission bancaire, sur instruction de la commission bancaire, effectue des contrôles sur pièces et sur place. La commission délibère périodiquement du programme des contrôles sur place. / Le secrétariat général de la commission bancaire peut convoquer et entendre toute personne pour en obtenir des informations. " ; que le I de l'article L. 613-21, dans sa rédaction alors applicable, précise : " Si un établissement de crédit ou une des personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 613-2 a enfreint une disposition législative ou réglementaire afférente à son activité (...), la commission bancaire, sous réserve des compétences du conseil des marchés

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financiers, peut prononcer l'une des sanctions disciplinaires suivantes : / 1° L'avertissement ; / 2° Le blâme ; / 3° L'interdiction d'effectuer certaines opérations et toutes autres limitations dans l'exercice de l'activité ; / 4° La suspension temporaire de l'une ou de plusieurs des personnes mentionnées à l'article L. 511-3 et à l'article L. 532-2 avec ou sans nomination d'administrateur provisoire ; / 5° La démission d'office de l'une ou de plusieurs de ces mêmes personnes avec ou sans nomination d'administrateur provisoire ; / 6° La radiation de l'établissement de crédit ou de l'entreprise d'investissement de la liste des établissements de crédit ou des entreprises d'investissement agréés avec ou sans nomination d'un liquidateur (...). / En outre, la commission bancaire peut prononcer, soit à la place, soit en sus de ces sanctions, une sanction pécuniaire au plus égale au capital minimum auquel est astreinte la personne morale sanctionnée (...) " ; qu'aux termes du III de l'article L. 613-21 du même code : " La commission bancaire peut décider que les sanctions prises dans le cadre du présent article feront l'objet d'une publication aux frais de la personne morale sanctionnée dans les journaux ou publications que la Commission désigne, à moins que cette publication ne risque de perturber gravement les marchés financiers ou de causer un préjudice disproportionné aux parties en cause " ; qu'enfin, le I de l'article L. 613-23 du même code prévoit que : " Lorsque la commission bancaire statue en application de l'article L. 613-21, elle est une juridiction administrative " ; Considérant qu'en application de ces dispositions, la Commission bancaire a, par une décision du 18 décembre 2009, prononcé à l'encontre de la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR, d'une part, un blâme, d'autre part, une sanction pécuniaire de 600 000 euros et rejeté sa demande tendant à ce que cette décision ne fasse l'objet d'aucune mesure de publicité faisant apparaître son nom ; que la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR se pourvoit en cassation contre cette décision juridictionnelle rendue en premier et dernier ressort ; […] Considérant que, par la décision n° 2011-200 QPC du 2 décembre 2011, le Conseil Constitutionnel a jugé contraires à la Constitution le premier alinéa de l'article L. 613-1, les articles L. 613-4, L. 613-6, L. 613-21 et le paragraphe I de l'article L. 613-23 du code monétaire et financier, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d'agrément et de contrôle de la banque et de l'assurance, au motif que ces dispositions, en organisant la Commission bancaire sans séparer en son sein, d'une part, les fonctions de poursuite des éventuels manquements des établissements de crédit aux dispositions législatives et réglementaires qui les régissent et, d'autre part, les fonctions de jugement des mêmes manquements, qui peuvent faire l'objet de sanctions disciplinaires, méconnaissaient le principe d'impartialité des juridictions ; que le juge constitutionnel a précisé que cette déclaration d'inconstitutionnalité est applicable à toutes les instances non définitivement jugées à la date de sa décision ; que cette décision implique que le juge administratif écarte l'application de ces dispositions pour régler tout litige régulièrement engagé par un organisme qui a fait l'objet d'une décision de sanction prononcée par la Commission bancaire ; qu'ainsi, il incombe au juge de cassation d'annuler, sans qu'il soit besoin pour lui d'examiner les moyens du pourvoi dont il est saisi, la décision attaquée ; Considérant que le III de l'article 22 de l'ordonnance du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d'agrément et de contrôle de la banque et de l'assurance précise que : " A compter de la première réunion de son collège, l'Autorité de contrôle prudentiel succède dans leurs droits et obligations respectifs à l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, au Comité des entreprises d'assurance, au comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement et à la Commission bancaire. (...) / 2° La validité des actes de constatation et de procédure accomplis antérieurement à la première réunion du collège de l'Autorité s'apprécie au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date à laquelle ils ont été pris ou accomplis ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 612-38 du code monétaire et financier, issu de la même ordonnance : " L'une des formations du collège examine les conclusions établies, dans le cadre de la mission de contrôle de l'Autorité de contrôle prudentiel, par les services de l'Autorité ou le rapport établi en application de l'article L. 612-27. Si elle décide l'ouverture d'une procédure de sanction, son président notifie les griefs aux personnes concernées. Il transmet la notification des griefs à la commission des sanctions qui désigne un rapporteur parmi ses membres (...) " ; que, compte tenu du motif de non-conformité à la Constitution des dispositions du code monétaire et financier en cause retenu par le

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Conseil constitutionnel dans sa décision du 2 décembre 2011, l'annulation de la décision attaquée ne fait pas obstacle à ce que l'Autorité de contrôle prudentiel engage, en vertu de l'article L. 612-38 du code monétaire et financier et dans le respect des nouvelles règles de séparation des fonctions de contrôle et de sanction, une nouvelle procédure de sanction à l'encontre de la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR sur le fondement des actes de contrôle et de constatation accomplis par la Commission bancaire dont la validité doit être appréciée, en application du 2° du III de l'article 22 de l'ordonnance du 21 janvier 2010, au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date à laquelle ils ont été accomplis ; que, dans ce cas, il appartiendra à la commission des sanctions de l'Autorité de contrôle prudentiel, conformément au principe constitutionnel de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère, de faire application des dispositions de l'article L. 612-39 du code monétaire et financier issu de la même ordonnance dans la limite de l'échelle des sanctions en vigueur au moment de la commission du manquement le cas échéant retenu ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR est fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État, avec imputation sur le budget de l'Autorité de contrôle prudentiel, le versement de la somme de 5 000 euros ; DECIDE : Article 1er : La décision de la Commission bancaire du 18 décembre 2009 est annulée. Article 2 : L'Etat (Autorité de contrôle prudentiel) versera à la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Doc. 5 : ACP, comm. sanctions, 13 mai 2011, n°2010-06 bis (...) la banque B demande à la Commission des sanctions, à l'appui de ses observations en défense dans le cadre de la procédure disciplinaire n° 2010-06 ouverte à son encontre, de transmettre au Conseil d'État la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au « bloc de constitutionnalité » auquel appartient l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 selon lequel : « Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution », des articles L. 612-1.1, L. 612-1.11.3° alinéa 2, L. 612-4, L. 612-38, alinéa 3, L. 612-16.1, L. 612-16.1V du code monétaire et financier qui organisent la distinction des fonctions de poursuite, d'instruction et de jugement de l'ACP ; (...) I. Sur la recevabilité de la question prioritaire de constitutionnalité Considérant qu'aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé (...) » ; que selon l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée : « Devant les juridictions relevant du Conseil d'État ou de la Cour de cassation, le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. (. ..) » ; Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 612-9 et L. 612-38 à 41 du code monétaire et financier, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d'agrément et de contrôle de la banque et de l'assurance, que la Commission des sanctions de l'ACP statue collégialement sur les griefs disciplinaires dont l'a saisie le Collège, organe de poursuite de cette autorité, à l'issue d'une instruction qu'elle mène contradictoirement entre la personne mise en cause et le représentant de cet organe ; que par ces dispositions, relatives notamment à la composition de la Commission, à la faculté de récuser un membre dont il existe une

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raison sérieuse de mettre en doute l'impartialité, aux garanties des droits de la défense, aux conditions dans lesquelles elle délibère et au « recours de plein contentieux » dont ses décisions peuvent faire l'objet devant le Conseil d'État à l'initiative de l'une ou l'autre des parties, le législateur a conféré à la Commission la nature d'une juridiction administrative spéciale de première instance, soumise au contrôle d'appel du Conseil d'État ; que par suite la banque B est recevable à présenter devant elle une question prioritaire de constitutionnalité, comme elle l'a fait par son mémoire distinct du 18 avril 2011 ; Il. Sur le fond Considérant qu'en vertu de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée, une question prioritaire de constitutionnalité ne peut être transmise au Conseil d'Etat que si elle présente un caractère sérieux ; Considérant que la banque B soulève la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au bloc de constitutionnalité » auquel appartient l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, des articles L. 612-1.I, L. 612-1.II.3° alinéa 2, L. 612-4, L. 612-38, alinéa 3, L. 612-16.I, L. 612-16.IV du code monétaire et financier, relatifs aux fonctions de poursuite, d'instruction et de jugement de l'ACP, laquelle, selon la banque B, cumulerait ainsi les fonctions de partie, par l'intermédiaire de son Collège et de son Président, et de juge, par l'intermédiaire de sa Commission des sanctions ; elle en conclut que cette Commission n'est pas impartiale et que l'organisation de l'ACP est inconstitutionnelle ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 612-4 du code monétaire et financier : « L ‘Autorité de contrôle prudentiel comprend un collège et une commission des sanctions. (.) » ; que selon l'article L. 612-9 de ce code : « (...) les fonctions de membre de la commission des sanctions sont incompatibles avec celles de membre du collège (...) » ; que selon l'article L. 612-38 : « Lorsque l'une des formation du collège décide l'ouverture d'une procédure de sanction, son président notifie les griefs aux personnes concernées (...) » ; que les articles L. 612-39 à L. 612-41 donnent à la seule Commission des sanctions le pouvoir de prononcer une sanction disciplinaire ; que l'article L. 612-38 du code dispose que : « (...) Le membre du collège désigné par la formation qui a décidé de l'ouverture d'une procédure de sanction est convoqué à l‘audience. Il y assiste sans voix délibérative (...). Il peut présenter des observations au soutien des griefs notifiés et proposer une sanction. (...) » ; Considérant que les dispositions précitées organisent la séparation entre les autorités poursuivante (le Collège) et juridictionnelle (la Commission des sanctions), dans des conditions garantissant pleinement l'indépendance de cette dernière au sein de l'ACP, alors même que, comme croit devoir l'invoquer la banque B, la Commission des sanctions n'a pas de personnalité morale propre et que le président de l'ACP peut présenter, par la voie du représentant du collège, des conclusions relatives à la sanction et faire appel devant le Conseil d'État ; que, par suite, la question de constitutionnalité posée par la banque B est dépourvue de caractère sérieux ; Par ces motifs, décide : Article 1er - Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité présentée par la banque B. (...)

Doc. 6 : ACP, comm. sanctions, 10 janvier 2013, n°2012-04 (…) Considérant qu’aux termes de l’article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé […] » ; que selon l’article 23-1 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 : « Devant les juridictions relevant du Conseil d’État ou de la Cour de cassation, le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d’irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. […] »; Considérant qu’aux termes des articles L. 612-1 et L. 612-4 du COMOFI, dans leur rédaction issue de l’ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010, l’ACP est une autorité administrative indépendante comprenant un Collège et une Commission des sanctions ; que si le IV de l’article L. 612-16 du même code prévoit seulement que les décisions de la Commission des sanctions « peuvent faire l’objet d’un

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recours de pleine juridiction devant le Conseil d’État », l’article L.311-4 du CJA, tel que modifié par l’article 16 de la même ordonnance, précise que c’est « en premier et dernier ressort » que le Conseil d’État connaît de ces recours ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que, même si la Commission des sanctions est organisée et fonctionne de manière similaire à une juridiction, le législateur n’a pas entendu lui conférer cette qualité ; que, par suite, bien que la commission ait, dans une décision du 13 mai 2011, regardé comme recevable une QPC avant de refuser de la transmettre faute de caractère sérieux, les trois QPC soulevées par la BPCA sont irrecevables ; Considérant qu’au cours de l’audience, l’établissement a en outre demandé un renvoi de l’affaire en vue de la préparation d’une QPC supplémentaire tirée de ce que l’engagement d’une procédure disciplinaire devant l’ACP aurait le caractère d’une auto-saisine ; qu’il n’a pas été fait droit à cette demande dès lors que, pour les motifs indiqués ci-dessus, une telle QPC serait irrecevable ; qu’au demeurant, l’organisation dissociée mise en place par l’ordonnance du 21 janvier 2010 se caractérise par une stricte séparation de la poursuite et du jugement, la première fonction étant exercée par le Collège et la seconde par la Commission des sanctions (…)

Doc. 7 : ACP, comm. sanctions, 25 novembre 2013, n°2013-01 (…) Considérant que l’article 267 du TFUE dispose que « La Cour de justice de l’Union européenne est compétente pour statuer, à titre préjudiciel : / a) sur l’interprétation des traités, / b) sur la validité et l’interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l’Union. / Lorsqu’une telle question est soulevée devant une juridiction d’un des États membres, cette juridiction peut, si elle estime qu’une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de statuer sur cette question. / Lorsqu’une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour. / Si une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale concernant une personne détenue, la Cour statue dans les plus brefs délais » ; que l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux dispose que « Toute personne a droit au respect de sa vie familiale, de son domicile et de ses communications » ; qu’aux termes de l’article 47 de cette charte, « Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article. / Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter. Une aide juridictionnelle est accordée à ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes, dans la mesure où cette aide serait nécessaire pour assurer l’effectivité de l’accès à la justice. » ; que l’article 6, paragraphe 3, de la CESDHLF prévoit que « Tout accusé a droit notamment à : / a. être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ; / b. disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; / c. se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ; / d. interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ; / e. se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience » ; Considérant que la CELR soutient qu’il y aurait lieu pour la Commission des sanctions de transmettre à la CJUE une question qu’elle propose de formuler de la manière suivante : « Les articles 7 et 47 de la Charte des droits fondamentaux, éclairée par les dispositions des articles 6 § 3 et 8 CEDH, impliquent-ils que, - au cours des phases d’enquêtes menées dans les locaux de la personne sous enquête, par une autorité administrative indépendante, dotée de pouvoirs importants et contraignants d’investigation et de pouvoirs juridictionnels de sanctions, et dans la mesure où, d’une part ces enquêtes se déroulent sur place, c’est-à-dire au "domicile" du sujet de l’enquête et où d’autre part, au cours de ces enquêtes peuvent être recueillies directement par les enquêteurs, au moyen d’investigations dans les documents et systèmes de la personne contrôlée et auxquels la loi leur donne accès, sans possibilité pour la personne sous enquête de s’y opposer, des preuves ou des déclarations des personnes soumises à enquête, susceptibles de fonder des poursuites juridictionnelles ultérieures et d’être ainsi opposées à charge de la personne poursuivie, - la personne concernée

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soit informée, quel qu’en soit le procédé, de la faculté de se faire assister d’un conseil et de son droit à garder le silence, notamment de façon à ne pas être amenée, au cours de la phase d’enquête à s’auto incriminer et à permettre ainsi à la personne contrôlée, dès ce stade, de bénéficier de façon effective de son droit à un procès équitable ? Les mêmes articles impliquent-ils que l’ordre juridique national prévoit de façon effective cette faculté de manière à garantir à la personne concernée le bénéfice effectif des droits reconnus par les articles 7 et 47 de la Charte des droits fondamentaux ? » ; Considérant que, pour apprécier si l’organisme de renvoi possède le caractère d’une juridiction au sens de l’article 267 ci-dessus mentionné, la CJUE tient compte d’un ensemble d’éléments, tels que l’origine légale de l’organisme, sa permanence, le caractère obligatoire de sa juridiction, la nature contradictoire de la procédure, l’application, par l’organisme, des règles de droit ainsi que son indépendance ; que l’ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d’agrément et de contrôle de la banque et de l’assurance a mis en place, au sein de l’ACP, devenue depuis ACPR, un Collège et une Commission des sanctions ; que, lorsqu’elle est saisie par le Collège, cette dernière est seule compétente pour statuer sur les manquements disciplinaires reprochés aux organismes assujettis au contrôle de l’ACPR ; que la procédure devant la Commission est contradictoire ; qu’elle applique des règles de droit et que des dispositions législatives garantissent son indépendance ; qu’elle est donc susceptible d’être qualifiée de juridiction au sens du droit de l’Union européenne bien qu’elle n’ait pas cette qualité en droit interne ; Considérant cependant, en premier lieu, que le IV de l’article L. 612-16 du COMOFI dispose que les décisions prononcées par la Commission des sanctions peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant le Conseil d’Etat ; qu’en conséquence, compte tenu des termes précités de l’article 267 du TFUE, et ainsi que l’a jugé le Conseil d’Etat dans une décision du 1er juin 1994, n° 129727, la Commission n’est en tout état de cause pas tenue de transmettre à la CJUE la question préjudicielle présentée par la CELR ; (…)

Doc. 8 : CE, 9ème et 10ème SSR, 20 janvier 2016, n°374950 (extraits) (…)1. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite d'un contrôle effectué entre le 28 septembre 2011 et le 19 janvier 2012 et conclu par un rapport d'inspection définitif du 10 août 2012, le collège de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, statuant en sous-collège sectoriel de la banque, a, le 17 décembre 2012, décidé l'ouverture d'une procédure disciplinaire à l'encontre de la caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon (CELR) pour des manquements à ses obligations professionnelles en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme ; que, par une décision rendue le 25 novembre 2013 dont elle a ordonné la publication au registre de l'Autorité, la commission des sanctions a prononcé à l'encontre de la CELR un blâme et une sanction pécuniaire d'un montant d'un million d'euros ; que la CELR demande l'annulation de cette décision ; Sur la régularité de la procédure de contrôle : En ce qui concerne le respect des droits de la défense : 2. Considérant, en premier lieu, que si, lorsqu'elle est saisie d'agissements pouvant donner lieu aux sanctions prévues par le code monétaire et financier, la commission des sanctions de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution doit être regardée comme décidant du bien-fondé d'accusations en matière pénale au sens des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le principe des droits de la défense, rappelé tant par l'article 6 de cette convention que par l'article L. 612-38 du code monétaire et financier, s'applique seulement à la procédure de sanction ouverte par la notification de griefs par le collège de l'Autorité et par la saisine de la commission des sanctions, et non à la phase préalable des contrôles prévus par l'article L. 612-23 de ce code ; que ces contrôles doivent seulement se dérouler dans des

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conditions garantissant qu'il ne soit pas porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense des personnes auxquelles des griefs sont ensuite notifiés ; 3. Considérant que si la requérante fait valoir, s'agissant de la phase préalable à la procédure de sanction, en premier lieu, que la " vue d'ensemble ", document de synthèse du projet de rapport de contrôle, n'a été communiquée à la CELR qu'avec le projet de rapport du 13 juin 2012, et non avec l'avant-projet de rapport qui lui a été communiqué le 9 mars précédent, en deuxième lieu, que ses réponses au projet de rapport d'inspection étaient illisibles dans le dossier soumis au collège de l'Autorité et, enfin, que sa réponse à la " vue d'ensemble " qui lui a été communiquée avec le projet de rapport n'a été transmise ni au secrétariat général, ni au collège de l'Autorité, et ne figurait pas au dossier communiqué à la commission des sanctions, il n'en résulte toutefois aucune atteinte irrémédiable à la faculté de se défendre dont elle a ultérieurement bénéficié dans le cadre de la procédure de sanction ouverte par la notification des griefs ; 4. Considérant, en second lieu, que la CELR ne peut utilement se prévaloir, à l'appui de sa contestation de la régularité de l'enquête administrative de l'Autorité, d'une méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 14 § 3 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, en soutenant que les enquêteurs n'auraient pas notifié à leurs préposés leur droit de se taire, dès lors que ces stipulations ne sont pas applicables à la procédure d'enquête administrative ; qu'en outre, dès lors que la CELR a pu faire valoir ses observations devant la commission des sanctions, et à supposer même que certains des manquements retenus par la commission soient fondés sur les déclarations orales faites par ses préposés lors des contrôles sur place, la circonstance qu'elle n'aurait pas été informée de la possibilité de se faire assister d'un conseil ni du droit de ses préposés à garder le silence pendant la procédure d'enquête administrative n'a porté aucune atteinte irrémédiable aux droits de la défense ;

LE CONTRÔLE DE LÉGALITÉ DES RECOMMANDATIONS DE l'ACPR

Doc. 9 : O. DEXANT-DE BAILLIENCOURT, « Le contrôle de légalité des recommandations de l’AMF et de l’ACPR », Bull. Joly Bourse, 2016, n°12, page 543 Plan I – Le moyen tiré de l’incompétence de l’autorité de régulation I-A – Une compétence fondée sur une base textuelle explicite I- B – Une compétence explicitement limitée II – Les autres moyens II- A – Le moyen tiré d’un vice de procédure II - B – Le moyen tiré de la violation de la loi

En admettant de contrôler la légalité des instruments de droit souple utilisés par les autorités de régulation, le Conseil d’État a ouvert la voie à un nouveau contentieux. Ce contentieux sera nécessairement varié puisqu’il visera des instruments d’une grande diversité aussi bien quant à leur appellation que quant à leur auteur. Parmi ces instruments, les recommandations de l’ACPR et celles de l’AMF pourraient recevoir un traitement similaire.

1. Au-delà de leur dénomination commune, les recommandations de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et celles de l’Autorité des marchés financiers (AMF) présentent de nombreuses similitudes. D’abord, elles sont toutes deux édictées par des autorités de régulation à caractère économique. Ensuite, elles sont a priori dépourvues de caractère juridiquement

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contraignant, de telle manière qu’elles sont généralement classées dans la catégorie des normes de droit souple. Enfin, elles ont la particularité – pour des actes de droit souple – de reposer sur une base légale explicite62. En effet, l’article L. 612-29-1, alinéa 2, du Code monétaire et financier donne expressément compétence à l’ACPR pour formuler des recommandations. S’agissant de l’AMF, cette compétence est conférée par les articles L. 621-6, alinéa 2, et L. 621-18-3, alinéa 1, du Code monétaire et financier. Ces similitudes conduisent à étudier conjointement les moyens offerts aux justiciables qui souhaiteraient contester la légalité de ces recommandations, que cette contestation soit directe ou indirecte. 2. La légalité de la recommandation sera contestée directement lorsque le recours pour excès de pouvoir visera la recommandation elle-même. Le recours devra alors être exercé dans les deux mois de la mise en ligne de la recommandation. En effet, si l’article R. 421-1 du Code de justice administrative impose qu’un tel recours soit exercé dans les deux mois de la notification ou de la publication de la décision attaquée, le Conseil d’État a pu préciser à propos d’une « communication » de la Commission de régulation de l’énergie qu’en « l’absence de dispositions législatives ou réglementaires prévoyant un autre mode de publication, la mise en ligne d’un acte de la nature de celui contesté dans le recours sur le site internet de l’autorité de régulation qui l’édicte, dans l’espace consacré à la publication des actes de l’autorité, fait courir, à l’égard des professionnels du secteur dont elle assure la régulation, le délai de recours »63. Dans la mesure où les dispositions applicables aux recommandations de l’AMF – à l’instar de celles applicables aux communications de la Commission de régulation de l’énergie – ne prévoient pas un autre mode de publication, et que celles relatives aux recommandations de l’ACPR64 prévoient leur publication dans un recueil mais que ce recueil est disponible et accessible sur le site internet de l’ACPR, c’est bien la mise en ligne des recommandations sur le site internet de l’autorité de régulation qui constituera le point de départ du délai de recours. Un nouveau délai devrait d’ailleurs commencer à courir à chaque fois que la recommandation sera modifiée et donc une nouvelle fois mise en ligne, et ce peu importe que le point critiqué de la recommandation ait été l’objet de la modification. 3. À défaut pour le justiciable d’avoir exercé dans le délai son recours contre la recommandation, la légalité de la recommandation pourra être contestée indirectement. En effet, après avoir demandé l’abrogation de la recommandation, le justiciable pourra exercer un recours pour excès de pouvoir contre le refus de l’autorité de régulation d’abroger la recommandation. À cette demande d’annulation du refus d’abrogation, le requérant devra joindre une demande d’injonction de l’autorité de régulation d’avoir à abroger sa recommandation. Le recours devra alors être exercé dans les deux mois du refus de l’autorité de régulation d’abroger la recommandation. 4. Pour que les recommandations de l’AMF et de l’ACPR puissent être contestées, il faut encore que ces recommandations fassent grief au requérant. Cette condition de recevabilité ne devrait pas poser de difficulté particulière, puisque ces recommandations devraient systématiquement remplir le second critère de recevabilité dégagé par le Conseil d’État le 21 mars 201665. Par nature, les

62

La plupart des instruments de droit souple utilisés par les autorités de régulation ne

reposent en effet sur aucune base textuelle explicite. Il en est ainsi notamment des positions et

mises en garde de l’AMF, ou des positions et lignes directrices de l’ACPR 63 CE, sect., 13 juill. 2016, n° 388150. 64 C. mon. fin., art. L. 612-29-1, al. 4. 65 CE, ass., 21 mars 2016, n° 368082, Sté Fairvesta International GMBH ; CE, ass., 21 mars 2016, n°

390023, Sté NC Numericable : Banque et droit, mai-juin 2016, p. 28, Chacornac J. ; Sée A., « Le droit souple

des autorités de régulation », Dr. adm. 2016, comm. 34 ; von Coaster S. et Daumas V., « Le Conseil d’État

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recommandations de l’AMF et de l’ACPR ont en effet toujours « pour objet d’influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles elles s’adressent ». Le Conseil d’État66 a d’ailleurs déjà eu l’occasion d’admettre la recevabilité d’un recours pour excès de pouvoir dirigé à l’encontre d’une recommandation de l’ACPR portant sur les conventions concernant la distribution des contrats d’assurance vie, en relevant que « ces recommandations ont pour objet d’inciter les entreprises d’assurance et les intermédiaires, qui en sont les destinataires, à modifier sensiblement leurs relations réciproques »67. Ainsi, dès lors que le requérant aura un intérêt à agir – ce qui ne devrait pas poser de difficulté pour les destinataires de ces recommandations ou les groupements de destinataires – les recours pour excès de pouvoir exercés dans le délai de deux mois soit contre les recommandations de l’AMF ou de l’ACPR, soit contre les refus d’abrogation de telles recommandations devraient en principe être jugés recevables par le Conseil d’État. 5. Une fois la recevabilité du recours admise, on peut s’interroger sur les moyens qui pourront être avancés par les requérants. Le caractère non contraignant des recommandations a-t-il une influence sur les moyens de légalité qui pourront être soulevés par les requérants ? Ces moyens et la manière dont le Conseil d’État les accueillera devraient très vraisemblablement faire l’objet de prochains développements jurisprudentiels. Le Conseil d’État acceptera-t-il d’étudier les motifs de la même manière qu’il le fait pour tout acte administratif ? Le Conseil d’État ne pourrait-il pas faire preuve d’une certaine retenue lorsqu’il s’agira de juger de la légalité de recommandations68 ? C’est ce qui ressort notamment des décisions du Conseil d’État du 21 mars 2016, dans lesquelles le Conseil d’État a pris soin de préciser qu’il « appartient au juge, saisi de moyens en ce sens, d’examiner les vices susceptibles d’affecter la légalité de ces actes en tenant compte de leur nature et de leurs caractéristiques, ainsi que du pouvoir d’appréciation dont dispose l’autorité de régulation ». Cette retenue pourrait expliquer que lorsque le Conseil d’État a eu à examiner la recommandation de l’ACPR en juin 2016, il ait justifié la compétence de l’ACPR de manière assez surprenante puisqu’il s’est fondé sur le caractère non contraignant de la recommandation.

accepte de se saisir d’actes de droit souple », Dr. adm. 2016, comm. 20 ; AJDA 2016, p. 572 ; AJDA 2016, p.

717, chron. Dutheillet de Lamothe L. et Odinet G. 66 CE, 9e-10e ch. réunies, 20 juin 2016, n° 384297, FFSA c/ ACPR : Synvet H., « Droit bancaire – juillet

2015-septembre 2016 », D. 2016, p. 2305, obs. à propos de CE, 20 juin 2016, n° 384297. 67 Si le Conseil d’État a admis la recevabilité du recours en se fondant sur sa nouvelle jurisprudence issue

des arrêts Fairvesta et Numericable, une autre analyse aurait éventuellement pu permettre d’admettre la

recevabilité du recours en excès de pouvoir exercé contre la recommandation de l’ACPR. M. Synvet relève ainsi

qu’il « n’allait pas de soi que les recommandations de l’ACPR constituassent du droit souple, de sorte que l’on

aurait pu envisager de faire relever la recevabilité des recours dirigés contre elles de solutions plus classiques.

(…) Plutôt que de droit souple, il s’agit de véritables normes, non réglementaires (l’ACPR n’a pas reçu le

pouvoir réglementaire), mais qui modifient l’ordonnancement juridique de façon contraignante puisque le risque

d’une mesure de police et d’une sanction plane sur ceux qui ne s’y conformeraient pas » (obs. préc.). 68 À ce jour, on peut d’ailleurs remarquer que le Conseil d’État a eu l’occasion à sept reprises de se

prononcer sur la légalité d’actes de droit souple utilisés par les autorités de régulation en se fondant sur sa

nouvelle jurisprudence issue de ses décisions du 21 mars 2016 (CE, ass., 21 mars 2016, n° 368082, à propos

d’une mise en garde de l’AMF ; CE, ass., 21 mars 2016, n° 390023, à propos d’une prise de position de

l’Autorité de la concurrence ; CE, 20 juin 2016, n° 384297, à propos d’une recommandation de l’ACPR ; CE, 30

juin 2016, n° 383822, à propos d’une position de l’ACPR ; CE, 13 juill. 2016, n° 388150, à propos d’une

communication de la Commission de régulation de l’énergie ; CE, 5e-4e ch. réunies, 22 juill. 2016, n° 397014, à

propos d’un calendrier indicatif du Conseil supérieur de l’audiovisuel ; CE, 5e-4e ch. réunies, 10 nov. 2016, n°

384691, à propos d’une délibération et de communiqués du Conseil supérieur de l’audiovisuel). Sur les sept

recours, six ont été jugés recevables mais seule la décision du 13 juillet 2016 a abouti à la reconnaissance de

l’illégalité de l’acte critiqué, c’est-à-dire de la décision de refus d’abrogation de l’acte de droit souple.

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6. Sans présager de la manière dont le Conseil d’État acceptera d’étudier les moyens invoqués par ces requérants, il est néanmoins possible de s’interroger sur les motifs d’annulation qui pourraient être invoqués à l’encontre des recommandations de l’AMF et de l’ACPR en envisageant le moyen tiré de l’incompétence de l’autorité de régulation (I), puis les autres moyens (II). I – Le moyen tiré de l’incompétence de l’autorité de régulation 7. En permettant la recevabilité des recours pour excès de pouvoir dirigés contre les actes de droit souple des autorités de régulation, le Conseil d’État se prépare à vérifier la compétence de ces autorités pour adopter ce type d’actes. Lorsque le Conseil d’État sera saisi de recommandations de l’AMF ou de l’ACPR, le contrôle de la compétence de l’autorité devrait être simple puisque la compétence de ces autorités est fondée sur une base textuelle explicite (A), et que le champ de cette compétence est explicitement limité (B). A – Une compétence fondée sur une base textuelle explicite 8. En théorie, le moyen tiré de l’incompétence de l’ACPR ou de l’AMF pour édicter la recommandation dont la légalité est contestée ne devrait pas poser de difficultés particulières, dans la mesure où le législateur donne expressément compétence à ces autorités de régulation pour édicter de telles recommandations. 9. S’agissant de l’ACPR, on remarque que l’autorité de régulation rappelle systématiquement dans ses recommandations – à l’exception de sa recommandation n° 2015-R-02 du 12 février 2015 – qu’elle agit conformément aux articles L. 612-1, II, 3°, et L. 612-29-1, alinéa 2, du Code monétaire et financier69. Si l’ACPR prend soin de préciser ces deux fondements, il n’est pas certain que ces deux textes fondent sa compétence. En prévoyant que l’ACPR « peut (…) formuler des recommandations définissant des règles de bonne pratique professionnelle en matière de commercialisation et de protection de la clientèle », l’article L. 612-29-1, alinéa 2, du Code monétaire et financier donne compétence à l’ACPR pour édicter de telles recommandations. En revanche, l’article L. 612-1, II, 3°, du Code monétaire et financier ne traite pas de la compétence de l’ACPR mais de sa mission. Selon cette disposition, l’ACPR est chargée de « veiller au respect par les personnes soumises à son contrôle des règles destinées à assurer la protection de leur clientèle, résultant notamment (…) des bonnes pratiques de leur profession qu’elle constate ou recommande ». Certes, avant l’introduction par la loi de régulation bancaire et financière du 22 octobre 2010 de l’article L. 612-29-1 dans le Code monétaire et financier, l’article L. 612-1, II, 3°, était considéré comme fondant la compétence de l’ACP pour prendre des recommandations. Mais c’est justement afin d’élargir et de clarifier les compétences de l’ACP en matière de codes de bonne conduite et de règles de bonne pratique professionnelle, que le nouvel article L. 612-29-1 a été inséré70. La mission de l’ACPR ne pouvant se confondre avec sa compétence, il semblerait que la compétence de l’ACPR pour adopter des recommandations soit fondée exclusivement sur l’article L. 612-29-1, alinéa 2, du Code monétaire et financier. 10. Quant à l’AMF, sa compétence pour prendre des recommandations repose sur deux dispositions légales, lesquelles visent en réalité deux types de recommandations. D’une part, l’article L. 621-6, alinéa 2, du Code monétaire et financier prévoit que l’AMF peut « publier des instructions et des recommandations aux fins de préciser l’interprétation du règlement général ». L’AMF est également compétente sur le fondement de l’article L. 621-18-3, alinéa 1, du Code monétaire et financier. Dans le cadre de cette disposition, l’AMF doit établir chaque année un rapport sur la base des informations publiées par les sociétés cotées dont le siège statutaire est situé en France, portant sur le

69 Si la recommandation n° 2010-R-01 du 15 octobre 2010 ne se réfère qu’à l’article L. 612-1, II, 3°, du

Code monétaire et financier, c’est parce que lorsqu’elle a été adoptée, l’article L. 612-29-1 du Code monétaire et

financier n’avait pas encore été adopté. 70 V. not. Marini P., rapp. n° 703 (2009-2010), fait au nom de la Commission des finances du Sénat et

déposé le 14 sept. 2010, spéc. sous art. 7 undecies.

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gouvernement d’entreprise, la rémunération des dirigeants et le contrôle interne. À cette occasion, l’article L. 621-18-3, alinéa 1, donne compétence à l’AMF pour « approuver toute recommandation qu’elle juge utile ». 11. Ces différentes dispositions sont suffisamment claires pour écarter tout débat sur la compétence de l’AMF et de l’ACPR pour édicter des recommandations. Il est donc étonnant que dans sa décision du 20 juin 201671, le Conseil d’État ait justifié la compétence de l’ACPR pour édicter une recommandation en se fondant sur l’absence de caractère normatif de la recommandation72. Si l’absence de caractère normatif suffisait à justifier la compétence de l’autorité de régulation, les autorités de régulation seraient systématiquement compétentes pour édicter des actes de droit souple, qui sont par essence dépourvus de caractère normatif. Pourtant, s’agissant des recommandations de l’ACPR, il suffisait au Conseil d’État de se fonder sur l’article L. 612-29-1, alinéa 2, du Code monétaire et financier afin de justifier la compétence de l’ACPR pour édicter des recommandations73. En outre, tout détour par les dispositions relatives à la mission de ces autorités de régulation, comme cela a été fait par le Conseil d’État à propos d’une mise en garde de l’AMF74 et d’une position de l’ACPR75, serait donc inutile voire contraire à la loi. 12. En revanche, la compétence de l’AMF et l’ACPR – et plus particulièrement du collège de l’AMF76 et du collège de supervision de l’ACPR77 – pour édicter des recommandations, ne signifie pas que ces autorités sont dispensées de respecter le champ de leur compétence.

71 CE, 20 juin 2016, n° 384297. 72 Selon le Conseil d’État, « il résulte des termes mêmes de l’acte attaqué que les recommandations qu’il

contient ne présentent pas de caractère impératif et n’ont pas vocation à modifier l’ordonnancement juridique.

En formulant ces recommandations, l’ACPR s’est bornée à inviter les professionnels du secteur concerné à

adopter des règles de bonne pratique professionnelle en matière de distribution des contrats d’assurance vie.

Cet acte ne saurait être regardé comme édictant des règles nouvelles relevant du domaine de la loi ou du

règlement. L’ACPR était, dans ces conditions, compétente pour formuler la recommandation attaquée » (CE, 20

juin 2016, n° 384297, cons. 4). 73 Le rapporteur public, R. Victor, relevait d’ailleurs bien dans ses conclusions que « le législateur a lui-

même prévu que, dans l’exercice de son contrôle en matière de protection de la clientèle, l’ACPR pourrait

recourir à des actes de droit souple » (CE, 20 juin 2016, n° 384297, concl. Victor R., § 4.1). 74 CE, 21 mars 2016, n° 368082. 75 CE, 30 juin 2016, n° 383822. 76 La compétence du collège de l’AMF se déduit de l’article L. 621-2, I, du Code monétaire et financier.

Les « Principes d’organisation et de publication de la doctrine de l’AMF » (17 juill. 2014) rappellent d’ailleurs

que « la doctrine est approuvée par le collège de l’AMF ». 77 La compétence du collège de supervision de l’ACPR se déduit de l’article L. 612-4 du Code monétaire

et financier et est rappelée par l’autorité de régulation dans son document intitulé « Politique de transparence de

l’Autorité de contrôle prudentiel », juill. 2011.

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B – Une compétence explicitement limitée 13. Le législateur a en effet défini les domaines dans lesquels ces recommandations pouvaient être prises. En dehors des différents champs délimités par le législateur, l’AMF tout comme l’ACPR ne sont plus compétentes pour édicter des recommandations. Ainsi, l’ACPR ne pourrait pas adopter une recommandation qui ne concernerait pas la commercialisation et la protection de la clientèle visées par l’article L. 612-29-1, alinéa 2, du Code monétaire et financier, ce dont l’ACPR semble consciente lorsqu’elle présente les différents instruments juridiques dont elle dispose. Dans son document intitulé « Politique de transparence de l’Autorité de contrôle prudentiel »78, les recommandations sont en effet présentées dans une partie consacrée aux « instruments spécifiques de l’Autorité de contrôle prudentiel en matière de commercialisation et de protection de la clientèle ». Le champ de compétence de l’ACPR étant suffisamment large, le vice d’incompétence devrait rarement permettre d’annuler une recommandation prise par l’ACPR. 14. En revanche, un tel vice d’incompétence pourrait avoir de plus grandes chances de succès s’agissant des recommandations de l’AMF, notamment lorsque l’autorité s’intéresse au droit des sociétés. Il n’est en effet pas certain que l’AMF ait toujours conscience des limites de sa compétence en matière de droit souple et plus particulièrement de recommandations. Selon la loi, les recommandations de l’AMF peuvent soit concerner le gouvernement d’entreprise, la rémunération des dirigeants et le contrôle interne79, soit avoir pour objet de « préciser » l’interprétation de son règlement général80. Dans ce dernier cas, les termes de la loi sont dépourvus d’ambiguïté, l’AMF peut préciser l’interprétation de son règlement général et non ajouter à son règlement général. Si l’AMF souhaite ajouter à son règlement général, elle doit respecter la procédure prévue par le législateur, c’est-à-dire que cet ajout doit être homologué par le ministre de l’Économie. 15. Pourtant l’AMF a une approche plus équivoque de son champ de compétence en matière de recommandations. Lorsqu’elle explicite la portée de ses recommandations81, l’AMF reste vague sur ce point en considérant que « la recommandation est une invitation à adopter un comportement ou à se conformer à une disposition, comportement ou disposition que l’AMF considère comme susceptibles de faciliter la réalisation des objectifs des normes ou principes généraux relevant de son champ de compétence ». L’AMF semble ainsi adopter une vision extensive de son champ de compétence, ce qui se confirme à la lecture de certaines recommandations. Dans sa position-recommandation intitulée « Guide pour la rédaction des documents commerciaux et la commercialisation des OPC »82, l’AMF recommande notamment que « tout fonds commercialisé en France souhaitant mettre en avant un caractère ISR publie un document explicitant sa démarche sur le modèle du Code de transparence européen ou adhère à une charte, un code, ou un label sur la prise en compte de critères relatifs au respect d’objectifs sociaux, environnementaux et de qualité de gouvernance »83. Cette recommandation ne s’inscrit pas dans le champ de l’article L. 621-18-3, alinéa 1, du Code monétaire et financier, mais plutôt dans celui de l’article L. 621-6, alinéa 2. Pourtant, en

78 ACPR, « Politique de transparence de l’Autorité de contrôle prudentiel », juill. 2011. 79 C. mon. fin., art. L. 621-18-3, al. 1. 80 C. mon. fin., art. L. 621-6, al. 2. 81 AMF, « Principes d’organisation et de publication de la doctrine de l’AMF », 17 juill. 2014, préc. 82 AMF, Position-recomm. DOC n° 2011-24, mod. 26 mai 2016. 83 AMF, Position-recomm. DOC n° 2011-24, mod. 26 mai 2016, p. 9.

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adoptant cette recommandation, l’AMF dépasse son champ de compétence : l’AMF ne se contente pas de préciser son règlement général mais elle y ajoute. Dans une autre recommandation, celle sur les assemblées générales d’actionnaires de sociétés cotées84, l’AMF commence en rappelant que « le régulateur français, en raison de sa mission de protection de l’épargne, porte une attention particulière à la capacité des actionnaires d’exercer leurs droits de vote aux assemblées » générales. Par cette formule, l’AMF semble justifier sa compétence par sa mission, alors même que le législateur a délimité sa compétence en matière de recommandations. Or, dans cette recommandation, l’AMF semble encore une fois dépasser le champ de sa compétence. Prenons l’exemple de la proposition numéro 15 dont l’AMF recommande l’application. Selon cette recommandation, les sociétés cotées devraient « mettre en place un bureau de l’assemblée générale qui soit constitué d’un président et de deux scrutateurs, sauf impossibilité dûment expliquée dans le procès-verbal de l’assemblée ». Cette règle – bien que de droit souple – dépasse la compétence de l’autorité de régulation : cette recommandation ne s’inscrit ni dans le cadre de l’article L. 621-6, alinéa 2, puisqu’elle ne précise pas le règlement général, ni dans le cadre de l’article L. 621-18-3, alinéa 1, dans la mesure où elle ne concerne pas une question abordée dans les informations rendues publiques par les sociétés cotées au titre de cette disposition. 16. La compétence de l’autorité de régulation – et plus souvent certainement en pratique celle de l’AMF – pour adopter une recommandation pourrait ainsi parfois être discutée devant le juge de l’excès de pouvoir. Dans la mesure où le législateur donne spécialement compétence à l’AMF et à l’ACPR pour édicter de telles normes de droit souple, ces deux autorités doivent respecter le champ de leur compétence. Il y a là une véritable limite aux pouvoirs de l’AMF et de l’ACPR dont le Conseil d’État devra être garant, dès lors qu’il accepte désormais de vérifier la légalité de ces recommandations. Sauf à ne pas respecter les termes de la loi, rien n’autoriserait donc le Conseil d’État à justifier la compétence de l’AMF ou de l’ACPR pour édicter des recommandations en se fondant artificiellement sur la mission de ces autorités ou sur le caractère non contraignant de ces normes de droit souple. 17. L’existence d’une base légale explicite pour les recommandations de l’AMF et de l’ACPR constitue ainsi une garantie pour leurs destinataires. En cas de dépassement du champ de leur compétence, le Conseil d’État devrait être contraint d’accueillir le moyen tiré de l’incompétence de l’autorité de régulation. Au-delà de ce moyen, d’autres moyens pourraient également être développés par le requérant. II – Les autres moyens 18. Parmi les autres moyens qui pourraient être invoqués à l’encontre d’une recommandation de l’AMF ou de l’ACPR, deux moyens retiennent plus particulièrement l’attention, celui tiré d’un vice de procédure (A) et celui tiré de la violation de la loi (B). A – Le moyen tiré d’un vice de procédure 19. À l’heure actuelle, le moyen tiré d’un vice de procédure aurait peu de chance d’être accueilli par le Conseil d’État si ce dernier avait à connaître d’un recours contre une recommandation de l’AMF ou de l’ACPR. L’un des avantages de recourir à ce type d’instrument de droit souple est justement de dispenser l’autorité de régulation de contraintes procédurales particulières. C’est cette souplesse et cette flexibilité qui encouragent le recours aux recommandations. Si la loi est muette sur la procédure d’adoption des recommandations85, les autorités de régulation ne sont pas indifférentes au respect d’une certaine procédure qui consisterait à consulter préalablement les professionnels du secteur. C’est ainsi que dans le document intitulé « Politique de transparence de l’Autorité de contrôle prudentiel »,

84 AMF, Recomm. DOC n° 2012-05, mod. 11 févr. 2015. 85 L’article L. 612-29-1, al. 4, du Code monétaire et financier prévoit simplement la publication dans un

recueil des recommandations de l’ACPR. Cette règle de publicité ne devrait cependant pas être assimilée à une

règle de procédure dans la mesure où elle doit être respectée postérieurement à l’adoption de la recommandation.

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l’autorité de régulation explique que « les différents instruments auxquels l’ACP peut recourir sont adoptés

a l’issue d’un processus formalise. Le collège de l’ACP a compétence pour adopter les actes de l’ACP, après

avoir, sauf exception, consulte la profession. La consultation de la profession peut se faire soit par la saisine des

commissions consultatives que l’ACP a créées en son sein conformément a l’article L. 612-14, I, du Code

monétaire et financier, ou sont représentées différentes composantes de la profession, y compris les associations professionnelles, soit par l’organisation de consultations spécifiques, pouvant impliquer de façon particulière les organisations professionnelles et d’autres acteurs, soit encore en utilisant les deux canaux »86. L’AMF prévoit également que « les interlocuteurs de l’AMF – professionnels et représentants des épargnants – sont généralement consultés au cours du processus d’élaboration de sa doctrine, dans le cadre des commissions consultatives et/ou par le biais d’associations représentatives ou de personnalités qualifiées possédant une expertise dans le domaine concerné »87. 20. Tant l’AMF que l’ACPR prévoient donc une consultation préalable, des professionnels notamment. Cependant, aucune des deux autorités de régulation ne rend obligatoire cette consultation. En effet, l’ACPR explique qu’il pourrait être fait exception à cette consultation, sans préciser les cas qui pourraient faire exception. L’AMF est encore plus évasive, puisqu’elle prévoit simplement que les professionnels sont « généralement » consultés, laissant à sa libre appréciation la décision de procéder à des consultations. S’agissant de l’AMF, on remarque d’ailleurs une évolution de sa position sur cette question. En 2010, elle était plus exigeante puisqu’elle prévoyait une consultation des professionnels et représentants des épargnants « sauf exception motivée par des circonstances exceptionnelles ou particulières imposant des délais resserrés ou la confidentialité de la doctrine jusqu’à sa publication »88. En l’état des principes prévus par l’AMF et l’ACPR, l’absence de consultation de la profession avant l’adoption d’une recommandation ne constituerait donc pas nécessairement un vice de procédure. Tout dépendra en réalité de l’approche que retiendra le Conseil d’État. 21. Selon une première approche, le Conseil d’État pourrait estimer que la consultation est laissée à la libre appréciation de l’AMF et de l’ACPR et, dans ce cas, l’absence de consultation ne permettrait pas l’annulation d’une recommandation. Cette solution est très vraisemblable dans la mesure où le Conseil d’État semble vouloir imposer un « contrôle juridictionnel souple » au droit souple89, ce qui ressort notamment du considérant de principe des décisions du 21 mars 2016. Selon ce considérant qui a été repris dans les décisions ultérieures, il appartiendra au juge « d’examiner les vices susceptibles d’affecter la légalité de ces actes en tenant compte de leur nature et de leurs caractéristiques, ainsi que du pouvoir d’appréciation dont dispose l’autorité de régulation ». 22. Cependant, une seconde approche n’est pas à exclure. Le Conseil d’État pourrait être plus strict en exigeant que l’AMF ou l’ACPR apporte une justification à l’absence de consultation. Le Conseil d’État – ou plutôt certains de ses membres – semblent en effet particulièrement sensibles aux questions de procédure en matière de droit souple. Le rapporteur public dans l’affaire Fairvesta a ainsi pu écrire « si les autorités se dotent de textes formalisant la procédure à suivre pour l’élaboration de ces prises de position, recommandations et mises en garde publiques, nous ne voyons pas de raison de ne pas en contrôler le respect. Nous croyons en effet que les considérations de procédure ne sont pas neutres pour asseoir la

86 ACPR, « Politique de transparence de l’Autorité de contrôle prudentiel », juill. 2011, point 3.1. 87 AMF, « Principes d’organisation et de publication de la doctrine de l’AMF », 17 juill. 2014, préc. 88 AMF, « Principes d’organisation et de publication de la doctrine de l’AMF », 7 déc. 2010. 89 von Coaster S. et Daumas V., « Le Conseil d’État accepte de se saisir d’actes de droit souple », Dr.

adm. 2016, comm. 20.

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légitimité d’un pouvoir de régulation qui privilégie l’adhésion, plutôt que la contrainte »90. Si les autorités de régulation répondent à l’invitation du Conseil d’État à formaliser les procédures d’adoption de leurs instruments de droit souple, ce moyen tiré d’un vice de procédure pourrait éventuellement permettre à l’avenir de contester la légalité des recommandations de l’AMF et de l’ACPR, sous réserve que le Conseil d’État considère que la règle de procédure violée était bien substantielle. B – Le moyen tiré de la violation de la loi 23. Un autre moyen pourrait également permettre de contester la légalité des recommandations. Le requérant pourrait invoquer la contrariété de la recommandation à une norme supérieure. Devant respecter la hiérarchie des normes, les autorités de régulation ne peuvent pas – au travers de leurs recommandations – contredire des normes supérieures. En revanche, elles peuvent compléter ces normes, ce qui est d’ailleurs généralement l’objet du droit souple. Les normes supérieures sont alors celles du droit « dur », qu’il s’agisse des lois, des dispositions réglementaires – notamment le règlement général de l’AMF –, des règles issues du droit de l’Union européenne, ou encore des dispositions à valeur constitutionnelle. 24. Dans l’affaire FFSA c/ ACPR ayant donné lieu à la décision du 20 juin 2016, le Conseil d’État avait à se prononcer sur la conformité de la recommandation à certaines dispositions légales et réglementaires du Code des assurances, mais également au principe de valeur constitutionnelle de la liberté contractuelle. Si le Conseil d’État a évidemment analysé ces deux moyens, il ne semble pas avoir exercé son contrôle avec la même intensité. Le moyen tiré de la violation des dispositions du Code des assurances a été minutieusement étudié pour finalement être rejeté au motif que la recommandation préconisait simplement des modalités pratiques de mise en œuvre des dispositions du Code des assurances, et ce sans les méconnaître. En revanche, le second moyen tiré de la violation du principe de la liberté contractuelle semble avoir fait l’objet d’un contrôle plus superficiel. En effet, selon le requérant, la recommandation contredit ce principe constitutionnel, puisqu’elle impose en cas d’interposition d’intermédiaires entre l’organisme d’assurance et l’assuré, la conclusion d’un contrat non prévu par la loi entre l’intermédiaire « initial » et l’intermédiaire « distributeur ». Cependant, le Conseil d’État a refusé de reconnaître que par cette recommandation, l’ACPR portait atteinte au principe de la liberté contractuelle, et ce pour deux raisons. D’une part, il a estimé que cette recommandation « ne saurait conduire à modifier les contrats conclus avant cette date ». D’autre part, il s’est fondé sur le caractère non contraignant des recommandations pour considérer que les entreprises concernées n’étaient pas contraintes de conclure de telles conventions, et qu’elles pouvaient adopter « d’autres pratiques qui préserveraient de façon équivalente les intérêts de leurs clients ». Si les arguments avancés par le Conseil d’État se comprennent, ils peuvent néanmoins laisser songeur. Certes, en théorie, la liberté contractuelle est préservée. Mais, en pratique, l’exercice de cette liberté devient fictif. Les autorités de régulation considéreront-elles véritablement que l’intérêt des clients est préservé lorsqu’une telle convention n’a pas été conclue ? Et comment préserver l’intérêt des clients pour les contrats en cours ? En cas de chaîne de distribution, les organismes d’assurance prendront-ils le risque en pratique de ne pas imposer la conclusion des contrats recommandée par l’ACPR91 ? 25. Face à cette réalité, il semble difficile que le Conseil d’État ne contrôle pas avec la plus grande rigueur les moyens tirés de la violation de la loi par les recommandations de l’ACPR et de l’AMF. Le caractère non contraignant des recommandations ne peut servir de prétexte au Conseil d’État pour refuser de contrôler leur conformité aux normes supérieures. Sinon, ne pourrait-on pas y voir une

90 Conclusions de von Coester S., rapporteur public, dans l’affaire Fairvesta qui a donné lieu à la décision

du Conseil d’État du 21 mars 2016, n° 368082, p. 11. 91 Les personnes soumises au contrôle de l’ACPR risquent en effet une sanction en cas de non-respect

d’une recommandation, ou plus précisément d’une mise en garde d’avoir à respecter une pratique recommandée

(C. mon. fin., art. L. 612-30 ; C. mon. fin., art. L. 612-39).

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forme d’incitation pour les autorités de régulation à prendre certaines libertés à l’égard du droit dur en passant par la voie du droit souple ?

Doc. 10 : CE, Ass, 21 mars 2016, n°368082, Fairvesta 1. Considérant que les requêtes visées ci-dessus présentent à juger des questions connexes ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ; 2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Fairvesta International GmbH, société domiciliée..., a proposé aux investisseurs en France, à compter de 2009, des produits de placements immobiliers, dénommés Mercatus VIII, Lumis et Chronos, prenant la forme de prises de participation dans des sociétés en commandite simple de droit allemand ayant pour objet l'acquisition, la gestion ou le négoce d'immeubles ; que ces placements étaient commercialisés en France par l'intermédiaire d'agents immobiliers et de conseillers en gestion du patrimoine qui démarchaient les investisseurs potentiels ; que, le 21 juillet 2011, l'Autorité des marchés financiers a publié sur son site Internet, dans la rubrique " Mises en garde ", un communiqué intitulé " L'Autorité des marchés financiers attire l'attention du public sur les activités de la société Fairvesta ", rédigé comme suit : " L'Autorité des marchés financiers (AMF) reçoit de nombreuses questions de la part d'investisseurs particuliers et de professionnels relatives aux activités de la société Fairvesta. Cette société (...) propose des placements immobiliers tels que Mercatus VIII, Lumis, ou encore Chronos avec des perspectives de rendement élevées. Ces placements sont souvent commercialisés en France de manière très active par des personnes tenant des discours parfois déséquilibrés au regard des risques en capital encourus. Ces produits ne relèvent pas de la réglementation applicable aux titres financiers. La société Fairvesta n'est d'ailleurs ni autorisée à fournir en France des services d'investissement ou des conseils en investissement financier ni habilitée à se livrer à une activité de démarchage bancaire ou financier et les placements proposés n'ont pas donné lieu à l'élaboration d'un document d'information visé ou revu par l'AMF " ; que le communiqué invitait ensuite les épargnants, d'une manière générale, à appliquer des règles de vigilance avant tout investissement, et notamment à mesurer le risque des produits, à se renseigner de façon approfondie sur leurs caractéristiques, sur les intermédiaires les proposant, sur leurs modes de valorisation et leurs modalités de revente, en précisant que les épargnants pouvaient s'adresser à l'Autorité pour obtenir de plus amples informations ; que, le 17 juillet 2012, l'Autorité des marchés financiers a publié, dans les mêmes conditions, un communiqué attirant à nouveau l'attention du public sur les activités de la société Fairvesta, qui reprenait les termes du premier communiqué et précisait, dans une note de bas de page, que deux autres sociétés du groupe Fairvesta, les sociétés Fairvesta Europe AG et Fairvesta Europe AG II, domiciliées au Liechtenstein, émettaient des obligations ayant fait l'objet de visas délivrés par l'autorité de régulation de ce pays et de certificats d'approbation et prospectus notifiés à l'Autorité des marchés financiers ; que, le 5 novembre 2012, l'Autorité a publié un nouveau communiqué attirant cette fois l'attention du public sur le site Internet " Fairvesta ", dans des termes quasiment identiques à ceux utilisés en juillet 2012 ; que, par un courrier reçu par l'Autorité des marchés financiers le 16 janvier 2013, la société Fairvesta International GmbH a demandé l'indemnisation du préjudice qu'elle estimait avoir subi à la suite de la publication de ces trois communiqués ainsi que la publication d'un communiqué rectificatif sur son site Internet ; que, par un courrier du 13 février 2013, l'Autorité des marchés financiers a refusé de faire droit à cette demande, position qu'elle a confirmée dans un courrier du 12 avril 2013 en réponse à une nouvelle demande de la société ; que la société Fairvesta International GmbH et autres demandent l'annulation de ces trois communiqués, des décisions ayant refusé de les rectifier, et, dans le dernier état des conclusions, la condamnation de l'Autorité des marchés financiers à verser une somme de 15 millions d'euros à la société Fairvesta International GmbH au titre du préjudice financier et du préjudice d'image qu'elle estime avoir subis ; Sur la compétence de la juridiction administrative :

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3. Considérant que, sur renvoi effectué par la décision du Conseil d'Etat, statuant au contentieux du 10 juin 2015 visée ci-dessus, le Tribunal des conflits a déclaré, par une décision du 16 novembre 2015 visée ci-dessus, la juridiction administrative seule compétente pour connaître du litige né des demandes des sociétés Fairvesta International GmbH, Fairvesta Europe AG, Fairvesta Europe AG II et Fairvesta Vermögensverwaltung International AG tendant à l'annulation des communiqués litigieux et du refus de les rectifier, ainsi qu'à l'indemnisation du préjudice en résultant ; que l'Autorité des marchés financiers n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que la juridiction administrative ne serait pas compétente pour en connaître ; Sur le recours pour excès de pouvoir, introduit sous le n°368082, tendant à l'annulation des communiqués publiés par l'Autorité des marchés financiers : En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par l'Autorité des marchés financiers : 4. Considérant que les avis, recommandations, mises en garde et prises de position adoptés par les autorités de régulation dans l'exercice des missions dont elles sont investies, peuvent être déférés au juge de l'excès de pouvoir lorsqu'ils revêtent le caractère de dispositions générales et impératives ou lorsqu'ils énoncent des prescriptions individuelles dont ces autorités pourraient ultérieurement censurer la méconnaissance ; que ces actes peuvent également faire l'objet d'un tel recours, introduit par un requérant justifiant d'un intérêt direct et certain à leur annulation, lorsqu'ils sont de nature à produire des effets notables, notamment de nature économique, ou ont pour objet d'influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles ils s'adressent ; que, dans ce dernier cas, il appartient au juge, saisi de moyens en ce sens, d'examiner les vices susceptibles d'affecter la légalité de ces actes en tenant compte de leur nature et de leurs caractéristiques, ainsi que du pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité de régulation ; qu'il lui appartient également, si des conclusions lui sont présentées à cette fin, de faire usage des pouvoirs d'injonction qu'il tient du titre Ier du livre IX du code de justice administrative ; 5. Considérant que les communiqués attaqués ont été émis par l'Autorité des marchés financiers dans le cadre de sa mission de protection de l'épargne investie dans les placements offerts au public ; qu'ils sont destinés aux investisseurs et ont pour objet de les mettre en garde contre les conditions dans lesquelles sont commercialisés plusieurs produits de placement, précisément identifiés, offerts au public par la société Fairvesta International GmbH et de leur adresser des recommandations de vigilance ; qu'ils ont été publiés sur le site internet de l'Autorité des marchés financiers, ont connu une large diffusion et sont depuis lors restés accessibles sur ce site ; que la société Fairvesta International GmbH fait valoir des éléments sérieux attestant que la publication de ces communiqués a eu pour conséquence une diminution brutale des souscriptions des produits de placement qu'elle commercialisait en France ; qu'ainsi, les communiqués contestés doivent être regardés comme étant de nature à produire des effets économiques notables et comme ayant pour objet de conduire des investisseurs à modifier de manière significative leur comportement vis-à-vis des produits qu'ils désignent ; que, dans les circonstances de l'espèce, ces communiqués, qui font référence à " la société Fairvesta " doivent être regardés comme faisant grief à la société Fairvesta International GmbH et aux sociétés Fairvesta Europe AG, Fairvesta Europe AG II et Fairvesta Vermögensverwaltung International AG, filiales du groupe Fairvesta, qui sont recevables à en demander l'annulation ; que, par suite, la fin de non-recevoir soulevée par l'Autorité des marchés financiers doit être écartée ; En ce qui concerne la légalité des communiqués : 6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 621-1 du code monétaire et financier : " L'Autorité des marchés financiers, autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, veille à la protection de l'épargne investie dans les instruments financiers et les actifs mentionnés au II de l'article L. 421-1 donnant lieu à une offre au public ou à une admission aux négociations sur un marché réglementé et dans tous autres placements offerts au public. Elle veille également à l'information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d'instruments financiers et

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d'actifs mentionnés au II de l'article L. 421-1. Elle apporte son concours à la régulation de ces marchés aux échelons européen et international " ; 7. Considérant qu'en vertu de ces dispositions, il appartient à l'Autorité des marchés financiers de publier des communiqués invitant les épargnants ou investisseurs à faire preuve de vigilance vis-à-vis de certains types de placements ou de pratiques financières risqués ; qu'il résulte des termes des dispositions citées ci-dessus que le législateur a entendu confier à l'Autorité des marchés financiers une mission de protection de l'épargne et d'information des investisseurs qui s'étend non seulement aux instruments financiers, définis par l'article L. 211-1 du code monétaire et financier, et aux actifs mentionnés au II de l'article L. 421-1 du même code admis aux négociations sur un marché réglementé, mais également à tous les autres placements offerts au public ; que, par suite, alors même que les placements immobiliers proposés par la société Fairvesta International GmbH ne relevaient pas, ainsi que le soulignaient les communiqués attaqués, de la réglementation applicable aux titres financiers, il était loisible à l'Autorité des marchés financiers, sans excéder sa compétence, d'appeler l'attention des investisseurs sur leurs caractéristiques et leurs modalités de commercialisation, dès lors qu'il s'agissait de placements offerts au public ; que les sociétés requérantes ne sont, par suite, pas fondées à soutenir que l'Autorité des marchés financiers n'était pas compétente pour publier les communiqués litigieux ; 8. Considérant, en second lieu, d'une part, que les communiqués attaqués ne sont entachés d'aucune des inexactitudes alléguées par les sociétés requérantes ; que, notamment, en mentionnant que les placements immobiliers offerts par la société Fairvesta sont " souvent commercialisés en France de manière très active par des personnes tenant des discours parfois déséquilibrés au regard des risques en capital encourus ", les termes des communiqués attaqués n'impliquent pas nécessairement que les placements en cause seraient commercialisés en France par la société Fairvesta elle-même ; que les communiqués n'opèrent pas de confusion entre les activités de commercialisation de placements immobiliers de la société Fairvesta International GmbH et les activités de commercialisation de titres obligataires et de prestations de services d'investissement exercées par des filiales du même groupe, l'Autorité des marchés financiers ayant d'ailleurs inséré, dans ses communiqués des 17 juillet et 5 novembre 2012, une note de bas de page faisant clairement la distinction entre les activités respectives de ces différentes sociétés ; qu'il est constant que la société Fairvesta n'est ni autorisée à fournir en France des services d'investissements financiers, ni habilitée à se livrer à une activité de démarchage bancaire ou financier, et que les placements qu'elle propose n'ont pas donné lieu à l'élaboration de documents d'informations visés ou revus par l'Autorité des marchés financiers ; que, d'autre part, en publiant les communiqués attaqués, l'Autorité des marchés financiers n'a pas excédé les limites de sa mission d'information des investisseurs ni commis d'erreur de droit, et n'a pas entaché son appréciation d'erreur manifeste ; 9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation des communiqués qu'elles attaquent ; que le surplus de leurs conclusions ne peut, dès lors, qu'être rejeté ; Sur le recours pour excès de pouvoir, introduit sous le n° 368084, tendant à l'annulation du refus de rectifier les communiqués publiés par l'Autorité des marchés financiers : En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par l'Autorité des marchés financiers : 10. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 que la société Fairvesta International GmbH est recevable à demander l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à sa demande de rectification des communiqués litigieux ; qu'il en va de même, dans les circonstances de l'espèce, des sociétés Fairvesta Europe AG, Fairvesta Europe AG II et Fairvesta Vermögensverwaltung International AG, filiales du groupe Fairvesta ;

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11. Considérant, en second lieu, que l'Autorité des marchés financiers soutient que la requête est irrecevable en ce qu'elle est dirigée contre le refus de rectifier les communiqués litigieux signifié aux sociétés intéressées par un courrier du 12 avril 2013, qui ne ferait que confirmer le refus déjà opposé aux mêmes sociétés par un courrier du 13 février 2013, lequel n'aurait pas été contesté dans le délai de recours contentieux ; que, toutefois, la décision de refus opposée par l'Autorité des marchés financiers par son courrier du 13 février 2013 ne comportait pas la mention des voies et délais de recours prévue par l'article R. 421-5 du code de justice administrative, de sorte que le délai de recours contentieux n'a pas commencé à courir à l'égard des sociétés requérantes ; qu'ainsi, la requête enregistrée le 25 avril 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat n'est pas tardive ; qu'il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par l'Autorité des marchés financiers doit être écartée ; En ce qui concerne la légalité externe : 12. Considérant que le refus de l'Autorité des marchés financiers de rectifier un communiqué de mise en garde des investisseurs n'entre dans aucune des catégories de décisions dont l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, alors applicable, exige la motivation ; qu'aucune autre disposition réglementaire ou législative n'exige la motivation d'un tel refus ; qu'ainsi, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le refus qu'elles attaquent serait insuffisamment motivé ; En ce qui concerne la légalité interne : 13. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l'Autorité des marchés financiers ne serait pas compétente pour publier les communiqués litigieux et que son refus de les rectifier serait, dans cette mesure, entaché d'erreur de droit ; 14. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 8 que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir qu'en refusant de rectifier les communiqués litigieux sur les différents points mentionnés ci-dessus, l'Autorité des marchés financiers aurait commis une erreur manifeste d'appréciation et une erreur de droit ; 15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision de refus qu'elles attaquent ; que le surplus de leurs conclusions ne peut, dès lors, qu'être rejeté ; (…) DECIDE : Article 1er : Les requêtes de la société Fairvesta International GmbH et autres sont rejetées. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Fairvesta International GmbH, premier requérant dénommé et à l'Autorité des marchés financiers. Les autres requérants seront informés de la présente décision par la SCP Foussard-Froger, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.

Doc. 11 : CE, 9ème et 10ème chambres réunies, n°384297 Considérant ce qui suit : Sur la fin de non-recevoir opposée par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution : 1. Les avis, recommandations, mises en garde et prises de position adoptés par les autorités de régulation dans l'exercice des missions dont elles sont investies, peuvent être déférés au juge de l'excès de pouvoir lorsqu'ils revêtent le caractère de dispositions générales et impératives ou lorsqu'ils énoncent des prescriptions individuelles dont ces autorités pourraient ultérieurement

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censurer la méconnaissance. Ces actes peuvent également faire l'objet d'un tel recours, introduit par un requérant justifiant d'un intérêt direct et certain à leur annulation, lorsqu'ils sont de nature à produire des effets notables, notamment de nature économique, ou ont pour objet d'influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles ils s'adressent. Dans ce dernier cas, il appartient au juge, saisi de moyens en ce sens, d'examiner les vices susceptibles d'affecter la légalité de ces actes en tenant compte de leur nature et de leurs caractéristiques, ainsi que du pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité de régulation. 2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 612-29-1 du code monétaire et financier, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) " peut constater l'existence de bonnes pratiques professionnelles ou formuler des recommandations définissant des règles de bonne pratique professionnelle en matière de commercialisation et de protection de la clientèle ". Sur le fondement de ces dispositions, l'ACPR a, par l'acte du 3 juillet 2014 dont la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA) demande l'annulation pour excès de pouvoir, émis des recommandations sur les conventions, conclues entre les entreprises d'assurance et les intermédiaires en assurance, concernant la distribution des contrats d'assurance vie. Ces recommandations ont pour objet d'inciter les entreprises d'assurance et les intermédiaires, qui en sont les destinataires, à modifier sensiblement leurs relations réciproques. La FFSA, qui représente les intérêts des entreprises d'assurance, est dès lors recevable à en demander l'annulation. Sur les interventions : 3. La Chambre syndicale des courtiers d'assurances (CSCA), le Groupement des entreprises mutuelles d'assurance (GEMA) et la Fédération bancaire française (FBF) justifient d'un intérêt suffisant à l'annulation de la recommandation attaquée. Ainsi leurs interventions sont recevables. Sur la compétence de l'ACPR : 4. Il résulte des termes mêmes de l'acte attaqué que les recommandations qu'il contient ne présentent pas de caractère impératif et n'ont pas vocation à modifier l'ordonnancement juridique. En formulant ces recommandations, l'ACPR s'est bornée à inviter les professionnels du secteur concerné à adopter des règles de bonne pratique professionnelle en matière de distribution des contrats d'assurance vie. Cet acte ne saurait être regardé comme édictant des règles nouvelles relevant du domaine de la loi ou du règlement. L'ACPR était, dans ces conditions, compétente pour formuler la recommandation attaquée. Sur le respect des dispositions du code des assurances et des principes constitutionnels : En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 132-28, R. 132-5-1 et R. 132-5-2 du code des assurances : 5. Aux termes de l'article L. 132-28 du code des assurances : " I.-L'intermédiaire mentionné à l'article L. 511-1 établit des conventions avec les entreprises d'assurance ou de capitalisation proposant les contrats d'assurance individuels comportant des valeurs de rachat, les contrats de capitalisation, les contrats mentionnés à l'article L. 132-5-3 et à l'article L. 441-1 et en raison desquels il exerce son activité d'intermédiation. / Ces conventions prévoient notamment : / 1° Les conditions dans lesquelles l'intermédiaire (...) est tenu de soumettre à l'entreprise d'assurance ou de capitalisation les documents à caractère publicitaire préalablement à leur diffusion afin de vérifier leur conformité au contrat d'assurance ou de capitalisation et, le cas échéant, à la notice ou note ; / 2° Les conditions dans lesquelles sont mises à disposition de l'intermédiaire par l'entreprise d'assurance ou de capitalisation les informations nécessaires à l'appréciation de l'ensemble des caractéristiques du contrat. / II.-Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du I, notamment les cas et conditions dans lesquels l'obligation d'établir des conventions n'est pas justifiée compte tenu de la nature des contrats ou de leur mode de distribution. ". Aux termes de l'article R. 132-5-1 du même

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code : " Les conventions mentionnées à l'article L. 132-28 sont établies par écrit à la demande des intermédiaires et prévoient notamment : / 1° A la charge de l'intermédiaire d'assurance : / a) La soumission à l'entreprise d'assurance de tout projet de document à caractère publicitaire qu'il a établi, quel que soit son support, et de toute modification qu'il entend apporter à ce document, préalablement à sa diffusion ; / b) L'obligation de n'utiliser que les documents à caractère publicitaire approuvés par l'entreprise d'assurance ; / 2° A la charge de l'entreprise d'assurance : / a) La vérification de la conformité au contrat d'assurance ou de capitalisation de tout projet ou modification de document à caractère publicitaire relatif à ce contrat et établi par l'intermédiaire, dans un délai fixé par la convention ; / b) La transmission et la mise à jour systématique, notamment sous forme de fiches de présentation, des informations nécessaires à l'appréciation de l'ensemble des caractéristiques du contrat, tant par l'intermédiaire que par la clientèle (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 132-5-2 du même code : " I. - Les conventions prévues à l'article L. 132-28 ne sont pas exigées dès lors que l'intermédiaire n'a recours qu'aux documents à caractère publicitaire mis à sa disposition par l'entreprise d'assurance et que celle-ci s'est engagée par écrit à lui transmettre les informations mentionnées au b du 2° de l'article R. 132-5-1. / II. - L'établissement d'une telle convention n'est pas exigé en cas de commercialisation des contrats mentionnés à l'article L. 441-1 lorsque le lien qui unit l'adhérent au souscripteur rend obligatoire l'adhésion au contrat. ". 6. D'une part, la recommandation attaquée préconise, à son paragraphe 4.1.3, que lorsque l'intermédiaire a recours à des communications à caractère publicitaire autres que celles mises à sa disposition par l'organisme d'assurance, la convention prévue à l'article L. 132-28 du code des assurances prévoie clairement l'engagement de l'organisme d'assurance de vérifier la conformité des communications à caractère publicitaire " dans un (des) délai(s) fixé(s) en nombre maximum de jours, adapté(s) le cas échéant aux modalités de commercialisation de l'intermédiaire et aux support(s) de communication utilisés ". Ces énonciations, qui se bornent à préconiser des modalités pratiques de mise en oeuvre des dispositions fixées au a du 2° de l'article R. 132-5-1 du code des assurances, laissent aux parties à la convention le soin de fixer la durée du délai dans lequel l'organisme d'assurance doit vérifier la conformité des communications à caractère publicitaire qui lui sont transmises. Dès lors elles ne méconnaissent pas les dispositions de cet article. 7. D'autre part, si la recommandation énonce, à son paragraphe 4.2.3, qu'en cas d'absence de convention, l'écrit par lequel l'entreprise d'assurance doit, aux termes de l'article R. 132-5-2, s'engager à transmettre au distributeur les informations relatives au contrat, devrait préciser le type de documents destinés à cette communication ainsi que le délai et les modalités de transmission de ces informations, ces préconisations constituent, également, des modalités pratiques de mise en oeuvre des dispositions de l'article R. 132-5-2 et n'ajoutent aucune obligation nouvelle qui serait édictée en méconnaissance de ces dispositions. En ce qui concerne le moyen tiré de la violation du principe de la liberté contractuelle : 8. La liberté contractuelle est au nombre des principes de valeur constitutionnelle auxquels seule la loi est, le cas échéant, susceptible d'apporter des restrictions et limitations. La FFSA soutient que la recommandation attaquée porte atteinte à cette liberté en ce qu'elle impose, à son paragraphe 4.3, en cas de " chaîne de distribution ", c'est-à-dire d'interposition de deux ou plusieurs intermédiaires entre l'organisme d'assurance et l'assuré, la conclusion d'un contrat, non prévu par la loi, entre l'intermédiaire " initial " et l'intermédiaire " distributeur ". Il lui est également reproché d'imposer une modification des conventions en cours afin d'y insérer une clause prévoyant la conclusion de convention entre l'intermédiaire initial et l'intermédiaire distributeur. 9. D'une part, si elle prévoit son application à compter du 1er janvier 2015, la recommandation attaquée ne saurait conduire à modifier les contrats conclus avant cette date. 10. D'autre part, si le législateur n'a, par l'article L. 132-28 du code des assurances, prévu la conclusion de conventions qu'entre les entreprises d'assurance ou de capitalisation et les

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intermédiaires mentionnés à l'article L. 511-1 du même code, la recommandation attaquée ne saurait être regardée comme ayant méconnu le principe de la liberté contractuelle en invitant les intermédiaires d'assurance à conclure, entre eux, de telles conventions en cas de " chaîne de distribution ", dès lors que ces dispositions, qui sont dépourvues de caractère impératif, ne contraignent pas les entreprises concernées à conclure de telles conventions mais se bornent à les y inviter, en leur laissant la faculté d'adopter d'autres pratiques qui préserveraient de façon équivalente les intérêts de leurs clients. 11. Il résulte de ce qui précède que la FFSA n'est pas fondée à demander l'annulation de la recommandation qu'elle attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font dès lors obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat (ACPR) qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la FFSA la somme de 3 000 euros à verser à l'Etat (ACPR) au titre des mêmes dispositions. DECIDE : Article 1er : Les interventions de la Chambre syndicale des courtiers d'assurances (CSCA), du Groupement des entreprises mutuelles d'assurance (GEMA) et de la Fédération bancaire française (FBF) sont admises. Article 2 : La requête de la FFSA est rejetée. Article 3 : La FFSA versera à l'Etat (ACPR) la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA), à la Chambre syndicale des courtiers d'assurances, au Groupement des entreprises mutuelles d'assurance, à la Fédération bancaire française et à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

EXERCICE

CE, 9ème et 10ème SSR, 15 décembre 2014, n° 366640 1. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite d'un contrôle effectué du 29 octobre 2007 au 11 janvier 2008 et conclu par un rapport d'inspection définitif du 2 avril 2008, la Commission bancaire a, par une décision du 18 décembre 2009, prononcé à l'encontre de la Banque populaire Côte-d'Azur (BPCA), pour des manquements aux dispositions des règlements du comité de la réglementation bancaire et financière du 15 février 1991 relatif à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic de stupéfiants et du 21 février 1997 relatif au contrôle interne des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, un blâme et une sanction pécuniaire de 600 000 euros, et a rejeté sa demande tendant à ce que cette décision ne fasse l'objet d'aucune mesure de publicité faisant apparaître son nom ; que, par la décision n° 2011-200 QPC du 2 décembre 2011, le Conseil constitutionnel a jugé contraires à la Constitution le premier alinéa de l'article L. 613-1, les articles L. 613-4, L. 613-6, L. 613-21 et le paragraphe I de l'article L. 613-23 du code monétaire et financier, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d'agrément et de contrôle de la banque et de l'assurance ; que le 11 avril 2012, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé la décision de la Commission bancaire du 18 décembre 2009 qui avait été prise sur le fondement de l'article L. 613-21 du code monétaire et financier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 21 janvier 2010 ; qu'à la suite de cette décision, le président du collège " banque " de l'Autorité de contrôle prudentiel a, par deux lettres du 10 mai 2012, d'une part, notifié à la BPCA l'ouverture d'une nouvelle procédure disciplinaire à son encontre sur le fondement des actes de contrôle et de constatation accomplis par la Commission bancaire et, d'autre part, saisi la commission des sanctions ; que, par une décision rendue le 10 janvier 2013 dont elle a ordonné la publication au registre de l'Autorité, la commission des sanctions a prononcé à l'encontre de la BPCA

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un blâme et une sanction pécuniaire de 500 000 euros ; que la BPCA demande l'annulation et, à titre subsidiaire, la réformation de cette décision ; Sur les conséquences à tirer de l'ordonnance du 21 janvier 2010 et de la décision du Conseil constitutionnel du 2 décembre 2011 : 2. Considérant, en premier lieu, que le code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 21 janvier 2010 précitée, conférait à la Commission bancaire la compétence de sanctionner les établissements de crédit, notamment lorsque ceux-ci enfreignaient une disposition législative ou réglementaire au respect de laquelle la Commission avait pour mission de veiller ; que l'article L. 613-6 de ce code donnait compétence au secrétariat général de cette Commission pour effectuer des contrôles sur pièces et sur place ; que, par la décision du 2 décembre 2011 mentionnée au point 1, le Conseil constitutionnel a jugé contraires à la Constitution les dispositions de l'article L. 613-6 et L. 613-21 du code monétaire et financier au motif que ces dispositions, en organisant la Commission bancaire sans séparer en son sein, d'une part, les fonctions de poursuite des éventuels manquements des établissements de crédit aux dispositions législatives et réglementaires qui les régissent et, d'autre part, les fonctions de jugement de ces mêmes manquements, qui peuvent faire l'objet de sanctions disciplinaires, méconnaissaient le principe d'impartialité des juridictions ; que le Conseil constitutionnel a précisé que cette déclaration d'inconstitutionnalité était applicable à toutes les instances non définitivement jugées à la date de sa décision ; 3. Considérant que le premier alinéa du III de l'article 22 de l'ordonnance du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d'agrément et de contrôle de la banque et de l'assurance précise que : " A compter de la première réunion de son collège, l'Autorité de contrôle prudentiel succède dans leurs droits et obligations respectifs à l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, au Comité des entreprises d'assurance, au comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement et à la Commission bancaire. (...) " ; que le 2° de ce III dispose : " La validité des actes de constatation et de procédure accomplis antérieurement à la première réunion du collège de l'Autorité s'apprécie au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date à laquelle ils ont été pris ou accomplis (...) " ; que l'article L. 612-38 du code monétaire et financier, inséré dans ce code par la même ordonnance, donne compétence à l'une des formations du collège de l'Autorité de contrôle prudentiel pour examiner les conclusions établies par ses services dans le cadre de sa mission de contrôle et pour décider l'ouverture d'une procédure de sanction devant sa commission des sanctions ; que, compte tenu, d'une part, du motif de non-conformité à la Constitution de l'article L. 613-6 du code monétaire et financier retenu par le Conseil constitutionnel dans sa décision et, d'autre part, de la portée de l'abrogation de cet article, il était loisible à l'Autorité de contrôle prudentiel d'engager, sur le fondement des dispositions de l'article L. 612-38 du même code et dans le respect des nouvelles règles de séparation des fonctions de contrôle et de sanction, une nouvelle procédure de sanction à l'encontre de la banque requérante, sur le fondement des actes de contrôle et de constatation accomplis par le secrétariat général de la Commission bancaire, dont la validité doit être appréciée au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date à laquelle ils ont été accomplis, conformément aux dispositions du 2° du III de l'article 22 de l'ordonnance du 21 janvier 2010, sans que la banque requérante soit en tout état de cause fondée à soutenir qu'elle aurait ainsi irrégulièrement donné à ces dernières dispositions la portée d'une loi de validation ; qu'il suit de là que la BPCA n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait, du fait de la décision du 2 décembre 2011 du Conseil constitutionnel, dépourvue de fondement légal ; Sur l'engagement d'une nouvelle procédure disciplinaire: 4. Considérant que la BPCA soutient que la sanction complémentaire de publication de la décision du 18 décembre 2009 de la Commission bancaire ayant été entièrement exécutée, le collège de l'Autorité de contrôle prudentiel ne pouvait engager des poursuites pour les mêmes manquements ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 1, la décision du 18 décembre 2009 a été annulée par la décision n°336839 du Conseil d'Etat statuant au contentieux du 11 avril 2012 ; qu'ainsi, la banque requérante

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ne saurait en tout état de cause soutenir qu'en engageant une nouvelle procédure disciplinaire, l'Autorité de contrôle prudentiel aurait méconnu la règle non bis in idem ; Sur la régularité de la procédure : En ce qui concerne la procédure d'enquête : 5. Considérant que si, lorsqu'elle est saisie d'agissements pouvant donner lieu aux sanctions prévues par le code monétaire et financier, la commission des sanctions de l'Autorité de contrôle prudentiel doit être regardée comme décidant du bien-fondé d'accusations en matière pénale au sens des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le principe des droits de la défense, rappelé tant par l'article 6 de cette convention que par l'article L. 612-38 du code monétaire et financier, s'applique seulement à la procédure de sanction ouverte par la notification de griefs par le collège de l'Autorité et par la saisine de la commission des sanctions et non à la phase préalable des contrôles prévus par l'article L. 613-6 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 21 janvier 2010, et par l'article L. 612-23 de ce code, depuis l'entrée en vigueur de cette ordonnance ; qu'il suit de là que la banque requérante ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour soutenir que les conditions de réalisation du contrôle préalable à la procédure de sanction auraient méconnu les exigences du contradictoire ; En ce qui concerne la procédure de sanction : 6. Considérant que le premier alinéa de l'article L. 612-38 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable à la procédure relative à la banque requérante, dispose que " L'une des formations du collège examine les conclusions établies, dans le cadre de la mission de contrôle de l'Autorité de contrôle prudentiel, par les services de l'Autorité ou le rapport établi en application de l'article L. 612-27. Si elle décide l'ouverture d'une procédure de sanction, son président notifie les griefs aux personnes concernées. Il transmet la notification des griefs à la commission des sanctions qui désigne un rapporteur parmi ses membres. " ; que le deuxième alinéa du même article prévoit que la commission des sanctions veille au respect du caractère contradictoire de la procédure, procède aux communications et convocations nécessaires et dispose des services de l'Autorité pour la conduite de la procédure ; qu'aux termes de son troisième alinéa : " Le membre du collège désigné par la formation qui a décidé de l'ouverture de la procédure de sanction est convoqué à l'audience. Il y assiste sans voix délibérative. Il peut être assisté ou représenté par les services de l'Autorité. Il peut présenter des observations au soutien des griefs notifiés et proposer une sanction. " ; que son sixième alinéa prévoit que la commission des sanctions délibère hors la présence du membre du collège convoqué à l'audience, ainsi que des services de l'Autorité chargés de l'assister ou de le représenter ; qu'enfin, aux termes du sixième alinéa de l'article L. 612-9 de ce code : " Les fonctions de membre de la commission des sanctions sont incompatibles avec celles de membre du collège " ; 7. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions qu'au sein de l'Autorité de contrôle prudentiel, l'organe habilité à déclencher des poursuites disciplinaires est séparé de l'organe qui instruit l'affaire et prononce la sanction ; que la commission des sanctions, à qui la notification des griefs est transmise par le président du collège de l'Autorité, ne dispose pas, en tout état de cause, du pouvoir de se saisir d'office ; qu'en outre, le membre du collège désigné par la formation qui a décidé de l'ouverture de la procédure de sanction ne participe pas au délibéré de la commission des sanctions ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient la banque requérante, les dispositions relatives aux conditions dans lesquelles la commission des sanctions de l'Autorité de contrôle prudentiel statue ne peuvent être regardées comme méconnaissant, par elles-mêmes, le principe d'impartialité rappelé par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

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8. Considérant, d'autre part, qu'il est constant qu'en l'espèce, la commission des sanctions a statué dans le respect des dispositions citées au point 6 ; qu'en outre, la circonstance que le rapport établi par l'inspection de la Banque de France dans le cadre de la mission de contrôle de la Commission bancaire, qui n'est d'ailleurs qu'un des éléments du dossier au vu desquels la commission se prononce et dont le contenu et les conclusions sont sans incidence sur la légalité de sa décision, aurait pris parti sur la nature et la qualification des faits susceptibles d'être retenus contre la banque requérante, n'est pas de nature à mettre en cause l'impartialité de la commission ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la procédure de sanction aurait été conduite en méconnaissance du principe d'impartialité ne peut qu'être écarté ; (…) Sur l'application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative : 30. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre une somme à la charge de la BPCA au titre des mêmes dispositions ; qu'en revanche, il y a lieu de laisser la contribution pour l'aide juridique à sa charge ; DECIDE : Article 1er : La requête de la Banque populaire Côte d'Azur et les conclusions présentées par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Banque populaire Côte-d'Azur et à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

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Séance n° 4 LE COMPTE : GÉNÉRALITÉS (I)

OUVERTURE DU COMPTE Liberté d’ouverture du compte Doc. 1 : Art. L. 112-6 CMF Doc. 2 : Art. L. 123-24 C. com Droit au compte Doc. 3 : Art. L. 312-1 CMF Doc. 4 : Art. D. 312-5 CMF Obligation d’information du banquier lors de l’ouverture du compte Doc. 5 : Art. L. 312-1-1 CMF et L. 312-1-6 CMF Doc. 6 : Art. D. 312-1-1 CMF Doc. 7 : Art. L. 312-1-1 II CMF Doc. 8 : Cass. com., 3 novembre 2004, n° 01-16.238, Bull. civ. IV, n° Doc. 9 : Cass. om, 13 novembre 2012, n° 11-25.596, Bull civ. IV, n°205 Obligation de contrôle Doc. 10 : Art. L. 561-5 CMF Doc. 11 : Art. R. 312-2 CMF FONCTIONNEMENT DU COMPTE La reddition de comptes Doc. 12 : Art. L. 312-1-5 CMF Doc. 13 : Cass. com, 13 mars 2001, 97-10.611, Bull civ. IV n° 55

La rémunération du banquier (intérêts produits par le solde du compte)

Doc. 14 : Art. L. 312-3 CMF Doc. 15 : CJCE, 5 octobre 2004, Affaire C-442/02, CaixaBank France c/ Ministère de l’Economie, des finances et de l’industrie Doc. 16 : Commentaire du document 15 : Jean Stoufflet, RDBF n° 6, novembre 2004, étude 100073 Doc. 17 : Cass. com, 18 février 2004, n° 01-12123, Bull. civ. IV, n°3848 Doc. 18 : Cass. com, 6 avril 1993, n° 90-21198, Bull 1993 IV n°138 Doc. 19 : Cass. com, 17 janvier 2006, n°04-11100, Bull 2006 IV n°11 Doc. 20 : Cass. com 24 mars 2009, n° 08-12530, Bull 2009 IV n°44 Pluralité de comptes et de titulaires Doc. 21 : Cass. com, 14 avril 1975, n° 74-10651, n°98 Doc. 22 : Cass. com, 28 septembre 2004, n°01-16986, Bull 2004 IV n°166 La saisie du solde du compte Doc. 23 : Cass. com, 13 novembre 1973, n°70-1437 71-10478, n°325 Doc. 24 : Art. L. 162-1 CPCE

CLÔTURE DU COMPTE

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Les causes de la clôture

Doc. 25 : Art. L. 312-1 III al. 3 et Art. L. 312-1 al. 6 CMF Doc. 26 : Cass. com, 8 décembre 1987, n°87-11501, Bull 1987 IV, n°266 Les effets de la clôture Doc. 27 : Cass. Com, 17 mars 1981, n°79-13733, n°142 Exercice : commentaire d’arrêt : Cass. com., 3 novembre 2004 (doc. 8)

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OUVERTURE DU COMPTE

Doc. 1 : Art. L. 112-6 CMF I. – Ne peut être effectué en espèces ou au moyen de monnaie électronique le paiement d'une dette supérieure à un montant fixé par décret, tenant compte du lieu du domicile fiscal du débiteur, de la finalité professionnelle ou non de l'opération et de la personne au profit de laquelle le paiement est effectué. Au-delà d'un montant mensuel fixé par décret, le paiement des traitements et salaires est soumis à l'interdiction mentionnée à l'alinéa précédent et doit être effectué par chèque barré ou par virement à un compte bancaire ou postal ou à un compte tenu par un établissement de paiement ou un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement. Lorsqu'un professionnel achète des métaux à un particulier ou à un autre professionnel, le paiement est effectué par chèque barré ou par virement à un compte ouvert au nom du vendeur. Le non-respect de cette obligation est puni par une contravention de cinquième classe. II. – Nonobstant les dispositions du I, les dépenses des services concédés qui excèdent la somme de 450 euros doivent être payées par virement. II bis. – Nonobstant le I, le paiement des opérations afférentes au prêt sur gage peut être effectué en espèces ou au moyen de monnaie électronique, dans la limite d'un montant fixé par décret. III. – Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables : a) Aux paiements réalisés par des personnes qui sont incapables de s'obliger par chèque ou par un autre moyen de paiement, ainsi que par celles qui n'ont pas de compte de dépôt ; b) Aux paiements effectués entre personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels; c) Au paiement des dépenses de l'Etat et des autres personnes publiques. Doc. 2 : Art. L. 123-24 C. com Tout commerçant est tenu de se faire ouvrir un compte dans un établissement de crédit ou dans un bureau de chèques postaux. Doc. 3 : Art. L. 312-1 CMF I. – A droit à l'ouverture d'un compte de dépôt dans l'établissement de crédit de son choix, sous réserve d'être dépourvu d'un tel compte en France : 1° Toute personne physique ou morale domiciliée en France ; 2° Toute personne physique résidant légalement sur le territoire d'un autre Etat membre de l'Union européenne n'agissant pas pour des besoins professionnels ainsi que toute personne physique de nationalité française résidant hors de France. II. – Pour les personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels, les établissements de crédit disposent, au sein de leur gamme de services, de prestations de base définies par décret. Lorsque ces personnes sont en situation de fragilité financière au sens de l'article L. 312-1-3, elles se voient proposer l'offre spécifique mentionnée au même article dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve du respect des dispositions du chapitre Ier du titre VI du livre V, l'établissement procède à l'ouverture du compte de dépôt demandée par les personnes mentionnées au premier alinéa du présent II au plus tard dans les six jours ouvrés à compter de la réception de l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires à cet effet. L'établissement peut rejeter la demande d'ouverture de compte au motif que ces personnes peuvent bénéficier d'un compte de dépôt dans les conditions mentionnées au III. Si l'établissement refuse l'ouverture du compte de dépôt, il communique au demandeur, gratuitement et par écrit, les motifs de ce refus en mentionnant, le cas échéant, la procédure prévue au III.

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III. – En cas de refus de la part de l'établissement choisi d'ouvrir un tel compte à l'une des personnes mentionnées au I, celle-ci peut saisir la Banque de France afin qu'elle lui désigne un établissement de crédit situé à proximité de son domicile ou d'un autre lieu de son choix, en prenant en considération les parts de marché de chaque établissement concerné, dans un délai d'un jour ouvré à compter de la réception des pièces requises définies par arrêté. L'établissement de crédit qui a refusé l'ouverture d'un compte remet systématiquement, gratuitement et sans délai, au demandeur une attestation de refus d'ouverture de compte et l'informe qu'il peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte. Il lui propose, s'il s'agit d'une personne physique, d'agir en son nom et pour son compte en transmettant la demande de désignation d'un établissement de crédit à la Banque de France ainsi que les informations requises pour l'ouverture du compte. A la demande d'une personne physique, le département, la caisse d'allocations familiales, le centre communal ou intercommunal d'action sociale dont cette personne dépend, une association ou une fondation à but non lucratif dont l'objet est d'accompagner les personnes en difficulté ou de défendre les intérêts des familles ou une association de consommateurs agréée peut également transmettre en son nom et pour son compte la demande de désignation et les pièces requises à la Banque de France. Un décret détermine les conditions dans lesquelles les associations et fondations peuvent agir sur le fondement du présent alinéa. Les établissements de crédit ainsi désignés par la Banque de France sont tenus d'offrir au titulaire du compte des services bancaires de base dont le contenu et les conditions tarifaires sont précisés par décret. Ils procèdent à l'ouverture du compte de dépôt dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires à cet effet. L'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, mentionnée à l'article L. 511-29, adopte une charte d'accessibilité bancaire afin de renforcer l'effectivité du droit au compte. Cette charte précise les délais et les modalités de transmission, par les établissements de crédit à la Banque de France, des informations requises pour l'ouverture d'un compte. Elle définit les documents d'information que les établissements de crédit doivent mettre à disposition de la clientèle et les actions de formation qu'ils doivent réaliser. Elle fixe un modèle d'attestation de refus d'ouverture de compte. La charte d'accessibilité bancaire, homologuée par arrêté du ministre chargé de l'économie, après avis du comité consultatif du secteur financier et du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, est applicable à tout établissement de crédit. Le contrôle du respect de la charte est assuré par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et relève de la procédure prévue à l'article L. 612-31. IV. – L'établissement de crédit ne peut résilier unilatéralement la convention de compte de dépôt assorti des services bancaires de base, ouvert en application du III, que si l'une au moins des conditions suivantes est remplie : 1° Le client a délibérément utilisé son compte de dépôt pour des opérations que l'organisme a des raisons de soupçonner comme poursuivant des fins illégales ; 2° Le client a fourni des informations inexactes ; 3° Le client ne répond plus aux conditions de domicile ou de résidence définies au I ; 4° Le client a ultérieurement ouvert un deuxième compte de dépôt en France qui lui permet d'utiliser les services bancaires de base ; 5° Le client a fait preuve d'incivilités répétées envers le personnel de l'établissement de crédit ; 6° L'établissement est dans l'une des situations prévues à l'article L. 561-8. Toute décision de résiliation à l'initiative de l'établissement de crédit fait l'objet d'une notification écrite motivée et adressée gratuitement au client. La décision de résiliation ne fait pas l'objet d'une motivation lorsque la notification est de nature à contrevenir aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l'ordre public. La décision de résiliation à l'initiative de l'établissement est adressée, pour information, à la Banque de France. Un délai minimum de deux mois de préavis est octroyé au titulaire du compte, sauf dans les cas mentionnés au 1° et au 2°.

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L'établissement informe le client, au moment de la notification, de l'existence d'un service de relations avec la clientèle et de la médiation pour traiter les litiges éventuels liés à la résiliation de la convention de compte de dépôt.

V. – Le présent article s'applique aux personnes inscrites aux fichiers gérés par la Banque de France en application de l'article L. 131-85 du présent code et de l'article L. 751-1 du code de la consommation.

Doc. 4 : Art. D. 312-5 CMF Les services bancaires de base mentionnés aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 312-1 comprennent : 1° L'ouverture, la tenue et la clôture du compte ; 2° Un changement d'adresse par an ; 3° La délivrance à la demande de relevés d'identité bancaire ; 4° La domiciliation de virements bancaires ; 5° L'envoi mensuel d'un relevé des opérations effectuées sur le compte ; 6° La réalisation des opérations de caisse ; 7° L'encaissement de chèques et de virements bancaires ; 8° Les dépôts et les retraits d'espèces au guichet de l'organisme teneur de compte ; 9° Les paiements par prélèvement, titre interbancaire de paiement ou virement bancaire ; 10° Des moyens de consultation à distance du solde du compte ; 11° Une carte de paiement dont chaque utilisation est autorisée par l'établissement de crédit qui l'a émise ; 12° Deux formules de chèques de banque par mois ou moyens de paiement équivalents offrant les mêmes services.

Doc. 5 : Art. L. 312-1-1 et Art. L. 312-1-6 CMF Article L312-1-1 CMF I. – Les établissements de crédit sont tenus d'informer leur clientèle et le public sur les conditions générales et tarifaires applicables aux opérations relatives à la gestion d'un compte de dépôt, selon des modalités fixées par un arrêté du ministre chargé de l'économie. La gestion d'un compte de dépôt des personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels est réglée par une convention écrite passée entre le client et son établissement de crédit ou les services financiers de La Poste. Lorsqu'un relevé de compte est diffusé en application des stipulations de la convention visée à l'alinéa précédent et que celui-ci indique, à titre d'information, qu'un montant de découvert est autorisé, il mentionne immédiatement après, dans les mêmes caractères, le taux annuel effectif global au sens des articles L. 314-1 à L. 314-4 du code de la consommation, quelle que soit la durée du découvert autorisé considéré. Jusqu'au 31 décembre 2009, les établissements de crédit et les services financiers de La Poste sont tenus d'informer au moins une fois par an les clients n'ayant pas de convention de compte de dépôt de la possibilité d'en signer une. Les principales stipulations que la convention de compte de dépôt doit comporter, notamment les conditions générales et tarifaires d'ouverture, de fonctionnement et de clôture, sont précisées par un arrêté du ministre chargé de l'économie. Avant que le client ne soit lié par cette convention, l'établissement de crédit l'informe desdites conditions sur support papier ou sur un autre support durable. L'établissement de crédit peut s'acquitter de cette obligation en fournissant au client une copie du projet de convention de compte de dépôt. Si, à la demande du client, cette convention est conclue par un moyen de communication à distance ne permettant pas à l'établissement de crédit de se conformer au précédent alinéa, ce

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dernier satisfait à ses obligations aussitôt après la conclusion de la convention de compte de dépôt. L'acceptation de la convention de compte de dépôt est formalisée par la signature du ou des titulaires du compte. Lorsque l'établissement de crédit est amené à proposer à son client de nouvelles prestations de services de paiement dont il n'était pas fait mention dans la convention de compte de dépôt, les informations relatives à ces nouvelles prestations font l'objet d'un contrat-cadre de services de paiement régi par les dispositions des sections 2 à 4 du chapitre IV du présent titre relatives au contrat-cadre de services de paiement ou d'une modification de la convention de compte de dépôt dans les conditions mentionnées au II du présent article. II. – Tout projet de modification de la convention de compte de dépôt est communiqué sur support papier ou sur un autre support durable au client au plus tard deux mois avant la date d'application envisagée. Selon les modalités prévues dans la convention de compte de dépôt, l'établissement de crédit informe le client qu'il est réputé avoir accepté la modification s'il ne lui a pas notifié, avant la date d'entrée en vigueur proposée de cette modification, qu'il ne l'acceptait pas ; dans ce cas, l'établissement de crédit précise également que, si le client refuse la modification proposée, il peut résilier la convention de compte de dépôt sans frais, avant la date d'entrée en vigueur proposée de la modification. III. – Le client peut résilier la convention de compte de dépôt à tout moment, sauf stipulation contractuelle d'un préavis qui ne peut dépasser trente jours. Au-delà de douze mois, la convention de compte de dépôt peut être résiliée sans frais. Dans les autres cas, les frais de résiliation doivent être proportionnés aux coûts induits par cette résiliation. L'établissement de crédit résilie une convention de compte de dépôt conclue pour une durée indéterminée moyennant un préavis d'au moins deux mois. Les frais régulièrement imputés pour la prestation de services de paiement ne sont dus par le client qu'au prorata de la période échue à la date de résiliation de la convention de compte de dépôt. S'ils ont été payés à l'avance, ces frais sont remboursés au prorata. Avec l'accord du client, la convention de compte peut être adaptée avant l'expiration du délai de deux mois mentionné au II lorsqu'il bénéficie de la procédure de surendettement afin de faciliter l'exécution des mesures de traitement prévue au titre III du livre VII du code de la consommation. L'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, mentionnée à l'article L. 511-29 du présent code, adopte des normes professionnelles qui précisent les modalités et la durée du maintien du compte de dépôt et les adaptations, en particulier des moyens de paiement, de nature à en faciliter le fonctionnement et à éviter les incidents. Ces normes, homologuées par le ministre de l'économie, après avis du comité consultatif du secteur financier et du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, sont applicables par tout établissement de crédit. Le contrôle du respect de ces normes est assuré par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et relève de la procédure prévue à l'article L. 612-31. IV. – A tout moment de la relation contractuelle, l'établissement de crédit fournit à la demande de l'utilisateur les termes de la convention de compte de dépôt sur support papier ou sur un autre support durable. L'établissement de crédit ne peut refuser la fourniture au client d'une convention établie sur support papier. V. – Pour chaque opération de paiement mentionnée à l'article L. 314-2 relevant d'une convention de compte de dépôt et ordonnée par le payeur, le prestataire de services de paiement fournit à celui-ci, à sa demande, des informations sur le délai d'exécution maximal de cette opération spécifique, sur les frais qu'il doit payer et, le cas échéant, sur le détail de ces frais. Article L. 312-1-6 CMF

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La gestion d'un compte de dépôt pour les personnes physiques agissant pour des besoins professionnels est réglée par une convention écrite entre le client et son établissement de crédit. Les principales stipulations que cette convention de compte doit comporter, notamment les modalités d'accès à la médiation, sont précisées par un arrêté du ministre chargé de l'économie.

Doc. 6 : Art. D. 312-1-1 CMF Les établissements de crédit sont tenus d'utiliser dans leurs plaquettes tarifaires les dénominations définies comme suit : I. - Services bancaires : A. - Opérations au crédit du compte : 1° Versement d'espèces : le compte est crédité du montant d'un versement d'espèces ; 2° Réception d'un virement : le compte est crédité du montant d'un virement ; 3° Remise de chèque (s) : le compte est crédité du dépôt pour encaissement d'un ou de plusieurs chèque (s) ; B. - Opérations au débit du compte : 1° Emission d'un virement non SEPA : le compte est débité du montant d'un virement, permanent ou occasionnel, libellé en devises ou en euros hors zone SEPA (espace unique de paiements en euros) ; 2° Emission d'un virement SEPA : le compte est débité du montant d'un virement SEPA, permanent ou occasionnel, libellé en euros au profit d'un bénéficiaire dont le compte est situé en France ou dans n'importe quel pays de la zone SEPA ; 3° Emission d'un chèque de banque : le compte est débité du montant d'un chèque émis à la demande du client par la banque ; 4° Paiement d'un chèque : le compte est débité du montant d'un chèque émis et que le bénéficiaire a présenté au paiement ; 5° Paiement d'un prélèvement SEPA : le prélèvement SEPA est en euros et permet de régler les factures régulières ou ponctuelles auprès d'un créancier français, mais également auprès d'un créancier de l'espace SEPA dont le compte est situé en France ou dans n'importe quel pays de la zone SEPA ; 6° Paiement de titre interbancaire de paiement (TIP) : le compte est débité du montant d'un titre interbancaire de paiement (TIP) présenté au paiement par le créancier ; 7° Paiement par carte (la carte est émise par la banque) : le compte est débité, de façon immédiate ou différée, du montant d'un paiement par carte ; 8° Remboursement périodique de prêt : le compte est débité, à l'échéance convenue dans le contrat de prêt, du montant du capital, des intérêts et des frais d'assurance éventuels ; 9° Retrait d'espèces en agence sans émission de chèque : le compte est débité du montant d'un retrait d'espèces, effectué sans émission de chèque, dont le décaissement est réalisé au guichet de l'agence ; 10° Retrait d'espèces au distributeur automatique de billets : le compte est débité du montant d'un retrait d'espèces effectué au moyen d'une carte de retrait ou de paiement à un distributeur automatique de billets. II. - Frais bancaires et cotisations : 1° Cotisation à une offre groupée de services : le compte est débité des frais perçus par la banque au titre de la cotisation d'une offre groupée de services ; 2° Cotisation à une offre d'assurance perte ou vol des moyens de paiement : le compte est débité des frais perçus par la banque au titre de la cotisation à une offre d'assurance couvrant notamment la perte ou le vol des moyens de paiement ; 3° Abonnement à des services de banque à distance (internet, téléphone fixe, téléphone mobile, SMS, etc.) : le compte est débité des frais perçus par la banque au titre de l'abonnement à son offre de services de banque à distance ;

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4° Abonnement à un produit offrant des alertes de la situation du compte par SMS : le compte est débité des frais perçus par la banque au titre de l'abonnement à un service d'alertes sur la situation du compte ainsi que, le cas échéant, des frais perçus lors de chaque envoi de SMS ; 5° Cotisation carte : le compte est débité du montant de la cotisation de la carte ; 6° Droits de garde : le compte est débité des frais perçus par la banque pour la conservation d'un portefeuille de valeurs mobilières ; 7° Frais d'utilisation des services de banque à distance (internet, téléphone fixe, téléphone mobile, SMS, etc.) : le compte est débité des frais perçus par la banque à chaque utilisation des services de banque à distance ; 8° Frais de location de coffre-fort : le compte est débité des frais de location d'un coffre-fort ; 9° Frais de mise en place d'un virement permanent : le compte est débité des frais perçus par la banque pour la mise en place d'un virement permanent ; 10° Frais de mise en place d'un mandat de prélèvement : le compte est débité des frais perçus par la banque pour la mise en place d'un mandat de prélèvement SEPA ; 11° Frais d'émission d'un chèque de banque : le compte est débité des frais perçus par la banque pour l'émission d'un chèque de banque ; 12° Frais d'envoi de chéquier : le compte est débité des frais d'envoi d'un ou plusieurs chéquiers ; 13° Frais d'opposition (blocage) de la carte par la banque : le compte est débité des frais perçus par la banque lorsque celle-ci bloque une carte et s'oppose à toute transaction en cas d'utilisation abusive de cette carte par le titulaire ; 14° Frais d'opposition chèque (s) par l'émetteur : le compte est débité des frais perçus par la banque pour opposition sur un ou plusieurs chèques ; 15° Frais d'opposition chéquier (s) par l'émetteur : le compte est débité des frais perçus par la banque pour opposition sur un ou plusieurs chéquiers ; 16° Frais de lettre d'information préalable pour chèque sans provision : le compte est débité des frais perçus par la banque quand elle informe le client, par lettre, qu'il a émis un chèque sans provision ; 17° Frais de lettre d'information pour compte débiteur non autorisé : le compte est débité des frais perçus par la banque lorsqu'elle informe le client, par lettre, que le solde du compte est débiteur (négatif) sans autorisation ou a dépassé le montant ou la durée du découvert autorisé ; 18° Forfait de frais par chèque rejeté pour défaut de provision : le compte est débité des frais forfaitaires perçus par la banque pour un rejet de chèque pour défaut ou insuffisance de provision ; 19° Frais par paiement d'un prélèvement : le compte est débité des frais perçus par la banque pour le paiement d'un prélèvement présenté par le créancier ; 20° Frais de rejet de prélèvement pour défaut de provision : le compte est débité des frais perçus par la banque quand le solde disponible du compte est insuffisant pour régler le montant du prélèvement présenté au paiement par le créancier et que l'opération est rejetée ; 21° Frais par retrait d'espèces à un DAB d'une autre banque : le compte est débité des frais perçus par la banque pour un retrait d'espèces à un distributeur automatique de billets (DAB) d'une autre banque ; 22° Frais par avis à tiers détenteur : le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure de l'administration fiscale pour l'obtention d'une somme qui lui est due ; 23° Frais par opposition à tiers détenteur : le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure des collectivités territoriales, établissements publics locaux et d'autres catégories d'organismes pour l'obtention de sommes qui leur sont dues ; 24° Frais par saisie-attribution : le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure judiciaire engagée par un créancier pour obtenir une somme qui lui est due ;

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25° Frais par opposition administrative : le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure du Trésor public pour le recouvrement de sommes dues à l'Etat notamment au titre d'amendes ou de condamnations pécuniaires de caractère pénal ; 26° Frais par virement occasionnel : le compte est débité des frais perçus par la banque pour l'émission d'un virement occasionnel comportant les coordonnées bancaires correctes du bénéficiaire ; 27° Frais par virement occasionnel incomplet : le compte est débité des frais perçus par la banque lors de l'émission d'un virement pour lequel les coordonnées bancaires du bénéficiaire sont absentes ou incorrectes ; 28° Frais par virement permanent : le compte est débité des frais perçus par la banque pour l'émission d'un virement permanent ; 29° Frais de non-exécution de virement permanent pour défaut de provision : le compte est débité des frais perçus par la banque quand l'ordre de virement permanent n'a pas pu être exécuté en raison d'un solde disponible insuffisant ; 30° Frais de recherche de documents : le compte est débité des frais perçus par la banque pour la recherche et l'édition, à la demande du client, de documents concernant le compte ; 31° Intérêts débiteurs : le compte est débité des intérêts à raison d'un solde débiteur du compte pendant un ou plusieurs jours ; 32° Commission d'intervention : somme perçue par la banque en raison d'une opération entraînant une irrégularité de fonctionnement du compte nécessitant un traitement particulier ; 33° Frais de tenue de compte : frais perçus par la banque pour la gestion du compte ; 34° Frais suite à notification signalée par la Banque de France d'une interdiction d'émettre des chèques : le compte est débité des frais perçus par la banque pour mettre en œuvre l'interdiction pour le client d'émettre des chèques signalée par la Banque de France ; 35° Frais pour déclaration à la Banque de France d'une décision de retrait de carte bancaire : le compte est débité des frais perçus par la banque qui déclare à la Banque de France une décision de retrait de carte bancaire dont son client fait l'objet. NOTA : Décret n° 2014-373 du 27 mars 2014 article 2 : Les présentes dispositions s'appliquent aux plaquettes dont les tarifs sont modifiés à partir du 1er juillet 2014 pour les publications papier et du 1er avril 2014 pour les publications électroniques.

Doc. 7 : Art. L. 312-1-1 II CMF II. – Tout projet de modification de la convention de compte de dépôt est communiqué sur support papier ou sur un autre support durable au client au plus tard deux mois avant la date d'application envisagée. Selon les modalités prévues dans la convention de compte de dépôt, l'établissement de crédit informe le client qu'il est réputé avoir accepté la modification s'il ne lui a pas notifié, avant la date d'entrée en vigueur proposée de cette modification, qu'il ne l'acceptait pas ; dans ce cas, l'établissement de crédit précise également que, si le client refuse la modification proposée, il peut résilier la convention de compte de dépôt sans frais, avant la date d'entrée en vigueur proposée de la modification.

Doc. 8 : Cass. com., 3 novembre 2004, n° 01-16.238, Bull. civ. IV, n° 187 Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche : Vu les articles 1134 et 1937 du Code civil ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les sociétés Ardico et Charco, appartenant l'une et l'autre au Groupe X..., avaient conclu avec la Banque populaire du Nord des conventions de comptes courants dont une clause stipulait que l'accord du client sur les opérations portées au compte serait présumé résulter de l'absence de réclamation de la part de celui-ci dans le délai d'un mois de la réception de

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son relevé de compte ; qu'en décembre 1997, M. et Mme Jean-Pierre X..., M. Pierre X... et les sociétés Ardico et Charco (les consorts X...) ont contesté judiciairement vingt-quatre virements exécutés par la banque entre septembre 1992 et juillet 1993 dont ils affirmaient qu'ils avaient été réalisés sans ordre de MM. Jean-Pierre ou Pierre X..., seuls à disposer du pouvoir de faire fonctionner les comptes concernés et demandé la restitution des sommes correspondantes et des dommages-intérêts ; Attendu que pour rejeter ces demandes, la cour d'appel retient que les intéressés n'avaient pas contesté avoir reçu la totalité des relevés de compte afférents aux opérations litigieuses, qu'ils n'avaient formulé aucune réclamation dans le délai d'un mois dont ils disposaient conventionnellement pour protester et qu'aucune faute n'était démontrée à la charge de la banque ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'absence de protestation du client dans le délai d'un mois de la réception des relevés de compte n'emportait, selon la convention des parties, qu'une présomption d'accord du client sur les opérations y figurant laquelle ne privait pas celui-ci de la faculté de rapporter, pendant la durée de prescription légale, la preuve d'éléments propres à l'écarter, qu'elle avait elle-même relevé qu'aucun des ordres écrits relatifs aux virements litigieux n'était signé des personnes ayant pouvoir de faire fonctionner les comptes des sociétés Ardico et Charco et qu'à supposer qu'aucune faute ne soit imputable à la Banque populaire du Nord dans l'exécution des virements litigieux, cette circonstance n'était pas de nature à la décharger de son obligation de ne restituer les fonds qu'aux déposants ou à leurs mandataires, la cour d'appel a violé les textes susvisés PAR CES MOTIFS : et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs ;CASSE ET ANNULE,

Doc. 9 : Cass. com, 13 novembre 2012, n° 11-25.596, Bull civ. IV, n°205

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 octobre 2010) et les productions, que Mme X... était

titulaire, dans les livres du Crédit commercial de France, devenu la société HSBC France (la banque),

de deux comptes courant, professionnel et personnel ; que le solde du compte professionnel étant

devenu débiteur, la banque a dénoncé la convention, mis en demeure puis assigné Mme X... en

paiement ; que cette dernière a sollicité le remboursement de prélèvements et virements effectués sans

son autorisation depuis ces deux comptes, ainsi que la substitution du taux légal au taux d'intérêt

conventionnel ;

Sur le premier moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande de remboursement de la

somme de 74 232,60 euros, correspondant aux débits indûment effectués sur son compte, alors, selon

le moyen :

1°/ qu'indépendamment du caractère abusif ou non de la clause qui limite à un mois à compter de la

réception des relevés de compte le délai pendant lequel un client pourrait protester contre les

opérations qui y sont inscrites, l'absence de protestation du client pendant cette durée n'emporte qu'une

présomption d'accord de ce dernier et ne le prive pas soit de la faculté de rapporter, pendant la durée de prescription légale, la preuve d'éléments propres à l'écarter soit de celle de reprocher à la banque

d'avoir agi sans mandat ; que les juges ont considéré qu'il ne pouvait être fait exception à l'application

de cette clause que si le client apportait la preuve d'une faute grossière ou d'une erreur manifeste de la

banque dans la tenue du compte ; qu'en mettant une telle exigence à la charge de Mme X..., la cour

d'appel a violé les articles 1134, 1147 et 1937 du code civil ;

2°/ que les juges ne peuvent mettre à la charge d'une partie la preuve d'un fait négatif ; qu'en prévoyant

que la clause devait recevoir application sauf preuve de l'absence d'envoi ou de réception des relevés,

ce qui imposait au client de la banque une preuve négative, la cour d'appel a violé l'article 1315 du

code civil ;

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3°/ que les juges ne peuvent mettre à la charge d'une partie la preuve d'un fait négatif ; que Mme X...

faisait valoir que les prélèvements effectués au profit des sociétés Finaref, Cetelem et Franfinance

ainsi que les virements de son compte n'avaient pas été ordonnés par elle, la banque ayant agi sans

mandat ou sur l'ordre d'un tiers ; qu'en imposant à Mme X... la preuve de ce que les prélèvements

avaient été ordonnés par son ancien mari ou en se fondant sur des présomptions tirées de l'absence de

réaction de Madame X... au lieu de solliciter de la banque la preuve des ordres en vertu desquels elle

avait agi, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil,

ensemble les articles 1134 et 1937 du même code ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir énoncé que l'envoi et la réception des relevés de compte

constituent de simples faits pouvant être prouvés par tout moyen, puis relevé que la banque produit en

copie l'ensemble des relevés bancaires du compte litigieux à compter du 1er décembre 2003, qu'un

professionnel normalement diligent ne peut avoir négligé, durant sept années consécutives, de suivre

le relevé des écritures portées sur son compte et devait, en cas d'absence de réception de ses relevés périodiques ou dans le cas de retard de celle-ci, en aviser la banque et que Mme X... n'établit pas qu'

elle se soit plainte de n'avoir pas été destinataire de ses relevés de compte, l'arrêt retient que cette

dernière est mal fondée à soutenir que la banque ne lui aurait pas envoyé les relevés litigieux correspondant à son compte courant professionnel ou qu'elle ne les aurait pas reçus dans un temps

proche de leur établissement ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas exigé de Mme X... une preuve

négative, a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, que l'absence de protestation dans le délai imparti conventionnellement d'un

mois de la réception des relevés de compte n'emporte qu'une présomption d'accord du client sur les

opérations y figurant, laquelle ne prive pas celui-ci de la faculté de rapporter, pendant la durée de la

prescription légale, la preuve d'éléments propres à l'écarter ; que l'arrêt relève, d'un côté, que Mme X...

ne rapporte pas la preuve de ce que les crédits à la consommation qui constituent la cause des

prélèvements de son compte professionnel au profit d'établissements de crédit sont le fait de M. Y...,

de l'autre, que les virements automatiques effectués, depuis 1998, à partir de son compte professionnel

au profit d'une compagnie d'assurance sur le fondement d'une autorisation de prélèvement automatique

n'ont jamais suscité de réaction de la part de Mme X..., qui s'abstient de produire toute pièce

contractuelle permettant de connaître l'identité du souscripteur de l'assurance-vie et, enfin, que son

compte personnel qui présentait un solde débiteur a été clôturé et soldé sans qu'elle n'oppose de

contestation et qu'elle n'a raisonnablement pas pu ignorer les virements effectués régulièrement en

faveur du compte de son mari pour des sommes importantes ; qu'en l'état de ces constatations et

appréciations, faisant ressortir que Mme X... ne justifiait pas que les opérations litigieuses avaient été

exécutées sans son autorisation, la cour d'appel, abstraction faite du motif erroné mais surabondant

critiqué par la première branche, a pu décider, sans inverser la charge de la preuve, que la banque

n'avait pas commis de faute ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le second moyen :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à voir appliquer au montant

de sa dette les intérêts au taux légal et d'avoir décidé que devaient être appliqués les intérêts au taux

conventionnel indiqués sur les relevés de compte, alors, selon le moyen, que s'agissant d'un débiteur

non commerçant, en matière de prêt d'argent, l'exigence d'un écrit mentionnant le taux de l'intérêt

conventionnel est une condition de la stipulation d'intérêt ; qu'en l'absence d'un accord écrit sur ce

point, l'indication du taux d'intérêt sur les relevés de compte ne répond pas à cette exigence, alors

même qu'elle ne fait pas l'objet d'une protestation de la part du client ; qu'en condamnant Mme X... au

paiement des intérêts conventionnels bien qu'elle relevât expressément qu'aucun intérêt conventionnel

n'avait été préalablement fixé et que la stipulation de ces intérêts ne résultait que des relevés de

compte, la cour d'appel a violé l'article 1907 du code civil ;

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Mais attendu que la reconnaissance de l'obligation de payer des intérêts conventionnels afférents au

solde débiteur d'un compte courant peut, en l'absence d'indication dans la convention d'ouverture de

compte-courant, résulter de la réception sans protestation ni réserve, par l'emprunteur des relevés de

compte indiquant les taux de ces intérêts ; qu'après avoir constaté que les relevés de compte adressés

par la banque à Mme X... à compter du 1er décembre 2003 comportaient les mentions nécessaires et

suffisantes pour suppléer, au moins pour les intérêts échus postérieurement à leur réception, l'absence

de fixation préalable par écrit du taux effectif global de l'intérêt appliqué au découvert en compte et

relevé que Mme X... n'était pas recevable à contester les intérêts qui auraient été décomptés

antérieurement au 30 novembre 2004, l'action en nullité de ces intérêts étant prescrite, la cour d'appel a

pu condamner Mme X... au paiement de ces intérêts ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Doc. 10 : Art. L. 561-5 CMF I. – Avant d'entrer en relation d'affaires avec leur client ou de l'assister dans la préparation ou la réalisation d'une transaction, les personnes mentionnées à l'article L. 561-2 : 1° Identifient leur client et, le cas échéant, le bénéficiaire effectif au sens de l'article L. 561-2-2 ; 2° Vérifient ces éléments d'identification sur présentation de tout document écrit à caractère probant. II. – Elles identifient et vérifient dans les mêmes conditions que celles prévues au I l'identité de leurs clients occasionnels et, le cas échéant, de leurs bénéficiaires effectifs, lorsqu'elles soupçonnent qu'une opération pourrait participer au blanchiment des capitaux ou au financement du terrorisme ou lorsque les opérations sont d'une certaine nature ou dépassent un certain montant. III. – Lorsque le client souscrit ou adhère à un contrat d'assurance-vie ou de capitalisation, les personnes concernées identifient et vérifient également l'identité des bénéficiaires de ces contrats et le cas échéant des bénéficiaires effectifs de ces bénéficiaires. IV. – Par dérogation au I, lorsque le risque de blanchiment des capitaux ou de financement du terrorisme paraît faible et que c'est nécessaire pour ne pas interrompre l'exercice normal de l'activité, les obligations mentionnées au 2° dudit I peuvent être satisfaites durant l'établissement de la relation d'affaires. V. – Les conditions d'application du présent article sont précisées par décret en Conseil d'Etat.

Doc. 11 : Art. R. 312-2 CMF Le banquier doit, préalablement à l'ouverture d'un compte, vérifier le domicile et l'identité du postulant, qui est tenu de présenter un document officiel comportant sa photographie. Le banquier doit recueillir et conserver les informations suivantes : nom, prénoms, date et lieu de naissance du postulant, nature, date et lieu de délivrance du document présenté et nom de l'autorité ou de la personne qui l'a délivré ou authentifié. Pour l'ouverture d'un compte au nom d'une personne morale, le banquier demande la présentation de l'original ou l'expédition ou la copie de tout acte ou extrait de registre officiel datant de moins de trois mois constatant la dénomination, la forme juridique, l'adresse du siège social et l'identité des dirigeants. Pour l'application des dispositions du permier alinéa, l'adresse du centre communal ou intercommunal d'action sociale ou de l'organisme agréé au titre de l'article L. 264-2 du code de l'action sociale et des familles figurant sur la carte nationale d'identité en application des dispositions du cinquième alinéa de l'article 2 du décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 instituant la carte nationale d'identité vaut justification du domicile. Il en est de même de l'attestation d'élection de domicile présentée par la personne ne disposant pas d'un domicile stable instituée par le même article.

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FONCTIONNEMENT DU COMPTE

Doc. 12 : Art. L 312-1-5 CMF Le client, personne physique n'agissant pas pour des besoins professionnels, est informé gratuitement, par le biais de son relevé de compte mensuel, du montant et de la dénomination des frais bancaires liés à des irrégularités et incidents que l'établissement entend débiter sur son compte de dépôt. Ce débit a lieu au minimum quatorze jours après la date d'arrêté du relevé de compte. Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. Le dispositif mis en place par le présent article entre en vigueur dix-huit mois après la publication du décret mentionné à la première phrase.

Doc. 13 : Cass. com, 13 mars 2001, 97-10.611, Bull civ. IV n° 55 Sur le moyen unique : Vu les articles 1134 du Code civil et L. 122-4 du Code de la consommation, ensemble l'article 7 du décret n° 84-708 du 24 juillet 1984 ; Attendu qu'un établissement de crédit ayant omis de porter à la connaissance d'un nouveau client auquel il ouvre un compte les conditions d'utilisation de ce compte et le prix de ses différents services n'est pas déchu du droit de percevoir le prix de ses prestations de services et les frais y afférents, dès lors qu'il a, a posteriori, recueilli l'accord du client sur son droit à leur perception et sur leur montant ; que cet accord peut résulter, pour l'avenir, de leur inscription, dans un relevé d'opérations dont la réception par le client n'a été suivie d'aucune protestation ou réserve de sa part ; Attendu, selon le jugement attaqué, que Mme X... a ouvert, le 21 novembre 1989, un compte à la Caisse d'épargne de Champagne-Ardenne (la Caisse d'épargne) ; que la Caisse d'épargne a, à compter du mois de janvier 1994, facturé sur son compte des frais de rejet et de " forçage " ; que Mme X... a demandé la restitution du montant de ces frais ; Attendu que, pour condamner la Caisse d'épargne à verser une certaine somme à Mme X..., le jugement, après avoir énoncé que le client n'est informé que par la remise effective des conditions générales et particulières du fonctionnement du compte et que la simple mise à disposition de dépliant ou l'affichage des conditions tarifaires ne suffit pas à caractériser l'acceptation du client sur le principe et la tarification des opérations, retient qu'en l'espèce l'article 9 de la convention d'ouverture de compte se réfère à des frais administratifs forfaitaires sans les détailler et les chiffrer, qu'il ne ressort d'aucune clause de la convention que les conditions particulières et tarifaires ont été remises à Mme X... lors de l'ouverture du compte, que la Caisse d'épargne est dans l'impossibilité de produire un exemplaire signé de la main de Mme X... des conditions particulières applicables au service et qu'il n'est pas établi que les conditions des services aux particuliers ont été acceptées par Mme X... lors de l'ouverture du compte ; Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher si les frais litigieux ont été perçus, en totalité, par la Caisse d'épargne avant que Mme X... n'ait connu, par des inscriptions sur ses relevés de compte, les exigences de la Caisse à cet égard pour des opérations semblables, qui lui seraient postérieurement imputables, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, Doc. 14 : Art. L. 312-3 CMF

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Sans préjudice des sanctions disciplinaires qui peuvent être infligées par la commission bancaire, les

infractions aux dispositions du présent article sont punies d'une amende fiscale dont le taux est égal au

montant des intérêts payés, sans que cette amende puisse être inférieure à 75 euros.

Un décret pris sur le rapport du ministre chargé de l'économie fixe les modalités d'application du

présent article, et notamment les conditions dans lesquelles seront constatées et poursuivies les

infractions.

Les dispositions du présent article s'appliquent, quels que soient les entreprises, établissements ou

organismes dépositaires, au régime de l'épargne populaire défini à la section 2 du chapitre Ier du titre

II du livre II.

Doc. 15 : CJCE, 5 octobre 2004, Affaire C-442/02, CaixaBank France c/ Ministère de l’Economie, des finances et de l’industrie Cour de justice des Communautés européennes 05-10-2004 N° C-442/02 1 La demande de décision préjudicielle porte sur l'interprétation de l'article 43 CE.Le cadre juridique national 2 Aux termes de l'article L. 312-3 du code monétaire et financier dans sa rédaction applicable en l'espèce : « Nonobstant toutes dispositions contraires, il est interdit à tout établissement de crédit qui reçoit du public des fonds en compte à vue ou à moins de cinq ans, et par quelque moyen que ce soit, de verser sur ces fonds une rémunération supérieure à celle fixée par règlement du comité de la réglementation bancaire et financière ou par le ministre chargé de l'économie.» 3 Le règlement n° 86-13 du comité de la réglementation bancaire et financière, homologué par arrêté du ministre de l'Economie et des Finances, du 14 mai 1986 (JORF du 15 mai 1986, p. 6330), interdit la rémunération des comptes à vue. 4 Ladite interdiction s'applique aux comptes à vue libellés en euros, ouverts par les résidents en France, quelle que soit leur nationalité. Le litige au principal et les questions préjudicielles 5 Depuis le 18 février 2002, Caixa Bank France (ci-après «Caixa Bank»), société de droit français dont le siège se trouve en France et qui est une filiale de Caixa Holding, société de droit espagnol dont le siège est en Espagne et qui détient les participations du groupe Caixa dans les établissements de crédit implantés sous ce nom en Espagne et dans d'autres pays de l'Union européenne, commercialise en France un compte de dépôts à vue rémunéré à 2 % l'an à partir d'un encours de 1 500 €. Par une décision de la commission bancaire et financière du 16 avril 2002, Caixa Bank s'est vu, d'une part, interdire de conclure avec des résidents en France de nouvelles conventions portant sur des comptes à vue rémunérés libellés en euros, et, d'autre part, enjoindre de dénoncer les clauses des conventions déjà passées prévoyant la rémunération de tels comptes. 6 Caixa Bank s'est pourvue en cassation contre cette décision devant le Conseil d'Etat qui a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes : 1°) Dans le silence de la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 mars 2000, l'interdiction faite par un Etat membre aux établissements bancaires régulièrement installés sur son territoire de rémunérer des dépôts à vue et d'autres fonds remboursables constitue-t-elle une entrave à la liberté d'établissement?

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2°) Dans le cas de réponse positive à la première question, quelle est la nature des raisons d'intérêt général qui pourraient, le cas échéant, être invoquées pour justifier une telle entrave?» Sur les questions préjudicielles 7 Il convient de relever d'emblée que la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 mars 2000, concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice (JO L 126, p. 1), n'est pas applicable dans un cas comme celui de l'affaire au principal, dans la mesure, notamment, où cette directive ne vise pas les restrictions à l'établissement de sociétés qui, telles que Caixa Bank, font usage du droit d'établissement dans un Etat membre en tant que filiales d'établissements de crédit établis dans d'autres Etats membres. 8 Par ses questions, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 43 CE s'oppose à la réglementation d'un Etat membre qui interdit à un établissement de crédit, filiale d'une société d'un autre Etat membre, de rémunérer les comptes de dépôts à vue libellés en euros, ouverts par les résidents du premier Etat membre. 9 Le droit d'établissement prévu à l'article 43 CE, lu en combinaison avec l'article 48 CE, est reconnu tant aux personnes physiques ressortissantes d'un Etat membre qu'aux personnes morales au sens de cette dernière disposition. Il comporte, sous réserve des exceptions et conditions prévues, l'accès sur le territoire de tout autre Etat membre à toutes sortes d'activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d'entreprises, la création d'agences, de succursales ou de filiales (voir, notamment, arrêt du 11 mai 1999, Pfeiffer, C-255/97, Rec. p. I-2835, point 18). 10 La situation juridique d'une société telle que Caixa Bank relève du droit communautaire en vertu des dispositions de l'article 43 CE. 11 L'article 43 CE impose la suppression des restrictions à la liberté d'établissement. Doivent être considérées comme de telles restrictions toutes les mesures qui interdisent, gênent ou rendent moins attrayant l'exercice de cette liberté (voir, notamment, arrêts du 30 novembre 1995, Gebhard, C-55/94, Rec. p. I-4165, point 37, du 1er février 2001, Mac Quen e.a., C-108/96, Rec. p. I-837, point 26, et du 17 octobre 2002, Payroll e.a., C-79/01, Rec. p. I-8923, point 26). 12 L'interdiction de rémunérer les comptes de dépôts à vue, telle que celle prévue par la réglementation française, constitue pour les sociétés d'Etats membres autres que la République française un obstacle sérieux à l'exercice de leurs activités par l'intermédiaire d'une filiale dans ce dernier Etat membre, qui affecte leur accès au marché. Partant, cette interdiction s'analyse comme une restriction au sens de l'article 43 CE. 13 En effet, ladite interdiction gêne les établissements de crédit, filiales de sociétés étrangères, dans la collecte de capitaux auprès du public en les privant de la possibilité de livrer, par une rémunération des comptes de dépôts à vue, une concurrence plus efficace aux établissements de crédit traditionnellement implantés dans l'Etat membre d'établissement, dotés d'un réseau d'agences étendu et disposant, partant, de plus grandes facilités que lesdites filiales pour recueillir des capitaux auprès du public. 14 Ainsi, lorsque des établissements de crédit, filiales d'une société étrangère, cherchent à entrer sur le marché d'un Etat membre, livrer concurrence au moyen du taux de rémunération des comptes de dépôts à vue constitue une des méthodes les plus efficaces à cette fin. L'accès au marché par ces établissements est donc rendu plus difficile par une telle interdiction. 15 Si le gouvernement français a affirmé lors de l'audience qu'il existe des formes de comptes

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comparables aux comptes de dépôts à vue, tels les comptes à terme de 15 jours, qui ne sont pas visés par l'interdiction de rémunération et qui ont contribué à permettre à des établissements de crédit tels que Caixa Bank de concurrencer les établissements de crédit français dans la collecte des fonds du public et d'augmenter leurs parts de marché en France, ce même gouvernement a toutefois admis que ces comptes, à l'opposé des comptes de dépôts à vue, ne permettent pas l'utilisation de cartes bancaires ou de chèques. L'interdiction en cause entraîne dès lors une gêne pour les établissements de crédit, tels que Caixa Bank, dans leur activité de collecte de capitaux auprès du public, à laquelle l'existence d'autres formes de comptes dont les dépôts sont rémunérés ne saurait remédier. 16 La restriction à l'exercice et au développement de leurs activités par lesdites filiales, dont l'interdiction litigieuse est à l'origine, est d'autant plus importante qu'il est constant que la réception des dépôts du public et l'octroi de crédits représentent les activités de base des établissements de crédit (voir en ce sens, notamment, article 1er, point 1, et annexe I de la directive 2000/12). 17 Il résulte d'une jurisprudence constante que, lorsque, comme dans l'affaire au principal, une telle mesure s'applique à toute personne ou entreprise exerçant une activité sur le territoire de l'Etat membre d'accueil, elle peut être justifiée lorsqu'elle répond à des raisons impérieuses d'intérêt général, pour autant qu'elle soit propre à garantir la réalisation de l'objectif qu'elle poursuit et n'aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre (voir, notamment, arrêts du 4 juillet 2000, Haim, C-424/97, Rec. p. I-5123, point 57; Mac Quen e.a., précité, point 26, et du 15 janvier 2002, Commission/Italie, C-439/99, Rec. p. I-305, point 23). 18 Il convient dès lors de rechercher si les motifs invoqués par le gouvernement français répondent à ces critères. 19 Afin de justifier la restriction à la liberté d'établissement résultant de la disposition litigieuse, le gouvernement français a invoqué tant la protection des consommateurs que l'encouragement de l'épargne à moyen et à long terme. 20 D'abord, l'interdiction en cause au principal serait nécessaire au maintien de la gratuité des services bancaires de base. L'introduction de la rémunération des comptes de dépôts à vue alourdirait substantiellement les charges d'exploitation supportées par les banques qui, pour être compensées, entraîneraient une augmentation des facturations et une tarification des différents services bancaires actuellement fournis à titre gratuit dont, en particulier, l'émission des chèques. 21 Il convient néanmoins de relever que, si la protection des consommateurs figure parmi les exigences impératives pouvant justifier des restrictions à une liberté fondamentale garantie par le traité CE, l'interdiction en cause au principal constitue, à supposer même qu'elle présente en définitive pour le consommateur certains avantages, une mesure qui va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ledit objectif. 22 En effet, même à supposer que la levée de l'interdiction de rémunération des comptes de dépôts à vue entraîne inévitablement pour le consommateur une augmentation du coût des services bancaires de base ou la facturation des chèques, il pourrait notamment être envisagé de permettre au consommateur d'opter soit pour un compte de dépôts à vue non rémunéré et le maintien de la gratuité de certains services bancaires de base, soit pour un compte de dépôts à vue rémunéré et la faculté pour l'établissement de crédit de faire payer des services bancaires fournis jusqu'alors à titre gratuit, telle l'émission des chèques. 23 S'agissant ensuite du souci des autorités françaises d'encourager l'épargne à long terme, il convient de relever que, si l'interdiction de rémunérer les comptes de dépôts à vue est certes apte

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à inciter à l'épargne à moyen et à long terme, elle n'en demeure pas moins une mesure qui va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif. 24 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions préjudicielles que l'article 43 CE s'oppose à la réglementation d'un Etat membre qui interdit à un établissement de crédit, filiale d'une société d'un autre Etat membre, de rémunérer les comptes de dépôts à vue libellés en euros, ouverts par les résidents du premier Etat membre. Sur les dépens 25 La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement Par ces motifs, la Cour (grande chambre), dit pour droit : L'article 43 CE s'oppose à la réglementation d'un Etat membre qui interdit à un établissement de crédit, filiale d'une société d'un autre Etat membre, de rémunérer les comptes de dépôts à vue libellés en euros, ouverts par les résidents du premier Etat membre.

Doc. 16 : Jean Stoufflet, RDBF n° 6, novembre 2004, étude 100073 1. - La controverse sur le maintien de l'interdiction de la rémunération par les banques des dépôts à vue paraissait devoir se prolonger à l'infini. Elle était d'autant plus irritante que la rigueur du raisonnement était souvent affectée par la passion. Le débat va sans doute prendre fin à la suite de l'arrêt rendu par la Cour de Justice des Communautés Européennes le 5 octobre 2004 dans l'affaire CaixaBank France Note 1 .

2. - L'histoire est connue. Préoccupée dans la période de reconstruction qui a suivi la seconde

guerre mondiale de drainer l'épargne vers l'investissement, donc vers des placements longs, les

autorités monétaires ont prohibé la rémunération par les banques des dépôts à vue et plafonné les

taux sur les dépôts à court terme Note 2 . Le développement des marchés financiers rendus accessibles à un nombre croissant d'investisseurs et d'épargnants ainsi que d'entreprises, a privé de sa justification la réglementation des taux sur les dépôts courts et plus encore l'interdiction de rémunérer les dépôts à vue. Cette interdiction aurait sans doute été abrogée sans objection de quiconque, de même qu'a été rétablie la liberté du taux des commissions, si ne s'était progressivement imposée l'idée que la non rémunération des dépôts à vue constituait la contrepartie de la gratuité de l'usage du chèque à laquelle les banques souhaitent depuis longtemps mettre fin tandis qu'une part importante de leur clientèle et les associations de consommateurs y sont farouchement attachées Note 3 . 3. - La situation actuelle (pas d'intérêts sur la position créditrice des comptes à vue / gratuité des chèques) aurait pu durer longtemps, les banques françaises paraissant finalement s'en accommoder, peut-être en raison du dépérissement lent mais continu de l'usage du chèque. Cet instrument est progressivement remplacé, pour les paiements comptant, par les cartes de paiement dont l'usage est rémunéré et, pour les paiements à distance, par les dérivés électroniques du virement. De manière inattendue, le statu quo est remis en cause par une initiative commerciale de la filiale française de la banque espagnole Caixa. Cet établissement de crédit a proposé à ses clients titulaires de comptes à vue un intérêt créditeur de 2%, conformément à la pratique des banques du même groupe établies en Espagne Note 4 . Habilement, la Caixa n'a pas pour autant institué une commission sur les paiements de chèques. La Commission bancaire pouvait d'autant moins s'abstenir de réagir à une pratique dont la contrariété à la loi française était évidente, que la Caixa avait orchestré son offre par une large campagne publicitaire. Une décision de la Commision bancaire du 16 avril 2002 interdit à CaixaBank de conclure avec des résidents en France de nouvelles conventions relatives à des

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comptes à vue en euros rémunérés et lui enjoint de dénoncer les clauses des conventions déjà conclues prévoyant la rémunération de tels comptes Note 5 . Contre cette décision, dont on rappelle la nature juridictionnelle Note 6 , la banque a formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d'État. 4. - Dans sa défense devant la Commission bancaire et dans la procédure devant le Conseil d'État, la Caixa n'a pas tenté de contester la validité de la sanction qui la frappait au regard de la loi française. Elle n'a pas non plus mis directement en question la conformité de principe au droit européen de la prohibition des intérêts sur les dépôts à vue. Elle s'est appuyée sur la règle de droit communautaire qui permet à une entreprise d'un État membre d'exercer son activité sur l'ensemble du territoire communautaire dans les conditions où elle l'exerce dans son pays d'origine et exclut toute mesure nationale entravant l'accès d'une entreprise communautaire au marché d'un État membre autre que celui où elle a son siège. Le Conseil d'État a considéré que la question de savoir si la prohibition de la rémunération des dépôts à vue empêche effectivement une banque de développer sa présence sur un autre marché national, constitue une question de principe non encore résolue et qu'il devait s'en remettre à l'interprétation de la Cour de Justice. Par un arrêt du 6 novembre 2002 Note 7 il a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les deux questions suivantes : « 1) Dans le silence de la directive 2000/12/CE ....du 20 mars 2000, l'interdiction faite par un État membre aux établissements bancaires régulièrement installés sur son territoire de rémunérer des dépôts à vue et d'autres fonds remboursables constitue-t-elle une entrave à la liberté d'établissement ? 2) Dans le cas de réponse positive à la première question, quelle est la nature des raisons d'intérêt général qui pourraient, le cas échéant, être invoquées pour justifier une telle entrave ? ».

4. - L'arrêt de la Cour répond à ces deux questions dans un sens qui devrait conduire le Conseil d'État à annuler la décision de la Commission bancaire (I). Il restera à la France à tirer au plan législatif et réglementaire les conséquences de l'arrêt de la Cour. Puis les établissements de crédit auront, dans un cadre légal nouveau, à déterminer s'ils revoient ou non leurs conditions

(II).

I LA CONDAMNATION PAR LA CJCE DE L'INTERDICTION DE LA

RÉMUNÉRATION DES DÉPÔTS À VUE 5. - Devant les juridictions successivement saisies de l'affaire, la Caixa s'est prévalue, pour justifier sa pratique, du droit de libre accès au marché dont bénéficient les entreprises communautaires. Ce principe se traduit par la liberté d'établissement sous forme «de création d'agences de succursales ou de filiales » (Traitéart.43) et la liberté des prestations de services (Traité art.49). Deux raisonnements sont, toutefois, possibles pour démontrer que l'interdiction de rémunérer les dépôts à laquelle se heurtait la banque espagnole, entravait son accès au marché français de la banque de détail. 6. - Un premier raisonnement se fonde sur le principe de la reconnaissance mutuelle des produits et services qui permet à une entreprise d'offrir ses produits et services sur le territoire d'un État membre aux conditions qu'elle applique dans son pays d'origine et ceci qu'elle agisse par l'intermédiaire d'une agence ou succursale ou en prestation de services. Ce raisonnement est dans la ligne du considérant 17 de la directive bancaire n° 2000/12/CE : «Les États membres doivent veiller à ce que les activités bénéficiant de la reconnaissances mutuelle puissent être exercées de la même manière que dans l'État membre d'origine, pour autant qu'elles ne soient pas en opposition avec les dispositions légales d'intérêt général en vigueur dans l'Etat membre d'accueil » Note 8 . La Caixa faisait effectivement valoir qu'elle rémunère dans son pays d'origine les dépôts à vue qui lui sont confiés et elle revendiquait la faculté de pratiquer de la même manière en France. 7. - L'application, en l'occurrence, du principe de la reconnaissance mutuelle se heurtait, toutefois, à une difficulté. La Caixa est présente sur le marché français, non pas par une succursale, mais par une filiale, donc un établissement de crédit exerçant son activité en vertu d'un agrément délivré par les autorités françaises, sous le contrôle de ces autorités et en conformité avec la réglementation française. On peut, il est vrai, faire valoir que l'article 43 précité du Traité place sur le même plan, au regard de la liberté d'établissement, les filiales et les succursales et que le principe de la reconnaissance mutuelle, étroitement lié à la liberté

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d'établissement, vaut dans les deux cas. La question est pourtant délicate et les précédents font défaut Note 9 . De toute évidence, la Cour de Justice a préféré, sur ce terrain, se borner à une affirmation de principe négative. Pour caractériser la restriction d'accès au marché bancaire français résultant de l'interdiction de rémunérer les dépôts, elle a utilisé un raisonnement plus factuel. 8. - L'arrêt constate que l'interdiction de rémunérer les dépôts «gêne les établissements de crédit, filiales de sociétés étrangères, dans la collecte de capitaux auprès du public en les privant de la possibilité de livrer, par une rémunération des comptes de dépôt à vue, une concurrence plus efficace aux établissements de crédit traditionnellement implantés dans l'état membre d'établissement, dotés d'un réseau d'agence étendus... ». À l'argument du gouvernement français selon lequel certains types de comptes à très court terme ne sont pas visés par l'interdiction et qu'en conséquence la possibilité de concurrence subsiste, la Cour répond que ces comptes n'assurent pas à leurs titulaires des services équivalents à ceux des comptes à vue classiques. Il est encore observé que la restriction au développement de l'activité des filiales de banques étrangères est d'autant plus sérieuse que la réception de dépôts du public et l'octroi de crédits constituent l'activité de base des établissements de crédit selon l'article 1er de la directive 2000/12.

9. - La Cour ayant ainsi constaté une entrave à la possibilité pour la Caixa de développer sa part de marché en France par l'effet de la prohibition critiquée, il lui restait à s'assurer que cette entrave n'était pas justifiée par des raisons impérieuses d'intérêt général. Sur ce point également elle se livre à une analyse concrète qui lui permet de dire, même si les raisons données par le gouvernement français ne sont pas par leur nature étrangères à l'intérêt public, que l'interdiction de rémunérer les dépôts à vue ne peut bénéficier de l'exception d'intérêt général parce qu'elle constitue un moyen disproportionné par rapport à l'objectif invoqué. 10.- Le gouvernement français avait fait valoir que la rémunération des comptes de dépôt augmenterait les charges d'exploitation des banques qui devraient compenser cet avantage consenti à la clientèle par une tarification de services actuellement gratuits, notamment l'usage du chèque. Ainsi qu'il a été rappelé précédemment, le débat sur les intérêts créditeurs est associé à la question sensible dite du « chèque payant ». L'arrêt souligne que la protection des consommateurs est bien l'une des raisons d'intérêt public pouvant légitimer une mesure restrictive. Mais encore faut-il que cette mesure soit proportionnée à l'objectif. L'arrêt, avec sagesse et réalisme, énonce que même si le risque de majoration du prix de certains services bancaires est réel, il existe pour y faire face des solutions moins brutales que celle appliquée en France, par exemple permettre au consommateur de choisir entre plusieurs formules : un compte rémunéré et des services payants ou un compte non rémunéré et un service de base gratuit. Cette suggestion est ingénieuse. Il est permis d'ajouter que sa mise en œuvre stimulerait une concurrence souvent jugée trop molle en France dans le domaine de la banque de détail. De cette question la Commission consultative du secteur financier (C. monét. fin., art, L. 614-1) a d'ailleurs été récemment saisie par le ministre de l'économie et des finances.

11. - La Cour ne se montre pas non plus convaincue de la nécessité de prohiber la rémunération des dépôts à vue pour amener les épargnants à préférer les investissements à moyen et long terme. Ici également, l'intérêt public n'est pas nié, mais la mesure est considérée, dans les conditions économiques actuelles, comme allant au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif. 12. - La conclusion tirée par la Cour de Justice est nette. L'article 42 du Traité «s'oppose à la réglementation d'un État membre qui interdit à un établissement de crédit, filiale d'une société d'un autre État membre, de rémunérer les comptes de dépôt à vue libellés en euros, ouverts par les résidents du premier État membre». Telle est la réponse donnée à la double question posée par le Conseil d'État.

II CONSÉQUENCES À TIRER PAR LA FRANCE DE L'ARRÊT DE LA CJCE

13. - La conséquence la plus directe et la plus évidente de l'arrêt de la Cour sera celle qu'en tirera le Conseil d'État dans la procédure que la Commission bancaire a engagée contre CaixaBank France. Compte tenu de la précision de la question posée et de la netteté de la réponse qui lui est donnée, tant sur le principe que sur l'application de l'exception d'intérêt public, la Conseil d'Etat ne dispose plus d'aucun pouvoir d'appréciation.

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14. - Les conséquences à tirer de l'arrêt par le législateur français sont un peu moins évidentes. Certes la presse n'a pas manqué d'affirmer que la Cour de Justice a mis fin à la non rémunération des comptes à vue. La formule est un peu rapide et, d'un point de vue juridique, simplificatrice. Ce qui est en cause, c'est évidemment la licéité d'une telle rémunération. Les banques resteront libres de leur politique en la matière. Sous réserve de cette précision, une modification des textes légaux et réglementaires prohibant les intérêts créditeurs sur les dépôts à vue est inévitable. Elle l'est, non par un effet juridique direct de l'arrêt qui ne concerne que la filiale bancaire d'une société dont le siège se trouve dans un autre Etat membre, mais simplement pour éviter que se constitue une discrimination au préjudice des groupes bancaires français. 15. - Le législateur pourrait-il, en vue de limiter les conséquences de la rémunération des comptes à vue dont il va devoir en fait accepter le principe, plafonner ces taux et, éventuellement, maintenir le plafonnement existant pour les dépôts à terme court ? Une telle limitation de la liberté de fixation des taux ne pourrait être utilement justifiée par la volonté d'encourager les placements longs. La Cour de Justice, en effet, n'a pas considéré cette justification comme suffisante Note 10 . On pourrait aussi faire valoir qu'en limitant la rémunération des dépôts, les pouvoirs publics ont le souci de garantir l'équilibre de l'exploitation bancaire. Il est, cependant, douteux que la mesure soit jugée nécessaire et proportionnée à un tel objectif. La solvabilité et la liquidité des établissements de crédit est assurée par de stricts ratios de gestion, harmonisés dans l'UE, et dont le respect est garanti par la supervision qu'exerce, en France, la Commission bancaire. Ce dispositif n'a pas à être complété par des mesures nationales. Les pouvoirs de la Commission bancaire et de la Banque de France qui assiste la Commission, sont d'ailleurs définis en termes suffisamment larges pour leur permettre de réagir à toute pratique tarifaire téméraire d'un ou plusieurs établissements qui pourrait les mettre en péril. L'article L.613-1 du Code monétaire et financier confie à la Commission bancaire la mission d'examiner les conditions d'exploitation des établissements de crédit et de veiller à la qualité de leur situation financière. La formule est large. Il existe d'ailleurs un précédent. Constatant une tendance des banques à consentir des prêts à des taux jugés faibles et potentiellement dangereux pour elles, compte tenu des conditions du marché, le Gouverneur de la Banque de France a. il y a quelques années, publié en sa qualité de président de la Commission bancaire une instruction de mise en garde Note 11 . 16. - Dans le cadre législatif nouveau qui va se constituer, les banques exerçant leur activité en France vont être amenées à repenser leur politique tarifaire. À vrai dire, elles ont commencé à le faire dans le domaine des commissions de services. La tâche entreprise va pouvoir et devoir s'étendre à la rémunération des dépôts et à l'usage du chèque. Les décisions devront être individuelles et non corporatives, à défaut de quoi elles tomberaient sous le coup des lois sur la concurrence. Il est à souhaiter que les services bancaires de base demeurent accessibles à tous et que les modifications tarifaires soient transparentes. Les exigences de la législation récente en matière de transparence des tarifs ont d'ailleurs été assez bien intégrées dans la pratique des banques. Note 1 Aff. C-442/02 (reproduit ci-après en annexe). Note 2 L. 2 août 1956 . art. 17 (C. monét fin., art. L312-3).- Déc.CNC n° 69-02 modifiée à plusieurs reprises par Régi. CRBF. Différents types de comptes d'épargne bénéficient d'une dérogation. Note 3 On sait que l'article L. 131-71 du Code monétaire et financier impose aux établissements de crédit de délivrer gratuitement des formules de chèques mais ne leur interdit pas d'inclure dans leur tarif une commission pour l'usage du chèque. Toutefois les tentatives faites en ce sens par certaines banques ont tourné court à raison de la résistance de la clientèle. Note 4 La loi espagnole admet le paiement d'intérêts sur les dépôts à vue comme celle des autres pays membres de l'UE, exception faite de la loi grecque et de la loi française. Note 5 Sur cette décision v. J. Stoufflet, commentaire dans la Chronique de Droit bancaire européen et international : RD bancaire et financier nov.-déc.2002, p.335 : L.ldot, La rémunération des comptes à vue et le droit communautaire : À propos de la décision de la Commission Bancaire du 16 avril 2002 : Petites affiches. 23 oct. 2002, n° 212. p. 11 Note 6 Gavalda et Stoufflet, Droit bancaire : Litec, 5e éd., n° 122 Note 7 Arrêt de Section n° 247209 Note 8 Sur la réserve des dispositions d'intérêt général de la législation du pays d'accueil v.infra n° 9

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Note 9 V. à cet égard les doutes... et les regrets de l'avocat général W.Van Gerven, La deuxième directive bancaire et la jurisprudence de la Cour de Justice : Rev.de la Banque (Bruxelles). 1,1 199 p.39 Note 10 V.supra n° 11 Note 11 Instr. n° 98-03 de la CB, Rev.Banque 1998 p.74 ; Gavalda et Stoufflet, Chron.dr.bancaire, JCP E 1999 p. 758 n° 3 Doc. 17 : Cass. com, 18 février 2004, n° 01-12.123, Bull. civ. IV, n°38 Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Nîmes, 25 janvier 2001), que M. X..., commerçant, a conclu le 30 mars 1984 une convention de compte avec la banque Chaix (la banque) prévoyant que le compte fonctionnerait aux conditions habituelles en la matière, le compte étant arrêté par trimestre ou par année à la convenance de la banque et les intérêts capitalisés conformément aux usages bancaires ; que par assignation du 17 novembre 1997, M. X... a demandé la restitution à la banque de ce qu'il a estimé être trop perçu, à savoir la différence résultant entre le taux contractuel et le taux légal des intérêts prélevés sur son compte ; Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le moyen : 1 / qu'en matière de prêt d'argent l'indication du taux conventionnel sur les relevés de compte bancaire ne saurait suppléer, même en l'absence de protestation de l'emprunteur, à l'exigence d'un écrit mentionnant ce taux et valoir accord tacite sur le taux d'intérêt conventionnel pratique, si bien qu'en jugeant que l'action en restitution du trop-perçu d'intérêts conventionnels aurait soulevé nécessairement la question de la validité ou de la nullité de dispositions contractuelles, et aurait été ainsi soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du Code civil, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134 et 1907 du Code civil ; 2 / qu'à défaut d'indication du taux d'intérêt conventionnel dans la convention d'ouverture du compte courant, le taux d'intérêt légal est applicable, si bien que la cour d'appel qui, tout en constatant qu'aucun accord écrit n'avait été signé entre les parties sur un taux d'intérêt conventionnel a jugé le titulaire du compte-courant prescrit en son action visant à faire application dans le cadre des accords contractuels du taux d'intérêt légal applicable de par la loi, et à demander restitution des intérêts conventionnels indûment débités, n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 1304 et 1907 du Code civil ; Mais attendu que la reconnaissance de l'obligation de payer des intérêts conventionnels afférents au solde débiteur d'un compte courant, peut, en l'absence d'indication dans la convention d'ouverture de compte courant, résulter de la réception sans protestation ni réserve des relevés de compte par l'emprunteur, dès lors que les taux de ces intérêts y sont indiqués ; que l'arrêt retient qu'en demandant la condamnation de la banque à lui restituer la différence entre les intérêts perçus à un taux contractuel et les intérêts calculés au taux légal, M. X... a soulevé nécessairement la nullité des dispositions contractuelles concernant l'application des intérêts par la banque et que cette action en nullité s'éteint si elle n'a pas été exercée pendant cinq ans à compter de la connaissance de l'obligation de payer des intérêts conventionnels, connaissance acquise par lui et non contestée par les parties dès le mois de décembre 1987 et dont il n'était pas allégué que le taux aurait varié après cette date ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

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Doc. 18 : Cass. com, 6 avril 1993, n° 90-21.198, Bull 1993 IV n°138 Attendu, selon l'arrêt critiqué, que les sociétés X..., Jean X..., Suren et Ambre (les sociétés), titulaires de comptes courants dans les livres de la société Banco Exterior France (la banque), ont assigné celle-ci en restitution d'agios ; que la banque a demandé reconventionnellement leur condamnation au paiement des montants des soldes débiteurs de leurs comptes ; Sur le second moyen : (sans intérêt) ; Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche : Vu l'article 1131 du Code civil ; Attendu que les sociétés faisaient valoir que leur obligation de payer des intérêts était partiellement dénuée de cause, dans la mesure où les sommes prises en considération pour le calcul de ceux-ci étaient augmentées, sans fondement, par l'application de " dates de valeur " aux remises de chèques et d'espèces ainsi qu'aux retraits ; Attendu que, pour rejeter cette prétention, l'arrêt retient que la pratique, ainsi dénoncée, de la banque, est justifiée par le fait " qu'une remise au crédit du compte, comme un retrait porté à son débit, exige un certain délai pour l'encaissement ou le décaissement ", et que " la valeur d'un chèque ne peut être portée au crédit d'un compte qu'après encaissement, lequel ne peut être instantané " ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les opérations litigieuses, autres que les remises de chèques en vue de leur encaissement, n'impliquaient pas que, même pour le calcul des intérêts, les dates de crédit ou de débit soient différées ou avancées, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit " que la société Banco Exterior France n'a commis aucune faute en se livrant à la pratique des jours de valeur ", l'arrêt rendu le 3 octobre 1990, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour la cour d'appel de Lyon.

Doc. 19 : Cass. com, 17 janvier 2006, n°04-11.100, Bull 2006 IV n°11 Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : Vu l'article 1907 du Code civil, ensemble les articles L. 313-1, L.313-2, et R. 313-1 du Code de la consommation : Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a acquis un fonds de commerce au moyen d'un prêt d'équipement consenti par le Crédit lyonnais (la banque), le 18 février 1994 ; que l'acte de prêt mentionne un taux d'intérêt annuel de 9,78%, et un taux effectif global de 10,67 % ; que l'emprunteur a cessé de régler les échéances de ce prêt à compter du mois de novembre 1997 ; que la banque l'a alors poursuivi en paiement ; qu'il a contesté la validité de la stipulation de l'intérêt conventionnel au motif que cet intérêt n'avait pas été appliqué à une année civile de trois cent soixante cinq jours, mais à une année de trois cent soixante jours ; Attendu que, pour se borner à ordonner la restitution des sommes trop perçues, l'arrêt retient que la banque a seulement commis une erreur dans l'application du taux d'intérêt en calculant les intérêts sur la base de 360 jours au lieu de l'année civile ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la banque était redevable à son client d'une somme de 235,55 euros perçue par elle au titre des intérêts calculés par référence à l'année bancaire de 360 jours au lieu de l'avoir été par référence à l'année civile, ce dont il se déduisait que le

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taux d'intérêt indiqué n'avait pas été effectivement appliqué de sorte que les exigences légales relatives à l'indication préalable et par écrit du taux effectif global n'avaient pas été respectées, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 avril 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Doc. 20 : Cass. com 24 mars 2009, n° 08-12.530, Bull 2009 IV n°44 LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le second moyen : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 6 décembre 2007), que la Bred banque populaire (la banque) a consenti le 23 janvier 2004 à la société CCJL un prêt d'un montant de 440 000 euros, les intérêts étant stipulés au taux nominal de 4,60 % calculés sur 360 jours, et le taux effectif global (le TEG) mentionné dans l'acte étant de 4,69 % l'an ; qu'à la suite de l'ouverture de la procédure collective de la société CCJL, Mme X... étant désignée successivement représentant des créanciers puis liquidateur, la banque a déclaré sa créance qui a été contestée ; Attendu que Mme X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir admis la créance de la banque pour la somme de 403 312,56 euros à titre privilégié, avec les intérêts au taux conventionnel, alors, selon le moyen : 1°/ que méconnaît les exigences légales relatives à l'indication préalable et par écrit du taux effectif global et encourt à ce titre la déchéance du droit aux intérêts et l'application du taux légal, la banque qui perçoit, au titre d'un prêt, des intérêts calculés par référence à l'année bancaire de 360 jours au lieu de l'année civile ; qu'ayant constaté que le taux effectif global appliqué par la banque intégrait le taux conventionnel calculé sur une base de 360 jours, la cour d'appel, en statuant comme elle a fait, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation ; 2°/ qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le préjudice de la société emprunteuse n'était pas constitué par le fait que le montant des intérêts calculés sur 360 jours n'était pas nécessairement plus élevé que celui qui aurait dû être appliqué, calculé sur 365 ou 366 jours selon les années, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation ; Mais attendu que, si le TEG doit être calculé sur la base de l'année civile, rien n'interdit aux parties de convenir d'un taux d'intérêt conventionnel calculé sur une autre base ; qu'ayant relevé qu'il était expressément mentionné dans l'acte de prêt que les intérêts conventionnels seront calculés sur la base de 360 jours, l'arrêt retient, à bon droit, que ces modalités, qui ont été librement convenues entre les parties, ne peuvent être remises en cause ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche visée par la seconde branche, que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ; Et attendu que le premier moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Doc. 21 : Cass. Com, 14 avril 1975, n° 74-10.651, n°98

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SUR LE MOYEN UNIQUE : ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE (PARIS, 16 NOVEMBRE 1973) D'AVOIR DEBOUTE LES AYANTS DROIT DE DEJOUX, TITULAIRE A LA BANQUE HERVET DE DEUX COMPTES COURANTS PRESENTANT A SON DECES, L'UN N° 0036, UN SOLDE DEBITEUR, L'AUTRE N° 0037, UN SOLDE CREDITEUR, DE LEUR DEMANDE EN REMBOURSEMENT PAR LA BANQUE DU MONTANT DES AGIOS CALCULES SUR LE SOLDE DU COMPTE 0036, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE LES TERMES CLAIRS ET PRECIS DES DIVERS ACTES ET DOCUMENTS REPRIS PAR L'ARRET ET EMANANT DE LA BANQUE IMPLIQUENT QUE LES DEUX COMPTES FONCTIONNAIENT SOLIDAIREMENT, L'UN COUVRANT L'AUTRE, DE SORTE QUE, SEUL LE SOLDE COMPENSE DEVAIT ETRE RETENU POUR APPRECIER LA POSITION DU TITULAIRE DES COMPTES, QU'AINSI LA COUR D'APPEL A DENATURE LES TERMES DU CONTRAT QUI N'APPELAIT AUCUNE INTERPRETATION ET QU'ETAIT ETABLIE LA SOLIDARITE DES COMPTES, LES AUTRES ENONCIATIONS DE L'ARRET ETANT SANS PERTINENCE ; MAIS ATTENDU QUE L'ARRET CONSTATE QUE DEJOUX ET LA BANQUE N'AVAIENT CONCLU AUCUN ACCORD EXPLICITE SPECIAL AU SUJET DES DEUX COMPTES LITIGIEUX ; QU'IL RELEVE QUE, SI, DANS UNE LETTRE ENVOYEE LE 25 JANVIER 1968 AU NOTAIRE CHARGE DE LIQUIDER LA SUCCESSION DE DEJOUX, DECEDE LE 25 AOUT 1967, LA BANQUE A ECRIT QUE LES DEUX COMPTES "FONCTIONNAIENT SOLIDAIREMENT L'UN POUVANT ETRE COUVERT PAR L'AUTRE", ET SI LE MOT "SOLIDAIRE" FIGURE SUR LE RELEVE DE COMPTE ARRETE A LA MEME DATE, CE TERME NE PEUT AVOIR, S'AGISSANT DU MEME TITULAIRE POUR LES DEUX COMPTES, AUCUNE SIGNIFICATION JURIDIQUE, ET QU'IL RETIENT QUE L'INTENTION DES PARTIES N'A PAS ETE D'ETABLIR DE LIENS ENTRE LES COMPTES, LA BANQUE, POUR SA PART, AYANT SEULEMENT VOULU DIRE DANS LESDITS DOCUMENTS, ECRITS APRES LA MORT DE DEJOUX, QUE PAR L'EFFET DE CE DECES LES DEUX COMPTES COURANTS ONT ETE CLOTURES, ET QUE LES DEUX SOLDES, L'UN POSITIF, L'AUTRE NEGATIF, ONT ALORS ETE COMPENSES SANS QUE CELA IMPLIQUE L'EXISTENCE D'UNE CONVENTION PREALABLE EN CE SENS ET LES HERITIERS DEJOUX AYANT, DE LEUR COTE, COMMENCE PAR DEMANDER DANS LEUR ASSIGNATION DU 19 JUIN 1970 QUE LES COMPTES LITIGIEUX SOIENT CONSIDERES COMME INDEPENDANTS POUR S'OPPOSER A LA COMPENSATION PRECITEE, ET SE CONTREDISANT ENSUITE POUR PRETENDRE QU'UNE CONVENTION AURAIT FIXE CERTAINS LIENS ENTRE CES COMPTES ; QU'IL DECLAIRE QU'EN L'ABSENCE DE TOUTE CONVENTION, LA REGLE EST QUE LES DIVERS COMPTES COURANTS OUVERTS AU NOM DE LA MEME PERSONNE PAR LA MEME BANQUE SONT INDEPENDANTS, SANS QUE LE FAIT QUE LES COMPTES AIENT ETE CLOTURES LE MEME JOUR SOIT DE NATURE A Y FAIRE ECHEC ; QUE PAR CES MOTIFS, LA COUR D'APPEL N'A FAIT QU'USER DE SON POUVOIR D'APPRECIER LES ELEMENTS DE PREUVE QUI LUI ETAIENT SOUMIS POUR DIRE QU'IL N'Y A PAS EU DE CONVENTION SPECIALE ENTRE LES PARTIES, ET POUR DETERMINER, EN CETTE ABSENCE, LE CONTENU ET LA PORTEE DES USAGES APPLICABLES AUXDITS COMPTES ; QUE LE MOYEN EST DONC SANS FONDEMENT ; PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 16 NOVEMBRE 1973 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.

Doc. 22 : Cass. Com, 28 septembre 2004, n°01-16.986, Bull 2004 IV n°166

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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la Société générale que sur le pourvoi incident formé par la société CED Viandes : Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, qu'à la suite d'une saisie que la société CED Viandes avait fait pratiquer entre ses mains, le 3 septembre 1990, au préjudice de la banque irakienne Rafidain Bank, la Société générale a déclaré que sa correspondante lui restait redevable d'une somme de 34 726 505,51 francs représentant le montant compensé des soldes de dix-sept "comptes" internes, débiteurs à l'exception de trois d'entre eux ; que la société CED Viandes a contesté cette déclaration en faisant valoir que ces dix-sept "comptes" étant juridiquement autonomes, la Société générale n'était pas fondée, en l'absence de convention, à procéder à la compensation de leurs soldes respectifs et qu'en outre, il résultait d'un procès verbal de l'administration des Douanes que le montant créditeur du compte tenu en dollars américains était sous-estimé ; qu'après avoir accueilli pour partie cette argumentation, la cour d'appel a condamné la Société générale à payer à la société CED Viandes le montant cumulé des soldes créditeurs, tels qu'ils avaient été déclarés ; Sur le second moyen du pourvoi principal, pris en ses quatre branches : Attendu que la Société générale fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen : 1 ) que la compensation suppose, d'après l'article 1291 du Code civil, que les créances réciproques soient certaines, fongibles, liquides et exigibles ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il avait été soutenu, si l'embargo en vigueur depuis l'arrêté du 4 août 1990 n'avait pas eu pour effet d'empêcher les comptes bancaires litigieux de fonctionner conformément à la volonté des correspondants, toute possibilité de remises réciproques se trouvant désormais interdite, et si ces comptes n'en avaient pas été nécessairement clôturés, leurs soldes constituant dès lors des créances certaines, liquides et exigibles, la cour d'appel a entaché sa décision de base légale au regard du texte susvisé ; 2 ) qu'en se bornant à suggérer en termes vagues que l'existence de sommes libellées en devises différentes était de nature à empêcher leur compensation, sans examiner concrètement si la convertibilité de ces devises ne les rendait pas fongibles au sens de l'article 1291 du Code civil, la cour d'appel, par adoption de motif, a encore entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de ce texte ; 3 ) qu'en vertu de l'article 1290 du Code civil, la compensation légale s'opère de plein droit par la seule force de la loi, même à l'insu des débiteurs, dès l'instant que ses conditions se trouvent réunies ; qu'il s'ensuit, que la date à laquelle la compensation légale a été spécialement invoquée par l'un des débiteurs réciproques est sans influence sur l'opposabilité de cette exception au saisissant ; qu'en fondant l'inopposabilité à la société CED Viandes de l'exception de compensation légale sur l'incapacité de la banque de rapporter un document ayant date certaine, qui aurait constaté cette compensation antérieurement à la saisie, et sur le fait qu'elle avait continué de servir des intérêts sur les comptes litigieux, la cour d'appel, par adoption de motif, a violé le texte susvisé ; 4 ) qu'en tout état de cause, une saisie diligentée à l'initiative d'un tiers ne saurait priver l'un des contractants de son droit d'invoquer la compensation lorsque les créances et des dettes réciproques sont unies par un lien de connexité ; qu'en s'abstenant de rechercher si les mouvements retracés dans les divers comptes litigieux ne se rattachaient pas à des opérations de crédit identiques ou connexes, et notamment de crédit documentaire ainsi qu'il avait été soutenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1290 du Code civil ; Mais attendu que la Société générale n'ayant jamais démontré que les "comptes" ouverts dans ses livres au nom de la Rafidain Bank auraient été effectivement clôturés avant les opérations de saisie, la

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cour d'appel, qui n'avait pas à procéder aux recherches évoquées par les première, deuxième et quatrième branches, dès lors dépourvues d'incidence sur la solution du litige, a, abstraction faite du motif erroné mais surabondant, critiqué par la troisième branche, justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche : Vu l'article 1134 du Code civil ; Attendu que pour statuer comme il a fait, l'arrêt, après avoir relevé que, contrairement à ce qui était soutenu, les seize comptes litigieux n'avaient pas été ouverts pour y loger des créances litigieuses qui ne se retrouvaient pas dans le compte d'origine, retient, par motifs propres, que si la Société générale ne justifie que de l'ouverture d'un seul compte à l'initiative de la Rafidain Bank, elle établit par la production de ses relevés que les dix-sept "comptes" avaient fonctionné de manière autonome, générant des intérêts comptabilisés sur les soldes créditeurs indépendamment des soldes débiteurs, ne donnant jamais lieu à l'établissement d'un solde global sauf pour les besoins de la déclaration affirmative et, par motifs adoptés, qu'il était impossible de compenser des comptes libellés en dollars américains ou en deutsch marks avec des comptes en francs ; Attendu qu'en se déterminant ainsi alors que l'unité d'un compte n'est incompatible ni avec l'existence de chapitres libellés en devises étrangères dès lors que, celles-ci étant convertibles, une balance peut être calculée à chaque établissement de solde, ni avec l'existence d'intérêts différenciés selon les opérations auxquels ils se rapportent, ni avec l'établissement de relevés séparés pendant le cours du fonctionnement de ce compte, sans rechercher si, les comptes litigieux avaient ou non permis de recevoir ou d'opérer des règlements entre les parties ce dont elle aurait alors pu déduire qu'ils avaient une existence contractuelle et qu'ils n'étaient pas seulement, comme il était prétendu, de simples cadres comptables ou comptes d'ordre dont les débits n'entraînaient aucun paiement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; Et sur le moyen unique du pourvoi incident : Vu l'article 336-1 du Code des douanes ; Attendu que pour limiter la condamnation de la banque au titre des avoirs détenus par elle, pour le compte de la Rafidain Bank, sur le compte 75 090 139, à la somme de 6 316,04 USD, l'arrêt retient que compte tenu de son caractère succinct et du fait qu'il n'avait pas donné lieu à poursuites et à condamnation, le procès verbal des douanes dont il ressortait que d'après les états trimestriels adressés par la Société générale à la Banque de France, le montant de ces avoirs s'établissait, au 30 juin 1990, à la somme de 345 078 USD, n'établissait pas l'inexactitude de la déclaration affirmative de la banque ; Attendu qu'en statuant ainsi sans que la Société générale ait justifié ni expliqué la disparité dénoncée par la société CED Viandes, alors que les procès verbaux de douanes, lorsqu'ils sont, comme en l'espèce, rédigés par deux agents des Douanes, sont, en raison de la qualité de ceux, qui en apposant leur signature, en authentifient les constatations et énonciations, des actes publics et authentiques faisant foi jusqu'à inscription de faux, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 novembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ; Fait masse des dépens et les met par moitié à la charge de la Société générale et de la société CED Viandes ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société CED Viandes ;

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Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille quatre.

Doc. 23 : Cass. com, 13 novembre 1973, n°70-14374 71-10.478, n°325 SUR LE MOYEN UNIQUE DU POURVOI 70-14 374, QUI EST PREALABLE : ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR DECLARE QUE L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR AVAIT ETE, A JUSTE TITRE, MIS EN CAUSE ET QUE LA CONDAMNATION PRONONCEE CONTRE LE PERCEPTEUR DE SAINT-CLAUDE LUI ETAIT OPPOSABLE, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, LE LITIGE OPPOSANT LE CONTRIBUABLE AU PERCEPTEUR ETANT FONDE SUR LA PRETENDUE IRREGULARITE D'UNE OPPOSITION A TIERS-DETENTEUR PRATIQUEE SUR UN COMPTE-COURANT POUR LE RECOUVREMENT DE CONTRIBUTIONS DIRECTES, LA CAUSE DE L'ACTION N'ETAIT PAS ETRANGERE A L'IMPOT, CE QUI IMPLIQUAIT LA COMPETENCE DU COMPTABLE AUTEUR DES POURSUITES LITIGIEUSES ET NON DE L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR POUR DEFENDRE A L'ACTION EN RESPONSABILITE FONDEE SUR UN ACTE DE POURSUITES ; MAIS ATTENDU QU'APRES AVOIR RETENU QUE L'ACTION INTENTEE PAR BAPTISTA ETAIT ETRANGERE AU PRINCIPE ET AU MONTANT DE LA DETTE D'IMPOT NON CONTESTEE, MAIS TENDAIT UNIQUEMENT A FAIRE DECLARER L'ETAT DEBITEUR DE DOMMAGES-INTERETS EN RAISON DE LA FAUTE DE SERVICE QU'AURAIT COMMISE UN FONCTIONNAIRE DE L'ADMINISTRATION DES FINANCES DANS UNE PROCEDURE D'EXECUTION, LA COUR D'APPEL A PU EN DEDUIRE QUE LA MISE EN CAUSE DE L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR SUR UNE TELLE ACTION ETAIT JUSTIFIEE ; QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ; MAIS SUR LE MOYEN UNIQUE DU POURVOI N° 71-10 478, PRIS EN SA PREMIERE BRANCHE : VU L'ARTICLE 2093 DU CODE CIVIL ET L'ARTICLE 1922 DU CODE GENERAL DES IMPOTS ; ATTENDU QU'ESTIMANT QU'EN RAISON DE L'INDIVISIBILITE DES OPERATIONS D'UN COMPTE-COURANT, AUCUN SOLDE NE PEUT ETRE DEGAGE AVANT LA CLOTURE FINALE DU COMPTE ET QUE, TANT QUE CELUI-CI N'EST PAS DEFINITIVEMENT ARRETE, AUCUN CREANCIER N'A LE DROIT DE PRATIQUER SAISIE SUR UN SOLDE PROVISOIRE, LA COUR D'APPEL A CONSIDERE QUE LE PERCEPTEUR DE SAINT-CLAUDE, QUI POURSUIVAIT LE RECOUVREMENT D'IMPOTS, AVAIT COMMIS UNE FAUTE EN DEMANDANT A LA BANQUE DE LA GUADELOUPE, PAR VOIE D'AVIS A TIERS DETENTEUR, LE VERSEMENT DES DISPONIBILITES DU COMPTE-COURANT DONT BAPTISTA ETAIT TITULAIRE DANS CET ETABLISSEMENT ; ATTENDU, CEPENDANT, QUE LA CREANCE, OBJET DE LA PROCEDURE D'EXECUTION LITIGIEUSE, ETAIT RECOUVRABLE SUR L'ENSEMBLE DU PATRIMOINE DE BAPTISTA ET QUE, FAISANT PARTIE DUDIT PATRIMOINE, LE SOLDE PROVISOIRE DU COMPTE-COURANT, AU JOUR OU LE PERCEPTEUR A NOTIFIE SA DEMANDE A LA BANQUE, NE POUVAIT ETRE DISTRAIT DU GAGE GENERAL DU TRESOR ; QU'IL SUIT DE LA QU'EN SE REFUSANT A RECHERCHER QUELLES ETAIENT LES DISPONIBILITES DU COMPTE DE BAPTISTA LORS DE L'OPPOSITION DU PERCEPTEUR ET EN DECLARANT FAUTIVE UNE TELLE OPPOSITION, LA COUR D'APPEL N'A PAS LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ; PAR CES MOTIFS : SUR LE POURVOI N° 70-14 374, REJETTE ;

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SUR LE POURVOI N° 71-10 478, ET SANS QU'IL SOIT BESOIN D'EXAMINER LA SECONDE BRANCHE DU MOYEN UNIQUE : CASSE ET ANNULE L'ARRET RENDU LE 29 JUIN 1970 ENTRE LES PARTIES, PAR LA COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE ; REMET, EN CONSEQUENCE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL DE FORT-DE-FRANCE.

Doc. 24 : Art. L. 162-1 CPCE Lorsque la saisie est pratiquée entre les mains d'un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôt, celui-ci est tenu de déclarer le solde du ou des comptes du débiteur au jour de la saisie. Dans le délai de quinze jours ouvrables qui suit la saisie et pendant lequel les sommes laissées au compte sont indisponibles, ce solde peut être affecté à l'avantage ou au préjudice du saisissant par les opérations suivantes dès lors qu'il est prouvé que leur date est antérieure à la saisie : 1° Au crédit : les remises faites antérieurement, en vue de leur encaissement, de chèques ou d'effets de commerce, non encore portées au compte ; 2° Au débit : a) L'imputation des chèques remis à l'encaissement ou portés au crédit du compte antérieurement à la saisie et revenus impayés ; b) Les retraits par billetterie effectués antérieurement à la saisie et les paiements par carte, dès lors que leurs bénéficiaires ont été effectivement crédités antérieurement à la saisie. Par dérogation aux dispositions prévues au deuxième alinéa, les effets de commerce remis à l'escompte et non payés à leur présentation ou à leur échéance lorsqu'elle est postérieure à la saisie peuvent être contrepassés dans le délai d'un mois qui suit la saisie. Le solde saisi attribué n'est diminué par ces éventuelles opérations de débit et de crédit que dans la mesure où leur résultat cumulé est négatif et supérieur aux sommes non frappées par la saisie au jour de leur règlement.

CLÔTURE DU COMPTE

Doc. 25 : Art. L. 312-1 III al.3 et L. 312-1 al.6 CMF

Art. L. 312-1 III al.3 CMF III. – En cas de refus de la part de l'établissement choisi d'ouvrir un tel compte à l'une des personnes mentionnées au I, celle-ci peut saisir la Banque de France afin qu'elle lui désigne un établissement de crédit situé à proximité de son domicile ou d'un autre lieu de son choix, en prenant en considération les parts de marché de chaque établissement concerné, dans un délai d'un jour ouvré à compter de la réception des pièces requises définies par arrêté. L'établissement de crédit qui a refusé l'ouverture d'un compte remet systématiquement, gratuitement et sans délai, au demandeur une attestation de refus d'ouverture de compte et l'informe qu'il peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte. Il lui propose, s'il s'agit d'une personne physique, d'agir en son nom et pour son compte en transmettant la demande de désignation d'un établissement de crédit à la Banque de France ainsi que les informations requises pour l'ouverture du compte. A la demande d'une personne physique, le département, la caisse d'allocations familiales, le centre communal ou intercommunal d'action sociale dont cette personne dépend, une association ou une fondation à but non lucratif dont l'objet est d'accompagner les personnes en difficulté ou de défendre les intérêts des familles ou une association de consommateurs agréée peut également transmettre en son nom et pour son compte la demande de désignation et les pièces requises à la Banque de France. Un décret détermine les conditions dans lesquelles les associations et fondations peuvent agir sur le fondement du présent alinéa. Les établissements de crédit ainsi désignés par la Banque de France sont tenus d'offrir au titulaire du compte des services bancaires de base dont le contenu et les conditions tarifaires sont précisés par

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décret. Ils procèdent à l'ouverture du compte de dépôt dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires à cet effet. L'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, mentionnée à l'article L. 511-29, adopte une charte d'accessibilité bancaire afin de renforcer l'effectivité du droit au compte. Cette charte précise les délais et les modalités de transmission, par les établissements de crédit à la Banque de France, des informations requises pour l'ouverture d'un compte. Elle définit les documents d'information que les établissements de crédit doivent mettre à disposition de la clientèle et les actions de formation qu'ils doivent réaliser. Elle fixe un modèle d'attestation de refus d'ouverture de compte. La charte d'accessibilité bancaire, homologuée par arrêté du ministre chargé de l'économie, après avis du comité consultatif du secteur financier et du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, est applicable à tout établissement de crédit. Le contrôle du respect de la charte est assuré par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et relève de la procédure prévue à l'article L. 612-31. L. 312-1 al.6 CMF Sous réserve du respect des dispositions du chapitre Ier du titre VI du livre V, l'établissement procède à l'ouverture du compte de dépôt demandée par les personnes mentionnées au premier alinéa du présent II au plus tard dans les six jours ouvrés à compter de la réception de l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires à cet effet.

Doc. 26 : Cass. com, 8 décembre 1987, n°87-11501, Bull 1987 IV, n°266

Attendu qu'il résulte de l'arrêt infirmatif attaqué que la société Stratimme Cappello disposait d'un

compte courant ouvert dans les livres de la Banque nationale de Paris (BNP) et bénéficiait, dans le

cadre du fonctionnement de ce compte, d'un plafond d'escompte et d'un découvert dont les montants

étaient déterminés, qu'elle a été mise en redressement judiciaire avec M. X... pour administrateur, que

ce dernier a informé la BNP qu'usant de la faculté que lui offrait l'article 37, alinéa 1er, de la loi du 25

janvier 1985, il optait pour la poursuite de la convention de compte courant, que la banque lui a

répondu qu'elle considérait que le compte courant avait été clôturé de plein droit par l'effet du

redressement judiciaire, que la société Stratimme Cappello et l'administrateur ont assigné la BNP

devant le tribunal qui avait ouvert la procédure pour qu'il ordonne que soient continués la

convention de compte courant ainsi que le plafond d'escompte et le découvert contractuellement

fixés, et que les premiers juges ont accueilli cette demande ; .

Sur le premier moyen, pris en ses première et quatrième branches :

Vu les articles 1er et 37, alinéas 1er et 5, de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu que l'administrateur d'un redressement judiciaire a la faculté d'exiger l'exécution des

contrats en cours lors du prononcé de ce redressement judiciaire sans qu'il puisse être fait de

distinction selon que les contrats ont été ou non conclus en considération de la personne ; qu'il en

résulte que l'administrateur doit, lorsqu'il le demande, obtenir la continuation, pendant la période

d'observation, des conventions de compte courant, d'ouverture de crédits, de découvert ou

d'autorisation d'escomptes en cours au jour du jugement de redressement judiciaire, sauf pour

l'établissement financier à bénéficier des dispositions de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 et, s'il

y a lieu, de celle du deuxième alinéa de l'article 60 de la loi du 24 janvier 1984 ;

Attendu que pour décider que M. X... ne pouvait exiger le maintien de la convention de compte

courant et des concours financiers antérieurement accordés par la BNP, la cour d'appel s'est fondée

sur ce que ces conventions et concours avaient été consentis par la banque à la société Stratimme

Cappello en considération de la personne de son client et, spécialement, de la confiance qu'il lui

inspirait, après avoir énoncé, à tort, que le mécanisme de règlement simplifié et de garantie propre au

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compte courant s'opposait à la continuation de celui-ci et empêchait que l'on puisse tirer un solde

provisoire et le déclarer ;

Attendu cependant qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches et moyens :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 janvier 1987, entre les parties,

par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se

trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon

Doc. 27 : Cass. Com, 17 mars 1981, n°79-13.733, n°142 SUR LE PREMIER MOYEN : VU L'ARTICLE 1147 DU CODE CIVIL ; ATTENDU QUE, SELON L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE, DAME X..., TITULAIRE A LA BANQUE SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT (LA BANQUE) D'UN COMPTE COURANT DEVENU DEBITEUR, A REMIS A LADITE BANQUE A PLUSIEURS REPRISES DES BONS DE CAISSE DONT LE MONTANT A ATTEINT SENSIBLEMENT EN JANVIER 1973 LE DECOUVERT DE SON COMPTE ; QUE LA BANQUE SANS INSTRUCTIONS DE SA CLIENTE, A RENOUVELE CES BONS DE CAISSE A LEUR ECHEANCE ET, LE 31 JUILLET 1974, LES A PORTES AU CREDIT DE SON COMPTE COURANT, MAIS QUE CELUI-CI PRESENTANT ENCORE UN SOLDE DEBITEUR DE 21 664,21 FRANCS AU 31 DECEMBRE 1975, ELLE A ASSIGNE DAME X... QUI REFUSAIT DE REMBOURSER CETTE SOMME ; ATTENDU QUE POUR CONDAMNER DAME X... A PAYER CELLE-CI, LA COUR D'APPEL RETIENT QU'ELLE N'A PU CROIRE SOLDER SON COMPTE COURANT PAR LA REMISE DES BONS DE CAISSE ET QU'ELLE ETAIT TITULAIRE SIMULTANEMENT D'UN COMPTE COURANT DEBITEUR QUI LUI A VALU DES AGIOS DE PLUS EN PLUS ELEVES, ET DES BONS DE CAISSE QUI LUI RAPPORTAIENT UN INTERET TRES LARGEMENT INFERIEUR ; QU'ELLE ENONCE CEPENDANT QUE LE SEUL REPROCHE QUE DAME X... PUISSE FAIRE A SON BANQUIER, FORMULE DEJA DANS UNE LETTRE QU'ELLE LUI ADRESSAIT LE 22 SEPTEMBRE 1974, EST D'AVOIR NEGLIGE DES LEURS ECHEANCES, DE PORTER AU CREDIT DE SON COMPTE COURANT LE MONTANT DE CES BONS, ET DE LES AVOIR REMPLACES, SANS QUE LA CAUSE DE CETTE INITIATIVE SOIT CONNUE, PAR DE NOUVEAUX BONS ; ATTENDU QU'EN RETENANT QUE LA BANQUE A REMPLACE, SANS ORDRE DE SA CLIENTE, LES BONS DE CAISSE VENUS A ECHEANCE PAR DE NOUVEAUX BONS A ECHEANCE PLUS LOINTAINE, SANS RECHERCHER SI, EN AGISSANT AINSI DE SA PROPRE INITIATIVE, LA BANQUE N'AVAIT PAS COMMIS UNE FAUTE AYANT PU CAUSER UN PREJUDICE A DAME X..., LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION ; ET SUR LE SECOND MOYEN : VU L'ARTICLE 1134 DU CODE CIVIL ; ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL A CONDAMNE DAME X... A PAYER A LA BANQUE, SUR LE SOLDE DEBITEUR DE SON COMPTE COURANT CLOTURE, DES INTERETS AU TAUX DE 17,50 %, TAUX IDENTIQUE A CELUI PRATIQUE LORS DU FONCTIONNEMENT DU COMPTE ; ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, ALORS QUE LE TAUX CONVENTIONNEL DES INTERETS PREND FIN AVEC LE CONTRAT DU COMPTE COURANT SAUF STIPULATION CONTRAIRE, SANS RECHERCHER SI UN NOUVEL ACCORD ETAIT INTERVENU ENTRE DAME X... ET LA BANQUE POUR APPLIQUER CE MEME TAUX D'INTERET AU SOLDE DEBITEUR SUBSISTANT APRES

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LA CLOTURE DU COMPTE, LA COUR D'APPEL N'A PAS DERECHEF DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, EN SON ENTIER, L'ARRET RENDU ENTRE LES PARTIES LE 22 FEVRIER 1979 PAR LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE ; REMET, EN CONSEQUENCE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL DE NIMES.

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Séance n° 5 LE COMPTE :

COMPTE DE DÉPÔT ET COMPTE COURANT (II) INTRODUCTION Doc. 1 : A. Prüm « De la distinction entre compte de dépôt et compte courant » RD banc. fin. 2003 53. LE COMPTE DE DÉPÔT Ouverture et fonctionnement Doc. 2 : Art. L. 351-1 al. 1er CMF Doc. 3 : Art. L. 312-1-6 CMF Doc. 4 : Cass. Civ 1ère 8 janvier 2009 n°06-17.630 Doc. 5 : Cass. Civ 1ère 28 mai 2009, n°08-15.802, Bull civ. I 2009 n°110 Doc. 6 : Art. 1316-4 C. civ Doc. 7 : CE 14 septembre 2014 n°381183 Solde du compte Doc. 8 : Art 1736 IV-1 du CGI Doc. 9 : Cass. Com 9 février 2010 n°09-12-853 Doc. 10 : Art. 1939 C. civ. Doc. 11 : Art. L. 312-35 du Code de la consommation LE COMPTE COURANT La caractérisation du compte courant Doc. 12 : Cass. Com 8 juillet 1997 n°97-15.540 Doc. 13 : Cass. Com 5 octobre 2004 n°01-12.435 Doc. 14 : Cass. Com 6 décembre 2011 n°10-24.852 Doc. 15 : Cass. Com 23 mars 1993 n°91-13.256 Doc. 16 : Cass. Com 17 décembre 1991, n°90-12144, Bull 1991 IV n°389 Doc. 17 : Cass. Com 9 janvier 2001, n°97-13236, Bull 2001 IV n°1 Doc. 18 : Cass. Com 26 mai 1999 n°96-19.937 Doc. 19 : Cass. Com 9 avril 2002 n°99. 11.066 Doc. 20 : Cass. Civ. 1ere 6 janvier 2011 n°09-70.651 Doc. 21 : Cass. Civ 8 janvier 2009 n°06-17.630

Les effets du compte courant

Doc. 22 : Cass. Com 6 février 1996, n°93-19601, Bull IV n°34 Doc. 23 : Cass. Com 13 novembre 1973, n° 70-14374 71-10478, Bull n°325 Doc. 24 : Cass. Civ 1ère 9 février 1988, n°86-11557, Bull 1988 I n°34 Doc. 25 : Cass. Com. 22 mai 1991, n°89-19697, Bull 1991 IV n°168 Exercice : commentaire d’arrêt : Cass. Civ 1ère, 28 mai 2009 (doc. 5)

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INTRODUCTION

Doc. 1 : A. Prüm « De la distinction entre compte de dépôt et compte courant » RD banc. fin. 2003 53. La loi MURCEF changetelle la donne ? Les comptes bancaires de dépôt, encore appelés comptes ordinaires ou comptes chèques ne bénéficient pas d'un régime juridique aussi clairement établi que celui qui gouverne les comptes courants. Forgé par des usages séculaires, ce dernier a fait l'objet d'une analyse minutieuse alors que les règles régissant les comptes de dépôt sont le plus souvent déduites par simple différence avec celles dégagées pour les comptes courants. Tout en reconnaissant qu'en pratique les uns et les autres fonctionnent selon un mode opératoire similaire, l'on se contente ainsi d'observer que les comptes de dépôts échappent au principe de généralité ainsi qu'à l'exigence de réciprocité des remises, symptomatiques des comptes courants. Pour autant, la Cour de cassation s'abstient d'étendre pleinement aux comptes de dépôt la principale caractéristique des comptes courants, à savoir l'effet de règlement automatique attaché à l'entrée en compte d'une remise (R. Bonhomme, Proposition d'analyse de l'effet de règlement des comptes bancaires : Petites affiches, 21 juin 2001, p. 4). Soucieuse de protéger les clients non commerçants, n'atelle pas refusé d'admettre, d'une part, que le solde débiteur d'un compte de dépôt génère de plein droit des intérêts au profit de la banque (Cass. 1reciv., 4 déc. 1990, Wlambi : Banque 1991, p. 324, obs. RivesLange) et, d'autre part, que la convention d'intérêts susceptible d'être conclue entre la banque et son client puisse déroger aux règles de l'anatocisme posées par l'article 1154 du Code civil (Cass. 1reciv., 4 déc. 1990, Bonnet : Banque 1991, p. 428, obs. RivesLange). Comme l'a observé ajuste titre le professeur RivesLange, l'une et l'autre solutions, loin d'être confinées au régime des intérêts débiteurs, remettent directement en cause l'effet novatoire de l'inscription en compte de dépôt d'une créance de la banque puisqu'une telle créance ne se trouve désormais éteinte qu'à condition de pouvoir être compensée avec un solde créditeur et, à défaut, avec la créance que le client tire d'une éventuelle autorisation de découvert (Cass. avis, 9 oct. 1992 : Bull, civ, avis n° 1 ; JCP E 1993, I, 302, n° 9, obs. Gavalda et Stoufflet). La doctrine a critiqué l'entorse portée de la sorte à l'effet de règlement automatique des remises effectuées dans un compte en banque en estimant qu'il n'y avait pas lieu de distinguer à ce propos entre les comptes de dépôt et les comptes courants et, surtout, qu'il paraissait difficilement soutenable de soumettre le payement des créances de la banque à des conditions différentes de celles qui s'appliquent aux créances du client alors que les unes comme les autres entrent de la même manière dans le compte (Th. Bonneau, Droit bancaire, Montchrestien, 4e éd., 2001, n° 351). L'on doit effectivement regretter que le désir (excessif ?) manifesté par la première chambre civile de la Cour de cassation de ménager les intérêts des clients, à l'occasion des deux affaires citées, l'ai conduit à priver la convention de compte de dépôt d'un effet essentiel. La conception réductrice des comptes de dépôt retenue par la haute juridiction n'est sans doute pas étrangère aux tentatives doctrinales récentes de les assimiler aux comptes courants. Fort d'une pratique qui reconnaît de plus en plus souvent aux comptes de dépôt une amplitude comparable à celle des comptes courants tout en plaçant le banquier en position de créancier, organisant par la même la réciprocité des remises, certains n'hésitent pas à considérer que « les comptes de dépôt ou de chèques sont des comptes courants qui ne disent pas leur nom alors même qu'ils en présentent les caractères et que ces caractères correspondent bien à la volonté des parties » (F.J. Crédot et Y Gérard, RD bancaire et de la bourse, 1991, p. 142) en même temps que d'autres mettent en avant la très large identité de régime pour dénoncer l'inopportunité d'une distinction fondée sur des critères trop incertains (J.L Rives-Lange et M. Contamine Raynaud, Droit bancaire, 6e éd., n° 277 ; D.R. Martin, De l'idée de compte :

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Mélanges AEDBF, p. 285 ; Th. Bonneau, op. cit., n° 353 et 354 ; J. Belot, Compte de dépôt et compte courant en matière bancaire : RJ com. 1985, p. 41 ; 1. TroucheDoerflinger, La distinction entre compte de dépôt et compte courant : Petites affiches, 12 juin 1998, p. 4). Ce souhait peutil toujours être exhaussé depuis la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier qui introduit une nouvelle différence entre les régimes des comptes de dépôt et des comptes courants ? Mû par le même souci consumériste que la Cour de cassation, le législateur est venu, en effet, soumettre les premiers à un ensemble de conditions formelles parmi lesquelles la fameuse exigence d'une convention écrite, dont le contenu doit toujours être précisé par un règlement d'application (C. monét. fin., art. L 31211, même si le gouvernement a renoncé provisoirement à prendre ce règlemen en se contentant d'une charte professionnelle). Après la disparition de l'intérêt fiscal attaché à la distinction entre les comptes courants et les comptes de dépôt, celle ci se trouve ainsi restaurée légalement sur un autre plan. Vu le caractère relativement contraignant du nouveau formalisme applicable aux comptes de dépôt, il ne fait aucun doute que les banques se garderont dorénavant de les confondre avec les comptes courants. Leur différenciation sera d'ailleurs d'autant plus aisée qu'elle pourra s'appuyer sur des critères objectifs plutôt que sur l'analyse de l'intention des parties, critère favorisée par la doctrine (M. Cabrillac et JL Rives Lange, Rép. com. Dalloz, V° Dépôt et compte en banque, n° 79). Selon la Charte relative aux conventions de compte de dépôt, adoptée par la Fédération Bancaire Française, au mois de janvier de cette année (reproduite dans cette revue 2003, p. 9 et commentée par J. Soufflet, p. 122), la notion de compte de dépôt, tel que visée par l'article L. 31211 du Code monétaire et financier, doit être comprise comme s'étendant aux seuls « comptes de dépôt à vue et aux comptes courants postaux ouvert par des personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels », à l'exception des comptes soumis à une réglementation particulière. Bien qu'il ne s'agisse pas là à proprement parler d'une définition officielle, puisqu'émanant seulement d'une organisation professionnelle, il convient d'observer que la Charte reprend sur ce point littéralement l'article 1er du projet d'arrêté portant application de l'article L. 31211 du Code monétaire et financier préparé par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à la suite des recommandations du comité consultatif institué à l'article L. 6146 du même code (Rapport du comité consultatif pour l'exercice 2001-2002, p. 119). Le projet d'arrêté ajoute seulement que le compte en question « a vocation à fonctionner en position créditrice ». Le critère proposé a le mérite de la simplicité, mais ne l'estil pas excessivement ? La loi du 11 décembre 2001 n'opère à ce propos aucune discrimination entre personnes physiques et personnes morales, pas plus qu'elle n'exclut expressément de son champ d'application les comptes à terme. L'on voit difficilement comment un règlement d'application et, a fortiori, une charte professionnelle, peuvent venir restreindre dans ces conditions la portée des nouvelles exigences formelles par une définition (trop ?) étroite du compte de dépôt. Le souhait de la communauté bancaire de contenir autant que possible les contraintes impliquées par l'article L. 312 11 du Code monétaire et financier aux seuls comptes ordinaires ouverts à des particuliers n'agissant pas à des fins professionnelles est révélateur de l'enjeu que la loi du 11 décembre 2001 attache à la distinction entre les comptes de dépôt et les comptes courants. Paradoxalement, elle pourrait bien avoir pour effet indirect de rapprocher leurs régimes respectifs. Obligées de préciser par une convention écrite les modalités de fonctionnement de chaque compte de dépôt, les banques ne serontelles pas incitées à se ménager à cette occasion les mêmes garanties que celles offertes par un compte courant ? Elles devraient ainsi, sans difficulté, pouvoir convenir avec leurs clients que chaque remise affectée au compte se trouve réglée de façon automatique et indépendamment du solde. Les effets malencontreux de la position de la première chambre civile de la Cour de cassation, évoquée cidessus, se trouveraient ainsi évités. Au surplus, de nombreux clients ne devraient pas voir d'inconvénient d'accepter le principe de la généralité de leur compte de dépôt, surtout lorsqu'ils sont assortis d'une autorisation de découvert. Certes, cette affectation générale n'aura pas le même intérêt pour le banquier que celle consentie par un commerçant qui perçoit sur son compte courant tous les paiements reçus de ses clients ; elle lui permettra cependant d'enregistrer sur le compte les revenus réguliers de son titulaire.

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Une telle évolution ne laisserait subsister, en définitive, entre les comptes de dépôt et les comptes courants qu'une différence essentiellement formelle mais éviterait l'inconvénient d'une disparité injustifiée au niveau de l'effet de règlement des remises en compte. Espérons que la pratique saisira l'occasion d'opérer ce rapprochement.

LE COMPTE DE DÉPÔT

Doc. 2 : Art. L. 351-1 al. 1er CMF « Est puni d'une amende fiscale de 75 euros le fait de méconnaître l'une des obligations mentionnées aux deuxième, quatrième, cinquième et huitième alinéas du I de l'article L. 312-1-1 et, lorsque le client est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, à l'article L. 314-12 et au II de l'article L. 314-13. Cette amende est prononcée et recouvrée suivant les règles applicables à la taxe sur la valeur ajoutée. Le contentieux est suivi par l'administration qui a constaté l'infraction. »

Doc. 3 : Art. L. 312-1-6 CMF « La gestion d'un compte de dépôt pour les personnes physiques agissant pour des besoins professionnels est réglée par une convention écrite entre le client et son établissement de crédit. Les principales stipulations que cette convention de compte doit comporter, notamment les modalités d'accès à la médiation, sont précisées par un arrêté du ministre chargé de l'économie. »

Doc. 4 : Cass. Civ 1ère 8 janvier 2009 n°06-17.630

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que l'association UFC Que Choisir a, sur le fondement de l'article L. 421-6 du code de la

consommation, introduit contre le Crédit lyonnais une action en suppression de clauses contenues dans

la convention de compte de dépôt et dans le guide tarifaire proposés, en 2003, aux clients de la banque

; que l'arrêt attaqué, qui examine ces clauses contenues dans les documents contractuels, tels que

proposés aux clients dans leur version de 2005, accueille l'action pour certaines clauses mais la rejette

pour d'autres ;

Sur le douzième moyen, tel qu'il figure dans le mémoire en demande et est annexé au présent arrêt :

Attendu qu'ayant constaté que le Crédit lyonnais avait versé aux débats la convention de compte de

dépôt dans sa version d'octobre 2005 et l'édition du guide tarifaire de juillet 2005, la cour d'appel, qui a

examiné les clauses contenues dans ces documents contractuels, substitués, au jour où elle statuait, à

ceux antérieurement proposés aux consommateurs, a, à bon droit, rejeté la demande de l'association

UFC Que Choisir en ce qu'elle tendait à voir déclarer abusive la clause 1.5 § 2 qui ne figurait plus dans

la nouvelle version de la convention ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure dans le mémoire en demande et est

annexé au présent arrêt :

Attendu que, contrairement à ce qu'affirme le moyen, les clauses, prévoyant respectivement que les

relevés de compte remis ou transmis par voie informatique font preuve des opérations et écritures

qu'ils comportent et que la preuve de la remise d'espèces ou de chèques dans les automates, qui ne

vérifient pas le montant du dépôt mentionné par le client, résulte d'un inventaire ultérieur effectué par

la banque, réservent, sans altérer le pouvoir souverain d'appréciation du juge, la possibilité pour le

titulaire du compte d'apporter, sans en inverser la charge, la preuve de la réalité des opérations, des

ordres ou des dépôts ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

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Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est

annexé au présent arrêt :

Attendu que, d'abord, ayant retenu que, si le code confidentiel d'accès aux services de consultation et

de gestion de compte à distance par internet, audiotel ou minitel permettait de consulter le solde des

comptes, d'effectuer des virements entre comptes du même client et de réaliser des opérations

bancaires et sur titres, il n'était pas pour autant le code secret d'une carte bancaire, la cour d'appel, qui

n'avait pas à se livrer à la recherche prétendument omise dès lors que les dispositions de l'article L.

132-4 du code monétaire et financier, relatives aux cartes de paiement, se trouvaient sans application,

a légalement justifié sa décision d'écarter le caractère illicite de la clause selon laquelle le Crédit

lyonnais n'assumait pas la responsabilité des conséquences d'un usage abusif ou frauduleux du code

confidentiel ; qu'ensuite, ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que cette clause, contenue dans

des stipulations destinées à mettre en garde le client sur les mesures de sécurité élémentaires qu'il doit prendre concernant son code personnel pour en assurer la confidentialité et en prévenir la divulgation,

et retenu, en conséquence, qu'elle visait l'utilisation abusive ou frauduleuse par un tiers en possession

du code personnel du fait de la négligence de ce client ou par ce dernier, la cour d'appel a légalement justifié sa décision d'écarter le caractère abusif de ladite clause qui n'avait pas pour objet ni pour effet

d'exonérer la banque de sa responsabilité en cas de faute de sa part ; que le moyen ne peut être

accueilli ;

Sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est

annexé au présent arrêt :

Attendu que l'arrêt retient, à bon droit, que la clause, prévoyant que les carnets de chèques sont retirés

au guichet de l'agence ou envoyés par courrier recommandé aux frais du client, soit sur instruction de

celui-ci, soit en l'absence de retrait dans un délai de six semaines, ne méconnaît pas les dispositions de

l'article L. 131-71 du code monétaire et financier selon lesquelles les formules de chèques sont mises

gratuitement à la disposition du titulaire du compte, ni ne présente un caractère abusif, dès lors que les

chéquiers peuvent être effectivement retirés sans frais au guichet de l'agence pendant un délai

suffisamment long et que leur renouvellement, répondant au besoin du client, implique légitimement

que celui-ci assume les frais d'envoi lorsque, informé de la mise à disposition à l'agence, il n'a pas cru

devoir profiter de leur délivrance gratuite dans le délai suffisant dont il dispose ; que le moyen n'est

pas fondé ;

Sur le septième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est

annexé au présent arrêt :

Attendu que l'arrêt écarte, à bon droit, le caractère illicite et abusif de la clause stipulant que "certaines

opérations, rares ou spécifiques, ne figurent pas sur le guide tarifaire des principales opérations et qu'il

appartient au client de s'informer de leurs conditions financières auprès de son agence", dès lors que les qualificatifs attribués aux opérations concernées en délimitent suffisamment la nature et le domaine

en dehors des opérations envisagées par l'article 2 de l'arrêté du 8 mars 2005 et que l'information

dispensée au client sur sa demande et avant leur réalisation est de nature à prévenir tout déséquilibre

au détriment de ce dernier ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le huitième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est

annexé au présent arrêt :

Attendu que, d'abord, l'association UFC Que Choisir, qui a soutenu, devant la cour d'appel, que "si le

législateur a accordé une dérogation au principe de l'intangibilité des contrats synallagmatiques , en

faveur des banquiers, par l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier, c'est seulement pour "tout

projet de modification du tarif ..."... Dès lors, pour toute modification autre que celle du tarif des

produits et services, la clause est bien illicite", n'est pas recevable à fonder un grief sur une position

contraire en invoquant l'illicéité de la clause en ce qu'elle engloberait l'évolution des conditions

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tarifaires ; qu'ensuite, la cour d'appel a exactement écarté le caractère abusif de la clause prévoyant que

"les services entrant dans la gestion d'un compte de dépôts et les conditions de la convention sont

susceptibles d'évoluer notamment pour les adapter aux besoins de la clientèle et aux évolutions

financières ou techniques ainsi qu'aux mesures d'ordre législatif ou réglementaire. Nous en

informerons la clientèle .. La poursuite de la relation de compte ou l'absence de manifestation écrite

d'un désaccord vaudra acceptation de votre part", dès lors que ladite clause réservait la possibilité pour

le client de contester la modification et de mettre fin à la convention ; que le moyen ne peut être

accueilli ;

Sur le neuvième moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est annexé au présent arrêt :

Attendu que, l'association UFC Que Choisir s'étant bornée à invoquer l'interdiction de toute

prospection commerciale à partir de données personnelles communiquées sans l'accord préalable du

consommateur, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à la recherche, prétendument omise, relative à la possibilité pour le titulaire du compte de s'opposer à la diffusion de ses données

personnelles, qui ne lui était pas demandée, d'autant qu'il s'infère de l'arrêt, relevant que l'édition

d'octobre 2005 de la convention de compte de dépôt stipulait que le client autorisait la banque à partager les données le concernant, que celui-ci avait la faculté de ne pas donner son autorisation ; que,

dès lors, elle a légalement justifié sa décision ;

Sur le dixième moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est annexé au présent arrêt :

Attendu que la cour d'appel a exactement écarté le caractère abusif de la clause selon laquelle le Crédit

lyonnais s'autorisait à refuser les chèques émis sur des formules non conformes aux normes en usage

dans la profession et prévoyait une commission pour le traitement de pareils chèques, dès lors qu'une

telle clause, destinée à permettre un traitement rationalisé des formules de chèques normalisées au lieu

d'un traitement individualisé de formules singulières nécessairement plus long et plus onéreux, ne crée

aucun avantage au profit de la banque ni aucun désavantage au détriment du consommateur qui

bénéficie de la délivrance gratuite des chéquiers et d'une facilité d'utilisation, et, partant, n'a pas pour

effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; que le moyen n'est

pas fondé ;

Et sur les cinquième et sixième moyens, tel qu'ils figurent au mémoire en demande et sont annexés au

présent arrêt :

Attendu que ces moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais, sur le premier moyen :

Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation ;

Attendu que, pour déclarer non abusive la clause prévoyant "qu'à l'expiration d'un délai de trois mois à

compter de la date d'édition d'un relevé de compte les écritures et opérations mentionnées sur celui-ci

seront considérées comme approuvées", l'arrêt retient que le principe de l'acceptation tacite du client

invité à formuler des observations dans le délai raisonnable de trois mois n'est pas illicite puisqu'aucun

texte ne l'interdit, que le délai de trois mois permet au client de prendre connaissance de manière

approfondie de toutes les opérations, et qu'en outre il n'interdit pas, après son expiration, une

éventuelle action en responsabilité contractuelle en cas de faute ou d'erreur manifeste ;

Attendu, cependant, qu'une telle clause, qui postule l'approbation des écritures et opérations à

l'expiration du délai prévu, est de nature à susciter ou entretenir la conviction du titulaire du compte

qu'il se trouve privé de la possibilité de les contester, alors même qu'il n'aurait pu en connaître

l'inexactitude qu'au-delà du délai, et, partant, a pour objet et pour effet d'entraver l'exercice par le

consommateur de son droit d'agir en justice, de sorte qu'elle est abusive ; qu'en statuant comme elle l'a

fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

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Et sur le onzième moyen :

Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation ;

Attendu que pour écarter le caractère abusif de la clause stipulant que "le compte de dépôt fonctionne

comme un compte courant par lequel les créances et les dettes forment un solde de compte seul

exigible", l'arrêt retient qu'il n'existe pas de définition légale ou réglementaire du compte de dépôt et

du compte courant, que la clause litigieuse n'entraîne pas de confusion entre les deux notions

puisqu'elle précise que le compte de dépôt fonctionne selon les règles du compte courant et que le

mécanisme de fonctionnement du compte courant est simple et accessible à un entendement normal et

est, en outre, conventionnellement prévu ;

Qu'en se déterminant ainsi quand l'assimilation du compte de dépôt au compte courant, non conforme à la réalité du fonctionnement du premier, normalement mouvementé uniquement par des versements

ou des retraits dans la limite du disponible, permet à la banque d'éluder les obligations posées par

l'article L. 312-1 du code monétaire et financier, concernant les services liés à l'ouverture d'un compte de dépôt et la notification par écrit de la décision motivée de clore un tel compte, de sorte que la clause

litigieuse, qui a pour effet de limiter de façon inappropriée les droits légaux du consommateur vis-à-

vis du professionnel, crée ainsi un déséquilibre entre les droits et obligations des parties, la cour

d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile, la Cour de cassation

est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige, par application de la règle de droit

appropriée ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de suppression des clauses 2.1 §

3 et 1.1 § 1 de la convention de compte de dépôt, en sa version d'octobre 2005, proposée par le Crédit

lyonnais, l'arrêt rendu le 11 mai 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare abusives les dites clauses ;

Dit, en conséquence, qu'elles sont réputées non écrites ;

Condamne le Crédit lyonnais aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du Crédit lyonnais ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis

pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son

audience publique du huit janvier deux mille neuf.

Doc. 5 : Cass. Civ 1ère 28 mai 2009, n°08-15.802, Bull civ. I 2009 n°110

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Attendu que l'association Consommation, logement et cadre de vie (CLCV) a, sur le fondement de l'article L. 421-6 du code de la consommation, introduit contre la Société générale une action en suppression de clauses contenues dans la convention de compte de dépôt proposée, en 2006-2007, aux clients de la banque ; que le GIE Groupement des cartes bancaires-CB est intervenu à l'instance ; que l'arrêt attaqué accueille l'action pour certaines clauses mais la rejette pour d'autres ; Sur le moyen unique du pourvoi principal du GIE : Attendu que le GIE Groupement des cartes bancaires-CB fait grief à l'arrêt de déclarer abusive la clause III.1.b sur le retrait, le blocage ou la demande de restitution de la carte bancaire, alors, selon le moyen, que : l'usage d'une carte bancaire est un mode de paiement et non l'octroi d'un crédit ; que le titulaire d'une carte bancaire peut effectuer certains paiements opposables à la banque au-delà des capacités financières de son compte et du crédit octroyé ; que la banque doit en ce cas honorer ces paiements même en l'absence de provision ; que la clause permettant à la banque le retrait, le blocage ou la demande de restitution sans préavis de la carte n'est donc pas abusive dans la mesure où elle a pour objet de prévenir pendant la durée du préavis l'utilisation de la carte au-delà des capacités financières du compte et la création d'un solde débiteur non autorisé ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel aurait violé l'article R. 132-2 du code de la consommation ; Mais attendu que, indépendamment de l'énonciation erronée relative à l'assimilation de l'usage d'une carte bancaire à l'octroi d'un crédit, l'arrêt retient, à bon droit, que la clause litigieuse, qui, sans être limitée à la situation d'une utilisation excédant les prévisions contractuelles des parties et susceptible d'emporter la garantie de la banque, prévoit, de manière générale, que "la Société générale peut, à tout moment, retirer, faire retirer ou bloquer l'usage de la carte ou ne pas la renouveler. Sa décision de retrait est notifiée au titulaire de la carte et/ou du compte. Le titulaire de la carte doit restituer celle-ci à première demande de la Société générale", réserve au professionnel le droit de modifier unilatéralement, sans préavis, les conditions d'utilisation de la carte, et contrevient ainsi aux dispositions de l'article R. 132-2 du code de la consommation ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le premier moyen du pourvoi incident de l'association CLCV : Attendu que l'association CLCV fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la nouvelle version de la clause III.1 "moyens de paiement liés au compte courant - chéquiers", relative à la restitution du chéquier, n'était pas abusive, alors, selon le moyen, que : 1°/ dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; que tel est le cas d'une clause permettant au professionnel de résilier le contrat sans préavis et sans condition et de cesser ainsi de fournir la prestation prévue ; qu'en écartant cependant le caractère abusif de la clause d'une convention de compte courant prévoyant que la banque peut, à tout moment et sans préavis, demander au titulaire du compte la restitution du chéquier en sa possession, sans aucune précision relative aux hypothèses justifiant cette restitution, la cour d'appel aurait violé l'article R. 132-2 du code de la consommation, ensemble l'article L. 132-1 du même code ; 2°/ en toute hypothèse, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; que tel est le cas de la clause d'une convention de compte courant, qui, prévoyant que la banque peut, à tout moment et sans préavis, demander au titulaire du compte la restitution du chéquier en sa possession, sans aucune précision relative aux hypothèses justifiant cette restitution, n'informe pas le client des hypothèses dans lesquelles son chéquier peut lui être retiré ; qu'en écartant

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cependant le caractère abusif d'une telle clause, la cour d'appel aurait violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ; Mais attendu que la clause selon laquelle "la Société générale peut à tout moment, en motivant sa décision, demander au(x) titulaire(s) du compte et/ou à son (leur) mandataire, la restitution du chéquier en sa (leur) possession par courrier adressé au(x) client(s) ou au mandataire au domicile indiqué par lui (eux) à la Société générale", qui, ainsi, prévoit la motivation de la demande de restitution du chéquier justifiant les raisons et l'urgence de cette mesure et, partant, met le consommateur en mesure d'en contester le bien fondé, prévient suffisamment tout arbitraire et ne crée aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ; que, dès lors, l'arrêt qui retient que cette clause n'est pas abusive n'encourt pas les griefs du moyen ; Mais, sur le second moyen du pourvoi incident de l'association CLCV, pris en sa seconde branche : Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation et le point 1.b de l'annexe à cet article ; Attendu que pour déclarer non abusive la nouvelle version de la clause VI.3.a, selon laquelle "cette convention peut, par ailleurs, évoluer et nécessiter certaines modifications substantielles. Dans ce cas, et sauf conditions particulières prévues pour certains services, la Société générale avertira périodiquement les titulaires des comptes des modifications apportées à la convention par lettre circulaire ou par tout autre document d'information. Chaque titulaire (ou co-titulaire) disposera d'un délai de trois mois (sauf délai spécifique prévu pour les cartes bancaires Société générale) à compter de la notification de la modification pour refuser celle-ci et dénoncer la convention par lettre recommandée adressée à l'agence concernée ou par lettre signée et remise à son guichet. En l'absence de dénonciation par le (ou les) titulaire(s) dans le délai susvisé, la (ou les) modification(s) sera (seront) considérée(s) à son (leur) égard comme définitivement approuvée(s) à l'issue de ce délai", l'arrêt retient qu'elle ne crée pas de déséquilibre en ce qu'elle prévoit l'information par l'envoi d'une lettre circulaire qui est un moyen fiable permettant d'informer la clientèle et laisse un délai de réflexion de trois mois suffisant pour prendre connaissance de la modification et pour la refuser ; Qu'en se déterminant ainsi, alors qu'une telle clause, qui se borne à prévoir l'information par voie de circulaire de modifications substantielles apportées à la convention, sans que le client ait été prévenu à l'avance et ainsi mis en mesure, avant leur application, de les apprécier pour ensuite mettre pertinemment en oeuvre, dans le délai fixé, son droit de les refuser, limite de façon inappropriée les droits légaux du consommateur de dénoncer la convention et, partant, a pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ; Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige, par application de la règle de droit appropriée ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen du pourvoi incident : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que la nouvelle version de la clause VI.3.a - "modifications des conditions des opérations", n'était pas abusive et a rejeté la demande de suppression de ladite clause de la convention de compte courant proposée par la Société générale, l'arrêt rendu le 3 avril 2008 entre les parties par la cour d'appel de Paris ; Dit n'y avoir lieu à renvoi ; Déclare abusive la dite clause ; dit, en conséquence, qu'elle est réputée non écrite ; Condamne le Groupement des cartes bancaires aux dépens ;

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Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le GIE Groupement des cartes bancaires - CB à payer à l'association Consommation, logement et cadre de vie la somme de 2 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille neuf.

Doc. 6 : Art. 1316-4 C. civ “La signature nécessaire à la perfection d'un acte juridique identifie celui qui l'appose. Elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l'authenticité à l'acte. Lorsqu'elle est électronique, elle consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu'à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.”

Doc. 7 : CE 14 septembre 2014 n°381183 Vu l'ordonnance n° 1407240/2-1 du 10 juin 2014, enregistrée le 12 juin 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le tribunal administratif de Paris, avant de statuer sur la demande de la société BNP Paribas tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du directeur de la Banque de France du 10 février 2014 la désignant comme établissement bancaire chargé d'ouvrir un compte au bénéfice de la SCI Lamartine, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier ; Vu le mémoire, enregistré le 2 mai 2014 au greffe du tribunal administratif de Paris, présenté pour la société BNP Paribas, dont le siège est au 16 boulevard des Italiens à Paris (75009), représentée par ses représentants légaux en exercice, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; Vu : - les autres pièces du dossier ; - la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code monétaire et financier, notamment son article L. 312-1 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Sophie-Justine Lieber, maître des requêtes, - les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société BNP Paribas.

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1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'État lui a transmis, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changements de circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ; 2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier : " Toute personne physique ou morale domiciliée..., dépourvue d'un compte de dépôt, a droit à l'ouverture d'un tel compte dans l'établissement de crédit de son choix. Toute personne physique de nationalité française résidant hors de France, dépourvue d'un compte de dépôt, bénéficie également du droit à l'ouverture d'un tel compte dans l'établissement de crédit de son choix. / L'ouverture d'un tel compte intervient après remise auprès de l'établissement de crédit d'une déclaration sur l'honneur attestant le fait que le demandeur ne dispose d'aucun compte. En cas de refus de la part de l'établissement choisi, la personne peut saisir la Banque de France afin qu'elle lui désigne un établissement de crédit situé à proximité de son domicile ou d'un autre lieu de son choix, en prenant en considération les parts de marché de chaque établissement concerné, dans un délai d'un jour ouvré à compter de la réception des pièces requises définies par arrêté. L'établissement de crédit ainsi désigné par la Banque de France procède à l'ouverture du compte dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires pour procéder à cette ouverture. L'établissement de crédit qui a refusé l'ouverture d'un compte remet systématiquement et sans délai au demandeur une attestation de refus d'ouverture de compte et informe le demandeur que celui-ci peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte. (...) Les établissements de crédit ainsi désignés par la Banque de France sont tenus d'offrir au titulaire du compte des services bancaires de base dont le contenu et les conditions tarifaires sont précisés par décret. / Toute décision de clôture de compte à l'initiative de l'établissement de crédit désigné par la Banque de France doit faire l'objet d'une notification écrite et motivée adressée au client et à la Banque de France pour information. Un délai minimum de deux mois doit être consenti obligatoirement au titulaire du compte (...) " ; 3. Considérant que la société BNP Paribas, qui conteste la décision du 10 février 2014 par laquelle la Banque de France, sur le fondement de ces dispositions, a désigné l'une de ses agences pour ouvrir un compte à la SCI Lamartine, soutient, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier méconnaissent la liberté contractuelle découlant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en ce qu'elles prescrivent à l'établissement de crédit désigné par la Banque de France d'ouvrir un compte et de fournir des services à toute personne dépourvue d'un compte de dépôt en France s'étant vu opposer un premier refus d'ouverture, alors qu'aucun motif d'intérêt général ne justifie que ce " droit au compte " bénéficie aux personnes morales à but lucratif ; 4. Considérant qu'il est loisible au législateur d'apporter à la liberté contractuelle, qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, des limitations justifiées par un motif d'intérêt général, à condition qu'il n'en résulte pas d'atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ; que les dispositions contestées, qui prévoient que toute personne, morale ou physique, qui n'a pas de compte de dépôt en France et s'en est vu refuser l'ouverture par un établissement de crédit, peut demander à la Banque de France de lui désigner d'office un établissement chargé de lui ouvrir un compte de dépôt et de lui fournir gratuitement des services bancaires de base, répondent à l'objectif d'intérêt général de lutte contre les situations d'exclusion bancaire, dans un contexte où la généralisation de l'utilisation des virements, notamment pour le versement de salaires et de prestations, rend indispensable la détention d'un compte bancaire ; que, s'agissant des personnes morales à but lucratif, cet objectif d'intérêt général vise à faciliter l'activité de petites entités économiques telles que des micro-entreprises ou des entreprises unipersonnelles, qui peuvent rencontrer des difficultés d'accès aux banques, alors même que la détention d'un compte bancaire est essentielle à leur activité ; que les dispositions de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier limitent ce droit au compte au seul compte de dépôt, encadrent strictement les conditions dans

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lesquelles un tel compte peut être ouvert et prévoient que l'établissement désigné peut clore le compte qu'il a été obligé d'ouvrir, à condition d'adresser une notification écrite et motivée au client et à la Banque de France, et de consentir un délai minimum de deux mois au titulaire du compte ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier porteraient une atteinte disproportionnée à la liberté contractuelle est dépourvu de caractère sérieux ; 5. Considérant que la société BNP Paribas soutient, en second lieu, que les dispositions de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier méconnaissent le droit de propriété tel qu'il est protégé par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme, en ce qu'elles obligent l'établissement désigné à fournir gratuitement, sans compensation financière, des services bancaires de base à des personnes morales à but lucratif, alors que les obligations de vigilance imparties à l'établissement de crédit au titre des articles L. 561-5 et suivants du code monétaire et financier sont plus coûteuses lorsque les personnes morales concernées ont dû demander un droit au compte à la suite d'un refus d'ouverture de compte tenant à ce qu'elles ne remplissaient pas les obligations de transparence nécessaires ; que l'extension du droit au compte à des personnes morales à but lucratif, qui est disproportionnée au regard de l'objectif de lutte contre l'exclusion, méconnaît l'objectif à valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public dès lors que les dispositions de l'article L. 312-1 mettent en échec les dispositions de lutte contre le blanchiment prévues par les articles L. 561-5 et suivants du code monétaire et financier ; 6. Considérant toutefois que les dispositions contestées de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier n'emportent aucune violation du droit de propriété, mais se bornent à apporter des limites à son exercice ; que ces limites, qui imposent aux établissements concernés de fournir des services de base aux bénéficiaires du droit au compte, sont justifiées, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, par un objectif d'intérêt général visant à lutter contre l'exclusion bancaire ; que la gratuité des services bancaires de base que les établissements désignés doivent fournir aux bénéficiaires du droit au compte ne résulte pas des dispositions de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier, lequel se borne à indiquer que les conditions tarifaires de ces services sont prévues par décret, mais découle de l'article D. 312-6 du même code ; qu'en outre, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, l'établissement de crédit a la faculté de procéder à la clôture du compte si celle-ci est justifiée ; que, par ailleurs, l'article L. 312-1 n'a ni pour objet ni pour effet d'exonérer les établissements de crédit désignés par la Banque de France des obligations de vigilance qui leur incombent au titre notamment des articles L. 561-5 et suivants du code monétaire et financier ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les dispositions en cause méconnaîtraient le droit de propriété tel qu'il est garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ainsi que l'objectif constitutionnel de sauvegarde de l'ordre public ne présente pas non plus de caractère sérieux ; 7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'ainsi, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ; D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société BNP Paribas. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société BNP Paribas, au ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, au ministre des finances et des comptes publics et à la Banque de France. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et au tribunal administratif de Paris.

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Doc. 8 : Art 1736 IV-1 du CGI

IV. – 1. Les infractions au premier alinéa de l'article 1649 A sont passibles d'une amende de 1 500 €

par ouverture ou clôture de compte non déclarée.

Sauf cas de force majeure, les omissions de déclaration de modification de compte et les inexactitudes

ou omissions constatées dans les déclarations mentionnées au même premier alinéa entraînent

l'application d'une amende de 150 € par omission ou inexactitude, sans que le total des amendes

applicables aux informations devant être produites simultanément puisse être supérieur à 10 000 €.

Doc. 9 : Cass. Com 9 février 2010 n°09-12.853

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X... et Y..., titulaires d'un compte courant joint à la Barclays

bank à Bordeaux (la banque), ont envisagé en août 2000 d'effectuer avec M. Z... l'affrètement d'un

avion pour le Congo pour une opération présentée comme humanitaire ; que le 7 septembre 2000, la

banque a reçu par télécopie une instruction de virement de la somme globale de 175 000 US dollars

assortie de la garantie d'avoirs et de titres gagés ; qu'en exécution de ces ordres litigieux, le compte

joint de MM. X... et Y... est devenu débiteur de la somme de 1 110 623 francs (168 843,68 euros) ;

que la banque a procédé le 23 février 2001 à la clôture du compte ; que MM. X... et Y... ont alors

engagé une action à l'encontre de la banque pour avoir notamment paiement d'une certaine somme, en

restitution des ordres de virement contestés ;

Sur le premier moyen :

Attendu que ce premier moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 1315 et 1937 du code civil ;

Attendu que pour rejeter les demandes de MM. X... et Y... à l'encontre de la banque et les condamner à

payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt,

après avoir relevé que le dépositaire ne doit restituer la chose déposée qu'à celui qui la lui a confiée,

retient que la preuve d'un faux ordre de virement incombe à celui qui s'en prévaut ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartient au banquier tenu de restituer les fonds déposés par

son client d'établir que l'ordre de virement qu'il a effectué émanait de ce dernier, la cour d'appel a violé

les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 janvier 2009, entre les parties,

par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se

trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement

composée ;

Condamne la Banque Barclays Bank aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile la condamne à payer à MM. X... et Y... la somme globale

de 2 500 euros et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis

pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

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Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et

prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille dix.

Doc. 10 : Art. 1939 C. civ.

En cas de mort naturelle ou civile (1) de la personne qui a fait le dépôt, la chose déposée ne peut être

rendue qu'à son héritier.

S'il y a plusieurs héritiers, elle doit être rendue à chacun d'eux pour leur part et portion.

Si la chose déposée est indivisible, les héritiers doivent s'accorder entre eux pour la recevoir.

NOTA : (1) : La mort civile a été abolie par la loi du 31 mai 1854.

Doc. 11 : Art. L. 312-35 du Code de la consommation

Le tribunal d'instance connaît des litiges nés de l'application des dispositions du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être

formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet

événement est caractérisé par :

-le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;

-ou le premier incident de paiement non régularisé ;

-ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d'un contrat de

crédit renouvelable ;

-ou le dépassement, au sens du 13° de l'article L. 311-1, non régularisé à l'issue du délai prévu à

l'article L. 312-93.

Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l'objet d'un réaménagement ou

d'un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé

intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés ou après

adoption du plan conventionnel de redressement prévu à l'article L. 732-1 ou après décision de la

commission imposant les mesures prévues à l'article L. 733-1 ou la décision du juge de l'exécution

homologuant les mesures prévues à l'article L. 733-7.

LE COMPTE COURANT

Doc. 12 : Cass. Com 8 juillet 1997 n°95-15.540

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois n° D 95-15.540 et n° T 95-16.496 formés par :

1°/ M. Olivier Y..., demeurant ..., agissant en sa qualité de syndic de la liquidation des biens de M.

Ahmed X...,

2°/ M. Ahmed X..., demeurant 317, Corniche Kennedy, 13007 Marseille,

3°/ de la masse des créanciers de la liquidation des biens de la société anonyme suisse Réalisation construction boix, dont le siège social était Vers Ensier 1872 Trois Torrents et le siège de son principal

établissement en France 2, rue de la République, 74100 Annemasse et de la liquidation des biens de

M. Ahmed X..., ex-gérant de la société anonyme suisse Réalisation Construction Bois, ladite masse

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des créanciers représentée par M. Olivier Descloux, en cassation d'un arrêt rendu le 27 mars 1995 par

la cour d'appel de Montpellier (1re et 2e chambres reunies) , au profit de la banque San Paolo, dont le

siège est ..., venant aux droits de la Banque française BFC, défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs aux pourvois invoquent, à l'appui de leurs recours, un moyen unique identique annexé

au présent arrêt arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 27 mai 1997, où étaient présents : M. Bézard, président, M.

Leclercq, conseiller rapporteur, MM. Vigneron, Dumas, Gomez, Léonnet, Poullain, Métivet,

conseillers, Mme Geerssen, M. Huglo, Mme Mouillard, M. Ponsot, conseillers référendaires, M.

Mourier, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Leclercq, conseiller, les observations de Me Choucroy, avocat de M. Y..., de M.

X... et de la masse des créanciers de la liquidation des biens de la société suisse Réalisation Construction Bois, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la banque San Paolo, les

conclusions de M. Mourier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Joint les pourvois no D 95-15.540 et n° T 95-16.496, qui attaquent le même arrêt ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 27 mars 1995), rendu sur renvoi après cassation, que la

Banque française commerciale, aux droits de laquelle se trouve la banque de San Paolo, a consenti à la

société Réalisation construction bois (RCB) une ouverture de crédit en compte courant, garantie par

une inscription hypothécaire sur deux immeubles et par un cautionnement souscrit par M. X...; que la

banque a mis en jeu ces garanties; qu'après être devenue elle-même adjudicataire des deux immeubles,

la banque a réclamé à M. X... le solde de sa créance en compte courant, après y avoir inscrit au crédit

le prix des immeubles, et au débit le montant de la TVA, versé par elle, conformément au cahier des

charges de l'adjudication; que M. X..., représenté par le syndic de laliquidation de ses biens, a contesté

que le montant de la TVA puisse être inclus dans le solde du compte courant ;

Attendu que le syndic de la liquidation des biens de M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir fixé la créance de

la banque en la majorant du montant de la TVA, alors, selon le pourvoi, d'une part, que ne peuvent

constituer une remise que les créances susceptibles d'être payées par compensation et que la

compensation ne peut s'opérer que lorsque deux personnes se trouvent débitrices l'une envers l'autre en

la même qualité ;

qu'en l'espèce, la banque ne pouvait opérer la remise d'une créance qu'elle avait en qualité

d'adjudicataire dans un compte courant où elle figurait en tant que prêteur de deniers; d'où il suit

qu'en estimant que la qualité dans laquelle les parties interviennent pour faire fonctionner

le compte était indifférente pour juger que la remise litigieuse était valable, les juges du fond ont violé l'article 1134 du Code civil; alors, d'autre part, que le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par

le débiteur; que le compte courant ne saurait servir au règlement d'opérations imprévisibles lors de

son ouverture; qu'en l'espèce, tel était le cas de l'opération litigieuse, ni la banque, ni la société RCB ne

pouvant prévoir ou même imaginer que la banque serait un jour amenée à être adjudicataire d'un

immeuble appartenant à cette société et à payer la TVA sur le prix de vente pour son compte; d'où il

suit qu'en jugeant la remise litigieuse valable entre les parties et opposable à la caution, la cour d'appel

a violé l'article 2013 du Code civil; et alors, enfin, et en tout état de cause, qu'une remise ne saurait

être effectuée postérieurement à la clôture du compte courant; qu'en l'espèce, la clôture était

intervenue en mai 1983 et l'adjudication en vertu d'un jugement du 16 septembre 1983; qu'en jugeant

valable la remise d'une créance née de ce jugement, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil

;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient à bon droit que la convention

de compte courant porte sur toutes les remises réciproques des parties, sans distinction de leur

origine; qu'est surabondante son énonciation selon laquelle la qualité dans laquelle les parties

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interviennent pour faire fonctionner le compte courant est indifférente, dès lors qu'il n'était pas

prétendu devant la cour d'appel que la banque ait agi dans la procédure d'adjudication à d'autres fins

que le recouvrement de l'ensemble de ses créances contre la société RCB ;

Attendu, en second lieu, qu'il ne résulte pas de l'arrêt, ni des conclusions d'appel, qu'il ait alors été

soutenu que la convention de compte courant conclue entre la banque et la société ait exclu de ses

prévisions des créances telles que celle invoquée par la banque, ni que cette convention eût cessé d'être

applicable lors de l'établissement du solde de compte réclamé par la banque; que sur ces points, le

moyen, nouveau, est mélangé de fait et de droit ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en ses deuxième et troisième branches, n'est pas fondé en la

première ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois

Doc. 13 : Cass. Com 5 octobre 2004 n°01-12.435 AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la SNC Elysées Franklin, la société Financière 14 Matignon et M. Max X... que sur le pourvoi incident relevé par le CDR Créances ; Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que pour engager deux opérations d'acquisition hôtelière à la Guadeloupe dans le cadre de la loi du 11 juillet 1986, dite "loi Pons", la SNC Elysées Franklin, dont le capital est détenu par la société Financière 14 Matignon, société holding des frères X..., marchands de biens, ainsi que par la société Ibis participation, a constitué les SNC Saint-Barth's hôtel et Saint-François résidence et obtenu de la Société internationale bankers SA (la banque IBSA), aux droits de laquelle se sont successivement trouvés la banque Colbert puis aujourd'hui le CDR Créances, qu'elle lui consente, les 21 juillet 1988 et 13 septembre 1989, des ouvertures de crédit garanties par le cautionnement de M. Max X... ; que les créances qui en ont résulté n'ayant pas été remboursées, le CDR Créances, après avoir saisi les immeubles, a fait assigner en paiement la SNC Elysées Franklin, ses associées, les sociétés Ibis participation et Financière 14 Matignon ainsi que M. Max X... ; que, rejetant les divers moyens opposés par ces derniers pour échapper à leurs obligations, la cour d'appel a accueilli les réclamations du CDR Créances à l'exception de celles relative à la capitalisation des intérêts du crédit accordé pour l'opération Saint-Barth's hôtel au-delà du 31 décembre 1992 ainsi qu'à l'application des intérêts au taux conventionnel après cette date pour les deux concours ; Sur les quatre moyens du pourvoi principal : Attendu que les SNC Elysées Franklin, société Financière 14 Matignon et M. Max X... développent quatre moyens de cassation à l'appui de leur pourvoi, reprochant à la cour d'appel d'avoir violé les articles 1134, 1907, alinéa 2, 2015, 2037, 1315, 1135, 1147, 1353 du Code civil, 455 du nouveau Code de procédure civile, 4 de la loi du 28 décembre 1966, 2 du décret du 4 septembre 1985, L. 236-22 du Code de commerce ou privé sa décision de base légale au regard de ces mêmes textes ; Mais attendu que ces moyens, annexés à la présente décision et invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ; Sur le premier moyen pourvoi incident :

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Attendu que le CDR Créances fait grief à l'arrêt de l'avoir déchu, pour les deux crédits, du droit aux intérêts conventionnels à compter du 1er janvier 1993, alors, selon le moyen : 1 / que l'indication du TEG dans la convention d'ouverture de crédit suffit à fournir à l'emprunteur l'information prévue par la loi, qui n'exige pas que cette information soit réitérée ultérieurement dans chaque relevé de compte ; qu'en le déclarant déchu du droit aux intérêts conventionnels pour la période postérieure au 1er janvier 1993, faute pour la banque d'avoir, après cette date, fait figurer le TEG sur les relevés de compte, tout en constatant que les ouvertures de crédit mentionnaient le TEG, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, et a violé l'article 4 de la loi du 28 décembre 1966, ensemble l'article 1907 du Code civil ; 2 / qu'exigerait-on de l'établissement prêteur qu'il appose sur chaque relevé la mention du TEG, cette obligation formelle ne peut être imposée qu'en vertu d'une loi en vigueur au jour où lesdits relevés sont émis ; de sorte que viole les articles 2 du Code civil, ensemble l'article 4 de la loi du 26 juillet 1993, la cour d'appel qui reproche à l'établissement prêteur d'avoir omis d'indiquer le TEG sur des relevés postérieurs au 26 juillet 1993, date à laquelle la loi du 28 décembre 1966 était abrogée pour les prêts entre professionnels ; 3 / que les règles de forme qui conditionnent la validité de la perception d'intérêts s'appliquent immédiatement aux intérêts à échoir postérieurement à l'entrée en vigueur de ces règles ; que viole donc derechef l'article 2 du Code civil, ensemble l'article 4 de la loi du 26 juillet 1993, la cour d'appel qui refuse de faire immédiatement application de cet article en ce qu'il abroge l'article 4 de la loi du 28 décembre 1966 et met, par là-même fin, pour les prêts entre professionnels, à l'obligation d'indication du TEG ; Mais attendu, en premier lieu, que contrairement à ce que soutient le CDR Créances, il ne résulte pas de l'article L. 313-2 du Code de la consommation, qui s'est borné à reprendre, dans le cadre de la codification à droit constant réalisée par la loi du 26 juillet 1993, les règles générales, applicables à tous les prêts, figurant jusque-là dans les articles 1 à 7 de la loi du 28 décembre 1966 qu'elle abrogeait, que les prêts à finalité professionnelle soient exclus du champ d'application de ce texte ; Et attendu, en second lieu, que si, pour les découverts en compte, la mention du taux effectif global doit être portée, à titre indicatif, dans la convention d'ouverture de compte ou de crédit ou tout autre document, celle du taux effectif global appliqué doit aussi figurer sur les relevés périodiques du compte ; qu'ayant constaté, tant par motifs propres qu'adoptés, que si le taux effectif global avait bien été indiqué dans les actes d'ouverture de crédit consenti à la SNC Elysées Franklin, il avait cessé, à partir du 31 décembre 1992, d'être mentionné dans les extraits de compte adressés à celle-ci, la cour d'appel, qui en a déduit la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels à compter de cette date, loin d'avoir violé les textes visés au pourvoi, en a fait au contraire l'exacte application ; D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Sur le deuxième moyen incident : Attendu que le CDR Créances fait encore grief à l'arrêt d'avoir jugé qu'il ne pouvait prétendre aux intérêts capitalisés du crédit accordé pour l'opération Saint-François, alors, selon le moyen : 1 / que l'intention des parties de "travailler en compte courant" peut être tacite et résulter du fonctionnement réel du compte ; qu'en retenant que les parties n'avaient pas eu l'intention de travailler en compte courant tout en constatant l'existence d'une remise réciproque caractéristique du fonctionnement d'un compte courant, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du Code civil ; 2 / que l'existence d'un compte courant suppose simplement, outre l'intention des parties de travailler en compte courant, la possibilité de remises réciproques, de sorte que l'absence de remises

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réciproques effectives n'est pas de nature à priver une convention de sa nature de compte courant ; qu'en se fondant néanmoins, pour dénier l'existence d'un prêt en compte courant entre la société IBSA et la SNC Elysées Franklin pour le financement de l'opération Saint-François, sur le fait qu'une seule remise réciproque avait été enregistrée sur ce compte, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; Mais attendu que l'arrêt relève que, selon la convention d'ouverture, le compte ouvert pour l'opération Saint-François était un simple compte de dépôt et qu'il n'avait jamais enregistré de remises réciproques, le seul virement d'une somme de 1 300 000 francs ne pouvant être qualifié comme tel ; qu'ayant ainsi fait ressortir que les parties n'avaient pas eu la commune intention d'aménager leurs relations selon un mécanisme de compte courant et que cette absence d'intention était corroborée par la manière dont ce compte avait fonctionné, la cour d'appel a exactement décidé que le CDR Créances ne pouvait prétendre à la capitalisation d'intérêts qu'il sollicitait ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Mais sur le troisième moyen du pourvoi incident : Vu l'article 1134 du Code civil ; Attendu que pour rejeter la demande de capitalisation des intérêts du crédit accordé pour l'opération Saint-Barth's, au-delà du 31 décembre 1992, l'arrêt retient qu'à partir de cette date le compte n'avait plus enregistré d'opérations et en a déduit qu'il avait été tacitement clôturé ; Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs impropres à caractériser la clôture du compte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte précité ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi formé à titre principal par la SNC Elysées Franklin, la société Financière 14 Matignon et M. X... ; Statuant sur le pourvoi incident : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts du prêt consenti pour l'opération Saint-Barth's au-delà du 31 décembre 1992, l'arrêt rendu le 7 mai 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ; Condamne la SNC Elysées Franklin, la société Financière 14 Matignon et M. Max X... aux dépens ; Vu les dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, les condamne au paiement d'une somme globale de 1 800 euros à la société CDR Créances ;

Doc. 14 : Cass. Com 6 décembre 2011 n°10-24.852 LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 17 mai 2010), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 19 février 2008, pourvoi n° Z O6-18.147), que la société Chauray contrôle, aux droits de la société White elle-même aux droits de la Banque Monod (la banque) a consenti à la Société française d'aménagement (la société), le 12 avril 1988, un concours bancaire sous forme d'autorisation de découvert pour une durée indéterminée, destiné au financement d'opérations immobilières ; que, se prévalant de cette convention qui aurait fait l'objet d'un écrit disparu depuis et des relevés de compte établis depuis sa conclusion, la banque a assigné le 16 octobre

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1998 en paiement la société qui a formé une demande reconventionnelle en répétition de l'indu ; que l'arrêt, ayant rejeté les demandes de la banque et condamné cette dernière à payer une certaine somme à la société, a été cassé, faute pour les juges du fond d'avoir recherché si les parties n'avaient pas effectué habituellement sur le compte litigieux des remises réciproques caractéristiques d'un compte courant ; que, devant la cour d'appel de renvoi, la banque a repris sa demande initiale ; Attendu que la société reproche à l'arrêt d'avoir dit que la convention la liant à la banque est une convention de compte courant et de l'avoir condamnée en conséquence au paiement de la somme de 183 971,98 euros, alors, selon le moyen, que le compte courant est caractérisé par la possibilité de remises réciproques s'incorporant dans un solde pouvant, dans la commune intention des parties, varier alternativement au profit de l'une ou de l'autre; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que le fonctionnement du compte n'était pas caractéristique de celui d'un compte courant mais d'un compte spécial affecté à l'octroi et à l'utilisation du crédit et à son remboursement; qu'il ressort en effet de l'historique du compte tel qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la banque a mis le 1er janvier 1989 à disposition de la société un financement de 1 106 999,38 francs (168 760,94 euros) pour réaliser l'opération immobilière du Moule ; que ce financement principal a été ultérieurement complété de débits complémentaires, de montant insignifiant au regard de la somme principale de plus de un million de francs prêtée et correspondant à des intérêts ; que dans un second temps, au fur et à mesure des ventes réalisées, la société a crédité des sommes pour le remboursement du prêt; qu'il ne ressort pas des constatations de l'arrêt l'existence de remises réciproques et enchevêtrées, mais au contraire l'existence de deux périodes, la première de déblocage du financement, la seconde de remboursement au fur et à mesure des commercialisations, fonctionnement caractéristique d'un prêt et non d'un compte courant ; qu'en qualifiant le compte de compte courant, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du code civil ; Mais attendu qu'après avoir constaté que les conditions de fonctionnement du compte étaient établies par la production par la banque des relevés de compte entre le 1er janvier 1989 et le 1er juillet 1996 et que les arrêtés de compte de ces mêmes années portaient mention d'un taux effectif global variable, l'arrêt retient que, conformément à un rapport d'expertise non contesté, ces pièces établissent le caractère habituel de réciprocité des remises de sorte que l'enchevêtrement des opérations créditrices et débitrices était bien constitué ; que, de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire que la convention liant la société à la banque était une convention de compte courant: que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Doc. 15 : Cass. Com 23 mars 1993 n°91-13.256 Attendu qu'il résulte de l'arrêt déféré que M. X..., titulaire d'un compte courant dans les livres de la banque Rhône-Alpes, a été assigné par celle-ci, le 13 mars 1990, en paiement du solde débiteur de ce compte et des intérêts ; Sur le premier moyen : Vu l'article 1134 du Code civil ; Attendu que, pour condamner M. X... à payer à la banque Rhône-Alpes le montant du solde débiteur du compte au 31 mars 1987, l'arrêt se borne à retenir que le dernier mouvement avait eu lieu à cette date ; Attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher si M. X... avait voulu mettre fin à la convention de compte courant à la date considérée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

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PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.

Doc. 16 : Cass. Com 17 décembre 1991, n°90-12.144, Bull 1991 IV n°389 Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 janvier 1990), qu'en 1972 et 1974, la société Union immobilière a, pour financer la construction d'immeubles d'habitation, consenti à une société civile immobilière, que M. Y... avait fondée, trois ouvertures de crédit à échéances des 8 août, 18 septembre et 30 novembre 1974, lesquelles étaient garanties par des cautionnements des époux Y... ; que les contrats précisaient que les fonds seraient délivrés par inscriptions sur un compte spécial ouvert au nom de la société dans les livres de l'établissement financier, que les frais, commissions et agios y seraient également inscrits et qu'y seraient versés, en règlements des sommes dues, le produit de la vente des appartements ; qu'en outre, un crédit fut consenti en 1972, à échéance du 10 mars 1976, au profit d'une seconde société civile immobilière, fondée par les époux Y... et X..., lesquels se sont, tous quatre, portés cautions au profit de l'établissement prêteur ; que les remboursements ne sont jamais intervenus ; que, poursuivis en paiement, Mme Y... et ses enfants, ainsi que M. X..., ont opposé l'exception de prescription, contre laquelle l'UCIP a invoqué l'existence de comptes courants, non clôturés, entre elle et les sociétés civiles immobilières ; Attendu que l'UCIP fait grief à l'arrêt d'avoir décidé qu'il n'y avait pas eu ouvertures de comptes courants et d'avoir admis l'exception de prescription, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en subordonnant la formation d'une convention de compte courant à la rédaction d'un contrat écrit, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que le compte courant suppose seulement, pour être qualifié tel, la possibilité de remises réciproques, de sorte qu'en subordonnant l'existence du compte courant à la justification de remises effectuées notamment par la production de bordereaux constatant des opérations entrecroisées, la cour d'appel a encore violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, enfin, qu'en s'arrêtant à la dénomination de " compte spécial " utilisé par les parties sans rechercher si leurs conventions ne caractérisaient pas des remises réciproques propres à établir la convention de compte courant alléguée par l'une d'elles, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; Mais attendu que le contrat de compte courant est caractérisé par la possibilité de remises réciproques s'incorporant dans un solde pouvant, dans la commune intention des parties, varier alternativement au profit de l'une ou de l'autre ; Attendu qu'après avoir relevé que le compte spécial ouvert par l'établissement de crédit au nom de chaque société civile immobilière était seulement destiné à la délivrance des prêts consentis pour une durée limitée à cette société, en vue d'utilisations strictement définies, puis à l'inscription du produit des opérations ainsi financées pour les affecter au remboursement des crédits et au paiement des frais et intérêts, sans qu'il y ait eu des remises réciproques et alternées, et avoir, ainsi, fait ressortir qu'après la délivrance des fonds, le compte ne pouvait plus, à l'exclusion de tout solde disponible, que mentionner des montants de sommes à recouvrer, la cour d'appel a pu, indépendamment des autres motifs erronés, mais surabondants, critiqués par la première branche du moyen, retenir que le compte n'avait eu, ni dans la volonté initiale des parties, ni dans l'usage qu'elles en ont fait, les caractéristiques d'un compte courant ; que le moyen ne peut, dès lors, être accueilli en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

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Doc. 17 : Cass. Com 9 janvier 2001, n°97-13.236, Bull 2001 IV n°1 Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 janvier 1990), qu'en 1972 et 1974, la société Union immobilière a, pour financer la construction d'immeubles d'habitation, consenti à une société civile immobilière, que M. Y... avait fondée, trois ouvertures de crédit à échéances des 8 août, 18 septembre et 30 novembre 1974, lesquelles étaient garanties par des cautionnements des époux Y... ; que les contrats précisaient que les fonds seraient délivrés par inscriptions sur un compte spécial ouvert au nom de la société dans les livres de l'établissement financier, que les frais, commissions et agios y seraient également inscrits et qu'y seraient versés, en règlements des sommes dues, le produit de la vente des appartements ; qu'en outre, un crédit fut consenti en 1972, à échéance du 10 mars 1976, au profit d'une seconde société civile immobilière, fondée par les époux Y... et X..., lesquels se sont, tous quatre, portés cautions au profit de l'établissement prêteur ; que les remboursements ne sont jamais intervenus ; que, poursuivis en paiement, Mme Y... et ses enfants, ainsi que M. X..., ont opposé l'exception de prescription, contre laquelle l'UCIP a invoqué l'existence de comptes courants, non clôturés, entre elle et les sociétés civiles immobilières ; Attendu que l'UCIP fait grief à l'arrêt d'avoir décidé qu'il n'y avait pas eu ouvertures de comptes courants et d'avoir admis l'exception de prescription, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en subordonnant la formation d'une convention de compte courant à la rédaction d'un contrat écrit, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que le compte courant suppose seulement, pour être qualifié tel, la possibilité de remises réciproques, de sorte qu'en subordonnant l'existence du compte courant à la justification de remises effectuées notamment par la production de bordereaux constatant des opérations entrecroisées, la cour d'appel a encore violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, enfin, qu'en s'arrêtant à la dénomination de " compte spécial " utilisé par les parties sans rechercher si leurs conventions ne caractérisaient pas des remises réciproques propres à établir la convention de compte courant alléguée par l'une d'elles, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; Mais attendu que le contrat de compte courant est caractérisé par la possibilité de remises réciproques s'incorporant dans un solde pouvant, dans la commune intention des parties, varier alternativement au profit de l'une ou de l'autre ; Attendu qu'après avoir relevé que le compte spécial ouvert par l'établissement de crédit au nom de chaque société civile immobilière était seulement destiné à la délivrance des prêts consentis pour une durée limitée à cette société, en vue d'utilisations strictement définies, puis à l'inscription du produit des opérations ainsi financées pour les affecter au remboursement des crédits et au paiement des frais et intérêts, sans qu'il y ait eu des remises réciproques et alternées, et avoir, ainsi, fait ressortir qu'après la délivrance des fonds, le compte ne pouvait plus, à l'exclusion de tout solde disponible, que mentionner des montants de sommes à recouvrer, la cour d'appel a pu, indépendamment des autres motifs erronés, mais surabondants, critiqués par la première branche du moyen, retenir que le compte n'avait eu, ni dans la volonté initiale des parties, ni dans l'usage qu'elles en ont fait, les caractéristiques d'un compte courant ; que le moyen ne peut, dès lors, être accueilli en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 18 : Cass. Com 26 mai 1999 n°96-19.937 AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

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Sur le pourvoi formé par la Société de banque occidentale (SDBO), dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 2 juillet 1996 par la cour d'appel de Paris (15e chambre, section A), au profit de la société Engelhard, société anonyme, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 30 mars 1999, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Graff, conseiller référendaire rapporteur, MM. Grimaldi, Tricot, Badi, Mme Aubert, M. Armand-Prevost, Mmes Vigneron, Tric, Besançon, conseillers, Mme Geerssen, MM. Rémery, de Monteynard, Mme Gueguen, conseillers référendaires, M. Lafortune, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Graff, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de la Société de banque occidentale, de Me Guinard, avocat de la société Engelhard, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne acte à la société CDR Créances-Groupe Consortium de réalisation, aux droits par fusion-absorption de la Société de banque occidentale, de sa reprise d'instance ; Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que, par actes des 21 mai 1990 et 9 mars 1992, la société Engelhard a consenti à la société Bijoux Fix deux prêts portant sur 14 kgs et 30 kgs d'or fin ; que, par actes des 11 février 1991 et 17 mars 1992, la Société de banque occidentale (la banque) s'est portée caution solidaire de l'emprunteur pour le paiement ou le remboursement du prix du stock d'or prêté, à concurrence respectivement de 1 000 000 et 2 000 000 de francs ; qu'après que la société Bijoux Fix eût été mise en redressement judiciaire, la société Engelhard a assigné la banque en exécution de ses engagements ; que le Tribunal a déclaré éteinte la créance de la société Engelhard au titre des deux contrats de prêts, au motif qu'ils avaient été omis dans la déclaration au passif de la procédure collective ; Sur le second moyen, pris en sa première branche : Vu l'article 1134 du Code civil ; Attendu que, pour infirmer le jugement et décider que la créance de la société Engelhard sur la société Bijoux Fix n'était pas éteinte et condamner la caution, l'arrêt retient que chaque contrat ne concerne pas une opération de prêt ponctuelle mais une série d'opérations caractérisant une situation juridique permanente entre le fournisseur et le client cautionné et qu'il est "admissible d'assimiler cette situation à une convention de compte courant" ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si le compte ouvert par la société Engelhard au nom de la société Bijoux Fix afin d'y inscrire, d'une part, la délivrance de quantités d'or déterminées et, d'autre part, leur "remboursement ou restitution", avait, avec le consentement des parties, fonctionné de telle façon qu'y fussent possibles des remises réciproques et alternées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 juillet 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims ;

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Condamne la société Engelhard aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette sa demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.

Doc. 19 : Cass. Com 9 avril 2002 n°99. 11.066 AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le pourvoi formé par : 1 / Mme Nelly, Georgette, Jeanne X..., divorcée M..., demeurant ..., 2 / la société civile immobilière (SCI) du ... 78120, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 29 octobre 1998 par la cour d'appel de Versailles (1re Chambre civile, Section A), au profit : 1 / de la société Auxiliaire du Crédit Foncier de France (ACFF), venant aux droits de la Société de crédit pour le logement (SECRELOG), dont le siège est ..., 2 / de M. Roger, Emile, Eugène N..., 3 / de Mme P..., Marguerite, Roberte L..., épouse N..., demeurant ensemble ..., 4 / de M. G..., Marie, Charles B..., 5 / de Mme Noëlla, Anne-Marie I..., épouse A... de Franciosi, demeurant ensemble ..., 6 / de M. Yves, Georges, Michel C..., 7 / de Mlle Michelle, Hélène I..., demeurant tous deux ..., 8 / de M. Frédéric, Michel O..., 9 / de Mlle Z..., Janine D..., demeurant tous deux ..., 10 / de M. Edouard, Jean-Paul H...,

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11 / de Mme Cécile Y..., épouse H..., demeurant ensemble ..., 12 / de la Caisse de Crédit mutuel de Rambouillet, dont le siège est ..., 13 / de la société civile professionnelle (SCP) Jean-Yves F... et Jean-Claude K..., notaires associés, dont le siège est ..., défendeurs à la cassation ; La SCP F... et K..., défenderesse au pourvoi principal, a formé un pourvoi provoqué contre le même arrêt ; Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; La demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au Procureur général ; LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 26 février 2002, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Favre, conseiller rapporteur, M. Métivet, Mmes Garnier, Collomp, Betch, conseillers, Mme Mouillard, M. Boinot, Mmes Champalaune, Gueguen, MM. Sémériva, Truchot, conseillers référendaires, M. Jobard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Favre, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de Mme X... et de la SCI du ..., de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de la société civile professionnelle G... F... et Jean-Claude K..., de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société Auxiliaire du Crédit Foncier de France, venant aux droits de la Société de crédit pour le logement, de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat des époux N..., des époux A... de Franciosi, de M. C..., de Mlle I..., de M. O..., de Mlle D... et des époux H..., les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne acte à Mme Nelly X... et à la SCI du ... de leur désistement de pourvoi à l'égard de la Caisse de Crédit mutuel de Rambouillet ; Statuant tant sur le pourvoi principal de Mme X... et de la SCI du ... que sur le pourvoi provoqué de la SCP F... et K... ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 29 octobre 1998), que par acte notarié du 7 mai 1991, la société RMS a vendu un terrain à la SCI du ..., pour un prix de 450 000 francs ; qu'à l'acte est intervenue la société Socrelog, aux droits de laquelle est la Société Auxiliaire de Crédit Foncier de France (ACFF), qui a consenti à la SCI un prêt de 450 000 francs destiné à l'achat du terrain ainsi qu'un crédit d'accompagnement d'un montant identique pour lui permettre la construction d'un ensemble immobilier, avec affectation hypothécaire ; que les actes de vente des lots en l'état futur d'achèvement aux différents acquéreurs, dont Mme Nelly X..., par ailleurs associée de la SCI, ont été établis par M. F..., notaire associé ; que tous les acheteurs se sont acquittés du prix, en fonction de l'évolution de la construction de l'ouvrage ; que, cependant, la société Socrelog, prétendant ne pas avoir été désintéressée, a engagé à l'encontre des acquéreurs une procédure de saisie à tiers détenteurs ; que les acquéreurs, autres que Mme X..., devenue gérante de la SCI, ont assigné la société Socrelog et la SCP F... et K..., en demandant l'annulation des sommations de payer qui leur avaient été délivrées et la garantie du notaire ; que

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Mme X... est intervenue volontairement à l'instance pour faire statuer sur sa propre demande et sur celle de la SCI ; Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses cinq branches et le premier moyen du pourvoi provoqué, pris également en ses cinq branches, tels qu'énoncés aux mémoires en demande et reproduits en annexe, réunis : Attendu que Mme X... et la SCI, ainsi que la SCP F... et K..., font grief à l'arrêt infirmatif d'avoir déclaré valables les poursuites engagées par la société Socrelog, aux droits de laquelle se trouve la société ACFF, à l'encontre des consorts N..., A... de Franciosi, C..., Mineau, O..., E... et H..., ainsi qu'à l'encontre de la première, acquéreurs de lots vendus en l'état futur d'achèvement, et d'avoir condamné la SCI du ..., in solidum avec la SCP F... et K..., à garantir M. et Mme N..., M. et Mme A... de Franciosi, M. C..., Mlle E..., M. et Mme H..., J... I... et M. O... ; Attendu que les demandeurs aux pourvois soutiennent que la cour d'appel n'a pas caractérisé l'intention de la société Socrelog et de la SCI de travailler en compte courant ; qu'elle a dénaturé l'historique des comptes de la SCI relatifs au crédit consenti pour l'achat du terrain et au crédit d'accompagnement, en affirmant qu'ils avaient enregistré des remises réciproques ; qu'ils reprochent encore à l'arrêt une dénaturation des mentions claires et précises de l'acte notarié du 7 mai 1991 pour avoir retenu que l'ensemble des mécanismes mis en place établissait que la société Socrelog était appelée à financer toutes les opérations de construction ; qu'ils prétendent enfin que la cour d'appel ne s'est pas expliquée sur la responsabilité encourue par la société Socrelog dans le dépassement du crédit consenti ; Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt ne dit pas que le compte de la SCI relatif au crédit consenti pour l'achat du terrain est un compte courant ; Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant constaté que l'acte notarié mentionnait expressément que le crédit d'accompagnement était accordé au titre d'une ouverture en compte courant, qu'il prévoyait la possibilité de remises réciproques et spécifiait que l'hypothèque conventionnelle fournie par la SCI grevant l'immeuble et les constructions qui y seront édifiées était affectée à la sûreté et en garantie du solde du compte courant, tant en capital, qu'intérêts, commissions, frais et accessoires, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que les éléments spécifiques du compte courant étaient réunis ; Attendu, en troisième lieu, que c'est par une interprétation de l'acte, exclusive de toute dénaturation, rendue nécessaire par le rapprochement de stipulations apparemment contradictoires, que la cour d'appel a souverainement estimé que la société Socrelog était appelée à financer toutes les opérations de construction, recevant en contrepartie tous les prix des ventes à être réalisées dans le cadre du compte ouvert spécialement au nom de la SCI ; Attendu, enfin, que la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à des conclusions qui étaient inopérantes, dès lors qu'il n'était pas prétendu que la société Socrelog, qui n'avait pas l'obligation contractuelle de suivre l'évolution des fonds prêtés, avait libéré des fonds en violation des stipulations conventionnelles ; D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ; Sur le second moyen du pourvoi provoqué, pris en ses deux branches : Attendu que la SCP F... et K... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée, in solidum avec la SCI du ..., à garantir les consorts N..., A... de Franciosi, C..., E..., H..., Mineau et O..., alors, selon le moyen : 1 / que l'exécution de l'obligation d'information du notaire peut résulter des stipulations de l'acte instrumenté ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que les actes de ventes conclus au profit des différents acquéreurs stipulaient de façon claire que les paiements des fractions du prix restant dues devaient être réalisés par chèques bancaires à l'ordre de la société Socrelog, pour être affectés au compte de la SCI, sinon en l'étude du notaire et que tout autre paiement ne serait pas

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libératoire ; qu'en affirmant néanmoins que le notaire aurait dû attirer l'attention des acquéreurs sur la nécessité de respecter les modalités de paiement ainsi prévues, bien qu'une telle mise en garde résultât des termes mêmes de l'acte qui précisait tant la nature de l'obligation que la conséquence de leur violation, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; 2 / que le notaire ne saurait garantir une partie des conséquences de la violation d'une obligation contractuelle librement souscrite ; qu'en la condamnant à garantir les acquéreurs des conséquences du non-respect des modalités de paiements qu'ils s'étaient engagés, par des clauses claires et précises, à respecter, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; Mais attendu que l'arrêt relève qu'en vertu du devoir d'information et de conseil auquel il était tenu, il appartenait au notaire d'attirer l'attention des acquéreurs sur la portée et le danger des inscriptions hypothécaires prises sur leur immeuble au profit de la société Socrelog ainsi que sur l'obligation qui leur était faite de se libérer du solde du prix selon les modalités prévues à peine de paiement non libératoire ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations la cour d'appel, qui a fait ressortir que la mise en garde des clients contre les risques qu'ils couraient en ne payant pas entre les mains de la Socrelog ne résultait pas nécessairement de la simple lecture des clauses de la convention, a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ; Condamne Mme X..., la SCI du ... et la SCP F... et K... aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de Mme X..., la SCI du ... et de la société Auxiliaire du Crédit foncier de France ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille deux.

Doc. 20 : Cass. Civ. 1ere 6 janvier 2011 n°09-70.651 LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Attendu que la société BNP Paribas (la banque) ayant assigné Mme X... en paiement d'une certaine somme au titre du solde débiteur du compte ouvert en son nom dans ses livres, celle-ci a invoqué les dispositions applicables au crédit à la consommation et mis en cause la responsabilité de la banque ; que la cour d'appel a fait droit à la demande de l'établissement de crédit et a débouté Mme X... de ses prétentions ; Sur le premier moyen : Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de statuer ainsi alors, selon le moyen : 1°/ que la destination professionnelle d'un crédit ne peut résulter que d'une stipulation expresse ; qu'en décidant d'écarter les règles du crédit à la consommation au motif que le compte ouvert par Mme X... aurait une destination professionnelle sans constater que cette destination résultait d'une stipulation contractuelle expresse, la cour d'appel a violé l'article L. 311-3 du code de la consommation ; 2°/ que la commune intention des parties de s'engager dans une opération complexe ne peut résulter que d'une convention expresse de compte courant spécifiant qu'il peut fonctionner en position débitrice ; qu'à défaut de constater une telle convention, la cour d'appel ne pouvait décider que les parties s'étaient engagées dans une opération complexe autorisant le fonctionnement du compte à

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découvert, peu important que la banque ait unilatéralement adressé trimestriellement à Mme X... des relevés d'intérêts et de commissions relatifs à «votre compte courant» comportant des commissions de découvert et de mouvement ; que ce faisant, elle a violé les dispositions de l'article L. 311-2 du code de la consommation ; Mais attendu que si la destination professionnelle d'un crédit doit résulter d'une stipulation expresse, les dispositions régissant le crédit à la consommation ne sont pas applicables à la convention de compte courant à vocation professionnelle, ce dernier eût-il fonctionné à découvert ; que la cour d'appel a relevé, par motifs adoptés, que Mme X... s'était présentée à la banque comme une commerçante exploitant sous l'enseigne Suzy et a précisé, par motifs propres, qu'il ressortait du dossier d'entrée en relations que le compte litigieux avait été ouvert sous ce nom commercial, figurant après le nom patronymique de l'intéressée qui venait d'être immatriculée au registre du commerce et des sociétés pour son activité de "commerce non sédentaire d'objets mobiliers divers neufs et occasion, brocante" ; qu'ayant en outre constaté que la commune intention des parties avait été de s'engager dans une opération complexe, autorisant le fonctionnement à découvert du compte, qualifié de compte courant sur les relevés trimestriels d'intérêts et de commissions, et ayant enregistré des remises d'espèces importantes ainsi que des règlements d'achats auprès de commissaires-priseurs, correspondant à l'activité professionnelle de Mme X..., elle en a exactement déduit que cette convention ne relevait pas des règles applicables au crédit à la consommation ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Mais sur le second moyen, pris en sa première branche : Vu l'article 1147 du code civil ; Attendu que pour écarter la responsabilité de la banque l'arrêt attaqué retient qu'il ne saurait être soutenu que la BNP Paribas a accordé un crédit par caisse abusif dès lors que les dépassements dont Mme X... a pu profiter ne reflétaient que ses débordements unilatéraux et ne constituaient que des concours occasionnels tolérés par l'établissement de crédit qui les subissait tout en relevant que seuls des rejets de chèques ou d'autres valeurs auraient pu mettre un terme à cette situation de façon anticipée, ce que l'intéressée n'aurait pas manqué de reprocher à la banque ; Qu'en se déterminant ainsi sans préciser si Mme X... avait la qualité d'emprunteur non averti et, dans l'affirmative, si conformément au devoir de mise en garde auquel elle était tenue à son égard, la banque justifiait avoir satisfait à cette obligation au regard de ses capacités financières et des risques de l'endettement nés du découvert litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du second moyen : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme X... de ses demandes, l'arrêt rendu le 22 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ; Condamne la société BNP Paribas aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes tant de la SCP Waquet, avocat de Mme X... que de la BNP Paribas ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille onze.

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Doc. 21: Cass. Civ 8 janvier 2009 n°06-17.630 LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Attendu que l'association UFC Que Choisir a, sur le fondement de l'article L. 421-6 du code de la consommation, introduit contre le Crédit lyonnais une action en suppression de clauses contenues dans la convention de compte de dépôt et dans le guide tarifaire proposés, en 2003, aux clients de la banque ; que l'arrêt attaqué, qui examine ces clauses contenues dans les documents contractuels, tels que proposés aux clients dans leur version de 2005, accueille l'action pour certaines clauses mais la rejette pour d'autres ; Sur le douzième moyen, tel qu'il figure dans le mémoire en demande et est annexé au présent arrêt : Attendu qu'ayant constaté que le Crédit lyonnais avait versé aux débats la convention de compte de dépôt dans sa version d'octobre 2005 et l'édition du guide tarifaire de juillet 2005, la cour d'appel, qui a examiné les clauses contenues dans ces documents contractuels, substitués, au jour où elle statuait, à ceux antérieurement proposés aux consommateurs, a, à bon droit, rejeté la demande de l'association UFC Que Choisir en ce qu'elle tendait à voir déclarer abusive la clause 1.5 § 2 qui ne figurait plus dans la nouvelle version de la convention ; que le moyen ne peut être accueilli ; Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure dans le mémoire en demande et est annexé au présent arrêt : Attendu que, contrairement à ce qu'affirme le moyen, les clauses, prévoyant respectivement que les relevés de compte remis ou transmis par voie informatique font preuve des opérations et écritures qu'ils comportent et que la preuve de la remise d'espèces ou de chèques dans les automates, qui ne vérifient pas le montant du dépôt mentionné par le client, résulte d'un inventaire ultérieur effectué par la banque, réservent, sans altérer le pouvoir souverain d'appréciation du juge, la possibilité pour le titulaire du compte d'apporter, sans en inverser la charge, la preuve de la réalité des opérations, des ordres ou des dépôts ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est annexé au présent arrêt : Attendu que, d'abord, ayant retenu que, si le code confidentiel d'accès aux services de consultation et de gestion de compte à distance par internet, audiotel ou minitel permettait de consulter le solde des comptes, d'effectuer des virements entre comptes du même client et de réaliser des opérations bancaires et sur titres, il n'était pas pour autant le code secret d'une carte bancaire, la cour d'appel, qui n'avait pas à se livrer à la recherche prétendument omise dès lors que les dispositions de l'article L. 132-4 du code monétaire et financier, relatives aux cartes de paiement, se trouvaient sans application, a légalement justifié sa décision d'écarter le caractère illicite de la clause selon laquelle le Crédit lyonnais n'assumait pas la responsabilité des conséquences d'un usage abusif ou frauduleux du code confidentiel ; qu'ensuite, ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que cette clause, contenue dans des stipulations destinées à mettre en garde le client sur les mesures de sécurité élémentaires qu'il doit prendre concernant son code personnel pour en assurer la confidentialité et en prévenir la divulgation, et retenu, en conséquence, qu'elle visait l'utilisation abusive ou frauduleuse par un tiers en possession du code personnel du fait de la négligence de ce client ou par ce dernier, la cour d'appel a légalement justifié sa décision d'écarter le caractère abusif de ladite clause qui n'avait pas pour objet ni pour effet d'exonérer la banque de sa responsabilité en cas de faute de sa part ; que le moyen ne peut être accueilli ; Sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est annexé au présent arrêt : Attendu que l'arrêt retient, à bon droit, que la clause, prévoyant que les carnets de chèques sont retirés au guichet de l'agence ou envoyés par courrier recommandé aux frais du client, soit sur instruction de celui-ci, soit en l'absence de retrait dans un délai de six semaines, ne méconnaît pas les

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dispositions de l'article L. 131-71 du code monétaire et financier selon lesquelles les formules de chèques sont mises gratuitement à la disposition du titulaire du compte, ni ne présente un caractère abusif, dès lors que les chéquiers peuvent être effectivement retirés sans frais au guichet de l'agence pendant un délai suffisamment long et que leur renouvellement, répondant au besoin du client, implique légitimement que celui-ci assume les frais d'envoi lorsque, informé de la mise à disposition à l'agence, il n'a pas cru devoir profiter de leur délivrance gratuite dans le délai suffisant dont il dispose ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le septième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est annexé au présent arrêt : Attendu que l'arrêt écarte, à bon droit, le caractère illicite et abusif de la clause stipulant que "certaines opérations, rares ou spécifiques, ne figurent pas sur le guide tarifaire des principales opérations et qu'il appartient au client de s'informer de leurs conditions financières auprès de son agence", dès lors que les qualificatifs attribués aux opérations concernées en délimitent suffisamment la nature et le domaine en dehors des opérations envisagées par l'article 2 de l'arrêté du 8 mars 2005 et que l'information dispensée au client sur sa demande et avant leur réalisation est de nature à prévenir tout déséquilibre au détriment de ce dernier ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le huitième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est annexé au présent arrêt : Attendu que, d'abord, l'association UFC Que Choisir, qui a soutenu, devant la cour d'appel, que "si le législateur a accordé une dérogation au principe de l'intangibilité des contrats synallagmatiques , en faveur des banquiers, par l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier, c'est seulement pour "tout projet de modification du tarif ..."... Dès lors, pour toute modification autre que celle du tarif des produits et services, la clause est bien illicite", n'est pas recevable à fonder un grief sur une position contraire en invoquant l'illicéité de la clause en ce qu'elle engloberait l'évolution des conditions tarifaires ; qu'ensuite, la cour d'appel a exactement écarté le caractère abusif de la clause prévoyant que "les services entrant dans la gestion d'un compte de dépôts et les conditions de la convention sont susceptibles d'évoluer notamment pour les adapter aux besoins de la clientèle et aux évolutions financières ou techniques ainsi qu'aux mesures d'ordre législatif ou réglementaire. Nous en informerons la clientèle .. La poursuite de la relation de compte ou l'absence de manifestation écrite d'un désaccord vaudra acceptation de votre part", dès lors que ladite clause réservait la possibilité pour le client de contester la modification et de mettre fin à la convention ; que le moyen ne peut être accueilli ; Sur le neuvième moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est annexé au présent arrêt : Attendu que, l'association UFC Que Choisir s'étant bornée à invoquer l'interdiction de toute prospection commerciale à partir de données personnelles communiquées sans l'accord préalable du consommateur, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à la recherche, prétendument omise, relative à la possibilité pour le titulaire du compte de s'opposer à la diffusion de ses données personnelles, qui ne lui était pas demandée, d'autant qu'il s'infère de l'arrêt, relevant que l'édition d'octobre 2005 de la convention de compte de dépôt stipulait que le client autorisait la banque à partager les données le concernant, que celui-ci avait la faculté de ne pas donner son autorisation ; que, dès lors, elle a légalement justifié sa décision ; Sur le dixième moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est annexé au présent arrêt : Attendu que la cour d'appel a exactement écarté le caractère abusif de la clause selon laquelle le Crédit lyonnais s'autorisait à refuser les chèques émis sur des formules non conformes aux normes en usage dans la profession et prévoyait une commission pour le traitement de pareils chèques, dès lors qu'une telle clause, destinée à permettre un traitement rationalisé des formules de chèques normalisées au lieu d'un traitement individualisé de formules singulières nécessairement plus long et plus onéreux, ne crée aucun avantage au profit de la banque ni aucun désavantage au détriment du consommateur qui bénéficie de la délivrance gratuite des chéquiers et d'une facilité d'utilisation, et,

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partant, n'a pas pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; que le moyen n'est pas fondé ; Et sur les cinquième et sixième moyens, tel qu'ils figurent au mémoire en demande et sont annexés au présent arrêt : Attendu que ces moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ; Mais, sur le premier moyen : Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation ; Attendu que, pour déclarer non abusive la clause prévoyant "qu'à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date d'édition d'un relevé de compte les écritures et opérations mentionnées sur celui-ci seront considérées comme approuvées", l'arrêt retient que le principe de l'acceptation tacite du client invité à formuler des observations dans le délai raisonnable de trois mois n'est pas illicite puisqu'aucun texte ne l'interdit, que le délai de trois mois permet au client de prendre connaissance de manière approfondie de toutes les opérations, et qu'en outre il n'interdit pas, après son expiration, une éventuelle action en responsabilité contractuelle en cas de faute ou d'erreur manifeste ; Attendu, cependant, qu'une telle clause, qui postule l'approbation des écritures et opérations à l'expiration du délai prévu, est de nature à susciter ou entretenir la conviction du titulaire du compte qu'il se trouve privé de la possibilité de les contester, alors même qu'il n'aurait pu en connaître l'inexactitude qu'au-delà du délai, et, partant, a pour objet et pour effet d'entraver l'exercice par le consommateur de son droit d'agir en justice, de sorte qu'elle est abusive ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Et sur le onzième moyen : Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation ; Attendu que pour écarter le caractère abusif de la clause stipulant que "le compte de dépôt fonctionne comme un compte courant par lequel les créances et les dettes forment un solde de compte seul exigible", l'arrêt retient qu'il n'existe pas de définition légale ou réglementaire du compte de dépôt et du compte courant, que la clause litigieuse n'entraîne pas de confusion entre les deux notions puisqu'elle précise que le compte de dépôt fonctionne selon les règles du compte courant et que le mécanisme de fonctionnement du compte courant est simple et accessible à un entendement normal et est, en outre, conventionnellement prévu ; Qu'en se déterminant ainsi quand l'assimilation du compte de dépôt au compte courant, non conforme à la réalité du fonctionnement du premier, normalement mouvementé uniquement par des versements ou des retraits dans la limite du disponible, permet à la banque d'éluder les obligations posées par l'article L. 312-1 du code monétaire et financier, concernant les services liés à l'ouverture d'un compte de dépôt et la notification par écrit de la décision motivée de clore un tel compte, de sorte que la clause litigieuse, qui a pour effet de limiter de façon inappropriée les droits légaux du consommateur vis-à-vis du professionnel, crée ainsi un déséquilibre entre les droits et obligations des parties, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige, par application de la règle de droit appropriée ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de suppression des clauses 2.1 § 3 et 1.1 § 1 de la convention de compte de dépôt, en sa version d'octobre 2005, proposée par le Crédit lyonnais, l'arrêt rendu le 11 mai 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

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DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Déclare abusives les dites clauses ; Dit, en conséquence, qu'elles sont réputées non écrites ; Condamne le Crédit lyonnais aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du Crédit lyonnais ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille neuf.

Doc. 22 : Cass. Com 6 février 1996, n°93-19.601, Bull IV n°34 ARRÊT N° 2 Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 mai 1993), que, par acte du 31 juillet 1987, la Banque nationale de Paris (la banque) s'est portée, à concurrence d'un certain montant, caution envers la société compagnie Norwich Union, propriétaire de locaux loués à la Société internationale de gestion (société SIG), du paiement des loyers et charges locatives dus par celle-ci ; que la société SIG, par deux jugements du 19 mai 1988, a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires ; que le liquidateur de la procédure collective a demandé à la banque de lui verser la somme de 328 163,89 francs, représentant le montant du solde créditeur du compte courant ouvert dans ses livres à la société SIG ; que la banque n'a remis au liquidateur que la somme de 93 866,04 francs, déclarant conserver la différence pour la couvrir du montant des loyers et charges restant à payer dans la limite de son engagement de caution ; que le liquidateur a assigné la banque en paiement de cette somme ; Attendu que le liquidateur reproche à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande alors, selon le pourvoi, que si le principe de l'affectation des créances au compte courant crée un lien de connexité suffisant pour permettre la compensation entre une créance qui, née de l'exécution d'un contrat de cautionnement souscrit par une banque, est certaine, liquide et exigible de sorte qu'elle se trouve affectée au disponible du compte courant et le solde créditeur de ce compte, le lien de connexité n'est pas suffisant pour permettre une compensation entre le solde créditeur disponible d'un compte courant et la créance hypothétique que pourrait détenir une banque en raison de son engagement de caution, qui figure au différé et ne sera portée au disponible que lorsqu'elle sera certaine, liquide et exigible en raison de l'exécution du cautionnement souscrit par la banque ; qu'en énonçant que la banque pouvait retenir le solde créditeur du compte courant détenu par la société SIG afin d'être compensé avec la créance non certaine, ni liquide, ni exigible qu'elle pourrait détenir en raison du seul fait de son engagement de caution, la cour d'appel a violé les articles 1289 et suivants du Code civil ; Mais attendu que l'arrêt relève que la société SIG était défaillante dans le paiement des loyers dès avant sa mise en liquidation judiciaire, que la banque avait été appelée à se substituer à elle dans les règlements, en qualité de caution, et qu'après une première série de versements antérieurs à l'ouverture de la procédure collective, son obligation d'en exécuter ultérieurement d'autres était certaine ; qu'il en résulte que la créance certaine de la banque sur la société débitrice était, bien que non encore exigible, connexe de celles devant être inscrites au compte courant, dont elles avaient fait le cadre de règlement de leurs créances réciproques, et que ladite créance déclarée au passif du

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redressement judiciaire pouvait, en conséquence, être invoquée en compensation du solde du compte ; que par ces motifs, l'arrêt se trouve légalement justifié ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

Doc. 23 : Cass. Com 13 novembre 1973, n°70-14.374 71-10.478, Bull n°325 SUR LE MOYEN UNIQUE DU POURVOI 70-14 374, QUI EST PREALABLE : ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR DECLARE QUE L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR AVAIT ETE, A JUSTE TITRE, MIS EN CAUSE ET QUE LA CONDAMNATION PRONONCEE CONTRE LE PERCEPTEUR DE SAINT-CLAUDE LUI ETAIT OPPOSABLE, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, LE LITIGE OPPOSANT LE CONTRIBUABLE AU PERCEPTEUR ETANT FONDE SUR LA PRETENDUE IRREGULARITE D'UNE OPPOSITION A TIERS-DETENTEUR PRATIQUEE SUR UN COMPTE-COURANT POUR LE RECOUVREMENT DE CONTRIBUTIONS DIRECTES, LA CAUSE DE L'ACTION N'ETAIT PAS ETRANGERE A L'IMPOT, CE QUI IMPLIQUAIT LA COMPETENCE DU COMPTABLE AUTEUR DES POURSUITES LITIGIEUSES ET NON DE L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR POUR DEFENDRE A L'ACTION EN RESPONSABILITE FONDEE SUR UN ACTE DE POURSUITES ; MAIS ATTENDU QU'APRES AVOIR RETENU QUE L'ACTION INTENTEE PAR BAPTISTA ETAIT ETRANGERE AU PRINCIPE ET AU MONTANT DE LA DETTE D'IMPOT NON CONTESTEE, MAIS TENDAIT UNIQUEMENT A FAIRE DECLARER L'ETAT DEBITEUR DE DOMMAGES-INTERETS EN RAISON DE LA FAUTE DE SERVICE QU'AURAIT COMMISE UN FONCTIONNAIRE DE L'ADMINISTRATION DES FINANCES DANS UNE PROCEDURE D'EXECUTION, LA COUR D'APPEL A PU EN DEDUIRE QUE LA MISE EN CAUSE DE L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR SUR UNE TELLE ACTION ETAIT JUSTIFIEE ; QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ; MAIS SUR LE MOYEN UNIQUE DU POURVOI N° 71-10 478, PRIS EN SA PREMIERE BRANCHE : VU L'ARTICLE 2093 DU CODE CIVIL ET L'ARTICLE 1922 DU CODE GENERAL DES IMPOTS ; ATTENDU QU'ESTIMANT QU'EN RAISON DE L'INDIVISIBILITE DES OPERATIONS D'UN COMPTE-COURANT, AUCUN SOLDE NE PEUT ETRE DEGAGE AVANT LA CLOTURE FINALE DU COMPTE ET QUE, TANT QUE CELUI-CI N'EST PAS DEFINITIVEMENT ARRETE, AUCUN CREANCIER N'A LE DROIT DE PRATIQUER SAISIE SUR UN SOLDE PROVISOIRE, LA COUR D'APPEL A CONSIDERE QUE LE PERCEPTEUR DE SAINT-CLAUDE, QUI POURSUIVAIT LE RECOUVREMENT D'IMPOTS, AVAIT COMMIS UNE FAUTE EN DEMANDANT A LA BANQUE DE LA GUADELOUPE, PAR VOIE D'AVIS A TIERS DETENTEUR, LE VERSEMENT DES DISPONIBILITES DU COMPTE-COURANT DONT BAPTISTA ETAIT TITULAIRE DANS CET ETABLISSEMENT ; ATTENDU, CEPENDANT, QUE LA CREANCE, OBJET DE LA PROCEDURE D'EXECUTION LITIGIEUSE, ETAIT RECOUVRABLE SUR L'ENSEMBLE DU PATRIMOINE DE BAPTISTA ET QUE, FAISANT PARTIE DUDIT PATRIMOINE, LE SOLDE PROVISOIRE DU COMPTE-COURANT, AU JOUR OU LE PERCEPTEUR A NOTIFIE SA DEMANDE A LA BANQUE, NE POUVAIT ETRE DISTRAIT DU GAGE GENERAL DU TRESOR ;

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QU'IL SUIT DE LA QU'EN SE REFUSANT A RECHERCHER QUELLES ETAIENT LES DISPONIBILITES DU COMPTE DE BAPTISTA LORS DE L'OPPOSITION DU PERCEPTEUR ET EN DECLARANT FAUTIVE UNE TELLE OPPOSITION, LA COUR D'APPEL N'A PAS LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ; PAR CES MOTIFS : SUR LE POURVOI N° 70-14 374, REJETTE ; SUR LE POURVOI N° 71-10 478, ET SANS QU'IL SOIT BESOIN D'EXAMINER LA SECONDE BRANCHE DU MOYEN UNIQUE : CASSE ET ANNULE L'ARRET RENDU LE 29 JUIN 1970 ENTRE LES PARTIES, PAR LA COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE ; REMET, EN CONSEQUENCE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL DE FORT-DE-FRANCE.

Doc. 24 : Cass. Civ 1ère 9 février 1988, n°86-11.557, Bull 1988 I n°34 Sur le premier moyen, pris en sa première branche : Vu l'article 1907 du Code civil ; Attendu que le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit ; que cette règle, prescrite pour la validité même de la stipulation d'intérêt, est d'application générale et qu'il ne peut y être dérogé même en matière d'intérêts afférents au solde débiteur d'un compte courant ; Attendu que l'arrêt attaqué a constaté qu'il n'existait aucun écrit fixant le taux de l'intérêt du solde débiteur du compte courant de la société Toulon, avant sa clôture ; qu'il a néanmoins condamné cette société, ainsi que les cautions, à payer des intérêts au taux conventionnel de 19,65 % par des motifs tirés de l'absence de contestation des décomptes ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'à défaut d'écrit fixant le taux de l'intérêt conventionnel, le taux légal est seul applicable au solde débiteur d'un compte courant, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Et sur le second moyen, pris en sa seconde branche : Vu l'article 2013 du Code civil ; Attendu que pour condamner Mme veuve X..., M. Jean-Luc X... et M. Denis X... à payer à la Banque nationale de Paris, en leur qualité de caution, les intérêts, au taux de 19,65 %, du solde débiteur du compte courant de la société Toulon, après sa clôture, la cour d'appel s'est bornée à relever que par un acte du 29 mai 1981 lesdites cautions avaient accepté ce taux d'intérêt ; Attendu, cependant, qu'après la clôture d'un compte courant le taux conventionnel fixé auparavant ne continue à s'appliquer que s'il existe une convention entre le débiteur et le créancier et que le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur principal, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses ; d'où il suit qu'en statuant comme elle a fait, sans rechercher s'il existait un accord écrit entre la société Toulon, débiteur principal, et la Banque nationale de Paris, pour fixer au taux de 19,65 % les intérêts attachés au solde débiteur du compte courant après sa clôture, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche de chacun des moyens : CASSE ET ANNULE, en son entier, l'arrêt rendu le 9 décembre 1985, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.

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Doc. 25 : Cass. Com. 22 mai 1991, n°89-19.697, Bull 1991 IV n°168

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1907 du Code civil, ensemble l'article 4 de la loi du 28 décembre 1966, l'article 2 du décret

du 4 septembre 1985 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Banque populaire du Sud-Ouest (la banque), qui avait consenti un

découvert en compte courant à Mme X..., a assigné celle-ci en paiement du solde débiteur de ce

compte clôturé le 29 juillet 1983, comprenant des intérêts conventionnels ;

Attendu que, pour décider que sur les soldes débiteurs du compte courant, la banque ne pouvait

prélever que les intérêts au taux légal, la cour d'appel a relevé qu'aucune convention écrite fixant le

taux de l'intérêt en cas de découvert du compte courant n'était intervenue entre la banque et Mme X... ;

qu'en l'absence de l'écrit prévu à l'alinéa 2, de l'article 1907, du Code civil et à l'article 4 de la loi du 28

décembre 1966, l'accord des parties n'était pas acquis et que le taux légal était donc seul applicable au

solde débiteur ; qu'à cet égard, les correspondances adressées par Mme X... à la banque n'exprimaient

pas une approbation expresse et qu'un acquiescement tacite, conscient et dépourvu de toute ambiguïté,

ne pouvait être déduit de la réception par Mme X... des extraits ou relevés de compte périodiques, dès

lors que ces documents ne comportaient ni la mention des éléments propres à déterminer le taux

effectif global de l'intérêt avec notamment l'explication des modalités de calcul, ni la recommandation

d'informer la banque, dans un délai donné, d'un éventuel désaccord sur le décompte présenté, à

l'expiration duquel l'approbation serait considérée comme acquise ; qu'elle a retenu encore qu'il n'y

avait pas lieu de limiter la rétroactivité de la répétition des sommes prélevées au titre des intérêts au 10

septembre 1985, date d'entrée en vigueur du décret du 4 septembre 1985, puisque le taux effectif

global institué par ce texte ne différait de celui de la loi du 28 décembre 1966 que par son mode de

calcul et demeurait donc comme le précédent un intérêt soumis à la formalité de l'écrit prévu à l'article

1907 du Code civil ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la loi du 28 décembre 1966 n'était pas applicable avant l'entrée

en vigueur du décret du 4 septembre 1985 déterminant le mode de calcul du taux effectif global

lorsqu'il s'agit d'un découvert en compte et qu'en recevant sans protestation ni réserve les relevés de

compte qui lui étaient adressés, Mme X... avait accepté tacitement le taux des intérêts prélevés par la

banque, la cour d'appel, eu égard à la date de clôture du compte, a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 1154 du Code civil ;

Attendu que, pour exclure la capitalisation des intérêts pendant le fonctionnement du compte courant,

la cour d'appel a retenu que, si l'effet novatoire, c'est-à-dire l'incorporation au capital de l'intérêt par la

seule vertu de son inscription en compte, expliquait la capitalisation le plus souvent trimestrielle des

intérêts, il ne saurait justifier en l'espèce, en l'absence d'une convention spéciale d'anatocisme conclue

entre les parties, une pratique contraire aux dispositions de l'article 1154 du Code civil selon lesquelles

l'intervalle entre deux capitalisations est une année entière au moins ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la capitalisation des intérêts d'un compte courant se produit de

plein droit à chaque arrêté périodique par fusion dans le solde résultant dudit arrêté, d'où il suit que

l'article 1154 du Code civil n'était pas applicable, la cour d'appel a violé ce texte ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 mai 1989, entre les parties, par

la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient

avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.

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Séance n° 6 LES INSTRUMENTS DE PAIEMENT : le chèque (I)

LES NOTIONS ESSENTIELLES

Revoir les notions suivantes : formes de chèque, création, provision, transmission et paiement du chèque, responsabilité du banquier

LE CHEQUE DE GARANTIE

Doc. 1 : Cass. com., 24 octobre 2000, n° 97-21.710, Bull. civ., IV, n° 162

LA PROVISION DU CHEQUE

Doc. 2 : Cass. com., 4 mars 1986, n° 84-16.880 ; D. 1987, n° 2, M. Cabrillac Doc. 3 : Cass. com., 30 mai 2000, n° 96-20.423 (extraits) Doc. 4 : Cass. com., 12 janvier 2010, n° 08-20.241, Bull. civ., IV, n° 1 ; Gaz. Pal. 190-191, 9-10 juillet 2010, p. 25, A.C. Rouaud Doc. 5 : Cass. com., 18 janvier 2011,n° 10-10.259 (extraits) , Bull. civ., IV, n° 2 ; Gaz. Pal. 56-57, 25-26 février 2011, p. 21, A.C

LA PRESENTATION ET LE PAIEMENT DU CHEQUE

Doc. 6 : Article L. 131-31 du code monétaire et financier Doc. 7 : Article L. 131-32 du code monétaire et financier Doc. 8 : Article L. 131-35 du code monétaire et financier Doc. 9 : Article L. 131-37 du code monétaire et financier Doc. 10 : Article L.131-38 du code monétaire et financier Doc. 11 : Cass. com., 19 juin 2012, n° 11-17.061, Bull. civ., IV, n° 124; D. 2012, p. 1732, V. Avena-Robardet ; Gaz. Pal. 265-266/2013, p. 24, A.C. Rouaud ; Banque & Droit 5/2012, p. 14, T. Bonneau Doc. 12 : Cass. com., 23 janvier 2007, n° 05-18.557(extraits), Bull. civ., IV, n° 6 Doc. 13 : Cass. com., 27 novembre 2012, n° 11-19.864, Bull. civ., IV, n° 212; Gaz. Pal. 102-103/2013, p. 16, A.C. Rouaud; Banque & Droit 1/2013, p. 20, T. Bonneau

LA RESPONSABILITE DU BANQUIER

Doc. 14 : V. Niori et A. Drochon, « Le chèque falsifié, le banquier, son client et le faussaire : responsabilités », Gaz. Pal. 1er juillet 2004, p. 3 Doc. 15 : Cass. com., 16 mars 2010, n° 09-11.734, D ; Gaz. Pal. 190-191, 9-10 juillet 2010, p. 27, A.C. Rouaud Doc. 16 : Cass. com., 28 janvier 2014, n° 12-27.901 (extraits) ; Banque & Dr. n° 155, mai-juin 2014, p. 30, T. Bonneau

EXERCICE Commenter l’arrêt reproduit dans le doc. 3 : Cass. com., 30 mai 2000, n° 96-20.423.

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LE CHEQUE DE GARANTIE

Doc. 1 : Cass. com., 26 janvier 1988, Bull. civ. IV, n° 49 Sur le moyen unique, pris en ses trois branches du pourvoi principal et le moyen unique, pris en ses deux branches, du pourvoi incident :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 septembre 1997), que la société Hesnault a fait parvenir

à la société Dapharm un chèque de 2 200 000 francs tiré sur la BNP, en lui précisant qu'il était

destiné à " couvrir (des) urgences et quatre factures pro forma afin d'expédier sans délai, les

marchandises " et lui demandant " de ne pas le mettre en banque puisque c'est un chèque de garantie

" ; que s'estimant créancière envers l'organisme destinataire des marchandises la société Dapharm a

mis à l'encaissement le chèque émis à son profit par la société Hesnault, laquelle a formé opposition à

son paiement ; que la société Dapharm a saisi la juridiction des référés aux fins de mainlevée de

l'opposition ;

Attendu que la société Hesnault et la BNP font grief à l'arrêt de la mainlevée de l'opposition, alors,

selon le pourvoi, 1° que, dans la mesure où les conditions posées par la loi au regard des engagements

de garantie sont réunies, cette garantie peut consister en la remise d'un chèque assorti de la condition

qu'il ne sera porté à l'encaissement que si le tiers dont les obligations sont ainsi garanties ne les

exécute pas ; qu'en affirmant que le chèque de garantie n'existait pas en droit français, la cour d'appel

a violé, par fausse application, l'article 28 du décret-loi du 30 octobre 1935 ; alors, 2° que constitue

une utilisation frauduleuse légitimant l'opposition au paiement la remise à l'encaissement d'un chèque

qui a été préalablement adressé au bénéficiaire à titre de garantie, alors que cette garantie est

devenue sans objet ; qu'en ordonnant la mainlevée de l'opposition formée par l'émetteur du chèque

litigieux au motif qu'il ne soutenait pas que le chèque litigieux ait été perdu ou volé, et qu'il

n'établissait pas que le chèque ait été utilisé de façon " manifestement " frauduleuse, ce qui

supposerait sa falsification ou sa contrefaçon, la cour d'appel a violé l'article 32 du décret-loi du 30

octobre 1935 ; alors, 3° qu'il appartient au bénéficiaire d'un chèque sollicitant la mainlevée d'une

opposition à paiement d'établir qu'il est titulaire d'un droit sur la provision ; qu'en faisant droit à la

demande de la société Dapharm sans avoir relevé que le chèque avait été remis à l'encaissement dans

le délai prévu par l'article 52 du décret-loi du 30 octobre 1935, la cour d'appel a privé sa décision de

base légale au regard de l'article 32 dudit décret-loi ; alors 4° que le chèque, dont la remise est

assortie de la condition qu'il ne sera pas porté à l'encaissement si le tiers dont les obligations sont

ainsi garanties ne les exécute pas, est licite ; qu'en statuant pourtant comme elle l'a fait, la cour

d'appel a violé l'article 28 du décret-loi du 30 octobre 1935 ; et alors, 5° que constitue une utilisation

frauduleuse légitimant l'opposition au paiement la remise à l'encaissement d'un chèque qui a été

préalablement adressé au bénéficiaire à titre de garantie, cette garantie étant devenue sans objet ;

qu'en ordonnant cependant la mainlevée de l'opposition formée par l'émetteur du chèque de garantie,

la cour d'appel a violé l'article 32 du décret-loi du 30 octobre 1935 ;

Mais attendu, d'une part, qu'un chèque est un instrument de paiement que le bénéficiaire peut faire

encaisser même dans le cas où il lui a été " remis à titre de garantie ", sauf à lui à en restituer le

montant si le paiement reçu était indu ; que la cour d'appel a statué, à bon droit, en ce sens ;

Attendu, d'autre part, que le droit d'obtenir paiement d'un chèque ne pouvant être subordonné à la

réalisation d'une condition, ne constitue pas une utilisation frauduleuse justifiant l'opposition, la

remise de ce chèque à l'encaissement, même s'il a été reçu à titre de garantie ; que la cour d'appel a

statué à bon droit en ce sens ;

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Attendu, enfin, que le bénéficiaire d'un chèque peut agir en mainlevée de l'opposition tant que celle-ci

garde effet, à savoir jusqu'à la prescription de l'action contre le tiré ; qu'il ne résulte pas des

conclusions échangées en instance d'appel qu'il y ait été prétendu que cette prescription était

intervenue ; que la cour d'appel n'a, dès lors, pas privé sa décision de base légale à cet égard ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois tant principal qu'incident.

LA PROVISION DU CHEQUE

Doc. 2 : Cass. com., 4 mars 1986, n° 84-16.880 Vu les articles 3 et 65-3 du décret du 30 octobre 1935, l'article 1134 du Code civil ; Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt infirmatif attaqué que Mlle Martins X... était titulaire d'un compte ouvert dans les livres de la Caisse de Crédit Mutuel de Clermont-Ferrand (la Caisse) ; que cette banque a informé sa cliente que la situation de son compte ne permettait pas le paiement d'un chèque émis par elle et lui a adressé l'injonction prévue par l'article 65-3 du décret-loi du 30 octobre 1935 ; que Melle Martins X... a assigné en référé la Caisse pour voir ordonner la mainlevée de l'interdiction bancaire ainsi notifiée ; Attendu que, pour accueillir cette demande, la Cour d'appel a relevé, d'une part, que, si, à la date de refus de paiement du chèque, le compte de Mlle Martins X... était " mathématiquement déficitaire ", certains jours et momentanément ce compte était débiteur de sommes importantes, ce qui n'empêchait pas la Caisse d'honorer les chèques émis par sa cliente, que Mlle Martins X..., qui ne bénéficiait pas d'une convention de découvert, profitait d'une manière habituelle d'une assez large tolérance et que la Caisse avait l'habitude de lui consentir des découverts momentanés, et, d'autre part, que la Caisse savait qu'un chèque que Mlle Martins X... lui avait remis, pour que la somme soit versée au crédit de son compte, était en instance de paiement ; Attendu qu'en le déterminant par de tels motifs, qui ne faisaient pas apparaître que Mlle Martins X... bénéficiait d'un engagement stable et permanent de la Caisse de payer à découvert jusqu'à un certain montant les chèques émis par sa cliente, et dès lors que le montant d'un chèque en instance d'encaissement ne peut constituer une provision disponible, d'où il suivait que la banque avait l'obligation d'adresser à sa cliente l'injonction prévue par l'article 65-3 du décret du 30 octobre 1935, la Cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE.

Doc. 3 : Cass. com., 30 mai 2000, n° 96-20.423 Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 18 juin 1996), que la société Kessler a émis, les 7 et 27 octobre 1991, deux chèques tirés sur le Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine (CIAL) au profit de la société Edib ; que celle-ci a présenté les chèques à l'encaissement le 27 mai 1992, postérieurement à la révocation par la banque de l'autorisation de découvert qu'elle avait consentie à la société émettrice, devenue applicable le 28 janvier 1992, et à la mise en redressement judiciaire, intervenue le 19 février 1992 ; que le CIAL a refusé le paiement des chèques au double motif " liquidation judiciaire et sans provision " ; que la société Edib lui en réclamé judiciairement le paiement ; Attendu que le CIAL fait grief à l'arrêt de sa condamnation à paiement, alors, selon le pourvoi, qu'aucune obligation légale n'impose au banquier du tiré de bloquer la provision d'un chèque en faveur du porteur, hormis l'hypothèse où la banque connaît l'émission du chèque préalablement à la présentation de ce dernier pour paiement ; que la cour d'appel a condamné le CIAL à payer le

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montant des chèques litigieux, au prétexte que les chèques auraient été provisionnés lors de leur émission, sans rechercher ainsi qu'il le lui était demandé, si le compte présentait lors de la présentation des chèques à l'encaissement le 27 mai 1992, une provision suffisante pour être honorés ; qu'elle a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 3 du décret-loi du 30 octobre 1935 et de l'article 1382 du Code civil ; Mais attendu que si la banque, sur laquelle un chèque a été émis, n'est pas tenue d'en payer le montant, lorsque le solde du compte tiré, supérieur à la provision du chèque lors de son émission, est devenu ensuite insuffisant à la suite de retraits ordonnés par le client titulaire du compte, il en est autrement lorsque la provision était constituée lors de l'émission grâce à une autorisation de découvert alors consentie au tireur, la révocation ultérieure de ce découvert ne pouvant préjudicier au bénéficiaire du chèque ; que la cour d'appel a retenu qu'eu égard au découvert consenti à l'époque de l'émission des chèques, la preuve de leur insuffisance de provision n'était pas apportée ; qu'elle a, dès lors, légalement fondé sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ; […] PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

Doc. 4 : Cass. com., 12 janvier 2010, n° 08-20.241, Bull. civ., IV, n° 1 Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la BNP Paribas que sur le pourvoi incident relevé par la Selarl Aurélie X..., en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Y... ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, qui est recevable, et le premier moyen du pourvoi incident, pris chacun en leur première branche, réunis :

Vu l'article L. 131-31 du code monétaire et financier ;

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'un chèque est émis et sa provision transférée dès que le tireur s'en est dessaisi au profit du bénéficiaire, toute mention contraire étant réputée non écrite ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Y..., ayant connu des difficultés de trésorerie, a convenu avec la société Gaz de France, aux droits de laquelle vient la société GDF-Suez, de procéder à un règlement échelonné des sommes dues ; que, conformément à cet accord, la société Y... a adressé, le 30 septembre 2005, quatre chèques, dont le dernier, établi pour un montant de 35 000 euros, portait la date du 30 décembre 2005 ; que ce dernier chèque a été rejeté par le banquier tiré, la BNP-Paribas (la banque), au motif que le compte était indisponible à la suite du redressement judiciaire de la société Y..., prononcé le 4 janvier 2006 ; que n'ayant pu obtenir le règlement amiable de ce chèque, la société Gaz de France a assigné la banque et la Selarl Aurélie X..., liquidateur judiciaire de la société Y... (le liquidateur), le redressement ayant été converti en liquidation judiciaire ;

Attendu que pour dire que le chèque de 35 000 euros a été émis par la société Y... au profit de la société Gaz de France à la date du 30 décembre 2005, antérieurement à l'ouverture collective, l'arrêt, après avoir constaté que les chèques ont été adressés par la société Y... le 30 septembre 2005, relève que les parties se sont accordées pour que la créance de la société Gaz de France fasse l'objet de chèques dont la provision serait transférée de façon échelonnée à cette dernière société ; qu'après avoir énoncé que l'émission d'un chèque est un fait qui peut être établi par tout moyen et qu'un chèque est émis au moment où le tireur s'en dessaisit au profit du bénéficiaire, l'arrêt retient que l'émission des chèques en cause opérant transfert de la provision s'est donc réalisée à la date portée sur chacun d'eux, date à laquelle le tireur a entendu s'en dessaisir pour sa présentation à l'encaissement ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

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Et sur le moyen relevé d'office, après avertissement délivré aux parties :

Vu les articles L. 131-31 du code monétaire et financier et L. 622-7 du code de commerce ;

Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que la provision d'un chèque émis par un tireur avant d'être mis en redressement judiciaire n'est transférée au profit du bénéficiaire qu'autant qu'elle ait existé au jour du jugement d'ouverture ;

Attendu que pour condamner in solidum la banque et le liquidateur ès qualités au paiement de la somme de 33 621, 25 euros, outre intérêts au taux légal, l'arrêt, après avoir relevé que le transfert de la provision concernant le dernier chèque est intervenu le 30 décembre 2005, avant le jugement du 4 janvier 2006 prononçant le redressement judiciaire, et en avoir déduit que, sauf à prouver le défaut de provision à la date du 30 décembre 2005, la somme mentionnée sur le chèque est due par la société Y... à la société Gaz de France, retient que le relevé du compte de la société Y... ouvert dans les livres de la banque du 30 novembre au 31 décembre 2005 fait apparaître un solde créditeur de 33 621, 25 euros à cette dernière date ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté que le chèque litigieux avait été émis avant le jugement d'ouverture, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE

Doc. 5 : Cass. com., 18 janvier 2011, n° 10-10.259, Bull. civ., IV, n° 2 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a ouvert un compte dans les livres de la banque populaire Loire et Lyonnais (la banque), assorti d'une autorisation de découvert ; que le 8 mars 2004, M. Y... a signé une convention portant le découvert à 7 000 euros ; que le 31 décembre 2005, la banque a clôturé le compte puis a, le 17 mai 2006, assigné Mme X... et M. Y... en paiement solidaire du solde débiteur du compte ; que ces derniers se sont opposés à cette demande et ont formé une demande reconventionnelle en dommages-intérêts; que, par jugement du 27 novembre 2007, le tribunal d'instance de Tournon a annulé la convention de découvert du 8 mars 2004, constaté la forclusion de la demande en paiement du solde débiteur du compte et rejeté la demande de dommages-intérêts ; que, la banque ayant relevé appel de ce jugement, Mme X... et M. Y... ont formé un appel incident afin d'obtenir, chacun, paiement de 3 500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la faute de la banque ; Vu l'article L. 131-73 du code monétaire et financier ; Attendu que pour rejeter la demande de dommages-intérêts formée par Mme X... et M. Y..., l'arrêt retient que les rejets des chèques suivant le premier rejet de chèque, lequel avait fait l'objet du courrier du 16 avril 2004, ne sont pas fautifs ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans avoir recherché si le rejet des chèques suivants avait été précédé d'un avertissement précis visant chacun des chèques concernés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

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LA PRESENTATION ET LE PAIEMENT DU CHEQUE

Doc. 6 : Article L. 131-31 du code monétaire et financier

Le chèque est payable à vue. Toute mention contraire est réputée non écrite.

Le chèque présenté au paiement avant le jour indiqué comme date d'émission est payable le jour de la présentation.

Doc. 7 : Article L. 131-32 du code monétaire et financier

Le chèque émis et payable dans la France métropolitaine doit être présenté au paiement dans le délai de huit jours.

Le chèque émis hors de la France métropolitaine et payable dans la France métropolitaine doit être présenté dans un délai, soit de vingt jours, soit de soixante-dix jours, selon que le lieu de l'émission se trouve situé en Europe ou hors d'Europe.

Pour l'application de l'alinéa précédent, les chèques émis dans un pays riverain de la Méditerranée sont considérés comme émis en Europe.

Le point de départ des délais indiqués au deuxième alinéa est le jour porté sur le chèque comme date d'émission.

Doc. 8 : Article L. 131-35 du code monétaire et financier

Le tiré doit payer même après l'expiration du délai de présentation. Il doit aussi payer même si le chèque a été émis en violation de l'injonction prévue à l'article L. 131-73 ou de l'interdiction prévue au deuxième alinéa de l'article L. 163-6.

Il n'est admis d'opposition au paiement par chèque qu'en cas de perte, de vol ou d'utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur. Le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit.

Tout banquier doit informer par écrit les titulaires de compte des sanctions encourues en cas d'opposition fondée sur une autre cause que celles prévues au présent article.

Si, malgré cette défense, le tireur fait une opposition pour d'autres causes, le juge des référés, même dans le cas où une instance au principal est engagée, doit, sur la demande du porteur, ordonner la mainlevée de l'opposition.

Doc. 9 : Article L. 131-37 du code monétaire et financier

Le tiré peut exiger, en payant le chèque, qu'il lui soit remis acquitté par le porteur.

Le porteur ne peut pas refuser un paiement partiel.

Si la provision est inférieure au montant du chèque, le porteur a le droit d'exiger le paiement jusqu'à concurrence de la provision.

En cas de paiement partiel, le tiré peut exiger que mention de ce paiement soit faite sur le chèque et qu'une quittance lui en soit donnée.

Cette quittance, délivrée sur titre séparé, jouit, à l'égard du droit de timbre, de la même dispense que la quittance donnée sur le chèque lui-même.

Les paiements partiels sur le montant d'un chèque sont à la décharge des tireur et endosseurs.

Le porteur est tenu de faire protester le chèque pour le surplus.

Doc. 10 : Article L. 131-38 du code monétaire et financier

Celui qui paie un chèque sans opposition est présumé valablement libéré.

Le tiré qui paie un chèque endossable est obligé de vérifier la régularité de la suite des endossements, mais non la signature des endosseurs.

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Doc. 11 : Cass. com., 19 juin 2012, n° 11-17.061, Bull. civ., IV, n° 124 Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 17 février 2011), que, le 3 mars 2006, M. X..., gérant de la société le Bistrot des clercs (la société), a remis à l'encaissement sur le compte de la société dans les livres de la Banque populaire des Alpes (la banque) un chèque de 32 000 euros tiré par la société M.C développement dont M. X... était également le gérant ; que, le même jour, la banque a inscrit son montant sur un compte d'attente, après avoir été avisé qu'il était dépourvu de provision et a rejeté deux chèques émis par la société, dont le montant cumulé ajouté au découvert existant, excédait l'autorisation de découvert; que la banque ayant assigné la société en paiement du solde du compte courant, cette dernière, sans contester le montant réclamé, a reproché à celle-ci de lui avoir causé un préjudice en n'ayant pas inscrit le montant du chèque de 32 000 euros sur son compte courant ; Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts et de l'avoir condamnée à payer à la banque la somme de 31 525,08 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2006, alors, selon le moyen ; 1°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les parties s'accordaient sur le fait que le 3 mars 2006, le compte courant de la société présentait un solde débiteur autorisé, son montant étant de l'ordre de 43 334,74 euros pour une autorisation de 50 000 euros ; qu'en conséquence, si la banque n'avait pas refusé d'inscrire provisoirement le chèque de 32 000 euros au crédit de la société, les chèques émis par elle pour un montant cumulé de 31 681 euros auraient pu être payés ; que dès lors, en affirmant, pour rejeter le préjudice de perte de chance d'échapper aux pénalités, commissions et frais consécutifs au rejet du ou des chèques rejetés, que les deux chèques rejetés le 3 mars 2006 par la banque ne pouvaient qu'être rejetés, dans la mesure où il n'aurait été pas contesté qu'à cette date, l'autorisation de découvert était largement dépassée, la cour d'appel, qui a ignoré que les parties s'accordaient sur le fait que le 3 mars 2006 l'autorisation de découvert n'était pas dépassée, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ; 2°/ que le banquier qui reçoit un chèque à l'encaissement doit inscrire le montant de ce chèque au crédit du compte du remettant, quitte à exercer, en cas de non paiement pour défaut de provision, une action en remboursement contre son client ; qu'en conséquence, l'éventuelle absence de provision du chèque remis à l'encaissement n'interdit pas l'inscription du montant de ce chèque au crédit du compte du remettant et permet un éventuel décaissement de ce dernier correspondant au montant du chèque crédité ; que dès lors en affirmant, pour rejeter le préjudice de perte de chance d'échapper aux pénalités, commissions et frais consécutifs au rejet du ou des chèques rejetés, que le chèque de 32 000 euros ne pouvait en tout état de cause, faute de provision au 3 mars 2006, permettre le décaissement des sommes correspondant aux deux chèques rejetés, après avoir pourtant constaté que la banque avait manqué à ses obligations en n'inscrivant pas provisoirement le chèque de 32 000 euros sur le compte de la société, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé l'article L. 131-4 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1147 du code civil ; Mais attendu que le banquier, auquel un chèque est remis à l'encaissement, s'il ne procède pas à son inscription en compte immédiatement, a l'obligation d'en prévenir son client, faute de quoi il engagerait sa responsabilité, sauf stipulations contractuelles contraires ou circonstances particulières ; qu'après avoir rappelé que le gérant de la société avait remis, le 3 mars 2006, à l'encaissement un chèque d'un montant de 32 000 euros tiré sur une autre banque et que cette dernière avait répondu à la demande de la banque qu'il n'y avait pas de provision suffisante, de sorte que la banque a inscrit le montant du chèque, dans l'attente de son encaissement, sur un compte d'attente et rejeté les deux chèques émis par la société, l'arrêt retient que le chèque de 32 000 euros n'aurait pu, faute de provision au 3 mars 2006, permettre en tout état de cause le décaissement des sommes correspondant aux deux chèques rejetés ; qu'ayant ainsi fait ressortir que la faute de la banque ne pouvait être à l'origine du rejet des chèques et du préjudice en résultant, la cour d'appel, abstraction faite du grief de la première branche qui s'attaque à un motif surabondant, a légalement justifié sa décision; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

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Doc. 12 : Cass. com., 23 janvier 2007, n° 05-18.557, Bull. civ., IV, n° 6 Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 mai 2005), que le 4 mai 2001, le Crédit du Nord a porté au crédit du compte de sa cliente, la société Azur Micro, après l'avoir converti en francs, un chèque libellé en devises étrangères, d'un montant de 115 600 USD ou 847 436,62 francs, qui avait été tiré au bénéfice de celle-ci par une société américaine sur un compte ouvert à la Chase Manhattan Bank ; qu'ayant été informé que le chèque était frauduleux et ne serait pas payé, le Crédit du Nord a, le 24 mai 2001, contre-passé l'écriture précédente en tenant compte des variations de change intervenues entre-temps de sorte que le compte de la société Azur Micro a été débité d'un montant de 876 631,56 francs, soit une différence de 29 194,95 francs ; que celle-ci a d'abord contesté devoir supporter cette différence puis, considérant que le Crédit du Nord avait été bénéficiaire d'un endossement translatif, elle a aussi contesté le principe même de la contre-passation effectuée ; que la cour d'appel a rejeté cette seconde prétention en retenant que l'opération de crédit ayant été inscrite au crédit du compte de la société Azur Micro "sauf bonne fin" et rien ne permettant de retenir qu'il y avait eu escompte du chèque, il devait en être déduit que l'endossement avait été donné à titre de procuration mais accueilli la première en considérant qu'avant de porter le montant du chèque au crédit du compte de sa cliente, le Crédit du Nord aurait dû l'informer du risque de change et lui offrir le choix d'un crédit après encaissement et qu'en s'en abstenant, il avait fait perdre à celle-ci une chance d'éviter la perte ; Sur le premier moyen du pourvoi principal après avertissement délivré aux parties : Attendu que la société Azur Micro fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en paiement du montant du chèque en garantissant l'éventuelle différence de change, alors, selon le moyen : 1°/ qu'en l'absence de toute indication sur la nature de l'endossement, celui-ci est présumé translatif de propriété ; qu'en affirmant en l'espèce que le chèque litigieux avait été endossé par le Crédit du Nord à titre de procuration, sans retenir d'élément permettant de caractériser un tel endossement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 131-19, L. 131-20 et L. 131-26 du code monétaire et financier ; 2°/ que la clause qui n'a pas été acceptée par une partie au contrat ne lui est pas opposable ; qu'en considérant que le chèque litigieux avait été inscrit au crédit de son compte "sauf bonne fin", sans rechercher si elle avait bien accepté cette clause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1101 du code civil ; Mais attendu qu'en l'absence de faute de sa part, la banque a toujours, et quelle que soit la nature de l'endossement lui ayant bénéficié, le droit de se faire rembourser par le bénéficiaire de chèques, qui se sont révélés ensuite sans provision, le montant des avances qu'elle lui avait accordées lors de leur remise dans l'attente de leur encaissement ; que par ce seul motif substitué à ceux critiqués par le moyen, l'arrêt se trouve ainsi justifié ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Sur le second moyen du pourvoi principal : Attendu que la société Azur Micro fait encore grief à l'arrêt d'avoir indemnisé la perte de change subie du fait de l'encaissement immédiat du chèque au titre d'une simple perte de chance, alors, selon le moyen, qu'il appartient au professionnel auquel il est reproché d'avoir manqué à son obligation d'information en privant son client d'une faculté de choisir de prouver que, l'information aurait-elle été fournie, le client aurait agi de la même façon ; qu'en la déboutant de sa demande en remboursement par le Crédit du Nord de la perte de change subie du fait de l'encaissement immédiat du chèque, bien que ce professionnel n'ait pas établi que s'il l'avait consultée sur la date à laquelle son compte devait être crédité du chèque litigieux, elle n'aurait pas opté pour la formule de crédit après encaissement, ce qui seul aurait pu permettre au professionnel de s'exonérer de sa responsabilité, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ; Mais attendu que la société Azur Micro n'ayant pas, ainsi qu'elle en avait la charge, établi que si elle avait reçu l'information qui lui avait fait défaut, elle aurait à coup sûr choisi de renoncer à l'avance consentie par le Crédit du Nord, la cour d'appel qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a exactement décidé que l'intéressée pouvait seulement se prévaloir d'une perte de chance d'éviter la perte subie ; que le moyen n'est pas fondé ;

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[…] PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

Doc.13 : Cass. com., 27 novembre 2012, n° 11-19.864, Bull. civ., IV, n° 212

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Patrick X... a donné procuration sur son compte dans les livres

de la caisse régionale de crédit agricole mutuel Sud Rhône Alpes (la caisse) à M. Daniel X... ; que ce

dernier a, le 25 février 2009, présenté à l'encaissement un chèque de 320 000 euros daté du 14 avril

2008, tiré sur ce compte qui a été rejeté à la suite d'une opposition de la part du titulaire du compte ;

que M. Daniel X..., en sa qualité de porteur, a assigné, le 12 mars 2009, la caisse et M. Patrick X... en

référé à l'effet d'obtenir la mainlevée de cette opposition ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche et les deuxième et troisième moyens réunis :

Attendu que ces griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 131-59, alinéa 2 in fine, du code monétaire et financier ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que le bénéficiaire d'un chèque peut agir en mainlevée de l'opposition

tant que celle-ci garde effet, jusqu'à la prescription de l'action contre le tiré ;

Attendu que, pour dire la demande de M. Daniel X... tendant à la mainlevée de l'opposition formée

par M. Patrick X... au paiement du chèque émis le 14 avril 2008 sans objet, la cour d'appel a retenu

que, par application de l'article L. 131-59 du code monétaire et financier, le chèque était périmé

depuis le 14 avril 2009 de sorte que la demande de mainlevée de l'opposition était devenue sans objet

le 24 avril 2009 ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'assignation en mainlevée d'opposition avait interrompu la

prescription de l'action contre le tiré, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

Doc. 14 : K. Rodriguez, « Responsabilité du banquier et paiement d’un chèque falsifié » LPA 9 novembre 2012, p. 4 Parce qu'il doit vérifier la régularité formelle du titre, le tiré qui paie un chèque faux ou falsifié engage sa responsabilité. Mais s'agit-il d'une responsabilité pour faute ou d'une responsabilité de plein droit ? La réponse à cette question résulte d'une construction jurisprudentielle qui n'est certes pas nouvelle mais que la jurisprudence a pris le soin d'affiner ces deux dernières années. Rappelons qu'il faut distinguer deux situations. Si le titre est faux dès l'origine parce qu'il est signé par celui qui a détourné une formule de chèque, le tiré qui paie n'est pas libéré à l'égard du tireur. Le titre dépourvu de la signature du titulaire n'est pas un véritable chèque, le tiré ne paie pas un créancier et, conformément à l'article 1937 du Code civil, il n'est pas libéré. Le banquier reste tenu de restituer les fonds à son client sur le fondement du contrat de dépôt. En revanche, la preuve de la faute ou de la négligence du client l'exonère. La jurisprudence récente précise d'ailleurs que si cette

faute est caractérisée par le retard dans la consultation des comptes (1) ou par la mise à disposition d'un tiers des formules de chèque et l'absence consécutive de contestation lors de la réception des

relevés de comptes (2), elle ne l'est pas par le fait de laisser un proche accéder au carnet de chèque

(3). Bien entendu, si l'établissement du faux a été rendu possible à la suite d'une faute du titulaire du compte, le banquier n'est tenu envers lui que s'il a lui-même commis une négligence en ne décelant pas une signature apparemment différente du titulaire du compte, et ce, seulement pour la part de responsabilité en découlant. Si le titre est falsifié après son émission, c'est-à-dire signé par le véritable titulaire du chèque dont un élément a par la suite été frauduleusement modifié (montant, bénéficiaire...), seul le banquier qui paie malgré une irrégularité apparente est responsable envers le

titulaire du compte débité, y compris si l'irrégularité concerne l'endos du chèque (4). Le banquier

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peut malgré tout s'exonérer partiellement en invoquant la faute de son client qui a favorisé la fraude, la non-surveillance de ses chéquiers par exemple. Ce schéma bien assis en jurisprudence s'est récemment affiné dans l'hypothèse d'une anomalie intellectuelle du chèque. L'anomalie intellectuelle se distingue de l'anomalie matérielle du chèque en ce sens qu'elle ne se voit pas en raison de l'absence d'altération grossière du titre. Elle découle du contexte qui entoure l'utilisation du chèque qui s'avère être suspect, par exemple parce que le montant du chèque est anormal, ou bien parce que la fréquence de l'émission de chèques est anormale, tout cela étant apprécié au regard des habitudes du client et des caractéristiques de son compte. En l'absence d'anomalie matérielle, l'anomalie intellectuelle permet-elle d'engager la responsabilité du banquier tiré ? Un arrêt important de la chambre commerciale de la Cour de

cassation pose les jalons en la matière (5). En l'espèce, le banquier avait payé un chèque falsifié de manière extrêmement subtile alors qu'il augmentait le débit du compte au-delà du découvert autorisé, ce qui aurait dû, selon le titulaire du compte, éveiller les soupçons du banquier. La Cour de cassation rejette la demande de responsabilité : lorsqu'il n'existe pas de provision préalable suffisante, le banquier, en passant au débit du compte de son client un chèque émis par ce dernier et présentant toutes les apparences de régularité, lui consent une facilité de caisse. Les enseignements de l'arrêt sont triples. D'abord, d'une manière générale, l'arrêt nous rappelle implicitement que le principe de non-ingérence du banquier doit constituer un bouclier de protection efficace pour le banquier. En effet, si la banque doit relever les grosses anomalies conformément à son devoir de vigilance, elle ne doit pas pour autant s'immiscer dans les affaires de son client et relever la cause et l'opportunité de l'émission des chèques. Ainsi, en l'absence d'anomalie apparente du chèque, la jurisprudence doit être moins sévère à l'égard des banquiers tirés. Ensuite, et sans doute est-ce la résultante de ce qui vient d'être dit, le fondement avancé par la Cour de cassation pour rejeter la faute du banquier, la théorie des facilités de caisse, est particulièrement protecteur du tiré. En effet, dans des circonstances assez proches, la Cour de cassation avait déjà eu l'occasion de préciser que le tiré engageait sa responsabilité quand le dépassement du crédit disponible en compte pouvait être considéré comme une anomalie du fait qu'aucune convention de crédit, même tacite,

n'avait été conclue (6). En l'espèce, c'est l'existence d'une convention de crédit, y compris tacite, qui protégeait le banquier tiré. En recourant à la théorie des facilités de caisse dans son arrêt du 30 mars 2010, la Cour de cassation semble protéger davantage encore le banquier car la notion de facilités de caisse recouvre en principe, non seulement, la convention de crédit tacite, mais également, tout découvert ponctuel destiné à aider le client, sans engagement de renouvellement par la banque, et sans exigence de pratique antérieure du banquier prouvant tacitement son intention de faire crédit. Enfin, l'arrêt précise que la solution serait autre si l'importance du découvert devait alerter la banque et l'inciter à contacter le client. Ce n'est pas l'existence même d'un dépassement de découvert autorisé qui est sanctionnée mais l'importance suspecte du déficit atteint. Pour engager la responsabilité du tiré, le tireur devra donc démontrer l'importance notable du dépassement du découvert autorisé, et vraisemblablement son caractère exceptionnel. Autrement dit, pour revenir à notre question initiale, en l'absence d'anomalie matérielle, l'anomalie intellectuelle permet de retenir une faute à la charge du banquier qui engage sa responsabilité. Mais encore faut-il qu'elle soit véritablement caractérisée. Et en raison du principe de non-ingérence du banquier, la jurisprudence sera sans aucun doute plus tolérante envers le banquier en présence d'une anomalie intellectuelle qu'en présence d'une anomalie matérielle. Notamment, elle ne saurait se contenter du simple dépassement de découvert comme en l'espèce.

(1) Cass. com., 15 févr. 2011 : JCP E 1394, § 42. (2) Cass. com., 16 nov. 2010 : Gaz. Pal. 26 févr. 2011, p. 21 et s., obs. A.-C. Rouaut. (3) Cass. com., 3 nov. 2010 : JCP E 2011, 1394, § 40, C. Langlais-Lassalas ; RD bancaire et fin. 2011, no 39, F. Crédot et T. Samin ; RD bancaire et fin. 2011, no 39, F. Crédot et T. Samin. (4) Cass. com., 26 janv. 2010 : RD bancaire et fin. juill. 2010, p. 52, obs. F. Crédot et T. Samin – Cass. com., 16 mars 2010, no 09-11734.

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(5) Cass. com., 30 mars 2010, no 09-65949, Patrick Richard Vollailles c/ Caisse de Crédit Mutuel de Craon et Craonnais : D. 2010, jur. p. 1013, X. Delpech – Cass. com., 30 mars 2010 : JCP E 2010, 1739, K. Rodriguez ; D. 2010, p. 1527, J. Lasserre-Capdeville ; RD bancaire et fin., juill.-août, 2010, p. 53, F. Crédot et T. Samin. (6) Pour un chèque faux : Cass. com., 5 déc. 2000, no 2000-007225 : RTD com. 2001, p. 200 ; pour un chèque falsifié : Cass. com., 4 mars 2008, Juris-Data no 2008-043054 : RD bancaire et fin. 2008, no 98.

Doc. 15 : Cass. com., 16 mars 2010, n° 09-11.734 Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche : Vu l'article 1147 du code civil, ensemble l'article 1937 du code civil ; Attendu qu'il résulte de ces textes que constitue un paiement libératoire le paiement effectué par le banquier tiré sur présentation d'un chèque émis par son client, ne présentant aucune anomalie apparente ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la SCI Dolphi (la SCI) a émis, le 14 janvier 2005, un chèque tiré sur son compte ouvert dans les livres du Crédit du Nord (la banque), au profit de la société Piscines Caron ; que ce chèque, présenté au paiement par la société Azur piscines, qui l'a complété en ajoutant la mention Azur piscines, a été payé par la banque ; que reprochant à cette dernière d'avoir procédé à un paiement irrégulier, la SCI l'a assignée en responsabilité ; Attendu que pour condamner la banque à restituer à la SCI la somme de 15 756,62 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2005, l'arrêt retient que le banquier tiré, dépositaire des fonds que lui a remis son client, est soumis aux obligations de l'article 1937 du code civil relatives au contrat de dépôt, qu'il doit notamment s'assurer qu'il se dessaisit des fonds sur ordre de son client et au profit de la personne que celui-ci a désignée et que cette obligation légale constitue une obligation de résultat, de sorte que la responsabilité du banquier est engagée dès lors que le résultat auquel il est tenu n'est pas atteint et ce quand bien même aucune faute ne serait relevée à son encontre ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu que la banque n'avait commis aucune faute dans l'exécution de son devoir de contrôle, le rajout de la mention ne constituant pas une anomalie qu'un employé normalement avisé aurait dû déceler en procédant à la vérification de la régularité apparente du chèque, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions.

Doc. 16 : Cass. com., 28 janvier 2014, n° 12-27.901 Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après la mise en redressement puis liquidation judiciaires de la société Les Docks de l'électroménager (la société) en 2004 et 2005, M. X..., son gérant et associé, a, en 2008, assigné la Société générale (la banque) en paiement d'une certaine somme à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice personnel causé par le paiement de nombreux chèques frauduleusement établis par la comptable de la société en imitant sa signature ; Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche : Vu les articles 1147 et 1937 du code civil ; Attendu que, pour rejeter la demande de M. X..., l'arrêt, après avoir relevé que la banque avait commis une négligence en considérant comme authentiques des chèques falsifiés, retient que M. X..., tenu en sa qualité de gérant de la société de vérifier les agissements de sa comptable, lui avait laissé

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une trop grande latitude d'action, allant jusqu'à l'autoriser à signer des chèques en imitant sa signature, et que cette dernière négligence exonère la banque de sa responsabilité ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi la faute commise par le titulaire du compte constituait la cause exclusive du dommage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; (…) PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions.

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Séance n° 7 LES INSTRUMENTS DE PAIEMENT : les paiements bancaires

dématérialisés (II)

LES NOTIONS ESSENTIELLES

Revoir les notions suivantes : opérations de paiement, autorisation, exécution et contestation de l’ordre de paiement (virement, carte bancaire), bitcoins

LE VIREMENT BANCAIRE

Doc. 1 : Article L. 133-6 du code monétaire et financier Doc. 2 : Article L. 133-7 du code monétaire et financier Doc. 3 : Article L.133-8 du code monétaire et financier Doc. 4 : Cass. com., 19 décembre 2000, n° 97-15.394, Bull. civ., IV, n° 193 ; D. Aff. 2001, p. 920, V. Avena-Robardet ; RTD com. 2001, p. 749, M. Cabrillac Doc. 5 : Cass. com., 14 mars 2006, n° 04-16.946, Bull. civ., IV, n° 64 ; D. 2006, p. 979 Doc. 6 : Cass. com., 16 septembre 2008, n° 07-14.822 LA CARTE BANCAIRE

Doc. 7: Cass. com., 2 octobre 2007, n° 05-19.899, Bull. civ., IV, n° 208 Doc. 8 : Cass com., 16 octobre 2012, n° 11-19.981, Bull. civ., IV, n° 183 ; D. 2012, n° 38, p. 2508, X. Delpech; JCP G n° 46, 2012, 1242 p. 2042, K. Rodriguez ; JCP E n° 46, 2012, 1680, S. Piédelièvre ; Gaz. Pal. 102-103/2013, p. 17, A.C. Rouaud ; Banque & Droit 1/2013, p. 21, T. Doc. 9 : Cass. com., 27 mars 2012, n° 11-11.275, Bull. civ., IV, n° 65 ; Gaz. Pal. 153-154, 1-2 juin 2012, p. 24, A.C. Rouaud ; D. 2012, p. 944, X. Delpech LES BITCOINS

Doc. 10 : CJUE, 22 oct. 2015, no C-264/14, Skatteverket c/ David Hedqvist, RDC 2017, n° 1, p. 54, J. Huet

EXERCICE

Commenter l’arrêt reproduit dans le doc. 6 : Cass. com., 16 septembre 2008, n° 07-14.822

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LE VIREMENT BANCAIRE

Doc. 1 : Article L. 133-6 du code monétaire et financier

I. – Une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution.

Toutefois, le payeur et son prestataire de services de paiement peuvent convenir que le payeur pourra donner son consentement à l'opération de paiement après l'exécution de cette dernière.

II. – Une série d'opérations de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à l'exécution de la série d'opérations.

Doc. 2 : Article L. 133-7 du code monétaire et financier

Le consentement est donné sous la forme convenue entre le payeur et son prestataire de services de paiement.

En l'absence d'un tel consentement, l'opération ou la série d'opérations de paiement est réputée non autorisée.

Le consentement peut être retiré par le payeur tant que l'ordre de paiement n'a pas acquis un caractère d'irrévocabilité conformément aux dispositions de l'article L. 133-8.

Le consentement à l'exécution d'une série d'opérations de paiement peut être retiré, avec pour effet que toute opération postérieure est réputée non autorisée.

Doc. 3 : Article L.133-8 du code monétaire et financier

I. – L'utilisateur de services de paiement ne peut révoquer un ordre de paiement une fois qu'il a été reçu par le prestataire de services de paiement du payeur sauf disposition contraire du présent article.

II. – Lorsque l'opération de paiement est ordonnée par le bénéficiaire ou par le payeur qui donne un ordre de paiement par l'intermédiaire du bénéficiaire, le payeur ne peut révoquer l'ordre de paiement qu'avant d'avoir transmis l'ordre de paiement au bénéficiaire ou donné son consentement à l'exécution de l'opération de paiement au bénéficiaire.

Toutefois, en cas de prélèvement et sans préjudice du droit à remboursement mentionné à l'article L. 133-25, le payeur peut révoquer l'ordre de paiement au plus tard à la fin du jour ouvrable précédant le jour convenu pour le débit des fonds.

III. – Dans le cas où il a été convenu entre l'utilisateur qui a ordonné l'opération de paiement et son prestataire de services de paiement que l'exécution de l'ordre de paiement commencera un jour donné ou à l'issue d'une période déterminée ou le jour où le payeur aura mis les fonds à la disposition de son prestataire de services de paiement, l'utilisateur de services de paiement peut révoquer l'ordre de paiement au plus tard à la fin du jour ouvrable précédant le jour convenu ;

IV. – A l'expiration des délais mentionnés aux I, II et III, l'ordre de paiement ne peut être révoqué que si l'utilisateur de services de paiement et son prestataire de services de paiement en sont convenus. Dans les cas mentionnés au II, le consentement du bénéficiaire est également requis. Si la convention de compte de dépôt ou le contrat-cadre de services de paiement le prévoit, le prestataire de services de paiement peut imputer des frais pour la révocation.

Doc. 4 : Cass. com., 19 décembre 2000, n° 97-15.394, Bull. civ., IV, n° 193

Attendu, selon l'arrêt confirmatif critiqué, que, par erreur, la société de droit suisse Swatch AG (société Swatch) a viré, le 29 novembre 1993, une somme de 3 000 000 francs sur le compte courant ouvert dans les livres de la société Compagnie financière Edmond de Rothschild banque SA (la banque), au nom de la société Compagnie internationale de concerts et spectacles (société CICS) qui a été déclarée peu après en liquidation judiciaire ; que par suite de ce virement porté en crédit le 2 décembre 1993, le solde débiteur du compte, sur lequel la société CICS avait bénéficié, jusqu'au 30 novembre 1993, d'une autorisation de découvert de 3 000 000 francs et qui s'établissait à cette date à

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la somme de 3 178 551,35 francs, a été réduit ; qu'à la demande de la société Swatch, la société CICS puis son liquidateur ont donné, les 30 décembre 1993 et 28 janvier 1994, l'ordre à la banque de restituer les fonds ; que celle-ci a refusé en faisant valoir que le solde débiteur du compte ne le lui permettait pas ; que la société Swatch a assigné la banque en responsabilité ; Sur le premier moyen : (Publication sans intérêt) ; Mais sur le moyen relevé d'office, après avertissement donné aux parties : Vu l'article 1382 du Code civil ; Attendu qu'un établissement de crédit n'est tenu d'exécuter un ordre de virement, ne serait-ce qu'en vue de la restitution de fonds indûment perçus par son client, que si à la date de cet ordre, il existait sur le compte des fonds disponibles, soit en raison de l'état créditeur du compte, soit en raison de l'existence d'un découvert autorisé ; Attendu que pour condamner la banque à restituer la somme litigieuse de 3 000 000 francs, l'arrêt retient que celle-ci est mal fondée à prétendre qu'il lui était impossible de procéder à la restitution sollicitée en raison de la situation déficitaire du compte de la société CICS, alors qu'elle n'ignorait pas qu'aucune somme n'était plus due par la société Swatch à la société CICS au titre du contrat de partenariat et qu'en réalité elle avait voulu profiter de l'erreur commise pour réduire de 3 000 000 francs le solde débiteur du compte de sa cliente ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, à la date où l'ordre de restitution des fonds a été donné, il existait des fonds disponibles sur le compte de la société CICS, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions…

Doc. 5 : Cass. com., 16 septembre 2008, n° 07-14.822, Bull. civ., IV, n° 64

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a émis un chèque de 1 107 euros le 24 janvier 2002 alors que son compte ouvert à La Poste, assorti d'une autorisation de découvert de 200 euros, n'était créditeur que de 429,79 euros ; que par courrier du 28 janvier suivant adressé tant à son conseiller financier qu'au centre financier de La Poste, M. X... a demandé que lui soit accordé un découvert ponctuel ou, qu'à défaut, soient transférées les sommes figurant sur ses comptes d'épargne CEL ou PEL ou livret au crédit de son compte ; que le chèque litigieux a été rejeté le 6 février pour insuffisance de provision, ce dont M. X... a été avisé le 11 février suivant ; qu'il lui a été alors signifié une interdiction bancaire ; que le transfert des comptes d'épargne au crédit du compte est intervenu le 20 février suivant ce qui a conduit à la levée ultérieure de l'interdiction ; que M. X... a alors recherché la responsabilité de La Poste pour ne pas l'avoir informé préalablement des conséquences du défaut de provision et pour avoir tardivement transféré les fonds provenant de son épargne sur son compte ; que la cour d'appel a retenu une faute tant à l'encontre de M. X... que de La Poste et dit que celles-ci avaient concouru chacune pour moitié à la production du dommage ; Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche : Vu l'article L. 131- 73 du Code monétaire et financier ; Attendu que pour écarter toute responsabilité de La Poste au regard de son devoir d'information préalable et limiter à la somme de 1 000 euros les dommages-intérêts alloués à M. X..., l'arrêt retient que La Poste avait respecté son obligation pour lui avoir adressé lors de l'ouverture du compte le 18 juin 2001 un courrier l'informant des conditions générales de son autorisation de découvert et des conséquences attachées à son non respect ;

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Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que La Poste n'avait pas adressé à M. X..., avant le rejet du chèque litigieux, un avertissement précis à ce sujet, ce dont il résultait que le tiré n'avait pas satisfait à ses obligations d'information, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Sur le premier moyen pris en sa troisième branche : Vu l'article L. 131-73 du Code monétaire et financier ; Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient que M. X... ne pouvait reprocher à La Poste de ne pas l'avoir averti préalablement des conséquences de l'émission du chèque sans provision au motif qu'il l'avait prévenue, dans les jours qui ont suivi l'émission de ce chèque, et ne pouvait ainsi en ignorer les conséquences ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en toute circonstance, et quelle que soit la connaissance éventuelle par le client de l'insuffisance de provision du chèque qu'il se propose d'émettre et de ses conséquences juridiques, le banquier doit se conformer aux dispositions du texte susvisé lui imposant, avant le rejet d'un chèque, d'adresser à son client un avertissement précis à son sujet, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Et sur le second moyen, pris en sa seconde branche : Vu l'article 1147 du Code civil ; Attendu que pour limiter comme il fait la responsabilité de La Poste du fait de l'exécution tardive du virement, l'arrêt retient que M. X... a lui-même commis une faute en émettant un chèque qu'il savait sans provision ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la provision sur le compte de celui-ci au jour de la présentation du chèque litigieux aurait été suffisante si La Poste n'avait pas tardé à effectuer sur son compte les transferts demandés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE…

Doc. 6 : Cass. com., 16 septembre 2008, n° 07-14.822 Vu l'article 1937 du code civil ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 4 décembre 2002, la caisse régionale du crédit agricole mutuel centre Est (la caisse) a reçu une télécopie portant une signature manuscrite indiquée comme étant celle de l'un de ses clients, M. X..., lui demandant de procéder au rachat total de son épargne assurance et de son épargne PEL et d'en virer le montant à M. Y... dans une banque anglaise située à Londres ; que le 18 décembre 2002, une nouvelle télécopie a été adressée à la caisse, demandant de procéder à un virement de la somme de 50 000 euros par le rachat total du compte titres, au profit du même bénéficiaire ; que M. X... a, par télécopie du 31 décembre 2002,contesté toutes les opérations ainsi effectuées sur son compte et soutenant qu'il n'avait jamais donné son accord, a assigné la caisse ; Attendu que, pour confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de M. X..., l'arrêt retient que si l'expert a indiqué que les caractéristiques générales de l'écriture et des signatures apposées sur les télécopies se retrouvent dans l'écriture et la signature de M. X..., ce n'est qu'au terme de son étude menée avec les connaissances et les moyens dont dispose un expert en écritures, qu'il arrive à la conclusion, assortie expressément de réserves, selon laquelle l'écriture et les signatures figurant sur les pièces contestées ne sont pas de la main de M. X... ; qu'il retient encore qu'aucune dissemblance flagrante quant à l'écriture et la signature ne permettait de rendre le banquier soupçonneux, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a constaté qu'aucune faute de la caisse n'était établie et que le préjudice subi par M. X... ne pouvait lui être imputé ;

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Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartient au banquier, dépositaire des fonds que lui a confiés son client et qui, à ce titre, a l'obligation de ne les restituer qu'à celui qui les lui a confiés ou, conformément aux indications de paiement de ce dernier, d'établir, en cas de contestation, qu'il a reçu du déposant l'ordre d'effectuer le virement contesté, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE…

LA CARTE BANCAIRE

Doc. 7 : Cass. com., 2 octobre 2007, n°05-19.899, Bull. civ., IV, n° 208 Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Roanne, 5 juillet 2005) rendu en dernier ressort, que Mme X... était titulaire d'un compte à La Poste, aux droits de laquelle est venue la Banque postale (la banque) et d'une carte de paiement ; que le 10 avril 2004, elle a fait opposition à l'utilisation de sa carte déclarée perdue le 9 avril 2004 ; qu'une certaine somme a néanmoins été dépensée avant la mise en opposition ; que la banque ayant constaté que toutes les opérations effectuées avaient été réalisées avec contrôle du code confidentiel en a déduit la négligence de sa cliente et lui a alors imputé la totalité des prélèvements opérés avant opposition ; que Mme X... a assigné la banque en restitution des sommes ainsi portées au débit de son compte ; Attendu que la banque fait grief au jugement de l'avoir condamnée au remboursement de la somme de 2 742,42 euros, alors, selon le moyen : 1°/ que Mme X... s'était engagée contractuellement à assurer la conservation de sa carte ainsi que la conservation et la confidentialité de son code ; que suite à la perte de sa carte et à son utilisation avec composition du code confidentiel, il appartenait à Mme X... d'établir qu'elle n'avait pas commis de faute lourde ; qu'en mettant à la charge de la banque, l'obligation de prouver que Mme X... avait été négligente dans la protection de son code confidentiel, le tribunal a violé les articles 1134, 1147 et 1315 du code civil, ensemble l'article L. 132-3 du code monétaire et financier ; 2°/ que le tribunal s'est borné à relever que l'actualité récente faisait état de plusieurs cas dans lesquels des malfaiteurs étaient parvenus à s'approprier des codes confidentiels de cartes bancaires sans pour autant bénéficier de la négligence voire de la complicité du titulaire de ladite carte ; qu'en l'état de ces seules énonciations par lesquelles il n'a pas caractérisé, autrement que par un motif d'ordre général et abstrait, l'absence de négligence de Mme X..., le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, ensemble l'article L. 132-3 du code monétaire et financier ; Mais attendu qu'en cas de perte ou vol d'une carte bancaire, il appartient à l'émetteur de la carte qui se prévaut d'une faute lourde de son titulaire, au sens de l'article L. 132-3 du code monétaire et financier, d'en rapporter la preuve ; que la circonstance que la carte ait été utilisée par un tiers avec composition du code confidentiel est, à elle seule, insusceptible de constituer la preuve d'une telle faute ; Attendu qu'en retenant que la banque était défaillante dans l'établissement de la faute lourde alléguée à l'encontre de Mme X..., le tribunal, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut-être accueilli ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 8 : Cass com., 16 octobre 2012, n° 11-19.981, Bull. civ., IV, n° 183

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 16 décembre 2010 rectifié le 15 février 2011), que le 20 mai 2007, M. X... a constaté la disparition de la carte de retrait que la Banque de Nouvelle-Calédonie (la

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banque) avait mis à sa disposition avec un code confidentiel ; que le 21 mai 2007, recevant un relevé mentionnant dix-neuf retraits frauduleux entre le 7 et le 21 mai 2007 sur le compte ouvert avec son épouse, M. X... a formé opposition ; que M. et Mme X... ont ultérieurement assigné la banque en remboursement et en paiement de dommages-intérêts ; Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande de condamnation de la banque à leur rembourser 1 260 000 FCFP correspondant aux retraits bancaires frauduleux effectués entre le 7 mai et le 21 mai 2007 et à leur payer 300 000 FCFP à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral, alors, selon le moyen : 1°/ qu'en cas de perte ou de vol, le titulaire d'une carte de paiement ne supporte la perte subie avant la mise en opposition, au-delà de la limite du plafond de 150 euros, que s'il a agi avec une négligence constituant une faute lourde ou si, après la perte ou le vol de ladite carte, il n'a pas effectué la mise en opposition dans les meilleurs délais, compte tenu de ses habitudes d'utilisation de la carte ; qu'en décidant néanmoins que M. X... devait supporter la totalité des retraits bancaires frauduleux qui avaient été effectués avant opposition, motif pris qu'il avait commis une faute grave en conservant sa carte bancaire et son code confidentiel dans la boîte à gants de son véhicule, bien que seule une faute lourde ou une opposition tardive aient été de nature à lui faire supporter les pertes qu'il avait subies au-delà du plafond légal de 150 euros, la cour d'appel a violé l'article L. 132-3 ancien du code monétaire et financier ; 2°/ que le banquier est tenu à un devoir de vigilance permanent, de sorte qu'il lui appartient de procéder aux vérifications nécessaires lorsqu'il constate qu'une opération présente une anomalie apparente ou qu'il suspecte une fraude ou une malversation au préjudice de son client ; qu'en décidant néanmoins que la banque n'avait pas commis de faute en ne procédant à aucune vérification consécutivement aux dix-neuf retraits d'espèces effectués entre le 7 mai et le 21 mai 2007 pour un montant total de 1 260 000 FCFP, au moyen d'une carte de paiement qui n'avait été jusqu'alors utilisée que pour procéder à huit retraits étalés sur une période de neuf mois pour un montant de 24 000 FCPF, motif pris que le compte bancaire de M. et Mme X... était largement créditeur et connaissait de nombreux mouvements, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à établir le caractère non apparent des anomalies présentées par les retraits effectués, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ; 3°/ que seule la force majeure et la faute intentionnelle ou exclusive de la victime dans la survenance de son préjudice entraînent une exonération totale de responsabilité du débiteur ; qu'en écartant la responsabilité de la banque, motif pris que M. X... avait commis une faute grave qui était à l'origine de son préjudice, bien que seules la force majeure ou une faute intentionnelle ou exclusive de la victime aient été de nature à exclure un partage de responsabilité, la cour d'appel, qui a exonéré la banque de sa responsabilité au titre de son devoir de vigilance, sans caractériser les éléments constitutifs de la force majeure ni une faute intentionnelle ou exclusive de M. X... dans la survenance de son préjudice, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ; Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que M. X... avait indiqué aux services de police, en déclarant le vol de sa carte, qu'il avait laissé comme d'habitude cette carte dans son véhicule et son code confidentiel dans la boîte à gants, l'arrêt retient qu'il résulte de son propre aveu qu'il a commis une imprudence grave en laissant son code personnel à proximité de sa carte de retrait dans un lieu sans surveillance ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a fait ressortir que M. X... avait agi avec une imprudence constituant une faute lourde ; Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que le compte était largement créditeur et que l'anomalie ne pouvait être caractérisée d'apparente, s'agissant d'un compte d'entrepreneur aux nombreux mouvements, la cour d'appel, qui a fait ressortir l'absence d'anomalies apparentes, dans le fonctionnement du compte, a légalement justifié sa décision ; Attendu, enfin, que le rejet de l'action en responsabilité dirigée contre la banque rend sans objet le grief de la troisième branche ;

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D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 9 : Cass. com., 27 mars 2012, n° 11-11.275, Bull. civ., IV, n° 65

Vu l'article 1134 du code civil ; Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que M. X..., titulaire d'un compte ouvert dans les livres du Crédit industriel et commercial (la banque), et détenteur d'une carte de crédit, s'est connecté le 7 juin 2009 sur le site internet "MusicMe" pour y faire, selon ses déclarations, l'achat d'un titre unique de musique au prix de 0,99 euro ; qu'il a reçu à l'issue de cet achat un message électronique de confirmation lui indiquant "confirmation de votre abonnement sur MusicMe" au prix de 9,99 euros par mois ; qu'à réception de son relevé bancaire mensuel mentionnant un prélèvement de 9,99 euros effectué le 8 juillet 2009, M. X... a adressé le 11 juillet 2009 un courrier électronique à la banque, demandant l'annulation de l'opération et qu'il soit mis fin à l'abonnement ; que, les prélèvements s'étant poursuivis, M. X... a recherché la responsabilité de la banque ; Attendu que pour débouter M. X... de ses demandes, le jugement retient que, s'il est pas contestable que M. X... pensait avoir acheté un titre unique de musique, et en avoir réglé le prix, il résulte des pièces produites par les parties, notamment les conditions générales de souscription à MusicMe, que l'achat isolé d'un titre de musique n'était pas envisageable, cet achat s'inscrivant dans une formule à la carte qui obligeait nécessairement l'acheteur à commander d'autres titres jusqu'au plafond de la formule choisie ; qu'il relève encore que M. X... s'est manifestement trompé et qu'il ne peut contester a posteriori son engagement de paiement, qui est irrévocable ; Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher, dès lors qu'elle avait relevé que la carte avait été utilisée pour souscrire un abonnement payable mensuellement, si la contestation formulée par le titulaire de la carte ne valait pas révocation pour l'avenir du mandat ainsi donné, la juridiction de proximité n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE.

LES BITCOINS

Doc. 10 : CJUE, 22 oct. 2015, no C-264/14, Skatteverket c/ David Hedqvist

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

22 octobre 2015 (*)

«Renvoi préjudiciel – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Articles 2, paragraphe 1, sous c), et 135, paragraphe 1, sous d) à f) –

Services à titre onéreux – Opérations de change de la devise virtuelle ‘bitcoin’ contre des devises traditionnelles – Exonération»

Dans l’affaire C-264/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Högsta förvaltningsdomstolen (Cour administrative suprême, Suède), par décision du 27 mai 2014, parvenue à la Cour le 2 juin 2014, dans la procédure

Skatteverket

contre

David Hedqvist,

LA COUR (cinquième chambre),

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composée de M. T. von Danwitz, président de la quatrième chambre, faisant fonction de président de la cinquième chambre, MM. D. Šváby, A. Rosas (rapporteur), E. Juhász et C. Vajda, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 juin 2015,

considérant les observations présentées:

– pour le Skatteverket, par M. M. Loeb, en qualité de conseiller juridique,

– pour M. Hedqvist, par Me A. Erasmie, advokat, et M. F. Berndt, jur. kand.,

– pour le gouvernement suédois, par Mme A. Falk et M. E. Karlsson, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement allemand, par M. T. Henze et Mme K. Petersen, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement estonien, par Mme K. Kraavi-Käerdi, en qualité d’agent,

– pour la Commission européenne, par Mmes L. Lozano Palacios et M. Owsiany-Hornung ainsi que par MM. K. Simonsson et J. Enegren, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 juillet 2015,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 2, paragraphe 1, et 135, paragraphe 1, de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347, p. 1, ci-après la «directive TVA»).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Skatteverket (administration fiscale suédoise) à M. Hedqvist, au sujet d’un avis préalable donné par la commission de droit fiscal (Skatterättsnämnden) sur la soumission à la taxe sur la valeur ajoutée des opérations de change de devises traditionnelles contre la devise virtuelle «bitcoin», ou inversement, que M. Hedqvist souhaite effectuer par l’entremise d’une société.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3 Aux termes de l’article 2 de la directive TVA:

«1. Sont soumises à la TVA les opérations suivantes:

a) les livraisons de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel;

[…]

c) les prestations de services, effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel;

[…]»

4 L’article 14, paragraphe 1, de cette directive prévoit:

«Est considéré comme ‘livraison de biens’, le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire.»

5 L’article 24, paragraphe 1, de ladite directive est libellé comme suit:

«Est considérée comme ‘prestation de services’ toute opération qui ne constitue pas une livraison de biens.»

6 L’article 135 de la directive TVA dispose:

«1. Les États membres exonèrent les opérations suivantes:

[…]

d) les opérations, y compris la négociation, concernant les dépôts de fonds, comptes courants, paiements, virements, créances, chèques et autres effets de commerce, à l’exception du recouvrement de créances;

e) les opérations, y compris la négociation, portant sur les devises, les billets de banque et les monnaies qui sont des moyens de paiement légaux, à l’exception des monnaies et billets de collection, à savoir les pièces en or, en argent ou en autre métal, ainsi que les billets, qui ne sont pas normalement utilisés dans leur fonction comme moyen de paiement légal ou qui présentent un intérêt numismatique;

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f) les opérations, y compris la négociation mais à l’exception de la garde et de la gestion, portant sur les actions, les parts de sociétés ou d’associations, les obligations et les autres titres, à l’exclusion des titres représentatifs de marchandises et des droits ou titres visés à l’article 15, paragraphe 2;

[…]»

Le droit suédois

7 Sous le chapitre 1 de la loi (1994:200) relative à la taxe sur la valeur ajoutée [mervärdesskattelagen (1994:200), ci–après la «loi relative à la TVA»], l’article 1er prévoit que la TVA est due à l’État pour les livraisons ou les prestations sur le territoire national de biens ou de services imposables effectuées par un assujetti agissant en tant que tel.

8 Le chapitre 3 de cette loi comporte un article 23, paragraphe 1, en vertu duquel sont exonérées de la TVA les livraisons de billets de banque et de pièces de monnaie qui constituent des moyens de paiement légaux, à l’exception des objets de collection, à savoir les pièces en or, en argent ou en autre métal, ainsi que les billets, qui ne sont pas normalement utilisés dans leur fonction comme moyen de paiement légal ou qui présentent un intérêt numismatique.

9 Sous ce même chapitre 3, l’article 9 prévoit l’exonération des prestations de services bancaires et financiers ainsi que les opérations de change de valeurs mobilières et les opérations similaires. Les services bancaires et financiers n’incluent pas les activités notariales, les services de recouvrement et les services administratifs portant sur l’affacturage ou la location d’espaces de stockage.

Les faits du litige au principal et les questions préjudicielles

10 M. Hedqvist souhaite fournir, par l’intermédiaire d’une société, des services consistant en l’échange de devises traditionnelles contre la devise virtuelle «bitcoin», et inversement.

11 Il ressort de la décision de renvoi que la devise virtuelle «bitcoin» est utilisée, à titre principal, pour les paiements entre particuliers sur Internet ainsi que sur certaines boutiques en ligne acceptant cette devise. Cette devise virtuelle n’a pas d’émetteur unique, mais est directement créée au sein d’un réseau par le biais d’un algorithme spécial. Le système de la devise virtuelle «bitcoin» autorise la détention et le transfert à titre anonyme de sommes de «bitcoin» au sein du réseau par les utilisateurs détenant des adresses «bitcoin». Une adresse «bitcoin» pourrait être comparée à un numéro de compte bancaire.

12 Se référant à un rapport de l’année 2012 de la Banque centrale européenne sur les devises virtuelles, la juridiction de renvoi indique qu’une devise virtuelle peut être définie comme un type de monnaie numérique non réglementée, émise et vérifiée par ses développeurs et acceptée par les membres d’une communauté virtuelle spécifique. La devise virtuelle «bitcoin» fait partie des devises virtuelles dites «à flux bidirectionnel», que les utilisateurs peuvent acheter et vendre sur la base de taux de change. De telles devises virtuelles sont analogues aux autres devises échangeables s’agissant de leur usage dans le monde réel. Elles permettent d’acheter des biens et des services aussi bien réels que virtuels. Les devises virtuelles se distinguent de la monnaie électronique, telle que définie dans la directive 2009/110/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, concernant l’accès à l’activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements, modifiant les directives 2005/60/CE et 2006/48/CE et abrogeant la directive 2000/46/CE (JO L 267, p. 7), dans la mesure où, à la différence de cette monnaie, dans le cas des devises virtuelles les fonds sont exprimés non pas en l’unité de compte traditionnelle, par exemple, en euro, mais en une unité de compte virtuelle, telle que le «bitcoin».

13 La juridiction de renvoi indique que les opérations dont M. Hedqvist envisage la réalisation auraient lieu sous forme électronique, au moyen du site Internet de sa société. Cette société achèterait des unités de la devise virtuelle «bitcoin» directement auprès des particuliers et des entreprises, ou bien sur une bourse d’échange internationale. Ces unités seraient ensuite revendues par ladite société sur une telle bourse d’échange ou seraient stockées. La société de M. Hedqvist vendrait également de telles unités aux particuliers ou aux entreprises qui auraient effectué une commande sur son site Internet. Dans l’hypothèse où le client aurait accepté le prix en couronnes suédoises proposé par la société de M. Hedqvist et qu’un paiement aurait été reçu, les unités de la devise virtuelle «bitcoin» vendues seraient automatiquement envoyées à l’adresse «bitcoin» indiquée. Les unités de la devise virtuelle «bitcoin» vendues par

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cette société seraient soit celles qu’elle achèterait sur la bourse d’échange directement après que le client aurait passé sa commande, soit celles qu’elle aurait déjà en stock. Le prix proposé par ladite société aux clients serait déterminé en fonction du prix en vigueur sur une bourse d’échange spécifique, auquel serait ajouté un certain pourcentage. La différence entre le prix d’achat et le prix de vente constituerait le bénéfice de la société de M. Hedqvist. Cette société ne facturerait pas d’autres frais.

14 Les opérations que M. Hedqvist projette d’effectuer se limiteraient donc à l’achat et à la vente d’unités de la devise virtuelle «bitcoin» en échange de devises traditionnelles, telles que la couronne suédoise, ou inversement. Il ne ressort pas de la décision de renvoi qu’elles porteraient sur des paiements en «bitcoin».

15 Avant de commencer à effectuer de telles opérations, M. Hedqvist a demandé un avis préalable à la commission de droit fiscal en vue de savoir si la TVA devrait être acquittée lors de l’achat et de la vente d’unités de la devise virtuelle «bitcoin».

16 Dans un avis du 14 octobre 2013, cette commission a considéré, sur le fondement de l’arrêt First National Bank of Chicago (C-172/96, EU:C:1998:354), que M. Hedqvist offrira un service de change effectué à titre onéreux. Elle a toutefois jugé que ce service de change relève de l’exonération prévue à l’article 9 figurant sous le chapitre 3 de la loi relative à la TVA.

17 Selon la commission de droit fiscal, la devise virtuelle «bitcoin» est un moyen de paiement utilisé de manière analogue aux moyens de paiement légaux. Par ailleurs, l’expression «moyens de paiement légaux» figurant à l’article 135, paragraphe 1, sous e), de la directive TVA serait utilisée afin de restreindre le champ d’application de l’exonération portant sur les billets de banque et les pièces de monnaie. Il en résulterait que cette expression devrait être comprise en ce sens qu’elle ne concerne que les billets de banque et les pièces, et non pas les devises. Cette interprétation serait également conforme à l’objectif visé par les exonérations prévues à l’article 135, paragraphe 1, sous b) à g), de la directive TVA, à savoir éviter les difficultés afférentes à la soumission à la TVA des services financiers.

18 Le Skatteverket a formé un recours contre la décision de la commission de droit fiscal devant le Högsta förvaltningsdomstolen (Cour administrative suprême), en faisant valoir que le service visé par la demande de M. Hedqvist ne relève pas de l’exonération prévue au chapitre 3, article 9, de la loi relative à la TVA.

19 M. Hedqvist soutient, quant à lui, que le recours formé par le Skatteverket doit être rejeté et que l’avis préalable de la commission de droit fiscal doit être confirmé.

20 La juridiction de renvoi est d’avis qu’il pourrait être déduit de l’arrêt First National Bank of Chicago (C-172/96, EU:C:1998:354) que les opérations de change d’une devise virtuelle contre une devise traditionnelle, et inversement, effectuées contre le paiement d’une somme correspondant à la marge entre le prix d’achat payé par l’opérateur et le prix de vente pratiqué par celui-ci constituent des prestations de services effectuées à titre onéreux. Dans une telle hypothèse, se poserait la question de savoir si ces opérations relèvent de l’une des exonérations prévues à l’article 135, paragraphe 1, de la directive TVA, pour les services financiers, plus précisément celles figurant aux points d) à f) de cette disposition.

21 Éprouvant des doutes quant à la question de savoir si l’une de ces exonérations s’applique à de telles opérations, le Högsta förvaltningsdomstolen (Cour administrative suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) L’article 2, paragraphe 1, de la directive TVA doit-il être interprété en ce sens que les opérations prenant la forme de ce qui est décrit comme l’échange de devises virtuelles contre des devises traditionnelles, et inversement, effectué moyennant une contrepartie que le prestataire intègre dans le calcul du taux de change, constituent des prestations de services effectuées à titre onéreux?

2) Dans l’affirmative, l’article 135, paragraphe 1, [de cette directive] doit-il être interprété en ce sens que les opérations de change telles qu’elles ont été décrites ci-dessus sont exonérées?»

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

22 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA doit être interprété en ce sens que constituent des

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prestations de services effectuées à titre onéreux, au sens de cette disposition, des opérations, telles que celles en cause au principal, qui consistent en l’échange de devises traditionnelles contre des unités de la devise virtuelle «bitcoin», et inversement, effectuées contre le paiement d’une somme correspondant à la marge constituée par la différence entre, d’une part, le prix auquel l’opérateur concerné achète les devises et, d’autre part, le prix auquel il les vend à ses clients.

23 L’article 2, paragraphe 1, de la directive TVA énonce que sont soumises à la TVA les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel.

24 Il convient de constater, en premier lieu, que la devise virtuelle à flux bidirectionnel «bitcoin», qui sera échangée contre des devises traditionnelles dans le cadre d’opérations de change, ne peut être qualifiée de «bien corporel» au sens de l’article 14 de la directive TVA étant donné que, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 17 de ses conclusions, cette devise virtuelle n’a pas d’autres finalités que celle de moyen de paiement.

25 Il en est de même des devises traditionnelles, dès lors qu’il s’agit de monnaies qui sont des moyens de paiement légaux (voir, en ce sens, arrêt First National Bank of Chicago, C-172/96, EU:C:1998:354, point 25).

26 En conséquence, les opérations en cause au principal, qui consistent en l’échange de différents moyens de paiement, ne relèvent pas de la notion de «livraison de biens», prévue audit article 14 de la directive. Dans ces conditions, ces opérations constituent des prestations de services, au sens de l’article 24 de la directive TVA.

27 S’agissant, en second lieu, du caractère onéreux d’une prestation de services, il convient de rappeler qu’une prestation de services n’est effectuée «à titre onéreux» au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA, et n’est dès lors assujettie à la TVA, que s’il existe un lien direct entre le service rendu et la contre-valeur reçue par l’assujetti (arrêts Loyalty Management UK et Baxi Group, C-53/09 et C-55/09, EU:C:2010:590, point 51 ainsi que jurisprudence citée, et Serebryannay vek, C-283/12, EU:C:2013:599, point 37). Un tel lien direct est établi lorsqu’il existe entre le prestataire et le bénéficiaire un rapport juridique au cours duquel des prestations réciproques sont échangées, la rétribution perçue par le prestataire constituant la contre-valeur effective du service fourni au bénéficiaire (arrêt Le Rayon d’Or, C-151/13, EU:C:2014:185, point 29 et jurisprudence citée).

28 Dans l’affaire au principal, il ressort des éléments du dossier soumis à la Cour qu’il existerait entre la société de M. Hedqvist et ses cocontractants un rapport juridique synallagmatique dans le cadre duquel les parties à l’opération s’engageraient réciproquement à céder des montants dans une certaine devise et à en recevoir la contre-valeur dans une devise virtuelle à flux bidirectionnel, ou inversement. Il est également exposé que cette société serait rémunérée pour sa prestation de services par une contrepartie correspondant à la marge qu’elle intègrerait dans le calcul des cours de change auxquels elle serait disposée à vendre et à acheter les devises concernées.

29 La Cour a déjà jugé qu’est dépourvu de pertinence, aux fins de la détermination du caractère onéreux d’une prestation de services, le fait qu’une telle rémunération ne prend pas la forme d’un versement d’une commission ou d’un paiement de frais spécifiques (arrêt First National Bank of Chicago, C-172/96, EU:C:1998:354, point 33).

30 Il y a lieu de considérer, au regard des considérations qui précèdent, que des opérations, telles que celles en cause au principal, constituent des prestations de services effectuées contre remise d’une contrepartie qui présente un lien direct avec le service rendu, c’est-à-dire des prestations de services à titre onéreux, au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA.

31 Dès lors, il convient de répondre à la première question que l’article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA doit être interprété en ce sens que constituent des prestations de services effectuées à titre onéreux, au sens de cette disposition, des opérations, telles que celles en cause au principal, qui consistent en l’échange de devises traditionnelles contre des unités de la devise virtuelle «bitcoin», et inversement, effectuées contre le paiement d’une somme correspondant à la marge constituée par la différence entre, d’une part, le prix auquel l’opérateur concerné achète les devises et, d’autre part, le prix auquel il les vend à ses clients.

Sur la seconde question

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32 Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 135, paragraphe 1, sous d) à f), de la directive TVA doit être interprété en ce sens que sont exonérées de la TVA des prestations de services, telles que celles en cause au principal, qui consistent en l’échange de devises traditionnelles contre des unités de la devise virtuelle «bitcoin», et inversement, effectuées contre le paiement d’une somme correspondant à la marge constituée par la différence entre, d’une part, le prix auquel l’opérateur concerné achète les devises et, d’autre part, le prix auquel il les vend à ses clients.

33 À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, les exonérations visées à l’article 135, paragraphe 1, de la directive TVA constituent des notions autonomes du droit de l’Union ayant pour objet d’éviter des divergences dans l’application du régime de la TVA d’un État membre à l’autre (voir, notamment, arrêts Skandinaviska Enskilda Banken, C-540/09, EU:C:2011:137, point 19 ainsi que jurisprudence citée, et DTZ Zadelhoff, C-259/11, EU:C:2012:423, point 19).

34 Il est également de jurisprudence constante que les termes employés pour désigner lesdites exonérations sont d’interprétation stricte, étant donné qu’elles constituent des dérogations au principe général selon lequel la TVA est perçue sur chaque prestation de services effectuée à titre onéreux par un assujetti (arrêts Ludwig, C-453/05, EU:C:2007:369, point 21, et DTZ Zadelhoff, C-259/11, EU:C:2012:423, point 20).

35 Toutefois, l’interprétation desdits termes doit être conforme aux objectifs poursuivis par les exonérations prévues à l’article 135, paragraphe 1, de la directive TVA et respecter les exigences du principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de TVA. Ainsi, cette règle d’interprétation stricte ne signifie pas que les termes utilisés pour définir les exonérations visées audit article 135, paragraphe 1, doivent être interprétés d’une manière qui priverait celles-ci de leurs effets (voir, notamment, arrêts Don Bosco Onroerend Goed, C-461/08, EU:C:2009:722, point 25; DTZ Zadelhoff, C-259/11, EU:C:2012:423, point 21, et J.J. Komen en Zonen Beheer Heerhugowaard, C-326/11, EU:C:2012:461, point 20).

36 À cet égard, il ressort de la jurisprudence de la Cour que les exonérations prévues à l’article 135, paragraphe 1, sous d) à f), visent notamment à pallier les difficultés liées à la détermination de la base d’imposition ainsi que du montant de la TVA déductible (voir, notamment, arrêt Velvet & Steel Immobilien, C-455/05, EU:C:2007:232, point 24, ainsi que ordonnance Tiercé Ladbroke, C-231/07 et C-232/07, EU:C:2008:275, point 24).

37 Au demeurant, les opérations exonérées de la TVA en vertu de ces dispositions sont, par leur nature, des opérations financières, bien qu’elles ne doivent pas nécessairement être effectuées par les banques ou par les établissements financiers (voir arrêts Velvet & Steel Immobilien, C-455/05, EU:C:2007:232, points 21 et 22 ainsi que jurisprudence citée, et Granton Advertising, C-461/12, EU:C:2014:1745, point 29).

38 S’agissant, en premier lieu, des exonérations prévues à l’article 135, paragraphe 1, sous d), de la directive TVA, il convient de rappeler que, aux termes de cette disposition, les États membres exonèrent les opérations concernant notamment «les dépôts de fonds, comptes courants, paiements, virements, créances, chèques et autres effets de commerce».

39 Les opérations exonérées en vertu de ladite disposition sont donc définies en fonction de la nature des prestations de services fournies. Pour être qualifiés d’opérations exonérées, les services en question doivent former un ensemble distinct, apprécié de façon globale, qui a pour effet de remplir les fonctions spécifiques et essentielles d’un service décrit à cette même disposition (voir arrêt Axa UK, C-175/09, EU:C:2010:646, points 26 et 27 ainsi que jurisprudence citée).

40 Il ressort du libellé de l’article 135, paragraphe 1, sous d), de la directive TVA, lu à la lumière de l’arrêt Granton Advertising (C-461/12, EU:C:2014:1745, points 37 et 38), que les opérations visées à cette disposition concernent des services ou des instruments dont le mode de fonctionnement implique un transfert d’argent.

41 En outre, ainsi que l’a exposé Mme l’avocat général aux points 51 et 52 de ses conclusions, ladite disposition ne vise pas les opérations qui portent sur la monnaie elle-même, celles-ci faisant l’objet d’une disposition spécifique, à savoir l’article 135, paragraphe 1, sous e), de la directive TVA.

42 La devise virtuelle «bitcoin» étant un moyen de paiement contractuel elle ne saurait, d’une part, être regardée ni comme un compte courant ni comme un dépôt de fonds, un paiement ou

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un virement. D’autre part, à la différence des créances, des chèques et des autres effets de commerce visés à l’article 135, paragraphe 1, sous d), de la directive TVA, elle constitue un moyen de règlement direct entre les opérateurs qui l’acceptent.

43 Partant, des opérations telles que celles au principal ne relèvent pas du champ d’application des exonérations prévues à cette disposition.

44 S’agissant, en deuxième lieu, des exonérations prévues à l’article 135, paragraphe 1, sous e), de la directive TVA, cette disposition prévoit que les États membres exonèrent les opérations portant notamment sur «les devises, les billets de banque et les monnaies qui sont des moyens de paiement légaux».

45 À cet égard, il convient de rappeler que les notions employées à ladite disposition doivent être interprétées et appliquées de manière uniforme à la lumière des versions établies dans l’ensemble des langues de l’Union (voir, en ce sens, arrêts Velvet & Steel Immobilien, C-455/05, EU:C:2007:232, point 16 ainsi que jurisprudence citée, et Commission/Espagne, C-189/11, EU:C:2013:587, point 56).

46 Ainsi que l’a exposé Mme l’avocat général aux points 31 à 34 de ses conclusions, les différentes versions linguistiques de l’article 135, paragraphe 1, sous e), de la directive TVA ne permettent pas de déterminer sans ambiguïté si cette disposition s’applique aux seules opérations portant sur les devises traditionnelles ou bien si, en revanche, elle vise également les opérations impliquant une autre devise.

47 En présence de divergences linguistiques, la portée de l’expression concernée ne saurait être appréciée sur la base d’une interprétation exclusivement textuelle. Il convient d’interpréter cette expression à la lumière du contexte dans lequel elle s’inscrit, des finalités et de l’économie de la directive TVA (voir arrêts Velvet & Steel Immobilien, C-455/05, EU:C:2007:232, point 20 ainsi que jurisprudence citée, et Commission/Espagne, C-189/11, EU:C:2013:587, point 56).

48 Ainsi que cela a été rappelé aux points 36 et 37 du présent arrêt, les exonérations prévues à l’article 135, paragraphe 1, sous e), de la directive TVA visent notamment à pallier les difficultés liées à la détermination de la base d’imposition ainsi que du montant de la TVA déductible qui surgissent dans le cadre de l’imposition des opérations financières.

49 Or, les opérations portant sur des devises non traditionnelles, c’est-à-dire autres que les monnaies qui sont des moyens de paiement légaux dans un ou plusieurs pays, pour autant que ces devises ont été acceptées par les parties à une transaction en tant que moyen de paiement alternatif aux moyens de paiement légaux et n’ont pas une finalité autre que celle de moyen de paiement, constituent des opérations financières.

50 En outre, ainsi que M. Hedqvist l’a fait valoir en substance lors de l’audience, dans le cas particulier d’opérations telles que les opérations de change, les difficultés liées à la détermination de la base d’imposition et du montant de la TVA déductible peuvent être identiques, qu’il s’agisse d’échange de devises traditionnelles, normalement exonéré en vertu de l’article 135, paragraphe 1, sous e), de la directive TVA, ou d’échange, d’une part, de telles devises contre, d’autre part, des devises virtuelles à flux bidirectionnel qui, sans être des moyens de paiement légaux, constituent un moyen de paiement accepté par les parties à une transaction, et inversement.

51 Il résulte donc du contexte et de la finalité dudit article 135, paragraphe 1, sous e), qu’une interprétation de cette disposition selon laquelle elle vise les opérations portant sur les seules devises traditionnelles reviendrait à la priver d’une partie de ses effets.

52 Dans l’affaire au principal, il est constant que la devise virtuelle «bitcoin» n’a pas d’autres finalités que celle de moyen de paiement et qu’elle est acceptée à cet effet par certains opérateurs.

53 Par conséquent, il y a lieu de conclure que l’article 135, paragraphe 1, sous e), de la directive TVA vise également les prestations de services, telles que celles en cause au principal, qui consistent en l’échange de devises traditionnelles contre des unités de la devise virtuelle «bitcoin», et inversement, effectuées contre le paiement d’une somme correspondant à la marge constituée par la différence entre, d’une part, le prix auquel l’opérateur concerné achète les devises et, d’autre part, le prix auquel il les vend à ses clients.

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54 S’agissant, en dernier lieu, des exonérations prévues à l’article 135, paragraphe 1, sous f), de la directive TVA, il suffit de rappeler que cette disposition vise notamment les opérations portant sur «les actions, les parts de sociétés ou d’associations [et] les obligations», à savoir des titres conférant un droit de propriété sur des personnes morales, ainsi que sur les «autres titres», lesquels doivent être considérés comme étant d’une nature comparable par rapport aux titres spécifiquement mentionnés à ladite disposition (arrêt Granton Advertising, C-461/12, EU:C:2014:1745, point 27).

55 Or, il est constant que la devise virtuelle «bitcoin» ne constitue ni un titre conférant un droit de propriété sur des personnes morales ni un titre d’une nature comparable.

56 Dès lors, les opérations en cause au principal ne relèvent pas du champ d’application des exonérations prévues à l’article 135, paragraphe 1, sous f), de la directive TVA.

57 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la seconde question que:

– l’article 135, paragraphe 1, sous e), de la directive TVA doit être interprété en ce sens que des prestations de services, telles que celles en cause au principal, qui consistent en l’échange de devises traditionnelles contre des unités de la devise virtuelle «bitcoin», et inversement, effectuées contre le paiement d’une somme correspondant à la marge constituée par la différence entre, d’une part, le prix auquel l’opérateur concerné achète les devises et, d’autre part, le prix auquel il les vend à ses clients, constituent des opérations exonérées de la TVA, au sens de cette disposition;

– l’article 135, paragraphe 1, sous d) et f), de la directive TVA doit être interprété en ce sens que de telles prestations de services ne relèvent pas du champ d’application de ces dispositions.

Sur les dépens

58 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit:

1) L’article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprété en ce sens que constituent des prestations de services effectuées à titre onéreux, au sens de cette disposition, des opérations, telles que celles en cause au principal, qui consistent en l’échange de devises traditionnelles contre des unités de la devise virtuelle «bitcoin», et inversement, effectuées contre le paiement d’une somme correspondant à la marge constituée par la différence entre, d’une part, le prix auquel l’opérateur concerné achète les devises et, d’autre part, le prix auquel il les vend à ses clients.

2) L’article 135, paragraphe 1, sous e), de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens que des prestations de services, telles que celles en cause au principal, qui consistent en l’échange de devises traditionnelles contre des unités de la devise virtuelle «bitcoin», et inversement, effectuées contre le paiement d’une somme correspondant à la marge constituée par la différence entre, d’une part, le prix auquel l’opérateur concerné achète les devises et, d’autre part, le prix auquel il les vend à ses clients, constituent des opérations exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée, au sens de cette disposition.

L’article 135, paragraphe 1, sous d) et f), de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens que de telles prestations de services ne relèvent pas du champ d’application de ces dispositions.

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J. Huet, « Le bitcoin, dont la légalité paraît admise, est une sorte de monnaie contractuelle », Revue des contrats, mars 2017, n° 1, p. 54

Le bitcoin, qualifié au niveau communautaire de « monnaie virtuelle », dont la conversion avec une monnaie traditionnelle échappe à la TVA et qui ne tombe pas sous les incriminations protégeant la monnaie nationale ou la monnaie émise par une union monétaire, apparaît comme une monnaie privée, comme une monnaie contractuelle. CJUE, 22 oct. 2015, no C-264/14, Skatteverket c/ David Hedqvist On ne saurait passer sous silence, dans une revue consacrée aux contrats, ce qu’on appelle vulgairement les « monnaies virtuelles » (lesquelles ne sont pas des « monnaies électroniques », celles-ci devant être émises contre la remise de fonds, par exemple sur le support d’une carte), dont le bitcoin constitue un exemple typique. D’autant que, dans une décision rendue en 2015, la Cour de justice de l’Union européenne a statué sur le bitcoin en le qualifiant de « devise virtuelle », en disant qu’il s’agit d’« un type de monnaie numérique non réglementée, émise et vérifiée par ses développeurs et acceptée par les membres d’une communauté virtuelle spécifique » (et d’ajouter que « de telles devises virtuelles sont analogues aux autres devises échangeables s’agissant de leur usage dans le monde réel. Elles permettent d’acheter des biens et des services aussi bien réels que virtuels », consid. 22) et l’opposant dès lors à ce qu’elle a dénommé des « devises traditionnelles », constituées par les monnaies nationales, sans pour autant le qualifier expressément de « monnaie virtuelle ». Et elle a considéré que les transactions opérées sur cette valeur pour l’échanger contre une monnaie nationale relèvent du régime de l’exemption de TVA, prévu à l’article 135, 1°, e, de la directive n° 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, pour « les opérations (…) portant sur les devises, les billets de banque et les monnaies qui sont des moyens de paiement légaux (…) », comme les opérations d’échange entre deux monnaies nationales, et lui a donc conféré ce régime très favorable, tout en reconnaissant au bitcoin une

parfaite légalité (1). Au niveau français aussi, on observe que cette monnaie virtuelle a déjà fait l’objet de jurisprudence, la cour d’appel de Paris ayant eu à statuer à son propos en 2013 et décidé qu’un intermédiaire assurant la conversion d’euros en bitcoins, et réciproquement, doit être qualifié de prestataire de service de

paiement et obtenir l’agrément nécessaire pour exercer cette activité (2). Là encore la légalité du bitcoin semble avoir été admise. Et, par ailleurs, la Banque de France, après avoir émis de grands doutes sur cette légalité, semble bien être revenue à plus de tolérance à l’égard du bitcoin, non sans avoir souligné les risques qu’une

telle devise pouvait présenter sous l’angle du blanchiment et du financement du terrorisme (3). Pourtant, on peut se demander ce qui justifie une telle clémence. Car tout un chacun pense que ce qui touche de près ou de loin à la monnaie présente un caractère d’ordre public et que les tentatives d’y porter atteinte doivent être sanctionnées. De fait, on a longtemps pensé que la monnaie était une affaire nationale, un élément de souveraineté et que les moyens de paiement étaient une affaire d’État, une affaire de monnaie garantie par l’État

(4). Cela devait assurer aux usagers de la monnaie que celle-ci pouvait leur apporter toute sécurité. Et, pendant longtemps, d’ailleurs, les monnaies nationales étaient garanties par une référence à l’or, métal précieux entre tous.

L’idée va de pair avec le fait que la fabrication de fausse monnaie est pénalement sanctionnée (5). Cela ne vaut, certes, que pour les pièces et les billets : monnaie métallique et fiduciaire. À cet égard, on a vu le propriétaire d’une automobile, désireux de la stationner, condamné pour avoir introduit dans un

parcmètre une rondelle métallique, acceptée par ce dernier, au lieu de la pièce requise (6). Mais, avec l’arrivée de la monnaie scripturale, les choses ont évolué et de la masse monétaire a été créée par les établissements de crédit. Les entreprises et les particuliers, en se servant des chèques et des cartes de

paiement, l’ont fait circuler (7). On a sanctionné les mauvais usages de tels procédés : la lutte laborieuse contre les chèques sans provision en témoigne. Mais, surtout, la pénalisation entourant la monnaie allait alors changer d’objet : au lieu de n’incriminer que la fabrication de fausse monnaie, on allait sanctionner également le fait de contrefaire ou falsifier des instruments de paiement, des cartes

de paiement notamment (8). Et c’est sans compter sur l’aide apportée dans la répression par les

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infractions de droit commun comme le vol, qui sanctionnent le fait de dérober ou de la monnaie physique ou des instruments de paiement. Avec les monnaies virtuelles, les choses changent encore. On perçoit, par exemple, que les incriminations existantes ne permettent pas de sanctionner l’émission de bitcoins. Il n’y a là ni

fabrication de fausse monnaie, ni contrefaçon ou falsification d’instruments de paiement (9). D’où la tentation de considérer que les monnaies virtuelles, et notamment le bitcoin, sont légales. Toutefois, il est pour le moins paradoxal de voir encadrées de manière assez prudente et restrictive les monnaies

locales alternatives (10) et, dans le même temps, admise la validité de monnaies virtuelles à l’échelle internationale. Mais cela s’inscrit dans un contexte où les monnaies nationales sont de plus en plus sous influence d’institutions privées, les établissements de crédit. Avec l’abandon du franc et la création de l’euro dans le cadre d’une union monétaire, on a pu voir Jean Carbonnier se demander « si, en transférant la compétence monétaire à une banque (la Banque centrale européenne), d’ailleurs déclarée indépendante du pouvoir politique, le traité (européen) n’a pas substitué un mécanisme bancaire à un

mécanisme d’État, si l’euro n’est pas en définitive une monnaie privée » (11). On comprend alors aisément que le bitcoin, dont la Cour de justice européenne, dans sa décision rendue en 2015, considère qu’en tant que devise virtuelle « elle n’a pas d’autres finalités que celle de moyen de paiement et qu’elle est acceptée à cet effet par certains opérateurs » (consid. 52 ; rappr. consid. 49 : « Les opérations portant sur des devises non traditionnelles, c’est-à-dire autres que les monnaies qui sont des moyens de paiement légaux dans un ou plusieurs pays, pour autant que ces devises ont été acceptées par les parties à une transaction en tant que moyen de paiement alternatif aux moyens de paiement légaux et n’ont pas une finalité autre que celle de moyen de paiement,

constituent des opérations financières ») (12), voie sa légalité si aisément reconnue. On n’a pas fini de définir le statut précis de ce qui apparaît comme une « monnaie contractuelle », si tant est que cette expression ait un sens. Monnaie contractuelle dans laquelle on a troqué la sécurité apportée par une garantie d’État (ce qui justifie le cours légal) contre une sécurité technique de la réalité des échanges (ce qu’apporte la blockchain).

(1) CJUE, 22 oct. 2015, n° C-264/14, Skatteverket c/ David Hedqvist : Banque 2015, n° 790, p. 75, obs. Storrer P. ; Banque et droit 2015, n° 164, p. 55, obs. Storrer P. ; adde : Bonneau T., « Analyse critique de la contribution de la CJUE à l’ascension juridique du bitcoin », in Liber amicorum Blanche Sousi, L’Europe bancaire, financière et monétaire, Revue Banque, 2016.

(2) CA Paris, 26 sept. 2013 : JCP E 2014, 1091, note Bonneau T. ; RD bancaire et fin. 2014, comm. 3, par Crédot F.-J. et Samin T.

(3) V. Banque de France, Focus n° 10, 5 déc. 2013 ; adde la recommandation sur « L’encadrement des monnaies virtuelles » visant à prévenir leur usage à des fins frauduleuses ou de blanchiment, du groupe de travail « monnaies virtuelles » du ministère de l’Économie et des Finances, juin 2014.

(4) V. Carbonnier J., Droit civil, t. 3, Les biens, 1992, PUF, n° 9, déclarant : « La monnaie est un mécanisme d’État. L’État a le pouvoir, absolu et exclusif, d’émettre et de retirer les monnaies, comme d’en régler le cours », et comp. du même auteur l’édition de 1998, citée infra ; Starck B., Droit civil, t. I, Introduction, 1972, Librairies techniques, nos 296 et s., qui évoque « les prérogatives souveraines dont l’État dispose en matière de monnaie » (n° 306).

(5) C. pén., art. 442-1 et s.

(6) V. T. corr. Saint-Étienne, 17 avr. 1970 : JCP G 1972, II, 17277, note Gassin R.

(7) V. Jeandidier W., Droit pénal des affaires, 2005, PUF, nos 86 et s.

(8) C. mon. fin., art. L. 161-1 et s., not. art. L. 163-3 : « Est puni d’un emprisonnement de sept ans et d’une amende de 750 000 euros le fait pour toute personne : 1. De contrefaire ou de falsifier un chèque ou un autre instrument mentionné à l’article L. 133-4 [le texte vise la carte de paiement munie d’un dispositif de sécurité, par exemple une puce] ; 2. De faire ou de tenter de faire usage, en connaissance de cause, d’un chèque ou un autre instrument mentionné à l’article L. 133-4 contrefaisant ou falsifié ; 3. D’accepter, en connaissance de cause, de recevoir un paiement au moyen d’un chèque ou d’un autre instrument mentionné à l’article L. 133-4 contrefaisant ou falsifié » ; Jeandidier W., Droit pénal des affaires, op. cit., nos 86 et s. ; Conte P., Droit pénal spécial, 2016, LexisNexis, nos 602 et s.

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(9) On aurait pu songer pourtant à appliquer – ou adapter à cet effet – l’article 442-4 du Code pénal selon lequel : « La mise en circulation de tout signe monétaire non autorisé ayant pour objet de remplacer les pièces de monnaie ou les billets de banque ayant cours légal en France est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende » ; on objectera que le bitcoin n’a pas été créé en France, mais la loi pénale s’applique quand un des éléments de l’infraction a été commis en France, ce qui est le cas du bitcoin en ce qui concerne sa mise en circulation.

(10) C. mon. fin., art. L. 311-5 ; C. mon. fin., art. L. 311-6.

(11) Carbonnier J., Droit civil, t. 3, Les biens, 1998, PUF, n° 12 ; comp. Laine M., « La monnaie privée », RTD com. 2004, p. 227.

(12) V. aussi la recommandation précitée du groupe de travail sur les monnaies virtuelles : « Les monnaies virtuelles peuvent être employées pour régler des transactions sur Internet, mais également peuvent être dépensées dans l’économie réelle auprès de commerçants les acceptant. »

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Séance n° 8 LA RESPONSABILITE DU BANQUIER DISPENSATEUR DE CREDIT

LES NOTIONS ESSENTIELLES

Revoir les notions suivantes : le devoir de mise en garde et la notion d’emprunteur non averti, le principe d’irresponsabilité du banquier pour octroi de crédit à une entreprise en difficulté, les hypothèses de responsabilité du banquier pour octroi de crédit à une entreprise, la rupture abusive de crédit.

EXERCICE :

- Dissertation : La mise en œuvre de la responsabilité du banquier vis-à-vis de son client et des

tiers.

LES FONDEMENTS JURIDIQUES DE LA RESPONSABILITE DU BANQUIER

Doc.1 : Article 1103 du code civil

Doc. 2 : Article 1231-1 du code civil

Doc. 3 : Article 1240 du code civil

Doc. 4 : Article L 650-1 du code de commerce.

Doc. 5. Article L 313-1 du Code monétaire et financier.

Doc. 6 : Article L 313-12 du Code monétaire et financier.

LA RESPONSABILITE DU BANQUIER POUR OCTROI DE CREDIT

Doc.7 : Cass. Ass. Plénière, 9 octobre 2006, n°06-11056, Bull. AP, n°11, Affaire B. Tapie (extraits), JCP G 2006, II, 10175, T. Bonneau, D. 2006, p. 2933, D. Houtcieff – Liberté du banquier d’octroyer un crédit.

Doc 8 : Cass. Com, 31 mars 1992, Bull Civ, IV, n°145, p.102 ; JCP 1993 éd. E, I, 302, n°11, obs Gavalda et Stoufflet – cas où le refus de crédit par le banquier constitue une faute.

LA RESPONSABILITE DU BANQUIER POUR RUPTURE ABUSIVE DE CREDIT

Doc.9 : Cass. Com, 26 janvier 2010, n°09-65086, Motifs de rupture de crédit et défaut de responsabilité du banquier.

Doc. 10 : Cass.Com, 27 janvier 2015, n°13-26.475, Rupture abusive de crédit et dépassement d’autorisation de découvert.

LE DEVOIR DE MISE EN GARDE DU BANQUIER.

Doc. 11 : Cass. Civ, 1ère, 27 juin 1995, n°92-19212.

Doc. 12 : Cass. Civ, 1ère, 8 juin 2004, n°02-12185.

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Doc. 13 : Cass. Civ, 1ère, 12 juillet 2005, n°03-10.921, Bull Civ I, n°327, Banque & Droit, n°104, nov-dec. 2005, p.80, T Bonneau, JCP E, 2005, 1359, D Lageais, JCP G 2005, II, 1014à0, A Gourio – Devoir de mise en garde du banquier.

Doc 14 : Cass. Ch Mixte, 29 juin 2007 (2 arrêts), n°05-21.104, et n°06-11.673, Bull. ch. Mixte, n°7 et 8 – Domaine du devoir de mise en garde du banquier.

Doc 15 : Cass.1ère Civ, 30 avril 2009, n°07-18.334, Bull Civ, I, N°85 – Conditions de qualification de l’emprunteur non averti.

Doc 16 : Cass.1ère Civ, 21 février 2006, n°02-19066 – Risques d’endettement.

Doc 17. Cass. 1ère Civ, 14 janvier 2010, n°08-18033 – Risques d’endettement.

Doc 18. Cass. Com, 20 octobre 2009, n°08-20274 – Préjudice subi du fait du manquement à l’obligation de mise en garde.

Doc 19. Cass.Com, 26 janvier 2010 – Point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité contre la banque.

Doc 20. Cass. Com, 3 mai 2006, n°04-19315 – Reconnaissance de l’obligation de mise en garde à l’égard de la caution non avertie.

Doc 21. Cass. Com, 27 novembre 2012, n°11-25967 – Notion de caution non avertie.

LE PRINCIPE ET LES LIMITES DE LA RESPONSABILITE DU BANQUIER : OCTROI DU CREDIT A UNE ENTREPRISE EN DIFFICULTE

Doc 22 : Cass.1ère Civ, 4 juillet 1995, n°93-16822 – Crédit excessif

Doc 23 : Cass.Com, 10 octobre 2000, n°96-20121 – Crédit ruineux

Doc 24. Cass. Com, 22 mars 2005, n°03-12922 – Soutien abusif et crédit ruineux

Doc 25. Cass. Com, 25 avril 2006, n°04-17642 – Notion de crédit ruineux

Doc 26. Cass. Com, 11 mai 1999, n°96-16088 – Notion de soutien abusif

Doc 27. Cass. Com, 28 juin 2005, n°03-17311 – Connaissance de la situation irrémédiablement compromise de l’entreprise

Doc. 28 : Cass. Com, 27 février 2007, n°06-13649 – Préjudice causé par le soutien abusif – responsabilité solidaire des créanciers.

Doc 29 : Cass.Com, 24 juin 2003, n°00-12566 – Cautions intégrées (cautions dirigeantes et associées)

Doc 30 : Conseil Constit, 22 juillet 2005, n°2005-522, DC

Doc 31. F.J Crédot et Y Gérard, « Encadrement de la responsabilité des créanciers pour soutien abusif », RDBF, n°6, sep-oct 2005, n°154.

Doc 32. V.J Lasserre Capdeville « Le banquier dispensateur de crédit face au principe de proportionnalité », Banque et Droit, n°113, mai juin 2007, 25.

Doc 33. Cass. Com, 27 mars 2012 – Conditions de la responsabilité du banquier pour soutien abusif à une entreprise en difficulté

Doc 34. Cass Com, 16 cotobre 2012, n°11-22993 – Notion de fraude

Doc 35. Cass Com, 13 janvier 2015, n°13-25360 – Garanties disproportionnées.

LA RESPONSABILITÉ PÉNALE DU BANQUIER

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Doc 36. R. SALOMON, « Précision de la notion d’obtention de moyens ruineux pour se procurer des fonds », Droit des sociétés n°1, Janvier 2011, comm.19.

Doc 37. F-J CREDOT et T. SAMIN, « Fourniture de moyens ruineux », RDBF n°6, novembre 2011.

Doc 38. Cass. Com, 9 octobre 1989, Rev. Soc, 1990, 279, note Bouloc, D. 1990, som com 120, obs Cabrillac.

LINKS ABOUT BANKING REGULATION AND DUTY OF VIGILANCE IN FRENCH LAW

LES FONDEMENTS JURIDIQUES DE LA RESPONSABILITE DU BANQUIER

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Doc.1 : Article 1103 du code civil

Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Doc. 2 : Article 1231-1 du code civil

Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Doc. 3 : Article 1240 du code civil

Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Doc. 4 : Article L 650-1 du code de commerce.

Lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci.

Pour le cas où la responsabilité d'un créancier est reconnue, les garanties prises en contrepartie de ses concours peuvent être annulées ou réduites par le juge.

Doc. 5. Article L 313-1 du Code monétaire et financier.

Constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne ou prend, dans l'intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu'un aval, un cautionnement, ou une garantie.

Sont assimilés à des opérations de crédit le crédit-bail, et, de manière générale, toute opération de location assortie d'une option d'achat

Doc. 6 : Article L 313-12 du Code monétaire et financier.

Tout concours à durée indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit ou une société de financement consent à une entreprise, ne peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis fixé lors de l'octroi du concours. Ce délai ne peut, sous peine de nullité de la rupture du concours, être inférieur à soixante jours. Dans le respect des dispositions légales applicables, l'établissement de crédit ou la société de financement fournit, sur demande de l'entreprise concernée, les raisons de cette réduction ou interruption, qui ne peuvent être demandées par un tiers, ni lui être communiquées. L'établissement de crédit ou la société de financement ne peut être tenu pour responsable des préjudices financiers éventuellement subis par d'autres créanciers du fait du maintien de son engagement durant ce délai.

L'établissement de crédit ou la société de financement n'est pas tenu de respecter un délai de préavis, que l'ouverture de crédit soit à durée indéterminée ou déterminée, en cas de comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit ou au cas où la situation de ce dernier s'avérerait irrémédiablement compromise.

Le non-respect de ces dispositions peut entraîner la responsabilité pécuniaire de l'établissement de crédit ou de la société de financement.

LA RESPONSABILITE DU BANQUIER POUR OCTROI DE CREDIT

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Doc.7 : Cass. Ass. Plénière, 9 octobre 2006, n°06-11056, Bull. AP, n°11, Affaire B. Tapie (extraits), JCP G 2006, II, 10175, T. Bonneau, D. 2006, p. 2933, D. Houtcieff – Liberté du banquier d’octroyer un crédit.

Statuant tant sur le pourvoi n S 06-11.056 formé par la société CDR créances (le CDR créances) venant aux droits de la Société de banque occidentale (la SDBO) que sur le pourvoi n Q 06-11.307 formé par la société Le Crédit lyonnais (le Crédit lyonnais), qui attaquent le même arrêt ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... avait, avec son épouse, organisé ses activités et son patrimoine autour de deux sociétés en nom collectif dont ils étaient les seuls associés, la société Financière et Immobilière Bernard X... (la société FIBT) et la société Groupe Bernard X... (la société GBT) ; que tandis que la première regroupait les divers actifs patrimoniaux des époux X..., la seconde détenait la majorité du capital de la société anonyme Bernard X... finance (la société BTF SA), elle-même détentrice des participations industrielles du groupe et notamment de celle acquise en juillet 1990 et janvier 1991, par l'intermédiaire de la société allemande BTF GmbH et avec le concours financier de la SDBO, dans le capital de la société Adidas ; que M. X... ayant décidé de cesser ses activités industrielles et commerciales, les sociétés GBT, FIBT et BTF SA ont, les 10 et 16 décembre 1992, conclu avec la SDBO un "mémorandum" puis une "lettre d'engagement" aux termes desquels la société BTF SA s'engageait de manière irrévocable à vendre, au plus tard le 15 février 1993 et pour un prix fixé à 2 085 000 000 francs, à toutes sociétés désignées par la SDBO et à première demande de celle-ci, la totalité de ses parts représentant 78 % du capital de la société BTF GmbH ainsi qu'à affecter l'intégralité du prix à percevoir de cette cession au remboursement des concours ayant bénéficié aux trois sociétés, lesquelles devaient par ailleurs fusionner au sein d'une société nouvelle ; que ce même 16 décembre 1992, la société BTF SA a confié à la SDBO, pour la même durée, le mandat irrévocable de solliciter des acquéreurs et de recevoir le prix ; que les cessions prévues sont intervenues le 12 février 1993 au profit de huit sociétés, parmi lesquelles la société Clinvest, filiale du Crédit lyonnais, qui, alors qu'elle était déjà titulaire de 10 % du capital de la société BTF GmbH, en a acquis 9,9 % supplémentaires, et la société Rice SA constituée par M. Y..., à l'aide pour certaines d'entre elles d'un prêt spécifique dit "à recours limité" accordé par le Crédit lyonnais et stipulant notamment qu'en cas de revente, la plus-value serait partagée à raison d'un tiers pour l'emprunteur et de deux tiers pour la banque ;

que le même jour, l'ensemble des cessionnaires a par ailleurs consenti à M. Y..., jusqu'au 31 décembre 1994, une promesse de cession de leurs acquisitions respectives pour un prix de 3 498 000 000 francs, option qui a été levée le 22 décembre 1994 ; que le mémorandum n'ayant pu être exécuté, non plus que le protocole signé le 13 mars 1994 avec le Crédit lyonnais pour mettre fin aux relations bancaires des intéressés et solder les comptes du groupe X..., les prêts accordés à celui-ci ont été rendus exigibles ; que les sociétés du groupe X... ont alors fait l'objet de procédures de redressement puis de liquidation judiciaires, bientôt poursuivies sous patrimoine commun, à l'exception de la société BTF SA qui, bénéficiant d'un plan de continuation, est devenue la Compagnie européenne de distribution et de pesage (la société CEDP) ; que reprochant au Crédit lyonnais et à la SDBO d'avoir abusivement soutenu le groupe X... et frauduleusement conclu, dès le mois de décembre 1992, "un accord secret de revente au double" avec M. Y..., les organes des procédures collectives ont recherché la responsabilité du Crédit lyonnais et de la SDBO ; qu'après avoir déclaré la société Mandataires judiciaires associés (la société MJA) et M. Z... recevables à agir, en leur qualité de mandataires liquidateurs des sociétés GBT, FIBT, BTF SA et Bernard X... gestion (la société BTG) ainsi que de M. et Mme X..., en réparation du préjudice subi par la société GBT et dit que, bien que n'ayant pas été partie au mandat, le Crédit lyonnais était obligé par celui-ci, la cour d'appel a jugé, tout d'abord, que les deux établissements de crédit avaient failli à leurs obligations de mandataires en se portant acquéreurs par personnes interposées des participations qu'ils étaient chargés de vendre ainsi qu'en manquant de loyauté envers le mandant qu'ils n'avaient pas informé des négociations en cours avec M. Y... et auquel ils n'avaient pas proposé les prêts à recours limité octroyés aux cessionnaires et, ensuite, que cette dernière faute avait fait perdre au groupe X... une chance de réaliser le gain dont il aurait bénéficié si, ayant obtenu le financement adéquat, il avait pu vendre directement les participations Adidas à M. Y... en décembre 1994 ; qu'appréciant ce préjudice au regard des conditions des prêts à recours limité, elle a en conséquence condamné la SDBO et le Crédit lyonnais à payer aux mandataires liquidateurs une indemnité de 135 000 000 euros égale, selon son calcul, au tiers de la différence existant entre le prix qui aurait pu être obtenu en décembre 1994 et celui perçu en février

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1993, réservant sa décision quant à la réparation éventuelle du préjudice consécutif à la mise en liquidation judiciaire des entités du groupe X... et à l'incidence fiscale de sa décision ;

Sur le cinquième moyen du pourvoi formé par le CDR créances et le premier moyen du pourvoi formé par le Crédit lyonnais, qui sont préalables, réunis :

Attendu que le CDR créances et le Crédit lyonnais font grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable l'action engagée contre eux par la société MJA et M. Z..., agissant en leur qualité de mandataires liquidateurs des sociétés GBT, FIBT, BTF SA et BTG, ainsi que de M. et Mme X..., alors, selon le moyen développé par le CDR créances :

1 / que si l'existence d'un groupe de contrats peut justifier l'intérêt du tiers à agir à l'encontre d'une personne avec laquelle il n'est pas directement lié par un contrat, cette circonstance ne lui donne pas pour autant qualité pour exercer à son encontre une action de nature contractuelle ; qu'en l'espèce, les liquidateurs judiciaires de la SNC GBT fondaient leur action à l'encontre du Crédit lyonnais et du CDR créances sur la violation de leurs obligations contractuelles de mandataire, ainsi qu'en atteste le visa des articles 1116, 1134, 1596, 1991 et 1992 du code civil ; qu'en jugeant leur action recevable au motif inopérant qu'existait un lien indiscutable entre le mandat du 16 décembre 1992 et le mémorandum du 10 décembre 1992, la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil, ensemble l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

2 / qu'un tiers à un contrat ne saurait se prévaloir de la violation des obligations qu'il renferme sans établir que le manquement invoqué est également constitutif d'une faute à son égard ; qu'en l'espèce, le mémorandum du 10 décembre 1992 se bornait à prévoir l'affectation du prix de la cession future d'Adidas à l'apurement des dettes de la société BTF SA et de la SNC GBT à l'égard de la SDBO ; que ce mémorandum ne faisait référence ni aux modalités de la cession à intervenir, ni à l'existence d'un mandat entre BTF SA et la SDBO ; qu'en jugeant que, du seul fait de sa qualité de partie au mémorandum du 10 décembre 1992, la SNC GBT était fondée à demander réparation du préjudice que lui avait personnellement causé les manquements de la SDBO aux obligations d'information et de loyauté que mettait à sa charge le mandat qui lui avait été confié par la société BTF SA, la cour d'appel a violé les articles 1165 et 1382 du code civil ;

3 / que l'actionnaire d'une société est irrecevable à demander à un tiers la réparation d'un préjudice qui n'est que le corollaire d'un dommage infligé à cette société ; qu'en affirmant, au contraire, que les liquidateurs judiciaires de la SNC GBT, actionnaire majoritaire de la société BTF SA, étaient recevables à demander l'indemnisation du préjudice qu'ils estimaient avoir subi par ricochet à raison de l'exécution fautive du contrat du 16 décembre 1992, la cour d'appel a violé l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

4 / que le CDR créances rappelait dans ses conclusions que, selon les termes du mémorandum du 10 décembre 1992, l'affectation de la trésorerie disponible dégagée par la cession d'Adidas et des autres filiales industrielles de BTF SA au désendettement des SNC GBT et FIBT était subordonnée à la condition préalable d'une fusion des sociétés BTF SA, GBT et FIBT en une entité unique, cette condition étant nécessaire pour éviter un abus de biens sociaux au préjudice de BTF SA ; qu'elle soulignait encore que la société BTF SA avait expressément renoncé à la fusion envisagée, en raison de l'hostilité de ses actionnaires minoritaires, ce dont elle avait informé la SDBO et la COB par lettres des 28 janvier et 3 février 1993 ; qu'en se bornant à affirmer que la SNC GBT était recevable à critiquer les conditions d'exécution du mandat de vente d'Adidas du seul fait de sa qualité de partie au mémorandum du 10 décembre 1992 sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la renonciation de la société BTF SA au projet de fusion entre les trois sociétés concernées n'avait pas rendu le mémorandum caduc et privé la SNC GBT de tout intérêt à se plaindre des circonstances de la cession d'Adidas par sa filiale BTF SA, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

5 / que la réparation octroyée au demandeur ne peut excéder les limites dans lesquelles le juge a admis son intérêt à agir ; qu'il résulte des constatations mêmes de l'arrêt attaqué que la SNC GBT n'avait d'intérêt à agir qu'autant qu'une partie du prix de vente que la société BTF SA percevrait au titre de la cession d'Adidas serait affectée à l'extinction de ses dettes propres, dans les conditions prévues par le mémorandum du 10 décembre 1992 ; que l'arrêt attaqué, qui reconnaît lui-même que la SNC GBT n'avait pas qualité pour "demander la remontée de la plus-value qui aurait pu être réalisée par BTF SA à la suite de la vente d'Adidas", ne pouvait, sans méconnaître les conséquences de ses propres constatations et violer les articles 1382 du code civil et 31 du nouveau code de procédure

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civile, octroyer au seul profit de la SNC GBT une somme de 135 000 000 euros correspondant à la plus-value que le "Groupe X..." aurait réalisée si un prêt à recours limité lui avait été proposé ;

6 / qu'en omettant de préciser laquelle des entités du "Groupe X..." avait perdu une chance de réaliser cette plus-value et d'indiquer si cette entité était distincte du vendeur BTF SA, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de s'assurer que le préjudice dont elle ordonnait réparation était bien un préjudice personnel de la SNC GBT, distinct de celui subi par sa filiale BTF SA ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

7 / qu'une éventuelle acquisition par la SNC GBT des titres d'Adidas détenus par sa filiale BTF SA au moyen de prêts à recours limités consentis par le Crédit lyonnais aurait caractérisé un abus de biens sociaux par transfert illicite des plus-values latentes de l'actif d'une société cotée en bourse (BTF SA) au profit de l'un de ses actionnaires (SNC GBT), de sorte qu'en déclarant la SNC GBT recevable à appréhender, à titre de réparation, le produit de ce montage illicite, la cour d'appel a violé les articles L. 242-6 du code de commerce et 31 du nouveau code de procédure civile ;

et, selon le moyen développé par le Crédit lyonnais :

8 / qu'une société est irrecevable à demander l'indemnisation d'un préjudice subi par une autre société dont elle détient les parts sociales ; qu'en déclarant l'action exercée par les mandataires judiciaires de la SNC GBT en réparation d'un préjudice prétendument subi par la société BTF SA, société dont la SNC GBT avait été actionnaire, la cour d'appel a violé l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

9 / qu'ayant constaté la perte, par la SNC GBT, de sa qualité d'actionnaire de la société BTF SA depuis le 25 octobre 1995, par suite de l'attribution des actions de BTF à la SDBO, et dès lors qu'il était par ailleurs constant que l'instance engagée par les liquidateurs judiciaires du "Groupe X..." et des époux X... aux fins de condamnation du Crédit lyonnais, de SDBO et de Clinvest à leur payer une indemnité globale de 2 500 000 000 francs à raison de diverses fautes prétendues, avait été introduite par acte du 21 février 1996 soit postérieurement à la perte par la SNC GBT de sa qualité d'actionnaire de la société BTF SA, la cour d'appel, qui a refusé d'en déduire l'absence d'intérêt actuel de GBT et de ses liquidateurs à se plaindre des circonstances de la cession par la société BTF SA des parts de la société BTF GmbH, a violé l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

10 / qu'en déduisant l'intérêt à agir de la SNC GBT et de ses liquidateurs de l'application d'un mémorandum prévoyant l'affectation par la société BTF SA du prix de la future cession d'Adidas au paiement des sommes dues par GBT à la SDBO, application hypothétique puisque dépendant de la possibilité pour BTF de réaliser effectivement cette affectation, une fois la cession réalisée, voire de sa volonté de respecter les termes du mémorandum, la cour d'appel a retenu un intérêt à agir purement éventuel, en violation de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

11 / qu'en ne recherchant pas, comme l'y avait invité le Crédit lyonnais, si l'exécution du mémorandum prévoyant une affectation du produit de la vente des parts de la société BTF GmbH, détenant elle-même Adidas, détenues par la société BTF SA au remboursement des concours consentis par la SDBO à la SNC GBT et à la SNC FIBT, n'était pas subordonnée à la réalisation préalable d'une condition tenant à la fusion de ces deux dernières sociétés et de la société BTF SA, dès lors que la société BTF SA était une société cotée et que la plus-value résultant de la cession des parts lui appartenant ne pouvait, sans lésion des intérêts des actionnaires minoritaires, être affectée au paiement des dettes de sociétés tierces, l'une d'elles étant la SNC GBT, fût-elle actionnaire de la société BTF SA, et si, en conséquence, l'abandon rapide du projet de fusion entre les trois sociétés concernées n'avait pas rendu le mémorandum caduc et privé la SNC GBT de tout intérêt, même purement éventuel, à se plaindre des circonstances de la cession par la société BTF SA de s parts de la société BTF GmbH, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

12 / qu'en affirmant purement et simplement que les mandataires judiciaires de la SNC GBT seraient recevables à solliciter l'indemnisation du préjudice par ricochet subi du fait de la prétendue exécution fautive du contrat du 16 décembre 1992, sans toutefois préciser aucunement la teneur de ce prétendu préjudice par ricochet, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni de leurs conclusions que le CDR créances et le Crédit lyonnais aient développé, à l'appui de leur contestation relative à la recevabilité

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de l'action des mandataires liquidateurs, les critiques évoquées par les quatrième, cinquième, sixième, septième, dixième et onzième branches du moyen, qui sont nouvelles et mélangées de fait et de droit ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt relève que les mandataires liquidateurs ne se bornaient pas à demander l'indemnisation de la perte éprouvée par la société GBT en sa qualité d'actionnaire de la société BTF SA mais qu'invoquant des manquements à la convention du 16 décembre 1992 par laquelle cette dernière société avait, en exécution du mémorandum du 10 décembre 1992 dont cette convention constituait la mise en oeuvre, chargé la SDBO de la cession de sa participation, ils sollicitaient en outre la réparation du préjudice subi par la société GBT pour avoir été privée d'une partie des fonds que le mémorandum avait prévu d'affecter au remboursement de ses propres dettes ; qu'en l'état de ces constatations dont il résulte que les mandataires liquidateurs, qui se prévalaient d'un préjudice propre à la société GBT, distinct de son préjudice d'actionnaire et susceptible d'être rattaché à des manquements aux conventions souscrites, avaient ainsi, dans cette mesure et abstraction faite du bien-fondé de leurs prétentions indifférent à ce stade, un intérêt à agir en responsabilité contre les établissements de crédit, la cour d'appel, qui n'encourt aucun des griefs articulés par les première, deuxième, troisième, huitième, neuvième et douzième branches, a exactement décidé que l'action, en tant qu'elle tendait à la réparation de ce préjudice personnel, était recevable ;

D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, est mal fondé pour le surplus ;

Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi formé par le CDR créances, réunis :

Attendu que le CDR créances fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la SDBO avait manqué à ses obligations de mandataire, alors, selon le moyen :

1 / que la prohibition faite au mandataire de se porter contrepartie est d'intérêt privé et ne sanctionne que les opérations de contrepartie dissimulées au mandant ; qu'en l'espèce, les liquidateurs judiciaires des sociétés du "Groupe X..." n'avaient pas soutenu dans leurs conclusions que le renforcement par Clinvest de ses propres participations dans le capital de la société BTF GmbH (Adidas) réalisé par l'acquisition de 9,90 % supplémentaires, ait été constitutif d'une opération de contrepartie qui aurait été dissimulée au mandant et de ce fait illicite au regard de l'article 1596 du code civil ; qu'ils avaient, en outre, abandonné toute demande de ce chef contre la société CDR participations, venant aux droits de Clinvest, dans leurs dernières conclusions ; qu'en affirmant pourtant qu'il n'aurait pas été rendu compte au mandant de l'acquisition par Clinvest d'un bloc de titres de 9,90 % pour en déduire que cette acquisition était illicite au regard de l'article 1596 du code civil, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du nouveau code de procédure civile ;

2 / que la prohibition édictée par l'article 1596 du code civil n'a pas lieu de jouer lorsque le mandant consent à ce que le mandataire se porte contrepartie en ratifiant l'opération ; qu'en l'espèce, il indiquait dans ses conclusions que la société BTF SA était représentée par un mandataire ad hoc, un avocat, par le truchement duquel elle avait conclu l'acte du 12 février 1993 portant cession des 78 % qu'elle détenait dans le capital de la société BTF GmbH au profit de divers acquéreurs nommés incluant la société Clinvest pour 9,90 % ;

qu'en affirmant que cette acquisition d'un bloc de 9,90 % par Clinvest était illicite au regard de l'article 1596 du code civil, sans rechercher si la société BTF SA, mandante, n'avait pas consenti en connaissance de cause à vendre une partie de ses parts à Clinvest, dès lors qu'elle avait conclu l'acte de cession désignant celle-ci comme l'un des acquéreurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

3 / que seul l'octroi d'un droit d'intervention dans les affaires sociales au profit du prêteur de deniers est de nature à lui conférer la qualité d'associé de l'affaire qu'il finance ; qu'en l'espèce, il soulignait dans ses conclusions que les conventions de prêts à recours limité conclues entre le Crédit lyonnais et certains des acquéreurs des parts de la société BTF GmbH (Adidas) n'avaient conféré à la banque aucun droit d'intervention dans les affaires de la société cédée, chacun des emprunteurs demeurant libre d'exercer ses prérogatives d'associé à sa convenance, sans avoir de compte à rendre à la banque ; que, pour décider que le Crédit lyonnais s'était porté acquéreur des parts de la société BTF GmbH par personnes interposées, la cour d'appel a retenu que les acquéreurs de ces parts n'en étaient que les propriétaires apparents, dès lors qu'ils avaient conventionnellement renoncé à disposer librement de leurs parts et que la banque s'était elle-même réservée les deux tiers de la plus-value que pourrait dégager la revente de ces parts ; qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à justifier la disqualification de ces contrats de prêts en société, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que les prêts à

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recours limité aient conféré à la banque un droit d'intervention dans les affaires sociales de la société BTF GmbH, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1596, 1832 et 1892 du code civil ;

4 / que l'article 8-3 des conventions de prêt à recours limité prévoyait : "indépendamment de la réalisation de toute opération de cession, l'Emprunteur aura la faculté de rembourser par anticipation l'intégralité du présent prêt moyennant respect d'un délai de préavis de quinze jours. (...) Tout remboursement sera définitif et interviendra pour solde de tout compte." ; qu'il résulte des termes clairs et précis de cette disposition que les emprunteurs avaient la faculté de recouvrer à tout moment la libre disposition de leurs parts en se réservant l'intégralité d'une éventuelle plus-value en substituant un prêt classique au prêt à recours limité ; qu'en affirmant qu'il résultait de la combinaison des articles 8 et III des conventions de prêt que les emprunteurs, propriétaires apparents, ne resteraient en définitive en possession de leurs titres que si leur valeur s'avérait nulle, pour en déduire que cette opération constituait un portage, la cour d'appel a dénaturé les stipulations claires de l'article 8 des conventions de prêt à recours limité, en violation de l'article 1134 du code civil ;

5 / que le portage est la convention par laquelle une personne acquiert des titres pour le compte d'un donneur d'ordre qui s'engage à les lui racheter ou les faire racheter par un tiers à une date fixée et pour un prix minimal ; qu'en jugeant que les prêts consentis par le Crédit lyonnais à certains des acquéreurs des parts de la société BTF GmbH (Adidas) constituaient une opération de portage dans l'attente de la levée de l'option consentie jusqu'au 31 décembre 1994, à la demande de la banque, par tous les associés à M. Y..., cependant qu'elle constatait que M. Y... s'était seulement vu consentir une option d'achat à terme sur ces parts, ce dont il résultait que les co-acquéreurs d'Adidas n'étaient créanciers d'aucun engagement de rachat de leurs parts, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

6 / que le mandataire chargé de vendre des parts sociales n'est tenu de porter à la connaissance du mandant que les éléments de nature à conduire ce dernier à renoncer à la vente projetée ou à en réviser les conditions ; qu'en retenant qu'il entrait dans les obligations de la SDBO d'informer son mandant qu'un repreneur était "éventuellement acheteur" à un terme de deux ans pour un prix supérieur à celui fixé par le mandant, cependant qu'elle relevait qu'il ne s'agissait que d'une simple option d'achat, insusceptible de déboucher sur la moindre certitude d'une vente future, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 199 2 et 1147 du code civil ;

7 / que la cour d'appel qui reproche, de surcroît, au Crédit lyonnais de ne pas avoir informé M. Bernard X... qu'il était prêt à financer les acquéreurs d'Adidas, information de nature indifférente au mandant et que la banque n'avait pas à porter à sa connaissance viole derechef les articles 1992 e t 1147 du code civil ;

8 / qu'il en est d'autant plus ainsi que le banquier, tenu d'un devoir de confidentialité sur les affaires de ses correspondants, n'a pas à révéler, fût-ce à son propre mandant, les conventions privées conclues par les acquéreurs des parts sociales qu'il est chargé de vendre, dès lors qu'elles se rapportent à des opérations distinctes du contrat projeté ; qu'il lui est loisible de financer les acquéreurs sans être tenu d'en informer son mandant ; qu'en jugeant que le Crédit lyonnais avait commis une faute en s'abstenant de dévoiler à son mandant la circonstance que la banque était disposée à consentir un financement à certains des acquéreurs d'Adidas ainsi que les arrangements réciproques par lesquels certains de ces acquéreurs avaient consenti à l'un d'entre eux une option de rachat à terme de leurs actions, la cour d'appel a violé les articles 1992 et 1147 du code civil et L. 511-33 du code monétaire et financier ;

9 / que le mandataire n'est pas tenu d'attirer spécialement l'attention de son mandant sur des informations publiques d'ores et déjà connues de lui ; qu'en l'espèce, il versait aux débats, d'une part, un communiqué de presse du 4 février 1993, antérieur à la vente d'Adidas, par lequel M. Bernard X... avait, par avance, publiquement défendu la légitimité de l'intervention du Crédit lyonnais dans le financement des acquéreurs et, d'autre part, les déclarations par lesquelles Mme Gilberte A..., conseil habituel de M. X..., avait indiqué au sujet de l'option d'achat consentie par les co-acquéreurs d'Adidas à M. Y... : "Je connais évidemment la clause dès l'achat des parts de X.... Mais je ne me rappelle pas si je lui en ai parlé. Il est plus probable que j'en ai parlé à son adjoint Elie Fellous", PDG de la société BTF SA ; qu'en jugeant que le Crédit lyonnais avait méconnu ses obligations de mandataire en dissimulant de tels éléments, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si leur connaissance, par le

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mandant n'était pas suffisamment établie par les pièces susvisées, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 1992 et 1147 du code civil ;

Mais attendu que, si l'arrêt relève tout d'abord que les banques ont commis des fautes en se portant cessionnaires des parts qu'elles avaient pour mandat de céder et en manquant à leur obligation d'informer loyalement leur mandant, il se borne ensuite, pour caractériser l'existence et apprécier l'étendue du préjudice causé par les manquements imputés au groupe Crédit lyonnais, à retenir que celui-ci n'a pas respecté ses obligations de banquier mandataire en s'abstenant de proposer au groupe X... le financement constitué par les prêts à recours limité consentis à certaines des sociétés cessionnaires ; que, la cour d'appel ayant ainsi retenu que cette abstention constituait la seule cause du préjudice dont elle accordait réparation, il ne peut lui être utilement reproché d'avoir relevé l'existence d'autres manquements qui ne constituent pas le soutien de sa décision ; que le moyen, inopérant, ne peut être accueilli ;

Mais sur le deuxième moyen du pourvoi formé par le Crédit lyonnais :

Vu les articles 1134 et 1165 du code civil ;

Attendu que pour retenir la responsabilité du Crédit lyonnais, l'arrêt retient que, bien qu'il n'ait pas été signataire du mandat ni d'aucune des conventions souscrites avec les sociétés GBT, FIBT et BTF SA en décembre 1992, cet établissement, qui s'était activement impliqué dans la conception et l'exécution de ces accords, notamment en consentant et en organisant les financements nécessaires au montage imaginé avec les coacquéreurs des participations Adidas, et qui avait même accepté de rendre compte de son action devant la presse et la commission d'enquête parlementaire chargée d'analyser l'opération, était obligé par le mandat ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que les mandataires liquidateurs, qui fondaient leur action sur des manquements aux articles 1116, 1134, 1596, 1991 et 1992 du code civil, avaient choisi d'agir sur le seul terrain contractuel, que les sociétés GBT, FIBT et BTF SA n'avaient traité, pour l'opération considérée, qu'avec la seule SDBO, personne morale distincte dont il n'était prétendu ni qu'elle aurait été fictive ni que son patrimoine se serait confondu avec celui de sa maison mère, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à faire apparaître que l'immixtion du Crédit lyonnais dans l'exécution du mandat délivré à sa filiale avait été de nature à créer pour les mandants une apparence trompeuse propre à leur permettre de croire légitimement que cet établissement était aussi leur cocontractant, ce dont elle aurait alors pu déduire que ce dernier était obligé par un mandat auquel il n'avait pas été partie, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le premier moyen du pourvoi formé par le CDR créances, pris en sa troisième branche, et le quatrième moyen du pourvoi formé par le Crédit lyonnais, pris en sa première branche, réunis :

Vu les articles 1134 et 1147 du code civil ;

Attendu que pour retenir la responsabilité du CDR créances et du Crédit lyonnais, l'arrêt retient que le groupe Crédit lyonnais avait manqué à ses obligations de banquier mandataire en s'abstenant de proposer au groupe X... le financement constitué par les prêts à recours limité qu'il avait octroyés à certains des cessionnaires des participations litigieuses ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'entre pas dans la mission du mandataire de financer l'opération pour laquelle il s'entremet et que, hors le cas où il est tenu par un engagement antérieur, le banquier est toujours libre, sans avoir à justifier sa décision qui est discrétionnaire, de proposer ou de consentir un crédit quelle qu'en soit la forme, de s'abstenir ou de refuser de le faire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel :

Attendu que les mandataires liquidateurs demandent, dans le cas où une cassation serait prononcée sur l'un ou l'autre des pourvois principaux, de casser les dispositions de l'arrêt ayant limité la réparation du préjudice subi par le groupe X... au tiers du gain dont il avait été privé ;

Mais attendu que les termes de la cassation prononcée sur les pourvois principaux rendent le moyen sans objet ;

Et attendu que l'arrêt étant cassé en ce qu'il a retenu que les banques avaient commis une faute engageant leur responsabilité, il n'y a pas lieu de statuer sur les griefs critiquant l'appréciation du préjudice qui aurait été causé par cette faute ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE (…)

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Doc 8 : Cass. Com, 31 mars 1992, Bull Civ, IV, n°145, p.102 ; JCP 1993 éd. E, I, 302, n°11, obs Gavalda et Stoufflet – cas où le refus de crédit par le banquier constitue une faute.

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Amiens, 15 février 1990) que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Oise (la banque) saisie par MM. X... et Y..., fondateurs de la société Oise construction menuiserie PVC (la société) d'une demande de financement de l'ordre de 700 000 francs a, courant mai 1982, consenti à cette dernière un découvert dont le maximum s'est élevé à 660 000 francs ; que le 7 avril 1983, la banque a annoncé à M. X... que tout concours financier était en définitive refusé à la société et qu'il devait solder ses comptes ; que, le 21 avril 1983, la banque est revenue sur sa position, accordant à la société différents prêts d'un montant total de 620 000 francs en contrepartie de l'engagement de caution hypothécaire de chacun des associés à concurrence de 310 000 francs ; que cependant un seul prêt de 350 000 francs était, suivant les conventions formalisées le 24 juin 1983, consenti à moyen terme, le surplus étant constitué par des prêts à court terme dont un prêt relais de 150 000 francs pour 6 mois dans l'attente de la constitution de fonds propres ; que, postérieurement aux conventions, la banque a d'initiative viré une somme de 65 000 francs du compte de la société au compte de M. X... ; qu'en suite du virement, deux chèques de 21 823 francs et 37 825 francs établis par la société à l'ordre de Plastibat, fournisseur dont elle dépendait étroitement, n'ont pu être payés à leur présentation, le 26 septembre 1983 ; qu'après sa mise en règlement judiciaire, le 15 mars 1984, la société, assistée du syndic, ainsi que les MM. X... et Y... ont assigné la banque en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli les demandes alors, selon le pourvoi, d'une part, que celui qui refuse de contracter, en retirant une offre précédente, n'engage sa responsabilité que s'il avait fait une offre ferme et inconditionnelle, que la société, le syndic et les associés n'ont pas soutenu que la banque s'était engagée de façon ferme à fournir un financement total et sans garantie, prétendant seulement qu'elle avait donné un accord de principe, qu'ils lui ont du reste, reproché ses tergiversations, qu'en affirmant que la banque avait laissé croire pendant près d'un an qu'elle fournirait les concours nécessaires, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé les articles 4 et 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'en retenant comme faute le fait que, saisie d'une demande de concours, la banque aurait laissé l'opération s'engager sans cadre précis, sans s'assurer d'un financement propre par les associés et aurait laissé la situation se prolonger pendant 11 mois, la cour d'appel lui a fait reproche de ne pas s'être immiscée dans les affaires de ses clients et a violé, par là même, l'article 1382 du Code civil ; alors, enfin, qu'en considérant que d'une simple autorisation de découvert résultait le fait que la banque avait laissé croire à son engagement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de ce même article ;

Mais attendu qu'après avoir constaté, sans méconnaître l'objet du litige ou faire reproche à la banque de ne pas s'être immiscée dans les affaires de ses clients, que celle-ci avait pendant près d'un an laissé croire qu'elle fournissait les concours nécessaires sans lesquels MM. X... et Y... ne se seraient pas engagés et relevé que ces concours avaient été refusés puis consentis partiellement en contrepartie d'engagements non prévus à l'origine et à une époque où les associés ne pouvaient plus se dégager, la cour d'appel a pu en déduire que la banque avait commis dans la négociation une faute de nature à engager sa responsabilité ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur les deuxième et troisième moyens : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

LA RESPONSABILITE DU BANQUIER POUR RUPTURE ABUSIVE DE CREDIT

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Doc.9 : Cass. Com, 26 janvier 2010, n°09-65086, Motifs de rupture de crédit et défaut de responsabilité du banquier.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 octobre 2008), que la Caisse d'épargne et de prévoyance Côte d'Azur (la caisse) a notifié, le 13 décembre 2005, à la société Riviera, titulaire de deux comptes courants dans ses livres, la cessation de leurs relations commerciales sous un délai de préavis de 90 jours ; que contestant cette décision unilatérale, la société Riviera a, le 27 juin 2006, assigné la caisse en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que la société Riviera fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son action en responsabilité exercée contre la caisse, alors, selon le moyen, que la convention d'ouverture de compte formée entre un établissement bancaire et son client ne peut être rompue unilatéralement par la banque qu'à la condition de motiver sa décision par des considérations propres à sa structure interne ou à son fonctionnement ou afférentes au mode de fonctionnement du compte ; qu'en décidant que la caisse avait pu, sans commettre une faute contractuelle, décider la fermeture des comptes ouverts dans ses livres par la société Riviera sans avoir l'obligation de motiver sa décision, la cour d'appel qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si le refus de motivation de la rupture par la banque n'était pas l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire en lui-même constitutif d'un abus dans le cadre de la relation spécifique entre une banque et son client, mais qui a débouté la société Riviera de sa demande d'indemnisation du préjudice ayant résulté de la rupture dépourvue de motifs qu'elle a dû subir a, en statuant ainsi, privé de base légale sa décision au regard des articles 1134 et 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'en l'absence de disposition légale particulière, toute partie à un contrat à durée indéterminée peut, sans avoir à motiver sa décision, mettre fin unilatéralement à celui-ci, sauf à engager sa responsabilité en cas d'abus; que l'arrêt retient que, si elle considère que cette faculté de résiliation discrétionnaire et arbitraire constitue une source potentielle de discrimination, la société Riviera n'établit pas ni même ne prétend que la décision de la banque qui a été assortie d'un délai de préavis de 90 jours suffisant à permettre à sa cliente de retrouver un nouveau banquier procéderait d'un motif illégitime ou d'une volonté de nuire ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

REJETTE le pourvoi ;

Doc. 10 : Cass.Com, 27 janvier 2015, n°13-26.475, Rupture abusive de crédit et dépassement d’autorisation de découvert.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 12 septembre 2013), que le compte de la société Freddo Venditelli (la société), ouvert dans les livres de la société BNP Paribas(la banque), présentant des soldes débiteurs à partir du 1er trimestre 2008, la banque, après lui avoir accordé un prêt de 170 000 euros, a informé la société qu'elle n'acceptait plus de laisser le compte fonctionner à découvert ; qu'ayant été mise en redressement judiciaire, la société a recherché la responsabilité de la banque pour rupture abusive de crédit ; qu'après sa mise en liquidation judiciaire, le liquidateur a poursuivi l'instance ; Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande en paiement de la somme de 1 034 467,14 euros à titre de dommages-intérêts alors, selon le moyen, que la banque qui laisse se créer l'apparence d'un découvert tacite à durée indéterminée engage sa responsabilité en dénonçant brutalement celui-ci ; que la cour d'appel devait donc rechercher si la société Freddo Venditelli avait pu légitimement croire que la banque, qui lui avait consenti de façon continue et sans la moindre réserve, pendant huit mois, un découvert allant de 30 000 à 200 000 euros, lui avait consenti un découvert tacite ; qu'en se bornant à déterminer quelle avait été l'intention de la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-12 du code monétaire et

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financier ; Mais attendu qu'après avoir relevé que la convention de compte n'était assortie d'aucune autorisation expresse de découvert et que les positions débitrices du compte étaient, de façon habituelle, rapidement compensées par des encaissements et remises, l'arrêt retient que les plus forts débits, enregistrés à l'approche de la fin d'un important chantier, ont résulté des débordements que la société s'était unilatéralement octroyés pour répondre à des besoins ponctuels de trésorerie dans la perspective d'importantes rentrées d'argent et que cette situation expliquait la tolérance de la banque, qui disposait de garanties, pendant la durée du chantier ; que, de ces constatations et appréciations, excluant que la banque ait pu faire naître chez la société la croyance légitime qu'elle bénéficiait d'une ouverture tacite de crédit, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a pu déduire que la preuve d'un découvert convenu entre les parties n'était pas rapportée et que les dispositions de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier relatives à la dénonciation des concours à durée indéterminée autre qu'occasionnels ne trouvaient pas à s'appliquer ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la seconde branche du moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS

REJETTE le pourvoi ;

LE DEVOIR DE MISE EN GARDE DU BANQUIER.

Doc. 11 : Cass. Civ, 1ère, 27 juin 1995, n°92-19212.

Sur le premier moyen du pourvoi principal du Crédit foncier de France et le moyen unique du pourvoi incident de l'Union de crédit pour le bâtiment, qui sont identiques :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, le 29 février 1988, les époux X... ont conclu avec la société Tradition et qualité un contrat de construction d'une maison individuelle sur un terrain acquis de la société André et fils ; que l'opération, d'un coût total de 465 000 francs, devait être financée au moyen de trois prêts, consentis par le Crédit foncier de France (CFF), l'Union de crédit pour le bâtiment (UCB) et le Comité du logement de Clermont-Ferrand et du Puy-de-Dôme (Colog) ; qu'en août 1988, les époux X... ont assigné la société Tradition et qualité et les trois prêteurs en nullité des contrats de construction et de prêt ; qu'un premier arrêt (Riom, 23 mai 1991) a déclaré les contrats valables, mais dit que l'inexécution des obligations contractuelles pouvait être sanctionnée par des dommages-intérêts et renvoyé les parties à conclure sur ce point ; qu'un second arrêt du 11 juin 1992 a, notamment, déclaré les sociétés Tradition et qualité, CFF et UCB, ainsi que le Colog, responsables du préjudice subi par les époux X... et les a condamnés, in solidum, à payer à ceux-ci une indemnité de 150 000 francs ;

Attendu que le CFF et l'UCB font grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué alors que, selon les moyens, les obligations du banquier dispensateur de crédits immobiliers sont définies par la loi spéciale du 13 juillet 1979 qui énonce, dans son article 5, les différentes informations qui doivent obligatoirement être portées à la connaissance de l'emprunteur pour éclairer sa décision ; d'où il suit qu'en constatant, d'une part, que tous les renseignements et avertissements exigés par ce texte avaient été portés à la connaissance des époux X... dans le cadre de chacun des prêts consentis, tout en affirmant, d'autre part, que les organismes prêteurs avaient commis une faute en ne mettant pas les intéressés suffisamment en garde sur l'importance de l'endettement résultant de ces prêts, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations ;

Mais attendu que la présentation d'une offre préalable conforme aux exigences de l'article 5 de la loi du 13 juillet 1979 ne dispense pas l'établissement de crédit de son devoir de conseil à l'égard de l'emprunteur, en particulier lorsqu'il apparaît à ce professionnel que les charges du prêt sont excessives par rapport à la modicité des ressources du consommateur ; que le second arrêt

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attaqué a relevé que le taux d'endettement proposé par le projet de financement établi par la société Tradition et qualité et connu des établissements de crédit, était insupportable pour les époux X... qui ne disposaient que de faibles revenus ; que les prêteurs ne justifiaient pas, ni même n'alléguaient avoir mis en garde les emprunteurs sur l'importance de l'endettement qui résulterait de ces prêts ; que la cour d'appel a pu en déduire que les établissements de crédit avaient manqué à leur devoir de conseil et engagé leur responsabilité envers les époux X... ;

D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;

Sur le second moyen du pourvoi principal : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident.

Doc. 12 : Cass. Civ, 1ère, 8 juin 2004, n°02-12185.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Bordeaux, 23 janvier 2001), qu'ayant interjeté appel du jugement ayant prononcé le divorce à ses torts en le condamnant à payer à son épouse une prestation compensatoire, M. X... a signifié, le 1er décembre 1999, des conclusions tendant au prononcé du divorce aux torts de Mme Y... et à la suppression de la prestation compensatoire ; que le conseiller de la mise en état ayant informé les parties que la clôture serait prononcée le 22 novembre 2000, celle-ci a signifié ses conclusions le 21 novembre 2000 ; que M. X... a demandé que de telles conclusions, en raison de leur tardiveté, soient écartées des débats ;

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande alors, selon le moyen, que le juge ne peut écarter des débats des conclusions déposées la veille de l'ordonnance de clôture sans préciser les circonstances particulières qui ont empêché de respecter le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, pour écarter les conclusions déposées le 21 novembre 2000 par elle dans la procédure de divorce l'opposant à M. X..., la cour d'appel se borne à invoquer les dispositions des articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile sans préciser les circonstances particulières qui auraient empêché le respect de la contradiction alors que Mme Y... sollicitait la confirmation du jugement sur le fond ; qu'ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 15, 779 et 783 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les conclusions de l'intimée tendaient à l'attribution d'une prestation compensatoire plus élevée que celle fixée en première instance et qu'en raison de leur signification la veille de l'ordonnance de clôture, l'appelant n'avait pas été en mesure d'y répondre, la cour d'appel a caractérisé les circonstances particulières ayant empêché le respect du principe de la contradiction et décidé à bon droit que de telles conclusions devaient être écartées des débats ;

Que le moyen ne peut qu'être rejeté ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Doc. 13 : Cass. Civ, 1ère, 12 juillet 2005, n°03-10.921, Bull Civ I, n°327, Banque & Droit, n°104, nov-dec. 2005, p.80, T Bonneau, JCP E, 2005, 1359, D Lageais, JCP G 2005, II, 1014à0, A Gourio – Devoir de mise en garde du banquier.

Attendu que, par acte authentique des 15 et 21 octobre 1988, la Banque nationale de Paris, aujourd'hui dénommée BNP Paribas (la banque), a consenti à M. et à Mme X... un prêt de la somme de 357 000 francs, au taux effectif global de 10,6 % l'an, remboursable en 240 mensualités progressives, à l'effet de financer l'acquisition d'une maison d'habitation destinée à être donnée en location ; qu'en raison de la défaillance des époux X..., la banque a, le 18 juin 1998, fait délivrer à ces derniers un commandement aux fins de saisie immobilière de ce bien ; que, le 10 novembre 1998, les époux X... ont assigné la banque en annulation dudit prêt, à défaut en paiement à titre de dommages-intérêts, pour octroi fautif de celui-ci, d'une somme égale au montant de leur dette ;

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Sur le premier moyen du pourvoi principal des époux X... :

Attendu que les époux X... reprochent à l'arrêt attaqué (Paris, 9 avril 2002) d'avoir déclaré prescrite l'action en annulation du prêt litigieux alors, selon le moyen, "qu'en application de l'article 1304 du Code civil, l'exception de nullité est perpétuelle ; qu'il résultait des conclusions prises en appel, comme devant le tribunal de grande instance, que l'action engagée par les époux X..., par exploits des 15 et 21 octobre (en réalité 10 novembre) 1998, tendait à la nullité du prêt ayant donné lieu à un commandement immobilier délivré par la banque le 18 juin 1998 et constituait ainsi une exception de nullité, par là-même, perpétuelle ; qu'en opposant la prescription quinquennale à une exception de nullité d'un prêt bancaire, les juges du fond ont violé les articles 1304 du Code civil et L. 212-1 et suivants du Code de la consommation d'ordre public" ;

Mais attendu que la règle selon laquelle l'exception de nullité est perpétuelle ne peut être invoquée par l'emprunteur qui agit en annulation du prêt, fût-ce en réponse à un commandement aux fins de saisie immobilière du bien dont l'acquisition a été financée par ce prêt ;

que le grief n'est donc pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de la banque :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir retenu sa responsabilité alors, selon le moyen, qu'en statuant comme elle a fait "sans rechercher si le prêt litigieux avait été sollicité par les emprunteurs et sans constater que la banque aurait eu sur leur situation financière et les risques de l'opération financée des informations qu'eux-mêmes auraient ignorées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions de l'article 1147 du Code civil" ;

Mais attendu qu'après avoir analysé les facultés contributives des époux X..., en tenant compte notamment des revenus produits par la location de la maison achetée au moyen du prêt litigieux, la cour d'appel, constatant que les emprunteurs ne pouvaient faire face aux échéances de ce prêt avec leurs revenus locatifs, non plus qu'avec leurs très modestes ressources, a retenu que la banque avait méconnu ses obligations à l'égard de ces emprunteurs profanes en ne vérifiant pas leurs capacités financières et en leur accordant un prêt excessif au regard de leurs facultés contributives, manquant ainsi à son devoir de mise en garde ; qu'elle a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le second moyen du pourvoi principal des époux X... :

Attendu que les époux X... reprochent encore à l'arrêt d'avoir limité la réparation du préjudice qu'ils invoquaient à la décharge du paiement des intérêts dus au titre du prêt litigieux alors, selon le moyen, "que la réparation du préjudice subi par l'emprunteur, du fait de la faute commise par la banque pour lui avoir consenti un prêt excessif par rapport à ses facultés de remboursement, consiste, outre la charge des intérêts en résultant, dans l'obligation d'avoir à le rembourser ; qu'ayant constaté la faute du banquier pour n'avoir pas recherché si, lors de l'octroi du prêt, l'emprunteur disposait de ressources lui permettant de rembourser, la cour d'appel n'a pas donné de base légale, au regard de l'article 1147 du Code civil, à sa décision qui déboute l'emprunteur de sa demande tendant à interdire à la banque de lui réclamer quelque paiement que ce soit" ;

Mais attendu que la cour d'appel a estimé qu'en réparation du préjudice né de la faute commise par la banque à l'égard des époux X..., il convenait de décharger ceux-ci des intérêts produits par la somme prêtée ; que c'est cette appréciation, qui est souveraine, que le moyen tente, en réalité, de remettre en cause ; qu'il ne peut donc être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Doc 14 : Cass. Ch Mixte, 29 juin 2007 (2 arrêts), n°05-21.104, et n°06-11.673, Bull. ch. Mixte, n°7 et 8 – Domaine du devoir de mise en garde du banquier.

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre-Est (la caisse) a consenti à M.X... pour les besoins de son exploitation agricole, entre 1987 et 1988, puis entre 1996 et 1999, seize prêts ; que des échéances étant demeurées impayées, la caisse a assigné en paiement M.X... qui a invoqué un manquement du prêteur à ses obligations ;

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Attendu que pour écarter ses prétentions, l'arrêt retient que la caisse avait accepté les dossiers de crédit après avoir examiné les éléments comptables de l'exploitation et l'état du patrimoine de M.X..., dont il ressortait que ce dernier était, au 30 juin 1998, propriétaire d'un cheptel d'une valeur dépassant le montant total des emprunts, qu'il était acquis que les trois prêts octroyés en 1987 et 1988 avaient été régulièrement remboursés jusqu'en 2000 et 2001 et qu'en dépit de la multiplicité des crédits accordés entre 1997 et 1998 qui n'était pas significative dès lors qu'elle résultait du choix des parties de ne financer qu'une seule opération par contrat, il n'était pas démontré que le taux d'endettement de M.X... qui avait d'ailleurs baissé, ait jamais été excessif, l'entreprise n'étant pas en situation financière difficile, que M.X... ne rapporte pas la preuve que les crédits auraient été disproportionnés par rapport à la capacité financière de l'exploitation agricole et que l'établissement bancaire qui consent un prêt n'est débiteur d'aucune obligation à l'égard du professionnel emprunteur ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser si M.X... était un emprunteur non averti et, dans l'affirmative, si, conformément au devoir de mise en garde auquel elle était tenue à son égard lors de la conclusion du contrat, la caisse justifiait avoir satisfait à cette obligation à raison des capacités financières de l'emprunteur et des risques de l'endettement né de l'octroi des prêts, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE (…)

Doc 15 : Cass.1ère Civ, 30 avril 2009, n°07-18.334, Bull Civ, I, N°85 – Conditions de qualification de l’emprunteur non averti.

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu que, reprochant au Crédit lyonnais de lui avoir consenti deux prêts dont le remboursement, garanti par le cautionnement solidaire de son ex-mari, M. X..., excédait ses facultés contributives, Mme Y... l'a assigné en réparation du préjudice né de cette faute ;

Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt attaqué retient que, bénéficiant lors de l'octroi des prêts litigieux de l'assistance de M. X..., présenté comme exerçant les activité ou profession de conseil ou consultant financier, Mme Y... était en mesure d'obtenir de celui-ci toutes les informations utiles à l'appréciation de l'opportunité et de la portée de l'engagement qu'elle contractait, de sorte qu'à supposer qu'elle n'ait pas disposé elle-même des compétences nécessaires pour porter seule une telle appréciation, elle ne pouvait se présenter comme une emprunteuse profane, partant rechercher la responsabilité du Crédit lyonnais pour avoir manqué au devoir de mise en garde auquel celui-ci n'était pas tenu à son égard ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que la banque qui consent un prêt à un emprunteur non averti est tenu à son égard, lors de la conclusion du contrat, d'un devoir de mise en garde en considération de ses capacités financières et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt, dont elle ne peut être dispensée par la présence au côté de l'emprunteur d'une personne avertie, peu important qu'elle soit tiers ou partie, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE (…)

Doc 16 : Cass.1ère Civ, 21 février 2006, n°02-19066 – Risques d’endettement.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1147 du Code civil ;

Attendu que le Crédit lyonnais a consenti aux époux Y..., le 20 juillet 1993, un prêt de 300 000 francs en vue de financer des travaux dans leur résidence principale et, le 25 mai 1994, un prêt de 190 000 francs destiné à l'acquisition d'un appartement à usage locatif ;

qu'à la suite de mensualités impayées, le Crédit lyonnais a assigné les époux Y... en paiement des sommes restant dues ; que les emprunteurs ont invoqué un manquement du prêteur à son obligation de conseil ;

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Attendu que pour accueillir la demande du Crédit lyonnais, l'arrêt attaqué relève que les échéances avaient été payées pendant plusieurs années, que si M. Y..., licencié depuis février 1993 pour cause économique, avait compte-tenu de son âge peu de chances de retrouver un emploi et si le taux d'endettement à la suite des prêts était à l'extrême limite de l'acceptable, les époux Y... étaient cependant propriétaires, hormis leur habitation principale, de plusieurs immeubles d'une valeur de 1 000 000 francs, d'un portefeuille de valeurs mobilières d'une valeur en mars 1994 de 425 682 francs selon les appelants et du double selon la banque et que le second prêt était destiné à un investissement locatif ; que même si la banque avait pris en accordant les prêts un risque élevé, à la limite de ce qui était raisonnable, il n'était pas suffisamment démontré qu'elle avait commis une faute ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si les époux Y... pouvaient être considérés comme des emprunteurs avertis et, dans la négative, si la banque les avait alertés sur l'importance de ce risque et avait ainsi rempli son devoir de mise en garde, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche :

CASSE ET ANNULE (…)

Doc 17 Cass. 1ère Civ, 14 janvier 2010, n°08-18033 – Risques d’endettement.

Sur le moyen unique pris en ses deux branches : Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué (tribunal d'instance de Perpignan, 15 février 2008) d'avoir condamné M. X... à payer à la société des paiements Pass une somme de 1 884,70 euros représentant le solde restant dû au titre d'un crédit renouvelable alors, selon le moyen : 1°/ que la banque qui accorde un prêt à un emprunteur non averti est tenue à son égard d'une obligation de mise en garde qui lui impose de vérifier ses capacités financières avant d'apporter son concours et de l'informer du risque de l'endettement né de l'octroi du prêt ; qu'en l'espèce, pour décider que la banque n'avait pas commis de faute contractuelle, le tribunal s'est borné à établir la réalité de sa fragilité psychique et de sa situation économique à la date de souscription des crédits concernés ; qu'en se prononçant de la sorte, sans préciser si M. X... était un emprunteur non averti et, dans l'affirmative, si conformément au devoir de mise en garde auquel elle était tenue à son égard lors de la conclusion des contrats, la banque justifiait avoir satisfait à cette obligation au regard des capacités financières de l'emprunteur et du risque de l'endettement né de l'octroi des prêts, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ; 2°/ qu'il appartient au banquier de rapporter la preuve qu'il a satisfait à cette obligation de mise en garde ; qu'en l'espèce, en mettant à la charge de l'emprunteur la preuve de sa fragilité psychique et de sa situation économique à la date de souscription des crédits concernés, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ; Mais attendu que le tribunal, devant lequel M. X... reprochait à la société des paiements Pass un manquement à son devoir de mise en garde en invoquant sa situation économique précaire au moment de l'octroi des crédits, a relevé qu'il ne produisait aucun document ou élément de nature à établir la réalité de sa situation économique à la date de la souscription des crédits concernés ; que faute d'avoir mis le tribunal en mesure de constater l'existence d'un risque d'endettement qui serait né de l'octroi de la somme prêtée, M. X... n'est pas fondé à lui reprocher d'avoir omis de procéder à une recherche que l'argumentation développée devant lui n'appelait pas ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Doc 18. Cass. Com, 20 octobre 2009, n°08-20274 – Préjudice subi du fait du manquement à l’obligation de mise en garde.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse de crédit mutuel Laval Trois Croix (la caisse) a consenti à

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Mme X... un prêt de 87 658,18 euros en vue du financement d'un fonds de commerce, prêt dont Mme Y..., sa mère, s'est rendue caution ; qu'en raison de la défaillance de Mme X..., la caisse a assigné Mme Y... en exécution de son engagement ; que cette dernière a invoqué un manquement de la caisse à son obligation de mise en garde ;

Sur le moyen, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches

Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu que le préjudice né du manquement par un établissement de crédit à son obligation de mise en garde s'analyse en la perte d'une chance de ne pas contracter ;

Attendu que pour condamner la caisse à payer à Mme Y... une indemnité égale au montant de la dette, l'arrêt retient que le préjudice découlant du manquement de la caisse à son devoir de mise en garde envers Mme Y... consiste pour celle-ci à devoir faire face au remboursement du prêt consenti à Mme X... à concurrence du montant de son engagement ;

Attendu qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE (…)

Doc 19. Cass.Com, 26 janvier 2010 – Point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité contre la banque.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 juin 2008), que le Crédit lyonnais et le Crédit foncier de France (les banques) ont consenti par acte notarié deux crédits, respectivement les 31 mai 1988 et 27 novembre 1991, à Mme X... et ses deux enfants, Guy et Margaret X... (les consorts X...) ; qu'à la suite du non paiement des échéances, les banques ont poursuivi les consorts X... en paiement et obtenu leur condamnation ; qu'en février 2004, ces derniers ont assigné M. Y..., leur notaire, et les banques pour manquement, le premier, à son devoir de conseil, et les secondes, à leurs obligations de conseil, d'information et de mise en garde ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite l'action en responsabilité engagée en 2004 à l'encontre des banques, tendant à la réparation du préjudice causé par le manquement de ces dernières à leur obligation de conseil lors de l'octroi du prêt et de l'ouverture de crédit, alors, selon le moyen, que le point de départ de l'action en responsabilité contractuelle dirigée contre un établissement bancaire à raison d'un manquement à son devoir de mise en garde n'est pas le jour où le manquement a été commis, mais le jour où le dommage qui en est résulté pour le client, ou l'aggravation de ce dommage, se sont manifestés ; que la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil ;

Mais attendu que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; que le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter se manifeste dès l'octroi des crédits ; qu'ayant ainsi retenu que l'inexécution alléguée s'était manifestée, à la date de conclusion des contrats, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action engagée en février 2004 à l'encontre des banques par les consorts X... était prescrite ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite l'action en responsabilité engagée en 2004 à l'encontre de M. Y..., rédacteur de l'acte, en réparation du préjudice causé par le manquement du notaire à son obligation de conseil lors de l'octroi par actes authentiques, d'un prêt le 31 mai 1988, et d'une ouverture de crédit le 27 novembre 1991 :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en confondant fait générateur du dommage et dommage lui-même, la cour d'appel a violé l'article 2270-1 du code civil ;

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2°/ qu'en cas de manquement d'un établissement bancaire à son devoir de mise en garde, ou d'un notaire à son devoir de conseil, la manifestation du dommage ne peut pas résulter d'un simple incident de paiement, mais de la constatation de la déconfiture du débiteur et de ce que son patrimoine, dans son ensemble, ne peut satisfaire à des engagements financiers excessifs ; que, faute d'avoir recherché et constaté à quel moment précis ce diagnostic avait pu être fait par les consorts X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2270-1 du code civil ;

3°/ que la cour d'appel ne pouvait pas, sans priver sa décision de base légale au regard de l'article 2270-1 du code civil, infirmer le jugement qui avait écarté la prescription, sans s'expliquer sur le motif des premiers juges qui avaient retenu l'existence d'une aggravation du dommage lors du commandement de saisie immobilière du 30 décembre 1999 ;

Mais attendu qu'ayant constaté que des mises en demeure de payer avaient été adressées aux consorts X... dès 1992, ce dont il résultait que le dommage s'était révélé dès cette époque, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action en responsabilité engagée à l'encontre du notaire était prescrite ; que le moyen, qui manque en fait dans sa troisième branche, ne peut être accueilli pour le surplus ;

Et sur le second moyen, en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite l'action dirigée contre

les banques en réparation du préjudice causé par leur manquement à leur devoir de conseil :

Mais attendu que le moyen critique un motif qui n'est pas le soutien du dispositif déclarant prescrite

l'action engagée à l'encontre des banques ; que le moyen n'est pas recevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Doc 20. Cass. Com, 3 mai 2006, n°04-19315 – Reconnaissance de l’obligation de mise en garde à l’égard de la caution non avertie.

Attendu, selon l'arrêt déféré et les productions, que, par acte notarié du 16 mai 1991, la société Natiocrédibail (la crédibailleresse) a consenti un crédit-bail destiné au financement de l'acquisition d'un terrain et de la construction d'un bâtiment à usage commercial à la SCI X... (la SCI) ; que le capital de cette dernière était réparti entre M. X..., son dirigeant, Mme Eliane X... et Mme Isabelle X... (les consorts X...), chacun détenteur de 30 parts ; que les dix autres parts étaient détenues par la SA X..., dirigée par Mme Eliane X... qui détenait avec son mari la majorité des actions, leur fille Isabelle X... étant titulaire d'une action ; que la SCI a donné à bail à la société X... les locaux dans lesquels les consorts X... exploitaient le fonds d'hôtel-restaurant ; que le règlement des redevances du contrat de crédit-bail a été garanti par le cautionnement solidaire des consorts X..., le nantissement des parts détenues par ces derniers à concurrence de 1 000 000 francs et le versement en compte courant d'associé de 1 800 000 francs dans les livres de la société X... ;

qu'en outre, M. X... était propriétaire d'un patrimoine immobilier important ; que la SCI a été mise en liquidation judiciaire ; que la crédit-bailleresse a demandé aux consorts X... d'exécuter leurs engagements de caution ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de nullité du contrat de crédit-bail conclu le 16 mai 1991, fixé la créance de crédit-bailleresse au passif de la SCI à la somme de 2 575 318,01 euros, sauf réduction éventuelle, et de les avoir condamnés en qualité de cautions, alors, selon le moyen, qu'il était soutenu que la SCI, prise en la personne de ses représentants légaux, s'était méprise, par suite d'une erreur provoquée, quant aux conditions dont la mise en oeuvre du droit de résiliation unilatérale était assortie et que la méprise n'a été découverte que lors de la signature des avenants intervenus les 27 avril 1994 et 28 juin 1996 ; qu'en s'abstenant de préciser à quelle date l'erreur invoquée avait été découverte, de manière à fixer correctement le point de départ du délai de cinq ans, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1304 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt constate que le bien dont le financement a été assuré par le crédit-bail litigieux a été acquis le jour même de la souscription de ce contrat et que les locaux ont été exploités à compter du 28 janvier 1992, que les loyers avaient été acquittés jusqu'en 1997 et que l'exception de

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nullité n'a été soulevée que par conclusions du 8 décembre 1999 ; qu'il relève que la clause de résiliation anticipée était connue dès la signature du contrat ; que, par ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a implicitement mais nécessairement écarté l'existence de manoeuvres dolosives susceptibles de différer le point de départ de la prescription, a exactement retenu que la prescription quinquennale était acquise à la date à laquelle elle a été soulevée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les consorts X... font encore grief à l'arrêt de les avoir condamnés à payer à la crédit-bailleresse la somme de 2 288 884,92 euros, sauf réduction éventuelle, alors, selon le moyen :

1 / que le banquier ou l'établissement financier commet une faute s'il exige des cautions, fussent-elles dirigeantes, des engagements sans rapport de proportion avec leurs possibilités financières ; qu'en décidant le contraire, motif pris de ce que M. et Mme X... étaient dirigeants et associés de la SCI, les juges du fond ont violé les articles 1134, alinéa 3, 1137, 1147 et 2011 du Code civil ;

2 / qu'en toute hypothèse, faute d'avoir recherché si l'établissement financier n'avait pas manqué à son obligation d'information en omettant d'alerter les cautions sur l'étendue de leurs engagements, peu important qu'ils fussent dirigeants ou associés de la SCI, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134, alinéa 3, 1137, 1147 et 2011 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient que les époux X... se sont engagés dans une opération commerciale importante à laquelle ils étaient directement impliqués et qu'ils ne démontrent pas que la crédit-bailleresse ait eu sur leur situation et leurs facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l'état du succès escompté de l'opération entreprise par la SCI des informations qu'eux-mêmes auraient ignorées ; qu'en l'état de ces constatations, dont il se déduisait que les intéressés détenaient toutes les informations utiles pour leur permettre d'apprécier la portée des engagements qu'ils souscrivaient, la cour d'appel a pu décider, sans encourir les griefs du moyen, que la crédit-bailleresse n'était tenue d'aucun devoir de mise en garde à l'égard de ces cautions ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 1147 du Code civil ;

Attendu que pour dire Mme Isabelle X... non fondée à rechercher la responsabilité de la crédit-bailleresse, l'arrêt retient que cette dernière dispose de 30 des 100 parts de la SCI familiale et d'une action de la société d'exploitation, qu'elle ne prétend pas que la société Natiocrédibail aurait eu sur ses revenus, son patrimoine et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l'état du succès escompté de l'opération entreprise des informations qu'elle-même aurait ignorées et qu'elle ne peut prétendre ne pas avoir eu connaissance de la nature et de la portée de son engagement ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, eu égard à son âge lors de l'engagement litigieux, à sa situation d'étudiante et à la modicité de son patrimoine, l'engagement souscrit par Mme Isabelle X..., qui n'exerçait aucune fonction de direction, ni aucune responsabilité au sein de la SCI n'était pas hors de proportion avec ses facultés financières et si, de ce fait, la crédit-bailleresse n'avait pas manqué à son devoir de mise en garde à l'égard de cette caution, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :CASSE ET ANNULE (…)

Doc 21. Cass. Com, 27 novembre 2012, n°11-25967 – Notion de caution non avertie.

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 9 août 2011), que la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire (la caisse) a consenti trois concours à la société VKRS (la société) dont M. et

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Mme X..., qui en étaient les cogérants et associés, se sont respectivement rendus cautions solidaires, pour un certain montant ; que la société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la caisse, après avoir déclaré sa créance, a assigné en exécution de leurs engagements M. et Mme X... qui ont recherché sa responsabilité pour manquement à ses obligations d'information et de mise en garde ; Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. et Mme X... la somme de 50 000 euros à chacun, à titre de dommages-intérêts et ordonné la compensation de ces créances avec les siennes, alors, selon le moyen, qu'un établissement de crédit n'est tenu d'aucun devoir de mise en garde à l'égard d'une caution avertie ; que l'associé gérant de la société cautionnée doit être considéré comme une caution avertie ; qu'en énonçant que la qualité de caution avertie de M. et Mme X... «ne saurait résulter de leur seul statut par la banque allégué de dirigeant de la société», débitrice principale des prêts cautionnés par M. et Mme X..., lorsqu'il est constant que ces derniers étaient les associés gérants de la société, ce dont il résultait qu'ils avaient la qualité de caution avertie, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des pièces et des éléments de preuve, que la qualité de caution avertie ne saurait résulter du seul statut allégué par la banque de dirigeants de la société de M. et Mme X..., cependant qu'il n'est pas démontré qu'ils avaient une compétence particulière en matière financière les qualifiant pour mesurer les enjeux et les risques de l'opération dans laquelle ils s'engageaient; qu'ayant ainsi estimé que M. et Mme X... étaient des clients non avertis de sorte que la caisse aurait dû les informer au moment de la signature des cautionnements, du caractère excessif des concours eu égard à leurs capacités financières, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire que la banque avait manqué à son obligation de mise en garde; que le moyen n'est pas fondé,

Et attendu que le moyen, pris en ses première, deuxième, troisième et cinquième branches, ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

LE PRINCIPE ET LES LIMITES DE LA RESPONSABILITE DU BANQUIER : OCTROI DU CREDIT A UNE ENTREPRISE EN DIFFICULTE

Doc 22 : Cass.1ère Civ, 4 juillet 1995, n°93-16822 – Crédit excessif

Sur le premier moyen :

Attendu que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Bouches-du-Rhône, devenu Crédit agricole Alpes-Provence, (la Caisse) fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 mai 1993) de l'avoir déclarée responsable pour moitié de l'endettement de Mme X..., à raison des prêts qu'elle a octroyés à cette dernière, alors, selon le moyen, d'une part, que les faits juridiques doivent être prouvés par celui qui en allègue l'existence ;

qu'il en est de l'usage ;

qu'en l'espèce, en énonçant qu'il convient d'examiner la responsabilité du banquier au regard de l'usage reconnu et pratiqué par tout le système bancaire, en matière de prêt aux particuliers, selon lequel l'endettement ne doit pas dépasser le tiers des ressources de l'emprunteur, les juges du fond qui ne relèvent aucun élément de preuve constatant l'existence de cet usage ont violé les articles 1315 du Code civil et 9 du nouveau Code de procédure civile ;

alors enfin, que l'usage conventionnel suppose nécessairement constaté qu'il ait été accepté par toutes les parties contractantes, l'insérant par là -même dans la convention ;

qu'en affirmant l'existence d'un usage reconnu et pratiqué par tout le système bancaire en matière de prêt aux particuliers selon lequel l'endettement ne doit pas dépasser le tiers des ressources de l'emprunteur, sans aucunement constater que ce prétendu usage ait été accepté par Mme X... lors de

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la conclusion des prêts, les juges du fond ont violé l'article 1135 du Code civil, ensemble les articles 1134 dudit Code et 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que le juge du fond apprécie souverainement l'existence d'un usage, dont il n'est pas tenu de préciser les éléments ni de constater l'intention dans une convention ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la Caisse fait encore grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel n'a pas pris en considération, ainsi que le faisait valoir la Caisse, le fait que Mme X... avait volontairement occulté la baisse de ses revenus en vue d'obtenir de nouveaux concours financiers, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

alors d'autre part que les juges du fond doivent caractériser l'existence d'un préjudice ;

qu'en l'espèce, en condamnant la Caisse à supporter la moitié du passif dû par Mme X..., sans préciser le préjudice subi par cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

alors enfin, que la caisse avait fait valoir que Mme X... avait sciemment continué à s'endetter cependant que ses revenus diminuaient plutôt que de se défaire du bien immobilier qu'elle venait d'acquérir ;

qu'en ne recherchant pas si ce fait n'était pas la cause de l'endettement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel, qui a constaté que, dès 1987, les charges mensuelles et Mme X... étaient supérieures au tiers de ses revenus, à une époque où la banque ne lui reprochait pas d'avoir majoré ses ressources, a souverainement constaté que cet organisme lui avait, en connaissance de cause, accordé des crédits excessifs et a pu en déduire qu'il avait agi avec une légèreté blâmable ;

Attendu, d'autre part, que la cour d'appel a jugé que la banque devait garder à sa charge la moitié de la créance de Mme X..., dont elle a chiffré le montant dans son dispositif ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à l'argument pris du refus par Mme X... de se défaire d'un bien immobilier ;

D'où il suit que le moyen non fondé en sa première branche, manque en fait dans la deuxième et est inopérant dans la troisième ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Doc 23 : Cass.Com, 10 octobre 2000, n°96-20121 – Crédit ruineux

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la banque Populaire du Midi a poursuivi en paiement Mme Y..., en sa qualité de caution de son mari, M. Y... ; que Mme Y... a invoqué la responsabilité de la banque à son égard ;

Attendu que pour retenir la faute de la banque, l'arrêt considère qu'elle devait cesser son concours en raison de l'accroissement régulier du compte courant de l'entreprise Y..., qui ne pouvait plus procéder à son remboursement et dont la situation s'aggravait ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans caractériser la situation irrémédiablement compromise dans laquelle aurait pu se trouver l'entreprise lors de l'octroi des crédits bancaires, qui aurait été, en conséquence de ces facilités, prolongée artificiellement, et qui aurait ainsi entraîné une aggravation du passif, ou sans préciser si ces crédits étaient nécessairement ruineux pour l'entreprise, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second grief :

CASSE ET ANNULE (…)

Doc 24. Cass. Com, 22 mars 2005, n°03-12922 – Soutien abusif et crédit ruineux

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Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., client du Crédit industriel de l'Ouest (la banque) depuis 1985 et courtier en assurance depuis 1990, a obtenu, pour son financement professionnel, des concours successifs de la banque auxquels celle-ci a mis fin en juin 1995 ; que M. X... a été mis en redressement puis liquidation judiciaires en janvier et février 1997 ; que faisant valoir que la banque, par l'octroi de crédits abusifs, avait artificiellement concouru à l'aggravation du déficit de M. X... et maintenu une fausse apparence de solvabilité de nature à induire en erreur d'autres créanciers, Mme Y..., liquidateur judiciaire de M. X..., a assigné la banque en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que pour retenir la responsabilité de la banque, l'arrêt relève que dès 1991, lorsqu'elle a accordé les concours litigieux, elle avait connaissance des difficultés de l'entreprise, que le fonctionnement des comptes avait entraîné des agios de plus en plus importants, que les échéances de prêts n'ont plus été payées à partir de mars 1994 ; qu'il relève encore que la banque a cumulé les garanties, ce qui confirmait la connaissance par elle de la situation compromise de son client et qu'elle a enfin rompu ses crédits lorsqu'elle a pris conscience de la ruine de son client en juin 1995 ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à faire apparaître que la banque avait ou bien pratiqué une politique de crédit ruineux pour l'entreprise devant nécessairement provoquer une croissance continue et insurmontable de ses charges financières, ou bien apporté un soutien artificiel à une entreprise dont elle connaissait ou aurait dû connaître, si elle s'était informée, la situation irrémédiablement compromise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que pour condamner la banque à payer la totalité de l'insuffisance d'actif de son client, sans exclure du préjudice mis à sa charge les créances nées antérieurement à 1993, l'arrêt retient que la banque aurait dû cesser ses concours après 1993 au motif, à supposer la faute caractérisée, qu'elle avait soutenu artificiellement l'activité de M. X... et, en concourant à l'aggravation de son déficit, maintenu ainsi une fausse apparence de solvabilité de nature à induire en erreur d'autres créanciers ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'établissement de crédit qui a fautivement retardé l'ouverture de la procédure collective de son client n'est tenu de réparer que l'aggravation de l'insuffisance d'actif qu'il a ainsi contribué à créer, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE (..)

Doc 25. Cass. Com, 25 avril 2006, n°04-17642 – Notion de crédit ruineux

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 10 juin 2004), que, par acte du 11 janvier 1990, la société Simvest a acquis un immeuble, en vue, après sa démolition, de construire un nouvel ensemble immobilier ;

que, par courrier du 27 janvier 1990, la société Le Jardin de Neuilly, locataire de l'immeuble, a informé la société Simvest de son intention de procéder à la rénovation de cet immeuble ; que la société Simvest a, le 26 mars 1990, fait délivrer au locataire un "congé pour démolir et reconstruire" pour le 1er octobre 1991, date d'expiration de la deuxième période triennale du bail ; que, par lettre recommandée du 24 avril 1990, la société Le Jardin de Neuilly a notifié à la société Simvest, dans les termes de l'article 2 de la loi du 1er juillet 1964 modifiant les rapports entre les bailleurs et les locataires des immeubles affectés à l'hôtellerie, son projet d'entreprendre d'importants travaux d'équipement et d'amélioration, estimés à un montant d'environ 9 000 000 francs TTC ;

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que ces travaux devaient être financés par des prêts obtenus par la société Le Jardin de Neuilly auprès des banques Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises (CEPME), Société générale et Bred Banque populaire pour un montant global de plus de dix millions de francs ; que, le 18 juin 1990, la société Simvest a notifié à la société Le Jardin de Neuilly son refus de donner son accord et a fait assigner, le 21 octobre 1994, outre cette société, le CEPME, la Société générale et la Bred en vue de voir, par un jugement opposable à la locataire, condamner in solidum les trois banques à l'indemniser du préjudice subi du fait des crédits injustifiés accordés fautivement par ces banques à la société Le jardin de Neuilly ;

Attendu que la société Simvest fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande dirigée contre les banques en réparation du préjudice qu'elle avait subi de leur fait, alors, selon le moyen :

1 / que le caractère ruineux du crédit accordé par une banque, partant la faute de cette dernière, s'apprécie au moment de l'octroi des prêts litigieux ; qu'en se bornant, pour dire que les établissements bancaires n'avaient pas commis de faute, à relever que la SNC Le Jardin de Neuilly poursuivait encore aujourd'hui son activité, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et, partant, privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

2 / que, dans ses conclusions devant la cour d'appel, la société SIMVEST faisait valoir qu'à la date de l'octroi des prêts litigieux, la SNC Le Jardin de Neuilly n'avait pas les moyens de procéder aux remboursements des prêts qui lui étaient ainsi consentis ; qu'à l'appui de ses dires, elle rappelait l'état des inscriptions de l'URSSAF et du Trésor public prises à l'encontre de la société, l'importance de ses pertes d'exploitation et encore que seuls les remises et délais accordés par les banques avaient permis un quelconque remboursement ; qu'en retenant le caractère non fautif du crédit accordé, sans s'expliquer sur le moyen des conclusions de la société SIMVEST faisant état de ce que l'emprunteuse n'avait pas, à la date d'octroi des prêts, la capacité de les rembourser, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé que les prêts avaient été consentis dans le courant 1991 et en 1992, l'arrêt retient que, depuis, la société Le Jardin de Neuilly a poursuivi normalement ses activités, son bénéfice d'exploitation ayant été en forte hausse en 1996 et 1997 avec l'apparition d'un bénéfice net, et que les prêts octroyés lui ont permis d'améliorer la rentabilité de son exploitation hôtelière ; qu'ayant ainsi fait ressortir, d'un côté, que la situation de la société Le Jardin de Neuilly n'était pas irrémédiablement compromise lors de l'octroi des prêts et, d'un autre, que les crédits consentis n'étaient pas, au moment de leur octroi, de nature à provoquer inéluctablement une croissance insurmontable des charges financières de la société, puisque la rentabilité de celle-ci s'est rétablie, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, et qui a répondu en l'écartant au grief de la deuxième branche, a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Doc 26. Cass. Com, 11 mai 1999, n°96-16088 – Notion de soutien abusif

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la BNP a consenti à M. X..., pour le financement de son entreprise individuelle de culture de champignons, qui rencontrait diverses difficultés, un découvert, dont le montant s'est considérablement accru, ainsi qu'un prêt destiné à réduire partiellement ce découvert ; que Mme X... s'est portée caution ; que poursuivis en remboursement de ces crédits, M. et Mme X... ont, pour leur défense, invoqué la responsabilité de la banque à leur égard, dont les crédits étaient excessifs eu égard aux capacités de l'entreprise ;

Sur le premier moyen pris en sa première branche :

Vu l'article 1147 du Code civil ;

Attendu que, pour retenir la responsabilité de la banque dans l'octroi d'un découvert excessif en compte courant, l'arrêt, après avoir relevé que le déficit de l'entreprise est né à la suite d'un achat de semences défectueuses en 1984 et de l'absence consécutive de toute récolte, retient que la banque ne pouvait ignorer, en 1987, que la situation de M. X... était " très obérée " ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs sans relever que la banque savait que la situation de l'entreprise était irrémédiablement compromise, et sans rechercher, dans le cas où elle l'aurait été, si,

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par suite de circonstances exceptionnelles, M. X... l'ignorait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 1147 du Code civil ;

Attendu que, pour retenir la responsabilité de la banque dans l'octroi du prêt de restructuration, l'arrêt retient que ce prêt a été consenti sans établissement d'un plan de financement sérieux qui aurait démontré à la banque " l'inopportunité " de celui-ci ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs alors qu'elle relevait que le prêt avait été demandé par M. X... et que le banquier n'a pas à s'immiscer dans la gestion des affaires de son client, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE (…)

Doc 27. Cass. Com, 28 juin 2005, n°03-17311 – Connaissance de la situation irrémédiablement compromise de l’entreprise

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 3 juin 2003), que le Crédit industriel de l'Ouest (la banque) a financé un marché de travaux dont sa cliente, la société Maçonnerie varadaise (la société SMV) était attributaire, en lui accordant des avances en contrepartie de cessions de créances professionnelles, entre le 2 mars et le 15 septembre 1992 ; que cette dernière à été mise en liquidation judiciaire le 17 septembre suivant ; que M. X..., liquidateur judiciaire de la société SMV (le liquidateur), a recherché la responsabilité de la banque pour soutien artificiel de crédit en invoquant notamment, son absence de diligence pour s'informer de la situation irrémédiablement compromise de la société SMV ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer au liquidateur la somme de 465 124 euros en principal à titre de dommages-intérêts, alors selon le moyen :

1 / que n'est pas fautif l'octroi ou le maintien de son concours par la banque qui, faisant preuve d'une diligence normale, ne pouvait connaître la situation obérée de la débitrice principale ; qu'en l'espèce, en imputant à la banque le fait d'avoir quadruplé le concours bancaire apporté à la société SMV, à compter du mois de mai 1992, sans constater que cette augmentation était disproportionnée par rapport au montant du marché de travaux qu'elle était destinée à financer et bien qu'il résultât des constatations des premiers juges - expressément reprises par l'exposant - non-démenties par l'arrêt, que jusqu'au début du mois de juillet 1992, le compte courant de la société SMV, honorablement connue dans la région pour son travail et sa probité, avait fonctionné de façon parfaitement normale, que les cessions de créances des 2, 31 mars et 27 avril 1992 avaient été intégralement réglées par le débiteur cédé et que les créanciers privilégiés de la société SMV, notamment l'URSSAF et le Trésor public, ayant apparemment omis de publier leurs créances privilégiées au greffe du tribunal de commerce, n'avaient nullement cherché à les recouvrer ou à alerter les partenaires de la débitrice, ce dont il résultait nécessairement qu'au moment de l'augmentation accordée, la banque ne pouvait pas connaître la situation obérée de sa cliente, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la faute retenue, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;

2 / qu'il était constant que le bilan comptable de la société SMV pour l'exercice 1990 était positif et qu'avant d'octroyer à celle-ci le crédit autoliquidatif reproché, la banque avait interrogé la société KPMG, expert-comptable de la société SMV, sur les raisons de l'absence de communication du compte de résultat arrêté au 31 octobre 1991, laquelle lui avait indiqué que, pour des raisons d'organisation administrative, l'assemblée générale extraordinaire du 30 octobre 1991 avait reporté la clôture de l'exercice 1991 au 28 février 1992 ; qu'il résulte en outre des propres constatations de l'arrêt que, compte tenu des délais usuels d'établissement des bilans, l'arrêté des comptes du 28 février 1992 n'aurait été disponible -au plus tôt- qu'à la fin du mois d'avril 1992 ; que dès lors, en affirmant que la banque avait commis une faute en augmentant son concours à compter du mois de mai 1992, sans procéder aux vérifications qu'imposaient des circonstances particulières résultant de l'absence de comptabilité régulièrement tenue, bien qu'en l'état des diligences normales accomplies par la banque, compte tenu des explications rassurantes fournies par l'expert-comptable de la société SMV et du bref délai entre la date prévue pour l'arrêté des comptes annuels et l'octroi du concours

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litigieux, rien ne lui laissait augurer le défaut de tenue de comptabilité révélé par la suite, la cour d'appel a statué par un motif impropre à caractériser la faute de l'exposant, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

3 / qu'en mettant à la charge de la banque une obligation de vigilance particulière, au motif erroné que l'accroissement sensible du volume d'affaires de la société SMV, bénéficiaire à compter de décembre 1991 d'un marché de construction de 40 logements locatifs consenti par la société Samo dont elle avait expressément constaté la réalité, représentait un risque économique patent, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

4 / qu' il résulte également des énonciations de l'arrêt que les cessions de créances litigieuses avaient été justifiées par les états de situation de travaux visés par l'architecte les 5 mars, 7 avril et 28 juillet 1992 ; que comme le soutenait la banque, le document visé par l'architecte le 28 juillet 1992 attestait de l'avancement des travaux sur la période comprise entre le 31 mars 1992 et le 27 juillet 1992 , dont le montant correspondait aux avances versées ; que dès lors, en imputant à faute à la banque un prétendu défaut de vérification des conditions d'exécution du marché de travaux cédé en garantie du concours accordé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 1382 du Code civil ;

5 / que, comme l'avait soutenu la banque, et retenus les premiers juges, la carence des principaux créanciers de la société SMV (fournisseurs, URSSAF et Trésor public) à recouvrer leurs créances et à alerter les partenaires de l'entreprise était à l'origine de l'aggravation de son passif, dès lors que leur inertie avait empêché l'ouverture d'une procédure collective dès le 15 février 1992, date à laquelle la société SMV se trouvait déjà en état de cessation des paiements du fait du non-paiement des dits créanciers, ce que -contrairement auxdits organismes- la banque n'était pas en mesure de savoir ; qu'en décidant le contraire, bien qu'elle eût constaté que la situation de la société SMV était gravement obérée des le mois de février 1992, l'URSSAF et les organismes sociaux étant impayés depuis février 1992, les fournisseurs, depuis avril 1992, et le Trésor public depuis mai 1992, ce qui justifiait que l'état de cessation des paiement soit reporté au 15 février 1992, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt constate que les avances de la banque, qui se sont élevées, entre le 29 avril et le 17 juin 1992, à un montant de 3 550 000 francs, consenties sur simple présentation de bordereaux, n'ont plus été justifiées par des situations visées par un architecte et que, malgré un incident de paiement le 10 juillet 1992, les avances de la banque se sont encore poursuivies les 28 juillet et 10 août suivant pour un montant de 1 700 000 francs ; que le montant cumulé des avances consenties a ainsi excédé la valeur de la prestation de l'entreprise de 1 491 694 francs ; qu'il constate également que ce concours, apportés à la société SMV, qui avait soudainement quadruplé, s'est maintenu à partir de mai 1992 sans que la banque, qui ne disposait que des comptes arrêtés au 30 octobre 1990, ait jamais cherché à obtenir communication des documents comptables qui auraient dû être arrêtés au 28 février 1992 après que la clôture de l'exercice a été différée de quatre mois, et qu'il n'est pas contesté qu'elle ne s'est à aucun moment inquiétée des motifs pour lesquels ces documents n'ont jamais été établis, circonstance en elle-même alarmante ; que l'arrêt relève en outre que le risque économique patent, caractérisé par le report puis le défaut d'établissement des documents du dernier exercice conjugué à l'accroissement sensible du volume des affaires d'une entreprise dont l'évolution de la situation financière était inconnue devait conduire la banque à faire preuve d'une vigilance particulière pour veiller à ce que les avances consenties ne masquent pas, par un soutien artificiel, les pertes d'exploitation que sa cliente était susceptible d'accuser ; qu'il relève enfin que le simple devoir de discernement de la banque aurait dû à tout le moins, en l'absence d'informations comptables, la conduire à se faire justifier de ce que sa cliente honorait ses dettes fiscales et sociales ;

qu'en l'état de ces seules constatations et appréciations dont elle a déduit que si la banque avait fait

preuve d'une diligence normale, en procédant aux vérifications qu'imposaient ces circonstances

particulières, elle aurait dû savoir, en mai 1992, que la situation de la société SMV était

irrémédiablement compromise, la circonstance de l'inertie procédurale des organismes sociaux et du

Trésor n'étant pas exclusive de la faute de la banque, la cour d'appel a justifié légalement sa décision ;

que le moyen, inopérant dans ses premières, deuxième, quatrième et cinquième branches est non fondé

pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

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Doc. 28 : Cass. Com, 27 février 2007, n°06-13649 – Préjudice causé par le soutien abusif – responsabilité solidaire des créanciers.

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société coopérative agricole Agrinieul que sur le pourvoi incident relevé par Mme X..., ès qualités ;

Attendu, selon l'arrêt déféré rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 28 septembre 2004, pourvoi n° 01-13.528), que la société des établissements Joubert et la société Deux Sévrienne de pâtisserie et de panification ont été mises en redressement puis liquidation judiciaires les 1er décembre 1995 et 26 janvier 1996 ; que le liquidateur, Mme X..., a engagé contre la société coopérative agricole Agrinieul (la coopérative), leur fournisseur de farine, une action en responsabilité pour soutien abusif ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que le moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Et sur la première branche du moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que le moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur la seconde branche du moyen :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que pour confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la coopérative à payer à Mme X..., ès qualités, la somme de 5 000 000 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que le soutien abusif dont la coopérative s'est rendue responsable s'est inscrit dans un mouvement d'ensemble beaucoup plus large impliquant des créanciers institutionnels et des services publics, que la responsabilité de la coopérative n'est pas entière et doit être limitée en raison de la cause extérieure qu'a constituée l'engagement des créanciers institutionnels, et qu'en mettant à la charge de la coopérative la moitié du préjudice, le tribunal a fait une juste appréciation de la part de responsabilité qui lui est imputable dans le préjudice ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la coopérative qui avait fautivement retardé l'ouverture de la procédure collective était tenue de réparer l'intégralité de l'aggravation de l'insuffisance d'actif qu'elle avait ainsi contribué à créer, sauf son recours contre les autres coauteurs du même dommage, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi principal ;

CASSE ET ANNULE (..)

Doc 29 : Cass.Com, 24 juin 2003, n°00-12566 – Cautions intégrées (cautions dirigeantes et associées) Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société BSC (la société) était titulaire d'un compte dans les livres de la Société générale (la banque) dont le solde débiteur s'est aggravé à compter de janvier 1984 ; que, par actes séparés du 12 juillet 1984, les époux X... et les époux Y..., actionnaires de la société dirigée par Mme X..., se sont portés cautions solidaires des dettes de cette société à concurrence de 400 000 francs chacun, en principal ; qu'en octobre 1984, la banque a consenti à la société une avance de trésorerie ; que la société ayant été mise en règlement judiciaire le 21 mai 1985, puis en liquidation de biens le 24 février 1987, la banque a assigné les cautions en exécution de leurs engagements ; que, par un arrêt du 8 novembre 1989, la cour d'appel de Poitiers a condamné les époux Y... à exécuter leurs engagements de caution, a rejeté leur action en responsabilité contre la banque pour soutien abusif de crédit et a confirmé un jugement du 21 juin 1988 condamnant Mme X... à payer à la banque le solde débiteur du compte de la société à concurrence de 400 000 francs outre les intérêts ;

que les époux X... ont assigné la banque en paiement de dommages-intérêts en faisant valoir qu'elle avait abusivement soutenu la société ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

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Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en responsabilité engagée à son encontre par les époux X..., alors, selon le moyen :

1 / que l'action en responsabilité civile extracontractuelle se prescrit par dix ans à compter de la date de naissance de l'obligation et qu'à supposer démontrée l'aggravation du passif de la société par l'octroi des crédits accordés par la banque, le dommage en résultant pour les cautions aurait nécessairement été réalisé au plus tard au jour du prononcé du règlement judiciaire le 21 mai 1985, antérieur de plus de 10 ans à l'action en responsabilité des époux X... ; qu'ainsi la cour d'appel, qui a fait courir le délai à partir du jour où les cautions ont été assignées, a violé l'article 189 bis du Code de commerce ;

2 / que le point de départ du délai de prescription ne pouvant être retardé qu'en présence d'une ignorance du préjudice dont la preuve incombait à la victime, la cour d'appel, qui a constaté que, de par leurs fonctions de direction, les cautions ne pouvaient ignorer les risques des crédits demandés et accordés, a violé de plus fort l'article 189 bis du Code de commerce ;

Mais attendu que la cour d'appel, saisie d'une action en responsabilité engagée à titre principal par des cautions contre une banque pour soutien abusif de crédit, a exactement décidé que le point de départ du délai de prescription de l'article 189 bis de l'ancien Code de commerce, devenu l'article L. 110-4 du Code de commerce, doit être fixé au jour où les cautions ont su que les obligations résultant de leurs engagements étaient mises à exécution du fait de la défaillance du débiteur principal, en l'espèce le 10 avril 1986, date à laquelle l'assignation en paiement leur a été délivrée, en sorte que la prescription n'était pas acquise lorsque les cautions ont engagé leur action en responsabilité ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Poitiers le 8 novembre 1989 et déclaré recevable l'action en responsabilité engagée par les cautions pour soutien abusif de crédit, alors, selon le moyen, qu'il ressortait des termes de cet arrêt que les mêmes dettes de la société -et notamment le solde débiteur de son compte courant- avaient fait l'objet de cautionnements solidaires entre les époux Y... et X... ; que chaque codébiteur solidaire doit être considéré comme le représentant nécessaire de ses obligés, de sorte que la chose qui a été jugée à l'égard de l'un est opposable aux autres ; que les époux Y... ayant invoqué la faute de la banque dans le but de s'opposer à l'exécution de leurs engagements de caution, le dispositif de l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers les condamnant au paiement du solde débiteur du compte courant de la société emportait nécessairement rejet de leurs prétentions et que l'autorité de chose jugée s'attachant ainsi au dispositif était opposable aux époux X..., contrairement à la décision de l'arrêt qui viole les articles 1208 et 1351 du Code civil ;

Mais attendu qu'il ne résulte ni des énonciations de l'arrêt ni des conclusions de la banque que le moyen tiré de la représentation mutuelle des codébiteurs solidaires ait été soulevé devant la cour d'appel ; que, nouveau et mélangé de fait et de droit, le moyen est irrecevable ;

Mais sur les troisième et quatrième moyens, réunis :

Vu l'article 1147 du Code civil ;

Attendu que pour condamner la banque à payer des dommages-intérêts aux cautions, l'arrêt retient que celle-ci a soutenu artificiellement et abusivement l'activité de la société dès les premiers mois de 1984, et surtout en octobre 1984, et les mois qui ont suivi jusqu'au mois de mai 1985 ; qu'ainsi, elle a laissé des découverts s'accroître, puis a dispensé un crédit inapproprié au vu de l'évolution négative de la situation financière de la société, et a encore laissé des découverts se pérenniser, ceci en exigeant parallèlement, et à chaque étape matérialisant son soutien, les garanties des époux X... ; que cette faute de la banque, qui a eu pour conséquence la mise en oeuvre des engagements des époux X... et a généré l'appauvrissement de leur patrimoine, justifie le principe de la demande de dommages-intérêts qu'ils présentent ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, à la date où elle a accordé les crédits à la société BSC, la banque savait ou aurait dû savoir que la situation de celle-ci était irrémédiablement compromise et, dans le cas où elle l'aurait été, si, par suite de circonstances exceptionnelles, les époux X... l'ignoraient eu égard à leur qualité et à leurs fonctions dans la société, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE (…)

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Doc 30 : Conseil Constit, 22 juillet 2005, n°2005-522, DC

Vu la Constitution,

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel;

Vu le code de commerce ;

Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 19 juillet 2005 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi de sauvegarde des entreprises ; qu'ils contestent notamment la conformité à la Constitution de ses articles 8, 33, 108 et 126 ;

- SUR LES ARTICLES 8, 33 et 108 :

2. Considérant que l'article 8 de la loi déférée, qui modifie l'article L. 611-11 du code de commerce, instaure un privilège au bénéfice des créanciers qui consentent au débiteur un nouvel apport en trésorerie ou lui fournissent un nouveau bien ou service dans le cadre d'un accord dont l'homologation met fin à la procédure de conciliation ; que l'article 33, qui modifie l'article L. 622-17 du code de commerce, détermine, compte tenu de ce nouveau privilège, le rang des créances dans le cadre des procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire ; que l'article 108, qui insère dans le même code un article L. 641-13, détermine, compte tenu du même privilège, le rang des créances applicable dans la procédure de liquidation judiciaire ;

3. Considérant, en premier lieu, que les requérants soutiennent que ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité en établissant un privilège au profit des créances nées d'un nouvel apport en trésorerie ; qu'ils font valoir que ne bénéficieront pas de ce privilège les créances de l'Etat, des organismes de sécurité sociale et des institutions d'assurance chômage lorsqu'ils consentent des remises de dettes dans le cadre de l'accord homologué ;

4. Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;

5. Considérant que le législateur a institué le privilège contesté afin d'inciter les créanciers d'une entreprise en difficulté, quel que soit leur statut, à lui apporter les concours nécessaires à la pérennité de son activité ; qu'au regard de cet objectif, ceux qui prennent le risque de consentir de nouveaux concours, sous forme d'apports en trésorerie ou de fourniture de biens ou services, se trouvent dans une situation différente de celle des créanciers qui se bornent à accorder une remise de dettes antérieurement constituées ; qu'ainsi, le législateur n'a pas méconnu le principe d'égalité ;

6. Considérant, en second lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les auteurs des saisines, la seule circonstance que les établissements de crédit peuvent déjà facturer le risque qu'ils prennent n'entache pas d'erreur manifeste l'appréciation à laquelle s'est livré le législateur en instaurant le privilège contesté ;

7. Considérant qu'il s'ensuit que les griefs dirigés contre les articles 8, 33 et 108 doivent être écartés ;

- SUR L'ARTICLE 126 :

8. Considérant que l'article 126 de la loi déférée insère dans le code de commerce un article L. 650-1 ainsi rédigé : " Les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci. - Pour le cas où la responsabilité d'un créancier est reconnue, les garanties prises en contrepartie de ses concours sont nulles " ;

9. Considérant que, selon les requérants, cette disposition " annihile quasiment toute faculté d'engager la responsabilité délictuelle des créanciers " pour octroi ou maintien abusif de crédit ; qu'elle méconnaîtrait tant le principe de responsabilité que le droit au recours ;

10. Considérant, en premier lieu, que si la faculté d'agir en responsabilité met en oeuvre l'exigence constitutionnelle posée par les dispositions de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du

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citoyen de 1789 aux termes desquelles : " La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ", cette exigence ne fait pas obstacle à ce que, en certaines matières, pour un motif d'intérêt général, le législateur aménage les conditions dans lesquelles la responsabilité peut être engagée ;

11. Considérant, d'une part, que le législateur a expressément prévu que la responsabilité de tout créancier qui consent des concours à une entreprise en difficulté resterait engagée en cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou de prise de garanties disproportionnées ; qu'ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, il n'a pas supprimé cette responsabilité ;

12. Considérant, d'autre part, qu'en énonçant les cas dans lesquels la responsabilité des créanciers serait engagée du fait des concours consentis, le législateur a cherché à clarifier le cadre juridique de la mise en jeu de cette responsabilité ; que cette clarification est de nature à lever un obstacle à l'octroi des apports financiers nécessaires à la pérennité des entreprises en difficulté ; qu'elle satisfait ainsi à un objectif d'intérêt général suffisant ;

13. Considérant, en second lieu, que les dispositions contestées ne portent pas d'atteinte au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction ; que doit être dès lors écarté le grief tiré de la violation de l'article 16 de la Déclaration de 1789 ;

14. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution,

Décide : Article premier.- Les articles 8, 33, 108 et 126 de la loi de sauvegarde des entreprises ne sont pas contraires à la Constitution.

Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Doc 31. F.J Crédot et Y Gérard, « Encadrement de la responsabilité des créanciers pour soutien abusif », RDBF, n°6, sep-oct 2005, n°154.

NOTE : La loi nouvelle, en limitant les cas où la responsabilité (délictuelle) des créanciers pour soutien abusif pourra être engagée, tend, en supprimant un «frein psychologique», à favoriser l'essor du financement bancaire des entreprises et, plus particulièrement, des PME, en ne dissuadant plus les banques (et les autres créanciers fournisseurs de crédit) de consentir des crédits, de crainte de voir ultérieurement leur responsabilité recherchée, alors même que l'entreprise en difficulté pourrait surmonter celles-ci. Il s'agit d'assurer la sécurité juridique des prêteurs et de ne permettre l'engagement de leur responsabilité que dans les cas, en quelque sorte, pour citer le Garde des Sceaux, d'une faute lourde (déb.AN 3e séance, 8 mars 2005, p. 1791). Le recours contre cet article, dont le Conseil constitutionnel avait été saisi, a été rejeté, le Conseil ayant notamment considéré que, dès lors que la responsabilité de tout créancier qui consent des concours à une entreprise en difficulté restait engagée dans les trois cas limitatifs énoncés, le législateur n'avait pas supprimé toute responsabilité (Coms. const. 22 juill. 2005 : LPA 4 août 2005, n° 154, p. 14).

On sait que jusqu'ici, la responsabilité des prêteurs pouvait être retenue principalement en cas de soutien apporté à une entreprise dont ils connaissaient ou auraient dû connaître la situation irrémédiablement compromise. Certes, la Cour de cassation veillait, par sa jurisprudence, à limiter strictement cette responsabilité. Pour autant, les actions judiciaires restaient nombreuses, même si les condamnations l'étaient beaucoup moins, et nourrissaient ce «frein psychologique» précédemment mentionné.

S'agissant du premier cas de responsabilité possible, la fraude, il vise à éviter que des manoeuvres ne soient exercées par le créancier qui consentirait un crédit au débiteur dans un but autre que celui de maintenir l'activité de l'entreprise ou d'assurer sa pérennité, le législateur faisant application ici de l'adage «fraus omnia corrompit». On peut citer comme exemples, le cas du prêteur qui entend, par ses concours, masquer la situation de son débiteur le temps de se dégager, ou la fraude du créancier qu'attesterait l'existence de pratiques telles que l'escompte d'effets fictifs ou de complaisance, la mobilisation par bordereau Dailly de factures ne correspondant pas à des créances réelles ou la circulation de traites de cavalerie, pratiques qui, en fait, rejoindront le premier exemple, en tant qu'elles peuvent n'avoir d'autre explication que la volonté du prêteur de masquer la situation irrémédiablement compromise de son débiteur le temps de se dégager au détriment des autres créanciers.

L'immixtion caractérisée du créancier dans la gestion du débiteur renvoie à l'hypothèse, particulièrement rare, dans laquelle le prêteur acquiert la qualité de dirigeant de fait en participant

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activement à la gestion du débiteur et en prenant seul des décisions importantes en ses lieu et place (sur le rappel de la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle ne peut être considéré comme gestionnaire de fait d'une entreprise que la personne dont il est établi qu'elle a « en fait exercé en toute indépendance une activité positive de direction dans la société ». - Cass. com., 12 juill. 2005, n° 02-19-860, FP-P+B+R, Mme , Nicoud épse Dru : Juris-Data n° 2005-029487.-Cass. com., 12 juill. 2005, n° 03-14-045 et 03-15-855, FP-P+B+R, M. Maître et J.P. Maître : Juris-Data n° 2005-029479).

Le troisième cas sanctionnable, la prise de garanties disproportionnées par rapport aux concours consentis par le créancier, s'inscrit dans le même contexte d'anormalité patente du comportement du créancier, l'abus manifeste dans la prise de garanties pouvant révéler une parfaite connaissance par le créancier d'une situation irrémédiablement compromise du débiteur et la volonté de s'avantager par cet excès de garanties au détriment des autres créanciers, ce cas de « faute lourde » pouvant rejoindre le premier, la fraude du créancier. Ainsi que le Garde des Sceaux l'a déclaré lors des débats parlementaires, « il s'agit ici de viser les prises de garanties inhabituelles au regard de la pratique. 11 va de soi que les crédits immobiliers qui sont consentis en échange d'une hypothèque sur la totalité du bien, alors qu'ils n'en financent qu'une partie, demeurent possibles puisque telle est la pratique » (déb. AN préc, p. 1791) (sur le principe de proportionnalité, V. D. Legeais, le cas du contrat de crédit avec constitution de garantie PA «existe-t-il un principe de proportionnalité en droit privé », 30 sept. 1998, n° 117, p. 38).

Dès lors que la responsabilité civile du créancier sera reconnue sur l'un des trois fondements précités, dans le respect de ses conditions (faute constituée par l'un de ces comportements, et dont le résultat devra avoir été la poursuite, au moyen des concours consentis, de l'activité d'une entreprise au mépris d'une situation irrémédiablement compromise, préjudice, lien de causalité), les garanties prises en contrepartie de ses concours seront, à titre de sanction complémentaire aux dommages-intérêts auxquels le créancier aura été condamné, considérées comme nulles, alors même, peut-on faire observer, que ces garanties n'auraient pas été disproportionnées par rapport aux crédits fautifs consentis.

Le nouvel article L. 650-1 du Code de commerce, dans sa rédaction nouvelle issue de l'article 126 de la loi de sauvegarde des entreprises, dont le Garde des Sceaux a également pu faire observer qu'« il constitue un juste équilibre entre la nécessité de ne pas décourager les apporteurs de crédit aux entreprises et les principes généraux du droit de la responsabilité » (déb. AN préc., p. 1791) entrera en vigueur le 1er janvier 2006 (L. préc., art. 190).

Doc 32. V.J Lasserre Capdeville « Le banquier dispensateur de crédit face au principe de proportionnalité », Banque et Droit, n°113, mai juin 2007, 25 (EPI).

Doc 33. Cass. Com, 27 mars 2012 – Conditions de la responsabilité du banquier pour soutien abusif à une entreprise en difficulté

Sur le second moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 9 décembre 2010), que la société Etablissements Lair, devenue société AMS Menuiserie (la société) a bénéficié du soutien financier de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Normandie (la caisse) ; que la société a été mise en redressement judiciaire puis a bénéficié d'un plan de redressement, M. X... étant désigné commissaire à l'exécution du plan ; que ce dernier a assigné la caisse en responsabilité ;

Attendu que M. X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande tendant à condamner la caisse au paiement de la somme de 246 083,96 euros en réparation du préjudice subi par le paiement d'agios injustifiés, alors, selon le moyen :

1°/ que les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait, et que la cour d'appel n'a pas le pouvoir d'écarter d'office les demandes formées pour la première fois devant elle ; que M. X..., ès qualités, sollicitait subsidiairement, dans ses conclusions devant la cour d'appel, que la caisse soit condamnée au paiement de la somme de 246 083,96 euros en réparation du préjudice subi du fait du paiement d'agios injustifiés ; que la caisse ne soutenait pas l'irrecevabilité de cette demande comme nouvelle devant la cour d'appel ;qu'en rejetant la demande de M. X... au motif, relevé d'office, qu'elle

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«est nouvelle en cause d'appel», la cour d'appel a violé l'article 564 du code de procédure civile ; 2°/ que la nouveauté d'une demande présentée pour la première fois en appel entraîne son irrecevabilité et non son rejet ;que la cour d'appel, après avoir relevé d'office la nouveauté de la demande subsidiaire formulée par M. X..., en a déduit que cette demande «sera donc également rejetée de ce chef» ; qu'en statuant ainsi alors que l'éventuelle nouveauté de la demande devant la cour d'appel ne pouvait engendrer qu'une irrecevabilité de la demande, la cour d'appel a violé l'article 564 du code de procédure civile ;

3°/ que la caisse est tenue, en tant que gestionnaire de comptes, d'éclairer son client sur les avantages et inconvénients des choix qui s'offrent à lui pour couvrir le solde débiteur de son compte; que M. X..., ès qualités, faisait valoir dans ses conclusions que la caisse avait manqué à ses obligations en s'abstenant d'éclairer la société sur les possibilités de crédits, beaucoup moins onéreuses que les intérêts, frais et agios acquittés par cette société durant de nombreuses années ; qu'en ne s'expliquant pas sur cette faute de la caisse, comme elle y était pourtant invitée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève que M. X..., ès qualités, ne peut soutenir que la caisse aurait manqué à son obligation de conseil en accordant des crédits trop onéreux, quand ces crédits ont permis pendant vingt ans à l'entreprise de poursuivre une exploitation qui n'a rencontré des difficultés qu'à compter des années 2000 ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants visés par les deux premières branches, a légalement justifié sa décision ; qu'inopérant en ses deux premières branches, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ; Et attendu que le premier moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Doc 34. Cass Com, 16 octobre 2012, n°11-22993 – Notion de fraude

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 mai 2011, RG n° 09/06582), que la société Dragoon éditions (société Dragoon) qui avait conclu le 16 janvier 2002 avec la société Flammarion un contrat de diffusion et de distribution, a été mise en liquidation judiciaire le 20 avril 2006, la SCP Ouizille de Keating étant nommée liquidateur (le liquidateur) ; que ce dernier a assigné la société Flammarion en paiement de dommages-intérêts sur le fondement des articles 1382 du code civil et L. 650-1 du code de commerce ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes dirigées contre la société Flammarion, alors, selon le moyen, que ni l'octroi de délais de paiement par un créancier ni le mécanisme d'un paiement par compensation ne constituent des concours bancaires au sens de l'article L. 650-1 du code de commerce, de sorte que la responsabilité civile du créancier obéit, dans ces deux cas, aux règles de droit commun de l'article 1382 du code civil ; qu'en reprochant par motifs propres et adoptés des premiers juges à la SCP Ouizille de Keating, ès qualités, de ne pas rapporter la preuve de l'existence de l'immixtion ou de la fraude commise par la société Flammarion au détriment de son administrée, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 650-1 du code de commerce et, par refus d'application, l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé que les termes génériques de "concours consentis" et de "créancier" de l'article L. 650-1 du code de commerce conduisent à ne pas limiter son application aux seuls établissements de crédit, la cour d'appel en a exactement déduit que des délais de paiement accordés par un cocontractant au débiteur constituaient des concours au sens de ce texte, de sorte qu'il était applicable à ce cocontractant ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il est fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que commet une fraude au sens de l'article L.. 650-1 du code de commerce, le créancier qui poursuit délibérément le service de ses intérêts au détriment de son débiteur dont il connaît la situation irrémédiablement compromise ; qu'en reprochant à la SCP Ouizille de Keating, ès qualités, de ne pas rapporter la preuve d'une fraude commise par la société Flammarion, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les délais de paiement accordés à la société Dragoon et les paiements par compensation effectués par le diffuseur, à

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partir de janvier 2005, ne traduisaient pas la volonté délibérée de ce créancier de protéger ses intérêts personnels au détriment de ceux de l'éditeur, qu'il savait dans une situation irrémédiablement compromise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce ;

Mais attendu qu'après avoir précisé que la fraude, en matière civile ou commerciale ne se démarque guère de la fraude pénale et qu'il s'agit d'un acte qui a été réalisé en utilisant des moyens déloyaux destinés à surprendre un consentement, à obtenir un avantage matériel ou moral indu ou réalisé avec l'intention d'échapper à l'application d'une loi impérative ou prohibitive, la cour d'appel, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuves qui lui étaient soumis et sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérantes, a pu retenir que les faits reprochés à la société Flammarion, à savoir la signature de l'avenant de novembre 2004, l'acceptation de traites parfaitement causées permettant ainsi indirectement l'octroi de délais de paiement, et un système de compensation, n'étaient manifestement pas de nature frauduleuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Doc 35. Cass Com, 13 janvier 2015, n°13-25360 – Garanties disproportionnées.

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article L. 650-1 du code de commerce ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Banque populaire Lorraine-Champagne (la banque) a consenti à la société X... (la société débitrice) un prêt de 80 000 euros, M. et Mme X... (les cautions) se rendant caution de son remboursement par acte du 17 mai 2006 ; que la société débitrice ayant été mise en redressement judiciaire le 20 octobre 2009 puis, après résolution de son plan, en liquidation judiciaire le 30 novembre 2012, la banque a assigné les cautions en exécution de leur engagement ;

Attendu que, pour annuler les cautionnements du 17 mai 2006, la cour d'appel, après avoir relevé que le prêt était garanti également par un nantissement sur le fonds de commerce de la société, retient que ces différentes garanties avaient vocation à se cumuler, qu'elles étaient manifestement disproportionnées avec le montant du prêt et que ce cumul conduisait incontestablement à protéger excessivement la banque, ce qui justifiait que « le principe de l'irresponsabilité du banquier » soit écarté ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir en quoi le cumul de deux cautionnements et d'un nantissement était disproportionné aux concours consentis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE (…)

LA RESPONSABILITÉ PÉNALE DU BANQUIER

Doc 36. R. SALOMON, « Précision de la notion d’obtention de moyens ruineux pour se procurer des fonds », Droit des sociétés n°1, Janvier 2011, comm.19.

Est caractérisé le délit dès lors que, d'une part, la banque, ayant connaissance de la situation

de cessation des paiements de la société, lui a artificiellement maintenu les crédits en compte-

courant, dans le but de réaliser des actifs à son profit et de réduire ainsi le débit de ce compte,

d'autre part, que les intérêts et frais comptabilisés ont excédé les capacités de remboursement

de la société.

Cass. crim., 22 sept. 2010, n° 09-83.274 : Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'en 1992, la société Caisse de crédit mutuel Bartholdi (CCMB) a octroyé à la SCI Les tyroliens (la SCI) divers concours financiers, notamment sous forme

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d'avances en compte-courant, pour réaliser une opération de vente d'immeubles à usage d'habitation, en l'état futur d'achèvement ; que cette SCI a été mise en liquidation judiciaire par jugement du 10 février 1995, la date de cessation de ses paiements étant fixée au 11 août 1993 ; que M. P., directeur de l'agence de la CCMB à Colmar, est poursuivi, en qualité de dirigeant de fait de la SCI, du chef de banqueroute, pour avoir, dans l'intention d'éviter ou retarder l'ouverture de la procédure collective, employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ; que la société CCMB est poursuivie, en qualité de pénalement responsable, à compter du 1er mars 1994, de l'infraction commise pour son compte par son représentant ;

Attendu que, pour dire M. P., gérant de fait de la SCI, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que celui-ci contrôlait l'utilisation des fonds de cette société, dont toutes les opérations étaient regroupées sur un compte spécial, qu'il opérait une sélection des dépenses, autorisant celles liées à la commercialisation des logements et rejetant systématiquement les autres, tandis que le gérant de droit ne détenait aucun chéquier ;

Attendu que, pour déclarer celui-ci coupable de banqueroute et dire la société CCMB pénalement responsable à compter du 1er mars 1994, les juges énoncent que, dès le 31 décembre 1992, la SCI, dont le passif s'élevait à plus de 2 000 000 francs, était en état de cessation des paiements ; qu'ils retiennent que la banque, alors qu'elle avait connaissance de cette situation, avait artificiellement maintenu les crédits en compte-courant, dans le but de réaliser des actifs à son profit et de réduire ainsi le débit de ce compte ; qu'ils ajoutent que les intérêts et frais comptabilisés pour la période du 28 octobre au 5 janvier 1995, d'un montant de plus de 510 000 F, excédaient les capacités de remboursement de la SCI dont le passif atteignait plus de 5 000 000 francs lors de sa mise en liquidation judiciaire ; qu'ils en déduisent que le crédit ainsi accordé à la SCI dans le seul but de retarder l'ouverture de la procédure collective était ruineux ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations relevant de son appréciation souveraine, qui, d'une part, établissent, sans insuffisance ni contradiction, la gestion de fait de M. P., d'autre part caractérisent, en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de banqueroute dont le prévenu a été déclaré coupable, et la société CCMB pénalement responsable, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens ne peuvent être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette les pourvois ;

NOTE : Cas relativement rare de banqueroute, l'emploi de moyens ruineux pour se procurer des fonds est punissable lorsqu'il est commis en vue d'éviter ou de retarder l'ouverture non seulement d'une procédure de redressement judiciaire, mais aussi de liquidation judiciaire immédiate, lorsqu'il

n'y a pas lieu d'ouvrir une période d'observation (C. com., art. L. 654-2, 1().

Cet emploi de moyens ruineux consiste, pour le débiteur en difficulté, à recourir à des pratiques de financement (escompte, découvert bancaire) ou à des emprunts, même consentis à des taux habituels, qui entraînent des frais financiers importants pour l'entreprise, alors que sa situation financière est irrémédiablement compromise (A. Lepage, P. Maistre du Chambon et R. Salomon, Droit pénal des affaires, 2e éd. 2010, n° 1083).

Plus précisément, il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement si le découvert bancaire consenti à l'entreprise en difficulté est trop important, si les intérêts et agios qu'il entraîne sont hors

de proportion avec le découvert de cette entreprise (Cass. crim., 18 mai 1976, n° 75-90.378 : JurisData n° 1976-095166 ; Bull. crim. 1976, n° 166 ; D. 1976, p. 578, note C. Gavalda. – Cass. crim., 13 mars 1978, n° 77-91.255 : Bull. crim. 1978, n° 91).

Si les dirigeants sociaux peuvent être retenus en tant qu'auteurs principaux de ce type de banqueroute, les imprudences caractérisées de la part des banquiers dans la distribution du crédit à des entreprises en difficulté peuvent entraîner à l'encontre de ces derniers des poursuites pénales du

chef de complicité (Cass. crim., 3 janv. 1985, n° 84-91.057, P+B : JurisData n° 1985-700029 ; Bull. crim. 1985, n° 2. – Cass. crim., 3 avr. 1991, n° 89-85.699 : JCP E 1992, I, 154, n° 11 obs. C. Gavalda et G. Stoufflet. – C. Mouly, La responsabilité pénale du banquier en cas de banqueroute de son client : un révélateur : D. 1984, chron. p. 32. – Y. Letartre, Le banquier complice : RD bancaire et bourse 1988, p. 192).

À ce dernier égard, la Cour de cassation exige que soit rapportée, tout à la fois, la connaissance du banquier de l'état de cessation des paiements du débiteur, le caractère ruineux du crédit consenti ainsi

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que la volonté du débiteur de retarder le dépôt de bilan. Ainsi, se rend coupable de ce délit le banquier qui a notifié à une personne morale l'interdiction d'émettre des chèques, puis a laissé le dirigeant social virer des fonds sociaux sur un compte personnel sur lequel des chèques ont ensuite

été émis en méconnaissance de l'ancien article 65-4 du décret-loi du 30 octobre 1935 (Cass. crim.,

9 oct. 1989 n° 89-80.160, P+B : JurisData n° 1989-703772 ; Bull. crim. 1989, n° 343, p. 831 ; D. 1990, somm. p. 120, note M. Cabrillac ; Rev. sociétés 1990, p. 279, note B. Bouloc). En revanche, n'a pas été établie la complicité du banquier, dès lors que les frais financiers étaient normaux et que ce dernier ignorait le caractère de complaisance d'un effet de commerce escompté (Cass. crim., 13 nov. 1989, n° 88-83.422, D : Rev. proc. coll. 1990, p. 287, obs. J. Devèze).

C'est en application de ces principes généraux relatifs à cette forme de banqueroute que s'inscrit l'arrêt rendu, le 24 septembre 2010, par la chambre criminelle.

En l'espèce, un établissement bancaire avait consenti à une société civile immobilière des concours financiers, sous forme notamment d'avances en compte courant, afin de réaliser des opérations immobilières. En raison de leur connaissance de l'état de cessation des paiements de leur société immobilière, le gérant de droit et le gérant de fait, par ailleurs directeur de l'agence bancaire, ont été retenus dans les liens du délit de banqueroute par obtention de moyens ruineux pour se procurer des fonds, aux motifs que la banque avait maintenu artificiellement des crédits en compte courant au profit de la société en difficulté, dans le but de réaliser des actifs à son profit et de réduire ainsi le débit de son compte courant. Par ailleurs, le délit était caractérisé, dans la mesure où les intérêts et frais durant cette période avaient excédé les capacités de remboursement de la société civile immobilière. Il est à noter que la responsabilité pénale de la banque, en tant que personne morale, aurait pu davantage être retenue par les juges comme complice que comme auteur principal de ce type de banqueroute.

Il convient par ailleurs de relever que si le responsabilité civile des banquiers dispensateurs de crédit

a été substantiellement réduit par la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005, la responsabilité de ces derniers demeure à raison des préjudices résultant d'agissements de leur part constitutifs de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou de disproportion de garanties (M. Betch, Droit pénal des affaires : Lamy 2009, n° 2281), comme cela est le cas dans l'espèce soumise ici à la chambre criminelle.

Comparaison de note : Doc 37. F-J CREDOT et T. SAMIN, « Fourniture de moyens ruineux », RDBF n°6, novembre 2011.

La cour d'appel a justifié sa décision en caractérisant en tous ses éléments, tant matériels

qu'intentionnel, le délit de banqueroute dont le préposé de l'établissement bancaire a été

déclaré coupable et cet établissement pénalement responsable.

Cass. crim., 22 sept. 2010, n° 09-83.274, F-D : JurisData n° 2010-019564 Note :

Le préposé d'une caisse de crédit mutuel avait été condamné par les juges du fond à une peine de sept mois d'emprisonnement avec sursis et la caisse, à une amende délictuelle de 80 000 euros pour des faits de banqueroute par emploi de moyens ruineux.

La caisse avait octroyé à la société Les Tyroliens divers concours financiers, notamment sous forme d'avances en compte-courant, pour réaliser une opération de vente d'immeubles à usage d'habitation, en l'état futur d'achèvement. La SCI avait été mise en liquidation judiciaire par jugement du 10 février 1995, la date de cessation de ses paiements étant fixée au 11 août 1993. Le directeur de l'agence de la caisse à Colmar était poursuivi en qualité de dirigeant de fait de la SCI, du chef de banqueroute, pour avoir, dans l'intention d'éviter ou retarder l'ouverture de la procédure collective, employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds. La caisse était poursuivie, en qualité de pénalement responsable, à compter du 1er mars 1994, de l'infraction commise pour son compte par son représentant.

Pour qualifier le préposé de gérant de fait de la SCI, les juges du fond ont considéré que l'intéressé contrôlait l'utilisation des fonds de cette société, dont toutes les opérations étaient regroupées sur un compte spécial, qu'il opérait une sélection des dépenses, autorisant celles liées à la commercialisation

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des logements et rejetant systématiquement les autres, tandis que le gérant de droit ne détenait aucun chéquier. Pour le déclarer coupable de banqueroute et dire la banque pénalement responsable à compter du 1er mars 1994, les juges ont énoncé que, dès le 31 décembre 1992, la SCI, dont le passif s'élevait à plus de 2 000 000 francs, était en cessation des paiements ; ils ont retenu que la banque, alors qu'elle avait connaissance de cette situation, avait artificiellement maintenu les crédits en compte-courant, dans le but de réaliser des actifs à son profit (ce qu'on peut qualifier de faute lucrative) et de réduire ainsi le débit de ce compte ; ils avaient ajouté que les intérêts et frais comptabilisés pour la période du 28 octobre au 5 janvier 1995, d'un montant de plus de 510 000 francs, excédaient les capacités de remboursement de la SCI dont le passif atteignait plus de 5 000 000 francs lors de sa mise en liquidation judiciaire. Ils en avaient déduit que le crédit ainsi accordé à la SCI, dans le seul but de retarder l'ouverture de la procédure collective, était ruineux. D'où le pourvoi formé par le préposé et la banque.

L'affaire se présentait mal pour ceux-ci. Et l'on n'est pas surpris du rejet de leur pourvoi.

« Attendu qu'en l'état de ces énonciations relevant de son appréciation souveraine, qui, d'une part,

établissent, sans insuffisance ni contradiction, la gestion de fait de M. Perny, d'autre part

caractérisent, en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de banqueroute dont le

prévenu a été déclaré coupable, et la société CCMB pénalement responsable, la cour d'appel, qui a

répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ».

S'agissant de l'élément matériel du délit, il importait peu que les financements obtenus pour retarder l'ouverture de la procédure collective aient été consentis à des taux habituels. Ils étaient constitutifs de moyens ruineux, dès lors qu'ils entraînaient des frais financiers importants, alors que la situation financière du crédité était irrémédiablement compromise et que le caractère insupportable des frais financiers en résultait nécessairement (Sur le banquier complice, Y. Letartre : RD bancaire et bourse

1988, n° 192). L'élément intentionnel du délit (C. com., art. L. 654-2) consiste dans la conscience de la faute commise par l'agent. Cette mauvaise foi découle de la double connaissance de l'état de cessation des paiements et du dommage causé aux tiers ainsi qu'aux créanciers sociaux. Le dol spécial qui est ici requis réside dans le but poursuivi par l'auteur, à savoir retarder l'ouverture d'une procédure collective. (A. Lepage, P. Maistre du Chambon, R. Salomon, Droit pénal des affaires : LexisNexis 2008, n° 1078 et 1087. – Adde R. Routier, Obligations et responsabilités du banquier : Dalloz, 3e éd., n° 821, p. 12). La Cour de cassation a ainsi pu considérer que la cour d'appel avait caractérisé les éléments du délit. Le directeur d'agence de la banque a pu à juste titre être qualifié de représentant de la banque. Le représentant peut être un employé dès lors que les fonctions impliquent la représentation et qu'il est titulaire d'une délégation de pouvoirs (F. Desportes, F. Le Gunehec, Droit pénal général : Économica 2008, 15e éd., n° 605 et 607). Étant rappelé que le troisième alinéa de

l'article 121-2 du Code pénal dispose que « la responsabilité pénale n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits ». Il n'impose pas pour autant la solution et le principe de l'opportunité des poursuites s'applique. (op. cit. n° 620 et 624).

Sur la condamnation d'un directeur de banque pour complicité de banqueroute par emploi de moyens

ruineux, Cass. crim., 16 déc. 2009, n° 08-87.458 : JurisData n° 2009-051676. L'intéressé avait mis à la disposition d'une société de fait des fonds qu'il savait devoir servir à financer des sociétés commerciales du même groupe dont les difficultés lui étaient connues, alors que ces sociétés n'étaient pas en mesure de recourir à des financements de cette importance et qu'elles n'auraient pu les obtenir si elles les avaient demandés directement, le financement ainsi consenti étant particulièrement anormal et ruineux.

Sur l'exemple d'une société qualifiée de dirigeant de fait d'une société par personne interposée, Cass.

com., 15 juin 2011, n° 10-17.023, F-D : JurisData n° 2011-011838 ; Sur celui de l'administrateur d'une société mère considéré comme dirigeant de fait d'une filiale pour s'être immiscé dans la gestion de celle-ci par l'intermédiaire de la société mère, Cass. com., 2 nov. 2005 : RJDA 5/2006, n° 535.

Doc 38. Cass. Com, 9 octobre 1989, Rev. Soc, 1990, 279, note Bouloc, D. 1990, som com 120, obs Cabrillac.

LA COUR,

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

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Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 59, 60, 402 et 403 du Code pénal, 197. 2° de la loi du 25 janvier 1985, 65-3 du décret du 30 octobre 1935 issu de la loi du 3 janvier 1975, 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé X... du délit de complicité de banqueroute par détournement d'actif et débouté la demanderesse de son action civile à l'égard du susnommé ;

" aux motifs " qu'Albert Y... a été définitivement convaincu du délit de banqueroute par détournement d'actif pour avoir confondu son patrimoine personnel avec celui de la société Y... en virant sur son compte joint personnel ouvert au Crédit Lyonnais des sommes dissipées du compte de la société frappé d'interdiction bancaire et tenu dans le même établissement, dans le but d'honorer les engagements de la société ; que pour déclarer Guy X...coupable du délit de complicité de ce délit, le premier juge a relevé qu'à compter de la première interdiction bancaire les crédits, constitués uniquement par l'escompte du banquier, étaient aussitôt reversés pour la plupart sur le compte personnel tenu par le même banquier ; que cette pratique a permis à la SARL Y... de poursuivre plusieurs mois son activité déficitaire ; mais que le banquier fait valoir qu'il n'a nullement excédé les pratiques professionnelles usuelles à l'époque en vigueur en laissant son client user d'un compte personnel alors que l'interdiction bancaire ne frappait que le compte de la société dont Albert Y... était le mandataire ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que Guy X... a incité Albert Y... à agir de la sorte ; qu'au demeurant, le banquier n'est nullement tenu de vérifier les raisons des virements bancaires pratiqués par son client ni habilité à les lui interdire dans la mesure où le compte débité est approvisionné ; d'autant qu'en l'espèce, Guy X..., ainsi que la Cour l'a précédemment rappelé, n'apparaissait nullement informé de l'état de cessation des paiements de la SARL Y... ; qu'en dehors d'actes matériels inhérents à la profession de banquier, l'information n'a donc caractérisé aucun acte positif de complicité ni permis au premier juge de caractériser l'élément intentionnel de l'infraction ; que le délit n'est donc pas constitué ; qu'il convient en conséquence d'infirmer la décision des premiers juges et de relaxer Guy X... des fins de la poursuite " ;

" alors, d'une part, que, si la complicité par aide ou assistance du délit de banqueroute par détournement d'actif ne peut s'induire d'une simple abstention, elle est caractérisée lorsqu'un banquier, qui a interdit à une société l'utilisation de son compte commercial, laisse le gérant de celle-ci transférer sur son compte personnel les sommes dissipées du compte de la société, permettant ainsi à cette dernière de poursuivre une exploitation déficitaire dont le banquier avait connaissance ; qu'en effet, l'article 65-3 du décret du 30 octobre 1935 (tel que modifié par la loi du 3 janvier 1975) autorise le banquier à interdire à un gérant de société de contourner l'interdiction du compte commercial par l'utilisation à des fins commerciales du compte personnel du gérant ; qu'en énonçant que X... n'était pas complice aux motifs, d'une part, qu'il n'avait pas incité M. Y... à virer les sommes dissipées du compte de la société Y... sur son compte personnel, d'autre part, que le banquier n'était pas tenu de vérifier les raisons des virements bancaires ni habilité à les interdire, la cour d'appel, qui a ainsi perdu de vue que le banquier, ayant les moyens légaux de s'opposer aux virements des sommes litigieuses sur le compte personnel de M. Y..., s'était rendu complice du délit de banqueroute par détournement d'actif en permettant ces virements, a violé les articles 59, 60, 402 et 403 du Code pénal, 197. 2° de la loi du 25 janvier 1985 et 65-3 du décret du 30 octobre 1935 ;

" alors, d'autre part, qu'en écartant la complicité du banquier au motif que celui-ci n'avait pas connaissance de l'état de cessation des paiements de la société Y..., la cour d'appel a statué par un motif inopérant dès lors que le fait de fournir en connaissance de cause à l'auteur du détournement d'actif les moyens de le perpétrer constitue la complicité de ce délit de banqueroute frauduleuse sans qu'il soit nécessaire que cette fourniture de moyens soit postérieure à l'état de cessation des paiements ; qu'il suffit donc que le banquier ait eu connaissance des difficultés du commerçant ; qu'ainsi, la censure est encourue pour manque de base légale au regard des articles 59, 60, 402 et 403 du Code pénal et 197. 2° de la loi du 25 janvier 1985 ;

" et alors, enfin qu'en ne recherchant pas si X... n'avait pas nécessairement connaissance des difficultés financières de Y... dès lors, d'une part, qu'il l'avait autorisé à utiliser son compte personnel à des fins commerciales à la suite de l'interdiction bancaire de la société Y..., d'autre part, qu'il avait lui-même déclaré, lors des interrogatoires, qu'il connaissait les difficultés de trésorerie de Y... qu'il évaluait à 500 000 ou 600 000 francs, par ailleurs, que la trésorerie de la société Y... reposait exclusivement sur l'escompte d'effets de commerce comme cela résulte des constatations de l'arrêt lui-même, enfin, que la créance de la société Sopelporc résultant d'effets impayés était en mars 1979 de 630 000 francs, ce que soutenait la demanderesse dans ses conclusions d'appel demeurées sans

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réponse, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 59, 60, 402 et 403 du Code pénal et 197. 2° de la loi du 25 janvier 1985, et violé l'article 593 du Code de procédure pénale " ;

Vu lesdits articles, ensemble l'article 65-4 du décret du 30 octobre 1935 modifié par la loi du 3 janvier 1975 ;

Attendu que, d'une part, tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, d'autre part, il résulte de l'article 65-4 susvisé, que l'interdiction bancaire d'émettre des chèques empêche le représentant d'une personne morale, qui en est frappée, d'émettre, tant en qualité de mandataire social qu'à titre personnel, des chèques autres que ceux qui sont certifiés ou qui permettent de retirer des fonds auprès du tiré ;

Attendu que, pour relaxer Guy X... du chef de complicité de banqueroute par détournement d'actif, l'arrêt attaqué énonce notamment que ce banquier n'a nullement excédé les pratiques professionnelles usuelles en vigueur en laissant son client user d'un compte personnel dans la mesure où l'interdiction bancaire ne frappait que le compte de la société dont celui-ci était le mandataire, les deux comptes étant ouverts dans la même agence ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les juges constatent par ailleurs que des fonds sociaux virés sur le compte personnel du dirigeant de droit ont été détournés postérieurement à la notification à la société de son interdiction bancaire et que le banquier avait connaissance des difficultés de trésorerie de celle-ci, la cour d'appel a méconnu le texte et le principe sus-énoncés ;

Que la cassation est, dès lors, encourue ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre moyen proposé :

CASSE ET ANNULE (…)

LINKS ABOUT BANKING REGULATION AND DUTY OF VIGILANCE IN FRENCH LAW

https://www.loc.gov/law/help/fr-banking/index.php

https://uk.practicallaw.thomsonreuters.com/w-007-9978?transitionType=Default&contextData=(sc.Default)

http://www.mondaq.com/france/x/622824/Corporate+Commercial+Law/The+French+Duty+Of+Vigilance+Law+What+You+Need+To+Know

SÉANCE N° 9 : LE REFINANCEMENT (I)

LES NOTIONS ESSENTIELLES

Revoir les notions suivantes : effets de commerce, engagement cambiaire, lettre de change, escompte, inopposabilité des exceptions. LE FORMALISME DE LA LETTRE DE CHANGE

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Doc. 1 : Article L. 511 du Code de commerce Doc. 2 : Cass. Com., 24 févr. 1965, n° 62-12258 Doc. 3 : Cass. Com., 20 janv. 1981 : Bull. civ. 1981, IV, n° 38 Doc. 4 : Cass. Com., 29 mars 1994 : Bull. civ. 1994, IV, n° 127 Doc. 5 : Cass. Com., 12 nov. 1992 : Bull. civ. 1992, IV, n° 349 Doc. 6 : Cass. Com., 3 avr. 2002 : Bull. civ. 2002, IV, n° 65 Doc. 7 : Cass. Com., 23 janvier 2007, n°05-14036 Doc. 8 : Cass. Com, 29 novembre 1994, n° 92-18003, Bull. IV n°354 Doc. 9 : Cass. Com, 9 mars 1971, Bull. civ. IV n°75 Doc. 10 : Cass. Com 16 Juin 2009, n° 08-14.589 Doc. 11 : Cass. Com, 10 février 1971, n°69-13230 LA PROVISION DE LA LETTRE DE CHANGE

Doc. 12 : Cass. Com 27 octobre 1992, n° 91-11.574 Doc. 13 : Cass. Com., 1er février 1977, n° 75-13556 Doc. 14 : Cass. Com 18 mars 1986, n° 84-15309 Doc. 15 : Cass. Com., 4 décembre 1984, n° 82-12239 L’ESCOMPTE

Doc. 16 : L. 511-8 du Code de commerce Doc. 17 : Cass. Com 25 avril 2006, n° 04-20.583 Doc. 18 : Cass. Com 1er avril 2014, n° 13-13.900 Doc. 19 : Cass. Com 23 mai 1989, n° 87-19231 Doc. 20 : Cass. Com. 20 mars 1984, Bull civ. IV N°109 Doc. 21 : Cass. Com. 24 mars 1992, n° 90-17.457 Doc. 22 : Cass. Com., 19 juin 2007 05-21958 Doc. 23 : Cass. Com, 10 juin 1997, n°95-12.403 Doc. 24 : Cass. Com, 30 janvier 1979, Bull civ. IV, n°38. Doc. 25 : Cass. Com 2 novembre 2016, Pourvoi nº 15-12.399 Doc. 26 : Cass. Com., 19 février 2013, n° 12-12.839 Article de doctrine : « Sur la définition de la mauvaise foi de l’article L. 511-12 du Code de commerce… », in Mélanges AEDBF, IV, 2004, p. 381 Exercice :: Commentaire d’arrêt de Cass. Com, 19 Février 2013 (doc. 27) ou Cass. Com 10 Juin 1997 (doc. 24). LE FORMALISME DE LA LETTRE DE CHANGE

Doc. 1 : Article L. 511 du Code de commerce I. - La lettre de change contient : 1° La dénomination de lettre de change insérée dans le texte même du titre et exprimée dans la langue employée pour la rédaction de ce titre ; 2° Le mandat pur et simple de payer une somme déterminée ; 3° Le nom de celui qui doit payer, dénommé tiré ;

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4° L'indication de l'échéance ; 5° Celle du lieu où le paiement doit s'effectuer ; 6° Le nom de celui auquel ou à l'ordre duquel le paiement doit être fait ; 7° L'indication de la date et du lieu où la lettre est créée ; 8° La signature de celui qui émet la lettre dénommé tireur. Cette signature est apposée, soit à la main, soit par tout procédé non manuscrit. II. - Le titre dans lequel une des énonciations indiquées au I fait défaut ne vaut pas comme lettre de change, sauf dans les cas déterminés aux III à V du présent article. III. - La lettre de change dont l'échéance n'est pas indiquée est considérée comme payable à vue. IV. - A défaut d'indication spéciale, le lieu désigné à côté du nom du tiré est réputé être le lieu du paiement et, en même temps, le lieu du domicile du tiré. V. - La lettre de change n'indiquant pas le lieu de sa création est considérée comme souscrite dans le lieu désigné à côté du nom du tireur. Doc. 2 : Cass. com., 24 févr. 1965, n° de pourvoi: 62-12258 Sur le moyen unique : vu l'article 126 du code de commerce ; Attendu que l'acceptation de la lettre de change est, aux termes de ce texte, signée du tiré ; Qu'une telle acceptation ne peut émaner d'une personne autre que celle qui est designee sur le titre comme devant payer ; Attendu que, pour déclarer que la société intercontinentale d'échanges commerciaux (s.i.e.c.), actuellement en règlement judiciaire, est engagée, non comme donneur d'aval pour le compte des tireurs, ainsi qu'elle le soutenait, mais comme tiré accepteur des lettres de change émises par divers fournisseurs sur la société "les bâtisseurs réunis", la cour d'appel, après avoir relevé que la s.i.e.c. A appose son cachet et sa signature au-dessus ou a cote du cachet et de la signature des "bâtisseurs réunis" sur le recto desdits effets et qu'a l'endroit de ces signatures, figure soit la mention imprimée "acceptation ou aval", soit la mention manuscrite "accepte", énonce que la s.i.e.c. S'est ainsi désignée elle-même comme tirée codébitrice avec les "bâtisseurs réunis" du montant des lettres de change et qu'au surplus, cette co-acceptation, jointe a d'autres circonstances, a révèle aux tiers l'existence entre la s.i.e.c. Et les "bâtisseurs réunis" d'une association en participation ; Attendu qu'en accueillant pour ces motifs l'action des tireurs contre la s.i.e.c., alors, d'une part, que, selon les propres constatations de l'arrêt, tous les effets portent, dans le cadre réservé à la désignation des tirés par les tireurs, la seule mention suivante : "tiré : les bâtisseurs réunis", et alors, d'autre part, que si elle entendait condamner la s.i.e.c. En vertu d'une obligation autre que celle qui résultait, selon le droit cambiaire, des lettres de change litigieuses, elle ne pouvait se fonder sur celles-ci, la cour d'appel n'a pas donne de base légale à sa décision ; Par ces motifs : casse et annule l'arrêt rendu entre les parties par la cour d'appel de paris, le 7 février 1962 ; Remet, en consequence, la cause et les parties au meme et semblable etat ou elles etaient avant ledit arret et, pour etre fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens. Doc. 3 : Cass. com., 20 janv. 1981 : Bull. civ. 1981, IV, n° 38 Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Vu les articles 592 du code local de procédure civile, et 110 du code de commerce;

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Attendu que, selon l'arrêt déféré, dame x... A accepte a hamm, gerant de la société sogeprest, cinq lettres de change que ce dernier a endossées au profit de la societe " discount bank " (la banque); que ces effets étant demeures impayés, la banque a assigne dame x... Selon la procédure spéciale sur titre, que le tribunal, estimant qu'il existait un doute sur la validite de la signature du tireur, a déclaré irrecevable la demande de la banque, que la cour d'appel, infirmant partiellement le jugement, a déclaré valables deux des effets litigieux, et a condamne dame x... A en payer le montant a la banque, tiers porteur; attendu que, pour déclarer recevable et bien fondée la procédure sur titre suivie par la banque pour obtenir paiement de ces deux lettres de change, la cour d'appel énonce qu'il n'est pas sérieusement conteste qu'elles ont ete signées par hamm, et tirées a l'ordre de M.M., indication permettant d'identifier clairement le bénéficiaire qui se confond avec l'endosseur, c'est-a-dire avec hamm, la mention m.m., se traduisant par " moi-meme "; Attendu qu'en décidant que les seules initiales m.m. Permettent d'identifier le bénéficiaire des deux effets et qu'il se confond avec l'endosseur, alors que la procédure spéciale sur titre exige la régularité formelle de la lettre de change qui doit notamment repondre aux conditions de validité prévues a l'article 110, paragraphe 6, du code de commerce, sans qu'il puisse être supplée a l'indication précise du nom du bénéficiaire par d'autres mentions ou par une interprétation des ecrits, la cour d'appel a viole, par fausse application, les textes susvisés; Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux autres branches du moyen : Casse et annule en son entier l'arret rendu entre les parties le 25 octobre 1977 par la cour d'appel de colmar; remet, en conséquence, la cause et les parties au meme et semblable état ou elles etaient avant ledit arret et, pour etre fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de metz. Doc. 4 : Cass. com., 29 mars 1994 : Bull. civ. 1994, IV, n° 127 Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : Attendu, selon l'arrêt critiqué (Limoges, 16 septembre 1991), que la société Marseillaise de Crédit, porteur de quatre lettres de change, dont une de 143 793,96 francs, en a demandé le paiement à la société Manufacture de Tapis Sallandrouze Frères (la société Sallandrouze), qui les avait acceptées ; Attendu qu'il est reproché à l'arrêt d'avoir rejeté cette prétention, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la société Marseillaise de Crédit réclamait le paiement des lettres de change en cause dont elle était porteur, à la société Sallandrouze, tiré-accepteur, et que la circonstance que le nom du bénéficiaire ait été laissé en blanc, ne suffisait pas à révéler qu'en apposant sa signature l'accepteur n'avait pas entendu s'engager selon la loi du change ; que dès lors, en estimant que le tiré n'était pas tenu dans les liens du change au simple motif que le bénéficiaire n'était pas désigné, la cour d'appel a violé les articles 110 du Code de commerce et 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que la lettre de change d'un montant de 143 793,96 francs précise, dans la case " Date de création ", " 2 FEV 1990 ", en sorte qu'à défaut de preuve contraire, la traite est réputée avoir été créée à cette date ; que dès lors, en refusant de considérer que ladite traite ait date certaine, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis en violation des articles 110 du Code de commerce et 1134 du Code civil ; alors enfin, que, la lettre de change ayant été acceptée par le tiré, et celui-ci n'ayant inscrit sur le titre aucune mention de nature à faire apparaître que la date aurait été insuffisante, la société Sallandrouze était valablement engagée dans les liens du change ; que dès lors, en accueillant sur ce point l'exception de nullité du titre opposée par le tiré, la cour d'appel a violé ensemble les articles 110 du Code de commerce et 1134 du Code civil ; Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté que le nom du bénéficiaire avait été " laissé " en blanc, ce dont il résulte qu'il n'y avait pas eu de régularisation de l'omission de cette mention, prévue par l'article 110-6° du Code de commerce comme condition de validité du titre cambiaire,

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c'est à bon droit que l'arrêt décide que le défaut d'une mention obligatoire prive les lettres de change de leurs effets cambiaires ; Attendu, d'autre part, que la cour d'appel, par une interprétation que l'imprécision même de la mention de la date rendait nécessaire, a décidé que cette date était incertaine en raison du défaut d'impression manifeste du tampon dateur ; Attendu, enfin, que le fait que le tiré n'inscrive pas sur l'effet, au moment où il l'accepte, que la date de sa création est indéterminée, ne suffit pas à écarter la sanction prévue par l'article 110 susvisé ; D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi. Doc. 5 : Cass. com., 12 nov. 1992 : Bull. civ. 1992, IV, n° 349 ; D. 1993, somm. p. 317, obs. M. Cabrillac). Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 14 novembre 1990), que M. X... a accepté une lettre de change émise par l'un de ses fournisseurs à l'ordre de " SFF " ; qu'à l'échéance, M. X... a refusé d'en payer le montant à la Société française de factoring en invoquant la nullité de l'effet pour absence de désignation du bénéficiaire, l'indication d'initiales étant, selon lui, insuffisante à cet égard ; Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer le montant de l'effet, alors, selon le pourvoi, qu'une lettre de change doit se suffire à elle-même et indiquer clairement le nom de son bénéficiaire ; que l'apposition sur l'effet de commerce de simples initiales " SFF " ne peut suffire à cet égard ; qu'en décidant le contraire sur le fondement de motifs inopérants, la cour d'appel a violé l'article 110 du Code de commerce ; Mais attendu que l'arrêt relève que la mention " SFF " désigne sans incertitude ni ambiguïté la Société française de factoring et, au surplus, que M. X... lui-même ne pouvait l'ignorer ; qu'elle a pu en déduire que l'indication du bénéficiaire sur l'effet litigieux satisfaisait aux exigences légales ; que le moyen n'est donc pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi Doc. 6 : Cass. com., 3 avr. 2002 : Bull. civ. 2002, IV, n° 65 Attendu, selon l'arrêt déféré (Lyon, 27 février 1998), que par acte sous seing privé du 22 février 1991, M. X... s'est porté caution solidaire des engagements de la société RAI (la société), dont il était le gérant, envers la Banque populaire de Lyon (la banque), à concurrence d'une somme de 250 000 francs ; que le compte courant de la société présentant un solde débiteur, la banque a informé la société, le 25 janvier 1993, de son intention de mettre fin aux facilités de caisse, lettre à laquelle la société a répondu le 16 février 1993, sous la signature de son gérant ; que, par la suite, la banque a escompté deux lettres de change revenues impayées à leurs échéances ; que la

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société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné la caution en exécution de son engagement ; Sur le premier moyen : Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de l'avoir condamné, en qualité de caution d'une société en liquidation judiciaire, à payer à la banque la somme de 250 000 francs et, pour ce faire, d'avoir écarté ses conclusions soutenant que la déclaration de créance était nulle pour n'avoir pas été faite par une personne habilitée à cet effet, alors, selon le moyen, que les copies d'actes, même certifiées conformes, lorsque le titre original subsiste, ne font foi que de ce qui est contenu au titre dont la représentation peut toujours être exigée ; qu'en déclarant que la délégation de pouvoir prétendument donnée à un préposé de la banque pour effectuer la déclaration de créance était établie par la production aux débats d'une copie de l'extrait d'un compte rendu de réunion du conseil d'administration certifié conforme par le secrétaire général de la banque, sans ordonner, comme elle y était pourtant invitée, la production de l'original de cette délégation, la cour d'appel a violé l'article 1334 du Code civil ; Mais attendu que M. X... n'ayant pas contesté, dans ses conclusions d'appel, l'existence de l'original de la délégation de pouvoir ni précisé en quoi la copie ne serait pas conforme à l'original, la cour d'appel, qui a retenu qu'aucun élément objectif ne permettait de mettre en cause l'authenticité de la délibération du conseil d'administration qui avait donné l'autorisation à M. Y... d'effectuer les déclarations de créance, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches : Attendu que M. X... reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la banque une somme de 250 000 francs et, pour ce faire, d'avoir écarté ses conclusions soutenant que les deux lettres de change tirées par la débitrice, escomptées par la banque et impayées à leur échéance, étaient nulles pour ne pas mentionner le nom du bénéficiaire, alors, selon le moyen : 1° que la lettre de change doit, à peine de nullité, contenir notamment, outre la signature du tireur, le nom du bénéficiaire ; que le seul fait pour le tireur de signer l'effet au recto et au verso ne suffit pas, en l'absence de toute autre manifestation de volonté clairement exprimée sur le titre, de faire du tireur le bénéficiaire ; qu'en retenant que les titres litigieux portaient tant au recto qu'au verso le cachet accompagné de la signature du gérant de la société débitrice, dont il était constant qu'elle était le tireur, et que ces mentions suffisaient à l'identification du bénéficiaire, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 110 du Code de commerce ; 2° que M. X... faisait valoir que la lettre de change d'un montant de 320 000 francs portait au recto non seulement la signature du tireur mais également la mention " BNP ", en sorte qu'il ne pouvait être déduit que le tireur en aurait été le bénéficiaire ; qu'en délaissant ces conclusions déterminantes, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que l'arrêt, répondant par là même aux conclusions prétendument omises, retient que les effets de commerce litigieux portent tant au recto qu'au verso le cachet de la société RAI accompagné de la signature de son gérant et que ces mentions suffisent à l'identification du bénéficiaire des effets ; qu'ainsi, la cour d'appel a pu en déduire que l'indication du bénéficiaire sur les effets satisfaisait aux exigences des articles 110, 111 et 117 du Code de commerce, devenus les articles L. 511-1, L. 511-2 et L. 511-8 du même Code ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Et sur le troisième moyen, pris en ses cinq branches :

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Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la banque la somme de 250 000 francs, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, alors, selon le moyen : 1° qu'il avait fait valoir que la banque ne justifiait pas avoir donné une " ligne de caution " à la société débitrice qui n'en avait d'ailleurs nul besoin ; qu'en interprétant la lettre de la banque du 25 janvier 1993, qui indiquait réduire à 100 000 francs la ligne de caution, en ce sens qu'il se serait agi d'une caution donnée par le créancier au débiteur et non de celle donnée par M. X... au premier, sans répondre à ses conclusions selon lesquelles la banque n'avait jamais accordé sa caution à la société débitrice, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 2° que le fait que la débitrice principale fût caution de ses propres dettes ne se conçoit pas, en sorte que si M. X... avait écrit la lettre du 16 février 1993 en qualité de dirigeant de la société débitrice en proposant des modalités de réduction du découvert de la personne morale, il l'avait également rédigée, comme déclaré à juste titre par les premiers juges, en son nom personnel en ce qu'il y indiquait ne pouvoir donner de caution sans facilité de caisse, l'engagement visé ne pouvant être que le sien propre ; qu'en affirmant que cette lettre n'aurait émané que du gérant de la société, la cour d'appel l'a dénaturée en violation de l'article 1134 du Code civil ; 3° qu'en indiquant dans son courrier du 16 février 1993 : " Nous ne pouvons vous donner de caution sans facilité de caisse ", M. X... avait ainsi clairement manifesté son intention de révoquer son engagement sans distinguer le solde débiteur du compte courant du montant d'effets escomptés et impayés à leur échéance ; qu'en déduisant de cette lettre que la révocation était seulement limitée au solde du compte courant et qu'il n'était pas établi que M. X... eût dénoncé le cautionnement général qu'il avait donné, la cour d'appel l'a dénaturée en violation de l'article 1134 du Code civil ; 4° que la créance portée en compte courant perd son individualité pour ne devenir qu'un article du compte, en sorte que le montant d'effets de commerce escomptés, impayés à leur échéance mais contrepassés, et ainsi porté au débit du compte courant devient partie intégrante de son solde débiteur ; que, dès lors qu'il était constant et reconnu par la banque qu'elle avait contrepassé les traites par elle escomptées et impayées à leur échéance, la révocation du cautionnement, à supposer même qu'elle eût été limitée au solde débiteur du compte courant, incluait bien le montant de ces effets qui avait été inscrit au débit du compte ; qu'en décidant que cette révocation ne concernait pas les titres escomptés par la banque et impayés à leur échéance, méconnaissant par là même la nature de la convention de compte courant, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 2015 du Code civil ; 5° que si le contrat à durée indéterminée peut être résilié unilatéralement et sans préavis, lorsque l'auteur de la résiliation a cependant précisé qu'elle prendrait effet sous certaines conditions, celles-ci doivent être respectées ; qu'ayant admis implicitement mais nécessairement que la révocation du cautionnement de M. X... devait prendre effet à la date à laquelle le compte courant de la société débitrice ne serait plus débiteur, le juge, dès lors qu'il a constaté qu'au 8 mars 1993, le compte courant de la société n'était plus débiteur, ne pouvait déclarer que les conditions stipulées n'avaient pas été remplies, par cela seul qu'ultérieurement il le serait redevenu ; qu'en se prononçant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 2015 du Code civil ; Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient, répondant par là même en les écartant aux conclusions invoquées, que dans les pratiques bancaires les plus habituelles, une ligne de caution désigne non pas les garanties personnelles apportées par des tiers aux obligations du client mais la garantie donnée par la banque au bénéfice de tiers ; qu'ainsi, la cour d'appel a satisfait aux exigences du texte cité à la première branche ; Attendu, en second lieu, qu'après avoir relevé que le découvert dont bénéficiait la société n'avait pas été apuré dans le délai annoncé, le compte courant continuant à présenter des soldes débiteurs élevés, l'arrêt retient, dans l'exercice du pouvoir souverain d'interprétation, que les

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conditions mises par M. X... à la dénonciation de sa garantie dans la lettre du 16 février 1993 n'ont jamais été réalisées, puisque le compte a continué à fonctionner à découvert, sauf à une date isolée, et en déduit que cette lettre ne valait pas dénonciation du cautionnement ; qu'en l'état de ces seuls motifs, abstraction faite de ceux surabondants critiqués par les deuxième, troisième et quatrième branches, la cour d'appel a, sans dénaturation, légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; Par ces motifs : REJETTE le pourvoi. Doc 7: Cass. com., 23 janvier 2007, n°05-14036 Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 février 2005), que trois lettres de change pour un montant global de 209 230,15 francs ont été établies et acceptées par la société E.M et Partners (la société EM), qui a désigné au recto comme tireur la société B et F éditions (la société B et F) en précisant sa dénomination et son siège ; que celle-ci les a endossées au profit de son créancier, la société Utexbel ; qu'à l'échéance des effets, le 31 mai 2000, la société EM, invoquant un défaut de livraison par la société B et F, en a refusé le paiement à la société Utexbel, endossataire, en contestant être tenue cambiairement vis-à-vis de cette dernière, faute de signature de la société B et F, en qualité de tireur, sur les effets litigieux ; que le tribunal a condamné la société EM au paiement de la somme de 30 372,34 euros après avoir jugé que les titres valaient non comme des lettres de change mais comme des billets à ordre ; que la cour d'appel a confirmé le jugement du tribunal, par substitution de motif, en décidant que les titres valaient, dans ces circonstances, lettres de change, le tiré ne pouvant avoir aucun doute sur le tireur ; Attendu que la société EM fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le moyen : 1°/ que les juges avaient relevé "en paiement, la société B et F a endossé au profit de la société Utexbel trois lettres de change tirées sur un de ses clients la société EM et acceptées par celle-ci", que, par ailleurs la société EM soutenait dans ses conclusions d'appel que les effets litigieux, "qui ne comportaient au recto aucune signature du tireur dans le cadre réservé en bas à droit pour la signature du tireur, ont nécessairement été remis au tireur avec un verso vierge, et donc à l'évidence la signature par le tireur au verso des effets est nécessairement postérieure à l'acceptation de ces mêmes effets par le tiré au recto de chacun d'eux" et encore : "c'est le gérant de la société EM qui a, sur des formulaires vierges, lui-même inséré au recto les mentions manuscrites juste avant de signer en tant que tiré les effets litigieux, avant de les remettre à la société B et F, laquelle n'a donc pu signer les effets au verso que postérieurement à leur acceptation par le tiré EM" ; qu'ainsi, en énonçant que "les faits constants sont résumés au jugement déféré selon lequel, en règlement de diverses factures... la société B et F endossait au profit de la société Utexbel, trois lettres de change tirées le 24 décembre 1999 sur l'une de ses clientes, la société EM, qui les acceptait à l'échéance du 31 mai 2000", la cour d'appel a dénaturé les énonciations précitées du jugement et des conclusions de la société EM violant ainsi les articles 1134 du code civil et 4 du nouveau code de procédure civile ; 2°/ que dans ses conclusions d'appel, la société Utexbel soutenait notamment que les traites litigieuses ont ... été émises par la société EM, ce qui lui confère juridiquement la qualité de tireur ; que la société EM est également tiré, ce que l'apposition de son cachet dans le cadre réservé aux "nom et adresse du tiré" démontre. La société EM est enfin tiré accepteur puisqu'elle a régulièrement paraphé le recto des traites, au dessus de la mention "acceptation ou aval" réservé au tiré et enfin qu'en toute hypothèse, la société EM ne saurait opposer au porteur la société Utexbel une absence de signature du tireur lors de l'acceptation du tiré, alors que la jurisprudence admet une régularisation postérieure ; qu'il résultait de ces conclusions que la société Utexbel ne contestait pas que la signature du tiré avait été apposée antérieurement à l'endossement des effets par le tireur la société B et F ; qu'ainsi, en énonçant que le tiré avait mentionné lui-même à l'émission la dénomination et le siège du tireur, puis accepté à l'échéance les lettres de change où figurait au verso la signature du tireur, la cour d'appel a méconnu l'objet

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du litige tels que fixé par les conclusions des parties et violé les articles 4 et 5 du nouveau code de procédure civile ; 3°/ qu'en se déterminant ainsi, alors qu'en l'absence, au moment de leur acceptation par le tiré de l'une des mentions énumérées par l'article L. 511-1 du code de commerce, à savoir, la signature du tireur, les effets litigieux ne pouvaient valoir comme lettres de change, la cour d'appel a violé l'article précité ; Mais attendu que si l'apposition de la signature du tireur au verso d'une lettre de change pour l'endosser ne supplée pas à l'absence de sa signature en qualité de tireur, le titre peut valoir comme billet à ordre lorsqu'il est revêtu de toutes les mentions exigées par l'article L. 512-1 du code de commerce ; Attendu que, selon les faits relevés par les premiers juges et non contestés, les effets étant revêtus de toutes les mentions exigées par l'article L. 512-1 du code de commerce pour valoir comme billet à ordre, la société EM était tenue de régler l'effet litigieux ; que par ce motif substitué à celui critiqué par le pourvoi, l'arrêt, qui n'a pas méconnu l'objet du litige, ni dénaturé les conclusions des parties, se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Doc. 8 : Cass. Com, 29 novembre 1994, n° 92-18003, Bull. IV n°354 Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 26 mai 1992), que la société Bondon a accepté un effet se présentant comme une lettre de change, mais où la signature du tireur n'était apposée que sur le timbre fiscal ; que cette signature du tireur a été, en outre, inscrite au verso aux fins d'endossement ; que la société Générale de miroiterie d'aluminium (société GMA), devenue porteur, en a réclamé le paiement à la société Bondon qui l'a refusé en prétendant que la lettre de change était nulle, en raison de l'omission de mentions essentielles ; Attendu que la société GMA fait grief à l'arrêt d'avoir retenu la nullité de la lettre de change, alors selon le pourvoi, d'une part, que l'article 110 du Code de commerce, qui conditionne la validité de la lettre de change à la signature de celui qui émet la lettre, n'impose pas que le tireur signe à un autre endroit que sur les timbres fiscaux ; que, dès lors, en estimant que l'effet en cause était nul parce que la signature du tireur avait été apposée sur le timbre fiscal, la cour d'appel a violé la disposition susvisée ; alors, d'autre part, que le tiré accepteur n'ayant aucunement soutenu que le timbre fiscal dont il admettait qu'il comportait la signature du tireur aurait été apposé après qu'il ait émis son acceptation, ou encore qu'un timbre fiscal autre ait été postérieurement apposé sur l'effet, la cour d'appel ne pouvait retenir qu'il s'agissait d'un " élément ajouté à l'effet et amovible ", sans provoquer les explications des parties, conformément à l'article 16 du nouveau Code de procédure civile, dont la violation est patente ; alors, enfin, que la signature du tireur a été apposée au verso de la lettre de change pour endossement, en sorte que l'effet était régulier ; que, dès lors, en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 110 du Code de commerce ; Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu à bon droit que la signature du tireur sur une lettre de change en est un élément obligatoire et que l'apposition de cette signature sur le timbre fiscal, élément ajouté à l'effet et amovible, ne permet pas d'y suppléer ; Attendu, d'autre part, qu'il importe peu, pour la vérification de la régularité de la lettre de change, que le timbre fiscal revêtu de la signature du tireur y soit apposé, ou remplacé, postérieurement, ou non, à l'inscription de la mention d'acceptation ; que la cour d'appel, qui n'a pas procédé à une telle recherche, n'avait, dès lors, pas à recueillir les observations des parties à ce sujet ; Attendu, enfin, qu'en l'absence de la signature du tireur avant l'inscription de son acceptation par le tiré, une lettre de change est nulle faute d'un des éléments essentiels énoncés à l'article 110 du

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Code de commerce ; qu'en l'espèce, il n'a pas été soutenu que l'apposition de la signature du tireur au verso du titre fût antérieure à l'acceptation par le tiré ; D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi. Doc. 9 : Cass. Com, 9 mars 1971, Bull. civ. IV n°75 Vu l'article 128 du code de commerce; Attendu qu'aux termes de ce texte le tiré s'oblige, par l'acceptation, a payer le lettre de change a l'échéance; Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaque que la société motoculture villeneuvoise battles et fils ayant vendu un tracteur à decaunes tira sur celui-ci, qui l'accepta, une lettre de change du montant du solde du prix, en date du 17 avril 1962 et a échéance du 30 avril 1962; Que cet effet, dans lequel le nom du preneur avait été laisse en blanc, ne devait pas, selon la convention des parties, être mis en circulation si, a la date d'échéance, le tireur vendeur recevait directement de la société de crédit, a laquelle decausnes avait demandé un prêt, le montant du prix; Que, cependant, la lettre de change fut immédiatement remise par le tireur a son banquier, le credit lyonnais, qui, après y avoir appose son nom comme bénéficiaire, la prit a l'escompte; Que, poursuivi apres l'échéance en payement dudit effet, decaunes prétendait ne plus rien devoir, la société de crédit ayant, le 2 mai 1962, verse directement le prix au vendeur; Attendu que, pour accueillir cette défense et rejeter l'action cambiaire, l'arret déclare qu'en remettant au credit lyonnais le titre accepte par decaunes le tireur a agi contrairement a la volonté de ce dernier et qu'il y a eu lieu de dire dans ces conditions que l'inscription posterieure du nom du bénéficiaire par la banque ne peut, en l'espèce, etre réputée conforme a un accord de decaunes, qu'en conséquence celui-ci est recevable à contester la validité de la lettre de change; Attendu cependant qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt que, d'une part, le tiré accepteur avait signé la lettre de change en blanc sans y inscrire une mention de nature a faire apparaitre qu'elle n'etait pas destinée, dans la commune intention des parties, a etre immediatement complétée et mise en circulation, que, d'autre part, en apposant son nom sur cette lettre de change pour indiquer qu'il en était le preneur, le credit lyonnais avait agi pleinement d'accord avec le tireur remettant créateur et détenteur de ladite lettre acceptée, lequel lui avait laisse ignorer qu'il agissait contrairement à la volonté du tiré acqu'il suit de la qu'en statuant comme elqu'il suit de la qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que la seule circonstance que le nom du preneur ait ete en blanc ne pouvait suffire a reveler qu'en apposant sa signature l'accepteur n'avait pas voulu, nonobstant les dispositions du texte susvisé, s'engager selon la loi du change, et alors qu'elle ne constate pas qu'en régularisant l'effet le banquier ait été de mauvaise foi, la cour d'appel n'a pas donne de base légale a sa décision; Par ces motifs : casse et annule l'arrêt rendu le 23 janvier 1969 entre les parties, par la cour d'appel d'Agen; Remet, en conséquence, la cause et les parties au même et semblable état ou elles étaient avant ledit arrêt, et, pour être fait droit les renvoie devant la cour d'appel de limoges.

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Doc. 10 : Cass. Com 16 Juin 2009, n° 08-14.589 Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 25 février 2008), que la société Gil, a accepté une lettre de change émise le 17 février 2004 par la Société de construction nordique, à échéance du 31 mars 2004, escomptée par le Crédit mutuel de Laval Avesnières (la banque) ; que cette lettre de change est revenue impayée ; que la banque a procédé à une saisie conservatoire à l'encontre la société Gil, dont la demande de mainlevée a été rejetée, décision confirmée par arrêt du 27 février 2007 ; que la société Gil, assignée en paiement de la lettre de change par la banque, a contesté cette demande en faisant valoir que la lettre de change était nulle, faute d'indication du nom du bénéficiaire ; Sur le premier moyen : Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la fin de non-recevoir, fondée sur l'arrêt du 27 février 2007, et rejeté sa demande en paiement à l'encontre de la société Gil, alors, selon le moyen, que si dans l'instance ayant conduit à l'arrêt du 27 février 2007, la société Gil invitait les juges du second degré à ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire, elle les invitait également à constater la nullité de la lettre de change ; qu'après avoir évoqué dans ses motifs la nullité de la lettre de change, l'arrêt du 27 février 2007 a confirmé le jugement du 1er février 2006 ayant refusé d'ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire et débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ; qu'en s'abstenant de rechercher après analyse des pièces de la procédure si la nullité de la lettre de change faisait l'objet d'une demande dans le cadre de la première procédure, recherche indispensable pour déterminer si les deux procédures successives avaient, sur ce point au moins, le même objet, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 4 et 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351 du code civil ; Mais attendu que l'arrêt retient que le litige tranché par la décision du 27 février 2007 avait pour objet la contestation de la validité de la saisie conservatoire pratiquée par la banque sur les comptes de la société Gil ; que la cour d'appel, qui a ainsi procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le deuxième moyen : Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en paiement, alors, selon le moyen, que dès lors que la régularisation de la lettre de change peut intervenir jusqu'au jour de la présentation en vue du paiement, il suffit que la régularisation soit intervenue à la date à laquelle le juge est invité à se prononcer sur le point de savoir si le porteur de la lettre de change peut agir sur le fondement du droit cambiaire ; qu'en cas d'appel, il suffit que la régularisation soit intervenue à la date à laquelle les juges du second degré sont appelés à se prononcer ; qu'en décidant le contraire, pour exiger une régularisation à la date de la décision des premiers juges, les juges du fond ont violé l'article L. 511-1 du code de commerce ; Mais attendu que la lettre de change, dont certaines mentions font défaut, peut donner lieu à régularisation à la condition que celle-ci intervienne avant la présentation au paiement ; qu'ayant constaté que la régularisation de la lettre de change du 17 février 2004, qui ne comportait pas le nom du bénéficiaire, n'était intervenue que postérieurement à la décision du tribunal, c'est à bon droit que la cour d'appel en a déduit que ce titre ne valait pas comme lettre de change ; que le moyen n'est pas fondé ; Et sur le troisième moyen : Attendu que la banque fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il fait, alors, selon le moyen, qu'à partir du moment où la lettre de change a été acceptée par le tiré, celui-ci s'interdit,

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sauf conscience de la banque d'agir contrairement à la volonté du tiré accepteur, d'invoquer la nullité de l'effet, tirée de ce que le nom du bénéficiaire ne figurait pas sur l'effet, dans la mesure où, par suite de l'acceptation, il s'est engagé à payer conformément au droit cambiaire ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, quand ils avaient constaté que la lettre de change remise à l'escompte à la banque avait été acceptée par la société Gil, les juges du fond ont violé les articles L. 511-1 et L. 511-19 du code de commerce ; Mais attendu que la banque ne s'est pas prévalue devant la cour d'appel de ce que l'acceptation de l'effet interdirait au tiré d'invoquer sa nullité par suite de l'omission du nom du bénéficiaire ; que le moyen, nouveau, et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Doc 11: Cass. Com, 10 février 1971, n°69-13230 Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : attendu qu'il est en premier lieu fait grief a l'arret attaque (pau, 30 juin 1969) d'avoir condamne aitcin a payer a olaiz-iriarte une somme de 83000 francs représentant le montant d'une lettre de change qui avait été acceptée par aitcin bien que cet effet ait été irrégulier comme ne portant pas la signature du tireur, par le motif qu'un effet de commerce, nul comme lettre de change, est cependant susceptible de faire preuve des engagements que ses signataires avaient contractes selon les règles du droit commun, alors d'une part, que la cour d'appel a statue par un motif d'ordre général et qu'elle n'a pas recherche si, en l'espèce et compte tenu de la nature de l'irrégularité qui entachait la lettre de change litigieuse, celle-ci pouvait etre retenue comme élément de preuve de l'existence d'une dette de l'intime envers olaiz-iriarte; Alors d'autre part, qu'une lettre de change non signée du tireur ne vaut que comme commencement de preuve par écrit de la dette du tiré accepteur ou comme simple présomption et qu'elle ne peut faire preuve complète de l'obligation du tiré que si elle est complétée ou corroborée par d'autres éléments de preuve, ce qui n'etait pas le cas de l'espèce; Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel ne s'est pas, contrairement aux allégations du pourvoi, bornée à invoquer le motif d'ordre général relevé par celui-ci; Qu'elle constate de plus qu'aitcin ne conteste pas son acceptation et releve ensuite les faits de l'espece; Attendu, d'autre part, qu'en déclarant que, eu egard aux circonstances de la cause, le titre litigieux demeure aux mains de olaiz-iriartre, suffisait a établir la dette de aitcin, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir souverain d'appréciation, la preuve étant libre en matiere commerciale; D'ou il suit que le moyen n'est fonde en aucune de ses branches : Sur le deuxieme moyen : attendu qu'il est de plus reproche à l'arret déféré de n'avoir pas répondu, sinon par des motifs insuffisamment explicites, aux conclusions de aitcin dans lesquelles celui-ci faisait valoir que cet engagement prétendu était dépourvu de cause, l'ecrit litigieux ayant ete rédigé en prévision d'une opération d'achat de marchandises qui ne s'etait pas réalisée; Mais attendu, qu'après avoir exposé qu'aux termes de ses conclusions, aitcin prétend qu'il a accepté la lettre de change pour fournir a pedro x... Une garantie vis-a-vis d'un vendeur espagnol d'amandes, exportateur en france de cette marchandise mais que ce marche ete abandonne, la cour d'appel constate que aitcin ne produit au soutien d'une telle allegation, que des comptes sybillins, ne présentant aucune garantie et déclaré que ledit aitcin échoué dans la preuve de l'exception de défaut de cause qu'il invoque pour sa défense;

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Que la cour d'appel a ainsi explicitement répondu aux conclusions prétendument délaissées; Que le moyen est sans fondement; Sur le troisieme moyen : attendu que l'arret est enfin critique pour avoir declare valable l'engagement contracte par aitcin, alors que les conventions relatives a l'importation clandestine de marchandises en france procedent d'une cause illicite et sont atteintes d'une nullite d'ordre public comme constituant une infraction a la règlementation douaniere ainsi qu'une infraction penale et qu'elles ne peuvent engendrer aucun droit, ni donner lieu a aucune action; Mais attendu qu'aitcin n'a nullement invoque devant les juges du fond le caractère illicite du contrat en vertu duquel il s'etait reconnu debiteur envers olaiz-iriarte et que la cour d'appel constate au contraire, qu'au moment ou elles ont ete conclues, les operations d'achat et de vente realisees par les parties n'avaient aucune cause illicite ou immorale; Que le moyen ne peut etre accueilli; Par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arret rendu le 30 juin 1969, par la cour d'appel de pau;

LA PROVISION DE LA LETTRE DE CHANGE

Doc. 12 : Cass. Com 27 octobre 1992, n° 91-11.574 Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches : Vu l'article 116, alinéa 2, du Code de commerce ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Société marseillaise de crédit a pris à l'escompte une lettre de change tirée sur la société Prestige de France et non acceptée par elle ; qu'après la mise en règlement judiciaire du tireur, la banque a poursuivi la société Prestige de France en paiement, mais qu'au nom de la masse des créanciers du tireur, le syndic du règlement judiciaire a fait valoir que lors de l'émission, la lettre de change n'était pas causée, parce qu'elle ne correspondait alors à aucune créance certaine, liquide et exigible et que les sommes restant dues par la société Prestige de France devaient être versées entre ses mains ; Attendu que pour accueillir l'exception soutenue par le syndic, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la lettre de change litigieuse était sans cause lors de son émission, les sommes conservées par la société Prestige de France à titre de garanties sur les travaux exécutés par le tireur ne pouvant alors être exigibles ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la provision d'une lettre de change est transmise au porteur de cet effet, si elle existe, au moins en son principe, à l'échéance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 décembre 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes

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Doc. 13 : Cass. com., 1er février 1977, n° 75-13556 Sur le premier moyen : attendu que, selon les énonciations de l'arrêt attaque, la société oredis qui depuis, a fait l'objet d'un règlement juridiciaire, ultérieurement converti en liquidation des biens a tiré sur la société conchon-quinette deux lettres de change venant respectivement à échéance les 10 et 30 avril 1970, que ces effets furent escomptés par la société de banque et de crédit qui les adressa pour acceptation au tire, les 16 janvier et 20 février 1970 ; Que la société conchon-quinette en fit retour a la banque, sans les avoir acceptes en précisant que les créances pour le paiement desquelles ils avaient été crées avaient été réglées par elle, le 13 février et le 6 mars 1970 ; Attendu qu'il est fait grief a l'arrêt d'avoir condamné la société conchon-quinette a payer a la banque le montant de ces effets aux motifs, selon le pourvoi, que des l'émission des lettres de change la provision avait été transmise au porteur et que le tiré acquis connaissait l'existence de ces effets ne pouvait plus se libérer entre les mains du tireur, alors, que la provision considérée par l'article 116 du code de commerce s'analyse dans la créance éventuelle du tireur contre le tiré susceptible d'exister a l'échéance de la lettre de change ; Qu'avant cette échéance le tiré non accepteur peut valablement payer le tireur tant que le porteur n'a pas consolide son droit sur ladite créance en lui adressant une défense de s'acquitter entre les mains du tireur ; Mais attendu que contrairement aux allégations du pourvoi, la cour d'appel a expressément écarté les conclusions de la société de banque et de crédit soutenant que des l'acquisition d'une lettre de change, le porteur a seul droit a la provision, et que le tiré s'il a connaissance de l'existence de l'effet ne peut plus se libérer qu'entre ses mains sans qu'il soit nécessaire qu'il ait reçu défense de verser au tireur le montant de la provision ; Qu'elle a considéré qu'il n'en était ainsi que lorsque la lettre de change est échue ; Que le moyen manque en fait ; Mais sur la seconde branche du second moyen : vu l'article 124, dernier alinéa, du code de commerce ; Attendu que pour faire droit a la demande de la banque, la cour d'appel a retenu que les conventions intervenues entre les sociétés conchon-quinette et oredis ne mettaient pas obstacle a la création de lettres de change, que le refus d'accepter oppose par le tiré était intervenu avant le règlement des fournitures fait par la société conchon-quinette a oredis les 13 février et 6 mars 1972 et que ce refus avait, en application du dernier alinéa de l'article 124 du code de commerce, entraine la déchéance du terme dont étaient assorties les lettres de change, de sorte qu'a compter de ce refus, les lettres de change, étant ainsi échues, le tiré qui en connaissait l'existence ne pouvait se libérer qu'entre les mains du porteur ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le refus par le tiré d'accepter une lettre de change, s'il rend immédiatement exigible la créance que le tireur a contre lui et qui en constitue la provision, n'a pas pour effet de modifier l'échéance de cette lettre de change, la cour d'appel a viole les dispositions du texte susvisé ; Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la première branche du second moyen : casse et annule l'arrêt rendu entre les parties le 18 juin 1975 par la cour d'appel de limoges ;

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Remet, en conséquence, la cause et les parties au même et semblable état ou elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers. Doc. 14 : Cass. Com 18 mars 1986, n° 84-15309 Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche : Vu l'article 116 du Code de commerce ; Attendu qu'il résulte de ce texte que l'escompte, avant son échéance, d'une lettre de change non acceptée ne rend pas indisponible au profit du tiers porteur, qui n'a pas fait défense au tiré de payer, la créance du tireur sur le tiré non accepteur ; Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué que, pour avoir paiement de marchandises qu'elle avait livrées à la société Morisaux la société Leroux a tiré sur sa débitrice deux lettres de change ; que ces effets, qui n'ont pas été acceptés par le tiré, ont été escomptés par la Société Générale (la banque) ; qu'à l'échéance la banque, porteur des effets, en a demandé le paiement à la société Morisaux, que celle-ci a refusé de payer, alléguant s'être libérée de sa dette envers la société Leroux ; Attendu que, pour condamner la société Morisaux à payer à la banque le montant des effets, la Cour d'appel énonce que cette société prétend avoir réglé par voie de compensation la dette correspondant aux deux lettres de change, mais qu'à une date antérieure à celle invoquée par la société Morisaux, la société Leroux avait transmis à la banque tous ses droits sur les effets à échoir, qu'ainsi en escomptant les effets la banque avait acquis ses droits de tiers porteur sur la créance du tireur contre le tiré, même si ce dernier n'avait pas accepté l'effet, que ladite créance demeurait donc indisponible et que dès lors, faute de remplir les conditions de liquidité et d'exigibilité prévues par l'article 1291 du Code civil, la compensation ne pouvait plus s'effectuer de plein droit ; Attendu qu'en se déterminant ainsi la Cour d'appel, qui a omis de rechercher si, avant l'échéance des effets, la Société Morisaux, tiré non accepteur, s'était libérée de sa dette envers le tireur par l'effet de la compensation qu'elle invoquait, n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche : CASSE et ANNULE en son entier l'arrêt rendu le 7 juin 1984 entre les parties, par la Cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Amiens Doc. 15: Cass. com., 4 décembre 1984, n° 82-12239 Donne défaut contre m. Villette x... De la liquidation des biens de la société des établissements Munch frères, la société constructions métalliques de la Moselle, mm. Y... Et nurdin x... Du règlement judiciaire de cette société, m. Reig x... De la liquidation des biens de la société estiot ; Sur le moyen unique : vu les articles 12 alinéa 1er et 13 alinéa 2 de la loi du 31 décembre 1975 relative a la sous-traitance, ensemble l'article 116 alinéa 2 du code de commerce ; Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaque, que, le 26 octobre 1979, la régie Renault, agissant au nom de la société fonderies du Poitou (la société du Poitou), a confié à la société des établissements Munch frères (la société Munch) la construction d'un bâtiment ; Que la société Munch a eu recours a des sous-traitants ; Que, le 30 avril 1980, la société Munch a remis à la société générale, qui l'a escomptée, une lettre de change à échéance du 20 juillet suivant, non acceptée, tirée sur la société du Poitou ;

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Que, le 6 octobre 1980, a été prononcée la liquidation des biens de la société Munch ; Que les sous-traitants ont assigne la société du Poitou en paiement de leurs créances ; Que la société générale a demande la condamnation de la même société au paiement du montant de la lettre de change ; Attendu que, pour débouter la société générale de sa demande, la cour d'appel a retenu qu'il importait peu d'examiner si, du fait de l'escompte, la provision avait été ou non transférée a la banque, puisque ce transfert devait être considère comme nul et de nul effet en vertu des dispositions de l'article 15 de la loi susvisée ; Attendu qu'en se fondant, pour accueillir la demande des sous-traitants, sur les seules dispositions de l'article 15 de la loi du 31 décembre 1975, sans préciser que l'action directe des sous-traitants avait été exercée avant la date d'échéance de la lettre de change, date à partir de laquelle, en l'absence de toute diligence du banquier escompteur, la provision résultant de l'effet, même non accepte, était acquise à ce banquier, la cour d'appel n'a pas donne de base légale a sa décision ; Par ces motifs : casse et annule l'arrêt rendu le 27 janvier 1982, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; Remet, en consequence, la cause et les parties au meme et semblable etat ou elles etaient avant ledit arret et, pour etre fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de limoges, a ce designee par deliberation speciale prise en la chambre du conseil ; L’ESCOMPTE

Doc 16 : L. 511-8 du Code de commerce Toute lettre de change, même non expressément tirée à ordre, est transmissible par la voie de l'endossement. Lorsque le tireur a inséré dans la lettre de change les mots " non à ordre " ou une expression équivalente, le titre n'est transmissible que dans la forme et avec les effets d'une cession ordinaire. L'endossement peut être fait même au profit du tiré, accepteur ou non, du tireur ou de tout autre obligé. Ces personnes peuvent endosser la lettre à nouveau. L'endossement doit être pur et simple. Toute condition à laquelle il est subordonné est réputée non écrite. L'endossement partiel est nul. L'endossement " au porteur " vaut comme endossement en blanc. L'endossement doit être inscrit sur la lettre de change ou sur une feuille qui y est attachée et dénommée allonge. Il doit être signé par l'endosseur. La signature de celui-ci est apposée, soit à la main, soit par tout procédé non manuscrit. L'endossement peut ne pas désigner le bénéficiaire ou consister en un endossement en blanc constitué par la simple signature de l'endosseur. Dans ce dernier cas, l'endossement, pour être valable, doit être inscrit au dos de la lettre de change ou sur l'allonge. Doc. 17 : Cass. Com 25 avril 2006, n° 04-20.583 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Lac carrières ultérieurement mise en liquidation judiciaire et représentée par Mme X..., liquidateur, a remis à l'escompte à sa banque, le Crédit

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Martiniquais, aux droits duquel est venue la société Financière forum, une lettre de change ; que celle-ci, acceptée par la société Gaddarkhan, et dont le montant a été inscrit au crédit du compte du tireur, est revenue impayée à son échéance ; que la société Gaddarkhan, après avoir fait l'objet de saisies, a assigné le Crédit Martiniquais pour contester sa qualité de porteur légitime, à défaut d'un endossement régulier ; que la banque Espirito Santo et de la Vénétie a été désignée par la société Eurotitrisation, société de gestion du fonds commun de créances Malta Compartiment Malta 1, pour agir au nom et pour le compte de ce dernier en vertu d'une cession de créances intervenue ultérieurement entre le fonds et la société Financière du forum ; Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche : Vu l'article 511-8 du Code de commerce ; Attendu que pour rejeter la demande du tiré accepteur, tendant à faire constater l'irrégularité de l'endossement de la lettre de change et faire juger que le Crédit Martiniquais n'était pas un porteur légitime de cette lettre, l'arrêt affirme que la signature de l'endosseur de la lettre litigieuse, dont la copie recto et verso est produite devant la Cour de Cassation, y figure au verso et que cet endossement a transmis à l'endossataire les droits résultant de la lettre ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le cachet commercial apposé sur la lettre de change pour endossement et comportant le nom de la société, son adresse et ses coordonnées téléphoniques ne peut tenir lieu de signature non manuscrite apposée par le procédé de la griffe, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Et sur le second moyen : Vu l'article 1382 du Code civil ; Attendu que pour condamner la société Gaddarkhan à payer à la banque Espirito Santo et de la Vénétie la somme de 2 000 euros, à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, l'arrêt relève que cette société n'avait élevé aucune contestation lors des précédentes procédures de saisies engagées à son encontre ; Attendu qu'en statuant ainsi, sans relever aucun élément de nature à caractériser la faute que la société Gaddarkhan aurait commise dans l'exercice de son droit de se défendre en justice, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 septembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France Doc 18 : Cass. Com 1er avril 2014, n° 13-13.900 Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche : Vu l'article L. 511-8 du code de commerce et l'article 455 du code de procédure civile ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société SAS Loft a tiré deux lettres de change sur la Société de constructions et travaux immobiliers (SCTI) qui les a acceptées ; que ces lettres de change, escomptées par la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Toulouse 31 (la caisse) qui

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en a réglé le montant à la société Loft architecture, ont été rejetées à leur échéance ; que la caisse a assigné en paiement la SCTI qui a opposé l'irrégularité de la chaîne des endos ; Attendu que écarter la demande de la caisse, l'arrêt, après avoir relevé que les lettres de change n'avaient pas été endossées par la société SAS Loft au profit de la société Loft architecture, retient que la caisse n'est pas devenue porteur des titres par une chaîne d'endos régulier ; Attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée si l'endossement en blanc des effets ne donnait pas à la caisse la qualité de porteur légitime, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 janvier 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon, autrement composée ; Doc 19 : Cass. Com 23 mai 1989, n° 87-19231 Sur le moyen unique pris en ses quatre branches : Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt infirmatif attaqué (Agen, 19 août 1987) que la Banco Exterior France (la banque) a escompté trois lettres de change tirées sur la société Manufacture de tricotage agenais (société MTA) au bénéfice de la Société internationale cotonnière ; qu'elle a assigné en paiement de ces effets non réglés à leur échéance la société MTA ; que celle-ci a prétendu n'être pas tenue par les liens du change, la signature d'acceptation figurant sur les effets émanant d'un sieur X... qui, à cette date, n'avait pas qualité pour engager la société MTA ; Attendu que la société MTA fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de la banque, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'arrêt qui a tenu pour engageant la sociéte MTA la seule signature, non identifiée de M. X..., en affirmant qu'il importe peu " qu'elle soit celle de Mercier ou d'un autre nom " a violé les articles 110 et suivants, 121, 124 du Code de commerce ; alors, d'autre part, que l'arrêt ne pouvait s'abstenir de répondre aux conclusions de la société MTA faisant valoir qu'il ne s'agissait pas en l'espèce de savoir si la banque est dispensée de vérifier les pouvoirs de l'auteur de l'acceptation, mais d'exclure comme preuve d'acceptation un simple paraphe, ne comportant aucun cachet, tampon ou mention d'une qualité permettant d'identifier l'auteur du paraphe, et que la cour d'appel a ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, encore, que ne peut précisément engager le tiré, la société MTA, la signature, non identifiée, d'un salarié du tireur dépourvu de toute qualité, signature non assortie du moindre cachet, tampon ou d'une qualité permettant à l'escompteur de penser que l'accepteur a agi pour le compte du tiré, celui-ci n'ayant donné aucun mandat au signataire et étant demeuré totalement étranger à l'apparence alléguée et que la cour d'appel a ainsi violé les articles 110 et suivants et 124 du Code de commerce ; et alors, enfin, qu'il ne peut être opposé à la société MTA de ne pas avoir remis en cause des actes occultes que par définition elle ignorait et que la cour d'appel a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1984 du Code civil ; Mais attendu qu'ayant relevé que les lettres de change comportaient toutes les mentions exigées par l'article 110 du Code de commerce et constaté l'existence d'une signature d'acceptation mise pour la société MTA, la cour d'appel a retenu qu'un usage bancaire constant dispense le banquier escompteur, lorsque des lettres de change sont rendues acceptées par une personne morale,

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d'exiger la justification des pouvoirs de la personne qui a apposé la signature d'acceptation ; qu'elle a, par ces seuls motifs, abstraction faite de tous autres qui sont surabondants, et répondant aux conclusions invoquées, justifié sa décision du chef critiqué ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi Doc. 20 : Cass. Com. 20 mars 1984, Bull civ. IV N°109 : Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : attendu que, selon l'arrêt déféré (Toulouse, 30 novembre 1982), la société parfumerie florixie (la société) a déposé le 30 mars 1979 plusieurs effets par elle tires a la banque courtois, pour escompte, avec un bordereau de remise, que la société a été mise en liquidation des biens le 2 avril, que la banque a crédité le compte courant de sa cliente le 6 avril, en portant sur le relevé de compte qu'elle lui a adresse le 4 avril comme date de valeur, que le syndic de la liquidation des biens de la société ayant encaissé le montant des effets, la banque, invoquant la qualité de porteur légitime, lui en a réclamé la restitution ; Attendu qu'il est fait grief a l'arrêt d'avoir rejeté la demande de la banque au motif qu'elle n'avait procède a l'escompte des effets que postérieurement au jugement de liquidation des biens, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en déduisant du délai évoque qu'il "permettrait de présumer" que l'agence de la banque n'avait pas pouvoir ou qualité pour procéder elle-même a des opérations d'escompte de sorte que l'acquisition par la banque des effets litigieux n'aurait pu avoir eu lieu le 31 mars 1979, la cour d'appel s'est fondée sur un motif hypothétique et a méconnu par suite l'article 604 du nouveau code de procédure civile comme elle n'a pas donne a sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, alors, d'autre part, que la date de valeur dont une banque affecte l' écriture qu'elle inscrit a un compte courant a pour seul objet de déterminer l'incidence de cette écriture sur le calcul des intérêts lies a la position du compte et peut plus ou moins différer de la date de l'opération sous-jacente a cette écriture ; Que des lors, en fixant l'opération litigieuse au 4 avril dans la considération que c'était la date de valeur dont était assortie l'écriture afférente a cette opération, la cour d'appel s'est fondée sur un motif inopérant, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 120 du code de commerce, alors, enfin, que la cession d'une traite par voie d'endossement translatif de propriété est réputée avoir lieu lors de la remise de l'effet par l'endosseur a l'endossataire, a moins qu'il ne soit établi que l'endosseur ou l'endossataire n'avaient pas alors la volonté ou le pouvoir, le premier de procéder a cette cession, le second d'acquérir le titre ; Qu'en se fondant, pour considérer qu'en l'espèce la cession des traites litigieuses n'était pas intervenue le 31 mars 1979, sur des motifs dubitatifs ou inopérants, sans rechercher s'il était établi qu'a la date de la remise, l'agence de la banque n'avait pas la volonté ou le pouvoir d'acquérir les lettres de change dont il s'agit, la cour d'appel a prive sa décision de base légale au regard des articles 117 et suivants du code de commerce ; Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui ne s'est pas déterminée par des motifs hypothétiques ou dubitatifs et abstraction faite de celui critique dans la première branche, qui est surabondant, a retenu que si la société avait offert a la banque pour escompte le 30 mars 1979 les effets en cause, en revanche la preuve n'était pas rapportée que le 2 avril 1979, date de l'ouverture de la procédure collective, la banque eut accepte cette offre et acquis la propriété de la provision ; D'ou il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

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Par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arrêt rendu le 30 novembre 1982 par la cour d'appel de toulouse ; Mauvaise foi – inopposabilité des exceptions Doc 21 : Cass. Com. 24 mars 1992, n° 90-17.457 Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : Vu l'article 121 du Code de commerce ; Attendu qu'il résulte de l'arrêt déféré que la Banque Marze et Cie (la banque) a ouvert un compte au nom de M. Jean X... en sa qualité d'administrateur judiciaire provisoire de la société Cerdicim conseil (société Cerdicim) ; que la mission de M. X... a cessé le 28 mars 1984 ; que, le 17 mai 1984, M. Y... a remis à la banque, pour escompte, deux lettres de change qu'il avait tirées, au nom de la société Cerdicim, sur la société Direct ; que celle-ci a accepté les effets mais n'a jamais reçu la marchandise en paiement de laquelle ils avaient été créés ; que la banque a assigné la société Direct en paiement du montant de ces effets ; Attendu que, pour décider que la banque était un tiers porteur de mauvaise foi, l'arrêt retient qu'elle savait, en ouvrant un compte au nom de l'administrateur judiciaire provisoire de la société Cerdicim, que cette société, dont les établissements de crédit de Carpentras refusaient d'escompter les effets de commerce, connaissait des difficultés, qu'elle savait également que M. Y... n'avait pas le pouvoir de lui présenter à l'escompte des effets tirés par la société Cerdicim et que, lorsque celui-ci l'a néanmoins fait, l'administrateur provisoire avait cessé ses fonctions depuis plus d'un mois, qu'elle " s'est abstenue de la moindre vérification malgré le caractère suspect des circonstances de l'opération ", qu'enfin elle " n'a pas pris les effets litigieux en compte, que dans le souci d'apurer le solde débiteur du compte " ; Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, desquels il ne résulte pas que la banque savait, à la date où elle a escompté les deux lettres de change, que la provision de celles-ci ne serait pas constituée à leur échéance et qu'ainsi elle avait conscience, à ce moment, d'empêcher la société Direct de se prévaloir de l'exception de défaut de provision, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu le 31 mai 1990 par la cour d'appel de Nîmes, en ce qu'il a confirmé les dispositions du jugement du 6 janvier 1989 du tribunal de commerce de Carpentras relatives aux demandes de la Banque Marze et Cie dirigées contre la société Direct, et en ce qu'il a condamné la Banque Marze et Cie à payer à la société Direct la somme de 3 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence Doc 22 : Cass. Com., 19 juin 2007 05-21958 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le Crédit commercial du Sud-Ouest (la banque) a pris à l'escompte deux lettres de change à échéance, respectivement à échéance du 31 janvier 2002 et du 18 mars 2002, tirées par la société Comptoir des vins du libournais (la société CVL) sur la société Grands vins sélections (la société GVS) qui les avait acceptées ; que ces effets étant

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revenus impayés, la banque a assigné en paiement la société GVS ; que celle-ci a demandé reconventionnellement, devant la cour d'appel, la condamnation de la banque à lui rembourser le montant d'un troisième effet ; Sur le premier moyen : Attendu que la société GVS fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer une certaine somme, alors, selon le moyen : 1 / que l'insuffisance de motifs équivaut à leur absence ; qu'en se bornant à affirmer qu'il n'est pas établi que la banque n'était pas porteur de bonne foi, sans s'en expliquer davantage et sans préciser les éléments qui auraient permis de d'apprécier la bonne ou la mauvaise foi de la banque au moment où elle avait acquis les traites litigieuses, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs, en violation de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ; 2 / que les exceptions au paiement d'une lettre de change fondées sur les rapports entre le tireur et le tiré peuvent toujours être opposées au porteur de mauvaise foi ; qu'en se bornant à affirmer "qu'il n'est pas établi que la banque n'était pas porteur de bonne foi sans rechercher, comme elle y était invitée, si la banque avait escompté les traites en connaissance d'une situation totalement obérée du tireur, ce qui aurait été de nature à caractériser la mauvaise foi du porteur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 511-12 du code de commerce ; Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que la société GVS invoquait l'imprudence de la banque et dès lors que cette circonstance est impropre à caractériser la mauvaise foi, ce dont il résultait qu'elle n'avait pas à effectuer une recherche inopérante, la cour d'appel n'a pas encouru le grief de la première branche ; Attendu, d'autre part, que la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à une affirmation qui n'était assortie d'aucune offre de preuve ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Mais sur le second moyen : Vu les articles 70 et 567 du nouveau code de procédure civile ; Attendu que pour déclarer irrecevable la demande reconventionnelle formée par la société GVS, l'arrêt retient que cette demande est formée pour la première fois en appel et qu' il n'est pas justifié qu'elle découle de l'évolution du litige ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la notion d'évolution du litige est étrangère à la recevabilité des demandes reconventionnelles formées pour la première fois en appel contre une personne qui était partie au procès devant le tribunal, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable la demande reconventionnelle formée par la société GVS, l'arrêt rendu le 18 octobre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse Doc 23 : Cass. com, 10 juin 1997, n°95-12.403

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Vu l'article 121 du Code de commerce ; Attendu, selon l'arrêt critiqué, que la Société de Banque Occidentale (la SDBO), aux droits de laquelle se trouve la société CDR-Créances-Groupe consortium de réalisation, qui a repris l'instance en son lieu et place, a escompté une lettre de change à échéance du 31 janvier 1989, acceptée par Mme X... en règlement d'une facture du 28 novembre 1988 de la société Extrême ; que cette société n'a pas rempli ses obligations à l'égard de Mme X... et a demandé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire le 29 décembre 1988 ; que, se prévalant de la qualité de tiers porteur, la SDBO a réclamé le paiement du montant de l'effet à Mme X..., laquelle a refusé ; Attendu que, pour condamner celle-ci, l'arrêt retient que rien ne démontre que l'endossement a eu lieu avec la conscience de causer par là même un préjudice à Mme X..., qu'ainsi que le note avec pertinence le premier juge, la banque était en droit de penser, soit que la provision était déjà constituée, comme le suppose de façon réfragable l'acceptation, soit qu'elle le serait à l'échéance ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la SDBO était pratiquement l'unique banquier de la société Extrême, que l'expert désigné par le Tribunal avait mis en lumière qu'il y avait eu dégradation constante de la trésorerie de cette société et augmentation importante des retours d'effets impayés, que l'évolution des engagements et la multiplicité des impayés ne pouvaient manquer d'alerter la banque, et qu'il ressortait du rapport d'expertise que celle-ci ne pouvait ignorer la situation désespérée de la société Extrême, ce dont il résultait qu'en acquérant la lettre de change la SDBO devait savoir que la provision ne pourrait être fournie à l'échéance, et qu'en mettant Mme X... dans l'impossibilité de se prévaloir, vis-à-vis du tireur, d'un moyen de défense issu de ses relations avec ce dernier, elle avait agi sciemment au détriment de la débitrice, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard du texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE Doc 24 : Cass. Com, 30 janvier 1979, Bull civ. IV, n°38. Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches : Attendu que, selon les enonciations de l'arret attaque (paris, 29 avril 1977), la societe des ateliers de decoupage et d'emboutissage de saint-ouen et du vexin (adeso), qui avait commande une machine a la societe fas, lui a remis une lettre de change acceptee d'un montant correspondant a une partie du prix convenu, que cet effet a ete pris a l'escompte le 20 juin 1974 par le credit francais international (cfi) et que l'ecriture correspondante a ete passee le 28 juin au credit du compte de la societe fas ; que cette derniere societe a ete declaree en reglement judiciaire avec fixation au 3 juin 1974 de la date de la cessation de ses paiements, et que, le materiel ne lui ayant pas ete livre, l'acheteur a refuse de payer a la banque la lettre de change ; Attendu qu'il est fait grief a l'arret d'avoir condamne la societe adeso a ce paiement alors, selon le pourvoi, que, d'une part, le cfi, banquier de la societe fas, ne pouvait ignorer, lorsqu'il a acquis la traite, que cette societe etait pratiquement en etat de cessation des paiements, ce que confirmait la vente par son gerant de ses biens personnels pour alimenter le compte social et ce que devait confirmer le jugement declaratif de reglement judiciaire de la societe, alors que, d'autre part, l'escompte d'une lettre de change se realise par l'inscription du credit au compte du client et que c'est le jour de cette inscription qui constitue la date de l'escompte et confere au banquier la qualite de tiers porteur, que c'est donc a ce meme jour que doit etre appreciee la conscience du dommage au sens de l'article 121 du code de commerce et que le refus du credit documentaire, le 26 juin, significatif de la mauvaise foi du banquier au sens de l'article 121 precite, etait etabli par

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le dossier de l'information penale, par le double de la demande de credit produit par la societe fas et par une lettre du cfi du 23 mai 1975, tous elements de preuve denatures par l'arret, et que les hypothetiques incidents de paiement imagines par la cour d'appel n'etaient meme pas invoques par le cfi, alors, en outre, que le credit d'escompte ne devait pas etre utilise pour compenser le solde debiteur de la societe fas, encore moins pour financer, indirectement, les importations destinees a un autre acheteur, mais devait etre affecte au denouement meme des operations qu'il avait pour objet de financer, et alors, enfin, que l'arret se contredit lorsqu'il retient, pour ecarter la mauvaise foi de la banque, que ce reglement est intervenu le 26 juin, soit deux jours avant l'entree en compte courant fas du produit de l'escompte, et que la date d'escompte se situe le 20 juin ; Mais attendu que l'arret releve que l'escompte a eu lieu le 20 juin 1974, et non le 28 juin, le decalage entre la remise de l'effet a la banque et sa relation comptable etant habituel dans la pratique bancaire, et declare a juste titre que, seule, la date de valeur - en l'espece20 juin et non 28 juin - fixe de maniere indiscutable le jour de l'operation d'escompte ; qu'ayant ajoute, a bon droit, que "la bonne foi du tiers porteur... Doit s'apprecier lors de l'acquisition de l'effet et non au vu des evenements survenus posterieurement", la cour d'appel enonce souverainement qu'il n'est pas etabli que le cif, en acquerant la lettre de change litigieuse, ait su qu'elle n'aurait pas de provision a l'echeance et ait agi sciemment au detriment du debiteurn, ; que ces constatations et appreciation qui ne sont pas contradictoires, rendent surabondants les autres motifs que critiquent les deuxieme et troisieme branches du moyen et qui sont relatifs a des faits posterieurs au 20 juin 1974 ; d'ou il suit que le moyen est depourvu de fondement en ses quatre branches ; Par ces motifs : Rejette le pourvoi forme contre l'arret rendu le 29 avril 1977 par la cour d'appel de paris. Doc 25: Cass. Com 2 novembre 2016, Pourvoi nº 15-12.399 Sur le moyen unique, pris en ses première et quatrième branches : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 novembre 2014), que la société Côté vacances, qui exerce une activité d'hôtellerie et restauration aux Orres (Hautes-Alpes) a, le 12 mal 2011, commandé des téléviseurs ainsi que les fixations murales correspondantes à la société Groupe Xalis et lui a versé un acompte ; que le paiement d'une somme complémentaire était prévu après la livraison et l'installation complète des téléviseurs, au moyen d'une lettre de change créée le 29 mai 2011, à échéance du 31 juillet suivant ; que la société Groupe Xalis a été mise en redressement judiciaire le 25 mai 2011 ; que les produits commandés n'ayant pas été livrés, la société Côté vacances a demandé le rejet de la lettre de change ; que la société Banque Delubac & Cie (la banque), qui avait escompté l'effet le 6 juin 2011, l'a poursuivie en paiement ; Attendu que la société Côté vacances fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la banque la somme de 17 940 euros, outre intérêts, alors, selon le moyen : 1º/ que le tireur d'une lettre de change peut, par la clause « retour sans frais », « sans protêt » ou toute autre clause équivalente inscrite sur le titre et signée, dispenser le porteur de faire dresser, pour exercer ses recours, un protêt faute d'acceptation ou faute de paiement ; que la clause pré-imprimée sur la lettre de change n'est efficace que si elle est spécifiquement signée par le tireur et le tiré ; qu'en ayant décidé que, sur la lettre de change, l'absence de signature validant spécialement la clause préimprimée mentionnant « Contre cette lettre de change stipulée sans frais, veuillez payer la somme indiquée ci-dessous à l'ordre de : » était sans incidence, dès lors

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que la clause figurant dans le corps même de la traite se trouvait validée par la signature unique du tireur, la cour d'appel a violé l'article L. 511-43 du code de commerce ; 2º/ qu'est un porteur de mauvaise foi l'établissement bancaire qui, connaissant le redressement judiciaire de son client depuis le 25 mai 2011 et l'état de cessation des paiements qui remonte au 1er octobre 2010, décide néanmoins, le 6 juin 2011, d'escompter des lettres de change, ayant nécessairement conscience que le tireur, dans une situation irrémédiablement compromise, ne pourrait fournir la provision à l'échéance et qu'en consentant à l'endossement du titre à son profit, il causait un dommage au tiré par l'impossibilité où il le mettait de se prévaloir, envers le tireur, d'un moyen de défense pris de ses relations avec ce dernier ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 511-12 du code de commerce ; Mais attendu, d'une part, que, lorsque une clause « retour sans frais » ou « sans protêt » est préimprimée sur la lettre de change, la seule signature du tireur portée sur l'effet suffit à la valider, sans qu'il soit nécessaire qu'une seconde signature, distincte de la première, soit apposée spécifiquement sous cette clause ; qu'ayant relevé que l'effet de commerce accepté et signé par la société Côté vacances mentionnait en caractères imprimés : « Contre cette lettre de change stipulée sans frais, veuillez payer la somme indiquée ci-dessous à l'ordre de : », c'est exactement que la cour d'appel a retenu que la clause se trouvait validée par la signature unique du tireur, apposée, selon l'usage, au bas de la lettre de change, et en a déduit que la banque n'avait pas l'obligation de dresser un protêt, pour pouvoir exercer ses droits contre la société Côté vacances, tiré-accepteur ; Attendu, d'autre part, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a retenu que la banque ignorait que les téléviseurs n'avaient pas été livrés au moment où elle a reçu la lettre de change et que sa connaissance, à cette date, de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard du tireur n'établissait pas sa mauvaise foi, cet état ne préjugeant en rien de la capacité d'une entreprise à exécuter ses obligations durant la période d'observation de cette procédure et n'établissant donc pas le caractère irrémédiablement compromis de sa situation ; qu'en en déduisant que la société Côté vacances ne faisait pas la démonstration qu'en consentant à l'endossement du titre à son profit, la banque avait eu conscience de lui causer un dommage par l'impossibilité où elle l'aurait mise de se prévaloir, vis-à-vis du tireur, d'un moyen de défense issu de ses relations avec ce dernier, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; PAR CES MOTIFS :REJETTE le pourvoi ; Doc. 26 : Cass. Com., 19 février 2013, n° 12-12.839 Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 26 octobre 2011), que la Banque populaire occitane (la banque) a pris à l'escompte, les 29 juillet et 5 octobre 2005, deux lettres de change d'un montant de 38 263,92 euros et 29 829,65 euros, à échéance respectivement des 31 octobre et 31 décembre suivants, tirées par M. X... (le tireur) sur l'EURL Savit (l'EURL) qui les avait acceptées ; que le tireur a été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 18 avril et 8 décembre 2006, la date de cessation des paiements étant fixée au 1er mars 2006 ; que la banque ayant assigné en paiement l'EURL, cette dernière a notamment contesté la qualité de tiers porteur de bonne foi de la banque ;

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Attendu que l'EURL fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer le montant des effets, outre les intérêts au taux légal, alors, selon le moyen : 1°/ que l'EURL précisait expressément qu'il résultait des relevés de compte de M. X... qu'il était interdit bancaire au moment de l'escompte, car il avait l'objet de frais d'infraction à une interdiction d'émettre des chèques et en déduisait que la banque avait escompté les effets avec mauvaise foi ; qu'en énonçant, pour exclure toute mauvaise foi de la banque, que l'EURL n'indiquait pas sur quelle pièce elle se fondait pour affirmer que M. X... faisait l'objet d'une interdiction bancaire, la cour d'appel a dénaturé ses conclusions, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ; 2°/ que les juges du fond doivent se prononcer sur les pièces régulièrement versées aux débats ; que l'EURL produisait les extraits de compte de M. X..., pour justifier que celui-ci avait fait l'objet de frais d'infraction à une interdiction d'émettre des chèques comme le montre le bordereau de pièces annexées à ses conclusions ; qu'en ne se prononçant pas sur ces pièces, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil ; Mais attendu qu'après avoir rappelé que la mauvaise foi de la banque ne peut se déduire du seul fait que les lettres de change ont été tirées aussitôt après l'établissement des devis et escomptées très rapidement, l'arrêt relève, d'un côté, que si le compte courant de M. X... présentait un solde débiteur de 85 687,07 euros au 29 juillet 2005, il n'était plus débiteur que de 19 437,99 euros à la date du 5 octobre 2005, avant de présenter un solde créditeur du 25 octobre 2005 au 31 janvier 2006, et, de l'autre, que le redressement judiciaire de M. X... a été ouvert le 18 avril 2006, la date de cessation des paiements étant fixée au 1er mars 2006 ; que de ces seuls motifs, dont il résulte que la situation de M. X... n'étant pas irrémédiablement compromise à la date de l'escompte des deux effets, le comportement de la banque était exclusif de mauvaise foi, la cour d'appel, hors dénaturation, a pu déduire qu'il n'était pas établi que la banque, au moment où elle avait escompté les lettres de change, avait eu conscience de causer un préjudice au tiré et d'empêcher celui-ci de se prévaloir de l'exception de défaut de provision ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

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SÉANCE N° 10 : LE REFINANCEMENT (II) : les cessions de créances simplifiées et l’affacturage

L’AFFACTURAGE

Doc. 1 : Article 1346 du Code civil. Doc. 2 : Article R 313-1-1 du Code de la consommation Doc. 3 : Cass. com. 3 avril 1990, n° 89-10.255 Doc. 4 : Cass. com. 13 mars 2001, no 98-11.163 Doc. 5 : Cass. 1ère civ. 30 mai 2006, n°03-17646 Doc. 6 : Cass. com. 23 septembre 2014, n°13-14815 Doc. 7 : Cass. com. 29 avril 2014, n°13-13.630 Doc. 8 : Cass. 1ère civ. 25 janvier 2005, n°01-21145 Doc. 9 : Cass.com. 13 novembre 2007, n°06-18978 Doc. 10 : Cass. Com. 18 mars 1997, n° 94-21075 Doc.11 : Cass.com. 30 janvier 2001, n°97-17784 Doc. 12 :Cass.com. 20 octobre 2007, n°06-14343 LA CESSION DAILLY

Régime de la cession DAILLY Doc. 13 : Article L.313-23 du Code monétaire et financier Doc 14 : Article L.313-24 du Code monétaire et financier Doc. 15 : Article L.313-27 du Code monétaire et financier Doc. 16 : Cass.com 11 juillet 2000, n°97-22452 Doc. 17 : Cass. Com 3 octobre 2006, n° 04-30.820 Doc. 18 : Cass. Com 23 octobre 2001, n° 98-20442 Doc. 19 : Cass. Com 2 novembre 2005, n° 04-13.718 Doc. 20 : Cass. Com. 1er février 2011, n°09-73.000 Doc. 21 : Cass. Com., 18 septembre 2007, n°06-13736 Doc. 22 : Cass. Com. 18 novembre 2014, n° 13-13.336 Doc. 23 : Cass. Com., 3 juillet 2012, n° 11-19796 Doc. 24 : Cass. Com, 18 janvier 2017, n°15-12.951 Doc. 25 : Cass. Com. 12 janvier 1999, n°96-13.723 Doc. 26 : Cass. Com 17 décembre 2013, nº 12-26.706 Doc. 27 : Cass. Com. 2 novembre 2016, n° 15-12.491 Doc. 28 : Cass.com. 3 novembre 2015, n°14-14.373 Cession DAILLY et procédures collectives Doc. 29 : Cass.com. 7 décembre 2004 , n°02-20.732 Doc. 30 : Cass.com. 19 mai 2015 , n°14-11.215 Doc. 31 : Cass.com. 30 juin 2015 , n°14-13784 Doc. 32 : Cass.com. 22 mars 2017 , n°15-15.361 Cession DAILY et les conflits liés à la mobilisation des créances

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Doc. 33 : Cass.com. 7 mars 1995 , n°93-13.544 Doc. 34 : Cass.com. 4 juillet 1995 , n°93-12.977 Doc. 35 : Cass.com. 19 décembre 2000 , n°97-15.011 Doc. 36 : Cass.com. 11 décembre 2000 , n°89-17.454 Doc. 37 : Article de doctrine Régine Bonhomme « la cession DAILLY en garantie n'est pas un paiement » in Bulletin Joly Entreprises en difficulté 01 mai 2017 n°3. Proposition d’exercice : Commentaire d’arrêt de Cass. Com, 30 juin 2015 (doc. 31) f L’AFFACTURAGE

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Doc. 1 : Article 1346 du code civil La subrogation a lieu par le seul effet de la loi au profit de celui qui, y ayant un intérêt légitime, paie dès lors que son paiement libère envers le créancier celui sur qui doit peser la charge définitive de tout ou partie de la dette.

Doc. 2 : Article R313-1-1

Lorsqu'il s'agit d'une avance réalisée dans le cadre d'un contrat d'affacturage, le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période et exprimé pour cent unités monétaires.

Le montant de l'avance à prendre en considération pour le calcul du taux effectif global est rapporté, selon la méthode des nombres, à une période d'un jour.

Ce taux est calculé selon la formule figurant en annexe au présent article.

Doc. 3 : Cass. com., 3 avril 1990, n° 89-10.255

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Société française de factoring international factors France (la SFF), ayant payé diverses factures à la société STAIC en exécution d'un contrat d'affacturage, en a réclamé le paiement à la société débitrice, la société des Transports Debeaux (société Debeaux) ; que celle-ci lui a opposé la compensation avec une créance qu'elle détenait sur la société STAIC ;

Et sur la seconde branche du moyen :

Vu les articles 1250-1° et 1252 du Code civil ;

Attendu que la subrogation conventionnelle, expressément consentie, en même temps que le paiement, par le créancier recevant ce paiement d'une tierce personne, transmet à celle-ci les droits et actions du créancier contre le débiteur ; que ce transfert est opposable au débiteur à la date du paiement subrogatoire ;

Attendu qu'après avoir exactement retenu qu'il est de principe qu'un débiteur ne peut se prévaloir de la compensation à l'égard d'une société subrogée à son créancier en vertu d'un contrat d'affacturage que si cette compensation s'est produite antérieurement à la subrogation et constaté que tel n'était pas le cas en l'espèce, l'arrêt énonce, pour rejeter la demande de la SFF, que cette limite au droit du débiteur d'opposer une exception n'est effective qu'autant que ce débiteur a été régulièrement informé du transfert de la propriété des créances au facteur ; que dès lors qu'il n'est pas justifié que la société Debeaux a été informée du contrat d'affacturage, le transfert des créances de la société STAIC à la SFF lui est inopposable ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

Doc. 4 : Cass com. 13 mars 2001, no 98-11.163

Vu l'article 1250 du Code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Banque française commerciale océan indien (BFCOI), se prétendant subrogée de la société de Palmas Structor, en application d'une convention

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d'affacturage, a poursuivi en paiement la société Etablissements Kaparia ; que celle-ci a invoqué le paiement du montant de la facture reçue de la société de Palmas Structor directement à celle-ci en l'absence de réception d'un avis lui notifiant la subrogation ;

Attendu que pour condamner la société Kaparia, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que cette société avait eu connaissance de la convention d'affacturage mais encore qu'elle s'y était soumise dès le mois de juin 1991, le relevé de factures adressé par le fournisseur le jour de la vente portant la mention de la subrogation, et un tableau récapitulatif des paiements antérieurs de la société Kaparia mentionnant ses paiements à la BFCOI ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher si, comme le prétendait la société Kaparia, la facture reçue par celle-ci de la société de Palmas Structor ne l'invitait pas à un règlement par effet de commerce à son propre ordre, et si ses mentions ne différaient pas ainsi de celles des factures antérieures, se référant, elles, à l'affacturage, ce dont il résulterait qu'en l'absence de tout autre avis de subrogation, antérieur au paiement, la société Kaparia aurait pu croire ne pas avoir à payer la facture litigieuse à la banque, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs ; CASSE ET ANNULE

Doc. 5 : Cass.1ère civ., 30 mai 2006, n°03-17646

Attendu que la société GPV, venue aux droits de la société Papeteries de Navarre (PNR), a résilié le contrat d'affacturage que celle-ci avait conclu avec la société Factofrance Heller et a assigné cette dernière en paiement de certaines sommes ; que l'arrêt attaqué l'a déboutée de ses demandes ;

Sur le second moyen, pris en ses trois branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :

Attendu que la cour d'appel a énoncé que la société Factofrance Heller reconnaissait avoir appliqué, pour les virements de financement, une date de valeur J-3 ouvrés, qui n'est contraire à aucun texte d'ordre public ni à la convention des parties qui faisait référence aux usages en vigueur dans les banques et établissements financiers et a retenu que cela avait été tacitement accepté par la société PNR, qui s'était abstenue, pendant la durée d'exécution du contrat, de toute contestation des relevés de compte faisant application des dates de valeur désormais critiquées, alors que ces relevés portaient la mention lisible : "toute écriture ou solde non contesté dans le mois suivant la date d'arrêté du présent relevé sera réputé définitivement accepté" ; qu'elle a, par ces seuls motifs, vainement critiqués par la troisième branche, légalement justifié sa décision ;

Mais sur le premier moyen,

Vu l'article L. 313-2 du code de la consommation, ensemble l'article 2 du décret n° 85-944 du 4 septembre 1985 ;

Attendu que pour rejeter la demande en restitution des intérêts perçus en plus des intérêts au taux légal, l'arrêt attaqué retient que le contrat d'affacturage n'est pas un contrat de prêt et n'est dès lors pas soumis aux dispositions d'ordre public de la loi du 28 décembre 1966 reprises à l'article L. 313-2 du code de la consommation après avoir considéré que les différents éléments de ce contrat constituent un ensemble indissociable sans que puisse en être isolée la faculté pour l'affacturé, en l'espèce prévue par l'article 14 des conditions générales applicables, d'effectuer des prélèvements sur le disponible de son compte courant par anticipation de l'échéance moyenne des règlements de ses acheteurs, moyennant la perception par l'affactureur d'une commission spéciale de financement dont le taux avait été fixé en l'espèce à l'origine à 12,15 % ;

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Qu'en statuant ainsi alors que l'exercice par l'affacturé de la faculté, que lui ouvrait le contrat, de prélever des sommes sur le disponible de son compte courant par anticipation de l'échéance moyenne des règlements de ses acheteurs, le faisait bénéficier d'avances entrant dans le champ d'application des dispositions susvisées, la cour d'appel a violé celles-ci par refus d'application ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

Doc. 6 : Cass.com, 23 septembre 2014, n°13-14815 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par contrat du 23 décembre 2003 soumis au droit français, la société de droit allemand Schwarzkopf & Henkel (la société Schwarzkopf) a cédé à la société de droit néerlandais Budelpack Holding BV les actions de la société Liepvre cosmetics, sa filiale française de conditionnement et d'emballages, le prix des actions étant stipulé payable en cinq échéances annuelles, du 3 janvier 2005 au 2 janvier 2009 ; que cette convention a été conclue sous la condition suspensive de la signature d'un second contrat, dénommé contrat de sous-traitance, régularisé le même jour entre la société Schwarzkopf, la société Budelpack internationnal BV, filiale de la société Budelpack Holding BV, et la société Liepvre cosmetics, devenue Budelpack Liepvre ; que la dernière échéance du prix de cession des actions n'ayant pas été acquittée, la société Schwarzkopf a cessé de régler le prix des livraisons de la société Budelpack Liepvre à la société de droit belge Eurofactor NV (la société Eurofactor), avec laquelle les diverses sociétés du groupe Budelpack avaient conclu un contrat d'affacturage ; que la société Eurofactor a assigné en paiement la société Schwarzkopf, qui lui a opposé le défaut d'intérêt à agir et, subsidiairement, la compensation de sa dette au titre du contrat d'approvisionnement avec sa créance au titre du contrat de cession des actions; Sur le premier moyen, pris en sa première branche : Attendu que la société Schwarzkopf fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société Eurofactor une somme de 2 394 763,81 euros et ses intérêts au taux légal à compter du 5 février 2009, alors, selon le moyen, que la subrogation conventionnelle de la part du créancier doit être expresse et faite en même temps que le paiement ; que celui qui se prétend subrogé doit donc rapporter la preuve qu'il a payé au créancier subrogeant les créances dont il demande paiement au débiteur ; qu'en l'espèce, la société Eurofactor ne pouvait se prétendre titulaire des créances de la société Budelpack Liepvre envers la société Schwarzkopf qu'à la condition de démontrer qu'elle avait précisément payé ces créances ; qu'il résulte des propres constatations des juges du fond que si la société Eurofactor établissait avoir payé des factures émises par différentes sociétés du groupe Budelpack, elle ne démontrait pas qu'elle aurait précisément payé les factures litigieuses ayant donné naissance aux créances dont la société Budelpack Liepvre était titulaire à l'égard de la société Schwarzkopf ; que la cour d'appel a ainsi relevé que « la société Eurofactor a produit des relevés des paiements effectués directement au profit de la société Budelpack Liepvre ainsi qu'au profit d'autres sociétés sur ordre de la société de Liepvre » mais que « l'on ne voit pas de corrélation directe entre ces paiements globalisés et le montant de chacune des nombreuses factures cédées » ; que pour admettre néanmoins la subrogation conventionnelle invoquée par la société Eurofactor, la cour d'appel a retenu qu' « il reste que la société Eurofactor est effectivement subrogée dans le bénéfice des créances de la société Budelpack Liepvre par le contrat préalable d'affacturage qui prévoyait la subrogation et par l'inscription des factures à l'actif du compte-courant de cette société » ; qu'en statuant ainsi, quand elle avait pourtant relevé que la société Eurofactor ne rapportait pas la preuve de son paiement subrogatoire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et violé l'article 1250 du code civil ; Mais attendu qu'ayant énoncé que l'accord pour opérer subrogation peut résulter de l'accord cadre préalable inclus dans le contrat d'affacturage et que l'inscription des factures cédées au compte courant vaut paiement, l'arrêt constate que le contrat d'affacturage conclu entre les parties prévoyait que la cession des créances de la société Budelpack Liepvre à la société Eurofactor se ferait par voie de subrogation conventionnelle, conformément à l'article 1250 du code civil, puis relève que le montant des factures cédées avait été inscrit au crédit du compte courant ouvert au nom de cette dernière dans les livres de la société Eurofactor ; que, de ces

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constatations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que, même s'il n'y a pas de corrélation directe entre les versements globalisés faits par la société Eurofactor à la société Budelpack Liepvre et le montant de chacune des factures que celle-ci lui a cédées, la société Eurofactor a été subrogée dans le bénéfice de ses créances sur la société Schwarzkopf ; que le moyen n'est pas fondé ; Et attendu qu'en ses trois dernières branches, le moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ; Mais sur le second moyen : Vu les articles 1134 et 1218 du code civil ; Attendu que, pour rejeter l'exception de compensation invoquée par la société Schwarzkopf, l'arrêt, après avoir énoncé que les créances ne peuvent pas être compensées lorsqu'elles ne sont pas réciproques entre les deux mêmes personnes, retient d'un coté que la société Schwarzkopf ne peut pas opposer à la société Eurofactor aux droits de la société Budelpack Liepvre la compensation avec la créance qu'elle détient contre la société Budelpack Holding BV et, de l'autre, que, si plusieurs dispositions contractuelles ainsi que les correspondances échangées entre les parties en cours d'exécution confirment que les conventions de cession d'action et d'approvisionnement étaient naturellement liées et reflétaient le lien économique fait par les parties entre les deux contrats, les diverses sociétés du group Budelpack ne se sont pas engagées solidairement envers la société Schwarzkopf, qu'il n'y a pas de véritable indivisibilité entre les conventions passées, qui peuvent exister l'une indépendamment de l'autre, que la société Schwarzkopf se fournissait déjà antérieurement auprès de la société qui était alors sa filiale à Liepvre et que la cession d'actions n'étant pas la cause du contrat d'approvisionnement passé entre la société Schwarzkopf et la société Budelpack Liepvre, le défaut de paiement des actions ne prive pas de cause ce contrat ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la clause conditionnant la conclusion du contrat de cession d'actions à celle du contrat d'approvisionnement, la simultanéité de la signature des deux contrats et les différentes clauses contractuelles les liant sur le plan économique, particulièrement celle prévoyant l'incorporation, dans le prix des produits fournis par la société Budelpack Liepvre, des frais financiers relatifs au paiement échelonné du prix des actions cédées, n'étaient pas de nature à caractériser l'intention des trois parties de faire de leurs différentes conventions un ensemble contractuel indivisible et leur volonté de voir leurs créances et dettes réciproques respectives pouvoir faire l'objet d'une compensation conventionnelle globale, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

Doc 7: Cass. com. 29 avril 2014, n°13-13.630

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 18 décembre 2012), qu'en exécution d'un contrat d'affacturage, la société Disorto a transmis à la société Natexis Factorem (l'affactureur) des factures émises à l'ordre de la société Dedienne santé (la société Dedienne), dont le montant a été crédité sur le compte courant servant de cadre à leurs conventions ; que la société Disorto a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 8 septembre 2004 et 11 janvier 2005, M. X... étant désigné liquidateur (le liquidateur) ; que la société Dedienne ayant laissé les factures impayées, l'affactureur a déclaré sa créance, arrêtée au 1er février 2005 puis, le 14 mars 2005, a contre-passé le montant des factures au débit du compte courant de la société Disorto ; que le liquidateur a assigné en paiement la société Dedienne, qui lui a opposé l'irrecevabilité de son action ;

Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'intégralité de ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en soulevant d'office le

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moyen tiré de ce que l'avis de restitution des factures adressé à M. X... le 14 mars 2005 ne pouvait produire aucun effet compte tenu de la subrogation conventionnelle qui avait opéré une transmission de la créance avec substitution du factor, en sorte que la société Disorto n'était plus bénéficiaire des créances, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que la contre-passation en compte courant d'une créance acquise d'un client et non payée à l'échéance équivaut à un paiement et prive l'affactureur du bénéfice de la subrogation qui lui avait été antérieurement consentie, cependant qu'elle réinvestit l'adhérent en sa qualité de créancier dès lors que les factures lui sont restituées ; qu'en décidant qu'en l'état de la déclaration de créance au passif de la société Disorto incluant les factures impayées avant l'ouverture de la procédure collective et notamment celles émises à l'encontre de la société Dedienne entre le 4 octobre 2002 et le 17 juin 2003 et de la garantie de paiement consentie par l'affactureur, la société Natexis Factorem, l'avis de restitution des factures adressé à M. X... le 14 mars 2005 ne pouvait produire aucun effet compte tenu de la subrogation conventionnelle ayant opéré une transmission de la créance avec substitution du factor dans les droits de la société Disorto, quand elle constatait que cette créance avait été contre-passée sur le compte de cette dernière et que l'affactureur avait parallèlement émis un avis de restitution desdites factures au profit de la société Disorto, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la cour d'appel a violé les articles 1234 et 1250 du code civil ;

3°/ que le jugement ouvrant la procédure de liquidation judiciaire emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception du paiement par compensation de créances connexes ; qu'en décidant que l'affactureur était restée titulaire des factures pour cela qu'aucune écriture ne pouvait être passée après la date de la liquidation judiciaire du 11 janvier 2005, quand la contre-passation du montant de factures impayées sur le compte ouvert entre les parties au titre du contrat d'affacturage opère paiement par compensation de créances connexes, comme découlant du dit contrat d'affacturage, la cour d'appel a violé les articles L. 621-24 et L. 622-3 du code de commerce, en leur version applicable aux faits ;

Mais attendu qu'ayant été effectuée après la mise en liquidation judiciaire de la société Disorto, la contre-passation sur le compte courant de celle-ci des factures litigieuses, dont il n'est pas soutenu que le montant a été absorbé par le solde créditeur du compte, ne vaut pas paiement et, par voie de conséquence, n'a pas fait perdre la propriété des créances correspondantes à l'affactureur, qui avait seul le droit d'en poursuivre le recouvrement, tout en les déclarant à la procédure collective de la société Disorto ; que par ce motif de pur droit, suggéré par la défense, substitué à celui critiqué, l'arrêt se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Doc. 8 : Cass. 1ère civ. 25 janvier 2005,n°01-21145

Sur le moyen unique :

Attendu que, par contrat d'affacturage en date du 14 octobre 1994, la société Crédifrance factor, aux droits de qui se trouve la société anonyme Banque Gallière a, le 8 février 1995 et contre quittance subrogative, crédité le compte courant de la société adhérente BVF du montant d'une facture établie par elle sur l'Association pour la formation professionnelle dans le bâtiment et les travaux publics (AFPBTP) ; que cette dernière, à laquelle l'affacturage avait été notifié le 15 décembre 1994, n'ayant pas acquitté la créance, l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de la Gironde (URSSAF 33) en a pratiqué entre ses mains la saisie attribution, le 14 février 1995, au titre d'une dette de la société BTV à son endroit ; que cette saisie ayant été validée par le juge de l'exécution pour la seule raison de l'absence de

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contestation dans le mois, la société Crédifrance factor a assigné l'URSSAF en répétition de l'indu ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Bordeaux, 11 juin 2001) d'avoir accueilli la demande, alors que, selon le moyen, ladite action, ouverte au débiteur saisi qui n'a pas élevé de contestation dans le délai prescrit par l'article 45 de la loi du 9 juillet 1991 suppose, conformément aux articles 1235 et 1376 du Code civil, l'inexistence de la dette ; qu'étant constant et non contesté que la société BVF était débitrice envers l'URSSAF de la Gironde en vertu d'une contrainte du 22 décembre 1994, de telle sorte que la somme payée à l'URSSAF par l'AFPBTP pour le compte de la société BVF n'était pas indue, la cour d'appel qui a considéré que la Banque Gallière, subrogée aux droits de la société BVF, était recevable à agir à la place de celle-ci en répétition de l'indu, a violé les articles 45 de la loi du 9 juillet 1991 et 1235 et 1376 du Code civil ;

Mais attendu que, à la date du paiement qu'elle implique et dans la mesure de la somme ainsi versée, la subrogation transmet la créance au subrogé, de sorte que, sortie du patrimoine du subrogeant, elle n'en garantit plus les dettes ; que la cour d'appel, qui, par motifs propres ou adoptés, a relevé l'antériorité et la régularité de la subrogation consentie par rapport à la saisie opérée, a exactement décidé que l'URSSAF ne pouvait prétendre exécuter une dette de la société BVF sur une créance dont celle-ci n'était plus titulaire ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 9 : Cass.com. 13 novembre 2007, n°06-18978 Attendu, selon l'arrêt déféré (Versailles, 19 janvier 2006), que la société Mora, à laquelle la société Placoplâtre avait confié plusieurs transports de marchandises, s'est substituée pour l'exécution de certains d'entre-eux la société Pétrault ; que la société Mora a subrogé dans ses droits la société Créditfrance Factor, aux droits de laquelle se trouve la société Natexis Factorem (société Natexis), affactureur, pour recouvrer ses créances sur la société Placoplâtre ; qu'à la suite de la mise en redressement judiciaire de la société Mora et du paiement des créances par la société Placoplâtre à la société Natexis, la société Pétrault, qui n'avait pas été payée de son fret, a agi en paiement sur le fondement de l'article L. 132-8 du code de commerce à l'encontre de la société Placoplâtre, laquelle a appelé en garantie et en paiement de dommages-intérêts la société Natexis ; Sur le premier moyen : Attendu que la société Placoplâtre reproche à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le moyen, que les juges du fond ont retenu que la société Placoplâtre était subrogée dans les droits de la société Petrault, sous-traitant, pour avoir payé ce dernier ; que la société Pétrault, en sa qualité de sous-traitant, avait des droits, non seulement contre la société Mora et la société Placoplâtre, mais également contre le factor, à savoir la société Natexis, dès lors que cette dernière, en tant que factor, avait reçu un paiement de la part de la société Placoplâtre pour des prestations effectuées, non pas par la société Mora, mais par la société Petrault ; qu'ainsi, la société Placoplâtre, en tant que subrogée dans les droits de la société Petrault, pouvait agir à l'encontre de la société Natexis ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 1249 et 1251 3° du code civil ; Mais attendu que l'expéditeur, subrogé dans les droits du transporteur substitué pour l'avoir payé de son fret, n'acquiert, du fait de cette subrogation, ni la garantie de paiement exclusivement réservée au transporteur, ni aucun droit à l'égard du cessionnaire ; que c'est donc exactement que la cour d'appel a retenu que la société Placoplâtre ne disposait d'aucun droit contre la société Natexis ; que le moyen n'est pas fondé ; Et sur les deuxième et troisième moyens :

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Attendu que la société Placoplâtre fait encore le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen : 1°/ qu'il résulte de l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 comme de l'article L. 132-8 du code de commerce, qui sont d'ordre public, que le transporteur sous-traitant a une action directe contre l'expéditeur maître de l'ouvrage ; qu'en application des articles 13-1 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, dès lors que la prestation a été accomplie par un sous-traitant et qu'une action directe est née à son profit, il est interdit à l'entrepreneur principal de transmettre à un tiers sa créance ; qu'avant de conclure le contrat, le factor doit s'assurer qu'il peut contracter licitement avec contrepartie de sa créance ; que ces règles gouvernent les rapports entre le factor et son client puisqu'elles commandent la licéité de l'opération ; qu'en décidant le contraire au motif que les articles 13-1 et 14 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ne concernent que les rapports entre l'entrepreneur principal et le sous-traitant, les juges du fond ont nié à tort l'existence de la faute du factor et violé, dans ses rapports avec le maître de l'ouvrage, l'article 1382 du code civil ; 2°/ qu'eu égard à l'action directe conférée par l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 comme par l'article L. 132-8 du code de commerce au sous-traitant, les articles 13-1 et 14 de la loi du 31 décembre 1975 s'appliquent dans les rapports entre l'entrepreneur principal et le factor ; qu'à tout le moins, le factor doit subordonner les effets du transfert de la créance à la constitution par l'entrepreneur principal d'une garantie, destinée à sauvegarder les droits du sous-traitant ; qu'en refusant de considérer que le factor avait commis une faute pour n'avoir pas pris cette précaution, les juges du fond ont violé l'article 1382 du code civil ; Mais attendu que seul le sous-traitant peut se prévaloir des dispositions des articles 13-1 et 14 de la loi du 31 décembre 1975 et que cette loi ne met aucune obligation à la charge du cessionnaire de la créance résultant du marché sous-traité envers le maître de l'ouvrage ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a écarté toute faute de la part de la société Natexis à l'égard de la société Placoplâtre ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS :REJETTE le pourvoi ;

Doc. 10 : Cass. com 18 mars 1997, n° 94-21075 Attendu, selon l'arrêt critiqué, que, liée à la banque Sofirec par une convention d'affacturage, la société Sotemac a cédé à celle-ci, avec subrogation, différentes factures sur la société Malet, soit, d'une part, deux factures d'un montant de 11 860 francs chacune, datées des 29 janvier et 11 avril 1990 et portant respectivement les numéros 749 et 842 et, d'autre part, une facture de 220 596 francs, établie le 19 mars 1990 et en vue du règlement de laquelle la société Malet avait accepté une lettre de change ; que la cour d'appel a condamné la société Malet à payer à la banque Sofirec le montant de la facture n° 842 du 11 avril 1990, ainsi que des dommages-intérêts d'un montant équivalent à celui de la facture du 19 mars 1990 ;

Sur le premier moyen : (sans intérêt) ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que, pour condamner la société Malet à payer à la banque Sofirec la somme de 232 456 francs, dont celle de 220 596 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que l'omission d'aviser le cessionnaire de l'intervention d'un paiement antérieur, alors qu'en application de la loi la subrogation emporte obligation de payer au " factor ", caractérise, en revanche, une négligence reprochable et que, de toute évidence, la banque Sofirec n'aurait pas mobilisé, le 17 avril 1990, la facture de 220 596 francs si le débiteur, raisonnablement diligent, étant observé qu'un délai d'un mois s'est écoulé entre la réception de la facture par le débiteur et son paiement par le " factor ", l'avait informée de l'acceptation de la traite ;

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Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le débiteur n'est pas tenu d'informer le créancier subrogé du paiement qu'il a effectué au profit du créancier subrogeant avant d'avoir eu connaissance de la subrogation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE

Doc.11 : Cass.com. 30 janvier 2001, n°97-17784 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Transfact a, sur le fondement d'un mandat d'encaissement dont elle était titulaire pour des créances non comprises dans l'escompte pratiqué pour d'autres créances au titre du contrat d'affacturage la liant aux sociétés La Pâtisserie européenne et Alliance plus, mises depuis lors en redressement judiciaire, encaissé des factures qui avaient été précédemment cédées, selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981 à la Banque française pour le commerce extérieur (BFCE) et que celle-ci avait mobilisées ; que les sommes perçues ont été inscrites par la société Transfact au crédit du compte courant ouvert dans ses livres au nom de ses deux adhérentes, dont le solde était débiteur ; que la société Transfact a refusé à la BFCE la restitution des fonds ; Sur le moyen unique pris en sa troisième branche :

Vu les articles 1134, 1937 et 1993 du Code civil ;

Attendu que pour la condamner à restituer à la BFCE, les sommes payées par les débiteurs cédés, l'arrêt retient que la société Transfact, établissement réceptionnaire de ces paiements, versés au crédit du compte courant des sociétés La Pâtisserie européenne et Alliance plus dans ses livres, n'était pas fondée à opposer à la BFCE le principe de l'indivisibilité du compte courant, ni son rôle de " simple teneur de livre ", alors qu'elle n'avait encaissé les fonds litigieux que pour assurer l'équilibre du fonctionnement du compte de ses clients, dans les limites et pour l'exécution du contrat d'affacturage

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société Transfact avait reçu les paiements litigieux au nom et pour le compte des sociétés La Pâtisserie européenne et Alliance plus, qui en étaient destinataires, pour les porter au crédit de leur compte courant, de sorte qu'elle n'était pas tenue à restitution envers la BFCE, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique pris en sa quatrième branche :

Vu les articles 1131 et 1919 du Code civil ;

Attendu que pour statuer comme il a fait, l'arrêt retient encore que la cession antérieure des créances litigieuses avait privé de cause le contrat de dépôt au titre duquel leur encaissement pouvait être envisagé par la société Transfact ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la cause du contrat de dépôt est la remise de la chose qui en est l'objet, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE,

Doc. 12 :Cass.com. 20 octobre 2007, n°06-14343

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ramb industrie a cédé le 7 novembre 1995, à titre de garantie, selon les modalités des articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier à la

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Banque régionale de l'Ouest (la banque) une créance professionnelle sur la société Galva éclair, aux droits de laquelle vient la société Galva union (la société Galva) correspondant à des livraisons à intervenir à partir de février 1996 de matériels vendus le 20 octobre 1995 pour le prix de 930 000 francs HT ; que cette cession a été notifiée à la société Galva le 8 novembre 1995 ; qu'après sa mise en redressement judiciaire le 12 décembre 1995, la société Ramb industrie a informé ses clients qu'à compter du 15 janvier 1996, le paiement de toutes les factures devrait être effectué entre les mains de la société Factofrance Heller aux droits de laquelle vient la société GE Factofrance (la société Factofrance) à laquelle elle avait transféré, par voie de subrogation, la propriété de ses créances puis a conclu, le 23 janvier 1996, un contrat d'affacturage avec cette dernière ; que le 6 mai 1996, le tribunal a arrêté un plan de cession des actifs de la société Ramb industrie au profit de la société Ramb zinc avec laquelle la société Factofrance a également conclu un contrat d'affacturage ; que la société Galva n'ayant réglé à la société Factofrance que le montant de huit factures émises entre février et mai 1996, la société Factofrance l'a assignée en paiement ; que la banque, appelée dans la cause, a réclamé à la société Galva le règlement de la somme de 930 000 francs correspondant à la vente du 20 octobre 1995 ; que la société Galva a réclamé à la société Factofrance le remboursement de cette somme qu'elle aurait indûment perçue ; Attendu que pour condamner la société Factofrance à restituer à la société Galva une certaine somme, l'arrêt retient que la cession, irrévocablement jugée régulière, de la créance "Dailly", notifiée à la société Galva par la banque cessionnaire, est également opposable à la société Factofrance de sorte que l'action en répétition de l'indu engagée par la société Galva à l'encontre du "factor" à qui ont été réglés les fonds correspondants est recevable et que, malgré sa bonne foi, ce dernier, qui a reçu indûment ces fonds en sa qualité de subrogé, doit rembourser à la société Galva la somme de 141 777,59 euros ; Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions par lesquelles la société Factofrance faisait valoir qu'elle n'était pas tenue de restituer les fonds litigieux au débiteur cédé qui les avait réglés entre ses mains, dès lors qu'elle les avait reçus en qualité de mandataire et que cette réception faisait obstacle à une quelconque répétition de l'indu, seul le mandant bénéficiaire du règlement étant tenu à remboursement, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi principal et sur l'autre grief du pourvoi incident : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société GE Factofrance à payer à la société Galva union la somme de 70 888,50 euros avec intérêts au taux légal à compter de la demande en répétition de l'indu, l'arrêt rendu le 1er février 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ; LA CESSION DAILLY

Régime de la cession DAILLY Doc. 13 : article L.313-23 du Code monétaire et financier

Tout crédit qu'un établissement de crédit ou qu'une société de financement consent à une personne morale de droit privé ou de droit public, ou à une personne physique dans l'exercice par celle-ci de son activité professionnelle, peut donner lieu au profit de cet établissement ou de cette société, par la seule remise d'un bordereau, à la cession ou au nantissement par le bénéficiaire du crédit, de toute créance que celui-ci peut détenir sur un tiers, personne morale de droit public ou de droit privé ou personne physique dans l'exercice par celle-ci de son activité professionnelle.

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Peuvent être cédées ou données en nantissement les créances liquides et exigibles, même à terme. Peuvent également être cédées ou données en nantissement les créances résultant d'un acte déjà intervenu ou à intervenir mais dont le montant et l'exigibilité ne sont pas encore déterminés.

Le bordereau doit comporter les énonciations suivantes :

1. La dénomination, selon le cas, " acte de cession de créances professionnelles " ou " acte de nantissement de créances professionnelles " ;

2. La mention que l'acte est soumis aux dispositions des articles L. 313-23 à L. 313-34 ;

3. Le nom ou la dénomination sociale de l'établissement de crédit ou de la société de financement bénéficiaire ;

4. La désignation ou l'individualisation des créances cédées ou données en nantissement ou des éléments susceptibles d'effectuer cette désignation ou cette individualisation, notamment par l'indication du débiteur, du lieu de paiement, du montant des créances ou de leur évaluation et, s'il y a lieu, de leur échéance.

Toutefois, lorsque la transmission des créances cédées ou données en nantissement est effectuée par un procédé informatique permettant de les identifier, le bordereau peut se borner à indiquer, outre les mentions indiquées aux 1, 2 et 3 ci-dessus, le moyen par lequel elles sont transmises, leur nombre et leur montant global.

En cas de contestation portant sur l'existence ou sur la transmission d'une de ces créances, le cessionnaire pourra prouver, par tous moyens, que la créance objet de la contestation est comprise dans le montant global porté sur le bordereau.

Le titre dans lequel une des mentions indiquées ci-dessus fait défaut ne vaut pas comme acte de cession ou de nantissement de créances professionnelles au sens des articles L. 313-23 à L. 313-34

Doc.14 : Article L.313-24 du Code monétaire et financier

Même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d'un prix, la cession de créance transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée.

Sauf convention contraire, le signataire de l'acte de cession ou de nantissement est garant solidaire du paiement des créances cédées ou données en nantissement.

Doc.15 : Article L.313-27 du Code monétaire et financier

La cession ou le nantissement prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau lors de sa remise, quelle que soit la date de naissance, d'échéance ou d'exigibilité des créances, sans qu'il soit besoin d'autre formalité, et ce quelle que soit la loi applicable aux créances et la loi du pays de résidence des débiteurs.

A compter de cette date, le client de l'établissement de crédit ou de la société de financement bénéficiaire du bordereau ne peut, sans l'accord de cet établissement ou de cette société, modifier l'étendue des droits attachés aux créances représentées par ce bordereau.

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La remise du bordereau entraîne de plein droit le transfert des sûretés, des garanties et des accessoires attachés à chaque créance, y compris les sûretés hypothécaires, et son opposabilité aux tiers sans qu'il soit besoin d'autre formalité.

En cas de contestation de la date portée sur le bordereau, l'établissement de crédit ou la société de financement rapporte, par tous moyens, l'exactitude de celle-ci.

Doc.16 :Cass.com.11 juillet 2000, n°97-22452Cambre commerciale, du 11

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1er de la loi du 2 janvier 1981 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, se prévalant d'une créance cédée suivant bordereau du 1er août 1990 par la société Codec, la Banque française du crédit coopératif (la BFCC) a assigné la société Slymag en paiement ;

Attendu que, pour condamner la société Slymag, la cour d'appel constate que le bordereau de cession comporte la dénomination " acte de cession de créance de loi Dailly " et la mention qu'il est soumis à la " loi du 2 janvier 1984 " et en déduit que le bordereau est régulier ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le titre dans lequel une des mentions exigées fait défaut ne vaut pas comme acte de cession au sens de la loi du 2 janvier 1981 et ne peut être invoqué pour demander paiement au débiteur dans les formes établies par cette loi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE

Doc. 17 : Cass.com. 3 octobre 2006 , n°04-30.820

Vu l'article L. 313-23 du code monétaire et financier ;

Attendu que pour statuer comme elle a fait, la cour d'appel a dit qu'en procédant aux paiements, les caisses avaient elles-mêmes reconnu avoir reçu, pour les créances concernées, les documents nécessaires à leur identification et qu'en conséquence, dès lors que les conditions de cette notification étaient indifférentes, ces cessions étaient opposables aux caisses ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors qu'elle avait constaté que les bordereaux de cession ne comportaient que l'indication du montant global des créances cédées en renvoyant, pour l'identification et l'individualisation de celles-ci, à des documents annexes que le cessionnaire n'établissait pas avoir joints et que le titre dans lequel une des mentions exigées fait défaut ne vaut pas comme acte de cession au sens de la loi du 2 janvier 1981 ce dont il résultait que ces cessions étaient, en tout état de cause, inopposables aux débiteurs cédés, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur la quatrième branche du moyen :

Vu les articles L. 313-28 du code monétaire et financier et D. 253-28 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, après que la cession de créance lui a été notifiée régulièrement, le débiteur cédé ne se libère valablement qu'entre les mains de l'établissement de

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crédit et que, selon le second, l'agent comptable des caisses primaires d'assurance maladie a qualité pour recevoir et détenir les titres de propriété et les titres de créance ;

Attendu que pour statuer comme elle a fait, la cour d'appel a jugé que les caisses ne démontraient pas que les notifications des cessions litigieuses leur seraient inopposables pour leur avoir été adressées directement au lieu de l'être à leurs comptables respectifs ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les comptables des organismes sociaux concernés ont, à l'exclusion des ordonnateurs, seuls qualité pour recevoir notification des cessions litigieuses ce dont il résultait que les notifications adressées directement aux caisses n'étaient pas opposables à celles-ci, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE

Doc. 18 : Cass.com. 23 octobre 2001 , n°98-20442

Vu l'article 1er de la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981, devenu l'article L. 313-23 du Code monétaire et financier, alinéa 3, paragraphe 3 ;

Attendu que, selon ce texte, le bordereau de cession de créance doit comporter le nom ou la dénomination sociale de l'établissement de crédit bénéficiaire ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 25 mars 1991, la SA Lasernet a, selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981, cédé à la banque Hervet une créance qu'elle détenait sur la société Unimat selon une facture du 3 janvier 1991, à échéance au 25 juin 1991, correspondant au prix d'acquisition par la société débitrice d'un scanner de cartes à fenêtre dans le cadre d'une opération de crédit-bail conclue avec la société NCA, locataire du matériel ; que, n'ayant pu obtenir le paiement de la créance cédée, la banque Hervet a assigné la société Unimat à cette fin ;

Attendu que, pour condamner la société Unimat à payer une somme à la banque Hervet, la cour d'appel retient que l'acte de cession de créance intervenu le 25 mars 1991 entre la société Lasernet et la banque Hervet, qui mentionne que l'établissement de crédit bénéficiaire est l'agence République du groupe Hervet, est conforme aux exigences formelles posées par l'article 1er de la loi du 2 janvier 1981 ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ces constatations que le bordereau ne comportait ni le nom ni la dénomination sociale de l'établissement de crédit bénéficiaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen ; CASSE ET ANNULE

Doc. 19 : Cass.com. 2 novembre 2005 , n°04-13.718

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Nîmes, 29 janvier 2004), rendu sur renvoi après cassation (Com, 20 juin 2000, pourvoi n° 97-19.413), qu'en application d'une convention-cadre concernant la cession de créances professionnelles conclue le 15 juin 1990 avec le Crédit Commercial de France (la banque), la société Gopeme (la société) a cédé le 17 janvier 1991 à la banque la créance qu'elle détenait sur la trésorerie principale d'Aix-en-Provence ; qu'à la suite de

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la déclaration de cessation des paiements effectuée le 18 janvier 1991, la société a été mise en redressement judiciaire par jugement du 21 janvier 1991, cette procédure étant convertie en liquidation judiciaire par jugement du 28 janvier 1991, M. X... étant désigné comme liquidateur ; que par jugement du 24 avril 1991, la date de cessation des paiements de la société a été reportée au 21 juillet 1989 ; que le liquidateur ayant demandé l'annulation de la cession précitée, le tribunal a accueilli cette demande ; que la cour d'appel de renvoi a confirmé le jugement ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1 / qu'une cession de créance professionnelle consentie dans les formes de la loi du 2 janvier 1981 peut intervenir à titre de simple garantie en vue de l'obtention de délais d'apurement d'une dette antérieure ou de l'apurement futur du solde d'un découvert en compte courant ; qu'en l'espèce, il résulte de l'article 4 de la convention cadre de cessions Dailly qu'elle a conclue avec la société le 15 juin 1990, que "les cessions sont faites en toute propriété afin d'assurer le remboursement des crédits consentis par la banque au cédant, c'est à dire : -que la contrepartie de la cession sera l'octroi d'un crédit faisant l'objet d'un accord séparé, quelles que soient la forme et la nature de ce crédit, étant précisé que l'acceptation par le Crédit Commercial de France d'un bordereau établi par le client n'entraîne pour la banque ni l'obligation de consentir un crédit égal au montant du bordereau, ni la confirmation des avances précédemment consenties ou admises ultérieurement ; -que l'encaissement des créances cédées servira à amortir le crédit consenti..." ; qu'il en résulte clairement que toute cession de créance professionnelle conclue dans le cadre de cette convention constitue non pas un paiement mais une garantie en contrepartie de laquelle d'autres crédits peuvent être accordés ; que la banque en justifiait pleinement en justifiant que les cessions de créances professionnelles intervenues dans le cadre de cette convention avaient pour seul but de garantir "un dépassement éventuel du découvert autorisé" et "d'assurer tous les nouveaux crédits consentis à la société" ; que ces cessions de créances "étaient affectées à la garantie du dépassement du découvert autorisé" et "n'avaient qu'un effet de garantie pour le futur" ajoutant que "dès lors, il importait peu que le solde de crédit de compte courant ne soit pas exigible pour que la cession soit valable" ; qu'en affirmant cependant, pour prononcer la nullité de la cession de créance professionnelle litigieuse, que celle-ci relevait d'une modalité de paiement d'une dette non échue, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 621-107, 3 , du Code de commerce et par refus d'application les dispositions de l'article L. 313-24 du Code monétaire et financier ;

2 / qu'en s'abstenant de toute référence aux termes de la convention-cadre liant les parties et en omettant ainsi de rechercher s'il ne résultait pas des termes clairs et précis de cette convention que la cession de créance litigieuse n'avait pu intervenir qu'à titre de garantie du dépassement du découvert autorisé, contractuellement limité à la somme de 1 500 000 francs, comme elle le faisait observer dans ses conclusions d'appel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes dispositions ;

Mais attendu qu'analysant les termes de la convention-cadre, dont la dénaturation n'est pas alléguée, l'arrêt, après avoir relevé, par motifs propres, que cette convention avait été conclue afin d'assurer le remboursement des crédits consentis par la banque à la société, retient, par motifs adoptés, que la cession de créance litigieuse a pour objet non pas de garantir un nouveau crédit mais de payer un découvert antérieur de la société dans les livres de la banque ; qu'après avoir constaté que le compte courant de la société n'était pas clôturé à la date du 17 janvier 1991, date à laquelle la cession de créance est intervenue, l'arrêt en déduit que cette opération, assimilée à une modalité de paiement, intervenue après la date de cessation des paiements pour une dette non échue, doit être considérée comme nulle au regard de l'article L. 621-107 3 du Code de commerce ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendument omise évoquée à la seconde branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

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Doc. 20 : Cass.com. 1er février 2011 , n°09-73.000 Sur le premier moyen, pris en sa première branche : Vu l'article L. 313-24 du code monétaire et financier ; Attendu que la garantie, à laquelle le cédant est tenu lors du paiement en application de l'alinéa 2 de ce texte, porte non seulement sur la solvabilité du débiteur cédé mais également sur l'existence de la créance cédée ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite des difficultés rencontrées par la société Herriau, les banques, créancières de cette société dont la BNP Paribas (la banque), ont, le 21 février 1994, conclu un moratoire, comportant notamment cession de la moitié de la créance que cette société est susceptible de détenir contre la société Etablissements Matrot (la société Matrot) à l'issue de l'action qu'elle a engagée à son encontre pour actes de contrefaçon ; que le 8 juin 1994, la société Herriau a cédé, selon les modalités prévues par la loi du 2 janvier 1981, codifiée aux articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier, cette créance pour une certaine somme représentant 50 % du montant auquel la société Matrot a été condamnée en vertu d'un arrêt rendu le 12 juillet 1990 par la cour d'appel de Paris ; que le 2 février 1995, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte contre la société Herriau et un plan de continuation arrêté le 7 juin 1996 ; qu'après que l'action en paiement des sommes dues au titre de la cession de créances a été rejetée et que l'arrêt de la cour d'appel de Paris a été cassé, la banque a assigné la société Herriau en paiement de cette créance ; Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient qu'à la suite de son annulation et de sa cassation, l'arrêt de la cour d'appel de Paris visé dans le bordereau de cession Dailly est censé n'avoir jamais existé, de sorte que ce bordereau, devenu sans objet, est caduc et que l'article 1693 du code civil ne peut pas recevoir application en l'espèce, dès lors que, même si l'existence de la créance est garantie par la société Herriau, le bordereau étant nul, il ne peut plus recevoir application ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la cession de créance par bordereau avait pris effet le 8 juin 1994, de sorte que la disparition ultérieure de la créance était sans effet sur la garantie donnée par le cédant, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE Doc. 21 : Cass.com. 18 septembre 2007 , n° 06-13.736

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 11 janvier 2006), que le 12 août 1996, M. X..., titulaire d'un compte dans les livres du Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine (la banque), a cédé à celle-ci la créance professionnelle de 144 650,50 francs qu'il détenait sur M. Y..., dans les conditions prévues aux articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier et en vertu d'une convention cadre conclue le 17 février 1988 ; que la banque a notifié la cession de créance à M. Y..., par lettre recommandée du 20 août 1996 et, sa créance demeurant impayée, a assigné en paiement M. X... en sa qualité de cédant ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à la condamnation de M. X... en garantie de la créance cédée, restée impayée, alors, selon le moyen :

1°/ qu'aux termes de l'article L. 313-24, alinéa 2, du code monétaire et financier, sauf convention contraire, le cédant d'une créance professionnelle est garant solidaire du paiement des créances cédées à l'égard du cessionnaire et tenu, en cas de défaillance du débiteur cédé, d'en régler le montant ; qu'en affirmant que le cessionnaire "n'est toutefois fondé à poursuivre le cédant que s'il justifie d'une démarche amiable accomplie auprès du débiteur cédé à fin de paiement ou de la

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survenance d'un événement rendant impossible le paiement", la cour d'appel a violé par fausse interprétation les dispositions précitées de l'article L. 313-24, alinéa 2, du code monétaire et financier ;

2°/ que, sauf convention contraire, le cédant d'une créance professionnelle est garant solidaire du paiement des créances cédées à l'égard du cessionnaire et tenu, en cas de défaillance du débiteur cédé, d'en régler le montant ; que par convention de cession de créances professionnelles du 17 février 1988, M. X... s'est d'ailleurs expressément engagé en ces termes : "en sa qualité de cédant, ... le Client garantit le parfait paiement des créances qu'il cède ou qu'il cédera à la banque à due concurrence de leurs montants. En conséquence, le Client autorise la banque à débiter son compte courant si le ou les débiteurs cédés laissent impayées ces créances à l'échéance" ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que M. X..., qui avait souscrit le 17 février 1988 auprès de la banque une convention de cession de créances professionnelles soumise au régime de la loi du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises lui a cédé le 12 août 1996 la créance d'un montant de 144 650,50 francs qu'il détenait sur M. Y..., SCI Château de Ditchviller, suivant facture n° 44/96, cette cession étant notifiée par la banque à M. Y... par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 août 1996 ; que cette créance est demeurée impayée, qu'en décidant cependant, pour débouter la banque de sa demande à l'encontre de M. X..., que la banque ne justifiait pas de l'accomplissement d'une démarche amiable auprès du débiteur cédé ou d'un événement rendant impossible le paiement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses constatations, a violé par refus d'application l'article L. 313-24 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1134 du code civil ;

3°/ que le cédant en sa qualité de garant solidaire du paiement des créances cédées à l'égard du banquier cessionnaire, est tenu des mêmes obligations que le débiteur cédé ; qu'en retenant avec les premiers juges que : "la banque n'a informé M. X... de l'impayé qu'au moment où il mettait un terme à ses relations contractuelles avec lui, un an après l'échéance de la créance cédée... qu'elle n'indique pas avoir produit sa créance à la liquidation judiciaire du débiteur cédé, de sorte que M. X... se trouve totalement démuni pour récupérer un tel paiement, que cette circonstance caractérise la faute de la banque qui justifie qu'en réparation du préjudice, qu'elle a causé, elle soit déboutée de ce chef de demande", la cour d'appel qui s'est prononcé par des motifs qui ne sont pas de nature à caractériser une faute de la banque et a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 313-24 du code monétaire et financier, ensemble de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que si le cessionnaire d'une créance professionnelle qui a notifié la cession en application de l'article L. 313-28 du code monétaire et financier bénéficie d'un recours en garantie contre le cédant, garant solidaire, sans avoir à justifier préalablement d'une poursuite judiciaire contre le débiteur cédé ou même de sa mise en demeure, il est cependant tenu de justifier d'une demande amiable adressée à ce débiteur ou de la survenance d'un événement rendant impossible le paiement ;

Attendu que la cour d'appel, qui a retenu que la banque, après avoir notifié la cession de créance à M. Y..., n'avait pas justifié d'une telle démarche, loin d'avoir méconnu l'article L. 313-24 du code monétaire et financier, en a fait, par ces seuls motifs, l'exacte application, abstraction faite des motifs surabondants, visés par la troisième branche, la circonstance que le cédant ait autorisé la banque, par convention cadre, à débiter son compte, si le débiteur cédé laissait impayée sa créance à l'échéance, n'étant pas susceptible d'exonérer la banque notificatrice de cette démarche amiable ; que le moyen, en aucune de ses branches, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

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Doc. 22 : Cass.com. 18 novembre 2014 , n°13-13.336

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Société générale (la banque) a, le 4 septembre 2006, consenti à la SCI Résidence du Grand Hôtel (la SCI) une ouverture de crédit de 1 600 000 euros destinée à la réhabilitation d'un ensemble immobilier ; que la réalisation des travaux ayant été retardée et un incendie ayant affecté le chantier, la SCI a assigné ses assureurs, divers intervenants à l'acte de construire, leurs assureurs et la banque ; que la SCI a, le 17 mai 2011, cédé en garantie à la banque les créances professionnelles dont elle poursuivait le recouvrement puis, le 22 juillet 2011, relevé appel du jugement du 1er juillet 2011 qui n'avait accueilli ses demandes que partiellement ; que la recevabilité de cet appel et celle des demandes de la SCI ayant été contestées, la banque a demandé, notamment, que les condamnations prononcées à l'encontre des assureurs au profit de la SCI fussent exécutées entre ses mains et, à titre subsidiaire, qu'il lui soit donné acte qu'elle reprenait à son compte l'ensemble des moyens de fait et de droit de la SCI ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable :

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de la déclarer irrecevable pour défaut de qualité à agir en toutes ses demandes à l'encontre de la compagnie Axa assureur, de V Bruno Paca, de Qualiconsult sécurité, de la compagnie Albingia, de Covea Risks, de M. Y..., de Coplan ingenierie, de M. Z..., de l'Eurl Le Château de ma mère et de la MAF alors, selon le moyen :

1°/ que l'acte du 17 mai 2011 définissait expressément la créance cédée à titre de garantie comme étant « toutes sommes qui pourraient être perçues à titre provisionnel ou définitif par le cédant à l'issue des procédures judiciairement actuellement en cours et qui sont liées au sinistre intervenu le 4 mars 2008 et/ ou aux litiges liés aux malfaçons et au dépassement de budget » ; qu'il en résultait nécessairement que les parties étaient convenues que la SCI poursuivrait les procédures en cours ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis de l'acte du 17 mai 2011 et violé en conséquence l'article 1134 du code civil ;

2°/ qu'en tout état de cause, la cession de créance effectuée à titre de garantie prend fin sans formalité particulière pour les sommes excédant la créance qui reste due à la banque cessionnaire par le cédant ; qu'il s'ensuit que lorsque la créance cédée consiste dans le produit éventuel d'actions en responsabilité en cours, diligentées antérieurement à la cession par le cédant et tendant au paiement de sommes pouvant être supérieures à celles garanties par la cession, le cédant conserve qualité et intérêt à agir même postérieurement à la cession à titre de garantie, pour la partie de la créance cédée qui excède le montant de celle garantie ; qu'en l'espèce, l'acte de cession à titre de garantie précisait que « la présente cession est consentie à la garantie d'une ouverture de crédit de 1 600 000 euros consentie au cédant par acte notarié reçu par M. A... le 4 septembre 2006 » ; que les demandes de la SCI à l'encontre des intimés excédaient ce montant, puisque la SCI sollicitait la condamnation in solidum des sociétés Axa France IARD, Qualiconsult sécurité, Albingia et Covea Risks, ou à défaut M. Y..., au paiement de la somme de 469 967, 62 euros TTC au titre des conséquences directes de l'incendie, la condamnation in solidum des mêmes au paiement de la somme de 762 071, 90 euros TTC au titre des conséquences indirectes de l'incendie, la condamnation in solidum de M. Y... et de la société Covea Risks au paiement de la somme de 452 482, 17 euros TTC au titre des malfaçons dans l'exécution des travaux non affectés par l'incendie, la condamnation in solidum de M. Y..., de la société Coplan ingenierie, de M. Z... et de la MAF au paiement de la somme de 2 093 969 euros au titre du dépassement de budget et la condamnation de M. Y... au paiement de la somme de 114 816 euros TTC en remboursement des honoraires perçus ; qu'en déclarant néanmoins la SCI irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir, en raison de la cession de créance à titre de garantie intervenue le 17 mai 2011, la cour d'appel a violé les articles L. 313-23 et L. 313-24 du code monétaire et financier, ensemble les articles 1134 du code civil, 31 et 122 du code de procédure civile ;

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3°/ qu'en tout état de cause, en cas de cession de créance faite à titre de garantie, tout paiement ou désintéressement partiel fait postérieurement à la cession faite par le cédant au profit du cessionnaire permet au premier, une fois le cessionnaire rempli de ses droits, de recouvrer son droit d'agir contre le débiteur pour la partie de la créance qui ne lui a pas été payée ; en sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Mais attendu, d'une part, que c'est par une interprétation souveraine des stipulations de la convention de cession de créance, que leur ambiguïté rendait nécessaire, que la cour d'appel a retenu que la SCI ne s'était pas réservé les actions en justice attachées à la créance cédée ;

Attendu, d'autre part, qu'il ne résulte ni de ses conclusions, ni de l'arrêt, que la SCI ait soutenu devant la cour d'appel que le montant des créances cédées excédait celui de la créance garantie et qu'elle conservait qualité à agir en recouvrement de cet excédent ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;

Attendu, enfin, qu'en cas de cession à titre de garantie d'une créance professionnelle selon les modalités prévues par les articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier, seul le cessionnaire peut réclamer au débiteur le paiement total de la créance cédée, même lorsque son montant excède celui de la créance garantie, le cédant ne retrouvant ses droits à agir qu'après le remboursement intégral de la dette garantie ou la renonciation du cessionnaire à tout ou partie de la créance cédée ; qu'ayant constaté qu'aux termes de l'acte du 17 mai 2011, la SCI avait cédé à la banque toutes sommes qu'elle pourrait percevoir à titre provisionnel ou définitif à l'issue des procédures judiciaires alors en cours, liées aux sinistres survenus le 4 mars 2008 et aux litiges liés aux malfaçons et au dépassement du budget, la cour d'appel en a exactement déduit que cette société n'avait plus qualité pour poursuivre son action ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus

Doc. 23 : Cass.com. 3 juillet 2012 , n°11-19.796 Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 mars 2011), qu'en 2002, la société Dielec et la société CM CIC La Violette financement (la société La Violette financement) ont conclu une convention de cession de créances professionnelles ; que, le 21 décembre 2005, M. X..., gérant de la société Dielec, s'est rendu caution personnelle et solidaire envers la société La Violette financement pour un montant de 37 500 euros ; qu'une facture du 30 octobre 2006 a été cédée par la société Dielec à la société La Violette financement ; que la société Dielec ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 19 janvier et 19 décembre 2007, la société La Violette financement a déclaré sa créance et assigné la caution en exécution de son engagement ; que M. X... s'est prévalu de l'irrégularité du bordereau de cession ; Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la société La Violette financement une certaine somme, alors, selon le moyen : 1°/ qu'en déclarant d'un côté, qu'une facture de la société Dielec du 30 octobre 2006 a été cédée à la société La Violette financement par acte de cession du 31 octobre 2006 et, d'un autre côté, que l'acte est régulier dans la mesure où il comporte un tampon de la société La Violette financement mentionnant "cession acceptée" avec la date du 3 novembre 2006, la cour d'appel a entaché son arrêt d'une contradiction de motifs et n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 2°/ qu'il résulte de la combinaison des articles L. 313-25 et L. 313-27 du code monétaire et financier, que l'acte de cession ne comporte qu'une seule date de cession ; qu'en décidant, après avoir retenu la date du 31 octobre 2006 comme étant celle de la cession de créances qu'il n'existe aucune équivoque sur la date de la cession parce que le bordereau de cession porte un tampon de la société La Violette financement mentionnant "cession acceptée" avec la date du 3 novembre

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2006, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 313-25 et L. 313-27 précités du code monétaire et financier ; Mais attendu, d'une part, que sous le couvert de la violation de l'article 455 du code de procédure civile, le moyen invoque une prétendue contradiction entre un élément figurant dans l'exposé des faits de la décision et les motifs retenus par les juges du fond ; Attendu, d'autre part, qu'il appartient à la banque cessionnaire, lorsque la date figurant dans l'acte est contestée, de rapporter la preuve de son exactitude par tous moyens ; que l'arrêt retient que l'acte porte un tampon de la société La Violette financement mentionnant "cession acceptée" avec la date du 3 novembre 2006, et que le fait que la date ne figure pas à l'emplacement désigné sur le bordereau est sans incidence sur la validité de l'acte puisqu'elle a été apposée par le cessionnaire ; que par ces constatations et appréciations faisant ressortir que le cessionnaire avait apposé sur le bordereau la mention de sa date, ce dont il résultait que le bordereau était régulier, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 24 : Cass.com. 18 janvier 2017 , n°15-12.951 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par des actes des 1er juin et 23 août 2005, M. X... (la caution) s'est rendu caution solidaire des dettes de la société Hexgo constructions (la société) envers la société Banque populaire Loire et Lyonnais (la banque) ; que par des actes des 30 novembre et 31 décembre 2009, la société a cédé à la banque, dans les conditions prévues par les articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier, deux créances qu'elle détenait sur la commune de Bonneuil-sur-Marne (le débiteur cédé), ces cessions ayant été notifiées à cette dernière les 1er décembre 2009 et 6 janvier 2010 ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 5 janvier 2010, la banque a déclaré sa créance, puis a, le 12 juillet 2011, assigné la caution en paiement ; que celle-ci s'est opposée au paiement de la créance cédée le 31 décembre 2009, en raison de l'absence de démarche amiable préalable effectuée auprès du débiteur cédé, et a présenté une demande de dommages-intérêts ; Sur le premier moyen : Vu l'article L. 313-24 du code monétaire et financier ; Attendu que si le cessionnaire d'une créance professionnelle qui a notifié la cession en application de l'article L. 313-28 du code monétaire et financier bénéficie d'un recours en garantie contre le cédant, garant solidaire, ou sa caution solidaire, sans avoir à justifier d'une poursuite judiciaire contre le débiteur cédé ou même de sa mise en demeure, il est cependant tenu de justifier d'une demande amiable adressée préalablement à ce débiteur ou de la survenance d'un événement rendant impossible le paiement ; Attendu que pour faire droit à la demande de la banque, l'arrêt, après avoir relevé que celle-ci justifiait avoir, par lettre recommandée avec avis de réception du 3 août 2012, mis en demeure le débiteur cédé de régler cette créance, retient que, peu important que cette démarche soit postérieure à l'assignation de la caution, la banque est fondée à exercer le recours en garantie contre le cédant, garant solidaire, et sa caution solidaire ; Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Et sur le second moyen : Vu l'article 624 du code de procédure civile ; Attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen entraîne, par voie de conséquence, la cassation du chef du dispositif rejetant la demande de dommages-intérêts de la caution contre la banque, dès lors que, celle-ci ayant été écartée en raison du caractère bien-fondé du recours de la banque contre la caution, ce motif devient inopérant du fait de la cassation atteignant ce recours ; PAR CES MOTIFS :CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. X... à payer à la société Banque populaire Loire et Lyonnais la somme de 51 386,51 euros, au titre de ses

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engagements de caution des 1er juin et 23 août 2005 pour solde des créances professionnelles cédées par la société Hexgo constructions les 30 novembre et 31 décembre 2009,

Doc. 25 : Cass.com. 12 janvier 1999 , n°96-13.723 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Merlin Gerin, aux droits de laquelle se trouve la société Schneider electric, a conclu avec la société Asal un marché de travaux immobiliers, au terme duquel le règlement des factures était subordonné à un contrôle de réalisations par la société Baudouin engineering ; qu'en cours d'exécution, la société Asal a cédé, en la forme prévue par la loi du 2 janvier 1981, plusieurs des créances futures se rapportant à ce marché à la fois à la société Lyonnaise de banque et à la Banque populaire provençale et corse, lesquelles ont notifié les cessions à la société Merlin Gerin ; que l'exécution du marché a été interrompue avant la réalisation de l'ensemble des travaux prévus et la société Asal mise en liquidation judiciaire ; que les banques cessionnaires ont réclamé paiement de leurs créances à la société Schneider, qui ne s'est reconnue débitrice que d'une somme très inférieure à leurs réclamations ; que l'arrêt a rejeté l'ensemble des prétentions des banques ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1er de la loi du 2 janvier 1981 ;

Attendu que pour rejeter les demandes en paiement de la société Lyonnaise de banque, l'arrêt relève qu'aucune des 4 factures cédées ne comporte le visa du cabinet Baudouin et retient que la société Schneider pouvait donc en refuser le paiement à la banque comme elle pouvait le faire à l'encontre de la société Asal ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, tout en relevant que la société Schneider se reconnaissait, dans ses écritures judiciaires, encore débitrice du prix de travaux exécutés par la société Asal, et compris dans l'ensemble des créances cédées aux banques par cette dernière, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 1er de la loi du 2 janvier 1981 ;

Attendu que pour rejeter la prétention de la société Lyonnaise de banque, selon laquelle la société Schneider l'avait indûment défavorisée dans ses paiements au profit de la Banque populaire provençale et corse, en versant à celle-ci le montant de créances cédées frauduleusement aux deux banques, sans respecter la priorité de la banque lyonnaise, l'arrêt retient que le conflit entre les cessionnaires ne peut être réglé par le débiteur cédé et que l'action en répétition doit être exercée non contre lui mais contre le cessionnaire qui a reçu un paiement indu ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le débiteur, ayant reçu notification d'une cession de créance de la part d'une banque doit lui en payer le montant, sans avoir à rechercher si un autre établissement n'a pas bénéficié d'une cession de créance antérieure, mais que si avant d'exécuter le paiement, il a reçu, pour une même dette notifications de deux cessions de créances concurrentes de la part de deux banques, il ne peut, ensuite, en payer le montant qu'à l'établissement dont le titre est le plus ancien, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

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Doc. 26 : Cass.com. 17 décembre 2013 , n°12-26.706

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Pierquin maçonneries (le cédant) a, dans le cadre d'une convention de cession de créances professionnelles conclue avec la société Laviolette financement, devenue la société CM-CIC Laviolette financement, aux droits de laquelle se trouve la société CM-CIC Factor (le cessionnaire), cédé à cette société, le 28 octobre 2003, une créance de 73 886,41 euros sur la société MCG International (le débiteur cédé), à qui la cession a été notifiée le jour même ; que le cédant ayant été mis en redressement puis liquidation judiciaires en juin 2004 et avril 2005, le cessionnaire a déclaré ses créances, incluant les sommes dues par le débiteur cédé ; que celui-ci ayant refusé de lui verser la somme de 44 331,85 euros en raison de paiements effectués directement entre les mains du cédant postérieurement à la notification de la cession de créance et de diverses non-façons ou malfaçons, le cessionnaire l'a assigné en paiement ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que le débiteur cédé fait grief à l'arrêt de sa condamnation à payer au cessionnaire la somme de 8 843,80 euros augmentés des intérêts de retard au taux légal à compter du 28 avril 2004 capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil, alors, selon le moyen :

1°/ que, selon le rapport d'expertise, la prestation de rebouchage de la cuve à fioul non effectuée était incluse dans la réalisation du dallage facturé le 27 octobre 2003 ; qu'en considérant, pour refuser de déduire cette non-façon qu'il résulte du rapport d'expertise que la prestation relative au rebouchage de la cuve à fuel n'avait pas été facturée par la société Piequin, la cour d'appel qui a dénaturé les termes clairs et précis du rapport d'expertise, a violé l'article 1134 du code civil ;

2°/ que le débiteur cédé qui n'a pas accepté la cession de créances peut toujours opposer au cessionnaire dont la créance a été admise au passif de la procédure collective du cédant, l'exception d'inexécution de son obligation par le cédant, peu important que le débiteur cédé ait ou non déclaré sa créance au passif du cédant ; qu'il est acquis aux débats que la créance de l'établissement de crédit a été admise au passif de la liquidation judiciaire de la société Pierquin ; qu'en retenant qu'à défaut d'avoir déclaré ses créances de malfaçons à la liquidation judiciaire de la société Pierquin, la société MCG ne pouvait plus les opposer au cessionnaire, la cour d'appel a violé l'article L. 313-29 du code monétaire et financier, ensemble les articles L. 621-43 et L. 621-46 du même code ;

Mais attendu, d'une part, que c'est par une interprétation exclusive de dénaturation, rendue nécessaire par l'ambiguïté des termes de ce rapport, qui ne précisaient pas explicitement que les travaux relatifs au rebouchage de la cuve à fioul étaient compris dans la facture du cédant du 27 octobre 2003, que, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, la cour d'appel a considéré que cette non-façon n'entrait pas dans la facturation effectuée par le cédant et qu'il convenait de ne pas opérer de déduction à ce titre sur la créance cédée ;

Attendu, d'autre part, qu'après avoir énoncé que les créances liées à des malfaçons devaient faire l'objet d'une déclaration au passif du cédant par application des articles L. 621-43 et L. 621-46 anciens du code de commerce, alors applicables, la cour d'appel en a exactement déduit qu'en l'absence de cette déclaration, le débiteur cédé ne pouvait les opposer au cessionnaire ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :

Vu les articles L. 313-28 et L. 313-29 du code monétaire et financier ;

Attendu que, pour limiter la condamnation du débiteur cédé au profit du cessionnaire à la somme en principal de 8 843,80 euros, l'arrêt, après avoir constaté que la notification de la cession de créance portait en tête la mention « notification et demande d'acceptation », faisait injonction au

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débiteur cédé de cesser tout paiement au cédant au titre de la dette et lui demandait de s'engager à régler désormais les sommes dues au cessionnaire, retient qu'il n'est pas justifié de l'acceptation de la cession de créance, laquelle ne s'évince pas de la seule réception de la notification, de sorte que le débiteur cédé n'était nullement tenu de réitérer auprès du cessionnaire le paiement des sommes qu'il avait versées au cédant après réception de la notification de la cession de la créance ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'à compter de la notification régulière de la cession de créance au débiteur cédé, celui-ci, même s'il n'accepte pas la cession, ne se libère valablement qu'entre les mains du cessionnaire, la cour d'appel a violé le premier des textes susvisés par refus d'application et le second par fausse application ;

PAR CES MOTIFS : Rejette le pourvoi incident ; Et sur le pourvoi principal : CASSE ET ANNULE

Doc. 27 : Cass.com. 2 novembre 2016 , n°15-12.491 Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 2014), que la société AIP Batifort (le cédant), titulaire d'un compte courant ouvert dans les livres de la société Banque BCP (le cessionnaire), a demandé à cette dernière un concours sous la forme d'une ligne de cession Dailly, garanti par le cautionnement solidaire de son gérant et associé, M. X... (la caution) ; que les 6 et 27 juillet 2011, la société AIP Batifort a cédé deux créances sur la société Casa (le débiteur cédé) ; que n'obtenant pas leur règlement, le cessionnaire s'est rapproché du débiteur cédé, qui lui a indiqué que la première avait été réglée au cédant et que la seconde n'avait jamais été comptabilisée dans ses livres ; que le cédant ayant été mis en liquidation judiciaire, le cessionnaire a assigné en paiement la caution, qui a demandé à être déchargée de son engagement en application de l'article 2314 du code civil ; Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes et de la condamner à payer au cessionnaire une certaine somme alors, selon le moyen, que devant la cour d'appel, la caution demandait à être déchargée de son engagement de caution par application de l'article 2314 du code civil en faisant valoir qu'en ne notifiant pas la cession Dailly au débiteur cédé, le cessionnaire avait nui à ses intérêts en qualité de caution ; qu'en se bornant à retenir, pour condamner la caution à payer au cessionnaire la somme de 78 815,24 euros TTC augmentée des intérêts au taux légal, que l'article L. 313-28 du code monétaire et financier ne fait pas obligation à l'établissement de crédit de notifier la cession au débiteur, sans rechercher si une telle faculté n'était pas devenue impérative afin que les droits de la caution, en sa qualité de caution, soient préservés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2314 du code civil ; Mais attendu que lorsqu'un établissement de crédit, cessionnaire d'une créance professionnelle, s'abstient de notifier la cession au débiteur cédé, la caution qui invoque la subrogation dans les droits du cessionnaire ne justifie pas de la perte d'un droit préférentiel conférant un avantage particulier au créancier pour le recouvrement de sa créance et n'est, dès lors, pas fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 2314 du code civil ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 28 : Cass.com. 3 novembre 2015 , n°14-14.373 Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant exécuté des travaux en sous-traitance pour le compte de la société Dumez Méditerranée (le débiteur cédé), la société Soft Air Méditerranée (le cédant) a cédé à la société Banque Delubac et Cie (le cessionnaire) des créances matérialisées par des

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situations afférentes à ces mêmes marchés, pour lesquelles le débiteur cédé avait émis des certificats de paiement ; que le débiteur cédé a accepté ces cessions à une date antérieure à la date de l'acte de cession ; qu'assigné en paiement, il a contesté la validité des actes d'acceptation ; Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches, du pourvoi incident : Attendu que le cessionnaire fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de paiement des créances d'un montant de 8 081,79 euros et de 44 910,30 euros, cédées le 2 septembre 2009, alors, selon le moyen: 1°/ que l'acceptation anticipée d'une cession Dailly n'est pas nulle lorsqu'elle est effectuée spontanément par le débiteur cédé, en vue de la survenance d'une cession précisément identifiée, au profit d'un cessionnaire déterminé ; qu'en rejetant néanmoins la demande de paiement de la banque, motif pris que les acceptations antérieures aux cessions étaient sans portée, la cour d'appel a violé l'article L. 313-29 du code monétaire et financier ; 2°/ que le débiteur cédé qui accepte une cession Dailly engage sa responsabilité envers le cessionnaire lorsque l'acceptation, donnée spontanément, exprime sans aucune réserve la reconnaissance par le débiteur de sa dette envers le cédant, alors qu'une incertitude pèse en réalité sur cette dette ; qu'en rejetant la responsabilité du débiteur cédé, aux motifs inopérants que celui-ci ignorait, au moment de l'acceptation, les irrégularités tenant à l'antériorité des notifications par rapport aux cessions, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 1382 du code civil ; Mais attendu, d'une part, qu'après avoir constaté que les deux cessions litigieuses étaient intervenues après la date de leur acceptation par le débiteur cédé, la cour d'appel a, à bon droit, retenu que les acceptations de cessions, qui n'étaient alors pas effectives, étaient sans portée ; Attendu, d'autre part, que l'arrêt retient qu'à la date à laquelle il a accepté les cessions de créances, le débiteur cédé ignorait nécessairement les irrégularités futures qui priveraient ses acceptations d'effet, résidant dans des notifications antérieures aux cessions, et que ces irrégularités incombaient à la seule banque ; qu'en cet état, la cour d'appel a pu retenir que le débiteur cédé ne pouvait, en raison de ses acceptations hâtives, se voir imputer une faute ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa deuxième branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche, du pourvoi principal : Vu l'article L. 313-29 du code monétaire et financier ; Attendu que pour condamner le débiteur cédé à payer au cessionnaire la somme de 80 895,89 euros, outre les intérêts au taux légal, l'arrêt, après avoir constaté que la cession de cette créance avait été acceptée à une date antérieure à celle figurant sur le bordereau, retient que le débiteur cédé a confirmé son engagement ; Qu'en statuant ainsi, alors que l'acceptation anticipée d'une cession qui n'a pas encore pris effet est sans portée et ne peut être confirmée que par un acte d'acceptation conforme aux dispositions de l'article L. 313-29 du code monétaire et financier et signé postérieurement à la date mentionnée sur le bordereau de cession, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : REJETTE le pourvoi incident ;Et sur le pourvoi principal : CASSE ET ANNULE CESSION DAILLY ET PROCEDURES COLLECTIVES

Doc. 29 : Cass.com. 7 décembre 2004 , n°02-20.732

Attendu, selon l'arrêt déféré, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 10 octobre 2000, pourvoi n° P 97-21.744), que, par acte du 27 janvier 1992, la société Euroméca a cédé à la CRCAM d'Aquitaine (la Caisse), selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981 codifiée sous les articles L. 313-23 et suivants du Code monétaire et financier, la créance qu'elle détenait sur la société Labat au titre d'une commande que celle-ci lui avait passée

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; que la société Labat n'a pas accepté cette cession, dont elle avait reçu notification, et a réglé le solde de la facture à la société Euroméca, en règlement judiciaire depuis le 19 février 1992 ;

que la Caisse a fait assigner la société Labat en paiement ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 313-23, L. 313-24 et L. 313-27 du Code monétaire et financier ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que, même si son exigibilité n'est pas encore déterminée, la créance peut être cédée et que, sortie du patrimoine du cédant, son paiement n'est pas affecté par l'ouverture de la procédure collective de ce dernier postérieurement à cette date ;

Attendu que pour rejeter la demande de la Caisse en paiement de la créance par la société Labat, débiteur cédé, l'arrêt retient que la créance cédée est née de la livraison et même de la fabrication postérieure au jugement d'ouverture du redressement judiciaire de la société Euroméca, entreprise cédante, et que ce jugement fait obstacle aux droits de la Caisse sur les créances nées de l'exécution du contrat au cours de la période d'observation et exigibles au jugement d'ouverture ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, la cession prenant effet entre les parties et devenant opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau, la cour d'appel, qui a relevé que la cession avait pris effet entre la société Euoméca et la Caisse avant l'ouverture de la procédure collective, ce dont il résulte que le paiement que la société Labat ne contestait pas devoir, et qu'elle avait effectué après avoir reçu notification de la cession, n'était pas libératoire, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les textes susvisés ;

Et sur le pourvoi incident :

Attendu que ce pourvoi se trouve privé d'objet par la cassation consécutive au pourvoi principal ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE

Doc. 30 : Cass.com. 19 mai 2015 , n°14-11.215 Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse régionale de Crédit maritime mutuel de Bretagne-Normandie (la Caisse) a consenti à M. X... un prêt destiné à financer l'achat du navire de pêche Le Chrisco sur lequel elle a inscrit une hypothèque maritime ; qu'en 2008, M. X... a demandé le bénéfice de l'aide à l'arrêt définitif de l'activité de pêche prévue à l'article 23 du règlement CE 1198/ 2006 du 27 juillet 2006 relatif au Fonds européen pour la pêche et impliquant la destruction du navire, sous réserve de la levée des hypothèques ; que le 22 août 2008, M. X... a cédé sa créance correspondant à cette aide à la Caisse laquelle a consenti à donner mainlevée de l'hypothèque maritime ; que M. X... ayant été mis en liquidation judiciaire le 21 avril 2009, et la date de cessation des paiements ayant été ultérieurement reportée au 7 avril 2008, le liquidateur judiciaire a assigné la Caisse en nullité de la cession de créance professionnelle sur le fondement des articles L. 632-1 et L. 632-2 du code de commerce ; Attendu que la Caisse fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au liquidateur judiciaire la somme de 318 623, 56 euros alors, selon le moyen : 1°/ que la loi spéciale déroge à la loi générale ; que le régime de sortie de flotte tel que défini et régi par les dispositions communautaires et réglementaires invoquées ayant pour objet la réglementation de la pêche maritime et la gestion des ressources halieutiques, constituent une loi spéciale au regard des dispositions législatives et réglementaires du code de commerce relatives à la sauvegarde, au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises dont il résultait

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comme soutenu par la Caisse et comme l'a admis la cour que « la mainlevée d'hypothèque était la condition nécessaire de la sortie de flotte du navire » et donc de l'octroi des « indemnités gouvernementale et européenne » objet de la cession litigieuse ; qu'à ce titre, elles dérogent à ce régime ; qu'en faisant néanmoins application des dispositions de l'article L. 632-1 du code de commerce pour prononcer la nullité de la cession de créance consentie par M. X... à la Caisse cependant que ce dernier réclamait l'application au litige des seules dispositions spéciales précitées, la cour d'appel déclarant à tort inopérante « la circonstance que la mainlevée d'hypothèque était la condition nécessaire de la sortie de flotte du navire », a violé le principe selon lequel la loi spéciale déroge à la loi générale, ensemble l'article L. 632-1 du code de commerce par fausse application ; 2°/ qu'est valable la cession de créance intervenue au cours de la période suspecte en exécution d'une convention cadre antérieurement conclue ; qu'en décidant que la cession de créance intervenue au profit de la Caisse ayant pour objet la subvention de sortie de flotte accordée à M. X... n'était pas valable motif pris de ce que la dette n'était pas échue, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 632-1 du code de commerce ; 3°/ que la déchéance du terme d'un prêt est encourue lorsque l'objet du financement et de la garantie prise pour assurer son remboursement périt ; qu'en affirmant que le paiement intervenu par l'effet de la cession de créance du 22 août 2008 était nul pour avoir réglé une dette non échue durant la période suspecte, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la perte du navire, dont la destruction était le préalable au versement de la subvention cédée, qui représentait à la fois l'objet du financement accordé par la Caisse et le support de la garantie prise par ce dernier pour en assurer le remboursement, n'avait pas eu pour conséquence la déchéance du terme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 632-1 du code de commerce ; Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé qu'en application d'une convention cadre de 2005, M. X... a cédé à la Caisse son droit aux indemnités gouvernementales et européennes de sortie de flotte et que la Caisse a ainsi reçu paiement de la totalité du solde du prêt et d'une indemnité de remboursement anticipé, l'arrêt retient que si ce procédé ne constitue pas en soi un mode anormal de paiement entre un établissement bancaire et l'armateur d'un navire, il tombe en revanche sous le coup de l'article L. 632-1 du code de commerce frappant de nullité tout paiement en période suspecte pour dettes non échues, quel qu'en soit le mode ; qu'ayant constaté que la Caisse ne justifiait pas qu'à la date du paiement qu'elle a reçu, il y avait eu de la part de l'emprunteur une demande de remboursement anticipé, ni, faute de déchéance du terme, que la totalité du prêt était devenu exigible, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de faire une recherche qui ne lui était pas demandée, en a exactement déduit que la circonstance que la mainlevée de l'hypothèque était la condition nécessaire de la sortie de flotte était inopérante ; Et attendu, en second lieu, qu'est nulle la cession de créance intervenue au cours de la période suspecte, fût-elle consentie en exécution d'une convention cadre signée antérieurement à la date de cessation des paiements, dès lors qu'elle a pour objet d'éteindre une dette non échue ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 31 : Cass.com. 30 juin 2015 , n°14-13784

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les sociétés Entreprise générale du bâtiment et des travaux publics Serge X... et Entreprise générale du bâtiment et des travaux publics X...-Z... (les sociétés) ont, dans les conditions prévues par les articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier, cédé diverses créances à la société Banque du bâtiment et des travaux publics (la banque), en garantie du remboursement des crédits que celle-ci leur avait accordés ; que les sociétés ayant été, par une procédure commune, mises en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a déclaré à leur passif tant les créances garanties par ces cessions que celles résultant de leur garantie du paiement des créances cédées ; que ces créances ont été contestées ;

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Sur le premier moyen :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de rejeter ses créances de 55 167, 73 euros et 142 361, 63 euros déclarées au passif de la liquidation judiciaire des sociétés alors, selon le moyen, que le cessionnaire d'une créance professionnelle dispose d'un recours contre le cédant, garant solidaire de la créance cédée ; qu'en cas de procédure collective du cédant, la créance de garantie régulièrement déclarée par le cessionnaire doit être admise ; qu'en déniant l'existence de la créance de garantie de la banque, cessionnaire de créances professionnelles, pour en refuser l'admission, la cour d'appel a violé l'article L. 313-24, alinéa 2 du code monétaire et financier ;

Mais attendu que lorsque la cession de créance professionnelle par bordereau est effectuée à titre de garantie d'un crédit, le cédant, garant du paiement de la créance cédée, reste tenu à l'égard de l'établissement cessionnaire lui ayant accordé le crédit, en sa qualité de débiteur principal ; qu'ayant relevé que les cessions de créances ont été faites à titre de garantie de toutes sommes que les deux sociétés pourraient devoir à la banque et retenu que, si le cédant est garant solidaire du paiement de ces créances ainsi cédées, il n'y a pas une créance au titre de la créance garantie et une autre au titre de la garantie, c'est exactement que la cour d'appel en a déduit qu'il ne peut y avoir une déclaration au titre des créances objet de ces garanties et une autre au titre des créances cédées ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article L. 313-24 du code monétaire et financier ; Attendu que, pour arrêter le montant des créances de la banque dont il prononce l'admission, l'arrêt retient qu'il convient de déduire des sommes déclarées au titre du prêt et du solde débiteur des comptes courants les règlements effectués entre les mains du cessionnaire avant l'ouverture de la procédure collective des sociétés cédantes par les débiteurs des créances cédées à titre de garantie ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, lorsque la cession de créances professionnelles par bordereau est consentie à titre de garantie, les règlements effectués avant l'ouverture de la procédure collective du cédant par le débiteur cédé entre les mains du cessionnaire restent acquis à ce dernier tant que les créances garanties par cette cession ne sont pas payées, l'excédent éventuel n'étant restitué qu'après ce paiement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande d'admission de la créance de la société Banque du bâtiment et des travaux publics au titre du prêt consenti à la société Entreprise générale du bâtiment et des travaux publics Serge X... et limite l'admission des créances de la banque au titre du solde débiteur des comptes courants aux sommes de 11 024, 73 euros pour cette société, et de 34 881, 55 euros pour la société Entreprise générale du bâtiment et des travaux publics X...-Z..., l'arrêt rendu le 28 novembre 2013 entre les parties par la cour d'appel de Limoges ; remet en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers

Doc. 32 : Cass.com. 22 mars 2017 , n°15-15.361 Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 janvier 2015), que la société Crédit industriel et commercial (la banque) a consenti le 23 avril 2009 à la société Legends un crédit de trésorerie dénommé « autorisation de Dailly en compte », adossé à une convention de cession de créances professionnelles à titre de garantie ; qu'elle a renouvelé plusieurs fois ce crédit par l'escompte de billets à ordre, toujours garanti par une cession de créances professionnelles ; que le 25 octobre 2011, la société Legends a émis un billet à ordre de 200 000 euros, à échéance du 28 décembre

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2011, puis, le 7 novembre 2011, a cédé en garantie à la banque, par bordereau, deux créances à échéance du 10 décembre 2011 ; qu'elle a été mise en liquidation judiciaire le 9 novembre 2011, la date de cessation des paiements étant fixée au 15 octobre 2011 ; qu'assignée par la banque en restitution de sommes indûment reçues des débiteurs cédés, à qui les cessions avaient été notifiées, la société SMJ, désignée liquidateur (le liquidateur), a reconventionnellement demandé la nullité des cessions intervenues pendant la période suspecte ; Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande et de le condamner à payer à la banque la somme de 22 314,65 euros alors, selon le moyen : 1°/ que le paiement d'une dette non échue pendant la période suspecte est nul de plein droit ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que les cessions de créances litigieuses sont intervenues en garantie d'un billet à ordre à échéance du 25 décembre 2011, que les cessions avaient eu lieu le 7 novembre 2011 et que la cessation des paiements a été fixée au 15 octobre 2011 ; qu'il en résultait un paiement, en période suspecte, d'une dette non échue, nul de plein droit ; qu'en considérant les cessions de créances valables, cependant que, réalisant, à la manière d'une dation, le paiement d'une dette née du billet de trésorerie non échue, lesdites cessions étaient nulles, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 632-1, 3° du code de commerce ; 2°/ que le paiement d'une dette non échue pendant la période suspecte est nul de plein droit ; qu'il s'agit-là d'une nullité de plein droit, automatique, exclusive de toute analyse des motifs de l'opération ; que, notamment, le paiement d'une dette non échue en période suspecte est nul quel que soit le motif de la dette ; qu'au cas présent, pour valider le paiement du billet à ordre non échu par les cessions de créances intervenues en période suspecte, la cour d'appel a relevé que lesdites cessions de créances étaient intervenues à titre de garantie, en application d'un accord-cadre antérieur à la période suspecte, qui n'avait pas pour objet le remboursement anticipé d'une dette non échue mais de déterminer l'octroi d'un nouveau crédit ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, la cour d'appel a violé l'article L. 632-1, 3° du code de commerce ; 3°/ que le jugement ouvrant la procédure collective entraîne, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement ; que dans la mesure où dans le cas d'une cession Dailly à titre de garantie, le paiement n'intervient réellement qu'au moment du non-paiement de la dette garantie, à son échéance, lors de l'appréhension par la banque cessionnaire des fonds payés par les débiteurs cédés, la cour d'appel a constaté, au cas présent, que le billet à ordre garanti par les cessions Dailly était venu à échéance le 28 décembre 2011, après le jugement d'ouverture du 9 novembre 2011 ; qu'à supposer donc que le paiement ne serait intervenu que le 28 décembre 2011, lorsque, faute de paiement spontanée du billet à ordre, les cessions Dailly à titre de garantie étaient devenues définitives, il s'agirait d'un paiement postérieur au jugement d'ouverture, prohibé par l'article L. 622-7 du code de commerce ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 622-7 du code de commerce ; 4°/ que le jugement ouvrant la procédure collective entraîne, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement ; qu'au cas présent, il est constant que le paiement des créances litigieuses a été reçu par la cédante, la société Legends ; que le CIC ne pouvait être tenu pour « titulaire » des fonds ainsi reçus par la cédante ; que, créancier d'une somme d'argent, le CIC, cessionnaire, ne pouvait, dès lors que le cédant était soumis à une procédure collective, que déclarer une créance de restitution et se soumettre à la discipline de la procédure collective ; qu'en considérant que, le CIC étant propriétaire des créances cédées dont le paiement a été reçu par la société Legends, il aurait été autorisé à contourner la procédure collective et à prélever directement les sommes correspondant aux créances en question, la cour d'appel a violé l'article L. 622-7 du code de commerce, ensemble le principe de l'égalité des créanciers ; 5°/ que les sommes reçues sur un compte ouvert au nom d'une personne en procédure collective ne peuvent être appréhendées par la banque tenant le compte en cause, laquelle, si elle a une créance à faire valoir, doit la déclarer à la procédure collective ; qu'il importe peu, à cet égard, que ces sommes correspondent à des paiements qui eussent été destinés à la banque, en tant que cessionnaire Dailly des créances ainsi payées ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté, que deux comptes ouverts au nom de la société Legends avaient reçu des paiements émanant de débiteurs cédés, et que le CIC avait prétendu appréhender directement ces sommes, au simple

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motif qu'il était cessionnaire et que, par ailleurs, il se trouvait être teneur de compte ; qu'en refusant de faire obstacle à cette prétention, la cour d'appel a violé l'article L. 622-7 du code de commerce, ensemble le principe de légalité des créanciers ; Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant exactement énoncé que la cession de créances professionnelles faite à titre de garantie implique la restitution du droit cédé au cas où la créance garantie viendrait à être payée et n'opère qu'un transfert provisoire de la titularité de ce droit, la restitution de la créance au cédant restant subordonnée à l'épuisement de l'objet de la garantie consentie, l'arrêt en déduit à bon droit qu'elle ne constitue pas le paiement de la créance garantie ; Et attendu, en second lieu, que l'arrêt n'autorise pas le cessionnaire à se faire payer une créance antérieure, au seul motif qu'il est titulaire des créances cédées, mais condamne le liquidateur à restituer des sommes qu'il a indûment perçues postérieurement au jugement d'ouverture ; D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en ses deux dernières branches, n'est pas fondé pour le surplus ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi CESSION DAILY ET LES CONFLITS LIES A LA MOBILISATION DES CREANCES

Doc. 33 : Cass.com. 7 mars 1995 , n°93-13.544 Sur le moyen unique, pris en ses six branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 30 novembre 1992) que, le 4 décembre 1990, une créance sur M. X... a été cédée au Crédit lyonnais (la banque), dans les conditions prévues par la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 ; que, le 7 décembre 1990, cette cession a été notifiée à M. X... ; que, le 30 novembre 1990, pour la même créance, une lettre de change a été tirée sur M. X..., lequel l'a acceptée à une date indéterminée et en a payé le montant à l'endossataire ; que la banque cessionnaire a réclamé paiement à M. X... ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande, alors, selon le pourvoi, de première part, que la compétence de la cour d'appel, qui a statué sur appel d'une ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de commerce et évoqué le litige, était subordonnée à la constatation de l'urgence et de l'absence de contestation sérieuse ; que la cour d'appel, qui condamne M. X... au paiement de la somme demandée par le Crédit lyonnais sans constater que les conditions d'un " cas d'urgence " sont réunies, a méconnu les dispositions de l'article 872 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de deuxième part, que la cour d'appel, qui considère qu'en application de l'arrêt de la Cour de Cassation du 24 mars 1992, aucune obligation d'information de la banque cessionnaire quant à l'existence ou la valeur des créances cédées ne pesait sur M. X... et qui, néanmoins, lui impute à faute une " inertie prolongée " qui caractériserait de sa part une " légèreté blâmable ", a entaché son arrêt d'une contradiction de motifs, en violation des dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de troisième part, que la cour d'appel, qui retient la responsabilité du débiteur cédé envers le cessionnaire en raison d'une double mobilisation de la même créance par le cédant, sans mettre en évidence une fraude du cédé ou une collusion entre le cédant et le cédé, n'a pas suffisamment motivé sa décision ; alors, de quatrième part, que lorsqu'une lettre de change est à échéance fixe, comme en l'espèce, l'acceptation n'a pas à être datée puisqu'elle est présumée être donnée à la date de création de la lettre ; qu'en considérant que M. X... avait la charge de la preuve de l'antériorité de son acceptation de la lettre de change par rapport à la notification de la cession Dailly, et en lui imposant de produire des " éléments complémentaires " à l'effet lui-même, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve en méconnaissance des dispositions de l'article 1315 du Code Civil ; alors, de cinquième part, que par l'acceptation, le tiré s'oblige irrévocablement à payer la lettre de change à l'échéance ; qu'en considérant que M. X... " n'était pas engagé dans un processus irréversible de paiement " bien qu'il résultât de ses propres constatations qu'il avait accepté la lettre de change, la cour d'appel n'a pas déduit de ses propres

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constatations les conséquences qui s'en évinçaient légalement au regard de l'article 128 du Code de commerce ; et alors, enfin, que la limite de la compétence du juge des référés est la contestation sérieuse ; qu'en considérant, compte tenu de ce qui précède et notamment de la discussion relative à l'antériorité de la date d'acceptation de l'effet par rapport à la date de la notification qui portait sur le fond, qu'aucune contestation sérieuse n'excluait la compétence du juge des référés, la cour d'appel a méconnu les dispositions des articles 562, alinéa 2, et 872 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'à bon droit, la cour d'appel a retenu qu'il incombait à M. X... d'apporter la preuve de l'antériorité de son acceptation de la lettre de change par rapport à la notification de la cession de créance pour pouvoir opposer à la banque cessionnaire l'exception de son engagement cambiaire ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant retenu que M. X... n'apportait pas la preuve de l'opposabilité de son engagement cambiaire à la banque cessionnaire et que par la remise à celle-ci d'un chèque, bien qu'inexactement libellé, il avait, auparavant, reconnu lui devoir la somme litigieuse, la cour d'appel a pu en déduire l'absence de contestation sérieuse quant à l'existence de sa dette et le condamner au paiement d'une provision ;

Attendu, en troisième lieu, qu'ayant ainsi statué sur le fondement de l'article 873, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel n'avait pas à rechercher si la demande était fondée sur l'urgence ;

Attendu, enfin, que c'est surabondamment, que la cour d'appel a retenu que l'inertie prolongée de M. X..., qui n'a opposé que tardivement à la banque des réserves sur l'existence de la créance dont elle était cessionnaire, constituait une légèreté blâmable ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

Doc. 34 : Cass.com. 4 juillet 1995 , n°93-12.977 Attendu, selon l'arrêt critiqué, que la société MAT a cédé à la Société de banque occidentale (la SDBO), selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981, trois créances, dont une sur le CHU Bichat, une autre sur l'Institut national de l'audiovisuel (INA), et une troisième sur la Marine nationale ; que cette société a été mise en redressement judiciaire ; que la SDBO a alors réclamé le paiement du montant des créances au Crédit commercial de France (le CCF) qui avait inscrit au compte courant de la société MAT, les sommes reçues des trois débiteurs ; que la cour d'appel, ayant par ailleurs décidé que le CCF ne prouvait pas qu'il avait acquis, avant la SDBO, les créances sur le CHU Bichat et l'INA, a accueilli la demande de la SDBO ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu les articles 1937 et 1993 du Code civil ;

Attendu que, pour le condamner à restituer à la SDBO les sommes payées par les trois débiteurs cédés, l'arrêt retient que le CCF, banque réceptionnaire de ces paiements, versés au crédit du compte courant de la société MAT dans ses livres, ne peut opposer à la SDBO le principe de l'indivisibilité du compte courant, ni son rôle de simple " teneur de livre ", et qu'il ne peut s'opposer à la restitution des fonds acquis par celle-ci, en soutenant que les sommes reçues, inscrites au crédit du compte courant de la société MAT en constituent désormais des articles formant un tout indivisible, alors que cette règle, qui régit les rapports des parties à la

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convention de compte courant, ne s'oppose nullement à ce que des tiers, qui n'ont pas participé à ce contrat, établissent qu'un virement a été opéré à leur préjudice ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le CCF avait reçu les paiements litigieux au nom et pour le compte de la société MAT, qui en était destinataire, de sorte qu'il n'était pas tenu à restitution envers la SDBO, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen : CASSE ET ANNULE

Doc. 35 : Cass.com. 19 décembre 2000 , n°97-15.011 Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 128 devenu l'article L. 511-19 du Code de commerce ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société A Plus M a émis, le 29 janvier 1993, une lettre de change à échéance du 10 mars 1993 acceptée par le tiré, la société Relais SA (Fnac), et l'a présentée à l'escompte à la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de l'Yonne (CRCAM) le 1er février suivant ; que, préalablement, le 26 janvier 1993, la société A Plus M avait cédé au Crédit lyonnais, selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981, la même créance qu'elle détenait sur la Fnac ; que cette cession a été notifiée le 16 mars 1993 à la Fnac, qui avait versé le montant de sa dette à la CRCAM le 10 mars 1993, jour de l'échéance ; que la société A Plus M ayant été mise en redressement judiciaire le 11 mars 1993, le Crédit lyonnais a déclaré sa créance entre les mains du représentant des créanciers du redressement judiciaire de la société A Plus M ;

Attendu que, pour condamner la CRCAM à payer au Crédit lyonnais le montant de la créance, l'arrêt retient que la CRCAM est un banquier escompteur et non un banquier réceptionnaire au nom de son client, cédant, des fonds versés par le débiteur cédé, que l'acceptation de la lettre de change par le tiré ne modifie pas cette situation et qu'il s'ensuit que le conflit qui oppose un banquier escompteur et un banquier cessionnaire a été justement tranché, en tenant compte de l'antériorité de l'acquisition de la créance et de son opposabilité aux tiers ;

Mais attendu qu'en sa qualité de tiers porteur de bonne foi d'une lettre de change acceptée, la CRCAM était en droit d'en percevoir le montant ; que c'est donc à tort que la cour d'appel l'a condamnée envers le Crédit lyonnais ;

Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief : CASSE ET ANNULE,

Doc. 36 : Cass.com. 11 décembre 2000 , n°89-17.454

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 12 mai 1989), rendu sur renvoi après cassation, que la société Fonderies de Sologne (la Fonderie), a été mise en liquidation des biens le 1er octobre 1981 sans avoir payé des fournitures livrées par M. X... ; qu'avant l'ouverture de la procédure collective, la Fonderie avait revendu les marchandises et avait été réglée de leur montant par la société Factofrance Heller (société Factofrance) avec laquelle elle était liée par un contrat d'affacturage et qui s'est trouvée subrogée dans ses droits ; que se prévalant d'une clause de réserve de propriété, M. X... a revendiqué le prix des marchandises à l'encontre du syndic de la procédure collective et de la société Factofrance ;

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Sur les deux moyens réunis, pris en leurs diverses branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que, dès lors qu'au jour de l'ouverture de la procédure collective, elles n'ont subi aucune transformation et sont encore détenues par l'acheteur en liquidation des biens, les marchandises peuvent être revendiquées et le syndic ne peut en disposer sans en payer la valeur ; qu'en relevant que les marchandises n'existaient plus en nature au jour de l'ouverture de la procédure collective parce qu'elles avaient été revendues, bien qu'elle eût constaté qu'à cette date ces marchandises existaient encore matériellement dans les locaux du débiteur dans leur consistance initiale, la cour d'appel a violé l'article 65 de la loi du 13 juillet 1967 ; alors, d'autre part, qu'en retenant que l'acheteur en liquidation des biens n'avait jamais été propriétaire des marchandises litigieuses, faute d'en avoir acquitté le prix, tout en constatant que les marchandises étaient sorties de son patrimoine à partir du moment où il les avait revendues, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, alors, encore, que les marchandises vendues avec réserve de propriété sont affectées à la garantie de la créance du vendeur qui exerce sa revendication sur les marchandises elles-mêmes, aussi longtemps qu'elles existent en nature entre les mains du débiteur, et, en cas de revente en l'état initial, sur le prix ; que la cession par le débiteur de sa créance née de la revente à un tiers, ne fait pas obstacle à l'action en revendication du prix ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 66 de la loi du 13 juillet 1967 et alors, enfin, que le subrogé n'a pas plus de droits que le subrogeant ; que la clause de réserve de propriété ayant été déclarée opposable à l'acheteur en liquidation des biens, cette clause était donc opposable au cessionnaire du prix de revente de la marchandise vendue avec réserve de propriété ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1249 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, analysant l'ensemble des conclusions présentées par M. X..., a relevé que celui-ci n'entendait plus faire porter son action en revendication que sur le prix des marchandises en application de l'article 66 de la loi du 13 juillet 1967 ; que, dès lors, le moyen tiré de la seule violation de l'article 65 de cette loi est inopérant ;

Attendu, en second lieu, que M. X... ne pouvait bénéficier des dispositions de l'article 66 de la loi du 13 juillet 1967, dès lors qu'au jour de l'exercice de la revendication, le prix de revente des marchandises avait été payé par les sous-acquéreurs entre les mains du tiers subrogé dans les droits de la Fonderie ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux, erronés, énoncés par la cour d'appel, l'arrêt, qui a constaté que les sous-acquéreurs des marchandises avaient réglé la société Factofrance aux dates prévues, dont la plus récente se situait au 10 novembre 1981, tandis que l'assignation en revendication avait été délivrée le 17 février 1982, se trouve justifié ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 37 : Article de doctrine Régine Bonhomme « la cession DAILLY en garantie n'est pas un paiement » in Bulletin Joly Entreprises en difficulté 01 mai 2017 n°3.

« Cass. com., 22 mars 2017, no o 15-15361 15-15361, PBI , PBI

Voilà posé un nouvel étai qui consolide la résistance de la cession Dailly en garantie à la procédure

collective du cédant : c’est la reconnaissance confirmée de sa nature fondamentale de garantie qui en interdit l’assimilation à la cession-escompte, consécration renouvelée de la suprématie de la propriété-garantie, si tant est que la créance soit objet de propriété.

Ce que l’on sait des faits, c’est que depuis plus de deux ans la banque consentait à la société un crédit de trésorerie qu’elle renouvelait plusieurs fois en lui faisant souscrire un billet à ordre de 200 000 € et qu’elle garantissait, selon un accord-cadre conclu à l’origine du concours, par des cessions de créances

professionnelles ( D aill y ) en garantie. Au final, le 25 octobre 2011, la société émettait un dernier billet à ordre de 200 000 €, à échéance du 28 décembre 2011, puis, le 7 novembre 2011, cédait en garantie à la banque, par bordereau, deux créances à échéance du 10 décembre 2011 dont le total approchait le montant

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du billet, cessions notifiées aux débiteurs cédés. Mais la société était mise en liquidation judiciaire le 9

novembre 2011, la date de cessation des paiements étant fixée au 15 octobre 2011, de sorte que les dernières cessions étaient faites en période suspecte. Par ailleurs, certaines créances cédées étaient payées entre les mains du liquidateur.

La banque ouvre les hostilités en réclamant au liquidateur la restitution des paiements reçus de débiteurs

cédés en dépit de la notification des cessions, laquelle, on ne le rappellera jamais assez, interdit aux cédés de

payer le cédant au risque d’être condamnés à payer une deuxième fois au profit du cessionnaire, et met fin au mandat (tacite) d’encaissement du cédant. Le liquidateur riposte en invoquant la nullité des cessions intervenues en période suspecte. Mais c’est la prétention de la banque qui emportera la conviction des juges du fond et le pourvoi en cassation formé par le liquidateur aboutit à l’arrêt de rejet que nous commentons et dont la nomenclature FS-BPI dit toute l’importance.

Le moyen unique en cinq branches pose essentiellement deux problèmes qui, pour l’application de règles de procédures collectives, mettent en question la nature de la cession de créances professionnelle en garantie. La cession peut-elle tomber sous le coup de la nullité de droit des paiements faits pour dette non échue ? La cession peut-elle constituer un paiement interdit de dettes antérieures ? L’arrêt de rejet oppose une réponse négative aux deux questions sans pour autant résoudre toutes les difficultés de la situation que le moyen ne lui soumettait pas.

La cour d’appel a rappelé, avec justesse, l’essentiel du fonctionnement de la cession en garantie affiné par la jurisprudence, à savoir qu’elle transfère la propriété des créances cédées à la date du bordereau4 et qu’une fois les créances sorties du patrimoine du cédant ces transferts et le paiement qui va en résulter au profit du cessionnaire ne sont pas affectés par l’ouverture postérieure de la procédure collective du cédant. Elle rappelle aussi que lorsque la cession est faite « en garantie », elle implique la restitution du droit cédé au cas où la créance garantie (sous-jacente) viendrait à être payée : le transfert de la titularité de ce droit est provisoire, mais la restitution de la créance au cédant reste subordonnée à l’épuisement de l’objet de la garantie consentie, de sorte que tant que la créance sous-jacente n’est pas réglée, le cessionnaire peut conserver les sommes qu’il a encaissées et ne pas restituer les créances acquises en garantie6.

C’est à partir de la combinaison de ces solutions que l’arrêt attaqué déduit l’absence d’incidence de l’interdiction des paiements de l’article L. 622-7 du Code de commerce, sur le droit du cessionnaire en garantie (2°). C’est aussi sur le fondement de ces solutions, qu’il écarte l’application de la nullité de droit de l’article L. 632-1, 3°, du même code, pour paiement de dette non échue en période suspecte (1°).

1. Les cessions de créances et leur encaissement sont attaqués au visa de l’article L. 632-1, 3 Les cessions de créances et leur encaissement sont attaqués au visa de l’article L. 632-1, 3°, du Code de commerce qui sanctionne d’une nullité de plein droit tout paiement en période suspecte, quel qu’en ait été le mode, pour dettes non échues au jour du paiement ; or les cessions étaient intervenues alors même que le billet à ordre représentant le crédit garanti n’était pas encore parvenu à échéance. La cour d’appel fonde sa réponse sur la nature même des cessions en garantie qui ont pour objet de déterminer l’octroi d’un nouveau crédit et non le remboursement anticipé de celui-ci (l’existence d’une convention-cadre antérieure à la cessation des paiements ayant permis au tribunal d’écarter tout risque de complaisance frauduleuse) : étant une garantie et non un paiement, elles ne sont pas visées par l’article L. 632-17. Quant à la nullité facultative de l’article L. 632-2, elle est écartée en l’espèce en l’absence de preuve de la connaissance par le cessionnaire de l’état de cessation des paiements du débiteur.

Tout repose donc sur la nature de la cession en garantie, l’argument fondé sur la préséance de la convention-cadre étant, concernant les nullités de droit, inopérant. Si la cession est assimilable à un paiement, elle peut être attaquée, aussi bien en tant que paiement frauduleux de la période suspecte, qu’en raison de l’interdiction de paiement d’une dette antérieure.

Or, l’idée de considérer qu’il y avait paiement n’était pas absurde compte tenu de la concomitance et de la

quasi-identité des cessions et des crédits garantis8… Mais dès lors qu’elle est qualifiée de « garantie » (et

sur cette qualification, nul n’est revenu) ce n’est pas un « paiement » et par voie de conséquence inéluctable,

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elle sort du domaine des textes visant les « paiements ». Cela méritait d’être affirmé encore plus nettement que dans les précédents, pour compléter le régime de la cession en garantie.

C’est d’autant plus nécessaire de le dire que l’article L. 632-1, 4°, du Code de commerce valide expressément la cession Dailly , sans distinction entre escompte et garantie, comme moyen de paiement communément admis dans les relations d’affaires, et que les cessions en garantie qui transfèrent la propriété de la créance sont tout autant mobilisables que les cessions-escomptes. Alors même qu’une seule

allusion est faite dans le Code monétaire et financier à la cession « en garantie » pour la dire translative de propriété9, comme la cession-escompte, c’est la Cour de cassation qui en a brodé un régime original et

spécifique, en affirmant le caractère provisoire de ce transfert au cessionnaire10, et en lui donnant toute la parure d’une sûreté, faisant oublier que c’est le nantissement de créances qui aurait dû jouer ce rôle.

2. L’application de l’article L. 622-7 du Code de commerce L’application de l’article L. 622-7 du Code de commerce est également invoquée : est également invoquée : le crédit garanti ayant été octroyé avant

l’ouverture de la procédure, il fait naître au profit de la banque une créance antérieure à cette ouverture, dont le paiement postérieur par son débiteur est incontestablement interdit ; la banque, en l’espèce, s’était d’ailleurs pliée à l’obligation de déclaration. De fait, en autorisant la banque à conserver les sommes encaissées des débiteurs cédés en garantie du billet à ordre qui venait à échéance après l’ouverture de la

procédure, il est certain que les juges la font bénéficier d’un traitement préférentiel, mais pas tout à fait d’un évitement de la procédure à laquelle, avait dit la cour d’appel, elle devait déclarer sa créance,

déduction faite de ses encaissements11. Et c’est là que la qualification de garantie va continuer à jouer son rôle pour écarter l’application d’un texte réservé au paiement. La cession en garantie, pas plus que n’importe quelle autre sûreté, personnelle ou réelle, ne peut constituer un paiement de la créance qu’elle garantit.

Pas plus que la cour d’appel, la Cour de cassation n’a validé un paiement postérieur de créance antérieure : elle a écarté, en ce qu’elles manquent en fait (le demandeur a fait dire à la cour d’appel ce qu’elle n’a pas dit), les dernières branches du moyen qui soutenaient que la cour d’appel avait violé l’article L. 622-7 en autorisant la banque à contourner la procédure collective et à prélever ou conserver les fonds encaissés correspondant aux créances cédées, bloqués dans un compte, et se rembourser d’un crédit antérieur. Or, la banque n’est pas autorisée à se payer d’une créance antérieure, mais sa qualité de cessionnaire implique qu’elle est devenue titulaire des créances cédées et des fonds encaissés auprès des débiteurs cédés, en vertu d’une cession insensible à l’ouverture de la procédure. La condamnation du liquidateur à restituer ces sommes en découle nécessairement puisqu’il les a perçues indûment ayant perdu tout droit au paiement des

créances dont la cession avait été notifiée aux débiteurs cédés ; le liquidateur, en représentation du cédant, ne peut se prévaloir ni d’un droit de propriété sur les créances en cause ni de la qualité de mandataire pour leur encaissement12. Évidemment, le paiement par les débiteurs cédés, en tant que paiement fait par des tiers, reste étranger à la procédure du cédant.

Peu importe alors que l’on considère que le paiement de la créance antérieure survenait lors de la cession, antérieure à l’ouverture de la liquidation, ou seulement lors de l’échéance du billet à ordre, postérieur à cette ouverture, en raison de la conservation par le cessionnaire des sommes encaissées : l’argument tiré du moment du paiement ne peut qu’être balayé par le refus d’assimiler l’encaissement des créances cédées en garantie à un paiement de la créance garantie13.

Il reste, soyons honnête, que la banque s’est bel est bien désintéressée, via l’encaissement des créances cédées, sans subir la loi du concours.

3. La cession La cession Dailly en sort encore grandie en sort encore grandie avec une logique imparable et

qui s’inscrit dans ce refus déjà bien affirmé de la chambre commerciale de confondre garantie et paiement. Elle devient la plus forte des sûretés, échappe à toutes les attaques, maintient ses effets malgré l’ouverture de la procédure du cédant, reste insensible à la suspension des poursuites, à l’interdiction des paiements de créances antérieures, aux nullités de la période suspecte n’étant ni un paiement ni une hypothèque, ni un nantissement.

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Terminons par le jeu des questions qui n’ont pas été posées à la Cour de cassation, et auxquelles aurait pu penser le liquidateur.

La question n’est pas présentée en termes de revendication revendication de sommes détenues par le liquidateur et revenant au cessionnaire. La revendication de sommes n’est toujours pas admise en jurisprudence, même si les sommes sont parfaitement individualisées comme en l’espèce par affectation dans un compte dédié. On aurait pu trouver ici un obstacle à la satisfaction de la banque en l’obligeant à déclarer sa créance de restitution qui n’était probablement pas éligible au privilège de l’article L. 622-17 du Code de commerce.

La question n’a pas été posée en termes de qualification en créance postérieure créance postérieure privilégiée de la créance de restitution du cessionnaire, alors que la liquidation a encaissé les créances cédées après le jugement d’ouverture. La banque aurait pu alors se heurter à la jurisprudence qui refuse ce privilège quand le crédit garanti par les cessions a été consenti avant l’ouverture de la procédure17.

Un dernier paradoxe paradoxe n’a pas, non plus, été relevé par les moyens, pourtant créé par la cour d’appel qui demande au cessionnaire autorisé à conserver les sommes encaissées des débiteurs cédés, de

diminuer d’autant le montant de sa déclaration de créance (le concours garanti) chez le cédant, ce qu’il fit. Cette déduction m’avait semblé logique alors que la solution contraire avait été adoptée par la Cour de cassation et approuvée largement par la doctrine. Mais il est vrai que si l’on oblige le cessionnaire à déduire ses encaissements, c’est qu’ils ont éteint en partie au moins la créance garantie, comme le ferait la réalisation d’une sûreté… Cela revient alors à considérer que par l’encaissement des créances cédées en garantie le cessionnaire est remboursé de son concours, ce qui remet en cause toute la logique des réponses données au moyen. Évidemment, la déduction des encaissements est encore moins admissible s’il s’agit de sommes perçues des débiteurs cédés après l’ouverture de la liquidation judiciaire du cédant puisque le montant de la créance à déclarer est « celui existant au jour de l’ouverture de la procédure collective, indépendamment des paiements effectués postérieurement entre les mains du créancier ». Nous laisserons le lecteur méditer sur ces incertitudes que la Cour de cassation a pu légitimement ignorer… »