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1 Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles des Droits Fondamentaux Éléments, concepts et critiques de débat Dr. EL BOGHARI Anouar Professeur de Sciences Politiques

Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

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Page 1: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

1

Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

des Droits Fondamentaux

Éléments, concepts et critiques de débat

Dr. EL BOGHARI Anouar

Professeur de Sciences Politiques

Page 2: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

2

SOMMAIRE

INTRODUCTION .................................................................................. 3

PREMIERE PARTIE : LES GARANTIE

JURIDICTIONNELLES ........................................................................ 9

Chapitre 1 : La consolidation de la justice ............................................. 11

Chapitre 2 : La consécration de la place du droit international dans

la nouvelle Loi fondamentale ................................................................. 48

Chapitre 3 : Le législateur organique ................................................... 100

DEUXIEME PARTIE : LES GARANTIES NON

JURIDICTIONNELLES .................................................................... 125

Chapitre 4 : Le système politique de l'État ........................................... 127

Chapitre 5 : Les institutions constitutionnalisées ................................. 137

CONCLUSION ................................................................................... 154

BIBLIOGRAPHIE ............................................................................. 161

Page 3: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

3

INTRODUCTION

La notion de « droits fondamentaux », couramment assimilée à

celle de « droits de l'Homme », indique subséquemment un noyau de

droits essentiels et inaliénables de la personne humaine, valables en toute

circonstance, sans possibilité de dérogation1 .

Il s'agirait tantôt de droits économiques, tantôt de droits civils ou

politiques.

Investis de l’universalité, ils forment le patrimoine commun de

l’humanité et représentent une charnière des ordres juridiques internes,

européens et internationaux.

A ce juste propos, le respect et la garantie de ces droits

fondamentaux marquent immanquablement l’un des soubassements

indispensables pour l'érection de l'État de droit au point que Hauriou

énonça : « C'est le moment de nous souvenir que le droit constitutionnel

tout entier est pour la garanties des libertés... »2

A cet enseigne, l’existence de la Constitution dans les démocraties

libérales est généralement amarrée à la garantie des libertés.

Loin de procéder du seul prisme historique en vertu duquel

l’adoption de nouvelles Constitutions satisfait à la volonté des peuples

de s’autodéterminer par rapport à une puissance étrangère ou à un groupe

minoritaire les aliénant3, mais cette osmose entre les garanties des

1 Hervé Guérin, «Les droits fondamentaux et les libertés publiques : Les mécanismes de protection»,

wikiterritorial, octobre 2016.

Sur:http://www.wikiterritorial.cnfpt.fr/xwiki/bin/view/vitrine/Les+droits+fondamentaux+et

es+libert%C3%A9s+publiques+%3A+Les+m%C3%A9canismes+de+protection+ 2 Cité par Patrice Rolland, " Garantie des droits ", Droits fondamentaux ,n°3,janvier –décembre 2003

Repris de M. Hauriou, Précis de droit constitutionnel, Paris, Sirey, 1929, p. 702. 3 Voir : Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme, Paris-Dakar, Présence africaine, 2004,

p. 23

Page 4: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

4

libertés publiques et la Constitution est inhérente à l'essence conceptuelle

de la Constitution.

A cet effet justement, la consubstantialité de la liberté politique et

de la Constitution est profondément ancrée comme en témoignent les

propos de Montesquieu : « La liberté, dans une société où il y a des lois,

est le droit de faire tout ce que les lois permettent4 ». Ce cadre

sémantique s'apparente à la liberté civile de Jean-Jacques Rousseau qui

postule à la limitation de la liberté par la volonté générale à travers la

loi5.

En un peu plus clair, une injonction est hissée au rang d'une

condition sine qua non, celle de « la participation des hommes au choix

de leur gouvernement, au processus de la législation, et au contrôle de

l’administration6 ». A n'en point douter, ce cadre balise concomitamment

un champ conceptuel et protecteur du domaine des droits et libertés par

le droit dont l'effectivité de l'exercice est consacré dans la Constitution.

En substance, la conception matérielle relève que la Constitution

est l’ensemble des règles juridiques les plus importantes 7définissant le

statut de l’État et celui des gouvernants8. L’affirmation de Fauré selon

4 Montesquieu, De l’esprit des lois, livre XI, chap. 3. 5 Voir : Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, livre I, chap.8 ,1762

En ligne sur:

http://classiques.uqac.ca/classiques/Rousseau_jj/contrat_social/contrat_social_tdm.html 6 Voir : Friedrich Hayek, La Constitution de la liberté, Raoul Audouin et Jacques Garello

(trad.), Paris, Litec,

1994, p. 13. 7 Jean Gicquel et Jean-Éric Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris,

Montchrestien, 2007, p. 171. 8 Cité par Sasso Pagnou, « Essai d’explication du déficit de garantie de la liberté politique au

Togo », Les

Annales de droit [En ligne], 9 | 2015, mis en ligne le 08 janvier 2018, consulté le 18 avril

2018. URL :

http://journals.openedition.org/add/363 ; DOI : 10.4000/add.363

Repris de Georges Burdeau, Traité de science politique, II : L’État, Paris, LGDJ, 1980,

p. 169.

Page 5: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

5

laquelle la Constitution est « une garantie des gouvernés, [...] une

conquête de la liberté par ceux qui, jusqu’alors, ont été soumis à la force

mécanique de la domination9 » corrobore cette réalité. A ce juste propos,

les « révolutionnaires » français de 1789, résolument persuadés de ce

constat ont soutenu que toute société dans laquelle la garantie des droits

n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’à point de

Constitution10 .

Dès lors, des principes et mécanismes sont consignés dans les

Constitutions libérales dans le dessein de soumettre le pouvoir politique

au droit : l’égalité, la liberté des citoyens, la division du pouvoir

politique, l’existence d’une autorité judiciaire et l’optimisation des

conditions de dévolution du pouvoir politique.

A juste raison, la nouvelle Charte constitutionnelle marocaine

prévoit une longue liste de droits et libertés. Or, des interrogations

persistent pourtant quant à leur effectivité. Il serait idoine de rappeler, en

l’occurrence, que dans l'esprit couronnant les garanties

constitutionnelles des droits et des libertés politiques, il est éminemment

stipulé de remplir deux conditions. Au prime abord, les droits et les

libertés doivent bénéficier d’un statut constitutionnel. En d'autres termes,

le statut garantit la paix sociale au sein de la société ou de la collectivité

et cuirasse leurs membres des éventuelles déviations des dirigeants.

A ce juste propos, le respect de statut assure la liberté des citoyens

à travers la limitation du pouvoir politique.Du reste, l'État doit ancrer des

procédures maximisant l'exercice de ces droits à l'encontre des

restrictions attentatoires dressées par les pouvoirs publics.

9 Yves-André Fauré, « Les Constitutions et l’exercice du pouvoir en Afrique. Pour une lecture

différente des

textes », Politique africaine, no 1, 1981, p. 35. 10 Article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Page 6: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

6

Évoquant en 1819 les écueils de transgressions des droits

fondamentaux, Daunou écrivait : « [...] nous appelons garanties

individuelles l'engagement qu'elle [la puissance publique] prend de s'en

abstenir et les institutions qui l'obligent en effet d'y renoncer.»11

Dans cette perspective, on relève, au Maroc, des antinomies entre

les droits proclamés et les restrictions qui les accompagnent, ce qui les

vide de leur contenu substantiel. A cet égard, la jouissance effective des

libertés publiques trahit depuis des décennies l’écart entre le texte et la

pratique, ce qui pose le problème de l’État de droit.

Encore faut-il se demander si la Constitution suffit par soi à la

garantie des droits ou s'il faut de surcroît prévoir des institutions

particulières. Rien de plus illustratif, en ce sens, que l'expérience de la

Terreur et de la dictature de Salut public. Autrement dit, l'exemple de la

perte des droits les plus élémentaires et de l'inanité des garanties, rend le

travail constituant que la Convention nationale entreprend pour la

seconde fois particulièrement exemplaire sur ce sujet. Par conséquent,

les droits et libertés ne peuvent être protégés de manière effective et

efficiente que s’il existe des dispositifs performants à la disposition des

justiciables.

Ces mécanismes sont la garantie de la protection réelle des droits.

A ce juste propos, l'inscription constitutionnelle des mécanismes de

protection, dans le corpus constitutionnel, s’assigne la satisfaction d'un

double impact sur la garantie des droits fondamentaux. D'une part, un

impact intellectuel dont notamment la prévision par la Constitution de

tels mécanismes, leur attribuant le statut constitutionnel. D'autre part, la

11 Cité par Patrice Rolland dans, «La garantie des droits », Droits fondamentaux, n° 3, janvier

– décembre 2003. P1.Sur :www.droits-fondamentaux.org

Repris de Daunou, « Essai sur les garanties individuelles que réclame l'état actuel de la

société », Paris, Foulon, 1819, pp. 3-4.

Page 7: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

7

possibilité accordée aux citoyens selon différentes procédures, de

disposer de voies de recours contre les transgressions de leurs droits,

traduit un impact politique.

C'est ce souci qui renvoie à l'épanouissement juridique du citoyen

qui est susceptible d’optimiser l'examen de la portée exacte des instances

chargées d'assurer la protection des droits fondamentaux qui se

rapportent à l'être humain.

La liberté étant une quête perpétuelle et les violations revêtant un

caractère quasi permanent et tout aussi perpétuel12 . Le rôle préventif des

mécanismes de protection des libertés publiques est essentiel ici dans le

sens où ils tendent à protéger la personne humaine, car comme le déclare

Frédéric Sudre :

« La justiciabilité de la règle conditionne l'efficacité de la garantie et

de sa sanction. Aucune protection internationale des droits de l'homme ne peut être

sérieusement mise en œuvre si elle ne s'accompagne pas des mécanismes

juridictionnels appropriés »13.

De quelle façon le Maroc puise-t-il les enseignements induits des

déboires consentis en matière de l'inanité des garanties constitutionnelles

des droits fondamentaux souvent bafoués ? A-t-il repensé des solutions

neuves palpitant au rythme de la démocratie libérale dûment consacrées

par la nouvelle Constitution ?

Les conventionnels auront à choisir en distinguant entre des

garanties juridictionnelles et des garanties non-juridictionnelles. Il

12 Paul Zbigniew, La garantie des droits fondamentaux au Cameroun, Université Abomey-

Calavi, Bénin -DEA en Droit international des Droits de l'Homme 2004,120 p.P96. Sur:

https://www.memoireonline.com/03/07/396/m_la-garantie-des-droits-fondamentaux-au-

cameroun1.html 13 Frédéric Sudre, Droit international et européen des droits de l'homme, 3e Edition, Paris,

PUF, 1989, p. 13.

Page 8: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

8

importe de se demander, pour autant : l'ancrage de la démocratie

représentative serait-il efficient, ou bien d'autres mécanismes

institutionnels, doivent-ils venir la parachever, voire le contrôler ?

La transition démocratique telle qu'attendue au Maroc est - elle

compatible avec l'ancrage de ces garanties constitutionnelles ? Ne

représente-t-il pas plutôt un luxe, un trompe-l’œil propre plus à un État

de droit consolidé qu’autre en voie d'édification ?

Pour percevoir les diverses strates qui jalonnent la composition de

cette étude, nous pourrons considérer que deux moutures successives

forment son ossature. Nous nous pencherons, au prime abord, sur

l'examen des garanties juridictionnelles (première partie) avant de nous

vouer à l'analyse des garanties non-juridictionnelles (deuxième partie).

Page 9: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

9

PREMIERE PARTIE : LES GARANTIES

JURIDICTIONNELLES

A peine , l’encre de la nouvelle mouture constitutionnelle avait-

elle séché, les commentateurs n’ont pas manqué de vanter le contenu

résolument favorable à l’ouverture orientée du nouveau remodelage

constitutionnel vers le renouement une effectivité dans l'exercice des

libertés publiques et ce, moyennant l'ancrage de maintes garanties

juridictionnelles qui rend tentant de savoir si la nouvelle ingénierie a

réussi, de facto, la protection des libertés publiques. Il importe, à ce juste

Page 10: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

10

égard, de déceler les incidences de l’ambition affichée de la

consolidation de la justice (Chapitre 1).

Par ailleurs, l'élément novateur dans la nouvelle la nouvelle Loi

fondamentale est la reconnaissance de la place d'avant plan du droit

international .En ce sens, éminemment précieux, l'examen des contrôles

effectués dans le dessein de raffermir les garanties juridictionnelles a

coutume de susciter l’appréciation critique. Il n'en demeure pas moins

vrai, à ce juste niveau, que projeter d'apprécier l'étendue du contrôle de

conventionalité à l’aune de la nouvelle Constitution conduit tout

naturellement à reconstituer ses diverses couches, les principes

fondamentaux qui l' animent et , ipso facto, les normes juridiques

formant le corps de règles le composant.

A juste raison, sera percée la tumultueuse question du ballottement

entre réception ou insertion du droit international à l’aune des

Constitutions précédentes (Chapitre 2) dans le dessein de scruter sa

quintessence sur la base de l’actuelle Constitution. Du reste, il importe

remarquablement d'évaluer le rôle du législateur organique (Chapitre 3).

Chapitre 1 :

La consolidation de la justice

A en croire la nouvelle Charte constitutionnelle, l'indépendance de

la justice (1) corrélés à la consécration de la justice constitutionnelle

traduisent des remparts contre les transgressions pouvant affecter

l’effectivité dans la jouissance des libertés publiques (2).

Page 11: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

11

1. L'indépendance de la justice

La mouvance est certes traduite par la consécration

constitutionnelle de la justice hissée au niveau de pouvoir au lieu

d’autorité 14.A ce juste propos, son indépendance est garantie tant vis-à-

vis des pouvoirs aussi bien exécutif que législatif. Le Roi demeure le

garant de cette indépendance en vertu de l’article 10715.

L'existence des droits et libertés politiques a pour postulat le

respect des droits les plus fondamentaux de la personne humaine. Toute

effectivité des droits des individus et des libertés publiques présuppose

l'existence d'un régime démocratique et l'indépendance de la Justice à

l'égard des autres pouvoirs publics. Ainsi que l'énonce l'article 16 de la

Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « toute société

dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée ni la séparation des

pouvoirs, déterminée, n’à point de Constitution.»

Dans le nouvel ordre institué par la nouvelle Charte, une nette

avancée juridique s’est enregistrée dans la mesure où les remaniements

induits sont prometteurs d’une profonde refonte. En outre, la teneur du

texte en est une et n’implique que la mise en œuvre.

14Cette transformation est radicale dans la mesure où la justice qui n’était, dans les textes

précédents, tout comme la France, qu’une simple autorité, se trouve érigée en pouvoir par le Titre VII « Du pouvoir judiciaire » de la nouvelle Constitution. En effet, il en est ainsi de la

Constitution française du 4 octobre 1958 dont le Titre VIII : « De l'autorité judiciaire » comprenant les articles (articles 64 à 66-1).

La Constitution espagnole, approuvée par les Cortès réunies en séances plénières du Congrès

des Députés et du Sénat célébrées le 31 octobre 1978, ratifiée par le peuple espagnol par le

référendum du 6 décembre 1978 sanctionnée par S.M. le Roi devant les Cortès le 27

décembre 1978, quant à elle, a consacré dans le Titre VI « un pouvoir judiciaire » 15 Cet article indique expressément « Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir

législatif et du pouvoir exécutif. Le Roi est le garant de l’indépendance du pouvoir

judiciaire »

Page 12: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

12

En ce sens, le pouvoir judiciaire paraît profondément affecté

subissant de profondes modifications. L’appréciation de la séparation

des pouvoirs dans la reconnaissance dudit pouvoir couplée de

l’évaluation des avancées et des limites de la justice constitutionnelle

pourvue d’une nouvelle architecture mécano-institutionnelle sauraient

rendre compte de la réalité de la nouvelle refonte.

En effet, le Constituant a soutenu sinon disertement, du moins

vaillamment, toutes les propositions du principe de la séparation des

pouvoirs bien plus que ne le faisaient en 1996, les quatre brefs alinéas

du préambule du texte révisé.

En revanche, se signale à l’attention une grande carence à bien des

égards. Au prime abord, il oblitère toute mention relative au statut de la

justice. De surcroît, il a omis d’établir tout lien entre la sanction

juridictionnelle et les activités de régulation et de contrôle confiées aux

institutions de bonne gouvernance dont la réalité et la fonction seraient

du ressort de la loi comme l’a bien stipulé l’article 17116 de la

Constitution.

Or, ce qui, à tout prendre, est sans nul doute, une avancée

considérable, c’est la nouvelle ingénierie judiciaire traduite par la

création de nouvelles catégories de juridictions comprises dans le

domaine de la loi largement défini par l’article 71.

Au-delà de la simple création d’une catégorie de juridictions, le

législateur est compétent, semble-t-il, d’édicter et de modifier des

éléments substantiels relevant de cette catégorie et relatifs à la

16L'article171précise : « Des lois fixeront la composition, l’organisation, les attributions et les

règles de fonctionnement des institutions et instances prévues aux articles 160 à 170 de la

présente Constitution et, le cas échéant, les situations des incompatibilités. »

Page 13: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

13

composition, à la compétence ou au fonctionnement des juridictions

d’une catégorie donnée17.

De même, en vertu de l’article 72 de la nouvelle Constitution, il

incombe au pouvoir exécutif en la personne du Chef du gouvernement

ou par délégation aux ministres 18 de procéder à la création de nouvelles

juridictions au sein d’une catégorie existante.

Le Roi, comme prévu dans l’article 10719, en sa qualité de garant

de l’indépendance du pouvoir judiciaire préside le Conseil Supérieur du

pouvoir Judiciaire comme énoncé dans l’article 5620. Par ce conseil, il

approuve la nomination des magistrats par dahir comme le prévoit

l’article 5721.

Dans ce même ordre, seront raffermis le statut de la magistrature

et le Conseil Supérieur du pouvoir Judiciaire. En effet, la loi organique

n° 100-13 publiée au bulletin officiel n° 6492 du 18-8-2016 relative au

Conseil supérieur du pouvoir judiciaire est venue fixer le statut des

magistrats en toute correspondance avec les principes ancrés par le titre

VII de la Constitution « Du pouvoir judiciaire » dont l’indépendance est

garantie par le Roi.

17 Yves Gaudemet, « Le pouvoir judiciaire dans la Constitution marocaine de 2011 » In « la

Constitution marocaine de 2011, Analyses et Commentaires », sous la direction du Centre

d’Études Internationales, 2012, L.G.D.J,p 201. 18 L’article 90 balise bien cette possibilité en ces termes : « Le Chef du Gouvernement exerce

le pouvoir réglementaire et peut déléguer certains de ses pouvoirs aux ministres. Les actes

réglementaires du Chef du Gouvernement sont contresignés par les ministres chargés de leur

exécution. » 19 Il énonce : « Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir

exécutif. Le Roi est le garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire. » 20 Il dispose : « Le Roi préside le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire.»

21 Il énonce :« Le Roi approuve par dahir la nomination des magistrats par le Conseil Supérieur

du Pouvoir Judiciaire. » Il serait seyant de préciser que ces nominations font figure des actes

échappant au contreseing par le Chef du gouvernement comme prévu dans l’alinéa 4 de

l’article 42 qui énonce : «Le Roi remplit ces missions au moyen de pouvoirs qui lui sont

expressément dévolus par la présente Constitution et qu’il exerce par dahir. Les dahirs, à

l’exception de ceux prévus aux articles 41, 44 (2ème alinéa), 47 (1eret 6èmealinéas), 51, 57,

59, 130 (1eralinéa) et 174sont contresignés par le Chef du Gouvernement.»

Page 14: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

14

Par ailleurs, au Conseil supérieur de la magistrature mis en place

par la Constitution de 1996 se substitue le Conseil Supérieur du Pouvoir

Judiciaire22 avec un partiel remaniement mais une composition

significativement modifiée23.

Comme de coutume, le Roi maintient la présidence24 dudit Conseil en

vertu de l’article 56.

Une innovation de taille, le ministre de la justice n’est plus le vice-

président. Il n’en fait même pas partie. La qualité président- délégué est

transmise au Premier président de la Cour de cassation.

A se référer aux dispositions de l’article 115, le Conseil Supérieur

du Pouvoir Judiciaire se compose au-delà du Premier-président de la

Cour de Cassation en qualité de Président-délégué, du Procureur général

du Roi près la Cour de Cassation, du Président de la Première Chambre

de la Cour de Cassation, de quatre représentants élus, parmi eux, par les

magistrats des cours d’appel, de six représentants élus, parmi eux, par

les magistrats des juridictions du premier degré.

Une représentation des femmes magistrats doit être assurée, parmi

les dix membres élus, dans la proportion de leur présence dans le corps

22 En effet, en vertu de l’article 178, le Conseil supérieur de la magistrature en fonction

continuera d’exercer ses attributions jusqu’à l’installation du Conseil Supérieur du Pouvoir

Judiciaire prévu par la présente Constitution. 23 En écho aux dispositions de la Constitution. Particulièrement celles de l’article 116, cette

loi organique détermine les règles d’élection et de nomination des membres du Conseil

supérieur du pouvoir judiciaire, les procédés de son organisation et de son fonctionnement, ses compétences ainsi que les critères relatifs à la gestion de la carrière des magistrats et les

règles de la procédure disciplinaire. 24 Or, l’on note à ce juste propos des dissemblances par rapport aux expériences modernes du

droit comparé. En France par exemple, Le Conseil supérieur de la magistrature comprend

une formation compétente à l'égard des magistrats du siège et une formation compétente à

l'égard des magistrats du parquet. La formation compétente à l'égard des magistrats du siège

est présidée par le Premier président de la Cour de Cassation tandis que la formation

compétente à l'égard des magistrats du parquet est présidée par le procureur général près la

Cour de cassation. En Espagne, le Conseil général du Pouvoir Judiciaire est formé par le

Président du Tribunal suprême qui le présidera,

Page 15: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

15

de la magistrature, du Médiateur, du Président du Conseil national des

droits de l’Homme, de cinq personnalités nommées par le Roi, reconnues

pour leur compétence, leur impartialité et leur probité, ainsi que pour

leur apport distingué en faveur de l’indépendance de la justice et de la

primauté du droit , dont un membre est proposé par le Secrétaire général

du Conseil Supérieur des Oulémas.

S’inscrivant sur les canons du constitutionnalisme occidental entre

autres l’Espagne25, le Constituant consacre le principe d’inamovibilité

des magistrats du siège dans l’article10826.

Pour assurer l’indépendance et l’impartialité en contournant toute

intervention, l’article 10927 résonne en écho. Cet article est la nette

expression de la volonté du Constituant de donner suite aux doléances

des membres du gouvernement et des associations des droits de

25 L’inamovibilité des juges et des magistrats est consacrée dans le titre VI dédié au pouvoir

judiciaire dans l’article 171 par les textes ci-indiqués : 1. La justice émane du peuple et elle

est administrée au nom du Roi par des juges et des magistrats qui constituent le pouvoir

judiciaire et sont indépendants, inamovibles, responsables et soumis exclusivement à

l’empire de la loi.

2. Les juges et les magistrats ne pourront être destitués, suspendus, transférés ou mis à la

retraite que pour l’une des causes et avec les garanties prévues par la loi.

3. L’exercice du pouvoir juridictionnel, dans tous les types de procès, aussi bien pour

rendre un jugement que pour le faire exécuter incombe exclusivement aux juges et aux

tribunaux déterminés par les lois, selon les normes de compétence et de procédure que celles-

ci établissent.

4. Les juges et les tribunaux n’exerceront pas d’autres fonctions que celles indiquées au

paragraphe précédent et celles qui leur seront expressément attribuées par la loi en garantie

de n’importe quel droit. 26 Ce principe auparavant consacré par l’article 85 de la Constitution de 1996 est réaffirmé

dans les mêmes termes par l’article 108 qui dispose : « Les magistrats du siège sont

inamovibles.» 27 Il dispose : «Est proscrite toute intervention dans les affaires soumises à la justice. Dans sa

fonction judiciaire, le juge ne saurait recevoir d’injonction ou instruction, ni être soumis à

une quelconque

pression. Chaque fois qu’il estime que son indépendance est menacée, le juge doit en saisir

le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire. Tout manquement de la part du juge à ses devoirs

d’indépendance et d’impartialité, constitue une faute professionnelle grave, sans préjudice

des conséquences judiciaires éventuelles. La loi sanctionne toute personne qui tente

d’influencer le juge de manière illicite.»

Page 16: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

16

l’Homme qui ont stigmatisé à maintes reprises, notamment lors de la

préparation de la Constitution, des cas d’influence et de corruption.

Décidément, toute intervention dans les affaires traitées par la

justice est prohibée. Pas davantage, dans l’exercice de sa fonction

judiciaire, le juge ne saurait recevoir d’injonction, d’instruction ni être

assujetti à quelque pression.

Dans le même ordre des idées, l’article 110 reprend la distinction entre

les magistrats du siège appelés à la seule application de la loi et les

magistrats du parquet qui en outre, se doivent d’appliquer l’application

du droit et doivent se conformer aux instructions écrites émanant de

l’autorité hiérarchique. Cette autorité hiérarchique ne serait autre que le

ministre de la justice et le Chef du gouvernement.

En somme, le parquet, fidèle à une configuration française

historique mais grevé d’une large liberté évolutive au profit des

magistrats du parquet, ce qui reste , à en croire Yves Gaudemet , critiqué

et condamné à terme à ne pas rester en l’état ,pour la France, dès lors que

la Cour européenne des droits de l’Homme disqualifie la qualité des

magistrats au sens de la Convention européenne de sauvegarde des droits

de l’Homme et des libertés fondamentales aux agents d’un parquet

hiérarchique et subordonné à l’autorité politique28.

La nouvelle Constitution rompt avec le passé en ce qu’elle oblitère

l’interdiction autrefois arrêtée en matière de la faculté des magistrats à

se regrouper en associations professionnelles. Qui plus est, le nouveau

texte garantit leur liberté d’expression mais interdit en fonction de

28 Pour preuve, l’arrêt émis par la grande Chambre de la Cour européenne des droits de

l’Homme daté du 29 mars 2010 relatif à l’affaire Medvedyev et autres réaffirme sa position

auparavant adoptée selon laquelle le juge « [...] doit présenter les garanties requises

d’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties [...]»

Page 17: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

17

l’article 11129, toute adhésion à des organisations syndicales ou à des

partis politiques.

Dans un autre ordre des idées, le Constituant a bien explicité le

rôle dudit conseil et ce, en vertu de l’article 11330. En réponse imparable

à la théorie de l’immunité contentieuse du dahir royal, l’article 114

soutient que les décisions individuelles du Conseil Supérieur du Pouvoir

Judiciaire sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir devant la

plus haute juridiction administrative du Royaume à savoir la Chambre

administrative de la Cour suprême.

Il faut rappeler que ledit Conseil est présidé par le Roi en sa simple

qualité de Président du Conseil et le dahir ne fait que traduire la décision

émanant du Conseil. Au reste, l’article 116 précise les règles régissant le

fonctionnement dudit conseil qui tient au moins deux sessions par an

disposant de l’autonomie administrative et financière.

En matière disciplinaire, le Conseil Supérieur du Pouvoir

Judiciaire est assisté par des magistrats-inspecteurs expérimentés. Dans

les affaires concernant les magistrats du parquet, le Conseil Supérieur du

Pouvoir Judiciaire prend en considération les rapports d’évaluation

établis par l’autorité hiérarchique dont ils relèvent. Chevillé , a - t-on pu

soutenir, sur les valeurs démocratiques émises par la Constitution

29 « Les magistrats jouissent de la liberté d’expression, en compatibilité avec leur devoir de

réserve et l’éthique judiciaire. Ils peuvent appartenir à des associations ou créer des

associations professionnelles, dans le respect des devoirs d’impartialité et d’indépendance et dans les conditions prévues par la loi. Ils ne peuvent adhérer à des partis politiques ou à

des organisations syndicales » art 111. 30Il dispose que le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire veille à l’application des garanties

accordées aux magistrats, notamment quant à leur indépendance, leur nomination, leur

avancement, leur mise à la retraite et leur discipline. En outre, Il élabore à son initiative, des

rapports sur l’état de la justice et du système judiciaire, et présente des recommandations

appropriées en la matière. A la demande du Roi, du Gouvernement ou du Parlement, le

Conseil émet des avis circonstanciés sur toute question se rapportant à la justice, sous réserve

du principe de la séparation des pouvoirs. Autant dire que le Conseil se charge des différents

aspects de leur statut à définir par une loi organique.

Page 18: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

18

marocaine relative à la consécration de l’indépendance du pouvoir

judiciaire ,le gouvernement a procédé à l’adoption de l'initiative

positive du « dialogue national sur la réforme du système de justice »,

proclamée par le Roi et suivie par le ministère de la Justice et des

Libertés, qui a soumis au Roi, après 14 mois de travail, une Charte en

Mai 2013.

Cette Charte s’est escomptée l’atteinte de six grands objectifs

stratégiques, étalés en 36 sous-objectifs, avec une mise en œuvre

effective de 200 mécanismes de travail. Le plan d’exécution de cette

Charte comprend un manuel de procédure avec 353 procédures

appliquées31.

Par ailleurs, la promulgation de la loi sur le transfert des

compétences du ministre de la Justice au procureur général du Roi près la

Cour de cassation par un dahir publié dans le Bulletin Officiel du lundi

25 septembre serait un jalon indélébile en matière de la réforme du

système judiciaire.

Selon cette loi, Mohammed Abdennabaoui, procureur général du Roi

près la Cour de cassation, remplace le ministre de la Justice dans ses

fonctions de présidence du ministère public (le parquet) et son autorité

sur ses magistrats32. Or, cette indépendance est vivement disqualifiée

attendu qu'elle peut transformer le Parquet général en une institution

hégémonique à la faveur de la consécration de son indépendance33sans

31Rapport de La ligue marocaine pour la citoyenneté et les droits de l’Homme dans le cadre

de l’Examen périodique universel de 2017 à l’occasion de la présentation par le Maroc de

son troisième rapport national, p. 5. 32Amine Derkaoui, « Le parquet est désormais indépendant… en théorie», La Dépêche | 26

septembre 2017

Sur: https://ladepeche.ma/parquet-desormais-independant-theorie/ 33Hassan Tariq s'écrie : «C’est un grand risque », qualifiant ainsi les éventuelles dérives

autoritaires des procureurs, qui se trouveraient, dit-il, « libres du contrôle du ministère de la

Justice, et par conséquent du Parlement.»

Page 19: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

19

oblitérer le danger de la soumission du parquet à des pressions provenant

d’un parti, d’un groupe ou d’un courant idéologique.

On a beau attendre que les réformes du système judiciaire

sauraient renforcer l’indépendance du pouvoir judiciaire et immuniser le

corps de la magistrature contre les dérapages obscurantistes. Rien de tel,

le rapport émis par le Groupe de travail sur l’Examen périodique

universel au cours de la Vingt-septième session tenue le 2 mai 2017

renseigne que toutes les parties prenantes récusent l’inanité des

résolutions ainsi que des objectifs tracés évaporés en fumée épaisse.

A cet effet, la ligue marocaine pour la citoyenneté et les droits de

l’Homme ne renseigne qu’aucune application, ni dotation budgétaire

nécessaire, ni outils de suivi ou d’évaluation des réalisations n’ont eu

lieu. Pire encore, la ligue marocaine pour la citoyenneté et les droits de

l’Homme aussi bien qu’Amnesty International34dénigrent la décision

disciplinaire à l’encontre de certains juges dont notamment juge M.

Mohammed Elhini qui réclame la réforme de la justice et qui fut

sanctionné d’exclusion du travail durant 6 mois. Dans la même lignée

s’inscrivent la mutation de la juge Amal Hamani, du juge Anbar et

Kandil et Fathi.

De même : «La nouvelle formule, le parquet général aura un bâtiment et sera doté de

l’autonomie financière et la prérogative de recruter les cadres qu’il souhaite. Le procureur

général de la Cour de cassation, le patron du parquet général, sera également ordonnateur. Résultat de la course et qui suscite des inquiétudes, c’est l’idée de se retrouver avec deux

ordonnateurs. «C’est le cœur du débat. Déjà l’autonomie du parquet par rapport au ministère de la Justice comporte des risques. Qui va contrôler le procureur général ? Si ses prérogatives

sont renforcées par des moyens matériels, humains, logistiques et financiers, ces risques

augmentent», souligne un avocat et professeur de droit public

Mohamed Chaoui, «L’indépendance du parquet suscite la polémique»,| Edition N°:5071 Le

24 juillet 2017. Sur : http://www.leconomiste.com/article/1015358-l-independance-du-

parquet-suscite-la-polemique 34 Amnesty International — Rapport 2016/17, la situation des droits humains dans le monde,

p298

Page 20: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

20

Certes, le Maroc a mis en place la Haute instance du dialogue

national sur la réforme du système judiciaire, et a même promulgué des

lois relatives au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire et au statut des

juges. Néanmoins, Amnesty International remarque que la refonte

souhaitée n’est pas atteinte tant en matière de l’indépendance du pouvoir

judiciaire qu’au chapitre de la souscription aux recommandations du

précédent EPU35.

Dans un autre ordre des idées, la Cour constitutionnelle incarne le

symbole vivant de la Constitution. En un peu plus clair, elle est le

couronnement d'une norme juridique destinée à se perpétuer pendant

plusieurs décennies. S’astreignant au Maroc à la rigueur d’élire

membres de la Cour constitutionnelle des juristes de profession, le

Constituant s’est conformé aux enseignements prêchés par Kelsen qui

disposait qu’il est de la plus grande importance d’accorder dans la

composition juridictionnelle une place adéquate aux juristes de

profession36.

Cette condition d’avoir des juristes au sein de la Cour

constitutionnelle trouvait résonance déjà dans la configuration de la

Chambre constitutionnelle de 1962 et 1970 qui requiert le choix d’un

35 Ibid 36Cité par Vivien Manangou Romain, Les évolutions récentes de la justice constitutionnelle

en république du Congo: Une analyse du rapport remis le 09 juin 2008 par la commission

politique, administrative et judiciaire de l'assemblée nationale, Mémoire pour le Master 2 de Droit Public, Transformation de l'État -Université de Cergy-Pontoise-Faculté de droit-

Session de juin 2009, dirigé par Madame Calvès.120p

Sur :http://www.memoireonline.com/09/09/2687/Les-evolutions-recentes-du-

constitutionnalisme-en-RDC.html. Repris de Hans Kelsen, « La garantie juridictionnelle de

la Constitution », La Revue du droit public, 1928, p 228. Déjà en 1962 et 1970, la condition

d’avoir un profil juridique sous la forme d’un professeur de droit était de rigueur. Cette

condition s’est fait inhiber dans les Constitutions ultérieures cédant la place à des profils

répondant davantage au seul critère politique.

Page 21: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

21

enseignant de droit et d’un membre de Chambre administrative de la

Cour suprême.

En ce sens , toutes les nominations nécessitent un contrôle rigoureux

abstraction faite de leurs origines qu’elles soient de l’exécutif ou du

législatif à l’encontre des pratiques en droit comparé où le législatif est

investi d’un crédo lui assurant un contrôle moins strict que celui de

l’exécutif.

Issus d’horizons a fortiori tridimensionnels, de la magistrature, de

l’administration et de l’université, les juges constitutionnels37 seraient

aptes à fournir une expertise juridique infaillible.

A ce juste propos, les désignations judiciaires ambitionnent

bourrer les failles de l’omniprésence de la représentation politique. Cette

juridisation requiert un vote qualifié afin que les juges désignés soient

consensuels. En outre, le alem38 fait son entrée dans la structure pour être

sans doute présent au cas où se profilerait un éventuel contrôle d’islamité

des lois.

En somme, le pouvoir constituant avait pour objectifs de contrer

le clientélisme, de moraliser l’organe, de « juridiciser » l’institution, de

renforcer sa légitimité en exigeant des juges des qualifications juridiques

et des conditions éthiques et techniques largement répandues en droit

comparé39.

Le nouvel élément qui se signale à l’attention est l’éradication des

professions libérales.

37 Le droit comparé renseigne que la fonction de juge constitutionnel est incompatible avec

toute autre fonction au Parlement ou au Gouvernement ou n’importe quelle fonction

publique ou salariée. Cf, Thierry Debard, Dictionnaire de droit constitutionnel, Éditions

Ellipses, 2002, 350p.P. 162. 38 On entendait souvent dire que la constitution des anciens conseils comprenait un membre

issu du monde des oulémas. 39 Cité par Vivien Manangou Romain, op., cit.Repris de Hans Kelsen, op.cit., p 220

Page 22: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

22

Maintes questions taraudent les esprits quant à cette stratégie

disqualifiante, qui serait vraisemblablement consubstantielle aux juges

constitutionnels et aux avocats en étroit rapport avec leur rendement

inopérant dans les anciens conseils ou même à la règle de

l’incompatibilité.

La Cour constitutionnelle doit, en conséquence, agir par delà les

mutations touchant la scène politique, en quelque sorte, les transcender.

C'est la raison pour laquelle la Cour constitutionnelle est -et doit

demeurer -totalement verrouillée à tout contrôle politique, aussi bien du

gouvernement que du parlement. Elle doit, du reste, dépasser, toute

pression de la part de partis politiques ou de groupements d'intérêts.

La justice constitutionnelle, comme toute justice40, est soumise à

l’exigence d’impartialité. Charles Eisenmann soulignait au sujet de la

Haute Cour constitutionnelle d’Autriche :

« Elle est appelée à jouer dans une certaine mesure le rôle d’arbitre

entre les parties, à assurer le règne du droit jusque dans le domaine politique.

L’impartialité de ses membres apparaît d’autant plus nécessaire qu’ils ont à se

prononcer sur des questions plus brûlantes »41.

40 «De la justice de classe, fustigée par La Fontaine […] à la justice actuelle soupçonnée aussi

bien d’être aux ordres du pouvoir que d’être parfois trop influencée par la presse ou l’opinion publique et les effets possibles de ses décisions sur celles-ci, les critiques les plus acerbes

formulées contre les décisions des institutions juridictionnelles ont trait à leur impartialité. C’est dire combien la nécessité d’un tribunal impartial est ressentie comme étant de l’essence

même de la justice, ce qui fait de l’impartialité un composant majeur de l’éthique des juges

». Pierre Crocq, « Le droit à un tribunal impartial », Droits et libertés fondamentaux, sous la

dir. de Remy Cabrillac, Marie-Anne Frison-Roche et Thierry Revet, Paris, Dalloz, 9ème éd.,

2003, p. 412) 41Charles Eisenmann, La justice constitutionnelle et la Haute Cour constitutionnelle

d’Autriche, Paris, 1928, rééd. Paris, Economica, 1986, p. 175.

Page 23: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

23

Pour y parvenir, il importe éminemment de nommer les juges à

vie quand bien même il s'afficherait telle une disposition rarement

constitutionnalisée même dans les démocraties libérales.

A moins qu'on exclue la Cour suprême des États-Unis, le mandat

des juges constitutionnels européens est généralement relativement court

(9 à 12 ans dans la plupart des cas), spécialement en Italie où les juges

de la Cour constitutionnelle sont nommés pour neuf ans. Cette

disposition se trouve toutefois pondérée par de plusieurs autres garanties

comprises pour garantir l'indépendance de la Cour et des juges.

S'agissant des garanties visant à assurer l'indépendance des

membres de la Cour, la Constitution italienne, à titre illustratif, formule

en premier lieu un certain nombre d'incompatibilités qui doivent être

strictement prises en considération.

C'est ainsi que l'article 135(5) dispose que les fonctions de juge à

la Cour sont incompatibles avec celles de membre du parlement ou d'un

conseil régional ainsi qu'avec l'exercice de la profession d'avocat et avec

toutes les charges et offices prévus par la loi (tels que maire, maître de

conférences, directeur de société, etc.).

De surcroît, les juges ne peuvent être membres de partis politiques

ni participer à des activités politiques. De même, nul ne peut être nommé

ou élu juge à la Cour constitutionnelle à moins qu'il dispose des

qualifications professionnelles spécifiques à cette fonction.

Aux termes de l'article 135(2), les juges sont choisis parmi les

magistrats, même en retraite, des juridictions supérieures ordinaires et

administratives, les professeurs de droit des universités et les avocats

ayant au moins 20 ans d'exercice.

D'autres garanties viennent consacrer l'indépendance de la Cour

constitutionnelle en tant que pouvoir autonome de l'État, c'est-à-dire en

Page 24: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

24

tant qu'institution indépendante de tout autre pouvoir. A ces fins, la

Constitution a conservé à la Cour une autonomie absolue en matière de

son organisation, de son fonctionnement et de la gestion de son budget.

Appréhendée au niveau de son organisation interne, la Cour

dispose de ses propres règles, qu'elle ne doit définir qu’en toute

compatibilité avec la Constitution et avec la loi visée par l'article 137(2)

de cette dernière établissant les autres règles nécessaires à l'organisation

et au fonctionnement de la Cour.

En outre, la Cour est identiquement pourvue d'une juridiction

interne pour les affaires concernant ses agents, tant pour leur poste que

pour leur rémunération. Plusieurs garanties assurent l'autonomie de la

Cour entre autres l'examen par la Cour de la validité des qualifications

professionnelles de ses membres une fois que ceux-ci ont été nommés

par le Président de la République, le parlement ou les organes

juridictionnels suprêmes. Elle tranche en matière d'inéligibilité ou

d'incompatibilité avec la fonction de juge constitutionnel. Les décisions

de la Cour en ce domaine sont sans appel.

Or, ce qui se signale à l'attention est qu'en droit comparé, à rebours

de l'expérience marocaine, c'est la Cour elle-même qui désigne son

président parmi ses membres, généralement les plus anciens. En Italie et

en Roumanie, maintes dispositions sauraient optimiser l'effectivité de

l'exercice de cette Cour en sa qualité « d'enfant mal aimé » de l'ordre

constitutionnel.

Primo, l'on a consacré l'indépendance et l'inamovibilité des juges

ainsi que leur antagonisme à toute autre fonction publique ou privée,

hormis celle de l'enseignement juridique supérieur.

En conséquence, les juges qui composent la Cour constitutionnelle

n’appartiennent à aucun parti politique. Outre l'activité didactique, seule

Page 25: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

25

activité exercée et inscrite au niveau de l'enseignement supérieur d'État

ou dans les institutions privées, aucune autre activité n’est tolérée en plus

de celle juridique.

La Constitution roumaine, à titre d’exemple, ordonne que les juges

constitutionnels aient une formation juridique supérieure, une haute

compétence professionnelle et une ancienneté de 18 ans au moins dans

l'activité juridique.

Actuellement, tous les juges de la Cour sont docteurs en droit, la majorité

étant professeurs universitaires .Ajoutons que parmi eux, deux sont

membres de l'Académie Roumaine.

Enfin, les prescriptions constitutionnelles maximisent

"l'oxygénation" de la formation de la Cour, par son actualisation tous les

trois ans, la dénomination étant effectuée légalement par la Chambre des

Députés, le Sénat et le Président de la Roumanie.

2. La justice constitutionnelle

On nomme « justice constitutionnelle » la partie du droit public

(institutions et techniques) qui est chargée de garantir le respect de la

Constitution et de sa suprématie sur toutes les autres normes. Cette

notion est inhérente à celle de l'État de droit42.

Au Maroc, ce contrôle est exercé par le conseil constitutionnel

depuis 1994. La jeune expérience de cet organe en la matière ne regorge

pas d’évènements exceptionnels pouvant susciter l’admiration de la

doctrine constitutionnelle. Néanmoins, elle agit en marquant son

environnement par l’autorité de ses décisions.

42 https://cestadire.weebly.com/233-droit---constitutionnel.html

Page 26: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

26

En fonction des pays, la justice constitutionnelle est exercée par

une juridiction spéciale, comme en France, ou par les tribunaux

ordinaires qui peuvent contester l'application d'une loi antagonique à la

Constitution. Dans ce second cas, s'acquitte de cette fonction une

hiérarchie de juridictions au sommet de laquelle se situe une cour dont

la jurisprudence fait autorité.

En France, c'est une juridiction spéciale, en l’occurrence, le

Conseil Constitutionnel, qui se charge de contrôler le respect de la

Constitution et de sanctionner la non conformité des actes des

institutions politiques au regard de la Constitution. Ce contrôle de la

constitutionnalité est appréhendé tel un élément du parlementarisme

rationalisé qui contribue au renforcement de la sécurité juridique.

Manifestement, la question qui dérive touche à la fonction chargée

de garantir la protection et le respect de ces dispositions

constitutionnelles. A cet enseigne, le Professeur Mauro Cappelletti,

soutient que si le XIXème siècle a été le siècle des parlements, le XXème

siècle est celui de la justice constitutionnelle43.

Au début du siècle dernier, la pratique judiciaire s'active pour

parer aux carences de dispositions constitutionnelles claires en

consacrant une forme de contrôle le contrôle juridictionnel. Ainsi en et-

il des États -Unis, de la Grèce et Hongrie44.

Créé en 1992 et remplaçant la chambre constitutionnelle de la

Cour suprême, le Conseil constitutionnel marocain s'escomptait pour

43 Nadia Bernoussi, «La justice constitutionnelle entre légitimité et effectivité»,

leconomiste.com,| Edition N°:3269 Le 05 mai 2010. Sur :http://www. /article/la-justice-

constitutionnelle-entre-legitimite-et-effectivitebripar-le-pr-nadia-bernoussii 44Ainsi, par des décisions rendues en 1871 et en 1897, la Cour de Cassation grecque a retenu

que "le pouvoir judiciaire ne peut considérer qu'une loi n'est pas valide si elle ne contredit

pas de façon manifeste une disposition supérieure de la Constitution"

A leur tour, des instances norvégiennes ont statué, en 1890 et en 1893, qu'on ne pouvait pas

appliquer des lois considérées comme inconstitutionnelles.

Page 27: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

27

principale mission de contrôler la régularité des élections nationales et

référendums. Par ailleurs, depuis la Constitution marocaine de 2011, il

va être remplacé par la Cour Constitutionnelle prévue à l'article 129 et

dotée de compétences dites substantielles (2.1).

A en croire Jacques Derrida «être démocrate, ce serait agir en

reconnaissant que nous ne vivons jamais dans une société assez

démocratique »45. C'est en s'appliquant à édifier une telle société que le

concept de constitutionnalité émergeait (2.2). Ce contrôle serait doublé

d'un autre de conventionalité (2.3).

2.1. Les compétences de la Cour constitutionnelle

La Cour constitutionnelle s'érige tel un contre-pouvoir qui puise

sa légitimité dans sa mission de garantir la démocratie et défendre les

libertés en veillant, entre autres, au respect de la

constitutionnalité. Inscrits sous un angle purement historique, l’idée

d’une telle fonction s'est nourrie des fédéralistes américains revêtant

l'aspect de « poids et contrepoids » pour l’établissement d’un équilibre

social parfait.

L'examen des dispositions de la Constitution marocaine relatives

à la Cour constitutionnelle témoigne de l’attention accordée par le

législateur constitutionnel au contrôle judiciaire de la constitutionnalité

des lois, afin d'assurer la conformité des lois et des actes des autorités

publiques à la Constitution.

45Vanessa Ratté, « La démocratie du Québec et d'ailleurs », Éthique publique [Online], vol.

13, n° 2 | 2011, URL : http://journals.openedition.org/ethiquepublique/612 ; DOI :

10.4000/ethiquepublique.612

Page 28: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

28

Pour cela, il a été prévu dans la Constitution la création d’une Cour

Constitutionnelle pour remplacer le Conseil constitutionnel, qui avait

remplacé à son tour la Chambre constitutionnelle lors de la réforme de

1992. Ainsi le Maroc a suivi le chemin des États qui ont introduit le

contrôle judiciaire sur le travail des autorités de l’État et sur la

constitutionalité des lois.

Par ailleurs, dans les modalités procédurales prévues par la loi

fondamentale pour la saisine des juridictions constitutionnelles, la

détermination du quorum est un indice prégnant et révélateur de la

maturation en démocratie .Il cadrerait en parfaite harmonie avec cette

attente démocratique lorsqu’il a pour ambition de compliquer et

d’entraver le recours .Il s’éloigne de cette ultime visée quand il brigue la

protection des droits de l’opposition et des minorités bien plus que

lorsqu’ il cherche à contourner les recours dilatoires.

Dans une perspective évolutionniste, le Constituant de 2011 se

devait de fixer un nombre46 statufié et non flexible pour la Chambre des

46En droit comparé, l’expérience allemande est parée aussi bien de mérites qu'elle est semée

de méfaits notamment avec le recours au tiers rationnel pour la saisine dudit conseil. En

effet, cette modalité a pour mérite de préserver la stabilité de l’ordre législatif mais bien

néfaste est l’incidence débouchant sur l’élimination des petites formations entre autres les

Verts et les communistes. Dans cette même veine, le Conseil constitutionnel français est

saisi à partir de 60, le Liban à partir de 10 alors qu’en Espagne à partir de 50. L’expérience

constitutionnelle marocaine renseigne qu’en 1992, le Constituant a opté pour un quart,

autrement dit 82 élus au sein de la Chambre des représentants et 68 pour la Chambre des

conseillers. Le Constituant marocain a acquiescé à une réduction du quorum à un cinquième

pour la Chambre des représentants et à 40 pour la Chambre des conseillers, ce qui était équivalent à 65 élus de l’ancienne composition de la Chambre des représentants estimée à

325. En ce faisant, le Constituant s’est positionné au juste milieu entre les 82 antérieurement institués et 33 réclamés par les partis politiques et les ONG. Incontestablement, les saisines

dépourvues de tout intérêt déstabilisent l’ordre législatif mais les droits des minorités

devraient bénéficier d’une protection contre le joug de la majorité.

Le paradoxe dramatique est que lors des arbitrages finaux, l’effectif de la Chambre des

représentants a culminé le nombre de 394 déjouant ainsi toute tentative d’asseoir un quorum

inscrit sur les canons de la démocratie libérale .Vaine tentative qui n’a abouti qu’à baisser

ce quorum de trois élus puisque le cinquième de l’actuelle Chambre des représentants est

79 au lieu de 82 auparavant.

Page 29: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

29

représentants de la même manière que celui figé à 40 pour la Chambre

des conseillers.

Au lieu de l’option arrêtée pour un cinquième pour la Chambre

des représentants, le chiffre préétabli serait l’incarnation de l’équité dans

l’approche de la composition de ces deux institutions. Autrement, la

situation est presque la même qu’en 1996 à quelques exceptions près

pour la Chambre des représentants et sur 40 conseillers dans la Chambre

des conseillers.

Cet état des lieux est susceptible de revigorer les recours du coté

de la Chambre haute pareillement au Sénat français et de contourner les

situations où les saisines nécessiteraient des coalitions de plusieurs partis

politiques tout en palliant, comme l’a bien soutenu Nadia Bernoussi, le

risque de paralysie à travers le fait que la Cour constitutionnelle ne puisse

fonctionner qu’avec les membres nommés. En ce sens, l’article 130 au

deuxième alinéa est bien édifiant47.

On relève que la nouvelle Constitution a étendu les pouvoirs de la

Cour constitutionnelle et lui a imposé des délais légaux pour traiter les

litiges qui lui sont soumis. Il a aussi accordé aux citoyens le droit de faire

valoir l’inconstitutionnalité des lois devant cette Cour, et a convenu à

cette dernière d'amples prérogatives , entre autres , consultatives , de

règlement de litige entre les autorités publiques , de traitement des

irrégularités électorales , d'examen de la constitutionnalité des lois.

En matière consultative, la Constitution marocaine précise que la

Cour Constitutionnelle peut intervenir dans divers actes des autorités

politiques : le roi, le gouvernement et les deux chambres du Parlement.

47Il dispose « Si les deux Chambres du Parlement ou l’une d’elles n’élisent pas les membres

précités dans le délai requis pour le renouvellement, la Cour exerce ses attributions et rend

ses décisions sur la base d’un quorum ne tenant pas compte des membres non encore élus.

Chaque catégorie de membres est renouvelable par tiers tous les trois ans. »

Page 30: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

30

En effet, le roi ne peut pas dissoudre une ou les deux chambres du

Parlement qu’après consultation du Président de la Cour

constitutionnelle en vertu de l’article 96 de la Constitution.

Dans ce même ordre des idées, le chef du gouvernement ne peut

procéder à la dissolution de la Chambre des représentants par un décret

publié par le Conseil des ministres, qu’après avoir consulté le roi et le

président de la Cour constitutionnelle.

Cela dit, le contrôle de la répartition des compétences entre le

centre et la périphérie fait figure de parent pauvre dans la nouvelle

rédaction.

Tout bien dévisagé, le modèle de régionalisation voulu en dépit de toute

référence à la libre administration et au principe de subsidiarité s’aligne

davantage sur un modèle beaucoup plus français qu’espagnol érigeant

en valeur absolue l’intervention du tribunal constitutionnel.

Enfin, une nouvelle attribution nous interpelle. Elle porte sur la

consultation préalable de la Cour constitutionnelle en cas de réforme

simplifiée, laquelle consultation formelle porterait sur le contrôle de la

procédure augurant éventuellement un contrôle sur le fond au moment

des révisions ultérieures. Le Constituant, en se conformant ainsi aux

États entreprenant le contrôle de la constitutionnalité des Chartes

suprêmes, sacrifie aux valeurs supra- constitutionnelles qui transcendent

toute révision48.

48La dite supra-constitutionnalité est inacceptable en France car jugée antinomique au principe

de la souveraineté du pouvoir constituant lequel devrait transcender toutes les limites et les contingentements. Cette idée de normes supra-constitutionnelles est abrogée en France en

vertu de la décision du Conseil constitutionnel n° 92-312 DC du 2 septembre 1992 relative

au traité sur l’Union européenne. Elle a été abolie en ces termes : « l’existence de normes

supra-constitutionnelles serait contraire au principe de la souveraineté du pouvoir

constituant, ce dernier étant illimité »

Cf Philippe Ardant et Bertrand Mathieu, Institutions politiques et droit constitutionnel,

Librairie générale de droit et de jurisprudence, Lextenso éditions ,21e édition, Septembre

2009 - Paris, p84.623p

Page 31: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

31

Du reste, le roi ne peut pas proposer un projet de révision partielle

d’une partie de la Constitution au Parlement qu’après avoir consulté le

président de la Cour constitutionnelle qui est compétente pour se

prononcer en matière de la validité des procédures de cette révision et

pour annoncer son résultat..

Par ailleurs, au chapitre du règlement des litiges entre les autorités

publiques, il sied de rappeler que la Cour constitutionnelle est

compétente à trancher les conflits de compétence entre les autorités

publiques.

En ce sens, au cas où le gouvernement refuserait un projet de loi

ou un amendement, sous prétexte de son illégalité, la Cour est habilitée

à intervenir, suite à la demande de l’un des présidents de l’une des deux

chambres du Parlement ou à la demande du chef du gouvernement.

Dans cette perspective, l'on ne peut changer des textes législatifs

dans leur forme par décret sans l’acquiescement de la Cour

constitutionnelle, si le contenu de ces textes législatifs intéresse un des

domaines de compétence de l’autorité réglementaire.

Par ailleurs, propulsé de l’ambition d'asseoir un modèle de

démocratie marocaine inscrit dans la grande culture de l'universalisme

démocratique, le Constituant s’ouvre en la matière sur le contrôle des

traités. De surcroît, au niveau du traitement des irrégularités électorales,

la Cour est habilitée, tout comme le Conseil constitutionnel de la

Constitution de 1996, à examiner les recours liés aux déviations des

élections des membres du Parlement tout en se prononçant sur la

transhumance partisane.

A cet enseigne, sur la base d’une demande émanant du Président

de l’une des chambres, la Cour peut déposséder un élu de sa qualité de

parlementaire s’il a changé son appartenance politique en vertu de

Page 32: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

32

laquelle il a établi sa candidature, ou s’il a abandonné son groupe

parlementaire.

La Cour intervient pour constater la vacance du siège

parlementaire suite au changement d’appartenance politique d’un élu en

cours de mandat. Cette infraction ainsi arrêtée engendre la déchéance de

l’élu de son mandat s’inscrit dans la moralisation de la vie parlementaire

et confère à la Cour constitutionnelle une mission d’enregistrement

déclarative d’une situation nouvelle.

Comparées aux expériences dans les grandes démocraties, les

compétences de la Cour Constitutionnelle marocaines demeurent minces

sachant pertinemment que de larges domaines transcendent le «

Contrôle de la légalité Constitutionnelle », entre autres, les autres « actes

» du parlement et du gouvernement ou pouvoir central et les règlements

dans la mesure où une bonne partie des actes est exclue du champ des

lois pour être incluse dans le cadre de la règlementation.

De même, en effet, en vertu de l'article 105 de la Constitution de

Lituanie, la Cour constitutionnelle examine et adopte les décisions

relatives a la conformité des lois de la République de Lituanie et des

actes du Seimas (Parlement) à la Constitution de la République de

Lituanie.

Au reste, et c'est le plus important, elle statue sur la conformité des actes

du Président de la République et des actes du Gouvernement de la

République à la Constitution.

La Cour constitutionnelle donne un avis sur la question de savoir

si l’état de santé du Président de la République lui permet de continuer à

exercer ses fonctions et si des actes concrets des membres du Seimas et

des fonctionnaires de l’État, contre lesquels a été engagée une procédure

d’accusation, sont contraires à la Constitution.

Page 33: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

33

Dans le même esprit , en fonction de l'article 108 de la

Constitution de la Finlande, le chancelier de la Justice est chargé de

veiller à constitutionnalité des actes du gouvernement et du Président de

la République dans l’exercice de leurs fonctions.

Qui plus est, le chancelier de la Justice doit, en outre, veiller à ce

que les juridictions et autres autorités, ainsi que les fonctionnaires,

employés du secteur public et autres personnes exerçant une fonction

publique observent les injonctions légales et remplissent leurs

obligations.

Le plus important, semble-t-il, est que le chancelier de la Justice

veille au respect des droits fondamentaux et des droits de l’homme.

Si le Président de la République, le gouvernement ou un ministère en

font la demande, le chancelier de la Justice est tenu de leur remettre des

informations et des avis sur des questions juridiques.

2.2. Le contrôle de constitutionnalité

Il est l'émanation indéniable de la suprématie constitutionnelle, et

signifie que le principe de constitutionnalité se superpose au principe de

légalité. L'on peut avancer que si garantie formelle consiste dans la

rigidité de la Constitutions, la garantie matérielle demeure

inéluctablement du ressort du contrôle de constitutionnalité.

La concrétisation du caractère normativiste du contrôle de

constitutionnalité dans son approche classique a permis de déduire que

ce contrôle – dans sa dimension abstraite qui est la spécificité du modèle

kelsénien de justice constitutionnelle- peut être accompli, soit a priori,

dit par voie d’action soit a posteriori labellisé exception

d'inconstitutionnalité

Page 34: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

34

Il convient à présent de se pencher sur le contrôle de

constitutionnalité par voie d’action (1.2.1.) avant d'analyser l'exception

d'inconstitutionnalité (1.2.2.).

2.2.1. Le contrôle de constitutionnalité par voie d’action

Ce contrôle relève d’une juridiction spécialisée qui a le monopole

du contrôle de constitutionnalité. Il se fait a priori mais de façon

abstraite. Le contrôle par voie d’action présente l’avantage de la sécurité

juridique puisque la loi est contrôlée avant son entrée en vigueur.

Il consiste à contester directement, devant un juge spécialisé, la

conformité à la constitution d'une loi ou d'une partie de loi et de lui

demander de l'annuler en dehors de tout litige concret. Le juge ordinaire

est incompétent dans ce domaine. Autrement dit, c'est un contrôle

effectué par un juge spécialisé devant lequel, à l'occasion d'un recours,

il lui est demandé de vérifier la constitutionnalité d'une loi. Ce juge

spécialisé siège dans un tribunal ou une cour constitutionnelle. Le juge

ordinaire est incompétent dans ce domaine.

Le contrôle de constitutionnalité par voie d'action découle de

l’article 133 de la Constitution. Il s’agit d’un contrôle opéré avant la

promulgation de la loi (a priori). La possibilité de la saisine de la Cour

diffère en fonction de l’objet du recours. Lorsqu’il s’agit de l’examen de

la constitutionnalité d’une loi organique, d’une loi ou d’un traité

international, les autorités compétentes pour saisir la Cour sont le roi, le

Chef du Gouvernement, les présidents des Chambres du parlement, le

cinquième des membres de la Chambre des représentants ou quarante

membres de la Chambre des conseillers, comme l’indique la

Constitution.

Page 35: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

35

Néanmoins, il n’y a jamais eu de saisine de la part du roi ni des

présidents des Chambres du parlement. En ce sens, l'article 2349 du Dahir

n° 1-14-139 du 16 chaoual 1435 (13 août 2014) portant promulgation de

la loi organique n° 066-13 relative à la Cour constitutionnelle énonce

que la transmission des lois à la Cour constitutionnelle aux fins de se

prononcer sur leur conformité à la Constitution, conformément aux

dispositions du 3ème alinéa de son article 132, est effectuée par une lettre

du Roi, du Chef du gouvernement, du président de la Chambre des

représentants ou du président de la Chambre des conseillers ou par une

ou plusieurs lettres comportant, au total, les signatures d'au moins un

cinquième du nombre des membres de la Chambre des représentants ou

quarante membres de la Chambre des conseillers.

Les décisions de non-conformité conduisent à la censure totale ou

partielle de la loi mais non à son annulation puisqu'elles sont prononcées

avant la promulgation, acte juridique qui en assure l'application. Selon

cette procédure, le texte jugé inconstitutionnel est annulé définitivement

et pour tous les citoyens50.

Les décisions s'imposent (ou doivent s'imposer) erga omnes aux

pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et

juridictionnelles. Elles sont insusceptibles de recours.

L'autorité absolue de la chose jugée implique que le Conseil ne

puisse statuer deux fois sur un même texte, ni (au moins en théorie) que

les « pouvoirs publics et les autorités administratives et juridictionnelles

» puissent contredire les décisions.

49 Dahir n° 1-14-139 du 16 chaoual 1435 (13 août 2014) portant promulgation de la loi

organique n° 066-13 relative à la Cour constitutionnelle. 50 Charles Cadoux Droit constitutionnel et institutions politiques. Tome 1, Théorie générale

des institutions politiques, 4ème édition (Broché) p.203-203.

Page 36: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

36

Le droit comparé renseigne qu'en Roumanie, en vertu de l'article

144, lettre a) de la Constitution, la Cour se prononce sur

l'inconstitutionnalité des lois avant leur promulgation.

Les sujets saisis sont le Président de la Roumanie, les présidents

de l'une des deux Chambres du Parlement, le Gouvernement, la Cour

suprême de Justice et un groupe de 50 députés (environ 14% du total) ou

de 25 sénateurs (environ 17%) au moins.

Suivant les dispositions de l'article 77 de la Constitution, la loi

peut être promulguée dans un délai de 20 jours, tout au plus à partir de

sa réception, ce qui accorde au Chef de l'État la possibilité d'accomplir

cette opération aussitôt que la loi lui est acheminée. Dans une situation

identique, il existe, théoriquement au moins, l’éventualité que du fait

d'une promulgation hâtive, l'on ne peut plus user du droit de saisine.

Afin de parer à une telle éventualité, l'article 17 de la loi organique

de la Cour précise que, avant d'être remise au Président en vue de la

promulgation, la loi doit être retenue par le Secrétariat général de chaque

Chambre pour un délai de 5 jours (seulement deux jours dans la

procédure d'urgence). Et d'ajouter que les parlementaires en sont

informés dans une séance plénière. Ils ont donc à leur disposition cinq

jours, pour recueillir le nombre de signatures nécessaires au cas où ils

désireraient saisir la Cour constitutionnelle.

La Cour suprême de Justice en est informée elle aussi. Certes, les

sujets du droit saisis peuvent toujours solliciter la Cour de se prononcer

en matière de l'inconstitutionnalité de la loi, même après l'expiration de

ce délai, si le président de l'a pas encore promulguée. Cependant,

l'expérience a attesté que pratiquement toutes les lois ont été attaquées

pour cause d'inconstitutionnalité dans ce délai.

Page 37: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

37

En substance, toute saisine adressée à la Cour suspend le droit de

promulgation de la loi, que ce soit seulement l'un ou bien plusieurs de

ses articles qui sont mis en cause.

La Cour discute des saisines qui lui ont été destinées dans son

assemblée plénière après avoir pris connaissance des positions des deux

Chambres et du Gouvernement.

Les décisions sont adoptées à la majorité de voix des juges dont

deux -tiers au moins doivent s'associer aux débats. Elles sont transmises

aux autorités intéressées et publiées dans le « Monitorul Oficial » de la

Roumanie.

Quand la Cour enregistre l'inconstitutionnalité de certaines

dispositions, les présidents des Chambres, en recevant sa décision,

doivent procéder, suivant les dispositions de l'article 145 de la

Constitution, au déclenchement de la procédure de réexamen.

Au cas où les deux-tiers des députés et les deux-tiers des sénateurs

voteraient pour le maintien du texte initial adopté par le Parlement,

l'opposition d'inconstitutionnalité est refusée.

En somme, il se cristallise que ce type de contrôle est simple,

rapide et garantit une parfaite sécurité aux rapports juridiques vu que la

contestation de la loi étant réglée avant son entrée en vigueur, chacun

peut, une fois le texte mis en vigueur, fonder en toute tranquillité son

comportement sur la loi sachant qu’elle ne peut plus être mise en cause51.

L’inconstitutionnalité que pourrait relever le juge constitutionnel

est dénuée de conséquences sur la vie et les équilibres politiques et

institutionnels ainsi que sur les droits fondamentaux des justiciables.

51 Dominique Rousseau, La justice constitutionnelle en Europe, Paris, Montchrestien, 1992,

p. 80

Page 38: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

38

L’expérience marocaine montre qu'en matière des textes à valeur

constitutionnelle, l’intérêt du contrôle préventif n’est plus à démontrer.

Il est indispensable à la sauvegarde de la « pureté constitutionnelle » de

textes servant de normes de référence pour le contrôle de

constitutionnalité, c'est-à-dire appartenant au bloc de constitutionnalité.

Il prédispose à l'automaticité de la conformité à la Constitution des

normes du bloc de constitutionnalité. D’autre part, le contrôle préventif

offre au Maroc, compte tenu des recours exercés par les titulaires du droit

de recours en la matière, l’occasion de conjurer l’arbitraire du législateur

électoral. Ce n’est donc que dans cet esprit qu’il faut acquiescer le

contrôle abstrait dit a priori.

La Cour constitutionnelle béninoise, à l’instar de son homologue

belge, utilise des normes constitutionnelles ou quasi constitutionnelles

pour exécuter son contrôle de constitutionnalité des normes infra

constitutionnelles, ce qui est tout à fait en harmonie avec l’esprit

kelsénien de la justice constitutionnelle. « Pour tout acte, c’est sa

conformité aux normes du degré supérieur qui doit être vérifiée52.»

2.2.2. L'exception d'inconstitutionnalité

Le Conseil constitutionnel est limité au seul contrôle préventif, 53

il substitue la Cour constitutionnelle dont la compétence s’étend à la

faculté de statuer sur les exceptions d’inconstitutionnalité,54 soulevée

52 Hans. Kelsen, « La garantie juridictionnelle de la Constitution (La justice constitutionnelle)

», RDP, 1928, p. 236. 53 Omar Bendourou, « La justice constitutionnelle au Maroc », in Revue de droit public et de

la science politique en France et à l’étranger, 1997, pp 1023-1046. 54 Cette compétence sera précisée par une loi organique dont l’incidence immédiate est de

transformer la Cour en une véritable juridiction.

Page 39: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

39

devant toutes les juridictions en fonction de l’article 13355. Le contrôle

est exercé concrètement à partir d’un contentieux et a posteriori.

Cependant, si la Cour constitutionnelle est désormais dotée du

pouvoir de juger lorsqu’elle est saisie par voie de l’exception

d’inconstitutionnalité, elle n’appartient pas à proprement parler au

pouvoir judiciaire56.

Certes, cette particularité, à l’inverse des cours constitutionnelles

du monde, la rapproche, derechef, au Conseil constitutionnel français

depuis la réforme de la loi du 23 juillet 2008 complétée par la loi

organique du 10 décembre2009.

Du reste, tout comme les expériences française et espagnole, le

nouveau texte consacre l’unité de juridiction, cet acquis du

protectorat57est grevé dans la vie institutionnelle marocaine depuis

l’indépendance58 .A cet effet, l’exception d’inconstitutionnalité s’inscrit

dans le cadre d’un procès, comme moyen invoqué par l’une ou l’autre

55 « La Cour Constitutionnelle est compétente pour connaître d’une exception

d’inconstitutionnalité soulevée au cours d’un procès, lorsqu’il est soutenu par l’une des

parties que la loi dont dépend l’issue du litige, porte atteinte aux droits et libertés garantis

par la Constitution. »Article 133 56Yves Gaudemet, op.cit., p 197. 57Incarnant une rémanence du privilège de juridiction issu du régime des capitulations, les

tribunaux civils français de Tunisie et du Maroc étaient chargés du contentieux des causes

françaises et étrangères. Pour la Tunisie, c’est par le décret beylical du 27 novembre 1888

sur le contentieux administratif que leur compétence était consacrée tandis que dans le cas

du Maroc, c’est l’article 8 §4 du dahir sur l’organisation judiciaire du 12 août 1913 qui

régissait cette compétence.

En Tunisie se limitant, en matière administrative, à la seule compétence de trancher les litiges où un Français ou un étranger étaient parties, les tribunaux français au Maroc ont une

compétence entière de se prononcer en contentieux administratif quelle que soit la nationalité des parties.

58Il convient de rappeler que le Maroc a adopté depuis le dahir du 12 août 1913relatif à

l’organisation judiciaire, le système d’unité de juridiction. En matière de contentieux

administratif, les tribunaux ordinaires et la Chambre administrative de la Cour Suprême.

A en croire les propos retenus par ces auteurs, la justice administrative outre-mer s’exerçait

à l’exception de la Tunisie et du Maroc, par les Conseils du contentieux administratif – juges

administratifs de premier degré et de droit commun qui furent généralisés à l’ensemble des

colonies et aux protectorats d’Asie en 1881 – et par le Conseil d’État métropolitain.,

Page 40: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

40

partie. Amenée à connaître de ce moyen, la cour sera invitée à y faire

droit ou à le rejeter s’il en est saisi et se transforme de la sorte en

juridiction constitutionnelle.

Il faut souligner que le champ d’exception d’inconstitutionnalité

est limité aux dispositions législatives qui portent atteinte aux droits et

libertés que la Constitution garantit, selon un schéma qu’on retrouve

dans d’autres systèmes constitutionnels.

Ce qui est plus significatif dans cette proposition, c’est que le

contrôle par voie d’exception va permettre aux citoyens en litige de

contester toutes les dispositions législatives existantes qui sont

antinomiques aux droits et libertés consacrés par la Constitution et cela

touche à même les dispositions antérieures à la nouvelle Constitution.

Ceci va aboutir, a–t-on pu reprendre, à une jurisprudence

constitutionnelle qui sera, incontestablement, performante et efficiente.

Dans le dessein de déjouer les collusions pouvant se manigancer entre la

majorité et l’opposition et ambitionnant de prémunir les droits des

justiciables, le Constituant a établi cette exception d’inconstitutionnalité.

Aux antipodes des enseignements véhiculés par les expériences

comparées telle l’expérience allemande , le Constituant a édifié un

modèle maroco-marocain instituant non une saisine individuelle directe

devant la Cour constitutionnelle mais se nourrissant plus d’un esprit

progressif répondant à des considérations de pure logistique induisant

l’annulation de la loi antinomique aux droits fondamentaux des

justiciables sur un double renvoi des tribunaux ordinaires vers la Cour

Page 41: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

41

de cassation puis à la Cour constitutionnelle. L’effet est de disqualifier

la loi concernée qui se trouverait du fait « blessée » par hasard59.

A ce juste propos, les cas espagnol et italien sont décisifs. La

personne requérante, en l’occurrence un Marocain ou un étranger ou

même une personne physique ou morale ne pourra déclencher la saisine

de la Cour constitutionnelle dont les modalités, les délais et les voies de

renvoi à la Cour constitutionnelle ainsi que les effets de l’annulation

seraient explicités par une loi organique relative à « l’exception

d’inconstitutionnalité ».

Le droit comparé renseigne que pour que la Cour constitutionnelle

soit saisie, il faut réunir trois critères :

- la disposition législative critiquée est applicable au litige ou à la

procédure, ou constitue le fondement des poursuites.

- la disposition législative critiquée n'a pas déjà été déclarée

conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel.

- la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux.

Une fois saisi, la Cour constitutionnelle doit juger la question prioritaire

de constitutionnalité dans un délai de trois mois. Si elle déclare que la

disposition législative contestée est conforme à la Constitution, cette

disposition conserve sa place dans l'ordre juridique interne.

La juridiction doit l'appliquer, à moins qu'elle ne la juge

incompatible avec une disposition d'un traité international ou du droit de

l'Union européenne.

En revanche, si la Cour déclare que la disposition législative

contestée est contraire à la Constitution, la décision de ladite Cour a pour

59Cette expression est empruntée à Alexis de Tocqueville, reprise dans, Louis Fovoreu. Les

cours constitutionnelles, Paris, PUF, coll. Que sais-je ?, n° 2293, 1986, 2e éd., 1992, p 6.

127 p.

Page 42: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

42

effet d'abroger cette disposition. Elle disparaît de l'ordre juridique

français.

Cette mouvance initiée au niveau de l’intervention de la Cour

constitutionnelle justifie, au demeurant, la nouvelle appellation induisant

au-delà de la simple confrontation abstraite de la loi à la Constitution,

l’application concrète de la loi.

C'est le contrôle concret (postérieur) des normes légales entrées en

vigueur réalisé après leur promulgation qui forme l'objet d'une autre

partie, identiquement sérieuse, de l'activité de la Cour. Ce contrôle peut

également concerner les dispositions des ordonnances

gouvernementales. Ainsi en est-il des exceptions d'inconstitutionnalité,

initiées devant les instances judiciaires, par n'importe quelle partie

impliquée dans un procès ainsi que par l'instance d'office.

Le droit comparé renseigne qu'en Italie ou en Roumanie, les juges

a quibus constituent les seules autorités en droit de saisir la Cour

exprimant dans un jugement leur opinion à l'égard de l'exception. Le juge

est compétent à suspendre le jugement de l'affaire jusqu'à ce que la Cour

constitutionnelle statue sur la contestation.

Elle se prononce en collège de trois juges. Si on constate qu'elle

est certainement dépourvue du bon fondement, on peut procéder au

règlement de l'affaire sans citer les parties avec l'accord de tous les

membres du collège.

Par ailleurs, l'appel par voie de recours par les parties ou par le

ministère Public représente une particularité de la procédure dans ce cas.

Le recours est jugé par un collège de cinq membres piloté par le président

de la Cour ou son suppléant.

Une fois que la décision de la Cour est définitive, autrement dit, si

la décision prononcée par le collège de trois juges n'a pas été attaquée

Page 43: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

43

par l'appel, elle devient définitive et obligatoire pour toutes les autorités

publiques mais n'a de portée que pour l'avenir.

2.3. Le contrôle de conventionalité

Le contrôle de conventionalité s'entend au contrôle de la

conformité des lois par rapport aux traités, pour lequel il se déclare

incompétent. En ce sens, Hans Kelsen admet que « le droit international,

si l’on en suppose la primauté, peut constituer un mètre de la régularité

de toutes les normes étatiques, y compris la plus élevée d’entre elles, la

Constitution.60»

Il relèverait ultérieurement que « les traités internationaux doivent

aussi – du point de vue de la primauté de l’ordre étatique- être considérés

comme des actes immédiatement subordonnés à la Constitution »61. Il

déduit, à ce juste égard, que si « le traité international peut déroger aux

lois ; il est donc du plus haut intérêt politique qu’il soit conforme à la

Constitution (…). Aucune règle de droit international ne s’oppose à ce

contrôle des traités »354.

Le régime juridique des normes internationales s’intègre

progressivement dans le régime juridique général des règles de droit au

Maroc.

Il serait fort légitime de se demander si par le contrôle de

conventionalité, on ne fait qu’entériner aux dires de Nadia Bernoussi, un

fait existant.

60 Hans Kelsen, «La garantie juridictionnelle de la Constitution (la justice constitutionnelle)

», RDP N° 35,1928, p. 212. 61 Ibid., p. 232.

Page 44: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

44

De jure, ce contrôle s’effectue moyennant le contrôle de la loi

d’approbation du traité qui induit concomitamment un contrôle du traité.

C’est la non-mise en œuvre du contrôle de la loi ordinaire qui a frappé

d’ankylose le contrôle des traités qui lui, a toujours existé. Or, ce qui est

novateur, c’est l’examen de certains traités échappant au Parlement.

Un tel contrôle est effectué a priori par les diverses autorités de

saisine entre autres le Roi, le Chef du gouvernement, les Présidents des

Chambres, le cinquième de la Chambre des représentants ou quarante

membres de la Chambre des conseillers. La conséquence d’un tel

contrôle en cas de conclusion d’un antagonisme avec la Constitution

serait la révision de la Charte suprême.

En ce faisant, la Constitution accorde à la Cour le pouvoir de

traiter le cas des transgressions de la Constitution par les conventions

internationales. A ce juste niveau, dès qu’elle est saisie par le roi ou le

président de la Chambre des représentants ou le Président de la Chambre

des conseillers ou un sixième des membres de la première chambre ou

un quart des membres de la deuxième chambre, d’un engagement

international comprenant des termes antinomiques à la Constitution, la

ratification de cet engagement ne se fait qu’après révision de la

Constitution.

Dans les expériences comparées à l'instar de la France, le

constituant a souhaité rétablir la priorité du contrôle de constitutionnalité

sur le contrôle de conventionalité. Eu égard à la prééminence de la

Constitution sur les traités, il paraît étrange que le contrôle de

conventionalité prime sur le contrôle de constitutionnalité si bien que les

traités auraient la primauté sur la Constitution. Ce mécanisme est réputé

actuellement sous la formule de Question prioritaire de constitutionnalité

(QPC).

Page 45: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

45

Il importe d'identifier le sujet de droit exerçant ce contrôle de la

conformité des lois par rapport aux traités, qu'on peut qualifier de

contrôle de conventionalité, par opposition au contrôle de la conformité

des lois à la Constitution, qu'on peut qualifier de contrôle de

constitutionnalité.

Accepter d'établir au Maroc un dispositif de contrôle de

constitutionnalité des traités internationaux est une tâche bien ardue étant

donné que dans la mesure où se hisse en problématique la question de la

primauté des traités internationaux à l’ensemble du droit interne, y

compris la Constitution.

En effet, l’issue du contrôle ne sera pas la même selon que l’on

considère que c’est l’une ou l’autre des deux normes que sont d’une part

la Constitution, d’autre part, le traité international, qui est supérieure à

l’autre.

Au cas ou l'on admettrait que la Constitution serait supérieure au

traité international, on ne saurait permettre qu’un texte appartenant à

cette deuxième catégorie de normes et comportant certaines dispositions

antithétiques à la Constitution puisse produire ses effets dans l’ordre

juridique interne sans que l'on ne mette en place un dispositif de blocage

préventif, ou un système d’assainissement de son ordre juridique.

Aux antipodes, la reconnaissance de la primauté du traité sur la

Constitution, conduit à choisir de réviser la Constitution chaque fois que

l’État s’engage dans un traité dont certaines dispositions antinomiques à

la Constitution.

Si les dispositions du traité sont d’applicabilité directe, il faut les

mettre en œuvre en ignorant les dispositions opposées comprises dans la

Constitution. Devant un tel cas, on estimerait que la reconnaissance de

la prééminence du traité international sur la Constitution dispense le

Page 46: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

46

pouvoir constituant, afin de pouvoir se conformer aux obligations

internationales de l’État, de modifier au cas par cas, le texte dont il est

l’auteur62.

Le fait est que plusieurs Constitutions prévoient à la fois les

contrôles préventifs de constitutionnalité des traités internationaux et des

possibilités de révision de la constitution en cas de contrariété avec un

traité international. Une telle situation laisse libre cours aux partisans de

l’une et l’autre des deux thèses qui s’affrontent s’agissant de la

supériorité de l’une des deux normes évoquées sur l’autre.

En expérience belge, en matière de contrôle des normes

internationales, il est toléré de déduire que s’il est de la volonté de la

Constitution que les normes du droit international soient respectées, ce

qui est le cas dans chacun des deux pays sous examen. En ce sens, Hans

Kelsen soutient :

« Il faut donc assimiler complètement les lois contraires au droit

international aux lois inconstitutionnelles (…) que ces normes aient été reçues par la

Constitution avec le rang de lois constitutionnelles ou non, car dans l’un et l’autre

cas, leur réception signifie qu’elles ne peuvent être écartées par une loi ordinaire »63

.

Pour autant, la Cour constitutionnelle est réfractaire à l'exécution

de contrôles directs de conventionalité, mais en admettant l'interprétation

des dispositions constitutionnelles à la lumière du droit international,

notamment le droit international des droits de l’homme, on assiste

toutefois à un usage des normes internationales comme normes de

référence, même si ce n’est que de manière auxiliaire.

62 Sêgnon Gilles Badet, Contrôle intra normatif et contrôle ultra normatif de constitutionnalité

-Contribution à l’identification des sous catégories du modèle kelsénien de justice

constitutionnelle à partir des systèmes belge et béninois, Université Catholique de Louvain

-Faculté de droit et de criminologie, Centre de recherches sur l’État et la Constitution. 2011-

2012. p. 568, et p. 83. 63 Hans Kelsen, loc. cit., p. 238

Page 47: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

47

Chapitre 2 :

La consécration de la place du droit international dans la

nouvelle Loi fondamentale

S’il est vrai qu’au Maroc comparativement aux textes précédents,

la Charte de 2011 apporte dans sa substance une promotion incontestable

du droit international, il n’en demeure pas moins vrai qu'il serait malaisé

de parvenir à un consensus national sur la primauté de la norme

internationale sur la législation interne64.

64 Notons à cet égard que l’Europe et les pays occidentaux, somme toute, ont opté, pour la

plupart, pour la primauté de l’ordre international comme en témoigne les cas de la République fédérale allemande, l’Italie et les pays du Benelux ou même la France dans la

Loi fondamentale de 1958.Cette reconnaissance est scellée dans la Constitution et la justice

internationale. Par contre, les États –unis ainsi que l’Australie et la Grande Bretagne plaident

pour l’égalité des deux ordres juridiques. Or, force est de constater que la plupart des pays

en voie de développement ou ceux décolonisés sont résolument persuadés de la supériorité

de la loi interne sur la norme internationale. Ceux -ci voient dans la primauté de la législation

internationale les indices symptomatiques attentatoires à la souveraineté d’autant plus qu’ils

n’ont en rien participé à l’élaboration de la substance même des règles juridiques

Page 48: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

48

En dépit de l’option arrêtée par le Constituant favorable à la

promotion de la norme internationale et à son incorporation dans le droit

interne, la primauté du droit international n’est pas clairement résolue

par les dispositions y afférentes, et partant, l’accomplissement des droits

et libertés, qui doit transiter par cette primauté, ne peut être que

problématique65.

Le texte constitutionnel semble, en effet, imprégné du désarroi

poussant à se demander sur la place du droit international ballotée entre

réception et insertion (1) souffrant, ergo , une grande réticence et

indécision servant la reconduction des valeurs traditionnelles.

Pour autant, l'inscription constitutionnelle de la primauté du droit

international serait-elle une superstition juridique ? (2).

1. La suprématie du droit international : réception ou insertion ?

1

internationales d’où l’émergence d’une grande méfiance quant aux éventuelles incidences

délétères sur l’ordre juridique interne. Ainsi préfèrent-ils demeurer la source unique de leur

législation et la seule autorité qui commande l’organisation de leurs États. Cet esprit est bien

illustré par l’idéologie développementaliste .En fait foi l’adoption de la Charte des droits et

des devoirs économiques des États en 1974 ou même la Charte relative au Nouvel ordre

économique international s’érigeant en valeur absolue dans les 1970 et 1980.

Par ailleurs, dans un monde en parfaite obédience aux injonctions du développement

économique et gagné davantage par une mondialisation globalisante, les pays en développement dont fait partie bien entendu le Maroc, se trouve intégré dans des circuits

financiers et commerciaux internationaux impliquant l’érection en injonction absolue la norme internationale en particulier en économie. 65 Abdelaziz Lamghari Moubarrad, « Les emprunts constitutionnels dans la Constitution

marocaine de 2011

Contenu et implications d’une révision constitutionnelle », sur Faculté de droit de

l'université d'Oslo, 2014.p

2. Disponible sur : https://www.jus.uio.no/english/research/news-and-

events/events/conferences/2014/wccl-

cmdc/wccl/papers/ws5/w5-lamghari.pdf

Page 49: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

49

C'est fondamentalement avec l’harmonisation66, avec la

convergence spontanée des droits ou « convergence régulatrice»67 et

avec le « transgouvernementalisme »68 que le « droit commun 69» se

construit. A cet enseigne, l'on milite en faveur des « textes

d’harmonisation donnant un certain nombre d’objectifs à atteindre avec

une obligation de résultat raisonnable laissant à chacun le choix des

moyens »70.

L’harmonisation demeure surtout le fruit de phénomènes

d’imitation - par exemple avec le « dialogue des juges »71 , lesquels sont

qualifiés de « moteur de l’unification culturelle et donc juridique »72 et

induisent la « perméabilisation des systèmes juridiques »73et le

développement des systèmes de droit mixtes74. Boutros-Boutros Ghali

soutient en la matière que les droits de l’Homme abolissent la distinction

traditionnelle entre l’ordre interne et l’ordre international. Ils sont

créateurs, ajouta-t-il d’une perméabilité juridique nouvelle»75.

66 Mireille Delamas Marty, Pour un droit commun, Le Seuil, coll. Librairie du XXIe siècle,

1994.320p 67 Karim Benyekhlef, Une possible histoire de la norme – Les normativités émergentes de la

mondialisation,Thémis (Montréal), 2008, p. 735. 68 Ibid 69 Mireille Delmas-Marty, Trois défis pour un droit mondial, Le Seuil, coll. Essais, 1998, p

136.200p 70 Stéphane Astier , « Une régulation éthique de l’internet : les défis d’une gouvernance

mondiale », RISA 2005, p. 153.

71 Guy Canivet « Les influences croisées entre juridictions nationales et internationales – Éloge

de la bénévolence des juges », Rev. sc.crim. 2005, p. 799 s. 72 Jean François Riffard, « La mutation de la norme : l’avènement d’un droit nivelé ? Ou retour

sur quelques aspects de l’unification et la globalisation des droits », in Nathalie Martial-Braz , Jean-François Riflard, Martine Behar-Touchais, dir. Collection Etudes Juridiques drigée

par Nicolas Molfessis ,2011.p. 105. 73 Jean -Bernard Auby, La globalisation, le droit et l’État, 2e éd., LGDJ, coll. Systèmes, 2010,

p. 116.275p.

74 Boris Barraud. Le renouvellement des sources du droit - Un exemple prospectif : le droit de

la communication par internet. Droit. Universite d'Aix Marseille, Thèse dirigée par Hervé

Isar, présentée et soutenue publiquement le 1er juillet 2016, 413 p, p 201.

75 Ghali Boutros Boutros, Discours à la Conférence mondiale sur les droits de l’Homme tenue

à Vienne (Autriche) en juin 1993. Sur:

http://www.ohchr.org/FR/NewsEvents/OHCHR20/Pages/WCHR.aspx

Page 50: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

50

La nouvelle Charte s’est employée, si on en croit aux termes des

dispositions constitutionnelles, à promouvoir concomitamment, le droit

international public et privé. Cette volonté serait perceptible à travers la

nouvelle approche traduite dans l'élargissement du domaine du droit

international à d’autres branches de ce droit international (1.1) 76.

Pour s’aligner sur les canons de la démocratie, l’harmonisation de

la législation nationale avec le droit international des droits de l’Homme

demeure une condition sine qua non (1.2).

1.1. Élargissement du domaine du droit international

Cet élargissement du domaine du droit international est bien

perceptible dans les « irruptions » du droit international dans l’ordre

juridique interne (1.1.1.) notamment à travers l’incorporation de

l’arsenal juridique afférent au maintien de la paix et de la sécurité

internationales. Par ailleurs, les modalités extensives du droit

international atteindront d’abord, l’enchâssement des normes

internationales dans la législation interne et le contrôle de la

constitutionnalité du traité international.

A cet effet, il convient d’étudier la place de la Convention

internationale en matière humanitaire dans la nouvelle Constitution

(1.1.2.).

76Said Ihraî, « Le droit international et la nouvelle Constitution », In « la constitution

marocaine de 2011, Analyses et Commentaires », sous la direction du Centre d’Études

Internationales ,2012 L.G.D.J, p 173

Page 51: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

51

1.1.1. Les « irruptions » du droit international dans l’ordre

juridique interne

L’incorporation du droit international humanitaire a suivi un

schéma double .En effet, le préambule stipule l’engagement du Maroc à

attribuer aux conventions internationales dûment ratifiées par lui, dans

le cadre des dispositions de la Constitution et des lois du Royaume, dans

le respect de son identité nationale immuable, et dès la publication de

ces conventions, la prépondérance sur le droit interne du pays, et

concilier en conséquence les dispositions pertinentes de sa législation

nationale.

A ce juste titre, les Conventions de Genève de 1949 et le Protocole

I de 1977 dédié à la protection des victimes des conflits armés

internationaux ont une préexcellence sur la législation interne.

Dans le même ordre des idées, l’article 23 dispose que le génocide,

les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et toutes les violations

graves et systématiques des droits de l’Homme sont punis par la loi. Une

loi devrait insérer cette récusation dans le droit interne. Ces crimes

menacent la paix, la sécurité et le bien-être du monde et ne pourraient

par conséquent, rester dans l’impunité.

Cette consécration constitutionnelle s’harmonise avec les

stipulations du Statut de la Cour pénale internationale adopté à Rome le

17 juillet 1998. Du coup, leur répression doit être inévitablement

garantie par des mesures prises dans le cadre national et par la

consolidation de la coopération internationale.

Dans la même veine, cadrant avec la mouvance du droit

international en matière des conflits armés, la structure désormais

chargée de faire la guerre est le ministère de défense et non de guerre.

Page 52: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

52

Or, étant donné que la déclaration de guerre est bien obsolète en

vertu de l’article 2, paragraphe 4 de la Charte des Nations-Unies et vu

que le non recours à la force était inscrit en tant que principe de jus

cogens, la référence de la Constitution dans l’article 49 et 9977 à la

déclaration de guerre semble « hérétique ». En effet, le régime prohibitif

de la guerre est marqué par l’interdiction depuis 1928, laquelle

interdiction serait grevée par l’article 2 paragraphes 3et 4 de la Charte

des Nations –Unies.78

Par ailleurs, l’on peut déceler que l’inscription de l’article 55 du

contrôle de la constitutionnalité de l’engagement international marque

inévitablement une autre incursion du droit international dans l’ordre

juridique interne.

Dans cette perspective s’inscrivent les dispositions de l’article 30

énonçant entre autres que la diaspora étrangère résidant au Maroc peut

participer aux élections locales en vertu de la loi, de l’application de

conventions internationales ou de pratiques de réciprocité et que les

conditions d’extradition et d’octroi du droit d’asile sont définies par la

loi.

Ce contrôle de la conformité des dispositions internationales aux

prescriptions constitutionnelles touche des questions sensibles telles la

paix et l’union. L’objectif d’une telle disposition est de ne pas porter

77Cet article dispose : « La déclaration de guerre, décidée en Conseil des ministres,

conformément à l’article 49 de la présente Constitution, a lieu après communication faite par le Roi au Parlement. Des rapports entre les Pouvoirs législatif et exécutif. »

78On relève dans ce sens l’article 2 disposant en son troisième paragraphe : « Les Membres

de l'Organisation règlent leurs différends internationaux par des moyens pacifiques, de telle

manière que la paix et la sécurité internationales ainsi que la justice ne soient pas mises en

danger ». De même le quatrième paragraphe énonce : « Les Membres de l'Organisation

s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la

force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de toute

autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies ».

Page 53: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

53

atteinte à l’indivisibilité du territoire marocain et ne pas nuire aux valeurs

constates et fondamentales du royaume.

Ces valeurs sont déjà citées dans l’article 175 énonçant qu’aucune

révision ne peut porter sur les dispositions relatives à la religion

musulmane, sur la forme monarchique de l’État, sur le choix

démocratique de la nation ou sur les acquis en matière de libertés et de

droit s fondamentaux inscrits dans la présente Constitution.

De même, sont soumis à ce contrôle les traités de commerce ou

ceux engageant les finances de l’État ou dont l’application nécessite des

mesures législatives, ainsi que les traités relatifs aux droits et libertés

individuelles ou collectives des citoyennes et des citoyens.

Cette implémentation de la législation internationale à l’ordre

juridique interne convie le parlement à transposer le droit international

dans le droit interne. Une loi devrait initialement approuver un certain

nombre d’accords internationaux. En effet, en vertu de l’article 55, les

étrangers bénéficie des libertés fondamentales reconnues aux citoyennes

et citoyens marocains, suivant la loi. Ceux d’entre eux qui résident au

Maroc peuvent contribuer aux élections locales en vertu de la loi, de

l’application de conventions internationales ou de pratiques de

réciprocité. Les conditions d’extradition et d’octroi du droit d’asile sont

définies par la loi.

En outre, l’institution législative devrait édicter une loi

incorporant le droit international du droit interne au chapitre de la

nationalisation d’entreprises et en matière du régime des privatisation

comme l’a bien disposé l’article 71.

L’arsenal juridique interne devrait palpiter au rythme du droit

international comme en témoigne le cas des dispositions contenues dans

l’article 55 énonçant :

Page 54: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

54

« Le Roi peut soumettre au Parlement tout autre traité avant sa

ratification. Si la Cour Constitutionnelle, saisie par le Roi ou le Président de la

Chambre des Représentants ou le Président de la Chambre des Conseillers ou le

sixième des membres de la première Chambre ou le quart des membres de la

deuxième Chambre , déclare qu’un engagement international comporte une

disposition contraire à la Constitution, sa ratification ne peut intervenir qu’après la

révision de la Constitution ».

Or, les formes que revêtira cet acte royal ainsi que les

conséquences juridiques ne sont en rien précisées. En somme, en dépit

d’une inscription du droit international sur la Loi fondamentale, malgré

son élargissement aux autres sources du droit, le Constituant semble

attaché à la conception moniste avec prépondérance et non primauté du

droit interne.

1.1.2. La place des Conventions des droits de l’Homme

Le Constituant a enregistré par la nouvelle Loi fondamentale du

29 juillet 2011 une avancée considérable traduite notamment dans

l’incorporation du principe de l’universalité des droits humains (1.1.2.1)

qui souffre pourtant des limites (1.1.2.2.).

1.1.2.1. Le principe de l’universalité des droits humains :

quelle incorporation ?

Le choix démocratique irréversible proclamé dans le préambule

s’est traduit certes dans la reconnaissance solennelle du principe de

l’universalité qui rappelle les propos réitérés depuis bien longtemps sur

cette volonté marocaine d’incorporer à sa législation interne les valeurs

Page 55: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

55

des droit s de l’Homme et d’honorer intégralement ses engagements

internationaux en la matière.79

L’exploration des points et des orientations d’harmonisation de la

législation nationale avec les instruments internationaux des droit s

humains ratifiés par le Maroc permet de mieux scruter la solution

véhiculée par le constituant en matière d’harmonisation et des défis

interprétatifs émergés par la constitutionnalisation de la portée relative

des conventions internationales sur l’ordre juridique interne.

En effet, la nouvelle Loi fondamentale concourt indubitablement

à l'édification d'un authentique État de droit. Elle aménage un nouvel

ordre résolument porté vers l'idéal démocratique. Cette résolution est

perceptible dans la consonance démocratique du préambule qui dispose :

« Mesurant l’impératif de renforcer le rôle qui lui revient sur la scène

mondiale, le Royaume du Maroc, membre actif au sein des organisations

internationales, s’engage à souscrire aux principes, droit s et obligations énoncés

dans leurs chartes et conventions respectives , il réaffirme son attachement aux droit

s de l’Homme tels qu’ils sont universellement reconnus, ainsi que sa volonté de

continuer à œuvrer pour préserver la paix et la sécurité dans le monde ».

La satisfaction de cet impératif ne serait que poursuite de vent sans

une effectif amarrage sur la voie protectrice et promotrice des dispositifs

des droit s de l’Homme et du droit international humanitaire optimisant

partant leur développement dans leur indivisibilité et leur universalité.

Cet alignent sur l’idéal démocratique tel que palpable dans le préambule

est corroboré par la consécration constitutionnelle du préambule faisant

79Hamid Rbii, « Droits de l’Homme et souveraineté : réflexion sur le cas du Maroc »,

contribution au colloque international : Droits de l’Homme : souveraineté et ingérence ,

organisé par le Centre de recherche sur la coopération internationale pour le développement

de la faculté de Droit de Marrakech et Walter –Schucking- Institut Fur Internationales Recht

Christan Alberchts –Universiat Zu Kiel ,13 et 14 mars 2002 à Benslimane , publiée dans

REMALD ,série Thèmes actuels , n°37-2002,pp.29-54

Page 56: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

56

dorénavant non seulement figure d’une autorité morale non

contraignante mais partie intégrante de la présente Constitution.80

Cette précision ne pourrait qu’ancrer davantage la primauté de la

norme internationale et sa suprématie sur l’ordre juridique interne

signalant par voie de déduction que les instruments internationaux sont

invocables et opposables dans l’ordre interne.

Cet esprit incorporateur des normes internationales dans la Charte

fondamentale est bien traduit dans la substance même du document

constitutionnel qui défend le principe de l’universalité à travers la

condamnation dans l’article 23 des crimes définis par le droit

international.

L’édification de l’État de droit induit une promotion des droits

politiques, avec à leur tête, l’organisation des élections libres et

transparentes81, dont le déroulement dans les conditions optimales

implique l’intervention des pouvoirs publics et du législateur 82 qui en

définit non seulement le cadre législatif seyant mais en définit également

les conditions et les modalités de l’observation indépendante et neutre

80Les Constitutions qui se sont succédé au Maroc se sont engoncées à priver le préambule de

toute force contraignante. A tout le plus, il s’érigeait en une autorité morale non

contraignante. Les incidences en sont légion. En effet, l’inscription de la primauté de la

norme internationale sur l’ordre juridique interne se trouverait du coup émiettée et sur cette

base les juridictions accorderaient aux dispositions du préambule une valeur juridique vaine

écartant par conséquent l’application des conventions internationales au niveau interne. Du

reste, cette ineffectivité de dispositions du préambule donne à montrer le visage narquoi à la

suprématie de la règle internationale qui ne serait plus directement invocable et opposable

dans l’ordre interne. 81Il est précisé dans l’article 11 en son premier alinéa que les élections libres, sincères et

transparentes constituent le fondement de la légitimité de la représentation démocratique. Les pouvoirs publics sont tenus d’observer la stricte neutralité vis-à-vis des candidats et la

non-discrimination entre eux. 82Le second tiret de l’article 11 stipule que la loi définit les règles garantissant l’accès équitable

aux médias publics et le plein exercice des libertés et droits fondamentaux liés aux

campagnes électorales et aux opérations de vote et que les autorités en charge de

l’organisation des élections veillent à l’application de ces règles. Il ajoute que la loi définit

les conditions et les modalités de l’observation indépendante et neutre des élections en

conformité avec les normes internationalement reconnues.

Page 57: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

57

en conformité avec les normes internationalement reconnues.83 A cet

effet, les acteurs politiques et la société civile ont été conviés à réfléchir

sur les dispositifs soutenant le déroulement des opérations électorales de

manière neutre et transparente.

C’est dans ce sens que s’inscrit la loi 30 .11 prédisposant aux

élections du 25 novembre 2011. En effet, son article 1 formule le cadre

général de l’observation indépendante et neutre des élections.84

Consolidant cette veine promotrice des droits et libertés, la

nouvelle Charte fondamentale garantit aux étrangers l’effectivité dans

l’exercice de leurs droit s -participation et de leurs droits civils et

politiques d’autant plus que l’article 30 énonce clairement que les

étrangers jouissent des libertés fondamentales reconnues aux citoyennes

et citoyens marocains, conformément à la loi.

Il ajoute que ceux d’entre eux qui résident au Maroc peuvent

participer aux élections locales en vertu de la loi, de l’application de

conventions internationales ou de pratiques de réciprocité.

Puisant dans les préceptes internationaux, le Constituant aménage

dans l’article 19 l’égalité entre l’homme et la femme énonçant que

l’homme et la femme jouissent, à égalité, des droit s et libertés à

83Plaidant en faveur de la modification de la loi 30-11 fixant les conditions et les modalités de

l’observation indépendante et neutre des élections, l’Organisation marocaine des droits

humains (OMDH) a conçu un mémorandum.

Suivant Boubker Largo, Président de l’OMDH, les 18 modifications énoncées par l’organisation se conforment sur les normes internationales pour des élections libres,

intègres, transparentes et crédibles. 84Cet article soutient : « Au sens de la présente loi, on entend par l’observation indépendante

et neutre des élections , toute opération ayant pour objet le suivi sur le terrain du déroulement

des opérations électorales , la collecte objective , impartiale et neutre des données y afférents

et l’évaluation des conditions de leur organisation et de leur déroulement ainsi que du respect

des règles constitutionnelles et des textes législatifs et réglementaires régissant les élections

et des normes internationales , et ce à travers des rapports élaborés par les instances

concernées comprenant leurs observations et éventuellement leurs recommandations à

soumettre aux autorités concernée »

Page 58: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

58

caractère civil, politique, économique, social, culturel et

environnemental, énoncés dans le présent titre et dans les autres

dispositions de la Constitution, ainsi que dans les conventions et pactes

internationaux dûment ratifiés par le Royaume et ce, dans le respect des

dispositions de la Constitution, des constantes et des lois du Royaume.

Dans ce sens, l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes

formes de discrimination a été créée pour booster la réalisation de la

parité entre les hommes et les femmes.

Il n’en demeure pas moins vrai que l’élargissement du domaine de

la loi tel que stipulé dans l’article 7185 corrélé aux garanties de

l’effectivité de l’exercice des droit s et libertés après la proclamation de

l’état d’exception contenues dans l’article 5986 conjugué à la création du

85Cet article énonce: « Sont du domaine de la loi, outre les matières qui lui sont expressément

dévolues par d’autres articles de la Constitution : les libertés et droits fondamentaux prévus

dans le préambule et dans d’autres articles de la présente Constitution, le statut de la famille

et l’état civil, les principes et règles du système de santé, le régime des médias audio-visuels

et de la presse sous toutes ses formes, l’amnistie, la nationalité et la condition des étrangers,

la détermination des infractions et des peines qui leur sont applicables, l’organisation

judiciaire et la création de nouvelles catégories de juridictions, la procédure civile et la

procédure pénale, le régime pénitentiaire, le statut général de la fonction publique, les

garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires, le statut des

services et forces de maintien de l’ordre,le régime des collectivités territoriales dont les

principes de délimitation de leur ressort territorial, le régime électoral des collectivités

territoriales, dont les principes du découpage des circonscriptions électorales, le régime

fiscal et l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impôts, le régime juridique

de l’émission de la monnaie et le statut de la banque centrale, le régime des douanes, le

régime des obligations civiles et commerciales, le droit des sociétés et des coopératives, les

droits réels et les régimes des propriétés immobilières publique, privée et collective, le

régime des transports, les relations de travail, la sécurité sociale, les accidents de travail et

les maladies professionnelles, le régime des banques, des sociétés d’assurances et des

mutuelles, le régime des technologies de l’information et de la communication, l’urbanisme et l’aménagement du territoire, les règles relatives à la gestion de l’environnement, à la

protection des ressources naturelles et au développement durable, le régime des eaux et forêts et de la pêche, la détermination des orientations et de l’organisation générale de

l’enseignement, de la recherche scientifique et de la formation professionnelle, la création

des établissements publics et de toute autre personne morale de droit public, la

nationalisation d’entreprises et le régime des privatisations. Outre les matières visées à

l’alinéa précédent, le Parlement est habilité à voter des lois-cadres concernant les objectifs

fondamentaux de l’activité économique, sociale, environnementale et culturelle de l’État. » 86En effet, cet article stipule expressément : « Lorsque l’intégrité du territoire national est

menacée ou que se produisent des événements qui entravent le fonctionnement régulier des

Page 59: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

59

Conseil national des droit s de l’Homme consacrent cette portée

universaliste des droits de l’Homme contenue dan la nouvelle Loi

fondamentale.

1.1.2.2. Limites du principe de l’universalité

Mieux vaut ne pas verser candidement dans un pur idéalisme et

croire ingénument au caractère pléthorique qu’une législation suprême

aménage théoriquement et textuellement dans le cadre de la souscription

à l’arsenal conventionnel et la consécration du principe de l’universalité

.Tant s’en faut, l’inscription sur ce canon n’est ni pleine ni entière et le

Constituant a voulu consciemment en limiter légèrement les

conséquences.87

A ce juste propos, l’article premier ancre l’inviolabilité et

l’opposabilité des constantes marocaines fédératrices, en l’occurrence la

religion musulmane modérée, l’unité nationale aux affluents multiples,

la monarchie constitutionnelle et le choix démocratique.

institutions constitutionnelles, le Roi peut, après avoir consulté le Chef du Gouvernement,

le président de la Chambre des Représentant, le président de la Chambre des Conseillers,

ainsi que le Président de la Cour Constitutionnelle, et adressé un message à la nation,

proclamer par dahir l’état d’exception. De ce fait, le Roi est habilité à prendre les mesures

qu’imposent la défense de l’intégrité territoriale et le retour, dans un moindre délai, au fonctionnement normal des institutions constitutionnelles. Le Parlement ne peut être dissous

pendant l’exercice des pouvoirs exceptionnels. Les libertés et droits fondamentaux prévus par la présente Constitution demeurent garantis. Il est mis fin à l’état d’exception dans les

mêmes formes que sa proclamation, dès que les conditions qui l’ont justifié n’existent plus. » 87Hamid Rbii, « La place de la convention internationale dans la nouvelle Constitution : cas

des conventions des droits de l’Homme », in Constitution marocaine 2011 : Nouveautés et

perspectives, Actes du colloque organisé par la Faculté des Sciences Juridiques ,

Économiques et Sociales de l’Université Mohammed 1er -Oujda en partenariat avec le

Centre des Études et d Recherches Humaines et Sociales –Oujda , le 20 et 21 avril 2012 ,1ère

Edition 2012-1433 , p 63

Page 60: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

60

Cette réalité est manifeste dans les dispositions du préambule qui

enveloppent d’un caractère prééminent les principes de la religion

musulmane.

Force est de constater que le Constituant a hissé la religion

islamique au rang d'un bastion inexpugnable contre l’effectivité de la

primauté du droit international sur la législation interne d’autant plus que

la suprématie des conventions internationales dûment ratifiées par lui

n’est applicable que dans le cadre des dispositions de la Constitution et

des lois du Royaume, dans le respect de son identité nationale immuable.

Conformément à cet esprit restrictif , l’égalité entre l’homme et la

femme en matière des droits et libertés à caractère civil, politique,

économique, social, culturel et environnemental, énoncés dans les

conventions et pactes internationaux dûment ratifiés par le Royaume ne

serait existante que dans le respect des dispositions de la Constitution,

des constantes et des lois du Royaume.

Certes, on peut consentir à une certaine similitude entre les

percepts véhiculés par les standards internationaux en matière des droits

humains avec maintes dispositions dispensées par la religion islamique

dans la mesure où les deux références ambitionnent l’aménagement d’un

cadre seyant et commode pour le bien être humain sous toutes ses

facettes.

Or, il importe de souligner qu’ils s’entrechoquent notamment au

chapitre de la liberté sexuelle. De surcroît, le changement de la religion

jugé d’apostat par l’islam demeure un brûlant foyer de tensions. Qui plus

est, le mariage interreligieux fomente des poche de conflit et de

controverse. Dans le même ordre des idées, se profile la question

lancinance de l’égalité en matière de succession.

Page 61: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

61

Le Maroc aspire à se cheviller sur les canons du libéralisme

démocratique en répondant en écho aux interjections émises en la

matière. Dans cette perspective, l’inscription marocaine sur les standards

internationaux en matière des droits humains s’est certes concrétisée par

la levée de l’ensemble des réserves émises à la Convention sur

l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des

femmes (CEDAW) ratifiée par le Maroc en 1993.88

En outre, le gouvernement a ratifié le Protocole facultatif à cette

convention, accordant aux femmes victimes de transgressions de leurs

droits de porter plainte devant une instance internationale89. Une seule

réserve est toujours maintenue à la CEDAW, dépourvue de toute portée

substantielle attendu qu’il s’agit du refus de la compétence obligatoire

88Ces réserves portaient sur la transmission de la nationalité (article 9) ainsi que sur le mariage,

le divorce et la garde des enfants (article 16). Par conséquent, la levée de ces réserves impose

au Maroc d’ajuster sa législation nationale sur les canons de l’arsenal conventionnel contenu

Dans la CEDAW. Une telle harmonisation favorisera la transmission par les femmes de leur

nationalité à leur conjoint et à leurs enfants au même titre que les hommes. Dans le même

ordre des idées, les femmes jouiront des mêmes droits que les hommes dans le mariage et

lors du divorce. Le gouvernement doit abolir toutes les lois discriminatoires parallèlement à

la levée des déclarations interprétatives aux articles 2 et 15 de la CEDAW. En effet, le Maroc

a fait deux déclarations lors de son accession au CEDAW ambitionnant au-delà de la réserve

tendant à immuniser le droit de primogéniture mâle au trône royal, la perpétuation du Code

du statut personnel de 1958 alors en vigueur, abrogé par le Code de la famille de 2004. Les

déclarations: « 1. En ce qui concerne l’article 2 : Le Gouvernement du Royaume du Maroc

se déclare disposé à appliquer les dispositions de cet article à condition :– qu’elles n’aient

pas d’effet sur les dispositions constitutionnelles régissant les règles de succession au trône

du Royaume du Maroc; – qu’elles n’aillent pas à l’encontre des dispositions de la Charia

Islamique, étant donné que certaines dispositions contenues dans le Code marocain du statut

personnel qui donnent à la femme des droits qui diffèrent de ceux octroyés à l’époux, ne

pourraient être transgressées ou abrogées du fait qu’elles sont fondamentalement issues de la Charia Islamique qui vise, entre autres, à réaliser l’équilibre entre les conjoints afin de

préserver la consolidation des liens familiaux. » 2. En ce qui concerne le paragraphe 4 de l’article 15 : Le Gouvernement du Royaume du Maroc déclare qu’il ne pourrait être lié par

les dispositions de ce paragraphe, notamment celles qui concernent le droit de la femme de

choisir sa résidence et son domicile, que dans la mesure où ces dispositions ne seraient pas

contraires aux articles 34 et 36 du Code marocain du statut personnel. 89En ce sens, Sophie Bessis, Secrétaire générale adjointe de la FIDH, a déclaré : « Par cette

décision le gouvernement marocain a fait un pas très important pour les droits de femmes.

C’est grâce à une mobilisation des acteurs de la société civile et en particulier des

organisations de défense des droits des femmes, que cette victoire a pu être remportée »

Page 62: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

62

de la Cour internationale de justice. Cette réserve ne concerne qu’un cas

de figure très théorique relatif aux conflits éventuels entre le Maroc et

un autre État partie à la CEDAW.90

En vertu de la nouvelle Charte, et conformément aux dispositions

de l’article 42 , il incombe au souverain en tant que Chef de l’État, son

Représentant suprême, Symbole de l’unité de la Nation, Garant de la

pérennité et de la continuité de l’État et Arbitre suprême entre ses

institutions, de veiller au respect de la Constitution, au bon

fonctionnement des institutions constitutionnelles, à la protection du

choix démocratique et des droit s et libertés des citoyennes et des

citoyens, et des collectivités, et au respect des engagements

internationaux du Royaume. Il est le Garant de l’indépendance du

Royaume et de son intégrité territoriale dans ses frontières authentiques.

Cadrant en parfaite harmonie avec de telles stipulations, adhérer à

une convention internationale serait tributaire de l’observance de la

compatibilité de ses dispositions avec les prescriptions de la religion à

défaut de laquelle, les réserves seraient l’unique issue.

Le parlement, quant à lui, a un droit de regard sur la ratification

des instruments internationaux .En effet, en fonction de l’article 55 , les

traités de paix ou d’union, ou ceux relatifs à la délimitation des

frontières, les traités de commerce ou ceux engageant les finances de

l’État ou dont l’application nécessite des mesures législatives, ainsi que

les traités relatifs aux droits et libertés individuelles ou collectives des

90Cette troisième réserve est toujours en vigueur .Elle concerne l’article 29 :« Le

Gouvernement du Royaume du Maroc ne se considère pas lié par le paragraphe 1 de cet

article qui dispose que tout différend entre deux ou plusieurs États concernant

l’interprétation ou l’application de la Convention qui n’est pas réglé par voie de négociation,

peut être soumis à l’arbitrage à la demande de l’un d’entre eux.

Le Gouvernement du Royaume du Maroc estime, en effet, que tout différend de cette nature

ne peut être soumis à l’arbitrage qu’avec le consentement de toutes les parties au différend. »

Page 63: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

63

citoyennes et des citoyens, ne peuvent être ratifiés qu’après avoir été

préalablement approuvés par la loi.

Par ailleurs, le Roi peut soumettre au Parlement tout autre traité

avant sa ratification. Du coup, le pouvoir de censure des députés

parlementaires est effectif quant à toute adhésion antagonique aux

valeurs immuables de la nation.

Dans la même veine, si la Cour Constitutionnelle, saisie par le Roi

ou le Président de la Chambre des Représentants ou le Président de la

Chambre des Conseillers ou le sixième des membres de la première

Chambre ou le quart des membres de la deuxième Chambre , déclare

qu’un engagement international comporte une disposition contraire à la

Constitution, sa ratification ne peut intervenir qu’après la révision de la

Constitution. Pour autant, l’intervention de la Cour constitutionnelle

pour déterminer la concordance d’un arsenal conventionnel avec la

Charte suprême est décisive.

Il gagnerait davantage de noter que l’apport du juge est majeur

dans la protection des droits et libertés inscrites par les diverses normes

juridiques en l’occurrence l’arsenal conventionnel. En effet, il lui

incombe de grever le caractère invocable et opposable des dispositions

conventionnelles par le justiciable marocain, notamment pour demander

que soient écartées les dispositions de la législation nationale qui n’y

sont pas conformes. Pour autant, la nouvelle Constitution a inséré une

garantie de taille pour les droits des particuliers traduite dans la

possibilité de soulever devant les juridictions l’inconstitutionnalité des

lois.

En ce sens, l’article 133 dispose que la Cour Constitutionnelle est

compétente pour connaître d’une exception d’inconstitutionnalité

soulevée au cours d’un procès, lorsqu’il est soutenu par l’une des parties

Page 64: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

64

que la loi dont dépend l’issue du litige, porte atteinte aux droit s et

libertés garantis par la Constitution. Il ajoute qu’une loi organique fixe

les conditions et modalités d’application du présent article.

Or, devant un cadre juridique axé sur la reconduction des lignes

rouges incarnées par les principes immuables fort restrictifs, l’effectivité

de l’exercice de ce droit en souffrira devant les tribunaux prétextant que

les dispositions conventionnelles sont antinomiques aux principes

fondamentaux de la nation. En conséquence, le principe de l’universalité

serait effrité sous l’effet du grand équarrissage interprétatif -

déconstructif des juridictions nationales où il serait entraîné.

1.2. L’harmonisation de la législation nationale avec le droit

international des droits de l’Homme

La revendication de la consécration constitutionnelle de la

primauté du droit international sur la législation marocaine émanant du

tissu associatif à la Commission consultative chargée de la révision de la

Constitution a été fortement commanditée par le domaine d’activité

corrélé au référentiel idéologique des acteurs auteurs des

mémorandums.91

Si on se voue à une étude analytique des mémorandums adressés

à la Commission Consultative chargée de la Révision de la Constitution

, on se rend compte de la pluralité des perceptions de la consécration

constitutionnelle de la portée de la primauté du droit international sur la

91« L’harmonisation de la législation marocaine avec le droit international des droits de

l’Homme », Novembre 2013 Imprimerie : Dar Al Qalam à Rabat, Étude initiée par

l’Association Adala en partenariat avec la Fondation Friedrich Ebert Stiftung , avec le

soutien du Ministère des Affaires Étrangères d’Allemagne ,P 7.

Disponible sur :

https://www.fes.org.ma/common/pdf/publications_pdf/publicationAA2013/9.pdf

Page 65: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

65

législation interne qui oscille entre une portée absolue, relative, limitée

ou conditionnée.

A cet juste propos , dans une perspective conditionnée et limitée

s’aligne la position de la l’Association Espace de Développement

Durable92 qui paraît réfractaire à une portée illimitée ou absolue du droit

international émettant ainsi des réserves d’ordre religieux attendu

qu’elle plaide en faveur de la consécration constitutionnelle de la

primauté du droit international des droits de l’Homme, « sous réserve de

compatibilité de ses instruments avec la loi islamique ».

Adoptant une attitude analogue intrinsèquement liée à des

considérants identitaires, Le Reseau Maillages93 a émis, dans sa

plaidoirie en faveur de la constitutionnalisation du principe de primauté,

la réserve de « compatibilité » du droit international des droits de

l’Homme avec « l’identité marocaine et musulmane ».

Relève d’un cas similaire, La des Associations Régionales94 qui a prêché

la sauvegarde des bastions inexpugnables traduites dans les constantes

qui ne devraient être atteintes.

L’élément novateur et inédit dans les mémorandums des

associations serait la proposition de L’Union Nationales des Femmes

Marocaines95 qui a pris à bras le corps la réalité en insufflant une

dynamique d’harmonisation inversée voire intervertie en préconisant «

l’harmonisation des conventions et des traités internationaux avec « le

référentiel religieux et les conditions socioéconomiques du Royaume

92L’ASSOCIATION ESPACE DE DEVELOPPEMENT DURABLE : mémorandum adressé

à la Commission Consultative chargée de la révision de la Constitution (p3) 93RESEAU MAILLAGES : mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de

la révision de la Constitution (p5) 94LA Ligue des Association Régionales : mémorandum adressé à la Commission Consultative

chargée de la révision de la Constitution (p4) 95L’Union Nationale des Femmes Marocaines : mémorandum adressé à la Commission

Consultative chargée de la révision de la Constitution (p5)

Page 66: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

66

».Cette position puisant son essence dans une origine religieuse trouve

sa juste expression la plus poussée dans les préconisation de

l’Association des Professeurs de l’Éducation Islamique96 favorable à une

consécration constitutionnelle de « la loi islamique comme source

suprême de la législation ». Or, l’association convie à juger « comme nul

et non avenu » « tout ce qui est incompatible » avec la loi islamique.

En contrepartie, nombreuses associations se sont alignées sur la

voie de la constitutionnalisation de la portée absolue de la primauté du

droit international sur la législation interne. En ce sens s’affichent

nombre d’associations prisant la constitutionnalisation de la primauté du

droit international des droits de l’Homme sur l’ordre juridique interne. Il

en est ainsi du Réseau Marocain Euromed des ONG97 , du Réseau

Marocain Transnational Migration et Développement98. De la Fédération

de la Ligue Démocratique des Droits de l’Homme99, du Collectif

Démocratie et Modernité100 , le Réseau Amazigh pour la Citoyenneté-

Azett101, l’Institut Marocain des Relation Internationales102 ,

l’Association Marocaine pour les Droits des Femmes103, l’Association

96L’Association des Professeurs de l’Éducation Islamique : mémorandum adressé à la

Commission Consultative chargée de la révision de la Constitution (p6) 97Réseau marocain Euro-Med des ONG : mémorandum adressé à la Commission Consultative

chargée de la révision de la Constitution (p6). 98Réseau marocain transnational migration et développement : mémorandum adressé à la

Commission Consultative chargée de la révision de la Constitution (p5) 99Fédération de la ligue démocratique des droits de l’homme : mémorandum adressé à la

Commission Consultative chargée de la révision de la Constitution (p4) 100 Collectif démocratie et modernité : mémorandum adressé à la Commission Consultative

chargée de la révision de la Constitution (p5). 101Le Réseau amazigh pour la citoyenneté-AZETTA : mémorandum adressé à la Commission

Consultative chargée de la révision de la Constitution (p7) 102L’Institut Marocain des Relation Internationales : mémorandum adressé à la Commission

Consultative chargée de la révision de la Constitution (p5) 103L’Association Marocaines pour les Droits des Femmes : mémorandum adressé à la

Commission Consultative chargée de la révision de la Constitution (p4)

Page 67: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

67

Touche pas a mon Enfant104 , Transparency Maroc105, La Fondation

Karama106.

D’autres acteurs associatifs ont sollicité l’inscription

constitutionnelle dans le préambule-qui fait désormais partie intégrante

de la Constitution- de cette primauté du droit international des droits de

l’Homme et du droit international humanitaire sur la loi interne comme

en témoignent les cas du réseau Deventwork107 ainsi que le Mouvement

Nouvel Elan de Düsseldorf.108

Par ailleurs, dans l’ultime visée de raffermir la portée absolue de

la prééminence du droit international des droits de l’Homme sur la

législation interne, des mémorandums ont identifié des mécanismes et

des modalités normatives et interprétatives. En font foi les cas de

L’Instance des Marocains Expatries pour la Reforme de la

Constitution109et le Forum des Alternatives Maroc110 qui ont opté pour

l’ancrage de l’opposabilité et l’invocabilité du principe de la suprématie

des instruments conventionnels ratifiés et publiés par le Maroc devant

les juridictions nationales. A cet effet, le Forum des Alternatives Maroc,

l’Union d’Action Féminine111et le Printemps Féminine de la Démocratie

104 L’Association Touche pas a mon Enfant : mémorandum adressé à la Commission

Consultative chargée de la révision de la Constitution (p8) 105 Transparency Maroc : mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution (p3) 106 Fondation Karama : mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution (p5) 107Réseau Devenetwork : mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution (p2) 108 Mouvement Nouvel Elan : mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée

de la révision de la Constitution (p 5)

109 L’Instance des Marocain Expatrie pour la Reforme de la Constitution : mémorandum

adressé à la Commission Consultative chargée de la révision de la Constitution (p17). 110 Forum des Alternatives Maroc : mémorandum adressé à la Commission Consultative

chargée de la révision de la Constitution (p3). 111 L’Union d’Action Féminine : mémorandum adressé à la c Commission Consultative

chargée de la révision de la Constitution p5)

Page 68: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

68

et de l’Égalité 112 ont réclamé l’élévation du traité international en source

de législation.

Ces deux dernières associations ont sollicité, en outre,

l’inscription d’un engagement constitutionnel pour la levée des réserves

incompatibles avec les principes de l’égalité. Ne dérogent pas à cette

optique les mémorandums de L’Institut Amadeus113 plaidant en faveur

de la mise en place d’une stratégie de « renforcement axiologique » du

principe de la primauté par une consécration constitutionnelle de

l’indivisibilité des droits de l’Homme.

Embrassant la même démarche, les plaidoyers du Médiateur pour la

Démocratie et les Droits de l’Homme114 souscrivent à l’idéal d’une

constitutionnalisation des « clauses interprétatives » en vue de booster

l’effectivité de cette primauté dans l’action législative et

jurisprudentielle. Cette association agit en faveur de l’élaboration d’un

fondement constitutionnel à une dynamique prévisionnelle de

l’harmonisation de la législation nationale avec le droit international des

droits de l’Homme, attendu que la clause interprétative qu’elle a

suggérée ne concerne pas exclusivement les instruments ratifiés mais

identiquement ceux en cours de ratification, consentant partant à une «

harmonisation par anticipation ». Il n’en demeure pas moins vrai que la

proposition issue du Mouvement pour la Parité115 et l’Association

Démocratique des Femmes du Maroc116 demeure originale vu qu’elle

112 Printemps Féminine de la Démocratie et de la l’Égalité : mémorandum adressé à la

Commission Consultative chargée de la révision de la Constitution (p4) 113 Institut AMADEUS : mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution (p14) 114Médiateur pour la Démocratie et les Droits de l’Homme : mémorandum adressé à la

Commission Consultative chargée de la révision de la Constitution (p9) 115 MOUVEMENT POUR LA PARITE : mémorandum adressé à la Commission Consultative

chargée de la révision de la Constitution (p7) 116 ASSOCIATION DEMOCRATIQUE DES FEMMES DU MAROC : mémorandum adressé

à la Commission Consultative chargée de la révision de la Constitution (p5)

Page 69: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

69

souscrit à une optique plus étendue de sécularisation de la législation

proposant l’insertion d’une disposition constitutionnelle prévoyant pour

seule source de la loi le droit positif. Elle plaide en faveur de

l’instauration d’un mécanisme d’harmonisation, dans le cadre d’une

sécularisation de la législation, de la législation nationale avec les

instruments internationaux des droits de l’Homme.

2. La suprématie du droit international : une superstition

juridique ?

Il est indubitable que le renvoi dans le préambule et à l’article 55

à l’attachement marocain à la souscription au référentiel international

puise son essence dans le contexte mondial traduisant une indéniable

réceptivité à l’influence internationale. Cet évident alignement est un

emprunt au droit constitutionnel mondialisé, notamment à travers la «

dualité institutions/droits fondamentaux qu’il est possible d’appréhender

comme la réalité constitutionnelle du XXIème siècle ».117 En revanche,

cette souscription ne s’est pas accompagnée d’une clarification des

rapports entre le droit international et le droit interne qu’il s’agisse de

la norme constitutionnelle ou législative si bien que tout le système des

droits fondamentaux qui doit les englober semble se diluer et se perdre

dans les contradictions et l’équivoque des dédales du document

constitutionnel.

117 Didier Maus: « Réflexions sur la mondialisation du droit constitutionnel », in New

millenium constitutionnalism : paradigms of reality and challenges. NJHAR, 2013.p 183

Page 70: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

70

Peut –on dire pour autant que cette inscription n’est qu’une simple

épitaphe118 ? (2.1). Nous serons amenés à apprécier concomitamment la

suprématie de la loi interne (2.2), la consécration du filtre obligatoire de

la retranscription législative (2.3). Il sied de percer le rang légal dit

controversé du droit international au Maroc avant (2.4) scruter les

interactions entre l’instrument conventionnel, l’ordre juridique interne et

international (2.5).

2.1. L’inscription constitutionnelle de la primauté du droit

international : une simple épitaphe ?

En dépit de la proclamation solennelle de la promotion

constitutionnelle du droit international et malgré son incorporation dans

ladite Charte fondamentale, l’équivoque ne s’est point dissipé quant à la

place du droit international par rapport à l’ordre juridique interne119.

118 Une épitaphe est un mot composé de « epi » signifiant « sur » et « taphos » désignant «

tombeau ». C’est une inscription funéraire, placée sur une pierre tombale ou un monument

funéraire. Cela peut être un objet donné à une civilisation comme signe de paix. 119 Le large mouvement de réformes constitutionnelles initié depuis le début des années 1990

découle inéluctablement de la mondialisation juridique : Une nette perméabilité entre les

frontières entre ordres juridiques nationaux et ordre international. Les frontières ne sont plus

étanches entre les deux normes. Pour explication, moult arguments sont invoqués. Au prime

abord, la dissolution du bloc communiste et les transitions démocratiques survenues en

Amérique Latine et notamment en Europe de l’Est ont optimisé une nouvelle ère étatique

plus réceptive du droit international. De surcroît, le mouvement d’intégration régionale

corrélé à l’émergence de nouvelles organisations internationales maximisent l’existence de

normes supranationales pesant sur le droit interne. En outre, le recours constant aux

conventions multilatérales génératrices des effets sur les individus exigent des modifications

internes conséquentes comme en témoigne la Convention d’Ottawa sur les mines anti-personnel en 1997 ou le traité établissant la Cour pénale internationale (CPI) en 1998, ou

encore la Convention sur les disparitions forcées en 2006).Deux constats résultent de la lecture des Constitutions révisées .D’emblée, l’on note une sensible disparité des méthodes

constitutionnelles d’intégration du droit international .En outre, l’on assiste à une volonté

étatique favorable à une nette précision. Or, le Maroc opte toujours, nonobstant la révision

constitutionnelle pour une rédaction équivoque. A vrai-dire, la Commission consultative de

révision de la Constitution lui incombait une tâche épineuse. Résoudre la difficile équation

de la conciliation entre , une éventuelle consécration de la primauté du droit international

qui serait synonyme l’amarrage du pays sur les positions de l’Union européenne et engagée

dans un processus d’intégration régionale narguant ainsi la singularité marocaine et ses

Page 71: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

71

Corrélativement au discours royal du 9 mars 2011 et aux

désidératas populaires portés par le printemps arabe, la transposition du

droit interne devrait être une lapalissade.

Rien de tel, ni la Charte fondamentale ni son préambule ne

concluent infailliblement à la suprématie de l’ordre juridique

international sur le droit national. A tout le plus, la nouvelle Constitution

aménage, au droit international, un statut de primauté conditionnée.

Cette Figure oxymorique120 vide la suprématie, parée de toutes les

vertus, de toute sa force obligatoire, à même de la vassaliser sous le joug

des valeurs traditionnelles immuables reconduites. En effet, la primauté

synonyme de la prédominance et de la prééminence ne pourrait

nullement être tributaire de la satisfaction de conditions. La ravaler à ce

second rang inhérent à l’observance des fondements immuables de la

nation serait remettre aux calendes grecques cette primauté.

Si on ne se réfère qu’au préambule et aux articles 55 et 19 , nous

serons inexorablement conduits à conclure au caractère hybride de cette

prééminence .Cela étant ,en vertu du préambule le Maroc s’engage à

accorder aux conventions internationales dûment ratifiées par lui, la

primauté sur le droit interne du pays et à harmoniser en conséquence les

dispositions pertinentes de sa législation nationale. La ratification

s’affiche, toutefois, à en croire ce préambule, respectueuse des

constantes et le choix de la suprématie de l’ordre juridique interne ce qui influerait pernicieusement sur les choix économiques du pays notamment en faveur du libéralisme.

L’incidence serait délétère sur le développement économique et social du pays. 120 Un oxymore ou oxymoron, est une figure de style qui vise en rhétorique à accoler deux

termes (un nom et un adjectif) qui sont antithétiques par le sens dans une formule en

apparence antinomique, comme « un jeune vieillard » ou « un aveugle voyant » ou « démo-

despotisme » , un mot valise composé de deux termes sémantiquement antagoniques ,

« démo » rappelant la démocratie et son antonyme « despotisme ». L'oxymore permet ainsi

d’exprimer ce qui est inconcevable. Il a pour fonction de traduire l’absurde.

Page 72: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

72

dispositions de la Constitution et des lois du Royaume et de son identité

nationale immuable.

Dans le même ordre des idées, l’article 19 argue que la ratification

marocaine des conventions et des pactes internationaux se doit d’être

respectueuse des dispositions de la Constitution, des constantes du

Royaume et de ses lois. Du reste, au cas où la Cour Constitutionnelle,

saisie par le Roi ou le Président de la Chambre des Représentants ou le

Président de la Chambre des Conseillers ou le sixième des membres de

la première Chambre ou le quart des membres de la deuxième Chambre

, décèlerait une disposition d’un engagement international antinomique

à la Constitution, sa ratification ne peut intervenir qu’après la révision

de la Constitution.

Cette primauté demeure non seulement conditionnée mais

hypothéquée. Cette réalité ancre davantage, pour reprendre la formule de

Said Ihrai, « un système moniste avec prépondérance et non-primauté du

droit interne ».

On comprend dès lors les ingrédients de cette forme hybride

instaurée par le Constituant. Distincte de la conception moniste en

fonction de laquelle le droit international prévaut de façon immédiate

en droit interne, hétérogène par rapport à toute approche dualiste

explicite affirmant que les normes du droit international n'acquièrent de

force juridique qu'en étant transposées en droit interne et n’affichant

aucune similitude avec la forme mixte telle qu’appliquée aux États-Unis

selon que les traités soient ou non considérés comme étant d'application

directe par les tribunaux. Cette hybridité est invétérée dans l’ordre ainsi

aménagé, d’autant plus que la primauté du droit interne n’est plus

expressément stipulée.

Page 73: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

73

Cette réalité hybride brouillant toute interprétation repose sur les

dispositions de l’article 55 qui, fidèle au schéma instauré par la

Constitution abrogée de 1996, laisse profiler l’impression d’une certaine

prédominance du traité international sur la Constitution attendu qu’en

cas de litige entre la norme conventionnelle et la règle constitutionnelle,

la règle conventionnelle s’impose en écartant la norme constitutionnelle.

Force est de noter un parallélisme entre l’article 55 de la nouvelle

Loi fondamentale marocaine et l’article 54 de la Constitution française

qui dispose :

« Si le Conseil constitutionnel, saisi par le Président de la République,

par le Premier ministre, par le président de l'une ou l'autre assemblée ou par soixante

députés ou soixante sénateurs, a déclaré qu'un engagement international comporte

une clause contraire à la Constitution, l'autorisation de ratifier ou d'approuver

l'engagement international en cause ne peut intervenir qu'après révision de la

Constitution ».

Certes, il est logique et rationnel qu’un traité en forme solennelle

soit supérieur à la Constitution. Or ce qui échappe à notre entendement

est qu’un simple engagement international, tel que stipulé dans l’article

55 de la Constitution marocaine, inséré dans un simple instrument de

moindre importance, transcende les dispositions constitutionnelles.

A moins que le Constituant ait été motivé par cette intention de

brouiller les rapports entre l’engagement international et la Constitution,

ce qui est écarté bien entendu, il aurait été judicieux d’établir les relations

entre chacune des normes internationales et celles correspondantes dans

l’ordre juridique interne et vice-versa, entre le traité et la loi, entre la loi

et l’accord en forme simplifiée ou entre le décret et l’acte unilatéral à

portée internationale.

Cette valeur supra-constitutionnelle du droit international serait

mieux explicitée par les juridictions nationales qui seront conviées à se

Page 74: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

74

prononcer en la matière à l’occasion d’un conflit qui leur sera soumis.

Certes, elles seront appelées à trancher en fonction du choix inscrit dans

la Constitution laissant s’imprimer la présomption de la suprématie de la

norme internationale.

Au delà de la simple marge d'interprétation laissée à la discrétion

du juge , le système moniste s’appuie sur maintes considérations plaidant

en faveur de la primauté de l’engagement international. En effet,

l’engagement international traduit l’accord de plusieurs États et demeure

de ce fait récalcitrant à la révision121. Du reste, un État est souverain en

matière de la législation interne et demeure la seule autorité qui

commande de ses procédures internes, ce qui est distinct dans le cas d’un

engagement interétatique ou avec une organisation internationale. En

outre, la primauté de l’engagement international découle de la

Convention de Vienne de 1969 en vertu de laquelle aucun État partie ne

pourrait se soustraire de ses obligations sous le prétexte des

considérations juridiques internes.

2.2. La suprématie de la loi interne

On note non sans étonnement que les Constitutions précédentes

ont maintenu du mutisme intentionnel sur la question des rapports entre

121 Frédéric Rouvillois, Droit constitutionnel, la Vème République, Paris, Flammarion,

Collection Champs Université 2009, 400p .P.306.

Page 75: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

75

la loi et l’engagement international. Or, la nouvelle Loi fondamentale a

évoqué le rapport à maintes reprises moins dans le dessein de la

consécration de la primauté du droit international ou du moins de celui

d’une nette clarification que pour le raffermissement de la norme interne.

Aussi la Constitution et la loi paraissent-elles plus prépondérantes que la

norme internationale.

Cette réalité est manifeste à travers maintes dispositions

constitutionnelles. C’est dans cet esprit que la lecture du préambule

devrait s’effectuer puisque cette primauté qu’il convient d’accorder aux

conventions internationales dûment ratifiées par la Maroc n’est pas

directe et immédiate mais tributaire des contingentements des

dispositions de la Constitution et des lois du Royaume, dans le respect

de son identité nationale immuable. L’engagement international paraît

fléchir sous le joug des impératifs de la Constitution et des lois du

royaume. Il devrait se plier à leurs injonctions sinon il n’est plus

applicable.

En outre, si l’article 6 aménage une nette hiérarchisation des

normes juridiques en affirmant les principes de constitutionnalité, de

hiérarchie et d’obligation de publicité des normes juridiques, la place de

l’engagement international se trouve minimisée étant donné bien

entendu que le terme « constantes » disséminé entre « Constitution » et

« loi » dans l’article 19 122 est loin de concerner la norme internationale.

Ces constantes sont bien explicitées dans l’article 175 précisant

qu’aucune révision ne peut porter sur les dispositions relatives à la

122 Il énonce entre autres que l’homme et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à

caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental, énoncés dans le

présent titre et dans les autres dispositions de la Constitution, ainsi que dans les conventions

et pactes internationaux dûment ratifiés par le Royaume et ce, dans le respect des dispositions

de la Constitution, des constantes et des lois du Royaume.

Page 76: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

76

religion musulmane, sur la forme monarchique de l’État, sur le choix

démocratique de la nation ou sur les acquis en matière de libertés et de

droit s fondamentaux inscrits dans la présente Constitution.

Du reste, la loi interne est prépondérante de jure et de facto. En

effet, au-delà des dispositions de l’article 55 soumettant à l’approbation

de la loi une grande partie des traités internationaux, les stipulations de

l’article 23123 relatives à la condamnation par la loi du génocide, des

crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et de toutes les violations

graves et systématiques des droits de l’Homme, consacre manifestement

cette primauté de la loi interne du moment que cette loi qui punira ces

violations devrait incorporer les dispositions de l’arsenal conventionnel

international d’autant plus que cette place attribuée à la loi serait

consolidée par les injonctions de l’article 30 124prévoyant que les

conditions d’extradition et d’octroi du droit d’asile sont définies par la

loi.

123 En effet, l’article 23 stipule : «Nul ne peut être arrêté, détenu, poursuivi ou condamné en

dehors des cas et des formes prévus par la loi. La détention arbitraire ou secrète et la

disparition forcée sont des crimes de la plus grande gravité et exposent leurs auteurs aux

punitions les plus sévères. Toute personne détenue doit être informée immédiatement, d’une

façon qui lui soit compréhensible, des motifs de sa détention et de ses droits, dont celui de

garder le silence. Elle doit bénéficier, au plus tôt, d’une assistance juridique et de la

possibilité de communication avec ses proches, conformément à la loi. La présomption

d’innocence et le droit à un procès équitable sont garantis. Toute personne détenue jouit de

droits fondamentaux et de conditions de détention humaines. Elle peut bénéficier de

programmes de formation et de réinsertion. Est proscrite toute incitation au racisme, à la haine et à la violence. Le génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et

toutes les violations graves et systématiques des droits de l’Homme sont punis par la loi ». 124 Cet article prévoit : « Sont électeurs et éligibles, tous les citoyennes et les citoyens majeurs

jouissant de leurs droits civils et politiques. La loi prévoit des dispositions de nature à

favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux fonctions électives. Le vote est un

droit personnel et un devoir national. Les étrangers jouissent des libertés fondamentales

reconnues aux citoyennes et citoyens marocains, conformément à la loi. Ceux d’entre eux

qui résident au Maroc peuvent participer aux élections locales en vertu de la loi, de

l’application de conventions internationales ou de pratiques de réciprocité. Les conditions

d’extradition et d’octroi du droit d’asile sont définies par la loi. »

Page 77: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

77

En somme, il résulte distinctement que non seulement la primauté

de la règle juridique internationale est conditionnée mais son

applicabilité passe inexorablement par le filtre obligatoire de la loi. Pour

ultime preuve, on cite l’article 71 qui prévoit que la nationalisation

d’entreprises et le régime des privatisations la nationalité et la condition

des étrangers sont des matières relevant du domaine de la loi.

2.3. La consécration du filtre obligatoire de la retranscription

législative

L’expérience comparée des droits constitutionnels illustre une

mutation impressionnante vers une prise en compte avancée du droit

international. La place accordée par les États à la norme juridique

internationale s’affiche nettement parles règles constitutionnelles vouée

à davantage de précision qu’auparavant. Pourtant, bon nombre des États

demeurent récalcitrants à la pression du droit international.

En somme, la « nationalisation » du droit international, naguère

typique au dualisme, semble vouée à l’extension. De ce fait, abstraction

faite de la règle constitutionnelle, loin des doctrines systémiques, la

pratique paraît favorable à la retranscription législative du droit

international, parfois de manière tardive et/ou partielle. En ce sens,

l’intervention de la loi permet de légitimer autant que légaliser une

norme produite par des autorités extérieures.

Par voie de conséquence, l’incorporation du droit international

relève bien plus de l’opportunité politique que de logiques juridiques.

Du reste, l’effort judiciaire d’application et d’interprétation de la règle

internationale traduit encore la carence en une méthodologie efficiente,

Page 78: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

78

profitant à une approche casuistique complexe mais apparemment

inévitable.

La détermination de la validité interne ainsi que la reconnaissance

de la valeur hiérarchique des diverses normes internationales incombe

aux dispositions constitutionnelles qui accordent une large part aux

traités vu les exigences habituelles de ratification.

A ce niveau, il convient de distinguer les approches monistes et

dualistes. En effet, le système moniste souscrit à une méthode optimisant

une insertion dite « automatique ».

De ce fait, un faisceau de modalités formelles sont déployées,

tenant compte de la répartition interne des compétences internationales.

Il est de coutume d’insérer une clause constitutionnelles affirmant sans

ni fard ni artifice que le droit international appartient à l’ordre juridique

interne et lui consacrent souvent une suprématie impliquant partant un

rang ordinairement supra-légal. Ces évocations sont contenues

implicitement dans un seul article ou disséminés plus explicitement dans

plusieurs articles constitutionnels.

Par ailleurs, les modalités procédurales impliquent la ratification

ou signature du traité par les autorités politiques compétentes, puis sa

publication. Dès lors, on scelle la validité et l’opposabilité du traité aux

autorités dans l’ordre juridique interne.

A ce juste propos, il importe de souligner qu’en France, à titre

d’exemple, la ratification des traités les plus importants est soumise à

l’approbation du pouvoir législatif. L’on assiste dernièrement à une

prédisposition, certes rare, à la détermination des conditions

d’application des traités attendus que certaines constitutions affirment

une présomption d’applicabilité directe des traités en attribuant la

Page 79: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

79

compétence aux juges nationaux pour connaître des réclamations

fondées sur des traités.125

Or, la réception126 , qui caractérise la pratique des systèmes

dualistes, implique la prise de mesures internes d’exécution, voire de

transformation, du traité. A défaut de l’automaticité intégrative, maintes

techniques d’intégration du traité coexistent, selon les cas.

Entre la ratification marquant l’engagement international de l’État

et la validité interne du traité, qui lui est généralement attribuée par le

pouvoir législatif, les États procèdent au choix. Une nécessaire

transposition dans le droit interne par la loi s’impose pour que le traité

soit opposable et invocable dans le droit interne.

Force est de constater que le caractère sommaire et l’imprécision

sont les qualificatifs des clauses constitutionnelles dualistes liées aux

traités. Dans ce même ordre des idées, il arrive souvent que ces clauses

soulignent l’entrée en vigueur des traités par une loi ou un acte

réglementaire, sans préciser quel est l’objet et le contenu de la règle

interne. Dans la même veine, l’on y notifie que l’intervention

parlementaire est une condition sine qua non pour la transposition en

droit interne de tout accord international.

125 « Internalisation du droit, internalisation de la justice », 21-23 juin 2010 Cour suprême du

Canada Ottawa, 3ème congrès de l’Association des hautes juridictions de cassation des pays

ayant en partage l'usage du français (AHJUCAF). 126C’est le terme employé par la doctrine depuis Anzilotti. Dionisio Anzilotti (1867-1950) est

une illustre référence italienne du droit international qui a marqué le début du XXème siècle.

Son œuvre traite la question centrale de l’effectivité du droit international public qui demeure

selon lui tributaire de l’affirmation d’un droit positif international. En ce sens, rompre avec

la tradition jusnaturaliste, ce que veut à toute force Anzilotti, exige moins d’inventer cette

existence du droit international public que d’en rendre compte, ce qui n’est pas des tout

tâches faciles.

Page 80: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

80

En somme, l’organe législatif est appelé à avaliser le traité conclu

par le pouvoir exécutif tantôt lors de la ratification du traité tantôt au

cours de son incorporation au droit interne.

On serait amené alors à différencier entre l’autorisation de la

ratification et l’approbation interne du traité. Une imprécision entache

les dispositions constitutionnelles qui ne clarifient guère le contenu

même de la loi ou des « mesures de mise en œuvre nécessaires », c’est

au législateur qu’incombe de définir les diverse méthodes.

Il importe également de noter que certains États adoptent les

méthodes dualistes quand bien même aucune disposition de la Loi

fondamentale ne l’exige. Ainsi en est-il des pays de tradition de Common

law, il incombe généralement au juge de préciser certaines règles

fondamentales, dont la place du droit international, l’exemple prototype

demeure le Canada. In fine, plus qu’une exigence textuelle, c’est une

pratique constitutionnelle.

Les deux types de techniques se différencient au niveau de la

valeur hiérarchique consacrée au traité. C’est ainsi que le traité

incorporé, sous les auspices dualistes, acquiert la valeur de l’acte interne

de réception, ordinairement une loi.

La pratique marocaine, telle qu’elle découle de la Charte

fondamentale requiert pour l’incorporation d’un engagement

international tantôt l’adoption par le souverain d’un dahir de ratification

après autorisation législative prévue par la Constitution dans certains cas

tantôt par une loi dûment publiée au Bulletin officiel permettant son

opposabilité et invocabilité par les justiciables dans les juridictions

internes.

Cette pratique marocaine s’inscrit a fortiori, dans un système

similaire à celui de la France où la ratification des traités les plus

Page 81: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

81

importants est soumise à l’approbation du pouvoir législatif. Il tient

également du système dualiste qui nécessite une transposition dans le

droit interne par la loi pour que le traité soit opposable et invocable dans

le droit interne.

Rappelons –le encore une fois, il se propose en somme tel un

système moniste avec prépondérance et non-primauté du droit interne.

La primauté du droit interne semble être atténuée.

2.4. Un rang légal controversé ?

Ce serait hâtif de conclure au caractère inférieur de la norme

internationale étant donné que cette même question départage les

spécialistes .C’est ainsi que certains arguent en faveur de ce statut infra

–légal avançant que l’engagement international se place à mi-chemin

entre la loi et le règlement. Et d’ajouter que cette loi est le plus souvent

fruit de l’initiative gouvernementale à 90 ℅ sachant pertinemment que

les mécanismes de la rationalisation parlementaire sont reconduits à

l’aune de la nouvelle Charte.

Dès lors, le l’exécutif négocie, signe et ratifie les traités. Cette

réalité est d’autant plus lucide, selon ces spécialistes, que la conduite des

affaires étrangères relève du domaine réservé du Chef de l’État et de

l’exécutif si l’on songe au processus d’adoption des actes internationaux

impliquant le Roi. Le constat est que l’engagement international relève

de la catégorie des actes de gouvernement insusceptibles de contrôle

juridictionnel.

Cette situation, alignant le Maroc sur la même voie que les États

–Unis ou l’Angleterre, est marquée concomitamment par l’absence de

validité interne du traité international contraire à la Constitution et par

Page 82: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

82

l’égalité formelle entre le traité international et la loi nationale ou la

supériorité de fait de l’ordre interne.127

En revanche, d’autres spécialistes récusent cette position et ils

soutiennent la nécessaire harmonisation de la législation marocaine avec

le droit international telle que stipulée dans la Constitution. Ce constat

est déduit des dispositions du préambule faisant dorénavant partie

intégrante de la Loi suprême du pays qui énonce que le Maroc s’engage

à accorder aux conventions internationales dûment ratifiées par lui, dans

le cadre des dispositions de la Constitution et des lois du Royaume, dans

le respect de son identité nationale immuable, et dès la publication de

ces conventions, la primauté sur le droit interne du pays, et harmoniser

en conséquence les dispositions pertinentes de sa législation nationale.

L’article 23 prévoit la nécessaire harmonisation de la législation

marocaine avec le droit international des droit s de l’Homme d’autant

plus qu’en vertu de l’article 55 , la Cour constitutionnelle intervient en

dernier ressort pour trancher le cas de litige entre l’engagement

conventionnel et la Constitution. En outre, en fonction de l’article

133128 « l’inconventionalité » de la loi pourrait être invoquée par voie

d’exception devant la Cour constitutionnelle au cas où une loi ne se serait

pas conformée sur les prescriptions véhiculées par un engagement

international ratifié et publié.

Il serait plus judicieux devant de telles considérations de conclure,

au nom de la neutralité et en parfaite compatibilité avec les termes du

127Dominique Carreau et Fabrizio Marrella, Droit international, Pedone, 11 ème Edition, Paris,

2012, p. 376 et p. 72. 128L’article 133 stipule « La Cour Constitutionnelle est compétente pour connaître d’une

exception d’inconstitutionnalité soulevée au cours d’un procès, lorsqu’il est soutenu par

l’une des parties que la loi dont dépend l’issue du litige, porte atteinte aux droits et libertés

garantis par la Constitution. Une loi organique fixe les conditions et modalités d’application

du présent article. »

Page 83: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

83

texte constitutionnel, selon ces contestants, sinon à la quasi-égalité entre

la loi et l’engagement international, du moins à une égalité virtuelle par

rapport à la loi .Cette virtualité tient lieu du fait que sa transposition en

droit interne par une loi lui confère une valeur législative.

2.5. L’instrument conventionnel, l’ordre juridique interne et

international : quelles interactions ?

A vrai-dire, l’ordre juridique marocain puise son essence dans

double terreau. Primo, un socle religieux axé sur les enseignements de la

sharia appliqués en matière de statut personnel et du droit de la famille

.Secundo, un fondement constitutionnel corrélé à un arsenal législatif

séculière pour régir la vie économique.

La résolution de cette équation de la conciliation entre ces deux

impératifs est perceptible à travers les démarches corrélatives aux

engagements internationaux du Maroc dans le domaine de la protection

de l’investissement international (2.5.1). Il n’en demeure pas moins vrai

que les implications de l’accord France-Maroc sur l'encouragement et la

protection réciproques des investissements (2.5.2) et les incidences de

l’arrimage du Maroc à l’Union européenne (2.5.3) en sont des exemples

emblématiques.

2.5.1. La protection de l’investissement étranger

Force est de noter une disparité en matière du cadre conceptuel de

l’investissement protégé. Une définition unanime fait défaut. On ne peut

déceler un consensus entre les États d’autant plus que l’on note une

Page 84: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

84

dissimilitude au chapitre du cadre terminologique de l’investissement

international dans chaque ordre interne129.Dans le même sens,

l’instrument conventionnel bute toujours sur cette question dans la

mesure où il n’a pas pu concevoir une définition unique de

l’investissement130.

Cette dissemblance s’explique par les intérêts divergents qui

s’interposent à l’élaboration d’une unité de définitions nationales.

Ceci dit, une certaine tendance se développe. Celle de la pratique du

CIRDI, mais aussi celle de la pratique des négociateurs de traités

bilatéraux d’investissements.131

Les traités conclus par les pays magrébins avec d’autres États

n’échappent pas à cette tendance et il est possible de proposer une

définition de l’investissement telle qu’elle ressort des instruments

conventionnels.

La définition insérée dans la plupart des traités bilatéraux paraît

vaste et très évasée , elle comprend toutes les catégories d’avoirs et

propose une liste indicative, en notifiant que la modification de la forme

sous laquelle les avoirs sont investis ou réinvestis n’affecte pas leur

caractère d’investissement en ce termes : « Les abrogations susceptibles

d'intervenir à l'avenir ne s'appliquent pas aux investissements réalisés

dans le cadre de la présente ordonnance à moins que l'investisseur ne le

demande expressément. »

129 Patrick Juillard, « Chronique de droit international économique », Annuaire Français de

Droit International, XXX, 1984, p.773.

130 En effet, le cadre conceptuel suggéré par les conventions est marqué par la divergence .De

même, la Convention C.I.R.D.I n’a proposé aucune approche terminologique à

l’investissement qui serait une référence confiant cette tâche aux signataires des traités

bilatéraux et à leurs interprétants que sont les arbitres. 131 Mahmoud Anis Bettaieb, « La protection de l’investissement étranger au Maghreb (Algérie,

Maroc, Tunsie), OECD, Global forum on international investment, 27-28mars 2008 ,p 10

Page 85: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

85

Toute approche exclusivement interne ambitionnant la protection

des investissements serait vouée à l’échec à telle enseigne qu’elle doit

« consister en la conclusion de conventions et traités relatifs à la

promotion et à la protection des investissements »132.

Cadrant avec cette expectative, le Maroc a brodé un ample réseau

d’accords de promotion et de protection des investissements. A cet effet,

il aurait procédé à la conclusion de plus de 60 traités bilatéraux133.

Cette approche a hissé le Maroc en tête des pays les plus actifs en

Afrique au cours de la période 2006 - juin 2007 par la CNUCED, avec

respectivement trois accords de promotion et de protection des

investissements134.

Il convient de ne pas omettre le dense réseau d’accords de libre

échange, tissé notamment avec l’Association Européenne de libre

échange135 et avec certains pays arabes dans le cadre de l’accord

d’Agadir136, et, concernant le Maroc avec les États-Unis d’Amérique137

et d’accords d’association avec l’Union européenne138.

Par conséquent, le Maroc serait sommé à honorer ses engagements

internationaux qui découlent de son adhésion depuis 1967 à la Banque

Mondiale sur la protection de l’investissement139 du 18 mars 1965 , de

132 Jane Schokkaert, « Protection contractuelle par les Etats des investissements privés effectués

sur leur territoire », DPCI, Tome 6, n°1, 1980, p.30.

133 Consulter le site de la direction des investissements du Maroc sur: http://www.invest.gov.ma/

134 « Recent developments in international investment agreements (2006 – June 2007) »,

UNCTAD, IIA Monitor, n° 3, (2007), p.3. D’après ce même rapport, au cours de la même période, le Maroc aurait renégocié 12

accords.

135 Le Maroc a conclu cet accord de libre échange le19 juin 1997.

Pour le texte des accords : http://secretariat.efta.int

136 La zone de libre échange, en vertu de l’Accord d’Agadir du 24 février 2004 est ainsi délimitée

: le Maroc, la Jordanie, la Tunisie, et l’Égypte. 137 Accord de libre échange Maroc – États unis d’Amérique du 15 juin 2004. 138 Cet accord d’Association avec le Maroc est entré en vigueur, le 1e mars 2000. 139 « La protection des investissements peut être définie comme étant l’ensemble des principes

et des règles, de droit international comme de droit interne, qui ont pour objet ou pour effet

Page 86: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

86

la conclusion de conventions bilatérales d’investissement, de contrats

internationaux et de l’Accord de libre –échange conclu avec les États –

Unis.

En effet, du moment que le Maroc fait partie intégrante en 1967 à

la convention relative à l’investissement privé baptisée Convention de

Washington du 18 mars 1965 , il se trouve sommé à observer ses

stipulations notamment celles relatives au CIRDI et qui incarnent une

exception aux règles classiques du droit international 140puisque

l’investisseur , personne privée , physique ou morale se trouve partie au

différend devant l’Etat et ce , dans le déploiement total des mécanismes

d’empêcher ou de réprimer toute atteinte publique à l’existence ou à la consistance de

l’investissement international »

Dominique Carreau , Juillard Patrick , Droit international économique, Paris, LGDJ, 4ème

éd, 1990 , 728p P.483. 140 En effet, l’article 25 de ladite Conventions énonce clairement :

« (1) La compétence du Centre s’étend aux différends d’ordre juridique entre un État contractant

(ou telle collectivité publique ou tel organisme dépendant de lui qu’il désigne au Centre) et

le ressortissant d’un autre Etat contractant qui sont en relation directe avec un investissement

et que les parties ont consenti par écrit à soumettre au Centre. Lorsque les parties ont donné

leur consentement, aucune d’elles ne peut le retirer unilatéralement. (2) « Ressortissant d’un

autre État contractant » signifie :

(a ) toute personne physique qui possède la nationalité d’un Etat contractant autre que l’Etat

partie au différend à la date à laquelle les parties ont consenti à soumettre le différend à la

conciliation ou à l’arbitrage ainsi qu’à la date à laquelle la requête a été enregistrée

conformément à l’article 28, alinéa (3), ou à l’article 36, alinéa (3), à l’exclusion de toute

personne qui, à l’une ou à l’autre de ces dates, possède également la nationalité de l’Etat

contractant partie au différend ;

(b) toute personne morale qui possède la nationalité d’un Etat contractant autre que l’Etat partie

au différend à la date à laquelle les parties ont consenti à soumettre le différend à la

conciliation ou à l’arbitrage et toute personne morale qui possède la nationalité de l’Etat

contractant partie au différend à la même date et que les parties sont convenues, aux fins de la présente Convention, de considérer comme ressortissant d’un autre Etat contractant en

raison du contrôle exercé sur elle par des intérêts étrangers. (3) Le consentement d’une collectivité publique ou d’un organisme dépendant d’un État

contractant ne peut être donné qu’après approbation par ledit État, sauf si celui-ci indique au

Centre que cette approbation n’est pas nécessaire.

(4) Tout État contractant peut, lors de sa ratification, de son acceptation ou de son approbation

de la Convention ou à toute date ultérieure, faire connaître au Centre la ou les catégories de

différends qu’il considèrerait comme pouvant être soumis ou non à la compétence du Centre.

Le Secrétaire général transmet immédiatement la notification à tous les États contractants.

Ladite notification ne constitue pas le consentement requis aux termes de l’alinéa (1). »

Page 87: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

87

du droit international alors que les sujets sont exclusivement les États et

les organisations internationales.

Le Centre International pour le règlement des différends relatifs

aux investissements 141qui personnifie la justice privée tire sa

compétence du consentement des parties. En d’autres termes, les États

signataires de la convention sont contraints de reconnaître aux sentences

arbitrales du CIRDI, dans leur ordre juridique, force de chose jugée.

L’exécution de ces verdicts ne sollicite aucun passage par l’étape de

l’exequatur. C’est dans ce sens que s’inscrit l’article 57 de la convention

de Washington, ratifiée et signée par le Maroc qui stipule.

« Chaque État contractant reconnaît toute sentence rendue dans le cadre de

la présente Convention comme obligatoire et assure l’exécution sur son territoire des

obligations pécuniaires que la sentence impose, comme s’il s’agissait d’un jugement définitif

d’un tribunal fonctionnant sur le territoire dudit État ».

En application du principe de Ratione Voluntatis, les parties

signataires confèrent au CIRDI le plein pouvoir de régler le litige en

s’abstenant bien entendu d’invoquer un recours parallèle devant les

juridictions particulièrement étatiques. C’est le Ratione Voluntatis. Un

principe qui à la fois fonde et conditionne la compétence du CIRDI.142

141 Les quatre arbitres marocains choisis en 2010 avec un mandat prenant fin en mai 2016 pour

trancher les différends sont Abdalilah Barjani, président de Chambre à la cour d’appel commerciale ; Idriss Bouziane, avocat; El Hassan El Guassim, directeur des affaires civiles

au sein du ministère de la Justice et Abdelkader Lahlou, avocat et professeur de droit. 142Abdelali El Hourri, « Qu’est-ce que le CIRDI, cet épouvantail d’Al Amoudi contre le

Maroc?» , medias24,17décembre 2015, .

Disponible sur :

http://webcache.googleusercontent.com/search?q=cache:xqybYAZ6WsIJ:www.medias24.

com/DROIT/160466-Qu-est-ce-que-le-CIRDI-epouvantail-d-Al-Amoudi-contre-le-

Maroc.html&num=1&hl=fr&gl=fr&strip=1&vwsrc=0

Page 88: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

88

Sachant pertinemment que le Maroc a doublement consenti à

soumettre au Centre ses différends relatifs à l’investissement143 et

résolument persuadé que le recours à ce centre permet de mettre en

exergue les obligations du Maroc vis-à-vis des investisseurs qui

découlent soit d’un contrat liant l’investisseur à son pays hôte, soit qui

résultent d’une convention bilatérale conclue entre ce dernier et l’Etat

d’origine de l’investisseur, l’entrepreneur saoudien Cheikh Amoudi ,

président de Coral Holding suédoise et actionnaire majoritaire de la

Samir, compte s’adosser sur l’accord passé entre le Maroc et la Suède

pour faire valoir ses droits.

Cet accord confère des devoirs qu’il faut respecter par les deux

parties contractantes. Ces devoirs reposent sur des droits pour les

investisseurs et sociétés ressortissants à savoir le droit au traitement juste

et équitable, le droit au traitement de la nation la plus favorisée, et la

protection contre l’expropriation.

La crise de « Samir » serait due, à en croire les allégations d’Al

Amoudi, aux attitudes attentatoires du gouvernement marocain qui a

bafoué ces droits. Or, il devrait démontrer la corrélation entre le

préjudice dont il se prévaut, et les prétendues atteintes du gouvernement

marocain.

Par ailleurs, le CIRDI a déjà statué sur trois litiges impliquant le

Maroc. En effet, le premier date de 1972 opposant le gouvernement

marocain à deux sociétés américaines en l’occurrence Holidays Inn SA,

143 Le premier consiste en la ratification de la Convention de Washington tandis que le second

rappelle l’article 8 de l’accord conclu avec la Suède en 1990 œuvrant à la promotion et la

protection réciproques des investissements disposant : «Si un tel différend ne peut être réglé

à l’amiable dans un délai de 4 mois (…) chacune des parties contractantes consent à le

soumettre, aux fins d’arbitrage au Centre International pour le règlement des différends

relatifs aux investissements…»

Page 89: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

89

une filiale suisse de Holiday Inns Inc, et Occidental Petroleum

Corporation. Ces deux sociétés ont intenté un recours d’arbitrage CIRDI

contre le Maroc se basant sur une clause d’arbitrage CIRDI introduite

dans un contrat de construction d’hôtels de luxe.

Selon leurs dires, le gouvernement marocain n’aurait pas honoré ses

engagements de financement. Le dénouement était heureux puisque les

parties parvenaient à une transaction L’affaire est close en 1978.

Le second cas date de l’année 2000 et incarnera dorénavant la base

de l’analyse de la notion d’investissement, nécessaire pour engager la

compétence du CIRDI. Cette affaire baptisée «Salini test», ayant fait

jurisprudence a opposé le Maroc à Salini Costruttori S.p.A. et Italstrade

S.p.A, deux sociétés italiennes, qui s’étaient référées à l’accord de

promotion et de protection des investissements conclu avec l’Italie.

Le troisième date de la même année à savoir 2010 et rappelle la

requête sollicitée par le Consortium R.F.C.C., un groupement de droit

italien attributaire de deux lots, suite à l’appel d’offres international

lancé par la Société Nationale des Autoroutes du Maroc en août 1994,

pour la construction d’une autoroute reliant Rabat à Fès. Ce groupement

serait victime, selon ses propos, de mesures discriminatoires dans

l’octroi de l’un des lots. Par conséquent, il réclamait une réparation du

préjudice subi. Statuant sur l’affaire, le CIRDI lui a donné raison sans

que la sentence n’ait été publiée.

2.5.2. Les implications de l’accord France-Maroc sur

l'encouragement et la protection réciproques des investissements

Le Maroc a signé avec la France, le 13 janvier 1996 un accord sur

l'encouragement et la protection réciproque des investissements entre la

France et le Maroc. Cet accord , qui est le couronnement d’un long

Page 90: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

90

cheminement d'enrichissement des relations bilatérales déjà resserrées,

en liaison avec le renforcement du partenariat euro-méditerranéen , est

prévu pour une durée initiale de quinze ans et sera reconduit en

application de l’article 12144, tacitement après ce terme, sauf

dénonciation par l'une des parties avec préavis d'un an. En outre, il

prévoit de prolonger pendant quinze ans la protection des

investissements effectués pendant la période de validité de l'accord.

La France demeure incontestablement le premier partenaire

commercial, le premier investisseur et également le premier bailleur de

fonds au Maroc.

Dans cet esprit , la France a déployé son aide économique et sa

collaboration en vue de consolider la dynamique des mutations

politiques et économiques initiées au Maroc le faisant bénéficier des

avantages de son d'ouverture à l'économie internationale et de son

rapprochement privilégié avec l'Union européenne, symbolisé par

l'accord d'association signé le 26 février 1996.145

Résolument persuadés des mérites de l’actualisation du cadre

juridique146régissant les investissements réalisés par leurs ressortissants

144 Cet article dispose : « Chacune des Parties notifiera à l'autre l'accomplissement des

procédures internes requises en ce qui la concerne, pour l'entrée en vigueur du présent

Accord, qui prendra effet un mois après le jour de la réception de la dernière notification.

L'accord est conclu pour une durée initiale de quinze ans. Il restera en vigueur après ce

terme, à moins que l'une des Parties ne le dénonce par la voie diplomatique avec préavis d'un

an. A l'expiration de la période de validité du présent Accord, les investissements effectués pendant qu'il était en vigueur continueront de bénéficier de la protection de ses dispositions

pendant une période supplémentaire de quinze ans ». 145 Mme Brisepierre Paulette, Sénateur, Rapport n° 319 : « accord France-Maroc sur

l'encouragement et la protection réciproques des investissements » Commission des Affaires

étrangères - Rapport n° 319 - 1996/1997. Disponible sur : https://www.senat.fr/rap/l96-

319/l96-319.html#RTFToC1 146En effet, l’accord précédent entre les deux pays date de 1975 et semble déphasé et inadapté

à la conjoncture politique et économique actuelle du Maroc avide d’investissement privé

étranger en vue de la modernisation du secteur public et de la réhabilitation des

infrastructures que requiert le développement de l'économie. Notons bien que cet accord

Page 91: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

91

dans l'un et l'autre pays, la France et le Maroc ont procédé à la conclusion

de cet accord qui s’inspire , au demeurant ,des accords passés entre la

France et plus d'une quarantaine de pays.

Le champ d’application de cet accord comprend en vertu de

l’article 1.4147, le territoire et la zone maritime (incluant la zone

économique et le plateau territorial) de chacune des parties.

Aux antipodes de l'accord du 15 juillet 1975, l’accord 13 janvier

1996 détermine avec précision la notion d'investissement. Pour autant,

les investissements recouvrent l'ensemble des avoirs énumérés dans

l'article 1 de l'accord en son premier alinéa148 comprenant notamment les

biens meubles et immeubles ainsi que les autres droits réels (hypothèque,

privilège, usufruit, cautionnement...), les actions, les obligations, les

s’inscrit dans le chantier de règne initié au Maroc à savoir le vaste programme de

privatisations. 147 Cet article énonce : « Le présent Accord s'applique au territoire de chacune des Parties

contractantes ainsi qu'à la zone maritime de chacune des Parties contractantes, ci-après

définie comme la zone économique et le plateau continental qui s'étendent au-delà de la

limite des eaux territoriales de chacune des Parties contractantes et sur lesquels elles ont, en

conformité avec le Droit international, des droits souverains et une juridiction aux fins de

prospection, d'exploitation et de préservation des ressources naturelles. » 148 Il dispose comme suit : «Pour l'application du présent Accord 1. Le terme « investissement

» désigne des avoirs tels que les biens, droits et intérêts de toutes nature et, plus

particulièrement mais non exclusivement

a) Les biens meubles et immeubles, ainsi que tous les autres droits réels tels que les

hypothèques, privilèges, usufruits, gages, cautionnements et droits analogues

b) Les actions, primes d'émission et autres formes de participations, même minoritaires ou

indirectes, aux sociétés constituées sur le territoire de l'une des Parties contractantes ;

c) Les obligations, créances et droits à toutes prestations ayant valeur économique ;

d) Les droits d'auteur, les droits de propriété industrielle (tels que brevets d'invention,

licences, marques déposées, modèles et maquettes industrielles), les procédés techniques, les noms déposés et la clientèle; e) Les concessions accordées par la loi ou en vertu d'un

contrat, notamment les concessions relatives à la prospection, la culture, l'extraction ou l'exploitation de richesses naturelles, y compris celles qui se situent dans la zone maritime

des Parties contractantes. Le présent Accord s'applique aux investissements effectués

conformément à la législation de la Partie contractante sur le territoire ou dans la zone

maritime de laquelle l'investissement est réalisé avant ou après l'entrée en vigueur du présent

Accord. Toute modification de la forme d'investissement des avoirs n'affecte pas leur

qualification d'investissement, à condition que cette modification ne soit pas contraire à la

législation de la Partie contractante sur le territoire ou dans la zone maritime de laquelle

l'investissement est réalisé. »

Page 92: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

92

droits d'auteur et de propriété commerciale ou industrielle, les

concessions accordées par la loi ou en vertu d'un contrat.

Par ailleurs, les investissements bénéficient de cette protection

conformément au droit interne de la partie contractante sur le territoire

de laquelle ils sont effectués, quelle que soit la date de leur réalisation,

antérieure ou postérieure à l'entrée en vigueur de l'accord.

L’article 1.2.précise que les investisseurs intéressés sont d'une part

les personnes physiques qui doivent posséder la nationalité de l'une des

parties contractantes et d'autre part les sociétés constituées

conformément à la législation de l'État contractant où se trouve situé leur

siège social. L’article 1.3 énonce que les revenus recouvrent toutes les

sommes produites par un investissement durant une période donnée.

Par ailleurs, l’article 2 ancre le principe de l'encouragement des

investissements. Cette promotion est bidimensionnelle. Au prime abord,

l’article 3149 dudit accord stipule l’observance d'un traitement juste et

équitable pour ces investissements en parfaite harmonie avec les

principes du droit international. L’objectif escompté est de lutter contre

les attitudes et mesures arbitraires et discriminatoires et particulièrement

toute restriction à l'achat et au transport des matières indispensables à la

production et à l'exploitation ainsi que toute entrave à la vente et au

transport des produits.

Du reste, l’article 4150commandite l'application de la clause la plus

favorable et la plus avantageuse aux investisseurs qu’elle soit marocaine

149 Cette disposition est bien expressément stipulée : «Chacune des Parties contractantes

s'engage à assurer sur son territoire et dans sa zone maritime, un traitement juste et équitable

en accord avec les principes du Droit international, aux investissements des investisseurs de

l'autre Partie et à faire en sorte qu'aucune mesure arbitraire ou discriminatoire ne limite

l'application de ce principe.» 150En effet, il précise : «Chacune des Parties contractantes applique, sur son territoire et dans sa

zone maritime, aux investisseurs de l'autre Partie, en ce qui concerne leurs investissements

et activités liées à ces investissements, un traitement non moins favorable que celui accordé

Page 93: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

93

ou française .Cet article exige de chaque partie un traitement au moins

aussi favorable aux investisseurs de l'autre partie que celui accordé à ses

propres investisseurs. Il importe de souligner en l’occurrence que cet

avantage ne s’étend pas au domaine fiscal attendu que les investisseurs

nationaux jouissent d’importants allégements fiscaux.

Du reste, ce régime d'encouragement ne pourrait en rien être

similaire aux avantages offerts dans le cadre d'accords particuliers tels

une zone de libre-échange, une union douanière, un marché commun ou

une autre forme d'organisation économique régionale.

Au chapitre de la protection des investissements, l’accord et en

place un dispositif axé sur trois principes classiques. Au prime abord,

conformément aux dispositions de l’article 5 en son second alinéa, en

cas de dépossession pour cause d’utilité publique à l’instar des

nationalisations ou des expropriations, l’État ayant procédé à la prise de

ces mesures doit envisager de faire jouir les investisseurs de l'autre partie

d'une indemnité prompte et adéquate. En outre, le montant serait estimé

dans le sens d’une situation économique normale à la veille du jour où

ces mesures sont prises ou connues du public.

De surcroît, en application de troisième tiret de l’article 5, les

investisseurs étrangers ont droit à un traitement aussi favorable que celui

des investisseurs nationaux ou de la nation la plus favorisée en cas de

dommages et pertes provoqués par des circonstances exceptionnelles

à ses investisseurs, ou le traitement accordé aux investisseurs de la Nation la plus favorisée,

si celui-ci est plus avantageux. A ce titre, les nationaux autorisés à travailler sur le territoire et dans la zone maritime de l'une des Parties contractantes doivent pouvoir bénéficier des

facilités matérielles appropriées, dans le cadre de la réglementation en vigueur, pour

l'exercice de leurs activités professionnelles.

Ce traitement ne s'étend toutefois pas aux privilèges qu'une Partie contractante accorde aux

investisseurs d'un État tiers, en vertu de sa participation ou de son association à une zone de

libre échange, une union douanière, un marché commun ou toute autre forme d'organisation

économique régionale, ou en vertu d'une convention de non double imposition fiscale ou de

toute autre convention dans le domaine fiscal.»

Page 94: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

94

telles qu'un conflit armé, une révolution ou lors d la proclamation de

l'état d'urgence.

Dans le même ordre des idées, l’article 6 151pose les procédures de

garanties du principe de la liberté des transferts. Son application est

exempte de réserves particulièrement aux revenus et aux produits de la

cession ou de la liquidation de l'investissement (y compris les plus-

values).

Encore faut il signaler que cette application demeure, selon

l’article 6, plus restreinte pour les transferts des revenus des

ressortissants de l'une des parties travaillant sur le territoire de l'autre

partie du moment que ceux-ci ne sont garantis que dans la limite d'une

quotité appropriée de leur rémunération.

En cas de conflits, l’accord prévoit dans l’article 8152 le recours à

des voies à l'amiable dans un délai de 6 mois .A cet effet, l'investisseur

151 Ce principe est bien protégé par les dispositions suivantes : «Chaque Partie contractante, sur

le territoire ou dans la zone maritime de laquelle des investissements ont été effectués par

des investisseurs de l'autre Partie contractante, accorde à ces investisseurs le libre transfert :

a) Des intérêts, dividendes, bénéfices et autres revenus courants ;

b) Des redevances découlant des droits incorporels désignés au paragraphe 1, lettres d et e,

de l'article 1er ;

c) Des versements effectués pour le remboursement des emprunts régulièrement contractés

d) Du produit de la cession ou de la liquidation totale ou partielle de l'investissement, y

compris les plus-values du capital investi ;

e) Des indemnités de dépossession ou de perte prévues à l'article 5, paragraphes 2 et 3 ci-

dessus. Les nationaux de chacune des Parties contractantes qui ont été autorisés à travailler

sur le territoire ou dans la zone maritime de l'autre Partie contractante, au titre d'un

investissement agréé, sont également autorisés à transférer dans leur pays d'origine une

quotité appropriée de leur rémunération. Les transferts visés aux paragraphes précédents sont

effectués sans retard au taux de change normal officiellement applicable à la date du transfert. »

152Il notifie : «Tout différend relatif aux investissements entre l'une des Parties contractantes et un investisseur de l'autre Partie contractante est, autant que possible, réglé à l'amiable entre

les deux parties concernées. Si un tel différend n'a pas pu être réglé dans un délai de six mois

à partir du moment où il a été soulevé par l'une ou l'autre des parties au différend, il est

soumis à la demande de l'investisseur, soit à la juridiction compétente de la Partie

contractante impliquée dans le différend, soit l'arbitrage du Centre international pour le

règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), créé par la Convention pour

le règlement des différends relatifs aux investissements entre Etats et ressortissants d'autres

Etats, signée à Washington le 18 mars 1965. Une fois qu'un investisseur a soumis le différend

Page 95: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

95

solliciterait sa soumission soit à la juridiction compétente de la partie

impliquée, soit au CIRDI, le choix de l'une ou l'autre procédure devenant

définitif dès la saisine de l'organisme.

Cette option choisie par le présent accord s’éloigne de la solution

retenue par la majorité des accords d’investissement ne prévoyant que le

recours à l'arbitrage international. Elle cadre en contrepartie en écho avec

les stipulations déjà mises en œuvre avec l'Algérie ou certains pays

d'Amérique latine.

L'article 9153 énonce expressément que dans le cas où l'une des

parties effectuerait au profit de l'un de ses investisseurs un versement en

vertu de la garantie donnée pour un investissement sur le territoire de

l'autre partie, elle se trouve « subrogée dans les droits et actions » de

celui-ci.

Par ailleurs, en cas d’émergence de différends relatifs à

l'interprétation et à l'application du présent accord, ces litiges seront

soumis, en vertu de l’article 11, à défaut de règlement amiable par la voie

diplomatique dans un délai de six mois, à un tribunal d'arbitrage ad hoc

dont les décisions sont définitives et exécutoires de plein droit.

2.5.3. Les incidences de l’arrimage du Maroc à l’Union

européenne

à la juridiction compétente de la Partie contractante impliquée dans le différend ou au CIRDI, le choix de l'une ou l'autre de ces procédures reste définitif. »

153 Les dispositions de cet article énoncent : « Si l'une des Parties contractantes, en vertu d'une garantie donnée pour un investissement réalisé sur le territoire ou dans la zone maritime de

l'autre Partie, effectue des versements à l'un de ses investisseurs, elle est, de ce fait, subrogée

dans les droits et actions de ceux-ci.

Lesdits versements n'affectent pas les droits du bénéficiaire de la garantie à recourir soit au

CIRDI, soit à la juridiction compétente de la Partie contractante impliquée dans le différend,

ou à poursuivre les actions engagées soit devant le CIRDI, soit devant la juridiction

compétente de la Partie contractante impliquée dans le différend, jusqu'à l'aboutissement de

la procédure ».

Page 96: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

96

En vertu de l’ancrage du Maroc à l’Union européenne inscrit dans

le cadre de la politique européenne de voisinage, le Maroc est appelé à

observer ses obligations en matière de la protection des investissements.

En effet, le Maroc doit honorer les engagements qui découlent du traité

de coopération conclu avec l’Union européenne.

Or, ce cadre instauré par l’Union européenne reconnaît la primauté

du droit international et du droit communautaire 154sur la législation

interne. Cette suprématie est manifeste dans la consécration de la

prééminence tantôt de la norme internationale sur la Loi fondamentale

dans l’ordre juridique de certains États membres tantôt sur la loi pour

d’autres.

A cet effet, il devrait harmoniser son cadre législatif avec le droit

communautaire. Cette harmonisation requiert la transposition des

stipulations de la norme internationale dans le droit interne d’autant plus

que le programme indicatif national envisagé par les deux parties prévoit

la mise à niveau de l’ordre juridique interne législatif et réglementaire

marocain de manière à l’harmoniser avec le droit international.

Cette expectative expliquerait vraisemblablement deux moutures

successives jalonnant l’inscription marocaine sur les canons du droit

international reconnaissant ipso facto sa primauté. Sans doute

l’enclenchement de ces deux moutures serait –il doublement impulsé par

l’arrimage du Maroc à l’Union européenne et par l’accord de libre

échange conclu avec les États –Unis.

La première mouture est traduite par la loi relative aux droits

d’auteur et droits voisins du 14 février 2006. Cette loi prévoit

154 L’instrument européen de voisinage et de partenariat – Maroc – Document de stratégie

2007-2010.

Page 97: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

97

l’invocabilité et l’opposabilité des conventions internationales en la

matière. Les dispositions de l’article 68155 de la loi de 2000 maintenues

dans leur intégralité dans la loi de 2006 consacrent, en cas de litige, la

prééminence de la norme internationale régissant les droits d’auteur et

droits voisins.

Cette applicabilité des dispositions jalonnant les traités

internationaux auxquels le Maroc ferait partie est une avancée

considérable en la matière. La deuxième mouture est relative au chapitre

VIII du titre V du Code de la procédure civile156.

En ce sens, les dispositions contenues dans l’article 52157 du 3ème

chapitre relatif à l’arbitrage international instaurent les mécanismes

d’arbitrage et de médiation dans la mesure où elles confèrent au tribunal

arbitral la pleine liberté de choisir le droit à appliquer pour trancher un

différend sans écarter l’applicabilité du droit international.

Dans cet ordre des idées , il faut rappeler , tout comme le dernier

alinéa , que les stipulations du contrat , par ailleurs soumis au droit

international, demeurent contraignantes pour les deux parties

contractantes.

En somme, en vertu de la loi 08-05 du 30novembre 2007, les

investisseurs étrangers ont la liberté de choisir tant la loi internationale

155 Au chapitre de l’applicabilité des conventions internationales, l’article 68 dispose « Les

dispositions d’un traité international concernant le droit d’auteur et les droits voisins auquel le Royaume du Maroc est partie sont applicables aux cas prévus dans la présente loi. En cas

de conflit entre les dispositions de la présente loi et celles d’un traité international auquel le Royaume du Maroc est partie, les dispositions du traité international seront applicables.»

156 Dahir n° 1-07-169 du 30 novembre 2007 portant promulgation de la loi n°08-05 abrogeant

et remplaçant le chapitre du titre V du Code de procédure civile. 157Cet article précise : « La Convention d’arbitrage détermine librement les règle de droit que

le tribunal arbitral devra appliquer au fond de litige. A défaut de choix par les parties des

règles de droit applicables, le tribunal arbitral tranche le litige conformément à celles qu’il

estime appropriées .Dans tous les cas, le tribunal arbitral tient compte des dispositions du

contrat qui lie les parties et des coutumes et usages pertinents de commerce »

Page 98: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

98

que les arbitres internationaux pour trancher leurs différends. Dès lors,

le recours à une clause d’arbitrage en interne ou en international est

permis.158

Chapitre 3 :

Le législateur organique

Jugée norme infra-constitutionnelle, la loi organique se doit de se

plier devant les injonctions de la Constitution en tant que norme

suprême. Il serait superflu de rappeler que l’ultime visée de

l’intervention du juge constitutionnel est de conjurer les pratiques

arbitraires vidant les lois organiques de leur substance et déjouant les

formalités exigées.

Toujours faudrait-il se demander si les décisions du Conseil

constitutionnel sont infaillibles et se plient à cette expectation159 .A cet

158 Entretien au quotidien, L’Économiste, édition n° 2703 du 30 janvier 2008, avec Azzedine

Kettani, avocat au barreau de Casablanca. 159 Les analystes et observateurs ont pertinemment décelé des anomalies dans les dernières

décisions émises par le Conseil constitutionnel au chapitre du contentieux électoral (décision

n°856-12), de la Loi de finance (décision n°912- 13) et d’incompatibilités (décision n°913-

Page 99: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

99

égard, l’analyse des limites du contrôle effectué au chapitre des lois

organiques touchant les lois et les libertés vaut réflexion.

Au prime abord, seront explicitées les injonctions du contrôle qui

élucident les défections du législateur organique (1) pour mieux scruter

l'étendue du contrôle des juges ordinaires (2).

1. Le Conseil constitutionnel et l’incompétence négative du

législateur organique

Force est de noter que le contrôle de la Cour constitutionnelle

accorde davantage d’intérêt à la forme plus qu’au contenu des normes

organiques.

En s’attachant au respect de la procédure spéciale de leur élaboration et

à la seule vérification de l’objet de la loi et de son contenu, le Conseil

constitutionnel pèche doublement.

Au prime abord, il ravale son contrôle, a fortiori préventif et non-

contentieux, à une simple procédure administrative.

Du reste, il pratique une cécité volontaire sur les conditions de

fond stipulant la compatibilité matérielle avec la loi fondamentale en tant

que norme de fond et se refuse, aux dires du professeur Youssef Fihri

13). Et mieux vaut passer sous silence sa position pro-monarchique encline à sauvegarder

les prérogatives royales quitte à empiéter sur les compétences du Chef du gouvernement

.En fait foi sa décision n° 02- 12 relative à la nomination aux fonctions supérieures

(B.O.R.M n° 6070) du 02 aout 2012.Cette décision a été jugée inconstitutionnelle par les

observateurs attendu qu’elle valide la loi organique relative à la nomination dans les

établissements publics dits stratégiques.

Page 100: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

100

Fassi, de sanctionner l’incompétence négative160 du législateur

organique et néglige tout examen du défaut de la qualité de la loi

examinée trahissant de la sorte un mutisme controversé aux incidences

délétères.

Le législateur organique ne saurait, par méprise, méconnaître

l’étendue de sa compétence la croyant moins élargie et la déléguer par

conséquent au législateur ordinaire.

Ce serait censuré qu’une loi organique se confine dans une simple

formulation assertive des principes généraux et conférer aux lois

ordinaires le soin d’expliciter les conditions d’exercice et de déploiement

des droits et des libertés.

Inversement, le législateur organique peut élargir ses compétences

pour édicter des dispositions inhérentes au domaine de la loi organique

et relevant par essence de la loi ordinaire.

Au demeurant, l’intervention du contrôle du Conseil

constitutionnel du caractère organique des dispositions édictées est

induite tantôt par la nature organique des dispositions soumises au

contrôle tantôt par leur finalité ou objet authentiquement organique.

Le juge constitutionnel est convié, dans sa validation des

dispositions législatives ordinaires, à faire montre de rigueur et de

160 La théorie de l'incompétence négative instituée en droit constitutionnel renvoie à la

méconnaissance d’une institution des limites et de l’étendue de ses compétences

(incompétence) si bien qu’elle se croit incompétente (négative) et délègue partant des pouvoirs qu'elle devrait exercer elle-même. Cette incompétence négative avait initialement

pour but de censurer les refus d’exercer leurs compétences par les autorités alléguant à tort cette même incompétence. Le précurseur de cette théorie demeure La ferrière qui l’a opposée

à l’incompétence positive. A ce juste propos, il déclare : « Une autorité au lieu de franchir

les limites de sa compétence, reste en deçà, et refuse de faire un acte de son ressort en

déclarant qu’elle n’a pas qualité pour l’accomplir" et ajoute : "Elle constitue le cas

d’incompétence négative, par opposition à l’incompétence positive. ». Cité par Georges

Schmitter, « L’incompétence négative du législateur et des autorités administratives », in

Annuaire International de Justice Constitutionnelle, Economica-Presses universitaires

d’Aix-Marseille, 1989, p. 140-141.

Page 101: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

101

lucidité en observant leur caractère inséparable, par essence organique.

L’ultime visée étant de cadrer en osmose avec les dispositions du texte

constitutionnel. Or, l’on peut s’étonner que le juge constitutionnel ait

dévié de ce dessein en validant, dans le cadre des Marocains résidant à

l’étranger, le vote par procuration sapant la suprématie des dispositions

constitutionnelles dans la mesure où sa motivation érige le vote par

procuration en règle de principe balisant le vote de tous les Marocains

résidant à l’étranger. En effet, cette validation est antinomique avec la

Constitution qui, en vertu de l’article 30 énonce que le droit de vote est

un droit personnel et un devoir national.

Cette disposition requiert un dépôt personnel du bulletin du vote

et implique que tout vote par correspondance ou par personne interposée

ne sera autorisé qu’en sacrifiant aux exigences stipulées en fonction de

la situation strictement particulière des personnes concernées.

Or, la décision n° 817-2011 du 13 octobre 2011 avalise en toute

incompatibilité avec le texte constitutionnel la dérogation au principe de

la personnalité du vote161 en consacrant l’article 72 de la loi organique

n° 27-11 relative à la Chambre des représentants publié dans le B.O. n°

59-92 du 03 novembre 2011, énonçant que les électrices et les électeurs

inscrits sur les listes électorales générales résidant hors du territoire du

Royaume peuvent voter par procuration.

161 Pour motiver cette prise de position déviante ,le Conseil constitutionnel affirme :« bien que

le vote soit un droit personnel, de par l’article 30 de la Constitution, la Constitution elle-

même a renvoyé à la loi, dans son article 17, la détermination des conditions et des modalités

de l’exercice effectif des droits de vote et de candidature pour les Marocains résidant à

l’étranger à partir du pays de résidence, faisant ainsi que la mesure édictée – dans le cadre

de son pouvoir discrétionnaire – par le législateur, de pouvoir voter par procuration n’est pas

– en tant que dérogation par rapport au principe de la personnalité de l’élection concernant

en particulier la catégorie en question et liée aux mesures explicitées dans les paragraphes

suivants du même article – contraire à la Constitution ».

Page 102: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

102

La dérive de l’approche jurisprudentielle du Conseil

constitutionnel se situe à plusieurs niveaux. Au prime abord, il aurait dû

sanctionner l’abstention du législateur organique et censurer ipso facto

son incompétence négative .Il lui aurait été plus commode de procéder à

la condamnation de l’abstention du législateur organique qui n’a pas

épuisé sa compétence étant donné que le contrôle concerne l’élection par

suffrage universel direct et égal des membres de la Chambre des

représentants.

Certes, le contenu de l’article 17 a précisé que la loi fixerait les

critères spécifiques d’éligibilité et d’incompatibilité. Elle déterminerait

de même les conditions et les modalités de l’exercice effectif du droit de

vote et de candidature à partir des pays de résidence.

Et d’ajouter que les Marocains résidant à l’étranger jouissent des

droits de pleine citoyenneté, y compris le droit d’être électeurs et

éligibles. Ils peuvent se porter candidats aux élections au niveau des

listes et des circonscriptions électorales locales, régionales et nationales.

Cette disposition ordinaire sape de facto le principe de l’égalité

politique des citoyens érigé en norme impérative s’imposant devant tous

types de législateurs, ordinaire et organique.

En ce faisant, le Conseil constitutionnel bafoue toute

configuration pyramidale a fortiori verticale entre la Charte suprême et

les lois ordinaires162.

162 La hiérarchie des normes s’entend à un classement hiérarchisé d’un ensemble stratifié de

normes juridiques qui forment le système juridique d'un État de droit pour en assurer la cohérence et la rigueur. Elle est basée sur le principe qu'une règle de droit inférieure doit

respecter celle du niveau supérieur en observant ses injonctions et en appliquant ses

dispositions tout en la détaillant. Au cas où s’enclencherait un conflit de normes, la norme

juridique inférieure demeure subordonnée à la règle de droit supérieure.

L’initiateur de cette théorie est Hans Kelsen (1881-1973), auteur de la « Théorie pure du

droit ». La mise en œuvre de cette théorie implique un contrôle juridictionnel qui peut être

effectué par exception lors d'un litige précis (ex : par un juge aux Etats-Unis) ou par voie

d'action lors de la saisine d'un organe spécifique (le Conseil constitutionnel en France). En

Page 103: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

103

De surcroît, la loi organique en tant que norme supra-législative

pourrait empiéter sur le domaine de la loi ordinaire .En revanche, tout

empiètement de la loi ordinaire dans le domaine des normes

supérieurement hiérarchisées doit être entaché d’inconstitutionnalité.

Dans le cas présent, le Conseil constitutionnel a validé, par

mégarde, une loi ordinaire qui incarne, une dérogation d’une règle de

principe prévue in abstracto par la Constitution.

La conséquence et pas des moindres est de violer le principe même

du bloc de constitutionnalité tout en privant l’ordre juridique ainsi établi

de toute dimension verticale aux fortes incidences sur la détermination

des normes et de leur effet juridique163.

En s’attachant dans son examen au seul formalisme , le Conseil

constitutionnel opère dans l’espèce une aberrance en s’écartant des

finalités substantielles des normes constitutionnelles et en insérant dans

l’ordre juridique des lois jugées conformes selon les considérants de ses

d’autres termes, deux modalités sont offertes pour vérifier la compatibilité et la conformité

d’une loi à la Constitution : Avant ou après l'entrée en vigueur de la loi. On parle de contrôle

a priori ou de contrôle a posteriori. En effet, le contrôle a priori ou préventif s'exerce avant

l'entrée en vigueur de la loi. Ce contrôle est généralement confié à un organe spécial. Le

contrôle a posteriori ou répressif implique qu'une loi ne peut être attaquée pour

inconstitutionnalité qu'après avoir été adoptée et promulguée.

La Constitution est la charte suprême qui s’érige au sommet de la hiérarchie juridique d’un

État. Sa primauté peut cependant entrer en concurrence avec les normes juridiques

internationales. En Europe, c'est le cas avec la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE)

et la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) qui donnent la primauté aux

engagements internationaux.

Dès sa constitutionnalisation au Maroc, cette suprématie des règles internationales sur le droit interne alimente de vives polémiques au Maroc, quant à certaines questions lancinantes

entre autres l’égalité entre l’homme et la femme en héritage. 163A en croire Hans Kelsen, « la Constitution, le plus souvent, ne se limite pas à déterminer la

procédure de création des normes juridiques générales (ce qu’on appelle la législation), mais

aussi, très fréquemment, détermine le contenu des lois futures, au moins négativement, en

excluant certains contenus […],mais les mêmes normes générales édictées par le législateur

déterminent toujours non seulement la procédure des organes qui ont à appliquer ces normes,

mais aussi le contenu de ces normes […]. »

Hans Kelsen, Théorie générale des normes – traduit de l’allemand par Olivier Beaud et

Fabrice Malkani – Ed. P.U.F. (coll. Léviathan), 1996, p. 346.616p

Page 104: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

104

décisions mais aux répercussions préjudiciables à l’effectivité des

injonctions constitutionnelles.

Dans un autre ordre des idées, la loi organique se doit de

concrétiser les dispositions constitutionnelles et de booster leur

effectivité d’où l’importance d’une rédaction intelligible et accessible

exempte de confusions. Ces deux critères sont des conditions sine qua

non pour maximiser l’effectivité des énoncés de la loi fondamentale si

bien que le Conseil constitutionnel français en a fait un objectif de valeur

constitutionnelle164.

Loin de se cantonner dans le seul examen formel de l’intégralité

d’une loi, le juge constitutionnel est amené dans son contrôle, au-delà de

la simple vérification de la compatibilité des lois avec les dispositions

constitutionnelles , à sanctionner concomitamment les déviances du

législateur qui serait enclin à voter des lois aseptisées de toute substance,

servant ainsi de simples effets d’annonce dénuées de toute incidence en

matière d’obligation et de sanction et dépourvues de mesures d’ordre

institutionnel et processuel.

Dans l’évolution de la politique jurisprudentielle du Conseil

constitutionnel, la décision n° 818/2011 du 20 octobre 2011 relative au

projet de loi sur les partis politiques incarne un jalon indélébile des

dérives du juge constitutionnel.

D’abord, au lieu de motiver son infirmation partielle sur des

considérants d’ordre substantiel, il a étayé sa réflexion se basant ainsi sur

des éléments falots. En effet, le 4e paragraphe de l’article 32 du projet de

la loi organique est jugé défectueux car il prévoyait la possibilité pour

les partis politiques de bénéficier des services de fonctionnaires publics

164 Cf. Bertrand Mathieu, « Répartition des compétences normatives et qualité de la loi », in

Annuaire international de justice constitutionnelle, 2006, Economica 2007, p. 579 et s.

Page 105: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

105

dans le cadre de la procédure administrative de mise à disposition. Or,

les partis politiques ne constituent pas des organes publics d’autant plus

que cette mise à disposition nuit au principe de la bonne gouvernance

poursuivi par le texte constitutionnel.

En rejetant ainsi l’énoncé dudit paragraphe, le Conseil

constitutionnel omet d’autres imperfections plus prégnantes souffrant le

mutisme délétère de la loi organique. Du reste, la loi organique dans

l’article 2 omet de préciser la nature de la personne morale reconnue aux

partis politiques. Ladite loi a gardé du silence quant à la définition de la

nature de la personnalité morale de droit public ou de droit privé. Cette

carence sèmerait les confusions quant au droit applicable en cas de litiges

et embrouillerait le domaine de la compétence juridictionnelle qui serait

davantage obscurcie devant la multiplicité des questions soulevées par

les justiciables et qui feraient que la juridiction habilitée ne serait pas la

même durant les multiples étapes du contentieux concernant le parti

politique.

En outre , satisfaisant les injonctions prêchées par l’article 154165

de la Constitution en matière de bonne gouvernance et notamment de

reddition des comptes , l’article 25 de la loi organique dispose que tout

parti politique doit être organisé et administré selon les principes

démocratiques donnant vocation à chacun de ses membres de participer

effectivement à la direction et à la gestion de ses différents organes. Il

doit être également tenu compte des principes de la bonne gouvernance

165 Il dispose : « Les services publics sont organisés sur la base de l'égal accès des citoyennes et

citoyens, de la couverture équitable du territoire national et de la continuité des prestations.

Ils sont soumis aux normes de qualité, de transparence, de reddition des comptes et de

responsabilité, et sont régis par les principes et valeurs démocratiques consacrés par la

Constitution. »

Page 106: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

106

dans la gestion des affaires du parti, notamment les principes de

transparence, de responsabilité et de reddition des comptes.

Or, l’énoncé de cet article demeure lacunaire cantonné dans un

aspect creux et incantatoire car ne prévoyant aucun système de sanction

en cas de violation des règles statutaires du parti politique. En effet, les

principes de transparence, de responsabilité et de reddition des comptes

stipulent l’observance des droits et des devoirs et toute transgression

serait passible de sanction.

La tenue des élections libres et transparentes pour la composition

des organes partisans et le respect des conditions du déroulement des

délibérations sont souvent dénoncés.

Avec un énoncé aussi étriqué, tout recours devant les tribunaux

serait poursuite de vent devant la mutité de la loi quant au régime de

sanctions applicable d’autant plus que toute mesure disciplinaire ne

pourrait faire l’objet d’un examen pour conformité avec les statuts du

parti devant une juridiction compétente.

Le paradoxe criard est que le silence sur les sanctions prévues

devant toute attitude attentatoire aux droits des membres partisans par

les secrétaires généraux et les dirigeants, se double d’un arsenal répressif

« draconien » pour toute atteinte à l’ordre public166.

Qui plus est, l’article 38 prohibe expressément aux partis

politiques de bénéficier de toute subvention des collectivités

166 Qualifié d’abscons, l’article 60 de la loi organique relative aux partis politiques profite avec

son équivoque aux interprétations arbitraires de la part des autorités administratives chargées

de l’application de la loi.

Avec sa disposition fort abstruse , il est l’incarnation pérenne, dit-on , de l’épée de Damoclès

sur l’existence légale d’un parti politique : « lorsque les organes délibérants d’un parti

politique prennent une décision ou mesure ou appellent à une action qui porte atteinte à

l’ordre public, l’autorité gouvernementale chargée de l’Intérieur requiert du président du

tribunal administratif de Rabat, statuant comme juge des référés, d’ordonner la suspension

du parti et la fermeture provisoire de ses locaux […] ».

Page 107: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

107

territoriales, des établissements publics, des personnes morales de droit

public ou des sociétés dont le capital est détenu, en totalité ou en partie,

par l’État167.

L’aphasie cette fois - ci réside dans la nature de la transgression

de cet article. Relève - t-elle d’une simple infraction administrative ou

représente-t-elle une infraction pénale habilitant partant une juridiction

répressive ?

Dans les faits, les subventions qui proviennent de personnes morales de

droit privé servent de couverture sinon pour les personnes de droit

public du moins pour les sociétés exerçant des activités lucratives

principalement reliées aux commandes publiques.

Par voie de conséquence, que l’on ambitionne l’assainissement

des ressources des partis politiques ou que l’on aspire à moraliser leurs

rapports avec les deniers publics, ces deux issues de subventionnement

doivent être interdites.

Un fossé sépare les dons émanant des sympathisants désintéressés de

ceux animés de motifs malintentionnés.

Or, le Conseil constitutionnel a dévié en s’abstenant de formuler

des réserves quant à ces carences relatives au financement privé des

partis politiques ou à celles liées à leur gestion et organisation.

Le comble est que, au lieu de s’activer dans une posture

constructive innovant au chapitre des décisions, le Conseil

constitutionnel se borne dans une approche axée sur « le considérant –

balai » se départissant de toute lecture intégrale de la loi organique mais

167 Il interdit toute : «subvention directe ou indirecte des collectivités territoriales, des

établissements publics, des personnes morales de droit public ou des sociétés dont le capital

est détenu, en totalité ou en partie, par l’État, les collectivités territoriales, les établissements

publics ou les personnes morales de droit public »

Page 108: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

108

déclarant les autres dispositions authentiquement compatibles avec la

Constitution quoique non examinées.

Cette pratique qualifiée, derechef, de déni de justice

constitutionnelle, est à même de saper la sécurité de l’ordre juridique,

laissant dans l’ombre du contrôle certains articles de la loi aux dires de

Guillaume Drago et Nicolas Molfessis 168.

Par ailleurs, le Constituant peut pécher dans la rédaction de la loi

fondamentale qui pourrait abriter des poches tantôt d’équivoque tantôt

de silence nuisant à l’intelligibilité et à l’accessibilité du texte.

Devant l’ankylose du législateur organique doublée de son

impuissance décisionnelle, il incombe au juge constitutionnel

d’expliciter les énoncés abscons et combler les lacunes par une approche

interprétative ancrant dans la réalité les prescriptions abstraites et

investissant dans les virtualités du texte constitutionnel169.

Se déliant de toute interprétation déconstructive inhérente à une

lecture littéralo-formelle sans aucune incidence sur l’effectivité des

droits et libertés posés, le juge constitutionnel doit déployer une vue

panoramique sur la substance constitutionnelle pour traduire ses

dispositions dans une dimension pléthorique.

Le nouvel ordre constitutionnel ainsi aménagé confère à

l’intervention jurisprudentielle du juge constitutionnel une importance

168 Chronique constitutionnelle, in Revue « Justices », Ed. Dalloz, 1996, p. 310. 169 A ce juste propos, il serait seyant de rappeler les propos suivants fort significatifs « Si

l’interprétation c’est bien déterminer par un acte de volonté le sens d’un texte et si une norme

n’est pas autre chose qu’une signification attachée par l’ordre juridique à un acte humain,

alors, interpréter c’est bien déterminer la norme exprimée par un texte. Aussi, le juge

constitutionnel, lorsqu’il interprète la Constitution, détermine lui-même la norme

constitutionnelle : il exerce un pouvoir constituant. » Michel Troper, « Kelsen et le contrôle

de constitutionnalité », in Carlos-Miguel Herrera (Dir.), Actualité de Kelsen en France,

Bruylant-LGDJ, Paris, 2001, p. 181.

Page 109: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

109

de premier ordre mais tempérée du garde–fou induit par la motivation de

sa décision qui devrait être acceptée comme raisonnable170.

Assimilé au protecteur des droits et libertés, le juge constitutionnel

doit transcender la vision étriquée du législateur négatif171en édifiant le

statut de concepteur des lois organiques, l’ultime exigence étant

d’observer leur compatibilité avec la quintessence du texte

constitutionnel.

Dans cet ordre des idées, les confusions disséminées dans les

couffins du texte sont devenues légion notamment entre le préambule et

l’article 133. La mission du juge constitutionnel serait d’interpréter les

virtualités du Préambule afin de mieux conjurer les scories d’une

rédaction éclopée qui affecte la rédaction du droit diplomatique172.

En effet, l’approche jurisprudentielle du juge constitutionnel doit

sacrifier à l’exigence de se plier aux injonctions du texte constitutionnel.

170 Jacques Lenoble et André Berten, Dire la norme (droit, politique et énonciation), L.G.D.J.,

1990 (Ed. Story-Scientia), p. 45.249p 171 A en croire Hans Kelsen, la fonction du juge constitutionnel ne relève pas du juridictionnel

mais du législatif. Il est, dans ce sens, la représentation d’un second degré de la fonction

législative attendu que les décisions émanant du juge constitutionnel portent sur les lois

elles-mêmes et ne consistent pas à édicter des normes individuelles d’où son appellation du

« législateur négatif ».

Il surenchérit à ce niveau en déduisant : « Ainsi l’annulation des lois est la fonction

législative même, et un tribunal annulant une loi est un organe doté d’un pouvoir législatif »

In : Qui doit être le gardien de la Constitution ? Trad. Sandrine Baume . Ed. Michel

Houdriard, Paris, 2006, p. 127-128. 172Alexandre Flûckiger avance : « Là où les juristes cherchent la précision, les diplomates

pratiquent le non-dit et ne fuient pas l'ambiguïté. Il arrive donc, plus souvent qu'on ne croit,

qu'ils ne se mettent d'accord sur un mot que parce qu'il n'a pas la même signification pour tout le monde. [···] De même encouragent-ils des techniques de rédaction qui permettront

de laisser subsister ici et là d'intéressantes - et prometteuses - contradictions » Alexandre Flûckiger «Le principe de clarté de la loi ou l'ambiguïté d'un idéal», Cahiers du

Conseil constitutionnel n° 21 Dossier : La normativité) - janvier 2007

Sur: http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/nouveaux-

cahiers-du-conseil/cahier-n-21/le-principe-de-clarte-de-la-loi-ou-l-ambiguite-d-un-

ideal.50557.html

Page 110: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

110

L’interprétation des virtualités des énoncés constitutionnels est ouverte

à maintes lectures.

La présomption de constitutionnalité de la loi adoptée par le

législateur demeure la méthode la plus prisée pour trancher entre moult

possibilités d’interprétation offertes.

Certes, cette technique rend caduques les défaillances de la norme

législative mais demeure parée de toutes les vertus car fléchissant sous

l’impératif substantiel de la Constitution matériellement déterminant.

Les prescriptions du texte constitutionnel demeurent le filtre sans

lequel une loi infra-constitutionnelle ne saurait être validée. L’enjeu

devient majeur et le tri des critères épineux quand les dispositions

constitutionnelles sont dotées d’abstraction avancée et d’imprécision.

Dans cette rubrique se répertorie la très difficile fusion des

enseignements antinomiques du Préambule conduisant à accorder aux

conventions internationales dûment ratifiées par lui, dans le cadre des

dispositions de la Constitution et des lois du Royaume, dans le respect

de son identité nationale immuable, et dès la publication de ces

conventions, la primauté sur le droit interne du pays, et harmoniser en

conséquence les dispositions pertinentes de sa législation nationale. L’on

pourrait anticiper sur la voie que va se frayer le juge constitutionnel

acculé face à une disposition d’une loi organique à contrôler la

conventionalité des lois ordinaires garantissant les droits et les libertés.

Il se trouverait engouffré entre une validation sous-tendant que

cette disposition est compatible avec la Constitution et une déclaration

avançant que seuls les droits expressément prévus par les articles de la

Constitution peuvent être soumis au contrôle de constitutionnalité. Entre

universalisme induit simultanément par la Constitution et l’islam ouvert,

et conservatisme stipulé par les constantes et les lois du Royaume, le

Page 111: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

111

juge doit opérer un choix ardu voire difficultueux. Il n’en demeure pas

moins vrai que l’option arrêtée pour la première thèse impliquerait une

mise en œuvre d’une politique jurisprudentielle cadrant avec

l’expectative de la complémentarité normative au chapitre des droits de

l’Homme.

Priser la seconde serait exercer un effet subversif à l’unité

constitutionnelle en ravalant le Préambule à un simple texte creux et

incantatoire pour ne pas dire un simple hors d’œuvre déconnecté de tout

ancrage .Cette voie serait chaotique attendu qu’elle nuirait à

l’indivisibilité et à l’universalité des droits de l’Homme et pourrait

mettre en cause la responsabilité internationale du Maroc.

2. Le contrôle des juges ordinaires

Nous étudierons d'abord le contrôle du juge judiciaire (2.1) avant de

vaquer à l'analyse du contrôle effectué par le juge administratif (2.2).

2.1. Le juge judiciaire

Le juge national est en première ligne pour garantir la protection

des droits et libertés. Pourtant, le juge judiciaire s'affiche tel le gardien

naturel de libertés individuelles en raison des doutes qui ont longtemps

pesé sur le juge administratif. Aujourd’hui, la suspicion à l’égard des

juridictions administratives n’a plus lieu d’être.

Page 112: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

112

En ce sens, nul ne peut être détenu arbitrairement d’autant que,

l’autorité judiciaire, gardienne des libertés individuelles, assure le

respect de ce principe.

Il résulte de ce principe que c’est à un magistrat d’autoriser les atteintes

substantielles à la liberté individuelle, telle que la prolongation d’une

garde à vue, une mesure de détention provisoire.

De la même façon, les atteintes portées à la liberté individuelle et

au domicile doivent être sanctionnées par le juge judiciaire.

Ainsi, lorsque l’administration porte une atteinte injustifiée à la propriété

privée, elle perd le privilège de juridiction dont elle jouit au profit de la

juridiction administrative (théorie de l’emprise). Il convient de voir à

présent le cas de la réparation des erreurs judiciaires (2.1.1) et la

réparation de la dignité (2.1.2).

2.1.1. Le cas de la réparation des erreurs judiciaires

Quoique reconnu, une pléthore de disparités jalonne le système de

dédommagement dans le droit comparé. Les conditions de fond ne sont

pas exigées au même niveau de la procédure d’autant plus que la nature

de la réparation diffère. De même, l’on peut consentir à l'automaticité de

la réparation dans le cas de France, la Maroc et l’Italie alors qu’en

Allemagne et au Royaume- Uni, elle souffre des défaillances.

En effet ,en vertu de l’article 122 de la Constitution marocaine

2011,l’indemnité est de droit ,abstraction faite de la nature de l’erreur,

qu’elle soit issue de jugement de la machine judiciaire ou bien d’un

Page 113: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

113

fonctionnement défectueux du service public173. Les notes de

jurisprudence des professeurs Benabdallah et Rousset soulèvent le fait

que le système d’indemnisation du Maroc est le plus avantageux174.

Autrement dit, le dédommagement est tributaire de la seule

démonstration de la responsabilité d’un agent du service public ou d’une

erreur judiciaire .Loin s’en faut , en France et au Royaume-Uni ,une

entrave procédurale incarnée dans le passage par le filtre de la réparation

est susceptible de vider le principe de sa substance en particulier dans le

droit anglais où la révision n’est pas toujours source de réparation alors

qu’elle est encline d’être une simple formalité superficielle en France .

En Italie, la réparation s’érige au rang d’un droit

constitutionnellement protégé avec la loi n° 504 de 1960.En d’autres

termes, elle s’affirme comme un véritable droit subjectif devant être

satisfait dès que les conditions sont réunies175. Mais, l’évolution en la

matière s’arrête à cette affirmation176.Pour autant, la responsabilité de

l’État du fait du dysfonctionnement dommageable de la justice appelle

la combinaison de diverses dispositions légales. Le jugement

d’acquittement ordonne la restitution des sommes payées en exécution

de la condamnation et des peines pécuniaires. En outre, le bénéficiaire

173 Carole Nawessi, « Erreur judiciaire : conséquence du déclin du système judiciaire et des

valeurs sociales sans auteur précis » (1ère partie)- Mars 2014, sous le numéro 15.

Sur :http://juridika.net/droit-penal/procedure-penale/erreur-judiciaire--consequence-du-

declin-du-systeme-

judiciaire-et-des-valeurs-sociales sans-auteur-precis-t40.html#sthash.cwewnv8G.dpuf 174Michel Rousset et Mohammed Amine Benabdallah, « La réparation du préjudice résultant

d’une erreur judiciaire », REMALD, numéro double 109-110, mars-avril 2013, p. 227 175Pour l’application de l’article 644 C.P.P, la victime doit avoir été acquittée à l’issue de la

révision et n’avoir pas :

« provoqué l’erreur judiciaire par intentionnalité ou faute grave ». L’indemnisation dépend

de la durée de la peine encourue des « conséquences personnelles et familières dérivant de

la condamnation ». Les sommes dues éventuellement à ce titre sont payées sous la forme

d’un versement unique ou d’une rente viagère. 176 « Responsabilité de l’Etat pour le dysfonctionnement dommageable de la justice en

Italie(La) »Juriscope - 2000

Page 114: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

114

de la révision pourra demander que la décision réformée soit publiée. On

consent ainsi à la victime le rétablissement de sa dignité.

Pour tous ces droits, elle est une décision de l’autorité judiciaire

tandis qu’elle est une procédure aux mains du ministre de la justice en

droit anglais. Qui plus est, face à la procédure unifiée en la matière pour

tous ces pays, elle revêt tout son sens en droit anglais, dans lequel

l’ouverture d’un droit à réparation est bien distincte de la reconnaissance

de l’erreur judiciaire, et qui a donc mis en place un second « filtre » pour

l’admission de la demande en indemnisation.

Cela étant, en Italie, la procédure de « réparation des erreurs

judiciaires » est régie par les articles 643 et suivants du Code de

procédure pénale. Par ailleurs, le revirement de la Cour de cassation en

matière d’indemnisation des victimes de dysfonctionnement de la justice

semble ouvrir la voie à une amélioration d’origine prétorienne. Aux

termes de l’article 14, les dispositions de la présente loi ne portent pas

atteinte au droit à la réparation en faveur des victimes d’erreur judiciaire

et d’injuste détention. Il s’agit de réparer, même imparfaitement, les

conséquences des dysfonctionnements de l’administration de la justice.

L’action ouverte à la victime d’erreur judiciaire se prescrit par deux ans.

En matière d'indemnisation des détentions provisoires, le droit

anglais méconnaît toute procédure de réparation pour une détention

provisoire. Certaines règles visent à alléger le poids des réparations pour

les finances publiques tandis qu'en Allemagne, la responsabilité de l'État

est automatique, quand bien même elle ne serait engagée qu'au delà des

six premiers mois de détention et même si la réparation est forfaitaire par

Page 115: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

115

jour de détention. En France, on souligne une incomplétude de

l'uniformisation177.

Au Maroc, l’indemnisation de la victime est conditionnée à sa

demande en vertu de l’article 573 du code de procédure pénale. Si elle

ne la fait pas, elle ne sera pas dédommagée. L’action en indemnisation

est ouverte à la victime. Si celle-ci est décédée, elle est ouverte à son

conjoint, ses ascendants et ses descendants. Si un parent d’un degré plus

éloigné en fait la demande, elle devra prouver le préjudice matériel que

lui a causé la condamnation178 alors que le droit français dispose encore

que pour être indemnisée, la victime ne doit pas être à l’origine de

l’erreur comme le prévoit le protocole n°7 à la convention de sauvegarde

des droits de l’homme et des libertés fondamentales. De même, l’État

est exonéré des dommages- intérêts dus au faux témoignage. C’est la

personne qui a fait le faux témoignage qui se chargera d’assumer ses

actes.

Depuis la loi marocaine du 30 décembre 2000, la victime qui subit

personnellement et directement un préjudice physique, moral ou

matériel, du fait d’une infraction pénale, d’une erreur judiciaire révélée

par un fait nouveau et ayant fait l’objet d’une procédure de révision peut

obtenir réparation intégrale du préjudice matériel et moral résultant de

sa condamnation.

Dans la même lignée, la Chambre administrative de la Cour de

Cassation a décidé que le juge administratif est compétent pour statuer

177 Les proches du détenu provisoire acquitté, bénéficiaire d'un non-lieu ne peuvent pas obtenir

réparation de leur préjudice moral, alors que ceux d'un condamné innocenté après la révision

de son procès, peuvent l'obtenir. Or, on ne voit pas la différence de situation dans le désarroi

de la famille de l'un et de l'autre qui justifie une telle différence de traitement. En outre,

l'étude de cas fait apparaître que l'indemnité accordée au titre du préjudice moral n'est

proportionnée à la durée de la détention que jusqu'à trois mois d'incarcération; au-delà,

l'indemnité subit un effet de seuil accentué à partir de deux années de détention. 178 Article 573 du CPPM, p. 230 .

Page 116: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

116

sur tous les recours tendant à mettre en cause la responsabilité de l’État

pour la réparation d’un dommage résultant des actes et des activités des

personnes de droit public. Ainsi, la victime est désormais assurée

de pouvoir obtenir une indemnité en réparation du préjudice subi dès lors

qu’elle apportera la preuve de la faute commise par le service public de

la justice et celle de la réalité du préjudice179 et, par ailleurs, c’est devant

le seul juge administratif qu’elle pourra agir180 .

Depuis la réforme de la constitution, les citoyens marocains sont

mieux traités et leurs droits de plus en plus respectés. Le constituant de

2011 s’est contenté de poser le principe d’indemnisation en laissant au

juge toute latitude d’évaluation du dommage causé par l’erreur

judiciaire.

2.1.2. La réparation de la dignité

Répondant aux impératifs des droits de l’Homme, les États sont

tenus de réparer les dommages subis non seulement au niveau matériel

mais également moral en l’occurrence la dignité et la réputation. En

effet, tous ces droits ont envisagé de réparer ce type de dommage en

dépit des dissimilitudes enregistrées tant au niveau de la reconnaissance

qu’au niveau de l’effectivité : Reconnu avec réserves par le droit anglais

en vertu de la section 133A181du Criminal Justice Act 1988,

179 Il convient de souligner qu’il n’est pas facile dans nombreux cas de démontrer la faute

commise par le service public ainsi que la réalité du tort subi. Ceci doit incomber à l’Etat

dans la mesure où par méconnaissance ou par manque de moyens, le citoyen ne peut assurer

la démonstration. 180 C.C.A., 12 février 2013, Agent judiciaire du Royaume c/ Chelkha

181 Louise Belanger-Hardy, «Négligence, victimes indirectes et préjudice moral en common

law: les limites à la réparation se justifient-elles?» (Negligence, Mental Harm and Indirect

Victims: Can Barriers to Compensation Be Justified?) (1998). Osgoode Hall Law Journal,

Vol. 36 No. 3 (1998). Sur: https://ssrn.com/abstract=2271673

Page 117: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

117

laconiquement en droit français aux termes de l’article 626 du

CPC182,largement par les droit s marocain ,italien et allemand.

Cela étant, la Constitution et le Code de procédure pénale

marocains prévoient des mesures pour blanchir la réputation de la

victime tout comme le cas français duquel il s’inspire est qui tient à faire

publier la décision de diverses manières183. En Italie, le jugement

d’acquittement ordonne la restitution des sommes payées en exécution

de la condamnation et des peines pécuniaires. En outre, le bénéficiaire

de la révision pourra demander que la décision réformée soit publiée. On

consent ainsi à la victime à rétablir sa dignité.

Différemment, le Royaume - Uni, paraît plus réticent et demeure

attaché seulement à la réparation pécuniaire dont il est question du «

montant » dans les sections 133 et 133A du Criminal Justice Act 1988.

Or, moult divergences sont notées en matière de réparation du

préjudice moral subi par la famille de la victime dans la mesure ou le

droit français introduit la notion du« préjudice d’affection » induit par

l’erreur judiciaire ,formule absente dans le droit anglais qui se trouve

réservé sur les demandes des victimes indirectes. La même conception

est appliquée en droit allemand sous la forme

d’Aufopferungsanspruch184(littéralement, la « responsabilité pour

182 Il dispose à son premier alinéa qu’« un condamné reconnu innocent en application du présent

titre a droit à réparation intégrale du préjudice matériel et moral que lui a causé la condamnation »

183 Ainsi l’article 626 du CPP dispose-t-il à son avant-dernier alinéa : « Si le demandeur le requiert, l’arrêt ou le jugement de révision d’où résulte l’innocence du condamné est affiché

dans la ville où a été prononcée la condamnation, dans la commune du lieu où le crime ou

le délit a été commis, dans celle du domicile des demandeurs en révision, dans celles du lieu

de naissance et du dernier domicile de la victime de l’erreur judiciaire, si elle est décédée ;

dans les mêmes conditions, il est ordonné qu’il soit inséré au Journal officiel et publié par

extraits dans cinq journaux au choix de la juridiction qui a prononcé la décision. » 184 Initialement prévue aux paragraphes 74 et 75 de l’Allgemeines Landrecht für die

Preußischen Staaten (1794)

Page 118: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

118

sacrifice ») fondée non pas sur la faute mais sur la solidarité sociale qui

est entérinée par le droit marocain.

2.2. Le juge administratif

Les droits fondamentaux constitutionnellement consacrés

n'impliquent pas inexorablement une portée générale et absolue. Ils

doivent être mis en œuvre et encadrés par le législateur et, dans certaines

conditions, les considérations de l'ordre public induisent leur limitation

temporaire même par les autorités relevant de l'Exécutif.

Toutefois, l'encadrement de ces droits s'exerce toujours sous le

contrôle du juge constitutionnel pour les mesures de nature législative

ou du juge administratif pour les mesures relevant du pouvoir exécutif.

Réussissant un syncrétisme de bon aloi, peut-on déceler, l’ordre

judiciaire ainsi aménagé au Maroc a contourné tout mimétisme sacrifiant

à la condition d’un réalisme pertinent .En effet, en consacrant un ordre

juridictionnel unique , la justice administrative spécialisée répondait en

écho aux expectations d’un contentieux administratif doublé d’une

multiplication progressive des voies de recours en perpétuelle

mouvance185.Cette spécialisation en matière du contentieux administratif

n’a pas induit un double ordre juridictionnel ainsi qu’il en est en France.

Par voie de conséquence, au sein du pouvoir judiciaire dont l’unité

est toujours maintenue et à titre de spécialité fonctionnelle, les tribunaux

administratifs et cours d’appel administratives, sous le contrôle de la

185 En effet, après la création des tribunaux administratifs entrés en fonction en 1994, l’on a

procédé en vertu de la loi du 14 février à la création de deux cours d’appel de Marrakech et

de Casablanca, laquelle loi serait modifiée par celle du 18 février 2009.

Page 119: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

119

Chambre administrative de la Cour suprême, seront en vertu de la

nouvelle Constitution, compétents en matière administrative.

Au Maroc, la protection des libertés fondamentales est d'origine

prétorienne. C'est le juge administratif qui s'est le premier imposé en tant

que garant de la protection des droits de l'Homme186.

Les citoyens, peuvent encourir le risque de l’arbitraire et des abus

de l’administration. Le juge administratif est compétent pour contrôler

les actes émanant de l’administration, et qui portent atteinte aux libertés

fondamentales. Il y a deux possibilités d’intervention :

D'abord, à travers le recours pour excès de pouvoir, qui vise

l’annulation de l’acte administratif jugé illégal. S'affiche ensuite le

recours en indemnité, lorsque l’intervention de l’administration peut être

qualifié de faute de service et qui peut finir par attribuer des dommages

de la victime.

Le juge administratif peut statuer en matière de liberté à l’occasion

d’un recours pour excès de pouvoir, permettant d’annuler un acte

administratif. La technique des principe généraux du droit a ainsi permis

au juge de développer un catalogue de normes propres à assurer la

promotion des droits et libertés entre autres les droits applicables à la

garantie juridictionnelle , le droit au recours , le droit au procès équitable.

Par ailleurs il existe devant le juge administratif un recours

spécifique et efficace en matière de protection des libertés, le référé-

liberté. C’est une procédure récente puisqu’il n’existe que depuis la loi

du 30 juin 2000. Cette procédure permet au juge des référés de

186 Omar Bendourou, « Les droits de l’homme dans la constitution marocaine de 2011: débats

autour de certains droits et libertés », La Revue des droits de l’homme [En ligne], 6 | 2014,

mis en ligne le 28 octobre 2014, consulté sur. URL :

http://journals.openedition.org/revdh/907

Page 120: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

120

prononcer, à l’encontre de l’administration, une injonction en vue de

mettre fin à une atteinte portée à une liberté fondamentale.

Les violations des libertés publiques, dans un État démocratique,

sont généralement les incidences imminentes plus de manquements

administratifs que de l'intervention du législateur.

Du reste, le recours contre les lois réputées contraires aux libertés

publiques n'a été possible historiquement qu'ultérieurement à l'ouverture

des voies de recours contre les actes de l'administration.

C'est le recours pour excès de pouvoir devant le Conseil

constitutionnel au Maroc qui a été le dispositif imparable de la garantie

des libertés publiques.

Cette voie de recours a émergé par voie jurisprudentielle au XIXe siècle,

en s'ouvrant progressivement à toute personne ayant intérêt à

l'annulation d'une décision administrative.

De même, la compétence du juge s'est élargie aux actes du

gouvernement de valeur législative, quand ce dernier était autorisé à

légiférer.

En somme, et pour récapituler, le juge administratif est compétent

à annuler n'importe quelle décision prise par une autorité administrative

quelconque, individuelle ou de portée générale, attentatoire aux libertés

publiques. Il le fait en toute référence à la loi qui organise les conditions

d'exercice de cette liberté, à la Constitution elle-même et même à un

principe fondamental qu'il dégage lui-même.

En France, au Conseil d'État qui n'est plus le juge de droit commun

de la légalité des actes administratifs se substituent des juridictions

subordonnées et les tribunaux administratifs.

Cependant, il se hisse toujours au sommet de la pyramide des

juridictions administratives et demeure habilité en premier et dernier

Page 121: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

121

ressort pour enclencher des recours pour excès de pouvoir conduits

contre les décisions prises directement par les ministres et le

gouvernement.

Par ailleurs , le rendement efficient du recours pour excès de

pouvoir a été amplifié en France par la création d'une procédure de sursis

à exécution de la décision litigieuse, procédure elle-même rénovée il y a

quelques années sous la forme d'un référé qui permet au juge «

d'ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté

fondamentale à laquelle une personne morale de droit public aurait porté

une atteinte grave et manifestement illégale. »187.

En France, les exemples foisonnent : le principe de la liberté de

réunion découle de la loi du 30 juin 1881. Il doit primer sur les pouvoirs

de police, , à tout le moins , en l'absence de menaces de troubles graves

et le maire ne peut donc pas empêcher une réunion publique. (Conseil

d'État. 19 mai 1933 Benjamin).

Un autre cas illustratif et pas des moindres : La liberté

d'association figure parmi les principes fondamentaux consacrés par les

lois de la République à valeur constitutionnelle et l'autorité

administrative ne peut pas prendre de mesure préjudiciable à ce droit

(Conseil d'État. 11 juillet 1956. Amicale des Annamites de Paris).

De même, le principe selon lequel l'État doit contester l'extradition

d'un étranger lorsqu'elle est demandée dans un but politique est un

principe fondamental reconnu par les lois de la République que le

187 Renaud Denoix De Saint Marc, «Les garanties constitutionnelles des droits et libertés

politiques

en France»- Paris, conseil-constitutionnel.fr,le 2 février 2009

http://www./conseil-constitutionnel/francais/publications/contributions-et-

discours/2009/les-garanties-constitutionnelles-des-droits-et-libertes-politiques-en-

france.147422.html

Page 122: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

122

Conseil d'État a lui même dégagé à partir des règles constantes de notre

droit de l'extradition (Conseil d'État. 3 juillet 1996, Koné.)

Pour autant, la seule limite qui s'impose au juge administratif

demeure l'interdiction qu'il s'impose à lui-même d'écarter l'application

d'une loi sous le prétexte de son caractère inconstitutionnel.

En effet, le Conseil d'État a toujours appréhendé que la loi votée

par le Parlement s’impose à lui car elle est censée être l'émanation de la

volonté générale. La critique et, le cas échéant, la censure de la loi

appartiennent au Conseil constitutionnel.

Page 123: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

123

DEUXIEME PARTIE : LES GARANTIES NON

JURIDICTIONNELLES

Page 124: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

124

Lesage affirme sans ambages :

[...] la première base de toute constitution, [...] le premier soutien de

la liberté publique, [...] la garantie la plus ferme de tous les droits de l'homme vivant

en société se trouvent dans la division des pouvoirs.

Corroborant ces propos, Cambacérès soutient :

« nous sommes tous d'accord qu'elle [la proposition] tient à la

séparation des pouvoirs sans laquelle il est difficile de donner aux gouvernés une

garantie contre les gouvernants […]la séparation des pouvoirs est donc «le palladium

de la liberté .

C'est là que où se confine indubitablement la sauvegarde de la

liberté et de l'indépendance des pouvoirs.

Pour ainsi dire, la garantie se manifeste dans cette bonne organisation

des pouvoirs.

La quintessence de la garantie est inhérente à la capacité

d'organiser chaque pouvoir et tous les pouvoirs si bien que dans la

poursuite de leur intérêt particulier, ils pourront satisfaire aux injonctions

de la préservation de la Constitution et l'intérêt de tous, en d’autres

termes, en particulier la garantie des droits :

« [...] il faut [...] qu'ils soient forcés à se respecter mutuellement par

le sentiment de leur force et de leur dignité. Il faut que dans l'organisation du

Page 125: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

125

gouvernement chacune de ses parties soit établie et posée de manière à retenir toutes

les autres dans leur place ; il faut pour ainsi dire opposer l'ambition à l'ambition... ».

La modération des pouvoirs, garantie de nos droits, ne découlera

pas d'un contrôle extérieur mais du seul jeu des pouvoirs pourvu qu'il

soit bien organisé103. En un peu plus clair, le système politique de l'État

(Section 1) couplé des institutions constitutionnalisées (Section 2)

forment la quintessence des garanties non juridictionnelles.

Chapitre 4 :

Le système politique de l'État

La représentation parlementaire (1) et le pluralisme politique (2)

sont pour autant des mécanismes garantissant la protection des libertés

publiques

1. La représentation parlementaire

L'intérêt du peuple est de mettre ses pouvoirs en représentation.

La liberté s'étend quand on se fait représenter. Sieyès pousse sa logique

représentative jusqu'à un point jamais atteint, fut-ce par Benjamin

Constant, attendu qu'il préviendra contre l'abandon de tous nos droits

politiques qui conduirait à la perte d'une garantie essentielle.

En tant qu’institution étatique représentant le peuple, le Parlement

s’érige en gardien des libertés publiques.

Page 126: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

126

La fonction parlementaire traduite dans l’élaboration des lois,

l’adoptions du budget et le contrôle de l’exécutif couvre tout le spectre

des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels et impacte

considérablement la jouissance des droits de l’Homme.

Cette représentation parlementaire veille à ce que les dispositions

internationales des droits de l’Homme soient insérées dans les dispositif

législatif interne en s’appliquant à ce que les projets de loi ne soient pas

antinomiques aux obligations conventionnelles de l’État tout en initiant

des mesures assurant la prééminence des normes internationales sur les

normes internes et assurant la justiciabilité de tous les droits l’Homme.

A ce juste propos, il importe de souligner qu’en France, à titre

d’exemple, la ratification des traités les plus importants est soumise à

l’approbation du pouvoir législatif. L’on assiste dernièrement à une

prédisposition, certes rare, à la détermination des conditions

d’application des traités attendus que certaines constitutions affirment

une présomption d’applicabilité directe des traités en attribuant la

compétence aux juges nationaux pour connaître des réclamations

fondées sur des traités188.

Or, la réception189, qui marque la pratique des systèmes dualistes,

présuppose la prise de mesures internes d’exécution, voire de

188« Internalisation du droit, internalisation de la justice », 21-23 juin 2010 Cour suprême du

Canada Ottawa, 3ème congrès de l’Association des hautes juridictions de cassation des pays

ayant en partage l'usage du français (AHJUCAF). 189 C’est le terme employé par la doctrine depuis Anzilotti. Dionisio Anzilotti (1867-1950) est

une illustre référence italienne du droit international qui a marqué le début du XXème siècle.

Son œuvre traite la question centrale de l’effectivité du droit international public qui

demeure selon lui tributaire de l’affirmation d’un droit positif international. En ce sens,

rompre avec la tradition jusnaturaliste, ce que veut à toute force Anzilotti, exige moins

d’inventer cette existence du droit international public que d’en rendre compte, ce qui n’est

pas des tout tâches faciles.

Page 127: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

127

transformation, du traité. A défaut de l’automaticité intégrative, maintes

techniques d’intégration du traité coexistent, selon les cas.

Entre la ratification marquant l’engagement international de l’État

et la validité interne du traité, qui lui est généralement attribuée par le

pouvoir législatif, les États procèdent au choix. Une indispensable

transposition dans le droit interne par la loi s’exige pour que le traité soit

opposable et invocable dans le droit interne.

En somme, l’organe législatif est appelé à avaliser le traité conclu

par le pouvoir exécutif tantôt lors de la ratification du traité tantôt au

cours de son incorporation au droit interne.

La pratique marocaine, telle qu’elle découle de la Charte

fondamentale requiert pour l’incorporation d’un engagement

international tantôt l’adoption par le souverain d’un dahir de ratification

après autorisation législative prévue par la Constitution dans certains cas

tantôt par une loi dûment publiée au Bulletin officiel permettant son

opposabilité et invocabilité par les justiciables dans les juridictions

internes.

Cette pratique marocaine s’inscrit, a fortiori, dans un système

similaire à celui de la France où la ratification des traités les plus

importants est soumise à l’approbation du pouvoir législatif. Il tient

également du système dualiste qui nécessite une transposition dans le

droit interne par la loi pour que le traité soit opposable et invocable dans

le droit interne.

Rappelons-le encore une fois, il se proclame en un système

moniste avec prépondérance et non-primauté du droit interne. La

supériorité du droit interne semble être atténuée.

Les INDH peuvent soumettre au Parlement les recommandations,

propositions et rapports relatifs aux droits de l’Homme. Elles peuvent

Page 128: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

128

présenter et discuter les rapports annuels devant les commissions

parlementaires, et formuler un avis sur tous les projets et propositions de

loi susceptible d’avoir un impact sur la jouissance des droits de

l’Homme.

Les INDH peuvent également assurer enfin des sessions de

formation au profit des parlementaires en vue de renforcer leurs

capacités en la matière

2. La liberté politique

Si on en croit au néo-institutionnalisme190et à la théorie

transitologique, pluralisme politique, parlementarisme et multipartisme

sont des garants des libertés publiques.

A n'en point douter, la liberté politique incarne une garantie

politique organisée. A ce juste propos, l'égalité politique et la

démocratisation des conditions de la participation politique en sont les

traits saillants. En ce sens, Dubois-Crancé réitérait que la vraie, la seule

garantie du peuple contre le despotisme» consistait dans la confiance

qu'il pouvait avoir dans une administration de son choix191.

Encore faut-il ancrer l'égalité politique, droit inaliénable sans

lequel il n'y a pas de liberté. Elle proposait que tout homme puisse

volontairement acquitter une contribution pour pouvoir exercer le droit

de vote192. Daunou attesta que la constitution assurait à tous la capacité

de s'inscrire sur la liste des membres du souverain.

Il n'en demeure pas moins vrai que les conditions concrètes de la

citoyenneté active se sont singulièrement resserrées. Berlier expose les

190 Mamadou Gazibo, «Le néo-institutionnalisme dans l'analyse comparée des processus de

démocratisation », in Politiques et Sociétés, Volume 21, numéro J, 2002. 191 Séance du 23 messidor An III, Mon. univ., 25-214. 192 Ibid

Page 129: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

129

équivoques de la notion de souveraineté au regard des droits de l'homme

: « La souveraineté consiste-t-elle à faire tout ce qui plaît, sans que les

limites en soient posées ? Dans ce sens elle ne serait qu’anarchie »193.

Sieyès manifeste encore plus fortement le refus de la démocratie

directe en tant que forme de garantie sociale des droits :

« Mais alors, comme à présent encore, il régnait une erreur

grandement préjudiciable : c'est que le peuple ne doit déléguer de pouvoirs que ceux

qu'il ne peut exercer lui-même. On attache à ce prétendu principe la sauvegarde de

la liberté : c'est comme si l'on voulait prouver aux citoyens qui ont besoin d'écrire, à

Bordeaux, par exemple, qu'ils conserveront bien mieux toute leur liberté, s'ils veulent

se réserver le droit de porter leurs lettres eux-mêmes, car ils le peuvent, au lieu d'en

confier le soin à cette partie de l'établissement public qui en est chargé »194.

Or, le multipartisme marocain souscrit à une dynamique de

réduction du poids des formations politiques et satisfait aux désidératas

d’une stratégie entravant leur essor les prédisposant ainsi aux scissions

suivant la loi du schisme par la mise en place de formations partisanes

de moindre force.

Cette politique a été soutenue par la tendance oligarchique

marquant le champ partisan et prédominant au sein des formations

politiques marocaines.

Cette stratégie a optimisé une spirale d’ « enfantements » de partis

politiques, en reproduisant le modèle anthropologique de la tribu qui se

scinde en fractions puis en petits groupements plus ou moins

homogènes195.

193 Séance du 4 thermidor An III, Mon. univ., 25-312.

194Séance du 2 thermidor An III, Mon. univ., 25-292. 195Hassan Zouaoui, « La crise des partis politiques marocains », du 22/05/2017

Sur :http://www.huffpostmaghreb.com/hassan-zouaoui/la-crise-des-partis-politiques

marocains_b_16748870.html -marocains_b_16748870.html

Page 130: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

130

Les incidences en sont l’éclosion d’un échiquier partisan docile

et soumis et la déliquescence devant le pouvoir monarchique ancrant

davantage la désaffection du citoyen brouillant toute démarche

entreprise en vue de leur classification en fonction des clivages

idéologiques classiques. En ce sens, le consensus mis en place vers la fin

des années 1990 a largement impacté le champ partisan en reprenant le

pluralisme et en le canalisant en parfaite harmonie avec la stratégie

makhzénienne ciblant la consécration de la suprématie de l’État profond.

Cette réalité partisane s’explique au demeurant par la quête

systématique du consensus par les partis politiques qui a généré

progressivement une équivocité doctrinale immanente à leurs

positionnements politiques et un émiettement des cloisons idéologiques

faisant perdre toute substance à la dichotomie gauche-droite.

Les forces partisanes ont substitué à leurs missions énoncées par

l’article 7 de la nouvelle Constitution, la course électorale au point de se

muer, aux dires de Jean-Claude Santucci, en une « écurie de course à la

candidature ou en club de supporters pour futurs professionnels de la

politique en quête de mandats et de maroquins »196.

Loin de produire une élite compétente, issue de partis crédibles,

engagée et porteuse d’un projet de société et loin d’incarner une avant-

garde de la société concentrant les compétences pour en faire un levier

de développement du pays, le système politique au Maroc, à en croire

des analystes tel Najib Akesbi n’accepte point de concurrent politique et

encore moins le partage d'une partie de ses prérogatives. A cet effet, il

ne serait pas hérétique d’avancer que les problèmes économiques du

Maroc sont purement d’origine politique dans la mesure où le système

196 Ibid

Page 131: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

131

actuel ne produit pas d'institutions compétentes à même de mener les

réformes économiques nécessaires.

Dans cette même perspective, le système politique marocain

optimise la mise en place d’une monarchie exécutive où le Palais détient

tous les pouvoirs y compris le pouvoir économique197.

Tant s’en faut, le système lamine toute concurrence politique si

bien que les élites et les partis sont incapables de se dresser en un

véritable contre-pouvoir susceptible de réussir un équilibre de pouvoir et

devenir un partenaire de la monarchie dans le processus décisionnel.

A juste raison, le seul véritable acteur partenaire de la monarchie

dans la prise de décisions demeure la Banque mondiale étant donné que

les principales orientations économiques émanent de l’autorité

monarchique d’autant plus que cette crise actuelle n’émerge pas ex-

nihilo mais puise son essence dans le les choix stratégiques opérés depuis

la décennie 1960198.

Par ailleurs, par leur passivité et déliquescence199 devant le pouvoir

monarchique, les élites et partis politiques ont accepté l’assujettissement

à ce jeu faussé les acculant à se relayer sur l’administration des affaires

publiques en mettant en œuvre les orientations et les décisions du Palais

et celles de la Banque Mondiale.

197 Najib Akesbi : «les véritables autorités au Maroc sont le Palais et la Banque Mondiale»,

Lakome, 25 juin 2013 Disponible sur : http://www.ziripress.com/en-franacis/najib-akesbi-les-veritables-autorites-au-maroc-sont-le-palais-et-la-banque-mondiale/

198 «Les partis politiques apparaissent et disparaissent tandis que les véritables autorités

inaltérables au Maroc sont le Palais et la Banque Mondiale », explique Najib Akesbi 199 Najib Akesbi avance : «si nous étions dans un véritable système politique, celui-ci aurait

soutenu le gouvernement actuel pour mener les réformes». Mais le fait est, selon lui, que

nous vivons une situation absurde. «Ceux qui sont au-devant de la scène ne sont pas de

véritables acteurs politiques mais uniquement des marionnettes entre les mains de gens

connus»

Page 132: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

132

Cette réalité rappelle le constat arrêté par Mohammed Madani200

qui résuma le rôle des partis politiques au Maroc comme suit : Les partis

politiques sont confinés dans des fonctions secondaires d'éducation

civique et de sélection des élites qui vont participer à la gestion des

affaires communes. Ils ne peuvent prétendre conquérir le pouvoir.

L’option arrêtée pour le scrutin proportionnel s’inscrit dans cette

perspective de préservation du statut quo par l’enclenchement d’une

dynamique de balkanisation partisane génératrice d’un microcosme

partisan polarisé 201s’interposant à tout véritable changement

d'orientation politique. A ce juste niveau, la définition du système

électoral actuel et de sa mise en œuvre demeurent tributaires de la

volonté politique du pouvoir central, animée par le souci du contrôle des

forces partisanes par le truchement de ce système électoral

vigoureusement inclusif maximalisant les chances d’accès au Parlement

de petites formations politiques.

En somme, l’esprit déclencheur de l’instauration du multipartisme

est moins la consécration du pluralisme que la balkanisation partisane

qui ne favorise pas de véritable changement d'orientation politique.

L’équité tant réclamée via la représentation proportionnelle n’est

au demeurant qu’un prétexte à intensifier la multiplication des partis202

200 Mohammed Madani. Le paysage politique marocain, Rabat. Dar AI Qalam. 2006, p. 42.170p 201 Mounia Bennani-Chraïbi, « L'espace partisan marocain : un microcosme polarisé », Revue

française de science politique 2013/6 (Vol. 63), p. 1163-1192.

Disponible sur : https://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2013-6-p-1163.htm

202 Il convient de citer, en l’occurrence Lahcen Oulhaj qui, régissant à une question relative à

la démocratie et les partis politiques, a énoncé : « Le multipartisme est une vieille

expérience dans le monde arabe, mais ce fut, sauf rares exceptions, un artifice et un jeu de

façade. Il n’était pas synonyme de démocratie. Il n’était ancré ni dans une philosophie, ni

dans une culture démocratique et devait coexister avec l’ordre colonial.

Lahcen Oulhaj « Partis politiques et démocratie-Rencontre nationale organisée à Rabat le

24 février 2012, Konrad-Adenauer-Stiftung , p 3.

Page 133: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

133

et l’émiettement du cadre partisan et l’affaiblissement de son efficience

pour l’établissement des majorités cohérentes.

En fait foi le blocage consenti par Abelilah Benkirane à former sa

majorité, lequel blocage a duré cinq mois se soldant par un échec203. En

ce sens, l’ultime finalité du processus électoral au Maroc depuis

l'indépendance est d’ancrer en valeur suprême la continuité

institutionnelle.

Du reste, la modalité électorale traduite par le scrutin de liste en

tant que mécanisme de reconfiguration de l’échiquier politique ayant

pour toile de fond « Imarat Al Mouminin » assimilée au paradigme

inaltérable du pouvoir profitant au Roi afin d’y puiser la légitimité

traditionnelle fédératrice d'une « puissance spirituelle » et de vaquer,

partant à la représentation suprême de la nation laminant partant les

acteurs politiques.

L’exemple irréfragable en est le gouvernement de Saâd Eddine El

Othamni, fruit d’une lente et douloureuse gestation, a balayé sur son

chemin, le Chef du gouvernement Abdelilah Benkirane nommé par le

Roi après les élections législatives du 7 octobre 2016.

Les tractations ayant ponctué le blocage ont bien dévoilé que

certains partis étaient moins des formations programmatiques porteuses

de projet sociétal, que des « alliances de clans » convoitant

exclusivement des portefeuilles ministériels.

Dans cette perspective, les élections législatives du 7octobre 2016

servent l’exemple péremptoire du verrouillage de la vie politique

marocaine par le pouvoir central au Maroc. Outre le pilotage exclusif des

203 Il serait idoine de reprendre la formule d'Alain Rouquié arguant que cette procédure

électorale apparaît comme ressortissant à une technologie politique douce aux effets

stabilisateurs indéniables. Cité par Hassan Zouaoui, op, cit.,

Page 134: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

134

opérations électorales204 par le ministère de l'Intérieur fait figure de la

réincarnation de l'autoritarisme électoral , un aspect majeur de la tutelle

de l'État qui demeure un des labyrinthes de la transition démocratique,205

ce verrouillage est perceptible dans la mainmise sur les ministères

régaliens « ministères de souveraineté » où les ministres technocrates se

sont arrogés les pôles économiques, affaires étrangères et intérieur tandis

que les islamistes du PJD pourtant classés en tête des élections avec 125

sièges sur 395, se sont vus léguer des ministères sans véritable enjeu

stratégique.

Cette stratégie permet d’atteindre un double objectif. D’abord,

consolider la position centripète de la monarchie en véhiculant l’idée

selon laquelle les partis politiques sont incompétents à réussir l’équation

de la transition politico-économique réconfortant partant indirectement

la suprématie du pouvoir central en tant que seul acteur habilité à prendre

des décisions stratégiques. Cette prééminence de la monarchie s’est

renforcée après l’échec lancinant du champ partisan à gérer notamment

le « Hirak » du rif. En fait foi le discours royal à l’occasion du 18ème

anniversaire du trône206 .

204A ce juste égard, martèle «En gardant à l’esprit la règle électorale comme produit de la

stratégie et choix des acteurs dans la transition démocratique, il convient de faire remarquer

que les règles électorales constituent des instruments institutionnels et politiques aux mains

des dirigeants.» Dogba Blaise Ogou. Les évolutions de la règle électorale dans les systèmes politiques

transitionnels : les élections législatives en Europe du Sud-est (1989-2009). Science politique. Université de Bordeaux .Thèse de doctorat dirigée par Philippe Claret, présentée

et soutenue publiquement le 4 février 2016, 451p, p74.

في الدكتوراه شهادة لنيل نتخابية في المغرب دراسة في الوظائف و الأنساق, أطروحةبتينة قروري ,السياسة الا 205

العلوم القانونية والاقتصادية و الاجتماعية الرباط اكدال , وحدة علم السياسة كلية –محمد الخامس جامعة العام، القانون

ص 409. 271.ص2011-2010و الفانون الدستوري , تحت إشراف د. امحمد الداسر 206 Discours royal du samedi 29 juillet 2017

Disponible sur : https://ledesk.ma/2017/07/29/texte-integral-du-discours-royal-

loccasion-de-la-fete-du-trone/

Page 135: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

135

Chapitre 5 :

Les institutions constitutionnalisées

Les Britanniques connaissent une garantie efficiente et

performante de leurs libertés sans ni Constitution ni même une

séparation des pouvoirs mais grâce à des institutions spécifiques. Le

Conseil national des droits de l’Homme (1) et le Médiateur (2) sont entre

autres les institutions marocaines les plus significatives en matière de

protection des libertés publiques.

1. Le Conseil national des droits de l'Homme

Maintes institutions constitutionnalisées par la Charte

constitutionnelle de 2011 œuvrent en matière des droits de l'Homme

entre autres le Conseil national des droits de l'Homme. Enfant légitime

du Conseil consultatif des Droits de l’Homme (CCDH), institution créée

à la veille de l’alternance politique en 1990, le CNDH est une

consécration du processus de consolidation de l’État de droit et des

Institutions.

En effet, il vient se substituer au CCDH qui a été une des

institutions majeures de la transition démocratique au Maroc notamment

Page 136: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

136

en matière de règlement du passé des violations graves des droits de

l’Homme après une première réforme en 2002.

Conformément aux dispositions du Dahir n°1-90-12 du 24

ramadan 1410 (20 avril 1990) portant création du Conseil Consultatif

des Droits de l’Homme (CCDH) et aux dispositions du Dahir du 15

moharrem 1422 (10 avril 2001) portant sa réorganisation et à l’esprit des

principes régissant les Institutions nationales de promotion et de

protection des droits de l’homme, appelés « principes de Paris »,

consacrés par la résolution de l’ONU du 20 décembre 1993, le CCDH

est une institution nationale spécialisée dans la protection et la promotion

des droits de l’Homme tels qu’ils sont universellement reconnus207.

Placé auprès de Sa Majesté le Roi et chargé d’une mission

consultative de proposition et d’impulsion, le CCDH est une institution

pluraliste indépendante qui entretient aussi bien avec les autorités

publiques qu’avec la société civile et politique des relations

constructives, d’ouverture et d’échange.

Dans l’exercice de ses fonctions, telles que définies par le Dahir

du 15 moharrem 1422 (10 avril 2001), portant réorganisation du CCDH,

le Conseil recherche le plus haut degré de probité morale et intellectuelle

dans ses avis et propositions et se montre objectif et impartial dans ses

démarches et analyses, ferme et exigeant face aux violations des droits

de l’Homme. Ainsi, concernant les instances de protection et de

promotion des droits de l'homme, la Constitution précise dans son article

161 :

« Le Conseil national des droits de l'Homme est une institution

nationale pluraliste et indépendante, chargée de connaître toutes les questions

relatives à la défense et à la protection des droits de l'Homme et des libertés, à la

207 http://www.mission-maroc.ch/fr/pages/218.html

Page 137: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

137

garantie de leur plein exercice et à leur promotion, ainsi qu'à la préservation de la

dignité, des droits et des libertés individuelles et collectives des citoyennes et

citoyens, et ce, dans le strict respect des référentiels nationaux et universels en la

matière » .

Pour ainsi dire, en matière de protection et défense des droits de

l’Homme et libertés le CNDH208 s’assigne pour objectifs la veille à

l’observation, à la surveillance et au suivi de la situation des droits de

l’Homme tant au niveau national que régional.

Du reste, il peut observer des investigations et enquêtes qui

s’induisent relativement aux entorses enregistrées.

En outre, il s’emploie à concevoir des rapports appuyés de

recommandations à base de ses observations et investigations pour les

communiquer aux autorités compétentes. De surcroît, par mesure

d’anticipation pour conjurer les menaces attentatoires aux droits

fondamentaux, il peut intervenir dans le cadre des missions qui lui sont

confiées et de concert avec les autorités concernées.

Qui plus est , le rôle du CNDH est crucial en matière de mise en

œuvre des mécanismes prévus par les conventions internationales

afférentes aux droits de l’Homme auquel le Maroc a adhéré.

Il n’en demeure pas moins vrai que sa vocation droit de

l’hommiste se cristallise nettement dans les rapports qu’il élabore et qu’il

émet aux autorités compétentes, à l’issue de ses visites effectuées aux

lieux de détention et aux établissements pénitentiaires, aux centres de

protection de l’enfance et de la réinsertion, aux établissements

hospitaliers spécialisés dans le traitement des maladies mentales et

psychiques et aux lieux de rétention des étrangers en situation irrégulière

.

208 Bilan du Conseil National des droits de l'Homme 2011-2017 , p3.

Page 138: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

138

Dans la même veine consécrante des droits fondamentaux, il

procède à l’examen et à l’étude de l’harmonisation des textes législatifs

et réglementaires en vigueur avec les conventions internationales des

droits de l’homme et au droit international humanitaire en véhiculant ses

recommandations aux autorités compétentes notamment au

gouvernement avec qui il contribue dans la confection des rapports

adressés aux organes de traités;

Il s’acquitte d’une mission injonctivo-prescriptive en incitant à

l’adhésion aux conventions internationales des droits de l’Homme et au

droit international humanitaire.

A ce juste niveau, se manifeste sa vocation promotrice des droits

de l’Homme 209 attendu qu’il s’emploie à l’ancrage des valeurs, des

principes et, somme toute de la culture des droits de l’Homme et de la

citoyenneté , du droit international humanitaire et à leur consolidation

tout en soumettant , en la matière , à Sa Majesté des rapports annuels et

thématiques sur les droits de l’Homme et en exposant devant chacune

des deux chambres du parlement le contenu des rapports.

Il serait seyant de noter, en l’occurrence, que son rapport annuel

sur la situation des droits de l’Homme et les perspectives d’action du

Conseil est publié dans le bulletin officiel.

Par ailleurs, le CNDH est compétent à examiner la situation des

droits de l’Homme au niveau régional et ce, moyennant les commissions

régionales des droits de l’Homme dont les présidents sont nommés par

Dahir. A cet enseigne, il reçoit et évalue les plaintes et les transgressions

soumises. De même, ces commissions régionales procèdent à

l’élaboration des rapports spéciaux ou périodiques sur les mesures

209 Ibid

Page 139: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

139

adoptées pour le traitement des affaires et des plaintes à caractère

régional ou local.

Par ailleurs, le CNDH est pourvu de compétences en matière de

droit international humanitaire. A cet enseigne, en coordination avec les

autorités intéressées, il veille à la synchronisation des activités des

diverses autorités, s'acquitte du suivi de la mise en œuvre des

conventions internationales auxquelles le Maroc a adhéré, coopère au

programme de formation et de sensibilisation y afférent et étend les

relations de coopération et de partenariat afin d'optimiser l’échange

d’expertise avec le Comité international de la Croix-Rouge et toutes les

instances concernées par le droit international humanitaire. Qui plus est,

souscrivant aux canons démocratiques prévus aussi bien par l’OPCAT210

que par les instruments internationaux des droits de l’Homme, un

nouveau projet de loi accorde à l’institution du CNDH la compétence

d’exercer les attributions afférentes au MNP.

Il sied de souligner que le CNDH a été ré-accrédité en mars 2016

au statut «A» en tant qu’institution en pleine conformité avec les

Principes de Paris211.

Le Maroc a cadré en écho avec les injonctions en matière de la

confirmation du statut « A » du CNDH en 2016 par l’Alliance globale

des institutions nationales des droits de l’Homme. En cela, se cristallise

une nette application des recommandations appuyées par le Maroc au

Cours de son deuxième EPU212.

A ce juste niveau, en vertu du Rapport du Haut-commissariat des

Nations Unies aux droits de l’Homme, le CNDH apprend que le

210 Optional Protocol to the Convention against Torture 211 Rapport national présenté conformément au paragraphe 5 de l’annexe à la résolution 16/21

du Conseil des droits de l’homme, op, cit, p 3 212 Conseil des droits de l’homme, op,cit.,, p 1

Page 140: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

140

Royaume a procédé à la proposition d’ un nouveau projet de loi visant

l’instauration d’un Mécanisme national de prévention de la torture213,

d’un mécanisme chargé de traitement des plaintes relatif aux enfants

victimes214 et d’un mécanisme indépendant pour la protection des droits

des personnes handicapées215.

Par ailleurs, il a été vivement recommandé par le CNDH d’activer

l’adoption du projet de loi sur le Mécanisme national de prévention de

la torture. Le CNDH souligne qu’une approche axée sur les droits de

l’Homme est intégrée à la Stratégie nationale de la santé publique.

A juste raison, il prise l’adoption des modalités efficientes pour

soutenir le droit des groupes vulnérables à la santé. Satisfaisant la

demande du CNDH en 2015, le Maroc a procédé à la reconnaissance de

21 associations par la loi d’autant plus que le Parlement a cadré en

parfait écho aux injonctions émises par un mémorandum d’accord

véhiculé par le CNDH relatif à l’examen de la législation notamment au

chapitre de la justice militaire, la traite des êtres humains et le travail

domestique des enfants.

Optimisant le processus de justice transitionnelle, le Maroc a

dédommagé certaines victimes de transgressions des droits de l’Homme

d’autant plus que les victimes et les proches ont bénéficié des mesures

relatives aux soins de santé ainsi qu’aux programmes de réinsertion

sociale. Dans la même veine, le CNDH soutient que l’adoption de la loi

sur la famille s’affiche positive.

En revanche, la pleine jouissance féminine des droits est entravée

par des insuffisances d’ordre juridique dont la polygamie, l’accès des

213 Ibid 214 Ibid 215 Ibid

Page 141: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

141

femmes à la tutelle légale, la discrimination en matière de la succession

et l’accès à la terre sont les faits les plus saillants.

A cet effet, il a été vivement recommandé au Maroc au cours de

l’EPU 2017 notamment par le CNDH d’avaliser les recommandations

qu’il a rejetées lors du deuxième cycle de l’EPU, entre autres la révision

du Code de la famille satisfaisant ainsi à l’exigence de l’égalité entre les

hommes et les femmes en matière d’héritage.

De même, il lui a été prêché de prohiber le mariage des mineurs.

Force est de souligner la souscription marocaine aux standards

démocratiques universellement reconnus , laquelle souscription se

cristallise par la mise en œuvre d’une loi sur la traite des êtres humains

et d’une politique de la migration ainsi qu’une large campagne de

régularisation exceptionnelle amorcée en 2014 faisant bénéficier à 70 %

des demandeurs enregistrés.

Il a été fortement recommandé au Maroc lors de l’examen

périodique universel de 2017 d’optimiser le recours aux instruments

internationaux par les tribunaux nationaux dans l’élaboration de leurs

décisions.

Le CNDH recommande l’amélioration du mandat de l’Autorité

pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination de

façon à la pourvoir des ressources nécessaires pour accomplir de son

mission de manière indépendante tout en promulguant une loi cernant le

cadre conceptuel de la discrimination et envisageant des sanctions

adaptées.

Il a par ailleurs prêché de rendre effectives dans son ordre interne

les dispositions de la résolution de l’Assemblée générale instituant

l’adoption d’un moratoire de jure sur l’application de la peine de mort,

et prévoyant l’adhésion au Deuxième Protocole facultatif se rapportant

Page 142: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

142

au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ciblant

l’abrogation de la peine de mort.

Dans un autre ordre des idées, le CNDH estime primordial la mise

en œuvre de procédures au profit des personnes mises en garde à vue en

matières d’abord d’aide juridique automatique ne requérant aucune

autorisation préalable , et ensuite de la pleine jouissance d’un examen

médical au début et à la fin de la garde à vue avec enfin l’observance de

la condition de la généralisation de l’enregistrement audiovisuel des

interrogatoires.

Dans cet esprit, le CNDH incite le Maroc à procéder

méthodiquement des évaluations médicales se rapportant aux cas

d’allégations de torture et enclencher objectivement des enquêtes justes

et équitables sur ces allégations à tous les niveaux du procès.

A ce juste égard, il importe éminemment d’envisager des peines

de substitution et de réformer la procédure de grâce afin résorber la

surpopulation carcérale. Du reste, le CNDH insiste sur la nécessité de

mettre en place des mécanismes de protection des journalistes dans

l’exercice de leur profession en rendant effectif le droit d’accès à

l’information. En effet, si l’accès à l’information publique a été promu

au Maroc suite à l’adoption de la Constitution de 2011 (art.27),

différentes contraintes institutionnelles et une certaine « culture du secret

» 216 rendent opaques un certains nombre de procédures – relatives

216 Conforté par le flou qui entour l’accès à l’information publique. Citons à cet égard l’article

18 du décret portant statut général de la fonction publique, promulgué le 24 février 1958 et

ainsi formulé Indépendamment des règles instituées dans le code pénal en matière de secret

professionnel, tout fonctionnaire est lié par l'obligation de discrétion professionnelle pour

tout ce qui concerne les faits et informations dont il a connaissance dans l'exercice ou à

l'occasion de l'exercice de ses fonctions. Tout détournement, toute communication contraire

au règlement de pièces ou documents de service à des tiers sont formellement interdits. En

dehors des cas prévus par les règles en vigueur, seule l'autorité du ministre dont dépend le

fonctionnaire peut délier celui-ci de cette obligation de discrétion ou le relever de

Page 143: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

143

notamment à des circulaires précisant ou limitant des dispositions

législatives – et de données publiques qui rendent d’autant plus difficile

le travail de collecte d’informations par le

Chercheur217.

Il a été vivement recommandé au Maroc par le CNDH à l’occasion

de l’EPU 2017 d’instaurer des plans d’action nationaux fondés sur des

objectifs de développement durable puisant dans une conception basée

sur les droits de l’Homme.

Pour autant, le CNDH prise l’adoption d’une approche prônant

équité et qualité en procédant à la réforme du système éducatif national.

Cependant, la ligue marocaine pour la citoyenneté et les droits de

l’homme relève que bien que les textes balisant l’organisation dudit

Conseil prévoient des compétences relatives aux plaintes dans le

domaine de transgression des droits de l’Homme, ces compétences

demeurent entachées de la généralité218 exemptes de toute définition des

mécanismes de ces plaintes ou détermination de garanties commanditant

partant la coopération des organismes de l’État avec les institutions

nationale dans l’ultime visée de rendre justice aux victimes.

l'interdiction édictée ci-dessus. » - Décret royal sur le statut général de la fonction publique,

24 février 1958 ; Bulletin officiel 2372, 11 avril 1958, article 18.

217Nadia Khrouz. La pratique du droit des étrangers au Maroc : essai de praxéologie juridique et politique, Université Grenoble Alpes, Science politique. Thèse dirigée par Baudouin

Duprêt, présentée et soutenue publiquement le 2 juin 2016, 381p, p 79. Pour d'amples renseignements, se référer au plaidoyer mené par le Réseau Marocain pour

le Droit d’Accès à l’Information (REMDI). Cf,Saâd Filali Meknassi, Accéder à l'information

c'est notre droit - Guide pratique pour promouvoir l'accès à l'information publique au Maroc,

UNESCO, Edité et publié par le secteur Communication et Information Du Bureau de

l’UNESCO pour l’Algérie, Le Maroc, la Mauritanie et la Tunisie , 2014, pp35. 218Rapport de La ligue marocaine pour la citoyenneté et les droits de l’Homme dans le cadre de

l’Examen périodique universel de 2017 à l’occasion de la présentation par le Maroc de son

troisième rapport national, p 2

Page 144: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

144

Par ailleurs, la compétence du CNDH paraît bien cantonnée

compte tenu son activité purement académique dans l’émission des avis

et des publications sur les questions relatives aux droits de l’Homme.

Loin d’impliquer les représentants de la société civile œuvrant

dans le domaine des droits de l’Homme, le CNDH adopte une attitude

discriminatoire, rappelle le rapport de la ligue marocaine pour la

citoyenneté et les droits de l’homme219.

Encore faut –il espérer que le Conseil ne serait plus perçu en tant

qu’une instance d’opposition comme le laisse entendre la relation de

Benkirane avec ledit Conseil au point qu’il réagissait

exceptionnellement à ses initiatives et propositions220. Il ne ressent pas

non plus du mal à ignorer son devoir de consulter le CNDH pour les

questions en relation avec les droits de l’Homme à moins qu’il ne soit

contraint221.

Preuve à l’appui , en mars 2014, à l’issue d’un conseil du

gouvernement, le gouvernement a procédé à la conception d’un

communiqué pour témoigner de sa volonté de donner suite aux plaintes

émanant dudit Conseil de façon à interagir rapidement et à répondre

efficacement aux doléances et suggestions émanant aussi bien du

Conseil national des droits de l’Homme que de ses délégations

régionales au niveau national tout en prévoyant la mise en place des

points de liaison permanents avec la désignation des interlocuteurs au

sein des ministères concernés par ces plaintes.

219Ibid

220Tahar Abou El Farah, « La difficile cohabitation entre les instances de bonne gouvernance et

le gouvernement » Le Soir Echo, 21 Juin 2015. Sur :

http://lavieeco.com/news/maroc/politique/la-difficile-cohabitation-entre-les-instances-de-

bonne-gouvernance-et-le-gouvernement-34331.html 221 Ibid

Page 145: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

145

Il a même établi un délai maximum de trois mois pour répondre à

ces plaintes estimées à 50 000. Rien de tel ne s’est produit et même le

communiqué s’est évaporé en fumée épaisse.

Un communiqué public était prévu en ce sens. A ce jour, aucune

trace de ce communiqué, ni de la suite accordée à ces doléances. On

comprend que la réaction de Benkirane était beaucoup plus motivée par

la conjoncture marquée par une campagne de dénonciation visant le

gouvernement à ce sujet à Genève où ledit Conseil avait réunion.

Récemment, le projet de loi76.15 relative à la réorganisation du

Conseil national des droits de l'Homme ciblant la réorganisation du

Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) est examiné par la

commission permanente de la législation et des droits de l’Homme à la

Chambre des représentants.

Les enjeux en sont diversifiés .Ce projet de loi contenant 65

articles, approuvé par le Conseil du gouvernement en mai dernier, puis

déposé en juillet à la Chambre des représentants n'a été initialement

examiné qu'au début du mois de décembre dernier par la commission

permanente de justice, de législation et des droits de l'Homme.

Force est de noter que ce texte renferme deux principaux enjeux.

D’abord, il permet au texte régissant le CNDH d’être en parfaite

harmonie avec la loi fondamentale, singulièrement avec les articles 161

et 171 de la Constitution.

En outre, il admet l'incorporation dans le nouveau texte des attributions

nouvelles du CNDH. Il s’agit principalement des mécanismes nationaux

de renforcement et de protection des droits de l’Homme.

En effet, le projet de loi 76-15 relatif à la réorganisation du CNDH

consacre la création au sein du Conseil de trois mécanismes nationaux

de prévention de la torture, de recours pour les enfants victimes de

Page 146: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

146

violation des droits des enfants et de protection des droits des personnes

handicapées222.

L'élément qui se signale est la création du mécanisme national de

prévention de la torture vu que le Maroc est le 76e pays à avoir ratifié le

«Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou

traitements cruels inhumains ou dégradants», après avoir déposé les

instruments de ratification du protocole en 2014.

Le Maroc a procédé conformément aux dispositions du protocole

stipulant la création d’un mécanisme national de prévention de la torture,

bénéficiant d’une indépendance fonctionnelle, de l’indépendance de son

personnel et d’experts possédant les compétences et les connaissances

professionnelles requises disposant d’un staff compétent, indépendant et

des ressources

nécessaires à son fonctionnement223.

Ce mécanisme de prévention est compétent à effectuer des visites

régulières imprévues sur tous les lieux de privation de liberté, ce qui est

de nature à prévenir d’éventuelles violations , à accéder sans restriction

à tous les renseignements relatifs au nombre de personnes privées de

liberté dans les lieux de détention, au nombre de lieux de détention et à

leur emplacement et à accéder également sans restriction à tous les

renseignements relatifs au traitement de ces personnes et à leurs

conditions de détention. Toutes ces prérogatives ont été prévues dans le

projet de loi 76-15.

222 Brahim Mokhliss , «Quels enjeux comporte loi 76.15 relative à la réorganisation du Conseil

national des

droits de l'Homme»,LE MATIN du N 03 Janvier 2018 223 Ibid

Page 147: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

147

2. L’institution du Médiateur du Royaume

La Constitution a défini le Médiateur comme une institution

nationale indépendante et spécialisée qui a pour mission, dans le cadre

des rapports entre l'administration et les usagers, de défendre les droits,

de contribuer à renforcer la primauté de la loi et à diffuser les principes

de justice et d'équité, et les valeurs de moralisation et de transparence

dans la gestion des administrations, des établissements publics, des

collectivités territoriales et des organismes dotés de prérogatives de la

puissance publique. Le principe de la primauté du Droit et de l'équité

sont les raisons intrinsèquement inhérentes à la création dudit Médiateur.

Par ailleurs, il satisfait à l'objectif de corriger les travers et les

atteintes essuyés par les citoyens en raison des anomalies dans certaines

administrations ou de leur mauvaise application de la loi, suite à des

actes d’arbitraire, des excès et des abus de pouvoir commis,

éventuellement, par des responsables administratifs.

En fonction de l’article 5 du dahir portant création de l’Institution

du Médiateur du Royaume, le Médiateur est chargé d’instruire, soit de

sa propre initiative conformément aux modalités fixées dans le

Règlement intérieur de l’Institution, soit sur plaintes ou doléances dont

il est saisi, les cas qui porteraient préjudice à des personnes physiques

ou morales, marocaines ou étrangères en raison de tout acte de

l’Administration, qu’il soit une décision implicite ou explicite, une

action ou une activité, considéré contraire à la loi, notamment lorsqu’il

est entaché d’excès ou d’abus de pouvoir, ou contraire aux principes de

justice et d’équité.224

224 Sur: https://www.mediateur.ma/index.php/fr/principe-de-la-primaute-du-droit-de-lequite

Page 148: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

148

Dans la même veine , le Médiateur s'érige en une force de

proposition et de suggestion Chargé de promouvoir l’intermédiation

entre les citoyens, individus ou groupes, et les administrations ou tout

organisme titulaire de prérogatives de puissance publique, et d’inciter

ces dernières à respecter les règles de la primauté du Droit et d’Équité,

le Médiateur du Royaume exerce à cet effet une triple mission auprès de

l’Administration : contrôle, proposition et amendement225.

A cet esprit, il exerce, à côté des structures existantes, un nouvel

aspect de contrôle sur les administrations qui se déploie en un pouvoir

de redressement dans la mesure où il examine les plaintes et les

doléances des citoyens formulant des décisions et actes administratifs

jugés antagoniques aux règles de la primauté du Droit et de l’Équité.

Par ailleurs, la suggestion de mesures susceptibles d’améliorer

l’efficacité de l’Administration confère à l’Institution du Médiateur du

Royaume un pouvoir réel de proposition, et en fait une source

d’amendement des règles et procédures préjudiciables aux citoyens et

aux administrés dans le sens de leur simplification et de leur allégement,

de la suppression des obstacles bureaucratiques et de la réforme des

structures administratives.

Le Médiateur du Royaume présente au Chef du Gouvernement des

recommandations de portée générale afférentes aux mesures susceptibles

de cadrer en écho avec les doléances qui lui sont soumises. Il émet

identiquement des propositions relatives aux mesures ciblant

l’optimisation de l’efficacité des administrations, objet des plaintes, et la

correction des anomalies et déficits inhérentes au fonctionnement de

leurs services, et la réforme des textes les régissant.

225 Ibid

Page 149: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

149

En outre, il l’informe, le cas échéant, du refus des administrations

concernées de donner suite à ses recommandations. Les plaintes sont

présentées au Médiateur, au médiateur régional ou, le cas échéant, au

médiateur local par toutes les personnes physiques ou morales de droit

privé ; Individuellement ou en groupes.

Quand la plainte est présentée par un groupe de personnes, ceux-

ci doivent y préciser l’identité de chacun d’eux, émargée de leurs

signatures, avec la désignation du mandataire qui les représente auprès

de l’Institution, sauf lorsqu’il s’agit d’un avocat.

Le plaignant directement, ou une personne qu’il mandate à cet

effet ;

Le plaignant peut désigner une autre personne pour le représenter

en vertu d’une procuration spéciale, sauf lorsqu’il s’agit d’un avocat. Les

plaintes pourront être transmises par courrier ordinaire ou recommandé ;

par un dépôt direct au siège de l’Institution et tout autre moyen de

communication.

Pour être recevable, la plainte doit être écrite, signée par son auteur

ou par son représentant mandaté à cet effet. Elle doit comporter les

indications complètes sur son identité : prénom, nom, adresse complète,

et s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination, sa nature, l’adresse

de son siège social, son représentant légal, ainsi que tout autre moyen de

contact possible. Elle doit mentionner l’administration objet de la

plainte, présentée à l’encontre de sa décision ou de son agissement. Elle

doit en outre présenter les preuves et les pièces justificatives, lorsque le

plaignant, en dispose.

Par ailleurs, les plaintes peuvent être formulées oralement. Dans

ce cas, elles doivent être consignées et enregistrées par les services

compétents de l’Institution du Médiateur. Il en est délivré une copie à

Page 150: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

150

l’intéressé. Or, les plaintes et les doléances comportant une diffamation

ou une injure, à l’égard de toute personne ou d’un organisme déterminé,

ne sont pas recevables

Un accusé de réception portant la date et le numéro

d’enregistrement est remis ou envoyé à l’auteur de la plainte.Imprimer

E-mail Imprimer E-mail Au cas où le Médiateur serait résolument

persuadé de la véracité des faits contenus dans la plainte et de la réalité

du dommage essuyé par le requérant, il statuera en observance des

injonctions d’indépendance et de neutralité, en se fondant sur la

prééminence du Droit et des principes de Justice et d’Équité. En

conséquence, il exhorte l’administration intéressée à donner suite à la

requête du plaideur, dans un délai ne dépassant pas les 30 jours en

communiquant au Médiateur les actions entreprises en ce sens.

Le Médiateur est habilité à proroger le délai, une seule fois, sur

demande justifiée de la part de l’administration. En outre , il peut

solliciter à l’administration concernée de réexaminer le cas à la lumière

des circonstances nouvellement explicitées en s’alignant sur les canons

de la légalité et des principes de Justice et d’Équité et en motivant sa

décision définitive.

Or, au cas où l’administration se refuse de répondre, il se trouve

acculé, après l’expiration du délai fixé, à émettre une recommandation

comprenant la solution qu’il juge équitable pour le plaideur qui sera

avisé des mesures adoptées.

Par ailleurs, le Médiateur demeure incompétent pour trancher les

questions afférentes aux doléances ambitionnant la révision d’une

décision de justice irrévocable ; aux plaintes relatives aux questions pour

lesquelles la justice a été saisie ; aux questions qui touchent à la

Page 151: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

151

compétence du CNDH.

CONCLUSION

Page 152: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

152

Le respect d’une collectivité aux valeurs de liberté et des droits

présuppose l’inscription constitutionnelle des droits humains et des

libertés publiques corrélée à l’élaboration d’un statut destiné à en

permettre l’effectivité de l’exercice. Cette inscription ne serait que

poursuite de vent sans une consécration effective de la suprématie de la

Constitution.

A ce juste niveau, la nouvelle Constitution de 2011 qui souscrit à

une démarche gradualiste abordée depuis les années 1990, incarne,

répète-t-on, le couronnement d’un processus de transition démocratique

amorcé dans les années 1990 avec la sortie des «années de plomb».

Elle ambitionne la consolidation de l'État de droit qui serait, à en croire

le Constituant, mieux réconfortée par la consécration de la primauté de

la Loi fondamentale.

Cet État de droit implique inexorablement la protection des droits

-libertés qui sont appelés droits de statut négatif dans la mesure où ils

impliquent l’abstention de l’État et garantissent la protection d’une

sphère de liberté individuelle. Ils engendrent d’autres droits

fondamentaux qui lui sont inhérents et dont la portée et la valeur

diffèrent226.

La consécration de la suprématie de la Constitution est une

condition sine qua non dans l'instauration des garanties des libertés

publiques. La suprématie de la Constitution n’a été consacrée dans le

constitutionnalisme européen qu’après la seconde guerre mondiale au

226 L’expérience constitutionnelle française renseigne que le juge constitutionnel procède à une

stratification du système des droits fondamentaux .En effet, il commence par identifier, les

droits fondamentaux dits majeurs voire matriciels dans la mesure où ils édifient le

soubassement du système des droits fondamentaux.

Il en déduit, dans un second temps, les droits qui, par essence, s’y rattachent attendu qu’ils

constituent le corollaire de ces principes et en boostent la portée.

Page 153: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

153

lendemain du précédent bref de l’Autriche, dans la mesure où la

souveraineté parlementaire s'est interposée à l’existence du contrôle de

constitutionnalité des lois.

En Espagne, cette suprématie est consacrée par la Constitution en

vigueur, après le bref précédent de la Seconde République (1931-36).

Cette primauté se justifie, au demeurant, du fait que la Constitution

renferme un système de valeurs qu'elle s'emploie à réaliser. Cette

approche puise son authenticité du constat que la démocratie exclut les

valeurs antinomiques pour se protéger.

De même, l’efficacité directe des droits fondamentaux et leur

«contenu essentiel » découle de l’idée que tous les pouvoirs sont exigés

par la Constitution. Cette théorie du «contenu essentiel» de droits

fondamentaux, d’origine allemande, s'affiche telle la formule efficiente

pour prévenir efficacement la violation des droits par le législateur.

Dans les faits, la supériorité de la Constitution est une évidence à

condition toutefois d'en préciser la nature. Cette primauté est

inéluctablement incontestable sur le plan symbolique et politique.

Toutefois, la question se pose quant à l'effectivité de la garantie qu'on

attend d'elle.

En somme, il s'agit de la sanction de sa supériorité juridique. En

ce sens, Pelet se demande si le législateur respectera les droits des

citoyens et si la Constitution comporte la disposition qui préviendra la

violation de ces droits. Il conclut qu'il faut entourer la liberté publique

de formes plus rassurantes227. Mailhe, quant à lui, doutant après Rouzet

de l'utilité d'un Préambule, se demande si la Déclaration des droits serait

une loi ou un simple package d'abstractions philosophiques.

227 Séance du 19 germinal An III, Mon. univ., 24-173.

Page 154: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

154

Cela étant, en quoi pourrait-elle s'avérer utile si une Déclaration

ne s'imprime pas de la forme légale ? Au cas où l'on ne dépasserait le

prisme de principes, à quoi servent, par conséquent, des fondements

auxquels on n'est pas lié ?228

Il y avait en réalité dans la crainte de proclamer les principes celle

de leur valeur juridique obligatoire qui pourrait servir d'appui à des

réclamations inacceptables229. A ce juste propos, Cambacérès soutient, a

contrario, l'utilité d'une telle proclamation pour mieux forcer le

législateur au respect de la Constitution : « L'on donne au corps législatif

une latitude beaucoup trop effrayante, si on ne l'astreint à des règles dans

l'exercice de ses pouvoirs »230martèle-t-il.

Il faut, somme toute, établir des principes de manière concise

d'autant plus qu'une loi peut recéler un objectif dissimulé voilé du

peuple.

On attend comme une garantie indispensable que la Constitution

proprement dite soit effectivement un texte de nature supérieure.

Thibaudeau contredit la confiance dans de simples lois organiques pour

la mise en œuvre de la constitution :

« On dit qu'une loi organique peut faire disparaître toutes ces

craintes ; mais, citoyens, faites attention que toute loi qui n'est pas constitutionnelle

peut être abrogée par le corps législatif (on applaudit). Une loi qui sert de garantie à

la liberté du peuple et à celle de ses représentants doit être immuable comme la

constitution [...] »231.

228 Séance du 16 messidor An III, Mon. univ., 25-148/149 229 Voir par exemple Thibaudeau dans la séance du 26 thermidor An III, Mon. univ., 25-501 :

« [...] je demande la question préalable sur toute déclaration des devoirs, car plus vous

jetterez dans la société de ces maximes imparfaites et isolées, plus leur interprétation y

répandra le trouble et la confusion ». 230 Séance du 29 germinal An III, Mon. univ., 24-245. 231 Séance du 1

er germinal An III, Mon. univ., 24-32.

Page 155: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

155

Dans cette perspective, la garantie demeure dans la procédure de

révision constitutionnelle et dans la relative rigidité du texte. Sieyès

conviait, en effet, en 1788 à dissiper les confusions entre le pouvoir

constituant et les pouvoirs constitués.

Dans cette veine, la Constitution s'annonce comme la référence

supérieure pour le «tribunal législatif » de la même façon que la loi l'est

pour les tribunaux judiciaires. Il affirme dans son second discours qu'«

une constitution est un corps de lois obligatoires, ou ce n'est rien [...] »232.

Daunou sera bien plus concis en 1819 qu'en 1795 : «Une

constitution n'est évidemment rien du tout, si ce n'est pas la loi de toutes

les autres lois »233.

Certes, la supériorité de la Constitution est confirmée. Il importe

seulement d'en percevoir la nature et d'en dégager les instruments

constitutionnels. A cet effet, Carré de Malberg certifiait que la garantie

principale des droits individuels était la séparation des pouvoirs

constituant et constitué.

Or, force est d'assister à deux processus néfastement pernicieux à

cette perspective, à savoir le déclassement de la Constitution et

l’anéantissement des principes de limitation du pouvoir politique. En

effet, le déclassement est une opération qui s'emploie à modifier, par un

acte réglementaire, une disposition de forme législative ne devant pas,

en principe, relever du domaine de la loi. On note à ce juste niveau une

volonté de contourner la Constitution par des articles juridiques. Par

conséquent, le déclassement de la Constitution indique un certain

nombre d’actes tendant à la faire passer de sa situation de norme

fondamentale à une loi comme les autres.

232 Séance du 18 thermidor An III, Mon. univ., 25-442. 233 Daunou, op, cit,. p. 159.

Page 156: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

156

Ce processus repose sur une remise en cause de la suprématie de

la Constitution. Au Maroc, comme ailleurs, dans les pays africains, on

assiste, à une volonté des dirigeants à une nette «

déconstitutionnalisation » de la Constitution accentuant davantage la

crise de la normativité de la Constitution.

La conviction de cette normativité évoque la question de l’État de

droit dont le respect s’affiche comme une exigence constitutionnelle.

Par ailleurs, les mécanismes de contrôle et de garantie des libertés

publiques en général, jouent un rôle immense dans la préservation

desdites libertés mais il faut avouer qu’ils sont encore non-efficients

quant aux transgressions pesantes et réitérées des droits de l’Homme,

c’est cette inadaptation qui entrave une réelle effectivité de ces

mécanismes.

Qu’il soit toléré de conclure que maints réflexes liberticides

entachent l’effectivité de la jouissance des libertés publiques au Maroc.

Nonobstant les promesses de la nouvelle Constitution, des dérapages

obscurantistes entravent la mise œuvre substantielle des ses dispositions.

Pour autant, « on ne change pas une société par décret105 ».

Tomberait en poussière l’édifice patiemment construit sur la base de la

ferme volonté de piloter la transition à une société libérale supplantant

tout germe d’un État de confusion de pouvoirs et d’autoritarisme. Cette

transition démocratique est truffée d’indicateurs de vulnérabilité.

La survivance des mêmes réflexes administratifs réfractaires à

toute démocratisation axée sur une préparation à la citoyenneté et aux

valeurs démocratiques. Du reste, se déploie la résurgence des pratiques

issues d’anciennes mentalités, lesquelles sont attentatoires non

seulement aux valeurs démocratiques mais à la Constitution.

Page 157: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

157

Sans conteste, la restauration de la suprématie de la Constitution

est tributaire à ce juste niveau, à un changement des mentalités.

En outre, les autorités à qui incombe l'application de la loi sont enclines

à se dérober à leurs exigences.

Il n’en demeure pas moins vrai que la justice qui est censée

garantir la protection des droits et des libertés fléchit sous le joug de la

soumission à l'administration qui s'interpose à la réalisation de sa

mission et reste assujettie au contrôle de l’exécutif.

En conséquence, force est de plaider en faveur d’une «

interprétation démocratique » de la nouvelle loi fondamentale et de sa

mise en œuvre. D'où l'intérêt du contrôle du respect des libertés

publiques qui engage pour sa part des pouvoirs de coercition

fréquemment amarrés à une structure étatique, ou supra-étatique.

De surcroît, l’érection de l’État de droit se heurte devant la

résilience perverse des interactions dialectiques paradoxales entre

Constitution et société.

Sans conteste, les garanties constitutionnelles balisent l’équilibre de la

société. Il n’en reste pas moins vrai que l’équilibre social garantit aussi

l’équilibre constitutionnel234.

Les garanties constitutionnelles ne sauraient être effectives sans

une activation de la responsabilité redditionnelle des fauteurs d’atteintes

aux libertés publiques et sans une extirpation de la pauvreté matérielle et

singulièrement mentale de la population, tant il est vrai qu’« il faut un

minimum de confort pour pratiquer la vertu235 ».

234 Sasso Pagnou, « Essai d’explication du déficit de garantie de la liberté politique au Togo

», op,cit,. 235 Ibid

Page 158: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

158

BIBLIOGRAPHIE

I. Ouvrages, traités, cours et dictionnaires

A. Ouvrages :

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pratique pour promouvoir

l'accès à l'information publique au Maroc, UNESCO, Edité et publié par

le secteur Communication et Information Du Bureau de l’UNESCO pour

l’Algérie, Le Maroc, la Mauritanie et la Tunisie, 2014

II. Dictionnaires

➢ Thierry Debard, Dictionnaire de droit constitutionnel, Editions Ellipses,

2002, 350p

III. Ouvrages spéciaux, thèses et mémoires

A. Thèses en Français :

➢ Boris Barraud. Le renouvellement des sources du droit - Un exemple

prospectif : le droit de la communication par internet. Droit. Université

d'Aix Marseille, Thèse dirigée par Hervé Isar , présentée et soutenue

publiquement le 1er juillet 2016,413p

➢ Dogba Blaise Ogou. Les évolutions de la règle électorale dans les

systèmes politiques transitionnels : les élections législatives en Europe

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du Sud-est (1989-2009). Science politique. Université de Bordeaux

.Thèse de doctorat dirigée par Philippe Claret, présentée et soutenue

publiquement le 4 février 2016, 451p

➢ Nadia Khrouz. La pratique du droit des étrangers au Maroc : essai de

praxéologie juridique et politique, Université Grenoble Alpes, Science

politique. Thèse dirigée par Baudouin Duprêt , présentée et soutenue

publiquement le 2 juin 2016 , 381p

➢ Sêgnon Gilles Badet, Contrôle intra normatif et contrôle ultra normatif

de constitutionnalité , Contribution à l’identification des sous catégories

du modèle kelsénien de justice constitutionnelle à partir des systèmes

belge et béninois , Université Catholique de Louvain ,Faculté de droit et

de criminologie ,Centre de recherches sur l’Etat et la Constitution . 2011-

2012.568p

B. Thèses en arabe

لنيل , أطروحةالسياسة الانتخابية في المغرب دراسة في الوظائف و الأنساقبتينة قروري , •

العلوم القانونية والاقتصادية و كلية –محمد الخامس جامعة العام، القانون في الدكتوراه شهادة

الاجتماعية الرباط اكدال , وحدة علم السياسة و الفانون

ص 409. 271.ص 2011-2010الدستوري , تحت إشراف د. امحمد الداسر

C. Mémoires

➢ Vivien Manangou Romain, Les évolutions récentes de la justice

constitutionnelle en république du Congo: Une analyse du rapport remis

le 09 juin 2008 par la commission politique, administrative et judiciaire

de l'assemblée nationale, Mémoire pour le Master 2 de Droit Public,

Transformation de l'Etat -Université de Cergy-Pontoise-Faculté de droit-

Session de juin 2009, dirigé par Madame Calvès.120p

IV. Articles, chroniques et rapports

Page 162: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

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A. Articles :

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la Constitution marocaine de 2011 Contenu et implications d’une

révision constitutionnelle », jus.uio, 2014 ,p 2

➢ Abdelali El Hourri, « Qu’est-ce que le CIRDI, cet épouvantail d’Al

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➢ Alexandre Flûckiger «Le principe de clarté de la loi ou l'ambiguïté d'un

idéal», Cahiers du Conseil constitutionnel n° 21 Dossier : La

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➢ Amine Derkaoui ,« Le parquet est désormais indépendant… en

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réorganisation du Conseil national des droits de l'Homme»,LE MATIN

du N 03 Janvier 2018

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l’Homme : souveraineté et ingérence , organisé par le Centre de

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faculté de Droit de Marrakech et Walter –Schucking- Institut Fur

Internationales Recht Christan Alberchts –Universiat Zu Kiel ,13 et 14

mars 2002 à Benslimane , publiée dans REMALD ,série Thèmes actuels

, n°37-2002

➢ Hamid Rbii , « La place de la convention internationale dans la nouvelle

Constitution :cas des conventions des droits de l’Homme », in

Constitution marocaine 2011 :Nouveautés et perspectives , Actes du

colloque organisé par la Faculté des Sciences Juridiques , Economiques

et Sociales de l’Université Mohammed 1er -Oujda en partenariat avec le

Centre des Etudes et d Recherches Humaines et Sociales –Oujda , le 20

et 21 avril 2012 ,1ère Edition 2012-1433

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➢ Mounia Bennani-Chraïbi, « L'espace partisan marocain : un microcosme

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2012, L.G.D.J

➢ Vanessa Ratté , « La démocratie du Québec et d'ailleurs », Éthique

publique [Online], vol. 13, n° 2 | 2011

B. Chronique

➢ Chronique constitutionnelle, in Revue « Justices », Ed. Dalloz, 1996

C. Rapports (Classés par année de publication)

➢ Amnesty International — Rapport 2016/17, la situation des droits

humains dans le monde

➢ Rapport de La ligue marocaine pour la citoyenneté et les droits de

l’Homme dans le cadre de l’Examen périodique universel de 2017 à

l’occasion de la présentation par le Maroc de son troisième rapport

national.

➢ « Recent developments in international investment agreements (2006 –

June 2007) », UNCTAD,IIA Monitor, n° 3, (2007)

IV. Dahirs, Discours royaux et mémorandums

Page 167: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

167

A. Dahirs royaux

➢ Dahir n° 1-14-139 du 16 chaoual 1435 (13 août 2014) portant

promulgation de la loi organique n° 066-13 relative à la Cour

constitutionnelle.

➢ Dahir n° 1-07-169 du 30 novembre 2007 portant promulgation de la loi

n°08-05 abrogeant et remplaçant le chapitre du titre V du Code de

procédure civile.

B. Discours royal

➢ Discours royal du samedi 29 juillet 2017

C. Mémorandums

➢ Mémorandum du FJV présenté à la Commission de Révision de la

Constitution, le 11 avril 2011 en arabe.

➢ Mémorandum de l’OMDH sur la révision de la Constitution, de 11 avril

2011 version arabe

➢ Mémorandum pour modifier la loi 00/76 réglementant les

rassemblements public », AMSED avec l’appui du projet SANAD de

l’USAID/février2012.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par L’ASSOCIATION ESPACE DE

DEVELOPPEMENT DURABLE,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par LE RESEAU MAILLAGES, 2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par LA LIGUE DES ASSOCIATIONS

REGIONALES,2011.

Page 168: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

168

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par L’UNION NATIONALE DES FEMMES

MAROCAINES ,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par L’ASSOCIATION DES

PROFESSEURS DE L’EDUCATION ISLAMIQUE,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par le Réseau marocain Euro-Med des

ONG,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par le Réseau marocain transnational

migration et développement,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par la Fédération de la ligue démocratique des

droits de l’homme, 2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par le Collectif démocratie et

modernité,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par Le Réseau amazigh pour la citoyenneté-

AZETTA,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par l’INSTITUT MAROCAIN DES

RELATIONS INTERNATIONALES , 2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par l’ASSOCIATION MAROCAINE POUR

LES DROITS DES FEMMES,2011.

Page 169: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

169

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par l’ASSOCIATION TOUCHE PAS A

MON ENFANT,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par TRANSPARENCY MAROC,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par FONDATION KARAMA,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par le Réseau DEVENETWORK, 2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par le MOUVEMENT NOUVEL ELAN ,

2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par l ’INSTANCE DES MAROCAINS

EXPATRIES POUR LA REFORME DE LA CONSTITUTION, 2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par le FORUM DES ALTERNATIVES

MAROC, 2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par l’UNION D’ACTION FEMININE ,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par le PRINTEMPS FEMININ DE LA

DEMOCRATIE ET DE L’EGALITE, 2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par l'INSTITUT AMADEUS ,2011.

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par le MEDIATEUR POUR LA

DEMOCRATIE ET LES DROITS DE L’HOMME ,2011.

Page 170: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

170

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par le MOUVEMENT POUR LA PARITE

,2011 .

➢ Mémorandum adressé à la Commission Consultative chargée de la

révision de la Constitution par l'ASSOCIATION DEMOCRATIQUE

DES FEMMES DU MAROC ,2011

D. Entretien

➢ Entretien au quotidien, L’Economiste, édition n° 2703 du 30 janvier

2008, avec Azzedine Kettani , avocat au barreau de Casablanca.

V. Sites Internet et ressources électroniques

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decryptage-juridique-du-dr-remi-honore-dara-au-regard-du-droit-

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➢ http://webcache.googleusercontent.com/search?q=cache:xqybYAZ6Ws

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➢ http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-

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➢ http://www.huffpostmaghreb.com/hassan-zouaoui/la-crise-des-partis-

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➢ http://www.ziripress.com/en-franacis/najib-akesbi-les-veritables-

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➢ https://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2013-6-p-

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➢ http://www.mission-maroc.ch/fr/pages/218.html

➢ https://ledesk.ma/2017/07/29/texte-integral-du-discours-royal-

loccasion-de-la-fete-du-trone

➢ https://www.mediateur.ma/index.php/fr/principe-de-la-primaute-du-

droit-de-lequite

Page 172: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

172

TABLE DE MATIERE

INTRODUCTION .................................................................................. 3

PREMIERE PARTIE : LES GARANTIE

JURIDICTIONNELLES ........................................................................ 9

Chapitre 1 : La consolidation de la justice ......................................... 11

1. L'indépendance de la justice ............................................................... 11

2. La justice constitutionnelle ................................................................ 25

2.1. Les compétences de la Cour constitutionnelle ................................ 27

2.2. Le contrôle de constitutionnalité ..................................................... 33

2.2.1. Le contrôle de constitutionnalité par voie d’action ...................... 34

2.2.2. L'exception d'inconstitutionnalité ................................................. 39

Page 173: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

173

2.3. Le contrôle de conventionalité ........................................................ 43

Chapitre 2 : La consécration de la place du droit international

dans la nouvelle Loi fondamentale ...................................................... 48

1. La suprématie du droit international : réception ou insertion ? .......... 49

1.1. Élargissement du domaine du droit international ............................ 51

1.1.1. Les « irruptions » du droit international dans l’ordre

juridique interne .................................................................................. 51

1.1.2. La place des Conventions des droits de l’Homme ....................... 55

1.1.2.1. Le principe de l’universalité des droits humains : quelle

incorporation .................................................................................. 55

1.1.2.2. Limites du principe de l’universalité ......................................... 60

1.2. L’harmonisation de la législation nationale avec le droit

international des droits de l’Homme ...................................................... 65

2. La suprématie du droit international : une superstition

juridique ? ............................................................................................... 70

2.1. L’inscription constitutionnelle de la primauté du droit

international : une simple

épitaphe ? ............................................................................................... 71

....................................................................................................................

2.2. La suprématie de la loi interne ........................................................ 76

2.3. La consécration du filtre obligatoire de la retranscription

législative ................................................................................................ 78

2.4. Un rang légal controversé ? ............................................................. 82

2.5. L’instrument conventionnel, l’ordre juridique interne et

international : quelles interactions ? ....................................................... 84

2.5.1. La protection de l’investissement étranger .................................. 85

2.5.2. Les implications de l’accord France-Maroc sur

l'encouragement et la protection réciproques des investissements

................................................................................................................ 91

2.5.3. Les incidences de l’arrimage du Maroc à l’Union européenne .... 97

Chapitre 3 : Le législateur organique ............................................... 100

1. Le Conseil constitutionnel et l’incompétence négative du

législateur organique. ............................................................................ 101

2. Le contrôle des juges ordinaires ..................................................... 113

2.1. Le juge judiciaire ........................................................................... 113

2.1.1. Le cas de la réparation des erreurs judiciaires ............................ 114

2.1.2. La réparation de la dignité .......................................................... 118

2.2. Le juge administratif ...................................................................... 119

Page 174: Introduction à l’Étude des Garanties Constitutionnelles

174

DEUXIEME PARTIE : LES GARANTIES NON

JURIDICTIONNELLES .................................................................... 125

Chapitre 4 : Le système politique de l'État ...................................... 127

1. La représentation parlementaire ....................................................... 127

2. La liberté politique ........................................................................... 130

Chapitre 5 : Les institutions constitutionnalisées ............................ 137

1. Le Conseil national des droits de l'Homme ..................................... 137

2. L’institution du Médiateur du Royaume ........................................ 149

CO NCLUSION .................................................................................. 154

BIBLIOGRAPHIE ...................................................................................