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Introduction Roches sédimentaires et roches magmatiques prennent naissance dans un domaine thermodynamique bien défini. Les premières se forment à basse température et sous pression habituellement faible. Les secondes, à température plus élevée (650 à 1 200 °C) et à des pressions variables pouvant aller de l'atmosphère (roches volcani- ques de surface) à celles se chifant en kilobars, atteintes dès quelques kilomètres de profondeur. Or, Les minéraux ne sont stables que dans des domaines définis, plus ou moins vastes, de température (T) et de pression (P). OYl)'r �plé p0S MvdiXer'se vaéts d siVoé (fig. 8.+). Lors d'un cycle orogénique, les roches sont entrainées pour des raisons tectoniques vers la profondeur, il y a transformation des minéraux par réaction entre eux. De nouveaux assemblages apparaissent, typiques des conditions P, T rencontrées durant ce parcours: c'est le métamorphisme. Les roches réagissent donc à l'état solide aux changements des conditions P et T, elles se transforment: c'est le métamorphisme qui peut se définir comme l'ensemble des modïcations intervenant à l'état solide dans la composition minérale et dans la structure d'une roche soumise à des conditions de température et de pression dé- rentes de celles où elle s'est formée. Les minéraux des roches issues de la profondeur et parvenues en surface, par l e j eu de l' or ogenèse puis de l'ér osion ou par celui des éruptions volcaniques, se modifient aussi c'est l'altération température ( ° C] 200 600 800 1000 métamorphisme de contact / / I / I 10 / 0.5 / ½ I I ½ I 20 I -� / métamo, ph1sme / / · O cataclast1que / / / 30 1.0 / / / 40 s o 2 -� " " h 0 1.5 h 50 ; J l.8 Les trois types de métamorphisme. La zone hachurée représente des conditions qui ne sont pas atteintes sur Terre (d'après La recherche a montré qu'une matière initiale peut donner des minéraux difrents selo 1 d . · du milieu . Un cas exemplaire est celui du silicate d'alumine Al SiO (fig 11 9) S 1 , 1 n l es con i t ' ons d 1 . , . 2 5 · . e on es va eurs relative s u coup e pre:son-t�rnperature , il se_trouve sous trois rmes minéral ogiques différentes: andalousite (orthor- h_ ombique), s1�hmarn�e orthorhom?1que) et dr:thène (triclinique) . Selon que ]a roche contient l'une ou l'au- '.e de ces especes mmerales , on d1stmgue trms domaines-de conditions de métamorphisme différents que on � 1 �pelle «zos» (fig. 11.10) . D'autres zones peuvent être défini es sur la base de minéraux sensibles aux con1tt ons du milieu. · · ' ' , De plus, on détermine l es conditions de métamorphisme par l'association de minérau , t d 1 roches ap , J . t · ' x presen s ans es · res a rans, ormat*n; ces associati ons définissent différents faciès· par exempl e le f· ·, h . , ts verts est t , · , 1 , , , . ac1 es «sc 1s- » carac ense par a presence de chlorite , albite , épidote et actinote .

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Introduction
Roches sédimentaires et roches magmatiques prennent naissance dans un domaine thermodynamique bien défini. Les premières se forment à basse température et sous pression habituellement faible. Les secondes, à température plus élevée (650 à 1 200 °C) et à des pressions variables pouvant aller de l'atmosphère (roches volcani­ ques de surface) à celles se chiffrant en kilobars, atteintes dès quelques kilomètres de profondeur. Or, Les minéraux ne sont stables que dans des domaines définis, plus ou moins vastes, de température (T) et de pression (P). OYl)'cVV\Vpff"r t}{nplé lYp0PflS MvdiXer'se.srvavi'ét.és d.it siVoé (fig. 8.11). Lors d'un cycle orogénique, les roches sont entrainées pour des raisons tectoniques vers la profondeur, il y a transformation des minéraux par réaction entre eux. De nouveaux assemblages apparaissent, typiques des conditions P, T rencontrées durant ce parcours: c'est le métamorphisme.
Les roches réagissent donc à l'état solide aux changements des conditions P et T, elles se transforment: c'est le métamorphisme qui peut se définir comme l'ensemble des mod(fïcations intervenant à l'état solide dans la composition minérale et dans la structure d'une roche soumise à des conditions de température et de pression diffé­ rentes de celles où elle s'est formée.
Les minéraux des roches issues de la profondeur et parvenues en surface, par le jeu de l'orogenèse puis de l'érosion ou par celui des éruptions volcaniques, se modifient aussi c'est l'altération
température (°C] 200 600 800 1000
métamorphisme de contact
/ / I / I 10
50
; J l.8 Les trois types de métamorphisme. La zone hachurée représente des conditions qui ne sont pas atteintes sur Terre (d'après
La recherche a montré qu'une matière initiale peut donner des minéraux différents selo 1 d. · du milieu. Un cas exemplaire est celui du silicate d'alumine Al SiO (fig 11 9) S 1 , 1
n l es con
d 1 . , . 2 5 · • . e on es va eurs relatives
u coup e pre:son-trnperature, il se_trouve sous trois formes minéralogiques différentes : andalousite (orthor- h_ombique), s1hmarne orthorhom?1que) et dr:thène (triclinique). Selon que ]a roche contient l'une ou l'au­
'.e de ces especes mmerales , on d1stmgue trms domaines-de conditions de métamorphisme différents que
· · ' ' ,
De plus, on détermine les conditions de métamorphisme par l'association de minérau , t d 1 roches ap , J . t .. • · ' x presen s ans es
· res a rans,ormat10n; ces associations définissent différents faciès· par exemple le f· ·, h., t"'s verts est t, · , 1 ,
, , . ac1es «sc 1s- » carac ense par a presence de chlorite , albite , épidote et actinote.
En principe, le domaine des roches métamorphiques s'étend en température de 50- li ·c à 650-700 °C, et en pression de quelques atmosphères à quelques milliers d'atmosphères. L :·rn­ cessus qui, à des pressions faibles ou moyennes et à des températures inférieures à 10l1 ·,·. aboutit à une simple compaction et à un départ d'eau dans les minéraux fortement hydra,t, doit être appelé diagenèse. On a donc successivement les phénomènes suiv,v;its : à basse température le couple altération-sédimentation ; au-delà, la diagenèse, puis le métamorphisme, la zone de transition étant celle de l'anchimétamorphisme.
Le degré le plus élevé du métamorphisme conduit à la fusion totale ou partielle des roches dépendant fortement de l'hydratation du milieu. Ainsi le domaine de l' anatexie
(fusion partielle des roches), qui est limité par le solidus du granite, vient-il recouvrir le domaine du métamorphisme. L' anatexie de la croûte continentale aboutit à la for­ mation in situ d'un magma de composition granitique (néosmne ou leucosome) qui se mélange à la trame des roches métamorphiques (paléosome).
Si le métamorphisme affecte des roches sédimentaires, on parle de roches para­ métamorphiques ; s'il s'agit de roches magmatiques, cl' orthométamorphisme ; enfin, s'il s'agit de roches déjà métamorphisées antérieurement on utilise le terme de poly­ métamorphisme. Une roche soumise à un degré élevé de métamorphisme, peut ulté­ rieurement être transformée jusqu'à fournir une roche de moindre degré métamorphique: c'est la rétromorphose. Ceci se passe régulièrement pour des unités tectoniques ci' abord enfouies lors des collisions continentales puis exhumées (remon­ tées) lors de l'évolution tardive des systèmes orogéniques. On parle de métamorphisme prugrade pour une évolution à P et T croissantes, et rétrograde pour une évolution à P ou T décroissante.
D!HtREh!TS TYPES DE MÉTAMORPHISME
On distingue classiquement le métamorphisme de contact, d'extension limitée (quel­ ques centimètres à quelques kilomètres), se développant autour d'une intrusion magmatique et le métamorphisme régional ou général qui constitue des formations étendues sur dizaines ou des centaines de kilomètres. Enfin, plus récemment, on a défini un métamorphisme d'ultra-haute pression ou UHP qui se rencontre dans deux contextes : celui de l'impact de météorites (astroblèmes) et celui des roches de très grandes profondeurs comme les éclogites. \À..._X° i'\.
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a. Un exemple de métamorphisme de contact : Jlt \"Cvw¼>"\l-v.) 1 l'auréole du granite de Flamanville (Manche, France) C2..a..,G,cl
U:..:V ........,.,
Sur la côte ouest du Cotentin (fig. 8.31), le granite de Flamanville (granite à amphi­ bole) est intrusif dans une série sédimentaire plissée constituée de schistes et de calcaires (Silurien et Dévonien). Au contact du granite, sur environ 150 à 200 m, les roches sédimentaires sont affectées ··ue modifications texturales et minéralogiques (auréole de métamorphisme). La nature et l'importance de ces transformations dépendent de deux facteurs :
- la distance par rapport au granite ; la nature de la roche sédimentaire originelle.
Ainsi à partir d'une couche schisteuse, en se rapprochant du granite, on observe la transition suivante :
- schistes à texture finement orientée (roche sédimentaire non transformée) ;
schistes tachetés (les taches correspondant à des petits nodules d'un minéral nouveau : la cordiérite) ; schistes noduleux et micacés : la roche perd alors sa texture orientée régulière et il y a développement de micas et d'andalousite; enfin, à proximité du contact, on passe à des roches dures, massives, à grains fins, isotropes (les minéraux de cordiérite et cl' anda1ousite sont dispersés dans toute la masse, il n'y a plus d'orientation préférentielle). On les nomme cornéennes car leur aspect rappelle celui de la corne. ,_
Cette zonation traduit bien le rôle du corps granitique : les transformations sont d'autant plus importantes qu'on s'approche de celui-ci.
Les grès ordoviciens sont moins transformés, on observe une simple recristallisation en quartzites, de même_les calcaires dévoniens donnent par recristallisation des cipo­ lins (marbres) à minéraux .. La nature initiale de la roche intervient donc ; on peut d'ailleurs remarquer que l'auréole de métamorphisme est plus étendue clans les faciès schisteux que dans les faciès gréseux (fig. 8.31).
Dans la majorité des cas, les roches métamorphiques de l'auréole ont globalement la même composition chimique que celle des roches sédimentaires dont elles provien­ nent. Il y a eu un simple réarrangement minéralogique éventuellement accompagné de départ d'eau et de CO? métamorphisme isochimique ( ou topochimique).
FrrnJRE 8.31 - Carte du granite de Flamanville (Extrait de la carte Cherbourg 1/50 000). y/e: granite de Flamanville ; ba : schistes et grès (Cambrien) ; S2 grès armoricain (Ordovicien inférieur) ; S3 : schistes (Ordovicien moy.) ; S4 b-a : schistes et grès (Ordovicien supérieur) ; SS : schistes et grès du Silurien; d2: calcaires et schistes du Dévonien. L'auréole de métamorphisme de contact est représentée par un figuré de tiretés horizontaux en surcharge et par l' associatio.1 du sigle y/e à celui du terrain (S2y/e = S2 métamorphisé). On notera, notamment au nord du mfü:sif, que l'étendue de l'auréole est beaucoup plus réduite dans les grès (S2) que dans les formati,ms schisteuses.
L'apparition de minéraux nouveaux traduit les modifications des conditions physi­ ques régnant au voisinage de l'intrusion. C'est principalement la chaleur dissipée par le corps magmatique en cours de refroidissement qui est responsable des modifica­ tions, c'est un thennométamorphism,e, la pression joue peu ainsi que le monu·e la texture isotrope des cornéennes.
On ne peut pas dire que la pression ne joue aucun rôle car l'injection de la masse gra­ nitique produit aussi une augmentation locale de pression et dans quelques rares affleurements on a pu décrire, juste au contact du granite, quelques mètres de roches
foliées rappelant les micaschistes ou les gneiss.
Dans quelques cas, on-•'rencontre cependant, dans l'auréole, des roches dont la composition suppose une migration d'éléments chimiques à partir de la masse grani­ tique intrusive (métasomatose), c'est le cas des skarns (sorte de cornéennes calciques) à grenats qu2-en peut trn11ver en galet su:i:.k.1;1lage de Diél_te_dans.X.xemple du gfü"fîîte - De même la digestion des roches sédimentaires par le magma grani­ tique peut modifier la composition de celui-ci ( endométamorphisme ). La digestion d'un banc calcaire se traduit par un enrichissement en chaux (granite à amphibole, voire même diorite). Des parties non digérées peuvent demeurer à l'état d'enclaves à l'intérieur de la masse intrusive. .
b. Un exemple de métamorphisme régional (ou métamorphisme général) le massif de /'Arize (Arièg Js_ -e,
(pe m;ru;"if, 1ffi carte de Saint-Gitons 0150 000), appartient à la zone structurale nord-pyrénéenne ; U:H-Contact tectau iqne Je sépare au sud.. dn nwif des Trnis-Sei-
....g11e11rs (j!,g.8.32). Il est principalement constitué d'une série d'âge paléozoïque (allant clu Cambrien au sud au Carbonifère au nord). Au nord, la série (Silurien à Carbonifère) correspond à <les roches sédimentaires peu ou pas transformées, il s'agit principale­ ment de schistes riches en matière organique et de calcaires qui présentent fréquemment des fossiles (Graptolites, Tribolites, Brachiopodes, Polypiers). Cepen­ dant, dans les roches de l'assise la plus au sud (Silurien), on observe le développement de minéraux nouveaux : la séricite, la chlorite qui donnent aux roches un aspect soyeux et la muscovite. Nous sommes entrés dans le domaine du métamorphisme.
On trouve ensuite un complexe schisto-gréseux, à intercalations de bancs calcaires ; cl' âge carnbro-ordovicien, il est caractérisé ar la aragenèse mi_néral12ré­ céclente (séricite1te, muscovite) et par la disparition des restes fossilifères. Plus .. -·--,---'--'-:--,;.---- . - - - -a,1uu1Ji,_Ja structure des roches c!'lQg de façsrn impgrtante, elles sont formées de
--
q!,JJ_ n' étaien :. t que_ mis:_roscopiq ues dans les roches précédentes se développent et
devinnent visibles à l'œil nu, les roches sont alors appelées gneiss. De nombreux - -- - - -
changements minéralogiques sont concomitants : disparition de la inuscovite et de l'andalousite, apparition de la sillimanite et du feldspath potassique (microcline). Jusqu'aux micaschistes compris, les changements observés ne correspondent qu'à de simples réarrangements minéralogiques ; dans les gneiss, l'apparition du micro­ cline correspond à un début d'anatexie (fusion partielle), la zone des gneiss à sillirnanitc comporte donc des migmatites de type métatexites constitués par un
·q
paléosome de gneiss à sillirnanite et par un leucosome granitoïde. L'anatexie se généralisant, on passe ensuite à des migmatites diatexites, roches beaucoup plus homogènes, proches des granites d' anatexie, où le paléosome est réduit à des enclaves surmicacées.
0 1 km
Schistes
fossiliferes
CARS.
FIGURE B.32 - Le métamorphisme régional du massif de I' Arize'. (Ariège). Extrait de la carte de Saint-Girons au 1/50 000. Carb = Carbonifère, Dév = Dévonien, Sil = Silu­ rien, Ord = Ordovicien, Camb = Cambrien. l : isograde séricite +, chlorite +, muscovite +; 2: isograde biotite +; J : isograde andalousite + ; 4 : isograde muscovite-, andalousite-, sillimanite + et feldspath potassique (microcline) +. Le figuré du Massif des Trois Seigneurs ne préjuge pas de sa nature géologique qui est complexe (teri·ains sédimentaires secondaires, métamorphiques primaires et granitiques).
Par rapport à l'exemple précédent, on peut noter les différences suivantes:
l'étendue de la zone métamorphique ;
l'architecture anisotrope des micaschites et des gneiss ;
le passage progressif aux phénomènes cle fusion.
Différents minéraux apparaissent ou disparaissent successivement ; on peut carto­ graphier les lignes d' iso-apparitions (ou disparitions) de ces espèces minérales (isogrades). Puisque les minéraux ne sont stables que dans un domaine particulier de température et de pression on peut - si les espèces minérales index sont bien choisies - définir ainsi des zones d'intensité de métamorphisme. Dans l'exemple du massif de l' Arize on trace ainsi l'isograde de la séricite + et de la chlorite + (+signifiant
apparition), celui de la biotite +, celui de l'andalousite +, celui de la muscovite-, de l'andalousite- (- signifie disparition), de la sillimanite + et du microcline +.
Les principales circonstances donnant naissance à un métamorphisme régional sont l'enfouissement par
subsidence simple (partie profonde d'épais bassins sédimentaires); - empilement d'unités tectoniques crustales dans le cas de l'orogenèse; - subduction. La subduction peut alors concerner la lithosphère océanique (cas des
frontières de plaques en convergence) comme la lithosphère continentale (cas des collisions continentales, exemple des Alpes ou !'Himalaya. Dans les Alpes franco-italiennes (voir fig.7.56), les unités internes les plus
métamorphiques (faciès éclogites et schistes bleus, _fig.8. 40 et 41), issues du domaine océanique (schistes lustrés à ophiolites), sont charriées sur des unités de la marge ,de l'Europe. Ces dernières comprennent des unités inférieures relativement peu métamorphiques (exemple de la partie basse du massif de Dora Maira), elles-mêmes recouvertes tectoniquement par des unités de marge plus métamorphiques ( exemple des unités supérieures du massif de Dora Maira, dont les sous-unités de très haute pression à coésite, cf ci-dessous).
Dans certains cas, à la suite d'une extension régionale conséquente, comme en Grèce dans les Cyclades au Miocène ou dans le Basin and Range de l'ouest des États-Unis, de grandes failles ductiles subhorizontales mettent en contact des unités profondes métamorphiques avec des ensembles plus superficiels. Les unités métamorphiques ainsi remontées constituent des dômes de roches métamorphiques nommés metamor­ phic core complex par les anglo-saxons. Au cours de la remontée, il se développe, au ' 1 dépend des faciès de haute pression, un métamorphisme de haute température et basse pression, qui peut atteindre le domaine de l' anatexie (fig 8.33).
15 km granite mylonitisé
FIGURE 8.33 - Le modèle du « métamorph.ic core complex » (d'après Jolivet et Nataf, 1998). Postérieurement à la formation d'une chaîne qui a vu l'enfouissement à grande profondeur, par chevauchement, d'unités froides et le développement de paragenèses de haute pression et basse température, il s'établit un régime-extensif qui-aboutit à un réchauffement et à une remontée de la limite fragile/ductile dans la croûte. Au cours de la remontée il se développe un métamorphisme de haute-température et basse-pression au dépend des faciès de haute-pression préexistants.
Au cours de la formation de la chaîne de montagne, il y a un épaississement crustal qui résulte, au moins dans la partie frontale, de chevauchements qui entraînent rapidemeilt, des unités superficielles froides, en profondeur. Il se développe alors des paragenèses de haute pression et basse température. Lors deJ'arrêt de la convergence ces roches se trouvent soumises à une augmentation du gradient géothermique, il y a une remontée de la transition fragile/ductile dans la croûte et la base de la croûte peut même atteindre le point de fusion granitique. Les roches remontées par extension auront donc subit un réchauffement et montreront une évolution vers la haute température voire vers l' anatexié. En France, il existe au niveau de la chaîne hercynienne dans le Massif Central des dômes métamorphiques de haute température et basse pression (Velay, Montagne Noire) qui ont une structure comparable et qui sont interprétées. par certains auteurs comme des « metamorphic core complex ». Ainsi, en Montagne Noire (jig. 8.34) après la mise en place des nappes duflàhc sud, il s'établit un régime extensif qui provoque une remontée du dôme de !'Espinouse. C'est pouquoi, partant de faciès métamorphiques de haute pression comme les éclogites (fig. 8.34) on évolue vers de,s paragenèse de haute température et de basse pression et la fusion (gneiss de Montagne Noire) au cours de cette remontée. La zone de cisaillement ductile qui borde le dôme.au Nord évolue ensuite en faille normale contrôlant la sédimentation dans des bassins stéphaniens (bassin de Graissessac).
sw
NE
FIGURE 8.34 - Interprétation du massif de gneiss de !'Espinouse (Montagne Noire, France) en terme de « métamorphic core complex » (d'après Jolivet et Nataf, 1998).
Rappelons qu'au niveau des dorsales océaniques, les roches de la croûte sont aussi soumises systématiquement à un métamorphfame régional. Les gabbros, les filons et certains basaltes présentent en effet des paragenèses minérales riches en minéraux hydroxylés et enrichies en Na, K, Ca, ... témoignant de réactions métamorphiques tra­ duisant la déstabilisation des assemblages originaux à basse pression et dans des conditions de température allant de 800 °C (faciès amphibolites) à 350 °C (faciès des schistes verts, voir fig. 8.41).
c. Le métamorphisme d'ultra-haute pression (UHP)
Ce métamorphisme est caractérisé par la présence de coésite (fig. 8.11), silice de très haute pression, supérieure à 27 kbars, découverte d'une part dans des roches de grande profondeur (éclogites) et d'autre part dans les cratères d'impact de météorites ou astro­ blèmes (métamorphisme d'impact ou métamorphisme de choc).
Le métamorphisme UHP a été mis en évidence dans des rochf?S ayant subi, au niveau des chaînes de collision, un profond enfouissement avant de remonter vers. la surface. La coésite est"souvent incluse dans les volumineux grenats très magnésiens (pyropes) des éclogites, associés à des staurotides magnésiennes et à une nouvelle espèce miné­ rale, l'ellenbergite, alumino-silicate magnésien titanifère plus ou moins riche en phosphore (Dora Maira, Monte Rosa, Grand Paradis dans les Alpes, chaîne des Calé­ donides en Norvège, Précambrien du Sahara). La coésite des éclogites de la chaîne Qinling-Dabie en Chine orientale et celle des gneiss du Kazakhstan sont en outre asso­ ciées à des microdiamants, signe d'un métamorphisme encore plus profond (pression supérieure à 40 kbars, température supérieure à 700 degrés soit une profondeur supé­ rieure à 120 km).
Quant aux coésites des astroblèmes, résultant d'un métamorphisme de choc, elles sont parfois associées à une variété de silice de pression extrême (supérieure à 100 kbars), la stishovite. En outre la structure des autres minéraux est modifiée (planaire pour le quartz, en arêtes de poisson pour le mica), tandis que les roches prennent une structure cônique emboîtée (shatter cane). Le plus ancien astroblème encore visible sur la Terre est celui de Subdury dans l'Ontario (1 700 à 2 000 Ma), un des plus récents est le Meteor Crater en Arizona (phot9 2).
8.3.2. LA STRUCTURE DES ROCHES MÉTAMORPHIQUES
Ce survol des différents métamorphismes a mis en évidence deux types de roches qui s'opposent par leur structure: d'une part les cornéennes dont la structure isotrope montre que les minéraux ont pu se développer dans toutes les directions et d'autre part les micaschistes et les gneiss dont la structure orientée (disposi tion en feuillets) indique que les croissances cristallines se sont faites suivant des directions privilégiées. C'est de cette disposition en feuillets qu'est tiré le terme cristallophyllien qui était uti­ lisé, autrefois, pour caractériser les terrains métamorphiques.
Les roches métamorphiques peuvent avoir subi des actions mécaniques qui ont déformé optiquement ou même brisé certains minéraux, le quartz notamment, qui présente alors une extinction progressive (extinction roulante) en lumière polarisée. C'est la structure cataclastique (du grec cataclas briser). Lorsque certains minéraux, ou groupements de minéraux (quartz, feldspaths, grenats) forment des nodules alignés pouvant atteindre 1 à 3 cm de diamètre on a une structure
œillée (gneiss). Si les yeux s'allongent en amande.,..c'est la structure amygdalaire ou
glanduleuse. Ces structures traduisent la plupart du temps un apport de matériel mag­ matique qui vient se mélanger à la trame métamorphique.
L'étude structurale des roches métamorphiques a pour objet d'analyser non seulement la nature du litage et des déformations (aspect statique ou géométrique), mais aussi le nombre et l'âge des épisodes successifs- de déformation ( aspect chronologique) ainsi que la cinématique de la déformation ( critères de sens de cisaillement, par exemple relation entre les plans C et S: chapitre 7,fig. 7.39). C'est le domaine de la: tectonique analytique.
Trois grands types d.e litage peuvent exister dans les ensembles métamorphiques régionaux:
a. La stratification (SO)
C'est le seul type qui est caractéristique des roches sédimentaires. La stratification est produite par les variations de nature de la sédimentation souvent renforcées par des
processus diagénétiques ; elle aboutit au découpage en bancs (joints de stratification). Elle peut être encore préservée alors que la schistosité est bien exprimée.
b. La schistosité (S)
Ce feuilletage mécanique marque le plan d'aplatissement de la matière. Il est souvent parallèle à l'axe des plis éventuels (schistosité de plan axial). La schistosité est donc souvent oblique par rapport aux phms de stratifications notamment dans les têtes de plis (SO oblique sur S : fig. 7.37). En revanche dans les flancs des plis, SO et S peuvent être confondus. La schistosité peut d'autre part se réfracter, c'est-à-dire changer d'orientation entre des bancs présentant des contrastes de rigidité (argiles-grès par exemple) (fig. 8.35A et B).
A
FTGURE 8.35 - Structures des roches métamorphiques. A - plissement de la stratification (SO) et schistosité de plan axial (S) ;
B - réfraction de la schistosité dans un banc de grès ; C- critères de sens de cisaillement (en haut feldspath déformé asymétrique; en bas, cristallisation
en ombres de pression (o.p.) à l'abri d'un minéral plus résistant).
De nombreuses observations montrent que, dans les régions plissées, la schistosité n'apparaît nettement qu'à une certaine profondeur, lorsque la charge de sédiments atteint une puissance de l'ordre de 5 km. La limite de la zone où apparaît le feuilletage oblique par rapport à la stratification a été appelée, par Fomrnarier, front de schistosité (fig. 7.45).
c. La foliation
Dans les plans de foliation (fig. 7.38 à 7.40), on observe des ségrégations minérales ; les espèces néoformées se concentrent le long de plans privilégiés. Au contraire de la schistosité, les feuillets ont donc une constitution minéralogique variable ; de plus, la cristallinité des minéraux augmente. Cette structure est typique des micaschistes et des gneiss (photo 4).
On définissait aussi un front de foliation mais la profondeur de ces différents fronts sont très variables en fonction du contexte géodynamique et de la position dans l'orogène (fig. 7.45)
8.3.3. U:S IDIFFlHEH'ff!E5 ROCHfS MÉTAMORPHIQUES
Dans l'ancienne terminologie, lorsqu'une roche métamorphique c01respondait à une
simple transformation minéralogique, sans apport extérieur, on la n01mnait ectinite ( du grec, tension). Cette terminologie n'est plus utilisée.
Dans la nomenclature actuelle, on désigne la roche métamorphique par son nom ori­
ginel (anté-métamorphe) précédé du préfixe méta. On parle ainsi de méta-grès, de méta-basalte ou de méta-granite ; malheureusement toutes les roches métamorphiques
ne présentent pas de critères suffisamment sûrs permettant d'identifier la roche-mère (initiale) ou protolithe.
Nous proposons ci-dessous quelques exemples de transformations métamorphiques
appliquées à divers protolithes.
2 O
5 Alz(OH\, le premier faciès pétrographique obtenu est celui de l'argilite, ou schiste
argileux, dû à la formation d'illite. Par déshydratation et cristallisation progressive, on passe ensuite aux phyllades, ou aux schistes sériciteux et aux séricitoschistes. La séricitc diffère de la kaolinite par une perte d'eau et un apport de potasse. Celle-ci est contenue dans les impuretés de l'argile avec d'autres alcalins, du fer et du magnésium qui inter­ viennent dans les cristallisations ultérieures pour former de la chlorite et des grenats. La séiicite peut se transformer en muscovite K.Alz(A1Si
3 Ow)(OH,F)
2 (micaschistes à
mica blanc), puis la chlorite en biotite (micaschistes à deux micas) : chlorite + alcalin (muscovite) donnent biotite+ grenat (almandin). Des plagioclases commencent à se former en cristaux microscopiques. L'excès d'alu­ mine donne des silicates riches en Al : andalousite, staurotide, disthène, grenats (schistes à minéraux). Dès que les feldspaths deviennent macroscopiques, on passe aux gneiss bien caractérisés par l'alternance de lits riches en quartz d'une part et en feldspaths d'autre part (photo 4). Le métamorphisme s'accentuant, la muscovite disparaît, rem­ placée par une varitté de feldspath potassique, le microcline :
KAlz(AlSi 3 O
10 )(OH, F)
muscovite orthose silicate d'alumine
La forme minéralogique du.silicate d'alumine (Al2SiO 5 ) est représenté par la sillimanite,
le disthène ou l' andalousite selon les conditions de pression et de température (jïg. 8.36).
Série siliceuse
Les grès purement siliceux se transforment en quartzites. La présence d'un peu d'argile explique la formation de quartzites sériciteux ou chloriteux donnant des quartzites t
muscovite et biotite. Les arkoses, initialement riches en feldspaths, se métamorphisent en leptynites, roches très claires, formées essentiellement de quartz et de feldspath où la foliation est en général peu apparente.
Série carbonatée
Un calcaire chimiquement pur recristallise en marbre blanc entièrement cristallin. En général, la présence d'impuretés confère à la roche un aspect particulier: l'argile donne naissance à des lits micacés (cipolins). La magnésie des calcaires dolomitiques peut se transformer en serpentines.
0 ,---,----,---.------,----,----,---,--
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_90- 800 700 600 500 400 300 200 100 0
Degrés centigrades
0
5
20
FIGURE 8.36 - Le domaine de stabilité des trois silicates d'aluminium anhydres Al2SiO5•
La sillimanite est un minéral de pression variable - haute température; l'andalousite de haute tem­ pérature et de pression faible ou moyenne ; le disthe a un domaine fort étendu à température moyenne.
Série calcaro-pélitique
Des marnes on passe aux schistes calcarifères appelés calcschistes dans les zones internes des Alpes (briançonnais et nappe des schistes lustrés), qui renferment d'abord de la séricite et de la chlorite, puis de l'épidote, de la zoïsite et de l'actinote.
Série carbonée
Les houilles se transforment en anthracites, mais la recristallisation affecte le vitrain plutôt que le fusain. Un métamorphisme plus intense conduit à la formation de graphite. Ces carbones métamorphiques peuvent apparaître dans des roches d'une autre série: schistes anthraciteux, gneiss graphiteux.
Série granitique
Le granite faiblement métamorphisé (comme certaines protogines des massifs cristallins externes, Mont-Blanc et Oisans en particulier) a une structure feuilletée et cataclastique due à la déformation des cristaux de quartz qui présentent alors une extinction roulante en lumière polarisée. La coloration verdâtre est due à la transformation de feldspaths et de biotite en séricite et en chlorite. Les orthogneiss, sont d'anciens granites fortement déformés dans lesquels les grands feldspaths prennent une forme d'amygdales plus ou moins asymétriques selon le caractère co-axial (fig. 7.14) ou non co-axial de la défor­ mation (gneiss œillés, fig. 8.35C).
Série volcanique acide
Les rhyolites et les porphyres à quartz bien individualisés conduisent à la formation de roches séricifeuses laminées, les porphyroïdes, puis à des ortholeptynites, lorsque les minéraux ferromagnésiens sont très peu abondants.
Série gabbro-dioritique
Les faciès sont voisins de ceux de la série granitique, mais les minéraux ferromagné­ siens et calciques plus abondants sont représentés par la zoïsite, l'épi dote, l'albite. Les olivines sont souvent serpentinisées. Les métagabbros sont abondants dans le cortège des ophiolites des Alpes (par exemple les massifs du Viso ou du Queyras).
Série volcanique basique
Les laves basiques (basalte) deviennent schisteuses et granulaires par. appant10n d'amphibole, d'albite et d'épidote. On obtient des prasinites puis, dans les zones de métamorphisme plus intense, des orthoamphibolites et des orthopyroxénites. Les éclo­ gites, roches riches en grenats et en omphacite (pyroxène sodique), proviennent de la transformation du basalte et des gabbros à haute pression.
b. les migmatiques
Dans ce cas, la roche est formée d'une trame métamorphique ancienne (le paléosome) plus ou moins perturbée par la cristallisation d'un matériel nouveau de composition granitique issu de la fusion partielle des roches (le néosome). La cristallisation du néosome conduit à la formation de lentilles ou les minéraux clairs (leucosome constitué de quartz et feldspaths) abondent dans la partie centrale tandis que la périphérie est enrichie en minéraux noirs réfractaires à la fusion (mélanosome). Lorsque le néosome est intercalé, en lentilles, dans un paléosome qui demeure régulièrement orienté (c'est­ à-dire que la structure cristallophyllienne est conservée), la roche porte le nom de métatexite (équivalent à l'ancien terme d'embréchite). Lorsque la proportion du néosome augmente, le paléosome devient difficile à identifier ; la roche perd sa struc­ ture orientée. On parle alors de diatexites (équivalent à l'ancien terme d'anatexites) qui par homogénisation progressive passent aux granites d'anatexie.
8.3.4. LES FACTEURS DU MÉTAMORPHISME
Les mécanismes de subduction et d'épaississement crustal ont pour effet d'enfouir les roches. La pression et la température vont donc progressivement varier au cours de l'enfouissement et être responsables des modifications minéralogiques et structurales. Le métamorphisme est d'abord une simple conséquence de l'enfouissement par aug­ mentation de la température et de la contrainte isotrope (lithostatique). Cependant lors des raccourcissements crustaux, les contraintes anisotropes - qui seules conduisent aux déformations - jouent au,s.i un rôle important dans la mesure où les fluides circulent préférentiellement le long des cisaillements ductiles à toutes les échelles. Or les fluides, en tant que vecteurs d'éléments chimiques, sont des facteurs essentiels du métamorphisme.
a. la température
'
Un apport local de chaleur supplémentaire, exceptionnel, provoqué par la montée d'un corps magmatique est à l'origine du métamorphisme de contact.
b. La pression lithostatique et les contraintes orientées
En tout point de l'écorce terrestre la pression lithostatique est due au poids de roches surincombantes. En prenant 2,5 comme densité moyenne des roches de l'écorce, on arrive à une pression de 1 000 atmosphères à une profondeur de 4 000 m, de 5 kb à environ 15 km et de 10 kb à 30 km. Il s'agit d'une pression isotrope, les roches sou­ mises à ces pressions ne présentent donc pas nécessairement d'orientation préférentielle par déformation synmétamorphe. On connaît ainsi des gabbros alpins présentant de magnifiques textures magmatiques non déformées mais seulement transformées minéralogiquement dans les faciès schistes bleus ou éclogitiques. D'une manière générale, les roches ne peuvent pas supporter des contraintes déviatoriques élevées ; elles se déforment sous l'effet de contraintes orientées de quelques centaines de bars seulement. Ces pressions qui constituentla partie anisotrope du tenseur des -·
contraintes sont ridiculement faibles par rapport à la pression lithostatique. Elles n'ont que peu d'effet sur le métamorphisme, sauf en facilitant la déformation, et en activant la circulation de fluides et donc les échanges entre les minéraux, condition nécessaire pour que les réactions abçmtissent. C'est donc beaucoup plus par ces phé­ nomènes de circulation induits que par l'augmentation des contraintes qu'on explique la relation classique observée entre orogenèse et métamorphisme (fig. 8.37).
L'augmentation de pression favorise, à partir des mêmes composants, l'apparition de minéraux- plus denses. C'est un cas particulier de la loi de Latelier : « un système chinùque, comprimé à température constante, déplace son équilibre du côté où la réac­ tion se fait avec diminution de volume». Ainsi l'olivine réagit avec l'anorthite pour donner des grenats avec une contraction de 17 %. L'albite, seule, fortement comprimée, perd de la silice et donne un pyroxène, la jadéite, soit globalement :
NaA1Si3O8 - NaA1Sip 6 + SiO
2
Becke avait noté, dès 1903, cette influence de la loi des volumes, amenant en profondeur la genèse de certains nùnéraux. Il avait d'autre part remarqué que la température joue en sens inverse de la pression pour bien des réactions résultant du métamorphisme.
c. Le facteur temps, préservation des assemblages, vitesse d'exhumation
La plupart des minéraux sont métastables, c'est-à-dire qu'ils se maintiennent sans modifications sensibles en dehors de leur domaine de formation. C'est ce phénomène qui nous permet d'observer à l'affleurement des paragenèses d'origine profonde. Les réactions de formation des minéraux sont réversibles, mais bien souvent les roches sont rapidement soustraites aux conditions P, T qui ont présidé à la genèse des assemblages progrades et les réactions rétrogrades ne se produisent pas ou à des vitesses extrè­ mement faibles. Ainsi, des amphiboles, des pyroxènes, des grenats de haute pression sont-ils parfaitement conservés à la surface de la Terre. La vitesse d'exhumation c'est­ à-dire de remontée des unités profondes est donc un facteur essentiel de conservation
. des assemblages métamorphiques. Si au cours de la remontée, les unités métamorphiques restent dans des conditions intermédiaires pendant un temps assez long, les paragenèses initiales pourront être partiellement ou totalement effacées. On estime ces vitesses grâce aux datations radiochronologiques des différents assem­ blages. Pour estimer les températures décroissantes, on utilise les marqueurs de la
tose est ce processus d'échanges d'éléments chimiques véhiculés par les fluides. Elle s'oppose ainsi au métamorphisme topochimique ou isochimique se produisant à composition chimique constante. C'est ainsi que la transformation d'une dolomie sili­ cieuse en tal? nécessite l'apport d'eau et le départ de C0
2 :
3CaMg(C03)2 + 4Si02 + HzO - Mg3Si40 10(0H) 2 + 3CaC03 + 3C02.
La présence de pyroxènes et de grenats dans les skarns, roches voisines des cor­ néennes calciques, et qui dérivent des mêmes niveaux carbonatés, suppose un apport de silicè. La mobilité des ions est d'autant plus grande que leur diamètre ionique est plus petit. C'est ainsi qu'un «échange» hydrogène-sodium permet la formation de muscovite à partir d'albite et d'orthose, dans les greisens, roches à quartz et mica des coupoles granitiques.
6NaA1Si 3 0
albite orthose·· muscovite
Le pouvoir dissolvant de l'eau croît rapidement avec la température et avec la présence de minéralisateurs. Au voisinage de sa température critique (375 °C), l'eau dissout le verre, la silice et plusieurs silicates. Au-delà de ce point critique elle se trouve dans un état de fluide homogène supercritique où il est impossible de différencier plusieurs phases. Cette température est atteinte vers 10 000 m dans les roches à gradient géothermique normal. Les inclusions fluides des minéraux des toches érnptives et métamorphiques sont des témoins piégés des solutions de fluides circulant en profondeur.
8.3.5. ESTIMATION DE L'INTENSITÉ DU MÉTAMORPHISME
a. les paragenèses métamorphiques, calibration des conditions P, T : géothermomètres-géobaromètres
La minéralogie expérimentale a montré qu'à chimisme global constant la composition minéralogique change en fonction des conditions de température et pression. En faisant les études pour divers minéraux, on peut ainsi obtenir des outils (les minéraux repères ou minéraux index) pour déterminer les conditions P, T du métamorphisme. Citons quelques exemples (fig.8.38):
- l' andalousite, la sillimanite et le disthène sont des minéraux typiques des roches alu­ mineuses (métasédiments). Ils ont la même formule chimique (Al
2 Si0
5 ), mais
cristallisent dans des systèmes différents. À relativement basse pression, mais haute température, on rencontre l' andalousite. Ce minéral sera ainsi symptomatiquè du métamorphisme de contact. À haute pression (jig.8.36), le disthène est stable pour des températures assez faibles, on le rencontrera dans les séries ayant évolué au cours d'un enfouissement rapide (subduction). La sillimanite se i·encontre pour des conditions de température et de pression relativement élevées ;
- l'albite (NaAlSip8) devient jadéite (NaA1Siz06) + quartz (Si02) quand la pression augmente;
- la muscovite (KA13Si30 10 (OH) 2) + quartz (Si02) se transforme en .orthose (KA1Si308) + sillimanite (Al2Si05) + eau (HzÜ).
La signification de la présence ou de l'absence d'un minéral est cependant complexe puisqu'il peut s'agir:
15
10
5
- D'un minéral dont la synthèse est typique du métam01phisme: sa présence montre que Je domaine de stabilité de ce minéral a été atteint (par exemple la présence de jadéite signifie forte pression). En revanche son absence est plus ambiguë puisqu'elle peut indiquer soit:
- que le domaine de stabilité n'a pas été atteint; - que le chimisme de la roche n'a pas permis sa synthèse (la jadéite, par exemple,
ne pourra cristalliser, quelle que soit la pression dans une roche sans sodium). - D'un minéral incompatible avec les conditions du métamorphisme: sa présence
indique alors que le domaine d'instabilité de ce minéral n'a pas été atteint (la pré­ sence de rnuscovile indique, par exemple, que la température n'a pas dépassé 650 °C). Ici encore, l'absence du minéral est plus complexe, elle peut montrer soit:
Pression (Kbar) IW
FJUURE 8.38 - Quelques réactions expérimentales entre différentes phases solides représentées sur le diagramme pression-température.
Les courbes d'équilibres univariants sont des droites; P = point triple des polymorphes SiAl2O5
(dont la position reste encore imprécise malgré de nombreux travaux expérimentaux). Les courbes en traits rouges sont les courbes P-T pour les trois types de métamorphisme principaux de la clas­ sification de Miyashiro (cf infra) : climat dit de haute pression (jadéite-quartz); climat dit de pression intermédiaire (disthène-sillimanite); climat dit de basse pression (anclalousite­ sillimanite).
- que le domaine d'instabilité a été atteint ; - que le minéral n'était pas présent dans la roche originelle.
- D'un minéral mixte: on peut citer les feldspaths, minéraux présents dans les roches magmatiques et sédimentaires et qui ne sont pas (ou peu) détruits par le métamorphisme. Des néogenèses de feldspaths de métamorphisme peuvent, en revanche, se produire par diverses réactions. Exemple :
muscovite + _ _guartz donne orthose + sillirnanite.
On voit donc que la présence (ou l'absence) d'un seul minéral ne donne que des informations très fragmentaires sur la pression et la température atteintes par la roche. Il est nécessaire d'étudier le plus de minéraux (ou de coupls) possibles (j-ïg. 8.38).
On recherche des minéraux dont les compositions permettent de fixer un des deux paramètres P ou T du métamorphisme. Un géothermomètre est un assemblage miné­ ralogique dont la présencef ou la composition chimique, donne une bonne indication sur les conditions de température. Un géobaromè_tre renseigne sur la pression. Dans un diagramme pression-température, les conditions de stabilité des minéraux et les réactions d'apparition-disparition sont représegtées par des courbes d'équilibre. L'allure de ces courbes nous renseigne sur les pai·amètres P, T qui contrôlent les réac­ tions. Ainsi, si l'équilibre est très sensible à la pression, la courbe sera plus ou moins parallèle à l'axe des températures. Il en va à l'inverse pour la sensibilité aux tempé­ ratures (fig. 8.39).
L'idéal est donc de pouvoir disposer au sein d'une roche donnée d'un bon géo­ thermomètre et d'un bon géobaromètre. En utilisant ce principe, on peut cerner un champ de conditions possibles pour un assemblage. En pratique, on ne se contente pas d'équilibre entre minéraux, on utilise souvent la distribution d'éléments chimiques donnés entre deux espèces minérales (coefficient de partage), par exemple le Fe, le Mg ou le Ca entre des grenats et des pyroxènes ou bien la teneur en un élément donné au sein d'une seule espèce minérale (par exemple le Na dans les pyroxènes sodiques). Ces teneurs sont mesurées directement à la microsonde électronique, sur lame mince polie. Dans l'exemple de la figure 8.40, les conditions du métamorphisme des unités
p
a
b
2 thermomètres (1,2)
To
FIGURE 8.39 - Géothermomètres et géobaromètres. Dans un diagramme P, T, les courbes d'équilibres entre minéraux du métamorphisme peuvent constituer de bons repères permettant de calibrer les conditions P et T du métamorphisme. Ce sont des baromètres (exemple: a, b) ou des thermomètres (exemple: 1, 2) selon leur orientation dans le diagramme. On peut ainsi cerner un champ de conditions P, T du métamorphisme en utilisant des couples de géotherrnomètres et de géobaromètres.
alpines internes (fig. 7.54 à 56) du Queyras (schistes bleus) et du Mont-Viso (éclogites) ont été determinées de cette façon à l'aide de plusieurs indicateurs (teneur en Si des micas blancs, teneur en Na du pyroxène sodique, partage du Fe-Mg entre grenat et micas blancs, présence ou absence de clinozoïsite, présence ou absence de lawsonite, chimisme du grenat des éclogites, etc).
15
10
5
, / glaucophane // Q: Queyras
0
FtGURE 8.40 - Les champs P, T des conditions du métamorphisme des unités du Queyras (faciès des schistes bleus) et du Mont Viso (faciès des éclogites) dans les Alpes internes franco-italiennes. Ce diagramme permet d'illustrer l'utilisation des équilibres afin de délimiter les champs de sta­ bilité des assemblages métamorphiques (détail dans le texte).
b. Jsogrades, faciès et climats métamorphiques, chemins P, T, t
Les isogrades et les zones de métamorphisme ··,
Au début du siècle, Banow et Tilley remarquent dans la série alumineuse, l'apparition successive de certains minéraux en fonction de l'intensité du métamorphisme: chlo­ rite, biotite, staurotide, disthène, sillimanite. Ils les considèrent comme des minéraux­ repères dont l'apparition définit une ligne d'égâle intensité ou isograde.
C'est la méthode utilisée sur la figure 8.32 pour décrire le métamorphisme du massif de l' Arize. On peut, de cette façon, délimiter des zones métamorphiques ; ainsi la zone à biotite est délimitée par l'apparition de la biotite (qui la distingue de la zone à chlo­ rite) et par l'apparition de l' andalousite (la biotite ne disparaissant que beaucoup plus tardivement,Jig. 8.32). Cette méthode ___ est encore très utile sur le terrain.
La zonéographie métamorphique
_Eecke et Grubenman ont essayé d'établir une zonation du métamorphisme où l'inten­ sité des transformations est assimilée à la simple profondeur. Dans ce système remanié par Niggli en 1924, trois zones se succèdent de plus en plus profondes, précédées par l' anchizone, intermédiaire entre diagenèse et métamorphisme. Nous les rappelons ici uniquement à titre informatif, elles ont un intérêt limité car elles ne fournissent aucune indication sur les gradients géothermiques concernés (haute ou basse température par exemple).
L'épizane est le domaine dù métamorphisme de basse pression et d'apports chimiques en présence d'eau à température faible. C'est la zone à séricite, chlorites, stilpnomélane, antigorite, actinote, épidote, zoïsite, albite, glaucophane, grenats manga nésifères et car­ bonates. La mésozane est le domaine d'un métamorphisme à pression et température plus élevées dont les minéraux caractéristiques sont la biotite, la muscovite, la staurotide, le disthène les amphiboles, l'almandin. L'albite, l'épidote, la zoïsite, les carbonates y sont encore présents. La catazane, domaine d'importàntes recristallisations sous températures et pressions élevées se caractérise par la sillimanite, l' andalousite, l'hypersthène, l' omphacite, la jadéite, les grenats, les spinelles, les plagioclases calciques sont avec les biotites, les feldspaths potassiques, les principaux minéraux. En prenant simplement pour repère la série alumineuse, comme Barrow et Tilley, Jung et Roques proposèrent une zonéogéographique qu'ils appliquent au Massif Central et qui comprend, au fur .et à mesure que croît l'intensité du métamorphisme, les zones d'isométamorphisme suivantes - micaschistes supérieurs à chlorite et séricite ; ·· - micaschistes inférieurs à deux micas ; - gneiss supérieurs à deux micas ; - gneiss ultra-inférieurs à feldspath potassique, dépourvu de micas.
Les faciès métamorphiques
Une classification d'une application universelle où pression et température sont nette­ ment explicitées, quelle que soit la profondeur, a été proposée par Eskola. Ce sont les faciès de métamorphisme définis non plus à partir de la série alumineuse, mais de la série basique où la variété minérale est plus grande (fig. 8.40) Il regroupe ainsi, dans un même faciès, des roches qui ont subi le métamorphisme dans des conditions phy­ siques voisines, quelle que soit leur composition. On distingue alors :
- faciès des zéolites (à laumonite, défini par la cristallinité de l'illite), qui marque la transition entre diagenèse et métamorphisme (anchimétamorphisme, température inférieure à 300 °C) .
- faciès à prehnite-pumpellyite (température un peu plus élevée, 350 à 400 °C, et pression toujours modérée) .
- faciès des cornéennes (à amphibole, à pyroxène), caractéristique du métamor­ phisme de contact (température élevée, faible pression) ;
- faciès des schistes verts (zoïsite-épidote-albite) : basse température et faible pres­ sion
- faciès des schistes bleus à jadéite, glaucophane et lawsonite: basse température et haute pression (métamorphisme alpin, zones internes) ;
- faciès à disthène et sillimanite : moyenne température et moyenne pression (massif des Maures) appelé encore faciès barrovien (en hommage au géologue écossais Barrow);
- faciès à andalousite et sillimanite : haute température et faible pression
- faciès à andalousite et staurotide, intermédiaire entre les deux précédents
- faciès des amphibolites à hornblende et plagioclases : pressions élevées (2 à 3 kilo­ bars) et températures de 600 à 700 °C, voisines de la fusion ;
- faciès des granulites (absence de micas, pyroxènes, sillimanite, disthène, grenat pressions et températures élevées atteignant Je domaine de l' anatexie ;
- faciès des éclogites, où gabbros et basaltes se transforment en une roche à pyroxène et grenat : température élevée et pression considérable ;
- faciès des sanidinites, à sanidine, corindon et formes de haute température de la silice comme celles qu'on trouve dans les briques et les poteries. C'est un faciès de haute température instantanée et pression très faible, guère supérieme à la pres­ sion atmosphérique, qui concerne les roches au contact des laves ou en enclaves à l'intérieur (métamorphisme de «cuisson» ou thermométamorphisme).
Un faciès correspond donc à un domaine défini de température et pression mais il faut bien souligner que l'appartenance d'une roche métamorphique à un faciès de ce système n'implique pas que la roche ait la composition de la référence basique. Ainsi un basalte porté sous 6 kbar à 550 °C devient une amphibolite, ce qui donne le nom au faciès, mais un gneiss à deux micas, plagioclases, quartz, feldspath potassique appartient aussi au faciès amphibolites bien qu'il ne contienne pas d'amphiboles.
Les « climats » métamorphiques
Cette classification, qui représente un apport capital à la compréhension du métamorphisme, a été élaborée par Miyashiro au cours des années soixante, à partir de l'étude des ceintures métamorphiques de l'arc japonais.
P (kbar)
50
40
30
20
1 0
FIGURE 8.41 - Répartition des principaux faciès métamorphiques en fonction de la température et de la pression.
Zone hachurée: conditions non réali sées dans-la nature. Les trois )jgnes pointillées correspondent aux différents climats métamorphiques de Miyashiro : 1 haute pression/basse température, 2 moyenne pression - moyenne température, 3 basse pression. Comparer avec la figure 8.38.
Les variations relatives de la pression et de la température pe1mettent de définir des « climats » métamorphiques qu'il ne faut pas confondre avec des intensités de métamorphisme car dans chaque climat on peut rencontrer tous les degrés de métamorphisme.
Suivant les gradients différents de pression et température on distingue :
Le climat BP-HT (basse pression-haute température)
Le gradient géothermique est fort : Ia--température croît très vite même pour une faible profondeur. Ce climat aboutit à une série dite de type Abukuma-Rioké (du nom du plateau japonais) ou encore à« andalousite-sillimanite » (du nom des minéraux carac­ téristiques). Ce climat conduit souvent à l'anatexie.
Le climat MP-MT (m_oy:nne pression-moyenne température) Le gradient géothermique st moyen. C'est le type barrovien. Il aboutit souvent à l' anatexie. Les minéraux caractéristiques en sont le disthène et la sillimanite.
Le climat HP-BT (haute pression-basse température)
Le gradient géothermique est faible : la pression.-croît sans élévation notable de la tempé rature. Les schistes bleus (à lawsonite et glaucophane, amphibole bleue) se forment sous ce type qui n'aboutit jamais à l'anatexie.
Une roche évoluera différemment suivant le climat : par exemple, un basalte deviendra successivement schiste vert puis amphibolite, puis granulite en climat MP­ MT. Il deviendra schiste bleu puis éclogite en climat HP-BT (fig. 12. 29).
La répartition de ces différents « climats » et faciès dans les zones orogéniques est développée dans le chapitre 12, nous rappellerons que les zones de subduction se caractérisent par deux ceintures métamorphiques
- une ceinture externe de type basse température-haute pression (à glaucophane), - une ceinture interne de type haute température-basse pression (à andalousite et
sillimanite).
Les chemins P, T, t
En réalisant des datations géochronologiques sur des roches métamorphiques, on peut intégrer le temps sur les diagrammes du type 8.38 et 8.41. On réalise des chemins P.T.t., (pression, température, temps), traduisant de façon visuelle l'évolution des séries métamorphiques dans les orogènes. Sur la figure 8.42 nous présentons 3 types de chemins théoriques. Le premier montre une évolution rapide vers les hautes pres­ sions et basses températures (ex. éclogites) suivi par un retour sans réchauffement. On peut supposer que les unités profondes ont été exhumées rapidement. Le second montre un début d'évolution semblable mais un retour par des conditions de plus fortes températures indiquant un réchauffement. Ceci n'est possible que si les unités ont pu se rééquilibrer thermiquement ce qui suppose une exhumation lente. Le dernier cas se rapporte à une évolution à température élevée conduisant à l' anatexie.
8.4. DUALITÉ DE L'ORIGINE DES GRANITES ANATEXIE CRUSTALE ET FUSION DU MANTEAU
Les domaines du métamorphisme et de la fusion partielle se chevauchant, on est donc amené à se poser le problème des relations entre métamorphisme et granitisa­ tion. Toutefois le problème de l'origine des granites dépasse largement le cadre du
(cf seconde partie). De nombreux auteurs distinguent ainsi les évolutions <<horaires» des comportements « antihoraires ». Cette distinction n'a de sens que si l'axe des pressions, généralement ''en ordonnées, est toujours représenté de la même façon : valeurs croissantes des pressions vers le haut de la figure. Dans ce manuel, il a été choisi de représenter différemment un certain nombre de diagrammes, la pression étant croissante en fonction de la profondeur, c'est-à-dire vers le bas de la figu,J-"e. La signification des termes horaires et antihoraires est dans ce cas inversée. Pour éviter les confusions, ces termes ne seront pas employés dans la suite de l'exposé.
2.3 TEXTURES ET NOMENCLATURE··­
DES ROCHES MÉTAMORPHIQUES
Les données qui précèdent fournissent les bases d'une systématique des roches métamorphiques.
·2.3.1 Les principales textures des roches métamorphiques
Le développement des textures (fig. 2.9) est contrôlé par le régime de contraintes et par la nature des minéraux des roches, c'est-à-dire par leur composition chimique.
Les textures granoblastiques caractérisent les roches constituées pour l'essentiel de minéraux dont les formes sont relativement régulières (quartz, feldspaths, grenat, cordiérite, pyroxènes, olivine, carbonates, etc.). Lorsque les contraintes sont isotropes ou faiblement anisotropes au cours de la recristallisation, ces textures sont proches de l'arrangement idéal correspondant à la minimisation de l'énergie de surface, avec des joints de grains à 120°. Les contraintes plus nettement anisotropes conduisent à la croissance préférentielle des grains parallèlement à la foliation et la texture devient granoblastique orientée, l'orientation étant déterminée par la trace de la foliation sur le plan d'observation. Une déformation très accentuée (forte anisotropie de contrainte) mène à des textures blastoniylonitiques caractérisées par des néoblastes de très petite taille parmi lesquels des porphyroclastes sontdispersés.
Les textures lépidoblastiques (de lepidos = écaille) sont caractéristiques des roches très riches en minéraux phylliteux (chlorites et micas à habitus aplati) disposés parallèlement à la schistosité. Les textures nématoblastiques ( de nematos = aiguille) sont caractéristiques des roches très riches en minéraux aciculaires (amphiboles, sillimanite), dont 1 'orientation détermine souvent une linéation d'allongement.
L'association dans une même roche, à l'échelle centimétrique, de niveaux riches .. en minéraux phylliteux ou aciculaires, et de niveaux riches en quartz et feldspaths, détermine l'existence de textures mixtes, granolépidoblastiques et granonémato­
blqstiques, extrêmement répandues dans les séries métamorphiques issues de la recristallisation des pélites et des grauwackes.
Figure 2.9 Principales textures des roches métamorphiques.
1 - Texture granoblastique : cornéenne, granofels ou marbre. 2 - Texture granoblas­ tique orientée et blastomylonitique (gneiss, leptynite). 3 - Texture granolépidoblastique (gneiss, micaschiste). 4 - Texture granonématoblastique (amphibolite). 5 - Texture porphyroblastique. 6 - Texture porphyroclastiq_iJe. 7 - Texture symplectitique (in Joanny, 1991) : intercroissances réactionnelles de clinopyroxène et de plagioclase dans une éclo­ gite. Échelles 1 à 6 : 1 mm à 1 cm; 7 : 0, 1 mm.
Le terme porphyroblastique désigne toute texture caractérisée par le développe­ ment de grands cristaux (porphyroblastes) généralement post-cinématiques. Le terme porphyroclastique est utilisé··pour décrire la présence de cristaux antécinéma­ tiques déformés de grande taille (porphyroclastes).
Enfin la texture symplectitique ( ou symplectique) est caractérisée par l'abondance des an-angements réactionnels dans lesquels les cristaux néoformés sont restés sous la forme de vermiules très fins imbriqués les uns dans les autres (symplectites). Ce type de texture résulte de l'évolution de la coronitisation des minéraux réactionnels, c'est-à-dire de leur transformation partielle, en couronne, répondant à une instabi­ lité. L'évolution symplectique, ou la coronitsation, caractérise des évolutions thermobariques rapides au cours desquelles les assemblages n'atteignent ni l' équi­ libre thermodynamique, ni l'équilibre textural. Les températures sont trop faibles en fin d'évolution pour permettre la minimisation de l'énergie de surface et le recuü des symplectites.
2.3.2 Nomenclature des roches métamorphiques
Comme il a été annoncé au début de ce chapitre, il n'est pas possible de parler de classification. La nomenclature des roches métamorphiques est en effet essentielle­ ment descriptive et entre dans le cadre d'usages plus ou moins largement adoptés. Elle présente un certain nombre de synonymes, dont les uns ou les autres peuvent être employés selon les caractéristiques de la roche qu'il paraît souhaitable de faire ressortir. Il est possfüle de se placer de 3 points de vue différents : nature du proto­ lithe, structure, ou composition minéralogique des roches.
a) Nature du protolithe
Si la roche initiale (protolithe) est encore clairement reconnaissable il est commode de lui associer le préfixe méta. Métabasalte, métagranite, métapélite ou métachert
sont quelques exemples d'appellations largement employées. Dans le cas où le protolithe n'est pas très bien identifié, mais si son origine - ignée ou sédimentaire - est bien reconnue, les préfixes ortho- ou para- sont souvent utilisés. Ainsi un orthogneiss est un granitoïde métamorphisé tandis qu'un para­
gneiss est une métapélite ou une ,nétagrauwacke.
b) Structure des roches
La nomenclature est ici principalement fondée sur l'absence ou la présence de schistosité.
;> Les roches non schisteuses
Elles sont généralement caractérisées par des textures granoblastiques isotropes. Ce sont des cornéennes ou des granofels, suivant la dimension moyenne du grain (infé­ rieure ou supérieure à 1/10 mm, respectivement). Ces termes ne s'appliquent pas aux roches carbonatées.
Les roches schisteuses
Ce sont des schistes lorsque les plans de schistosité sont relativement serrés (épais­ seur des lits interschisteux de l'ordre du mm). Ce sont des gneiss lorsque l'espacement est de l'ordre du cm. En fait, l'usage courant en langue française réserve le terme de gneiss aux roches granolépicloblastiques qui montrent l'alter­ nance à l'échelle du cm de lits quartzofeldspathiques et de lits micacés, ces derniers étant extrèmement réduits ou absents dans les orthogneiss.
Le terme micaschiste désigne des schistes micacés à biotite et/ou muscovite. Contrairement à un usage abusif, il n'existe aucune raison d'admettre à priori qu'un gneiss corresponde à un degré de métamorphisme plus élevé que celui qui caracté­ rise un micaschiste et il faut conserver un caractère strictement descriptif à ces termes. Une catégorie assez populaire de schistes est celle des schistes tachetés; ces roches, généralement associées au métamorphisme de contact ( cf seconde partie), sont caractérisées par des porphyroblastes de cordiérite et/ou d' andalousite, altérés en produits phylliteux (mica blanc + chlorite), dispersés dans une matrice très fine, granoblastique orientée.
Cette nomenclature établie sur la base de la structure concerne essentiellement les métapélites, les métagrauwackes et les métagranitoïdes. Cependant, le terme de schiste s' applique également à certaines métabasites : schiste vert (schiste à épidote + chlorite + épidote), schiste à glaucophane, etc.
Certains éléments texturaux permettent de compléter cette nomenclature en faisant apparaître des caractéristiques remarquables des roches. Le cas le plus typique est celui des gneiss œillés. Ces roches contiennent des éléments feldspathi­ ques et quartzofeldspathiques de grande dimension, dispersés dans une matrice granolépidoblastique orientée à grain beaucoup plus fin. Dans un grand nombre de cas, les yeux des gneiss œillés sont des éléments antécinématiques (fig. 2.10). Ces «yeux» sont - soit des porphyroclastes de feldspath potassique ou de plagioclase dérivant
d'anciens phénocristaux de granitoïdes; dans ce cas la structure œillée démontre le caractère orthodérivé du gneiss;
- soit des amandes quartzofelspathiques plus ou moins effilées, dérivant du boudi­ nage syncinématique de filorinets granitiques anciennement inclus dans une métapélite migmatisée; dans Y cas les gneiss œillés sont paradé rivés.
c) Composition minéralogique des roches
La nature des assemblages minéralogiques permet de préciser aèl libitum la descrip­ tion des roches métamorphiques (cornéenne à épidote; micaschiste à staurotide et di:,:thène; gneiss à sillimanite et grenat; etc.). Elle est aussi à la base de la nomen­ clature usuelle concernant les métabasites et, d'une façon plus générale, de l'ensemble des roches métamorphiques riches ? Ca.
Les termes d' amphibolite et de pyroxénite se définissent d'eux-mêmes, ainsi que leurs équivalents plus précis : glaucophanite, diopsidite, etc. Biotitite, albitite, épidotite sont également employés plus ou moins systématiquement. Chacun de ces
Figure 2.10 Texture des gneiss œi! lés.
a) Les «yeux» sont constitués par des monocristaux de feldspath potassique et de plagioclase, antécinématiques, plus ou moins déformés et fragmentés; échelle = 3 cm. Cette . texture porphyroclastique dérive de la déformation et du métamorphisme de granites porphyroïdes. La roche est un orthogneiss œillé. Gneiss du Canigou, Pyrénées-Orientales, d'après Guitard, 1970.
b) Les «yeux» sont constitués d'un assemblage quartzofeldspathique granoblas­ tique comportant un peu de biotite; échelle = 5 cm. Ces yeux dérivent du boudinage syncinématique (syn- ou tardimigmatitique?) de filonnets granitiques injectés dans une métapélite au cours d'une phase de migmatisation. Il s'agit d'un paragneiss œillé. Gneiss de Port-Navalo, Loire-Atlantique, d'après Johannes, 1988.
termes est souvent précisé par la mention d'un autre minéral important: de la parage­ nèse (amphibolite à épidote; pyroxénite à grenat; etc.).
Les éclogites sont des pyroxénites à grenat obligatoirement dépourvues de plagioclase : caractère négatif, mais essentiel pour la définition de ces roches ; l'usage veut que le clinopyroxène des éclogites (l' omphacite) soit relativement riche en jadéite NaA1Si
2 O
Les roches carbonatées (à calcite et/ou dolomite) métamorphiques sont des
marbres lorsque la schistosité y est peu ou pas marquée ; dans le cas contraire le terme de calcschiste est utilisé. Les marbres et les calcschistes sont presque toujours des ,nétacalcaires, la probabilité de l'existence de métacarbonatites étant extrème­ ment réduite. Notons que le mot marbre a une acception beaucoup plus générale dans l'industrie de la pierre, où il désigne toute roche susceptible d'acquérir un poli suffisant pour l'utilisation ornementale. La plupart des marbres des marbriers sont des granitoïdes, des anorthosites et des serpentines.
Parmi les différents termes présentés dans ce paragraphe, certains sont utilisés non seulement pour caractériser pétrographiquement certains types de roches (schistes verts, amphibolites, éclogites), mais aussi pour définir les conditions du métamorphisme (cf chapitre 3). Les ambiguïtés qui découlent de ce double usage sont soulignées plus loin.
11 Le métamorphisme
Dans le chapitre précédent, nous avons montré comment un sédiment meuble passe à l'état de roche indurée. L'agent principal de cette transformation était le poids des sédiments plus jeunes accumulés au­ dessus de lui. Cet enfouissement est toutefois limité à quelques kilomètres d'épaisseur, puisque la dia genèse ne concerne que des changements-minéralogiques légers. Nous avons vu par ailleurs au chapitre 6 que du matériel géologique qui pénètre de plusieurs dizaines de kilomètres dans l'écorce terrestre subit une fusion partielle et se transforme ainsi en magma. Que se passe-t-il entre ces deux situations extrêmes?
Le métamorphisme représente l'ensemble des transformations intervenant dans une roche à l'état solide, sans passage par l'état magmatique. Suite à de fortes modifications physiques et chimiques, la composition minéralogique de la roche, la texture (arrangement des cristaux) êf la structure (géométrie à l'échelle de l'affleurement) sont affectés. Les facteurs principaux qui contrôlent le métamorphisme sont la pre&sion et la température auxquelles s'ajoute l'action des fluides; ils sont interdépendants. Ces processus de modifica­ tion sont d'autant plus efficaces qu'ils agissent sur une longue durée.
Quelles sont les circonstances géologiques qui peuvent être source du métamorphisme? Il s'agit essen­ tiellement du phénomène des orogenèses. Voyons comment évoluent les conditions de pression et de tem­ pérature d'un volume élémentaire de roche pris dans une croûte continentale lors d'une collision de plaques (fig. 11.1).
Une première phase, l'orogenèse proprement dite, conduit certaines parties de la lithosphère à un enfouis­ sement pouvant atteindre plusieurs dizaines de kilomètres, ce qui correspond à une augmentation de la pres-
pression [GPa]
D phase de subduction (120-70 Ma)
D phase de surrection (35-40 Ma)
Fig. 11.1 Evolution des conditions de métamorphisme au cours d'un cycle orogenèse-érosion. Exemple des Alpes entre Viège et Locarno (d'après [40]).
ion et ùe la température. C'est ce que l'on appelle le lllétamorphisllle prograde. On comprend ainsi pour­ quoi le métamorphisme est intimement lié à la tectonique (chap. 12).
Que se passe-t-il en revanche lors de la phase érosive de la chaîne de montagne? Nous avons vu à pro­
pos de la théorie de l'isostasie (chap. 4) que l'arasement du relief conduit à une remontée des rûcbcs pro­
fondes vers la surface. Il en résulte pour notre volume élémentaire de roche une diminution de pression et de température: c'est le métamorphisme rétrograde.
Fonclamentalemcnt, le métamorphisme crée une grande variété de roches. En effet, les conditions de pression et de température ainsi que les fiux géochimiqucs sont fortement variables selon le contexte géo­ logique et tous les types de roches sont susceptibles d'être métamorphisés. Nous nous concentrons ici sur les conditions les plus fréquentes du métamorphisme, soit le métamorphisme prograde.
11.1 Processus de transformation
A l'instar de la cliagenèsc, le métamorphisme est la résultante de plusieurs mécanismes qui agissent en
parallèle, sans pour autant qu'ils soient toujours activés ensemble. Nous en retenons ici trois principaux.
11.1.1 Modifications minéralogiques
Par le changement des conditions physiques du milieu, essentiellement décrites par la pression géosta­
tique (égale au poids de la colonne de tenains qui recouvrent la roche) et la température, un minéral peut
arriver dans un domaine d'instabilité thermodynamique; il se transforme alors en un nouveau minéral dés­
ormais stable dans ces conditions. Ce faisant, il peut également réagir avec d'autres minéraux de la roche ou avec les fluide:; contenus dans celle-ci. Par exemple, les minéraux argileux se transforment en micas; uù
mélange quartz - argile peut donner des feldspaths (fig. 11.2); un mélange argile-calcite forme des amphi­ boles ou des pyroxènes.
pression [Gl'a]
limiteclc stabilité
100 200 300 400 500 600 700 800 900 l 000
température-[-°CJ
profondeur [km)
15
10
5
Fig. 11.2 Transformation minéralogique d'un mé.!ange clc mica et cle quartz (cl 'après [351). Par augmentation de pression et de lempé­
rawre, il se fornie un feldspath potassique et un silicate d'alumine. Pour la forme cristalline de ce dernier, voir la figure 11.9.
Par ailleurs, on observe un remplacement des petits cristaux (quartz détritique, calcite biogène) par de nou­ veaux individus de plus grande taille. Les structures intrnes des roches sédimentaires, comme des fossiles ou des figures de sédimentation, sont partiellement ou totalement effacées par la recristallisation (fig. 11.3).
caJcii;e fÔ.ssilifère /, , L;
MÉTAMORPHISME
Fig.11.3 Effacement des structures internes de la roche par la recristallisation. Le fossile dans Je marbre n'est esquissé que pour mon­ trer où il se trouvait.
Nous verrons plus Join comment ces diverses transformations minéralogiques aboutissent à de nouvel­ les roches en fonction du matériel d'origine.
A l'échelle des constituants intimes de la roche, des phénomènes de réorientation des cristaux se produi­ sent par le phénomène de dissolution sous pression. Voyons l'exemple d'un minéral en feuillet, par exem­ ple un mica, qui est orienté parallèlement à la contrainte dominante. Un lent processus de redistribution de la matière se produit: les atomes du cristal qui sont face à la contrainte maximale ont tendance à migrer dans les fluides d'imbibition de la roche et à se recristalliser sur les côtés du minéral, dans la direction de la contrainte la plus faible (fig. l l .4). De cette manière, un granite, qui possède des micas dans toutes les direc­ tions, se transforme au cours du temps en un gneiss dans lequel tous les micas sont parallèles (fig. 11.5). Ce phénomène ne doit pas être confondu avec la réorientation mécanique des minéraux par le laminage de la roche(§ 11.1.3).
to 11 12
vv0 = 0vv-,.I

0vv-,,,. migration fluide Fig. 11.4 Recristallisation d'un minéral soumis à un champ de contraintes anisotrope. Exemple d'un mica or