16
INFORMATIONS OUVRIÈRES TRIBUNE LIBRE DE LA LUTTE DES CLASSES L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes INFORMATIONS OUVRIÈRES nouvelle série N 0 131 (2525) Semaine du 13 au 19 janvier 2011 1,5 euro (soutien 2 euros) ISSN 0813 9500 6 444 abonnés reçoivent ce numéro. Et vous ? (page 16) Photo AFP Tout un programme! Lors de la cérémonie des vœux en présence des syndicats, Nicolas Sarkozy a renouvelé son appel au « dialogue social » pour faire passer toutes ses contre- réformes. (Pages 2 et 3) Pour les actionnaires du CAC 40 : 40 milliards de dividendes en 2010... Pour les travailleurs : “Il y aura des décisions difficiles à prendre”, annonce Sarkozy Algérie : une spéculation criminelle contre le peuple L’actualité La Poste, la SNCF, EDF, GDF... Des services publics qui n’en seraient plus... Pages 4 et 5 Education Le “dialogue social” selon Chatel Le gouvernement veut supprimer 16 000 nouveaux postes à la rentrée prochaine. Page 6 Enquête Retraites complémen- taires Des millions de travailleurs et de retraités concernés par l’enjeu des négociations sur les retraites complémentaires. page 7 Vie du parti Le POI dans les élections cantonales Une déclaration de Gérard Schivardi, maire de Mailhac. Pages 8 et 9 Histoire “Le syn- dicalisme en France” Un ouvrage de Joël Sohier destiné aux étudiants. Page 15 En 48 heures, les prix sur des produits de première nécessité, comme l’huile et le sucre, ont augmenté de 30 à 70 %, provoquant les incidents en Algérie. (lire pages 10 et 11)

IO_131

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: IO_131

INFORMATIONSOUVRIÈRESTRIBUN E L I B R E D E L A L U T T E D E S C L A S S E S

L ’ é m a n c i p a t i o n d e s t r a v a i l l e u r s s e r a l ’ œ u v r e d e s t r a v a i l l e u r s e u x - m ê m e s

INFORMATIONSOUVRIÈRES

nouvelle série

N0131 (2525)Semaine du 13

au 19 janvier 20111,5 euro (soutien 2 euros)

ISSN 0813 9500

6444abonnés reçoiventce numéro.Et vous ?(page 16)

Phot

oAF

P

TToouutt uunn pprrooggrraammmmee!!Lors de la cérémonie des vœux en présence des syndicats, Nicolas Sarkozy arenouvelé son appel au « dialogue social » pour faire passer toutes ses contre-réformes. (Pages 2 et 3)

Pour les actionnaires du CAC 40 :40 milliards de dividendes en 2010...Pour les travailleurs :“Il y aura des décisions difficiles à prendre”, annonce Sarkozy

Algérie : une spéculationcriminelle contre le peuple

L’actualitéLa Poste, la SNCF, EDF, GDF...

Des services publics qui n’en seraient plus...

Pages 4 et 5

EducationLe “dialoguesocial” selon Chatel

Le gouvernement veut supprimer 16 000 nouveaux postes à la rentréeprochaine.

Page 6

EnquêteRetraitescomplémen-taires

Des millions de travailleurs et de retraitésconcernés par l’enjeudes négociations sur les retraitescomplémentaires.

page 7

Vie du partiLe POI dansles électionscantonales

Une déclaration de Gérard Schivardi,maire de Mailhac.

Pages 8 et 9

Histoire“Le syn-dicalisme en France”

Un ouvrage de Joël Sohier destinéaux étudiants.

Page 15

En 48 heures, les prixsur des produitsde première nécessité,comme l’huileet le sucre,ont augmenté de 30 à 70 %,provoquant lesincidents en Algérie.(lire pages 10 et 11)

Page 2: IO_131

Al’occasion de sesvœux aux « parte-naires sociaux », leprésident de la Ré-publique a dé-claré que l’année2011 serait aussi« dense que l’année

2010 ». Certains, dans la majorité prési-dentielle, soumise à de profondes contra-dictions, y ont vu l’occasion pour lancerquelques sondes : remise en cause de« l’emploi à vie pour les fonctionnaires »(Jacob, le président du groupeUMP à l’As-semblée nationale) ou sur les 35 heures(Copé, chef de l’UMP). Et Fillon et Sarkozyont cherché à recadrer ces voix dissonantes,qui ne sont qu’une expression de l’in-quiétude, venant des rangs mêmes de lamajorité, sur la capacité du président depoursuivre les « réformes ».

“NE PAS RECOMMENCERLE PSYCHODRAME”Le 24 janvier s’ouvrira la discussion entresyndicats et patronat sur l’assurance chô-mage, dans l’objectif d’un accord faisantsuite à celui de 2008. Comme l’écrit le quo-tidien patronal Les Echos : « En 2008, unvéritable psychodrame s’était joué, se sol-dant par une seule signature syndicale aubas de l’accord Unedic, celle de la CFDT. »Le psychodrame, pour Les Echos, c’est queles autres syndicats avaient refusé de signer.C’est pourquoi le quotidien souligne : « L’en-jeu de la négociation qui va s’engager tien-dra donc principalement dans le nombrede signatures syndicales au bas du futuraccord » (6 janvier 2011).C’est en effet là la question centrale. Cegouvernement en crise, qui a vu se dres-ser contre sa « réforme » des retraites desmillions de travailleurs, doit en mêmetemps poursuivre sa politique de contre-réformes exigée par les patrons.

HOMMAGE À LA RESPONSABILITÉDES “PARTENAIRES SOCIAUX”Dans ses vœux, le président Sarkozy, à pro-pos de la réforme des retraites, a insisté :« Je veux rendre hommage au sens de la res-ponsabilité des partenaires sociaux (…). »Au nomde la réduction des déficits, il s’estfélicité de la « réforme des retraites ». Il ad’ailleurs souligné que « demander auxsalariés de travailler plus longtemps (…) aété la voie choisie dans tous les pays déve-loppés, qu’il s’agisse de gouvernements de

gauche ou de gouvernement de droite ». Etil a ajouté, concernant la France et dans lerespect du cadre de l’Union européenne :« Ma conviction, c’est que personne ne re-viendra sur la réforme des retraites. »Il peut, en effet, pour cela, s’appuyer surle fait qu’aucun des partis « de gauche » neréclame l’annulation-abrogation de la ré-forme des retraites.Il a d’ailleurs insisté sur le fait qu’il n’avaitqu’à mettre en œuvre l’une des parties duLivre blanc deMichel Rocard de 1991,met-tant ainsi en évidence que, en se refusant àremettre en cause le cadre de l’Union euro-péenne, la « gauche » se situe sur le terrainde la « réduction des déficits publics ».

“DES IDÉES SYNDICALESQUE NOUS AVONS REPRISES”Mais, surtout, il a répondu à l’inquiétudequi se fait jour dans son propre camp sursa capacité à poursuivre les contre-ré-formes : « Certains disent que le dialoguesocial n’est plus possible et que les réformesdans le champ social vont s’interrompre. Jem’attacherai à leur montrer qu’ils ont tort. »Car, précise-t-il, « l’Etat ne peut pas faireseul, nous avons besoin des partenairessociaux ».Et pour bien se faire comprendre, il pré-cise : « Sur l’activité partielle, le contrat detransition professionnelle, le fonds d’inves-tissement social sont des idées syndicalesque nous avons reprises. » Loin d’être desidées syndicales, ce sont effectivement lespropositions de certains dirigeants de l’in-tersyndicale, tel Chérèque, qui ont étéreprises par le gouvernement Sarkozy.

“UN GOUVERNEMENTATTENTIF AUX PROPOSITIONS”Et pour se faire mieux comprendre, aprèsavoir énuméré l’ensemble des contre-ré-formes qu’il propose, Nicolas Sarkozy pré-cise : « La stratégie que je vous propose, c’estque nous anticipions au choc, c’est que nousfassions quelque chose, même si, naturelle-ment, il y auradesdécisionsdifficiles àprendre(…). Quelle que soit la profondeur de nosdésaccords, l’image qu’a donnée la France en2010, celle d’un pays qui, sans violence,grâceà l’esprit de responsabilité de chacun, a puaffronter un rendez-vous aussi importantque celui des retraites. » Il ajoutera : « Si lespartenaires sociaux ou les partis politiquesont des propositions à faire,bien évidemmentle gouvernement y sera attentif. »

Lucien GAUTHIER �

Phot

oAF

P

La crise…Marguerite Leuwen

Au nom de la crise, tout serait devenudésormais possible ? Des dizainesdemilliers de travailleurs brutalementjetés au chômage ont été « accompa-gnés » avec des contrats de transitionprofessionnelle (CTP). Sur sept bassinsd’emplois, le bilan fait au Sénaten novembre 2010 fait apparaître que,pour les CTP arrivant à échéance,65 % se retrouvent au chômage,35%auraient retrouvé un « emploi » :CDI,CDD, contrat de travail tempo-raire, création et reprise d’entreprise.Tandis que, sur cette même périodede trois ans, 100 000 postes ont été sup-primés dans la fonction publique avecdes conséquences désastreuses, commeon l’a vu,par exemple, avec l’épisodeneigeux ou dans les écoles.Ajoutons quece sont autant de postes de travail qui neseront plus disponibles pour les jeunesarrivant sur le «marché du travail ».Pasmieux du côté des « seniors », commeondit, qui n’ont plus droit aux préretraites,qui ont été supprimées, commed’ailleurs la dispense à 58 et 59 ansde la recherche—illusoire—d’unemploi.De plus,pour eux commepour toutlemonde,au nomd’un prétendu déficit,l’augmentation de l’âge de départà la retraite !Il faudrait, au nom de la réductiondes déficits publics, livrer les servicespublics au privé (lire pages 4 et 5).Retraite, assurance chômage, assu-rancemaladie, tout devrait y passer.Tout devrait y passer pour que les pro-fits augmentent et que les actionnairess’enrichissent. 40milliardsde dividendes ont ainsi été versésaux actionnaires des entreprisesdu CAC 40 au titre de l’exercice 2010.

40 milliardsdedividendesversés auxactionnairesdu CAC 40en 2010

L’ESSENTIEL

“Une année utile”C’est le mot de Fillon, le 10 janvier,pour annoncer le programmedu gouvernement en 2011.Trois jours auparavant, Sarkozyen avait fait de mêmedevant les « partenaires sociaux ».

� L’emploi :— Seniors : « Depuis trois ans, beau-coup a été fait. Nous avons mis finaux préretraites publiques.Nous avons supprimé la dispensede recherche d’emploi (…). Nousdevons aller beaucoup plus loin, etcela passe par une nouvelle organi-sation des conditions de travaildans l’entreprise » (Sarkozy).— Assurance chômage : « C’estune composante essentielle de notresécurité sociale professionnelle (…).Mise en place d’un dispositif d’ac-compagnement des salariés licen-ciés économiques se substituantaux actuels CTP, CPR (…).En échange de cette indemnisation,une formation ou l’acceptationd’un emploi. » Comme en Grande-Bretagne, l’obligation d’acceptern’importe quel petit boulot ?— « Priorité à l’emploi des jeunes »(Sarkozy). C’est-à-dire, sous couvertde lutter contre les rigidités,la précarisation à outrance.

� Fonction publique :— Fillon annonce poursuivre l’effortde réduction de la dépense publiqueen taillant à la hache dans la fonc-tion publique. Il note avec satisfac-tion que c’est « la politiquela plus sévère jamais réaliséedepuis vingt ans dans notre pays ».

� Sécurité sociale :— Le « grand chantier de la dépen-dance ». « Roselyne Bachelots’en occupe. Comme nous l’avonsfait sur les retraites, je considèrequ’il est de notre devoir d’anticipersur cette évolution »(lire page 6).— Suite sur les retraites.

Le 6 janvier, Sarkozya présenté ses vœuxaux « partenairessociaux ».

“2011 : il y aura des décisionsdifficiles à prendre...”

> A la Une >>>INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 20112

Page 3: IO_131

é“Q ue va-t-il se passer

quand la bulle vaéclater? (…)Commetoujours, les inves-tisseurs cesseront

brutalement leurs prêts. Mais cette fois-ci,de grands Etats seront atteints (…).Nous ren-trerons alors dans un monde nouveau.Tel-lement nouveau qu’il semble inconcevable(…). Si le choc se produit, il sera d’une vio-lence inouïe. Il suffit de songer à ce qui sepasserait en France si les fonctionnairesn’étaient pas payés pendant des mois (…).Les gouvernants devraient alors très vite faireun choix impossible. Soit ils impriment desbillets — mais c’est interdit dans la zone euro(…).Soit ils ne bougent pas,prenant le risqued’une dislocation totale des institutions pu-bliques.Soit ils resserrent l’Etat sur ses mis-sions régaliennes (justice et sécurité),en lar-guant au privé des pans entiers d’activitésdevenues largement publiques au fil dessiècles, comme l’éducation et la santé (…).Ce scénario peut paraître incroyable.Maisquelle est l’alternative ? Au bout du compte,c’est la démocratie sous sa forme actuelle quirisque de chavirer (…).La faillite à venir desEtats modernes risque donc de submergernon seulement l’économie,mais aussi la poli-tique (…). Le choc serait particulièrementrude en France, où l’Etat constitue le soclede la nation. »

C’est ainsi qu’un éminent spécialiste etpartisan de l’économie demarché détaillele scénario de la faillite annoncée du pays,de la misère généralisée et de l’effondre-ment de la démocratie que prépare la criseactuelle de la dette (Vittori, éditorialiste,mensuel Enjeux Les Echos, janvier 2011).

C’est la marche à la barbarie qu’il dé-peint. Et cela dans un avenir proche.

Y a-t-il une alternative ? Non, prétendVittori. De son côté, Patrick Bessac, porte-parole duParti communiste français,déclarece 7 janvier : « Sortir de l’euro et de l’Unioneuropéenne serait absolument désastreuxpour les travailleurs. » Tandis qu’ArnaudMontebourg, dirigeant du Parti socialiste,président de conseil général, n’hésite pas àaffirmer trois jours plus tard : « Les dépar-tements sont en grave difficulté financière.J’ai été obligé de prendre des décisions unpeu à la grecque,à la Papandréou,avec desdiminutions drastiques des dépenses et desaugmentations excessives des impôts poursauver mon département. Je me sens undevoir de poursuivre cette œuvre. »

On le voit : refuser de rompre avecl’Union européenne, la dette et son rem-boursement, c’est s’engager sur une voiequi conduit des responsables de « gauche »à organiser eux-mêmes lesmesures de des-tructiondontVittori indiquequ’elles condui-sent à la barbarie.

Pas d’alternative ? Si. Cette alternativea unpoint de départ : la rupture avec l’Unioneuropéenne et l’euro, l’annulation de ladette, le refus de tout consensus sur les plansde rigueur et contre-réformes dictés par « lanécessaire réduction des déficits publics ».

C’est la voie de la défense pied à pieddes droits, des garanties et des revendica-tions ouvrières. C’est la voie de la défenseet de la reconquête de la démocratie par larupture avec les institutions de l’Union euro-péenne et de laVe République.

Lorsque les représentants du capitalfinancier ne parviennent même plus à ca-moufler le sombre avenir de barbarie queprépare l’effondrement de leur système, ily a urgence à organiser la force politiquequi prendra en charge l’aide au combat derésistance sur une ligne d’indépendance.

En ayant à l’esprit les paroles de RosaLuxemburg : « Socialisme ou barbarie. »

Ces questions seront au cœur des débatsdu conseil fédéral national du POI des 15et 16 janvier.

Pasd’alternative ?

Daniel GlucksteinSecrétaire national du POI

ÉDITORIAL

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 20113

Dans une réunion de fonctionnaires

A u cours d’une réunion de travailleursdes services publics, une discussion alieu : « Nous affirmons que l’exigence

du retrait des contre-réformes, qui a soudé desmillions de travailleurs et demilitants de toutestendances pendant l’année 2010 à propos desretraites, doit être au centre des prochainesmobi-lisations, qui nemanqueront pas de surgir faceaux annonces de Fillon.Comme le dit la déclaration adoptée par laconférence nationale, aucun argument, et no-tamment celui de la “nécessaire réduction desdéficits publics”, ne peut être accepté pour jus-tifier les “réformes”, dont la “RGPP” (révisiongénérale des politiques publiques—NDLR) etson cortège de réorganisations et de suppres-sions de postes.— Et s’agissant de notre secteur professionnel,il est impératif de se recentrer sur une mobili-sation unie pour arrêter les destructions despostes qui assuraient les missions d’aménage-ment du territoire, telles qu’elles étaient misesen œuvre dans le cadre des directions départe-mentales de l’Equipement (DDE). C’est ce quiconduit à formuler, selon nous, l’exigence del’abrogation de la loi du 14 août 2004, qui atransféré 30 700 agents des DDE vers les conseilsgénéraux (…).—A propos de ce “dialogue”, j’ai relevé que, dansle tract CGT de la fédération de l’Equipementpublié au lendemain de l’épisode neigeux quia bloqué des milliers d’automobilistes dans larégion parisienne et du chaos que cela a généré,il est très justement expliqué que les premièrescauses, ce ne sont pas les cinq ou dix centimètresde neige, mais la suppression de milliers depostes d’agents d’exploitation et les consignesd’économies en matière de déneigement. Maisce tract se termine par une demande “d’ouver-ture d’un grand débat public national” ayantpour objectif “de répondre aux besoins poursortir de cette situation” : n’y a-t-il pas là lemême type de formulation que celle publiée audébut de l’année 2010 par “l’intersyndicale”nationale, demandant “l’ouverture d’un débat”quand le gouvernement a annoncé son projetde loi sur les retraites ? » �

Appel adopté par des travailleursde l’arsenal deToulon

“Nous sommes desmilitants de dif-férentes tendances de l’arsenaldeToulon, syndicalistes, ouvriers

d’Etat, personnels sous convention collective…Ayant pris connaissance de l’appel adopté parles 330 délégués de la conférence pour l’unitéouvrière du 11 décembre (dont deux déléguésde l’arsenal de Toulon), nous avons décidéd’échanger sur ce que signifie dans notre sec-teur le combat contre le consensus pour la“nécessaire réduction des déficits publics” (…).Mais, au nom de la réduction des déficits pu-blics et de la “concurrence libre et non faus-sée”, pourtant rejetée par le peuple en 2005, lapolitique de démantèlement des arsenauxd’Etat estmenée depuis des années par les gou-vernements de droite comme de “gauche plu-rielle”.Hervé Morin, ministre de la Défense du gou-vernement Sarkozy, s’adressait ainsi en 2009 àl’Assemblée nationale aux députés de gauche :“Permettez-moi de rendre hommage à AlainRichard, qui, à l’époque (…), a décidé d’enga-ger l’évolution du statut de DCNS qui permet àcette entreprise d’être aujourd’hui un fleuronindustriel (…). Aussi, nous accuser de vouloirprivatiser DCNS n’est en rien justifié. Vousdevriez, au contraire, approuver l’évolution quenous préconisons, car elle ne fait que poursuivrecelle que vous aviez engagée, d’autant que,Mme Adam,M.Viollet, vous appelez à l’Europede la défense et à la construction d’une Europeindustrielle de la défense, comme tout commeM. Garrigue, du reste !”En 2008, le gouvernement publie le Livre blancsur la défense et annonce 54 000 suppressionsd’emplois en sept ans et demi (8 250 postessupprimés en 2011).A DCNS, la moitié des 12 000 ouvriers d’Etatont été remplacés depuis 2003 par des per-sonnels sous convention collective,moins bienpayés, sans droits statutaires. Et aujourd’hui,la précarité s’installe, avec la multiplicationdes contrats à durée déterminée et de l’inté-rim. »

FONCTION PUBLIQUE > Après les déclarations de Christian Jacob contre “l’emploi à vie des fonctionnaires”

Faudrait-il appuyer leministre UMPcontre le groupe UMP ?

Les suites de la conférence nationale pour l’unité ouvrière

Deux réunions dans le Varavec des fonctionnaires de l’Equipementet à l’arsenal de Toulon

Daniel Shapira

Ce mardi 11 janvier, des négociations sesont ouvertes dans la fonction publiqueentre le gouvernement et les organisa-

tions syndicales autour d’un docu-ment d’orientation proposé par legouvernement en vue d’un projet deloi au premier semestre 2011 (voirInformations ouvrières, n° 130).Cette réunion a été précédée d’unedéclaration provocatrice du chef dugroupeUMP à l’Assemblée nationale,Christian Jacob, contre « l’emploi àvie des fonctionnaires ».Aussitôt, de multiples déclarationssyndicales se sont élevées pourcondamner ces propos.Le secrétaire d’Etat à la Fonction pu-blique, Georges Tron, a désavoué àson tour les propos de Christian Jacoben affirmant qu’il était « attaché austatut de la fonction publique » et quel’emploi à vie « était une garantie dustatut ».Y aurait-il une opposition entre le ministre etle chef du groupe UMP ?

C’est ce que laisse entendre l’UNSA, dont lareprésentante, Elisabeth David, a condamnéainsi les propos de Jacob : « Celame paraît assezcontradictoire à trois ou quatre jours d’une négo-ciation sur la déprécarisation dans la fonction

publique, notamment par la titulari-sation, que l’on dise qu’il faille déti-tulariser des fonctionnaires. »Les déclarations de Jacob seraient« contradictoires » avec l’objet de lanégociation entamée par le gouver-nement ? Qui peut croire cela ?D’autant que tout le projet du mi-nistre Tron est axé sur la généralisa-tion des CDI dans la fonction pu-blique en lieu et place du statut defonctionnaire. Et quelle est la diffé-rence entre les deux ? C’est précisé-ment que le CDI ne donne pas lagarantie d’emploi, contrairement austatut.Tout le document d’orientation dugouvernement est une machine deguerre contre le statut, puisque, au

nom de la lutte contre la précarité, il proposeque les CDD puissent devenir CDI et non pasagents titulaires. Dès lors, une question se pose

à tout le mouvement ouvrier : peut-on, endénonçant Jacob, créditer le ministre Tron dedéfendre le statut ?Peut-on, comme la secrétaire générale de laFSU, Bernadette Groison (vendredi 7 janvier àPublic Sénat), qualifier ainsi les déclarationsdu ministre par rapport à celles de Jacob : « Ila été prudent et il a eu raison », ajoutant : « Pourl’instant, les propositions du gouvernement enla matière sont très faibles. »Les propositions du gouvernement seraientsimplement « faibles » ?Peut-on, comme on l’entend ici ou là, dire : onne peut exiger l’abandon du projet gouverne-mental, car il y a des avancées ?N’est-ce pas ce que l’on a déjà entendu pen-dant le mouvement des retraites de la part decertains responsables confédéraux de la CGTou de la CFDT affirmant : « On ne peut pas direretrait du projet, car ce serait se priver de la pos-sibilité d’obtenir des avancées » ? Ce mêmescénario devrait-il à nouveau se reproduirepour la fonction publique avec les consé-quences connues d’avance ?La défense du statut de fonctionnaire n’exige-t-elle pas, à l’inverse, de dire en préalable : aban-don des propositions du ministre Tron ? �

Abrogationdes mesuresdu ministreTron !

Appel de la conférencepour l’unité ouvrière (extraits)« Nous savons que la contre-réforme desretraites constitue le premier acte d’un plande rigueur et de contre-réformes sans pré-cédent que le gouvernement Sarkozy veutimposer au peuple au nom des déficitspublics.Nous refusons de nous plier à la “nécessaireréduction des déficits publics”, prônée par lecommuniqué de l’intersyndicale du 29 no-vembre correspondant aux souhaits du Pre-mier ministre Fillon, qui représente le fran-chissement d’un pas dans la voie du “consen-sus” pour accompagner les contre-réformeset les plans de rigueur.Nous affirmons : mettre le doigt dans l’en-grenage d’un consensus sur la base de la“nécessaire réduction des déficits publics”qui commande le démantèlement immédiatde la Sécurité sociale, des hôpitaux, de toutle système scolaire, des services de l’Equi-pement… est un piège mortel pour la classeouvrière et ses organisations. Nous prenonsl’engagement — partout, dans les villes, lesdépartements, dans les secteurs profession-nels — d’organiser la liaison politique per-manente entre militants de toutes affiliationssyndicales et politiques pour faire triompherl’unité pour dire : “Non au chantage de ladette, non au consensus pour la “nécessaireréduction des déficits publics”, unité pour lerejet des contre-réformes et des plans derigueur.” A l’issue de notre discussion et dela lecture des mandats qui ont été portés ànotre connaissance, nous décidons de consti-tuer, à partir de la tribune de cette confé-rence, un “comité de liaison” chargé depoursuivre, de manière organisée, l’échangeque nous avons commencé et de resserrerles liens entre nous. »

11 décembre 2010, Issy-les-Moulineaux

Durant cemois de janvier se préparent et se tiennent,dans les localités, les secteurs professionnels,à l’initiative des délégués à la conférence du 11 décembre 2010, des réunions de compte rendu.

11 DÉCEMBRECONFÉRENCE NATIONALE

POUR L’UNITÉOUVRIÈRE

PhotoAFP

Page 4: IO_131

Interview de deux syndicalistes

En décembre dernier, les médias ont large-ment parlé des pannes d’électricité « duesà la neige ». Qu’en penses-tu ?Adeux reprises, dans lamême semaine, le recordde consommation d’électricité a été battu.Maisil y a eu beaucoup de problèmes : des pannes,mais aussi des délestages dont on n’a pas parlé.La demande d’électricité a été très importante,car il faisait froid partout en France au mêmemoment. EDF a arrêté d’exporter et la produc-tion a été sollicitée au maximum. Pour tenirl’équilibre du réseau, EDF a fait des délestages,c’est-à-dire des coupures ciblées et locales. Parexemple, dans certaines communes, on constatedes coupures dans une rue un soir, puis dansles rues voisines le lendemain. EDF s’adresseauxmairies et aux collectivités locales pour ciblerdes coupures. Sans cela, c’est l’ensemble duréseau qui peut tomber. C’est le spectre de lapanne générale, comme en no-vembre 2006, où dixmillions d’Eu-ropéens, en Allemagne et en Francenotamment, avaient vu leur élec-tricité coupée à la suite d’un déles-tage sur une ligne à haute tensionen Allemagne. Mais c’est aussi unsacré problème pour les usagers,qui ne bénéficient plus de l’obli-gation de fourniture d’électricité.La consommation d’électricité pro-gresse en France, mais les inves-tissements sur les moyens de pro-duction (centrales) ne sont pas suf-fisants, notamment parce que legouvernement, et par conséquentles dirigeants d’EDF égalementétaient polarisés ces dernières années à prépa-rer l’ouverture à la concurrence et la privatisa-tion. D’ailleurs, avec la loi NOME (Nouvelleorganisation du marché de l’énergie – NDLR),qui a été votée en novembre dernier, il s’agit decéder 25 % de la production des centrales nu-cléaires d’EDF au privé : on imagine facilementque ces délestages devraient s’amplifier. En effet,les fournisseurs privés profiteront de la mannenucléaire sans investir. On a vu ce que cela adonné, il y a plusieurs années, en Californie,avec la grande panne électrique.

De nombreux articles de presse ont fait étataussi de la vétusté du réseau électrique. Quelest ton point de vue ?On veut nous faire croire que la neige de no-vembre-décembre 2010 a été quelque chosed’exceptionnel. Je m’interroge, car est-ce qu’ilne s’agit pas plutôt de camoufler que c’est ledémantèlement du service public qui conduità cette situation ?

Avec laprivatisationencours, labaissedeseffectifsstatutairesàEDFetGDFestdeplusde20000postesdepuis 2000 (date de la première loi de trans-position des directives européennes sur l’élec-tricité, sous le gouvernement Jospin).Qui peut penser que cette baisse n’a pas deconséquences désastreuses pour les usagers ?Dans mon agence, en 2003, on était 36 agents,et aujourd’hui, nous ne sommes plus que 20 !Je me souviens que les collègues « inactifs » (1)qui avaient étémobilisés aumoment de la tem-pête de 1999 étaient encore en capacité de réa-liser l’élagage des arbres, même si progressive-ment, avec l’ouverture desmarchés à la concur-rence, cet aspect de lamission de service publica été abandonné. Il est aussi vrai que le réseaude transport et de distribution d’électricité vieillitet que les investissements n’ont pas été faits :les dirigeants d’EDF et d’ErDF (Electricité réseaudistribution France – NDLR) favorisent les pro-fits des actionnaires plutôt que d’investir dansle réseau et dans la production. Un directeur

d’ErDF n’a-t-il pas reconnu qu’ilfallait investir 10 milliards pourmoderniser le réseau ?

Selon Michel Lapeyre, ancienmembre de la Commission derégulation de l’énergie (CRE) (2),le nombre annuel de coupuresa augmenté de 50 % en dixans... Comment est-ce possi-ble ?J’ai lu avec intérêt cette interviewdans Le Parisien daté du 23 dé-cembre. Il y a des choses inté-ressantes et correctes dans ce quiest dit, notamment sur lemanqued’investissement sur le réseau

électrique, depuis le changement de statut d’EDFet son introduction en Bourse. Mais je ne suispas d’accord avec M. Lapeyre quand il dit quele problème, c’est que « le capital d’EDF a étéouvert sans que soient instaurés les garde-fousnécessaires ». Pour lui, il s’agit d’accompagnerl’ouverture à la concurrence, la privatisation.Ce qui est cohérent avec le fait qu’il est entré àla CRE dès sa création, en 2000. Il était parrainépar la CFDT, dont la stratégie d’accompagne-ment des contre-réformes est bien connue. Surce point comme sur les retraites !Le problème deM. Lapeyre, c’est qu’il souhaiteconcilier deux choses contradictoires. Pourmoi,c’est impossible : l’ouverture à la concurrenceet la marche à la privatisation sont incompa-tibles avec le service public. On ne peut pas,d’un côté, payer les actionnaires, et, de l’autre,faire les investissements nécessaires au main-tien de la qualité de la fourniture d’électricité.Ou alors, il faut faire payer les usagers ! Et c’estce qui se passe depuis 2004 : les factures explo-sent. Mais ça aussi, c’est une remise en causedu service public tel qu’il a été créé en 1946.La CRE, depuis sa création en 2000 du fait desdirectives européennes, a été le moteur dudémantèlement du service public et l’instru-ment au service du pillage par les multinatio-nales, avec ses conséquences pour les personnelset les usagers.La CRE est bien obligée de reconnaître la dégra-dation de la qualité d’alimentation d’électricité,mais elle se satisfait que « le réseau français sesitue dans une bonne moyenne européenne ».Elle explique aussi : « En 2010, le tarif d’utilisa-tion des réseaux publics d’électricité (TURPE)proposé par la CRE a permis la relance des inves-tissements d’ErDF à hauteur de 2,7 milliards

d’euros, dont les effets se feront sentir progressi-vement. »Alors, je pose la question : qui va payer ? Pourtous ceux qui sont pour l’ouverture à la concur-rence et pour la privatisation, ce sont les usa-gers qui vont payer, et qui vont payer pour lescapitalistes.

Propos recueillispar Clarisse DELALONDRE �

(1) Jusqu’en 2004, date du changement de statut d’EDFet de GDF, les électriciens et gaziers étaient salariés à vieà EDF-GDF, et lorsqu’ils étaient en « inactivité de service »(retraite, aujourd’hui), ils pouvaient être réquisitionnés.Ce n’est plus le cas aujourd’hui avec la privatisation enmarche et l’amputation du statut des personnels.(2) La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a étéinstituée par la loi de 2000 ouvrant l’électricité à la concur-rence pour surveiller l’application des règles de la concur-rence dans ce secteur. Au passage, signalons que M. La-peyre a été remplacé à la CRE par Jean-Christophe LeDuigou, responsable confédéral de la CGT, qui fut nommépar décret à ce poste par Nicolas Sarkozy.

“Avec la privatisa-tion en cours, labaisse des effectifsstatutaires à EDFet GDF est de plusde 20 000 postesdepuis 2000”

Des services

> L’actualité politique et sociale >>>4

La Poste, EDF-GDF,la SNCF...Ces entreprisesbénéficiaient hierd’un monopole public,cassé par les directiveseuropéennesavec la complicitédes gouvernementssuccessifs.Autrefois fleuronsdu service public,elles sont maintenantprivatisées ou en voiede l’être, multipliantles dysfonc-tionnementset les abandonsd’activités“non rentables”.Pour chacune,le retour au monopolepublic et l’abrogationdes directivesde l’Unioneuropéennesont une exigencevitale.

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 2011

Gaz, électricité :des coupures massivesà répétitionRéseau électricité :quelques exemples récents

• Sud de l’agglomération nantaise, 15 dé-cembre : 63 000 foyers privés d’électri-cité en raison de pics de consommation.Le réseau a subi de sérieuses perturba-tions en raison d’un délestage intempestif,semble-t-il (Presse Océan).

• 18 décembre : 40 000 foyers plongésdans le noir du fait des chutes de neige.

• Dordogne, le 24 décembre : 6 000foyers étaient privés d’électricité. La neigea provoqué la chute d’arbres et de bran-ches d’arbres tombés sur les lignes élec-triques dans la région de Bergerac.

• Seine-et-Marne, région de Provins, le24 décembre : la chute d’un câble demoyenne tension a entraîné la coupuredu courant électrique dans 3 000 foyers.

Sur le réseau gaz aussi :

• Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), 23et 24 décembre : avarie sur une canali-sation de gaz, 215 familles privées dechauffage.

• Val-de-Marne, 2 décembre : 3 000 fa-milles (10 000 personnes) privées de chauf-fage et d’eau chaude pendant quarante-huit heures. Quatre villes du département— Valenton, Limeil-Brévannes, Boissy-Saint-Léger et Villeneuve-Saint-Georges — ontété victimes d’une panne dans le réseaude transport de gaz. Un retraité de 72 ansprivé de gaz confie au Parisien : « J’ha-bite ici depuis quarante ans. Je n’ai jamaisvu ça. » Ce même journal indique dansson édition du 3 décembre : « Le syndi-cat CGT énergie 94 avance même le chiffrede 12 000 domiciles impactés. »

EDF : les usagers ne bénéficient plusde “l’obligation de fourniture d’électricité”

CHIFFRE

54,5%C’est, selon l’Insee,

l’augmentation moyennedu prix du gaz pour les particuliers

entre janvier 2004et novembre 2010.

Les services publicsmalades de l’ouverture à la concurrence :

Page 5: IO_131

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 20115

publics... qui n’en seraient plus

Par Pierre Besse, cheminot, syndicaliste

Les médias ont largement parlé de certains incidents fer-roviaires ces derniers jours.A savoir les vingt-quatre heuresde trajet du train Strasbourg-Port-Bou et leTGVParis-Rennesdévié sur Nantes. Ajoutons par ailleurs que la presse cite çàet là divers incidents plus locaux. Faut-il s’en étonner ?

Prenons un exemple. Le train Strasbourg-Port-Bou asubi des heures d’arrêt en gare de Belfort pour attented’un conducteur. Oui, mais pourquoi ? Il n’y avait pas

de conducteur programmé.Certes, c’est un dysfonctionnement, une erreur. Cependant,cette nuit-là, il y avait des conducteurs à Belfort, des chemi-nots de la SNCF, mais appartenant à l’activité fret (transportdemarchandises). En raison de la séparation des activités ausein du groupe SNCF, impossible de conduire ce train, alorsqu’il y a quelques années, quand la SNCF était une et indivi-sible, il n’y aurait eu aucun problème.La solution apportée au problème a donc été de faire venirun autre conducteur « activité voyageur » de Lyon pour pal-lier cette absence. Résultat : défaillance totale du service publicet coût extrême pour la SNCF confrontée à la séparation desactivités.

Depuis la directive européenne 91-440,tout s’est enchaîné

La place manque dans cet article pour relater tous les dys-fonctionnements à la SNCF aujourd’hui. Cependant, les retardsaccumulés, les voitures de voyageurs privées de climatisation,de chauffage, les suppressions de trains à la dernièreminute,auxquels s’ajoutent bien évidemment les dysfonctionnementspour les cheminots (réorganisations permanentes entraînantmutations géographiques et professionnelles, déplacementstemporaires sans perspectives, précipitations de dernièreminute pesant sur les conditions de travail...) ont une origine.

Le tronçonnage de la SNCFen “activités” autonomes

Depuis l’application de la directive européenne exigeant laséparation de la gestion de l’infrastructure du reste du réseau— la fameuse 91-440 créant Réseau ferré de France (RFF) en1997 —, tout s’est enchaîné. Une multitude d’autres direc-tives instaurant la concurrence ont été appliquées. Aujour-d’hui, on ne dit plus SNCF,mais « groupe SNCF », organisé enactivités (infra, voyageurs, TER, etc.).Ces activités dissèquent la SNCF en tranches pour les livrerplus facilement à la concurrence. Exemple : l’activité fret estpropriétaire de ses wagons et de ses locomotives, mais ausside son personnel, et en aucun cas ne doit servir à une autreactivité (remplacement impossible à Belfort d’un conducteuralors que la qualification est la même, voire, même, la loco-motive). Seulement, Fret SNCF est en concurrence directeavec Cargo rail, Veolia, etc., qui, eux aussi, ont leur matérielet leur personnel.

25 000 suppressions de postes en neuf ans

Comme l’a rappelé le responsable de la CGT cheminots, Gil-bert Garrel, cela s’est accompagné en neuf ans de 25 000 sup-pressions de postes.Nous le voyons bien, il n’y a évidemment aucune raison des’en étonner, et le pire est même à craindre pour la sécuritédes voyageurs et du personnel si ce démantèlement persiste.Ces problèmes de dysfonctionnement, malheureusement,sont présents dans tous les services publics, avec les consé-quences pour le personnel et les usagers. Nous l’avons vurécemment avec la neige.La seule issue conforme aux intérêts des personnels et de lapopulation n’est-elle pas l’exigence commune de l’abroga-tion des directives européennes et de la renationalisation desservices publics ?

Par José Nicol, postier, syndicaliste

Depuis le 1er janvier 2011, l’acheminement et la distri-bution du courrier postal sont totalement ouverts à laconcurrence. La Tribune (30 décembre 2010) titre : « Le

groupe s’est métamorphosé pour se préparer à l’ouverture totaledu marché. » Chaque citoyen peut mesurer, dans sa vie quo-tidienne, les effets de cette « métamorphose ».

6 000 bureaux de poste remplacés par des agences commu-nales ou des « points-poste ».En sept ans, les 17 000 points de vente, qui étaient assurés parde vrais bureaux de poste dans la quasi-totalité des cas, sontdevenus, pour 6 000 d’entre eux, des agences postales com-munales (APC) ou intercommunales et des points-poste chezles commerçants.Or les APC ne rendent pas les mêmes services : retraits finan-ciers très limités, délais d’exécution des services (mandats,remises de chèques…) très longs.Il n’y a pas de remplacement du personnel communal absent.C’est ainsi que l’APC près de chezmoi est fermée trois semainesl’été pour raison bien méritée de congés.

Trois semaines pour récupérerune lettre recommandée !

En décembre, un de mes collègues m’aexpliqué que pour aller chercher une lettrerecommandée de la préfecture en ins-tance dans une APC, il lui avait fallu pa-tienter trois semaines, car l’APC étaitfermée pour cause d’arrêt de maladie.Quant aux points-poste, ils durent letemps que dure le commerce (sans par-ler du problème de la confidentialité).L’égalité d’accès aux véritables servicespublics est mise en cause.Dans le même temps, de nombreux bu-reaux de poste sont devenus des com-merces avec la pression sur les guiche-tiers… pour vendre à tout prix.Vous l’avez bien compris, « le plus impor-tant, c’est de maintenir la rentabilité »(Nicolas Routier, directeur adjoint de LaPoste).

De très onéreux colis“Chronopost”

C’est ainsi que, pour ne prendre que cetexemple, les « paquets ordinaires » ontdisparu pour être remplacés par les « Chronopost », « Colis-simo » beaucoup plus chers.D’abord, la population n’a pas forcément besoin d’envoi urgentet, ensuite, il y a dix ans, les paquets ordinaires étaient déli-vrés rapidement.Sous la pression de « la rentabilité indispensable pour faire faceà la concurrence », on est passé d’un système où la populationavait accès à un service à prix abordable à un autre systèmeoù la direction de La Poste supprime les offres bon marchépour imposer des prestations chères et pas forcément utiles àl’usager.

Dégradation inimaginabledes tournées des facteurs

Quant à la distribution du courrier, « Facteur d’avenir » a dégradédans des proportions inimaginables les conditions de travaildu personnel ; et aussi le service rendu au public (heures dedistribution très variables, tournées à découvert, retard d’ache-minement lié à la fermeture des centres de tri de proximité…).C’est un constat partagé par la population : La Poste, commed’autres anciens services publics (la SNCF, EDF, France Télé-com…), vamal, très mal, alors qu’il y a quinze ou vingt ans, ilsétaient présentés comme desmodèles de service public dansle monde entier !

Comment en est-on arrivé là ?

Quinze ou vingt ans ? Comment ne pas voir que c’est précisé-ment « l’ouverture à la concurrence », sa préparation, conte-nue dans le Livre vert européen de 1989, qui a été la colonnevertébrale de toute cette politique ?Car il s’agissait, dès lors, selon les propos du sénateur PS Tre-mel (Journal officiel, 28 janvier 2004), « d’alléger La Poste de seshandicaps concurrentiels ». Faire allégeance àMaastricht, c’estfaire allégeance à cette « revendication », partagée par tous lesgouvernements depuis 1989.La rédaction du Livre vert européen en 1989 a préparé les direc-tives européennes postales de 1997 et 2002.Notons au passage que le NPA aura réussi l’exploit de faire uncommuniqué, le 31 décembre 2010, sur La Poste sans parlerde l’Union européenne !

Les directives de l’Union européenne

Ces directives ont ouvert progressivement la distribution ducourrier à la concurrence, lequel courrier constituait à cetteépoque plus des deux tiers du chiffre d’affaires de La Poste.La loi du « socialiste » Paul Quilès (1990) donnera le cadre juri-

dique de cette politique qui ré-pondait à la nécessité pour lecapital d’ouvrir des brèches dansles monopoles publics, puis deles détruire, afin que les multi-nationales pillent les secteurs lesplus rentables… et s’ouvrent denouveaux marchés.

La transformationen société anonyme

Puis, il y a eu la transformationde La Poste en société anonyme,sa privatisation afin d’attirer lesactionnaires (publics et privés).Pour prouver que le rendementsur investissement est consé-quent, La Poste a supprimé30 000 emplois entre 2005 et2010.L’ouverture totale à la concur-rence du 1er janvier poursuit etaggrave cette offensive de des-truction, car, désormais, lesentreprises privées, les collecti-vités peuvent distribuer tout lecourrier.

Désengagement de la distribution du courrieren zone rurale

D’ores et déjà, La Poste engage dans des départements « pilotes »des négociations afin de transférer la distribution du courrieraux communes en zone rurale. Elle a besoin, dans des délaistrès rapides, de se débarrasser de tout ce qui est encore du ser-vice public… et de chercher de nouveaux marchés pour fairede l’argent (dans d’autres départements, comme la Manche,La Poste monte des partenariats financiers avec le conseil gé-néral en direction des personnes âgées).Toutes les formules de dislocation de l’ancienmonopole publicsont possibles.Les dirigeants de La Poste annoncent, entre autres, qu’ils vontse lancer sur le marché des téléphones portables.

Rétablir le monopole postal public

La population et les postiers n’acceptent pas cette politique ;ils l’ont montré en 2005 et dans les multiples combats uni-taires quasi quotidiens.On ne sauvera et rétablira le service public qu’en rétablissantle monopole postal, en abrogeant les directives postales euro-péennes, c’est-à-dire en cassant la logique folle de « l’allége-ment des handicaps concurrentiels ». �

SNCF : des perturbationsen cascade

La Poste : les conséquences de l’ouverturetotale à la concurrence

“Ils n’en mouraient pas tous, tout de suite, mais tous étaient frappés” (citation légèrement modifiée d’une fable de Jean de la Fontaine)

Page 6: IO_131

Peux-tu nous présenter Fra-lib et nous décrire la situa-tion actuelle de l’entreprise ?La Société française d’alimen-tation et de boissons (Fralib)est implantée dans le départe-ment depuis des dizaines d’an-nées. A l’origine, Fralib possé-dait la marque Eléphant. Ellea été rachetée parUnilever, qui possé-dait la marque Lip-ton, dans les années1970 (…).Il y a eu des réorgani-sations : il existait uneusine au Havre, qui aété fermée en 1998.Tous les personnelsont été transférés surle site de Gémenos, ce qui faitque l’usine emploie aujour-d’hui 182 salariés. Et mainte-nant, on nous présente unprojet de fermeture.

Tu as pris connaissance dutract du comité de Gémenosdu POI. Que penses-tu de lamanière dont il pose le pro-blème ?Aujourd’hui, nous nous bat-tons pour une chose toutesimple : on veut garder notreusine et tous nos emplois. Jesuis d’accord avec les motsd’ordre du tract du POI : Nonà la fermeture ! Aucun licen-ciement à Fralib !

Quel est l’état d’esprit dessalariés ?Les salariés sont combatifs. Auprintemps, nous avons fait neuf

semaines de grève pour les sa-laires. Nous avons gagné uneaugmentation double de celleproposée par le patron (1,6 %au lieu de 0,8 %). Nous avonsobtenu le maintien de notremutuelle et gagné des embau-ches, ce qui n’est pas rien dansla période actuelle.

Mais le combatne fait que com-mencer. On estprêt à tenir tout letemps qu’il fau-dra pour gagner(…).

Le tract du POIpose la ques-tion : si Unilever

s’entête, ne revient-il pas auxautorités du pays de prendreleurs responsabilités ennationalisant l’entreprise ?Pourmoi, c’est une possibilitéparmi d’autres, mais qui n’estpas à l’ordre du jour.On ne s’interdit aucune solu-tion, y compris la nationalisa-tion. Je le répète : nous avonsle temps et c’est nous qui défi-nirons la solution qui nousparaît la meilleure.C’est à nous, les salariés, defaire le choix.Ce qu’on veut, c’est le main-tien de l’outil industriel, y com-pris lamarque, et le maintiende tous les emplois, quelle quesoit la forme juridique de l’en-treprise.Propos recueillis, le 6 janvier 2011,

par Nicole BAREAUet Jacky ROUVIÈRE �

Un instituteurde Seine-Saint-Denis

L’arithmétique desfermetures de classes :“6 + 5 = 9”

“Dans ma commune, enSeine-Saint-Denis, l’ins-

pecteur a reçu la consigne de…“rendre des postes” à l’inspec-teur d’académie, qui doit rendredes postes au ministre !La chasse est ouverte.Comment y arriver ? Dans uneécole ordinaire déjà victimed’une fermeture l’an dernier,on a deux cours préparatoiresà 25 élèves, dont deux enfantshandicapés avec un auxiliairede vie scolaire et deux élèves engrande difficulté, privés de touteaide spécialisée sansmême quelaMDPH (1) ait traité leur dos-sier, et deux classes à double ni-veau.Cette situation devient le lot detoutes les écoles. Les écoles lesplus inquiètes sont celles quin’ont pas eu de fermetures declasses ces dernières années.Trois écoles, deux élémentaireset unematernelle, sont dans lecollimateur. Germe donc unprojet de fusion de deux écoles :une de six classes et l’autre decinq, pour aboutir à une écolede neuf classes avec une seuledirection d’école, qui n’auraitque deux tiers de décharge deservice au lieu des deux demi-décharges actuelles. Donc, deuxpostes un tiers de gagnés.Voilàce qu’on nous propose de “dis-cuter démocratiquement” !L’argument des autorités n’estpas triste. Avec des écoles fu-sionnées, donc plus grosses,cela permet de mieux organi-ser la répartition des élèves dansles classes dont l’enseignant estabsent ! Les fusions d’écoles,c’est aussi la disparition depostes d’enseignants titulaireschargés des remplacements.On a bien l’intention, avec lessyndicats qui refusent cettechasse aux postes, d’informer

les collègues, les parents et lesélus de ce qui se trame contreleurs enfants pour que toutesces mesures soient abandon-nées. L’inspection académiquevient d’informer les syndicatsque le comité technique pari-taire chargé de discuter de cettecharcuterie était repoussé sinedie. Il paraît que le ministre neveut pas demanifestations avecles parents pour l’annulationdes suppressions de postesavant les cantonales. Cela per-turberait “le dialogue social”. »

(1) Maison départementale des per-sonnes handicapées.

Un professeur de collègedu Val-de-Marne

“Les pressionsindividuelles sur lescollègues ont commencé”

“Dans mon collège, lechef d’établissement a

reçu des consignes du recteurde supprimer des postes. Il adonc commencé des pressionsindividuelles sur plusieurs pro-fesseurs pour les intimider. Ilveut supprimer une sixième etles faire à 28 élèves, alors quepas une, actuellement, ne dé-passe 25. Il cherche aussi à fairepasserdes suppressionsd’heuresd’anglais pour faire sauter unposte.Cela ne passe pas et la bagarreva commencer pour obtenirl’arrêt de ces prévisions encours d’élaboration. Les per-

sonnels souhaitent que les syn-dicats refusent cesmesures. Onn’a pas bien compris, d’ailleurs,quel était l’objectif d’unemani-festation organisée le samedi22 janvier à Paris. Qu’il failleprotester, d’accord,mais s’agit-il d’obtenir l’annulation detoutes les suppressions depostes et des contre-réformesqui les organisent ? »

Un enseignant du Val-de-Marne, parent d’élève

“Mon fils a déjà deuxprofs stagiaires… Ils ontbeaucoup de difficultés”

“Mon fils, en collège, adéjà deux profs sta-

giaires sans formation, dont leprof de maths. Ils ont beau-coup de difficultés, malgré toutle soutien des parents. Le chefd’établissement est désemparé,car le rectorat lui dit que ce sys-tème va se généraliser avec laréduction des postes auxconcours et qu’il va falloir s’ha-bituer à ce que chaque éta-blissement recrute des contrac-tuels pour aumoins mettre unadulte dans les classes.Voilà où nous ont menés lesdirigeants de la FSU qui ontsoutenu la contre-réforme dela mastérisation, qui a permisde supprimer les IUFM et defaire des étudiants enmaster 2une immense réserve de…contractuels. L’abolition de laréforme de liquidation de la for-mation des enseignants et le

rétablissementde tous lespostesaux concours supprimés cesdernières années sont devenuscruciaux pour l’avenir immé-diat. »

Un professeur de lycée

“La propagandepublicitaire de L’Oréalen lieu et placede cours demaths !”

“Dans mon lycée, où lessuppressions d’heures

de cours doivent s’appliquer envertu de la réforme condamnéepar toutes les sommités dessciences de notre pays, c’estquatre heures demaths au lieude six heures en 1re S, avec deuxheures où l’on pourra organiserdes maths sans prof de mathspour faire des activités. Lasociété L’Oréal est déjà sur lesrangs avec des “mallettes péda-gogiques” pour initier les élèvesaux problèmes de compétiti-vité des entreprises... » �

“Les salariéssont combatifs.Au printemps,nous avons faitneuf semainesde grève pourles salaires”

Michel Landron

L e ministre Luc Chatel, au nom dugouvernement, vient d’appeler au« dialogue social » pour préparer la

prochaine rentrée scolaire. Le « dialoguesocial », c’était le droit des organisations dela classe ouvrière de négocier leurs reven-dications avec leurs employeurs et l’Etat.Cela devient désormais le droit de négocierles revendications du gouvernement et duMedef contre les droits des salariés, de lajeunesse, des retraités. LeMedef exige ainsi« l’allégement des charges sociales ». Le « dia-logue social », ce serait donc que les res-ponsables des syndicats « négocient » lesexonérations de cotisations sociales à laSécurité sociale, aux Assedic, aux caisses de

retraite, au logement social, à la formationprofessionnelle, aux handicapés…Ces coti-sations, rappelons-le, sont prises sur lamassesalariale. Le « dialogue social » revient ici ànégocier l’amputation des salaires des sa-lariés.Luc Chatel et le gouvernement exigent « laréduction des déficits publics ».Le « dialoguesocial » consiste, là, à demander aux syndi-cats, aux associations de parents, aux éluslocaux, aux associations dites « éducatives »,de trouver ensemble comment et où sup-primer 16 000postes dans l’Educationnatio-nale cette année. Les premiers témoignagesqui nous arrivent (lire ci-dessous)montrentsans équivoque qu’il s’agit d’une politiquetransformant les syndicats et les élus locauxen auxiliaires du pouvoir politique.

A l’inverse, partir des besoins incompres-sibles pour garantir la scolarité des élèvesdans l’enseignement public exige le refusde ce « dialogue social » pour permettre lecombat uni pour l’annulation immédiatede toutes les suppressions de postes. Lesgrandes déclarations « antilibérales » nesont que rideau de fumée si cette exigenceest escamotée.N’est-ce pas le point de départ obligé pourune reconstruction de l’école laïque mar-tyrisée par tous les gouvernements depuisla loi Debré de 1959, détournant des mil-liards de fonds publics vers les écoles pri-vées, et la loi Jospin de 1989, ouvrant la voieà « l’autonomie des établissements scolaires »pour organiser… le désengagement de l’Etatet la privatisation ? �

La recettedu ministèrepour faire sauterdes classespar dizainesde milliersRecommandationsministérielles, dites« les gisements d’effi-cience », de mai 2010 :« Une augmentationd’un élève par classeen moyenne devraitse traduire par uneéconomie de prèsde 10 000 classes.L’augmentationde la taille des classespeut donc êtreglobalement envisa-gée sans dégradationdes résultatsdes élèves. »

“Plan social” avant fermeture chez Fralib

“Nous voulons garder notre usineet tous nos emplois”Interview d’unmilitant syndicaliste de l’entreprise.

Alors que le gouvernement veut supprimer 16 000 nouveaux postesà la rentrée prochaine dans l’Education nationale

Leministre Chatel appelle au “dialoguesocial”… pour négocier les revendications

du gouvernement et du patronat

École

Des enseignants témoignent

Lecteurs, correspondants, vous pouvez faire parvenirvos reportages, vos interviews, vos photos

par e-mail : [email protected] par courrier : rédaction d’Informations ouvrières,

87, rue du Faubourg-Saint-Denis 75010 Paris

Des interventions à la conférence du 11 décembresont disponibles sur le site du POI :www.parti-ouvrier-independant.com

> L’actualité politique et sociale >>>6INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 2011

Phot

oAF

P

Manifestation des employés de Fralib, à Marseille.

L’usine Fralib est la propriété de la multinationale Unilever,qui a versé unmilliard d’euros de dividendes à ses actionnairesen 2007 et 2008. Située à Gémenos (Bouches-du-Rhône), elleest le seul site en France à fabriquer les thés Lipton et les infu-sions Eléphant. Le 10 janvier, la direction a confirmé la miseenœuvre d’un « plan social », avant la fermeture de l’usine enavril. Nos correspondants ont rencontré Henri S.,membre dela commission exécutive du syndicat CGT.

Phot

oAF

P

Page 7: IO_131

Par Jacques Cubaud

« Réforme des retraites, acte 2 ! Après le régime géné-ral, c’est au tour des complémentaires de passer à lamoulinette. »C’est ainsi que Liaisons sociales (29 dé-cembre 2010) résume l’enjeu des négociations quiviennent de s’engager entre le Medef et les confé-dérations de salariés qui gèrent, paritairement, lesrégimes de retraite complémentaire de l’ARRCO etde l’AGIRC.

L’importance de ces négociations est considé-rable. Non seulement parce qu’elles concer-nent l’ensemble des dix-huitmillions de travail-

leurs du secteur privé qui cotisent à l’ARRCO et àl’AGIRC, et plus de onze millions de retraités, maisaussi parce que le montant de la retraite complé-mentaire est primordial pour assurer des revenusdécents une fois à la retraite.Les organisations syndicales ont prévenu qu’ellesn’accepteraient aucune nouvelle dégradation duniveau des retraites.LeMedef, lui, considère qu’une baisse est inévitablepour maintenir à long terme l’équilibre financier del’AGIRC et de l’ARRCO.Pour cela, comme toujours quand il faut cogner à lahache sur la protection sociale, il s’appuie sur les pré-tendus déficits à venir.Les organisations syndicales CGT et FO demandentune augmentation des cotisations patronales. Unetelle demande, totalement légitime au moment oùles sociétés du CAC 40 annoncent des bénéfices deplusieurs dizaines de milliards d’euros, est le seulmoyen de stopper la baisse du rendement des retraitescomplémentaires et, donc, du montant général despensions avec lesquelles les retraités doivent vivre.Pour le Medef, qui est pourtant le premier respon-sable des licenciements et du blocage des salaires,pas question d’augmenter les cotisations.

L’objectif avoué du patronat :“Renforcer le besoin des assurésde souscrire des produits d’épargne”

Comme d’habitude, il met en avant le « maintien dela compétitivité des entreprises ». Mais la raison essen-tielle pour laquelle le patronat refuse toute augmen-tation des cotisations est révélée par une note internede la Fédération française des sociétés d’assurances(FFSA), branche « assurances » duMedef : « La baisse

du rendement, qui devrait être actée lors de ces négo-ciations, devrait renforcer le besoin des assurés de sous-crire des produits d’épargne retraite. »Aumoins, c’est clair ! Il s’agit de piller à pleinesmainsdans le salaire différé, en refusant la hausse des coti-sations, pour alimenter les circuits de la spéculation.Refus du Medef d’augmenter les cotisations patro-nales, d’un côté, refus des organisations syndicalesd’accepter une baisse des retraites, de l’autre.

La CFDT prête“à prendre des décisions difficiles”

LaCFDT, encore elle, fait une proposition : après avoirprévenu que « ce ne sera pas une négociation facile. Ily aura des décisions difficiles à prendre » (26 novembre),elle annonce la couleur en proposant de « jouer sur lesavantages familiaux » (Le Figaro, 22 décembre 2010).

Tu parles d’un jeu ! Il s’agit de remettre en cause lesmajorations de pensions qu’accordent l’AGIRC etl’ARRCOpour les enfants élevés et les enfants à charge,les pensions de reversion sans condition de ressourcespour les veuves ou les orphelins.Autant demesures qui distinguent encore les régimesAGIRC et ARRCO du régime général, et dont la dis-parition permettrait de faciliter l’intégration de cesrégimes dans le grand régime universel par pointsprévu à l’article 16 de la loiWoerth. Or la CFDT estpour lamise en place de ce régime universel qui englo-berait tous les régimes de retraite « légalement obli-gatoires », ce qui est le cas de l’AGIRC et de l’ARRCOdepuis la loi du 29 décembre 1972.

La logique infernale de la “réformesystémique” prévue par la loiWoerth

Dans Syndicalisme hebdo (16 décembre 2010), la CFDTrappelle sa position : « L’ouverture d’un débat citoyensur une refonte globale du système de retraites que laCFDT appelle de ses vœux est un élément positif. Il fautsouhaiter que cette mission devienne prioritaire. »Comme on le voit, la mise en place de la loiWoerthest une véritable bombe à fragmentation, qui, dèsaujourd’hui, impacte toutes les règles de la retraite.Ce n’est pas en 2013, c’est tout de suite que la logiqueinfernale de la « réforme systémique » est opposéeaux salariés.Le refus de la réforme systémique et de la retraite parpoints impose de dire aujourd’hui :maintien de toutesles dispositions des régimes ARRCO-AGIRC plus avan-tageuses que le régime général.

Le gouvernementa nommé quatrepersonnalités

pour présiderles groupes de travailqui vont planchersur la « réformede la dépendance ».Rappelons que, sousce prétexte, le gouver-nement voudrait ins-taurer une assuranceobligatoire pour tousles salariés dès 50 ans,augmenter la CSGet sortir définitivementles soins aux personnesâgées du champde la Sécurité sociale(voir notre précédentnuméro).Pour organiserla « concertation »,le gouvernementa notamment choisiBertrand Fragonard,qui, rappelle le journalpatronal Les Echos(5 janvier), estun énarque qui « a faittoute sa carrière entrecabinets ministérielsde gaucheou de droite ».Autre personnalitésélectionnée pourprésider un groupede travail, Jean-MichelCharpin : « Ancienconseiller de LionelJospin, il est l’auteurd’un rapport de réfé-rence sur l’avenirdu systèmedes retraites, en 1999 ».Ces deux hommes,plus deux autres per-sonnalités, « sont entrain de constituerles groupes de travail,qui comprendronttrente à quarantemembres— élus,conseillers généraux,syndicats,associations... ».

Des millions de travailleurs et de retraitésconcernés par l’enjeu des négociations

sur les retraites complémentairesLe patronat veut baisser les pensions, la CFDT est prête à une remise en cause des « avantages familiaux »

pour aller vers un « régime universel par points ».

Enquête

Reportage à l’hôpital Tenon (Paris)

Mobilisation contre la mise en accusation du syndicat CGT

7INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 2011

Par Michèle Lepeuve

A l’appel de l’union départementale CGTde Paris, un rassemblement de 300 mili-tants s’est tenu le 10 janvier pour exiger leretrait de la plainte déposée contre le secré-taire du syndicat CGT de l’hôpital Tenon,Patrice Lardeux, après la grève de douzesemaines des personnels de cet hôpital. S’yétaient joints des représentants de SUD,de FO-AP-HP, des retraités SNES-FSU.

Plusieurs responsables CGT ont reliécette tentative de « criminalisation »de l’action syndicale avec la mise en

place du « dialogue social » par le gouver-nement. « Il faut se rappeler que l’on nous aimposé cette loi régressive du dialogue social »,a précisé une représentante de la fédérationnationale CGT santé. « Il s’agit d’un “faux”dialogue social », a souligné la secrétaire del’USAP-CGT, Rose-May Rousseau, « il n’y apas de vraies négociations, puisque toutes les

discussions se situent dans le cadre de la lo-gique de rentabilité et de destruction du ser-vice public. La défense des militants syndi-caux, c’est la défense des droits de tous lespersonnels et celle de la population. Aujour-d’hui, l’hôpital public est en très grave dan-ger. L’institution, le statut de l’AP-HP et despersonnels sont mis en cause. »Un autre responsable de l’USAP-CGT indi-quait que cette répression syndicale contrele délégué CGT deTenon et d’autres syndi-calistes, à La Poste, à la SNCF, à la Cité dessciences, a lieu au moment où la nouvelleloi sur la représentativité syndicale signifie,à l’AP-HP, le passage de 690 délégués à 240pour représenter les 85 000 agents. Le res-ponsable de l’union locale CGTduXIIIeajou-tait que cette menace de sanction s’inscritdans le contexte de la restructuration del’AP-HP, qui signifie la perte de 1 500 emploispour la seule Pitié-Salpêtrière, la suppres-sion de 800 lits en gériatrie… Il appelait àrelier cette bataille contre la répression syn-

dicale avec l’ensemble du combat pour lesrevendications. Lamanifestation s’est ensuitemassée, aux cris de « Retrait, retrait, de laplainte contre Patrice, non à la répressionsyndicale, satisfaction des revendications »,devant le commissariat où Patrice Lardeuxétait convoqué pour une audition.Celui-ci a démontré, faits à l’appui, l’ina-nité des accusations portées par le respon-sable de la sécurité de l’hôpital, soutenu parla direction de l’AP-HP.« La situation à Tenon,malgré les embauchesque nous avons obtenues, risque d’être à nou-veau explosive : dans le service de néphro-logie, pour neuf embauches, il y a douze dé-parts ; aux urgences, on exige des infirmièresdes services de 12 heures ; la flexibilité géné-rale, avec le système de la “grande équipe”,continue à s’imposer à tous. Pour faire faceaux affrontements qui se préparent, il fautcontinuer à agir dans un cadre interprofes-sionnel, comme nous l’avons fait avec suc-cès aujourd’hui. » �

Éclairage

Retraites complémentaires : de 35 % à 55 %du montant total des pensions dans le privéMalgré une baisse continue du niveau des pensionsservies par les régimes de retraite complémentaire(100 euros de cotisation rapportaient 9 euros de retraiteà la fin des années 1990 : ils ne rapportent plus que6,50 euros aujourd’hui, soit une baisse de près de30 %), leur montant représente, en moyenne, 35 %de la retraite totale des non-cadres et jusqu’à 55 %de celle des cadres.

Le “déficit” : un faux prétexte, là aussi…

Les régimes de l’AGIRC et de l’ARRCO sont des régimespar répartition : les cotisations prélevées sur les salairessont reversées immédiatement sous forme de pen-sion. Si la masse salariale globale se rétracte, commeces deux dernières années, sous les effets conjuguésdes plans de licenciements massifs et du gel des salaires,et que le nombre de départs à la retraite augmentede façon importante, ces régimes accusent immédia-tement un déficit : 2,5 milliards d’euros en 2010.Les 75 milliards d’euros de réserves qu’ont constituéesl’AGIRC et l’ARRCO pour faire face à ce type de crisepermettent largement d’y remédier.

Chiffre

40milliards

C’est, en euros, le montant des dividendes querecevront les actionnaires des quarante plus grossesentreprises cotées à la Bourse de Paris au titre

de l’exercice 2010, en progression de 13 % par rapportà l’année précédente. De 2007 à 2010, le total cumulé

se monte à 153 milliards (Les Echos, 7 janvier).

“Dépendance”:des “groupesde travail” trèsconsensuels

Page 8: IO_131

Albert Dal Pozzolo

Le 28 décembre 2010, le préfet de l’Audea décidé de dissoudre la communautéde communes—dont la communede

Mailhac est membre— contre la volonté dela population, qui s’était prononcée à 99 %contre le rattachement auGrandNarbonne.Qu’est-ce qui donne au préfet cette audace ?Examinons les faits. Le 22 décembre 2010,l’AFP a publié une dépêche intitulée : « Ré-forme territoriale : le gouvernement passe àl’application. » On y apprend que « le gou-vernement est passémercredi à la phase d’ap-plicationde sa réforme territoriale en adressantaux préfets des instructions pour qu’ils plan-chent sur la nouvelle carte de France de l’in-tercommunalité censée être achevée en juin2013.Leministre qui pilote le dossier,PhilippeRichert (Collectivités), a souligné devant leConseil desministres que la refonte de la carteintercommunale est“l’unedesmesures essen-tielles” de la loi sur la réforme territorialepubliée le 17 décembre au Journal officiel (…).Les préfets vont préparer un schéma départe-mental de coopération intercommunal, quiservira de référence à l’évolution des inter-

communalités dans chaque département, aindiqué M. Richert à l’AFP (…). Les préfetsdevront présenter le schéma avant avril 2011aux commissions départementales de coopé-ration intercommunale composées d’élus, quipourront proposer des modifications. Leschémadevra être arrêté auplus tard fin 2011.»Philippe Richert, interviewé le 3 janvier 2011dans la Gazette des communes, explique :« Nous allons couvrir toute la France d’éta-blissements publics de coopération intercom-munale (EPCI). Il n’y aura plus d’îlots où cer-taines communes ou communautés restentdans leur coin (…). Nous allons réduire demanière considérable le nombre de syndicats,qui atteint 15 300.D’ici au 1er juin 2013, il n’enrestera plus que 4 000 à 5 000. » Sur la chaînede télévision LCI, le 6 janvier 2011, PhilippeRichert précise : « La réforme des collectivitésterritoriales est nécessaire et indispensable, toutlemonde en convient.Tout ce qui relève dubloccommunal et intercommunal est reconnucomme étant accepté par tous, y compris parla gauche. »C’est pourquoi, s’appuyant sur ceconsensus, le préfet de l’Aude adécidé dedis-soudre la communauté de communes dontla commune deMailhac estmembre. �

Comment se tra-duit la réforme dela taxe profes-sionnelle, qui vised’abord à un étouf-fement financierdes communes ?Le percepteur vientd’informer lesmairesdu canton qu’il fau-drait, « par précau-

tion », diminuer les prévisions budgétairesde 6 % pour 2011. Il précise par écrit : « Lesmontants de vos ressources ne seront connusavec précision qu’à l’automne 2011. »Ce n’estdonc qu’à ce moment-là que l’Etat nousinformera des dotations. Allez élaborer unbudget en mars avec ça !

La réforme territoriale conduite par legouvernement vise aussi à étouffer avanttout la démocratie communale. Peux-tunous indiquer quelles formes cela prenddans ton canton ?Le canton de Bourg, 12 900 habitants, surles bords de l’estuaire de la Gironde, est toutsimplement menacé de disparition, avecéclatement sur les cantons voisins. Le seuilde « viabilité » serait entre 15 et 21 000 habi-tants…Mais ce canton n’est pas seulement une divi-sion administrative, c’est aussi une com-munauté de quinze communes, un syndicatdes eaux et de l’assainissement, une appel-lation viticole, les Côtes de Bourg…La Poste, en voie de privatisation, a déjà anti-cipé et décidé d’éclater le canton : les bureauxde poste (ceux qui restent) sont répartis, rat-tachés aux trois cantons voisins !

Quelles sont les réactions ?Le président (apparenté UMP) de la com-munauté de communes, partisan de la ré-forme territoriale, veut néanmoins « défendreson canton jusqu’au bout ».Le député PS, quant à lui, considère que« bien voter aux cantonales et aux présiden-tielles en 2012 permettrait de revenir sur cetteréforme ». Comment « défendre le canton »

sans combattre pour l’abrogation de la ré-forme territoriale ?

Que disent les élus, en particulier à gau-che ?A la base, les élus sont désemparés par l’at-titudedes dirigeants. Ici, dix-neuf élus,maireset conseillers, ont participé à lamise enplaced’un collectif d’élus pour le retrait de la ré-forme territoriale.Nous avons eudes dizainesde signatures. Nous sommes allés en délé-gation au conseil général. C’est donc une dis-cussion que nous avons depuis plusieursmois.Depuis décembre 2009, il n’y a euaucunappel à lamobilisation pour le retrait.

Se satisfont-ils des déclarations indignéesde leurs dirigeants, dont tous les prési-dents de conseils généraux et régionauxqui anticipent la mise en œuvre de cetteréforme ?Le conseil général de la Gironde (PS) a aug-menté les impôts de 3%, nos salaires et pen-sions en sont loin ! Unautre exemple, lorsquele SMICVAL, syndicat intercommunal quigère les ordures ménagères (président PS,également vice-président du conseil géné-ral) décidede taxer les apports des communesendéchetterie. J’ai voté contre. C’est une taxesupplémentaire, qui retombera encore unefois sur les contribuables via les impôts lo-caux !Mêmeproblèmepour le syndicat inter-communal des eaux : les subventions del’Agence de l’eau ont été supprimées, leconseil général a diminué ses subventionsdemoitié… et le président (PS) propose dedoubler le prix dumètre cube d’eau en cinqans. Encore les contribuables qui devraientpayer la note ! Les élus ont refusé.Nous devons donc être cohérents : il ne peuty avoir undiscours en conseilmunicipal pourrefuser les contraintes qui pèsent sur nos col-lectivités… et un vote en syndicat intercom-munal pour de nouvelles contraintes. Onnepeut pas sans cesse protester et continuer àappliquer, à mettre en place ce que noussommes censés combattre, alors que nousn’y sommes pas obligés.

> La vie du parti >>>8INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 2011

PA

RT

IO

UV

RIE

RIN

PE

ND

AN

T Elections cantonales : les comités

Correspondant

Comment comprendre la volonté affi-chée et maintenue à ce jour de fer-meture de collèges publics du dépar-

tement ? Deux fermetures de collèges annon-cées, dans un premier temps, par la majo-rité PS et PCF du conseil général d’Indre-et-Loire (collèges deNouâtre et Pasteur, àTours),sept envisagées, jusqu’à quinze évoquéesdans la presse… Cela alors que les collègesprivés reçoivent trois millions d’euros. C’estla stupéfaction chez les parents d’élèves, lesenseignants, les amis de l’école publiquelaïque et de très nombreux habitants du dé-partement.Comment comprendre cette volonté de pas-ser en force à tout prix, au mépris de la de-mande des parents d’élèves et des ensei-gnants qui se sont mobilisés, nombreux età plusieurs reprises devant le conseil géné-ral, imposant même à celui-ci un spectacu-laire recul ?Comment comprendre, enfin, le refus, à cejour, à la veille des élections cantonales, detout engagement clair et net pour l’abandondes fermetures de collèges publics ?Lamajorité PS-PCF du conseil général (1) a-t-elle été élue pour relayer la politique des-tructrice du gouvernement ou pour défendreles intérêts de la population ?Fermer des collèges publics, n’est-ce pas sesoumettre platement à l’exigence gouver-nementale formulée ouvertement ainsi parle ministre Châtel dans la fiche no 7 « Dia-

logue Centrale-académie » : « Il s’agit pourl’académie d’entamer ou de poursuivre le dia-logue avec les collectivités afin d’aboutir à lafermeture des petits établissements » ?Alors que les banques empochent des mil-liards d’euros et que les salariés, les jeunes,les retraités sont contraints de se serrer laceinture, que signifie la décision du conseilgénéral d’augmenter les impôts de 20 % endeux ans ?Augmenter de 20 % les impôts, faire payerla population, n’est-ce pas donner un for-midable encouragement à ce gouvernementde droite pour justifier et poursuivre sa poli-tique antisociale, dite de « réduction des défi-cits publics », dictée par le Fondsmonétaireinternational et l’Union européenne ?Qui avait écrit, en 2008, dans une luxueusebrochure électorale imprimée sur papierglacé : « Aucune augmentation des impôtspour les trois années à venir » ? La présidentedu conseil général, madame Roiron, condui-sant la liste du Parti socialiste… Commentcomprendre un tel reniement ? N’est-ce pascéder en tous points au diktat gouverne-mental ?Le conseil général doit-il continuer à être la« chambre d’amortissement » de la politiquegouvernementale ou doit-il mobiliser lapopulation pour la défense du département,des services publics et des acquis sociaux ?

(1) Majorité départementale composée de vingt etun conseillères et conseillers PS, et d’une conseillèrePCF.

INDRE-ET-LOIRE. Le mandat des six candidats présentés par le POI

“Aucune fermeture de collège publicen Indre-et-Loire !”

ÉCLAIRAGE

Le regroupement des communesà marche forcée

Gérard Schivardi,secrétaire nationaldu POI

D’abord, jevous pré-sente mes

meilleurs vœux pour2011. Nous devonstous ensemble tra-

vailler pour le développement de notreparti, dernier rempart pour la classe ou-vrière (...).Monsieur le préfet, par décret, a dissous,le 28 décembre, la communauté de com-munes dont Mailhac était membre.Cette dissolution, faite dans l’urgence, laissemacommunedevantdesproblèmesénormes.Après le vote massif de la population, quia refusé l’intégration au Grand Narbonne,nous sommes obligés de conventionnerpour tout ce qui concerne le social, le ser-vice à domicile, crèche, RAM (relais assis-tancematernelle—NDLR), cantine scolaire,ALSH (accueil de loisirs sans hébergement— NDLR), ordures ménagères, tri sélectif,etc.

Travail énorme, car nous devons continuerles services publics, et dès le 3 janvier.Cette précipitation à dissoudre n’a pu sefaire sans l’accord du Parti socialiste. Aprèsune lettre ouverte à monsieur le préfet età monsieur le sous-préfet, parue dans lapresse, vendredi 31 décembre, monsieur lesous-préfet m’a téléphoné, preuve que lesarguments annoncés par le conseil muni-cipal étaient fondés.Pas de réunion de la commission départe-mentale sur l’intercommunalité, pas dechiffrage concernant les compétences nonreprises par le Grand Narbonne, créationd’un SIVU (syndicat intercommunal à voca-tion unique — NDLR),mais pas de prési-dent ni de bureau pour signer des conven-tions… Cerise sur le gâteau, nous avionsreçu les décrets non signés dès le lundi27 décembre et le décret de dissolution parfax le jeudi 30 décembre.Voilà la collusion entre l’Etat et les liqui-dateurs du PS, qui avaient été prévenus àl’avance.Nous devons continuer à nous battre. L’ave-nir des communes de la République est enjeu. �

CORRESPONDANCE

Le préfet dissout la communauté decommunes dont Mailhac est membre

GIRONDE

“On ne peut pas mettre en placece que nous sommes censés combattre”

Interview de Christian Baqué, conseiller municipalà Mombrier et candidat sur le canton de Bourg

Page 9: IO_131

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 20119

PO

I Je souhaite prendre contact avec le Parti ouvrier indépendant� Je souhaite adhérer�

Nom, prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Code postal : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . E-mail : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Bulletin à retourner à : Parti ouvrier indépendant 87, rue du Faubourg-Saint-Denis 75010 Paris

PARTI OUVRIER INDÉPENDANT 87, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75010 Paris - Tél. : 01 48 85 85 - E-mail : [email protected] www.parti-ouvrier-independant.com

du POI en campagne

Correspondant

Mercredi 5 janvier, le comité duGersdu POI organisait, à Auch, une réu-nion publique de compte rendu dela Conférence mondiale ouvertecontre la guerre et l’exploitation (Al-ger, 27, 28 et 29 novembre 2010), enprésence deDaniel Gluckstein, secré-taire national du POI.

Avec ses près de trente partici-pants, cette réunion était déjà,à son ouverture, un premier

succès. La suite, dans les élémentsapportés par l’orateur comme dansles échanges, l’a démontré encore plus.Le compte rendu deDaniel Glucksteina nettementmontré que lamasse des40 000 milliards de dollars de dettespubliques dans lemonde est le résul-tat voulu d’un endettement décidé parles gouvernements aux ordres des spé-culateurs. Le POI se prononce pourl’annulation de cette dette. Le débat

avec la salle, très attentive, a permisde préciser un certain nombre depoints, comme la façon dont la confé-rence d’Alger a pu se tenir dans unpays soumis, pendant plus de dix ans,à une oppression et à une violenceinouïes.Mais l’actualité sociale de ces der-nières semaines s’est elle aussi invi-tée dans le débat. Tout d’abord, parceque le combat pour la défense des re-traites s’inscrit dans la volonté despeuples de ne pas payer une dette quin’est pas la leur, mais aussi parce quela question de savoir « pourquoi onn’a pas gagné » a été soulevée.Après plus de deux heures de débat,c’est avec deux adhésions que la réu-nion s’est terminée. Des contacts ontété pris, des discussions se sont pour-suivies bien après la réunion, et cesliens continueront de se tisser au tra-vers des élections cantonales : le co-mité du Gers y présentera un can-didat. �

AUCH (GERS)

Compte rendude la conférence d’Alger :deux adhésions au POI

Toulouse, le jeudi 6 janvier 2011 : plus de cent participants à la réunion publiquedu POI pour le compte rendu de la conférence d’Alger.

FICHE ARGUMENTAIRE N°3

L’acte III de la décentralisation� On lit dans le communiqué du 10 décembrepublié par Elisabeth Guigou, au nom duPS : « Le PS, fidèle à l’héritage républi-cain, propose un nouvel acte de la dé-centralisation. Il rappelle qu’il abrogeracette réforme des collectivités territo-riales dès son retour aux responsabi-lités et mettra en œuvre une granderéforme de progrès (…), une réformequi permettra à la démocratie d’êtreétendue et aux services publics locauxd’être renforcés. »Trois questions, au moins, se posent àla lecture de ces lignes :— La réforme se résume-t-elle à unemanipulation des découpages des cir-conscriptions électorales ?— Peut-on attendre 2012 ?— Que réservent cette « réforme de pro-grès » promise et ce « nouvel acte de ladécentralisation » ?

Désarmer les communesLe vote de la loi au Parlement a été dif-ficile, les amendements se sont multi-pliés, le gouvernement a multiplié lespressions sur sa propre majorité et n’aréussi à passer qu’à quelques voix près.Mais, sur le fond, il n’a pas lâché sonobjectif : impuissanter les communesen les étouffant dans l’intercommuna-lité forcée et disloquer l’édifice républi-cain garant de l’égalité des citoyens àl’échelle de la nation.L’intercommunalité a fait à ce pointconsensus parmi les députés que la dated’achèvement en a même été avancéeà juin 2013 ! L’élection, au suffrage uni-versel, des délégués communautaires« par fléchage » des premiers de chaqueliste vise à faire passer les conseils muni-cipaux sous leur domination et à les ré-duire au rôle de figurants.Par ailleurs, en superposant les « métro-poles », ou diverses moutures de « pôlesmétropolitains », qui s’emparent desprérogatives de l’ensemble des collec-

tivités qu’elles recouvrent (communes,intercommunalités, départements etrégions en totalité ou en partie), on créeune sorte de chaos, les prérogatives descommunes et des départements pas-sant dans les mains, au niveau des mé-tropoles et des régions, d’élus désormaisinaccessibles à la population. En revan-che, là où tout se compte en centainesde millions ou en milliards d’euros, lavoie serait ouverte aux banquiers et auxmultinationales du type Veolia ou Bouy-gues.

“La claire consciencede nos déficits”La question centrale est bien celle de ladette publique, là aussi. Il s’agit d’im-poser aux élus « de raisonner avec laclaire conscience des déficits que nousavons » (Sarkozy). Les délais de bou-clage des budgets ont été repoussés enavril pour éviter de faire tomber en pleinecampagne électorale des cantonales lesdécisions découlant de l’économie dequarante-cinq milliards d’euros fixée auxcollectivités dans le plan d’ensemble decent milliards d’ici à 2013. Toutefois, leministre du Budget a annoncé le gel desdotations pour trois ans.Attendre 2012, c’est se résigner au « saleboulot » et relayer immanquablementde brutales dégradations pour la popu-lation.Le POI de Seine-Saint-Denis a ainsi éva-lué à 625 euros, pour une famille detaille moyenne, la dépense découlantdes hausses décidées par Claude Bar-tolone, président PS du conseil généralde Seine-Saint-Denis (25 euros d’aug-mentation pour une carte Améthyste,des centaines d’euros pour la carte Ima-gine’R). Dans notre département du Val-de-Marne, où le conseil général est àjorité PCF-PS-PG, le président ChristianFavier vient de demander aux communesde financer le Fonds solidarité habitat(FSH) de manière à compenser le man-

que à gagner dû à la non-compensationdes transferts de charges par l’Etat. Le FSHpermet d’aider les locataires confrontésaux expulsions ou aux coupures (eau,électricité, gaz). Or, du fait de la loiNOME, des hausses allant jusqu’à 25 %des factures d’électricité vont faire explo-ser les demandes d’aide…

Un acte III de la décentralisation,pour aller où ?Pour installer les hôpitaux et la Sécuritésociale sous le contrôle des agences ré-gionales de santé (ARS), comme en Ile-de-France, où l’ancien ministre PS ClaudeEvin, président de l’ARS, prend sans sour-ciller des mesures de démantèlementde l’AP-HP ?Pour abandonner les établissements del’Education nationale à la machine infer-nale de l’autonomie ? Pour développerles regroupements d’écoles en EPEP etramener les enseignants sous la coupedes élus politiques et de groupes depression locaux ? Pour soumettre lesprofesseurs de lycée professionnel auxexigences de la gestion des ressourceshumaines des entreprises de leur bas-sin ?Ou bien, comme à Montpellier, pourfaire appliquer la loi Pécresse par le conseilrégional « de gauche », qui décide deliquider les filières littéraires et d’assu-jettir la recherche au profit ?Pour poursuivre la destruction de la SNCFen l’éclatant dans le cadre des vingt-deux régions, au prix de la disparitionde toute desserte cataloguée « non ren-table » ?Sans des services publics organisés natio-nalement, comment peut-il y avoir éga-lité des droits ?Par conséquent, la décentralisation-régio-nalisation se pare du masque de la dé-mocratie, mais s’est faite, en réalité, laboîte à outils du démantèlement de laRépublique et de la destruction des com-munes.

BAGNOLET (SEINE-SAINT-DENIS)

Délégation au maire pour la défense des services publics

“On ne peut pas être jetés à la rue”Cécile Brandely

Le 7 décembre, une délégation dequatre militants du POI et de cinqhabitants, signataires de la pétitionpour la défense des services publicsinitiée par le comité du POI (plus detrois cents signatures recueillies), aété reçue par le maire PCF de Ba-gnolet.

La délégation a présenté et dé-fendu les revendications de lapopulation, notamment le

maintien du stade de la Briqueterie,l’embauche de personnel au centremunicipal de santé, la constructionde logements HLM.Mina, une habitante, explique :« M. le maire, on vous a soutenu à LaNoue,mais vous nous avez déçus, vousnous avez abandonnés.Vous vous étiez

engagé à aider mon fils à trouver untravail. On ne vous demandait pasqu’il soit adjoint au maire, mêmebalayeur on s’en serait contenté ! A LaNoue, il n’y a même plus d’éclairagepublic à certains endroits, vous atten-dez quoi pour réparer, un viol, unmeurtre ? »Yamina témoigne : « J’ai reçu une lettrede mon bailleur “social” : j’avais jus-qu’à hier pour quitter mon domicile.Pourtant, je paie le loyer, la taxe d’ha-bitation.Monmari est malade. Je suisvenue de nombreuses fois à la mairiepour rencontrer l’assistante sociale.Impossible de la voir !J’étais gardienne dans un immeublede Paris, qui a été vendu. Je n’avais pasles moyens de racheter l’appartement.En perdant mon logement, je perdaisaussi mon travail. Avec monmari, ona dû venir habiter chez notre fille. On

ne peut pas être jetés à la rue ! » Ladélégation s’est battue pour que lemaire apporte une solution.A la sortie, Yamina nous dit : « C’est lapremière fois que je me sens soutenue,c’est un vrai soulagement de vous avoirrencontrés. »

TROIS ADHÉSIONSAU POILe maire nous a parlé de « marge demanœuvre réduite » parce que « l’Etatnous rogne nos possibilités ». Maispour Abdelkrim, chef de chantier :« Ce n’est pas à nous de payer la dette.Moi, quand je me gare de travers, jepaie mon PV, je ne demande pas auxautres de le payer à ma place. Là, c’estpareil, ils font des c…, ils paient ! »Un parti qui ne lâche pas ? Pour pour-suivre la bataille, les trois camaradesont adhéré au POI. �

Meetings et réunionsde compte rendu de la conférence mondiale

Jeudi 13 janvier :Mulhouse

Vendredi 14 janvier :Orthez,Auxerre, Poligny

Jeudi 20 janvier : Rennes

Vendredi 21 janvier : Chambéry,Saint-Brieuc

Samedi 22 janvier : LeMans

Mardi 25 janvier : LaRoche-sur-Yon

Jeudi 27 janvier :Metz

Vendredi 28 janvier : Grenoble

Samedi 29 janvier :Saint-Cyr-sur-Loire

Samedi 5 février :Montbéliard

Page 10: IO_131

> L’actualité internationale >>>10

ChroniqueINTERNATIONALE

Non, l’Afriquen’est pas victimed’unemalédiction

Par Jean-Pierre Raffi

Par-delà le côté dramatiquede la mort des deux otagesau Niger — au termed’une intervention militaire donton est en droit de se demandersi elle n’obéissait pas plusà des considérations de politiqueintérieure française qu’à un réelsouci de les libérer —,on rappellera ici quelques faitspermettant d’éclairer les enjeuxde ces guerres qui ensanglantentl’Afrique et précipitentchaque jour un peu plusses peuples dans le chaos.La vaste région du Sahel,englobant le sud de la Mauritanie,du Mali, du Tchad et du Soudan,est une zone extrêmement richeen minerais précieux (parmilesquels l’uranium, exploitépar la société française Cogema),qui attisent bien évidemmentla convoitise des grands groupesmultinationaux, et notammentfrançais et américains. Regardezla carte géologique de la régionet vous verrez se dessiner celle,politique, des conflits, des basesmilitaires et des agissementsde groupes mafieuxs’auto-intitulant « Al-Qaida ».Prenez le Soudan : « Une régionqui regorge de conflits avecde fortes accusations d’ingérenceétrangère » et où « l’odeur de pétroleest assez forte pour susciter toutesles convoitises », comme le soulignele journal algérien El Watan.Depuis dimanche dernieret durant toute la semaine,un référendum est appeléà trancher sur l’« indépendance »du Sud-Soudan. Référendumdont tout le monde préditqu’il n’aboutira qu’à relancerune guerre dévastatrice, qui,depuis 2003, s’est déjà soldéepar plus de 300 000 mortset plusieurs millions de déplacés,parqués dans des camps, affamés,massacrés par les bandes arméesqui sévissent dans la région.Et tous les puits de pétrole,dont regorge le sous-solsoudanais, sont au sudet partiellement dans la régiond’Abyei, objet de contentieuxentre les deux parties du pays.Non, l’Afrique n’est pas victimed’une malédiction.Comme sont venus le dénoncerà Alger les nombreux déléguésafricains à la Conférence mondialecontre la guerre et l’exploitation,le sort atroce dont sont victimesles peuples de ce continentest le résultat exclusifd’une guerre souterrainequi opposeles « grandes puissances »impérialistes pour le contrôledes richesses abondantesenfouies dans le sous-sol africain. �

“Prendresans tarderles mesuresà la hauteurdesexigencesformuléesparles jeunes”

Communiquédu PT algérien

L’é

ne

me

nt

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 2011

PhotoAFP

Lu dans la presse algérienne

Trois jours après lesma-nifestations, notam-ment de jeunes, qui,toute la fin de la se-maine dernière, ontembrasé la plupart desgrandes villes algé-riennes, le gouverne-

ment Bouteflika vient de prendre des me-sures d’urgence, destinées, dit-il, à « jugulerla flambée des prix des denrées alimentairesde base » à l’origine de cette explosion decolère.La centrale syndicale algérienne UGTA aaussitôt condamné « les actes de spécula-tion qui ont conduit à une augmentationdes prix touchant les produits de largeconsommation » et s’est adressée au gou-vernement pour qu’il prenne « des mesuresurgentes et appropriées à l’effet de contreravec fermeté la spéculation sur les prix ».De son côté, le Parti des travailleurs d’Al-gérie appelait le gouvernement à prendresans tarder lesmesures à la hauteur des exi-gences formulées par les jeunes. En pre-mier lieu, des mesures visant à annuler leshausses de prix.Le journal algérien Le Temps (8 janvier) anoté, parmi les mesures préconisées par lePT : « Le recouvrement de la totalité du com-merce extérieur par l’Etat, la restructurationdes quelque 1 000 entreprises publiquesdéstructurées, le plafonnement des prix desproduits de large consommation, ainsi quela réouverture des espaces conçus pour lavente des produits nationaux, connus aupa-ravant sous le nom des Galeries algérienneset des Souks El Fellah. Et la réquisition de820 000 logements vides. »L’Expression (8 janvier) souligne l’accusa-tion portée contre le patron du groupe Cevi-tal, « détenteur du quasi-monopole sur lesucre et les corps gras, qui jette de l’huile surle feu en annonçant d’autres augmentationsavant les décisions du Conseil du gouver-nement », ainsi que la vigoureuse dénon-ciation de ce que le Parti des travailleursd’Algérie qualifie de « spéculation crimi-nelle sur les prix », « une véritable provoca-

tion politique et sociale », et qui « s’interrogesur ses desseins politiques ».Le site d’information Algérie Focus (8 jan-vier) a longuement interviewé la secrétairegénérale du PT, Louisa Hanoune. « La secré-taire générale du Parti des travailleurs a ap-pelé à ouvrir des canaux de communicationet de dialogue avec les jeunes pour être à leurécoute », note-t-il, ajoutant que, pour elle,ce qu’elle a qualifié de « soulèvement » desjeunes « ne concerne pas seulement leminis-tère du Commerce,mais l’ensemble du gou-vernement, qui est appelé à ouvrir la portedu dialogue autour de toutes les mesurespouvant être prises afin d’améliorer les condi-tions socioprofessionnelles ». Elle a, à ceteffet, appelé à la création d’offices des pro-duits vitaux subventionnés par l’Etat.« Louisa Hanoune a en outre appelé, rap-porte Algérie Focus, à accorder aux jeunessans emploi une allocation de chômage quine soit pas inférieure à la moitié du salairenational minimum garanti (SNMG), pro-posant d’accélérer l’élaboration d’une loi definances complémentaire 2011 prévoyantcette allocation, ainsi que d’autres mesuresqui concrétisent le monopole de l’Etat surles matières premières importées. » « Lesjeunes ne sont pas sortis dans la rue seule-ment à cause de la hausse des prix de l’huileet du sucre, mais en raison de l’accumula-tion de leurs problèmes, dont le chômage etla crise du logement », a dit la secrétairegénérale du PT, qualifiant les récenteshausses des prix de certains produits depremière consommation de « provocations »et de « hausses criminelles ».« Les séquelles du redressement structurel etde la tragédie nationale sont toujours pré-sentes », a-t-elle poursuivi, rappelant à lafois les plans destructeurs imposés par leFMI et les années noires de guerre et de ter-rorisme, qui, il n’y a pas si longtemps, ontmenacé l’existencemême de la nation algé-rienne. Louisa Hanoune a en outre souli-gné la nécessité de saisir les messagesadressés par les jeunes à travers leur sou-lèvement, estimant que cette frange « est lamoins bien lotie dans la société et la plusinquiète pour son avenir », et que « ces jeunesont trouvé dans ce soulèvement et ces actesde violence un véritable exutoire à leur colère

“Les jeunes ne sont pas sortis dans la rue seulementà cause de la hausse des prix de l’huile et du sucre,mais en raison de l’accumulation de leurs problèmes,dont le chômage et la crise du logement” (Louisa Hanoune)

Lu dans la presse en France

Qualifiant les manifestations de « fuiteen avant dans la destruction et l’émeute »,Le Figaro (10 janvier) en voit la causedans le « populisme clientéliste du régime.A défaut de créer des emplois pour résor-ber le chômage (10 % officiellement,25 % selon la Banque mondiale), quitouche particulièrement les moins de30 ans (75 % de la population), le gou-vernement a encouragé des pratiquesillicites. Des importateurs et autres gros-sistes proches du régime ont fait fortunedans la spéculation de produits bas degamme, souvent contrefaits. Agissant àla barbe du fisc, ils alimentent les circuitsde l’économie parallèle, qui emploientdes milliers de jeunes. En annonçant larévision des critères pour l’octroi du re-gistre de commerce, l’obligation de venteavec factures et le paiement par chèqueà partir de 500 000 dinars (environ5 000 euros), le gouvernement a secouél’équilibre des bénéficiaires de la rentedans le sérail et a déclenché la colèredes barons du marché informel. »

et une manière d’exprimer leur appréhen-sion de l’avenir », ajoutant que l’Etat doitenregistrer ces protestations comme unSOS, « car ces jeunes en détresse peuventêtre manipulés par n’importe qui ».Elle a également jugé « insuffisantes » et« inefficaces » les décisions prises par l’Etatenmatière d’emploi, estimant que la flam-bée des prix absorbe toute augmentationdes salaires. Elle a en outre appelé l’Etat àcombattre la spéculation et « les importa-teurs qui monopolisent toujours le marchélocal ».Par ailleurs, LouisaHanoune s’est dite éton-née de la manière avec laquelle certainsmédias arabes et occidentaux ont traitéces protestations, de leurs interprétations« tendancieuses et graves, et de leur ampli-fication » d’un soulèvement de jeunes quiont voulu exprimer leur colère, estimantqu’il y a « des parties étrangères qui se réjoui-raient de l’effondrement de l’Etat algérienpour qu’elles puissent piller ses richesses ».

Algérie :une spéculationcriminellecontre le peuple

En quarante-huit heures, les prix de certainsproduits de base ont augmenté de 30 à 70 % !

Page 11: IO_131

Tunisie

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 201111

PhotoAFP

Le secrétariat du bureau politique duParti des travailleurs s’est réuni cejour, toutes affaires cessantes, pour

débattre de la propagation des émeutes dejeunes en colère à la suite de la flambée pro-vocatrice des prix, qui a touché notammentle sucre et l’huile, et les pro-duits dont ils sont à la base.Scandalisé par les proposdu patron de Cevital, le dé-tenteur du quasi-mono-pole sur le sucre et les corpsgras, qui jette de l’huile surle feu en annonçant d’au-tres augmentations et enattendant les décisions duConseil du gouverne-ment, le secrétariat dubureau politique, qui dé-nonce vigoureusementla spéculation criminellesur les prix, une véritableprovocation politique etsociale, et s’interroge surses desseins politiques,s’adresse au gouverne-ment pour qu’il prenneles mesures urgentesappropriées, àmêmededésamorcer la situa-tion. Pour le PT, parce que la preuve est éta-blie que cette situation dangereuse, et, par-delà, la spéculation sur le marchémondial,est le produit direct de la fermeture des EPE(entreprises publiques économiques—NDLR)du secteur de l’agroalimentaire dans le cadreduPAS et duprogrammedeprivatisation, etdu désengagement de l’Etat du commerceintérieur et extérieur, les solutions àmêmede stopper la spéculation consistent en :1. Dans l’immédiat, le plafonnement desprix des produits concernés, à savoir l’huileet le sucre.2. La restauration, même de façon provi-soire, du monopole de l’Etat sur le com-merce externe et interne pour que lecontrôle des prix soit effectif…

3. La réouverture des grandes surfacespubliques réservées aux produits subven-tionnés par l’Etat et à la production natio-nale.4. La réouverture des EPE de l’agroalimen-taire fermées…Ce sont là des mesures réalistes et réali-

sables, qui traitent les pro-blèmes à la racine touten renforçant les cor-rectifs introduits dansl’orientation économi-que. Ces mesures sont,en outre, bénéfiques pourla création d’emplois etpour la protection de laproduction nationale.Dans le même temps, ils’agit de barrer la routedevant les serviteurs zélésdes multinationales quidéversent leurs produitsdans notre pays à la faveurde l’accord d’associationavec l’Union européenne etdes concessions consentiesà l’OMC, et dont les intérêtssont contrariés par les loisde finances complémen-

taires 2009 et 2010, et par la demande dugouvernement de révision du calendrier dudémantèlement tarifaire, et devant les aven-turiers de tous bords qui, chevauchant laréaction de colère légitime des citoyenneset citoyens épuisés par l’augmentation conti-nue des prix, tentent de l’orienter vers desdesseins obscurs. Parce que l’heure est graveet que rien ne saurait être supérieur aux in-térêts de la nation, le secrétariat du bureaupolitique considère que cette colère desjeunes soulève l’urgence d’une prise encharge durable du problème du chômage,par de vraies solutions créatrices d’emploispermanents àmême d’assécher le vivier dudésespoir, à savoir la précarité sociale.

Alger, le 6 janvier 2011 �

“Du pain, du travail, dehors Ben Ali !”La révolte commencée il y a plus de deux semaines contre lechômage et la vie chère devient chaque jour un peu plus unsoulèvement contre la dictature pro-impérialiste deBenAli.

“Le secrétariat national de l’UGTAs’est réuni ce jour, le vendredi7 janvier 2011, pour examiner

la situation qui prévaut actuellement danscertaines localités.L’UGTA condamne vigoureusement les actesde spéculation qui ont conduit à une aug-mentation des prix touchant les produitsde large consommation, notamment l’huileet le sucre. Cette spéculation honteuse portepréjudice au pouvoir d’achat des travailleurset de leurs familles.L’UGTA considère que cette spéculation estune atteinte à l’effort national pour l’amé-lioration du bien-être social de notre popu-lation. A ce titre, l’UGTA sollicite les pouvoirspublics afin de prendre des mesures ur-

gentes et appropriées à l’effet de contreravec fermeté la spéculation sur les prix desproduits de large consommation.L’UGTA, qui demeure convaincue des bien-faits de la sérénité sociale et de la noble sa-gesse qui caractérise notre population, etnotamment sa jeunesse, lance un appelpour un retour au calme.L’UGTA est persuadée que la prise en chargedes différentes préoccupations, particuliè-rement celles relatives aux aspirations denotre jeunesse, se concrétisent à travers laconfiance et le dialogue. »

Le secrétaire général,ABDELMADJID SIDI SAÏD

(7 janvier 2011)

En urgence, le gouvernement décrète une baisse de 41 %des charges sur l’huile et le sucreA l’issue d’une très longue réunion d’urgence, le gouvernement algérien a annoncésamedi soir (8 janvier) l’exonération à titre temporaire de 41 % des charges impo-sées aux importateurs et producteurs d’huile et de sucre pour contrer la flambéedes prix des produits de base à l’origine de violentes émeutes. Le communiquéprécise que ces « exonérations temporaires et exceptionnelles » concernent les« droits de douane, de TVA et d’IBS (impôt sur le bénéfice des sociétés — NDLR)sur le sucre roux et sur les huiles alimentaires ». Ces mesures, destinées à « faireface à la hausse subite des prix de certains produits alimentaires de base », sontapplicables rétroactivement depuis le 1er janvier et jusqu’au 31 août 2011. Le gou-vernement déclare « attendre des producteurs et des distributeurs qu’ils répercu-tent en urgence les effets sur les prix de vente aux consommateurs ».

La déclaration du secrétariat nationalde l’Union générale des travailleurs algériens

Le communiqué du secrétariatdu bureau politiquedu Parti des travailleurs d’Algérie

Alger, le 06 janvier 2011Communiqué urgentLe secrétariat du Bureau politique du Parti des travailleurs, s’est réuni ce jour, toutes affaires

cessantes, pour débattre de la propagation des émeutes de jeunes en colère suite à la flambée

provocatrice des prix qui a touché notamment le sucre et l’huile et les produits dont ils sont à la base.

Scandalisé par les propos du patron de Cevital, le détenteur du quasi-monopole sur le sucre et les

corps gras, qui jette de l’huile sur le feu en annonçant d’autres augmentations et en attendant les

décisions du Conseil du gouvernement, le secrétariat du Bureau politique, qui dénonce vigoureusement

la spéculation criminelle sur les prix, une véritable provocation politique et sociale et s’interroge sur ses

desseins politiques, s’adresse au gouvernement pour qu’il prenne les mesures urgentes appropriées, à

même de désamorcer la situation. Pour le PT, parce que la preuve est établie que cette situation

dangereuse et par delà la spéculation sur le marché mondial, est le produit direct de la fermeture des EPE

du secteur de l’agroalimentaire, dans le cadre du PAS et du programme de privatisation, et du

désengagement de l’Etat du commerce intérieur et extérieur, les solutions à même de stopper la

spéculation consistent en :

1- Dans l’immédiat, le plafonnement des prix des produits concernés à savoir l’huile et le

sucre.

2- La restauration même de façon provisoire du monopole de l’Etat sur le commerce externe

et interne pour que le contrôle des prix soit effectif…3- La réouverture des grandes surfaces publiques réservées aux produits subventionnés par

l’Etat et à la production nationale4- La réouverture des EPE de l’agroalimentaire fermées…Ce sont là, des mesures réalistes et réalisables qui traitent les problèmes à la racine, tout en

renforçant les correctifs introduits dans l’orientation économique. Ces mesures sont, en outre, bénéfiques

pour la création d’emplois et pour la protection de la production nationale.Dans le même temps, il s’agit de barrer la route devant les serviteurs zélés des multinationales qui

déversent leurs produits dans notre pays à la faveur de l’accord d’association avec l’UE, et des

concessions consenties à l’OMC, et dont les intérêts sont contrariés par les LFC 2009 et 2010 et par la

demande du gouvernement de révision du calendrier du démantèlement tarifaire, et devant les

aventuriers de tous bords qui chevauchant la réaction de colère légitime des citoyennes et citoyens

épuisés par l’augmentation continue des prix, tentent de l’orienter vers des desseins obscurs.Parce que l’heure est grave et que rien ne saurait être supérieur aux intérêts de la nation, le

secrétariat du Bureau politique, considère que cette colère des jeunes, soulève l’urgence d’une prise en

charge durable du problème du chômage, par de vraies solutions créatrices d’emplois permanents à

même d’assécher le vivier du désespoir à savoir la précarité sociale.

Le Secrétariat du Bureau politiquedu Parti des Travailleurs

Jusqu’à présent, si laTu-nisie occupait unebonne place dans lesmédias, c’était avant

tout pour les publicitésconsacrées au « tourismebonmarché ». C’était là unemanière de mettre en évi-dence ce que la presse « sé-rieuse » expliquait docte-ment pour sa part, à savoirque la Tunisie était la clefde voûte de la stabilité duMaghreb tout entier, que legouvernement appliquaitsans rechigner toutes lesinstructions du Fondsmo-nétaire international (FMI), entraînant ainsi l’éco-nomie sur la voie du progrès, et que la démocratiene cessait de s’y développer.Aujourd’hui, ce sont les « troubles sociaux », pourreprendre l’euphémisme auquel se résigne LeMonde (11 janvier), c’est-à-dire les manifesta-tions déterminées de lycéens, d’étudiants, dechômeurs et de travailleurs, et la sanglante répres-sion par laquelle le régime cherche à les briser,qui fait la « une » des journaux.« Du pain, du travail, dehors Ben Ali ! » : cesmotsd’ordre se mêlent et surgissent de ces cortègesdemilliers demanifestants défiant la violence del’armée et de la police de la dictature pro-impé-rialiste du gouvernement Ben Ali. « La Tunisie,où le gouvernement ne tolère aucune remise encause, est la proie, depuis qu’un jeune vendeurs’est immolé par le feu, d’une vague d’émeutes »,constate le quotidien britannique Financial Times.La vérité s’impose : le régime de Ben Ali, installéau pouvoir depuis 1987 (1), a procédé à la pri-vatisation forcenée des entreprises publiques,conformément aux instructions du FMI.L’adhésion à l’Organisation mondiale du com-merce (OMC) et l’établissement d’un accord d’as-sociation avec l’Union européenne (1995) ontencore accéléré ce démantèlement.Le résultat ? Par exemple, les deux tiers des entre-prises privatisées sont maintenant directement

entre les mains de l’impérialisme. Sur les sixcimenteries existant enTunisie, cinq appartien-nent à des groupes italiens, espagnols ou por-tugais.Le résultat ? Aujourd’hui, on évalue — en par-tant de statistiques officielles — le nombre depersonnes sans travail ou sous-employées à1 114 275, soit 42 % de la population active dupays.C’est dans ces conditions qu’une nouvelle vagued’augmentations des prix des produits de pre-mière nécessité a mis le feu aux poudres. Maisil ne s’agit pas que d’une explosion de colère quipourrait n’avoir pas de suite. On est au contraireen présence d’un profond mouvement des tra-vailleurs et du peuple tunisiens.Unmouvement où la colère, loin de se dissiper,se concentre contre ce gouvernement, et que laviolence de la répression (plus de cinquantemorts) exacerbe. Unmouvement qui a été assezpuissant pour faire que la centrale syndicale quia ses origines dans la lutte pour l’indépendance,l’UGTT, dont la direction coopérait avec le gou-vernement, a été amenée à soutenir le mouve-ment et à condamner la répression.

François FORGUE �

(1) Ben Ali est arrivé au pouvoir par un coup d’Etat, écar-tant le président vieillissant, mais légitimement élu.

� Les premièresmanifestations ont eu lieu à SidiBouzid, dans le centre du pays. C’est alors (le17 décembre) queMohamed Bouazizi s’immolepar le feu pour protester contre la saisie de sonétal de primeurs par la police.� Lesmanifestations se sont étendues dans toutle pays. Il ne s’agit pas de simple solidarité avecSidi Bouzid, mais d’unmouvement national quia commencé à Sidi Bazu.� Dans au moins six villes importantes, degrandes manifestations ont lieu. Les emblèmesdu pouvoir sont brûlés. Toutes les couches dupeuple y participent. Le jeudi 6 janvier, parexemple, les lycéens étaient à la tête d’unemani-festation à Jbeniana, près de Sfax.� Le 31 décembre, les avocats se sont mis engrève. Le barreau avait dénoncé « un usage sansprécédent de la force », affirmé sa volonté de« défendre la liberté d’expression » et « le droit deshabitants de Sidi Bouzid et d’autres régions dému-nies à l’emploi et à la dignité ».� « Usage sans précédent de la force. » Ce n’estpas seulement la police, mais aussi l’armée quiintervient avec des moyens de guerre. Il y a descentaines de blessés et on fait état de vingt-troismorts (chiffre très en dessous de la réalité).Les pires exactions ont été commises à Thala età Kasserine, où, dès le 6 janvier, des chars étaienten position. D’après des informations localesfiables, les cadavres sont même jetés dans lesoueds aux alentours de la ville. D’autres cadavressont enterrés directement sans passer par l’hô-pital : ainsi, aucun constat médical sur la causede la mort n’est établi et, par conséquent, ils neseront pas comptabilisés comme victimes de cemassacre. Craignant la reprise des contestationsde masses, les forces de l’ordre dispersent les

cortèges des funérailles en tirant sur la foule eten utilisant les gaz lacrymogènes.Le 11 janvier, un responsable syndical fait étatd’une cinquantaine de morts dans le centre dupays, évoquant une situation de « chaos » à Kas-serine.� Dès les premières manifestations, des mili-tants de l’UGTT étaient présents. Des instancessyndicales avaient apporté leur soutien. Maisces militants, ces sections syndicales agissaientsans l’accord de la direction de l’UGTT. Le samedi8 janvier amarqué un changement profond dansl’attitude de la direction de l’UGTT, qui a apportéson soutien aux manifestants.

Correspondant �

La prise de position de l’UGTTA Tunis, lors d’un rassemblement public, le8 janvier, la centrale syndicale unique, l’Uniongénérale des travailleurs tunisiens (UGTT), aproclamé son appui aux revendications « légi-times » du mouvement. « Nous soutenons lesrevendications de la population de Sidi Bou-zid et des régions intérieures », a lancé le secré-taire général adjoint de l’UGTT, Abid Brigui,devant quelques centaines de personnes stric-tement encadrées par des centaines de poli-ciers en civil et des unités anti-émeutes. « Il estcontre nature de condamner ce mouvement.Il n’est pas normal d’y répondre par des balles »,a-t-il ajouté sous les applaudissements, appe-lant plutôt au « dialogue avec les jeunes ». Lafoule a observé une minute de silence à « lamémoire des martyrs » du mouvement social,entre hymne national et chansons engagéesdiffusés par haut-parleurs.

Le déroulement des événements

Page 12: IO_131

CUBA

Contre-réformes à La HavaneLe mardi 4 janvier 2011, le gouvernement de Raoul Castro a com-mencé à mettre en application les mesures, annoncées depuis desmois, de suppressions d’emplois dans la fonction publique et lesentreprises d’Etat. Dans les prochains six mois, ce sont 500 000 emploisqui doivent disparaître et, dans un délai de trois ans, 1 300 000,soit 25 % des salariés du secteur public. Rappelons que l’Etat

emploie 95 % des salariés du pays. Le gouverne-ment a annoncé qu’un nombre limité d’offresd’emplois vont être délocalisées vers des sec-teurs comme l’agriculture et le bâtiment, le restedevant aller vers le privé. Le gouvernement pré-voit qu’une centaine de milliers de ces travailleurspourraient devenir des travailleurs indépendants.Dans chaque établissement, une commission

d’experts a été constituée sous l’égide dela Centrale des travailleurs de Cuba pourdéterminer le nombre de travailleurs « entrop » et « inadaptés » au poste qu’ils oc-cupent. Ces mesures ont commencé àêtre appliquées dans les ministères del’Industrie du sucre, de l’Agriculture, duBâtiment, de la Santé publique et dansle secteur du tourisme. Le 1er janvier,

le cardinal Jaime Ortega, chef de l’Eglise catholique à Cuba, a déclarédans son homélie « soutenir le processus de réforme économiqueproposé par Raoul Castro ». Tout le monde comprendra que desconquêtes fondamentales de la révolution cubaine sont en dan-ger, mais que les travailleurs et le peuple cubains n’acceptent paset n’ont pas dit leur dernier mot.

GUADELOUPE

Vœux de Sarkozysur fond d’inondations meurtrièresUn communiqué du LKP informe que « le 9 janvier, jour de carna-val, Nicolas Sarkozy présente ses vœux aux colonies depuis la Gua-deloupe. Le pays est sous haute surveillance militaire (…). La mortde cinq personnes durant les dernières pluies est révélatrice de lasituation qui prévaut en Guadeloupe. Malgré l’annonce faite par lamétéo, malgré la montée visible des eaux, aucune mesure spéci-fique de prévention et d’alerte (fermeture anticipée des écoles, dévia-tion, fermeture de routes, etc.) n’a été mise en œuvre par la préfecture,laissant ainsi des milliers de personnes se “débrouiller” elles-mêmesface aux pluies diluviennes ; et en définitive, les rendant respon-sables de leur sort et de leur propre mort (comme l’a affirmé ce mer-credi 5 janvier le préfet). Aussi, après les deux jours de mobilisationdes 14 et 15 décembre et l’allocution de Nicolas Sarkozy, le LKPprend bien acte du refus de l’Etat français de respecter ses enga-gements relatifs à l’application pleine et entière des accords du26 février 2009 (Bino) et du 4 mars 2009 (…). En conséquence, leLKP, les organisations qui la composent, les travailleurs et le peuplede Guadeloupe s’organisent et se placent résolument dans la pers-pective d’un nouveau mouvement, beaucoup plus ample qu’en jan-vier 2009 et d’une portée décisive, mouvement renforcé parl’expérience acquise de nos deux années de lutte. »

Ce 1er janvier 2011, c’est un véritabledéchaînement contre la Hongrie quimarque les débuts de la présidence

hongroise de l’Union européenne. Le régimeduPremierministre ,ViktorOrban, est accusépar la Commission européenne de violer laliberté de la presse (1), de remettre en causela démocratie… Accusations reprises enchœur par la direction du Parti socialiste enFrance, pour qui les mesures d’Orban sont« incompatibles avec les principes défenduspar les institutions européennes » (commu-niquédu3 janvier), et la Confédération euro-péenne des syndicats (CES), qui dénonceune « infraction à la Charte des droits fon-damentaux » (communiqué du 6 janvier).Incroyable mais vrai : ceux qui ont piétinéla démocratie et le vote nonmajoritaire despeuples français et néerlandais de 2005, leschantres des institutions antidémocratiquesdeBruxelles…, s’érigent aujourd’hui enpères-la-vertu et en donneurs de leçons de démo-cratie.Que le gouvernementOrbann’ait rien à voiravec la liberté de la presse, la démocratie etles intérêts du peuple travailleur deHongrieen général, cela ne fait aucundoute. Commel’indique une correspondante de Hongrie :« Parler de “remise en cause de la liberté dela presse” enHongrie, c’est faire croire qu’il yaurait une liberté de la presse qui, dans lesfaits, est une chimère.Le gouvernement conser-vateur agit en apparence de façon contra-dictoire. Il a plus oumoins gardé sapopularité,par exemple, quand il a refusé les nouvellesexigences du FMI.Enmême temps, il accepteentièrement la “stabilisation”du budget exi-gée par l’Union européenne, continue à aug-menter le contingent militaire hongrois enAfghanistan, fait voter une loi qui permet“l’intervention des forces étrangères en casde conflit intérieur”. Sur le plan social, lesbudgets de la santé, de l’éducation sont la-minés.D’un côté,on remet en cause les congésmaternités dans le calcul des annuités pourle droit à la retraite… et, en même temps, legouvernement applique un impôt extraor-dinaire aux banques et aux “secteurs ren-tables”… »Quant au discours démagogique d’Orban,et de ceux qui le soutiennent, sur la «GrandeHongrie » ou contre lesminorités nationaleset les tziganes (2), ils ne peuvent que servirl’Union européenne et le FMI en cherchantà opposer les travailleurs entre eux. Alors,quelles sont les raisons de cedéchaînement ?

Rien à voir avec la démocratie ni avec la« liberté de la presse ». D’ailleurs, Orban aeu beau jeu de répondre à cette campagnequ’il était prêt à se plier aux exigences del’Union européenne et demodifier la loi surles médias « à condition que les autres payseuropéens comme la France ou l’Allemagneen fassent demême ».

DES RAISONS À CHERCHER AILLEURSL’effondrement social du pays—un tiers dela population vit en dessous du seuil de pau-vreté —, résultat de vingt ans de privatisa-tion-pillage de la propriété d’Etat, crée unesituation explosive. Après sept ans de gou-vernement duParti « socialiste » (issude l’an-cien parti unique du régime stalinien), quia privatisé à tour de bras, fait entrer le paysdans l’Union européenne etmis la Hongrie« sous-tutelle » duFMI, la situation est explo-sive. Pour se maintenir au pouvoir, Orbandoit à la fois frapper les masses populairespar des mesures de rigueur, comme danstoute l’Europe, et tenter deprendre «unpeu »aux multinationales qui, depuis vingt ans,profitent d’undes « coûts du travail » les plusbas de l’Union européenne.Ainsi, treize grands groupes industriels (alle-mands, autrichiens, néerlandais, françaiset tchèque) ont appelé, début janvier, laCommission européenne à prendre dessanctions contre la Hongrie, accusée demesures « anticompétitives ». La Commis-sion européenne a immédiatement suivil’exigence des trusts (parmi lesquels legroupe Axa), contestant les taxes excep-tionnelles que le gouvernement veut leurimposer.Tout cela au nomde la sacro-sainte« concurrence libre et non faussée ». Il s’agitainsi, pour la Commission européenne etses serviteurs, de lancer unmessage clair àtous les gouvernements d’Europe : aucunécart ne sera toléré dans la mise en œuvredes plans de rigueur antipopulaires. Pourles masses travailleuses en Europe, uneseule conclusion à en tirer : rupture avecl’Union européenne des spéculateurs et desmultinationales ! �

(1) Le gouvernement hongrois a instauré une «HauteAutorité » chargée de contrôler la presse et lesmédias.(2) Discours chauvins qui font écho aux mesurescontre les droits démocratiques desminorités hon-groises des pays voisins, comme celle interdisantl’usage de la langue hongroise dans l’administra-tion prise par le gouvernement de Slovaquie.

Présidencehongroisede l’Unioneuropéenne :ça commencebien !

PhotoAFP

PhotoAFP

HAÏTI

Un an après...Le 12 janvier 2010, un tremblementde terremeurtrier ravageaitHaïti,pro-voquant lamortdeplusde200000ha-bitants et une invasion de l’arméeaméricaine.Un an plus tard, selon lesinstitutions de l’ONU, les dixmilliardsde dollars promis par des donateursinternationaux sont loin d’avoir étéversés, tandis que l’épidémie de cho-léra fait rage (plus de 3 000 morts).Haïti est toujours occupée par lestroupes étrangères de la Minustah.

ÉTATS-UNIS

La fusillade de l’Arizonaravive la crise politiqueLa crise politique aux Etats-Unis a fait unpas de plus après la fusillade qui a griè-vement blessé la parlementaire démo-crate Gabrielle Giffords et fait six mortsdans l’Arizona. Un sénateur démocratea indiqué que les déclarations récentesde Sarah Palin ont pu inspirer l’acte dutireur « déséquilibré ». Sarah Palin (an-cienne candidate à la présidence et diri-geante du mouvement d’extrême droitedes Tea Party) avait récemment déclaré :« Considérez les circonscriptions électo-rales comme des cibles dans un colli-mateur. » Les Tea Party avaient menécampagne contre Gabrielle Giffords. Celle-ci, considérée comme un membre mo-déré du Parti démocrate, avait soutenula réforme de la santé d’Obama et refuséune loi ultra-réactionnaire anti-immigrésen Arizona.

> L’actualité internationale <INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 201112

RUSSIE

LibérezValentin Ourousov !Le Comité internationalcontre la répression (Cicr)a réussi à entrer en contactavec le syndicaliste russeValentin Ourousovdans sa prison en Yakoutie,emprisonné après un coupmonté l’accusantde « possession de drogue ».Le Cicr appellele mouvement ouvrierà redoubler de vigilanceet à poursuivre la campagnepour sa libération.

CHIFFRE

100 000C’est le nombre

de fonctionnaires britanniquesqui ont reçu leur avis

de licenciement en vertudu plan de rigueur

du gouvernement britannique.Les secrétaires généraux deUNITE et du RMT (cheminots)

ont refusé de se rendreà la réunion secrète

de la direction des TUC(confédération syndicale)

et du gouvernement.

U N E S E M A I N E D A N S L E M O N D E

COMMUNIQUÉ DE PRESSE DE L’UGTG

Après Charly Lendo et José Naëjus,un autre syndicaliste de l’UGTG, Denis Dorvilius,est traîné devant la justice colonialeA l’issue d’un faux procès le 22 octobre dernier, Charly Lendo (secré-taire adjoint de l’UGTG) et José Naëjus (dirigeant de l’UGTG) étaienttotalement relaxés pour toutes les accusations d’agressions et demenaces dont ils avaient fait l’objet. Et pourtant, dans cette mêmeaffaire, ils sont tous deux condamnés à 1 000 euros d’amende pouravoir refusé de se soumettre à un prélèvement ADN. Et pourtant,ils sont innocents.La justice coloniale et de classe sévissant en Guadeloupe poursuitsa sauvage campagne de répression contre les syndicalistes et mili-tants, singulièrement ceux de l’UGTG.Ainsi, ce vendredi 7 janvier 2011, le dirigeant de l’UGTG Denis Dor-vilius est cité à comparaître à 8 heures devant le tribunal correc-tionnel de Basse-Terre pour avoir refusé de se soumettre à un pré-lèvement ADN...Ce procès s’inscrit dans une longue chaîne de tentatives d’intimi-dation dont les militants de l’UGTG, leurs représentants et égale-ment leurs avocats font l’objet.L’UGTG dénonce la chasse entreprise contre les militants qui osentrevendiquer et combattre les injustices par un pouvoir colonial auservice de la pwofitasyon, mais d’autant plus féroce qu’il est auxabois.L’UGTG dénonce cette loi liberticide visant à assimiler militants syn-dicalistes et délinquants sexuels dans l’objectif de faire taire le mou-vement syndical.L’UGTG appelle les militants et les travailleurs à se mobiliser poursignifier au pouvoir colonial français leur refus de donner leur em-preinte génétique.Sendikalis pa kriminèl ! (Syndicalistes, pas criminels !)L’UGTG invite les travailleurs à soutenir Denis Dorvilius, afin de signi-fier notre refus de tout prélèvement ADN et exiger l’arrêt de toutesles poursuites engagées contre les syndicalistes.

JORDANIE

Le roi s’inquiète de possibles manifestationsLe roi Abdallah II de Jordanie a ordonné à l’armée, qui détient plusde 80 coopératives alimentaires, « de ne pas augmenter les prix (...), en particulierdu riz et du sucre », alors que l’inflation a atteint le mois dernier le chiffre recordde 6,1 %. Le syndicat des journaliers agricoles avait appelé à un mouvementde protestation dans tout le royaume après la prière du vendredi.

Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, le 6 janvier 2011, à Budapest.

Raoul Castro.

S’agit-il de la “liberté de la presse” ?

Page 13: IO_131

Par Gérard Morin

Le 19 octobre dernier, la prési-dence de l’Assemblée nationalea enregistré une proposition deloi contresignée par 81 députésde la majorité « visant à exoné-

rer les écoles privées sous contrat d’associa-tion de la taxe foncière sur les propriétésbâties ».

Dans l’exposé des motifs pour justifierce nouveau détournement d’argent public,onpeut lire : « Il est incontestable que les écolesprivées sous contrat d’association rendent desservices extrêmement appréciables aux com-munes sur lesquelles elles sont implantées.C’est ainsi qu’elles assurent l’enseignementdans un certain nombre de communes dé-pourvues d’établissements publics. A ce titre,elles permettent aux collectivités territorialesd’être dispensées des charges lourdes qui de-vraient leur incomber. »

Il faut oser ! Rappelons la réalité : 10mil-liards de fonds publics sont détournéschaque année au profit de l’école catho-lique. Autant d’argent enmoins pour l’écolede la République.

Les gouvernements successifs de laVe Républiqueont fermédesmilliers d’écoles.C’est ainsi qu’entre 1981 et 2000, 11 948 écolescommunales ont été fermées et 5 833 com-munes ont perdu leur école publique.

Depuis dix ans, la situation n’a fait ques’aggraver avec toutes les fermetures depostes. Depuis 2007, 62 000 postes ont étérayés de la carte et 14 367 sont prévus d’êtresupprimés dans le projet de budget pour2011.

Dernièrement (voir Informations ou-vrières, n° 128), le sénateur Carle a proposéun amendement à la loi de finances 2011qui transfère 4millions d’euros de crédits àl’enseignement privé, lui permettant de re-trouver 250 postes supplémentaires. Pourles adversaires de l’école laïque, ce n’est pasassez. Il en faut toujours plus.

Alors, une question se pose : pourquoices attaques incessantes des tenants de l’en-seignement privé, qui pillent l’école publiquedepuis cinquante ans ?

Un constat,malheureusement, s’impose :les organisations dites laïques ont renoncé

à exiger l’abrogation des lois antilaïques età revenir au principe républicain « Fondspublics à l’école publique, fonds privés àl’école privée » (1).

Depuis la loi Debré du 31 décembre 1959jusqu’à la loi Carle, les lois antilaïques sesont succédé et complétées au fil des annéesdans un consensus « droite-gauche » inin-terrompu (loi Guermeur, accords Lang-Clou-pet, loi Jospin, décret Kouchner-Vatican,etc.).

Pourquoi, dans ces conditions, les 81 dé-putés se gêneraient-ils pour réclamer encoreplus, toujours plus, d’argent public ? �

(1) Dans la pétition initiée en décembre 2009 par lesorganisations composant le Comité national d’actionlaïque (CNAL), intitulée « Priorité à l’école laïque », l’exi-gence de l’abrogation des lois antilaïques ne figure pas.Dans une conférence de presse du 1er février 2010, leSyndicat national des personnels de direction de l’Edu-cation nationale (SPDEN), affilié à l’UNSA, a déclaré :« Ancrer la laïcité dans notre temps, c’est prendre encompte la loi Debré,mais c’est aussi faire respecter stric-tement son application : si la question du financementdoit être posée en termes de contribution effective au ser-vice public d’éducation, cela implique le respect d’ob-jectifs stratégiques, qui justifie l’investissement publicde l’Etat ou des collectivités territoriales » (cité dans sarevueDirection, n° 176, page 11, mars 2010).

> Chroniques <INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 2011

Chronique d’en haut

“Ordre juste”et désordre au PS

Par Jean Cambredaze

François Mitterrand, lorsqu’ilétait dans l’opposition, dénonçadans un essai paru en 1964 lesinstitutions de laVe République,régime du « coup d’Etat per-

manent ». Mais une fois élu, il s’en délectaau point d’y ajouter sa touche personnelle,celle des coups tordus permanents...

Le Parti socialiste, parti « institutionnel »,est depuis devenu une foire d’empoigne per-manente. De Valls à Royal en passant parMontebourg ou Aubry, chaque postulantbonaparte fourbit son petit coup d’Etat pourdoubler l’écurie voisine.

Les « primaires », où le choix du candi-dat à la candidature est confisqué aux adhé-rents pour être livré à un hypothétique « peu-ple de gauche », emballent le manège. L’or-ganisation de ce plébiscite s’ajoutant aucaractère plébiscitaire de l’élection prési-dentielle ne pouvait que disloquer davan-tage un attelage qui n’a plus de parti que lenom. C’est une gifle de plus à la démocra-tie politique...

Il ne faudrait cependant pas oublierqu’au bal des ego, toutes et tous dansent surlamêmemusique, celle queNicolas Sarkozymoulinait dans ses vœux duNouvel An pourle compte de toute la classe politique : l’Eu-rope, l’Europe et encore l’Europe !

La défense désespérée de l’euro, le paie-ment de la dette creusée par les « marchésfinanciers » et imputée aux peuples à coupsde « réformes », la réduction des déficits auprix d’un chômage et d’une paupérisationgalopants sont la feuille de route des « socia-listes » Papandréou, Socrates et autres Zapa-tero comme des « conservateurs » Cameron,Merkel et autres Sarkozy.

Tout au plus, en France, pour sauver lesapparences, la « gauche » cherche-t-elle àse démarquer de la « droite » en prônant une« juste » répartition des sacrifices...

Les mots ont un sens. Le mot « juste »,que l’on retrouve à tout bout de chapitre duprojet du Parti socialiste (1), est lourd desens.

On se souvient que la candidate du PSavait fait campagne en 2007 sur le thème del’« ordre juste ». Elle reprenait mot pourmotle thème central de l’encyclique du papeBenoît XVI Deus est caritas (« Dieu estamour »), publiée quelques mois plus tôt,en janvier 2006 : « L’ordre juste de la sociétéet de l’Etat est le devoir essentiel du politique. »

Mais où et comment placer le curseur ?Qui dessinera cet « ordre juste » ?

Réponse : un empilement de nouvellesstructures de « dialogue social » s’ajoutantaux organismes corporatistes déjà mis enplace par les gouvernements successifs.

Par exemple, le PS propose la créationd’un « Comité prospectif permanent » asso-ciant les partenaires sociaux à l’élaborationd’une « stratégie industrielle pour la France » ;la tenue d’une « Conférence salariale an-nuelle » pour définir une politique des reve-nus ; la réactualisation des lois Auroux,puisque « l’entreprise est un “bien social”dont toutes les parties prenantes ont chacuneleurmot à dire sur les grandes orientations »,etc.

On l’aura compris, « l’ordre juste » n’estrien d’autre que « l’ordre corporatiste »...

Ce que de Gaulle avait rêvé, le PS et seshabituels ralliés de second tour électoral seproposent de le réaliser...

(1) On y lit, par exemple, que « le juste échange » doitréguler « l’économie demarché » pour « unmonde plusjuste et plus durable »... Que nous devons passer du« libre-échange au juste échange »... Qu’un « impôt juste »et « individualisé » sera prélevé à la source par la fusionde la CSG et de l’impôt sur le revenu... Que « la fiscalitélocale doit être plus juste », etc.

Chronique politique

Encore un mauvais coup en préparationcontre l’école publique !

Par Fabrice Toscan

Les spéculateurs ont pris posses-sion d’un nouveau domaine,l’électricité du métro parisien.Depuis le 1er janvier, des contratspassés avec « deux entreprises qui

ne sont pas EDF » régissent l’alimentation encourant de la RATP, la régie autonome destransports parisiens. La firme autrichienneVerbund répondra aux besoins de base, 23%de la consommation. Les périodes de pointe,77 %, seront couvertes par la société alle-mande Eon. Le tout s’élève à 1,3 million demégawattheures, c’est-à-dire 90 % des be-soins de la RATP.

Pari risqué. Eon fait partie d’un grouped’entreprises qui, le 15 décembre dernier, ontporté plainte à la Commission européennecontre le gouvernement hongrois, accusé demesures anticompétitives.

Car la compétition généralisée s’impose.Si l’électricité dumétro parisien vient d’Au-tricheoud’Allemagne, elle empruntera, à titrepayant, les centaines de kilomètres de câblesappartenantàuneentreprisenomméeRéseaude transport d’électricité (RTE), qui, provi-dentiellement,n’estplusEDF.C’est là lamoin-dredes incohérencesdu systèmede « concur-

rence libre et non faussée » qui commence àenvahir tous les recoins de la vie sociale.

Les entreprises publiques comme EDF,construites par des décennies d’investisse-ments considérables pour répondre aux be-soins de la population, sont désormais enface de prédateurs qui prétendent utiliserleurs équipements pour faire commerce dece fluide essentiel qu’est l’électricité, commeils le font pour le pétrole, le blé, l’argent.

D’ailleurs, la loi sur la « nouvelle organi-sation dumarché de l’électricité » va obligerEDF à vendre jusqu’à un quart de sa produc-tion nucléaire à ses concurrents, officielle-ment pour stimuler la concurrence, en réalitépour livrer aux spéculateurs des biens et desmarchés qui leur avaient échappé du fait desnationalisations.

Les gouvernements de l’Europeont trouvélemoyen, grâce à des traités signés entre eux,d’échapper au contrôle des Parlements, qui,théoriquement, représentent les peuples. Enimposant ensemble les règles dictatorialesde la concurrence tous azimuts, ils se sontdonné la possibilité de reléguer, de « réfor-mer » les acquis sociaux résultant de l’his-toire de chacundes pays duVieuxContinent.Et, pour le gouvernement français, de violersa propre loi fondamentale en ignorant l’ar-

ticle 9 du préambule de la Constitution de1946, toujours envigueurmalgré l’oubli volon-taire dont il est frappé : «Tout bien, toute entre-prise dont l’exploitation a ou acquiert les ca-ractères d’un service public national ou d’unmonopole de fait doit devenir la propriété dela collectivité. » Nombre d’entreprises pu-bliques ont été privatisées par les gouverne-ments successifs, animés depuis 1983 par unvéritable… courant alternatif, qui a tétanisétoutes les résistances que recelaient, dans lespartis les plus importants du pays, les tradi-tions républicaines et socialistes.

Quand tout le système de gouvernementd’un pays atteint ce point d’« étrange renon-cement » et de déliquescence, aucun rafis-tolage n’est plus possible et c’est la questiondes institutions, de la Constitution, qui estposée. Aujourd’hui, les résistances existentdans le peuple. Elles se sont exprimées parle non au référendum de 2005, par la luttecontre le contrat première embauchede 2006et celle de 2010 contre la réformedes retraites.Elles sont à l’œuvre dans toutes les couchesde la société, mais en dehors des partis quise partagent le pouvoir et qui ont bloqué en-tièrement tout le système politique. Ce quileur manque encore, c’est une expressionpolitique à la dimension des enjeux. �

Chronique politique

Le métro de Paris roule désormais à l’électricité privée

13

Trait libre par Juju

Page 14: IO_131

Mercredi 22 décembre, le comité localde Noisy-le-Grand apprenait ledécès brutal, suite à une crise car-

diaque, de notre camarade et amiHenri Ley-val.Au nom de Daniel Gluckstein, membre dela direction nationale et du secrétariat dépar-temental du Courant communiste interna-tionaliste de Seine-Saint-Denis du POI, desmilitants des unités de base CCI de Noisy-le-Grand, de Christel Keiser, secrétaire ducomité départemental du Parti ouvrier indé-pendant de Seine-Saint-Denis et du comitélocal de Noisy-le-Grand du POI, je tiens àrendre hommage à Henri, militant com-muniste, convaincu que l’émancipation destravailleurs serait l’œuvre des travailleurseux-mêmes.

Henri a, dans un premier temps, milité à laGauche prolétarienne. Très vite, il a prisconscience de l’impasse politique de cemouvement.Alors, il a rejoint les rangs de la IVe Interna-tionale au début des années 1970 à Gre-noble, quand il était étudiant à l’écoled’ingénieurs en informatique.Toute sa vie, il est resté fidèle à ses engage-ments.Quand certains ont calomnié la IVe Inter-nationale, Henri l’a défendue contre ventset marées.Henri a été toute sa vie un militant inter-nationaliste.Le 17 décembre, il participait au meetingrendant compte de la conférence d’Algerorganisée par l’Entente internationale destravailleurs et des peuples.Tout naturellement, Henri participait acti-vement au bureau du comité du POI, car, àses yeux, cette tâche était essentielle à laconstruction du Parti ouvrier indépendant.Il était chaque samedi au Champy, son quar-tier, au piquet de diffusion du POI, où il ven-dait notre journal, Informations ouvrières.Geneviève,Willy, Sophie, Lucie, au nom detous nos camarades, nous vous adressonsnos condoléances et toute notre solidarité.Nous allons continuer la lutte d’Henri pourle socialisme, contre la barbarie.

Richard VIGNAL �

> Tribunes libres <INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 201114

Dans le courrier

Que de bienveillance...

Sharan Burrow, secrétaire générale de laConfédération syndicale internationale (CSI),dont sont adhérentes les principales confé-dérations ouvrières françaises (CGT, FO, CFDT),a donné une interview à Libération (24 dé-cembre).Cette « confédération syndicale mondiale »a-t-elle quelque chose à voir avec une orga-nisation syndicale, c’est-à-dire défendantexclusivement les intérêts des salariés ? Qu’onen juge avec les propos suivants de sa diri-geante.« Les gouvernements sont tétanisés par lesmarchés. Ils font trop peu, trop tard... » Troppeu ? Comme les 500 000 postes supprimésen Grande-Bretagne pour diminuer le dé-ficit creusé par le renflouement des banques ?« Dominique Strauss-Kahn, son patron (duFMI), peut dire des choses pleines de bonsens sur le partenariat social quand il dis-court à l’Organisation internationale du tra-vail, mais le FMI copilote des plans de rigueuren Roumanie, en Grèce ou en Irlande, où iltaille à la serpe les acquis sociaux (...). DSKa beau avoir une vue claire et promouvoirun nouveau modèle, axé sur une nouvellegouvernance, il accepte les potions infligéesaux pays en pleine restructuration... »Que de bienveillance pour DSK, obligé d’ac-cepter les mesures d’austérité !

P. B., Orsay (91)

Que penser d’un arrêtémunicipalcensé affronter la neigedans la bonne villede Longjumeau,dont lemaire est aussiministre de l’Environnement ?

Il est écrit dans le bulletin municipal : « Ilappartient aux riverains, propriétaires oulocataires, de faire le nécessaire pour sécu-riser les trottoirs longeant leur propriété (sic !les locataires promus propriétaires par arrêtémunicipal…) de même que les voies pri-vées… »En pratique, comment déneiger son propretoit, dans un moment pareil, sans mettre savie en danger (article 4) et comment cet« oukase neige » peut-il contraindre lescontrevenants (ceux qui ne veulent pas mon-ter sur leur toit ou faire un passage d’unmètre cinquante de large…) mettant la vied’autrui en danger ? Que penser des fonc-tionnaires de la police nationale qui ne dénei-gent jamais le trottoir donnant accès au com-missariat ? Peut-être qu’ils ne sont pas encorepropriétaires des lieux ? Faudra-t-il verba-liser les verbalisateurs ?Et puis, que fait le service public municipaldans ce cas-là, quels sont ses moyens, quelest son plan d’action d’urgence, par quoicommence-t-il, écoles, hôpital, maisons deretraite ?Comment réagit-il en périodes de week-ends, de congés ? Nous n’en saurons rien.S’agirait-il de privatiser le déneigement dela ville ? Faut-il, en plus des impôts locaux,s’acheter une pelle à neige, du sable, et secouvrir de cendres ?Depuis peu, cette année seulement, unelame existe se fixant devant un camion pourles 44 kilomètres de voiries municipales.Mais une question se pose sur les voiriesprivées. Que penser d’une impasse privée,mais dont la moitié se compose d’écoles etd’une maison de quartier avec une pented’accès dangereuse en cas de neige ? Lebailleur HLM n’a jamais, en quarante ans,déneigé sa voirie, pourquoi la ville ne l’a-t-elle pas fait, au moins sur cette pente ? Unmaire est-il oui ou non responsable de lasécurité, y compris sur les voies privées ?

A. V., Longjumeau (91)

Nous écrire : INFORMATIONS OUVRIÈRES 87, rue du Faubourg-Saint-Denis, CS 30016 75479 Paris cedex E-mail : [email protected]

Comité de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) du POI

Jean-PierreDruart

DISPARITIONS

Extrait de l’intervention de son ami et cama-rade Rémy Le Roux lors de la cérémonied’incinération de notre camarade Jean-Pierre Druart.

La maladie a fini par emporter notrecamarade le mardi 7 décembre.Né au Havre, en 1939, il arrivera à

Saint-Nazaire en 1962, après son servicemilitaire en Algérie.Il trouvera un emploi à la SNPA (Sociéténationale des pétroles d’Aquitaine—NDLR)avant de rentrer aux Chantiers de l’Atlan-tique.Il adhère à la CGT et, pendant plusieursdécennies, il remplira de nombreux man-dats de délégué au compte de son syndicat.Homme d’une droiture exemplaire, il étaitun personnage incontournable dans lesnégociations et n’a jamais failli aux tâches

qui lui étaient confiées. A ce titre, il était res-pecté de tous.Outre ses activités syndicales etmutualistesau sein de la CGT, Jean-Pierre était aussi unmilitant politique.Membre du Parti communiste français pen-dant vingt ans, il supporte difficilement l’at-titude de son parti au début des années 1980et, en 1985, il s’en détache pour devenir l’undes membres fondateurs du MPPT (Mou-vement pour un parti des travailleurs —NDLR).Dans cette continuité, il opte en 1991 pourla création du Parti des travailleurs et rejoin-dra les rangs de la IVe Internationale.Durant toutes ces années, il ne ménagerapas ses efforts pour construire un parti re-nouant avec ce que fut la Ire Internationale,dans le respect de la diversité des courantsdu mouvement ouvrier.Présent sur le terrain, il se présentera commecolistier ou tête de liste à l’occasion d’élec-tions municipales ou cantonales.Il sera naturellementmembre fondateur etadhérent du Parti ouvrier indépendant.Très attentif à la vie du parti malgré ses pro-blèmes de santé, il se tenait informé desdéveloppements de notre activité, en par-ticulier de la tenue de la conférence d’Al-ger.De nombreux militants de la IVe Interna-tionale, du POI, de la CGT, du PCF, ont tenuà lui rendre un dernier hommage.Nous n’oublierons pas notre camarade.

Nous tenons ici à rendre hom-mage à Jean-Marie Bellot, in-firmier psychiatrique de for-

mation. Pendant de longues années,il a occupé des responsabilités syn-dicales au sein de la Fédération despersonnels des services publics et desanté Force ouvrière, à la tête de la-quelle il aura été secrétaire généralde 2002 à 2008.Durant toute sa vie, il aura été unmili-tant ouvrier profondément attaché àla défense des intérêts de la classe ou-vrière. Homme de conviction, répu-blicain convaincu, pratiquant l’indé-pendance syndicale et le syndicalismede contrepoids, il a été un défenseurinlassable de l’hôpital public, du sta-tut, des droits des salariés hospita-liers.Dans le milieu hospitalier et à tousles niveaux, il n’aura laissé personneindifférent. Tout autant dans sa fédé-ration qu’au sein de sa confédération.Après avoir lutté pendant un an contrele cancer, il nous a quittés à l’âge de59 ans.Jean-Marie Bellot, homme indépen-dant, n’était adhérent d’aucun parti.Mais, souvent, nous nous retrouvionssur les mêmes positions.Aumoment où le gouvernement pré-pare de nouvelles offensives contrela fonction publique et son statut, aumoment où l’hôpital public et sesagents vont être confrontés à une cured’austérité, notre ami et camaraden’aurait pas ménagé ses forces pourcombattre ces nouvelles contre-ré-formes.Les militants du Parti ouvrier indé-pendant saluent le combat et la placequ’il a occupée dans le mouvementsyndical, et ils tiennent particulière-ment à rendre hommage à cemilitantouvrier courageux, qui était attachéà sa classe.A sa famille, son épouse, ses enfantset petits-enfants, nous transmettonsnos sincères condoléances.Aux militants et camarades qui ontcombattu avec lui, nous les assuronsde notre salut fraternel.Salut Jean-Marie, le combat continue.

L. D. �

COMITÉ INTERNATIONAL CONTRE LA RÉPRESSION

Le Cicr vous invite à participer au compte rendu de la Conférencemondiale ouvertequi a eu lieu à Alger du 27 au 29 novembre 2010.

Lundi 24 janvier, de 18 h 30 à 20 h 30Bourse du travail, 3, rue du Château-d’Eau (métro République), salle AndréTollet.

Comité de Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) du POI

Henri Leyval Jean-MarieBellot,militantouvrier,nous a quittés

Page 15: IO_131

> La page quinze <INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 2011

LES LIVRES

Qui veut la peaudes services publics ?De Jacques CottaEditions Jean-Claude Gawsewitch,18,90 euros.

Jacques Cottaest journalisteet réalise fré-

quemment des do-cumentaires de télé-vision sur France 2. Ilvient de publier unouvrage éclairant surla démolition déjàtrès largement enga-gée des services pu-blics denotre pays. Sile propos est claire-

ment polémique, dénonçant « les piresdérives politico-mafieuses qui ont jalonnélaVe République », il est étayé par une suc-cession d’enquêtes précises. Hôpitaux,écoles, poste, gares, tribunaux et servicessociaux, l’auteur nous livre un état des lieuxaccablant des méfaits déjà accomplis parles gouvernements successifs, de droitecomme de « gauche ».Il proposedes élémentsde réponseà laques-tion qu’il pose lui-même : « Quelles en sontles conséquences pour notre vie quotidienneet pour les 36 000 communes françaises ? »Des raisons de la « pagaille » ayant suivi leschutes de neige de décembre aux derniersscandales de la SNCF, le pourquoi, le com-ment et cet appel à la résistance pour « ladéfense des droits fondamentaux auxquelsnul ne devrait pouvoir porter atteinte, durespect des conditions de vie de millions etmillions de nos concitoyens ».

F. P. �

Gérard Bauvert

Le livre de Joël So-hier, maître deconférence ensciences de ges-tion à l’universitéde Reims-Cham-pagne-Ardennes,se propose d’ex-

pliquer ce qu’est « le syndicalismeen France ». Enmoins de deux centspages, il réussit à décrypter l’es-sentiel. Pour quelles raisons ? Trèspédagogique dans sa structure, pré-cis quant aux faits, il pourra aussi,au-delà du public étudiant auquelil est d’abord destiné, servir de guideà tous les militants ouvriers quiconsidèrent que le syn-dicalisme est une formeessentielle de l’organi-sation des travailleurs.L’auteur n’hésite pas àpartir des bases écono-miques et sociales quifondent le syndicalisme,c’est-à-dire des faits ob-jectifs et de leur dérou-lement historique. « Lesyndicalisme est l’ex-pression concrète del’antagonisme des inté-rêts existant dans les so-ciétésmodernes entre lesemployeurs et les sala-riés, rappelle l’auteur. Lesalariat n’est apparudans sa formemoderne qu’avec l’avè-nement de l’économie capitaliste(…). Pour comprendre les débatsactuels, il est utile de connaître leprocessus qui a conduit à l’appari-tion de la relation salariale, donc àl’avènement dumode de productioncapitaliste. »A partir de cela, l’auteur indiqueclairement en quelques pages enquoi le travail est unemarchandise,explique les spécificités de la «mar-chandise travail » et démontre quele travail est la source de la plus-value.Pour les lecteurs d’Informationsouvrières et nombre de militantssyndicalistes, ce qui est une « évi-dence » ne se retrouve pas de ma-nière générale dans lesmilieux uni-

versitaires, où, souvent,ces questions fonda-mentales sont soit occul-tées, soit travesties.Il n’est pas dans notrepropos de résumer l’ou-vrage de Joël Sohier,maisd’attirer l’attention surquelques-uns des sujetstraités et d’inviter noslecteurs à le lire.Bien entendu, l’histoiredu syndicalisme est re-tracée en établissant ce-lui qui relève de la Charted’Amiens (CGT, CGT-Force ouvrière) et celuiqui relève de la « doctrine

sociale de l’Eglise », et notammentde l’encyclique RerumNovarum (laCFTC et la CFDT).Ensuite, comment s’est forgé le droitdu travail, comment se sont struc-turées les organisations syndicaleset les grandes lignes de ce qui consti-tue un acquis majeur : le systèmedeprotection sociale collective, avecun résumé de la « genèse de la Sécu-rité sociale ». Sans oublier ceque sontles conventions collectives, la « hié-rarchie des normes », le « principe defaveur », d’une part, et, de l’autre, laplace et le rôle des lois Auroux.Pour tous nos lecteurs n’ayant pasde ces notions une connaissanceleur semblant suffisante, ils en trou-veront ici une explicitation trèsclaire.

Les chapitres du livre commencentpar énoncer quelques-uns desmotsclés qui seront au cœur de chacundes développements, ce qui permetau lecteur de disposer de repèressimples. Donc, d’abord et avant tout,à l’étudiant… d’étudier.Car cet ouvrage est destiné à l’étude.Et on appréciera particulièrementle fait que l’auteur entreprenne denous expliquer la naissance descaisses de secours, les raisons de lastructuration du syndicalisme, ledéveloppement des regroupementsprofessionnels et, par conséquent,lesmotivations de ceux qui ont crééle fédéralisme. Trouve sa place éga-lement un résumé retraçant la nais-sance des Bourses du travail.« L’existence de syndicats de métiern’exclut pas les spécificités locales »,nous dit l’auteur, avant d’expliquerles conditions de la naissance duconfédéralisme en France, en pas-sant par le 1ermai 1884 à Chicago,où les travailleurs se mettent engrève générale pour obtenir la jour-née de 8 heures. Le 1er mai devien-dra une journée internationale desolidarité.En France, « les conditions étaientdonc mûres pour une unificationsyndicale des travailleurs. En 1895,75 délégués représentant 28 fédéra-tions nationales (du Livre, des che-minots…), 126 chambres syndicaleset 18 Bourses du travail se réunis-sent en congrès. Ils fondent la Confé-

dération générale du travail (CGT). »Les termes ont à ce niveau unegrande importance. Il ne s’agit pasd’une fusion, le terme de confédé-ration désigne le rassemblementdes fédérations qui conservent leurexistence organisationnelle.Le dernier chapitre, « Syndicalismeet mondialisation », aborde l’inter-nationalisme syndical, ses évolu-tions et ses enjeux dans la « tour-mente mondialiste ».Laissons la conclusion à l’auteur,s’adressant à ses étudiants : « Lespouvoirs publics et le patronat déplo-rent la faiblesse des syndicats fran-çais. Pourtant, ils expriment leur ré-probation lorsque les appels à lagrève de ces mêmes syndicats sontsuivis par les salariés. S’agit-il d’unparadoxe ? Ou n’est-ce pas tout sim-plement l’expression du fait que lessyndicats sont une nécessité objec-tive qui découle de l’antagonismedes intérêts inhérents à la relationsalariale ? » Rafraîchissant. �

(1) Joël Sohier, Le Syndicalisme en France,collection Explicit, éditions Vuibert.144 pages, 16 euros.

Histoire

“Le syndicalisme en France”présenté aux étudiants

Un ouvrage de Joël SohierIl n’est pas si fréquent qu’un ouvrage destiné aux étudiants de l’Université traite sérieusement desquestions du syndicalisme.Surtout par les temps qui courent,où il est de bon ton d’enfourcher desniaiseries intéressées comme la fin de la classe ouvrière, de la lutte des classes et du syndicalisme.Là est l’intérêt du travail rigoureux que nous présentons cette semaine à nos lecteurs.

15

Repères

� 1895 : constitution de la Confé-dération générale du travail (CGT).

� 1906 : adoptionde la Charte d’Amiens.

� 1922 : scission animéepar les militants proches du PCFet constitution de la « CGT-Unitaire »(CGT-U).

� 1936 : réunification en mars, peuavant la grande grève de mai-juin.

� 1940-44 : période de la clandes-tinité sous l’occupation.

� 1947 : constitution de la CGT-Force ouvrière, affirmant,dès l’origine, être une branchede la CGT et son attachementà la Charte d’Amiens.

ÉCLAIRAGE

Dans la Charted’Amiens« Le congrès confédéral d’Amiensconfirme l’article 2, constitutifde la CGT : “La CGT groupe, endehors de toute école politique,tous les travailleurs conscientsde la lutte à mener pour la dis-parition du salariat et du patro-nat.”Le congrès considère que cettedéclaration est une reconnais-sance de la lutte de classe quioppose, sur le terrain écono-mique, les travailleurs en révoltecontre toutes les formes d’ex-ploitation et d’oppression, tantmatérielles que morales, misesen œuvre par la classe capita-liste contre la classe ouvrière.(…) Les travailleurs, quelles quesoient leurs opinions ou leurstendances politiques ou philo-sophiques (ont le) devoir d’ap-partenir au groupement essentielqu’est le syndicat.Comme conséquence, en ce quiconcerne les individus, le congrèsaffirme l’entière liberté pour lesyndiqué de participer, en dehorsdu groupement corporatif, àtelles formes de lutte corres-pondant à sa conception philo-sophique ou politique, se bor-nant à lui demander, en réci-procité, de ne pas introduiredans le syndicat les opinionsqu’il professe en dehors.En ce qui concerne les organi-sations, le congrès déclare qu’afinque le syndicalisme atteigne sonmaximum d’effet, l’action éco-nomique doit s’exercer directe-ment contre le patronat, les or-ganisations confédérées n’ayantpas, en tant que groupementssyndicaux, à se préoccuper despartis et des sectes, qui, en de-hors et à côté, peuvent pour-suivre, en toute liberté, la trans-formation sociale. »

“L’auteur n’hésitepas à partirdes baseséconomiqueset socialesqui fondentle syndicalisme,c’est-à-diredes faitsobjectifset de leurdéroulementhistorique”

UN COURRIER

A propos du film“Cheminots”La critique d’A.V. (Informations ouvrières,no 126, page 15) me semble pertinente,mais incomplète. Les témoignages des che-minots révèlent un rejet de la privatisationet du démantèlement de la SNCF, maisaussi un attachement profond, presqueviscéral, à l’unicité de la SNCF, au servicepublic. La volonté d’assurer un service dequalité pour tous traduit également l’at-tachement au statut qui le garantit.Mais le film en reste à ce constat. Personnene pose le problème de la perspective quipermettrait à cet immense rejet exprimépar les cheminots de se concrétiser dans lecombat pour préserver la SNCF et le statut.Lors du débat organisé après la projectiondu film à Rouen, à l’initiative du comitéd’établissement régional deNormandie, jesuis intervenu pour avancer la perspectivede revenir au statut juridique d’entreprisenationale, statut qu’avait la SNCF avant1981.Les témoignages du film sont un réquisi-toire implacable de toute la politiquemenéedepuis la LOTI (loi d’orientation des trans-ports intérieurs—NDLR) de Charles Fiter-man, ministre PCF du premier gouverne-ment Mitterrand, et poursuivie avec zèlepar tous les gouvernements successifs, enappliquant servilement toutes les directivesde l’Union européenne. Cette politique estdéjà une catastrophe, elle en prépare d’au-tres.Le mot d’ordre de renationalisation per-mettrait de donner à cette multitude debatailles de résistance une perspective cen-trale. La sortie du film permet d’en discu-ter à nouveau, c’est une de ses qualités.

G. C., cheminot retraité,syndiqué à la CGT �

RECTIFICATIF

Nous avons écrit par erreur dans nos “Re-pères” concernant l’exposition sur la mu-sique en Union soviétique (Informationsouvrières, no 128) que K. Malevitch avaitété expulsé d’URSS en 1929. Ce n’est pasexact. Il est décédé dans ce pays en 1935.Nous prions nos lecteurs de nous excuserpour cette erreur.

Page 16: IO_131

Faites-le savoir

C’est pourtant vraiSelon une étude de l’Insee (6 décembre 2010), prèsde 2,9 millions d’habitants, en France, sont des « mal-logés ».

PhotoAFP

PhotoDR

Le ministre de l’Agricul-ture, Bruno Le Maire, arendu public, le 6 jan-

vier 2011, un rapport sur la for-mation des prix et desmargesdans la filière de la viande bo-vine.A l’arrivée, le consommateura vu le prix du kilo de viandeaugmenter de 24% en dix ans.Si aumoins les agriculteurs en

profitaient. Las ! sur cettemêmepériode, le prix de la viandesur pied est resté identique :2,70 euros par kilo ! Ce qui faitdire au ministre : « Il y a clai-rement des perdants, qui sontles producteurs de viande bo-vine. Il y a urgence à apporterdes réponses structurelles pouraméliorer les revenus de cesagriculteurs, qui figurent parmiles plus bas du secteur agri-cole. » Si l’on peut se féliciterde la clairvoyance duministresur les « perdants », on peuts’interroger sur les « réponsesurgentes » : afin de ne pas pro-voquer une hausse de leurscharges (en particulier, la nour-riture du bétail), il préconise…de passer des contrats avec lescéréaliers.En attendant, le prixmoyen aukilo passe donc de 2,70 eurosà la sortie de l’élevage à 3,77 eu-ros à la sortie de l’abattoir,pour atteindre 15 euros à l’étal.C’est peut-être là, sur lesmar-ges des intermédiaires et de lagrande distribution, qu’il yaurait desmesures urgentes àprendre ! R. M. �

Ça roule pour eux

L’HUMEURde Michel Sérac

« Le Vatican contrele blanchiment.Trois mois aprèsle déclenchementd’une enquête sur leprésident de l’Institutdes œuvres religieuses(IOR), la “banquedu Vatican”,trente ans aprèsla faillite de sa filialebancaire, la BancoAmbrosiano, accuséede recycler l’argentde la mafia sicilienneavec la complicitéde la loge maçonniqueP2, le pape Benoît XVIs’engagecontre la criminalitéfinancièreinternationale.Un décretantiblanchimentinstaure une autoritéd’informationfinancière du Vatican(...). L’IOR ne publiepas ses comptes. »

Entendu, vu, lu

dans “Le Nouvel Obs”(6 janvier 2011)

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 131 SEMAINE DU 13 AU 19 JANVIER 2011

Bulletin à renvoyer à : Informations ouvrières, 87, rue du Faubourg-Saint-Denis, CS 30016, 75479 Paris Cedex 10. Chèque à l’ordre d’Informations ouvrières

INFORMATIONS OUVRIÈRES

ET TOUJOURS...

12 numéros : 10 euros pour tout premier abonnement �

� Par prélèvement mensuel : 5,80 euros ( � 9,50 euros pour les plis clos)(datez et signez l’autorisation de prélèvement ci-contre en joignant un relevé d’identité bancaire ou postal)

OU :� 5 numéros “découverte” : 7 euros • � 12 numéros : 17 euros •� 4 mois (17 numéros) : 24 euros

� 6 mois (25 numéros) : 33 euros • � 1 an (51 numéros) : 65 euros • � 1 an, pli clos : 110 euros

CHOISISSEZ VOTRE FORMULE

Comité : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Département : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Nom, prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

N° : . . . . . . . . . . . Rue, bd, ave., etc. : . . . . . . . . . Nom de la voie : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Code postal : . . . . . . . . . . . . . Ville : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Autorisation de prélèvementJ’autorise l’établissement teneur demon compte à effectuer les prélève-ments chaque fin de mois de 5,80 eurosprésentés par Informations ouvrières.Je pourrai suspendre à tout momentces prélèvements par simple lettre.

Date : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Signature (obligatoire) :

IMPORTANT : n’oubliez pasde joindre un relevé d’identité

bancaire ou postal,de dater et signer votre

autorisation de prélèvement.

Numéro national émetteur : 442543

Dans tous les cas, remplir lisiblement et en lettres majuscules vos nom, prénom et adresse

sincèrement combattre pour l’émancipationdes travailleurs. Cela sous leur propreresponsabilité. L’hebdomadaire est éditépar l’association (loi 1901)Informations ouvrières.Daniel Gluckstein, directeur de la publication.

INFORMATIONS OUVRIÈRESTribune libre de la lutte des classesDans le cadre de sa tribune libre, Informationsouvrières, fondé par Pierre Lambert, offrela possibilité de s’exprimer librement à toutgroupement ou formation politique qui entend

• Rédacteur en chef : Lucien Gauthier.• Siège : 87, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75010 Paris.• Imprimerie : Rotinfed 2000, Paris.• Tirage : 20 000 exemplaires.• Commission paritaire : 0909 C85 410.• ISSN : 0813 9500.

• Rédaction : Informations ouvrières,87, rue du Faubourg-Saint-Denis,CS 30016 - 75479, Paris CEDEX 10.Tél. : 01 48 01 89 23.Fax : 01 48 01 89 29.E-mail : [email protected]

• Administration-abonnements :Maïté Dayan.Tél. : 01 48 01 88 22 ;

01 48 01 88 41.E-mail : [email protected]• Dépôt légal : à publication.

Vu à la télévision

Toussaint Louverture,le libérateur d’Haïti

Documentaire de N. Walker.Arte, 8 janvier 2011.

Haïti, en1789, s’appelait Saint-Domingue.C’était la capitalemondiale du sucre, grâce à

une économiebasée sur l’esclavage.Haïti, en 2010, c’est l’undes pays lesplus pauvres de la planète, aban-donné de tous après les ravages duséismede janvier 2010, réprimépardes troupesd’occupationqui lui ont,de surcroît, apporté le choléra.Au XVIIIe siècle, les planteurs trai-taient lesNoirs commeonne traitepas les animaux (ils étaientmutilés,ébouillantés, brûlés vifs).Mais, en 1789, les colons saluent laRévolution française, pour lui de-mander… une plus grande libertédans la gestion de leur île sucrière.LesNoirs saluent la révolutiond’uneautre façon : en lançant un appel àl’insurrection, lors de la fameuseréunion du Bois-Caïman (22 août1791), Ier Congrès haïtien.C’est alors queToussaint Louvertureentre en scène : le « Spartacus noir »rassemble une armée de va-nu-pieds, qui pulvérise les troupes fran-çaises, espagnoles et anglaises.Quand la Convention abolit l’escla-vage (décret depluviôse, an II), enté-rinant un fait accompli, ce sont unmillion d’esclaves noirs qui, d’untrait de plume, deviennent citoyensfrançais. Leur principal dirigeant,Toussaint Louverture, esclave affran-chi, lettré, général de la Républiquenommé par la Convention, entre-prend ensuite de rédiger la Consti-tutionde1801, qui, pour la premièrefois dans l’histoire, interdit la dis-crimination raciale.Toussaint Louverture ne verra pasle triomphe de la révolution haï-tienne : arrêté par traîtrise, il seradé-porté et condamnéàmourir de froiddans une forteresse de la Sibérie ju-rassienne en 1803.Son lieutenant, Jean-Jacques Des-salines, écrasera une armée bona-partiste et proclamera la premièreRépubliquenoirede l’histoire (1804).Dans l’élan de cette révolution anti-coloniale et antiesclavagiste, lesHaï-tiens ont été les seuls esclaves quiont réussi à créer une nation où futinstaurée,pour lapremière fois, l’éga-lité des droits pour tous.

DANIEL HUET �

Un an après

Fin décembre 2009, l’usine Continental de Clairoix, dans l’Oise,fermait et l’ensemble de ses salariés étaient licenciés. Rappe-lons que « l’accord » négocié avec le patronat aboutissait à payer

les travailleurs licenciés durant deux ans. De nombreux travailleurs,à l’époque, posaient la question : « Et après ? Il n’y a pas de travail dansla région. »Les exemples ne manquent pas. En janvier 2011, c’est ce travailleurqui explique qu’à part une « formation », on ne lui a rien proposé.C’est cet autre travailleur qui raconte que le seul travail qu’on lui aproposé était très loin de chez lui et pour 1 000 euros par mois, soitmoins que ce qu’il touche en indemnités, qu’il risquerait alors deperdre.Aujourd’hui, 85 travailleurs ont été embauchés en CDI ou CDD, 40déclarés en invalidité et 50 comme « auto-entrepreneurs » (et donc955 sans emploi).Avec ses indemnités, l’un d’entre eux a racheté un bar en espérantque celui-ci ne fasse pas partie desmilliers de bars qui, à terme, vontfermer dans ce pays. Un autre, Christophe, qui a travaillé vingt-deuxannées à Continental et qui a 44 ans, a d’abord fait une formation enpharmaceutique pour finalement, avec ses indemnités, racheter lalicence de taxi d’un chauffeur partant à la retraite. Il a dû acheter unevoiture, et maintenant, il doit assurer. Durant l’épisode neigeux qui abloqué toute la Picardie, il a dû, face à l’interruption des navettes etdes autobus, parcourir une distance de plus de trente kilomètres surdes routes impraticables pour aller chercher des gens bloqués à lagare TGVHaute-Picardie. Il n’avait pas le choix, il devait absolumenttravailler.Selon les chiffres fournis par le groupeContinental, au premier semestre2010, ses profits ont été de 227 millions d’euros.

Lucien GAUTHIER �

Ceux que cerégime honoreL’histoire a ses malices.Juste après la Légiond’honneur décernéeparWoerthà de Maistre, experten fraudes fiscalesdes Bettencourt, voicicelle — grand’croix,s’il vous plaît, le gradesuprême— remiseen 2009 par Sarkozy àM. Servier. Le présidenta félicité ce dernierde « proposer auxmédecins et à leurspatients des médica-ments efficaces ». L’effi-cacité du coupe-faimtoxique Mediator,dont la vente a rempliles coffres du capitalisteServier, se chiffre entre500 et 2 000 morts.La Sécu resta tenue,durant 33 ans, de rem-bourser ce poison :423 millions. Cetteneuvième fortune deFrance, celle de Servier,fut d’abord entasséepar de gras bénéficessur l’Isoméride, interditen 1996 comme causepossible de maladiesgraves, puis parla vente duMediatorà 5 millions de nosconcitoyens. Mais siMme Frachon, pneumo-logue, courageusecitoyenne, parvintseule à identifier dansle Mediator, camouflée,la mêmemoléculetoxique et mortelle quedans l’Isoméride, prou-vant la récidive, alorscomment les agencesofficielles, les ministres,experts pourdéremboursernos médicaments,ont-ils pu rester sibizarrement aveugles ?Nationaliser l’industriepharmaceutique,rétablir la Sécuritésociale de 1945 sontles vraies solutions.Peuvent-elles êtreoctroyées par un« bon » président,dans ce même régimequi exsude depuiscinquante ans l’arbi-traire et la corruption ?L’expérience destravailleurs répond :fadaises ! C’est belet bien pour l’abolitionde ce régime politique,pour l’Assembléeconstituante, rendantses droits au peuple,qu’il faut aujourd’huimiliter. �