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La dépression du sujet âgé
Pierre Krolak-Salmon
Centre de Mémoire, de Ressources et de Recherche de Lyon
Centre de Recherche Clinique « Vieillissement-Cerveau-Fragilité »
Hôpital des Charpennes
Centre de Recherche
Neurosciences Lyon
Critères diagnostiques de la dépression selon le DSM IV
1 – Humeur dépressive
2 – Diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir
3 – Perte ou gain de poids significatif en l’absence de régime
4 – Insomnie ou hypersomnie
5 – Agitation ou ralentissement psychomoteur
6 – Fatigue ou perte d’énergie
7 - Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inapproprié
8 – Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer
9 – Pensées de mort récurrentes, idées suicidaires récurrentes ou tentative de suicide
Particularités chez le SA• Pathologie mentale la plus fréquente chez l'âgé
• Sur-représentation féminine :– effet du vieillissement
– effet de l'humeur dépressive qui serait plus fréquente chez les femmes > hommes (RAS pour les autres symptômes)
• difficile à reconnaître :– Difficulté d'expression de la douleur morale
– Difficulté de repérage de cette douleur par le clinicien
– Difficulté de porter ou accepter ce diagnostic (vécu dépressif mis sur le compte de la vieillesse)
• Attention aux présentations atypiques de cette dépression
• Nécessité de traiter et longtemps.
Facteurs favorisants
• Biologiques :
– Vulnérabilité physique
– Pathologies: ex.:vasculaire cérébrale, AVC surtout si
loca. frontale gauche …
– Iatrogénie : rôle dépressiogène des anti HTA, NL….
• Psychologiques :
– Conflits,
– Deuils, pertes cumulées, veuvage
• Sociaux :
– Solitude, isolement
– Retraite, problèmes financiers …
Clinique de l’état dépressif
• Trépied sémiologique
– Trouble de l'humeur : tristesse douleur
morale– tristesse : morosité douleur morale, souffrance intérieure
– pessimisme, dégoût de la vie,
– sentiment d'échec, d'impuissance, doute sur sa valeur
– irritabilité, hostilité, agressivité
– idées de mort, suicidaires
– Ralentissement: inhibition psychomotrice
– Symptomatologie somatique : toujours
présente
Ralentissement
Conséquences sur la vie psychique et relationnelle
• Psychique
– Fonctionnement est pénible, demande un effort
– Opérations de la vie mentale
• attention, concentration, mémoire, raisonnement, jugement
– Inhibition psychomotrice
• Relationnelle
– Repli, isolement, absence de communication
– Extériorisation uniquement de contenus relationnels
négatifs, sur un mode parfois véhément
– Agitation anxieuse
Symptomatologie somatique
• Insomnie, anorexie, asthénie, amaigrissement
• Signes somatiques autres– manifestations fonctionnelles : variées
• douleurs
• frilosité
• hypochondrie portant plutôt sur le tractus digestif (constipation…)
– Ne pas rapporter ces troubles somatiques d'accompagnement au vieillissement
• Savoir répéter l'examen clinique
• A un autre trouble Psychiatrique– dépression greffée sur une autre pathologie psy. (névrotique, psychotique,
alcoolisme, personnalité pathologique …)
– cette pathologie pèse pour son propre compte sur la dépression
• A un trouble somatique :– Parkinson :
• Peut précéder l'apparition des troubles moteurs
• 60 % des parkinsoniens = syndrome dépressif au cours de l'évolution
• pas de différence d'intensité si traitement antiparkinsonien ou non.
– Démence (MA), douleurs chroniques, maladies endocriniennes(hypothyroidie etc…)
– AVC : dépression vasculaire• Ralentissement psychomoteur marqué, apathie
– Cancers
– Iatrogénie• En pleine expansion, Conséquences de la polymédication du SA
• Aggravées par l'avidité médicamenteuse propre au grand âge
• Y penser systématiquement et rechercher l'intoxication
• Psychotropes ++ (BZD, NL), corticoïdes, antithyroidiens, antiHTA ….
Formes associées
• Alexithymie• Dépression à masque somatique• Dépression à masque anxieux• Dépression à masque anhédonique• Dépression à masque délirant• Syndrome de COTARD : état délirant dont la thématique
hypochondriaque associe des idées :– d'immortalité, – de damnation, – de négation d'organe (organes "pourris", "bouchés" ou
"transformés en pierre« …), – de négation du corps
• Dépression à masque démentiel
Formes trompeuses
Suicide et PA
• Une des principales causes de décès de la PA avec le cancer et les maladies cardio-vasculaires.– 30% des suicidés ont > 60 ans
– Prévalence du suicide > 60 ans : 4 fois + élevée que dans les autres tranches d'âge
– Sur-représentativité masculine, qui avec l'âge : 4 fois plus de suicides masculins après 75 ans
– Souvent sans pathologie Psy. antérieure
• Le suicide létal des PA +++– Suicides le + svt violents, en lien avec la solitude (svt l'année qui suit un
veuvage)
– Surtout en milieu rural, à domicile, avec des moyens radicaux
• de la culpabilité dans le suicide du SA, surtout s'il y a eu un décès dans l'entourage– le + impressionnant = la détermination implacable du SA
Traitements
• Prise en charge globale Cette PEC associe
souvent plusieurs thérapies en fonction :
– de l'âge du patient
– de son état physique
– des pathologies associées
– et du tableau clinique de la dépression
• PEC associe :
– traitement médicamenteux
– PEC "psychologiques"
– traitement par sismothérapie ou ECT (Electro
/Convulsivo /Thérapie)
Modalités de prescription des AD
• Plusieurs critères de choix doivent être pris en compte :– les effets secondaires
– la présence ou non de polypathologie
– les interactions médicamenteuses
– l'action thérapeutique recherchée : stimulation ou sédation
• Privilégier les produits à demi vie courte, sans métabolite actif à faible fixation protéique et volume de distribution modéré (Citalopram, Escitalopram, Sertraline, Miansérine, Mirtazapine, Venlafaxine)
• Suffisamment long pour éviter les rechutes– Un traitement d'attaque est nécessaire, sachant que l'efficacité peut
n'apparaître qu'entre 4 et 12 semaines de traitement
– Un traitement de consolidation doit succéder, pendant 6 à 8 mois après l'amélioration des troubles et à la même posologie
– Pour éviter les récidives, si le risque existe : poursuivre le ttt 1 à 5 ans
Les médicaments antidépresseurs
• Indications :– Épisodes dépressifs majeurs (caractérisés)
– Certains troubles : TOC, prévention ou ttt des attaques de panique avec ou sans agoraphobie, phobies sociales, anxiété généralisée chez l’adulte, alcoolisme,
– Névralgies faciales, algies rebelles, migraines
• Activités :– Sur l’humeur : action thymoanaleptique « lente »
– Sur l’anxiété : action sédative « rapide »
– Sur l’inhibition : action psychotonique « rapide »
• Choix de la posologie– Réévaluer posologie après 15j :
• Délai d’action de quelques jours à quelques semaines (désensibilisation des récepteurs)
– Grande variabilité d’un sujet à l’autre, physiopathologie du patient, résistance pharmacologique
– Per os en majorité
– Arrêt progressif du traitement pendant au moins 1 mois, sinon symptômes de sevrage (vertiges, anxiété, tremblements, dysphorie) infos patient
• Durée traitement : au moins 6 mois
Les médicaments antidépresseurs
Les médicaments antidépresseurs classes pharmacologiques
• Antidépresseurs IMAO
(inhibiteurs de la MonoAmine Oxydase)
• Antidépresseurs Tricycliques
(ou imipraminiques)– Molécules à effet anticholinergique
• confusion, tr mnésiques
• sécheresse de bouche, troubles d’accomodation, constipation, dysurie
– Molécules à effet adrénolytique => hypoTA
• Antidépresseurs ISRS
(inhibiteur spécifique de la recapture de la 5HT)
• Antidépresseurs ISRSNa non tricycliques
(inhibiteur spécifique de la recapture de la 5HT et de la NA)
• Antidépresseurs atypiques
ISRS• Indications :
états dépressifs majeurs, prévention des attaques de panique, TOC, phobies sociales
• Efficacité proche des imipraminiques
• Meilleure tolérance :– pas ou peu d’effets atropiniques mais hypoglycémie
– pas de cardiotoxicité mais hyponatrémie, convulsions
– nausées, vomissements, anorexie, constipation, bouche sèche
• Quelques interactions médicamenteuses :
inhibiteurs enzymatiques
carbamazépine, lithium, millepertuis, AVK, dépresseurs du système nerveux central, alcool…
• Risque de syndrome sérotoninergique :diarrhées, sueurs, fièvre 40°, confusion, coma
Inhibiteur spécifique de la recapture de S et Na
• Pharmacodynamie :
– Nouveaux inhibiteurs non tricycliques de la recapture de la
noradrénaline et de la sérotonine / +DA pour venlafaxine
– Efficacité comparable aux imipraminiques
• Pharmacocinétique
– Absorption digestive correcte -> per os
– Elimination urinaire
– Demi-vie = 8 à 12h -> 1 à 2 prises
ISR S et Na
• Indication :– Épisode dépressif majeur
– Attaques de panique, phobie sociale et anxiété (venlafaxine)
– Douleur neuropathique (duloxetine)
• Effets indésirables:– sécheresse buccale, constipation, dysurie, tachycardie, mydriase
effets atropiniques
– Nausées, vomissements, sueurs, tachycardie
(= surdosage)
– Venlafaxine: risque de convulsion, TA
ISR S et Na• Les molécules
– Milnacipran IXEL* gel 25mg et 50mg
– Venlafaxine EFFEXOR* gel LP 37.5, LP 75, cp 50mg
• effets indésirables en relation avec sa structure de type
amphétaminique : nervosité
– Duloxétine CYMBALTA* gél 30 et 60 mg
• inhibiteur plus récent avec indications dans douleurs neuropathiques
chez les diabétiques
• Mises en garde : – risque levée d’inhibition
– Surveiller TA et FC à forte dose
– arrêt progressif du traitement sur 1 à 2 semaines
• Quelques interactions médicamenteuses :
association entre eux, IMAO sélectifs ou non, triptans, alcool…
• Risque de syndrome sérotoninergique :diarrhées, sueurs, fièvre 40°, confusion, coma
ISR S et Na
• ont mêmes propriétés que les précédents
• ont mêmes toxicités
• inhibent de manière plus ou moins marquée les iso enzymes
du cytochrome P 450 et exposent au risque d’inter actions
médicamenteuses
les anticoagulants oraux
la phénytoine ( DIHYDAN *)
la carbamazépine ( TEGRETOL *)
Autres antidépresseurs
• tianeptine (STABLON®) – miansérine (ATHYMIL®) –
mirtazapine (NORSET®))
• Activité comparable aux imipraminiques avec diminution de certains effets indésirables :– Pas d’effets anticholinergiques
– Moins d’effets adrénolytiques
• Indication seule dans les épisodes dépressifs majeurs
Autres antidépresseurs
• mirtazapine cp 15mg, sol buv– Antidépresseur sédatif chimiquement proche de la miansérine
– Effet anticholinergique faible – Pas de cardiotoxicité
– Posologie 1 à 3 cp/ jour en 1 prise
– Effets indésirables : Agranulocytose, leucopénie, neutropénie, thrombopénie, somnolence,…
• mirtazapine et miansérine:
Risque agranulocytose (surveiller l’hémogramme
pendant les 1er mois et chez le sujet âgé)
Classe Dci Spécialités Posologies Choix
ISRS
• Citalopram
• Escitalopram
• Fluoxétine
• Fluvoxamine
• Paroxétine
• Sertraline
• Séropram
• Séroplex
• Prozac
• Floxyfral
• Deroxat
• Zoloft
• 20 - 60 mg/j
• 10 - 20 mg/j
• 20 - 60 mg/j
• 100 - 300 mg/j
• 20 -50 mg/j
• 50 - 200 mg/j
1ère
intention
ISRSNA
• Duloxétine
• Milnacipran
• Venlafaxine
• Cymbalta
• Ixel
• Effexor
• 60 -120 mg/j
• 100 mg/j
• 37,5 -150 mg/j
1ère
intention
IMAO NS
IMAO SA
• Iproniazide
• Moclobémide
• Marsilid
• Moclamine
• 50 -150 mg/j
• 300 - 450 mg/j
Imipraminiques
• Amoxapine
• Amitrityline
• Clomipramine
• Dosulépine
• Doxépine
• Imipramine
• Maprotiline
• Trimipramine
• Défanyl
• Elavil /Laroxyl
• Anafranil
• Prothiaden
• Quitaxon
• Tofranil
• Ludiomil
• Surmontil
• 100 - 400 mg/j
• 75 - 100 mg/j
• 75 - 100 mg/j
• 75 - 100 mg/j
• 10 - 300 mg/j
• 75 - 100 mg/j
• 75 - 100 mg/j
• 75 - 100 mg/j
Autres
• Miansérine
• Mirtazapine
• Tianeptine
• Athymil
• Norset
• Stablon
• 30 - 90 mg/j
• 15 - 45 mg/j
• 37,5 mg/j
1ère
intention
Les prises en charge psychologiques
• L'association chimiothérapie / psychothérapie est souvent bénéfique. Il a été montré que l'association des 2 est plus efficace que le traitement seul.
• Différents types de psychothérapies envisageables en fonction :– du type de dépression,
– des capacités du sujet à appréhender la psychothérapie,
– de son environnement familial et social
• La prise en charge du SA déprimé ne se conçoit pas sans un volet psychothérapique. – Tous les types de psychothérapie peuvent être utilisés dans la PEC de
la PA, l'âge n'est pas en lui-même une CI de ces pratiques.
• psychothérapie de soutien : – cherche à rétablir l'équilibre psychologique du patient dans un lien relationnel rassurant et
étayant, qui l'aide à l'analyse introspective
• psychothérapie cognitivo-comportementale– modifications de comportements pathologiques pour les remplacer par d'autres, plus adaptés,
(par des méthodes de conditionnement et d'apprentissage)
• psychothérapie psychodynamique : – soit cure psychanalytique, avec mise à jour progressive de la dynamique psychologique
inconsciente du patient
– soit thérapie d'inspiration psychanalytique plus simple, plus courte et moins élaborée
• psychothérapie familiale– clarifier les problèmes, expliquer les stratégies d'adaptation et aider la famille à résoudre les
conflits
• psychothérapie interpersonnelle– améliorer l'estime de soi, aider à élaborer des stratégies efficaces dans les relations sociales et
interpersonnelles
• psychothérapie de couple– tensions dans le couple (exacerbées dans D)
– favorise information et soutien du conjoint
• psychothérapie de groupe– utilise les inter-actions au sein du groupe, combat isolement, rétablit la communication sociale
– permet de bénéficier de l'expérience de chacun dans le groupe.
La réserve cognitive
3 = Stress- Maladies aiguës
2 = Maladies chroniques
D’après le Modèle 1+2+3 (J.P BOUCHON)
age
Insuffisance
1 = Vieillissement « réussi »
Fragilité
Références
Centre de Recherche
Neurosciences Lyon
Saintrain MV, Guimaraes AV, Honorio VA, de Almeida PC, Vieira AP. Depression symptoms
and oral discomfort in elderly adults. J Am Geriatr Soc 2013;61:651-652.
de Souto Barreto P. Exercise for depression in elderly people. Lancet 2013;382:1325.
Forlani M, Morri M, Belvederi Murri M, et al. Anxiety symptoms in 74+ community-dwelling
elderly: associations with physical morbidity, depression and alcohol consumption. PloS one
2014;9:e89859.
Taylor WD. Clinical practice. Depression in the elderly. N Engl J Med 2014;371:1228-1236.
Yaka E, Keskinoglu P, Ucku R, Yener GG, Tunca Z. Prevalence and risk factors of depression
among community dwelling elderly. Archives of gerontology and geriatrics 2014;59:150-154.