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DOSSIER LA METACOGNITION par Micheline Séguin avec la collaboration de Joanne Fournier alphabétisation populaire, malgré sa pauvreté matérielle, a ceci de particulier qu'elle recèle des riches- ses immenses sur le plan de sa pra- tique spécifique: une pratique qui a toujours été centrée sur l'apprenante et l'ap- prenant, qui les a toujours considérés comme des personnes dans toutes leurs dimensions sociales, affectives, cognitives, etc., qui a su les respecter dans leur vécu et leur culture. L'alphabétisation populaire a pu ainsi, au cours des années, développer dans le cadre de cette pratique qui lui est spécifique, une approche que l'on pourrait qualifier d'«holistique». Cette ap- proche se veut aussi collective; le groupe qui constitue l'atelier d'alphabétisation, est basé sur l'entraide mutuelle plutôt que sur la compétition entre apprenantes et apprenants. On pourrait aussi qualifier cette approche de réalis- te, car sa pédagogie a su partir de la vie quotidienne de personnes qui, en majorité, proviennent des milieux populaires où l'aspect concret des cho- ses constitue le quotidien des gens. Le dossier sur la métacognition s'inscrit dans cette continuité. Il veut, par les informa- tions qu'il pourra leur fournir, offrir aux ani- " SI LE LANGAGE EST UN CODE ARBITRAIRE, CONVENTIONNEL, LE CHOIX QUE L'ON FAIT DES MOTS QU'IL CONTIENT NE L'EST PAS. LIRE ET ÉCRIRE DES MOTS, C'EST AUSSI LIRE ET ÉCRIRE LA RÉALITÉ " (SERGE WAGNER) matrices et aux animateurs l'occasion de ré- fléchir sur cette pratique pédagogique, tant sur l'aspect de son ancrage dans la réalité que sur celui de l'ascendant que certaines théories exercent sur elle. Le phénomène de l'apprentissage chez une personne adulte - en processus d'alphabéti- sation dans le cas qui nous intéresse ici - se produit essentiellement par l'entremise des interactions avec son environnement. Cet as- pect de l'apprentissage, c'est-à-dire le proces- sus comme tel et les moyens que l'animatrice et l'animateur peuvent utiliser pour le faciliter, feront l'objet de prochains dossiers. En effet, il nous a semblé trop lourd d'aborder d'un même souffle l'ensemble du processus, tant sur le plan théorique qu'au niveau de son ancrage dans la pratique, et d'étudier en plus différents moyens que plusieurs spécialis- tes nous proposent. Nous nous en tiendrons donc à l'aspect méta- cognitif et aux différents modes d'apprentissage présents dans le processus. Le présent dossier traite ainsi de la MÉTA- COGNITION chez la personne adulte, et plus par- ticulièrement la personne en alphabétisation populaire, dans l'apprentissage de la lecture. Le monde alphabétique, numéro 1, printemps 1991 : La métacognition - RGPAQ

La métacognition : dossier / par Micheline Séguin avec la

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Page 1: La métacognition : dossier / par Micheline Séguin avec la

DOSSIER

LA METACOGNITIONpar Micheline Séguin avec la collaboration de Joanne Fournier

alphabétisation populaire, malgrésa pauvreté matérielle, a ceci departiculier qu'elle recèle des riches-ses immenses sur le plan de sa pra-tique spécifique: une pratique qui

a toujours été centrée sur l'apprenante et l'ap-prenant, qui les a toujours considérés commedes personnes dans toutes leurs dimensionssociales, affectives, cognitives, etc., qui a su lesrespecter dans leur vécu et leur culture.L'alphabétisation populaire a pu ainsi, aucours des années, développer dans le cadre decette pratique qui lui est spécifique,une approche que l'on pourraitqualifier d'«holistique». Cette ap-proche se veut aussi collective; legroupe qui constitue l'atelierd'alphabétisation, est basé surl'entraide mutuelle plutôt que surla compétition entre apprenanteset apprenants. On pourrait aussiqualifier cette approche de réalis-te, car sa pédagogie a su partir dela vie quotidienne de personnesqui, en majorité, proviennent desmilieux populaires où l'aspect concret des cho-ses constitue le quotidien des gens.

Le dossier sur la métacognition s'inscritdans cette continuité. Il veut, par les informa-tions qu'il pourra leur fournir, offrir aux ani-

" SI LE LANGAGE EST

UN CODE ARBITRAIRE,

CONVENTIONNEL,

LE CHOIX QUE L'ON FAIT

DES MOTS QU'IL CONTIENT

NE L'EST PAS. LIRE ET

ÉCRIRE DES MOTS,

C'EST AUSSI LIRE ET

ÉCRIRE LA RÉALITÉ "

(SERGE WAGNER)

matrices et aux animateurs l'occasion de ré-fléchir sur cette pratique pédagogique, tantsur l'aspect de son ancrage dans la réalité quesur celui de l'ascendant que certaines théoriesexercent sur elle.

Le phénomène de l'apprentissage chez unepersonne adulte - en processus d'alphabéti-sation dans le cas qui nous intéresse ici - seproduit essentiellement par l'entremise desinteractions avec son environnement. Cet as-pect de l'apprentissage, c'est-à-dire le proces-sus comme tel et les moyens que l'animatrice

et l'animateur peuvent utiliserpour le faciliter, feront l'objet deprochains dossiers. En effet, il nousa semblé trop lourd d'aborderd'un même souffle l'ensemble duprocessus, tant sur le planthéorique qu'au niveau de sonancrage dans la pratique, etd'étudier en plus différentsmoyens que plusieurs spécialis-tes nous proposent. Nous nous entiendrons donc à l'aspect méta-cognitif et aux différents modes

d'apprentissage présents dans le processus.Le présent dossier traite ainsi de la MÉTA-

COGNITION chez la personne adulte, et plus par-ticulièrement la personne en alphabétisationpopulaire, dans l'apprentissage de la lecture.

Le monde alphabétique, numéro 1, printemps 1991 : La métacognition - RGPAQ

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MOSAÏQUE DE RÉFLEXIONSENTOURANT LA MÉTACOGNITION, LES «STRATÉGIES» ET LA SOCIÉTÉ.

La métacognition a plu-sieurs définitions; maispour un certain nombre

d'auteurs qui ont beaucoup travaillé• cette question, il s'agit des connais-sances que l'on a sur les connais-sances. Quand on parle de métaco-gnition, on parle de connaissances qui

• n'ont pas pour objet un contenuquelconque comme la chimie, la phy-sique, la mécanique, mais qui ontpour objet les connaissances elles-mêmes. C'est la définition la plus sim-ple possible. Parce que dans la méta-cognition, les auteurs distinguentgénéralement deux composantes. Lapremière est cette connaissance-là etla conscience en plus : la conscience•d'avoir cette connaissance-là ou laconscience de soi; c'est la conscience,plus les connaissances. La deuxièmecomposante est l'autorégulation.Lorsque l'on prend conscience quel'on a des connaissances sur nos con-naissances, on peut agir. Il s'agit doncde quelque chose de plus dynamique:c'est la partie active, alors que lapremière est beaucoup plus statique;l'ensemble constituerait la métaco-gnition.

Les stratégies d'apprentissagefont partie de la métacognition, etsurtout de sa composante dynamique,à savoir l'autorégulation. C'est par lebiais de stratégies d'apprentissage quel'on arrive à agir sur son propre proces-sus, que l'on parvient à l'«autoréguler».

Il existe tout un corpus de littéra-ture et de recherches sur ces questions:métacognition, autorégulation etstratégies. Personnellement, je n'aimepas le mot «stratégies», même si j'ai dûl'utiliser dans le titre de ma thèse. C'estun terme qui traduit plus un état

d'esprit d'une culture, un terme em-prunté au domaine militaire, bien sûr,et pas à n'importe lequel, puisque c'estl'armée américaine qui a le plus misde l'avant le terme «stratégies». Celatraduit la «militarisation» intellectu-elle de la société, dans le sens où l'onpense en termes de stratégies. Et ceterme, on le voit partout : on parle destratégies éducatives, de stratégiesd'apprentissage, de stratégies de mar-keting; il n'y a pas un jour où on ne voitpas le mot écrit! Je trouve que le termen'est pas nécessaire; il est souvent malemployé, en plus. Parce que dans«stratégies», il y a beaucoup d'impli-cations; cela a un sens quand mêmeassez précis «d'avoir une stratégie». Etlorsque l'on parle de stratégies d'ap-prentissage, il ne s'agit pas vraiment destratégies, mais plutôt d'une méthodeou d'une technique ou d'un procédéou d'une façon, d'une manière, d'uneapproche ou autres, mais pas néces-sairement d'une stratégie. Je trouveque l'on abuse de l'utilisation de ceterme.

Il est plus juste de parler en termesde «COMPORTEMENTS STRATÉGIQUES».

Lorsque l'on parle de comportementsstratégiques, on comprend souventtoute l'intelligence, parce qu'il n'y apas seulement une représentation dubut à atteindre et des moyens d'yarriver, mais du meilleur moyen, entenant compte de la situation, en te-nant compte de ses capacités, en te-nant compte d'un ensemble de fac-teurs. Pour cela, l'emploi de «straté-gies» fait penser à un comportementintelligent de la part de la personne.Chez une personne qui va employerdes «stratégies» et qui va les appliquercomme des recettes, peu importe la

situation, on ne peut pas parler d'uncomportement stratégique. Un com-portement stratégique fait appel à dela créativité, fait appel à une analysede la situation. Dans le sens militaire,qui est toujours présent, une stratégiesignifie que l'objet puisse réagir. Or ici,l'objet ne réagit pas. On a une stratégieface à un ennemi, parce qu'il est aussiintelligent que nous, parce qu'il vaadapter son comportement aux gestesque nous posons. Lorsque je désireapprendre à démonter ma radio parexemple, la radio ne refuse pas et nem'oppose rien pour résister.

Plus on réfléchit sur nous-mêmesquand on apprend, sur les moyensqu'on utilise pour apprendre, sur lescontenus d'apprentissage, et plus ona de chances de réussir notre appren-tissage. Il y a tout un courant de penséeaux États-Unis qui dit qu'il fautenseigner aux apprenants la méta-cognition plus que les connaissances,pour plusieurs raisons. La premièreest qu'il est plus puissant d'enseignerla métacognition à un individu quedes connaissances. La deuxième, c'estque les connaissances sont de plus enplus éphémères; il y a tellement dechangements technologiques, une telleébullition dans les idées, que les conte-nus seront périmés dans trois ou qua-tre ans; dans le cas le l'informatique,ce n'est même pas quatre ans; enmédecine, c'est autour de quatre àcinq ans. Les tenants de cette approchese demandent, pourquoi enseignerdes contenus qui deviennent périméssi rapidement; il vaut mieux ensei-gner aux gens comment apprendre.Ils affirment que les gens qui réussis-sent, ce sont les gens qui font appel àde la métacognition.

22 LE MONDE ALPHABÉTIQUE

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Il existe aussi beaucoup d'écritsà propos des auditifs et des visuels,mais je ne sais pas si cela existe vrai-ment. Les gauchers et les droitiers, çaon peut le voir; mais les visuels etauditifs, je me demande...! Il y a plutôtdes gens qui privilégient un moded'acquisition de connaissances plutôtqu'un autre. Je ne trouve pas la recher-che suffisamment fondée pour le jus-tifier. Je peux juste dire une chose : lasociété moderne occidentale est trèsvisuelle. On passe beaucoup de tempsà lire, à conduire une automobile et àregarder la télévision. Ce sont troisactivités qui prennent énormémentde temps dans la journée d'une per-sonne. Ces activités-là font essentielle-ment appel au visuel et très peu àl'auditif. La vision est très sollicitéecontrairement au toucher, à l'odorat,sens auxquels on fait rarement appel.On ne peut pas s'attendre à ce que lesgens développent autant l'ouïe qu'ilsdéveloppent la vision, puisque la vueest plus sollicitée. Dans une sociétéorale, la sollicitation serait probable-ment plus équilibrée : les gens fai-saient beaucoup plus appel à l'ouïe,surtout dans les campagnes, jusqu'àtout récemment, quand l'utilisationde l'écrit restait peu répandue. il y aune chose à ne pas oublier il s'agitd'un phénomène mondial. Il y a unsiècle, la majorité des gens ne savaientpas écrire; c'était les hommes de loi etles religieux qui détenaient ce savoir-faire. L'alphabétisation est quelquechose de récent dansl'histoire de l'humanité.

(Propos recueillis lors d'une entrevueavec Mohamed Hrimech, andragogue à

l'Université de Montréal, le 13 février 1991 ]

En ce qui a trait à l'ensembledes thèses avancées dans ce dos-sier, nous invitons la lectrice et lelecteur à confronter nos dires avecleurs pratiques dans les groupesd'alphabétisation populaire. Ilsdevront alors interpréter le texte àla lumière de leurs expériences res-pectives, le corriger en fonction decelles-ci, et le critiquer en y appor-tant leurs réactions, leurs réflex-ions et leurs recommandations, àpartir des résultats déjà observésdans leurs groupes ou de l'ex-ploration des réflexions proposéesdans la synthèse de repères signalésdans ce dossier.

LES STRATÉGIES D'APPRENTISSAGEDANS LA MÉTACOGNITION

Les théories du développe-ment cognitif de Piaget et d'autresthéoriciens peuvent nous éclairersur ce qui se passe au momentd'un apprentissage chez un indi-vidu, nous rappelle Denyse Maya-no en entrevue, mais ils ne nouséclairent pas sur le «comment faire»pour intervenir. «On va parlerd'équilibre instable, et c'est vrai;mais comment parvient-on à fairebouger cet équilibre, qui se trouvestable1?» Nous nous posons laquestion avec elle. D'où l'utilité des'intéresser à des stratégies (oucomportements stratégiques) pou-vant participer au processusd'apprentissage et en assurer lefonctionnement maximal. Cesstratégies peuvent être de naturecognitive, métacognitive ou affec-tive, selon qu'elles se rapportent àl'une ou l'autre de ces fonctions;

néanmoins, elles sont étroitementinterreliées, comme on pourra levoir.

Pour Robert Gagné, «lesSTRATÉGIES COGNITIVES sont des «ca-pacités» structurées que l'étudiantutilise afin d'orienter son atten-tion, son apprentissage, sa réten-tion et sa pensée (...)2.» (Pages 57-58) À propos du fonctionnementde l'attention, de la compréhensionet de la mémoire, De la Garanderie3

explique, de son côté, que ces gestessont implicites; toutefois, dès quesurvient une difficulté, les person-nes se livrent alors à un effort et cesgestes mentaux peuvent devenirconscients: on se rend compte desopérations mentales effectuées ouà effectuer. C'est dans ce sens, diri-ons-nous, que l'apprenante etl'apprenant utilisent une stratégiecognitive, en faisant attention àcertaines caractéristiques d'untexte qu'ils lisent, par exemple. Lesstratégies cognitives peuvent êtreapprises comme n'importe quelleautre matière donnée: l'animatriceou l'animateur peut fournir auxapprenantes et apprenants destechniques de «codification» pourmieux comprendre et retenir cettematière. Les stratégies cognitivessont des moyens dont peut se servirl'individu pour diriger son appren-tissage.

Les STRATÉGIES AFFECTIVES,quant à elles, se définissent davan-tage en rapporta l'environnementaffectif de la personne qui apprend.Les conditions entourant l'appren-tissage peuvent avoir une influen-ce radicale sur le résultat de la dé-marche: elles peuvent faciliter un

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La métacognition

marche: elles peuvent faciliter unaboutissement heureux ou bloquerle processus. Par exemple, si unepersonne se rend compte qu'elle sesent plus à l'aise lorsqu'elle tra-vaille en équipe avec une autrepersonne et que, de ce fait, elle

. comprend mieux les explicationsou ce qu'on lui demande defaire,elle se dira alors qu'elle ap-prendra plus si elle travaille decette façon. Ou au contraire, ellepourra éviter toute interaction di-recte avec une autre personne quila met mal à l'aise dans son ap-prentissage, dès le moment où elleprendra conscience que ces étatsaffectifs influencent son appren-tissage.

Les STRATÉGIES MÉTACOGNITIVES

portent sur la conscience qu'al'individu de pouvoir intervenir surson processus d'apprentissage enadoptant un certain comporte-ment, dit métacognitif. Le proces-sus d'apprentissage comporte gé-néralement trois fonctions inter-actives et concomitantes: cogni-tive, affective et métacognitive.

L'individu intervient donc ici entant qu'être conscient, par uneautorégulation de ce processus. Lesstratégies métacognitives peuvent,quant à elles, porter tant sur lafonction cognitive que sur la fonc-tion affective au moment du pro-cessus d'apprentissage. Ainsi, l'in-dividu peut se mettre dans un étatd'esprit de disponibilité pour ap-prendre et déterminer selon quelleapproche il entreprendra son ap-prentissage: devra-t-il se faire da-vantage d'images mentalesvisuelles ou auditives, ou encoreêtre plus actif en écrivantl'information qu'il veut saisir,comprendre et retenir?

La recherche entourant cescomportements stratégiques faitl'objet d'un domaine d'étude quel'on appelle la métacognition. C'esten en comprenant mieux le fonc-tionnement que les animatrices etles animateurs pourront par la suiteinviter les apprenantes et les ap-prenants à prendre conscience deleur propre fonctionnement et,ainsi, à gérer ces comportementspar l'autorégulation.

" LA MAÎTRISEDE L'ATTENTIONDÉBOUCHE SURLA CONSCIENCE

DE SOI "(JACQUES LANGUIRAND)

Ce qui nous permet de gérer nospropres comportements stra-

tégiques est donc la métacogni-tion; c'est un peu l'apprentissagedu «comment» apprendre. Les stra-tégies d'apprentissage font doncpartie de la métacognition. Lors-que l'on parle de métacognition,selon Mohamed Hrimech, «onparle de connaissances qui n'ontpas pour objet un contenuquelconque comme la chimie, laphysique, la mécanique, mais quiont pour objet les connaissanceselles-mêmes.» La métacognition adeux composantes, la premièreétant la conscience de posséder uneconnaissance ou encore la con-science de soi, et la deuxièmel'autorégulation. «Lorsque jeprends conscience que j'ai des con-naissances sur mes connaissances,je peux aussi agir dessus. C'est parce biais que l'on arrive à agir surson propre processus, que l'on ar-rive à l'autoréguler4», confirmeMohamed Hrimech.

Les stratégies d'apprentissagecomposent ainsi la partie dyna-mique de la métacognition, à sa-voir l'autorégulation. Comment etoù intervient-elle dans le proces-sus d'apprentissage?

Dans le modèle théorique deColette Dufresne-Tassé5, toute lapartie qu'elle nomme «orientation»de l'apprentissage est de l'ordre dela métacognition. En effet, c'est lapersonne qui dirige son proprefonctionnement à ce moment-là;aussi, quand elle en fait une«évaluation», chaque fois que lapersonne passe d'un type d'opé-ration à un autre, c'est-à-dire d'une«cueillette» à une «synthèse», etsurtout à une «intégration de don-nées», il y a une intervention vo-lontaire.

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tient d'en vérifier l'«occurrence»dans nos groupes, est la différencedu sens attribué au terme «com-préhension» par l'un ou l'autregroupe d'adultes: «Alors que tousles adultes alphabétisés définissentla compréhension comme une acti-vité cognitive axée sur le sens dumessage (...«saisir le sens», «savoirce qu'il veut dire», «être capable del'expliquer»), près de la moitié desadultes analphabètes assimilentplutôt la compréhension à d'autresactivités cognitives comme l'audi-tion et la mémorisation.» De plus,et conformément à leur définitionde la compréhension, ceux-ci «at-tribuent leurs difficultés de com-préhension au vocabulaire utilisé,à la vitesse de débit verbal dulocuteur, à son accent, etc., tousdes facteurs qu'on pourrait appe-ler circonstanciels ou périphéri-ques, par opposition à des facteursplus centraux, comme la structuredu message, invoqués par les al-phabétisés.» Bibeau pense que cesinterprétations dissemblablespourraient représenter une «dif-férence fondamentale» entre lesadultes alphabétisés et non alpha-bétisés quant à leur «conceptionde la nature même du processus decompréhension8.» (Page 65)

DANS L'APPRENTISSAGEDE LA LECTURE

Plusieurs études sur l'appren-tissage de la lecture conduisent àla conclusion qu'il y a mauvaiseutilisation ou absence de straté-gies dans le cas de personnes ayantdes difficultés à lire efficacement.Les lectrices et les lecteurs «faibles»ne posséderaient pas les stratégiesnécessaires, ou les utiliseraient mal.

Une étude faite par Guthrie etTyler en 1976, dont Marc Bibeaurapporte les résultats dans son

mémoire, révèle que les mauvaislecteurs ont des problèmes de com-préhension dus à un décodage in-complet, attribuable à une inca-pacité d'identifier un nombre suf-fisant de mots pour pouvoir don-ner du sens à ce qu'ils lisent.

Finalement, Bibeau opère unrapprochement, en ce qui concernel'utilisation de bonnes stratégiesdans l'apprentissage de la lecture,entre les adultes analphabètes etles enfants ayant des difficultésd'apprentissage; les deux pour-suivraient un objectif de décoda-ge plutôt que de compréhension.Il rejoint ici l'approche de FrankSmith sur l'apprentissage de lalecture (voir l'encadré à ce sujet).

À partir de ses constatationsen matière de compréhension descommunications orales par lesadultes analphabètes, Bibeau re-commande, dans le cas de com-munications écrites, que l'objectifde compréhension soit clairementdéfini aux participantes et parti-cipants et que la méthode péda-gogique utilisée pour l'apprentis-sage de l'écrit ne permette aucuneconfusion à cet égard. En ce sens, ilpropose comme stratégie de trans-poser à la lecture des comporte-ments équivalents en communi-cation orale: faire répéter unlocuteur et relire un écrit, ou poserdes questions et porter plus atten-tion au texte et au contexte. Il pré-conise, finalement, pour favoriserl'autonomie des personnes anal-phabètes par rapport à la lecture etpour rehausser leur image de soisouvent négative, de baser notreaction auprès d'eux sur le faitqu'elles peuvent exercer un cer-tain contrôle sur leur niveau decompréhension grâce à l'utilisationdélibérée et autonome de diversesstratégies.

Les styles cognitifs:la diversité des formesdans l'apprentissage

La personne peut non seule-ment apprendre des éléments

nouveaux, mais elle peut aussi dé-couvrir des façons nouvelles d'yparvenir. Celles-ci constituent desmodes d'accès à l'information, àla réalité. Selon la personnalité desapprenantes et apprenants, lesstratégies d'apprentissage peuventvarier pour s'adapter à cette réalité.Ces différents traits de personna-lité, dans le contexte de l'apprentis-sage, sont abordés en termes destyles cognitifs; on doit s'y référersurtout à titre de «constructionshypothétiques qui nous aident àexpliquer le processus d'apprentis-sage», nous met en garde Marie-Paule Dessaint12.

DIFFÉRENTES APPELLATIONS

Si, quand il s'agit de définir lephénomène de la diversité des for-mes dans l'apprentissage, les «spé-cialistes» de la question présententgénéralement des versions assezanalogues, il n'en va pas de mêmeen ce qui concerne les termes qu'ilschoisissent pour le qualifier.

Marie-Paule Dessaint définitles styles cognitifs comme des habi-tudes dans la manière de traiterl'information, ce qui signifie lesmoyens habituellement utilisés parles apprenantes et les apprenantspour percevoir, penser, résoudredes problèmes, se rappeler, etc. Ils'agit de l'ensemble des approchesmises en oeuvre par une personnedans une interaction avec un envi-ronnement cognitif. Elle reprendaussi, en des termes différents, lescaractéristiques établies par ClaudeLamontagne, le spécialiste québé-

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cois des tests servant à définir lesprofils d'apprentissage, à partir destyles correspondants.

Parlant du même phénomè- ne, De la Garanderie utilise, poursa part, un vocabulaire différentpour qualifier des «manifestations»identiques. Ainsi, il parle de gestesmentaux (habitudes évocatives) enrapport avec les actes cognitifs del'attention, de la compréhension

et de la mémorisation; il utilise leterme de profils pédagogiques pournommer les différents styles. PourFrank Smith, dans l'apprentissagespécifique de la lecture, il s'agirade modes: apprendre par l'action(faire), par l'observation (voir) etpar l'écoute (entendre). Dans l'ap-proche instrumentale-fonction-

elle du théoricien-praticien JeanPatry, c'est en termes de stylesd'identité fonctionnelle que s'éta-blissent les profils des personnesque l'on soumet à son test. De plus,plusieurs spécialistes font interve-nir les deux hémisphères cérébrauxdans leur classification des habitu-des cognitives des apprenantes etapprenants.

Finalement, s'ajoute à ces ap-proches plus particulièrementpédagogiques celle de la PNL (Pro-grammation neurolinguistique)qui en transpose une application àla pédagogie en se basant sur dif-férentes caractéristiques de l'ap-prentissage . On parle alors, en PNL,de catégories sensorielles (voir,écouter et ressentir) ou de systèmesde représentation de la réalité, quis'observent dans ce qui est appelédes consignes ou indices d'accès13.

LES CATÉGORISATIONSRESPECTIVES

Dans l'éventail des diversesappellations du phénomène -généralement défini comme des

traits de la personnalité qui influ-encent la personne dans son ap-proche tant cognitive qu'affectiveet métacognitive lors du processusd'apprentissage - on retrouve éga-lement des variations dans lesnoms attribués aux catégoriesétablies par ces spécialistes. Cepen-dant, même sous des dénomina-tions diverses, ceux-ci font référen-ce aux mêmes types de manifes-tations, dans la plupart des cas.

LES STYLES COGNITIFS

Plusieurs auteur-e-s définis-sent les différents styles d'apprentis-sage à partir de trois caractéristi-ques, qui donnent trois styles cor-respondants. 11 s'agit de la carac-téristique de la vue, de celle del'ouïe et de l'élément psycho-mo-teur, qui définissent des individusen termes de «visuels», d'«auditifs»et de «kinesthésiques». À ces troiscomposantes des styles les plusrépandus dans la littérature s'ajou-te une quatrième qui qualifie lesindividus qui en manifestent lescaractéristiques d'«audio-visuels».Les principaux spécialistes qui uti-lisent cette terminologie et dont ilest question dans ce dossier sontAntoine De la Garanderie3, Deny-se Mayano1, et les tenants del'approche de la PNL13.

Marie-Paule Dessaint12 orga-nise ces différents styles dans unesynthèse des principales approchesdes auteurs, en les complétant parquelques autres qui peuvent aussise classer dans cette catégorisation.Certains des éléments décrivant cesstyles portent plus sur l'aspect co-gnitif, alors que d'autres - quipourraient paraître plus «farfelus»- touchent davantage l'aspect af-fectif de la personnalité. Nous lesprésentons à titre indicatif seule-ment afin d'aider le repérage des

tendances dans les comportementsdes apprenantes et apprenants.

Les personnes destyle visuel prédominant

Toute personne dont le styleparticulier de perception del'information (la réalité) passed'abord par la vue, qui se fie à cequ'elle voit tant dans son envi-ronnement que dans sa tête pourapprendre et communiquer12.

La caractéristique des person-nes visuelles, dans leurs procédésde travail intellectuel, réside dansl'habitude qu'elles ont développéede produire des évocations men-tales visuelles tant au moment del'attention, qu'à celui de la com-préhension et de la mémorisation,d'après De la Garanderie. Leurs re-présentations mentales se présen-tent donc sous forme d'images oude figures.

La personne visuelle seraitplutôt sensible aux expressions duvisage et au ton des personnes quis'adressent à elle, rapporte Marie-Paule Dessaint; elle poursuit enprécisant que ce type de personne«s'attacherait surtout aux détails,à la lettre de ce qui est dit (...) Lapersonne visuelle réfléchirait à tra-vers sa parole et organiserait sapensée en parlant12.» (Page 23) Elledeviendrait alors volubile et ex-travertie en situation de confiance.

En situation d'apprentissage,Marie-Paule Dessaint nous informeque l'adulte visuel privilégierait desexplications claires, précises etconcrètes s'appuyant sur des sché-mas et des dessins. Il serait par con-tre ennuyé par les explicationsthéoriques ou abstraites, préférantun enseignement inductif. Cetadulte éprouverait le besoin d'êtreguidé par des images et autresreprésentations visuelles pouvant

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l'aider à se situer dans l'espace.Pour la personne visuelle, le be-soin de toucher serait toujoursprésent et interviendrait commeun prolongement de son oeil. Elletermine en apportant ces élémentsqui réfèrent davantage à l'aspectaffectif: «la personne visuelle ac-cepterait difficilement l'échec. Elletendrait alors à se déprécier immé-diatement et n'accepterait de re-commencer qu'avec de l'aide. Sielle n'a pas appris à s'auto-évalu-er, elle tendrait à se sous-estimerou à se surestimer. Elle se fieraitbeaucoup à la réaction des autres.Elle rechercherait avant tout laréussite personnelle12.» (Page 24)

On peut rencontrer deux sous-types de visuels: le visuel-passif etle visuel-actif. Le premier seraitd'un calme apparent au pointd'apparaître comme un auditif. Ilne s'exprimerait pas beaucoup; ilaurait un regard scrutateur tout ense disant timide. Le deuxième, poursa part, ne pourrait rester inactif etchangerait souvent d'activités pourse détendre, il ne pourrait terminerun travail sans en avoir d'abordentrepris plusieurs à la fois.

Les personnes destyle auditif prédominant

La personne dont le style deperception est plutôt auditif se fie àce qu'elle entend et à ce qu'elle sedit dans sa tête lors de son appren-tissage ou dans sa relation à l'envi-ronnement12.

La caractéristique des procé-dés intellectuels chez les person-nes auditives réside dans l'habitu-de qu'elles ont développée de se pro-duire des évocations mentales audi-tives pour chacun des modes établispar De la Garanderie. Ainsi, elles serépètent l'information mémoriséesous forme de langage intérieur.

En matière de relations inter-personnelles, la personne auditiveserait quelqu'un de réservé qui s'ex-primerait peu. C'est en écoutant etréfléchissant qu'elle organiseraitsa pensée et sa réflexion, selonMarie-Paule Dessaint, qui préciseque ce genre de personne préfèredes explications succinctes et syn-thétisées faisant appel à des no-tions abstraites. Sa préférence iraitpour un enseignement de typedéductif appuyé sur de l'informa-tion orale. De plus, son apprentis-sage serait facilité si on la situaitdans le temps à l'aide de formulestemporelles. Elle aurait tendance àrecommencer après un échec ententant de réussir par d'autresmoyens, même si elle en éprouvede la déception. Par contre, la per-sonne auditive manquerait d'ob-servation visuelle et tactile, croiraitles autres sur parole et elle seraitplus habile intellectuellement quemanuellement12.

Il existerait les mêmes sous-types chez les personnes auditives,l'un passif et l'autre actif. Les au-ditifs-passifs auraient une attitudeflegmatique. Ils se percevraientcomme des personnes lentes et in-comprises et seraient parfois dé-primés. Tandis que les auditifs-actifs posséderaient une capacitéde travail impressionnante, maisauraient tendance à s'éparpiller;en travaillant, ils se concentre-raient au point de ne pas se rendrecompte que quelqu'un leur adres-se la parole.

Les personnes de stylekinesthésique prédominant

La caractéristique prédomi-nante chez ces individus, résideraitdans l'action ou l'expérience. Ilsapprendraient mieux en faisantles choses qu'ils veulent appren-

dre. C'est par l'intermédiaire deleur corps tout entier qu'ils feraientleur apprentissage. Ils auraientdonc besoin de bouger pour quel'attention se produise, pour queviennent les idées et que se pour-suive la réflexion, la compréhen-sion, la mémorisation ou la remé-morisation et que s'accomplisse laconcrétisation de l'apprentissage1.

Ces personnes se situeraientau niveau des sensations corpo-relles, de leur senti. Comme lessensations corporelles qui leur vien-nent de l'extérieur surtout se prê-tent assez mal au contenu de l'en-seignement traditionnel, ces per-sonnes auraient des difficultés àacquérir l'apprentissage engénéral. En effet, les moyens d'en-seignement utilisés, les techniquesactuelles en pédagogie ne tiennentaucun compte de ce mode d'ap-proche, sinon pour l'acquisitiond'habiletés d'ordre psycho-moteur.«Un des stéréotypes classiques enmilieu scolaire est celui de l'athlètedésemparé dès qu'il pénètre dansl'univers visuel et auditif des coursmagistraux, des livres et des ta-bleaux noirs et, en contrepartie,celui du petit maigre studieux quia toujours des «A» mais pour quil'univers kinesthésique des sportssemble semé d'obstacles insurmon-tables13.» (Page 11)

Les personnes destyle audio-visuel

Les personnes qui se fient à la fois àce qu'elles voient, entendent et sedisent dans leur tête, n'appren-draient ou ne communiqueraientavec l'environnement pas différem-ment des autres de styles visuel etauditif. Si différence il y a, c'est d'a-bord dans le fait qu'elles auraientappris très tôt à utiliser les deux ap-proches de manière concomitante.

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Ces Individus, selon Marie-Paule Dessaint, n'éprouveraientpas de difficultés sur le plan sco-laire, et feraient preuve d'un excel-lent rendement en matière depensée logique, de fluidité verbale,de pensée créative figurée, etc.12

LES STYLES PRATICIENET THÉORICIEN

Les personnesde style praticien

Cette catégorisation appar-tient à Claude Lamontagne (1984);les éléments dont il est question icisont rapportés par Marie-PauleDessaint dans son étude sur lesdifférents styles d'apprentissage12.

Les individus de style prati-cien correspondraient à ceux destyle visuel. Ils seraient avantagésdans leur apprentissage par uncontact direct avec les personnes,les choses et les événements, ensomme par la réalité immédiate.Ils pourraient présenter des carac-téristiques secondaires, et être enmême temps de type sensorimo-teur ou de type médiateur. «Dansle premier cas, ils aimeraient êtreen mouvement pour apprendre etrechercheraient la manipulationde la réalité concrète (activités d'ap-prentissage sur le terrain ou en la-boratoire). Dans le second cas, ilsressentiraient le besoin de se situerdans la réalité concrète et mou-vante pour mieux apprendre, maissans pour autant ressentir le besoinde manipuler12.» (Page 28)

Les personnes de stylethéoricien

Le style théoricien regrou-perait davantage des individusauditifs. L'apprentissage de ces der-

niers se trouverait facilité par desconcepts ou des signes abstraits,tout ce qui a déjà été traduit enmots, en chiffres ou en signes ouqui exprime des rapports de propo-sition ou de relation. Ces person-nes peuvent avoir une tendance àl'état d'auditeur ou celui de lec-teur. C'est en écoutant de l'infor-mation qu'apprendraient davan-tage les individus du premier type,soit des enregistrements de toutessortes, cassettes, disques, etc., oupar l'écoute de la radio ou de latélévision; le second type ap-prendrait mieux en lisant dumatériel écrit varié12.

LES STYLES D'IDENTITÉ

FONCTIONNELLE

À partir d'un test sur l'identitéfonctionnelle, la classification deJean Patry14,7 établit quatre profils,qui correspondent aux quatremodes de son modèle d'interven-tion fonctionnel: «ressentir», «ex-plorer», «comprendre» et «agir».De ces profils, qui définissent descompétences convergentes, émer-gent les différents styles, au nom-bre de quatre également.

En premier se trouve le styleémotif-perceptif, dont le modedominant s'apparente au «ressen-tir». Les principales caractéristiquesde ce profil sont la capacité de sesituer dans le présent, de fairepreuve d'ouverture, de beaucoupd'affectivité et d'intuition.

Le deuxième, dont le modedominant est l'exploration («ex-plorer»), est le style perceptif-cognitif. C'est dans la cueillette dedonnées, dans leur sélection, leurorganisation et leur description querésident les principales compéten-ces de ce profil.

Vient ensuite le style cogni-

tif-actif dont le mode dominant sesitue dans le «comprendre». Lescompétences entourant les con-cepts, le jugement, le raisonnementet la prise de décision se retrouventplus particulièrement dans ceprofil.

Le dernier, le style actif-émo-tif, a pour mode dominant 1' «agir».Les compétences rattachées à ceprofil résident dans la capacité deprendre des risques, des initiatives,des responsabilités ainsi que dansla capacité de faire des évalua-tions.

LES HÉMISPHÈRES CÉRÉBRAUX

D'autres chercheur-e-s fon-dent leur catégorisation sur la spé-cialisation des hémisphères du cer-veau; dans ce sillon, on retrouveaussi l'approche qui tient comptedes dominantes droite et gauche.

Il est généralement reconnuque l'hémisphère cérébral du côtégauche du cerveau gère le fonction-nement moteur et sensoriel droitdu corps, et que l'hémisphère céré-bral droit gouverne le côté gauchedu corps. Ce qu'il est convenu d'ap-peler «la latéralité croisée» du cer-veau. Cependant, les deux hémi-sphères du cerveau travaillent en-semble.

Même si le fonctionnementdu cerveau se fait globalement etque les hémisphères travaillent eninteraction, l'un des deux prendraitle «leadership» selon les circons-tances du travail à accomplir; «l'hé-misphère dominant serait celui quesa spécialisation rendrait plus apteà régler un problème donné12.»(Page l8) On a prolongé cette «spé-cialisation» des hémisphères aufonctionnement cognitif spécia-lisé de ceux-ci. «Le cerveau droitgouvernerait la pensée concrète,globale et figurée (formation des

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images), alors que le cerveau gau-che serait le cerveau de la penséelogique et abstraite», relate Marie-Paule Dessaint12, citant ainsiLafontaine et Lessoil (1984). Les«deux cerveaux» n'auraient pasles mêmes fonctions: c'est par lecôté droit du champ visuel quesont identifiées les lettres alors queles figures géométriques le sont parle côté gauche; les apprentissagesconcrets s'effectuent du côté droitet les apprentissages théoriques ducôté gauche.

Une prévalence fonctionnelledu côté droit du cortex cérébralserait présente chez le visuel, alorsque chez l'auditif, il s'agirait d'uneprévalence fonctionnelle du côtégauche.

Chez le visuel, l'hémisphèredroit dominant s'activerait surtoutpar des intonations et des images.De cet hémisphère dépendraientla perception spatiale, l'intuition,et ses représentations mentales con-sisteraient en images mettant enscène des êtres et des choses. L'hé-misphère droit visualiserait les fi-gures, les équations et les règles degrammaire comme elles se pré-sentent sur papier. Le «savoir-res-sentir», avec sa pensée globale, sesmodèles, ses configurations, saconstruction de classes logiques,etc., relèverait de l'hémisphèredroit. Le visuel posséderait une in-tériorité projetée. Il fonctionneraitde façon intemporelle et aurait lamémoire du vécu personnel et desobjets. Les émotions maîtresses dela personne visuelle se caractéri-seraient par le pessimisme, la mo-rosité et le mal-être. Parmi les qua-lités du visuel, on retrouverait lavivacité et un esprit de saine com-pétition de manière privilégiée.

Chez l'auditif, la dominanteappartiendrait à l'hémisphèregauche. Celui-ci s'exprimerait par

des mots et des concepts; ce lan-gage serait abstrait, symbolique etthéorique. La parole, la penséelogique, l'analyse seraient ses do-maines de prédilection, ainsi qu'unfonctionnement linéaire temporel.Chez la personne auditive, les re-présentations mentales pren-draient une forme verbale. Elle en-tendrait les énoncés des règles degrammaire et de mathématiques,souvent en les écrivant. Le «savoir-penser», avec une facilité pour lapensée, l'écriture, la lecture, lecalcul, etc., appartiendrait à cethémisphère. La projection seraitintériorisée chez la personne audi-tive. Elle aurait la mémoire desmots et des archives. Les émotionss'exprimeraient habituellement demanière positive par l'optimismeet la bonne humeur. Ses qualitésseraient le calme, la profondeur etla coopération.

DEXTRALITÉ, CERVEAUGAUCHE ET VICE VERSA

Pour la plupart des personnes,la partie gauche du cerveau joueun rôle important dans l'acqui-sition du langage, c'est-à-dire quela prédominance va à la maindroite (dextralité). Cependant,Frank Smith estime que cette spé-cialisation n'est pas universelle,car au moins dix pour cent despersonnes ont un hémisphère droitresponsable des fonctions du lan-gage.

Chez ces personnes, dont lamain dominante est la gauche et àlaquelle correspond l'hémisphèredroit, Denyse Mayano est d'avisque plusieurs facteurs reliés au typede société qui est la nôtre - avec unfonctionnement basé sur le moderationnel - compenseraient ce«déséquilibre». La situation pour-

rait s'avérer différente dans d'au-tres sociétés ou cultures dont le mo-de de fonctionnement a tendanceà être plus intuitif, par exemple.

Par contre, elle croit qu'il enest tout autrement lorsqu'il s'agitde l'oreille; ainsi, les personnes quiont une prédominance de l'oreillegauche pourraient éprouver quel-ques problèmes. En effet, c'est d'a-bord par l'oreille droite que l'onentend. «Pour que le message ailledirectement au niveau du cerveau,habituellement, il doit être perçuune parcelle de seconde par l'oreilledroite d'abord. S'il est perçu avantpar l'oreille gauche, le message par-vient au cerveau mais avec un dé-calage de quelques mini-secondesentre le moment où le son est émiset celui où la personne l'entend»,nous précise Denyse Mayano1.

LA PROGRAMMATIONNEUROLINGUISTIQUE

Il s'agit ici d'un modèled'explication des procédés «car-tographiques» de la réalité qu'uti-liserait le cerveau pour organiserl'environnement. Chaque individuposséderait sa carte de l'univers, etles premiers éléments constitutifsde ces cartes seraient les systèmessensoriels, véritables représenta-tions du monde. La PNL13 les dési-gne sous le nom de catégoriessensorielles. Il y en a quatre: l'au-dition (ouïe), la vision (vue), lakinesthésie (sensations corporelles)et l'olfaction ou gustation (odoratou goût), ce dernier n'étant toute-fois pas très développé dans nossociétés. Les sources qui les ali-mentent peuvent être «externes»(e) - regarder, écouter, sentir, goûter- ou «internes» (i) - se rappeler ouimaginer une image, un son, unesensation, une odeur ou un goût

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quelconque. Ainsi, chacune desprincipales catégories peut se si-tuer dans le cadre d'un des stadesde représentation: «voir», «écou-ter» et «ressentir».

Les indices d'accès sont desmanifestations de mécanismesneurologiques qui serviraientd'outils pour aider à capter l'in-formation constituant le systèmecartographique d'un individu. Cesindices d'accès pourraient se per-cevoir visuellement; il faudraitdonc leur porter attention. Ils se-raient surtout observables chez lespersonnes droitières. «En général,l'évocation d'un souvenir relèvede l'activité d'un hémisphèrecérébral, tandis que la construc-tion d'une expérience relève de cellede l'autre hémisphère. C'est pour-quoi (les) yeux s'orientent plutôtvers la gauche ou vers la droiteselon le genre d'activité cérébraleà laquelle (la personne se livre)13.»(Page 4) Dans l'observation dulangage, les mots utilisés pour-raient servir aussi d'indices, surtoutles verbes comme voir, entendre,ressentir, dire, montrer, écouter,paraître, etc. Ainsi, pour voir,montrer, paraître (au présent oupassé), le regard se lèverait vers lagauche; pour voir, montrer,paraître (au futur), il se lèveraitvers la droite. Pour les verbes en-tendre, écouter (au présent etpassé), le regard s'orienterait hori-zontalement vers la gauche; alorsque pour le futur, il s'orienteraithorizontalement, mais vers ladroite cette fois. Pour le verbe dire(présent, passé ou futur), le regards'abaisserait vers la gauche, tandisque pour le verbe ressentir (présent,passé ou futur), il s'abaisserait versla droite.

Par exemple, dans le cas d'unepersonne visuelle, le regard levévers la gauche, indiquerait qu'elle

produit des images eidétiques; s'ilest levé vers la droite, c'est qu'elleest en train de construire ses pro-pres images. La respiration auraittendance à devenir plus courtelorsque la personne se fait unereprésentation visuelle. «Leschampions en orthographe diri-gent invariablement leur regardvers le haut et à gauche et voient lemot entier écrit ou imprimé13.»(Page 14)

Une personne auditive, dontle regard est baissé vers la gaucheou la tête penchée dans la positiondu «téléphone», entretiendrait undialogue intérieur; par contre, sison regard est horizontal, soit vers

la droite ou vers la gauche, la per-sonne opérerait une constructionou une réconstruction auditive.«Quand une personne prononceintérieurement un mot, elle inclineinvariablement la tête et le regardvers la gauche13.» (Page 14)

Chez la personne kinesthé-sique, un regard baissé vers la droiteou une main touchant l'axe cen-tral du corps indiquerait qu'elle esten train d'éprouver une sensationcorporelle. Elle finirait même parcoder, dans sa mémoire muscu-laire et motrice, jusqu'à l'ortho-graphe des mots. «Un mot or-thographié correctement lui pro-cure une sensation agréable, tandis

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DOSSIER

qu'une orthographe fautive lui pro-cure une sensation désagréable13.»(Page 16)

QUELLE IMPORTANCE ACCORDERÀ CES DIFFÉRENTS TYPESD'APPRENTISSAGE?

L'adulte peut, selon les cir-constances, tout aussi bien adop-ter un style plutôt qu'un autre pourrépondre à différents typesd'interlocutrices ou d'interlo-cuteurs; cependant, en cas de dif-ficulté, un style particulier plusdominant a tendance à revenirspontanément.C'est ce sur quoi veut insister Marie -

Paule Dessaint, quand elle évoqueKeefe (1979) pour qui «l'individuévoluerait du mode psychomoteurdurant l'enfance, au mode visuel,puis, éventuellement au mode au-ditif en vieillissant. Il existeraitévidemment des exceptions et, chezl'adulte, ces trois modes fonction-neraient en coopération avec unepréférence pour l'un d'entre eux.12.»(Page 17)

Pour Smith, par ailleurs, ilfaut éviter de confondre une sim-ple disposition avec le comporte-ment global d'une personne. Ilprécise que chez la majorité desgens, le cerveau fonctionne com-me un tout, et non par entités in-

dépendantes d'un hémisphère àl'autre. Il est dangereux, nous dit-il, de confondre «une dispositionstructurelle, qui ne concerne que lefonctionnement interne du cer-veau, avec la manière dont unepersonne fonctionne globalement.Il n'existe pas de gens qui ne pen-sent qu'avec l'hémisphère droit oul'hémisphère gauche, même si leurpersonnalité et leur conduitedénotent des tendances plus ana-lytiques ou plus réflexives, face àla vie, et à l'apprentissage. Il fautdire qu'un type particulier depréférence ou d'activité est domi-nant, mais non qu'un hémisphèreest dominant".» (Page 70)

Toutefois, en appui aux te-nants de ces approches, De la Ga-randerie rapporte que «le profes-seur Paul Laget et sa collabora-trice, le docteur Creff, ont pu cons-tater une corrélation entre leshabitudes mentales visuelles, au-ditives ou mixtes et la forme desondes cérébrales obtenues à partirde stimuli visuels. Voici donc, dit-ilcinquante sujets, dont nous avionstracé le «profil pédagogique», dontcertains étaient des visuels, d'au-tres des auditifs, d'autres enfin desmixtes (visuels et auditifs), quipassent un électro-encéphalo-gramme; on constate la spécificitéde la forme de l'onde cérébrale desvisuels, celle des auditifs aussi, celledes mixtes également. Faut-il pré-ciser que c'est d'une façon entière-ment indépendante que les profilspédagogiques d'une part, et la for-me des ondes cérébrales d'autrepart, ont été comparés et que lescorrélations sont apparues3.»(Page 124) Il précise égalementqu'un deuxième profil pédagogi-que peut s'acquérir de façon vo-lontaire, plus tardivement que lepremier et de manière beaucoupmoins implicite.

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motivation de départ n'est pas in-trinsèque que la personne n'ap-prendra pas. Toutefois, dans le cas

d'une personne qui n'est pas in-téressée, qui ne veut pas appren-dre, on peut négocier avec elle le

fait qu'elle ne dérange pas legroupe. On peut utiliser le groupepour négocier les règles du jeu. Lessituations d'apprentissage que lesanimatrices établiront avec lespersonnes du groupe, ne doiventpas être créées en assumant lesdécisions politiques du gouverne-ment ni les décisions individuellesdes personnes9.»

Par contre, Jean Patry fait re-marquer que la «surmotivation»peut par ailleurs être un facteurtout aussi perturbant que l'anxiété

en ce qui concerne le bon fonction-nement dans un apprentissage.

LA CONSOMMATION DE DROGUES(MÉDICAMENTS OU ALCOOL)

Un autre aspect du compor-tement affectif qui nous sembleavoir son importance en alphabé-tisation, c'est de pouvoir jouir detoutes ses facultés au moment d'ap-prendre. Toutes les personnes à quinous avons posé la question del'impact de la consommation dedrogues sur le processus d'appren-tissage reconnaissent unanime-ment que celle-ci affecte directe-ment la perception discriminatoireou l'attention; cette incidence sur-vient au tout début du processus,empêchant ainsi son déroulementdans des circonstances favorables.

Sur le plan intellectuel, la con-sommation de drogues perturbe laperception, nous dit MohamedHrimech, «dans le sens de la défa-voriser; peut-être que cela enlèveun peu de stress chez certains indi-vidus, mais cela dérange énormé-ment leur perception4.»

Expérience enmétacognitionauprès d'adultes

L a plupart des applications dela théorie métacognitive ont

été expérimentées auprès d'adultesalphabétisés, et en particulier au-près d'étudiantes et d'étudiants uni-versitaires. Mais cela ne signifiepas que ces personnes emploientdes stratégies métacognitives com-pliquées pour comprendre des tex-tes ou acquérir des connaissances.

La thèse de Mohamed Hri-mech10 porte essentiellement surles stratégies utilisées dans leursétudes par des adultes universitai-res. Hrimech a cherché à dégagerces stratégies ou, selon ses proprestermes, «les démarches qu'ils uti-lisent pour apprendre ou pour faireface à une difficulté rencontrée aucours de l'apprentissage.» Voici lasynthèse de son analyse des répon-ses données à ses questions, tellequ'il l'a présentée en entrevue:

Dans le domaine universitai-re, lorsque les sujets apprennent,ils cherchent d'abord, à apprendreen utilisant des liens, en établis-sant des liens entre le contenu d'unobjet d'apprentissage et un autreélément extérieur; il peut s'agird'un livre, de leurs connaissancesantérieures ou d'un autre guide. Lerecours à l'analogie est la stratégiela plus importante qui soit ressor-tie. La recherche de liens est essen-tielle. Pour bien apprendre, il fautfaire des liens avec quelque chosed'autre; sinon, ce que l'on apprendreste isolé.

La deuxième stratégie par or-dre d'importance, c'est ce que Hri-mech appelle une période de la-tence, pendant laquelle les gensarrêtent leur processus momen-

tanément pour le reprendre plustard. Cette période est importantepour les sujets. «Je ne peux pas direpourquoi, mais j'avance l'hypothè-se que cette période permet proba-blement une certaine maturationintérieure. L'individu ne fonctionnepas de façon consciente, mais ilcontinue à apprendre, il continueà être travaillé par le contenu qu'ilvient d'apprendre. Lorsqu'il re-prend son apprentissage, il ne lereprend pas à l'endroit où il l'a ar-rêté. Il a fait un cheminement pen-dant cette période de latence. Il sepeut même que beaucoup de cho-ses se soient opérées pendant cetemps. C'est comme s'il avait, ens'imprégnant de cela, intégré unepartie de ces connaissances4.»

La troisième stratégie concer-ne davantage le côté affectif. Il s'a-git de se placer dans un état dedisponibilité, d'ouverture. Car sou-vent, on se met dans des états oùl'on se ferme à beaucoup d'ap-prentissages, ou l'on refuse carré-ment d'apprendre.

L'imagerie mentale appli-quée à l'apprentissage constitueune pratique assez répandue.Développer une image mentale dece que l'on est en train d'apprendre,du contenu, aide à apprendre.

Les étudiants ont dit que cequi les aidait beaucoup, c'était defaire des schémas de visualisation,car avec les schémas, ils peuventclarifier énormément de choses enles percevant d'une manièrevisuelle; il s'agit d'une façon deréorganiser les contenus, de les re-structurer à sa manière.

Il faut aussi mentionner la di-versité des sources et des points devue. Apprendre d'une seule source,que ce soit d'une personne ou d'unmanuel, reste limitatif. Quand ondiversifie les sources avec des pointsde repères variés, au contraire, on

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multiplie les apprentissages. Ladiscussion avec des pairs est sou-vent utilisée par les gens qui ap-prennent ainsi entre eux.

Dans le domaine du concret,il y a la préparation de la situationd'apprentissage. Avant de com-mencer son apprentissage, il fautque l'individu ait tous les élémentsdont il a besoin dans son environ-nement cognitif.

Autre stratégie souvent em-ployée par les étudiantes et les étu-diants: commencer par les pointsles plus simples de l'apprentissage.Face à une difficulté, ce qui lesaidait le plus était d'identifier ladifficulté; de s'autoquestionner surleur fonctionnement, d'avoir re-cours à autrui et au travail enéquipe4.

Quelques-uns de ces compor-tements stratégiques sont sûrementtransférables à l'adulte en situationd'alphabétisation, même s'ils sontmis en application dans le cadred'études universitaires. Utiliser l'a-nalogie, laisser passer du tempspour permettre une intégration del'apprentissage, se préparer avantl'apprentissage, identifier les diffi-cultés en s'interrogeant sur son pro-pre fonctionnement, en sont quel-ques exemples.

Cependant, très peu d'étudesont été menées sur le fonctionne-ment cognitif des adultes analpha-bètes. Deux personnes au Québec,à notre connaissance, se sont inté-ressées plus particulièrement à lamétacognition chez des adultesanalphabètes: Pierre Audy, qui tra-vaille sur le phénomène de la mé-tacognition en alphabétisation desadultes, et dont l'approche feral'objet d'un prochain dossier, etMarc Bibeau, dont le mémoire demaîtrise en psychologie traite précisé-ment de ce sujet, mais seulement auniveau des communications orales.

Marc Bibeau mentionne d'a-bord une étude menée en 1930 enRussie chez des paysans analpha-bètes. Le chercheur Luria a trouvéque ces adultes analphabètes pou-vaient effectuer des catégorisations,mais qu'ils «avaient plutôt ten-dance à regrouper les objets quileur étaient présentés dans descatégories qu'on peut appeler fonc-tionnelles8.» (Pages 11-12) Ainsi cespersonnes, à qui l'on demandaitde classer quatre objets familiers -une scie, une pelle, une hache etun billot - ne les ont pas regroupés,contrairement à ce à quoi l'onaurait pu s'attendre, dans unecatégorie «outils» comprenant lascie, la hache et la pelle; elles ontrangé dans une catégorie «fonc-tionnelle» la scie, la hache et le bil-lot, écartant la pelle qui n'avaitaucune utilité dans la coupe dubois. Peut-être devrait-on opérerici un rapprochement avec les con-cepts concrets que Gagné définitcomme la forme la plus simple dela conceptualisation. Ces conceptsconstituent des classes qui serventà identifier des objets de l'envi-ronnement, des qualités d'objets,des événements ainsi que des rela-tions entre ceux-ci.

Bibeau livre aussi la conclu-sion d'une autre étude (Scribner etCole, 1973) sur les différences no-tées concernant l'habileté à fairedes classifications chez des adultesayant des degrés de scolarité dif-férents. «Ces différences ne tien-nent pas tant aux classificationselles-mêmes qu'aux raisons invo-quées pour former les catégories.Les raisons données par les scola-risés montrent que ceux-ci établis-sent leurs catégories en fonctiond'un critère sémantique ou despropriétés physiques des objets; lesnon- scolarisés donnent plutôt desraisons arbitraires8.»(Page 12)

Il évoque, par ailleurs, uneétude de Gambrell et Heathingtonréalisée en 1981 et comparant lesavoir métacognitif d'adultesanalphabètes à celui d'étudiantsde niveau cégep en matière de lec-ture. Les résultats de cette recher-che ont démontré que les adultesanalphabètes «n'ont qu'une con-ception élémentaire de l'activitéde lecture et connaissent peu destratégies8.» (Page 19)

LA MÉTACOGNITIONET LA COMMUNICATION ORALE

CHEZ LES ADULTES ANALPHABÈTES

Bibeau a ainsi démontré, deson côté, qu'il est «très pertinentd'étudier le savoir métacognitif desadultes analphabètes afin d'iden-tifier les savoirs dont ces adultespourraient tirer profit dans l'ap-prentissage de la lecture et del'écriture.» Il ajoute que c'est sur lacompréhension de communica-tions orales qu'il importe de s'arrê-ter, à cause de l'intérêt particulierqu'elle représente comme facteurd'adaptation, «domaine où cesadultes sont susceptibles d'avoirdéveloppé des habiletés d'autoré-gulation et acquis certains sa-voirs8.» (Pages 18, 20)

Il s'est donc lui-même penchésur leur savoir métacognitif dansla compréhension des communi-cations orales, les variables enprésence étant les «personnes», les«tâches», les «objectifs» et les«stratégies». Les «personnes» sontles protagonistes en interactiondans la communication orale, lesavoir portant sur le fait que l'in-dividu peut reconnaître ou nond'avoir de la difficulté à compren-dre ce que l'autre dit et d'en exami-ner les causes; tandis que dans la«tâche», le savoir se rapporte à l'ac-te de comprendre; quant à la va-

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riable «objectifs», il s'agit de véri-fier si l'individu a conscience del'existence d'objectifs différents encommunication orale; le savoirportant sur les «stratégies» se rap-porte à deux types de stratégiespouvant être utilisées par l'indivi-du en communication, l'une axéesur l'objectif, aspect cognitif, et ladeuxième sur les moyens d'attein-dre cet objectif, aspect métacognitif.

L'objet de sa recherche, à sa-voir étudier le savoir métacognitif

des adultes analphabètes en ma-tière de compréhension de commu-nications orales et de le comparer

à celui d'adultes alphabétisés,devait aussi lui permettre de «voirdans quelle mesure le déficitmétacognitif caractéristique desenfants en difficulté d'apprentissa-ge est une caractéristique partagéepar les adultes analphabètes». Il aainsi étudié autant les stratégiesqu'un individu connaît que lescroyances qu'il entretient à l'égardde son comportement lors d'unecommunication orale. Dans cesens, on devrait s'attendre à ce que«lorsqu'un individu fait l'autorégu-lation de sa compréhension, ilcommence par évaluer sa compré-hension et ensuite, quand il n'estpas satisfait du niveau de com-préhension atteint, qu'il emploiedes moyens pour remédier à lasituation. Cette conséquence impli-que que l'individu utilise d'abord,de façon plus ou moins consciente,des stratégies métacognitives, pourévaluer sa compréhension, et uti-lise ensuite des stratégies cogniti-ves compensatoires pour atteindrele niveau de compréhension désiré.Ces dernières stratégies sont cogni-tives parce qu'elles visent la com-préhension, mais compensatoiresparce que l'individu les utilise aprèsune première évaluation de sacompréhension8.» (Pages 23, 25)

Les diverses «habiletés» quedoit posséder un individu pour as-surer le succès d'une communica-tion orale consistent, selon le mé-moire de Bibeau, à connaîtreplusieurs moyens de vérifier si lemessage a bien été compris, et àposer les questions: «qu'est-ce quetu veux dire?», ou «est-ce que c'estbien ce que tu veux dire?» Il doitaussi pouvoir «réguler» le proces-sus. «Un individu peut planifierson discours en fonction des carac-téristiques de ses interlocuteurs,superviser sa compréhension, dansle rôle d'auditeur, en accordantune attention délibérée à ses im-pressions momentanées et fugacesd'incompréhension (Lefebvre-Pinard,1983), vérifier sa compré-hension ou celle de ses interlo-cuteurs, selon qu'il est dans un rôled'auditeur ou de locuteur, en po-sant des questions, par exemple,ou en tentant de redire l'essentieldu message en ses propres mots,etc.»» (Pages 14-15)

DES RÉSULTATS DE LA

RECHERCHE DE BIBEAU

La comparaison entre le sa-voir des adultes analphabètes etcelui des adultes alphabétisés n'apas révélé beaucoup de différen-ces. En effet, nous dit Bibeau, il y aplusieurs points communs: en cequi a trait aux habiletés tant delocuteur que d'auditeur, presquetous «reconnaissent l'existence dedifférences inter- et intra-indivi-duelles dans la compréhension.»Ils savent qu'il peut exister desdifficultés de compréhension et ilsconsidèrent qu'il est possible pourun individu d'agir sur son propreniveau de compréhension et del'améliorer. Enfin, les adultes anal-phabètes connaissent les mêmesstratégies métacognitives et cogni-

tives compensatoires que les adul-tes alphabétisés, bien qu'ils men-tionnent, en moyenne, moins destratégies métacognitives que cesderniers8» (Page 62)

Par contre, Bibeau a noté desdifférences plus marquées entre lesdeux groupes d'adultes en ce qui atrait à la variable «objectifs». Lesadultes analphabètes admettenten plus grand nombre que la com-préhension du message peut êtreplus importante dans certains cas:quand il s'agit de directives prove-nant du patron, il est plus impor-tant de bien comprendre que lorsde l'écoute d'une émission de télé-vision, par exemple. Ces derniersfont preuve en cela de plus de nu-ances que le groupe des adultesalphabétisés qui n'ont pas établide différence.

En ce qui concerne la tâche, lesavoir métacognitif des deux grou-pes d'adultes ne variait pas beau-coup lorsqu'il s'agissait de prendreconscience «du caractère progres-sif de la compréhension et [perce-voir...] l'influence qu'exercent lastructure et le but d'un message surla facilité avec laquelle on le com-prend11.» (Page 84) Plus des deuxtiers des sujets des deux groupesétaient conscients de ces élémentset de leur rôle dans la compréhen-sion d'un message tant oralqu'écrit. On a d'ailleurs pu en ob-server la mise en application, enoctobre dernier lors du FORUM SURLES DROITS DES PERSONNES ANALPHA-

BÈTES, d a n s la part ic ipat ion d'ap

prenantes et d'apprenants au comité d'évaluation des affiche:d'intérêt public soumis pour leconcours d'accessibilité du messagepour les personnes très peu ou passcolarisées.

Un aspect très important de:conclusions de cette recherche, etdont, à notre avis, il nous appar

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tient d'en vérifier l'«occurrence»dans nos groupes, est la différencedu sens attribué au terme «com-préhension» par l'un ou l'autregroupe d'adultes: «Alors que tousles adultes alphabétisés définissentla compréhension comme une acti-vité cognitive axée sur le sens dumessage (...«saisir le sens», «savoirce qu'il veut dire», «être capable del'expliquer»), près de la moitié desadultes analphabètes assimilentplutôt la compréhension à d'autresactivités cognitives comme l'audi-tion et la mémorisation.» De plus,et conformément à leur définitionde la compréhension, ceux-ci «at-tribuent leurs difficultés de com-préhension au vocabulaire utilisé,à la vitesse de débit verbal dulocuteur, à son accent, etc., tousdes facteurs qu'on pourrait appe-ler circonstanciels ou périphéri-ques, par opposition à des facteursplus centraux, comme la structuredu message, invoqués par les al-phabétisés.» Bibeau pense que cesinterprétations dissemblablespourraient représenter une «dif-férence fondamentale» entre lesadultes alphabétisés et non alpha-bétisés quant à leur «conceptionde la nature même du processus decompréhension8.» (Page 65)

DANS L'APPRENTISSAGEDE LA LECTURE

Plusieurs études sur l'appren-tissage de la lecture conduisent àla conclusion qu'il y a mauvaiseutilisation ou absence de straté-gies dans le cas de personnes ayantdes difficultés à lire efficacement.Les lectrices et les lecteurs «faibles»ne posséderaient pas les stratégiesnécessaires, ou les utiliseraient mal.

Une étude faite par Guthrie etTyler en 1976, dont Marc Bibeaurapporte les résultats dans son

mémoire, révèle que les mauvaislecteurs ont des problèmes de com-préhension dus à un décodage in-complet, attribuable à une inca-pacité d'identifier un nombre suf-fisant de mots pour pouvoir don-ner du sens à ce qu'ils lisent.

Finalement, Bibeau opère unrapprochement, en ce qui concernel'utilisation de bonnes stratégiesdans l'apprentissage de la lecture,entre les adultes analphabètes etles enfants ayant des difficultésd'apprentissage; les deux pour-suivraient un objectif de décoda-ge plutôt que de compréhension.Il rejoint ici l'approche de FrankSmith sur l'apprentissage de lalecture (voir l'encadré à ce sujet).

À partir de ses constatationsen matière de compréhension descommunications orales par lesadultes analphabètes, Bibeau re-commande, dans le cas de com-munications écrites, que l'objectifde compréhension soit clairementdéfini aux participantes et parti-cipants et que la méthode péda-gogique utilisée pour l'apprentis-sage de l'écrit ne permette aucuneconfusion à cet égard. En ce sens, ilpropose comme stratégie de trans-poser à la lecture des comporte-ments équivalents en communi-cation orale: faire répéter unlocuteur et relire un écrit, ou poserdes questions et porter plus atten-tion au texte et au contexte. Il pré-conise, finalement, pour favoriserl'autonomie des personnes anal-phabètes par rapport à la lecture etpour rehausser leur image de soisouvent négative, de baser notreaction auprès d'eux sur le faitqu'elles peuvent exercer un cer-tain contrôle sur leur niveau decompréhension grâce à l'utilisationdélibérée et autonome de diversesstratégies.

Les styles cognitifs:la diversité des formesdans l'apprentissage

La personne peut non seule-ment apprendre des éléments

nouveaux, mais elle peut aussi dé-couvrir des façons nouvelles d'yparvenir. Celles-ci constituent desmodes d'accès à l'information, àla réalité. Selon la personnalité desapprenantes et apprenants, lesstratégies d'apprentissage peuventvarier pour s'adapter à cette réalité.Ces différents traits de personna-lité, dans le contexte de l'apprentis-sage, sont abordés en termes destyles cognitifs; on doit s'y référersurtout à titre de «constructionshypothétiques qui nous aident àexpliquer le processus d'apprentis-sage», nous met en garde Marie-Paule Dessaint12.

DIFFÉRENTES APPELLATIONS

Si, quand il s'agit de définir lephénomène de la diversité des for-mes dans l'apprentissage, les «spé-cialistes» de la question présententgénéralement des versions assezanalogues, il n'en va pas de mêmeen ce qui concerne les termes qu'ilschoisissent pour le qualifier.

Marie-Paule Dessaint définitles styles cognitifs comme des habi-tudes dans la manière de traiterl'information, ce qui signifie lesmoyens habituellement utilisés parles apprenantes et les apprenantspour percevoir, penser, résoudredes problèmes, se rappeler, etc. Ils'agit de l'ensemble des approchesmises en oeuvre par une personnedans une interaction avec un envi-ronnement cognitif. Elle reprendaussi, en des termes différents, lescaractéristiques établies par ClaudeLamontagne, le spécialiste québé-

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La métacognition

marche: elles peuvent faciliter unaboutissement heureux ou bloquerle processus. Par exemple, si unepersonne se rend compte qu'elle sesent plus à l'aise lorsqu'elle tra-vaille en équipe avec une autrepersonne et que, de ce fait, elle

. comprend mieux les explicationsou ce qu'on lui demande defaire,elle se dira alors qu'elle ap-prendra plus si elle travaille decette façon. Ou au contraire, ellepourra éviter toute interaction di-recte avec une autre personne quila met mal à l'aise dans son ap-prentissage, dès le moment où elleprendra conscience que ces étatsaffectifs influencent son appren-tissage.

Les STRATÉGIES MÉTACOGNITIVES

portent sur la conscience qu'al'individu de pouvoir intervenir surson processus d'apprentissage enadoptant un certain comporte-ment, dit métacognitif. Le proces-sus d'apprentissage comporte gé-néralement trois fonctions inter-actives et concomitantes: cogni-tive, affective et métacognitive.

L'individu intervient donc ici entant qu'être conscient, par uneautorégulation de ce processus. Lesstratégies métacognitives peuvent,quant à elles, porter tant sur lafonction cognitive que sur la fonc-tion affective au moment du pro-cessus d'apprentissage. Ainsi, l'in-dividu peut se mettre dans un étatd'esprit de disponibilité pour ap-prendre et déterminer selon quelleapproche il entreprendra son ap-prentissage: devra-t-il se faire da-vantage d'images mentalesvisuelles ou auditives, ou encoreêtre plus actif en écrivantl'information qu'il veut saisir,comprendre et retenir?

La recherche entourant cescomportements stratégiques faitl'objet d'un domaine d'étude quel'on appelle la métacognition. C'esten en comprenant mieux le fonc-tionnement que les animatrices etles animateurs pourront par la suiteinviter les apprenantes et les ap-prenants à prendre conscience deleur propre fonctionnement et,ainsi, à gérer ces comportementspar l'autorégulation.

" LA MAÎTRISEDE L'ATTENTIONDÉBOUCHE SURLA CONSCIENCE

DE SOI "(JACQUES LANGUIRAND)

Ce qui nous permet de gérer nospropres comportements stra-

tégiques est donc la métacogni-tion; c'est un peu l'apprentissagedu «comment» apprendre. Les stra-tégies d'apprentissage font doncpartie de la métacognition. Lors-que l'on parle de métacognition,selon Mohamed Hrimech, «onparle de connaissances qui n'ontpas pour objet un contenuquelconque comme la chimie, laphysique, la mécanique, mais quiont pour objet les connaissanceselles-mêmes.» La métacognition adeux composantes, la premièreétant la conscience de posséder uneconnaissance ou encore la con-science de soi, et la deuxièmel'autorégulation. «Lorsque jeprends conscience que j'ai des con-naissances sur mes connaissances,je peux aussi agir dessus. C'est parce biais que l'on arrive à agir surson propre processus, que l'on ar-rive à l'autoréguler4», confirmeMohamed Hrimech.

Les stratégies d'apprentissagecomposent ainsi la partie dyna-mique de la métacognition, à sa-voir l'autorégulation. Comment etoù intervient-elle dans le proces-sus d'apprentissage?

Dans le modèle théorique deColette Dufresne-Tassé5, toute lapartie qu'elle nomme «orientation»de l'apprentissage est de l'ordre dela métacognition. En effet, c'est lapersonne qui dirige son proprefonctionnement à ce moment-là;aussi, quand elle en fait une«évaluation», chaque fois que lapersonne passe d'un type d'opé-ration à un autre, c'est-à-dire d'une«cueillette» à une «synthèse», etsurtout à une «intégration de don-nées», il y a une intervention vo-lontaire.

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DOSSIER

Cependant, nous dit ColetteDufresne-Tassé en entrevue - et sapensée rejoint par là celle d'AntoineDe la Garanderie -, «la plupart desinterventions doivent être telle-ment automatisées que lorsquetout va bien, on ne s'en aperçoitpas; c'est quand le processus bloquequ'il y a alors intervention de mé-tacognition pour décider commentfaire, comme dans l'autorégula-tion; et j'ai aussi l'impression qu'ildoit y avoir intervention de méta-cognition dans l'acte de relier laréaction affective au résultat dufonctionnement intellectuel.» Elledonne alors l'exemple de la per-sonne qui se demande pourquoielle s'ennuie dans un cours et quitrouve la réponse dans le fait qu'ellen'apprend plus ou qu'elle ne com-prend plus rien. C'est donc la méta-cognition, qui part du signal prove-nant de la réaction affective del'ennui, qui vérifie le fonctionne-ment intellectuel; ensuite viendrala décision «autorégulatrice», soitune modification du fonctionne-ment ou le choix d'abandonner.«Chaque fois qu'une personne sedit «je peux», il y a acte de méta-cognition parce que cela impliquela conscience; quand la personnese dit qu'elle peut, elle définit desobjectifs et, à l'issu de cette activité,elle sera en mesure de6...»

Jean Patry, à propos de sonmodèle d'intervention intégré auGuide de formation sur mesure enalphabétisation, nous présente lamétacognition comme la cogni-tion que les personnes ont de leurscognitions, c'est-à-dire des conte-nus cognitifs, des stratégies et desmoyens mis en place pour attein-dre les buts et les facteurs qui peu-vent influencer ces stratégies. Àl'animatrice ou l'animateur qui

veut comprendre ces derniers, ilprécise que c'est au moment oùl'on essaie avec la personne decomprendre son fonctionnement,que «souvent l'on va se rendrecompte, où la personne n'a pasconnaissance de ses propres conte-nus, n'a pas connaissance de sonpropre fonctionnement, et surtout,n'a pas connaissance des facteursqui viennent l'influencer... Alorsla démarche thérapeutique ou deformation va être d'instrumenterla personne, c'est-à-dire lui remet-tre les connaissances sur son pro-pre fonctionnement7...» De là l'im-portance qu'il accorde à l'autoré-gulation, qu'il désigne par l'ex-pression «instrumenter la per-sonne».

Mohamed Hrimech, pour sapart, précise que «si j'adopte uncomportement stratégique adé-quat donné, je n'agis pas unique-ment en tant qu'être émotif, maisen tant qu'être métacognitif, quine cherche pas seulement à ac-quérir des connaissances mais quiintervient sur ses mécanismesd'acquisition de la connaissance.Je travaille sur des processus qui,eux-mêmes, travaillent sur desprocessus. C'est là toute la puis-sance de la théorie métacogni-tive4.» Aussi, pense-t-il, plus lespersonnes sont habilitées à sepencher sur leur processusd'apprentissage, plus elles appren-nent à réfléchir sur les moyensqu'elles utilisent pour apprendre,sur les contenus d'apprentissagequ'elles ont acquis, et plus leurschances de réussir leur démarched'apprendre augmentent. Il s'agitici d'une prise de conscience duprocessus d'apprentissage et del'autorégulation systématique deson fonctionnement.

FAIRE PRENDRECONSCIENCE DU PROCESSUS

En alphabétisation, commepartout ailleurs, la personne quifait une acquisition, chez qui unprocessus d'apprentissage seproduit, n'a généralement pas con-science de celui-ci. Elle a cepen-dant conscience des résultats ou decertaines décisions qu'elle a prisesconcernant ces derniers. Il faut doncqu'elle apprenne à développer da-vantage cette prise de consciencemétacognitive, en concluent lesspécialistes. Le «feed-back» sur l'uti-lisation d'une stratégie adéquateau moment de la réussite d'unapprentissage en constitue lemoyen par excellence, pourvu quel'animatrice ou l'animateur fasseréfléchir la personne sur ce quivient de se passer chez elle. Refaireainsi avec elle le parcours qui apermis l'accomplissement duprocessus, entre le moment de lamotivation d'apprendre, de com-prendre ou de retenir une unitéd'apprentissage et le but atteint -qui est confirmé par le succès de ladémarche et la reconnaissance dece succès.

C'est en ce sens que MarcBibeau, évoquant une revue d'étu-des portant sur l'apprentissage destratégies réalisée par Belmont,Butterfield et Ferrera (1982), sou-ligne l'importance de la constata-tion suivante concernant «l'ap-prentissage de stratégies telles quel'auto-interrogation ou la révisionmentale (...): pour qu'il y aitgénéralisation des stratégies ap-prises, il ne suffit pas d'entraînerles individus à l'usage de certainesstratégies cognitives, mais il fauten plus leur inculquer un savoirplus général portant sur ces strate-

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gies, c'est-à-dire sur leur usage, enfonction des caractéristiques de latâche, des personnes impliquées etdes objectifs poursuivis, sur la façond'en contrôler l'efficacité (...)8»(Page 18)

POUR QUE LA PERSONNE GÈRE ELLE-

MÊME SON APPRENTISSAGE...

Les personnes peuvent diffi-cilement avoir le plein contrôle des

contenus d'apprentissage en al-phabétisation, même si elles déci-dent des thèmes qui permettentd'aborder ces contenus et même sil'on respecte leur rythme d'appren-tissage. Elles ne peuvent contrôlerentièrement, en dernier lieu, queleur propre exigence par rapport àelles-mêmes, les efforts qu'elles sontdisposées à déployer dans l'appren-tissage de la lecture, de l'écriture etdu calcul. C'est au niveau du pro-cessus qu'elles peuvent apprendreà intervenir avec le plus d'à-pro-pos, car comme le mentionneMichèle Dupuis en entrevue, «toutce que l'animatrice peut faire, c'estde faire prendre conscience de laratée dans le processus. Mais si lapersonne n'est pas consciente qu 'ily a une ratée à un endroit dans sonprocessus, elle va continuer àfonctionner de la même manière;car elle gère déjà son apprentissage,mais elle le gère avec les moyensqu'elle possède9.»

Comment y parvenir? En fai-sant naître, chez la personne, laconscience de son propre fonction-nement cognitif ou en augmen-tant l'acuité de ce fonctionnement.Colette Dufresne-Tassé exprimeainsi cette prise de conscience: «Cequi m'est utile quand quelqu'unme rend conscient, c'est qu'il aug-mente mon acuité «perceptuelle»pour que moi, je saisisse ce que jefais; après, l'utilité de cela viendra

plus tard. C'est, au moins, que jesaisisse ce que je fais. Souvent, chezles gens qui n'ont pas beaucoupd'aptitudes, les choses sont faites leplus vite possible en espérant queça va être correct. Tu peux faire lamême chose dans le cas d'un mou-vement physique, dans le cas d'unehabileté psychomotrice, et tantqu'une personne n'a pas réussi àcréer la situation pour que toi, tupuisses saisir ce que tu as fait, pasjuste de façon artificielle, mais unebonne représentation à tous lesniveaux, il ne se passe rien. Mais sielle est arrivée à t'aider à faire ça,après, tu deviens toi-même ton pro-pre repère. Il s'agit moins de dire:«tu vois telle affaire,» que de mepermettre, à moi, de le saisir del'intérieur6.»

Comme les trois fonctionssont toujours présentes dans leprocessus d'apprentissage et dansl'intervention en alphabétisationdes adultes (il s'agit des dimen-sions cognitive, métacognitive etaffective), parler de stratégies mé-tacognitives touche évidemmentla dimension métacognitive.Cependant, il n'est pas possible deparler de cette dimension sans faireréférence aux deux autres, car ellessont interactives. Il faut doncégalement prendre conscience desaspects affectifs dans le comporte-ment cognitif. Tous les élémentsaffectifs en interaction dans le pro-cessus d'apprentissage, et particu-lièrement en alphabétisation desadultes, y compris la motivation,sont d'une importance capitalequand il s'agit de parler de straté-gies métacognitives. En effet, ceséléments doivent d'abord êtreidentifiés avant même de regarderla dimension cognitive du proces-sus, car ils peuvent être la caused'un blocage qui peut sembler sesituer au plan cognitif.

LES ÉLÉMENTS AFFECTIFS

Plusieurs aspects de l'ordre del'affectif jouent un rôle de tailledans le processus d'apprentissage,en particulier le concept de l'imagede soi, la confiance en soi et en sescapacités d'apprentissage, la peurde se tromper, etc. Mohamed Hri-mech suggère que, dans le cas depersonnes analphabètes, l'affectifjoue plutôt dans un sens négatif,comme un frein; car en alphabéti-sation, «la personne analphabètedoit apprendre à maîtriser des ha-biletés qui, dans un sens, ne sontplus de son âge, qui ne sont plus decette période de la vie de l'adulte.Sur le plan affectif, il doit y avoirbeaucoup de blocages parce qu'ellese sent marginalisée; elle se senthandicapée par cet état de choses.Les personnes analphabètes ontappris à fonctionner, elles sont«adaptées» à leur manière. Alpha-bétiser ces personnes, c'est en quel-que sorte défaire leur adaptation,c'est désorganiser leur personnali-té: elles ont développé toutes sortesde trucs... elles n'auront plus besoinde mentir. Elles se sont adaptées àla société avec une dimensiond'elles-mêmes qui est l'analpha-bétisme; si on les alphabétise, ellesdoivent se réadapter à nouveau, etcela n'est pas facile4.»

La capacité d'accepter lechangement, et plus particulière-ment le changement s'opérant sursoi, fait partie du processus méta-cognitif de l'apprentissage. Il enest l'un des éléments affectifs. Dansce sens, comme nous le rapporteMichèle Dupuis, «ce n'est pas faci-le d'admettre que maintenant onsait; c'est plus facile de dire: je nesais pas, car les gens vont me lemontrer; mais si je dis: je le sais,j'aurai l'air fou le lendemain si jene sais plus. Ainsi, dans ma déci-

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D0SSIER

sion de dire «je sais», j'ai assumé lefait que je ne peux plus ne passavoir; cela implique que je suisobligée d'accepter d'être différentede ce que j'étais quand je ne savaispas9.» Il s'agit là de deux typesd'apprentissage: l'un portant surdu contenu et l'autre portant sursoi.

Apprendre à vivre des rap-ports différents avec soi et avec lesautres tout en s'alphabétisant enmême temps, constitue une dou-ble adaptation. Dans les groupesd'alphabétisation populaire, cesrapports d'apprentissage se viventautrement, pense Michèle Dupuis;les apprenantes et les apprenantsseront amenés à se demander«comment utiliser l'apprentissagequi se fait de toute manière à cetégard pour apprendre autrementà lire, écrire et compter? Car lesdeux apprentissages ne sont pasdéconnectés, comment le faire dansun continuum, compte tenu qu'ils'agit des deux roues d'une mêmecharrette9?» La même probléma-tique se pose pour les animatriceset les animateurs.

La part des éléments affectifsdans l'apprentissage doit être priseen considération par l'apprenanteou l'apprenant et par les anima-trices et animateurs, car l'affectifreprésente un facteur qui en in-fluence le déroulement: elle peutsouvent expliquer les «accélérés»comme les «ralentis» dans l'ap-prentissage.

Toutefois, Mohamed Hri-mech croit qu'en règle générale,l'aspect affectif est géré par la fonc-tion métacognitive chez la per-sonne. Il dit à ce sujet que dans unsens, le métacognitif se charge del'affectif. «Si je sais que dans cer-taines situations, je suis mal à l'aise,je vais les éviter. 11 s'agit aussi d'uncomportement métacognitif puis-

que j'ai utilisé mes connaissancessur mon fonctionnement affectif.Dans la réalité, cette prise en chargeest concomitante4.» Jean Patry par-le, dans ce cas, de comportementd'évitement, dans ses propos re-cueillis en entrevue. Il fait remar-quer que c'est là que la concomi-tance des quatre modes de sonmodèle se perçoit le mieux, quemême si le processus se situe dansle cognitif, les émotions sont tou-jours présentes; quelquefois, «lapersonne a peur de l'échec, elle an-ticipe son échec par un condition-nement opérant; alors elle émetdes comportements d'évitementplutôt que des comportementsd'approche7.»

Il est important de tenircompte de l'affectif en alphabéti-sation, ajoute Mohamed Hrimech,parce que «si les gens ne recon-quièrent pas cette confiance eneux-mêmes, s'ils ne se sentent pasoutillés pour entreprendre cettetâche de s'alphabétiser, on va leurapprendre malgré eux; ils vontréagir de façon non favorable àl'apprentissage. Car il faut une ré-action positive, sinon personne nepeut apprendre, malgré le meil-leur enseignement. Cela reste à lapersonne elle-même à le faire. Sansla motivation, il ne peut y avoird'apprentissage délibéré. Avec unemotivation négative, à cause d'ex-périences négatives, comme parexemple chez les enfants battus,il y a plutôt façonnement de lapersonnalité à cause de conditionsadverses. Alors, si l'on ne prévoitpas des moyens pour favoriser lamotivation, je pense que l'on abeaucoup de chances de n'obteniraucun résultat4.»

LA MOTIVATIONLa motivation est donc un

des éléments affectifs les plus im-portants pour l'apprenante et l'ap-prenant en démarche d'alphabé-tisation. Qu'en est-il plus préci-sément?

«J'ai l'impression, nous ditColette Dufresne-Tassé, que ce quimotive la personne, c'est son fonc-tionnement, ce n'est pas l'appren-tissage comme tel. Même quand tuapprends à maîtriser une langue,ce n'est pas l'apprentissage commetel qui compte, c'est la capacité det'en servir, c'est ce que tu en fais.L'apprentissage est secondaire, cequi motive, c'est la réponse trou-vée à un besoin, à une question.Mais je pense qu'il y a une motiva-tion qui permet de s'intéresser àquelque chose et il y a une motiva-tion aussi qui soutient ce que tufais. Si on peut amener des gens àavoir un fonctionnement qui estsatisfaisant, l'apprentissage va segreffer sur ce fonctionnement-là.Je ne sais pas ce que peut être lasignification, la valeur de cela unefois transposé dans une situationd'apprentissage presque imposée,comme lorsque l'on est obligé des'alphabétiser parce que le gouver-nement nous pousse à le faire, par-ce que l'on ne peut pas faire autre-ment pour se débrouiller et trouverun emploi. Je ne sais pas jusqu'àquel point c'est valable dans unesituation imposée'!»

Pour réussir en alphabétisa-tion, la motivation reste essen-tielle. La personne doit être intéres-sée par ce qu'elle fait; en ce sens,Michèle Dupuis explique que «pouraller en alphabétisation, il fautque la motivation vienne de la per-sonne. Mais en même temps, lamotivation peut se créer à mesurequ'elle découvre le contenu descours; ce n'est pas parce que sa

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motivation de départ n'est pas in-trinsèque que la personne n'ap-prendra pas. Toutefois, dans le cas

d'une personne qui n'est pas in-téressée, qui ne veut pas appren-dre, on peut négocier avec elle le

fait qu'elle ne dérange pas legroupe. On peut utiliser le groupepour négocier les règles du jeu. Lessituations d'apprentissage que lesanimatrices établiront avec lespersonnes du groupe, ne doiventpas être créées en assumant lesdécisions politiques du gouverne-ment ni les décisions individuellesdes personnes9.»

Par contre, Jean Patry fait re-marquer que la «surmotivation»peut par ailleurs être un facteurtout aussi perturbant que l'anxiété

en ce qui concerne le bon fonction-nement dans un apprentissage.

LA CONSOMMATION DE DROGUES(MÉDICAMENTS OU ALCOOL)

Un autre aspect du compor-tement affectif qui nous sembleavoir son importance en alphabé-tisation, c'est de pouvoir jouir detoutes ses facultés au moment d'ap-prendre. Toutes les personnes à quinous avons posé la question del'impact de la consommation dedrogues sur le processus d'appren-tissage reconnaissent unanime-ment que celle-ci affecte directe-ment la perception discriminatoireou l'attention; cette incidence sur-vient au tout début du processus,empêchant ainsi son déroulementdans des circonstances favorables.

Sur le plan intellectuel, la con-sommation de drogues perturbe laperception, nous dit MohamedHrimech, «dans le sens de la défa-voriser; peut-être que cela enlèveun peu de stress chez certains indi-vidus, mais cela dérange énormé-ment leur perception4.»

Expérience enmétacognitionauprès d'adultes

L a plupart des applications dela théorie métacognitive ont

été expérimentées auprès d'adultesalphabétisés, et en particulier au-près d'étudiantes et d'étudiants uni-versitaires. Mais cela ne signifiepas que ces personnes emploientdes stratégies métacognitives com-pliquées pour comprendre des tex-tes ou acquérir des connaissances.

La thèse de Mohamed Hri-mech10 porte essentiellement surles stratégies utilisées dans leursétudes par des adultes universitai-res. Hrimech a cherché à dégagerces stratégies ou, selon ses proprestermes, «les démarches qu'ils uti-lisent pour apprendre ou pour faireface à une difficulté rencontrée aucours de l'apprentissage.» Voici lasynthèse de son analyse des répon-ses données à ses questions, tellequ'il l'a présentée en entrevue:

Dans le domaine universitai-re, lorsque les sujets apprennent,ils cherchent d'abord, à apprendreen utilisant des liens, en établis-sant des liens entre le contenu d'unobjet d'apprentissage et un autreélément extérieur; il peut s'agird'un livre, de leurs connaissancesantérieures ou d'un autre guide. Lerecours à l'analogie est la stratégiela plus importante qui soit ressor-tie. La recherche de liens est essen-tielle. Pour bien apprendre, il fautfaire des liens avec quelque chosed'autre; sinon, ce que l'on apprendreste isolé.

La deuxième stratégie par or-dre d'importance, c'est ce que Hri-mech appelle une période de la-tence, pendant laquelle les gensarrêtent leur processus momen-

tanément pour le reprendre plustard. Cette période est importantepour les sujets. «Je ne peux pas direpourquoi, mais j'avance l'hypothè-se que cette période permet proba-blement une certaine maturationintérieure. L'individu ne fonctionnepas de façon consciente, mais ilcontinue à apprendre, il continueà être travaillé par le contenu qu'ilvient d'apprendre. Lorsqu'il re-prend son apprentissage, il ne lereprend pas à l'endroit où il l'a ar-rêté. Il a fait un cheminement pen-dant cette période de latence. Il sepeut même que beaucoup de cho-ses se soient opérées pendant cetemps. C'est comme s'il avait, ens'imprégnant de cela, intégré unepartie de ces connaissances4.»

La troisième stratégie concer-ne davantage le côté affectif. Il s'a-git de se placer dans un état dedisponibilité, d'ouverture. Car sou-vent, on se met dans des états oùl'on se ferme à beaucoup d'ap-prentissages, ou l'on refuse carré-ment d'apprendre.

L'imagerie mentale appli-quée à l'apprentissage constitueune pratique assez répandue.Développer une image mentale dece que l'on est en train d'apprendre,du contenu, aide à apprendre.

Les étudiants ont dit que cequi les aidait beaucoup, c'était defaire des schémas de visualisation,car avec les schémas, ils peuventclarifier énormément de choses enles percevant d'une manièrevisuelle; il s'agit d'une façon deréorganiser les contenus, de les re-structurer à sa manière.

Il faut aussi mentionner la di-versité des sources et des points devue. Apprendre d'une seule source,que ce soit d'une personne ou d'unmanuel, reste limitatif. Quand ondiversifie les sources avec des pointsde repères variés, au contraire, on

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LE MODÈLE D'ACQUISITIONDE LA LECTURE DE SMITH

• Frank Smith1, le «théoricien» de l'apprentissage de la lecture, base sonmodèle d'acquisition de la lecture sur celui du traitement de l'information parordinateur: en cela, par la reconnaissance des traits, fonctionnement doublédu processus cognitif qui permet l'expectative d'un sens à accorder à ces traits.

L'APPROCHE DE SMITH

La mécanique de la lecture,jusqu'à un certain point, fonctionne àl'instar de l'informatique: l'oeil hu-main détecte une information qui estensuite transposée en code intelligiblepour le cerveau (dans le «magasinsensoriel»), et lui est ainsi transmise;le cerveau est alors en mesure de trai-ter cette dernière, via la mémoire àcourt terme, à partir de données déjàen mémoire à long terme, rappeléesen mémoire à court terme pour l'oc-casion. Tel est en somme, le plus sim-plement énoncé, le «mécanisme»physiologique de la lecture d'aprèsl'approche de Frank Smith. Les carac-tères significatifs du processus de lalecture relèvent d'abord de ses qualitésd'acte délibéré, sélectif, se fondant surl'anticipation et sur la compréhen-sion. Dans ce sens, lire ne consiste pasà émettre les sons adéquats en fonctiondes mots imprimés perçus par la per-sonne qui lit, mais bien à trouver dusens à partir de cet écrit.

Pour comprendre le fonctionne-ment de la lecture, Smith nous indi-que quels facteurs doivent être prisen considération : ces derniers sont«liés à la perception, aux processuscognitifs, à la linguistique et à la mo-tivation.» (Page 9)

La perception

Dans la lecture, le cerveau per-çoit en vision discontinue et recueilleune information «fragmentaire» àtravers la série des saccades visuelles,quelquefois en va-et-vient, que luifournit le mouvement des yeux. Pourdétecter les traits de l'écrit, le cerveaude la lectrice ou du lecteur utilise lavue; toutefois, les yeux ne sont que lemoyen par lequel celui-ci recueillel'information dont il aura à déciderde la nature ou de la fonction. Pourprendre cette décision, le cerveau dis-pose d'informations déjà présentesdont il se sert. Cependant, la personnequi lit doit prendre des risques sur leplan de l'information visuelle (del'écrit) en ne s'y attardant pas, laissantainsi le relais à l'information nonvisuelle, c'est-à-dire à ses connais-sances, sa «conception du monde».

Même si la personne observeplus longtemps, elle ne verra pas plusque la quantité moyenne d'infor-mations par seconde; si l'informationn'est pas reconnue rapidement, pourêtre prise en charge par le cerveau, ilpeut alors se produire un rétrécis-sement de la vision, qui s'appelle une«vision en tunnel» et qui se solde parune impossibilité de prédire du senset donc de comprendre.

L'attention n'a pas à être rete-nue par des essais de compréhensionde bribes de lettres ou de mots ren-contrées auparavant dans le texte.Dans la mesure où la personne pas-se d'une fixation à l'autre à un ryth-me moyen de trois à quatre fixationspar seconde, et que le texte qu'elle litcorrespond à sa compétence, auxconnaissances qu'elle possède déjà,le mécanisme de la lecture «signi-fiante» peut s'accomplir. Voici com-ment l'explique Smith: «L'informationvisuelle ne reste pas longtemps à ladisposition du cerveau, après avoir étérecueillie par les yeux. De toute évi-dence, elle réside quelque part dans latête, pendant un bref laps de temps,tandis que. le cerveau travaille surl'information visuelle prélevée au coursdes premières ms (millièmes de se-conde) de chaque regard. Les psycho-logues ont donné un nom à l'endroitoù cette information est censée résider,entre le moment où elle est transmi-se par les yeux et le moment où lecerveau a pris ses décisions: «le maga-sin sensoriel.» (Page 37)

Ainsi donc, en lecture, le cerveauutilise un maximum de donnéesdéjà connues pour analyser un mini-mum d'informations visuelles nou-vellement apportées, dans un délaitrès court

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DOSSIER

Les processus cognitifs

L'information est ainsi très rapi-dement traitée par la mémoire à courtterme afin de ne pas monopoliser l'at-tention dont la personne a besoinpour poursuivre sa lecture. Le conte-nu de la mémoire à court terme est«volatile», il n'y séjourne que très peude temps pour être chassé par l'arrivéed'une nouvelle information fourniepar l'attention. La capacité de la mé-moire à court terme est limitée à unedouzaine d'«items».

Pour sa part, la mémoire àlong terme fonctionne davantagecomme un réseau de connaissancesorganisé selon des relations de sens.L'apport d'informations nouvellesdoit avoir un rapport avec ces con-naissances préalables. Cette or-ganisation des connaissances, àlaquelle les psychologues donnentle nom de structure cognitive etque Smith appelle la structure pro-fonde du langage - par rapport à lalecture - permet de donner du sensà l'information visuelle, perçueavec l'attention via l'organe sen-soriel des yeux et traitée par lamémoire à court terme. Le contenude la mémoire à long terme corres-pond donc aux connaissances ac-quises et à la vision permanentedu monde et au développementcognitif de la personne (à la struc-turation «piagétienne»). Contrai-rement à la mémoire à court terme,la mémoire à long terme fonc-tionne beaucoup plus lentement;elle peut avoir besoin de cinq se-condes pour enregistrer une infor-mation, et pendant ce temps, toutel'attention est requise. Sa capacitéd'emmagasinage serait par con-tre illimitée.

Smith apporte les précisions sui-vantes au sujet de ces différences entreles mémoires à court et à long terme

au moment de la lecture: dans lamémoire à court terme, «comme onpeut conserver les lettres contenuesdans les mots plus facilement que deslettres disparates, on peut garder enmémoire une suite de mots ayant unsens, plus efficacement que des motsisolés disparates. Cela est vrai aussi dela mémoire à long terme: on peutstocker du «sens» en quelques secon-des à peine - sans avoir consciencede le faire - même quand ce sens setrouve dans une douzaine de motsou plus. (...) Tout «sens» que nousplaçons dans la mémoire à long ter-me sera plus facile à retenir et àrécupérer.» (Page 54)

L'écrit ne sera compris par lapersonne qui le lit que si celle-ci peut ytrouver une signification; cette signifi-cation de l'écrit se trouve seulementdans la mesure où ce dernier corres-pond à l'organisation de la structurecognitive de la personne qui le lit. C'estpar la syntaxe que la structure super-ficielle du langage, dans ses caractéris-tiques observables (son code), est reliéeà la structure profonde (l'organisationdu monde de la personne qui lit).

Le facteur linguistique

Dans sa démarche pour com-prendre la lecture, Smith insiste sur cepoint fondamental, à savoir le lienentre la structure superficielle du lan-gage, c'est-à-dire le code, et la structureprofonde, la compréhension. L'oralne s'apprend pas en décodant les sonsmais en y mettant du sens; pour l'écrit,c'est la même chose. Smith ajoute que«lorsqu'on lit pour chercher du sens,on ne confond pas bonne et donne,car le contexte rend cette confusionimpossible.» Pour comprendre lalangue dans l'écrit, «la syntaxe (l'ordredes mots)est le pont qui relie la structuresuperficielle de la langue à sa structure

profonde.» (Pages 45,76) On ne doitpas s'attendre à trouver plus d'unesignification dans une même séquen-ce de mots. Il faut donc procéder parprédiction à l'élimination des hypo-thèses inexactes ou improbables. Dansla lecture à voix haute ou par «subvo-calisation», le cerveau, qui est enavance sur la voix, utilise les yeuxpour prendre par avance les décisionssur le sens des mots ou des groupes demots qu'il reçoit ainsi. Smith parle icid'un décalage de quatre à cinq motsen moyenne entre la voix et le cerveau.

Il peut quelquefois cependantexister des ambiguïtés de sens dans untexte. Les animatrices et les anima-teurs savent à quel point il est difficilepour les apprenantes et apprenantsde savoir faire la différence de sensentre certains homophones. Dans cescas, pour trouver le sens, il faut recou-rir à l'orthographe du mot qui encertifie le sens. «Il ne faut pas chercherde logique, ni de nécessité dans lesformes que prend un langage. C'est ceque signifie le terme «conventionnel»:des formes qui sont arbitraires et quipourraient être différentes, mais quifonctionnent par ce qu'elles sont l'objetd'un accord mutuel», qui leur confèreun sens, précise Smith pour expliquerles extravagances de la langue écrite.Il ajoute que la partie active de toutelangue, «l'idiome» en constitue la partla plus importante puisque «c'est lamanière d'utiliser les mots du voca-bulaire et les formes de la grammairedans une communauté de languedonnée.» (Pages 87, 88) Tout commele jeune enfant apprend la langueorale en la parlant, en faisant destentatives et en recevant du «feed-back» sur celles-ci, la lecture s'apprendaussi par «immersion» : c'est en lisant,au début avec possibilité plus granded'erreurs, que l'on devient bon en lec-ture. Il faut savoir prendre des risques,dirait Smith.

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* La motivation

Il ne peut cependant y avoirapprentissage si la motivation n'estpas de la partie. Smith parle d'ap-prentissage en termes d'engagementde la part de la personne qui ap-prend On apprend la langue parceque cela fait partie du monde qui:nous entoure, parce qu'on en voitl'utilisation qu'en font les autres,parce qu'enfin, on en comprendl'importance et l'utilité. Cependant,la motivation n'est pas suffisante, à'elle seule, pour assurer l'appren-tissage de la lecture. On doit aussiretrouver la «composante de toutesituation d'apprentissage: l'absencede toute anticipation d'échec ou dedifficultés dans cet apprentissage.»(Page 105) On peut faire ici un rap-prochement avec De la Garanderiequi parle de la nécessité de se projeterdans l'avenir avec confiance, com-me l'un des éléments importantspour assurer le succès d'un appren-tissage. Smith ajoute, rejoignantainsi Jean Patry, que «l'anticipationde l'échec, elle-même, s'apprend.»(Page 106)

Une fois ces facteurs réunis,comment s'opère le processus delecture? Quelles habiletés doit-ondévelopper pour améliorer la ca-pacité de lecture?

L'IDENTIFICATION DES CODES

L'identification des lettres peutse faire seulement par le processuspréalable - et qui l'englobe - queconstitue la reconnaissance desschèmes. Celle-ci consiste en la ca-pacité de percevoir des équivalencesentre deux configurations visuelles.Elle se fait, comme nous l'avonsdéjà mentionné par l'analyse destraits, à la façon d'un ordinateur.

Par exemple, on apprend à fixer lescritères de traits par catégorisationdes éléments fonctionnellementéquivalents, tels A, a, a et @ faisantpartie de la catégorie «A» en lesreconnaissant, après les avoir déjàvus. Smith explique: «Nous appre-nons à identifier les lettres de l'al-phabet en établissant des listes detraits pour les vingt-six catégoriesvoulues, chacune d'entre elles étantreliée à un seul nom A, B, C et ainside suite (...).» (Page 115)

Quant à l'identification desmots, Smith soutient qu'elle n'exigepas l'identification préalable deslettres, dont on aura d'abord apprisles catégories et les équivalences. Iln'est donc pas nécessaire de décodermais de comprendre pour lire effi-cacement. Il rapporte trois grandesthéories portant sur l'identificationdes mots, à savoir l'approcheglobale, l'approche de l'identifica-tion de lettre à lettre, et une appro-che intermédiaire d'identification denoyaux de mots, qu'il nomme«schèmes orthographiques». Selonle besoin ou l'état des connaissanceset de l'habileté de la personne quiapprend à lire, ces trois approchesne sont pas fausses mais chacunecomporte des insuffisances. Dansl'approche phonétique par exem-ple, Smith affirme que les règlesphoniques ne sont que probables etne permettent pas de faire des hy-pothèses sans ambiguïté. Il ajoutecependant qu'en somme, une «ten-tative sérieuse pour comprendre lalecture doit permettre d'expliquerpourquoi la personne identifie par-fois les mots globalement, et doit, àd'autres occasions, passer par l'iden-tification des lettres ou des groupesde lettres qui constituent le mot.»(Page 124)

Ce que tente de faire sa théo-rie, c'est d'expliquer la similitude duprocessus de vision et de décision,

que la personne identifie des lettresou des mots lorsqu'elle analyse l'in-formation visuelle en fonction descatégories de traits. Ce qui diffère,c'est la direction de son projet; eneffet, le projet de trouver du senspeut être orienté vers l'identificationdes mots d'une phrase ou vers deslettres des vingt-six lettres de l'al-phabet pouvant avoir servi à com-poser un mot. Dans ce processusd'identification, en plus de l'infor-mation non visuelle de ses connais-sances du monde, à même l'infor-mation visuelle dont la personnedispose, se trouve aussi l'aspect or-thographique de l'écrit, qui seprésente comme une duplication del'information et facilite la prise dedécision.

Ce dont il faut aussi tenircompte, c'est qu'il est par ailleursimpossible «d'utiliser une mêmeinformation en ayant simultané-ment deux objectifs différents. Onvoit 10 soit comme un nombre, soitcomme des lettres, mais non lesdeux.» (Page 130) L'élimination deshypothèses non plausibles constituela base de la lecture, selon Smith.Pour ce faire, plusieurs possibilitéspeuvent se présenter, la prédiction àpartir du contexte, l'identificationpar analogie à d'autres mots connus,l'identification grapho-phonémiqueou l'identification médiatisée du sensde certains mots dans la phrase.

La personne qui apprend à liresur ces bases apprend à identifier lesens dans la lecture. «Les mots, àl'écrit comme à l'oral, sont toujoursseconds par rapport au sens, à lacompréhension, conclut-il. L'écrit(comme l'oral) est transparent: saufsi l'on remarque des anomalies ou sil'on a des difficultés de compréhen-sion.» (Page 152)

l.SmiLh, Frank (1986). Devenir lecteur.Paris, Armand Colin, 182p.

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TENIR COMPTE DES STYLES COGNITIFS...

Dans l'ensemble, les spécialistes rencontrés en entrevue ont fait une mise engarde contre la tentation de cantonner de manière hâtive dans l'une ou l'autre descatégories les apprenantes et apprenants. Ils conseillent plutôt de s'en tenir à l'ob-servation de ce qui se passe réellement chaque fois, puisque des changements peu-vent survenir chez toute personne, à n'importe quel moment de son cheminement.

Une fois cette mise en garde établie, il est aussi important de reconnaître, àl'instar surtout d'Antoine De la Garanderie, que l'animatrice ou l'animateur possèdeaussi un style dominant dans ses différentes approches avec les apprenantes et lesapprenants. Comment se comporter alors en atelier devant tous ces divers styles, ces possibi-lités de stratégies? Voilà qui pourra faire partie d'un prochain dossier.

1. Propos recueillis lors d'une entrevue avecDenyse Mayano, orthopédagogue et direc-trice de l'école Vanguard, le 13 février 1991.Cette école secondaire s'adresse aux élèvesayant des problèmes d'apprentissage.

2. Gagné, Robert M. (1976). Les principesfondamentaux de l'apprentissage. Appli-cation à l'enseignement (traduit par RobertBrien et Raymond Paquin). Montréal,Études vivantes, 148p.

3. De la Garanderie, Antoine (1982). Péda-gogie des moyens d'apprendre: les en-seignants face aux profils pédagogiques.Paris, Édition du Centurion, 131p.

4. Propos recueillis lors d'une entrevue avecMohamed Hrimech, le 13 février 1991.

5.Veuillez vous référer à l'ouvrage deColette Dufresne-Tassé, (1980). L'Opalede feu. Analyse du processusd'apprentissage de l'adulte. Faculté dessciences de l'éducation, Université de Mon-tréal, 187p., ainsi qu'à l'interprétation qu'enfait Michèle Dupuis dans Les personnesanalphabètes et l'apprentissage. Mon-tréal, RGPAQ, 85p. (Un visa pour l'alphapop, 2).

6. Propos recueillis lors d'une entrevue avecColette Dufresne-Tassé, psychologue enandragogie à l'Université de Montréal, le 7février 1991.

7. Propos recueillis auprès de Jean Patry,psychologue andragogue, lors d'une entre-vue à la Maison de l'éducation des adultesde Longueuil, le 7 février 1991.

8. Bibeau, Marc (1984). Le savoir méta-cognitif des adultes analphabètes por-tant sur la compréhension de communi-cations orales, mémoire de maîtrise enpsychologie, UQAM, 108p.

9. Propos recueillis lors d'une entrevueavec Michèle Dupuis, andragogue, le 7février 1991.

10. Résumé des principales conclusions dela thèse de doctorat de Mohamed Hrimech(1990), Utilisation des stratégies au-torégulées d'apprentissage selon desadultes, étudiants universitaires. Dé-partement de psychologie et d'andragogie,Faculté des sciences de l'éducation, Uni-versité de Montréal, 226p.

ll.Pinard, Adrien, Lefebvre-Pinard,Monique et Bibeau, Marc (1989). «Lesavoir métacognitif des adultes analpha-bètes portant sur la compréhension: com-paraison entre adultes analphabètes et adul-tes alphabétisés,» in Revue québécoise depsychologie, Vol. 10, n°3, pp. 78-91.

12.Dessamt,Marie-Paule(1986).Influencedes styles cognitifs visuel et auditif surl'apprentissage adulte. Examen de syn-thèse pour le doctorat en andragogie,U. de M., 55p. Elle rapporte que le termede «style cognitif», d'après James Keefe(1979), aurait été inventé en 1937 par uncertain Allport qui en parlait dans le sensde traits de personnalité dans la façon des'adapter par rapport à une qualité de vie.

13. Dilts, Robert D. (1985). Appli-cations de la Programmation neurolin-guistique à la composition écrite (traduc-tion d'une partie de l'ouvrage intituléApplications of Neuro-Linguistic Pro-gramming), 18p. et Applications péda-gogiques de la Programmation neurolin-guistique, 26p.

14. Patry, Jean (1986). L'évolution del'identité comme conscience de soi eninteraction avec l'environnement chezdes personnes analphabètes engagéesdans une démarche d'alphabétisation.Thèse de doctorat en psychologie, MontréalUQAM, 375 p.

15. Smith, Frank (1986). Devenir lecteur.Paris, Armand Colin, 182p.

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