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L’éducation dans un monde multilingue PRINTEMPS 2007 Numéro 12 Une publication commune d’un réseau de magazines issus de dix pays d’Europe version française éditée par Revue de la petite enfance et de l’intégration et par l'Observatoire de l'enfant de la Commission communautaire française

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L’éducation dans un monde multilingue

PRINTEMPS 2007Numéro 12

Une publication commune d’un réseau de magazines issus de dix pays d’Europe

version française éditée par

Revue de la petite enfance et de l’intégration

et par l'Observatoire de l'enfant de laCommission communautaire française

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Comité de rédaction

Irene Balaguer, Infancia, Espagne

L’Associació de Mestres Rosa Sensat publie deuxmagazines différents, Infància et Infancia, en Cata-lan et en Espagnol, six fois par an. Tous deux trai-tent des enfants de 0 à 6 ans et mélangent théorieet pratique. Chaque magazine possède son proprecomité de rédaction et s’occupe de régions dis-tinctes sur les plans géographiques et linguistiques.

www.revistainfancia.org

Peter Moss, Rédacteur en chef

[email protected]

Bronwen Cohen, Children in Scotland,Royaume-Uni

Children in Scotland est un mensuel qui proposedes articles et des informations fouillées sur dessujets qui touchent les enfants, les jeunes et lesfamilles en Ecosse.

www.childreninscotland.org.uk

Ferruccio Cremaschi, Bambini, Italie

Bambini, destiné aux éducateurs de la petiteenfance (0 à 6 ans), s’intéresse à la recherchescientifique et aux bonnes pratiques en matièred’éducation. Il examine en particulier les change-ments sociaux et culturels en plaçant toujours lesbesoins des enfants à l’avant-plan.

www.edizionijunior.it

Annica Grimlund, Tidningen Förskolan, Suède

Tidningen Förskolan c’est le magazine mensueldu syndicat des Suédois enseignant.

www.forskolan.net

Eva Grüber, Betrifft Kinder, Allemagne

Bettrift Kinder est un mensuel d’informationconcernant les initiatives et les bonnes pratiquesdans l'éducation de jeunes enfants en Allemagne.

www.verlagdasnetz.de

Perrine Humblet, Grandir à Bruxelles,Communauté française de Belgique

Grandir à Bruxelles est publié par l’Observatoirede l’enfant de la Commission communautairefrançaise de la Région de Bruxelles-Capitale.Quatre mille exemplaires sont distribués gratuite-ment tous les six mois.

www.grandirabruxelles.be

Stig G Lund, Børn & Unge, Danemark

Børn & Unge est distribué gratuitement aux50 000 membres du BUPL (le syndicat despédagogues). Il traite de la pratique, de la théorie et des condi-tions de travail des éducateurs au Danemark.

www.boernogunge.dk

Alexandra Marques, Cadernos de Educação de Infancia, Portugal

L’Associação de Profissionais de Educação deInfancia, publie trois fois par an la seule revueportugaise sur la petite enfance (0-6 ans)

http://apei.no.sapo.pt

Jan Peeters, Kiddo, Flandre et Pays-Bas

Kiddo est publié huit fois par an et couvre aussibien les Pays-Bas que la Flandre. Le magazinevise la tranche d’âge de 0 à 12 ans et s’adresseaux praticiens qui travaillent avec les enfants.

www.kiddo.net

Marie Nicole Rubio, Le Furet, France

Publié trois fois par an, Le Furet couvre la tranched’âge de 0 à 6 ans et s’adresse aux professionnelsde la petite enfance, aux associations et aux res-ponsables des politiques petite enfance en France.

www.lefuret.org

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Enfants d’Europe 1

L’éducation dans un monde multilingueEnfants d’Europe 2007

Bienvenue dans le douzième numérod’Enfants d’Europe. Dans ce nouveau numéronous nous penchons sur la question deslangues en Europe, et plus particulièrementsur le fait de valoriser nos sociétésmultilingues, de soutenir le plurilinguisme ausein des familles et d’encourager ledéveloppement de celui-ci chez les enfantsen bas âge.Enfants d’Europe se félicite d’être unepublication multilingue, disponible dans 11langues différentes. Mais éditer ce numérom’a fait réaliser combien il est difficiled’étudier en profondeur la diversitélinguistique en Europe. Nous ne faisonsqu’effleurer la question. Littéralement, descentaines de langues sont parlées, que cesoit celles qui sont parlées en Europe depuisdes centaines d’années, ou bien celles quise sont largement développées récemmenten Europe en quelques dizaines d’années àpeine. Certaines langues, comme le breton,le corse ou le frison septentrional sont envoie de disparition alors que d’autres,comme le gallois (qui figure d’ailleurs dansce numéro), inversent la tendance et sont enpleine renaissance.

Nous avons mélangé des articles générauxadoptant une perspective transnationale,avec des rapports sur la façon dont lemultilinguisme est valorisé et soutenu dansles structures d’accueil de la petite enfanceet les écoles de différents pays européens (y compris en Roumanie, qui vient d’entrerdans l’Union). Alors que le contexte estdifférent d’un endroit à un autre, on retrouvedans toutes ces expériences, même les pluslocales, l’idée que le multilinguisme est unevaleur et la diversité linguistique un atoutpour les sociétés et les individus devant êtrecélébré et cultivé. Toutes ces expériencessoulignent également un des enjeux del’Europe : comment créer des structuresadaptées à nos sociétés multilingues ? Enfin, nous avons aussi réuni lestémoignages des personnes les plusconcernées : les multilingues (multilinguismelié au hasard de la naissance ou résultantd’une migration).

Peter Moss

Avec le soutien de la Fondation Bernard Van Leer

2Langue maternelle plus deux : le plurilinguisme peut-il devenir la norme ?MARIE NICOLE RUBIO et ANDRÉE TABOURET KELLER

4Langues officielles et minoritaires

7Le rôle du Conseil de l’EuropeADRIAN BUTLER

8Les langues dans les services pour l’enfanceANEMONE GEIGER-JAILLET

10Et si le coq donnait sa langue au chat...CHRISTIANE PERREGAUX

12Un modèle pour promouvoir les expériences bilingues précocesSIÂN WYN SIENCYN

15«Les limites de mon langage limitent mon accès au monde.» Les enfants multilinguesdans les structures monolinguesSERAP SIKCAN

18 Trois langues pour une région : les enfants multilingues du Tyrol du SudMARTIN DODMAN

20Le désir de communiquer : la vie dans une école maternelle suédoise multilingueEMILIE STENDHAL

22L’école maternelle multilingue en RoumanieMARIANA NOREL

24Histoires pour une société multiculturelleISABEL MARTINS

26La langue maternelle et son ennemiAGOTA KRISTOF

27Ma voix n’a pas le même sonSIRISAK/BILLY

28Etre multilingue : un don des plus précieuxMICHEL VANDENBROECK

30Pleins feux sur... Marta Mata i GarrigaIRENE BALAGUER

32Actualités européennes

Enfants d’Europe 2007

Editeurs responsables : Perrine Humblet et Marie Nicole Rubio

Rédacteur en Chef : Peter Moss

Rédactrice invitée : Marie Nicole Rubio etAndrée Tabouret-Keller

Traduction: Morgan Vincent et AuréliaCapello

Imprimé par Tecnoprint S.n.c. Romano di Lombardia (BG) - Italie

Printemps 2007 - n° 12

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D’après les dernières estimations, plus dela moitié de la population mondiale vitdans des zones «multilingues», où l’onpeut constater la présence de deux ouplusieurs langues. Les nombreusessituations de multilinguisme que l’onobserve actuellement dans notre mondeproviennent essentiellement deschangements qui affectent la façon dontvivent les gens. Parmi ces changementsradicaux, on note l’introduction dusystème scolaire obligatoire et ce qui endécoule, c’est-à-dire l’évolution versl’utilisation universelle de la forme écrited’une langue nationale, qui se distingued’ailleurs bien souvent de la langue oraled’une région ; le fait que le tracé desfrontières politiques ne tienne pas comptedes réalités linguistiques ou que deslangues aient été imposées par lespuissances coloniales (souventeuropéennes) ; le phénomèned’urbanisation chez des populationsd’origines diverses, souvent rurales ; etenfin, la banalisation des migrations entredifférents pays.

Le terme de «situation multilingue» est unterme très général. Il ne nous renseignepas sur qui utilise quelle langue pour direquoi, ni combien de personnes parlentquelle langue, ni la proportion de vrai«plurilingues» d’une population donnée (leConseil de l’Europe définit le terme

«plurilingue» comme «la capacité à utiliserles langues dans le but de communiqueret de prendre part aux interactionsinterculturelles»). Le terme «plurilingue»est également très vague. Il ne dit rien surles conditions sociales qui déterminentl’utilisation de plus d’une langue. Parexemple, quelle langue sera utilisée à lamaison ou à l’école. Pourquoi choisirait-onde discuter finance avec son époux dansune langue, et éducation des enfants dansune autre ? Ces deux termes nedéfinissent pas non plus les lois quigouvernent l’utilisation des langues et enparticulier quelles langues sont désignéescomme «officielles». Ils ne définissent pasplus les règles qui régissent les formesécrites ou orales d’une langue.

Langage, culture, identité et pouvoirDe nos jours, en Europe, un enfant doitfaire face à de nombreuses situationsdans lesquelles il est exposé à au moinsdeux autres langues, que ce soit à lamaison, dans son entourage immédiat,dans les structures d’accueil de la petiteenfance ou à l’école. Dans ce mondemultilingue, l’UE veut promouvoir leplurilinguisme. En effet, à l’issue de laréunion de chefs d’Etats à Barcelone enmars 2002, l’enseignement précoce d’aumoins deux langues étrangères a étéencouragé. Dans une interview récente, leCommissaire Européen au Multilinguisme,

Leonard Orban (Roumanie), parle del’importance d’être multilingue, «mon butest de prouver que la diversité culturelle etlinguistique n’est pas un fardeau mais unesuperbe opportunité à saisir.» Il ajouteensuite qu’«apprendre une langueétrangère dès le plus jeune âge est unefaçon efficace de contribuer aumultilinguisme.» On reconnaît aujourd’hui l’importance dulangage pour plusieurs raisons : lareconnaissance identitaire, l’appartenanceculturelle et le succès économique. Etpourtant, une certaine ambivalencedemeure à propos du plurilinguisme, toutdu moins en qui concerne certaines de sesformes. Comme le souligne ChristianePerregaux dans son article, «le bilinguismea longtemps été mis en cause commeétant un des facteurs de retard de langageet de difficultés d’apprentissage souventobservés chez les enfants de famillesd’immigrés.» Ce n’est pas le bilinguismequi doit être pointé du doigt mais bien lesstructures elles-mêmes, telles que lesstructures d’accueil de la petite enfance etles écoles «classiques» par exemple, quine sont pas à même de recevoir desenfants bilingues. Comme le fait remarquerSerap SIkcan, «lorsque le développementmonolingue des enfants grandissant avecune seule langue de référence est utilisécomme principale référence, les enfantsmultilingues sont désavantagés.» Le statutinégal des langues est aussi un problèmepuisque les enfants «perçoivent dès le plusjeune âge que les langues sont appréciéesdifféremment.» Par conséquent, statut etpouvoir entrent dans l’équation toutcomme les connaissances, formations etattitudes envers les langues des équipeséducatives des structures d’accueil et desécoles. «Ce n’est pas l’université qui a leplus besoin des équipes enseignantes lesplus qualifiées mais bien les structuresd’accueil de la petite enfance» déclareAnémone Geiger-Jaillet qui souligneégalement l’importance du lien entre lesfamilles et les structures d’accueil elles-mêmes.

2 Enfants d’Europe

Langue maternelle plus deux :le plurilinguisme peut-ildevenir la norme ?Marie Nicole Rubio et Andrée Tabouret Keller

Le multilinguisme est-il un problème purementéducatif ? Le multilinguisme est-il un problèmepurement politique ? Ces questions constituent lespositions antagonistes du débat sur un sujeteuropéen fondamental. Nos rédactrices invitéesMarie Nicole Rubio et Andrée Tabouret-Kellerintroduisent ce douzième numéro d’Enfants d’Europesur la diversité des langues.

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Dans ce numéroAvec 23 langues officielles, des dizainesde langues régionales et des centaines delangues parlées par les immigrants enEurope, ce numéro d’Enfants d’Europe nepeut se prétendre être exhaustif. Nousfournissons une information générale surles langues parlées en Europe, l’articled’Anémone Geiger-Jaillet qui propose unaperçu des différentes approchesd’enseignement des langues, et celui deAdrian Butler à propos du Conseil del’Europe, qui a joué un rôle de pionnierdans l’incitation à l’apprentissage deslangues. Nous examinons ensuite des exemples desoutiens à la diversité linguistique, dansdes pays où cette diversité a des originestrès différentes (Pays de Galles, Suède,Allemagne, Italie, Portugal et Roumanie)ainsi que dans deux projets nationauxspécifiques : Eveil aux langues etEducation et Ouverture aux Langues àL’école qui encouragent les enfants àadopter, dès leur plus jeune âge, uneattitude positive envers l’apprentissagedes langues et la diversité.

Par le biais de témoignages, nousapprenons également ce qu’est êtrepolyglotte dans une société multilingue,afin de mieux en comprendre les plaisirscomme les difficultés. Agota Kristof, quiest née en Hongrie et est devenue écrivainde langue française après avoir dû fuir sonpays, parle d’une vie passée, cernée pardes langues «ennemies», «éradiquant ma

langue maternelle». Billy, âgé de 10 ans,né en Thaïlande mais arrivé en Ecosse àl’âge de 7 ans., a dû faire face auxdifficultés liées à l’adaptation à unenouvelle langue et à un système scolairedifférent. Son témoignage, riche de détails,nous donne un aperçu de la réalité dubilinguisme. «Quand je parle thaïlandais mavoix sonne différemment. En thaïlandais mavoix est plus aiguë alors que ma voixanglaise est plus grave». MichelVandenbroeck écrit à propos de sacondition d’enfant, de père et dechercheur polyglotte dans le contextemultilingue belge, et de la façon dont cetteexpérience a fait naître en lui un sentimentfort d’engagement envers une éducationqui encourage les enfants à respecter ladiversité dès le plus jeune âge.

En conclusionLes enfants en bas âge sont rarement lacible des politiques de promotion deslangues, bien que ce soit précisément cegroupe d’âge là qui soit le plus ouvert auxdifférentes langues. Dès le plus jeune âge,les enfants devraient être encouragés àreconnaître la diversité linguistique qui lesentoure, comme une richesse et unbienfait.

Nos structures d’accueil de la petiteenfance et nos écoles doivent prendre encompte les différentes langues utiliséespar les enfants et leurs familles. Ellesdoivent aussi développer des méthodesd’enseignement adaptées aux sociétés

multilingues. On doit offrir des formationsaux éducateurs et leur fournir lesressources (livres, CDs, vidéos, jeux, etc.)pour encourager cette ouverture. Commepour tous les éléments qui façonnent uneculture, les langues doivent, elles aussi,évoluer pour rester vivantes et êtrepartagées. L’Europe de demain doit être fondée surnotre riche héritage linguistique et ladiversité. Chaque langue ouvre uneperspective particulière (une vue uniquedu monde avec ses propres champs depensées et de sensibilités), qui estirréductible et qui ne peut être retranscritede manière parfaite. C’est pour cetteraison qu’une langue est très précieuse.Savoir apprécier les sociétés multilingueset promouvoir le plurilinguisme ouvrira lavoie à un plus grand respect et à une plusgrande tolérance. Bien que les initiatives linguistiques ciblantles jeunes enfants n’en soient encore qu’à leurs balbutiements, nousespérons que ce numéro de notre revuepermettra de faire avancer cesconceptions.

Marie Nicole Rubio est directrice de rédaction de la revueLe Furet, partenaire français d’Enfants d’[email protected]

Andrée Tabouret-Keller est présidente du Centred’information sur l’éducation bilingue et plurilingue à Aosteen [email protected]

Enfants d’Europe 3

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4 Enfants d’Europe

Langues officielles et minoritaires

Dans l’Union Européenne, on peut dénombrer 23 langues officiellesd’usage courant. L’irlandais, le bulgare et le roumain y ont été ajoutésle 1er janvier 2007.

Le quiz des langues

• Dans quel pays membre de l’UEparle-t-on ces langues ?

❑ Le ladin..................................................

❑ Le luxembourgeois ............................

❑ Le manx ................................................

❑ L’occitan................................................

❑ Le shelta ..............................................

• Nommez cinq des dix langues lesplus parlées au monde (commepremière ou deuxième langue).

❑ ................................................................

❑ ................................................................

❑ ................................................................

❑ ................................................................

❑ ................................................................

• Nommez deux des cinq paysmembres de l’UE ayant la plusgrande proportion de personnesmultilingues… Et deux des cinqpays ayant la plus basse ?

❑ ................................................................

❑ ................................................................

❑ ................................................................

❑ ................................................................

LANGUES ROMANESAR AragonaisAO Aroumain (macédo-roumain)AS AsturienCA CastillanCT CatalanCO CorseFP Franco-provençalFR FrançaisFU FrioulanGL GalicienIT ItalienLD LadinOC OccitanOI Langue d’OïlPO PortugaisRO RoumainSA SardeWA Wallon (inclus le Picard, le Lorrain

et le Champenois)

LANGUES GERMANIQUESDK DanoisNL NéerlandaisEN AnglaisFO FaroeseFY FrisonDE AllemandLU LuxembourgeoisFA Frison SeptentrionalSL Frison SaterlandaisSC EcossaisSE SuédoisUS Ecossais d’Ulster

LANGUES TURQUESTA TatarTR Turc

LANGUE EUSKADIENEEU Basque

LANGUES FINNO-OUGRIENNESEE EstonienFI FinnoisHU IngreSM Sami

LANGUES INDO-EUROPÉENNES

AUTRES LANGUAGES

LANGUES CELTIQUESBR BretonKE CorniqueIE Gaélique irlandaisMX ManxGA Gaélique écossaisCY Gallois

LANGUES SLAVESBI BiélorusseBG BulgareKA CachoubeHR CroateCZ TchèquePL PolonaisPM PomaqueRT RuthèneSB SerbeSL Macédonien-slaveSK SlovaqueSI SlovèneSO SorabeUA Ukrainien

LANGUES BALTIQUESLV LettonLT LituanienLI Livonien

LANGUES ALBANAISAL AlbanaisAV Arménien

LANGUES GRECSGR Grec

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Enfants d’Europe 5

La Charte Européenne des Langues Régionales ou Minoritaires a été adoptéeen 1992 sous les auspices du Conseil de l’Europe dans le but de protéger et depromouvoir les langues régionales ou des minorités en Europe. Elle s’appliqueuniquement aux langues traditionnellement pratiquées par les ressortissants despays signataires, qui diffèrent de manière significative de la langue officielle oumajoritaire ; et qui sont, soit parlées par les populations de zones géographiquesspécifiques à l’intérieur de l’état, soit utilisées par les minorités linguistiques au seinde l’état tout entier. Elle exclut donc les dialectes locaux dérivés de la langueofficielle ou majoritaire ; les langues des immigrés récemment arrivésd’autres pays, et les langues telles que le romani ou le yiddish qui sontutilisées dans une vaste zone géographique. La charte propose auxétats un grand nombre d’actions possibles afin qu’ils puissentprotéger et promouvoir les langues historiquement minoritaires. Ondistingue deux niveaux de protection. Tous les signataires de laCharte doivent appliquer le niveau minimum de protection auxlangues agréées ; les signataires peuvent ensuite attribuer le plushaut niveau de protection à une ou plusieurs des languessélectionnées. Les états doivent s’engager à entreprendre au moins35 des actions proposées dans ce haut niveau de protection.

(http://conventions.coe.int/treaty/en/Treaties/Html/148.htm).

PORTUGALPortuguais

ITALIEItalien

GRECEGrec

FRANCEFrançais

PAYS-BASNéerlandais/flamand

IRLANDEGaélique Irlandais

ROYAUME-UNIAnglais

DANEMARKDanois

LUXEMBOURGLuxembourgeois

ALLEMAGNEAllemand

REPUBLIQUE TCHEQUETchèque

POLOGNEPolonais

LITUANIELituanien

LETTONIELetton

ESTONIEEstonien

FINLANDEFinnois

SUEDESuédois

SLOVAQUIESlovaqueAUTRICHE

SLOVENIESlovène

HONGRIEHongrois

ROUMANIERoumain

BULGARIEBulgare

BELGIQUE

Asturien

Galicien

Basque

Aragonais

Catalan

Sarde

Occitan

Langue d’oïl

LadinFrioulan

VénèteRomanche

Breton

Frison

Allemand

Cachoube

Sorabe Biélorusse

Polonais

Live

Suédois

Finnois Tornedalien

Sami

Finnois

Ukrainien

Sebe

Turc

Turc

Pomaque

Albanais

Albanais

Aroumain

Macédonien

Ruthène

Cornouaillais

Gaélique écossais

Ecossais

Féroïen

Manx

Ecossais d’Ulster

Gallois

Frison septentrional

Frison saterlandais

Bas-allemand

Franco-provençal

CorseESPAGNECastillan ETATS

Langues minoritairesLangues officielles

Isolats ou locuteurs dispersés

Langue isolée

Les Langues d’Europe

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point de vue linguistique, mais même endehors de la capitale, on parle au moins196 langues différentes. Les principaleslangues des communautés viennent dusub-continent indien, mais la tendance està la diversification, au niveau de l’éventaildes langues pratiquées et aussi des zonesgéographiques dans lesquelles ceslangues sont parlées.

Dans un rapport pour l’UNESCO, GuusExtra et Kutlay Yagmar commentent lamanière dont sont traitées les différenteslangues minoritaires, qu’elles soientrégionales ou issues de l’immigration : «Les pays européens ont adopté denombreuses mesures quant au maintiendes langues minoritaires régionales.Certaines d’entres elles comme le catalan,le basque ou le frison jouissent d’unsoutien légal et éducatif dans le systèmescolaire ordinaire, ce qui n’est pas le casdes langues des communautés issues del’immigration… En effet celles-ci sontbeaucoup moins protégées que leslangues régionales par des mesures dediscrimination positive ou des mesureslégales, par exemple en matièred’éducation. En réalité, l’apprentissage ettrès certainement l’enseignement de deslangues des immigrants sont souventconsidérés par les locuteurs des languesdominantes et par les législateurs commedes obstacles à l’intégration. Au niveaueuropéen, les recommandations et lesdirectives les concernant sont plutôt rareset dépassées… [et] il y a beaucoup moinsde connaissances à propos du statut etde l’utilisation des langues minoritairesdes immigrants à travers l’Europe, enraison des processus d’immigration et deminoration. Contrairement aux languesminoritaires régionales, les langues

minoritaires des communautés issues del’immigration ne bénéficient d’aucun statutofficiel.»(http://www.unesco.org/most/dp63extra.pdf)L’anglais est de loin la langue la plusparlée de l’UE. C’est la langue maternelle de 13% de lapopulation de l’UE, et 34% disent pouvoirsuivre une conversation courante enanglais. Après l’anglais, ce sont l’allemand(18%+12%) et le français (12%+11%)qui dominent. Les pays, dont les plus grandesproportions de la population déclarent queleur langue maternelle n’est pas unelangue officielle ou régionale de l’UE, sont la Lettonie (30%) et l’Estonie (20%)qui s’expriment majoritairementen russe ; suivi de la Bulgarie (11%), duRoyaume Uni (5%), de l’Allemagne (4%)et enfin de la Belgique et de la France(3% réunis).

6 Enfants d’Europe

Plus d’une soixantaine de languesrégionales minoritaires sont parlées parquelque 40 millions de citoyens de l’UE,et cela, généralement en supplément de laou des langues officielles d’Etat. Dans laCharte Européenne des LanguesRégionales ou Minoritaires, celles-ci sontdéfinies comme étant «des languespratiquées traditionnellement par unepartie de la population d’un Etat et qui nesont ni des dialectes de langues officiellesd’Etat, ni des langues d’immigrés ou deslangues créées de manière artificielle».Parmi ces langues régionales minoritaireson trouve des langues que l’on rencontreexclusivement dans un seul Etat membre(comme le gallois au Royaume Uni ou legalicien en Espagne), ou dans plusieursdes Etats membres (le catalan, parexemple, est parlé par 7 millions depersonnes en Espagne, en France et enItalie), ainsi que des languestransfrontalières, majoritaires dans un étatmembre mais minoritaires dans d’autres(comme le hongrois en Slovaquie et enRoumanie) ou encore des langues nonterritoriales (comme le romani ou leyiddish). (http://ec.europa.eu/education/policies/lang/languages/langmin/regmin fr.html)On rencontre aussi beaucoup de languesminoritaires des communautés issues del’immigration. Celles-ci ne sont pasrépertoriées de manière exhaustive maiselles existent en grand nombre. Parexemple, une étude entreprise en 2004-2005 montre que plus de 700 000 enfantsscolarisés en Angleterre, en Ecosse, et auPays de Galles parlent plus de 300«langues des communautés» (c’est-à-direune autre langue que la langue officielle).Londres est la zone la plus diversifiée d’un

Les t-shirts avec l’inscription «parle moi» traduite en 15 langues, ont été distribués à l’occasion de la JournéeEuropéenne des Langues.

Réponses du Quiz

Ladin- Italie (Tyrol du sud) ; luxembourgeois-Luxembourg ; manx- Royaume Uni (Ile de Man) ; occitan

– France (sud et Monaco); shelta– Irlande (The Travellers: minorité ethnique irlandaise, nomades)

Chinois(Mandarin) – 1052 millions ;anglais– 508millions ;hindi– 487 millions ; espagnol– 417 millions ;russe– 277 millions ; bengali– 211 millions ;portugais–191 millions ;allemand– 128 millions ; français– 128millions ;japonais– 126 millions (Source : Nicholas Ostler(2005) Empires of the Word : ALanguage History of the World)

Pays ayant le plus de personnes multilingues:Luxembourg (99%) ; Lettonie, Malte (93%) ; Pays-Bas(91%) ; Lituanie (90%). Pays ayant le moins de

personnes multilingues: Hongrie (29%) ; Royaume Uni(30%) ; Portugal, Italie, Espagne (36%) (Source : SpecialEurobarometer 237, September 2005 ; disponible sur lesite : http://ec.europa.eu/public opinion/archives/ebs/ebs

237.en.pdf)

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Le Conseil de l’Europe met en œuvre desprogrammes novateurs dans le domainedes politiques d’éducation aux languesdepuis 1957. Ceux-ci couvrent les langues «nationales»,leurs variantes régionales et les languesrégionales des minorités et desimmigrants, ainsi que les langues«étrangères» enseignées à l’école ouacquises par d’autres voies. Le conceptde plurilinguisme est à la base de cestravaux et se définit comme suit: «lacompétence à communiquerlangagièrement et à interagirculturellement d’un acteur… qui possède,à des degrés divers, la maîtrise deplusieurs langues et l’expérience deplusieurs cultures».

L’Europe est multilingue et lemultilinguisme (c’est-à-dire la coexistencede plusieurs langues dans un espacedéfini) est en pleine croissance. Laconnaissance des langues joue un rôleessentiel pour la promotion de l’intégration sociale, du dialogueinterculturel, des droits de l’Homme et dela citoyenneté démocratique et despolitiques sont nécessaires afin depromouvoir l’apprentissage des languesdans les systèmes éducationnelsnationaux. C’est là que le Conseil de l’Europe a fait une contributionimportante.

Il a développé le Cadre européencommun de référence pour les langues(http://www.coe.int/T/DG4/Portfolio/documents/Cadre%20de%20reference%20avec%20hyperliens.pdf) qui offre une basecommune pour le développement descurricula des cours, des examens et desmanuels dans le domaine des langues àtravers l’Europe, ainsi que des standardsclairs devant être atteints au cours desdifférentes étapes de l’apprentissaged’une langue vivante. Le Guide pourl’élaboration des politiques linguistiqueséducatives en Europe(http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Source/Guide_court_FR.pdf) du Conseil élargit leconcept d’éducation plurilingue pour yinclure l’éducation au plurilinguisme :l’éducation pour la promotion de latolérance linguistique, la conscience de ladiversité linguistique et la citoyennetédémocratique.

Le Centre européen pour les languesvivantesLe travail du Conseil de l’Europe dans ledomaine du plurilinguisme est l’œuvre dedeux unités ayant des missions et desméthodes de travail distinctes, maiscomplémentaires. La Division despolitiques linguistiques à Strasbourg traiteprincipalement du développement despolitiques et des standards. Le Centreeuropéen pour les langues vivantes(CELV) à Graz, en Autriche, se concentrequant à lui sur la mise en œuvre despolitiques par le biais de la promotion del’innovation et des bonnes pratiques dansl’enseignement des langues. Il aide lesEtats membres à mettre en œuvre despolitiques efficaces d’enseignement deslangues et à améliorer l’enseignement etl’apprentissage. Il organise des projetsdans le domaine de l’éducation auxlangues destinés en premier lieu auxformateurs des enseignants, auxchercheurs et aux enseignants qui formentleurs collègues ; ceux-ci sont nommés entant que participants par leurs autoritésnationales. Le centre de documentation etde ressources du CELV est une mined’informations pour les enseignants enlangues et les publications du Centrepeuvent être téléchargées gratuitement.(Pour plus de détails, veuillez consulterl’adresse suivante : http://www.ecml.at/)

Bilinguisme et apprentissage précoce deslanguesLe Conseil de l’Europe souligne la valeurdu plurilinguisme et le potentiel quepossède toute personne de devenirplurilingue grâce à des mesureséducationnelles adaptées. Cet aspectpositif est valable pour les jeunes enfants.Le rôle du Conseil n’est cependant pasde donner des conseils spécifiques auxparents à propos de l’apprentissage

précoce des langues ou de l’éducationdes enfants élevés dans un environnementplurilingue. Son souci dans ce domaineest de nature politique et concerne surtoutles dangers courus par les enfants qui nesont pas scolarisés dans leur languematernelle ou une variante de celle-ci. Cesdangers incluent la stigmatisation liée aumanque de compétence dans la langue de scolarisation (généralement lalangue «nationale») ou l’abandon par lesélèves de leur langue de socialisationprimaire et, en conséquence, de leuridentité ethnique.

Un certain nombre de projets du CELV sesont consacrés à la question del’enseignement des langues aux jeunesenfants, dans la plupart des cas en âged’école primaire. Le projet JanuaLinguarum – La porte des langues- parexemple, organisé dans 16 payseuropéens, a fait la promotion de «l’éveilaux langues». Plutôt que de leur enseignerune langue spécifique, les enfants sevoient présenter une diversité de langueset de cultures : écouter les sonorités dedifférentes langues, découvrir leursécritures, comprendre leurfonctionnement, s’intéresser auxpersonnes qui les parlent(http://www.ecml.at/doccentre/abstract.asp?r=58&&l=F). Un projet actuel intituléFormation des enseignants en languesvivantes pour jeunes apprenants a, quantà lui, pour but de développer, piloter etmettre en œuvre un programme innovantpour les enseignants de langues vivantes(http://www.ecml.at/mtp2/TEMOLAYOLE/).

Adrian Butler est directeur exécutif du Centre européenpour les langues [email protected]

Le rôle du Conseil de l’EuropeAdrian Butler

Adrian Butler explique le rôle clé dans la promotiondu «plurilinguisme» du Conseil de l’Europe, uneorganisation intergouvernementale basée àStrasbourg qui offre un forum paneuropéen unique àses 46 Etats membres.

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apprennent en principe une 2ème languedès l’école primaire. L’évolution dans lepré primaire est plus complexe et lacomparaison plus difficile au vu de lamultiplicité de structures pour cettetranche d’âge, que ce soit dans un mêmepays, ou entre pays. Mais certains paysintroduisent dans leurs programmes unepremière approche aux languesétrangères ainsi que des cours de soutienpour les enfants dont la première languene serait pas celle du pays d’accueil.

Principes sur l’enseignement des languesIl y a globalement consensus sur troisprincipes. Selon le premier principe plusles enfants sont jeunes, plus il estimportant d’appliquer le principe de lapersonne-référence. Selon ce principe,appelé le principe de Ronjat-Grammont(«une personne – une langue»), unepersonne utilise toujours une seule langueavec les enfants. Un deuxième principeest également reconnu : l’équité entre lesdeux langues, le statut comparable deslangues en contact améliore les résultatslinguistiques des enfants. (Dans le cascontraire, une des deux langues souffrede son statut de langue dominée qui ladévalorise, comme pour le turc enAllemagne. Cf. l’article de Serap SIkcan).Le troisième principe méthodologique,celui de l’instrumentalisation de la langue,n’est pas encore suffisamment mis en

œuvre dans les dispositifsd’apprentissage précoce des languesétrangères. Selon ce principe, la languedoit être utilisée lors des activités. Pourles jeunes enfants, cela veut dire, écouteret chanter dans cette langue, bricoler enayant les consignes et l’aide nécessairedans cette langue, faire des jeux, bougerou regarder une cassette vidéo dans cettelangue, faire du théâtre etc. Par contre, les chercheurs sont moinsunanimes sur la nécessité absolue decommencer très jeune. Un grouped’experts souligne que le seul fait decommencer très jeune n’est pas synonymede résultat garanti, si les ressourcesadaptées, la continuité éducative etcertains principes méthodologiques etdidactiques ne sont pas assurés.Commencer avec 3 heures de langueétrangère à l’âge de 4 ans, et gardertoujours 3 heures par semaine jusqu’aubaccalauréat 12 ans après, n’est pas nonplus très motivant. C’est à la foisbeaucoup et trop peu. Il faudrait passerpar des phases plus intensesd’enseignement dans cette langue, alterneravec des phases de maintien, varier lesapproches pédagogiques, prévoir del’extrascolaire, des activités et des voyagesdans des pays de la langue cible.

Exemples de cas

1. Langues étrangères (dispositif non bilingue)Les langues vivantes sont souventintroduites dans les structures de la petiteenfance (les Kindergärten (jardind’enfants) en Allemagne ou en Autrichepar exemple), où on «expose» les enfantsà une autre langue, souvent l’anglais, dèsl’âge de 3 ans. Beaucoup de villes ou derégions ont mis en place des programmes

d’échanges avec deséducateurs/enseignants de maternelle despays de la langue cible (la Sarre avec laLorraine par exemple). C’est le principedu locuteur natif (c’est-à-dire l’idée queseul un natif peut transmettre sa langue)qui domine largement dans ce domaine.L’approche, certes ludique, estdéconnectée des autres apprentissages(l’anglais, par exemple, est séparé desautres sujets sur l’emploi du temps).Cependant un changement est en train des’effectuer du modèle 1 vers les modèles2 et 3 (Geiger-Jaillet 2002).

2a. Bilinguisme fonctionnel (langues ciblesprestigieuses)L’approche favorise la communicationinterculturelle et l’ouverture à d’autrescultures, plus que l’apprentissage d’unelangue en particulier. Dans certains cas,les jardins d’enfants ou les écoles(souvent payantes) proposent desstructures bilingues pour les tout-petits.C’est le cas par exemple de la Viennabilingual School à Vienne en Autriche. Surle site de l’association pour leplurilinguisme précoce en Allemagne(l’association Verein für FrüheMehrsprachigkeit anKindertageseinrichtungen und Schulen)(http://www.fmks-online.de/), on trouve laliste de toutes les structures allemandesqui proposent une autre langue. Dansd’autres cas, l’approche est adoptée parune région entière, comme par exempledans la région italienne du Tyrol du Sud(décrite dans l’article de Martin Dodman).

2b. Langue nationaleDe nombreux Kindergärten bilingues àBerlin montrent la sensibilité de certainsparents turcs d’amener leurs enfants à un

Les langues dans les servicespour l’enfanceAnémone Geiger-Jaillet

L’Union Européenne encourage activement sescitoyens à apprendre d’autres langues européennes.En 2002, les gouvernements réunis à Barcelone sesont prononcés en faveur de l’enseignement d’aumoins deux langues étrangères dès le plus jeune âge.Anémone Geiger-Jaillet examine ce qu’implique dansla pratique l’apprentissage précoce des langues.

Dans la dernière décennie, l’enseignementprécoce de langues étrangères s’estquasiment généralisé dans tous les paysde l’Union européenne. Les enfants y

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bilinguisme équilibré de la langueallemande (langue nationale) et de lalangue turque. L’article de P. Blanchet(2004) montre toute la complexitéd’enseigner d’autres langues en mêmetemps que la langue nationale. (http://www.cahiers-pedagogiques.com/article.php3?id article=850) Si la deuxième langue est une langue defaible diffusion, nous sommes alors dansle cas qui suit.

3. Langues minoritaires comme langued’enseignementCertaines régions en France ayant commehéritage linguistique une autre langue quela langue nationale du pays, ont mis enplace depuis une trentaine d’années, desdispositifs (d’abord privés, puisgénéralement, relayés par l’écolepublique), où se conjuguent le françaiscomme langue nationale et une deslangues régionales (le basque, le catalan,le breton, l’occitan etc.). Des formationspubliques et privées pour ces nouveauxenseignants bilingues existent dorénavant.Un autre cas de figure est celui duLuxembourg, où l’école maternelle estobligatoire pour tous les enfants sur le solluxembourgeois dès l’âge de 4 ans, pourune pré scolarisation en luxembourgeois(francique mosellan), pendant deux ans. Ils’agit d’une immersion totale, c’est-à-direqu’aucune autre langue n’est utilisée àl’école maternelle. Cette immersion sert àl’apprentissage et la transmission de lalangue luxembourgeoise, langue nationaledepuis environ 25 ans. Elle sert aussi àconstituer une base à l’allemand commelangue d’alphabétisation et au françaiscomme deuxième langue à l’école primaire.On estime à 40 millions le nombre decitoyens de l’Union Européenne qui,généralement en plus de la ou deslangue(s) officielle(s) de leur État, utilisentrégulièrement une langue régionale ouminoritaire, transmise de génération engénération (http://ec.europa.eu/education/policies/lang/languages/langmin/regmin_fr.html). Même si ces langues ne sont, engénéral, pas elles-mêmes menacées, leurvitalité et leur héritage culturel le sont danscertaines régions. C’est ainsi que lacommunauté danoise a mis en place desjardins d’enfants allemands/danois danscertains districts ruraux au nord duSchleswig-Holstein, et la communautégermanophone du sud du Danemark desstructures équivalentes.

4. Classes d’intégration pour les enfantsimmigrantsDans le rapport européen «L’intégrationscolaire des enfants immigrants enEurope. Descriptions nationales»(http://www.eurydice.org/ressources/eurydice/pdf/044DN/044_FR_FR.pdf), seuls sixpays (Danemark, Finlande, Lituanie,Luxembourg, Pays-Bas et Suède) ontdéclaré organiser des classes d’intégrationpré primaires afin de préparer les enfantsde migrants à l’enseignement obligatoiredispensé dans la langue d’État.

Au Danemark, une fois atteint l’âge descolarisation obligatoire (6 ans), lesenfants allophones sont généralementplacés dans des classes d’intégrationjusqu’à ce que leur niveau de danois leurpermette de suivre les cours dans uneécole de la municipalité. «Toutefois, unrécent amendement à cette loi sur lafolkeskole (école) oblige les autoritéslocales à mettre sur pied des«programmes de stimulation linguistique»pour tous les enfants de migrants dequatre ans et plus. Ces programmes sesont avérés très efficaces: 95 % desenfants qui en ont bénéficié ont pu entrerdans une folkeskole sans passer par lesclasses d’intégration».(http://oraprod.eurydice.org/portal/page?_pageid=257,167675&_dad=portal&_schema=PORTAL&pub=025FR&h=17&page=1)En France, l’accompagnement d’un élèvenon francophone ne commence qu’àl’école primaire. Avant cela, à l’écolematernelle, les enfants ne bénéficient pasd’aides particulières ; les législateurscroient qu’une immersion complète enfrançais est suffisante (http://www.ac-nancy-metz.fr/casnav/docprimo/Evaluations/evalmathfranc.htm). Néanmoins, La France, comme d’autrespays, dont l’Allemagne, prévoit d’adopterune approche plus systématique en ce quiconcerne l’acquisition de la langue du pays.

Conclusion1. La problématique des langues dans la

petite enfance ne concerne passeulement les langues étrangères, maiségalement les langues minoritaires.

2. De nombreux parents et décideurspolitiques n’ont pas conscience de lanécessité d’une éducation bi- ouplurilingue dès le plus jeune âge, afind’éviter les situations de dominationdes langues.

3. Sur la base d’une vision positive duplurilinguisme, il s’agira de créer unedidactique spécifique du plurilinguismedès le plus jeune âge. A la limite, cen’est pas à l’université qu’on a besoindu personnel enseignant le plusqualifié, c’est dans les écoles ou lieuxd’accueil de la petite enfance !

4. Les moyens actuels au niveau de larecherche empirique ainsi que de laformation du personnel éducatif etpédagogique sont insuffisants danstous les pays, c’est encore un domaineen émergence.

5. «Une éducation bilingue peut êtreréalisée au sein de la famille(bilinguisme familial) ou au sein del’école (bilinguisme institutionnel),chacune ayant ses caractéristiques etses limites propres» (Geiger-Jaillet2005). Il convient de valoriser les deuxpôles, en accordant une placeprivilégiée à la passerelle entre lafamille et l’école obligatoire.L’association allemande FMKS(l’association pour le plurilinguismeprécoce en Allemagne : Verein fürFrühe Mehrsprachigkeit an

Kindertageseinrichtungen und Schulen)montre le bon chemin en associantparents, éducateurs, enseignants,chercheurs en langues et enneurosciences, assistants sociaux,crèches, hommes politiques etreprésentants du monde économique.

Anemone Geiger-Jailett est professeur à l’InstitutUniversitaire de Formation des Maîtres d’[email protected]

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10 Enfants d’Europe

Cock-a-doodle-doo ! dit le coq anglais,Miao, miao! répond le chat italien,

Kikiriki chante le coq albanais,Miaou, répondent les chats arabes

et français

Partout dans le monde, les enfants en basâge sont de plus en plus en contact avecd’autres langues que la leur : dans leurmilieu familial lorsque leur père et leurmère ne parlent pas la même langue,lorsqu’ils sont gardés par une personnequi parle une autre langue que celle de lafamille ou encore lorsqu’ils apprennentune langue à la maison et une autre à lacrèche ou au jardin d’enfants. Ils vontdévelopper un bilinguisme (ou unplurilinguisme) simultané s’ils apprennent

à parler en plusieurs langues, ou unbilinguisme successif si l’apprentissaged’une seconde langue intervient aprèsquatre ans environ. Dans la première situation, le contexteindiquera à l’enfant la langue qui va fairesens (il va savoir, par exemple, que sonpère ne s’attend pas à ce qu’il parle de lamême manière qu’avec sa mère). Peu àpeu il va différencier les langues, même sià certains moments il pourra utiliser desmots d’une langue dans l’autre (ce qu’onappelle le code-switching ou lesinterférences) parce qu’ils sont plussimples, ou qu’ils prennent plus de senspour l’enfant. Dans une situation debilinguisme successif, l’enfant va seréférer à sa première langue pour sesnouveaux apprentissages. Il faudrait donc

que cette première langue soit le mieuxdéveloppée possible (pour l’âge del’enfant bien sûr) et donc qu’il ait eul’occasion de l’utiliser dans denombreuses situations pour pouvoir enconnaître et reconnaître les variations (cequi se dit aux adultes, aux autres enfants,commencer de raconter une histoire, direune comptine). Dans de nombreux caspourtant, lorsque les enfants fréquententdes structures d’accueil de la petiteenfance ou des institutions scolaires, leurpremière langue n’est pas considéréecomme une ressource mais comme unobstacle à apprendre la langue del’environnement majoritaire. En revanche,d’autres enfants grandissent dans unenvironnement monolingue qui ne leur ajamais donné l’occasion de s’intéresseraux langues.

L’éveil aux languesPour ces différentes raisons, desrecherches et des projets se sontdéveloppés en Europe et au Québec,dans le but de proposer aux enfants âgésde 4 à 12 ans, des activités les mettant encontact avec de nombreuses langues.Ces approches appelées Eveil aux

Christiane Perregaux

Christiane Perregaux présente un projet national pourstimuler les enfants à s’intéresser à la diversitélinguistique, dans un monde où le monolinguisme nereprésente pas la norme.

Et si le coq donnait salangue au chat...

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langues ou Education et Ouverture auxLangues à l’Ecole (EOLE), Begegnung mitSprachen en Allemand, ont l’ambition dedévelopper chez les jeunes enfants déjà(puis tout au cours de la scolarité) desattitudes favorables envers l’apprentissagedes langues et les personnes qui lesparlent ; principalement de les rendrecurieux des faits linguistiques qui,pourquoi pas, pourraient devenir aussipassionnants que l’histoire desdinosaures.

Les activités proposées concernent aussibien la découverte et l’utilisation duplurilinguisme du groupe d’enfants ou dela classe que de l’immeuble ou du quartierpour les plus grands. La saga des crisd’animaux, pour reprendre cet exemple,entretient un questionnement auquel lesjeunes enfants ne répondront que plustard mais auquel ils se seront déjàfamiliarisés : les animaux sont- ilsplurilingues ou comment se fait-il qu’ils nefassent pas tous les mêmes cris ? Avecl’onomatopée, on se trouve à mi-cheminentre l’arbitraire du signe linguistique quiprend habituellement toute liberté parrapport à l’objet (pourquoi la tables’appelle-t-elle table et la pipe, pipe) etune interprétation qui repose sur laperception auditive de la réalité (on entendbien un bruit approximatif dans le cri del’animal, cri qui dès lors va prendre lestraits phonologiques particuliers deslangues). Lorsque, travaillant sur les emprunts, lesenfants vont découvrir que le mot chocolat(Schokolade, Chocolat, Chocolata) a faitun voyage extraordinaire pour arriverjusqu’à eux depuis l’Amérique latine et lalangue nahuatl, à travers les coloniesespagnoles, les langues cesseront d’êtredes systèmes fermés, cloisonnés pourdevenir des champs vivants, toujours enchangement, où se retrouve l’histoirehumaine dans ses contacts pacifiques etguerriers. Les mêmes découvertes seferont avec l’introduction de termes venantde langues différentes dans la languefrançaise et inversement. Prenonsl’exemple de Frère Jacques chanté dansplusieurs langues : les enfants feront ladécouverte de sonorités peu ou pasconnues, du prénom de frère Jacquesdans d’autres langues, du bruit descloches qui se modifient (Ding dang dong !en anglais, Bim bam bum ! en albanais eten allemand, Dlim, dlim, dlão ! enportugais). Les enfants pourrontégalement se confronter à d’autressystèmes graphiques et se familiarisernotamment avec les alphabets arabe oucyrillique ou les idéogrammes chinois puisréfléchir sur leurs prénoms et leurtraduction (est-ce que c’est la même

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plurilingues d’exprimer leurs propresconnaissances et de sentir de la part deleurs pairs et des adultes qu’ilsrespectent, de l’intérêt pour leur(s)langue(s) familiale(s), reconnues dans lesespaces institutionnels qu’ils fréquententquotidiennement.

Le multilinguisme est la norme d’aujourd’huiCes approches partent du point de vueque n’avoir qu’un monolinguisme totalisantcomme norme ne correspond pas à laréalité sociolinguistique actuelle. Cetteperspective qui considère qu’une langueest connue seulement si la maîtrise del’oral et de l’écrit est complète (ce quin’existe pas), ne peut que léser tous ceuxet celles qui ont des connaissancespartielles en plusieurs langues, parfoissimplement à l’oral, et parfois à l’oral et àl’écrit. Ces compétences partielles sontdes ressources à valoriser dans lesfamilles et chez les enfants bilingues etplurilingues, dont il faut favoriser laconsolidation plutôt que de les ignorer.

Les temps ont changé. Le bilinguismetraqué pendant longtemps comme un desresponsables des retards de langage etdes difficultés scolaires de nombreuxélèves issus de familles migrantes a reprisses lettres de noblesse. Il est apparu, eneffet, que l’apprentissage d’une langue nese faisait pas au détriment d’une autremais se référait à la première et laconsolidait ; pour autant quel’apprentissage se déroule dans debonnes conditions.

Penser les langues et leur apprentissage àpartir d’une perspective plurilingue, c’estse concentrer sur les acquis, sur le «déjàlà» plutôt que d’insister sur les lacunes.C’est un véritable changement deparadigme et les activités d’Education etd’Ouverture aux Langues proposent cettephilosophie. Elles demandent d’essayerde nouvelles pratiques, comme d’enrichirles bibliothèques des institutions de lapetite enfance, les bibliothèques scolaireset publiques de livres dans différenteslangues ou de livres bilingues commeressources pour les familles. Mais il s’agitégalement que chacun repense sonpropre rapport aux langues.

Christiane Perregaux est professeur de sciences del’éducation à l’université de Genè[email protected]

chose de se nommer Julie ou Julia,Fernando ou Fernand ?). Toutes cesactivités (pour n’en reprendre quequelques-unes) proposées aux jeunesenfants, vont à la fois offrir à tous lesélèves, monolingues et bilingues, desoccasions de connaître d’autres languesdans des situations ludiques et sérieuses,et permettre aux jeunes bilingues et

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Le gallois, communément considérécomme la plus vieille langue vivanted’Europe, est toujours une langue bienvivante. Par le biais du Welsh LanguageAct (loi sur la langue galloise) de 1993, ilfut exigé que les organismes du secteurpublic accordent au gallois et à l’anglaisun statut équivalent. Cela constitua un pasdécisif dans l’histoire moderne de lalangue. De nos jours, un touriste envoyage au Pays de Galles ne peutmanquer de voir et d’entendre le galloispartout. Les panneaux de signalisation, lesavis à la population et les noms de lieuxsont écrits dans les deux langues. Lesrésultats du recensement de 2001montrent une augmentation significative dunombre de personnes parlant le gallois, etsignalent que plus de 40% des enfantsâgés de 5 à 15 ans sont bilingues. En 2003, le Welsh Assembly Government(Gouvernement de l’Assemblée Galloise)a introduit le Iaith Pawb, Plan d’Actionpour un Pays de Galles Bilingue, avecl’idée que «la langue galloise fait partieintégrante de notre identité nationale». Legouvernement voulait que le Pays de

Galles soit «une nation réellementbilingue… où la présence des deuxlangues est une source visible et audiblede fierté et de force pour nous tous».

Un rôle important à jouer pour les structuresd’accueil à la petite enfanceLes prérogatives de Iaith Pawb sont trèsétendues, allant de la renaissanceéconomique, à la régénération de lacommunauté et aux activités culturelles. Leplan souligne en particulier l’importancecruciale du bilinguisme précoce, secteurdans lequel l’association de playgroupsd’immersion en langue galloise MudiadYsgolion Meithrin (MYM) joue un rôle clef(www.mym.co.uk). Fondée en 1971,l’association MYM s’est développéeprogressivement pour devenir l’une desorganisations galloises des plus actives etdes plus respectées. Elle comptemaintenant un millier de membres affiliés

qui offrent toute une gamme de structuresd’accueil dont des playgroups (cylchoeddmeithrin), des halte-accueil réservées auxenfants de moins de 2 ans et leursaccompagnateurs (cylchoedd Ti a Fi) ettrois crèches. Au pays de Galles, si untiers des enfants âgés de 3 ansfréquentent des structures d’immersion enlangue galloise (dans certaines régions, laproportion avoisine plutôt les 90%),l’association MYM y est pour beaucoup.De par sa participation au programme deIaith Pawb, l’association a été impliquéedans la formation de 300 personnesspécialisées dans les métiers de la petiteenfance en langue galloise afin de travaillerdans les structures d’immersion en gallois. Une autre évolution significative dans lesorientations prisesconcernant la petiteenfance au pays deGalles réside dans

Un modèle pour promouvoir lesexpériences bilingues précocesSiân Wyn Siencyn

L’anglais est de loin la langue la plus parlée auRoyaume-Uni. Mais il y existe également cinq autreslangues officielles. Siân Wyn Siencyn explique que lerôle des structures d’accueil à la petite enfance estcrucial dans la résurgence d’une de ces langues : legallois.

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Enfants d’Europe 13

The Foundation Phase 3-7 years old(Phase des fondements pour les enfantsde 3 à 7 ans), qui n’est autre que le projetvisionnaire du Gouvernement del’Assemblée Galloise relatif à un nouveauprogramme basé sur le jeu pour lesenfants de 3 à 7 ans. La Fondation Phasea ajouté au programme pour la petiteenfance un nouveau domained’apprentissage : le bilinguisme.Dorénavant, tous les enfants du Pays deGalles acquerront, dès le plus jeune âge,une expérience de la langue galloise enlangue galloise. Chaque enfant a accès soit aux écoles enlangue galloise, soit aux écoles bilingues,alors que dans les écoles en langueanglaise, le gallois est enseigné de 5 à 16ans comme seconde langue. (Pour plusd’information, vous pouvez consulter lesite du Conseil de la LangueGalloise/Welsh Language Board :www.bwrdd-yr-iaith.org.uk)

Geiriau BachLe projet Geiriau Bach (traduction littérale :petits mots) est basé dans le départementdes sciences de l’éducation de la petiteenfance (School of Early Years Education)au Trinity College (qui fait partie del’université du Pays de Galles) et soutenupar le Gouvernement de l’AssembléeGalloise. Il permet aux travailleurs desstructures d’accueil à la petite enfance enlangue anglaise d’accroître leur pratiquedu gallois, afin de développer desexpériences du bilinguisme chez lesenfants en bas âge. Les 200 étudiantsviennent des quatre coins du Pays deGalles. On trouve parmi eux desinstituteurs, des assistantes maternelles,des animateurs, des assistantspédagogiques et du personnel decrèches. Ils n’ont aucune ou peu decompétences en langue galloise. Le projetoffre l’opportunité à ces étudiants de sequalifier par un diplôme de PratiqueBilingue et Galloise dans la PetiteEnfance. Toutes les structures d’accueil à la petiteenfance et aux familles doivent s’inscriredans un système de valeurs et de

principes forts. Le projet Geiriau Bachn’est pas une exception. Il se fonde sur lacroyance que le bilinguisme est positif etaccessible, que tous les jeunes Galloisont le droit d’être bilingues, et que ledéveloppement du bilinguisme estcompatible avec des pratiques de qualitédans les structures de la petite enfance.Cette idée est soutenue par un ensembleimpressionnant de résultats de recherchesqui montrent que le bilinguisme estenrichissant dans de nombreux domaines.Les bénéfices tirés du bilinguisme sontaussi bien économiques que culturels etsociaux, ou encore cognitifs et scolaires.Bien plus, au Pays de Galles, il estcommunément accepté que tous lesenfants ont le droit de faire valoir leurhéritage, de ressentir leur appartenance àleur région, et de jouir des expériencestirées de la pratique de la langue galloiseet vécues dans cette même langue. Parler

gallois et apprécier le fait d’être Gallois nedoit pas être réservé aux enfants dont lesparents ont choisi les écoles en languegalloise. Le projet Geiriau Bach est en étroiterelation avec la Foundation Phase, mais ilinsiste plus sur le fait de permettre auxenfants l’acquisition du gallois (en tant queseconde, troisième, voire quatrièmelangue chez certains enfants) par le jeu.Cette intégration du langage et du jeu, dubilinguisme et de pratiques pour la petiteenfance offre aux étudiants l’opportunitéde remettre à jour leurs compétences etleurs connaissances sur l’apprentissagechez les jeunes enfants. Le directeur encharge du projet Geiriau Bach dirigeégalement une école de la nature (ForestSchool) et s’intéresse particulièrement auxopportunités d’apprentissage d’uneseconde langue qui sont offertes par lesexpériences ludiques en extérieur.

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doivent décoder les enfants (demain,mercredi, plus tard, samedi dernier,anniversaire, demi-heure, presque, bientôt,deux minutes, le temps d’aller se coucher,etc.), l’idée de wedyn n’est qu’un conceptparmi une liste interminable de termesabstraits. Le terme wedyn est plusque simplement un autre terme, ilest une combinaison de plus tard etd’après, il en dit aussi plus que lesdeux termes réunis. Le projet Geiriau Bach encourageaussi bien une écoute attentive queles capacités de communication etde narration des enfants, c’est-à-dire la façon dont les jeunes enfantsutilisent un large panel de stratégieset de moyens pour communiquer(les bras, les mains, les mimiques,les grognements, les pauses, lessoupirs, la danse, le silence, etc.).Les facultés de langage des jeunesenfants sont époustouflantes. Lesenfants savent bien que le langageva bien plus loin que le simple faitde nommer des choses et de dire

14 Enfants d’Europe

Premier résultatsLes progrès faits par les étudiants sontsuivis avec attention, et les premièresanalyses sont très positives. Les étudiantsrendent compte de l’intérêt croissant desparents et des professionnels envers lebilinguisme, d’une plus grande confianceen eux, et de l’augmentation prometteusede l’utilisation qu’ils font du gallois avecles enfants. Etudiants et parentsconfondus notent que les enfants utilisentle gallois de manière non préparée,devenant ainsi un langage spontané etnon sollicité. Il est intéressant de soulignerque certains éléments font penser que lelangage utilisé avec les enfants est plusvarié dans sa fonction. Il est moins cognitifet plutôt social et environnemental. Peut-être avons-nous été trop timorés enmatière d’enfance et de langage. «Iswedyn a tomorrow word ?» est la questionqui m’a été posée récemment par unenfant de trois ans et demi. Wedyn est-ilun mot qui renvoie vraiment à la notion defutur ? Quand on considère tous lesconcepts linguistiques de temps que

Comté du Donegal,République d’IrlandeDans le comté duDonegal, au nordouest de l’Irlande, laquestion du langagechez les enfants enbas âge tient uneplace particulièrementimportante dans lesstructures d’accueil.Avec une grande zonede langage gaéliqueou irlandais (AnGhaelacht), le

Donegal maintient l’équilibre entre l’utilisation de l’anglaiscomme langue de tous les jours et les influences dynamiquesde la langue irlandaise. Pour les 120 structures d’accueil de lapetite enfance, les exemples d’expériences bilingues chez lesenfants en bas âge sont variés.

Park School of Early Learning La Park School d’éducation préscolaire à Letterkenny, la plusgrande ville du Donegal, utilise principalement l’anglais, mais lalangue irlandaise est introduite par l’utilisation de mots, dephrases et de concepts de base comme les couleurs et lesnombres. Ceux-ci sont ensuite renforcés par une signalétiquependant des jeux de constructions en langue irlandaise et desinteractions adultes-enfants qui encouragent l’usage de lalangue. Etant donné que quelques-unes des 40 famillesfréquentant l’école habitent An Ghaelacht, Park School voitaussi l’utilisation de l’irlandais comme un moyen d’intégrationsociale pour les enfants qui parlent cette langue à la maison.L’utilisation précoce de l’irlandais procure aux enfants un plaisirà l’apprentissage des langues, plaisir qu’ils emportent ensuiteavec eux à l’école primaire, où apprendre l’irlandais devientobligatoire.

Naíscoil Dhomhnach ÓgNaíscoil Dhomhnach Óg est différente des autres écolesmaternelles dans la ville de Inishowen, où l’anglais est la languede tous les jours. Tous les enseignements dispensés auxenfants de cette école se font en irlandais, bien que la plupartd’entre eux n’aient aucun vocabulaire irlandais en arrivant.Naíscoil Dhomhnach Óg utilise «la méthode d’immersion»conçue par Áine Andrews, instituteur à Belfast, pour délivrercet enseignement exclusivement en irlandais. Les vingt enfantsde la structure apprennent la langue à travers des histoires, deschansons et des pièces de théâtre. L’irlandais est pratiqué partout dans l’école, aussi bien dans lesjeux d’eau ou de sable, que dans des activités comme lapeinture, ou dans le coin maison. Pour que les parents puissent soutenir le développementlinguistique de leurs enfants, le Naíscoil dispense aussi descours d’irlandais aux parents.

Naíolann Gaoth DobhairAn Ghaeltacht est la zone de langue irlandaise du comté deDonegal et pour beaucoup d’enfants, l’irlandais est leur languede tous les jours. Les dispositifs concernant la petite enfancesont mis en place en langue irlandaise, principalement dans lesstructures préscolaires à temps partiel, c’est-à-dire les naíonraí.A l’heure actuelle, Naíolann Gaoth Dobhair est le seul milieud’accueil à plein temps en langue irlandaise dans une importantezone rurale, qui prenne complètement en charge les petits, lesmoyens et les grands enfants d’âge préscolaire et qui disposede ressources adaptées à l’apprentissage de la langueirlandaise. Ces structures préparent les enfants qui vont entrerdans des écoles primaires (Gaelscoil) en langue irlandaise.

Ce rapport a été préparé par le Comité pour les services àl’enfance du Comté du Donegal (Donegal County ChildcareCommittee ou Coiste Cúram Paistí Chontae Dhún na nGall),l’agence locale responsable du développement des services àla petite enfance.

Un apprentissage précoce des langues

des phrases toutes faites. Et Geiriau Bachle sait aussi !

Siân Wyn Siencyn est responsable du département desciences de l’éducation de la petite enfance (School of EarlyYears Education) au Trinity College, Carmarthen (Pays de Galles)[email protected]

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A la naissance, tous les enfants ont lepotentiel d’apprendre à parler. Ilscherchent à communiquer avec des mots,des regards, des expressions ou desgestes. Ils attendent des adultes qui lesentourent, un apport linguistiquesubstantiel. Bien que tous les enfantsaient une capacité innée au langage, ledéveloppement du langage chez lesenfants issus de l’immigration est l’un desproblèmes les plus fréquemment soulevésdans les débats politiques allemands enmatière d’éducation. Le manque decompétences en allemand des enfantsmigrants entraîne souvent l’échec scolaire.De nos jours, les structures d’accueil dela petite enfance sont soumises à despressions immenses dans le but decontrebalancer le «déficit de langage» deces enfants. Chaque jour apparaissent de nouvellesapproches pour promouvoir ledéveloppement de compétences enallemand chez les enfants de l’immigrationet de milieux sociaux défavorisés. Lestravailleurs de la petite enfance peuventfacilement perdre de vue la situationgénérale, parce qu’ils se battent pourtrouver une approche adaptée aucontexte. Malheureusement, tous lesprogrammes de soutien ne tiennent pascompte des histoires individuelles desenfants, ni de leurs connaissances oucentres d’intérêts ; et c’est pourquoi ilsont peu d’effets.

Enfants multilingues et structuresmonolinguesBeaucoup d’enfants migrants sontconfrontés à plusieurs langues. Beaucoupd’entre eux perçoivent leur multilinguismecomme un atout important, et aimentapprendre et parler plusieurs langues. Ungarçon de 8 ans répond à la question«quelle est ta langue préférée ?» Le turc. J’apprends l’allemand. Sij’apprenais le français et l’anglais, l’un desdeux pourrait devenir ma langue préférée.Mais il n’y a pas beaucoup de différencesentre l’allemand et le turc. J’aimel’allemand aussi, je n’ai pas de problèmesavec… nous chantons en allemand à

l’école. Mais nous écoutons de la musiqueturque à la maison. Je comprends tout enallemand et en turc. Ce n’est pas unproblème pour moi.

La plupart des parents immigrants adhèrentau multilinguisme de leurs enfants. Ilsvoient la (ou les) langue(s) familiale(s)comme un instrument important decompréhension mutuelle, tout enreconnaissant l’allemand comme lelangage du Kindergarten (jardin d’enfants)et de l’école. Paradoxalement, cesstructures adoptent principalement unmodèle monolingue rigide. On supposecommunément que le multilinguismedemande trop d’un enfant intellectuellementparlant, et le monolinguisme est considérécomme la norme. Donc même si jusqu’à80% des enfants qui fréquentent desstructures d’accueil à la petite enfance sontmultilingues, leurs expériences en matièrede langage ne sont pas prises en comptedans les pratiques et conversationsquotidiennes, ni dans les structures dupersonnel. La majorité du personnel voit lemultilinguisme de manière positive. Maisils ne peuvent intégrer les différenteslangues parlées par les enfants dans leurtravail : les éducateurs monolingues dansles groupes multilingues trouvent questimuler les compétences linguistiquestout en enseignant l’allemand à tous lesenfants, est une tâche trop lourde poureux. Ils se sentent sous pression car ilssavent qu’un manque de compétences enallemand entraîne souvent l’échecscolaire, et que les parents attendent

d’eux qu’ils enseignent l’allemand,conscients de l’importance que cela apour l’avenir de leurs enfants. Mais laformation initiale des éducateurs ne faitqu’effleurer les approches multilingues,donc ils savent peu de choses sur lafaçon dont un enfant multilinguedéveloppe des compétences linguistiques.

Le monolinguisme des structuresd’accueil de la petite enfance s’illustreclairement lorsque les professionnels

«Les limites de mon langagelimitent mon accès au monde.»1

Les enfants multilingues dans les structures monolingues

Serap SIkcan

Les structures d’accueil de la petite enfancemonolingues peuvent participer à l’intégration socialeen Allemagne. Serap SIkcan décrit la façon dont desespaces favorables à l’apprentissage des languessoutiennent les capacités linguistiques de tous lesenfants.

Enfants d’Europe 15

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définissent des enfants multilinguescomme ayant des «problèmes de langage»ou comme étant «mutique», alors que lemanque de connaissance de la langueallemande est la vraie problématique. Nepas maîtriser l’allemand ne veut pas direqu’un enfant ne sait pas parler, cet enfantpeut communiquer dans sa languematernelle. Mais lorsque ledéveloppement monolingue des enfantsayant grandi avec une seule languedevient la norme, les enfants multilinguessont désavantagés.

Multilinguisme contre monolinguisme : des conflits ? Même si les parents adhèrent aumultilinguisme, alors que les structuresd’accueil à la petite enfance soutiennentgénéralement le monolinguisme, celan’entraîne pas de conflits. Les parentsacceptent habituellement le consensusautour du monolinguisme de la société etne demandent aucun soutien envers leurmultilinguisme. Appartenant à un groupeminoritaire, ils ne s’attendent pas à ce queleurs demandes soient entendues oumises en oeuvre. Ils acceptent le fait quela langue allemande soit plus importanteque n’importe laquelle de leurs languesmaternelles, car elle donne l’accès à desressources clés pour une future carrière.Certains parents immigrants retirent mêmeleurs enfants des structures où la plupartdes enfants sont issus de l’immigration.Pour beaucoup d’enfants, entretenir salangue maternelle est du domaine privé.Lorsque les parents n’assurent pas, demanière systématique, l’extension descompétences dans la langue maternelle,celles-ci déclinent peu à peu.

Le multilinguisme : une compétenceparticulière de valeur incertaine.Les enfants qui se sentent compétents etconfiants dans leur(s) langue(s), perdentfréquemment ce sentiment en arrivantdans les structures d’accueil de la petiteenfance où ils ne sont plus capables decommuniquer «correctement» avec leséducateurs et les autres enfants.Beaucoup d’entre eux font alorsl’expérience de l’exclusion et de ladiscrimination, expériences qui ne sontpas remarquées dans la plupart desstructures monolingues. Voici un exemplede ce phénomène :

En parlant de son nom, le petit âgé de 5ans dit, stressé : «ils me disent toujours«Febi Baby, Febi Baby»… alors je les tape !».Son ami, qui s’assoit à côté de lui, lesoutient : «oui, je le fais aussi ! Ilsm’appèlent «Uga Uga Ugur» alors je lesfrappe et nous nous battons». Aprèsenquête, il est apparu que les deuxgarçons avaient des noms turcs quin’avaient été ni écrits ni prononcéscorrectement au centre. Ces nomsmodifiés déclenchent le ridicule et lamoquerie. Vehbi et Ugur tiennent tête àleur façon, mais finissent par se mettre legroupe à dos… L’enseignant ignore

16 Enfants d’Europe

totalement les préoccupations desgarçons. Elle ne sait pas comment onprononce leurs noms, ni ce qu’ils veulentdire. Les parents de Vehbi n’ont pasprécisé que son nom se prononçait«Veckbi» et qu’il voulait dire «cadeau» ; ilsl’appellent même Febi au centre. Et lesparents de Ugur n’ont pas expliqué queson nom signifiait «de bon augure» et quel’accent au dessus du g est prononcécomme un H silencieux et glottal. C’estpeut-être aussi que personne ne le leuravait demandé.

Les effets du monolinguismeQuels sont les effets constatés desstructures d’accueil de la petite enfancemonolingues sur les enfants multilingues ?Ils se sentent insécurisés et ne peuventparticiper activement aux processusd’apprentissage. Ils disposent de peud’opportunités pour montrer leurscompétences linguistiques acquises, nipour les développer davantage. Beaucoupd’entre eux se demandent dès le plusjeune âge s’ils sont autorisés à utiliser lesdeux langues, ou s’ils doivent en choisirune en particulier. Ils font alorsl’expérience de la dévalorisation nonseulement de leur(s) langue(s) familiale(s)mais aussi de leur identité.Très tôt, ils perçoivent le fait que leslangues sont appréciées différemment,ainsi que les hiérarchies entre les langueset les peuples qui les parlent. Il est quasiautomatique que les enfants parlant deslangues maternelles valorisées, commel’anglais ou le français, soient jugéscapables d’apprendre l’allemand, alorsque les enfants parlant une langue moinsvalorisée, comme le persan ou l’arabe,soient présupposés en difficulté dansl’apprentissage des langues. Les enfantsqui parlent la langue majoritaire intègrenteux aussi l’idée que les langues sontévaluées différemment. Ils ressentent lagrande considération attachée à leurlangue et le fait que cela s’applique aussià eux-mêmes. Cela peut entraîner ledéveloppement d’un sentiment desupériorité chez les enfants du peuplemajoritaire, et d’infériorité chez les enfantsissus de l’immigration, et cela peut êtrepréjudiciable pour tous. Cela peut aussiamener les enfants à conclure qu’il estnormal d’être monolingue et anormald’être multilingue.

Création d’un environnement favorable àl’apprentissage des langues. Dans une structure d’accueil de la petiteenfance où cohabitent des languesdifférentes, il n’est pas dit que tous lesenfants apprennent correctementl’allemand ou qu’ils apprennent à mieux seconnaître les uns les autres. Cela n’arriveque lorsque les éducateurs donnent auxenfants la chance d’expérimenter de façonactive le contexte multilingue dans lequelils grandissent. Pour pouvoir promouvoiret encourager le développement desaptitudes langagières de manièreconsciente, il faut que les éducateurs

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saisissent mieux la manière dont lesenfants monolingues et multilinguesacquièrent et développent lescompétences de langage. Le personnelmonolingue devra faire un effort particulierpour observer, documenter et soutenir ledéveloppement multilingue des enfants.

KINDERWELTEN fait partie de l’Institut fürden Situationsansatz/InternationaleAkademie (Institut pour l’ApprocheContextuelle/Académie Internationale) àl’Université Libre de Berlin. C’est unprojet en vigueur dans toute l’Allemagne,qui encourage une éducation sans préjugédans les Kindergarten et autres structures(www.kinderwelten.net). Ce projet inclutdes activités qui aident les éducateurs àdévelopper l’estime et le respect enversles langages multiples des enfants, ainsiqu’à les rendre plus visibles dans leursinstitutions. Les éducateurs commencentpar réfléchir sur leur propre relation etleurs propres expériences avec leslangues. Avec quelle langue suis-je encontact ? Quelles sont les langues quej’associe avec des expériences agréables,ou désagréables ? Réfléchir sur laquestion peut sensibiliser les éducateursaux expériences vécues par les enfants.Ensuite ils se demandent : quelles sont leslangues parlées par les enfants de moncentre ? Où dans le centre peut-onobserver toutes les langues parlées parles enfants et leurs familles ? Est-ce queles enfants rencontrent d’autres typesd’écritures et de symboles ? Quels médiautilise-t-on au centre ? Est-ce que lesenfants peuvent trouver des livres, parexemple, dans la langue parlée à lamaison? Les éducateurs se fixent alorsl’objectif d’inclure dans leurs pratiques

pédagogiques toutes les langues parléespar les enfants de leurs groupes.Comment peuvent-ils atteindre cesobjectifs ? En familiarisant les enfants auxsonorités des différentes langues grâce auxressources et aux activités multilingues,comme l’accueil en différentes langues,les jeux, les chansons, les histoires, lesK7 et les CDs. Et en dévoilant aussil’aspect visuel de la diversité linguistique àtravers des badges nominatifs, despanneaux multilingues, des calendriersd’anniversaires, des panneaux d’affichageaux parents, des invitations, des magazineset des journaux, des livres d’images etdes ressources ludiques écrites dansdifférentes langues ; et à travers laprésence de différents symboles écrits.

Il semble évident que les éducateurs nepeuvent apprendre toutes les languesparlées par les enfants, mais en exposantces langues à la vue et à l’écoute de tous,chaque enfant percevra la reconnaissanceet la prise en compte de son groupe et deson identité propre (1er objectif del’approche anti-préjugés de l’éducationdes enfants), et sentira que lui et safamille sont bienvenus dans le centre.Cela consolide leur confiance en eux.Grâce à cette base de respect et dereconnaissance, les enfants peuventpasser à l’étape suivante, c’est-à-diredécouvrir d’autres langues et d’autrestypes d’écriture, et élargir ainsi leurshorizons (2ème objectif). Si les enfants ontfoi en eux-mêmes et se sentent à l’aiseavec la diversité, ils peuvent commencer àréfléchir de manière critique sur ce qui estjuste ou ce qui ne l’est pas, sur lespréjugés et les injustices (3ème objectif).L’approche anti-préjugé invite tous lesenfants à savoir reconnaître les inégalités età les combattre ensemble (4ème objectif).

Soutenir ensemble les processusd’éducation linguistiquesLes parents sont les experts en ce quiconcerne le soutien du développement dulangage de leurs enfants à la maison. Leséquipes éducatives, quant à elles, ont àpromouvoir le développement du langagedans les structures d’accueil de la petiteenfance. Pour vraiment soutenir lesenfants, parents et éducateurs doiventpartager leurs connaissances etcollaborer. Les enseignants peuvent inviterles parents à les aider à mettre en placedes ressources pédagogiques multilinguescomme par exemple :

– Créer une bibliothèque multilingue pourles enfants.

– Expliquer aux enfants la signification deleurs noms.

– Lire des livres aux enfants dans leurlangue maternelle.

– Enregistrer des cassettes audiomultilingues avec les voix des membresde la famille.

– Jouer des jeux multilingues avec lesenfants.

– Raconter l’histoire de leur vie.

En échange, les équipes éducativespeuvent faire des suggestions aux parentssur la manière dont ils peuvent soutenir ledéveloppement linguistique de leursenfants à la maison (par exemple en leurlisant des livres ou en ayant desconversasions avec eux avant d’aller au lit). Si garçons et filles réussissent à établir unlien entre la culture familiale et la culturede leur structure d’accueil, si ilsressentent des formes d’attachementenvers les personnes qui leur sontdévouées, qui sont intéressées par leursobservations et leur interprétation dumonde, et qui leur fournissent desressources et établissent avec eux desconversations qui nourrissent leur soif deconnaissance, alors les processus éducatifsleur seront plus accessibles. Les parentspeuvent renforcer l’enracinement descompétences linguistiques de leurs enfantset les structures les laisser s’épanouir !

Serap SIkcan est responsable de la coordination du projetKINDERWELTEN à Berlin. Elle est l’auteur d’un dictionnairede l’éducation en tros langues (Dictionary of Education) quicouvre les termes et concepts de la pratique pédagogiqueen anglais, allemand et [email protected]

Note 1 Ludwig Wittgenstein

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18 Enfants d’Europe

Un demi-million de personnes vit dans larégion du Tyrol du Sud. Parmi lespersonnes de nationalité italienne, on endénombre 69% qui parlent allemand,27% qui parlent italien et 4% qui parlentle ladin. On dénombre également unnombre croissant de ressortissantsétrangers, qui viennent notamment despays germanophones, de l’ancienneYougoslavie, d’Albanie, du Maroc et duPakistan. Leur nombre a presquequadruplé en 15 ans et ils représententmaintenant 4 % de la population du Tyroldu sud.

Entre Rome et VienneHistoriquement, la région a toujours été uncarrefour international et interculturel entrele nord et le sud. A l’époque de l’Empire Romain, le Tyroldu Sud faisait partie d’une grandeprovince montagneuse, Rhaetia, quis’étendait à travers les Alpes Centrales.La population adopta progressivement lalangue latine vulgaire parlée par les

soldats et les marchands romains, et ceque l’on appelle de nos jours le ladin,c’est-à-dire la fusion des différentsidiomes formés par la langue «rhéto-romane» qui s’étendait sur un vasteterritoire. L’effondrement de l’Empire et lesmigrations entraînèrent la germanisationde Rhaetia et la réduction du territoire delangue rhéto-romane. Cette zone estmaintenant réduite à deux valléesseulement : Val Gardena et Val Badia.

Après des siècles d’appartenance àl’Empire des Habsbourg et de soumissionà Vienne, la région fut annexée par l’Italieaprès la première guerre mondiale. Sousl’autorité autrichienne, on apprenaitl’allemand à l’école. Il s’en suivit unepériode d’italianisation, avec l’immigrationd’Italiens du sud et l’introduction del’italien comme seule langue enseignée àl’école. Sous la dictature fasciste, ceprocessus fut particulièrement violent et fitbeaucoup souffrir la populationgermanophone. Après la seconde guerre mondiale, une loisur l’autonomie fut proclamée pourdéfendre les groupes parlant allemand etladin de la région. Cette loi soutient trois systèmes scolairesséparés, dans un effort de promotion deformes variées de bilinguisme et demultilinguisme. Ceci a entraîné ledéveloppement d’écoles en langueallemande, comprenant quelques heures

d’italien en seconde langue ; d’écoles enlangue italienne avec quelques heuresd’allemand comme seconde langue ; etd’écoles en ladin qui combinentinitialement le ladin à l’allemand et àl’italien, tout en renforçantprogressivement l’enseignement del’allemand et de l’italien en vue d’obtenirl’égalité des trois langues. Une approche similaire fut adoptée dans

Trois langues pour une région :les enfants multilingues du Tyrol du Sud

La ligne de partage entrel’allemand et l’italientraverse la région duTyrol du sud au nord-estde l’Italie. Mais il y aaussi de la place pourune langue locale unique.Martin Dodman décrit unsystème éducatifmultilingue.

Martin Dodman

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les écoles maternelles (pour les enfants âgés de 3 à 6 ans) et lescrèches pour les enfants de moins de 3 ans.

Faire de la scolarité multilingue une réalitéDans les écoles en langue allemande, latendance a été de maintenir le caractèreessentiellement monolingue du systèmeafin de protéger la culture d’un groupequi, bien que majoritaire au Tyrol du Sud,est minoritaire en Italie et garde unsouvenir amer de la répression dont il aété victime entre les deux guerresmondiales. Néanmoins l’apprentissagelimité de l’italien a toujours donné de bonsrésultats.Dans les écoles en langue italienne, lescompétences en allemand ne sont pasaussi bonnes. Cela est dû à un nombre defacteurs complexes, dont un sentiment demalaise général dans la communautéitalienne, et la pratique répandue dudialecte sud tyrolien plutôt que del’allemand standard. Toutefois, dans les écoles en italien, onconstate un accroissement desexpérimentations concernant l’utilisationde l’allemand comme langued’enseignement. Et malgré l’opposition dela plupart des politiciens germanophones,qui sont résolus à conserver le principe deséparation car ils le considèrent comme lemeilleur moyen de défendre leur langage,la demande pour plus d’écolesmultilingues avec des enseignements enitalien, allemand et aussi anglais est entrain d’augmenter. En pratique, les écoles en ladin donnent lemeilleur exemple de multilinguisme. Laprésence du ladin est assurée, bien quel’allemand et l’italien, deux langues plusprestigieuses, soient devenuesprogressivement les langues utilisées pourenseigner toutes les matières. Pendant lapremière année d’école primaire, lesenfants apprennent à lire et à écrired’abord dans une langue puis dans uneautre. En général les parents choisissentd’inscrire leur enfant dans une section delangage ou une autre, en fonction de leurpréférence, ou des connaissances qu’adéjà l’enfant de cette langue. Danscertains cas, les instituteurs essaientd’enseigner la lecture et l’écriture dans lesdeux langues simultanément, maisl’incertitude demeure chez les dirigeantset les enseignants des écoles quant àl’intérêt de telles pratiques.L’apprentissage de la lecture et del’écriture en ladin est introduit plustardivement.

Un langage pour les jeunes enfantsLes opportunités de développementlinguistique varient considérablement chezles enfants en bas âge. Lesenvironnements sociaux et familiauxpeuvent être source de monolinguisme, enparticulier (même si ce n’est pasautomatique) dans les zones rurales, ou

de bilinguisme et de multilinguisme, plusfréquent dans les villes, et surtout dans leszones touristiques. Au même titre que lafamille et le contexte social général, lescrèches et les écoles maternelles jouentun rôle fondamental dans ledéveloppement linguistique de l’enfant. Làaussi la situation est très variée. Il y a,cependant, une diffusion progressive deprogrammes introduisant une secondelangue dans des activités quotidiennestelles que les repas, l’hygiène, ou le faitd’aller aux toilettes, ou bien les jeux, leshistoires et autres activités ludiques. Cesprogrammes sont parfois financés par lesautorités locales et parfois par les parentseux-mêmes. Les écoles maternelles en ladin offrent lecontexte linguistique le plus riche. Alorsqu’il y a beaucoup de familles danslesquelles on ne parle que le ladin, dansbeaucoup d’autres, un parent ou ungrand-parent parle aussi une autre langue.L’enfant qui parle le ladin, est aussiforcement en contact avec l’allemand oul’italien par le biais des média, la télévisionen particulier. Evidemment, les enfantsconcernés parlent le ladin entre eux,même s’ils développent progressivementdes compétences dans les autreslangues. Dans ces écoles, les activités sontorganisées autour de projets. L’explorationdu Massif des Dolomites (la région typiquedes communautés ladinnes) joue un rôleimportant, et amplifie l’intérêt envers lesquestions environnementales. Le ladin estla principale langue, mais l’allemand etl’italien sont utilisés avec les enfants quisont initialement en difficulté dansl’apprentissage du ladin. Dans denombreuses situations, les enfantscommuniquent avec leurs amis enmélangeant le ladin, l’allemand et l’italien ;cela démontre une remarquable capacitéde communication. L’interaction avec leséquipes éducatives se fait également dansles trois langues. Cette interaction permetde devenir réellement multilingue et d’êtrecapable d’utiliser différentes langues.

Formation du personnel éducatifLa formation du personnel est unedes conditions fondamentales dusuccès d’une approchemultilingue. Tous les éducateursqui postulent dans les structuresde la petite enfance, doiventpasser un examen d’allemand etd’italien. Dans les écoles en ladin,il faut être trilingue. Ceci estencouragé par les formationsproposées par les autoritéslocales. La formation se concentresur la façon dont certains sujets etcertains projets interdisciplinairespeuvent utiliser plus qu’unelangue. La formation deséducateurs qui travaillent dans lescrèches, a tendance à appuyerdavantage sur le multilinguisme,

surtout avec le niveau élevé d’immigrationconstaté ces dernières années. En plusde cela, les 3 groupes linguistiquess’investissent considérablement dans lesformations continues concentrées sur leslangues, même si les écoles en ladin sontplutôt motivées par les formations quiencouragent le multilinguisme.

La situation évolue rapidement. Laséparation excessive des groupeslinguistiques se réduit progressivement,bien qu’elle existe encore dans beaucoupde secteurs de la société et dans lesinstitutions sociales et culturelles, mêmes’il y a des exceptions significatives. Parexemple, le multilinguisme est répandudans l’éducation supérieure ; en effetplusieurs langues d’enseignement peuventêtre utilisées de la même manière. Lemanque de confiance profond concernantle multilinguisme recule graduellementalors que la prise de conscience de sesatouts s’accroît. L’augmentation dunombre de familles et de personnesmultilingues qui ne se considèrent pascomme appartenant à un groupelinguistique spécifique, l’ouverture desfrontières due à l’Union Européenne, etles mutations provoquées par lesmigrations ne sont que quelques-uns desnombreux facteurs qui entraînent unchangement progressif de politique.Basée d’abord sur l’idée qu’il fallait forcerl’intégration, puis séparer lescommunautés linguistiques pour lesprotéger, la législation tend maintenant àaccueillir la diversité, et à soutenirl’intégration afin d’exploiter pleinement lepotentiel d’une société multilingue etmulticulturelle.

Martin Dodman est conférencier en Education Comparativeà l’université de [email protected]

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l’idée que le langage fait partie intégrantede toutes les activités et qu’il ne doit pasêtre traité séparément. Les enfantsdevraient avoir l’opportunité de s’exprimerde plusieurs manières différentes, et ledésir de communiquer devrait êtreencouragé et soutenu.

Les enfants donnent le tonCette approche pédagogique générale,qui croit fermement aux capacitésd’apprentissage des enfants, guide lapratique. Nevelle Harper, le directeur del’école, pense qu’il est important des’écarter d’une routine quotidiennecontrôlée par les adultes. «Les adultesavaient l’habitude de diviser la semaineselon les différentes activités. Aujourd’hui,nous écoutons davantage les enfants, etils aménagent le planning en accord avecles pédagogues.» Beaucoup de projetsont évolué de cette manière à Stella Nova ;les projets s’épanouissent naturellementquand les enfants s’intéressent à quelquechose. Les pédagogues les suivent dansleurs projets en les soutenant et enleur apportant des idées. Pendant le déjeuner, les enfantss’assoient par petits groupes,autour de tables basses enbois, et les adultess’assoient séparément.C’est le fruit desnombreuses réflexions etdiscussions entreenseignants qui pensentque c’est leur

responsabilité de créer des opportunitéspour que la communication s’établissedans de bonnes conditions, aussi bienentre enfants et adultes, qu’entre enfants.Le temps et l’espace devraient êtrestructurés de manière à permettre lesconversations et les discussions intimes,plutôt que de mettre en place des activitésde pratique de la langue. De ce point devue, les repas fournissent desopportunités rêvées car ils favorisent laconversation et l’interaction des enfantsentre eux. Si un adulte s’assoit avec lesenfants, la communication se fait avec oupar le biais de l’adulte, et toujours selonles règles de l’adulte.Le personnel encadrant parle aux enfantsen suédois, mais d’une manière attentiveet considérée. Jenny travaille actuellementavec les enfants d’un an, et verra le mêmegroupe d’enfants grandir à travers lesdifférentes sections. Elle leur parle dès àprésent sans simplifier du tout son proprelangage, et les observe lorsqu’ilscommuniquent : «Les gens me demandentcomment nous pouvons travailler avec desenfants qui parlent tant de languesdifférentes. Je leur réponds

20 Enfants d’Europe

Le désir de communiquer : lavie dans une école maternellesuédoise multilingueEmilie Stendhal

De nos jours, la Suède est un pays diversifié auniveau ethnique : 14% des enfants âgés de moins de5 ans ont leurs deux parents nés dans un autre pays.Emilie Stendhal visite une structure d’accueil de lapetite enfance (ou structure préscolaire) deStockholm qui a développé sa propre approche dutravail avec cette diversité.

La structure préscolaire Stella Nova estsituée à Hallonbergen, une banlieue deStockholm où cohabitent plusieursnationalités. Des 105 enfants âgés de 1 à5 ans de l’école, les trois quarts parlentune autre langue que le suédois à lamaison. Au total, 30 nationalitésdifférentes sont représentées par cesfamilles. Les quatre plus grands groupessont de nationalité érythréenne, syrienne,libanaise et iranienne.

La diversité : un problème ou une richessepotentielle ?Influencés par les théories et les pratiquespédagogiques de Reggio Emilia, lespédagogues de Stella Nova (aussi biendes instituteurs que des éducateurs)n’insistent ni sur la diversité (en terme depays d’origine des enfants) ni sur lesdifficultés des enfants (une approcheadoptée communément envers les enfantsmigrants). Au lieu de cela, tous, enfants etadultes confondus, sont considéréscomme différents, uniques et importants,et ce qui est mis en valeur c’est ce queles enfants peuvent faire. Jenny Chen,institutrice depuis 15 ans à Stella Nova,ne voit que les richesses et les potentielslà où d’autres ne verraient que desproblèmes. «J’ai rencontré des gens quidisent que je devrais être payée plusparce que je travaille dans unenvironnement tel qu’Hallonbergen» Elle ledit de telle manière qu’on comprenne quepour elle cette suggestion est absurde.Les pédagogues croient fermement à

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qu’il suffit de trouver une façon deconstruire une relation avec les enfants.En tant qu’adulte, il faut être très curieuxet les écouter attentivement.»Il y a plusieurs manières d’apprendre unelangue, et la valeur des différents mots estcontinuellement pesée et débattue à StellaNova : «le langage est très important etnous faisons très attention aux mots quenous utilisons. Nous discutons les mots enpermanence», raconte Jenny. Nous évitonsl’argot et le langage vernaculaire, et lesenseignants font l’effort d’utiliser les motsprécis qui désignent chaque chose. Unechaussure, c’est plus spécifiquement unebotte en caoutchouc, une basket, unepaire de tongs ou de chaussure à talons.Tous les jouets sur les étagères, comme lacollection d’animaux en plastique, ontleurs noms écrits en caractères grasscotchés dessus. Un chien n’est pas justeun chien, c’est un colley ou un goldenretriever. Sur les pots en verre, on lit :crayons à papier, stylos argentés, feutresSuper Ferby et taille-crayons.

Accueillir les famillesL’idée de participation et d’ouverture estétendue afin d’inclure non seulement lesenfants, mais aussi leurs familles. Avantl’arrivée d’un nouvel enfant à Stella Nova,Nevelle Harper rend toujours visite à safamille chez eux. Etant donné la tailleimportante de l’école, on peut facilementse sentir perdu et dépassé en venant là-

bas, alors qu’à la maison, la famille sesent plus à l’aise, explique-t-il. Parprincipe, ils n’utilisent pas d’interprètes,donc lors de la première visite audomicile, le langage des signes est parfoisplus utile que les mots : «parfois je rendsvisite à une famille et tout ce qui enressort c’est trois mots. En partant, jeréalise que nous avons beaucoup detravail devant nous. Et ce n’est pas grave.Trois mots, c’est déjà un début».

Nevelle souligne l’importance de construireune relation avec les familles, relation quipeut être retardée par la présence d’uninterprète : «j’ai besoin de trouver unemanière de communiquer avec chaqueindividu. Et je sais que nous avons dutemps devant nous: au moins cinq ans, etpeut-être plus». Submerger les parentsd’informations utiles ne sert pas à grandchose, dit-il, car pour cela il faut que lesgens soient réceptifs à l’information qu’onleur donne. C’est mieux de laisser lesparents formuler leurs propres questions, àleur propre rythme et ensuite êtredisponible pour répondre à ces questionsau moment venu, peut-être avec l’aided’autres familles qui parlent la mêmelangue ou celle d’un des 25 membres del’équipe qui, à eux tous, parlent 13 langues.

Ils font l’effort de se renseigner sur lepays d’origine de chaque nouvelle famille,et un pédagogue rend visite une seconde

fois à la famille avant la rentrée de l’enfant.Un référent (un des enfants des groupesplus âgés) vient également avec lui dansla famille. «Nous ne sommes pas là pouréduquer les familles mais pour les écouter.Nous les invitons à participer parce qu’ilspeuvent contribuer, par leurs expérienceset leurs perspectives, à nous faireavancer.» Images et photos sont une autresource d’information dans lacommunication avec les familles. Les mursde Stella Nova sont couverts dephotographies, d’histoires faites par lesenfants, de dessins et de peintures, dansle but de rendre visibles les individus et letravail fait à l’école.A Stella Nova, le personnel pense que lacommunication est plus importante que lelangage en soi, et son ambition est defaire ressentir aux enfants que leurspensées, leurs opinions et leurs histoiresont de l’importance. Je laisse le mot de lafin à Nevelle : «Si nous réussissons à fairepasser à l’enfant le fait que nous sommesvraiment intéressés, et que nous noussoucions de ce qu’il a à dire, alors nousaurons fait un long chemin. Parce quel’enfant ne percevra plus le langagecomme une barrière, mais comme unvaste champ de possibilités.»

Emilie Stendahl est journaliste indé[email protected]

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22 Enfants d’Europe

L’éducation de la petite enfance est unevieille tradition en Roumanie : en effet, lapremière structure d’éducation préscolaire(pour les enfants âgés de 3 à 7 ans) futfondée en 1881 à Bucarest. Cinq ans plustard, une loi sur l’éducation primairepublique soulignait l’importance del’introduction d’un système de structuresd’enseignement préscolaire au sein dusystème éducatif. De nos jours,l’enseignement préscolaire tient une placeessentielle dans ce système, et àl’intérieur même des structurespréscolaires, on attache une grandeimportance au développement du langage.

Enseignement de la langue maternelleEn Roumanie, on compte un grandnombre de minorités, les Hongrois (6,5%de la population), et les Roms (2,5%) sontles plus nombreux. Ces minorités ont ledroit d’apprendre et de recevoir leuréducation dans leur langue maternelle. Enmême temps, la loi demande égalementque les minorités nationales apprennent leroumain, la langue nationale. Apprendre leroumain n’est pas seulement uneobligation ; c’est aussi une manièred’accéder aux valeurs culturelles dupeuple roumain.

Quatorze minorités nationales ontl’opportunité d’être éduquées soit dansleur langue maternelle tout en apprenant leroumain, soit en roumain tout enapprenant leur langue maternelle. Lesenfants de 8 groupes minoritaires(presque 48 000 enfants au total) suiventun enseignement préscolaire où leurlangue maternelle est leur premièrelangue. 87% d’entre eux parlent le

hongrois. Dans ces structurespréscolaires, les deux langues (la languematernelle et la langue nationale) doivent,d’une manière ou d’une autre, êtrerassemblées. Cependant, les deuxlangues n’appartiennent pas toujours à lamême famille linguistique (par exemple leroumain est une langue romane, et lehongrois, le turc, le romani et l’allemandne le sont pas), et requièrent donc desméthodes différentes d’apprentissage.

C’est là que les compétencespédagogiques et humaines desenseignants entrent en jeu, ainsi que leurflexibilité et leur ouverture par rapport aumultilinguisme (les enseignants doiventparfaitement connaître les deux langues).Des méthodes spécifiques

d’enseignement ont été adaptées aumultilinguisme. Mais il y a toujours denouvelles idées intéressantes à trouverdans les revues (par exempleÎnvat,amantul preflcolar – éducationpréscolaire), dans les recommandationsdu Ministère de l’Education, et dans lepartage de bonnes pratiques.

Bilinguisme : structure préscolaire N°11,BrasovBrasov est une ville du centre de laRoumanie, où Roumains, Hongrois etAllemands cohabitent. Là-bas, danscertaines structures préscolaires, on peutêtre éduqué dans une ou deux des troislangues. Dans de nombreux cas,Roumains, Hongrois et Allemands vont àla même école ; cela aide à créer descitoyens à l’esprit de tolérance trèsdéveloppé.

A la structure préscolaire No.11,l’institutrice Dr?guflanu Emese a ungroupe d’enfants âgés de 5 à 7 ans, issusprincipalement de familles bilingues(roumaines et dans ce cas précis,hongroises). Son souci principal est detrouver des formes de communicationappropriées afin de faire des enfants deslocuteurs avisés, que ce soit dans leurlangue maternelle ou en roumain. Pendantles activités, elle écoute attentivement lamanière dont les enfants s’expriment, etse sert de chaque opportunité pour lesimpliquer dans le processus decommunication dans les deux langues,ainsi que pour leur faire partager leurspensées, leurs émotions et leurs activités.

Ce à quoi les enfants aspirent, c’estd’être capable de se faire comprendre parquelqu’un d’autre. Cet échangeprésuppose de la tolérance, uneconnaissance de soi-même et des autres,et l’acceptation de la diversité culturelle etethnique.

Mariana Norel est conférencière à la Faculté de Psychologieet d’Education à l’université Transylvania de [email protected]

L’école maternelle multilingueen Roumanie

Mariana Norel présente le membre le plus récent del’UE, un pays qui a une longue tradition en ce quiconcerne l’éducation de la petite enfance, et unengagement fort envers le multilinguisme.

Mariana Norel

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Selon les paroles de Paulo Freire,apprendre implique avant tout « apprendreà lire le monde », acquérir la capacité àreconnaître et interpréter ce qui se passeautour de nous, et agir de manièreindépendante et cohérente. Les histoirespour enfants jouent un rôle essentiel dansle processus de développementpersonnel, de stimulation de la consciencecritique et d’apprentissage de la vie. Atravers leurs mondes imaginaires etmagiques, les histoires deviennent desoutils qui permettent de comprendrel’évolution des sociétés actuelles. Gardantceci en tête, le secrétariat intercultureld’ACIME (la haute commission pourl’immigration et les minorités ethniques),en collaboration étroite avec les écoles, ainvesti dans la production de ressourcespédagogiques depuis le début des années90, afin de soutenir la réflexioninterculturelle, et un système scolaire quipermette une meilleure intégration.

Ces ressources sont maintenant trèsvariées. Elles comprennent des jeux, dumatériel audiovisuel, des histoires pour lesenfants d’âge préscolaire, des histoirestraditionnelles, du matériel d’information,et du matériel de soutien pédagogique etde formation pour les professionnels de

l’éducation. Ils incitent à la réflexion àpropos de la diversité, stimulent ladiscussion et le dialogue, et encouragentl’apprentissage des langues (la langue dupays d’accueil ou d’autres langues) et lerespect envers les différentes langues etla diversité.

« Estória, Estória… Do tambor aBlimundo » (Histoire, Histoire…DeTambor à Blimundo) est un bonexemple. Ce livre-cassette,publié par diversesinstitutions en collaborationavec ACIME, a étédéveloppé pourpromouvoir l’éducationlinguistique et mettre envaleur la diversité. Cettehistoire traditionnellecapverdienne est(re)racontée par CelinaPereira et a été traduiteen italien, en créolecapverdien, enportugais et en anglais.

Isabel Martins travaille ausecrétariat interculturel d’ACIME

Histoires pour une sociétémulticulturelleIsabel Martins

Pendant les 40 dernières années, le Portugal a accueilli beaucoupd’immigrants. Parmi ceux-ci on trouve des gens d’expression portugaisevenus du Brésil et des anciennes colonies africaines, en particulier du CapVert et d’Angola, mais aussi beaucoup d’Européens de l’Est arrivés pendantles dix dernières années. Isabel Martins expose une des réponses faite àcette diversité culturelle et linguistique croissante.

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déménagé. Nous sommes allés habiterune ville frontière où au moins le quart dela population parlait la langue allemande.Pour nous, les Hongrois, c’était unelangue ennemie, car elle rappelait ladomination autrichienne, et c’était aussi lalangue des militaires étrangers quioccupaient notre pays à cette époque.Un an plus tard, c’étaient d’autresmilitaires étrangers qui occupaient notrepays. La langue russe est devenueobligatoire dans les écoles, les autreslangues étrangères interdites.Personne ne connaît la langue russe. Lesprofesseurs qui enseignaient des languesétrangères : l’allemand, le français,l’anglais, suivent des cours accélérés derusse pendant quelques mois, mais ils ne

connaissent pas vraiment cette langue,et ils n’ont aucune envie de l’enseigner.Et de toute façon, les élèves n’ontaucune envie de l’apprendre.On assiste là à un sabotage intellectuelnational, à une résistance passivenaturelle, non concertée, allant de soi.C’est avec le même manqued’enthousiasme que sont enseignées etapprises la géographie, l’histoire et lalittérature de l’union soviétique.Une génération d’ignorants sort desécoles.C’est ainsi que, à l’âge de vingt et unan à mon arrivée en Suisse, et tout à faitpar hasard dans une ville où l’on parlele français, j’affronte une langue pourmoi totalement inconnue. C’est ici quecommence ma lutte pour conquérircette langue, une lutte longue etacharnée qui durera toute ma vie.Je parle le français depuis plus detrente ans, je l’écris depuis vingt ans,mais je ne le connais toujours pas. Jene le parle pas sans fautes, et je nepeux l’écrire qu’avec l’aide dedictionnaires fréquemment consultés.C’est pour cette raison que j’appelle la langue française une langueennemie, elle aussi. Il y a encore uneautre raison, et c’est la plus grave :cette langue est en train de tuer malangue maternelle.

Au début, il n’y avait qu’une seulelangue. Les objets, les choses, lessentiments, les couleurs, les rêves, leslettres, les livres, les journaux, étaientcette langue.Je ne pouvais pas imaginer qu’une autrelangue puisse exister, qu’un être humainpuisse prononcer un mot que je necomprendrais pas.Dans la cuisine de ma mère, dansl’école de mon père, dans l’église del’oncle Guéza, dans les rues, dans lesmaisons du village et aussi dans la villede mes grands-parents, tout le mondeparlait la même langue, et il n’étaitjamais question d’une autre.On disait que les Tziganes, installés auxconfins du village, parlaient une autrelangue, mais je pensais que ce n’étaitpas une vraie langue, que c’était unelangue inventée qu’ils parlaient entreeux seulement, juste comme mon frèreYano et moi, quand nous parlions defaçon que notre petit frère Tila nepuisse pas nous comprendre.Je pensais aussi que les Tziganesfaisaient cela parce que dans le bistrotdu village ils avaient des verresmarqués, des verres rien que pour eux,car personne ne voulait boire dans unverre dans lequel un Tzigane avait bu.On disait aussi que les Tziganesvolaient des enfants. Certes, ils volaientbeaucoup de choses, mais quand onpassait devant leurs maisons construitesen argile et que l’on voyait le nombred’enfants qui jouaient autour de cesmesures, on se demandait pourquoi ilsen voleraient d’autres.D’ailleurs, quand les Tziganes venaientdans le village pour vendre leurspoteries, ou leurs paniers tressés avecdes roseaux, ils parlaient«normalement», la même langue quenous.Quand j’avais neuf ans, nous avons

Terminons maintenant notre exploration du multilinguisme en Europe parl’exposition des réflexions personnelles de trois Européens, très différentsles uns des autres, mais qui ont en commun le fait d’être multilingues.

La langue maternelle et son ennemiAgota Kristof

Agota Kristof est née en Hongrie en 1935. Elle est arrivée en Suisse en tant que réfugiée en1956. Elle a appris le français, et elle a commencéà écrire, d’abord pour le théâtre, puis des romans.L’extrait ci-dessous est issu de son autobiographie, L’Analphabète, qui a été rédigée en français et qui a été publiée en 2004.

Extrait deL’analphabète, Agota Kristof, 2004Editions Zoé11, rue des MorainesCH–1227 Carouge-Genève - Suisse

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Mon nom thaï est Sirisak, et mon nomanglais est Billy. J’ai 10 ans. Je suis néen Thaïlande, et je suis arrivé en Ecossequand j’avais 7 ans. En Thaïlande, jeparlais thaï avec presque tout le monde.Ma maman et mon papa parlaient le thaïentre eux mais Papa me parlait enanglais. Je travaillais beaucoup à l’écoleen Thaïlande, il y avait moins de tempspour jouer. Mais nous avions destortues dans la cour que j’aimaisregarder. C’était dur d’apprendre à lirele thaï, mais j’ai réussi à prendre lecoup.

Je savais très bien lire le thaï jusqu’à ceque j’arrive ici, en Ecosse, etmaintenant ma capacité à lire le thaïs’efface peu à peu de ma mémoire. J’aidû apprendre des mots que je neconnaissais pas. Par exemple j’ai dûapprendre les noms des arbres et desfleurs. La première fleur dont j’ai dûapprendre le nom était le narcisse,

Sirisak/Billy est né en 1996 en Thaïlande où il a passé ses premières années.Il vit maintenant à Edimbourg, en Ecosse, où il est inscrit à l’école primaire.

Enfants d’Europe 27

Ma voix n’a pas le même sonSirisak/Billy

parce que je suis arrivé quand ils étaienten train d’éclore. Et ensuite, j’ai appris lenom des roses (les fleurs écossaisespréférées de Maman) et celui despâquerettes. J’ai appris à faire des colliersde pâquerettes. Le premier arbre dont j’aiappris le nom était le chêne.

J’ai commencé l’école en plein milieu de latroisième année d’école primaire. Jetrouvais que c’était dur d’apprendre à lireet à écrire lorsque je suis arrivé à l’école,mais c’est devenu facile au bout d’unmoment. Mes amis m’aidaient lorsquej’étais bloqué.

C’était très différent d’ici, en Thaïlande. Lalangue est différente ici, et d’autresenfants d’autres parties du monde vont àcette école. Comme mon ami Jason quivient de Chine, et comme Suraj qui vientd’Inde, et comme Damon qui vient d’Iran(mais je ne sais pas de quelle partied’Iran).

Maintenant, c’est plus facile pour moi deparler anglais que de parler thaï, mais jecontinue à parler thaï avec ma maman,et avec certains de ses amis. Papa etMaman parlent encore thaï ensemble.

Quand je parle thaï, ma voix estdifférente. En thaï, ma voix a un sonplus aigu. Et en anglais, ma voix a unson plus grave. En thaï, je parle plusvite, et en thaï le même son peut vouloirdire plusieurs choses. Quand j’étais enquatrième année de primaire, il y avaitun autre garçon à mon école qui parlaitthaï, et on avait l’habitude de parlerensemble. Mais maintenant, il va aucollège. Je peux parler thaï avecd’autres enfants lorsque je vais autemple. Et je peux parler thaï avec mamaman et mon papa, et aussi avec lesamis de ma maman. Je rêve en thaï eten anglais, mais pas en même temps.Quand je fais un cauchemar, il me faitplus peur en anglais qu’en thaï.

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L’enfantPour chacun des enfants, mes parentsont choisi un prénom que les Flamandscomme les francophones considèrentcomme étant l’un des leurs. La famillede mon père est principalementoriginaire de Bruxelles. Ce qui signifieque aux réunions de famille, on passaitrapidement du français au néerlandaisou au dialecte bruxellois, et souventmême plusieurs fois en une seulephrase. En dehors de la maison, lefrançais était la langue dominante car,comme le disait mon grand-père, c’estune langue du monde. Même s’il utilisaittoujours le dialecte bruxellois pour meparler, il n’aimait pas être surpris enpublic en train de lire un journalflamand. Pourtant, il envoya mon pèredans une école néerlandophone. Lafamille de ma mère est originaire desFlandres, et ne parlait donc que lenéerlandais. Pourtant, ma mère futenvoyée dans un lycée francophone entant qu’interne, quand il fut question deréussir dans la vie.L’absurdité fantastique de la Belgique,et de Bruxelles en particulier, fitqu’enfant, je grandis dans unenvironnement multilingue. En bref, mesparents m’offrirent, de manière à moitié

intentionnelle et à moitié fortuite, un dondes plus précieux pour le reste de ma vie :le multilinguisme. Je leur suis surtoutreconnaissant de m’avoir permisd’apprendre ces deux langues sans mêmeavoir à essayer de le faire. En effet, ilsm’ont ouvert les portes de deuxcommunautés distinctes, qui ont chacuneleurs propres romans et séries télévisées,leurs propres chansons et pièces dethéâtre, ainsi que leur propre manière derefaire le monde, tard le soir, dans lesbars. Mais, imaginons un instant que mesparents aient émigré des montagnes duRiff d’Afrique du Nord. Il m’auraient sansdoute transmis le même don d’êtremultilingue : j’aurais appris le berbère et lefrançais. Mais il y aurait eu peu dechances que je chante les louanges demes parents dans Enfants d’Europe. C’estcomme ça. Dans ce pays, un enfantfrancophone qui maîtrise bien lenéerlandais est perçu comme bilingue ; unenfant dont la langue maternelle est leberbère et qui maîtrise bien le français estperçu comme un enfant qui souffre dedéficience langagière, et qui a besoin detravailler pour y remédier. Bien sûr, detemps en temps, ce n’est pas mauvais dedispenser des cours intensifs de

renforcement de la langue dominante àun enfant dans cette situation. Aprèstout, il est nécessaire d’avoir une bonneconnaissance de la langue dominantepour se faire une place dans notresociété. Il est juste dommage que cetenfant soit considéré comme«possédant une langue maternelledifférente», et non comme bilingue. Il estdommage aussi que le reste du grouped’enfants auquel il appartient ne puissebénéficier de ses connaissances duberbère.

Le ParentComme de nombreux autres parents, ily a une question que je me posesouvent ces temps-ci. Commentpouvons-nous aider nos enfants à toutmettre en oeuvre pour être multilingue ?Il y a longtemps, j’ai déménagé deBruxelles à Gand, dans une partie deBelgique où il n’y a qu’une seule langueofficielle, le néerlandais. J’ai envie derentrer sous terre à chaque fois quemon fils aîné rentre de l’école avec unemauvaise note en français. Je n’ai pasréussi à transmettre à mes enfantsl’héritage linguistique dont mes parentsm’ont permis de bénéficier.Ce problème représente un réeldilemme pour certains parents. D’aprèsune étude réalisée sur des famillesrésidant à Anvers, il apparaît que lesparents d’origine marocaine ou turquequi élèvent leurs enfants en utilisant leurlangue maternelle craignent que ceux-cirencontrent plus de difficultés à l’école(et donc dans la société) que les autres.S’ils élèvent leurs enfants en utilisant lalangue dominante, ils craignent queceux-ci ne soient plus capables deparler à leurs grands-parents. Bref, deplus en plus de parents veulent savoircomment élever un enfant de façon à cequ’il soit multilingue. Lorsque l’on tentede répondre à ma question, l’un desproblèmes qui apparaît est qu’il nousest impossible d’étudier le sujet del’acquisition de la langue sans prendre

Etre multilingue : un don des plus précieuxMichel Vandenbroeck

Michel Vandenbroeck a grandi à Bruxelles dans lesannées 1960. Ce texte présente ses réflexions surle multilinguisme et rend compte des différentspoints de vue vécus par l’auteur : celui d’un enfant,d’un parent, d’un universitaire, et d’un citoyen d’unpays où la diversité linguistique a joué un rôleprépondérant.

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en compte les contextes sociaux,relationnels et émotionnels. Il est plusfacile d’apprendre une langue quand onl’apprécie. Mais le statut des languesvarie aussi, ce qui reflète les inégalitésdes rapports de pouvoir qui régissentnotre société. Par exemple, dans lemonde, plusieurs millions de gensparlent arabe, mais très peud’Européens non arabophonespenseraient à envoyer leurs enfants àdes cours supplémentaires d’arabe.

L’universitaireDans les années 60, je vivais dans unepartie de Bruxelles où de plus en plusde fonctionnaires européens et leursenfants venaient s’installer. Le garçonavec qui je jouais à Zorro était écossais,la fille que j’aimais bien était danoise, etle garçon qui pédalait toujours un peuplus vite que moi était allemand. Pournous comprendre, nous parlionsanglais, alors que ce n’était la languematernelle d’aucun d’entre nous (à partpeut-être le garçon écossais, mais detoute façon, à l’époque, nous n’arrivionspas bien à le comprendre quand ilparlait !)Ce qui se passait alors dans cetteenclave privilégiée est devenu uneréalité à travers l’Europe : la diversitélinguistique est en pleine croissance. Sivous empruntez une rue où, il n’y a passi longtemps, la moitié des enfantsparlaient le turc, vous entendrezaujourd’hui une vingtaine de languesdifférentes. Pour faire face à cettemultiplicité de langues, nous avons plusque jamais besoin d’une lingua francaqui nous permettrait de vivre tousensemble, d’une langue usuelle quenous utiliserions pour nous parler. Aprèstout, l’autre alternative serait que nousparlions séparément dans chaquegroupe de la communauté (par exemple,à chaque groupe de parents) à l’aided’interprètes, ce qui nous éloigneraitplus que jamais de l’idée de vivreensemble en communauté.Cependant, alors que le besoin d’unelingua franca se fait de plus en plusurgent, les inégalités des rapports depouvoir semblent croître. La languedominante est bien trop souvent celledes privilégiés, et réciproquement, ellereprésente aussi une condition sine quanon pour accéder aux privilèges. De nosjours, ceci se vérifie indéniablementdans le domaine de la science. Dans cedomaine, l’anglais est la langue usuelleprédominante, et quelqu’un qui ne saitni le lire ni l’écrire se retrouve exclu.D’un côté, cela signifie que lesscientifiques du monde entier peuventdorénavant communiquer, ce quireprésente une avancée considérable,mais d’un autre côté, cela signifie aussique les discussions entre scientifiquesne sont menées qu’en anglais, et

qu’elles se retrouvent alors d’elles-mêmesavortées. L’utilisation de l’anglais en tantque langue usuelle a établi les concepts etles points de vue anglo-américains commeétant dominants. Les autres concepts etpoints de vue se marginalisent donc, oumême s’éteignent. Il est urgent et nécessaire que nousrévisions et retravaillions les modèlesd’éducation multilingue qui existentactuellement. On peut trouver quelquesréponses toutes faites. Mais il est clairque nous avons besoin d’apprendre,ensemble, à mieux envisager lemultilinguisme complexe, tout commenous devons être attentifs aux effets

involontaires de celui-ci sur les rapportsde pouvoir entre les gens. Parconséquent, nous devons trouver unmoyen de répondre à la questionexistentielle provoquée par le messageque nous transmettons à nos enfants :«Est-ce bien d’être seulement ce que jesuis ?»

Michel Vandenbroeck est chercheur au départementd’études sur l’aide sociale à l’université de Gand.

Enfants d’Europe 29

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30 Enfants d’Europe

A travers l’Europe, et même au-delà del’Europe, il existe des noms célèbres dansle domaine de la pédagogie, des noms telsque Pestalozzi, Froebel, Montessori,Freinet, Malaguzzi. Mais il existe beaucoupd’autres gens qui ont apporté unecontribution importante au domaine del’éducation et qui ne sont pas célèbres endehors des frontières de leur propre pays.Des gens comme Marta Mata i Garriga,une pédagogue catalane qui a eu uneinfluence fondamentale sur le renouveaupédagogique dans notre pays, surtout lorsdu dernier tiers du 20ème siècle; prenonspour exemple son implication dans laformation des enseignants, et dansl’élaboration des lois sur l’éducation de lajeune démocratie espagnole.

Marta est née à Barcelone en 1926. Elle agrandi dans un environnement qui lui apermis de comprendre quels étaient lanature et les enjeux de l’éducation, etquelles différences il y avait entre un typed’éducation et un autre, entre un typed’école et un autre, entre une notion del’enfance et une autre. Les parents deMarta étaient enseignants, ils faisaientpartie de ce groupe d’enseignants qui, autournant du 20ème siècle, a été formé pour

donner naissance à une nouvelle éducation :une éducation active dans une école quiavait pour but d’émanciper les gens.

Durant les années 30, pendant lesquelques années que dura la républiqueespagnole, le pays traversa une périodeextraordinaire au point de vue politique,social et culturel, ce qui transforma ledomaine pédagogique, tant au niveauthéorique que pratique. De nouveauxréseaux de communication sedéveloppèrent grâce aux mouvementsinternationaux et aux grands pédagoguesde cette époque. En tant qu’enfant, Martaeut l’expérience de cette nouvellepédagogie dans une école qui respectaitles enfants, qui donnait de l’importance à

leurs capacités et à leurs centres d’intérêt,bref une école qui permettait aux enfantsd’être libres dans un environnement basésur le respect mutuel et sur la viedémocratique.

Forte de cette expérience, Marta Matas’est mise au service de l’éducation demanière intense et féconde. Selon moi, lesactions entreprises par Marta sontcaractérisées par sa compréhension detrois points essentiels.

Pratique et ThéorieD’après la conception de Marta, lapratique entretient un dialogue constantavec la théorie, un dialogue entre égauxqui permet une progression mutuelle.Cette idée est en relation avec le conceptde l’Education Nouvelle, dans lequell’école est appréhendée comme unlaboratoire pédagogique. Ce conceptdécoule lui-même du programme del’Education Nouvelle qui fut publié en1912 à Genève, et qui développa unmouvement international dont l’impact futénorme en Europe. Cette idée de dialogue entre pratique etthéorie participa à l’élaboration et à lafondation de l’Escola de Mestres RosaSensat (l’école de formation des maîtresde Rosa Sensat) en 1965, lorsquel’Espagne était encore sous la dictature,dans le but de «re-former» les enseignantsqui avaient été formés selon les idéauxéducatifs de la politique de Franco. Lematin, ces enseignants travaillaient dansdes écoles, mais l’après-midi, ilsapprenaient d’autres pratiques qui sebasaient sur d’autres théories. Cette

PLEINS FEUX SUR… PLEINS FEUX SUR… PLEINS FEUX SUR… PLEINS FEUX SUR…

Marta Mata i Garriga (1926-2006)

Irene Balaguer rend ici hommage à la vie et au travail d’une supportricepassionnée de la démocratie et de l’éducation, d’une femme engagée dans laréforme de l’éducation de la petite enfance en Espagne.

Irene Balaguer

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formation était ouverte, elle n’avait pas debarrières. Le travail se basait sur le débat,et était alimenté par celui-ci. Depuis, chaque année, Rosa Sensatcontinue de dispenser une activité deformation qui a été inaugurée durant lesannées franquistes : c’est l’école d’étéRosa Sensat, à laquelle des milliersd’enseignants prennent part. Pendantleurs vacances, durant 15 jours, lesenseignants viennent ensemble participerà des cours traitant des anciennes etnouvelles idées sur l’éducation.

Pédagogie et PolitiqueD’après la conception de Marta, pourchanger l’école, il faut que les enseignantssoient formés, qu’ils soient capables deréfléchir par eux-mêmes et de dialogueravec les gens, et donc avec la société,afin de défendre une éducation «libre»pour les enfants. Mais ces enseignantsont aussi besoin de nouvelles politiques etde nouvelles lois pour développer unenouvelle réalité éducative. Marta a sustimuler la relation entre la pédagogie et lapolitique, et ce surtout lors des écolesd’été, durant lesquelles les enseignantsavaient la possibilité de débattre des plusimportantes questions politiques etsociales en rapport avec l’éducation.

Il est important de mentionner ici ledocument qui fut publié à la suite de la10ème école d’été de 1975, «Pour unenouvelle éducation publique». Cedocument est une déclaration desenseignants qui rêvaient de démocratie, etqui réfléchissaient aux actions qu’il fallaitentreprendre pour s’assurer que l’école etl’éducation soient démocratiques. Onretrouve de manière flagrante l’empreintede ce document dans la Constitutionespagnole de 1979, et dans les loisimportantes sur l’éducation de la périodepost-franquiste de l’Espagnedémocratique. Citons pour exemple laLODE qui reconnaît le droit à l’éducationet à la participation, et la LOGSE quidéfinit et organise le système éducatifentre 0 et 18 ans, précisant que l’âge

entre 0 et 6 ans représente le premierpalier de ce système.

A de nombreuses reprises, Marta Mata areprésenté les enseignants quidemandaient de profonds changementsdans les écoles et dans le systèmeéducatif au sens large. Mais, en tant quepoliticienne socialiste engagée, elle aégalement intégré la politique au domainede la pédagogie. Par exemple, lors dudébat intense à propos de la langueutilisée dans les écoles catalanes, Marta aconvaincu tout le monde que, dansl’intérêt des enfants, il ne faut pas queceux-ci soient éduqués dans des écolesséparées où l’on parle soit l’espagnol, soitle catalan, si l’on veut qu’ils grandissentdans une société intégratrice. Au lieu decela, il faut que les écoles donnent auxenfants l’opportunité de se rencontrer, devivre ensemble, d’être amis et de secomprendre.

Les responsabilités politiques de Marta ausein des parlements espagnol et catalan,et du conseil municipal de Barcelone nel’ont jamais détournée de son travailpermanent avec les enseignants. Lors del’école d’été de 2005, elle a contribué demanière décisive à l’élaboration et audéveloppement d’une nouvelle déclarationintitulée «Pour une nouvelle éducationpublique». Ce document est à la foismodeste et ambitieux, il se tourne versl’avenir avec optimisme, et il a pour butd’ouvrir les barrières qui empêchentencore aujourd’hui l’éducation publiquepour tous d’exister.(http://www.rosasensat.org/marco.htm)

Démocratie et ParticipationDu fait de l’engagement profond de Martapour la démocratie, le principe departicipation faisait naturellement partie desa vie quotidienne, de sa manière detravailler avec les autres, et aussi de saréflexion sur la gestion de l’éducation. Sonattachement au travail en équipe, laconfiance qu’elle manifestait à sescollègues et à d’autres équipes, sacapacité à déléguer les responsabilitésfirent qu’autour de Marta, tout grandissait,tout se multipliait. Mais, au-delà de son style personnel, ce

Enfants d’Europe 31

sont les idées de Marta qui ont ouvert lesportes de l’éducation et de l’école à tous.Elle défendait le fait que les enfants et lesjeunes, les familles et les enseignantsdoivent jouir du droit à la participation et dudroit d’être entendus et de prendre partaux décisions, tout comme elle défendait lefait qu’il est nécessaire que les enseignantsapprennent à écouter les autres, c’est-à-dire les enfants, les familles et la société.

Que proposait Marta pour les plus petits,pour les 0-6 ans ? Depuis les années 60,Marta travaillait d’arrache-pied pour que ledroit à l’éducation de ces enfantsdevienne une réalité : elle a formé desenseignants, elle a créé des écoles, elle apréparé des lois, elle a exercé soninfluence politique, et elle a attirél’attention de l’opinion publique. C’est àtravers les activités qu’elle a menées pourpromouvoir l’éducation de la petiteenfance que Marta devint une figureimportante pour beaucoup de gens. Eneffet, elle était toujours là pour apporter del’aide ou pour mener à bien n’importequelle action en faveur d’une éducationpublique de qualité – ce qui représentaitselon elle le seul moyen de respecter lesdroits de chaque enfant.

A partir des écrits de Marta, nouspouvons extraire de nombreuses idées quisont valables pour le présent et le futur.Pour finir cet article, j’ai effectué unesélection de ces idées, et j’en ai choisiune: «[Le principe de la pédagogie] consisteà être capable d’être surpris par chaqueenfant. En effet, la pédagogie ne peut pastoujours être un jeu orchestré par la définitionet la vérification d’hypothèses, car aucontraire elle s’inscrit parfaitement dans ledomaine de la créativité. Si l’éducation est undroit universel, la pédagogie, qui la sert, nepeut pas rester sur l’Olympe des sciences[théoriques], elle doit s’engager à ce que lespolitiques, dont le but est d’assurer ce droit,favorisent une telle créativité. Et à travers cetengagement, la pédagogie construit l’histoire,l’histoire de l’humanité.»

Irene Balaguer est directrice du magazine “Infancia”,[email protected]

PLEINS FEUX SUR… PLEINS FEUX SUR… PLEINS FEUX SUR… PLEINS FEUX SUR…

Il est caractéristique que Marta Mata ait

apporté son soutien à Enfants d’Europe lors

de son lancement en accueillant les premières

réunions de discussion et de planification du

magazine chez elle, dans le village de

Saifores. Nous nous souvenons d’elle avec

gratitude et affection, comme d’une amie

sincère de tous les enfants d’Europe.

Peter Moss

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Actualités européennesA la suite de la sixième journéeeuropéenne des langues (26 septembre2006), la Commission européenne a misen place un groupe de haut niveau quiétudiera la question du multilinguisme afinde conseiller le commissaire européen aumultilinguisme. Jusqu’à présent, lemultilinguisme faisait partie desresponsabilités du commissaire àl’éducation, à la formation, à la culture etau multilinguisme. Mais depuis le 1er janvier 2007, il existeun poste à part entière de commissaire aumultilinguisme. Ce poste est occupé parLéonard Orban de Roumanie, qui estdonc en charge de la politique linguistique

société des groupes sous-représentés; Reconnaissance : célébrer et accueillir ladiversité; Respect et tolérance : œuvreren faveur d’une société plus solidaire.

«L'égalité des chances pour tous» sera lethème de la prochaine publication d’Enfantsd’Europe, qui paraîtra à l’automne 2007.

L’Organisation de coopération et dedéveloppement économiques (OCDE) aentrepris une étude unique et novatrice de lapolitique d’éducation et de d’accueil des jeunesenfants (ECEC, Early Childhood Educationand Care) dans 20 de ses états membres.Cette étude inclut tous les partenairesd’Enfants d’Europe, hormis l’Espagne.Le second rapport de cette étude, StartingStrong II, a été publié en septembre lorsd’une conférence à Reggio Emila. Ce

rapport définitif contient deprécieuses informations ausujet des 20 paysparticipants, ainsi qued’importantes conclusions etrecommandations sur lespolitiques, les structures dejeunes enfants et lespratiques dans ces pays. Pour plus de renseignements surcette étude, sur les rapports individuelssur les pays; pour le téléchargement dupremier rapport, Starting Strong et lacommande du second rapport, StartingStrong II , nous vous invitons à visiter lapage d’accueil de l’ECEC sur le site del’OCDE (Early Childhood Education andCare Home Page): http://www.oecd.org/document/3/0,2340,fr_2649_34509_27000067_1_1_1_1,00.html

32 Enfants d’Europe

Conférence Enfants d’Europe - organisée par BUPL

Titre provisoire - Enfance en Europe : pratiques et réglementationsDu 12 au 14 octobre à Copenhague

Langues officielles de la conférence : anglais et danois (traduction simultanée)

Les objectifs de la conférence sont de :1) Promouvoir Enfants d’Europe et ses propositions concernant une Approche

Européenne de la Petite Enfance et de ses structures d’accueil2) Présenter et échanger les différents points de vue à propos de l’accueil et de

l’éducation des enfants en bas âge (de 0 à 10 ans)

Programme provisoire

Mercredi 10 octobreDans l’après-midi : inscription des participants, puis accueil de ceux-ci à la mairie deCopenhague.

Jeudi 11 octobre

Discours de l’orateur principal (Italie, à confirmer) sur les enjeux pédagogiques de l’Europe.

Courte intervention sur l’enjeu concernant les réglementations et les structures d’accueilaux enfants de 0 à 3 ans (Suède), 3 à 6 ans (Royaume Uni), et 7 à 10 ans.

Visite d’étude dans les environs de Copenhague.

Vendredi 12 octobre

Discours de l’orateur principal (un médiateur venu d’un pays européen) sur la notiond’Enfance en Europe.

Présentations et ateliers autour du document de travail d’Enfants d’Europe « Vers uneapproche européenne de l’accueil de la petite enfance»

Comité de discussion : les représentants du parlement européen et de la commission euro-péenne, le Danemark et Peter Moss, rédacteur en chef d’Enfants d’Europe.

Les participants : La conférence peut accueillir jusqu’à 225 participants. Public concerné : les praticiens, étudiants et chercheurs ainsi que les législateurs et politi-ciens des pays européens.

Le tarif d’admission :Le tarif d’admission n’est pas encore définitif, mais il faudra compter approximativement295 €. Il couvrira l’entrée, l’interprétation/les conférenciers, les documents et supportsd’études fournis aux participants, les pauses café et déjeuner des 11 et 12 octobre, ledîner conférence du 11 octobre et les visites d’études. Chaque participant doit organiserlui-même son transport et son logement.

Pour plus d’information, contactez [email protected]

au sein de la Commission européenne.Cette politique linguistique a pour objectifsprincipaux d’encourager l’apprentissagedes langues, de promouvoir une économiemultilingue saine, et de donner accès àtous les citoyens européens à unelégislation dans leur propre langue. Conjointement avec le président de laCommission européenne et lecommissaire à l’éducation, à la formationet à la culture, le nouveau commissaire estégalement chargé de la promotion d’un«dialogue interculturel», et donc del’élaboration de l’Année européenne dudialogue interculturel en 2008.

En 2007, les Etats membres devrontrendre compte des actions entreprisespour remplir les objectifs du Plan d’actionde la Commission européenne pourl’apprentissage des langues et la diversitélinguistique. Ce Plan s’étalait sur 2 ans(de 2004 à 2006) et avait pour but depromouvoir l’apprentissage des langues etla diversité linguistique à travers une série

d’actions.

L’Union européenne adécidé de faire del’année 2007 l’Annéeeuropéenne del’égalité des chancespour tous «en

l’inscrivant dans une action concertéevisant à favoriser l’égalité et la non-discrimination dans l’Union européenne».Cette Année européenne s’articuleautours de 4 «grands thèmes»:Droits : sensibiliser l’opinion publique audroit à l’égalité et à la non-discrimination; Représentation : stimuler un débat sur lesmoyens de renforcer la participation à la

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Quelques dossiers de portée globale parus dans

Grandir à Bruxelles

• La politique d’accueil de la petite enfance

en 4 dimensions (n°4)

• Enjeux et fondements de la participation

des enfants (n°12)

• L’enfant citoyen (n°14)

• Les nouveaux visages de l’accueil (n°15)

• Des bébés aux ados, l’éveil au plaisir

de lire (n°16)

Dernier numéro paru

Guide : l’accueil de l’enfant à Bruxelles

de 0 à12 ans (numéro spécial 17/18)

Vous pouvez vous les procurer à l’adresse

[email protected] ou les télécharger

sur le site www.grandirabruxelles.be

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“ENFANTS D’EUROPE” est une publication éditée conjointement par un réseau de revues de huit paysd’Europe. Enfants d’Europe concerne les services destinés aux enfants âgés de 0 à 10 ans et à leur famille.Bien que la plupart des contributions émanent des pays participants, Enfants d’Europe n’en demeure pasmoins ouvert à toutes les régions d’Europe.

Les objectifs d’ENFANTS D’EUROPE sont:• Offrir un forum d’échange d’idées, de pratiques et d’informations• Approfondir la relation entre théorie et pratique• Contribuer au développement de politiques et de pratiques au niveau européen, régional et local• Valoriser la diversité et la complexité• Reconnaître que le passé enrichit le présent• Approfondir la compréhension de l’enfance en Europe, hier, aujourd’hui et demain

Grandir à Bruxelles et Le Furet, revues éditrices d’Enfants d’Europe en Communauté française de Belgiqueet en France se sont entendues pour coproduire la version française de ce numéro.

Pour l’édition en anglais Children in Europe:Children in Scotland, Princes House 5 Shandwick Place, Edinburgh, EH2 4RG, Scotland

tél.: (0044) 131 228 8484, fax: (0044) 131 228 8585site web: www.childreninscotland.org.uk, e-mail: [email protected]

Children in Wales, 25 Windsor Places, Cardiff CF 10 3BZtél.: 029 2034 2434, fax 029 2034 3134, e-mail: [email protected]

Pour l’édition en italien Bambini in Europa:Bambini in Europa, Viale dell’Industria, 24052 Azzano San Paolo (Bg), Italia

tél.: (+39) (0)35 53 41 23, fax: (+39) (0)35 53 41 43site web: www.edizionijunior.it, e-mail: [email protected]

Pour l’édition en catalan Infància a Europa et en espagnol Infancia en Europa:Avinguda de les Drassanes 3, 08001 Barcelona, Spain

tél.: (0034) 93 481 7373, fax: (0034) 93 301 7550site web: www.revistainfancia.org , e-mail: [email protected]

Pour l’édition en néerlandais Kinderen in Europa: Kiddo, Uitgeverij SWP, Postbus 257, 1000 Amsterdam, Holland

aux Pays-Bas: tel.: (0031) 20 330 72 00, fax: (0031) 20 330 80 40en Belgique: VBJK, Raas van Gaverestraat 67A, 9000 Gent

tél.: (0032) 9 232 47 35, fax: (0032) 9 232 47 50, site web: www.ubjk.be, e-mail: [email protected]

Pour l’édition en danois Børn i Europa: BUPL, Blegdamsvej 124, 2100 Copenhagen, Denmark

tél.: (0045) 35 46 50 00, fax: (0045) 35 46 50 39, e-mail: [email protected]ørn i Europa peut-être téléchargé gratuitement du site www.bupl.dk

Pour l’édition en français Enfants d'Europe:en Belgique: Observatoire de l’enfant, Rue des Palais 42, 1030 Bruxelles

tél.: (0032) 2 800 83 58, site web: www.grandirabruxelles.be, e-mail: [email protected] en France: Le Furet, 6 quai de Paris, 67000 Strasbourg

tél.: (0033) 3 88 21 96 62, fax: (0033) 3 88 22 68 37, site web: www.lefuret.org, e-mail: [email protected]

Pour l’édition en allemand Kinder in Europa: en Allemagne: Betrifft Kinder, Wilhelm-Kuhr-Str. 64, 13187 Berlin

tél.: 030 48096536 - 01774141517, fax: 030 4815686site web: www.verlagdasnetz.de, e-mail: [email protected] - [email protected]

en Autriche: Unsere Kinder, Kapuzinerstraße 84, A-4021 Linztél.: (0043) (0)732/7610-2091, fax: (0043) (0)732/7610-2099

website: www.unserekinder.at, e-mail: [email protected]

Pour l’édition en portugais Infancia na Europa:APEI, Bairro da Liberdade, Lote 9, Loja 14, Piso 0, 1070-023 Lisbonne, Portugal

tél.: (00351) 213 827 619 - 620, fax: (00351) 213 827 621website: http://apei.no.sapo.pt, e-mail: [email protected]

Pour l’édition en suédois Barn i Europa:Tidningen Förskolan, Lärarförbundet, Box 12239, 102 26 Stockholm

tel.: (0046) (0)8 7376568, fax: (0046) (0)8 7376500website: www.forskolan.net, e-mail: [email protected]

Supplément à la revue Le FuretISSN 1163-4383 • 4,00 €

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