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Collection «Aliments dans les villes» Les circuits dapprovisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchs en Afrique et Madagascar Laurence Wilhelm Programme «Approvisionnement et distribution alimentaires des villes» AC/03-97F - 1997 Communication présentée au séminaire sous-régional FAO-ISRA «Approvisionnement et distribution alimentaires des villes de l’Afrique francophone» Dakar, 14 • 17 avril 1997

Les circuits dÕapprovisionnement alimentaire des …4: Les circuits d’approvisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchés en Afrique et à Madagascar viiOn

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Collection «Aliments dans les villes»

Les circuits dÕapprovisionnement alimentaire des villes

et le fonctionnement des march�sen Afrique et � Madagascar

Laurence Wilhelm

Programme

«Approvisionnement et distribution alimentaires des villes»

AC/03-97F - 1997

Communication présentée au séminaire sous-régional FAO-ISRA«Approvisionnement et distribution alimentaires

des villes de l’Afrique francophone»Dakar, 14 • 17 avril 1997

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Les appellations employées dans ce document et la présentation des don-

nées qui y figurent n'impliquent de la part de l'Organisation des Nations Unies

pour l'alimentation et l'agriculture aucune prise de position quant au statut

juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant

au tracé de leurs frontières ou limites.

Les opinions contenues dans ce document restent sous la seule responsabi-

lité de leur(s) auteur(s) et ne sauraient engager les personnes citées. Elles

ne reflètent pas nécessairement, non plus, le point de vue officiel des institu-

tions citées ou de leurs pays membres.

Tous droits réservés. Aucune partie de ce document ne peut être reproduite,

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se sous quelque forme ou par quelque procédé que ce soit: électronique,

mécanique, par photocopie ou autres, sans autorisation préalable. Adresser

une demande motivée, en indiquant les passages ou illustrations en cause,

au

Rédacteur en chef

Revue et Collection «Aliments dans les villes»

Service de la commercialisation et des financements ruraux (AGSM)

FAO

Viale delle Terme di Caracalla

00100 Rome, Italie

Télécopies: (+39 6) 5705 6850 - 5705 4961

Adresse électronique: [email protected]

© FAO 1997

http://www.fao.org/ag/sada.htm

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Remerciements

La FAO remercie la Caisse française de développement pour avoir mis à disposition le rapport «Les circuits d’ap-provisionnement et le fonctionnement des marchés en Afrique et à Madagascar, synthèse des études socio-éco-nomiques récentes», rédigé par Mme Laurence Wilhelm en 1994.

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Résumé

Les circuits d’approvisionnement et les marchés

Les circuits d’approvisionnement

Les circuits marchands fournissent l’essentiel de l’ap-provisionnement urbain en produits vivriers.

Deux types d’organisations différencient les circuitsd’approvisionnement:

• le grossiste collecteur est obligé de se déplacer lui-même physiquement le long du circuit, assurant laplupart des opérations nécessaires à la circulationdu produit, c’est-à dire la prospection, la collecte, legroupage, le convoyage et la mise sur le marché.Ce type de grossiste est, par conséquent, relative-ment spécialisé dans un produit et une zone d’ap-provisionnement;

• le commerçant est inséré dans un réseau marchandqui, grâce à la circulation des flux d’information etdes flux financiers entre ses membres, permet ladémultiplication, dans le temps et dans l’espace, deces opérations et, par conséquent, une maîtrisebien supérieure des risques et des contraintes inhé-rents au commerce des produits vivriers.

La gamme de produits sur lesquels le grossiste inter-vient est alors beaucoup plus diversifiée au gré desopportunités commerciales: la commercialisation desproduits manufacturés et des denrées alimentairesde base (riz, farine, sucre) complète celle des pro-duits vivriers et représente souvent une composantedu fret de retour entre correspondants.

L’environnement économique du commerce des pro-duits vivriers se caractérise par un niveau élevé derisque et d’incertitude. L’environnement institutionnel,quant à lui, se caractérise par l’existence de pratiquesréglementaires inadaptées et tatillonnes ainsi que detaxations abusives et fréquemment arbitraires. A cesdifférentes contraintes s’ajoutent celles propres auxcommerçants - de capital, d’accès au crédit -, pour neciter que les deux plus importantes.

Ces contraintes affectent, en conséquence, tous lescommerçants, façonnent leurs comportements, orien-tent leurs choix et fixent leurs stratégies.

Ces stratégies revêtent des formes identiques quelsque soient les produits ou les types d’organisationdes circuits: les pratiques visent avant tout, à traversdes relations personnalisées avec les producteurs et

les détaillantes, des associations et des systèmes decrédit, à restreindre l’entrée des «outsiders» dans lecommerce, afin de garantir une certaine régulationd’un marché caractérisé par une forte instabilité (deprix, d’offre et de demande).

En définitive, on remarque que les grossistes desmarchés constituent des communautés dont l’accèsest relativement fermé, soudées par de forts lienssociaux et ethniques et où la concurrence joue peu.C’est en effet la condition de la permanence et de larégularité de leurs activités.

Par conséquent, les grands marchés urbains sur les-quels s’exerce l’essentiel des activités de gros d’ap-provisionnement ne sont pas des lieux de formationdes prix (au sens de la rencontre entre une offre etune demande); ceux-ci se fixent en amont par le jeudes rapports de force et de négociation entre le pro-ducteur et le commerçant, et en aval entre lesdétaillantes et les acheteurs, suivant les relations decrédit et de confiance qu’ils ont nouées et, en dernierressort, suivant le pouvoir d’achat des consomma-teurs urbains.

Dans le domaine des produits manufacturés tout par-ticulièrement, l’approvisionnement des marchés, àpartir des circuits de la fraude, est le fait marquant dela situation actuelle.

Les marchés

La place des marchés dans le secteur commercial urbain

Les marchés concentrent aujourd’hui l’essentiel del’activité et du dynamisme du secteur commercialinformel urbain. Ils sont encore l’endroit où s’approvi-sionne la très grande majorité de la population urbai-ne, aussi bien pour les produits manufacturés etvivriers que pour les grands produits de base de pre-mière nécessité (riz, sucre, farine, etc.).

On distingue très nettement deux sous-secteurs spé-cifiques dans l’activité des marchés:

• celui des commerces de produits manufacturés, quiprésentent les caractéristiques de développementéconomique les plus rapides et réalisent les chiffresd’affaires les plus élevés. A ce sous-secteur desproduits manufacturés, il faut rattacher du point devue du dynamisme commercial, les commerçantsdes grandes denrées de base (riz, sucre, farineetc.);

• celui des commerces de produits vivriers. Dans lavente des produits vivriers, la micro-activité est la

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forme commerciale généralisée et les revenus sonttrès faibles. Les commerçantes occupent les sec-teurs les plus dégradés des marchés, ceux qui cris-tallisent tous les dysfonctionnements: surconcentra-tion, enclavement, manque d’hygiène, bâti vétuste àla limite du dangereux, etc.

Le réseau des marchés

Le réseau des marchés ne présente pas un caractè-re figé dans le temps: selon les saisons, les produits,leur origine géographique, l’importance respectivedes marchés d’approvisionnement et de redistribu-tion se modifie, le nombre de grossistes qui s’y trou-vent augmente ou, au contraire, se contracte forte-ment.

L’évolution des conditions et des modes de transport,tant des voyageurs que des marchandises, et leurorganisation dans le tissu urbain, spontanée ou for-malisée par des interventions administratives, expli-quent l’émergence de certains marchés d’approvi-sionnement, comme leur déclin, voire leur disparition.

Une certaine volatilité des marchés de gros traduitune capacité de réaction très rapide des circuits d’ap-provisionnement à toute intervention extérieure.

Ceci concerne en particulier les grossistes opéranthors de l’emprise physique des marchés, dans desconditions très précaires, en particulier sur la chaus-sée.

On observe souvent, suite à des mesures adminis-tratives restrictives (réglementation de la circulation,interdiction de tel ou tel commerce pour cause de nui-sances, délocalisation, etc.), la disparition des activi-tés de ces grossistes et leur reconstitution dans unautre lieu de la ville qui entraîne de nouvelles concen-trations de détaillants. Ainsi se développe un véritablemarché d’approvisionnement et de redistribution.

A la différence des circuits d’approvisionnement desproduits vivriers qui organisent une certaine hiérar-chisation des marchés, dans le cas des produitsmanufacturés, on observe toujours une polarisationdes activités sur un seul marché et dans une seulezone urbaine: le centre-ville.

Le développement d’hypercentres et le déséquilibre des réseaux de marchés

Le développement d’hypercentres concentrant aucoeur des agglomérations l’ensemble des formesd’activité commerciale (gros, demi-gros, détail etmicro-détail), à la fois sur l’espace public du marché,dans les rues adjacentes et dans les entrepôts des

grossistes des quartiers environnants, est un aspectcaractéristique de l’urbanisme commercial des villessubsahariennes aujourd’hui.

Or, il est frappant de constater que les activités d’ap-provisionnement et de distribution des produitsvivriers occupent en définitive une place secondairedans les flux économiques et financiers brassés parces commerces.

Le véritable moteur de l’activité économique de l’hy-percentre - qu’il s’agisse des magasins et entrepôtsdes grossistes importateurs, des vendeurs réguliersdes marchés ou des innombrables vendeurs à la sau-vette -, c’est la vente des produits manufacturés, enparticulier de tous ceux provenant de la fraude et/oude ceux qui seront écoulés par les réseaux clandes-tins transfrontaliers des grands commerçants, ou parla petite entreprise contrebandière.

On doit souligner, par conséquent, que cette surcon-centration d’activités et de vendeurs sur un marchépôle exerce un «effet d’ombre» sur l’ensemble duréseau de distribution. Seuls peuvent subsister detrès petits marchés dont la multiplication, dans uncontexte de très faible solvabilité de la clientèle,contribue à les fragiliser dangereusement.

La problématique des marchés de gros

L’organisation spatiale des activités de gros de pro-duits vivriers dans les grandes villes en Afrique et àMadagascar présente deux caractéristiques princi-pales:

• l’absence d’équipements et d’installations spéciali-sés que l’on pourrait qualifier de marchés de gros.Les grossistes exercent en effet leurs activités surdes lieux non spécialement aménagés à cet effet;

• il n’existe pas un seul pôle de concentration degrossistes faisant office, à l’image d’un Rungis, decentre de redistribution pour tous les produits etpour la ville toute entière. On observe le plus sou-vent, au contraire, plusieurs pôles de regroupementde grossistes, relativement dispersés dans le tissuurbain, fonctionnant généralement en synergie avecles grands marchés de consommation (que ce soitsur l’emprise même de ces marchés, sur les voiesadjacentes ou à proximité immédiate, dans desquartiers «spécialisés» de grossistes).

Ce sont ces concentrations de grossistes que l’ondésigne, selon les sources, par les noms d’«aires dedégroupage», «aires de gros», «centres grossistes»et que, par commodité, on appellera «marchés degros».

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On observe que les conditions d’activité des gros-sistes de produits vivriers sont toujours particulière-ment défectueuses, en particulier dans le cas desgrossistes de produits frais.

La relative dispersion spatiale des grossistes de pro-duits vivriers dans le tissu urbain permet une bonneirrigation du réseau des marchés et des innom-brables points de vente qu’ils approvisionnent (étalsdes rues, commerces du soir, etc.) et, de ce fait, uneoptimisation des coûts de redistribution, compte tenudu prix très élevé du transport urbain.

De nombreux grossistes de produits frais, produitsles plus générateurs de déchets, sont contraintsd’exercer leurs activités sur la chaussée à proximitédes marchés. Dans ces conditions, leur activité repré-sente un facteur parfois non négligeable, mais surtoutle plus visible et souvent le plus spectaculaire, desnuisances attachées à la présence des grossistes deproduits vivriers dans les villes. Cette situation ali-mente le discours des autorités sur «la nécessairedélocalisation des grossistes du centre-ville».

Les marchandises générales et les denrées alimentaires de première nécessité: une surconcentration d’entrepôts dans le centre-ville

Par contraste avec cette relative dispersion des lieuxd’activité des grossistes de produits vivriers, il fautremarquer que le commerce de gros des marchan-dises générales et des denrées alimentaires impor-tées est une donnée fondamentale de l’activité com-merciale des centres-villes.

Aussi faut-il souligner que le trafic fret généré par cescommerces de gros représente une source d’encom-brement de la circulation et de congestion du centre-ville souvent bien plus importante que celle occasion-née par les activités des grossistes de produitsvivriers.

Partant du constat fait par les Autorités des nuisancesassociées à la présence des seuls grossistes de pro-duits vivriers sur les grands marchés du centre-ville,on s’interroge sur la pertinence de la création de mar-chés de gros à l’extérieur des agglomérations,comme le souhaitent généralement les responsablesmunicipaux.

Toute création d’un marché de gros de produitsvivriers, très loin des zones les plus peuplées et deslieux d’activités du centre urbanisé, semble vouée àl’échec considérant la logique des circuits d’approvi-sionnement actuels.

Trois points doivent être soulevés:

• les conséquences sur les coûts de la distributionintra-urbaine;

• une telle implantation entraînerait immanquable-ment une multiplication des lieux de déchargementsauvages dans le centre-ville, recréant ainsi les nui-sances que l’on pensait supprimer;

• la délocalisation éventuelle des activités de gros deproduits vivriers ne suffirait pas, à elle seule, àrésoudre tous les problèmes observés aujourd’hui.

Comme on l’a souligné, la congestion du centre-villetient, pour une large part, aux activités liées auxgrands entrepôts des grossistes importateurs. Or,pour le moment, on ne constate pas de la part desAutorités l’intention de prendre des mesures vigou-reuses visant à limiter la prolifération de ces entre-pôts privés en plein coeur des villes (incitations à ladélocalisation vers une zone de stockage excentrée,application plus rigoureuse de règlements de circula-tion, de stationnement et de traversée de la ville pourles poids lourds, etc.).

En conclusion, un aménagement de marché de grosde produits vivriers doit se donner pour premierobjectif d’améliorer les conditions d’activité des opé-rateurs et non de les pénaliser, de fournir les facilitésen matière de services (eau, gardiennage, sécurité,éclairage etc.), de stockage, de groupage et deconditions de manutention qui sont régulièrementréclamées par les grossistes.

C’est pourquoi, lorsque c’est possible (configurationdu terrain, possibilité d’extension, localisation parrapport aux flux principaux), il faut privilégier la réor-ganisation des activités de gros sur le site existant.Dans d’autres cas, la délocalisation peut s’avérernécessaire: des sites d’implantation potentielle doi-vent être recherchés à distance raisonnable des lieuxd’activités du centre urbanisé.

L’organisation des marchés

Les aménagements et les équipements des marchés

La halle (qui remonte souvent à la période coloniale)est le premier équipement, et souvent le seul, qui aitété construit sur les marchés centraux. La plupart deces marchés ne comprenait aucun aménagementspécifique en matière d’installations de vente ou destockage.

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Il faut attendre la fin des années 60 et le début desannées 70 pour voir la réalisation de nouveaux équi-pements sur plusieurs marchés centraux. Ces bâti-ments en hauteur, selon la mode de l’époque, ontd’abord été réalisés sur les lieux du commerce deproduits manufacturés. Ces équipements se sontrévélés souvent non fonctionnels, et ont été insuffi-sants pour répondre à la demande croissante deplaces de vente sur les marchés centraux.

Ils n’ont pu enrayer le développement incontrôlé d’ungrand nombre de constructions précaires ni celui desmarchés «zone» qui caractérisent les années 80.

Les installations de vente et de stockage sur les marchés

La multiplicité et l’hétérogénéité des installations devente semblent, à première vue, caractériser les mar-chés africains. Un examen plus attentif montre qu’enfait, on retrouve toujours les quatre mêmes grandescatégories d’installation de vente, dont le niveaud’équipement est directement fonction du niveau derevenu du commerce considéré. Cette typologie,classée par niveau d’équipement, distingue: les bâti-ments et les boutiques, l’installation délimitée parquatre poteaux, couverte et ouverte (hangar), la tableet l’étalage au sol.

D’une façon générale, on constate que sur les mar-chés africains, les aménagements ont été réalisés etfinancés en grande partie par les commerçants eux-mêmes.

Les caractéristiques physiques des marchés

Du point de vue des caractéristiques physiques, onpeut classer les marchés africains en deux grandescatégories: les marchés «centres commerciaux» etles marchés «zone».

Les marchés «centres commerciaux» sont d’originesouvent ancienne et de taille plutôt réduite car ils ontété implantés dans le coeur commercial des cités.Leurs emprises ont été bien circonscrites dès leurcréation. Ils sont fortement structurés et organisés etles vendeurs de produits manufacturés sont les plusnombreux.

Les marchés «zone» (Marché au mil, Dantokpa,Andravoahangy) ont été implantés sur de vastes ter-rains, à l’origine relativement éloignés du centre ter-tiaire et marchand de la cité. Leurs limites n’ayantjamais été définies avec précision, ils se sont étenduset développés de façon quasi spontanée. Sur cesmarchés, le bâti est très hétéroclite: boutiquesmodernes très bien construites, misérables baraquesbricolées en matériaux de récupération.

Les statuts et modes d’utilisation des installations de vente: des enjeux de pouvoir

Les règles d’attribution des places de marché, quiinterdisent la sous-location et imposent qu’il n’y aitqu’un attributaire par emplacement et qu’un vendeurne puisse en cumuler plusieurs, sont partout trans-gressées. Le nombre d’installations d’un marché necorrespond jamais au nombre de vendeurs: demême, la liste d’attributaires que l’on peut trouverauprès de la municipalité n’a qu’un lointain rapportavec la réalité.

La sous-location et la revente de pas de porte

Il s’agit de pratiques généralisées sur tous les grandsmarchés.

Les montants de la sous-location représentent unecharge beaucoup plus lourde que le paiement de laredevance mensuelle ou du droit de place.

La cession d’installations semble aussi une pratiquecourante. Elle aurait été particulièrement fréquenteentre la fin des années 70 et le début des années 80,dates qui marquent sur les marchés l’essor importantdes vendeurs de produits manufacturés (les produits«riches»). A cette époque, en effet, l’essentiel descessions aurait consisté en la revente, par les ven-deuses de produits vivriers, de leur installation (han-gar).

La multipropriété

Il est très courant qu’un vendeur dispose de plusieursinstallations de vente à travers des prête-noms. Onconstate que ces cas de multipropriété concernentexclusivement des commerçants de produits manu-facturés à forte valeur ajoutée et des commerçantsde produits alimentaires de première nécessité (riz,sucre, farine, sel).

Le recours à cette multipropriété est souvent la façonde satisfaire les besoins de locaux de stockage defaible capacité qui caractérisent les marchés, besoinsqui ne peuvent être satisfaits par la location d’entre-pôts en ville, trop grands ou trop chers.

Le partage d’installation

On constate que la pratique inverse de partage d’uneinstallation par plusieurs vendeurs est tout aussirépandue. Deux causes distinctes sont à l’origine decette situation: d’une part, la saturation des marchéset l’impossibilité d’obtenir un emplacement et, d’autrepart, la nécessité de partager les frais d’installation etd’exploitation de l’installation.

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Les vendeurs et les produits

Le développement des vendeurs «illégaux»

Les différentes observations faites sur les grandsmarchés urbains en Afrique et à Madagascar confor-tent toutes ce même constat: il y a une réelle muta-tion dans la composition et le comportement des ven-deurs des marchés.

Ce qui frappe aujourd’hui dans cette population c’est,d’une part, le nombre croissant d’ambulants itiné-rants, semi-itinérants et occasionnels, d’autre part, laforte mobilité spatiale qui caractérise les stratégiescommerciales des vendeurs installés.

Les distinctions, opératoires autrefois, entre séden-taires et ambulants, réguliers et occasionnels,deviennent de plus en plus floues: l’image du vendeurà l’étal attendant son client et de l’ambulant se por-tant au devant de celui-ci est aujourd’hui totalementbrouillée.

Les vendeurs réguliers payant redevance sontprompts à dénoncer la concurrence des ambulants,des occasionnels, des «illégaux» squattant les alléeset les abords des marchés et à exprimer leur regretd’un âge d’or où l’ordre régnait sur les marchés, oùchacun était à sa place; mais ces discours véhé-ments masquent des comportements ambigus: cesvendeurs sont souvent aujourd’hui les premiers à uti-liser des ambulants pour écouler plus rapidementleurs marchandises, et à se déplacer eux-mêmes surd’autres marchés régionaux où ils concurrencent àleur tour les vendeurs régulièrement installés.

L’organisation interne des marchés

Des services inexistants ou largement insuffisants palliés par les vendeurs

• Sécurité et gardiennage;

• entretien, nettoyage et enlèvement des ordures;

• équipements sanitaires;

• un besoin sur tous les marchés: le stockage desinvendus; un service adapté: le stockage à façon;

• un service omniprésent sur tous les marchés: la res-tauration populaire.

En règle générale, la sécurité des personnes et legardiennage des marchandises ne sont de fait jamaisassurés par le gestionnaire des marchés ou l’Autoritépublique. Les vendeurs se sont organisés en consé-quence.

Un nettoyage intérieur des marchés est dans presquetous les cas assuré par l’Autorité du marché, maistoujours de façon très insuffisante. Les vendeurs pal-lient dans la mesure du possible l’insuffisance de ceservice (recours à un aide familial qui est chargé defaire le nettoyage de la place très tôt le matin). Si lenettoyage pose peu de problèmes pour les vendeursde produits manufacturés, en revanche les com-merces produisant beaucoup de déchets (produitsvivriers et surtout boucheries) ont beaucoup plus demal à atteindre un niveau minimal d’hygiène.

Presque tous les marchés sont équipés de latrines (àl’exception notable des marchés de N’Djamena) quisont dans des états plus ou moins satisfaisants. Ellessont de toute façon toujours en nombre insuffisant etchères.

Sur tous les marchés fonctionnent des systèmes degardiennage et de stockage temporaire (à façon) misen place et assurés par les commerçants. Ils consis-tent en réseaux d’installations où les commerçantsviennent déposer le soir leur marchandise contrepaiement d’un loyer calculé à la journée ou au moiset dont le montant est indexé sur la valeur de la mar-chandise. Ces installations sont le plus souvent desconstructions fermées - boutiques, magasins - maison rencontre aussi des «gardiens à façon» installéssous des hangars ou autour des marchés dans lesinstallations des particuliers.

Les gargotes des marchés ont pour clients tous lesusagers (vendeurs et acheteurs), et sont devenuesles cantines des travailleurs des quartiers environ-nants. Ce sont les seuls endroits, comme àAntananarivo par exemple, où peuvent s’approvision-ner les ménages très démunis.

Le coût et le revenu des activités commerciales sur les marchés

On constate une remarquable stabilité de la structuredes chiffres d’affaires par catégorie d’activités surl’ensemble des marchés étudiés.

Les tableaux ci-après résument les chiffres d’affairesquotidiens et les coûts par marchés, en francs CFA,observés en Afrique centrale et occidentale (Librevilleexcepté).

Chiffres d’affaires(FCFA)

Produits Détail Gros

Vivriers 2 000 - 5 000 20 000 - 80 000

Alimentaires 11 000 - 28 000 50 000 - 155 000

Manufacturés 10 000 - 30 000 80 000 - 1 400 000

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On notera la particulière faiblesse des chiffres d’af-faires des produits vivriers qui aboutissent à desmarges commerciales se situant entre FCFA 500 et 1000 par jour pour les toutes petites détaillantes quiforment la grande majorité des vendeuses.

Coûts par marché(FCFA)

Afrique de l’Ouest Libreville

Postes Vivrier Manufacturé Vivrier Manufacturéde coûts

Gardien 33 113 100 166

Eau 25 25 100 100

Latrines 25 29 100 200

Nettoyage 17 8 50 -

Droit de place 25 93 500 1 000

Sous-location 17 150 666 -

Total charges 142 418 1 516 1 466

Chiffres d’affaires 3 000 16 666 20 000 40 000

La logique spatiale et l’organisation des marchés

La division entre commerces riches et pauvres com-mande l’organisation spatiale des marchés. Cettedynamique, qui a entraîné de profondes mutationsces dix dernières années dans la physionomie desmarchés, consiste en l’expulsion progressive desvendeurs de produits «pauvres» (vivriers) par lesvendeurs de produits «riches» (manufacturés). Cephénomène ne se limite pas au commerce de détailmais intéresse aussi le commerce de gros.

Aujourd’hui, les produits manufacturés occupent laplus grande partie de l’emprise des marchés et levéritable marché alimentaire s’exerce bien souventdans les rues autour du marché.

Les souhaits des commerçants à l’occasion d’un réaménagement du marché

Au-delà de la diversité des situations étudiées, il fautsouligner certaines préoccupations des usagers desmarchés.

Les souhaits des détaillants sont apparemment trèssimples.

En premier lieu, ils souhaitent avoir une place sur lemarché, ce qui est loin d’être acquis pour tous lesvendeurs selon leur statut et leur catégorie d’activité,

leur ethnie, leur nationalité, leur situation dans le sec-teur informel.

Les facteurs d’exclusion sont innombrables et jouentà plein dans la situation d’un réaménagement d’unmarché. Il ne faut pas masquer cette réalité-là.

En second lieu, s’ils ont une place, ils désirent pou-voir payer la redevance, ce qui est loin d’être acquispour les commerces les plus pauvres et les artisans.

Si, aujourd’hui, la plupart de ces marchés sont desmarchés polyvalents où chacun a malgré tout unechance d’entrer, l’augmentation des droits de placeconsécutive à un réaménagement, entraîne l’exclu-sion de ces commerces pauvres et les rejette vrai-semblablement à la périphérie immédiate du marché,voire, dans le cas des artisans, à la périphérie de laville, ce dont sont bien conscients de nombreuxacteurs de ces marchés.

Ensuite, ils veulent disposer d’un certain nombre deservices dont l’amélioration est demandée de façonunanime:

• la sécurité (marché clôturé, éclairage nocturne, ser-vice de police efficace);

• l’approvisionnement en eau;

• les équipements sanitaires: latrines et douches.

Enfin, ils désirent être dans un marché couvert. Laprotection contre la pluie et le soleil passe avant touteautre considération relative aux équipements devente.

Les besoins prioritaires exprimés par les grossistesde produits vivriers sont:

• la localisation sur un marché, étant donné que bonnombre d’entre eux exercent leurs activités sur lachaussée;

• des infrastructures et des superstructures conçuesde la manière la plus «simple» possible afin d’ajus-ter les coûts d’exercice sur le marché de gros àleurs marges réelles (et non supposées);

• des superstructures simples, que les grossistessont en général disposés à aménager et à financereux-mêmes ou en partie, selon un cahier descharges précis;

• l’amélioration des conditions de fonctionnement deleurs activités par la mise à disposition des

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quelques services réellement adaptés à leursbesoins;

• le choix du site d’implantation du marché de gros,question cruciale, en concertation avec les opéra-teurs concernés.

Les détaillants, comme les grossistes, demandent enoutre de façon insistante à être informés à l’avancedu contenu et des objectifs des projets de réaména-gement de marchés et être associés à la gestion et àl’organisation interne du marché futur.

Conclusions et recommandations

Informer et appuyer les autorités locales dans la mise en oeuvre d’une stratégie globale des marchés pour l’approvisionnement urbain

Les carences générales dans le secteur des marchésurbains entraînent des coûts sociaux, économiqueset politiques élevés pour la collectivité, tandis que lesautorités locales manquent d’éléments pour définirles interventions prioritaires: par quel marché com-mencer, quelle hiérarchie dans les actions, quels enseront les différents coûts, les différents impacts,etc.?

Il est par conséquent impératif d’appuyer les Autoritéslocales dans la mise en oeuvre d’une stratégie globa-le des marchés pour l’approvisionnement urbain sui-vant trois axes:

• élaboration des outils nécessaires à la prise dedécision;

• implication, responsabilisation et appui des Autori-tés locales;

• information et formation des Autorités locales.

Elaborer des outils facilitant la prise de décision

Les ressources à mettre en oeuvre sont rares et, parconséquent, il est primordial d’avoir une vision d’en-semble afin d’établir des priorités pour les actions àentreprendre. Les outils suivants doivent apporter lespremiers éléments indispensables à la prise de déci-sion en permettant de clarifier les objectifs attendusdes interventions dans le secteur des marchés et demettre à jour leur impact économique:

• l’étude des circuits d’approvisionnement des mar-chés et des pôles commerciaux urbains;

• le Schéma de développement urbain des marchés;

• l’étude de la création de marchés de gros.

Cette première phase doit fournir l’occasion de mettreen place l’indispensable processus de concertationavec les commerçants usagers de ces équipementssans lequel la réussite est loin d’être assurée.

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xii Aliments dans les villes: collection d’ouvrages - vol. 1

Présentation de l’auteur

Laurence Wilhelm est diplômée en sciencespolitiques de l’Institut universitaire des hautesétudes internationales (IUHEI, Genève) et ensociologie de l’Institut universitaire d’études dudéveloppement (IUED, Genève).

Elle travaille depuis 25 ans sur différents pro-blèmes relatifs au développement rural eturbain en Afrique. Après avoir enseigné pen-dant neuf ans à l’ IUED en sociologie du déve-loppement, effectué un séjour de recherche dedeux ans au Burkina Faso et mené parallèle-ment diverses études de consultation pour desorganismes internationaux (UNCTAD etUNRISD), elle travaille depuis 1981 commeconsultant indépendant en Afrique et enFrance. En Afrique, elle a réalisé de nom-breuses enquêtes socio-économiques enmilieu rural et urbain, en particulier sur les cir-cuits de commercialisation et de distributiondes produits alimentaires, et l’approvisionne-ment des villes. En France, elle a menédiverses études sur la fonction commerciale enrelation avec l’aménagement urbain descentres-villes ainsi que dans les quartiers endifficulté (politique de la ville).

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xiii4: Les circuits dÕapprovisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des march�s en Afrique et � Madagascar

Table des matières

RésuméPrésentation de l’auteurListe des siglesListe des tableauxListe des encadrés

Introduction

1. Les circuits d’approvisionnement et les marchés

1.1 Les circuits d’approvisionnement des villes et les acteurs1.1.1 Les produits vivriers: circuits marchands et non-marchands

1.1.1.1 L’auto-approvisionnement aujourd’hui en milieu urbain: une réponse à la crise1.1.1.2 Les circuits marchands fournissent l’essentiel de l’approvisionnement urbain en

produits vivriers1.1.2 L’organisation des circuits marchands indirects

1.1.2.1 Des fonctions commerciales spécifiques1.1.2.2 L’organisation des circuits marchands et mainmise sociale sur l’information

commerciale1.1.3 Le fonctionnement dans un environnement économique risqué: des stratégies et des

pratiques non concurrentielles1.1.4 Les acteurs des marchés: grossistes et détaillants

1.1.4.1 Les grossistes1.1.4.2 Les détaillantes des marchés

1.1.5 Les produits manufacturés et les denrées alimentaires de base (riz, farine, sucre)

1.2 Le secteur des marchés1.2.1 La place des marchés dans le secteur commercial urbain

1.2.1.1 Un secteur moderne de la grande distribution 1.2.1.2 Un secteur import-export animé principalement par des grands commerçants

nationaux organisés en réseaux1.2.1.3 Un secteur de la petite distribution formelle grafilisé1.2.1.4 Un secteur des marchés qui concentre l’essentiel de l’activité et du dynamisme

du secteur commercial informel urbain1.2.2 Les caractéristiques des marchés

1.2.2.1 Les marchés dont l’influence s’exerce sur la ville, le quartier ou les zones inter-médiaires

1.2.2.2 Les marchés «officiels», «administrés» ou «organisés» (suivant les appellationsen vigueur) par opposition aux marchés de rue ou spontanés

1.2.2.3 Les marchés polyvalents1.2.2.4 Les marchés urbains et les marchés villageois1.2.2.5 Les marchés diurnes et les marchés «de nuit»1.2.2.6 Les marchés provisoires et les emplacements réservés

1.2.3 La localisation et la répartition des marchés sur le territoire de la ville1.2.3.1 Du point de vue géographique1.2.3.2 Du point de vue de la population desservie1.2.3.3 La répartition en fonction du découpage administratif

1.2.4 Le rôle des marchés dans les circuits d’approvisionnement intra-urbains1.2.4.1 Les marchés d’approvisionnement et de redistribution1.2.4.2 Les marchés de consommation

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1.2.5 Les relations fonctionnelles entre marchés et pôles commerciaux: l’importance desmoyens de transport pour la redistribution

1.2.6 La situation actuelle des marchés: diagnostic technique, sanitaire et économique1.2.7 Le développement d’hypercentres

1.3 La problématique des marchés de gros1.3.1 Des situations diverses qui appellent des réponses adaptées1.3.2 Les caractéristiques des activités de gros dans le tissu urbain: lieux et modes de fonc-

tionnement1.3.2.1 Les produits vivriers1.3.2.2 Les marchandises générales et les denrées alimentaires de première nécessi-

té: une surconcentration d’entrepôts dans le centre-ville1.3.3 Les fonctions d’approvisionnement et de réexpédition

1.3.3.1 Les marchés de gros terminaux: une dominante, la fonction approvisionnement1.3.3.2 Des villes-carrefours assurant les fonctions de groupage pour la réexpédition1.3.3.3 La fonction réexpédition: un rôle moteur pour les grossistes importateurs de riz

et de denrées alimentaires1.3.4 La problématique de la création de marchés de gros

1.3.4.1 Le choix du site d’implantation1.3.4.2 Le regroupement des grossistes sur un marché de gros unique? Quelles incita-

tions?1.3.4.3 La gestion et la concertation1.3.4.4 L’importance de constituer des réserves foncières

2. Le fonctionnement et l’organisation des marchés urbains

2.1 Les aménagements et les équipements des marchés2.1.1 Les équipements publics: un bref rappel historique2.1.2 L’effectif et la densité des marchés2.1.3 Les installations de ventes et de stockage sur les marchés aujourd’hui

2.1.3.1 Des aménagements réalisés en grande partie par les commerçants eux-mêmes2.1.3.2 Des installations financées dans leur très grande majorité par les commerçants

eux-mêmes2.1.3.3 Des installations de vente en majorité ouvertes 2.1.3.4 Des «installations» ambulantes (tables individuelles et étalages au sol) qui ont

envahi tous les espaces interstitiels des marchés2.1.4 Les caractéristiques physiques de deux exemples types de marchés

2.1.4.1 Les marchés «centre-commerciaux»2.1.4.2 Les marchés «zone»

2.2 La gestion des marchés, les statuts et les modes d’occupation par les commerçants2.2.1 La gestion des marchés

2.2.1.1 La gestion et l’organisation des marchés2.2.1.2 La contribution des marchés aux finances locales

2.2.2 Les statuts et les modes d’utilisation des installations de vente: des enjeux de pouvoir2.2.2.1 La sous-location et la revente de pas-de-porte2.2.2.2 La cession2.2.2.3 La multipropriété2.2.2.4 Des installations gélées par des particuliers pour leurs besoins de stockage2.2.2.5 Le partage des installations

2.2.3 Les dysfonctionnements2.2.3.1 Des marchés vides à l’intérieur2.2.3.2 Les magasins habitations: les marchés comme lieux de repli

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2.3 Les vendeurs et l’activité économique2.3.1 Les comportements des vendeurs et les stratégies commerciales: les effets de la crise2.3.2 L’activité économique sur les marchés: commerces «riches» et commerces «pauvres»

2.3.2.1 Les commerces de détail2.3.2.2 L’artisanat et les services2.3.2.3 Les commerces de gros

2.4 L’organisation des marchés et les dynamiques spatiales à l’oeuvre2.4.1 Des services inexistants ou largement insuffisants palliés par les vendeurs

2.4.1.1 La sécurité et le gardiennage2.4.1.2 L’approvisionnement en eau: marchands d’eau et branchements privés2.4.1.3 L’entretien, le nettoyage et l’enlèvement des ordures2.4.1.4 Les équipements sanitaires2.4.1.5 Un besoin permanent sur tous les marchés: le stockage des invendus; un ser-

vice adapté: le stockage à façon2.4.1.6 Un service omniprésent sur tous les marchés: la restauration

2.4.2 Le coût de l’exercice de l’activité sur les marchés2.4.2.1 Les droits de place2.4.2.2 Le récapitulatif des coûts par marché

2.4.3 La dynamique d’occupation spatiale2.4.3.1 La division entre commerces riches et pauvres commande à l’organisation spa-

tiale des marchés2.4.3.2 Le refoulement des activités de gros de produits vivriers

2.5 Les souhaits des vendeurs des marchés

3. Conclusions et recommandations

3.1 Les aspects-clés de la situation actuelle du secteur des marchés: des coûts économiques éle-vés3.1.1 Les coûts directs pour la commune3.1.2 Les coûts indirects pour la collectivité

3.2 Le secteur des marchés: recommandations pour une stratégie globale3.2.1 Un impératif: informer et appuyer les Autorités locales dans la mise en oeuvre d’une

politique globale des marchés pour l’approvisionnement urbain3.2.2 Elaborer des outils facilitant la prise de décision

3.2.2.1 L’étude des circuits d’approvisionnement des marchés et des pôles commer-ciaux urbains

3.2.2.2 Le Schéma de développement des marchés urbains3.2.2.3 La création de marchés de gros

3.3 En amont et en aval du secteur des marchés: l’amélioration des circuits d’approvisionnementet de redistribution

Notes de bas de page

Bibliographie

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Liste des sigles

BIC Bénéfices industriels commerciauxCFAO Compagnie française de l’Afrique occidentaleCFD Caisse française de développementCIRAD Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développementFCFA Francs de la communauté financière africaineSADA Système d’approvisionnement et de distribution alimentaireSCOA Société commerciale pour l’Afrique occidentaleSEM Société d’économie mixte

Liste des tableaux

1: Marchés centraux en Afrique et à Madagascar2: Effectif des installations et des vendeurs. Nombre moyen de vendeurs par installation3: Répartition des installations par type4: Répartition des installations de vente en installations permanentes (fixes) et mobiles5: Répartition des installations de vente en installations couvertes et non couvertes6: Budget des collectivités locales en Afrique centrale et de l’Ouest7: Chiffres d’affaires journaliers en Afrique centrale et de l’Ouest8: Coût de l’exercice d’activité sur les marchés

Liste des encadrés

1: Importance de quelques marchés de gros dans différentes villes d’Afrique et de Madagascar

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Introduction

Si la ville est un acteur-clé du développement socialet économique de l’Afrique actuelle, citadins et pay-sans ont longtemps été opposés dans une vision trèsréductrice de leurs intérêts et de leurs compétencesque ce soit par les acteurs nationaux ou internatio-naux.

L’approvisionnement des villes met en évidence l’ex-traordinaire dynamisme dont font preuve les acteursurbains comme ceux des campagnes, leurs commu-nautés de dessins et aussi les fortes contraintes quis’exercent sur la réalisation quotidienne de leurs acti-vités.

Comment améliorer la consommation des citadins enquantité, régularité, qualité et prix, et comment, dansun juste retour des choses, cette amélioration se tra-duira-t-elle par une meilleure rémunération de l’effortpaysan? Tel est l’enjeu aujourd’hui de l’approvision-nement et de la distribution alimentaires des villes enAfrique, tel est, par conséquent, l’enjeu de l’arbitragepublic.

Cette contribution comprend trois parties: la premièreexamine le cadre général de l’approvisionnement desvilles et traite du rôle et des fonctions des marchésurbains en Afrique subsaharienne et à Madagascar.La seconde se concentre exclusivement sur l’analysede l’organisation et du fonctionnement internes desgrands marchés d’approvisionnement et de redistri-bution. En conclusion sont élaborées des recomman-dations pour la mise en oeuvre d’une stratégie globa-le du secteur des marchés.

L’analyse qui suit est réalisée à partir des résultats etdes conclusions d’études socio-économiques quel’auteur a menées dans le cadre de diverses missionsainsi qu’au cours d’études de projets de réhabilitationde marchés financés par la Coopération française etla Caisse française de développement (CFD) (WIL-HELM, 1994). La présente étude a été actualisée etremaniée à partir de données complémentaires col-lectées par l’auteur depuis 1994.

Les éléments chiffrés qui sont donnés (coûts del’exercice sur les marchés, droits de place, etc.)datent pour la plupart d’avant la dévaluation. Les don-nées complémentaires recueillies récemment sur lescoûts de l’exercice de l’activité sur les marchés indi-quent qu’ils n’ont pas changé substantiellement.

1Les circuits d’approvisionnement et les marchés

1.1 Les circuits d’approvisionnementdes villes et les acteurs

En distinguant produits vivriers et produits manufac-turés, on présentera dans cette partie le fonctionne-ment des circuits d’approvisionnement et les caracté-ristiques de leurs acteurs urbains: les grossistes etles détaillants.

Alors que les études sur le commerce des produitsmanufacturés restent extrêmement rares, il existeune abondante littérature sur les systèmes de com-mercialisation des produits alimentaires, vivriers enparticulier. C’est la raison pour laquelle on est limité,pour ces produits, à faire le point sur les acquis de larecherche.

On soulignera, en particulier, le rôle déterminant de lamainmise sociale sur l’information commercialecomme facteur-clé de différenciation dans l’organisa-tion et le fonctionnement des systèmes d’approvi-sionnement, et l’importance des pratiques non con-currentielles en tant que réponses économiques à unenvironnement imparfait.

1.1.1Les produits vivriers: circuits marchands et non-marchands

L’approvisionnement des citadins des villes subsaha-riennes est assuré conjointement par des circuitsmarchands et non-marchands. Parmi les premiers,on a coutume de distinguer les circuits directs danslesquels le producteur vend directement au consom-mateur, et les circuits indirects, qui font intervenir unnombre plus ou moins grand d’intermédiaires. Par cir-cuits non-marchands, on fait référence aux diversesformes de l’auto-approvisionnement (auto-productionet échanges intra-familiaux).

1.1.1.1L’auto-approvisionnement aujourd’hui en milieu urbain: une réponse à la crise

Au début des années 70, l’existence d’activités agri-coles dans les capitales africaines était mise en rela-tion par les géographes avec le bas niveau d’urbani-sation des pays et la faible capacité intégratrice deleurs centres urbains. Vingt ans plus tard, malgré lapression du foncier dans des métropoles dépassantparfois le million d’habitants, on constate non seule-ment la permanence d’activités agricoles urbaines

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2 Aliments dans les villes: collection d’ouvrages - vol. 1

mais aussi leur dynamisme soutenu, en particulierdans le secteur du maraîchage.

L’agriculture urbaine - entendue au sens large, à lafois intra-urbaine et surtout périurbaine - recouvredes situations très différentes du point de vue de l’ap-provisionnement alimentaire. Parmi les ménages pra-tiquant des activités agricoles on ne connaît pas laproportion de ceux qui assurent toute, ou l’essentielde leur consommation avec leurs propres cultures(auto-production), ni la proportion de ceux qui sontdes acheteurs nets, leur production ne couvrant quetrès imparfaitement leurs besoins de base en grandsproduits vivriers.

On sait, toutefois, que les activités agricoles, qu’ils’agisse de parcelles cultivées à proximité de la villeou du retour au village de certains membres du grou-pe familial au chômage, représentent aujourd’hui nonseulement une stratégie de rechange en matière derevenus mais parfois aussi un moyen de survie pourdes ménages urbains durement touchés par la crise.

C’est, par conséquent, dans ce contexte qu’il fautanalyser aujourd’hui le rôle des échanges alimen-taires intra-familiaux dans l’approvisionnement descitadins. Entre le village et la ville, depuis longtempsles produits alimentaires circulent dans les deuxsens: du village à la ville à la récolte, en sens contrai-re pendant la période de soudure et pendant «lesmauvaises années».

Le recours accru à l’auto-approvisionnement, qu’ils’agisse des cultures urbaines ou périurbaines oudes échanges intra-familiaux, est attesté par diffé-rentes sources et par nos propres interlocuteurs: ilapparaît bien comme l’une des réponses à la dégra-dation des conditions de vie en milieu urbain.

1.1.1.2Les circuits marchands fournissent l’essentiel de l’approvisionnement urbain en produits vivriers

Souples, efficaces, très structurés et surtout organi-sés, tels sont décrits les systèmes privés de com-mercialisation des produits vivriers (ARDITI, 1975;CIRES, 1980; COUTY et BARRIS, 1977; YUNG,1983). Ils ont fait la preuve de leur capacité d’assurer,sans heurt important, l’approvisionnement desgrandes métropoles, et cela même dans les condi-tions les plus difficiles. Ils ont su s’adapter en perma-nence aux changements de la demande alimentaireurbaine et ont, en retour, provoqué nombre de muta-tions dans les systèmes de production agricole.

Les circuits commerciaux, loin d’être perçus commeun facteur d’appauvrissement du monde rural(approche caractéristique de nombreux travaux des

années 70), sont plus souvent analysés aujourd’huicomme la principale sollicitation externe au dévelop-pement des campagnes.

La permanence des circuits directs

La commercialisation directe du producteur auconsommateur est un fait encore observée sur lesmarchés de toutes les villes africaines.

Le rôle et l’importance de ce circuit varient fortementselon les produits, les saisons culturales, les types demarchés urbains, et le niveau de développement dela fonction commerciale dans le pays.

Il concerne prioritairement les produits maraîchersdes cultures intra et périurbaines, moins fréquem-ment, les autres produits vivriers. Les zones d’appro-visionnement sont rarement distantes de plus detrente kilomètres de la ville, et au-delà, la fonctioncommerciale prend généralement le relais, saufsituation exceptionnelle. Les ventes de produitsvivriers en ville par les producteurs - ou plus généra-lement par les femmes de ceux-ci - s’effectuent prin-cipalement après la récolte et sur les marchés dequartier, beaucoup plus rarement sur les marchéscentraux. Elles ne se pratiquent d’ailleurs pas que surles marchés, la vente de porte à porte étant courantedans les quartiers périphériques, proches des zonesde culture.

Les apports par vendeur représentent nécessaire-ment de très faibles quantités, mais le volume globalpeut être significatif: en 1988, Chaleard soulignaitcomme un fait marquant dans l’approvisionnementde Bouaké en manioc frais, l’importance des ventesdirectes réalisées par les femmes de planteurs (plusdu tiers, semble-t-il).

Les circuits indirects:un rôle majeur dans l’approvisionnement urbain

Alors que «crises agricoles et crises alimentaires»(CNRS, 1987) se succèdent dans la plupart des paysafricains compromettant la sécurité alimentaire despopulations rurales, on constate que les circuits pri-vés, considérés dans leur dynamique historique(GUYER, 1991), ont montré leur capacité à assurersur le long terme et sans trop d’à-coups l’approvi-sionnement de villes à la forte croisssance démogra-phique (LEPLAIDEUR et MOUSTIER,1991).

Il est vrai que cet approvisionnement est souvent réa-lisé à un coût élevé, et ce, tant en raison descontraintes s’exerçant sur les conditions de la pro-duction agricole qu’en raison de celles propres auxsystèmes privés de commercialisation. La politiqued’importations de biens de première nécessité - en

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34: Les circuits d’approvisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchés en Afrique et à Madagascar

particulier de riz - a répondu moins au souci desAutorités de se prémunir contre les risques de pénu-rie urbaine qu’à celui de garantir le maintien de lapaix sociale en permettant de ravitailler à prixmodiques les «segments les plus vulnérables desconsommateurs urbains».

Dans les pays sahéliens, quand bien même lesOffices céréaliers ont été appuyés dans leurs activi-tés par des aides substantielles, leurs achats decéréales locales n’ont jamais représenté que de trèsfaibles tonnages. L’essentiel des céréales qu’ils ontfourni aux populations urbaines - et encore s’agissait-il de certaines catégories très minoritaires - a consis-té en maïs, sorgho ou riz importés. En définitive, lescircuits privés de commercialisation ont assuré, enquantité et en régularité, l’approvisionnement de latrès grande majorité des consommateurs des capi-tales sahéliennes et ce, même dans les pires condi-tions.

D’une manière générale, les interventions autoritairesdes Etats dans les circuits de commercialisation ontété plus efficaces pour faire disparaître les produitsdes étals que les sécheresses, les inondations ou lesguerres (l’approvisionnement de N’Djamena encéréales n’a jamais cessé, même lorsque la guerrecivile transforma la capitale en champ de bataille)(ARDITI, 1993). Nombreux sont les exemples demétropoles dont les habitants ont survécu grâce à lafaculté des systèmes privés d’organiser des circuitsparallèles d’approvisionnement qui ont permis decompenser, et surtout de suppléer au rationnementalimentaire organisé par les Autorités (Antananarivo,ou Conakry, par exemple).

Ainsi, les circuits privés d’approvisionnement ont nonseulement réussi à organiser des flux réguliers surles villes en produits vivriers de base (céréales, tuber-cules, féculents) qui composent encore une trèsgrande part de l’alimentation urbaine domestique,mais ils ont su aussi s’ajuster aux changements decette demande et répondre à celle de nouveaux sec-teurs tels que la restauration populaire, la fabricationde plats cuisinés, et les filières de transformation arti-sanales agroalimentaires: on relève, par exemple, ledéveloppement remarquable des filières maraîchèresurbaines, périurbaines et même internationales, celuide la commercialisation de l’igname précoce commevariété de «luxe», des circuits de commercialisationet de transformation du manioc pour la fabrication del’attiéké, et du sorgho germé pour la fabrication de labière de mil.

1.1.2 L’organisation des circuits marchands indirects

1.1.2.1Des fonctions commerciales spécifiques

En amont de la chaîne de commercialisation, on n’ob-serve pas d’intégration de la production par le com-merce.

Des cas existent, certes, de grands commerçantsurbains mettant en valeur d’importantes exploitationsagricoles à l’aide d’une main-d’oeuvre salariée. Mais,dans ces exemples qui concernent d’ailleurs toujoursles zones soudano-sahéliennes, la finalité estpresque toujours domestique (l’approvisionnementdu groupe familial et du vaste réseau de dépendants)et secondairement commerciale (ventes des excé-dents).

La situation inverse est fréquente. Ainsi des produc-teurs de zones mal desservies par les commerçantspeuvent se grouper pour affréter un véhicule, desplanteurs à la tête d’exploitations produisant plu-sieurs dizaines de tonnes de tubercules peuventacheter un camion pour maîtriser les circuits de gros,etc. Ces tentatives, nombreuses, restent très épiso-diques et se soldent souvent par des échecs. Si l’ac-tivité de commercialisation devient régulière, c’estgénéralement parce que le producteur s’est spéciali-sé dans le convoyage et la vente de ses récoltes etde celles d’autres exploitants, accédant de ce fait austatut de «commerçant-exploitant».

En aval, quand la distribution jusqu’au consommateurn’est pas organisée seulement par les détaillantesmais aussi par les artisans de la transformationagroalimentaire, meuniers, restaurateurs des gar-gotes, préparatrices des plats cuisinés, etc., le travaildes détaillantes se spécialise. Par exemple, la redis-tribution intermarchés est assurée exclusivement parles détaillantes.

L’approvisionnement des villes en produits vivriersest donc organisé par des grossistes dont le métierspécifique recouvre plusieurs opérations: la prospec-tion, l’achat, le groupage des produits, leur collecte,l’expédition, le transport et la mise sur les marchés.

Ces opérations peuvent être assurées par des agentsdifférents, relativement spécialisés, ou par un seul etmême agent, seule la fonction transport étant alorsremplie par un intervenant spécialisé.

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4 Aliments dans les villes: collection d’ouvrages - vol. 1

1.1.2.2L’organisation des circuits marchands et mainmisesociale sur l’information commerciale

La façon dont se réalise la mainmise sociale sur l’in-formation commerciale est un élément-clé de diffé-renciation dans l’organisation des circuits d’approvi-sionnement.

Le commerce à moyenne et longue distance suppo-se en effet un réseau d’informations rassemblant desdonnées sur la production, sur la demande quantita-tive et qualitative, et sur celui des routes. Comme lesouligne Bredeloup (1989): «Il ne suffit pas d’être pré-sent dans la chaîne de distribution pour avoir uneconnaissance précise et actualisée de la situation.Chaque maillon détient une information partielle etpartiale. De façon à maîtriser l’information, il convientde se déplacer physiquement tout au long du circuitou bien d’avoir intégré dans son organisation desagents spécialisés».

L’existence de réseaux anciens de commercialisa-tion, les trajectoires migratoires des commerçantsurbains, leurs relations avec leurs zones d’origine etleur type d’implantation dans le pays, leur essaimagedans des villes relais sur le plan national et interna-tional, expliquent le développement de fonctionscommerciales spécialisées dans certains circuitsd’approvisionnement des villes, indépendamment duproduit traité.

On peut distinguer deux formes principales d’organi-sation des circuits d’approvisionnement:

• dans le premier cas, l’agent principal de l’approvi-sionnement, le grossiste collecteur, est obligé de sedéplacer lui-même le long du circuit, assurant la plu-part des opérations nécessaires à la circulation duproduit: prospection, collecte, groupage, convoya-ge, mise sur le marché (cette dernière opérationétant parfois abrégée par les «grossistes assis» surle marché terminal de distribution). Ce grossiste estpar conséquent relativement spécialisé dans unproduit et une zone d’approvisionnement;

• dans le second cas, le grossiste collecteur est insé-ré dans un réseau marchand qui, grâce à la circula-tion des flux d’information et des flux financiersentre ses membres permet, en démultipliant cesopérations dans l’espace et le temps, une maîtrisebien supérieure des risques et des contraintes inhé-rents au commerce des produits vivriers. La gammede produits sur lesquels le grossiste intervient estalors beaucoup plus diversifiée au gré des opportu-nités commerciales: la commercialisation des pro-duits manufacturés et des denrées alimentaires debase (riz, farine, sucre) complète celle des produits

vivriers et représente souvent une composante dufret retour entre correspondants.

Les systèmes d’approvisionnement des villes sontcaractérisés par la coexistence de différents types decircuits et de réseaux, sans que l’on puisse toujourssaisir avec précision leurs articulations dans le tempset dans l’espace, leurs relations exactes de concur-rence, de complémentarité ou de dépendance versusdomination.

1.1.3Le fonctionnement dans un environnement économique risqué: des stratégies et des pratiques non concurrentielles

Dans le commerce des produits vivriers, le niveauélevé d’atomisation des acteurs, la faiblesse relativedes marges, compte tenu de la très forte dispersionde l’offre agricole et de l’importance du temps impro-ductif, les volumes limités traités par la plupart desgrossistes urbains, et le faible montant de capitalnécessaire au démarrage dans ce type d’activité, ontsouvent fait conclure à l’existence d’un systèmeouvert fonctionnant de façon «plutôt concurrentielle»en dépit de certaines «imperfections du marché».

Les travaux de recherche actuels, en mettant l’accentsur l’analyse des stratégies commerciales et du com-portement des acteurs, ouvrent de nouvelles pers-pectives dans la compréhension du fonctionnementdes systèmes d’approvisionnement. Pour la plupart,elles relèvent l’importance des comportements anti-concurrentiels mis en oeuvre pour prévenir lesrisques et l’instabilité des marchés.

L’environnement économique du commerce des pro-duits vivriers se caractérise par un niveau élevé derisques et d’incertitudes: en amont, il s’agit desrisques dus aux aléas de la collecte compte tenud’une offre agricole dispersée et irrégulière, aumanque d’information sur la disponibilité des pro-duits, aux insuffisances de l’offre de transport, à sonirrégularité et à son prix. En aval, les risques décou-lent de la conjoncture du marché, de la concurrencepermanente de nouveaux arrivants, des fluctuationsdes prix et de la demande sous l’effet de différentsfacteurs non prévisibles. L’environnement institution-nel, quant à lui, se caractérise par l’existence de pra-tiques réglementaires inadaptées et tatillonnes, detaxations abusives et fréquemment arbitraires, etc. Aces différentes contraintes s’ajoutent celles propresaux commerçants - de capital, d’accès au crédit -,pour ne citer que les deux plus importantes.

Ces contraintes affectent, par conséquent, tous lescommerçants, façonnent leurs comportements, orien-tent leurs choix et fixent leurs stratégies.

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Ces stratégies revêtent des formes identiques, quelsque soient les produits ou les types d’organisationdes circuits (collecteur indépendant ou inséré dansun réseau marchand): ce sont des pratiques d’achatet de vente basées sur des relations personnaliséespour fidéliser à la fois les vendeurs et les acheteurs,des contrats et des commandes anticipées pourréguler l’approvisionnement, des systèmes de créditpour sécuriser l’approvisionnement et garantir l’écou-lement des marchandises, la constitution d’associa-tions entre commerçants visant à limiter la concur-rence sur les marchés d’achat ou sur les marchés devente, et à restreindre l’accès au crédit des «outsi-ders», etc.

Les recherches menées par l’IRAT/CIRAD sur lesfilières maraîchères en Afrique centrale sont particu-lièrement intéressantes à cet égard1. Dans ce secteurmarqué par une très grande variabilité des flux et desprix, on s’aperçoit que plus la mise de fonds initialenécessaire est faible, plus facile est, théoriquement,l’entrée dans le commerce, et plus fortes sont les pra-tiques des acheteuses collectrices visant à limiter laconcurrence de façon à garantir un niveau d’activité àpeu près régulier. L’accès sélectif des nouvellesvenues aux réseaux de crédit est au coeur de cespratiques.

A une toute autre échelle, un certain nombre d’étudesanciennes (SAUL, 1985; WILHELM, 1994) et plusrécentes (ARDITI, 1993) sur le commerce descéréales en zone soudano-sahélienne soulignent, àcertains moments-clé, le rôle que jouent les pôlesd’accumulation représentés par les grands grossistesstockeurs hors marchés. Les études remettent encause l’opinion généralement partagée (depuis lesrapports Berg) de systèmes commerciaux concurren-tiels.

En définitive, on remarque que les grossistes desmarchés constituent des communautés dont l’accèsest relativement fermé, soudées par de forts lienssociaux et ethniques dans lesquels la concurrencejoue peu, ce qui permet la permanence et la stabilitéde leurs activités.

La prolifération d’intermédiaires occasionnels peutcréer l’illusion de marchés vivriers «ouverts»; en réa-lité, la durée de vie très limitée de leur commerce etles faillites rapides et fréquentes qui les sanctionnent,montrent à l’évidence que «le jeu économique restele plus souvent déterminé par le système social».

On en voit les conséquences sur le processus de for-mation des prix: les grands marchés urbains sur les-quels s’exerce l’essentiel des activités de gros d’ap-provisionnement ne sont pas forcément des lieux deformation des prix (au sens de la rencontre entre offre

et demande); ceux-ci se fixent en amont, par le jeudes rapports de force et de négociation entre le pro-ducteur et le commerçant et, en aval, entre lesdétaillantes et les acheteurs, suivant les relations decrédit et de confiance nouées et, en dernier ressort,suivant le pouvoir d’achat des consommateursurbains.

1.1.4 Les acteurs des marchés:grossistes et détaillants

1.1.4.1Les grossistes

Les grossistes des marchés urbains sont pour la plu-part des grossistes collecteurs traitant des quantitéslimitées de produits.

Dans le commerce des céréales, en particulier pourles produits secs et les tubercules, d’après nosenquêtes sur les marchés de Ouagadougou et deBobo-Dioulasso, la majorité des grossistes commer-cialise en moyenne entre 200 et 300 tonnes par an.Une minorité (moins d’une dizaine pour les deux prin-cipales villes du pays) peut intervenir sur un millier detonnes par an2.

A N’Djamena, sur le Marché au mil, les ordres degrandeur sont sensiblement les mêmes: sur 70 gros-sistes environ, quelques six commerçants seulementcommercialisent entre 600 et 1 000 tonnes par an, laplupart ne dépassant pas les 300 tonnes.

L’enquête générale sur les grossisses en Côted’Ivoire permet de se faire une idée du volume moyend’activité de ces commerçants dans des villes assezdifférentes: par exemple, sur les marchés d’Abidjan,les grossistes de produits secs et féculents traitentmoins d’une tonne par jour, en moyenne entre 0,5 et0,8 tonne.

En revanche, les grossistes expéditeurs de la ville deBouaké, principal centre de redistribution et d’expédi-tion des produits vivriers pour tout le pays, traitententre deux et trois tonnes par jour, en moyenne.

A Madagascar, les grossistes du marché d’Isotry netraitent que rarement plus de 0,4 tonne par jour, signede perte de vitesse de ce marché alors que, d’aprèsnos enquêtes, ceux d’Andravoahangy et surtoutd’Anosibe commercialisent entre 0,8 et 2 tonnes parjour en moyenne.

Cette moyenne de une tonne par jour sur l’annéedans le commerce des produits secs, des tuberculeset des fruits (produits majoritairement commercialiséspar les grossistes hommes) donne une idée assez

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concrète du volume d’activité de la majorité des gros-sistes exerçant sur les marchés de distribution termi-nale des grands centres urbains.

La maîtrise des débouchés est le principal souci desgrossistes car la rapidité de rotation des expéditionsen dépend. Ils se déplacent peu, ne possèdent pasde véhicule, utilisent les services de collecteurs ouachètent aux paysans qui se rendent sur les marchésen convoyeurs de leurs récoltes.

La collecte étant longue et coûteuse, les grossistescherchent à limiter au maximum leurs dépenses etleur temps. Le coût du stockage et du transport, ainsique les risques de pertes impliquent que l’écoule-ment soit d’autant plus rapide que la collecte a étélongue.

En ce qui concerne les produits périssables (produitsmaraîchers) et semi-périssables (manioc, féculents),les quantités traitées par les grossistes collecteurssont beaucoup plus variables.

Sur de très grands marchés comme celui de la villede Dakar, les grossistes collecteurs de produitsmaraîchers traitent également environ une tonne parjour. Mais, l’essentiel de ces opérateurs commerciali-se des volumes nettement plus limités, entre 300 et500 kg par jour.

Ces grossistes collecteurs sont en général en contactétroit avec les zones de production.

Les femmes sont en nette majorité sur les marchés etsont spécialisées dans les produits périssables:bananes, manioc, produits maraîchers. Elles assu-rent la recherche du produit (et souvent sa récolte),son groupage, la recherche du véhicule et leconvoyage du chargement.

Convoyeuses de produits fragiles, ne disposant pasde réseau de commercialisation ni souvent de struc-tures d’accueil, elles cherchent à assurer la sécuritéde leurs débouchés par des réseaux courts, intégrantdétaillantes, gros consommateurs et transforma-trices.

Le risque de leur profession est élevé, les opérateursoccasionnels de ce créneau venant nombreux enpleine période de commercialisation les concurrencerdans leurs zones d’achat.

Ces collectrices manquent d’information sur lademande ponctuelle, font face à la faible solvabilitédes clients (les détaillantes) et doivent financer unepartie de la filière en aval pour fidéliser leur clientèle.

Les caractéristiques de ces circuits concourent àrendre la revente et la marge bénéficiaire aléatoireset irrégulières.

En conclusion:

• dans leur quasi-totalité, les grossistes des marchésne possèdent pas de véhicule et sont dépendantsdes transporteurs;

• étant donné la faiblesse de leur capital commercial,la stratégie de vente de ces intervenants est guidéepar une recherche de rapidité de la circulation descapitaux et donc de circulation des stocks;

• les coûts élevés de commercialisation sont large-ment grevés par les frais de transport;

• dans le commerce de gros des produits vivriers, lesmarges nettes sont limitées;

• la productivité de l’activité et du travail est trèsfaible.

1.1.4.2Les détaillantes des marchés

L’ activité des détaillantes est principalement condi-tionnée par l’extrême faiblesse de leur capital com-mercial. Les quantités pouvant être journellementcommercialisées sont de ce fait toujours très limitées.

En conséquence, la détaillante est fortement dépen-dante des possibilités de crédit accordées par legrossiste, ce qui l’empêche de jouer entre plusieursfournisseurs selon les saisons ou l’état du marché,pour pouvoir obtenir le «meilleur prix».

Le transport urbain intermarché représente un coûtparticulièrement élevé dans l’ensemble des frais deredistribution, et ceci en dépit du développementdans toutes les grandes villes de moyens de trans-port (mécanisés et surtout non mécanisés: pousse-pousse, charrette, etc.) adaptés précisément auxfaibles quantités commercialisées par les détaillantesde produits vivriers. Par conséquent, une bonne par-tie du transport se fait encore par portage (soit par ladétaillante elle-même, soit par porteur), ce qui limiteencore les quantités pouvant être commercialisées.

A la vente, l’activité de la détaillante est soumise àune double contrainte: celle de la concurrence d’in-nombrables autres marchandes, en particulier detoutes les vendeuses à la sauvette, et celle des pos-sibilités financières réduites de sa clientèle.

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1.1.5Les produits manufacturés et les denrées alimentaires de base (riz, farine, sucre)

Dans le domaine des produits manufacturés, l’appro-visionnement des marchés, principalement à partirdes circuits de la fraude, est le fait marquant de lasituation actuelle.

En effet, le recours massif aux importations fraudu-leuses a permis de satisfaire les besoins des citadinsalors même que les circuits de distribution, mis enplace par des industries nationales érigées à la gran-de époque de la substitution des importations (le sec-teur textile principalement mais aussi les industriesagroalimentaires et le petit tissu manufacturier natio-nal), se sont révélés incapables de s’adapter en prixet en qualité à la demande de ménages paupérisés.

L’essentiel de l’approvisionnement urbain en mar-chandises générales et en denrées alimentaires debase a longtemps dépendu des réseaux marchandstrès structurés des grands patrons de commerce.S’ils gardent la maîtrise de certains grands secteurs -denrées de base (riz, en particulier), mais aussi maté-riaux de construction -, on assiste, depuis la fin desannées 80, à la prolifération de nouveaux interve-nants dans les circuits d’approvisionnement de pro-duits manufacturés: ce sont tous «les exclus des sys-tèmes productifs villageois et urbain à la recherched’un hypothétique revenu dans la petite entreprisecontrebandière».

En amont, dans les opérations d’approvisionnement,les recherches actuelles3 (LABAZEE, 1993) mettenten évidence les phénomènes de concurrence qui sedéveloppent entre ces différents circuits et leur réper-cussion en matière de partage de la rente frontalière.En aval, compte tenu de la multiplicité des canauxpar lesquels les produits manufacturés arriventaujourd’hui sur les marchés, il faut souligner aussil’exacerbation de la concurrence entre les vendeursréguliers payant patente et droit de place et lesinnombrables colporteurs ambulants démarchant lesconsommateurs urbains. On ajoutera que, dans untel contexte, il est extrêmement difficile d’estimer lesmarges actuelles des commerçants des marchés deproduits manufacturés.

C’est le circuit des denrées alimentaires (riz, farine,etc.) qui a offert les plus grandes opportunités d’ac-cumulation rapide de richesses ces dernières annéesen Afrique. En conséquence, la formation et le contrô-le de la répartition de la rente interne et/ou frontalière(réexportations non contrôlées) ont fait l’objet desconflits les plus vifs entre grands commerçants etfonctionnaires.

C’est dans le circuit de commercialisation des den-rées importées que l’on observe les investissementsles plus élevés en capacités de stockage (magasinset boutiques divers sur les marchés) et véhiculeslourds (semi-remorques).

Ce circuit occupe dans le tissu urbain des espacestoujours bien délimités et d’une grande lisibilité -zones de concentration d’entrepôts autour des mar-chés ou dans certains quartiers, boutiques bienconstruites sur les marchés - et dont le statut d’occu-pation est pour l’essentiel bien défini (bail, location,propriété titrée), ce qui en garantit la pérennité,contrairement à la précarité caractéristique des ins-tallations de grossistes de produits vivriers.

Les circuits d’approvisionnement des denrées ali-mentaires sont encore dominés, comme on l’a noté,par un groupe de quelques grands importateurs oudistributeurs agréés (dans les pays où le secteur del’importation est contrôlé par l’Etat) coiffant une pyra-mide, non seulement de nombreux grossistes régio-naux et urbains, mais également de semi-grossistesdes marchés. La filière de la distribution repose surune cascade de crédits entre opérateurs. La rotationdes stocks est particulièrement rapide, à tous leséchelons, ce qui permet un rapide amortissement desinvestissements.

1.2Le secteur des marchés

1.2.1 La place des marchés dans le secteur commercial urbain

Le secteur commercial de l’approvisionnement desvilles d’Afrique subsaharienne peut être décrit suc-cinctement comme suit:

1.2.1.1 Un secteur moderne de la grande distribution

Il se compose essentiellement des filiales de grandessociétés commerciales étrangères (par exemple, dela Société commerciale pour l’Afrique occidentale(SCOA), de la Compagnie française de l’Afrique occi-dentale (CFAO), etc.). Depuis les années 60, ellessont intervenues principalement dans deux direc-tions:

• l’importation et la distribution de produits spéci-fiques (biens d’équipement, outils agricoles, piècesdétachées, matériaux de construction, véhicules)dont les Etats, par le biais des sociétés publiques oudes grands projets d’aménagement, ont été les prin-cipaux acheteurs;

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• la distribution de produits de consommation couran-te grâce à l’ouverture, dans la plupart des villes afri-caines, de supermarchés et supérettes fréquentésuniquement par une clientèle aisée. Ce secteur aéprouvé de grandes difficultés du fait de la criseéconomique et de la concurrence de plus en plusaiguë des importations frauduleuses de produitsmanufacturés.

D’autres opérateurs étrangers ou nationaux ontouvert, à leur suite, dans la plupart des grandes villesafricaines, des supermarchés et des supérettes dontles caractéristiques en matière de produits (essentiel-lement importés, même pour les produits frais) et declientèle sont semblables. On n’observe pas pour lemoment un réel développement de ce secteur dansles villes.

1.2.1.2Un secteur import-export animé principalementpar des grands commerçants nationaux organisésen réseaux

Ce secteur fournit aujourd’hui à la population la plusgrande partie de son approvisionnement en produitsalimentaires de première nécessité et en produitsmanufacturés.

Ce secteur est issu des anciens circuits marchands àlongue distance qui ont façonné l’organisation deséchanges en Afrique depuis la période pré-coloniale.Organisant à l’origine les échanges entre des airesde production complémentaires (produits de la forêtcomme la cola; contre produits de la zone soudano-sahélienne comme le natron, le poisson séché, lebétail; etc.), ces échanges se sont ensuite accruspendant la période coloniale pour répondre aux exi-gences de ravitaillement des troupes et des villesnaissantes (céréales, viande, oléagineux principale-ment). Progressivement, les marchands africains ontsaisi les nouvelles opportunités commerciales de lacollecte des «produits du cru» (karité, arachide, huilede palme, etc.), d’abord comme sous-traitants desgrands comptoirs et des libano-syriens, ensuite pourleur propre compte, comme exportateurs.

Les grands commerçants d’aujourd’hui sont très sou-vent les descendants de ces anciennes lignées mar-chandes. Ils sont organisés en réseaux solidementstructurés, reposant à la fois sur des rapports deparenté et de clientèle. Le «capital relationnel», end’autres termes, le nombre de dépendants, qui peutêtre mobilisé à leur profit par ces «patrons de com-merce» est une condition-clé de leurs stratégies com-merciales et donc de leur réussite.

La diversification des risques entre plusieurs activités(commerce des produits agricoles, transport, impor-

tations de marchandises générales, etc.) est l’unedes principales caractéristiques de la pratique entre-preneuriale de ces commerçants.

Ces réseaux marchands ont des champs géogra-phiques d’intervention multiples. Ils opèrent aussibien à l’échelle régionale, nationale, transfrontalièrequ’intercontinentale4 (LABAZEE, 1993). Ils mettenten oeuvre simultanément des circuits officiels et descircuits parallèles à cheval sur plusieurs pays,«jouant des différences de politiques économiquessuivies par les Etats, de leur appartenance à deszones monétaires distinctes, du prix et de la disponi-bilité de ces marchandises de part et d’autre de cesfrontières» (EGG et al., 1988).

Ils sont les principaux fournisseurs des revendeursdes marchés en produits manufacturés et en denréesde première nécessité (riz importé, farine, sucre,etc.). Dans les pays soudano-sahéliens, ces grandscommerçants ont aussi maintenu un rôle déterminantdans les circuits de commercialisation des céréaleslocales et, à ce titre, ils sont les fournisseurs privilé-giés, à certaines périodes de l’année, des grossistesdes marchés.

1.2.1.3Un secteur de la petite distribution formelle fragilisé

Il s’agit de l’ensemble des petites entreprises com-merciales de la ville répertoriées par la Chambre decommerce: boulangeries, quincailleries, librairies-papeteries, commerces alimentaires, etc. Ces entre-prises ont peu de rapports économiques avec lescommerçants des marchés. L’essentiel de leur clien-tèle se recrute parmi les ménages salariés du secteurpublic et privé.

Aussi victimes de la concurrence des produits de lafraude, les petites entreprises sont surtout touchéespar les conséquences de la crise économique sur lesrevenus et l’emploi des ménages salariés.

1.2.1.4Un secteur des marchés qui concentre l’essentielde l’activité et du dynamisme du secteur commercialinformel urbain

Le marché est encore l’endroit où s’approvisionne latrès grande majorité de la population urbaine aussibien pour le manufacturé et le vivrier que pour lesgrands produits de base de première nécessité (riz,sucre, farine, etc.).

Le commerce des produits alimentaires est un élé-ment important de l’activité économique des mar-chés. Mais les grands marchés centraux doivent leurdynamisme, leur rayonnement national, et même

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souvent international, à la vente des produits manu-facturés.

Selon leur situation - proximité de plusieurs fron-tières, marchés de capitales portuaires -, ils sontdevenus des centres privilégiés de groupage etd’éclatement de produits manufacturés acheminéspar les multiples circuits animés tant par les réseauxfortement structurés des grands commerçants quepar les «petites entreprises contrebandières» (LABA-ZEE, 1993) (détaillants des marchés, petits trafi-quants et «aventuriers» des villes). C’est essentielle-ment pour ces produits que se pressent autour desboutiques et des étals les consommateurs urbains,les producteurs des régions voisines, les commer-çants et les colporteurs étrangers venus chercherauprès de leurs logeurs des lots de pagnes, de tis-sus, de friperie, de pièces détachées, etc.

Aussi distingue-t-on nettement deux sous-secteursdans l’activité des marchés:

• celui des commerces de produits manufacturésdont le développement économique est le plusdynamique, qui réalise les chiffres d’affaires les plusélevés et occupe la plupart des constructionsrécentes, en dur et de bonne qualité, que l’on obser-ve sur les marchés. En moins d’une dizaine d’an-nées, il a envahi la majeure partie de l’espace publicdes marchés urbains. Ce faisant, il a «repoussé» àl’extérieur des marchés une grande partie du vivrier.A ce sous-secteur, il faut rattacher, du point de vuedu dynamisme commercial, les commerçants desgrandes denrées alimentaires importées;

• celui des commerces de produits vivriers, dans les-quels la micro-activité est la forme commercialegénéralisée et les revenus sont très faibles. Le com-merce du vivrier de détail, en effet, appartient toutentier à ce vaste secteur informel qui permet, enfournissant aux femmes ressources et emplois, à latrès grande majorité des ménages urbains de sur-vivre.

Les commerçantes de vivriers occupent les secteursles plus dégradés des marchés, ceux qui cristallisenttous les dysfonctionnements: surconcentration,enclavement, manque d’hygiène, bâti vétuste à lalimite du dangereux. Quant à la rue, elle accueilleaujourd’hui non seulement les petites détaillantesprogressivement refoulées hors des marchés par lesvendeurs de produits manufacturés, mais aussi, ennombre toujours plus grand, des grossistes de pro-duits vivriers.

1.2.2Les caractéristiques des marchés

Suivant les critères de niveaux de desserte, d’équi-pement et de services, ainsi que de catégories deproduits vendus, il existe différentes typologies demarchés urbains.

1.2.2.1Les marchés dont l’influence s’exerce sur la ville, le quartier ou les zones intermédiaires

Les grands marchés historiques localisés dans lesquartiers anciennement urbanisés exercent un rayon-nement sur la ville toute entière.

Souvent dénommés marchés centraux, même s’ilsne sont plus situés au centre géographique de la villeactuelle, ils réunissent le nombre le plus important decommerçants, ceux dont la gamme de produits et deservices est la plus étendue. Le rayonnement de cer-tains de ces marchés centraux dépasse de loin laseule clientèle locale (la ville) mais atteint la région, lepays tout entier ou même des territoires plus vastes.

Les marchés de quartier (parfois appelés secon-daires) sont des équipements de proximité assurantessentiellement un approvisionnement alimentairedes habitants. On considère que leur desserte cor-respond à environ 10 000 habitants.

Dans les grandes agglomérations, on observe, pourquelques marchés, une desserte à un échelon inter-médiaire: selon les découpages administratifs, onparlera de marché d’intérêt communal ou de marchéde secteur, voire de marché interquartiers. Leur cha-landise concerne au moins 100 000 habitants.

1.2.2.2Les marchés «officiels», «administrés» ou «organisés» (suivant les appellations en vigueur)par opposition aux marchés de rue ou spontanés

Parmi les marchés organisés, les plus ancienss’exercent sur un terrain officiellement affecté spécifi-quement à cet usage. Ils se caractérisent générale-ment par un certain niveau d’équipement (halle, han-gars, stalles, latrines, borne-fontaine) et d’organisa-tion, et, à ce titre, ils bénéficient de prestations de lamairie pour l’entretien et le nettoyage. D’autres mar-chés, dits organisés, sont d’origine spontanée et nedisposent d’aucun équipement public mais sont offi-ciellement «reconnus». Dans les deux cas, la distinc-tion entre marché organisé et marché spontané estsurtout d’ordre fiscal: les marchés «organisés» sontceux où les droits de place sont en principe réguliè-rement perçus.

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La plupart des marchés de quartiers sont des mar-chés spontanés, localisés dans la rue, et leur com-merçants sont uniquement des tabliers ou des ven-deurs à la sauvette. Leur existence est connue desservices de la municipalité mais celle-ci n’y perçoitpas de droits de place et n’y assure aucun service.

En effet, s’il existe souvent une liste et une premièretypologie des marchés de la collectivité locale, celles-ci ne prennent généralement en compte que les mar-chés où sont perçus les droits de place. Il est alorstrès important de réintroduire les marchés de ruepour une première appréciation, non seulement de ladynamique des marchés en termes de fonctions et deservices au public, mais aussi pour évaluer lesrecettes potentielles pour la collectivité locale.

1.2.2.3Les marchés polyvalents

A l’exception des marchés spécialisés, tous les mar-chés urbains sont polyvalents, c’est-à-dire des mar-chés vendant aussi bien tous les produits manufactu-rés que les produits alimentaires, des marchés spé-cialisés dans un seul produit ou une gamme de pro-duits.

Dans cette catégorie, seuls diffèrent d’un marché àl’autre l’étendue de la gamme de produits, le nombreet la variété de services (artisans, réparateurs, etc.)et les prix. Les grands marchés présentent toujours lagamme complète de prix et de qualité nécessaire à lasatisfaction d’une demande hétérogène (clientèle deproximité pour les produits banals, clientèle de pro-duits de luxe, nationale et/ou étrangère).

Nombre de marchés spécialisés résultent d’une déci-sion des Autorités qui ont regroupé en un lieu déter-miné des activités et des commerces qu’elles ne vou-laient plus laisser subsister au centre-ville, du fait desnuisances entraînées par les ventes de combus-tibles, de matériaux de construction et d’animaux, lesactivités d’artisans divers (ferrailleurs, forgerons,réparations automobiles, etc.) ou bien celles dont lesvendeurs sont devenus si nombreux qu’elles justifientun emplacement spécifique.

On constate que, progressivement, sous l’effet del’intervention des Autorités ou du fait des commer-çants et artisans à la recherche d’espace plus fonc-tionnels, les marchés spécialisés et les artisans sontrepoussés de plus en plus loin des centres-villes.C’est particulièrement le cas pour tous les produits etles services liés à la construction de l’habitat domes-tique. Cet éloignement représente un coût additionneld’approvisionnement pour la population.

On associe aux marchés spécialisés les «marchés degares routières» qui ne sont pas non plus de véri-tables marchés d’approvisionnement polyvalents.

On désigne sous ce terme la concentration d’activitéscommerciales liées à la présence de voyageurs. Cesmarchés se caractérisent par le nombre importantd’activités et de services liés à la restauration (gar-gotes, vente de produits alimentaires préparés ounon sur place) et le grand nombre de vendeursambulants.

D’autres caractéristiques peuvent être retenues pourspécifier certains marchés dans l’ensemble du sec-teur commercial non sédentaire de la ville.

1.2.2.4Les marchés urbains et les marchés villageois

Dans certaines grandes villes subsahariennes, lesvillages ayant été englobés par l’extension urbaineont pu maintenir des caractères propres à leur origi-ne rurale, comme le type d’habitat, la proportion éle-vée d’habitants pratiquant une activité agricole régu-lière, et notamment la fréquence des marchés. Dansces «villages-quartiers», la fréquence des marchésn’est pas celle quotidienne des marchés urbains.

1.2.2.5Les marchés diurnes et les marchés «de nuit»

Des marchés de quartier peuvent ne présenter dejour qu’une activité réduite (faible nombre de com-merçants, gamme de produits limitée) et jouer aucontraire un rôle dominant dans l’approvisionnementurbain le soir ou la nuit. C’est le cas, par exemple, dumarché de Farakan à Bobo-Dioulasso qui, dès 19heures, prend le relais du marché central. De jour, ilcompte environ une centaine de commerçants et, lanuit, il totalise plus de 1000 vendeurs, offrant aussibien des produits vivriers que toute une gammevariée de produits manufacturés (vêtements, équipe-ments domestiques, etc.).

1.2.2.6Les marchés provisoires et les emplacements réservés

Les marchés provisoires sont installés sur des ter-rains réservés par l’Administration pour la construc-tion de marchés dans les zones d’extension. On trou-ve, dans cette catégorie, des marchés en cours deconstruction et des terrains vagues. Ces terrains,actuellement non utilisés, constituent une réserved’emplacements pour les années à venir.

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1.2.3La localisation et la répartition des marchés sur le territoire de la ville

1.2.3.1Du point de vue géographique

La répartition des marchés, du point de vue géogra-phique, est forcément très variable d’une ville àl’autre selon la morphologie de la ville (contraintes desite plus ou moins importantes), le type d’urbanisa-tion, les politiques foncières mises en oeuvre, etc. Larépartition des marchés sur le territoire de la ville estaussi tributaire de la plus ou moins grande facilité decirculation des marchandises et des commerçants:elle est donc intimement liée au développement duréseau routier.

Mais, au-delà d’une simple localisation des marchéssur une carte, c’est le croisement de l’analyse typolo-gique des marchés avec leur mode de répartitionspatiale sur le territoire de la ville qui fait apparaîtreles facteurs d’équilibre ou de déséquilibre dans leréseau des marchés urbains.

Si l’examen du réseau des marchés, d’une ville àl’autre, révèle bien évidemment des situationsvariées, la polarisation des activités commercialessur un seul grand marché et ses effets de dépressionsur le réseau des marchés secondaires s’observe fré-quemment. Nous aurons l’occasion d’y revenir et d’enmesurer ses implications à la fin de ce chapitre.

1.2.3.2Du point de vue de la population desservie

Les données précises sur la population desservie parmarché sont difficiles à établir et demandent toujoursune étude approfondie. Mais la démarche est néces-saire afin de constituer une base pour la programma-tion des besoins futurs en équipements commer-ciaux.

Elle doit partir des observations et des analyses desmarchés qui ont permis d’apprécier le niveau d’activi-té, le nombre de vendeurs, les surfaces commer-ciales et la nature des produits vendus. La répartitiondes zones d’influence est définie en privilégiant lafonction de proximité que chaque marché, même leplus important, est appelé à jouer sur la populationenvironnante pour les besoins quotidiens.

On peut alors calculer la population actuellementdesservie et celle à desservir par le marché à court etmoyen termes, compte tenu du taux de croissancedémographique rapporté aux densités observées etau type d’urbanisation de la zone desservie.

Le ratio m2 de surface commerciale (marché) pour100 habitants fournit les indications concernant leniveau de desserte actuelle. Sur la base d’un ratio de15 m2 pour 100 habitants, généralement estimécomme un niveau de desserte commerciale satisfai-sant, on détermine la surface de terrains nécessairepour les marchés à prévoir et le niveau du déficit pourchaque marché existant.

On notera que la saturation de nombreux marchés etla prolifération de vendeurs à la sauvette dans lesrues sont certainement le signe de l’insuffisance deplaces de marchés dans certains quartiers.

Inversement, le gonflement de l’effectif des marchéset la multiplication des petits métiers de rue sontaussi à mettre en rapport avec une situation écono-mique générale médiocre.

Dans ce contexte, il faut pouvoir distinguer entre lesbesoins en nouveaux marchés, dont la création devraaccompagner la croissance de la population urbaine,et ceux qui, du fait de la réduction extrême du chiffred’affaires et de la parcellisation des volumes de ventecaractérisant pour longtemps encore l’activité com-merciale des vendeurs non sédentaires, ne pourrontêtre satisfaits.

1.2.3.3La répartition en fonction du découpage administratif

La distribution des marchés dans une ville, en fonc-tion du découpage administratif, permet d’apprécierle niveau d’équipement marchand de chaque com-mune.

Il n’y a, en général, pas d’équilibre entre les com-munes pour des raisons qui tiennent à la fois à l’his-toire et au mode de développement urbain:

• les grands marchés bien équipés dont le rayonne-ment s’étend à la ville entière sont localisés logi-quement dans les parties anciennement urbaniséesde l’agglomération: ils sont presque toujours com-pris dans le périmètre de la commune de la villecentrale;

• les communes périurbaines ou les banlieues lesplus éloignées du centre n’ont en général quequelques marchés organisés et faiblement équipéset, surtout, des marchés de rue, quelle que soit lataille de ces marchés;

• la répartition des marchés spécialisés est trèsvariable d’une ville à l’autre, mais on a noté la ten-dance à la décentralisation de ce type de marchésdans les communes périphériques.

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12 Aliments dans les villes: collection d’ouvrages - vol. 1

Cette répartition, forcément provisoire, évolue au furet à mesure que la ville se développe, et a une inci-dence sur la gestion des marchés et le montant desrecettes perçues.

Les communes de périphérie, lorsqu’elles sont trèspeuplées, ont un grand besoin des recettes que leurapportent les marchés. Ce sont précisément cellesdont les marchés sont les plus pauvrement équipésen boutiques et où les locations mensuelles repré-sentent des ressources plus sûres que les faiblesdroits de place versés par les micro-détaillantes devivriers constituant le gros de l’effectif des vendeursde leurs marchés.

D’où la tentative des communes d’augmenter la ren-tabilité de ces marchés en délivrant des permis deconstruire à des commerçants souvent absentéistesqui profitent de cette opportunité pour «geler» leurinstallation (boutique transformée en dépôt), ce quiaboutit à l’effet inverse à celui recherché en terme dedynamisme économique.

1.2.4Le rôle des marchés dans les circuits d’approvisionnement intra-urbains

Le rôle joué par les marchés dans ces circuits et lahiérarchisation ou spécialisation des places de mar-chés qui se dessinent dans l’armature commercialevarient selon les produits considérés: vivriers oumanufacturés.

Suivant les fonctions qu’ils remplissent dans les cir-cuits d’approvisionnement en produits vivriers, ondistingue deux grandes types de marchés urbains:

1.2.4.1Les marchés d’approvisionnementet de redistribution

Ce sont ceux où opèrent les grossistes de vivriers.Ainsi, les marchés d’approvisionnement et de redis-tribution fonctionnent tout à la fois comme «marchésde gros» et «marchés de détail». Ces concentrationsde grossistes correspondent souvent à des points derupture de charge qui varient selon la géographie desapprovisionnements (axes routiers principaux, aires àproximité de gares routières ou ferroviaires, débarca-dères, etc.). Mais elles trouvent aussi leur originedans le contexte socio-économique et politique ayantmarqué le développement du secteur marchand de laville (formation du réseau des marchés, interventionsde l’Etat).

Les principaux d’entre eux représentent toujours deslieux d’articulation entre circuits nationaux et circuitslocaux, entre circuits internationaux et nationaux.

Pour leur approvisionnement, ils drainent les produc-tions et les marchandises bien au-delà des frontièresnationales, leur clientèle se composant aussi biendes revendeurs détaillants, locaux et étrangers, quede l’ensemble des consommateurs urbains.

Ils assurent souvent une fonction de réexpéditionpour des villes éloignées.

Quatre facteurs les caractérisent comme places degros prééminentes:

• le nombre élevé de grossistes (au minimum unecentaine);

• la gamme étendue de produits sur laquelle ils inter-viennent;

• des tonnages commercialisés importants;

• la permanence des flux de ces produits sur toutel’année.

D’autres marchés d’approvisionnement ont uneinfluence plus locale. Le nombre de grossistes y estréduit (une vingtaine tout au plus), mais on y observeun nombre assez élevé de «revendeuses-détaillantes». La fonction d’approvisionnement et deredistribution qu’ils assurent se limite aux besoins deconsommation de la capitale, et éventuellement à unensemble de quartiers des zones suburbaines.

Ils sont souvent spécialisés dans un ou deux types deproduits vivriers, liés à leur situation géographique(proximité d’une zone de grande production maraî-chère, etc.). En amont, les grossistes de ces mar-chés se réapprovisionnent à certaines saisons sur lesmarchés principaux tandis qu’en aval, leur réseau deredistribution ne concerne qu’un nombre réduit demarchés.

Il faut souligner dès à présent qu’il existe toujours plu-sieurs marchés d’approvisionnement et de redistribu-tion en milieu urbain.

La dispersion de places de gros est un élémentimportant de la problématique de la création des mar-chés de gros dans les villes subsahariennes.

1.2.4.2Les marchés de consommation

Sous le nom de marchés de consommation sontregroupés les marchés de quartier, officiels et spon-tanés, les marchés spécialisés et les marchés degare routière. Il s’agit toujours des marchés de détail.

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Les marchés d’approvisionnement et de redistribu-tion structurent l’espace urbain sur un réseau decentres de décision commerciale qui présente lescaractéristiques suivantes:

• un réseau qui n’est pas figé dans le temps;

Le réseau des marchés ne présente pas un carac-tère figé dans le temps: selon les saisons, le type deproduit et leur origine géographique, l’importancerespective des marchés d’approvisionnement et deredistribution se modifie, le nombre de grossistesqui s’y trouvent augmente ou, au contraire, secontracte.

L’évolution des conditions et des modes de trans-port, tant des voyageurs que des marchandises,l’organisation des parcours, spontanée ou guidéepar des interventions administratives, expliquentl’émergence de certains marchés d’approvisionne-ment, leur déclin, voire leur disparition.

• une forte «volatilité» des places de marchés où opè-rent les grossistes;

Elle traduit une capacité de réaction très rapide descircuits d’approvisionnement à toute interventionextérieure.

Ceci concerne surtout les grossistes qui travaillent àl’extérieur des marchés, dans des conditions trèsprécaires, en particulier sur la chaussée.

On observe souvent, suite à des mesures adminis-tratives concernant la réglementation de la circula-tion, l’interdiction de tel ou tel commerce pour causede nuisance, la disparition, voire la reconstitution,des activités des grossistes dans d’autres lieux de laville, ce qui entraîne de nouvelles concentrations dedétaillants et, par là même, le développement d’unvéritable marché d’approvisionnement et de redistri-bution.

• une hiérarchie des marchés très différente selon lesfilières de produits.

Il y a à la fois autonomisation partielle et hiérarchi-sation des places de marchés du point de vue descircuits d’approvisionnement en produits vivriers.

En effet, si les grossistes des places de gros secon-daires ont leurs réseaux d’approvisionnementdirects auprès des producteurs ou des grossistesrégionaux, en période de rareté (chronique commela soudure ou conjoncturelle), ils sont toujours obli-gés de se réapprovisionner auprès des grossistesdu principal marché de gros qui ont seuls lesmoyens financiers et le réseau de collecteurs

capables de garantir l’approvisionnement pérennede la ville.

Ce dernier type de marché organise de fait une hié-rarchisation dans les circuits de distribution infra-urbains.

Dans le cas des produits manufacturés, on observetoujours une polarisation des activités d’approvi-sionnement et de redistribution sur un seul grandmarché (marché spécialisé ou marché polyvalent).

1.2.5Les relations fonctionnelles entre marchés et pôles commerciaux: l’importance des moyens de transport pour la redistribution

L’analyse des relations fonctionnelles entre marchésne doit pas se limiter aux seuls marchés (organisésou spontanés). Une approche en terme de circuitsd’approvisionnement doit prendre en compte d’autrespôles commerciaux qui constituent, avec les mar-chés, l’ensemble des centres d’approvisionnement etde redistribution d’une ville. Ils assurent les fonctionscommerciales essentielles de conditionnement, destockage, de conservation, de transformation desproduits et de transport, sans lesquelles les produitsn’arriveraient pas sur les marchés.

Il nous apparaît indispensable de pouvoir situer surune carte, en même temps que les marchés, ces dif-férents pôles d’approvisionnement et de redistribu-tion pour comprendre la dynamique des relationsentre les marchés au sein de la ville. On peut, decette manière, saisir les raisons pour lesquelles desmarchés s’implantent à tel ou tel endroit, celles quifont que certains marchés s’étiolent, ou que d’autresconnaissent au contraire un fort développement.

Les systèmes de transport qui relient les marchésentre eux, et entre ces derniers et les pôles commer-ciaux, jouent un rôle particulièrement important.

Trop souvent, lors des opération d’aménagement oude création de marchés, la question des transportsest oubliée. L’organisation fonctionnelle doit prévoirdes aires de stationnement pour le déchargement(poids lourds pour l’approvisionnement, camion-nettes, véhicule légers, taxis, ou transport non méca-nisé pour la redistribution).

La réflexion sur les conditions d’approvisionnementdes ménages urbains doit tenir compte de ce réseaucommercial et de transport urbain spontané qui est lemoins coûteux et le plus adapté aux revenus des cita-dins.

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En tenir compte, c’est principalement définir desemplacements qui leur seront réservés.

1.2.6La situation actuelle des marchés: diagnostic technique, sanitaire et économique

Toutes les grandes villes africaines ont connu etconnaissent encore une forte croissance démogra-phique. Parallèlement, la situation économique aengendré le développement du secteur informel et lamultiplication des petits métiers.

Ces éléments ont eu pour conséquence l’augmenta-tion considérable des effectifs des vendeurs sur lesmarchés existants et, de façon générale, dans toutela ville. Cette augmentation n’a pas été accompagnéed’une expansion significative du nombre d’équipe-ments commerciaux.

Ces deux facteurs conjugués sont en grande partie àl’origine de la situation actuelle caractérisée par lasaturation, la désorganisation et l’insalubrité deséquipements existants ainsi que par l’occupationgénéralisée des emprises de la voirie par les ven-deurs.

La situation de profondes carences techniques etsanitaires qui prévaut sur l’ensemble des marchés adeux causes essentielles: une insuffisance d’infra-structures techniques de base (drainage, eau, électri-cité) et un manque d’entretien et de services.

Sur la plupart des marchés, les infrastructures debase font défaut, soit parce que ces marchés n’ontjamais été construits (c’est la situation de tous lesmarchés spontanés), soit parce que, bien qu’exis-tants, en particulier sur les grands marchés centraux,ils ne fonctionnent pas ou sont insuffisants. Quant àl’entretien et aux services (évacuation des orduresménagères, nettoiement, entretien des installationset des réseaux) en raison des difficultés tant finan-cières qu’organisationnelles de la part des Autorités,ils sont assurés de manière très imparfaite et, seule-ment, sur les quelques marchés organisés.

Du point de vue organisationnel, les dysfonctionne-ments les plus apparents se traduisent principale-ment par le mélange des activités de gros et dedétail, le regroupement non fonctionnel des produits,la présence d’activités nuisibles ou dangereuses surles marchés (utilisation de foyers dans les activités derestauration, blanchisserie, repassage, etc.).

L’ensemble de ces facteurs techniques, sanitaires etorganisationnels créent des risques graves pour lesusagers consommateurs et commerçants.

Certains dysfonctionnements sont moins connus etdemandent à être soulignés. On mentionnera, en par-ticulier, le cercle vicieux qui s’est instauré à cause dela concurrence des vendeurs à la sauvette qui s’ag-glutinent autour des grands marchés: la proliférationde ces vendeurs qui, pour la plupart, ne paient pas dedroits de place, finit par entraver l’accès de celui-ciaux usagers consommateurs. Cette situation incitealors les commerçants du marché, qui eux paient desdroits, à en sortir à leur tour pour tenter de maintenirleur chiffre d’affaires. C’est l’une des raisons de lasous-occupation de l’intérieur des grands marchésque l’on peut constater un peu partout.

Il faut noter, enfin, le faible dynamisme commercial denombreux marchés de quartier créés à l’occasion deprogrammes d’urbanisme récents. Ces marchés ontété en général enclavés en plein coeur du quartier,suivant une démarche urbanistique classique, maisaujourd’hui obsolète en Europe, qui fait abstractiondes axes de circulation et de chalandise. Ces mar-chés n’ont jamais correctement fonctionné, les ven-deurs ayant toujours préféré s’installer sur les voiesroutières les plus passantes à la lisière du quartier.

1.2.7Le développement d’hypercentres

Le développement d’hypercentres concentrant aucoeur des agglomérations l’ensemble des formesd’activité commerciale (gros, demi-gros, détail, micro-détail), à la fois sur l’espace public du marché, dansles rues adjacentes et dans les entrepôts des gros-sistes des quartiers environnants, est un aspectcaractéristique de l’urbanisme commercial de nom-breuses villes subsahariennes aujourd’hui.

Il est frappant de constater que les activités d’appro-visionnement et de distribution des produits vivriersoccupent, en définitive, une place secondaire dansles flux économiques et financiers brassés par cescommerces.

La vente des produits manufacturés est le véritablemoteur de l’activité économique de l’hypercentre.Certains sont fournis par les circuits non contrôlésd’importation et de réexportation. D’autres permettentune accumulation plus rapide de capital dans uncontexte de crise économique aiguë. Les denrées debase importées telles que le riz, le sucre, le sel, la

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farine, et les produits manufacturés tels que les tis-sus, les articles de friperie et les pièces détachées,occupent le premier rang dans les échanges trans-frontaliers.

La polarisation des activités commerciales dans lecentre-ville s’explique largement par le rôle charnièreque joue la plupart des grands marchés entre ces dif-férents circuits.

On doit souligner, par conséquent, que cette surcon-centration d’activités et de vendeurs sur un marchépôle exerce un effet dépressif sur l’ensemble duréseau de distribution.

Les marchés de quartier étant peu attractifs, les usa-gers (clients et commerçants) les délaissent au profitdu marché central pôle, qui exerce alors, à l’échelleurbaine, une majeure attraction. Ce processus préci-pite le déclin des autres marchés dont le niveau derecettes est tellement faible qu’ils ne peuvent prati-quement faire l’objet d’aucun investissement en l’étatactuel des choses.

Cette analyse montre comment des interventionspubliques peuvent influencer le fonctionnement del’ensemble du réseau des marchés. En effet, uneintervention limitée au marché pôle risque fort d’ac-centuer encore le déséquilibre de l’armature des mar-chés en survalorisant l’effet d’attraction de celui-ci.

Il est donc nécessaire d’inscrire les interventionspubliques dans une stratégie d’ensemble de rééquili-brage du réseau des marchés.

1.3La problématique des marchés de gros

1.3.1Des situations diverses qui appellent des réponses adaptées

La création de marchés de gros est aujourd’hui unenécessité pour les grandes villes subsahariennes. Lemarché de gros est en effet la réponse rationnellepour le développement d’une fonction commercialemoderne.

Cette solution suppose cependant de saisir correcte-ment le fonctionnement des circuits de gros à l’inté-rieur de la ville, circuits sur lesquels les décideurs ontle plus souvent une vision réductrice et quelquefoiserronée.

Un même problème, en effet, détermine des situa-tions très diverses qui demandent des réponses dif-férentes, cas par cas:

• Quels sont les grossistes concernés, ceux des pro-duits frais et périssables, ceux des produits secs oudes produits importés?

• Où s’exercent leurs activités commerciales aujour-d’hui, tant du point de vue de l’approvisionnementque des ventes et du stockage?

• Quelles sont les fonctions principales assurées parces activités de gros dans les circuits d’approvision-nement urbain et interurbain et quelles en sont lesimplications en matière de flux de circulation, deproblèmes d’acheminement, de stationnement,etc.?

• Quels sont les souhaits des différents types degrossistes concernant leur regroupement éventuelsur un futur marché de gros?

Les caractéristiques ainsi dégagées permettent d’ap-précier les besoins réels de délocalisation, voire sim-plement de localisation et de définir les nécessités duou des marchés de gros à créer.

On peut aussi, et c’est fondamental, évaluer l’amélio-ration de l’approvisionnement urbain ou au contrairel’aggravation des dysfonctionnements que telle outelle solution entraîne. Le souhait des Autorités estplus souvent dicté par des considérations sur l’envi-ronnement (réductions des nuisances) que soutenupar la conviction que la création d’un marché de grosest une étape économique nécessaire pour l’amélio-ration des circuits d’approvisionnement des popula-tions urbaines. Bien que ces deux raisons ne s’ex-cluent d’ailleurs pas l’une l’autre, les effets attendusne sont pas les mêmes et les retombées politiquesseront différentes. Il faudra donc définir très précisé-ment les objectifs.

1.3.2Les caractéristiques des activités de gros dans le tissu urbain: lieux et modes de fonctionnement

L’organisation des activités de gros recouvre dessituations contrastées suivant les groupes de pro-duits (vivriers locaux et importés) et les catégories degrossistes.

On notera, en préambule, ces deux caractéristiquesmajeures de la répartition spatiale des circuits degros qui sont communes à toute la sous-région:

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• la dispersion dans le tissu urbain des grossistes deproduits vivriers;

• la concentration des zones d’entreposage des den-rées alimentaires importées.

1.3.2.1Les produits vivriers

L’approvisionnement des villes en produits vivriersest organisé par des grossistes regroupés sur lesmarchés dans des quartiers proches des grands mar-chés, et de plus en plus sur la voie publique.

Les lieux d’activité se différencient nettement en fonc-tion des types de produits commercialisés.

Les grossistes de produits frais (légumes surtout) etde féculents (banane plantain) exercent leurs activi-tés sur les marchés mais aussi, le plus souvent, surla voie publique. Ces aires de dégroupage des car-gaisons peuvent s’être développées sur un des axesprincipaux de pénétration de la ville, très souvent àcôté d’une gare routière.

Cette situation est générale. Elle s’observe aussi bienà Conakry et à Abidjan qu’à Bouaké, Bangui,Brazzaville, Dakar, etc.

Pour les fruits et les tubercules, il faut remarquer queles plates-formes d’arrivée fonctionnent à la foiscomme relais dans le trajet des poids lourds etcomme lieux d’achat. Il s’agit d’aires de stationne-ment situées à côté de grands marchés et de garesroutières où sont donnés les ordres d’acheminementvers l’intérieur de la ville. Les chargements étant leplus souvent achetés en bloc, le dégroupage y estrare.

Ce mode de distribution par chargement est fonctionde la taille du marché de consommation urbain: il sedéveloppe dans les villes de plus d’un million d’habi-tants.

Les grossistes de produits vivriers secs, tels que lescéréales, les légumineuses, les tubercules et, danscertains cas, les fruits (ces deux produits pouvantêtre traités ensemble par les mêmes grossistes) sontinstallés principalement sur les marchés (principauxet secondaires) ou dans les quartiers où ils formentsouvent un ensemble dense de magasins réunisdans une ou deux rues.

Le regroupement des grossistes sur un marché oudans un quartier résulte de la combinaison d’unensemble de facteurs historiques (primauté et pou-voir des commerçants de produits secs par rapportaux acteurs des autres circuits commerciaux), eth-

niques et familiaux (spécialisation dans un type deproduits), et enfin socio-économiques (communautésde besoins et d’intérêts).

Les quartiers «spécialisés» dans lesquels opèrentaujourd’hui les grossistes de produits vivriers sontsitués à proximité immédiate du marché central5.

Ce processus, assez récent, de transformation dutissu urbain d’habitation autour des marchés au profitde la fonction commerciale (plus spécialement lecommerce de gros et le stockage) trouve sa sourcedans la pression foncière qui découle de la saturationdes installations actuelles des marchés centraux.

En résumé, on observe que les lieux où s’exerce lecommerce de gros de produits vivriers présententtrois caractéristiques:

• une absence d’équipement spécialisé, tel que lesouligne une étude sur les marchés vivriers de Côted’Ivoire, «... si certaines de ces concentrations degrossistes fonctionnent effectivement comme desmarchés, au sens de lieux de formation des prix, laplupart ne sont en fait que des aires techniquessans fonction commerciale commune au départ,des plates-formes à fonction purement physique(entreposage et dégroupage)»;

• une dispersion dans le tissu urbain et une redistri-bution facilitée: la relative dispersion spatiale desgrossistes de produits vivriers dans le tissu urbainpermet une bonne irrigation du réseau des marchéset des innombrables points de vente qu’ils approvi-sionnent (étals des rues, commerces du soir, etc.)et, de ce fait, une optimisation des coûts de redistri-bution, compte tenu du prix très élevé du transportintra-urbain;

• des conditions toujours défectueuses de fonction-nement sur les marchés, dans les quartiers, et a for-tiori sur la voie publique, les activités de gros deproduits vivriers rencontrant toutes de très gros pro-blèmes: absence ou insuffisance des équipementsde stockage, mauvaises conditions de conserva-tion, manque de place pour le stationnement desvéhicules et les opérations de déchargement, pro-blèmes d’hygiène et d’insécurité. On voit ainsi unmarché conçu au départ spécialement pour desactivités de gros (Sikasso Cira à Bobo-Dioulasso)en être réduit aujourd’hui, suite à l’implantationd’une gare routière sur son site, à se tenir presqueentièrement sur la chaussée. Quant à la majoritédes grossistes du marché Mont-Bouët, ils n’ontd’autre choix que de pratiquer leur commerce «à lasauvette» sur les trois grandes rues entourant lemarché.

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174: Les circuits d’approvisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchés en Afrique et à Madagascar

Dans ces conditions, l’activité des grossistes repré-sente un facteur parfois non négligeable, mais surtoutle plus visible et souvent le plus spectaculaire, desnuisances liées à la présence des grossistes devivriers dans les villes. Cette situation alimente le dis-cours des Autorités sur «la nécessaire délocalisationdes grossistes du centre-ville».

Les besoins prioritaires exprimés par les grossistesde produits vivriers sont de deux types:

• la localisation de ceux qui, pour des raisonsdiverses, n’ont d’autre lieu d’exercice que la rue;

• l’amélioration des conditions d’activité des gros-sistes des marchés et des quartiers (encadré).

1.3.2.2 Les marchandises générales et les denrées alimentaires de première nécessité: une surconcentration d’entrepôts dans le centre-ville

Contrairement à l’activité des grossistes de produitsvivriers dont l’activité est dispersée, le commerce degros des marchandises générales et denrées alimen-taires importées se déroule essentiellement dans lescentres-villes.

Les lieux d’activités dans le commerce de gros desdenrées alimentaires se différencient suivant la caté-gorie du commerçant:

Les grands grossistes importateursou grossistes distributeurs

La commercialisation des denrées alimentaires estorganisée depuis leur réseau de magasins entrepôts.

Les magasins des grands importateurs grossistespeuvent être regroupés en majorité dans un seulquartier adjacent au marché central, commeDantokpa-Gbogbanou à Cotonou ou Madina àConakry, ou quelque peu dispersés dans l’agglomé-ration. Mais même dans ce dernier cas, on observetoujours une nette concentration d’entrepôts dans lesquartiers du centre-ville.

On rappellera que la stratégie de la plupart desgrands grossistes de denrées alimentaires cherchantà limiter au maximum leurs coûts de stockage consis-te à revendre immédiatement la plus grande partie dustock aux clients semi-grossistes. Ces opérateurscherchent à entreposer les stocks les plus réduitsdans leurs magasins, qui sont souvent d’anciensentrepôts situés dans leurs concessions et dont lesdépenses d’entretien sont minimes. C’est le casgénéralement des grossistes des villes sahéliennes.

Au contraire, des dépenses importantes pour laconstruction d’entrepôts de grande taille ou la loca-tion de magasins sont consenties par les principauxgrossistes et/ou importateurs de villes côtières, tellesque Cotonou ou Conakry, grâce aux profits substan-tiels générés par le commerce de réexpédition noncontrôlé (riz principalement) vers les pays voisins.

Les conditions d’activité, du point de vue de la majo-rité de ces opérateurs privés, sont par conséquentsatisfaisantes.

Tout au plus existe-t-il un problème pour les «derniersarrivés» du fait de la saturation aujourd’hui presquetotale des quartiers-entrepôts adjacents aux marchéscentraux. C’est la raison pour laquelle on a pu obser-ver quelques implantations décentrées de nouveauxmagasins de stockage, comme à Conakry en 1991ou à N’Djamena en 1992.

Mais ces initiatives restent très ponctuelles et neconstituent pas les prémices d’un mouvement plusgénéral.

La tendance encore et toujours observée est celle dela densification du centre-ville par les magasins desgrands grossistes importateurs et distributeurs dedenrées alimentaires ou de produits manufacturés:Cotonou et Conakry en sont des exemples types.

Les petits grossistes

Les lieux d’activités sont identiques à ceux des com-merçants de produits vivriers de base: on les trouveaussi bien sur les marchés que dans les quartiers, etexceptionnellement sur la chaussée, comme àCotonou, à côté du marché Dantokpa. Leurscontraintes étant pratiquement les mêmes que cellesdes grossistes de produits vivriers, leurs souhaits, enmatière d’amélioration du fonctionnement de leursactivités, sont identiques.

1.3.3Les fonctions d’approvisionnement et de réexpédition

1.3.3.1Les marchés de gros terminaux: une dominante, la fonction approvisionnement

Ils opèrent le dégroupage nécessaire à la répartitionentre les différents marchés de quartiers. En aval, lesclients sont principalement les petites détaillantesdes marchés et, secondairement, les consomma-trices.

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18 Aliments dans les villes: collection d’ouvrages - vol. 1

Bobo-Dioulasso

Une ville secondaire de quelque 300000 habitantsen 1990, mais un centre de réexpédition pour lesfruits et les céréales.

A Bobo-Dioulasso, deux marchés centralisent lesactivités des grossistes: le marché de fruits ettubercules de Sikasso Cira, organisé par des gros-sistes, et tourné quasi exclusivement vers la réex-pédition sur la capitale et les villes du Niger, et leMarché central polyvalent de la ville où exercentles petits grossistes de céréales ainsi que les gros-sistes de légumes (sur la voirie à côté du marché)pour l’approvisionnement local.

Les quantités traitées par les grossistes du Marchécentral et de ses abords (légumes frais) portentenviron sur 30000 tonnes, celles traitées par lemarché de Sikasso Cira sur environ 70000 tonnes.

Il faut également noter les 60000 tonnes environde céréales transitant par les magasins des gros-sistes stockeurs de la ville qui sont, pour l’essen-tiel, destinées à la réexpédition sur Ouagadougouet les villes sahéliennes.

N’Djamena

Une ville moyenne d’environ 600000 habitants en1991.

A N’Djamena, le Marché au mil constitue la plusimportante concentration des activités de gros deproduits vivriers de la capitale (plus de 60000tonnes de céréales), loin devant le Marché central(20000 tonnes) qui est pourtant le pôle dominantpour l’approvisionnement en produits secs et frais.Des aires de dégroupage très actives (produitsfrais, céréales et aussi poisson frais) se sont déve-loppées sur des marchés d’approvisionnementsecondaires tels Dembe et Choléra. Au total, on aévalué à environ 45000 tonnes les flux commer-ciaux de produits maraîchers, fruits et tuberculesarrivant sur les quatre marchés d’approvisionne-ment et de redistribution de la capitale tchadienne,dont 80 pour cent sur les deux principaux marchésurbains (Marché au mil et Marché central).

Encadré 1

Importance de quelques marchés de gros dans différentes villes d’Afrique et de Madagascar

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194: Les circuits d’approvisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchés en Afrique et à Madagascar

Dakar

Une très grande agglomération de près de deuxmillions d’habitants en 1994.

Il existe plusieurs marchés d’approvisionnement etde redistribution de produits vivriers à Dakar. Lesdeux plus importants en nombre de grossistes eten volumes traités sont situés dans la communede Pikine: il s’agit du marché de fruits Syndicat,regroupant environ 200 grossistes et plus de 1500vendeurs semi-grossistes, et du marché delégumes et de tubercules de Thiaroye-Gare. Lepremier traite environ 260000 tonnes par an alorsque le seul «parc à produits» de Thiaroye-Gare,qui regroupe environ 200 grossistes et courtiers,traite à plus de 100000 tonnes de produits fraispérissables par an. Ces deux marchés s’exercentdans des conditions extrêmement difficiles.

Antananarivo

Une grande ville d’environ 1,1 million d’habitantsen 1991.

La géographie des zones d’approvisionnement dela capitale malgache a suscité le développementde deux grands marchés, Anosibe et Andra-voahangy, aux points de rupture de charge descamions et des camionnettes en provenance del’Ouest et du nord.

L’activité du marché d’Anosibe, qui s’est dévelop-pée de façon spontanée sur une ancienne gareroutière au sud-Ouest de la ville, porte surquelques 100000 tonnes annuelles, dont 60 pourcent en produits frais périssables (fruits etlégumes) et le reste en produits secs. Environ12000 à 15000 tonnes de fruits et légumes sontréexpédiées sur Toamasina et Majunga.Andravoahangy est devenu le premier centre d’ap-provisionnement de produits secs (riz et légumi-neuses) des quartiers nord très peuplés et deslocalités suburbaines. Ce marché de gros assureaussi la commercialisation des légumes verts pro-duits dans la couronne maraîchère nord et nord-est, et il est un important centre de stockage et de

commercialisation de l’oignon et de l’ail. Son acti-vité pour les produits secs porte sur au moins20000 tonnes.

Quant à Isotry, situé en plein centre urbain à proxi-mité de la gare ferroviaire et officiellement seulmarché de gros de la capitale, il a perdu une gran-de partie de sa fonction de redistribution des pro-duits secs au profit des deux autres marchés degros. Le marché d’Analakely ne représente plus,quant à lui, le pôle de redistribution qu’il a assuréau niveau des circuits d’approvisionnement dansles années 60. Il n’assume plus guère un rôle degros que pour la commercialisation de certainslégumes verts (brèdes, cressons et tous leslégumes «haut de gamme» dits «européens»).

Bouaké

Une petite ville moyenne d’environ 500000 habi-tants, mais un rôle exceptionnel de carrefour dansles circuits de commercialisation de produitsvivriers de la sous-région.

La ville de Bouaké et son marché de gros jouentun rôle particulièrement important et fort anciendans les circuits marchands de produits vivriers,non seulement de la Côte d’Ivoire, mais aussi dela sous-région de l’Afrique de l’Ouest.

Ce marché traitait en 1993 près de 360000 tonnes,dont plus des deux tiers étaient réexpédiées. Onestime qu’en 1997, année de son ouverture, lefutur marché de gros traitera environ 650000tonnes, dont seules quelque 200000 tonnes repré-senteront la consommation urbaine de Bouaké.

La majorité des réexpéditions concerne l’ignamequi fait de Bouaké le plus grand centre de redistri-bution de ce tubercule de la sous-région, un tiersdes tonnages réexpédiés portant sur des produitssecs (maïs et arachide). La cola transite dans lesens sud-nord et Bouaké constitue le principal lieude stockage et de reconditionnement des noixavant leur exportation dans les pays voisins dunord.

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20 Aliments dans les villes: collection d’ouvrages - vol. 1

Le fractionnement des lots est très important étantdonné la faiblesse des capacités commerciales de lamajorité des acteurs de la redistribution; l’utilisationde moyens de transport non mécanisés est une pra-tique courante et concerne, dans presque toutes lesvilles, une part importante de la redistribution inter-marchés.

En amont, les moyens de transport acheminant lesproduits jusque sur les aires techniques des gros-sistes sont extrêmement divers, mais les véhiculeslégers forment une grande partie du trafic fret et laquasi-totalité de celui des marchés de produits frais(à Dakar, N’Djamena, Cotonou, etc.).

La plupart des marchés de gros de produits vivriersassurent aussi une fonction secondaire de réexpédi-tion plus ou moins développée selon le produit, lemarché, et le rôle de la ville dans les circuits d’appro-visionnement interrégionaux6. Cette fonction peutêtre ancienne (N’Djamena), saisonnière et récente(Cotonou) ou permanente (Anosibe à Antananarivo).Bien que portant sur des tonnages limités, les réex-péditions jouent un rôle économique non négligeablesur le développement de l’ensemble de l’activité desgrossistes.

1.3.3.2Des villes-carrefours assurant les fonctions de groupage pour la réexpédition

Certaines villes secondaires remplissent une fonctionstratégique de groupage et de réexpédition de pro-duits vivriers dans les circuits à longue distance inter-régionaux et/ou internationaux.

Les tonnages traités par les grossistes pour la réex-pédition excèdent largement ceux destinés à la con-sommation urbaine locale. C’est le cas de Bouaké enCôte d’Ivoire et, dans une bien moindre mesure, celuide Bobo-Dioulasso au Burkina Faso.

Les lieux d’activités et les acteurs ne sont d’ailleurspas les mêmes selon que l’on considère la fonctionapprovisionnement de la ville à Bobo, assurée par lespetits grossistes du Marché central et des rues adja-centes, ou celle de réexpédition, gérée par les gros-sistes transporteurs de Sikasso Cira et les grandscommerçants stockeurs de la ville.

1.3.3.3La fonction réexpédition: un rôle moteur pour les grossistes importateurs de riz et de denrées alimentaires

Pour les grands grossistes importateurs ou les gros-sistes distributeurs de denrées alimentaires, la fonc-tion réexpédition joue toujours un rôle aussi important

que celle de la consommation urbaine, et peut mêmereprésenter le moteur de leur activité (Cotonou,Conakry). Leurs clients sont quasi exclusivement desgrossistes et semi-grossistes urbains et ruraux, natio-naux et étrangers. En amont comme en aval, l’appro-visionnement des magasins, comme les flux de réex-pédition, se font essentiellement par les gros por-teurs.

Aussi faut-il souligner que le trafic fret généré par cescommerces de gros représente une source d’embou-teillage et de congestion du centre-ville souvent bienplus importante que ceux occasionnés par les activi-tés des grossistes de produits vivriers.

Ces problèmes généraux de circulation et d’organisa-tion des flux de transport (passagers et marchan-dises), dont souffrent les grandes villes, ont suscitél’élaboration de nombreux projets: plans de circula-tion, projets de rationalisation des activités de trans-port et projets d’équipements connexes en périphériedes villes (plates-formes bimodales, gares routières,zones d’entreposage, etc.). Force est de constaterque peu de projets ont été réalisés jusqu’à présent(ils supposent toujours une mobilisation importantede financements extérieurs) et peu de mesures ontété prises par les Autorités pour limiter la proliférationdes entrepôts privés en plein coeur des villes sur lecourt terme (incitations à la délocalisation vers unezone de stockage, application plus rigoureuse derèglements de circulation, de stationnement et de tra-versée de la ville pour les poids lourds, etc.).

1.3.4La problématique de la création de marchés de gros

La création de marchés de gros représente une étapenécessaire aujourd’hui pour l’amélioration de l’appro-visionnement et de la distribution alimentaires desgrandes villes en Afrique. Les avantages écono-miques qu’ils offrent à l’organisation des filières sontbien identifiés7 (GERGELY, 1996; TOLLENS, 1997).La question qui se pose actuellement est celle desmodalités de leur réalisation et non plus seulementde leur justification.

A cet égard, un nombre de facteurs doit être pris enconsidération.

1.3.4.1Le choix du site d’implantation

La création d’un marché de gros en-dehors de la villea l’avantage de la simplicité (peu ou pas du tout deproblème foncier, pas d’expropriation à envisager) etle mérite de proposer une réponse apparemmentrationnelle.

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Cependant, à la lumière des analyses qui ont étémenées dans plusieurs villes en Afrique et dans lacapitale malgache, la création d’un seul marché degros de vivriers ex nihilo implanté très à l’extérieurdes zones les plus peuplées et des lieux d’activitésdu centre urbanisé semble vouée à l’échec, étantdonné la logique actuelle des circuits d’approvision-nement.

En ce qui concerne les critères d’implantation desmarchés de gros, le débat est ouvert entre les parti-sans d’une implantation à distance minimum despoints de vente principaux (les centres de gravité duréseau des marchés de détail) afin de diminuer lestemps de transport intra-urbain (dont le coût est leplus élevé), et ceux qui estiment «... que l’impact dumarché sur la circulation est plus déterminant: uneimplantation en périphérie offrirait une facilité d’accèsqui compenserait le surcoût du trajet pour ledétaillant.» (DCGTX, 1988).

Deux aspects de la question doivent être soulignés:

1. L’impact sur les coûts du transport intra-urbain et,d’une manière générale, sur les coûts de redistri-bution.

Le principal coût dans les circuits de distributionintra-urbaine est celui du transport.

L’une des conséquences de la réalisation d’unmarché de gros très loin hors de la ville est vrai-semblablement, dans un premier temps, la haussesensible des coûts de distribution intra-urbaine.

Pour pouvoir effectivement amortir ces hausses deprix du transport, il faudrait que les revendeusespuissent augmenter substantiellement leur volumed’achat, ce qui paraît difficile dans l’immédiat, vu lafaiblesse de leurs disponibilités financières.

Il faut souligner, à cet égard, qu’on ignore en gran-de partie le coût réel de la redistribution en milieuurbain. Cette méconnaissance des caractéris-tiques et du coût du fret urbain pour la redistribu-tion intermarchés, qui n’est pas propre auxgrandes villes africaines (DIAGONAL, 1996),appelle un certain pragmatisme en matière delocalisation des équipements de gros et, surtout,une connaissance plus approfondie de cet aspectdéterminant de l’approvisionnement urbain.

2. La multiplication des déchargements sauvages aucoeur de la ville.

Une implantation loin à l’extérieur de la ville estsusceptible d’entraîner la multiplication des lieuxde déchargement sauvages à proximité des mar-

chés de détail, recréant ainsi les nuisances quel’on pensait supprimer. L’extrême volatilité desplaces de grossistes a déjà été soulignée.

Il faut, en effet, tenir compte des spécificitéspropres du fret approvisionnant les grossistesurbains en fruits et légumes: une très grande partde ces produits est acheminée par véhiculeslégers (de une à deux tonnes de charge utile). Onconstate quotidiennement, dans les capitales,combien il leur est facile de «contourner» (au senspropre et figuré) les différentes réglementations depolice sur la circulation et le stationnement.

En conclusion, un aménagement de marché de grosde vivriers doit avoir, pour premier objectif, d’amélio-rer le fonctionnement des circuits d’approvisionne-ment ainsi que les conditions d’activité des opéra-teurs (grossistes comme détaillants) et non de lespénaliser.

C’est pourquoi, lorsque c’est possible (configurationdu terrain, possibilité d’extension, localisation parrapport aux flux principaux, situation déjà à la péri-phérie de la ville), il faut privilégier la réorganisationdes activités de gros sur les sites existants.

Dans d’autres cas, la délocalisation peut s’avérernécessaire: des sites d’implantation potentielle doi-vent être recherchés à distance raisonnable des lieuxd’activités du centre urbanisé.

1.3.4.2 Le regroupement des grossistes sur un marché de gros unique? Quelles incitations?

Il s’agit de considérer les types de regroupements degrossistes qui peuvent être envisagés en fonction desproduits vendus, et la possibilité de rassembler latotalité des grossistes des diverses places de gros dela ville en un seul lieu: le futur marché de gros.

Dans un premier temps, les regroupements possibleset prioritaires concernent les produits frais péris-sables et semi-périssables (tubercules). Dans lesvilles de plus d’un million d’habitants, les tonnagescommercialisés justifient amplement la création demarchés de gros spécifiquement destinés à ces pro-duits. Dans de plus petites villes, notamment cellesde la zone soudano-sahélienne dont la consomma-tion comprend encore une part importante decéréales locales, il peut être envisagé de regroupercommerçants de produits secs et les grossistes devivriers frais. Bon nombre de ces grossistes de pro-duits secs exercent aujourd’hui dans les magasins decertains quartiers «spécialisés». Ils sont souventlocataires. Il faut donc les intéresser à se délocalisersur un marché de gros (conditions de location plus

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sûres, financièrement abordables, meilleur fonction-nement, etc.). C’est un processus qui demande à êtreorganisé par étapes.

D’une manière générale, on soulignera qu’il sembleindiqué d’associer au départ des opérateurs qui par-tagent des conditions communes de fonctionnementet d’organisation et de ne pas associer des filièresaussi différentes que les filières animales (foirail ouabattoir, comme dans l’exemple du projet de Dakarmentionné ci-dessus) à celles de produits vivriers.

La possibilité de regrouper la totalité des grossistesde la ville dès le démarrage du marché de grosdépend de la taille et de la configuration géogra-phique de la ville - et donc de la dispersion des placesde gros sur son territoire -, mais aussi de la fonctionprincipale des grossistes urbains (approvisionne-ment, réexpédition). Le regroupement des grossistessur l’équipement envisagé tient aussi, et surtout, auxefforts de concertation déployés et aux mesures inci-tatives mises en place pour le favoriser.

Cela suppose un processus de concertation qui tien-ne compte des souhaits en matière de services (eau,gardiennage, sécurité, éclairage, etc.), d’installationde stockage, de groupage, de conditionnement et demanutention.

1.3.4.3La gestion et la concertation

Si le marché de gros représente une condition pourl’amélioration du fonctionnement de l’approvisionne-ment urbain, ses répercussions ne se feront sentirque progressivement sur le moyen et long termes, aucours d’un processus de mutation des circuits degros, des comportements des opérateurs et de l’ap-parition de nouveaux opérateurs. Ces changementsne pourront se réaliser sans un processus corres-pondant de concertation entre les partenaires concer-nés.

Les marchés de gros sont des équipements dont lescommunes attendent légitimement des gains supplé-mentaires, quel que soit le mode de répartition adop-té entre l’Etat, l’agglomération et la commune où seraimplanté le marché.

Par conséquent, le succès d’un marché de grosdépendra étroitement de la volonté des opérateursd’y participer et de développer leurs activités dans cecadre nouveau. Il est donc impératif d’impliquer dèsle démarrage du projet les grossistes concernés. Enparticulier, ceux-ci doivent être consultés, non seule-ment sur le site d’implantation, mais aussi sur les ins-

tallations de vente, les services et les règles de fonc-tionnement du marché et de gestion.

Le type de gestion adopté pour le marché de grosreprésente un aspect-clé de l’implication des gros-sistes. Dans le cadre des quelques expériences deSociétés d’économie mixte (SEM) gérantes degrands marchés urbains en Afrique (marchés polyva-lents en général), le rôle mineur dévolu dans le capi-tal social aux usagers grossistes directement intéres-sés ou au secteur privé est une des principales rai-sons des nombreuses défaillances de gestion.

On préconise aujourd’hui dans le montage institution-nel, quand la formule d’une SEM est retenue, de limi-ter l’apport dans le capital social des organismespublics et parapublics afin d’éviter une mainmise del’Administration, de droit ou de fait, sur la gestion cou-rante de la société. D’autres pistes doivent être enfinexplorées, comme celle de la privatisation qui suppo-sent un secteur privé acceptant de prendre desrisques.

1.3.4.4L’importance de constituer des réserves foncières

Quelle que soit la solution retenue pour le courtterme, une démarche de programmation urbaine surle long terme semble nécessaire afin de préparerl’avenir.

En particulier, il semble important d’attirer l’attentiondes Autorités, dès la mise en oeuvre d’un projet deréaménagement ou de création d’un marché de gros,sur la nécessité impérieuse de procéder à la consti-tution de réserves foncières qui sont une condition dela réalisation du réseau d’équipements nécessaires àla mutation progressive souhaitée des circuits d’ap-provisionnement.

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234: Les circuits d’approvisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchés en Afrique et à Madagascar

2Le fonctionnement et l’organisation des grands marchés urbains

2.1Les aménagements et les équipements des marchés

2.1.1 Les équipements publics: un bref rappel historique

Des halles anciennes et vétustes, des bâtimentsrécents peu fonctionnels, des places en nombreinsuffisant: telles sont les principales caractéristiquesdes équipements publics des marchés aujourd’hui.

La halle est le premier équipement, et souvent leseul, ayant été construit sur les marchés centraux. Laplupart datent de la période coloniale.

Hormis la halle, la plupart de ces marchés ne com-prenait aucun aménagement spécifique en matièred’installations de vente ou de stockage.

Il faut attendre la fin des années 60 et le début desannées 70 pour voir la réalisation de nouveaux équi-pements sur plusieurs marchés centraux. Ils ontconcerné en priorité l’aménagement d’emplacementspour les commerçants de produits manufacturéslorsque la configuration du marché s’y prêtait: c’est lavogue des bâtiments à étages, principalement dansles grandes villes côtières (Lomé, Abidjan, Cotonou,Douala, Yaoundé, etc.). Ce type de constructiondevait répondre aux contraintes d’espace et desnombreuses installations de vente nécessaires aucoeur des capitales.

Le rez-de-chaussée de ces bâtiments était générale-ment conçu pour accueillir un certain nombre de com-merçants de produits vivriers (étals maçonnés). Maisces installations n’ont pas toujours été occupéesconformément à leur destination originelle. Dans denombreux cas, sous la pression de la demande, on ya installé des vendeurs de produits manufacturés quiles ont progressivement transformées (ajouts detables et présentoirs, grillage, construction de mursen dur autour de l’étal, etc.) pour les adapter à leursbesoins d’exposition, de stockage et, par consé-quent, de sécurité.

Si l’on excepte les grands projets de réaménagementrécents (marchés de Niamey et de Ouagadougou),les équipements construits depuis les années 70 sesont souvent révélés non fonctionnels, car ilsn’étaient que partiels. Ils n’ont, par conséquent, pas

pu répondre à la demande croissante de places devente sur les marchés centraux.

Ils n’ont pu enrayer le développement incontrôlé d’ungrand nombre de constructions précaires, d’abord surles espaces encore non bâtis du marché, ensuitedans les allées intérieures, aboutissant ainsi à lasaturation définitive de celui-ci.

Enfin, au cours de la décennie 1980-90, l’occupationanarchique des rues adjacentes du marché par lesinstallations des vendeurs ambulants devient très fré-quente: de véritables «marchés parallèles» se créentdont les effectifs peuvent être aussi importants queceux des marchés centraux.

2.1.2L’effectif et la densité des marchés

Les chiffres fournis dans ce chapitre concernent neufgrands marchés centraux en Afrique et à Mada-gascar. L’importance de ces marchés est indiquée autableau 1, à trois niveaux:

• le marché officiel, soit les points de vente à l’inté-rieur des limites officielles du marché retenues parle gestionnaire de ces marchés (municipalités etSEM dans le cas du marché Dantokpa de Cotonou),pour effectuer la collecte des droits de place;

• le marché réel, à savoir les vendeurs du marchéofficiel, plus tous les vendeurs à proximité immédia-te du marché;

• l’hypercentre, c’est-à-dire l’ensemble des points devente recensés dans les rues entourant le marché.

Le plus petit de ces marchés compte quelque 1 300installations de vente, le plus grand environ 15 500.Quatre marchés sur neuf comptent environ 4 500points de vente.

Ces marchés couvrent des surfaces très variables,de moins d’un ha à près de 19 ha. Mais la densité desmarchés présente toutefois deux situations types:des marchés très denses avec 8 à 9 m2 par vendeur,et des marchés dont la densité est faible avec 14 à 17m2 par vendeur. Environ un ha de marché densecomprend à peu près de 1 100 à 1 400 vendeurs(tableau 2).

2.1.3Les installations de vente et de stockage sur les marchés aujourd’hui

La multiplicité, voire l’hétérogénéité, des installationsde vente semblent, à première vue, caractériser les

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marchés africains. Un examen plus attentif montrequ’en fait, on retrouve toujours les quatre mêmesgrandes catégories d’installation de vente, dont leniveau d’équipement est directement fonction duniveau de revenu du commerce considéré. Cettetypologie, classée par niveau d’équipement, dis-tingue: les bâtiments clos (boutique, magasin), l’ins-tallation délimitée par quatre poteaux, couverte etouverte (hangar), la table et l’étalage au sol.

2.1.3.1Des aménagements réalisés en grande partie par les commerçants eux-mêmes

Les aménagements réalisés par les Autorités ges-tionnaires des marchés ne représentent qu’une faiblepart (0 à 30 pour cent) des installations de venteactuelles sur les marchés centraux, à l’exception duMarché central de Bobo-Dioulasso (68 pour cent) quiest l’un des rares à avoir fait l’objet d’un aménage-ment complet après l’Indépendance.

2.1.3.2Des installations financées dans leur très grandemajorité par les commerçants eux-mêmes

Jusque vers la fin des années 70, la construction desboutiques et des hangars a été laissée le plus sou-vent à la libre initiative des commerçants. A partir desannées 80, à l’occasion de travaux partiels de réamé-nagement des marchés par le gestionnaire - ou suiteaux incendies - les constructions ont dû plus fré-quemment respecter un cahier des charges minimumconcernant essentiellement la trame des installationsde vente, leur alignement, ainsi qu’une certaine sec-torisation des produits vendus.

2.1.3.3Des installations de vente en majorité ouvertes

Les hangars, tables et étalages au sol représentententre 60 et 80 pour cent du total des installationsrecensées sur les marchés (tableau 3).

Tableau 1

Marchés centraux en Afrique et à Madagascar

Marchés centraux: marchés officiels et marchés réels

Bobo-

Ville: Dioulasso N’Djamena Cotonou Libreville Antananarivo

Marché: Marché Marché Marché Dantokpa Mont- Analakely Andravoahangy Anosibe Isotrycentral central au mil Bouët

Officiel 4 837 2 663 4 293 15 342 4 251 4 356

Réel 5 332 3 895 4 693 n.d. 5 982 5 467 2 564 1 495 1 294

Hypercentre 7 234 8 588* n.d. 6 682 9 179** 3 551** 2 296**

N.B.: (*) Hypercentre constitué du marché central et du marché à mil, ainsi que des vendeurs ambulants;

(**) Zoma + jour de foire;

(n.d.) non disponible.

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254: Les circuits d’approvisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchés en Afrique et à Madagascar

Tableau 2

Effectif des installations et des vendeursNombre moyen de vendeurs par installation

AFRIQUE

Bobo-

Ville Dioulasso N’Djamena Cotonou Libreville

Marché Marché Marché Marché Dantokpa Dantokpa Dantokpa Mont-

central central au mil nord sud nord et sud Bouët

Total intallations 4 837 2 663 4 293 13 299 2 043 15 342 4 251

Installations en activité 4 603 2 539 4 006 11 352 1 699 13 051 3 769

Vendeurs principaux 5 440 3 259 5 325 12 115 1 838 13 953 3 884

Vendeurs auxiliaires 919 329 744 4 166 680 4 846 n.d.

Total actifs 6 359 3 588 6 069 16 281 2 518 18 799 3 884

Vendeurs/intallation 1,18 1,28 1,33 1.07 1,08 1,07 1,03

Vendeurs auxiliaires/installation 0,20 0,13 0,19 0.37 0,40 0,37 n.d.

Total actifs/installation 1,38 1,41 1,52 1,44 1,48 1,44 n.d.

MADAGASCAR

Ville Antananarivo

Marché Analakelmy Andravoahangy Anosibe IsotryJour ordinaire Foire Jour Foire Jour Jour Foire

officiel réel ordinaire ordinaire ordinaire

Total intallations 3 456 5 467 9 179 2 564 3 551 1 495 1 294 2 296

Installations en activité 2 938 4 634 8 347 2 190 3 082 1 358 1 202 2 175

Vendeurs principaux 2 938 4 634 8 347 2 190 3 082 1 358 1 202 2 175

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En conséquence, sur tous les marchés, les vendeurséprouvent d’énormes besoins de gardiennage et, sur-tout, d’organisation du stockage temporaire.

2.1.3.4Des «installations» ambulantes (tables individuelleset étalages au sol) qui ont envahi tous les espacesinterstitiels des marchés

Ces installations représentent entre 33 et 50 pourcent du total sur les marchés. La prolifération de cesinstallations précaires sur les voies de circulationsoulève des problèmes considérables d’organisation,d’entretien et de nettoyage des marchés. Voir lestableaux 4 et 5.

2.1.4Les caractéristiques physiques de deux exemples types de marchés

Du point de vue des caractéristiques physiques, onpeut classer les grands marchés des villes africainesen deux types: les marchés «centres commerciaux»et les marchés «zone».

2.1.4.1Les marchés «centres commerciaux»

Ils sont d’origine souvent ancienne et de taille plutôtréduite car ils ont été implantés dans le coeur com-mercial des cités. Leurs emprises ont été bien cir-conscrites dès leur création. Ils sont fortement struc-turés et organisés, le secteur des produits manufac-turés domine en nombre de vendeurs, l’activité degros et de demi-gros dans le vivrier y est réduite(Bobo-Dioulasso, Marché central de N’Djamena, etd’Analakely à Antananarivo).

Ces marchés sont densément bâtis8: les installationsfermées (de type boutique) ou hangars en dur yreprésentent la majorité des installations de vente.

2.1.4.2Les marchés «zone»

Ils se sont développés spontanément sur de vastesterrains, à l’origine relativement éloignés de l’épi-centre marchand de la cité.

Tableau 3

Répartition des installations par type

Bobo-

Ville Dioulasso N’Djamena Cotonou Libreville Antananarivo

Marché Marché Marché Dantokpa Mont- Anala- Andra- Anosibe Isotry

central central au mil nord nord sud Bouët kely voahangy

et sud

Total installations 4 837 2 663 4 293 15 342 13 299 2 043 4 251 3 456 2 564 1 495 1 294

Répartition en %

Installations

pouvant se fermer 53 39 29 16 16 13 20 25 33 15 15

Hangars 9 20 29 48 47 53 12 0 1 9 0

Tables 24 19 6 26 27 23 63 71 54 47 63

Etalages au sol 14 22 36 10 10 11 5 4 12 29 22

Total 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100

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Leurs limites n’ayant jamais été définies avec préci-sion, ils se sont étendus de façon anarchique, princi-palement par adjonction de hangars bricolés et d’ins-tallations précaires. Suite à l’urbanisation, ils sontaujourd’hui entourés par des quartiers très peuplés.Du fait de la présence de ces gros marchés, la fonc-tion habitat se transforme progressivement au profitde la fonction commerciale, d’entreposage principale-ment.

Il faut souligner qu’il existe sur chaque marché dessecteurs semblables au type «centre commercial» etd’autres dont le bâti ressemble à celui du marché«zone».

Cette dualité est le reflet de la division entre com-merces «riches» (produits manufacturés) et com-merces «pauvres» (alimentaire, artisanat, friperie) quicommande à l’organisation spatiale de tous les mar-chés.

2.2La gestion des marchés, les statuts et les modes d’occupation par les commerçants

2.2.1La gestion des marchés

2.2.1.1La gestion et l’organisation des marchés

A l’exception de quelques marchés récemmentconstruits ou réhabilités grâce à des financementsextérieurs, la plupart des marchés relèvent de la com-pétence municipale, aussi bien pour l’aménagementet l’entretien que pour le recouvrement des droits deplace (régie directe).

L’intervention de la municipalité en matière d’organi-sation des marchés (et des gares routières) recouvreprincipalement quatre fonctions:

Tableau 4

Répartition des installations de venteen installations permanentes (fixes) et mobiles

Bobo-

Ville Dioulasso N’Djamena Cotonou Libreville Antananarivo

Marché Marché Marché Dantokpa Mont- Anala- Andra- Anosibe Isotry

central central au mil nord nord sud Bouët kely voahangy

et sud

Total installations 4 837 2 663 4 293 15 342 13 299 2 043 4 251 3 456 2 564 1 495 1 294

Répartition en %

Permanents 64 64 58 67 50 31 43 31 20

Mobiles 36 36 42 33 50 69 57 69 80

Total 100 100 100 100 100 100 100 100 100

N.B.: (*) y compris les étals en maçonnerie sur certains marchés

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• l’attribution des places et le recouvrement des taxesde marché;

• le règlement du marché;

• les aménagements complémentaires (construc-tions);

• les services et l’entretien.

Les services administratifs impliqués:

• selon les villes, il existera un service spécifique -Service des halles et marchés - où les fonctions ci-dessus seront assurées par les services techniquesgénéraux de la Mairie en application des délibéra-tions du Conseil municipal (attribution des placespar exemple);

• les services techniques qui ne s’occupent que defaçon marginale de la gestion des équipementsmarchands;

• la Trésorerie générale de l’Etat qui est aussi celle deRecette publique (receveur municipal). Le recouvre-ment des taxes est, dans la plupart des cas, assuréen régie par des collecteurs intervenant sous l’auto-rité du receveur municipal et sous le contrôle dumaire;

• d’autres services, comme les services d’hygiène etla Police municipale, sont aussi appelés à intervenirdans le fonctionnement des équipements mar-chands, principalement dans celui des marchés.

Comme on l’a noté précédemment en matière d’amé-nagement et d’entretien, les interventions des com-munes sont en général très limitées par le manque de

Tableau 5

Répartition des installations de venteen installations covertes et non couvertes

Bobo-

Ville Dioulasso N’Djamena Cotonou Libreville Antananarivo

Marché Marché Marché Dantokpa Mont- Anala- Andra- Anosibe Isotry

central central au mil nord nord sud Bouët kely voahangy

et sud

Total installations 4 837 2 663 4 293 15 342 13 299 2 043 4 251 3 456 2 564 1 495 1 294

Répartition en %

Couverture

permanente 69 76 64 70 71 66 51 42 49 40 33

Couverture précaire 9 8 13 9 8 12 30 39 n.d. n.d. n.d.

Non couverte 22 16 23 21 21 22 19 19

Total 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100

N.B.: Couverture permanente: installations fixes et mobiles sous halle, hangar, bâtiment;

Couverture précaire: installations sous parasol, bâche, secco, etc.

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moyens techniques et financiers: le bâti est souventvétuste, les équipements sanitaires sont déficients,voire absents et, de façon générale, l’assainissementdes marchés est insuffisant. La maintenance estréduite à sa plus simple expression et, dans la pra-tique, la gestion des sites des marchés est laisséeaux commerçants et à leurs associations.

2.2.1.2La contribution des marchés aux finances locales

Les municipalités ont vu, au fil des années, leur situa-tion financière se détériorer en raison des chargesaccrues et des besoins d’équipement et de servicesque l’accroissement de la population urbaine a géné-ré.

Se sont ajoutées les difficultés financières liées à ladiminution des reversements de recettes par l’Etat età l’unicité de caisse qui occasionne des problèmes detrésorerie à la municipalité9.

Les marchés constituent, a priori, des gisementsimportants de ressources au travers des loyers, desdroits de place et des patentes10. On rappellera icique les produits du Domaine «ont pour caractéris-tique d’être les seules ressources gérées en directpar les collectivités locales» (BREEF/CFD, 1994). Ilsconcernent surtout les services publics marchands(marchés, abattoirs, gares routières).

Dans la réalité, les marchés ne fournissent pas lesrecettes escomptées, qui ne dépassent que très rare-ment 10 pour cent des recettes courantes desgrandes villes d’Afrique subsaharienne.

Par exemple, les comptes administratifs de la com-mune de Ouagadougou montrent que les marchés etles gares routières alimentent le budget de la ville àhauteur de FCFA 40 à 50 millions (les marchés repré-sentant FCFA 12 millions). Ce montant équivaut àcinq pour cent des recettes de fonctionnement réellesde la commune.

Les raisons de cette faible contribution financièresont presque toujours les mêmes et combinent plu-sieurs facteurs:

• la faiblesse générale des droits de place;

• l’évaporation des sommes recouvrées par les col-lecteurs. La faiblesse des rémunérations et desprimes qui leur sont allouées favorise la fraude et lacorruption (mise en circulation de faux tickets,entente entre les commerçants et collecteurs pours’acquitter partiellement des droits de place, etc.);

• la qualification des personnes recrutées pour assu-rer la collecte est globalement insuffisante, voireinexistante puisque certaines d’entre elles sont illet-trées. Bon nombre de collecteurs étant d’un niveaude formation faible ou inexistant, la tenue de leurslivres et registres oblige le régisseur municipal àpratiquer la substitution;

• le manque de moyens et les difficultés pratiques derecouvrement: les collecteurs, le plus souvent, nedisposent ni des plans des marchés, ni des listesdes commerçants ou des emplacements. En l’ab-sence d’une autorité reconnue et respectée, ilséprouvent généralement de grandes difficultés dansl’exercice de leurs fonctions, selon les marchés;

• les mauvais résultats de la collecte sont dus à l’ab-sence de motivation des agents ou à la fraude. Ilsse reproduisent parce que, en général, il n’existepas de suivi régulier des recettes réalisées parchaque collecteur et parce que le contrôle semblerelever d’actions ponctuelles;

• les difficultés à les recouvrer, a fortiori à les aug-menter, en raison de l’absence générale de serviceset d’équipements sur les marchés.

Cependant, on n’explique pas le faible taux de recou-vrement par le seul fait de collecteurs indélicats. Onfait quelquefois le constat d’une mise à contributiondes commerçants par les communes, lors de certainsévénements (élections), qui peut se traduire, parexemple, par un allégement de leurs contributionssous forme de droits de place.

Au total, les taux de recouvrement des droits deplaces dépassent rarement 30 pour cent sur l’en-semble des marchés d’une ville et l’impact sur lesfinances locales est encore aujourd’hui marginal(tableau 6).

On constate enfin rarement une réelle volonté poli-tique de l’Autorité municipale d’améliorer les res-sources financières, d’obtenir des résultats et de sedoter des moyens nécessaires, malgré un cadre ins-titutionnel, juridique et comptable peu ou pas adapté.

Les faits observés ne militent pas pour une gestionmunicipale centralisée des équipements marchandsactuels ou futurs. On envisage fréquemment, à l’oc-casion d’un réaménagement de marché, un mode degestion en régie directe avec une autonomie finan-cière, ou déléguée. Une troisième voie pour lesgrands équipements marchands est envisagée éga-lement, celle de la concession à une structure mixte(SEM) ou privée. Les quelques exemples de SEM ou

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de Chambres de commerce assurant la gestion degrands marchés urbains montrent suffisammentquelles sont les dérives qui guettent ce type de ges-tion dans la mesure où les marchés sont alors utiliséscomme centres de profits; les services rendus auxusagers ne sont, la plupart du temps, pas beaucoupplus satisfaisants que ceux des municipalités.

2.2.2Les statuts et les modes d’utilisation des installations de vente: des enjeux de pouvoir

«Obtenir une place sur le marché est un obstaclebien plus grand que d’obtenir des marchandises.»(LEWIS et ROBERTSON, 1976).

Ce constat, qui souligne la difficulté pour un commer-çant d’avoir d’accès aux marchés centraux, qu’il

s’agisse de Dakar, d’Abidjan, de Lomé, d’Accra oudes grands marchés Yorouba à la fin des années197011 est plus que jamais d’actualité (LEWIS etROBERTSON, 1976).

Pourtant, la congestion de ces marchés par des ven-deurs ambulants «illégaux» donnant à penser que lesAutorités ont souvent renoncé à en réguler l’accèssous l’effet de la pression des commerçants, en par-ticulier, et de l’opinion publique, en général, peutsembler paradoxale. En réalité, obtenir une placerégulière sur le marché central reste l’objectif premierde tous ces vendeurs «illégaux» très conscients de laprécarité de leur situation.

Des mesures restrictives visant à limiter l’entrée«d’outsiders»dans les circuits commerciaux et, de cefait, sur les marchés, ont toujours existé parmi cer-taines catégories de commerçants, comme par

Tableau 6

Budget des collectivités locales en Afrique centrale et de l‘Ouest(en milliards de FCFA)

Sénégal Cameroun Côte Burkina Bénin

d’Ivoire Faso

Fiscalité partagée 0,7 7,3 0 0,1 0

Dotation en fonctionnement 0 0 3,5 0 0

Fiscalité directe locale 7 5,2 12,3 1,2 1,1

Impôt per capita 1,8 0,8

Taxes foncières 1,8 3,5

Taxes d’habitation

Patentes/licences 3,3 3,0 6,5 1,0

Taxes municipales et

produits du domaine 3,1 2,0 4,1 0,4 0,3

Dont marchés 1,9 0,4 2,1 0,1

Autres (dont report) 0,2 10,0 1,7 0,5 0,05

Total 11,0 24,5 21,6 2,2 1,5

Source: BREEF/CFD, 1994.

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exemple les interventions des revendeuses de tissussur les grands marchés de la côte auprès des res-ponsables visant à interdire l’attribution d’une placeaux femmes «étrangères» et/ou fonctionnaires(LEWIS, 1976; CORDONNIER, 1987).

Mais à ces comportements corporatistes, acceptéscomme des règles du jeu inhérentes à la réalisationde certaines activités commerciales, sont venuess’ajouter des pratiques dues à la concurrence exa-cerbée que se livrent les vendeurs pour obtenir uneplace sur des marchés déjà saturés. Cette situation asouvent accompagné des changements politiquesdans le pays, facteurs qui ont accru d’autant le pou-voir discrétionnaire du gestionnaire dans l’attributiondes emplacements au détriment des règles deconsultation des associations des commerçants quiprévalaient autrefois, au cas par cas, sur certainsmarchés12 (CORDONNIER, 1987).

Ceci explique l’opacité qui entoure encore, aujour-d’hui, les conditions réelles d’attribution d’un empla-cement sur le marché central et dont l’arbitraire estconstamment dénoncé par les vendeurs: «Plus dedémocratie et d’équité dans la distribution desplaces», tel est l’un des souhaits majeurs en matièrede gestion des marchés.

Les règles d’attribution des places de marché, quiinterdisent la sous-location et veulent qu’il n’y aitqu’un attributaire par emplacement et qu’un vendeurne puisse en cumuler plusieurs, sont partout trans-gressées. Il n’y a jamais identité entre le nombred’installations d’un marché et le nombre de vendeurs;de même, la liste d’attributaires que l’on peut trouverauprès de la municipalité n’a qu’un lointain rapportavec la réalité.

2.2.2.1La sous-location et la revente de pas-de-porte

La sous-location et la revente de pas-de-porte sontdes pratiques généralisées sur tous les grands mar-chés étudiés.

Les installations les plus couramment sous-louéessont les boutiques et les hangars. A Mont-Bouët, onobserve une situation assez exceptionnelle: celle dela sous-location généralisée des «stands» (étalsmaçonnés). La sous-location de ce type d’installationse pratique entre attributaires nationaux «proprié-taires non commerçants absentéistes» et commer-çants étrangers.

Deux éléments principaux sont à souligner:

• dans presque tous les cas recensés (informationsdirectes du vendeur), le sous-locataire paye saredevance au service du marché en plus du loyer;

• les montants de la sous-location représentent tou-jours une charge beaucoup plus lourde que le paie-ment de la redevance mensuelle ou du droit deplace.

Les montants de la sous-location varient fortementsuivant le type d’installation, sa localisation et les pro-duits vendus par le sous-locataire, en d’autres termesson chiffre d’affaires potentiel. Ces montants repré-sentent une charge beaucoup plus lourde que lepaiement de la redevance mensuelle ou du droit deplace.

2.2.2.2La cession

La cession d’installations est aussi une pratique cou-rante. Elle aurait été particulièrement fréquente entrela fin des années 70 et le début des années 80, datesqui marquent, sur les marchés, l’essor important desvendeurs de produits manufacturés (produits«riches»).

A Bobo-Dioulasso dans les années 80, les montantsne dépassaient pas FCFA 150 000 à 300 000 selon lataille du hangar ou de la boutique. Aujourd’hui, lessommes sur un marché comme celui de Bobo-Dioulasso s’élèvent à plus d’un million de FCFA pourune boutique bien placée de neuf m2.

Fin 1994, sur le marché de Thiaroye-Gare, la cessiond’une «cantine» (boutique) montait à un peu plus d’unmillion de FCFA.

2.2.2.3La multipropriété

Il est très courant qu’un vendeur dispose de plusieursinstallations de vente à travers des prête-noms. Onconstate que ces cas de multipropriété concernentexclusivement les commerçants de produits manu-facturés à forte valeur ajoutée et les commerçants deproduits alimentaires de première nécessité (riz,sucre, farine, sel, etc.).

2.2.2.4Des installations gelées par des particulierspour leurs besoins de stockage

Le recours à cette multipropriété est souvent la façonde satisfaire les besoins de locaux de stockage defaible capacité qui caractérisent les marchés, besoins

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qui ne peuvent être satisfaits par la location d’entre-pôts en ville, trop grands ou trop chers.

2.2.2.5Le partage des installations

La pratique inverse de partage d’une installation parplusieurs vendeurs est tout aussi répandue. Deuxcauses distinctes sont à l’origine de cette situation: lasaturation des marchés et donc l’impossibilité d’obte-nir un emplacement, de même que la nécessité departager les frais d’installation et d’exploitation del’installation.

2.2.3Les dysfonctionnements

2.2.3.1Des marchés vides à l’intérieur

La plupart des grands marchés urbains, que l’ondésigne habituellement comme sursaturés, présen-tent toutefois toujours un secteur vide ou sous-occu-pé à l’intérieur. Il s’agit généralement d’un secteurcompris dans la partie du marché aménagée à l’origi-ne par le gestionnaire. Les installations vides ferméesou inoccupées que l’on recense s’expliquent pourdiverses raisons:

Les faillites, maladies graves, décès, problèmespolitiques ayant entraîné la ruine ou la fuitede commerçants

Ce sont les raisons les plus couramment évoquéesde l’inoccupation des installations de vente ferméeset/ou vides depuis plusieurs mois, voire (très rare-ment) depuis quelques années.

Situation ambiguë: théoriquement, toute cessation del’exploitation commerciale sur le marché devrait êtresanctionnée par la réattribution de l’emplacement àun autre commerçant. Dans la pratique, aucunemesure de ce genre ne peut être prise (absence d’unrèglement intérieur, pressions multiples qui ne man-quent pas de s’exercer sur le gestionnaire lorsquel’installation a été financée et construite par le com-merçant, etc.) de telle sorte qu’au pire, la situationreste en l’état, au mieux, une solution est recherchéeavec la famille (succession du commerçant ou sous-location de l’installation).

Des aménagements non fonctionnels, des défautsde construction, des problèmes économiques

Hormis ces cas ponctuels, on recense des rangéesentières d’installations de vente vides ou très faible-ment occupées depuis plusieurs années et ceci dans

les secteurs des marchés qui ont fait l’objet d’un amé-nagement par le gestionnaire.

L’existence de nombreuses installations vides dansces secteurs peut s’expliquer par un ensemble de rai-sons dans lesquelles interviennent trois grands pro-blèmes:

• les problèmes économiques fragilisant la professioncommerciale: concurrence des vendeurs à la sau-vette à l’intérieur et aux abords des marchés, délo-calisation arbitraire de commerçants sur un sitedéfavorable à leur activité économique, taux dessous-locations qui ne sont plus supportables dansune situation de crise;

• les dysfonctionnements propres à l’organisation desmarchés: absence de sectorisation des produits,difficultés d’accès à certains secteurs du marché;

• les défauts de conception, de construction et/oud’entretien des aménagements par le gestionnaire.

2.2.3.2Les magasins habitations:les marchés comme lieux de repli

On observe qu’une bonne partie des magasins sonten réalité de véritables habitations où résident defaçon permanente des ménages (ménages des gar-diens, de certaines catégories de grossistes devivriers, etc.). Ces marchés «zone» présentent ainsila caractéristique de ne pas fonctionner seulementcomme centres de commerce mais aussi commelieux de repli, de survie et d’habitation pour desfamilles très démunies de la ville.

La perte de ce type d’habitat sur un marché réamé-nagé, est une des conséquences dramatiques etredoutées d’un «projet de marché».

2.3Les vendeurs et l’activité économique

2.3.1Les comportements des vendeurs et les stratégies commerciales: les effets de la crise

Les différentes observations faites sur les grandsmarchés urbains en Afrique et à Madagascar confor-tent toutes ce même constat: il y a une réelle muta-tion dans la composition et le comportement de lapopulation des vendeurs des marchés.

Ce qui frappe aujourd’hui dans cette population, c’estbien, d’une part, le nombre croissant d’ambulants iti-

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nérants, semi-itinérants et occasionnels et, d’autrepart, la forte mobilité spatiale des stratégies commer-ciales des vendeurs installés.

Les distinctions, opératoires autrefois, entre séden-taires et ambulants, réguliers et occasionnels,deviennent de plus en plus floues; l’image du vendeurà l’étal attendant son client et de l’ambulant se por-tant au devant de celui-ci, est aujourd’hui totalementbrouillée.

Les vendeurs réguliers payant redevance sontprompts à dénoncer la concurrence des ambulants,des occasionnels et des «illégaux» squattant lesallées et les abords des marchés, et à exprimer leurregret d’un âge d’or où l’ordre régnait sur les marchéset où chacun était à sa place; mais ces discoursvéhéments masquent des comportements ambigus:ces vendeurs sont souvent aujourd’hui les premiers àutiliser des ambulants pour écouler plus rapidementleurs marchandises et à se déplacer eux-mêmes surd’autres marchés régionaux où ils concurrencent, àleur tour, les vendeurs régulièrement installés.

2.3.2L’activité économique sur les marchés: commerces «riches» et commerces «pauvres»

On constate une remarquable stabilité de la structuredes chiffres d’affaires par catégorie d’activités surl’ensemble des marchés étudiés.

2.3.2.1Les commerces de détail

Sur l’ensemble des marchés d’Afrique de l’Ouest, leschiffres d’affaires journaliers des produits vivriers debase (condiments, légumes courants et produitssecs) se situent entre FCFA 2 000 à 8 000 (Afriquede l’Ouest) et entre FCFA 10 000 à 20 000 (Libre-ville).

Le commerce général alimentaire génère un chiffred’affaires deux à trois fois supérieur à celui du vivrier.Les bouchers sont les mieux lotis avec des chiffresd’affaires qui varient entre FCFA 25 000 et 40 000selon les pays.

Dans le commerce des produits vivriers de groscomme de détail, les marges commerciales sont trèslimitées. Elles sont particulièrement faibles pour lestoutes petites détaillantes qui forment la grande majo-rité des vendeuses. La marge brute se situe entreFCFA 500 et 1 000. Le bénéfice net, une fois déduitsles coûts d’exercice de l’activité sur le marché, nedépasse pas FCFA 500 à 700 par jour.

Pour les produits manufacturés, les chiffres d’affairesse situent entre FCFA 10 000 et 30 000 par jour enAfrique de l’Ouest et entre FCFA 20 000 et 40 000 auGabon.

Les marges des commerçants de produits manufac-turés sont très difficiles à saisir étant donné la multi-plicité des sources d’approvisionnement et le poidsdes circuits de fraude. Ces derniers permettentd’ailleurs aux commerçants d’abaisser leurs prix et degarder ainsi un volume de vente suffisant bien plusque d’augmenter leurs marges. Sur des produitscomme les pagnes de luxe (Wax de Hollande oud’Angleterre), les marges se seraient considérable-ment réduites ces dernières années (pas plus de cinqpour cent du chiffre d’affaires comme bénéfice net).

On note que, sur tous les marchés, les chiffres d’af-faires les plus faibles pour les produits manufacturéss’observent dans les commerces de friperie et d’ar-ticles artisanaux à usage domestique.

2.3.2.2L’artisanat et les services

A l’exception de la restauration (les gargotes), cesactivités génèrent les chiffres d’affaires les plus basde tous les marchés: de FCFA 3 000 à 5 000 enAfrique de l’Ouest, et de FCFA 12 000 à 15 000 àLibreville.

2.3.2.3Les commerces de gros

Dans le commerce de gros on observe, selon lescatégories de produits, la même dispersion deschiffres d’affaires que pour les commerces de détail.Les relevés sur les marchés montrent que les gros-sistes ont un chiffre d’affaires de huit à dix fois supé-rieur pour un produit donné (vivrier ou manufacturé) àcelui du détaillant correspondant.

D’une manière générale, les vendeurs soulignenttous la baisse de leurs chiffres d’affaires depuis cescinq dernières années. La crise économique serépercute surtout sur les commerces les pluspauvres, comme les produits vivriers et les tout petitsartisans; elle entraîne une réduction de leurs margesà la limite de la survie.

Le tableau 7 résume les chiffres d’affaires quotidiens,en FCFA, observés en Afrique centrale et occidenta-le (Libreville exceptée).

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2.4L’organisation des marchés et les dynamiques spatiales à l’oeuvre

2.4.1Des services inexistants ou largement insuffisants palliés par les vendeurs

On examinera dans ce chapitre comment les ven-deurs s’organisent pour exercer leurs activités, com-ment ils pallient la défaillance des services quidevraient normalement leur être fournis par l’Autoritédu marché (eau, latrines, éclairage, stockage, net-toyage et sécurité, etc.) et ce qu’il leur en coûte.

2.4.1.1 La sécurité et le gardiennage

En règle générale, la sécurité des personnes et legardiennage des marchandises ne sont, de fait,jamais assurés par le gestionnaire des marchés oules pouvoirs publics. Les vendeurs se sont organisésen conséquence.

La sécurité

L’insécurité est devenue un problème majeur surnombre de marchés, en particulier pour les grossistesqui manipulent de grosses sommes d’argent et dontl’activité se déroule souvent à la tombée de la nuit ouà l’aube, dans des zones généralement mal éclai-rées. Il faut dire que ce phénomène a pris une certai-ne ampleur sur les marchés d’Antananarivo et deConakry. On assiste ainsi, sur certains marchésd’Antananarivo, à l’organisation par les grossistes de

véritables corps d’agents de sécurité rémunérés etrecrutés parmi les porteurs. A Conakry, ce sont lesdétaillants de produits de haute valeur (hi-fi, radios,télévisions) du marché Niger, par exemple, qui entre-tiennent une milice permanente pour la protectiondes clients.

Le gardiennage des marchandises

Sur tous les marchés, l’emploi d’un gardien est larègle pour les commerçants installés dans une bou-tique ou dans un hangar, et est même assez fréquentchez les vendeurs disposant d’une table. Le coût dugardiennage est très souvent partagé entre plusieursvendeurs. Le montant de la rémunération varie sui-vant la valeur des marchandises à garder et les ser-vices complémentaires qui peuvent lui être deman-dés (nettoyage).

Ce gardiennage privé semble insuffisant et tous lescommerçants se plaignent du développement desvols, de nuit comme de jour.

2.4.1.2L’approvisionnement en eau: marchands d’eau et branchements privés

L’eau est nécessaire à tous les vendeurs pour la bois-son, le nettoyage et le rafraîchissement des légumes,le nettoyage des stalles des bouchers et des ven-deuses de poisson frais, etc.

Les points d’eau sur les marchés sont inexistants oune fonctionnent plus. L’approvisionnement des usa-gers se fait par porteurs d’eau ou en achetant l’eau

Tableau 7

Chiffres d’affaires journaliers en Afrique centrale et de l’Ouest(FCFA)

Détail Gros

Vivriers 2 000 - 8 000 20 000 - 80 000

Produits alimentaires 11 000 - 28 000 60 000 - 90 000

Produits manufacturés 10 000 - 30 000 80 000 - 1 400 000

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de branchements privés (souvent pirates). La diversi-té des situations rencontrées entraîne de fortes varia-tions du prix d’achat de l’eau.

2.4.1.3L’entretien, le nettoyage et l’enlèvement des ordures

Un nettoyage intérieur des marchés est, danspresque tous les cas, assuré par l’Autorité du mar-ché, mais toujours de façon très insuffisante. Lesvendeurs pallient, dans la mesure du possible, l’in-suffisance de ce service en recourant à un aide fami-lial qui est chargé de faire le nettoyage de la placetrès tôt le matin. Si le nettoyage pose peu de pro-blèmes pour les vendeurs de produits manufacturés,en revanche, les commerces produisant beaucoupde déchets (les produits vivriers et surtout la bouche-rie) ont beaucoup plus de mal à atteindre un niveauminimal d’hygiène.

2.4.1.4Les équipements sanitaires

Presque tous les marchés sont équipés de latrines (àl’exception bien connue des marchés de N’Djamena)dont l’état est plus ou moins satisfaisant. Elles sont,de toute façon, toujours en nombre insuffisant etchères.

2.4.1.5Un besoin permanent sur tous les marchés: le stockage des invendus; un service adapté: le stockage à façon

Sur tous les marchés fonctionnent des systèmes degardiennage et de stockage temporaire (à façon) misen place et assurés par les commerçants. Ils consis-tent en réseaux d’installations dans lesquels les com-merçants viennent déposer le soir leur marchandisecontre paiement d’un loyer calculé à la journée ou aumois et dont le montant est indexé sur la valeur de lamarchandise. Ces installations sont le plus souventdes constructions fermées (boutiques, magasins),mais on rencontre aussi des «gardiens à façon» ins-tallés sous des hangars ou autour des marchés dansles installations des particuliers.

Ce besoin, que l’on retrouve sur tous les marchés,n’a jamais été organisé ni même identifié à l’excep-tion notable du marché Dantokpa où le gestionnaire aconstruit un certain nombre d’entrepôts à cet effet,mais dont la gestion est confiée à des privés.

Pour le cas particulier des bouchers et des vendeursde poisson se développe un stockage à façon debahuts congélateurs détenus par des commerçants.Ils sont encore en nombre insuffisant et pratiquent

souvent des tarifs élevés. On note que les quelqueschambres froides qui ont pu être construites sur lesmarchés par le gestionnaire ne fonctionnent pas outrès mal.

2.4.1.6Un service omniprésent sur tous les marchés:la restauration

Les gargotes des marchés qui ont pour clients tousles usagers (vendeurs et acheteurs), sont devenuesles cantines des travailleurs des quartiers environ-nants et sont aussi les seuls endroits, comme àAntananarivo par exemple, où peuvent s’approvision-ner les ménages très démunis.

Ces services sont indispensables sur les marchésmais leur présence pose un certain nombre de pro-blèmes de sécurité anti-incendie qu’il faut résoudre.

2.4.2Le coût de l’exercice de l’activité sur les marchés

On fera ci-après le récapitulatif de tous les coûts quedoit payer le vendeur pour exercer son activité dansl’enceinte d’un marché. Ces coûts comprennent larémunération des services ci-dessus et la redevanceou droits de place prélevés par le gestionnaire dumarché.

2.4.2.1Les droits de place

On observe deux modes de paiement pour l’occupa-tion d’un emplacement sur les marchés: la locationmensuelle et le paiement journalier.

La location mensuelle

Sur tous les marchés, la location mensuelle concerned’abord les commerçants installés dans une bou-tique, qu’il s’agisse d’une installation construite àleurs frais ou non. Les tarifs ont une progression plusou moins corrélée avec la surface occupée. Ons’aperçoit que l’échelle adoptée avantage en généralpresque toujours les grandes installations, sauf lors-qu’il existe un recensement systématique des sur-faces, ce qui est très rare.

En principe, l’autorisation d’occupation d’un emplace-ment sur le domaine privé de l’Etat ou de la commu-ne donne droit, une fois les différentes taxes payées,à la délivrance d’une carte de commerçant et à l’attri-bution d’un numéro apposé sur la boutique ou sur lehangar. La carte de commerçant est surtout utiliséepour l’établissement des patentes et de l’impôt sur les

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Bénéfices industriels commerciaux (BIC). Les com-merçants s’acquittant mensuellement de la locationfont toujours l’objet d’un recensement. Les docu-ments existants contiennent rarement des informa-tions sur l’identité du commerçant, ses activités, lessurfaces occupées, etc. De plus, n’étant pas réguliè-rement mis à jour, ils ne permettent pas de suivrel’évolution de la situation des marchés (notamment ladétermination des retardataires redevables).

Le droit de place journalier

Le paiement journalier s’effectue contre remise d’unticket. Les tarifs pratiquent généralement une diffé-rence selon les catégories de vendeurs: entre ambu-lants et sédentaires (tous les marchés), commerçantsde vivriers et manufacturés, «grosses» revendeuseset petites détaillantes de vivriers, manufacturé«riche» ou «pauvre» (fripier) (Mont-Bouët, Dan-tokpa), selon le type d’installation: précaire, table oubarnum (Antananarivo), et selon la surface et le typede marchandises au sol, matériaux de constructionou bassines (N’Djamena), etc.

Des critères aussi raffinés de différenciation des ven-deurs non sédentaires étant forcément difficiles àappliquer, la multiplicité des tarifs ouvre la porte àtous les procédés arbitraires au gré des rapports deforce entre collecteurs et vendeurs. La situation laplus courante observée sur de nombreux marchésest bien évidemment celle du paiement du droit deplace journalier sans que le collecteur ne remette leticket en contrepartie, le vendeur ne pouvant pas lelui réclamer.

La mise en place d’une nouvelle équipe de collec-teurs honnêtes est la première des revendicationsdes commerçants lorsque, à l’occasion d’un change-ment de régime, il leur est possible de se faire en-tendre du gestionnaire des marchés.

A Cotonou, ce fut, avec la réduction des tarifs exorbi-tants de la période Kérékou, l’une des raisonsmajeures de la marche des commerçantes sur le Pa-lais présidentiel en 1991.

2.4.2.2Le récapitulatif des coûts par marché

Le tableau 8 récapitule les coûts que doivent suppor-ter les vendeurs pour exercer leurs activités sur lesmarchés. On a choisi deux catégories de détaillants:les vendeuses de produits vivriers et les commer-çants de produits manufacturés. Les données chif-frées retenues correspondent à des chiffres d’affairesmoyens (voir le chapitre ci-dessus).

Les détaillants de produits manufacturés

On a retenu une marge d’environ 25 pour cent enAfrique de l’Ouest et de 30 pour cent pour Libreville.Cette marge est très variable selon les sources d’ap-provisionnement: l’exemple du commerce des piècesdétachées à Korhogo montre que, dans les circuitsde la contrebande, la marge varie de 21 pour cent siles vendeurs du grand marché passent par les gros-sistes de la place, à 33 pour cent s’ils se risquent eux-mêmes à s’approvisionner directement au Mali; leurmarge, en revanche, n’est que de 10 pour cent s’ilsachètent les pièces dans le circuit officiel (LABAZEE,1993). On rappellera que l’essentiel des produitsmanufacturés arrivant sur les marchés proviennentdes circuits d’échanges transfrontaliers non contrô-lés.

Les détaillantes de produits vivriers

On a retenu une marge d’environ 20 à 25 pour centdu chiffre d’affaires pour les petites détaillantes deproduits vivriers, sur la base des résultats desenquêtes menées auprès de ces commerçantes etde leurs principaux fournisseurs (grossistes et semi-grossistes des marchés).

Dans tous les cas, il s’agit de la marge brute, lescoûts d’acheminement (portage ou pousse-pousse)sur le marché même n’étant pas déduits. La toutepetite détaillante assure elle-même le portage de samarchandise, depuis les zones de déchargement oude stockage des grossistes jusqu’à son emplacementsur le marché, mais dès qu’il s’agit d’un achat entre50 et une centaine de kg, le recours à une main-d’oeuvre est indispensable. La rénumération d’unporteur sur les marchés d’Afrique de l’Ouest est deFCFA 25 à 100 le trajet et le poids de la marchandisede FCFA 50 à 100, s’il s’agit d’un pousse-pousse. ALibreville, l’acheminement des produits vivriers se faitexclusivement en brouette: les tarifs du «brouettier»sont de FCFA 100 à 200 le trajet, selon le poids desmarchandises.

Les coûts de portage ne concernent pas seulementl’acheminement des marchandises depuis le lieud’achat jusqu’à l’emplacement de vente. Ils représen-tent aussi un des postes de dépenses des systèmesde stockage à façon auxquels ont largement recoursles vendeurs des marchés (voir ci-dessus). Le budget«stockage à façon» peut être, en définitive, supérieurà celui de l’emploi d’un gardien en groupe.

Le dernier point à souligner concerne la marge bruteavant impôt (patente, BIC). Sur les marchés étudiés,les commerçants de produits manufacturés et une

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partie des artisans (tailleurs, menuisiers) paientassez fréquemment la patente. Pour les vendeusesde produits vivriers, c’est très variable selon les pro-duits et surtout les pays. Le paiement de la patentesemble généralisé pour les commerçantes de vivriersà Libreville, assez fréquent à Cotonou et àAntananarivo. Sur les marchés soudano-sahéliens,c’est très rare. Les coûts retenus nous paraissentpour ces différentes raisons un strict minimum.

Les charges rapportées à la marge brute représen-tent, selon les pays, sept à 15 pour cent pour les ven-deurs de produits manufacturés et 15 à 30 pour centpour les produits vivriers.

Un des facteurs importants de renchérissement descoûts est la sous-location. Comme on l’a vu, elle esten général largement supérieure au droit de placepayé par les commerçants. On comprend pourquoiles vendeuses de vivriers, sous-locataires de stands

à Mont-Bouët (Libreville), ont choisi de «sortir» dumarché, la crise ayant laminé leurs marges.

On remarquera que le droit de place n’est pas leposte de dépenses le plus élevé, excepté pourLibreville où ces droits de place correspondent mani-festement à la période faste durant laquelle lesmarges des commerçants étaient beaucoup plus éle-vées.

On notera encore, qu’au titre des dépenses quoti-diennes pour l’exercice de l’activité sur le marché, lesvendeurs donnent spontanément leurs dépenses denourriture et/ou celles de l’aide revendeur. Le prix du«plat» s’élève entre FCFA 100 et 200 dans les villesbon marché (Bobo-Dioulasso et Cotonou), autour deFCFA 500 à N’Djamena et entre FCFA 500 et 1000 àLibreville.

Tableau 8

Coût de l’exercice d’activités sur les marchés(FCFA)

BOBO-DIOULASSO N’DJAMENA COTONOU LIBREVILLE

Marché central Marché central Dantokpa Mont-Bouët

V M V M V M V M

Postes de charge

Gardien 25 100 50 140 25 100 100 166

Eau 25 25 25 25 25 25 100 100

Latrines 38 38 38 50 100 200

Nettoyage 25 25 25 50

Droit de place 25 67 25 120 25 93 500 1 000

Sous-location 200 50 250 666

Total charges 138 430 150 560 138 268 1 516 1 466

Chiffre d’affaires 3 000 15 000 2 200 20 000 3 800 15 000 20 000 4 000

Marge brute 750 3 750 652 5 600 950 3 750 5 000 11 200

Charges/marge brute 18% 11% 23% 10% 15% 7% 30% 13%

Charges/marge brute 18% 6% 15% 6% 15% 7% 17% 13%

(hors sous-location)

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2.4.3La dynamique d’occupation spatiale

2.4.3.1La division entre commerces riches et pauvres commande à l’organisation spatiale des marchés

C’est une situation générale sur tous les marchés.

Cette dynamique qui consiste en «l’expulsion pro-gressive» des vendeurs de produits vivriers par lesvendeurs de produits manufacturés est présente surtous les marchés observés. Elle a entraîné de pro-fondes mutations ces dix dernières années dans laphysionomie et le fonctionnement des marchés.

Le mouvement d’occupation par les commerces deproduits manufacturés se réalise en plusieurs étapes.

Dans un premier temps, les commerces de produitsmanufacturés occupent les installations fermées detype boutique, le vivrier - «le marché des femmes»-occupant les secteurs peu ou pas du tout équipés (aumieux quelques hangars, le plus souvent un espacenu). On observe une première transformation dessecteurs vivriers par l’édification ici et là d’installa-tions fermées. Cette transformation s’effectue par lejeu de cessions d’emplacements, plus rarement desous-locations entre vendeuses de vivriers et com-merçants de marchandises générales dont lesmoyens financiers sont nettement supérieurs.

Les produits vivriers sont alors progressivementrefoulés dans les allées de circulation et repoussésdans les secteurs généralement les moins fréquentésdu marché. Les problèmes de circulation, d’accessi-bilité et d’achalandage dont souffrent ces zonesentraînent ces mouvements de navettes entre l’exté-rieur et l’intérieur que l’on observe de la part de nom-breuses détaillantes de vivriers; cette turbulence estelle-même propice au grignotage de ces derniersemplacements par les commerces de produits manu-facturés.

Lorsqu’il s’agit des rapports entre vendeurs de pro-duits manufacturés et vendeuses de vivriers, la fai-blesse des secondes est évidente. Souvent femmesde producteurs maraîchers ou petites commerçantes,leurs besoins de trésorerie les ont conduites àrevendre leur emplacement aux vendeurs de produitsmanufacturés. D’autres encore, plutôt que de subir laconcurrence des vendeuses à la sauvette installéessur les pourtours des marchés, ont préféré monnayerleur départ.

La situation doit être analysée à la lumière des rap-ports de force qui se jouent, non seulement au seindes marchés centraux entre différentes catégories devendeurs selon les produits, mais aussi entre descommerçants dont les relations avec les appareilsd’Etat et les stratégies sociales avec les classes aupouvoir fondent les différences et les alliances selonles périodes politiques. Il s’agit d’un conflit entre unedynamique de capital, de réseaux d’alliances et decrédits personnalisés.

Ces rapports de pouvoir marquent aussi les positionsrespectives sur les marchés des «nouveaux riches»(les commerçants de denrées alimentaires de pre-mière nécessité) et des tenants des anciens réseauxd’approvisionnement des capitales (grossistes devivriers).

Dans les deux cas, les détaillantes comme les gros-sistes de vivriers voient leur espace se réduire deplus en plus.

On observe de ce fait une très nette coupure entre lazone des produits manufacturés et celle des produitsvivriers.

Les secteurs à forte valeur ajoutée

Ce sont les secteurs des commerces de produitsmanufacturés riches et des commerces de denréesalimentaires (riz, farine et sucre).

Sur tous les marchés, certains secteurs réunissentles commerces à valeur ajoutée élevée ou à forterotation des stocks, à savoir les commerces riches.On y relève les chiffres d’affaires les plus élevés.

Ces secteurs présentent, du point de vue du bâti, unaspect très caractéristique: boutiques soignées,allées entretenues, marchandises souvent de qualitéet très grande propreté des parcours. Tous ces élé-ments en font une zone d’activités qui s’inscrit logi-quement dans un centre urbain commercial et tertiai-re «moderne». Ils bénéficient des meilleures condi-tions d’accès et attirent de ce fait le maximum declients. Mais les abords de ces secteurs cumulentaussi embouteillage, prolifération de vendeurs ambu-lants et de commerces à la sauvette, ce qui ajouteencore à l’impression de dynamisme économique. Ilsbénéficient de l’effet d’entraînement créé par le déve-loppement à proximité de zones de stockage et d’en-treposage des grands produits de nécessité ou desproduits manufacturés importés.

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L’importance des affaires qui s’y traitent font bien decette partie le coeur économique et financier de toutle quartier marché.

Les secteurs marginalisés spatialementet économiquement, les commercesà faible valeur ajoutée

Ce sont les zones des produits vivriers, des artisans,de certains services, des vendeurs de produits manu-facturés de faible valeur comme l’équipement domes-tique: tous commerces dits «pauvres».

Ce sont les zones où les chiffres d’affaires sont lesplus faibles, où les conditions d’exercice des activitéssont les plus médiocres. Elles cristallisent la plupartdes problèmes de fonctionnement du marché central:mauvaise accessibilité, conditions physiques dégra-dées, conditions sanitaires très médiocres, état dubâti vétuste.

Dans ces zones excentrées s’étaient autrefoisrepliés, vers le milieu des années 80, les grossistesde produits vivriers, parfois de bois et charbon, etc.Premiers occupants, ils disposaient de suffisammentd’espace (N’Djamena, Dantokpa). Dès la fin 80, ilsont été à leur tour progressivement envahis par lespetits détaillants refoulés par les produits «riches».

En conclusion, aujourd’hui, les produits manufacturésoccupent partout la plus grande partie de l’emprisedes marchés, l’alimentaire étant réduit à la portioncongrue. Le véritable marché alimentaire aujourd’huien Afrique s’exerce dehors, dans les rues autour dumarché.

2.4.3.2Le refoulement des activités de gros de produits vivriers

L’expulsion des grossistes de produits vivriers ou leurrefoulement dans les secteurs les plus excentrés aplusieurs causes.

Fonctionnelles, certes, compte tenu du développe-ment des volumes commercialisés des grands pro-duits vivriers traditionnels et du développement denouvelles filières (légumes et fruits notamment); lesgrossistes ont été logiquement conduits à chercherdes emplacements ayant un accès plus direct auxvoies de circulation, à s’installer là où la place existaitencore (zones excentrées) ou tout simplement à s’or-ganiser sur la voirie parce qu’aucun emplacementn’avait jamais été prévu pour eux (les grossistes col-lectrices de légumes).

Lorsque le gros subsiste sur le marché, c’est «coin-cé» sur une étroite bande de terrain, comme dans lecas du Marché au mil, ou relégué dans les zonesinsalubres, comme sur le marché Dantokpa àCotonou ou Anosibe à Antananarivo, ou plus carica-tural encore, totalement enclavé dans un secteurprévu et équipé en conséquence pour des petitesdétaillantes, comme à Libreville sur le marché Mont-Bouët, obligeant les grossistes à des acrobaties pourfaire tenir des piles de sacs sur des étals en ciment!

Dans certains cas, les grossistes ont demandé eux-mêmes directement aux Autorités de leur trouver unemplacement plus adéquat. C’est le cas des gros-sistes de fruits et tubercules anciennement installéssur le Marché central à Bobo-Dioulasso ou des gros-sistes de légumes exerçant sur la chaussée à côté dece marché.

Le résultat est significatif de l’importance qui estaccordée à cette profession: les grossistes ont étéinstallés sur un vaste emplacement destiné, audépart, exclusivement au marché de gros de fruits ettubercules. Cinq ans après leur déplacement, laconstruction de la nouvelle gare routière voyageursde Bobo-Dioulasso absorbait la quasi-totalité du ter-rain du marché, repoussant les grossistes à sonextrémité et les contraignant à opérer en grande par-tie sur la voie publique. Quant aux femmes petitsgrossistes de légumes, le terrain qui leur avait étéproposé était si loin du centre-ville (bien plus loin quele marché de gros des tubercules) qu’elles décidèrentde rester dans la rue à côté du Marché central etd’engager l’épreuve de force avec les Autorités muni-cipales.

L’expulsion progressive des grossistes de vivriersdes marchés, d’une part, mais aussi le peu d’intérêtque suscite la question de l’amélioration de leursconditions de travail, d’autre part (en dehors de lasolution toujours évoquée de leur délocalisation àl’extérieur de la ville, traitée au chapitre suivant), tra-duisent très clairement leur peu de «poids» dans lesrapports de pouvoir actuels en Afrique.

2.5Les souhaits des vendeurs des marchés

Les souhaits des commerçants, en matière de ser-vices et d’équipements, ont été systématiquementrecueillis au cour des différentes études socio-écono-miques, préalables au réaménagement des marchés,menées sur différents grands marchés d’Afrique et deMadagascar13. Ils concernaient un ensemble varié dethèmes: équipements, services, installations souhai-

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tées, regroupements préférentiels des produits, tarifi-cation, localisation pendant les travaux, etc. Ces sou-haits étaient, bien entendu, fonction de la situationspécifique du marché et du projet envisagé.

Il apparaît qu’au-delà de la diversité des situationsétudiées, certaines grandes préoccupations com-munes aux usagers des marchés émergent avecforce et demandent à être soulignées.

Les souhaits sont apparemment très simples, le pre-mier étant de pouvoir avoir une place sur le marché.

Mais ceci est loin d’être acquis pour toutes sortes devendeurs, selon leur statut et leur catégorie d’activité,leur ethnie, leur nationalité et leur situation dans lesecteur informel.

Les facteurs d’exclusion sont innombrables et jouentà plein dans la situation d’un réaménagement demarché.

S’ils obtiennent une place, le second souhait descommerçants est de pouvoir payer la redevance, cequi est loin d’être acquis pour les commerces les pluspauvres et les artisans.

Si, aujourd’hui, la plupart de ces marchés sont desmarchés polyvalents où chacun a malgré tout unechance d’entrer, il est clair qu’un réaménagement, quia toujours pour conséquence d’augmenter les droitsde place, risquerait d’entraîner l’exclusion de cescommerces pauvres pour les rejeter vraisemblable-ment à la périphérie immédiate du marché, voire,comme dans le cas des artisans, à la périphérie de laville. De nombreux acteurs de ces marchés sont bienconscients de ce problème.

Leur troisième souhait est de disposer des trois ser-vices suivants:

• la sécurité (marché clôturé, éclairage nocturne, ser-vice de police efficace);

• l’approvisionnement en eau;

• les équipements sanitaires: latrines et douches.

Leur quatrième souhait est celui d’être dans un mar-ché couvert.

La protection contre la pluie et le soleil passe avanttoute autre considération relative aux équipementsde vente.

Quant aux besoins prioritaires exprimés par les gros-sistes de produits vivriers, ils sont de deux types:

• la localisation de ceux qui, pour des raisonsdiverses, n’ont d’autre terrain d’exercice que la rue;

• l’amélioration des conditions de fonctionnement deleurs activités pour les grossistes des marchés, cequi recouvre toute la gamme des services qui peutêtre envisagée sur un marché de gros.

Aux revendications mentionnées ci-dessus s’ajoutele souhait général de disposer de structures simples,qu’ils sont en général disposés à aménager et àfinancer eux-mêmes selon un cahier des chargesprécis. Le site d’implantation du marché de gros estenfin une question qui demande à être concertéeavec ces opérateurs.

Enfin, une information plus large et plus régulière surles objectifs et le contenu du projet de réaménage-ment du marché est la demande constamment émisepar tous les vendeurs. Cette demande d’informationsconcerne notamment des points tels que:

• connaître la date de démarrage des travaux suffi-samment à l’avance;

• le phasage des opérations;

• les conditions dans lesquelles s’opèreront lesdéplacements pendant les travaux et l’identificationdu lieu de transit;

• les critères d’identification des vendeurs qui serontdestinés à être relocalisés sur le futur marché:actualisation des recensements et conditions demise en oeuvre de ce recensement (impliquant lesreprésentants des vendeurs et leurs émissaires deconfiance), identification de la place occupée origi-nellement;

• les critères de réattribution des places;

• la tarification projetée.

Il faut souligner, pour finir, que les vendeurs des mar-chés demandent toujours à être étroitement associésà l’organisation interne et à la gestion de leur marché.

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414: Les circuits d’approvisionnement alimentaire des villes et le fonctionnement des marchés en Afrique et à Madagascar

3Conclusions et recommendations

3.1Les aspects-clés de la situation actuelle du secteur des marchés: des coûts économiques élevés

Les agglomérations ont connu et connaissent encoreun fort accroissement de leur population. Paral-lèlement, la situation économique a engendré ledéveloppement du secteur informel et la multiplica-tion des petits métiers.

Ces éléments ont notamment eu, pour conséquence,une augmentation considérable des effectifs des ven-deurs sur les marchés existants et, de façon généra-le, en ville. L’accroissement de la demande (des com-merçants) n’a pas été accompagnée d’une augmen-tation significative du nombre d’équipements com-merciaux et de transports (de l’offre).

Ces deux facteurs conjugués sont à l’origine de lasituation actuelle qui se caractérise par la saturation,la désorganisation et l’insalubrité des équipementsexistants, ainsi que par l’occupation fréquente de lavoirie par les vendeurs.

Les conséquences du déficit en équipements àl’échelle urbaine engendrent une série de coûts éco-nomiques au titre desquels on peut notamment citerdes coûts directs pour la commune et des coûts indi-rects pour la collectivité.

3.1.1Les coûts directs pour la commune

Les commerçants occupant les emprises publiquesou installés en dehors des marchés officiels ne fontque rarement l’objet de perception de droits.

Le désordre grandissant dans lequel fonctionnent lesmarchés complique la perception des droits et pèsesur les rendements de l’équipement et les possibilitésd’entretien.

La dégradation continue du service fourni rend deplus en plus difficilement acceptable par les usagersles réajustements des tarifs.

3.1.2Les coûts indirects pour la collectivité

Le manque d’équipements de gros et les contraintespesant sur les circuits de distribution et de commer-

cialisation engendrent, selon toute vraisemblance,des surcoûts sur les produits et bloquent toute évolu-tion vers une fonction moderne plus adaptée à ladiversité des exigences des consommateurs.

L’occupation des emprises et le désordre dans lequelfonctionnent les marchés d’approvisionnement et deredistribution (les places de gros) créent d’importantsdysfonctionnements de circulation (consommation decarburants, coûts d’exploitation, etc.).

Les conditions d’hygiène désastreuses engendrentdes coûts de santé.

En conséquence, il apparaît nécessaire d’engagerune stratégie globale pour le secteur des marchés quipuisse favoriser la mutation du système actuel versune fonction moderne d’approvisionnement et de dis-tribution des villes.

3.2Le secteur des marchés: recommandations pour une stratégie globale

3.2.1Un impératif: informer et appuyer les Autorités locales dans la mise en oeuvre d’une politique globale des marchés pour l’approvisionnement urbain

Le secteur des marchés, qui est l’une des préoccu-pations des Autorités locales, ne représente pas pourautant leur priorité immédiate, compte tenu des nom-breuses responsabilités à assumer (logement,emploi, santé, équipements divers, etc.). Dans cesecteur, elles envisagent, au prime abord, la questiondu réaménagement ou de la création de nouveauxmarchés de consommation pour leurs administrés.

Les objectifs poursuivis et les avantages qu’elles enattendent sont en effet nombreux et parfois contra-dictoires:

• l’amélioration de l’environnement par la réductiondes nuisances, la diminution de la congestion de lacirculation de leur ville et l’amélioration de l’évacua-tion des ordures autour des marchés;

• le développement de l’emploi dans le secteur desmarchés qui est la source majeure d’emplois. Il faut,par conséquent, maintenir et développer un niveauélevé d’emplois dans le commerce et donc, engénéral, éviter une trop grande rupture avec les cir-cuits traditionnels;

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42 Aliments dans les villes: collection d’ouvrages - vol. 1

• l’amélioration des conditions de vie sanitaires deleurs administrés par le réaménagement ou la créa-tion de nouveaux marchés de détail, porteurs deprogrès en matière d’hygiène;

• le bénéfice politique car les Autorités locales sont,de nos jours, légitimement intéressées à leurréélection, et sont donc en faveur d’actions visiblesdont elles attendent un rapide impact urbain et éco-nomique.

On constate que les Autorités locales, bien que sou-vent conscientes de l’intérêt de la création d’un mar-ché de gros, n’en voient pas toujours l’urgence étantprincipalement préoccupées par les problèmes degestion urbaine immédiate qu’elles doivent résoudrequotidiennement.

Par ailleurs, les carences générales dans le secteurdes marchés sont telles que les Autorités localesmanquent d’éléments pour apprécier les priorités enmatière d’intervention: par quel marché commencer?Quelle hiérarchie dans les actions? Quels en serontles différents coûts? Les différents impacts? etc.

Il est, par conséquent, impératif d’appuyer la mise enapplication des décisions indispensables à la poli-tique d’approvisionnement de la ville, en particulier dusecteur stratégique des marchés, suivant trois axes:

• l’élaboration des outils nécessaires à la prise dedécision;

• l’implication, la responsabilisation et l’appui desAutorités locales;

• l’information et la formation des Autorités locales.

Les outils nécessaires à la prise de décision permet-tent de clarifier les objectifs attendus des interven-tions dans le secteur des marchés et de mettre à jourleur impact économique.

L’implication et la responsabilisation des Autoritéslocales demandent qu’elles soient appuyées dansleur volonté et leur engagement de créer les condi-tions d’une véritable politique d’approvisionnementde la ville.

A cet égard, s’il faut nécessairement distinguer lesniveaux de responsabilités institutionnelles selon letype d’équipement et la fonction des marchés (mar-chés de gros d’intérêt national ou marchés urbains deconsommation), il est important d’impliquer et d’inté-resser les collectivités locales à l’ensemble de la pro-

blématique des marchés tout en privilégiant le renfor-cement de leurs responsabilités et de leurs compé-tences dans le secteur des marchés de détailurbains.

Enfin, il faut favoriser et développer les systèmesd’échanges d’expériences, d’informations et de for-mations des techniciens et des élus des villesd’Afrique subsaharienne afin de dégager les leçonsdes expériences en cours en Afrique, fournir descomparaisons et tirer des enseignements du fonc-tionnement des marchés dans d’autres continents.

On soulignera, dans cette perspective, l’importancedu rôle d’appui et de conseil de la part desAssociations internationales et nationales de pou-voirs locaux, des acteurs de la coopération décentra-lisée en général dans l’information et la formation desAutorités locales en ce qui concerne la gestion et l’or-ganisation des marchés.

3.2.2Elaborer des outils facilitant la prise de décision

Les ressources à mettre en oeuvre sont rares et, parconséquent, il est primordial d’avoir une vision d’en-semble afin d’établir des priorités pour les actions àentreprendre. Les premiers éléments indispensablesà la prise de décision seront:

• l’étude des circuits d’approvisionnement des mar-chés et des pôles commerciaux urbains;

• le Schéma de développement des marchés urbains;

• l’étude de la création de marchés de gros.

3.2.2.1L’étude des circuits d’approvisionnementdes marchés et des pôles commerciaux urbains

On a examiné la complexité des circuits d’approvi-sionnement des villes africaines et souligné les fortesinterdépendances entre les marchés d’une mêmeville et les différents équipements connexes de lafonction commerciale (zone d’entrepôts, gare routiè-re marchandises et passagers, etc.).

Aussi, avant de prendre en considération un projetspécifique d’aménagement d’un marché, il est indis-pensable de connaître le rôle que remplit ce marchédans le système d’approvisionnement et de distribu-tion afin de pouvoir évaluer globalement les effets decet aménagement et s’assurer de sa pertinence.

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Les circuits d’approvisionnement des villes sont, engénéral, mal connus des responsables municipaux etde l’administration du commerce, et leur caractèrelargement informel exige le plus souvent la réalisationd’enquêtes spécifiques.

L’importance de la connaissance globale du fonction-nement des circuits d’approvisionnement est ample-ment justifiée par le contexte actuel où toute inter-vention isolée sur un marché est susceptible de per-turber le fonctionnement des marchés qui lui sont liéset de neutraliser les avantages escomptés.

3.2.2.2Le Schéma de développement des marchés urbains

L’élaboration d’un Schéma de développement desmarchés de détail est nécessaire pour établir la hié-rarchisation des actions sur le court, moyen et longtermes.

Ce type d’étude est directement opérationnel. LeSchéma de développement des marchés doit déga-ger un calendrier et un programme possible d’actionstechniques et économiques. Les contraintes et lesopportunités d’investissements doivent être claire-ment analysées. Les conditions de mise en oeuvredes actions de réaménagement ou de création demarchés seront présentées. Enfin, les modalités degestion des marchés et les niveaux de services ferontl’objet d’une première réflexion débouchant sur uncertain nombre de scénarios.

3.2.2.3La création de marchés de gros

Les études doivent fournir l’examen des conditionséconomiques, techniques, financières et juridiquesnécessaires à la création de ce type d’équipement:volumes commercialisés, types et caractéristiquesdes opérateurs concernés, souhaits de ceux-ci, ana-lyse des sites d’implantation possibles, structuresphysiques des installations, cadre réglementaire,niveaux de services, scénarios de gestion, etc.

Mais qu’il s’agisse des études sur les circuits d’ap-provisionnement, sur le Schéma de développementdes marchés urbains, ou celles préalables à la créa-tion d’un marché de gros, cette première phase doitêtre l’occasion de mettre en place l’indispensableprocessus de concertation avec les commerçantsusagers de ces équipements sans lequel leur réussi-te est loin d’être assurée.

3.3En amont et en aval du secteur des marchés: l’amélioration des circuitsd’approvisionnement et de redistribution

Il faut rappeler les importantes contraintes qui s’exer-cent sur les circuits d’approvisionnement, tant enamont (transport, production agricole, manque defonds de roulement des grossistes, difficultés d’accèsau crédit, taxations diverses, etc.), qu’en aval, oùelles consistent notamment dans le manque de capi-tal des détaillants et dans les difficiles conditions defonctionnement du transport de marchandises intra-urbain pour l’approvisionnement des marchés.

Bien que ces contraintes fassent l’objet de divers pro-grammes et politiques d’intervention de la part desAdministrations concernées (Ministère de l’agricultu-re, Chambre de commerce, etc.), il nous faut men-tionner ici deux axes de réflexion et d’études en rela-tion directe avec le secteur des marchés:

• favoriser un meilleur accès au crédit commercial etd’équipement des agents en s’appuyant sur la plusgrande transparence de leurs activités (montage dedossiers de financement et, éventuellement, possi-bilités de nantissement de stocks pour les gros-sistes). En effet, la création d’équipements mar-chands, en particulier de marchés de gros, permet-tra une meilleure identification et une plus grandetransparence de l’activité économique, tant desagents grossistes - volumes traités, régularité deleurs rotations, conditions d’approvisionnement, prixpratiqués, etc. - que des transporteurs fréquentantces équipements;

• améliorer substantiellement le cadre d’activité dutransport intermarchés de produits vivriers, notam-ment par la prise en compte des besoins d’empla-cements et de stationnement, l’amélioration ducadre réglementaire et de taxation des transpor-teurs, ainsi que la reconnaissance de leur rôle émi-nent dans l’approvisionnement des villes.

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44 Aliments dans les villes: collection d’ouvrages - vol. 1

Notes de bas de page

1. Plusieurs études et recherches sur les filièresmaraîchères en Afrique et à Madagascar sontmenées par des équipes IRAT/CIRAD.

2. Les très grands grossistes que l’on trouve dans lecommerce des céréales au Burkina Fao, au Nigeret au Mali, à la tête de réseaux marchands impor-tant pouvant mobiliser entre 3000 et 5000 tonnespar an, n’exercent jamais leurs activités sur lesmarchés.

3. Les études sur les circuits d’approvisionnement etde redistribution des produits manufacturés sonttrès rares.

4. Les pratiques entrepreneuriales, les logiques mar-chandes et l’organisation des réseaux des grandscommerçants ont fait l’objet ces dernières annéesde plusieurs travaux de recherche.

5. La concentration de grossistes dans certainsquartiers de la ville peut avoir une origine ancien-ne et être liée aux circuits de quelques produitstrès spécifiques: quartier des commerçants decola, de poisson séché, etc. Dans ce cas, cesregroupements de grossistes sont rarement situésà proximité du marché central, leur champ d’ac-tion ayant toujours été principalement interrégio-nal ou international et, secondairement, local.

6. On entend par réexpédition les flux destinés àd’autres villes, nationales ou étrangères. Ne sontdonc pas considérées comme réexpéditions lesventes aux grossistes des localités suburbainesou de la région rurale environnante.

7. «Le marché de gros constitue un lieu de concen-tration de l’offre et de la demande où s’effectue laformation des prix dans les meilleures conditionsde transparence. Il favorise la spécialisationnécessaire des fonctions entre les opérateurs degros et de détail. Il permet la concentration géo-graphique des fonctions d’approvisionnement,bénéfique en termes d’aménagement urbain, etnécessaire pour l’existence d’un niveau minimald’équipement du marché.» (GERGELY, 1996).

8. Pour Analakely, c’est vrai jusqu’à la fin des années70 où quelque 900 pavillons représentaient prèsde 45 pour cent de l’effectif total des installationsde vente. Aujourd’hui, ces boutiques ne sont plusqu’un petit lot en dur, submergé par la marée destables, barnums et étalages au sol des commer-çants.

9. En Afrique francophone, le «principe d’unicité decaisse», hérité du système francophone, s’estgénéralement perverti, notamment avec la crisedes finances publiques. La rétrocession des res-sources n’est plus assurée, ou s’effectue très irré-gulièrement, car l’Etat utilise les sommes perçuespar la commune pour sa trésorerie. A son niveau,il s’agit d’un enjeu financier marginal mais dontl’impact est parfois dramatique pour la majoritédes communes. «Cette situation favorise la créa-tion de caisses officieuses par les municipalitésqui ne déposent plus au Trésor la totalité de leursrecettes propres (marchés). On aboutit donc àune déresponsabilisation des acteurs vis-à-visdes autres.» (BANQUE MONDIALE, 1996).

10. La fiscalité directe locale constitue, dans la plu-part des systèmes, la base de l’autonomie finan-cière des communes. On y trouve essentielle-ment la patente (frappant les professionnels) etles taxes foncières (frappant les professionnels etles ménages).

11. Certains sujets ont périodiquement été soulevéspar les femmes au marché Treichville pour fairepression sur les Autorités municipales: l’un dessujets récurrents est le désir d’exclure les femmesnon ivoiriennes «qui prennent nos places dans lemarché.» A Accra, les propriétaires d’éventairesforment le groupe le plus puissant du marché desfemmes en termes d’influence sur les prix et decontrôle sur ceux qui sont autorisés à vendredans le marché.» (ROBERTSON, 1976).

12. «Des listes de revendeuses désireuses de louerun étal sont remises au chef du Grand marché deLomé. Son autorité est devancée, dans certainscas, par le soutien mutuel des revendeuses asso-ciées qui préservent l’intérêt de leurs membres.Lorsqu’une revendeuse s’absente, ses collèguess’occupent de son commerce et gardent son étal.Lorsqu’elle quitte définitivement le marché, l’as-sociation des revendeuses en est la premièreinformée.» (CORDONNIER, 1987).

13. Voir introduction et tableaux.

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