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Revista de Psicoanálisis

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  • Franoise Dezoncle, Lillusion de lavenirpour Henri REY-FLAUD, Et Mose cra les Juifs

    Guy Le Gaufey, Sur ltal du vignettistepour Raymond CAHN, La fin du divan ?

    Guy Casadamont, La pense Lacan nexiste paspour Paul-Laurent ASSOUN, Lacan

    George-Henri Melenotte, Convergence et divergence entre Lacan et Foucaultpour Judith REVEL, Expriences de la pense, Michel Foucault

    Marie-Claude Thomas, Le pre ? un numropour Michel TORT, Fin du dogme paternel

    Marie-Hlne Devoisin, De Bethsabe Mde, sur la gynco-logiquepour Isidoro VEGH, Le prochain, nouage et dnouage de la jouissance

    Pierre-Henri Castel, Dissidence et consensus : lunit de la psychanalyse vue de New Yorkpour Martin S. BERGMANN, Understanding Dissidence and Controversy

    in the History of Psychoanalysis

    Laurent Cornaz, Une Chine-pour-analyste ?pour Rainier LANSELLE, Le sujet derrire la muraille

    Jean-Christophe Weber, Le pur cristal du sujet normalpour Pascal METTENS, Psychanalyse et sciences cognitives :

    un mme paradigme ?

    Quid pro quon 1

    novembre 2006

    EEPPEELLrevue critique de publications psychanalytiques

  • SOMMAIRE DU No1

    Franoise DEZONCLE, Lillusion de lavenir 3 Et Mose cra les Juifs . Le testament de Freud de Henri REY-FLAUD

    Guy LE GAUFEY, Sur ltal du vignettiste 15La fin du divan ? de Raymond CAHN

    Guy CASADAMONT, La pense Lacan nexiste pas 23Lacan de Paul-Laurent ASSOUN

    George-Henri MELENOTTE, Convergence et divergence 35entre Lacan et Foucault propos du cas

    Expriences de la pense, Michel Foucault de Judith REVEL

    Marie-Claude THOMAS, Le pre ? un numro 45Fin du dogme paternel de Michel TORT

    Marie-Hlne DEVOISIN, De Bethsabe Mde, 57sur la gynco-logique

    Le prochain, nouage et dnouage de la jouissance de Isidoro VEGH

    Pierre-Henri CASTEL, Dissidence et consensus : 69lunit de la psychanalyse vue de New York

    Understanding Dissidence and Controversy in the History of Psychoanalysisde Martin S. BERGMANN (ed.)

    Laurent CORNAZ, Une Chine-pour-analyste ? 77Le sujet derrire la muraille. propos de la question

    des deux langues dans la tradition chinoise de Rainier LANSELLE

    Jean-Christophe WEBER, Le pur cristal du sujet normal 87Psychanalyse et sciences cognitives : un mme paradigme ?

    de Pascal METTENS

    Bulletin dabonnement Quid pro quo 95

  • Lillusion de lavenir

    Et Mose cra les Juifs , le testament de FreudHenri REY-FLAUD

    Paris, Flammarion, dpartement Aubier,coll. La psychanalyse prise au mot , 2006

    Was unsterblich im Gesang soll leben, muss im Leben untergehen.

    Ce qui doit vivre indestructible dans le chant doit disparatre dans la vie.

    Schiller1

    Pour prsenter le testament de Freud LHomme Mose et la religion monothiste2,Henri Rey-Flaud met en uvre la mtaphore du mtier tisser : Ainsi, dit-il, la trameanalytique sous-jacente, qui reconstitue lintroduction de lhomme au symbolique, est-elle indissociable de la chane narrative manifeste qui retrace le destin du peuple juif,chaque aller-retour de la navette faisant avancer dun rang les deux histoires et produi-sant la fin un seul tissu, dans un procs dcriture qui restitue son sens originel au mottexte (textum) (p. 13). Cette modalit de fabrication dun texte/tissu, tressage de fils detrame et de fils de chane, nouage du sous-jacent et du manifeste, est luvre dans cedernier ouvrage dHenri Rey-Flaud quil ne parat pas exagr de prsenter comme le tes-tament, provisoire, de cet auteur. Ce texte reprend et prolonge, en effet, une laborationinitie de longue date. Dans les propos liminaires un ouvrage publi en 1994, une notede bas de page indique que ce livre est le produit dun travail poursuivi depuis plus dequinze ans dans le cadre des sminaires de recherche du dpartement de psychanalysede luniversit Paul-Valry, conduit dans un change troit avec Bernard Salignon3 .Douze ans plus tard, il adresse ses remerciements Bernard Salignon au nom dun tra-vail de sminaire conduit en commun depuis plus de vingt ans (p. 325). Donc vingt ansdtudes universitaires et de recherche psychanalytique couronns par la publication,cette anne, dun travail de lecture de la dernire uvre de Freud, LHomme Mose et lareligion monothiste, hommage une pense sans gale dans notre modernit (p. 11).

    Manifeste dans lintroduction, lhommage ne va pas sans quelque enthousiasme nidenflammes mtaphores : La pense la plus forte, la plus courageuse et la plus noblequait produite une poque que nous touchons de la main, phare dans la nuit qui palpiteencore, nous qui errons en aveugles dans ces temps de dtresse (p. 13), des braisesincandescentes (p. 18), un retour de flamme fulgurant , une dernire flambe cra-trice , trois annes flamboyantes (p. 19), luvre du plus grand gnie de notremodernit (p. 20).

    1. Johann Friedrich von Schiller, Les Dieux de la Grce, in Werke in drei Bnden hrsg. von Reinhard Buchwald,Wiesbaden, Insel-Vert, 1955, cit et traduit par Henri Rey-Flaud, p. 97 ; cit par Sigmund Freud, in LHommeMose et la religion monothiste, Trois essais, [1939], trad. Cornlius Heim, Paris, Gallimard, 1986, coll. Connaissance de linconscient , p. 198. La traduction de C. Heim diffre de celle de H. Rey-Flaud : Cequi est destin vivre ternellement dans le chant doit chouer dans la vie. 2. S. Freud, LHomme Mose, op. cit.3. Henri Rey-Flaud, Comment Freud inventa le ftichisme et rinventa la psychanalyse, Paris, Payot etRivages, 1994, p. 7.

    3

    pour

  • se laisser guider par les phrases-titres des deux ouvrages cits, et par lidentifica-tion exprime de Freud Mose, la question vient dun paralllisme entre linvention duftichisme et la cration des Juifs . Tel est bien le cas : dpliant les rapports quen-tretiennent le mythe du meurtre de Mose et son dmenti, la clinique, et llaborationmtapsychologique, lauteur affirme : Cette opration capitale [il sagit de la rcusationdu meurtre] qui trouve son effectuation au registre de la clinique dans la production duftiche, a pour correspondant au champ de la culture un procs dcriture inou, quiconstitue dans la fiction potique de Freud lpisode clef de lhistoire du monothismejuif : le compromis de Cads (p. 111). Et encore : La perversion (notamment fti-chiste) rpond au champ de la clinique de lindividu au destin du peuple juif accomplidans la fiction freudienne au registre de lhistoire (p. 163). Les termes pervers , perversion sont prendre, lauteur le prcise, dans leur sens analytique, indiquant un rapport structurel particulier du sujet lAutre, en tant que tel (p. 189).

    Sagissant dune analyse textuelle, et sans oublier la prsentation, en quatrime decouverture, dHenri Rey-Flaud professeur de littrature (et de psychanalyse) , on nesera pas surpris de rencontrer, fils de chane, des fleurons de la littrature : la posie cour-toise, Stphane Mallarm, Guy de Maupassant, Herman Melville, Molire, etc. en place,pour notre bonheur de lecteur, des vignettes cliniques4. Sont aussi de la partie : ThodorReik et sa gigantesque tude sur le Schofar, Jacques Derrida dans la lecture en forme dedialogue quil a faite du livre de Yosef Hayim Yerushalmi Le Mose de Freud5, dont lesapports thoriques sont accueillis et dpasss pour les premiers, fermement carts dansle cas de Yerushalmi. H. Rey-Flaud lit LHomme Mose, et les crits de Freud, antrieursau Mose, et qui en constituent la gnalogie, avec Freud, et pas sans Lacan. La trame delouvrage est faite de ce minutieux dchiffrage.

    Cette lecture de Freud, sen tenir aux indications de lauteur, prend son dpart dansltude de la gense de linvention du ftichisme par Freud et de la promotion dun autremode de ngativit que celle produite par le refoulement, soit la Verleugnung, intervenantpour introduire lhomme au symbolique. Nombre de traductions franaises ngligeant laspcificit de la Verleugnung et de ce qui est verleugnet (quelles rendent par dnga-tion et ni ) nont pas favoris la reconnaissance de cet apport thorique. LisantFreud en allemand, H. Rey-Flaud piste les signifiants (Verleugnung, Enstellung,Entfremdung) oprant dans la complexe laboration du Mose, depuis leur mergencedans les crits antrieurs, et consacrant lapport thorique indit de cette uvre ultime.

    Sans Yerushalmi

    Il est convenu de dire, comme le rappelle H. Rey-Flaud, que LHomme Mose et lareligion monothiste, uvre quasi posthume , publie Amsterdam quelques moisavant la mort de Freud, survenue le 23 septembre 1939, a dconcert non seulement lepublic restreint des psychanalystes mais encore la large audience quil avait suscitechez les intellectuels juifs et non juifs de lpoque. Les historiens des religions lui repro-chrent lappui pris sur des hypothses rendues caduques par des travaux ultrieurs, lesspcialistes des tudes bibliques une manipulation de faits incertains.

    4. Pour une critique logicienne des vignettes cliniques, cf. Guy Le Gaufey, Le pastout de Lacan : consistancelogique, consquences cliniques, Paris, EPEL, 2006, p.123-127.5. Yosef Hayim Yerushalmi, Le Mose de Freud, Judasme terminable et interminable, Paris, Gallimard, coll. NRF essais , 1993.

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  • Plus rcemment, en 1993, Yerushalmi, un grand scholar dit Jacques Derrida ilnest pas ais de faire la part de ladmiration et de lironie dans cette nomination pro-posa une lecture dont cest peu dire quelle est oriente. Freud la fin de sa vie, dvastpar un cancer invalidant, au moment de lcriture du Mose, en aurait termin avec seslaborations analytiques. Scientifiquement, cest--dire par les voies de lhistoriographie,Yerushalmi sapplique dmontrer que Freud aurait consacr son ultime effort la ques-tion de son appartenance au peuple juif, et produire les archives, attestant que, en dpitde ses allgations officielles exprimant sa distanciation voire son indiffrence, Freud taitjuif toute heure, en toute circonstance et quoi quil ft de mme que pour dautres onest psychanalyste, on lest en permanence, quoiquon fasse, ft-ce un pet de travers6 .Selon le grand scholar , LHomme Mose et la religion monothiste demeure, en sonfond, un livre rsolument juif7. Ce quoi objecte H. Rey-Flaud, affirmant que Freud avait avec ce texte fait le choix de prendre de la hauteur, non pas pour regarder ailleurs,comme limagine Yerushalmi, mais pour voir plus loin (p. 40).

    Freud, lui, est catgorique lorsquil crit Smiley Blanton : En tant quuvre descience, elle (la psychanalyse) nest ni juive, ni catholique, ni paenne8 ; ou quand ilrpond Ferenczi dans une lettre du 8 novembre 1913 (cite par Yerushalmi qui enmconnat la porte) : Mais lexistence dune science aryenne et dune science juive estinconcevable. Les rsultats scientifiques doivent tre identiques quelle que puisse tre lafaon de les prsenter. Si ces diffrences se refltent dans lapprhension des paramtresscientifiques objectifs, cest quil y a quelque chose qui ne va pas9. Si Freud est cat-gorique ajoutons pas toujours, hlas, puisquil crit aussi : Je dirais mme que seuleson entre en scne [celle de Jung] a soustrait la psychanalyse au danger de devenir uneaffaire nationale juive10. La suite est connue

    Il est vrai que les crits de Freud, publications officielles ou innombrables courriersdont certains ont t rendus publics par Yerushami, attestent que Freud, dans le mmetemps, revendiquait la fidlit au nom de ses anctres, rejetant toute action qui viserait effacer sa filiation contrairement ceux de ses collgues qui avaient pris un autre nompour viter la consonance juive de leur patronyme , et saffirmait infidle leurscroyances, comme toute forme de religion, refusait lengagement nationaliste sous-jacent au mouvement sioniste, auquel par ailleurs il accordait sa sympathie.

    Cette question des effets de la filiation sur le sujet va donner lieu, en 1936, une la-boration thorique prenant appui sur une exprience trange faite au cours dun voyage Athnes relate dans une lettre adresse Romain Rolland11. H. Rey-Flaud y reprelusage par Freud, pour dcrire sa raction devant lAcropole, du terme dEntfremdung(traduit par stupeur ou sentiment dtranget), terme prcdemment utilis dans la cli-nique du ftichisme12 pour rendre compte de leffet produit sur le sujet par la dcouverte

    6. Jean Allouch, Lthification de la psychanalyse, calamit, Paris, Cahiers de lUnebvue, EPEL, 1997, p. 60.7. Y. H. Yerulshalmi, Le Mose de Freud, op. cit., p. 26.8. Cit par Jacquy Chemouny, Freud, la psychanalyse et le judasme, Paris, ditions universitaires, 1991, coll. mergences , p. 114.9. Y. H. Yerushalmi, Le Mose de Freud, op. cit., p. 94.10. Sigmund Freud, Karl Abraham, Correspondance complte 1907-1925, trad. Fernand Cambon, Paris,Gallimard, 2006, coll. Connaissance de linconscient .11. Sigmund Freud, Un trouble de la mmoire sur lAcropole, (Lettre Romain Rolland) [1936], trad.M. Robert, in Rsultats, Ides, Problmes, II, 1921-1938, Paris, PUF, 1987, p. 221-230.12. Sigmund Freud, Le Ftichisme, [1927], trad. fr. Denise Berger, in La Vie sexuelle, [ce titre est de lditeur],Paris, PUF, 1969, p. 133-138.

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  • des organes sexuels fminins (p. 116), la Verleugnung rglant le destin de la reprsenta-tion dans les deux cas (ftichisme et Acropole). claire par les laborations postrieures,se fait jour la thse du double dmenti : le dmenti de la ralit de lAcropole, au momentdu voyage, est lcho dun premier refoulement-dmenti survenu bien des annes aupa-ravant, au moment o, pour Freud, lenseignement des fondements de la culture occiden-tale entrait en conflit avec la culture juive de son grand-pre Rabbi Schlomo pour quiAthnes ntait rien (p. 117). Dun ct, Freud na jamais mis en doute Athnes et la cul-ture grecque, dun autre ct, il ny a pas cru : double statut de la reprsentation, symbo-lise et non symbolise, qui rend compte de la survenue de lincident psychopatholo-gique. Du ftichisme lAcropole se construit une laboration dont la reprise et le dve-loppement sont au fondement de la construction du Mose, et qui introduit au champ dela nvrose le dmenti et le clivage gnraliss (p. 112).

    Ignorant la dimension inconsciente de fabrication thorique de lcrit de Freud,Yerushalmi se prive dy interroger la fonction de la judit. Sa vise est autre : il exhumeune archive qui va lui permettre de dire ce qui le tracasse chez Freud. loccasion dutrente-cinquime anniversaire de Sigmund, en 1891, Jakob, pre de Sigmund, offre sonfils la Bible de Philippsohn dans laquelle ce dernier a tudi dans son enfance. Il la faitrecouvrir dune reliure neuve et y a inscrit une ddicace en hbreu et en melitzah : Constitue dune mosaque de fragments et dexpressions tirs de la Bible, de la littra-ture rabbinique ou de la liturgie, runis et tisss ensemble de faon former un textecohrent refltant les penses de lauteur13. Yerushalmi en dgage lamour du pre pourle fils, un appel au retour et la rconciliation et le rappel dune promesse . Touteson rudition, et elle nest pas mince, concourt nous faire entendre le dolent reprochefait au fils, qui avait dabord accompli la promesse, plan sur les ailes de lesprit , puissen tait loign, et la prire de ne pas abandonner le Livre, de ne pas le laisser tomberlui le pre (Jakob/Yerushalmi). Comme en cho, rsonne ce texte de lvangile deMatthieu 12, 46 o, l, le fils implore le pre :

    partir de la sixime heure, lobscurit se fit sur toute la terre, jusqu la dernireheure. Et vers la neuvime heure, Jsus clama en un grand cri : Eli, Eli, lemisabachtani.

    Jacques Derrida faisant valoir la reliure/peau comme prpuce, [] la peau neuvedun livre consignant la nouvelle peau blesse et bnie dun nouveau-n14 , JeanAllouch propose de pousser lanalyse jusqu noter que Jakob, ce jour-l, rend Sigmund son prpuce []. Il a beau faire, le patriarche de la psychanalyse, il a beau met-tre dans la balance toute la bonne volont dont il est capable en faveur de la promesse,le dsir, lui, ne cesse pas de montrer le bout de nez15 .

    Mais, Yerushalmi ne mange pas de ce pain-l ; il dplore ltat des relations du pre etdu fils : Comme Sisyphe poussant son rocher, dipe et Laos sont ternellement vous saffronter16. Ce faisant, note H. Rey-Flaud, il mconnat que, de Labdacos (le boiteux) Laos (le gauche) et dipe (le pied enfl), le nom des pres est marqu dune essen-

    13. Y. H. Yerushalmi, Le Mose de Freud, op. cit., p. 139 pour la traduction franaise, p. 194 pour la versionen hbreu.14. Jacques Derrida, Mal dArchive. Une impression freudienne, Paris, Galile, 1995, coll. Incises .15. Jean Allouch, Ncrologie dune science juive, Pour saluer Mal dArchive de Jacques Derrida ,LUnebvue, Totem et tabou, un produit nvrotique , 1995, n 6, p. 131-147, p. 146.16. Y. H. Yerushalmi, Le Mose de Freud, op. cit., p. 178.

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  • tielle boiterie [] la dette symbolique, en tant que transmission altre, erratique, mau-dite, [] est lenvers de la dette imaginaire17 , celle quvoquent les embrassades trans-gnrationnelles18 du verset de Malachie, que nous citons plus bas.

    la suite de H. Rey-Flaud, il faut se demander si, selon la distinction classiquetablie propos de la formation du rve entre le dsir conscient [] et le dsir incons-cient cach, la fonction de la judit de lauteur [celle de Freud] na pas t dans cetteralisation [il sagit du Mose] celle de lentrepreneur, facile identifier sur le chantier,qui laisse indtermine linspiration de fond qui a jou le rle du capitaliste qui dirigedepuis son bureau lointain les travaux (p. 30).

    Avec Jacques Derrida

    Analysant la thse implicite au monologue de Yerushalmi avec Freud, Derridaremarque que, si pour Yerushalmi le judasme (judaism) est terminable, la judit(jewishness) est interminable19 et quil y a bien pour lui une essence dterminante etirrductible de la judit . Quelle est cette essence de la judit ? : Cest justementlattente de lavenir, louverture du rapport lavenir , lanticipation dune esprancespcifique dans lavenir20 . Il en donne cette remarquable formulation : Comme si Dieunavait inscrit quune chose dans la mmoire dun seul peuple et dun peuple entier : lavenir rappelle-toi de te rappeler lavenir21. Cette formule permet Derrida de fairevaloir la double supposition sous-tendue par la thse yerushalmienne : non seulementcelle de lantriorit dune archive mais, plus encore, lobligation de larchive. Ce quevrifie Yerushalmi qui trouve dans un verset du dernier des prophtes (Malachie 3, 24),un contenu cette injonction concernant lavenir : Il rconciliera le cur des pres aveccelui des fils et le cur des fils avec celui des pres22.

    Tremblant devant la revendication dunicit de la thse ( un seul peuple, un peupleentier ), Derrida nen fait pas moins sienne cette affirmation de lavenir, tout en lui refu-sant tout contenu. Ce nest pas, pour lui, une thse positive. Ce nest rien dautre que laf-firmation mme, le oui en tant quil est la condition de toute promesse ou de toute esp-rance, [] de toute ouverture lavenir []23. cette raffirmation de Yerushalmi, pour-suit-il, je serais prt souscrire sans rserve . Cet avenir auquel Derrida se dit prt souscrire est radicalement venir, cest--dire indtermin24 [] .

    Tout archivage est dans le mme temps consignation du pass et, de par la slectionquil opre, coup denvoi dun avenir non quelconque. Difficile, ds lors, dinvoquer lave-nir sans convoquer ipso facto la dimension de la promesse. Ce lien du pass (de lammoire) et du doublon avenir/promesse ne peut laisser indiffrent le psychanalyste ; pasquestion pour lui dentonner le refrain populaire cest dur aujourdhui peut-tre, demaina ira vachment mieux . Car une promesse, contrairement ce que lon peut croire,

    17. Henri Rey-Flaud, Lloge du rien, Pourquoi lobsessionnel et le pervers chouent l o lhystrique russitParis, Seuil, 1996, coll. Champ freudien , p. 218-219.18. J. Allouch, Ncrologie, op. cit., p. 147.19. J. Derrida, Mal dArchive, op. cit., p. 11520. Ibidem, p. 120.21. Ibidem, p. 121.22. Y. H. Yerushalmi, Le Mose de Freud, op. cit., p. 179.23. J. Derrida, Mal dArchive, op. cit., p. 109.24. Ibidem, p. 112.

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  • est quelque chose daussi spectral, daussi mort quun spectre ! Et sans doute est-ce l laraison pour laquelle, la diffrence des gurisseurs de tous poils, le psychanalyste, lui,ne fait aucune promesse25 .

    H. Rey-Flaud, quant lui, valide la thse derridienne rfrant lessence de la judit louverture lavenir , faisant de l-venir le trait unaire du juif (p. 191) dont iltrouve le fondement mtapsychologique dans la fidlit indfectible tmoigne par lesJuifs la lettre, incarnation du signifiant primordial [] (p. 191). Pour prendre lamesure du propos, il est ncessaire de suivre le pas pas de son laboration avant de sehter de conclure que le psychanalyste rey-flaudien , lui, ferait des promesses.

    Il a prcdemment tabli la formule du dmenti : la formule nvrotique monpre tait mort et je ne le savais pas qui maintient le pre dans les Limbes o il psecomme un revenant sur la vie du sujet [] soppose laffirmation : Mon pre est mort/ilnest pas mort puisquil ma choisi. (p. 189). La premire formule se vrifie dans la cli-nique de lHomme aux rats o lomniprsence du pre mort envahit le quotidien du sujet,bien des annes aprs son trpas. La seconde formule rend compte de ce que Freud pro-duit avec la fiction du meurtre de Mose et de son dmenti. Laccs au symbolique quou-vre cette relation indite au pre mort accomplie par le dmenti est radicalement dif-frent de celui issu du refoulement : Cette introduction ne traduit plus un travail verticalde mtaphore [] Unterdrckung) mais horizontal de dplacement (A > B, Enstellung) (p. 186). Donc Enstellung versus Unterdrckung. Classiquement, avec la thorie durefoulement, louverture au symbolique effectuait la perte de ce qui est chu ; avec la tho-rie du double dmenti, cette ouverture consigne le maintien de ce qui a t aban-donn/labandon de ce qui est maintenu : cest lapport du Mose. Ce qui fait dire PeterSloterdijk dans un ouvrage rcent que Freud, dans son dernier essai, nutilise plus nullepart le concept dinconscient, comme si celui-ci tait devenu superflu avec lintroductionde lEnstellung26 .

    Les effets de la d-stallation

    Pour dcrire le procs de lecture et de rcriture dun texte (celui du rve, puis le rcitbiblique), Freud fait maintes fois usage de ce terme de la langue courante, Enstellung.Sagissant des remaniements des textes bibliques intervenus au cours des temps prcdantleur rdaction dfinitive, il affirme : Il en va de lEnstellung dun texte comme dun meur-tre. Le difficile nest pas dexcuter lacte mais den liminer les traces. On aimerait pr-ter au mot Enstellung le double sens quil peut revendiquer bien quil nen soit plus faitusage de nos jours. Il ne devrait pas seulement signifier : changer laspect de quelquechose, mais aussi : changer quelque chose de place (Stelle), le dplacer ailleurs27.

    Ce terme a t souvent traduit par dformation ; le titre du chapitre IV de laTraumdeutung, par exemple, a t rendu par la dformation dans le rve . H. Rey-Flaud propose de dire au pied de la lettre que le texte comme le rve est d-stall :le prfixe d correspond au prfixe allemand Ent. Quant stalle [], cest le correspon-

    25. J. Allouch, Ncrologie, op. cit., p. 142.26. Peter Sloterdijk, Derrida, un gyptien, Le problme de la pyramide juive, traduit de lallemand par OlivierMannoni, Paris, Maren Sell diteurs, 2006, p. 26.27. S. Freud, LHomme Mose, op. cit., p. 115.

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    AB

  • dant de lallemand Stelle28 . Si Freud na pas employ le mot Verstellung, un synonymeselon les dictionnaires, dont le mrite aurait t de sinscrire la suite de la Verschiebunget de la Verdichtung, cest, nous dit, Rey-Flaud, que celles-ci portent sur les signifiantsdu texte du rve lorsque lEnstellung touche le texte lui-mme29 .

    Freud, la suite de laphorisme cit plus haut [il en va de lEnstellung dun textecomme dun meurtre], poursuit : Dans bien des cas dEnstellung de texte, nous pouvonsnous attendre trouver, ici ou l, llment rprim ou dni (Das Unterdrckte und dasVerleugneute), mme sil est modifi et arrach son contexte. Seulement il ne sera pastoujours facile de le reconnatre30.

    Le travail du Mose consiste donc rtablir le texte partir des traces non limines.En effet, lEnstellung dun texte nest pas un meurtre parfait31 . Ce paralllisme entretuer le pre (ou le grand homme ) et tuer le texte sous-tend tout le travail danalyse duMose, qui tire sa lgitimit analytique de ce que tout discours humain est le meurtredun autre discours32 .

    Le dmenti, traduisant un trait de d-stallation (Enstellung) qui consigne le main-tien de ce qui a t abandonn, et non plus la perte de ce qui est chu, on conoit que lerapport au sens de la mort, la perte des pertes (p. 187) en soit affect. La momie cegrand corps utopique qui persiste travers le temps33 , traduisant un refus de la mort, exprime la volont de maintenir limage spculaire intacte aprs la mort (p. 187), et sedploie donc dans le registre du moi-idal. loppos, les Juifs, procdant un dmentisubversif de la mort , abandonnent ce registre des identifications secondaires, tout en pr-servant la clef de cet espace , insigne impossible reprsenter (p. 188) : lidal dumoi. Le moi [] senorgueillit de renoncer la pulsion comme dune ralisation qui a dela valeur , dit Freud34 ; cette fiert, commente H. Rey-Flaud, trahit la conscience davoirchapp la loi du signifiant laquelle les autres hommes sont assujettis (p. 189).

    Le dmenti pervers de la mort du pre, qui fonde lidal du moi (et dont la formule,rappelons-le, est : mon pre est mort/il nest pas mort puisquil ma choisi), est ainsi lacondition du transfert instantan et en bloc de la fonction paternelle sur le sujet . Lemeurtre du pre dmenti (non refoul), de ne pas avoir t pris dans le rseau des signi-fiants qui tissent lhistoire du sujet constitue un point dancrage qui chappe la tempo-ralit et qui la fonde. (p. 194). Reprenant ce motif, et le rrrant la lettre, id est laproduction du sujet du langage, H. Rey-Flaud en dduit la thse de ladquation poseentre l tre-juif et ltre-ouvert--lavenir . Si, comme Lacan laffirme : En tant quele signifiant primordial est pur non-sens, il devient porteur de linfinitisation de la valeurdu sujet, non point ouverte tous les sens, mais les abolissant tous (le 17 juin 1964),alors la lettre, incarnation du signifiant primordial, rpondant de cette infinitisation de lavaleur du sujet, dtient en puissance la possibilit des sens ; et la fidlit la lettre estdonc le positionnement dun sujet en ce point dEinzigkeit (unicit symbolique), qui estaussi le signifiant des possibles. Si le Juif est ce sujet, ladquation pose par H. Rey-

    28. H. Rey-Flaud, Freud et le texte, www. tats-gnrauxpsychanalyse.net, in Le rapport de la psychanalyse lart, la littrature, la philosophie, archives 2000.29. S. Freud, LHomme Mose, op. cit., p. 115.30. Ibidem.31. H. Rey-Flaud, Freud et le texte, op. cit., p. 9.32. Ibidem.33. Michel Foucault, Utopies et htrotopies, INA 2004, piste 9.34. S. Freud, LHomme Mose, op. cit., p. 216.

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  • Flaud entre ltre juif et ltre ouvert lavenir rend compte de son introduction ausymbolique et de son ouverture au champ du partage, celui de la structure langagire.

    Avec Jean Allouch

    Dans le texte de la sance inaugurale (17 janvier 2006) de son sminaire LamourLacan , Jean Allouch soutient que cest cela mme que ralise lanalyse : dlesterlanalysant de sa proccupation de lavenir. Dsirer, ai-je crit, cest tre sans avenir. Dj en 1995, il affirmait : Quest-ce quun psychanalys ? Cest, en effet, quelquun quina plus davenir, quelquun comme dipe Colonnes [sic] ou le Vice-Consul aprs quila tir sur Lahore, ou ltudiant borgne de Kenzaburo e aprs la mort de D***, dansAgwii, le monstre des nuages35 . Plus rcemment, en juin 2005, lors dun colloque delcole lacanienne de psychanalyse (La psychanalyse malade de lHistoire), il sinterro-geait : Suis-je sorti de mon analyse muni dune histoire ? Non Il y a bien eu des boutsdhistoire qui ne furent pas sans porte analytique, mais il sest trouv que ces sens ontfait long feu Dsirer, cest tre sans avenir, cest aussi tre sans pass historis (notesprises lors de lexpos).

    Rsumons les termes en jeu dans lensemble de cette discussion. la fin de son livre,dans son monologue avec Freud, Yerushalmi interroge le pre de la psychanalyse : Professeur Freud, parvenu ce point, il me semble futile de vous demander si la psy-chanalyse est bien, gntiquement ou structurellement, une science juive []. Jaimeraisseulement savoir si vous, personnellement, en tes venu la croire telle36. Derridalisant, mot mot, en anglais, le texte de Yerushalmi en dgage ce trait archiv de lajudit ; le privilge absolu, lunicit absolue dans lexprience de la promesse (lavenir)et linjonction de la mmoire37 . Ayant tabli que les deux assignations (celle de lave-nir et celle de la mmoire donc de larchivage) ne sont pas ajoutes ou juxtaposes, maisque lune est fonde dans lautre , et dont nous rappelons la formule donne : lave-nir, rappelle-toi de te rappeler lavenir38.

    Poursuivant son analyse, H. Rey-Flaud nous claire sur cette yrushalmienne drive.Mose, lgyptien, se choisit un peuple et par une dcision arbitraire lui impose la cir-concision, pratique gyptienne sans signification particulire ; ce faisant il lve [cetrait] au rang dinsigne qui va ds lors d-signer les lus quil a choisis (p. 199). Cetrait nest pas, comme le trait unaire, ncessit par la logique du langage, il est produitpar un choix volontaire de Mose. Marque sur le rel du corps, la circoncision est crite lconomie du refoulement, donc de tout dfaut de traduction (p. 201). La formule del-venir comme trait unaire ne convient plus, H. Rey-Flaud corrige : [] cest cetrait rel , marqu sur le corps du sujet, qui confre lintress, habit par la volontactuelle de Dieu, son rapport inn l-venir. (p. 201, italiques H. R-F.). Par cettemarque quil leur impose, signe dlection et de maldiction, Mose se fait le matre delidentit symbolique de son peuple (p. 203). De l dcoule la possibilit de deux posi-tions subjectives opposes. La premire est celle du judasme spirituel vant par Freud,o le Juif install au point de virtualit du manque (p. 254) sattache maintenir lesymbolique comme symbolique par la pratique de la Torah et des commentaires midras-hiques. quoi soppose la mutation de cette position lorsque cette lettre qui supportait

    35. J. Allouch, Ncrologie, op. cit. p. 144.36. Cit par Jean Allouch, Ncrologie op. cit. p. 141.37. J. Derrida, Mal dArchive, op. cit., p. 121.38. Ibidem.

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  • le judasme spirituel, anim par lamour du symbolique, est devenue, linstar du ftiche,le garant rel du narcissisme de lintress, dsormais bunkris derrire un insigne degranit (p. 255).

    Pour se convaincre, sil en tait besoin, que l-venir promu par H. Rey-Flaud napas de parent avec lavenir yerushalmien, lisons ce quil crit dans les dernires pagesde son ouvrage : La leon retenir, aussi bien pour le peuple juif que pour le sujet delinconscient, est que, de toute faon, lorigine est perdue et que cest de cette perte quelun et lautre se constituent comme -venir (p. 303). Et encore, commentant la rponsede Sigmund Freud une requte de lassociation sioniste de Jrusalem Keren Hajes-sod39 : [] lessentiel pour Freud est de rcuser les prtentions de ceux qui, encherchant asseoir lavenir de la nation juive sur la caution du pass, signent la ruine del-venir (p. 303). Ce qui nest pas sans rappeler les propos dItzhak Rabin, entendussur France Culture, en novembre 1995, quelques jours avant sa mort, parlant de certainscolons israliens : Ils prennent la Bible pour un cadastre.

    Pour un sujet install au point de virtualit du manque, le risque est grand dune bas-cule vers une position de matrise du symbolique : la Loi qui en rsulte, non bride parla chane signifiante, exerce alors une violence digne du pre de la horde, pour freudien-nement le dire. titre dillustration de ce qui advient quand la loi se rduit un seulcommandement absolu , laissant lhomme ptrifi devant un symbolique devenu rel (p. 203), H. Rey-Flaud nous invite lire La Colonie pnitentiaire de Kafka40 o une mons-trueuse machine inscrit dans la chair du sujet, en lettres de sang, le commandement : Sois juste .

    Sans histoire et sans avenir

    Le projet du Mose, de Freud, lu par H. Rey-Flaud, aura t de rendre compte duneintroduction de lhomme au symbolique qui ne repose plus sur le refoulement jusqualors pierre angulaire de ldifice . La thse du double dmenti ouvre la voie trois destins :

    1. La mise en place du signifiant primordial dans linconscient, sous leffet du refou-lement advenu comme relve du dmenti, constitue le premier destin ; le signifiant effac,cest--dire pos et supprim, lenvers du trait marqu de la circoncision, [] devientexpression de la ngativit en tant que telle, pur non-sens [] . Il ne saurait plus alorstre question dun rapport inn lavenir ; tout au contraire, le devenir humain nestdsormais plus dtenu par personne (ft-ce Dieu) (p. 233). Ainsi de la foi chrtiennequi nest plus, comme la foi juive, fidlit au manque en tant que tel, mais au principedu manque dont le nom est la grce. (p. 246). Le nom lacanien de la grce est le dsir.Ce pas est franchi par Paul de Tarse le continuateur du judasme41 , dit Freud. Ce des-tin est pour Freud un progrs dans la vie de lesprit : progrs du point de vue de lhis-toire religieuse, cest--dire sous le rapport du retour du refoul42. Toutefois si Paul estpour lui le continuateur du judasme , il en est aussi le destructeur . Et Freud choi-sit de rester fidle au judasme spirituel, soit la lettre. Lacan, quant lui, prend et la

    39. lisabeth Roudinesco, propos dune lettre indite de Freud sur le sionisme et la question des lieuxsaints , Cliniques mditerranennes, Har, ignorer , 2004, n 70, p. 5-9.40. Franz Kafka, La Colonie pnitentiaire et autres rcits II, traduits par Catherine Billmann et JacquesCellard, Paris, Actes Sud, 1998.41. S. Freud, LHomme Mose, op. cit., p. 180.42. Ibidem.

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  • lettre et la grce, en fait valoir les implications pour la psychanalyse, et poursuit son la-boration.

    2. Les Talibans, manifestant une idoltrie des crits coraniques , exemplifient ledeuxime destin : La rlisation de la lettre, vritable forclusion de linconscient (p. 260), marque, dans ce cas, une bascule rgressive du symbolique au rel dans unprojet oppos celui des Juifs appliqus prserver le signifiant de toute dchancedans limaginaire (p. 261).

    3. Le troisime destin est celui choisi par le sage, qui ayant eu accs lespace repr-sentatif ouvert par le refoulement originaire, dcide de sen retirer.

    Freud revendiquait pour son rcit la vrit historique quil opposait la vritmatrielle , soit la vrit de la construction contre celle des faits. Son Mose est une fic-tion potique dont la valeur pour les psychanalystes tient au pouvoir heuristique de sesinventions. Quant Lacan, il affirmait le 14 mars 1962 :

    En fait, si le fond du christianisme se trouve dans la rvlation paulinienne, savoirdans un certain pas essentiel fait dans les rapports au pre, si le rapport de lamourau pre en est ce pas essentiel, sil reprsente vraiment le franchissement de tout ceque la tradition smite a inaugur de grand de ce fondamental rapport au pre, decette baraka originelle, laquelle il est tout de mme difficile de mconnatre quela pense de Freud se rattache plus dune faon contradictoire, maldictoire, nousne pouvons en douter car si la rfrence ldipe peut laisser la questionouverte, le fait quil ait termin son discours sur Mose et comme il la fait, ne laissepas douteux que le fondement de la rvlation chrtienne est donc bien dans ce rap-port de la grce que Paul fait succder la loi43.

    Dans le mme temps, poursuivant son laboration avec la logique de la ngativit deCharles Sanders Peirce, Lacan produit un calcul de la fonction paternelle en trois tempsqui, dit H. Rey-Flaud, dfinit trois positions subjectives : [] celle de lexclusion relledu pre non-pre, celle de lexception symbolique du pre mort, celle de linclusionimaginaire de tous les quidams qui seront, ce terme, introduits, sans trop savoir com-ment, au champ de la paternit.

    1 2 3

    pre de la horde pre mort tout-venant des pres

    exclusion relle exception symbolique inclusion imaginaire

    (p. 278)

    En ces temps dits de fin du dogme paternel, on se prend rver une psychanalysequi, ayant accueilli, avec Freud, et puis Lacan, les rfrences religieuses lies au Pre , ferait le pas suivant auquel Lacan linvite.

    Un exemple : le volume qui runit non sans raison deux interventions de Lacan,loignes de dix ans, 8 juillet 1953-20 novembre 1963, et qui portent sur des sujets appa-remment htrognes44 ne sintitulerait plus Des Noms-du-Pre mais Le symbo-lique, limaginaire et le rel . Dautant que le prfacier-diteur ajoute juste titre : Lavraie raison qui ma dcid [] rapprocher ces [deux textes] [] cest de donner du

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    43. J. Lacan, Lidentification, dit Sminaire IX , Paris, 2000, p. 137 [version Michel Roussan].44. Jacques-Alain Miller, dans sa prface Jacques Lacan, Des Noms-du Pre, Paris, Seuil, coll. Champfreudien , 2005, p. 7.

  • poids lindication de Lacan dans son enseignement, mi-boutade, mi-sentence, bien danssa manire de mi-dire, selon laquelle le symbolique, limaginaire et le rel, voil les vraisNoms-du-Pre45. Pourquoi ne pas en avoir pris acte ?

    Nonobstant son admiration passionne pour Freud, qui ne rate aucune occasion dem-paterniser le quidam, Henri Rey-Flaud sy emploie avec art.

    suivre son rudite laboration, il parat exclu que lanalyste rey-flaudien fassedes promesses. Le testament de Freud remis sur pied par son minutieux travail de lecturenous incite penser quil se pourrait bien que oui, dcidment, le psychanalys soit sansavenir et sans histoire, mais certainement pas sans histoires.

    Franoise [email protected]

    45. Ibid., p. 8.

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  • Sur ltal du vignettiste

    La fin du divan ?Raymond CAHN

    Paris, Odile Jacob diteur, 2002

    Avec son titre accrocheur La fin du divan ? ce livre pourrait passer pour auda-cieux dans la mesure o son auteur, ancien prsident de la Socit psychanalytique deParis, vient des milieux les plus orthodoxes de la pense freudienne franaise. Mais ensornant dun point dinterrogation, ce mme auteur sautorise un large bmol qui vienttemprer lexcs daudace pour couvrir un livre mi-chvre mi-chou, tiraill entre le rcitdune longue exprience danalyste ouvert la diversit des situations cliniques et despathologies rencontres, et le constant souci de respecter les canons dune rglementa-tion ttue et pointilleuse, qui seule aurait droit au nom bien labellis de psychanalyse .De l que le mot le plus frquent, qui ponctue rgulirement lnonciation des momentsles plus divers, nest autre que certes . Certes ! , la psychanalyse, la vraie, la bonne,la srieuse, la digne dloges, cest celle du divan, des trois (ou quatre) sances hebdo-madaires de trois quarts dheure chacune, des longues interprtations de transfert bref,celle de lInstitut mais quand mme (comme aurait dit Octave Mannoni), il y a ausside lanalyse en dehors de tout ce tralala car, tenez-vous bien, les patients ne sont plus cequils taient.

    Lide quil y aurait eu un temps bni o les psychanalystes ne se seraient occupsque de psychanalyse (au sens fort troit codifi par lIPA) participe de ces clichs quonne discute plus. Et pourtant les nvroses narcissiques et autres tats-limites ne datent pasdhier, et les psychanalystes davant-hier, le plus souvent mdecins et psychiatres, lesrecevaient bel et bien. Nempche, on veut tout prix que le changement quantitatif(indniable, lui, tant du ct des psychanalystes que du ct des analysants) se soit dou-bl dun changement qualitatif : avant, les psychanalystes pouvaient choisir des patientsqui correspondaient la limitation de leur pratique. Aujourdhui, il leur faut accueillirdes patients plus difficiles : Il appert que ces nouveaux patients constituent dsormaisle plus grand contingent des analysants, contraignant ainsi rvision la direction descures et le principe de leur pouvoir (Lacan) [sic] (p. 39).

    Raymond Cahn se veut, quant lui, dfenseur des pratiques qui ne requirent paspour autant le divan, non pour clbrer les psychothrapies tous azimuts, mais pour mon-trer que la technique labore par Freud ne se rduit pas la pratique quen eut soninventeur. Il est donc dchir entre deux objectifs : maintenir que la cure-type (celle quelIPA dit tenir de Freud) est LE lieu deffectuation de lanalyse, et soutenir dans le mmetemps que le face--face peut loccasion avoir autant de vertus, pour peu quil soit misen acte par un analyste1. Cela nous vaut un livre la fois attractif par la diversit des

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    1 [] il nest peut-tre pas inutile dvoquer cette remarque du Britannique Klauber (1984), quitte rou-gir face sa dimension quasi tautologique [] : cest la qualit de lanalyste, quel que soit le cadre, qui dter-minera celle de la cure. (p. 93). J. Lacan navait pas cru ncessaire de rougir pour donner, trente ans plustt, une dfinition semblable : Une psychanalyse, type ou non, est la cure quon attend dun psychanalyste (J. Lacan, Variantes de la cure-type , crits, Seuil, Paris, 1966, p. 329). On stonne parfois que lauteurne fasse jamais rfrence cette phrase, puisque cest par-dessus tout ce quil tient tablir.

    pour

  • points de vue, et conventionnel par son arrimage une conception pour le moins classique. ce titre, il donne un panorama assez instructif de la diversit des pratiques atteinte duct de lInstitut de psychanalyse, mais permet aussi de mesurer un peu quel pointlclectisme des rfrences permet de ne lire aucun auteur, tout en en invoquant beaucoup.

    Cette absence de lecture clate dans les parties dites cliniques o lauteur necesse de monologuer. On en trouve un exemple brutal ds la page 42 o, sous le titre Les tats limites , nous attend la premire vignette clinique qui, selon lusage, se ras-semble sous un prnom demprunt.

    Rmi, 30 ans, en analyse depuis deux ans et demi, est un intellectuel, clibataire,exceptionnellement brillant et apparemment bien adapt un regard extrieur. Ilest venu lanalyse parce quil se sentait vide, irrel, incapable dprouver unemotion vraie ; [] (p. 40).

    Suit une brve description dont le moins quon puisse dire est quelle est charge : leRmi en question serait presque ranger dans les Caractres de La Bruyre tant il parathomogne aux quelques lignes qui lont, demble, camp. Comme de bien entendu, lavignette va nous conter un moment charnire dans cette situation apparemment sansissue, et nous sommes prvenus quun rve va en tre linstrument :

    Voici le rve quil fait alors :

    Il arrive en retard chez moi. Sur mon bureau se trouve un produit miracle pour tout,que je lui injecte dans laine. Linjection est douloureuse mais, vu la grosseur delaiguille, le mal est moins grand que ce quoi il sattendait. Je lui propose alors[] (p. 42).

    Pass un bref instant de sidration, on se dit que, dans ce contexte, jamais personnena rv il arrive en retard chez moi . Peut-tre quelquun a rv jarrive en retardchez vous , ou quelque chose dapprochant, mais avec une telle entame, pour ce qui estde la littralit du texte du rve, tintin ! Adieu les associations du rveur, puisquil estclair quil naura pas droit la parole. Seul le rcitant, lanalyste bien sr, uvre en pre-mire personne avec son vocabulaire et ses shifters ; le cas , lui, ne sortira pas de latroisime personne puisque cest de lui quon parle . Du coup, on stonne moins de lasuite immdiate, sans mme le moindre dcrochement qui aurait conduit un autre para-graphe :

    Je lui propose alors, dans une formulation prudente et labore, linterprtation deson dsir de pntration par le pnis du pre, quil prendrait en lui sur un modenergtique et structurant. Il acquiesce, en rajoutant que ce rve na pas t un cau-chemar (p. 42).

    Le psychanalyste a donc rpondu au rve en injectant sa solution la pntration parle pnis du pre laide dune aiguille quil estime lui-mme pas trop grosse, pru-dente et labore . On apprendra que, lors de ses recherches de termes anatomiquesdans les dictionnaires, Remi enfant nosait pas regarder le mot aine qui, pour lui,constituait un euphmisme pour bas-ventre . Pas un mot de plus.

    Ce il arrive en retard chez moi qui vient la place dun jarrive en retard chezvous , ce choix du style indirect, pourrait sembler, de prime abord, bien innocent. Maisseulement pour celles et ceux qui tiennent ce quun rve soit un rcit qui raconte unehistoire, des faits, des vnements, quil est ds lors permis de dcrire dun point de vue

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  • ou dun autre, et peu importe alors les mots que la censure aura choisi de faire passerou pas. Dun freudien et je ne doute pas un instant que notre auteur le soit, je niraipas lui chercher chicane l-dessus , il est cependant permis dattendre autre chosequune prise en compte directe du texte manifeste comme dune historiole dont il nyaurait qu tirer la moralit. Cette interprtation crase le rve manifeste sur lui-mmeet se contente dnoncer dans le vocabulaire conceptuel qui sied lanalyste une sortede vrit globale du rcit, rduit lacte de linjection. Cette injection que je lui aifaite, poursuit imperturbablement lauteur, il la sentie comme une sorte de seuil fran-chir (p. 42). Et en effet, tout se passe comme si cette injection avait bel et bien t faiteet nattendait plus que sa signification, dj prsente en creux dans la description dupatient donne antrieurement :

    Selon un processus dfensif vident par rapport au transfert, il fait seul sa propreanalyse intellectuellement trs pertinent de tout ce matriel avec ses nombreuxrves. Lensemble est complaisamment exhib plutt que rellement offert, dans unsystme o moi-mme ainsi que ses affects sommes totalement exclus (p. 41).

    Sous le vernis dun constat sans mnagement, la parole du technicien prend ici sesaises, et aide comprendre la prcipitation de lanalyste interprter le rve dans le sensdune ouverture enfin ! sa prsence. Ce qui tait attendu, nous dit-on, survient.Bingo.

    L se situe le ct bouffon de la vignette clinique : dans son ambition de faire cas ,elle se soumet (et dautant plus navement quelle se veut brve) aux seules exigences dela narrativit et de ses modes de succs. Dans le cas prsent, le raisonnement est simple :il sagit de convaincre le lecteur que les tats limites existent, quils sont essentiellementdes troubles narcissiques et quen dpit des difficults ils peuvent aussi tre du ressortde lanalyse. Voici donc Rmi en charge de nous dmontrer la thse de lauteur. Il nestpas l comme tel, dans son trouble, les avatars de sa subjectivit, la frappe de sa parole ;non, il est en service, charg d illustrer lune des deux grandes varits de fonction-nement psychique dans les tats limites (p. 40), et ce titre rduit une image dpi-nal dans laquelle toute donne dissonante viendrait semer un trouble superflu. Le rvementionn est lunique incident dun tableau par ailleurs statique. Avec ce rve et sapntrante interprtation, un tournant se produit dans lanalyse (p. 42) et lon apprendque le monde exclusivement narcissique dans lequel Rmi tait enferm se trouve br-ch. Langoisse fait de-ci de-l enfin son apparition, pour aboutir alors cette conclusionque je cite in extenso dans la mesure o sy dploie le style emblmatique de la majoritdes vignettes cliniques :

    On retrouve chez Rmi les caractristiques mmes de cette catgorie de patientschez lesquels prdominent les troubles narcissiques : la dpersonnalisation de lob-jet ; la dsmotionnalisation de la relation dobjet ; lhypertrophie des dfensesintellectuelles ; la technique exhibitionniste particulire o tout du sujet est com-plaisamment montr sans tre rellement donn, sans vritable relation lanalyste,comme si ce dernier ntait pas l, ou lui-mme ntait pas l. Ainsi se trouve repro-duite la technique de rduction dautrui un sentiment de futilit, dimpuissanceou dinfriorit en dpit de la richesse apparente du matriel, lequel nest dployque pour renforcer labsorption exclusive en soi-mme. Cette belle totalit, ce dis-cours narratif-rcitatif fait plus que sopposer lcoute. Il assure les limites dusujet et constitue une couverture, un revtement protecteur qui met labri le corps

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  • pour surtout ne pas courir le risque de dtruire limage de soi hante par le morcel-lement (p. 43).

    Vraiment, ils sont infernaux, ces narcissiques ! Ils font tout mieux que tout le monde superintelligents, trop bien adapts tout en trompant leur monde puisquils sont enfait vides, insensibles, futiles, fuyant les risques subjectifs ! Heureusement que les ana-lystes ne sont pas de cette trempe ! Et pourtant pour ce qui est du narratif-rcita-tif qui la palme ? Et la technique exhibitionniste particulire o tout du sujet estcomplaisamment montr sans tre rellement donn ? Et la dsmotionnalisation dela relation dobjet ? Sans parler de lhypertrophie des dfenses intellectuelles .Comme dans les cours de rcration, on a envie de crier : Cest clui qui dit qui lest !

    Si un quelconque Rmi a vraiment exist, o est-il ? Quest-ce qui, en lui, pourraitvenir mettre quelque bton dans les roues de ltat-limite-narcissique cher lauteur, etnous convaincre ainsi de la pertinence de llment nosographique en question en mon-trant comment un individu se trouve travers par des contraintes psychiques, se dbatavec elles ( commencer par sa dcision dentreprendre une cure) et ne se contente jamaisden tre le pitre, la marionnette. Mais non ! Avec la vignette clinique et son obissanceaux exigences narratives, rien ne doit venir objecter au savoir qui ici se pavane etsnonce sur le ton la fois docte et pragmatique du chef de clinique. lui le vocabu-laire et lui lexprience : assis sur ce double trne, il lche, dun cas lautre, un frag-ment de sa large pratique clinique.

    Le plus grotesque, dans ce vaste guignol, touche lidentit du cas. Qui donc estJacques, qui fait son apparition au bas de la page 75 ? La rponse ne se fait pas attendre : Jacques est un tat limite venu lanalyse pour sa difficult sentir la ralit, lasienne propre et celle dautrui. Qui est Bruno, qui intervient dans le chapitre Lapproche psychanalytique de la dpression ? Premire phrase son propos : Bruno est ainsi profondment dprim, habit par des ides de suicide. Ainsi !Comment ces pauvres bougres, commis ici au seul titre de leur nosographie, pourraient-ils faire entendre quoi que ce soit au lecteur ? Ils ne sont rien que les marionnettes dusavoir qui les fabrique, et nont pas voix au chapitre. Ils sont les faire-valoir, sinon delanalyste lui-mme, du moins de ses convictions nosographiques et pratiques.

    La position nonciative de ces rcits clairs nest pas lapanage de lInstitut de psy-chanalyse. Les lacaniens, dans leur grande majorit, ont depuis longtemps embot le paset y vont gaiement, eux aussi, de leurs vignettes. Bien sr, le dsir de pntration parle pre ne fait plus recette chez eux, et provoque volontiers lclat de rire, voire lindi-gnation, si pas la consternation convenue. Mais suivre de prs, tout au long de lim-mense littrature analytique contemporaine, des expressions comme signifiant matre ou identification au sinthome , on trouverait aussi une petite arme de Rmi, deJacques, de La et autres, tous empresss de montrer quel point la thorie qui leurdonne existence littrale est puissante, puisquelle est vraie ! Et cest donc toujours lemme refrain, mme si les paroles changent un peu : les outils dont lanalyste sest servipour soutenir sa position, dans le transfert comme dans lintelligence quil peut en avoir,sont lancs au public comme autant de savoir rfrentiel qui dirait ce quil en est dupatient, maintenant devenu un cas sur ltal du vignettiste. Et si je parle de lanalyste pr-sent dans toute vignette comme dun chef de clinique, cest parce quil ne cesse alors dese rfugier dans cette posture mdicalo-universitaire o, sous prtexte daider la trans-mission de son savoir, il le rifie sur le dos de la vrit de sa pratique.

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  • O est-il donc, lui qui vient nous dire le vrai sur le vrai en exhibant un trognon dexis-tence comme garant du savoir quil a russi fabriquer (et/ou quil a pris aussi sur lta-gre, comme tout le monde) ? Jusqu quel point se fait-il la dupe des impratifs pdago-giques de transmission et des pressions ditoriales de rewriting ( Donnez des exemples !Donnez des exemples ! ) ? Quelle scurit cherche-t-il dans cette petite prouesse narra-tive dont la consistance tranche par rapport aux longues coules supposment tho-riques ? Lartifice fard de la vignette svertue ne pas le dire : lanalyste nest l quautitre de tmoin impartial, dot du vocabulaire ad hoc. Et mme lorsquil se met courageu-sement en scne face lchec, comme R. Cahn dans le cas de Marion (p. 155-158), leton ne change pas, et la fameuse implication contre-transfrentielle maintient le rcitantdans la mme posture de savoir : cest lui qui a trbuch dans cette prise au pige rci-proque dune analyse interminable, mais pas sa conception des tats limites, qui sortinentame de lpreuve. La cure est rate, mais son savoir est sauf.

    Les plus frus de thorie ne sont donc pas toujours celles et ceux que lon croit. Souslapparente modestie dune tranche de vie qui viendrait sopposer aux drives spculativeset intellectualistes, on assiste de fait, avec ce genre de vignette, une banalisation dusavoir conu comme pur instrument de description, possdant en permanence un rfrent.Loin dtre montr sous un jour problmatique, dans la difficile dialectique qui larticuleaux ralits quil se propose dordonner peu ou prou, ce savoir ne prtend plus que dcriredes ralits, telles quelles : chaussez ces lunettes, et voyez ! Tout un bestiaire est l, quisoffre vous ! Ainsi le lecteur se voit-il refiler toute une verroterie psychopathologique,dautant plus trompeuse quelle parat, premire vue, vaguement vraisemblable sintait le harnachement terminologique auquel il faut sastreindre pour y atteindre.

    Quelle fatalit entrane freudiens et lacaniens dans ce mme tourbillon de la vignette ?Comment lexigence freudienne du cas sest elle dgrade dans ces petits reality-shows quise veulent vraces et ne sont que vulgaires dans leur prtention la clart et la concision ?Ne serait-ce pas un certain mode de rapport la thorie qui en dciderait ?

    Avec son chapitre VI : Le travail de psychanalyse : une thorisation , R. Cahn nousoffre une chance de le savoir, quoique lincipit en soit fort bizarre : Si le terme de sub-jectivation nest pas dans les dictionnaires [] (p. 165). Bon, daccord, il nest pas dansle Petit Robert, mais ce nom est reu dans la langue franaise depuis au moins 1937, sijen crois le Grand Robert, qui lui consacre vingt-deux lignes. Il sagirait, selon notreauteur, du mouvement que Freud lui-mme a dsign avec son fameux Wo es war, sollIch werden , mentionn en allemand et dont il propose en note sa traduction : L otait du a, je doit advenir. Alors, ce Ich , est-il sujet ou objet ?

    Ce Ich qui advient, dont le moi constitue linstrument en mme temps que lobsta-cle, savre bien le sujet []. (p. 166).

    Savre ! Ah bon ? Mais cest tout le problme, le casse-tte que les lecteurs atten-tifs au texte de Freud connaissent bien et qui, sa faon, a partag en deux le petit mondefreudien franais : dun ct, il y a eu ceux qui en tenaient pour le moi doit advenir (lInstitut), et de lautre ceux qui, avec Lacan, optaient pour Je dois advenir . Notreauteur, qui se veut syncrtique, choisit plutt les deux la fois : je doit , mais ce je savre bien le sujet .

    Il nest jamais vain de revenir sur des points aussi chauds, et par ailleurs il est clairque R. Cahn veut faire de la subjectivation le principe de la cure analytique, avec ou sans

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  • divan. Pourquoi pas ? Il invente pour ce faire le concept de subjectalisation ainsientendu :

    La subjectalisation apparat ainsi comme le processus commandant linstaurationdun soi suffisamment autonome, suffisamment diffrenci pour permettre la subjec-tivation et dont inversement les empchements ce dveloppement compromet-tront plus ou moins srieusement la capacit subjectiver (p. 169).

    Mais quelle nest pas la surprise de voir Freud invoqu ce point dune trangefaon :

    Rappelons ce propos que Freud, dans Psychologie des masses, oppose le Subjektdes Ichs (soit lidentit subjective ou plutt le moi dans son ple subjectal) l objekt des Ichs (le moi dans son ple objectal) (p. 169).

    Une note nous renvoie alors la page 62 des Essais de psychanalyse, parus chez Payoten 1981. On sy rend : rien. Pas une mention de la chose, ni dans les pages avoisinantes.On parcourt, en dsespoir de cause, Massenpsychologie dans le texte allemand, pour finirpar buter sur la phrase :

    Im ersten Falle ist der Vater das, was man sein, im zweiten das, was man habenmchte. Es ist also der Unterschied, ob die Bindung am Subjekt oder am Objekt desIchs angreift2.

    Dans le premier cas le pre est ce quon voudrait tre, dans le second ce quon vou-drait avoir. Ce qui fait donc la diffrence, cest que la liaison sattaque au sujet ou lobjet du moi3.

    On a ici affaire un vrai problme freudien. Lexpression Objekt des Ichs apparat(si lon en croit les moyens que linformatique nous offre dans le balayage systmatiquedes textes) une seule fois dans lensemble des Gesamelte Werke : ici mme. Quant lex-pression Subjekt des Ichs , on ne la rencontre pas une seule fois, et mme pas forc-ment ici, faut-il rajouter, car le dpliement du gnitif nest pas valide dans tous les cas.Si je dis : Jai vendu la maison et le bateau de Pierre , il nest pas certain que la mai-son vendue soit celle de Pierre. Cela dit, cest possible aussi, mais ds lors quil sagit dusujet et de lobjet, nous voil carrment sur la ligne de partage des eaux entre ltre etlavoir. Cela mrite un peu plus quun rappelons ce propos [] , puisque cest toutle problme de la subjectivation : comment le fait davoir des expriences peut-il toucherde faon dterminante ce quon est ? Comment des vnements se transforment-ils enprdicats dun sujet ? Mais au fait, quest-ce donc que la subjectivation pour notreauteur ?

    Parmi toutes les dfinitions de la subjectivation, on pourrait choisir celle la consi-drant comme le travail de transformation et dappropriation subjective, partir descapacits de la psych sinformer de son propre fonctionnement, se reprsenterque celui-ci reprsente son activit reprsentative (p. 165).

    Molire, que tu nous fais dfaut ! Car enfin, que nous dit-on dans tout cela, sinonque la vertu subjectivisante de la subjectalisation est seule conduire la subjectivation,

    20

    2. S. Freud, Massenpsychologie, Studienausgabe IX, Fischer Verlag, Franckfurt, p. 99.3. S. Freud, OCF/P, XVI, Paris, Puf, 1991, p. 44. En fait, dans ldition Payot de 1981, cest la page 168 !

  • je veux dire lappropriation par le sujet de ses vcus subjectifs. Voil o serait le pou-mon de la psychanalyse ( moins que a nen soit lopium ?)

    Cette dfinition que lauteur dit choisir nest hlas rien que de son cru et ne lui donneaucun fil retordre. Elle est, si lon y pense, aussi docile que la petite cohorte des Rmiet des La, elle vient opiner doctement de la tte pour soutenir le monologue du narra-teur-rcitant, comme ces auditeurs qui, dans une assemble, donnent en permanence ettrs ostensiblement leur assentiment lorateur, lequel bientt ne peut plus dtourner leregard, fascin par tant daccord.

    La narration gagne ds lors sur tous les fronts. Les cas lui obissent au doigt et lil,mais le savoir qui les tisse relve de la mme tessiture : pas de fausse note audible danscette mlope. a coule, plutt uniformment, sans grand problme conceptuel, dans unelangue qui se voudrait la servante efficace et discrte, un peu borne mais brave, dontlhonnte homme aime faire son ordinaire. Au lieu de quoi elle couvre de son ronron cequon devine chez lauteur, de-ci de-l, de difficults pratiques dans lexercice de la fonc-tion analyste, qui eussent pu devenir heuristiques pour peu que ft questionn ce savoirdans sa consistance mme.

    part a, quil y ait de la psychanalyse sans divan est plutt une thse sympathique,capable de lancer sur dautres pistes que celle du souci tatillon dune rglementation pra-tique faite pour privilgier avant tout les institutions analytiques et leurs thurifraires.Quant savoir ce qui qualifie lanalyste en dehors de son tralala il faudra attendreencore un peu.

    Guy LE [email protected]

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  • La pense Lacan nexiste pas

    LacanPaul-Laurent ASSOUN

    Paris, PUF, coll. Que sais-je ? , n 3660, 2003

    Jenseigne quelque chose dont le terme est obscur.Jacques Lacan1

    Dans une confrence dont le texte ne se trouve pas dans les Dits et crits, MichelFoucault souligne qu il y a quelque chose dans la critique qui sapparente la vertu2 .Le lecteur jugera. Par son Lacan, Paul-Laurent Assoun ralise une prouesse, celle dvo-quer le parcours de Jacques Lacan, de la thse de mdecine en 1932 la destruction delcole freudienne de Paris, en 1980 ; et ce, dans le respect du format 128 pages dela collection Que sais-je ? . On sait que cette collection se qualifie dencyclopdique,et quelle prtend servir, aujourdhui, les envies de savoir . Sur Amazone.fr, le 26 avril2006, propos de ce Que sais-je ?, zllm sinterroge : Est-ce un Que sais-je ? Quoique fortbien document, ce livre nest pas vraiment une introduction Lacan. Tout au long delouvrage, il suppose du lecteur une connaissance pralable des grands concepts laca-niens. Ce qui rend louvrage inaccessible quelquun voulant dcouvrir luvre de lana-lyste. On peut se demander comment cet ouvrage a trouv place dans la collection Quesais-je ?. Il offre une bonne chronologie de lvolution des concepts au cours de lensei-gnement de Lacan. En effet Ce Que sais-je ?, quoi quil prtende tre, entend, expli-citement, procder une opration que nous dirons spcifique. Cette opration est uneopration dhomologation. Comment P.-L. Assoun en est-il arriv simposer cette op-ration ? Retenons dans limmdiat cette mise en esprit : On gardera lesprit, traversce dense voyage clair dans lunivers de pense de Lacan, quil est parti dun fait cliniquemajeur : la rencontre de la psychose [] (p. 15, italiques P.-L. A.). Majeur ? Discret !

    Ces trois-l

    En arrire-plan de ce Que sais-je ?, ce qui fit, un temps, trinit. ma connaissance,dans le cours du XIXe sicle, deux ou trois enfants naquirent quon nattendait pas : Marx,Nietzsche, Freud3. Cette remarque dAlthusser (1964) a d compter pour une gnra-tion, ce fut aussi, la mme anne, le thme de lintervention de Michel Foucault auColloque de Royaumont sur Nietzsche4. Il se trouve que le rapprochement de cestrois-l , de ces trois franc-tireurs [sic], P.-L. Assoun en attribue linitiative Paul

    1. J. Lacan, Discours aux catholiques , [titre invent par J.-A. Miller], confrence du 10 mars 1960 Bruxelles, la facult universitaire Saint-Louis, in J. Lacan, Le triomphe de la religion, [titre Miller], Paris,Seuil, 2005, p. 64. Srie Paradoxe de Lacan de la coll. Champ Freudien .2. M. Foucault, Quest-ce que la critique ? [Critique et Aufklrung] , sance du 27 mai 1978, Bull. Soc.fran. de Philosophie, 1990, t. 84, n 2, p. 34-63, p. 36.3. Louis Althusser, Positions, (1964-1975), Paris, d. Sociales, 1976, p. 12.4. M. Foucault, Nietzsche, Freud, Marx , in Nietzsche, Cahiers de Royaumont, philosophie n VI, 7e col-loque des 4-8 juillet 1964, Paris, d. de Minuit, [1967], 1973, p. 183-200 ; repris in DE, I, n 46.

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    pour

  • Ricur, (mais en donnant deux dates, 1963 puis 1965) dans un article5 que le Quesais-je ? rappelle lexistence (p. 120). Restituons les principaux fragments de ce texte.

    Dans ce texte extraordinairement (re)construit, P.-L. Assoun indique quelle est samise, il suffira den donner le plan pour que de premires articulations soient lisibles. Cestrois matres du soupon, chacun selon sa ligne, oprent une destitution de la conscience,puis une fracture du sens, contradiction (Widerspruch) chez Marx, puissance (Wille zurMacht) chez Nietzsche, symptme (Symptom) chez Freud. Or le point de vue dont senset conscience indiquent les artes vives nest autre que la question du sujet6. Chez Marx,il sagira du sujet de lidologie et de lhistoire, chez Nietzsche dune gnalogie du sujetet chez Freud dun sujet divis, donc [italiques de P.-L. A]. Ce syntagme de sujetdivis a beau tre attribu Freud, il nen est pas moins de Lacan. Non pas pour preuvemais pour illustration, ce passage de son adresse aux psychiatres : Voil ce que dsignele S barr, S cest le sujet en tant que divis, qui est dans un certain rapport avec lob-jet a. Cet objet a a pour proprit dtre ce qui fait le dsir, en tant que le dsir est ce quiest support de ceci qui est la formule du fantasme7. Notons encore que dans unouvrage sur la psychanalyse freudienne, P.-L. Assoun restitue les grands axes de celle-cidans des termes qui empruntent sans le dire , Lacan, notamment les concepts degrand Autre et de sujet divis8.

    Ce petit texte dense de 1989 se poursuit et distribue au verdict matrialiste (Marx),le sujet de lhistoire, au diagnostic gnalogique (Nietzsche), le sujet-fiction, au messagemtapsychologique (Freud) le sujet-cliv. Nulle part mieux que sous le terme deSpaltung, dans le texte qui y est consacr, Freud na mieux figur cet effet9 [leffet dins-cription de linsu dans la conscience]. Ce qui est pos ici en point dorgue du parcours deFreud, cest un manuscrit inachev de quatre pages dat du 2 janvier 1938, DieIchspaltung im Abwehrvorgang, soit le clivage du moi pris entre revendication pul-sionnelle (Triebanspruch) et lopposition faite par la ralit (Realittseinspruch) 10. Quatrepages inacheves, signe souligner du caractre fragmentaire du parcours freudien queLacan na pas manqu de marquer : Enfin, que Freud soit fragmentaire, cest ce qui estvraiment norme, cest que ce ne soit pas la premire chose sensible quiconque ouvreson uvre, et ce, rien que dj par la distance fabuleuse quil y a de la Traumdeutung, ce quon a runi sous le nom des Essais de psychanalyse11. Peu avant la conclusion deson article, P.-L. Assoun prte Freud en ces termes une critique du sujet qui jusquau cur du sujet, questionne lAutre (et qui nest autre que linconscient) cepour quoi la psychanalyse reprsente de la faon sans doute la plus pure le drame de

    5. P.-L. Assoun, Crise du sujet et modernit philosophique : Marx, Nietzsche, Freud , in Andr Jacob (dir.),Encyclopdie philosophique universelle. I. Lunivers philosophique, prface de Paul Ricur, Paris, PUF, 1989,p. 731-738.6. Ibidem, p. 735. Italiques P.-L. A.7. J. Lacan, Petit discours aux psychiatres [Sainte-Anne, Cercle psychiatrique H. Ey, 10 novembre 1967],in Petits crits et confrences, s.d. s.l., d. pirate anonyme, p. 469-499, p. 490. Cf. aussi in Pas-tout Lacan,site de lcole lacanienne de psychanalyse.8. P.-L. Assoun, Introduction la mtapsychologie freudienne, Paris, PUF, coll. Quadrige , 1993.9. Marx, Nietzsche, Freud , op. cit., p. 736.10. S. Freud, Le clivage du moi dans le processus de dfense , traduit par Roger Lewinter et J.-B. Pontalis,in Sigmund Freud, Rsultats, ides problmes, II, 1921-1938, Paris, PUF, 1985, coll. Bibl. de psychana-lyse , p. 283-286.11. Jacques Lacan lcole belge de psychanalyse , [14 octobre 1972], in J. Lacan, Petits crits et conf-rences, op. cit., p. 523-541, p. 531.

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  • la modernit, touche en son plus vif, ltre mme du sujet12 . Passage lisse et subrepticedu moi de Freud au sujet de Lacan, celui-ci appelle pourtant une tude particulire,laquelle a t propose13. Pour autant, dans ce texte, nulle rfrence (explicite) Lacan ;celle-ci arrive, dans les publications de P.-L. Assoun, huit ans plus tard avec un volumi-neux ouvrage lequel enchsse plusieurs livres et interventions antrieurs du mmeauteur intitul Psychanalyse14.

    Enfin vint Lacan

    Cest partir de cet ouvrage de 1997 que des lieux du parcours de Lacan sont intro-duits, et ce quatre titres : 1. Sous une section des Figures postfreudiennes delObjet , un paragraphe : De lobjet spculaire lobjet a ; 2. Sous une sectiondes Figures postfreudiennes du Sujet , un paragraphe : De la fonction du Je ima-ginaire au sujet divis ; 3. Sous une section des Figures de lAutre et de laltrit dansla postrit freudienne , un paragraphe : LAutre de la demande et lAutre du dsir.Symbolique et Nom-du-Pre ; 4. Sous une section Figures de la ralit et du rel dansla postrit postfreudienne , un paragraphe : Le rel comme impossible . Une parti-tion est retenue dont les termes sont lobjet, le moi et lAutre15. Le lecteur attentif seratonn de labsence de rfrences prcises aux textes de Lacan. Les crits, sont cits sixfois, sans rfrence paginale Et lerreur vient sur petit a. Lobjet a est le corrlat[sic] du sujet divis ou cliv [] : cest l quil trouve sa signification propre (p. 660,nos italiques). Non, lobjet a nest pas corrlat, mais cause (du dsir), faisant du dsir uneffet. Lacan : Quoi quil en soit, cet objet a cest la formule gnrale de ce qui se mani-feste de faon absolument dcisive et causale dans la dtermination prcisment de ceque la dcouverte de linconscient nous a permis dapercevoir, savoir : la division dusujet16. Cette erreur est heureusement translittrable17 en le corps est l. Eneffet, ce dont il sagit avec lobjet petit a, cest de ces pices dtachables et pourtantfoncirement relies au corps [] 18 .

    En 2003, Lacan fait donc son entre dans la trs courue collection Que sais-je ?dite encyclopdique, au numro 3660. Pour une vue densemble, reportons-nous latable des matires. Elle est compose de trois parties. La premire partie est intitule Fondements, imaginaire, symbolique, rel ; la deuxime partie, La mathesis laca-nienne. Autre, objet, sujet ; la troisime partie, Lacte analytique et le mathme.Structure et symptme . Alors mme que ce nest pas un trait dfinitionnel de la collec-tion, il nest pas un Que sais-je ? de P.-L. Assoun qui ne soit compos de trois parties19Et dautres ouvrages encore dont la volumineuse Psychanalyse. Premire partie,

    12. Marx, Nietzsche, Freud , op. cit., p. 737. Nos italiques.13. Bertrand Ogilvie, Lacan, La formation du concept de sujet, (1932-1949), Paris, Puf, coll. Philosophies ,1987.14. P.-L. Assoun, Psychanalyse, Paris, Puf, coll. Premier Cycle , 1997.15. Est trac un tableau (VIII) intitul Rcapitulatif gnalogique de la thorie postfreudienne , inPsychanalyse, op. cit., p. 689.16. Petit discours aux psychiatres, [1967], in Petits crits et confrences, op. cit., p. 489, soulignement danscette dition.17. Jean Allouch, Lettre pour lettre, transcrire, traduire, translittrer, Toulouse, Ers, coll. Littoral essais enpsychanalyse , 1984.18. J. Lacan, sminaire La logique du fantasme, sance du 16 novembre 1966, indit.19. Lcole de Francfort, 1987 ; Le freudisme, 1990 ; Le ftichisme, 1994 ; La mtapsychologie, [2000].

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  • Fondements ; deuxime partie, Figures ; troisime partie, Perspectives . Demme pour une Introduction la mtapsychologie freudienne20 : premire partie , Lesfondements ; deuxime partie , Les lments ; troisime partie , Les marges . Unplan en trois parties.

    Pour dautres pas, on peut aussi appeler au 36.53.75. pour un prcis balisage dufrayage de Lacan on y vrifie quil ny a pas de systme Lacan [pas plus quil ny ade systme Foucault ] , ces trois chiffres datant trois temps de crise21. Soit 36 pourlinvention du stade du miroir , 53 pour linvention du ternaire S.I.R., 75 pour lenouage borromen de R.S.I. se rfrer aux chiffres de ce numro de tlphone, toustrois, 36, 53 et 75 tombent dans la premire partie de ce Lacan, tandis que 63 [ indiquerici pour le pas franchi par linvention de lobjet petit a le 9 janvier 196322] tombe dans ladeuxime partie ; la troisime partie restant hors de ce chiffrage. Pour ce quil prsentecomme un dense voyage clair (p. 15), lauteur de ce Lacan, donne dans une Noteliminaire (p. 35), un conseil de lecture. Ce Que sais-je ? est lire avec un autre Quesais-je ? du mme : La mtapsychologie, lui-mme condens dun autre ouvrage23. Disons-le demble pour ne plus y revenir, les textes de P.-L. Assoun prsentent trois usages abu-sifs, celui des majuscules, celui des guillemets et celui de lautocitation. Or, il a beau-coup publi.

    Trouvaille

    En marge de ce Que sais-je ?, lappelant, ce petit voyage. Dun stade lautre. Stadium de Berlin, le 1er aot 1936, 16 heures. Le chancelier Hitler, flanqu de sesministres et des membres du Comit international Olympique (CIO), fait son entre danslarne flambant neuve o va solennellement dbuter la XIe Olympiade de lre moderne.Dans une enceinte archi-comble, 100 000 spectateurs se lvent comme un seul hommeet, bras tendu vers le ciel, crient un tourdissant Heil Hitler ! tandis que lorchestre dirigpar Richard Strauss entame la Marche dhonneur de Richard Wagner. Sitt le Fhrer ins-tall dans sa loge, ce sont les hymnes nazis, repris gorge dploye24 []. Est-ce cette scne laquelle Lacan a assist ? Cest probable. De Berlin, il se rend au congrsde psychanalystes de lIPA Marienbad pour y prsenter un expos sur son stade dumiroir . Sigmund Freud est absent. Ce 3 aot 1936 15 h 40, dix minutes ayant pass,le prsident du congrs, Ernest Jones, faisant preuve dune impriosit sans mnage-ment25 linterrompit. Son texte ne sera pas publi, et ne lest toujours pas Effet, enacte, de mire, de miroir, de mirage. Entre ces deux scnes, lune dun stade, lautre duncongrs, un passage de La Troisime, fait le lien :

    20. Paris, Puf, coll. Quadrige , 1993.21. Jean Allouch, TEL 36 53 75 , Esquisses psychanalytiques, Jacques Lacan , 1991, n 15, p. 9-30.22. Pour cette datation de linvention lacanienne de lobjet petit a, cf. Jean Allouch, La psychanalyse : unerotologie de passage, Paris, Cahiers de lUnebvue, EPEL, 1998, p. 29-59.23. Il sagit de La mtapsychologie, prcite et de Lintroduction la mtapsychologie freudienne, galementprcite.24. Ph.-J. Catinchi, Berlin 1936, Lenjeu symbolique des olympiades , Le Monde des Livres, 4 aot 2006,p. 13. Article pour le livre de Fabrice Abgrall et Franois Thomazeau, 1936 : La France lpreuve des Jeuxolympiques de Berlin, Paris, Alvik d., 2006.25. J. Lacan, crits, Paris, Seuil, 1966, p. 697.

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  • Le rapport lhomme, de ce quon appelle de ce nom, avec son corps, sil y aquelque chose qui souligne bien quil est imaginaire, cest la porte quy prendlimage et au dpart, jai bien soulign ceci, cest quil fallait pour a quand mmeune raison dans le rel, et que la prmaturation de Bolk ce nest pas de moi, cestde Bolk, moi je nai jamais cherch tre original, jai cherch tre logicien cestquil ny a que la prmaturation qui lexplique, cette prfrence pour limage quivient de ce quil anticipe sa maturation corporelle, avec tout ce que a comporte,bien sr, savoir quil ne peut pas voir un de ses semblables sans penser que cesemblable prend sa place, donc naturellement quil le vomit26.

    Dans une chose en voir une autre Avec ce miroir, cest une nouvelle thorie du moi,qui nest pas celle de Freud (1914, 1921, 1923). Le moi de Lacan est autre27. Il est prisdans ces formes qui ne sont pas immdiatement visibles, miroir ou pas, ce que SalvadorDal avait dj vu28, puis peint en son activit paranoaque critique . Ds lors, aucommencement est laltrit et non pas lon ne sait quel narcissisme primaire29 . cetgard, le Que sais-je ?, sil renvoie lexpos des fonctions mtapsychologiques de lathorie du moi freudienne [dans La mtapsychologie, prcite laquelle asserte que lenarcissisme freudien peut servir de base la fonction spculaire, ou lidentification une thorie du trait unaire (Lacan) (p. 68)], souligne que dans cette exprience sp-culaire, on trouve aussi le noyau de la jouissance, imaginaire (p. 35). Dans le Que sais-je ? il nest pas crit que, selon Lacan, Freud, non pas dsigne, mais trahit que le moinest quun trou (R.S.I., le 17 dcembre 1974), parce que le miroir lest30 . La tho-rie du miroir est prsente comme la premire des traverses de Freud Lacan Une note liminaire en annonce dautres (p. 35) ; or traverse suppose le passage dunbord lautre, dune rive lautre soit une lisibilit sans trou du passage.

    Freud dplac

    Puis, un deuxime dplacement : On peut situer l le second dplacement de lapense-Lacan : de la thorie pulsionnelle la thorie du signifiant. Lacan rompt avectout ralisme de la pulsion, en tant quelle pourrait accrditer peu ou prou un fait (psy-cho) biologique tant avr que Freud vide le concept de cette connotation (p. 47, ita-liques P.-L. A.). Ici, non plus traverse mais dplacement31 . La pulsion, lun des qua-tre concepts de la psychanalyse selon le Lacan de 1964, elle-mme freudiennement

    26. J. Lacan, La Troisime , [1er novembre 1974], Lettres de lcole freudienne, Bull. int. de lEFP, Rome,VIIe Congrs de lEcole freudienne, 1975, n 16, p. 178-203, p. 191. Nos italiques.27. On trouvera une prsentation du stade du miroir dans lopuscule prcit de B. Ogilvie, Lacan, Le Sujet,[titre de la couverture avec ses deux majuscules], p. 96-118. Cf. aussi louvrage dmile Jalley, Freud WallonLacan, Lenfant au miroir, Paris, EPEL, 1998.28. Salvador Dal, Interprtation Paranoaque-critique de lImage obsdante de LAnglus de Millet ,Minotaure, 1933, n 1, p. 65-67. Cf. Roland Lthier, LAnglus de Dal , Revue du Littoral, Oui, lar-tiste , 1996, n 43, p. 36-56.29. J. Allouch, Point de vue lacanien en psychanalyse , Encycl. Md. Chir., Psychiatrie, 37-801-A-50,1995, p. 1-5, p. 3.30. Philippe Julien, Le retour Freud de Jacques Lacan, Lapplication au miroir [1985], Paris, EPEL, 1990,p. 230, red. sous le titre Lire Jacques Lacan, Le retour Freud, EPEL/Seuil, 1995, p. 228.31. J. Allouch, Freud dplac , Littoral, Freud Lacan : quelle articulation ? , 1984, n 14, p. 5-15. Cetexte en forme de dclaration dcimale sera nomm Manifeste neuf ans aprs dans Freud, et puis Lacan,J. Allouch, Paris, EPEL, 1993, p. 19. Avec rotologie analytique I, il est possible de compter deux mani-festes.

    27

  • caractrise de quatre lments (pousse, source, but, objet), est le constituant majeurde la cuisine de la sorcire mtapsychologie, son matriau et son plat de rsistan-ce32 . Freud note que aussi trange que cela paraisse, lon devrait envisager la possi-bilit que quelque chose dans la nature mme de la pulsion sexuelle ne soit pas favorable la ralisation de la pleine satisfaction33. Non loin de cette insatisfaction pulsionnelleirrductible, Lacan a pu avancer, un mot prs, le grand secret de la psychanalyse selonquoi il ny a pas de rapport sexuel . Secret, il lest rest.

    Le Que sais-je ? voque que le signifiant prend la place du reprsentant-reprsen-tation de la pulsion, ce qui implique un dplacement de la fonction de reprsentance,de la mtapsychologie freudienne la thorie lacanienne du signifiant. Cela nannulenullement la rfrence la pulsion (voir, infra p. 74), mais en redfinit lconomie eugard au registre du signifiant. (p. 43). Ici deux remarques sont ajouter auxpages 74-75 du Que sais-je ?. La traduction du freudien Vorstellungsreprsentanz par reprsentant-reprsentation et non par sa lacanienne traduction de reprsentant dela reprsentation [ Car il faut dire [] : je men rappelle, soit : je me rappelle ltre(de la reprsentation) partir de cela. De quoi ? Dun signifiant34. ] ne conduit pas ladistinction entre reprsentation freudienne et signifiant lacanien, marque parGuy Le Gaufey35. Lacan ayant relev que Freud accentuait ceci que le refoulement portesur ce reprsentant de la reprsentation, lequel est par Lacan, le 3 juin 1964, dit signi-fiant binaire , cause de laphanisis du sujet, soit de sa disparition ou encore de sonfading36. Quun ratage de lrotologie ait eu lieu de par lindistinction du signifiant et dureprsentant dans la reprsentation par un effet descamotage de la pulsion par-del lefantasme37, cest ce que Jean Allouch a montr38. Lrotologie analytique se passe dereprsentation(s), et didentification(s) aussi bien, mais pas de la pulsion.

    Nomination

    Troisime effet . Ce que Psychanalyse avait relat en ces termes : [] l ouFreud prend acte des fonctions du pre, Lacan fait du Nom-du-pre un oprateur dusymbolique39 , le Lacan le dit ainsi : On peut situer l le troisime effet de retour Freud : l o Freud articulait fermement les fonctions du pre interdit, idalisation,identification [] Lacan introduit cette notation indite [celle de Nom-du-Pre] quiproduit une articulation structurale de ces fonctions et renvoie au travail de la mta-phore (p. 50, italiques P.-L. A.). Pour quels effets, cest cela qui importe. Cette place

    32. La Mtapsychologie, op. cit., p. 35. Nos italiques.33. S. Freud, Sur le plus gnral des rabaissements de la vie amoureuse [1912], trad. fr. J. Laplanche, inS. Freud, La Vie sexuelle [ce titre nest pas de Freud, mais de lditeur], introduction Jean Laplanche, Paris,PUF, 1969, p. 55-66, p. 64. Nos italiques.34. J. L. La mprise du sujet suppos savoir [1967], Scilicet, 1968, n 1, p. 31-41, p. 35-36 et note 1 dep. 36. Article sign J. L. Nos italiques.35. Guy Le Gaufey, Reprsentation freudienne et signifiant lacanien , Littoral, Freud Lacan : quellearticulation ? , 1984, n 14, p. 41-56. Cf. Guy Le Gaufey, LIncompltude du symbolique, de Ren Descartes Jacques Lacan, Paris, EPEL, 1996, notamment p. 139-145.36. J. Lacan, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, livre XI [1964], texte tabli par Jacques-Alain Miller, Paris, Seuil, 1973, p. 198 et 199.37. J. Allouch, Le sexe de la vrit, rotologie analytique II, Paris, Cahiers de lUnebvue, EPEL, 1998,p. 136.38. J. Allouch, La psychanalyse : une rotologie de passage, op. cit., p. 109-142, remarque p. 139.39. P.-L. Assoun, Psychanalyse, op. cit., p. 680. Guillemets et italiques de P.-L. A.

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  • du Dieu-le-Pre, cest celle que jai dsigne comme le Nom-du-Pre40 [] , puis cesera le sminaire Les Noms-du-Pre (passage au pluriel de la sance unique du 20 novem-bre 1963), et dix ans plus tard le pluriel homophonique Les non-dupes errent, intitul dusminaire de 1973-1974 dont nous retiendrons cet exemple quasi homophonique : Lesnon-pudes errent (le 12 mars 1974). Quand la nomination fait trou Ce Lacan lenote si juste titre : Les noms du pre, cest a : le symbolique, limaginaire et le rel.Ce sont les noms premiers (s. XXII, 11 mars 1975) (p. 54). Comment la-t-il not ? comparer avec Eh bien, les noms du pre, cest a : le Symbolique, lImaginaire et leRel [] : les noms premiers en tant quils nomment quelque chose (sminaire R.S.I.indit). Effet de rduction radicale de cette nomination en R.S.I.

    Subjectivit en RSI

    Quatrime effet : On peut situer l le quatrime effet de Lacan : substitution laralit psychique du rel. Lui-mme lvoque humoristiquement comme une peau de banane glisse sous les pieds de Freud ! (p. 59, italiques P.-L. A.). Dansles heures qui suivent la jonesienne interruption Marienbad, Lacan crit un Au-deldu Principe de ralit o, dans un accent prlacanien, il moque chez le clerc cepdantisme ternel qui, pour ignorer combien sa vrit est relative aux murailles de satour, mutile ce que du rel il lui est donn de saisir41 . La distinction ralit/rel sim-posera chez Lacan, ainsi dans La Troisime , il raille le discours du matre dont la finest que les choses aillent au pas de tout le monde. Eh bien a, ce nest pas du tout lamme chose que le rel, parce que le rel, justement, cest ce qui ne va pas, ce qui se meten croix dans ce charroi, bien plus, ce qui ne cesse pas de se rpter pour entraver cettemarche42 . Sur la fin de son frayage, Lacan a ce dire que Freud ntait pas lacanien et ajoutait quil lui avait gliss sous le pied cette peau de banane du R.S.I. []. Quest-ce quil a fait Freud ? [] : il a invent quelque chose quil appelle ralit psychique.[]. Ce quil appelle la ralit psychique a parfaitement un nom, cest ce qui sappellecomplexe ddipe43. Cette ralit psychique nest pour Lacan rien que la ralit reli-gieuse (11 fvrier 1975). La religion est ce qui fait rapport. Dans Freud, et puis Lacan,qui dplie le statut pistmologique de la conscution incluse dans ce titre, Jean Allouchaffirme que la confrence du 8 juillet 1953 publie lan dernier44 , par laquelleLacan prsente, dans un contexte de bagarre, son ternaire S.I.R., a donn son paradigme la psychanalyse45. Ce que le Que sais-je ? laisse passer, pinglant Fonction et champ dela parole et du langage [en psychanalyse manque] et le discours de Rome [sic] (siccar cest le mme) comme le texte-manifeste du retour Freud de Lacan (p. 20). Surce retour, le Que sais-je ? ne fait pas cas de ses trois versions successives [il retient qua-tre effets lisibles de passage] et donc pas de celle qui est la consquence chez Lacan [pasmoins que la doctrine des quatre discours] de la confrence de Michel Foucault, Quest-

    40. J. L. La mprise du sujet suppos savoir , op. cit., p. 39.41. J. Lacan, crits, op. cit., p. 80.42. J. Lacan, La Troisime , op. cit., p. 183.43. J. Lacan, sminaire R.S.I., sance du 13 janvier 1975.44. Confrence publie in J. Lacan, Des Noms-du-Pre, [titre donn par J.-A. Miller], Paris, Seuil, 2005, coll. Champ Freudien , srie Paradoxes de Lacan, p. 9-63. Cf. J. Allouch, De quoi suis-je fait ? in sitedipe, Le petit journal, 2005.45. J. Allouch, Freud, et puis Lacan, op. cit., Trois , p. 23, 29, 31, 70, 89-92, 102, 107, 123.

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  • ce quun auteur ? (22 fvrier 1969)46. Le Que sais-je ? nindique pas que ce retour en ses trois points de suspension est retour ce qui manque Freud, soit le manquede la version du pre47 (dipien (manque de manque)).

    Puissances de lobjet [sic]

    Cest dans un chapitre VI intitul Puissances de lobjet quest prsente linven-tion lacanienne de lobjet petit a. Ce titre est dautant plus inattendu que non seulementce terme de puissance ne se trouve pas chez Lacan mais chez Nietzsche48 [Wille zurMach, (la vie est) volont vers la puissance (et non de )] , mais ne se trouve pas nonplus dans ce chapitre VI ! Ce que lon trouve cest le terme jouissance , au seul para-graphe 6, terme cit 21 fois sur deux pages (p. 76-77) Ce petit a nest pas moins pr-sent comme lpicentre du sisme que Lacan introduit dans le monde [sic] analytique (p. 70).

    Bien quil ait not le caractre intrinsquement contradictoire dune prsentationuniversitaire de lapport de Jacques Lacan [il arrivera Lacan de dire que luniversitairede structure a la psychanalyse en horreur] (p. 5), P.-L. Assoun nen crit pas moins : Pourtant, lobjet a, avance majeure de Lacan, nest pas prtexte lindicible : cestau contraire ce qui fonde lobjet de la psychanalyse, en sa rigueur (de rel et dcri-ture). Cela nous lgitime donc tenter de caractriser la pense-Lacan en ses avances,de la reconnatre dans lordre du discours, comme un discours qui ne serait pas du sem-blant Ainsi se dgage ce que nous appelons la pense-Lacan [] [p. 5, nos ita-liques]. Mais non ; glissant ce titre du sminaire de 1971 de Lacan dans sa phrase, P.-L.Assoun na pas pu lire que le signifiant en lui-mme est, par excellence, le semblant49.Exemple, l o lacting out fait passer le semblant sur la scne, [le fait] monter la hau-teur de la scne , le passage lacte, lui, ne fait pas semblant, il y a de temps en tempsdu rel, sang rouge50. Quant lopration de La pense un paragraphe laccueille plusloin.

    Cet objet petit a, plus dune fois, au rythme de ses crits et sminaires, Lacan le pr-sente , en dressant la liste. Lors de la sance du 16 dcembre 1966 de son sminaire, Lalogique du fantasme, Lacan se livre ce bref dialogue : Quavez-vous donc fait ? medisait lun dentre eux [un parmi les psychanalystes], quaviez-vous besoin dinventer cetobjet petit a ? Cet objet qui ne nous laisse pas tranquille, et pour cause puisquelorsque sa liste se dresse elle donne le sein, le scybale, le regard, la voix, ces pices dta-chables et pourtant foncirement relies au corps voil ce dont il sagit dans lobjetpetit a . Que cet objet nen soit pas un rend impossible quil soit lobjet mthodologique-ment rgl dune pense, non plus quil fasse lobjet dune prsentation universitaire ,sans que celle-ci nait demble un caractre intrinsquement contradictoire (p. 5).

    46. Dits et crits, I, n 69, p. 789-821, et n 258.47. J. Allouch, Les trois petits points du retour , Littoral, La discursivit , 1983, n 9, p. 39-78,p. 76.48. P.-L. Assoun, Freud et Nietzsche [1980], Paris, PUF, coll. Philosophie daujourdhui dirige par P.-L.Assoun, 1982. Sur ce que serait une remarquable homologie fonctionnelle entre la Volont de puissance etla Libido , p. 145-150. Majuscules P.-L. A.49. J. Lacan, sminaire Dun discours qui ne serait pas du semblant, sance du 13 janvier 1971, version AFI,Paris, publication hors commerce, 1996. [] il ny a pas de semblant de discours, tout ce qui est discoursne peut que se donner pour semblant [] (p. 15).50. Ibidem, sance du 20 janvier 1971. Sagissant de passage lacte, Lacan donne ce jour-l lexemple du viol.

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  • Lacan avait averti : La valeur de la psychanalyse, cest doprer sur le fantasme. []Do se pose seulement sen tenir l, que le fantasme fait ralit son cadre : videntl ! Et aussi bien impossible bouger, ntait la marge laisse par la possibilit dextrio-risation de lobjet a. [] Sil tait si facile den parler, nous lappellerions autrement quelobjet a. Un objet qui ncessite la reprise de tout le discours sur la cause, nest pas assi-gnabl