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L’Université de Bucarest à l’époque du régime communiste Ovidiu Bozgan Pour le régime installé à Bucarest en mars 1945, la communisation de l'enseignement supérieur représentait un enjeu majeur. Les autorités pouvaient bénéficier du prestige que les universitaires ralliés fournissaient, de compétences dans l'acte de direction, de propagandistes plus crédibles par rapport aux militants reconnus et, finalement, de modèles d'adaptation pour une société qui traversait une profonde crise politique et morale. Les transformations subies par l'enseignement supérieur reflètent l'évolution - au niveau global - de la compétition politique et l'intrusion brutale de certains facteurs extérieurs. Dès le début, le corps universitaire a été agressé par des représailles déclenchées après le 23 août 1944, quand on avait pris les premières mesures d'épuration, à partir de l'arrestation des universitaires membres de l'administration de Ion Antonescu, tel le cas de Mihai Antonescu, vice- 222

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L’Université de Bucarestà l’époque du régime

communisteOvidiu Bozgan

Pour le régime installé à Bucarest en mars 1945, la communisation de l'enseignement supérieur représentait un enjeu majeur. Les autorités pouvaient bénéficier du prestige que les universitaires ralliés fournissaient, de compétences dans l'acte de direction, de propagandistes plus crédibles par rapport aux militants reconnus et, finalement, de modèles d'adaptation pour une société qui traversait une profonde crise politique et morale. Les transformations subies par l'enseignement supérieur reflètent l'évolution - au niveau global - de la compétition politique et l'intrusion brutale de certains facteurs extérieurs. Dès le début, le corps universitaire a été agressé par des représailles déclenchées après le 23 août 1944, quand on avait pris les premières mesures d'épuration, à partir de l'arrestation des universitaires membres de l'administration de Ion Antonescu, tel le cas de Mihai Antonescu, vice-président du Conseil de Ministres et professeur de droit international à la faculté de droit de Bucarest.

Le processus d'épuration a été prolongé jusqu'en 1948, mais même après la loi de l'éducation promulguée la même année, on a continué de prendre des mesures de suppression de certains enseignants. Dans la même période critique a lieu le ralliement d'un certain nombre de professeurs universitaires, parmi lesquels des véritables personnalités culturelles et scientifiques qui adhèrent soit directement au P.C.R. (Parti Communiste Roumain), soit aux organisations contrôlées par celui-ci, au P.S.D. (Parti Social-Démocrate) y compris.

Les modifications en ce qui concerne le contenu des disciplines universitaires ne semblent pas significatives jusqu'en 1948, les modifica-tions radicales n'intervenant qu'après cette date. L'action sur la jeunesse universitaire a été systématique, et les mesures prises en vue de l'enrégimenter ont été encore plus drastiques, d'autant plus que ce corps avait déjà manifesté son hostilité envers les nouvelles autorités. L'Université de Bucarest, la plus importante institution scientifique et culturelle du pays,

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reproduit d'une manière fidèle les processus ci-dessus évoqués.

Etapes et événements dans le processus de communisation de l'Université.

Le 4 avril 1944, les bombardements terrifiants de l'aviation américaine sur les institutions de Bucarest ont éclaté. Le siège de l'ancienne Université, le local de la faculté de droit, de nombreux laboratoires et instituts ont été avariés. Le Jardin Botanique - soumis à un bombardement massif, vu son voisinage avec le Palais Royal de Cotroceni - a été gravement affecté. C'est dans ces circonstances critiques qu'une partie du matériel de l'Université, des appareils, des collections scientifiques, ont été évacués à Târgu-Jiu.

La réaction du corps didactique face à ces évolutions dramatiques est représentée par le mémoire des universitaires et des académiciens, remis en avril 1944 au maréchal Antonescu. Le mémoire avait pour prémisse le fait que, vu les promesses des alliés, notamment celles de l'U.R.S.S., comme quoi le régime politique ne serait pas modifié en Roumanie au cas de la sortie de celle-ci de son association avec l'Allemagne, il était donc inutile de continuer la guerre en alliance avec l'armée allemande et on sollicitait la cessation de celle-ci. Il serait excessif de soutenir que ce mémoire représentait les options politiques des enseignants de l'Université. L'idée était surgie le 3 avril 1944, pendant une discussion entre Mihai Neculcea et Gheorghe Vrânceanu, tous les deux mathématiciens à la Faculté de Sciences. Une partie des signataires du mémoire d'avril 1944 deviendront, ultérieurement, des collaborateurs zélés des autorités communistes, en exhibant leur attitude antifasciste en contraste avec l'immense majorité des enseignants n'ayant pas signé le document. La dichotomie est fausse, et il est très grave que toute une série d'antifascistes soient devenus des fidèles du régime communiste dans l'action d'asservir la Roumanie à l'Etat soviétique. L'action a été désordonnée, en s'agissant, il paraît, de deux mémoires remis au dirigeant en juillet et août 1944 et servant pour acte fondateur de l'université “démocratique”. Nos affirmations se basent sur le fait que les signataires de celui-ci soutiennent des faits contradictoires, et que de leurs déclarations il ne ressort pas que le mémoire fût jamais remis au maréchal Antonescu. Parmi les signataires du mémoire d'avril 1944 et appartenant à l'Université de Bucarest, on retient les noms de: Daniel Danielopolu, Nicolae Gh. Lupu, Grigore T. Popa, C.I. Parhon, Francisc Rainer, P.P. Stănescu, Constantin Bordeianu, Alexandru Rosetti, Mihail

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Ralea, Eugen Herovanu, Amza Jianu, Simion Stoilov, Alexandru Ghika, Gheorghe Vrânceanu, Gheorghe Demetrescu, Gheorghe Banu, Istrate Micescu, Constantin Popovici, Eduard Mezincescu, Bazil Munteanu, Alexandru Pantazi, Marin Enăchescu, Dumitru Bagdasar, D.D. Gerota, Stefan Vencov, Radu Rosca, Ion Jovin, Mihail Neculcea, Anton Dimitriu, Florica Mezincescu, George Constantinescu, Constantin Motas, Constantin Angelescu. Parmi ceux-ci, ont été détenus dans les prisons communistes: Amza Jianu, Istrate Micescu, Constantin Motas, Dimitrie D. Gerota et Ion Jovin. Le document aurait été remis au maréchal en juin ou en juillet 1944, précédé par une lettre signée par Daniel Danielopolu, Simion Stoilov, Grigore T. Popa et P. P. Stănescu et il a été intégralement publié dans “România liberă” du 6 septembre 1944.

Le coup d'Etat du 23 août 1944 a eu des conséquences immédiates sur l'Université de Bucarest. A partir de l'automne de l'an 1944, l'Université est confrontée à un rythme accéléré de changements où l'on retrouve les actions coordonnées du P.C.R. en vue de dominer tous les compartiments de la société roumaine. Afin de promouvoir leurs propres intérêts de confisquer l'entier pouvoir politique, les communistes ont déclenché une brouillante campagne de “démocratisation” pour anéantir leurs adversaires politiques. Des accusations de collaboration avec le régime du maréchal Antonescu, de soutien de la guerre antisoviétique, de colportage de certaines conceptions sociales et politiques qui étaient, évidemment, loin de l'absurdité du marxisme-léninisme, commencent à se faire entendre. Les dites forces démocratiques culpabilisaient les autorités universitaires de tergiverser la rentrée universitaire comme si elle n'aurait pas désiré que les étudiants participent à l'action de “démocratisation” du pays. En réalité, la situation matérielle de l'Université de Bucarest était déplorable, le 12 septembre 1944 étant décidé l'appel aux taxes universitaires pour remédier les dégâts. Les voies d'insinuation des communistes dans l'université ont été: la domination des syndicats universitaires, la nomination d'une direction obéissante et la destruction de la vie associative des étudiants et son remplacement avec des organisations directement subordonnées au parti communiste et évidemment, la mise en place du cadre juridique qui puisse permettre la décapitation “légale” de l'université. Les communistes ont pu même se prévaloir de la convention d'armistice du 12 septembre 1944, qui obligeait le gouvernement roumain d'interdire l'activité des organisations “fascistes” qui s'étaient rendues coupables d'attitudes hostiles envers les Nations Unies et notamment envers l'U.R.S.S. L'action a été dirigée par Lucretiu Pătrăscanu, ministre de la justice durant 1944-1948. Le premier acte législatif a été le décret d'épuration de l'administration publique du 8

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octobre 1944, qui offrait aux nouvelles autorités la possibilité de démettre les fonctionnaires publiques employés dans l'intervalle février 1938-23 août 1944. C'est à ce moment-là que les professeurs Nichifor Crainic, Mihai Antonescu, Ion Petrovici, P.P. Panaitescu, Alexandru Marcu sont éliminés de l'Université (la plupart des professeurs étaient déjà arrêtés). Le respectif décret a été modifié dans un sens dur le 24 novembre 1944 et sa variante définitive a été promulguée le 30 mars 1945. Une nouvelle vague d'arrestations en suit en avril 1945, comme une conséquence immédiate, les victimes peuplant le goulag de Caracal.

Le 16 octobre 1944, l'ancienne direction de l'université est mise à l'écart, et en novembre Simion Stoilov (1887-1961) est nommé recteur. Ancien professeur titulaire à la faculté de sciences de Cernăuti de 1923 en 1939, temps pendant duquel il a rempli la fonction de doyen en 1925-1926 et en 1938-1939, il est transféré à l'Ecole Polytechnique de Bucarest en 1939 et en 1941 à l'Université de la capitale. Il a fait part des signataires du mémoire des universitaires par lequel Ion Antonescu était sommé de mettre fin à la guerre contre l'U.R.S.S. En 1944, grâce à sa qualité de sympathisant des communistes et à son remarquable prestige scientifique, il a été nommé recteur de l'université, fonction qu'il détiendra jusqu'en 1946, quand il est envoyé en tant que ministre plénipotentiaire à Paris, position qu'il va occuper jusqu'à l'été de 1948. Il revient à la chaire et il deviendra la premier doyen de la faculté de mathématique-physique, jusqu'en 1951; parallèle-ment, il détiendra la fonction de directeur adjoint de l'Institut de mathéma-tique de l'Académie de la R.P.R. (République Populaire Roumaine). Il a été membre fondateur de l'ARLUS (Association Roumaine pour la conso-lidation des relations avec l'Union Soviétique) et vice-président de celle-ci en 1944-1946, membre fondateur du Groupement Démocrate Universitaire et du Syndicat du Corps Didactique Universitaire, et en novembre 1945 il est devenu membre du P.C.R. Quant à son statut d'académicien, Stoilov en était membre correspondant depuis 1936 et membre actif depuis 1945, en 1948 étant reconfirmé membre de l'Académie de la R.P.R.

Le 17 décembre 1944, a lieu l'élection du comité provisoire du syndicat du corps didactique universitaire, constitué de: C. I. Parhon, Petre Constantinescu-Iasi, Simion Stoilov, Gheorghe Nicolau, Grigore Moisil, Eduard Mezincescu. Enfin, le 22 septembre 1944, sur base des propositions de l'U.T.C. (Union de la Jeunesse Communiste), on a pris la décision d'élire un comité de coordination de la Jeunesse Universitaire Démocrate qui réunissait des représentants du P.C.R. à l'époque de Mihnea Gheorghiu et de Manea Mănescu, du P.S.D., de l'Union des Patriotes, du Parti Socialiste Paysan, P.N.L. (Parti National Libéral) et P.N.T. (Parti National Paysan).

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Des assemblées des étudiants qui démontrent leur attachement aux nouvelles idées ont été immédiatement organisées. Les premiers à se rassembler le 23 septembre ont été les étudiants de la faculté de sciences, suivis par ceux de la faculté de lettres et philosophie (le 28 septembre), médecine (le 28 septembre) et droit (le 29 septembre). L'intention du P.C.R. était de mettre en place une organisation unique des étudiants, encadrée par des militants du parti et qui érodent les organisations traditionnelles démocratiques des étudiants.

Après le mémoire rédigé à la fin du mois de décembre 1944 par les étudiants captés par la gauche politique et adressé au ministre de l'éducation, Stefan Voitec, mémoire par lequel on réclamait l'ouverture des cours de l'Université de Bucarest, le 15 janvier 1945 a lieu la désirée festivité. L'inauguration des cours, qui s'est déroulée en présence du roi Michel, a eu pour point central l'allocution du recteur Simion Stoilov. Le discours de celui-ci a des significations programmatiques pour ce qu'il va suivre, dans le sens d'une négation globale du passé, critiqué sans aucune nuance, sur le ton déjà devenu familier, des dénonciations qui prétendaient de “démasquer” et par l'insistance obsédante sur le fait qu'une nouvelle ère débuterait, une ère paradisiaque, dont les promoteurs ne seraient que les communistes. Ainsi, Simion Stoilov constatait que “dans cette période de 20 ans, le processus de désintellectualisation de nos jeunes a continué lui aussi, sans répit, et les forces obscurantistes tenaces se sont implantées dans les esprits immaturés de ces jeunes égarés”. Par conséquent, il était nécessaire que “cet an universitaire soit le début d'une nouvelle vie. Bannissez les fantômes du passé qui autrefois ont voulu s'emparer de vos esprits jeunes, vous obnubiler la vue, vous restreindre l'horizon”. Le même mois, une partie des enseignants et des étudiants de l'université ont adhéré au Front National Démocrate et le 27 février 1945, Simion Stoilov, C. I. Parhon, Eduard Mezincescu, Nicolae Gh. Lupu et Nicolae Hortolomei ont protesté auprès du roi au sujet des “actes répressifs” du premier-ministre Nicolae Rădescu qui essayait désespérément de s'opposer à l'ascension au pouvoir des communistes. En parallèle, on a commencé les épurations à l'université et une série de professeurs à options politiques marxiste-léninistes vérifiées, tel que Petre Constantinescu-Iasi, ont été employés. Vu ces événements, on peut affirmer que l'Université de Bucarest était grièvement affectée par la réaction communiste. Pourtant, une dernière résistance a été organisée par les étudiants de l'université, qui ont participé, dans leur grande majorité, aux manifestations du 8 novembre 1945 où ils ont déclaré leur soutien moral face à la monarchie et ont exprimé des protestations vigoureuses à l'adresse du gouvernement dirigé par la marionnette du P.C.R., Petru Groza. Le 13

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novembre, le comité central des syndicats des enseignants universitaires, à travers les déclarations de C.I. Parhon, Grigore Moisil, P. Constantinescu-Iasi, Dimitrie Pompeiu et Simion Stoilov, s'est empressé à désavouer en termes violents la participation des étudiants aux démonstrations. La défection des étudiants de l'Université de Bucarest a irrité et inquiété le P.C.R. qui, par l'intermédiaire des enseignants et des étudiants enrégimentés dans ses rangs, a précipité le processus de constitution d'une organisation des étudiants dévouée et contrôlée par les activistes du parti. Par conséquent, le 3 mars 1946, à l'initiative de la Société des étudiants ès sciences a été publié le manifeste du Front Démocrate Universitaire (F.D.U.), salué avec un “enthousiasme révolutionnaire” par C.I. Parhon, Alexandru Rosetti, Mihai Ralea, George Călinescu, Nicolae Gh. Lupu, Miron Nicolescu. L'ancien directeur de la Fondation pour la littérature et l'art “Charles II” et le nouveau recteur de l'Université, Alexandru Rosetti, déclarait dans “Scânteia” du 18 mars 1946 qu'il va soutenir “ce regroupement des forces démocratiques de l'université”. Le F.D.U. s'engageait dans la campagne de mobilisation des étudiants roumains autour du parti communiste, en utilisant de manière démagogique les problèmes sociaux de l'assistance constituée d'étudiants. L'assistance sociale universitaire était dans une situation difficile, amplifiée par la situation économique désastreuse du pays. La famine de 1946 ravageait des zones étendues du pays et l'armée d'occupation soviétique accentuait la pénurie alimentaire qui avait touché des proportions catastrophiques. De nombreux foyers étaient inutilisables, les cantines fonctionnaient défectueusement et les possibilités d'étude étaient précaires. La situation limite de l'assistance sociale était indiscutable, mais elle a été surenchérie au maximum par les associations des étudiants organisées par les communistes. A l'époque, on a débattu le problème de l'encadrement ou non des étudiants dans la vie politique. Dans une enquête effectuée par “Scânteia”, C.I. Parhon déclarait le 18 mars 1946, qu'à mon avis, les étudiants ont le devoir d'apprendre la pensée politique”. Evidemment, C.I. Parhon, qui était président de l'Association roumaine pour la consolidation des relations avec l'Union Soviétique, envisageait une politique d'extrême gauche. Lors du congrès national des étudiants du 9-11 juin 1946, déroulé à Iasi, le F.D.U. a été définitivement constitué. Dans les documents du congrès fondateur il était écrit: “Le succès définitif de notre action de démocratiser l'enseignement ne peut être assuré que par sa réforme structurelle. Cette réforme doit orienter l'éducation vers les besoins réels du pays, en créant en urgence des cadres nécessaires à l'élévation du peuple roumain et à la reconstruction”. Les idées qui y ont été exposées expriment la même obstinante négation de tout ce

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que l'on avait fait jusque là. Son président, l'étudiant communiste Gheorghe Matei, deviendra député du parlement après la farce électorale du 19 novembre 1946, sur les listes du Bloc des Partis Démocratiques, évidemment. En mai 1947, lors du Congrès des étudiants de Cluj, le Front Démocrate Universitaire a été transformé en Union nationale des étudiants de Roumanie (UNSR), et président de la nouvelle organisation est élu Gheorghe Brătescu, qui deviendra plus tard un éminent spécialiste en histoire de la médecine. La résolution du congrès exigeait “d'éloigner toute trace du passé coupable, qui essayerait à mettre en danger la liberté et la prospérité du pays”. Lors du suivant congrès de l'UNRS en 1947, déroulé à Iasi, on a impérieusement demandé d'encadrer les étudiants dans l'activité de reconstruction du pays. Les premiers pas vers l'intégration des étudiants dans le système global du travail forcé ont été faits en 1945-1946, quand débutent les participations aux chantiers de reconstructions tels que le chemin de fer Bucarest-Rosiorii de Vede-Craiova, les exploitations carbonifères de Valea Jiului, ou les usines métallurgiques de Hunedoara. Dans le plus agressif esprit de l'internationalisme prolétaire, les étudiants bucarestois ont participé, durant 1946-1947, aux chantiers organisés en Bulgarie, Yougoslavie, Albanie, Tchécoslovaquie. L'apogée de la participation des étudiants aux chantiers nationaux - où le travail se déroulait dans des conditions infernales - a été constitué par la période 1948-1949, depuis que datent les chantiers de triste renom Agnita-Botorca, Bumbesti-Livezeni, Salva-Viseu ou Lunca Prutului. Simultanément, les étudiants se sont honorablement acquittés des missions qui leur sont revenues pendant les campagnes d'alphabétisation.

L'enrégimentation politique des étudiants roumains est démontrée aussi par les relations internationales qui allaient être établies juste après la guerre. Du 19 août au 1er septembre 1946, à Prague se déroule le premier congrès mondial des étudiants, ayant des participants de 39 pays, occasion avec laquelle on a mis en place l'Union Internationale des Etudiants (président: I. Grohman). Un commentateur anonyme écrivait alors: “Les étudiants des pays libérés par l'Armée Soviétique, connaissant pour la première fois la liberté (sic) et le droit à la vie, venaient amener au congrès le message d'un monde luttant pour son affranchissement de l'exploitation”. La tâche primordiale était le combat contre le fascisme dans les universités, expression éloquente de la politique stalinienne de désignation d'un adversaire imaginaire. L'Union Internationale des Etudiants (U.I.S.) était membre associé de la Fédération Mondiale de la Jeunesse Démocrate (F.M.T.D.) fondée à Londres en novembre 1945. En 1949, lors des travaux du Conseil de l'U.I.S. de Sofia, les étudiants français, anglais et danois ont

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essayé à amorcer une action de dépolitisation de l'Union, mais ils ont échoué devant l'opposition des délégués soviétiques et de ceux appartenant aux démocraties populaires. Après l'exclusion des Yougoslaves en janvier 1950, lors de la session du Comité Exécutif de la F.M.T.D., déroulé à Bucarest, la même chose arrive en février de la même année, à Londres, lors des travaux du Conseil de l'U.I.S. Les étudiants roumains ont été mobilisés dans l'action de collecte de signatures pour l'Appel pour la Paix de Stockholm (1950), une géante manoeuvre propagandiste soviétique. La même année, dans les facultés roumaines ont été constitués pas moins de 159 comités pour la paix dans lesquels ont a intégré des enseignants et des étudiants.

Un vecteur important de la soviétisation de la Roumanie a été représenté par l'Association Roumaine pour la consolidation des relations avec l'Union Soviétique (ARLUS). Si nous insistons sur cette toute puissante institution, c'est puisque la fondation et les premières années de l'activité de celle-ci sont inextricablement liées à l'Université de Bucarest. Son énorme popularité, la ferveur avec laquelle plusieurs professeurs universitaires y ont adhéré s'expliquent à cette époque-là, dominée par opportunisme et abdications morales, par la recherche d'une nouvelle identité “démocratique”, par l'investissement de l'ARLUS avec la fonction de purifier des biographies compromettantes. Comme il arrivait dans ce genre de cas, on avait créé un comité d'initiative composé de toute une série d'intellectuels de gauche, parmi lesquels les professeurs universitaires bucarestois suivants: C.I. Parhon, Gh. Nicolau, Constantin Ionescu-Mihăiesti, Grigore T. Popa, Alexandru Rosetti et Stefan Milcu. La première réunion a eu lieu à la faculté de sciences, le 12 novembre 1944. Officiellement, l'ARLUS a été fondée le 14 novembre (parmi ses initiateurs se sont également comptés Petre Constantinescu-Iasi et Iorgu Iordan). La première direction de l'ARLUS était constituée de: président - C.I. Parhon; vice-présidents - Simion Stoilov, Gheorghe Nicolau, Dimitrie Gusti, Nicolae Porfiri, Daniel Danielopolu, Dumitru Bagdasar; secrétaires généraux - P.P. Stănescu, Simion Oeriu; secrétaires de séance - Marin Enăchescu, Eduard Mezincescu; bibliothécaire - Traian Săvulescu; membres - Petre Constantinescu-Iasi, Constantin Ionescu-Mihăieşti, Gheorghe Vlădescu-Răcoasa, Simion Sanielevici, Alexandru Rosetti; censeur - Dimitrie Pompeiu.

C.I. Parhon, le président de l'ARLUS, écrivait significativement sur le rôle de celle-ci: “Depuis le 23 août, a été brisée enfin et bien sûr, définitivement, la campagne de calomnies entretenues par des fonds étrangers contre l'Union Soviétique par une couche d'accapareurs et

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parvenus qui n'avaient rien en commun avec les grands intérêts de ce peuple, mais qui désiraient continuer à vivre tranquilles du travail de ce peuple, en le maintenant dans l'ignorance et esclavage permanent. La lumière qui vient de l'Est, de l'Union Soviétique, permettra à tous les ouvriers de voir et de comprendre qu'ils doivent être les seuls bénéficiaires des résultats de leur travail”. L'activité effective de l'ARLUS a débuté le 16 novembre 1944 par la conférence de C.I. Parhon, intitulée “L'amitié avec l'U.R.S.S., pourquoi?” Très rapidement, l'association a patronné le 10 janvier 1945, l'inauguration des Editions “Le Livre Russe”, destinée à traduire en roumain notamment de la littérature russe et soviétique, mais aussi des ouvrages idéologiques qui glorifiaient le nouveau credo du moment. Si la présence de certains universitaires dans la direction de l'ARLUS était justifiée par leur passé de militants de gauche (quelques uns étaient des vétérans de l'Association les Amis de l'U.R.S.S., qui a fonctionné de 1934 à 1935), il existe aussi des attitudes d'un opportunisme ridicule, mais qui n'assureront point les survies escomptées. Ainsi, en 1945, Dimitrie Gusti sollicite la mise en place à la faculté de lettres, d'une chaire de langue et littérature russe, et auprès de l'Institut Social Roumain, d'un centre de documentation et d'information scientifique relatives au marxisme et surtout au léninisme et au stalinisme, en motivant de la manière suivante: “Connaître systématiquement, méthodiquement et intégralement les Nations de l'Etat voisin dans leur existence, leur organisation et leur fonction créatrice seront de la plus grande et bienfaisante utilité pour la Nation et l'Etat Roumains qui ont énormément à construire en profondeur et non pas à la surface, comme ils l'ont fait jusque là”. L'ARLUS aura une structure tentaculaire visant la science et la culture entières et cela à travers ses sections où la présence des professeurs de l'Université de Bucarest est notable. Le président de la section de sciences appliquées était le zélé stalinien Traian Săvulescu. A la section de sciences figuraient, parmi autres, Gheorghe Nicolau, Grigore T. Popa, Radu Vlădescu, Mihai Ciucă, Nicolae Lupu. A la sous-section mathématique, dont le président était Dimitrie Pompeiu, il y avait Grigore Moisil, Alexandru Ghika et Alexandru Froda. La sous-section physique-chimie comprenait Negoită Dănăilă, Aurel Potop et Eugen Angelescu et le président de la sous-section géographie était Ion Conea. A la direction de la sous-section d'histoire-philologie il y avait Andrei Otetea, à côté de George Oprescu, Constantin Balmus et d'Alexandru Graur. La section sociologie comptait parmi ses membres Alexandru Claudian, Athanasie Joja, Anton Golopentia et Stanciu Stoian. Enfin, la sous-section enseignement supérieur avait pour président Constantin Motas et pour membres: Basil Munteanu, Iosif Gabrea, Damian

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Bogdan, Miron Nicolescu et Traian Săvulescu. Certains d'entre eux ne survivront cependant pas à la radicalisation du régime, ARLUS n'étant pas, finalement, un refuge sûr. Afin de supprimer l'équivoque qui pourrait subsister, dans les conditions où il y avait des justifications clamant l'apolitisme de l'association, nous allons reproduire l'article 2 du Statut de l'ARLUS, voté le 31 octobre 1948: a) Consolider les relations d'amitié avec l'U.R.S.S., le pays du socialisme et de la culture la plus avancée au monde, la dirigeante du goulag démocratique anti-impérialiste, la garantie de l'intégrité de l'indépendance et de la souveraineté de la R.P.R.; b) Populariser les réalisations du régime soviétique et de son idéologie; c) Populariser l'application de l'expérience soviétique afin de développer la R.P.R. sur la voie de la paix, de la démocratie et du socialisme; d) Entraîner les masses larges de la R.P.R. à la participation active dans la lutte que les forces progressistes du monde, dirigées par l'Union Soviétique mènent pour une paix durable”.

Les nouvelles autorités ont traité en priorité le problème de la suppression de l'autonomie universitaire, réalisée par le décret no. 658 du 24 août 1946. Cette grave atteinte à l'adresse de l'institution universitaire n'a pas été dépourvue de réactions, tel que le prouve le mémoire rédigé par Grigore T. Popa et qui doit figurer dans toute anthologie de la résistance roumaine anticommuniste. Le mémoire, particulièrement documenté et péremptoire, a été discuté lors de la séance du Sénat de l'Université du 15 octobre 1946 et a été approuvé et soutenu par Eugen Angelescu, Alexandru Ciucă, George Fotino et Constantin Ionescu-Mihăiesti. Comme il était prévisible, celui qui s'est opposé à son diffusion fût le néophyte communiste Alexandru Rosetti, récemment nommé recteur de l'Université et qui reprochait à l'assistance, constituée des doyens des facultés, le fait d'avoir été nommés et non pas élus, ce qui faisait que l'autonomie universitaire aurait été déjà enfreinte. L'initiateur du mémoire, Grigore T. Popa, va subir les conséquences de son geste courageux, étant demis dans la même année du décanat et en octobre 1947, étant exclu (“comprimé”) de la chaire. La suspicion des autorités envers les études universitaires peut être entrevue même dans les initiatives de doubler la forme officielle d'enseignement supérieur. Le 14 mars 1945, on a mis les bases de l'Université libre démocratique, dirigée par Simion Stoilov et inaugurée le 26 mais par une allocution de Andrei Otetea. L'objectif en était la diffusion du marxisme-léninisme parmi l'intellectualité et le prolétariat, sous le prétexte de la culturalisation et de la démocratisation. La manière dont on a approché la “démocratisation” de l'enseignement à l'Université de Bucarest, clamée par les organisations des étudiants communistes et par les enseignants fidèles au

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nouveau régime, a engendré un véritable drame - l'extermination des élites culturelles et scientifiques - mais, en parallèle, une caricature du statut d'universitaire, à cause de la promotion d'individus ayant une vague formation de spécialité, mais ayant su se recommander en tant que serviles exécutants du nouveau régime. L'épuration de l'Université de Bucarest a touché dans certaines facultés (notamment à la faculté de droit) les proportions d'une hécatombe. A l'Université on institue un comité d'épuration comprenant le social-démocrate P. P. Stănescu, Simion Stoilov et Alexandru Rosetti (membre du P.C.R. depuis 1946). Les accusés pouvaient se défendre devant les accusations soit verbalement, soit à travers des mémoires (c'est le cas de Gheorghe I. Brătianu). Parallèlement, on déployait une fervente campagne de presse par les journaux communistes ou par ceux asservis au P.C.R. contre les personnes visées, en accréditant l'idée qu'elles auraient été compromises non seulement du point de vue politique, mais qu'elles seraient aussi des nullités professionnelles. Une critique virulente en était opérée même par des futurs universitaires, tels que Henri Wald et Silvian (Sylvain) Iosifescu. Parmi ceux gratifiés des plus grotesques accusations il y avait les professeurs de la faculté de droit et de lettres George Strat, George Fotino, Istrate Micescu, Ion V. Gruia, Gheorghe Leon, Gheorghe Tască, Gheorghe I. Brătianu, Dimitrie Caracostea, C. C. Giurescu, Theodor Capidan, Stefan Ciobanu, Scarlat Lambrino, Nicolae Bănescu. Plus tard, le 23 mai 1947, on a institué une commission de rationalisation de l'éducation supérieure constituée de Traian Săvulescu, Miron Nicolescu, C. Tegăneanu, C. Daicoviciu, P. Constantinescu-Iasi (président de l'Union des Syndicats du Corps Didactique universitaire et secondaire) qui va élaborer la loi de la compression dans l'enseignement supérieur, apparemment une loi dictée par des économies budgétaires, en réalité une pure mesure politique. De la sorte, le 4 octobre 1947, sont forcément mis à la retraite Stefan Ciobanu, Dimitrie Marmeliuc, Marin Liscu, Teofil Sauciuc-Săveanu, Vasile Grecu, Alexandru Otetelisanu, Dobre Ionescu-Bujor (minéralogie), David Preda (géologie), Dimitrie Gusti, Gheorghe Oprescu, Amza Jianu, Traian Nasta. Au total, par cette loi, on a supprimé à l'Université de Bucarest 53 chaires et conférences. La situation la plus dramatique était celle de la faculté de droit.

Après 1948, on a effectué de massifs emplois à l'Université, de sorte que la motivation économique de la loi de compression est ridicule. Pendant l'année universitaire 1948-1949, du personnel didactique antérieur à la date de 23 août 1944, il y subsistait encore: 3,5% à la faculté de philosophie, 23% à la faculté de philologie, 35% à la faculté de droit, 36% à la faculté d'histoire-géographie, 40% à la faculté de chimie, 50% à la faculté de

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sciences naturelles, 60% à la faculté de mathématique-physique. Dans l'an universitaire 1949-1950, a lieu une nouvelle vague d'épurations affectant Mircea Florian, Anton Dumitriu, Tache Papahagi, Mihail G. Rarincescu, Victor Bădulescu, Alexandru Vălimărescu, Constant Georgescu, Jean Vermeulen, Barbu Dimitrescu. C'est ainsi que prenait fin - en grandes lignes - un phénomène tragique qui peut être justement qualifié pour la décapita-tion de l'université bucarestoise et qui envisageait la suppression de l'influence de certains éléments “incertains” sur la jeunesse universitaire et l'annihilation progressive des valeurs nationales, étiquetées sans remords pour réactionnaires et bourgeoises. L'épuration a dégénéré dans l'extermina-tion des professeurs universitaires au moment où on est passé à la “solution finale” de la suppression des personnes qui auraient pu péricliter l'installa-tion irréversible des communistes roumains au gouvernail du pays. Les recherches entreprises jusqu'à présent ne nous permettent pas de dresser une situation définitive. Dans une énumération effectivement incomplète, nous rappelons les enseignants bucarestois qui ont été incarcérés dans les prisons communistes (surtout à Sighet et à Aiud), où nombreux d'entre eux ont décédé à cause du traitement inhumain, parfois ni même la date de leur mort ne pouvant être déterminée: Traian Brăileanu (mort en 1947), Erwin Antonescu (mort à Sighet), Victor Bădulescu (mort à Sighet, en 1954), Gheorghe Leon (mort à Sighet, en 1950), Istrate Micescu (mort à Sighet, en 1951), George Strat (mort à Botosani, en 1961), George Manu (mort en 1961), Anton Golopentia (mort en 1951), Mircea Vulcănescu (mort en 1952), Traian Herseni, Anibal Teodorescu, Petre Topa, Petre Tomescu, Anton Dimitriu, Dimitrie D. Gerota, Constantin Motas, P. P. Stănescu, Ioan Petrovici, Ion C. Petrescu, Aristide Bazilescu, Gheorghe Brătianu (mort à Sighet, en 1953), Grigore Dimitrescu (mort à Sighet, en 1955), Gheorghe Tască (mort à Sighet, en 1951), Constantin Angelescu, Dimitrie Caracostea, Alexandru Marcu (mort en 1951), George Fotino, C.C. Giurescu, Ion Hudiţă, Ioan I. Nistor, Victor Papacostea, Teofil Sauciuc-Săveanu. Ceux-ci, comme d'ailleurs tous les détenus politiques de la Roumanie communiste, étaient incarcérés souvent suite à des procès truqués, selon des accusations fantaisistes, parfois confirmées par les aveux arrachés des inculpés par des tortures atroces. Pour illustrer cela, nous présentons le cas de Istrate Micescu, juriste éminent. Né le 22 mai 1881 à Pitesti, docteur en droit à Paris, conférencier (1912) et ensuite professeur (1930) à la chaire de droit civil de la faculté de droit de Bucarest, plusieurs fois doyen du Barreau Ilfov pendant 1923-1936, député et ministre, il a dû affronter un sinistre procès politique en 1948. Istrate Micescu était accusé d'avoir fait part d'une organisation “subversive” nommée “Le Salut du Peuple”, qui aurait été

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créée en octobre 1947 par Nichifor Robu, un adepte de A. C. Cuza. Micescu aurait été élu président du conseil spirituel de cette organisation et désigné à élaborer le programme et la doctrine de celle-ci. Bien que les preuves administrées dans le procès étaient totalement inconsistantes, Istrate Micescu a été condamné le 3 juillet 1948 à une peine de 20 ans de travaux forcés et 10 ans de dégradation civique. Suite au recours, le 18 janvier 1951 et vu son âge avancé, on a remplacé le travail forcé avec l'emprisonnement dur pour les accusations ridicules de complote, de participation aux activités d'une formation fasciste, facilitation des infractions contre le silence publique. Sollicité par Micescu pour le défendre, l'avocat et l'écrivain Ionel Teodoreanu refuse de manière catégorique. La même année, l'éminent juriste meurt en détention.

Un autre cas, moins tragique, est celui du professeur Dimitrie Gusti. L'illustre sociologue, en tant que directeur des fondations royales, avait une position incommode par rapport aux imposteurs qui se trouvaient à la direction du pays. En 1947, le gouvernement a demandé à Dimitrie Gusti d'approcher les problèmes de l'industrialisation dans les régions de Resita, Valea Jiului, Moinesti-Comănesti-Bacău. Miron Constantinescu, son ancien étudiant et doctorand, maintenant haut dignitaire du parti, secrétaire général de la Commission pour la réforme monétaire et pour la stabilisation économique, n'omettait pas de lui demander d'adopter “la dialectique matérialiste du marxisme-léninisme, la seule qui puisse mener à une interprétation juste des résultats obtenus par la recherche monographique et statistique de la réalité”. Beaucoup plus tard, le même Miron Constantinescu écrivait que “dans les cours que Dimitrie Gusti a soutenu ces années-là (après 1945 - n. a.), il a utilisé une formule éclectique, où il a combiné sa propre conception avec des éléments de marxisme, mais pour n'importe quel lecteur attentif à ce cours, cette fusion serait visible. Le fait qu'un homme ayant utilisé depuis des dizaines d'années certaines interprétations, n'ait pas réussi cependant à restructurer totalement sa pensée, explique pourquoi ses cours contiennent des affirmations fort discutables, erronées et dépourvues de consistance du point de vue du marxisme”. Le fait de généraliser de tels points de vue a été couramment répété et il a eu pour effet l'exclusion d'un nombre important de professeurs de valeur et leur remplacement avec des personnes ayant propagé avec de l'aplomb la nouvelle religion. Toute une série d'illégalistes ou de personnes revendiquant cette qualité feront ainsi leur entrée à l'Université: Tudor Bugnariu, Valeriu Novacu, Ladislau Banyay, Mihail Dragomirescu ou bien Mihai Cruceanu, membre fondateur du P.C.R., Alexandru Graur, Constantin Ionescu-Gulian, Ionel Banu, Silvian Iosifescu, Savin Bratu, Nicolae Bellu, Alexandru Sanielevici, Ionel

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Vitner, Leonte Tismăneanu. Ce n'était pas la compétence professionnelle - parfois douteuse, d'autres fois (plus rarement) adéquate - de ces universitaires qui comptait dans leur dénomination, mais leur attachement politique. Dans certaines disciplines, telles que l'histoire, la sociologie, l'économie politique, les sciences juridiques, la littérature, la philosophie, ont a massivement introduit des éléments de la conception marxiste-léniniste enseignés par des personnes appropriées à cette mission. Par exemple, l'automne de 1946, vient d'être nommé à la chaire d'économie politique le leader communiste Lucretiu Pătrăscanu, qui y va fonctionner jusqu'à son arrestation en 1948.

Dans cet intervalle de temps ce n'est pas seulement la structure du corps professoral qui a été modifiée, mais aussi la structure sociale des étudiants. Durant 1944-1946, suivant la provenance sociale, il y avait à l'Université de Bucarest: 0,33% fils d'ouvriers et 15,83% fils de paysans. En 1947-1948, suite à des mesures prises aux insistances de l'U.N.S.R. par le ministère de l'éducation nationale, l'origine sociale a été modifiée de la manière suivante: 16% fils d'ouvriers et 31,2% fils de paysans. Le changement de la structure sociale des étudiants est le résultat de la décision du ministère de 1947 de réserver aux fils d'ouvriers et de paysans 30% des places des facultés de médecine et 20% des places des autres facultés, pourcentage qui en réalité sera dépassé. Ces mesures sont catégoriquement discriminatoires et leurs résultats seront négatifs. L'admission à l'Université dépendra de l'origine sociale et politique et l'enseignement supérieur sera pratiquement inaccessible pour certaines catégories sociales pour des raisons humiliantes et absurdes, et tout cela rien que pour fabriquer une intellectualité dévouée au parti. En même temps que ces involutions, la situation de l'assistance sociale des étudiants s'est améliorée. Si en 1945 il y avait 500 places au foyer pour les étudiants de l'Université de Bucarest, en 1947 on est arrivé à 1.000 places. Les allocations pour les bourses universitaires ont considérablement augmenté et en décembre 1947 on introduit les taxes progressives. Un an avant la réforme de l'éducation, la situation des étudiants se présentait comme il suit:

Les étudiants de l'Université de Bucarest en 1947-1948

Théologie Droit Lettres Sciences Médecine Pharmacie Médecine vétérin.

673 4 428 3 883 2 793 4 015 1 243 705

L'idée de réforme de l'éducation apparaît dès 1945, quand l'officieux du parti communiste a initié une enquête et a sollicité une série de cadres

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universitaires tels que C. I. Parhon, Serban Cioculescu, Stanciu Stoian, pour des interviews. On reprend des leitmotifs comme la démocratisation de l'enseignement, la restructuration des programmes analytiques, le rôle des associations des étudiants. Lors de la conférence nationale du P.C.R. d'octobre 1945, on a également mis en discussion le problème de la réforme du système d'instruction scolaire de tous les degrés. Le congrès de l'U.N.S.R. de mai 1947 exige que la réforme de l'éducation soit légiférée, demande soutenue par C. I. Parhon, Traian Săvulescu et Simion Stoilov. Le moment paraissait propice pour aborder cette question. A la fin de l'an 1947, la monarchie est abolie et en mars 1948, le pays prend part au triomphe dans les élections du Front de la Démocratie Populaire, qui marquait une nouvelle étape dans le processus de communisation de la Roumanie. Le 3 août 1948, on promulgue la loi de la réforme de l'éducation, inspirée de la législation similaire soviétique. Par cette loi, on a rendu à l'enseignement une organisation uniforme, la diversité de jusqu'alors ayant inspiré beaucoup d'inquiétude aux autorités. Par les attributs que lui on a immédiatement conférés par la littérature apologétique du moment se sont comptés: “démocratique”, “réaliste-scientifique”, “laïque”, “d'Etat”. Il est certain que les programmes analytiques étaient uniformisés; dans l'enseignement supérieur on introduisait des cours obligatoires de marxisme-léninisme et de langue russe, on mettait en place les chaires (de nombreux collectifs d'activité didactique et scientifique) et dans toutes les facultés on créait des chaires de sciences sociales. A remarquer le fait que l'autonomie universitaire était complètement annulée, après avoir été critiquée en tant qu'instrument de la réaction bourgeoise. Les organisations de parti des universités et des instituts supérieurs devenaient omnipotentes dans la direction des activités didactiques et scientifiques. Un premier bilan de la réforme, surpris dans l'inconfondable langue de bois stalinienne, disait: “Dans l'an scolaire 1949-1950, la réforme révolutionnaire de l'éducation a avancé d'un pas géant grâce à ses nouvelles formes d'enseignement introduites dans nos institutions d'enseignement supérieur, selon le modèle de l'expérience des étudiants soviétiques”. Quant à son impact sur l'Université de Bucarest, au delà de tous les éléments de fond ci-dessus mentionnés, celui-ci a consisté dans le détachement de la faculté de théologie qui avait constitué un institut universitaire indépendant en janvier 1949 et dans l'union des facultés de médecine et de celle de pharmacie, en faisant naître l'Institut de médecine et pharmacie de Bucarest, et dans le transfert de la faculté de médecine vétérinaire à l'Institut agronomique mis en place en 1948.

La voie sur laquelle la Roumanie s'était engagée comporte des

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concordances chronologiques avec les autres pays qui constitueront le bloc communiste. Après 1945, en Hongrie, les facultés de théologie et de médecine se séparent des universités; en 1947, en Bulgarie est promulguée une loi de l'éducation supérieure, suivie par la Tchécoslovaquie (1950) et par la Pologne (1950-1953). Seule la Pologne fait exception dans ce tableau gris du modèle unique, en conférant l'autonomie universitaire, sous la pression des protestations anticommunistes d'octobre 1956. Les communistes de Roumanie ont fait tout ce qui était possible pour faire croire que l'enseignement supérieur eût connu une résurrection. Le dirigeant du parti, Gheorghe Gheorghiu-Dej, écrivait en 1956: “Les fabricants et les latifundistes de notre pays n'avaient pas besoin de liquider l'analphabétisme. Ils n'étaient pas intéressés dans la culturalisation des masses populaires, puisque cela aurait mené à une évolution de la conscience des masses, à l'intensification de leur combat pour une vie meilleure. Les classes exploiteuses n'avaient pas besoin d'un peuple culte, mais d'esclaves obéissants qui travaillent pour elles”. Au contraire - comme l'affirme explicitement une Décision du Conseil des Ministres (HCM) de 1953 - dans l'optique des nouveaux gouvernants, l'enseignement supérieur en Roumanie envisageait “l'éducation idéologique et politique des enseignants et des étudiants, selon la doctrine de Marx, Engels et Lénine”.

La ville de Bucarest continuait de rester le centre de la science et de la culture roumaines, malgré le fait d'être à cette époque-là méthodiquement agressées et malgré les obstacles que l'on dressait devant leur évolution normale. Après la réforme de l'éducation de 1948, on a mis en place ou réadapté aux projets de développement social-économique de nombreuses institutions d'enseignement supérieur: l'Institut de sciences économiques et de planification (l'ancienne Académie de Hautes Etudes Commerciales et Industrielles), l'Institut de Géologie et de technique minière, l'Institut de pétrole, gaz et géologie, l'Institut Polytechnique (l'ancienne Ecole Polytechnique), l'Institut de chemins de fer, l'Institut de constructions (1949), l'Institut d'exploitation et d'usinage du bois, l'Institut de l'industrie alimentaire, l'Institut agronomique, l'Institut de zootechnie et de médecine vétérinaire, l'Institut médico-pharmaceutique, l'Institut de culture physique, l'Institut de beaux arts “Nicolae Grigorescu” (1950), l'Institut de Théâtre et d'Art cinématographique “I.L. Caragiale” (1954), le Conservatoire de musique “Ciprian Porumbescu”, l'Institut d'architecture (1952).

Les autorités communistes ont radicalement agi là où la sociabilité universitaire était particulièrement diverse et vivace. L'immense majorité des associations, des sociétés et des revues afférentes ont été interdites. Le plus gravement a été sanctionné le domaine de la sociabilité savante

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médicale, à travers le regroupement de toutes les sociétés, après une préalable purification idéologique, dans une Société des Sciences Médicales de Roumanie, en avril 1949.

La réorganisation de l'Académie de la R.P.R. en 1948, a ensuite entraîné la réforme de la recherche scientifique à travers la mise en place de nouveaux instituts qui en réalité étaient les continuateurs de certains instituts fondés depuis plusieurs décennies. Dans leur institution, leur organisation et leur direction, c'est aux professeurs de l'Université de Bucarest que le rôle essentiel a appartenu. De plus, toute une série d'enseignants supprimés de l'Université, ont été récupérés par ces instituts qui on pu, de la sorte, bénéficier de compétences précieuses, échappant aux improvisations et aux tâtonnements.

A part ces instituts, il y avait aussi des institutions bizarres, tels que l'Institut Roumain-Soviétique et l'Institut pédagogique “Maxime Gorki” (dirigé par Barbu Zaharescu), qui formait des professeurs de russe. Tous les deux représentaient les symboles du monopole culturel soviétique. Lors de la séance de constitution de l'Institut Roumain-Soviétique du 16 mars 1947, la présence des universitaires bucarestois est suffocante. C'est alors que le Comité de direction va être constitué de: Stefan Nicolau, Eugen Bădărău, Andrei Otetea et Valeriu Novacu.

Après la réforme de 1948, l'Université de Bucarest comprenait les facultés suivantes: la faculté de mathématique-physique, la faculté de sciences naturelles, la faculté de philosophie, la faculté de pédagogie-psychologie, la faculté d'histoire-géographie et la faculté de sciences juridiques et administratives. Tout au long de plus de quatre décennies depuis la réforme, l'Université a connu plusieurs modifications par la scission et l'apparition de certaines facultés, dans une première phase, ensuite par la fusion et la diminution du nombre de facultés pendant la dernière décennie. En 1950, la faculté d'histoire-géographie s'est scindée en deux facultés indépendantes. En 1951, a lieu la mise en place de la faculté de journalisme, qui a fonctionné jusqu'en 1957. En 1957, la faculté de pédagogie-psychologie a été supprimée et transformée en section de la faculté de philosophie. Le même phénomène de scission intervient dans la faculté de mathématique-physique en 1962. Une autre innovation fût la mise en place de l'Institut de langues et littératures étrangères (1963) qui regroupait la faculté de langues classiques, romanes et orientales, la faculté de langues germaniques et la faculté de langues slaves (l'ancien Institut “Maxime Gorki”). C'est toujours à ce moment-là que de la faculté de philologie se détache la faculté de Langue et Littérature Roumaines. L'activité didactique et scientifique était axée sur des chaires dont les

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principes de base ont été fixés en 1949 et 1953. Les enseignants étaient entraînés dans des activités minutieusement établies dans le cadre des chaires, qui ont introduit une certaine rigidité dans la vie universitaire. Le corps didactique accroît sensiblement ses rangs: 1948/1949 -458, 1949/1950 -685, 1950/1951 -831, 1951/1952 -966 et 1952/1953 -793.

Le nombre des étudiants de l'Université de Bucarest après la réforme de 1948 a considérablement diminué, pour qu'ultérieurement il augmente jusque vers la première moitié des années '70. La fréquence aux cours et aux travaux pratiques était obligatoire. Initialement, toutes les facultés avaient la durée des études de 4 ans. Depuis 1956-1957, la durée de la scolarité a été prolongée à 5 ans. Inédites par rapport à la situation antérieure à l'an 1948 sont les formes d'enseignement du soir et par correspondance.

Afin de soutenir la formation professionnelle on a institué en 1950-1951 les réunions scientifiques des étudiants, qui déployaient une activité inégale, parfois formelle, des fois particulièrement intéressante.

Par comparaison avec la période antérieure à la réforme de 1948, les étudiants de l'Université de Bucarest, comme d'ailleurs tous les étudiants de Roumanie, étaient encadrés dans l'activité de pratique productive. Celle-ci se différenciait des conditions inhumaines des chantiers nationaux et dans une certaine mesure, correspondait à la formation de spécialistes.

En juillet 1954 on a élaboré le règlement de la pratique dans la production des élèves et des étudiants, règlement qui essayait d'éliminer les éléments d'improvisation et les privations auxquelles étaient soumis les jeunes durant les périodes de travail forcé. Après l'adoption de ce règlement, toutes les facultés de l'Université de Bucarest effectuaient la pratique productive. Cependant, l'intention des autorités de supplémenter le volume d'informations pratiques des étudiants à travers la pratique productive n'est pas convaincante. Au fond, les autorités voulaient disposer de force de travail gratuite et consacrée à des activités qui ne contribuaient en rien à l'approfondissement de la formation professionnelle. Dans le nouveau règlement de la pratique dans la production du 1er juillet 1958, on soulignait que “la pratique dans la production donne aux étudiants la possibilité de connaître le caractère social de la production, la lutte enthousiaste des ouvriers et des techniciens des entreprises et des institutions pour la réalisation des biens matériels, en contribuant à l'éducation des futurs spécialistes, dans l'esprit de l'amour par rapport au travail et aux gens du travail, à la spécialité choisie, dans l'esprit du dévouement par rapport à l'édification du socialisme dans notre pays”. Sur ces coordonnées on pouvait se confronter à des situations absurdes, où les étudiants en chimie effectuaient le stage productif dans les ateliers des

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écoles de métiers (professionnelles) ou collectaient de la ferraille et les étudiants en philosophie essayaient de persuader les paysans à s'inscrire dans les coopératives agricoles.

C'est à l'actif des premières années de “démocratie populaire” que figurent les mesures d'assistance sociale par l'allocation par l'Etat des fonds nécessaires à améliorer les conditions de vie et d'étude pour les étudiants. A la place de l'Office Universitaire, on a institué l'office d'assistance sociale, qui en général avait les mêmes missions. Le nombre d'étudiants bénéficiant de bourses a sensiblement augmenté, bien qu'il serait important de vérifier en quelle mesure le numéraire touché par les bénéficiaires suffisait à leur assurer une existence minimale.

Le nombre des boursiers de l'Université de Bucarest pendant 1948-1960

1948-1949

1949-1950

1950-1951

19511952

1952-1953

1953-1954

1954-1955

1955-1956

1956-1957

1957-1958

1958-1959

1959-1960

1445 1759 2315 2874 3154 4079 2940 2237 2761 2844 2915 3203

C'est à peu près dans le même rythme que le nombre d'étudiants hébergés dans les foyers de l'Université de Bucarest augmente, même s'il y avait de grandes concessions de confort.

1948-1949

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1956-1957

1957-1958

1958-1959

1959-1960

1219 1429 1460 1550 1800 2980 2161 2255 2300 2614 2820 3090

En 1960 est mis au service des étudiants le complexe “6 Mars”, et en 1961 le complexe Grozàvesti, doté de foyers et de cantines modernes. Dans le contexte de l'assurance sociale des étudiants, on a pris de mesures afin de prêter de l'assistance médicale pour les étudiants, susceptible de multiples améliorations (en 1956 on a mis en place l'Hôpital des Etudiants et de 1953 jusqu'en 1968 a fonctionné un hôpital T.B.C. pour les étudiants).

Le cadre rigide assuré par la réforme de l'éducation du 3 août 1948 a vite prouvé son manque de viabilité. En 1956-1957, ont été prises diverses mesures concernant l'enseignement supérieur, mais qui n'ont pas mis en discussion les principes initiaux. La situation a changé dans les années 1960, la période de relative libéralisation et de suppression des attitudes serviles envers le modèle soviétique.

C'est dans ce contexte-là que les distinctions en fonction de l'origine sociale des candidats ou en fonction de leur qualité de boursiers de certains organismes du pouvoir d'Etat ont été supprimées. Le geste a été suffisamment significatif pour générer un commentaire au ministre de la

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L'UNIVERSITÉ DE BUCAREST À L'ÉPOQUE DU RÉGIME COMMUNISTE

France à Bucarest le 13 octobre 1962: “Cette réforme dont bénéficient les éléments éliminés précédemment pour cause d'origine malsaine et qui n'a pu être décidée qu'à l'échelon le plus élevé, peut être interprétée comme un important signe de détente sociale. Bien que ne procédant que de la justice la plus élémentaire, elle est accueillie avec reconnaissance et favorisera le ralliement des anciennes classes nouvelles”. Une autre séquelle du stalinisme des premières années de “démocratie populaire”, l'Institut “Maxime Gorki”, est supprimé en septembre 1963.

En outre, il faut prendre en considération le développement spectaculaire de l'enseignement supérieur en Roumanie:

L'an universitaire Nombre total des étudiants

Nombre des facultés

1946-1949 48.676 1291960-1961 71.989 1311967-1968 141.589 185

L'étude relative à la réforme de l'éducation, notamment de celui supérieur, paraissait dans la presse le 21 juillet 1967 et visait en grandes lignes 3 coordonnées: éliminer l'influence soviétique, revitaliser les traditions de l'éducation roumaine d'avant la seconde guerre mondiale, assimiler la législation occidentale dans le domaine. La réforme de l'éducation du 13 mai 1968 ciblait la remise en droits des sciences naturelles, de la mathématique et des sciences sociales, d'introduire de nouvelles méthodes didactiques, d'étendre les séminaires, de décentraliser l'enseignement supérieur à travers l'accroissement du poids de la province, d'améliorer les salaires, de revitaliser les conseils professionnels et les sénats universitaires, mais sans offrir cependant une véritable autonomie universi-taire. En janvier 1969, le Ministère de l'Education et de l'Enseignement a été réorganisé, comprenant à partir de ce moment-là, parmi d'autres, une direction générale de d'enseignement universitaire et une direction générale des activités éducatives et sociales des étudiants. Les spécialisations dans le cadre de l'enseignement supérieur étaient faites sur base de l'accord d'entre le Ministère et le Conseil National de la Recherche Scientifique, créé en 1965. Si à court terme la réforme a engendré des résultats positifs, les effets de celle-ci ont été corrompus par la dégénérescence du régime de Ceausescu, mélange monstrueux de stalinisme et de nationalisme. Il est certain que sous l'empire de la loi du 13 mai 1968, l'Université de Bucarest a enregistré un développement sensible; dans les années 1969-1970 il y

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Ovidiu Bozgan

avait 12 facultés qui comptaient 21.903 étudiants et 1.270 enseignants.Sur la vie politique des étudiants, ainsi que sur celle de l'Université de

Bucarest, en général, on pourrait dire peu de choses. Au fait, la vie politique en Roumanie était devenue inexistante, sa place étant prise par des festivités organisées de manière “démocratique”, se limitant à la ratification enthousiaste de certaines décisions dans lesquelles s'impliquait un groupe restreint de leaders d'Etat et de parti. Les autorités communistes ont réagi violemment face à toute forme de résistance. On a opéré des arrestations en masse dans la période immédiatement suivante à la conquête du pouvoir politique par les communistes, l'une des plus fameuses actions de ce genre étant celle du 2 mai 1950, quand tous les anciens dignitaires de la Roumanie pré-communiste ont été licenciés et internés sans procès judiciaire dans différents goulags, étant soumis à un régime d'extermination. Parmi les arrêtés, comme on l'a déjà vu, il y avait de nombreux professeurs de l'Université de Bucarest. Le martyre a été subi également par les nombreux étudiants qui ont été arrêtés dès 1945. Le goulag de rééducation de Pitesti, qui a fonctionné de 1949 à 1952, a été peuplé essentiellement par des étudiants. Des agitations des étudiants de l'Université de Bucarest, rapidement réprimées - grâce à la théorie de l'appareil de répression - ont eu lieu en automne de 1956, à l'occasion de la révolution de Hongrie et en 1958, quand les occupants soviétiques se sont retirés du pays.

La Révolution hongroise de 1956 a eu de l'impact sur les étudiants roumains, le groupe le plus vulnérable en ce qui concerne la fidélité de la société roumaine par rapport au communisme. Des manifestations de sympathie avec les insurgés de Budapest ont eu lieu à l'Université de Cluj et de Timisoara, et la crise semblait être assez sérieuse, vu que les autorités aient remplacé Ilie Murgulescu, le ministre de l'éducation, par un activiste fanatique dans la personne de Miron Constantinescu. Les diplomates fran‡ais à Bucarest étaient en mesure de transmettre au Ministère fran‡ais des Affaires Etrangères la note ci-jointe, rendant compte de l'écho de la révolution magyare sur l'Université de Bucarest:

Note annexe sur des manifestations universitairesà Bucarest

Deux ou trois jours après la seconde intervention soviétique en Hongrie (4 novembre) une manifestation d'étudiants était prévue à Bucarest.

Un groupe d'étudiants avait décidé de demander que les cours de marxisme-léninisme et de langue russe ne soient plus obligatoires. Ils avaient fait prévenir leurs camarades, non communistes.

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L'UNIVERSITÉ DE BUCAREST À L'ÉPOQUE DU RÉGIME COMMUNISTE

Au jour et à l'heure dite, les étudiants se sont dirigés sur l'une des principales places de Bucarest, vers la statue de Michel Le Brave où devait avoir lieu la manifestation.

Là, ils se sont trouvés face à face avec des forces importantes de la police, prévenue par les dénonciateurs.

La manifestation n'a donc pas eu lieu; mais de nombreuses arrestations ont été opérées ainsi que des perquisitions à domicile, au cours desquelles des livres ont été confisqués. La police cherche à découvrir les responsables.

D'autre part, on signale que les étudiants roumains font montre d'hostilité à l'égard de leurs condisciples asiatiques (des Chinois auraient été battus à Iassi, des Coréens, défenestrés à Bucarest?!). Ceux-ci s'opposaient notamment à toute diminution de la place du russe dans l'enseignement, car ils ne cachent pas que pour eux la connaissance de cette langue est incomparablement plus importante que celle du roumain.

Dans cette période, la mesure punitive radicale à l'adresse des étudiants était l'exclusion de l'Université, ce qui déterminait pratiquement un statut de paria pour la victime qui ne pouvait plus espérer de finir ses études universitaires. Les exclusions les plus massives se sont produites durant 1958-1959, sur base de l'HCM no. 1003/1957 relative à l'amélioration de la composition sociale des étudiants et des enseignants. On présente ci-dessous, selon les dossiers conservés dans les Archives de l'Université de Bucarest, une série de cas d'étudiants exclus, les causes qui auraient mené à cela consignées dans ces documents permettant, évidemment, de détacher quelques conclusions:

1. Vasilica Ruicănescu (sciences naturelles). Son père a été prêtre.2. Constanta Chiciorea (sciences naturelles). Arrêtée en 1950 pour

omission de dénonciation.3. Florica Bucur (sciences naturelles). Son père a été propriétaire et

légionnaire (membre de la “Garde de Fer”, initialement la Légion de l'Archange Michel).

4. Nina Larisa Ciobanu (sciences naturelles). Son père, Nicolae Ciobanu, ancien membre du Parti National Paysan, a été détenu au canal de 1950 à 1954.

5. Cornelia Chira (sciences naturelles). Son père, Aurel Chira, légionnaire, a été détenu de 1944 à 1945 et de 1948 à 1955.

6. Paula Cosmescu (sciences naturelles). Son père, d'origine allemande, a fait de la politique légionnaire.

7. Florentina Paula Grosu (sciences naturelles). Son père, Grosu Ghica, a participé à la rébellion légionnaire, il s'est inscrit dans le P.C.R. en

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Ovidiu Bozgan

1946, d'où il a été exclu suite aux vérifications.8. Ion Ioniţă (sciences naturelles). Son père était kjabour (similaire au

russe “koulak”).9. Alexandru Ionescu (sciences naturelles). Son père, membre du Parti

National Paysan, avait détenu un dépôt de bois scié, maisons nationalisées, condamné à deux ans de prison.

10. Mircea Traian Ionicà (sciences naturelles). Né à Paris en 1936. Son père a été légionnaire.

11. Elena Ionescu (sciences naturelles). Le père - kjabour.12. Willy Lazarovici (sciences naturelles). Ses parents ont émigré en

Israël dès 1950. Il avait fait part de l'organisation sioniste Hashomer Hata‹r de 1941 à 1948 et de 1946 à 1948 il en avait été le secrétaire II. Il a été arrêté en juin 1953 pour agitation sioniste. Amnistié par le décret no. 421 de septembre 1955, réinscrit à l'Université en décembre 1955 (il en avait été exclu à l'occasion de son arrestation).

13. Constanţa Marinescu (sciences naturelles). Son père - prêtre légio-nnaire, son oncle, Cristea Marinescu, - légionnaire condamné par le régime de Antonescu à 3 ans et par le régime communiste à 15 ans de prison.

14. Victoria Manolescu (sciences naturelles). Son père - détenu de 1951 à 1954 pour des relations avec les partisans.

15. Elena Mihai (sciences naturelles). Son oncle, Spiridon Călinescu - criminel de guerre.

16. Madeena Popovici Moroianu (sciences naturelles). Son père, prêtre à Tighina, s'était réfugié avec sa famille en Roumanie en 1940-1941 et en mars 1944. Elle-même mariée à un fils de latifundiste.

17. Cornelia Zălaru (sciences naturelles). Son père - kjabour et libéral.18. Rodica Vulpescu (chimie). Son père, ingénieur chimiste, membre

de la direction de la Société Nationale de Gaz des Marais de Medias, légionnaire de 1940 à 1944, inscrit dans le P.C.R., exclu lors des vérifications en 1950.

19. Doina Blănaru (chimie). Son père - latifundiste, membre du Parti National Paysan, échappé de Roumanie.

20. Mihai P. David (chimie). Son père a été maire. Un oncle, Ştefan P. David, arrêté en 1954, un autre, Panait P.David, emprisonné de 1947 à 1950.

21. Liliana Ionescu (chimie). Son père, David Ionescu, a été parti en Israël en 1944-1946 et en 1951 il redemande son départ pour l'Israël. Sa mère, Malvina Ionascu, a été arrêtée en 1952 pour ses relations avec la bibliothèque américaine.

22. Elena Neagu (chimie). Son père - latifundiste.

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L'UNIVERSITÉ DE BUCAREST À L'ÉPOQUE DU RÉGIME COMMUNISTE

23. Francisc Potmischil (chimie). Né à Reşiţa en 1939. Son père, Ludovic, a fait part du Groupe Ethnique Allemand; il est envoyé aux travaux de reconstruction en U.R.S.S., où il décède en 1948.

24. Ion Olimpiu Stamatescu (mathématique-physique). Son père - légionnaire.

25. Nicolae Frecuş (mathématique-physique). Son père a détenu un magasin de 1936 à 1947. Après la liquidation de celui-ci, il devient marchand de légumes au marché de la ville de Constanţa. Etudiant avec un comportement douteux durant les événements de Hongrie.

26. Silviu Mandache (mathématique-physique). Son père, ingénieur forestier, kjabour.

27. Alecu Cuturicu (mathématique-physique). Son père, Apostol Cuturicu, Aroumain venu du Quadrilatère en 1925, vendeur de boutique. Etudiant ayant eu un comportement douteux pendant les événements de Hongrie.

28. Maria Ioana Irina Boeru (mathématique-physique). Son père - officier débloqué. Sa mère, condamnée en 1951 pour omission de dénonciation. De 1950 à 1951, l'étudiante a distribué des fiches hostiles à Constanta, mais vu sa minorité, elle n'a pas été condamnée.

29. Emil Bâlcea (mathématique-physique). Son père - prêtre. Etudiant ayant eu des manifestations douteuses pendant les événements de Hongrie.

30. Ion Alexandru Ursu (mathématique-physique). Son père, le colonel Traian Ursu, a été mis à la retraite en 1945, arrêté de 1948 à 1955 comme criminel de guerre.

31. Ion Ganovici (mathématique-physique). Son père, patron d'une boulangerie nationalisée le 11 juin 1948.

32. Florica Apostol (mathématique-physique). Née en 1932 à Suici. Son père, Ion Gh. Apostol, a déroulé des activités subversives de 1948 à 1949, condamné à 2 ans. Son oncle, Dumitru Apostol (surnommé Bàlan), légionnaire, activité subversive en 1948-1949, condamné à des travaux forcés à vie ou condamné à mort.

33. Corneliu Costăchescu (mathématique-physique). Né en 1927. Il termine ses études lycéales à Bucarest en 1946, suit de 1946 à 1947 les cours de l'Académie Commerciale, en 1947 il passe des examens à la faculté de physique de Iasi. Le 7 juin 1948 il est arrêté pour le motif d'avoir fait part des “fratries de croix” et d'avoir déroulé des activités subversives de 1945 à 1948. En première instance il est condamné à 10 ans et lors du recours à 8 ans. Libéré le 4 juillet 1956. L'an suivant, il s'inscrit à la faculté.

34. Viorica Cruceanu (mathématique-physique). Son père, directeur d'entreprise.

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Ovidiu Bozgan

35. Elena Cojocaru (mathématique-physique). Son père-fonctionnaire à la mairie de Cernăuţi, légionnaire.

36. Petre Costinescu (mathématique-physique). Son père, Nicolae Costinescu, a été l'administrateur délégué des Entreprises Emil Costinescu de Sinaia de 1912 à 11 juin 1948 et sénateur de 1931 à 1932. Sa mère, Maria, était la fille de Barbu Ştirbei. Le grand-père de l'étudiant était le leader libéral Emil Costinescu.

37. Milita David (mathématique-physique). Son père - légionnaire et membre de P.N.L.-Tătărescu - arrêté de 1952 à 1954.

38. Florin Ghinrea (mathématique-physique). Son père - sous-préfet. L'étudiant - arrêté de 1949 à 1955 pour avoir fait part d'une organisation subversive.

39. Liviu Lungu (mathématique-physique). Son père, avocat, épuré du Collège des avocats en 1948 et légionnaire.

40. Vasile Marinescu (mathématique-physique). Son père, kjabour.41. Lucia Popa (mathématique-physique). Son père, officier, arrêté de

1949 à 1956.42. Despina Rosetti (mathématique-physique). Son père, l'ingénieur

Radu Rosetti, détenu à Aiud de 1949 à 1954. Son grand-père paternel, Radu R. Rosetti (1877-1948), a été général, mis à la retraite en 1925, membre correspondant de l'Académie (1927), membre titulaire de celle-ci (1934), ministre de l'Education Nationale, des Cultes et des Arts en janvier-décembre 1941, a dû céder en 1945 la superficie de 25 hectares. Mémorialiste et historien militaire renommé.

43. Ion Nainar (géographie). Son père, kjabour et légionnaire. L'étudiant s'enfuit en 1946 en Bulgarie, où il est capturé et rendu aux autorités roumaines. Officier de l'armée de 1947 à 1951, retiré de l'armée avec le grade de soldat.

44. Tănase Giurgea (géographie). Son père, kjabour.45. Maria Apostol (géographie). Son père, kjabour.46. Radu Capră (géographie). Son père, latifundiste.47. Dumitru Ciuparu (géographie). Son père, légionnaire.48. Elena Iatan (géographie). Son père, latifundiste, arrêté en 1952.49. Dumitru Mocanu (géographie). Il a été arrêté de 1950 à 1953 pour

avoir fait part de l'organisation subversive “Les Aigles dociles”.50. Iulian Tică (géographie). Son père, kjabour.51. Viorica Georgeta Panait (géographie). Son père, kjabour.52. Adrian Vasiliu (philosophie). Son père, Constantin Vasiliu,

advenu général en 1948, versé dans la réserve en 1949.53. Ilie Căpitănescu (philosophie). Son père et ses proches parents -

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L'UNIVERSITÉ DE BUCAREST À L'ÉPOQUE DU RÉGIME COMMUNISTE

légionnaires.54. Constantin Nicolaescu (philosophie). Son père, le général Aurel

Nicolaescu, mis à la retraite en 1949.55. Silvia Popovici (philosophie). Son père, officier, mis à la retraite

en 1949.56. Emil Popescu (philosophie). Son père - légionnaire.57. Marioara Stroe (philosophie). Son père, membre du Parti National

Paysan, inscrit ensuite au P.S.D. et exclu du P.M.R. (Parti Ouvrier Roumain) en 1952.

58. Alexandru Steriade (philosophie). Son père, avocat; un oncle, Stefan Steriade - colonel et un autre, Vasile Bràiloiu - général. Exclu de l'Université pour avoir des parents “officiers supérieurs dans l'armée bourgeoise-latifundiaire”.

59. Filofteia Ştefănescu (mathématique-physique). Son père, légionnaire, a fait part du groupe de Dumitru Apostol de Suici, condamné à 20 ans de travaux forcés. Ses parents se séparent en 1959.

60. Gabriela Manda (mathématique-physique). Son père, libéral, ayant fait de la propagande pendant la campagne électorale de 1946, exclu de l'enseignement.

61. Mariana Stănescu (mathématique-physique). Son père, patron d'un atelier de prêt-à-porter.

62. Florin Dumitrescu (philosophie). Son père, kjabour. Son oncle, Gheorghe Dumitrescu, avocat, avait défendu le maréchal Ion Antonescu, fuit le pays et ensuite y revient (?!).

63. Elena Dumitrescu (philosophie). Envoyée pour des études en U.R.S.S., elle a eu une attitude inadéquate pendant les événements de Hon-grie. Renvoyée en Roumanie, elle sera exclue de l'Université en juillet 1958.

64. Vasile Manolescu (sciences juridiques). Sa mère, condamnée politiquement en 1951.

65. Ilie Uzum (sciences juridiques). Son père - légionnaire, exclusion requise par la Sécurité (Police politique).

66. Viorica Popescu (sciences juridiques). Son père a été marié par le père de Corneliu Zelea Codreanu.

67. Valeria Lăcătuşu (sciences juridiques). Son père, kjabour.68. Alexandru Macovei (sciences juridiques). Arrêté en 1953 pour

agitation contre le silence publique.69. Traian Diaconescu (philologie). Son père, kjabour.70. Alexandru Bogdan (histoire). Le 12 mars 1959, lors de

l'assemblée générale de la faculté d'histoire, il avait applaudi la position du professeur Dionisie Pippidi, fait équivalant à une attitude politique

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Ovidiu Bozgan

inadéquate*. 71. Marian Ursache (philosophie). Il avait introduit la Bible dans le

foyer d'étudiants.72. Alexandru Visoreanu (philosophie). Son père - colonel.73. Alexandru Mihalcea (philosophie). Dans sa fiche personnelle on

mentionne qu'il avait était “exclu de l'UTM pour décomposition morale et défense de la littérature et de la critique bourgeoises. Il a eu de graves déviations de la discipline d'étudiant et de foyer; il y a introduit des boissons alcooliques et s'est adonné à des ivresses au foyer”.

74. Ioana Noe (philosophie). Son père, condamné; son frère, légionnaire condamné.

75. Vasile Teodorescu (philosophie). Caractérisé pour élément dissolvant.

76. Maria Bulgăre (philosophie). Son père, propriétaire d'immeubles à locataires.

77. Georgeta Elena Jurist (philosophie). A des relations avec un élément douteux, Sendrea, auquel elle a trouvé un avocat.

78. Iulian Cismasu (philosophie). Son père - légionnaire, ami lui-aussi de Şendrea.

79. Nicolae Plăiaşu (philosophie), relations avec Sendrea.80. Manolis Stanisis (philosophie). On lui a refusé la demande

d'inscription dans le Parti Communiste Grec. Il a refusé la citoyenneté rou-maine et a demandé d'être exclu de l'UTM. Il manifeste une position hostile à l'égard de la politique du PMR par rapport au problème yougoslave.

81. Nicolae Alecu (sciences juridiques). En novembre 1956, il a fredonné dans la cantine des étudiants une chanson où le nom de Horthy revenait à plusieurs reprises. Arrêté et enquêté.

82. Traian Bratu (sciences juridiques). Son père a exploité une tannerie de 1946 à 1948.

83. Nicolae Fertig (philologie). Son père avait été agent du Gestapo et condamné.

84. Elena Liana Bădescu (philologie). Son père - patron d'une librairie.

85. Vasile Beches (philologie). Arrêté de 1952 à 1953 pour activité subversive.

86. Gabriela Apostolescu (philologie). Son père, le colonel Gheorghe * C'est le seul cas enregistré par les documents dont on a disposé en ce qui concerne la faculté d'histoire. Des informations des témoins directs prouvent clairement l'existence d'un nombre beaucoup plus élevé d'étudiants en histoire exclus.

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L'UNIVERSITÉ DE BUCAREST À L'ÉPOQUE DU RÉGIME COMMUNISTE

Apostolescu, a été retenu en 1953-1954. Le grand-père maternel, le colonel Emil Brosteanu, a été condamné à 25 ans de travaux forcés.

87. Nidia Bădiţă (philologie). Son père, prêtre, kjabour.88. Geolinde Binder (philologie). Son père, médecin, a été envoyé aux

travaux de reconstruction en U.R.S.S. de 1945 à 1949.89. Socrate Cârniciu (philologie). Aroumain, colonisé au

Quadrilatère, arrêté en 1951-1955 pour trafic de cartes de rationnement et de devises.

90. Grigore Danciu (philologie). Son père, kjabour, a fait de la politique légionnaire et cuziste (sympathisant de A. C. Cuza).

91. Dragos Danciu (philologie). Son père, kjabour.92. Mariana Frimescu (philologie). Son père a été détenu dans une

colonie de travail en 1950-1951.93. Emilia Firtulescu (philologie). Son père, kjabour.94. Sorana Georgescu (philologie). Son père, Stefan Georgescu Gor-

jan, a été le propriétaire de l'imprimerie Gorjan (1942-1948) et condamné de 1949 à 1953 pour avoir été membre d'une commission de roumanisation.

95. Eugenia Ionescu (philologie). Son père, kjabour.96. Elisabeta Kovaci (philologie). Son père, kjabour.97. Adriana Lichiardopol (philologie). Son père - commerçant.98. Constantin Mircioagă (philologie). Son père, kjabour.99. Daniela Mărgineanu (philologie). Née le 29 novembre 1935, à

Cluj. Son père, le professeur universitaire Nicolae Mărgineanu, a été con-damné en 1949 à 25 ans de prison “pour complot contre le régime et haute trahison et à la confiscation de la fortune”. Sa mère, Eufrosina, a divorcé en 1951-1952. Daniela Mărgineanu s'est inscrite à la philologie en 1954.

100. Ioana Manu (philologie). Son père, propriétaire d'immeubles et usurier, arrêté de 1952 à 1953.

101. Constantin Mustaţă (philologie). Arrêté en 1954 en raison de son appartenance à une organisation subversive, mais acquitté faute de preuves. En 1955 il aurait écrit un slogan réactionnaire dans les W.-C.. de la faculté de droit.

102. Nicolae Manolescu Apolzan (philologie). Né le 27 novembre 1939 à Râmnicu-Vâlcea. Membre de l'UTM depuis 1955. Son père, Petru Apolzan, professeur, a enseigné depuis 1921 à Sibiu, Râmnicu-Vâlcea, Cernàuti, Bucarest. Sa mère, Sabina Apolzan (Manolescu), professeur à Sibiu. Les deux ont été membres de PNL-Tătărescu jusqu'en 1947. Ils ont été retenus pour des investigations de 1952 à 1954. Nicolae Manolescu suit l'école primaire à Sibiu, et l'école secondaire à Sibiu et à Râmnicu-Vâlcea. Lors de l'arrestation de ses parents, en août 1952, il a été adopté par son

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oncle, Nicolae Manolescu, avocat de Râmnicu-Vâlcea. En 1956 il s'est inscrit à la faculté de philologie. En 1956-1957, on lui a accordé la bourse de mérite républicaine.

103. Simona Noica (philologie). Son père, latifundiste.104. Mihai Negulescu (philologie). Son père - maire; des parents

ayant fait de la politique légionnaire.105. Ion Popescu (philologie). Son père, prêtre, propriétaire.106. Emil Pârvu (philologie). Son père a été adjudant chez les

gendarmes en Bessarabie jusqu'en 1944; arrêté de 1950 à 1957.107. Mia Rudi (philologie). Son père, latifundiste.108. Alexandru Urziceanu (philologie). Son père - officier et

latifundiste.109. Nechit Vinereanu (philologie). Son père, kjabour.110. Nicolae Vlad (philologie). Son père, légionnaire.111. Ştefania Voivozeanu (philologie). Son père, kjabour.Etant donné que notre recherche archivistique est partielle, il est

indiscutable que cette liste est incomplète. Au fond, les affirmations que nous détenons se limitent à des données biographiques, aux accusations non-vérifiables qui étaient portées à ces étudiants et à l'invariable formule selon laquelle les victimes, ne déclarant pas dans leurs autobiographies toutes les données concernant la situation sociale et politique de leurs parents ou des relatifs proches, ont induit en erreur les autorités qui à ce moment-là en prenaient leur revanche, dans les conditions des nouvelles réglementations. Les principales accusations étaient que les parents des étudiants en question auraient été des kjabour et des légionnaires, parfois ces accusations étant complémentaires - aux kjabour qui n'avaient eu que quelques hectares de terre, n'étant pas extrêmement compromettants, on ajoutait souvent, de manière arbitraire, la qualité de légionnaires. Les critères d'exclusion étaient donc sociaux et politiques: des kjabour ou des anciens kjabour, des fonctionnaires, des intellectuels, des officiers dans l'armée royale, mais également des membres des partis démocrates, du mouvement légionnaire, des détenus politiques et, bien sûr, très gravement, des éléments ayant participé au mouvement anti-communiste des partisans. Vu ces conditions de discriminations sociales et politiques, il était normal d'user de faux papiers, de déclarations et d'autobiographies truquées et incomplètes. Heureusement, pas tous les cas d'usage de faux papiers ou d'autobiographies tronquées ont été dépistés par les inspecteurs de cadres ou par les étudiants dénonciateurs volontaires. Les principaux protagonistes de ces exclusions spectaculaires, méticuleusement mises en scène, où les enseignants et les étudiants jouaient les rôles infâmes d'accusateurs

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publiques, ont été le recteur Iorgu Iordan et particulièrement Jean Livescu. Iorgu Iordan avait remplacé dans cette fonction le biologiste Nicolae Sàlàgeanu, qui avait été licencié de sa fonction le 15 mai 1957. Du point de vue des autorités, Sàlàgeanu était peu recommandable pour diriger les répressions contre les étudiants. Fils de prêtre, Nicolae Sàlàgeanu fonctionnait à la faculté de sciences depuis 1933. En 1958, on lui a donné le vote de blâme pour son “attitude conciliatoire”, évidemment pour l'esprit conciliant avec lequel le biologiste comprenait traiter la question de l'épuration parmi les étudiants.

Livescu, personne appropriée pour cette mission dégradante, avait été recteur de l'Université de Iasi de 1948 à 1955, transfert en 1955 à la chaire de langue et littérature allemande de l'université bucarestoise, en étant à ces moments tragiques le pro-recteur de celle-ci (1956-1959).

Une catégorie à part est constituée par les étudiants juifs qui avaient déposé leurs demandes d'émigration en Israël et qui ont été, en raison de cela, exclus de l'Université au cours de 1958. En septembre-octobre 1959, une partie de ceux-ci avan‡aient des demandes sollicitant leur réinscription, demandes souvent accompagnées par de lamentables justifications et auto-flagellations. On peut mentionner parmi ceux-ci: Rivelta Samuela Mibasan (philologie), Iolanda Goldschlays (philologie), Edith Lazăr (mathématique-physique, exclue en mars 1959), Victor Harnik (mathématique-physique), Tania Avram (philologie), Dida Grün (mathématique-physique), Gusta Berstein (mathématique-physique), Myria Wolitzer (mathématique-physique), Victoria Basch (chimie), Lucian Tirilman (mathématique-physique), Mariana Mărgineanu (philologie), Mioara Weiner (sciences juridiques), Isie Rozin (mathématique-physique), Alina Feyns (philologie), Adam Schwimmer (mathématique-physique), Marcela Bercovici (sciences naturelles), Pepy Rachmat (sciences naturelles), Rela Dore (sciences naturelles), Mara Zaidman (sciences naturelles), Pia Marvan (chimie). Sur la demande de l'étudiante Mioara Conea il y a la résolution suivante du 25 juillet 1959: “La pétitionnaire a été exclue par l'ordre du recteur no. 1073/1958 pour attitude politique incompatible avec la qualité d'étudiant dans un institut d'enseignement supérieur. Nous ne pensons pas que l'on pourrait revenir sur son exclusion, même si la pétitionnaire n'ait pas encore quitté le pays”.

En dépit de l'information relativement abondante ci-dessus étalée, il faut reconnaître que les archives restent inefficaces pour refaire la complexité des événements de cette décennie-là, quand la transparence avait totalement disparu. Il serait besoin d'enquêtes orales, laborieuses, décevantes, probablement, dans certains cas et seulement après leur

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corroboration avec les renseignements de nature archiviste on pourrait obtenir un tableau véridique.

D'après des informations orales, en 1968 auraient eu lieu des agitations des étudiants, en signe de solidarité avec le printemps de Prague. Au fait, l'an 1968 a été dominé au monde par un vaste mouvement contestataire, où le rôle essentiel a été détenu par les étudiants, qu'il s'agissait de la jeunesse universitaire parisienne ou de celle tchèque. En Roumanie, se produisent littéralement des mouvements de rue animés en premier lieu par les étudiants.

En tout cas, en juin 1956, les autorités communistes ont mis en discussion la situation du travail politique-éducatif parmi les étudiants, travail qui a été défavorablement apprécié, vu le compte-rendu “L'éducation communiste des étudiants”, présenté par Iorgu Iordan. C'est ainsi que l'on a pris la décision de mettre en place les Associations des Etudiants qui allaient être mises sous l'autorité de l'U.T.M.*. En mars 1957, on a créé l'Union des Associations des Etudiants de Roumanie, qui visait la formation professionnelle, l'activité culturelle et artistique et l'activité sportive. On créait ainsi un parallélisme entre les associations des étudiants à caractère syndical et les organisations politiques des étudiants. En faveur de ce parallélisme s'est prononcée aussi la séance plénière du C.C. du P.C.R. de novembre-décembre 1967. Mais lors de la Conférence de l'Union des Associations des Etudiants de Roumanie, déroulée en avril 1969, on a plaidé en faveur de l'élimination de ce parallélisme et pour le perfectionnement des objectifs de l'U.T.C. par l'U.A.S.R. C'est ainsi que l'on a créé les prémisses de la fusion entre les organisations politiques et professionnelles des étudiants. Le résultat de cette fusion a été appelé depuis 1973 l'Union des Associations des Etudiants Communistes de Roumanie. Les organisations d'étudiants de l'Université de Bucarest ont dû connaître la même évolution.

Les enseignants de l'Université. La recherche scientifique.

Après la réforme de 1948, un nombre de professeurs ont été licenciés de l'Université de Bucarest, tandis que d'autres ont gardé leurs postes et ont continué à y fonctionner, en parallèle avec des ascensions d'ordre politique. Les emplois de personnel didactique à l'Université de Bucarest - nombreux - ont été illégaux. Petit à petit, cependant, de nouveaux cadres didactiques se sont imposés, ayant une formation professionnelle compétente et ayant * Dans la période 1949-1957 ont fonctionné des syndicats des étudiants.

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réussi à maintenir l'Université à un niveau élevé, adéquat aux exigences de l'époque - abondante en défis. Des futures études critiques relatives à l'activité et à l'oeuvre scientifique des enseignants ayant activé à l'Université après 1948 mettront de l'ordre dans les hiérarchies et élimineront les fausses valeurs scientifiques.

Sous l'égide de l'Université de Bucarest ont pu fonctionner plusieurs stations de recherches, des bases didactiques, des instituts qui justifiaient l'une des raisons fondamentales d'existence de l'université, celle de centre de recherche et de progrès scientifique. La plus ancienne institution annexe en demeurait le Jardin Botanique. A partir du 1er octobre 1958, le cèlèbre Musèe d'histoire naturelle “Grigore Antipa” s'est vu intègrè pour un certain temps à l'Universitè de Bucarest. En 1962, Grigore Moisil a mis les bases du Centre de calcul de la faculté de mathématique, afin de promouvoir les techniques évoluées de calcul et d'implémenter les langages de programmation. Pendant les derniÈres décennies, la propagande officielle insistait sur le principe de l'intégration de l'enseignement avec la recherche scientifique et avec la production, le principe étant ultérieurement confisqué par Nicolae Ceauşescu comme une découverte personnelle.

En tout cas, en 1975, on a attribué à l'Université de Bucarest toute une série d'instituts de recherches, qui ont été intégrés, selon leur profil, aux différentes facultés de l'université. Ainsi, le collectif de recherche de l'Institut mathématique (organisé en 1975, après la suppression complète de l'Institut de Mathématique de l'Académie de la RSR) est revenu à la faculté de mathématique, l'Institut de géographie est revenu à la faculté de géologie-géographie, l'Institut de linguistique (fondé en 1949) et l'Institut d'histoire et de théorie littéraire “George Călinescu” (fondé en 1949) reviennent à la faculté de langue et littérature roumaines, l'Institut de recherches juridiques (fondé en 1954) revient à la faculté de droit, l'Institut d'histoire “Nicolae Iorga” (fondé en 1936, réorganisé en 1948), l'Institut d'études sud-est européennes (fondé en 1913, réorganisé en 1963), l'Institut d'archéologie (fondé en 1956), l'Institut de tracologie (fondé en 1979), l'Institut de philosophie (fondé en 1953) et le Centre de recherches sociologiques (fondé en 1966) reviennent à la faculté d'histoire-philosophie. Les chercheurs de ces instituts - en 1989 il y avait au total 407 chercheurs - étaient engrenés dans l'activité de recherche. Les étudiants effectuaient la pratique de spécialité dans le cadre de ces instituts sous le guidage directe des membres de ces instituts.

Après les événements de décembre 1989, la plupart des chercheurs ont sollicité le retour de ces instituts dans la subordination de l'Académie Roumaine, doléance qui a été rapidement satisfaite. Ainsi, par le décret du

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gouvernement, du 7 février 1990, sont passés à l'Académie les instituts de géographie, d'archéologie, d'études sud-est européennes, de linguistique, l'institut d'histoire et de théorie littéraire “George Călinescu” et l'institut d'histoire “Nicolae Iorga”. Par le décret du 3 mars 1990, le même fait arrivait aux instituts de recherches juridiques, de philosophie et de sociologie. Quant au collectif de recherche de la faculté de mathématique, qui ne comptait à la fin de 1989 que 9 chercheurs, celui-ci est passé le 8 mars 1990, dans la structure de l'Institut de mathématique de l'Académie Roumanie, récemment remis en place.

La structure de l'Université de Bucarest jusqu'en décembre 1989.

Les trois dernières décennies de l'histoire de l'Université de Bucarest démontrent l'évolution et l'involution de cette institution, la situation grave où elle est arrivé en 1989 et ses sombres perspectives si un changement n'avait pas intervenu. En 1961-1962, la faculté de mathématique-physique avait les chaires suivantes: 1. la Chaire d'analyse fonctionnelle et de théorie des fonctions; 2. la Chaire d'algèbre; 3. la Chaire de mathématiques appliquées; 4. la Chaire de calcul différentiel et intégral; 5. la Chaire d'équations différentielles; 6. la Chaire de calcul des probabilités; 7. la Chaire de mécanique théorique; 8. la Chaire d'astronomie; 9. la Chaire de géométrie et de topologie; 10. la Chaire de physique théorique; 11. la Chaire d'électricité; 12. la Chaire de thermodynamique théorique; 13. la Chaire de physique moléculaire et chaleur; 14. la Chaire d'hydrodynamique et élasticité; 15. la Chaire de structure de la matière; 16. la Chaire de physique expérimentale; 17. la Chaire de géophysique; 18. la Chaire d'optique et d'électronique à travers les gaz. Dans l'an universitaire 1969-1970, la faculté de mathématique-mécanique (devenue indépendante depuis 1962) comprenaient les chaires suivantes: 1. la Chaire d'analyse mathématique; 2. la Chaire d'algèbre; 3. la Chaire d'astronomie; 4. la Chaire de calcul des probabilités et statistique mathématique; 5. la Chaire de géométrie et de topologie; 6. la Chaire d'analyse appliquée; 7. la Chaire de fondements des mathématiques; 8. la Chaire de mathématiques supérieures; 9. la Chaire de mécanique générale, hydrodynamique et théorie de l'élasticité; 10. la Chaire de logique mathématique. En 1979-1980, la faculté ne comprenait plus que: 1. la Chaire d'analyse mathématique, algèbre et géométrie; 2. la Chaire de calcul des probabilités; 3. la Chaire de mécanique, situation qui se maintient aussi lors du dernier repère

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chronologique, 1989-1990 (jusqu'en décembre 1989). La faculté de physique, indépendante depuis 1962, comprenait dans l'an universitaire 1969-1970 les chaires suivantes: 1. la Chaire de physique moléculaire et chaleur; 2. la Chaire d'électricité; 3. la Chaire d'optique et d'électronique à travers les gaz; 4. la Chaire de thermodynamique, physique statique et mécanique quantique; 5. la Chaire de physique théorique; 6. la Chaire de structure de la matière; 7. la Chaire de physique du corps solide. Depuis 1974, la faculté de physique a à sa disposition un nouveau siège, construit sur la plate-forme Măgurele. Dans l'an universitaire 1979-1980, la situation se présente de la manière suivante: 1. la Chaire d'optique, spectroscopie, plasma et lasers; 2. la Chaire de mécanique physique, physique moléculaire et physique des polymères; 3. la Chaire de physique atomique et nucléaire; 4. la Chaire de physique théorique et mathématique; 5. la Chaire d'électricité, corps solide et biophysique, organisation qui se maintiendra aussi en 1989-1990. La faculté de chimie disposait en 1961-1962 de: 1. la Chaire de chimie-physique; 2. la Chaire de chimie organique; 3. la Chaire de chimie anorganique; 4. la Chaire de chimie analytique; 5. la Chaire de physique-chimie des polymères; 6. la Chaire de mathématiques supérieures; 7. la Chaire de physique générale. Les modifications survenues pendant l'an universitaire 1969-1970 sont les suivantes: 1. la Chaire de chimie organique; 2. la Chaire de chimie anorganique; 3. la Chaire de structure des atomes et des molécules; 4. la Chaire de théorie de la valence; 5. la Chaire de théorie cinétique de la matière et cinétique chimique; 6. la Chaire de thermodynamique chimique et électrochimie; 7. la Chaire de chimie analytique; 8. la Chaire de chimie technologique; 9. la Chaire de physique-chimie des macromolécules; 10. la Chaire de mathématiques supérieures; 11. la Chaire de physique générale. En 1977, la faculté de biologie (de 1948 à 1952 a fonctionné sous le nom de faculté de sciences naturelles) avait en 1961-1962 le planning d'études suivant: 1. la Chaire de biologie; 2. la Chaire de physiologie des animaux; 3. la Chaire d'anatomie; 4. la Chaire de zoologie; 5. la Chaire d'entomologie; 6. la Chaire de physiologie des plantes; 7. la Chaire de botanique; 8. la Chaire de biochimie et dans l'an universitaire 1969-1970 elle disposait de: 1. la Chaire de morphologie des plantes et pathologie végétale; 2. la Chaire de botanique systématique; 3. la Chaire de physiologie des plantes et microbiologie; 4. la Chaire de zoologie des invertébrés; 5. la Chaire de zoologie des vertébrés; 6. la Chaire d'anatomie; 7. la Chaire d'histologie; 8. la Chaire d'embryologie; 9. la Chaire de physiologie des animaux et de l'homme; 10. la Chaire de biologie; 11. la Chaire de biochimie; 12. la Chaire de génétique. En 1979-1980, le planning d'enseignement est modifié de manière drastique: 1. la Chaire

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d'écologie-physiologie animale; 2. la Chaire de biochimie-microbiologie; 3. la Chaire de biologie animale et végétale. La faculté disposait en 1974 d'une section de biochimie. La faculté de géologie et géographie a été mise en place en 1950 et en 1974 elle s'est unie avec la faculté de géologie technique. L'organisation des études a involué de manière semblable aux autres facultés. En 1961-1962 il y avait: 1. la Chaire de géographie physique; 2. la Chaire de géographie économique; 3. la Chaire de minéralogie; 4. la Chaire de géologie; 5. la Chaire de paléontologie. Pour l'an universitaire 1969-1970 ont peut consigner: 1. la Chaire de minéralogie; 2. la Chaire de géologie; 3. la Chaire de paléontologie; 4. la Chaire de géographie physique régionale; 5. la Chaire de géographie physique générale; 6. la Chaire de géographie économique régionale; 7. la Chaire de géographie économique générale. En 1979-1980 il n'y restent que 3 chaires: 1. la Chaire de minéralogie; 2. la Chaire de géologie et géophysique; 3. la Chaire de géographie physique et économique. En 1986, la faculté de biologie a fusionné avec la faculté de géologie-géographie, en résultant la faculté de biologie-géographie-géologie, qui en 1989-1990 possédait les chaires suivantes: 1. la Chaire de biologie végétale; 2. la Chaire de biologie animale; 3. la Chaire de géographie physique et économique; 4. la Chaire de géologie et géophysique; 5. la Chaire de minéralogie. Etant donné le profil de la faculté, celle-ci disposait d'une série de bases expérimentales, utilisées également à l'instruction des étudiants d'après comme il suit: la Station didactique de Bràila (fondée en 1956), la Station didactique de Sinaia (fondée en 1922 par Andrei Popovici-Bâznosanu), la Station didactique et de recherches de Orsova (fondée en 1964), la Station de recherches géographiques de Pàtârlagele (fondée en 1968). La faculté de philologie comprenait en 1961-1962 tant la langue et la littérature roumaines, que les chaires de langues et littératures étrangères. En 1963, la faculté de philologie a été scindée en: la faculté de langue et littérature roumaines qui avait 8 chaires et l'Institut de langues et littératures étrangères (où il y avait la faculté de langues slaves, la faculté de langues romanes, classiques et orientales et la faculté de langues germaniques). L'institut de langues et littératures étrangères a été supprimé en 1972, les trois facultés devenant autonomes pour une courte période et en 1977 elles ont été regroupées sous le nom de la Faculté de langues et littératures étrangères. Quelques années plus tard, la faculté de langue et littérature roumaines s'est unifiée à la faculté de langues et littératures étrangères dans le cadre de la faculté de philologie, qui comptait pendant l'an universitaire 1989-1990 les chaires suivantes: 1. la Chaire de langue roumaine; 2. la Chaire de littérature roumaine; 3. la Chaire de langue et littérature fran‡aises; 4. la Chaire de

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langues romanes, classiques et orientales; 5. la Chaire de langues germaniques; 6. la Chaire de langues slaves. La faculté d'histoire a subi une diminution du planning d'études jusqu'à la limite du supportable. En 1961-1962 la faculté avait: 1. la Chaire d'histoire de la Roumanie; 2. la Chaire d'histoire de l'U.R.S.S. et des pays de démocratie populaire; 3. la Chaire d'histoire universelle ancienne et d'archéologie; 4. la Chaire d'histoire universelle moyenne, moderne et contemporaine; 5. la Chaire d'archivistique. En 1969-1970 il y avait: 1. la Chaire d'histoire ancienne et moyenne de la Roumanie; 2. la Chaire d'histoire universelle ancienne et d'archéologie; 3. la Chaire d'histoire moderne et contemporaine de la Roumanie; 4. la Chaire d'histoire universelle moyenne, moderne et contemporaine. En 1977, la faculté d'histoire fusionne avec la faculté de philosophie dans une formule hybride. L'an universitaire 1979-1980 consigne pour la section d'histoire de la nouvelle faculté 2 chaires, l'une d'histoire de la Roumanie et l'autre d'histoire universelle, pour qu'en 1989-1990 il n'existe plus qu'une chaire, d'histoire de la Roumanie et d'histoire universelle. L'an universitaire 1961-1962, la faculté de philosophie était structurée par les chaires suivantes: 1. la Chaire de socialisme scientifique; 2. la Chaire de matérialisme dialectique et historique; 3. la Chaire d'économie politique; 4. la Chaire d'histoire de la philosophie; 5. la Chaire de logique; 6. la Chaire de psychologie; 7. la Chaire de pédagogie; 8. la Chaire de théorie et pratique de la presse. Suite aux insistances de Miron Constantinescu, en 1966 on réintroduit à l'Université l'enseignement sociologique, ce qui a fait qu'à la faculté de philosophie apparaisse une section de sociologie (la première promotion de sociologues date depuis 1970, la section étant ultérieurement supprimée à cause de considérants politiques). En 1969-1970, la faculté bénéficiait de: 1. la Chaire de philosophie marxiste; 2. la Chaire de socialisme scientifique; 3. la Chaire d'économie politique; 4. la Chaire d'histoire de la philosophie; 5. la Chaire de logique; 6. la Chaire d'esthétique et d'éthique; 7. la Chaire d'histoire de la sociologie; 8. la Chaire de sociologie; 9. la Chaire de psychologie et de pédagogie; 19. la Chaire de méthodologie et pratique pédagogique. Après sa fusion avec la faculté d'histoire, la section de philosophie avait dans l'an universitaire 1979-1980 le schéma suivant: 1. la Chaire de logique, esthétique et éthique; 2. la Chaire d'histoire de la philosophie; 3. la Chaire de philosophie marxiste; 4. la Chaire de socialisme scientifique; 5. la Chaire d'économie politique et sociologie; 6. la Chaire de pédagogie et psychologie. A leur tour, celles-ci ont été réduites, de sorte que dans l'an universitaire 1989-1990 il n'y avait plus que: 1. la Chaire de philosophie; 2. la Chaire d'économie politique, sociologie et socialisme scientifique; 3. la

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Chaire de pédagogie et psychologie. Enfin, la faculté de droit fonctionnait avec: 1. la Chaire de théorie de l'Etat et du droit; 2. la Chaire de droit civil; 3. la Chaire de droit pénal; 4. la Chaire de droit d'Etat. A partir de 1968 ont a organisé deux spécialisations en droit et en droit économique et administratif. Dans l'an universitaire 1969-1970, la faculté de droit avait: 1. la Chaire de théorie de l'Etat et du droit; 2. la Chaire de droit civil; 3. la Chaire de droit pénal; 4. la Chaire de droit constitutionnel et droit administratif; 5. la Chaire de droit international publique. 10 ans après, en 1979-1980, il n'y avait plus que 2 chaires: de droit civil et de droit publique, qui ultérieurement ont fusionné dans la chaire de droit.

Compte tenu de l'évolution du nombre des chaires, on peut facilement dégager la conclusion que l'Université de Bucarest a connu pendant les deux dernières décennies une régression évidente.

La fusion des chaires trahissait l'effort de consolider la surveillance sur le corps des enseignants et le ministère de ressort en pouvait réaliser d'importantes économies à travers la diminution des chaires, par le blocage des schémas et par la suppression de nombreux postes. Ce trajet accidenté peut être suivi dans le langage infaillible des chiffres.

L'évolution du nombre des enseignants à l'Université de Bucarest pendant 1961-1990

Ans universitaires Total des enseignants1961-1962 9751969-1970 15141970-1980 9691989-1990 738

L'évolution du nombre d'étudiants de l'Université de Bucarest

Ans universitaires Nombre total d'étudiants1961-1962 9.8081969-1970 21.8871970-1980 9.7721989-1990 8.068

En 1989, quand on fêtait 125 ans depuis la fondation de l'Université, on a proposé un plan d'activités en vue de marquer le jubilé.

La nomination le 1er octobre 1989 dans la fonction de recteur d'un

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activiste politique, Ioan Dodu Bălan, et, en général, la consolidation des éléments dures dans la direction de l'Université, ne permettaient pas d'anticiper au moins un arrêt du déclin de l'institution universitaire. Malheureusement, la même année, a lieu le dernier congrès du P.C.R. qui devait polariser l'attention de tout le monde, mais l'anniversaire prévue aurait risquer d'enlever une partie des énergies qui devaient glorifier le dirigeant.

Bibliographie

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