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memoire avec couverture - Frédéric PLANCHET · Résumé Solvabilité II sera le nouveau régime de solvabilité des compagnies d’assurance en vigueur à la fin de l’année

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Remerciements

Je tiens à remercier tout particulièrement mon maître de stage, Monsieur Johann Gi-rost, responsable de l’actuariat IARD à AXA Luxembourg, pour m’avoir permis d’in-tégrer son équipe, et pour la confiance qu’il m’a accordée pour la réalisation de cettemission. C’est aussi tous les membres du service actuariat IARD (une pensée particu-lière à Monsieur Frédéric Kint pour ses conseils avisés) ainsi que l’équipe du ProductManagement de Madame Sabine Detry que je remercie pour leur accueil parmi eux.Par ailleurs, je remercie la compagnie AXA Luxembourg de m’avoir accueillie pour cestage. Je témoigne ma gratitude à Monsieur Christophe Frissen d’AXA Bruxelles pourle temps qu’il m’a accordé pour discuter de mon sujet de stage. Pour finir, j’adresseun grand merci à Monsieur Stéphane Jasson, Chief Risk Officer d’AXA Luxembourg,pour sa disponibilité, ses précieuses aides et la motivation qu’il m’a donnée à rédigermon mémoire en Latex. Je témoigne également ma reconnaissance aux membres dema famille pour leur soutien tout au long de mon cursus universitaire.

Résumé

Solvabilité II sera le nouveau régime de solvabilité des compagnies d’assuranceen vigueur à la fin de l’année 2012. Il remplacera Solvabilité I actuellement en place.Les compagnies vont alors être soumises à de nouvelles exigences en la matière. Lecapital de solvabilité requis sera évalué au plus près des risques réellement encouruspar la compagnie sur un horizon d’un an. Dans ce mémoire nous étudions quels sontles changements impactant les provisions techniques non-vie et l’évaluation du risquede provisionnement.

Les provisions devront être évaluées au plus juste : best estimate. Nous comparonsdans ce mémoire différentes méthodes de provisionnement déterministes d’une part(Chain Ladder, DeVylder, London Chain, méthode par exercice, Taylor) et stochas-tiques (Mack et bootstrap) d’autre part, qui nous permettent de quantifier l’incertitudeliée à l’estimation. Mais ces méthodes stochastiques classiques quantifient le risque àl’ultime. Cet horizon long terme n’est plus en phase avec l’horizon de risque de courtterme imposé par Solvabilité II.

C’est pourquoi nous nous intéressons dans ce mémoire au risque de provision-nement selon les nouvelles exigences imposées par Solvabilité II. Ce risque provientd’une possible déviation défavorable des charges finales prévisibles au cours de l’annéecomptable. Il va donc être nécessaire d’avoir recours à de nouvelles méthodes d’éva-luation du risque de prédiction, à un an et non plus à l’ultime. Pour l’évaluer, nousutilisons la méthode proposée par Merz & Wüthrich, une méthode de bootstrap modi-fiée et des simulations par la méthode de Monte-Carlo en posant des hypothèses sur laloi suivie par les paiements cumulés.

Par ailleurs, une marge de risque doit être ajoutée aux provisions best estimate pourtenir compte des risques encourus par la compagnie au-delà de cet horizon de risque àun an. Nous obtenons ainsi les provisions techniques représentant la valeur de marchédes engagements. Pour évaluer la marge de risque nous utilisons deux simplificationsproposées par le CEIOPS.

—————

Mots clés : Solvabilité II, Provisions best estimate, SCR, Risque de provisionnement, Marge derisque

Abstract

Solvency II will be the new solvency regime for insurance companies and will comeinto force end of 2012. This reform will replace the current one, Solvency I. Thereforeinsurance companies will have to take into account new requirements. The solvencycapital requirement will be estimated close to the real risks which impact the companyin the next 12 months. In this report we analyse the changes impacting the technicalreserves for a non-life compagny and the valuation of the reserve risk.

Reserves will be evaluated on a best estimate. This report compares different meth-ods to valuate best estimate. First we will explain some determinist methods (ChainLadder, DeVylder, London Chain, method by accident year, Taylor) and then thestochastic methods (Mack and bootstrap) enabling the risk error quantification. Thestochastic methods evaluate the predictor error at the ultimate date, but this long termview is no longer in line with the one year view imposed by Solvency II.

So, in this report we examined the reserve risk according to the new requirementsof Solvency II. This risk comes from the possibility of adverse changes of liabilities’valuation within the calendar year. Therefore it will be necessary to get new methodsof prediction risk evaluation. For this matter we use the Merz & Wüthrich method, abootstrap method modified for the one-year risk, and Monte-Carlo simulations with theassumption of a distribution of cumulative payments.

Moreover, the risk margin should be added to the best estimate reserves to take intoaccount the company’s risks beyond one-year. Then we obtain the amount represent-ing the market value of liabilities. To estimate the risk margin we use two methodsprovided by the CEIOPS.

—————

Key Words : Solvency II, Reserve best estimate, SCR, Reserve risk, Risk margin

Table des matières

Introduction 9

I Cadre du mémoire 10

1 De Solvabilité I à Solvabilité II 11

1.1 Solvabilité I . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111.1.1 Brève description de la situation actuelle . . . . . . . . . . . 111.1.2 Les critiques à l’égard de Solvabilité I . . . . . . . . . . . . . 12

1.2 Solvabilité II : Horizon 2012 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131.2.1 Pourquoi Solvabilité II ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131.2.2 Les trois piliers de Solvabilité II . . . . . . . . . . . . . . . . 131.2.3 Processus Lamfalussy : Démarche de l’Union Européenne . . 16

2 Les provisions techniques 17

2.1 Vue générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172.2 Optique Solvabilité II . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

2.2.1 Best estimate . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182.2.2 Marge de risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

II L’évaluation des provisions 20

3 Méthodes déterministes 21

3.1 Notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213.2 Données utilisées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 223.3 Méthode de Chain Ladder . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

3.3.1 Hypothèses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233.3.2 Méthode . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233.3.3 Critiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 243.3.4 Test des hypothèses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 253.3.5 Application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

3.4 Méthode des facteurs de développement par année de survenance . . . 263.5 Méthode London Chain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273.6 Méthode de DeVylder . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 283.7 Méthode de séparation arithmétique (de Taylor) . . . . . . . . . . . . 293.8 Branches longues : trois méthodes pour estimer un "tail factor" . . . . 29

5

TABLE DES MATIÈRES

3.8.1 Méthode 1 : Proportion de la provision comptable Dossier/-Dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

3.8.2 Méthode 2 : Données de marché . . . . . . . . . . . . . . . . 303.8.3 Méthode 3 : Extrapolation par un modèle paramétrique . . . . 313.8.4 Comparaison des méthodes introduisant un "tail factor" . . . . 32

3.9 Méthode AXA Luxembourg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 333.10 Comparaison des résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 343.11 Conclusions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

4 Méthodes stochastiques 37

4.1 Processus stochastique de provisionnement . . . . . . . . . . . . . . 374.2 Méthodes de simulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

4.2.1 Bootstrap . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 384.2.2 Monte Carlo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

4.3 Mesures de risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 394.3.1 Value at Risk . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 404.3.2 Autres mesures de risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

4.4 Mack . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 414.4.1 Hypothèses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 414.4.2 Méthode . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 424.4.3 Application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 434.4.4 Critiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

4.5 Bootstrap . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 444.5.1 Méthode . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 454.5.2 Application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 464.5.3 Critiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

4.6 Comparaison des résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47

5 Actualisation 48

5.1 Sous Solvabilité I . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 485.2 Avec la nouvelle réglementation de Solvabilité II . . . . . . . . . . . 485.3 Application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

III Le risque de provisionnement dans le cadre du SCR 50

6 SCR : Capital de Solvabilité Requis 51

6.1 Présentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 516.2 Formule standard - Modèle interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

6.2.1 Formule standard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 536.2.2 Modèle interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

7 Définition du risque de provisionnement à un an 55

7.1 Pourquoi changer d’horizon ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 557.2 Définition formelle de ce risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 567.3 Boni - mali sur années de survenances antérieures . . . . . . . . . . . 577.4 Interprétation économique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 6

TABLE DES MATIÈRES

8 Claims Developement Result selon Merz & Wüthrich 59

8.1 Claims development result . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 598.2 Vue prospective versus vue rétrospective . . . . . . . . . . . . . . . . 618.3 Estimateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 618.4 Comparaison avec la formule de Mack . . . . . . . . . . . . . . . . . 638.5 Application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 648.6 Remarques et critiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

9 Simulation de la diagonale de paiements 68

9.1 Principe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 689.2 Simulation par une loi donnée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 709.3 Simulation par une méthode de bootstrap modifiée à un an . . . . . . 70

9.3.1 Principe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 709.3.2 Application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

9.4 Critiques et résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

10 Calcul du SCR lié au risque de provisionnement 75

10.1 Formule standard proposée par le CEIOPS . . . . . . . . . . . . . . . 7510.2 Optique modèle interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7510.3 Résultats et critiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

IV La marge de risque liée au risque de provisionnement 78

11 Présentation de la marge de risque 79

11.1 Présentation générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7911.2 Approche coût du capital . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8011.3 Quels sont les effets de diversification pris en compte dans le calcul de

la marge de risque ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8011.4 La marge de risque liée au risque de provisionnement . . . . . . . . . 80

12 Méthodes de calcul de la marge de risque liée au risque de provisionnement 82

12.1 Simplification par utilisation d’une proportionnalité avec le best estimate 8312.2 Simplification par l’utilisation de la duration . . . . . . . . . . . . . . 8412.3 Application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

12.3.1 Une branche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8512.3.2 Corrélation de branches . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

12.4 Commentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

Conclusions 87

Liste des abréviations 89

Références bibliographiques 94

V Annexes 97

A Test des hypothèses de Chain Ladder 98

B Modules de risque pour la formule standard 99

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 7

TABLE DES MATIÈRES

C Spécifications techniques QIS5, paramètres pour le risque de provisionne-

ment 100

D Loi Normale - Loi Log-normale 101

D.1 Loi Normale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101D.2 Loi Log - Normale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

E Explication de la formule standard 102

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 8

Introduction

La directive européenne Solvabilité II viendra remplacer, fin 2012, Solvabilité I quiest la réglementation actuellement en vigueur. Des insuffisances dans la réglementationSolvabilité I ont amené les autorités européennes à mettre en œuvre ce projet.

Les provisions techniques représentent la part la plus importante du passif d’unecompagnie d’assurance. L’impact sur le bilan d’une variation de leur montant a desconséquences importantes. Un exemple est donné dans l’ouvrage de Wüthrich & Merz[27], à savoir qu’une baisse de 1% du montant des provisions peut amener à un résultatdu double de sa valeur sans cette baisse. Il est donc crucial de connaître l’incertitude quiréside dans l’estimation des provisions. C’est pourquoi, en plein cœur de cette périoded’adaptation des assureurs à ces nouvelles normes réglementaires de solvabilité, nousnous concentrerons, au travers de ce mémoire, sur les changements amenés par la nou-velle directive Solvabilité II concernant l’évaluation des provisions et la quantificationdes risques qui y sont liés pour une compagnie d’assurance non-vie.

L’objectif de ce mémoire est, d’une part d’appréhender ces nouvelles exigences etd’autre part, de les transcrire en pratique à travers plusieurs méthodes. Les étapes decette mission sont reprises dans ce mémoire. Dans un premier temps, nous comparonsdifférentes méthodes d’évaluation des provisions best estimate. Dans le cadre de Solva-bilité II la quantification du capital de solvabilité à immobiliser se fait par l’évaluationdes risques auxquels est soumis la compagnie à un an. Parmi tous ces risques le risquede provisionnement fait partie des plus importants pour une compagnie d’assurancenon-vie. C’est pourquoi, dans un second temps, nous cherchons à le quantifier. Et pourfinir nous analysons l’intérêt de la marge de risque explicite pour les risques au-delàde l’horizon d’un an. Celle-ci sera étudiée dans le cadre du risque de provisionnement.

—————

Par souci de confidentialité, certaines valeurs numériques sensibles ont été ramenéesà une base 100.

9

Première partie

Cadre du mémoire

10

Chapitre 1

De Solvabilité I à Solvabilité II

Une compagnie d’assurance se distingue d’une entreprise traditionnelle du fait del’inversion du cycle d’exploitation. Les assurés paient une prime pour être couverts surune période à venir pour d’éventuels sinistres. Ainsi il est essentiel que la compagnied’assurance soit toujours en mesure de payer ses engagements envers les assurés. Lesystème Solvabilité I, en place depuis 1973, a présenté ses limites. Les autorités eu-ropéennes ont donc décidé d’instaurer un nouveau système : Solvabilité II. SolvabilitéI, tout comme Solvabilité II a pour objectif de garantir aux assurés la solvabilité descompagnies d’assurance.

Après un bref aperçu des exigences de solvabilité et des limites sous le régimeSolvabilité I, nous présenterons les contraintes imposées par Solvabilité II.

1.1 Solvabilité I

1.1.1 Brève description de la situation actuelle

La réglementation en vigueur (Solvabilité I) en application depuis 1973 définit lesexigences de solvabilité suivantes :

– des provisions techniques suffisantes,– des actifs sûrs, liquides et rentables,– une marge de solvabilité disponible.

ACTIFS

MARGE DE SOLVABILITEDISPONIBLE

PROVISIONSTECHNIQUES

FIGURE 1.1 – Illustration d’un bilan simplifié dans le cadre de Solvabilité I

La marge de solvabilité a pour but de combler le risque d’insuffisance de provisionslors d’événements exceptionnels. Celle-ci doit être supérieure à l’exigence de marge de

11

CHAPITRE 1. DE SOLVABILITÉ I À SOLVABILITÉ II

solvabilité et au fonds de garantie. Ces deux notions sont définies comme suit.

L’Exigence de marge de solvabilité

L’exigence de marge de solvabilité (EMS) est le premier seuil en-dessous duquella marge de solvabilité disponible ne doit pas descendre. Pour une activité non-vie elleest définie par le montant le plus élevé entre deux méthodes :

– un calcul par rapport aux primes– et un calcul par rapport à la charge moyenne annuelle des sinistres

avec un ratio de conservation supérieur à 50%.Les deux méthodes de calcul se font par l’application d’un taux qui est fonction

de la tranche où se situent les primes émises et la charge moyenne de sinistres. Lesdifférentes tranches et taux sont représentés dans le tableau suivant :

Montants 1ère Tranche 2ème Tranche(en millions d’euros) Montant Taux Montant Taux

Primes Emises < 57,5 18 % > 57,5 16 %Charge moyenne de sinistres < 40,3 26 % > 40,3 23 %

TABLE 1.1 – Tranches et taux applicables au 1er janvier 2010 [18] pour le calcul del’EMS

Le fonds de garantie

Le fonds de garantie (FdG) est le second seuil en-dessous duquel ne doit pas des-cendre la marge de solvabilité disponible. Il est défini par

FdG = max(FdG minimum;13·EMS)

où FdG minimum est le fonds de garantie minimum fixé selon la branche d’activité(par exemple 2,3 millions d’euros pour la branche Dommage Auto).

Deux seuils d’intervention

Si la marge de solvabilité est inférieure à l’exigence de marge de solvabilité, l’au-torité de contrôle exige de la compagnie un plan de redressement. Si celle-ci est in-férieure au fonds de garantie, l’autorité de contrôle exige de la compagnie un plan definancement à court terme. La sanction peut être le retrait d’agrément si la compagniene parvient pas à reconstituer une marge de solvabilité suffisante.

1.1.2 Les critiques à l’égard de Solvabilité I

En premier lieu, le calcul de l’exigence de marge de solvabilité est simpliste et restele même pour toutes les compagnies, quelle que soit leur taille et leur activité, qu’ellesestiment bien leurs risques ou non. La calibration se base uniquement sur un volumede primes ou de provisions et ne tient donc pas suffisamment compte des risques sous-jacents à l’activité d’assurance. En effet, prenons l’exemple de deux compagnies d’as-surance ayant les mêmes primes émises mais des périmètres d’activité différents :

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 12

CHAPITRE 1. DE SOLVABILITÉ I À SOLVABILITÉ II

– la première disposant d’un portefeuille diversifié et– la seconde, d’un portefeuille plus concentré.

La marge de solvabilité exigée sera identique pour ces deux entreprises alors qu’ellesprésentent des profils de risque très différents. Un autre exemple serait celui d’un assu-reur ayant beaucoup d’actions en portefeuille : son profil de risque est plus élevé. Cetaspect n’est toutefois pas pris en compte dans le calcul des fonds propres dans le cadrede Solvabilité I.

Par ailleurs, du côté du passif, les assureurs plus prudents se trouvent pénalisés parrapport à leurs concurrents car ils immobilisent plus de capital dans leurs provisionstechniques et sont soumis aux mêmes exigences que leurs concurrents en matière desolvabilité. Il y a donc une incohérence à ce niveau sous Solvabilité I.

Notons également le peu d’harmonisation des normes au niveau européen sousSolvabilité I. Les règles sont laissées à l’appréciation des pays membres. De plus cerégime ne dispose d’aucune exigence de gouvernance et de reporting.

La réforme Solvabilité II tente de combler ces insuffisances et remplacera la règle-mentation actuellement en vigueur Solvabilité I.

1.2 Solvabilité II : Horizon 2012

La nouvelle directive européenne Solvabilité II, applicable à l’ensemble des compa-gnies d’assurance européennes fin 2012, viendra remplacer 13 directives existantes au-jourd’hui. Elle définit de nouvelles exigences prudentielles pour les compagnies d’as-surance et de réassurance européennes.

1.2.1 Pourquoi Solvabilité II ?

La réforme Solvabilité II a pour principales missions d’harmoniser les normes auniveau de l’Union Européenne et d’instaurer une meilleure adéquation entre les exi-gences réglementaires de capital et les risques effectifs auxquels sont soumises lescompagnies d’assurance. Sous Solvabilité II, l’exigence de capital sera liée au profil derisque de la compagnie d’assurance. L’évaluation des besoins en capital se fera en fonc-tion du risque encouru par chaque compagnie. Ces mesures seront quantitatives maisaussi qualitatives afin d’inciter les compagnies d’assurance à mesurer et gérer leursrisques. Elles ont pour objectif d’améliorer la protection des preneurs d’assurance etd’assurer une stabilité financière du marché.

Solvabilité II introduit une harmonisation au niveau européen en supprimant lesdifférences marquantes entre les législations des États membres, et ne laissant que peud’interprétation de la directive. Les compagnies d’assurance au sein de l’Espace Eco-nomique Européen suivront toutes les mêmes règles, ce qui relancera la concurrence.

1.2.2 Les trois piliers de Solvabilité II

La Commission Européenne a retenu une architecture en trois piliers, qui s’inspirede la réforme pour le secteur bancaire, Bâle II. Le premier pilier définit les exigencesquantitatives en capital ; le second concerne les exigences qualitatives et les activitésde surveillance ; le troisième, la publication de l’information et la communication au-près des organismes de contrôle. Ces trois piliers ne sont pas indépendants, ils sontimbriqués les uns dans les autres.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 13

CHAPITRE 1. DE SOLVABILITÉ I À SOLVABILITÉ II

FIGURE 1.2 – Les 3 piliers de Solvabilité II

Pilier 1 : les exigences quantitatives

L’évaluation quantitative des besoins en fonds propres de la compagnie est entière-ment revue et harmonisée par la réforme. Ainsi la valorisation doit se faire selon uneapproche dite "market consistent" :

– Les actifs sont évalués en valeur d’échange, c’est-à-dire en valeur de marché sicelui-ci est liquide ;

– les passifs sont évalués en valeur de transfert.

FIGURE 1.3 – Représentation schématique du bilan sous Solvabilité I en comparaisonsà celui sous Solvabilité II

Provision Techniques : Les provisions techniques sont évaluées de façon prudentesous Solvabilité I, elles le seront à présent par un best estimate ajouté d’une margede risque. La notion de best estimate correspond à une valeur actuelle probable desflux futurs. Cette notion n’intègre pas de marge de prudence. Nous y reviendrons plusen détail dans la partie II de ce mémoire. La marge de risque explicite représente lemontant qu’un repreneur éventuel de l’activité exigerait pour reprendre et honorer lesengagements envers les assurés au-delà du best estimate. Elle correspond au coût d’im-mobilisation des fonds propres jusqu’à extinction des engagements.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 14

CHAPITRE 1. DE SOLVABILITÉ I À SOLVABILITÉ II

Au-delà des provisions techniques, deux seuils d’exigence en capital sont instau-rés :

Capital Minimum Requis : Le Capital Minimum Requis (Minimum Capital Requi-rement - MCR) représente le niveau en-dessous duquel les fonds propres ne doiventpas tomber sous peine d’intervention de l’autorité de contrôle, et retrait d’agrément sides mesures d’augmentation de capital ne sont pas réalisées immédiatement. Le MCRpeut se définir comme le niveau de fonds propres en-dessous duquel les intérêts desassurés seraient sérieusement menacés si la compagnie était autorisée à poursuivre sonactivité.

Capital de Solvabilité Requis, niveau de capital souhaité : Le Capital de Solvabi-lité Requis (Solvency Capital Requirement - SCR) est le niveau de fonds propres né-cessaire à la compagnie pour couvrir des pertes imprévues. Son calcul est basé sur uneprobabilité de ruine de 0,5% (Value at Risk de 99,5%) à un horizon d’un an, ce qui per-met de faire face et d’honorer les engagements pour 199 cas sur 200. Le calcul du SCRse base sur le profil de risque réel de la compagnie et intègre les principaux risquesauxquels elle est soumise, à savoir le risque de souscription, le risque de marché, lerisque de défaut et le risque opérationnel. Il tient compte des méthodes de transfertde risques et de diversification. Il peut être le résultat d’une formule standard ou d’unmodèle interne (partiel ou complet). Nous y reviendrons plus en détail dans le chapitre6.

Les données : Il est crucial de travailler sur des données fiables pour le calcul desexigences quantitatives. Le Consultation Paper 43 [6] définit les standards sur la qualitédes données, à savoir :

– Adéquation : les données doivent être appropriées pour évaluer les provisions etpertinentes pour l’estimation des passifs.

– Complétude : les données doivent couvrir les principaux groupes de risques ho-mogènes et leurs spécificités.

– Exactitude : les données doivent être sans erreurs ou omissions et cohérentes.

Pilier 2

Le deuxième pilier définit les exigences qualitatives. La mise en place de ce pi-lier résulte de la volonté de définir et d’harmoniser les activités de surveillance, aussibien au niveau des compagnies qu’au niveau des superviseurs. Au sein même de lacompagnie, cela impacte le processus de contrôle interne et de gestion des risques.

Cela concernera l’existence de procédures écrites, la fiabilité du système d’auditinterne, via un système ORSA (Own Risk Solvency Assessment) ainsi que la politiquede gestion des risques. Chaque entreprise devra mettre en place un système de gouver-nance efficace qui garantit une gestion saine et prudente de l’activité. La personne encharge de l’ORSA devra juger de l’adéquation de l’évaluation des fonds propres auxrisques encourus par la compagnie. En effet, le système de gouvernance doit inclurela fonction de gestion des risques, la fonction de conformité, la fonction d’audit interneet la fonction actuarielle.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 15

CHAPITRE 1. DE SOLVABILITÉ I À SOLVABILITÉ II

Concernant le rôle des superviseurs, il réside en une volonté d’harmonisation desoutils de supervision, des processus de contrôle, des pouvoirs et moyens d’action. Lessuperviseurs pourront exiger des capitaux add-ons en supplément des capitaux s’ilsestiment que certains risques ont mal été appréciés par la compagnie. Cependant, lesmesures prises par les autorités de contrôle des Etats membres resteront proportion-nelles à la nature, l’ampleur et la complexité des risques auxquels la compagnie estsoumise.

Pilier 3

Ce troisième pilier se rapporte aux éléments d’information qui doivent être publiéspar les sociétés d’assurance. Il s’agit d’une information à destination du public, aussibien des assurés que de l’autorité de contrôle. Pour ce pilier, sont prévus :

– d’une part une publication d’information publique, à savoir un rapport annuelde solvabilité et de la situation financière "Solvency and Financial ConditionReport" ainsi qu’une harmonisation des règles de reporting aux superviseurs,

– d’autre part une publication d’un "report to supervisor" à destination des su-perviseurs qui restera confidentielle.

1.2.3 Processus Lamfalussy : Démarche de l’Union Européenne

Solvabilité II est basé sur un processus de consultation au niveau européen dit"Lamfalussy". Cette démarche est souvent utilisée par l’Union Européenne pour conce-voir des textes plus adaptés aux marchés. L’objectif est d’échanger avec les entreprises.La connaissance se trouve dans le monde économique. Le nouveau régime de solvabi-lité restera ainsi en phase avec l’évolution du marché et des technologies.

QIS : Au travers des Quantitatives Impact Studies (QIS), c’est-à-dire des question-naires de plus en plus complets envoyés aux compagnies d’assurance, le CEIOPS éva-lue les conséquences financières de l’introduction des nouvelles normes de solvabilité.Les QIS évaluent :

– l’adéquation des méthodes de calcul, du calibrage du SCR et du MCR,– l’impact sur le bilan et les besoins en fonds propres.

Les résultats de ces études permettent une adaptation des calibrages de la formule stan-dard. A l’heure actuelle, le QIS 5 est en cours.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 16

Chapitre 2

Les provisions techniques

2.1 Vue générale

Les provisions techniques constituent la part la plus importante du passif d’un orga-nisme d’assurance. Dans le cadre d’une compagnie d’assurance non-vie, les provisionstechniques sont classées en différentes catégories.

Provision pour Primes Non Acquises - PPNA

La provision pour primes non acquises permet de couvrir, pour chacun des contrats,la part des primes émises au cours d’un exercice comptable qui doit être affectée àla période de l’exercice suivant comprise entre la date de clôture du bilan et la dated’échéance de ces contrats.

Incurred But Not Reported - IBNR

Une partie des sinistres survenus ne sont pas encore déclarés au moment de l’éva-luation. Ce sont les sinistres nommés "tardifs". Pour ceux-là, des provisions pour si-nistres non connus sont estimés : il s’agit d’une provision destinée à couvrir des coûtsde sinistres survenus mais non encore connus par la compagnie d’assurance au momentdu calcul de la provision. Ces provisions sont nommées IBNR.

Provisions pour Sinistres A Payer - PSAP

La provision pour sinistres à payer correspond au montant estimé, à un instantdonné, des paiements restant à effectuer par la compagnie pour tous les sinistres surve-nus qui sont déjà déclarés.

Dans le cadre de ce mémoire nous limiterons nos études aux PSAP. Celles-ci repré-sentent la part la plus importante des provisions techniques du bilan, soit près de 80%sur le bilan d’AXA Luxembourg. Du point de vue comptable, la méthode de base pourl’évaluation des PSAP est la méthode dite "dossier/dossier", appelée "case estimate" enanglais. Un gestionnaire sinistre évalue le montant restant à payer sur chaque sinistredéclaré non clos. Nous verrons par la suite comment évaluer ces provisions du point devue économique du bilan.

17

CHAPITRE 2. LES PROVISIONS TECHNIQUES

2.2 Optique Solvabilité II

Le but de cette réforme est d’harmoniser le système de solvabilité à l’échelle euro-péenne de façon à ce que les assurés aient la garantie, quel que soit le pays de l’EspaceEconomique Européen où ils souscrivent un contrat d’assurance, d’être dans une cer-taine mesure protégés de la défaillance de leur compagnie d’assurance. Il est donc im-portant que les contraintes réglementaires de provisionnement soient identiques danstous les Etats membres. La nouvelle norme Solvabilité II définit les provisions tech-niques comme suit (d’après l’article 76 - General provision de la proposition finale duCEIOPS [4] qui reprend certaines définitions des textes de niveau 1)

The value of technical provisions shall correspond to the current amount insu-rance and reinsurance undertakings would have to pay if they were to transfertheir insurance and reinsurance obligations immediately to another insuranceor reinsurance undertaking

Le montant des provisions techniques doit donc refléter la valeur à laquelle la com-pagnie pourrait céder ses passifs à un repreneur. Elles doivent être évaluées en fonctiondes caractéristiques propres au portefeuille de la compagnie.

Avec l’apparition des normes IFRS (International Financial Reporting Standards) etla tendance à aller vers une estimation de marché de plus en plus "juste", l’évaluationdes provisions techniques a été revue dans ce sens lors de l’élaboration de SolvabilitéII. Dans le cadre de cette nouvelle directive, les provisions techniques sont composéesde deux éléments : le best estimate et la marge de risque.

2.2.1 Best estimate

Nous distinguons deux types de passifs, dont l’estimation best estimate diffère :– Les passifs "hedgeables" qui peuvent être répliqués par des produits financiers

doivent être évalués par la valeur de marché de ces produits financiers.– Les passifs qualifiés de "non hedgeables", c’est-à-dire pour lesquels il est impos-

sible de reproduire les cashs-flows à l’aide de produits financiers, doivent êtreévalués à l’aide d’un best estimate augmenté d’une marge de risque.

Concernant les passifs "non hedgeables" l’évaluation doit se faire, selon l’article 77de la directive [14] "Calculation of the technical provisions", de la façon suivante :

The best estimate shall correspond to the probability-weighted average of fu-ture cash-flows, taking account of the time value of money (expected presentvalue of future cash-flows), using the relevant risk-free interest rate term struc-ture.

Ainsi la provision best estimate est définie comme la valeur actuelle probable descoûts futurs estimés sur la base de la courbe des taux sans risque. Ce point sera déve-loppé au chapitre 5. Il n’y a pas de marge de prudence intégrée dans la valeur du bestestimate, c’est une estimation qui se veut la plus "juste" possible. L’escompte des pro-visions techniques constitue un changement majeur apporté par la directive SolvabilitéII.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 18

CHAPITRE 2. LES PROVISIONS TECHNIQUES

Deux remarques complémentaires s’imposent : le best estimate doit être calculé pargroupe homogène de risques selon les méthodes standards de liquidation. Son évalua-tion doit se faire sur le portefeuille actuel sans considérer de nouvelle production.

2.2.2 Marge de risque

Dans le cadre de la directive Solvabilité II, la marge de risque est quantifiée de ma-nière explicite et n’est plus contenue dans les hypothèses d’évaluation des provisionset dans différentes marges ajoutées dans les provisions.

L’article 77 de la directive [14] la définit ainsi :

The risk margin shall be such as to ensure that the value of the technical pro-visions is equivalent to the amount insurance and reinsurance undertakingswould be expected to require in order to take over and meet the insuranceand reinsurance obligations.[...] The risk margin shall be calculated by de-termining the cost of providing an amount of eligible own funds equal to theSolvency Capital Requirement necessary to support the insurance and reinsu-rance obligations over the lifetime thereof.

La marge de risque (Market Value Margin - MVM) est le montant qu’exigerait unrepreneur éventuel du passif d’assurance au-delà du best estimate. Son évaluation estbasée sur une approche coût du capital selon Solvabilité II. C’est-à-dire qu’elle estdéfinie par la valeur actuelle de l’immobilisation du capital sur chaque période au coûtdu capital. Nous y reviendrons plus en détail dans la partie IV.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 19

Deuxième partie

L’évaluation des provisions

20

Chapitre 3

Méthodes déterministes

Dans cette partie nous présenterons différentes méthodes pour déterminer le mon-tant des provisions best estimate. Nous ne nous limiterons pas aux résultats classiquesde la méthode bien connue de Chain Ladder mais chercherons à comparer différentesméthodes, sans toutefois avoir la prétention d’en faire une liste exhaustive.

Le CEIOPS propose des conseils quant à l’évaluation du best estimate [4] :

For the estimation of non-life best estimate liabilities as well as life insuranceliabilities that not need simulation techniques, deterministic and analyticaltechniques can be more appropriate. [...] At the current point in time, stochas-tic reserving techniques, especially in non-life insurance, are not consideredas necessary valuation techniques to calculate best estimate values. The appli-cation of deterministic techniques and judgement can be far more importantthan the mechanical application of simulation methods.

Commençons donc par présenter quelques méthodes déterministes classiques d’éva-luation des provisions. Nous étudierons des approches stochastiques dans le chapitre4.

L’objectif de cette partie est de confronter les résultats obtenus par différentes mé-thodes à la méthode utilisée par AXA Luxembourg, qui intègre un jugement d’experts.Une présentation rapide de cette méthode sera faite dans la section 3.9. Les résultats decette comparaison ne seront pas présentés pour des raisons de confidentialité. Mais pré-sentons et comparons dans ce mémoire les résultats fournis par différentes méthodes.Cette confrontation est nécessaire dans une optique de gestion des risques. Les mé-thodes comparées ne sont que des méthodes calculatoires n’incluant donc pas d’avisd’experts (qui comporte une part d’arbitraire).

3.1 Notations

Notons n+1 la taille du triangle de paiements étudiée.– Ci, j : Les paiements cumulés pour la jème année de développement des sinistres

survenus l’année i

21

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

– Ci,n : Le paiement cumulé "final" pour l’année de survenance i après n+1 annéesde développement

– Zi, j : Les paiements non cumulés (incréments) pour la jème année de développe-ment des sinistres survenus l’année i.

On a donc : Ci, j+1 =Ci, j +Zi, j+1 ∀ j ≥ 0 et Ci,0 = Zi,0

i, j 0 1 . . . j . . . n0 C0,0 C0,1 . . . C0, j . . . C0,n...

......

... . ..

i Ci,0 Ci,1 . . . Ci, j...

...n Cn,0

Ces triangles peuvent se lire de trois manières différentes :– les lignes correspondent aux années de survenance i des sinistres,– les colonnes aux années de développement j,– les diagonales aux années calendaires i+ j.

3.2 Données utilisées

Dans la société AXA Luxembourg, les triangles par branches sont actuellementdisponibles sur 10 ans. Cependant l’année de survenance la plus ancienne du trianglecorrespond au cumul des paiements des sinistres de toutes les années antérieures. Nousnous priverons donc de cette année-là pour l’application des méthodes statistiques.

Nous présenterons par la suite les résultats obtenus par différentes méthodes sur lesbranches d’AXA Luxembourg. Des applications plus détaillées seront faites sur le tri-angle de la branche Dommage Auto (voir les données du tableau 3.1). Pour des raisonsde confidentialité, les données du triangle seront ramenées en base 100 pour le paie-ment de l’année de survenance la plus ancienne et première année de développement.

TABLE 3.1 – Paiements cumulés, branche Dommage Auto0 1 2 3 4 5 6 7 8

2001 100,00 136,69 137,55 138,27 138,15 138,17 138,02 138,16 137,252002 107,78 134,38 134,71 134,71 134,45 134,82 134,77 134,822003 127,06 159,20 157,82 158,20 158,25 158,67 158,942004 132,55 162,60 163,66 164,00 164,87 165,012005 134,65 166,09 166,96 166,66 166,842006 147,65 177,20 177,61 180,042007 166,91 212,38 213,332008 189,14 237,182009 198,22

Cette branche est à déroulement court. Une à deux années de développement suf-fisent pour que la charge finale soit atteinte, comme nous le constatons sur le graphique3.1 (les courbes présentent une pente nulle après une à deux années).

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 22

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

FIGURE 3.1 – Déroulement des paiements de la branche Dommage Auto

3.3 Méthode de Chain Ladder

La méthode de Chain Ladder est de loin la plus couramment utilisée par les com-pagnies d’assurance du fait notamment de sa facilité de mise en œuvre. Elle s’appliqueaux montants cumulés Ci, j et suppose que la cadence des paiements dépend de l’annéede développement des sinistres. Cela revient à écrire :

Ci, j+1 = f j ·Ci, j pour j = 0 à n−1

où f j est le facteur de développement de l’année de développement j à j+1. Ainsi ilest possible d’estimer les paiements futurs. Le montant des provisions correspondant àla somme des paiements futurs encore à effectuer en est alors déduit.

3.3.1 Hypothèses

La méthode de Chain Ladder repose sur deux hypothèses, à savoir :– (H1) les années de survenance sont indépendantes ;– (H2) les années de développement sont des variables explicatives du comporte-

ment des paiements futurs.

3.3.2 Méthode

Sous ces hypothèses, les facteurs de développement sont estimés par :

f j =∑

n− j−1i=0 Ci, j+1

∑n− j−1i=0 Ci, j

pour j = 0 à n−1

Les facteurs de développement permettent de compléter le triangle inférieur. Onestime alors :

Ci, j+1 = f j ·Ci, j pour i+ j > n

= Ci,n−i ·j

∏k=n−i

fk

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 23

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

La provision de l’année de survenance i, notée Ri s’estime alors par la relation :

Ri = Ci,n −Ci,n−i pour i = 1 à n

Enfin, l’estimation du montant total de la provision, notée R est obtenu en sommantles provisions de chaque année de survenance :

R =n

∑i=1

Ri

3.3.3 Critiques

Le principal avantage de la méthode est sa simplicité de mise en place. Mais cetteméthode suppose aussi des hypothèses fortes, pas toujours réalisées en pratique :

– (H1) Il s’agit d’une hypothèse forte qui suppose en particulier une stabilité desannées calendaires, c’est-à-dire pas de changement dans la législation, la gestiondes sinistres, le management, l’inflation. En effet, ces phénomènes peuvent af-fecter plusieurs années de survenances et donc entraîner la non-satisfaction del’hypothèse d’indépendance des années de survenance. De plus, les sinistres sur-venus au cours d’une année donnée sont censés n’avoir aucune influence sur lessinistres pouvant survenir l’année suivante.

– (H2) Cette hypothèse suppose que la seule explication de l’évolution du montantdes sinistres au cours des années de développement est justement la durée de cedéveloppement. Cela implique une non-corrélation des facteurs de développe-ment successifs.

Les tests de ces hypothèses sont présentés au paragraphe 3.3.4.

Une autre critique provient du dernier facteur de développement qui n’est estimé quesur une seule observation fn−1 = C0,n/C0,n−1. De plus ces données-là (C0,n et C0,n−1)sont des données très anciennes (n années avant l’année courante).

Pour les années de survenance récentes, l’estimation de la charge finale dépend desn facteurs de développement estimés sur les n années de survenance précédentes etrepose sur le premier paiement effectué. L’incertitude de l’estimation est donc trèsforte.

On peut également noter l’importance du premier paiement pour l’exercice le plusrécent. C’est sur cette seule valeur que sera basée l’estimation des provisions pourles années suivantes. (Toutes les estimations des provisions par année de survenancereposent sur la projection des données figurant sur la diagonale du triangle). Prenonsun exemple pour quantifier l’impact d’une différence de délai de traitement par lesgestionnaires sinistres pour l’année de survenance la plus récente (cf. tableau 3.2).

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 24

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

TABLE 3.2 – Impact d’une variation du montant des paiements Cn,0 de la branche Dom-mage Auto

Variation de l’estimationVariation de Cn,0 de la charge finale Variation de la provisions

pour l’année de survenance totale

5 % 5 % 5,2 %10 % 10 % 11 %20 % 20 % 22 %80 % 80 % 88 %

Le cas extrême serait une valeur nulle des paiements de la première année de dé-veloppement pour l’année de survenance la plus récente Cn,0. C’est un "problème" quel’on retrouve dans d’autres méthodes.

Un autre inconvénient de cette méthode est qu’elle ne fait aucune hypothèse sur la loisuivie par les coûts et les fréquences des sinistres, et donc, comme toutes les méthodesdéterministes, elle ne permet pas d’évaluer la précision de l’estimation obtenue.

3.3.4 Test des hypothèses

Sous Solvabilité II, il va être nécessaire de savoir démontrer que la méthode estadaptée aux données [4] :

The (re)insurance undertaking shall be able to demonstrate the appropria-teness, including the robustness, of the techniques, having regard to the na-ture, scale and complexity of risks. In order to meet this requirement, a(re)insurance undertaking shall provide sound rationale for the choice of onetechnique over other relevant techniques. This also applies to simplified tech-niques, approximations and the application of judgement.

Sur base de l’article de T. Mack [21], nous testons les hypothèses de la méthode,à savoir l’indépendance des années de survenance et la non-corrélation des facteursde développement successifs. L’hypothèses (H1) se vérifie par un test de non-effet ca-lendaire. Quant à l’hypothèse (H2), elle se contrôle par un test de non-corrélation desfacteurs de développement successifs. Cette hypothèse peut être testée par le test deSpearman, qui permet l’étude des corrélations des rangs. Elle peut être vérifiée graphi-quement : les points (Ci, j,Ci, j+1) pour chaque année j doivent ainsi faire apparaître unedroite passant par l’origine. Testons par exemple l’année de développement 1 à 2 (cf.graphique 3.2). Les autres graphiques sont présentés en annexe A.

Au vu du graphique (cf. graphique 3.2), les points semblent alignés sur une droitepassant par l’origine. On peut donc supposer l’hypothèse vérifiée. Les résultats obtenuspar les vérifications "mathématiques" des hypothèses en se basant sur l’article [21]valident également cette hypothèse.

3.3.5 Application

La méthode de Chain Ladder appliquée au triangle des paiements cumulés de labranche Dommage Auto fournit les résultats présentés dans le tableau 3.3.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 25

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

FIGURE 3.2 – Test de l’hypothèse (H2) pour l’année développement 1 à 2 sur la brancheDommage

TABLE 3.3 – Application de Chain Ladder0 1 2 3 4 5 6 7 8

2001 100,00 136,69 137,55 138,27 138,15 138,17 138,02 138,16 137,252002 107,78 134,38 134,71 134,71 134,45 134,82 134,77 134,82 133,932003 127,06 159,20 157,82 158,20 158,25 158,67 158,94 159,05 158,002004 132,55 162,60 163,66 164,00 164,87 165,01 165,04 165,15 164,062005 134,65 166,09 166,96 166,66 166,84 167,11 167,13 167,25 166,152006 147,65 177,20 177,61 180,04 180,21 180,50 180,53 180,65 179,462007 166,91 212,38 213,33 214,14 214,34 214,69 214,72 214,87 213,452008 189,14 237,18 237,82 238,73 238,95 239,33 239,37 239,54 237,962009 198,22 248,41 249,08 250,03 250,26 250,66 250,70 250,88 249,23

facteurs 1,253 1,003 1,004 1,001 1,002 1,000 1,001 0,993

Les méthodes qui suivent sont moins couramment utilisées en pratique, mais il estintéressant de comparer les possibilités qu’elles fournissent et leurs résultats. Commen-çons par une variante de la méthode de Chain Ladder.

3.4 Méthode des facteurs de développement par année

de survenance

Cette méthode calcule un facteur de développement pour chaque année de dévelop-pement et pour chaque exercice :

fi, j =Ci, j+1

Ci, jpour 0 ≤ i, j ≤ n−1

Ainsi on peut calculer un facteur moyen par année de développement : f j =∑n− j−1i=0 fi, j/(n− j)

pour j = 0 à n− 1. En notant les facteurs de développement de Chain Ladder sous laforme :

f j =n− j−1

∑i=0

Ci, j

∑n− j−1k=0 Ck, j

fi, j

on voit apparaître une moyenne pondérée dont les poids sont Ci, j/∑n− j−1k=0 Ck, j tan-

dis que la méthode des facteurs de développement par année de survenance est unemoyenne non pondérée.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 26

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

Cette méthode donne des résultats moins stables que la méthode de Chain Ladder,mais permet d’étudier la dispersion des facteurs de développement entre les années desurvenance. Le coefficient de variation (CV) permet de quantifier la dispersion des fac-teurs de développement par année de survenance pour chaque année de développementet ainsi déceler d’éventuels facteurs s’écartant fortement de la moyenne.

CVj =σ( fi, j)

fi, jou fi, j : moyenne fi, j et σ( fi, j) : écart-type des fi, j

Plus ce coefficient de variation est élevé, plus la dispersion des fi, j est importantepour l’année de développement j. Il va de soi que lorsque celui-ci est nul (écart-typeégal à zéro), les fi, j sont identiques pour l’année de développement j, donc la disper-sion est nulle.

Des méthodes proposent de supprimer les coefficients jugés "anormaux" et de lesremplacer par la moyenne par exemple. Il est également possible de pondérer les coef-ficients, pour donner un poids plus élevé aux années plus récentes par exemple, si l’onestime que la cadence de règlement a changé ces années-là.

3.5 Méthode London Chain

Cette méthode est moins utilisée, mais permet d’étudier les résultats obtenus lors-qu’on ne se contraint plus à avoir une relation linéaire entre Ci, j et Ci, j+1 comme laméthode de Chain Ladder. En effet cette méthode suppose qu’il existe une fonctionaffine entre les paiements cumulés de deux années de développement successives, telleque :

Ci, j+1 = f j ·Ci, j +α j pour j < n−1

Ci,n = fn−1 ·Ci,n−1 et αn−1 = 0

Par la méthode des moindres carrés on cherche à résoudre l’équation suivante :

(f j, α j

)= argmin

{n− j−1

∑i=0

(Ci, j+1 −α j − f j ·Ci, j)2

}pour j = 0 à n−1

Ainsi on obtient :

f j =

1n− j−1 ·∑

n− j−1i=0 Ci, j ·Ci, j+1 −C j ·C j+1

1n− j−1 ·∑

n− j−1i=0 Ci, j

2 − (C j)2et α j = C j+1 − f j ·C j

Avec :

C j =1

n− j−1

n− j−1

∑i=0

Ci, j C j+1 =1

n− j−1

n− j−1

∑i=0

Ci, j+1

Si l’hypothèse (H2) de la méthode de Chain Ladder est vérifiée, à savoir les points(Ci, j,Ci, j+1) pour chaque année j sensiblement alignés, ils le seront aussi par une droitenon contrainte à l’origine.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 27

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

FIGURE 3.3 – Illustration de la droite non contrainte selon London Chain - droitecontrainte selon Chain Ladder

3.6 Méthode de DeVylder

D’après la méthode de DeVylder, les paiements effectués pour l’année de surve-nance i et de développement j représentent une part du paiement cumulé final de l’an-née de survenance i : Zi, j =Ci,n ·Pj, où Pj représente la part de Ci,n payée dans l’annéede développement j. Cette méthode est donc basée sur les paiements non cumulés,contrairement aux méthodes présentées jusque-là.

i,j 0 . . . j . . . n0 C0,n ·P0 . . . C0,n ·Pj . . . C0,n ·Pn...

...... . .

.

i Ci,n ·P0 . . . Ci,n ·Pj...

... . ..

n Cn,n ·P0

La méthode permet donc de déterminer Ci,n et Pj. Ceux-ci sont estimés par la mé-thode des moindres carrés qui minimise les écarts entre les valeurs théoriques et les

valeurs observées : argmin{

∑ni=0 ∑

n−ij=0 (Zi, j −Ci,n ·Pj)

2}

. La solution est donnée par

le système d’équation :

Ci,n =∑

n−ij=0 Pj ·Zi, j

∑n−ij=0 P2

j

Pj =∑

n− ji=0 Ci,n ·Zi, j

∑n− ji=0 C2

i,n

etn

∑j=0

Pj = 1

Les équations de Ci,n et Pj dépendent l’une de l’autre, une solution est alors obtenuepar itération. On pose :

P(0)j =

1n

C(n+1)i,n =

∑n−ij=0 P(n)

j ·Zi, j

∑n−ij=0 P(n)

j2

P(n+1)j =

∑n− ji=0 C(n)

i,n ·Zi, j

∑n− ji=0 C(n+1)

i,n2

La provision totale est estimée par R = ∑ni=1 ∑n

j=n−i+1 Zi, j.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 28

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

En général une dizaine d’itérations suffisent à obtenir un écart très faible entre deuxitérations successives. L’avantage de cette méthode est qu’elle n’est pas contrainte pardes hypothèses comme celle de Chain Ladder.

3.7 Méthode de séparation arithmétique (de Taylor)

Cette méthode suppose : Zi, j = Pj · µi+ j où Pj est la part payée la jème année dedéveloppement et µi+ j est le coût total payé lors de l’année calendaire i + j. Cetteméthode permet d’intégrer des hypothèses d’inflation.

0 · · · j · · · n0 µ0 · P0 · · · µ j · Pj · · · µn · Pn... . .

.

i µi · P0 · · · µn · Pj... . .

.

n µn · P0

On obtient :

µn =n

∑i=0

Zi,n−i Pn =Z0,n

µnPn−k =

∑ki=0 Zi,n−k

∑nl=n−k µl

µn−k =∑

n−ki=0 Zi,(n−k)−i

1−∑nj=n−k+1 Pj

Il s’agit ensuite d’extrapoler les coefficients µn−k de n+1 à 2n. Pour cela il faut es-timer l’inflation future. Il est possible de se baser sur l’inflation observée sur les annéescalendaires 0 à n. Différentes méthodes sont possibles pour cela : on peut l’estimerpar la moyenne des µk+1/µk pour k = 0 à n− 1 ; ou en annualisant le taux d’inflationdes n années passées : (µn/µ0)

1/n −1 . On reconstitue ensuite le triangle inférieur parZi, j = Pj · µi+ j pour i+ j > n.

3.8 Branches longues : trois méthodes pour estimer un

"tail factor"

Les méthodes de provisionnement présentées jusqu’ici ne sont pas suffisantes pourl’estimation des charges finales et donc des provisions pour les branches à déroulementlong. Elles permettent uniquement d’estimer les paiements cumulés jusqu’au dévelop-pement n du triangle. Pour ces branches, notamment Responsabilité Civile Automobile(RCA) et Responsabilité Civile Générale (RCG), il est nécessaire d’avoir recours à un"tail factor" pour estimer la charge ultime sans quoi celle-ci sera sous-estimée. Pourcela il faut estimer les facteurs de la queue de développement. Nous utilisons troisméthodes d’évaluation du "tail factor".

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 29

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

On peut illustrer le déroulement long des paiements des sinistres sur la branche RCAuto par le graphique 3.4 représentant l’évolution des paiements cumulés par année desurvenance (il subsiste une pente positive après 8 ou 9 années de déroulement).

FIGURE 3.4 – Déroulement des paiements d’une branche longue : Responsabilité CivileAuto

3.8.1 Méthode 1 : Proportion de la provision comptable Dossier/-

Dossier

Une première façon d’estimer un "tail factor" est d’estimer la part de la provision

comptable qui sera effectivement payée : fult =C0,n+β·Q0,n

C0,n, où Q0,n représente la provi-

sion comptable (dossier/dossier). Un actuaire expérimenté fera le choix du β. En choi-sissant un β égal à 100%, il supposera que les provisions comptables correspondent àl’évaluation la plus juste de la charge finale. Les estimations des charges finales desautres années de survenance reposent sur cette estimation provenant de l’année de sur-venance la plus ancienne du triangle.

Cette méthode permet uniquement d’avoir une estimation de la charge ultime parannée de survenance mais sans connaître le déroulé par année de développement, entrel’année de développement n et l’ultime. Ceci pose problème lors du calcul du bestestimate dans l’optique Solvabilité II, pour laquelle les flux financiers futurs doiventêtre actualisés. Il faut alors utiliser une alternative. Par exemple actualiser le montantde la provision sur l’horizon de la duration de la branche considérée.

3.8.2 Méthode 2 : Données de marché

Nous avons également utilisé une deuxième méthode qui consiste à se baser surles données de marché. Faute de données luxembourgeoises, ce sont les données dumarché belge fournies par le CEIOPS dans le cadre du QIS 4 qui permettent de dé-duire les facteurs de développement du marché sur 30 ans. Cette méthode est utilepour la comparaison des deux autres méthodes, mais il faut tout de même s’assurerque les branches "marché" ont un comportement suffisamment comparable à celui desbranches de la compagnie.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 30

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

3.8.3 Méthode 3 : Extrapolation par un modèle paramétrique

Dans cette méthode, les facteurs sont extrapolés par l’utilisation de lois à deuxparamètres permettant l’ajustement des facteurs de développement et ainsi l’estimationdes facteurs pour les années de développement j > n.

Quatre lois sont habituellement utilisées : exponentielle, puissance, puissance in-verse et Weibull. Ce lissage des facteurs de développement par ces lois peut se faire surtous les facteurs estimés par la méthode de Chain Ladder ou se faire après exclusiondes points aberrants selon le jugement d’un expert.

Par exemple le modèle puissance inverse, défini par la fonction : f j = 1+ b · j−a

peut aussi s’écrire ln( f j −1) = ln(b)+a · ln( 1j ). Par régression linéaire on obtient alors

les paramètres a et b (en minimisant les écarts des carrés entre la courbe f( j, ln( f j −1))(où f j est le facteur de développement de Chain Ladder) et la droite d’ajustement).

Les principales autres lois usuellement utilisées sont :

f j f

Exponentielle 1+b · exp(−a · j) f( j, ln( f j −1))

Puissance ba jf( j, ln(ln( f j)))

Weibull 1/(1− exp(−b · ja)) f(ln( j), ln(ln(( f j −1)/ f j)))

TABLE 3.4 – Les trois autres lois principalement utilisées pour l’ajustement des facteursde développement

La qualité de l’ajustement peut s’évaluer par le coefficient de détermination R2,qui donne la part expliquée par le modèle. Ainsi, plus le coefficient est proche de 1,meilleur est le modèle.

Nous présentons sur les graphiques 3.5 les différents lissages possibles avec les loisexposées précédemment sur les branches longues Responsabilité Civile Auto (RCA) etResponsabilité Civile Générale (RCG).

FIGURE 3.5 – Facteurs de développement obtenus sur le triangle de données de 9 an-nées et par extrapolation des différentes lois (à gauche : RCA, à droite : RCG)

Nous évaluons ensuite la qualité des ajustements aux différentes courbes que nousobtenons sur les deux branches longues RCA et RCG (cf. tableau 3.5). Nous consta-tons que l’ajustement des facteurs de développement par une loi puissance inverse ouWeibull semble fournir les meilleurs résultats.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 31

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

TABLE 3.5 – Coefficient de détermination R2 obtenu par l’ajustement de chacune descourbes sur chacune des branches

puissance inverse exponentiel puissance Weibull

RC Auto 91% 78% 80% 88%RCG 78% 59% 59% 80%

Critique : Ces méthodes d’extrapolation par ajustement à une loi, fournissent sou-vent des facteurs de développement très rapidement proches de 1 alors que l’on sait quedans quelques dizaines d’années on va encore payer quelques sinistres importants (cf.graphique de gauche 3.6). Mais le lissage amènera à ne plus augmenter la provisionquelques années seulement après la fin du triangle.

FIGURE 3.6 – Facteurs de développement obtenus sur le triangle de données de 9 et 28ans et extrapolation par loi puissance inverse des facteurs de développement sur 9 ans(gauche : RCA, droite : RCG)

3.8.4 Comparaison des méthodes introduisant un "tail factor"

TABLE 3.6 – Impact d’un "tail factor" sur la charge finale selon la méthodeCharge

sans méthode 2)méthode 3)

finale puissance inverse exponentiel puissance Weibull

RC Auto 2 528,51 2 891,03 2 917,06 2 604,17 2 613,41 2 632,930,00% + 14,34% + 15,37% + 2,99% + 3,36% + 4,13%

RCG 2 368,67 3 438,19 2 732,05 2 451,76 2 464,08 2 455,830,00% + 45,15% + 15,34% + 3,51% + 4,03% + 3,68%

Nous constatons que les lissages par les différentes lois fournissent, sur les deuxbranches, le même classement entre les montants de la charge finale (cf. tableau 3.6).Le lissage par loi puissance inverse fournit sur les deux branches la plus forte hausse dela charge finale. C’est cette loi qui avait été retenue sur base du critère du coefficient dedétermination comme fournissant le meilleur ajustement. La part supplémentaire quele "tail factor" ajoute au montant des provisions est présentée dans le tableau 3.7.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 32

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

TABLE 3.7 – Part du "tail factor" dans le montant de la provision

Provisions sans méthode 2)méthode 3)

puissance inverse exponentiel puissance Weibull

RC Auto 493,35 855,87 881,91 569,02 578,25 597,770,00% 73,48% 78,76% 15,34% 17,21% 21,17%

RCG 507,78 1577,30 871,16 590,88 603,20 594,940,00% 210,63% 71,56% 16,36% 18,79% 17,17%

L’ajout d’un "tail factor" constitue une part importante du montant des provisions.Dans le cadre Solvabilité II, le choix d’une de ces méthodes repose également surle principe de proportionnalité. En effet, pour de petits portefeuilles, développer desmodèles sophistiqués n’est pas adapté. Les choix de l’actuaire doivent être cohérentsavec les recommandations du CEIOPS et dépendent du choix de la méthode de calculdu best estimate.

Nous avons pu comparer les résultats obtenus par ces méthodes de projection à ceuxobtenus sur les triangles de 28 ans obtenus grâce à des améliorations informatiquesau cours du stage. On obtient une provision de 973 et 766 sur les branches RCA etRCG respectivement pour les 9 années de survenance les plus récentes. Le lissage parla courbe puissance inverse donne les résultats les plus proches, mais tout de mêmeavec un écart d’environ 10 % sur les deux branches. C’est également cette courbe-ciqui nous donne un des meilleurs ajustements sur base du coefficient de détermination.Il faut tout de même nous assurer que la cadence de règlement n’a pas radicalementchangé en 28 ans. Pour cela nous étudions les facteurs de développement par année desurvenance.

Le "tail factor" reste le choix de l’actuaire selon Thomas Mack dans l’article [20] :"the tail factor used must be plausible and, therefore, the final tail factor is the resultof the personal assessment of the future development by the actuary".

3.9 Méthode AXA Luxembourg

La méthode de provisionnement best estimate utilisée par AXA Luxembourg estmise en œuvre via un outil fourni par le groupe AXA. Cette méthode est récursive etcomplétée par un jugement d’expert. A partir de l’estimation de charge finale prévi-sible (CFP) faite pour une année de survenance de sinistres, l’utilisateur effectue lesestimations de CFP pour les années de survenance ultérieures.

L’initialisation se fait à l’année de survenance la plus ancienne des triangles dedonnées (règlements cumulés et charges cumulées). En effet, c’est pour cette année-làque l’on est, au jour de l’estimation, au plus près de la CFP. Ensuite, l’outil proposedifférentes valeurs correspondant au montant de la CFP telle qu’elle serait si le déroulédes paiements futurs était semblable au déroulé de l’année de survenance antérieureconsidérée (utilisation des facteurs de développement par année de survenance consi-dérée). Ainsi l’outil propose autant de CFP possibles par année de survenance que dedéroulés d’années de survenance antérieures déjà déterminées.

Sur la base de ces informations et de proche en proche, pour chaque année desurvenance de la plus ancienne à la plus récente, l’utilisateur apporte son jugement

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 33

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

d’expert pour affiner son estimation de la CFP au plus juste (suivant notamment seséchanges avec le Département Sinistres), en tenant compte, le cas échéant, d’un tailfactor.

3.10 Comparaison des résultats

L’application de différentes méthodes aux différentes branches d’AXA Luxem-bourg fournissent les résultats présentés dans le tableau 3.8 (hors considération d’untail factor).

TABLE 3.8 – Montant de provision par méthode d’estimation et par branche (CL :Chain Ladder, LC : London Chain)

CL DeVylder Par exercice LC Taylor

RC Auto 493,35 490,77 493,81 -298,97 578,78Dommage Auto 47,93 47,40 48,22 72,66 54,56

Dommage Non Auto 113,65 114,32 120,61 84,80 130,94RCG 507,79 496,37 501,77 451,52 524,79

Divers 1 082,19 1 024,16 1 325,05 4 349,84 1 355,06

Nous constatons que les résultats obtenus par les différentes méthodes sont géné-ralement assez proches. Dans le tableau 3.9 nous comparons les méthodes à celle deChain Ladder.

TABLE 3.9 – Ecart relatif entre le montant des provisions par les différentes méthodeset la méthode de Chain Ladder

CL DeVylder Par exercices LC Taylor

RC Auto 0,00 % -0,52% 0,09% -160,60% 17,32%Dommage Auto 0,00 % -1,11% 0,60% 51,60% 13,83%

Dommage Non Auto 0,00 % -2,27% 3,11% -27,51% 11,94%RCG 0,00 % -2,25% -1,18% -11,08% 3,35%

Divers 0,00 % -5,36% 22,44% 300,10% 25,21%

Seule la méthode de London Chain s’écarte fortement des autres. Rappelons quecette méthode suppose que les paiements cumulés d’une année de développement àl’autre forment une droite non contrainte à passer par l’origine. Graphiquement nousobservons que cette droite s’éloigne fortement de la droite contrainte par l’origine deChain Ladder sur certaines années de développement, d’où les résultats observés. Parexemple, sur la branche RC Auto, l’année de développement 3 à 4 explique la plusgrande part de la baisse de la provision (voir graphique 3.7).

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 34

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

FIGURE 3.7 – London Chain - Chain Ladder sur la branche RC Auto, pour l’année dedéveloppement 3 à 4

Sur la branche Divers les méthodes ne convergent pas, et fournissent des résultatstrès différents. Cela s’explique par la diversité des risques qui composent cette branche.Celle-ci n’est pas suffisamment homogène, les résultats des méthodes en sont l’illus-tration. De plus, cette branche a connu une croissance importante (plus de 400% sur 9ans).

Nous constatons que les résultats fournis par la méthode de DeVylder et celleconsistant à calculer les facteurs de développement par année de survenance sont trèsproches, sur les branches d’AXA Luxembourg (hormis la branche Divers cf. explica-tions vues précédemment), de ceux obtenus par la méthode de Chain Ladder. L’écartrelatif de 3,11% sur la branche Dommage Non Auto est expliqué par deux années desurvenance dont les facteurs de développement fi, j sont élevés mais affectés d’une

faible pondération sous Chain Ladder par le biais du coefficient Ci, j/∑n− j−1k=0 Ck, j qui

est absente dans l’application d’une simple moyenne aux facteurs de développement.Quant à la méthode de Taylor, elle amène à des résultats supérieurs à ceux de la

méthode de Chain Ladder sur les cinq branches. Nous pourrions supposer que cela pro-vient des hypothèses d’inflation faite, mais pour "retomber" sur les résultats de ChainLadder il faudrait considérer des inflations négatives de l’ordre de -9% à -3% selon lesbranches.

Par ailleurs, nous observons (même sans considérer de "tail factor") que les brancheslongues (RCA et RCG) se distinguent des branches courtes (Dommage Auto et NonAuto). Les provisions à constituer sont nettement plus faibles pour les branches courtesdu fait que la quasi-totalité des paiements ont déjà été effectués.

Les différentes méthodes proposées reposent sur le passé, contrairement aux provi-sions comptable "dossier/dossier". Elles sont donc d’autant plus performantes et stablesque :

– Le passé est régulier,– Le passé explique bien le présent et le futur,– La branche considérée est peu volatile,– Les données sont nombreuses,– Les données sont fiables,– Les données sont homogènes,– Les données par branche sont stables et peu volatiles.

On peut citer un certain nombre de facteurs qui peuvent influencer les données, etdonc amener à ce que le passé n’explique pas au mieux le futur :

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 35

CHAPITRE 3. MÉTHODES DÉTERMINISTES

– d’une part des facteurs internes au portefeuille et à la compagnie :– l’évolution du portefeuille,– l’évolution des politiques de gestion des sinistres qui influe ainsi sur la cadence

de règlement des sinistres,– etc.

– d’autre part des facteurs externes :– cycles économiques,– évolution du taux d’inflation des sinistres,– modifications au niveau règlementaire,– etc.

3.11 Conclusions

Le choix d’une méthode de provisionnement best estimate est délicat. Il n’existepas de méthode a priori applicable à toutes les compagnies, ni à tous types de branchesde risque. [27] The model choice is probably one of the most difficult questions in anyapplication in practice [...] Only an experienced reserving actuary is able to tell whichis an accurate/good estimate for future liabilities for a specific data set [...]

Quel que soit le choix fait, il est important de pouvoir justifier le choix de la méthodeutilisée [7] :

Undertakings shall be able to demonstrate the applicability and relevance ofthe methods applied and the appropriateness of the level of technical provi-sions. (Re)insurance undertakings shall be able to demonstrate that the ac-tuarial methods and statistical methodologies are proportionate to the nature,scale and complexity of the risks supported by insurance and reinsurance un-dertakings. The best estimate and the assumptions underlying the calculationsare regularly compared against experience.

Pour cela il est donc utile de comparer régulièrement différentes méthodes et de lesconfronter à la réalité constatée a posteriori.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 36

Chapitre 4

Méthodes stochastiques

Dans une optique de gestion des risques, il peut être plus judicieux d’utiliser desméthodes stochastiques qui permettent de quantifier le risque d’estimation des provi-sions. Deux méthodes stochastiques sont plus particulièrement connues en assurancenon-vie : la méthode de Mack et celle du bootstrap.

4.1 Processus stochastique de provisionnement

Présentons de manière plus formelle le processus de provisionnement afin d’intro-duire les notations qui seront reprises dans les chapitres suivants.

i, j 0 1 . . . j . . . n0 C0,0 C0,1 . . . C0, j . . . C0,n...

......

... . ..

i Ci,0 Ci,1 . . . Ci, j...

...n Cn,0

Nous sommes à la date n et nous disposons du triangle de paiements cumulés ci-dessus. Pour chaque année de survenance i nous avons n− i+1 observations. A la daten l’information disponible est définie par D =

{Ci, j, i+ j ≤ n, 0 ≤ i, j ≤ n

}.

La provision constituée pour l’année de survenance i, pour les paiements restant àeffectuer à la date n est Ri = Ci,n −Ci,n−i où Ci,n est inconnue à cette date. C’est cettevariable que l’on cherche à estimer par le processus de provisionnement. Ou plus exac-tement la variable aléatoire conditionnelle à l’information connue Ci,n|D . On estime lemontant de la provision pour l’année de survenance i par :

Ri = E(Ri|D) = E(Ci,n|D)−Ci,n−i

Les paiements cumulés futurs (triangle inférieur) seront donc estimés par :

Ci, j = E(Ci, j|D)

Pour mesurer l’incertitude qui réside dans l’estimation de la provision R, nous de-vons étudier celle de la variable aléatoire Ci,n, c’est-à-dire la qualité du prédicteur Ci,n,

37

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

nous avons recours à l’erreur quadratique moyenne ("mean square error of prediction"(msep)). Celle-ci se définit de la façon suivante :

msepCi,n|D(Ci,n) = E[(Ci,n −Ci,n)2|D]

= E[((Ci,n −E(Ci,n))− (Ci,n −E(Ci,n)))2|D]

d’après les propriétés des espérances conditionnelles, on a :

msepCi,n|D(Ci,n) = E[(Ci,n −E(Ci,n))2|D]−E[(Ci,n −E(Ci,n))

2|D]

= Var(Ci,n|D)︸ ︷︷ ︸1

+(Ci,n −E(Ci,n|D))2

︸ ︷︷ ︸2

– Le premier terme de la somme est défini comme la variance du processus, c’est-à-dire la variabilité autour de la moyenne, due au processus stochastique. Cetteerreur ne peut donc pas être supprimée.

– Le second terme de la somme est l’erreur d’estimation. Elle provient de l’in-certitude de l’estimation que l’on fait des paramètres servant à déterminer Ci,n.En général celle-ci devrait diminuer avec l’augmentation de l’information dispo-nible.

Remarque : La littérature distingue deux notions : prédicteur - estimateur : Ci,n estun prédicteur de Ci,n et un estimateur de E[Ci,n|D]

4.2 Méthodes de simulation

On cherche à simuler un grand nombre de réalisations possibles du montant desprovisions pour en déduire une distribution. Ainsi nous pourrons, en plus des deuxpremiers moments, déterminer des intervalles de confiance ou encore des quantiles(Value at Risk - VaR).

4.2.1 Bootstrap

Le principe de la méthode du bootstrap est de "créer" un plus grand nombre dedonnées à partir de celles qui sont disponibles. Cela se fait en ré-échantillonnant nosdonnées sur la base d’un tirage aléatoire avec remise. Cette méthode est habituellementdéfinie par l’expression "se hisser en tirant sur ses propres lacets".

L’hypothèse fondamentale est de supposer que les éléments qui sont ré-échantillonnéssont des variables aléatoires indépendantes et identiquement distribuées (i.i.d.).

Détaillons le principe plus formellement :Soit X = (X1,X2, ...,Xn) n réalisations d’une variable aléatoire indépendante et iden-tiquement distribuée (i.i.d.) de loi inconnue. On note θ le paramètre de la distribu-tion que l’on cherche à estimer (moyenne, écart-type, Value at Risk par exemple).θ = f (X1,X2, ...,Xn) est l’estimation de θ obtenue à partir de l’échantillon initial.

A partir de cet échantillon initial, on effectue un tirage aléatoire avec remise (pourrespecter l’indépendance) de n éléments parmi les n éléments initiaux. On obtient unnouvel échantillon qui permet une nouvelle estimation du paramètre recherché. On

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 38

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

réitère cette étape un nombre de fois suffisamment grand. Cela permet alors d’estimerla distribution empirique suivie par la variable aléatoire et autres mesures statistiques.

Cette méthode sera appliquée à la section 4.5.

4.2.2 Monte Carlo

La méthode de Monte Carlo est une méthode de simulation selon la loi du phéno-mène étudié. Pour ce faire, il faut simuler des réalisations de lois de probabilités. Celase fait par inversion de la fonction de répartition F−1(y). L’inverse de la fonction derépartition F d’une variable aléatoire (v.a.) X est donné par :

F−1(y) = in f {x ∈ R|F(x)≥ y}

Cette méthode repose sur la définition suivante :

Si U est une v.a. de loi uniforme sur [0,1], alors F−1(U) est de même loi que X. Etsi F est continue sur R, alors F(X);U .

En effet, P(F(X)≤ t) = P(X ≤ F−1(t)) = F(F−1(t)

)= t, donc F(X);U .

Selon la méthode de Monte Carlo, pour simuler n réalisations i.i.d. d’une loi ayantpour fonction de répartition F , on simule n réalisations indépendantes d’une variablealéatoire de loi uniforme sur [0,1], et on applique l’inverse de la fonction de répartition.

Cette méthode sera appliqué au chapitre 9.1.

Remarque

Toutefois, il existe des lois pour lesquelles on ne dispose pas de formule explicitede l’inverse de la fonction de répartition. C’est notamment le cas de la loi normalestandard N (0,1) dont la fonction de répartition est donnée par :

F(x) =1

∫ x

−∞exp− t2

2dt

Pour ce faire, il existe des algorithmes d’approximation.Note : Sous Excel l’inversion de la loi normale par la fonction loi.normale.inverse

se fait par une technique d’itération, avec un maximum de 100 itérations.

4.3 Mesures de risque

La mesure de risque permet de mesurer le niveau du risque. On appelle mesure derisque ρ si, pour X la variable aléatoire définissant le risque :

ρ(X)> 0

La qualité d’une mesure de risque peut être appréciée par la notion de cohérence.Celle-ci repose sur les quatre propriétés suivantes :

– Invariance par translation :

∀c ∈ R, ρ(X + c) = ρ(X)+ c

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 39

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

– Sous-additivité :ρ(X +Y )≤ ρ(X)+ρ(Y )

– Homogénéité positive :

∀λ ∈ R+, ρ(λX) = λρ(X)

– Monotonie :P(X ≤ Y ) = 1 => ρ(X)≤ ρ(Y )

4.3.1 Value at Risk

La Value at Risk est la mesure de risque conseillée par le CEIOPS dans le cadre deSolvabilité II. On appelle VaR de niveau α la quantité suivante :

VaRα(X) = in f {x ∈ R, FX (x)≥ α}= F−1x (α)

Pour les lois continues, il s’agit donc d’un quantile. Cette mesure présente l’avan-tage d’être simple à mettre en œuvre et à interpréter, mais n’est pas qualifiée de co-hérente du fait que la propriété de sous-additivité n’est pas vérifiée. Les cas de sur-additivité sont tout de même rares en assurance et amènent à une surestimation durisque ; on reste dans le domaine de la prudence avec la VaR.

La VaRα est le niveau qui sera dépassé dans, au plus (1−α) % des cas, mais ellene donne aucune information sur la queue de distribution, c’est-à-dire sur ce qu’il sepasse quand ce niveau est dépassé.

4.3.2 Autres mesures de risque

Regardons alors brièvement quelles seraient les autres mesures de risque possibles.

Tail Value at Risk (TVaR)

Cette mesure de risque est qualifiée de cohérente. Elle se définit de la façon sui-vante, pour un risque X et un niveau de confiance α :

TVaRα(X) =1

1−α

∫ 1

αF−1

X (q)dq

= E[X |X >VaRα(X)]

Elle s’interprète également comme une moyenne des VaR de niveau supérieur à α,et donc s’écrit :

TVaRα(X) =VaRα(X)+1

1−αE[(X −VaRα(X))+]

et donc TVaRα(X) ≥ VaRα(X), à niveau de confiance égal, la TVaR sera toujoursplus élevée que la VaR. Elle présente l’avantage de pouvoir mesurer le montant de laperte quand celle-ci dépasse la VaR. Elle est par ailleurs plus stable que la VaR qui estbasée uniquement sur un quantile. C’est une mesure prudente.

Elle possède l’avantage de satisfaire la propriété de sous-additivité TVaR(X +Y )≤TVaR(X) + TVaR(Y ), ce qui est intéressant en cas d’agrégation des risques du faitqu’elle tient compte de l’effet de diversification.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 40

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

Conditional Tail Expectation (CTE)

La CTE est la perte attendue sachant que l’on a dépassé le niveau VaRα(X). Si Fest continue, la CTE correspond à la TVaR.

La TVaR et la CTE sont inutilisables dès lors que l’on ne connait pas la loi exacte.Une approximation par Monte Carlo est souvent inadaptée surtout avec des lois àqueues épaisses.

L’expected Shortfall (ES)

Cette mesure de risque est définie par : ESα(X) = E[(X −VaRα(X))+]. Ainsi onpeut faire le lien :

TVaRα(X) =VaRα(X)+1

1−α·ESα(X)

C’est cependant la Value at Risk qui a été retenue pour quantifier le risque dans lecadre du SCR de Solvabilité II, avec un niveau de confiance de 99,5% sur un horizond’un an. C’est donc cette mesure que nous utiliserons dans le cadre de ce mémoire.En effet, selon l’article 101 de la directive [14], le SCR doit être quantifié de la fa-çon suivante : It shall correspond to the Value-at-Risk of the basic own funds of aninsurance or reinsurance undertaking subject to a confidence level of 99,5% over aone-year period.

4.4 Mack

La version stochastique de la méthode de Chain Ladder a été introduite par Mack(1993). Il s’agit d’un modèle non paramétrique comme le modèle de Chain Ladder,c’est-à-dire qu’il ne suppose aucune distribution des montants cumulés. Par son exten-sion du modèle de Chain Ladder, Mack propose une estimation de l’erreur de provi-sionnement à l’ultime. L’impact d’une variation du montant des provisions sur le bilanest important, il est donc essentiel de pouvoir quantifier cette possible variation.

Conditionnellement aux données du triangle, le modèle permet d’estimer l’erreurcommise lors de l’évaluation du montant des provisions. Celui-ci repose sur trois hy-pothèses : les deux premières sont celles introduites par la méthode de Chain Ladder etla dernière concerne la variabilité des données du triangle.

Réintroduisons les notations pour tenir compte du fait que ce modèle est à présentstochastique. La méthode déterministe de Chain Ladder devient :

E[Ci, j+1] = f j ·E[Ci, j] ∀i, j = 0 à n−1

4.4.1 Hypothèses

– (H1) les années de survenance sont indépendantes :(Ci, j) j=1,...n indépendant de (Ci′, j) j=1,...n pour i 6= i′

– les (Ci, j) j≥0 constituent une chaîne de Markov, et il existe f0... fn−1 et σ0...σn−1

tels que :– (H2) E[Ci, j+1|Ci, j] = f j ·Ci, j ∀ j = 0 à n−1

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 41

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

– (H3) Var[Ci, j+1|Ci, j] = σ2j ·Ci, j

Sous les deux premières hypothèses le modèle de Mack fournit les mêmes estima-tions des facteurs de développement que le modèle de Chain Ladder. De plus cetteestimation est sans biais. Ainsi l’estimation de la provision Ri est sans biais.

Nous avons vérifié les deux premières hypothèses lors de l’introduction de la mé-thode de Chain Ladder à la section 3.3. Il reste à vérifier la troisième hypothèse. Celle-ci peut se visualiser : les points de coordonnées (Ci, j,Di, j) ne doivent présenter aucune

"structure", où Di, j =Ci, j+1− f j ·Ci, j√

Ci, j.

Remarque

La version originale de Mack ne précisait pas que les (Ci, j) j≥0 constituaient unechaîne de Markov. Ce n’est pas une propriété essentielle, mais elle permet de simplifierles écritures.

4.4.2 Méthode

Ces hypothèses permettent l’estimation de l’erreur de prévision que nous mesuronspar l’erreur quadratique moyenne (mean squared error of prediction - msep) :

msep(Ri) = E[(Ri − Ri)2|D]

= E[(Ci,n −Ci,n)2|D]

puisque Ri =Ci,n −Ci,n−i et Ri = Ci,n −Ci,n−i.

Formule que l’on décompose alors sous la forme :

msep(Ri) = Var (Ci,n|D)︸ ︷︷ ︸erreur de processus

+[E[Ci,n|D]−Ci,n

]2︸ ︷︷ ︸

erreur d’estimation

Mack propose alors une estimation de l’erreur quadratique moyenne pour i = 1 àn :

msep(Ri) = C2i,n ·

n−1

∑j=n−i

σ2j

f 2j

·(

1

Ci, j+

1

∑n− j−1k=0 Ck, j

)

= C2i,n ·

n−1

∑j=n−i

σ2j/ f 2

j

Ci, j︸ ︷︷ ︸erreur de processus

+C2i,n ·

n−1

∑j=n−i

σ2j/ f 2

j

∑n− j−1k=0 Ck, j︸ ︷︷ ︸

erreur d’estimation

avec Ci,n−i =Ci,n−i

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 42

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

On décompose alors l’estimateur en une erreur de processus et une erreur d’esti-mation des paramètres. L’erreur de processus est la variabilité autour de la moyenneet l’erreur d’estimation provient du fait que l’on estime les facteurs de développementmais qu’on ne connaît pas leur valeur réelle.

σ2j définit la variabilité du triangle par année de développement j :

σ2j =

1n− j−1

n− j

∑i=1

Ci, j

(Ci, j+1

Ci, j− f j

)2

pour j ≤ n−2

Pour j = n−1 nous disposons d’une seule observation, ainsi σ2n−1 doit être estimé

d’une autre façon. Mack propose une extrapolation qui amène à :

σ2n−1 = min

(σ4

n−2

σ2n−3

, σ2n−3, σ

2n−2

)

Pour estimer l’erreur de prédiction totale des provisions msep(R) = msep(∑ni=1 Ri)

on ne peut pas simplement sommer les msep(Ri) relatifs à chaque année de survenancedu fait que celles-ci sont estimées à l’aide des mêmes facteurs de développement. Il fautdonc tenir compte d’une corrélation entre elles. Mack estime alors l’erreur quadratiquemoyenne des provisions totales par :

msep(R) =n

∑i=1

(msep(Ri)+Ci,n

(n

∑k=i+1

Ck,n

)n−1

∑j=n−i

2σ2j/ f 2

j

∑n− j−1h=0 Ch, j

)

On dispose à présent d’un prédicteur de Ri (Ri) et de l’écart-type de celui-ci (se(Ri)=√msep(Ri)).

4.4.3 Application

Nous appliquons la méthode de Mack au triangle de la branche Dommage Auto quia été introduit en 3.1. Les résultats qui ont été obtenus sont présentés dans le tableau4.2.

TABLE 4.1 – Facteurs de développement, variabilité du trianglej 0 1 2 3 4 5 6 7

f j 1,25321 1,00271 1,00380 1,00096 1,00159 1,00015 1,0007 0,99348σ2

j 0,27421 0,00441 0,00512 0,00118 0,00025 0,00031 0,00003 0,00000σ2

j/ f 2j 0,17460 0,00438 0,00508 0,00117 0,00025 0,00031 0,00003 0,00000

On constate que la part due à l’erreur de processus croît avec les années de surve-nance, tandis que celle due à l’erreur d’estimation des paramètres diminue. Pour lesannées de survenance les plus récentes il y a un plus grand nombre de paiements futursincertains. Tandis que les paramètres utilisés pour les premières années de dévelop-pement sont estimés sur un plus grand nombre d’observations et ainsi la valeur dudénominateur ∑

i−1k=0 Ck,n−i augmente avec i.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 43

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

TABLE 4.2 – Résultats de l’estimation de l’erreur de provision, de l’erreur de processuset de l’erreur d’estimation selon le modèle de Mack

se(Ri) se(Ri)/Ri

√re(Ri)

√ee(Ri) re/msep ee/msep

2001 0,00 0 % 0,00 0,00 0 % 0 %2002 0,03 - 3 % 0,02 0,02 51 % 49 %2003 0,09 - 9 % 0,07 0,06 61 % 39 %2004 0,28 - 30 % 0,24 0,15 71 % 29 %2005 0,36 - 53 % 0,31 0,19 74 % 26 %2006 0,64 - 111 % 0,56 0,30 78 % 22 %2007 1,36 1085 % 1,21 0,61 80 % 20 %2008 1,83 235 % 1,64 0,83 80 % 20 %2009 8,25 16 % 7,59 3,25 84 % 16 %

agrégés 8,86 18 %

En supposant la loi suivie par les provisions, il nous est possible de déterminer desquantiles. Deux lois sont couramment utilisées en assurance non-vie : la loi Normale etla Log-Normale. Cependant l’utilisation de la loi Normale est critiquée du fait qu’ellepeut prendre des valeurs négatives, ce qui n’est pas le cas des provisions.

TABLE 4.3 – Quantiles, lorsque la distribution suivie par le montant des provisions estsupposée normale ou log-normale

Quantiles 50% 75% 95%

Loi Log-Normale 47,13 53,33 63,71Loi Normale 47,93 53,90 62,49

4.4.4 Critiques

La méthode de Mack fait partie des méthodes stochastiques les plus connues. Ellerepose sur la méthode déterministe de Chain Ladder, et permet, comme toutes les mé-thodes stochastiques, une mesure d’estimation de l’incertitude qui réside dans l’éva-luation des provisions.

Cette méthode permet seulement de connaître les moments d’ordre 1 et 2, mais nepermet pas de connaître la distribution suivie par les provisions, ni de déterminer desquantiles (et donc une Value at Risk). Néanmoins on peut supposer une distributionsuivie par les provisions (loi normale ou log-normale) et utiliser les paramètres fournispar Mack (moyenne et variance) pour estimer ces grandeurs.

4.5 Bootstrap

Dans cette section nous appliquerons la méthode de ré-échantillonage du bootstrapafin d’étudier la distribution suivie par l’estimation du montant des provisions.

L’hypothèse d’indépendance n’est pas vérifiée sur les incréments de paiements.C’est pourquoi nous utilisons les résidus calculés à partir de ces incréments de paie-ments observés, afin que l’hypothèse d’indépendance soit vérifiée.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 44

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

4.5.1 Méthode

Les différentes étapes à effectuer sont :

FIGURE 4.1 – Schéma illustratif du principe du bootstrap, Source détermination d’unintervalle de confiance des réserves « IBNR »

1. Sur base de la méthode de Chain Ladder, on estime les facteurs de développe-ment f j ;

2. On complète le triangle inférieur à partir des facteurs de Chain Ladder ;

3. On calcule le triangle des incréments : Zi,0 =Ci,0 et, pour j = 1 à n :Zi, j =Ci, j −Ci, j−1 ;

4. On recalcule le triangle supérieur "théorique" à rebours à partir des facteurs dedéveloppement en partant des dernières observations (situées sur la diagonale :Ci,n−i ). On obtient les paiements cumulés estimés Ci, j du triangle supérieur ;

5. Cela nous permet de calculer les incréments estimés µi, j pour la partie supérieuredu triangle ;

6. On calcule les résidus de Pearson du triangle supérieur : ri, j =Zi, j−µi, j√Var(µi, j)

, où

Var(µi, j) est la fonction variance de la distribution. On suppose usuellement unedistribution de poisson, donc Var(µi, j) = µi, j

Pour pouvoir comparer les résultats avec d’autres méthodes analytiques il estnécessaire d’appliquer un ajustement permettant de corriger le biais à chacundes résidus de Pearson tels que : ri, j =

√N/(N −P) · ri, j avec N = n(n+1)/2 le

nombre de données et P = 2n−1 le nombre de degrés de libertés ;

7. On procède à un ré-échantillonnage avec remise les résidus : ainsi on obtient desrésidus de Pearson après ré-échantillonnage r∗i, j ;

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 45

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

8. Enfin, on obtient les incréments Z∗i, j = r∗i, j ·

√Var(µi, j)+ µi, j, on en détermine

alors un triangle des règlements issus du bootstrap et ainsi le montant des provi-sions issues de ce triangle de bootstrap par la méthode de Chain Ladder ;

9. Remarque : La méthode du bootstrap classique ne donne que l’incertitude liéeà l’erreur d’estimation. Il nous faut ajouter l’erreur de processus. Plusieurs pu-blications récentes proposent des méthodes pour incorporer cette erreur. Nousavons utilisé celle d’un logiciel utilisé par le groupe, mais indisponible à AXALuxembourg ;

10. Réitération de l’étape 7 et de l’étape 8, N fois.

Ainsi pour un nombre d’observations N de R issues de l’échantillonnage suffisam-ment grand, on peut déterminer sa distribution empirique, sa moyenne, sa variance,etc.

4.5.2 Application

En répétant 10 000 fois les simulations, nous obtenons les résultats suivants, sur labranche Dommage Auto :

FIGURE 4.2 – Distribution empirique du montant de provision à l’ultime de la brancheDommage Auto

4.5.3 Critiques

Si les triangles des incréments de paiement µi, j présentent des valeurs négatives, laméthode n’est pas utilisable telle quelle. Dans ce cas-là il faudrait utiliser par exemplela méthode présentée dans le document [1]. Le triangle de la branche Dommage Autod’AXA Luxembourg pose ce problème sur une valeur lorsque nous utilisons le trianglede 9 ans. Nous l’avons forcée à une valeur nulle. Ce qui engendre vraisemblablementun biais à notre modèle du fait que cette valeur restera alors constante dans lors desré-échantillonnages.

Le fait de ré-échantillonner tout le triangle supérieur n’est pas forcément très réalistedu fait que les résidus r0,n et rn,0 sont par construction nuls. Il faut les exclure pour pou-voir supposer l’indépendance des résidus. Il faut alors également diminuer le nombrede données N dans le facteur d’ajustement des résidus.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 46

CHAPITRE 4. MÉTHODES STOCHASTIQUES

4.6 Comparaison des résultats

En appliquant les deux méthodes stochastiques présentées à la branche DommageAuto, nous obtenons les résultats suivants :

TABLE 4.4 – Comparaison : Mack vs. bootstrap (moyenne, écart-type) sur la brancheDommage Auto

Mack Bootstrap

Moyenne : µ 47,93 47,54Ecart-type : σ 8,85 10,78

On obtient une différence de moins de 1% du montant de la provision mais de27% de la volatilité de l’estimation à l’ultime. Mais ces résultats sont très variablesselon les branches. La méthode de Mack possède tout de même le grand avantage des’épargner les simulations et de fournir un résultat analytique immédiat. Cependantcette dernière ne fournit que les moments d’ordre un et deux si l’on ne suppose pas uneloi de distribution des provisions. La méthode du bootstrap a l’avantage de fournir unedistribution empirique du montant des provisions à l’ultime.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 47

Chapitre 5

Actualisation

5.1 Sous Solvabilité I

Avant l’entrée en vigueur de Solvabilité II, l’actualisation des provisions est inter-dite par mesure de prudence, à l’exception de certaines branches à déroulement trèslong qui pouvaient être actualisées.

5.2 Avec la nouvelle réglementation de Solvabilité II

Avec la nouvelle définition des provisions best estimate sous Solvabilité II, l’ac-tualisation est aujourd’hui une nécessité pour pouvoir qualifier les provisions de bestestimate. L’actualisation doit se faire à l’aide d’une courbe des taux sans risque "perti-nents".

5.3 Application

Pour déterminer la provision best estimate, il suffit de sommer les diagonales depaiements obtenues par la méthode qui aura été choisie pour définir les paiements fu-turs. Ensuite il s’agit d’actualiser ces différents paiements aux taux sans risque.

Soit Zk les paiements estimés à effectuer au cours de la kème année comptable futureet r(0,k) le taux sans risque d’échéance k fourni par la structure par terme des tauxsans risque. Notons Zd

k les paiements actualisés de la kème année future. Si on supposeles paiements effectués en fin d’année on a :

Zdk =

Zk

(1+ r(0,k))k k = n− i+1....∞ ∀i = 0...n

Par contre si l’on suppose les paiements effectués en milieu d’année, il nous fautalors procéder à une interpolation linéaire pour obtenir le taux sans risque de milieud’année, puis actualiser en k−0,5.

La provision best estimate est obtenue par : BE = ∑∞k=1 Zd

k

48

CHAPITRE 5. ACTUALISATION

Choix de la courbe des taux sans risque

Nous avons utilisée la courbe des taux sans risque fournie par le CEIOPS dans lesspécifications du QIS 5. Celles-ci fournissent quatre courbes selon la prime d’illiquiditéconsidérée (100%, 75%, 50%, 0%). C’est-à-dire plus on suppose une prime d’illiqui-dité élevée plus on considère les flux certains. On peut alors actualiser à un taux élevé,ce qui amène à constituer une provision plus faible. Nous considérons les flux du por-tefeuille non-vie plutôt incertains. Ainsi nous utilisons la courbe de taux sans risquequi inclue une prime d’illiquidité de 50% d’après les spécifications du QIS 5.

Résultats

Sur la branche RCA, la baisse du montant de la provision due à l’actualisation re-présente environ 20% du montant en considérant un tail factor (obtenu par extrapolationsur base de la courbe puissance inverse).

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 49

Troisième partie

Le risque de provisionnement

dans le cadre du SCR

50

Chapitre 6

SCR : Capital de Solvabilité

Requis

6.1 Présentation

Dans la directive [14], à l’alinéa 64, nous trouvons la définition suivante du SCR :

[...]The Solvency Capital Requirement should be determined as the econo-mic capital to be held by insurance and reinsurance undertakings in order toensure that ruin occurs no more often than once in every 200 cases or, alter-natively, that those undertakings will still be in a position, with a probabilityof at least 99,5 %, to meet their obligations to policy holders and beneficiariesover the following 12 months. That economic capital should be calculated onthe basis of the true risk profile of those undertakings, taking account of theimpact of possible risk-mitigation techniques, as well as diversification effects.

Ce capital économique est calculé sur base du profil de risque réel de l’entrepriseet tient compte des effets de diversification. Il doit être constitué de façon à ce que lesentreprises limitent leur probabilité de ruine à 0,5% sur un an. Le SCR doit être calculéau moins une fois par an et doit être suivi, afin de le modifier à chaque fois que le profilde risque de la compagnie change.

Le SCR correspond à une vision à court terme. La réforme Solvabilité II modifiel’horizon d’étude du risque classique de long terme à un horizon d’un an.

Selon l’article 101 de la directive [14], le calcul du capital de solvabilité requis doitcouvrir, au minimum, les risques suivants :

– risque de souscription non-vie ;– risque de souscription vie ;– risque de souscription santé ;– risque de marché ;– risque de crédit ;– risque opérationnel.

51

CHAPITRE 6. SCR : CAPITAL DE SOLVABILITÉ REQUIS

Parcourons ces différents risques dans le cas d’une compagnie d’assurance non-vie.

Risque de souscription non-vie

Le risque de souscription non-vie est défini par le risque de pertes due à des chan-gements défavorables de la valeur des engagements. Ceux-ci peuvent provenir de fluc-tuations dans le temps de la fréquence et de la sévérité des événements assurés. Leshypothèses de tarification et de provisionnement seront alors inadéquates. Ce risquetient compte de l’incertitude concernant les résultats de la souscription de contrats dansle cadre de ses engagements actuels.

Le risque de souscription se divise en deux éléments, à savoir le risque de provi-sionnement et le risque de prime.

Risque de prime Le risque de prime correspond à la situation où les dépenses et levolume de pertes pour les sinistres présents et futurs sont supérieurs aux primes reçues.Il s’agit d’un risque de sous-tarification, c’est-à-dire que les primes demandées ne suf-fisent pas à constituer des provisions suffisantes pour couvrir les sinistres déclarés. Lesprovisions pour primes non acquises sont alors insuffisantes.

Risque de provisionnement Le risque de provisionnement découle du fait de ne pasdisposer de provisions suffisantes pour respecter les obligations envers les assurés. Cerisque provient de deux sources : d’une part, le niveau absolu des provisions pour si-nistres peut être mal estimé, d’autre part, en raison de la nature aléatoire des paiementsfuturs, les sinistres réels varieront autour de leur moyenne statistique. Nous reviendronsplus en détail sur ce risque dans le chapitre 7.

Risque catastrophe Le risque de catastrophe s’ajoute au risque de souscription pourcompléter le risque lié à l’activité non-vie. Il résulte du risque de pertes ou de change-ments défavorables dus à des événements extrêmes ou exceptionnels qui ne sont passuffisamment pris en compte dans le calcul de la charge de capital pour les risquesde primes et de provisionnement. En assurance non-vie, la modélisation du risque decatastrophe est basée sur une approche par scénario.

Risque de résiliation Le risque de résiliation provient de l’utilisation d’hypothèsesinadéquates concernant le taux de résiliation. Celles-ci peuvent amener à de mauvaisesestimations de la provision pour primes non acquises. L’évaluation de ce risque estseulement nécessaire s’il est possible au souscripteur du contrat d’y mettre un termeavant la date prévue. Ce risque a été ajouté aux risques non-vie dans les spécificationsdu QIS 5.

Risque marché

Le risque de marché est le risque lié au niveau ou à la volatilité de la valeur demarché des instruments financiers ayant un impact sur la valeur des actifs et des passifsde la compagnie.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 52

CHAPITRE 6. SCR : CAPITAL DE SOLVABILITÉ REQUIS

Risque de crédit

Le risque de crédit provient du risque de défaut de contrepartie. C’est à dire despertes possibles qui pourraient provenir du défaut d’une contrepartie ou de la détério-ration de la qualité de crédit des contreparties et débiteurs de la compagnie.

Risque opérationnel

Le risque opérationnel est le risque résultant de procédures internes, de membresdu personnel et/ou de systèmes inadéquats ou défaillants. Le risque opérationnel in-clut également les risques juridiques. Ce module de risque a été conçu pour traiter lesrisques opérationnels qui n’ont pas été explicitement couverts dans les autres modules.

Nous nous intéressons ici au risque de provisionnement, qui fait partie du risque desouscription non-vie. Ce risque est le plus important pour une compagnie d’assurancenon-vie.

6.2 Formule standard - Modèle interne

Le SCR pourra être obtenu par une formule standard applicable à toutes les compa-gnies ou par l’élaboration d’un modèle interne à la compagnie. La formule standard estconstruite selon une approche modulaire des risques. Le modèle interne (ou holistique)est plus adapté aux risques réels auxquels est soumise la compagnie.

Quelle que soit la méthode retenue par la compagnie, l’objectif est de déterminer leniveau de capital dont elle doit disposer aujourd’hui pour ne pas être en ruine dans unan dans 199 cas sur 200, soit un niveau de capital qui sera dépassé dans au plus 0,5%des cas.

6.2.1 Formule standard

L’objectif de la formule standard du SCR est de fournir une méthode de calculsimple tout en quantifiant raisonnablement les risques selon le profil de risque de laplupart des compagnies d’assurance. Cette formule s’opère par modules de risques, leprincipe est d’associer à chacun des risques supporté par l’assureur une exigence decapital. En effet, d’après la formule standard, le SCR est égal à la somme des besoinsen capital pour chacun des risques (à laquelle sont apportés certains ajustements). Leschéma des risques à prendre en compte est présenté en annexe B.

Concernant le risque de provisionnement, les QIS proposent d’autres méthodes sim-plificatrices dont un calibrage de la volatilité à un an déterminé à partir d’études sur lemarché.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 53

CHAPITRE 6. SCR : CAPITAL DE SOLVABILITÉ REQUIS

6.2.2 Modèle interne

L’objectif du développement d’un modèle interne est de calculer l’exigence enfonds propres le plus fidèlement suivant les risques auxquels la compagnie est soumiseafin d’éviter une immobilisation de capital trop importante par rapport à ses risquesréels.

En ce qui concerne le passif, le modèle doit reproduire de manière fiable les prin-cipales caractéristiques de l’activité d’assurance de la compagnie ainsi que ses expo-sitions aux risques. Ceci suppose que le modèle intègre toutes les informations né-cessaires pour la projection des affaires souscrites, des primes, des frais, des primescédées, des provisions techniques etc.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 54

Chapitre 7

Définition du risque de

provisionnement à un an

Usuellement le risque d’évaluation des provisions étudié est le risque à l’ultime.Celui-ci est défini par la différence entre l’estimation de la charge finale faite aujour-d’hui et la valeur réelle à l’ultime de cette charge finale. C’est ce risque que nous avonsquantifié dans le modèle de Mack et par la méthode du bootstrap dans le chapitre 4.

Dans le cadre du SCR défini par Solvabilité II, nous cherchons à quantifier la volati-lité de l’estimation sur un an : De combien peut varier l’estimation qui sera faite dansun an de la charge finale, de celle qui en est faite aujourd’hui ?

Le risque de provisionnement dont il faut tenir compte dans le cadre du SCR provientdu risque de constater a posteriori une insuffisance de provisions. Cela peut provenirde la variation due au processus stochastique, de la variation due à d’éventuelles mau-vaises estimations (ces deux notions ont été définies dans la section 4.1) ou encore àd’événements de stress dus à des paiements imprévus.

Dans le cadre du SCR, la mesure de l’incertitude est effectuée avec la VaR à 99,5%sur un horizon d’un an. Concentrons-nous ici sur la quantification de la variabilité del’estimation faite de la charge finale lors de deux années calendaires successives.

7.1 Pourquoi changer d’horizon ?

Si la compagnie n’est pas solvable sur un horizon d’un an, a fortiori elle ne le serapas sur un horizon à plus long terme. Par ailleurs, de nombreuses décisions (d’aug-mentation de tarif par exemple), actions, projets (mise en place de nouveaux produits)sont établis sur un horizon de court et moyen terme (exigences des actionnaires à courtterme). La compagnie se doit également de maintenir sa performance à court termedu fait de l’impact qu’elle a sur sa réputation et sur sa solidité financière. Cet horizontemporel est donc essentiel à l’étude de la solvabilité d’une compagnie.

Toutefois, le positionnement sur un horizon d’un an a reçu de nombreuses critiquesde la part des professionnels, eu égard aux engagements longs termes d’un assureur.

55

CHAPITRE 7. DÉFINITION DU RISQUE DE PROVISIONNEMENT À UN AN

7.2 Définition formelle de ce risque

A la date t = n, nous sommes en possession de l’information suivante :

Dn ={

Ci, j i+ j ≤ n et i, j ≤ n}

Un an plus tard, à l’année calendaire suivante, c’est-à-dire à la date t = n+1, nousdisposons d’un peu plus d’observations :

Dn+1 ={

Ci, j i+ j ≤ n+1 et i, j ≤ n}= Dn ∪{Ci,n−i+1 i, j ≤ n}

Cela signifie que l’année suivante nous avons l’information de l’année t = n à la-quelle s’ajoute l’information que nous accumulons au cours de l’année calendaire[n,n+1] c’est-à-dire les paiements situés sur la diagonale suivante du triangle, à sa-voir Zi,n−i+1 ∀i = 1 à n.

FIGURE 7.1 – Schéma représentant l’information disponible deux années calendairessuccessives, source [22]

Dans ce mémoire nous considérons uniquement I = J = n.

Nous noterons Rni la prédiction faite de Ri avec l’information Dn accumulée à la

date t = n. Dans une vision à l’ultime, on cherche à quantifier la variabilité de cetteprédiction par rapport à sa valeur réelle à l’ultime. Dans une vue à un an, on s’intéresseà la variabilité de ce prédicteur par rapport à celui de l’année suivante, noté Rn+1

i ,auquel on ajoute les paiements effectués pendant l’année Zi,n−i+1.

On définit la variable aléatoire de la variation entre les deux prédictions successivesRn

i − (Rn+1i + Zi,n−i+1) . Dans la littérature, cette variable aléatoire est couramment

appelée "Claim Development Result observable" (CDR) pour l’année calendaire[n,n+ 1] (cf. figure 7.2). Le risque de provisionnement à un an est donc défini par lavariance de cette variable aléatoire CDR.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 56

CHAPITRE 7. DÉFINITION DU RISQUE DE PROVISIONNEMENT À UN AN

FIGURE 7.2 – Principe du CDR. Source : présentation Merz et Wuthrich

On prédit en général, à la date n, le CDR observable à la date n+ 1, pour l’annéecomptable [n,n+ 1], noté CDRi(n+ 1), par 0. En effet, les provisions sont estiméesde façon best estimate à chaque date. Donc si l’on suppose les estimations du montantdes provisions sans biais, on a : E(CDRi(n+ 1)|Dn) = 0. On cherche ici à étudier lafluctuation possible du CDR observable autour de 0. D’après la définition établie dansla section 4.1, cette possible fluctuation se mesure par :

msepCDRi(n+1)|Dn(0) = E

[(CDRi(n+1)−0)2|Dn

]

= E

[(Cn

i,n −Cn+1i,n )2|Dn

]

Donc le risque à un an est la variance de l’estimation de la variable aléatoire CDR.Il nous faudra donc un estimateur de cette variance.

7.3 Boni - mali sur années de survenances antérieures

A la date n+ 1 nous pourrons calculer le CDR(n+ 1) observable CDR(n+ 1). Cemontant correspond aux boni-mali (selon le signe) figurant dans le compte de résultatsde la compagnie. Il a donc un impact direct sur le résultat de l’année n + 1. Il estalors essentiel de pouvoir estimer (à la date n) la déviation possible autour de 0 duCDR(n+1) qui figurera au compte de résultat de la clôture en n+1.

Les boni-mali sont définis par le gain (ou la perte) lié au sur-provisionnement (res-pectivement sous-provisionnement) lors du passage d’une année calendaire à l’annéesuivante.

On parle de :– boni si pour l’année de survenance i : E(Cn

i,n)> E(Cn+1i,n )

et donc CDRi(n+1)> 0– et par conséquent de mali si : E(Cn

i,n)< E(Cn+1i,n ) et donc CDRi(n+1)< 0

Si l’estimation des charges finales est au plus juste, la compagnie a autant de chancesde faire un boni qu’un mali. L’espérance de la différence entre les deux estimations suc-cessives de la charge finale est nulle. Mais de combien cette espérance peut-elle s’écar-ter de zéro ? On cherche donc à connaître la volatilité de l’estimation de la réalisationdes CDR(n+1) autour de 0. Cette approche est une vue à court terme en accord avec

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 57

CHAPITRE 7. DÉFINITION DU RISQUE DE PROVISIONNEMENT À UN AN

l’optique de Solvabilité II, c’est-à-dire un environnement de risques (d’événements im-prévus) à un an.

7.4 Interprétation économique

Les CDR correspondent au résultat économique d’un portefeuille en run-off. Celasignifie que l’on ne considère que les engagements aujourd’hui en portefeuille (on nesuppose aucune nouvelle souscription). En effet on ne s’intéresse pas aux années desurvenances futures dans l’optique du risque de provisionnement. On travaille à partird’un nombre d’années de survenance passées fixes.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 58

Chapitre 8

Claims Developement Result

selon Merz & Wüthrich

L’article [22] publié en juin 2008 par Merz & Wüthrich (M&W) propose une mé-thode pour quantifier le risque de provisionnement. Celle-ci est basée sur la méthodede Mack, qu’ils ont adaptée pour évaluer le risque à un an. Ils supposent donc que leshypothèses sur lesquelles repose le modèle de Mack sont vérifiées (cf. 4.4).

Dans ce chapitre nous reprenons les principaux estimateurs que M&W proposentpour estimer la volatilité recherchée. Dans leur article, ils traitent le cas plus général oùle triangle ne fournit pas le même nombre de données en années de survenance qu’enannées de développement. Ici nous nous limiterons au cas où le nombre d’années dedéveloppement est égal au nombre d’années de survenance (ce qui est le cas pour lestriangles des différentes branches d’AXA Luxembourg). Nous notons n la dernièreannée de survenance du triangle.

8.1 Claims development result

Tout d’abord définissons le "claims development result" (CDR) réel pour l’annéede survenance i pour l’année calendaire [n,n+1] comme suit :

CDRi(n+1) = E[Rni |Dn]− (Zi,n−i+1 +E[Rn+1

i |Dn+1])

où Zi,n−i+1 sont les paiements effectués au cours de l’année [n,n+1] pour les sinistressurvenus lors de l’année i et tels que Zi,n−i+1 =Ci,n−i+1 −Ci,n−i ∀i = 1 à n.

Puisque l’on a :

E[Rni |Dn] = E[Ci,n −Ci,n−i|Dn]

= E[Ci,n|Dn]−Ci,n−i

E[Rn+1i |Dn+1] = E[Ci,n −Ci,n−i+1|Dn+1]

= E[Ci,n|Dn+1]−Ci,n−i+1

59

CHAPITRE 8. CLAIMS DEVELOPEMENT RESULT SELON MERZ & WÜTHRICH

On en déduit que :

CDRi(n+1) = E[Ci,n|Dn]−E[Ci,n|Dn+1]

Avec,

E[Ci,n|Dn] = Ci,n−i

n−1

∏j=n−i

f j

E[Ci,n|Dn+1] = Ci,n−i+1

n−1

∏j=n−i+1

f j

Les facteurs de développement f j ne sont bien évidement pas connus. On les estimeselon la méthode de Chain Ladder, avec l’information disponible à chaque date. A ladate n on estime :

f nj =

∑n− j−1i=0 Ci, j+1

Snj

avec Snj =

n− j−1

∑i=0

Ci, j

Snj représente la somme des paiements cumulés par année de survenance strictement

antérieure à l’année calendaire n. L’année calendaire suivante, on utilisera la nouvelleinformation disponible au courant de l’année [n,n + 1] à savoir Cn− j, j+1. Ainsi lesfacteurs de développement de Chain Ladder sont estimés par :

f n+1j =

∑n− ji=0 Ci, j+1

Sn+1j

avec Sn+1j =

n− j

∑i=0

Ci, j et Sn+1j = Sn

j +Cn− j, j

On estime alors comme suit le CDR observable à la date n+ 1 pour l’année desurvenance i :

CDRi(n+1) = Rni −(Zi,n−i+1 + Rn+1

i

)

= Cni,n −Cn+1

i,n

Si l’on connaissait les facteurs de développement réels de Chain Ladder f j on aurait(d’après les propriétés des espérances conditionnelles) :

E[CDRi(n+1)|Dn] = 0

L’estimation faite de la charge finale serait la meilleure possible, on ne se serait pastrompé d’une année à l’autre quant à l’estimation faite des facteurs de développement.On n’aurait donc pas à revoir notre estimation. Seule l’erreur due au processus seraitprésente. L’incertitude de cette prédiction serait mesurée (d’après la définition établieà la partie 4.1) par :

msepCDRi(n+1)|Dn(0) =Var(CDRi(n+1)|Dn) = E[Ci,n|Dn]2 (σn−i)

2/( fn−i)2

Ci,n−i

Mais les facteurs de développement de Chain Ladder sont estimés et ne sont pasconnus, il nous faut donc en tenir compte.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 60

CHAPITRE 8. CLAIMS DEVELOPEMENT RESULT SELON MERZ & WÜTHRICH

8.2 Vue prospective versus vue rétrospective

M&W proposent deux visions :

– Vue rétrospective : cette vision cherche à quantifier l’incertitude autour de ladistance entre le CDR réel et le CDR observable à l’année calendaire suivanteCDRi(n+ 1), du fait qu’on prédit le CDR réel par le CDR observable. Ce n’estpas l’approche que nous cherchons à étudier ici, mais nous en aurons besoin parla suite.

msepCDRi(n+1)|Dn(CDRi(n+1)) = E

[(CDRi(n+1)−CDRi(n+1)

)2∣∣∣∣Dn

]

– Vue prospective : on cherche ici à mesurer l’incertitude autour de 0 de notreprédiction des CDR observables à la fin de l’année calendaire n+1, pour l’année[n,n+1], du fait qu’on prédit (à la date n) les CDR observables (à la daten+1) par 0. C’est l’approche risque de provisionnement. Le SCR doit prendre encompte un capital du fait d’une possible déviation défavorable des CDR autourde 0.

msepCDRi(n+1)|Dn(0) = E

[(CDRi(n+1)−0

)2∣∣∣∣Dn

]

8.3 Estimateurs

Les valeurs prises par ces variables sont inconnues à la date n. M&W, dans leurarticle, en donnent des estimateurs.

L’estimateur de la variance du CDR réel est donnée par :

Var(CDRi(n+1)|Dn) = (Cni,n)

2 · Ψni avec Ψn

i =σ2

n−i/( f nn−i)

2

Ci,n−i

Et ils donnent des estimateurs des deux msep définis précédemment :

msepCDRi(n+1)|Dn(0) = (Cn

i,n)2 ·(Γn

i,n + ∆ni,n

)

msepCDRi(n+1)|Dn

(CDRi(n+1)

)= (Cn

i,n)2 ·(Φn

i,n + ∆ni,n

)

Avec

Γni,n = Φn

i,n + Ψni

Φni,n =

n−1

∑j=n−i+1

(Cn− j, j

Sn+1j

)2

·σ2

j/( f nj )

2

Cn− j, j

∆ni,n =

σ2n−i/ f 2

n−i

Snn−i

+n−1

∑j=n−i+1

(Cn− j, j

Sn+1j

)2

·σ2

j/( f nj )

2

Snj

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 61

CHAPITRE 8. CLAIMS DEVELOPEMENT RESULT SELON MERZ & WÜTHRICH

On voit alors immédiatement que l’on peut écrire :

msepCDRi(n+1)|Dn(0) = msepCDRi(n+1)|Dn

(CDRi(n+1)

)

︸ ︷︷ ︸erreur d’estimation

+Var (CDRi(n+1)|Dn)︸ ︷︷ ︸erreur de processus

Après simplifications, on peut écrire :

msepCDRi(n+1)|Dn(0)=

(Cn

i,n

)2

[σ2

n−i/( f nn−i)

2

Ci,n−i+

σ2n−i/( f n

n−i)2

Snn−i

+n−1

∑j=n−i+1

(Cn− j, j

Sn+1j

σ2j/( f n

j )2

Snj

]

Notons que (Cni,n)

2 ·∆ni,n correspond à l’erreur d’estimation de l’année de survenance

i et (Cni,n)

2 · Ψni à l’erreur de processus.

En ce qui concerne les estimateurs des msep pour les années de survenance agré-gées :

msep∑ni CDRi(n+1)|Dn

(n

∑i

CDRi(n+1)

)=

n

∑i=1

msepCDRi(n+1)|Dn

(CDRi(n+1)

)

+ 2 ∑k>i>0

Cni,nCn

k,n

(Φn

i,n + Λni,n

)

Avec

Λni,n =

Ci,n−i

Sn+1n−i

σ2n−i/( f n

n−i)2

Snn−i

+n−1

∑j=n−i+1

(Cn− j, j

Sn+1j

)2σ2

j/( f nj )

2

Snj

Et,

msep∑n

i CDRi(n+1)|Dn(0) =

n

∑i=1

msepCDRi(n+1)|Dn(0)

+ 2 ∑k>i>0

Cni,nCn

k,n

(ϒn

i,n + Λni,n

)

Avec

ϒni,n = Φn

i,n +σ2

n−i/( f nn−i)

2

Sn+1n−i

Il en découle une formule de la même forme que celle que l’on avait donnée pourles années de survenance vues individuellement,

msep∑n

i CDRi(n+1)|Dn(0) = msep∑n

i CDRi(n+1)|Dn

(n

∑i

CDRi(n+1)

)

+n

∑i=1

Var (CDRi(n+1)|Dn)

+ 2 ∑k>i>0

Cni,nCn

k,n

(ϒn

i,n − Φni,n

)

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 62

CHAPITRE 8. CLAIMS DEVELOPEMENT RESULT SELON MERZ & WÜTHRICH

8.4 Comparaison avec la formule de Mack

Pour finir, comparons les formules proposées par Mack pour quantifier l’estima-tion de l’incertitude qui réside dans l’estimation des provisions à l’ultime à celle quiest proposée par M&W [22] pour l’évaluation de l’incertitude des CDR. Rappelonsbrièvement les deux formules afin de les avoir "sous les yeux" :

– M&W ont proposé :

msepCDRi(n+1)|Dn(0)=

(Cn

i,n

)2

[σ2

n−i/( f nn−i)

2

Ci,n−i+

σ2n−i/( f n

n−i)2

Snn−i

+n−1

∑j=n−i+1

(Cn− j, j

Sn+1j

σ2j/( f n

j )2

Snj

]

– Mack quant à lui avait donné :

msep(Ri) =mse(Ci,n) = C2

i,n ·n−1

∑j=n−i

σ2j

f 2j

·(

1

Ci, j+

1S j

)

Dans la formule introduite par M&W seul le premier terme de la somme de l’er-reur de processus de Mack est maintenue. Concernant l’erreur d’estimation, elle estégalement maintenue pour la diagonale suivante (n − i), mais toutes les diagonalesultérieures (c’est-à-dire pour ( j ≥ n− i+1)) sont écrasées par le facteur :

Cn− j, j

Sn+1j

≤ 1

Cela est en accord avec le "Finale Advice 2" du Ceiops [5] dans la section "Calibra-tion by Member State Portugal for reserve risk" The question lies on the interpretationof the one-year time horizon : this should be understood to reflect the period in whichthe ’shock’ event is assumed to occur, but the effects of such event may indeed extendto the full term of the obligations [...] The proposal is to consider a measure of stan-dard deviation for [the undiscounted reserve] that reflects both proces and estimationerror in the first diagonal of the run-off matrix and only only estimation error in all theremaining diagonals

FIGURE 8.1 – Risque à 1 an : Erreur de processus - erreur d’estimation des paramètres,source [5]

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 63

CHAPITRE 8. CLAIMS DEVELOPEMENT RESULT SELON MERZ & WÜTHRICH

8.5 Application

Nous appliquons la méthode aux triangles d’AXA Luxembourg. On exprime lavolatilité à un an des provisions en pourcentage du montant des provisions :

√msepCDR|Dn

(0)

Rn

où Rn correspond à la provision best estimate non actualisée.

TABLE 8.1 – Comparaison de la volatilité à l’ultime selon Mack à celle à un an intro-duite par Merz & Wüthrich (en % du BE non actualisé), sans ajout d’un "tail factor"

volatilité volatilité part de la volatilitéà un an à l’ultime à un an dans la

Branches M&W Mack volatilité à l’ultime

RCA 25,14% 34,91% 72%Dommage Auto 17,57% 18,48% 95%

Dommage Non Auto 16,87% 18,91 % 89%RCG 12,41% 17,65% 70%

Divers 19,49% 22,59% 86%

On observe dans le tableau 8.1 que la volatilité à un an des provisions représenteune part très importante de la volatilité ultime dans le cas des branches courtes, tandisque cette part est plus faible sur les deux branches longues (RC Auto et RC Générale)même sans inclure de "tail factor".

Cela s’explique du fait que sur les branches courtes la quasi-totalité des paiementsont lieu les deux premières années. La volatilité du triangle est donc importante cesdeux années de développement-là et très faible les suivantes. Seules les deux années desurvenance les plus récentes auront des volatilités légèrement plus faibles à un an qu’àl’ultime, les autres étant très faibles dans les deux cas.

Sur les branches longues on retrouve une forte volatilité la première année de déve-loppement, mais du fait du déroulement lent des paiements on constatera une volatilitédans le triangle tout le long (cf. graphique 8.2). Ce qui explique la forte baisse de lavolatilité des provisions en ne considérant que celle à un an et non plus à l’ultime.

FIGURE 8.2 – Comparaison des volatilités du triangle par année de développement σ2j

d’une branche courte Dommage Auto et d’une branche longue RCA

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 64

CHAPITRE 8. CLAIMS DEVELOPEMENT RESULT SELON MERZ & WÜTHRICH

Commentaires sur la branche Dommage Auto : La forte volatilité du triangleconstatée la première année de développement est due à l’année de survenance la plusancienne. En choisissant de s’en priver, on obtient une volatilité à un an de 10% (contre17,57%). Cela s’explique essentiellement par la baisse de la volatilité du triangle lapremière année de développement σ2

0, comme nous pouvons le voir sur le graphique8.3. Cette même constatation se fait évidemment également sur le résultat de Mack(10,90% contre 18,48%). Il n’est donc pas toujours optimal de considérer le maximumd’informations disponibles si nos données ne sont pas stables.

FIGURE 8.3 – Graphique représentant les msepi et σ2n−i obtenus sur le triangle de 9 ans

et 8 ans

D’autre part le graphique 8.4 illustre bien le peu de distinction entre les volatilitéspar année de survenance msepi obtenues par la méthode de M&W et Mack. Regardonsalors plus particulièrement le cas d’une branche longue : RC Auto.

FIGURE 8.4 – Graphique représentant les msepi et σ2n−i obtenus sur le triangle de 9 ans

de la branche Dommage Auto par M&W et Mack

Commentaires sur la branche RC Auto : Grâce aux améliorations informatiquesnous permettant d’obtenir des triangles sur 28 ans, on peut supposer ne plus être soumis

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 65

CHAPITRE 8. CLAIMS DEVELOPEMENT RESULT SELON MERZ & WÜTHRICH

à la problématique de "tail factor". Les résultats obtenus sur ces triangles pour les deuxbranches longues de la compagnie sont présentés dans le tableau 8.2.

TABLE 8.2 – Comparaison de la volatilité à l’ultime selon Mack à celle à un an intro-duite par Merz & Wüthrich sur les deux branches longues (RCA et RCG) en utilisantles triangles de 28 ans (en % du BE non actualisé)

volatilité à un an volatilité à l’ultime part de la volatilité à un anBranches M&W Mack dans la volatilité à l’ultime

RCA 5,48% 11,25% 49%RCG 9,09% 14,67% 62%

On constate une volatilité à un an bien plus faible que celle obtenue sans considérerde "tail factor". Une part de la baisse est bien évidemment expliquée par la prise encompte de ce "tail factor" dans les données sur 28 ans. En regardant en détail la formulede la variance à un an par année de survenance (présentée dans la section 8.3) composéede trois termes, on observe que cela s’explique en très grande partie par la valeur de S j,figurant dans les dénominateurs, qui est bien plus élevée sur le triangle de 30 ans quede 9 ans. Cette constatation est identique sur le modèle de Mack. Mais dans le modèlede M&W la valeur de S j impacte aussi le facteur Cn− j, j/Sn+1

j qui a pour but de réduirel’effet des diagonales futures par rapport à la formule de Mack. Sur un "petit" trianglece facteur n’est que légèrement inférieur à un. Sur les 9 années de survenance les plusrécentes ce facteur d’écrasement est de 6 à 55 fois plus faible sur le triangle de 28 ansque sur celui de 9 ans. Ainsi le 3ème terme de la formule en sera d’autant plus impacté.

La volatilité à un an d’une année de survenance i est essentiellement liée à la vola-tilité du triangle l’année de développement n− i, tandis que dans le modèle de Mackce sont toutes les volatilités du triangle σ j pour j ≥ n− i qui impactent la valeur de lavolatilité l’année de survenance i. Le graphique 8.5 en est une parfaite illustration.

FIGURE 8.5 – Graphique représentant les msepi obtenues par la méthode de M&W,Mack et σ2

n−i obtenus sur la branche RCA

On peut également remarquer un impact plus faible des σn−i pour les années de

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 66

CHAPITRE 8. CLAIMS DEVELOPEMENT RESULT SELON MERZ & WÜTHRICH

survenance i récentes du fait qu’ils sont divisés par le facteur de développement fn−i.

Conclusion : Ces résultats mettent en évidence les résultats évoqués par la publica-tion de AISAM-ACME [1], notamment que l’étude de la variabilité à horizon un anplutôt qu’à l’ultime prend son importance dans le cas de branches à déroulement long(RC Auto et RCG). En effet, l’impact sur le niveau du SCR peut être très importantpour ces branches. Tandis que dans le cas des branches à déroulement court, le risqueà un an sera très proche du risque à l’ultime et il n’y aura alors que peu d’influence surle montant du SCR à étudier le risque à un an plutôt qu’à l’ultime.

8.6 Remarques et critiques

Les formules pour estimer la volatilité des CDR de M&W reposent sur la méthodede Mack. Il faut donc que les triangles de paiements satisfassent les hypothèses de cetteméthode.

La méthode proposée par M&W fournit une évaluation analytique du risque à unan (de l’écart-type des CDR) mais sans donner une distribution des CDR et donc deVaR à 99,5% comme le demande la directive Solvabilité II.

Par ailleurs, leurs approximations reposent sur :

n

∏j=1

(1+a j)−1 ≈n

∑j=1

a j où 1 >> a j

où dans les applications des formules qu’ils proposent : 1 >>σ2

n−i/ f 2n−i

Ci,n−i. Nous avons

alors vérifié la validation de cette hypothèse sur les triangles de paiements d’AXALuxembourg.

Remarque : Les spécifications du QIS 5 publiées en juillet 2010 ont désormaiségalement intégré cette méthode.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 67

Chapitre 9

Simulation de la diagonale de

paiements

Le risque de provisionnement peut se définir, comme nous l’avons déjà vu, parle risque que la variable aléatoire CDR prenne des valeurs négatives, c’est-à-dire defaire des mali. Nous rappelons que la variable aléatoire CDR pour l’année calendaire[n,n+1] se définit par CDR(n+1) = Rn − (Z[n,n+1]+Rn+1) où Z[n,n+1] correspond auxpaiements effectués au cours de l’année calendaire [n,n+1].

La méthode que nous avons présentée dans la section précédente (méthode proposéepar Merz & Wüthrich) nous fournit uniquement une estimation analytique du risquede provisionnement sous les hypothèses de Mack, sans en donner de distribution empi-rique. Les méthodes de simulation vont alors nous permettre de remédier à cette lacuneet d’obtenir une distribution empirique suivie par les CDR, conditionnellement aux in-formations disponibles en date n.

On cherche ici à simuler une nouvelle diagonale de paiements pour l’année calen-daire [n,n+1]. La somme des termes de la nouvelle diagonale permet d’obtenir le totaldes paiements de l’année calendaire [n,n+1]. Chaque simulation de la diagonale four-nit une nouvelle information, afin d’estimer la provision de fin d’année calendaire n+1et ainsi en déduire une observation des CDR en n+1.

On comparera les résultats obtenus par deux méthodes, à savoir :– simuler une loi normale ou log-normale avec pour paramètres les hypothèses du

modèle de Mack,– un bootstrap modifié pour l’obtention du risque à un an.

Remarque : Nous ne considérons ici ni actualisation, ni ajout d’une marge de risqueaux provisions best estimate.

9.1 Principe

L’évaluation de la distribution empirique des CDR se réalise en quatre étapes :

68

CHAPITRE 9. SIMULATION DE LA DIAGONALE DE PAIEMENTS

1. Provision d’ouverture : Il nous faut tout d’abord déterminer la provision bestestimate d’ouverture de l’année calendaire n, Rn à partir de l’information dispo-nible à la date n (triangle supérieur). A cet effet, nous appliquons une méthodeM que l’on pourra exécuter de manière répétée lors des simulations.

2. Simulation de nouveaux paiements : Cette deuxième étape consiste à générerdes paiements pour la nouvelle diagonale Zi,n−i ∀i = 1 à n. Pour ce faire, noussimulons soit selon une loi donnée avec les paramètres de Mack (cf. point 4.4.1)soit selon la méthode de bootstrap modifiée, conditionnellement aux donnéesobservées dans le triangle supérieur. Cette étape correspond à la "shock period"définie par l’article [1], c’est-à-dire la période où des événements défavorablespeuvent survenir.

3. Provision de clôture : Une fois cette nouvelle diagonale simulée, nous sommesen possession d’une nouvelle information. Nous appliquons alors, pour chaquesimulation, la méthode choisie M en tenant compte de cette nouvelle informa-tion disponible afin d’obtenir la provision de fin d’année n : Rn+1. Cette étapeprojette la "shock period" sur l’"effect period". Celle-ci est définie par l’article[1] comme la durée de run-off des engagements sur laquelle la période de chocpeut avoir un impact pour l’assureur.

FIGURE 9.1 – Illustration de la simulation des paiements de la diagonale de l’annéecalendaire suivante (étapes 2 et 3), source [13]

4. Distribution : Finalement, à partir de N simulations, on obtient N valeurs deCDR, ce qui permet d’en déterminer une distribution empirique, et d’en déduiredes percentiles (VaR, et plus particulièrement à 99,5% celle qui nous intéressedans le cadre de Solvabilité II).

Nous choisissons ici d’appliquer la méthode de Chain Ladder (sans "tail factor")pour M . Toutefois ces méthodes de simulation ont l’avantage de permettre d’utiliserd’autres méthodes de provisions ainsi que d’introduire une extrapolation pour tenircompte d’un "tail factor". Si l’on utilise une méthode basée sur le jugement d’expert, ilfaut savoir le traduire en un algorithme pour le simuler.

Remarque : Concernant les branches courtes nous ajoutons une diagonale Ci,n−i+1

pour i = 1 à n. Mais dans le cas des branches longues il serait plus juste d’ajouter unedonnée C0,n+1 à l’année de survenance la plus ancienne dont la valeur des paiementscumulés à cette date n n’est sûrement pas (selon la taille du triangle) la valeur de la

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 69

CHAPITRE 9. SIMULATION DE LA DIAGONALE DE PAIEMENTS

charge ultime finale pour cette année de survenance. On rappelle ici que, dans l’optiquedu risque de provisionnement, on ne s’intéresse pas aux années de survenances futures.

9.2 Simulation par une loi donnée

Nous faisons ici l’hypothèse que les paiements cumulés suivent une loi, afin desimuler la diagonale du triangle pour l’année calendaire [n,n+ 1] conditionnellementaux données et informations connues à la date n. En assurance non-vie, les paiementscumulés sont généralement modélisés par une distribution normale ou log-normale.

Nous supposons que les paiements cumulés Ci, j+1 suivent une de ces deux lois dontles paramètres sont donnés par les hypothèses (H2) et (H3) du modèle de Mack dans leparagraphe 4.4.1 :

moyenne : f j ·Ci, j

variance : σ2j ·Ci, j

Le passage des paramètres d’une loi normale à ceux d’une loi log-normale est pré-senté en annexe D.

Ci, j+1 ; N ( f j ·Ci, j , σ2j ·Ci, j)

La distribution empirique des CDR s’obtient alors en procédant à une simulationde type Monte Carlo suivant la loi choisie pour les paiements cumulés, et en appliquantles quatre étapes énoncées dans la section précédente 9.1.

9.3 Simulation par une méthode de bootstrap modifiée

à un an

Une seconde méthode consiste à adapter la méthode du bootstrap classique pourl’obtention du risque à un an.

9.3.1 Principe

Boucle sur N simulations :

1. application des étapes de la méthode classique du bootstrap (cf. point 4.5) ;

2. conversion de la diagonale de l’année calendaire [n,n+1] en incréments ;

3. conservation de la diagonale des incréments de l’année calendaire [n,n+1] ob-tenue par la méthode du bootstrap ;

4. concaténation des incréments du triangle observé à la date n et de la diagonaleobtenue à l’étape précédente ;

5. calcul du triangle des paiements cumulés ;

6. calcul des f j sur le triangle obtenu grâce à la nouvelle information disponible etcalcul de Rn+1 +Z[n,n+1], où Z[n,n+1] = ∑n

i=1 Zi,n−i+1 ;

7. calcul des CDR.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 70

CHAPITRE 9. SIMULATION DE LA DIAGONALE DE PAIEMENTS

Fin de boucle.

FIGURE 9.2 – Illustration de la méthode du bootstrap modifiée pour l’obtention durisque à un an

9.3.2 Application

Nous représentons l’impact sur la branche Dommage Auto et RCA du passaged’une distribution empirique des provisions à l’ultime à un an.

FIGURE 9.3 – Distribution empirique du montant des provisions obtenu par la méthodedu bootstrap à un an en comparaison à celle du bootstrap à l’ultime, sur la brancheDommage Auto

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 71

CHAPITRE 9. SIMULATION DE LA DIAGONALE DE PAIEMENTS

FIGURE 9.4 – Distribution empirique du montant des provisions obtenu par la méthodedu bootstrap à un an en comparaison à celle du bootstrap à l’ultime, sur la brancheRCA

Nous constatons graphiquement le résultat déjà évoqué précédemment, à savoir,une volatilité à un an du montant des provisions proche de celle à l’ultime sur labranche courte Dommage Auto. On a un impact visible graphiquement uniquementsur la branche longue RC Auto.

9.4 Critiques et résultats

L’application de ces méthodes à la branche Dommage Auto fournit les résultatsprésentés dans les tableaux 9.1 et 9.2 après 10 000 simulations.

TABLE 9.1 – Résultats des 3 simulations de la diagonale sur la branche Dommage Auto(triangle de 9 années)

Moyenne (CDR) Ecart-type (CDR) VaR99,5%(-CDR)

Bootstrap -0,23 7,95 22,45Loi Normale 0,03 7,75 20,11

Loi Log-Normale 0,02 7,65 19,63

TABLE 9.2 – Résultats des 3 simulations de la diagonale sur la branche Dommage Auto(triangle de 8 années)

Moyenne (CDR) Ecart-type (CDR) VaR99,5%(-CDR)

Bootstrap -0,33 7,75 21,74Loi Normale 0,08 4,93 12,59

Loi Log-Normale 0,07 4,93 12,74

Les méthodes de simulation possèdent l’avantage de nous fournir une distributionde la possible déviation défavorable des CDR et non plus seulement les deux premiersmoments comme proposé par Merz & Wüthrich. Cependant leur méthode a l’avantagede donner un résultat immédiat, sans simulations.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 72

CHAPITRE 9. SIMULATION DE LA DIAGONALE DE PAIEMENTS

Au niveau d’AXA Luxembourg, tant que la méthode d’estimation des provisionsbest estimate restera basée sur un avis d’expert non reproductible par un algorithme,il ne sera pas possible d’évaluer la réelle volatilité des provisions à un an de manièreprospective. On a alors utilisé la méthode de Chain Ladder d’après les conseils dugroupe AXA. Cependant la méthode de Chain Ladder est plus volatile que la méthodeutilisée par AXA. Il serait donc plus approprié de ramener nos volatilités à la provisionfaite par la méthode utilisée par AXA Luxembourg plutôt que par la méthode de ChainLadder.

Volatilité historique

Il nous est tout de même possible d’étudier la volatilité liée au risque de provi-sionnement subi par AXA Luxembourg en travaillant sur les données historiques etdonc de manière rétrospective. Cette méthode nécessite de disposer d’un historiquesuffisamment grand. AXA Luxembourg dispose d’estimations faites trimestriellementdepuis 2007. Ainsi pour une branche de risque, le CEIOPS propose, dans les spécifi-cations du QIS 5 d’estimer le risque de provisionnement sur base de l’historique desestimations faites, de la façon suivante :

Notons k une année calendaire donnée, BEk la provision best estimate qui avait étéfaite à la date k, BEk+1 celle faite à la date k+ 1 et Z[k,k+1] les paiements effectués aucours de l’année calendaire [k,k+ 1]. Attention pour l’année calendaire k+ 1 nous neconsidérons pas la nouvelle année de survenance k à chaque date. Ainsi le CEIOPSdonne :

β =

√1

N −1 ∑k

(BEk+1 +Z[k,k+1]−BEk)2

BEk

où N correspond au nombre d’observations de deux estimations successives faites dela provisions best estimate. En ramenant aux provisions best estimate, nous obtenonsla volatilité de la branche considérée :

σ =β√BEn

où n est la date actuelle

Remarque : Cette méthode pourrait présenter l’avantage de permettre le calcul dela volatilité sur l’agrégation des branches directement, du fait que l’on travaille sur lesdonnées historiques. Ainsi la corrélation historique entre les branches est présente dansles données. Cela nous éviterait d’utiliser des corrélations marché non conformes àcelle présente entre les branches d’AXA Luxembourg. Cependant le CEIOPS demandeun coefficient de variation à un an par branche de risque.

Résultats

TABLE 9.3 – Volatilité historique obtenue sur les branches d’AXA Luxembourg,d’après la méthode 1 proposée par le QIS 5

RCA Dommage Auto Dommage Non Auto RCG Divers

5,10% 44,98% 6,32 % 13,55 % 10,66%

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 73

CHAPITRE 9. SIMULATION DE LA DIAGONALE DE PAIEMENTS

Toutes branches agrégées on obtient 4 %. Les résultats par branche sont présentésdans le tableau 9.3. Notons que le CEIOPS indique qu’il faut disposer d’un historiqued’au moins 5 ans ce qui n’est pas le cas ici.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 74

Chapitre 10

Calcul du SCR lié au risque de

provisionnement

Dans la partie précédente nous avons évalué la volatilité des charges finales prévi-sibles à un an. Regardons maintenant, quel est le montant de fonds propres à immobili-ser dans le cadre du SCR du fait que la compagnie subit ce risque de provisionnement.

10.1 Formule standard proposée par le CEIOPS

La directive [14] fournit la formule standard pour déterminer le SCR lié au risquede souscription, ce qui permet un calcul simple et ne nécessite pas de simulations. LeSCR lié aux deux risques qui composent le risque de souscription (risque de primes etrisque de provisionnement) est noté NLpr. Celui-ci est défini comme suit par la formulestandard :

NLpr = ρ(σ) ·Voù V est une mesure de volume, σ la volatilité et ρ(σ) telle que :

ρ(σ) =exp(N0,995 ·

√ln(σ2 +1))√

σ2 +1−1

où N0,995 est le quantile 99,5% de la distribution de la loi normale centrée réduite.L’expression de ρ(σ) correspond à une loi log-normale de moyenne 1 et d’écart-

type σ. Une démonstration de l’origine de la formule est fournie en annexe E.

Nous considérons ici uniquement le risque de provisionnement. Dans ce cas-là nousavons : V = BElob où BElob est le montant de la provision best estimate d’une brancheet σ est le coefficient de variation des boni-mali, soit la volatilité des charges finalesprévisibles à un an. Les volatilités des boni-mail du marché par branche de risque sontfournies par le CEIOPS lors des QIS.

10.2 Optique modèle interne

Les méthodes de simulations présentées dans les parties précédentes (méthode desimulation de Monte-Carlo selon des lois données, ou par la méthode du bootstrap)

75

CHAPITRE 10. CALCUL DU SCR LIÉ AU RISQUE DE PROVISIONNEMENT

nous donnent des distributions empiriques de la variable CDR. Le SCR à constituerpour le risque de provisionnement est ensuite obtenu de la façon suivante :

SCR = VaR99,5%(−CDR)

et, d’après la propriété d’invariance par translation :

SCR = VaR99,5%(R−CDR)−R

où R−CDR est la variable aléatoire du montant des provisions à un an.

10.3 Résultats et critiques

Nous considérons ici les provisions non actualisées dans l’application de chacunedes méthodes. Nous utilisons la formule standard et introduisons le coefficient de varia-tion donné par la méthode de Merz & Wüthrich, c’est-à-dire

√msepCDR(n+1)(0) pour

obtenir le SCR selon cette méthode d’évaluation du risque à un an. D’autre part, nousavons introduit les volatilités provenant des données de marché fournies par le CEIOPSpour les comparer à celles issues des branches du portefeuille d’AXA Luxembourg.

TABLE 10.1 – SCR obtenus selon le choix de la méthode pour chaque branche

M&WLoi Loi

BootstrapFormule

Normale Log-normale standard

RCA 385 231 239 127 131Dommage Auto 25 20 20 23 13

Dommage Non Auto 58 47 48 60 36RCG 180 139 140 196 158

Divers 632 484 509 478 472

Sur les branches d’AXA Luxembourg, on constate dans la majeure partie des casque lorsque la volatilité est déterminée par Merz & Wüthrich on obtient un SCR supé-rieur aux autres méthodes, y compris les données de marché. Nous faisons référenceau chapitre 8 pour les explications. Par ailleurs, il faudrait s’assurer que les branchesmarché correspondent bien à celles d’AXA Luxembourg, c’est-à-dire que les garantiescomposant les différentes branches sont identiques entre le marché et AXA Luxem-bourg.

Suite à la constatation faite dans le chapitre 8 concernant la forte volatilité introduitedans le triangle avec l’année de survenance la plus ancienne (2001) sur la brancheDommage Auto, regardons l’impact sur le niveau du SCR en ne considérant que lesdonnées du triangle de 8 ans. D’autre part, utilisons les triangles de 28 ans pour lesbranches longues afin de ne plus être soumis à la problématique du "tail factor".

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 76

CHAPITRE 10. CALCUL DU SCR LIÉ AU RISQUE DE PROVISIONNEMENT

TABLE 10.2 – SCR obtenus selon le choix de la méthode pour chaque branche enmodifiant la taille du triangle utilisé

Taille duM&W

Loi Loi Log-Bootstrap

Formuletriangle Normale Normale standard

Dommage Auto 8 ans 16 13 12 22 16RCA 28 ans 184 171 170 817 328RCG 28 ans 110 94 99 119 135

Remarque : Nous n’avons pas considéré d’actualisation des provisions ici. Ce quiest un cas limite de notre modèle. En effet, cela amène à ne pas tenir compte de l’effetd’actualisation sur le déroulement des flux. La méthode de Merz & Wüthrich n’en tientpas compte non plus.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 77

Quatrième partie

La marge de risque liée au

risque de provisionnement

78

Chapitre 11

Présentation de la marge de

risque

11.1 Présentation générale

L’article 77 de la directive [14] : "Calculation of technical provisions" définit lamarge de risque (risk margin) :

The risk margin shall be such as to ensure that the value of the technical provi-sions is equivalent to the amount that insurance and reinsurance undertakingswould be expected to require in order to take over and meet the insurance andreinsurance obligations.

Les provisions techniques doivent représenter la meilleure estimation du prix demarché des engagements du portefeuille supposé en run-off. Cela signifie que l’onne considère pas les nouvelles affaires souscrites. Ainsi les provisions techniques sedécomposent en une provision best estimate à laquelle s’ajoute une marge de risque.

Cette marge de risque est justifiée. En effet, un passif n’arriverait pas à trouver pre-neur au prix du best estimate. Un montant supplémentaire doit être ajouté afin de pou-voir qualifier l’ensemble de "valeur de marché" des engagements. C’est donc une pro-tection des assurés en cas d’insolvabilité de l’assureur puisqu’elle permet à un tiersd’être en mesure de reprendre l’activité. Elle provient du fait que dès aujourd’hui lacompagnie sait qu’elle devra immobiliser du capital les années suivantes pour les en-gagements qu’elle a actuellement en portefeuille et ce jusqu’à leur extinction. La margede risque correspond alors au coût du capital qui est nécessaire pour couvrir les risquesliés à ces engagements.

Dans le cadre d’un portefeuille non-vie, les passifs sont, dans la très grande majo-rité du temps non réplicables (non-hegeables). Mais si les passifs s’échangeaient surun marché liquide, on pourrait déterminer le montant des provisions techniques (etdonc de la marge de risque) à partir des observations du marché. Mais de tels marchésn’existent pas. C’est pourquoi nous devons avoir recours à des méthodes subsidiaires.Dans le cadre de Solvabilité II c’est l’approche coût du capital qui retient la plus grandeattention.

79

CHAPITRE 11. PRÉSENTATION DE LA MARGE DE RISQUE

11.2 Approche coût du capital

La marge de risque doit correspondre au coût d’immobilisation des SCR futurs surtoute la durée de liquidation des engagements actuels. Ainsi dans cette approche coûtdu capital, la compagnie ne détient pas le capital lui-même, mais le coût d’immobilisa-tion de ce capital.

Le taux du coût de l’immobilisation de capital, appelé taux du coût du capital, estfourni par la législation. Il correspond au taux supplémentaire, au-delà du taux sansrisque, qu’une compagnie supporte du fait de l’immobilisation de SCR.

Cette méthode requiert le calcul des SCR pour chaque année future jusqu’à extinc-tion du portefeuille de run-off, ce qui n’est pas aisé à mettre en œuvre. Lors des diffé-rents QIS, le CEIOPS propose des méthodes simplificatrices.

11.3 Quels sont les effets de diversification pris en compte

dans le calcul de la marge de risque ?

D’après la proposition finale du CEIOPS ainsi que les spécifications du QIS 4, lamarge de risque doit être calculée par branche de risque, ce qui amène à ne pas prendreen compte les effets de diversification entre les branches. Le CEA a donné son avisà ce sujet dans les publications [2] et [3], et encourage la Commission Européenne àautoriser la prise en compte de cet effet de diversification. En effet, il indique que dansla grande majorité des cas de transfert de portefeuille, l’intégralité est cédée. Nousconstatons que les spécifications du QIS 5 considèrent cet effet par un calcul global dela marge de risque, suivi d’une ventilation de la marge de risque à chaque branche.

D’autre part, d’après les spécifications du CEIOPS, la marge de risque doit êtreindépendante de l’assureur qui reprendrait le portefeuille. En effet, il est difficile deconnaître l’effet de diversification supplémentaire entre le portefeuille de l’assureur endéfaut et celui du repreneur. Mais ce point reste en discussion [14] :

The assumptions made about the reference undertaking assumed to take overand meet the underlying insurance and reinsurance obligations should beharmonised throughout the Community. In particular, the assumptions madeabout the reference undertaking that determine whether or not, and if so towhat extent, diversification effects should be taken into account in the calcula-tion of the risk margin should be analysed as part of the impact assessment ofimplementing measures and should then be harmonised at Community level.

11.4 La marge de risque liée au risque de provisionne-

ment

Comme nous l’avons vu, la variable CDR(n) représente le montant par lequelon doit ajuster le montant de la charge finale prévisible à la date n afin d’obtenir lameilleure évaluation à chaque année calendaire [n,n + 1] (avant actualisation). Unemarge de risque est alors à constituer pour le risque de provisionnement au-delà d’unan.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 80

CHAPITRE 11. PRÉSENTATION DE LA MARGE DE RISQUE

Les CDR peuvent aussi être vus comme le résultat économique d’une compagnieen run-off. On peut alors déterminer la valeur de marché des engagements de ce por-tefeuille c’est-à-dire la valeur de marché du risque de provisionnement. Pour cela ilnous faut déterminer la marge de risque liée au risque de provisionnement à ajouteraux provisions best estimate.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 81

Chapitre 12

Méthodes de calcul de la marge

de risque liée au risque de

provisionnement

Nous cherchons ici à déterminer le montant de la marge de risque à constituer, liéeau risque de provisionnement.

L’approche coût du capital a été retenue par la Commission Européenne pour définirla marge de risque. La marge de risque à constituer liée au risque de provisionnementcorrespond alors à la valeur actuelle du coût d’immobilisation des SCR futurs que l’onaura à immobiliser pour ce risque.

Les étapes nécessaires à son calcul selon cette méthodologie sont les suivantes :

1. Déterminer le SCR en date actuelle n et pour toutes les dates ultérieures, jusqu’àextinction des engagements ;

2. Appliquer le taux du coût du capital, fixé à 6% dans la directive, à tous les SCRdéfinis à l’étape 1. Le but est de déterminer le coût d’immobilisation de ces SCRfuturs ;

3. Actualiser les montants obtenus à l’étape 2 par la structure par terme des tauxsans risque de la date d’évaluation ;

4. Additionner les valeurs actualisées pour obtenir la marge de risque de la brancheconsidérée.

Pour traiter le problème de la projection des SCR futurs (liés aux engagements au-jourd’hui en portefeuille) les QIS proposent des méthodes simplificatrices. Nous enutiliserons deux pour la détermination de notre marge de risque liée au risque de pro-visionnement.

82

CHAPITRE 12. MÉTHODES DE CALCUL DE LA MARGE DE RISQUE LIÉE AU RISQUE DEPROVISIONNEMENT

FIGURE 12.1 – Illustration de la méthode coût du capital pour la détermination de lamarge de risque (MVM)

12.1 Simplification par utilisation d’une proportionna-

lité avec le best estimate

Une méthode de calcul avait déjà été proposée dans le cadre du Test Suisse deSolvabilité. Celle-ci peut être reprise dans celui de la directive Solvabilité II. Cettesimplification suppose que les SCR futurs sont proportionnels au best estimate desprovisions, soit :

SCRn+k

Rn+k=

SCRn+k−1

Rn+k−1

où k correspond à la kème future année comptable et n à l’année comptable en coursdonc Rn est le best estimate déterminé aujourd’hui. Ainsi de proche en proche on a :

SCRn+k = SCRn ·Rn+k

Rn

Par simplification nous considérons uniquement le best estimate et non les provi-sions techniques qui incluent la marge de risque. Le QIS 5 précise que pour éviter toutecircularité dans le calcul de la marge de risque, les provisions techniques best estimatesont hors marge de risque. En effet, la marge de risque est faible proportionnellementaux provisions techniques.

Finalement,

MV M = CoC · ∑k≥0

SCRn+k · vkk

= CoC · SCRn

Rn· ∑

k≥0

Rn+k · vkk

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 83

CHAPITRE 12. MÉTHODES DE CALCUL DE LA MARGE DE RISQUE LIÉE AU RISQUE DEPROVISIONNEMENT

Avec

vk =1

1+ r(0,k)

où r(0,k) est le taux d’actualisation sans risque de maturité k fourni par la structure parterme des taux d’intérêt sans risque et CoC le taux du coût du capital. Le nombre dediagonales T à prendre en compte pour le run-off (nombre d’années pour liquider lesprovisions) est variable selon les branches.

Dans le cadre du risque de provisionnement, cette méthode revient à supposer uncoefficient de variation (CoV) des provisions à un an constant pour toutes les annéescalendaires futures.

SCRk =SCRn

RnRk, où

SCRn

Rn=CoV

Ce coefficient de variation est, par exemple, déterminé par une des méthodes vuesdans les chapitres 8 et 9.1.

Les provisions best estimate projetées Rn+k sont actualisées à l’aide des taux forwardimplicites à la structure par terme des taux sans risque actuels. Ainsi Rn+k · vk revientà actualiser les paiements futurs de date n+ k à la date n. Ceci n’est vrai que si l’onutilise la même courbe de taux sans risque pour le calcul du best estimate que pourcelui de la marge de risque.

Remarque Cette simplification est classifiée de niveau 3 sur 5 par le CEIOPS.

12.2 Simplification par l’utilisation de la duration

Cette méthode proposée lors des QIS utilise la duration modifiée des engagementsafin de calculer les SCR futurs et de les actualiser "en une seule fois". La méthodeest classée de niveau 4 sur 5 par le CEIOPS dans les simplifications proposées par lesspécifications du QIS 5.

MV M =CoC

1+ r1·Durmodif ·SCRn

où r1 est le taux d’intérêt à un an, CoC le taux du coût du capital et Durmodif est laduration modifiée déterminée aujourd’hui. Elle s’exprime par :

Durmodif =1

1+ r∑T

k=0 k ·Zn+k · (1+ r(0,k))−k

∑Tk=0 Zn+k · (1+ r(0,k))−k

︸ ︷︷ ︸duration

où r correspond au taux actuariel, T est l’horizon de run-off, Zk sont les paiementspour la kème future année calendaire. On peut noter P la valeur actuelle des engage-ments futurs telle que :

P =T

∑k=0

Zn+k · (1+ r(0,k))−k

Remarque : La duration modifiée correspond à la notion de sensibilité.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 84

CHAPITRE 12. MÉTHODES DE CALCUL DE LA MARGE DE RISQUE LIÉE AU RISQUE DEPROVISIONNEMENT

12.3 Application

Nous supposons de façon raisonnable que les deux simplifications du CEIOPS quenous utilisons sont applicables au SCR lié au seul risque de provisionnement.

12.3.1 Une branche

Nous déterminons la marge de risque liée au risque de provisionnement pour labranche RC Auto. Nous supposons la reprise d’un portefeuille de passif d’une branchespécifique. Pour ce faire, nous nous servons de la structure par terme des taux fourniepar le CEIOPS dans le cadre du QIS 5 pour actualiser les coûts d’immobilisation desSCR futurs. Nous utilisons celle correspondant à une prime d’illiquidité nulle, commele conseille le CEIOPS dans ses spécifications pour le QIS 5 concernant le calcul de lamarge de risque.

TABLE 12.1 – Marge de risque liée au risque de provisionnement pour la branche RCAen pourcentage du best estimate (en insérant la volatilité obtenue par Merz & Wüthrichdans la formule standard et en considérant un tail factor obtenu par un lissage selon laloi puissance inverse), selon les deux méthodes de projection des SCR utilisées

Par proportionnalité au best estimate Par l’utilisation de la duration modifiée

24,20 % 24,28%

12.3.2 Corrélation de branches

Comme nous l’avons mentionné à la section 11.3, la proposition finale du CEIOPSindique que la marge de risque globale est la somme des marges de risque calculéespar branche : the overall risk margin of the undertaking is given as the sum of the riskmargins as calculated by lines of business (i.e. without any diversification effects). LeCEA est en désaccord avec cette proposition et encourage la Commission Européenneà autoriser la prise en compte de l’effet de diversification entre les branches.

Nous cherchons alors à voir sur un petit exemple quel serait l’impact si la Commis-sion Européenne décidait d’autoriser la prise en compte de cet effet de diversification.Nous appliquons la formule donnée par le CEIOPS :

σ =

√1

V 2 ·∑i, j

CorrLobi, j ·σlob i ·σlob j ·Vlob i ·Vlob j

où i, j sont les indices des branches, CorrLobi, j correspond à la corrélation entre labranche i et la branche j et Vlob correspond au montant de provision best estimate dansle cadre du risque de provisionnement.

Nous utilisons les coefficients de corrélation proposés par le CEIOPS dans le cadrede la dernière étude quantitatives d’impact (QIS 5) pour déterminer la volatilité à un ande deux branches agrégées. Il est de 0,5 entre la branche RCA et Dommage Auto.

Nous utilisons la méthode de Merz & Wüthrich pour déterminer la volatilité à un ande chaque branche, et la simplification reposant sur la proportionnalité au best estimatepour le calcul de la marge de risque.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 85

CHAPITRE 12. MÉTHODES DE CALCUL DE LA MARGE DE RISQUE LIÉE AU RISQUE DEPROVISIONNEMENT

TABLE 12.2 – Marge de risque liée au risque de provisionnement pour la brancheDommage Auto et RC Auto, individuellement, et agrégée (en valeur et en pourcentagedu best estimate)

par branche agrégées

Dommage Auto 1 (2 %)RCA 163 (24 %)

Total 164 (23 %) 147 (20 %)

12.4 Commentaires

Cet exemple simple nous montre qu’il est clair que la décision prise par la Com-mission Européenne concernant la prise en compte de l’effet de diversification entreles branches aura un impact important sur le montant de la marge de risque à ajouteraux provisions best estimate.

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 86

Conclusions

Au travers de ce mémoire nous avons donné des explications et des méthodes d’éva-luation des nouvelles exigences en matière de solvabilité concernant les provisionstechniques. Nous nous sommes limités à l’analyse des provisions pour sinistres à payerqui représentent la part la plus importante pour une compagnie non-vie.

L’étude de différentes méthodes de provisionnement nous a montré la complexitéquant au choix de l’une ou l’autre de ces méthodes, aucune n’étant parfaite. Il est alorsimportant de réaliser un suivi des résultats qu’elles fournissent et de les confronterà la réalité observée a posteriori. D’autre part, nous avons pu quantifier l’impact duprincipal changement amené par Solvabilité II au niveau de l’évaluation des provisions,à savoir l’actualisation.

Concernant la quantification du risque de prédiction, nous avons vu que SolvabilitéII impose l’évaluation du risque à un an et non plus à l’ultime comme les méthodesactuarielles classiques. De ce fait, il a été nécessaire d’avoir recours à de nouvellesméthodes. Là aussi, un choix va devoir être fait. Cette étude nous a permis de mettre enévidence l’impact de l’évaluation du risque de prédiction sur un horizon d’un an plutôtqu’à l’ultime sur les branches à déroulement long, mais celui-ci est toutefois faible surcelles à déroulement court. Elle a également soulevé l’importance de l’attention à porteraux données. Les divergences importantes dans les résultats en appliquant la méthodede Merz & Wüthrich sur le triangle de 8 ou 9 ans en sont une parfaite illustration.

Lors de la quantification de la volatilité à un an (ainsi qu’à l’ultime) nous avonsuniquement traité les risques internes au modèle. Mais un autre risque est à prendreen considération si l’on veut quantifier l’intégralité de ceux auxquels la compagnie estsoumise lors de l’évaluation des provisions. Il s’agit du risque de modèle. Il est liéà l’utilisation d’un modèle inadéquat aux données, qui représente mal la réalité, ouencore où les hypothèses ne seraient pas vérifiées. Il n’est cependant pas aisé d’évaluerce risque. Ce point restera une limite de nos modèles.

Nous avons également vu que sous Solvabilité II, la marge de prudence devientexplicite. Nous l’avons quantifiée par des méthodes simplificatrices proposées par leCEIOPS lors du dernier QIS. Nous avons, à ce propos, relevé qu’un certain nombrede points sont encore en discussion entre les différents protagonistes, notamment auniveau de la prise en compte des effets de diversification (entre les branches et avec lerepreneur) lors de l’évaluation de la marge de risque.

Dans une optique de gestion des risques, quels que soient les choix faits, on ne peutse contenter de sélectionner les résultats obtenus par une méthode sans les confronterà d’autres. Il y a également lieu de vérifier les hypothèses et la validité de la mise en

place du modèle. Par ailleurs, sous la directive Solvabilité II il faudra pouvoir justifierdes choix faits, d’où la nécessité de l’existence de procédures écrites expliquant ceschoix.

Dans ce mémoire, nous n’avons traité qu’un aspect du passif des ces nouvelles exi-gences. Mais au niveau de l’actif, l’application d’un SCR avec des scénarios de stressà un an est très critiqué par les compagnies d’assurance qui ont des engagements delong terme. De plus, les actions sont beaucoup plus volatiles sur le court terme quesur le long terme. Nous avions également soulevé le fait que cette nouvelle directiverelancera la concurrence à travers l’Espace Economique Européen. Mais pour les payshors EEE, cela ne sera probablement pas le cas, à moins que le dispositif Solvabilité IIn’influence d’autres réglementations.

Liste des abréviations

ACME Association des Assureurs Coopératifs et mutualistes européens

AISAM Association Internationale des Sociétés d’Assurance Mutuelle

BE Best Estimate

CDR Claims Development Result

CEA Comité des Entreprises d’Assurance

CEIOPS Committee of European Insurance and Occupational Pensions Supervisors

CFP Charge Finale Prévisible

CL Chain Ladder

CoC Cost of Capital

CP Consultation Paper

CV Coefficient de Variation

IBNR Incurred But Not Yet Reported

IFRS International Financial Reporting Standards

i.i.d. Indépendantes et Identiquement Distribuées

LC London Chain

M&W Merz & Wüthrich

MCR Minimum Capital Requirement (Capital minimum requis)

MVM Market Value Margin (Marge de risque)

ORSA Own Risk Solvency Assessment

PSAP Provisions Pour Sinistres A Payer

QIS Quantitative Impact Studies

RC Responsabilité Civile

RCA Responsabilité Civile Automobile

RCG Responsabilité Civile Générale

SCR Solvency Capital Requirement (Capital de solvabilité requis)

VaR Value at Risk

Table des figures

1.1 Illustration d’un bilan simplifié dans le cadre de Solvabilité I . . . . . 111.2 Les 3 piliers de Solvabilité II . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141.3 Représentation schématique du bilan sous Solvabilité I en comparai-

sons à celui sous Solvabilité II . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

3.1 Déroulement des paiements de la branche Dommage Auto . . . . . . 233.2 Test de l’hypothèse (H2) pour l’année développement 1 à 2 sur la

branche Dommage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 263.3 Illustration de la droite non contrainte selon London Chain - droite

contrainte selon Chain Ladder . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 283.4 Déroulement des paiements d’une branche longue : Responsabilité Ci-

vile Auto . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 303.5 Facteurs de développement obtenus sur le triangle de données de 9 an-

nées et par extrapolation des différentes lois (à gauche : RCA, à droite :RCG) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

3.6 Facteurs de développement obtenus sur le triangle de données de 9 et28 ans et extrapolation par loi puissance inverse des facteurs de déve-loppement sur 9 ans (gauche : RCA, droite : RCG) . . . . . . . . . . 32

3.7 London Chain - Chain Ladder sur la branche RC Auto, pour l’année dedéveloppement 3 à 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

4.1 Schéma illustratif du principe du bootstrap, Source détermination d’unintervalle de confiance des réserves « IBNR » . . . . . . . . . . . . . 45

4.2 Distribution empirique du montant de provision à l’ultime de la brancheDommage Auto . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

7.1 Schéma représentant l’information disponible deux années calendairessuccessives, source [22] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

7.2 Principe du CDR. Source : présentation Merz et Wuthrich . . . . . . . 57

8.1 Risque à 1 an : Erreur de processus - erreur d’estimation des para-mètres, source [5] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

8.2 Comparaison des volatilités du triangle par année de développementσ2

j d’une branche courte Dommage Auto et d’une branche longue RCA 64

8.3 Graphique représentant les msepi et σ2n−i obtenus sur le triangle de 9

ans et 8 ans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 658.4 Graphique représentant les msepi et σ2

n−i obtenus sur le triangle de 9ans de la branche Dommage Auto par M&W et Mack . . . . . . . . . 65

90

TABLE DES FIGURES

8.5 Graphique représentant les msepi obtenues par la méthode de M&W,Mack et σ2

n−i obtenus sur la branche RCA . . . . . . . . . . . . . . . 66

9.1 Illustration de la simulation des paiements de la diagonale de l’annéecalendaire suivante (étapes 2 et 3), source [13] . . . . . . . . . . . . 69

9.2 Illustration de la méthode du bootstrap modifiée pour l’obtention durisque à un an . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

9.3 Distribution empirique du montant des provisions obtenu par la mé-thode du bootstrap à un an en comparaison à celle du bootstrap à l’ul-time, sur la branche Dommage Auto . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

9.4 Distribution empirique du montant des provisions obtenu par la mé-thode du bootstrap à un an en comparaison à celle du bootstrap à l’ul-time, sur la branche RCA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

12.1 Illustration de la méthode coût du capital pour la détermination de lamarge de risque (MVM) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

A.1 Ajustement par une droite contrainte à l’origine des points (Ci, j,Ci, j+1)pour j=2,3,4,5,6,7 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98

B.1 Modules SCR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 91

Liste des tableaux

1.1 Tranches et taux applicables au 1er janvier 2010 [18] pour le calcul del’EMS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

3.1 Paiements cumulés, branche Dommage Auto . . . . . . . . . . . . . 223.2 Impact d’une variation du montant des paiements Cn,0 de la branche

Dommage Auto . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 253.3 Application de Chain Ladder . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 263.4 Les trois autres lois principalement utilisées pour l’ajustement des fac-

teurs de développement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313.5 Coefficient de détermination R2 obtenu par l’ajustement de chacune

des courbes sur chacune des branches . . . . . . . . . . . . . . . . . 323.6 Impact d’un "tail factor" sur la charge finale selon la méthode . . . . 323.7 Part du "tail factor" dans le montant de la provision . . . . . . . . . . 333.8 Montant de provision par méthode d’estimation et par branche (CL :

Chain Ladder, LC : London Chain) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 343.9 Ecart relatif entre le montant des provisions par les différentes mé-

thodes et la méthode de Chain Ladder . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

4.1 Facteurs de développement, variabilité du triangle . . . . . . . . . . . 434.2 Résultats de l’estimation de l’erreur de provision, de l’erreur de pro-

cessus et de l’erreur d’estimation selon le modèle de Mack . . . . . . 444.3 Quantiles, lorsque la distribution suivie par le montant des provisions

est supposée normale ou log-normale . . . . . . . . . . . . . . . . . . 444.4 Comparaison : Mack vs. bootstrap (moyenne, écart-type) sur la branche

Dommage Auto . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47

8.1 Comparaison de la volatilité à l’ultime selon Mack à celle à un an in-troduite par Merz & Wüthrich (en % du BE non actualisé), sans ajoutd’un "tail factor" . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

8.2 Comparaison de la volatilité à l’ultime selon Mack à celle à un an in-troduite par Merz & Wüthrich sur les deux branches longues (RCA etRCG) en utilisant les triangles de 28 ans (en % du BE non actualisé) . 66

9.1 Résultats des 3 simulations de la diagonale sur la branche DommageAuto (triangle de 9 années) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

9.2 Résultats des 3 simulations de la diagonale sur la branche DommageAuto (triangle de 8 années) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

92

LISTE DES TABLEAUX

9.3 Volatilité historique obtenue sur les branches d’AXA Luxembourg,d’après la méthode 1 proposée par le QIS 5 . . . . . . . . . . . . . . 73

10.1 SCR obtenus selon le choix de la méthode pour chaque branche . . . 7610.2 SCR obtenus selon le choix de la méthode pour chaque branche en

modifiant la taille du triangle utilisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

12.1 Marge de risque liée au risque de provisionnement pour la brancheRCA en pourcentage du best estimate (en insérant la volatilité obtenuepar Merz & Wüthrich dans la formule standard et en considérant untail factor obtenu par un lissage selon la loi puissance inverse), selonles deux méthodes de projection des SCR utilisées . . . . . . . . . . . 85

12.2 Marge de risque liée au risque de provisionnement pour la brancheDommage Auto et RC Auto, individuellement, et agrégée (en valeur eten pourcentage du best estimate) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

C.1 Volatilité des provisions à un an par branche fournie par le CEIOPSlors du QIS 5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 93

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[3] CEA Comments - Technical Provisions, 28 June 2010

[4] CEIOPS, CEIOPS’ Advice for Level 2 Implementing Measures on Solvency IITechnical provisions - Elements of actuarial and statistical methodologies for thecalculation of the best estimate, 2009

[5] CEIOPS, CEIOPS’ Advice for Level 2 Implementing Measures on Solvency IITechnical provisions - SCR Standard Formula, Calibration of Non-life Underwri-ting Risk, 2010

[6] CEIOPS, CEIOPS, CP 43 : Draft Level 2 Advice on Technical Provisions - Stan-dards for Data Quality, 2009

[7] CEIOPS’ Advice for Level 2 Implementing Measures on Solvency II : Technicalprovisions Article 86 a Actuarial and statistical methodologies to calculate thebest estimate, octobre 2009

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[27] Wüthrich M., Merz M., Stochastic Claims Reserving Methods in Insurance, 2008

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 95

Cinquième partie

Annexes

97

Annexe A

Test des hypothèses de Chain

Ladder

Les graphiques ci-dessus laissent supposer que l’hypothèse (H2) de Chain Ladderest vérifiée, à savoir les points (Ci, j,Ci, j+1) alignés sur une droite contrainte par l’ori-gine.

FIGURE A.1 – Ajustement par une droite contrainte à l’origine des points (Ci, j,Ci, j+1)pour j=2,3,4,5,6,7

La vérification mathématique par le test de non-corrélation des facteurs de dévelop-pement successifs proposée par l’article [21] valide cette hypothèse pour un intervallede confiance fixé à 50%.

98

Annexe B

Modules de risque pour la

formule standard

FIGURE B.1 – Modules SCR

99

Annexe C

Spécifications techniques QIS5,

paramètres pour le risque de

provisionnement

TABLE C.1 – Volatilité des provisions à un an par branche fournie par le CEIOPS lorsdu QIS 5

standard deviationLoB for reserve risk

(net of reinsurance)Motor vehicle liability 9,50%

3rd-party liability 11%Assistance 11%

Credit 19%Fire 11%

Legal expenses 9%MAT 14%

Miscellaneous 15%Np reins (cas) 20%

Np reins (MAT) 20%Np reins (prop) 20%

Other motor 10%

Notons que ces taux ont été modifiés depuis le QIS 4. Les branches surlignées degris sont les branches CEIOPS que nous avons fait correspondre à celles du portefeuilled’AXA Luxembourg.

100

Annexe D

Loi Normale - Loi Log-normale

D.1 Loi Normale

La fonction de densité d’une variable aléatoire X suivant une loi normale de para-mètres µ et σ2 est donnée par :

f (x;µ,σ) =1

σ√

2πe− (x−µ)2

2σ2

D.2 Loi Log - Normale

Une variable aléatoire X suit une loi log-normale de paramètres µ et σ2 si la variablealéatoire Y = ln(X) suit une loi normale de paramètres µ′ et σ′2. On pose :

eµ′+ σ′22 = µ

e2µ′+σ′2(eσ′2−1) = σ2

Ainsi on obtient :

µ′ = ln(µ)− σ′2

2

σ′2 = ln

(1+

(σ2

µ

)2)

La fonction de densité de la variable aléatoire X de paramètres µ et σ est :

f (x;µ,σ) =e(− lnx−µ)2/2σ2

xσ√

101

Annexe E

Explication de la formule

standard

Donnons l’explication de l’origine de la fonction de la formule standard pour lerisque de souscription :

ρ(σ) =exp(N0,995 ·

√ln(σ2 +1))√

σ2 +1−1

où N0,995 est le quantile 99,5% d’une distribution Normale centrée réduite

Soit X une variable aléatoire suivant une loi log-normale de paramètres µ et σ2.

D’après l’annexe D, µ = eµ′+ σ′22 et σ2 = e2µ′+σ′2 · (eσ′2 −1), où µ′ et σ′2 sont les para-

mètres de la variable aléatoire Y = ln(X) de loi normale.On pose :

1 = eµ′+ σ′22

0 = µ′+σ′2

2

µ′ = −σ′2

2

En insérant la formule de µ′ dans l’équation de σ2, la variance de X :

σ2 = e−2· σ′22 +σ′2 ·

(eσ′2 −1

)

= eσ′2 −1

σ′2 = ln(σ2 +1)

σ′ =√

ln(σ2 +1)

102

ANNEXE E. EXPLICATION DE LA FORMULE STANDARD

On se place ensuite au niveau du quantile 99,5% de la loi normale centrée réduitepour la variable Y

99,5% = P

(Y −µ′

σ′ ≤ N99,5%

)

99,5% = P

(Y +µ′2/2

σ′ ≤ N99,5%

)

99,5% = P

(Y ≤ N99,5% ·σ′− σ′2

2

)

99,5% = P

(exp(Y )−1 ≤ exp

(N99,5% ·σ′− σ′2

2

)−1

)

exp

(N99,5% ·σ′− σ′2

2

)−1 = exp

(N99,5% ·σ′) · exp

(−σ′2

2

)−1

= exp

(N99,5% ·

√ln(σ2 +1)

)· exp

(σ′2

2

)−1

exp

(−σ′2

2

)=

1√exp(σ′2)

=1√

exp(√

ln(σ2 +1)2) =

1√exp(ln(σ2 +1))

=1√

σ2 +1

Finalement, on aboutit à l’expression donnée pour la formule standard :

exp

(N99,5% ·

√ln(σ2 +1)

)· exp

(−σ′2

2

)−1 =

exp(N0,995 ·√

ln(σ2 +1))√σ2 +1

−1

Evaluation des provisions techniques non-vie dans le contexte de Solvabilité II 103