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Mémoire D.E.S. Anesthésie-Réanimation
Vendredi 29 Avril 2011 LEBARD Christophe
[PLACE DES DISPOSITIFS DE PROTECTION CONTRE LES NUISANCES SONORE ET VISUELLE EN SSPI DANS L’AMELIORATION DE LA QUALITE DU SOMMEIL POSTOPERATOIRE]
Signature du directeur du mémoire :
Membres du Jury :
Pr M. SAMAMA
Pr F. BONNET
Pr D. JOURNOIS
Pr G. ORLIAGUET
Direction du mémoire :
Pr O.LANGERON
Dr M. LE GUEN
Pr LANGERON Olivier
A Mr le Professeur O. LANGERON
Pour avoir accepté de jugé ce travail. Veuillez recevoir l’expression de
ma sincère reconnaissance et de mon profond respect.
A Mr le Professeur M. SAMAMA
A Mr le Professeur F. BONNET
A Mr le Professeur D. JOURNOIS
A Mr le Professeur G. ORLIAGUET
Pour avoir accepté de jugé ce travail. Votre présence au sein de ce jury
est un grand honneur.
Au Docteur Morgan LE GUEN
Pour avoir accepté de diriger ce mémoire et pour l’aide qu’il m’a apporté
tout au long de ce travail, pour ses conseils et sa disponibilité.
A mes co-internes qui ont marqué mon internat
Matthieu LE DORZE, Elsa DARNAL, Céline ROUSSEL, Benjamin
CHOUSTERMAN, Marie PARIES, Daphnée MICHELET, Calliope HALLYNCK,
Antoine BODIN, Françoise TOMBERLI, Fréderic SEBAG, Yacine TANDJAOUI,
Ghislaine DOUFLE, Thomas ROSSIGNOL, Yannick BURG, Viridiana
JOUFFROY, Marie BINCZAK, Julia HILLY, Marion AUGE….
Sommaire
RESUME : ....................................................................................................................................... 5
INTRODUCTION : ........................................................................................................................... 5
ETUDE : .......................................................................................................................................... 7
Matériels et méthodes : ............................................................................................................ 7
Patients : .................................................................................................................................... 8
Méthode : .................................................................................................................................. 8
Analyse statistique : ................................................................................................................ 12
RESULTATS : ................................................................................................................................. 13
Caractéristiques des patients : ................................................................................................ 13
Mesure subjective du sommeil Spiegel scale et MOS sleep scale (autoévaluation): .............. 13
Mesure subjective par l’infirmière (hétéro évaluation): ......................................................... 16
Mesure objective par actimétrie: ............................................................................................ 17
Critères secondaires : .............................................................................................................. 17
DISCUSSION : ............................................................................................................................... 20
SOMMEIL ET SOINS INTENSIFS : .......................................................................................... 20
Le sommeil normal : ................................................................................................................ 20
L’évaluation du sommeil : ....................................................................................................... 21
L’altération du sommeil en SSPI : ............................................................................................ 23
Impact de l’altération du sommeil en SSPI et réanimation : ................................................... 24
SSPI et réanimation = facteurs perturbateurs du sommeil : ................................................... 25
INTERPRETATION DES RESULTATS :..................................................................................... 27
Le sommeil est altéré en SSPI .................................................................................................. 27
Sommeil et évaluation subjective (échelles psychométriques, hétéro évaluation): .............. 28
Sommeil et évaluation objective (actimétrie): ........................................................................ 29
Evaluation objective et subjective : comparaison ................................................................... 30
Amélioration du sommeil et impact mesurés : ....................................................................... 31
Compliance : ............................................................................................................................ 31
LIMITES DE L’ETUDE : .......................................................................................................... 32
CONCLUSION : ............................................................................................................................. 34
BIBLIOGRAPHIE: ........................................................................................................................... 35
ANNEXES : .................................................................................................................................... 41
ANNEXE 1 : ............................................................................................................................... 41
Lettre d’information et consentement remis au patient ........................................................ 41
ANNEXE 1BIS: .......................................................................................................................... 43
FORMULAIRE D’INFORMATION DE PATIENTS INCLUS DANS UNE ETUDE CLINIQUE
OBSERVATIONNELLE ................................................................................................................ 43
ANNEXE 2 : ............................................................................................................................... 45
Questionnaire de sommeil de Spiegel ..................................................................................... 45
ANNEXE 2 bis : ......................................................................................................................... 48
Questionnaire adapté du Medical Outcomes Score – Sleep Scale (MOSS – SS) ..................... 48
ANNEXE 3 : ............................................................................................................................... 50
Modèles des matériels utilisés : .............................................................................................. 50
RESUME :
Introduction : La Salle de Surveillance Post-Interventionnelle (SSPI) ne semble pas
être un environnement propice au repos des patients devant rester la nuit pour
surveillance compte tenu du bruit et de l’intensité lumineuse persistante. Le but de
cette étude est d’évaluer l’efficacité de certains dispositifs simples tels que le masque
oculaire et les bouchons auriculaires dans l’amélioration de la qualité et de la durée du
sommeil chez ces patients.
Patients et méthode : Après accord du Comité local de Protection des Personnes
(CPP), cette étude prospective randomisée monocentrique concerne les patients
opérés d’une chirurgie lourde et nécessitant une surveillance continue en SSPI la
première nuit post-opératoire. Ne sont pas inclus les patients présentant une
dysfonction cognitive post-opératoire précoce ainsi que ceux nécessitant une
assistance ventilatoire ou une éventuelle procédure invasive au cours de la nuit.
L’attribution d’un dispositif auriculaire et d’un masque oculaire (groupe traitement) ou
non (groupe contrôle) a été déterminée par randomisation. La qualité du sommeil chez
ces patients, critère principal de l’étude, a été mesurée selon trois méthodes
différentes : une mesure objective par actimétrie, une hétéro-évaluation horaire par une
infirmière, et les questionnaires d’autoévaluation (échelles de Spiegel et de MOSS).
Les données descriptives sont exprimées en moyenne +/- SD ou en pourcentage, et
une comparaison entre les deux groupes a été réalisée par un test T de Student ou de
Chi-2 corrigé selon les cas (SPSS 10,0). Une valeur de p < 0.05 est considérée comme
significative.
Résultats : 46 patients opérés principalement d’une chirurgie vasculaire aortique
(85%) ont été inclus. Il existe une différence significative entre les 2 groupes pour la
qualité du sommeil : Le score de Spiegel est significativement moins altéré (20 ±4 /30
contre 15 ±5 /30 dans le groupe « contrôle » p =0.006), la profondeur du sommeil est
significativement améliorée (diminution des réveils face aux soins 9% [4-22]versus
42% [13-71] dans le groupe contrôle p =0.03), tout comme l’état de fatigue diurne
(besoin de faire une sieste dans 95% [85-100] dans le groupe « contrôle » contre 50%
[20-80] dans le groupe « traitement »).
Discussion : Cette étude démontre qu’une mesure simple telle que le port d’un
masque oculaire associé à des bouchons auriculaires améliore la qualité du sommeil
des patients ayant subit une intervention chirurgicale et devant rester la nuit pour
surveillance en SSPI. La généralisation de ces dispositifs pourrait donc améliorer le
confort et la tolérance aux soins post-opératoires.
INTRODUCTION :
Le sommeil est couramment altéré en Salle de Surveillance Post-
Interventionnelle (SSPI) et cette altération est probablement plus marquée après
chirurgie majeure. Cette atteinte du sommeil est vécue par les patients comme l’un des
éléments les plus stressants au cours de leur séjour en SSPI ou en réanimation1 et
peut être responsable de troubles cognitifs et comportementaux allant de l’anxiété
jusqu’à des états d’agitations voire des états délirants 2,3. D’autres complications
consécutives à une altération prolongée du sommeil ont été rapportées par les études
telles qu’une diminution de l’endurance des muscles inspiratoires pouvant contribuer à
allonger le temps de sevrage de la ventilation mécanique, une diminution des défenses
immunitaires via la libération plasmatique de facteurs pro-inflammatoire ainsi qu’une
désorganisation de la sécrétion des hormones endogènes (glucocorticoïde,
catécholamine) responsable d’épisodes hyperglycémies et de poussées hypertensives
contribuant à augmenter les complications cardio-vasculaires4-6. Dans le souci
d’améliorer la qualité et la quantité du sommeil postopératoire, l’identification des
éléments perturbateurs a permis de classer les différentes étiologies en deux
catégories : la première catégorie regroupe les étiologies imputables à « l’acte
chirurgical » : douleur, anxiété, stress chirurgical ainsi que l’effet résiduel des
médicaments d’anesthésie sont autant de facteurs perturbateurs délétères qui restent
difficilement modifiables. En effet, si la prise en charge de l’analgésie postopératoire
s’est aujourd’hui améliorée, c’est au prix d’une consommation médicamenteuse
multimodale et puissante (morphinique, kétamine, anti-inflammatoires non
stéroïdiens..) non dénuée d’effets secondaires propre aux agents ou liés à leur
association, laquelle peut aussi altérer le sommeil des patients.
Les autres étiologies sont liées à l’environnement « agressif » des structures de
soins (SSPI et réanimation), inadaptées à l’initiation et au maintien du sommeil du fait
de la présence permanente (24h/24) d’une activité médicale, de bruit et d’une
exposition à une forte intensité lumineuse. Ainsi, le bruit, la lumière et le nursing sont
responsables de plus de 30% des éveils et réveils nocturnes des patients en
réanimation7 et sont considérés par les patients comme étant excessifs, nocifs et
perturbants8. L’exposition lumineuse nocturne est particulièrement délétère car en plus
de fragmenter le sommeil, d’altérer son architecture et de diminuer sa quantité, elle est
responsable d’une atteinte du rythme circadien contribuant à décaler les phases du
sommeil. De nombreuses mesures ont été évaluées dans l’objectif de diminuer ces
sources sonores et visuelles mais se sont avérées être des échecs du fait d’un
manque constant de résultats au prix d’une contrainte importante par l’ensemble de
l’équipe soignante. S’il parait difficile de supprimer ces facteurs perturbateurs, il semble
plus facile d’atténuer leur perception grâce à l’utilisation de dispositifs simples ayant
déjà prouvé leur efficacité par les compagnies aériennes : le masque oculaire et les
bouchons auriculaires.
ETUDE :
L’objectif principal de cette étude était d’évaluer l’intérêt des dispositifs de
protection contre les nuisances sonores et visuelles sur la qualité du sommeil des
patients restant la première nuit postopératoire en SSPI pour surveillance.
Matériels et méthodes :
Cette étude a été conduite de manière prospective en Salle de Surveillance
Post-Interventionnelle (SSPI) à l’hôpital de la Pitié-Salpétrière (Paris, France), hôpital
universitaire recouvrant 1600 lits. La Salle de Surveillance Post-Interventionnelle est
une structure ouverte en forme de L regroupant 15 lits réservés à la surveillance
postopératoire de chirurgie digestive, urologique, orthopédique et vasculaire ainsi qu’à
la prise en charge des patients nécessitant une ventilation mécanique qu’ils
proviennent du service d’accueil des urgences (SAU) ou d’autres services hospitaliers.
De plus, cette structure ouverte 24h/24 7j/7 accueille les patients polytraumatisés pris
en charge par les SAMU d’Ile de France et les patients en état de choc ou en état de
mort cérébrale avec environ 1200 admissions par an. La zone d’accueil de ces patients
comprend 4 emplacements dédiés mais ouverts sur le reste de la SSPI. Une part
importante de ces admissions a lieu entre 17h et 3h du matin ce qui contribue à altérer
le sommeil des patients opérés nécessitant une surveillance continue pendant la nuit
suivant la chirurgie.
Patients :
Etaient inclus dans l’étude les patients ASA 1 à 3 stable bénéficiant d’une
chirurgie programmée majeure non cardiaque sous anesthésie générale, hospitalisés
la veille de l’intervention (chambre seule ou double). La chirurgie à risque majeur chez
des patients avec différentes comorbidités expose à une augmentation du risque de
complications postopératoires imposant ainsi une surveillance de nuit en SSPI. Au
moment de la randomisation, les patients devaient être conscients et sevrés de toute
ventilation mécanique (ventilation non invasive ou mécanique). Ils pouvaient bénéficier
d’antalgiques de palier 3 selon des modalités standardisées de gestion de la douleur
post opératoire basée sur l’Echelle Visuelle Analogique d’usage courant dans le
service. N’étaient pas inclus les patients mineurs, les femmes enceintes, les patients
sous ventilation mécanique, les patients pour lesquels était prévu des séances de
Ventilation Non Invasive (VNI) au cours de la nuit en SSPI, ainsi que les patients
bénéficiant d’une rachianalgésie ou d’une analgésie péridurale. Les patients atteints
d’une pathologie neurologique donnant lieu à un tremblement des extrémités
(Syndrome de Parkinson, tremblement essentiel…) ou à une altération de la mémoire
et des capacités cognitives n’étaient également pas éligibles. Le transport en dehors
de la SSPI durant la période d’évaluation pour prise en charge diagnostique ou
thérapeutique (transport au scanner, reprise chirurgicale) tout comme la nécessité de
sédater le patient pour une ventilation mécanique (défaillance d’organe…) était un
motif d’exclusion. Par ailleurs, les refus d’inclusion par le patient étaient colligés.
Méthode :
Le consentement des patients était recherché la veille de l’intervention lors de
la visite préopératoire et une lettre d’information était remise telle que jointe en annexe
(Annexe 1).
Après l’intervention et lors de l’admission en SSPI pour la première nuit
postopératoire, les patients étaient répartis dans un des deux groupes de
randomisation prédéfini selon une table de randomisation standardisée. Le groupe
« contrôle » recevait les soins habituels tandis que le groupe « traitement » bénéficiait
en plus des soins courants des dispositifs de protection sonores (boules quies,
samurai™, Vandeputte Group, Pays-Bas) et visuels (masque oculaire similaire à ceux
proposés par les compagnies aériennes). Ces dispositifs étaient fourni dès l’arrivée en
SSPI et pouvaient être portés librement jusqu’à la sortie du réveil. Le port de ces
dispositifs était encouragé le plus possible par l’équipe soignante pendant toute la
durée de la nuit et le patient pouvait les retirer à tout moment. Un temps minimal de
port de ces dispositifs avait été fixé à 5 heures car il devait couvrir la durée moyenne
du sommeil mesurée au cours d’une étude observationnelle préliminaire qui rapportait
un temps moyen de 4 ±1h. En dessous de ce seuil, les patients étaient exclus de
l’étude.
L’évaluation de la qualité du sommeil réalisée entre 20h et 08h le lendemain,
critère principal de l’étude était réalisée au décours de la nuit passée en SSPI selon
trois différentes méthodes: mesure par actimétrie pour l’évaluation objective, mesure
par des questionnaires psychométriques remplis par le patient et une hétéro évaluation
par une infirmière pour l’évaluation subjective.
Dans chacun des groupes, un actimètre, bracelet-montre extensible, était
disposé au poignet du patient dès son arrivée et cela durant toute la période de l’étude
(soit jusqu’à la sortie du service). Dans le cas présent, l’analyse de l’historique de la
nuit était déterminée entre 20 et 08h le lendemain matin. Ce dispositif (Actiwatch™,
Cambridge neurotechnology Ltd, England) est composé d’une puce et d’un élément
piezzo-électrique, lui permettant d’enregistrer de façon continue l’intensité et la durée
des mouvements exercés par le poignet du patient tout au long de la période de
mesure. Le lendemain les données étaient transférées, analysées puis transcrites par
un logiciel informatique (Sleep analysis 7®, Cambridge Neurotechnology Ltd, England)
sous formes de différents items : efficacité du sommeil (temps de sommeil rapporté au
temps théorique du sommeil en %), durée de sommeil, nombre d’interruption du
sommeil, nombre de mouvement du poignet et score d’activité) ainsi que d’un
graphique représentatif des périodes de réveil (Figure 1). L’actimétrie, outil pratique et
performant, présente l’avantage sur la polysomnographie de permettre une évaluation
continue du sommeil et étalée sur de longues périodes (plus de 24h). Bien qu’il ne soit
pas l’examen de référence, de nombreuses études ont montré que ses mesures,
combinées aux données subjectives pouvaient être proposées comme alternative à la
polysomnographie9,10. En effet, dans l’étude de Kushida s’intéressant au diagnostic du
sommeil pathologique, l’efficacité du sommeil et sa durée mesurée par la
polysomnographie ou par l’actimétrie combinée aux données subjectives n’étaient pas
significativement différents. De ce fait, en vue des difficultés logistiques imputées à la
polysomnographie, nous avons choisis d’utiliser l’actimétrie en complément des
méthodes d’évaluation subjective pour comparer le sommeil dans les deux groupes.
FIGURE 1 – Enregistrements obtenus par actimétrie chez deux patients au cours d’une nuit
passée en SSPI. La première figure rapporte une nuit de bonne qualité avec quelques périodes
d’activité en début de nuit (jusqu’à 22H00) puis une période de sommeil continue jusqu’à 6H00.
La deuxième figure rapporte un sommeil ayant une structure altérée avec de nombreuses
périodes d’activités à 0H00, 2H00, 4H00 et 6H00.
La composante subjective du sommeil et du bien être du malade était évaluée à
J1 postopératoire, par l’utilisation de deux questionnaires psychométriques différents:
l’échelle Spiegel (Annexe 2) et l’échelle MOSS (Annexe 2bis). Le recueil des
informations par questionnement oral ne prenait que quelques minutes et portait sur la
nuit qui précédait l’intervention en hospitalisation chirurgicale et la nuit postopératoire
passée en SSPI. Ces deux tests d’évaluation psychométrique sont utilisés dans la
pratique courante pour évaluer la qualité et de la quantité de sommeil chez les patients
souffrant de troubles du sommeil (insomnies, ….). L’échelle MOS (Medical Outcome
Study sleep scale) pose 12 questions simples et permet d’évaluer les différents
aspects du sommeil en les classant en 5 sous-groupes : l’initiation et le maintien du
sommeil (4 questions : Q1-Q3-Q7-Q8), sa quantité (1 question : Q2), son adéquation
(2 questions : Q4-Q12), la somnolence diurne (3 questions : Q9-Q11-Q6) et les
perturbations respiratoires associées (2 questions : Q5-Q10) (Annexe 2 bis). Une note
de 0 à 100 était donnée par le patient pour chacune des questions posées en dehors
de l’évaluation de la quantité de sommeil qui est estimée en heures. Une note élevée
était péjorative. Deux questionnaires selon MOSS ont été utilisés dans cette étude : le
premier est la version originale, le second est une adaptation de l’échelle MOS
classique réalisé en concertation avec la fédération hospitalière du sommeil dont la
modification principale concerne la période de référence. Il s’agit d’une période de 4
semaines dans le cas de la version classique et d’une période d’une nuit dans la
version adaptée à l’étude. L’échelle de Spiegel est quant à elle un questionnaire simple
largement utilisé dans l’évaluation subjective de la qualité et de la quantité du sommeil.
6 questions sont posées, permettant d’obtenir un score total de 30 points (Annexe 2).
Le sommeil est classé de qualité normale entre 24 et 30 points, perturbé entre 15 et 24
points et pathologique en dessous de 15 points. Sa validité intrinsèque en fait un bon
test car elle permet la reproductibilité fiable des mesures.
L’hétéro-évaluation de l’état d’éveil et de sommeil par l’infirmière de nuit
constituait la deuxième méthode de mesure subjective. Cette évaluation était
discontinue, mesurée de façon horaire de 20h à 8h. Elle évaluait l’état de veille des
patient (éveil, somnolence, sommeil) et était associée à la mesure d’autres paramètres
relatifs à la qualité du sommeil (ronflement, réaction du patient face au nursing), à la
compliance du patient face au port des dispositifs (nombre d’heures portés pour
chaque) ainsi que la mesure des facteurs environnementaux perturbateurs (intensité
du bruit et de l’éclairage : critères secondaires).
Une partie des critères secondaires recueillis correspondait aux facteurs
environnementaux perturbateurs du sommeil. Le volume sonore présent, mesuré grâce
à l’utilisation d’un sonomètre (Sonometer™ IdB, Essilor, France) disposé à coté de la
tête du patient. Le bruit était considéré comme faible en dessous de 20 décibels,
intermédiaire entre 20 et 60 décibels et fort au delà de 60. L’environnement lumineux
était estimé par l’infirmière et notée en trois catégories obscurité, lumière tamisée,
lumière importante. L’activité médicale nocturne (déchoquage, nombre d’entrants et de
sortants), le nursing infirmier et la disposition du lit du patient au sein de la SSPI étaient
également recueillis. Les autres critères secondaires étaient la compliance pour les
systèmes antibruit et anti-lumière, la consommation totale de morphine au cours des
24 premières heures (titration + analgésie contrôlée par le patient), la survenue d’une
confusion et le devenir des patients à J1 postopératoire (hospitalisation ou
réanimation).
Analyse statistique :
Une étude observationnelle préliminaire évaluant la quantité de sommeil des
patients passant la nuit en SSPI avait mesuré une durée moyenne de sommeil de 4± 1
heure. Pour mettre en évidence une différence significative d’au moins 20% avec une
puissance de 80% et un risque α de 5%, un nombre minimum de 17 patients par
groupe étaient requis. En estimant un risque de non adhésion au protocole de 10%, le
nombre minimum de patient à inclure était calculé à 20 par groupe. Les données sont
représentées en moyenne ± SD et pourcentage ± IC95. Un test t de Student et un test
Chi2 étaient utilisés pour comparer les variables quantitatives et qualitatives du groupe
contrôle et du groupe « traitement ». Tandis qu’un test non paramétrique était utilisé
pour comparer les différentes nuits passées dans le service d’hospitalisation et la
SSPI. Une analyse en intention de traité était utilisée dans l’évaluation des différents
dispositifs de protection contre les nuisances visuelles et sonores. Les calculs
statistiques étaient analysés en utilisant le logiciel SPSS 10.1 (SSPS, Chicago, IL). Le
risque de première espèce α était fixé à 5%.
RESULTATS :
Caractéristiques des patients :
46 patients ont été inclus consécutivement durant les 5 mois de l’étude. 85% de
ces patients avait bénéficié d’une chirurgie de l’aorte abdominale par laparotomie,
chirurgie à risque majeur nécessitant une surveillance postopératoire continue d’une
durée minimale d’au moins 12 heures. Les autres chirurgies évaluées
étaient également des chirurgies à risque majeur (splénectomie, oesophagectomie,
surrénalectomie, anévrysme de l’aorte thoracique, chirurgie du rachis). 1 patient
appartenant au groupe contrôle s’est rétracté de l’étude pendant la nuit. 1 patient dans
le groupe contrôle a été orienté dans le mauvais groupe de randomisation. 3 patients
ont été exclus du groupe « traitement » : le premier nécessitait une dialyse en urgence
et a été transféré en unité de réanimation, le deuxième à cause d’une défaillance de
l’actimètre et le troisième parce qu’il n’avait pas porté suffisamment les dispositifs de
protection (temps inférieur au temps minimal requis <5 heures). Au final le groupe
contrôle comprenait 21 patients contre 20 patients dans le groupe « traitement ».
(Figure 1)
Mesure subjective du sommeil Spiegel scale et MOS sleep scale
(autoévaluation):
L’autoévaluation par remplissage du questionnaire de Spiegel le lendemain de
la nuit passée en SSPI retrouvait une différence significative entre les groupes, à la
faveur du groupe « traitement» avec un score de Spiegel égal à 20/30 ±4 qualifiant le
sommeil de perturbé contre 15/30 ±5, p= 0.006 dans le groupe « contrôle » le qualifiant
de pathologique. Par ailleurs, durant la nuit qui précédait l’intervention, la qualité du
sommeil était la même entre les groupes (21/30 ±4 versus 21/30 ±4 p=0,7). Ainsi, la
qualité du sommeil au cours de la nuit passée en SSPI dans le groupe « traitement »
reste constante et perturbée (21 ±4 20 ±4 p= 0,708) alors que celle du groupe
« contrôle » devient pathologique (21 ±4 15 ±5 p= 0,006) (Figure 3)
Figure 2: Diagramme de l’étude.
Les caractéristiques démographiques des patients étaient comparables dans les deux
groupes. La moyenne d’âge était de 59 +12 ans dans le groupe « contrôle » et de 62
+15 ans dans le groupe « traitement » et la grande majorité était des hommes (91%
[78-100] dans le groupe « contrôle » et 72% [52-95] dans le groupe « traitement »).
(Table 1)
Critères d’inclusion:
Chirurgie programme avec durée de séjour
prolongé en SSPI
Critères de non-inclusion:
Ventilation mécanique, ventilation
non invasive, surdité, pathologie
neurologique
Randomisation
N=46
Groupe « traitement »
N=23
Groupe « contrôle »
N=22
Actimetrie
Hétéroevaluation
Sleep Scales
20 H
8 H
Sortie de l’étude: n=1
Erreur d’orientation: n=1
Sortie prématurée: n=1
Infraction du protocole: n=1
Uncomplete datasheet: n=1
Groupe « traitement »
N=20
Groupe « contrôle »
N=21
Table 1: Caractéristiques démographiques de la population.
Groupe « contrôle »
N=21
Groupe “traitement”
N=20 p
Age (années) 59 ± 12 62 ± 15 0.45
Sexe (n, % d’hommes) 19, 91 [78-100] 15, 74 [52-95] 0.15
Hypertension artérielle (n, %) 12, 59 [37-81] 14, 68 [45-91] 0.55
Cardiopathie ischémique (n, %) 11, 50 [27-73] 9, 47 [22-72] 0.87
Diabète (n, %) 2, 9 [44-22] 3, 15 [2-33] 0.53
Pathologie du sommeil (n, %) 2, 9 [0-22] 1, 4 [0-13] 0.58
Abréviations: DS: Déviation Standard; 95IC: 95% Intervalle de Confiance; M/F pour
Masculin/Féminin; Les résultats sont donnés en moyenne ± DS. Ou en pourcentage avec 95%
IC.
Les domaines du questionnaire MOSS pour lesquels on observe une différence
significative concernent le nombre total de réveils nocturnes (4 ± 4 dans le groupe
« traitement » versus 7 ± 4 dans le groupe « contrôle », p=0.05), le pourcentage de
patients ayant eut une sensation de sommeil perturbé (56% IC[30 ;81] dans le groupe
« traitement» contre 95% IC [86-100] dans le groupe contrôle p=0.002) et le
pourcentage de patients ressentant le besoin d’une sieste supplémentaire d’au moins
15 minutes le lendemain (50% IC[30 ;80] dans le groupe « traitement » contre 95% IC
[85 ;100] p<0 .04). Dans les autres domaines explorés, il n’y avait pas de différence
significative entre les groupes mais une tendance pour le groupe « traitement » à un
endormissement plus rapide (31min ±43 contre 46min ±45), un temps de sommeil
plus long (319min ±147 contre 253min±129) et une somnolence moins importante
dans la journée suivant la nuit passée en SSPI (27% [7-47] contre 55% [32-77]).
(Table 2)
Figure 3 Comparaison du score de Spiegel entre le groupe « contrôle » (gris
clair) et le groupe « traitement » (gris foncé) durant la nuit préopératoire et la nuit
en SSPI
Mesure subjective par l’infirmière (hétéro évaluation):
Les résultats concernant l’hétéro évaluation horaire du sommeil par l’infirmière
montraient que les patients du groupe « traitement » était significativement moins
réveillés par les soins effectués comparé au groupe « contrôle » (9% [4-22] contre 42%
[13-71] p=0.03). Le temps de sommeil estimé était de 6.6h ± 2.6 dans le groupe
« traitement » et de 5.5 h ±2.6 dans le groupe « contrôle » sans qu’il y ait de
différences significatives. La durée totale des périodes de réveil complet était
également comparable entre les groupes 3.2h ±2.9 groupe « traitement » contre
3.2h±2.3 groupe « contrôle ». (Table 3)
Mesure objective par actimétrie:
Les données de l’actimétrie recueillies entre 20h et 8h, analysées par
ordinateur objectivaient un nombre de réveils élevé dans les deux groupes (31 ±19 et
28±17) . Aucune différence significative n’avait été mise en évidence entre les groupes
en ce qui concerne l’ensemble des items étudiés: efficacité du sommeil, nombre de
réveils, nombre de mouvements, score d’activité, nombre de fragmentation du sommeil
et fréquence d’immobilité au-delà d’une minute. (Table 3)
Critères secondaires :
Les patients du groupe « traitement » avaient une tolérance et une compliance
élevée pour les dispositifs de protection contre les nuisances sonores et visuelles. Une
meilleure compliance était observée pour le masque oculaire qui était porté plus
longtemps (7h15 ±2h10) que les bouchons auriculaires (6h40 ±1h45) avec p =0.573.
L’activité nocturne en salle de surveillance post interventionnelle était similaire dans les
deux groupes avec un taux d’urgences vitales de 2 ±3 par nuit. La quantité de soins
donnée aux patients (nursing, prélèvement biologiques, pansements…) n’était
également pas différente d’un groupe à l’autre (3 ±1 vs 3 ±1). La disposition des
patients, l’exposition sonore était la même dans les deux groupes. Le bruit était en
moyenne de 53dB, avec un pic maximum mesuré à 70dB.
La consommation de morphine dans le groupe « traitement » durant les 24
heures post chirurgie était significativement inférieure à celle du groupe contrôle (15
±12mg vs 27 ±17mg avec p=0.02). De plus, aucun état de confusion ni de délire n’a
été observé dans le groupe « traitement » alors que la confusion postopératoire était
observée dans 14% des patients du groupe « contrôle ».
Moyenne ± DS or % [95%IC] Groupe contrôle Groupe Ear-plug
N = 21 N = 20 p
AUTOEVALUATION
Echelle de Spiegel et de MOSS
Score de Spiegel Préopératoire 21 ± 4 21 ± 4 0.7
Score de Spiegel Postopératoire 15 ± 5 20 ± 4 0.006
Délai d’endormissement (min) 46 ± 45 31 ± 43 0.33
Estimation du temps de sommeil (min) 253 ± 129 319 ± 147 0.08
Sensation de sommeil interrompu (%) 95 [86-100] 56 [30-81] 0.002
Difficultés à rester éveillé (%) 55 [32-77] 27 [7-47] 0.07
Estimation du nombre de réveil (n) 7 ± 4 4 ± 4 0.05
Besoin de faire une sieste (%) 95 [85-100] 50 [20-80] 0.001
(Table 2) Abréviation: SSPI: Salle de surveillance post-interventionnelle; MOSS: Medical Outcome
S Scale; DS: Déviation Standard. Concernant l’actimétrie, l’efficacité du sommeil correspond au
temps total sans activité mesurée rapportée à la durée totale du sommeil, le score d’activité
correspond au nombre total de mouvements au cours de la période de mesure; la sensation de
sommeil interrompu correspond au nombre total de périodes ou il existe une rupture de la trame du
sommeil.
Moyenne ± DS or % [95%IC] Groupe contrôle Groupe Ear-plug
N = 21 N = 20 p
HETEROEVALUATION
Evaluation de l’infirmière
Temps éveillé (h) 3.2 ± 2.3 3.2 ± 2.9 0.88
Temps de sommeil (h) 5.5 ± 2.6 6.6 ± 2.6 0.19
Soins sans réveil du patient (%) 9 [4-22] 42 [13-71] 0.03
Actigraphie
Sommeil efficace (%) 89 [85-92] 87 [82-93] 0.63
Réveils (n) 31 ± 19 28 ± 17 0.67
Mouvements (n) 128 ± 77 141 ± 88 0.63
Score d’activité 9045 ± 7696 11073 ± 5289 0.51
Fragments de sommeil (n) 39 ± 15 41 ± 24 0.84
Fréquence d’immobilité > 1min (n) 15 [10-20] 15 [8-22] 0.92
(Table 3) Abréviation: SSPI: Salle de surveillance post-interventionnelle; MOSS: Medical Outcome
S Scale; DS: Déviation Standard. Concernant l’actimétrie, l’efficacité du sommeil correspond au
temps total sans activité mesurée rapportée à la durée totale du sommeil, le score d’activité
correspond au nombre total de mouvements au cours de la période de mesure; la sensation de
sommeil interrompu correspond au nombre total de périodes ou il existe une rupture de la trame du
sommeil.
DISCUSSION :
Les dispositifs de protection contre les nuisances sonores et visuelles
améliorent la qualité du sommeil évaluée subjectivement par les questionnaires
psychométriques (Spiegel, MOS) et améliorent le confort des patients face au nursing
(hétéro évaluation). Ce sommeil de meilleure qualité peut probablement expliquer les
résultats observés en ce qui concerne la diminution de la fatigue diurne (nécessité
d’une sieste selon l’échelle MOS).
SOMMEIL ET SOINS INTENSIFS:
Le sommeil normal :
Le sommeil est défini comme un état particulier se traduisant par une
suspension périodique, réversible et naturelle de la vie consciente. La périodicité du
sommeil (phénomène chrono biologique) s’intègre dans un rythme circadien via la
stimulation de la glande épiphysaire responsable d’une libération discontinue de
l’hormone du sommeil: la mélatonine. Les différents stades du sommeil normal
correspondent à des états comportementaux, physiologiques et électro-
encéphalographiques distincts se succédant tout au long de la nuit selon une trame
organisée. Le bon déroulement de la succession des différents stades du sommeil est
nécessaire à la bonne récupération des fonctions cognitives, comportementales et
physiologiques11,12.
L’architecture du sommeil normal, analysée par la polysomnographie est
divisée en deux états distincts se succédant à un intervalle de temps d’environ 90
minutes. Le premier état appelé sommeil paradoxal ou « REM sleep » du fait de
l’observation de mouvements oculaires rapides, ne compte que pour 20 à 25% du
sommeil total et est caractérisé par une structure électro-encéphalographique
composée d’ondes de hautes fréquences et de faibles amplitudes similaire à celle
observée lors de l’état d’éveil. Il s’agit d’un état indispensable à la bonne capacité de
mémorisation. Le sommeil parait agité et l’observation clinique retrouve une fréquence
respiratoire, une fréquence cardiaque et une tension artérielle variable tout comme la
tonicité vagale, contrastant avec un état d’hypotonie des muscles striés squelettiques.
Le deuxième état est appelé sommeil lent ou « NREM sleep » du fait de l’absence de
mouvements oculaires rapides13,14. Il est constitué de 3 séquences distinctes et
représente 75 à 80% de la durée totale du sommeil : stade 1 (2-5%) stade 2 (45-55%)
stade 3 (5-20%). Les données de l’électroencéphalographie permettent d’observer des
ondes de grandes amplitudes et de basses fréquences. Les stades 1 et 2 sont
considérés comme étant le reflet du sommeil léger et le stade 3 celui du sommeil
profond « Slow Wave Sleep » (SWS). Le sommeil profond constitue un état
d’anabolisme et est considéré comme étant la période au cours de laquelle le sommeil
est réparateur14.
Le déclenchement et le maintien du sommeil est étroitement corrélé avec la
circulation plasmatique de la mélatonine. Cette hormone, synthétisée par la glande
pinéale a une sécrétion nocturne cyclique dépendante de l’horloge interne de
l’organisme : le noyau suprachiasmatique de l’hypothalamus à l’origine de l’ensemble
des rythmes biologiques circadiens (cycles veille-sommeil, température corporelle,
sécrétion de cortisol et d'un certain nombre d'autres hormones). Il existe des variations
nycthémérales de la sécrétion de mélatonine. Les concentrations plasmatiques diurnes
sont inférieures à 10 pg/ml et donc pratiquement indétectables. La nuit, les taux
plasmatiques se situent entre 30 et 100 pg/ml, avec des pics horaires. Il existe
notamment un pic important entre 1h et 3h du matin. La sécrétion de mélatonine est
reproductible d'un jour à l'autre chez un même individu, par contre elle est très variable
d'un individu à l'autre rendant difficile l'établissement d'une zone de normalité. La
sécrétion de la mélatonine est par ailleurs inhibée par la lumière. L'information
lumineuse est transmise au noyau suprachiasmatique de l'hypothalamus par
l'intermédiaire de fibres rétinohypothalamiques issues des cellules ganglionnaires de la
rétine. Cette information inhibe l'activité du noyau suprachiasmatique et inhibe ainsi la
sécrétion de mélatonine. La lumière est donc délétère pour l’endormissement d’un
sujet.
L’évaluation du sommeil :
L’évaluation de la qualité et de la quantité du sommeil, qu’il soit normal ou
pathologique s’effectue par de nombreuses méthodes de mesures. Ces techniques
d’évaluation peuvent se classer en deux catégories. La première correspond
l’évaluation subjective fondée sur le ressenti du patient sur la qualité de son sommeil et
s’effectue par l’interrogatoire via des questionnaires dits psychométriques.
Un large panel de questionnaires psychométriques différents existe, certains
explorent un aspect pathologique particulier (échelle d’Epworth dans le dépistage
d’une somnolence diurne notamment en cas de syndrome d’apnées obstructives du
sommeil, l’index de la Qualité du sommeil de Pittsburg dans le dépistage des
insomnies….), d’autres cherchent davantage à mettre en évidence une séquence
défectueuse dans le déroulement du sommeil à l’origine d’un trouble du sommeil et
évaluent son retentissement sur la vie quotidienne (Agenda Veille-Sommeil, échelle de
Spiegel, échelle de MOSS). Ces méthodes de mesures sont fondamentales car
simples d’utilisation, reproductibles et permettent d’évaluer l’efficacité d’un traitement.
Elles constituent la première étape dans le diagnostic d’une pathologie du sommeil.
Cependant l’ensemble de ces questionnaires manquent de sensibilité justifiant le
recours à une deuxième catégorie d’examens complémentaires ou explorations
fonctionnelles du sommeil rentrant dans le cadre d’une évaluation objective. Parmi
elles deux méthodes prédominent : la polysomnographie « gold standard » de
l’évaluation du sommeil et l’actimétrie utilisée dans notre étude.
La polysomnographie ou polygraphie du sommeil est l’enregistrement continu et
simultané de différents paramètres (électroencéphalogramme, électro-oculogramme et
électro-myogramme) permettant l’analyse du sommeil en stades. Elle enregistre
également les paramètres cardiorespiratoires (électrocardiogramme, capteurs naso-
buccaux, oxymétrie, sangles thoraco-abdominales) et les paramètres musculaires
(électrodes ou sangles au niveau des jambes). Ces paramètres sont nombreux et
imposent une salle à disposition spécialement équipée (laboratoire du sommeil).
L’analyse visuelle des différents signaux électro-physiologiques est maintenant
assistée par des logiciels d’interprétation automatisée, conduisant à l’élaboration d’un
hypnogramme et d’un rapport détaillé des paramètres du sommeil. La
polysomnographie est le « gold standard » dans l’évaluation du sommeil et de ses
pathologies (syndrome d’apnées du sommeil, insomnies …) mais cet examen est en
pratique difficilement réalisable en dehors des laboratoires du sommeil et ne permet
pas d’évaluer le sommeil sur une période longue telle que 24 heures. Ceci explique la
mise à disposition d’autres moyens, plus simples comme alternative à la
polysomnographie telle que l’actimétrie.
L’actimétrie consiste à enregistrer les mouvements du corps au cours d’une
période courte ou longue pouvant aller jusqu’à plusieurs semaines au moyen d’un
"actimètre". Ce petit enregistreur, de la taille d’une montre, se porte au poignet et
stocke en mémoire les mouvements grâce à une cellule piézo-électrique sensible à
l’accélération. Le contenu de la mémoire est analysé par un ordinateur en fin
d’enregistrement et on peut observer sur un tracé de manière fiable et objective le
niveau d’activité diurne et nocturne et la périodicité des heures de coucher et de lever
du sujet. Les données objectives de l’actimétrie sont importantes pour compléter les
informations subjectives fournies par l’agenda du sommeil ainsi que les autres
questionnaires psychométriques. L’observation d’importantes différences souligne les
difficultés du sujet à apprécier justement la durée de son sommeil. Certains sujets
insomniaques estiment ne jamais arriver à dormir mais ses enregistrements objectivent
parfois de nombreuses phases de sommeil non ressenties. Dans la journée, ces micro-
sommeils contribuent à épuiser le « capital de sommeil » nocturne. Durant la nuit, ils
contribuent à sous-évaluer la qualité effective du sommeil. L’actimétrie met
particulièrement bien en évidence les syndromes de retard ou d’avance de phase. Elle
apporte également des arguments en faveur d’une hypersomnie mais seul
l’enregistrement polysomnographique du sommeil nocturne et des latences des siestes
éventuelles pourra affirmer ce diagnostic.
L’actimétrie est utilisée dans l’évaluation des cycles veilles/sommeil depuis plus
de 20 ans. L’avantage de l’actimétrie par rapport à la polysomnographie réside dans
son intérêt en ambulatoire du fait de sa grande validité ainsi que dans la possibilité
d’évaluer les troubles du sommeil de manière continue (24h /24) et sur une longue
période. L’amélioration de sa technologie (amélioration de la sensibilité des détecteurs
de mouvements, augmentation de la mémoire) a permis d’élargir son panel d’utilisation
au diagnostic ainsi qu’au suivi des troubles du sommeil. Sa performance diagnostique
à été démontrée dans l’exploration du sommeil chez les sujets sains avec une
sensibilité de 0.95 mais avec une faible spécificité (Sp=0.36)9. Son coefficient de
corrélation avec la polysomnographie est élevé (>90%)15 et font de lui un examen
validé comme alternative à la polysomnographie « gold standard » dans l’évaluation du
sommeil16.
L’altération du sommeil en SSPI :
Le sommeil est couramment altéré en SSPI et particulièrement après chirurgie
majeure. Les observations par la polysomnographie rapportent une diminution de la
quantité totale du sommeil ainsi qu’une altération de son architecture avec une
diminution voir une disparition du sommeil paradoxal (REM sleep) et du sommeil lent
profond (stade 3) au profit du sommeil lent léger (stade 1 et 2)17-19. De nombreuses
études rapportent également ce type d’atteintes en réanimation4,20-23 et confirment la
diminution des périodes de REM durant les trois premiers jour postopératoire avec un
effet rebond à partir de la troisième nuit19,24-26, particulièrement à risque chez les
patients porteurs d’un Syndrome d’Apnée Obstructive du Sommeil non appareillé.
Sur une période de 24h, l’enregistrement polysomnographique met en évidence
une atteinte du rythme circadien et confirme un temps de sommeil diminué, dont une
grande partie (environ 40%) est étalée tout au long de la journée23. De plus ce sommeil
est de mauvaise qualité, principalement composé de sommeil léger (stade 1 et 2). Le
sommeil paradoxal (REM sleep) reste présent mais les séquences de progressions
sont anormales car parasitées par de nombreuses ruptures et fragmentations
responsables d’éveils et de réveils 4,21,27,28. La conséquence immédiate est un état de
somnolence manifeste diurne et nocturne.
Impact de l’altération du sommeil en SSPI et réanimation :
La perturbation du sommeil est vécue par les patients comme l’un des éléments
les plus stressant au cours de leur séjour en SSPI ou en réanimation1. Outre le ressenti
du patient, le manque et la désorganisation du sommeil ont des conséquences
délétères sur le bon déroulement de la prise en charge postopératoire car s’associent à
des troubles cognitifs et comportementaux allant de l’anxiété jusqu’à des états
d’agitations voir des états délirants 2,3. Le recours à une nouvelle sédation pourrait ainsi
contribuer à prolonger la durée de la ventilation mécanique chez ces patients29. De
plus, une altération du sommeil diminue l’endurance des muscles inspiratoires pouvant
aggraver le sevrage de la ventilation mécanique30,31.
L’atteinte de la trame du sommeil peut également avoir des conséquences
néfastes pour le patient. La recrudescence des périodes de REM à partir de la
troisième nuit postopératoire par un effet rebond17-19 et le lien bien établi entre les
périodes de sommeil paradoxal et les complications cardiovasculaires 4-6 justifient
l’importance de la bonne prise en charge du sommeil des patients ayant des facteurs
de risques cardiovasculaire surtout si la chirurgie est à risque majeur. De même, cet
effet rebond est associé à des pauses respiratoires chez les patients ayant des
syndromes d’apnées du sommeil.
L’altération du rythme circadien, générateur chronobiologique de l’alternance
des cycles veille/sommeil, du maintien de la température corporelle et de la sécrétion
d’hormones endogènes (cortisol, catécholamines…) participe également à la
déstructuration du sommeil via une sécrétion anormale de la mélatonine et affecte la
thermorégulation. L’activation anormale de l’axe hypothalamo-surrénalien est
responsable d’une augmentation de la sécrétion des hormones endogènes
(glucocorticoïdes, catécholamines). L’augmentation de la sécrétion des
glucocorticoïdes en début de journée, associée à une insulinorésistance peut être
responsable d’épisodes d’hyperglycémies. L’augmentation de la sécrétion des
catécholamines endogènes (augmentation du nombre de pics de sécrétion) est
responsable d’une augmentation de la morbidité cardiovasculaire via l’hyperactivation
du système sympathique (tachycardie, hypertension artérielle..)32. La libération des
cytokines inflammatoires (TNFα, IL-1, IL-6) et la CRP (Protéine réactive C) est
également augmentée pouvant diminuer les défenses immunitaires33.
SSPI et réanimation = facteurs perturbateurs du sommeil :
Les nombreux facteurs perturbateurs responsables de l’altération du sommeil
ont été mis en évidence par l’étude de Reishtein34 : Ces facteurs peuvent être classés
en deux catégories. Les facteurs environnementaux représentés par le bruit, la lumière
et les soins courants (nursing, prélèvements…) et les facteurs non environnementaux
liés au stress chirurgical, une pathologie de fond, les médicaments administrés
(sédatifs, analgésie) ainsi que les facteurs individuels liés à l’anxiété du patient.
L’anesthésie et la chirurgie sont responsables de troubles du sommeil, mais
leurs mécanismes d’action respectifs diffèrent. L’inflammation et la douleur,
conséquences d’un stress chirurgical, jouent un rôle direct sur le sommeil par contre
l’imputabilité et les mécanismes d’action de l’anesthésie générale sur les troubles du
sommeil sont moins clairs.
L’anesthésie générale est une altération de l’état de conscience35, pouvant
avoir un impact sur le rythme circadien36. Les enregistrements polysomnographiques
des patients sous anesthésie générale permettent de bien différencier cet état qui
s’apparente plus du coma que du sommeil physiologique37,38. Le Propofol est l’agent
hypnotique intraveineux le plus utilisé en anesthésie du fait de ses avantages
pharmacologiques. Dispersyn et al ont montré dans leurs études que l’anesthésie par
Propofol seul (sans chirurgie) altérait la structure du rythme circadien aussi bien chez
les rats que chez les humains36,39. Les résultats font constat d’avancées de phase dans
la régulation de la température corporelle ainsi que dans l’initiation des cycles
veille/sommeil36,39. Cette désynchronisation circadienne est directement liée à la
sécrétion de mélatonine pouvant être influencée par l’anesthésie générale par Propofol
chez le rat40.
Les facteurs perturbateurs environnementaux sont prépondérants dans
l’atteinte du sommeil au cours de la période postopératoire ainsi qu‘en unités de soins
intensifs et ce indépendamment du sexe de l’âge…23,41 Selon Gabor et al, le bruit, la
lumière et le nursing sont responsables de plus de 30% des éveils et réveils nocturnes
des patients en ICU7. De nombreuses enquêtes ont également montré que les patients
en ICU considéraient que le bruit et la lumière étaient excessifs, nocifs et perturbants8.
Le bruit, principal facteur perturbateur, est mis en cause dans plus de 15% des
réveils chez les patients sédatés et ventilés mécaniquement en Soins Intensifs42. Chez
des volontaires sains passant la nuit dans un environnement de soins intensifs, la
polysomnographie objective une diminution de la qualité du sommeil, de la quantité et
des périodes de sommeil paradoxal (REM sleep) ainsi qu’une augmentation de la
latence de l’initiation du sommeil paradoxal (REM sleep) et de l’index de réveil7,43. Ces
résultats sont également rapportés chez les patients de réanimation pour qui s’ajoutent
de nombreux autres facteurs perturbateurs non environnementaux tel que le stress
chirurgical ou la pathologie intercurrente (sepsis….)7,44. L’intensité sonore nocturne
mesurée en réanimation est en moyenne de 56dB, ce qui est bien au-delà du seuil
maximal tolérable de 40dB normalement requis pour l’endormissement et le maintien
du sommeil chez les sujets sains 45. Mais une intensité sonore élevée en continu n’est
pas la plus délétère, en effet la majorité des éveils et réveils objectivés par
polysomnographie sont causés par les pics sonores contrastant avec une ambiance
sonore constante7 ce qui arrive très fréquemment en SSPI ou en réanimation qui sont
des environnements d’urgences ou les pics sonores peuvent excéder 86dB44.
Certaines directives européennes récentes (2005) concernant la protection des
travailleurs contre les nuisances sonores recommandent le port de dispositifs de
protection oculaire pour des bruits professionnels dépassant 80dB. Il est ainsi alarmant
que de telles intensités sonores puissent se mesurer la nuit en réanimation avec des
pics atteignant plus de 80dB46. Parmi les nombreuses sources bruyantes identifiées, la
composante humaine (conversation, télévision et sonneries téléphoniques) ainsi que
les alarmes des respirateurs représentent les principales plaintes des patients alors
que leur imputabilité dans les réveils n’est mis en évidence que dans 20 à 25% des
enregistrement polysomnographiques7. De plus, les mesures prises pour diminuer ces
sources bruyantes par des programmes de modification du comportement de l’équipe
soignante (chuchotement du personnel soignant, réglage précis des alarmes…), bien
que permettant de diminuer significativement les nuisances sonores, n’étaient pas
significativement efficaces sur l’amélioration du sommeil des patients47-49 car le gain
attendu dans la diminution de l’intensité sonore était principalement obtenu entre minuit
et 6 heures, période au cours de laquelle le niveau sonore est déjà bas. Ces résultats
sont d’autant plus décourageants que les mesures prises sont difficiles à obtenir car
contraignantes pour l’ensemble de l’équipe soignante.
La lumière, principal régulateur du rythme circadien, est impliquée dans
l’altération de la qualité du sommeil. L'information lumineuse, transmise de la rétine au
noyau suprachiasmatique de l'hypothalamus par l'intermédiaire de fibres
rétinohypothalamiques, inhibe la sécrétion pinéale nocturne de mélatonine. Ainsi, une
exposition lumineuse de 100 lux est suffisante pour inhiber la sécrétion de
mélatonine50 et altère la structure du sommeil chez les sujets sains51,52. Dans les
structures de soins continus (SSPI et réanimation) la stimulation lumineuse est un
véritable problème dans l’initiation et le maintient du sommeil des patients car elle est
permanente et varie de 5 à 1400 lux3,53. Malgré les efforts effectués par le personnel
soignant, il est impossible de supprimer totalement l’exposition lumineuse lors des
nombreux actes médicaux répétés tout au long de la nuit d’autant plus que ces actes
sont pour la plupart des actes d’urgence nécessitant une certaine concentration et ainsi
qu’une lumière forte. Certaines mesures peuvent être conduite comme l’isolement des
patients en chambre seule mais ne sont en pratique non réalisables surtout en SSPI ou
il n’existe pas de séparation possible.
Ces résultats soulignent le fait qu’outre essayer de lutter contre les facteurs
environnementaux presque inévitables par des mesures comportementales lourdes,
difficiles à mettre en place et surtout peu efficaces, une autre possibilité serait de plutôt
d’atténuer leur effets nocifs en utilisant des dispositifs de protection simples, peu
couteux et facilement applicable qui sont le port du masque oculaire pour l’intensité
lumineuse et le port de bouchons auriculaires pour l’intensité sonore.
INTERPRETATION DES RESULTATS :
Le sommeil est altéré en SSPI
Les résultats de notre étude concordent avec ceux obtenus dans les études
antérieures et confirment que dans une population de patients opérés d’une chirurgie à
risque majeur indemnes de complications, la qualité du sommeil évaluée
subjectivement est altérée. Dans le groupe « contrôle », l’évaluation subjective qualifie
ce sommeil de « pathologique » selon l’échelle psychométrique de Spiegel (score =15
±5 /30). Ce sommeil est quantitativement diminué (4h15min ±2h09 de sommeil en
moyenne selon l’échelle de MOSS) et est ressenti comme fortement perturbé dans
95% [86-100] des cas. De plus, ce sommeil est peu profond (91% [78-96] des soins
infirmiers sont responsable de réveils) et peu réparateur (95% [85-100] des patients
sont fatigués le lendemain et 55% [32-77] d’entre eux se considèrent comme
somnolent).
La comparaison de la qualité du sommeil des nuit pré et post-opératoires dans
le groupe « contrôle » permet de conclure que l’environnement de la SSPI associé à la
chirurgie altèrent significativement la qualité du sommeil évaluée subjectivement par
l’échelle de Spiegel (21 ±4/30 en préopératoire 15 ±5/30 en postopératoire p=0.005)
faisant passer d’un sommeil qualifié d’altéré à sommeil pathologique.
Sommeil et évaluation subjective (échelles psychométriques, hétéro
évaluation):
Les dispositifs de protection contre les nuisances sonores et visuelles
améliorent et préservent significativement la qualité du sommeil mesurée
subjectivement comme le montre les résultats obtenus auprès des questionnaires
psychométriques et de l’hétéro évaluation par infirmière. Le score de Spiegel est
significativement moins altéré (20 ±4 /30 contre 15 ±5 /30 dans le groupe « contrôle » p
=0.006), la profondeur du sommeil est significativement améliorée (diminution des
réveils face aux soins 9% [4-22]versus 42% [13-71] dans le groupe contrôle p =0.03),
tout comme l’état de fatigue diurne (besoin de faire une sieste dans 95% [85-100] dans
le groupe « contrôle » contre 50% [20-80] dans le groupe « traitement »).
Alors que le sommeil des patients du groupe « contrôle » s’est significativement
altéré entre les nuits pré et post-opératoires, il n’en est pas de même dans le groupe
« traitement » ou le score de Spiegel reste constant (table 2) (21 ±4/30 en
préopératoire 20 ±4/30 en postopératoire p= 0,708). Ceci suggère que les dispositifs
de protection contre les nuisances sonores et visuelles luttent efficacement contre ces
facteurs environnementaux perturbateurs comme on pouvait s’y attendre, mais
semblent aussi être efficace contre les facteurs délétères imputables à la chirurgie car
le sommeil évalué subjectivement par le score de Spiegel reste significativement le
même dans le groupe « traitement ».
La quantité de sommeil tend à être plus importante dans le groupe « traitement
» par rapport au groupe « contrôle » lors de l’évaluation subjective (questionnaires
psychométriques et hétéro évaluation) mais aucune différence significative n’a été
mise en évidence. L’échelle modifiée de MOSS rapporte un temps de sommeil de 4
heures 12 dans le groupe « contrôle » contre 5 heures 18 dans le groupe « traitement
» avec p =0.08. Par ailleurs, ces résultats ne se superposent pas avec ceux retrouvés
lors de l’hétéro évaluation : 5 heures 30 dans le groupe « contrôle » contre 6 heures 36
dans le groupe « traitement » p= 0.19. Cette discordance peut s’expliquer par des
méthodes de mesures totalement différentes puisque dans un cas il s’agit d’une
mesure subjective avec le risque de sous-estimation comme souvent observé dans le
cas des troubles du sommeil et dans l’autre cas, il s’agit d’une évaluation discontinue
(point horaire) avec un probable manque de fiabilité dans les recueils : nombre
important de paramètres de surveillance (nombre et type de soins réalisés, nursing,
intensité lumineuse, niveau sonore, compliance du patient face au port des dispositifs
de protection) en plus d’une charge de travail excessive et probable manque de
motivation du fait de la connaissance de l’existence des autres moyens d’évaluation du
sommeil (questionnaires et actimétrie).
Sommeil et évaluation objective (actimétrie):
De façon surprenante, les résultats obtenus par actimétrie n’objectivent pas
d’amélioration du sommeil dans le groupe « traitement ». Aucune différence
significative n’a été mise en évidence pour chacune des mesures (efficacité du
sommeil, nombre d’éveils ou de réveils, nombre de mouvements, score d’activité,
fragmentation du sommeil et période d’immobilité). De nombreuses raisons peuvent
expliquer ces résultats :
Premièrement, la période d’évaluation (entre 20h à 8h) était trop courte car se
limitait à la nuit. En effet, il est maintenant bien démontré qu’il existe au cours de la
période postopératoire tout comme en réanimation, des désordres du rythme circadien
responsables d’une diminution du temps total de sommeil, dont une grande partie
(environ 40%) s’étale tout au long de la journée23. Ainsi la période d’évaluation
nocturne n’est pas représentative de la durée totale du sommeil et les résultats
observés ne nous permettent pas de conclure sur l’absence de différences entre les
deux groupes sur la durée totale de sommeil.
Deuxièmement, l’actimétrie est un examen de choix dans l’évaluation des
pathologies du sommeil. Son utilisation initialement limitée à l’exploration du sommeil
chez les sujets sains (cycle veille/sommeil), s’est progressivement étendue du fait de
son utilisation possible en ambulatoire, au diagnostique des insomnies, des
hypersomnies et des anomalies du rythme circadien. Sa performance diagnostique à
été démontrée dans l’exploration du sommeil chez les sujets sains avec une sensibilité
=0.95 mais avec une faible spécificité =0.36 9. Son coefficient de corrélation avec la
polysomnographie est élevé (>90%)15 et font de lui un examen validé comme
alternative à la polysomnographie « gold standard » dans l’évaluation du sommeil16.
Cependant, les études ont montré que ce coefficient de corrélation était diminué (78%-
85%) dans l’évaluation du sommeil pathologique (syndromes d’apnées du sommeil,
insomnies…)15,54 et actuellement nous ne connaissons pas sa valeur concernant
l’étude du sommeil en SSPI chez des patients restant alités, subissant un stress
chirurgical important.
Par ailleurs, le contexte postopératoire tend à diminuer la spécificité de
l’actimétrie dans l’évaluation du sommeil. En effet, l’analgésie morphinique (titration et
PCA) peut induire une sédation importante sans toutefois contrôler la douleur des
patients55. Cette sédation est distincte du sommeil car s’apparente à la sédation induite
par les agents anesthésiques tels que les hypnotiques dont la similitude avec un coma
artificiel a été rapporté37,38. Cette sédation morphino induite peut ainsi constituer une
limite importante de l’actimétrie car elle diminue sa spécificité dans le diagnostic du
sommeil. Nos résultats retrouvent une différence significative dans la consommation de
morphine avec une consommation plus importante dans le groupe « contrôle » (27
±17mg contre 15 ±12mg avec p=0.02). Ainsi, il est possible que la quantité du sommeil
mesurée par actimétrie dans le groupe « contrôle » (groupe ayant consommé le plus
de morphine) soit surestimée du fait de la limitation des mouvements du poignet
expliquée par l’association ou non d’un excès de sédation morphino-induit, d’un défaut
d’analgésie ou simplement par l’alitement, expliquant l’absence de différences de
résultats entre les groupes.
Evaluation objective et subjective : comparaison
La comparaison des données de l’actimétrie avec celles des questionnaires
psychométriques est intéressante car les résultats diffèrent. En effet, le sommeil estimé
par le patient est de meilleure qualité que le sommeil rapporté par l’actimétrie. Par
exemple, le nombre de réveils rapporté par les patients est en moyenne de 7 ±4 et de
4 ±4 p=0.05 alors que l’actimétrie les évalue à 31 ±18 et 28 ±17 p=0.67. Cette
discordance dans les résultats s’explique par une sous estimation du nombre de
réveils par le patient et suggère l’existence de périodes d’éveils ou micro-réveils
inconscients non mémorisés, bien mis en évidence par les mesures objectives. Leur
présence témoigne tout de même d’une altération de la qualité du sommeil
(augmentation de la fragmentation du sommeil) et de sa quantité (un micro réveil altère
la trame du sommeil) pouvant ainsi expliquer la fatigue diurne comme l’avait démontré
Freedman et al en réanimation41.
Amélioration du sommeil et impact mesurés :
Dans notre étude, la consommation d’opioïdes administrés par PCA (Analgésie
Contrôlée par le Patient) durant les 24 premières heures postopératoires était
significativement moins importante dans le groupe « traitement » par rapport au groupe
« contrôle » (27 ±17mg contre 15 ±12mg avec p=0.02). Ces résultats sont importants
à souligner car la morphine a de nombreux effets secondaires (nausées-vomissement,
rétention aigue d’urines, syndrome confusionnel voir état délirant, sédation…), ainsi
une consommation excessive de morphine peut être responsable de troubles cognitifs.
Parallèlement, nous observons une différence significative dans la survenue
d’un état d’agitation ou délirant postopératoire (aucun patients dans le groupe
« traitement » contre 14% des patients du groupe « contrôle » p=0.01). Ces résultats
sont intéressants car rejoignent ceux déjà observés en réanimation en montrant que
plus le sommeil est altéré, plus les patients sont à risque de développer des troubles
cognitifs12. En effet dans cette étude portant sur 62 patients de réanimation, parmi les
24% de patients qui avaient des troubles sévères du sommeil, un syndrome
confusionnel était observé dans un tiers des cas, parmi les 16% des patients qui
avaient un trouble modéré du sommeil, 10% d’entre eux développait un syndrome
confusionnel et parmi les patients qui n’avait pas de troubles du sommeil, seul 3%
d’entre eux avait ce type de trouble cognitif. L’amélioration du sommeil des patients
par la simple utilisation des bouchons auriculaires et du masque oculaire permettrait
ainsi en diminuant la consommation morphinique de limiter la survenue de ces effets
secondaire et ainsi pourrait diminuer certains troubles cognitifs spécialement observés
au cours de la période postopératoire.
Compliance :
La généralisation des dispositifs de protection contre les nuisances sonores et
visuelles semble être une alternative pertinente dans l’amélioration de la qualité du
sommeil postopératoire. En effet, en plus d’être simples d’utilisation, peu couteux et
non invasifs, le masque oculaire et les bouchons auriculaires ont été bien accepté dans
le groupe « traitement ».
La tolérance et la compliance de ces dispositifs était élevée, avec une tendance
en faveur du masque oculaire (porté pendant 7h15 ±2h10) par rapport aux bouchons
auriculaires (portées 6h40 ±1h45) (p>0.05). A l’heure actuelle, peu d’études ont évalué
la compliance de ces dispositifs. Si certaines d’entre elles qualifiaient ces dispositifs de
confortables56 et bien acceptées57, d’autres étaient plus réservées car de nombreux
patients étaient réticents58. Certains patients rapportaient une sensation de chaleur,
d’étouffement, de transpiration excessive, de claustrophobie voir d’inefficacité59,60. Les
causes identifiées incluaient les difficultés d’insertion, une variabilité individuelle dans
l’anatomie de l’oreille et un état anxieux. Dans notre étude, la compliance était bonne
et aucune plainte n’a été rapportée. En effet, une information claire sur les modalités
pratiques d’utilisation était préalablement donnée et les patients qui étaient d’emblée
réticents n’étaient pas inclus dans l’étude, de plus les patients savaient qu’ils pouvaient
les retirer et les remettre à tout moment. Au total, un patient du groupe « traitement »
avaient été exclu car le temps de port des dispositifs était inférieur à 5h.
LIMITES DE L’ETUDE :
L’une des premières limites de l’étude réside dans le choix de l’actimétrie par
rapport à la polysomnographie dans l’évaluation objective du sommeil. Nous avions
délibérément choisi cet outil d’évaluation car il est simple d’utilisation, bien toléré et
validé comme alternative à la polysomnographie dans le diagnostic des troubles du
sommeil ainsi que dans les rythmes veille/sommeil. De plus nous ne disposions pas de
polysomnographe et considérions comme sa mise en place et son maintien non
réalisables car excessifs pour le patient déjà suffisamment monitoré (scope,
saturomètre, cathéter artérielle, perfusion…). Toutefois, les résultats montrent que
l’actimétrie n’est probablement pas adaptée à l’évaluation du sommeil dans le contexte
postopératoire car il est insuffisamment spécifique. En effet, la position allongée, la
sédation iatrogène par les analgésiques et la douleur excessive sont probablement
responsables de l’absence de différences significatives entre les groupes. Ces
résultats pourraient être différents avec la polysomnographie.
Deuxièmement, la période d’évaluation était limitée à la seule première nuit
postopératoire (20h-8h). Ceci constitue une limite importante car il existe en Salle de
Surveillance Post-Interventionnelle une atteinte du rythme circadien des cycles
veille/sommeil. Du fait de cette atteinte, une partie du sommeil (40%) normalement
nocturne s’étale sur la journée. Ainsi la période de recueil de l’actimétrie était trop
courte et aurait dû se poursuivre tout au long de la journée. D’autre part, l’atteinte du
rythme circadien est responsable d’une altération de l’architecture du sommeil avec
une recrudescence du sommeil paradoxal à partir du troisième jour postopératoire. Il
aurait donc fallut évaluer le sommeil non pas sur deux nuits mais sur quatre nuits (1 en
préopératoire et les trois autres à J0, J1 et J2). Toutefois, le profil d’activité en SSPI est
important tout au long de la nuit, laissant supposer que cette période d’évaluation est
suffisante pour mesurer une altération de la quantité et de la qualité du sommeil et
ainsi pour mettre en évidence des différences significatives entre les groupes.
Troisièmement, nous n’avons pas évalué le temps total de sommeil avec
l’actimétrie. Ceci constitue un paramètre manquant car nous n’avons pas pu comparer
le temps de sommeil par évaluation subjective (échelle psychométrique et hétéro-
évaluation) avec l’évaluation objective. Ce paramètre n’est pas exploitable car les
durées de sommeils disponibles par actimétrie correspondent aux durées d’immobilité
du poignet et sont très largement surestimées.
Quatrièmement, nous avons recueilli comme critères secondaires les états
d’agitation et états délirants. Cependant ce recueil ne peut être standardisé car il ne se
base sur aucune échelle de mesure validée. De plus il aurait été intéressant d’évaluer
le syndrome confusionnel selon l’échelle du Mini Mental Score (MMS).
CONCLUSION :
Les facteurs perturbateurs environnementaux (bruit, lumière et nursing)
représentent près du tiers des causes d’altération du sommeil en réanimation et de fait
en SSPI. S’il parait très difficile de les supprimer, il est beaucoup plus facile d’atténuer
leur perception par l’encouragement du port de ces dispositifs comme le prouve notre
étude. Le port du masque oculaire et des bouchons auriculaires ne se limite pas à
lutter contre les facteurs perturbateurs environnementaux (bruit, lumière, nursing) lors
de l’évaluation subjective car la qualité du sommeil était conservée entre la nuit pré et
post opératoire dans le groupe « traitement » suggérant une efficacité sur des
paramètres encore inconnus et difficilement évaluables comme le stress du patient. La
généralisation de ces moyens simples, peu couteux, non invasifs et de bonne
tolérance semble être une alternative pertinente dans l’amélioration de la qualité du
sommeil postopératoire et devrait à notre sens être systématiquement proposée.
L’encouragement du port de ces dispositifs la veille au soir de l’intervention par
l’anesthésiste lors de la visite préopératoire, permettrait d’une part de familiariser le
patient avec les modalités de mise en place, améliorant ainsi la compliance de ces
dispositifs au cours de la nuit postopératoire et d’autre part pourrait améliorer la qualité
du sommeil préopératoire, ce qui semble être important dans le cadre d’une démarche
de réhabilitation préopératoire.
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ANNEXES :
ANNEXE 1 :
Lettre d’information et consentement remis au patient
Madame, Monsieur,
Vous êtes actuellement hospitalisé(e) dans l’unité de Surveillance
Post-Interventionnelle et d’Accueil des Polytraumatisés (CHU Pitié
Salpétrière, Paris) pour une surveillance prolongée dans les suites d’une
intervention chirurgicale.
Ce séjour dans notre unité va se dérouler en particulier pendant la
nuit (première nuit post-opératoire). Une étude clinique est en cours
(Novembre 2007 – Octobre 2008) et cherche tout d’abord à déterminer la
qualité du sommeil des patients transitant dans cette zone, mais aussi à
évaluer l’intérêt de dispositifs tels que des bouchons auriculaires et un
masque oculaire, semblable à celui proposé dans des avions long-
courriers. Ces dispositifs seront ou non proposés selon un protocole
prédéfini dit de randomisation. Pour cette évaluation, en accord avec les
Comités de Protection de Personnes, deux questionnaires portant sur la
qualité et la quantité de sommeil seront à remplir et un enregistrement de
la durée du sommeil au moyen d’un bracelet porté au poignet, utilisé dans
les centres du sommeil sera réalisé puis analysé par la suite.
L’analyse de ces examens (questionnaires et enregistrement de
l’actimétrie) sur environ 30 patients a pour but de recueillir un certains
nombres d’informations qui pourront faire l’objet d’une publication dans
un journal médical (destiné aux réanimateurs et neurologues), en
respectant bien sûr le plus strict anonymat des patients inclus. Par ailleurs,
vous pourrez à votre demande être tenu informé des résultats globaux de
l’étude, une fois celle-ci achevée.
Pour cela, la loi Française nous demande de recueillir votre consentement et
de vous informer de l’utilisation de ces données.
Nous souhaitons insister particulièrement sur certains points :
1. Aucun nouveau traitement ni aucun nouveau matériel n’ont été expérimentés pour les besoins de ce travail
2. Aucune modification de la pratique des soins proposés dans le cadre de cette chirurgie n’est réalisée.
3. Seule une amélioration de la qualité des soins est finalement attendue.
4. Vous avez la possibilité de vous retirer à tout moment de l’étude, quel qu’en soit le motif.
Veuillez recevoir, madame, monsieur, nos sincères salutations
Pr Langeron O. Dr Le Guen M.
Chef de Service Chef de Clinique
ANNEXE 1BIS:
FORMULAIRE D’INFORMATION DE PATIENTS INCLUS DANS UNE ETUDE
CLINIQUE OBSERVATIONNELLE
Je, soussigné(e), (nom, prénom en lettres majuscules) ……………………
………………………………… déclare que le docteur Le Guen m’a informé que
des données cliniques et d’actimétrie acquises durant mon passage en
Salle de Surveillance Post-Interventionnelle et d’Accueil des
Polytraumatisés (CHU Pitié Salpétrière, Paris) entre le 01/11/07 et le
31/10/08 allaient être utilisées dans une étude intitulée «Evaluation des
ear-plug et du masque oculaire facial sur la qualité de sommeil nocturne
des patients hospitalisés en Salle de Surveillance Post-Interventionnelle
(SSPI). ».
J’ai été informé du but et de la nature de l’étude. J’ai eu le temps
nécessaire et la possibilité de me renseigner sur cette étude et toutes les
questions que j’ai posées ont reçu une réponse satisfaisante.
J’ai été informé que les données nécessaires à cette étude pourront faire
l’objet d’un traitement informatisé par les médecins menant cette étude.
J’ai été informé que la présentation de ces données ne pourra pas
permettre mon identification directe ou indirecte. J’ai bien noté que mon
droit d’accès à ces données, ainsi que de rectification, s’exerce à tout
moment auprès du médecin en charge de l’étude conformément à la loi
« informatique et libertés » (article 40).
J’ai été informé que les données médicales me concernant resteront
strictement confidentielles. Leur consultation, y compris la consultation de
mon dossier médical, est restreinte aux seuls médecins impliqués dans
cette étude, ainsi qu’aux Autorités Sanitaires Françaises.
Je pourrai à tout moment demander des informations complémentaires au
Docteur Le Guen.
L’information qui m’est délivrée ne décharge pas les organisateurs de la
recherche de leurs responsabilités. Je conserve tous mes droits garantis
par la loi.
Je conserverai un exemplaire de ce formulaire d’information signé et daté
personnellement par les deux parties.
Signature du patient : Date (écrite manuellement) :
……………..
Signature de l’investigateur Date (écrite manuellement) :
……………..
Nom et prénom de l’investigateur :
ANNEXE 2 :
Questionnaire de sommeil de Spiegel
Le questionnaire porte sur les deux dernières nuits précédentes :
N1 = la nuit dernière = Jour de travail ou Jour de repos
N2 = il y a deux nuits = Jour de travail ou Jour de repos
1/ Délai d’endormissement : Combien de temps vous a-t-il fallu pour vous endormir la nuit
dernière ?
5 très peu de temps
4 peu de temps
3 moyennement de temps
2 longtemps
1 très longtemps (je suis resté éveillé très longtemps)
0 ne sait pas
2/ Qualité du sommeil : Avez-vous bien dormi ?
5 oui, de façon parfaite (d’un sommeil paisible, sans réveil nocturne)
4 oui, bien
3 moyennement bien
2 non, mal
1 non, très mal (sommeil agité, réveils fréquents)
0 ne sait pas
N1 __ N2 __
N1 __ N2 __
3/ Durée du sommeil : Combien de temps avez-vous dormi ?
5 très longtemps (je ne me suis pas réveillé spontanément)
4 longtemps
3 moyennement longtemps
2 peu de temps
1 très peu de temps (je me suis réveillé beaucoup trop tôt)
0 ne sait pas
4/ Réveils nocturnes : Vous êtes-vous réveillé au cours de la nuit ?
5 jamais (j’ai dormi d’une seule traite)
4 rarement
3 relativement souvent
2 souvent
1 très souvent (réveils répétés)
0 ne sait pas
5/ Rêves : Avez-vous fait des rêves ?
5 aucun
4 quelques uns seulement
3 modérément
2 beaucoup
1 énormément et des rêves particulièrement marquants
0 ne sait pas
N1 __ N2 __
N1 __ N2 __
N1 __ N2 __
6/ Etat le matin : Comment vous sentez-vous actuellement ?
5 en excellente forme
4 en bonne forme
3 moyennement en forme
2 en mauvaise forme
1 en très mauvaise forme : fatigué, abattu
0 ne sait pas
Score N1 = Score N2 =
Le questionnaire de Spiegel est utile pour juger de la qualité du sommeil. Il permet de
calculer un score qui va de 0 à 30. Plus ce score est élevé, plus la qualité du sommeil est bonne.
Un score < 18 est un indicateur de troubles du sommeil, et s’il est < 15 il s’agit d’un
score d’alerte sévère.
N1 __ N2 __
ANNEXE 2 bis :
Questionnaire adapté du Medical Outcomes Score – Sleep Scale (MOSS –
SS)
Questionnaire à l’inclusion du patient :
1 – Combien de temps en moyenne (en heures) vous a-t-il été nécessaire pour vous endormir durant les 4 semaines passées ?
2 – Combien de temps (en heures) en moyenne chaque nuit estimez-vous avoir dormi durant les 4 semaines passées?
3 – Combien de fois durant les 4 semaines passées, avez-vous eu le sentiment que votre sommeil n’était pas tranquille (agitation et mouvements nocturnes, sentiments de tension, sentiments d’avoir parlé…) ?
4 – Combien de fois durant les 4 semaines passées, avez-vous eu suffisamment d’heure de sommeil pour vous sentir frais et reposé ?
5 - Combien de fois durant les 4 semaines passées, vous êtes-vous éveillé avec la sensation de souffle court ou de maux de tête matinaux ?
6 – Combien de fois durant les 4 semaines passées, vous êtes vous senti encore fatigué, groggy ?
7 – Combien de fois durant les 4 semaines passées, avez-vous eu des difficultés à vous endormir ?
8 – Combien de fois durant les 4 semaines passées, avez-vous eu des réveils nocturnes et des difficultés à vous rendormir?
9 – Combien de fois durant les 4 semaines passées, pensez-vous avoir eu des difficultés à tenir éveillé ?
10 – Combien de fois durant les 4 semaines passées, avez-vous ronflé pendant votre sommeil ?
11 – Combien de fois durant les 4 semaines passées, avez-vous fait une sieste d’une durée supérieure à 15 minutes?
12 – Combien de fois durant les 4 semaines passées, avez-vous obtenu la quantité de sommeil totale qui vous semblait nécessaire ?
Questionnaire modifié de MOS-SS distribué le lendemain midi :
1 – Combien de temps (en heures) vous a-t-il été nécessaire pour vous endormir la veille au soir?
2 – combien de temps (en heures) en moyenne estimez-vous avoir dormi cette nuit ?
3 – Avez-vous eu le sentiment la nuit passée que votre sommeil n’était pas tranquille (agitation et mouvements nocturnes, sentiments de tension, sentiments d’avoir parlé…) ?
4 – Avez-vous eu le sentiment ce matin de vous éveillé(e) en forme et reposé(e) ?
5 - Vous êtes vous éveillé(e) avec la sensation de souffle court ou de maux de tête matinaux ?
6 – Vous sentez vous encore fatigué(e), groggy ?
7 – Avez-vous eu la sensation d’avoir une difficulté particulière à vous endormir la nuit passée ?
8 – Combien estimez-vous avoir eu des réveils nocturnes et de difficultés à vous endormir de nouveau cette nuit ?
9 – Combien de fois dans la journée pensez-vous avoir eu des difficultés à tenir éveillé(e) ?
10 – Avez-vous ronflé pendant votre sommeil cette nuit ?
11 – Avez-vous fait la sieste ou ressentez-vous la nécessité d’en faire une ? (durée supérieure à 15 minutes) ?
12 – Avez-vous, cette nuit, obtenu la quantité de sommeil totale qui vous semblait nécessaire ?
ANNEXE 3 :
Modèles des matériels utilisés :
Dispositif ear-plug :
Masque oculaire :
Bracelet actimètre :
Matériel à disposition par la Fédération du Sommeil (Dr Arnulf) – CHU Pitié-Salpétrière.
Actimétrie longue durée : CCAM – AZQP 0001
RESUME :
Introduction : La Salle de Surveillance Post-Interventionnelle (SSPI) ne semble pas
être un environnement propice au repos des patients devant rester la nuit pour
surveillance compte tenu du bruit et de l’intensité lumineuse persistante. Le but de
cette étude est d’évaluer l’efficacité de certains dispositifs simples tels que le masque
oculaire et les bouchons auriculaires dans l’amélioration de la qualité et de la durée du
sommeil chez ces patients.
Patients et méthode : Après accord du Comité local de Protection des Personnes
(CPP), cette étude prospective randomisée monocentrique concerne les patients
opérés d’une chirurgie lourde et nécessitant une surveillance continue en SSPI la
première nuit post-opératoire. Ne sont pas inclus les patients présentant une
dysfonction cognitive post-opératoire précoce ainsi que ceux nécessitant une
assistance ventilatoire ou une éventuelle procédure invasive au cours de la nuit.
L’attribution d’un dispositif auriculaire et d’un masque oculaire (groupe traitement) ou
non (groupe contrôle) a été déterminée par randomisation. La qualité du sommeil chez
ces patients, critère principal de l’étude, a été mesurée selon trois méthodes
différentes : une mesure objective par actimétrie, une hétéro-évaluation horaire par une
infirmière, et les questionnaires d’autoévaluation (échelles de Spiegel et de MOSS).
Les données descriptives sont exprimées en moyenne +/- SD ou en pourcentage, et
une comparaison entre les deux groupes a été réalisée par un test T de Student ou de
Chi-2 corrigé selon les cas (SPSS 10,0). Une valeur de p < 0.05 est considérée comme
significative.
Résultats : 46 patients opérés principalement d’une chirurgie vasculaire aortique
(85%) ont été inclus. Il existe une différence significative entre les 2 groupes pour la
qualité du sommeil : Le score de Spiegel est significativement moins altéré (20 ±4 /30
contre 15 ±5 /30 dans le groupe « contrôle » p =0.006), la profondeur du sommeil est
significativement améliorée (diminution des réveils face aux soins 9% [4-22]versus
42% [13-71] dans le groupe contrôle p =0.03), tout comme l’état de fatigue diurne
(besoin de faire une sieste dans 95% [85-100] dans le groupe « contrôle » contre 50%
[20-80] dans le groupe « traitement »).
Discussion : Cette étude démontre qu’une mesure simple telle que le port d’un
masque oculaire associé à des bouchons auriculaires améliore la qualité du sommeil
des patients ayant subit une intervention chirurgicale et devant rester la nuit pour
surveillance en SSPI. La généralisation de ces dispositifs pourrait donc améliorer le
confort et la tolérance aux soins post-opératoires.