L’AUTOMESURE TENSIONNELLE :
MISE AU POINT
ESTHER SEBBAN, HÉLÈNE LELONG, JACQUES BLACHER
Unité hypertension artérielle Prévention et Thérapeutique Cardiovasculaires, Centre de Diagnostic et de Thérapeutique, Hôpital Hôtel-Dieu, AP-HP, place du
Parvis Notre Dame, 75004, Paris.
Résumé :
L’automesure tensionnelle en complément de la méthode conventionnelle, est devenue indispensable
pour confirmer l’HTA, mais aussi pour l’introduction ainsi que l’adaptation de traitements
antihypertenseurs. Elle permet notamment de dépister une HTA blouse blanche ou une HTA masquée
dont le retentissement cardiovasculaire et l’éventuelle mise en route de traitement en dépend.
Sa valeur pronostique et son intérêt sont reconnus par les différentes communautés d’experts, bien qu’il
existe plusieurs protocoles de mesure préconisés.
Celui retenu en France se fonde sur la règle des trois.
Le médecin généraliste et le patient sont au premier plan dans la pratique de l’automesure; le premier
ayant un rôle primordial dans la promotion ainsi que l’interprétation des résultats; le second dans
l’implication de sa maladie.
1
Par ailleurs, cette pratique ne convient pas à tous les patients et présente certaines limites que nous
présenterons. La Mesure Ambulatoire de Pression Artérielle reste une alternative complémentaire tout
aussi contributive en terme de spécificité et sensibilité.
Mots clés : Recommandations/ Automesure tensionnelle/ Hypertension artérielle/ Hypertension
blouse blanche/ Hypertension masquée.
Introduction:
Depuis plus d’une décennie, l’automesure tensionnelle (AMT) est considérée comme un outil nécessaire
dans le diagnostic et le suivi de l’hypertension artérielle (HTA) ; et est actuellement devenue
indispensable en complément de la mesure au cabinet.
En effet, les recommandations établies en 2013 par la Société Française d’Hypertension artérielle
(SFHTA) attribuent une place centrale à la répétition des mesures dans l’histoire de la maladie
hypertensive; et plus particulièrement à celles réalisées en dehors du cabinet: « les données scientifiques
récentes accordent aux mesures réalisées en dehors de l’environnement médical la valeur de décision la
plus importante ». (1)
Ainsi, il existe deux manières de mesurer la tension en dehors du cabinet médical: la mesure
ambulatoire de pression artérielle (MAPA) et l’AMT. Celle-ci devient alors un outil clé tant dans le
diagnostic que dans le suivi de l’HTA.
2
Pourtant le concept d’AMT fut longtemps contesté. Il vit le jour pour la première fois en 1930 par un
élève de Georges E. Brown de la Mayo Clinic (Minessota) qui, en empruntant un tensiomètre, étudia
pendant 3 ans sa pression artérielle au domicile (2). Dix ans plus tard, David Ayman et Archie Goldshine
du Beth Israel Hospital réalisent la première étude à ce sujet publiée dans l’American Journal of
Medical Sciences qui compare 40000 AMT à 2800 mesures hospitalières et découvrent que la pression
artérielle mesurée à domicile est en moyenne plus basse qu’au cabinet médical (3).
Puis dans les années 1970, les premiers autotensiomètres électroniques apparaissent sur le marché ce qui
pousse progressivement les patients à surveiller leur pression artérielle à domicile. Malgré le scepticisme
initial de la communauté médicale voyant d’un mauvais œil ces patients qui réalisent un acte propre aux
médecins, de nombreuses études scientifiques se penchent sur le sujet et révèlent d’une part l’existence
de formes d’HTA particulières telles que l’HTA blouse blanche et l’HTA masquée; et d’autre part une
meilleure précision du niveau tensionnel quotidien des sujets.
De ce fait, actuellement les données de la littérature internationale concordent toutes sur la supériorité de
l’AMT dans le diagnostic et le suivi de l’HTA mais aussi dans l’évaluation du pronostic
cardiovasculaire et sa valeur prédictive d’atteinte des organes cibles, comparativement à la méthode
usuelle de mesure tensionnelle au cabinet médical.
Sous réserve d’une bonne utilisation par les patients, ceux-ci deviennent alors les premiers acteurs
de leur prise en charge ce qui favorise probablement l’observance thérapeutique.
Mais le pari n’est pas encore gagné malgré tout, car l’utilisation de l’AMT notamment dans le suivi
nécessite une implication dans la formation des soignants et dans l’éducation des patients.
Quelles sont donc les raisons qui ont conduit à trouver une alternative à la mesure conventionnelle de
tension artérielle?
3
Quel est alors l’état des lieux dans la littérature et en pratique clinique?
Qu’en est-il de l’applicabilité? Comment s’organise le système de soins actuellement au sujet de
l’AMT ?
I. Pourquoi mesurer la PA en dehors du cabinet médical? :
4
La mesure de PA au cabinet reste la méthode de référence pour le dépistage et la prise en charge de
l’hypertension artérielle et reste la mesure la plus utilisée dans les essais thérapeutiques et les études
épidémiologiques. Cependant, elle n’est pas forcément représentative du niveau de PA quotidien des
patients. Les différences entre PA mesurée en consultation et niveau de pression d’un individu sont liées
à la fois à des facteurs physiologiques intrinsèques du patient mais aussi à des facteurs extrinsèques tels
que les moyens de mesures et le clinicien.
De plus, l’existence d’une HTA masquée ou d’une HTA blouse blanche peut amener à une erreur quant
au statut hypertensif et conduire à une prise en charge thérapeutique inadaptée.
A. Mauvaise estimation de la pression artérielle:
1. Variabilité tensionnelle physiologique:
Les mesures tensionnelles obtenues au cabinet bien que répétées en consultation sont prises à un instant
t et peuvent être non représentatives de la PA réelle du sujet du fait de variations physiologiques au
cours de la journée. En effet, physiologiquement, la PA s’élève rapidement le matin dès les minutes qui
précèdent le lever, varie ensuite au gré des activités et de l’environnement pour diminuer
progressivement en fin de soirée et rester à un niveau bas pendant la nuit afin de mettre le système
cardiovasculaire au repos. Dans la population hypertendue on distingue deux catégories en fonction de
ces variations circadiennes: les hypertendus non dippers dont la PA ne diminue pas voire s’élève
pendant la nuit et les hypertendus dippers définis par une baisse de plus de 10% de la PAS nocturne par
rapport à la PAS diurne.
Cette distinction est importante car il a été démontré que les sujets « non dippers » avaient un risque en
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terme de morbi-mortalité cardiovasculaire plus élevé que les « dippers » (4).
D’autre part, la variabilité de tension existe notamment au fil des années, l’âge étant le facteur de risque
principal d’HTA.
De plus, il existe un mécanisme physiologique appelé le baroréflexe à l’origine d’une variabilité
instantanée. Ce mécanisme physiologique permet en fait d’adapter la PA via le système sympathique et
parasympathique au gré des modifications environnementales (émotion, stress, caféine, tabac, certains
médicaments) en agissant sur l’activité cardiaque et le tonus vasculaire. Cette fonction de régulation est
précocement altérée chez les hypertendus.
Ces paramètres existantss, la multiplication des mesures est indispensable.
2. Erreurs liées aux appareils de mesure :
La mesure de PA au cabinet médical se fait par deux méthodes.
La méthode auscultatoire, la plus ancienne, consiste à détecter les bruits de Korotkoff dont le premier
audible correspond à la PAS et le dernier à la PAD. Pour cela deux types d’appareils sont utilisés:
- le sphygmomanomètre à mercure: appareil de référence, il consiste en une colonne à mercure
qui permet de lire les valeurs de PA en fonction des bruits entendus au stéthoscope.
L’avantage est qu’il donne des résultats fiables et précis et qu’il est peu sensible au dérèglement. Il est
toutefois recommandé de le vérifier tous les 12 mois.
Cependant, son utilité est limitée (voire interdite) par la plupart des autorités gouvernementales des pays
de l’UE du fait de la toxicité du mercure, et la fragilité du tube en verre en limite son transport.
6
- appareils anéroïdes: qui permettent des mesures précises d’autant que non toxiques et peuvent
être transportés. Ils nécessitent un recalibrage plus fréquent (tous les 6 mois).
Cette méthode auscultatoire est source de plusieurs biais liés à la subjectivité du clinicien tel qu’une
approximation des mesures et une divergence de perception inter-opérateur des bruits de Korotkoff ainsi
que l’erreur parallaxe.
La méthode oscillométrique utilisant des appareils semi automatiques est celle qui est actuellement
recommandée par la SFHTA. Elle permet l’annulation des biais liés à l’observateur mais aussi, du fait
de la simplicité des appareils électroniques et de la possibilité d’enregistrer les résultats, elle constitue la
meilleure candidate à l’automesure.
En outre, il a été démontré sa fiabilité même lorsque le brassard recouvre un vêtement fin ce qui peut
éviter l’action de déshabillage et respecter de manière plus stricte les conditions de repos précédant la
mesure.
Les coûts varient de 50 € (lecture directe instantanée) à 3000 € (pour ceux avec enregistrements
programmés, mémorisés et imprimantes). Il existe à l’heure actuelle une centaine de modèles
commercialisés qui ne sont pas toujours fiables, l’AFSSAPS a donc mis à jour une liste d’appareils
homologués.
En cas d’arythmie, d’extrasystoles et de fièvre il est préférable de répéter les mesures car elles sont
sujettes à caution.
3. Erreurs liées au clinicien :
Elles sont tout d’abord imputables au non-respect strict des recommandations, en effet, pour rappel, la
mesure de PA au cabinet doit se faire après un repos de plusieurs minutes au calme, en position assise
7
ou couchée avec un brassard adapté à la circonférence du bras. (1)
Quelques erreurs sont alors à éviter :
- Le brassard ne doit pas être trop serré, et être placé à la saignée du coude sans recouvrir un vêtement
pour ne pas comprimer l’artère brachiale car cela peut surestimer les résultats.
- Le dégonflage doit être lent et régulier et il faut respecter un temps de repos entre deux mesures
successives.
Une mauvaise vision ou audition du clinicien constituent évidemment une source d’erreurs avec la
méthode auscultatoire, mais il existe également une tendance volontaire à l’arrondissement des chiffres
tensionnels avec les appareils semi-automatiques pouvant conduire à une inertie thérapeutique.
B. Différentes formes d’HTA :
La pratique des mesures de PA en dehors du cabinet a permis d’identifier deux types d’HTA : l’HTA
blouse blanche et l’HTA masquée.
1. L’HTA blouse blanche :
L’HTA blouse blanche est définie par une PA supérieure ou égale à 140/90 mmHg en consultation mais
normale en dehors d’un environnement médical, elle peut donc entrainer des erreurs thérapeutiques
(traitement médicamenteux de sujets non hypertendus ou excès de traitement chez des hypertendus
connus).
Ce phénomène observé en 1983 à partir de mesures intra-artérielles, représente actuellement 15-30% de
la population, augmente avec l’âge et est plus fréquent pendant la grossesse (5).
8
Il faut alors devant toute HTA découverte au cabinet, réaliser une mesure en dehors du cabinet médical
afin de confirmer la permanence de l’HTA. L’AMT est donc l’examen d’excellence pour le diagnostic.
L’HTA blouse blanche a un meilleur pronostic cardiovasculaire qu’une HTA permanente (6)(7), mais
certaines données de littérature démontrent l’existence d’ un retentissement sur le myocarde et un risque
plus élevé de développer une HTA permanente que la population strictement normotendue.
Une analyse des données de la PAMELA study, étude multicentrique menée à Milan incluant un large
échantillon représentatif de la population générale (n=3200), de sujets de 25 à 74 ans, dont l’objectif
initial était de déterminer les valeurs seuils d’HTA avec la MAPA et l’AMT avait montré que la
prévalence de l’HTA blouse blanche était de l’ordre de 9-12%. Parmi ces sujets, on avait retrouvé une
prévalence plus importante d’hypertrophie ventriculaire gauche et d’élévation de l’index de masse
ventriculaire gauche (objectivés par échographie cardiaque) que chez les sujets normotendus au cabinet
et au domicile. (8)
Le suivi à long terme des sujets de l’étude PAMELA a permis de démontrer 10 ans plus tard que le
risque de développer une HTA permanente (objectivée par mesures au cabinet et en ambulatoire) était
plus élevé chez les patients ayant initialement une HTA blouse blanche (OR: 2.51, p<0.0001). (9)
Les recommandations actuelles estiment donc qu’il n’est pas indiqué de traiter une HTA de
consultation, mais de surveiller d’avantage la PA de ces patients.
2. L’HTA masquée :
L’HTA masquée correspond, elle, à une pression artérielle normale au cabinet alors qu’élevée en
dehors. Elle peut concerner des sujets hypertendus déjà traités et donc insuffisamment contrôlés.
Elle est d’origine inconnue, plus fréquente chez des individus avec FDRCV et augmente avec l’âge.
9
Ce phénomène a été clairement identifié depuis les années 2000 notamment grâce à l’étude de cohorte
française SHEAF (6). Cette étude prospective incluait 4939 patients hypertendus âgés de plus de 60 ans
suivis en médecine générale et avait pour objectif d’évaluer la valeur pronostique de la PA mesurée en
AMT par rapport à la mesure conventionnelle au cabinet. Elle a permis finalement d’identifier un sous-
groupe de 9 % de patients hypertendus ayant une PA normale au cabinet mais élevée au domicile et de
démontrer que l’incidence d’évènements CV dans cette population était élevée (30.6 cas pour 1000
patients-année) et proche de celle ayant une HTA non contrôlée (25.6 cas pour 1000 patients-année).
Après analyse multivariée en prenant comme référence un groupe d’hypertendus contrôlés au cabinet et
à domicile, le RR d’évènements CV était 2 fois plus élevé en cas d’HTA masquée (RR: 2.06 IC 95%
1.22-2.4) et d’HTA non contrôlée (RR: 1.96 IC95% 1.27-3.02).
L’hypertension masquée serait aussi voire plus dangereuse qu’une hypertension classique en terme de
risque cardiovasculaire justifiant l’importance de réaliser une automesure tensionnelle afin de la
dépister, et d’adapter le traitement plus précocement.
L’étude de cohorte Française des Trois Cités (10), publiée en 2013 dans Journal of Hypertension,
évaluant le risque à 1 an de développer une HTA permanente chez des sujets âgés non traités ayant soit
une HTA blouse blanche soit une HTA masquée ; a retrouvé sur une cohorte de 1481 patients âgés de 73
à 97 ans une prévalence d’HTA masquée non négligeable, de l’ordre de 40%, et un risque à 1 an de
développer une HTA permanente multiplié par 17 (OR = 16.8, P < 0.0001).
L’étude PAMELA retrouvait les mêmes constatations, le risque de développer une HTA permanente était
plus élevé chez les personnes présentant initialement une HTA masquée avec un OR de 1.78
(p<0.0001). (8)
10
La pratique des mesures ambulatoires et plus particulièrement d’automesure est donc particulièrement
indiquée chez les sujets âgés.
Méconnaitre cette forme d’HTA expose à un sous diagnostic et un sur-risque cardiovasculaire; les
mesures ambulatoires sont donc indispensables en complément de la mesure conventionnelle.
Outre l’AMT, il existe la MAPA. Ces deux méthodes ne sont pas compétitives mais complémentaires,
répondant à des besoins différents.
II. Automesure :
L’automesure tensionnelle, consiste à la prise de tension au domicile par le patient lui-même de manière
répétée sur plusieurs jours. Le diagnostic d’hypertension est obtenu quand la PA moyenne
≥135/85mmHg.
A. Preuve de son intérêt:
De nombreuses études ont été menées concernant l’AMT, cette méthode a fait la preuve de son intérêt
dans le diagnostic, du fait de sa meilleure spécificité par rapport à la mesure au cabinet et d’une bonne
sensibilité.
Dans une méta-analyse de 20 études (5) comparant la sensibilité et spécificité des mesures tensionnelles
prises au cabinet et par l’AMT, en prenant comme gold standard la MAPA ; la sensibilité de l’AMT
était identique à celle de la mesure au cabinet médical mais sa spécificité était par contre
supérieure.
Ainsi, l’AMT ne doit pas se substituer aux mesures du cabinet mais doit se faire en complément afin de
dépister les faux positifs et les faux négatifs.
11
Cette méta-analyse montrait notamment que :
- l’AMT est un meilleur outil de mesure que la mesure au cabinet pour établir le diagnostic d’HTA
mais n’est pas meilleure que la MAPA.
- pour des niveaux tensionnels élevés l’AMT est moins sensible et moins spécifique que la MAPA
pour le diagnostic d’HTA.
- pour des chiffres tensionnels bas l’AMT est plus sensible et moins spécifique que la MAPA pour le
diagnostic d’HTA.
Par ailleurs, sa valeur pronostique dans l’évaluation du risque d’évènements CV est bien établie et est
supérieure à celle de la mesure clinique. L’étude Ohasama a montré en suivant 1789 patients japonais
pendant 6,6 ans qu’il existait un lien entre les valeurs de PA systolique en AMT et la mortalité CV ; en
effet une augmentation de 1 mmHg de PAS en AMT augmente la mortalité CV de 2 %. (11)
L’étude SHEAF (6) rejoignait ces résultats en démontrant qu’une augmentation de PAS de 10 mmHg
en automesure était corrélée à une augmentation du risque d’événement CV de 17.2 % et qu’une
élévation de 5 mmHg de PA diastolique augmentait celui-ci de 11.7%. Par contre pour la même
augmentation avec la méthode conventionnelle il n’y’avait pas d’augmentation significative.
Une méta-analyse (5) comparant la valeur prédictive d’évènements cardiovasculaires (ECV) (tels que
mortalité cardiovasculaire, infarctus du myocarde, artériopathie oblitérante des membres inférieurs,
insuffisance cardiaque, intervention vasculaire, hospitalisation pour angine de poitrine) des mesures de
la MAPA et de l’AMT versus la mesure au cabinet et a démontré que l’AMT prédit mieux la morbi-
mortalité cardiovasculaire que les mesures au cabinet dans 2 études sur 3.
12
Les mesures obtenues par AMT sont également fortement corrélées à l’atteinte des organes cibles (cœur,
rein etc.).
De plus, l’AMT améliore l’adhésion du patient à son traitement et favorise l’observance, l’étude Mallion
et Al publiée en 2001 (12) dans Journal of Hypertension montrait qu’on obtient un meilleur contrôle
tensionnel avec l’AMT qu’avec la mesure clinique seule : 27% des sujets traités par au moins un
antihypertenseur étaient à l’objectif thérapeutique avec l’automesure contre 23% avec la mesure au
cabinet.
B. Modalités de l’automesure:
1. Quels appareils utiliser ?
L’automesure doit se faire à l’aide d’appareils électroniques. En France aucune directive de fabrication
n’existe ce qui est responsable d’une distribution d’appareils de qualité inégale. Ils doivent donc être
soumis à une validation sanitaire, notre rôle ainsi que celui des pharmaciens est déterminant et nous
pouvons nous référer à la liste d’appareils validés que L’ AFSSAPS publie régulièrement. (Annexe 1).
Il existe plusieurs types d’appareils :
- les appareils avec brassard au bras, à privilégier car plus fiables. Ils doivent cependant avoir une
taille adaptée à la circonférence du bras.
Il faut respecter une position adéquate : coude posé sur la table avec avant-bras tendu.
- les appareils avec brassard au poignet, d’avantage soumis à une variation des résultats du fait de
la position du bras et de la modification progressive de PA en périphérie. Il s’utilise en posant la
main du poignet portant l’appareil sur l’épaule opposée, le niveau de mesure devant être à
13
hauteur du cœur.
Actuellement, en France on estime que plus d’un tiers des hypertendus traités possèdent un
appareil d’automesure.
Selon l’étude FLAHS de 2010 (13), 6.78 millions d’appareils d’automesure sont en circulation en France
dont 3.8 chez des hypertendus traités. Cette possession a augmenté entre 2004 et 2010 (19% de la
population d’étude en 2010) et augmente avec l’âge à la fois dans la population générale (ce qui peut
permettre d’identifier d’avantage d’HTA masquée) et dans la population hypertendue.
Cela étant, l’étude rapporte une proportion plus importante d’appareils avec brassard au poignet
représentant quasiment le double des brassards au bras.
Nous devons donc mieux éduquer nos patients à ce sujet.
Depuis quelques années, pour faciliter l’utilisation et permettre une meilleure précision des résultats, on
peut proposer la télémédecine qui consiste à utiliser des tensiomètres dont les résultats sont enregistrés
automatiquement sur un site sécurisé auquel le médecin y a accès directement tel que le site
automesure.com.
De plus des tensiomètres connectés à un smartphone ou une tablette avec enregistrement simultané des
résultats sont mis sur le marché et validés.
2.Quel protocole de mesure ? :
Il existe plusieurs protocoles d’automesure à domicile dont le point commun est la répétition de celles-ci
sur plusieurs jours.
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En France selon la SFHTA (1), l’AMT repose sur la règle des trois c’est à dire 3 mesures de PA au bras
après repos de 5 minutes, en position assise le matin avant prise des traitements, et 3 le soir avant le
coucher pendant 3 jours de suite, chacune espacées d’au moins 1 minute. Il faut insister sur le fait de
recopier les résultats tels quels sur un carnet ou feuille de protocole et de calculer la moyenne des 18
mesures obtenues sur les 3 jours.
Il faut notamment proposer si le budget le permet, l’utilisation d’appareils avec enregistrements
automatique des résultats.
Par contre, l’ESH et les recommandations canadiennes (14) propose un schéma différent en se fondant sur
plusieurs études de pronostic cardiovasculaire ayant utilisé l’AMT et sur les études de reproductibilité et
recommande deux mesures matin et soir pendant 7 jours en enlevant les résultats du premier jour dans le
calcul de la moyenne. C’est effectivement un schéma un peu plus précis mais plus contraignant.
3 . Quand ? :
La SFHTA recommande devant toute HTA non sévère de confirmer celle-ci par une mesure en dehors
du cabinet, mais aussi avant toute instauration ou modification de traitement antihypertenseur et dans le
cadre du suivi du sujet hypertendu surtout si l’HTA est mal contrôlée en consultation ou qu’elle est
résistante. Elle est bien sûr recommandée en cas de suspicion d’effet blouse blanche, de suspicion
d’HTA masquée (PA normale au cabinet avec atteinte des organes cibles par exemple) ou de suspicion
d’hypotension orthostatique. (Annexe 2)
Etant moins coûteuse, plus accessible et ayant une performance quasi identique à la MAPA en terme de
diagnostic et de pronostique d’atteinte des organes cibles, l’automesure est souvent la méthode de choix.
L’ESC quant à elle ne recommande l’utilisation de l’AMT dans le diagnostic de l’HTA que si la
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réalisation d’une MAPA est mal tolérée. Son éventuelle utilisation tout comme celle de la MAPA dans
le cadre du suivi et avant tout traitement n’est pas évoquée.
Quant aux recommandations canadiennes, les recommandations de l’utilisation de l’AMT sont moins
formelles que la SFHTA. Celles-ci laissent le choix entre mesure conventionnelle ou mesures
ambulatoire de type MAPA ou AMT lorsque la PA est entre 140-179/90-109 en l’absence d’atteinte des
organes cibles afin d’établir le diagnostic d’ HTA.
Elle ne propose aussi la surveillance de PA par AMT que dans certaines situations :
- diabète sucré
- néphropathie chronique
- suspicion de mauvaise observance
- suspicion d’HTA blouse blanche ou masquée
En somme, la valeur pronostique et l’intérêt de l’AMT dans le diagnostic et le suivi de l’HTA sont bien
établis mais les différentes communautés d’experts ne lui accordent pas toutes la même place.
C. Limites/freins possibles:
En 2008, une étude anglaise (15) démontrait qu’environ 43% des patients hypertendus pratiquaient
l’AMT. En France, on estime qu’un hypertendu sur trois (27%) est en possession d’un appareil
d’automesure en 2006 (13).
Pourquoi n’arrive-t-on pas encore à une meilleure proportion et comment y arriver ?
16
1. Coût :
Le prix des appareils varie de 50 € à 130€ dont les plus chers correspondent à ceux avec
enregistrement des données ou aux appareils connectés de type tablettes et smartphones ou
télémédecine.
A l’heure actuelle, en France il n’existe pas encore de prise en charge par l’assurance maladie, mais
depuis 2013 celle-ci organise un plan d’action visant à distribuer gratuitement des appareils
d’automesure aux médecins généralistes qui en font la demande afin de pouvoir les prêter aux
patients. La distribution se fait sur simple demande du médecin sur le site AMELI via son
identifiant professionnel. Ces appareils sont à enregistrement automatique et permettent de
visualiser les résultats après rendu de l’appareil. L’objectif étant de promouvoir d’une part
l’utilisation de l’AMT dans le diagnostic de l’HTA, et d’autre part de faciliter l’accès des
autotensiomètres aux patients qui n’auraient pas les moyens de s’en procurer. Ce plan d’action a
aussi pour volonté la réduction de 15% de l’initiation de traitements antihypertenseurs en identifiant
une HTA blouse blanche.
2. Formation des soignants:
Un manque de formation des médecins généralistes quant à l’importance de l’AMT dans la prise en
charge de tout patient hypertendu représente sans aucun doute un frein à sa pratique.
Un programme de promotion de l’AMT (inclus dans le cadre du plan de distribution gratuite des
appareils) auprès des médecins généralistes a été mis en œuvre par l’Assurance Maladie, d’une part
en élaborant un MEMO validé par la SFHTA, la HAS et le Collège de Médecine Générale, et
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d’autre part en diffusant les informations nécessaires au travers de courriers, de visites médicales ou
via le site AMELI.
Une enquête auprès de 4 centres de CPAM (Aude, Aube, Tarn et Isère) réalisée entre mai et
novembre 2013 montraient des résultats satisfaisants de cette promotion ; en effet, 74 % des
appareils d’AMT disponibles avaient été commandés par les médecins généralistes et 85 % des
généralistes fournis avaient proposé l’utilisation de l’AMT à leurs patients. (16)
Bien que réalisée par le patient, l’AMT reste néanmoins un acte médical qui impose une
prescription et le respect des certaines contre-indications (terrain anxieux…) et une interprétation
des résultats par le médecin lui-même. Elle ne doit pas se substituer à la prise de PA lors de chaque
consultation. Par contre, il est important de respecter les contre-indications et d’adapter la
prescription aux patients avec troubles du rythme, troubles anxieux ou obsessionnels, patients isolés
avec troubles cognitifs.
Les pharmaciens sont aussi concernés par cette formation, en effet ils doivent être formés sur les
appareils validés par l’AFSSAPS qu’ils peuvent délivrer et pourraient aussi participer à l’éducation
du patient quant à l’utilisation de l’appareil, le bon positionnement et l’enregistrement des résultats.
3.Education des patients:
L’éducation du patient à l’automesure est de la responsabilité avant tout autre du médecin
généraliste qui doit motiver son utilisation et doit informer sur (17) :
- l’équipement : nécessité d’appareils validés, brassard adapté, vérification de l’appareil une fois par
an.
- l’utilisation de l’appareil.
18
- le protocole d’automesure
- les conditions de mesure de PA
- la restitution des résultats
- les chiffres tensionnels nécessitant une consultation en urgence
Elle devrait requérir un temps dédié en consultation (par exemple lors de la consultation d’annonce
du diagnostic d’HTA et à chaque consultation de renouvellement d’ordonnance) pour expliquer les
modalités de prise d’automesure et promouvoir son utilisation avant chaque consultation. Cette même
enquête de la CNAM avait montré que chez 80% des médecins généralistes il fallait moins de 10
minutes pour expliquer l’AMT aux patients.
Nous pouvons par ailleurs remettre aux patients des outils éducatifs disponibles sur le site
automesure.com avec explication du protocole et des conditions de mesure ainsi que des grilles de
relevés des résultats si il ne dispose pas d’appareil à mémoire. (Annexe 3)
4. Populations:
L’automesure est effectivement moins contributive dans certaines populations, tels que :
- Les sujets âgés avec troubles cognitifs ou vivant en institution.
L’enjeu de l’automesure est majeur dans la population âgée du fait de la prévalence d’HTA
croissante avec l’âge et de celle d’HTA masquée. Il faut alors promouvoir « l’hétéromesure » qui
consiste à la prise de PA selon la règle des trois par des aidants non professionnels de santé. Cela
sous-entend donc une éducation des aidants qui peut se faire au cabinet ou en maison de retraite par
le médecin traitant ou par l’utilisation d’outils éducatifs.
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- Insuffisance rénale terminale : on note une diminution de la performance des appareils
oscillométriques du fait de la rigidité artérielle et peu d’appareils ont été validés chez ces patients.
Cependant, il est important de promouvoir son utilisation afin d’obtenir un meilleur contrôle
tensionnel mais également et parce que sa valeur prédictive d’évènements CV et d’évolution en
insuffisance rénale terminale est supérieure à celle de la mesure au cabinet.
D. Alternative :
En cas d’impossibilité de réaliser l’AMT, la méthode alternative, est la MAPA. Considérée comme
« gold standard » dans plusieurs « Guidelines », elle répond à des attentes bien précises.
Elle consiste à mesurer la tension artérielle sur 24 heures et analyse les variations de pression artérielle
dans des conditions normales d'activité quotidienne, au repos et pendant la nuit.
Avec cette méthode, on définit l’hypertension artérielle par une PA diurne supérieure ou égale à 135/85
mmHg et une PA nocturne ≥ à 120/70 mmHg ou encore par une PA moyenne sur les 24h > à 130/80
mmHg.
Elle permet aussi de :
- Vérifier l’efficacité et la tolérance d'un traitement antihypertenseur dont une hypotension
artérielle,
- Eliminer l’effet blouse blanche, ou l’HTA masquée,
- Distinguer le profil dippers versus non dippers.
20
De nombreuses études ont été menées afin d’évaluer l’apport prédictif de la MAPA sur la morbi-
mortalité cardiovasculaire par rapport à la méthode usuelle du cabinet et démontraient que la MAPA est
plus prédictif de morbi-mortalité cardiovasculaire que la mesure au cabinet. (18)
Une méta analyse comparant la valeur prédictive d’évènements cardiovasculaires (ECV) des mesures de
la MAPA, de l’AMT et de la mesure au cabinet rapporte que la MAPA prédit mieux la survenue d’ECV
que la mesure conventionnelle dans 8 études sur 9 (5), l’étude Fagard de 2005 constatait qu’il n’ y’avait
pas de différence entre les deux méthodes ambulatoires.
Cependant, cette technique est la plus chère, non remboursée par l’Assurance Maladie en France, elle est
moins reproductible et moins accessible que l’AMT et ne permet pas d’impliquer le patient dans sa prise
en charge.
Il semble alors judicieux de ne pas mettre en concurrence les deux mesures ambulatoires, et de les
utiliser en fonction du patient et de la situation clinique.
Conclusion:
L’AMT représente un acte médical incontournable. Toutes les données de la littérature internationale
attestent le lien plus étroit entre les chiffres de pression artérielle mesurés par automesure et la survenue
d’évènements CV que les chiffres mesurés par le médecin.
De nos jours, elle fait partie intégrante des recommandations et doit être réalisée systématiquement afin
de confirmer la permanence de l’HTA. Elle permet également de dépister l’HTA blouse blanche ainsi
que l’HTA masquée.
En plus de ses fins diagnostiques, elle a des fins thérapeutiques car il est recommandé selon la SFHTA
21
d’avoir une mesure en dehors de l’environnement médical avant toute institution ou modification d’un
traitement antihypertenseur. Il a été clairement démontré que cette prise en compte permettait d’éviter
une inertie thérapeutique ou au contraire une intensification inutile.
De plus, elle permet d’impliquer le patient dans sa prise en charge et d’améliorer l’observance ainsi que
l’adhésion au traitement.
Le rôle des médecins et spécifiquement du médecin traitant, premier acteur de prise en charge de l’HTA,
est donc de promouvoir l’utilisation de l’automesure à chaque consultation (dépistage et suivi HTA),
d’éduquer les patients à sa pratique de comparer les résultats obtenus à domicile et au cabinet, et
d’adapter la thérapeutique le plus précocement possible.
Ainsi, l’automesure à domicile doit faire partie intégrante du parcours de soin de tout sujet hypertendu et
devenir aussi indispensable que l’appareil glycémique du sujet diabétique.
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Clinical Excellence: Guidance. London: Royal College of Physicians (UK); 2011, p. 64 à 67.
25
ANNEXE 2 : Recommandations 2013 de la SFHTA : place de mesure ambulatoire de
la PA.
ANNEXE 1 : Liste d’autotensiomètres validés par l’AFFSAPS 2012 :
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ANNEXE 3 : Grille d’automesure à l’intention des patients :
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