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ONUKO THEODORA, UKA
REG. NO. PG/MA/Ph.D/00/28199
PG/M. Sc/09/51723
UNE TRADUCTION ANGLAISE DE DOUCEURS DU BERCAIL
D’AMINATA SOW FALL : ETUDE DE TRADUCTOLOGIE
APPLIQUEE.
LA THÈSE DE DOCTORAT
PRÉSENTÉE PAR
FOREIGN LANGUAGES AND LITERARY STUDIES
A THESIS SUBMITTED TO THE DEPARTMENT OF FOREIGN LANGUAGES AND
LITERARY STUDIES
, FACULTY OF ARTS, UNIVERSITY OF NIGERIA, NSUKKA
Webmaster
Digitally Signed by Webmaster’s Name DN : CN = Webmaster’s name O= University of Nigeria, Nsukka OU = Innovation Centre
MARCH, 2012
ii
UNIVERSITY OF NIGERIA, NSUKKA
DEPARTMENT OF FOREIGN LANGUAGES AND LITERARY STUDIES
UNE TRADUCTION ANGLAISE DE DOUCEURS DU BERCAIL D’AMINATA SOW FALL :
ETUDE DE TRADUCTOLOGIE APPLIQUEE.
LA THÈSE DE DOCTORAT
PRÉSENTÉE PAR
ONUKO THEODORA, UKA
REG. NO. PG/MA/Ph.D/00/28199
SOUS LA DIRECTION DU
PROFESSEUR E.P. MODUM
LE 3 MAI, 2012
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ATTESTATION.
Cette recherche en vue de lřobtention dřun doctorat en traduction, approuvé
par le Department of Foreign Languages and Literary Studies à lřUniversity
of Nigeria, Nsukka est réalisée par Onuko, Theodora, Ukamaka sous la
direction du Prof. E.P Modum.
……………………………. ………………………
PROF. E.P. MODUM Date
Directeur de recherche
……………………………... ………………………
REV .(FR.)DR. I.A .ORJINTA Date
Chef du Département
…………………………… ………………………..
Date Examinateur Extérieur
iv
DEDICACE
Cette thèse est dédiée à Jésus Christ mon Seigneur et mon Sauveur.
v
REMERCIEMENTS.
Nos remerciements vont premièrement à Dieu le Tout- Puissant qui
nous a donné la bonne santé et lřhabilité dřentreprendre cette recherche.
Nous voudrons exprimer notre gratitude la plus profonde au Professor E. P.
Modum, notre directeur pour sa disponibilité, tous ses conseils et corrections
pendant la durée de cette recherche. Nous apprécions beaucoup, aussi tous
ses cours et ses efforts qui ont mené à la réalisation de ce travail .Monsieur,
nous prions que Dieu vous bénisse.
Nos reconnaissances immenses vont aussi à notre chef du
département, Rev. (Fr.)Dr. Orjinta, Professor Ohaegbu, Professor Egonu,
Dr. Abanime, Professor Iwuchukwu, Dr. Mrs. I. Ezeorah et, à tous les
professeurs dans le Departement of Foreign Languages and Literary Studies
à lřUniversity of Nigeria, Nsukka. Nous remercions également notre mari
Rev. Dr. Tony Onuko et nos enfants qui ont continué à nous soutenir par
leurs prières et leur encouragement. Nous sommes aussi très reconnaissantes
à Dr. C. C. Ezike pour toute sa patience et son encouragement pendant la
rédaction de cette étude. Nous le remercions beaucoup pour tous ses conseils
académiques, et mêmes, partennaires qui ont contribué énormément à la
réalisation de cette recherche. Nous remercions également nos amis et chers
collègues : Mme. Nkiru Okezie, Dr. J.N Okoye, Dr.A.P.Uchechukwu et
dřautres pour tous leurs encouragements et leurs soutiens moraux.
vi
AVANT-PROPOS.
La diversité des langues et la multiciplicité des cultures créent des problèmes
de communication qui empêchent, dans quelques mesures, la transmission
des idées socio-culturelles entre les pays, surtout, en Afrique occidentale.
Une augmentation continuelle de la technologie, la mondialisation,
lřaccessibilité aux échanges socio-culturels et multilatéraux dans le monde
nécessitent de plus les liens de solidarité et de co-opération entre divers
peuples du monde. Et, dans le but de contourner les problèmes linguistiques,
des co-opérations internationales telles que lřOrganisation des Nations
Unies, lřUnion Europénne, lřUnion Africaine et dřautres nřont dřoption que
de recourir à la traduction. La nécessité de rendre accessibles à notre peuple,
les œuvres littéraires et les faits culturels des autres pays et dřavancer la
transmission de nos œuvres littéraires à lřétranger nous inspire à
entreprendre ce travail. Notre thèse,intituleé :<<Une traduction anglaise de
Douceurs du bercail dřAminata Sow Fall :étude de traductologie
appliquée>>, se penche sur la traduction littéraire .Notre objectif est de
réaliser en anglais une bonne traduction de Douceurs du bercail dřAminata
Sow Fall, une œuvre littéraire africaine dřexpression française.En faisant ce
travail nous appliquerons les démarches de lřactivité traduisante de
lřapproche interprétative telles que nous les a proposées Jean Deslile dans
son livre l’Analyse du discours comme méthode de traduction.Dans notre
étude appliquée nous voudrons porter un regard critique sur <<le maniement
du langage>> pour étudier lřefficacité des mécanismes de cette approche
pour faciliter la tâche du traducteur littéraire. Dřautre part, nous osons
espérer que beaucoup de gens de notre continent seront sensibilisés par ce
travail, et leur attention attirée aux problémes socio-culturels, économiques
et politiques tels que lřexode des jeunes africains à lřétranger, lřoppression,
le racisme, la violation de droits de lřhomme pratiquées par les autorités
européennes contre les immigrés et cela pourra changer leur psyché. De
cette manière ce travail pourra contribuer à lřamélioration de notre société.
Nous ne croyons pas que la tâche du développement appartienne
exclusivement au gouvernement mais à tout le monde dans la société.Le vrai
développement ne se réalise que le moment où tous les potentiels de
lřhomme le physique, le mental et le spirituel seront déclenchés.
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UNE TRADUCTION ANGLAISE DE DOUCEURS DU BERCAIL
D’AMINATA SOW FALL : ETUDE DE TRADUCTOLOGIE APPLIQUEE.
L’lntroduction
Un article de Wikipedie nous apprend que :
La traductologie, en tant que science, étudie le processus
cognitif inhérent à toute reproduction (traduction) orale,
écrite ou gestuelle, vers un langage, de lřexpression dřune
idée provenant dřun autre langage (signes vocaux (parole),
graphiques (écriture) ou gestuels) (cité dans lřEncyclopédie
libre, 3 janvier, 2009).
Etymologiquement, la traductologie est un néologisme composé dans la
seconde moitié du XXème siècle, en 1970, à partir du mot « traduction » et
du suffixe : « logie ». Dřaprès un article de Wikitonnaire le dictionnaire
libre, Antoine Berman et Jean-René Ladmiral étaient parmi les premiers à
employer le terme (cité le 18 mai, 2011).
Mais, cřest James Holmes, qui en 1972 dans un article intitulé « The
Name and Nature of Translation Studies » a précisé dřune manière définitive
cette discipline en anglais.Il la désigne pour être une science qui étudie le
processus, aussi bien que tous les aspects de la traduction. James Holmes
divise cette discipline en deux parties complémentaires : la traductulogie
théorique et la traductologie appliquée. Pour lui, les deux branches sont en
corrélation, et devraient alors être conçues et étudiées conjointement. La
traductologie théorique renvoie à l étude du processus mental qui se déroule
dans la tête du traducteur au cours de lřopération traduisante tandis que la
traductologie appliquée réfère au résultat de la traduction. Les deux matières
enrichissent lřune lřautre. « Toutefois, Holmes admet que la traductologie
peut être approchée sous différents angles : on peut aussi bien étudier le
« produit », cřest-à-dire, pour simplifier, le texte, ou bien sřintéresser
exclusivement au « processus » autrement dit le déroulement de la
2
traduction, ou bien étudier les deux à la fois » (cité dans<<http
www.a4traduction.com18/5/2011>>).
La traductologie désigne donc la science qui examine le processus
cognitif, ou mental par lequel des phrases énoncées ou écrites dans une
langue donnée sont ré-exprimées dans une autre langue afin de faciliter la
pratique traduisante dans la société. La traductologie réfère également à
lřexercice « universitaire inscrite dans les programmes des facultés de
langues vivantes » pour lřapprentissage de la traduction même au niveau du
doctorat en plusieurs pays(cité dans l’Encyclopédie libre, 3, janvier,
2009).Elle prend pour objet la traduction comme produit et résultat et
sřintéresse également à ce qui se passe dans la tête des traducteurs ,
autrement dit lřactivité traduisante ou la traduction qui est en train de se
faire.Elle est très pertinente dans la formation de futurs traducteurs et dans
lřautomatisation de la traduction. Elle sert depuis des années à générer et à
perfectionner des logiciels de traduction automatique.Nous sommes servis
des deux branches de la traductologie pour achever notre travail.
Dř après Albir Hurtardo ;
Le besoin de communication qui est à lřorigine du
langage humain, donna alors naisssance à la traduction;
dès quřune pluralité de langues apparaît, la traduction
sřimpose, lřhomme trouve une solution à la punition de
Babel. La traduction, orale et écrite qui est une activité
humaine universelle, est aussi ancienne que le langage
et lřécriture ( 9).
Lřacte traductif existait chez lřhomme depuis des siècles mais ce nřest quřà
partir des années soixante-dix quřil a commencé dřattirer beaucoup
dřattention à cause dřune augmentation de demandes pour la co-opération
internationale après la deuxième guerre mondiale. Auparavant, les exigences
de la communauté nřétaient pas aussi diverses et complexes quřelles le sont
3
aujourdřhui. Les gens vivaient dans des environements naturels (Elliot dans
Ajulo et al. 334). Avec lřaccroissement de groupements humains et la
diversité des langues, les besoins du monde se multiplient, aussi bien que la
nécessité de communiquer (Albir 9).
Parmi tous les textes traduits, les oeuvres littéraires anciennes écrites
en grecque, en latin, en hebreu ainsi que la Sainte Bible constituent un
corpus très considérable.Au XVIème
siècle par exemple, pendant la
Renaissance, la traduction avait beaucoup contribué aux processus de la
civilisation et de la réformation. Et lřimprimerie permet une large diffusion
des œuvres littéraires qui forment la base des pensées et des concepts
nationaux de la plupart de lřEurope.Ces pensées et concepts ont contribué à
la formation et au développement de lřhomme dans les domaines spirituels
et mentaux pendant les époques suivantes. Les instructions puisées de ces
textes traduits en langues vernaculaires aident la clarification des anciens
textes.
Selon Bassnett-Mcguire;
The educative role of translation of the scriptures was well
established long before the 15th and 16
th centuries and the
early vernacular glosses inserted in Latin manuscripts have
provided valuable information concerning the development
of a number of European languages (50).
Le fait de la traduction avait beaucoup aidé à lřavancement des langues
européennes et aux renseignements socio-culturels et littéraires entre les
peuples. Inspirés par les œuvres anciennes, certains auteurs les prirent pour
modèles avec lesquels ils ont pu créer et établir leurs propres littératures
nationales. Ainsi, la Pléiade, dirigée par Pierre de Ronsard avait beaucoup
contribué à la formation de la poésie française au XVIème
siècle. (Salomon,
32).Le fait de la traduction a aussi aidé dans la formation et lřenrichissement
des idées scientifiques des humanistes à cette époque. (Bassnett -Mcguire,
44).
4
Voyons, donc certaines définitions faites par un nombre dřécrivains du
terme « traduction » :
Ladmiral Jean-René définit la traduction ainsi:
La traduction est un cas particulier de convergence
linguistique au sens le plus large, elle désigne toute de
Ŗmédiation inter-linguistiqueŗ permettant de transmettre
de lřinformation entre locuteurs de langues différentes.
La traduction fait passer un message, dřune langue de
départ (LD) ou langue source dans une langue dřarrivée
(LA) ou langue Ŕ cible. (11).
Pour Seleskovitch et Lederer:
Traduire, cřest faire parvenir ces idées jusquřà
lřauditeur ou au lecteur qui ne connait pas la langue
originale, en choisissant les moyens linguistiques qui les
lui feront comprendre (69).
Chez Bassnett- Mcguire ŖTranslation of course is a rewriting of an original
text. All rewritings whatever their intention, reflect a certain ideology and a
poetic and as such manipulate literature to function in a given society in a
given wayŗ (cité dans Heylen, Viii). Par ces définitions on voit que lřactivité
traduisante se réfère avant toute chose à lřacte de communication soit dans
le texte technique soit dans le texte littéraire (Seleskovitch et Lederer 10).
Lřacte traductif peut se faire soit sur des textes scientifiques soit sur des
textes pragmatiques ou encore sur des textes littéraires.
Le choix de lřAfrique Occidentale comme le cadre de notre travail se
justifie par lřimportance de la traduction littéraire dans le développement et
la civilisation de cette région et du monde entier. Si, nous nous intéressons à
la littérature africaine dřexpression française, cřest parce quřelle est une
littérature engagée et révolutionnaire. Ses écrivains nřécrivent pas dans le
seul but de faire plaisir à leurs lecteurs mais, plutôt à les faire réflêchir aux
5
problèmes socio-culturels, économiques et politiques de leurs pays. Elle
présente des idées ou des débats qui poussent ses lecteurs à réfléchir sur les
problèmes de leur existence. On espérait quřaprès des années
dřindépendance, les situations socio-culturelles, politiques et économiques
seraient meilleures pour les peuples africains. Mais malheuresement,
presque rien nřa changé pour améliorer la condition humaine en Afrique.Par
conséquent les écrivains dřaprès lřindépendance sont désenchantés, et ils
sřoccupent des réalités de lřAfrique contemporaine et en traitent des
problèmes sociaux. La façon par laquelle ils montrent leur désenchantement
est évidente dans les questions dont ils se posent.
Si Douceurs du bercail dřAminata Sow Fall constitue notre livre de
choix pour ce travail, cřest parce que son auteur occupe une place privilégiée
en tant que socio-critique dans la littérature africaine dřexpression française
dřaujourdřhui. Nous avons décidé de traduire Douceurs du bercail parmi
tous ses œuvres littéraires à cause de la relativité de son thème principal à
notre société nigériane.Nous voudrions par ce travail, sensibiliser et attirer
lřattention des Africains soit francophones soit anglophones au besoin de
changer notre psyché au fait de lřimmigration illégale qui est le sujet
principal du texte, afin dřaméliorer les circonstances de notre vie. Aminata
Sow Fall y critique aussi, le racisme, lřoppression, et la violation des droits
de lřhomme pratiqués actuellement par les autorités de lřimmigration contre
les immigrés francophones à lřaeroport en France. Ce texte lui sert aussi
dřinstrument approprié pour critiquer le gouvernement sénégalais qui ne fait
rien pour défendre ses citoyens qui comme Asta avaient obtenu tous les
documents nécessaires pour voyager à lřétranger. Lřauteur, par les
expériences dřAsta et ses amis décourage les jeunes africains ignorants, en
particulier les francophones qui quittent leurs pays dans la conviction quřil
existe de verts pâturages à lřétranger .Komla Nubukpo remarque que,
<<…lřon considère le nombre sans cesse croissant des jeunes Africains qui,
6
au risque de leur vie, continuent dřaffronter tous les dangers possibles pour
parvenir à lřhypothétique Eldorado européen ou américain>>(120). Nous
avons décidé de traduire ce texte afin de bien mettre en lumière le message
et la leçon trouvés dans Douceurs du bercail d’Aminata Sow Fall.
Aminata Sow Fall est née le 27 Avril, 1941 à Saint Louis au Sénégal.
Entre lřâge de sept et treize ans, elle a fait ses études primaires et une partie
des études secondaires à Saint Louis.Elle a ensuite préparé le Baccalauréat
au Lycée Van Vollenhoven à Dakar entre les années 1961 et 1962. Elle se
rend alors en France où elle poursuit une licence des lettres modernes. Elle
se marie en 1963 puis rentre au Sénégal où elle devient professeur,
enseignant dans plusieurs établissements secondaires et aux lycées. Elle
travaille ensuite dans le cadre de la Commission de Réforme de
lřEnseignement du Français en Afrique. Aminata Sow Fall a rempli
plusieurs fonctions dans lřadministration publique, par exemple, dans les
lettres et la propriété intellectuelle au Ministère de la Culture où elle était
directrice du Centre dřEtudes et de Civilisation.
Elle a fondé le Centre International dřEtudes, de Recherches et de
Réactivation sur la Littérature, les Arts, la Culture(CIRLAC) en 1996, les
Editions Khoudia en 1987, et le Bureau Africain pour la défense de libertés
de lřécrivain(BADLE) en (1989). Elle a quitté lřadministration de son propre
gré en 1989 pour mieux se consacrer à la création littéraire et à des activités
culturelles. A lřheure actuelle, Aminata Sow Fall est lřauteur de plusieurs
textes et articles de la littérature africaine. Elle est nommée docteur honoris
causa de lřuniversité Mount Holyoke Collège (Massachusettes, USA) le 25
mai ,1997.
Elle a écrit et a fait publier plusieurs romans notamment : Le
Revenant (Dakar, NEA- 1976), La Grève des battus (Dakar, NEA-1979 qui
a obtenu le Grand Prix littéraire de lřAfrique noire en 1980. Son troisième
roman l’Appel des arènes (Dakar, NEA-1982) a été présélectionné par le
7
jury Goncourt en 1982. L’EX-Père de la nation (Paris, LřHarmattan-1987).
Les autres romans sont Le Jujubier du patriarche (Dakar, Khoudia-1993),
Douceurs du bercail (Abidjan, NEI- 1998). Vu lřimportance de la traduction
dans la diffusion des informations dans le monde entier pour faciliter la co-
opération internationale pour le développement technique des pays sous-
développés, le sujet de notre étude se situe dans le cadre de la traductologie .
Cette thèse a lřobjectif de réaliser une bonne traduction de Douceurs du
bercail dřAminata Sow Fall, une œuvre littéraire africaine dřexpression
française et dřexaminer la méthode efficace qui facilite la traduction de tels
ouvrages littéraires africains.La multiplicité de langues indigènes au cours
des âges, mène les écrivains africains de sřapproprier de lřanglais et du
français, langues internationales pour exprimer les valeurs et les réalités
socio-culturelles de leurs peuples. Notre visée dans ce travail est de mettre
le message de Douceurs du bercail à la portée des lecteurs anglophones qui
sont dans la majorité en Afrique occidentale
Ce travail est fait dans la conviction que la traduction littéraire
pourrait devenir un véhicule par excellence pour la diffusion des
informations socio-culturelles en Afrique occidentale. Les pays de cette
région subissent presque les mêmes expériences socio-politiques et devraient
former des co-opérations pour réaliser leurs objectifs et promouvoir leurs
intérêts collectifs.La traduction littéraire sřavère pertinente pour franchir les
barrières linguistiques et culturelles entre les pays.A travers le moyen de la
traduction littéraire, des problèmes socio-culturelles peuvent être abordés et
résolus.Si Aminata Sow Fall le permet, cette traduction sera publiée pour
les destinataires anglophones.De plus, notre travail peut ainsi servir comme
un texte de référence pour dřautres chercheurs dans ce domaine dřétude.
Les mécanismes de la traduction interprétative telles qui les a
énumérés Jean Deslile dans son livre l’Analyse du discours comme
méthode de traduction sont très appropriés pour cette étude.L’Analyse du
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discours comme méthode de traduction de Jean Deslile nous fournit donc le
cadre théorique de notre traduction parce quřil préconise lřanalyse du
discours comme la méthode compétente pour dégager lřintention de lřauteur.
Les quatre paliers du maniement du langage à savoir : les conventions de
lřécriture, lřexégèse lexicale (le report des vocables monosémiques, la
réactivation des formes consignées dans les systèmes linguistiques,la
récréation contextuelle), lřinterprétation de la charge stylistique et
lřorganicité textuelle basés sur l’Analyse du discours comme méthode de
traduction sont adoptés pour diriger la traduction du texte parce quřils
favorisent lřintervention des compléments cognitifs, cřest-à-dire le bagage
cognitif et le contexte cognitif dans lřexégèse lexicale pour la saisie du sens
et la reformulation de lřintention de lřauteur en traduction.
Le travail, donc est une étude critique qui porte sur la production du
discours du texte pour mener à une traduction fidèle au message de lřauteur.
Des mots wolofs insérés dans le texte seront laissés dans le texte traduit,
mais leurs significations seront écrites en anglais en bas de page. Le texte
original en juxtaposition de la traduction anglaise nous permettra de
démontrer dans quelle mesure les préceptes de la traduction interprétative
ont été appliqués pour avoir un nouveau texte.
Notre travail est divisé en quatre chapitres suivis dřune conclusion.Le
premier chapitre qui est une étude traductologique, est un exposé sur la
relativité du phénomène de la traduction de nos jours, étudie des traits de la
traduction pragmatique et les spécificités de la traduction littéraire dans
laquelle se trouve le domaine de notre travail.Le chapitre deux se compose
du regard critique sur les processus traductifs de lřapproche linguistique et
lřapproche interprétative. Ce chapitre contient une revue de littérature sur
les deux approches ou méthodes qui sont couramment distinguées dans
lřétude de la traduction.ll soulève surtout, par des exemples concrets, le rôle
intellectuel que jouent les compléments cognitifs dans lřanalyse exégétique
9
de la traduction dite interprétative. Cette étude critique nous servira de
tremplin pour la traduction de notre texte.
Le chapitre trois comprend lřappréciation des problèmes rencontrés au
cours de la traduction de notre roman. Ce chapitre est consacré à lřétude du
maniement du langage considéré convenable à une pédagogie bien ordonnée
pour des cours pratiques de la traduction. Nous évaluons lřefficacité de cette
méthode au fur et à mesure que nous analysons les problèmes rencontrés au
cours de notre traduction de Douceurs du bercail dřAminata Sow Fall.
Ensuite, il met en relief les moyens par lesquels nous avons surmonté ces
problèmes.
Le chapitre quatre présente la traduction en anglais de Douceurs du
bercail dřAminata Sow Fall en juxtaposition du texte en français.
La conclusion est une synthèse émanant de toutes les idées examinées
dans notre travail.
10
CHAPITRE UN.
ETUDE TRADUCTOLOGIQUE.
En tenant compte des bénéfices de la communication, lřhomme veut et
cherche plus ardemment à comprendre les cultures et les pratiques dřautres
peuples du monde pour améliorer sa vie. Alors il nřa guère dřoption que de
recourir à la traduction comme véhicule de la communication entre ses
semblables.Cela démontre que le phénomène de traduction a contribué
énormément à la paix mondiale à travers les échanges mutuels et culturels
entre les pays du monde. Ce chapitre qui vise à faire une étude
traductologique débute par une discussion sur la relativité du phénomène de
la traduction de nos jours, lřétude des traits de la traduction pragmatique en
sřachevant dans lřexamen des spécificités de la traduction littéraire qui est
le champ de notre étude, intitulée Une traduction anglaise de Douceurs du
bercail d’Aminata Sow Fall : étude de traductologie appliquée.
Aujourdřhui, la mondialisation produit une explosion dřinformation dans
tous les domaines.On comprend donc que le besoin de traduire des termes
technologiques et scientifiques sřimpose afin de faciliter la dissémination
des informations. Cřest par ce moyen que beaucoup dřinformations
indispensables sont diffusées aux pays du tier monde pour accélerer la voie
de développment. (Khalil, Alio dans Ajulo et al. 253).Avec lřavènement de
la modernisation, voire la mondialisation, les nécessités dřintéraction et
dřinterdépendance ont continué à rendre la vie beaucoup plus complexe.
(Roger et al). De nos jours, la traduction des informations sur les
découvertes scientifiques et techniques continue à contribuer à
lřépanouissement des idées nouvelles dans tous les secteurs de lřexistence
humaine.
11
Une augmentation continuelle des faits technologiques, la
mondialisation, les échanges socio-culturelles et des négotiations
commerciales appellent en plus des liens de solidarité entre divers peuples
du monde.La traduction devient très pertinente dans les conférences des co-
opérations internationales telles que lřOrganisation des Nations Unies,
lřUnion Européenne,lřUnion Africaine, la Communauté Economique des
Etats de lřAfrique de lřOuest et dřautres afin de contourner les problèmes
linguistiques.Cřest à remarquer que la traduction est née du besoin de
communiquer et de se faire comprendre. Lřhomme a la nécessité dřexprimer
ses pensées et dřapprendre celles de ses semblables. La découverte de
lřélectricité et les nouvelles technologies améliorant la méthode de
production, dirigent en suite, les pas de lřindustrialisation et de
lřurbanisation (Stair and Reynolds 10).
Jean ŔRené Ladmiral soutient ce point en remarquant quř :
Il est clair que de nos jours les besoins en matières de
traductions sont extrêmement diversifiés et atteignent une
ampleur qui va croissant.Cřest lřurgence et la masse de ces
besoins en ce qui concerne les traductions scientifiques qui
sont à lřorigine des travaux sur la traduction automatique
(T.A.) ou << machine à traduire >> entrepris depuis la
Seconde Guerre mondiale(15).
Aujourdřhui, la traduction est un sine qua non pour la communication au
sein des associations internationales.On voit donc, que la traduction devient
de plus en plus indispensable dans divers secteurs de la vie. Evidemment, il
existe un ordre international avec des règles et des lois internationales qui
gouvernent les rapports sociaux, économiques, culturels et politiques.Ainsi,
des activités commerciales ont lieu par des arrangements et des accords
bilatéraux et multilatéraux entre les pays du monde.Et, de cette manière une
grande quantité dřargent est transmise électroniquement par lřinternet. Et la
traduction automatique facilite le travail du traducteur pour accélérer la
12
diffusion des informations dans le monde entier.
Lřobjectif des écrits techniques et des manuels scientifiques est
lřexactitude de lřinformation.Contrairement à la traduction littéraire dont le
but est de communiquer le plaisir esthètique et lřeffet émotif de lřœuvre, la
traduction pragmatique cherche surtout à renseigner son public. Considérons
un texte pragmatique qui véhicule des informations scientifiques dans le
champ médical dřun peuple donné.La connaissance des langages codifiés est
très pertinente dans la traduction de tels textes pragmatiques à cause de
lřobjectivité et de la précision des concepts caractéristiques de ce domaine.
Là, il faut non seulement le triple processus de la traduction interprétative,
mais, aussi la documentation approfondie sur les sujets du texte, la
connaissance des terminologies spécifiques, des connaissances
encyclopédiques sur lřauteur et lřhistoricité de la société du texte de départ.
Jean Deslile récapitule les qualités de ce genre de cette manière « le
texte pragmatique se distingue du littéraire par les suivants :il est dénotatif
plutôt que connotatif, il renvoie à une réalité plus ou moins objectivée, il a
pour but principal de communiquer une information, il donne lieu à une
seule information >>(32-33).Certes, le rôle du traducteur est considérable
puisquřil est lřintermédiaire entre lřauteur et ses destinataires, le véhicule par
lequel celui-ci dissémine son information qui pourrait être de nature fort
sensible ou délicate.Cela est la raison pour laquelle lřobjectivité et la fidèlité
sont pertinentes dans lřexécution de son travail.
13
Pour illustrer la gravité dřun manque de ces qualités dans la traduction,
Gerding-Salas remarque que :
Through experience , I have learned that the consequences of
wrong translations can be catastrophic-especially if done by
lay persons Ŕand mistakes made in the performance of this
activity can obviously be irreparable.Just think of what could
happen in cases of inadequacy in knowledge areas such as
science,medicine ,legal matters, or technology…It is quite
clear that a poor translation cannot only lead to hilarity or to
minor confusion,but it can also be a matter of life and
death(4).
Autrefois, cřétaient les textes littéraires qui figuraient prominément
sur la liste des œuvres traduites à cause de leur importance dans lřinstruction
morale.Mais la circonstance a changé considérablement, parce que
lřaccroissement des mouvements dřintegration et de co-opération exige de
plus en plus les services des traducteurs pragmatiques qui se révèlent
efficaces dans la résolution des problèmes linguistiques entre divers pays du
monde. Néanmoins, il est à noter que certaines organisations internationales
telles que lřUnion Européenne qui la revalorisent, continuent dřencourager
la traduction des œuvres littéraires afin de promouvoir des ententes
interculturelles parmi les citoyens de leurs pays. On pourra illustrer ce point
à travers cette remarque de Forrest Alan que ŘŘThe idea of giving financial
support for the translation of literary works is not new, UNESCO and the
Council of Europe having undertaken the schemes with varying degrees of
successŗ (348).
Traduites, les œuvres littéraires sont capables de traverser leurs
frontières dřorigine pour créer un impact sur une population beaucoup plus
large que celle des pays du départ.La traduction de tels grands genres
littéraires: la poésie, le roman, les contes et le théâtre sřavère efficace pour la
propagation des faits socio-culturels parmi les peuples du monde. Les textes
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littéraires abordent des sujets relatifs aux échanges socio-culturels,
économiques, politiques et ethnolinguistiques des peuples divers.
A travers leurs oeuvres litteraires, Homère, Aristote, Shakespeare,
Racine, de même que nos confrères de lřAfrique Occidentale comme Chinua
Achebe, Wole Soyinka, Buchi Emecheta, Camara Laye, Mongo Beti,
Sembene Ousmane, Mariama Ba, Aminata Sow Fall et dřautres ont tous
communiqué leur vision du monde et les réalités socio-culturelles de leurs
peuples. Les écrivains africains sřexpriment, surtout à travers lřanglais et le
français, langues internationales, afin dřatteindre des publics assez étendus.
De plus ils sont largement connus et appréciés, non seulement à cause de la
qualité de leurs œuvres surtout, par la diffusion de leurs pensées exprimées
dans leurs textes traduits dans différentes langues mondiales.
Aujourdřhui, le besoin sřimpose aux Africains qui sont participants
aux faits socio-culturels, économiques et politiques abordés dans des textes
dřorigine africaine de les traduire afin de rendre leurs idées accessibles à un
public plus large.On est témoin de lřimpact de telles œuvres littéraires ,
traduites ou non sur nos jeunes.Cřest par la mise en place de tels textes que
Things Fall Apart de Chinua Achebe, The Lion and The Jewel de Wole
Soyinka, The Joys of Motherhood de Buchi Emecheta, Une si longue lettre
de Mariama Ba, La Grève des battus dřAminata Sow Fall, Trois
prétendants…un mari dřOyono Mbia, L’Enfant noir de Camara Laye et
dřautres dans les institutions scolaires africaines que leurs auteurs ont
renseigné beaucoup de gens sur certaines réalités de leurs propres
sociétés.Ces écrivains nřont pas écrit dans le seul but de renseigner le public
sur les faits socio-culturels, économiques et politiques de leurs sociétés ,mais
en tant que critiques engagés recherchant des améliorations sociales pour
leurs peuples.Evidemment, la voix des femmes telles quřAminata Sow Fall
fait résonnance dans cette littérature, et il est incontestable que cřest par le
biais de ce moyen que les femmes réussissent dans leur lutte contre
15
lřoppression par les hommes.
Le genre littéraire, par sa nature est ambigu et connotatif. Il évoque
des thèmes universels et intemporels comme lřamour, la nature, la beauté, la
mort, la jeunesse, la religion qui touchent la vie socio-culturelle de lřhomme.
Son langage est caractérisé par des métaphores et des images qui élaborent
des idées et des réalités socio-culturelles dřun peuple.
Peter Newmark remarque que:
The basic difference between the artistic and the non-literary
is that the first is symbolical or allegorical and the second
representational in intention; the difference in translation is
that more attention is paid to connotation and emotion in
imaginative literature. (16).
La transmission des idées littéraires et culturelles se révèle compétente pour
la transformation et la civilisation des mœurs de la société. Aujourdřhui, il y
a beaucoup de problèmes de ségrégation et de conflits ethniques ou raciaux
qui à leur tour, provoquent des malentendus, des guerres et des actes de
violence non, seulement en Afrique occidentale, mais aussi en Afrique
entière.Par conséquence, il y a peu de progrès parmi ces pays. La traduction
littéraire pourra être un instrument par excellence pour encourager et
promouvoir lřentente mutuelle entre les pays situés, surtout en Afrique
occidentale.Elle se montre adéquate pour la propagation des faits socio-
culturels parmi les peuples du monde. Les peuples africains devraient être
sensibilisés au fait que la tâche du développement nřappartient pas
exclusivement au gouvernement mais à tout le monde dans la société.Le vrai
développement ne se réalise que le moment où tous les domaines de
lřhomme : la physique, le mental et le spirituel sont impliqués.
Heylen Romy remarque aussi dans son livre: Poetics and The Stage:
Six French Hamlets que « translations enable the transfer of literary devices
and models from one literature or culture to another and thus enrich,
16
ldeveloping literatures in need of poetic models or renew established
literatures that find themselves in crisis>> (10-11). Nous croyons également
que la traduction littéraire pourrait aider les écrivains nigérians, ainsi que
les écrivains dřautres pays africains à enrichir, revitaliser leurs œuvres et
leurs langues indigènes et améliorer quelques réalités socio-culturelles de
leurs pays.
Dans la traduction littéraire qui constitue notre sujet de travail, le
traducteur doit faire attention à la langue qui est le vecteur du message parce
quřil y a des informations implicites qui constituent lřaspect contextuel de
lřhistoire.Les éléments notionnels et affectifs contenus dans les mots ne se
révèlent guère lorsquřon traduit littéralement la lettre et la forme de
lřœuvre.Sa réalisation nécessite davantage la recherche de forme, de rythme
et de style, tous ceux-ci encore sont fonction de lřoeuvre qui peut bien être
une pièce théatrale, un texte prosaïque ou romanesque, ou un
poème.Supposons quřun traducteur entreprenne de traduire les deux oeuvres
théâtrales Julius Caesar et Hamlet de Shakespeare, dramaturge anglais fort
connu du xvième siècle qui avait écrit beaucoup de pièces théatrales dans
lesquelles il employait des tournures de phrases bien distinguées,
gracieuses,et même remarquables pour sřexprimer.Le traducteur aurait
surement trouvé beaucoup de difficultés à déterminer ou à dégager
linguistiquement le sens pertinent de lř écrivain.
Un tel traducteur devrait dřabord faire attention à son emploi du
langage recherché, si non, il serait induit à reduire le vouloir-dire de
Shakespeare aux simples substitutions grammaticales.Et de cette manière il
trahirait décidement le dramaturge.ll lui faut une compétence linguistique de
la langue anglaise et une documentation préalable sur la parole et les idées
de Shakespeare.De plus, il faut la prise en compte des aspects linguistiques
aussi bien quřextra-linguistiques du siècle de Shakespeare ainsi que la
connaissance des valeurs socio-culturelles des deux sociétés impliquées,
17
pour une ré-expression adéquate des faits en langue cible.
Le traducteur du texte pragmatique tend vers une reproduction exacte
et la fidèlité du message mais le traducteur littéraire cherche surtout à
évoquer la beauté et les sentiments que lřauteur perçoit et éprouve dans ses
réalités. Cřest pourquoi le traducteur littéraire cherche à recréer lřœuvre avec
de nouvelles expressions. Deslile Jean constate que « The order of words,
the rhythm of sentences, and the patterns of sound may all have evocative
power that is relevant to the message and must be conveyed by the
translator.ŗ(14).
Fortunato Israël, professeur à lřUniversité de Paris III, partisan
acharné de lřapproche interprétative, dans son article « Traduction
littéraire :LřAppropriation du texte » nous élabore ses recommendations sur
le sujet de la traduction littéraire au cours dřun Colloque International tenu à
lřE.S.I.T. en juin 1990 .Il nous apprend que le traducteur littéraire devrait
remplir le rôle dřun nouveau créateur en rapprochant non pas des mots des
langues (textes)mais en établissant <<des équivalences contextuelles
inédites>>, celles qui reprennent ces mêmes valeurs socio-culturelles,
historiques, écologiques, affectives afférentes. Et tout ceci en faisant égard à
la parole de lřauteur dřune part, à la langue dřarrivée ou au destinataire
dřautre part. Du reste, pour autant une telle traduction reste pour lui, << une
proposition éminemment personnelle>> (51).Il découle quřil nous a fallu
beaucoup dřinitiative, soumise aux règles de ce genre afin de réaliser une
bonne traduction de Douceurs du bercail dřAminata Sow Fall.
La communication littéraire est en quelque sorte incomplète parce que
lřinterlocuteur est toujours absent.En outre, le traducteur ne peut pas
observer les mouvements du visage, des lèvres et de tout le corps de
lřorateur.ll en va que pour traduire une œuvre littéraire, le traducteur est
tantôt lecteur, tantôt co-auteur qui présente une bonne traduction bien
comprise et appréciée par les nouveaux lecteurs. Le traducteur qui comprend
18
bien le message du texte viserait à le rendre dans la langue dřarrivée dřune
manière quřil soit compris par le recepteur. Pour que cela sřaccomplisse, le
traducteur doit dřabord être bon lecteur et ensuite bon traducteur
(Seleskovitch et Lederer 19).
La traduction littéraire qui comprend notre étude devrait évoquer des
réponses émotionnelles chez les destinataires.En considération de notre rôle
de médiateur,aussi bien quřun co-auteur du texte,lřexercice de notre
traduction de Douceurs du bercail est esthétique et affectif plutôt que
rationnel et informatif afin dřévoquer chez les destinataires les mêmes
sentiments que les lecteurs du texte de départ ont dû éprouver à sa
lecture.Cřest pourquoi nous avons été obligé de nous approprier ou faire
nôtre lřœuvre de quelquřun dřautre pour réaliser une traduction réussie.
Israël Fortunato explique :
Le plus souvent lřappropriation nřest pas un choix : elle est
imposée par la nature même de lřécriture littéraire. Les mots
dřabord qui, en apparence, sont ceux de tous les jours mais
qui, chargés de leurs valeurs culturelles et affectives,
assument volontiers une fonction symbolique, métaphorique
et sřappellent, se répondent, sřorganisent en réseaux. (18).
La traduction littéraire implique une exploitation des ressources
potentielles du langage pour traverser la surface conceptuelle des mots. Elle
nécessite la compréhension de la forme, du rythme, des symboles et des
images plus quřune comparaison de deux langues, pour dégager la
signification du texte.Israël Fortunato, remarque que« La forme nřest plus
un simple vecteur de lřidée, du contenu notionnel. Valorisée, sémantisée elle
devient un élément primordial dans lřélaboration du message au point que
souvent le dire compte autant sinon plus que le dit. » (19) En plus de la
maîtrise de deux langues, le traducteur doit être sensible à la culture du texte.
Il doit considérer la valeur des mots qui peuvent apparaître banals mais sont
19
chargés de valeurs culturelles et affectives. Il doit être aussi sensible à
lřagencement, au genre et aux rythmes qui peuvent assumer des fonctions
symboliques et métaphoriques.
ll faut au traducteur une connaissance Řŗa prioriŗ de lřauteur pour
réaliser une bonne traduction Nous sommes du même avis que Fortunato
Israël que le traducteur professionnel peut parvenir à une traduction
inégalable, malgré toutes les difficultés de la traduction littéraire. Fortunato
Israël conseille au traducteur de goûter la parole de lřécrivain et de tâcher à
la reexprimer en puisant dans la langue cible, des moyens
semblables,identiques et efficaces pour lui conférer des valeurs
communicatives.Le traducteur devrait sřefforcer de saisir la Ŗmagie Ŗ des
émotions affectives et notionnelles évoquées à partir de la relecture du texte
littéraire en soumettant dřune façon complète son esprit à celle-ci, à toutes
les idées provenant du cerveau de lřauteur / locuteur.
De lřœuvre littéraire Jean Deslile remarque:
Une œuvre dřimagination et de création recèle aussi un pouvoir
dřévocation.Tout le contenu du message nřest pas explicitement
formulé.Une grande portion du sens reste informulée.Dřoù
lřimportance capitale du jeu des connotations dans ce type
dřécrits.Une succession de mots, le rythme des phrases, les
sonorités peuvent porter une charge évocatrice que le traducteur
est tenu de rendre parce que celle-ci est pertinente au
message(29).
Le traducteur dřun texte littéraire nřest pas tout simplement un médiateur
entre lřécrivain et ses destinataires mais un co-auteur du texte. Cela est une
opération bien sensible parce quřelle sollicite lřintelligence et aussi bien que
le talent dřécrivain. Le texte littéraire est un produit de lřimagination qui est
née par lřélaboration de la forme. Encore Israël Fortunato accentue : « Et si
la littérature est un art, cřest surtout à cause de ce travail sur le verbe dont le
pouvoir de suggestion sřapparente alors à celui de la musique. » (19).Dans
Douceurs du bercail, comme dans tous textes de ce genre, il y a des mots
20
,des concepts et de tournures de phrases quřil faut dégager pour pouvoir
déverbaliser afin de reconstituer leurs sens dans la langue cible.Il sřimpose
donc,au traducteur de dégager le message de lřauteur qui se masque dans les
éléments esthétiques du texte littéraire pour le rendre aux destinataires.Une
tentation de calquer tels mots leur déposséderait de leur sens et de leurs
effets.
Le texte littéraire se prête à une multiplicité dřinterprétations parce
que cřest un produit de lřimagination qui est né par lřélaboration de la forme.
Alors, en outre son rôle du médiateur pour la compréhension de lřœuvre, le
traducteur a la responsabilité de produire dans ses destinataires, les mêmes
effets émotifs que le public du départ a éprouvés auprès du texte original.
Cela est une opération qui demande la créativité et la sensibilité. Elle
sollicite surtout lřintelligence pour la manipulation du langage de la culture
cible pour la restitution du vouloir-dire de lřécrivain.
Cela est le fait qui nécessite une connaissance encyclopédique sur des
faits sociaux du pays dřorigine, une étude critique des sujets du texte et, de
plus justifie la liberté pour le traducteur. Il est valable, et même obligatoire
quřil sřapproprie et adapte lřœuvre au goût de la nouvelle culture.Cela est
ce qui va la rendre relative à ses nouveaux destinataires. Cřest un acte de
recréation qui demande la sensibilité et la compréhension de la culture cible,
qui devrait accueillir ou rejeter lřœuvre. Israël Fortunato soutient ce point
lors quřil constate que « toute traduction doit être une recréation…(et que) la
traduction et créativité doivent au contraire aller ensemble ...»(31).
Le traducteur littéraire devrait jouir dřun certain degré de liberté pour
recréer et reproduire lřœuvre dans la langue dřarrivée. Lui, plus que le
traducteur pragmatique devrait aller au-delà de la surface conceptuelle des
mots pour faire comprendre, éprouver et re-exprimer le vouloir-dire de
lřauteur. Cette liberté lui est nécessaire pour sřapproprier, adapter et recréer
les situations qui aideront la compréhension de lřœuvre par les gens
21
appertainant à dřautres cultures.
En justifiant ce rôle du traducteur littéraire, Israël Fortunato écrit que :
Le point de vue que je défendrai ici est le suivant : toute
traduction est appropriation bonne ou mauvaise, et cette
appropriation est autant le résultat dřune contrainte que
lřaffirmation dřune liberté. Le traducteur littéraire est, en
quelque sorte, obligé dřêtre libre, plus libre peut-être que ses
confrères, mais reste soumis à certaines règles pour que soit
assurée la convergence entre les textes (18).
La traduction dans le domaine dans laquelle se situe notre étude va plus loin
tous les autres.La créativité et lřesthétique devraient être maintenues dans la
traduction littéraire. Le texte littéraire est toujours porteur de virtualités de
sens. Même son auteur nřest pas conscient de toutes les interprétations
possibles du texte. Avec la reécriture et lřadaptation faites par le traducteur,
le texte continue de vivre même après la mort de lřauteur. Il nřy a vraiment
pas de limite géographique pour lřœuvre qui est acclimatée à une autre
culture étrangère. Néanmoins, le traducteur devrait se rappeler que lřœuvre
nřest pas la sienne et quřil ne devrait pas ombrager la parole de lřauteur. Il
faut rendre une traduction transparente qui maintient son statut littéraire et
son caractère esthétique. De plus le thème et la structure de lřœuvre ne
devraient pas être compromis.
Iliade, une œuvre classique de Homer est un exemple des textes
littéraires qui furent lus, interprétés et recréés par divers auteurs, comme
Shakespeare et Racine.Shakespeare lřavait recreé sous le titre de Troilus
and Cressida(1609) tandis que Racine avait recreé la même histoire en
Andromaque(1667). Et elle continue de vivre des milliers dřannées même
après la mort de son auteur. Mais pour traduire un tel texte littéraire, le
traducteur devrait se fournir en plus de la compétence linguistique, dřun
excellent bagage cognitif des études culturelles gréco-latines, et même
germaniques.Cela va lui fournir dřun riche bagage de vocabulaire latinisé et
22
de connaissance des formations originalement grecques dans le texte.
La difficulté de la traduction dřun tel texte provient du fait que
lřauteur et certains de ses sujets ne sont plus relatifs à la société
contemporaine. Le traducteur devrait alors prendre le texte en perspective du
temps et de son milieu de production.Hamlet, qui est une pièce théâtrale de
Shakespeare traduite et adaptée en français sous des titres différents par six
différents traducteurs peut illustrer ce fait. Plusieurs traducteurs pourront
percevoir le texte de différentes façons pour le recréer selon leurs propres
compréhensions.
Dřaprès Hurtardo.
Lorsque le texte original est très ancien, la distance qui
le sépare de lřépoque de la traduction multiplie les
problèmes car dřune part, la langue du texte vieilli peut
poser des difficultés de compréhension. (157).
Afin dřéliminer les obstacles de la communication entre la langue du
texte ancien et le nouveau milieu culturel, le traducteur devrait sřapproprier
le texte. En lřoccurrence, le nouveau texte est adapté pour devenir
fonctionnel et relatif à la nouvelle société.Nous sommes du même avis que
Fortunato Israël qui insiste ici que:Ŗlřappropriation nřest pas un choix: elle
est imposée par la nature même de lřécritureŗ (cité dans Ledérer et Israël,
18).
Une chose est bien claire ici : le texte ancien ne pourra pas avoir la
même signification au moment de traduction quřà lřépoque de rédaction. De
plus, il sera difficile dřétablir un parallélisme de lřeffet produit sur ses
nouveaux destinataires et ceux de lřépoque passée. Cřest pourquoi le
traducteur devrait être libre de lřadapter afin de rapprocher le texte du
nouveau lecteur.La recréation de lřoeuvre pourra même le conduire aux
changements importants. (Hurtado, 172). Des changements nécesaires à la
traduction sont soutenus par cette remarque de Popovic Ŗthe translator has
23
the right to differ organically, to be independent, provided that independence
is pursued for the sake of the original in order to reproduce it as a living
workŗ. (cité dans Bassnett-Mcguire, ( 82.)
Même dans la tradaptation des œuvres littéraires notamment celles
de Shakespeare adaptées en Lamb’s Tales From Shakespeare, les traducteurs
nřont pas cherché à reproduire exactement les œuvres mais à les remodéler
de façon à ce quřelles soient acceptables aux nouveaux destinataires. La
traduction de ces oeuvres sřimprègne des idées saisies au cours de la lecture
par les traducteurs.Voilà ce qui explique pourquoi Lamb Charles et ses
collègues avaient recréé et adapté ces œuvres théâtrales de Shakespeare en
prose parce quřils les avaient destinées aux enfants.Ils avaient même fait
déssiner certaines scènes contenues dans les histoires pour évoquer du plaîsir
chez les enfants.
Laissées dans leur état original, beaucoup dřenfants auraient trouvé
ces œuvres de Shakespeare trop compliquées à comprendre parce quřelles
avaient été écrites en ancien anglais. Mais les nouveaux écrivains avaient
saisi lřessence de ces œuvres pour les re-exprimer autrement. Les idées sont
leurs propres interprétations qui portent les marques personnelles des
traducteurs fidèles aux idées de Shakespeare.Il est donc permis de dire que
dans sa capacité de lecteur, critique et rédacteur, le traducteur littéraire
pourra même améliorer la qualité de lřœuvre.ll pourra ajouter des phrases
dans la perspective de remplir les lacunes qui pourraient empêcher la
compréhension du texte.
Au cours des réflexions qui suscitent une ampleur dřinformations
emmagasinées à travers ses lectures et ses moments dřincubation, le
traducteur cherche à déverbaliser le texte. Avec de lřintelligence et de la
créativité, il arrive à recréer lřhistoire avec des images souhaitables qui
rendent acceptables les idées du texte original. Le traducteur, nous croyons,
pourra sřapproprier le texte en le faisant sien afin de lřadapter au goût de la
24
culture cible.La souplesse et lřintelligence sont nécessaires dans la
réalisation de cette tâche. Cřest ce qui justifie lřappropriation du texte par le
traducteur. Il devrait être libre de choisir parmi les idées et les expressions
qui lui surgissent à lřesprit pour re-exprimer le vouloir-dire de lřauteur.
Ce nouveau texte mis à la portée du nouveau public est né et recréé
avec les idées puisées au cours de ses lectures et celles générées en lui à
travers les éléments cognitifs et la créativité littéraire.Cette recréation du
texte original devrait, pour nous, être relative à la nouvelle culture, surtout,
si cřest une œuvre ancienne comme Oedipus Rex de Sophocles ou Hamlet de
Shakespeare.Nous sommes du même avis avec Newmark quand il constate
que << translation is an endless procedure, except in the case of
performative statements.Other translations can never be finished.They can
always be laid aside>>(140).
Compte tenu de la complexité de la traduction littéraire et de la
compétence nécessaire pour un bon résultat, la liberté est indipensable dans
cette tâche.Néanmoins, en nous appropriant lřœuvre nous devrions essayer
de rester fidèle au vouloir-dire de lřauteur. Nous avons entendu souvent le
maxim italien « Traduttore, traditore » (Traducteur, traître) qui signifie que
« traduire cřest trahir ».Alors, nous devrions rendre le message du texte
dřune façon acceptable afin dřéviter lřinfidélité à lřauteur.
Bassnett Ŕ Mcguire et lsraël Fortunato soutiennent que le lecteur dans
ce moment est revalorisé comme celui qui aide la production littéraire.
Traditionnellement, le lecteur était considéré comme celui qui consomme
mais, à lřheure actuelle son rôle est très pertinent dans la littérature. Cřest
ainsi que Roland Barthes remarque que « la démarche du lecteur devient
très proche de celle de lřécrivain » (cité dans Darcos et al. 438).
Eagleton affirme ce point lorsquřil insiste que :
25
Literary texts do not exist on bookshelves, they are
processes of signification materialized only in the
practice of reading. For literature to happen, the reader
is quite as vital as the author. (Cité dans Barry, 120).
Toute traduction dřune œuvre nřest qřune interteprétation, donc le
traducteur pourra saisir un nouveau sens différent de lřidée originale de
lřécrivain. Bassnet-Mcguire partage le concept de la notion de
lřintertextualité de Julia Kristeva (1970) qui propose quřil y ait des liens
entre tous les textes. Cette notion de lřintertextualité est expliquée ici par
Bergez :
Le terme, proposé par Julia Kristeva, élargit la notion
dřintersubjectivité introduite par Mikhaïl Baktine :il rend
compte de ce quřun texte est aussi un dialogue avec dřautres
textes, quřil reprend, cite, commente, déforme ou reélabore :
un texte se construit comme mosaïque de citations...(74).
Nous sommes du même avis que Kristeva Julia sur cette notion parce
quřaucun livre ne pourra se composer de toutes les idées concernant un sujet
ou une société. Or, nous comprenons que lřœuvre littéraire est un ensemble
ou un tout.Alors, il est attendu au traducteur de la traduire en se rendant
compte de sa complexité. Le texte littéraire se distingue dřautres textes par
lřusage du langage.Le langage littéraire organise et manipule les éléments
potentiels du langage ordinaire avec souplesse et dextérité, de façon à ce
que les idées qui y sont exprimées évoquent dans ses destinataires des
émotions et des imaginations esthétiques.
En outre, il arrive que les messages que constituent lřœuvre littéraire
telle que Douceurs du bercail d’Aminata Sow Fall soient exprimés avec une
brillance et une finesse qui ne se trouvent pas dans le langage courant. Le
traducteur devrait se rendre compte que le sens du discours dans le texte
littéraire ou même dans la conversation normale ne se trouve pas dans les
26
mots par lesquels, il est exprimé.Souvent le message est scellé dans la
totalité du discours et des idées évoquées en lui au cours de cette
communication.
Jean-Paul reconnaît ce fait lorsquřil remarque quř:
Ainsi dès le départ,le sens nřest plus contenu dans les
mots puisque cřest lui,au contraire,qui permet de
comprendre la signification de chacun dřeux ;et lřobjet
littéraire quoiquřil se réalise à travers le langage,nřest
jamais donné dans le langage ;...aussi les cent mille mots
alignés dans un livre peuvent être lus un à un sans que le
sens de lřœuvre en jaillisse ;le sens nřest pas la somme
des mots ,il en est la totalité organique.(50-51).
Aussi, est-elle cette complexité du langage littéraire qui mène certains
théoriciens à affirmer lřintraduisibilité des œuvres littéraires. On est
accoutumé à la diction<< traduttore- traditore>> qui pourra expliquer la
raison pour laquelle Cora Polet dans son article dans Babel lnternational
Journal of Translation, remarque que <<the image of the literary translator
as a tightrope walker is such a familiar one » (72).
Nous trouvons quřune considération de la traduction littéraire comme
exercice linguistique la rendrait presque impossible, mais, si lřon la
considère comme un acte de communication, lřon verrait que cřest
réalisable. Jacquin aussi a remarqué que « le traducteur littéraire a rarement
la tâche facile. Mais le traducteur de poésie risque de le trouver plus rude
encore »(47).ll découle alors que la difficulté est plus sévère encore dans la
traduction de la poésie à cause de sa sonorité.
Nous sommes dřaccord avec ces théoriciens que la traduction littéraire
est beaucoup plus difficile que la traduction des œuvres dites informatives ;
pourtant nous croyons quřelle est réalisable. Dans la plupart des cas, ce sont
des écrivains littéraires ou des professionnels qui entreprennent la traduction
des œuvres littéraires. Cela implique que ce nřest guère un travail des
néophytes ou des débutants à cause des difficultés qui y sont rencontrées.
27
ll sřensuit que, malgré cet argument de lřintraduisibilité de lřœuvre
littéraire, bon nombre dřécrivains ont fait dřexcellentes traductions.Les
travaux de certains écrivains comme Chateaubriand qui a traduit Paradise
Lost de Milton au dix-huitième siécle, Charles Baudelaire qui a traduit les
œuvres dřEdgar Allen Poe, poète américain du dix-neuvième siécle pourront
tous attester à ce fait. André Gide a également eu une grande réussite dans
sa traduction de Hamlet de Shakespeare au vingtième siécle, et il y a
dřautres exemples.
Chaque écrivain sřinspire souvent de lřhistoricité de son époque et des
problèmes socio-politiques de son milieu. Il donne ses visions subjectives et
pourra être emphatique sur un aspect particulier où un autre écrivain pourra
envisager dřautres angles au même phénomène. Alors, un traducteur qui
est en possession dřun riche bagage cognitif rempli de connaissances
extralinguistiques sur lřauteur et la société en question, serait dans une
meilleure position de restituer le vouloir dire de lřécrivain.
Dřaprès lřapproche interprétative, la communication sřeffectue à travers la
compréhension, la déverbalisation et la réexpression dans la langue
dřarrivée.La compréhension est très pertinente dans toute tâche de
traduction dite interprétative.Lřétude critique de lřœuvre est aussi capable
dřaider le traducteur à avoir une compréhension approfondie du sens et du
langage du texte. La phase de la compréhension pour nous est très
fondamentale, surtout dans la traduction littéraire.
La traduction, pour nous, devrait remplir les lacunes qui empêchent la
communication du texte pour les nouveaux destinataires. Evidemment, une
étude dřIliade de Homère aidera le traducteur à illucider et à compléter
lřhistoire d’Andromaque de Racine.ll arrive, alors que le message de
lřécrivain ne soit pas exprimé explicitement mais reste implicite dans le
texte.Pour bien comprendre un texte littéraire tel que Douceurs du bercail,
il est des fois nécessaire de lire dřautres textes. Lřhistoire de Things Fall
28
Apart de Chinua Achebe pourra également offrir une ampleur de
connaissances extra-linguistiques pour la compréhension et la traduction de
deux poémes intitulés, <<Abiku>> de J.P. Clark et de Wole Soyinka.
Au cours de notre lecture nous avons trouvé que certains éléments
contenus dans les deux poèmes mentionnés sont complémentaires parce
quřils renseignent le lecteur sur le phénomène étranger. Nous constatons
aussi que ce sont les idées fondamentales d’Oedipus Rex de Sophocles qui
forment la base de The Gods Are Not to Blame dřOla Rotimi. Cette pièce
dřOla Rotimi, pour nous, est un chef-dřœuvre, parce que cřest une reécriture
d’Oedipus Rex de Sophocles, adaptée à la culture yorouba. Cřest une
démonstration de la créativité littéraire et du génie du dramaturge.
Bassnett-Maquire soutient ce point en remarquant que :
The interlingual translation is bound to reflect the
translatorřs own creative interpretation of the SL text.
Moreover, the degree to which the translator reproduces
the form … of the SL text, will be as much determined
by the TL system and will also depend on the function
of the translation (80).
Il faut considérer le sens global du texte à cause des multiples connotations
du texte romanesque.ll est donc nécessaire dřapproprier Douceurs du bercail
dřAminata Sow Fall, qui est notre texte dřétude en comparant les réalités
sénégalaises décrites dans le texte aux actualités nigérianes afin de rendre le
vouloir-dire de lřauteur au nouveau public.Nous avons étudié les textes
dřautres écrivains du Sénégal notamment Mariama Ba et Sembene Ousmane
afin de comprendre le contexte situationnel de notre texte. Si nous
considérons trop le sens cela va nous détourner de la perception des
éléments du langage qui sont égalements importants pour bien rendre le
sens.Alors, nous avons essayé de rendre le message du texte dřune façon
acceptable au nouveau public.
29
CHAPITRE DEUX
REGARD CRITIQUE SUR LES PROCESSUS TRADUCTIFS DE
LřAPPROCHE LINGUISTIQUE ET DE LřAPPROCHE
INTERPRETATIVE.
Malgré le fait que lřon traduit depuis des années cřest à peu près il y a
une trentaine dřannées quřa commencé la pédagogie visant à former les
traducteurs.Ceci est dû au fait que lřaccroissement des groupements
dřhommes pour la co-opération et les relations internationales après la
deuxième guerre mondiale ont nécessité la médiation continuelle des
traducteurs Ŕ interprètes. La traduction devient fondamentale pour la
soutenance des politiques bilingues au Canada et la communication dans les
conférences internationales.
Compte tenu du volume de documents nécessitant la traduction, il a
fallu la création rapide des écoles spécialistes qui se chargeraient de
concevoir des programmes adéquats pour la formation des agents de
communication. Alors, en dépit du fait que lřon traduisait intelligemnt
depuis des millénaires, il a nécessité lřemergence des théories de traduction
pour assurer lřefficacité de la pédagogie aux apprenants Ŕ traducteurs.
Deslile soutient ce point en remarquant quřil Ŗdevient impérieux, pour des
raisons évidentes dřefficacité pédagogique, dřorganiser lřenseignement
autour dřun ensemble cohérent et juste de régles qui, sans avoir un caractère
absolu, servent de point dřappui à lřapprentissage dřune activité
intellectuelle.ŗ (47)
Evidemment, la montée de demandes pour les traducteurs
pragmatiques a précipité la naissance de telles théories que la théorie
sémiotique dřAlexandre Ljudskanov, la théorie linguistique de John Catford,
la théorie sociolinguistique de Eugène Nida, la méthode comparative de
Jean-Paul Vinay et Jean Darbelnet, et la théorie interprétative du groupe de
30
lřEcole Supérieure dřInterprètes et de Traducteurs à Paris, dont les chefs
sont Danica Seleskovitch et Marianne Lederer.
Parmi toutes ces théories qui ont apparu, deux sont couramment
distinguées dans les études et les pratiques de la traduction notamment:
lřApproche linguistique et lřApproche lnterprétative. Figurant prominément
sur la liste des publications des représentants de la théorie lingustique sont
Les problèmes théoriques de la traduction(1963) de Georges Mounin,
Approaches to Translation(1981) de Peter Newmark, Stylistique comparée
du français et de l’anglais, méthode de traduction(1977) de Jean-Paul Vinay
et Jean Darbelnet. Pour l’approche interprétative nous avons : Interpréter
pour traduire (1986) de Danica Seleskovitch et Marianne Lederer, Les
fondements sociolinguistiques de la traduction (1978) de Maurice Pergnier,
La traduction aujourd’hui (1994) de Marianne Lederer et L’Analyse du
discours comme méthode de traduction (1980) de Jean Deslile. Ce chaptire
fait un examen critique des deux approches et à travers des exemples
concrets démontre le rôle intellectuel que jouent les compléments cognitifs
dans lřanalyse exégétique de la traduction dite interprétative.
L’APPROCHE LINGUISTIQUE
Certains praticiens et théoriciens tels Catford John et Mounin Georges
ont la tendance à voir la traduction comme une branche de la linguistique.
Par exemple, Mounin Georges dans son ouvrage, Les problèmes théoriques
de la traduction, dit que Ŗla traduction, donc, est un contact de langue et un
fait de bilinguismeŗ (4).Et plus loin encore, il dit, Ŗcertes lřactivité
traduisante, implicitement nřest jamais absente de la linguistiqueŗ (8).
Dřaprès Albir Hurtardo, lui-même, chercheur à lřUniversité Autonome
de Barcelone et ardent praticien de lřapproche interprétative, ŖGeorges
Mounin centre donc sa recherche sur les langues. Il assigne à la traduction
lřobjectif de dire la même chose que lřoriginalŗ (Albir, 9). Mounin croit à
31
la fin quřil peut y avoir des problèmes dřinterférences dřun cas particulier.
Par exemple, lorsque le traducteur emploie deux langues, la langue dřoù il
traduit peut influencer son usage de la langue dřarrivée dans laquelle il veut
rendre le texte. Pour lui, la traduction nřest pas toujours possible parce que,
la traduction, équivaut véritablement le remplacement du texte original par
un texte équivalent, avec correspondances dans la langue dřarriveé.Il base
ses arguments de lřintraduisibilité sur les particularités de chaque langue,
cřest-à-dire, les problèmes linguistiques: sémantique, morphologique,
phonétique et stylistique.
Et Du Bellay avait au XVIème
remarqué que:
La traduction serait impossible à cause, non plus des
propriétés des langues elles-mêmes, mais à cause de la
façon très particulière dont les écrivains, surtout les
poètes, se servent des langues (cité dans Mounin, 48).
Les théoriciens linguistiques croient que cřest à travers la linguistique
que les opérations traductives seront éclairées. Les caractéristiques de
lřœuvre littéraire leur paraîssent trop complexes pour être rendues dans une
autre langue. (Frost cité dans Di Yanni 771).Jean-René Ladmiral, en
considérant lřactivité de la traduction arrive à lřidee quřil est presquř
impossible de la tenter.Chez lui, la traduction renvoie à une discipline qui
exige lřexactitude et est ainsi réglée par ses lois et ses principes comme
dans lřétude de la biologie.Le traducteur qui croit à lřapproche linguistique
en traduction,cherche souvent des équivalents statiques qui correspondent
aux mots du texte de départ, exercise qui sřavère parfois impossible..
Dřaprès Catford :
Translation fails Ŕ or untranslability occurs Ŕ when it is
impossible to build functionally relevant features of the
TL text. Broadly speaking; the cases where this happens
fall into two categories. Those where the difficulty is
linguistic, and those where it is cultural. (94).
32
Et Peter Newmark, professor à lřUniversité de Surrey et partisan
passionné de lřapproche linguistique insiste fermement sur les mots dřun
texte. Vinay J.P. et Darbelnet J. dans leur livre Stylistique comparée du
français et de l’anglais, méthode de traduction, définissent la traduction
comme Ŗle passage dřune langue A à une langue B, pour exprimer une
même réalité Xŗ (20).
Ils disent donc que:
La traduction est indissociable de la stylistique
comparée, puisque toute comparaison doit se baser sur
des données équivalentes. Mais la reconnaissance de ces
équivalences est un problème de traduction au premier
chef.Les démarches du traducteur et du stylisticien
comparatif sont intimement liées, bien que de sens
contraire. La stylistique comparée part de ses lois, le
traducteur utilise les lois de la stylistique comparée pour
bâtir sa traduction. (21).
Ils croient que pour avoir une traduction réussie, le traducteur devrait
chercher des équivalences statiques dans la nouvelle langue pour transposer
le message. Ils déclarent que par la comparaison de deux langues en question
le traducteur pourra faire ressortir les caractéristiques de ces langues. Vinay
J.P. et Darbelnet J. disent que Ŗce qui compte, ce nřest pas le sens de
lřénoncé, mais la façon dont procède une langue pour rendre ce sensŗ
(25).Donc, ils soulignent la forme et non pas le message quřelle véhicule
comme lřobjet de la traduction parce quřil y a des idées inédites, des actes
gestuels, des idiotismes et des valeurs uniques à chaque langue et sa culture
dont les exactitudes nřexistent pas dans dřautres langues étrangères (Vinay
et Darbelnet 25).
Ils insinuent par ce fait que lřon ne pourra guère faire ressortir les valeurs
culturelles en subsituant les mots avec les équivalents dans le texte littéraire
qui a la nature connotative. Ils mettent en relief la pratique de la
comparaison de deux langues sur trois plans; le plan lexique, de
33
lřagencement et du message. Ils appellent Ŗtraduction obliqueŗ une situation
où la langue dřarrivée emploie des moyens différents de ceux de la langue de
départ. Et ils recommandent sept procédés techniques pour faciliter lřactivité
traduisante à savoir lřemprunt, le calque, la traduction littérale la
transposition, la modulation, lřéquivalence et lřadaptation. Donc pour bien
traduire, il faut chez le traducteur la prise en compte de ces procédés.
L’EMPRUNT
Lřemprunt, cřest le plus simple de tous les procédés de traduction.
Souvent, il révèle une lacune métalinguistique, peut-être une technique ou
un concept inconnu. Le traducteur peut sřen servir aussi pour produire une
couleur locale. Par exemple, Ŗdollarsŗ en Amérique et ŖNairaŗ au Nigéria.
ŖThe coroner spokeŗ ŖLe coroner prit la paroleŗ.
LE CALQUE
Le calque se réfère à un emprunt dřune sorte particulière. Le traducteur
emprunte à la langue étrangère le syntagme mais transpose littéralement les
éléments qui les constituent. Cela résultera à un calque dřexpréssion qui
sřaccorde aux structures syntaxiques de la langue dřarrivée, en créant un
monde expréssif, par exemple, Ŗcompliments de la saisonŗ, ŖCompliments
of the seasonŗ.
LA TRADUCTION LITTÉRALE
Cřest une traduction mot à mot qui fait que le passage de langue de
départ mène à un texte à la fois correcte et idiomatique sans que le
traducteur ait eu à sřinquiéter dřautre chose que des servitudes linguistiques.
Par exemple, I left my spectacles on the table downstairsŗ; Ŗjřai laissé mes
lunettes sur la table en basŗ. Selon les linguistes Ŗla traduction littérale est
une solution unique, réversible et complète en elle-même.ŗ(Vinay et
34
Darbelnet, 48). Elle se trouve beaucoup dans les traductions réalisées entre
les langues du même milieu culturel (français Ŕ Italien).
LA TRANSPOSITION
Cřest le procédé qui consiste à remplacer une partie du discours par une
autre sans toucher au sens du message, Ŗil a annoncé quřil reviendraitŗ peut
devenir Ŗil a annoncé son retour. ŖIl a annoncé quřil va partir devient alors
Ŗil a annoncé son départ.ŗ
LA MODULATION
Ce precédé est une modulation dans le message, obtenue en
changement de point de vue. Elle sřimpose quand le traducteur voit que la
traduction littérale ou même transposée mène à une proposition
grammaticalement correcte, mais qui se heurte au génie de la langue
dřarrivée Par exemple, it is not difficult to show … il est facile de montrer
…ŗ
L’EQUIVALENCE
Elle sřen sert le moment où, dans deux langues différentes on trouve la
même situation ou la même réalité en employant les moyens stylistiques et
structuraux complètement différents. Cela sřobtient toujours dans la
traduction des proverbes, par exemple, ŖToo many cooks spoil the broth:
deux patrons font chavirer la barqueŗ.
L’ADAPTATION
Cřest le procédé quřon emploie dans des cas où une situation pareille à
celle du message du texte nřexiste pas dans la langue dřarrivée, et doit être
inventée par rapport à une situation, quřon juge équivalente. En élaborant ce
procédé, Vinay et Darbelnet disent, Ŗcřest donc ici un cas particulier de
lřéquivalence, une équivalence de situations.ŗ (53). Par exemple, ŖHe kissed
35
his daughter on the mouth; il serra tendrement sa fille dans ses bras.ŗ
L’APPROCHE INTERPRÉTATIVE
Seleskovitch et Lederer dans leur ouvrage, Interpréter Pour Traduire
remarquent que lesŖtraducteurs et les interprètes ont le même objectif:
communiquer la pensée dřautruiŗ (10). Les deux propagatrices de la théorie
croient que le traducteur devrait jouer le rôle dřinterprète. A un colloque des
théoriciens du langage et de la traduction, Seleskovitch Danica, le chef du fil
de théoriciens à lřEcole Supérieure dřInterprètes et de Traducteurs, lřE.S.I.T,
à Paris, France, explique que Ŗlřinterprète comprend le discours quřil entend,
en dégage du sens quřil mémorise, en oubliant par contre les mots exacts du
discours, et il reformule ensuite ce sens dans une autre langue avec la
spontanéité dřexpression dřun orateur ordinaireŗ (Seleskovitch, 184).
La théorie a une base dřoralité et considère le sens comme lřobjet même
de la traduction. Contrairement à Vinay et Darbelnet qui mettent lřaccent
sur Ŗla façon dont procède une langue pour ce sens,ŗ la théorie interprétative
souligne que cřest la communication du sens du discours ou de la pensée de
lřauteur qui est le but principal de la traduction, cřest-à-dire, le message
quřelle véhicule. (Seleskovitch et Lederer, 10).Puis quřun être humain peut
communiquer par dřautres moyens comme le regard et le langage gestuel, ce
qui est nécessaire, cřest de les comprendre afin de transmettre leur message
au destinataire.
Les propositons des comparatistes, si lřon ne connaît pas bien la
langue concernée mène à des contresens en traduction.Ce risque de
contresens est généré du fait que dans chaque texte à traduire , il y a des
tours de langues, des idiotismes, des valeurs socio-culturelles, voire
écologiques , des mots allégoriques qui renvoient à des réalités uniques à la
langue concernée.ll y a des inédits qui constituent les aspects contextuels du
texte, outre les éléments notionnels et affectifs que portent les mots au
36
niveau du discours qui ne ressortissent guère, lors de la traduction littérale.
Cřest ce qui produit la notion de lřintraduisibilité.ll ne serait plus question
de la recherche des correspondances des mots et des phrases dans une autre
langue. Cřest pourquoi le traducteur doit comprendre la pensée dřautrui
avant de la faire comprendre par les autres. Il ne faut pas analyser des mots
ou comparer les propositions de deux langues hors contexte pour rendre le
sens du texte original.
Voilà pourquoi Albir Hurtardo insiste que:
Les mots de lřorateur disparaissent très rapidement du
cerveau de lřinterprète, mais ce qui lui reste, cřest son
compris, qui doit immédiatement trouver son expression
dans une autre langue. Sřil sřattardait sur les mots, sa
traduction serait un balbutiement obscur, et
incompréhensible pour ses auditeurs. (53).
Les phrases sont porteuses des idées. Elles ne sont jamais innocentes
mais sont composées de deux parties: le signifiant (la forme) et le signifié(le
fond) qui est le vouloir dire du discours. (Saussure, 100). Cřest le signifié
qui compte vraiment dans la traduction. Cette école nous invite à faire
référence à la distinction faite par Saussure entre le langage, la langue et la
parole. (Saussure, 25).
Le langage est le véhicule de communication entre les hommes. Grâce à
la faculté langagière, lřhomme se distingue de tous les autres animaux.
Lřhomme est un animal social qui resent sans cesse le besoin de
communiquer avec les autres. La parole qui fait partie du langage est unique
à lřhomme.Selon Ferdinand de Saussure, le langage se constitue de deux
composants: la langue et la parole. Les deux font parties du langage; mais la
langue est sociale et collective tandis que la parole est individuelle et
spontanée.
37
Saussure pose la question :
Mais quřest-ce que la langue? Pour nous elle ne se
confond pas avec le langage; elle nřen est quřune partie
déterminée, essentielle, il est vrai. Cřest à la fois un
produit social de la faculté du langage et un ensemble de
conventions nécessaires, adoptées par le corps social pour
permettre lřexercise de cette faculté chez les individus.
Prise dans son tout, le langage est multiforme et
hétéroclite. (Saussure, 25).
Dřaprès Seleskovitch Danica dans le livre, Théorie du langage et
théorie de la traduction, “la compétence langagière spécifique à lřhomme
lui permet dřapprendre puis dřutiliser une langue pour communiquer avec
ses semblables.ŗ (188). La parole est toujours intelligible et immédiate.
Cřest en entendant parler les autres que les enfants apprennent leurs langues
maternelles. Peu à peu, ils commencent à associer des idées aux objets, aux
images et aux mots en voyant les actes de paroles.
Pour Saussure:
La parole est un acte individuel de volonté et
dřintelligence, dans lequel il convient de distinguer les
combinaisons par lesquelles le sujet parlant utilise le
code de la langue en vue dřexprimer sa pensée
personnelle; le mécanisme psycho-physique qui lui
permet dřextérioriser ces combinaisons. (Saussure, 30 Ŕ
33.).
Afin dřaccomplir cette tâche de communication, le traducteur devrait
saisir la pensée du locuteur qui est prononcée dans les discours pour la faire
exprimer dans une autre langue. Selon la théorie interprétative, il ne faut pas
analyser les mots ou comparer les phrases hors contexte.
Seleskovitch et Lederer remarquent que:
38
Polysémie et ambiguité sont caractéristiques de tout
assemblage de mots hors contexte, elles disparaissent
lorsque la phrase est placée dans le fil de son discours.
Seule,lřintention de communiquer qui construit la
parole, libère les mots de la polysémie, les phrases de
leur ambiguité et les charge de sens. (Seleskovitch et
Lederer, 17).
Alors, lřintention de communiquer le sens du discours qui est le but
fondamental du langage et de la traduction, fait disparaître certains
problèmes de la traduction, notamment lřintraduisibilité, lřéquivalence, les
faux amis, lřambiguité et la polysémie relevés par lřapproche linguistique.
(Seleskovitch et Lederer 69). De cette façon, on voit que lřacte traductif est
un travail intelligent, non pas une tâche mécanique. Ce qui compte vraiment
cřest de communiquer le message du texte.
Seleskovitch et Lederer montrent que:
Les problèmes dřintraduisibilités ont été posés par la
comparaison hors discours de signes linguistiques …
mais ils cessent dřexister au niveau de la
communication, cřest-à-dire, lorsque le seul objectif de
la traduction est de faire comprendre à ses destinataires
le contenu du message qui leur est adressé (69).
Il va de soi que le traducteur devrait étudier et intérioriser le texte afin
de le faire comprendre par ceux à qui il est destiné. Il lui faut une bonne
connaissance de deux langues, la LD et la LA, aussi bien que des
connaissances extralinguistiques sur lřauteur, sur ses environnements et sur
les destinataires du texte pour rendre le sens exacte du texte. (Seleskovitch et
Lederer 65).
39
De ce fait Seleskovitch et Lederer accentuent que:
Pour rendre justice à un texte rédigé en conformité avec
le génie de la langue dřorigine, la traduction sera
redigée en conformité avec le génie de ceux qui la
liront. Or, cřest là sans doute le gros problème sur
lequel achoppent si souvent et la traduction et
lřinterprétation: la re-expression dans la langue de
traduction ne rend pas toujours lisible le texte transposé,
ni intelligible le discours interprété. (62).
Nous constatons donc que la théorie interprétative élaborée par lřEcole
Supérieure dřInterprètes et de Traducteurs, est basée sur les observations des
interprètes dans les conférences internationales et sur la réflexion des
practiciens de leur propre pratique.Lřopération interprétative, selon, Danica
Seleskovitch et Marianne Lederer se résument en triple
processus:compréhension, déverbalisation, réexpression et la langue nřest
pas lřobjet à traduire mais fait fonction de véhicule du sens.( 73). Le
traducteur doit bien comprendre le texte pour exprimer le même sens que
lřoriginal avec les moyens dřune autre langue. Il fait la synthèse des idées
contenues dans le texte et il essaie de les reformuler ou de les re-exprimer.
Ce qui résulte est plus ou moins un nouveau texte qui contient le message du
texte original (Koutsivites 469).
Albir Hurtardo, lui aussi de la théorie du sens ajoute une quatrième
phase qui sřappelle, <<vérification>> aux trois phases identifiées par
Seleskovitch et Lederer en remarquant que la traduction écrite admet de
plus une phase de vérification. (Albir, 71).ll souligne<<quřil existe en réalité
deux phases interprétatives dans la traduction écrite: dans la première, on
interprète lřoriginal pour le comprendre, dans la deuxième on interprète la
reécriture pour vérifier si elle rend bien lřoriginal>>. (Albir, 70).
Il faut que le traducteur fasse son mieux pour rendre le message du
texte dřune manière quřil soit clair, lisible et intelligible pour ceux à qui, il
est destiné. Il devrait faire plus que de traduire le texte littéralement ou de
40
comparer les mots de deux langues pour trouver le sens juste. (Seleskovitch
et Lederer 62). Ce nřest pas un cas de remplacer les mots avec des
équivalences qui correspondent en langue dřarrivée, parce que le résultat ne
peut pas donner le sens du texte original.
Bassnett-Mcguire explique que ŖWhat the translator must do,
therefore, is to first determine the function of the SL system and then find a
TL system that will adequately render that functionŗ. (119).La
compréhension réquiert toujours une compétence contextuelle qui va aider la
compétence linguistique. Dès le moment où le sens du texte est compris et
approprié par le processus de déverbalisation, le traducteur le reverbalise.
Cřest le même message capté ou puisé du texte original qui est re-exprimé
dans une autre langue.
Dřaprès Vennewitz Leila, Ŗmany processes in translation are not different
from those that go on in the daily speech of a monolingual personŗ (87).Cela
confirme le fait que lřacte traductif est un processus mental et intelligent
plus quřun processus mécanique. Les actes de déverbalisation et de
réexpression continuent dans lřindividu même quand il en est inconscient
(Vennewitz, 87).
Cřest tout à fait naturel de communiquer la pensée dřautrui à la manière
interprétative. Mais il devient difficile et presque impossible dřavoir une
traduction réussie par lřanalyse des mots et la comparaison de deux langues,
par exemple, quand il nřexiste pas dřéquivalents qui correspondent aux
clichés, aux idiotismes, aux proverbes, et à certaines valeurs socio-
culturelles qui sont uniques à une culture donnée.
41
Venneneitz Leila affirme ce point en disant:
When communication occurs between two people of
similar age and background, every sentence uttered has
to be filtered through layers of received ideas, of
prejudice, preference and conditioning. Normally this
filtering process goes on automatically; we do it all the
time without a thought. The sense of what is being said
is our first concern, but we bring our sensibility to bear
on the interpretation of that sense. (87).
Le mot, par sa nature peut avoir plusieurs sens mais, sřil est placé
dans son contexte, lřon peut arriver à comprendre sa vraie valeur. Un mot
placé hors contexte peut avoir un sens différent de celui du texte original. De
même, une phrase pourrait signifier plusieurs choses dans une langue. Cřest
pourquoi lřanalyse et la comparaison des mots et des phrases dans deux
langues pourraient ne pas donner le sens du texte.Afin de contourner
lřintraduisibilité, lřapproche interprétative conseille carrément la recherche
de la restitution du sens en voulant quřil soit considéré comme une synthèse
non-verbale de toute démarche sémasiologique ou
onomasiologique.Seleskovich et Lederer considèrent le sens comme lřobjet
même de la traduction, comme un souvenir cognitif, le produit du processus
mental de compréhension.Celui qui fait abstraction du sens prive la
traduction de son essence.
Dřaprès Seleskovitch et Lederer:
Pour que lřétude de la traduction reste attachée à son
plan propre, cřest-à-dire au discours, ce nřest pas la
surface conceptuelle des mots quřil convient de
comparer mais la taxonomie, opérée par le discours.
(54).
Une traduction qui réexprime fidèlement chaque mot rendra rarement le
sens de lřoriginal. Le rôle dřun traducteur est considérable puisquřil est
lřintermédiaire entre lřauteur et son audience. Il est le porte-parole par lequel
42
lřauteur émet son message qui pourrait être de nature médicale, scientifique,
technologique ou littéraire. Cřest pourquoi il faut la fidélité à la forme et la
fidélité au sens de lřinformation que veut transmettre lřauteur à son
audience.
Encore Seleskovitch et Lederer expliquent que:
Il ne suffit pas quřune parole soit correcte par rapport aux
normes pour être claire, il faut que les idées sřassocient à
des énoncés dont la composition correspond à la logique
de la langue dřexpression. Pour que la traduction soit
claire, elle doit se faire discours. (62).
Lřapproche linguistique accorde la priorité à lřanalyse des mots et à la
comparaison des équivalences en deux langues, tandis que lřapproche
interprétative conçoit la traduction comme un problème de lřinterprétation
du sens de la parole.Lřapproche linguistique réduit la traduction à un
problème linguistique tandis que lřapproche interprétative met en relief
lřintention de communiquer comme le but principal de la traduction.
Dřaprès Jean Deslile, professeur titulaire en traduction et lřun des
premiers diplomés de lřESIT à Paris et partisan acharné de la théorie du
sens, cet acte de communication se déroule avec la compréhension, la
reformulation et la justification du texte dans une autre langue. Lřactivité
traduisante devrait mobiliser tous les appareils cognitifs du traducteur; la
compétence linguistique et le bagage cognitif pour quřil puisse comprendre,
reformuler et ré-exprimer le texte (Deslile, 66).On ne parle jamais sans but,
même sřil sřagit dřune soliloque. Lřhomme normal a toujours un message à
transmettre dans le discours quřil prononce. Le traducteur devrait essayer de
saisir ce message afin de le récapituler et de le re-exprimer dans sa
traduction.
43
De ce fait Vassilis Kousivites fait cette observation:
On constate quřon ne traduit pas des mots, même pas
des phrases, mais des textes … On traduit lřessence du
texte. La traduction est un acte de parole et non pas un
fait de langue. Lřessence dřun texte est la réalité
psychique et mentale que lřemetteur du message veut et
essaie de communiquer, et que le récepteur saisit grâce
à son support sémantique et stylistique, mais aussi grâce
au contexte général. (469).
Alors, il ne faut pas confondre la fidélité en traduction avec la
translittération qui est faite mot à mot et qui ne pourrait guère communiquer
le vouloir-dire de lřauteur. Cette sorte de traduction pourrait même créer des
nuances qui la rendraient inintelligible aux destinataires. Dřaprès Hurtardo
Albir, Ŗil existe un dynamisme du sens, qui se construit de manière
différente dans la poétique, dans la technique, dans les chansons, malgré cela
le sens reste la synthèse finale du processus de la compréhension du
récepteurŗ. (202).
Donc par lřaffirmation de la théorie interprétative, il nřy a pas
dřintraduisibilité puisque la traduction est toujours possible, parce quřelle est
portée sur les contenus des discours et des textes, et non pas sur les langues.
La traduction est toujours possible, même dans les textes littéraires parce
quřil ne sřagit pas, tout simplement dřune transformation des signes dans
dřautres signes mais, de la précision de la signification pertinente de ces
signes (Seleskovitch et Lederer 69).
Hurtardo Albir montre que:
La traduction nřest pas … une opération de langue à
langue mais une opération de sens à sens; peu importe
alors la différence des langues en traduction, car il ne
sřagit pas de mettre en rapport des langues mais un sens
et un effet produit, qui, étant non verbaux, peuvent être
réverbalilsés dans nřimporte quelle autre langue. (206).
44
A lřopposé des praticiens de lřapproche interprétative, Vinay et Darbelnet
voient la traduction comme un acte de comparaison entre deux langues et
remarquent ainsi:
On peut considérer un troisième rôle de la traduction.
La comparaison de deux langues, si elle est pratiquée
avec réflexion, permet de mieux faire ressortir les
caractères et le comportement de chacune. Ici, ce qui
compte nřest pas le sens de lřénoncé, mais la façon
dont procède une langue pour rendre ce sens. (25)
Cependent, comparer les mots de deux langues ne pourra guère donner un
bon résultat dans la traduction à cause de la polysémie des mots et de la
polyavelence des phrases.Les théoriciens du sens nous font voir que la saisie
du sens et sa reexpression sont parfois impossibles au niveau linguistique
parce que contrairement à la parole, la langue peut présenter pour chaque
mot ou chaque symbole dans un texte plusieurs significations virtuelles mais
aucun sens réel.Chaque mot pourra avoir plusieurs significations hors
contexte. Considérons dřabord le mot Ŗnaviguerŗ pour illustrer la nature
polysémique du mot.
Dřaprès Le Robert pour tous: dictionnaire de langue française,
naviguer pourra signifier (1) se déplacer sur lřeau (2) voyager comme marin
sur un navire (3) Diriger la marche dřun bateau, dřun avion Ŕ (figurative).
Savoir naviguer: être débrouillard. (4) (Figuratif et familier), voyager, se
déplacer souvent Ŕ bourlinger (761). En plus, Le Collins et Robert
dictionnaire français – anglais, anglais – français de sa part ajoute ce sens:
naviguer sur lřordinateur Ŕ sur lřinternet. To surf or browse the internet
(640).
Pour insérer ces significations du mot dans leurs contextes nous avons
des phrases, suivantes:
(1) Les matelots sont allés naviguer sur la rivière.
45
(2) Les touristes naviguent en voiture à travers Détroit.
(3) Le jeune homme devrait savoir naviguer, afin de réussir dans sa
nouvelle profession.
(4) Martin et Jacqueline aiment le sport, donc passent ce weekend en
naviguant sur la planche.
(5) Les étudiants naviguent sur lřinternet toute la nuit afin de faire leur
devoir.
Cette illustration montre quřun seul mot peut signifier plusieurs
choses mais que la valeur découle du contexte dans lequel il sřintègre.
Ferdinand de Saussure confirme cette idée lorsquřil montre que le terme
Ŗmoutonŗ en français peut avoir la même signification que lřanglais Ŗsheepŗ,
mais non la même valeur. Une tranche de viande mise à la table est
représentée en anglais comme Ŗmuttonŗ et non Ŗsheepŗ. En français le
terme Ŗmoutonŗ, représente deux choses tandis quřen anglais deux termes
différents sont employés pour les désigner.
La compréhension est donc pertinente dans la restitution des énoncés
successifs dřun texte donné. La compréhension exige certains faits et des
connaissances particulières pour se réaliser dans lřindividu. Une compétence
de la langue est pertinente pour lřobtention du sens de lřœuvre et la maîtrise
de la langue dřarrivée est indispensable pour sa re-expression dans la culture
cible. La compréhension nécessite souvent la compétence linguistique et,
simultanément un savoir encyclopédique qui fonctionnent
complémentairement pour achéver un sens global du texte.
46
Dřaprès Jean Deslile :
… comprendre un énoncé, cřest (entre autres
choses), y reconnaître une phrase de la langue,
retenir un, et un seul des sens de cette phrase,
donner une valeur aux expressions référentielles,
calculer les sous-entendus. Ces opérations
intellectuelles sřappuient sur la compétence
grammaticale, mais aussi sur la compétence du
monde … (60).
Il découle alors que la compréhension renvoie à lřassociation de toutes
les idées explicitées et à celles qui ne le sont pas dans le texte. De telles
activités rhétoriques sřaccomplissent continuellement dans le cerveau sans
que nous ne nous en rendions guère compte et le résultat cřest
lřinterprétation dřun tel énoncé. La compréhension du contexte dřune
histoire aide à éclairer et à déterminer lřinterprétation du sens.Legendre R.
remarque que<< la compréhension est la capacité de comprendre un
message dans son ensemble...de déceler lřintention de lřauteur...de
distinguer les idées principales des idées secondaires, de reconnaître les
idées sous Ŕjacentes ou implicites>>(cité dans Tijani Adebowole, 104).
Marianne Lederer soutient ces idées de lřimplicite et de lřexplicite
lorsquřelle remarque que :
La compréhension embrasse les sens présupposés et des sous-
entendus, quřon peut classer sous le général dřimplicites.lls sont
indissociables de la connaissance de la langue et ont leur importance, car ils
ont une incidence sur le sens des textes au même titre que lřexplicite
linguistique(34). Chez le traductologue, les sens des phrases explicites ou les
présupposés sont ceux quřil faut re-exprimer dans sa traduction.Mais les
sous-entendus qui sont les idées implicites servent à éclairer le sens global
du texte .Les présupposés qui sont explicités dans la langue participent dans
un sens général à lřacquisition des connaissances mises à la portée du
47
monde.II va sans dire alors que le traducteur qui est un lecteur privilégié du
texte pourrait profiter des idées explicites et implicites qui lui sont
disponibles pour avoir une bonne traduction.
Pour bien comprendre le vouloir-dire de lřauteur, le traducteur devrait
posséder des connaissances approfondies et pertinentes qui sont
vraisemblables à celles de lřauteur. Même si elles ne sont pas tout à fait
semblables aux siennes, le traducteur pourra les approprier et les intérioriser
pour quřil les rende dans sa traduction avec les émotions désirables.Une
traduction basée sur une bonne compréhension du texte éclairera les motifs
et les intentions de lřauteur.
Marianne Lederer constate que :
Le sens est ce que veut dire un auteur, ce quřil veut faire
comprendre à travers ce quřil dit. Sřil est bien compris, il est
le même pour tout lecteur, que les connaissances de ce
dernier soient juste suffisantes pour le saisir ou quŘil dispose
dřun savoir qui lui permette de le corriger, de le contrer ou
de le compléter (35).
Le traducteur qui partage des expériences identiques avec lřauteur trouve
que les éléments cognitifs chez lui soient actifs pour enrichir sa
compréhension du texte.Ces connaissances lui permettraient à leur tour de
soutenir ou de combattre la thèse de lřauteur.Elles lui viendraient aussi en
aide pour compléter les nuances qui se trouvent dans le texte à travers la
polysémie des mots, les faux amis et lřambiguïté des phrases. Cela explique
la raison pour laquelle la plupart de traducteurs choisissent à traduire les
auteurs avec lesquels ils ont des affinités ou des textes dont ils sont les plus
spécialisés.
Voyons dřabord ce terme Ŗrhétoriqueŗ qui soutient le cadre théorique
de la méthode interprétative de la traduction. Dřaprès Deslile, Ŗla rhétorique
serait donc dans une très large mesure la manière dont les énoncés mettent
48
en jeu et modifient le savoir partagé de deux inter-locuteurs ou dřun
rédacteur et dřun lecteurŗ. (60) Il sřen va que le traducteur qui cherche des
équivalences pour la traduction dřun texte devrait dřabord faire un examen
du sens de lřénoncé contenu dans le texte quřil traduit.
Il devrait essayer dřanalyser les discours dans les circonstances de leur
production.Pour soutenir ce fait, Deslile remarque que <<Dans un processus
créateur ,il est impensable dřopérer un tansfert de signes sans procéder au
préalable à une analyse de lřinformation dont les signes sont porteurs ,et
sans tenir compte du supplément dřinformation nécessaire à leur juste
interprétation.Ce <<supplément dřinformation>> correspond aux
compléments cognitifs…>> (52).Il est fondamental de comprendre que le
concept de traduction est modifié ici. ŖLa traductionŗ (résultat) et lřŖactivité
traduisanteŗ (série dřopérations intellectuelles) présentent une distinction
analogue à celle que Piaget établit entre la Ŗperception: et lřŖactivité
perceptiveŗ. (Deslile, 61). Il en est de même que lřactivité traduisante
renvoie aux activités intellectuelles qui conduisent le traducteur à trouver
des équivalences aux concepts dans le texte.
Dans son aspect psychologique, lřactivité traduisante consiste en
éclaircissant un assemblage de faits compliqués entremêlés dans des
relations logiques et soutenus par des discours. Certaines expressions se
révèlent appropriées pour représenter les Ŗopérations psycholinguistiquesŗ
qui se développent successivement dans le cerveau du traducteur. Telles
expressions quřŖopération traduisanteŗ, Ŗprocessus traductionnelŗ,
Ŗmécanisme de traductionŗ et Ŗacte de traduireŗ sont des acceptions plus
préférables au mot Ŗtraductionŗ qui est moins explicite.
Notre analyse du termeŖ naviguerŗ démontre que cřest le contexte qui
détermine le sens et élimine les effets polysémiques du mot dans la
traduction. Cřest pourquoi traduire ne renvoie pas à la substitution des mots
du texte qui est analogue au transcodage. Cřest une opération interprétative
49
qui dégage de lřénoncé le sens du discours. Naviguer nřa pas la même valeur
dans toutes les phrases, mais le contexte précise le sens dans chaque cas.
De même, le mot anglais Ŗ sympathetic ŗ pourra signifier plusieurs
choses dans différents contextes. Le Collins et Robert dictionnaire français –
anglais, anglais – français traduit sympathetic ainsi: (1) showing concern
(person (smile) compatissant). (2) (Kind) (person), bien disposé,
bienveillant; favorable (3) sympathique (4) (Anatomie, physiologie)
sympathique Ŕ the sympathetic nervous system (le système nerveux
sympathique (2076). Les phrases suivantes peuvent illustrer les différentes
acceptions du mot:
1. Anglais.
The manager is quite sympathetic to the plight of the striking railway
workers, nevertheless …
Français.
Le patron est réceptif envers les problèmes des chéminots en grève,
néanmoins …
2. Anglais.
Eugenie is quite a nice girl.
Français.
Eugénie est une fille bien sympathique.
3.Anglais.
Heřs suspected of having some Nazi sympathies .
Français.
On le supçonne dřavoir des sympathies avec le nazisme.
4. Anglais.
The judge was sympathetic of the problems of divorcees.
Français.
Le juge comprenait les problèmes des divorcées.
50
5. Anglais.
The nurse is very sympathetic towards the sick child.
Français
Lřinfirmière est bien sympathique envers lřenfant malade.
Dans la première phrase, sympathetic signifie que le patron comprend
bien les problèmes qui confrontent les cheminots en grève, cependant ne
pourra rien y changer. Dans la deuxième phrase, sympathetic a le même sens
que le mot Ŗaimableŗ ou gentilleŗ, tandis que dans le troisième contexte,
sympathetic évoque les idées que lřhomme a une prédisposition pour les
idées du mouvement nazi. Sympathetic dans la quatrième phrase, démontre
que le juge est en affinité avec les divorcées.Dans la dernière phrase,
sympathetic est une terminologie médicale qui représente le système
nerveux sympathique qui est responsable pour lřévocation des sentiments de
compassion dans lřinfirmière pour lřenfant malade.
Cette analyse a encore illustré lřimportance du contexte dans
lřinterprétation pour faciliter la compréhension. Le traducteur devrait se
méfier de chercher des équivalences dans des signes de la langue dřarrivée
qui sont semblables aux mots de la langue de départ. Cette sorte de
traduction a la tendance dřaboutir à un mauvais résultat à cause du problème
de faux amis.Il faut noter que cette dernière analyse démontre ce point
puisque sympathetic et sympathique sont des faux amis qui ne représentent
pas les mêmes faits dans tous les contextes. Ce nřest que par lřinterprétation
du mot que lřon pourra restituer lřintention de lřauteur dans le texte. Nous
avons aussi démontré par cette analyse quřun mot pourra sřinvestir dřune
autre acception que celle que lřon lui reconnaît ordinairement hors contexte.
Alors, le contexte élimine les virtualités des significations et libère le sens
pertinent comme la seule valeur de la phrase.Et, Jean Deslile affirme ces
idées en remarquant que<< le contexte favorise un sens en déterminant les
51
signfiés de chaque signe (indéterminé par nature) qui le compose.Enrichis de
cette univocité provisoire, les énoncés sřintègrent dans un réseau de relations
linguistiques et non-linguistiques, et la polysémie ne se réalise pas>>(66).
Les théoriciens de la traduction interprétative tels que Jean Deslile, le
trouvent nécessaire de faire comprendre à lřapprenti-traducteur Ŗle processus
intellectuel par lequel le message donné est transposé dans une autre
langueŗ. (6) Cette démarche interprétative est plus valable quřune simple
confrontation de systèmes linguistiques parce quřelle demande une grande
aptitude de compréhension en unité avec la compétence du maniment du
langage. Cette méthodologie consiste en textologie, dont lřobjet est lřétude
du discours (16).
Par conséquent, cette méthode est structurée dřaprès Deslile:
… autour du maniement du langage plutôt quřautour de
lřétude ou de la description des langues. Pour ce faire, quatre
paliers du maniement du langage en traduction seront définis:
(1) les conventions de lřécriture; (2) lřexegèse lexicale; (3)
lřinterprétation de la charge stylistique; (4) lřorganicité
textuelle. (46)
Une des contributions fondamentales de cette méthode est la division des
difficultés principales de la traduction en quatre et la proposition des
solutions pour les surmonter. Contraire à la méthode de la stylistique
comparée qui voit la traduction comme un exercice de comparaison entre les
langues, la méthode propose Ŗla textologie, dont lřobjet est lřétude du
discoursŗ (16) pour lřopération traduisante. Lřobjectif de la méthode qui est
double vise à structurer lřanalyse du contexte linguistique et extra-
linguistique dans lequel sřinsère le message du texte. De cette manière, elle
encourage le traducteur Ŕ débutant à apprendre lřhabilité de la manipulation
du langage afin de développer au maximum sa faculté de communication.
Généralement, la traduction renvoie à lřopération de la restitution des
faits dans un texte de départ par des équivalences des phrases dans la langue
52
dřarrivée. Mais Deslile dans son livre l’Analyse du discours comme méthode
de traduction, fait une distinction entre la Ŗtraductionŗ (résultat) et lřactivité
traduisante (série dřopérations intellectuelles) afin dřexpliquer les activités
intellectuelles qui interviennent dans le cerveau du traducteur pour réaliser
un tel travail.
Dřaprès lui :
Lřactivité traduisante se définit donc comme lřopération qui
consiste à déterminer la signification pertinente des signes
linguisitiques en fonction dřun vouloir-dire concretisé dans
un message, puis à restituer ce message intégralement au
moyen des signes dřune autre langue (68).
Il montre quřune traduction qui est basée sur lřanalyse ou la
comparaison des langues équivaut au transcodage tandis que la traduction
qui provient de lřanalyse de discours est une opération de lřinterprétation. Il
nous informe aussi que lřanalyse exégétique est une activité très pertinente
dans lřopération traductive, parce que les langues ne possèdent pas tous les
signes nécessaires pour représenter toutes les expériences concrètes ou
abstraites de lřêtre humain. Il met en évidence que Ŗlřanalyse exégétique ou
(lřinterprétation) correspond à une prise de conscience réfléchie de la
dynamique des rapports entre référents et signes linguistiques combinés en
un messageŗ (73).Pour une démonstration de ceci, nous voudrons emprunter
un schéma représentatif que nous a donné Jean Deslile à la page(85) de son
livre, Analyse de discours:comme méthode de traduction. Ce tableau
représente ce processus heuristique de la traduction.
53
Le processus heuristique de la traduction
Texte de départ
Enoncé original
Décodage des signes linguistiques
(Référence à la langue)
Saisie du sens
(Référence à la réalité)
Reverbalisation des concepts
Analyse justificative
Choix dřune solution
Énoncé réexprimé
Texte dřarrivée
Deuxième inteprétation
// STADE NON VERBAL // (Prise en charge des concepts par les mécanismes cérébraux non linguistiques)
Solutions provisoires
Vérification
Processus analogique
Reformulation
Première interprétatio
n
Compréhension
54
DEMONTAGE DU PROCESSUS DE TRADUCTION
Lřanalyse du mécanisme intellectuel nous permettra de savoir si
lřactivité traduisante est une opération sur la langue ou un exercice sur le
discours.En principe, la restitution dřune équivalence en traduction
sřeffectue en trois étapes: compréhension, reformulation et justification.
Respectivement, à chacune de ces étapes sřaccordent les sous-opérations
suivantes: le décodage des signes linguistiques et la saisie du sens; le
raisonnement analogique et la reverbalisation; lřinterprétation à rebours et le
choix dřune solution (Deslile, 70). Voyons en détail ces étapes.
La compréhension
Cette étape est fondamentale dans lřopération de la traduction parce que
cřest la démarche par laquelle le traducteur sřefforce de dégager lřintention
de lřauteur. Nous pouvons identifier deux paliers dans la phase de
compréhension: celui de la saisie des signifiés et celui de la saisie du sens.
Ils sont différents mais se suivent dans un rapport intégral pour effectuer la
compréhension dans lřindividu. Voyons la phase en forme graphique.
La compréhension
Le décodage de signes La saisie du sens
Le traducteur cherche dans le palier du décodage des signes à extraire
le contenu des mots par un examen grammatical. La maîtrise ou la
connaissance de la langue dřarrivée aide le traducteur à se rappeler dans sa
mémoire les sens des termes de lřénoncé. Il ne suffit pas de dégager tout
simplement le contenu conceptual du mot, mais de comprendre surtout les
55
liens qui associent les mots dans des phrases. Il sera certainement très
difficile dřassocier un sens dans cet assemblage de mots parce quřil est
dépourvu de tout sens : Le ciel Ŕ le chien Ŕ lřarbre Ŕ nettoyer Ŕ le livre.Ce
type de groupement de mots nřa aucune valeur traductive parce quřil ne
communique aucun sens. Mais, voyons la série de mots suivants : maison Ŕ
habiter Ŕ lřhomme Ŕ chien. Malgré lřabsence de marques morphologiques,
dans le deuxième groupe, la série est porteuse de sens.Nous voulons par
les phrases suivantes illustrer lřincompétence du décodage des signes :
The gardener planted the sky.
The cook ate the pot.
The cat married a wife.
The dog built a house.
Ces phrases sont grammaticalement correctes mais nřont aucune valeur
parce que lřon ne pourrait les associer ni aux expériences concrètes ni aux
idées abstraites. Alors, lřopération sur le code linguistique est insuffisante
pour un bon résultat dans la traduction.Seleskovitch et Lederer aussi
soutiennent ce point en remarquant que cřest le sens qui est capital en
communication traductive(10).Donc celui qui fait abstraction du sens prive
la phrase et la traduction de toute essence.
Le deuxième palier de lřexégèse de la compréhension cřest-à-dire, la
saisie du sens, se déroule à travers une analyse approfondie du mot. Pour y
arriver, le traducteur devrait essayer dřexaminer le contexte situationnel dans
lequel le mot sřintègre. Cette exégèse rigoureuse est pertinente dans la
compréhension afin de franchir le problème dřintraduisibilité. Deslile
soutient ce point en remarquant que lřŖanalyse exégétique est nécessaire, car
les langues nřont pas de signes distincts pour désigner chacune des réalités
concrètes ou abstraites de lřhommeŗ (73).
La traduction est possible malgré le fait que lřon nřa pas dans la
langue dřarrivée tous les mots qui substituteraient à tous les autres mots dans
56
la langue de départ. Il y a certaines réalités données dans la langue de départ
qui nřont aucune équivalence toute faite dans langue de lřarrivée. Pour
illustrer ce fait, nous avons cette phrase. << Bon appetit!>> Le problème ici
provient de la culture des français et des anglais. Par courtoisie, les français
le trouvent nécessaire de souhaiter à quelquřun ŖBon appetitŗ tandis que les
anglais nřont pas telle culture. Mais on pourrait exprimer le même souhait en
anglais par lřexpression ŖEnjoy your meal!ŗ
Examinons un peu le titre de ce texte que nous avons extrait de
l’Analyse de discours de Jean Deslile, << The Icy Grip Tightens>>. Si nous
rendons la traduction de ce titre littéralement, le résultat sera Ŗla prise
glaciale (se) reserreŗ ou Ŗlřétreinte glaciale (se) reserreŗdémontrant que le
résultat peut étre grammaticalement correcte mais insatisfaisante au point de
vue sémantique(71)Cřest un exercice du transcodage dont la valeur nřest
que purement au niveau technique parce que cette équivalence nřa rien avec
le contexte. Cette phrase montre quřune traduction pourrait être
grammaticalement correcte sans quřelle nřait aucun sens. Regardons donc le
titre <<The Icy Grip Tightens>> en nous appuyant sur certains faits
imaginaires ou réels qui peuvent servir du contexte . La phrase, dřabord, fait
allusion à deux poèmes anglais. Le premier poème est celui du poète
anglais, James Shirley (1596 Ŕ 1666), ŖDeath the Levellerŗ. Ce titre évoque
également les images du froid et de la mort dans le poème de Lord Bryon
(1789 Ŕ 1824) intitulé ŖReconciliationŗ.Le poète américain Walt Whitman
(1819 Ŕ 1892) a aussi employé cette image pour représenter Death and Night
(Deslile, 74).Le traducteur,ici, est guidé par les informations dans son
bagage cognitif pour sa traduction parce quřil ne fait aucun contact directe
avec lřauteur.Le traducteur peut alors penser à telles expressions comme
ŖLřétreinte glaciale se resserreŗ Ŗlřétreinte dřune mainŗ et Ŗlřétreinte de la
mortŗ Ŗla main de la fatalitéŗ parce que selon Le dictionnaire Petit Robert,
elles connotent en poésie une privation de chaleur et de vie .
57
La première interprétation se situe dans les circonstances générales de
la tristesse qui se présentent dans la lecture.Mais pour préciser le sens de ce
titre, le passage suivant qui provient des circonstances immédiates des faits
donnés sert du contexte pour renforcer lřanalyse exégétique des mots.
If there is too much winter in some sections of the country,
there is, strangely enough, too little elsewhere. With
far less snowfall than usual, the West is suffering
from a prolonged drought. /…/ In Oregon, forest fires
have broken out. ŖSome say the world will end in fire,
wrote Robert Frost, Ŗsome say in iceŗ. Last week,
Americans had their choice of disasters.
Ce passage nous révèle la manière par laquelle le contexte dřun récit
pourra enrichir la compréhension du traducteur : on pourra interpréter le titre
en question en le rapportant aux faits imaginaires des poèmes mentionnés
ou au contexte de sa production.Deslile remarque que Ŗlřexamen minutieux
des paramètres contextuels et référentiels projette un autre éclairage sur le
titreŗ (75). Ce qui est important cřest que lřinterprétation sřinscrive dans un
contexte, probablement dans les circonstances générales de la production.
Elle pourra aussi sřidentifier aux autres situations imaginaires. ll découle
par ce fait que ce nřest que lřinterprétation qui se relie aux paramètres de la
production du discours qui soit vraiment capable de libérer le sens de la
phrase.Dans sa recherche pour une équivalence,le traducteur devrait faire
une analyse de discours.ll est exigeant quřil procède par une analyse du texte
à un niveau plus élevé quřà celui du mot ou de la phrase de lřénoncé isolé,
comme cřest le cas chez la plupart des linguistes qui font leur analyse hors
contexte.
Lřinterprétation du titre The Icy Grip Tightens basée sur la situation
de la production souligne les avis de lřauteur sur un hiver de longue durée
inaccoutumée aux Etats-Unis, un hiver caractérisé par les conditions variées,
mais également sévères selon les régions du pays. Avant la publication de
58
lřarticle (le 15 février, 1977) le temps dur y faisait déjà des ravages depuis
près dřun mois et démi. Antérieurement, ŖTimeŗ avait publié deux articles
sur le même sujet: The Big Freeze (cover story) et The Great Winter Hits
Again. Nous constatons ici que le degré de lřemphase nřest pas sur les
conséquences désastreuses de la période du mauvais temps mais sur la
persistence du froid. Cette conclusion parvient du fait que la durée
exceptionnelle avait occasioné la multiplicité et lřintensité de désastres dans
tout le pays. (Deslile, 73 Ŕ 74).
Par conséquent, le traducteur devrait chercher des termes qui
pourraient exprimer la Ŗpersistence obstinéeŗ du froid dans tout le pays. Il
découle que toutes les deux interprétations qui enrichissent et éclaircissent la
compréhension du titre The Icy Grip Tightens proviennent dřun contexte
imaginaire ou réel. Par lřanalyse exégétique, le traducteur sřexerce sur Ŗla
réflexion qui interprète les signes linguistiques en fonction de la situation et
du contexte afin de dégager lřintention de lřauteur …ŗ (Deslile, 76).Les
expressions ci-dessous peuvent servir pour restituer ces idées en langue
cible:<<le mauvais temps sřentêtait>>, <<le mauvais temps persistait
obstinénement>>qui expriment les conséquences désastreuses de la longue
période de froid intense.
Dans le premier cas, le traducteur réfère à son bagage cognitif qui
représente les connaissances quřil partage avec lřauteur pour la
compréhension du titre. Mais dans la seconde interprétation, le traducteur
sřappuie sur le texte et les circonstances qui entourent la production des faits
pour élucider le titre. Deslile souligne lřimportance du raisonnement
exégétique dans la traduction par cette remarque, Ŗcomprendre et
interpréter ne sont quřune seule et même chose, car le raisonnement de la
compréhension est un Ŗdialogue herméneutique intérieurŗ (77).
ll arrive que le bagage cognitif existe préalablement dans lřesprit du
lecteur et y contribue à évoquer des éléments qui facilitent la
59
compréhension.Nous nous servons des expériences dřAsta, lřhéroïne de
Douceurs du bercail et dřAnne, son amie à un hôpital à Paris pour illustrer
ce fait. Les deux femmes avaient accouché des bébés prématurés qui étaient
alors isolés dans une salle réservée aux bébés prématurés, ou à ceux qui
avaient des problèmes médicaux à la naissance.
Les idées puisées au cours de notre lecture au sein de ce sujet se
situent à notre domain cognitif contextuel qui applique à la mémoire
immédiate.Elles sont identiques aux expériences que nous avons eues à la
naissance de notre premier enfant.Les souvenirs de cet événement important
dans notre vie avaient été refoulés dans notre mémoire à long terme
constituant ainsi une partie de notre bagage cognitif.
Or, cette histoire du roman qui se situe dans le contexte cognitif
arrive à évoquer en nous ces expériences refoulées dans notre mémoire
pour effectuer la compréhension et les émotions désirables. Notre bébé a eu
des problèmes médicaux à la naissance, et a dû être isolé jusquř à ce quřil
eut regagné la santé. Nous nřavons aucune difficulté à nous identifier aux
sentiments quřéprouvent les deux femmes : Asta et Anne dans le roman.
Ainsi,nous pourrons facilement imaginer et reconstruire la scène
dřune manière à ce que les destinataires ressentent les mêmes émotions que
ces femmes dans notre traduction.Les expériences personnelles que nous
avons eues préalablement avant notre lecture de Douceurs du bercail ont
donc contribué énormément à notre bagage cognitif pour la compréhension
de ce récit. Alors ces expériences qui nous sont subjectives nous aide à
comprendre lřauteur et de ré-exprimer fidèlement ses idées dans notre
traduction.
Nous remarquons à travers ces expériences que les compléments
cognitifs,cřest-à dire, les éléments du bagage cognitif fusionnent avec ceux
du contexte cognitif pour nous clarifier cet épisode dans notre roman de
traduction.Nous voudrons attester aussi à ce phénomène à travers cette
60
information de Kalat James,dans son livre,Biological Psychology qui
démontre que.<<The memories that stand out are mostly the emotional
ones...One reason why we remember emotional events is that they excite the
sympathetic nervous system...>>(351). Cřest évident que cřest sous cette
optique que la créativité littéraire joue un rôle fondamental de contribution
à la traductologie.
Considérons dřabord des échantillons de ce récit sur la rencontre de
ces deux femmes dans Douceurs du bercail d’ Aminata Sow Fall :
Elles venaient toutes les deux à quelques minutes près,dřaccoucher de deux
fillettes prématurées.Le bébé dřAnne, grand prématuré,avait été mis en
couveuse alors que celui dřAsta était dans un berceau chauffant.Les bébés
étant isolés dans une pièce contiguë séparée de la grande salle par une
cloison vitrée à travers la quelle les mamans pouvaient tout au plus les
deviner dans leur habitacle dřinnocence...La première question que chaque
nouvelle arrivée subissait était immanquablement :,<< ll pèse combien, le
bébé ?>>Et chacune donnait à son tour lřinformation la concernant. (150-
151).
Il va sans dire, que les expériences de lřauteur partagées par le
traducteur lřaident à appréhender mêmes les émotions et les idées
intrinsèques de lřauteur. Les idées vécues par le traducteur, les informations
puisées dřautres textes, de lřInternet, des faits observés et des conversations
pourront tous contribuer à la créativité littéraire qui fait partie du bagage
cognitif. Ces faits se transforment aux informations qui sřajoutent à la
clarification des textes traduits, qui, eux-mêmes représentent des idées
subjectives ou imaginaires dřun écrivain auxquelles sont attribuées certaines
valeurs esthétiques et morales.
La théorie interprétative nous invite, ainsi, à voir lřunification des
éléments culturels du discours comme facteur fondamental dans lřactivité
traductive dřune œuvre littéraire.Elle démontre que les éléments
61
linguistiques et des connaissances extra-linguistiques sont très nécessaires
dans cette opération traduisante.Alors elle soutient que le contexte cognitif
du discours qui fait reporter au contexte socio-culturel dřune œuvre
<<correspond aux idées qui se dégagent peu à peu du discours>>
(Seleskovitch et Lederer 43).Elle illustre que le bagage cognitif et le
contexte cognitif sont tous pertinents dans la traduction.
Par cette explication, nous apprenons la pertinence du contexte situationnel
pour faciliter la compréhension et la traduction dřun texte donné.Le traducteur
devrait lire ou étudier une œuvre littéraire en se rendant compte de son contexte
situationnel.Cela va certainement lřaider à comprendre non seulement les
significations de la structure, des sons, du langage, mais, surtout du message qui est
connoté. Cette observation montre quřau fur et à mesure que lřidée de lřécrivain
sřéclaire, le traducteur pourra facilement en construire les unités du sens.
Dřapres Seleskovitch et Lederer :
Le contexte cognitif est lřensemble dynamique des
informations quřa porté à lřauditeur le déroulement du
discours ou au lecteur celui de sa lecture. Egal à zero aux
premiers mots ou discours, le contexte cognitif gonfle de plus
en plus au fil de lřénonciation. Plus lřidée que meut lřorateur
sřéclaire, plus les tenants et aboutissants sřaffirment, plus
sřélargit et se consolide la base à partir de laquelle
lřauditeur ou le lecteur peuvent construire les unités de sens
qui se succèdent (45).
Nous remarquons alors que lřintervention des compléments cogntifs dans la
compréhension du sens et sa déverbalisation dans un texte littéraire se déroulent
inconsciemment, comme dans un discours normal où les interlocuteurs échangent des
informations.II arrive souvent que la séquence verbale dřune communication mobilise
les connaissances encyclopédiques qui existent préalablement dans lřesprit de
lřindividu pour lui faire comprendre le sens dřune telle communication.Cette
séquence verbale enrichit le contexte cognitif qui associe et dégage les signifiés des
mots du texte dans la mémoire immédiate pour y effectuer la compréhension.
62
Seleskovitch et Lederer nous informent que :
Le contexte cognitif ne diffère de lřensemble du bagage cognitif
que par sa durée.On retient suffisamment longtemps en mémoire
cognitive ce quřon vient de lire ou dřentendre pour comprendre la
suite du texte ou du discours.De courte durée le contexte cognitif
sřajoute au savoir plus durable fixé de manière permanente dans
la mémoire et dont une part seulement un savoir pertinent, est
mobilisé par chaque phrase du discours (45).
Les nouvelles idées extraites du texte qui font partie du contexte
cognitif, alors font surgir aussi des idées qui facilitent la traduction.Ainsi,
ces connaissances scellées dans la mémoire immédiate se joignent au
bagage cognitif qui se constitue des idées refoulées dans la mémoire à
long terme pour arriver à une bonne compréhension du vouloir-dire de
lřauteur.II va de soi que les connaissances encyclopédiques sont alors
ranimées pour créer globalement, les idées explicites et implicites qui sont
le message derrière les mots et le vouloir-dire de lřauteur.
Nous sommes dřavis que la signification de la situation contextuelle
dřune œuvre littéraire ne pourra pas être surestimée dans la communication
parce quřelle est composée des éléments socio-culturels du texte littéraire
en question.Nous trouvons que le contexte situationnel des faits littéraires
aide la clarification de lřhistoire et inhibe lřambiguïté dans la
traduction.Nous devrons nous rendre compte que le contexte cognitif est
composé de la totalité dřinformations et dřidées qui se transmettent au
traducteur au cours de la lecture du texte ou de la communication .Plus le
savoir partagé entre lřécrivain et le lecteur est grand, moins est il nécessaire
dřêtre explicite dans le texte.
63
Marianne Lederer reprend ces idées lorsquřelle remarque que :
Nous avons vu ce que sont les complémentés cognitifs chez
lřhomme, contexte et bagage cognitifs, savoirs dévérbalisés
qui se joignent au sémanatisme des phrases et ne laissent
apparaître aucune ambiguïté lexicale ou synthétique. Le
contexte cognitif nřa pas seulement pour effet dřinhiber des
ambiguïtés ; il crée de nouvelles connaissances non verbales
qui jouent à tout instant dans la compréhension des textes.
(184).
Nous trouvons que lřécrivain,aussi bien que son traducteur,
devraient être des observataires attentifs qui se passionnent pour se
renseigner sur des faits socio-culturels dans leurs milieux.lls devraient aussi
passer des moments de réflexion aux idées qui leur viennent à lřesprit,
idées sur lesquelles, ils sont appelés à donner leur propre jugement.Nous
croyons aussi que le traducteur devrait jouer le rôle dřinterprète, cřest- à-
dire, comprendre vraiment les idées du texte afin de les rendre dans la
langue dřarrivée.
La reformulation
Suite à la phase de la compréhension, est la reformulation qui consiste à ré-
exprimer les concepts et les idées en les couvrant des signifiants provenant
dřune autre langue. Cette opération intellectuelle est complexe à décrire
parce quřelle se fait inconsciemment chez le traducteur. Elle tend à isoler les
idées comprises par lřexégèse en déclenchant au même temps, une activité
analogique dans lřesprit du traducteur.
Elle nřest pas une opération simple mais un acte dřintelligence qui
constitue un mouvement continuel dans le cerveau du traducteur en
recherche des termes convenables pour extérioriser les idées du texte de
départ dans la langue dřarrivée. Il en va que cette recherche intelligente se
poursuit inconsciemment dans le cerveau du traducteur jusquřà ce quřil ré-
64
exprime par les moyens linguistiques de la LA les idées originalement
conçues par lřauteur dans la LD. Nous sommes du même avis que Deslile
qui remarque que ŖLa reformulation nřest pas un banal étiquetage de
concepts. Elle est fondamentalement un acte dřintelligence … un ensemble
dřopérations vivantes et agissantes, même si lřon nřa pas conscience de
chacune dřellesŗ (77).
Nous trouvons, par expérience, que cette opération continue dans le
cerveau même après que la traduction soit faite. Lřesprit du traducteur
nřoublie pas complètement certains concepts étrangers du texte jusquřà ce
quřil trouve une équivalence vraiment satisfaisante pour rendre le sens du
terme. Ici, la compétence langagière et la connaissance encyclopédique sur
lřauteur et sur la culture dřarrivée sont pertinentes pour aider le traducteur à
accomplir sa tâche.
Le schéma qui suit montre la phase.
Reformulation
Raisonnement analogique Reverbalisation
Comme la précedente, cette phase est composée de deux opérations
successives et entremêlées dans lřassociation des idées et du raisonnement
logique (inférénces). Le raisonnement analogique prédispose le traducteur à
associer des idées de lřauteur dans la langue du départ pour évoquer les
mêmes idées dans le traducteur. Des dictionnaires tel que Dictionnaire
alphabetique et analogique de la langue française de Paul Robert qui
fournit pour chaque mot certaines informations sur lřétimologie, la
définition, les liens de synonymie, dřantonymie et des enchaînements
65
syntaxiques contribuent énormément à découvrir des mots qui sřavèrent
compétents dans cette opération.
Une des stratégies qui pourraient être exploitées est lřemploi du
négatif qui se révèle efficace pour surmonter ce problème. Cet exemple
pourra illustrer ce fait. Devant un restaurant qui veut promouvoir la vente de
ses boissons, on affiche cette inscription anglaise sur le comptoir contenant
des bouteilles de vin. FOR SALE. La tendance est que la vente augmentera
à cause de lřinformation que lřon a fait réduction dans le prix de la boisson.
Mais quřest-ce quřon aurait inscrite devant la boutique si la boisson nřest
pas à vendre ? On aurait probablement écrit NOT FOR SALE ou FREE
DRINK.
Pour rendre FOR SALE en français nous écrivons À VENDRE et
NOT FOR SALE peut être traduit comme PAS À VENDRE ou BOISSON
GRATUITE. Nous croyons que la dernière traduction de NOT FOR SALE
est plus appropriée pour attirer plus de clientèle parce que cette phrase fait
allusion à lřobjet en question. Le raisonnement analogique est très
avantageux surtout dans le cas où lřéquivalence ne se produit pas
spontanément dans la langue dřarrivée.
Voyons ces échantillons tirés de Douceurs du bercail pour
comprendre comment le raisonnement analogique peut faciliter la
reformulation. ŖElle a suivi en automate la tête de son escorte - deux
hommes et une femme Ŕ jusquřau fond de la salleŗ (40).Si nous rendions
cette phrase littéralement nous aurons ŖShe automatically followed the head
of her escort Ŕ two men and a woman- to the end of the room.ŗ
Mais nous lřavons rendue de cette manière:
Anglais
ŖShe automatically followed her team of escorts Ŕ two men and a lady-to
the end of the roomŗ pour réexprimer le vouloir-dire de lřauteur qui nous
informe quřAsta lřhéroine du texte a suivi sans question, la même direction
66
que son escorte.Ici, la créativité littéraire joue un rôle contributif à la
solution désirée. Lřévocation de plusieurs mots dans la pensée du traducteur
lui offre des choix entre lesquels il déduit un terme qui rendra dřune manière
efficace le concept du texte original .
La reverbalisation
Cřest le moment de la réexpression qui exige tout simplement la restitution
du vouloir-dire de lřauteur selon le génie de la langue dřarrivée plus la prise
en compte du destinataire à lřégard de la production du sens.Chez Jean
Deslile, cřest le deuxième palier de la phase de la reformulation. Après avoir
saisi le sens des idées énoncées dans le discours, le traducteur devrait
essayer vraiment de le retenir dans sa mémoire.ll lui faut dès ce moment
rechercher la meilleure façon dřôter aux énoncés leurs vieux vêtements dans
le texte de départ pour leur remettre de nouveaux habits convenables.Les
théoriciens de lřapproche interprétative nous proposent la mise en présence
du contexte cognitif et du contexte verbal lors du processus traductif. ll y a
toujours dans un texte des concepts quřon doit dégager pour pouvoir les
déverbaliser, puis les restituer dans la langue cible. Voyons ici, un dialogue
entre Asta et le douanier dans le texte.Lřauteur du texte nous présente ici la
scène dans laquelle Asta a eu beaucoup de difficultés à la douane .
Français:
Asta le suit. Quelques mètres en chemin de croix:
- Posez la valise sur le tapis. Ouvrez. Le douanier fouille. Entre les habits;
les moindres replis de la doublure toutes les poches, le trousseau de toilettes.
Anglais:
Asta followed him. A few metres on the crossroads of her life:
- Put your suitcase on the rug. Open it. The customs officer searched
through the baggage: through the clothing; in between the folds of the
pockets and, even her make-up bag.
67
- You may now close it, Madam.
Trouver lřéquivalence de cette phrase.
ŖQuelques mètres en chemin de croixŗ nřest pas très facile parce quřil nřy a
pas dřéquivalence toute faite dans le dictionnaire bilingue pour la substituer
dans la langue dřarrivée .Lřéquivalence du terme<< crossroads>>en anglais
est le carrefour. Alors cřest par lřapplication du Ŗraisonnement analogique
qui consiste à établir des ressemblances par lřimaginationŗ (Deslile, 80) que
la phrase a pu être ré-exprimée. Une traduction littérale de la phrase la
rendra de cette manière.
Français: Asta le suit. Quelques mètres en chemin de croix.
Anglais: Asta followed him. Some metres on the way of the Cross.
Cette traduction littérale est une illustration de la manière quřune
phrase peut être grammaticalement correcte mais nřa aucun sens. Voyons la
démarche traductive que nous avons employée pour dégager la valeur de la
phrase. Dřaprès le Robert et Collins dictionnaire français – anglais –
français, le chemin de croix (du Christ, (dans une église) signifie the
Stations of the Cross. Mais il y a dans le dictionnaire des phrases qui font
allusions au sens figuratif du mot tel que lřon a en anglais. ŖSon long chemin
de croix dans les élections européennes Ŕ His long, hard battle in the
European electionsŗ, Ŗla réforme de lřéducation sera le chemin de croix de
ce gouvernement Ŕ It will be a long, hard road to education reform for this
governmentŗ (165).
La traduction littérale ne rendant guère le vouloir dire de lřauteur,
nous avons cherché à trouver lřéquivalence par le contexte. Cřest très
interéssant que ce sont les événements produits ici qui conduisent à
68
lřintrigue du récit. The Oxford Advanced Learner’s Dictionary montre que
crossroads, idiomatiquement, signifie Ŗat an important point in somebodyřs
life or developmentŗ (351). Cette analyse montre quřil faut beaucoup
dřimagination et de sensibilité de la part du traducteur pour accomplir le
processus dřanalogie entre le mot ou la phrase à traduire et de lier ce qui est
compris à un autre texte ou contexte.
Avant dřarriver à la conclusion nette sur une équivalence anglaise
pour rendre ŖQuelques mètres en chemin de croixŗ, le traducteur a déjà
examiné les sens des mots Ŗcheminŗ et Ŗcroixŗ pour savoir sřil existe un
chemin qui sřappelle <<le chemin de la croix >>à lřaeroport. Ce terme ne
réfère pas non plus au Ŗchemin de la croixŗ qui se situe dans lřéglise à
lřaeroport. Et puisque cřest une œuvre littéraire, on ne néglige pas la nature
connotative de son langage.
Pour procéder à une exploration analogique des possibilités dans la
langue dřarrivée, nous avons considéré le concept de Ŗla croixŗ. Le Robert
pour tous, dictionnaire de la langue française définit le terme de cette
manière. Croix n.f (latin.crux, cruces, n. dřinstruments de supplice 1. Poteau
muni dřune traverse et sur lequel on attachait des condamnés pour les faire
mourir; - Porter sa croix: supporter ses épreuves avec resignation. 2.
Représentation ou évocation symbolique de la croix de Jésus Christ Ŕ
Calvaire, crucifix. 3. Décoration, insigne dřun ordre honorifique 4. La croix
Ŕ Rouge, organisation humanitaire internationale et apolitique. 5. Marque
formée par deux traits croisés. 6. En croix: à angle droit ou presque droit. 7.
La croix du sud, constellation de lřhémisphère austral (262).
Le contexte cognitif où est scellée la phrase fait allusion à tant de
difficultés quřa confrontées Asta, lřhéroïne du récit. La deuxième définition
du terme recoupant cette idée de la souffrance qui est connotative au terme
Ŗcalvaireŗnous a fait décider que cřest le sens le plus adéquat à rendre le
vouloir-dire de lřauteur.Par cette application, nous avons démontré que
69
lřanalogie est très pertinente dans le processus de la réverbalisation pour ré-
exprimer le message de lřauteur. Et la plupart de fois, il sřimpose au
traducteur de choisir la solution la plus apte entre toutes les suggestions dans
son esprit.
Le traducteur est appelé à étudier certains termes dans la langue
dřarrivée pour voir ceux qui correspondent aux idées du texte orginal. Les
jugements portés sur lřadéquation des multiples solutions convoquées dans
son esprit sont pertinents pour la reverbalisation de ces idées dans la langue
dřarrivée. Deslile remarque que ŘŘce raisonnement est un effort Ŗcréateurŗ,
un pocessus cognitif dřactivation de ce que lřon appelle communément le
Ŗbagage culturelŗ dřune personne, cřest-à-dire tout ce qui compose son
savoir tant linguistique quřencyclopédiqueŗ (82).
Lřactivation de ce bagage culturel est nécessaire parce quřil faut
beaucoup dřinformations extra-linguistiques au traducteur, pour quřil sache
certains faits qui entourent et clarifient le sujet en question. Nous
considérons encore la traduction de ŖQuelques mètres en chemin de croixŗ
pour illustrer ce point. Lřactivation de notre bagage culturel nous assure
quřil nřexiste normalement, ni route ni voie nommée dans lřaeroport Ŗle
chemin de croixŗ, et, de plus, quřaucune église nřy est construite non plus.
Par inférence, nous avons décidé que ces termes sont analogues à toutes les
souffrances que lřofficier a fait subir à Asta à la douane. Cette démarche
conduit le traducteur progressivement à la phase suivante.
L’analyse justificative
Cette troisième étape est la dernière phase du processus cognitif dans la
théorie interprétative. Elle a pour objectif de justifier lřadéquation de la
solution transitoire. Cette phase est la période où le traducteur vérifie la
traduction pour voir si lřéquivalence rendue dans la langue dřarrivée
correspond absolument au vouloir-dire de lřauteur. Pour procéder, nous
70
avons considéré les expressions comme Ŗthe way of the crossŗ, Ŗthe way to
the crossŗ, Ŗthe crossroadsŗ, Ŗon the way to her calvaryŗqui nous ont surgi à
la mémoire.
Cette dernière expression évoque en nous la souffrance de Jésus
Christ sur la croix et fait allusion au sens figuratif du mot qui a lřacception
dřune épreuve longue et douleureuse. Quand on porte sa croix, on subit ses
épreuves avec patience. Toutes ces raisons sont satisfaisantes pour
considérer ŖA few metres on the crossroads of her lifeŗ comme une
équivalence de ŖQuelques métres en chemin de croixŗ.
Notre analyse démontre que la phase de la justification est basée sur
lřinterprétation faite préalablement avant la réexpression et quřelle est
nécessaire pour confirmer que la traduction est appropriée. Si avant la
réexpression lřinterprétation donnée au sens contenu dans la langue de
départ est valable, la justification des mots restitués dans la langue dřarrivée
sera aussi authentique. Ce qui est fondamental est que la justification soit
basée sur un raisonnement logique.
Cette deuxième interprétation est faite pour vérifier lřefficacité des
mots rendus dans la langue dřarrivée pour exprimer les intentions de
lřauteur. Deslile met en évidence que Ŗlřactivité traduisante comporte donc
une double interprétation: lřune prend appui sur les signes originaux, lřautre
sur ceux de la langue dřarrivée une fois actualisés les essais de la solution,
les équivalences provisoires; le sens est lřunique objet de cette double
interprétation" (84). Cette opération justificative porte sur les deux
formulations: celles de la langue de départ et celles employées
provisoirement par le traducteur pour reformuler les idées de lřauteur.
Choix d’une solution
Par la méthode exégétique, nous avons examiné les signes linguistiques du
texte du départ et ceux du texte dřarrivée pour justifier des solutions que
71
nous avons choisies pour la traduction de notre texte. Voyons dřabord si,
dans le contexte en question, ŖA few metres on the crossroads of her lifeŗ se
justifie comme équivalent de ŖQuelque mètres en chemin de croixŗ. Ce sens
figuratif du mot Ŗcrossŗ sřemploie pour rendre lřidée dřune épreuve longue
et douleureuse pour Asta. Ainsi la traduction qui est proposée au-dessus
montre que lřhéroine vient de commencer un trajet long et difficile Ŕ A
long, hard road.
Nous voudrons par le schéma qui suit illustrer cette dernière démarche
traduisante:
Schéma de la double interprétation du processus traductionnel. (Démarche
sémasiologique/ onomasiologique)
Démarche Démarche
semasiologique onomasiologique
Quelques mètres A few metres on the
en chemin de croix cross roads of her life.
Evidemment, nous avons cherché à exprimer le vouloir-dire de
lřauteur pour communiquer le message comme lřont proposé Seleskovitch et
Lederer au traducteur, de<< sřefforcer dřarriver à cet endroit où le vouloir-
dire de lřécrivain rejoint le vouloir comprendre du lecteur>>(40) A travers
ces mécanismes intellectuels, le message de lřauteur est compris, reformulé
et reverbalisé. Finalement, les nouvelles expressions par lesquelles il est
transposé sont vérifiées pour justifier leur compétence. Les compléments
cognitifs, cřest-à-dire le bagage contextuel, qui clarifient les circonstances
des faits du texte et le bagage cognitif qui contient les connaissances
encyclopédiques sont très pertinents dans cette operation traduisante. Le
tableau tiré de l’Analyse du discours comme méthode de traduction de Jean
CONCEPTUALISATION A long, hard battle // Endurance +
connotative et figurative
COMPLÉMENTS COGNITIFS
72
Dèslile (85) soutient le point de la théorie interprétative que la traduction
nřest guère un exercice comparatif sur deux langues mais bien plutôt une
activité exégétique et intellectuelle du traducteur. Comme nous lřavons
remarqué, dans notre méthodologie, le chapitre suivant porte sur les
problèmes rencontrés au cours de notre traduction aussi bien que lřefficacité
du maniement du langage pour les surmonter .
73
CHAPITRE TROIS.
APPRECIATION DES PROBLEMES RENCONTRES AU COURS DE
LA TRADUCTION DE DOUCEURS DU BERCAIL D’AMINATA
SOW FALL.
Tout compte fait, traduire est fondamentalement une opération sur le
discours et celui-ci intervient entre la langue et la pensée. Il découle que
lřobjectif principal des cours de la formation du traducteur devrait viser la
compétence de la compréhension et de la reformulation dans la langue
dřarrivée. Cette habileté, la façon dont le traducteur comprend un sens et le
ré-exprime (la compétence linguistique et la compétence contextuelle) ne
sera pas formée en un jour. Lřapprenti-traducteur devrait subir des cours
pour lřapprentissage de cette habileté qui est indispensable à la
traduction.Certes, il existe plusieurs idées et concepts dans le texte que lřon
devrait dégager afin de pouvoir les déverbaliser et les restituer dans la
langue cible. Le traducteur doit avoir non seulement la compétence
linguistique, mais aussi, emmagasiner des bagages extra-linguistiques
suffisants pour la traduction des nombreux genres de discours dans le
monde: littéraire, juridique, administratif, technique, scientifique et dřautres.
Il nous semble dès lors nécessaire dřentreprendre ici une analyse de
quelques démarches techniques que nous a proposées Jean Deslile dans son
livre, Analyse du discours comme méthode de traduction afin de mettre en
relief certains enjeux qui se manifestent efficaces dans la traduction du genre
littéraire dont notre texte de traduction. Cřest pourquoi nous consacrons ce
chapitre à lřétude du maniement du langage considéré convenable à une
pédagogie bien ordonnée pour des cours pratiques de la traduction. Nous
évaluerons lřefficacité de cette méthode au fur et à mesure que nous
analysons les problèmes rencontrés au cours de notre traduction de
Douceurs du bercail dřAminata Sow Fall.
Dans le but de faciliter la tâche de traduction, Jean Deslile a fait une
74
classification des problèmes spécifiques à la traductologie dans son
livre.Pour comprendre au juste ce phénomène Ŗmanier le langageŗ, il nous
informe que<< le maniement du langage exige une double compétence: une
« compétence de compréhension » pour évaluer le vouloir-dire de lřauteur
du texte original(lřexégèse) et une « compétence de ré-expression » pour
recomposer ce texte dans une autre langue (les techniques de rédaction)>>
(98). Il en va que le traducteur devrait se fournir de ces deux grandes
qualités : lřhabilité de la compréhension et la compétence de lřexpression qui
devraient collaborer pour avoir une bonne traduction. Cependant, il est
pertinent de comprendre que toutes les parties dřun discours ne nécessitent
pas la même considération. Afin de faciliter le phénomène de la traduction,
les problèmes sont classés selon leur degré de difficulté. Les quatre paliers
dans le maniement du langage sont :
1. Les conventions de lřécriture.
2. Lřexégèse lexicale.
a. Le report des vocables monosémiques.
b. la réactivation des formes consignées dans les systèmes linguistiques.
c. la création contextuelle.
3. Lřinterprétation de la charge stylistique.
4. Lřorganicité contextuelle.
Des exemples concrets sont extraits du passage suivant pour démontrer
lřétalage de ces paliers, qui sont caractéristiques de lřactivité traduisante.
Ces extraits font partie du premier paragraphe du texte Rebuilding the Breast
écrit en juxtaposition de sa traduction à la page(99) de l’Analyse du discours
comme méthode de traduction de Jean Deslile.
75
Rebuilding the Breast
After the removal of her left breast because of cancer in 1970, Mrs. Joan
Dawson, 54, of New York City, spent the next three years battling
depression and a sense of loss. Then she decided to do something about it.
Most women in the same situation turn to a psychiatrist. Mrs. Dawson (not
her real name) went to her doctor and asked him to rebuild her missing
breast. ŖI didnřt want to be made into a sensational beautyŗ she explained. ŖI
just wanted to be restoredŗ. Her surgeon was able to do just that. In two
separate operations, he implanted a silicone-filled sac under the skin where
the breast had been removed, then reduced the size of the other breast to
make it more nearly ressemble the new one. The result is not a duplication of
Mrs. Dawsonřs pre Ŕ1970 figure, but she is delighted nevertheless. Says she
: I can finally look at myself in the mirror without wincing.
La reconstitution des seins.
Une Newyorkaise de 54 ans, Mme
Joan Dawson* subit en 1970 lřablation du
sein gauche atteint du cancer et passa les trois années suivantes à lutter
contre la dépression et le traumatisme de la mutilation. Un beau jour, elle
décide dřagir. La plupart des femmes en pareil cas, vont sřen remettre à un
psychiatre, mais Mme Dawson, elle retourne chez son médicin pour quřil lui
refasse un sein. ŖJe ne voulais pas quřil me transforme en une beauté
sensationnelle, a-t-elle expliqué par la suite, mais simplement quřil élimine
les traces de lřamputationŗ. Elle avait frappé à la bonne porte. Le chirurgien
inséra sous la peau un sac de silicone en remplacement de la glande
mammaire et, par une seconde intervention, il reduisit les proportions de
lřautre sein pour le rendre à peu près de la même grosseur que le sein
artificial. Mme
Dawson nřa pas retrouvé sa silhouette dřavant 1970, mais elle
est enchantée du résultat. ŖJe peux enfin me regarder dans un mirioir sans
76
grimacer ŗ, a-t-elle confié.
*Ce nom est fictif.
1. PREMIER PALIER : CONVENTIONS DE L’ECRITURE
Le premier palier est composé des emplois établis de rédaction. Il renvoie,
de manière générale, à toutes les conditions de présentation formelle
distincte dřune langue à lřautre : abréviations conventionnelles semblables
aux titres de civilité et autres, unités de mesures et de temps, écriture des
nombres et signes usuels; emploi des majuscules dans les titres, noms
propres, noms géographiques et historiques; orthographes, ponctuation et
signes divers. Ce palier réfère également aux protocoles de la
corréspondance administrative ou commerciale et les autres étiquettes, codes
ou conventions dřécriture en usage dans les écrits pragmatiques (Deslile, 99
Ŕ 100).
Dans le texte dřillustration ci-dessus, les exemples des conventions de
lřécriture comprennent la graphie française de Mrs. en Mme, la manière de
mettre les passages en style direct entre guillements (les courtes incises sont
mises à lřintérieur des guillements en français à moins quřelles achèvent la
citation), lřutilisation des majuscules dans les titres anglais et les accords
grammaticaux. Il sřagit ici de la Ŗpropreté du styleŗ dont le traducteur
devrait avoir la compétence. Dans notre traduction, nous avons adopté ce
premier palier du maniement du langage pour franchir certaines difficultés
qui sont de nature à ne pas nécessiter dřattention particulière.
De même, certains termes et expressions <<monosémiques>> tels que les
noms propres des personnages, des lieux géographiques ou historiques sont
des éléments directement transcodables et que donc restent invariables dans
la traduction. Cřest la raison pour laquelle de tels signes graphiques que
77
Asta, Tata, Anne, Didier, Dakar, Dépôt, Foyer et dřautres sont laissés dans
leurs états originaux dans le texte cible.
DEUXIÈME PALIER : L’EXÉGÈSE LEXICALE.
Vu les rôles pertinents que remplit lřanalyse exégétique dans lřinterprétation
qui fait partie de la phase de la compréhension, la théorie interprétative
reconnaît aussi son importance dans la solution des difficultés de la
traduction. Lřopération analytique peut être portée sur tous les signes dřun
texte, mais le degré dřeffort nřest pas le même pour toutes les parties du
discours. Evidemment, il y a des signes et des tournures grammaticaux que
le traducteur pourra facilement rendre sans même consulter le dictionnaire.
Par contre, dřautres mots, phrases ou locutions requierent plus dřattention
pour les traduire. La compétence linguistique parfois, se trouve incapable
devant un terme ou phrase qui résiste à tout effort dřêtre reformulé en une
autre langue. Deslile montre que Ŗla difficulté réside dans leur acception
contextuelle et non dans leur signification intrinsèqueŗ (109).Afin de
démontrer le rôle fondamental du textologie dans la solution de la
traduction, lřexégèse lexicale est divisée en trois niveaux :
a. le niveau zéro, ou le Ŗreportŗ des vocables monosémiques ;
b. le premier niveau, ou la Ŗréactivationŗ des formes consignées dans les
systèmes linguistiques;
c. le second niveau, ou la Ŗrecréationŗ contextuelle.
A. Le report des vocables monosémiques.
Presque dans tous les textes à traduire, littéraires ou pragmatiques, il existe,
dans un pourcentage non-déterminé, des rudiments dřinformation qui
nřexigent guère dřanalyse exégétique. Le traducteur nřy exerce que peu de
raisonnement analogique puisque leur compréhension et leur ré-expression
78
sont réalisées presque instantanément dans la langue dřarrivée sans
difficulté. Ce type dřinformation renvoie aux Ŗunités monosémiquesŗ que le
traducteur rend immédiatement dans sa traduction sans le besoin de recourir
au contexte ou à la situation.
Ce groupe de mots comprend les noms propres, les nombres et la plupart des
termes qui appartiennent au vocabulaire scientifique. Compte tenu de leur
nature complètement monosémique, ces vocables ont la valeur de purs
symboles. Deslile nous informe que ŖDanica Seleskovitch a démontré que
les interprètes notent toujours ces mots parce que ceux-ci sont objet de
savoir et non de compréhensionŗ (102). Ils nřont dřautre acception que celle
de leur signification linguistique et ne se mémorisent pas facilement. Isolés
dans le discours, ils résistent à toute activité de raisonnement ou dřanalyse.
Les exemples des mots monosémiques dans le texte intitulé Rebuilding the
Breast sont : Joan Dawson, cancer, 1970, 54, three, psychiatrist, surgeon,
silicone. Le nom propre New York City appartient à cette liste mais le
traducteur a choisi dřy ajouter un autre morceau dřinformation :
(of:citoyenne de) pour que lřexpression devienne « le substantif et sujet de la
première phrase » : ŖUne Newyorkaise de 54 ans, Mme Joan Dawson …ŗ
(Deslile, 102). Malgré lřenrichissement de New York City par lřinformation
supplémentaire, le sens ne change pas.
Par conséquent, leur signification même dans le texte dřarrivée reste
invariable, tandis que les mots polysémiques se prêtent aux plusieurs sens,
et, donc au raisonnement analogique. Il découle que tout texte contient à
divers degrés, des éléments dřinformation qui ne demandent aucune analyse
exégétique pour être compris et ré-exprimés dans la langue dřarrivée.Alors
on pourra bien comprendre les différentes significations de ces mots isolés,
79
sans que lřon fasse beaucoup dřeffort avant de trouver les équivalences qui
les ré-expriment dans la langue dřarrivée. La difficulté de leur traduction ne
provient que du contexte où ils sont intégrés.
B. La réactivation des formes consignées dans les systèmes
linguistiques.
II sřagit ici des mots polysémiques dans le texte de départ.Lřanalyse
exégétique du premier degré est sévère sur des composantes lexicales dont le
sens découle seulement du contexte linguistique.La réactivation des formes
consignées dans les systèmes linguistiques sřavère efficace pour la
traduction des mots et des tournures de phrases dont la reverbalisation en
langue dřarrivée ne nécessite que la connaissance et la mémoire des
langues.Dans cette opération interprétative, le traducteur cherche dřabord à
saisir le sens contextuel qui est fondamental à la traduction du mot. Il essaie
successivement de trouver dans la langue dřarrivée un vocable qui
habituellement et généralement est en usage pour représenter le même
phénomène dans le même cadre énonciatif. Ce type de mots ou de tournures
dont les équivalences contextuelles peuvent facilement se trouver dans des
dictionnaires bilingues sont caractérisés comme Ŗconsignésŗ.
Considérons dřabord le mot << removal >> qui se trouve à la première ligne
du texte ŖRebuilding the Breastŗ ci-dissus. Afin de lřinterpréter, on devrait
procéder par un examen du sens général du contexte (qui, ici est un texte
médical). ll exige la compréhension du micro-contexte, cřest-à-dire la phrase
où il sřest incorporé ŖAfter the removal of her left breast because of cancer
…), car, même dans un texte médical, il pourrait y avoir dřautres sens que
celui qui se rapporte aux réalités en question, Ŗaction dřenlever
chirurgicalement un membre, un organe ou une tumeurŗ (Deslile, 103).
Lorsque le mot « removal » a cette acception médicale, il a naturellement le
80
terme Ŗablationŗ comme le mot qui explique le même sens contextuel en
français.
Il y a dřautres exemples dřinterprétation du premier degré dans notre texte
dřillustration notamment : breast: sein, years: années, dépression:
depression, she decided : elle décida; most women ,la plupart des femmes;
situation, cas; her doctor: son médicin; I didnřt want to: je ne voulais pas;
sensational beauty: beauté sensationnelle; skin: peau; figure: silhouette;
finally: enfin. Ces mots pourront avoir dřautres significations que celles que
lřon leur reconnaît, mais le contexte aide le traducteur à préciser le sens qui
est pertinent dans le texte. Alors, on ne peut pas considérer les signes qui
appartiennent au premier niveau de lřexégèse comme on fait pour les termes
monosémiques classés au niveau zéro.Pour démontrer notre application de
cette démarche dans la traduction du texte, jetons un regard sur la traduction
de quelques phrases extraites de Douceurs du bercail, notre texte;
Français.
Des enfants piaillent, dřautres pleurent, des policiers se mettent en face,
dřautres sřen vont (90-91).
Notre traduction anglaise.
Some children were whining, others crying, some policemen were reporting
for duty, while others were signing off.
Dřaprès le Robert et Collins dictionnaire français – anglais, anglais –
français ,lřinfinitif<< se mettre >> signifie (se placer)to go, to put oneself, to
begin something, to turn to ,to put on, (606)alors que<< se mettre à>>veut
dire set to, to get down to, to start(607).<<En face>> signifie; across,
opposite,over(394).La première chose que nous avons constatée au cours de
notre recherche sur le sens du syntagme, cřest que le verbe <<se
mettre>>est fort polysémique et que plusieurs acceptions lui sont consignées
81
dans le dictionnaire.ll nous a fallu donc examiner soigneusement le contexte
qui détermine le sens le plus adéquat pour exprimer le vouloir dire de
lřauteur.La traduction littérale aurait rendu la phrase de cette façon:Some
children were whining , others crying, some policemen were sitting opposite
themselves, others leaving.Nous croyons que le premier sens consigné dans
le dictionnaire pour le syntagme<<se mettre à>><< to start>> est plus
approprié pour restituer le sens de la phrase. Ce qui justifie notre traduction
se situe dans notre contexte.La scène est produite le matin au moment où les
gens commencent à se saluer après leur repos de la nuit.Cřest le moment où
les policiers qui sřoccupent des immigrés au dépôt commencent ou quittent
leur travail.
La recréation contextuelle
Pour trouver les équivalences des mots du premier niveau de lřexégèse
lexicale, le raisonnement analytique nřest pas très exigeant parce quřelles
sont déjà consignées dans la langue dřarrivée. Néanmoins, dans certains
genres, surtout, en littérature, les équivalences des mots ou des segments de
la phrase qui composent un sens dŘune unité lexicale du texte de départ ne se
trouvent pas facilement dans la langue dřarrivée. Evidemment, ceci peut
provenir du fait quřil existe des fois certaines réalités socio-culturelles dans
des textes à traduire qui nřexistent pas dans la langue dřarrivée.
Même dans des textes pragmatiques, il y a certains mots et expressions dont
les équivalences ne sont pas instantément trouvées dans la langue cible puis
quřelles ne sont pas consignées dans le dictionnaire bilingue. Un écrivain
pourra par des alliances de mots créer de nouveaux termes ou une nouvelle
combinaision de mots dont les acceptions ne sont pas trouvées dans le
dictionnaire. Le traducteur rencontrera certainement des obstacles dans la
reformulation et la reverbalisation dřun tel mot ou dřune telle combinaison
82
de signes linguistiques.
Pour illustrer cette idée, voyons le syntagme <<a sense of loss >>dans le
texte Rebuilding the Breast ŖMrs. Joan Dawson, 54, of New York City,
spent the next three years battling depression and a sense of lossŗ. Pour
trouver dans la langue dřarrivée une équivalence qui correspond au
syntagme<< a sense of loss>>, il faut comprendre le sens dans le contexte
où il sřinsère. Il a un sens unique ici en dépit de son usage régulier dans les
annonces nécrologiques telles que celle-ci Ŗwith a deep sense of loss …ŗ
Compte rendu du fait que cette combinaison de mots nřa pas, dans la langue
dřarrivée, dřexpression toute faite et pré-existante qui soit compétente pour
ré-exprimer le sens contenu dans le texte de départ, le traducteur devrait
exercer son intelligence pour la traduire. En plus, de la connaissance
linguistique, le traducteur devrait appliquer un raisonnement contextuel plus
fort que dans la traduction de tels mots comme removal (chirurgie)
« ablation » (chirurgie), women:ŗfemmesŗ, figure (dřune personne)
Ŗsilhouetteŗ dřune personne, etc. ll est obligatoire que le traducteur fasse un
peu plus dřeffort analytique ici que dans la reformulation et la ré-expression
des mots du premier niveau de lřexégèse lexicale.
Nous avons constaté au cours de notre traduction que la recherche dřune
équivalence dřun mot ou dřun syntagme du second niveau de lřexégèse
lexicale tel que <<a sense of loss>> peut évoquer une multitude de solutions
provisoires dans lřesprit du traducteur. La liste de ces expressions qui font
partie des solutions suggerées par des étudiants de traduction dans l’Analyse
de discours comme méthode de la traduction de Deslile pour le syntagme
<<a sense of loss>> illustre ce fait. On lřa rendu par une variété
dřexpressions telles quř <<un sentiment de perte >>, Ŗune vive sensation de
83
perteŗ:, Ŗun sentiment de vide intérieurŗ, Ŗun sentiment de dégradation:ŗ,
Ŗun sentiment de choc émotionnelŗ, Ŗun sentiment dřincomplétudeŗ, Ŗun
sentiment dřinfériorité:, Ŗun sentiment dřabandon…ŗ
Alors, comment réussir à extraire le sens le plus approprié pour restituer le
syntagme <<a sense of loss>> en français dans ce contexte? Deslile
remarque ici que ŖNous ne sommes aucunement en présence dřun cas
dřintraduisibilité, mais devant une combinaison de mots dont lřacception est
inusitée, inédite et qui exige un surcroît dřeffort analytique de la part du
traducteur.La Ŗrecréation contextuelleŗ est la seule façon de sortir dřune telle
impasseŗ (106). Vu quřil nřexiste pas préalablement dřexpression toute faite
dans le dictionnaire qui correspond à ce syntagme comme dans le cas de
removal (chirurgie), Ŗablationŗ, il ne reste dřautre voie que le raisonnement
logique au traducteur pour lui trouver une équivlance satisfaisante.Voyons
ici, la première phase de la recréation contextuelle.
Phase I – Analyse contextuelle
Dans le contexte où sřintègre le syntagme, les mots : removal, breast, cancer,
operations, localisent le texte dans le champ médical.Et un examen du
micro-contexte, cřest-à-dire son entourage lexical immédiat (… three years
battling depression … Most women in the same situation turn to a
psychiatrist …) confirme que le texte réfère exclusivement au domaine de la
médicine qui étudie et sřoccupe des problèmes nerveux et des pathologies de
la vie psychique. Compris de cette manière, <<a sense of loss>> fait surgir
dans lřesprit du traducteur Ŗun choc émotionnel violent parvenu par la perte
dřun seinŗ. Nous constatons alors que ce choc émotionnel est la cause de
lřétat dépressif (battling depression) de Mme
Dawson.
84
Phase II – Recoupement conceptuel
Le terme Ŗtraumatismeŗ en psychanalyse, renvoie à un violent déséquilibre
émotionnel et en chirurgie, les six mots suivants sont employés pour
désigner lřaction de retirer de lřêtre vivant une partie malade: << ablation>>
Ŗamputationŗ, Ŗexcisionŗ, Ŗexérèseŗ, Ŗrésectionŗ et Ŗmutationŗ. Ce dernier
terme connote des idées péjoratives et dřabaissement. Les autres cinq mots
ne connotent pas cette idée pejorative. Cette analyse nous démontre
clairement que ce sentiment dřavoir été Ŗmutiléeŗ est ce qui a conduit Mme
Dawson à lřétat de dépression.Nous sommes convaincus quřelle nřaurait pas
probablement réagi violemment si cřétait lřappendicectomie ou lřopération
césarienne quřelle avait subie.
Ces dernières opérations chirurgicales ne déforment aucunement le
corps du malade, tandis que lřablation du sein le fait.La phrase suivante, qui
se trouve dans le micro-contexte nous élucide lřétat psychologique de Mme
Dawson: ŖI didnřt want to be made into a sensational beautyŗ she explained,
I just wanted to be restoredŗ. Cřest par cette exégèse rigoureuse que le
traducteur arrive à conclure que lřexpression Ŗle traumatisme de la
mutilationŗ est lřéquivalence appropriée pour le syntagme <<a sense of loss
>>dans le texte.
A travers cet argument, Deslile nous a appris que les difficultés de la
traduction peuvent être classifiées selon lřeffort exégétique nécessaire pour
les résoudre. Lřexégèse lexicale peut faciliter la solution des problèmes de
traduction. Pour un terme monosémique tel que<< femme>> qui appartient
au niveau zéro dřexégèse lexicale, sa traduction nécessite peu dřeffort parce
que lřéquivalence existe déjà dans le dictionnaire bilingue. Mais il faut plus
dřeffort intellectuel pour la traduction dřun mot comme<< removal>> qui se
classifie au premier niveau de lřexégèse lexicale. Malgré le fait quřil existe
85
des mots consignés dans le dictionnaire bilingue qui correspondent au sens
du terme « removal », cřest un terme polysémique, donc ce nřest que le
contexte qui peut déterminer sa vraie équivalence.
Il découle que les problèmes dans ces deux niveaux sont soit de nature
linguistique soit de nature encyclopédique. Cependant dans la traduction des
mots au premier niveau, il faut plus dřeffort exégétique à cause de la nature
polysémique du mot <<removal>>. Mais, cřest dans la traduction des
syntagmes et des expressions tels que <<a sense of loss>> qui font partie du
deuxième niveau de lřexégèse lexicale que le traducteur devrait exercer un
raisonnement bien considérable et rigoureux pour démontrer son savoir-
faire.Pour montrer comment nous avons résolu de tels problèmes du
deuxième niveau de lřexégèse lexicale dans la traduction de notre texte,
voyons la reformulation de quelques extraits du texte en français:
Français.
ŖComplexé, va!ŗ (130).
Anglais.
Get away, you snob, stupid idiot!
Dřaprès le Robert et Collins dictionnaire français – anglais, anglais –
français, le terme complexe se situe au domaine psychologique, complexe
dřŒdipe, complexe dřinfériorité, complexe de supériorité. Lřinfinitif
complexer a ces explicationsŕOn peut dire, ça le complexe terriblement =
heřs very hung up. = Être très complexé = to be very hung up ou mixed up
(195).
Le Robert Pour Tous dictionnaire de la langue française montre que le
terme complexe peut avoir deux sens. 1. Adjectif. Qui contient, qui réunit
plusieurs éléments différents. Un problème très complexe. 2. Difficile à
86
cause de sa complexité. Complexé. Adjectif qui signifie inhibé. Un type
malheureux, complexé, et tout (212).
La traduction littérale de cette phrase nous donne:
Complexée, Va!
Get away from here, you unhappy fellow. Mais ces expressions nřexpriment
guère le message du texte.
Le problème ici est autant linguistique quřencyclopédique.Puisque les
équivalences notées dans les dictionnaires ne nous disent rien, nous nřavons
dřautre option que de recourir au contexte pour dégager le vouloir-dire de
lřauteur. Cřest le contexte de la production qui explique les circonstances
(du temps, du lieu, du sujet et des interlocuteurs). Cette phrase est extraite
dřune scène violente entre deux immigrés au dépôt qui attendent lřexpulsion
vers leurs pays dans Douceurs du bercail.Une remarque frivole dřune dame
a déclenché une bagarre entre cette dame et un autre immigré dans le local.
Considérons dřabord le micro-contexte de la phrase dans le dialogue entre
les deux;
ŖIls ont eu raison! Ils ont eu raison de ra-a-aser le Quartier de la Gare.
Cřétait devenu de la merde! Insupportable pour tous, pour nous aussi qui, à
cent mètres de là, ne pouvions plus nous reposerŗ.
Sega lřa interrompue … Il a hurlé de toute la force de ses poumons.
ŖComplexée, Va! Voilà pourquoi ils sont racistes et nous méprisent et osent
nous parquer ici comme du bétail avant de nous embarquer dans des convois
de la honte …ŗ (130).
Par cette étude, il est clair que la dame à qui Sega a adressé cette phrase ne
87
partage pas les mêmes sentiments que les autres immigrés.Elle manifèste son
approbation pour les actions des autorités europénnes contre les immigrés en
France. Dans une autre circonstance dans le roman elle a agi dřune manière
de se faire paraître plus supérieure que les autres immigrés. Voyons la façon
par laquelle lřauteur nous lřa présentée avec son compagnon:
On voit un couple qui fait pour la première fois depuis son arrivée, un
geste significatif par rapport au contexte.Lřhomme a fait le signe de croix, la
femme a levé les deux mains jointes face à son visage, en attitude de prière.
Surprise générale du voisinage qui croyait que ce monsieur et cette dame
élégamment habillés ne parlaient aucune des langues qui, par intermittence,
emplissent le local de mille et une sonorités, nuances et intonations.Le
monsieur et la dame, tous deux atypiques, nřont en effet rien fait comme les
autres depuis quřils ont été conduits dans le dépôt:ils sont restés debout entre
Sega et une<< disquette>>fourbue.lls ne sont allés ni au chariot Ŕexpression
déjà consacrée-, ni aux toilettes, et nřont pas ouvert la bouche en direction
des autres, de ceux surtout qui ont essayé de savoir pourquoi ils ont été
<<intégrés>>, en dřautres termes ,pourquoi ils ont été amenés au Dépôt.lls
nřont pas parlé juste quelques brefs chuchotements entre eux(106).
De plus, une amie sénégalaise nous a informé que cřest par ce terme
ŖComplexéeŗ que lřon désigne au Sénégal, les Francophones qui se montrent
assimilés, cřest-à-dire, son peuple qui font singer les Français en adoptant
leurs attitudes et leurs pratiques sans aucune considération pour leurs
confrères. Une de ces attitudes de complexe de supériorité est de parler la
langue française dřune manière affectée, comme ferait un français. Ayant
bien compris cette phrase, il nous reste à la reformuler et la reverbaliser.
La fonction du mot dans le texte est très fondamentale, pour la
reverbalisation, car cřest le moyen par lequel le traducteur assigne un rôle au
88
terme traduit .Dans le contexte, la phrase est une insulte.Alors,puisque nous
nřavons trouvé aucun signe ni dans le dictionnaire bilingue ni sur lřinternet
qui correspond au sens du mot, nous avons décidé de faire une analyse
exégétique de tous les mots de la langue dřarrivée qui nous surgissent à la
mémoire, tels que: complicated, assimilated, inhibited, confused,
conservative, hypocrite, pretender, haughty and affected.
Ces deux derniers mots nous semblent plus proches à lřidée que la lecture a
évoquée en nous. Afin dřarriver à une équivalence qui correspond au vouloir
de lřauteur, nous avons essayé dřimaginer des façons par lesquelles les
Français se comportaient au XVIIème
siècle.Pierre Salomon, dans son
livre:Précis d’histoire de la littérature française nous a montré que les
femmes agissaient dřune façon affectée quřon appelait la
préciosité.Beaucoup de bourgeois qui nřappartennaient guère à la classe des
nobles aimaient adopter les goûts et les pratiques du gentilhomme(101).Ce
problème de traduction a fait appel à notre bagage cognitif où sont
emmagasinées des choses que nous avons apprises au cours de notre lecture
dans le passé.Ces connaissances refoulées dans notre mémoire fusionnent
avec celles puisées au cours de notre lecture du texte qui se situent à notre
domain cognitif contextuel pour effectuer une traduction appropriée du
texte.La conduite de cette dame est aussi analogue à celle de Mr. Darcy
envers Miss Elizabeth Bennet, lřhéroïne de Pride and Prejudice de Jane
Austen. Dans ce roman anglais, on a exprimé la même attitude par les termes
:snob,>><<haughty,>><<supercilious>> et <<affected>>.
Et Le Robert Pour Tous, dictionnaire de la langue française définit Ŗsnobŗ
comme Ŗpersonne qui admire et imite sans discernement les manières, les
goûts, les modes des milieux dits distinguésŗ (104). Nous avons dès lors
décidé de restituer ce signe par le mot snob.
Pour justifier notre traduction de cette phrase, nous avons cherché les
89
équivalences de ces termes<<affected et snob>> dans Oxford Advanced
Learner’s Dictionary. Ici, le terme « affected » signifie :adj. (of a person or
their behaviour) not natural or sincere(24).Tandis que le terme « snob »
signifie:
1. A person who admires people in the higher social classes.
2. A person who thinks they are much higher than other people because
they are intelligent or like things that many people do not like (1395). Alors
pour cette phrase, nous avons recréé le vouloir dire de lřauteur dans la
langue cible par cette traduction: Complexée, Va! Ŕ Get away, you snob,
stupid idiot!
Cela est une démonstration de la pertinence des compléments
cognitifs comme attestée par lřapproche interprétative dans lřactivité
traduisante .
Les nouvelles idées extraites du texte qui font partie du contexte cognitif,
alors font surgir aussi la faculté de créativité dans le traducteur.Ainsi, ces
connaissances scellées dans la mémoire immédiate se joignent au bagage
cognitif qui se constitue des idées refoulées dans sa mémoire à long terme
pour arriver à une bonne compréhension du vouloir-dire de lřauteur.II va de
soi que les connaissances encyclopédiques sont alors ranimées pour
créer, globalement, les idées explicites et implicites qui sont le message
derrière les mots et le vouloir-dire de lřauteur.La compréhension des idées
intimes et des intentions de lřauteur donc évoque la créativité littérare pour
leur ré-expression dans le nouveau texte par le traducteur.
Stefanink et Balacescu exqliquent que :
90
(Cřest)… la conception de la créativité Ŕcomprise comme
une activité cherchant des solutions à des problèmes- telle
quřelle est défendue par le psychologue Giulford (1971). Il
/ : »sřagit dřune créativité mise au service de la traduction…
(Cité dans Le Français dans le monde, 41).
Cřest de cette manière que les compléments cognitifs interviennent dans la
pensée du traducteur pour réaliser un bon résultat. Nous sommes dřavis que
les rôles des compléments cognitifs dans la traduction dřune œuvre littéraire
ne pourront jamais être surestimés, compte tenu de la composition des
éléments socio-culturels du texte littéraire en général.Nous trouvons que le
contexte situationnel des faits littéraires aide la clarification de lřhistoire et
inhibe lřambiguïté dans la traduction.Nous devrons nous rendre compte que
le contexte cognitif est composé de la totalité dřinformations et dřidées qui
se transmettent au traducteur au cours de la lecture du texte ou de la
communication .Nous trouvons que le traducteur pourra développer la
faculté de créativité quand il se sert de son intuition dans lřopération
traductive. Avec une connaissance approfondie de lřœuvre quřil aurait
acquiese en lřétudiant intégralement comme un organisme, le traducteur
pourra générer de nouvelles idées qui lřaideraient à transmettre le sens aux
destinataires.Plus le savoir partagé entre lřécrivain et le lecteur est grand,
moins il est nécessaire dřêtre explicite dans le texte.
Un article de Wikipédie remarque que :
Lřacte créatif peut être considéré comme le fruit dřune
volonté de puiser quelques informations provenant de la
mémoire (logique ou irrationnelle) et les réorganiser dřune
manière nouvelle poussée par lřimagination, lřinstinct,
lřinspiration, les émotions fortes...La lecture comme de
nombreuses autres activités demandant un effort
dřimagination, peut être un stimulant de la créativité (cité
dans LřEncyclopédie libre, le premier, janvier, 2001).
91
Voyons maintenant la traduction de cette autre expression extraite de
Douceurs de bercail dřAminata Sow Fall:
Français:
Elle nřest pas très jeune et affiche un bon maintien (27).
Traduire la première phrase ŖElle nřest pas très jeuneŗ nřest pas difficile
parce que lřon la rend presque littéralement en: She is not very young. Mais
la difficulté est dans la restitution de la deuxième phrase: Ŗet affiche un bon
maintienŗ Ni les dictionnaires bilingues ni les dictionnaires monolingues ne
contiennent dřéquivalence qui correspond à ce syntagme. En examinant le
micro-contexte de la phrase, nous avons constaté que le sens de la première
phrase est fondamental dans la traduction du syntagme Ŗet affiche, un bon
maintienŗ parce que les deux segments contiennent les attributs de la dame,
ici, un policier de lřimmigration.
Dřaprès le dictionnaire , Le Robert Pour Tous, afficher: (1) ŖFaire connaître
par voie dřaffiche. (2) Poser des affiches (3) Publiquement. faire étalage de
→ affecter → sřafficher. Sřafficher avec quelquřun, se montrer en public
accompagné de quelquřunŗ (18) Le même dictionnaire définit le mot
maintien ainsi: (1) ŖAction de maintenir, de faire durer, (2) Manière de se
tenir en société → poseŗ (686).
Le Robert et Collins dictionnaire français – anglais, anglais- français
montre que le verbe afficher signifie, 1. To put up, stick up, post, bill,
display. 2. To exhibit, flaunt → sřafficher Ŕ to displayŗ (19). Tandis que
dans le même dictionnaire, << maintien>> signifie(1) preservation,
upholding, maintenance, keep up (2) support. (3) bearing, deportment (576).
Nous avons dřabord essayé de comprendre le sens général du contexte (qui,
92
ici, est une scène à lřimmigration) et le micro-contexte où le syntagme est
intégré.Voyons<< Cřest une dame en uniforme: jupe bleue, chemise,
blanche et galons à lřépaule. Elle nřest pas très jeune et affiche un bon
maintien>>. La présentation de cette femme démontre quřelle se porte dřune
manière bien soignée. Et une allusion au mot <<galons>> qui se trouve dans
le contexte confirme quřelle appartient à la classe elevée dans lřimmigration.
Dřaprès le dictionnaire de la langue française, Le Robert Pour Tous,
le galon signifie (1) ŖRuban de tissu épais qui sert à orner (2) Signe distinctif
de grade dans lřarméeŗ (508). Lřexégèse lexicale du sens des mots Ŕ clés de
ce contexte Ŗafficher un bon maintien, galon éclaircit lřidée sur cette dame.
Ayant bien compris ces expressions dans le contexte, il nous reste à les
reformuler et à les reverbaliser. Puisquřil nřexiste préalablement dans la
langue dřarrivée aucune expression qui rend effectivement ce syntagme
Ŗaffiche un bon maintienŗ, il nous reste à recourir à la recréation
contextuelle.
Au cours de lřopération exégétique, plusieurs expressions ont été évoquées
dans notre esprit, telles que Ŗshe wasnřt very young but exhibited maturity,
she wasnřt very young and exhibited that she was experiencedŗ, Ŗshe wasnřt
very young but looked well keptŗ, Ŗshe wasnřt very young but maintained a
good appearanceŗ, Ŗshe wasnřt very young but looked quite smartŗ. A la fin,
nous avons décidé de restructurer la première phrase en Ŗshe looked quite
experienced ŗ. Ce qui suit naturellement est la restitution du syntagme qui
aussi, est un attribut de la femme. Nous avons pour ce syntagme Ŗshe looked
quite smartŗ.
Nous avons constaté alors, que le sens de la conjonction Ŗetŗ, peut mieux se
rendre par<< but >>dans la langue dřarrivée parce cřest une comparaison
des qualités de la dame.La première phrase est rendue à la forme négative
mais nous lřavons rendue à la forme affirmative afin de réaliser le but de la
93
phrase. La signification est illustrée dans cette phrase Ŗmalgré quřelle nřest
pas très jeune, elle connaît bien sa professionŗ. Cřest cette signification qui
rend le vouloir-dire de lřauteur et justifie notre traduction.Ainsi:
Français.
Elle nřest pas très jeune et affiche un bon maintien.
Anglais.
She looked experienced and smart.
La traduction du titre de notre texte nous a vraiment posé des difficultés, et,
cřest à travers la démarche de la recréation contextuelle que nous les avons
résolues. Nous avons procédé par une considération globale du texte qui est
du genre littéraire. Nous avons examiné les rôles du sujet, de lřauteur, du
vecteur et les destinataires dans la traduction du texte. Jetons dřabord un
regard sur le titre: Douceurs du bercail.
Dřaprès le Petit Robert pour Tous dictionnaire de la langue française, le
terme << douceur>> renvoie à la(1) ŖQualité de ce qui procure aux sens un
plaisir délicatŗ. (2) Qualité dřun moment progressif et aisé, de ce qui
fonctionne sans heurt ni bruitŗ. (3) ŖImpression douce, plaisir modéré et
calme. La douceur de (+ infinitif: lřagrément quřil a à … La douceur de
vivre → bien-être, bonheur (4) Qualité morale qui porte à ne pas heurter
autrui de front, à être patient, conciliant, affectueux → bienveillance, bonté,
gentillesse, indulgenceŗ (5) ŖChose douce; petit plaisir, petit agrémentŗ
(344).
Le même dictionnaire remarque que bercail signifie Ŗfamille, foyer, pays
(natal). Rentrer au bercailŗ (106).Et nous avons considéré que lřhistoire de
Douceurs du bercail est une fresque de la société sénégalaise, voire
africaine. Beaucoup de jeunes gens peuvent facilement se reconnaître dans
les personnages dřAminata Sow Fall. Le retour au pays natal, et, surtout à la
94
maison maternelle est très nécessaire pour ceux qui sont égarés.Nous
soutenons cette idée par cette remarque de Bachelard :
Avant dřêtre jeté au monde lřhomme est déposé dans le
berceau de la maison… la maison est un grand berceau…
lřhomme est tout de suite une valeur. La vie commence bien,
elle commence enfermée, protégée, toute tiède dans le giron
de la maison (cité dans Angrey Unima Francis, 24).
Et lřexamen des mots-clés du titre évoque les images et les idées de la
douceur, du plaisir, du confort et de la bienveillance qui se trouvent dans la
famille, la maison et le pays natal. Considérons aussi le passage où lřauteur
fait référence à ce terme.
Le texte
Lřaventure était lancée à Naatangué et bien lancée, avec au fil des ans, les
bonheurs, les angoisses, les jours de grisailles et les matins de soleil, avec les
joies, les difficultés et le combat quotidien, comme dans toute œuvre
humaine. Et la prospérité, au fil du temps, avait pointé le bout de nez. Elle
sřétait consolidée grâce à lřimagination, le dynamisme fou des promoteurs
… Mais leur grand bonheur avait été de sřidentifier à un label: DOUCEURS
DU BERCAIL, DOUCEURS DU BERCAIL! Lřheureuse trouvaille de
Dianor nřétait pas seulement une manière de nommer les produits ainsi
étiquetés qui, de Naatangué, convoyaient partout dans le pays et ailleurs
lřidée dřune terre généreuse et hospitalière capable de donner plus quřon lui
a offert. Cřétait aussi la plus belle expression, pour ceux dřentre eux qui
avaient vécu les jours affreux du Dépôt et lřinfamie du charter, de leur
dignité retrouvée. Le rêve, enfin! Et le temps de se dire en se référant à la
sagesse populaire que le bonheur, au fond, cřest comme le Savoir: il nřest
95
pas loin, il faut savoir le trouver: *kham kham sore woul, dafa lakhou!
DOUCEURS DU BERCAIL, cřétait un label de réconciliation avec soi,
cřétait une griffe, cřétait un style (216-217).
1.* (Oulof) Littéralement, le Savoir nřest pas loin, il est seulement caché.
En nous appuyant sur notre compréhension du sens global du texte et du
micro-contexte où sřinsèrent ces expressions, nous avons choisi de rendre le
titre en langue cible de cette manière, ŖHome Sweet Homeŗ. Ces douceurs
sont précédées de souffrances, de traumatisme, de honte et de tous les faits
déstabilisants pour ceux qui avaient vécu au dépôt en France. Ce sont des
conforts et des plaisirs qui viennent pour réhabiliter ces gens qui avaient subi
des expériences désespérantes et amères. Leur retour au pays natal reste
symbolique parce quřils représentent les non-dèsirés de la France qui
retrouvent leurs pas au pays natal.Ce retour est significatif parce que leur
pays natal est comparable à la maison maternelle. La maison, reçoit et
heberge ses enfants rejetés par un monde difficile. Bachelard soutient cette
idée lorsquřil remarque que<<la maison est notre coin de monde. Elle est
notre premier univers. Elle est vraiment un cosmos ». (Cité dans Angrey
Unimna, Francis) (23).
On ne peut guère apprécier certains conforts si lřon nřen avait jamais été
privé. En effet, cřest parce que les fondateurs de Naatangué ont beaucoup
souffert au Dépôt à Paris, quřils peuvent maintenant vraiment apprécier les
nouveaux bonheurs qui leur semblent désormais sřoffrir. Ils sont partis loin à
la recherche dřune toison dřor quřils nřont pas trouvé.Revenus chez eux
deçus et désillusionés, ils lřont trouvé dans le confort de leur propre foyer.
Il faut quřil y ait la déception et les souffrances pour quřils découvrent et
apprécient les bonheurs que leur pays natal leur offre. Le titre fait résonance
96
à lřenfant égaré de la Bible. Ces plaisirs existaient au pays avant leur départ,
mais ils ne les ont point aperçus et ce sont leurs agonies qui ont fait évoluer
ces expulsés. Considérant le progrès quřils ont fait, les rêves et les ambitions
accomplis dès leur rentrée, Asta et ses compagnons du dépôt ont retrouvé
leur dignité. Cela est la raison qui justifie le titre ŖHome Sweet Homeŗ.
Il est clair que les sens du mot dans le micro-contexte et le sens global sont
pertinents pour la compréhension et la restitution du sens contenu dans
lřoriginal.Par la combinaison des connaissances linguistiques et
encyclopédiques, la compétence exégétique, le traducteur arrive à recréer ce
sens dans la langue cible.Par lřélucidation du sens engendré par lřanalyse
rigoureuse, le traducteur arrive à traduire ces expressions .Ce nřest
aucunement un exercice comparatif des langues, ni un acte de transcodage,
mais celui dřanalyse.Cřest dans la traduction, de telles expressions que le
traducteur fait appel à toutes ses facultés dřobservation, de jugement
dřintelligence et de créativité.
Dřaprès Bassnett- Mcguire :
The interlingual translation is bound to reflect the
translatorřs own creative interpretation of the SL Text.
Moreover, the degree to which the translator reproduces
the form … of the SL text, will be as much determined
by the TL system and will also depend on the function
of the translation (80).
Il faut toujours considérer le sens global et le sens contextuel du texte à
cause de multiples connotations du texte romanesque. Aussi avons- nous
approprié le texte en comparant les réalités sénégalaises décrites dans le
texte aux actualités du reste de lřAfrique occidentale afin de rendre le
vouloir-dire de lřauteur. Si nous considérons trop les significations des mots
isolés cela risque de nous détourner de la perception des autres éléments qui
97
sont égalements importants au sens de lřhistoire.
Jacquin affirme que:
Lřintéraction des éléments élabore le sens global; le
texte est un tout; plus et autre que la somme des
éléments. Cette complémentarité dynamique des signes
et leur non-univocité laissent au traducteur une liberté
dřaction: il pourra opérer commutations, transferts,
trouver des correspondances, travailler dans le sens de
la recréation... ou de la transposition créatrice. (52).
TROISIEME PALIER:LřINTERPRETATION DE LA CHARGE
STYLISTIQUE.
Dřaprès Jean Deslile<< le style est comparable à un vêtement imposé par les
impératiifs de la communication dans lequel le traducteur drape son texte
pour le rendre conforme aux régles du genre ou pour atteindre la sensibilité
du lecteur. >>(118).Le style de lřauteur est très fondamental parce que cřest
par lui que le message de son écriture est communiqué à ses lecteurs.Il
devient un instrument qui sřavère efficace pour susciter des émotions chez
les lecteurs.Ce palier, donc a pour objectif de faire comprendre au traducteur
la façon par laquelle le texte devrait être ré-exprimé afin de réussir dans la
société cible.Il est exigeant que le style technique qui a des traits formels soit
adopté dans les textes pragmatiques.Dans tels textes, il sřagit des registres
adminstratifs, juridiques, journalistiques et les terminologies spécialisées
par lesquels les auteurs ont rédigé leurs textes. Par contre, la charge
stylistique dans le texte littéraire renvoie à tous les éléments esthétiques tels
que la connotation, le langage métaphorique, la simili, lřironie, le flashback
et même la chanson qui caractérisent le texte littéraire.Deslile soutient
lřimportance du style sur le message de lřauteur, lorsquřil remarque
que<<Indissociables comme le recto et le verso dřune feuille,fond et forme
contribuent lřun et lřautre au sens global dřun message et à lřimpression
cognitive et affective quřil laisse sur les lecteurs>>(113).
98
Nous estimons quřil est absolument nécessaire pour le traducteur de
jouer le rôle dřun critique littéraire afin de dégager les rapports qui existent
entre les différents éléments du texte.Ce rôle comprend une analyse détaillée
du fond et de la forme qui constituent les matières premières qui permettent
à la réalisation dřune œuvre littéraire. A ce propos, on note que la forme ne
peut pas être détachée du fond parce quřils contribuent tous deux à faire
ressortir le sens global de lřécriture. Plusieurs rédacteurs emploient le style
simple, non sophistiqué tandis que dřautres adoptent une approche radicale
et un peu compliqué pour faire part de leurs idées.Outre son rôle de
médiateur entre lřauteur et son nouveau public, le traducteur devrait jouer le
rôle dřun critique littéraire et dřun critique social. Autrement dit, le
traducteur des œuvres littéraires est appelé à transmettre le message en
relèvant les questions.
Le langage du texte littéraire sřavérant expressif et subjectif, le
traducteur doit analyser le langage et les thèmes pour déceler les éléments
qui aideront la compréhension à ses destinataires. Bergez soutient ce point
en remarquant que<< la sociocritique tente dřinformer le texte littéraire par
toutes les données historiques et sociales qui peuvent éclairer son existence
et son sens>> (44). Etant dřabord lecteur pour comprendre, le traducteur
devrait dans cette opération intellectuelle trouver des éléments qui aideront
ses destinataires à apprécier davantage lřœuvre dans tous ses aspects. Le
traducteur devrait se rendre compte du contexte social et historique de son
texte pour faciliter sa compréhension.Ici la faculté de créativité et lřopération
traductive sont en corrélation pour montrer les liens qui existent entre les
idées et les éléments esthétiques de lřœuvre.
99
Deslile Jean remarque que:
Language is not merely a means of communication, as it is in
pragmatic texts, it is also an end in itself. In no other type of
writing, are form and content so inextricable. Poetry and
artistic prose seek not only to communicate, but also to elicit
an emotional response (14-15).
Par cette remarque nous comprenons que lřœuvre littéraire est un ensemble
ou un tout. Il est attendu au traducteur de la traduire en se rendant compte de
sa complexité. Le texte littéraire, par sa composition est caractérisé par des
traits ambigus et connotatifs. Il abonde en langage métaphorique et
symbolique qui est porteur des réalités socio-culturelles. Cřest pourquoi le
message de lřauteur ne se trouve pas juste dans les mots isolés mais bien
plutôt dans la complexité du texte. Il faut donc que le traducteur essaie de
comprendre le message de lřauteur masqué dans les figures de style comme
la comparasion, la métaphore, les proverbes et les images.
Le commencement du récit de Douceurs du bercail qui évoque une
scène dřatterrissage de lřavion par lequel a voyagé Asta, lřhéroïne, nous
servira dřexemple pour illustrer ce fait. Lřarrivée dřAsta et des autres
passagers est marquée par une pluie qui pourra avoir deux sens : un sens
dénotatif et un sens connotatif. Ici, la pluie signifierait pour nous, le froid et
le vent, caractéristiques du mauvais temps quřil fait à lřaéroport.
Aminata Sow Fall décrit cette scène ainsi :
Lřavion a atterri sous une pluie battante. Asta répond
à peine aux souhaits de lřhôtesse de lřair et emprunte
le couloir. Malgré ses bras lourdement chargés et ses
pieds qui lui font terriblement mal dans les escarpins,
elle presse le pas, entraînée par la vague de voyageurs.
Elle est fatiguée et a le sommeil(5).
La première impression que nous faisons dřAsta est quřelle est
psychologiquement occupée parce quřelle nřa guère répondu aux bons
100
souhaits de lřhôtesse. On se demande alors la raison pour laquelle elle est
troublée ou bien ce qui lřabsorbe. Sigmund Freud nous apprend que
beaucoup dřévénements refoulés dans lřinconscient de lřindividu pourraient
expliquer les raisons de ses actions et de ses comportements aux moments
donnés.(Wikipedie, LřEncyclopédie libre, mars 3, 2008). Quant à Asta, elle
a subi et a souffert beaucoup dřexpériences amères qui proviennent surtout
de son mariage malheureux avec Diouldé et leur divorce.
Cependant, son attitude ici pourrait aussi être un produit de ses circonstances
immédiates.Cřest possible quřelle contemlplait déjà le mauvais temps qui
pourrait empêcher les mouvements dehors. Elle est lourdement chargée et
les souliers lui font mal. En outre, de tous ces faits, Asta est fatiguée et elle
a sommeil. A lřaéroport, la routine du contrôle se révèle exigeante et
mesquine. Cřest pourquoi les nerfs dřAsta se lâchent quand la douanière
atteint son intimité pour la fouiller et lřhumilier.
Cette analyse démontre implicitement le rapport qui existe entre la
forme et le fond dans notre texte littéraire qui est Douceurs du bercail
dřAminata Sow Fall.La traduction de lřœuvre littéraire apparaîtrant
complexe, nous voulons souligner encore une fois lřimportance de la phase
de compréhension dans la traduction, comme la préconise la théorie
interprétative.Nous avons trouvé que traduire un texte sans compréhension
approfondie aboutit à un effort en futilité. Une telle traduction dřun texte
littéraire ou même dřun texte pragmatique sera inadéquate pour réexprimer
le vouloir-dire de lřauteur.
Nous avons donc essayé de rendre les images et les figures de
rhétoriques avec leurs équivalences en anglais ou avec dřautres phrases ou
dictions qui évoquent les mêmes images dans la langue cible qui signifieront
les mêmes idées aux destinataires.La traduction littéraire exige une
réproduction exacte de lřéquilibre de fonction du message et une évocation
des réponses émotionnelles chez les destinataires.Cřest pourquoi le
101
traducteur est obligé de sřapproprier ou faire sien lřœuvre de quelquřun
dřautre pour une traduction réussie (Israël cité dans Lederer et Israël, 26).
La compréhension exige certains faits et des connaissances
particulières pour se réaliser dans lřindividu.Une compétence de la langue de
départ est pertinente pour lřobtention du sens de lřœuvre et la maîtrise de la
langue dřarrivée est indispensable pour sa réexpression dans la culture
cible.La compréhension nécessite souvent la compétence linguistique et,
simultanément un savoir encyclopédique qui fonctionnent
complémetairement pour réussir à transmettre le sens global du texte.ll
découle alors que la compréhension renvoie à lřassociation de toutes les
idées explicites et de celles qui ne le sont pas dans le texte.
Koustivitis insiste que:
Lřessence dřun texte a un caractère holistique et
monistique. Cřest grâce à ce caractère de lřessence du
texte quřon peut y fonder une approche globale de la
traduction. Elle comporte des aspects notionnels,
émotionnels et formels. Elle contient des éléments
explicites. Dans un sens large, lřessence dřun texte
englobe son auteur, son contexte et sa finalité. (cité dans
Meta Translation Journal, 469).
Dřaprès lřapproche interprétative, la communication sřeffectue à travers la
compréhension, la déverbalisation et la réexpression dans la langue
dřarrivée.La compréhension est très pertinente dans toute tâche de
traduction dite interprétative.Lřétude critique de lřœuvre est capable dřaider
le traducteur à avoir une compréhension approfondie du sens et du langage
du texte. La phase de la compréhension pour nous est très fondamentale,
surtout dans la traduction littéraire.
Les théoriciens de lřapproche interprétative préconisent la production
de lř<<effet>> chez le destinataire.Dans lřouvrage, La liberté en
traduction,Fortunato Israël souligne lřimportance de lřeffet émotif de la
102
traduction du texte littéraire sur le nouveau public.Le texte de la langue cible
devrait produire sur ses destinataires le même effet que
lřoriginal(41)Maurice Gravier, aussi dans le même colloque, remarque quřil
<<y a des traductions qui sont parfaites sémantiquement, analytiquement et
qui sont absolument sans effet>>(42).Amparo Hurtado Albir, dans La notion
de fidélité en traduction soulêve aussi lřimportance de lř<<effet>> en
traduction lorsquřil écrit <<sens et effet sont étroitement liés et font parties
du même processus; si le sens change, lřeffet change >>(43)Au cours de
cet argument il nous a informé que les deux ont une liaison de <<cause et
résultat>>, le sens compris étant la cause tandis que lřeffet est :<<Un résultat
de la synthèse opérée par le processus de la compréhension>>(44).
ll sřen suit que ce nřest que le texte pragmatique que lřon peut
traduire sans se soucier tant de lřeffet car le sens une fois compris, lřeffet
importe peu et cřest aux traducteurs chévronnés que restent sřil le faut , la
contestation du sens. Cřest pour cette raison que Riffaterre Michel remarque
que <<la tâche de la stylistique est dřidentifier la réaction du lecteur devant
le texte et de retrouver la source de ces réactions dans la forme du
texte>>(cité dans Bergez Daniel, 61). Alors, par lřusage de notre habilité et
de la faculté créative, nous avons cherché à explorer et à exploiter les
potentiels dřanglais, qui est notre langue dřarrivée pour recréer un nouveau
texte. Nous nřavons pas concentré sur le contenu au détriment de la forme de
lřœuvre. Nous avons plutôt considéré le texte comme un organisme où tous
les éléments fonctionnent par rapport aux autres.
De ce fait Israel explique que :
Lřunité de traduction nřest plus le mot, le syntagme ou la
phrase mais le texte tout entier. Dans cette perspective
lřexactitude de lřinformation compte moins que la création
dřun effet propre à susciter une réaction affective, une
émotion esthétique voisines de celles quřengendre le contact
avec lřoriginal (cité dans Lederer et Israël, 22).
103
Le texte littéraire est un produit de lřimagination qui est né par lřélaboration
de la forme. Alors nous avons considéré notre opération traduisante comme
une tâche imaginative et intélligente qui nécessite notre intuition et une
application de notre créativité pour communiquer le message de Douceurs
du bercail aux destinataires anglophones.Avec lřintuition, une démonstration
de la compétence langagière de la langue dřarrivée et des connaissances
extra-linguistiques sur la culture de départ, nous avons traduit le texte.
En guise de lecteur, critique littéraire et socio-critique, nous avons
essayé de saisir le message de lřauteur afin de le rendre dans notre
traduction.Notre lecture nřest quřune interprétation, donc nous croyons
quřun autre traducteur pourra saisir un nouveau sens du livre. Mais nous
avons essayé de rester fidèles au message de lřauteur. Nous avons pris le
texte dans la perspective de certains événements qui se passent dans le
milieu de production du texte. Au regard du texte, Aminata Sow Fall critique
la vie ostentatoire, le culte dřargent, lřimmigration illégale et la corruption
qui mettent toute la société sénégalaise dans lřétat de misère. En nous basant
sur notre compréhension des problèmes socio-culturels du contexte
situationnel de lřhistoire, nous avons approprié le texte afin de recréer le
vouloir-dire de lřécrivain.
Lavault Elisabeth affirme ce point en disant que :
La traduction littéraire accorde une place prépondérante
aux fonctions expressives, évocatives, et connotatives
du langage et le traducteur doit tenir compte de la
forme autant que du fond. Le traducteur doit en quelque
sorte recréer lřœuvre en conservant ses aspects
esthétiques et stylistiques (50).
Or, lřauteur se sert des figures de style et des connotations pour
exprimer certains phénomènes et notions socio-culturels. Une traduction
créative pourra amplifier les valeurs culturelles et esthétiques de lřœuvre en
question. Elle pourra rendre explicites les messages implicites lesquels le
104
traducteur avait trouvés pendant sa lecture approfondie du texte.
Nolet Marie- Josée explique quř:
Il sřagit … dřallier ces divers éléments afin de montrer
comment les manifestations contextuelles, thématiques
et stylistiques agissent conjointement, sřappuient
mutuellement pour produire le sens global du texte (cité
dans Wikipédie lřencyclopédie libre, le 16, septembre,
2007).
Flamand Jacques, souligne que le traducteur devrait jouer la triple fonction
du lecteur, critique et rédacteur qui comprend bien le texte à travers une
connaissance approfondie et transmet fidélement le message comme un
créateur ou co-auteur (47) du texte. Or, Fortunato lsraël nous apprend que
lřappropriation est très pertinente dans la traduction du texte littéraire à
cause de la multiplicité de sens qui le caractérisent.ll remarque aussi sur le
texte littéraire que:<<la forme nřest plus un simple vecteur de lřidée, du
contenu notionnel.Valorisé, sémantisée, elle devient un élément primordial
dans lřélaboration du message au point que souvent le dire compte autant
sinon que le dit >>(19)
Avec lřintelligence et la créativité, le traducteur pourra récréer le texte
avec les images, des symboles et des phrases qui seront efficaces pour
évoquer les mêmes sentiments chez les nouveaux lecteurs lesquels ont été
suscités dans les lecteurs de lřoriginal. Il devrait choisir parmi les idées et
les mots qui lui viennent à la mémoire pour reéxprimer son interprétation.Il
pourra à sa guise exploiter et explorer les ressources de la langue dřarrivée
dřune manière que le sens correspond au message de lřoriginal. (Jacquin
dans Ballard, 62).
II en dècoule que le traducteur devrait faire attention à la nature du
texte pour quřil puisse choisir les mots appropriés à travers lesquels il ré-
exprime les idées du texte du départ. En effet, il est nécessaire que le
traducteur du texte obéisse aux régles qui gouvernent lřécriture de ce genre
105
de texte. Tous les genres de texte ont des registres linguistiques et ne sont
pas rédigés dřune même convention collective.Fortunato Israël nous informe
que le traducteur littéraire est plus libre que les traducteurs dřautres genres
de réaliser un excellent résultat dans son travail.ll est nécessaire quřil prenne
de lřinitiative de reformuler le texte avec de la créativité.Normalement, les
rédacteurs du texte littéraire écrivent dans le but de solliciter des émotions
de lřapprobation ou du jugement sur certains faits socio-culturels dans une
société donnée.Mais lřauteur du texte pragmatique ou administratif cherche
surtout à renseigner le public.Les écrivains littéraires sont souvent engagés
donc cherchent à influer leurs lecteurs.ll sřensuit alors que le traducteur
devrait prendre tous ces faits en consideration pour un bon résultat.
Dřaprès Deslile
Quatre élements interviennent toujours dans un texte :
lřauteur, le sujet traité, le vecteur (genre de texte, ressources
linguistiques utilisées) et les destinataires. Le style, entendu
au sens large, serait ni plus ni moins que le respect des
contraintes imposées par la présence simultainée de ces
quatre éléments (113).
Le langage du texte pragmatique est souvent objectif et informatif, tandis
que celui du texte littéraire a la nature subjective et connotative. La
traduction pragmatique dřun texte texte scientifique par exemple, se sert de
symboles, dřabrévations, et elle est caractérisée par lřexactitude.
Considérons encore lřarticle entitulée Rebuilding the Breast. Lřauteur est
inconnu et le sujet se porte sur une nouvelle technique de mammo-plastique.
Le vecteur est un texte journalistique dont lřobjectif est purement informatif
qui a lřobjectif de sensibiliser des milliers de lecteurs du Time. La traduction
devrait respecter lřensemble des règles régissant la langue dřarrivée, le
style journalistique et le style médical du texte de départ.
Dans la traduction littéraire, le traducteur se sert de lřintelligence et de
106
lřimagination, pour dégager le sens des liaisons, des techniques littéraires
employées par lřauteur du texte de départ.Outre la compétence de
lřimagination, le traducteur devrait avoir une base littéraire forte qui lřaidera
dans lřappréciation des complexités et des détours du texte.Pour se sentir à la
hauteur de la tâche, le traducteur en plus de la connaissance linguistique, et
en dépit du fait quřil aurait fréquenté ce pays, ayant préalablement connu et
goûté certains aspects de sa culture et civilisation personellement et dans les
livres, devrait emmagasiner des bagages extra-linguistiques assez riches.Les
procédés de la traduction exigent beaucoup dřapplication insinuante et
intellectuelle surtout dans le raisonnement analogique pour une bonne
traduction.
QUATRIEME PALIER : L’ORGANICITE TEXTUELLE.
Chaque texte se développe en conformité avec la logique intérieure qui le
rend harmonieux. Dans la traduction, les énoncés composant les phrases
devraient être agencés dřune façon harmonieuse avec les idées du texte
original. Un texte est analogue à un batiment et lřorganicité renvoie à
lřinterdépendance hierarchisée de tous les éléments du texte (Deslile, 119).
Nous constatons que cřest lřorganicité qui forme la charpente, tandis que le
style désigne lřapparence externe.
Alors, ce palier porte sur la liaison des énoncés, lřélucidation des
relations soutenues par les morceaux dřinformation, le mouvement
progressif des idées ou des émotions suivant les différents types de discours
écrits. On dira dřun traducteur qui a une excellente façon de rendre ses
textes harmonieusement quřil a Ŗun style fluideŗ. Cela peut signaler que le
traducteur est habile à associer les idées les unes aux autres, dans la
séquence de lřoccurrence. Il nřest pas satisfaisant de traduire
individuellement chaque mot, chaque énoncé, chaque phrase. Il est exigeant
que le traducteur reformule la totalité du message exprimé dans les signes
107
linguistiques dřune façon cohérente et dynamique.
Evidemment, on ne traduit pas juste le mot ou la phrase, mais le texte
qui contient un message. Lřorganicité textuelle dřun texte traduit est un
témoignage de lřhabilité du raisonnement logique chez le traducteur, aussi
bien que de sa compétence de communiquer clairement une idée. Cependant,
la clarté ne signifie pas composer les phrases simples afin dřéviter au lecteur
tout effort intellectuel. La clarté ici, équivaut au détail qui peut conduire à
lřexactitude de lřinformation exprimée dans le texte.
Restructurant les concepts en conformité avec les idées fondamentales
du texte de départ nécessite de la part du traducteur non seulement une
grande compétence du maniement du langage mais aussi une grande adresse
intellectuelle. Il est pertinent au traducteur de ré-exprimer le texte par des
structures syntaxiques qui sont inhérentes au dynamisme interne de la langue
dřarrivée et non selon les contraintes de la langue de départ. On constate que
le traducteur requiert beaucoup dřapplication intellectuelle pour réaliser une
bonne traduction.
Deslile remarque que:
Le quatrième palier du maniement du langage est donc celui
des transformations structurales commandées par la
dynamique dřun message. Les innombrables rajustements
textuels dont certains sont obligatoires, dřautres, facultatifs,
alimentent la reflexion du traducteur et révèlent ses qualités
de traducteur (122).
Donc, les transformations occasionnées par lřorganicité textuelle, relèvent
du mouvement intérieur du texte et peuvent assumer diverses formes qui se
composent de : Lřorganicité textuelle peut prendre diverses formes telles
que :
A. La redistribution d’éléments d’information.
108
Pour traduire certaines parties du texte, nous avons ici, redistribué quelques
pièces dřinformation contenues dans Douceurs du bercail dřAminata Sow
Fall.
1. Français: Les enfants dormant, calme plat dans le dépôt (84).
Anglais: The children were all asleep, so the Ŗdépôtŗ was dead calm.
La conjonction<< so>> en anglais relie les circonstances du dépôt à lřaction
de dormir par les enfants.Nous avons ré-exprimé lřidée de la phrase
principale par le passé composé de lřindicatif du verbe sleep au lieu du
participe présent du verbe français Ŗdormirŗpour un meilleur effet dans le
texte cible.
2. Français: … elle tente de se racrocher à une réalité fuyante. ŖQuelle
heure, quel jour? … (84)
Anglais: … trying by all means to hold on to the fleeting reality, she
wondered, Ŗwhat time and day it was.ŗ
Par lřemploi du participe présent du verbe<< try >>et la conjonction
<<and>>, les phrases sont restructurées pour préciser leur sens dans la
langue dřarrivée. Ici, la question directe est devenue indirecte.
B. La concentration de plusieurs signifiés sur un plus petit nombre
de signifiants. Ces exemples du texte Rebuilding the Breast peuvent illustrer
ce point.
ŖMrs. Joan Dawson … of New York Cityŗ : Une New Yorkaise … Mme.
Joan Dawson.
109
La traduction de ce passage tiré de Douceurs du bercail peut aussi illustrer
comment plusieurs éléments dřinformation peuvent être concentrés sur un
petit nombre de signifiants.Nous avons employé cette démarche pour
contourner telle difficulté dans Douceurs du bercail. Ainsi dans ces phrases
extraites du texte nous avons :
Français
Ces boutons offrent aux femmes de lřencens à senteur de bois sauvage et de
lavande, et des décoctions aux vertus aphrodiasiques dont elles ont le secret
pour apprivoiser le coureur de pagnes le plus invétéré (211).
Anglais
These buttons provided women with the wild incense-scented wood and
lavender, as well as the aphrodisiac concotions which they believed were
quite capable of taming the worst womanizer imaginable.
Dans la phrase du départ, le nom Ŗlřencensŗ est complété par le nom senteur
à lřaide dřune préposition, cřest-à-dire que laŖsenteur de bois sauvageŗ est
un complément du nom<< lřencens>>, donc il est, important dans le sens
global de la phrase. Afin dřavoir une bonne traduction, nous avons
rapproché <<scented>> au mot Ŗincenseŗ par un trait dřunion: incense-
scented. Nous avons fait presque la même chose pour lřautre syntagme Ŗet
des décoctions aux vertus aphrodisiaques.
Nous constatons que le syntagme,<<Aux vertus aphrodisiaques>>, ici est un
complément circonstanciel de la qualité, juste comme pour<< à senteur de
bois sauvage>> qui se trouve dans la phrase. La traduction littérale nřaurait
pas atteint les contraintes de la langue dřarrivée. Le résultat de la traduction
aurait été<< concotions with aphrodisiac qualities >>. Mais dans la
rechrerche de la clarté et de la précision dřinformation, nous avons rendu le
110
syntagme ainsi : <<the aphrodisiac concotions>>.Lřinformation exprimée
dans <<aux vertues aphrodiasiques>> est par ce tour dans la langue cible
concentrée pour donner<< aphrodisiac concotions>>.
C. L’implication ou l’explicitation d’éléments.
Une autre façon par laquelle lřorganicité textuelle fonctionne est dans le
refus de certaines équivalences abusives. Dans le texte Rebuilding the
Breast nous avons des exemples suivants:
- Ŗa silicone-filled sacŗ un sac de silicone.
- Mrs. Dawson went to her doctor and asked him to rebuild her missing
breast. ŖMme Dawson, elle retourne chez son médicin pour quřil lui refasse
un sein.
Ici, « asked » and « missing » sont traduits par le contexte. Ainsi, nous
avons traduit cette phrase en éliminant certains mots dont lřinformation est
déjà dans le contexte.On trouve une semblable démarche dans la phrase qui
suit et qui est tirée de Douceurs du bercail.
Français
ŖEt on disait et répétait à la progéniture : ŖAttention aux fréquentations, mon
fils, pense à ton honneur, ma fille, car le diable, il est dřune beauté
fascinante, mais quand il embrasse, il prend tout. Tout, tout, tout! Jusquřà
votre âme, et ne vous laissera quřune carcasse vide et honteuse, lřombre de
vous-même …ŗ (108).
Anglais
And they repeatedly admonished their offsprings : ŖBe careful of the friends
you keep, my son, think of your reputation, my daughter, because the devil,
is a fascinating beauty, but when he embraces you, he takes away
everything, even your soul, leaving you an empty and shameful carcass, a
111
mere shadow of yourself …ŗ
Pour traduire la première phrase ŖEt on disait et répétait à la
progénitureŗ nous avons modifié le verbe<< admonished >> à lřaide dřun
<<adverbe repeatedly>>. Ainsi, nous avons ŖAnd they repeatedly
admonished their offspringsŗ. << They admonished >> est un exemple
dřexplicitation, au lieu de traduire le verbe<< disait>> comme<< said>> ou
<<told>>, nous avons employé un autre verbe qui amplifie le souci des
parents pour leurs enfants.
Au milieu de la phrase, nous avons détourné de la même tournure de la
phrase originale pour avoir des équivalences contextuelles appropriées,
ainsi, nous avons abandonné les trois<< tout, tout, tout!>> dans la phrase
française. Pour rendre le sens de Ŗtoutŗ dans la phrase, nous avons rendu la
phrase de cette façon: Ŗhe takes away everything, even your soul, leaving
you an empty and shameful carcass … Nous avons lié les deux phrases à
lřaide de la conjonction Ŗevenŗ. Voyons encore la phrase oiginale Ŗ… il
prend tout. Tout, tout, tout! Jusquřà votre âme, et ne vous laissera quřune
carcasse vide et honteuse …ŗ On peut constater que ces rudiments
dřinformation contenus dans ŖTout tout, tout!ŗ sont suffisamment exprimés
par la restitution faite dans la langue dřarrivée.Nous avons essayé de rester
fidèle au sens de lřauteur, tout en respectant les exigences de la langue
dřarrivée.
D. Les charnières articulant les énoncés
Dans le texte Rebuilding the Breast, nous constatons quřŖun beau jourŗ se
traduit par la conjonction << then >> dans le contexte. De la même façon
les extraits de Douceurs du bercail discutés au dernier paragraphe, se
traduisent par une conjonction <<even>>. Cette tournure de la phrase est
rendue possible par le dynamisme du texte.
112
Il nous arrive de décider la manière de traduire de telles formes contractées
comme Ŗjřy suis pas dřaccordŗ, Třas quřà, třas pasŗ, Ŗy a pasŗ dans le texte
par lřanglais standard. Elles nřappartiennent pas à lřargot mais au français
familier. Ces formes ne sont ni le français tirailleur dřAbidjan ni celui des
autres pays francophones. Cřest le contexte ou les circonstances dans
lesquels les dialogues sont produites qui déterminent les discours que les
locuteurs prononcent.
Pour illustrer ce fait, un employé sřadresse normalement à son maître dřune
façon formelle: ŖJe vous en prieŗ au lieu de Ŗpas de quoiŗ, ŖVous partez,
Monsieur? Et non ŖTu pars, déjà? Il existe de telles formes contractées en
anglais, par exemple, ŖIřll be seeing you laterŗ, ŖSheřs going to schoolŗ, au
lieu de <<I will be seeing you later>> et<< she is going to school>>. Afin de
bien marquer cette distinction, les français tutoient les gens avec lesquels ils
maintiennent des affinités mais vouvoient les autres par politesse. Deslile
soutient cette idée lorsquřil remarque que Ŗle contexte a aussi pour effet de
libérer les formes linguistiquesŗ(139).Dès lors,il découle que lřanalyse du
discours est exigeante pour une bonne traduction.Ce type dřopération se fait
au niveau de la communication.Certainemnt, le traducteur qui aborde sa
tâche en se rendant compte constamment, au fur à mesure de cette opération
de la traduction et en se posant les questions:qui parle?, à qui parle-t-il?,dans
quel but parle-t-il?, et dans quel contexte parle-t-il?serait plus compétent à
donner de bonnes traductions.Prenons dřautres phrases tirées de Douceurs
de bercail comme exemples:
Français
Et y a plus rien au pays, je te dis. (9)
Anglais
Thereřs nothing back home, I assure you.
113
Français
Třas raison, mon gars!
Anglais
Youřre right, pal! (56)
Nous voudrions montrer notre traduction des figures de style : la
métaphore et la comparaison employées dans le texte .Il est attendu au
traducteur de traduire ces figures de style en représentant les mêmes
situations par lřemploi des moyens stylistiques et structuraux différents dans
la langue dřarrivée. Dřaprès Newmark Peter, il y a des métaphores
universelles qui varient dřune culture à lřautre au point de vue syntaxique.
Elles expriment les mêmes notions ou les mêmes concepts socio-culturels.
Mais il existe dřautres qui sont particulières à une société donnée et ne
sřobtiennent pas dans dřautres langues. Le traducteur, trouverait
certainement des difficultés à les traduire.
Deslile remarque que Ŗla métaphore est un moyen non une fin … le
traducteur doit, néanmoins, chercher à préserver cette figure de rhétorique
dans sa traduction chaque fois quřil le peut. Trois solutions sřoffrent à lui: la
traduction littérale, lřemploi dřune autre métaphore de sens équivalent ou, en
dernier resort, ne rendre que lřidée sous-jacenteŗ (191). Voyons alors des
règles qui pourront nous aider à traduire la metaphore. Newmark
recommande cinq guides qui pourront faciliter la traduction de la métaphore.
Il remarque que le traducteur devrait faire le choix de quelle solution il
voudrait adopter. Premièrement il pourra la traduire avec une autre
métaphore qui signifie la même réalité dans la langue dřarrivée. Le
traducteur pourra également traduire la métaphore par une autre image qui
exprime une même réalité par exemple Ŗavoir dřautres chats à fouetterŗ
signifie Ŗhaving other fish to fry.
114
Il continue ainsi:
The third is to convert the metaphor into a simile, the
fourth is to qualify the simile with the sense … which in
communicative translation may be advisable, if the
metaphor is obscure; the fifth is to translate as much as
possible of the sense behind the image, the sense being
the common area between the metaphorřs object and the
image, as seen by the writer and interpreted by the
translator (49).
Ci Ŕjoints dans les pages suivantes sont certaines figures de styles retrouvées
dans notre texte et les traductions que nous en avons rendues :
Anne avait jeté un pavé dans la mare, sans crier gare(166).
Anne, had unintentionally said something that caused trouble.
La vie ne mřa jamais rien offert sur un plateau dřargent (86)...
Life has never offered me anything on a silver platter .
La tête bourdonnait de toutes sortes de questions et dřidées confuses… (55).
Her head was ringing with all kinds of confusing questions and ideas.
Morte de fatigue (41).
Dead tired.
Tous sřétaient tordus de rire avant de demander … (23).
All of them twisted in laughter before asking …
Je sortirai indemne de ce trou…(87)
I will surely come out unhurt from this valley…
Jusquřici toute ma vie a été un combat…(85)
115
Till this moment life has always been a struggle for me…
Advienne qui pourra (28).
Come what may. (lřéquivalence).
Le viol est un crime odieux.Un fléau qui fortifie ses racines dans les
dérèglements de notre société(138).
Rape is a heinous crime .A plague …which has spread its tentacles in the
unwholesome nature of our society.
Cřest dire que nous avons eu des difficultés à traduire ces expressions
figées, ce qui nřest pas étonnant puisquřil nřest pas facile de trouver leurs
équivalences dans la langue dřarrivée.Cependant, avec notre visée qui est le
sens, nous sommes arrivés à rendre leurs significations dans le texte. Il y
amêmes des théoriciens linguistes comme Catford et Mounin qui croient à
lřintraduisibilité de ces mots. Mais nous sommes dřavis que leur traduction
est possible tant que Ŗlřobjectif de la traduction est de communiquer la
pensée dřautruiŗ (Seleskovitch et Lederer 10).
Cřest une occasion qui demande lřintelligence et la créativité afin que
le traducteur puisse surmonter lřobstacle qui empêche la communication ou
crée de la nuance dans la traduction.Pour lui une traduction réussie est celle
qui suscite chez ses destinataires, les effets émotifs qui équivalent aux effets
esthétiques que le texte original a produits sur ses premiers lecteurs.Cřest ici
que le traducteur, en tant quřécrivain et artiste va manifester sa créativité.
Une telle situation difficile lřobligerait à approprier le texte.Et par une
application de ses connaissances méta-linguistiques, de son intuition et de
son habilité, il pourrait recréer le texte dřune manière quřil soit compris et
accueilli par la nouvelle culture. Il devrait adopter les solutions qui lui sont
plus éfficaces que les autres. La chose la plus importante est que le texte
remplisse la même fonction que le texte de départ aurait remplie chez ses
116
lecteurs.
Dřaprès Venuti
Nida states (that) that which unites mankind is much
greater than that which divides, and hence there is, even
in cases of very disparate languages and cultures, a
basis for communication (22).
Cette citation montre que la plupart des langues humaines contiennent des
potentielles qui pourraient communiquer des réalités semblables ou variées
dans différentes cultures. Puisque le proverbe joue presque le même rôle que
la métaphore, le traducteur est conseillé de le traduire de la même manière
que la métaphore. Newmark le met dans la même classe que la métaphore,
et lřidiome. (89, 126). Ce qui compte vraiment cřest que le traducteur rende
le sens ou lřimage de ces figures de style par la méthode quřil trouve la plus
efficace dans la langue cible.
117
CHAPITRE QUATRE
LA TRADUCTION ANGLAISE DE DOUCEURS DU BERCAIL
DřAMINATA SOW FALL EN JUXTAPOSITION DU TEXTE EN
FRANÇAIS.